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Full text of "Essais de Montaigne (self-édition)"

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MAY  2  5  2000 


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ESSAIS 


DE 


MONTAIGNE 


(Self-Edition) 


TEX.TE  ORIGINAL,   ACCOMPAGNÉ  DE  LA  TRADUCTION 
EN  LANGAGE  DE  NOS  JOURS, 


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le    Général    MICHAUD 


QUATRIEME    VOLUME 

Notice,  Sommaire  des  Essais,   Table  des  citations,   Varianles, 
l'Esprit  des  Essais,  Xotes,  Glossaire. 


PAlllS 
LIHRAIRIE    DE    PARIS 

I'irmii:i-Diclot    et    C",    liîditeurs 

5G,   RUE  Jacob,   5t) 
IDOU 


Exemplaire 

N"  127 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE 


Of   THE 
UNIVERSITE  ûF  ILLINO/S 


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ESSAIS  DE  MONTAIGNE 


(Self-Edition*) 


TEXTE  ORIGINAL  ACCOMPAGNÉ  DE  LA  TRADUCTION 
EN  LANGAGE  DE  NOS  JOURS, 


PAR 


le    G"'    MICHAUD 


QUATRIEME  VOLUME 

Notice,  Sommaire  des  Essais,  Table  des  citations,   Variantes, 
l'Esprit  des  Essais,  Notes,  Glossaire. 


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PARIS 

LIBRAIRIE    FIRMIN-DIDOT    ET    G»',    ÉDITEURS 
06,  RUE  Jacob,  56 

1909 

*  Edition  se  suffisant  à  elle-même. 


v4 


NOTE  DE   L'EDITEUR 


Le  Général  Michaud  étant  décédé  au  cours 
de  V%inpression  du  présent  ouvrage,  ce  IV  vo- 
lume Oj  été  rédigé  d'après  le  texte  et  les  notes 
laissées  par  fauteur. 


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FASCICULE   A 


NOTICE 


SUH    MONTAIGNE,    LES    ESSA.IS 
ET    LES    ILLUSTRATIONS    DU    PRESENT    OUVRAGE. 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE.  —  T.   IV. 


RÉSUMÉ  CHRONOLOGIQUE 


DES    FAITS    PRINCIPAUX    DE    LA    VIE    DE    MONTAIGNE. 


François  /«■'  régnant. 
1533.  —  Naissance  de  Michel  Eyquem,  Seigneur  de  Montaigne  (28  lév.). 
IMfit  ■"■  ^^  ^^^  élevé  au  collège  de  Guyenne. 
?      —  Il  achève  ses  classes  à  la  faculté  de  Bordeaux. 

15^7.  —  Mort  de  François  Z",  avènement  de  Henri  II. 

1548.  —  Il  est  témoin  à  Bordeaux  d'un  soulèvement  populaire  '  dans  lequel  le 
Gouverneur  de  la  ville  est  massacré. 

?      —  11  fait  ses  études  de  droit  à  l'Université  de  Toulouse, 

1555.  —  Premier  vojage  de  Montaigne  à  Paris,  où  il  accompagne  son  père. 

1556.  —  Celui-ci  lui  cède  sa  charge  de  conseiller  à  la  cour  des  aides  de  Périgueux. 

1557.  —  11  devient  conseiller  au  parlement  de  Bordeaux  par  suite  de  la  fusion 
de  ces  deux  cours  judiciaires 

1558.  —  Il  fait  connaissance  et  se  lie  d'amitié  avec  La  Boétie,  comme  lui  conseiller 
au  parlement  de  Bordeaux. 

1Ô5V.  —  Mort  de  Henri  II,  avènement  de  François  II. 

1559.  —  Autre  voyage  de  Jlontaigne  à  Paris,  à  l'occasion  du  sacre  de  François  II  ; 
et,  de  là,  à  Bar-le-Duc,  où  le  roi  se  rend  peu  après. 

I.IGO.  —  Mort  (le  François  II,  avènement  de  Charles  IX. 
1562.  —  Bataille  de  Dreux. 

iîJô'l.  —  Autre  voyage  à  Paris,  et  de  là  à  Rouen  où  il  accompagne  la  cour. 

1563.  —  Mort  de  La  Boétie. 

1564) 

1  vSv  —  Montaigne  traduit  la  <■  Théologie  naturelle  >•  de  Sebond. 

1565.  —  Il  épouse  Françoise  de  la  Chassaigne  (25  sept.). 

1566.  —  Voyage  de  Charles  IX  à  Bordeaux. 

1568.  —  Mort  de  Pierre  Eyquem,  père  de  Montaigne. 

lôDV.  —  Bataille  de  Jarnac,  combat  de  la  Roche-Abeille,  bataille  de  MontcoaUmr. 

1570.  —  Montaigne  résilie  sa  charge  de  conseiller. 

1571.  —  U  a  achevé  l'installation  de  sa  bibliothèque  et  commence  à  écrire  les 
Essais. 

id.    —  Naissance  de  sa  fdle  Léonor. 
id.    —  Il  est  fait  chevalier  de  l'ordre  de  S'-Michel. 
?     —  Le  roi  le  nomme  gentilhomme  de  sa  chambre. 


A. IV  NOTICE  SIJU  MONTAIGNE. 

i'û2.  —  Massacre  de  la  Saint- Bar Ihélemy . 
i57i.  —  Moi't  de  Charles  IX,  avètiement  de  Henri  III. 

1577.  —  Le  roi  de  Navarre  lui  confère  le  même  titre. 

1580.  —  Publication  à  Bordeaux  de  la  première  édition  des  Essais. 

.  /Voyage  de  dix-liuit  mois  à  Paris,  la  Fère,  Soissons,  Plombières,  la  Suisse, 
^^'  — <  l'Allemagne  du  Sud,  l'Italie,  employé  en  partie  à  faire,  en  divers 
^    '      '         endroits,  usage  des  eaux  thermales. 

1581.  —  Non  encore  de  retour  en  France,  il  est  élu  maire  de  Bordeaux  pour 
une  période  de  dou-x  ans. 

1582.  —  Autre  voyage  à  Paris. 

id.    —  Publication  à  Bordeaux  de  la  seconde  édition  des  Essais. 

1583.  —  Montaigne  est  réélu  maire  de  Bordeaux  pour  une  nouvelle  période  de 
deux  ans. 

id.    —  Incident  du  château  Trompette  que  son  gouverneur  projetait  de  livrer 
à  la  Ligue. 

1584.  —  Henri  de  Navarre  vient  passer  deux  jours,  en  partie  de  chasse,  au 
manoir  de  Montaigne. 

1585.  —  Epidémie  de  peste  à  Bordeaux  qui,  s'étendant,  oblige  Montaigne  et  sa 
famille  à  errer  pendant  six  mois  liors  de  chez  eux. 

1586.  —  Son  manoir  est  envahi  et  pillé  dans  les  désordres  de  la  guerre  civile. 

1587.  —  Bataille  de  Contras. 

1587.  —  Le  roi  de  Navarre  y  couche  à  nouveau  le  lendemain  de  la  bataille, 
id.    —  Publication,  à  Paris,  de  la  troisième  édition  des  Essais. 

I'>88.  —  Journée  des  Barricades,  assassinat  du  duc  de  Guise. 

1588.  —  Dernier  voyage  de  Montaigne  à  Paris;  de  là  à  Rouen  où  le  roi  s'est 
transporté;  à  Compiègne,  chez  la  mère  de  M"'  de  Gournay  dont  il  vient  de  faire  la 
connaissance;  a  Blois  où  le  roi  s'est  retiré;  entre  temps  (10  juillet)  Montaigne  est 
arrêté  par  les  Ligueurs  et  conduit  à  la  Bastille  où  il  reste  détenu  quelques  heures. 

id.    —  Publication,  à  Paris,  de  la  quatrième  édition  des  Essais. 

I58U.  —  Assassi7iat  de  Henri  III,  avènement  de  Henri  /!'. 

1590.  —  Mariage  de  sa  fdle  Léonor. 

1591.  —  Il  devient  grand-père  d'une  petite -fdle. 

1592.  —  Mort  de  Montaigne  (13  sept.).  —  11  est  inhumé  au  couvent  des  Feuillants 
à  Bordeaux. 

1595.  —  Publication  posthume,  à  Paris,  de  la  dernière  des  éditions  originales 
des  Essais. 
I60I  (?).  —  Mort  d'Antoinette  de  Louppes,  mère  de  Montaigne. 

1610.  —  Assassinat  de  Henri  1]'. 

I61G.  —  Mort  de  Léonor,  fille  de  Montaigne, 

1627.  —  Mort  de  Françoise  de  la  Chassaigne,  sa  femme. 

1871.  —  Transfert  du  corps  et  du  monument  funéraire  de  Montaigne  à  la 
chapelle  du  lycée  de  Bordeaux  à  la  suite  d'un  incendie  du  couvent  des  Feuillants. 

1886.  —  Réédification,  sur  son  emplacement  primitif,  du  monument  et  nouvelle 
translation  du  corps,  le  bâtiment  ayant  été  reconstruit  et  devenu  le  palais  des 
Facultés. 


NOTICE  SUR  MONTAIGNE. 


S.\  VIE. 


Michel  Eyquem.  Seigneur  de  MONTAIGNE,  auteur  des  Essais,  naquit  le  der- 
nier jour  de  février  de  l'an  1533,  au  manoir  de  Montaigne  (1),  entre  Castillon  et 
Bergerac,  sur  les  confins  de  la  Guyenne  et  du  Périgord. 

Les  renseignements  les  plus  anciens  que  l'on  possède  sur  sa  filiation,  remon- 
tent à  un  nommé  Ramon  de  Gaujac,  du  nom  du  village  dont  il  était  originaire. 
Ce  Ramon  exei'çait  à  Bordeaux,  rue  Rousselle,  un  commerce  de  vins  qu'il  ex- 
portait à  l'étranger,  et  auquel  il  avait  joint  celui  de  pastel  et  de  poissons  salés. 
Sa  sœur  avait  épousé  un  Martin  Eyquem,  du  village  de  Blanquefort  (2)  dans 
le  Médoc;  elle  en  eut  un  fils,  Ramon  Eyquem,  que  son  oncle  associa  à  son  com- 
merce, et  auquel,  à  sa  mort,  vers  I4C2,  il  laissa  une  foi'tune  déjà  assez  consi- 
dérable. 

Ramon  Eyquem,  né  en  1402,  est  le  bisaïeul  de  Montaigne.  En  1477,  il  achetait 
le  fief  de  Montaigne  relevant  de  l'archevêque  de  Bordeaux,  et  mourait  l'année 
suivante,  laissant  deux  fils  et  deux  filles. 

Les  deux  fils  demeurèrent  associés;  le  cadet  mourut  jeune,  sans  avoir  été 
marié;  l'aîné,  Grimon  Eyquem,  grand-père  de  Montaigne,  paraît  avoir  été,  en 
affaires,  d'une  remarquable  activité  et  avec  lui  la  situation  de  fortune  de  la 
famille  s'accrut  encore  notablement.  De  14813  à  1507,  il  fut  jurât  (3)  de  Bordeaux. 
Il  mourut  en  1519,  presque  septuagénaire,  laissant  quatre  fils  et  deux  filles. 

L'aîni',  Pierre  Eyquem,  escuyer,  seigneur  de  Montaigne,  comme  il  s'appelait 
lui-même,  le  père  de  l'auteur  des  Essais,  hérita  du  manoir  dont  son  aïeul  avait 
fait  acquisition  et  où  lui-môme  était  né,  et  des  terres  constituant  la  seigneurie 
du  même  nom.  Il  avait  embrassé  la  carrière  militaire  et  guerroya  en  Italie; 
mais  il  l'abandonna,  lorsqu'eni  1523  il  épousa  Antoinette  de  Louppes,  dont  la 
famille,  du  nom  primordial  de  Lopez,  juive  et  originaire  des  environs  de  Tolède, 
était  venue  s'établir,  depuis  une  ou  deux  générations,  à  Toulouse  et  en  Guyenne, 
pour  chercher  fortune,  y  avait  réussi  et  embrassé  le  protestantisme. 

Le  père  de  Montaigne  apparaît  dès  lors,  moitié  bourgeois,  moitié  gentilhomme 
de  province,  occupé,  tantôt  à  Bordeaux  à  vendre  ses  vins,  tantôt  à  agrandir 
son  domaine,  rebâtir  et  fortifier  son  manoir.  La  considération  dont  il  jouissait 
l'avait  fait  appeler  par  ses  concitoyens  bordelais  à  faire  partie  de  la  munici- 
palité, et  pendant  25  ans  il  en  avait  exercé  les  diverses  charges,  lorsqu'en  1554 
il  fut  <''lu  maire  pour  deux  ans,  ce  qui  était  la  durée  légale  de  ces  fonctions. 

Cette  même  année,  était  créée  à  Périgueux  une  Cour  des  aides  (4);  il  y  sol- 

(1)  Paroisse  de  S.-Michel  (aujourd'hui  commune  de  Saint-Michel  de  Montaigne),  alors 
juridiction  de  Montravel;  aujourd'hui  canton  de  Vélines  (Dordogne). 

(2)  Blanquefort,  chef-lieu  de  canton  à  deux  lieues  environ  N.-O.  de  Bordeaux;  — 
Gaujac  ou  Gajac,  hameau  à  peu  de  distance  de  Blanquefort. 

(;*)  On  appelait  ainsi,  à  Bordeaux,  les  consuls  et  les  échevins,  autrement  dit  les  mem- 
hres  de  la  municipalité. 

('*)  La  Cour  des  aides  était  une  chambre  jugeant  en  dernier  ressort  les  questions  affé- 
lentes  aux  aides,  subsides  établis  jadis  sur  les  boissons  pour  subvenir  aux  dépenses  de 
l'Etat;  et  ultérieurement  et  par  extension  tous  autres  impôts. 


A.vi  NOTICE  SUR  MONTAIGNE. 

licita  et  obtint  uno  place  de  conseiller,  se  proposant  de  la  résigner  dès  que 
cela  lui  serait  possible  au  profit  de  son  fils  aine,  en  faveur  duquel  il  se  démit 
en  effet  un  ou  deux  ans  après,  quand  celui-ci  atteignit  sa  vingt-troisième  année. 

Esprit  naturellement  ingénieux  et  pratique,  Pierre  Eyquem  avait  senti  dans 
ses  guerres  d'Italie  se  développer  en  lui  le  goût  des  arts  et  des  sciences;  et, 
regrettant  sa  jeunesse  demeurée  étrangère  aux  lettres,  il  recherchait  volontiers 
la  société  de  ceux  qui  s'y  étaient  livrés,  et  s'efforça  de  doter  ses  fils  de  ce  qui, 
sous  ce  rapport,  avait  pu  lui  faire  défaut. 

En  11368,  il  mourait,  laissant  cinq  enfants  mâles  et  trois  filles  ;  de  par  son  tes- 
tament, Michel,  l'aîné  de  tous  par  la  mort  de  deux  auti-es  décédés  en  bas  âge 
héritait  de  la  maison  noble  de  Montaigne  et  du  droit  d'en  porter  le  nom;  ce 
qu'il  fit,  abandonnant  complètement,  dès  le  premier  moment,  son  nom  patro- 
nymique, le  rayant  même  sur  le  livre  de  famille  qu'il  tenait,  pour  ne  conserver 
que  celui-là,  le  seul  sous  lequel  il  soit  connu,  qu'il  a  du  reste  illustré  à  un  si 
haut  degré  et  qui  s'est  éteint  avec  lui. 

Montaigne  a  raconté  lui-même,  dans  les  Essais,  l'histoire  de  sa  vie  avec  celle 
lie  ses  pensées;  son  enfance  rustique,  sa  première  éducation;  le  latin  appris 
familièrement  par  lui  dans  les  bras  d'un  précepteur  étranger  et  au  milieu  d'un 
entoui-age  qui  ne  lui  parlait  jamais  qu'en  cette  langue:  la  sollicitude  dont  il  était 
l'objet;  enfin  les  .sept  années  de  sa  vie  scolaire  passées  au  collège  de  Guyenne, 
qu'il  quitta  en  1546  parce  que,  semble-t-il,  la  peste  régnait  à  Bordeaux  ;  il  avait 
alore  treize  ans  et  venait  d'achever  son  cours,  nom  sous  lequel  on  comprenait 
alors  ce  qui  correspond  à  notre  classe  de'rhétorique  d'aujourd'hui. 

On  est  moins  renseigné  sur  son  adolescence.  On  pense  qu'il  fit  sa  philosophie, 
soit  à  la  faculté  des  arts  de  Bordeaux,  soit  avec  des  profes.seurs  particuliers, 
et  son  droit  à  Toulouse,  où  il  avait  des  parents  du  côté  de  sa  mère.  Sa  liaison 
avec  Henri  de  Mesmes,  Paul  de  Foix,  (Juy  de  Pibrac  et  autres,  alors  étudiants 
en  droit  à  l'université  de  cette  ville,  porte  à  croire  qu'il  en  a,  lui  aussi,  suivi 
les  cours  et  que  c'est  là  qu'il  a  fait  leur  connaissance. 

C'est  à  cette  époque  (1548)  qu'eut  lieu  à  Bordeaux,  à  propos  de  l'impôt  de  la 
gabelle  auquel  on  voulait  la  soumettre,  le  mouvement  populaire  dans  lequel 
perdit  la  vie  Tristan  de  Moneins,  gouverneur  de  la  ville  ;  spectacle  dont  Mon- 
taigne paraît  avoir  été  témoin  et  qui  le  frappa  au  point  qu'après  l'avoir  con- 
signé une  première  fois  au  ch.  23  du  liv.  I"  des  Essais,  I,  198,  il  y  revient  plus 
tard,  dans  les  additions  qu'il  y  fait  après  1.588,  en  vue  d'une  édition  nouvelle. 

En  1556,  Montaigne,  ainsi  qu'il  est  dit  plus  haut,  était  nommé  à  la  Cour  dos 
aides  de  Périgueux,  par  suite  de  la  résignation  faite  par  son  père,  en  sa  faveur, 
de  sa  charge  de  conseiller.  L'année  suivante,  cette  cour  était  fusionnée  avec 
le  Parlement  de  Bordeaux. 

C'est  peu  après  que  Montaigne  fit  la  rencontre  de  La  Boétie,  l'auteur  du  ■•  Dis- 
cours sur  la  servitude  volontaire  »,  comme  lui  conseiller  à  ce  même  parlement, 
avec  lequel,  dès  le  premier  moment,  il  se  lia  de  la  plus  vive  et  de  la  plus  étroite 
amitié  et  dont,  par  ses  écrits,  il  a  fait  la  réputation  et  conservé  le  souvenir 
à  la  postérité.  —  Dans  leurs  rapports,  nous  attribuons  volontiers  le  premier 
rang  à  Montaigne,  laissant  La  Boétie  dans  la  pénombre  ;  c'est  l'inverse  de  ce  qui 
était.  La  Boétie,  de  trois  ans  plus  âgé  que  Montaigne,  supérieur  à  lui  par  le 
savoir,  l'éducation  et  le  caractère,  aux  jeux  des  contemporains  et  des  deux  amis 
eux-mêmes,  tenait  le  rang  de  fi'ère  aîné.  Par  son  exemple  et  ses  observations 
discn'tes,  il  modérait  chez  son  ami,  dont  la  nature  droite  mais  indécise  se 
prêtait  à  cette  direction,  les  entraînements  d'une  ardeur  juvénile  assez  pro- 
noncée, et  contribuait  à  former  l'àme  réfléchie,  l'esprit  observateur  et  méditatif 
de  l'auteur  des  Essais.  Montaigne  s'en  rendait  compte  et  nous  le  laisse  entendi-e  ; 
lui  mort,  mort  bien  plus  jeune  que  Montaigne,  il  n'en  parle  jamais  qu'avec  un 
sentiment  de  respect  et  lui  rapporte  tout  ce  qu'il  a  fait  de  meilleur.  Il  est  à 
croire  que  si  La  Boétie  eût  vécu  davantage,  il  eût  souvent  préservé  son  ami  de 
l'excès  de  scepticisme  qui  a  été  en  lui  le  cai-actère  dominant.  Son  éducation 
première  et  son  amitié  pour  La  Boétie  sont  dans  la  vie  de  Montaigne  les  sujets 
favoris  de  ses  souvenirs  et  de  ses  réflexions. 

En  1555,  semble  avoir  eu  lieu  le  premier  voyage  de  Montaigne  à  Paris  pour 


SA  VIE.  .  A.VH 

laquelle  il  montre  tant  cralïection;  il  accompagnait  son  pore,  qui  venait  solliciter 
du  roi  le  rétablissement  des  privilèges  de  la  ville  de  Bordeaux  dont  elle  s'était 
vue  privée,  à  la  suite  de  la  sédition  de  1548. 

Les  obsèques  de  Henri  II  en  1559  l'y  ramènent  et  il  y  demeure  jusqu'au  sacre 
de  son  successeur,  cérémonie  à  laquelle  il  a  dû  assister,  ayant  avec  la  cour 
accompli  le  voyage  le  Bar-le-Duc  qui  suivit. 

En  1562  nous  l'y  retrouvons  et  l'y  voyons  prêter,  sans  y  être  convié,  devant 
lo  Parlement  de  cette  ville,  le  serment  de  profession  de  religion  catholique, 
qu'en  opposition  à  l'édit  de  janvier  de  cette  même  année,  qui  avait  reconnu  aux 
Protestants  la  liberté  de  leur  culte,  cette  cour  de  justice  avait  imposé  à  tous  ses 
membres,  ce  qu'imitèrent  bientôt  tous  les  autres  Parlements  du  royaume.  —  De 
Paris,  Montaigne  suit  la  cour  à  Rouen,  dont  venait  de  s'emparer  sur  les  Réformés 
le  duc  do  Guise,  après  un  siège  où  se  place  le  projet  d'assassinat  ourdi  contre 
ce  prince,  dont  il  est  question  au  ch,  23  du  liv.  I".  C'est  durant  cette  excursion  à 
Rouen  que  Montaigne  eut  occasion  de  voir  les  sauvages  brésiliens  venus  en 
France  dont  il  nous  entretient  ch.  31  de  ce  même  livre,  et  de  converser  avec 
eux. 

Rentré  à  Bordeaux,  il  assista  peu  après  (1563)  à  la  mort  de  La  Hoétie,  dont  il 
fait,  dans  une  lettre  à  son  père  parvenue  jusqu'à  nous,  un  récit  qu'on  ne  peut 
lire  sans  émotion;  en  le  ])erdant,  il  crut  perdre  plus  qu'un  frère  et  no  s'en 
consola  jamais  entièrement. 

Pour  faire  diversion  à  sa  douleur,  son  père  lui  demanda  de  lui  traduire  l'ou- 
vrage de  Raymond  Sebond,  «  le  Livre  des  créatures,  ou  Théologie  naturelle  », 
écrit  en  latin  mélangé  d'espagnol;  et  aussi,  le  maria. 

Le  25  septembre  1565,  il  épousait  Françoise  de  la  Chassaigne,  lille  d'un  conseiller 
à  la  cour  de  Bordeaux,  qui  semble  avoir  été  femme  de  grand  sens,  compagne 
discrète  et  dévouée,  telle  qu'il  la  fallait  à  Montaigne,  possédant  en  ménage  les 
qualités  d'ordre  et  de  direction  qui  manquaient  à  son  mari  dont  elle  appréciait 
la  valeur,  et  vis-à-vis  duquel  elle  eut  le  tact  de  s'effacer,  lui  laissant  tout  loisir 
de  penser;  si  bien  que  malgré  les  nuages  momentanés  et  inévitables  dont  on 
retrouve  trace,  cette  union  a  été  heureuse;  et  Montaigne,  laissant  à  sa  femme  le 
soin  exclusif  de  l'éducation  de  leur  fille,  a,  de  fait,  rendu  à  ses  qualités  l'hom- 
mage le  plus  probant:  toujours  est-il  qu'il  lui  doit  deux  immenses  services  :  elle 
l'a  déchargé  des  soucis  du  ménage  et  a  pris  soin  de  ses  manuscrits. 

Quelques  mois  après,  en  1566,  Charles  IX  venait  à  Bordeaux,  où  son  passage 
fut  marqué  par  une  assez  verte  remontrance  infligée  en  sa  présence  et  en  sou 
nom  au  Parlement,  par  le  chancelier  de  l'Hospital. 

En  1568,  Montaigne  perdait  son  père.  A  ce  moment,  il  terminait  la  traduction 
de  Sebond  et  la  livrait  à  l'impression;  et,  en  1570,  se  trouvant  dans  une  situation 
de  fortune  qui  le  laissait  maître  d'en  agir  à  sa  guise,  et  un  laps  de  temps  suffisant 
s'étant  écoulé  depuis  la  mort  de  son  père  pour  qu'il  pût  le  faire  décemment, 
résiliant  en  faveur  de  Florimond  de  Raymond  son  office  de  conseiller  pour  lequel 
il  ne  s'était  jamais  senti  grand  goût  et  qu'il  s'était  laissé  octroyer  par  déférence 
pour  la  volonté  paternelle,  il  quitta  la  robe  pour  l'épée.  On  ne  saurait  dire  s'il 
porta  celle-ci  seulement  en  qualité  de  gentilhomme;  il  est  cependant  probable 
qu'il  prit  part  à  quelques  expéditions  militaires,  ainsi  que  plusieurs  passages 
(ies  Essais  le  donnent  à  penser  (V.  N.  III,  408  :  Profession),  et  surtout  celui  où  il 
fait  ce  magnifique  éloge  de  la  vie  des  camps  (ch.  13  du  liv.  III,  III,  662),  tout 
rempli  d'un  accent  guerrier  qui  serait  ridicule  sous  la  plume  d'un  homme  qui 
ne  l'aurait  jamais  pratiquée,  ce  qu'auraient  inévitablement  fait  ressortir  ceux 
de  ses  contemporains  tels  que  Brantôme,  Scaligcr  qui  étaient  peu  disposés  pour 
lui. 

Plus  libre  de  son  temps,  et  tout  en  ne  négligeant  pas  aussi  complètement 
iju'il  l'insinue  la  gestion  de  son  domaine,  il  se  donne  alors  tout  entier  à  la  publi- 
cation des  œuvres  de  La  Boétie,  à  laquelle  il  se  croyait  tenu,  ayant  hériti'-  de 
ses  livres  et  de  sa  bibliothèque.  Ce  travail  fut  pour  lui  l'occasion  d'un  nouveau 
voyage  à  Paris  ;  c'est  là  qu'il  reçut  la  nouvelle  de  la  naissance  et  de  la  mort  de 
sa  première  fille. 

A  son  retour  en  Guyenne,  envahi   par  un  immense  besoin  de   solitude,   il 


A.viii  NOTICE  SUR  MONTAIGNE. 

s'occupe  de  s'aménager,  cliez  lui,  une  sorte  de  réduit  où  échappant  aux  autres, 
libre  de  lui-même,  il  pût  méditer  à  l'aise;  il  organise  en  conséquence  la  prin- 
cipale tour  de  son  manoir,  qui  depuis  est  dite  «  Tour  de  Montaigne  ».  L'ins- 
cription latine,  dont  la  traduction  suit,  qu'avec  nombre  d'autres  il  fait  tracer 
dans  sa  librairie  ou  bibliothèque  qui  devait  constituer  son  cabinet  de  travail  et 
dont  il  donne  si  complaisamment  la  description  au  ch.  3  du  liv.  111  des  Essais, 
j)eint  bien  quel  pouvait  être  son  état  d'âme,  à  ce  moment  de  son  existence  : 
«  L'an  du  Christ  1571,  y  est-il  dit,  à  l'âge  de  trente-liuit  ans,  la  veille  des  ca- 
lendes (1)  de  mars,  Jlichel  de  Montaigne,  depuis  longtemps  déjà  ennuyé  de 
l'esclavage  de  la  cour  et  des  charges  publiques,  se  sentant  encore  dispos,  est 
venu  dans  cette  retraite  se  reposer  sur  le  sein  des  doctes  vierges,  espérant  y 
passer  enfin  dans  le  calme  et  la  sécurité  les  joui*s  qui  lui  restent  à  vivre. 
Puissent  les  destins  lui  permettre  de  parfaire  cette  habitation,  où  déjà  ses  pères 
venaient  agréablement  se  reposer  et  qu'il  consacre  à  sa  liberté,  à  sa  tranquillité 
et  à  ses  loisirs.  » 

En  même  temps,  il  commençait  à  écrire  les  Essais,  cette  œuvre  capitale  de  sa 
vie.  Il  ne  semble  pas  toutefois  que  ce  fût  avec  l'idée  d'en  composer  un  ouvrage  ; 
ce  n'était  tout  d'abord  que  de  simples  notes,  sur  lesquelles  il  transcrivait  ce  qui 
l'avait  frappé  dans  sa  lecture  du  jour,  accompagné  de  quelques  brèves  réflexions 
d'un  caractère  général,  ainsi  qu'il  ressort  de  la  division  du  livre  I"  en 
chapitres  courts,  dont  plusieurs  parfois  sur  le  même  sujet.  Quant  à  ce  qui  est 
devenu  plus  tard  et  de  plus  en  plus  le  dessein  avoué  et  affiché  de  son  livre  : 
l'étude  minutieuse  de  soi-même,  avec  parti  pris  de  se  peindre  tout  entier  et  à 
nu,  cela  parait  si  peu  avoir  été  sa  première  intention  que,  dans  ces  mêmes 
chapitres,  il  prend  des  détours  pour  parler  de  lui  et  ne  se  met  en  scène  que 
sous  le  voile  de  l'anonyme,  comme  par  exemple  dans  celui  intitulé  :  «  Du  parler 
prompt,  ou  tardif  ».  Ce  n'est  qu'à  la  longue  qu'il  s'est  décidé  à  livrer  au  public 
ces  extraits  de  ses  lectures,  les  souvenire  de  ses  observations  et  de  ses  causeries, 
tout  ce  qu'enfin  il  a  cueilli  en  faisant  l'école  buissonnière. 

En  cette  même  année  1571,  lui  naissait  une  seconde  fille,  Léonor,  la  seule,  sur 
les  six  qu'il  a  eues,  qui  ne  soit  pas  morte  en  bas  âge;  et,  comme  si  le  sort  se 
prenait  à  railler  ses  projets  de  retraite,  il  était  fait  chevalier  de  l'ordre  de 
S.-Michel,  «  pour  ses  vertus  et  ses  mérites  »,  dit  la  lettre-patente  lui  conférant 
cette  distinction. 

Les  événements  furent  du  reste  plus  forts  que  sa  résolution;  et  ici  s'intercalent, 
pour  se  continuer  par  intervalles  jusqu'à  la  fin  de  sa  vie,  les  incidents,  à  la 
vérité  accidentels  et  passagers  et  sur  lesquels  on  n'a  que  de  très  vagues  données, 
qui  font  que,  dans  les  Essais,  Montaigne  laisse  entendre  qu'il  a  exercé  la  profes- 
sion militaire,  ce  qui  du  reste  était  alors,  par  circonstance,  le  cas  d'à  peu  près 
tout  gentilhomme,  et  ceux  qui  lui  font  attribuer  à  diverses  époques  des  missions 
sur  l'objet  précis  desquelles  on  n'est  pas  davantage  fixé,  mais  qui,  étant  donné 
son  caractère,  son  entregent,  la  situation  à  laquelle  il  parvint,  paraissent  avoir 
dû  consister  surtout  en  négociations  auprès  de  certains  princes  et  chefs  princi- 
paux des  divers  partis.  Il  demeure  toutefois  trace  de  l'une  d'elles,  à  lui  confiée 
en  1574,  par  le  duc  de  Montpensier,  commandant  l'armée  royale  en  Poitou, 
auprès  du  Parlement  et  du  Corps  de  ville  de  Bordeaux,  pour  qu'ils  aient  à 
prendre  des  dispositions  de  défense. 

En  1577,  le  roi  de  Navarre  le  nomme  gentilhomme  de  sa  chambre,  titre  abso- 
lument honorifique  pour  certains,  comme  ce  fut  le  cas  pour  lui,  ne  comportant 
aucun  service  auprès  du  prince.  Ce  même  titre  lui  avait  été  ou  lui  fut  dévolu 
aussi,  la  date  en  étant  incertaine,  par  Charles  IX  ou  son  successeur,  ainsi  qu'en 
font  foi  les  titres  des  deux  premières  éditions  des  Essais  et  son  diplôme  de 
citoyen  romain. 

(l)On  donnait  ce  nom,  dans  la  chronologie  romaine,  aux  premiers  jours  de  cliaque 
mois.  Les  Romains  comptaient  par  calendes,  lesquelles  n'existaient  pas  chez  les  Grecs, 
d'où  le  proverbe  •  renvoyer  une  chose  aux  calendes  grecques  .,  pour  dire  qu'on  ne  la 
fera  jamais;  à  remarquer  ici  que  la  veille  des  calendes  de  mars,  ou  dernier  jour  de 
février,  était  la  date  anniversaire  de  la  naissance  de  Montaigne. 


SA  VIE.  A. IX 

En  1580,  parut  la  première  édition  de  son  ouvrage,  qui  n'en  comprenait  que 
les  deux  premiers  livres. 

Montaigne  qui,  depuis  des  années  déjà,  avait  commencé  à  ressentir  des  atteintes 
de  gravelle  et  vainement  avait  eu  recours  pour  les  combattre  aux  eaux  ther- 
males de  son  voisinage,  Aigues-Chaudes,  Bagnères,  se  résolut  à  cette  époque  à 
voyager  au  loin,  autant  par  goût  que  pour  essayer  si  d'autres  eaux  ne  lui 
seraient  pas  plus  favorables;  et  aussi,  pense-t-on,  pour  échapper  aux  difficultés 
sans  cesse  croissantes  do  la  situation  intérieure  et  à  celles  non  moins  pénibl'^s 
pour  lui  résultant  du  train  de  vie  que,  chacun  de  son  côté,  menaient  le  roi  et 
la  reine  de  Navarre  et  de  leurs  rapports,  qu'il  déplorait  d'autant  plus  qu'il  était 
particulièrement  attaché  à  tous  deux. 

Il  se  rendit  d'abord  à  Paris  où  il  fit  hommage  de  son  livre  au  Roi;  puis  à  La 
Fère  pour  rendre  les  derniers  devoirs  au  comte  de  Grainmont,  le  mari  de  la 
belle  Corisande  d'Andouins,  qui  venait  d'être  tué  au  siège  de  cette  place  et  dont 
il  accompagna  le  corps  à  Soissons;  et,  de  là,  aux  bains  de  Plombières  et  de 
Bade. 

De  ce  voyage  qui  devait  le  tenir  dix-huit  mois  hors  de  chez  lui,  du  22  juin  1580 
au  30  septembre  1581,  effectué  en  courant  çà  et  là  à  travers  la  Suisse,  l'Allemagne 
du  Sud  et  l'Italie.  Montaigne  a  tenu  un  journal  qui  n'a  rien  de  remarquable  au 
point  de  vue  littéraire,  mais  est  intéressant  par  la  connaissance  qu'il  nous  donne 
de  son  auteur;  un  de  ses  frères  et  un  jeune  seigneur  d'Estissac,  probablement 
le  fils  de  la  dame  de  ce  nom  à  laquelle  est  dédié  le  ch.  7  du  liv.  II  des  Essais, 
l'accompagnaient. 

Entré  en  Allemagne  par  Bàle,  il  pousse  jusqu'à  Augsbourg,  où  il  cache  ses  nom 
et  qualités  pour  qu'on  le  croie  plus  grand  seigneur  qu'il  n'est,  et  d'où  il  revient 
en  Italie  par  Venise,  pour  arriver  à  Rome  où  il  fait  un  séjour  de  cinq  mois, 
entrecoupé  d'excursions  à  Notre-Dame  de  Lorette,  où  il  laisse  dans  la  Casa  Santa 
son  portrait  et  ceux  de  sa  femme  et  de  sa  fille;  c'était  alors  un  grand  honneur 
d'y  figurer  :  «  à  peine  est  reçu  à  donner  qui  veut,  dit-il,  au  moins  c'est  faveur 
d'être  accepté  •>;  puis  il  passe  à  Florence,  et  va  faire  une  cure  d'eau  aux  bains 
délia  Villa  près  de  Lucques. 

A  son  arrivée  à  Rome,  ses  livres  avaient  été  saisis  et  parmi  eux  un  e.xemplaire 
des  Essais,  dont  l'examen  assez  superficiel  donna  lieu  de  la  part  de  la  censure 
à  quelques  critiques  assez  anodines,  dont  l'auteur  ne  tint  du  reste  aucun  compte 
et  qui  n'eurent  cette  fois  aucune  suite  fâcheuse,  à  rencontre  de  ce  qui  en  résulta 
un  siècle  après  où  l'ouvrage  fut  frappé  d'interdit. 

Avant  de  quitter  Rome,  il  sollicita  et  obtint  le  diplôme  de  citoyen  romain.  Bien 
que  dans  les  Essais  il  le  qualifie  de  <•  faveur  vaine,  qui  lui  fut  octroyée  avec 
toute  gratieuçe  libéralité  »,  il  convient  dans  son  journal  avoir  employé  pour 
l'obtenir  «  ses  cinq  sens  de  nature  »  ;  de  fait,  cette  concession  n'était  pas  prodi- 
guée. 

Montaigne  était  aux  bains  délia  Villa,  quand  dos  lettres  lui  parvinrent,  l'infor- 
mant qu'un  mois  et  demi  auparavant,  le  I"  juillet  1581,  il  avait  été,  à  l'unani- 
mité, élu  maire  de  Bordeaux.  Il  revint  à  Rome  où  il  trouva  la  missive  des  jurats 
lui  notifiant  officiellement  son  élection  ;  il  s'achemina  alors  vers  la  France  par  le 
mont  Cenis,  laissant  à  Rome  son  frère  et  M''  d'Estissac. 

Il  avait  été  nommé  maire  sans  l'avoir  brigué  :  le  souvenir  des  services  rendus 
par  son  père  dans  cette  charge,  les  quatorze  années  durant  lesquelles  lui-même 
avait  siégé  au  Parlement,  les  deux  premiers  livres  des  Essais  parus  l'année  pré- 
cédente qui  obtenaient  un  vif  succès,  ses  relations  l'avaient  désigné  au  choix 
de  ses  concit03fens,  on  même  temps  que  le  désir  d'évincer  le  maréchal  de  Biron 
qui  quittait  ces  fonctions,  dont  il  sollicitait  le  renouvellement  pour  lui  ou  l'attri- 
bution à  quelqu'un  des  siens,  mais  qui,  pendant  (ju'il  les  avait  occupées,  avait 
indisposé  nombre  de  pei-sonnes  et  entre  autres,  à  la  fois,  le  roi  de  Navarre  et  sa 
femme  la  reine  Jlarguerite  sœur  du  roi  de  France. 

Mais  le  caractère  de  Montaigne,  autant  que  ses  goûts  et  même  sa  santé,  l'éloi- 
gnaient  des  charges  publiques,  et  il  avait  décliné  l'honneur  qui  lui  était  fait. 
Les  Bordelais,  s'entêtant,  s'étaient  adressés  au  roi  ;  et  à  son  arrivée  chez  lui,  il 
trouva  une  lettre  de  Henri  III  l'invitant  à  accepter  :  il  dut  céder;  peut-être  au 


A.xii  NOTICE  SUR  MONTAIGxNE. 

Il  fut  inhumé  dans  l'église  du  couvent  des  Feuillants  à  Bordeaux. 

Quand  son  mari  vint  à.  lui  manquer,  après  une  union  qui  avait  duré  plus  de 
vingt-sept  ans,  M""  de  Montaigne  se  donna  la  double  tâche  de  lui  ériger  un 
tombeau  et  de  faire  rééditer  les  Essais  conformément  aux  dernières  volontés  de 
leur  auteur. 

Ce  ne  fut  qu'en  1614  que  le  monument  funéraire  qu'elle  voulait  lui  consacrer 
fut  achevé  :  il  y  est  représenté  en  grandeur  naturelle,  étendu  sur  un  sarcophage, 
revêtu  d'une  armure,  ayant  son  casque  et  ses  gantelets  à  côté  de  lui,  et  un  lion 
couché  à  ses  pieds,  si  bien  que  malgré  ses  armes,  ■■  on  hésiterait  à  reconnaître  le 
paisible  Montaigne  sous  cet  appareil  guerrier  »,  si  deux  épitaphes,  l'une  en  latin, 
l'autre  en  grec,  gravées  l'une  d'un  côté,  l'autre  de  l'autre,  résumant  sa  vie  et  sa 
doctrine,  ne  renseignaient  absolument  à  ce  sujet  (P.  Bonnefox).  —  Toutes  deux 
ont  été  composées  par  Jean  de  S'-Martin  avocat  au  parlement  de  Bordeaux.  La 
première,  pompeuse  et  banale,  est  sans  valeur.  La  seconde  résume  assez  bien  sa 
vie  et  ses  idées;  elle  est  ainsi  conçue  : 

«  A  Michel  Montaigne,  Périgourdin,  fils  de  Pierre,  petit-fils  de  Grimon,  arrière- 
«  petit-fils  de  Ramon,  Chevalier  de  S.-Michel,  citoyen  romain,  natif  de  Boideaux. 
«  ancien  maire  de  la  cité  des  Bituriges,  homme  né  pour  la  gloire  de  la  nature  : 
«  dont  la  douceur  de  mœurs,  la  finesse  d'esprit,  la  facilité  d'élocution  et  la  justesse 
«  de  jugement  ont  été  estimées  au-dessus  de  la  condition  humaine  ;  qui  a  eu  pour 
«  amis  les  rois  les  plus  illustres,  les  plus  grands  seigneurs  de  France  et  même  les 
■■  chefs  du  parti  égaré,  quoique  lui-même  fût  d'une  moindre  condition  et  fidèle 
«  observateur  des  lois  et  de  la  religion  de  ses  pères.  N'ayant  jamais  blessé  per- 
«  sonne,  aussi  incapable  de  flatter  que  d'injurier,  il  reste  cher  à  tous  indistincte- 
«  ment.  Ayant  toujoure  fait  profession,  dans  ses  discours  et  dans  ses  écrits,  d'une 
«  sagesse  à  toute  épreuve  contre  toutes  les  attaques  de  la  douleur,  après  avoir 
«  lutté  longtemps  avec  courage  contre  les  assauts  répétés  d'une  maladie  impla- 
«  cable,  égalant  ses  écrits  par  ses  belles  actions,  il  a  fait,  avec  la  volonté  de  Dieu, 
«  une  belle  fin  à  une  belle  vie. 

«  Il  vécut  cinquante-neuf  ans,  sept  mois  et  onze  jours,  et  mourut  le  13  septembre 
«  de  l'an  du  salut  1592. 

«  Françoise  de  Lachassaigne,  pleurant  la  perte  de  cet  époux  fidèle  et  constam- 
•  ment  chéri,  lui  a  érigé  ce  monument,  gage  de  ses  regrets.  » 

En  1800,  la  dépouille  de  Montaigne  fut  transférée  en  grande  pompe  au  musée 
de  la  ville;  mais  il  se  trouva  que  par  le  fait  d'une  erreur  ce  n'était  pas  son  corps, 
mais  celui  d'une  de  ses  nièces  inhumée  au-dessus  de  lui,  qu'on  avait  déplacé.  Il 
continuait  donc  à  demeurer  à  la  place  qu'il  occupait  depuis  deux  cents  ans,  quand, 
en  1871,  l'incendie  de  l'église  où  il  reposait,  qui  respecta  son  mausolée,  amena  son 
transfert  à  titre  provisoire  dans  la  chapelle  du  lycée  et  plus  tard,  en  1886,  dans 
le  vestibule  des  Facultés  de  Bordeaux  construitei^  sur  l'emplacement  du  couvent 
des  Feuillants;  c'est  là  qu'on  le  voit  actuellement,  tandis  qu'on  n'a  pu  retrouver 
le  petit  vaisseau  contenant  le  cœur  de  l'illustre  philosophe,  déposé  à  son  décès 
dans  l'église  de  S.-Michel  de  Montaigne.  Rien  n'indiquant  qu'il  en  ait  été  enlevé, 
il  doit  s'y  trouver  encore,  seulement  on  ignore  où  il  avait  été  placé. 

En  1616,  dans  ce  même  tombeau  qui  réunit  ainsi  le  père  et  la  fille,  avait  été 
inhumée  Léonor.  Quant  à  Françoise  de  la  Cliassaigne.  qui  mourut  en  1627,  à  l'âge 
de  83  ans,  ayant  survécu  trente-cinq  ans  à  son  mari,  elle  alla  reposer  dans  l'église 
de  S.-Michel. 

Léonor  s'était  mariée  deux  fois  :  veuve  de  François  de  la  Tour,  elle  avait 
épousé  en  secondes  noces  le  vicomte  de  Gamaches  ;  elle  en  eut  une  seconde  fille, 
Marie  :  c'est  par  Marie  de  Gamaches,  mariée  à  un  de  Lur  Saluce,  que  s'est  formée 
la  descendance  directe  de  Montaigne  représentée  aujourd'hui  par  les  familles 
0'  Kelly-Farrell,  de  Ségur,  de  Puységur  et  de  Pontac.  (Voir  le  tableau  généalogique 
ci-contre). 

En  outre  de  la  traduction  de  la  «  Théologie  naturelle  »  de  Sebond  et  des  Essais, 
on  a  encore  de  Montaigne  :  quelques  traductions  d'ouvrages  grecs  et  latins  accom- 
pagnées de  dédicaces,  quelques  poésies  en  latin  et  en  français,  le  journal  de 
ses  voyages,  trouvé  dans  un  grenier  de  son  manoir,  publié  pour  la  première  fois 
en  1774  et  dont  le  manuscrit  a  disparu,  une  éphémeride  assez  succincte,  enfin 


GENEALOGIE   ET   DES 


Ramon  Eyqukm  (1402  à  1476 
Acquéreur  en 


—  GrimON  EyqUEM,  né  vers  1450,  m.  en  1519,  marié  à  Jehanne  du  Four. 


Pierre  Eyqukm,  escuyer,  seigneur  de   Montaigne    (1495  à   1668),   marié    en 
1528  à  Antoinette  de  Louppes,  née  de  1506  à  1510,  morte,  croit-on,  vers  1601. 


"^ 


MICHEL,  seigneur  de   MONTAIGNE    (1533  à  1592),  auteur  des   ESSAIS.  ^ 

Ép.  en  1565    FRANÇOISE   DE  LA  ChASSAIGNE    (1544  à  1627)  ; 
en  a  six  filles,  dont  cinq  meurent  avitnt  l'âge  d'un    an. 


LÉONOR    DE    M( 


En  1590,  François  de  Latour  (m.  en  1694). 

1.  —  Françoise  de  Latour  (1591  à  1613). 

Épouse  en  1600  Honoré  de  Lur  (1594  à  1660)  (elle  avait 

9  ans  et  son  mari  en  avait  6). 

(Honoré  de  Lur  et  Louis  de  Lur,  qi 


Charles  de  Lur  (vicomte  d'Oreillan)    (1612  à  1639). 

Tué  au  siège  de  Salces  (Roussillon). 

Mort   sans  postérité. 


(a)  —  De  Jeanne  de  Gamaches,  deacem 
(i)  _  De  Claude-Madeleine  descendent 


*  A  partir  de  1622  où,  remarié,  il  quitte  Montaigne  et  se  retire  dans  ses  terres,  sa  trace  se  p 


4NCE   DE   MONTAIGNE. 


1449    Isabeau  de  Ferraignes. 
f  de  Montaigne. 

Pierre  (1452-1480),  n'a  pas  été  marié, 
'erogrina,  épouse  de  Lansac. 
Ludita,  épouse  Verteuil. 

rhomas,  dit  M.  de  St-Michel,  de  ce  qu'il  était  curé  de  cette  paroisse,  mort  peu  âgé. 
Pierre  (minor),  dit  Seigneurde  Gaujac,  chanoine  de  Bordeaux,  curé  de  Lahontan,  m.  à  67  ans. 
Raymond,  seigneur  de    Bussaguet,  conseiller  au  parlement  de  Bordeaux,  m.  vers  1567. 
[31anquine,  épouse  de  Belcier. 
Jehanne,  épouse  Dugrain. 

Arnaud  /      ^   ,     ,     ...  ,    ,  ,       . 

>■  i    aines  de  Alicnel,   morts   en  bas  âge  avant  sa  naissance. 

Iliomas,  né  en  1534,  .seigneur  de    Beauregard,    protestant,  épouse   en    secondes  noces    Jacquette 

d'Arsac,  belle-fille  de  La  Boétie. 

•*ierre,  seigneur  de  la  Brousse  (1536  à  1597),  ne  semble  pas  avoir  été  marié. 

Jeanne,    née  en    1536,  protestante,  épouse     Richard    de    Lestonna,     conseiller    au  parlement   de 

Bordeaux. 

Arnaud,  dit  capitaine  St-Martin  (1541  à  1564). 

jéonor,  née  en    1552,  mariée  à  Thibaud  de   Caraain,  conseiller  au  parlement  de  Bordeaux. 

klarie,  née  en  1554,  femme  de  Bernard  de  Cazalis. 

iertrand,  né  en  1560,  seigneur  de    Mattecoulom,    mort  sans   postérité,    ne    semble  pas    avoir  été 

marié. 

[1571  à  1616). 


En  1608,  le  vicomte  de  Gamaches*. 


2.  —  Marie  de  Gamaches  (leio  à  1683). 
Ép.  en  1627  Louis  de  Lur,  B""  de  Fargues  (m.  en  1696).* 
res,  ont  épousé  les  deux  sœurs  utérines).  | 

1  Charles-François  (1638  à  1669),  mort  sans  postérité. 

2  PhilbeRT,  né  en  1640,  sans  autre  renseignement. 

3  Marguerite,  épouse  L.  de  Laneau,  m.  sans  enfants. 

4  Jeanne,  épouse  L.  de  Saint-Jean   (a). 

5  Claude-Madeleine,  épouse  L.  de  Ségur  (ô). 


5[elly-Farrell,  les  Farrell  et  les  de  Puységiir. 
Montaigne  et  les  Pontac. 


SA  VIE.  A.xm 

quelques  lettres  :  une  d'elles  à  son  père,  sur  la  mort  de  La  Boétie,  est  assez  étendue 
et  mérite  attention:  les  autres  sont  sans  importance. 

On  lui  a  attribué  la  rédaction  d'instructions,  rédigées  en  1503,  par  Catherine 
de  Médicis,  à  l'adresse  de  Charles  IX  qui  venait  d'atteindre  sa  majorité;  il  y  a 
tout  lieu  de  croire  qu'il  y  est  complètement  étranger,  et  qu'elles  ont  été  dictées 
par  la  reine  à  un  homonyme  de  Jlontaigne  remplissant  auprès  d'elle  les  fonctions 
de  secrétaire,  le  même  probablement  au  profit  duquel  elle  faisait  délivrer  en  1586 
une  ordonnance  de  paiement  de  150  écus,  que  l'on  a  retrouvée,  ■<  pour  renouveler 
un  des  chevaux  de  sa  charriote  et  acheter  quelques  hardes  qui  lui  sont  nécessaires  ». 

!Mais  tout  ce  qui  a  trait  à  l'auteur  des  Essais  s'efface  devant  l'éclat  de  cette 
œuvre  capitale;  par  elle,  la  mémoire  de  Montaigne  rayonne  d'une  gloire  qui  se 
maintient  en  ces  temps  où  tout  va  passant  si  rapidement  :  sa  statue  orne  li' 
principal  site  de  Périgueux;  il  existe  de  lui  de  nombreux  b^tes  et  portraits;  en 
bien  des  villes,  des  lycées,  des  promenades,  des  avenues,  des  rues  portent  son 
nom;  pendant  la  Révolution  française  il  a  été  le  sujet  d'une  comédie;  son  éloge 
a  été  mis  au  concours,  et  innombrables  sont  les  ouvrages  et  articles  de  littérature, 
critiques  et  autres,  dont  il  a  été  l'objet.  Par-dessus  tout,  son  livre  traduit  à 
l'étranger  en  plusieurs  langues,  sans  cesse  réédité  en  France  à  toutes  époques, 
introduit  par  extraits  dans  l'enseignement,  lui  a  donné  l'immortalité  en  ce  monde. 

Bien  que  passant  trop  légèrement  sur  le  scepticisme  confinant  à  l'égoïsme  qui 
est  le  fond  de  cette  existence  et  la  flattant  un  peu,  Villemain  dans  son  panégy- 
rique de  Montaigne  l'a  très  heureusement  résumée  et  appréciée  :  »  Sa  vie,  dit-il, 
"  offre  peu  d'événements  :  elle  ne  fut  point  agitée;  c'est  le  développement  paisible 
■<  d'un  caractère  aussi  noble  que  droit.  La  tendresse  filiale,  l'amitié  occupèrent 
«  ses  plus  belles  années.  Il  voyagea,  n'étant  plus  jeune,  et  n'ayant  plus  besoin 
•■  d'expérience;  mais  son  àme,  nourrie  si  longtemps  du  génie  antique,  retrouva 
■<  de  l'enthousiasme  à  la  vue  des  ruines  de  Rome.  —  Malgré  son  éloignement  pour 
•<  les  honneurs  et  les  emplois,  élu  par  le  suffrage  volontaire  de  ses  concitoyens, 
«  il  remplit  deux  fois  les  fonctions  de  premier  magistrat  dans  la  ville  de  Bordeaux. 
•<  Il  était  plus  fait  pour  étudier  les  hommes  que  pour  les  gouverner  :  c'était 
«  l'objet  où  se  portait  naturellement  son  esprit:  il  s'en  occupait  toujours  jusque 
'<  dans  le  calme  de  la  solitude  et  dans  les  loisirs  de  la  vie  privée.  —  Les  fureurs 
•<  de  la  guerre  civile  troublèrent  quelquefois  son  repos;  et  sa  modération,  comme 
"  il  arrive  toujours,  ne  put  lui  servir  de  sauvegarde.  Cependant  ces  orages  même 
«  ne  détruisirent  pas  son  bonheur.  C'est  ainsi  qu'il  coula  ses  jours  dans  le  sein 
«  des  occupations  qu'il  aimait,  libre  et  tranquille,  élevé  par  sa  raison  au-dessus 
«  de  tous  les  chagrins  qui  ne  venaient  point  du  cœur,  attendant  la  mort  sans  la 
«  craindre,  et  voulant  qu'elle  le  trouvât  «  occupé  à  bêcher  son  jardin  et  non- 
«  chalant  d'elle  ».  —  Les  «  Essais  »  ne  furent  pour  lui  qu'un  amusement  facile, 
«  un  jeu  de  son  esprit  et  de  sa  plume.  Heureux  l'écrivain  qui,  rassemblant  ses 
«  idées  comme  au  hasard,  et  s'entretenant  avec  lui-même,  sans  songer  à  la  pos- 
«  térité,  se  fait  cependant  écouter  d'elle.  On  lira  toujours  avec  plaisir  ce  qu'il  a 
«  produit  sans  effort.  Toutes  les  impressions  de  sa  pensée,  fixées  à  jamais  par  le 
•<  style,  passeront  aux  siècles  à  venir.  Quel  fut  son  secret?  Il  s'est  mis  tout  entier 
"  dans  son  ouvrage;  aussi  en  lui  l'homme  ne  sera  jamais  séparé  de  l'écrivain, 
«  non  plus  que  son  caractère  ne  le  sera  de  son  talent.  » 


LES  ESSAIS. 

«  Livre  consubstantiel  à  son  auteur  »,  écrit  Montaigne  (liv.  II,  ch.  18,  II,  524 
et  N.  Autheur);  autrement  dit  :  mon  livre  et  moi  ne  faisons  qu'un  (III,  244). 

Les  ESSAIS  et  leur  auteur  sont  en  effet  inséparables  :  qui  analyse  l'un,  analyse 
l'autre,  ils  ne  sauraient  être  analysés  l'un  en  dehors  de  l'autre;  et  d'autre  part, 
le  proverbe  qui  dit  que  nous  pouvons  nous  flatter  de  connaître  l'homme  avec  qui 
nous  avons  mangé  un  boisseau  de  sel  est  ici  en  défaut  :  qui  peut  dire  en  effet 
combien  d'exemplaires  des  Essais  il  faut  avoir  usés  avant  de  croire  qu'on  connaît 
Montaigne  J 


A.xiY  NOTICE  SUR  iMOiNTAIGNE. 

Ondoyant  et  divere,  est  sa  caractéristique  essentielle  on  uiôme  temps  quil  nous 
apparaît  être  tel  ou  tel  suivant  nos  propres  sentiments,  suivant  même  nos  disposi- 
tions du  moment;  on  ne  le  tient  jamais;  aucune  doctrine  n'est  tellement  sienne 
qu'il  ne  puisse  avoir  soutenu,  dans  quelque  coin  des  Essais,  la  doctrine  contraire. 

Aux  yeux  des  uns,  il  est  le  plus  naturel,  le  plus  pratique,  le  plus  simple  des 
sages,  et  voilà  de  quoi  plaire  au  plus  grand  nombre;  aux  yeux  des  autres,  il  est 
le  plus  avisé,  le  plus  fin,  le  plus  raffiné  des  libres  penseurs,  et  voilà  de  quoi 
plaii'e  aux  plus  délicats;  généralement  on  aime  sa  hardiesse,  quelques-uns  le 
trouvent  osé;  d'autres  le  louent  de  maintenir  à  l'état  de  questions  ouvertes 
une  foule  de  problèmes  que  ceux-là  estiment  préférable  d'écarter  en  les  passant 
sous  silence. 

A  première  vue  moraliste  de  premier  ordre,  le  jugement  et  la  connaissance 
du  cœur  humain  priment  en  lui  l'érudition  et  sa  morale  n'effarouche  pas  comme 
celle  de  tant  d'autres  qui  l'ont  devancé  ou  suivi.  Sous  une  forme  simple  et 
attrayante,  il  nous  montre  combien  du  fait  même  de  la  natuie,  dont  notre 
liaison  est  l'interprète,  sont  faciles  et  agréables  la  recherche  de  la  vérité  et  la 
pratique  de  la  vertu,  quel  contentement  elles  sont  susceptibles  de  nous  pi'o- 
curer,  et  que  sous  leur  action  réconfortante  peu  à  peu  Tapaisement  se  fait  en 
nous.  Loin  de  nous  détourner  des  jouissances  qu'il  nous  est  donné  de  ressentir 
ici-bas,  il  nous  incite  à  ne  pas  les  dédaigner,  nous  mettant  seulement  en  garde 
contre  l'abus;  comme  aussi  à  patienter  avec  les  misères  de  l'existence,  en  les 
comparant  à  ce  qu'elles  pourraient  être,  et  considérant  qu'il  est  toujoui*s  loisible 
de  s'y  soustraire  à  qui  elles  sont  devenues  intolérables.  —  Élevé  dans  la  pratique 
de  la  foi  catholique  la  plus  orthodoxe,  il  la  confesse  à  maintes  reprises,  tout  en 
évitant  avec  grand  soin  d'en  discuter  les  dogmes.  —  Partisan  de  la  royauté 
qui,  pour  lui,  représente  l'ordre,  base  essentielle  des  sociétés,  la  domination 
jwpulaire  ne  lui  semble  pas  moins  être  la  plus  naturelle  et  la  plus  équitable: 
mais  par-dessus  tout,  il  est  ennemi  de  la  violence  et  des  abus  d'où  qu'ils 
viennent;  rebelle  à  toute  contrainte,  il  veut  pour  chacun  la  liberté  la  plus 
absolue  uniquement  limitée  par  l'obligation  de  ne  pas  porter  atteinte  à  celle 
d'autrui  et  d'observer  les  lois. 

Et  nonobstant,  en  le  scrutant  davantage,  peut-on  nier  que  sous  le  rapport 
philosophique,  nul  plus  que  lui  ne  se  soit  évertué  à  démontrer  l'inanité  de  tout 
système  et  l'impuissance  de  l'esprit  humain?  Rien  n'est  absolu,  tout  est  relatif, 
est  sa  conclusion  en  toutes  choses.  —  Personne  a-t-il  mieux  montré  à  quel 
point  un  homme  peut  être  irréligieux,  avec  la  volonté  de  n'être  pas  antire- 
ligieux! jamais  personne  n'a  fait  plus  complètement  abstraction  de  la  vie  éter- 
nelle; sa  religion  est  toute  de  surface  et  d'étiquette.  Lui  si  prolixe  en  citations, 
use  relativement  assez  peu  de  l'Ecriture  Sainte  et  de  la  Bible,  tout  juste  assez 
pour  ne  pas  paraître  les  ignorer,  et  sa  solution  de  la  question  religieuse  n'est 
autre  en  définitive  que  de  «  demander  à  son  curé  ce  qu'il  faut  croire  et  n'y  plus 
penser  •.  —  Ces  mêmes  lois,  pour  lesquelles,  comme  citoyen,  il  professe  le  plus 
grand  respect,  comme  penseur  il  a  pour  elles,  et  pour  toutes  en  général,  un 
mépris  absolu,  convaincu  qu'il  est  que  pas  une  n'est  fondée  sur  la  raison  et  que 
leur  existence  seule  fait  leur  autorité  (Stapfer).  —  Il  est  humain,  réprouve  toute 
rigueur  inutile  et  s'apitoye  volontiers  sur  le  sort  des  malheureux;  il  est  de 
commerce  facile,  c'est  incontestable;  mais  de  la  question  sociale  il  ne  dit  mot, 
et  d'autre  part  que  d'égoïsme  en  lui  !  C'est  à  un  degré  tel  qu'imbu  de  ses  idées, 
un  homme  peut  vivre  heureux,  mais  qu'une  nation  chez  laquelle  chacun  s'ins- 
pirerait de  pareils  sentiments,  résigné  à  tout  plutôt  que  d'accepter  d'être  troublé 
dans  sa  quiétude,  laissant  aux  autres  le  soin  de  lutter  pour  ce  que  soi-même  on 
approuve,  souhaite  ou  désire,  serait  immanquablement  perdue.  Et  c'est  bien  là 
ce  qui  nous  menace  :  notre  bourgeoisie  qui  forme  le  fond  sérieux  de  notre 
population,  absolument  formée  sur  ce  modèle,  à  peu  près  satisfaite  de  son  sort, 
ne  voit,  elle  aussi,  rien  au  delà  (le  bien-être  est  mère  de  la  veulerie);  n'ajant 
au  cœur  qu'une  passion,  l'égoïsme,  elle  se  désintéresse  du.  flot  montant  des 
revendications  des  classes  ouvrières  auxquelles  elle ,  ne  veut  pas  prêter  l'atten- 
tion, attacher  l'importance  qu'elles  méritent,  soit  pour  y  donner  satisfaction,  soit 
pour  y  résister,  ne  semblant  pas  se  douter  qu'en  politique  comme  à  la  guerre. 


LES  ESSAIS.  A.xv 

pour  avoir  la  paix  il  faut  être  tort  et  redouté,  et  prévoyant;  regarder  en  face 
les  difficultés,  et  les  combattro  en  prenant  les  devants  et  non  s'incliner.  Que 
peut-on  voir  en  effet  de  plus  probant  sur  cette  disposition  d'esprit  chez  Mon- 
taigne que  ces  passages  mêmes  de  son  livre  :  «  le  me  contente  de  iouïr  du 
monde  sans  m'en  empresser,  de  viure  vne  vie  seulement  excusable  et  qui  seule- 
ment ne  poise  nj'  à  moi  ny  à  autrui.  »  —  «Si  ne  sçais  à  l'examiner  de  près,  si 
selon  mon  humeur  et  mon  sort,  ce  que  i'ay  à  souffrir  des  affaires  et  des  domes- 
tiques, n'a  point  plus  d'abiection,  d'importunité  et  d'aigreur,  que  n'auroit  la 
suitte  d'vn  homme,  nay  plus  grand  que  moy,  qui  me  guida.st  vn  peu  à  mon 
aise.  •  —  «  le  hay  la  pauureté  à  pair  de  la  douleur;  mais  ouy  bien,  changer 
cette  sorte  de  vie  à  vne  autre  moins  braue  et  moins  aflaireuse.  »  —  «  le  me 
consolerois  aysement  de  cette  corruption  des  mœurs  présentes  de  nostre  estât, 
pour  le  regard  de  l'interest  public:  mais  pour  le  mien,  non.  l'en  suis  en  par- 
ticulier trop  pressé.  >•  —  «  La  plus  honorable  vacation  est  de  seruir  au  publiq 
et  estre  Uile  à  beaucoup.  Pour  mou  regard,  ie  m'en  despars,  partie  par  cons- 
cience, partie  par  poltronorie  »  (ch.  IX  du  liv.  III,  III,  390,  392,  396).  Ce 
scepticisme  outré,  dont  on  lui  fait  reproche,  s'explique  bien,  du  reste,  i)ar 
les  circonstances  dans  lesquelles  il  se  trouvait.  En  politique,  les  partis  chan- 
geaient de  thèse  au  fur  et  à  mesure  que  les  événements  se  produisaient,  et 
chacun  changeait  de  parti  suivant  ce  qu'il  croyait  plus  avantageux,  les  con- 
victions n'y  étaient  généralement  pour  rien.  En  matière  religieuse,  son  père 
était  catholique,  sa  mère  protestante,  ses  frères  et  sœurs  tenaient  les  uns  pour 
la  première  de  ces  religions,  les  autres  pour  la  seconde;  les  discussions  eu 
famille  sur  les  mérites  de  l'une  et  de  l'autre  devaient  être  fréquentes  en  ce 
temps  où  elles  étaient  l'une  des  causes  essentielles  des  ti'oubles  qui  agitaient 
si  profondément  la  France.  Ce  devait  être  pour  lui,  qui  aimait  à  penser,  un 
sujet  de  méditations  constantes,  et  la  méditation  en  pareille  matière,  quand 
la  raison  seule  s'en  mêle  à  l'exclusion  de  la  foi  (et.  chez  lui,  chacune  avait  son 
heure),  conduit,  ainsi  qu'il  le  dit,  «  ayant  toilt  essayé,  tout  sondé,  à  ne  trouuer 
en  cet  amas  de  choses  diuerses,  rien  de  ferme,  rien  que  vanité  »  (II,  220); 
«  toutes  choses  nous  sont  occultes,  il  n'en  est  aucune  de  laquelle  nous  puissions 
établir  quelle  elle  est  .  (II,  244). 

S''-Belve  rappelle  «  le  plus  sage  des  Français  >>;  c'est  beaucoup  dire,  mais  à 
coup  sur.  Montaigne  fut  un  sage;  il  est  un  maître  sous  le  rapport  du  bon  sens, 
pour  cette  moyenne  de  l'humanité  qui  forme  un  groupe  si  considérable  et  si 
honorable,  qui  n'est  bien  capable  au  cours  ordinaire  de  la  vie  que  d'une  sagesse 
courageuse  encore,  mais  tempérée  et  modeste;  il  nous  gouverne,  nous  dirige, 
nous  inspire,  il  est  le  héros  et  le  hérault  du  bon  sens;  et,  quand  il  a  affaire 
à  des  âmes  plus  hautes,  plus  sévères  à  la  fois  et  plus  ardentes,  il  ne  les  conquiert 
pas,  mais  néanmoins  il  les  séduit,  les  charme  jusqu'à  les  inquiéter;  il  s'en  fait 
non  des  amies,  mais,  ce  qui  est  plus  flatteur,  des  ennemies  qui  ne  peuvent  dé- 
tacher de  lui  ni  leurs  pensées,  ni  leurs  regards  (Faguet).  —  Et  cependant,  si 
l'on  vous  disait  d'un  homme,  sans  le  nommer  :  II'  a  traversé  l'étude,  la  magis- 
trature, la  coui-,  la  guerre,  l'administration,  et  nulle  part  il  ne  s'est  arrêté,  ni 
engagé  à  fond.  Rentré  dans  la  vie  privée,  il  n'y  a  point  pris  racine;  il  a  jugé 
que  les  devoirs  et  les  intérêts  domestiques  étaient  encore  un  cercle  trop  large, 
pour  ce  que  j'appelle  sa  paresse,  une  charge  trop  lourde,  pour  ce  qu'il  appelle 
son  indépendance:  il  s'est  isolé  de  sa  famille  après  s'être  isolé  du  monde  : 
comme  mari,  comme  père,  il  a  cru  faire  assez  en  laissant  sa  femme  gronder 
à  l'aise  et  .sa  fille  s'élever  au  hasard,  pendant  qu'il  s'enfermait  et  rêvait  dans 
une  tourelle  réservée  de  son  petit  château,  sans  jamais  faire  aucun  effort  pour 
autrui.  Un  tel  homme  peut-il  réellement  être  considéré  comme  le  type  de  l'homme 
vraiment  sage?  Que  pouvait-il  y  faire  autre  que  d'observer  cet  être  unique,  ce 
moi  auquel  il  avait  réduit  son  univers,  que  par  moment  il  maltraite  en  paroles, 
mais  dont  il  est  évidemment  trop  jaloux,  pour  qu'on  admette  qu'il  n'en  (Hait  pas 
amoureux;  et,  frappé  des  contrariétés  et  des  complexités  de  sa  nature,  concluant 
de  lui-même  a  nous  tous,  pouvait-il  se  représenter  l'homme  autrement  qu'une 
énigme  indéchiffrable?  (G.  Guizot).  —  «  Mérite-t-il  d'être  pris  pour  modèle,  celui 
qui  se  félicite  d'être  ai'rivé  à  ce  point  de  philosophie  qu'il  puisse  mourir  sans 


A.xvi  -NOTICE  SUIl  MONTAIGNE. 

regret  de  chose  quelconque,  non  pas  mémo  de  sa  femme  et  de  ses  enfants;  qui, 
poui"  n'être  point  importuné  à  ce  moment  par  la  présence  de  ses  amis  et  de  ses 
proches  dont  il  soupçonne  les  larmes,  pour  n'être  point  obligé  de  consoler  leur 
douleur  ou  soutenir  leur  faiblesse,  souhaite  d'aller  souffrir  et  mourir  parmi 
des  mercenaires  et  des  inconnus;  qui,  apprenant  la  mort  de  sa  fille  unique, 
envoie  à  sa  femme  une  lettre  badine,  avec  un  traité  de  Plutarque  pour  la 
consoler?  »  (Biot). 

Pour  nous,  qui  avons  vécu  des  années  avec  lui,  Montaigne  nous  apparaît  vif, 
exubérant,  et  avec  cela  nonchalant,  répugnant  à  prendre  une  décision;  très 
malin,  très  piquant  sous  une  certaine  rondeur  d'allures,  sociable  néanmoins, 
d'humeur  facile,  indulgent  pour  autrui  et  en  somme  agréable  compagnon,  ne  se 
sachant  pas  du  reste  mauvais  gré  d'être  le  bonhonmie  qu'il  parait  et  qu'il  fait 
plus  encore  peut-être  qu'il  ne  l'est;  ayant  le  jugement  sain,  l'àme  sincère,  mais 
la  conscience  peu  sévère;  c'est  un  penseur  capricieux  mais  profond,  qui  a  de 
l'originalité,  le  culte  de  l'antiquité,  du  pittoresque  dans  son  style,  nerveux, 
écrivant  au  jour  le  jour,  par  passe-temps,  mais  s'intéressant  peu  à  ce  qui  n'est 
pas  lui,  dont  il  parle  avec  franchise,  tout  en  ne  confessant  guère  que  les  défauts 
dont  on  se  fait  généralement  gloire  dans  le  monde;  d'un  égoïsme  profond,  répu- 
gnant à  l'action  et  aimant  par-dessus  tout  le  calme  et  le  repos;  d'un  scepticisme 
achevé,  qui  le  porte  à  accepter  par  trop  toutes  les  faiblesses  liumaines,  sans 
jamais  provoquer  un  effort  quel  qu'il  soit  pour  les  prévenir  ou  les  refréner;  et 
cependant  sensible  à  la  vertu  et  réprouvant  le  vice;  admirateur  du  beau  et  du 
bien,  tout  en  se  reconnaissant  incapable  d'}^  atteindre;  prenant  ses  maux  en 
patience,  compatissant  à  ceux  dautrui,  résigné  à  ce  qu'il  ne  peut  empêcher, 
se  contentant  de  son  sort;  pondéré,  n'exagérant  rien,  ne  se  passionnant  pas; 
ne  se  croyant  pas  infaillible;  tolérant,  n'imposant  pas  ses  idées,  respectant  les 
opinions  des  autres  et  même  leurs  erreurs;  considérant  la  versatilité  comme 
inhérente  à  la  nature  humaine  et  ne  s'en  étonnant  pas;  fuyant  les  discussions; 
a  tout  procès,  préférant  un  accommodement;  assoiffé  de  liberté  pour  lui  et  pour 
autrui;  respectueux  des  pouvoirs  établis,  non  qu'il  les  tînt  comme  parfaits,  mais 
parce  qu'il  estimait  qu'il  n'y  a  rien  qui  ne  prête  à  la  critique  et  qu'il  ne  donnait 
point  dans  les  utopies;  tout  en  étant  d'un  parti,  se  conciliant  les  autres,  sans 
manquer  ni  à  ses  obligations,  ni  à  ses  propres  sympathies;  ne  se  mêlant  aux 
affaires  publiques  qu'à  son  corps  défendant,  et  faisant  alors,  sans  jamais  outre- 
passer, ce  qu'il  croyait  être  son  devoir;  cherchant  à  esquiver  toute  ingérence 
dans  les  intérêts  et  les  affaires  des  autres,  ne  s'occupant  même  que  modérément 
des  siennes,  préféi^ant  l'inconvénient  d'être  volé  à  l'obligation  de  surveiller  ses 
domestiques;  ne  s'obstinant  pas  à  vouloir  pénétrer  quand  même  la  raison  de  ce 
qui  est;  se  laissant  vivre,  ne  faisant  fi  d'aucune  des  jouissances  et  agréments 
que  l'existence  comporte;  envisageant  la  mort  sans  appréhension,  constamment 
préparé  à  sa  venue;  fidèle  à  la  religion  de  ses  pères,  moins  par  conviction,  que 
pour  n'être  pas  troublé  par  l'ignorance  où  nous  sommes  de  ce  qui  se  passe  après 
nous,  et,  parce  qu'il  trouvait  difficilement  à  accommoder  sa  foi  avec  sa  raison, 
évitant  avec  le  plus  grand  soin  de  les  mettre  en  présence.  Avec  cet  ensemble  de 
défauts  et  de  qualités,  honnête  sans  être  parfait,  satisfaisant,  en  ces  temps  ex- 
traordinairement  agités,  aux  conditions  essentielles  de  ce  qui  procure  à  l'homme 
cette  tranquillité  relative  du  corps  et  de  l'àme,  qui  en  somme  est  le  bonheur  tel 
qu'il  peut  être  ici-bas,  réalisant  Vaurea  mediocrttas  d'Horace,  Montaigne  est  un 
consolateur  précieux  et,  à  ce  titre,  vaut  d'être  lu  et  médité  de  tous. 

L'ouvrage  de  Montaigne  est  un  vrai  répertoire  de  souvenirs  et  de  réflexions 
nées  de  ces  souvenirs.  Sur  chaque  sujet,  il  commence  par  dire  tout  ce  qu'il  sait 
et  il  finit  par  dire  ce  qu'il  croit  et  naïvement,  en  toutes  choses,  le  pour  et  le 
contre;  c'est  un  penseur  profond,  mais  capricieux;  et  le  cours  de  ses  idées 
l'entraîne  sans  cesse  à  tous  les  points  imaginables  de  l'horizon.  On  lui  a  re- 
proché de  conter  trop  d'histoires,  mais  c'est  précisément  par  là  qu'il  arrive 
à  son  but  :  nous  montrer  l'homme  dans  toutes  les  attitudes. 

Le  succès  des  Essais  s'affirma  assez  rapidement,  bien  qu'il  semble  que  ses 
contemporains  aient  été  plus  vivement  ciioqués  que  nous  ne  le  sommes 
aujourd'hui)  des  incorrections  et  des  singularités  de  son  style;  Pasquiek   lui 


LES  ESSAIS.  A.xvii 

reprochait  qu'en  plusieurs  endroits  de  son  livre,  on  reconnaissait  «  je  ne  sais   - 
quoi  du  ramage  gascon  »,  et  l'inVitait  à  les  corriger,  ce  dont,  du  reste,   il  se 
garda  bien. 

Déjà  à  la  lin  de  son  siècle,  .Iuste  Lipse  avait  surnommé  l'auteur  des  Essais 
«  le  Thaïes  français  »  et  de  Thou,  qui  le  qualifie  d'  «  Homme  franc,  ennemi  de 
toute  contrainte  »,  lui  promet  l'immortalité;  par  contre  Scaliger  l'appelle  «  un 
ignorant  hardi  »,  et  les  gens  d'Église  le  traitent  de  «  sophiste  ». 

Dès  le  milieu  du  xvn-  siècle,  les  Essais  étaient  presque  universellement  ré- 
pandus, beaucoup  déjà  s'en  inspirent  et  bien  diverses  sont,  à  cette  époque,  les 
appréciations  émises  à  leur  sujet  : 
Le  cardinal  Duperkon  les  dénomme  «  le  bréviaire  des  honnêtes  gens  ». 
Bacon  écrit  ses  Essais  ayant  sous  les  yeux  ceux  de  Montaigne,  qu'il  comparait 
au  travail  des  abeilles. 

GuEz  DE  Balzac  dit  en  en  parlant  :  «  Ce  n'est  pas  un  corps  entier,  c'est  un 
corps  en  pièces,  tant  l'auteur  est  ennemi  de  toute  liaison  soit  de  la  nature,  soit 
de  l'art.  Il  sait  bien  ce  qu'il  dit,  mais  ne  sait  pas  toujours  ce  qu'il  va  dire;  s'il 
a  dessein  d'aller  dans  un  lieu,  le  moindre  objet  qui  lui  passe  devant  les  yeux, 
le  fait  sortir  de  son  sujet  pour  courir  après  ce  nouvel  objet;  mais  il  s'égare  plus 
heureusement  que  s'il  allait  tout  droit  et  ses  digressions  sont  agréables  et  ins- 
tructives »,  et  il  le  tient  comme  ayant  porté  la  raison  humaine  aussi  haut  qu'elle 
peut  s'élever,  sOit  en  politique,  soit  en  morale. 
Mézerav  l'appelle  «  un  Sénèque  chrétien  ». 
S.-EvREMOND  dit  qu'il  «  s'y  plaira  toute  sa  vie  ». 

Pascal,  qui  avait  commencé  par  le  lire  avec  passion  et  le  goûter  très  vive- 
ment, s'élève  contre  les  tendances  païennes  de  sa  morale,  lui  reproche  de  mettre 
toutes  choses  dans  un  doute  universel,  ce  qui  est  en  effet  la  caractéristique 
de  sa  philosophie,  et  trouve  bien  sot  le  projet  qu'il  a  eu  de  se  peindre.  Sur  ce 
dernier  point,  M.  Faguet  a  depuis  observé  judicieusement  :  «  qu'en  tous  cas, 
le  sot  projet  ne  fut  pas  de  s'étudier  et  de  se  connaître;  que  c'est  peut-être  notre 
premier  devoir  que  de  savoir  ce  que  nous  sommes;  à  qui,  en  nous,  nous  avons 
affaire;  que  rien  n'est  plus  digne  d'un  esprit  sérieux,  ne  lui  est  plus  nécessaire, 
ne  s'impose  plus  à  lui  ».  Et  cependant,  malgré  les  violentes  attaques  dont  il  le 
poursuit,  allant  jusqu'à  l'accuser  de  ne  penser  qu'à  mourir  lâchement  et  molle- 
ment, nul  plus  que  Pascal  n'a  emprunté  à  Montaigne,  à  la  vérité  sans  le  nom- 
mer, si  bien  qu'on  a  pu  dire  que,  malgré  les  différences  profondes  qui  les 
séparent,  la  Bible  est  le  seul  livre  qui  ait  agi  sur  Pascal  plus  que  les  Essais;  et 
que,  par  une  dévotion  outrée  et  mal  dirigée,  il  en  est  arrivé  au  même  point 
que  Montaigne  par  son  scepticisme  exagéré. 

Après  Pascal,  c'est  l'école  de  Port-Royal  qui,  tout  en  convenant  que  Jlontaigne 
a  beaucoup  d'esprit,  lui  reproche  qu'après  avoir  bien  aperçu  le  néant  des  choses 
humaines,  il  croit  peu  à  celles  du  ciel  et  réduit  la  philosophie  à  l'art  de  vivre  à 
son  aise  ici-bas;  qu'en  tant  que  philosophe,  c'est  un  •<  menteur  »  qui  se  moque  du 
lecteur. 
M""'  DE  Lafayette  écrit  qu'«  il  y  a  plaisir  à  avoir  un  voisin  tel  que  lui  ». 
Molière  rivalise  de  sagacité  et  de  profondeur  avec  lui,  quand  il  peint  la 
morgue  et  la  vanité  des  érudits,  l'ignorance  et  le  pédantisme  des  médecins,  les 
sottes  prétentions  des  femmes  savantes  et  plusieurs  autres  ridicules. 

La  Fontaine,  qui  a  à  peu  près  sa  méthode  et  sa  morale,  imite  dans  ses  fables 
sa  philosophie  naïve. 

"  Quel  aimable  homme,  qu'il  est  de  bonne  compagnie,  que  son  livre  est  plein 
de  bon  sens!  »  écrit  M'""  de  Sévigné. 

Malebranche  le  juge  avec  sévérité  :  il  le  tient  pour  pédant*  parce  qu'il  cite 
beaucoup  sans  être  érudit;  comme  fort  en  citations,  mais  malheureux  et  faible 
en  ses  raisons  et  déductions,  lui  reprochant  de  persuader  non  par  des  argu- 
ments, mais  par  son  imagination;  «  un  trait  d'histoire  ne  prouve  pas,  un  petit 
conte  ne  démontre  pas;  deux  vers  d'Horace,  un  apophthegme  de  Cléomènes,  un  de 
César  ne  doivent  pas  persuader  des  gens  raisonnables  »  ;  et  cependant  les  Essais 
ne  sont  qu'un  tissu  de  traits  d'histoire,  de  petits  contes,  de  bons  mots,  de  dis- 
tiques et  d'apophthegmes. 

ESSAIS  DE   MONTAIONE.  —  T.    IV.  b 


A.xvm  NOTICE  SUR  MONTAIGNE. 

HuET,  qui  ne  se  piquait  cependant  pas  d'une  grande  austérité,  appelait  les  Essais 
«  le  bréviaire  des  honnêtes  paresseux  et  des  ignorants  studieux  qui  veulent  s'en- 
fariner  de  quelque  connaissance  du  niondr-  ot  de  quelque  teinture  «les  lettres  ». 
«  A  peine  trouverez-vous,  disait-il,  un  gentilhomme  de  campagne  qui  veuille  se 
distinguer  des  preneurs  de  lièvres,  sans  un  Montaigne  sur  sa  cheminée.  » 

Bayle,  cet  esprit  si  judicieux,  le  continue  et  le  commente. 

La  Bruyère,  qui  l'a  beaucoup  étudié,  s'empare  de  son  style;  il  en  a  le  pitto- 
resque, mais  avec  beaucoup  plus  de  hardiesse;  et  en  peu  de  lignes,  il  le  venge 
des  attaques  de  Balzac  et  de  Mai.ebkanche  :  «  L'un  ne  pensait  pas  assez  pour 
goûter  un  auteur  qui  pense  beaucoup;  l'autre  pense  trop  subtilement  pour  s'ac- 
commoder de  pensées  qui  sont  naturelles.  » 

Le  xviu"  siècle  a  pour  lui  une  admiration  profonde,  dans  laquelle  il  entre  peut- 
être  quelque  parti  pris  :  ses  idées  triomphent;  les  philosophes  de  cette  époque 
le  réclament  comme  un  des  leurs,  un  peu  à  tort  du  reste,  car  à  lopposé  des 
encyclopédistes  qui  estiment  que  l'homme  est  né  bon  et  que  c'est  la  société 
qui,  mal  organisée,  le  déprave,  Montaigne  a  plutôt  tendance  à  croire  que  c'est 
l'homme,  plus  que  la  société,  dont  l'amélioration  est  à  poursuivre. 

Montesquieu  en  particulier  se  fait  son  défenseur  (1). 

M""^  DU  Deffand  l'excepte  lui  seul  de  son  dédain  pour  les  philosophes  qui  tous, 
dit-elle,  sauf  lui,  sont  des  fous. 

Voltaire  plus  que  tout  autre  lui  prodigue  l'éloge,  estime  surtout  en  lui  son 
imagination  (?),  trouve  charmant  le  projet  qu'il  a  eu  de  se  peindre  naïvement 
comme  il  l'a  fait,  et  ajoute  :  «  Quelle  pauvre  idée  ont  eue  Nicole,  Malebranche  et 
Pascal  de  le  décrier  (3).  » 

Vauvexargues  et  Duclos  marchent  sur  ses  pas,  montrant  à  l'homme  ses  travere 
et  ses  défauts. 

J.-J.  Rousseau  s'en  inspire,  le  copie  souvent,  et,  comme  lui,  ne  craint  pas  de 
se  montrer  tout  entier  et  sans  voile  aux  regards  de  ses  contemporains. 

BuFFOx  développe  ses  pensées  sur  la  nature. 

Sedaine  l'unit  à  Shakspeare  et  à  Molière,  admirant  "  ce  fonds  immense  de  na- 
turel, de  raison,  de  grâce,  de  variété,  de  profondeur  et  de  naïveté  qui  caracté- 
rise ces  grands  hommes  >•. 

«  Il  est  aussi  vraisemblable,  dit  Marmontel,  que  sans  Montaigne  on  n'eût  pas 
eu  Pascal,  qu'il  l'est  que  sans  Corneille  on  n'eût  pas  eu  Racine.  » 

Ducis,  lui  aussi,  admire  sa  raison  et  sa  grâce.  ' 

Delille  lui  dresse  un  piédestal,  ainsi  qu'on  en  peut  juger  par  les  vers  qui  ter- 
minent cette  notice. 

La  Harpe  s'exprime  ainsi  à  son  sujet  :  «  Écrivain,  il  a  imprimé  à  la  langue 
française  une  sorte  d'énergie  familière,  qu'elle  n'avait  point  avant  lui  et  qui  ne 
s'est  pas  usée.  Philosophe,  il  a  peint  l'homme  tel  qu'il  est  sans  l'embellir  avec 
complaisance,  sans  le  défigurer  avec  misanthropie.  Il  n'est  jamais  vain,  ennuyeux, 
hypocrite,  ainsi  qu'il  arrive  souvent,  quand  on  se  met  soi-même  en  scène.  Quels 
trésors  de  bon  sens!  Ses  Essais  sont  le  livre  de  tous  ceux  qui  lisent  et  même  de 
ceux  qui  ne  lisent  pas.  • 

Le  siècle  suivant,  s'en  rapportant  généralement  au  précédent,  ne  lui  a  pas  été 
moins  favorable,  bien  que  ses  critiques  n'y  soient  pas  en  moins  grand  nombre 
que  ses  admirateurs;  mais  c'est  surtout  son  style,  plus  que  ses  idées,  qui  alors  est 
en  honneur.  En  1812,  son  éloge  était  mis  au  concours,  et  dans  Yillemain,  déjà 
cité,  auquel  en  fut  attribué  le  premier  prix,  on  relève  :  •  La  morale  de  Mon- 
taigne n'est  pas  sans  doute  assez  parfaite  pour  des  Chrétiens;  il  serait  cependant 
à  souhaiter  qu'elle  servit  de  guide  à  tous  ceux  qui  n'ont  pas  le  bonheur  de  l'ê- 
tre. Elle  formera  toujours  un  bon  citoyen  et  un  honnête  homme.  Elle  n'est  pas 
fondée  sur  l'abnégation,  mais  elle  a  pour  premier  principe  la  bienveillance  envers 
les  autres,  sans  distinction  de  pays,  de  mœurs,  de  croyance  religieuse.  Elle  nous 
instruit  à  aimer  le  gouvernement  sous  lequel  nous  vivons,  à  respecter  les  lois 
auxquelles  nous  sommes  soumis,  sans  mépriser  le  gouvernement  et  les  lois  des 
autres  nations;  nous  avertissant  «de  ne  pas  croire  que  nous  ayons  seuls  le  dépôt 

(1)  V.  N.  I,  55-2  :  Inusité.  —  (2)  V,  N.  II,  47^  :  Creu.  —  (3)  V.  >.  II,  18  :  Extrauagaat. 


LES  ESSAIS.  A.xix 

delà  justice  ot  de  la  vérité.  Elle  n'est  pas  héroïque,  uiais  elle  n'a  lion  de  faible; 
souvent  même  elle  agrandit,  elle  transpoi-te  notre  àme  par  la  peinture  des  fortes 
vertus  de  l'antiquité,  par  le  mépris  des  choses  mortelles  et  î'entiiousiasme  des 
grandes  vérités;  mais  bientôt  elle  nous  ramène  à  la  siniplicit(;  de  la  vie  com- 
mune, nous  y  fixe  par  un  nouvel  attrait  et  semble  ne  nous  avoir  élevé  si  haut 
dans  ses  théories  sublimes,  que  pour  nous  réduire  avec  plus  d'avantage  à  la 
facile  pratique  des  devoirs  habituels  et  des  vertus  ordinaires.  » 

MiciiEi.ET  le  traite  assez  durement  :  «  Les  Essais  disent  le  découragement,  l'en- 
nui, le  dégoût  qui  remplissent  les  âmes;  j'j-  trouve  à  chaque  instant  certain 
goût  nauséabond,  comme  dans  une  chambre  de  malade.  »  Ailleurs  il  l'appelle  «  ce 
malade  égoïste,  clos  dans  son  château  de  Montaigne  ». 

<;.  GuizoT,  dont  nous  avons  plus  haut  donné  des  extraits,  déclare  nettement, 
après  l'avoir  étudié  de  ti'ès  près,  qu'il  l'admire  mais  ne  l'aime  pas  :  «  Montaigne, 
dit-il,  est  venu  jusqu'à  nous,  porté  par  les  (lots  changeants  de  l'opinion,  dont  il 
est  l'enfant  gâté;  en  dépit  des  vicissitudes  dont  elle  est  coutumière,  il  est  des 
écrivains  de  son  temps  le  seul  de  qui  l'importance  et  l'influence  aient  grandi 
avec  les  ans.  Esprit  singulièrement  libre,  ouvert,  équitable  et  prudent,  de  tous  nos 
grands  hommes  d'autrefois,  il  est  peut-être  celui  que  nous  aurions  le  plus  de  pro- 
fit à  évoquer  et  à  consulter.  11  a  le  génie  de  la  modération  et  du  langage  le  plus 
propre  à  exprimer.  A  travers  trois  siècles  qui  nous  séparent,  nous  n'avons  pas  à 
faire  effort  pour  remonter  jusqu'à  lui,  tellement  il  est  près  de  nous,  plus  près  que 
beaucoup  d'une  date  plus  récente  et  d'une  langue  plus  semblable  à  la  nôtre.  Il  est 
nommé  et  cité  partout;  il  est  si  répandu,  ses  anecdotes  et  ses  traits  de  style  ont 
tant  circulé,  que,  même  anonyme,  on  le  retrouve  sans  cesse;  de  plus,  on  lui  prête 
autant  qu'on  lui  emprunte  et  ce  n'est  pas  peu  dire.  Mais  au  fond,  tout  essayer, 
tout  esquiver;  ne  jamais  exposer  une  pensée  sans  en  laisser  entrevoir  la  contre- 
partie, et  ne  jamais  conclure;  peu  de  caractère,  pas  d'idéal,  s'accommodant  de 
tout;  vieux  de  bonne  heure,  jeune  jusqu'à  la  fin  :  voilà  Jlontaigne;  c'est  un 
homme  de  génie,  mais  en  tout  un  amateur  :  en  morale,  en  religion,  en  politique  et 
même  en  affections  de  famille.  Les  Essais  ont  réussi,  incontestablement,  et  avant 
tout,  par  le  talent,  l'esprit,  l'entrain,  l'imagination  de  leur  auteur;  mais  en  même 
temps,  parce  qu'il  s'y  applique  à  nous  apprendre  à  arranger,  à  son  exempre, 
commodément  notre  vie  et  à  reposer  notre  tète  sur  un  oreiller  doux  et  sain.  » 

Plus  près  de  nous,  Margerie  le  résume  de  la  sorte  :  «  Il  connaît  à  merveille 
les  misères  humaines,  et  les  expose  sans  chercher  à  les  corriger;  sa  sagesse  est 
de  vivre  et  de  se  réjouir,  et  le  meilleur  moyen  d'y  atteindre  est  poui-  lui  de  ne  se 
troubler  de  rien  et  de  ne  rien  prendre  au  sérieux.  D'une  façon  générale,  il  dé- 
courage les  élans  généreux  qui  sont  la  source  des  grandes  choses;  et,  pour  ce 
motif,  il  n'est  pas  à  mettre,  en  entier,  entre  les  mains  de  la  jeunesse,  à  laquelle 
il  enlèverait  trop  tôt  ses  illusions.  Par  contre,  de  quel  charme  n'est-il  pas  pour 
celui  qui  va  atteindre  l'âge  de  la  retraite;  quand  l'expérience  lui  a  appris  com- 
bien décevantes  sont  les  gloires  de  ce  monde,  et  qu'il  cherche  à  orienter  sa  vie  on 
vue  de  se  reposer  des  luttes  auxquelles  il  a  pris  part,  il  lui  fait  voir  toutes  choses 
sous  leur  véritable  jour.  »  Et  il  termine  :  •<  Bon  homme  et  aimable  compagnon, 
oui;  mais  cœur  chaud  et  grand  cœur,  non;  son  attitude  pendant  la  peste  de 
Bordeaux,  alors  qu'il  était  maire  de  cette  ville,  en  témoigne;  il  lui  manquait  en 
outre  une  conscience  sévère  et  un  vaillant  désir  de  progrès  moral.  » 

Dans  son  Hhioire  de  France  (tome  IX),  Henri  Martin  estime  que  la  plupart  des 
écrivains,  Rabelais  même,  peuvent  s'analj'.ser  ;  seul  Montaigne  échappe  :  «  On 
peut,  dit-il,  esquisser  le  profil  des  Alpes  et  des  Pyrénées  mais  comment  fixer 
l'a-spect  de  l'Océan  aux  flots  mobiles?  Chez  lui  c'est  en  tout  le  respect  des  cou- 
tumes établies,  non  parce  qu'elles  sont  bonnes,  mais  parce  qu'elles  sont,  et  coû- 
tent trop  à  changer  en  admettant  même  que  nous  gagnions  au  change;  mais  tout 
en  nous  accommodant  de  toutes  choses  extérieures,  tout  en  subissant  patiem- 
ment tous  les  jougs,  il  veut  que  nous  ne  nous  y  engagions  que  le  moins  possible, 
que  nous  conservions. la  pleine  liberté  de  penser;  et  cette  réserve  est  en  lui  le 
point  de  départ  d'une  guerre  à  tout  ce  dont  tout  à  l'heure  il  nous  commandait 
le  respect,  à  toute  coutume,  à  toute  convention,  à  tout  préjugé,  toute  supersti- 
tion, qui  tous  sont  de  sa  part  l'objet  d'un  doute  universel.  • 


A.xx  NOTICE  SUR  MONTAIGNE. 

Enfin,  tout  récemment,  M.  Albalat  émet  sur  lui  l'appréciation  suivante  :  «  C'est 
l'homme  de  Sénèque  et  de  Plutarque;  l'antiquité  fut  son  modèle,  d'elle  il  accepte 
tout,  ne  conteste  rien.  Il  en  est  plein  au  point  que  si  l'on  retranchait  tout  ce 
qu'elle  lui  a  fourni,  les  Essais  se  trouveraient  fort  abrégés,  de  nombreux  chapi- 
tres n'auraient  qu'un  petit  nombre  de  lignes  et  quelques-uns  disparaîtraient 
complètement.  C'est  un  penseur  que  n'ont  jamais  troublé  ni  les  difficultés  de  la 
vie  présente,  ni  les  angoisses  de  la  vie  future.  Né  dans  la  religion  catholique, 
il  est  au  plus  haut  degré  respectueux  de  ses  dogmes  et  observateur  de  ses  pra- 
tiques; mais,  la  plume  à  la  main,  après  avoir  placé  la  vérité  religieuse  au-dessus 
de  tout  débat,  il  fait  montre  d'un  état  d'âme  et  d'une  tournure  d'esprit  tout 
autres  :  Son  chapitre  sur  les  croyances  et  les  légendes  est,  de  fait,  la  négation  de 
toutes  révélations  divines  et  de  toute  espèce  de  miracles;  il  réfute  la  théorie  du 
repentir  et  de  la  pénitence:  il  parle  de  la  mort  en  homme  qui  n'est  pas  précisé- 
ment convaincu  de  l'immortalité  de  l'âme,  et  ne  demande  jamais  du  courage  et 
de  la  résignation  à  l'idée  religieuse:  sa  morale  n'a  rien  de  commun  avec  celle  du 
christianisme  »;  et,  bien  que  ces  sujets  tiennent  une  grande  place  dans  son  livre, 
lui,  si  prolixe  en  citations,  n'use  en  cela  de  l'Écriture  sainte  et  de  la  Bible  que 
tout  juste  assez  pour  ne  pas  paraître  les  ignorer. 

Toutefois  ce  scepticisme  outré  qui,  chez  lui,  est  un  point  dominant,  qui  se  ré- 
vèle partout  dans  les  Essais  et  qui  l'a  amené  à  une  sorte  d'adaptation,  dit  Bru.ne- 
TiÈRE,  ou  accommodation  aux  circonstances,  qui  ne  sont  jamais,  ou  bien  rare- 
ment, les  mêmes,  ni  pour  deux  d'entre  nous,  ni  pour  chacun  de  nous,  à  deux 
moments  différents  de  son  existence,  il  faut,  pour  en  juger  équitablement,  con- 
sidérer les  temps  où  vivait  Jlontaigne;  tant  d'événements  extraordinaires 
venaient  de  s'accomplir  ou  étaient  encore  en  évolution,  qui  étaient  bien  faits 
pour  faire  douter  quiconque  de  bonne  foi  cherchait  à  se  rendre  compte.  C'étaient 
l'invention  de  l'imprimerie  (1440),  la  chute  de  l'Empire  d'Orient  (1453),  la  décou- 
verte du  Nouveau  Monde  (1492),  la  Renaissance  (xv''  et  xvi«  siècles),  enfin  la 
Réforme  de  Luther  (1517)  avec  les  troubles  de  conscience  qui  en  résultèrent  et 
les  guerres  civiles  de  si  longue  durée,  où  se  donnèrent  si  longtemps  et  si  pleine- 
ment carrière  toutes  les  passions  déchaînées,  qui  éclatèrent  à  cette  occasion  et 
dont  la  France,  qu'elles  mirent  dans  le  plus  complet  désarroi,  fut  particulière- 
ment le  théâtre. 

Étudiant  de  plus  près  l'influence  qu'ont  pu  avoir  sur  l'œuvre  de  Montaigne  et 
les  opinions  qu'il  }•  manifeste,  l'origine  de  sa  famille,  la  situation  à  laquelle  il 
était  arrivé,  ses  alliances  et  les  événements  au  milieu  desquels  sa  vie  s'est  dé- 
roulée, Malvezix,  en  1875,  s'exprimait  ainsi  : 

«  Michel  Eyquem  descendait  de  ces  anciens  bourgeois  de  Bordeaux  (son  père 
prenait  encore  ce  titre),  continuateurs  du  municipe  romain,  qui  vivaient  dans 
une  véritable  république,  ne  reconnaissant  au-dessus  d'eux  aucun  seigneur,  si 
ce  n'est  le  duc  de  Guyenne  et  plus  tard  le  roi  de  France,  avec  lesquels  ils  étaient 
souvent  en  lutte  quand  ceux-ci,  toujours  à  court  d'argent,  cherchaient  à  faire 
peser  plus  lourdement  sur  eux,  sur  leur  commerce  ou  sur  leurs  terres  leur  joug 
fiscal,  alors  que  ceux-là  considéraient  ne  leur  devoir  que  l'hommage  de  souve- 
raineté et  l'octroi  volontairement  consenti  de  subsides  et  d'impôts. 

«  Ces  fiers  marchands,  qui  dans  leurs  actes  prenaient  le  titre  de  «  Sire  »,  n'a- 
vaient pas  encore  perdu  l'habitude  de  se  gouverner  eux-mêmes,  de  voter  eux- 
mêmes  leurs  taxes,  de  lever  des  troupes  et  de  les  commander;  ils  possédaient 
des  maisons  nobles,  des  juridictions,  des  seigneuries,  des  baronnies  au  même 
titre  que  les  gentilshommes  et  s'anoblissaient  eux-mêmes  comme  citoyens  de 
Bordeaux,  sans  souci  du  pouvoir  royal,  lui  rendant  seulement  le  service  militaire 
du  ban  et  de  l'arrière-ban  pour  leurs  terres  nobles. 

«  Quant  aux  gentilshommes  du  pays,  ils  avaient  encore,  eux  aussi,  l'habitude 
de  penser  et  de  s'exprimer  librement;  la  royauté  n'avait  encore  que  peu  de 
puissance  sur  eux  et  les  souvenirs  de  la  nationalité  perdue  n'étaient  pas  éteints. 

«  A  l'indépendance  de  ces  bourgeois  dont  il  était  issu,  de  ces  gentilshommes 
parmi  lesquels  il  comptait,  Montaigne  joignait  celle  de  l'érudit  qui  s'était  fait  un 
idéal  du  citoyen  des  cités  grecques  et  romaines;  c'est  en  obéissant  à  ce  courant 
d'idées  qu'il  a  porté  la  lumière  sur  les  abus  les  plus  criants  de  son  époque  et 


LES  ESSAIS.  A.xxi 

attaqué  les  superstitions  et  erreurs  de  son  temps.  Les  questions  politiques,  sociales 
et  j'eligieuses  ne  faisaient  pas  plus  défaut  à  ce  moment  que  maintenant,  et  c'est 
ainsi  que  nous  le  voyons  signaler  les  inconvénients  de  la  vente  des  offices  de 
judicature,  du  mode  d'éducation;  l'abolition  de  la  torture  qui  était  avec  l'ins- 
truction secrète  des  procès  un  des  modes  d'exercer  la  justice,  celle  des  peines 
édictées  contre  les  sorciers. 

«  Mais  s'il  voulait  remédier  aux  abus,  il  ne  reconnaissait  pas  moins  combien 
il  est  dangereux  de  vouloir  renverser  tout  ce  qui  existe,  au  lieu  de  procéder  avec 
mesure  et  avec  l'aide  du  temps.  Il  vivait  alors  que  catholiques  et  huguenots  riva- 
lisaient de  haines  sauvages  et  de  fureurs  sanglantes;  dans  la  Guyenne  même  les 
cruautés  du  catholique  de  Montluc  étaient  égalées  par  celles  du  protestant  baron 
des  Adrets  ;  dans  toute  la  France  se  répétaient  officiellement  les  massacres  de  la 
Saint-Barthélémy,  les  Guises  assassinaient  Coligny,  le  roi  assassinait  les  Guises, 
Jacques  Clément  assassinait  le  roi;  dans  les  campagnes,  chaque  gentilhomme 
faisait  la  guerre  de  partisan  pour  le  Roi  ou  pour  la  Ligue,  pour  les  catholiques 
ou  pour  les  huguenots;  dans  les  villes,  les  émeutes  et  les  massacres  populaires 
étaient  suivis  des' pendaisons  et  des  massacres  royaux;  et,  dans  ces  conditions, 
Montaigne  ■<  assis  au  moyeu  de  tout  le  trouble  »  des  guerres  civiles  de  France, 
était  fondé  à  redouter  les  «  nouvelletez  »,  à  prêcher  l'obéissance  à  la  loi  et  faire 
appel,  sans  distinction  de  parti,  à  la  tolérance  et  à  la  modération.  Véritable  pré- 
curseur des  temps  modernes,  il  nous  montre  l'idéal  que  nous  n'avons  pas  encore 
atteint  :  la  liberté  sans  la  licence,  l'ordre  sans  le  despotisme.  » 

S'il  parle  de  lui,  dit-on  souvent,  il  ne  se  livre  pas  :  «  Sauf  de  son  père,  ce  qu'il 
dit  des  siens  est  fort  vague  ;  de  ses  amis,  à  part  La  Boétie  et  M"°  de  Gournay, 
il  ne  dit  mot;  il  fait  parfois  allusion  à  des  événements  auxquels  il  a  été  mêlé, 
mais  fort  rarement  et  sans  jamais  préciser;  au  point  que  la  profession  militaire 
à  laquelle  en  certains  passages  il  fait  allusion  et  que  semble  lui  confirmer  le 
monument  funéraire  élevé  sur  sa  tombe,  a  été  mise  en  doute;  de  même  qu'on 
n'a  par  lui  aucune  donnée  sur  les  missions  et  négociations  dont  il  a  été  chargé 
et  que  d'autres  documents  établissent.  »  A  cela  lui-même  a  répondu  par  avance  : 
«  Ce  ne  sont  mes  gestes  que  i'escris  :  c'est  moy,  c'est  mon  essence  »  (vol.  I, 
pag.  680).  —  Peut-être  est-on  plus  fondé  quand  on  lui  reproche  de  n'avouer  guère, 
en  les  présentant  comme  tels,  que  des  défauts  discutables,  tenus  souvent  pour 
des  qualités;  mais  avec  quel  art  il  les  discute  et  nous  amène  à  leur  sujet  à  faire 
un  retour  sur  nous-mêmes! 

Il  est  à  remarquer  que  bien  que  Montaigne  ait  étudié  l'homme  à  fond,  et 
qu'au  ch.  13  du  liv.  III  (III,  670)  il  dise  qu'il  s'adonne  volontiers  aux  petits, 
il  ne  parle  guère  des  prolétaires  qu'en  deux  occasions,  pour  les  plaindre  d'être 
foulés  par  tous  les  partis  et  lui  aussi  par  conlre-coup,  et  pour  faire  ressortir  avec 
quelle  résignation  ils  supportent  le  mauvais  sort  ;  il  est  vrai  qu'en  ces  temps,  ils 
tenaient  bien  peu  de  place  et  que  son  égoïsme  le  portait  à  s'en  désintéresser. 

C'est  cette  communauté  de  sentiments  entre  leur  auteur  et  la  bourgeoisie  qui 
fait  que  les  Essais  sont  un  des  livres  de  prédilection  de  celle-ci  ;  elle  s'y  retrouve 
avec  ses  qualités  et  ses  défauts  :  son  bon  sens,  son  honnêteté  native,  son  amour 
de  la  paix  à  tout  prix,  sa  versatilité,  sa  vanité  et  ses  idées  tant  soit  peu  fron- 
deuses. 

Cette  vogue,  un  dessin  humoristique  de  Gavabni,  daté  de  1840,  la  fait  bien 
ressortir  :  un  détenu  à  la  prison  de  Clichy  pour  dettes  (à  cette  époque  tout 
créancier  pouvait  faire  incarcérer  un  débiteur  laissant  en  souffrance  ses  enga- 
gements), reçoit  la  visite  de  sa  femme  et  de  leur  enfant;  celle-ci  l'aborde  en  lui 
disant  :  «  Petit  homme,  nous  t'apportons  ta  casquette,  ta  pipe  d'écume  et  ton 
Montaigne.  »  —  Non  moins  probante  est  cette  inscription  funéraire  que  porte  au 
Père-Lachaise,  principal  cimetière  de  Paris,  la  tombe  d'Auguste  Collignon,  secré- 
taire général  du  ^Ministère  de  la  guerre,  en  1800,  sous  Carnot  :  «  11  vécut  en 
homme  de  bien  et  puisa  la  vérité  dans  les  Essais  de  Montaigne.  » 

Les  Essais  sont  moins  un  livre,  qu'un  journal  divisé  en  chapitres,  qui  se  sui- 
vent sans  se  lier  et  qui  portent  chacun  un  titre  sans  se  soucier  beaucoup  d'en 
tenir  les  promesses  (Ciikistian)  :  ces  en-tète  dépistent  le  lecteur  plus  qu'ils  ne  le 
guident,  ce  sont  de  vrais  trompe-l'œil.  II  est  question  de  tout  dans  cet  ouvrage  : 


A.xxii  NOTICE  SUR  MONTAIGNE. 

poésie,  médecine,  histoire  naturelle,  art  militaire,  politique,  religion,  éducation, 
morale,  et  de  bien  d'autres  choses,  et  tout  y  est  confondu  ;  ce  qui  y  est  dit  sur 
un  même  sujet  est  épars  un  peu  partout,  pêle-mêle,  que  viennent  encore  accroître 
des  digressions  fréquentes,  des  citations  nombreuses  n'ayant  parfois  qu'un  rap- 
port éloigné  avec  le  texte  où  elles  sont  enchâssées,  souvent  avec  une  signification 
tout  autre  que  celle  qu'elles  ont  dans  l'ouvrage  d'où  elles  sont  tirées;  des  répé- 
titions et  aussi  des  intercalations  faites  après  coup  qui  rompent  le  sens,  que 
l'auteur  ne  se  donne  pas  la  peine  de  rétablir,  ce  qui  le  rend  par  place  de  com- 
préhension difficile;  véritable  maquis  littéraire  où,  à  tout  instant,  malgré  les 
Ilots  de  lumière  que  le  style  y  répand,  on  a  besoin  d'être  éclairé,  d'où  une  curio- 
sité sans  cesse  éveillée  qui  n'est  pas  un  des  moindres  attraits  des  Essais. 

Aucun  plan  préconçu  n'a  évidemment  présidé  à  leur  rédaction  et  même,  au 
début,  ils  n'étaient  pas  destinés  à  l'impression;  c'est  ce  qui  explique  qu'ayant 
commencé  à  les  écrire  en  1571,  Montaigne  n'en  a  publié  qu'environ  neuf  ans 
après  les  deu.x  premiers  livres,  rédigés  cependant  au  courant  de  la  plume,  ce 
qui  était  vrai  alors,  et  sans  les  retouches  et  augmentations  notables  qu'il  y  a 
apportées  depuis. 

C'est  vraisemblablement  après  cette  première  publication,  et  à  ce  moment  seu- 
lement, que  Montaigne  a  pris  à  cœur  ce  travail,  s'est  décidé  à  en  accroître  l'im- 
portance, l'a  retouché,  y  a  ajouté  et  écrit  le  troisième  livre  où,  de  parti  pris, 
se  mettant  résolument  en  cause,  il  peut  dire  en  toute  vérité  qu'il  en  est  le 
sujet  principal  et  constant. 

Mais  cette  absence  de  plan  ne  nuit  en  rien  à  l'unité  de  doctrine  qui  n'est 
•autre,  et  sur  ce  point  l'auteur  ne  se  dément  pas  une  seule  fois,  que  l'inanité  et 
l'inutilité  de  tout  système  philosophique;  chacun,  s'étudiant,  doit  se  suffire  à 
lui-même. 

Certes  il  y  a  des  secrets  de  l'art  d'écrire  que  Montaigne  ne  possède  pas,  mais 
par  son  charme,  il  en  fait  oublier  l'absence;  les  mérites  qui  tiennent  de  la 
méthode  lui  sont  inconnus;  mais  il  écrit  comme  il  parle,  en  cela  il  a  été  l'un  des 
précurseurs  de  ce  genre,  et  les  qualités  qui  tendent  à  l'expression  proprement 
dite  lui  sont  innées  et  il  atteint  à  l'éloquence  quand  il  exprime  les  beaux  senti- 
ments et  loue  les  belles  actions.  La  plupart  des  grands  écrivains  du  xvn'  siècle 
l'ont  beaueoup  étudié,  et  l'originalité  de  son  style  leur  a  fourni  nombre  d'ex- 
pressions et  d'images  que  l'on  retrouve  en  lui.  —  En  vrai  gascon,  du  reste,  il 
va  au-devant  de  toutes  les  critiques  :  11  n'a  souci,  dit-il,  ni  de  l'orthographe, 
ni  de  la  ponctuation;  si  les  mots  lui  font  défaut,  il  en  forge;  peu  lui  importe 
que  les  faits  qu'il  cite  soient  vrais  ou  non;  c'est  intentionnellement  qu'il  saute 
d'un  sujet  à  un  autre,  qu'il  n'énonce  pas  les  sources  où  il  puise;  si  ce  qu'il  dit 
ici  est  en  contradiction  avec  ce  qu'il  a  dit  là,  c'est  qu'alors  il  pensait  difi'érem- 
ment  que  maintenant;  les  erreurs  légères  de  rédaction  qu'on  pourra  relever,  il 
n'y  a  pas  à  lui  en  tenir  compte;  celles  de  quelque  importance  sont  à  attribuer  à 
ses  imprimeurs. 

La  langue  française  ne  faisait  guère  que  commencer  à  se  former,  il  est  même 
de  ceux  qui  ont  le  plus  contribué  à  la  fixer;  le  jargon  que  parlaient  nos  aïeux 
dans  les  siècles  précédents  commençait  à  peine  à  s'affiner;  les  meilleurs  ouvrages 
s'écrivaient  en  latin,  et  les  Essais  eux-mêmes,  bien  qu'écrits  en  français,  l'ont 
été  comme  l'on  écrit  en  latin.  C'est  à  cela  qu'on  doit  d'y  rencontrer  de  si  nom- 
breux mots  latins  francisés,  de  si  fréquentes  tournures  et  constructions  de 
phrase  latines,  et  notamment  des  ellipses  répétées;  si  bien  qu'on  peut  dire  que 
Montaigne  a  créé  la  langue  dont  il  a  fait  emploi,  en  usant  avec  toute  la  liberté 
d'un  inventeur;  les  formules  reçues  sont  pour  lui  sans  autorité;  il  pense  et  les 
mots  ne  servent  qu'.à  peindre  sa  pensée;  rarement  se  rencontrent  en  lui  des 
circonlocutions;  toujours  vif  et  précis,  il  est  économe  de  mots  et  prodigue 
d'idées  (La  Dixmerie);  et  ce  que,  dans  sa  préface  de  Milliridate,  Racine  dit  en 
parlant  d'Amyot,  lui  est  de  tous  points  applicable  :  «  Je  rapporte  les  paroles  de 
Plutarque,  telles  qu'Amyot  les  a  traduites,  parce  qu'elles  ont  une  grâce,  dans  le 
vieux  style  de  ce  traducteur,  que  je  ne  crois  pas  pouvoir  égaler  dans  notre 
langue  moderne.  » 

A  l'éloge  de  Sénèque  et  de  Plutarque,  Montaigne  .a  consacré  un  de  ses  cha- 


LES  ESSAIS.  A.xxii 

pitres;  c'est  à  bon  droit,  car  les  emprunts  qu'il  leur  a  faits  et  aussi  les  idées,  les 
inspirations  qu'il  leur  a  prises  sont  considérables;  Ciccron  également  a  été  mis 
largement  à  contribution,  quoique  cependant  à  un  degré  moindre,  et  il  a  été 
aussi  ingrat  qu'injuste  envers  lui  en  le  traitant  aussi  mal  qu'il  l'a  fait  à  diverses 
reprises. 

Quant  à  écrire  à  bride  abattue,  à  ne  pas  se  relire  comme  il  le  dit,  il  n'en  est 
rien,  du  moins  à  partir  du  moment  où  il  cesse  d'écrire  pour  lui  seul.  L'examen 
des  diverses  éditions  des  Essais  fixe  complètement  à  cet  égard.  C'est  alors  un 
écrivain  raffiné  et  habile  qui  sait  cacher,  sous  des  dehors  innocents,  la  hardiesse 
de  la  pensée;  son  style  n'a  ni  masque,  ni  fard,  mais  il  a  de  la  toilette;  non 
seulement  il  corrigeait,  mais  il  ajoutait;  et  quand  il  ajoutait  ce  n'était  pas  en 
une  fois  et  d'un  jet.  En  regardant  les  notes  manuscrites  de  l'exemplaire  de 
Bordeaux,  dont  il  est  question  plus  loin,  on  voit  qu'en  deux  tiers  de  page,  la 
plume  et  l'encre  changent  jusqu'à  dix  fois,  et,  au  lieu  que  ce  soit  le  flot  courant 
d'une  conversation  abondante,  cela  apparaît  comme  un  chef-d'œuvre  de  mar- 
queterie (G.  GmzoT)  ;  si  bien  que  ses  trois  éditions  principales  de  1580,  88,  95, 
apparaissent  en  quelque  sorte  comme  trois  livres  distincts  écrits  sous  des 
impressions  dilTérentes,  ce  sont  trois  images  d'un  même  homme  le  plus  mobile 
le -plus  ondoyant  qui  fut  jamais,  le  plus  habile  à  se  dérober  tout  en  ayant  l'air 
de  se  livrer  jusqu'à  l'abandon,  et  qu'on  ne  peut  un  peu  connaître  qu'en  super- 
posant la  seconde  de  ces  images  à  la  première  et  la  troisième  aux  deux  autres 
(Brunetière)  :  idée  fort  judicieuse  que  réalise  le  procédé  indiqué  dans  l'avant- 
propos  par  lequel,  dans  la  présente  édition,  débute  le  fascicule  afférent  aux 
variantes.  V.  infra,  p.  97. 

Mais  ces  constatations  une  fois  faites,  de  quelle  valeur  sont-elles  devant  le 
satirique  et  immuable  bon  sens  de  Montaigne,  sa  verve  constante,  son  style 
pittoresque,  ses  expressions  au  ton  nerveux,  original,  auquel  on  ne  peut  toucher 
sans  les  affaiblir  considérablement,  sans  courir  risque  souvent  d'altérer  le  fond 
de  la  pensée  et  de  lui  enlever  partie  de  sa  force  et  de  son  agrément?  Tout  cela, 
jusqu'à  l'allure  de  hasard  qu'affecte  son  livre,  en  rend  la  lecture  facile  et  at- 
trayante. Ces  qualités,  jointes  à  ce  qu'il  est  éternellement  vrai,  font  qu'il  se 
lit  et  se  lira  toujours,  alors  que  déjà  bien  rares  sont  les  ouvrages  sérieux  qui  se 
lisent  aujourd'hui;  on  en  écrit  encore,  on  les  parcourt  quelquefois,  on  ne  les  lit 
plus,  on  n'en  a  plus  le  temps;  en  dehors  de  ce  qui  a  trait  à  la  profession  de 
chacun,  le  journal  du  matin,  le  roman  et  la  pièce  de  théâtre  du  jour  suffisent  à 
notre  époque,  et  cela  semble  devoir  aller  sans  cesse  en  s'accentuant,  par  suite 
du  surmenage  intellectuel  qu'impose  la  satisfaction  des  besoins  de  la  vie  ma- 
térielle de  plus  en  plus  exigeante  et  difficile  à  assurer. 

Les  Essais,  pour  qui  les  connaît,  et  .dans  un  certain  milieu  nul  ne  les  ignore, 
échappent  à  cette  loi,  parce  que  leur  lecture,  ne  demandant  aucun  effort,  repose 
de  l'état  de  surexcitation  dans  lequel  nous  vivons.  Ils  se  lisent  sans  suite,  à 
bâtons  rompus,  comme  ils  ont  été  écrits,  et  c'est  là  un  de  leurs  plus  grands 
charmes  :  pas  n'est  besoin  de  marquer  où  vous  en  êtes  resté;  ouvrez-les  à  n'im- 
porte quelle  page,  et  le  passage  sur  lequel  vous  êtes  tombé  vous  intéressei-a  sans 
qu'il  soit  nécessaire  de  vous  reporter  à  ce  qui  précède,  non  plus  qu'à  ce  qui 
suit;  et  plus  tard,  vous  le  relirez  encore,  lorsqu'il  se  représentera  à  vous,  sans 
que  l'idée  vous  vienne  de  tourner  le  feuillet. 

Il  s'y  rencontre  bien,  de  ci,  de  là,  quelques  expressions  de  nature  à  choquer 
la  pruderie  de  nos  jours,  où  l'on  tient  plus  de  compte  de  la  forme  que  du  fond; 
elles  s'expliquent  par  ce  fait  qu'autrefois  on  n'attachait  pas  à  la  pureté  des 
termes  employés  celle  des  sentiments  et  des  idées;  lascif  dans  ses  expressions, 
Montaigne  était  pudibond  en  pensée  :  versu  lascivus,  menl^ pudicus  eral;  et  s'en 
souvenant,  on  passe  outre  sans  en  être  autrement  offusqué. 

En  somme  la  grande  singularité  et  le  plus  grand  mérite  des  Essais,  c'est  que, 
mettant  en  pratique  la  philosophie,  toute  opinion  extrême  y  est  combattue; 
qu'ils  enseignent  la  paix,  la  douceur,  la  bienveillance  entre  les  hommes,  et  que, 
quoi  que  l'on  pense  de  leur  auteur  à  un  titre  quelconque,  le  langage  dans  lequel 
il  s'exprime  ne  laisse  pas  de  captiver. 


A.xxiv  xNOT[CE  SUR  MONTAIGNE. 

PASSAGES  DES  ESSAIS 

S  1.  —  Où  il  est  plus  particulièrement  question  de  cet  ouvrage  (1). 

Quelle  fin  Montaigne  s'est  proposée  en  écrivant  les  Essais,  I,  58.  —  Il  les  con- 
sidère comme  l'essai  de  ses  facultés  naturelles  et  non  de  ses  facultés  acquises, 

II,  60. 

Sa  manière  de  les  composer,  I,  210,  552. 

Comparaison  relative  aux  Essais,  I,  296. 

Pourquoi  il  s'est  pris  lui-même  pour  sujet  d'étude,  I,  676. 

Diversité  du  sujet  qu'il  traite,  III,  108. 

Connaissance  approfondie  qu'il  en  a,  III,  110. 

Faute,  dans  sa  vie,  d'actions  de  quelque  intérêt,  il  enregistre  ses  fantaisies. 

III,  376. 

II  exprime  ses  idées  du  moment,  demain  elles  seront  peut-être  autres,  I,  ■2'3-2. 

Pourquoi  il  parle  si  souvent  de  lui-même  dans  son  livre,  II,  524. 

Ce  qu'il  gagne  à  publier  ses  mœurs,  III,  440. 

Peut-être  se  faisant  connaître,  se  fera-t-il  un  ami,  III,  444. 

Il  esquisse  plutôt  qu'il  ne  traite  les  sujets  dont  il  s'occupe,  I,  434. 

Malgré  les  apparences,  les  sujets  traités  se  tiennent  toujours  plus  ou  moins 
les  uns  les  autres,  III,  470. 

Il  s'est  imposé  d'oser  dire  tout  ce  qu'il  ose  faire,  III,  186. 

Aveu  de  l'obligation  où  il  est  cependant  de  voiler  parfois  sa  pensée,  III,  474. 

Ce  qu'il  pense  de  ceux  qui  condamnent  la  licence  de  ses  écrits,  III,  186. 

Comment  il  excuse  cette  licence,  III,  270. 

Dans  quel  but  Montaigne  a  inséré  dans  son  livre  des  citations  et  des  passages 
empruntés  à  d'autres  auteurs,  III,  582. 

Ses  principes  à  l'égard  de  ces  citations  et  de  ces  imitations,  I,  232.  —  II  ne 
compte  pas  ces  emprunts,  il  les  pèse,  II,  60. 

Motifs  pour  ne  pas  citer  les  auteurs  où  il  puise  et  ne  pas  mettre  d'ordre  dans 
ses  récits,  II,  62. 

Raison  de  l'absence  de  toute  méthode  dans  son  ouvrage,  I,  552. 

Pourquoi  il  aime  les  digressions,  III,  470. 

Caractère  de  son  style,  II,  476. 

Son  français  corrompu  par  le  langage  du  pays  où  il  vit,  ÏI,  478.   ' 

Langage  qu'il  s'est  appliqué  à  employer,  I,  278. 

Comment  il  travaillait  aux  Essais,  III,  22. 

Plusieurs  feuillets  lui  en  ont  été  soustraits,  III,  22. 

II  fait  volontiers  des  additions  à  son  livre,  mais  ne  le  corrige  pas,  III,  410. 

Il  craint,  par  faute  de  mémoire,  de  se  répéter,  III,  406. 

Il  ne  se  mêle  ni  de  l'orthographe,  ni  de  la  ponctuation,  et  ne  revise  pas  le 
travail  de  l'imprimeur,  III,  412. 

Affection  qu'il  a  pour  son  livre,  II,  52, 

Ses  différentes  appréciations  sur  sa  valeur,  III,  366. 

Sa  soumission  à  la  critique  que  l'Eglise  peut  en  faire,  I,  578. 

11  est  loin  d'en  être  complètement  satisfait,  II,  474. 

Succès  uuquel  il  lui  semble  pouvoir  prétendre,  I,  572. 

Comment  il  peut  être  utile  à  la  santé  de  l'âme  et  à  celle  du  corps,  III,  628. 

Destinée  qui  lui  paraît  réservée,  III,  448. 

?  2.  —  Notes  ayant  trait  à  la  contexture  des  Essais. 

Origine  de  ce  titre  «  les  Essais  »,  N.  I,  Titre,  Essais. 

Montaigne  esquisse  plutôt  qu'il  ne  traite  les  sujets  dont  il  s'occupe,  N.  I,  436, 
Air. 

(1)  Voir  Nota,  fasc.  B,  p.  3. 


LES  ESSAIS.  A.xxv 

Toute  assertion^  exacte  ou  non,  lui  est  bonne,  comme  point  de  départ  d'une 
idée  qu'il  se  propose  d'exposer,  N.  I,  40,  Dit. 

Précautions  oratoires  prises  avant  l'émission  d'idées  peu  orthodoxes,  N.  I,  578, 
Icy. 

Tendance  de  Montaigne  à  écrire  le  français  en  latin,  N.  II,  584,  L'enuie. 

Il  altère  souvent  les  citations  qu'il  donne,  N.  II,  242,  Profuerunt. 

Montaigne,  les  Essais  et  Henri  III,  N.  II,  524,  Autheur. 

La  première  édition  des  Essais  parut  en  1580. 

Cette  édition,  imprimée  à  Bordeaux,  ne  comprenait  que  les  deux  premiers 
livres,  chacun  formant  un  volume  in-S"  dont  l'impression  n'est  pas  faite  avec 
les  mêmes  caractères  pour  tous  deux;  les  citations  y  sont  peu  nombreuses;  les 
sonnets  de  La  Boétie,  objet  du  ch.  28  du  livre  1"%  y  figurent.- 

En  1582,  Montaigne  en  publiait  une  seconde  édition,  revue  et  augmentée,  mais 
toujours  réduite  à  ses  deux  premiers  livres,  renfermés  cette  fois  en  un  seul 
volume  in-8°. 

En  1587,  troisième  édition,  celle-ci  du  format  in-12;  la  ponctuation  y  est 
améliorée,  d'assez  nombreuses  corrections  de  style  et  quelques  phrases  remaniées. 

Ces  trois  premières  éditions  sont  devenues  fort  rares;  dans  diverses  ventes 
publiques  du  siècle  dernier,  des  exemplaires  de  la  première  ont  été  vendus  : 
527,  515,  645,  1.050  et  jusqu'à  2.060  francs;  un  de  la  seconde  a  dépassé  200  francs, 
un  de  la  troisième  a  atteint  près  de  500  francs. 

Enfin  en  1588,  autre  édition,  in-4''  cette  fois,  qui,  d'après  son  titre,  serait  la 
cinquième.  La  quatrième  n'existe  pas;  on  pense  qu'elle  avait  pu  être  publiée 
dans  l'intervalle  en  Angleterre,  ou  encore  en  France,  le  privilège  de  l'imprimeur 
de  l'édition  précédente  étant  expiré;  mais  on  manque  de  données  précises  à  cet 
égard.  Imprimée  à  Paris,  l'édition  de  1588  se  trouve,  toujours  d'après  le  titre 
même  de  l'ouvrage,  augmentée  d'un  troisième  livre  et  de  six  cents  additions  aux 
deux  premiers;  la  pagination  du  dernier  livre  y  est  distincte  de  celle  des  deux 
autres;  les  additions  introduites  interrompent  déjà  assez  fréquemment  le  texte 
primitif  et  l'alourdissent  parfois. 

Cette  édition  est  la  dernière  publiée  du  vivant  de  Montaigne,  qui  mourut 
encore  occupé  à  en  préparer  une  nouvelle.  Les  rapports  qui  s'étaient  établis 
entre  lui  et  le  poète  Pierre  de  Bracii  d'une  part  et  M""  de  Gournay  de  l'autre, 
lors  de  l'impression  de  l'édition  de  1588  à  laquelle  ils  semblent  s'être  intéressés, 
firent  que  naturellement,  et  peut-être  aussi  sui"  sa  recommandation,  Françoise 
de  la  Chassaigne  sa  veuve,  résolue  à  donner  suite  aux  intentions  de  son  mari, 
s'adressa  à  eux  pour  l'y  aider. 

Montaigne  consignait  toutes  les  modifications  et  additions  qu'il  projetait  sur 
un  exemplaire  de  l'édition  de  1588,  y  joignant  des  notes  détachées.  Pierre  de 
Brach  reçut  mission  de  les  transcrire,  en  les  mettant  au  net  sur  un  autre 
exemplaire,  qu'il  adressa  à  M"°  de  (îournay  chargée  d'en  surveiller  l'impression. 
Tous  deux  s'acquittèrent  avec  conscience  et  promjjtitude  de  leurs  tâches  respec- 
tives; moins  de  trois  ans  après  la  mort  de  l'auteur,  l'édition  nouvelle,  portant  la 
date  de  1595,  était  livrée  au  public. 

Cette  «klition,  in-folio,  est  d'un  tiers  plus  considérable  que  la  précédente.  Comparée 
à  l'exemplaire  annoté  de  la  main  de  Montaigne  qui,  conservé  par  la  famille,  a 
ensuite  appartenu  aux  Feuillants  et  se  trouve  actuellement  à  la  Bibliothèque 
publique  de  Bordeaux,  l'orthographe  en  est  plus  simple,  la  ponctuation  établie 
de  manière  à  n'avoir  que  de  très,courtes  phrases,  et  dans  les  cas  très  rares  où  les 
deux  textes  diffèi-ent,  les  divergences,  toutes  de  forme,  ne  consistent  guère  qu'en 
quelques  termes  adoucis,  quelques  expressions  moins  primesautières,  des  mots 
ajoutés,  retranchés  ou  modifiés  pour  rectifier  des  incorrections  de  style,  ce  qu'im- 
manquablement l'auteur  eût  opéré  lui-même,  avant  de  livrer  son  travail  au  public, 
témoignant  de  la  part  de  ses  exécuteurs  testamentaires  de  la  fidélité  la  plus 
absolue.  —  Qu'eût  été  cette  édition  si  elle  avait  été  publiée  du  vivant  de  l'auteur? 
Nul  ne  le  saurait  dire;  immanquablement,  jusqu'au  dernier  moment,  il  eût  fait 
encore  des  modifications  aux  notes  d'après  lesquelles  celle-ci  a  été  établie  (sur 
l'exemplaire  de  Bordeaux,  Montaigne  écrit  et  raye  trois  fois  avant  de  l'admettre 


A.xxvi  NOTICE  SUR  MONTAIGNE. 

la  citation  :  HIe  bealus....  [Vol.  I,  pag.  484,  lig.  25];  rien  ne  prouve  que  finalement 
il  l'eût  maintenue),  de  telle  sorte  que  le  texte  définitif  des  Essais  n'aj'ant  pas  existé, 
ne  sera  jamais  connu. 

Il  est  à  observer  que  par  le  fait  d'une  omission  qui  n'a  pas  été  constatée  à  temps, 
cette  édition  ne  porte  pas  VAvis  au  lecteur  qui  devrait  figurer  en  tête;  par  contre, 
elle  est  précédée  d'une  préface  assez  étendue  et  par  trop  apologétique  de  M"'  de 
Gournay  qui  l'a  dotée  en  outre  d'une  table  analytique  assez  détaillée;  enfin  par 
suite  d'une  mention  bien  ou  mal  interprétée,  inscrite  sur  le  manuscrit  de  Bor- 
deaux, les  sonnets  de  La  Boétie  n'y  sont  pas  reproduits.  —  Quant  à  l'exemplaire 
qui  a  servi  de  copie,  il  n'existe  plus;  il  semble  avoir  été  détruit,  aussitôt  l'im- 
pression achevée.  i 
"  M"'  de  Gournay,  sa  fille  d'alliance  comme  il  l'appelait  et  titre  dont  elle  aimait 
à  se  parer,  s'était  donnée  de  toute  son  âme  à  Montaigne  et  à  son  œuvre  ;  pos- 
térieurement à  l'édition  de  1595,  elle  en  a  publié  nombre  d'autres  (une  dizaine  en- 
viron), dérivant  toutes  de  celle-ci;  entre  autres  : 

Une  en  1608,  portant  en  marge  des  sommaires,  forcément  réduits  à  quelques 
mots;  ce  qui  avait  déjà  été  réalisé,  dès  1595,  à  Lyon,  dans  une  réédition  de  celle 
de  1588. 

Une  en  1611,  où  elle  donne  l'indication  de  la  plupart  des  sources  où  Montaigne 
a  pris  ses  citations. 

Une  en  1617,  qui  présente  la  traduction  de  toutes  ces  mômes  citations. 

Enfin  la  magnifique  édition  in-folio  de  1635,  dédiée  au  cardinal  de  Richelieu, 
dont  la  libéralité  avait  aidé  à  la  publication.  Pour  la  première  fois^  figure  au  fron- 
tispice de  l'ouvrage  la  devise  de  Montaigne  :  "  Que  sçais-je  »,  avec  la  balance.  La 
préface  est  celle  de  l'édition-mère,  notablement  augmentée  et  corrigée.  Le  texte 
présente  parfois  avec  celui  de  l'édition  de  1595  de  légères  différences;  certains 
changements  y  ont  été  malencontreusement  apportés,  sur  la  demande  expresse 
des  imprimeurs,  pour  rajeunir  le  style  et  rendre  l'ouvrage  plus  facile  à  lire. 

Depuis,  les  éditions  des  Essais  n'ont  cessé  de  se  succéder.  Le  docteur  Payen, 
mort  en  1870,  qui  s'était  adonné  avec  passion  à  Montaigne  et  à  tout  ce  qui  s'y 
rattache,  en  possédait  cent  trente-six,  dont  une  vingtaine  en  langue  allemande, 
anglaise,  hollandaise  et  italienne,  et  sa  collection,  aujourd'hui  propriété  de  la 
Bibliothèque  nationale,  n'était  pas  complète;  leur  nombre  s'accroît  chaque  jour. 

Parmi  elles,  nous  citerons  : 

Deux  éditions  données  de  1724  à  1725  et  enrichies  de  notes  nombreuses  par 
Pierre  Coste  qui,  lui  aussi,  a  pris  pour  base  l'édition  de  1595,  mais  en  en  ra- 
jeunissant l'orthographe. 

Une  édition  de  Naigeon,  également  annotée  par  lui,  stéréotypée  par  Firmin- 
Didot,  portant  la  date  de  1802  et  imparfaitement  établie  d'après  le  manuscrit  de 
Bordeaux,  et  en  outre  en  en  altérant  l'orthographe. 

Une  édition  de  1820,  d'Amaury  Duval;  en  tète  de  chaque  chapitre  se  trouvent 
des  sommaires  détaillés,  permettant  d'en  embrasser  l'ensemble  et  de  se  retrouver 
dans  ce  dédale  d'idées  qu'est  l'ouvrage;  le  texte  est  celui  de  1595,  mais  l'ortho- 
graphe est  de  convention. 

Une  de  1826,  de  J.-V.  Leclerc,  dans  les  mêmes  conditions  que  la  précédente. 

Une  de  MM.  Barckhausen  et  Dezeimeris  (1873),  donnant  le  texte  original  de 
l'édition  première  de  1580,  avec  les  variantes  de  celles  de  1582  et  1587. 

Une  de  MM.  Courbet  et  Royer  (1872  à  1900),  réédition  de  celle  de  1595,  remar- 
quable par  son  exactitude  et  .son  exécution  typographique,  suivie  d'une  notice 
des  plus  complètes  sur  Montaigne,  et  d'un  relevé  des  variantes  des  éditions  de 
1580,  1582,  1587,  1588  et  du  manuscrit  de  Bordeaux. 

Une  de  MM.  Motheau  et  .Jouaust  (1873-80),  très  soignée,  éditée  d'après  l'édition 
de  1588  et  donnant  en  notes  toutes  les  variantes  de  celle  de  1595  en  respectant 
scrupuleusement  l'orthographe  de  l'une  et  de  l'autre. 

Une  dite  «  Edition  municipale  de  Bordeaux  »,  en  cours  de  publication  aux 
frais  de  cette  ville  rpii  en  a  confié  l'exécution  à  M.  Strozzi.  Elle  a  pour  base  le 
texte  de  1588,  que  suit  celui  de  1580,  et  en  second  lieu  les  additions  et  même  les 
ratures  manuscrites  de  l'exemplaire  de  Bordeaux,  le  tout  imprim('  avec  des 
diflférences  typographiques  qui  ne  permettent  aucune  confusion. 


LES  ESSAIS.  A.xxvn 

A  l'étranger,  une  de  1897,  à  laquelle  un  grand  soin  a  été  apporté;  publiée  à 
Londres,  elle  est  une  réédition  d'une  autre  de  1603,  la  première  en  langue  étrangère. 

Celle-ci  enfin,  qui  porte,  en  regard  du  tes.te  de  1595,  sa  traduction  en  langage 
de  nos  jours,  et  dans  un  volume  à  part  tous  les  renseignements  propres  à  lui 
permettre,  ainsi  que  son  titre  l'indique,  de  se  suffire  à  elle-même.  —  Puisse  le 
lecteur  la  lire  avec  le  même  intérêt  que  nous  avons  éprouvé  à  la  composer  et 
chacun  réaliser  le  souhait  qu'au  début  de  ce  siècle,  Delille  formait  en  parlant  de 
Jlontaigne,  dont  en  ces  quelques  vers  il  appréciait  fort  judicieusement  l'œuvre  : 

Uiclie  du  fonds  d'autrui,  riche  aussi  par  son  fonds, 
Fidèle  à  son  caprice,  infidèle  à  ses  litres, 
Il  sait  parler  au  sage  et  causer  en  ami. 
Heureux  ou  malheureux,  en  ville,  à  la  campagne, 
Que  son  livre  charmant  partout  vous  accompagne. 


PASSAGES   DES   ESSAIS 

ou    IL    EST   PLUS   PARTICULIÈREMENT   QUESTION    DE    MONTAIGNE 
ET    DES    SIENS  (1). 

Dans  chaque  groupe  de  deux  nombres,  le  premier  indigue  le  volume, 
le  second  te  page. 

« 

Les  aïeux  de  Montaigne.  —  Noms  patronymiques  de  Montaigne,  II, 
4.Ï6.  —  Éloge  de  ses  aïeux,  II,  96.  —  Son  affection  pour  eux,  II,  522.  —  Leur 
longévité,  III,  34. 

Le  père  de  Montaigne.  —  Portrait  de  Pierre  Eyquem,  père  de  Montaigne, 
quelques  particularités  de  sa  vie,  I,  620.  —  Ses  soins  pour  les  affaires  de  la  ville 
de  Bordeaux  pendant  qu'il  en  fut  maire,  III,  488.  — 11  aimait  à  bâtir,  III,  380. 

—  Un  de  ses  projets,  I,  388.  —  Il  tenait  un  journal  des  faits  intéressant  sa  famille, 
I,  390  —  Soins  qu'il  prit  pour  l'éducation  de  son  fils,  I,  282;  III,  670.  —  Ses  dis- 
positions à  l'égard  des  savants,  II,  110.  —  Il  demande  à  son  fils  de  faire  pour 
lui  la  traduction  de  la  «  Théologie  naturelle  »  de  Raymond  Sebonde,  II,  112. 

MONTAIGNE. 

Jeunesse  de  Montaigne.  --  Ob.servation  sur  la  durée  de  la  grossesse  de  sa 
mère,  II.  330.  — Temps  précis  de  sa  naissance,  I,  110.  — Tenu  sur  les  fonts  bap- 
tismaux par  des  personnes  de  la  plus  basse  extraction,  III,  670.  —  Montaigne 
en  nourrice,  III,  670.  —  Dressé  dès  le  plus  bas  âge  à  la  plus  commune  façon  de 
vivre,  III,  670.  —  Précaution  avec  laquelle  on  l'éveillait  dans  son  enfance,  I,  282. 

—  Douceur  avec  laquelle  il  a  été  élevé,  II,  26.  —  Comment  il  apprit  le  latin, 
I,  280;  —  le  grec,  I,  282.  —  Collège  où  il  fit  ses  études  et  fruit  qu'il  en  retira, 
I,  284.  —  Sa  paresse  était  telle,  qu'elle  résistait  même  à  l'attrait  du  jeu,  I,  282. 

—  Comment  il  prit  goût  à  la  lecture  dès  l'âge  de  huit  ans,  I,  28-4.  —  Ne  lut 
jamais  de  romans,  I,  284.  —  Vers  douze  ans,  jouait  au  collège  les  premiers  rôles 

(Il  Dans  cette  table  comme  dans  toute  autre  des  Essais,  ce  Prolée  Insaisissable,  lout 
point  qui  s'y  trouve  mentionné,  bien  que  quelque  peu  précisé  dans  la  page  dont  le 
numéro  suit,  se  rattache  plus  ou  moins  directement  aux  pages  qui  précèdent  et  qui 
suivent  dans  lesquelles  il  est  conuiie  enchâssé,  formant  en  quelque  sorte  un  tou\  indi- 
visible^  considération  dont  le  lecteur  a  à  tenir  compte. 


A.xxviii  NOTICE  SUR  MONTAIGNE. 

dans  des  tragédies  latines,  I,  286.  —  Souvenir  d'un  soulèvement  populaire  à 
Bordeaux,  I,  198.  —  Bien  qu'il  eût  un  jugement  sain  et  des  idées  au-dessus 
do  son  âge,  ses  facultés  intellectuelles  ne  se  sont  développées  que  lentement, 
I,  282. 

Montaigne  à  âge  d'homme.  —  Son  portrait  au  physique  et  au  moral,  II, 
482.  —  Effet  de  l'àgt  sur  lui  après  trente  ans,  I,  598.  —  Ses  armoiries,  I,  514.  — 
Sa  devise,  II,  276.  —  Montaigne  combattant  un  effet  d'imagination,  1, 138.  —  Son 
mépris  pour  le  jeu  d'écliecs,  I,  552.  —  Son  jurement  ordinaire,  III,  246.  —  Mon- 
taigne chevalier  de  l'ordre  de  S. -Michel,  II,  370.  —  Mort  de  son  frère  le  capitaine 
S.-Martin,  I,  114.  — Histoire  d'un  accident  qui  lui  causa  un  long  évanouissement, 
I,  668.  —  Duel  de  son  frère  le  S""  de  Mattecoulom,  II,  574.  —  11  obtient  le  titre  de 
bourgeois  de  la  ville  de  Rome,  III,  280.  —  Il  est  élu  maire  de  Bordeaux,  III,  488, 
518.  —  A  quelles  extrémités  il  fut  réduit  par  la  peste  qui  le  chassa  de  chez  lui, 
III,  566.  —  Personnages  de  son  temps  qu'il  tient  le  plus  en  estime,  II,  518.  — 
Éloge  de  M'""  de  Goui-na}-,  II,  518.  —  Son  souhait  pour  ses  vieux  jours,  III,  390. 

—  Ses  dispositions  morales  dans  sa  vieillesse,  II,  180.  —  Usages  auxquels  il  se 
trouvait  asservi  à  cette  époque  de  sa  vie,  III,  636.  —  Dans  sa  demeure,  il  a  donné 
l'hospitalité  à  des  rois,  III,  458.  —  Particularité  de  l'une  des  tours  de  son  ma- 
noir, I,  156. 

Ses  qualités  physiques.  —  11  était  de  forte  constitution,  mais  nonchalant 
et  peu  dégourdi,  II,  482;  III,  662.  —  11  a  ressenti  jusque  dans  la  vieillesse  les 
effets  de  cette  bonne  constitution,  III,  664.  —  Excellence  de  sa  vue;  comment  il  la 
ménageait  quand  elle  a  commencé  à  être  fatiguée,  III,  680.  —  Geste  qui  lui  était 
propre  et  qui  pouvait,  passer  pour  la  marque  d'une  sotte  fierté,  II,  466.  —  Sa 
disposition  particulière  à  sentir  les  odeurs  et  à  s'en  imprégner,  I,  574.  —  Son 
goût  pour  l'équitation  et  son  endurance  à  cheval,  I,  532;  II,  550;  111,430.  — 
Ses  sentiments  se  reflètent  sur  son  visage,  III,  664.  —  Son  air  naïf  a  été  d'un 
grand  secours  dans  deux  circonstances  très  importantes,  111,592.  — La  sincérité 
de  ses  intentions  qui  paraît  dans  ses  yeux  et  dans  sa  voix  empêche  qu'on  ne 
prenne  en  mauvaise  part  la  liberté  de  ses  discours,  III,  596.  —  Effet  sur  lui 
du  bruit  imprévu  d'une  arquebusade,  I,  82. 

Ses  qualités  morales  et  intellectuelles.  —  Sa  disposition  naturelle  à  la 
pudeur,  I,  34.  —  Son  peu  de  mémoire,  I,  58;  II,  496,  498,  500;  III,  406,408.  — 
11  s'en  défiait,  lors  même  qu'il  avait  appris  un  discours  par  cœur,  III,  410.  — 
Son  horreur  naturelle  pour  les  vices,  II,  96.  —  Son  aversion  pour  le  mensonge, 
I,  64;  —  pour  toute  espèce  de  tromperie, -même  au  jeu,  I,  158.  —  Son  sentiment 
sur  l'ivrognerie.  1, 618.  —  Son  éloignement  pour  la  curiosité,  1, 656.  —  Son  aversion 
pour  le  larcin,  II,  24.  —  Son  aversion  particulière  pour  la  cruauté,  11,98.  —  Son 
humanité  à  l'égard  des  bêtes,  II,  104.  —  Il  haïssait  la  dissimulation.  II,  492.  — 
En  quoi  consistait  la  vertu  de  Montaigne,  II,  94.  —  En  quoi  consistait  ce  qu'il 
avait  de  bon,  II,  98.  —  Inconstance  et  diversité  de  ses  dispositions  morales  et 
intellectuelles,  I,  348.  — Il  a  l'esprit  primesautier;  ce  qu'il  ne  comprend  pas 
d'abord,  il  le  comprend  encore  moins  en  s'y  obstinant,  II,  64.  —  Il  était  naturelle- 
ment irrésolu,  II,  348,  504,  506.  —  Délibérer  l'importune,  II,  488.  —  Ses  dispositions 
à  la  paresse,  II,  484.  —  Son  incapacité  à  soutenir  un  travail  pénible,  à  parler  ou 
composera  volonté,  I,  70.  —  Il  était  peu  fait  aux  mœurs  de  son  siècle,  II,  490. 
Était  dégoûté  de  l'ambition  par  l'incertitude  qui  l'accompagne,  II,  488.  —  Son 
stoïcisme  dans  la  plupart  des  circonstances  qui  causent  ordinairement  une 
grande  affliction,  I,  462.  —  Il  aimait  à  louer  le  mérite  dans  ses  amis  et  'même 
dans  ses  ennemis,  II,  514. 

Son  caractère.  —  Son  caractère  dans  ses  premières  années,  I,  282.  —  Con- 
formité de  son  caractère,  dans  l'âge  mûr,  avec  celui  qu'il  annonçait  dans  ses 
premiers  ans,  II,  486.  —  Application  du  caractère  de  Persée,  roi  de  Macédoine, 
à  l'homme  en  général  et  à  lui-même  en  particulier,  III,  624.  —  Il  est  naturellement 
porté  à  la  commisération,  I,  18.  — Son  éloignement  pour  la  tristesse,  I,  22.  —  Son 
penchant  pour  la  nonchalai}Co,  II,  486.  —  Son  peu  de  goût  pour  la  vie  de  gen- 
tilhomme campagnard,  II,  502;  III,  388.  —  Il  aime  à  vivre  dans  la  médiocrité, 
III,  322.  —  Aurait  préféré  une  vie  tranquille  à  celle  si  belle  d'un  Régulus,  III,  324. 

—  Il  aime  à  se  recueillir,  II,  512.  —  Il  produisait  ordinairement  ses  plus  profondes 


LES  ESSAIS.  A.xxix 

pensées  à  l'improviste,  III,  248.  —  Se  délivrait  d'une  passion  par  une  autre  pas- 
sion, III,  170.  —  Pou  accessible  toutefois  aux  passions  violentes,  II,  351.  —  Sa 
S3'mpatliio  va  surtout  aux  faibles,  III,  670.  —  Sa  loyauté  dans  les  petites  choses, 
I,  158.  —  Il  ne  peut  même  pas  souffrir  qu'on  se  trompe  sur  son  compte,  III, 
82.  —  Se  tenait  comme  absolument  oblige  par  les  engagements  de  probité  et  les 
promesses,  III,  410.  —  Caractère  de  son  courroux  dans  les  grandes  et  les 
petites  affaires,  II,  618.  —  Il  a  toujours  été  chatouilleux  et  sensible  aux  offenses, 
mais  il  le  devient  encore  davantage  en  vieillissant,  III,  184.  —  Ses  conseils  à 
sa  famille  pour  le  cas  où  il  se  met  en  colère,  II,  616.  —  11  ne  présume  les 
vices  qu'après  les  avoir  vus,  III,  390.  —  Son  peu  de  goût  pour  les  grandeurs, 
III,  324.  —  Sa  franchise,  II,  492.  —  Était  naturellement  ouvert  et  libre  avec  les 
grands,  II,  496.  —  Dans  les  affaires,  il  s'offre  toujours  par  ses  opinions  les  plus 
vives  et  par  la  forme  la  plus  sienne,  II,  82.  —  11  aimait  par-dessus  tout  l'indé- 
pendance, III,  418.  —  N'aimait  ni  à  maîtriser,  ni  à  être  maîtrisé,  III,  324.  — 
Sa  passion  pour  la  liberté,  III,  614'.  —  Pourquoi  il  s'opposait  aux  affections  qui 
l'attachaient  à  autre  chose  qu'à  lui-même,  III,  484.  —  Avait  soin  de  ne  pas 
devenir  esclave  de  ses  affections,  III,  501.  —  Etait  ennemi  de  toute  obligation 
et  contrainte,  II,  498.  —  L'était  au  point  qu'il  comptait  comme  un  gain  d'être 
dégagé  de  son  attachement  à  certaines  personnes  par  leur  ingratitude,  III, 
418.  —  Limites  dans  lesquelles  il  est  prêt  à  se  sacrifier,  III,  84.  —  N'aime  à 
solliciter,  ni  à  contracter  d'engagement  ni  pour  lui-mémo,  ni  pour  autrui,  III, 
422.  —  11  hait  la  pauvreté  à  l'égal  de  la  douleur,  III,  392.  —  Préfère  donner 
que  recevoir,  III,  422.  —  Il  osait  dire  ce  qu'il  osait  faire,  III,  186.  —  11  était 
fort  porté  à  imiter,  III,  246.  —  Influence  sur  lui  de  l'imagination,  I,  132;  III, 
08-1.  —  Son  éloignement  pour  toute  espèce  de  nouveauté  surtout  en  politique, 
I,  178.  —  11  jugeait  mieux  de  lui-même  par  ses  propres  réflexions  sur  sa  con- 
duite, que  parles  reproches  ou  les  louanges  de  ses  amis,  III,  114.  —  Prenait 
son  jugement  pour  direction  ordinaire  de  ses  actions,  III,  124.  —  Il  ne  partage 
pas  cette  erreur  commune  de  juger  d'un  autre  d'après  soi,  I,  398.  —  Se  ser- 
vait rarement  des  avis  d'autrui  et  en  donnait  rarement  aux  autres,  III,  128. 

—  Ne  se  repentait  jamais  de  la  manière  dont  il  avait  conduit  ses  affaires, 
III,  124.  —  Pourquoi  il  ne  s'affligeait  pas  lorsque  les  événements  ne  répon- 
daient pas  à  ses  désirs,  III,  130.  —  11  était  plus  sage  et  plus  modéré  dans  la 
prospérité  que  dans  l'adversité,  III,  380.  —  Beaucoup  de  choses  sont  des  sujets 
d'affliction  pour  les  autres  hommes,  qui  n'en  sont  pas  pour  lui,  I,  462.  —  Pour- 
quoi il  étendait  ses  besoins  au  delà  de  ce  que  la  nature  exige  nécessairement, 
III,  496.  —  11  était  porté  à  ravaler  le  prix  des  choses  qu'il  possédait  et  à  ne  pas 
faire  grand  cas  de  lui-même,  II,  468. 

Ses/lnœurs.  —  Il  s'étudiait  lui-même  plus  qu'aucun  autre  sujet;  ce  qu'il 
apprenait  par  là,  III,  618.  —  Cette  étude  le  mettait,  en  outre,  à  même  de  juger 
passablement  des  autres,  III,  622.  —  Ses  discours  s'accordaient  avec  ses  mœurs, 
III,  698.  —  11  était  moins  réglé  dans  ses  opinions  que  dans  ses  mœurs,  II,  96. 

—  Son  antipathie  pour  la  cérémonie,  I,  84.  —  Comment  dans  la  conduite  de  ses 
affaires  et  de  ses  propres  actions,  il  évitait  les  inconvénients  en  les  prévenant, 
III,  506.  —  A  quel  prix  il  s'est  appliqué  à  éviter  les  procès,  III,  510.  —  11  était 
ennemi  des  décisions  trop  hardies,  III,  534.  —  11  s'opposait  tout  d'abord  au 
progrès  de  ses  passions,  III,  504.  —  II  aimait  une  f:agesse  douce  et  gaie  et  fuyait 
l'àpreté  des  mœurs,  III,  186.  —  Il  appréciait  à  leur  valeur  les  voluptés  natu- 
relles, III,  684.  —  11  ne  devait  guère  qu'au  hasard  de  sa  complexion  ce  qu'il  a  pu 
montrer  de  sagesse;  il  ne  se  sent  pas  grand  empire  sur  lui-même,  II,  96.  —  C'est 
par  cela  qu'il  a  pu  résister  aux  plus  fortes  impressions  de  la  volupté,  lî,  98.  —  Il 
hait  à  peu  près  également  une  lourde  oisiveté  et  un  travail  pénible,  III,  276. — 
Dans  quel  rang  il  mettait  les  plaisirs  purs  de  l'imagination  et  les  plaisii"s 
corporels,  III,  686.  —  Son  intention  est  de  passer  doucement  et  non  laborieu- 
sement ce  qui  lui  reste  de  vie,  II,  62.  —  En  somme,  il  l'aime  et  cherche  à  en 
tirer  le  meilleur  parti,  III,  696. 

Son  mariage.  —  Sa  répugnance  pour  le  mariage  et  sa  conduite  par  rapport 
aux  devoirs  de  cette  union,  III,  200.  —  Date  de  son  mariage,  II,  26.  —  Sa  con- 
fiance en  sa  femme  pour  la  conduite   de  sa  maison.  III,  432.  —  Il  lui  avait 


A.xxx  iNOTICK  SUll  MOiNTAIGNE. 

abandonna  tout  ce  qui  concernait  l'éducation  de  leur  lillc,  III,  208.  —  Exemple 
de  sa  circonspection  à  l'égard  de  cette  éducation,  III,  208.  —  Réforme  qu'il  a 
introduite  dans  sa  famille,  II,  o2.  —  Il  ne  souffrait  pas  volontiers  près  de  lui  les 
enfants  nouveau-nés,  II,  22.  —  Comment  il  a  supporté  la  perte  de  ses  enfants 
en  bas  âge,  I,  402.  —  Ne  comptait  pas  pour  un  malheur  de  n'avoir  point  d'en- 
fants qui  pussent  ])orter  son  nom,  III,  478. 

Montaigne  et  La  Boétie.  —  Sa  liaison  avec  La  Boétie,  I,  296.  —  Comment,  dès 
leur  première  rencontre,  ils  s'aimèrent  de  la  plus  parfaite  amitié,  I,  298,  300, 
306,  310.  — Regrets  de  Montaigne  sur  sa  perte,  1, 316.  — Eloge  qu'il  en  fait,  1,318. 

Economie  domestique.  —  Répugnance  qu'éprouvait  Montaigne  à  s'occuper 
de  soins  domestiques,  I,  422;  III,  382  et  suiv.  —  Ne  jouissant  encore  d'aucuns 
revenus,  il  dépensait  sans  compter,  I,  466.  —  Il  thésaurisait  au  début,  quand  il 
a  commencé  à  être  le  maître  de  sa  fortune,  I,  468.  —  Ce  n'est  que  plus  tard  qu'il 
s'est  mis  à  dépenser  en'proportion  de  ce  qu'il  possédait,  I,  472.  —  Ses  dispositions 
et  ses  idées  à  l'égard  de  l'administration  de  sa  maison,  III,  392  et  suiv.  —  11  était 
peu  fait  pour  amasser,  III,  394.  —  Trouvait  commode,  pour  ses  dépenses,  de  se 
fier  à  ses  domestiques,  quoi  qu'il  pût  lui  en  coûter,  III,  390. 

Vie  sociale.  —  Etait  trop  délicat  dans  le  commerce  qu'on  est  obligé  d'entre- 
tenir avec  le  commun  des  hommes,  III,  138.  —  Passionné  pour  des  amitiés 
exquises,  il  est  peu  propre  aux  amitiés  communes,  III,  140.  —  Il  aime  la  société 
des  honnêtes  gens,  III,  146.  —  Son  sentiment  sur  les  rangs  et  préséances,  111,444. 

—  Sa  manière  d'être  dans  la  conversation,  III,  138.  —  Son  goût  pour  la  discussion. 
III,  334.  —  Souffrait  sans  peine  la  contradiction,  III,  336.  —  N'aimait  pas  à  être 
interrompu  quand  il  parlait,  III,  248.  —  Aimait  à  railler  et  à  être  raillé,  mais 
il  déteste  les  jeux  de  main,  III,  366.  —  Hait  la  sottise  chez  ceux  avec  lesquels  il 
cause;  ne  perd  pas  son  temps  à  relever  celles  qu'on  dit  devant  lui,  III,  362.  — 
Son  peu  de  disposition  pour  la  llatterie,  II,  476,  496.  —  Mention  de  ses  rela- 
tions avec  la  cour,  III,  82.  —  Quelle  était  la  solitude  qu'il  désirait,  III,  146. 

Vie  publique.  —  Montaigne  se  félicitait  de  ne  rien  devoir  aux  princes  et  de 
vivre  dans  l'indépendance,  111,420.  — Les  compositions  que  nécessite  la  vie  publique 
l'en  ont  dégoûté,  III,  466.  —  Il  n'a  jamais  souhaité  de  postes  fort  élevés,  III, 
322.  —  Il  fuyait  les  emplois  publics,  III,  464.  —  Son  éloignement  pour  la  magis- 
trature, III,  90.  —  Sa  règle  de  conduite  dans  les  charges  publiques,  III,  '492, 
500,  524.  —  Elu  maire  de  Bordeaux,  il  est  obligé  d'accepter  cette  charge; 
comment  il  s'en  est  acquitté;  elle  lui  est  continuée  par  seconde  élection,  111,488. 

—  Portrait  qu'il  fit  de  lui-même  à  Messieurs  de  Bordeaux,  III,  488.  —  Attitude 
qu'il  conseille  à  l'égard  de  troupes  convoquées  pour  une  revue  dont  on  était  en 
défiance,  I,  200.  —  Jugement  qu'on  fit  de  la  manière  dont  il  s'était  acquitté  de  sa 
mairie,  III,  518.  —  Montaigne  et  le  métier  des  armes,  II,  450,  500;  III,  038, 
662.  —  Comment  il  entendait  le  rôle  de  négociateur,  III,  82,  86. 

Montaigne  et  les  guerres  civiles.  —  Ses  sentiments  à  l'égard  de  son  temps, 

I,  398.  —  Tranquillité  de  sa  conscience  durant  les  guerres  civiles,  II,  356.  —  II 
n'embrassait  aucun  parti  avec  trop  d'ardeur,  III,  84.  —  Sa  conduite  vis-à-vis  de 
personnes  de  différents  partis,  III,  86.  —  En  épousant  un  parti,  il  n'épousait 
point  les  injustices  et  les  entêtements  ridicules  de  ce  parti,  III,  500.  —  Comment 
pendant  longtemps,  au  début,  il  se  trouva  préservé,  dans  une  maison  sans  défense, 

II,  438.  —  Les  troubles  s'aggravant,  il  a  la  douleur  de  n'être  plus  à  l'abri  du 
pillage  que  grâce  à  la  protection  d'autrui,  III,  414.  —  En  butte  aux  excès  des 
deux  partis,  il  finit  par  en  pàtir  considérablement,  III,  554,  560.  —  En  quoi,  en 
cette  occurrence,  il  faisait  consister  tout  son  bonheur,  III,  132.  —  Mention  de  la 
mort  de  son  page,  I,  658.  —  Détails  sur  deux  circonstances  critiques  dans  lesquelles 
il  s'est  trouvé,  III,  592.  —  Son  opinion  sur  la  meilleure  forme  de  gouvernement  et 
sur  les  révolutions,  III,  398  et  suiv. 

Quelques-unes  de  ses  idées  sur  certains  points.  —  Son  opinion  sur  la 
nature  de  Dieu,  II,  250.  —  Sur  la  Patenôtre,  II,  578.  —  Ses  idées  philosophiques, 

III,  698.  —  Seuls  biens  qu'il  mette  en  ligne  de  compte,  III,  72.  —  Il  préfère  l'es- 
time présente  à  celle  qui  pourrait  le  suivre  après  sa  mort,  III,  72.  —  Il  n'a  pas 
l'ambition  d'être  jugé  plus  favorablement  après  sa  mort,  qu'il  ne  l'aura  été  de 
son  vivant,  III,  72.  —  Il  regarde  tous  les  hommes  comme  ses  compatriotes, 


LES  ESSAIS.  A.xxxi 

III,  428.  —  Son  sentiment  sur  l'exil,  III,  428.  —  Son  opinion  sur  la  science  et 
ses  dispositions  à  l'égard  des  savants,  II,  110.  —  Ce  qu'il  jugeait  de  la  langue 
française,  III,  212.  —  Sur  les  miracles  el  les  prodiges,  III,  528.  —  Aveu  de 
quelques  idées  superstitieuses  de  sa  part,  III,  oo4.  —  Son  procédé  pour  con- 
soler une  personne  affligée,  III,  158.  —  Son  remède  contre  le  cliagrin,  III,  170. 

—  Sa  tendresse  pour  Paris,  III,  428.  —  Son  admiration  pour  la  ville  de  Rome, 

111,  474.  —Pourquoi  il  se  défiait  de  l'habileté  d'un  homme  qu'il  voyait  en  situa- 
tion élevée.  III,  360.  —  Ses  observations  sur  le  mal  de  mer  fondées  sur  sa  propre 
expérience,  III,  288. 

Montaigne  et  les  femmes.  —  De  la  douceur  qu'il  trouvait  dans  le  com- 
merce des  femmes,  III,  148.  —  Il  voulait  que  ce  commerce  fût  accompagné  de 
sincérité,  III,  150.  —  Son  goût  sur  \e  chapitre  de  l'amour,  III,  264.  —  Cette 
passion  l'a  beaucoup  fait  souffrir  dans  sa  jeunesse,  III,  148.  —  Il  n'a  jamais 
beaucoup  fréquenté  les  femmes  publiques,  III,  152.  —  En  amour,  il  préférait  les 
grâces  du  corps  à  celles  de  l'esprit,  III,  152.  —  Disci'étion  et  bonne  foi  qu'il 
apportait  dans  ses  amours,  III,  272.  —  Croyait  salutaire  l'amour  pris  avec 
modération,  III,  276.  —  Son  opinion  sur  l'âge  où  l'amour  est  convenable,  III, 
282. 

Montaigne,  les  livres  et  les  lettres.  —  Ouvrage  qui  lui  inspira  le  goût 
de  la  lecture  et  moyen  par  lequel  on  entretint  ce  goût  en  lui,  I,  284.  —  Il  se 
complaisait  dans  le  commerce  des  livres,  III,  154.  —  Ce  qu'il  dit  de  sa  biblio- 
thèque et  de  sa  situation,  III,  156.  —  Ce  qu'il  recherchait  dans  les  livres,  II, 
62.  —  Effet  de  la  lecture  sur  son  esprit,  III,  138:  —  Indication  de  ses  auteurs  de 
prédilection,  I,  284;  II,  64.  —  Pourquoi  il  préférait  les  anciens  aux  modernes, 
II, ,61.  —  Son  goût  particulier  pour  l'histoire  et  la  poésie,  I,  228,  404;  II,  76. 

—  Sa  méthode  pour  la  lecture  des  historiens,  I,  94.  —  Poètes  latins  qu'il 
mettait  au  premiei-  rang,  II,  66.  —  Modifications  successives  de  son  goût 
pour  la  poésie,  I,  404.  —  Ce  qu'il  pensait  d'Ovide  à  la  fin  de  ses  jours,  H,  64. 

—  Quel  usage  il  faisait  de  Sénèque  et  de  Plutarque,  II,  70.  —  Comment  il  s'y 
prenait  pour  juger  d'un  ouvrage  d'esprit  que  l'auteur  soumettait  à  son  appré- 
ciation, III,  666.  —  Aveu  du  peu  de  profondeur  de  ses  connaissances  en  fait 
de  sciences,  II,  226.  —  Son  ignorance  des  clioses  les  plus  vulgaires,  II,  502. 

Son  langage,  son  style,  etc.  —  Son  langage,  II,  476;  I,  480.  —  Fort  libre 
dans  ses  paroles,  comment  il  excuse  cette  licence,  II,  186.  —  Détails  sur  sa 
manière  d'écrire  et  de  parler,  II,  474;  III,  244.  —  Sur  son  style,  I,  152,  278,  — 
Son  mode  de  travail,  III,  22.  —  Son  peu  de  succès  dans  la  poésie,  II,  472.  — 
Son  motif  pour  traduire  la  «  Théologie  naturelle  »  de  Raymond  Sebonde,  II, 

112.  —  Pourquoi,  excepté  Plutarque,  il  aime  à  se  passer  de  livres  en  écrivant, 
III,  244.  —  Quand  il  composait,  ne  se  faisait  aider  par  personne,  III,  244.  — 
En  Guj'enne  il  acheta  les  imprimeurs,  ailleurs  ils  l'achètent,  III,  116.  —  Son 
genre  pour  le  style  épistolaire,  III,  436.  —  Etait  ennemi  des  compliments  outrés 
qu'on  emploie  dans  les  lettres,  II,  438.  —  Peu  propre  à  écrire  des  lettres  de 
i-ecommandation,  II,  438.  —  II  écrivait  ses  lettres  avec  beaucoup  de  rapidité  et 
de  négligence,  II,  438.  — (^  Celles  qui  lui  coûtent  le  plus  sont  celles  qui  valent  le 
moins,  II,  440.  —  Il  n'aime  pas  à  se  relire  et  ce  n'est  qu'à  contre-cœur  qu'il  se 
corrige.  III,  400. 

Voyages.  —  Pourquoi  il  se  plaisait  à  voyager,  III,  380.  —  En  voyage,  il  ne 
pense  qu'à  lui,  III,  394.  —  Autres  avantages  qu'il  y  trouve,  III,  430.  —  Raisons 
qui  auraient  pu  l'en  détourner,  réponse  qu'il  y  fait,  III,  456.  —  Sa  manière  de 
voyager,  III,  450  et  suiv.  -—  Sa  manière  de  voyager  à  cheval,  III,  430.  —  Il  se 
prêtait  sans  peine  aux  différents  usages  et  modes  de  chaque  pays,  III,  454.  — 
Pratique  à  laquelle  il  s'était  habitué  en  voyage,  I,  92.  —  Aurait  aimé  un  com- 
pagnon de  voyage  avec  lequel  il  eût  pu  s'entretenir,  III,  456.  —  Mésaventure 
qui  lui  est  survenue  dans  un  voyage  à  Paris,  111,596.  — Autre  aventure  qui  s'est 
produite  dans  un  voyage  qu'il  faisait  avec  son  frère  le  sieur  de  la  Brousse,  I, 
658.  —  Mention  d'un  voyage  à  Orléans,  I,  272.  —  A  Rouen,  I,  374.  —  A  Vitrv- 
le-François,  I,  136.  —  A^Bar-le-Duc,  II,  501.  —A la  Fère,  III,  174.  —  ASoissons, 
III,  174.  —  Aux  stations  thermales,  III,  56.  —  En  Allemagne,  III,  630.  —  En 
Italie,  I,  238;  III,  474.  —  Impression  que  fit  sur  lui  le  Tasse  devenu  fou,  II, 
212. 


A.xxxii  NOTICE  SUR  MONTAIGNE. 

Ses  goûts,  ses  habitudes,  ses  dispositions  naturelles.  —  Détails  sur 
SOS  goûts,  habitudes,  etc.,  relatifs  aux  actions  les  plus  communes  de  la  vie,  III, 
484,  630,  660.  —  Ses  songes  étaient  plus  ridicules  que  tristes,  III,  666.  —  Quand 
il  était  jeune,  il  aimait  à  se  parer,  III,  294.  —  Règles  qu'il  observait  à  l'égard 
de  ses  vêtements,  I,  394;  III,  678.  —  Sa  démarche;  il  se  tenait  fort  peu  dans 
une  même  situation,  III,  (38-2.  —  Son  habitude  de  porter  une  canne.  II,  564.  — 
Ses  habitudes  de  table,  I,  268,  548:  III,  638,  642,  6fJ8,  672  et  suiv.  -  Peu  sensible 
au  plaisir  de  boire,  I,  622.  —  Jeûnait  quelquefois  et  pourquoi,  III,  676.  —  Sain 
ou  malade,  il  suivait  volontiers  ses  appétits  naturels,  III,  642.  —  Il  était  peu 
délicat  à  table,  III,  668.  —  Ce  qu'il  jugeait  des  plaisirs  de  la  table,  III,  (J82.  — 
Son  goût  a  eu  ses  changements  et  ses  révolutions,  III,  676.  —  Il  avait  soin  de 
se  tenir  le  ventre  libre,  III,  640.  —  N'airpait  pas  à  demeurer  dans  un  air  con-. 
fine,  III,  680.  —  La  chaleur  l'incommodait  plus  que  le  froid,  III,  680.  —  Ne 
pouvait  souffrir  ni  coche,  ni  litière,  ni  bateau,  III,  290.  —  Ses  raisons  pour 
renoncer  aux  jeux  de  hasard,  III,  506.  —  Les  odeurs  les  plus  simples  et  les  plus 
naturelles  sont  celles  qui  lui  plaisent  davantage,  I,  574. 

Montaigne  et  la  maladie.  —  Sa.  bonne  constitution,  II,  482;  III,  6&1.  — 
Son  peu  de  confiance  dans  la  médecine,  I,  192;  II,  34;  III,  648.  —  En  quel  état 
il  serait,  s'il  venait  à  se  livrer  aux  mains  des  médecins,  II,  76.  —  Malade,  il 
conservait  la  même  manière  de  vivre  que  lorsqu'il  se  portait  bien,  III,  630.  — 
Son  esprit  peu  troublé  par  les  maladies  du  corps,  III,  666.  —  Pourquoi  parler 
lui  nuisait  dans  ses  maladies,  III,  644.  —  Sa  santé  sur  ses  vieux  jours,  III,  651. 

—  Devenu  sujet  à  la  colique  (gravelle),  avec  le  temps  il  s'accommode  avec  ce 
mal,  III,  24.  —  Quels  avantages  il  retire  de  cette  douloureuse  maladie,  II,  26; 
III,  650  et  suiv.  —  Il  pense  la  tenir  de  son  père,  II,  32.  —  Il  arrive  à  se  pos- 
séder assez  bien  dans  ses  accès,  II,  30.  —  Tout  bien  considéré,  il  se  console  de 
ses  infirmités,  III,  660.  —  Eaux  thermales  dont  il  a  fait  usage,  II,  58. 

Montaigne  et  la  mort.  —  Quels  étaient  ses  préparatifs  par  rapport  à  la 
mort,  III,  446.  —  L'idée  de  la  mort  est  plus  pénible  en  santé  qu'en  maladie, 
I,  122.  De  quel  genre  de  mort  il  s'accommoderait  le  mieux,  III,  450.  —  Il  lui 
est  indifférent  de  mourir  loin  des  siens,  III,  438.  —  Voudrait  être  assisté  d'un 
sage  ami  en  sortant  de  ce  monde,  III,  440.  —  Son  projet  pour  ses  dernière 
moments,  I,  56.  —  Son  opinion  sur  les  cérémonies  des  funérailles,  I,  38. 

Jugements  de  Montaigne  sur  lui-même.  —  Estime  qu'il  avait  de  lui- 
même,  II,  470,  508.  —  Idée  qu'il  avait  de  la  justesse  de  ses  opinions,  II,  510.  — 
Par  le  fait  même  qu'il  écrit  sur  lui-même,  il  est  tenu  de  s'observer  dans  ses 
mœurs,  III,  442.  —  Lui-même  était  le  miracle  le  plus  réel  à  ses  yeux,  III,  532. 

—  En  quelles  sortes  d'affaires  il  aurait  pu  être  employé  utilement,  III,  518.  —  Il 
se  serait  cru  propre  à  parler  librement  à  son  maître  et  à  lui  apprendre  à  se  con- 
naître lui-même,  III,  624. 

NOTES  ayant  trait  à  Montaigne  et  aux  siens. 

Nota.  —  L'indication  N.  I,  620,  Italie,  signifie  qu'il  y  a  lieu  de  se  reporter 
aux  notes  (N)  afférentes  au  premier  volume  (I),  page  620;  et,  parmi  elles,  à  celle 
ayant  pour  indice  le  mot  Italie. 

Le  père  de  Montaigne.  —  Détails  sur  Pierre  Eyquem,  N.  I,  620,  Italie.  — 
Oncles  de  Montaigne,  N.  III,  34,  Quatre.  —  Frères  et  sœurs  de  Montaigne,  N. 
III,  32,  Mère.  —  Naissance  de  son  dernier  frère,  N.  I,  620,  Miracles-  —  Parenté 
protestante  de  Montaigne,  N.  III,  560,  Vojsinage.  —  Pierre  Eyquem  maire  de 
Bordeaux,  N.  III,  488,  Appelé.  —  Mise  de  sa  maison  en  état  de  défense.  N.  II, 
438,  Faicte. 

Montaigne,  sa  jeunesse.  —  Prononciation  de  son  nom,  N.  I,  Titre, 
Montaigne.  —  Observation  sur  la  durée  de  la  grossesse  de  sa  mère,  N.  II,  330, 
Mois.  —  Son  prénom,  N.  III,  670,  Attacher.  —  Lacune  de  son  éducation,  N.  I, 
280,  Moy.  —  Son  précepteur  allemand,  N.  I,  280,  Latine.  —  Ses  frères  et  sœurs, 
N.  I,  114,  Frère. 

Montaigne  à  âge  d'homme.  —  Montaigne  et  son  nom  patronymique,  N. 


LES  ESSAIS.  A.xxxiii 

III,  A2[,  Noiir.  —  Ses  armoiries,  N.  I,  514,  Fasce.  —  Sa  devise,  N.  II,  276,  «  Que 
sçay-ie  ».  —  Montaigne  élu  maire,  N.  III,  488,  Aussi.  —  Montaigne  réélu,  N. 
111,518,  Charge.  —  Montaigne  maire  et  Montaigne  simple  particulier,  N.  III, 
500,  Claire.  —  Henri  de  Navarre  chez  Montaigne,  N.  III,  456,  Pompe.  —  M"'  de 
Gournay,  N.  II,  518,  D'alliance. 

Ses  qualités  morales  et  intellectuelles.  —  Son  peu  de  mémoire,  N.  I, 
58,  iMienne.  —  Montaigne  et  le  bon  sens,  N.  II,  310,  Inconstante:  N.  III,  366, 
L'asne.  —  Son  humeur  paresseuse,  N.  III,  396,  Volonté. 
Mœurs.  —  Procès  relatif  à  sa  succession,  N.  II,  44,  Masculines. 
Son  mariage.  —  Date  de  son  mariage,  N.  II,  26,  Ans.  —  Sa  retenue  dans  le 
mariage,  N.  I,  346,  Simple.  —  Ses  filles,  N.  I,  462,  Fascherie.  —  Paix  du  ménage, 
X.  III,  382,  Clier.  —  Son  nom  s'est  éteint  avec  lui,  N.  III,  478,  Nom. 

Montaigne,  les  livres  et  les  lettres.  —  Ses  livres,  N.  III,  156,  Liures.  — 
Montaigne  comparé  à  Sénèque,  N.  II,  476,  Seneque.  —  Montaigne  qualifié  de 
•  sage  ignorant  >■,  N.  I,  232,  Autruy. 

Son  langage,  son  style,  etc.  —  Traduction  delà  ■>  Théologie  naturelle  ■•  de 
Sebond,  N.  II,  112,  Mort.  —Lettres  de  Montaigne,  N.  I,  436,  Chose. —  Son 
écriture,  N.  I,  438,  Mal.  —  11  usait  aussi  de  secrétaires,  N.  III,  156,  Dicte.  — 
Montaigne  et  son  imagination,  N.  II,  478,  Creu. 

Économie  domestique.  —  Son  souhait  de  vivre  en  s'en  remettant  à  un 
gendre  de  tout  souci  matériel,  N.  III,  -M),  Amy.  —  Ce  qu'est  devenu  son  patri- 
moine entre  ses  mains,  N.  I,  472,  Folies;  N.  I,  472,  Terres. 

Vie  sociale.  —  Montaigne  et  Charron,  N.  III,  444,  loindre.  —  Séjours  de 
Montaigne  à  la  cour,  N.  II,  146,  Vie. 

Vie  publique.  —  Montaigne  et  les  différents  chefs  de  parti,  N.  I,  152,  Partis. 
—  Il  no  voulait  s'inféoder  à  aucun  d'eux,  N.  I,  246,  Particulières.  —  De  parti 
pris,  il  repousse  toute  avance  tendant  à  le  faire  rentrer  dans  la  vie  publique,  N. 
II,  210,  Viurc.  —  Auprès  de  qui  il  a  joué  le  rôle  de  négociateur,  N.  III,  80, 
Princes.  —  Quelle  était  sa  profession,  N.  III,  408,  Profession. 

Montaigne  et  les  guerres  civiles.  —  Sur  ce  qu'il  pensait  de  la  moralité 
publique  en  son  époque,  N.  I,  550,  Nous.  —  Guerres  de  religion  du  temps  de 
Montaigne,  N.  I,  668,  Deuxièmes.  —  Pillage  de  sa  mai.son,  N.  III,  414,  Sac.  — 
Montaigne  à  la  Bastille,  N.  III,  614,  Receu. 

Quelques-unes  de  ses  idées  sur  certains  points.  —  Montaigne  chré- 
tien et  moraliste,  N.  I,  590,  Instruisants.  —  Le  doute  est  de  règle  dans  les  con- 
troverses religieuses,  N.  II,  332,  Reseruément.  —  Résumé  de  la  morale  de  Mon 
taigno,  N.  111,546,  Sequi;  N.  III,  704,  Extrauagance.  —  Montaigne  et  le  suicide. 
N.  1,628,  Contestations.  —  Montaigne  et  "la  fatalité,  N.  III,  126,  Regret.  —  Son 
influence  sur  nos  lois,  N.  III,  610,  lustice. 

Voyages.  —  Journal  de  voyage  de  Montaigne,  N.  I,  92,  Voyages;  N.  III,  654, 

Passée.  — Sur  son  titre  de  bourgeoisie  romaine,  N.  III,  480,  Bulle. 

Montaigne  et  la  maladie.  —  Maladie  dont  il  est  mort,  N.  III,  438,  Gorge. 

Montaigne  et  la  mort.  —  Lui-même  distribue  à  ses  serviteurs  les  legs  qu'il 

leur  destine,  N.  III,  148,  leur.  —  Sa  mort,  N.  I,  122,  Mort.  —  Son  tombeau,  N. 

III,  438,  Miens. 


ESSAIS    DE  MONTAIGNE. 


LES  ILLUSTRATIONS  DU  PRESENT  OUVRAGE. 


Planche  I  (P'  volume). 

Portrait  de  Montaigne.  —  Il  existe  soit  en  original,  soit  reproduits  par 
la  gravure,  d'assez  nombreux  portraits  de  Montaigne  plus  ou  moins  authentiques, 
laits  de  son  vivant,  à  différents  âges. 

Celui  qui  présente  le  plus  d'authenticité  et  en  même  temps  semble  le  mieux 
rendre  sa  physionomie  telle  qu'elle  pouvait  être  et  que  nous  nous  la  représentons 
à  l'époque  où  il  écrivait  les  Essais,  aurait  été  peint  en  1581,  à  Rome,  pendant  le 
voyage  qu'il  y  fil  (il  avait  donc  alors  48  ans),  par  Palma  Vecchio  (le  vieux),  peintre 
italien  (né  en  1548  et  mort  en  1588).  Ce  portrait,  alors  que  Montaigne  était  maire 
de  Bordeaux,  aurait  été  donné  par  lui  en  1583  au  musée  de  cette  ville,  où  en  1640 
il  a  été  copié  par  Ribeira,  dit  l'Espagnolet,  pour  la  famille  qui  le  détient  encore. 
L'original  a  disparu,  sans  qu'on  sache  ce  qu'il  est  devenu,  bien  que  certains  pré- 
tendent qu'il  n'est  autre  qu'un  portrait  qui  se  trouverait  actuellement  au  château 
de  Montaigne. 

De  ce  tableau  et  de  sa  copie,  il  existe  plusieurs  gravures  dont  les  plus  an- 
ciennes remontent  à  1772;  la  vignette  en  tête  de  notre  premier  volume  est  la 
reproduction  de  l'une  d'elles  exécutée  en  1826  par  Ilenriquet  Dupont.  Le  ruban 
et  la  médaille  qu'y  porte  Montaigne  sont  ceux  de  l'ordre  de  S.-Michel,  dont  les 
règlements  imposaient  à  ses  titulaires  de  ne  jamais  les  quitter,  fût-ce  au  péril  de 
la  vie;  quand  il  se  faisait  peindre  à  Rome,  Montaigne  en  était  chevalier  depuis 
une  dizaine  d'années. 

Des  diverses  gravures  le  représentant,  il  en  est  une  reproduisant  son  portrait 
par  Thomas  de  Leu  ;  nous  la  signalons  parce  qu'au-dessous  se  lit  ce  quatrain 
attribué  à  Malherbe  : 

«  Voicy  du  grand  Montaigne  vne  entière  figure, 
Le  peindre  a  peinct  le  corps  et  luymesme  l'esprit; 
Le  premier  par  son  art  égale  la  Nature, 
Le  second  la  surpasse  en  tout  ce  qu'il  escrit.  • 

Une  autre  de  ces  gravures  porte  ces  vers  de  l'abbé  Gacon  : 

«  Ennemi  de  tout  fanatisme, 
Après  avoir  réglé  son  esprit  et  ses  mœurs, 

Par  un  aimable  pjrrhonisme 
Il  rendit  ses  écrits  le  charme  des  lecteurs.  » 

Les  vere  suivants  en  accompagnent  une  autre  de  1837  : 

«  Philosophe  sublime  en  sa  naïveté, 
Lorsque  le  fanatisme  appelait  l'ignorance, 
En  enseignant  le  doute  il  illustra  la  France 
Et  sut,  dans  son  portrait,  peindre  l'humanité.  > 

Une  édition  des  Essais  de  1611,  est  la  première  qui  soit  ornée  d'un  portrait. 

Armoiries.  —  «  le  porte  d'azur  semé  de  trèfles  d'or,  à  une  pâte  de  lyon  de 
mesme,  armée  de  gueules,  mise  on  face  ■>  (liv.  1,  ch.  46,  I,  514);  ce  qui,  pour  les 
profanes,  se  traduit  de  la  sorte  :  Mon  écusson  est  sur  fond  d'azur  (bleu),  semé  de 
trèfles  d'or  (jaune)  ;  y  figure  une  patte  de  lion  de  même  couleur,  armée  de  gueules 


ILLUSTRATIONS  DU  PRÉSENT  OUVRAGE.  A.xxxv 

(ayant  les  griffes  rouges),  mise  en  fac«^  (posée  de  face)  et  brochant  sur  le  tout 
(allant  d'un  bord  à  l'autre  de  l'écusson);  cette  dernière  indication  n'est  pas  dans 
le  texte,  mais  la  disposition  qu'elle  marque  existe.  — Montaigne,  à  sa  mort,  n'ayant 
point  d'héritier  mâle,  légua  ses  armes  à  Charron,  l'auteur  de  la  Sagesse,  qui,  en 
ses  derniers  ans,  était  devenu  son  ami  et  son  disciple. 

Signature.  —  Cette  signature  est  le  fac-similé  de  celle  apposée  sur  une  lettre 
adressée,  le  21  mai  1582,  par  Montaigne  aux  jurats  (sorte  de  conseillers  muni- 
cipaux) de  Bordeaux,  alors  qu'il  en  était  maire. 

11  est  à  observer  que  l'n  de  son  nom  est  supprimée,  ce  qui  était  assez  fréquent 
dans  la  façon  d'écrire  de  l'époque,  quand  dans  la  syllabe  cette  lettre  était  suivie 
d'une  voyelle,  ainsi  qu'on  peut  voir  sur  la  planche  IV;  elle  se  remplaçait  alors 
par  un  trait  sur  la  lettre  précédente,  trait  qui  dans  sa  signature  se  confondait 
avec  la  barre  du  t. 

A  la  mort  de  son  père,  Montaigne  devenu  chef  de  famille  a  cessé,  dans  sa  signa- 
ture, de  faire  précéder  son  nom  de  son  prénom,  que  ses  frères,  au  contraire, 
continuèrent  à  apposer  concurremment. 

Prononciation  du  nom  de  Montaigne.  —  Se  reporter  à  ce  sujet  à  la  note 
y  afférente,  I,  13,  Montaigne. 

Planche  II  (II"  volume). 

Plan  et  perspective  du  manoir  de  Montaigne  au  XVIII"  siècle  et 
croquis  topographique  des  environs.  —  Le  manoir  ou  maison  noble  de  Mon- 
taigne, sa  »  maison  »  comme  il  l'appelle,  ne  mérite  lo  nom  de  château  qu'on  lui 
donne  la  plupart  du  temps,  que  depuis  sa  réfection  à  peu  près  complète  vers  1860, 
et  sa  reconstruction  totale,  la  tour  exceptée,  1887. 

Il  est  situé  à  environ  4  kil.  N.  de  la  route  de  Bergerac  à  Libourne  par  Castillon 
et  de  la  Dordogne  que  longe  cotte  route,  et  est  distant  de  20  kil.  E.  de  Bergerac  à 
rO.  et  de  8  kil.  de  Castillon  à  l'E.  Cet  immeuble  fait  partie  du  territoire  de  la 
commune  de  S.-Michel-Montagne,  appelée  aussi  Saint-Michel-Bonnefare  (agglomé- 
ration d'environ  400  habitants  dont  il  est  éloigné  de  5  à  600°")  ;  cette  commune  qui 
relève  du  canton  de  Vélines,  arr.  de  Bergerac,  dép,  de  la  Dordogne,  est  limitrophe 
(lu  département  de  la  Gironde. 

Le  manoir  est  construit  sur  un  mouvement  de  terrain  d'à  peu  près  70'"  d'éléva- 
tion, à  pentes  moyennes,  au  pied  duquel  coule  la  Lidoire,  petit  affluent  de  la 
Dordogne  ;  en  ce  point,  la  vallée  est  assez  large  et,  de  l'habitation  dans  la  direction 
de  N.-O.,  la  vue  s'étend  assez  loin  sur  les"  plaines  du  Périgord  et  du  Bordelais. 
Suivant  une  description  de  1778,  quoique  habité,  il  était,  à  cette  époque,  dans  un 
état  de  délabrement  complet;  du  reste,  il  n'avait  jamais  dû  présenter  rien  de 
grandiose,  ne  devait  d'avoir  résisté  à  l'action  du  temps  que  grâce  à  la  solidité 
de  ses  murs  et  n'était  intéressant  que  par  le  souvenir  de  Montaigne. 

Il  se  composait  d'une  enceinte  rectangulaire  complètement  fermée. 

La  face  S.-O.  N.-E.  était  flanquée  de  deux  tours.  Joignant  celle  du  S.  mais  sur 
l'autre  face  y  attenant,  était  la  porte  d'entrée,  des  plus  simples,  quoique  garnie 
de  mâchicoulis.  Elle  donnait  accès  dans  une  sorte  de  préau  étroit  servant  de 
passage,  qui  contournait  en  partie  la  tour  et  d'où  par  une  seconde  porte  on 
débouchait  dans  la  cour  qui  était  de  forme  à  peu  près  carrée  et  avait  cinquante 
pas  environ  de  longueur  sur  à  peu  près  autant  de  largeur;  elle  était  plantée 
d'arbres  sur  son  pourtour. 

La  maison  d'habitation  en  occupait  le  côté  faisant  face  aux  deux  tours;  les  trois 
autres  l'étaient  par  les  communs.  La  maison  comprenait  un  rez-de-chaussée  et 
deux  étages;  la  distribution  en  était  assez  confuse  et  mal  entendue.  Derrière 
était  une  longue  et  large  terrasse,  présentant  des  ombrages  et  des  parterres,  d'où 
l'on  avait  une  vue  belle  et  étendue;  une  balustrade,  rendue  nécessaire  par  des 
soutènements  assez  abrupts,  la  clôturait  du  côté  de  la  vallée. 

La  tour  S.  encore  existante  et  sur  laquelle  nous  reviendrons  à  propos  des 
illustrations  de  la  planche  III,  assez  massive  et  un  peu  écrasée,  comprend  également 
un  rez-de-chaussée  et  deux  étages;  elle  est  connue  sous  le  nom  de  Tour  de  Mon- 


A.xxxvi  NOTICE  SUR  MONTAIGNE. 

taigne.  L'auteur  des  Essais  }•  avait  une  chambre  où  il  couchait  parfois  et  sa 
bibliothèque.  Un  beffroi  surmontait  cette  tour  et  abritait  une  cloche  dont  il  est  fait 
mention  au  ch.  22  du  liv.  1  des  Essais,  page  156,  elle  sonnait  l'Angelus  et  servait 
à  appeler  les  tenanciers  du  fief  les  jours  de  fête  et  aussi  en  cas  d'alarme.  L'autre 
tour,  moins  grosse  et  un  peu  plus  élevée,  était  dite  tour  de  Trachère  et  il  semble 
que  c'est  uniquement  par  opposition  avec  le  nom  de  la  première,  et  à  tort,  qu'on 
rappelle  parfois  Tour  de  Madame;  ni  la  femme,  ni  la  mère  de  Montaigne  ne  l'ont 
occupée.  De  construction  beaucoup  plus  récente  que  l'autre,  vraisemblablement 
bâtie  pour  accroître  la  force  défensive  de  la  demeure,  elle  était  déjà  en  ruines 
au  commencement  du  siècle  dernier,  et,  ne  faisant  plus  que  masquer  le  coup 
d'oeil,  elle  a  depuis  complètement  disparu. 

Vendu  à  diverses  reprises,  ce  manoir  en  était  venu,  faute  d'entretien,  à  un 
tel  état  de  délabrement,  qu'il  n'était  plus  guère  habitable,  quand  en  1857  il  fut 
entièrement  restauré,  mais  en  tenant  compte  du  progrès  en  matière  de  confort  ; 
seule,  la  tour  de  Montaigne  le  fut  en  conservant  sa  distribution  intérieure,  toutefois 
le  beffroi  fut  supprimé.  En  1885,  ruiné  de  fond  en  comble  par  un  incendie,  il  fut 
l'éédifié  peu  après,  mais  cette  fois  sans  s'astreindre  à  respecter  aussi  passivement 
le  plan  primitif,  dont  on  s'écarta  aussi  bien  pour  les  détails  extérieurs  que  dans 
l'aménagement;  c'est  devenu  une  très  belle  habitation,  luxueuse  à  l'intérieur, 
justifiant  aujourd'hui  le  nom  de  château  qu'on  lui  avait  donné  prématurément. 
Par  contre,  de  la  maison  de  Montaigne  il  ne  reste  plus  que  l'emplacement  et  la 
tour,  que  le  feu  avait  encore  épargnée  grâce  à  sa  situation  à  l'écart  et  à  l'épaisseur 
de  ses  murs;  sauf  le  beffroi,  elle  garde  sa  physionomie  d'antan. 

On  peut  remarquer  que  le  croquis  topographique  (copie  de  la  Carte  de  l'Etat- 
Major)  porte  S.-Michel-Montagne,  conformément  à  la  prononciation  locale  que 
pour  un  centre  d'habitations  il  y  aurait  en  effet  inconvénient  à  altérer  sur  une 
carte;  tandis  qu'il  y  est  écrit  Château  de  Montaigne  d'après  les  errements  anciens 
existant  encore;  la  prononciation  n'en  est  pas  moins  la  même,  dans  le  pays,  pour 
l'un  comme  pour  l'autre. 


Pi.ANCHF.  III  (III'  volume). 

Tour  de  Montaigne.  —  Cette  tour,  dont  il  a  été  indiqué,  à  propos  do  la 
planche  II,  la  situation  par  l'apport  au  reste  du  manoir,  semble,  par  ses  assises, 
datei"  du  xni"  siècle;  elle  a  10'"  de  diamètre.  13™  de  haut;  au  ras  du  sol  ses  murs 
sont  épais  de  près  d'un  mètre  cinquante. 

Elle  comprend,  a-t-il  été  dit,  un  rez-de-chaussée  et  deux  étages,  auxquels  ou 
accède  par  un  escalier  en  colimaçon  aménagé  dans  une  tourelle  latérale.  En  outre, 
un  appentis,  surmontant  la  porte  d'entrée  et  son  porche  intérieur,  la  joint  et 
faisant  corps  avec  elle  communique  à  chaque  étage  qui  se  trouve  ainsi  accru 
chacun  d'une  pièce  de  dégagement  mesurant  3"'50  sur  3'". 

Le  rez-de-chaussée  est  aménagé  en  chapelle.  A  l'extérieur,  au-dessus  de  la 
porte  y  donnant  accès,  sont  sculptées  les  armes  de  IMontaigne,  qui  se  retrouvent 
là  un  peu  partout;  l'intérieur  est  de  forme  carrée,  aux  angles  arrondis;  le  plafond. 
de  3""  d'élévation,  est  voûté;  la  pièce,  assez  obscure,  ne  rec^oit  de  jour  que  par  la 
porte  et  deux  soupiraux;  l'autel  est  .placé  dans  une  niche  éclairée  par  la  partie 
supérieure. 

Au  premier  étage,  se  trouve  une  chambre  à  coucher  carrée  de  sept  mètres  de 
côté.  Il  y  a  une  cheminée  et  deux  fenêtres  assez  étroites  auxquelles  on  parvient 
par  quatre  marches  pratiquées  dans  l'épaisseur  des  murs.  Une  ouverture,  ménagée 
dans  le  carrelage  du  sol,  permet  d'avoir  vue  sur  l'autel  de  la  chapelle  et  de  suivre 
<;e  qui  s'y  passe.  La  pièce  de  l'appentis  attenante  à  la  chambre  forme  débarras. 

Quarante-six  marches  conduisent  du  pied  de  la  tour  au  tleuxième  étage  où 
était  la  bibliothèque  de  Montaigne,  dont  il  donne  si  complaisamment  la  descrip- 
tion au  ch.  14  du  liv.  III  des  Essais  (IIP  vol.,  page  1.56).  Cette  bibliothèque  est  de 
forme  circulaire,  de  8™  .50  de  diamètre;  il  y  a  trois  fenêtres  et  pas  de  cheminée;  le 
plafond  a  3""  d'élévation  ;  ses  poutres  et  solives  font  saillies  et  sont  couvertes 
d'inscriptions  latines  et  grec(|ues  tracées  au  pinceau,  nous  en  donnons  ci-après 


ILLUSTRATIONS  DU  PRÉSENT  OUVRAGE.  A.xxxvii 

la  traduction.  La  pièce  contiguë  de  l'appentis  possède  une  cheminée,  sa  fenêtre 
permet  de  voir  tout  ce  qui  se  passe  à  l'intérieur  du  manoir.  C'était  le  cabinet  de 
travail  elle  lieu  de  repos  de  Montaigne;  il  s'était  plu  à  l'ornementer.  On  y  re- 
trouve des  vestiges  de  peintures  murales  parmi  lesquelles  on  distingue  encore  : 
Les  amours  de  Mars  et  de  Vénus,  Cimon  allaité  par  sa  fille,  etc.  ;  c'est  là  enfin 
qu'était  l'inscription  latine  dont  la  traduction  suit,  consacrant  ce  local  aux  Muses, 
annonçant  la  détermination  du  maître  du  logis  de  renoncer  aux  tracas  de  la 
vie  publique  et  fixant  la  date  à  laquelle  il  a  commencé  à  écrire  :  «  L'an  du  Christ 
1571,  à  l'âge  de  'i8  ans,  la  veille  des  calendes  de  Mars,  anniversaire  de  sa  naissance, 
Michel  de  Montaigne,  ennuyé  déjà  depuis  longtemps  de  l'esclavage  de  la  cour 
et  des  charges  publiques,  alors  qu'il  se  sentait  encore  dispos,  est  venu  ici  pour 
s'isoler  et  s'y  reposer  sur  le  sein  des  doctes  vierges,  dans  le  calme  et  la  sécurité; 
il  y  passera  les  jours  qui  lui  restent  à  vivre.  Espérant  que  le  destin  lui  permettra 
de  parfaire  cet  asile,  cette  douce  retraite  qu'il  doit  à  ses  ancêtres,  il  la  consacre 
à  sa  liberté,  à  sa  tranquillité  et  à  ses  loisirs.  « 

Voir  sur  le  contenu  de  cette  bibliothèque  les  notes  :  III,  156,  Liures;  II,  8'2, 
Lisant. 

Inscriptions  de  la  bibliothèque  de  Montaigne.  —  C'est  aussi  Mon- 
taigne qui  a  fait  peindre  les  sentences  qui  se  lisent  sur  les  poutres  et  solives 
du  plafond  de  la  bibliothèque;  on  peut  donc  les  considérer  comme  reflétant, 
mieux  ((ue  tout,  ses  dispositions  d'esprit;  au  moins  à  cette  époque,  où  il  fit 
aménager  ce  local  ;  c'est  à  ce  titre  que  nous  en  donnons  le  relevé  fait  en  1861 
par  MM.  Galy  et  Lapierre,  traduites  par  eux  et  consignées  dans  l'opuscule  in- 
titulé «  Montaigne  chez  lui  ». 

Ces  sentences  étaient  au  nombre  de  56;  quatre  n'ont  pu  être  déchiffrées.  Le 
plus  grand  nombre  est  tiré  de  l'Ecclésiaste,  des  Epîtres  de  S.  Paul,  de  Stobée  et 
de  Sextus  Empiricus;  elles  dénotent  bien  dans  leur  ensemble  le  scepticisme  dont 
Montaigne  était  imbu.  La  plupart  sont  insérées,  soit  textuellement,  soit  en  subs- 
tance, dans  les  Essais,  notamment  dans  l'Apologie  de  Sebond  :  celles  pour  les- 
quelles il  en  est  ainsi,  sont  signalées  ci-dessous  par  une  astérisque;  celles  en 
grec  sont  marquées  de  l'indication  1.  G.,  les  autres  sont  en  latin. 

—  *  Pour  l'homme  l'extrême  science,  c'est  d'approuver  les  choses  telles  qu'elles 
sont;  et,  quant  au  reste,  de  l'envisager  avec  confiance  (d'après  l'Ecclésiaste). 

—  *  La  curiosité  de  connaître  les  choses  a  été  donnée  aux  hommes  pour 
Iléau,  dit  la  Sainte  Écriture  (d'après  l'Ecclésiaste). 

—  Le  souffle  enfle  les  outres  vides,  l'opinion  enfle  les  cerveaux  creux  des 
hommes  (I.  G.,  Stobée,  attribué  à  Socrate). 

—  *  Tout  ce  qui  est  sous  le  ciel,  court- loi  et  fortune  pareilles. 

—  *  Pas  plus  ceci  que  cela;  pourquoi  ceci  plutôt  que  cela?  (Sextus  Empiricus). 

-  Dieu  a  mis  en  nous  l'idée  des  œuvres  grandes  ou  petites  qu'il  a  multipliées 
sur  la  terre. 

-  *  Je  vois  en  efïet  que  tous,  en  cette  vie,  ne  sommes  que  des  simulacres 
ou  des  ombres  légères  [l.  G.,  Stobée). 

—  0  faible  esprit  humain!  ô  cœurs  aveugles!  dans  quelles  ténèbres,  parmi 
quels  dangers  vous  usez,  en  tous  temps,  votre  existence!  (Lucrèce). 

—  Celui  qui  compte  sur  son  élévation,  sera  renversé  par  le  premier  accident 
venu  (I.  N.,  Stobée). 

—  *  Tout,  et  le  ciel  et  la  terre  et  les  eaux,  ne  sont  rien, auprès  de  l'immensité 
do  l'univers  (Lucrèce). 

—  *  Avez-vous  vu  un  homme  qui  se  croit  sage?  Espérez  mieux  de  celui  auquel 
la  raison  fait  défaut  (Proverbes  de  Salomon). 

-  Par  ce  fait  que  tu  ignores  comment  l'àme  est  unie  au  corps,  tu  ne  connais 
pas  l'œuvre  de  Dieu  (d'après  l'Ecclésiaste). 

—  Cela  se  peut  et  aussi  ne  se  peut  pas  (L  G.,  Sextus  Empiricus). 

—  *  Le  beau,  digne  d'admiration  (1.  G.,  d'après  Platon). 

-  *  Homme,  vase  fragile  (l.  G.). 

-  Ne  soyez  point  sages  à  vos  |)ropres  yeux  (S'  Paul  aux  Romains). 

—  *  La  superstition  suit  l'orgueil  et  lui  obéit  comme  à  son  père  (1.  G.,  Stobée, 
attribué  à  Socrate). 


A.xxxvui  NOTICE  SUR  MONTAIGNE. 

—  *  C'est  à  elle  seule  (la  Majesté  divine)  qu'appartient  la  science  et  la  sagesse 
(1.  G.,  Hérodote). 

—  Ni  désirer,  ni  craindre  son  dernier  jour  (Martial). 

—  Homme,  tu  ne  sais  pas  si  ceci  te  convient  plutôt  que  cela,  ou  si  les  deux 
ne  te  sont  pas  nécessaires  (d'après  l'Ecclésiaste). 

—  *  Je  suis  homme  et  crois  être  soumis  à  toutes  les  conditions  de  ma  nature 
humaine  (Térence). 

—  *Ne  soyez  pas  plus  sage  qu'il  n'est  nécessaire,  de  peur  que  vous  n'en  de- 
veniez stupide  (Ecclésiaste). 

—  *  L'homme  qui  croit  savoir,  ne  sait  ce  que  c'est  que  savoir  (S'  Paul  aux 
Coi'inthiens). 

—  *  Celui  qui  pense  être  quelque  chose  n'est  rien,  et  se  leurre  lui-même 
(S'  Paul  aux  Galates). 

—  *  Ne  soyez  pas  plus  sage  qu'il  ne  faut,  soyez  modéré  dans  votre  sagesse 
(S'  Paul  aux  Romains). 

—  Nul  homme  n'a  su,  nul  homme  ne  saura  rien  de  certain  (I.  G.,  Xénophon). 

—  *  La  vie  que  nous  vivons  est-elle  la  vie,  ou  est-ce  ce  que  nous  appelons 
mort  qui  est  la  vie?  (I.  G.,  Stobée). 

—  Tout  ce  que  l'homme  voit  est  de  trop  grande  difficulté  pour  qu'il  puisse 
l'interpréter  (I.  G.,  d'après  l'Ecclésiaste). 

—  *  Il  est  très  aisé  de  parler  à  tort  et  à  travers,  pour  et  contre  (1.  G.,  Iliade). 

—  Le  genre  humain  est  trop  avide  de  fables  (Lucrèce). 

—  Quelle  inanité  en  toutes  choses!  (Perse). 

—  Partout  vanité!  (Ecclésiaste). 

—  *  Garder  mesure,  ne  pas  dévier  de  sa  voie,  suivre  nature  (Lucain). 

—  *  Bourbe  et  cendre,  qu'as-tu  à  te  glorifier?  (Ecclésiaste). 

—  *  Malheur  à  vous  qui  êtes  sages  à  vos  propres  yeux!  (Isaïe). 

—  *  Jouis  agréablement  de  ce  que  tu  as,  que  t'importe  le  reste?  (d'après  l'Ec- 
clésiaste). 

—  *  Il  n'y  a  pas  de  raison  qui  n'ait  sa  contraire  (L  G-,  Sextus  Empiricus). 

—  Notre  esprit  erre  dans  les  ténèbres;  privé  de  lumière,  il  ne  peut  apercevoir 
la  vérité  (Michel  de  l'Hospital). 

-  *  Dieu  a  fait  l'homme  semblable  à  l'ombre;  qui  peut  en  juger  quand  le 
soleil  n'est  plus?  (d'après  l'Ecclésiaste.  —  Pline). 

^  *  Il  n'y  a  de  certain  que  l'incertitude,  et  rien  de  plus  misérable  et  de  plus 
orgueilleux  que  l'homme  (Pline). 

—  De  toutes  les  œuvres  de  Dieu,  rien  n'est  plus  inconnu  à  l'homme  que  la 
trace  du  vent  (d'après  l'Ecclésiaste). 

—  Chacun  s'occupe  à  sa  manière  des  dieux  et  des  hommes  (I.  G.,  Euripide). 

—  L'opinion  que  tu  as  de  ton  importance  te  perdra,  parce  que  tu  te  crois 
quelque  chose  (I.  G.,  Stobée). 

—  *  Les  hommes  sont  tourmentés  par  les  opinions  qu'ils  ont  des  choses,  non 
par  les  choses  mêmes  (I.  G.,  Stobée). 

—  *  L'homme  élève  sa  pensée,  mais  il  reste  mortel  (I.  G.,  Stobée). 

—  A  quoi  bon  charger  son  àme  d'une  ambition  qu'elle  ne  saurait  porter? 
(Horace). 

—  Les  jugements  de  Dieu  sont  des  abimes  profonds  (Psalmiste); 

—  *  Je  n'établis  rien  (I.  G.,  Sextus  Empiricus). 

—  *  Je  ne  comprends  pas,  je  m'arrête,  j'examine  (1.  G.,  Sextus  Empiricus). 

—  *  Je  prends  pour  guide  la  coutume  et  les  sens. 

—  Par  le  raisonnement  alternatif. 

—  .le  ne  puis  comprendre  (I.  G.). 

Planche  IV  (IV'  volume). 

Fac-similé  de  la  page  151  de  l'exemplaire  de  Bordeaux,  donnant 
la  fin  du  ch.  5  du  liv.  II,  pages  660,  1.  37  à  664,  I.  5  du  1"  volume  de  la  présente 
édition.  Cette  page  se  compose  de  deux  éléments  :  l'un,  typographique,  est  le 


ILLUSTRATIONS  DU  PRÉSENT  OUVRAGE.  A.xxxix 

texte  de  l'édition  de  1588,  dont  le  livre  est  un  exemplaire;  l'autre,  manuscrit, 
est  de  la  main  même  de  Montaigne. 

Ci  la  transcription  de  ces  inscriptions  manuscrites  avec  leur  orthographe 
et  leur  ponctuation  : 

Premier  renvoi  figurant  dans  la  marge  de  droite  et  prenant  place  après  le 
mot  asseurance  :  Maior  animus  ot  natura  ei^at  ao  maiori  fovtunœ  asauctus  quam 
vt  rem  osse  sohyil  et  summilieii^e  se  in- humilUatemr'eausam  dicenlium  (citation  de 
Tite-Live  écrite  puis  rayée  par  l'auteur,  elle  n'a  été  reproduite  dans  aucune  édi- 
tion) :  il  auoil  le  ceur  trop  gros  de  nature  et  acoslume  a  trop  haute  fortune  dit 
Tite  Liue  pour  qu'il  sceu  estre  criminel  et  se  desmellre  a  la  bassesse  de  deffan- 
dre  son  emme  innocence  (cette  addition  est  la  traduction  de  la  citation  raturée 
qui  précède;  elle  figure  dans  l'édition  de  1595). 

Renvoi  figurant  dans  la  marge  de  gauche  et  prenant  place  après  le  mot 
vérité  :  El  celuy  qui  les  peut  souffrir  cache  la  vérité  et  celuy  qui  ne  les  peut 
souffrir  (addition  introduite  dans  l'édition  de  1595). 

Première  rature  dans  le  texte  :  est  appuie  sur,  substitué  à  vient  ao  (variante 
qui  n'a  pas  été  insérée  dans  l'édition  de  1595). 

Deuxième  renvoi  figurant  dans  la  marge  de  droite  et  prenant  place  après 
le  mot  douleurs  :  Etiam  innocenter  cogit  mentiri  dolor.  Dou  il  auient  que  celluy 
que  le  iuge  a  faict  geiner  pour  ne  le  faire  mourir  innocent  il  le  face  mourir  et 
innocent  et  geiné  (addition  qui  figure  dans  l'édition  de  1595). 

Deuxième  rature  dans  le  texte  :  confessions,  substitué  à  accusations  (variante 
qui  figure  dans  l'édition  de  1595). 

Troisième  rature  dans  le  texte  :  loge,  substitué  à  compte  (variante  qui  figure 
dans  l'édition  de  1595). 

Intercalation  dans  le  texte,  après  le  mot  c'est,  dict  on  (addition  introduite 
dans  l'édition  de  1595). 

Addition  inscrite  dans  le  bas  de  la  page  et  faisant  suite  au  mot  inuenter. 
Bien  inhumainement  pourtant  et  bien  inutilement  a  mon  auis.  Plusieurs  nations 
moins  barbares  en  cela  que  la  grecque  et  la  romaine  qui  les  en  apellent  estiment 
horrible  et  cruel  de  tourmanter  et  desrompre  un  home  de  la  faute  du  quel  uous 
estes  encores  en  double.  Et  que  pour  ne  le  tuer  sans  raison  vous  luy  faciès  pis 
que  le  liwr.  Information  plus  pénible  que  le  supplice.  Que  peut-il  mais  de  uostre 
ignorance  pour  estre  ainsi  traicto.  Estes  vous  pas  tustes-iniustes  qui  pour  ne  le 
tuer  sans  ï^mson  occasion  luy  f aides  pis  que  le  tuer.  Qu'il  soit  ainsin;  voies  com- 
bien de  fois  il  aime  mieux  mourir  sans  raison  que  de  passer  par  cette  informa- 
lion  plus  pénible  que  le  supplice  :  et  qui  souuent  par  son  aspreté  deuance  le 
supplice  et  la  oomdomnaiion  l'exécute.  le  ne  scai  dou  ie  tiens  ce  conte  mais  il 
raporte  exactement  la  conscience  de  nostre  iustice.  Vne  feme  de  village  accusoit 
deuant  un  gênerai  d'armée  grand  iusticier  un  soldat  pour  auoir  arrache  a  ses 
petits  enfans  ce  peu  de  la  bouillie  qui  luy  resloit  a  les  sustanter  cette  armée 
aiant  rauage  tous  les  villages  a  l'enuiron.  De  preuue  il  n'y  en  auoit  point  le  iugo 
gênerai  après  auoir  somme  la  feme  de  regarder  bien  a  ce  quelle  disait  d'au- 
tant qu'elle  serait  coupable  de  l'accusation  si  elle  mantoit  et  elle  persistant 
il  fit  ouurir  le  vantre  au  soldat  pour  s'esclaircir  de  la  vérité  du  faict.  Et  la  feme 
se  trouua  auoir  raison  Condemnation  instructiue  (addition  introduite  dans  l'édi- 
tion de  1595). 

Remarquer  la  mutilation  que,  du  fait  du  relieur,  ont  subie  la  plupart  des  mots 
terminant  les  lignes  manuscrites  de  la  marge  de  droite. 

Fleurons  divers. 

QUE  SÇAY  IE?  (I,  verso  du  faux-titre). 

C'est  la  devise  de  Montaigne  (II,  276)  ;  elle  répond  bien  au  doute  universel 
qui  est  le  fond  de  sa  philosophie  et  aux  réflexions  que  lui  suggéraient  ses 
lectures  habituelles.  C'est  la  même  pensée  qui  lui  inspirait  cette  médaille  qu'il 
faisait  frapper  à  son  nom,  portant  en  exergue  iniyoi  «  (je  doute)  »  (N.  II,  276, 
Que  sçay-ie),  qui,  sous  une  autre  forme,  exprime  la  même  idée  laquelle,  de  fait, 


A.XL  NOTICE  SUR  MONTAIGNE. 

est  celle  de  tout  homme  qui  sans  le  secours  de  la  foi,  s'adressant  uniquement 
à  la  raison,  médite  sur  ces  questions  insolubles  relatives  à  la  divinité,  à  l'im- 
mortalité de  l'àme,  la  vie  future,  etc. 

FAY  TON  FAICT  ET  TE  COGNOY  (II,  verso  de  la  planche  II). 

C'est  la  règle  de  conduite  des  sages  de  l'antiquité  et  de  toutes  les  époques  : 
elle  rentrait  d'une  façon  absolue  dans  les  idées  de  notre  philosophe  dont  l'àme 
était  foncièrement  iionnête  et  qui  de  plus  s'étudiait  constamment. 

CACHE  TA  VIE  (III,  verso,  du  faux-titre). 

Il  semble  que  cette  sentence  d'Épicure  ou  de  quelqu'un  des  siens  soit  mal 
venue  à  être  appliquée  à  l'auteur  des  Essais  qui  dit  son  «  livre  consubstantiel 
à  son  autheur  •  (II,  524),  ajoutant  que  «  sa  fin  principale  et  perfection  c'est  d'oslre 
exactement  mien  •  (III,  241);  et  cependant  nul  moins  que  lui  n'a  tenu  ce  qu'il 
promet.  Il  donne  bien  sur  lui-même  quelques  détails  physiques,  cite  quelques- 
uns  de  ses  penchants,  mais,  sauf  quelques  mots  sur  son  enfance  et  la  mention 
de  son  élection  à  la  mairie  de  Bordeaux,  de  son  obtention  de  l'ordre  de  S'-Michel 
et  de  la  qualité  de  citoyen  romain,  il  est  absolument  muet  sur  ses  faits  et 
gestes.  En  dehors  de  quelques  allusions  sur  .sa  vie  de  famille,  nous  n'en  connais- 
sons rien,  rien  de  ce  qu'il  a  pu  faire  pendant  qu'il  était  conseiller  au  parlement: 
il  semble  avoir  été  aux  armées,  rien  ne  nous  révèle  à  quels  moments  et  dans 
quelles  conditions;  les  relations  de  ses  contemporains  le  présentent  comme 
ayant  été  employé  à  diverses  reprises  à  des  missions  politiques,  il  n'en  dit  mot 
et  là  encore  le  doute  subsiste.  Pour  savoir  par  quoi  ont  été  marquées  ses  quatre 
années  de  mairie,  sauf  une  circonstance,  il  faut  avoir  recours  aux  archives  de 
l'époque;  les  seuls  l'enseignements  que  l'on  ait  sur  sa  vie  publique,  sa  vie  intime 
et  les  siens,  à  part  de  rares  détails  bien  insignifiants,  c'est  ailleurs  que  dans 
son  livre  qu'il  faut  les  rechercher;  et,  pour  quelqu'un  qui  répète  en  plusieurs 
endroits  qu'il  y  est  tout  entier,  il  est  difficile  de  dire  moins  de  soi-mênje  qu'il 
ne  fait. 

RIEN  TROP  (III,  verso  de  la  dernière  page). 

Cette  maxime  (citée  I,  292)  résume  le  livre  et  aussi  la  vie  de  Montaigne,  telle 
qu'elle  ressort  de  son  aveu  et  de  ce  que  nous  en  savons;  il  semble,  de  parti 
pris,  ne  s'être  passionné  pour  rien,  afin  de  s'assurer  une  existence  tranquille 
autant  que  le  permettaient,  dans  les  temps  troublés  où  il  vivait,  la  lutte  des 
partis  et  ses  propres  sympathies  qui,  avant  tout,  allaient  à  lui-même;  aussi 
cette  devise  est-elle  tout  indiquée  comme  conclusion  des  Es.sais. 

VIRES  ACQUIRIT  EUNDO  (IV,  verso  de  la  planche  IV). 

«  Plus  il  va,  plus  ses  forces  acquièrent  de  développement.  •  Est-il  une  épi- 
graphe qui  soit  d'application  plus  exacte  que  celle-ci,  inscrite  par  Montaigne 
en  tète  de  l'exemplaire  de  Bordeaux  et  marquant  les  accroissements  successifs 
de  chaque  édition  des  Essais,  pour  qualifier  également  le  développement  cons- 
tant qu'à  la  suite  de  l'ouvrage  lui-même,  ont  pris  les  dissertations,  interpréta- 
tions et  notes  de  toute  nature  auxquelles  il  a  donné  lieu? 


FASCICULE  B 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS 
(relevé  des  sommaires  intercalés  dans  la  traduction) 


ESSAIS   DE  MONTAIGNE.  —  T.   IV. 


Dès  i59o,  dans  une  édition  publiée  à  Lyon,  et  jusqu'au  commen- 
cement du  siècle  dernier,  la  plupart  des  éditions  des  Essais  ont  été 
pourvues  de  «  sommaires  »  accompagnant  le  texte  et  insérés  en 
marge.  En  l'état,  outre  qu'ils  modifiaient  légèrement  la  contexture 
apparente  de  l'ouvrage,  ils  se  trouvaient  forcément  réduits  à  quel- 
ques mots  et  par  suite  manquaient  parfois  de  clarté;  c'est  pour- 
quoi, depuis,  ils  ont  été  généralement  supprimés  malgré  leur  in- 
contestable utilité,  car  ils  aident  fort  à  s'y  reconnaître. 

Pour  bénéficier  des  avantages  qu'ils  présentent  et  parer  aux  in- 
convénients, Amaury  Duval,  dans  son  édition  de  1820-22,  a  établi  ses 
sommaires  par  chapitre  et  les  a  placés  en  tête  de  chacun  d'eux  ;  il 
a  pu,  notamment,  leur  donner  de  la  sorte  plus  de  précision  et  une 
liaison  qui  leur  avait  manqué  jusqu'alors.  Mais  la  lecture  de  Mon- 
taigne ne  se  fait  guère  par  chapitre  ;  on  l'ouvre  au  hasard  et  là 
où  le  livre  s'est  ouvçrt,  on  lit. 

Ces  considérations  nous  ont  amené  à  intercaler  ces  sommaires 
dans  la  traduction,  ce  qui  a  permis  de  les  libeller  d'une  façon  plus 
intelligible,  tout  en  respectant  la  physionomie  du  texte  oi'iginal  ;  et 
simultanément,  à  les  réunir  à  part  pour  l'ouvrage  entier,  dont  ils 
donnent  ainsi  une  idée  d'ensemble  que  l'on  ne  peut  se  former  en  le 
lisant,  en  raison  des  nombreuses  digressions  et  intercalations  qui 
s'y  trouvent. 

Les  sommaires  de  la  présente  édition  sont,  pour  la  plupart,  re- 
produits, le  plus  souvent  textuellement,  d'Amaury  Duval  ;  il  eût  été, 
en  effet,  difficile  de  faire  mieux. 


Nota.  —  Les  nombres  en  chiffres  romains,  sans  autre  indication, 
marquent  le  volume;  ceux  en  chiffres  arabes  indiquent  la  page. 


ESSAIS  DK  MONTAIGNE. 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS. 

(relevé  des  sommaires  intercalés  dans  la  traduction). 


LIVRE  PREMIER. 

CHAPITRE  I. 

Divers  moyens  mènent  à  même  fin,  I,  17.  —  Par  une  extrême  soumis- 
sion on  peut  désarmer  la  colère;  parfois  on  parvient  au  même  but  en  inspirant 
l'estime  et  l'admiration  (le  prince  Edouard,  ScANOERnERO,  Conrad-  III,  Pélopidas, 
Épaminondas  et  les  Thébains,  Pompée),  17.  —  Mais  quelquefois  aussi  un  courage 
obstiné  irrite  le  vainqueur  et  le  rend  implacable  (Denys  l'Ancien  et  Phyton,  Sylla, 
Alexandre  le  Grand  à  l'égard  de  Bétis  et  des  Thébains),  19. 

CHAPITRE  IL 

De  la  tristesse,  I,  23.  —  La  tristesse  est  une  disposition  d'esprit  des  plus 
déplaisantes,  23.  —  Effet  des  grandes  douleurs  en  diverses  circonstances;  tout  sen- 
timent excessif  ne  se  peut  exprimer  (Psamménit  et  Cambyse,  le  cardinal  Charles  de 
Lorraine,  le  sacrifice  d'IPHioÉNiE,  Niobé,  le  seigneur  de  Raïsciac),  23.  —  Saisissement 
causé  par  la  joie,  la  honte,  etc.  (Sophocle,  Denys  l'Ancien,  Thalna,  Léon  X,  Dio- 
DORE  le  dialecticien),  25. 

CHAPITRE  III. 

Nous  prolongeons  nos  affections  et  nos  haines  au  delà  de  notre 
propre  durée,  I,  29.  —  L'homme  se  préoccupe  trop  de  l'avenir,  29.  —  La  sa- 
gesse voudrait  qu'on,  s'occupât  davantage  du  temps  présent  et  qu'on  s'appliquât 
à  se  bien  connaître  (Platon,  Épicure),  29.  —  C'(5tait  une  loi  très  sage  que  celle  qui 
ordonnait  d'e.xaminer  la  conduite  des  rois  après  leur  mort,  29.  —  Nous  leur  de- 
vons obéissance,  mais  l'estime  et  l'affection  ne  sont  dus  qu'à  leurs  vertus  (Néron, 
Lacédémone),  31.  —  Réflexions  sur  ce  mot  de  Solon  que  nul,  avant  sa  mort,  ne 
peut  être  dit  heureux  (Aristote),  33.  —  Honneurs  rendus  et  influence  prêtée  à 
certains  après  leur  mort  (Duguesclin,  Barthélémy  d'Alviane,  Nicias,  Agésilas, 
Edouard  I,  roi  d'Angleterre,  Jean  Ghiska,  Tribus  indiennes),  33.  —  Fermeté  de 
Bayard  sur  le  point  d'expirer,  35.  —  Particularités  afférentes  à  l'empereur  Maxi- 
MiLiEN  età  Cyrus,  35.  —  Nos  funérailles  doivent  être  en  rapport  avec  notre  situation, 
aussi  éloignées  d'une  pompe  exagérée  que  de  la  mesquinerie  (Marcus  Lepidus, 
Lycon,  Saint  Augustin,  Socrate),  37.  —  Cruelle  et  dangereuse  superstition  des 
Athéniens  sur  la  sépulture  à  donner  aux  morts  (combat  près  des  Iles  Argineu- 
SEs  et  DioMÉDON,  combat  près  de  l'ile  de  Naxos  et  Ch.\brias),  39. 


B.6  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


CHAPITRE  IV, 

L'âme  exerce  ses  passions  sur  des  objets  auxquels  elle  s'attaque 
sans  raison  quand  ceux,  cause  de  son  délire,  échappent  à  son 
action,  I,  41.  —  Il  faut  à  l'àme,  en  proie  à  une  passion,  des  objets  sur  lesquels 
elle  l'exerce  à  tort  ou  à  raison,  41.  —  Souvent  même,  en  pareil  cas,  nous  nous  en 
prenons  à  des  objets  inanimés  (Xerxès  et  le  mont  Athos,  Cyuls  et  le  Gyndde, 
Caligula;  folie  d'un  Roi  voulant  se  venger  de  Dieu  lui-même,  d'AuGUSTE  contre 
Neptune  et  lors  du  désastre  de  Varus,  des  Thraces  contre  le  ciel  en  temps 
d'orage),  43. 

CHAPITRE  V. 

Le  commandant  d'une  place  assiégée  doit-il  sortir  de  sa  place  pour 
parlementer,  I,  45.  —  Jadis  on  réprouvait  l'emploi  de  la  ruse  contre  un  en- 
nemi (Lucius  Marcius  et  Persée;  les  Romains  envers  Pyrrhus  et  les  Phalisques,  les 
Achkexs,  les  peuples  de  Ternate,  Florence),  45.  —  Aujourd'hui,  nous  tenons 
comme  licite  tout  ce  qui  peut  conduire  au  succès;  aussi  est-il  de  principe  que  le 
gouverneur  d'une  place  n'en  doit  pas  sortir  pour  parlementer  (les  seigneurs  de 
MoNTMORD  et  de  I'Assigny  et  le  comte  de  Nassau,  Guy  de  Raigon  et  le  seigneur 
de  l'EcuT,  EuMÈNE  et  Antigone),  47.  —  Exemple  d'un  cas  où  cependant  le  gou- 
verneur d'une  place  s'est  bien  trouvé  de  se  fier  à  son  adversaire  (Henry  de  Vaux  et 
Barthélémy  de  Bonnes),  49. 

CHAPITRE  VI. 

Le  temps  durant  lequel  on  parlemente  est  un  moment  dangereux, 

I,'  51.  —  La  parole  des  gens  de  guerre,  même  sans  que  cela  dépende  d'eux,  est 
toujours  sujette  à  caution  (jEmilius  Reggius  et  la  ville  de  Phocée,  Cléomène  et  les 
Argiens),  51.  —  C'est  souvent  pendant  les  conférences  en  vue  de  la  capitulation 
d'une  place,  que  l'ennemi  s'en  rend  maître  (Casilinum,  Capoue,  Yvoy,  Gènes,  Ligny 
en  Barrois),  53.  —  La  victoire  devrait  toujours  être  loyalement  disputée  (Principe 
italien,  Chrysippe,  Alexandre  le  Grand  et  Darius),  53. 

CHAPITRE  VII. 

Nos  actions .  sont   à  apprécier  d'après  nos  intentions,   I,  55.  —  Il 

n'est  pas  toujours  vrai  que  la  mort  nous  libère  de  toutes  nos  obligations 
(Henry  VII  d'Angleterre  et  le  duc  de  Suffoi.k,  les  comtes  d'Egmont  et  de  Horn, 
l'architecte  de  Rhampsinet,  roi  d'Egypte),  55.  —  Il  est  trop  tard  de  ne  réparer  ses 
torts  qu'après  sa  mort,  et  odieux  de  remettre  à  ce  moment  de  se  venger,  57. 

CHAPITRE  VIII. 

De  l'oisiveté,  I,  27.  —  L'esprit  est  comme  une  terre  qu'il  faut  sans  cesse 
cultiver  et  ensemencer;  l'oisiveté  le  rend  ou  stérile  ou  fantasque,  57. 

CHAPITRE  IX. 

Des  menteurs,  I,  59.  —  Montaigne  déclare  qu'il  manque  de  mémoire,  ce  qui 
n'est  pas  un  aussi  grand  désavantage  qu'on  le  croit  communément.  Cela  a  l'in- 
convénient de  le  faire  parfois  taxer  de  manque  de  bonne  volonté,  mais  lui  pro- 
cure l'avantage  de  lui  interdire  l'ambition,  de  lui  faire  juger  des  choses  par  lui- 
même,  de  le  porter  à  parler  peu  et  le  dispose  à  l'oubli  des  offenses  (Darius),  59. 
—  Un  menteur  doit  avoir  bonne  mémoire,  63.  —  Le  mensonge  est  odieux  et 
expose  à  bien  des  dangers;  il  est,  avec  rentêtement,  à  combattre  dès  le  début 
chez  l'enfant,  65.  —  Mésaventures  de  deux  ambassadeurs  (François  I"  et  Francis- 
que DE  Taverna,  un  ambassadeur  du  pape  Jules  II),  67. 


SOXfMAIRE  DES  ESSAIS.       MV.  I,  Cil.  X.  —  VOL.  I.  B.7 

CHAPITRE  X. 

De  ceux  prompts  à  parler  et  de  ceux  auxquels  un  certain  temps 
est  nécessaire  pour  s'y  préparer,  I,  69.  —  Certaines  gens  ayant  à  parlei- 
en  public,  ont  besoin  de  préparer  ce  qu'ils  ont  à  dire;  d'autres  n'ont  pas  besoin 
de  préparation.  La  première  de  ces  qualités  est  le  propre  des  prédicateurs,  la  se- 
conde convient  au.x  avocats  (le  chancelier  Poyet  et  le  cardinal  dl  Bellay),  69.  — 
Il  en  est  chez  lesquels  la  contradiction  stimule  le  talent  oratoire  (Severus  Cas- 
sius),  71.  —  Il  y  a  des  personnes  qui,  sans  préparation,  parlent  mieux  qu'elles 
n'écrivent,  quelque  peine  et  travail  qu'elles  apportent  à  rédiger,  71. 

CHAPITRE  XL 

Des  pronostics,  I,  73.  —  Les  anciens  oracles  avaient  déjà  perdu  tout  crédit 
avant  l'établissement  de  la  religion  chrétienne,  73.  —  On  croit  encore  cependant 
à  certains  pronostics.  Origine  de  l'art  de  la  divination  chez  les  Toscans,  art  vain 
et  dangereux  qui  ne  rencontre  la  vérité  que  par  l'effet  du  hasard  (le  marquis  de 
Saluces,  citation  d'IIoRACE,  Dl\ooras  surnommé  l'athée,  Joachlm  abbé  de  la  Calabre, 
l'empereur  Léon),  73.  —  Ce  que  parait  avoir  été  le  démon  familier  de  Socrate,  79. 

CHAPITRE  XII. 

De  la  constance,  I,  79.  —  En  quoi  consistent  la  résolution  et  la  constance, 
79.  —  11  est  parfois  licite  de  céder  devant  l'ennemi,  quand  c'est  pour  le  mieux 
combattre  (les  Turcs,  Socrate  et  Lâchés,  les  Lacédémoniess  à  Platée,  les  Scythes  et 
Darius),  81.  —  Chercher  à  se  soustraire  à  l'effet  du  canon,  quand  on  est  à  décou- 
vert, est  bien  inutile  par  suite  de  la  soudaineté  du  coup  (le  marquis  du  Guast, 
Laurent.de  Médicis),  81.  —  Les  stoïciens  ne  dénient  pas  au  sage  d'être,  sur  le  pre- 
mier moment,  troublé  par  un  choc  inattendu;  mais  sa  conduite  ne  doit  pas  en  être 
influencée,  83. 

CHAPITRE  XIII. 

Cérémonial  des  entrevues  des  rois,  I,  85.  —  Attendre  chez  soi  un  grand 
personnage  dont  la  visite  est  annoncée,  est  plus  régulier  que  d'aller  au  devant  de 
lui,  ce  qui  expose  à  le  manquer  (Marguerite  de  Navarre),  85.  —  Dans  les  entrevues 
de  souverains,  on  fait  en  sorte  que  celui  qui  a  la  prééminence,  se  trouve  le  premier 
au  rendez-vous  (Clément  VII  et  François  I";  Clément  VII  et  Charles-Quint),  85.  —  Il 
est  toujours  utile  de  connaître  les  formes  de  la  civilité,  mais  il  faut  se  garder  de 
s'en  rendre  esclave  et  de  les  exagérer,  87. 

CIUPITRE  XIV. 

On  est  punissable  quand  on  s'opiniâtre  à  défendre  une  place  au 
delà  de  ce  qui  est  raisonnable,  I,  87.  —  La  vaillance  a  ses  limites;  et  qui 
s'obstine  à  défendre  une  place  trop  faible,  est  punissable  (le  connétable  de  Mont- 
morency à  Pavie  et  au  château  de  Villane,  le  capitaine  Martin  du  Bellay  à  Turin), 
87.  —  L'appréciation  du  degré  de  résistance  et  de  faiblesse  d'une  place  est  diffi- 
cile, et  l'assiégeant  qui  s'en  rend  maître  est  souvent  disposé  à  trouver  que  la 
défense  a  été  trop  prolongée,  89. 

CHAPITRE  XV. 

Punition  à  infliger  aux  lâches,  1, 89.  —  La  lâcheté  ne  devrait  pas  être  punie 
de  mort  chez  un  soldat,  à  moins  qu'elle  ne  soit  l'effet  de  mauvais  desseins  (\c 
seigneur  deVervins,  89).  —  Les  peuples  anciens  et  modernes  ont  souvent  varié  dans 
la  manière  de  sévir  contre  la  poltronnerie  (Charondas,  l'empereur  Julien,  les  Ro- 
mains après  la  défaite  de  Cannes,  le  seigneur  de  Franget,  etc.),  91. 


B.8  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

CHAPITRE  XVI. 

Façon  de  faire  de  quelques  ambassadeurs,  1,93.  —  Los  hommes  aiment 
à  faire  parade  de  toute  science  autre  que  celle  objet  de  leur  spécialité  (Périandre, 
CÉSAR,  Denys  l'Ancien),  93.  —  Pour  juger  de  la  valeur  d'un  chroniqueur,  il  im- 
porte de  connaître  sa  profession,  95.  —  Les  ambassadeurs  d'un  prince  ne  doivent 
lui  cacher  quoi  que  ce  soit  (Ambassadeurs  de  François  I"  auprès  de  Charles-Quint), 
95.  — Rien  de  la  part  des  subordonnés  n'est  apprécié  par  un  supérieur  comme 
leur  obéissance  pure  et  simple  (Publius  Crassus),  97.  —  Une  certaine  latitude  est 
cependant  à  laisser  aux  ambassadeurs  (fâcheux  errements  des  Perses),  97. 

CHAPITRE  XVII. 

De  la  peur,  I,  99.  —  La  peur  est  la  plus  étrange  de  toutes  les  passions;  ses 
effets  sur  le  vulgaire,  99.  —  Les  soldats  eux-mêmes  en  sont  atteints  (un  enseigne  à 
l'attaque  de  S.-Paul,  lors  du  siège  de  Rome  par  M.  de  Bourbon,  épisode  de  la  guerre 
de  Germanicus  contre  les  Allemands),  99.  —  Elle  a  souvent  des  effets  contraires,  elle 
nous  immobilise  ou  nous  donne  des  ailes  (l'empereur  Théophile),  101.  —  Quelque- 
fois elle  détermine  des  actions  d'éclat  (les  Romains  à  la  bataille  de  laTRÉBiE),  101. 

—  Elle  domine  toutes  les  autres  passions  et,  plus  qu'aucune  autre,  nous  démora- 
lise (les  compagnons  de  Pompée),  101.  —  Terreurs  paniques  (Carthage),  103. 

CHAPITRE  XVIII. 

Ce  n'est  qu'après  la  mort,  qu'on  peut  apprécier  si,  durant  la  vie, 
on  a  été  heureux  ou  malheureux,  I,  103.  —  Par  suite  des  vicissitudes  con- 
tinuelles de  la  fortune,  ce  n'est  qu'après  notre  mort  qu'on  peut  dire  si  nous  avons 
été  heureux  ou  non;  incertitude  et  instabilité  des  choses  humaines  (Crésus  et 
Cyrus,  Agésilas,  un  successeur  d'ALEXANDRE  le  Grand,  Denys  le  Jeune  à  Corinthe, 
Pompée  en  Egypte,  Ludovic  Sforza,  Marie  Stuart),  103.  —  Une  belle  mort  absout 
parfois  une  vie  coupable  ;  elle  finit  dignement  une  vie  innocente  et  pure  (Scipion, 
Épaminondas),  105. 

CHAPITRE  XIX. 

Philosopher,  c'est  apprendre  à  mourir,  1, 107.  —  Ce  que  c'est  que  philo- 
sopher, 107.  —  Le  plaisir  est  le  seul  but  delà  vie,  mais  on  ne  se  le  procure  surtout 
que  par  la  vertu;  la  difficulté  ajoute  aux  satisfactions  qu'elle  nous  cause,  109.  — 
Le  mépris  de  la  mort  est  l'un  des  plus  grands  bienfaits  que  nous  lui  devons,  111. 

—  La  mort  est  le  but  essentiel  de  la  vie;  le  mot  en  était  désagréable  aux  Romains, 
1 13.  —  La  mort  nous  surprend  inopinément  de  bien  des  façons  (un  duc  de  Bre- 
tagne, Henry  II  roi  de  France,  Philippe  fils  de  Louis  le  Gros,  ^Emilius  Lepidus,  Aufi- 
dius,  Cornélius  Gallus,  Tigellinus,  Ludovic  de  Gonzague,  Speusippe,  Babius,  Caius 
JuLius,  le  capitaine  S. -Martin  frère  de  Montaigne),  115.  —  Il  faut  toujours  être 
préparé  à  la  mort,  et  l'idée  en  être  toujours  présente  à  notre  esprit  (coutume  des 
Egyptiens,  Paul  Emile  et  Persée,  raison  d'être  des  cimetières  autour  des  temples 
au  milieu  des  villes,  combats  de  gladiateurs  chez  les  Romains  pendant  les  festins), 
1 15.  —  Intérêt  que  nous  avons  à  y  penser  fréquemment.-  Le  mépris  de  la  vie  est 
le  fondement  le  plus  assuré  de  la  religion,  117.  —  La  mort  fait  partie  de  l'ordre 
universel  des  choses  ;  la  vie  n'est  par  elle-même  ni  un  bien  ni  un  mal  (Socrate, 
les  éphémères),  127.  —  L'immortalité  n'est  pas  désirable.  Pourquoi  la  mort  est  mê- 
lée d'amertume  (Chikon,  Thalès),  131.  —  Pourquoi  elle  nous  paraît  autre  à  la  guerre 
que  dans  nos  foyers  ;  pourquoi  elle  est  accueiUie  avec  plus  de  calme  par  les  gens 
du  commun  que  par  les  personnes  des  classes  plus  élevées,  133. 

CHAPITRE  XX. 

De  la  force  de  l'imagination,  I,  133.  —  Effets  de  l'imagination  (Gallus 
Vinius),  133.  —  Des  émotions  violentes  peuvent  occasionner  des  modifications 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       IJV.  I,  CH.  XX.  —  VOL.  I.  B.9 

radicales  dans  notre  organisme  (Cippus,  le  ku-s  de  Crésus,  Antiochus,  Lucics  Cos- 
siTius,  Ii'His,  Marie  Germain),  135.  -r  L'imagination  peut  produire  des  extases,  des 
visions,  des  dél'aillances  considérées  jadis  comme  le  fait  d'enchantements  (le  roi 
Dac.obert,  s.  François,  exemples  rapportés  par  Celse,  par  S.  Augustin,  plaisante 
ANECDOTE  dont  Montaigne  a  été  l'auteur,  Amasis  roi  d'Egypte  et  Laodice,  la  bru  de 
Pythagore),  137  —  Comment  les  mariés  doivent  se  comporter  dans  la  couche 
nuptiale,  143.  —  Nos  organes  sont  sujets  à  aller  à  rencontre  de  notre  volonté 
qui,  elle-même,  échappe  parfois  à  toute  direction,  143.  —  Du  seul  fait  de  l'imagi- 
nation, les  maladies  peuvent  se  guérir  ou  s'aggraver;  exemples  à  l'appui,  147. — 
Les  bêtes,  elles  aussi,  en  ressentent  les  effets,  149.  —  Notre  imagination  est  sus- 
ceptible d'agir  même  sur  d'autres  que  sur  nous  (Femmes  de  Scythie,  impressions 
ressenties  par  les  enfants  dans  le  sein  de  leur  mère,  fascination  exercée  sur  des 
animaux),  149.  —  Jlontaigne  cite  les  faits  qui  arrivent  à  sa  connaissance,  sans 
se  préoccuper  de  leur  exactitude;  il  se  borne  à  en  prendre  texte  pour  ses  ré- 
flexions. L'impossibilité  de  contrôler  ceux  qu'ils  consignent  fait  que  le  rôle  de 
chroniqueur  ne  convient  guère  ni  à  un  philosophe,  ni  à  un  théologien;  motifs 
pour  lesquels  l'auteur  s'est  refusé  à  écrire  la  chronique  de  son  temps,  151. 

CHAPITRE  XXI. 

Ce  qui  est  profit  pour  l'un,  est  dommage  pour  l'autre,  I,  155.  —  Dans 
toute  profession,  on  ne  fait  bien  ses  affaires  qu'aux  dépens  d'autrui  (Demade  l'A- 
thénien), 155. 

CHAPITRE  XXII. 

Des  coutumes  et  de  la  circonspection  à  apporter  dans  les  modifi- 
cations à  faire  subir  aux  lois  en  vigueur,  I,  155.  —  Force  de  l'habitude; 
elle  s'exerce  même  malgré  des  intermittences  de  certaine  durée  (Mithrydate, 
alimentation  de  certains  peuples,  endurcissement  de  I'athlète,  habitants  des  cata- 
ractes, MUSIQUE  céleste,  VÊTEMENTS  parfumés,  bruit  de  cloches),  155.  —  Les  vices 
prennent  pied  chez  l'enfant  dès  le  bas  âge  et  devraient  être  combattus  dès  ce  mo- 
ment, 159.  —  Habileté  à  laquelle  on  peut  atteindre  par  l'habitude,  161.  —  Puis- 
sance de  la  coutume  sur  les  opinions;  elle  est  cause  de  la  diversité  des  institutions 
humaines,  16L  —  Coutumes  bizarres  de  certains  peuples,  161.  —  Les  lois  de  la 
conscience  dérivent  plus  des  coutumes  que  de  la  nature;  notre  attachement  au 
gouvernement,  au  pays,  est  notamment  un  fait  d'habitude,  169.  —  L'habitude  est 
aussi  la  source  de  grands  abus,  entre  autres  la  vénalité  des  charges  de  la  justice, 
son  mode  d'administration;  et,  en  fait  de  choses  de  moindre  importance,  le  gro- 
tesque de  certains  vêtements  de  notre  époque;  difficulté  d'aller  à  fencontre,  173. 
—  Il  n'en  faut  pas  moins  se  conformer  aux  usages  et,  sauf  le  cas  d'absolue  néces- 
sité, se  garder  de  toute  innovation  dans  les  institutions  publiques.  Ébranlement 
causé  en  France  par  l'introduction  de  la  Réforme  (Charondas,  Lycurgue,  I'éphore 
et  la  CYTHARE,  la  Réforme  et  la  Ligue,  le  Sénat  romain,  I'oracle  de  Delphes),  177.  — 
L'obéissance  aux  lois  est  un  principe  de  la  religion  chrétienne;  quanta  ses  pro- 
pres dogmes,  ils  sont  hors  de  toute  discussion,  181.  —  Cas  où  l'absolue  nécessité 
impose  des  modifications  à  l'état,  de  choses  existant  (Octavius,  Caton,  Agésilas, 
Alexandre  le  Grand,  les  Lacédémoniens  avec  Lysandre  et  Périclès,  Philopoemen), 
185. 

CHAPITRE  XXXIII. 

Une  même  ligne  de  conduite  peut  aboutir  à  des  résultats  dissem- 
blables, I,  187.  —  La  clémence  désarme  souvent  des  conjurés  (le  duc  de  Guise 
à  Rouen,  Auguste  envers  Cinna),  187.  —  La  médecine  n'est  pas  le  seul  art  où  la 
fortune  ait  une  large  part  dans  le  succès  ;  les  beaux-arts,  les  lettres,  les  entreprises 
militaires  sont  dans  le  même  cas,  193.  —  Parti  à  prendre  lorsque  ce  qui  peut 
s'ensuivre  présente  de  l'incertitude,  195.  —  Il  n'est  pas  avantageux  de  s'attacher  à 
prévenir  les  conjurations  par  la  rigueur  (Dion  et  Calypsus,  Alexandre  le  Grand  et 
Philippe  son  médecin),  195.  —  Triste  état  d'un  prince  enclin  à  la  défiance,  197.  — 


BAO  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

La  hardiesse  permet  seule  de  n^aliser  de  grandes  choses  (Scipion  et  Syimiax, 
Louis XI,  Césak),  197. —  Conduite  à  tenir  en  présence  d'émeutes;  la  conliance qu'on 
montre  doit,  pour  porter  l'ruit,  être  ou  paraître  exempte  de  crainte,  iOU.  —  Con- 
fiance de  César  en  sa  fortune,  201.  —  Conseil  donné  à  un  tyran  pour  se  mettre  à 
couvert  des  complots  qu'on  pouvait  former  contre  lui  (Denys  de  Syracuse,  le  duc 
d'ATHÈNEs  à  Florence),  201.  —  Mourir  vaut  mieux  parfois  que  d'être  sous  la  menace 
continue  d'une  fin  tragique,  203. 

CHAPITRE  XXIV. 

Du  pédantisme,  I,  203.  —  Les  pédants  sont  et  ont  été  de  tous  temps  mépri- 
sés et  ridiculisés  malgré  leur  savoir  (du  Bellay,  Plutarque,  Rabelais,  Marguerite 
DE  Valois),  203.  —  Les  philosophes  de  l'antiquité  étaient  au  contraire  générale- 
ment estimés,  parce  que  sous  leur  originalité  et  leur  dédain  pour  les  fonctions  pu- 
bliques, existait  une  science  profonde;  différence  essentielle  entre  eux  et  les  pé- 
dants de  nos  jours  (Arciiimède,  CRATf:s,  Heraclite  ;Empédoci.e,  Tiialès,  Anaxagore), 
205.  —  Les  pédants  ne  s'occupent  que  de  meubler  leur  mémoire  et  à  en  faire  pa- 
rade, sans  que  bénéficient  de  ce  qu'ils  apprennent  ni  leur  jugement,  ni  leur  cons- 
cience, 209.  —  Exemple  de  ce  Romain  qui  se  croj^ait  savant,  parce  qu'il  avait  des 
savants  à  ses  gages,  211.  —  La  science  n'est  utile  qu'autant  qu'elle  nous  devient 
propre.  Caractères  distinctifs  des  vrais  et  des  faux  savants  (Lucullus,  Protagoras, 
Adrien  Turnebus),  213.  — La  science  sans  le  jugement  ne  saurait  porter  fruit,  peut- 
être  est-ce  là  le  motif  pour  lequel  nous  la  tenons  comme  une  superfétation  chez  la 
femme  (François  duc  de  Bretagne), 217. —  Nos  pères  n'en  faisaient  pas  grand  cas; 
et,  chez  ceux  auxquels  les  dispositions  naturelles  pour  en  bénéficier  font  défaut, 
elle  est  plus  dangereuse  qu'utile;  la  plupart  des  pédants  de  notre  époque  est  dans 
ce  cas,  parce  qu'ils  ne  s'y  sont  adonnés  que  pour  en  tirer  profit  (Ariston  de  Chio), 
217.  —  Les  Perses  s'appliquaient  à  apprendre  la  vertu  à  leurs  enfants  (Astyage  et 
Cyrus)  ;  les  Lacédémoniens  à  les  mettre  en  présence  de  la  réalité,  les  instruisant 
par  l'exemple  de  ce  qu'ils  auraient  à  faire  quand  ils  seraient  devenus  des  hommes 
(Agésilas),  221.  —  Différence  entre  l'éducation  que  recevaient  les  Spartiates  et 
celle  que  recevaient  les  Athéniens  (les  Lacédémoniens  et  Antipater,  Agésilas  et 
Xénophon),  223.  —  Comment  Socrate  se  joue  d'un  sophiste  se  plaignant  de  n'avoir 
rien  gagné  à  Sparte,  223.  —  Les  sciences  amollissent  et  efféminent  les  courages 
(les  Turcs,  les  Scythes,  les  Parthes,  Tamerlan,  les  Goths  en  Grèce,  Charles  YIII 
en  Italie),  225. 

CHAPITRE  XXV. 

De  réducation  des  enfants,  I,  227.  —  Montaigne  déclare  n'avoir  que  des 
données  assez  vagues  sur  les  sciences;  en  dehors  de  Plutarque  et  de  Sénèque, .il 
n'a  guère  d'auteurs  qui  lui  soient  familiers.  Tout  en  traitant  des  sujets  sur  les- 
quels il  n'a  que  des  connaissances  superficielles,  il  se  garde  d'imiter  ces  trop  nom- 
breux écrivains  qui,  donnant  dans  une  erreur  trop  commune,  empruntent  dans 
une  large  mesure  aux  auteurs  anciens,  croyant  ainsi  en  imposer  à  leurs  lecteurs 
(Chrysippe,  Épicure,  centons  de  Capilupus  et  de  Juste  Lipse),  227.  —  L'éducation 
de  l'enfant  doit  commencer  dès  le  bas  âge;  il  est  difficile  de  préjuger  par  ses 
premières  inclinations  de  ce  qu'il  sera  un  jour,  aussi  ne  faut-il  pas  y  attacher 
trop  d'importance  (Cimon,  Thémistocle,  Platon),  233.  —  La  science  convient  sur- 
tout aux  personnes  de  haut  rang;  non  celle  qui  apprend  à  argumenter,  mais  celle 
qui  rend  habile  au  commandement  des  armées,  au  gouvernement  des  peuples,  etc., 

235.  —  Le  succès  d'une  éducation  dépend  essentiellement  du  gouverneur  qui  y 
préside,  lequel  doit  avoir  du  jugement,  des  mœurs  plutôt  que  de  la  science,  s'ap- 
pliquer à  aider  son  élève  à  trouver  lui-même  sa  voie  et  l'amener  à  exposer  ses 
idées  au  lieu  de  commencer  par  lui  suggérer  les  siennes  (Socrate,  Arcésilas), 

236.  —  Chaque  enfant  est  à  instruire  suivant  le  tempérament  qui  lui  est  propre; 
appliquer  à  tous  une  mÇ'me  méthode,  ne  peut  donner  pour  le  plus  grand  nombre 
que  de  mauvais  résultats,  237.  —  L'élève  ne  doit  pas  adopter  servilement  les  opi- 
nions des  autres  et  n'en  charger  que  sa  mémoire;  il  faut  qu'il  se  les  approprie  et 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.      LIV.  I,  CH.  XXV.  —  VOL.  I.         B.M 

les  rende  siennes,  239.  —  Le  profit  de  l'élude  est  de  rendre  meilleur.  Ce  qu'il  faut 
développer,  c'est  l'intelligence;  savoir  pai'  cœur,  n'est  pas  savoir.  Tout  ce  qui  se 
présente  aux  yeux  doit  être  sujet  d'observation,  241.  —  Les  voyages  bien  dirigés 
sont  particulièrement  utiles;  il  faut  les  commencer  de  bonne  heure,  243.  —  L'en- 
fant gagne  à  être  élevé  loin  des  siens;  il  faut  l'habituer  aux  fatigues,  endurcir 
son  corps  en  même  temps  que  fortifier  son  âme,  243.  —  En  société,  l'adolescent 
s'appliquera  plus  à  connaître  les  autres  qu'à  vouloir  paraître;  et,  dans  ses  pro- 
pos, il  se  montrera  réservé  et  modeste,  245.  —  Il  sera  affectionné  à  son  prince, 
prêt  à  le  servir  avec  le  plus  grand  dévouement  pour  le  bien  public,  mais  mieux 
vaut  qu'il  ne  recherche  pas  d'emploi  à  la  cour,  247.  —  On  lui  inspirera  la  sincé- 
rité dans  la  discussion;  il  prêtera  attention  à  tout,  s'enquerra  de  tout,  247.  —  L'é- 
tude de  l'histoire  est  de  première  importance;  supériorité  de  Plutarque  comme 
historien  (JIaucellus,  Alexandridas),  249.  —  La  fréquentation  du  monde  contri- 
bue beaucoup  à  nous  former  le  jugement  (Socrate),  251.  —  Le  monde  doit  être 
notre  livre  d'étude  de  prédilection  (Pythagore  et  les  jeux  olympiques),  253.  —  La 
philosophie  servant  à  diriger  notre  vie,  est  ce  qui  doit  tout  d'abord  être  enseigné 
à  l'homme  quand  il  est  jeune,  253.  —  Avant  d'observer  le  cours  des  a.stres,  il  doit 
observer  ses  propres  penchants  et  s'attacher  à  les  régler,  255.  —  Il  pourra  ensuite 
se  livrer  aux  autres  sciences,  les  scrutant  à  fond  au  lieu  de  se  borner  à  n'en  ap- 
prendre que  quelques  définitions  vides  de  sens,  257.  —  La  philosophie,  dégagée  de 
l'esprit  de  discu.ssion  et  des  minuties  qui  la  discréditent  trop  souvent,  loin  d'être 
sévère  et  triste,  est  d'une  étude  agréable  (Démétrius  le  grammairien  et  Héracléox 
DE  Mkoare,  Bradamante  et  Angélique),  257.  —  La  vertu  est  la  source  de  tous  les 
plaisirs  de  l'homme  par  cela  même  qu'elle  les  légitime  et  les  modère,  261.  —  L'é- 
ducation adonnera  l'enfant  ne  doit  pas  se  régler  d'après  le  rang  des  parents  dans 
la  société,  mais  d'après  ses  propres  facultés,  261.  —  La  philosophie  est  de  tous 
les  âges:  trop  de  science  abêtit  (Aristote  et  Alexandre  le  Grand,  Épicure  et  Meni- 
CEus,  Carnéade),  263.  —  Toutes  les  circonstances,  même  le  jeu,  pz'êtent  à  l'étude 
de  la  philosophie  (Socrate),  265.  —  Le  dressage  du  corps  chez  l'enfant,  doit  être 
mené  de  front  avec  celui  de  l'âme,  265.  —  L'étude  doit  lui  être  rendue  attrayante, 
et  tout  procédé  violent  pour  l'y  astreindre  être  banni,  267.  —  L'homme  ne  doit  se 
singulariser  en  rien  ;  être  capable  de  se  conformer  aux  usages  de  son  milieu  quel 
qu'il  soit,  mais  n'aimer  à  faire  que  ce  qui  est  bien  (Germanicus,  Callisthène  et 
Alexandre  le  Grand,  Alcibiade  chez  les  Perses  et  les  Lacédémoniens,  Aristippe), 
269.  —  C'est  par  ses  actes  qu'on  jugera  du  profit  qu'un  jeune  homme  a  retiré  de 
l'éducation  qu'il  a  reçue  (Platon,  IIéraclide  du  Pont,  Diogène  et  Hégésias,  Zeuxi- 
DAMUs),  271.  —  Ce  qu'il  saura  bien,  il  arrivera  toujours  à  l'exprimer  suffisamment; 
la  connaissance  des  choses  importe  plus  que  les  mots  pour  les  rendre  (Cléomène 
et  les  AMBASSADEURS  de  Samos,  deux  architectes  d'Athènes,  Cicéron  et  Caton),  273. 
—  Dans  un  poème,  l'idée  et  le  vers  sont  deux  choses  essentiellement  distinctes 
(Ménandre,  Ronsard,  du  Bellay),  275.  —  Les  subtilités  sophistiques  qui  s'ensei- 
gnent dans  les  écoles  sont  à  mépriser;  un  langage  simple  est  à  rechercher  (Aris- 
tippe, Chrysippe,  Aristophane  le  grammairien  et  Épicure,  caractéristiques  du 
langage  chez  les  Athéniens,  les  Lacédémoniens  et  les  Cretois,  Philologues  et 
LoGOPHiLEs),  277.  —  Comment  Montaigne  apprit  le  latin  et  le  grec;  causes  qui 
empêchèrent  ce  mode  d'instruction  de  porter  tous  ses  fruits,  281.  —  Comment 
naquit  chez  lui  le  goût  de  la  lecture,  285.  —  Les  jeux  et  les  exercices  publics  sont 
utiles  à  la  société,  287. 

CHAPITRE  XXVI. 

C'est  folie  de  juger  du  vrai  et  du  faux  avec  notre  seule  raison,  I, 

289.  —  L'ignorance  et  la  simplicité  se  laissent  facilement  persuader;  mais  si  l'on 
est  plus  instruit,  on  ne  veut  croire  à  rien  de  ce  qui  paraît  sortir  de  l'ordre  natu- 
rel des  choses,  289.  —  Et  cependant,  autour  de  nous,  tout  est  prodige,  et  l'habi- 
tude seule  nous  empêche  de  tout  admirer  (Chilon),  291.  —  S'il  est  des  choses  que 
l'on  peut  rejeter,  parce  qu'elles  ne  sont  pas  avancées  par  des  hommes  qui  peuvent 
faire  autorité,  il  en  est  de  très  étonnantes  qu'il  faut  au  moins  respecter,  lorsqu'el- 
les ont  pour  témoins  des  personnes  dignes  de  notre  confiance  (Froissart,  Plu- 


B.12  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

TARQUE,  CÉSAR,  Plixe,  Bolchet,  S.  AiGLSTix),  293.  —  En  matière  de  religion,  ce 
n'est  pas  à  nous  à  décider  ce  que  l'on  peut  ou  non  concéder  aux  ennemis  de  la 
foi,  295. 

CHAPITRE  XXVII. 

De  ramitié,  1,297.  —Le  discours  de  la  Boétie  sur  la  servitude  volontaire,  a  été 
le  point  de  départ  de  l'amitié  qui  l'unit  si  étroitement  à  Montaigne,  297.  —  L'amitié 
vraie  est  le  sentiment  le  plus  élevé  de  la  société;  il  est  es.sentiellement  différent 
des  autres  affections  qui  s'y  rencontrent  communément  et  en  ont  l'apparence,  299. 
—  Toute  contrainte  exclut  l'amitié;  c'est  ce  qui  fait  que  les  rapports  entre  les 
pères  et  les  fils  revêtent  un  autre  caractère  :  de  même  entre  les  frères  que  divisent 
souvent  des  questions  d'intérêt  (Aristippe),  299.  —  Entre  hommes  et  femmes,  dans 
le  mariage  comme  en  dehors,  un  autre  sentiment  prédomine  et  l'amitié  ne  saurait 
y  trouver  place,  301.  —  Les  unions  contre  nature  admises  chez  les  Grecs  y  tendaient 
parfois  (Plaidoyer  à  ce  sujet  des  philosophes  de  l'Académie;  Achille  et  Patrocle, 
Harmodius  et  Aristogiton),  303.  —  Caractère  essentiel  de  l'amitié  parfaite;  elle  ne  se 
raisonne  pas  et  deux  âmes,  unies  par  ce  sentiment,  n'en  font  qu'une  (La  Boétie  et 
Montaigne,  Tiberius  Gracchus  et  Blosius),  307.  —  Dans  les  amitiés  communes,  il 
faut  user  de  prudence  et  de  circonspection  (Chilox,  Aristote),311.  —  Entre  amis  vé- 
ritables, tout  est  commun;  et,  si  l'un  est  assez  heureux  pour  pouvoir  donner  à  son 
ami,  c'est  celui  qui  donne,  qui  est  l'obligé  (Diogène  le  philosophe,  testament  d'Eu- 
DAMiDAS  et  Aréthée  le  Corinthien),  311.  —  Aussi,  dans  l'amitié  véritable,  les  deux 
amis  ne  s'appartenant  plus,  ce  sentiment  est  exclusif  chez  eux  et  ils  ne  sauraient 
l'étendre  à  une  personne  tierce,  313.  —  Dans  les  autres  relations  que  l'on  peut 
avoir,  peu  importent  d'ordinaire  le  caractère,  la  religion,  les  mœure  des  personnes 
avec  lesquelles  on  est  en  rapport;  il  n'en  est  pas  de  même  en  amitié,  315.  —  Re- 
grets profonds  qu'a  laissés  à  Montaigne,  jusqu'à  la  fin  de  ses  joui-s,  la  perte  de 
son  ami,  317.  —  Pourquoi  Montaigne  substitue  au  Discours  sur  la  servitude  volon- 
taire de  La  Boétie,  qu'il  avait  dessein  de  transcrire  ici,  la  pièce  de  vers  du  même 
auteur  qu'il  donne  dans  le  chapitre  suivant,  319. 

CHAPITRE  XXVin. 
Vingt-netifs  sonnets  d'Etienne  de  la  Boétie,  I,  319. 

CHAPITRE  XXIX. 

De  la  modération,  I,  345.  —  D  faut  de  la  modération,  même  dans  l'exercice 
de  la  vertu  (Horace,  S.  Paul,  Henri  III,  la  mère  de  Pausaxias,  le  dictateur  Postl'l- 
Mius),  345.  —  La  philosophie  elle-même  poussée  à  l'extrême,  comme  toutes  autres 
choses,  est  préjudiciable  (Calliclès),  :^5.  —  Dans  tous  les  plaisirs  permis,  entre 
autres  dans  ceux  du  mariage,  la  modération  est  nécessaire  (S  Thomas,  les  Musul- 
mans, ZÉNOBiE,  Jupiter,  les  rois  de  Perse,  Épaminondas  et  Pélopidas,  Sophocle  et  PÉ- 
RiCLÈs,  l'empereur  tElius  Vérus),  347.  —  L'homme  s'applique  à  aggraver  les  mi- 
sères de  sa  condition  :  c'est  avec  des  privations  et  des  souffrances  qu'on  croit 
guérir  ou  calmer  les  passions,  c'est  donner  d'un  excès  dans  un  autre,  351.  —  C'est 
à  ce  sentiment  qu'il  faut  rattacher  les  sacrifices  humains  généralement  pratiqués 
dans  les  temps  passés  et  qui  subsistaient  également  en  Amérique,  lors  de  sa  décou- 
verte (Amurat,  les  peuples  d'AMÉRiQUE,  Fernand  Cortez),  351. 

CHAPITRE  XXX. 

Des  Cannibales,  I,  353.  —  Fausse  opinion  que  l'on  a  quelquefois  des  peuples 
que  l'on  dit  «  barbares  .  (Pyrrhus  et  les  Romains,  Flaminius,  Publius  Galba  et  les 
Grecs),  353.  —  De  la  découverte  de  l'Amérique;  il  n'est  pas  probable  que  ce  soit 
l'Atlantide  de  Platon,  ni  cette  terre  inconnue  où  voulurent  s'établir  les  Carthagi- 
nois (V^iLLEGAiGNOs,  SoLON,  Aristote),  355.  —  Qualités  à  rechercher  chez  ceux  qui 
écrivent  des  relations  de  voyage  ;  chacun  devrait  exposer  ce  qu'il  a  vu  et  ne  parler 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  I,  Cil.  XXX.  —  VOL.  I.  B.13 

que  de  ce  qu'il  sait  pertinemment,  357.  —  Pourquoi  et  combien  à  tort  nous  quali- 
fions de  «  sauvages  »  les  peuples  d'Amérique,  359.  —  Description  d'une  contrée  du 
nouveau  continent;  manière  do  vivre  de  ses  habitants,  leurs  demeures,  leur 
nourriture,  leurs  danses,  leurs  prêtres,  leur  morale  (les  Scythes),  363.  —  Comment 
ils  font  la  guerre  ;  pourquoi  ils  tuent  et  mangent  leurs  prisonniers  ;  en  quoi  ils 
sont,  en  cela  même,  moins  barbares  que  nous  dans  certains  de  nos  actes  (les  Scy- 
thes, les  Portugais,  les  Stoïciens,  les  Gaulois  à  Alésia,  les  Gascons),  365.  —  Ils  ne 
se  proposent,  dans  leurs  guerres,  que  d'acquérir  de  la  gloire  sans  rechercher  d'a- 
grandis-sement  de  territoire;  tous  leurs  efforts  auprès  de  leurs  prisonniers  ten- 
dent à  leur  faire  demander  merci  (les  Hongrois),  369.  —  La  vaillance  consiste 
essentiellement  dans  notre  force  d'àme  et  non  dans  notre  supériorité  physique; 
aussi  y  a-t-il  des  défaites  plus  glorieuses  que  des  victoires  (Léonidas  aux  Thermo- 
pyles,  Iscnoi-AS  contre  les  Arcadiens),  371.  —  Constance  des  prisonniers  chez  ces 
peuplades  sauvages,  en  présence  des  tourments  qui  les  attendent,  373.  —  Les 
femmes,  dans  cette  contrée,  mettent  un  point  d'amour-propre  à  procurer  d'autres 
compagnes  à  leurs  maris  (les  femmes  d'Abraham  et  de  Jacob,  Livia  femme  d'Au- 
guste, Stratonice),  373.  —  Opinions  émises  sur  nos  mœurs  par  trois  de  ces  sauva- 
ges venus  visiter  la  France,  375.  —  Privilèges  que  confère  chez  eux  la  supréma- 
tie, 377. 

CHAPITRE  XXXI. 

Il  faut  apporter  beaucoup  de  circonspection  quand  on  se  mêle 
d'émettre  un  jugement  sur  les  décrets  de  la  Providence,  I,  377.  —  On 
ne  croit  à  rien  si  fermement  qu'aux  choses  qui  ne  peuvent  être  soumises  au  rai- 
sonnement, 377.  —  Pour  appuyer  la  vérité  de  la  religion  chrétienne,  il  ne  faudrait 
jamais  apporter  en  preuve  le  èuccès  de  telle  ou  telle  entreprise;  c'est  donner  ma- 
tière à  toutes  sortes  de  contestations  (combats  de  la  Roche-Abeille,  de  Montcontour 
et  de  Jarnac;  bataille  de  Lépante,  Arrius  et  le  pape  Léon,  Héliogabale,  S.  Irénée), 
379.  —  Les  événements  sont  dus  à  des  causes  que  Dieu  seul  connaît  et  qu'il  n'est 
pas  donné  à  l'homme  de  pénétrer,  381. 

CHAPITRE  XXXII. 

Les  voluptés  sont  à  fuir,  même  au  prix  de  la  vie,  I,  381.  — Abandon- 
ner la  vie,  quand  elle  est  misérable  et  tourmentée,  n'a  rien  que  d'ordinaire  et  na- 
turel ;  mais  se  donner  la  mort  a;U  milieu  de  toutes  les  prospérités  et  pour  se  sous- 
traire aux  joies  de  ce  monde  et  de  la  volupté  est  plus  singulier  (Sénèque  et  Lucilius, 
Épicure  et  Idoménée;  S.  Hilaire,,  sa  fille  Habra  et  sa  femme),  381. 

CHAPITRE  XXXIII. 

La  fortune  marche  souvent  de  pair  avec  la  raison,  I,  385.  —  La 
fortune  agit  dans  les  conditions  les  plus  diverses  :  parfois  elle  se  substitue  à  la 
justice  (le  duc  de  Valentinois  et  le  pape  Alexandre  VI),  385.  —  Elle  détermine 
les  événements  les  plus  bizarres  qui  vont  jusqu'à  tenir  du  miracle  (le  Sieur  de 
LiQUES,  les  deux  Contantin,  Clovis  à  Angoulême,  le  roi  Robert  près  d'Orléans,  le 
capitaine  Rense  à  Erone),  385;  —  opère  des  cures  inespérées  (Jason  de  Phèrcs), 
387;  —  produit  dans  les  arts,  dans  nos  affaires  les  effets  les  plus  inattendus  (le 
peintre  Protogène,  Isabelle  reine  d'Angleterre,  Timoléon,  les  deux  Ignatius),  387. 

CHAPITRE  XXXIV. 

Une  lacune  de  notre  administration,  I,  389.  —  Utilité  dont  serait  dans 
chaque  ville  un  registre  public  où  chaque  habitant  pourrait  insérer  des  annon- 
ces et  des  avis,  proposer  ce  qu'il  veut  vendre  ou  acheter,  etc.  (Lilius  Gregorius 
GiRALDi  et  Sébastien  Chasteillon),  389.  —  Intérêt  que  présenterait  également  la 
tenue  dans  chaque  famille  d'un  livre  où  seraient  consignés,  jour  par  jour,  les  pe- 
tits événements  qui  l'intéressent  :  mariages,  naissances,  décès,  voyages,  nouvelles 
bonnes  et  mauvaises,  etc.,  391. 


B.14  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


CHAPITRE  XXXV. 

De  l'habitude  de  se  vêtir,  I,  393.  —  La  nature  nous  a-t-elle  formés  pour 
être  vêtus?  Dans  des  contrées  où  cependant  le  froid  est  rigoureux,  il  y  a  des  na- 
tions, comme  des  individus,  qui  se  sont  accoutumés  à  vivre  nus  ou  presque  nus 
(les  PEUPLADES  d'Amérique,  nos  paysans,  le  fou  du  duc  de  Florence,  le  roi  Massi- 
NissA,  l'empereur  Sévère,  les  Égyptiens  et  les  Perses,  Ao.ésu.as,  César,  Anmbai.,  les 
HABITANTS  DU  PÉGU,  le  Roi  de  Pologne),  393.  —  Du  froid  en  certaines  circonstances 
(dans  le  Luxembourg,  au  Palus  Méotides,  les  Romains  et  les  Cap.thaginois  à  la  ba- 
taille près  de  Plaisance,  en  Arménie  lors  de  la  rcti*aite  des  Dix  mille  :  arbres  frui- 
tiers enterrés  pour  les  protéger  du  froid),  395.  —  Usages  à  la  cour  de  l'empereur 
du  Mexique,  397. 

CHAPITRE  XXXVI. 

Sur  Gaton  le  Jeune,  I,  399.  —  Il  ne  faut  pas  juger  des  autres  d'après  soi, 
399.  —  Aujourd'hui  la  vei'tu  n'est  qu'un  vain  mot;  on  n'est  vertueux  que  par 
habitude,  par  intérêt  ou  par  ambition  (les  Spartiates  et  Aristodème),  399.  —  11 
est  des  hommes  qui  cherchent  à  rabaisser  les  personnages  éminents  par  leurs 
vertus;  il  faudrait  au  contraire  les  offrir  sans  cesse  comme  des  modèles  à  l'admi- 
ration du  monde  (Caton  d'Utique),  401.  —  Comment  cinq  poètes  anciens  ont 
parlé  de  Caton;  la  vraie  poésie  nous  transporte,  mais  ne  peut  s'analyser  (Mar- 
tial, Manilius,  Lucain,  Horace  et  Virgile),  403. 

CHAPITRE  XXXVII. 

Une  même  chose  nous  fait  rire  et  pleurer,  I,  405.  —  Un  vainqueur 
pleure  souvent  la  mort  d'un  vaincu,  et  ce  ne  sont  pas  toujours  des  larmes  faus- 
ses (Antigone  vis-à-vis  de  Pyrrhus,  René  de  Lorraine  vis-à-vis  de  Charles  de  Bour- 
gogne, le  comte  de  Montfort  vis-à-vis  de  Charles  de  Blois,  César  vis-à-vis  de 
Pompée),  405.  —  Des  passions  multiples  et  souvent  contraires  subsistent  en  effet 
simultanément  dans  le  cœur  de  l'homme  (Néron  ;  Xerxès),  407.  —  D'ailleurs  nous 
n'envisageons  pas  sans  cesse  une  même  chose  sous  un  même  aspect  (Timo- 
léon),  409. 

CHAPITRE  XXXVIII. 

De  la  solitude,  I,  411.  —  Les  méchants  sont  nombreux;  nul  doute  que  leur 
société  ne  soit  funeste,  c'est  un  motif  de  rechercher  la  solitude  (Bias,  I'Ecclésias- 
tique,  Albuquerque,  Charondas,  Antisthène),  411.  —  Ce  que  la  plupart  des  hommes 
y  recherchent,  c'est  d'y  vivre  loin  des  affaires  et  dans  le  repos;  mais  elle  ne  nous 
dégage  ni  de  tous  soins  domestiques,  ni  surtout  de  nos  vices  (Socrate),  413.  — 
Affranchir  notre  âme  des  passions  qui  la  dominent,  la  détacher  de  tout  ce  qui  est 
en  dehors  de  nous,  c'est  là  la  vraie  solitude  ;  on  peut  en  jouir  au  milieu  des  villes 
et  des  cours  (Stilpon,  Antisthène,  l'évêque  Paulin),  415.  —  Les  hommes  se  passion- 
nent pour  mille  choses  qui  ne  les  concernent  pas,  417.  —  La  retraite  convient 
surtout  à  ceux  qui  ont  consacré  la  majeure  partie  de  leur  vie  au  service  de  l'hu- 
manité (Thalès),  419.  —  Il  faut  être  capable  de  faire  abstraction  de  toutes  nos 
obligations,  et,  faisant  un  retour  sur  nous-mêmes,  être  exclusivement  à  nous; 
tempéraments  qui  s'y  prêtent  le  mieux  ;  comment  y  arriver,  419.  —  Il  faut  user 
de  ce  que  nous  avons,  mais  sans  nous  en  faire  une  nécessité,  et  être  prêts  à 
nous  en  passer,  si  la  fortune  vient  à  nous  en  priver,  421.  —  Occupations  qui  con- 
viennent davantage  dans  la  vie  solitaire  (Cyrus,  Démocrite),  423.  —  Pline  et  Cicé- 
ron  conseillent  de  mettre  à  profit  la  retraite  pour  se  faire  un  nom  par  quelque 
œuvre  littéraire,  423.  —  Cas  particulier  de  ceux  qui,  par  dévotion,  recherchent  la 
vie  solitaire,  425.  —  Combien  peu  est  raisonnable  le  conseil  de  Pline  et  de  Cicé- 
ron,  425.  —  Études  et  soins  auxquels  on  peut  se  livrer  dans  la  solitude;  sciences 
dont,  à  ce  moment,  il  ne  faut  pas  s'embarrasser  l'esprit,  427.  —  La  gloire  et  le  re- 
pos sont  choses  incompatibles  (Épicure  et  Sénèque),  427. 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  I,  CH.  XXXIX.  —  VOL.  I.      B.15 

CHAPITRE  XXXIX. 

Considérations  sur  Cicéron,  I,  431.  —  Cicéron  et  Pline  le  Jeune  étaient  des 
ambitieux  pleins  de  vanité;  ils  ont  été  jusqu'à  solliciter  les  historiens  de  faire 
l'éloge  de  leurs  faits  et  gestes,  431.  —  Même  dans  leure  lettres  intimes,  ils  ont  re- 
cherché l'élégance  du  style;  elles  semblent  n'avoir  été  écrites  que  pour  être  pu- 
bliées (XÉNOPHON  et  César;  Scipion,  L-«lius  et  Térence),  431.  —  Les  rois  et  les 
grands  ne  doivent  pas  tirer  vanité  d'exceller  dans  les  arts  et  les  sciences;  seuls 
les  talents  et  qualités  qui  importent  à  leur  situation  sont  susceptibles  de  leur 
faire  honneur  (Cyrus,  Charlemagne,  Philippe  et  Démosthène,  Philippe  et  Alexan- 
dre, Iphicrate,  Antisthène),  433.  —  Dans  ses  Essais,  Montaigne  dit  avoir  inten- 
tionnellement évité  de  développer  les  sujets  qu'il  traite  ;  il  se  borne  à  les  esquis- 
ser, sans  même  se  préoccuper  de  la  forme  sous  laquelle  il  les  présente,  435.  — 
Combien  sont  différents  de  Pline  et  de  Cicéron,  Épicure  et  Sénèque  qui  criti- 
quent cette  soif  de  célébrité  dans  un  style  moins  brillant,  mais  plus  sensé,  437. 

—  Raisons  qui  font  que  Montaigne  préfère  la  forme  qu'il  donne  à  ses  Essais  au 
genre  épistolaire  pour  lequel  il  avait  cependant  des  dispositions  particulières,  437. 

—  Rien  de  ridicule  comme  les  formules  oiseuses  de  respect  et  d'adulation  qu'on 
prodigue  de  nos  jours  dans  la  correspondance  privée;  comment  lui-même  procé- 
dait (Annibal  Caro,  Montaigne),  439. 

CHAPITRE  XL. 

Le  bien  et  le  mal  qui  nous  arrivent  ne  sont  souvent  tels  que  par 
l'idée  que  nous  nous  en  faisons,  I,  441.  —  La  diversité  des  opinions  sur  les 
biens  et  les  maux  est  grande;  la  mort  elle-même  n'apparaît  pas  à  tous  comme  un 
mal,  441.  —  Des  gens  plaisantent  sur  son  seuil  même,  en  allant  au  supplice,  etc. 
(Théodore  et  Lysimaque,  les  habitants  d'ARRAs;  plaisanteries  de  condamnés  con- 
duits au  supplice,  de  bouffons  à  leurs  derniers  moments),  443.  —  Dans  les  Indes, 
les  femmes  s'ensevelissent  ou  se  brûlent  vivantes  sur  le  corps  de  leurs  maris; 
fréquemment  les  vicissitudes  de  la  guerre  amènent  des  populations  entières  à  se 
donner  volontairement  la  mort  (au  royaume  de  Narsingue,  le  peuple  de  Milan, 
les  Xanthiens,  les  Grecs  lors  des  guerres  médiques),  ^147.  —  Souvent  l'homme  sa- 
crifie sa  vie  à  la  consenation  de  ses  opinions  religieuses  (les  Turcs,  les  Juifs 
sous  Jean  et  Emmanuel  de  Portugal,  les  Albigeois),  447.  —  Parfois  la  mort  est  re- 
cherchée comme  constituant  un  état  préférable  à  la  vie  ;  elle  ne  saurait  donc 
être  un  sujet  de  crainte  (Pyrrhon),  449.  —  La  douleur  est  tenue  par  certains 
comme  le  plus  grand  des  maux  ;  il  en  est  qui  nient  sa  réalité,  tandis  que  d'au- 
tres au  contraire,  mentant  à  eux-mêmes,  prétendent  faussement  ne  redouter 
dans  la  mort  que  la  douleur  qui  d'ordinaire  l'accompagne  (Aristippe,  Hiéronyme, 
PosiDONius  et  Pompée,  Saint  Augustin),  451.  —  La  réalité  de  la  douleur  n'est  pas 
douteuse,  c'est  même  le  propre  de  la  vertu  de  la  braver,  453.  —  Plus  elle  est  vio- 
lente plus  elle  est  coui-te,  et  plus  il  est  possible  à  l'homme  d'en  diminuer  l'acuité 
en  réagissant  contre  elle,  ce  que  nous  permettent  de  faire  les  forces  de  l'âme, 
et  ce  à  quoi  nous  parvenons  tous  sous  l'empire  de  sentiments  divers  (les  femmes 
en  couches,  en  particulier  celles  des  Suisses  et  les  Bohémiennes  ;  la  femme  de  Sabinus, 
des  enfants  de  Lacédémone,  Mutius  Scevola,  les  gladiateurs,  les  femmes  par  coquet- 
terie, une  FILLE  de  Picardie,  les  Turcs,  S.  Louis,  Guillaume  dernier  duc  de  Guyenne, 
Foulques  comte  d'Anjou,  Q.  Maximus,  M.  Caton,  L.  Paulus,  Térez  roi  de  Thrace, 
les  Espagnols,  austérité  du  cardinal  Borromée,  accident  funeste  que  certains  sup- 
portent sans  peine),  455.  —  Est-ce  un  bien  ou  non  d'avoir  beaucoup  d'enfants  (Mon- 
taigne, Thalès)?  465.  —  L'opinion  que  nous  en  avons  fait  seule  le  prix  des  cho- 
ses, 465.  —  Comment  Montaigne  réglait  ses  dépenses  alors  qu'il  n'était  pas  encore 
maître  de  ses  biens,  467.  —  L'indigence  peut  subsister  chez  le  riche  comme  elle 
existe  chez  le  pauvre,  469.  —  Être  riche  est  un  surcroît  d'embarras;  on  est  bientôt 
en  proie  à  l'avarice  et  à  ses  tourments  (Montaigne,  César,  Denys  et  un  Syracu- 
sain),  469.  —  Vivre  au  jour  le  jour  suivant  ses  revenus,  sans  trop  se  préoccuper 
de  l'imprévu,  est  le  parti  le  plus  sage  (Féraulez  seigneur  Persan,  un  vieux  pré- 


B.16  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

lat),  471.  —  Les  bicMis  ne  sont  donc  pas  plus  réels  que  les  maux;  les  uns  comme 
les  autres  ne  sont  tels  que  par  l'appréciation  que  nous  en  portons,  475.  —  En 
somme,  il  faut  savoir  se  commander  et,  finalement,  il  nous  est  toujours  loisible 
de  mettre  un  terme  à  ce  que  nous  envisageons  comme  des  maux,  quand  ils  nous 
deviennent  intolérables,  475. 

CHAPITRE  XLI. 

L'homme  n'est  pas  porté  à  abandonner  à  d'autres  la  gloire  qu'il 
a  acquise,  I,  477.  —  Le  vain  désir  d'acquérir  de  la  réputation  nous  fait  renon- 
cer à  des  biens  plus  réels,  tels  que  le  repos,  la  santé,  etc.  ;  et  nous  porte  même  à 
sacrifier  notre  vie.  La  gloire  n'est  qu'une  illusion,  une  ombre,  et  cependant  on 
voit  jusqu'à  des  philosophes  qui,  tout  en  la  décriant,  la  recherchent,  477.  —  On 
trouve  rarement  des  hommes  qui  abandonnent  aux  autres  leur  part  de  gloire; 
exemples  de  cette  abnégation  de  soi-même  (Catulus  Luctatius,  Antoine  de  Lève 
et  Charles-Quint,  Archélonide  mère  de  Brasidas,  Edouard  III  d'Angleterre,  L^ïlius 
et  SciPioN,  'Théopompe  roi  de  Sparte,  l'évèque  de  Beauvais  à  la  bataille  de  Bouvi- 
nes),  479. 

CHAPITRE  XLII. 

De  l'inégalité  qui  règne  parmi  les  hommes,  I,  481 .  —  Extrême  diffé- 
rence que  l'on  remarque  entre  les  hommes;  on  ne  devrait  les  estimer  qu'en  rai- 
son de  ce  qu'ils  valent  par  eux-mêmes  et  après  les  avoir  dépouillés  de  tout  ce 
qui  n'est  pas  eux;  c'est  par  leur  àme  qu'il  faut  les  juger,  481.  —  De  vaines  appa- 
rences extérieures  distinguent  seules  le  roi  du  paysan,  le  noble  du  roturier,  etc. 
Que  sont  les  l'ois?  des  acteurs  en  scène,  des  hommes  plus  méprisables  quelquefois 
que  le  dernier  de  leurs  sujets,  soumis  aux  mêmes  passions,  aux  mêmes  vices  (les 
ROIS  de  Thrace,  Alexandre  le  Grand  et  ses  flatteurs,  Antigone  et  le  poète  Hermo- 
dore),  485.  —  Le  bonheur  est  dans  la  jouissance  et  non  dans  la  possession;  or 
peuMl  jouir  des  avantages  de  la  royauté  celui  qui  ne  sait  apprécier  son  bonheur, 
celui  dont  l'esprit  est  borné,  l'âme  grossière,  ou  qui  est  tourmenté  par  des  dou- 
leurs physiques?  487.  —  Combien  le  sort  des  rois  est  à  plaindre;  leurs  devoirs 
constituent  une  lourde  charge  (Séleucus,  Cyrus),  489.  —  La  satiété  leur  rend  tous 
les  plaisii-s  insipides  (le  roi  Hiéron,  le  Grand  Seigneur),  489.  —  Ils  sont  constam- 
ment sous  les  yeux  de  leurs  sujets  qui  les  jugent  avec  sévérité  (le  roi  Hiéron;  le 
roi  Alphonse),  491.  —  La  vie  d'un  seigneur  retiré  dans  ses  terres,  loin  de  la  cour, 
est  bien  préférable,  493.  —  Les  rois  ne  connaissent  pas  l'amitié,  la  confiance  ;  ils 
n'ont  autour  d'eux  que  des  flatteurs  et  des  hypocrites  (Hiéron,  l'empereur  Julien), 
493.  —  Les  commodités  effectives  dont  ils  jouissent  leur  sont  communes  avec  les 
autres  hommes  (l'empereur  Dioclétien),  495.  —  Gouvernement  idéal  (Anacharsis), 
495.  —  Une  folle  ambition  les  porte  souvent  à  ravager  le  monde  lorsqu'ils  pour- 
raient, sans  effort,  se  procurer  le  repos  et  les  vrais  plaisirs  (Cinéas  et  Pyr- 
rhus), 495. 

CHAPITRE  XLIII. 

Des  lois  somptuaires,  I,  497.  —  Interdire  l'usage  de  l'or  et  de  la  soie  à 
certaines  classes  de  la  société  dans  le  but  d'enrayer  le  luxe,  c'est  aller  à  rencon- 
tre de  ce  que  l'on  se  propose,  497.  —  L'exemple  des  grands  fait  loi,  c'est  pour- 
quoi ils  devraient  se  distinguer  par  leur  simplicité  (Zeleucus),  497.  —  Bizarrerie 
et  incommodité  de  certaines  modes,  499.  —  Même  dans  les  modes,  les  change- 
ments sont  dangereux  pour  la  jeunesse  (Platon),  501. 

CHAPITRE  XLIV. 

Du  sommeil,  I,  501.  —  Sans  doute  le  sage  peut  commander  à  ses  passions; 
mais  il  n'est  pas  impassible  et  il  ne  peut  les  empêcher  d'émouvoir  son  àme  ; 
aussi,  faut-il  regarder  comme  très  extraordinaires  ces  hommes  qui,  dans  les  plus 
importantes  circonstances   de  leur  vie  et  lorsqu'ils  devraient  éprouver  les  plus 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  I,  Cil.  XLIV.  —  VOL.  I.        B.17 

vives  agitations,  ont  pu  se  livrer  au  sommeil  (Alexandre  le  Grand,  l'empereur 
Othon,  Caton  d'Utiqle,  le  jeune  Marius),  501.  —  Le  sommeil  est-il  nécessaire  à  la 
vie  (Persée,  Pline,  Hérodote,  Éplménide),  505? 

CHAPITRE  XLV. 

Sur  la  bataille  de  Dreux,  I,  505.  —  H  importe  peu  que,  dans  une  action 
de  guerre,  un  chef  ne  fasse  pas  tout  ce  que  commande  le  devoir  ou  la  bravoure, 
pourvu  qu'il  obtienne  la  victoire;  le  succès  est  le  seul  objectif  à  poursuivre  (le 
duc  de  Guise,  Puilopoemen,  Agésu.as),  505. 

CHAPITRE  XLVI. 

Des  noms,  I,  50y.  —  11  est  des  noms  qui  sont  pris  en  mauvaise  part;  cer- 
tains sont,  par  tradition,  plus  particulièrement  usités  dans  telle  ou  telle  famille  de 
souverains,  d'autres  plus  ou  moins  répandus  chez  tel  ou  tel  peuple  (noblesse  ré- 
partie en  un  festin  suivant  la  ressemblance  des  noms;  mets  servis  dans  l'ordre 
alphabétique),  509.  —  11  est  avantageux  de  porter  un  nom  aisé  à  prononcer  et 
qui  se  retient  facilement,  509.  —  Influence  des  noms  (un  jeune  homme  de  Poitiers; 
Pvthagore,  les  Calvinistes),  511.  —  Il  serait  bon  de  ne  jamais  traduire  les  noms 
propres  et  de  les  laisser  tels  qu'ils  sont  écrits  et  se  prononcent  dans  leur  langue 
d'origine  (Jacques  Amyot),  511.  —  Inconvénient  qu'il  y  a  à  prendre,  comme  cela 
se  fait  en  France,  des  noms  de  terre;  la  tendance  à  falsifier  les  généalogies  s'en 
trouve  favorisée,  513.  —  Les  armoiries  passent  également  des  uns  aux  autres  (Ar- 
moiries de  Montaigne),  515.  —  On  se  donne  bien  de  la  peine  pour  illustrer  un 
nom  qui  souvent  sera  altéré  par  la  postérité;  un  nom,  après  nous,  n'est  en  (in  de 
compte  qu'un  mot  et  un  assemblage  de  traits  sans  objet  (Duguesclin),  515.  — 
Parfois,  de  notre  vivant  même,  ce  n'est  qu'un  pseudonyme  (Nicolas  Denoist,  Sué- 
tone, Bayard,  Escalin),  515.  —  A  qui  le  souvenir  que  les  noms  consacrent,  s'ap- 
plique-t-il  parmi  le  grand  nombre  d'êtres  connus  et  inconnus  de  l'histoire,  qui 
na  sont  plus  et  qui  ont  porté  le  môme  nom  ?  517.  —  Qu'importe  après  eux  aux 
grands  hommes  la  gloire  de  leur  nom  (Épaminondas,  Scipion  l'Africain)?  5-17. 

CHAPITRE  XLVII. 

Incertitude  de  notre  jugement,  I,  519.  —  En,  maintes  occasions  on  peut 
être  incertain  sur  le  parti  à  prendre,  par  exemple  :  Faut-il  poursuivre  à  outrance 
unennemi  vaincu?  L'adversaire  peut  regarder  comme  un  témoignage  de  faiblesse 
que  vous  ne  poursuiviez  pas  le  cours  d'un  succès;  et,  d'autre  part,  c'est  quelquefois 
une  imprudence  qui  peut  devenir  fatale,  le  désespoir  pouvant  donner  de  nou- 
velles forces  au  vaincu  (le  duc  d'ANJOu  à  Montcontour,  les  Espagnols  à  S.-Quen- 
tin.  Pompée  à  Oricum,  Sylla  et  Marius  pendant  la  guerre  sociale,  M.  de  Foix  à 
Ravenne,  les  Lacédémoniens,  Clodomir,  roi  d'Aquitaine),  519.  —  Faut-il  permettre 
que  les  soldats  soient  richement  armés?  Leur  courage  en  est  quelquefois  exalté; 
ils  sont  plus  fiers  et  ont  davantage  le  désir  de  conserver  des  armes  précieuses, 
mais  on  présente  à  l'ennemi  un  appât  de  plus  (les  peuples  d'Asie,  les  Romains  et 
les  Sammtes,  réponse  d'AsNiBAL  à  .\ntiochus,  Lycurgue),  bil.  —  Faut-il  permettre 
aux  soldats  de  braver  l'ennemi  par  leurs  propos  au  moment  d'en  venir  aux 
mains?  S'il  est  bon  do  maintenir  en  eux  l'idi-e  de  leur  supériorité  sur  leurs  ad- 
versaires, il  peut  arriver  aussi  que  les  injures  rendent  le  courage  à  ceux  qui  l'a- 
vaient perdu  (V'^iTELi.ius  et  Othon),  523.  —  Un  général  doit-il,  pour  le  combat,  se 
déguiser  pour  n'être  pas  reconnu  des  ennemis?  Cette  ruse  a  quelquefois  du  suc- 
cès, mais  elle  expose  le  chef  à  être  méconnu  de  ses  troupes  (le  roi  Pyrrhus, 
Alexandre,  César,  Lucullus,  Agis,  Agésilas,  Gylippe),  523.  —  Est-il  préférable  au 
combat  de  demeurer  sur  la  défensive  ou  de  prendre  l'offensive?  D'une  part  celui 
qui  attend  en  position  sent  faiblir  son  courage;  mais,  de  l'autre,  en  se  portant  à 
l'attaque,  on  risque  de  se  désagréger  et  d'épuiser  ses  forces  dans  la  course  finale 
(bataille  de  Pharsai.e,  Cléarque  à  Cunaxa),  525.  —  Vaut-il  mieux  attendre  l'ennemi 

essais    de    MONTAIGNE.    —   T.    IV.  2 


B.18  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

chez  soi  ou  aller  le  combattre  chez  lui?  Chez  soi,  le  pays  est  foulé  par  les  deux 
partis,  ses  ressources  sont  annihilées,  les  habitants  molestés,  un  échec  peut  les 
conduire  à  prendre  de  fâcheuses  résolutions  ;  par  contre,  on  y  dispose  de  tout,  il 
vous  est  favorable  et  connu  dans  tous  ses  détails,  les  communications  de  l'ennemi 
y  sont  difficiles,  il  est  obligé  de  se  garder  de  toutes  parts,  en  cas  de  revers  la 
retraite  peut  lui  être  coupée  (invasion  de  la  Provence  par  les  Espagnols  sous 
François  I",  Scipion  et  A  nnibal,  les  Athéniens  en  Sicile,  Agathocle  en  Afrique), 
525.  —  Cette  même  indécision,  que  nous  relevons  dans  des  circonstances  ayant 
trait  à  la  guerre,  existe  dans  toutes  les  déterminations,  de  quelque  nature  qu'elles 
soient,  que  nous  pouvons  avoir  à  prendre,  529. 

CHAPITRE  XLVIII. 

Des  chevaux  d'armes,  I,  529.  —  Chez  les  Romains,  les  chevaux  avaient 
différents  noms  suivant  l'emploi  auquel  ils  étaient  destinés  ;  usage  simultané  à  la 
guerre  de  deux  chevaux  chez  eux  et  chez  les  Numides,  529.  —  Il  y  a  des  che- 
vaux dressés  à  défendre  leurs  maîtres,  à  se  précipiter  sur  ceux  qui  les  attaquent 
(Artibius  général  Persan,  Charles  VIII  à  Fornoue,  chevaux  des  Mameluks),  531. 

—  Particularités  relatives  aux  chevaux  d'Alexandre  et  de  César,  531.  —  L'exercice 
du  cheval  est  salutaire,  533.  —  Pour  combattre,  les  Romains  faisaient  parfois 
mettre  pied  à  terre  à  leurs  gens  à  cheval;  aux  peuples  nouvellement  conquis 
ils  étaient  leurs  armes  et  leurs  chevaux,  533.  —  Nos  ancêtres  combattaient  généra- 
lement à  pied  afin  de  moins  compromettre  leurs  chances  de  succès,  533.  —  Les 
armes  les  plus  courtes  sont  les  meilleures,  une  épée  vaut  mieux  qu'une  arque- 
buse, 535.  —  Aussi  faut-il  espérer  qu'on  abandonnera  cet  usage  des  armes  à  feu, 
pour  reprendre  les  armes  anciennes  ;  ce  qu'était  la  phalarique,  535.  —  Autres 
armes  des  anciens  qui  suppléaient  à  nos  armes  à  feu,  537.  —  Plusieurs  peuples 
ont  excellé  dans  l'art  de  manier  les  chevaux,  537.  — Dans  certains  pays  les  mules 
et  mulets  sont  considérés  comme  des  montures  déshonorantes,  dans  d'autres 
comme  fort  honorables  (les  chevaliers  de  I'Echarpe,  les  Abyssins),  539.  —  Com- 
ment en  usaient  les  Assyriens  avec  leurs  chevaux,  539.  —  Dans  des  cas  de  néces- 
sité, les  chevaux  ont  servi  à  nourrir  les  hommes  (les  Sarmates,  les  Cretois,  les 
Turcs,  les  Tartares,  les  Moskovites),  539.  —  Effet  produit  par  l'apparition  des 
chevaux,  lors  de  la  découverte  de  l'Amérique,  sur  les  peuplades  qui  n'en  avaient 
jamais  vu,  541.  —  Montures  diverses  en  usage  dans  les  Indes,  541.  —  Comment, 
au  combat,  accroître  l'impétuosité  des  chevaux  (Rutilianus  contre  les  Sarmates, 
Flacgus  contrôles  Celtibériens),  541.  —  Autres  particularités  relatives  au  cheval 
(Acte  de  vassalité  du  duc  de  Moskovie  vis-à-vis  des  Tartares,  chevaux  éventrés 
pour  se  garantir  du  froid,  Bajazet  fait  prisonnier,  chevaux  déconsidérés  par  la 
perte  de  leur  crinière  et  la  mutilation  des  oreilles,  manière  de  combattre  des 
Dahes),  541.  —Aucun  peuple  ne  surpasse  les  Français  pour  leur  adresse  et  leur 
grâce  à  cheval;  exemples  d'habileté  hippique  (M.  de  Carnavalet,  tours  de  force 
équestres,  le  prince  de  Sulmone),  543. 

CHAPITRE  XLIX. 

Des  coutumes  des  anciens,  I,  545.  —  Il  est  naturel  de  tenir  aux  usages  de 
son  pays  ;  cela  rend  plus  surprenant  encore  l'instabilité  des  modes  en  France, 
545.  _  Coutumes  diverses  des  anciens,  en  particulier  des  Romains;  ils  combat-  - 
talent  l'épée  d'une  main,  l'autre  enveloppée  dans  un  pan  de  leur  manteau  ;  ils  se 
baignaient  avant  leurs  repas,  mangeaient  couchés,  s'épilaient  (Caton  après  la  ba- 
taille de  Pharsale),  547.  —  Comment  ils  se  saluaient  (Pasiclès  le  philosophe),  547. 

—  Usage  auquel  ils  employaient  les  éponges;  récipients  disposés  dans  les  rues 
pour  les  besoins  des  passants,  549.  —  Ils  faisaient  rafraîchir  le  vin  avec  de  la  neige, 
se  servaient  de  réchauds  et  avaient  pour  les  voyages  des  cuisines  portatives,  549. 

—  Nous  n'arrivons  pas  plus  à  les  égaler  dans  leurs  débauches  que  dans  leurs 
vertus,  549.  —  Être  nommé  avant  ou  après  un  autre  n'était  d'aucune  importance 
chez  les  Romains  au  point  de  vue  de  la  prééminence,  551.  —  Les  dames  Romaines 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  I,  CIL  XLIX.  —  VOL.  I.         B.19 

aux  bains,  55L  —  Les  passages  en  bateau  se  payaient  au  départ,  55L  —  Les 
femmes  couciiaient  du  côté  de  la  ruelle  du  lit;  elles  portaient  le  deuil  en  blanc 
(César  et  Nicomède,  les  dames  à  Argos  et  à  Rome),  551. 

CHAPITRE  L. 

Sur  Démocrite  et  Heraclite,  I,  553.  —  En  toutes  choses  le  jugement  est 
nécessaire;  Montaigne,  dans  les  Essais,  en  fait  une  application  constante.  Dans 
la  composition  de  cet  ouvrage,  il  ne  s'astreint  à  aucune  règle,  tout  sujet  lui  est 
bon,  et  il  l'effleure  ou  l'approfondit  plus  ou  moins,  suivant  l'idée  qui  lui  vient,  553. 
—  Dans  n'importe  quel  acte  de  la  vie  le  caractère  de  l'homme  se  révèle,  et  à 
toutes  choses  notre  àme  imprime  un  cachet  personnel;  aussi  peut-on  juger  les 
hommes  dans  leurs  petites  comme  dans  leurs  plus  grandes  actions,  à  table,  au 
jeu,  comme  à  la  tête  des  armées:  au  jeu  d'échecs  par  exemple,  si  ridicule  par  la 
contention  d'esprit  qu'il  nécessite  pour  un  passe-temps,  ont  part  toutes  les  facul- 
tés de  notre  àme  (Cicéron,  Caton,  Socrate,  Alexandre),  555.  —  Démocrite  riait, 
Heraclite  pleurait  de  nos  sottises;  le  premier  était  dans  le  vrai,  il  faut  rire  de  ce 
que  l'on  méprise  et  non  s'en  affliger  (Diogène,  Timon  le  Misanthrope,  Statilils  et 
Brutus,  Hégéslas,  Théodore),  559. 

CHAPITRE  LI. 

Combien  vaines  sont  les  paroles,  I,  559.  —  La  rhétorique  est  l'art  de 
tromper  (Thucydide  et  Périclès),  559.  —  Les  républiques  bien  ordonnées  ont  tou- 
jours fait  peu  de  cas  des  orateurs;  c'est  surtout  dans  celles  en  décadence  qu'a 
fleuri  l'éloquence  (la  Crète,  Lacédémone,  Athènes,  Rhodes,  Rome;  Ariston,  Socrate, 
Platon;  les  Mahométans,  les  Athéniens;  Pompée,  César,  Crassus,  Llcullus,  Lentu- 
i.ts,  Metelll's  ;  Volumnius),  559.  —  Ayant  surtout  action  sur  les  masses,  l'art  de  la 
parole  est  moins  en  honneur  dans  les  monarchies  (Macédoine,  Perse),  56L  —  Abus 
qu'on  en  fait  dans  toutes  les  professions  (le  maître  d'hôtel  du  cardinal  Carafl'a, 
les  architectes,  les  grammairiens),  561.  —  Abus  qui  se  produisent  également  dans 
les  titres  pompeux  que  nous  donnons  à  certaines  charges  et  les  surnoms  glorieux 
que  nous  attribuons  à  de  médiocres  personnages  (Platon  et  I'Arétin),  563. 

CHAPITRE  LU.  ^ 

Parcimonie  des  anciens,  I,  565.  —  Exemples  de  la  parcimonie  avec  laquelle 
ont  vécu  certains  personnages  illustres  de  l'antiquité  et  de  Rome  en  particulier 
(Attilius  Regulus,  Caton  l'ancien,  Scipion  Émilien,  Homère,  Platon,  Zenon,  Tibe- 
Kius  Gracchus),  565. 

CHAPITRE  LUI. 

A  propos  d'une  phrase  de  César,  I,  565.  — L'imperfection  de  l'homme  est 
démontrée  par  l'inconstance  de  ses  désirs;  à  peine  possède-t-il  un  bien,  qu'il  sou- 
pire après  un  autre;  il  ne  sait  jamais  jouir  du  bonheur  présent  (Lucien,  Épicure, 
César),  565. 

CHAPITRE  LIV. 

Inanité  de  certaines  subtilités,  I,  567.  —  Certaines  subtilités  et  les  ta- 
lents frivoles  ne  méritent  pas  d'être  encouragés;  il  est  plus  facile  qu'on  ne  pense 
d'exceller  en  ce  genre  (certains  poètes,  I'homme  au  grain  de  millet),  567.  —  En 
bien  des  choses  les  extrêmes  se  touchent;  la  peur  et  un  courage  excessif  produi- 
sent parfois  en  nous  les  mêmes  effets ph3^siques  (dénominations  de  Sire,  de  Dame; 
Don  Sanche),  56!».  — Aux  prises  avec  la  souffrance,  la  bêtise  et  la  sagesse  on  arri- 
vent aux  mêmes  fins,  571.  — Les  esprits  simples  sont  propres  à  faire  de  bons  chré- 
tiens ot  les  esprits  élevés  des  chrétiens  accomplis;  les  esprits  médiocres  sont  su- 
jets à  s'égarer  (paysans,  philosophes  et  demi-savants),  571.  —  La  poésie  populaire 
est  souvent  comparable  à  la  plus  parfaite  (villanelles),  573.  —  Ayant  fait  de  vains 


B.20  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

ciïorts  pour  soitir  de  la  médiocrité,  Montaigne  pense  que  si  ses  Essais  ne  plaisent 
ni  aux  esprits  vulgaires  ni  aux  intelligences  supérieures,  peut-être  pourront-ils 
se  soutenir  dans  la  région  moyenne,  573. 

CHAPITRE  LV. 

Des  odeurs,  I,  575.  —  On  a  dit  de  certaines  personnes  que  les  émanations 
de  leur  corps  avaient  une  odeur  suave;  mieux  vaut  encore  ne  rien  sentir  que 
sentir  bon  (Alexandre  le  Grand,  les  femmes  scythes),  575.  —  11  est  des  personnes 
extrêmement  sensibles  aux  odeurs  qui,  pourtant,  ne  sont  pas  plus  sujettes  que  les 
autres  aux  maladies  épidémiques  qui  se  propagent  par  l'air  (Montaigne,  Socrate), 
575.  —  Il  semble  que  les  médecins  pourraient  tirer  plus  de  parti  des  odeurs,  car 
elles  ont  sur  nous  une  action  très  sensible  (emploi  de  I'encens  dans  les  églises), 
577.  —  En  Orient  on  fait  emploi  des  parfums  dans  l'apprêt  des  viandes  (le  roi  de 
Tunis),  577.  —  La  puanteur  est  une  des  incommodités  des  grandes  villes  (Venise, 
Paris),  577. 

CHAPITRE  LVI. 

Des  prières,  1,579.  —  Profession  de  foi  de  Montaigne:  elle  prime  tout  ce  qu'il 
peut  dire  ou  écrire  sur  la  religion,  579.  —  De  toutes  les  piùères,  l'oraison  domi- 
nicale est  celle  dont  on  devrait  faire  le  plus  fréquemment  usage,  579.  —  Dieu  ne 
devrait  pas  être  indifféremment  invoqué  à  propos  de  tout;  on  devrait  avoir  l'àme 
pure,  quand  on  le  prie,  579.  —  Mais  le  plus  souvent  on  prie  par  habitude;  on 
donne  une  heure  à  Dieu,  le  reste  au  vice,  581.  —  Que  peuvent  valoir  les  prières 
de  ceux  qui  vivent  dans  une  inconduite  persistante;  on  en  voit  qui  vont  jusqu'à 
sacrifier  leurs  convictions  religieuses  à  leurs  intérêts  temporels,  583.  —  Quelle 
prétention  que  de  penser  que  toute  croyance  autre  que  la  nôtre  est  entachée  d'er- 
reur, 583.  —  Les  psaumes  de  David  ne  devraient  pas  être  chantés  indifféremment 
par  tout  le  monde,  c'est  les  profaner;  la  Bible  ne  devrait  pas  dava-ntage  se  trou- 
ver dans  toutes  les  mains,  elle  ne  doit  être  lue  qu'avec  respect  et  lorsqu'on  y  est 
préparé,  son  étude  n'amende  point  les  méchants,  585.  —  Il  n'y  a  pas  d'entreprise 
plus  dangereuse  qu'une  traduction  de  la  Bible  en  langage  vulgaire,  peu  de  per- 
sonnes étant  aptes  à  prononcer  sur  les  difficultés  d'interprétation  (les  Juifs,  les 
Musulmans),  587.  —  Une  grande  prudence  est  à  apporter  dans  l'étude  des  questions 
dogmatiques  sur  lesquelles,  aujourd'hui,  les  femmes  et  même  les  enfants  se  mê- 
lent de  discuter  (les  mystères  du  temple  de  Delphes,  les  empereurs  Théodose  et 
Andronic  Comnène,  les  habitants  de  l'île  Dioscohide,  les  Païens),  587.  —  On  ne  de- 
vrait jamais  mêler  la  théologie  aux  discussions  philosophiques;  c'est  une  science 
à  part,  qui  a  son  objet  propre  et  sur  laquelle  les  initiés  seuls  devraient  être  ap- 
pelés à  écrire  (S.  Jean  Chrysostome),  589.  —  Le  nom  de  Dieu  ne  devrait  être  in- 
voqué que  dans  un  sentiment  de  piété,  591.  —  Abus  qu'on  fait  de  la  prière  (anec- 
dote contée  par  Marguerite  de  Navarre),  591.  —  Que  de  choses  on  demande  à 
Dieu,  qu'on  n'oserait  lui  demander  en  public  et  à  haute  voix  (les  Pythagoriciens, 
Œdipe),  593.  —  On  dirait  que  pour  beaucoup,  la  prière  n'est  qu'une  sorte  de  for- 
mule cabaUstique  pouvant  faciliter  l'accomplissement  de  nos  désirs,  593. 

CHAPITRE  LVII. 

De  l'âge,  I,  595.  —  Qu'entend-on  par  la  durée  naturelle  de  la  vie  de  l'homme, 
alors  que  tant  d'accidents  surviennent  qui  en  interrompent  le  cours  (Caton 
d'Utique)?  595.  —  Mourir  de  vieillesse  n'est  pas  un  genre  de  mort  plus  naturel 
qu'un  autre  et  c'est  la  mort  la  plus  rare  de  toutes,  597.  —  C'est  un  vice  des  lois 
d'avoir  retardé  jusqu'à  25  ans  l'âge  auquel  il  est  permis  de  gérer  soi-même  ses 
affaires;  dès  l'âge  de  vingt  ans,  on  peut  le  plus  souvent  augurer  ce  que  nous  se- 
rons (Servius  Tullius,  l'empereur  Auguste),  597.  —  On  cite  un  bien  plus  grand  nom- 
bre d'hommes  qui  se  sont  distingués  par  de  belles  actions  avant  leur  trentième 
année,  qu'on  n'en  cite  qui  se  sont  rendus  célèbres  après  (Annibal,  Scipion),  599.  — 
La  vieillesse  arrive  promptenient  ;  aussi  ne  faudrait-il  donner  à  l'apprentissage 
de  la  vie,  c'est-à-dire  à  l'éducation,  que  le  temps  strictement  nécessaire,  599. 


SOMMAIHE  DES  ESSAIS.       LIV.  II,  r.Il.  I.  —  VOL.  I.  B.21 


LIVRE  SECOND. 

CHAPITRE  I. 

De  l'inconstance  de  nos  actions,  I,  601.  —  On  trouve  dans  l'homme  tant 
de  contradictions,  qu'on  chercherait  en  vain  à  les  expliquer  (Marius  le  jeune, 
BoNiFACE  YIII,  Néron),  601.  —  Tout  homme  a  un  caractère  indéterminé  (l'empe- 
reur Auguste],  601.  —  Rien  de  plus  ordinaire  en  nous  que  l'inconstance;  à  peine 
l'antiquité  nous  offre-t-elle  quelques  hommes  toujoui-s  fermes  dans  leurs  desseins, 
cependant  le  caractère  de  la  sagesse  est  la  constance  dans  tout  ce  qui  est  juste  et 
bon  (Sénèque,  Démosthène),  601.  —  C'est  toujours  l'occasion  qui  fait  les  hommes 
tels  qu'ils  nous  apparaissent  (fille  de  vertu  équivoque  qui  tente  de  se  tuer  parce 
qu'elle  craint  d'être  violentée;  soldat  d'Antigone  qui,  venant  à  guérir  d'une  ma- 
ladie, perd  sa  valeur;  autre  soldat  devenu  courageux  pour  avoir  été  dévalisé), 
603.  —  Essentiellement  variable,  l'homme  est  tantôt  humble,  tantôt  orgueilleux  ; 
un  jour  chaste,  un  autre  jour  débauché;  avare  et  prodigue,  etc.  (le  chef  des 
Janissaires  de  Mahomet  II),  607.  —  Pour  être  véritablement  vertueux,  il  faudrait 
l'être  dans  toutes  les  circonstances  de  la  vie  ;  autrement  c'est  à  l'action  et  non  à 
l'homme  que  l'on  doit  des  éloges  (les  Grecs,  les  Cimbres,  les  Celtibériens),  609.  — 
Peu  d'hommes  ont  de  belles  qualités  qui  ne  présentent  des  taches.  La  vaillance 
même  d'Alexandre  le  Grand  n'en  est  pase.xempte;  quoique  extrême  en  son  genre, 
elle  n'a  pas  toujours  été  parfaite  et  ne  s'est  pas  étendue  à  tous  ses  actes,  609.  — 
Notre  inconstance  dans  les  diverses  circonstances  de  la  vie  n'a  rien  qui  puisse 
surprendre,  attendu  que  nul  d'entre  nous  n'a  de  règle  de  conduite  bien  définie 
(Sophocle,  les  Pariens  et  les  Milésiéns),  611.  —  On  ne  saurait  porter  un  jugement 
sur  les  hommes  d'après  les  actes  isolés  dont  l'ambition,  l'amour  ou  toute  autre 
passion  ont  pu  les  i-endre  capables;  pour  les  bien  connaître,  il  faudrait  pénétrer 
profondément  dans  leur  àme  et  les  examiner  longuement;  devant  une  tâche  aussi 
difficile  beaucoup,  qui  se  mêlent  de  juger,  devraient  s'abstenir,  611. 

CHAPITRE  IL 

De  l'ivrognerie,  I,  613.  —  Tous  les  vices  ne  sont  pas  de  même  gravité;  il  y 
a  entre  eux  des  degrés,  613.  —  L'ivrognerie  est  un  vice  grossier  qui  n'exige  pas, 
comme  d'autres,  de  l'adresse,  du  talent,  du  courage,  615.  —  Dans  l'ivresse  on 
n'est  plus  maître  de  ses  secrets.  On  a  vu  cependant  quelques  hommes  conserver,  en 
cet  état,  le  sentiment  de  leurs  devoirs;  mais  d'autres,  en  pareille  situation,  ont  pu 
éprouver  les  plus  grands  outrages  sans  même  en  rien  sentir  (l'historien  Josf:phe 
et  un  ambassadeur,  Auguste  et  Lucius  Pison,  Tibère  et  Cossus,  Cimber,  Cassius,  les 
Allemands,  Attale  et  Pausanias,  une  villageoise  des  environs  de  Bordeaux),  015. 
—  Les  anciens  ont  peu  décrié  le  vice  de  l'ivrognerie;  c'est  en  effet  celui  qui  porte 
le  moins  de  dommage  à  la  société,  il  est  des  plus  faciles  à  satisfaire  et  dans  les 
mœurs  de  certains  peuples  (Socrate,  Caton  le  Censeur,  Cyrus),  617.  — Les  anciens 
passaient  les  nuits  à  table  et  quelquefois  les  jours;  nous  avons  tendance  en  France 
à  nous  modérer  sous  ce  rapport,  mais  nous  nous  dédommageons  en  nous  adon- 
nant davantage  au  libertinage,  619.  — Portrait  et  caractère  du  père  de  Montaigne; 
ce  qu'il  pensait  de  la  chasteté  des  femmes,  619.  —  Boire  est  à  peu  près  le  dernier 
plaisir  qui  demeure  à  la  vieillesse.  D'où  vient  l'usage  de  boire  de  grands  verres 
à  la  fin  des  repas  (Anacharsis),  621.  —  Platon  interdit  le  vin  aux  adolescents  tout 
en  le  permettant  aux  hommes  faits;  encore  devraient-ils  s'en  abstenir  lorsqu'ils 
sont  à  la  guerre  ou  dans  l'exercice  de  fonctions  publiques;  son  abus  est  nuisible 
aux  vieillards  (les  Carthaginois,  Stili'on,  Arcésilas),  623.  —  Le  vin  peut-il  triom- 
pher de  la  sagesse?  Pour  répondre,  il  ne  faut  que  réfléchir  combien  est  grande  la 
faiblesse  humaine  (Lucrèce,  Virgile,  Plutarque),  625.  —  Les  faits  d'impassibilité 
au  milieu  des  tourments  que  nous  fournissent  les  philosophes  et  aussi  les  raart3Ts 
chrétiens,  sont  des  effets  de  surexcitation  due  à  un  enthousiasme  frénétique  (Mé- 
trodore,  Anaxarque,  les  martyrs),  627.  —  Cette  surexcitation  apparaît  également 


B.22  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

dans  les  propos  tenus  sous  l'effet  d'idées  fixes;  nous  la  constatons  aussi  chez  les 
guerriers,  les  poètes  chez  lesquels  l'àme  peut,  sous  cette  influence,  s'élever  au- 
dessus  d'elle-môme  (Antisthène,  Sextius,  Épicuke,  Akistote,  Platon),  627. 

CHAPITRE  III. 

A  propos  d'une  coutume  de  l'île  de  Céa,  I,  629.  —  Il  y  a  des  accidents 
pires  que  la  mort;  celui  qui  ne  la  craint  pas,  brave  toutes  les  tyrannies  et  toutes 
les  injustices  (Damindas,  Agis,  un  enfant  de  Lacédémone,  les  Lacédémoniens  et  An- 
tipater,  les  Lacédémoniens  et  Philippe),  629.  —  C'est  un  bienfait  de  la  nature  que 
d'avoir  mis  constamment,  comme  elle  l'a  fait,  la  mort  à  notre  portée,  et,  par  elle, 
de  nous  avoir  faits  libres  d'accepter  ou  de  refuser  l'existence  qui  nous  est  faite. 
Arguments  en  faveur  du  suicide  (Boiocalus,  le  grammairien  Servius,  les  Stoïciens, 
Hégésias,  Diogène  et  Speusippe),  631.  —  Objections  contre  le  suicide;  c'est  une  lâ- 
cheté de  fuir  l'adversité;  c'est  aller  contre  les  lois  de  la  nature  que  de  ne  pas  sup- 
porter l'existence  telle  qu'elle  nous  l'a  faite  (Regulus  et  Caton,  Martial,  Lucain, 
Platon),  633.  —  Pour  ceux  qui  admettent  comme  licite  de  se  donner  la  mort, 
dans  quel  cas  est-on  fondé  à  user  de  cette  faculté?  Tant  que  demeure  un  reste 
d'espérance  on  ne  doit  pas  disposer  de  sa  vie,  et  les  revirements  de  la  fortune 
sont  tels  qu'il  n'y  a  jamais  lieu  de  désespérer  (les  vierges  de  Milet,  Therycion  et 
Cléomène,  Josèphe,  Cassius  et  Brutus,  le  duc.  d'Enghien  à  Cérisoles),  637.  —  Cepen- 
dant des  maladies  incurables,  d'irrémédiables  infortunes  peuvent  autoriser  une 
mort  volontaire  (Démocrite  chef  des  Étohehs,  Antinous  et  Theodotus,  un  Sicilien 
à  Goze,  les  femmes  juives  lors  de  la  persécution  d'Antiochus,  subterfuge  employé 
par  sa  famille  vis-à-vis  d'un  criminel,  Scribonia  et  son  neveu  Libo,  mort  coura- 
geuse de  Razias  lors  de  la  persécution  de  Nicanor),  639.  —  Elle  est  glorieuse  chez 
les  femmes  qui  n'ont  d'autre  moyen  de  conserver  leur  honneur,  ou  auxquelles  il 
a  été  ravi  par  la  violence,  ce  dont  beaucoup  pourtant  finissent  par  prendre  leur 
parti  (Pelagia  et  Sopiironia,  une  femme  de  Toulouse,  Clément  Marot),  641.  —  Les 
raisons  les  plus  diverses  ont  été  cause  de  semblables  résolutions  (L.  Aruntius, 
Gr.  Silvanus  et  Statius  Proximus,  Spargapizez,  Bogès,  Ninachetuen  seigneur  indien, 
CoccEius  Nerva),  643.  —  Femmes  se  donnant  la  mort  pour  encourager  leurs  maris 
à  faire  de  même  (Sextilia  femme  de  Scaurus,  Paxea  femme  de  Labeo,  la  femme  de 
Fulvius),  645.  —  Mort  de  Vibius  Virius  et  de  vingt-sept  autres  sénateurs  de  Ca- 
poue,  645.  —  Inhumanité  de  Fulvius  consul  romain  (Taurea  Jubellius),  647.  — 
Indiens  qui  se  brûlent  tous  dans  une  ville  assiégée  par  Alexandre  le  Grand,  647. 
—  Fin  tragique  des  habitants  d'Astapa,  ville  d'Espagne  assiégée  par  les  Romains, 
649.  —  Fin  analogue  des  habitants  d'Abydos;  de  semblables  résolutions  sont  plus 
facilement  décidées  par  les  foules  que  par  les  individus,  649.  —  Privilège  accordé 
du  temps  de  Tibère  aux  condamnés  à  mort  qui  se  la  donnaient  eux-mêmes, 
649.  —  Parfois  on  se  donne  la  mort  dans  l'espoir  des  félicités  d'une  vie  future 
(S.  Paul,  Cléombrote,  Jacques  du  Chatel  évêque  de  Soissons,  les  Indiens),  651.  — 
Plusieurs  coutumes  et  institutions  politiques  autorisaient  le  suicide  et  s'y  prê- 
taient (à  Marseille,  dans  l'île  de  Céa;  mort  courageuse,  dans  ces  conditions,  d'une 
femme  de  haut  rang  de  cette  île  qui  s'empoisonne  en  public;  chez  une  nation 
hyperboréenne),  651.  —  Conclusion  :  de  grandes  douleurs  et  une  mort  misérable  en 
perspective  sont  les  motifs  les  plus  excusables  qui  peuvent  nous  porter  à  nous 
ôter  la  vie,  653. 

CHAPITRE  IV. 

A  demain,  les  affaires,  I,  655.  —  Amyot  nous,  a  rendu  un  réel  service  on 
traduisant  Plutarque,  ouvrage  si  plein  d'enseignements;  il  ferait  également  œuvre 
utile  en  traduisant  Xénophon,  655.  —  Plutarque  nous  cite,  entre  autres,  un 
exemple  de  discrétion  donné  par  Rusticus  différant  d'ouvrir  un  message  de  l'em- 
pereur, pour  ne  pas  troubler  une  conférence.  655.  —  Si  trop  de  curiosité  est  ré- 
préhensible,  trop  de  nonchalance  ne  l'est  pas  moins  et,  de  la  part  de  quelqu'un 
chargé  des  affaires  publiques,  ce  peut  avoir  les  plus  graves  inconvénients  (M.  de 
Routières,  Jules  César,  Arciivas  tyran  de  Thèbes),  657.  —  Ligne  de  conduite  qu'il 
semble  possible  de  tracer  à  ce  sujet  (Place  consulaire),  657. 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  II,  CU.  V.  —  VOL.  I.  B.2a 


CHAPITRE  V. 

De  la  conscience,  I,  659.  —  On  dissimule  en  vain;  l'àmc  se  révèle  toujours 
par  quelque  côté  (un  gentilhomme  du  parti  contraire  à  celui  de  Montaigne,  Bessls), 
059.  —  Qui  va  contre  sa  conscience,  l'a  contre  lui  ;  le  châtiment  d'une  faute  com- 
mence au  moment  même  où  elle  se  commet  (Platon,  Hésiode,  Apollodoke,  tyran 
de  Potidée,  Épicure,  Juvenal),  659.  —  Par  contre,  une  bonne  conscience  nous 
donne  confiance  (Scipion),  661.  —  Injustice  et  danger  de  la  torture  pour  obtenir 
des  aveux  des  accusés  (Publils  Syrus,  Philotas),  663.  —  Ce  procédé  d'information 
est  réprouvé  par  certaines  nations  que  nous  qualifions  de  barbares  et  qui,  en  cela, 
le  sont  moins  que  nous  (Bajazet  1"),  663. 

CHAPITRE  VI. 

De  l'exercice,  I,  665.  —  Le  raisonnement  et  la  science  ne  suffisent  pas  pour 
lutter  contre  les  difficultés  de  la  vie;  il  faut  nous  y  exercer  pour  pouvoir  en 
triompher  le  cas  échéant,  665.  —  Mais  si  l'on  peut  par  l'expérience  fortifier  son 
âme  contre  la  douleur,  l'indigence,  etc.,  contre  la  mort,  nous  n'avons  pas  cette 
ressource  parce  qti'on  ne  la  souffre  qu'une  fois,  665.  —  Exemple  mémorable  de 
.1.  Canius  qui,  au  moment  de  mourir,  ne  songeait  qu'à  observer  l'impression  qu'i 
en  pouvait  ressentir,  667.  —  Il  y  a  pourtant  possibilité  de  se  familiariser  avec  lai 
mort  et  presque  de  l'essaj'er;  le  sommeil  en  est  une  image,  les  évanouissements 
lui  ressemblent  plus  encore,  667.  —  Comme  tant  d'autres  choses,  la  mort  produit 
plus  d'effet  de  loin  que  de  près,  669.  —  Accident  survenu  à  Montaigne  qui  lui 
causa  un  long  évanouissement,  669.  —  Ce  qu'il  éprouva  pendant  cette  défaillance 
et  en  reprenant  ses  sens,  671.  —  Ce  fut  pour  lui  une  preuve  de  l'idée,  qu'il  s'était 
faite  depuis  longtemps,  que  les  affres  de  la  mort  sont  les  effets  d'une  désorgani- 
sation à  laquelle  l'âme  ne  participe  pas,  671.  —  L'agonie  est  un  état  analogue  à 
celui  d'un  homme  qui  ne  serait  ni  tout  à  fait  éveillé,  ni  complètement  endormi, 
673.  —  Au  début  de  son  accident  Montaigne  demeure  anéanti,  ses  mouvements 
comme  ses  réponses  sont  inconscients,  seul  règne  en  lui  un  sentiment  de  bien- 
être  qui  le  tient  tout  entier;  à  ce  moment  où  la  mort  était  si  proche,  sa  béatitude 
était  complète,  675.  —  Peu  à  peu  renaissant  à  l'existence,  la  mémoire  lui  revient, 
et  en  même  temps  les  souffrances  l'envahissent  et  prennent  une  place  prépondé- 
rante, 677.  —  Si  Montaigne  s'est  si  longuement  arrêté  sur  cet  accident,  c'est  que 
son  but  est  de  s'étudier  dans  toutes  les  circonstances  de  la  vie,  afin  d'offrir  aux 
autres  d'utiles  documents  (Pline  l'Ancien),  677.  —  C'est  à  tort  que  l'on  accuse  de 
vanité  ceux  qui  se  confessent  publiquement  et  qui,  en  toute  sincérité,  montrent 
à  découvert  leurs  actes  et  leurs  passions;  nous  sommes  à  nous-mêmes,  pour  qui 
sait  s'observer,  une  précieuse  source  d'enseignements  (Socrate),  679.  —  Il  faut 
reconnaître  toutefois  que  cette  étude  de  soi-même  est  des  plus  délicates,  681.  — 
S'occuper  de  soi  n'est  pas  se  complaire  en  soi,  c'est  le  moyen  de  se  connaître  ;  par 
suite  d'arriver  à  m,ieux,  ce  qui  est  le  but  de  la  sagesse,  683. 


DEUXIÈME   VOLUME 

CHAPITRE  VII. 

Des  récompenses  honorifiques,  II,  IL  — Les  distinctions  honorifiques  sont 
éminemment  propres  à  récompenser  la  valeur  (l'empereur  Auguste),  11.  —  A  cet 
égard,  l'institution  des  ordres  de  chevalerie  est  une  conception  des  plus  heureu- 
ses (ordre  de  S.-Michel),  II.  —  Les  récompenses  pécuniaires  s'appliquent  à  des 
services  rendus  de  tout  autre  caractère,  13.  —  La  vaillance  est  une  vertu  assez 
commune  qui  prime  chez  nous  la  vertu  proprement  dite,  laquelle  est  bien  autre- 
ment rare,  13.  —  Conditions  dans  lesquelles  se  décernait  l'ordre  de  Saint-Michel  ; 


B.24  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

abus  qui  en  a  été  fait,  discrédit  en  lequel  il  est  tombé  ;  mieux  vaudrait  ne  pas  le 
donner  à  des  gens  le  méritant,  que  l'avilir  en  le  prodiguant,  13.  —  Ce  discrédit 
rend  difficile  de  mettre  en  honneur  un  nouvel  ordre  de  chevalerie  (ordre  du 
S. -Esprit),  15.  —  En  France,  la  vaillance  tient  chez  l'homme  le  premier  rang 
comme  la  chasteté  chez  la  femme,  17. 

CHAPITRE  Vm. 

De  l'affection  des  pères  pour  leurs  enfants,  II,  19.  —  Comment  Mon- 
taigne a  été  amené  à  écrire  et  à  faire  de  lui-même  le  sujet  de  ses  Essais,  et  pour- 
quoi il  consacre  ce  chapitre  à  Madame  d'Estissac,  19.  —  L'affection  des  pères 
pour  les  enfants  est  plus  grande  que  celle  des  enfants  pour  leurs  pères,  ce  qui 
tient  à  ce  que  tout  auteur  s'attache  à  son  œuvre  et  que,  toujours,  celui  qui 
donne  aime  plus  que  celui  qui  reçoit,  21.  —  Il  ne  faut  pas  trop  se  laisser  in- 
fluencer par  les  penchants  que  l'on  nomme  naturels;  on  ne  doit  d'amitié  aux  en- 
fants que  s'ils  s'en  rendent  dignes;  et  c'est  une  faute  qui  se  produit  fréquem- 
ment, d'être  plus  généreux  envers  les  enfants  lorsqu'ils  sont  très  jeunes,  que 
lorsque  à  un  âge  plus  avancé  leurs  besoins  se  sont  accrus;  il  semble  qu'alors 
on  les  jalouse,  21.  —  11  faudrait,  au  contraire,  partager  de  bonne  heure  ses  biens 
avec  eux;  cela  leur  permettrait  de  s'établir  plus  tôt  et  dans  de  meilleures  condi- 
tions, et  ne  les  inciterait  pas,  comme  il  arrive  parfois,  à  commettre  par  besoin 
des  actions  viles,  des  vols  par  exemple,  auxquelles  ils  s'habituent  (un  gentilhomme 
adonné  au  vol),  23.  —  Mauvaise  excuse  des  pères  qui  thésaurisent  pour  conser- 
ver le  respect  de  leurs  enfants;  c'est  par  leur  vertu  et  leur  capacité  seules  qu'ils 
peuvent  se  rendre  respectables,  25.  —  Trop  de  rigueur  dans  l'éducation  forme  des 
âmes  serviles  (Montaigne,  Léonore  sa  fille),  27.  —  Il  ne  faut  pas  se  marier  trop 
jeune  ;  l'âge  le  plus  favorable  au  mariage  semble  être  de  trente  à  trente-cinq  ans, 
cette  règle  ne  s'appliquant  pas  toutefois  aux  classes  inférieures  de  la  société  où 
tout  homme  vivant  du  travail  de  ses  mains  a  intérêt  à  avoir  beaucoup  d'enfants 
(Aristote,  Platon,  Thalès,  les  Gallois,  un  roi  de  Tunis,  les  athlètes  en  Grèce, 
coutume  dans  les  Indes),  27.  —  Un  père  ne  doit  pas  se  dépouiller  trop  jeune  en 
faveur  de  ses  enfants,  29.  —  Celui  qu'accablent  les  ans  et  les  infirmités  ne  devrait 
garder  pour  lui  que  le  nécessaire  (l'empereur  Charles -Quint),  29.  —  Mais  peu  de 
gens  savent  se  retirer  à  temps  quand  l'âge  les  gagne,  31.  —  En  faisant  l'abandon 
de  l'usufruit  de  son  superflu  à  ses  enfants  un  père  doit  se  réserver  la  faculté  de 
les  surveiller,  de  vivre  avec  eux  et  même  de  reprendre  ses  biens  s'il  a  des  motifs 
de  plainte  (singularité  d'un  doyen  de  S.-Hilaire  de  Poitiers),  31.  — ■  Appeler  les 
parents  des  noms  de  père  et  de  mère,  ne  devrait  pas  être  interdit  aux  enfants; 
on  se  trompe  quand  on  croit  se  rendre  plus  respecta,ble  à  eux  par  la  morgue  et 
la  hauteur;  il  vaut  mieux  s'en  faire  aimer  que  s'en  faire  craindre,  33.  —  Exemple 
d'un  vieillard  qui,  voulant  se  faire  craindre,  était  joué  par  tout  son  entourage, 
35.  —  Quand  les  vieillards  sont  chagrins,  grondeurs,  avares,  toute  leur  maison  : 
femme,  enfants,  domestiques,  se  ligue  contre  eux  pour  les  tromper  (Caton),  37. 
—  Profitons  pour  nous  diriger  à  ce  moment  de  la  vie,  des  exemples  que  nous 
voyons  autour  de  nous,  39.  —  Un  père  regrette  parfois  de  s'être  montré  trop  grave, 
trop  peu  bienveillant  pour  ses  enfants  (le  maréchal  de  Montluc),  39.  —  Dans 
la  vieillesse  c'est  surtout  un  ami  qu'il  faudmit;  l'amitié  est  préférable  à  toutes 
les  liaisons  de  famille,  41.  —  C'est  un  tort  de  laisser  à  sa  veuve  les  biens  dont 
les  enfants  devraient  jouir.  Ce  n'est  pas  non  plus  toujours  une  bonne  affaire  que 
d'épouser  une  femme  ayant  une  belle  dot,  quoique  une  femme  pauvre  ne  soit 
pas  par  cela  même  plus  maniable,  aucune  considération  ne  modifiant  sur  ce 
point  le  caractère  de  la  femme,  41  —  Un  mari  ne  doit  attribuer  à  sa  veuve  que 
ce  qu'il  lui  faut  pour  se  maintenir  dans  le  rang  qu'elle  a  dans  la  société;  on  ne 
doit  la  laisser  maîtresse  de  disposer  de  la  fortune  de  ses  enfants  que  durant  le 
temps  de  leur  minorité,  43.  —  Pour  la  répartition  des  biens  qu'on  laisse  en  mou- 
rant, le  mieux  est  de  s'en  rapporter  aux  lois  admises  dans  le  pays;  les  testa- 
ments sont  presque  toujours  injustes,  43.  —  Les  substitutions  en  vue  d'éterniser 
notre  nom  sont  ridicules.  On  fait  fréquemment  erreur  en  déshéritant  des  enfants 
dont  l'extérieur  ne  pronostique  pas  un  avenir  avantageu.x;  dans  son  enfance, 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  II,  Cil.  VIII.  -  VOL.  II.        B.25 

Montaigne  était  lourdaud  et  peu  dégourdi,  45.  —  Raisons  données  par  Platon 
pour  que  les  questions  d'héritage  soient  réglées  par  les  lois,  15;  —  Revenons  aux 
femmes  :  Il  ne  faut  pas  leur  laisser  le  droit  de  partager  les  biens  que  les  enfants 
tiennent  de  leur  père,  la  mobilité  et  la  faiblesse  de  leur  jugement  ne  leur  permet- 
tant pas  de  faire  de  bons  choix;  le  plus  souvent  ce  sont  ceux  qui  le  méritent  le 
moins,  qu'elles  affectionnent  le  plus,  47.  —  On  compte  en  vain  sur  ce  qu'on  ap- 
pelle la  tendresse  maternelle;  en  ont-elles  celles  qui  confient  à  des  étrangères,  et 
souvent  aux  mamelles  des  animaux,  les  enfants  qu'elles  devraient  allaiter?  47.  — 
Les  hommes  chérissent  les  productions  de  leur  esprit  bien  plus  que  leurs  propres 
enfants,  et  en  effet  c'est  bien  plus  exclusivement  leur  ouvrage  (Labienus,  Cassius 
Severl's,  Cremltius  Cordus,  Lucain,  Épicure,  s.  Augustin,  Montaigne,  Épaminondas, 
Alexandre  et  César,  Phydias,  Pygmalion),  49. 

CHAPITRE  IX. 

Des  armes  des  Parthes,  II,  55.  —  Mauvaise  habitude,  aux  armées,  de  la 
noblesse  de  nos  jours  de  ne  s'armer  qu'au  dernier  moment,  55.  —  Nos  armes 
actuelles  sont  plus  incommodes  par  leur  poids  qu'elles  ne  sont  propres  à  la  dé- 
fense (Alexandre  le  Grand,  les  anciens  Gaulois,  Lucullus  et  les  Mèdes),  55.  —  On 
est  plus  vigilant,  quand  on  se  sent  moins  protégé  (Scipion  Émilien),  57.  —  C'est  le 
défaut  d'habitude  qui  nous  fait  paraître  nos  armes  si  pesantes;  poids  énorme  porté 
par  les  soldats  romains  (Caracalla,  les  soldats  de  Marius,  Scipion  Émilien  en  Es- 
pagne), 57.  —  Ressemblance  des  armes  des  Parthes  avec  celles  dont  nous  faisons 
usage  nous-mêmes  aujourd'hui  (Démétrius  etALCiNus),  57. 

CHAPITRE  X. 

Des  livres,  II,  Cl.  —  En  écrivant  ses  Essais,  Montaigne  n'a  pas  de  plan 
arrêté,  il  donne  libre  cours  à  sa  fantaisie;  il  sait  combien  il  est  ignorant,  aussi, 
tout  en  disant  sur  chaque  chose  ce  qu'il  juge  à  propos,  peu  lui  importe  les  er- 
reurs que  l'on  pourra  relever,  61.  —  Double  motif  qu'il  a  pour  ne  pas  nommer 
les  auteurs  auxquels  il  emprunte  des  idées,  voire  même  des  passages  entiers  et 
dont  il  donne  des  citations;  il  veut  orner  son  ouvrage  et  rire  de  la  critique  que 
l'on  fera  peut-être  en  lui,  et  sans  s'en  douter,  des  auteurs  de  l'antiquité  auxquels 
il  fait  des  emprunts,  61.  —  Il  renouvelle  l'aveu  de  son  ignorance,  mais  la  science 
coûte  trop  à  acquérir  et  il  préfère  passer  doucement  la  vie;  aussi,  ne  lit-il  que 
les  autours  qui  l'amusent  et  ceux  qui  lui  apprennent  à  bien  vivre  et  à  bien  mou- 
rir, 63.  —  Parmi  les  auteurs  des  temps  modernes  simplement  amusants,  Montai- 
gne n'apprécie  guère  que  Boccace,  Rabelais  et  Jean  Second;  il  a  toujours  trouvé 
insipides  les  romans  des  Amadis  et,  l'âge  ayant  modifié  ses  goûts,  AaiosTEet  même 
Ovide  qui  dans  son  enfance  lui  plaisait  tant,  n'ont  plus  d'attrait  pour  lui,  65.  — 
11  regrette  d'avoir  à  confesser  qu'il  n'apprécie  pas  I'Axioche  de  Platon,  c'est 
probablement  un  effet  de  son  ignorance,  65.  —  Les  fables  d'ÉsopE  renferment 
généralement  un  sens  plus  profond  que  celui  qui  ressort  à  première  vue,  67.  — 
Parmi  les  poètes  latins,  les  premiers  pour  lui,  sont  :  Virgile,  surtout  par  ses 
Géorgiques  et  le  cinquième  livre  de  I'Énéide;  Lucrèce,  Catulle  et  Horace;  il 
prise  aussi  Lucain,  mais  plus  pour  ses  pensées  que  pour  son  style,  67.  —  Com- 
bien Térence  est  au-dessus  de  Plaute;  quelle  élégance,  quelle  grâce  inimitable,  un 
rien  lui  suffit  pour  provoquer  l'intérêt;  quelle  différence  sous  ce  rapport  entre 
eux  et  les  poètes  comiques  de  nos  jours!  67.  —  Les  bons  poètes  ont  toujours  évité 
l'affectation  et  la  recherche:  c'est  ce  qui  fait  que  les  épigrammes  de  Catulle  sont 
si  supérieures  dans  leur  simplicité,  aux  satires  de  Martial  dont  les  pointes  sont 
aiguisées  avec  tant  de  soin,  69.  —  Comme  les  bons  plaisants,  les  bons  poètes 
n'ont  pas  non  plus  besoin  de  déguisements,  d'ornements  superflus  pour  exciter 
l'intérêt;  Que  l'on  compare  Virgile  et  Arioste  :  le  premier  fend  l'air  d'un  vol 
hardi,  le  second  ne  fait  que  voleter  de  branche  en  branche,  71.  —  D'entre  les 
ouvrages  sérieux,  Plutarque  et  Sénèque  sont  ceux  que  préfère  Montaigne;  compa- 
raison entre  ces  deux  auteurs,  71.  —  Quant  à  Cicéron,  ce  que  Montaigne  ap- 


B.26  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

précie  le  plus  en  lui,  ce  sont  ses  ouvrages  philosophiques;  mais  il  Tennuie  par 
ses  longs  préambules  et  ses  éternelles  définitions,  il  arrive  trop  tard  au  sujet. 
On  peut  en  dire  autant  de  Platon  dont  la  forme  dialoguée  alourdit  le  style,  ce 
n'est  point  ainsi  qu'écrivent  Pline  et  quelques  autres,  73.  —  Les  lettres  de 
CicÉRON  à  Atticus  sont  d'un  grand  intérêt  par  les  particularités  qu'elles  con- 
tiennent sur  les  mœui"s  et  le  caractère  de  l'auteur  qui,  bon  citoyen,  avait  peu 
d'énergie,  était  dévoré  d'ambition  et  de  vanité  et  avait  la  faiblesse  de  se  croire 
un  grand  poète  (Brutus),' 75.  —  Son  éloquence  hors  de  pair,  a  trouvé  cependant 
des  censeure:  on  lui  a  reproché  ses  trop  longues  périodes  et  les  mots  à  effet  par 
lesquels  il  les  termine  si  souvent  (Cicéron  le  jeune  et  Cestius),  75.  —  De  tous  les 
auteurs  de  divers  genres,  les  historiens  sont  ceux  que  Montaigne  affectionne 
le  plus,  parce  qu'ils  font  connaître  l'homme  en  général;  et,  parmi  les  histo- 
riens ceux  qui,  tels  que  Plutarque  et  Diogène  Laerce,  ont  écrit  la  vie  de  grands 
personnages,  77.  —  Éloge  des  Commentaires  de  César,  77.  —  Les  meilleurs  histo- 
riens, sont  ceux,  assez  rares  du  reste,  qui,  ayant  le  génie  de  l'histoire,  s'imposent 
par  leur  valeur,  et  ceux  qui  l'écrivent  avec  simplicité  et  bonne  foi;  les  autres 
nous  induisent  en  erreur  par  leurs  relations  tronquées  ou  altérées  et  leurs  juge- 
ments erronés  (Froissard),  79.  —  Les  bonnes  histoires  sont  surtout  celles  faites 
par  des  hommes  ayant  pris  part  aux  événements  qu'ils  racontent;  difficulté  de 
fixer,  même  dans  ce  cas,  les  détails  de  certains  faits  (Asinils  Pollio  et  les  Com- 
mentaires DE  CÉSAR,  Bodin),  81.  —  Jugcmeuts  de  Montaigne  sur  Guichardin,  Phi- 
lippe de  Comines,  Guillaume  et  Martin  du  Bellay;  ces  deux  derniers  paraissent 
avoir  eu  pour  but  de  faire  le  panégyrique  de  François  I",  plutôt  que  d'écrire  des 
mémoires  (Sire  de  Joinville,  Éginhard),  81. 


CHAPITRE  XI. 

De  la  cruauté,  II,  85.  —  La  bonté  a  l'apparence  de  la  vertu;  mais  celle-ci 
lui  est  supérieure  en  ce  qu'elle  suppose  une  lutte  perpétuelle  contre  les  passions 
(les  Stoïciens,  Épicuriens  et  Arcésilas),  85.  —  C'est  par  les  combats  qu'elle  livre, 
que  la  vertu  se  perfectionne  (Épaminondas,  Socrate,  Metellus),  87.  —  Dans  les 
âmes  touchant  à  la  perfection,  la  vertu  est  facile  à  pratiquer  parce  qu'elle  y  est  à 
l'état  d'habitude  (Socrate),  89.  —  Combien  est  belle  la  mort  de  C.aton  d'Utique, 
étant  donnés  ses  circonstances  et  son  mobile,  91.  —  L'espèce  de  gaîté  qui  ac- 
compagne la  mort  de  Socrate  met  encore  celle-ci  au-dessus  de  celle  de  Caton 
(Aristippe),  93.  —  La  vertu  comporte  divers  degrés  :  résister  au  vice  d'une  façon 
continue  et  en  triompher,  est  plus  beau  que  de  réagir  après  y  avoir  cédé  de 
prime  abord;  et  cette  réaction  elle-même  est  plus  méritoire  que  de  ne  pas  s'a- 
bandonner à  mal  faire  par  nonchalance  de  tempérament,  93.  —  Certaines  vertus 
nous  sont  attribuées  qui  ne  proviennent  que  de  la  faiblesse  de  nos  facultés,  ce 
dont  il  y  a  lieu  de  tenir  compte  avant  de  porter  un  jugement  sur  nos  actes 
(appréciation  sur  la  bravoure  chez  les  Italiens,  les  Espagnols,  les  Français,  les 
Allemands  et  les  Suisses),  93.  —  Jlontaigne  déclare  qu'il  a  dû  à  son  tempérament, 
•plus  qu'aux  efforts  qu'il  a  faits  pour  leur  résister,  de  ne  pas  céder  à  ses  pas- 
sions, et  qu'il  était  plus  réglé  dans  ses  mœui's  que  dans  ses  pensées  et  ses  pro- 
pos, ainsi  que  cela  arrive  chez  bien  d'autres  (Aristippe,  Épicure),  95.  —  Il  estime, 
contrairement  à  ce  qu'en  pensent  les  Stoïciens,  que,  pour  être  adonné  à  un  vice, 
on  n'est  pas  nécessairement  sujet  à  tous  les  autres  (Socrate,  Stilpon),  99.  —  Il  est 
possible  à  l'homme,  quoique  le  contraire  ait  été  soutenu,  de  demeurer  maître  de 
ses  pensées  et  de  sa  volonté  sous  les  caresses  les  plus  ardentes  de  la  femme  la 
plus  désirée,  plus  encore  que  sous  l'excitation  de  la  chasse  pour  qui  a  cette  pas- 
sion, 101. —  Sensibilité  de  Montaigne;  son  horreur  pour  tout  ce  qui  est  cruauté 
(Jules  César),  101.  —  Même  à  l'égard  des  criminels,  la  peine  de  mort  devrait  être 
appliquée  sans  aggravation  de  tourments  barbares  qui  n'ajoutent  rien  à  son  effet 
(un  soldat  prisonnier),  103.  —  Ces  barbaries  devraient,  tout  au  plus,  s'exercer 
sur  les  corps  inanimés  des  suppliciés;  d'autant  qu'il  est  à  remarquer  que  mutiler 
les  cadavres,  produit  une  grande  impression  sur  le  peuple.  Aujourd'hui,  au  con- 
traire, on  en  est  arrivé  à  tuer  et  à  torturer  les  gens  uniquement  pour  le  plaisir 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  II,  Cil.  XI.  -  VOL.  11.         B.27 

de  leurs  souffrances  (le  voleur  Catena,  Artaxerxès,  les  Égyptiens),  lOli.  —  Huma- 
nité de  MOiNTAioNE  vis-à-vis  des  bêtes,  105.  —  Le  dogme  de  l'immortalité  de  l'àme 
a  conduit  au  système  de  la  métempsjcose  auquel,  pour  sa  part,  Montaigne  ne 
croit  guère  (Pythagore,  les  Égyptiens,  les  anciens  Gaulois),  107.  —  Chez  certains 
peuples,  certains  animaux  étaient  divinisés;  c'était  un  hommage  rendu,  soit  aux 
services  que  nous  en  retirons,  soit  aux  qualités  essentielles  qui  les  caractérisent, 
107.  —  Nous  devons  nous  montrer  justes  envers  nos  semblables  et  avoir  des 
égards  pour  toutes  les  autres  créatures  susceptibles  d'en  sentir  les  effets;  des 
peuples  entiers,  des  hommes  célèbres  ont  témoigné  par  des  monuments  et  autre- 
ment leur  reconnaissance  à  des  animaux  (les  Turcs,  les  oies  du  Capitole,  les  bêtes 
de  somme  employées  à  Athènes  à  l'érection  d'un  temple,  les  Agrigentins,  les  Égyp- 
tiens, CiMON,  Xantippe,  Plutarque),  109. 


CHAPITRE  XII. 

Apologie  de  Raixaond  Sebond,  II,  111.  —  Est-il  vrai  que  la  science  soit 
mère  de  toutes  les  vertus,  comme  l'ignorance  de  tous  les  vices?  111.  —  Son  père 
avait  les  savants  en  haute  estime  et  les  accueillait  avec  distinction;  pour  lui,  Mon- 
taigne, il  se  contente  de  les  aimer,  111.  —  Un  de  ces  savants.  Pierre  Bunel,  qui  avait 
prévu  les  immenses  conséquences  de  la  Réforme,  laquelle  commençait  à  poindre 
en  France,  ayant  donné  le  traité  de  Raimond  de  Sebond  sur  «  la  Théologie  natu- 
relle »  au  père  de  Montaigne,  celui-ci  le  fit  traduire  d'espagnol  en  français  par  son 
fils,  traduction  qui  depuis  a  été  publiée,  111.  —  Éloge  de  ce  livre  (Adrien  Turne- 
Bus),  113.  — Cet  ouvrage  a  soulevé  des  objections;  la  première  c'est  qu'  «  il  ne 
faut  pas  appuyer  de  raisons  humaines  ce  qui  est  article  de  foi  »,  115.  —  Il  est 
vrai  que  la  raison  est  insuffisante  pour  démontrer  par  elle-même  des  faits  au-des- 
sus de  notre  intelligence;  il  faut  que  d'abord  nous  soyons  éclairés  parla  foi  qui 
est  une  grâce  de  Dieu  ;  la  raison  a  alors  son  utilité  en  venant  corroborer  ce  que 
la  foi  enseigne,  115.  — Chez  le  Chrétien,  la  foi  fait  généralement  défaut;  aussi  sa 
vie  qui,  dirigée  par  la  Divinité  elle-même,  devrait  être  si  édifiante,  prête-t-elle 
si  fort  au  reproche  ;  les  uns  font  semblant  de  croire,  les  autres  se  persuadent 
qu'ils  croient  et  ne  savent  ce  que  c'est  que  croire  (les  Mahométans,  Ics^Païens, 
S.  Louis  et  un  hoi  tartare  converti,  un  Juif  voyageant  à  Rome),  117.  —  Dans  les 
guerres  de  religion,  ce  sont  les  intérêts  des  jiartis  qui  les  guident,  si  bien  que 
parfois  les  maximes  de  l'un  sont  abandonnées  par  lui  et  reprises  par  l'autre  qui 
les  combattait,  119.  —  Chacun  fait  servir  la  religion  à  ses  passions;  le  zèle  du 
chrétien  éclate  surtout  pour  produire  le  mal;  si  notre  foi  était  sincère,  outrage- 
rions-nous sans  cesse  Dieu  comme  nous  le  faisons  et  craindrions-nous  la  mort 
qui  doit  nous  réunira  lui  (ANTiSTiif:NE,  DioGi':NE)?  121.  —  C'est  ne  pas  croire,  que 
croire  par  faiblesse  ou  par  crainte,  123.  —  Les  athées  ne  le  sont  guère  que  par 
vanité;  ils  veulent  se  montrer  au-dessus  des  croyances  populaires;  en  présence 
de  la  mort,  ils  reviennent  aux  idées  religieuses  (Bion),  125.  —  L'opinion  de  Pla- 
ton, que  les  enfants  et  les  vieillards  sont  plus  portés  à  la^  religion  que  les  hommes 
dans  la  force  de  l'âge,  n'est  pas  exacte;  ce  n'est  pas  par  faiblesse  d'esprit  que  nous 
y  sommes  amenés,  mais  parce  que  Dieu  se  manifeste  à  nous  par  ses  œuvres;  ce 
que  nous  en  saisissons  explique  ce  qui  nous  en  échappe;  c'est  ce  que  Sebond 
s'applique  à  démontrer,  127.  —  Ses  arguments,  par  leur  conformité  avec  ce  que 
nous  enseigne  la  foi,  ont  une  valeur  indéniable  (Socrate,  Caton,  Sebond),  129. 

La  seconde  objection  faite  à  Sebond,  c'est  que  «  ses  arguments  sont  faibles  »; 
mais  est-il  possible  d'en  produire  d'autres,  étant  donné  le  peu  que  nous  pouvons 
par  nous-mêmes?  129.  —  11  faut  tout  d'abord  reconnaître  qu'il  est  bien  des  choses 
qui  ne  peuvent  s'expliquer  par  la  raison  seule  (S.  Augustin),  131.  —  L'homme  se 
croit  une  grande  supériorité  sur  toutes  les  autres  créatures;  examinons  ce  qui  en 
est,  133. —  Est-il  fondé  à  prétendre  que  le  ciel,  la  mer  et  toutes  les  merveilles  de  la 
nature  n'ont  été  créés  que  pour  lui?  135.  —  S'il  est  vrai  que  les  astres  ont  de  l'in- 
lluence  sur  nos  destinés,  pouvons-nous  dire  que  nous  commandons,  quand  nous 
ne  faisons  qu'obéir?  135.  —  Que  savons-nous  de  ces  astres,  sur  quoi  pouvons- 
nous  appuyer  les  suppositions  que  nous  émettons  à  leur  sujet?  mais  notre  pré- 


B.28  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

somption.est  sans  limites  (Anaxagore),  135.  —  Vis-à-vis  des  animaux,  en  quoi 
consiste  notre  supériorité?  nous  pensons,  nous  parlons,  mais  est-il  sûr  que  les 
botes  n'aient  pas,  elles  aussi,  des  idées  ot  un  langage  (I'Age  d'or  d'après  Platon)? 
J37.  —  Les  bétes  se  comprennent  entre  elles  ;  si  nous  ne  les  comprenons  pas,  est- 
ce  à  elles  ou  à  nous  que  cela  est  imputable?  139.  —  Celles  qui  n'ont  pas  de  voix 
se  font  comprendre  par  les  mouvements  du  corps;  que  de  choses  n'exprimons- 
nous  pas  nous-mêmes,  par  gestes  (un  ambassadeur  d'Abdèreet  Agis  roi  de  Sparte)? 
139.  —  Leur  habileté  surpasse  celle  de  l'homme,  si  bien  qu'il  semblerait  que  la 
nature  les  a  traitées  plus  favorablement  que  nous  (les  abeilles,  les  hirondelles, 
I'araignée),  141.  —  11  n'en  est  rien;  en  dépit  des  apparences,  elle  a  donné  à 
l'homme  tout  ce  qui  est  nécessaire  à  sa  conservation,  145.  —  Il  ne  tiendrait  qu'à 
nous  de  nous  passer  de  vêtements,  même  dans  les  climats  froids  ;  et,  sans  culti- 
ver le  sol,  ni  nous  livrer  à  aucune  préparation  d'aliments,  nous  pourrions  trouver 
partout  notre  nourriture  (certaines  peuplades  sauvages,  les  Gaulois,  les  Irlandais), 
145.  —  L'homme  est  naturellement  mieux  armé  que  beaucoup  d'autres  animaux; 
et  s'il  a  recours,  pour  accroître  sa  force,  à  des  moyens  de  défense  artificiels,  d'au- 
tres animaux,  qui  ont  des  armes  naturelles,  agissent  de  même  (I'éléphant,  le 
taureau,  le  sanglier,  I'iciineumon),  147.  —  Le  langage  n'est  pas  chez  l'homme  une 
chose  naturelle;  mais,  de  même  que  les  animaux  manifestent  leurs  sentiments  et 
se  font  comprendre  en  donnant  de  la  voix,  il  y  a  lieu  de  penser  que  nous-mêmes 
avons  un  parler  inné,  car  nous  nous  faisons  comprendre  d'eux;  et,  de  ce  langage, 
semble  qu'il  y  ait  trace  chez  l'enfant,  149.  —  Tout  cela  dénote  que  nous  ne 
sommes  ni  au-dessus  ni  au-dessous  du  reste  des  animaux,  151.  —  Les  bêtes,  comme 
les  hommes,  suivent  librement  leurs  inclinations;  comme  eux,  elles  sont  suscep- 
tibles de  réflexion  dans  ce  qu'elles  font  (renards  employés  par  les  Thraces  pour 
vérifier  l'adhérence  de  la  glace),  151.  —  Si  nous  les  asservissons,  n'en  est-il  pas  de 
même  des  hommes  vis-à-vis  les  uns  des  autres?  Souvent  même,  nous  nous  astrei- 
gnons à  l'égard  des  bêtes,  à  ce  que  ne  feraient  pas  pour  nous  nos  propres  servi- 
teurs (les  Climacides,  les  femmes  de  Thrace,  les  gladiateurs,  les  Scythes,  Diogènè), 
151.  —  Les  animaux  (les  tigres,  les  lions,  le  chien,  le  brochet,  I'hirondelle,  I'éper- 
vier,  la  cigogne,  I'aigle,  les  faucons  en  Thrace,  les  loups  dans  les  Palus-lMéotide, 
la  seiche)  pratiquent  la  chasse  comme  font  les  hommes,  parfois  de  commun  ac- 
cord, 155. —  La  force  de  l'homme  est  inférieure  à  celle  de  bien  des  animaux,  et  de 
bien  plus  petits  que  lui  en  triomphent  aisément  (Sylla),  157.  —  Les  bêtes  savent 
discerner  ce  qui  peut  leur  être  utile  'soit  pour  leur  subsistance,  soit  en  cas  de 
maladie  (les  chèvres  de  Candie,  la  tortue,  le  dragon,  les  cigognes,  les  éléphants), 
157.  —  Exemple  caractéristique  de  raisonnement  chez  le  chien,  157.  —  Les  bêtes 
sont  capables  d'être  instruites  (chiens  savants,  chiens  d'aveugle,  chien  du  théâtre 
de  Marcellus,  les  boeufs  des  jardins  de  Suze),  159.  —  On  constate  que  quelques- 
unes  se  livrent  à  l'instruction  des  autres,  et  il  y  en  a  qui  s'instruisent  elles-mêmes 
(le  ROSSIGNOL,  des  éléphants  de  cirque,  une  pie,  un  chien  qui  veut  se'désaltérer), 
161.  —  Subtilité  et  pénétration  des  éléphants,  163.  —  D'hommes  à  hommes,  nous 
traitons  de  sauvages  ceux  qui  n'ont  pas  les  mêmes  usages  que  nous  ;  de  même 
nous  nous  étonnons  de  tout  ce  que,  chez  les  animaux,  nous  ne  comprenons  pas, 
167.  —  II  semble  que  chez  I'éléphant,  il  y  ait  trace  de  sentiment  religieux;  l'é- 
change d'idées  entre  animaux  auxquels  la  voix  fait  défaut,  n'est  pas  niable  (les 
FOURMIS  de  Cléanthe),  167.  —  Propriétés  que  nous  ne  possédons  pas  et  dont  jouis- 
sent certains  animaux  (le  rémora,  le  hérisson,  le  caméléon,  le  poulpe,  la  torpille), 
169.  —  Les  prédictions  fondées  jadis  sur  le  vol  des  oiseaux,  pouvaient  avoir  leui- 
raison  d'être  (les  oiseaux  de  passage),  171.  —  N'attribue-t-on  pas  aux  chiennes  de 
savoir  discerner,  dans  une  portée,  le  meilleur  de  leurs  petits?  171.  —  Sous  bien 
des  rapports,  nous  devrions  prendre  modèle  sur  les  animaux,  171.  —  Ils  ont  le 
sentiment  de  la  justice,  leur  amitié  est  plus  constante  que  celle  de  l'homme  (le 
CHIEN  du  roi  Lysimaque,  celui  de  Pyrrhus),  173.  —  Dans  leurs  goûts,  leurs  affections, 
en  amour,  ils  sont  délicats,  bizarres,  extravagants  comme  nous-mêmes  (propension 
des  CHEVAUX  pour  ceux  de  même  robe,  I'éléphant  et  la  bouquetière  d'Alexandrie, 
le  bélier  de  Glaucia),  173.  —  Subtilité  malicieuse  d'un  mulet,  177.  —  Certaines 
bêtes  paraissent  sujettes  à  l'avarice,  d'autres  sont  fort  ménagères  (La  fourmi  et  le 
GRAIN  de  blé),  177.  —  Quelques-unes,  ce  sont  des  exceptions,  se  font  la  guerre  à 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  II,  Cil.  XII.  -  VOL.  II.  B.29 

l'instar  des  hommes  chez  lesquels  elle  dénote  une  si  grande  imbécillité,  les  princes, 
qui  sont  soumis  aux  mêmes  passions  que  nous,  la  faisant  pour  des  motifs  aussi 
futiles  que  ceux  qui  occasionnent  les  querelles  des  particuliers  et  son  issue  étant 
souvent  amenée  par  des  incidents  des  moins  importants  de  la  vie  ordinaire 
(causes  de  la  guerre  de  Troie,  de  la  guerre  civile  entre  Antoine  et  Auguste  ;  inter- 
vention de  la  poussière  dans  les  batailles  livrées  par  Sertorius  à  Pompée,  par 
EuMÈNE  à  Antigone,  par  Suréna  contre  Crassus;  des  abeilles  au  siège  de  Tam|y), 
177.  —  Fidélité  et  gratitude  des  animaux  (le  chien  d'Hésiode  et  autres,  le  lion 
d'Androclès),  161.  —  Comme  nous,  ils  se  constituent  en  sociétés  pour  se  défen- 
dre mutuellement;  des  individus  d'espèces  différentes  s'associent  pour  pourvoir 
a  leur  sûreté  et  à  leur  subsistance  (les  boeufs,  les  pourceaux,  etc.;  I'escake,  le 
barbier;  la  baleine  et  son  guide,  le  crocodile  et  le  roitelet,  la  nacre  et  le  pino- 
thère;  les  thons),  187.  —  Nous  trouvons  en  eux  des  exemples  de  magnanimité, 
de  repentir,  de  clémence  (fierté  d'un  chien,  repentir  d'un  éléphant,  clémence 
d'un  tigre),  189.  —  L'ingéniosité  de  1' alcyon  dans  la  construction  de  son  nid  dé- 
fie notre  intelligence,  189.  —  Les  animaux  nous  ressemblent  et  nous  égalent  aussi 
par  l'imagination  puisque,  comme  nous,  ils  ont  des  songes  et  des  souvenirs  (le 
cheval,  les  chiens),  191.  —  Quant  à  la  beauté,  pour  savoir  si  nous  avons  sur  eux 
quelque  avantage  de  ce  fait,  il  faudrait  tout  d'abord  être  fixé  sur  ce  en  quoi  elle 
consiste;  or,  que  d'opinions  diverses  sur  ce  point  :  telles  formes,  telles  couleurs 
appréciées  dans  un  pays,  sont  rebutantes  dans  un  autre  (les  Orientaux,  les  femmes 
Basques,  les  Mexicaines,  les  Italiens,  les  Espagnols),  193.  —  A  cet  égard,  nous  ne 
sommes  nullement  fondés  à  nous  croire  privilégiés  par  rapport  aux  bêtes,  celles 
qui  ont  le  plus  de  ressemblance  avec  nous  sont  les  plus  laides,  195.  —  L'homme 
a  plus  de  raisons  que  tout  autre  animal  de  couvrir  sa  nudité,  tant  il  y  a  d'im- 
perfections en  son  corps,  197.  —  Du  reste  tous  les  biens  qu'il  s'attribue  sont  ima- 
ginaires, et  les  biens  réels  il  les  départ  aux  animaux  (Héraclide  et  Phérécide, 
Ulysse  et  Circé),  199.  —  Malgré  cela,  estimant  notre  forme  extérieure  au-dessus 
de  tout,  nous  n'admettons  de  supériorité  sous  aucun  rapport  de  qui  n'est  pas 
formé  à  notre  image,  199. 

Examinons  maintenant  si  l'homme  a  lieu  de  s'enorgueillir  de  ses  connaissances. 
Avec  tant  de  vices  et  d'appétits  déréglés,  est-il  en  droit  de  se  glorifier  de  sa  rai- 
son? 201.  —  La  science  ne  nous  garantît  ni  des  maladies,  ni  des  incommodités  de 
la  vie  (Varron,  Aristote),  201.  —  Les  ignorants  sont  plus  sages  et  savent  plus  que 
bien  des  savants,  203.  —  Dès  le  principe,  Dieu  nous  a  interdit  la  science;  la  re- 
ligion veut  que  nous  demeurions  ignorants  et  obéissants  (la  Genèse,  les  Sirènes  et 
Ulysse,  S.  Paul),  203.  —  Mais  la  présomption  est  le  partage  de  l'homme  (CicÉ- 
RON,  Lucrèce.  Démocrite,  Aristote,  Chrysippe,  Sénèque),  205.  —  Et  pourtant,  com- 
bien la  force  d'àme  de  nos  philosophes  est  impuissante  contre  les  douleurs  physi- 
ques devant  lesquelles  l'ignorant  souvent  demeure  impassible  (Posidonius,  Arcé- 
siLAS,  Denys  d'Héraclée),  207.  —  Les  effets  de  l'ignorance  sont  préférables  à  ceux 
de  la  science;  selon  quelques  philosophes,  reconnaître  la  faiblesse  de  son  juge- 
ment est  le  souverain  bien  (Pyrrhon,  au  Brésil),  209.  —  Les  maladies  du  corps  et 
de  l'esprit  sont  souvent  causées  par  l'agitation  de  notre  âme,  le  génie  est  proche 
de  la  folie  (Le  Tasse),  211.  —  L'indolence  de  l'esprit,  non  toutefois  une  indolence 
complète  laquelle  n'est  du  reste  ni  possible  ni  durable,  produit  la  vigueur  cor- 
porelle et  la  santé  (Crantor  et  Épicure),  213.  —  La  science  nous  renvoie  souvent 
à  l'ignorance  pour  nous  adoucir  les  maux  présents,  215.  —  La  philosophie  agit  de 
même,  lorsqu'elle  nous  incite  à  oublier  les  maux  passés  (Lycas,  Thrasylaus),  215. 

—  En  nous  concédant  de  mettre  fin  à  notre  vie  quand  elle  nous  est  devenue  in- 
supportable, elle  témoigne  encore  plus  nettement  de  son  impuissance  (Cicéron, 
Horace,  Démocrite,  Antisthène,  Chrysippe,  Cratès,  Sextius),  219.  —  La  simplicité 
et  l'ignorance  sont  des  conditions  de  tranquillité  (V^alens,  Licinius,  Mahomet, 
Lycurgue),  221.  —  Il  est  dans  le  Nouveau  Monde  des  nations  qui,  sans  magistrats 
et  sans  lois,  vivent  plus  régulièrement  que  nous  ne  faisons,  221.  —  Funestes  effets 
de  la  curiosité  et  de  l'orgueil,  223.  —  A  quoi  Socrate  a  dû  le  nom  de  Sage,  223. 

—  Les  recherches  sur  la  nature  divine  sont  condamnables;  nos  notions  sur  l'Être 
suprême  sont  imparfaites,  lui  seul  peut  se  connaître  et  s'interpréter  (S.  Augustin, 
Tacite,  Platon,  Cicéron),  223.  —  Ce  que  nous  possédons  de  la  vérité,  ce  n'est  point 


B.30  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

avec  nos  propres  forces  que  nous  y  sommes  arrivés,  nous  en  sommes  incapables 
(S.  Paul),  225.  — A  la  fin  de  leur  vie,  les  plus  savants  philosophes  se  sont  aperçus 
qu'ils  n'avaient  rien  appris  (Velleius,  Phérécide,  Socrate,  Platom,  Cicéron),  227. — 
Examinons  jusqu'à  quel  degré  de  connaissances  ont  pu  parvenir  les  plus  grands  gé- 
nies, 229. —  Il  y  a  trois  manières  de  philosopher:  l'une  dogmatique,  qui  est  celle  de 
ceux  qui  assurent  avoir  trouvé  la  vérité;  l'autre,  académique,  est  appliquée  par 
ceux  qui  déclarent  qu'elle  est  au-dessus  de  notre  compréhension;  la  troisième, 
sceptique,  est  le  propre  de  ceux  qui  la  cherchent  encore,  229.  —  État  d'esprit  et 
doctrine  des  Pvrrhoniens  qui  personnifient  ce  dernier  mode,  231.  —  Avantage  de 
leur  doctrine  ;  toutes  les  opinions  étant  contestables,  il  n'y  a  pas  de  raison  pour 
se  décider  et  adopter  plutôt  l'une  que  l'autre,  233.  —  Dans  la  vie  ordinaire,  ils  agis- 
sent comme  tout  le  monde,  se  soumettant  aux  lois,  aux  usages,  parce  qu'ils  dou- 
tent qu'on  puisse  leur  en  substituer  de  meilleurs  (Pyrrhon),  235.  —  Combien  sont 
plus  faciles  à  gouverner  les  esprits  simples  et  peu  curieux;  plus  que  tous  autres, 
ils  sont  préparés  à  recevoir  la  parole  de  Dieu,  237.  —  Quant  aux  Dogmatistes  qui 
prétendent  avoir  trouvé  la  vérité,  leur  assurance  ne  fait  guère  que  masquer  leur 
doute  et  leur  ignorance  (Socrate,  Cicéron,  Aristote,  Épicure),  239.  —  Souvent  les 
philosophes  affectent  d'être  obscurs,  pour  ne  pas  révéler  le  vide  de  leur  science 
(Aristote,  Carnéade,  Épicure,  Heraclite),  241.  —  Certains  ont  dédaigné  les  arts 
libéraux  et  même  les  sciences,  prétendant  que  ces  études  détournent  des  devoirs 
de  la  vie  (Cicéron,  Zénon,  Chrysippe,  Plutarque,  Épicure,  Socrate),  241.  —  On  ne 
sait  si  Platon  était  dogmatiste  ou  sceptique;  ses  opinions  ont  dontié  naissance 
à  dix  sectes  différentes,  243.  —  On  peut  en  dire  autant  de  la  plupart  des  philo- 
sophes anciens  de  quelque  renom  ;  combien  se  contredisent  eux-mêmes  (Anaxa- 
gore,  Parménide,  Xénophane,  Sénèque,  Plutarque,  Euripide,  Démocrite,  Empédocle)! 
243.  —  11  ne  faut  pas  s'étontier  de  voir  tant  de  gens  s'efforcer  ainsi  de  découvrir 
la  vérité,  il  y  a  quelque  charme  à  cette  recherche  (les  Stoïciens,  Démocrite),  245. 
—  L'étude  de  la  nature  est  également  une  occupation  où  se  complaît  notre  es- 
prit (Eudoxe),  247.  —  Mais  il  est  peu  probable  qu'ÉPicuRE,  Platon  et  Pythagore 
nous  aient  donné  comme  réels,  l'un  ses  atomes,  l'autre  son  spiritualisme,  le  der- 
nier ses  nombres;  en  émettant  ces  théories,  ils  n'ont  sans  doute  que  voulu  faire 
échec  à  d'autres  systèmes  préconisés,  ne  reposant  pas  sur  des  bases  plus  solides, 
247.  —  La  vraie  philosophie  consiste  à  ne  rien  donner  comme  certain  et  à  res- 
pecter ostensiblement  la  religion  et  les  lois  de  son  pays,  tout  en  réservant  son 
jugement,  249.  —  Malgré  notre  impuissance  à  déterminer  ce  que  c'est  que  Dieu, 
la  question  a  été  fort  agitée  par  les  anciens;  l'opinion  la  plus  fondée  est  celle 
qui  le  représente  comme  une  puissance  incompréhensible  qui  a  produit  et  con- 
serve tout  (Valerius  Seranus,  s.  Paul,  Pythagore,  Numa),  251.  —  Mais  il  faut  au 
peuple  une  religion  palpable  qui  émeuve  l'homme  dans  ses  croyances  et  quand 
il  prie;  et,  de  tous  les  cultes,  le  plus  excusable  est  celui  du  Soleil,  258.  — Opinions 
diverses  des  philosophes  sur  la  nature  de  Dieu;  elles  sont  sans  nombre  (Thalès, 
Anaximandre,  Anaximène,  Anaxagore,  Alcméon,  Pythagore,  Parménide,  Empédocle, 
Protagoras,  Démocrite,  Platon,  Socrate,  Speusippe,  Aristote,  Héraclide  du  Pont, 
Théophraste,  Straton,  Zénon,  Diogène  d'Apollonie,  Xénophane,  Ariston,  Cléanthe. 
Persée,  Chrysippe,  Diagoras,  Théodore,  Épicure,  Ennius),  255.  —  Cette  diversité 
montre  la  faiblesse  de  notre  raison;  mais  ce  qui  est  le  comble  de  l'extravagance, 
c'est  de  faire  des  dieux  des  hommes  que  nous  connaissons  tant,  on  comprend 
mieux  que  des  bêtes  on  ait  fait  des  dieux  parce  qu'elles  nous  sont  moins  connues. 
Une  autre  folie,  est  de  déifier  certaines  abstractions,  comme  la  concorde,  la  liberté, 
ou  certains  de  nos  maux  comme  la  peur,  la  fièvre,  etc.,  257.  —  Impudente  pru- 
dence des  Égyptiens  au  sujet  de  leurs  dieux,  259.  —  Est-ce  sérieusement  que  les 
philosophes  ont  traité  de  la  hiérarchie  de  leurs  divinités,  comme  aussi  de  la  con  - 
dition  des  hommes  dans  une  autre  vie  (Platon,  Mahomet)? 259.  —  Il  n'est  pas  con- 
cevable que  notre  àme  dégagée  des  sens  ses  organes,  puisse  conserver  ses  goûts, 
ses  affections;  et  si,  dans  une  autre  vie,  nous  n'existons  plus  tels  que  nous 
sommes  sur  la  terre,  ce  n'est  pas  nous  qui  sentirons,  qui  jouirons;  ce  qui  a  cessé 
d'être,  n'est  plus  (Pythagore,  le  Phénix,  le  ver  a  soie),  261.  —  Et  puis,  pourquoi 
les  dieux  récompenseraient-ils  ou  puniraientrils  l'homme,  après  sa  mort?  n'est-co 
pas  par  leur  volonté  qu'il  a  été  tel?  263.  —  Il  est  ridicule  de  prétendre  arriver  à 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  II,  Cil.  XII.  —  VOL.  II.  B.31 

connaître  Dieu,  sa  nature,  etc.,  en  prenant  l'homme  pour  terme  de  comparai- 
son, ainsi  que  cela  s'est  toujours  fait,  265.  —  C'est  en  partant  de  là  qu'on  a  cru 
l'apaiser  par  des  prières,  des  fêtes,  des  présents,  et  même  en  immolant  des  êtres 
humains  sur  ses  autels  (Tiberius  Semphonius,  Paul  Emile,  Alexandre  le  Grand, 
Énée,  les  Gètes,  Amestris,  les  idoles  de  Themixtatan,  les  Carthaginois,  les  Lacédé- 
MOMENS,  Iphigénie,  Ics  deux  Decius),  265.  —  Prétendre  satisfaire  à  la  justice  divine 
en  choisissant  soi-même  son  expiation,  est  un  contre-sens;  est-ce  au  criminel  à 
fi.xer  lo  châtiment  qu'il  a  encouru  (Poi.ycrate,  les  Corybantes,  les  Ménades,  cor- 
tains  Maiiométans)?  267.  —  Il  n'est  pas  moins  ridicule  de  juger  d'après  nou.s- 
mémes  du  pouvoir  et  des  perfections  de  Dieu  ;  de  croire  qu'il  peut  se  réjouir,  se 
fâcher,  etc.,  que  ses  règlements,  sa  juridiction  ressemblent  aux  nôtres,  et  que 
c'est  à  notre  intention  qu'il  a  fait  les  lois  qui  régissent  le  monde  (Stili'on),  269. — 
Non  seulement  ces  lois  s'appliquent  à  notre  monde  mais  aux  autres  encore  si, 
comme  il  est  vraisemblable,  il  en  existe  en  nombre  infini,  probablement  bien 
différents  de  celui-ci  où  l'éloignement  des  lieux  suffit  pour  que  de  grandes  dif- 
férences subsisteut  entre  les  êtres  qui  s'y  trouvent  (Platon,  Démocrite,  ÉpicuitE, 
Pline,  Hérodote,  Plutarque),  271.  —  Les  règles  que  nous  avons  cru  déduire  de  la 
nature  sont  sans  cesse  démenties  par  les  faits;  tout  est  obscurité  et  doute;  nous 
ne  savons  même  pas  si  nous  vivons.  Diversité  des  opinions  sur  le  monde  et  la 
nature  (Métrodore  de  Chio,  Euripide,  Melissus,  Protagoras,  Nausiphane,  Parménide, 
Zenon),  275.  —  C'est  que  la  puissance  divine  ne  peut  être  définie  par  aucun  lan- 
gage humain,  dont  l'imperfection  est  cause  de  toutes  les  erreurs  et  contestations 
qui  se  produisent,  277.  —  C'est  par  suite  de  cette  même  imperfection  que  nous 
disons  qu'il  y  a  des  choses  impossibles  à  Dieu,  comme  de  ne  pas  être,  de  faire 
que  le  passé  ne  soit  pas,  etc.  ;  du  reste  notre  outrecuidance  à  vouloir  tout  sou- 
mettre à  notre  examen,  à  faire  Dieu  à  notre  image,  fait  que  nous  lui  prêtons  des 
attributs  qui,  pour  lui,  sont  dépourvus  de  sens,  alors  qu'il  ne  nous  est  pas  donné 
d'avoir  de  lui  la  moindre  conception  (Pline,  Épicure,  Thalès,  Platon,  Pythagore, 
Tertullien,  Straton,  Cicéron,  s.  Augustin,  S.  Paul),  279.  —  Nous  l'avons  tellement 
rabaissé  que  nous,  incapables  de  créer  quoi  que  ce  soit,  sommes  arrivés  à  faire  des 
dieux  à  la  douzaine  (Faustine,  Auguste,  les  Thasiens  et  Agésilas,  Trismégiste),  281. 
—  Énoncé  de  quelques-uns  des  arguments  que  les  philosophes  ont  mis  en  avant 
pour  déterminer  la  nature  de  Dieu,  283.  —  On  allait  jusqu'à  admettre  couram- 
ment que  les  dieux  pouvaient  entrer  en  rapport  avec  la  femme  (Pauline;  un 
gardien  du  temple  d'Ilercule,  Laurentina  et  Teruncius,  Apollon,  Ariston  et  Péric- 
TiONE,  les  Merlins),  285.  —  Chaque  être  s'estimant  la  perfection,  si  les  bêtes  s'avi- 
saient de  faire  des  divinités,  chacune  les  ferait,  elle  aussi,  à  son  image  (Xéno- 
phane),  287.  —  L'homme  s'est  imaginé  que  tout,  dans  le  monde,  n'existe  que  pour 
lui;  que  pour  lui  seul  il  fait  jour,  il  pleut,  il  tonne;  que  les  dieux  ne  parlent  et 
n'agissent  que  pour  lui,  qu'ils  épousent  ses  querelles,  partagent  ses  plaisirs  (Nep- 
tune et  JuNON,  les  Cauniens),  289.  —  Il  donnait  à  chacun  d'eux  telle  ou  telle  attri- 
bution :  l'un  guérissait  de  la  toux,  l'autre  de  la  fièvre, etc.;  il  y  en  avait  dont  la 
puissance  était  si  bornée,  qu'il  en  fallait  bien  cinq  ou  six  pour  produire  un  épi 
de  blé,  289.  —  Outre  qu'il  était  de  principe  que,  dans  son  propre  intérêt,  on  doit 
laisser  ignorer  au  peuple  beaucoup  de  choses  vraie^  et  lui  en  donner  à  croire  de 
fausses,  dès  que  l'esprit  humain  veut  pénétrer  certains  mystères,  il  s'y  perd. 
Combien  d'idées  n'ont-elles  pas  été  émises  sur  la  matière  dont  est  formé  le  soleil? 
en  vérité,  mieux  eût  valu  s'abstenir  (Scévola,  Varron,  S.  Augustin,  Anaxagore, 
Zénon,  Archimède,  Socrate,  Polyenus),  291.  —  N'a-t-on  pas  imaginé  que  le  mouve- 
ment des  corps  célestes  fonctionne  d'après  les  mêmes  moyens  que  les  machines 
de  notre  invention!  293.  —  En  somme,  la  philosophie  nous  présente  toutes  choses 
comme  font  les  poètes,  èous  forme  d'énigmes  (Timon  et  Platon),  293.  —  Du  reste 
l'homme  n'a  pas  d'idées  plus  nettes  sur  lui-même  que  sur  tout  ce  qui  l'entoure  : 
en  combien  de  parties  différentes  du  corps  û'a-t-on  pas  logé  l'àme?  quelle  expli- 
cation a  pu  être  donnée  de  ce  que  celle-ci  s'unit  à  une  substance  matérielle  (une 
SERVANTE  de  Milot,  Cicéron  et  Démocrite,  Socrate)?  295.  -  Ce  qui  fait  qu'on  ne  ré- 
voque pas  en  doute  ces  théories,  c'est  qu'on  ne  les  discute  jamais;  on  les  accepte 
sous  l'autorité  du  nom  de  qui  les  a  émises  et,  si  on  vient  à  tenter  de  les  soumet- 
tre à  l'examen,  on  s'égare  soi-même  (Aristote,  Pythagore),  299.  —  Voulons-nous, 


B.32  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

pour  nous  décider,  recourir  <à  l'expérience?  les  sens  nous  trompent;  à  la  raison? 
sujette  elle  aussi  à  l'erreur,  elle  ne  peut  pas  mieux  nous  guider  que  les  sens,  303. 
—  Que  nous  apprend  celle-ci  sur  la  nature  de  l'àme  par  exemple?  A  chaque  phi- 
losophe elle  enseigne  que  l'âme  est  une  substance  différente  suivant  l'idée  que 
chacun  s'en  fait  (Cratès,  Dicéarque,  Platon,  Thalès,  Asclépiade,  Hésiode,  Anaxi- 
MANDRE,  Parmémde,  Empédocle,  Possidonius,  Ci.éanthe,  Galien,  IIippocrate,  Varron, 

ZÉNON,  HÉRACI.IDE  DU  PONT,  XÉNOCRATE,  ICS  ÉGYPTIENS,  ICS  ChALDÉENS,  ArISTOTE,  LaC- 
TANCE,    SÉNÈQUE,  leS  DOGMATISTES,    CiCÉRON,  S.   BERNARD,  HERACLITE),  305.    —  OÙ  lOgC- 

t-elle?  la  môme  divergence  règne  sur  ce  point  (nombre  d'entre  les  philosophes 
déjà  cités;  IIiérophile,  Démocrite,  Épicure,  Moïse,  Straton,  Chrysippe,  les  Stoï- 
ciens, etc.),  305.  —  Ces  opinions  diverses  ne  prouvent-elles  pas  la  vanité  des  re- 
cherches philosophiques,  joint  à  cela  les  définitions  incohérentes  émises  sur  le 
monde  et  sur  l'homme?  Faiblesse  du  système  des  atomes  et  de  quelques  autres 
(Platon,  les  Épicuriens,  Cotta,  Zénon,  Socrate),  309.  —  Si  bien  qu'on  est  tenté  de 
croire  que  ce  n'est  pas  sérieusement  que  ces  philosophes  ont  débité  leurs  rêve- 
ries; de  fait,  il  n'y  a  rien  d'absurde  qui  n'ait  été  dit  sur  ces  sujets,  par  l'un 
ou  par  l'autre,  311.  —  Pour  en  revenir  à  l'âme,  l'opinion  la  plus  vraisemblable 
est  qu'elle  loge  au  cerveau  et  que  de  là,  au  moyen  des  différents  organes,  elle 
gouverne  le  corps,  313.  —  Quant  à  son  origine,  nouvel  embarras  ;  diversité  des 
opinions  à  ce  sujet;  est-ce  une  émanation  de  l'àme  univereelle?  préexiste-t-elle  au 
corps?  est-elle  immortelle  ou  non?  313.  —  Ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  qu'elle 
nait  avec  le  corps,  croît,  se  fortifie  et  s'affaiblit  avec  lui;  qu'il  ne  faut  pour  la 
troubler,  pour  faire  d'un  sage  un  furieux,  qu'un  accident  souvent  léger,  une 
maladie,  la  bave  d'un  chien  (Socrate,  Caton),  317.  —  Les  plus  hardis  Dogmatistes 
eux-mêmes  rie  soutiennent  que  faiblement  le  dogme  de  l'immortalité  de  l'âme  (Phé- 
récyde  de  Syros,  Thalès),  321.  —  Bien  que  ceilaines  considérations  portent  à  con- 
cevoir ce  dogme,  aucun  de  ceux  qui  l'ont  admis  n'ont  insisté  et  n'ont  produit  à 
l'appui  de  raisons  de  quelque  valeur;  ils  n'ont  rencontré  juste  que  par  hasard,  et 
il  nous  faut  sur  ce  sujet  nous  en  rapporter  uniquement  à  ce  que  nous  enseigne 
la  révélation,  323.  —  Arguments  qui,  selon  différents  philosophes,  militent  pour 
ce  principe  ;  tous  sont  défectueux  et,  avec  eux,  le  système  de  la  métempsycose  et 
autres  auxquels  il  a  donné  lieu  (Pythagore,  Origène,  Varron,  Chrysippe,  Platon, 
PiNDARE,  Plutarque),  325.  —  La  manière  dont  se  forme  le  corps  humain  est  aussi 
inconnue  que  la  nature  de  l'âme,  tout  est  mystère  dans  la  génération  (Archélaus, 
Pythagore,  Platon,  Alcméon,  Démocrite,  Épicure,  Aristote,  Galien),  329.  — ^  D'où 
cette  conclusion  :  ne  se  connaissant  pas  lui-même,  l'homme  ne  peut  arriver  avec 
ses  propres  moyens  à  la  connaissance  de  quoi  que  ce  soit  (Protagoras,  Thalès), 
331. 

En  raison  de  notre  impuissance  à  faire  la  lumière  par  nous-mêmes,  les  argu- 
ments qui  précèdent  ne  sont  pas  sans  danger;  ils  peuvent  se  retourner  contre 
nous,  3.33.  —  L'esprit  humain  malgré  les  mesures  prises  pour  le  contenir  et  le 
guider,  ayant  toujours  tendance  à  échapper  et  à  divaguer,  mieux  vaut  s'en  tenir 
sur  ces  questions  aux  enseignements  de  la  foi  et  éviter  toute  controverse;  toute- 
fois si,  avec  certaines  gens,  on  est  obligé  de  les  discuter,  ces  arguments  pour- 
ront être  utilement  employés,  335.  —  Actuellement,  les  sciences  sont  l'objet  d'un 
enseignement  officiel,  en  dehors  duquel  toute  innovation  est  abusivement  pro- 
hibée, 337.  —  Il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  l'esprit  humain  ne  peut  outrepasser 
certaines  limites  dans  la  connaissance  des  choses,  parce  qu'il  ignore  les  causes 
premières  et  que,  l'àme  étant  incapable  de  distinguer  entre  la  vérité  et  le  men- 
songe, force  nous  est  de  nous  arrêter  dès  les  premiers  pas,  339.  —  Aussi  est-il 
plus  facile  et  moins  hasardeux  d'être  Pyrrhonien  et  de  refuser  à  l'homme  la 
possibilité  d'une  certitude  sur  quoi  que  ce  soit,  que  d'être  Dogmatiste  et  d'ad- 
mettre dans  une  certaine  mesure  cette  possibilité,  339.  —  En  dehors  de  l'infinie 
diversité  d'opinions  qui  nous  divisent,  nous  varions  nous-mêmes  constamment 
dans  les  jugements  que  nous  portons  sur  un  même  sujet,  343.  —  Ces  jugements 
sont  essentiellement  variables  avec  nos  dispositions  physiques,  et  cette  influence 
est  bien  difficile  à  constater;  ceux  qui  parlent  on  public,  par  exemple,  n'arri- 
vent-ils pas  à  subir  eux-mêmes  l'effet  de  leur  propre  parole  (Cléomène,  I'Aréopage, 
Montaigne)?  345.  —  Les  passions  auxquelles  l'àme  est  en  proie,  n'ont  pas  une  ac- 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  II,  Cil.  XII.  —  VOL.  II.  B.33 

tion  moindre;  les  plus  grands  hommes  sont  ceux  qui  éprouvent  les  passions  les 
plus  fortes;  quelle  confiance  par  suite  avoir  en  notre  jugement  soumis  à  de  pa- 
reils mobiles,  d'autant  qu'il  semble  que  plus  il  est  exalté  plus  il  a  part  aux  se- 
crets des  dieux  (Thémistocle,  Démosthkne)  ?  353.  —  Peut-on  disconvenir  que  sous 
l'influence  de  l'amour  nous  voyons,  nous  pensons,  nous  agissons  tout  autrement 
que  lorsijue  nous  sommes  au  calme?  Sommes-nous  plus  dans  la  vérité  dans  un 
cas  que  dans  l'autre?  C'est  un  point  qu'il  n'est  pas  facile  de  décider  (Montaigne, 
Pykiihox),  355.  —  De  tout  cela  il  résulte  qu'il  ne  faut  pas  se  laisser  aller  aisément 
aux  opinions  nouvelles,  on  risque  de  perdre  au  change;  et  puis,  quel  privilège 
ont  donc  les  nouveautés  pour  nous  séduire  et  nous  enti-aîner  (Cléanthe  de  Sa- 
Mos,  NicÉTAs  de  Syracuse,  Copernic)?  355.  — Quelles  garanties  particulières  de  sta- 
bilité présentent-elles  pour  l'avenir  (Aristote,  Paracelse,  Théoi'iiraste,  Jacques 
Peletier,  Ptolémée)?  357.  —  Tout  en  ce  monde  et  ce  monde  lui-même  ne  se  mo- 
difient-ils pas  continuellement?  Combien  sont  incertaines  les  données  que  nous 
avons  sur  son  origine  (Platon,  les  prêtres  d'Egypte  et  Hérodote,  Aristote  et 
CicÉRON,  Salomon  et  Isaie,  Heraclite,  Apulée,  Alexandre,  les  Chaldéens,  Zoroas- 
TRE,  Sais,  Athènes,  Épicure),  361.  —  Dans  le  Nouveau  Monde,  n'a-t-on  pas  re- 
trouvé des  pratiques  et  des  traditions  ayant  cours,  qui  existent  ou  ont  existé 
dans  le  monde  ancien?  363.  —  Malgré  ces  ressemblances  qu'on  relève  en  des 
lieux  différents  bien  éloignés  les  uns  des  autres,  il  est  certain  que  l'esprit  de 
l'homme  change  suivant  les  climats  et  les  siècles,  et  son  inconstance  dans  ses 
désirs  est  une  preuve  indéniable  de  sa  faiblesse  (Véuèce,  les  prêtres  d'Egypte, 
SoLON,  Athènes,  Thèbes,  Cyrus),  367.  —  Incapables  de  discerner  ce  qui  leur  con- 
viendrait, souvent  les  hommes  demandent  au  ciel  des  biens  qui  sont  pour  eux 
une  source  de  malheurs  (Socrate,  les  Lacédémoniens,  Midas,  Cléobis  et  Biton, 
ÏROPHONius  et  Agamède),  369.  —  Dans  l'impossibilité  où  ils  sont  de  discerner  en 
quoi  consiste  le  souverain  bien,  il  semble  que  ce  qui  en  est  le  plus  approchant 
soit  ce  que  les  Pyrrhoniens  considèrent  comme  tel  :  l'ataraxie,  c'est-à-dire  le 
calme  absolu  de  l'esprit  ne  décidant  jamais  sur  rien  (Pythagore,  Aristote,  Ar- 
CHÉsiLAs),  371.  —  En  prenant  la  raison  pour  guide,  la  confusion,  nos  embarras 
sont  les  mêmes,  car  tout  change  autour  de  nous,  et  les  lois  plus  encore  que 
toute  autre  chose  ;  souvent  ce  qui  est  légitime  ici  est  criminel  ailleurs,  373.  — 
On  n'est  même  pas  d'accord  sur  ce  qu'on  appelle  les  lois  naturelles;  elles  sont 
aussi  inconstantes  que  les  autres;  pas  une  n'est  observée  par  toutes  les  nations 
(Protagoras,  Ariston,  Thrasymaque),  375.  —  Que  de  choses,  sur  lesquelles  l'accord 
devrait  exister,  voyons-nous  acceptées  par  les  uns,  proscrites  par  les  autres,  en 
raison  du  point  de  vue  différent  auquel  chacun  se  place  (Peuplades  chez  les- 
quelles les  enfants  mangent  leurs  pères  et  mères  défunts,  Lycurgue,  Platon,  Aris- 
TippE  et  Denys  le  tyran,  Aristippe  et  Diogène,  Solon  pleurant  son  fils,  Socrate 
pleuré  par  sa  femme),  377.  —  Les  plaidoyers  des  avocats  et  en  maintes  occasions 
les  embarras  des  juges,  prouvent  combien  les  lois  prêtent  à  interprétation;  les 
idées  sur  la  morale  n'ont  pas  plus  de  fixité  (Arcésilas,  Dicéarque),  379.  —  Les 
lois  et  les  mœurs  tiennent  surtout  leur  autorité  de  ce  qu'elles  existent.  Si  on 
remontait  à  leur  origine,  on  constaterait  parfois  combien  sont  discutables  les 
principes  qu'elles  consacrent;  aussi  les  philosophes  qui  se  piquaient  le  plus  de 
ne  rien  accepter  sans  examen,  ne  se  faisaient-ils  nullement  scrupule  de  ne  pas 
les  observer  et  de  ne  tenir  aucun  compte  des  bienséances  (Chrysippe,  Métroclès 
et  Cratès,  Diogène,  IIipparchia),.381.  — Des  philosophes  ont  avancé  que,  dans  un 
même  sujet,  subsistent  les  apparences  les  plus  contraires;  ce  qu'il  y  a  de  cer- 
tain, c'est  que  les  termes  les  plus  clairs  peuvent  toujours  être  interprétés  diffé- 
remment et  que  bien  des  écrits  obscurs  ont,  grâce  à  cela,  trouvé  des  interpréta- 
tions qui  les  ont  mis  en  honneur  (Heraclite,  Protagoràs),  383.  —  Homère  n'a-t-il 
l>as  été  présenté  comme  ayant  traité  en  maître  les  questions  de  tous  genres? 
Et  Platon  n'ost-il  pas  constamment  invoqué  comme  s'étant  prononcé  en  toutes 
choses,  dans  le  sens  de  celui  qui  le  cite,  etc.?  387.  —  Quoique  les  notions  qui 
nous  viennent  des  sens  puissent,  comme  on  l'a  dit,  être  erronées,  les  sens  sont 
pourtant  la  source  de  toutes  nos  connaissances  (Chrysippe,  Carnéade),  389.  —  Si 
nous  ne  pouvons  tout  expliquer,  peut-être  est-ce  parce  que  certains  sens  exis- 
tent dans  la  nature  et  que  l'homme  s'en  trouve  dépourvu,  ce  qu'il  lui  est  impos- 

ESSAIS   de  MONTAIGNE.  —  T.    IV.  3 


B.34  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

sible  de  constater,  391.  —  C'est  par  les  sens  que,  malgré  les  erreurs  en  les- 
quelles ils  nous  induisent,  toute  science  s'acquiert;  chacun  d'eux  y  contribue  et 
aucun  ne  peut  suppléer  à  un  autre  (Épicuiie,  Timagoras),  395.  —  L'expérience  ré- 
vèle les  erreurs  et  les  incertitudes  dont  est  entaché  le  témoignage  des  sens  qui, 
bien  souvent,  en  imposent  à  la  raison  (Philoxène,  Narcisse,  Pygmalios,  Démocrite, 
Théophraste,  le  joueur  de  flûte  de  Gracchus),  399.  —  Par  contre,  les  passions  de 
l'âme  ont  également  action  sur  les  opérations  des  sens  et  concourent  à  les  alté- 
rer, 403.  —  C'est  avec  raison  que  la  vie  de  l'homme  a  été  comparée  à  un  songe; 
que  nous  dormions  ou  que  nous  soyons  éveillés,  notre  état  d'âme  varie  peu, 
405.  —  En  général,  les  sens  des  animaux  sont  plus  parfaits  que  ceux  de  l'homme; 
des  dififéreiices  sensibles  se  peuvent  aisément  constater  entre  eux,  405.  —  Même 
chez  l'homme,  nombreuses  sont  les  circonstances  qui  modifient  les  témoignages 
des  sens,  et  leur  enlèvent  tout  degré  de  certitude,  d'autant  que  souvent  les  indi- 
cations données  par  l'un  sont  contradictoires  avec  celles  fournies  par  un  autre, 
409.  —  En  somme,  on  ne  peut  rien  juger  définitivement  des  choses  d'après  les 
apparences  que  nous  en  donnent  les  sens,  413.  —  En  outre,  rien  chez  l'homme 
n'esta  l'état  stable;  constamment  en  transformation,  il  est  insaisissable  (Pla- 
ton, Parmémde,  Pytil\gore,  Heraclite,  Épicharme,  Plutarque),  415.  —  D'où  nous 
arrivons  à  conclure  qu'il  n'y  a  rien  de  réel,  rien  de  certain,  rien  qui  n'existe 
que  Dieu;  que  l'homme  n'est  rien,  ne  peut  rien  par  lui-même;  et  que,  seule,  la 
foi  chrétienne  lui  permet  de  s'élever  au-dessus  de  sa  misérable  condition  (Plu- 
tarque, Sénèque),  417. 

CHAPITRE  XHI. 

Du  jugement  à  porter  sur  la  mort  d'autrui,  II,  421.  —  Peu  d'hommes 
témoignent  à  leur  mort  d'une  réelle  fermeté  d'âme;  il  en  est  peu  qui  croient  à 
ce  moment  que  leur  dernière  heure  est  venue,  421.  —  Quand  nous  en  sommes 
là,  nous  sommes  portés  d'ordinaire  à  croire  la  nature  entière  intéressée  à  notre 
conservation  et  que  nous  ne  pouvons  périr  sans  que  le  monde  en  soit  boule- 
versé (César),  421.  —  Pour  juger  du  courage  de  qui  s'est  donné  la  mort,  il  faut 
examiner  dans  quelles  circonstances  il  se  trouvait;  la  fermeté  que  nous  ad- 
mirons ne  vient  souvent  que  de  la  crainte  de  souffrir  une  mort  lente  ou  hon- 
teuse (Caligula,  Tibère,  Héliogabale),  423.  —  Exemples  de  faiblt^sse  chez  des  gens 
qui  avaient  décidé  de  se  tuer  (L.  Domitius,  Plautius  Sylvanus,  Albucilla,  Dé- 
mosthène,  g.  Cimbria,  Ostorius),  425.  —  Une  mort  prompte  et  inattendue  est  la 
plus  désirable  (l'empereur  Adrien,  César),  425.  —  Noble  constance  de  Socrate 
dans  l'attente  de  la  mort,  427.  —  Exemples  (Pomponius  Atticus,  le  philosophe 
Cléanthe,  Tullius  Marcellinus),  427.  —  Courage  de  Caton  aidant,  en  pareille 
circonstance,  la  mort  à  accomplir  son  œuvre,  429. 

CHAPITRE  XIV. 

Comment  notre  esprit  se  crée  à  lui-même  des  difficultés,  II,  431. 
—  Le  choix  de  l'homme  entre  deux  choses  de  même  valeur  se  détermine  par 
si  peu,  qu'on  est  amené  à  en  conclure  que  tout  ici-bas  est  doute  et  incertitude 
(Pline),  431. 

CHAPITRE  XV. 

Notre  désir  s'accroît  par  la  difficulté  qu'il  rencontre  à  se  satis- 
faire, II,  4;]3.  —  La  difficulté  de  les  obtenir  et  la  crainte  de  les  perdre  sont 
ce  qui  donne  le  plus  de  prix  à  nos  jouissances;  les  obstacles  rendent  notam- 
ment les  plaisirs  de  l'amour  plus  piquants;  tout  ce  qui  est  étranger  a  pour 
nous  plus  d'attr*it  (Jupiter  et  Danaé,  Lycurgue  et  les  lois  de  Lacédémone,  la  cour- 
tisane Flora),  433.  —  Les  femmes  ne  se  voilent  et  n'affectent  de  la  pudeur,  que 
pour  exciter  davantage  nos  désii-s  (l'impératrice  Poppée),  435.  —  C'est  pour  ré- 
veiller notre  zèle  religieux,  que  Dieu  permet  les  troubles  qui  agitent  l'Église, 
437.  —  En  interdisant  le  divorce,  ou  a  affaibli  les  nteuds  du  mariage,  437,  —  La 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  II,  Cil.  XV.  —  VOL.  II.  B.3o 

sévérité  des  supplices,  loin  d'empêcher  les  crimes,  en  augmente  le  nombre;  il  y 
a  des  peuples  qui  ont  existé  sans  lois  répressives  (les  Argyppiîes),  437.  —  Mon- 
taigne, au  milieu  des  guerres  civiles,  a  garanti  sa  maison  de  toute  invaison,  en 
la  laissant  ouverte  et  sans  défense,  439. 

CHAPITRE  XVI. 

De  la  gloire,  II,  441.  —  En  tout,  il  y  a  lieu  de  distinguer  le  nom  et  la  chose, 
442.  —  A  Dieu  seul  appartient  gloire  et  honneur;  l'homme  manque  de  tant  d'au- 
tres choses  qui  lui  sont  autrement  nécessaires,  qu'il  est  bien  puéril  à  lui  de  re- 
chercher celles-là,  441.  —  Plusieurs  philosophes  ont  pi'èché  le  mépris  de  la  gloire 
laquelle,  chez  l'homme,  est  cause  de  si  grands  dommages;  elle  n'est  à  rechercher 
que  lorsque  d'autres  avantages  plus  réels  l'accompagnent  (CnuYsn'PE,  Diogène, 
les  SniJ;NES  et  Ulysse),  443.  —  Et  cependant  l'homme  est  tellement  complexe 
que  bif'n  que  ce  mépris  fût  un  des  dogmes  fondamentaux  de  sa  doctrine.  Épi- 
cure  lui-même,  à  son  heure  dernière,  n'a  pas  été  sans  se  préoccuper  du  soin  de  sa 
réputation,  445.  —  Selon  d'autres  pliilosophes  la  gloire  est  désirable  pour  elle- 
même;  le  plus  généralement  on  admet  qu'il  ne  faut  ni  la  rechercher,  ni  la  fuir 
(Carnéade,  Ari.stote),  447.  —  Erreur  de  ceux  qui  ont  cru  que  la  vertu  n'est  dési- 
rable que  pour  la  gloire  qui  l'accompagne  (Cicéron),  447.  —  S'il  en  était  ainsi,  il  ne 
faudrait  jamais  faire  de  belles  actions  que  lorsqu'on  est  remarqué  (Sextus  Pedu- 
CEUS,  Sextilius  Rufus,  m.  Crassus  et  Q.  IIortensius),  447.  —  La  vertu  serait  chose 
bien  frivole,  si  elle  tirait  sa  recommandation  de  la  gloire,  449.  —  Quant  à  Mon- 
taigne, toute  la  gloire  qu'il  désire,  c'est  de  passer  une  vie  tranquille,  telle  qu'il  la 
conçoit,  449.  —  C'est  le  hasard  qui  donne  la  gloire:  que  de  belles  actions  demeu- 
rent inconnues  (César,  Alexandre),  449.  —  La  vertu  est  à  rechercher  pour  elle- 
même,  indépendamment  de  l'approbation  des  hommes,  451.  —  Le  jugement  des 
foules  est  méprisable  ;  le  sage  ne  doit  pas  attacher  de  prix  à  l'opinion  des  fous 
(Uémétrius,  Cicéron),  453.  —  Quand  on  ne  suivrait  pas  le  droit  chemin  uniquement 
parce  qu'il  est  droit,  il  faudrait  encore  le  suivre  pour  son  propre  avantage,  les 
choses  honnêtes  étant  ordinairement  celles  qui  profitent  le  plus  (Paul  Emile,  Fa- 
bius), 153.  —  On  fait  trop  cas  de  la  louange  et  de  la  réputation,  d'ailleurs  on 
n'est  jamais  jugé  que  sur  des  apparences;  aussi  notre  juge  le  plus  sûr,  c'est  nous- 
mêmes,  455.  —  Certains  vont  jusqu'à  vouloir  que  leurs  noms  soient  connus  à  tout 
prix,  même  par  des  crimes  (Érostkate,  Manlius  Capitolinus),  457.  —  Qu'est-ce 
pourtant  que  la  gloire  attachée  à  un  nom?  n'est-il  pas  des  noms  communs  à  plu- 
sieurs familles,  témoin  celui  de  Montaigne?  457.  —  Peu  d'hommes,  sur  un  très 
grand  nombre,  jouissent  de  la  gloire  à  laquelle  ils  pourraient  prétendre  (les 
Grecs,  les  Romains,  les  Lacédémoniens),  459.  —  Les  écrits  qui  relatent  leurs  actions, 
le  souvenir  qui  s'en  conserve  sont  eux-mêmes  de  bien  courte  durée,  459.  —  A 
quel  degré  ne  faut-il  pas  atteindre  pour  que  notre  mémoire  se  perpétue!  dans  de 
telles  conditions,  et  la  vertu  portant  elle-même  sa  récompense,  est-ce  la  peine  de 
sacrifier  à  la  gloire?  4(51.  —  On  peut  cependant  arguer  en  sa  faveur  qu'elle  est  un 
stimulant  pour  les  hommes;  qu'elle  les  porte  quelquefois  à  la  vertu,  parce  que  re- 
doutant le  blâme  de  la  postérité,  ils  recherchent  son  estime  (Trajan,  Néron,  Pla- 
ton), 461.  —  Un  semblable  mobile  équivaut  à  avoir  recoui's  à  la  fausse  monnaie 
(luand  la  bonne  ne  suffit  pas;  cela  a  été  le  cas  de  tous  les  législateurs  (Numa,  Ser- 
TORius,  Zoroastre,  Trismégiste,  Zamolxis,  Charondas,  Minos,  Lycurgue,  Dragon  et 
Soi.oN,  Moïse,  la  religion  des  Bédouins),  463.  —  Quant  aux  femmes,  elles  ont  tort 
d'appeler  honneur  ce  qui  est  leur  devoir;  celles  qui  ne  sont  retenues  que  par  la 
crainte  de  perdre  leur  honneur,  sont  bien  près  de  céder,  463. 

CHAPITRE  XVII. 

De  la  présomption,  II,  465.  —  La  présomption  nous  fait  concevoir  une  trop 
haute  idée  de  notre  uiéfite,  elle  nous  représente  à  nous-mêmes  autres  que  nous  ne 
sommes;  mais,  pour  fuir  ce  défaut,  il  ne  faut  pas  tomber  dans  l'excès  contraire 
et,  par  une  excessive  modestie,  s'apprécier  moins  qu'on  ne  vaut;  en  toutes  choses, 


B.36  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

il  faut  être  vrai  et  sincère,  465.  —  Se  peindre  soi-môme  est  le  moyen  de  se  faire 
connaître  pour  qui  mène  une  vie  obscure;  c'est  ce  qui,  contrairement  aux  con- 
ventions mondaines,   a  déterminé  Montaigne  à  parler  de  lui-même  et  l'incite  à 
continuer  (Llcilius),  462.  —  Remontant  à  son  enfance,  il  remarque,  qu'ainsi  qu'il 
arrive  souvent,  il  avait  des  gestes  habituels  qui,  chez  lui,  pouvaient  indiquer  de 
la  fierté;  on  ne  saurait  en  inférer  qu'il  .soit  réellement  atteint  de  ce  défaut  (Alexan- 
dre, Alciiîiade,  Jules  César,  Cicéron,  Constantin),  467.  —  Il  ne  trouve  bien  rion 
de  ce  qu'il  fait,  et  estime  toujours  moins  les  choses  qu'il  possède  que  celles  qui 
appartiennent  aux  autres,  469.  —  La  trop  bonne  opinion  que  l'homme  a  de  lui- 
même,  semble  à  Montaigne  être  la  cause  des  plus  grandes  erreurs,  471.  —  Il  sait 
le  peu  qu'il  vaut,  il  a  toujours  été  peu  .satisfait  de  ce  que  son  esprit  a  produit, 
surtout  lorsqu'il  s'est  essayé  dans  la  poésie  que  cependant  il  aime,  471.  — Accueil 
fait  aux  jeux  olympiques  à  celle  de  Denys  l'Ancien,  473.  —  Opinion  que  Montaigne 
a  de  ses  propres  ouvrages;  il  a  grand'peine  à  rendre  ses  idées  et  ne  s'entend  nul- 
lement à,  faire  valoir  les  sujets  qu'il  traite  (Cicéron,  Xénophon,   Platon),  475.  — 
Son  style  est  embarrassé,  sa  nature  primesautière  s'accommode  mieux  de  parler 
que  d'écrire;  sa  prononciation  est  altérée  par  le  patois  de  son  pays;  avec  l'âge,  il 
a  perdu  l'habitude  qu'il  avait,  étant   enfant,  de  s'exprimer  et  d'écrire  en  latin 
(Salluste,  César,  Sénèque,  Plutakqle,  Messala),  477.  —  De  quel  prix  est  la  beauté 
corporelle?  c'est  elle  qui,  la  première,  a  mis  de  la  différence  entre  les  hommes,. 
479.  —  Montaigne  était  d'une  taille  au-dessous  de  la  moyenne.  A  rencontre  de  ce 
qui  est  pour  la  femme,  chez  l'homme  une  taille  élevée  est  la  condition  essentielle 
et  presque  unique  de  la  beauté  (C.  Marius.  les  Éthiopiens,  les  Indiens,  Jésus-Christ, 
Platon,  Philopcsmen),  481.  —  Généralement  maladroit  aux  exercices  du  corps,  il 
était  cependant  vigoureux  et  résistant,  quand  les  fatigues  auxquelles  il  se  livrait 
provenaient  de  sa  propre  volonté,  483.  —  Son  état  de  fortune  à  sa  naissance  lui 
assurait  l'indépendance,  il  s'en  est  tenu  là,  485.  —  Sa  nonchalance  est  telle,  qu'il 
préfère  ignorer  les  préjudices  qu'il  peut  en  éprouver  que  d'avoir  à  s'en  préoccu- 
per, 487.  —  Toute  réflexion,  toute  délibération  lui  sont  pénibles,  bien  qu'une  fois 
sa  détermination  prise,  la  résolution  ne  lui  fasse  pas  défaut,  487.  —  L'incertitude 
du  succès  l'a  dégoûté  de  l'ambition,  qu'il  n'admet  que  chez  ceux  qui  sont  dans  l'o- 
bligation de  chercher  fortune  pour  se  maintenir  dans  la  condition  où  ils  sont  nés 
(le  chancelier  Olivier),  489.  —  Son  siècle,  par  sa  dépravation,  ne  convient  nulle- 
ment à  son  humeur,  491.  —  On  n'y  connaît  pas  la  franchise,  la  loyauté  et,  lui, 
abhorre  la  dissimulation  (Aristote,  Appollonius),  493.  —  La  fourberie  finit  presque 
toujours  par  avoir  de  mauvais  résultats;  il  est  plus  nuisible  qu'utile  pour  les 
princes  d'y  avoir  recours  (Metellus  Macedonicus,  Louis  XI,  Tibère,  Soliman),  495. 
—  Montaigne,  ennemi  de  toute  contrainte  et  de  toute  obligation,  apportait  dans 
ses  relations  avec  les  grands   une  entière  liberté  de  langage  (Aristippe),  493.  — 
L'infidélité  de  sa  mémoire  lui  rendait  impossible  de  prononcer  des  discours  de 
longue  haleine,  497.  —  II  était  tellement  rebelle  à  toute  pression,  que  sa  volonté 
elle-même  était  parfois  impuissante  à  obtenir  obéissance  de  lui-même  (un  archer), 
497.  —  Son  peu  de  mémoire  qui  se  révélait  en  maintes  occasions,  le  mettait  no- 
tamment hors  d'état  de  démêler  dans  ce  qui  lui  venait  à  l'esprit,  ce  qui  lui  était 
propre  de  ce   qui  était  une  réminiscence  de   ses   lectures  (Messala    Corvinus, 
Georges  Trapezunce),  499.  —  Il  avait  l'esprit  lent  et  obtus,  mais  ce  qu'il  avait  une 
fois  compris  il  le  retenait  bien  (Pline  le  Jeune),  501.  —  Son  ignorance  à  propos 
des  choses  les  plus  communes,  503.  —  Il   était  foncièrement  irrésolu,  trouvant 
tour  à  tour  également  bonnes  les  raisons  alléguées  pour  ou  contre,  ce  qui  le  por- 
tait dans  les  cas  douteux  à  suivre  les  autres  ou  à  s'en  rapporter  au  hasard,  plus 
qu'à  se  décider  par  lui-même  (René  de  Lorraine,  Chrysippe,  Mathias,  Socrate), 
505.  —  Par  la  même  raison,  il  est  peu  favorable  aux  changements  politiques,  parce 
qu'on  n'est  jamais  sûr  des  institutions  nouvelles   qu'on  veut  substituer  à  celles 
existant  depuis  longtemps  déjà  (Machiavel),  507.  —  Sur  quoi  est  fondée  l'estime 
que  Montaigne  a  de  lui-même;  il  croit  à  son  bon  sens,  du  reste  personne  au 
monde  ne  s'imagine  en  manquer,  509.  —  C'est  ce  qui  fait  que  les  ouvrages  uni- 
quement inspirés  par  le  bon  sens,  attirent  si  peu  de  réputation  à  leurs  auteurs; 
chacun  se  croit  capable  d'en  faire  autant,  511.  —  Montaigne  estime  que  ses  opi- 
nions sont  saines;  il  en  voit  une  preuve  dans  le  peu  de  cas  qu'il  n'a  jamais  cessé 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       IJV.  Il,  Cil.  XVII.  —  VOL.  II.       B.37 

de  faire  de  lui-même  malgré  la  profomle  aU'ection  qu'il  se  porte,  511.  —  Los  au- 
tres regardent  en  avant  d'eux;  lui  ne  regarde  que  lui-même,  s'examine,  se  con- 
trôle et  exerce  ainsi  constamment  son  jugement,  513.  —  11  estime  peu  son  épo- 
que ;  peut-être  ce  sentiment  provient-il  en  partie  de  son  commerce  continu  avec 
l'antiquité  autrement  riche  à  tous  égards.  513.  —  C'est  toujours  avec  plaisir  qu'il 
loue  le  mérite  partout  où  il  le  constate,  chez  ses  amis  et  même  chez  ses  enaemis 
(les  Perses),  515.  —  Les  honunes  complets  sont  rares;  éloge  de  son  ami  Etienne 
de  la  Boétie,  515.  —  Les  gens  de  lettres  sont  vains  et  faibles  d'entendement; 
peut-être  exige-t-on  trop  d'eux  et  est-on,  envers  eux,  moins  porté  à  l'indulgence, 
515.  — Mauvaise  direction  imprimée  à  l'éducation  qui  se  borne,  en  fait  de  morale,  à 
des  définitions,  au  lieu  de  nous  en  inculquer  les  principes,  517.  —  EfTets  d'une  bonne 
éducation;  elle  modifie  le  jugement  et  les  mœurs.  Les  mœurs  du  peuple,  en  leur 
simplicité,  sont  plus  réglées  que  celles  des  philosophes  de  ce  temps,  517.  — 
Honunes  de  guerre,  hommes  politiques,  poètes  et  autres  qui,  seuls,  parmi  ceux  de 
son  siècle,  semblent  à  Montaigne  mériter  une  mention  spéciale  (le  duc  de  Guise, 
le  maréchal  Stkozzi,  les  chanceliers  Olivier  et  l'IIospital,  Daurat,  Théodore  de 
Bèze,  Buchaxax,  Mont-Doré,  Turnebus,  Ronsard,  du  Bellay,  le  duc  cI'Albe,  le  con- 
nétable DE  Montmorency,  M.  de  la  Noue),  519.  —  Éloge  de  Marie  de  Gournay,  sa 
flUe  d'alliance,  519.  —  En  ces  temps  de  guerre  civile  continue,  la  vaillance,  en 
France,  a  atteint  presque  à  la  perfection  et  y  est  devenue  une  vertu  commune, 
521. 

CHAPITRE  XVIII. 

Du  fait  de  donner  ou  recevoir  des  démentis,  II,  521.  —  Si,  dans  son 
livre,  Montaigne  parle  aussi  souvent  de  lui-même,  dont  la  vie  n'offre  rien  de  re- 
marquable, c'est  pour  laisser  un  souvenir  de  lui  à  ses  amis  (César,  Xénopiion, 
Alexandre,  Auguste,  Caton,  Sylla,  Bkutus),  521.  —  Mais  alors  même  que  personne 
ne  le  lirait,  il  n'en  aurait  pas  moins  employé,  d'une  manière  agréable,  à  s'étudier 
et  à  se  peindre,  une  grande  partie  de  sa  vie;  que  lui  importe  le  reste,  525.  —  Son 
siècle  est  si  corrompu  que  l'on  ne  se  fait  plus  scrupule  de  parler  contre  la  vérité, 
défaut  imputé  à  bien  des  époques  aux  Français  (Pindare,  Platon,  Salvinus  Mas- 
siLiENsis),  527.  —  Et  cependant  rien  ne  les  offense  plus  que  de  leur  en  faire  re- 
proche, probablement  parce  que  les  reproches  mérités  blessent  plus  que  les  ac- 
cusations non  fondées;  et  aussi,  parce  que  mentir  est  une  lâcheté  (Lysandre),  527. 

—  Le  mensonge  est  un  dissolvant  de  la  société;  il  est  en  abomination  chez  cer- 
tains peuples  de  l'Amérique  récemment  découverte,  529.  —  Les  Grecs  et  les  Ro- 
mains, moins  délicats  que  nous  sur  ce  point,  ne  s'offensaient  pas  de  recevoir  des 
démentis  (César),  529. 

CHAPITRE  XIX. 

De  la  liberté  de  conscience,  II,  529.  —  Le  zèle  religieux  est  souvent  ex- 
cessif et  conséquemment  injuste,  529.  —  C'est  à  ce  zèle  outré  des  premiers  chré- 
tiens qu'il  faut  attribuer  la  perte  d'un  grand  nombre  d'ouvrages  de  l'antiquité 
(l'empereur  Tacite  et  Cornélius  Tacite),  531.  —  Leur  intérêt  les  a  aussi  portés  à 
louer  de  très  mauvais  empereurs  favorables  au  christianisme,  et  à  en  calomnier 
de  bons  qui  lui  étaient  contraires;  du  nombre  de  ces  derniers  est  Julien,  sur- 
nommé l'Apostat,  qui  était  un  homme  de  premier  ordre;  sa  continence,  sa  justice 
Alexandre,  S'ch'ion),  531.  —  Appréciation  portée  sur  lui  par  deux  historiens  chré- 
tiens ses  contemporains,  Ammien  Marcellin  et  Eutkope,  533.  —  Sa  sobriété,  son 
application  au  travail,  son  habileté  dans  l'art  militaire  (Alexandre  le  Grand),  533. 

—  Sa  mort  a  quelque  similitude  avec  celle  d'Épaminondas,  535.  —  On  l'a  sur- 
nommé l'Apostat;  c'est  un  surnom  qu'il  ne  mérite  pas,  n'ayant  vraisemblable- 
ment jamais  été  chrétien  par  le  cœur.  11  était  excessivement  superstitieux;  l'ex- 
clamation qu'on  lui  prête,  lorsqu'il  se  sentit  fra[)pé  à  mort,  ne  semble  pas  avoir 
été  dite  (Marcus  Brutus),  535.  —  11  voulait  rétablir  le  paganisme  et  détruire  les 
chrétiens  en  entretenant  leurs  divisions  par  une  tolérance  générale,  525.  —  Nos 
rois,  probablement  par  impuissance,  suivent  le  même  système  à  l'égard  des  ca- 
tholiques et  des  protestants,  537. 


B.38  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


CHAPITIIE  XX. 


Nous  ne  goûtons  rien  qui  ne  soit  sans  mélange,  II,  537..—  Los 
hommes  ne  sauraient  goûter  de  plaisirs  sans  n^Mange;  toujours  quelque  amer- 
tume se  joint  à  la  volupté;  il  semble  que,  sans  cet  ingrédient,  on  ne  saurait  la 
supporter  (Akiston,  Pykrhon,  Épicharme,  Socrate,  Métuodore,  Attale),  537.  —  Au 
moral,  il  en  est  de  même;  point  de  bonheur  sans  quelque  teinte  de  vice,  point  de 
justice  sans  quelque  mélange  d'injustice  (Platon),  541.  —  Dans  la  société  même, 
les  esprits  las  plus  parfaits  ne  sont  pas  les  plus  propres  aux  affaires  ;  tel  homme 
du  plus  grand  sens  ne  sait  pas  conduire  sa  maison,  tel  qui  connaît  l'économie 
publique  laisse  glisser  en  ses  mains  toute  une  fortune  (Simomde  et  le  i"oi  Hié- 
ron),  541. 

CHAPITRE  XXI. 

Contre  la  fainéantise,  II,  543.  —  C'est  un  devoir  pour  un  prince  de  mourir 
debout,  c'est-à-dire  sans  cesse  occupé  des  affaires  de  l'État;  pourquoi  des  sujets 
se  sacrifieraient-ils  au  service  et  aux  intérêts  d'un  souverain  dont  l'âme  est  avilie 
par  l'oisiveté  (les  empereurs  Vespasien  et  Adrien)?  543.  —  Il  est  naturel  qu'un  prince 
commande  ses  armées;  les  succès  qu'il  remporte  sont  plus  complets  et  sa  gloire 
plus  justifiée  (Sélim  I,  Bajazet  II,  Amurat  III  et  Charles  V;  les  rois  de  Castille  et 
de  Portugal),  545.  —  A  l'activité  les  princes  doivent  joindre  la  sobriété  (l'empe- 
reur Julien,  la  jeunesse  lacédémonienne  et  la  jeunesse  persane,  les  anciens  Ro- 
mains), 545.  —  Le  désir  de  mourir  bravement  et  utilement  est  très  louable,  mais 
cela  n'est  pas  toujours  en  notre  pouvoir  (les  légions  romaines  de  M.  Fabius,  quel- 
ques soldats  indiens,  Philistus),  547.  —  Bel  exemple  de  vertus  guerrières  donné 
par  IMouLEY-MoLuCH,  roi  de  Fez,  dans  un  combat  où  il  expire  vainqueur  des  Por- 
tugais, 547.  —  Tranquillité  d'âme  de  C.aton,  résolu  à  la  mort  et  sur  le  point  de  se 
la  donner,  551. 

CHAPITRE  XXII. 

Des  postes,  II,  551.  Montaigne,  petit  et  trapu,  courait  volontiers  la  poste 
dans  sa  jeunesse,  551.  —  L'usage  de  disposer  à  demeure  des  chevaux  de  relais, 
de  distance  en  distance,  a  été  établi  par  Cyrus,  roi  de  Perse  ;  les  Romains  ont  agi 
de  même  (Vibullius  Rufus,  César,  Tiberius  Néron,  Sempronius  Gracchus),  553. 
—  Emploi  d'hirondelles,  de  pigeons  pour  faire  parvenir  rapidement  des  nouvelles 
(Cecina,  D.  Brutus),  553.  —  Au  Pérou,  c'était  avec  des  porteurs  que  se  courait  la 
poste  ;  mesure  prise  en  Turquie  pour  assurer  le  service  des  courriers,  553. 

CHAPITRE  XXIII. 

Des  mauvais  moyens  employés  à  bonne  fin,  II,  553.  —  Les  états  po- 
litiques sont  sujets  aux  mêmes  vicissitudes  et  accidents  que  le  corps  humain; 
lorsque  leur  population  s'accroît  outre  mesure,  on  recourt  aux  émigrations,  à  la 
guerre,  etc.  (les  anciens  Francs,  les  Gaulois  et  Brennus,  les  Goths,  les  Vandales, 
les  Turcs,  les  Romains,  Edouard  III  roi  d  Angleterre,  Philippe  de  Valois),  553.  —  La 
faiblesse  de  notre  condition  nous  réduit  à  recourir  parfois,  dans  un  bon  but,  à  de 
mauvais  moyens  (Lycurgue,  condamnés  a  mort  livres  vivants  au  scalpel  des  méde- 
cins), 557.  —  Les  spectacles  de  gladiateurs  avaient  été  inventés  pour  inspirer  au 
peuple  romain  le  mépris  de  lamort  (l'empereur  Théodose),  557. 

CHAPITRE  XXIV. 

De  la  grandeur  romaine,  II,  559.  —  Montaigne  ne  veut  dire  qu'un  mot  do 
la  grandeur  des  Romains,  à  laquelle  il  ne  trouve  rien  de  comparable.  N'étant 
encore  que  simple  citoyen  romain,  César  donne,  vend,  propose  des  trônes  (César 
et  CicÉRON,  M.  FuRius,  le  roi  Déjotarus  et  un  gentilhomme  de  Pergame,  le  roi  Pto- 
lémée),  559.  —  Une  lettre  du  sénat  romain  suffit  pour  faire  abandonner  ses  con- 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LI\ .  If,  GII.  \.\IV.  —  VOL.  II.       B.;50 

quèU's  à  un  roi  puissant  (I'oimi.ils  et  le  roi  Antiochus),  5G1.  —  Los  Romains  ren- 
daient leurs  royaumes  aux  rois  qu'ils  avaient  vaincus,  pour  faire  de  ceux-ci  des 
instruments  de  servitude  (Alulste,  le  roi  breton  Cogidlnls,  Soi-iman),  ûG. 

CHAPITRE   XXV. 

Se  garder  de  contrefaire  le  malade,  II,  563.  —  Exemples  de  personnes 
devenues  soit  goutteuses,  soit  borgnes  après  avoir  feint  de  l'être  pendant  quelque 
temps  (Celils,  un  homme  cité  par  Appien),  503.  —  Réflexion  de  Montaigne  sur  un 
vœu  formé  par  quelques  gentilshommes  anglais,  565.  —  Il  faut  empêcher  les  en- 
fants de  contrefaire  les  défauts  physiques  qu'ils  aperçoivent  chez  les  autres,  de 
peur  qu'ils  ne  les  contractent  eux-mêmes,  565.  —  Exemple  d'un  homme  devenu 
aveugle  en  dormant,  565.  —  Une  folle  habitant  la  maison  de  S(''nèque,  devenue 
aveugle,  croyait  que  c'était  la  maison  qui  était  devenue  obscure;  réflexion  de  ce 
philosophe  sur  ce  que  les  hommes  ressemblent  à  cette  folle,  attribuant  toujours 
leurs  vices  à  d'autres  causes  qu'à  eux-mêmes,  565. 

CHAPITRE    XXVI. 

Du  pouce,  II,  567.  —  Usage  chez  cei'tains  i*ois  barbares  de  cimenter  leurs 
alliances  en  entrelaçant  leurs  pouces,  les  piquant,  et  suçant  le  sang  l'un  de  l'autre, 
567.  —  Etymologie  du  mot  pouce,  567.  —  Coutume  des  Romains  d'abaisser  ou 
d'élever  le  pouce  pour  applaudir  ou  pour  ordonner  la  mort  des  gladiateurs,  567.  — 
La  mutilation  du  pouce  chez  les  anciens  dispensait  du  service  militaire  (les  Ro- 
mains, Alglste,  C.  Vatienus,  Phu.oclès,  les  Athéniens  et  les  Écinètes,  les  Lacédémo- 
NIENS),  569. 

CHAPITRE  XXVII. 

La  poltronnerie  est  mère  de  la  cruauté,  II,  569.  —  Vérité  de  l'adage  qui 
fait  le  titre  de  ce  chapitre;  lo  vrai  brave  pardonne  à  l'ennemi  qu'il  a  vaincu,  le 
lâche  l'injurie  et  le  frappe  même  lorsqu'il  est  réduit  à  l'impuissance  (Alexandre 
tyi-an  de  Phères),  569.  —  Tuer  son  ennemi  quand  il  est  abattu,  c'est  se  priver  de 
la  vengeance;  mieux  vaudrait  le  conserver  à  la  vie,  pour  jouir  de  sa  honte.  Celui 
qui  succombe  n'est  pas  du  reste  le  plus  à  plaindre;  le  i-epos  lui  est  acquis,  tandis 
que  le  survivant  est  obligé  de  fuir,  de  se  cacher  (Bias,  Lysiscus,  coutume  du 
l'oyaume  de  Narsingue),  571.  —  Une  chose  inexcusable  c'est  d'attendre  la  mort  d'un 
ennemi  pour  publier  des  invectives  contre  lui  (Asinils  Pollion  et  Plancus,  Aris- 
tote),573. —  Les  duels  dérivent  d'un  sentiment  de  lâcheté,  de  la  crainte  que  notre 
adversaire  ne  renouvelle  ses  offenses  ;  l'usage  de  s'y  faire  accompagner  de  tenants 
dans  les  querelles  particulières  part  de  ce  même  sentiment,  la  peur  de  se  voir 
abandonné  à  soi-même  devant  le  danger;  devoirs  des  tenants  en  pareille  occur- 
rence (le  duc  d'Orléans  et  le  roi  Henry  d'AxoLETERRE,  les  Argiens  et  les  Lacédé- 
moniens,  les  Horaces  et  les  Curiaces,  un  frère  de  Montaigne),  573.  —  S'il  est  vrai 
que,  seul,  le  courage  doive  être  honoré,  l'art  de  l'escrime  est  à  flétrir,  puisqu'il  ne 
procure  la  victoire  qu'à  force  de  feintes  et  de  ruses;  de  plus,  il  porte  à  violer  les 
lois  (le  consul  P.  Rutilils,  César  à  Pharsale),  577.  —  D'ailleure,  à  la  guerre,  cet 
art  est  inutile  et  parfois  dangereux  (Piiilopoemen,  Pl.vton),  579.  —  Les  gens  sangui- 
naires et  cruels  sont  généralement  lâches,  et  un  premier  acte  de  cruauté  en 
amène  nécessairement  d'autres  (l'empereur  Maurice  et  Phocas;  Philippe  roi  de 
Macédoine,  Thkoxkne  et  Poris),  581.  —  Les  tyrans  s'ingénient  à  prolonger  les 
tourments  de  leurs  victimes;  mais  leur  intention  est  souvent  trompée,  les, tortures 
violentes  tuant,  et  celles  qui  sont  toiérables  ne  suffisant  pas  à  leur  rage,  583.  — 
Dans  les  exécutions  ordinaires  de  la  justice  tout  ce  qui  outrepasse  la  mort  simple, 
est  cruauté  (.Jliks  crucifiés),  583.  —  Détails  de  quelques  supplices  atroces;  Mon- 
taigne pense  que  les  plus  hideux  à  voir,  ne  sont  pas  toujours  ceux  qui  causent 
le  plus  de  douleur  aux  malheureux  qui  ont  à  les  subir  (l'empereur  Meciimet  en 
Épire,  Crésls;  Georges  Séchel,  chef  des  paysans  polonais  révoltés),  585. 


B.40  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


CHAPITRE  XXVIU. 


Chaque  chose  en  son  temps,  II,  587.  —  Ce  furent  deux  grands  hommes 
que  Caton  le  Censeur  et  Caton  d'Utique;  mais  celui-ci  l'emporte  de  beaucoup  sur 
le  premier,  587.  —  Dans  sa  vieillesse,  Caton  le  Censeur  s'avisa  d'apprendre  le  grec  ; 
c'est  un  ridicule,  toutes  choses  doivent  être  faites  en  leur  temps  (Q.  Flaminius, 
EuDAMiNONDAS  et  XÉNOCRATE,  Philopoemen  et  le  roi  Ptolémée),  587.  —  Nos  désirs  de- 
vraient être  amortis  par  l'âge,  mais  nos  goûts  et  nos  pa.ssions  survivent  à  la  perte 
de  nos  facultés;  quant  à  lui,  Montaigne,  il  ne  pense  qu'à  sa  fin  et  ne  forme  pas 
de  projets  dont  l'exécution  nécessiterait  plus  d'une  année,  589.  —  Sans  doute  un 
vieillard  peut  encore  étudier,  mais  ses  études  doivent  être  conformes  à  son  âge, 
elles  doivent  lui  servir  à  quitter  le  monde  avec  moins  de  regrets  (Caton  d'Utique), 
589. 

CHAPITRE   XXIX. 

De  la  vertu,  II,  591.  —  Par  le  mot  vertu,  il  faut  entendre  ici  la  force  d'âme. 
Ce  n'est  pas  en  des  élans  impétueux  mais  passagers  que  consiste  ce  genre  de 
vertu  ;  elle  demande  de  la  persévérance,  un  caractère  solide  et  constant,  et  se  ren- 
contre rarement,  591.  —  Bien  qu'il  la  possédât  à  un  haut  degré,  Pyrrhon  essaya 
vainement  de  toujours  mettre  sa  vie  en  conformité  avec  sa  doctrine  ;  c'est  que 
ce  n'est  pas  tout  de  témoigner  de  la  fermeté  d'âme  dans  une  circonstance  donnée, 
le  difficile  est  de  se  montrer  tel  dans  toutes  ses  actions,  591.  —  Traits  de  courage 
amenés  par  une  soudaine  résolution  (un  paysan  et  un  gentilhomme  du  pays  de 
Montaigne,  une  femme  de  Bergerac),  593.  —  Autres  exemples,  ceux-là  suite  de  dé- 
terminations, de  projets  arrêtés  longtemps  à  l'avance;  ces  actions  fortes  et  cou- 
rageuses longuement  préméditées  sont,  en  général,  le  fruit  de  préjugés  absurdes 
ou  de  fausses  doctrines  (les  femmes  hindoues,  les  gymnosophistes,  Calanus),  595.  — 
Le  dogme  de  la  fatalité,  souvent  mis  en  avant  mais  facile  à  réfuter,  est  fréquem- 
ment exploité  pour  surexciter  les  esprits;  c'est  lui  qui  inspire  tant  d'audace  aux 
Turcs  (les  Bédouins,  deux  moines  de  Florence,  un  jeune  Turc,  Henry  de  Navarre), 
597.  —  Quant  aux  assassins,  la  plupart  du  temps  ce  sont  les  passions  religieuses 
ou  politiques  qui  arment  leur  bras  (les  assassins  du  prince  d'Orange  et  du  duc  de 
Guise,  la  secte  des  Assassins),  601. 

CHAPITRE  XXX. 

A  propos  d'un  enfant  monstrueux,  II,  605.  —  Description  d'un  enfant  et 
d'un  pâtre  monstrueux;  ce  qui  nous  paraît  telj  ne  l'est  pas  pour  la  nature,  005. 

CHAPITRE  XXXI. 

De  la  colère,  II,  607.  —  Il  vaut  mieux  confier  les  enfants  au  gouvernement 
qu'à  leurs  propres  parents  (les  institutions  de  Lacédémone  et  de  Crète),  607.  — 
Ceux-ci  les  châtient  quelquefois  dans  des  transports  de  colère,  ils  les  accablent  de 
coups,  les  estropient;  ce  n'est  pas  correction,  c'est  vengeance,  607.  —  La  colère 
nous  fait  le  plus  souvent  envisager  les  choses  sous  un  aspect  trompeur;  les  fautes 
qui  nous  irritent  ne  sont  pas  telles  qu'elles  nous  paraissent.  Combien  hideux 
sont  les  signes  extérieurs  de  la  colère  (César  et  Rabirius),  609.  —  Il  ne  faut  pas 
juger  de  la  vérité  ou  de  la  fausseté  des  croyances  et  des  opinions  des  hommes  par 
leur  conduite  habituelle  (Eudaminondas,  Cléomène,  Cicéron  et  Brutus,  Cicéron  et 
Sénèque,  les  ÉPHORES  de  Sparte),  611.  —  Modération  de  quelques  grands  hommes 
sous  l'empire  de  la  colère  (Plutarque  et  un  de  ses  esclaves,  Archytas  de  Tarente, 
Platon,  le  lacédémonien  Charylle  et  un  ilote),  611.  —  Nous  cherchons  toujours  à 
trouver  et  à  faire  trouver  notre  colère  juste  et  raisonnable  (Cneius  Pison),  613.  — 
Les  femmes  naturellement  emportées,  deviennent  furieuses  par  la  contradiction  ; 
le  silence  et  la  froideur  les  calment  (l'orateur  Celius,  Phocion),  615.  —  Pour  ca- 
cher sa  colère,  il  faut  des  efforts  inouïs  ;  elle  est  moins  terrible  quand  elle  éclate 
librement  (les  hommes  de  guerre,  Diogène  et  Démosthèse),  615.  —  Attentions  à  avoir 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  II,  Cil.  XXXI.  —  VOL.  H.       B.41 

quand,  dans  son  intérieur,  on  a  sujet  de  se  mettre  en  colère,  617.  —  Caractère  du 
courroux  de  Montaigne;  il  l'oint  parfois  d'être  plus  en  colère  qu'il  ne  l'est  réelle- 
ment, 617.  —  Il  ne  croit  pas  que  la  colère  puisse  jamais  avoir  de  bons  effets, 
même  quand  il  s'agit  de  forcer  les  autres  à  pratiquer  la  vertu;  c'est  une  arme  dan- 
gereuse; elle  nous  tient,  nous  ne  la  tenons  pas  (Akistote),619. 

CHAPITRE  XXXII. 

Défense  de  Sénèque  et  de  Plutarque,  II,  621.  —  Combien  est  fausse  la 
comparaison"  que  l'on  a  voulu  établir  entre  SKNi^;QUE  et  le  cardinal  de  Lorraine,  en 
s'appuyant  sur  le  portrait  injurieux  que  l'historien  Dion  trace  du  premier;  il  est 
plus  rationnel  de  croire  ce  qu'en  disent  Tacite  et  quelques  autres  qui  en  parlent 
d'une  manière  très  honorable,  621.  —  Quant  à  Pi.ur arque,  il  a  été  accusé  par  Bo- 
din,  d'ignorance,  d'excessive  crédulité  et  de  partialité  ;  réfutation  de  ces  accusa- 
tions. Sur  le  reproche  d'ignorance,  Montaigne  n'a  pas  le  savoir  nécessaire  pour  en 
juger,  623.  —  Nombreux  exemples  témoignant  que  les  faits  avancés  par  Plutarque 
et  qualifiés  d'incroyables  par  son  critique,  n'ont  rien  d'impossible  (un  enfant  de 
Lacédémone,  Pyrrhus,  les  jeunes  Spartiates,  Ammien  Marcelun  et  les  Égyptiens,  un 
PAYSAN  espagnol  et  L.  PisoN,  Ei'iCHARis,  do  simples  villageois  du  temps  de  Mon- 
taigne), 623.  —  C'est  un  tort  de  vouloir  juger  du  possible  et  de  l'impossible  par 
ce  dont  nous  sommes  nous-mêmes  capables  (Agésilas),  629.  —  La  partialité  de 
Plutarque  en  faveur  des  Grecs  et  au  détriment  des  Romains  n'est  pas  mieux  fon- 
dée, d'autant  qu'il  ne  prétend  pas  que  les  grands  hommes  de  ces  deux  peuples 
qu'il  met  en  parallèle,  ont  même  valeur;  il  ne  porto  pas  sur  eux  d'appréciation 
d'ensemble,-  il  ne  compare  que  des  points  de  détail  en  des  situations  déterminées, 
629. 

CHAPITRE  XXXIII. 

Histoire  de  Spurina,  II,  633.  —  Nous  apprendre  à  commander  à  nos  pas- 
sions, tel  est  le  but  de  la  philosophie.  Mais  il  en  est  d'une  violence  extrême;  et, 
des  appétits  qu'elles  font  naître  en  nous,  ceux  que  l'amour  occasionne  semblent 
les  plus  excessifs;  peut-être  est-ce  parce  qu'ils  intéressent  à  la  fois  le  corps  et 
l'âme,  633.  —  De  combien  de  moyens  ne  s'est-on  pas  servi  pour  les  amortir  ;  les 
mutilations,  les  cilicos,  les  réfrigérants  de  toutes  espèces  (un  prince  français,  XÉ- 
nocrate),  633.  —  Chez  quelques-uns,  l'ambition  est  plus  indomptable  que  l'amour; 
Jules  César,  qui  était  d'une  incontinence  excessive,  a  toujours  su  réprimer  la 
fougue  de  cette  passion  quand  il  s'agissait  de  grands  intérêts  (César,  Mahomet  II), 
635.  —  D'autres,  au  contraire,  ont  fait  céder  l'ambition  à  l'amour  (Ladislas  roi 
de  Naples),  637.  —  César  ne  sacrifiait  jamais  à  ses  plaisirs  une  heure  de  son 
temps  quand  les  affaires  l'exigeaient  tout  entier;  il  était  à  la  fois  le  plus  actif  et 
le  plus  éloquent  de  son  époque;  il  était  aussi  très  sobre  (César  et  Caton),  639.  — 
Sa  douceur  et  sa  clémence  ont  paru  douteuses;  mille  exemples  prouvent  qu'il  avait 
ces  qualités  (les  capitaines  de  Pompée,  César  à  Pharsale,  C.  Memmius,  C.  Calvius, 
Catulle,  C.  Oppius),  641.  —  Mais  son  ambition  effrénée  l'a  amené  à  renverser  la 
république  la  plus  florissante  qui  ait  jamais  existé,  ce  dont  rien,  d'après  Mon- 
taigne, ne  saurait  l'absoudre  (j\Iarc  Antoine),  6^13.  —  ExeKiple  extraordinaire  d'un 
jeune  Toscan,  Spurina,  qui,  extrêmement  beau,  se  cicatrisa  tout  le  visage  pour  se 
soustraire  aux  passions  qu'il  inspirait,  645.  —  Une  telle  action  ne  se  peut  approu- 
ver; il  est  plus  noble  de  lutter  que  de  se  dérober  aux  devoirs  que  la  société  nous 
impose,  autrement  c'est  mourir  pour  s'épargner  la  peine  de  bien  vivre  (Scipion  et 
Diogène),  645. 

CHAPITRE  XXXIV. 

Observations  sur  les  moyens  que  Jules  César  employait  à  la 
guerre,  II,  6^17.  —  Dans  le  chapitre  précédent,  Montaigne  a  examiné  les  vices  et 
les  qualités  de  César,  il  s'occupe  ici  de  ses  hauts  faits  et  de  ses  talents  militai- 
res; selon  lui,  ses  commentaires  devraient  être  le  bréviaire  de  tout  homme  de 
guerre,  6'17.  —  Pour  rassurer  ses  troupes  alarmées  de  la  supériorité  numérique  de 


B.42  ESSAIS  DE  MONTAIGNE, 

ronuenii,  il  leur  exagérait  lui-même  cette  supériorité;  il  accoutumait  ses  soklats  à 
lui  obéir  sans  les  laisser  commenter  ses  desseins;  très  ménager  du  temps,  il  sa- 
vait amuser  l'ennemi  pour  le  surprendre  avec  plus  d'avantage  (le  roi  Jlba,  Cy- 
Kus,  les  Suisses),  647.  —  II  n'exigeait  guère  tle  ses  soldats  que  la  vaillance  et  la 
discipline,  parfois  il  leur  donnait  toute  licence;  il  aimait  qu'ils  fussent  richement 
armés,  les  honorait  du  nom  de  «  Compagnons  »,  ce  qui  n'empêchait  pas  qu'il  ne 
les  traitât,  le  cas  échéant,  avec  beaucoup  de  sévérité,  649.  —  Il  se  complaisait  aux 
travaux  de  campagne,  651.  —  Il  aimait  à  haranguer  ses  troupes  avant  le  combat, 
et  ses  harangues  sont  des  modèles  d'éloquence  militaire,  651.  —  Rapidité  de  Cé- 
sar dans  ses  mouvements;  aperçu  de  ses  guerres  nombreuses  en  divers  pays,  653. 
—  Il  voulait  tout  voir  par  lui-même;  préférait  obtenir  le  succès  en  négociant, 
plutôt  que  par  la  force  des  armes;  il  était  plus  circonspect  qu'Alexandre  dans  ses 
entreprises,  et  donnait  hardiment  de  sa  personne  chaque  fois  que  la  nécessité  le 
comportait  (bataille  de  Tournai,  siège  d'Av.\RicuM,  guerre  contre  Afraxius  et  Pe- 
TREius,  César  à  Dyurachium,  César  franchissant  I'Hellespoxt),  633.  —  Sa  confiance 
et  sa  ténacité  au  siège  d'ALÉsiA;  deux  particularités  dignes  de  remarque  à  pro- 
pos de  ce  siège  (Luculi.us,  Vercingétorix),  657.  —  Avec  le  temps.  César  devint  plus 
retenu  dans  ses  entreprises.  Quoique  peu  scrupuleux,  il  n'approuvait  cependant 
pas  qu'on  se  servît  de  toutes  sortes  de  moyens  à  la  guerre  pour  obtenir  le  suc- 
cès (Arioviste),  659.  —  Il  savait  très  bien  nager  et  aimait  à  aller  à  pied,  659.  — 
Ses  soldats  et  ses  partisans  avaient  pour  lui  une  extrême  affection  et  lui  étaient 
tout  dévoués  (l'amiral  de  Chatillo.n,  Sceva  soldat  de  César,  Graxius  Petromus,  le 
siège  de  Salone),  661. 

CHAPITRE  XXXV. 

Trois  bonnes  femmes,  II,  663.  —  Quelques  épigrammes  de  IMontaigne  con- 
tre les  femmes  qui  font  parade  de  leur  affection  pour  leurs  maris  seulement 
quand  ils  sont  morts  (la  veuve  d'un  prince  français),  663.  —  Cependant,  dans 
l'antiquité,  il  en  relève  trois  qui  voulurent  partager  le  sort  de  leurs  époux  se 
donnant  la  mort.  La  première,  une  italienne,  citée  par  Pline  le  Jeune,  était  de 
naissance  commune;  son  dévouement,  665.  —  Les  deux  autres  sont  nobles;  l'une 
est  Arria,  femme  de  Cecina  P^tus  ;  son  énergie,  667.  —  L'autre  est  Paulixa  Pom- 
PEiA,  femme  de  Sénèque;  son  histoire,  671.  —  Singulière  preuve  d'amour  que,  de 
son  côté,  Sénèque,  renonçant  pour  elle  à  mourir,  avait  donnée  à  sa  femme,  675. 


TROISIEME   VOLUME. 


CHAPITRE  XXXVI. 


Quels  hommes  occupent  le  premier  rang   entre  tous,  III,   II.  — 

Trois  hommes  des  temps  passés  occupent,  selon  Montaigne,  le  premier  rang  en- 
tre tous.  Le  premier,  c'est  Homère,  le  prince,  le  modèle  de  tous  les  poètes;  estime 
que  l'on  en  a  fait  dans  tous  les  temps  (Aristote,  Varrox,  Virgile,  Alexandre  le 
Grand,  Cléomène,  Plutarque,  Alcibiade,  Hiéron,  Platon  et  Panetius,  Mahomet  II  et 
le  pape  Pie  II),  II.  —  Le  second  est  Alexandre  le  Grand  :  ses  belles  actions  pendant 
sa  vie  si  courte;  il  est  préférable  à  César  qui  pourtant  lui  est  supérieur  sous 
certains  rapports  (Annibal,  les  Mahométans),  15.  —  Le  troisième  et  le  meilleur  de 
tous,  c'est  Epaminondas;  il  l'emporte  sur  Alexandre  et  César,  mais  son  théâtre 
d'action  a  été  beaucoup  plus  restreint.  Les  Grecs  l'ont  nommé  le  premier  d'entre 
eux;  il  réunissait  toutes  les  qualités  que  l'on  trouve  éparses  chez  les  autres,  et  chez 
lui  elles  atteignaient  la  perfection,  19.  —  Scipion  Emilien  pourrait  lui  être  com- 
paré, s'il  eût  eu  une  fin  aussi  glorieuse.  Ce  qu'on  peut  dire  d'ALCiBiADE,  21.  — 
Bonté,  douceur,  équité  et  humanité  d'Épaminondas  (Pélopidas,  les  Béotiens),  21. 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  II,  Cil.  XXXVIl.  —  VOL.  III.       B.43 


CHAPITRE  XXXVIl. 

De  la  ressemblance  des  enfants  avec  leurs  pères,  III,  23.  —  Com7 
ment  Montaigne  a  fait  son  livre:  il  n'y  travaillait  que  lorsqu'il  avait  des  loisirs; 
un  valet  lui  a  emporté  une  partie  de  son  manuscrit,  il  le  regrette  peu,  23.  —  Il  y 
a  sept  ou  huit  ans  qu'il  a  commencé  à  l'écrire,  et  depuis  dix-huit  mois  il  souffre 
d'un  mal  qu'il  avait  toujours  redouté,  de  coliques  néphrétiques,  23.  —  Combien 
les  hommes  sont  attachés  à  la  vie!  Pour  lui,  il  est  bien  plus  sensible  aux  maux 
physiques  qu'aux  douleurs  morales,  et  cependant  il  commence  à  s'habituer  à  sa 
cruelle  maladie  qui  lui  offre  cet  avantage  de  le  mieux  famiUariser  avec  la  mort 
(Mécène,  Tamerlan  et  les  lépreux,  Antisthène  et  Diogène),  23.  —  11  n'est  point  de 
ceux  qui  réprouvent  que  l'on  témoigne  par  des  plaintes  et  des  cris  les  souffrances 
que  l'on  ressent,  quoiqu'il  arrive  à  assez  bien  se  contenir,  et  que,  même  dans  les 
plus  grandes  douleurs,  il  conserve  sa  lucidité  d'esprit,  s'observe  et  se  juge,  27.  — 
Ce  qui  l'étonné  et  qu'il  ne  peut  s'expliquer,  ce  sont  ces  transmissions  physiques 
et  morales,  directes  et  indirectes,  des  pères,  des  aïeux,  des  bisaïeuls  aux  enfants 
(la  famille  des  Lépides  à  Rome,  une  famille  de  Thèbes),  31. —  11  pense  tenir  de  son 
père  ce  mal  de  la  pierre  dont  il  est  affecté,  comme  aussi  il  a  hérité  de  lui  de  son 
antipathie  pour  la  médecine,  31.  —  Motif  du  peu  d'estime  en  laquelle  il  tient  cette 
science,  elle  fait  plus  de  malades  qu'elle  n'en  guérit,  35.  —  La  plupart  des  peu- 
ples, les  Romains  entre  autres,  ont  longtemps  existé  sans  connaître  la  médecine 
(les  Romains,  Caton  i.e  Censeur,  les  Arcadiens,  les  Libyens,  nos  villageois),  39.  — 
L'utilité  des  purgations  imaginées  par  la  médecine  n'est  rien  moins  que  prou- 
vée ;  sait-on  du  reste  jamais  si  un  remède  agit  en  bien  ou  en  mal  et  s'il  n'eût  pas 
mieux  valu  laisser  faire  la  nature  (un  Lacédémonien,  l'empereur  Adrien,  un 
LUTTEUR  et  Diogène,  Nicoclès),  39.  —  Les  médecins  se  targuent  de  toutes  les  amé- 
liorations qu'éprouve  le  malade  et  trouvent  toujours  à  excuser  le  mauvais  succès 
de  leurs  ordonnances  (Platon,  Ésope),  41.  —  Loi  des  Égyptiens  obligeant  les  mé- 
decins à  répondre  de  l'efficacité  du  traitement  de  leurs  malades  (Esculape),  43. — 
Le  mystère  sied  à  la  médecine;  le  charlatanisme  qu'apportent  les  médecins  dans 
la  désignation  et  le  mode  d'emploi  de  leurs  drogues,  leur  attitude  compassée  près 
de  leurs  malades  en  imposent;  ils  devraient  toujours  discuter  à  huis  clos  et  se 
garder  de  traiter  à  plusieurs  un  même  malade,  ils  éviteraient  ainsi  de  déceler  les 
contradictions  qui  régnent  entre  eux,  45.  —  Sur  la  cause  même  des  maladies,  que 
d'opinions  diverses!  47.  —  Quand  la  médecine  a  commencé  à  être  en  crédit; 
fluctuations  que,  depuis  cette  époque,  ont  subies  les  principes  sur  lesquels  elle  re- 
pose (lIipPOCRATE,  Chrysippe,  Érasistrate,  Hiérophile,  Asclépiade,  Thémisson,  Musa, 
Vectius  Valens,  Thessalus,  Crinas  de  Marseille,  Charinus,  Pline  l'Ancien,  Paracelse, 
P'ioraventi,  Argentarius),  47.  —  Rien  de  moins  certain  que  les  médicaments  qui 
ne  font  pas  de  bien  ne  font  pas  de  mal  ;  en  outre,  les  méprises  sont  fréquentes  ; 
la  chirurgie  offre  une  bien  jjIus  grande  certitude,  49.  —  Comment  ajouter  foi  à 
des  médicaments  complexes,  composés  en  vue  d'effets  différents,  souvent  con- 
traires, devant  se  produire  simultanément  sur  divers  de  nos  organes?  53.  —  Cha- 
que maladie  devrait  être  traitée  par  un  médecin  distinct  qui  s'en  serait  spécia- 
lement occupé  (les  Égyptiens),  55.  —  Faiblesse  et  incertitude  des  raisonnements 
sur  lesquels  est  fondé  l'art  de  la  médecine  :  l'un  condamne  ce  que  l'autre  ap- 
prouve, 55.  —  Quoique  Montaigne  n'ait  confiance  en  aucun  remède,  il  reconnaît 
que  les  bains  sont  utiles,  peut-être  aussi  les  eaux  thermales;  diversité  dans  les 
modes  d'emploi  de  ces  eaux  (sources  minérales  en  France,  en  Allemagne,  en  Ita- 
lie), 57.  —  Conte  assez  plaisant  contre  les  gens  de  loi  et  les  médecins  (les  habi- 
tants du  pays  de  Lahontan),  Gl.  —  Autre  conte  sur  la  médecine  (un  bouc  nourri 
d'herbes  apéritives  et  de  vin  blanc),  63.  —  Ce  n'est  que  leur  science  que  Slontai- 
gne  attaque  chez  les  médecins  et  non  eux,  pour  lesquels  il  a  la  même  estime  que 
pour  les  gens  de  n'importe  quelle  autre  profession;  limite  dans  laquelle  il  se  con- 
fie à  eux  ;  combien  au  surplus  ne  font  pas,  pour  eux-mêmes,  usage  des  drogues 
qu'ils  prescrivent  à  autrui  (Lycurgue,  un  gentilhomme  gascon),  65.  —  C'est  la 
crainte  de  la  douleur,  de  la  mort,  qui  fait  qu'on  se  livre  communément  aux  mé- 
decins (les  Babyloniens,  les  Égyptiens),  07.  —  Sur  quoi,  du  reste,  la  connaissance 


B.44  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

que  les  médecins  prétendent  avoii-  do  lefficacité  de  leurs  remèdes  est-elle  fondée 
(Galien)?  69.  —  Insertion  d'une  lettre  do  Montaigne  à  IMadame  de  Duras.  Elle  lui 
a  entendu  exposer  ses  idées  sur  la  médecine,  elle  les  retrouvei'a  dans  son  ouvrage 
où  il  se  peint  tel  qu'il  est,  ne  voulant  pas  paraître  après  lui  autre  qu'il  n'était  de 
son  vivant,  se  souciant  peu  de  ce  que,  lui  mort,  on  en  pourra  penser  (Tibère), 
71.  —  S'il  a  parlé  si  mal  de  la  médecine,  ce  n'a 'été  qu'à  l'exemple  de  Pline  et 
de  Celse,  les  seuls  médecins  de  Rome  ancienne  qui  aient  écrit  sur  leur  art,  75. 
—  11  se  peut  que  lui-môme  en  arrive  à  se  remettre  entre  les  mains  des  médecins; 
c'est  qu'alors,  comme  tant  d'autres,  il  sera  gravement  atteint  et  ne  sera  plus  en 
possession  de  la  plénitude  de  ses  facultés;  au  surplus,  sur  ce  sujet  comme  sur 
toutes  autres  choses,  Montaigne  admet  fort  bien  que  tout  le  monde  ne  soit  pas 
de  son  avis  (Périclès),  7ô. 


LIVRE  TROISIEME. 

CHAPITRE  I. 

De  ce  qui  est  utile  et  de  ce  qui  est  honnête,  III,  79.  —  La  perfidie  est 
si  odieuse  que  les  hommes  les  plus  méchants  ont  parfois  refusé  de  l'employer, 
même  quand  ils  y  avaient  intérêt  (Tibèke  et  Arminius),  79.  —  L'imperfection  de 
la  nature  humaine  est  si  grande  que  des  vices  et  des  passions  très  blâmables, 
sont  souvent  nécessaires  à  l'existence  de  la  société;  c'est  ainsi  que  la  justice  re- 
court quelquefois  et  bien  à  tort  à  de  fausses  promesses,  pour  obtenir  des  ayeux, 
79.  —  Dans  le  peu  d'affaires  politiques  auxquelles  IMontaigne  a  été  mêlé,  il  a 
toujours  cru  devoir  se  montrer  fi'anc  et  consciencieux  (Hypéride  et  les  Athéniens, 
Attigus),  81.  —  Quelque  danger  qu'il  y  ait  à  prendre  parti  dans  les  troubles  inté- 
rieurs, il  n'est  ni  beau,  ni  honnête  de  rester  neutre  (Gélon  tyran  de  Syracuse, 
MoRviLLERs  évêque  d'Orléans),  85.  —  Quel  que  soit  le  parti  que  l'on  embrasse,  la 
modération  est  à  observer  à  l'égard  des  uns  comme  vis-à-vis  des  autres,  87.  —  Il 
est  des  gens  qui  servent  les  deux  partis  à  la  fois;  ils  sont  à  utiliser,  tout  en  se 
gardant  du  mal  qu'ils  peuvent  vous  faire,  87.  — Quant  à  Montaigne,  il  disait  à  tous 
les  choses  telles  qu'il  les  pensait,  et  se  contentait  de  ce  qu'on  lui  communiquait 
sans  chercher  à  pénétrer  les  secrets  de  personne,  ne  voulant  du  reste  être  l'homme 
lige  de  qui  que  ce  fût  (Philippide  et  Lysimaque),  87.  —  Cette  manière  de  faire  n'est 
pas  celle  que  l'on  pratique  d'ordinaire,  mais  il  était  peu  apte  aux  affaires  publi- 
ques qui  exigent  souvent  une  dissimulation  qui  n'est  pas  dans  son  caractère,  89. 

—  11  y  a  une  justice  naturelle,  bien  plus  parfaite  que  les  justices  spéciales  à  cha- 
que nation',  que  chacune  a  créées  à  son  usage  et  qui  autorisent  parfois  des  actes 
condamnables  lorsque  le  résultat  doit  en  être  utile  (l'indien  Dendamis),  91.  —  La 
trahison,  par  exemple,  est  utile  dans  quelques  cas,  elle  n'en  est  pas  plus  honnête; 
ceux  qui  s'y  prêtent  en  sont  flétris  et  on  ne  saurait  vous  imposer  d'en  commettre 
(deux  COMPÉTITEURS  au  royaume  de  Thrace,  l'empereur  Tibère  et  Pomponils  Flac- 
cus,  les  Lacédémomens  et  Antipater,  les  rois  d'Egypte  et  leurs  juges),  93.  —  Si  elle 
est  excusable,  ce  n'est  qu'opposée  à  une  autre  trahison  sans  que  pour  cela  le 
traître  cesse  d'être  méprisé;  parfois  il  est  puni  par  ceux-là  mêmes  qu'il  a  servis 
(F.ABRicius  et  le  médecin  de  Pyrrhus,  Jaroi.epc  duc  de  Russie,  Antigone  et  les  sol- 
dats d'EuMÈNE,  I'esclave  de   Sulpitius,  Clovis,  Mahomet  II,  la  fille  de  Séjan),  95. 

—  Ceux  qui  consentent  à  être  les  bourreaux  de  leurs  parents  et  de  leurs  compa- 
gnons encourent  la  réprobation  publique  (Witolde,  prince  de  Lithuanie),  99.  — 
Les  princes  sont  quelquefois  dans  la  nécessité  de  manquer  à  leur  parole;  ils 
ne  sont  excusables  que  s'ils  se  sont  trouvés  dans  l'impossibilité  absolue  d'assurer 
autrement  les  intérêts  publics  dont  ils  ont  charge,  99.  —  Comment  le  Sénat  de 
Corinthe  s'en  remit  à  la  Fortune,  du  jugement  qu'il  avait  à  porter  sur  Timoléox 
qui  venait  de  tuer  son  propre  frère,  101.  —  Acte  inexcusable  du  Sénat  romain 
revenant  sur  un  traité  qu'il  avait  ratifié,  revirement  fréquent  dans  les  guerres 
civiles,  101.  —  L'intérêt  privé  ne  doit  jamais  prévaloir  sur  la  foi  donnée;  ce  n'est 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       UV.  HI,  CH.  I.  —  VOL.  III.  B.45 

que  si  on  s'est  engagé  à  quelque  choso  d'inique  ou  de  criminel,  que  l'on  peut 
manquer  à  sa  parole,  103.  —  Chez  Épaminondas,  l'esprit  de  justice  et  la  délica- 
tesse de  sentiments  ont  toujours  été  prédominants;  son  exemple  montre  qu'ils 
sont  compatibles  avec  les  rigueurs  de  la  guerre  et  qu'il  est  des  actes  qu'un 
homme  ne  peut  se  permettre  même  pour  le  service  de  son  roi,  non  plus  que 
pour  le  bien  de  son  pays  (Pompée,  Césau,  Maiuls,  un  soldat  de  Pompée,  un  autre 
à  une  époque  un  peu  postérieure),  103.  —  En  résumé,  l'utilité  d'une  action  ne  la 
rend  pas  honorable,  107. 

CHAPITRE  II. 

Du  repentir,  III,  107.  —  Avant  d'entrer  en  matière,  Montaigne  jette  un  re- 
gard sur  lui-même  et  expose  que,  si  la  peinture  qu'il  (ait  de  lui  dans  son  ouvrage 
ne  le  représente  pas  constamment  avec  les  mêmes  idées,  c'est  qu'il  se  peint  au 
jour  le  jour  et  que  rien  n'est  stable  en  ce  monde;  il  change,  parce  que  tout 
change  (Demade),  107.  —  Quoique  sa  vie  n'offre  rien  de  particulier,  l'étude  (|u'il 
en  fait,  n'en  a  pas  moins  son  utilité,  étant  donné  que  c'est  un  homme  qu'il  dé- 
peint, et  non  un  grammairien,  un  poète  ou  un  jurisconsulte;  que  jamais  auteur 
n'a  traité  un  sujet  qu'il  possédait  mieux,  et  qu'il  ne  veut  que  raconter  et  non  en- 
seigner, 109.  —  Tout  vice  laisse  dans  l'àme  une  plaie  qui  tourmente  sans  cesse; 
une  bonne  conscience  procure,  au  contraire,  une  satisfaction  durable;  c'est  ce 
qui  fait  que  Montaigne  se  félicite  de  n'avoir,  malgré  la  contagion  de  son  siècle, 
causé  ni  la  ruine  ni  l'affliction  dé  personne,  de  n'avoir  pas  attenté  publique- 
ment aux  lois,  ni  manqué  à  sa  parole,  111.  —  Chacun  devrait  être  son  propre 
juge,  les  autres  n'ont  qu'une  fausse  mesure  de  nous-mêmes;  ce  n'est  pas  nous 
qu'ils  voient,  mais  ce  qu'ils  croient  deviner  de  nous  sous  le  masque  dont  nous 
nous  couvrons,  113.  —  Le  repentir  est,  dit-on,  la  suite  inévitable  d'une  faute; 
cela  n'est  pas  exact  pour  les  vices  enracinés  en  nous,  115.  —  La  vie  extérieure 
d'un  homme  n'est  pas  sa  vie  réelle,  il  n'est  lui-même  que  dans  sa  vie  privée; 
aussi  combien  peu  font  l'admiration  de  ceux  qui  vivent  constamment  dans  leur 
intérieur  et  même  dans  leur  voisinage  immédiat.  C'est  surtout  chez  les  hommes 
de  condition  sociale  peu  élevée,  que  la  grandeur  d'âme  se  manifeste  (Bias,  Livius 
Drusus,  Agésilas,  Montaigne,  Aristote,  Alexandre  et  Socrate,  Tamerlan,  Érasme), 
115. —  Les  inclinations  naturelles,  les  longues  habiXudes  se  développent,  mais  ne 
se  modifient  ni  ne  se  surmontent  par  l'éducation  ;  aussi  ceux  qui  entreprennent 
de  réformer  les  mœurs,  se  trompent-ils  en  croyant  y  arriver  :  ils  n'en  changent 
que  l'apparence,  121.  —  Les  hommes  en  général,  même  dans  leur  repentir,  ne 
s'amendent  pas  réellement  ;  s'ils  cherchent  à  être  autres,  c'est  parce  qu'ils  espè- 
rent s'en  trouver  mieux;  pour  lui,  son  jugement  a  toujours  dirigé  sa  conscience 
(un  PAYSAN  de  l'Armagnac),  121.  —  Aussi  ne  se  repent-il  aucunement  de  sa  vie 
passée;  dans  la  gestion  de  ses  propres  affaires,  il  a  pu  commettre  des  erreurs 
importantes  :  c'est  à  la  fortune,  et  non  à  son  jugement,  qu'il  en  impute  la  faute, 
125.  —  Les  conseils  sont  indépendants  des  événements;  lui-même  en  demandait 
peu  et  n'en  tenait  guère  compte;  d'autre  part,  il  en  donnait  rarement.  Une  fois 
une  affaire  finie,  il  se  tourmentait  peu  de  la  tournure  qu'elle  avait  prise,  lors 
même  qu'elle  était  contraire  à  ses  désirs  ou  à  ses  prévisions  (Phocion),  129.  — 
On  ne  saurait  appeler  repentir  les  changements  que  l'âge  apporte  dans  notre 
manière  de  voir  et  par  suite  dans  notre  conduite;  la  sagesse  des  vieillards  n'est 
que  de  l'impuissance;  ils  raisonnent  autrement,  et  peut-être  moins  sensément 
que  dans  la  vigueur  de  l'âge  (Antisthène),  131.  —  Il  faut  donc  s'observer  dans  la 
vieillesse  pour  éviter,  autant  que  possible,  les  imperfections  qu'elle  apporte  avec 
elle  (Sochate),  133. 

CHAPITRE  in. 

De  la  société  des  hommes,  des  femmes  et  de  celle  des  livres,  II E, 

137.  —  La  diversité  des  occupations  est  un  des  caractères  principaux  do  l'âme 
humaine;  le  commerce  des  livres  est  de  ceux  qui  la  distraient  (Caton  l'Ancien), 


B.46  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

137.  —  Pour  Montaigne,  son  occupation  favorite  était  de  méditer  sur  lui-même  ; 
par  la  lecture,  il  ajoutait  à  ses  sujets  de  méditation;  il  se  plaisait  aussi  aux  con- 
versations sérieuses,  sans  bannir  toutefois  les  sujets  ayant  de  la  grâce  et  de  la 
beauté;  les  entretiens  frivoles  n'étaient  pour  lui  d'aucun  intérêt  (Aristote),  137. 
—  Peu  porté  à  se  lier,  il  apportait  beaucoup  de  circonspection  dans  ces  amitiés 
de  rencontre  qu'engendre  la  vie  journalière;  celte  réserve,  commandée  aussi  par 
le  mauvais  esprit  du  temps,  n'a  pas  été  sans  indisposer  beaucoup  de  personnes 
contre  lui  ;  par  contre,  assoiffé  d  amitié  vraie,  il  se  livrait  sans  restriction  s'il 
venait  à  se  rencontrer  avec  quelqu'un  répondant  à  son  idéal  (Socrate,  Plltar- 
que),  139.  —  Il  est  utile  de  savoir  s'entretenir  familièrement  avec  toutes  sortes  de 
gens  et  il  faut  se  mettre  au  niveau  de  ceux  avec  lesquels  on  converse;  aussi 
n'aime-t-il  pas  les  personnes  au  langage  prétentieux  (Platon,  les  Lacédémomens), 
141.  —  Cette  sorte  de  langage  est  un  défaut  fréquent  chez  les  savants  et  qui  lui 
fait  fuir  les  femmes  savantes;  que  la  femme  ne  se  contente-t-elle  de  ses  dons  na- 
turels ;  si,  cependant,  elle  veut  étudier,  qu'elle  cultive  la  poésie,  l'histoire  et  ce 
qui,  en  fait  de  philosophie,  peut  l'aider  à  supporter  les  peines  de  la  vie,  143.  — 
Montaigne,  de  caractère  ouvert  et  exubérant,  s'isolait  volontiers  autant  par  la 
pensée  au  milieu  des  foules,  à  la  cour  par  exemple,  que  d'une  manière  effective, 
chez  lui,  oîi  on  était  affranchi  de  toutes  les  contraintes  superflues  qu'impose  la 
civilité,  145.  —  Dans  le  monde,  il  recherchait  la  société  des  gens  à  l'esprit  juste  et 
sage,  lesquels  sont  bien  plus  rares  qu'on  ne  croit;  nature  des  conversations  qu'il 
avait  avec  eux.  C'est  là  ce  que  finalement  il  appelle  son  premier  commerce  (Ilip- 
poMACHus;,  147.  —  Le  commerce  avec  les  femmes  vient  en  second  lieu;  il  a  sa  dou- 
ceur, mais  aussi  ses  dangers;  les  sens  y  jouent  un  grand  rôle;  Montaigne  vou- 
drait que  de  part  et  d'autre  on  y  apportât  de  la  sincérité,  à  cet  égard  l'homme 
est  au-dessous  de  la  brute  (les  fh-les  des  Brahmanes),  149.  —  Idée  qu'il  donne 
de  ses  amours;  les  grâces  du  corps,  en  pareil  cas,  l'emportent  sur  celles  de  l'es- 
prit bien  que  celles-ci  y  aient  aussi  leur  prix  (l'empereur  Tibère,  la  courtisane 
Flora),  153.  —  Un  troisième  commerce  dont  l'homme  a  la  disposition,  est  celui 
des  livres;  c'est  le  plus  sur,  le  seul  qui  ne  dépende  pas  d'autrui  ;  les  livres  con- 
solent Montaigne  dans  sa  vieillesse  et  dans  la  solitude  (Jacques  roi  de  Naples  et 
de  Sicile),  153.  —  Sa  bibhothèque  est  son  lieu  de  retraite  de  prédilection  ;  description 
qu'il  en  donne,  155.  —  Les  Muses  sont  le  délassement  de  l'esprit.  Dans  sa  jeunesse, 
Montaigne  étudiait  pour  briller;  dans  l'âge  mùr,  pour  devenir  plus  sage;  devenu 
vieux,  il  étudie  pour  se  distraire,  159.  — Mais  le  commerce  des  livres  a,  lui  au.ssi, 
des  inconvénients  ;  il  n'exerce  pas  le  corps  :  de  ce  fait,  dans  la  vieillesse,  il  est 
préjudiciable  à  la  santé,  159. 

CHAPITRE  IV. 

De  la  diversion,  III,  159.  —  C'est  par  la  diversion  qu'on  parvient  à  calmer 
les  douleurs  vives.  On  console  mal  par  le  raisonnement  ;  il  faut  distraire  l'esprit, 
appeler  son  attention  sur  d'autres  objets,  mais  l'effet  en  est  de  courte  durée 
(Cléanthe,  les  PÉRiPATÉTiciENS,  Chrysippe,  Épicure,  Cicéron),  159.  —  A  la  guerre,  la 
diversion  se  pratique  utilement  pour  éloigner  d'un  pays  un  ennemi  qui  l'a  en- 
vahi, pour  gagner  du  temps  (Périclfis,  le  sielr  d'Himbercourt,  Atalante  et  IIippo- 
mène),  161.  —  C'est  aussi  un  excellent  remède  dans  les  maladies  de  l'àme,  par  elle 
on  rend  moins  amers  nos  derniers  moments;  Socrate  est  le  seul  qui,  dans  l'at- 
tente de  la  mort,  sans  cesser  de  s'en  entretenir,  ait  constamment,  durant  un  long 
espace  de  temps,  gardé  la  plus  parfaite  sérénité  (les  disciples  d'HÉoÉsus  et  le  roi 
Ptolémée),  lti5.  —  Chez  les  condamnés  à  mort,  la  dévotion  devient  une  diversion 
à  leur  terreur,  165.  —  Fermeté,  loi'S  de  son  exécution,  de  Subrius  Flavius  con- 
damné à  mort,  167.  —  Sur  un  champ  de  bataille,  dans  un  duel,  l'idée  de  la  mort 
est  absente  de  la  pensée  des  combattants  (L.  Silancs),  167.  —  Dans  les  plus  cruelles 
calamités,  nombre  de  considérations  rendent  notre  situation  moins  pénible; som- 
mes-nous menacés  d'une  mort  prochaine,  l'espérance  d'une  vie  meilleure,  le  suc- 
cès de  nos  enfants,  la  gloire  future  de  notre  nom,  l'espoir  que  nous  serons  ven- 
gés, etc.,  tout  se  présente  à  notre  esprit,  l'occupe  et  le  distrait  (Didon,  Arune, 
XÉNOPHOx,  Épicure,  Épaminondas,  Zéxon),  167.  —  Moyen  de  dissiper  un  ardent  dé- 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  III,  CH.  IV.  —  VOL.  III.         B.47 

sir  de  vengeance,  169.  —  C'est  encore  par  la  diversion  qu'on  se  guérit  de  l'amour, 
comme  de  toute  autre  passion  malheureuse;  par  elle,  le  temps,  qui  calme  tout, 
exerce  son  action,  169.  —  De  même  en  détournant  l'attention,  on  fait  tomber  un 
l)iiiit  public  qui  vous  offense  (Ai.cibiade),  171.  —  Un  rien  suffit  pour  attirer  et  dé- 
tourner notre  esprit;  en  présence  même  de  la  mort,  les  objets  les  plus  frivoles 
entretiennent  en  nous  le  regret  de  la  vie  (Plutarque,  la  robe  de  César,  Tibère), 
173.  — L'orateur  et  le  comédien  en  arrivent  souvent  à  ressentir  en  réalité  les  sen- 
timents qu'ils  expriment  dans  le  plaidoyer  qu'ils  débitent  ou  le  rôle  qu'ils  jouent 
(les  PLEUREUSES,  Ic  convoi  de  M.  de  Grammont,  Quintilien),  175.  —  Singulier  moyen 
que  nous  mettons  en  œuvre  pour  faire  diversion  à  la  douleur  que  nos  deuils 
peuvent  nous  causer,  177.  —  Nous  nous  laissons  souvent  influencer  par  de  purs 
effets  d'imagination;  parfois,  il  n'en  faut  pas  davantage  pour  nous  porter  aux  pi- 
res résolutions  (Cambyse,  Arisïodème,  Midas,  Prométhée),  177. 


CHAPITRE  V. 

A  propos  de  quelques  vers  de  Virgile,  III,  179.  —  La  vieillesse  est  si 
naturellement  portée  vers  les  idées  tristes  et  sérieuses  que,  pour  se  distraire,  elle 
a  besoin  de  se  livrer  quelquefois  à  des  actes  de  gaité;  à  l'âge  où  il  est  parvenu, 
Montaigne  se  défend  de  la  tempérance  comme  il  se  défendait  autrefois  de  la  vo- 
lupté, 179.  —  Aussi  saisit-il  avidement  toutes  les  occasions  de  goûter  quelque 
plaisir  et  pense  qu'il  vaut  mieux  être  moins  longtemps  vieux,  que  vieux  avant  de 
l'être  (Platon),  181.  —  Ce  qu'il  y  a  de  pire,  dans  la  vieillesse,  c'est  que  l'esprit  se 
ressent  des  souffrances  et  de  l'affaiblissement  du  corps,  185.  —  Lasanté,  la  vigueur 
physique  font  éclore  les  grandes  conceptions  de  l'esprit;  la  sagesse  n'a  que  faire 
d'une  trop  grande  austérité  de  mœurs,  elle  est  par  essence  gaie  et  sociable  (Platon, 
SocRATE,  Crassus),  185.  —  Ceux  qui  se  blessent  de  la  licence  des  écrits  de  Montaigne 
devraient  bien  plutôt  blâmer  celle  de  leurs  pensées.  Pour  lui,  il  ose  dire  tout  ce  qu'il 
ose  faire  et  regrette  que  tout  ce  qu'il  pense  ne  puisse  de  même  être  publié;  il  est 
du  reste  à  présumer  que  la  confession  qu'il  fait  de  ses  fautes,  aura  peu  d'imitateurs 
(Thalès,  Origène,  Ariston),  187.  —  Ce  que  les  hommes  craignent  le  plus,  c'est 
qu'une  occasion  quelconque  mette  leurs  mœurs  à  découvert;  et  pourtant,  com- 
ment un  homme  peut-il  être  satisfait  d'être  estimé,  honoré,  lorsqu'il  sait  qu'il  ne 
mérite  ni  l'estime,  ni  la  vénération?  Montaigne,  qui  va  maintenant  entrer  dans 
le  vif  de  son  sujet,  appréhende  que  ce  chapitre  des  Essais  ne  fasse  passer  son 
livre  du  salon  de  ces  dames  dans  leur  boudoir  (ArchélaOs,  Socrate),  191.  —  Com- 
ment se  fait-il  que  l'acte  par  lequel  se  perpétue  le  genre  humain,  paraisse  si  hon- 
teux qu'on  n'ose  le  nommer?  Il  est  vrai  que  si  on  tait  son  nom,  il  n'en  est  pas 
moins  connu  de  tout  sexe  (Aristote,  Plutarque,  Lucrèce),  193.  —  Pourquoi  avoir 
voulu  brouiller  les  Muses  avec  Vénus?  Rien  n'inspire  plus  les  poètes  que  l'amour, 
et  rien  ne  peint  mieux  ses  transports  que  la  poésie;  pour  s'en  convaincre,  il  ne 
faut  que  lire  les  vers  oîi  Virgile  décrit  avec  tant  de  chaleur  une  entrevue  amou- 
reuse de  Vénus  avec  Vulcain,  193.  —  Le  mariage  diffère  de  l'amour;  c'est  un 
marché  grave,  dicté  par  la  raison,  que  l'on  contracte  en  vue  de  la  postérité  ;  les 
extravagances  amoureuses  doivent  en  être  bannies; au  surplus,  les  mariages  aux- 
quels l'amour  a  seul  présidé,  ont,  plus  que  tous  autres,  tendance  à  mal  tourner 
(Aristote),  195.  —  L'amour  ne  fait  pas  partie  intégrante  du  mariage,  pas  plus 
que  la  vertu  n'est  d'une  façon  absolue  liée  à  la  noblesse.  Digression  sur  le  rang 
en  lequel  sont  tenus  les  nobles  dans  le  royaume  de  Calicut  (Antigone),  195.  —  Un 
bon  mariage,  s'il  en  existe,  est  une  union  faite  d'amitié  et  de  confiance,  qui  im- 
pose des  devoirs  et  des  obligations  mutuelles;  il  n'est  pas  d'état  plus  heureux 
dans  la  société  humaine  (Socrate),  199.  —  Montaigne  répugnait  beaucoup  à  se 
marier,  cependant  il  s'est  laissé  assujettir  par  l'exemple  et  les  usages  à  ce  com- 
mun devoir;  et,  tout  licencieux  qu'on  le  croit,  il  a  mieux  observé  les  lois  du  ma- 
riage qu'il  ne  l'avait  promis  et  espéré.  Ceux-là  ont  grand  tort  qui  s'y  engagent 
sans  être  résolus  à  s'y  comporter  de  même,  201.  —  Différence  entre  le  mariage 
et  l'amour;  une  femme  peut  céder  à  un  homme,  dont  elle  no  voudrait  pas  pour 
mari  (Virgu.e,  Isocrate,  Lycurgue,  Platon),  203.  —  Nos  lois  sont  trop  sévères 


B.48  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

envers  les  femmes,  on  voit  qu'elles  ont  été  faites  par  les  hommes.  Nous  voulons 
qu'elles  maîtrisent  leurs  désirs  plus  ardents  encore  que  les  nôtres,  que  nous  n'es- 
sayons même  pas  de  modérer  (Isocrate,  Tirksias,  Proculus  et  Messalixe,  une 
FEMME  DE  Catai.oose  ct  la  REINE  d'Akagox,  Solox),  205.  —  Il  n'y  a  pas  de  passion 
plus  impérieuse,  et  nous  nous  opposons  à  ce  qu'elles  en  tempèrent  les  effets  ou 
reçoivent  entière  satisfaction;  épousent-elles  un  jeune  homme,  cela  ne  l'empêche 
pas  d'avoir  des  maîtresses;  un  vieillard,  c'est  comme  si  elles  restaient  vierges  (le 
philosophe  Polémox,  la  vestale  Clodia  L.«ta,  Bolesi.as  roi  de  Pologne  et  Kixge 
sa  femme),  200.  —  L'éducation  qu'on  donne  aux  jeunes  filles,  tout  opposée  à  ce 
qu'on  exige  d'elles,  éveille  constamment  en  elles  ce  sentiment:  elles  n'entendent 
parler  que  d'amour;  ce  qu'on  leur  en  cache,  souvent  maladroitement,  elles  le 
devinent;  aussi,  leur  imagination  aidant,  en  savent-elles  plus  que  nous  qui  pré- 
tendons les  instruire,  et  Boccace  et  l'Arétin  n'ont  rien  à  leur  apprendre  (la  fii,le 
DE  Montaigne),  200.  —  Du  reste  c'est  l'amour,  c'est  l'union  des  sexes  qui  sont  la 
grande  affaire  de  ce  monde;  aussi  ne  faut-il  pas  s'étonner  si  les  plus  grands  phi- 
losophes ont  écrit  sur  ce  sujet  (Socrate,  Zéxon,  Straton,  Théophraste,  Aristippe, 
Platon,  Démétrius  de  Phalère,  Héraclide  du  Pont,  Antisthène,  Ariston,  Cléanthe, 
Sphereus,  Chrysippe,  l'école  d'ÉPiciRE),  211.  —  Dans  l'antiquité,  les  organes  de  la 
génération  étaient  déifiés;  aujourd'hui,  comme  alors,  tout  du  fait  de  l'homme 
comme  de  celui  de  la  nature,  rappelle  constamment  l'amour  aux  yeux  de  tous 
(à  Babylone,  dans  l'île  de  Chypre,  à  Héliopolis,  les  Égyptiennes,  les  matrones  de 
Rome,  la  chaussure  des  Suisses,  les  costumes  des  hommes  et  des  femmes  chez  nous 
et  ailleurs,  un  pape),  213.  —  Mieux  vaudrait  renseigner  de  bonne  heure  la  femme 
sur  les  choses  de  l'amour,  que  de  lui  en  faire  mystère  et  de  laisser  son  imagina- 
tion travailler,  ce  qui  la  porte  notamment  à  des  exagérations  qui  aboutissent  à 
des  déconvenues  lorsqu'elle  est  en  présence  de  la  réalité;  en  somme,  dans  toutes 
les  règles  qu'il  a  édictées,  l'homme  n'a  eu  que  lui-même  en  vue  (Platox,  les 
FEMMES  de  I'Ixde,  Livie,  les  Lacédémoniexnes,  S.  Augustin),  215.  —  11  est  bien  diffi- 
cile, dans  l'état  actuel  de  nos  mœurs,  qu'une  femme  demeure  toujours  chaste  et 
fidèle  (S.  Jérôme),  217.  —  Elles  n'en  ont  que  plus  de  mérite,  lorsqu'elles  parvien- 
nent à  se  maintenir  sages;  mais  ce  n'est  pas  en  se  montrant  prudes  et  revêches 
qu'elles  feront  croire  à  leur  vertu.  Ce  à  quoi  elles  doivent  s'appliquer,  c'est  à  con- 
server leur  réputation,  ou,  si  elles  l'ont  perdue,  à  la  rétablir.  L'indiscrétion  des 
hommes  est  un  grand  tourment  pour  elles,  219.  —  La  jalousie  est  une  passion 
inique  dont  elles  ont  également  à  souffrir,  etc.;  le  préjugé  qui  nous  fait  considé- 
rer comme  une  honte  l'infidéhté  de  la  femme  n'est  pas  plus  raisonnable.  Que  de 
grands  hommes  se  sont  consolés  de  cet  accident  ;  les  dieux  du  paganisme,  Vul- 
CAix  entre  autres,  ne  s'en  alarmaient  pas.  Chez  la  femme,  la  jalousie  est  encore 
plus  terrible  que  chez  l'homme;  elle  pervertit  en  elle  tout  ce  qu'il  y  a  de  bon  et 
de  beau  et  la  rend  susceptible  des  pires  méfaits  (le  berger  Chratis,  Lucullus, 
CÉSAR,  Pompée.  Antoine,  Catox,  Lépide,  Vulcain  et  Vénus,  Octave  et  Paulia  Posthu- 
mia),  223.  —  La  chasteté  est-elle  chez  la  femme  une  question  de  volonté?  Pour 
réussir  auprès  d'elle,  t<)ut  dépend  des  occasions  et  il  faut  savoir  oser  (Montaigne 
était  de  ceux  qui  n'osent  guère)  ;  celles  qui  se  prétendent  sûres  d'elles-mêmes,  ou 
n'ont  pas  été  exposées  à  la  tentation,  ou  se  vantent  ;  du  reste  ce  que  nous  enten- 
dons leur  interdire  à  cet  égard,  est  mal  défini  et  peut  se  produire  parfois  incons- 
ciemment (les  FEMMES  Scythes,  Fatua  femme  de  Faustus,  la  femme  de  Hiérox),  227. 
—  C'est  d'après  l'intention  qu'il  faut  juger  si  la  femme  manque,  ou  non,  à  son  de- 
voir; qu'a-t-on  à  blâmer  chez  celle  qui  se  prostitue  pour  sauver  son  mari?  à  celle 
qui  a  été  livrée  au  libertinage  avant  l'âge  d'avoir  pleine  connaissance?  et  puis, 
quel  profit  retirons-nous  de  prendre  trop  de  souci  de  la  sagesse  de  nos  femmes 
(Phaulius  d'Argos  et  le  roi  Philippe,  Galba  et  Mécène,  les  ffmmes  de  l'Ixde,  le  phi- 
losophe Phédon,  Solon)  ?  231.  —  Il  vaut  mieux  ignorer  que  connaître  leur  mauvaise 
conduite;  un  honnête  homme  n'en  est  pas  moins  estimé  parce  que  sa  femme  le 
trompe.  C'est  là  un  mal  qu'il  faut  garder  secret,  mais  c'est  là  un  conseil  qu'une 
femme  jalouse  ne  saurait  admettre,  tant  cette  passion,  qui  l'amène  à  rendre  la 
vie  intolérable  à  son  mari,  la  domine  une  fois  qu'elle  s'est  emparée  d'elle  (Pitta- 
cus,  le  sénat  de  Marseille),  233.  —  Un  mari  ne  gagne  rien  à  user  de  trop  de  con- 
trainte envers  sa  femme  ;  toute  gêne  aiguise  les  désirs  de  la  femme  et  ceux  de 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.      LIV.  III,  CH.  V.  —  VOL    HI.  B.49 

ses  poursuivants  (un  hôte  de  Flamimis,  Messaline  et  Claude),  237.  —  Lucrèce  a 
peint  les  amours  de  Vénus  et  de  Mars  avec  des  couleurs  plus  naturelles  que  Virgile 
décrivant   les  rapports  matrimoniaux  de  Vénus  et  de  Vulcain;  quelle  vigueur 
dans  ces  deux  tableaux  si  expressifs!  Caractère  de  la  véritable  éloquence;  enrichir 
et  perfectionner  leur  langue  est  le   propre  des  bons  écrivains;  quelle  différence 
entre  ceux  des  temps  anciens  et  ceux  du  siècle  de  Montaigne  (Viroile,  Llcrèce, 
Gallls,  Hokace,  Plutarque,    Ronsard    et    la  Pléiade),  239.   —  La  langue   fran- 
çaise, en  l'état,  se  prête  mal,  parce  qu'on  no  sait  pas  en  user,  à  rendre  les  idées 
dont  l'expression  comporte  de  l'originalité  et  de  la  vigueur;  ce  qui  fait  qu'on  a  sou- 
vent recours  à  l'aide  du  latin  et  du  grec,  alors  qu'on  en  pourrait  tirer  davantage. 
On  apporte  également  trop  d'art  dans  le  langage  employé  dans  les  questions  de 
science  (Léon  l'Hébreu,  Ficin,  Aristoïe,  Bambo,  Équicola),  243.  —  Montaigne  ai- 
mait, quand  il  écrivait,  à  s'isoler  et  à  se  passer  de  livres  pour  ne  pas  se  laisser 
intUiencer  par  les  conseils  et  par  ses  lectures;  il  ne  faisait  exception  que  pour 
Plutarque  (un  peintre,  le  musicien  Antigemde),  245.  —  Il  a  grande  tendance  à 
imiter  les  écrivains  dont  il  lit  les  ouvrages,  aussi  traite-t-il  de  préférence  des  sujets 
qui  ne   l'ont  pas  encore  été;  n'importe  lequel,  un  rien  lui  suffit  (des  sinc.es  et 
Alexandre,  Socrate,  Zenon  et  Pythagore),  247.  —  Les  idées  les  plus  profondes, 
comme  les  plus  folles,  lui  viennent  à  l'improviste,  surtout  lorsqu'il  est  à  cheval; 
le  souvenir  qu'il  en  conserve  est  des  plus  fugitifs,  249.  —  Revenant  à  son  sujet 
principal,  Montaigne  estime  que  l'amour  n'est  autre  que  le  désir  d'une  jouissance 
physique;  et,  considérant  ce  que  l'acte  lui-même  a  de  ridicule,  il  est  tenté  de 
croire  que  les  dieux  ont  voulu  par  là  apparier  les  sages  et  les  fous,  les  hommes 
et  les  bêtes  (Socrate,  Platon,  Alexandre),  249.  —  D'autre  part,  pourquoi  regarder 
comme  honteuse  une  action  si  utile,  commandée  par  la  nature?  On  se  cache  et 
on  se  confine  pour  construire  un  homme;  pour  le  détruire,  on  recherche  le  grand 
jour  et  de  vastes  espaces  (les  Esséniens,  les  Athéniens),  251.  —  N'y  a-t-il  pas  des 
hommes,  et  même  des  peuples,  qui  se  cachent  pour  manger?  chez  les  Turcs,  des 
fanatiques  qui  se  défigurent?  un  peu  partout  des  hommes  quj  s'isolent  de  l'hu- 
manité? On  abandonne  les  lois  de   la  nature,  pour  suivre  celles  plus  ou  moins 
fantasques  des  préjugés,  253.  —  Parler  discrètement  de  l'amour,  comme  l'ont  fait 
Virgile  et  Lucrèce,  c'est  lui  donner  plus  de  piquant;  ainsi  font  les  femmes  qui 
cachent  leurs  appâts  pour  les  rendre  plus  attrayants;  et  les  prêtres,  leurs  dieux 
pour  leur  donner  plus  de  lustre  (Virgile,  Lucrèce,  Ovide,  Martial),  255.  — ^  L'amour, 
tel  que  le  pratiquent  les  Espagnols  et  les  Italiens,  plus  respectueux  et  i)lus  timide 
que  chez  les  Français,  piait  à  Montaigne;  il  en  aime  les  préambules;  celui  qui  ne 
trouve  de  jouissance  que  dans  la  jouissance  n'est  pas  de  son  école.  Le  pouvoir  de 
la  femme  prend  fin,  dès  l'instant  qu'elle  est  à  nous  (Thrasomde),  257.  —  La  cou- 
tume d'embrasser  les  femmes  lorsqu'on  les  salue,  lui  déplaît,  c'est  profaner  le 
baiser;  les  hommes  eux-mêmes  n'y  gagnent  pas  :  pour  trois  belles  qu'ils  embras- 
sent il  leur  en  faut  embrasser  cinquante  laides  (Socrate),  259.  —  11  approuve  que, 
même  avec  des  courtisanes,  on  cherche  à  gagner  leur  affection  afin  de  ne  pas 
avoir  que  leur  corps  seulement  (les  Italiens,  la  Vénus  de  Praxitèle,  un  Égyptien, 
Pkriandre,  la  Lune  et  Endymion),  259.  —  Les  femmes  sont  plus  belles,  les  hommes 
ont  plus  d'esprit  en  Italie  qu'en  France;  mais  nous  avons  autant  de  femmes 
dexquise  beauté  et  d'hommes  supérieurs  que  les  Italiens.  La  femme  mariée  est 
chez  eux,  ti'op  étroitement  tenue,  ce  qui  est  d'aussi  fâcheuse  conséquence  que  de 
leur  laisser  trop  de  licence,  261.  —  Il  est  de  l'intérêt  de  la  femme  d'être  modeste 
et  d'avoir  de  la  retenue;  même  n'étant  pas  sages,  elles  sauvegardent  de  la  sorte 
leur  réputation;  la  nature  d'ailleurs  les  a  faites  pour  se  refuser,  du  moins  en  ap- 
parence, car  elles  sont  toujours  prêtes;  par  ces  refus,  elles  excitent  beaucoup  plus 
l'homme  (les  Sarmates,  Aristippe,  Tiialestris  et  Alexandre),  2G5.  —  Il  y  a  de  l'in- 
justice à  blâmer  l'inconstance  de  la  femme;  rien  de  violent  ne  peut  durer  et,  par 
essence,  l'amour  est  violent;  d'autre  part,  c'est  une  passion  qui  n'est  jamais  as- 
souvie, il  ne  faut  donc  pas  leur  savoir  mauvais  gré  si,  après  nous  avoir  acceptés, 
s'aporcevant  que  nos  facultés,  notre  mérite  ne  sont  pas  ce   qu'elles   attendaient 

de  nous,  elles  se  pourvoient  ailleurs  (la  reine  Jeanne  de  Naples,  Platon)  265. 

Quand  l'âge  nous  atteint,  ne  nous  abusons  pas  sur  ce  dont  nous  sommes  encore 
capables,  et  ne  nous  exposons  pas  à  être  dédaignés,  267.  —  Montaigne  reconnaît 

ESSAIS   de    MONTAIGNE.  —  T.    IV.  4 


B.50  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

la  licence  de  son  style,  mais  il  tient  à  ce  que  son  livre  soit  une  peinture  exacte 
de  lui-même;  et,  bien  qu'aimant  la  modestie,  il  est  obligé  par  les  mœurs  de  son 
temps  à  une  grande  liberté  de  langage  qu'il  est  le  premier  à  i-egretter  (Théodohe 
DE  Bkze,  Saint-Gelais),  269.  —  Il  est  injuste  d'abuser  du  pouvoir  que  les  femmes 
nous  donnent  sur  elles  en  nous  cédant;  à  cet  égard,  il  n'a  rien  à  se  reprocher  :  il 
tenait  religieusement  les  engagements  pris  avec  elles,  en  observait  toutes  les  con- 
ditions, souvent  au  delà  et  plus  môme  qu'elles  n'eussent  voulu,  273.  —  Même  dans 
ses  plus  vifs  transi)orts,  il  conservait  sa  raison.  Il  estime  qu'en  pareille  matière, 
la  modération  doit  être  de  règle;  tant  (ju'on  reste  maître  de  soi  et  que  ses  forces 
ne  sont  point  altérées,  on  peut  s'abandonner  à  l'amour;  quand  viennent  les  ans, 
l'imagination,  substituée  à  la  réalité,  nous  i-anime  encore  (le  philosophe  Panetiis, 
Agésilas,  Anackéon,  Socrate),  275.  —  Dans  l'usage  des  plaisirs,  l'esprit  et  le  corj)s 
doivent  s'entendre  et  s'entr'aider  pour  que  chacun  y  participe  dans  la  mesure  où 
cela  lui  est  possible,  comme  il  arrive  de  la  douleur,  279.  —  L'amour  chez  le  vieil- 
lard que  n'a  pas  encore  atteint  la  décrépitude,  ranimerait  le  corps,  obligerait  à 
en  prendre  plus  de  soin,  ragaillardirait  l'esprit,  ferait  diversion  aux  tristesses  et 
aux  chagrins  de  toutes  sortes  qui  l'assaillent;  mais  il  ne  saurait  exiger  un  amour 
i"écipi'oque;  surtout  qu'il  ne  s'adresse  pas  à  des  femmes  hors  d'âge.  A  dire  vrai, 
l'amour  sans  limites  ne  convient  qu'à  la  première  jeunesse  (Biox,  Cvkus,  Ménon, 
l'empereur  Gai.ba,  Ovide,  Emoxès  de  Chio  et  le  philosophe  Arcésii.as.  Hofiace,  Ho- 
mère, Platon,  la  reine  Marguerite  de  Navarre,  Saint  Jérôme),  281.  —  On  voit  sou- 
vent les  femmes  sembler  faire  de  l'amour  une  question  de  sentiment  et  dédaigner 
la  satisfaction  que  les  sens  peuvent  y  trouver,  285.  —  En  somme,  hommes  et 
femmes  ont  été  pétris  dans  le  même  moule,  et  un  sexe  n'est  guère  en  droit  de  cri- 
tiquer l'autre  (Platon,  Antisthène),  287. 


CHAPITRE  VI. 

Des  coches,  III,  287.  —  Différence  des  opinions  des  philosophes  sur  les 
causes  et  les  origines  de  divers  usages  et  accidents,  par,  exemple  sur  l'habitude 
de  dire  :  «  Dieu  vous  bénisse!  »  à  qui  éternue,  sur  le  mal  de  mer;  digression  sur 
la  peur  (Plltarqle,  Montaigne,  Socrate,  Épicure),  287.  —  Variété  d'emploi  dos 
chars  à  la  guerre;  usage  qui  en  a  été  fait  pendant  la  paix,  par  nos  premiers  rois, 
par  divers  empereurs  romains  (les  Hongrois  et  les  Turcs,  les  rois  fainéants,  Marc- 
Antoine,  IIÉLiOGABALE,  l'empercur  Firmus),  293.  —  En  général,  les  souverains  ont 
grand  tort  de  se  livrer  à  des  dépenses  de  luxe  pour  se  montrer  avec  plus  d'ap- 
parat, donner  des  fêtes  au  lieu  d'employer  leurs  trésors  à  élever  des  monuments 
et  des  établissements  utiles;  ces  prodigalités  sont  mal  vues  des  peuples  qui  esti- 
ment, avec  raison,  qu'elles  sont  faites  à  leurs  dépens  (Isocrate,  Démosthène,  Théo- 
PHRASTE,  Aiustote,  le  pape  Grégoire  XIII,  la  i-eine  Catherine,  l'empereur  Galba), 
295.  —  Un  roi,  en  effet,  ne  possède  rien,  ou  ne  doit  rien  posséder  en  propre  et  il 
se  doit  tout  entier  à  son  peuple;  une  sage  économie  et  la  justice  doivent  présider 
à  ses  libéralités  d'autant  que,  quoi  qu'il  fasse,  il  lui  sera  toujours  impossible  de 
satisfaire  l'avidité  de  ses  sujets  (Denys  le  Tyran,  Cyrus  et  Crésus),  297.  —  On  pou- 
vait à  Rome  excuser  la  pompe  des  spectacles,  tant  que  ce  furent  des  particuliers 
qui  en  faisaient  les  frais,  mais  non  quand  ce  furent  les  empereurs,  parce  que  c'é- 
tait aloi-s  les  deniers  publics  qui  en  supportaient  la  dépense  (Philippe  père  d'A- 
lexandre), 301.  —  Description  de  ces  magnifiques  et  étranges  spectacles;  ce  que 
l'on  en  doit  le  plus  admirer,  c'est  moins  leur  magnificence  que  l'invention  et  les 
moyens  d'exécution;  nous  y  voyons  combien  les  arts,  que  nous  croyons  arrivés 
chez  nous  à  la  perfection,  sont  moins  avancés  que  chez  les  anciens;  l'artillerie  et 
l'imprimerie  qui  viennent  d'apparaître  chez  nous,  étaient  connues  depuis  mille  ans 
en  Chine  (l'empereur  Probus,  Solon  et  les  prêtres  égyptiens),  301.  —  Un  nouveau 
monde  vient  d'être  découvert;  ses  habitants  sont  gens  simples,  moins  corrompus 
que  nous,  ayant  du  bon  sens;  des  arts  leur  sont  absolument  inconnus,  d'autres, 
à  en  juger  par  certaines  de  leurs  œuvres,  ne  le  cèdent  en  rien  à  ce  que  nous- 
mêmes  pouvons  produire,  307.  — Pour  ce  qui  est  de  leur  courage,  il  n'est  pas  dou- 
teux que,  s'ils  ont  succombé,  c'est  beaucoup  plus  par  ruse  et  par  surj)rise  que  du 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.      LIV.  Ili,  CH.  VI.  -  VOL.  III.        B.ol 

l'ait  de  la  valeur  de  leurs  ennemis,  309.  —  Tout  autre  eût  été  le  sort  de  ces  peu- 
ples s'ils  étaient  tombés  entre  les  mains  de  conquéi-ants  plus  humains  «H  policés 
comme  étaient  les  anciens  Grecs  et  Romains;  les  réponses  que  firent  certains 
d'enti-e  eux  à  leurs  envahisseurs  se  présentant  pour  pénétrer  chez  eux,  témoi- 
gnent (le  leur  mansuétude  et  de  leur  bon  sens,  311.  —  Mauvaise  foi  et  barbarie 
des  Espagnols  à  l'égard  des  derniers  rois  du  Pérou  et  de  Mexico;  horrible  auto- 
dafé qu'ils  firent  un  jour  de  leurs  prisonniers  de  guerre,  conduite  odieuse  que  la 
Providence  n'a  pas  laissée  impunie,  313.  —  L'or,  par  lui-même,  n'est  pas  une  ri- 
chesse, il  ne  le  devient  que  s'il  est  mis  en  circulation,  317.  —  Les  Mexicains 
croyaient  à  cinq  âges  du  inonde,  et  pensaient  se  trouver  dans  le  dernier  quand  les 
Espagnols  vinrent  les  exterminer,  319.  —  La  route  de  Quito  à  Cusco,  au  Pérou, 
surpasse  sous  tous  rapports  n'importe  quel  ouvrage  qui  ait  été  exécuté  en  Grèce, 
à  Rome  et  en  Egypte,  319.  —  Pour  en  revenir  aux  coches,  ils  étaient  inconnus 
dans  le  Nouveau  Monde;  le  dernier  roi  du  Pérou  était,  au  milieu  de  la  mêlée, 
porté  sur  une  chaise  d'or  élevée  sur  des  brancards  d'or,  lorsqu'il  fut  fait  prison- 
nier par  les  Espagnols,  321. 

r.IIAPITRE  VII. 

Des  inconvénients  des  grandeurs,  III,  321.  — Qui  connaît  les  grandeurs 
et  leurs  incommodités,  peut  les  fuir  sans  beaucoup  d'efforts  ni  grand  mérite,  321. 
—  Montaigne  n'a  jamais  souhaité  des  postes  très  élevés;  bien  difl'érent  de  César, 
il  préférait  être  le  deuxième  ou  le  troisième  dans  sa  ville,  que  le  premier  à  Paris; 
une  vie  douce  et  tranquille  lui  convient  bien  mieux  qu'une  vie  agitée  et  glo- 
rieuse; il  ne  voudrait  ni  commander  ni  obéir,  si  ce  n'est  aux  lois  (Thokius  Bai.- 
Dus  et  Regli.ls,  Otanez),  323.  —  Il  est  très  porté  à  excuser  les  fautes  des  rois, 
parce  que  leur  métier  est  des  plus  difficiles;  leur  toute-puissance  est  une  préroga- 
tive dangereuse;  on  leur  cède  en  tout,  ils  n'ont  jamais  la  satisfaction  de  la  diffi- 
culté vaincue  (deux  auteurs  écossais,  Brisson  et  Alexandre,  Carnéade,  IIomi^ire 
et  Vénus),  325.  —  Leurs  talents  et  leurs  vertus  ne  peuvent  se  manifester,  parce 
que  ceux  qui  les  entourent  se  sont  fait  une  règle  de  louer  in<lifféremment  toutes 
leurs  actions  et  qu'ils  leur  cachent  leurs  défauts  do  crainte  de  les  offenser.  Com- 
ment dans  ces  conditions  s'étonner  qu'ils  commettent  tant  de  fautes;  ce  sont  leurs 
flatteurs,  cause  de  ce  mal,  qui  seraient  à  punir  (Tibère  et  le  Sénat  Romain  ;  les 
COURTISANS  d'ALEXANDRE,  de  Denys,  de  Mithridate,  le  philosophe  Favorinus  et 
l'empereur  Adrien,  Polliox  et  Auguste;  Philoxène,  Platon  et  Denys),  329. 

CHAPITRE  VIII. 

Sur  l'art  de  la  conversation,  III,  331.  ' —  En  punissant  les  coupables,  la 
justice  ne  saurait  avoir  qu'un  but  :  empêcher  les  autres  hommes  de  commettre 
les  mêmes  fautes;  c'est  ainsi  que  l'aveu  que  Montaigne  fait  de  ses  erreurs,  doit 
servir  à  corriger  les  autres  (Platon,  Caton,  un  .ioueur  de  lyre),  331.  —  Mais  où 
l'esprit  se  forme  le  plus  c'est,  selon  notre  moraliste,  dans  la  conversation;  cet 
exercice  lui  parait  plus  instructif  encore  que  l'étude  dans  les  livres,  333.  —  On  y 
apprend  à  supporter  la  sottise,  la  contradiction  et  la  critique.  Sur  le  premier 
point,  Montaigne  connaissant  la  faiblesse  de  l'esprit  humain,  écoutait  patiemment 
les  propositions  les  plus  absurdes,  les  opinions  les  plus  folles,  335.  —  La  contradic- 
tion éveille  l'esprit  et  aide  parfois  à  la  découverte  de  la  vérité,  mais  il  faut  qu'elle 
ait  lieu  en  termes  courtois.  La  critique  est  susceptible  de  nous  corriger,  mais  il 
faut  être  de  bonne  foi  et  savoir  l'accepter,  ce  qui  n'est  pas  donné  à  tout  le  monde 
(Socrate,  Antisthène),  335.  —  Dans  les  conversations,  la  subtilité  et  la  force  des 
arguments  importent  moins  que  l'ordre  ;  le  vulgaire  en  met  souvent  dans  ses  dis- 
cussions plus  que  les  philosophes  et  les  savants;  les  conversations  sans  méthode, 
sans  ordre,  dégénèrent  vite  en  dispute;  et,  pour  ce  qui  est  de  discuter  avec  un 
sot,  il  ne  faut  absolument  pas  s'y  prêter,  339.  —  Les  disputes  devraient  être  in- 
terdites; quand  on  en  arrive  là,  chacun,  sous  l'empire  de  l'irritation,  y  perd  la 
notion  de  ce  qui  est   raisonnable;  on  se  quitte  ennemis,  sans  avoir  fait  faire  un 


B.52  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

pas  à  la  question  (Platon),  341.  —  L'attitude  des  gens  de  science,  l'usage  qu'ils  en 
font,  laissent  souvent  à  désirer;  suivant  qui  la  possède,  c'est  un  sceptre  ou  la  ma- 
rotte d'un  fou,  311.  —  C'est  l'ordre  et  la  môthode  qui  donnent  du  prix  aux  con- 
versations; la  forme  y  importe  autant  que  le  fond;  il  en  est  de  même  dans  notre 
vie  familiale,  où  nous  supportons  plus  aisément  les  fautes  de  nos  domestiques  que 
les  mauvaises  excuses  que,  par  bêtise,  ils  s'entêtent  à  nous  présenter  pour  les  pal- 
lier (DÉMOCRiTE,  Ai.cibiade),  343.  —  C'est  un  grand  défaut  de  ne  pouvoir  souffrir 
les  sottises  des  autres;  ne  se  trompe-t-on  pas  soi-même  en  les  croyant  des  sottises; 
sommes-nous  donc  si  sûrs  de  notre  propre  jugement?  que  de  fois  ce  que  nous 
i-eprochons  aux  autres,  existe  chez  nous-mêmes  (Heraclite,  Myson',  Platon,  So- 
crate)  !  347.  —  Ce  qui  frappe  nos  sens  a  une  grande  influence  sur  nos  jugements  :  la 
gravité  d'un  personnage,  son  costume,  sa  situation,  etc.,  tout  cela  donne  du  poids 
aux  sottises  qu'il  débite,  349.  —  Parfois  aussi  les  grands  paraissent  plus  sots  qu'ils 
ne  sont,  parce  qu'en  raison  de  leur  position  on  attend  plus  d'eux  que  du  com- 
mun des  mortels;  le  plus  souvent  leur  intérêt  est  de  garder  le  silence,  de  la  sorte 
leur  ignorance  ressort  moins  (MÉOABYSEet  Apelle),  351.  —  Et  pourquoi  les  grands 
seraient-ils  plus  éclairés  que  les  autres?  c'est  le  hasard  qui,  la  plujiart  du  temps, 
distribue  les  rangs,  donne  les  places  et  il  ne  saurait  guère  en  être  autrement,  353. 
—  Le  succès  obtenu  dans  les  grandes  affaires  n'est  i)as  une  preuve  d'habileté; 
souvent  il  est  dû  au  liasard  qui  intervient  dans  toutes  les  actions  humaines  (les 
Carthaginois,  les  Romains,  le  persan  Syramnez,  Thucydide),  355.  —  Pour  juger  des 
grands,  voyez  ceux  que  la  fortune  fait  tomber  de  leur  rang  élevé;  comme  ils  parais- 
sent au-dessous  du  médiocre,  lorsqu'ils  ne  sont  plus  entourés  d'un  éclat  imposant 
(^MÉLANTHE  et  Denys,  Antisthène,  les  Mexicains),  357.  —  Montaigne  est  porté  à  se  dé- 
fier de  l'habileté  d'un  homme,  dès  lors  que  cet  homme  a  une  haute  situation  ou 
jouit  de  la  faveur  populaire,  359.  —  Il  n'accepte  qu'avec  réserve  les  mots  heureux 
de  ses  interlocuteui's,  qui  peuvent  les  avoir  empruntés  et  ne  pas  se  rendre  compte 
eux-mêmes  de  leur  valeur,  301.  —  II  se  méfie  également  de  ceux  qui,  dans  leurs 
reparties,  se  renfei-ment  dans  des  généralités;  il  faut  les  amener  à  préciser  pour 
savoir  au  juste  ce  qu'ils  valent,  361.  — Souvent  les  sots  émettent  des  idées  justes, 
mais  elles  ne  sont  pas  d'eux;  hors  d'état  d'en  faire  une  judicieuse  application,  il 
n'y  a  qu'à  les  laisser  aller,  ils  ne  tardent  pas  à  s'embourber  (Hégésias,  Cyrus), 
3G3.  — Reprendre  un  sot,  avec  l'espérance  de  rectifier  son  jugement,  c'est  peine 
perdue,  365.  —  Ce  qu'il  y  a  de  plus  déplaisant  chez  un  sot,  c'est  qu'il  admire 
toujours  tout  ce  qu'il  dit,  365.  —  Les  causeries  familières,  à  bâtons  rompus,  où 
on  fait  assaut  d'esprit,  ont  aussi  leurs  charmes;  les  propos  vifs  et  hardis  qui  s'y 
échangent,  forment  le  caractère  et  peuvent  parfois  nous  éclairer  sur  nos  défauts, 
367.  —  Les  jeux  de  main  sont  à  proscrire;  ils  dégénèrent  trop  souvent  en  voies 
de  fait  (deux  princes  de  la  famille  royale),  367.  —  Comment  Montaigne  s'y  prenait 
pour  juger  d'une  œuvre  littéraire  sur  laquelle  l'auteur  le  consultait  ;  sur  les  siennes, 
sur  ses  Essais,  il  était  toujours  hésitant,  bien  plus  que  lorsqu'il  s'agissait  de  colles 
des  autres,  367.  —  Un  point  sur  lequel  il  faut  se  montrer  très  réservé,  c'est  lors- 
qu'on rencontre  des  idées  qui  peuvent  ne  pas  appartenir  en  propre  à  fauteur, 
sans  qu'on  ait  de  certitude  à  cet  égard  (Philippe  de  Commines,  Tacite,  SÉNh:yiE,  Ci- 
céron),  369.  —  Digression  sur  Tacite.  Cet  historien  a  relégué  au  second  plan  les 
faits  de  guerre  et  s'est  plutôt  attaché  aux  événements  intérieurs,  qu'il  juge  plus 
qu'il  ne  les  raconte,  371.  —  Sa  sincérité  ne  fait  pas  doute,  il  est  du  parti  de  l'or- 
dre; néanmoins,  il  semble  avoir  jugé  Pompée  avec  trop  de  sévérité;  à  propos  de 
Tibère,  Montaigne  a  quelque  doute  sur  l'impeccabilité  de  son  jugement.  371.  — 
C'est  à  tort  qu'il  s'excuse  d'avoir  parlé  de  lui-même  dans  son  histoire;  Montaigne, 
lui,  non  seulement  ne  craint  pas  de  parler  de  lui-même  dans  ses  Essais,  mais  il 
ne  parle  que  de  lui  et  en  observateur  désintéressé,  373.  —  Caractère  de  Tacite  à 
en  juger  par  ses  écrits;  on  ne  saurait  que  le  louer,  lui  et  tous  les  historiens  qui 
ont  agi  de  même,  d'avoir  recueilli  et  consigné  tous  les  faits  extraordinaires  et  les 
bruits  populaires  (Vespasien),  375. 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  III,  CH.  IX.  —  VOL.  III.         B.53 


CHAPITRE  IX. 

De  la  vanité,  III,  377.  —  Montaigne  plaisante  sur  la  manie  qu'il  a  d'enre- 
gistrer toutes  les  idées  qui  lui  i)assent  par  la  tête;  c'est  Uà  une  occupation  qu'il 
pourrait  prolonger,  tant  (|u'il  y  aui-a  au  monde  de  l'encre  et  du  papier  (un  gen- 
tilhomme, DioMÈDE,  Galba),  :>77.  —  On  devi-ait  faire  des  lois  contre  les  écrivains 
ineptes  et  inutiles;  il  \'  <mi  a  tant  que  pendant  qu'on  sévirait  contre  les  plus  dan- 
gereux, il  aurait,  lui,  le  temps  de  s'amender  (le  médecin  I'hu.otinls),  379.  — 
Comment  k%  politiques  amusent  le  peuple,  alors  qu'ils  le  maltraitent  le  plus  (les 
Spartiates),  379.  —  Tout  différent  des  autres,  Montaigne  se  sent  plus  porté  à  de- 
venir meilleur  dans  la  bonne  que  dans  la  mauvaise  fortune  (Xénophon),  IWl.  —  Il 
aimait  le  changement  et,  comme  conséquence,  les  voyages,  qu'il  affectionnait 
aussi  parce  qu'ils  le  sortaient  de  chez  lui  et  que,  s'il  est  agréable  de  commander 
chez  soi,  si  modeste  que  soit  son  domaine,  la  situation  a  ses  ennuis,  381.  —  l'eu 
fait  à  la  gestion  de  ses  biens,  ce  qu'il  considère  du  reste  comme  chose  aisc'e,  elle 
lui  était  d'autant  plus  à  charge,  que  ce  qu'il  possédait  lui  suffisait  et  qu'il  n'avait 
nulle  envie  d'accroître  son  patrimoine,  383.  —  Les  voyages  ont  l'inconvénient  de 
coûter  cher,  mais  cela  ne  l'arrêtait  pas;  il  s'arrangeait  seulement  à  y  subvenir 
sans  entamer  son  capital  qu'il  estimait  devoir  suffire  à  son  unique  héritier,  puis- 
qu'il lui  avait  suffi  à  lui-même  (Phociox,  Cratès),  385.  —  Si  peu  qu'il  s'occupât 
de  son  intérieur,  ce  pourquoi  il  avait  peu  d'aptitude,  il  y  trouvait  mille  sujets 
de  contrariété  qui,  si  légers  qu'ils  fussent,  constamment  répétés,  ne  laissaient 
pas  de  le  blesser  souvent  davantage  que  de  bien  plus  grands  maux  ;  aussi  pré- 
férait-il la  vie  hors  de  chez  lui  (Diogène),  'S8Î).  —  Nullement  sensible  au  plaisir 
de  bâtir,  s'il  a  fait  quelques  changements  dans  sa  maison,  cela  a  été  pour  se 
conformer,  à  l'intention  qu'en  avait  eue  son  père.  Il  n'aime  non  plus  ni  la  chasse, 
ni  le  jardinage,  et,  si  profitable  que  ce  soit,  il  n'est  pas  porté  à  s'occuper  des  af- 
faires publiques;  jouir  de  l'existence,  lui  suffit  (Platon),  387.  —  Il  souhaiterait 
pouvoir  abandonner  la  gestion  de  ses  biens  à  quelque  ami  honnête,  à  un  gendre 
par  exemple,  auquel  il  en  céderait  les  revenus  et  qui  lui  assurerait  le  bien-être 
jusqu'à  la  fin  de  ses  jours,  391.  —  Il  se  fiait  à  ses  domestiques,  évitant  de  se 
renseigner  sur  eux  pour  ne  pas  être  obligé  de  les  avoir  en  d(>fiance,  391.  —  Sa 
répugnance  à  s'instruire  de  ses  proprcîs  affaires  était  telle,  qu'il  n'a  jamais  pu 
prendre  sur  lui  de  lire  un  titre,  un  contrat  (Cratès),  393.  —  Chez  lui,  la  moindre 
chose  qu'il  voit  le  préoccupe;  que  n'a-t-il  au  moins  pour  l'assister  dans  la  direc- 
tion de  son  intérieur  un  second,  sur  lequel  il  puisse  se  reposer;  obligé  de  veiller 
à  tout,  sa  manière  de  recevoir  les  éti-angers  s'en  ressent,  chose  contraire  à 
son  tempérament  beaucoup  plus  porté  à  dépenser  qu'à  thésauriser  (Platon),  395. 

—  Une  autre  raison  qui  le  portait  à  voyager,  c'est  la  situation  morale  et  poli- 
tique de  son  pays,  dont  il  souffre,  moins  par  intérêt  pour  la  chose  publique, 
tout  finissant  par  s'arranger,  que  pour  lui-même  qui  n'a  pas  le  courage  de  voir 
tant  de  corruption  et  de  déloyauté  (le  roi  Philippe),  397.  —  Toutes  les  discus- 
sions, les  disputes  sur  la  meilleure  forme  de  gouvernement,  sont  parfaitement 
inutiles;  le  monde  existe  :  si  on  peut  le  redresser,  on  ne  saurait  lui  faire  perdre 
un  pli  qui  est  déjà  pris.  Pour  chaque  nation,  le  meilleur  gouvernement  est  celui 
auquel  elle  est  accoutumée  (Solon,  Varron,  de  Pibrac  et  Monsieur  de  Foix),  399. 

—  Rien  n'est  plus  dangereux  pour  un  état  qu'un  changement  radical;  il  faut 
s'appliquer  à  améliorer,  mais  non  à  renverser  (les  meurtriers  de  César),  401.  — 
Les  réformes  elles-mêmes  sont  souvent  difficiles;  un  gouvernement  même  vi- 
cieux peut  se  maintenir  malgré  ses  abus,  sans  compter  que,  parfois,  si  on  re- 
gardait chez  ses  voisins,  on  y  trouverait  pire  (Pacuvius  Caluvius,  Solon),  401.  — 
L'empire  romain  est  un  exemple  qu'une  domination  étendue  ne  témoigne  pas 
qu'à  l'intérieur  tout  soit  pour  le  mieux,  et  montre  que,  si  miné  que  soit  un  état,  il 
peut  se  soutenir  longtemps  par  la  force  même  des  choses  (Isocrate),  405.  —  De 
la  corruption  générale  des  états  de  l'Europe,  Montaigne  conclut  que  la  France 
peut  se  relever  de  son  état  actuel  ;  toutefois,  il  redoute  qu'elle  ne  se  désagrège, 
405.  —  M'ontaigne  craint  de  parfois  se  répéter  dans  ses  Essais;  il  le  regretterait, 
mais  sa  mémoire  va  lui  faisant  de  plus  en  plus  défaut  (Lynceste),  407.  —  S'il  a  à 


B.o4  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

prononcer  iin  discours  qu'il  ait  préparé,  la  crainte  de  perdre  le  fil  de  ses  idées 
le  paralyse:  aussi,  comme  le  lire  c'est  se  lier  les  mains  et  qu'il  n'est  pas  capable 
d'improviser,  il  a  pris  la  résolution  de  s'en  abstenir  désormais  (l'orateur  Ciuiox), 
409.  —  Il  fait  volontiers  des  additions  à  son  livre,  mais  ne  cori-igo  pas;  ce  se- 
rait faire  tort  aux  acheteurs  des  éditions  précédentes;  et  puis,  il  a  vieilli  sans 
s'assagir  et  les  changements  qu'il  pourrait  y  introduire  ne  vaudraient  peut-être 
pas  ce  qui  y  est  (Antiochls),  411.  —  Il  s'en  rapporte  uniquement  à  ses  éditeurs 
pour  l'orthographe  et  la  ponctuation;  des  fautes  d'autre  natui-e  peuvent  être 
relevées  dans  le  texte,  il  ne  s'en  préoccupe  pas;  qu'elles  proviennent^ de  la  copie 
ou  de  l'impression,  le  lecteur,  qui  connaît  ses  idées,  saura  les  rectifier,  413.  — 
Vivant  au  foyer  des  guerres  civiles,  il  est  exposé  aux  insultes  de  tous  les  partis; 
il  souffre  beaucoup  dans  ses  intérêts  de  cet  état  de  choses,  bien  que,  jusqu'ici, 
il  ait  échappé  au  pillage,  ce  qu'il  attribue  à  ce  qu'il  n'a  pas  mis  sa  maison  en 
t'tat  de  défense,  à  l'eAime  dont  il  jouit  dans  le  pays,  aux  sei'vices  qu'il  rend  à 
ses  voisins  et  à  sa  bonne  fortune;  il  regrette  que  les  lois  soient  impuissantes  à 
le  protéger  et  d'en  avoir  obligation  à  d'autres  (Lvclrgle  d'Athènes),  415.  —  Il  se 
considère  comme  absolument  obligé  par  ses  engagements  et  ses  promesses;  mais 
il  est  tellement  ennemi  de  toute  contrainte,  qu'il  lui  répugne  même  d'être  lié 
par  les  devoirs  de  la  reconnaissance  et  tient  pour  avantageux  de  se  trouver  dé- 
livré, par  leurs  mauvais  procédés  à  son  égard,  de  son  attachement  à  certaines 
personnes,  417.  —  Il  ne  doit  rien  aux  grands  et  ne  leur  demande  que  de  ne  pas 
s'occuper  de  lui;  il  s'applique  à  tout  supporter  et  à  se  passer  de  tout;  il  aime  à 
obliger  ses  amis,  mais  ils  l'importunent  s'ils  lui  demandent  d'intervenir  en  leur 
faveur  auprès  de  tiers;  en  tout  cas,  s'il  lui  faut  contracter  des  obligations  envers 
autrui,  il  souhaite  que  ce  soit  pour  tout  autre  chose  qu'obtenir  protection  contre 
les  fureurs  de  la  guerre  civile  (Hippias  d'Élis,  Baj.azet  et  Tameki.an.  l'empereur 
Soi.iMAX  et  l'empereur  de  Caliclt,  Cvkis,  i.e  phemieu  des  Scipions),  419.  —  Il  vit 
dans  des  transes  continues;  ces  désordres  étaient,  du  reste,  un  mal  depuis  long- 
temps à  l'état  latent,  et  peut-être  est-il  préférable  de  le  voir  passé  à  l'état  aigu; 
c'est  encore  là  une  des  causes  qui  font  qu'il  voyage  tant,  bien  qu'il  ne  soit  pas 
assuré  de  trouver  mieux,  425.  ^  Quoique  les  troubles  qui  la- déchirent,  le  dégoû- 
tent de  la  France,  il  aime  Paris;  il  n'est  français  que  par  cette  capitale;  puisse- 
t-elle  demeurer  à  l'abri  de  dissensions  intestines,  ce  serait  sa  ruine,  429.  —  Au 
surplus,  il  regarde  tous  les  hommes,  à  quelque  nation  qu'ils  appartiennent, 
comme  ses  compatriotes;  le  monde  entier  est  pour  lui  une  patrie,  aussi  ne  re- 
douterait-il pas  la  peine  de  l'exil  (les  rois  de  Peiise,  Socrate),  429.  —  Avantages 
que  Montaigne  trouve  à  vojager;  il  demeure  sans  peine  huit  à  dix  heures  consé- 
cutives à  cheval  et,  sauf  les  chaleui-s  excessives  (il  voyage  alors  de  nuit),  ne  re- 
doute aucunes  intempéries  (les  anciens  Romains,  les  Perses  dans  l'antiquité,  les 
EsPAONOLs),  431.  —  On  le  blâme  de  ce  que,  vieux  et  marié,  il  quitte  sa  maison 
pour  voyager;  mais  il  y  laisse  une  gardienne  fidèle  qui  y  maintient  l'ordre.  La 
science  du  ménage  est  la  plus  utile,  la  plus  honorable  chez  une  mère  de  famille; 
il  est  vrai  que  bien  des  femmes  ne  pensent  qu'à  leur  toilette  et  vivent  dans  l'oi- 
siveté, la  sienne  n'est  pas  telle,  433.  —  On  objecte  que  c'est  témoigner  peu  d'af- 
fection à  sa  femme  que  de  s'en  éloigner;  mais  l'absence  momentanée  aiguise,  au 
contraire,  le  désir  de  se  revoir;  il  se  connaît  en  amitié,  et  affirme  qu'on  n'aime 
pas  moins  son  ami  absent  que  présent  (les  ensorcelés  de  Kareinty),  433.  — 
Pourquoi  craindre  de  voyager  quand  on  est  vieux  1  C'est  alors  que  les  voyages 
sont  le  plus  utiles;  il  peut  mourir  en  route,  dira-t-on,  qu'importe;  c'est  une  éven- 
tualité dont  il  ne  se  préoccupe  pas  quand  il  se  met  en  route  (les  Stoïciens),  437. 
—  Quoiqu'il  lui  soit  indifférent  de  mourir  là  ou  ailleurs,  il  préférerait  que  la 
mort  le  surprît  à  cheval  et  hors  de  chez  lui  ;  il  serait  plus  en  paix  et  sentirait 
moins  de  peine  et  de  regrets  autour  de  lui,  439.  —  Quelle  fâcheuse  habitude  que 
notre  entourage  s'apitoie  sur  nos  maux,  cela  nous  énerve;  voir  auprès  de  nous 
moins  de  mines  impressionnées  nous  disposerait  plus  favorablement,  441.  —  A 
publier  cette  étude  sur  lui-même,  Montaigne  trouve  qu'elle  a  ce  grand  avantage 
de  lui  servir  de  règle  de  conduite  et  que  les  critiques  seront  moins  itoités  à  dé- 
naturer ses  qualités,  .sa  confession  devant  les  désarmer  en  partie;  il  reconnaît, 
du  reste,  avoir  toujours  été  traité  au-dessus  de  ses  mérites  (Antio.one  et  le  philo- 


SOM.MAIIŒ  DES  ESSAIS.       LIV.  III,  CH.  IX.  —  VOL.  III.         B.55 

sophe  Bios),  113.  —  Peut-être  aussi  sa  lecture  fera-t-ellc  ((ue  quelqu'un  lui  conve- 
nant, sera  di'sireu.x  d'entrer  en  rapport  d'amitié  avec  lui  :  Oh!  un  ami!  que  ne 
donnerait-il  pas  pour  en  avoir  un,  445.  —  C'est  finir  par  devenir  à  charge!  aux 
nôtres  que  de  les  occuper  constamment  de  nos  maux.  Viendrait-il  à  tomber  ma- 
lade dans  un  coin  jierdu,  il  a  de  quoi  se  suffire  avec  ce  qu'il  porte  avec  lui;  et 
puis,  dès  qu'il  se  sent  malade,  il  a  toujours  soin  de  mettre  en  ordre  ses  affaires 
de  conscience  et  autres,  ce  qui  fait  qu'il  est  toujours  prêt  (les  Indiens),  447.  — 
Son  livre  ne  lui  survivra  que  peu  d'années,  d'autant  que  notre  langue  se  trans- 
forme continuellement;  il  n'en  constitue  pas  moins  une  précaution  pour  qu'a- 
près lui,  on  ne  le  juge  pas  autre  qu'il  n'est,  449.  —  Genre  de  mort  dont  Mon- 
taigne s'accommoderait  le  mieux;  toujours  est-il  qu'il  a  cette  satisfaction  que  la 
sienne  ne  sera  pour  les  siens,  dont  les  intérêts  sont  assurés,  un  sujet  ni  de  plai- 
sir, ni  de  déplaisir  (les  commolkants  d'Antoine  et  de  Cléopàtre,  PÉrifONE,  TuiELi.i- 
Nus,  le  philosophe  Théophhaste),  451.  —  Il  ne  recherche  pas  ses  aises  en  voyage; 
il  va  au  jour  le  jour,  sans  iitnéraire  fixe;  aussi  est-il  toujours  satisfait,  même 
s'il  ne  trouve  pas  dans  un  pays  ce  qu'il  venait  y  voir,  il  apprend  du  inoins  que 
la  curiosité  signalée  n'existe  pas,  ^153.  —  Il  sait  s'accommoder  de  tout  et  se  jjlie  à 
tous  les  usages  du  pays  où  il  se  trouve,  rien  ne  lui  parait  litrange;  aussi  blàmc- 
t-il  fort  la  sotte  tendance  qu'ont  les  Français  à  l'étranger  de  tout  y  dc-nigrer,  et 
ne  ac  joignait-il  pas  à  leurs  sociétés  quand  il  en  rencontrait,  455.  —  Tout  ce 
(ju'il  demanderait,  ce  serait  d'avoir  un  compagnon  de  voyage  de  même  humeur 
que  lui,  car  il  aime  à  communiquer  ses  idées  (Sénèque,  Cicékon,  Ahchvtas,  Aius- 
tipi'e),  457.  —  La  situation  qu'il  a,  le  bien-être  dont  il  jouit,  devraient,  ce  sem- 
ble, le  détourner  de  sa  passion  des  voyages  ;  mais  il  y  trouve  l'indépendance,  et 
elle  lui  est  si  chère  qu'il  rejette  les  commodités  de  la  vie  par  crainte  d'en  être 
asservi,  457.  —  C'est  là,  dira-t-on,  de  la  vanité,  mais  où  n'y  en  a-t-il  pas?  Les 
plus  belles  maximes  philosophiques,  les  plus  beaux  règlements  de  vie  sont  vains; 
et  ceux-là  mêmes  qui  les  émettent  ne  les  suivent  pas.  Ne  voit-on  pas  journelle- 
ment un  juge  prononcer  une  condamnation  pour  un  fait  que  lui-même  a  commis 
ou  va  commettre?  La  faute  en  est  aux  lois,  qui  exigent  de  nous  plus  que  nous 
ne  pouvons  (Akiston,  Xénophon,  Soi.on,  Antisthî:ne,  DioGf;NE,  la  courtisane  Laïs), 
401.  —  On  peut  encore,  à  la  rigueur,  admettre  que  dire  et  faire  soient  dissem- 
blables chez  les  gens  qui  professent  la  morale;  mais  lui,  parlant  de  lui-même, 
est  tenu  à  être  plus  conséquent.  L'homme  public  doit  compter  avec  les  vices  de 
son  temps;  Montaigne  a  reconnu  par  lui-même  que  les  affaires  publiques  ne  se 
traitent  pas  d'après  les  mêmes  principes  que  les  affaires  privées,  son  caractère 
ne  se  prête  pas  à  semblal)le  compromission;  au  surplus,  il  est  fréquent  de  ne  pas 
trouver  réunies  chez  un  même  homme  les  qualités  nécessaires  à  ces  deux  genres 
d'affaires  (Caton,  un  uoi  de  France,  Platon,  Sochate,  Saturninus),  465.  —  Une 
vertu  naïve  et  sincère  ne  peut  être  emplojée  à  la  conduite  d'un  état  corrompu; 
du  reste,  sa  notion  s'altère  dans  un  milieu  dépravé;  quoi  qu'il  en  soit,  on  doit 
toujours  obéissance  à  ceux  qui  ont  charge  d'a[)pliquer  les  lois,  si  indignes  qu'ils 
soient  (SKNf:yUE,  Acésilas),  4G9.  —  Si  Montaigne  sort  aussi  fréquemment  de  son 
sujet,  c'est  qu'il  s'abandonne  au  flux  de  ses  idées  qui,  en  y  regardant  de  près,  ne 
sont  cependant  pas  aussi  décousues  qu'elles  en  ont  l'air;  et  puis,  il  oblige  ainsi 
le  lecteur  à  plus  d'attention,  ce  qui  déjà  l'a  porté  à  donner  à  ses  chapitres  plus 
d'extension  qu'au  début  (Platon,  ïéhence,  Plutakque),  471.  — Affection  particu- 
lière de  Montaigne  pour  la  ville  de  Rome,  due  au  souvenir  des  grands  hommes 
qu'elle  a  produits;  lui,  qui  a  le  culte  du  passé,  ne  voit  ses  ruines  qu'avec  émotion 
et  respect;  aujourd'hui  encore,  n'cst-elle  pas  la  métropole  de  la  chrétienté,  la  ville 
universelle,  la  seule  au  monde  qui  ait  ce  caractère  (Akcésilas  et  CTESinius)?  475. 
—  11  doit  Vjeaucoup  à  la  fortune  pour  l'avoir  ménagé  jusqu'ici.  Il  est  vrai  que 
l'avenir  est  inquiétant,  mais  que  lui  importe  ce  qui  adviendra  quand  il  ne  sera 
plus?  il  n'a  pas  d'enfant  mâle  qui  continuera  son  nom;  et  puis,  même  ne  pas 
avoir  d'enfants  du  tout  ne  lui  semble  pas  chose  bien  regrettable,  477.  —  11  lais- 
sera après  lui  son  patrimoine  tel  qu'il  l'a  reçu,  la  fortune  ne  lui  ayant  jamais 
octroyé  que  de  légères  fav(Hirs  sans  consistance,  479.  —  De  ces  faveurs,  il  n'y  en 
a  pas  à  laquelle  il  ait  été  plus  sensible  qu'au  titre  de  citoyen  romain  qui  lui  a 
été  accordé  quand  il  était  à  Rome,  titre  dont  il  reproduit  textuellement  la  teneur, 


B.o6  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

pour  ceux  que  cela  intéresse  et  aussi  un  peu  par  vanité,  479.  —  C'est  qu'en  effet 
l'homme  est  tout  vanité;  et  c'est  parce  que  nous  sonmies  déçus  par  ce  que  nous 
voyons  quand  nous  venons  à  nous  observer,  que  nous  reportons  constamment 
nos  regards  partout  ailleurs  que  sur  nous-mêmes,  483. 

CHAPITRE  X. 

Il  faut  contenir  sa  volonté,  III,  185.  —  Montaigne  ne  se  passionnait  pour 
rien;  il  se  gardait  de  prendre  des  engagements,  résistant  même  à  ce  à  quoi  le 
poussaient  .ses  propres  affections,  parce  qu'une  l'ois  entraîné,  on  ne  sait  plus  où 
l'on  va;  si,  nonobstant,  on  parvenait  à  l'intéi'esseï'  à  des  affaires  autres  que  les 
siennes,  i  I  promettait  de  s'en  charger,  mais  modérément,  ayant  bien  assez  de 
celles-ci  pour  l'occuper,  485.  —  Beaucoup  se  font  les  esclaves  des  autres,  se  prodi- 
guant pour  s'employer  à  ce  qui  ne  les  regarde  pas;  cela  devient  une  nécessité  chez 
eux;  il  ne  manque  cependant  pas  sur  notre  propre  i-oute  de  mauvais  pas  dont 
nous  avons  assez  à  faire  de  nous  garder,  487.  —  Élu  maire  de  Bordeaux,  Montai- 
gne n'accepta  qu'à  son  corps  défendant  cette  charge  à  laquelle  il  fut  réélu  à  l'ex- 
piration de  son  mandat.  Portrait  qu'il  fit  de  lui  à  Messieurs  de  Bordeaux,  leur  fai- 
sant connaître  qu'ils  ne  devaient  pas  compter  qu'il  s'emploierait  tout  entier  à  leurs 
affaires,  comme  avait  fait  son  père  qui  avait  également  occupé  ces  fonctions,  489. 
—  Son  père  était  imbu  de  ce  principe  si  généralement  enseigné  et  que  des  sages 
ont  eux-mêmes  prêché  il  y  a  longtemps,  que  nous  devons  nous  oublier  pour  ne 
travailler  que  pour  le  bien  public;  est-ce  raisonnable?  Le  vrai  sage  qui  sait  bien 
ce  qu'il  se  doit,  trouve  par  là  même  ce  qu'il  doit  aux  autres,  491.  —  Il  faut  se 
dévouer  aux  fonctions  que  l'on  occupe,  mais  ce  ne  doit  être  qu'un  prêt  temporaire 
et  accidentel  de  sa  personne;  il  ne  faut  pas  qu'elles  nous  absorbent  entièrement 
ni  qu'elles  nous  passionnent,  ce  qui  nous  entraînerait  à  manquer  de  prudence  et 
d'équité,  493.  —  Excellent  caractère  d'un  prince  du  temps  de  Montaigne,  qui  était 
supérieur  aux  accidents  de  la  fortune.  Même  au  jeu,  il  faut  être  modéré;  nous  le 
serions  plus,  si  nous  savions  exactement  combien  peu  nous  est  nécessaire  (Sockate, 
Metrodore,  Épiclre,  Cléasthe),  495.  —  Bien  que  les  besoins  que  nous  tenons  de  la 
nature  soient  faciles  à  satisfaire,  nos  habitudes,  notre  position  dans  le  monde, 
notre  âge  nous  portent  à  en  étendre  le  cercle:  c'est  dans  ces  limites  que  nous 
devons  les  contenir;  les  multiplier,  c'est  offrir  à  l'adversité  plus  de  chance  encore 
de  nous  atteindre  (calendrier  Grégorien),  497.  —  C'est  folie  de  s'enorgueillir  de  l'em- 
ploi que  l'on  occupe  et  de  ne  pas  s'apercevoir  que  la  plupart  du  temps,  c'est  la 
robe  du  magistrat  que  l'on  salue  et  non  sa  personne;  notre  personnnalité  doit 
toujours  demeurer  indépendante  de  la  fonction  que  nous  remplissons  (JIontaione), 
501.  —  Si  l'on  se  jette  dans  un  parti,  ce  n'e.st  pas  une  raison  pour  qu'on  en  excuse 
toutes  les  injustices,  toutes  les  fureurs,  tous  les  entêtements  ridicules;  la  raison 
veut  qu'on  reconnaisse  ce  qui  est  mal  dans  le  parti  qu'on  a  embrassé  et  ce  qui  est 
bien  dans  le  parti  contraire  (Marcus  Manlils),  501.  —  Facilité  extraordinaire  des 
peuples  à  se  laisser  mener  par  les  chefs  de  parti  (Apollonius,  Mahomet),  505. —  Dif- 
férence entre  la  guerre  que  se  faisaient  César  et  Pompée  et  celle  qui  eut  lieu  entre 
Marils  et  Sylla;  avertissement  à  en  tirer,  505.  —  Du  danger  qu'il  y  a  à  être  l'es- 
clave de  ses  affections  (Diogène),  505.  —  Il  faut  s'efforcer  de  prévenir  ce  qui,  dans 
l'avenir,  peut  nous  attirer  peines  et  difficultés;  c'est  ainsi  que  Montaigne  évitait 
d'avoir  des  intérêts  communs,  surtout  avec  des  parents;  il  fuyait  les  discussions 
et  les  gens  de  caractère  difficile  (le  roi  Cotvs),  507.  —  Quelques  âmes  fortement 
trempées  affrontent  les  tentations;  il  est  plus  prudent  à  celles  qui  s'élèvent  peu 
au-dessus  du  commun,  de  ne  point  s'y  exposer  et  de  s'efforcer  de  maîtriser  ses 
passions  dès  le  début;  ce  qui  se  passe  dans  le  cas  de  la  volupté  et  du  plaisir  de 
se  venger  en  témoigne;  il  est  trop  tard  de  leur  fermer  la  porte,  lorsque  déjà  elles 
ont  pénétré  (Caton,  Zénon  et  Chrémonyde,  Socrate,  Cyrls  et  Panthée,  le  S. -Esprit), 
509.  —  Montaigne  fuyait  les  procès,  alors  même  que  ses  intérêts  devaient  en 
souffrir;  il  n'en  a  jamais  eu,  non  plus  que  de  duels;  et, jamais  une  épithète  mal- 
sonnante n'a  été  associée  à  son  nom,  511.  —  Les  plus  grands  troubles  ont  le  plus 
souvent  des  causes  futiles;  dans  toutes  les  affaires,  et  particulièrement  dans  nos 
querelles,  il  faut  réfléchir  avant  d'agir;  mais  une  fois  lancé,  il  faut  aller,  dût-on 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  III,  CH.  X.  —  VOL.  III,         B.57 

périr  à  la  poine;  le  manque  de  prudence  conduit  au  manque  de  cœur  (le  dernier 
DUC  DE  BoLiiGoiiNE,  la  cliutc  dc  Rome  républicaine,  la  guerre  de  Troie,  Pi.utarque, 
BiAs),  513.  —  La  pluj)art  des  réconciliations  qui  suivent  nos  querelles  sont  hon- 
teuses; quand  on  ne  le  fait  pas  de  son  plein  gré,  démentir  ce  qu'on  a  fait  ou  dit 
est  une  lâcheté,  515.  —  Jugement  que  l'on  a  porté  sur  la  manière  dont  Montai- 
gne s'est  acquitté  de  sa  mairie  de  Bordeaux  et  appréciation  qu'il  en  porte  lui- 
même.  Divci-sité  des  jugements  des  hommes  sur  ceux  qui  les  administrent.  11 
avoue  (jue  ceux  qui  lui  reprochent  de  n'avoir  pas  apporté  dans  ces  fonctions  une 
ardeur  excessive,  sont  dans  le  vrai;  mais,  de  fait,  la  population  n'a  pas  dû  être 
trop  mécontente  de  son  administration  puisqu'elle  l'a  réélu.  Il  faisait  ce  qu'il  fal- 
lait; n'aimait  ni  le  bruit,  ni  l'ostentation;  et,  en  tin  de  compte,  il  a  maintenu 
l'ordre  et  la  paix,  517.  —  Il  n'est  pas  de  ceux  qui  ont  de  l'ambition,  laquelle  n'est 
pas  de  mise  quand  les  questions  que  l'on  a  à  traiter  sont  affaires  courantes  dont 
il  ne  faut  pas  exagérer  l'importance,  521.  —  La  renommée  ne  s'attache  pas  qu'à 
des  actes  qui  sortent  de  l'ordinaire;  elle  vient  d'elle-même,  nos  sollicitations  n'y 
font  rien,  523.  —  En  somme,  il  n'avait  qu'à  maintenir  l'état  de  choses  existant; 
il  l'a  fait,  y  donnant  di"  lui-même  plus  qu'il  ne  s'y  était  engagé  ;  il  n'a  offensé 
personne,  ne  s'est  attiré  aucune  haine;  et,  quant  à  être  regretté,  il  ne  l'a  jamais 
souhaité,  525. 

CHAPITRE  .XI. 

Des  boiteux,  III,  527.  —  Critique  des  changements  opérés  dans  le  calendrier 
par  la  réforme  grégorienne  ;  depuis  tant  de  siècles  que  le  monde  existe,  nous  ne 
sommes  pas  encore  arrivés  à  nous  entendre  sur  la  forme  adonner  à  l'année,  527. 
—  Vanité  des  recherches  de  l'esprit  humain;  on  veut  découvrir  les  causes  d'un 
fait,  avant  d'être  assuré  que  ce  fait  est  certain,  527.  —  Comment  de  prétendus 
miracles  s'accréditent  par  notre  propension  à  vouloir  persuader  les  autres  de  ce 
que  nous  croyons  nous-mêmes,  et  par  l'autorité  que  prend  sur  nous  toute  croyance 
qui  a  de  nombreux  adeptes  et  est  éclose  depuis  un  certain  temps  déjà;  que  ne  va- 
t-on  au  fond  des  cho.ses  (un  prince  goutteux  et  un  prêtre)? 529.  —  La  plupart  d'en- 
tre eux  rej)osent  sur  des  riens,  et  on  se  perd  à  leur  chercher  des  causes  sérieuses; 
le  seul  miracle  <|ue  Montaigne  ait  constaté,  c'est  lui-même  :  il  a  beau  s'étudier,  il 
ne  parvient  pas  à  s'explic^uor,  533.  —  Histoire  d'un  miracle  bien  près  d'être  accré- 
dité, qui  ne  rei)0Sait  que  sur  de  simples  plaisanteries,  533.  —  'Lous  les  préjugés 
de  ce  monde  viennent  de  notre  présomption  et  de  notre  ignorance,  nous  ne  vou- 
lons pas  douter;  pourtant  il  est  une  ignorance  qu'il  ne  faudrait  jamais  craindre 
d'avouer  (Lus  [l'arc  en  ciel]  et  Thaumantis,  Corras,  I'Aréopage),  535.  —  De  ce  que 
les  livres  sacrés  relatent  des  miracles,  il  ne  faut  pas  en  conclure  qu'il  doive  s'en 
opérer  de  nouveaux  de  notre  temps,  537.  —  Montaigne  n'admet  pas  qu'on  maltraite 
ceux  d'opinions  contraires  aux  nôtres,  537.  —  Oter  la  vie  aux  sorciers  pour  se  dé- 
fendre contre  leurs  prétendus  actes  surnaturels,  c'est  faire  peu  de  cas  de  l'existence 
humaine;  la  plupart  du  temps  les  accusations  portées  contre  eux  sont  sans  fon- 
dement; et  puis,  on  n'est  pas  obligé  de  croire  à  un  miracle  qui  se  peut  démas- 
quer ou  expliquer,  539.  —  Montaigne  est  très  porté  à  croire  que  ces  gens,  et  il  en 
a  observé  plusieurs,  ont  l'imagination  malade  et  sont  fous  plutôt  que  criminels; 
il  ne  prétend  pas  d'ailleurs  qu'on  se  range  de  son  avis  (Prestantius),  539.  —  Ré- 
flexions sur  un  proverbe  italien  qui  attribue  aux  boiteux  des  deux  sexes  plus  d'ar- 
deur aux  plaisirs  de  l'amour,  et  explications  qu'on  en  donne  (la  reine  des  Ama- 
zones, les  BOITEUX,  les  tisserandes),  543.  —  L'esprit  humain  admet  comme  i-aisons 
les  choses  les  plus  chimériques,  et  souvent  on  explique  un  même  effet  par  des 
causes  opposées  (i,e  Tasse,  les  Français  et  les  Italiens,  Antigone  et  un  philosophe 
cynique),  543.  —  C'est  ce  qui  a  amené  les  Académiciens  à  poser  en  principe  de 
douter  de  tout,  ne  tenant  rien  pour  absolument  vrai,  non  plus  que  pour  absolu- 
ment faux  (Clitomaque,  Carnéade,  Ésope),  545. 

CHAPITRE  XII. 

De  la  physionomie,  III,  547.  —  Presque  toutes  nos  opinions  ne  se  forment 
que  par  l'autoi'ité  d'autrui.  Nous  admirons  Socrate  sans  le  connaître,  parce  qu'il 


B.o8  ESSAIS  DE  MOM'ÂlGNE. 

est  robjot  do  l'ai)pi'obation  universelle.  Il  est  vrai  qu'il  n'en  impose  pas  comme 
Caton,  et  s'il  vivait  à  notre  époque,  peu  d'Iiommes  feraient  cas  d'un  enseignement 
donné  sous  la  forme  simple  et  naïve  qu'il  emploie,  547.  —  Notre  bonne  fortune  a 
voulu  que  sa  vie  et  ses  enseignements  nous  aient  été  transmis  {)ar  des  témoins 
très  fidèles  et  compétents.  Quel  inmiense  service  n'a-t-il  pas  rendu  à  l'homme  en 
lui  montrant,  dans  un  langage  à  la  portée  do  tous,  ce  qu'il  peut  par  lui-même, 
549.  —  L'homme  est  incapable  de  modération,  même  dans  sa  passion  d'apprendre: 
la  science  d'une  utilité  discutable,  qui  ne  nous  conduit  seulement  pas  à  affron- 
ter la  mort  avec  plus  de  fermeté  qu'un  paysan,  n'est  même  pas  sans  danger.  Ce 
qui  nous  est  vraiment  utile  est  naturellement  en  nous,  mais  il  faut  le  découvrir 
et  c'est  ce  que  Socrate  enseignait  (la  mkhf.  D'AditicoLA,  les  Tlscli.anes),  549.  — 
SÉNKQLE  et  Pi.LTARQLE  ont  traité  de  la  préparation  à  la  mort;  le  premier  s'en 
montre  très  préoccupé,  le  second  beaucoup  moins.  L'indifférence  et  la  résignation 
avec  lesquelles  les  pauvres  gens  la  supportent,  elle  et  les  autres  accidents  de  la 
vie,  sont  plus  instructives  que  les  enseignements  de  la  science  à  ce  même  pro- 
l)0s,  553.  —  C'est  au  milieu  des  désordres  de  la  guerre  civile  que  iMontaigne  écrit 
ce  passage  de  son  livre:  excès  qui  se  commettent,  indiscipline  des  troupes;  les 
meilleui's,  en  ces  circonstances,  finissent  par  se  gâter  (les  ahmées  komaines  et  les  ar- 
mées TLHQUEs),  555.  —  Quels  que  soient  les  abus  d'un  gouvernement,  s'armer  con- 
tre lui  sous  préte.xte  d'y  porter  remède,  n'est  pas  excusable  :  il  faut  laisser  faire  la 
Providence  (Favomls,  Platon),  559.  —  Le  peuple  se  trouve  l'uiné  pour  de  longues 
années  par  les  déprédations  qui  se  commirent  alors;  lui-même  eut  de  plus  à  souf- 
frir des  suspicions  de  tous  les  partis,  aggravées  par  le  peu  de  souplesse  de  son 
caractère,  561.  —  Dans  son  infortune,  Montaigne,  ne  voyant  pas  d'amis  à  qui 
s'adresser,  pi'end  le  parti  de  ne  compter  que  sur  lui-même  et  de  lutter  sans  se 
préoccuper  de  ce  qu'il  avait  perdu,  pour  ne  songer  qu'à  conserver  ce  qui  lui 
reste;  et,  dès  lors,  il  agit  comme  s'il  devait  en  être  réduit  aux  pires  extrémités. 
D'autre  part,  se  désintéressant  complètement  de  ce  qui  ne  le  touche  pas  directe- 
ment, il  se  prend  à  considérer  uniquement  comme  un  sujet  d'étude  l'effondre- 
ment auquel  il  assiste  et  en  suit  les  progrès  presque  avec  intérêt;  il  avoue,  à  sa 
honte,  en  être  arrivé  de  la  sorte  à  n'être  pas  troublé  dans  son  repos  et  sa  tran- 
quillité d'esprit,  563.  —  Pour  comble  de  malheur,  la  peste  survint;  il  dut,  avec  sa 
famille,  pour  laquelle  il  redoutait  la  contagion,  errer  à  l'aventure  pendant  six  mois: 
le  fléau  avait  fait  de  grands  ravages  et  pendant  longtemps  la  main-d'œuvre  fit 
défaut  pour  la  culture,  567.  —  Résignation  des  gens  du  peuple  dans  ce  désastre  géné- 
ral (les  NÉoitiTEs,  nos  paysans,  les  soldats  romains  après  la  défaite  de  Cannes),  569. 
—  De  combien  peu  de  secours  nous  sont  les  enseignements  de  la  science  dans  les 
grands  événements  de  la  vie  !  ils  ne  font  que  porter  atteinte  à  la  force  de  résistance 
que  la  nature  a  placée  en  nous;  à  quoi  bon  appeler  notre  attention  sur  les  maux 
auxquels  nous  .sommes  exposés,  ne  vaut-il  pas  mieux  les  ignorer  jusqu'au  moment 
où  ils  nous  frappent  (Sénèque)?  571.  —  L'expérience  qu'elle  prétend  nous  donner 
est  déjà  un  tourment;  apprendre  à  souffrir  et  à  mourir,  c'est  souffrir  et  mourir 
avant  le  temps;  la  science  ne  nous  prépare  pas  à  la  mort,  mais  aux  approches  de 
la  mort;  laissons  faire  la  nature,  elle  se  chai-ge  au  moment  voulu  de  suppléer  à 
tout  ce  que  nous  ne  savons  pas  et,  par  elle,  nous  serons  en  meilleures  disposi- 
tions que  n'était  Aristote  (César),  573.  —  Socrate,  par  ses  discours  et  ses  exemples, 
nous  enseigne  à  suivre  purement  la  nature.  Sa  défense  devant  ses  juges  :  «  Il  ne 
sait  ce  que  c'est  que  la  mort;  si  c'est  une  transmigration  des  âmes,  n'ayant  rien 
à  se  reprocher,  il  ne  s'effraie  pas  d'aller  réjoindre  tant  de  grands  personnages  qui 
ne  sont  plus.  Que  ses  juges  décident  suivant  leur  conscience;  s'il  a  un  conseil  à 
leur  donner,  c'est  de  récompenser  sa  vie  passée  à  prêcher  le  bien,  en  le  nourris- 
sant le  restant  de  ses  jours,  en  raison  de  sa  pauvi'eté,  aux  frais  du  trésor  public. 
Il  ne  les  implore  pas,  non  par  di'dain,  mais  parce  que  ce  serait  se  démentir. 
leur  faire  injure  et  douter  des  dieux».  577.  —  Quelle  naïveté  et,  à  la  fois,  quelle 
hauteur  de  sentiments  dans  ce  plaidoyer  si  digne  de  lui  ;  aussi  en  quel  honneur 
le  tient,  à  si  juste  raison,  la  postérité,  tandis  que  ses  accusateurs,  accablés  par  le 
mépris  public,  de  désespoir  en  sont  venus  à  se  i)endre  (Socrate  et  l'orateur  Lvsl\s). 
581.  —  Socrate  y  parle  de  la  mort  comme  d'un  incident  naturel  de  la  vie,  et  il 
est  dans  le  vi-ai;  ce  n'est  pas  la  mort  que  les  âmes  simples  redoutent,  mais  la 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       MV.  III,  CH.  XI.  —  VOL.  III.       B.59 

douleur  qui  l'accompafrno  ;  la  nature  ne  saurait  en  effet  nous  faire  prendre  en 
horreur  ce  passage  de  vie  à  trépas  indispensable  à  l'accomplissement  de  son 
œuvre;  par  la  simplicité  de  sa  vie  et  celle  avec  laquelle  il  rend  ses  idées,  Socrate 
est  admirable  (les  chevalx,  les  cygxks,  les  kléphants),  581.  —  Bien  qu'il  vienne  de 
dire  que  nous  ne  vivons  pas  assez  sur  notre  propre  fond,  Montaigne  a,  lui  aussi, 
introduit  quantité  de  citations  dans  son  ouvrnge  ;  ce  n'était  pas  dans  son  idée 
première,  mais  il  s'est  laissé  entraîner  par  le  goût  de  son  époque  et  le  besoin 
d'occuper  ses  loisirs;  il  n'indique  pas  d'où  il  les  tire,  parfois  il  les  transforme  ou 
les  détourne  de  leur  vrai  sens,  et  cela  pour  ne  pas  faire  étalage  d'une  science  qui 
n'est  pas  en  lui  (Sockate  et  Euthydkme,  un  phésidknt),  583.  —  Il  est  dangereux  de 
se  mettre  à  écrire  sur  le  tard,  l'esprit  a  perdu  sa  verdeur;  lui-même  eût  dû  s'y 
prendre  plus  tôt,  mais  il  ne  se  propose  pas  tant  de  montrer  ce  qu'il  sait  que  ce 
((uil  ne  sait  pas;  et,  voulant  peindre  sa  vie,  il  a  dû  attendre  le  moment  où  elle  se 
(léroulait  tout  entière  à  ses  yeux,  585.  —  A  propos  de  physionomie,  Montaigne 
revient  à  Socrate  :  il  est  fâché  qu'une  si  belle  âme  se  soit  trouvée  dans  un  cori)s 
si  disgracié,  il  pense  qu'il  y  a  une  certaine  relation  et  conformité  entre  le  corps 
et  l'esprit  (La  Boétie),  587. —  Comme  Platon  et  la  plupart  des  anciens  philosophes, 
il  estime  singulièrement  la  beauté;  toutefois,  une  piiysionomie  avantageuse  n'est 
pas  toujours  fondée  sur  la  n'-gularité  des  traits  du  visage,  et  on  ne  peut  pas  tou- 
jours faire  fond  sur  la  physionomie  pour  porter  un  jugement  sur  un  individu 
(l'iiKVNÉ,  Cvitus,  Ai.EXANDUE,  CÉsAK,  Scu'ion),  589.  —  Eu  principc,  il  faut  suivre  les 
indications  de  la  nature;  les  lois  et  la  religion,  au  lieu  de  servir  de  régulateurs  à 
nos  devoirs,  nous  les  dictent;  et  on  en  arrive  à  s'imaginer,  bien  à  tort,  que  les 
observances  religieuses,  sans  de  bonnes  mœurs,  suffisent  au  salut  d'un  état,  591. 
—  Physionomie  de  Montaigne;  son  air  naïf  lui  attirait  la  confiance.  Récit  de  deux 
aventures  où  le  bon  effet  qu'il  produisait  à  première  vue  et  sa  franchise  lui  ont 
été  très  avantageux,  593.  —  La  simplicité  de  ses  intentions,  qu'on  lisait  dans  son 
regard  et  dans  sa  voix,  empêchaient  qu'on  ne  prît  en  mauvaise  part  la  liberté 
de  ses  discours;  dans  la  répression  des  crimes,  il  n'était  pas  pour  trop  de  sévérité 
(AiusTOTE,  Ciiaimlle),  597. 

CHAPITRE  Xlil. 

De  l'expérience,  III,  599.  —  L'expérience  n'est  pas  un  moyen  sûr  de  par- 
venir à  la  vérité,  parce  qu'il  n'y  a  pas  d'événements,  il  n'est  point  d'objets  abso- 
lument semblables;  on  ne  peut,  par  suite,  juger  sainement  par  analogie,  599.  — 
Par  cette  même  raison,  la  multiplicité  des  lois  est  fort  inutile;  jamais  les  législa- 
teurs ne  peuvent  embrasser  tous  les  cas;  les  meilleures  lois  sont  les  moins  nombreu- 
ses, les  plus  simples,  n'embrassant  que  les  cas  généi-aux,  601.  —  Celles  de  la  nature 
nous  procurent  plus  de  félicité  que  celles  que  nous  nous  donnons,  et  les  juges  les 
plus  équitables  seraient  peut-être  les  premiers  venus,  jugeant  uniquement  d'après 
les  inspirations  de  leur  raison  (quelques  républiques  italiennes,  Ferdinand  i.e  Ca- 
tholique, Platon),  (X)3.  —  Pour  vouloir  être  trop  précis,  les  textes  de  lois  sont 
conçus  en  termes  si  obscurs,  dont  l'obscurité  est  encore  accrue  par  les  gloses  et 
commentaires  qui  se  sont  greffés  sur  eux  (ce  qui  est  du  reste  le  propre  de  toutes 
les  interpr(''tations),  que,  si  bien  qu'on  s'exprime  dans  la  vie  ordinaire,  on  n'arrive 
pas  dans  les  contrats  et  testaments  à  formuler  ses  idées  d'une  façon  indiscutable; 
à  quoi  s'ajoute  que,  sur  chaque  chose,  il  y  a  autant  d'opinions  que  d'hommes, 
et  que  souvent  le  même  homme  pense  différemment  en  des  temps  différents,  par- 
fois à  des  heures  différentes  de  la  même  journée  (Ulpian,  Bartholdus,  Baldus, 
Aristote,  les  chiens  d'Ésope,  Cratès  et  Heraclite),  603.  —  Si  les  interprétations 
se  multiplient  à  ce  point,  la  cause  en  est  à  la  faiblesse  de  notre  esprit  qui,  en  outre, 
ne  sait  se  fixer.  En  nos  siècles,  on  ne  compose  plus,  on  commente;  compren- 
dre un  auteur  est  devenu  notre  seule  science;  nos  opinions  ne  se  forment  plus- 
elles-mêmes,  elles  se  entent  les  unes  sur  les  autres.  Les  Essais  de  Montaigne 
reviennent  souvent  à  parler  d'eux-mêmes;  on  y  trouvera  peut-être  à  dire,  son 
excuse  c'est  que  lui-même  en  est  le  sujet,  607.  —  Ce  qu'il  y  a  de  singulier,  c'est 
que  les  discussions,  les  disputes  ne  roulent  guère  que  sur  des  questions  de  mots. 
Si  on  ne  trouve  nulle  part  de  similitude  absolue,  la  dissemblance  ne  l'est  pas 


BM  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

davantage,  et  dans  les  choses  dissemblables  se  trouve  toujours  quelque  joint  qui 
fait  que  ciiacun  les  interprète  à  sa  façon  (Luther,  Sockatk  et  Ménon),  H09.  —  Im- 
perfection des  lois;  exemples  d'actes  d'inhumanité  et  de  foi-faits  judiciaires  aux- 
quels elles  conduisent;  refus  d'assistance  à  des  malheureux  en  péril;  exécution 
d'innocents,  victimes  de  ce  que  leurs  condamnations  n'étaient  entachéas  d'aucun 
vice  de  forme.  Combien  de  condamnations  sont  prononcées,  qui  sont  plus  crimi- 
nelles que  les  crimes  qui  les  motivent  (des  i'aysans  du  pays  de  Montaigne,  des 
jLiiEs  de  la  même  contrée,  Phu.ippe  de  Macédoine)!  611.  —  Montaigne  partage  l'o- 
pinion des  anciens,  qu'il  est  prudent,  qu'on  soit  accusé  à  tort  ou  non,  de  ne  pas 
se  mettre  entre  les  mains  de  la  justice.  Puisqu'il  y  a  des  juges  pour  punir,  il  de- 
vrait y  en  avoir  pour  récompenser  (Ai-ciBiADE,  les  Ciiinoi.sj,  613. —  Il  n'a  jamais  eu  de 
démêlés  avec  la  justice,  et  il  est  si  épris  de  liberté,  qu'il  irait  n'importe  où,  s'il  se 
sentait  menacé  dans  son  indépendance,  615.  —  Les  lois  n'ont  autorité»  que  parce 
qu'elles  sont  les  lois  et  non  parce  qu'elles  sont  justes.  Comment  le  seraient-elles,  étant 
le  plus  souvent  l'œuvre  de  sots,  ou  de  gens  qui,  en  haine  de  l'égaHté,  manquent  à 
l'équité;  pour  lui,  il  a  renoncé  à  leur  étude;  c'est  lui  seul  qu'il  étudie,  et,  pour  le 
reste,  il  s'en  remet  simplement  à  la  nature,  615.  —  Que  ne  prêtons-nous  plus  d'atten- 
tion à  cette  voix  qui  est  en  nous  et  qui  suffit  pour  nous  guider?  Quand  nous  cons- 
tatons que  nous  nous  sommes  trompés  en  une  circonstance,  à  moins  d'être  un  sot, 
nous  devrions  être  atout  jamais  en  défiance  de  nous  dans  toutes  les  circonstances 
analogues;  c'est  ce  qui  lui  arrive  pour  sa  mémoire;  aussi  devons-nous  nous  étudier 
constamment  pour  que  nos  passions  ne  viennent  pas  pervertir  notre  jugement, 
617.  —  «  Se  connaître  soi-même  •  est  la  science  capitale;  ceux-là  seuls  qui  la  prati- 
quent savent  combien  peu  nous  savons;  celui  qui  sait,  hésite  et  est  modeste;  l'igno- 
rant est  affirmalif,  querelleur,  opiniâtre,  ce  résultat  est  le  fait  de  l'école  du  monde  ; 
c'était  aussi  ce  qu'en  pensait  Socrate  (Socrate  et  Elthydème,  Ahistarqle,  Antée,  Ax- 
TisTHÈsE  et  Socrate),  621.  —  Montaigne  étudiait  sans  cesse  les  autres,  pour  se  mieux 
connaître;  il  en  était  arrivé  à  les  juger  avec  assez  de  discernement;  toutefois,  il 
était  très  hésitant  pour  se  prononcer,  rien  n'étant  difficile  comme  de  déterminer 
dans  quelle  catégorie  doit  prendre  place  telle  ou  telle  de  nos  actions.  En  géné- 
ral, l'homme  est  mal  équilibré;  quel  service  on  rend  à  qui  sait  l'entendre,  de 
lui  dire  avec  franchise  ce  qu'on  pense  de  lui  (Persée  roi  de  Macédoine,  Mon- 
TAKiNE)  !  623.  —  Montaigne  estime  qu'il  n'est  propre  à  rien,  sauf  à  parler  librement 
à  un  maître  auprès  duquel  il  eut  été  placé,  lui  dire  ses  vérités  et  faire  qu'il  se 
connaisse  lui-même.  Pareil  censeur  bénévole  et  discret  qui,  sans  paraître  censurer 
leur  conduite,  leur  en  ferait  apercevoir  les  conséquences,  les  tiendrait  au  courant 
de  ce  que  le  peuple  pense  d'eux,  serait  chose  précieuse  pour  les  rois,  sur  lesquels 
cette  engeance  maudite  des  flatteurs  a  un  effet  si  pernicieux  (Montaigne,  Alexan- 
dre), 625.  —  Ses  Essais  sont  une  sorte  de  cours  expérimental,  fait  sur  lui-même, 
d'idées  afférentes  à  la  santé  de  l'àme  et  du  corps.  Pour  ce  qui  est  de  l'àme,  on  y 
apprend  moins  ce  qui  est  à  faire  que  ce  qui  n'est  pas  à  faire;  quant  au  corps, 
on  peut  en  déduire  que  chacun  qui  s'observe,  est  à  lui-même  son  meilleur  méde- 
cin. Exposé  du  régime  qu'il  a  suivi  toute  sa  vie  durant  (Tibère,  Socrate,  Platon), 
627.  —  Montaigne  conservait  le  même  genre  de  vie,  qu'il  fût  malade  ou  bien  por- 
tant; il  fuyait  la  chaleur  émanant  directement  du  foyer  (mode  de  chauffage  usité 
à  Augsbourg,  Evenus),63I.  —  Les  coutumes  d'un  pays  sont  parfois  le  contraire  de 
celles  de  quelque  autre  nation;  tendance  que  nous  avons  à  aller  chercher  ailleurs, 
dans  l'antiquité  notamment,  des  arguments  que  notre  époque  nous  fournirait 
amplement,  633.  —  Exemples  de  singularités  résultant  de  l'habitude  :  Andron  l'argien 
traversant  sans  se  désaltérer  les  déserts  de  la  Libye,  gentilhomme  passant  des  mois 
et  même  une  année  entière  sans  boire;  savant  qui  aimait  à  travailler  au  milieu 
du  bruit;  Socrate  dans  son  intérieur;  Sénèque  ne  mangeant  rien  de  ce  qui  avait 
eu  vie  (Sextius,  Attale),  633.  — Nos  goûts  se  transforment  par  l'effet  de  l'habitude; 
il  faut  faire  en  sorte,  surtout  quand  on  est  jeune,  de  n'en  avoir  aucun  dont  nous 
soyons  les  esclaves  et  contre  lequel  nous  ne  puissions  aller  à  un  moment  donné 
(Pythagore,  Philopoemen),  635.  —  Habitudes  qu'avait  contractées  Montaigne  dans  sa 
vieillesse;  passer  la  nuit  au  grand  air  l'incommodait,  faiblesse  contre  laquelle  la 
jeunesse  doit  se  prémunir;  soin  qu'il  avait  de  se  tenir  le  ventre  libre  (Marius, 
César),  637.  —  Ce  que  les  malades  ont  de  mieux  à  faire,  c'est  de  ne  rien  changer  à 


SOMMAIRE  DES  ESSAIS.       LIV.  III,  CH.  XIII.  —  VOL.  III.        B.61 

leur  mode  d'existence;  lui-même,  malade  ou  bien  portant,  ne  s'est  jamais  abstenu 
de  ce  qui  lui  faisait  envie;  il  en  a  été  de  même  des  plaisirs  de  l'amour  qu'il  a 
commencé  si  jeune  à  connaître,  que  ses  souvenirs  ne  remontent  pas  jusque-là 
(Qlartu.i.a),  641.  —  L'incertitude  de  la  médecine  autorise  toutes  nos  envies,  ((45. 

—  Montaigne  avait  un  timbre  de  voi.x  élevé,  ce  qui  faisait  qu'il  fatiguait  en  par- 
lant; dans  la  vie  courante,  l'intonation  de  notre  voix  est  à  régler  suivant  l'idée 
qu'on  veut  rendre  (Carnéade),(>45.  —  Les  maladies,  comme  tout  ce  qui  a  vie,  ont 
leurs  évolutions  dont  il  faut  attendre  patiemment  la  fin;  laissons  faire  la  nature, 
nous  luttons  en  vain.  Dès  notre  naissance,  nous  sommes  voués  à  la  souffrance  et, 
arrivés  à  la  vieillesse,  l'efTondrement  est  forcé;  les  médecins  n'y  peuvent  rien, 
sinon  nous  troubler  par  leurs  pronostics  (Crantor,  les  Mexicains,  Ctésiphon),  647. 

—  Dans  ses  maux,  Slontaigne  aimait  à  flatter  son  imagination  :  atteint  de  gra- 
velle,  il  s'applaudit  que  ce  soit  sous  cette  forme  qu'il  ait  à  payer  son  tribut  inévi- 
table à  l'âge;  c'est  une  maladie  bien  portée;  peut-être  comme  tant  d'autres  finira- 
t-elle  avant  lui  ;  en  tout  cas,  elle  ne  le  prive  pas  de  tenir  sa  place  en  société 
et,  par  les  souffrances  qu'elle  lui  fait  endurer,  le  prépare  insensiblement  à  la 
mort,  649.  —  Passant  habituellement  par  les  mêmes  phases,  on  sait  au  moins 
avec  elle  à  quoi  s'en  tenir;  et  si  les  crises  en  sont  particulièrement  pénibles,  quelle 
ineffable  sensation  quand,  d'un  instant  à  l'autre,  le  bien-être  succède  à  la  douleur 
(les  Stoïciens,  Socrate),  655.  —  La  gravelle  a  encore  l'avantage  sur  bien  d'autres 
maladies,  de  ne  pas  entraîner  d'autres  maux  à  sa  suite,  de  laisser  au  patient 
l'Usage  de  ses  facultés,  la  possibilité  de  vaquer  à  ses  occupations  et  à  ses  plaisirs; 
elle  n'altère  pas  sa  tranquillité  d'esprit,  s'il  ne  prête  pas  l'oreille  à  ce  que  lui  en 
diraient  les  médecins,  657.  —  Montaigne  était  grand  dormeur,  ce  qui  est  préjudi- 
ciable à  la  santé;  cependant  en  cela,  comme  en  toutes  choses,  il  savait  s'accom- 
moder aux  circonstances.  Sa  petite  taille  lui  faisait  préférer  aller  à  cheval  qu'à 
pied  dans  les  rues  et  quand  il  y  avait  de  la  boue  (Platon,  Scipion),  661.  —  Le  mé- 
tier des  armes  est  de  toutes  les  occupations  la  plus  noble  et  la  plus  agniable,  663. 

—  Montaigne  était  d'excellente  constitution;  touchant  à  la  soixantaine,  il  est  en- 
core vigoureux  pour  cet  âge;  chez  lui,  les  maux  du  corps  n'avaient  que  peu  de 
prise  sur  l'âme,  <56ô.  —  Ses  préoccupations  n'ont  pas  souvent  troublé  son  som- 
meil, et  ses  songes  étaient  rarement  tristes  (Platon,  Socrate,  Xésophon,  Aristote, 
les  Atlantes,  Pvtiiacore,  le  philosopiie  Théon,  le  valet  de  Périclès),  667.  —  Il  était 
peu  délicat  sous  le  rapport  de  la  nourriture;  la  délicatesse  est  le  fait  de  quiconque 
affecte  une  préférence  trop  marquée  pour  quoi  que  ce  soit  (Favorixus),  669.  —  Dès 
le  berceau,  Montaigne  avait  été  habitué  à  vivre  comme  les  gens  de  la  plus  basse 
classe  et  à  se  mêler  à  eux;  cette  fréquentation  l'a  rendu  sympathique  au  sort  des 
malheureux  (la  reine  Chéi.onis,  Flaminius,  Pyrrhus),  671.  —  Il  n'airnait  pas  rester 
longtemps  à  table;  les  anciens  Grecs  et  Romains  entendaient  beaucoup  mieux  que 
nous  cette  jouissance  (Auguste),  673.  —  Indifférent  à  ce  qu'on  lui  servait,  il  se 
laissait  aller  à  manger  de  tout  ce  qui  paraissait  sur  la  table,  673.  —  C'est  un<> 
grâce  que  Dieu  nous  fait  quand  la  mort  nous  gagne  peu  à  peu,  ce  qui  est  l'effet 
de  la  vieillesse;  le  moment  fatal  doit  alors  nous  moins  affecter,  puisque  ce  n'est 
plus  qu'une  fraction  de  nous-mêmes  qu'elle  atteint;  du  reste  la  mort  est  indisso- 
lublement liée  à  la  vie,  on  en  constate  en  nous  la  présence  et  les  progrès  dans 
tout  le  cours  de  notre  existence  (Solon),  67o.  —  Montaigne  n'a  jamais  acquis  la 
certitude  que  certains  mets  lui  fussent  nuisibles;  il  en  est  dont  il  s'accommodait 
parfaitement,  dont  ensuite  il  s'est  mal  trouvé  et  que,  plus  tard,  il  a  très  bien  suppor- 
tés, 677.— Il  lui  est  arrivé  parfois  de  se  passer  de  prendre  un  repas,  quand  il  vou- 
lait se  ménager  pour  mieux  manger  le  lendemain,  avoir  l'esprit  dégagé,  ou  quand 
il  n'avait  pas  une  société  qui  lui  convint.  11  est  bon  de  manger  doucement,  fré- 
quemment plutôt  que  beaucoup  à  la  fois.  Tout  régime  trop  longtemps  suivi,  cesse 
d'être  efficace  (Éimcure,  Chilon),  677.  —  Il  ne  sert  de  rien  non  plus  de  se  trop 
couvrir,  on  s'y  habitue  et  cela  n'a  plus  d'effet,  679.  —  Nos  occupations  et  nos  plai- 
sirs nous  portent  à  donner  plus  d'importance  au  soufier  qu'au  dîner;  l'estomac, 
d'après  Montaigne,  s'accommode  mieux  du  contraire.  H  buvait  peu,  seulement 
aux  repas  et  uniquement  du  vin  coupé  d'eau  (Auguste,  Démocrite,  Cranaus  roi 
d'Athènes),  679.  —  Il  n'aimait  pas  l'air  confiné;  était  plus  sensible  au  froid  qu'au 
chaud;  avait  bonne  vue,  mais  elle  se  fatiguait  aisément;  sa  démarche  était  vive, 


B.62  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

il  ne  pouvait  tenir  en  i)lacc  ;  à  table,  il  mangeait  avec  trop  d'avidité  (la  servante 
de  Chrysippe,  DioGf;NE),  681.  —  Des  convives  agréables,  des  mets  délicats,  une  ta- 
ble bien  sei-vie,  sont  essentiels  pour  un  bon  repas;  il  est  des  gens  qui  dédaignent 
ce  genre  de  plaisir  qui  est  cependant  de  ceux  que  la  natui-e  nous  offre  elle-même, 
ce  dédain  est  le  fait  d'un  esprit  maladif  et  chagrin  (Ai.ciriade,  Vakhon,  Xeuxès), 
083.  —  Les  plaisirs  de  l'âme  sont  peut-être  supérieurs  à  ceux  du  corps;  les  plus 
appréciables  sont  ceux  auxquels  l'une  et  l'autre  participent  simultanément  (les 
PHILOSOPHES  Cykknaiqles,  Aristu'pe,  Zénon,  Pvthaoohe,  Socrate,  Platon),  085.  — 
Tout  ce  qui  est  de  nécessité  la  nature  l'a  rendu  agréable,  et  le  sage  use  des  vo- 
luptés comme  de  toutes  autres  choses;  bien  vivre  et  imprimer  une  bonne  direc- 
tion à  sa  vie,  est  la  seule  et  véritable  lin  de  l'homme  (Brutus,  les  deux  Caton), 
087.  —  Les  délassements  siéent  aux  âmes  fortes  et  généreuses  comme  aux  autres, 
ainsi  qu'il  ressort  des  exemples  d'ÉPAMiNONOAS,  de"  Scipion  et  de  Socrate,  689.  — 
La  grandeur  d'âme  consiste  surtout  à  régler  sa  conduite  et  à  la  circonscrii'e  dans 
de  justes  limites;  elle  ne  doit  pas  fuir  les  plaisirs  que  lui  offre  la  nature,  mais 
leS|goûter  avec  modération  et  montrer  une  égale  fermeté  dans  la  volupté  comme 
dans  la  douleur  (Eudoxls,  Platon),  093.  —  Pour  lui,  Montaigne,  bien  (|u'au 
déclin  de  sa  vie  et  prêt  à  la  quitter  sans  regret  parce  que  c'est  dans  l'ordre 
naturel  des  choses,  il  ne  se  contente  pas  de  passer  le  temps;  et,  quand  il  ne 
souffre  pas,  il  le  savoure,  jouissant  du  calme  qui  s'est  fait  en  lui,  sans  préoccu- 
pation de  l'avenir,  ce  poison  de  l'existence  humaine  (Alexandre),  095.  —  La  vie 
est  à  accepter  telle  que  Dieu  nous  l'a  faite  ;  tout  ce  qui  vient  de  lui  est  bon  ;  c'est 
se  montrer  ingrat  à  son  égard  que  de  repousser  les  satisfactions  dont  il  l'a  dotée 
(Éplménide),  097.  —  Vivons  suivant  la  nature,  ce  guide  si  doux  autant  que  pru- 
dent et  judicieux;  chez  la  plupart  des  gens  dont  les  idées  vont  s'élevant  au-dessus 
du  ciel,  les  mœurs  sont  plus  bas  que  terre  (Socrate),  0î)9.  —  En  somme,  dans 
tous  les  états  de  la  vie,  il  faut  jouir  loyalement  de  ce  que  l'on  est,  et  c'est  folie  de 
vouloir  s'élever  au-dessus  de  soi-même  (Socrate,  Platon,  Alexandre  et  Philotas,  les 
Athéniens  et  Pompée],  703. 


FASCICULE  C 


TABLE  DES  CITATIONS 

ET    INDEX    DES    AUTEURS    d'oU    ELLES    SONT    TIREES. 


Cette  table  des  citations,  établie  par  ordre  alphabétique",  donne,  en  regai-d  de 
chacune  d'elles,  l'indication  do  l'auteur  d'où  elle  est  tirée. 

Elle  a  surtout  pour  objet  d'aider  à  la  collation  des  diverses  éditions,  étant  le 
plus  sûr  moyen  de  trouver  aisément  dans  l'une  un  passage  relevé  dans  une  au- 
tre, par  la  détermination  et  la  recherche  de  la  citation  qui  la  précède  ou  de  celle 
qui  la  suit. 

Ces  citations,  réparties  entre  9G  auteurs,  sont  au  nombre  de  1.308,  y  compris 
cinq  qui  ne  figurent  que  dans  l'exemplaire  de  Bordeaux  et  trois  qui  ne  se  trou- 
vent que  dans  les  éditions  antérieures  à  1595,  dans  lesquelles  on  en  relève  en 
outre  deux  qui  y  sont  reproduites  deux  fois  chacune. 

Une  annexe  donnant  la  liste  alphabétique  des  auteurs  ainsi  mis  à  contribution, 
suit  avec  indication  du  chiffre  de  leur  apport;  parmi  eux,  Cicéron,  Lucrèce,  Ho- 
race, Virgile  et  Sénèque  y  occupent  de  ce  fait,  et  de  beaucoup,  le  premier  rang. 

Montaigne  n'indique  jamais  la  source  de  ses  citations;  bien  plus,  il  en  change 
très  souvent  un  ou  plusieurs  mots,  soit  pour  la  mieux  approprier  à  sa  pensée, 
soit  encore,  mais  rarement,  par  pudeur.  Souvent  aussi,  il  y  ajoute  un  membre 
de  phrase  de  son  crû,  ou  amalgame  deux  fi-agments  d'un  même  auteur  ou  d'au- 
teurs différents;  aussi  les  recherches,  auxquelles  se  sont  particulièrement  livrés 
Jlademoiselle  de  Gournay,  Coste,  Le  Clerc  et  autres  pour  adapter  à  chacune  le 
nom  de  qui  elles  émanent,  ont-elles  dû  présenter  une  certaine  difficulté;  dans  le 
nombre,  trente-six  demeurent  encore  d'origine  inconnue.  —  A  noter  aussi  que 
Montaigne  les  détourne  très  fréquemment  du  sens  qu'elles  ont  dans  le  texte  d'où 
il  les  tire,  ou  les  applique  à  des  sujets  tout  différents,  ce  qui,  à  la  vérité,  est  un 
procédé  en  usage  de  temps  immémorial. 

A  ces  mêmes  auteurs  et  à  quelques  autres,  Montaigne  a  fait  bien  d'autres  em- 
prunts, dont  partie  sont  signalés  dans  les  notes,  mais  il  n'est  question  ici  que  des 
citations  proprement  dites. 

Dans  la  table,  les  mots  en  égyptienne  italique  sont  les  premiers  de  chaque  ci- 
tation; les  deux  nombres  qui  suivent  indiquent  le  volume  et  la  page;  les  asté- 
risques, quand  il  y  en  a,  marquent  qu'elles  ont  donné  lieu  à  une  note;  le  nom  qui 
vient  après,  en  petites  majuscules,  est  celui  de  l'auteur;  puis,  en  ilaliques  et  géné- 
ralement en  abrégé,  celui  de  l'ouvrage;  les  nombres  qui  terminent  en  indiquent 
suivant  sa  nature  :  le  livre,  le  volume  ou  l'acte;  le  chapitre  ou  la  scène;  enfin  l'a- 
linéa ou  le  vers  selon  qu'il  y  a  lieu. 

Dans  l'annexe,  le  nombre  qui  suit  le  nom  de  chaque  auteur  est  celui  des  cita- 
tions extraites  de  lui;  les  autres  indiquent  l'époque  où  il  a  vécu,  les  dates  de  sa 
naissance  et  de  sa  mort,  date  suivie  de  av.,  si  elle  est  antérieure  à  l'ère  chré- 
tienne. 

F.X.  de  Bord,  signifie  ;  Exemplaire  de  Bordeaux. 

Ed.  de  80,  88,  ant.  signifient  :  Édition  de  1580,  1588,  antérieures  à  1595. 


ESSAIS   DE  MONTAIGNE. 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


TABLE  DES  CITATIONS. 

(INDICATIONS  REPORTANT  A  L'ÉDITION  dite  <•  SELF-ÉDITION  »)• 


A  demain.  —  I,  (ÎM.  —  Pi.utahque,  de  V Esprit  familier  de  Sacrale. 

A  multis.  —  II,  194.  —  SÉXKQUE,  Epist.  12 1. 

A  natui^a.  —  III,  182.  —  Sénkqle,  Epist.  \i9. 

A  quo  ceu.  —  III,  12.  —  Ovide,  Amor.,  III,  9,25. 

A  sole.  —  I,  510.  —  CicÉRON,  Tusc,  V,  17. 

Abducendus.  —  III,  1(j4.  —  Cicérox,  Tusc,  IV,. 35. 

Ablatum.  —  III,  300.  —  Ovide,  Trist.,  L  6,  29. 

Ac  veluti.  —  II,  052.  —  Virgile,  Enéide,  XU,  684. 

Ad  deos.  —  I,  18<J.  —  Tite-Live,  X,  G. 

Ad  hsec.  —  I,  516.  —  Juvénai.,  Sat.,  X.  137. 

Ad  ictus.  —  I,  536.  —  Tite-Live,  XXXVIIL  5. 

Ad  nos.  —  II,  458.  —  Virgile,  En.,  VII,  616. 

Ad  nuilum.  —  III,  18-1.  —  Pseudo-Gallls,  I,  125. 

Ad  primum.  —  III,  636.  —  Jlvénal,  VI,  576. 

Ad  quamcumque.  —  II,  232.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  3. 

Ad  summum.  —  II,  204.  —  Horace,  Episl.,  I,  1,  106. 

Ad  unum.  —  III,  268.  ^-  Horace,  Ep.,  Xll,  15. 

Adde  heliconiadum.  —  III,  12.  —  Lucrèce,  111,  1050 

Adeo  minimis.  —  II,  288.  —  Tite-Live,  XXVII,  23. 

Adeo  nihil.  —  I,  178.  —  Tite-Live,  XXXIV.  54. 

Adeo  pavor.  —  I,  100.  —  Qlixte-Curce,  III,  11. 

Adbuc  ardens.  —  III,  204.  —  Juvénal,  Sat.,  VI,  128. 

Aditum.  —  1,  184.  —  Sénèque,  Œdipe,  111,  686. 

^que  pauperibus.  —  I,  26'4.  —  Horace,  Epist.,  I,  1.  25. 

Age!  si  haec.  —  III,  348.  —  Térence,  .Andr.,  IV,  11.9. 

Agnosco  veteris.  —  III,  194.  —  Virgile,  En..  IV,  23. 

Agros  divisere.  —  II,  4^1  —  Lucrèce.  V,  liœ. 

Ah!  tum.  —  III,  222.  -  Catulle,  Carw'.,  XV.  17. 

Ainsi  voit-on.  —  III,  606.  —  La  Boétie. 

Alcon  hesterno*.  —  III,  60.  —  Avsone.  Epigr..7\. 

Aliquis.  —  I,  G'^.  —  Séxèque,  Epiât.  13. 

AUoquar.  —  i;  318.  —  Catulle,  LXV,  9. 

Aller  ab.  —  I,  286.  —  Vukui.e,  E'/loç/.,  Vlll,  39. 

Aller  remus  aquas,  aller  mibi.  —  III,  160.  —  Properce,  III,  3,  23. 

Aller  remus  aquas,  aller  tibi.  —  II,  490.  —  Properce,  III,  2,  23. 

Aller  ridebal.  -   I,  7£j{).  —  .ruvÉNAi,,  Sat.,  X,  28. 

Amor  ordinem  *.  —  III,  286.  —  S.  .Jérôme,  Lettre  à  Chroinatius. 

Amorem  conatum.  —  I.  306.  —  Cicérox.  Tusc,  IV,  34. 


C.68  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

An  potei'unt.  ~  II,  39-2.  —  Llckkce,  IV,  487. 

An  quidquam.  —  II,  452.  —  Cicéron,  Tusc,  V,  36. 

An   vivere*.  —  III.  640.  —  Psecdo-Gallus,  Eleg.,  I,  155,  247. 

Animus  multo.  —  (III,  510).  —  Serait  de  Sésèque.  (Ne  se  trouve  que  dans  l'ex. 

de  Bord.). 
Animus  quod.  —  III,  180.  —  Pétrone,  Salyr.,  c.  128. 
Ante  oculos  *.     -  III,  434.  —  Ovide.  Ti-isl.,  III,  4,  57. 
Apud  alios.  —  I,  210.  —  Cicéron,  Tusc,  V,  36. 
'Api-Tia  xw>'ô;  "•  —  III.  542.  —  Théocrite.  Idylle,  IV,  62. 
'ApiffXûv  ixExpov  *.  —  III,  674.  —  DiooÈNE  Laerce,  I,  93. 
Aiistoni  tvagico.  —  1,  288.  —  Tite-Live,  XXIV.  24. 
Arma  acri.  —  III,  224.  —  Virgile,  En.,  VIII,  441. 
Arma  enim.  —  II.  56.  —  Cicéron,  Tu.sc.,  Il,  16. 
Arma  proferri.  —  I,  532.  —  César,  de  Bello  gall.,  VII,  11. 
Arma  rogo.    -  III.  224.  —  Virgile,  En.,  VIII,  383. 
Armati  terram.  -   III,  396.  —  Virgile,  £'ne/rf.,  VII,  748. 
Arripe  dilatam.  —  II,  5.56.  —  Prudence,  Cont.  Symm.,  II.  frJ3. 
'ArrwTo-j;  ex  —  I,  218.  —  Cicéron,  de  Nul.  deor.,  III,  31. 
At  tibi  nil.  —  I,  548.  —  Martial,  Epigr.,  11,  58,  11. 
At  tu   Catulle.  —  III,  46(i.  —  Catulle,  Carm.,  VIII,  19. 
Athenis  tenue*.  —  II,  'S&i.  —  Cicéron,  de  Fato,  4. 
Atque  adeo.  —  II,  128.  —  Manilius,  IV,  907. 
Atque  aliquis.  —  III,  222.  —  Ovide,  Métam.,  IV,  187. 
Atque  idem  —  I,  5-1.  —  Virgile,  En.,  X,  732. 
Atque  illum.  —  II,  222.  —  Cicéron,  Irad.'du  Timêe,  2. 
Atque  in  se.  —  I,  128.  —  Virgile,  Georg.,  II,  402. 
Attonitus  novitate.  —  II,  370.  —  Ovide,  Mélam.,  XI,  128. 
Audit  iter.  —  I,  112.  —  Cj.audien,  in  Riif.,  11,  137. 
Auterimur.  —  II,  100.  —  Ovide,  de  Rem.  Amor.,  1,  343. 
Auro  quoque*.  —  III,  304.  —  Calpurnius,  Eclog.,  Vil,  53. 
Aut  bibat.  —  II,  218.  —  Cicéro>-,  Tmc,  V,  4. 
Aut  fuit*.  —  I,  452.  —  La  Boétie.  —  Ovide,  Ep.  d'Ariadnc. 
Aut  nimiis.  —  III,  382.  —  Lucrèce,  V,  216. 
Aut  qui  non.  —  I,  276.  —  Quintil.,  VIII,  3. 
Aut  verberatœ.  —  III,  383.  —  Horace,  Od.,  III,  1,  29. 
Aves  quasdam.  —  I,  72.  —  Cicéron,  de  .\at.  deor.,  II,  (M. 
Avida  est.  —  I,  454.  —  Sénèque,  de  Prov.,  4. 
Aymé  l'estat.  —  III,  398.  —  De  Pibracq,  Quatrains. 


Balteus.  —  III,  302.  —  Calpurnius,  Eclog.,  VIII,  47. 

Basti*.  —  I,  92.  —  Properce,  II,  I,  43,  trad.  italienne. 

Belli.  —  III.  238.  —  Lucrèce,  1,  .33. 

Belluœ.  —  II,  106.  —  Cicéron,  de  \al.  deor.,  I,  36. 

Bellum.  —  II,  378.  —  Virgile,  En.,  III,  539. 

Bénéficia.  —  III,  368.  —  Tacite,  Ann.,  IV,  18. 

Bina.  —  II,  40(j.  —  Lucrèce,  IV,  451. 

Bona  iam.  —  III,  478.  —  Source  inconnue. 

Bouha.  —  I,  210.  —  Dicton  gascon. 

Brevis  esse.  —  II,  476.  —  Horace,  Art  poél.,  25. 

Brevis  est  *.  —  II,  118.  —  Quintilien,  XII,  11. 


Chercher  par  Q  les  citations  qui  ne  se  trouveraient  pas  ict 

Csedebant.  —  I,  534.  —  Virgile,  En.,  X,  756. 
Csedimur.  —  II,  506.  —  Horace.  Epist.,  II,  2.  97. 


TABLE  DES  CITATEONS.  CAP.  C.69 

Caetera  pars.  —  II,  312.  —  Lucrèce,  IIL  144. 

Calamitosus.  --  I,  28.  —  Sénèque,  Epist.  90. 

Gapienda.  —  II,  490.  —  Sénèque,  Agnm.,  II,  1,  \7. 

Captisque.  —  III,  540.  —  Tite-Live,  VIII,  18. 

Caspamus.  —  I,  426.  —  Perse,  Sal.,  V,  loi. 

Casta.  —  II,  668.  —  Martial,  I,  14. 

Casus.  —  II,  458.  —  Juvénai.,  Saf.,  XIII,  0. 

Catoni.  —  II,  ÎW.  —  Cicéron,  deOff'.,  I,  31. 

Cavete.  ~  II,  204.  —  S.  Paul,  ad  Coloss.,  II,  8. 

Ceu  tlamina.  —  III,  510.  —  Virgile,  En.,  X,  97. 

Ceux  qui.  —  III,  192.  —  D'après  Pi.utarque,  Qu'il  faut  qu'un  philosophe  converse 

avec  les  princes,  c.  5. 
Che  non.  —  I,  238.  —  Dante,  Inf.,  XI,  93. 
Che  ricordasi.  —  II,  214.  —  Le  Tasse,  Jér.  dél.  . 

Chi  puo.  —  I,  2(5.  —  Pétrarque,  sonnet  137. 
Chi  troppo.   —  II,  332.  —  Pétrarque,  Chants,  XI,  48. 
Clare.  —  I,  592.  —  Horace,  Epist.,  I,  16,  59. 
Clarus.  —  II.  240.  —  Lucrèce,  I,  640. 
Coacervanturque.  —  II,  518.  —  Tite-Live,  II,  47. 
Cogitationes.  -  II.  244.  —  Liv.  de  la  Sagesse,  IX,  14. 
Corne  quei.  —  I,  670.  —  Le  Tasse,  Ger.  lib.,  VIII,  26. 
Corne  segue.    -  I,  ;i02.  —  Ariosto,  X,  7. 
Commun!  *.  —  I,  566.  —  César,  de  Bello  civ.,  II,  I. 
Concessa.  --  III,  236.  —  Lucain,  II,  446. 
Conentur.  —  I,  122.  —  Horace,  Ep.,  1,  1,  19. 
Conîusum.  -  III,  602.  —  Sénèque,  Epist.  89. 
Coniicito  humorem.  —  III,  170.  —  Lucrèce,  IV,  1062. 
Coniugis.  —  I,  386.  —  Catulle,  LXVIH,  81. 
Coniugium  *.  —  II,  368.  —  Juvénal,  X,  352. 
Conscia.  —  I,  660.  —  Ovjde,  Fast.,  I,  485. 
Consiliis*.  —  I,  516.  —  Cicéron,  Tusc,  V,  17. 
Consueta.  —  II,  192.  —  Lucrèce,  IV,  999.      "  . 
Consuetudine.  —  I,  290.  —  Cicéron,  de  Nat.  deor.,  Il,  38. 
Consuetudinis.  —  I,  156.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  17. 
Consurgit  *.  —  II,  558.  —  Prudence,  Cont.  Symm.,  Il, '617. 
Contemnite.  -  II,  434.  —  Properce,  II,  14,  19. 
Contextus.  —  III,  240.  —  Sénèque,  Epist.  33. 
Gontorta.  —  I,  276.  —  Cic,  Acad.,  II,  24. 
Contrahi  *.  —  II,  320.  —  Cicéron,  de  Divin.,  II,  5S. 
Convenu.  -  III,  510.  —  Cicéron,  de  0/f.,  II,  18. 
Gonverso.  —  II,  568.  —  Juvénal,  III,  36. 
Corpoream.  —  II,  318.  —  Luckèce,  111,  176. 
Gorruptibile.  —  II,  136.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  XIII,  15. 
Cosi  per.  —  II,  148.  —  Dante,  nel  l'urg.,  XXVI,  31. 
Gras  vel.  —  II,  278.  —  Horace,  Od.,  Ili,  29,  13. 
Crédit.  ~  II,  422.  —  Lucain,  V,  653. 
Credo.    -  II,  4.50.  —  Ariosto,  Orlando,  XI,  81. 
Crocodilon.  —  II,  108.  —  Juvénal,  XV,  2-7. 
Cui  cor.    -  III,  688.  —  Cicéron,  de  Fin.  bon  et  mal.,  II,  8. 
Gui  cum.  —  III.  620.  —  Lucain,  IV,  599. 
Gui  malus.    -  II,  12.  —  Martial,  XII,  82. 
Cui  sit.   -  II,  m.  —  Horace,  Epist.,  I,  1,  51. 
Cui  Vivendi.  —  I.  610.  —  Cicéron,  Parad.,  V,  1. 
Cujus  in  *.  —  III.  280.  —  Horace,  Epod.,  XII,  19. 
Cujus  livida.  —  III,  258.  —  Martial,  VII,  94. 
Gujusque.  —  III,  12.  —  Manilius,  II,  18. 
Cum  de.  —  II,  324.  —  Sénèque.  Episl.  117. 
Cum  in  summa.  —  II,  272.  —  Lucrèce,  II,  1077. 
Cum  jam.  —  II,  100.  —  Lucrèce,  IV,  1099. 


C.70  ESSAIS  DE  MOISTAIGNE. 

Cum  moriar.  —  I,  120.  —  Ovide,  Am.,  II,  10,  36. 

Cum  morosa.  -   III,  170.  —  Perse,  SaL,  IV,  73. 

Cum  relego.  —  II,  474.  —  Ovide,  de  Ponlo,  I,  5,  15. 

Cum  res.  —  I,  271.  —  Séxèque,  Cunt.,  111. 

Cum  semper.  —  III,  518.  —  Q.  Cicéron,  île  Pelil.  Consulat.,  2. 

Cum  suspicimus.  —  II,  134.  —  Lucrèce,  V,  1203. 

Cum  vint.  —  I,  01 1.  —  LtiCiiKCE,  III,  475. 

Cuncta  ferit.  —  II,  580.  —  Ci.audien,  in  Eutr.,  I,  182. 

Cunctaque.  —  II,  400.  —  Ovide,  Melam.,  III,  424. 

Cupidine.  —  III,  536.  —  Tacite,  flisL,  I,  22. 

Cur  amplius.  —  I,  126.  —  Lucrèce,  III,  054. 

Ciir  isto.  —  I,  72.  —  Cicéron,  de  Divin.,  II,  57, 

Cur  hanc.  —  I,  74.  —  Lucain,  II,  1,  14. 

Cur  non.  —  I,  126.  —  Lucrèce,  111,951. 

Curée.  —  I.  26.  —  Sénèque,  Hipp.,  II,  3,  607. 

Curatio. —  I,  38.  —  S.  Augustin,  deCiv.Dei,  I,  12. 

Curentur.  —  III,  462.  —  Juvé.">ai,,  XIII,  124. 

Curis.  —  III,  572.  —  Virgile,  Georg.,  I,  123. 


D'autant  es-tu.  —  III,  702.  —  Pi.utarque,  Pompée,  c.  7  [Amyotj. 

Dare  pondus.  —  III,  528.  —  Perse,  V,  20. 

De  capsula  *.  -—  III,  144.  —  D'après  Sénèque,  Episl.  115. 

De  la  vertu.  —  II,' 218.  —  Pi.utarque,  Cont.  des  Phil.  Sloïq.  {Amyot). 

Débet  enim.  —  I,  634.  —  Lucrèce,  III,  874. 

Debilem  *.  —  III,  24.  —  Sénèque,  Epist.  101 . 

Deçà  vers.  —  II,  442.  —  D'après  Homère,  Od.,  XII.  181. 

Dédit  hoc.  —  II,  452.  —  Quintilien,  Inst.  oral.,  I,  12. 

Detienda.  —  III,  642.  —  Dicton  espagnol. 

Deliberata  *.  —  II,  00.  —  Horace,  Od.,  I,  37. 

Democriti  pecus.  —  I,  422.  —  Horace,  Ep.,  1,  12,  12. 

Democritum  postquam.  —  II,  218.  —  Lucrèce,  III,  1052. 

Denique  connubia.  —  II,  328.  —  Lucrèce,  III,  777. 

Denique  cur.  —  II,  314.  —  Lucrèce,  III,  741,  746. 

Denique  ut.  —  II,  410.  —  Lucrèce,  IV,  714. 

Deprendas.  —  I,  258.  —  Juvénai,,  IX,  18. 

Desinit  in.  —  I,  296.  ^-  Horace,  Art  poàt.,  4. 

Deum  namque*.  —  II,  314.  —  Virgile,  Georg.,  IV,  221. 

Deus  hœc.  ~  III,  406.  —  Horace,  Epod.,  XIII,  7. 

Deus  ille.  —  II,  206.  —  Lucrèce,  V,  8. 

Deus  ita.  —  II,  280.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  XI,  22. 

Deus  superbis.  —  II,  130.  —  S.  Pierre,  Epist.  I,  5,  5. 

Di  citatorie.  —  II,  220.  —  Ariosto,  Orland.  fur.,  14,  84. 

Diaboli  *.  —  III,  218.  —  S.  Jérôme,  Contre  Jovinien. 

Dicendum.  —  II,  228.  —  Cicéron,  de  Divin.,  II,  3. 

Ditticultatem*.  —  III,  604.  —  Quintilien,  Insl.orat.,  X,  3. 

Diriguisse  *.  —  I,  24.  —  Ovide,  Metam.,  VI,  301. 

Diis  te.  —  III,  702.  —  Horace,  Od.,  III,  6,  5. 

Distinguo.  —  I,  608.  —  Terme  de  logique. 

Diverses.  —  II,  588.  —  Pseudo-Gallus,  I,  104. 

Divitiarum.  —  I,  472.  —  Cicéron,  Parad.,  VI,  2. 

Dixerat.  —  III,  194.  —  Virgile,  En.,  387,  392. 

Dolus  an  ".  —  I,  46.  —  Virgile,  En.,  H,  390. 

Dominus  novit.  —  Psaume  XCIII,  II.  j  JJj~4^ 

Domitosque.  —  II,  288.  —  Horace,  Od.,  II,  12,  6. 
Dubia.  —  II,  488.  —  Sénèque,  Agam.,  III,  1,  29. 


TABI.E  DES  CITATIONS.  DUC.  C.71 


Ducimur.  —  I,  (K)-,'.  —  Horace,  Sal.,  II,  7,  ^i. 
Dum  abest.  —  I,  566.  —  Lucrèce,  III,  1095. 
Dum  œs.  —  I,  550.  —  Horace,  Sat.,  I,  5,  13. 
Dum  tortiina.  —  I,  518.  —  Lucain,  VII,  73 1. 
Dum  in.  —  II,  506.  —  Térence,  Andr.,  I,  6,  32. 
Dum  licet.  —  III,  186.  —  Horace,  Epod.,  XIII,  7. 
Dum  melior.  —  III,  621.  —  Virgile,  En.,  V,  415. 
Dum  nova.  —  III,  276.  —  Juvénai.,  Sal.,  III,  26. 
Dum  spectant.  —  I,  148.  —  Ovide,  De  rem.  amor,  615. 
Dum  tela  *.  —  III,  106.  —  Lucain,  VII,  320. 
Duris  ut.  —  1,  634.  —  Horace,  Od.,  IV,  4,  57. 


E 

E  cosi.  —  I,  406.  —  Pétrarque 

'H  Seto-iôani-ovia*.  —  11,222.  —  Stobée,  Serm.,  XXII,  189. 

"H  !;^v*.  —  I,  380.  —  D'après  Stoiîi';i:,  Serm.,  20. 

Ea  non.   -  III.  81.  —  Tite-Live,  XXXII,  21. 

Eam  vir.  —  I,  46.  —  Fi.orus,  1.  12. 

Ego  deum.  —  II,  256.  —  Exmi  s,  (///.  Cic,  de  Div.,  11,  50. 

Ego  hoc.  —  II,  452.  —  Cicéron,  de  Fin.,  Il,  15. 

Ego  illos.  —  III,  476.  —  Sénèque,  Episl.  64, 

Ego  vero  *.  —  II.  76.  —  Cicérox,  de  Senect.,  10. 

Egregium.  —  III,  470.  —  .Iuvénai,,  XIll,  64. 

Eheu!  cicatricum.  —  III,  402.  —  Horace,  Od.,  1,  35,33. 

Ejulatu  \  —  III,  28.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  14. 

E'I  silenzio.  —  II,  140.  —  Le  Tasse,  Aminla,  II,  34. 

Emori''.  —  II,  426.  --  Cicéron,  Tusc,  I,  8. 

Emunctœ.  —  I,  274.  —  IIor.,  SnL,  1,  4,  8. 

'Ev  Tô).  —  II,  218.  —  Sophocle,  Ajax,  552. 

Enimvero*.  —  III,  404.  —  Pi.aute,  Prologue  des  Captifs. 

Ense  maritali.  —  III,  222.  —  Source  inconnue. 

Eodem  enim.   —  III,  692.  —  Cicéron,  Tusc,  IV,  31. 

'Euéwv  8è.  —  I,  518.  —  Homère,  lUadr,  XX,  249. 

Equi  sine.  —  I,  538.  —  Tite-Live,  XXXV,  11. 

Equidem.  —  III,  374.  —  Quinte-Curce,  IX,  1. 

Eritis.  -  II,  20-1.  —  Homère,  ap.  Cic,  de  Fin.,  V,  18. 

Esse  unum.  —  III,  270.  —  Q.  Cicéron,  de  Petit,  consul.,  14. 

Esse  videatur.  —  II,  76.  —  Cicéron,  de  Orat.,  23. 

Est  prudentis.  —  III,  418.  —  Cicéron,  de  Amie,  17. 

Est  quaedam  ileve.  —  II,  538.  —  Ovide,  Trist.,  IV,  3,  27. 

Est  quaedam  vox.  —  III,  646.  —  Quintilien,  XI,  3. 

Est  situm.  -—  II,  21(i.     -  ('iri;i;i.\,  de  Fin.,  l,  17. 

Estne.  —  I,  4m.  —  (au  lu;.  i.W  I,  15. 

Et  cantharus.  —  III,  ;394.  —  Horace,  Episl.,  1,  5,  23. 

Et  casta.  —  II,  266.  —  Lucrèce,  I,  99. 

Et  cuncta.  —  I,  404.  —  Horace,  Od.,  II,  1,  23. 

Et  errât.  —  II,  26.  —  Térence,  Adelph.,  I,  1,  40. 

Et  tugit.  —  II,  434.  —  Virgile,  Eglog.,  III,  65. 

Et  gens.  —  I,  538.  —  Lucain,  IV,  682. 

Et  habet.  —  III,  186.  —Martial,  VII,  58,  !». 

Et  a,  qui.  —  II.  86.  —  Cicéron,  Epist.  fam.,  XV,  19. 

Et  iuvictum.  —  I,  401.  —  Manilius,  Astr.,  IV,  87. 

Et  ipse.  —  I,  300.  —  Horace,  Od.,  II,  2,  6. 

Et  languor.  —  II,  432.  —  Horace,  Epod.,  XI,  9. 

Et  laxas.  —  II,  522.  —  Catulle,  XCIV,  8. 

Et  lupus.  —  II,  570.  —  Ovide,  Trist..  III,  5,  35. 

Et  maie.  —  I,  528.  —  Manilius.  IV,  '.t.i. 


C.72  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Et  mentem.  —  III,  210-  —  Viitiiii.i:,  Cleor;/.,  III,  267. 

Et  mihi.  —  III,  'M).  —  Pseudo-Gai.i.ls.  I,'  «il. 

Et  militavi.  —  III,  6l±  —  Horace,  Od.,  III,  20,  2. 

Et  minimœ.  —  III,  181.  —  Ovide,  Trisl.,  111,  11,  t2. 

Et  mutœ.  —  II,  138.  —  Lucrèce,  V,  1058. 

Et  nihil  ^  II,  262.  —  Lucrèce,  III,  857. 

Et  nudam.  —  III,  254.  —  Ovide,  Amor.,  I,  5.  24. 

Et  nuUa.  —  III,  104.  —  Ovide,  de  Porilo,  I,  7,  o7.     ' 

Et  Numidse.  ~  I,  538.  —  Viruii.e,  En.,  IV,  41. 

Et  obscenas.  —  II,  380.  —  Cicéron,  Tusc,  IV,  33.  ■ 

Et  patimur.  —  II,  55^1.  —  Juvénal,  VI,  291. 

Et  plaga.  —  II,  360.  —  Véuèce,  I,  2. 

Et  post.  —  I,  112.  —  Horace,  Od.,  111,  1,  40, 

Et  quaerendum.  —  III,  266.  —  C.\tuu.e,  Carm.,  LXVII.  27. 

Et  quo  ferre.  —  I,  534.  —  Lucain,  VIII,  384. 

Et  quo  quemque.  —  I,  254.  —  Virgile,  En.,  III,  459. 

Et  se  n'aflige.  —  (III,  26j. —  Auteur  inconnu.  (Ne  se  trouve  que  dans  les  éd.  ant. 

à  1595). 
Et  secum.  —  II,  616.  —  Claudien,  in  Eulrop.,  1,  237. 
Et  solem''.  —  II,  404.  —  Vu^-ile,  Ejiéide,  IV,  470. 
Et  sua  sunt*.  —  III,  406.  —  Source  inconnue. 
Et  supera  *.  —  III,  304.  --  Lucrèce,'  V,  327. 
Et  taciti.  —  III,  268.  —  Ovide,  Amor.,  1,  7,  21. 
Et  tellus.  —  II,  146.  —  Lucrèce,  11,  1157. 
Et  velut.  —  III,  16.  —  Virgile,  Enéid.,  XU,  521. 
Et  veniunt.  —  I,  360.  —  Properce,  1,  2,  10. 
Et  via.  —  I,  26.  —  Virgile,  En.,  XI,  151. 
Et  versus.  —  III,  194.  —  Juvénal,  VI,  196. 
Et  vulgo.  —  II,  408.  —  Lucrèce,  IV,  73. 
Etenim.  —  III,  510.  —  Cicéron,  Tusc.,lY,  18. 
Etiam.  —  I,  662.  —  Sentences  de  Publius  Syrus. 
E'j/oyov*.  —  I,  636.  —  Diogène  Laerce,  VllI,  130. 
Ex  quo  Ennius.  —  I.  212.  —  Cicéron,  de  Off.,  III,  45. 
Ex  quo  intelligitur.  —  I,  162.  —  Cicéron,  Tusc,  III,  28. 
Ex  senatus-consultis.  —  III,  92.  —  Sénèque,  Epist.  95. 
Excindintur  *.  —  III,  516.  ~  Source  inconnue. 
Excludat.  —  III.  134.  —  Horace,  Ep.,  H,  1,  38  et  45. 
Excursusque.  —  II,  70.  —  Virgile,  Geurg.,  IV,  194. 
Excutienda.  —  III,  444.  —  Cicéron,  de  Amie,  6.   (Se   trouve   une  seconde  fois 

dans  l'éd.  de  88,  II,  60). 
Exeat  aula.  ~  III,  464.  —  Luc.un,  Vlll,  493. 
Exeat  inquit.  —  III,  302.  —  .Juvénal,  Sal.,  III,  153. 
Experta.  —  III,  266.  —  Martial,  VII,  58,  3. 
Exsilia  tormenta.  —  III,  .572.  —  Sénèque,  Epist.,  9\,  107. 
Exsilioque.  —  III,  2ïi4.  —  Virgile,  Georg.,  II,  511. 
Exstantesque.  —  II,  398.  —  Lucrèce,  iv',  398,  390,  421. 
Exsuperat.   -  III,  554.  —  ^'IRGILE,  Enéid.,  XII,  46. 
Extrema.  —  II,  666.  —  Virgile,  Georg.,  II,  173. 


Faber  est.  —  I.  468.  —  Sai.luste,  de  Rep.  Ord.,  I,  1. 
Faciasne.  —  II,  518.  —  Horace,  Sat.,  II,  3,  253. 
Facta  etenim.  —  II,  134.  —  Manilius,  111,  58. 
Falciteros.  —  I,  674.  —  Lucrèce,  III,  642. 
Falsus  honor.  —  II,  454.  —  Horace,  Epist.,  1,  16,  39. 
Fata  viam.  —  III,  354.  —  Virgile,  En.,  111,  395. 
Fate  bea*.  —  III,  282.  —  Proverbe  italien. 


TXTW.E  DES  CITATIO>'S.  FAT.  C.73 


Fatum  est.  —  III,  -'<•:.'.    -  ,]i  vknai.,  Sal..  IX,  32. 
Fautor.   —  II,  5tJ8.  —  IIohaci;,  Hpisl.,  I,  18,  Wi. 
Favellar.  —  III,  142.  —  Expression  italienne. 
Fay  ton  faict.  —  I,  28.  —  Platon,  T'unée. 
Félix  qui.    -  III,  516.  —  Vnuiii.E,  Georg.,  II,  490. 
Ferox  gens.  —  I,  462.  —  Tite-Livk,  X\\1\  .  1*. 
Festinatio.  —  III,  494.  —  Qlime-Ci  uri:.  IX.  '.),12. 
Fit  etiam.  —  II,  402.  —  Cicéiion,  de  Divin.,  I,  37. 
Flagitii.  —  III,  211.  —  Ennius,  ap.  Cicéhon,  Tusc,  IV,  33. 
Flere  omnes.  —  I,  42.  —  Tite-Live,  XXV,  37. 
Flexilis.  —  II,  58.  —  Ci.AunnoN,  conlix  hufin,  II,  358. 
Fluctus  uti.  —  III,  618.  —  Vnuiu.E,  En.,  VII,  528. 
FoUiculos.  —  III,  172.  —  Llcuèce,  V,  801. 
Formas.  —  II,  258.  —  Cicéron,  deNal.  deor.,  II,  28. 
Fors  etiam.  —  III,  234.  —  Catulle,  Carm.,  LXVII,  170. 
Fortes  creantur.  —  II,  314.  —  Horace,  Od.,  IV,  4,  29. 
Fortis  imaginatio.  —  I,  132.  —  Sénèque,  Epist.  24. 
Fortuna  vitrea  *.  —  I,  4(j8.  —  Ex  Mim.  P.  Syri. 
Fortunae  cetera.     -  III,  478.  —  Ovide,  Mélam.,  II,  1 10. 
Fortunse  miseras.  —  I,  350.  —  Properce,  III,  7,  44. 
Fractam  et.  —  II,  76.  —  Cicéron,  de  Orat.,  18. 
Fructus  enim.  —  III,  390.  —  Cicéron,  de  AmicU.,  19. 
Frui  paratis.  —III,  701.        lim;  \(i,.  Od.,  I,  31,17. 
Fu  il  vincer.  —  I,  52.  —  AinuMu,  W.  1. 
Fulgur  ibi.  —  II,  178.  —  Lucrèce,  II,  325. 
Fugax  rerum.  —  III,  48 1.  —  Ovide,  rrisl.,  III,  2, 9. 
Fuge  suspicari  *.  —  III,  268.  —  Horace,  Od.,  11,4,12. 
Furem  signata.  —  II,  438.  —  Sénèque,  Epist.,  68. 
Furit  alter.—  II,  134.  —  Manilius,  IV,  79,118. 


Galla  nega.  —  II,  432.  —  .Mautiai.,  IV,  37. 

Gaudeat.  —  II,  346.  —  IMcton  judiciaire. 

Gentes  esse.  —  II,  376.  —  Ovide,  Métnm.,  X,  331. 

Gigni  pariter.  —  II,  3IS.  —  Lucrèce,  III,  116. 

Goria  in.  —  II,  112.        S.  Luc,  Evawj.,    II,  M. 

Gloria  nostr a.        II,    15().  — S.  Paul,  Ep.ad  Cnrinlh.,  Il,  1,12. 

Gloria,  quantalibet. —  II,  442.  —  JuvÉNAL,.bi'rt^.,  Vil,  81. 

Gratatusque.  —  1,548.  —  Ovide,  de  Ponlo,  IV,  9,13. 

Gratum  est.  —  II,  608.  —  Juvénal,  XIV,  70. 

Gravissimi.  —  I,  520.  —  Porcius  Latro. 


H 

Habita  fides.  —  I,  ItMi.  —  Tite-Live,  XXII,  22. 

Habitum  quemdam.  —  I,  301.  —  Lucrèce,  III,  inO. 

Hac  duce.  —  I,  612.  — Tihulle,  II,  1,  75. 

Hase  demum  *.  —  I,  278.  —  Faisricius.  11,  10. 

Haec  loca.  —  I,  364.  —  Virgile,  En.,  111,  11  1. 

Hœc  nempe  *.  —  II,  48(3.  —  Horace,  Epiai.,  1,  6,  45. 

Hœc  neque.  —  III,  374.  —  Tite-Live,  I,  Frœ/.,  et  VIII,  6. 

Haec  perinde.  —  I,  486.  —  Tére.nce,  HeoM.,  I,  3,21. 

Haec  si.  —  III,  274.  —  Téhence,  Eunuch.,  I,  1, 16. 

Hœcsunt.—  III,  168.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  23. 

Haeret  lateri.  —  I,  412.  —  Virgile,  En.,  IV,  73. 

Hanc  amplissimam.  —  I,  270.  —  Cicéron,  Tksc,  IV,  3. 

Harum  sententiarum.  —  II,  306.  —  Cicéron,  Tusc,  l,  Il 


C.74  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Has  meus.  —  II,  61.  —  Properce,  IV,  1,  70. 

Has  vobis.  —  I,  'rlH.  —  Mautiai.,  Epigr.,  VII,  IN,  4. 

Haud  cuivis.  —  I,  592.  —  Perse,  II,  (3. 

Haud  ignai^us. —  II,  91.  —  Virgile,  En.,X\,  151. 

Hector  erat.  —  II,  2(30.  —  Ovide,  Trist.,  111,  11,  27. 

Hem!  vir.  —  I,  180.  —  Tékence,  Eiin.,  II,  3,  1. 

Heredis,  tletus.  —  I,  106.  —  Pubi.ius  Syrus. 

Hesterno  *.  —  I,  61 1.  —  Virgile,  Egl.,  V,  lo. 

Heulpatior.  —  I,  178.  —  Ovide,  Ep.  Phyl.  Dam.,  v.  48. 

Heu! reliquias.  — II,  104.  —  Cicéron,  Tusc,  1,41. 

Heu!  senibus.  —  I,  122.  —  Pseudo-Gallls,  1,  16. 

Heu!  tantum.  —  III,  592.  —  Source  inconnue. 

Hi,  motus.  ~  II,  180.  —  Virgile,  Georg.,  IV,  86. 

Hic  illius.  —  II,  288.  —  Virgile,  En.,  l,  16. 

Hic  exultât.  —  II,  306.  —  Lucrèce,  III,  142. 

Hic  rogo.  —  I,  634.  —  x^Iartial,  II,  80,  2. 

His  dantem.  —  I,  404.  —  Virgile,  En.,  VIII,  670. 

His  quidam.  —  II,  142.  —  Virgile,  Georg.,  IV,  219. 

His  se.  —  III,  172.  —  Lucrèce,  II,  42. 

Hoc  âge  *.  —  II,  72.  —  Sentence  tirée  du  grec. 

Hoc  est.  —  III,  180.  —  Martial,  X,  23,  7. 

Hocipsum  ita.  —  III,  418.  —  Cicéron,  de  Off.,  I,  9. 

Hoc  ipsum,  quo.  —  I,  590.  —  Perse,  II,  51. 

Hoc  liberiores.  —II,  232.  —  Cicérox,  Acad.,  Il,  3. 

Hoc  quoque.  —  I,  616.  —  Pseudo-Gallus,  I,  47. 

Hoc  salsum.  —  I,  562.  —  Térence,  Adelph.,  IIL  3,  71. 

Hoc  sermone.  —  III,  144.  —  Jlvénal,  VI,  189. 

Homo  homini  *.  —  III,  200.  —  Cecilils,  d'après  Symmaque,  Epist.,  X,  104;  et 

Plaute.  Asinar.,  11,  4,  88. 
Honesta.  —  I,  178.  —  Térence,  Aridr.,  1,  1,  114. 
Hos  inter.  —  II,  5.58.  —  Stace,  Sylv.,  1,  6,  51. 
Hos  natura.  —  I,  362.  —  Virgile,  Georg. ,U,  20. 
Hostis  adest.  —  III,  554.  —  Ovide,  de  Ponto.,  1.  3,57. 
Huic  versatile.       III,  136.  —  Tite-Live,  XXXIX,  40. 
Humani  a  se  *.—  I,  624.  —  Térence,  Heaut.,\,  1,  25. 
Humani  qualis.  —  III,  352.  —  Claudien,  in  Eulrop.,  1,  303. 
Hune  ego.  —  I,  672.  —  Virgile,  En.,  IV,  702. 
Hune  saltem.  —  III,  556.  —  Virgile,  Georg.,  l,  500. 


Chercher  par  J  les  citations  gui  ne  se  trouveraient  pas  ici. 

Id  cinerem.  —  I,  516.  —  Virgile.  En.,  IV,  34. 

Id  cum.  —  I,  540.  —  Tite-Live,  XL,  10. 

Id  genus.  —  I,  378.  —  Horace,  Sat.,  I,  2,  2. 

Id  maxime.  —  III,  90.  —  Cicéron,  de  Off.,  1,  34. 

Igneus  est.  —  II,  304.  —  Virgile,  En.,  VI,  730, 

Ignoratur.  —  II,  304.  —  Lucrèce,  I,  113. 

Illam  mese.  —  I,  316.  —  Horace,  Od.,  II,  17,  5. 

Ille  beatus.^  I,  484.  —  Sénèque,  Ep.,  115. 

lUe  etiam.  —  II,  422.  —  Virgile,  Georg.,  I,  466. 

lUe  licet.  —  I,  116.  —  Properce,  III,  18,  25. 

Ille  quod.  —  II,  196.  —  Ovide,  de  Rem.  amor.,  429. 

nie  solus.  —  II,  34.  —  TÉRENCE,  ^rf.,  IV,  2,  9. 

Illevelut.  —  II,  466.  —  Horace,  Sat.,  II,  I,  30. 

mis  est.  —  (III,  688).  —  Source  inconnue.  (Ne  se  trouve  que  dansl'ex.  de  Bord. 

lUisos  *.  —  II,  116.  —  Imité  de  Virgile,  En.,  VII,  587. 

Illiterati.  —II,  202.  —  Horace,  Epod.,S,  17. 


TABLE  DES  CITATIONS.  ILL.  CVS 

JUiid  in  his.  —  I,  1-20.  —  Llckkce,  III,  913. 

lUud  ssepe.  —  III,  -288.  —  Maktiai.,  VII,  62,  6. 

Immortalia.  —  II,  -lii.  —  Llcukce,  V,  122. 

Immunis.  —  I,  5!)i.  —  Horace,  Od.,  III,  23,  17. 

Impellens.   -  III,  1 1.  —  Lucain,  I,  149. 

Imperet  bellante.  —  I,  132.  —  Hokack,  Carm.  saec,  v.  51. 

Imperiti  enim.  —  III,  490.  —  Qlintilien',  Inst.  oral.,  II,  17. 

Impiger...  et.  —  II.  424.  —  Lucain,  IV,  798. 

Impius  hœc  *.  —  III,  424.  —  Virgile,  Eglof/.,  I,  71. 

Imponit  finem.  —  II,  586.  —  Juvénal,  VI,  44 1. 

Iinportunus.  —  III,  284.  —  Horace,  Od.,  IV,  13,  9. 

In  aequo.  —  II,  132.  —  Séxèque,  Ephl.  98. 

In  culpa  *.  —  I,  414.  —  Horace,  Ep.,  I,  14,  13. 

In  divitiis.  —  I,  168.  —  Sénèque,  Epixl.  74. 

In  ferrum.  —  II,  462.  —  Lucain,  I,  461. 

In  tragili.  —  III,  182.  —  Cicéron,  de  Senecl.,  I,  18. 

In  génère.  —  I,  222.  —  rormule  scolastique. 

In  manicis.  —  I,  124.  —  Horace,  Episl.,  I,  16,  76. 

In  me  omnis.  —  III,  420.  —  Térence,  Adelph.,  III,  5,  9. 

In  negotiis  *.  —  III,  486.  —  Sénèque,  Episl.  22. 

In  rébus.       II,  404.  —  Lucrèce,  IV,  812. 

In  solis.  —  I,  416.  —  Tirulle,  IV,  13,  12. 

In  tam  *.  —  III,  510.  —  Source  inconnu»'. 

In  vera.  —  I,  128.  —  Lucrèce,  III,  898. 

In  virtute.  —  II,  206.  —  Cicéron,  de  Xal.  deor.,  III,  36. 

In  vitium.  —  I,  678.  —  Horace,  de  Ai't.  poel.,  31. 

Incedis  per.  —  III,  488.  —  Horace,  Od.,  II,  1,  7. 

Incertam.  —  III,  574.  —  Properce,  II,  27,  1. 

Indefiiror.  ~  II,  378.  —  Juvénau,  XV,  37. 

Inde  toro.  —  I,  546.  —  Virgm.e,  En.,  11,2. 

Inde  tragus.    -  III,  &12.  —  Martial,  XI,  22,  7. 

Indignare  si.  —  III,  ft48.  —  Sénèque,  Epist.  91. 

Indum  sanguineo.  —  III,  268.  —  Virgile,  Enéld.,  XII,  67. 

Indupedita.  —  II,  150.  —  Lucrèce,  V,  874. 

Iners  malorum.  —  II,  216.  —  Sénèque,  Œdipe,  III,  7. 

Infirmum.  —  II,  268.  —  S.  Paul,  Ep.  aua;  Corinthiens,  I,  1,25. 

Inguina.  —  I,  550.  —  JIartial,  Epif/r.,  VII,  35,  1. 

Insani  sapiens.  —  I,  314.  —  Horace,  Ep.,  l,  6,  15. 

Insita.  —  III.  530.  —  Tite-Live,  XXVIII,  24. 

Instillata.  —  II,  314.  —  Auteur  inconnu. 

/i2ter  caetera.  —  II,  136.  —  Sénèque,  de  Ira,  II,  9. 

Inter  enim.  —  II,  262.  —  Lucrèce,  III,  872. 

Inter  furor.  —  II,  378.  —  Juvénal,  XV,  37. 

Inter  se.  —  I,  126.  —  Lucrèce,  II,  75,  78. 

Inter  visa.  —  II,  340.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  28. 

Interdum.  —  II,  4;jii.  —  Properce,  II,  15,  6. 

Intolerantissima .  —  II,  5^1.  —  Tite-Live,  X,  28. 

Intrandum.       III,  698.  —  Cicéron,  de  Fin.  bon.  et  mal.,  V,  16. 

Invenies.  —  IJ,  3ÎK».  —  Lucrèce,  IV,  479,483. 

Invitum  qui.  —  II.  428.  —  Horace,  de  Art.  poet.,  167. 

Ipsa  consuetudo.  —  II,  504.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  21. 

Ipsa  dies.  —  III,  380.  —  Pétrone,  Fragments. 

Ipsa  félicitas.  —  II,  538.  —  Sénèque,  Episl.  74. 

Ipsa  se  velocitas.  —  III,  494.  —  Sénèque,  Epist.  44. 

Ipsa  si  velit.  —  III,  402.  —  Térence,  Adelph.,  IV,  7,  43. 

Ipsa  veritatis.  —  II,  324.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  XI,  22. 

Ipsee  res.  —  I,  274.  —  Cicéron,  de  Fin.,  IIL  5. 

Ipse  ego  *.  ~  II,  106.  —Ovide,  Métam.,  XV,  160. 

Ipse  inter.  —  II,  480.  —  Virgile,  Enéide,  VII,  783. 


C.76  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Jpsi  animi.  —  III,  586.  —  Cicékon,  Tu.sc.,  I,  33. 
Irarumque.  —  III,  '238.  —  Virgile,  En.,  XII,  499. 
Ista  sic.  —  I,  71.  — CicÉRON,  de  Divin.,  I,  6. 
Jstud  nihil.  —  II,  -21 1.  —  Cicéron,  Tuhc,  III,  6. 
It  nigrum.  —  II,  180.  —  Virgile,  En.,  IV,  101. 
Ita  est.  —  II,  280.  —  Cicékon,  de  Nal.  deot\,  I,  27. 
Ita  finitima.  —  III,  528.  —  Cicéron,  Academ.,  II,  21. 
Jtaliam  si  *.  —  II,  122.  —  Lucain,  V,  570. 


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Jactantius  *.  —  II,  664.  —  Tacite,  Ann.,  II,  77. 

Jam  tuerit.  —  I,  118.  —  Lucrèce,  III,  928. 

Jam  nemo.  —  I,  290.  —  Lucrèce,  II,  1037. 

Jam  prece  *.  —  III,  596.  —  Catulle,  Carm.,  LXVl,  (55. 

Jamque  adeo.  —  III,  306.  —  Lucrèce,  II,  1151. 

Jamque  caput.  — II,  420.  —  Lucrèce,  II,  1165. 

Jovis  incunabula.  —  II,  290.  —  Ovide,  Métam.,  VIII,  99. 

Jucundum  qumn.  —  I,  118.  —Catulle,  LXVIII,  16. 

Junctaque.  —  II.  288.  —  Ovide,  Fast.,  III,  81. 

Jupiter  omnipotens.  —  II,  2bO.  —  Valerius  Soranus  d'ap.  S.  Augustin,  de  Cic. 

Dei,  Vil,  9  et  11. 
Jure  perhorrui.  —  III,  516.  —  Horace,  Od.,  III,  16,  18. 
Jus  hoc.  —  I,  mi.  —  Lucain,  VIII,  633. 
Justa  pari.  —  II,  506.  —  Tibulle,  IV,  41. 


L'husbergo.  —  II,  56.  —  Ariosto,  XII,  30. 

La  fama.  —  I,  476. —  Tasso,  Gerus.  lib.,  XIV,  63. 

La  fortune.  —  I,  386.  —  Ménandre,  trad.  de  Montaigne. 

La  lumière.  —  II,  252.  —  Ronsard. 

Labor  callum.  —  I,  2M.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  15. 

Laborum  nuUa  —  III,  28.  —  Virgile,  Enéide,  VI,  103. 

Leetius  est.  —  I,  151.  —  Lucain,  IX,  404, 

Lsetus  in.  —  I,  74.  —  Horace,  Odes,  H,  16,  25. 

Languidior  \  —  II,  228.  —  Catulle,  Carhi.,  I.XVll,  21. 

Largus  enim.  —  I,  408.  —  Lucrèce,  V,  282. 

Latent  ista.  —  II,  294.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  39. 

Latius  excisas  *.  —  II,  438.  —  Rutilius,  Iliner.,  1,  397. 

Laudandis.  —  III,  476.  —  Sidoine  Apollinaire,  Carm.,  XXIII,  Xarbo,  v.  62. 

Laudari  haud.  —  II,  454.  —  Perse,  Sat.,  I,  47. 

Les  œuvres.  —  II,  244.  —  Plutarque,  des  Oracles  qui  ont  cessé  {trad.  d'Amyol). 

Levationes.  —  II,  214.—  Cicéron,  Tusc,  111,  15. 

Licet  quoi.  —  I,  128.  —  Lucrèce,  111,  1103. 

Licet  sapere.  —  I,  244.  —  Sénèque,  Epist.  103. 

Liquidus.  —  II,  68.  —  Horace,  Epist.,  Il,  2,120. 

Lotus  nobiscum.  —  III,  60.  —  Martial,  VI,  53. 

Lurida  preeterea.  —  II,  406.  —  Lucrèce,  IV,  333. 

Luxuria  ipsis.  —  III,  262.  —  Tite-Live,  XXXIV,  4. 

M 

Ma  or.  —  II,  28.  —  Tasso,  Ger.  lib.,  X,  39. 
Magis  magnos.  —  I,  204.  —  Rabelais,  Garg.,\,  39. 
Magna  dii.  —  II,  280.  —  Cicéron,  de  Nal.  deor.,\\,  66. 
Magna  pars.  —  III,  670.  —  Sénèque,  Epist.  123. 


TAm.E  DES  CITATIONS .  MAC.  C.77 

Magna  servitus.  —  III.  liki.  —  Sénèque,  Cons.  adPolyb.,  2G. 

Magnaw  rem.  —  I,  010.  —  Sé.nkque,  Epist.  120. 

Magno  veluti.  —  II,  611.  —  Virciile,  Enéid. ,\ll,  462. 

Magnum  stridens.  —  I.  ô36.  —  Virgile,  En.,  IX,  705. 

Magnus  animus.  —  III,  552.  —  Sénèque,  Epist.  115,  114. 

Mais  ie  hay.  —  I,  204.  —  .Ioachim  dl  Bellay. 

Maioi^em  fidem  *.  —  III,  536.  —  Source  inconnue. 

Malam  mortem.  —  I,  452.  —  S.  Alclstix,  de  Civ.  Dei,  1,  II. 

Maie  cuncta.  —  III.  492.  —  Stage,  Thébaïde,  X,  704. 

Malo  me  *.  —  I.  54.  —  Qiinte-Clrce,  IV,  13. 

Malum  consilium  est  consultori.  —  I,  660.  —  Allu-Gelle,  IV,  5. 

Malum  consilium  est  quod.  —  I,  600.  —  Alll-Gf.i.i.e,  XVII,  14. 

Manco  maie.       III.  472.  —  Expression  italiennt». 

MavEÎ-^v  jj:à>,).ov  *.  -     I.  626.  —  Aulu-Geli.e,  IX,  5. 

Manant  (dict-il)  ♦.  —  I.  120.  —  Virgile,  En.,  IV,  8N. 

Manente  memoria.  —  III,  104.  —  Titk-Live,  XXV,  \H. 

Materiam  culpse.  —  III,  236.  —  Ovide,  Trisi.,  IV.  1,  31. 

Maximum  hoc.  ~-  I.  402.  —  Sénèque,  Thiesl.,  II.  1.  30. 

Me  si  fata.  —  III.  45(5.  —  Virgile,  En.,  IV,  310. 

Me  tabula  *.  -   III,  274.  —  Horace,  Od.,  I,  5,  13. 

Medio  de.  ~  II,  538.  —  Lucrèce,  IV.  1130. 

Mediocribus.  —  II,  472.  —  Horace,  de  Arle  poel.,  372. 

Médium  non.  —  II.  312.  —  Claudien,  de  Sexto  cons.  Hon.,  V.  411. 

Melius  non  *.  —  III,  506.  —  Sénèque,  Epist.  Ti. 

Melius  scitur.  —  II,  222.  —  S.  Augustin,  de  Ord.,  II.  10. 

Meminerint  Deum.  —  II,  448.  —  Cicéron,  de  O/J'.,  III,  10. 

Memineris  maximos.  —  I,  454.  —  Cicéron,  de  Fin.,  I.  l.j. 

Memini  etiam.  —  II.  216.  —  Cicéron,  de  Fin.,  II,  32. 

Memoria  certe.  —  II,  500.  —  Cicéron,  Acad.,  II.  7. 

Mené  huic.  —  III,  524.  —  Virgile,  Eneid.,  Y,  849. 

Mens  immota.  —  I,  82.  —  Virgile,  En.,  IV,  449. 

Mens  intenta  *.  -  III,  180.  —  Ovide,  Trist.,  IV,  I,  4. 

Mensque  pati.  —  III,  184.  —  Ovide,  de  Ponto,  I,  5,  18.  , 

Mentem  sanari.  —  II,  318.  —  Lucrèce,  III,  509. 

Mihi  nempe.  —  II,  510.  —  Lucrèce,  V,  959. 

Mihi  quidem.  —  III,  524.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  20. 

Mihi  sic.  —  I,  314.  —  Térence,  Heaut.,  I,  I,  28. 

Mille  animas  *.  —  III,  582.  —  Ovide,  Fastes,  I,  380. 

Minister  veteris.  —  II,  538.  —  Catulle,  XXVII,  1. 

Minus  afficit.  —  III,  574.  —  Quintilien,  Inst.  Oral.,  I,  12. 

Minus  un.  —  II.  68.  —  Martial,  Préf.  du  liv.  VIII.  ' 

Minutatim.  —  II,  482.  —  Lucrèce,  II,  I13I. 

Miramur.  —  III,  532.  —  Sénèque,  Epist.  118. 

Mirum  quo.   -  II,  278.  —  Pline,  Aal.  Hist.,  II,  23. 

Misce  stultitiam.  —  III,  182.  —  Horace,  Od.,  IV,  12,  27. 

Miser!  ô  miser.  —  I,  120.  —  Lucrèce,  III,  911. 

Misero  quod  *.  —  I,  26.  —  Catulle,  Carm.,  LI,  5. 

Miaw  CTosiCTiriv.  —  I,  71.  —  Euripide,  np.  Cicéron,  ap.  fain.,  XIII,  15. 

Mista  senum.  —  III.  566.  —  Horace,  Od.,  I,  28,  19. 

Modus  quo.  ~-  II,  2f»8.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  XXI.  10. 

Mœchus  ex.  —  II.  382.  —  Martial,  III,  70. 

MoUiter.  —  II,  484.  —  Horace,  Sal.,  II,  2,  12. 

Morbis  in.  —  II,  318.  -  Lucrèce,  III,  461. 

More  terrarum.  —  II,  172.  —  Lucrèce,  IV,  1261. 

Mores  cuique.  —  1,  4Î)6.  —  Cornélius  Nei>os,  Alt.,  IL 

Mors  utinam.  —  I,  442.  —  Lucain,  IV,  580. 

Morte  carent.  —  II,  106.  —  Ovide,  Métatn.f  XV,  158. 

Morte  obita.  —  III,  6!)6.  —  Virgile,  Enéide,  X,  011. 

Motus  doceri.  —  III,  208.  —  IIurace.  Od.,  III.  6.  21. 


C.78  ESSAIS  DE  MONTATGNE. 

Mugitus  veluti.  —  II.  GIG.  —  Vir(;ii,f,.  Enriil..  XII.  I(i:i. 

Mulciber  in.  —  II,  :îo8.  —  Ovidk,  Tiist.,  1.  -2.  5. 

Mulier  tum  *.    -I.  574.  —  Plaute,  MoftlelL,  I,  :;,  llu. 

Multa  ceimunt.    -  I.  72.  —  Cicéhon,  de  Nat.  Dem-..  II.  i>i>. 

Multa  dies.  —  I,  ()38.  —  Tihuile,  En.,  XI,  l-^."). 

Multi  fallere.  —  III.  390.  —  Sénkque,  Episl.  :i 

Multimodis.  —  II,  101.  —  Lucukce,  IV,  1152. 

Multo...  mortem.  —  I,  128.  —  Lucrkce.  III,  939. 

Multos  in.  —  I.  031.  —  Lucain,  VII,  101. 

Multum  interest.  —  I,  270.  —  SÉNÈyii:.  A>/.s7.  Do. 

Multum  sibi.  —  II,  80.  —  Sénèqle,  Episl.  13. 

Mundus  domus  *.  —  II,  292.  —  Varhon. 

Mundus  universus  *.  —  III,  .500.  —  Pétrone. 

Mûris  nuUa.  —  III,  ôO(».  —  Ci.aldien,  m  Eulrop.,ï,  244. 

Mus  in  pisce.  —  III,  (jOO.  —  Proveibo  latin. 

Muta  îerrarum.  —  II,  100.  —  Ci.aldien,  ///  Ruf.,  II,  182-491. 

Mutât  enim.  —  II,  410.  —  Lucrèce,  V.  826. 


N 


Nas  iste.  —  III,  78.  —  Térence,  Heaul.,  111,  5,  8. 

Nam  cupide.  —  II,  112.  —  Lucrèce,  V,  1139. 

Nam  istis.  —  I.  74.  —  P.\cuvius,  ap.  Cic,  de  Divin.,  1,  57. 

Nam  mulier.  —  II,  272.  —  Lucrèce,  IV,  1266. 

Nam  nos  quoque.  —  III,  148.  —  Cicéron,  Parad.,  V,  2. 

Nam  nox  nulla.  —  I,  130.  —  Lucrèce,  V,  579. 

Nam  Pater.  —  III,  44.  —  Virgile,  Enéid.,  Vil,  770. 

Nam  qui  putat.  —  III,  .368. —  Sénèque,  Epist.  81. 

Nam  quod  adest.  —  II,  360.  —  Lucrèce,  V,  1411. 

Nam  quum  vidit.  —  I,  560.  —  Lucrèce,  IV,  9. 

Nam  si  quando.  —  III,  286.  —  Virgile,  Georg.,  111,  98. 

Nam  si  quod.  —  III,  496.  —  Lucilius,  lib.  5,  ap.  Nonius,  V,  98. 

Nam  si  tantopere.  —  II,  316.  —  Lucrèce,  III.  071. 

Nam  tibi.  —  I,  128.  —  Lucrèce,  III,  957. 

Nam  verse.  —  I,  101.  —  Lucrèce,  III,  57. 

Namque  sagacius.  —  I,  574.  —  Horace,  Epod.,  XII,  M. 

Namque  unam.  —  III,  286.  —  Lucrèce,  VI,  701. 

Namquodcumque.  —  I,  154.  —  Lucrèce,  II,  752. 

Narras  et.  —  III.  112.  —  Horace,  Odes,  111,  19,  3. 

Narratur  et.  ~  I.  016.  —  Horace,  Od.,  111,  51,  11. 

Nascentes  morimur.  —  I,  126.  —  Manilius,  Asiron.,  IV,  16. 

Nasutus  sis.  —  II,  504.  —  Martiai,.  II.  13. 

Natura  homo.  —  III,  610.  —  Si'nèi^i  e,  Ejiisl.  M2. 

Ne  amores.  —  II,  380.  —  Cicéhon,  de  Fin.,  111.  20. 

Ne  nos  inducas.  —  III.  5(t8.  —  S.  .AIatuiif.l.  VI.  13. 

Ne  si,  ne  no.  —  II.  .501.  —  PÉTiiAiifjui;. 

Ne  toga.  —  II.  .522.  —  Mautiai,.  XIII,  1,  1. 

Ne  utile.  —  I,  71.  —  CiCKi;nN,  <h'  \at.  Deor.,Ul,  G. 

Ne  veraque.  —  I,  184.  —  Lucrèce,  II,  47. 

Nec  ad  melius  *.  —  III,  342.  —  Cicéron,  de  Fin..  I,  19. 

Nec  calidse.  —  I,  486.  —  Lucrèce.  11.  34. 

Nec  divis.  —  III,  224.  —  Catui.i.f.  Cfr,,,.,  I. XVIII.  141. 

Nec  facilis.  —  I,  614.  —  Juvénal,  XV.  17. 

Nec  fas  *.  —  I  316.  —  Térence,  JHeauL.  1.  1.  97. 

Nec  gentibus.  —  III,  104.  —  Lucain,  I,  82. 

Nec  habetur.  —  II.  170.  —  Oviue,  MiMam..  X.  325. 

Nec  id.  —  II.  !(]<;.  —  Tacite.  Ayric.  1. 


TABLE  DES  CITATIONS.  M-C.  C.79 

Nec  in  regnis.  —  II.  280.  —  Cickuon.  <lr  Xal.  Ihmr.,  111.  •"!."». 

Nec  jam  *.  —  III,  10  J.  —  Licain,  I,  l:». 

Nec  me.  —  III,  510.  —  Cickuon,  Tusc,  1.  -.Ti. 

Nec  mihi.  —  III,  191.  —  Autour  incouiui. 

Nec  minimo.  —  I,  502.  —  Juvknai.,  Sal.,  V,  12:î. 

Nec  nisi.  —  II,  570.  —  Claudif.n,  Ep.  ml.  Had.,  oO. 

Nec,  si.  —  II,  208.  —  Lucrkce,  III,  859. 

Nec  sibi.  —  I,  128.  —  Lucrèce,  III,  932,  935. 

Nec  sunt.  —  III,  420..—  Virgile,  Enéid.,  Xll.  519. 

Nec  tam.  —  III,  130.  —  Quintilien,  Inst.  oral..  V.  12. 

Nec  tamen.  —  II,  390.  —  Lucrèce,  IV,  380,  390. 

Nec  tantum.  —  III,  210.  —  Catulle,  Cariii.,  LX\1,  125. 

Nec  ultra.  —  II,  98.  —  Juvénal,  Sal.,  VIII,  101. 

Nec  Vénères.^  II,  190.  —  Lucrèce,  IX.  1182. 

Nec  vincet—  I.  (;12.   —  Iloii\(i.  Sdf..  1.  :!.  115. 

Nec  vitiant.  —III,  000.  —  Ovii.k.  /'/vv/.,  111.  s.  25. 

Necnon  libelli.  —  III.  21i).  —  Horace,  Epad.,  VIIL  15. 

Neminem.  —  I,  52.       Ci'  i'uun-,  de  0/f'.,  III,  17. 

Nemo  altero.  —  I,  lis.       Sknèque,  Episl.  91. 

Nemo  enim.  —  III,  :!.s(;.  —  Sknèque,  Episl.  13. 

Nemo  expergitus.  —  I,  001.  —  Lucrèce,  III,  942. 

Neque  in.  —  II,  512.  —  Perse,  IV,  2.3. 

Nemo  satis.  —  III,  102.  —  Juvénal,  XIV,  233. 

Nempe  et.  —  I,  1 10.  —  Horace,  Od.,  III,  2,  14. 

Neptunus  *.  —  II,  288.  —  Virgile,  En.,  11,010. 

Neque  aftectui.  —  III,  150.  —  Tacite,  .4nHai.,  XII,  45. 

Neque  enim  disputari.  —  III,  330.  —  Cicéron,  de  Fin.  bon.  et  mal,  1,  8. 

Neque  enim  eaedem.  —  II,  14.  —  Tite-Live,  XXV,  19. 

Neque  enim  est.  —  I,  ;300.  —  Catulle,  LXVIII.  17. 

Neque  extra.  —  II,  502.  —  Source  inconmic 

Neque  gratia.  —  II,  221.  —  Cicéron,  de  Nal.deor.,  I,  17. 

Neque  illa.  —  II,  174.  —  Horace,  Sal.,  I,  2,  09. 

Neque  sepulcrum.  —  I,  40.  —  En.nius,  ap.  Cic.  '/'asc.,  I,  11. 

Neque  submissam.  —  III,  520.  —  Cicéron,  de  0/J'.,  I,  :{1. 

Neque  ut.  —  I,  211.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  3. 

Nequidquam.  —  I,  212.  —  Lwus,  ap.  Cicéron,  de  O/J'.,  III,  15. 

Nescio  quis.  —  I,  148.  —  N'iik.ii.k,  /•:///..  III.  103. 

Nihil  actum.  —  III,  090.  —  Aimmia.  dr  /■;.//'.  Ah'.r..  V,  20. 

Nihil  enim.  —  I.  008.  —  Cici'kon,  7'».sr..  11,  -i: . 

Nihil  est  bis.  —  III,  410.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  1. 

Nihil  est  tam  populare.  —  II,  492.  —  Cicéron,  pru  Lig.,  XII. 

Nihil  est  tam  utile.  —  III,  472.  —  Sénèqie.  E/d^l.  2. 

Nihil  est  turpius.  —  III,  020.  —  Cicéron,  Aind.,  1,  13. 

Nihil  in.  —  III,  558.  —  Tite-Live,  XXXIX,  10. 

Nihil  itaque.  —  II,  370.  —  Source  inconnue. 

Nihil  sanantibus.  —  III.  312.  —  Sénèque,  E/risl.  5'.t. 

Nihil  suprse.  —  III,  178.  —  Horace,  Od.,  Il,  18  et,  11. 

Nihil  tam  absurde.  —  II,  312.  —  Cicéron,  de  Divin..  II.  58. 

iViiadeo  fieri  ♦.  —I,  108.— Lucrèce,  ni,  183. 

Nil  adeo  magnum.  — I,  172.  —  Lucrèce.  IL  1027. 

Nihil  admirari.  —  II,  372.  —  IIoraci.,  E/iisf..  I.  0.  1 

Nil  ego.  —  I,  310.  —  Horace,  Sal.,  I,  5,   1 1. 

Nihil  mihi  *.  ~  II,  .550.  —  C.vrui.i.E,  LXVllI,  77. 

Nil  scii^i.  —  II,  230.  —  Lucrèce,  IV,  470. 

Nil  tam  inasstimabile.  —  II,  452.  —  Tite-Livk,  XXXI,  31. 

Nimirum  hac.  —  I,  101.  —  Macrobe,  Sal..  H.  7. 

Nimirum  propter.  — 111,212.  —  Anfciir  iiirnnuii. 

Nimirum,  quia.  —  I,  190.  —  Li  (  uèi  r.  \  ,  I  1:11. 

Nimirum  sapiunt.  —  III.  2riX.  ^-  Vi,ii.i!i\i  i'uktmmm  iatai.ecta.  ad  Malionas. 


C.80  KSSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Nimium  boni.  —  II,  ili.  —  Enxius,  ap.  Cic,  de  Fin..  II.  13. 

Nisi  purgatum.  —  I,  114.  —  Luckkce,  V,  44. 

Nisi  tu  servare.     -  II,  434.  —  Oviue,  Amor.,  II,  19,  47. 

NoUo  barbam.  —  III,  'M2.    -  Makhai..  X,  9(),  9. 

Nomen  habent.  —  II,  IGG.  —  Maktial,  IV,  29,  0. 

i\ô[jLoiç  ETTErrOai.  I,  ITG.  —  Kx  Iruf^ed.  (jrœcis  Huo.  Groitii. 

Non  sestimatione.  —  III,  '3H2.  —  Cicéuon,  Parad..  VI,  o. 

Non  agimuv.  —  II,  484.  —  Horace,  Episl.,  Il,  201. 

Non   alia  longe.  —  II,  140.  —  Lucrèce,  V,  1029. 

Non  alio  pacto.  —  II,  320.  —  Lucrèce,  III,  111. 

Non  alium  videre.  —  I,  128.  —  Mamlius,  I,  529. 

JVoiJ  ampliter.  —  III.  4o2.     -  Poète  cité  par  Nomus,  XI,  19. 

Non  armis.  —  III,  .'k>4.  —  Source  inconnue. 

Non  emolumento.  —  II,  452.  —  Cicéron,  de  Fin..  1,  id. 

Non  domus.  —  I,  4(S(;.  —  Horace,  Episl.,  1,  2,  47. 

Non  enim  gazée.  —  I,  181.  —  Horace,  Od.,  11.  IG,  9. 

Non  enim  hilaritate.  —  I,  454.  —  Cicéron,  de  Fin.,  II,  KK 

Non  enim  nos.  —  II,  23G.  —  Cicéron,  de  Divin.,  I,  18. 

Non  enim  parenda.  —  I,  212.  —  Cicéron,  de  PVnibux,  I,  1. 

Non  enim  patria  *.    -  III,  104. —  Cicéiuin,  de  ()/]'..  III,  2.'). 

Non  equidem  *.  —  II,  .522.  —  Perse,  V,  19. 

Non  esse.  —  I,  472.  —  Cicéron,  Farad.,  VI,  3. 

Non  est  loquendum.  —  I,  210.  —  Sénèque,  Episl.  108. 

Non  est  ornamentum.  —  I,.434.  —  Sénèque,  Ep.  115. 

Non  est  ut.  —  I,  <;34.  —  Sénèque,  Theb.,  1,  190. 

Non  hoc  amplius.  —  III,  6G1.  —  Horace,  Od.,  III,  10,  19. 

Non  ipse  pro.  —  III,  4!)2.  —  Horace,  Orf.,IV,  9,  51. 

Non  jam.  —  II,  122.  —  Lucrèce,  III,  G12. 

Non  levia.  —  I,  514.  —  Viroii.e,  Eh.,  XII.  70 1. 

Non  nobis.  —  III,  522.  —  Psaume  CXIII,  1. 

Non  ponebat.  —  III,  182.  —  Ennius,  ap.  Cicéron,  deO/f'.,  I,  21. 

Non  potest.  —  II,  .338.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  41. 

Non  pudeat  -    III,  18G.  —  Auteur  inconnu. 

Non  pudet.  —  I,  IGO.  —  Cicéron,  île  Mal.  deor.,  I,  :!ii. 

Non  quidquid.  —  II,  45G.  —  Perse,  Sal.,  I.  5. 

Non  recito  *.  —  II,  .522.  —  Horace,  Sal.,  I,  4,  7:5. 

Non  schivar.  —  II,  .578.  —  Tasso,  Ger.  lih.,  XII,  55. 

Non  secus.  —  III,  G48.  —  Pseudo-Gali.us,  I,  171. 

Non  si  te.  —  II,  284.  —  Horace,  Sal.,  II,  3,  19. 

Non  siculse.  —  I,  110.  —  Horace,  Od.,  III,  1,  18. 

Non  sumus.  —  I,  238.  —  Sénèque,  Episl.  33. 

Non  tam  commutandarum.  —  III,  400.  —  Cicéron,  de  Off..  H,  I. 

Non  tam  id  sensisse.  —  II,  250.  —  Source  inconnue. 

Non  tam  omnia.  —  III.  502.—  Tite-Live,  XXXIV,  21. 

Non  tam  patientibus.  —  I,  .536.  —  Tite-Live,  XXXVIH,  3G. 

Non  tanta  cœlo.  —  II,  422.  —  Pi.ine,  Hisl.  nal..  H,  8. 

Non  viriliter  *.  —  II,  592.  —  Tibui.le,  Priap.,  84. 

Non  vitse.  —  I,  216.  —  Sénèque,  Ep.  106. 

Non  vultus.  —  I,  124.  —  Horace,  Od.,  HI,  3,  3. 

Nonne  videmus,  nil.  —  1,482.  —  Lucrèce,  II,  16. 

Nonne  videmus,  quid.  —  I,  602.  —  Lucrèce,  III,  1070. 

Nonne  vides.  —  111,330.  —  Horace,  Sat.,  I,  4,  409. 

Nosse  oui.  —  II,  282.  —  Lucain,  I.  452. 

Nostre  mal.  —  III,  554.  —  Source  inconnue. 

Nostri  nosmet.    -  III,  252.   -  Térence,  Phor.,  I,  3,  20. 

Notumque.       III,  224.  —  Virgile,  En.,  V,  21. 

Nudaque.  —  I,  390.   -  Ovide,  TrisL,  III,  10,  23. 

Nul  avant*.  —  I.  32.  —  Hérodote,  I,  3^2. 

NuUa  ars.  —  III.  29G.  —  Cicéron,  de  Fin.  bon.  elnuil.,  V,  0. 


TABLE  DES  CITATIONS.  NUL.  C.81 


Niilla  placida.  —  III,  458.  —  Sénkqlë,  Epist.  2G. 
NuUae  sunt.  -  III,  224.  —  Propekce,  II,  8,  3. 
NuUum  initia.  —  III,  276.  —  Sénkque,  Episl.  !)5. 
Nullum  scelus.  —  II,  26.  —  Tite-Live,  XXVII,  28. 
NuUum  sine.  —  II,  538.  —  Sénèqle,  Epiât.  6'J. 
NuUus  in  urbe.  —  II,  381.  —  Mautial,  I,  71. 
Num  tu  quse.  —  JII,2I8.  —  Horace,  Od.,  II,  12,  21. 
Nunc  caput.  —  II,  558.  —  Mamlius,  Astron.,  IV,  225. 
Nunc  levior*.  —  II,  458.  —  Perse,  Sat.,  1,37. 
Nunc,  si.  —II,   UMJ.  — JtvÉNAi-,  XIII,60. 
Nunquam  ad  liquidum.  —  III,  532.  —  Qoixte-Curce,  IX,  2. 
Nunquam  adeo.  —  II,  508.  —  Juvénal,  VIII,  183. 
Nunquam  naturam.  —  I,  458.  —  Cicéron,  Tusc,  V,  27. 
Nunquam  simpliciter.  —  III,  458.  —  Quinte-Curce,  IV,  14. 
Nunquam  tutelse.  —  I,  238.  —  Séxèque,  Epist.,  33. 


0 

0  ego,  di  *.  —  III.  282.  —  Ovide,  ex  Ponio,  I,  4,  49. 

0  fortes.  —  III,  688.  —  Horace,  Od.,  I,  7,  30. 

0  lane!  - 1,  550.  —  Perse,  Sat.,  I,  58. 

0  lupiter.  —  1,588.  —  Plutarque,  Traité  de  l'amour,  12. 

0  pater.  —  II,  326.  —  Virgile,  Enéid.,  VI,  719. 

0  misero  frater.  —  I,  316.  —  Catli.i.e,  LXVIII,  20. 

0  misera  quorum.  —  III,  254.  —  Pseudo-Galixs,  I,  180. 

0  prima.  —  III,  178.  —  Properce,  III,  5,  7. 

0  sancte.  —  II,  288.  —  Cicéron,  de  Divin.,  II,  56. 

0  seclum.  —  II,  66.  —  Catuu.e,  XL III,  8. 

Obest  plerùmque.  —  I,  236.  —  Cicéron,  de  Xat.  deor.,  I,  5. 

Obstetrix.  —  III,  230.  —  S.  Augustin,  De  Civ.  Dei,  I,  18. 

Obstupui,  steteruntque.  —  I,  98.  —  Virgile,  i?».,  II,  774. 

Obstupuit  virgo.  —  III,  162.  —  Ovide,  Mélam.,  X,  666. 

Obuersentur.  —  I,  428.  —  Cicéron,  Tusc,  H,  22. 

Occultum  quatiens.  —  I,  658.  —  Juvénal,  XIII,  195. 

Occupavi  te.  —  I,  626.  —  Cicéron,  Tusc,  V,  9.    . 

Ocyor.  —  II,  652.  —  Lucain,  V,  405. 

Odi  homines.  —  I,  206.  —  Pacuvius,  ap.  Gallium,  XHI,  8. 

Offendor.  —  III,  230.  —  Martial,  7,  6. 

Otficii.  —  II,  460.  —  Source  inconnue. 

Ogni  medaglia.  —  III,  544.  —  Proverbe  italien. 

Ole  quid.  —  III,  462.  —  iMartial,  VH,  9,  I. 

Ohm  jam.  —  II,  588.  —  Sénèque,  Epist.  77. 

Omne  adeo.  —  III,  214.  —  Virgile,  Georg.,  III,  241. 

Omne  magnum.  —  11,540.  —  Tacite,  Ann.,  XIV,  44. 

Omnem  credo.  —  1,  116.  —  Horace,  Epist.,  I,  4,  13. 

Omnes  clari.  —  III,  168.  —  Cicéron,  7'w.sc.,  II,  24. 

Omnes  eodem.  —  I,  110.  —  Horace,  Od.,  II,  3,  25. 

Omnes  pêne.  —  II,  226.  —  Cicéron,  Acad.,  I,  12. 

Omnia  cum.  —  II,  270.  —  Lucrèce,  VI,  679. 

Omnia  îanda.  —III,  554.  —>■  Catulle,  de  Nupl.  Pd.  et  Thet.,  V,  405. 

Omnia  incerta.  —  II.  298.  —  Pline,  Xat.  Hist.,  II,  37. 

Omnia  non.  —  III,  106.  —  Properce,  lil,  9,  7. 

Omnia  quse  secundum  naturam  tiunt.  —  III,  674.  —  Cicéron,  de  Senect.,  cl  9. 

Omnia  quee  secundum  naturam  sunt  *.  —  III,  698.  —  Cicéron,  de  Ein.  bon.  et 

mal,.,  111,  6, 
Omnia  te.  —  I,  130.  —  Lucrèce,  III,  981. 
Omnia  vitia.  —  II,  616.  —  Sénèque,  Epist.  56. 
Omnino  amicitiae.  —  I,  306.  —  Cicéron,  de  Amie,  20. 

essais    de    .MONTAIGNE.   —  T.    IV.  (» 


C.82  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Omnino  si.  —  II,  512. —  Cicékon,  de  Off.,  I,  31. 

Omnis  Aristippum.  —  I,  270.  —  Horace,  Episl.,  l,  17,  2.'). 

Omnium  rerum.  —  II,  432.  —  Sénèque,  de  Benef.,  VII,  D. 

Oncques  ne  furent.  —  I,  21.  —  La  Boétie. 

Opinio  est.  —  I,  476.  —  Cicérox,  Tusc,  II,  22. 

Optât  ephippia.  —  I,  92.  —  Horace,  Epist.,  I,  14,  43. 

Optato  quam  .  —  III,  198.  —  Catulle,  de  Coma  Beren.,  LXIV,  79. 

Ora  tument.  —  II,  (308.  —  Ovide,  de  Arle  amandi,  111,  503. 

Orabunt  causas  *.  —  I,  432.  —  Virgile,  En.,  VI,  51. 

'ii;  oùSèv  T).  —  I,  216.  —  Ap.  Stobée,  III,  37. 

Oscula  dat  ».  —  II,  400.  —  Ovide,  Mélam.,  X,  256. 

Oii  Yàp  èâ.  —  II,  130.  —  HÉRODOTE,  VII,  10. 


Pacisque  bonus.  —(III,  ^148).  —  Virgile,  En.,  XI,  658.  —  (Cette  citation  ne  fi- 
gure que  dans  l'éd.  de  88,  pag.  444,  au  lieu  et  place  de  celle  «  Uterque  bo- 
nus »,  dont  elle  n'est  qu'une  inversion). 

Pallada  *.  —  II,  288.  —  Ovide,  FasL,  111,  81. 

Pannonis  haud.  —  I,  42.  —  Lucain,  VI,  220.  ^ 

Paridis  propter.  —  II,  178.  —  Horace,  Epist.,  I,  2,  6. 

Parem  passis.  —  III,  572.  —  Séniîque,  Episl.  74. 

Parum  mihi  *.  —  II,  242.  —  Salluste,  Bell.  Jug.,  85. 

Paterna  vestis.  —  II,  522.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  I,  13. 

Pati  natse.  —  III,  264.  —  Sénèque,  Epist.  95. 

Paucis  opus.  —  III,  550.  —  Sénèque,  Epist.  106. 

Paucos  servitus.  —  I,  492.  —  Sénèque,  Episl.  22. 

Paulum  sepultae.  —  II,  446.  —  Horace,  Od.,  IV,  9,  29. 

Pectus  est.  —  III,  240.  —  Quintilien,  X,  7. 

Pecuniarum.  —  III,  300.  — Cigéron,  de  Off.,  l,  14. 

Pejoraque.  —  111,396.  —  Juvénal,  Sat.,  XIll,  28. 

Pejus  vexabar.  —  III,  288.  — Sénèque,  —  Episl.  53. 

Per  dispositos.  —  II,  532.  —  Tite-Live,  XXXVII,  7. 

Per  quae  luxuria.  —  III,  668.  —  Sénèque,  Epist.  18. 

Per  varias.  —  III,  598.  —  Manilius,  1,  59. 

Perché,  dubbiosa.  —  I,  670.  —  Le  Tasse,  Ger.  lib.,  XII,  74. 

Perdam  sapientiam.  —  II,  324.  —  S.Paul,  Corinth.,  I,  1,  19. 

Permitte  divis.  —  III,  356.  —  Horace,  Od.,  1,  9,  9. 

Perspicuitas.  —  III,  560.  —  Cicéron,  de  jVa<.  Deor.,  111,  4. 

Petite  hinc.  —  I,  262.  —  Perse,  V,  64. 

P inguis  amor.  —  I,  488.  —  Ovide,  Amor.,  H,  19,  25. 

Placet!  pare  *.  —  II,  218.  —  Sénèque,  Episl.  70. 

Plenus  rimarum  *.  —  II,  500.  —  Térence,  Eunuch.,  1,  2,  25. 

Plerumque  gratas.  —  I,  490.  —  Horace,  Od.,  111,  29,  13. 

Plus  dolet.  —  III,  576.  —  Sénèque,  Episl.  95. 

Plus  salis  *.  —  III,  452.  —  Cornélius  Nepos,  Allicus,  13. 

Plus  sapit.  —  II,  518.  —  Lactance,  Div.  Inslit.,  III,  5. 

Plus  sonat.  —  I,  276.  —  Sénèque,  Episl.  40. 

Pocula  Lethxos.  —  III,  408.  —  Horace,  Epod.,  XIV,  3. 

Pœna  minor.  —  III,  574.  —  Source  inconnue. 

Poste,  non  dolet.  —  II,  668.  —  Pline  le  Jeune,  III,  16. 

Point  ne  se  tault.  —  I,  44.  —  Plutarque,  trad.  d'Amyot. 

Polf  me  occidistis.  —  II,  216.  —  Horace,  Epist.,  II,  2,  138. 

Pone  seram.  —  III,  232.  —  Juvénal,  Sat.,  VI,  346. 

Possint  ut.  —  III,  280.  —  Horace,  Od.,  IV,  13,  26. 

Post,  bellator.  —  II,  184.  —  Virgile,  En^,  XI,  89. 

Posterior...  res.  —  II,  344.  —  Lucrèce,  V,  1413. 

Posthume  non.  —  I,  574.  —  Martial,  II,  12,  14. 


TABLE  DES  CITATIONS.  POS.  C.83 

Postquam  cupidae.  —  III,  256.  —  Catulle,  Carm.,  LXIV,  1 17. 
Postquam  docti.  —  I,  218.  —  Sénèque,  Epist.  95. 
Potare  et.  —  II,  21(i.  —  Horace,  Epist.,  I,  5,  14. 
Potentissimus.  —  III,  504.  —  Sénèque,  Epist.  90. 
Prsetulerim...  —  I,  114.  —  Horace,  Epist.,  II,  2,  126. 
Prima  est.  —  I,  660.  —  Juvénal,  Sut.,  XIII,  2. 
Prima  quse.  —  I,  126.  —  Sénèque,  Het-c.  fur.,  III,  874. 
Primitiœ.  —  II,  576.  —  Viugile,  Enéide,  XI,  156. 
Primoque.  —  II,  101.  —  Ovide,  Métam.,  XV,  106. 
Primus  clamor.  —  I,  534.  —  Tite-Live,  XXV,  41. 
Principis  est.  —  III,  354.  —  Martial,  VIII,  15. 
Profecto  fortuna.  —  II,  418.  —  Salluste,  Bell.  Catil.,  8. 
Protecto  non.  —  II,  284.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  XII,  15. 
Proinde  quod.  —  II,  396.  —  Lucrèce,  IV,  500. 
Pronaque.  —  II,  194.  —  Ovide,  Métam.,  I,  84. 
Proptereaque.  —  I,  392.  —  Lucrèce,  IV,  936. 
Provehimur.  —  II,  420.  —  Virgile,  En.,  III,  72. 
Proxima  deinde.  —  II,  632.  —  Virgile,  En.,  VI,  43^1. 
Prudens  tuturi.  —  I,  74.  —  Horace,  Odes,  III,  29  et  suivants. 
Psilothro  nitet.  —  I.  546.  —  Martial,  Epigr.,  VI,  93,  9. 
Puellae  hune.  -  I,  486.  —  Perse,  Sal.,  II,  38. 
Pugiles  etiam.  —  III,  28.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  23. 
Pulchrumque.  —  III,  664.  —  Virgile,  Enéid.,  II,  317. 
Pungit  dolor.  —  II,  218.  —  Cicéron,  nwc,  II,  14. 
Pungit  in.  —  II,  312.  —  La  Boétie. 
Pusi  saepe.  —  I,  548.  —  Lucrèce,  IV,  1024. 


\Chercher  par  C  les  citations  qui  ne  se  trouveraient  pas  ici. 

Qua  Deus.  —  III,  616.  —  Properce,  III,  5,  26. 

Qua  tacie.  —  II,  306.  —  Cicéron,  Tit.<sc.,  I,  28. 

Quae  fuerant.  —  III,  114.  —  Sénèque,  Epist.  39. 

Quse  fuit.  —  II,  266.  —  Cicéron,  de  Nat.  Deor.,  III,  6. 

Quœ  ista.  —  III,  522.  —  Cicéron,  de  Fin.  bon.  et  mal.,  II,  15. 

Quae  magis.  —  III,  552.  —  Cicéron,  Tusc,  V,  5. 

Quse  mare.  —  II,  296.  —  Horace,  Epist.,  I,  12,  16. 

Qiuae  mens  *.  —  III,  114.  —  Horace,  Odes,  IV,  10,  7. 

Quae  molitio.  —  II,  134.  —  Cicéron,  de  Nat.  Deor.,  I,  8. 

Quae  nequeunt.  —  III,  560.  —  Ovide,  Trisl.,  III,  10,  65. 

Quae  nisi.  —  I,  590.  —  Perse,  II,  4. 

Quae  procul.  —  II,  258.  —  Lucrèce,  V,  123. 

Quae  quasi.  —  I,  IIO.  —  Cicéron,  de  Fin.,  I,  18. 

Quae  quia.  —  II,  46-4.  —  Ovide,  Amor.,  III,  4,  4. 

Quae  sunt.  —  II,  136.  —  Cicéron,  de  Nat.  Deor.,  I,  31. 

Quae  te  nunc.  —  III,  458.  —  Ennius,  ap.  Cic,  de  Senecl.,  I. 

Quae  tellus.  —  I,  218.  —  Properce,  IV,  3,  39. 

Quae  venit.  —  III,  650.  —  Ovide,  Heroid.,  V,  8. 

Quae  veritati.  —  I,  278.  —  Sénèque,  Epist.  10. 

Quaenam  ista.  —  III,  250.  —  Claudien,  in  Ëïilrop.,  I,  26. 

Quaeramus  ad.  —  II,  380.  —  Sénèque,  Epist.  123. 

Quaeris  quo  *.  —  I.  10.  —  Sénèque,  Troad.,  \\,  30. 

Quaerite  quos.  —  III,  616.  —  Lucain,  I,  417. 

Quaestuque.  —  II,  101.  —  Virgile,  Enéide,  VII,  501. 

Quai  l'alto.  —  III,  191.  —  Le  Tasse,  Gerus.  liber.,  XII,  63. 

Qualis  gemma.  —  II,  (J44.  —  Virgile,  Enéid.,  X,  131. 

Qualis  ubi  alterno.  —  II,  354.  —  Virgile,  Enéide,  XI,  024. 

Qualis  ubi  Oceani.  —  III,  16.  —  Virgile,  Enéid.,  VIII,  589 


C.84  ESSAIS  DE  MOiNTÂIGNE. 

Quam  docti.  —  II,  238.  —  Source  inconnue. 

Quam  miserum.  —  III,  424.  —  Ovide,  Trisl.,  IV,  1,  9. 

Quam  multi.  —  II,  180.  —  Vmigile,  Enéid.,  Vil,  718. 

Quam  vereri  *.  —  I,  31)8.  —  Cicéron,  Tusc,  V,  2. 

Quamcumque  Deus.  —  (I,  426).  —  Source  inconnue.  — (Ne  se  trouve  que  dans  les 

cdit.  ant.  à  88). 
Quamvis  non  *.  —  III,  304.  —  Martial,  XII,  29,  15. 
Quando  leoni.  —  II,  178.  —  .Juvénal,  XV,  100. 
Quantaque.  —  II,  134.  —  Manimus,  I,  55;  IV,  93. 
Quanto  quisque.  —  III,  478.  —  Horace,  Od.,  III,  16,  21  et  42. 
Quantum  vis.  -  I,  606.  —  Horace,  Epist.,  II,  2,  39. 
Quare  etiam.  —  II,  272.  —  Lucrèce,  II,  1072. 
Quare  vitia.  —  III,  186.  —  Sénèque,  Epist.  53. 
Quasi  non  sit.  —  II,  418.  —  Cicéron,  de  Off.,  I,  4. 
Quasi  quidquam.  —  I,  280.  —  Pline,  Hist.  nat. 
Quasi  vero  forti  *.  —  III,  102.  —  Cicéron,  de  0/f.,  III,  30. 
Quasi  vero  mensuram.  —  II,  330.  —  Pline,  Hist.  nat.,  II,  1. 
Quasi  vero  quidquam.  —  III,  530.  —  Cicéron,  de  Divinat.,  II,  39. 
Que  sçay-je.  —  II,  276.  —  Devise  de  Montaigne. 
Quem  circumcursans.  —  III,  642.  —  Catulle,  Carin.,  LXVI,  133. 
Quem  duplici  *.  —  I,  270.  —  Horace,  Epist.,  I,  17,  25. 
Quem  semper.  —  I,  316.  —  Virgile,  En.,  49. 
Quem  si  puellarum.  —  I,  282.  —  Horace,  Od.,  H,  5,  21. 
Queis  arte.  —  I,  216.  —  Juvénal,  XIV,  34. 
Qui  alicujus.  —  I,  276.  —  Sénèque,  Epist.  59. 
Qui  autem  *.  —  I,  370.  —  Cicéron,  de  Fin.,  V,  5. 
Qui  capite.  —  I,  112.  —  Lucrèce,  IV,  474. 
Qui  certis.  —  II,  236.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  2. 
Qui  corpus.  —  II,  102.  —  S.  Luc,  XII,  4. 
Qui  disciplinam.  —  I,  270.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  4. 
Qui  genus.  —  II,  216.  —  Lucrèce,  III,  1056. 
Qui  nisi  sunt.  —  I,  452.  —  Lucrèce,  IV,  486. 
Qui  quid  sit.  —  III,  12.  —  Horace,  Epist.,  I,  2,  3. 
Qui  requirunt.  —  II,  240.  —  Cicéron,  de  Nal.  Deor.,  I,  5. 
Qui  se  unus.  —  II,  216.  —  Épicure,  .  ajo.  Cic,  de  Fin.,  Il,  3. 
Qui  se  non.  —  III,  368.  —  Q.  Cicéron,  de  Pet.  cous.,  9. 
Qui  sibi  amicus.  —  I,  490.  —  Sénèque,  Epist.  6. 
Qui  ut  rationem.  —  I,  294.  —Cicéron,  Tusc,  I,  21. 
Qui  valut  *.  —  III,  700.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  XIV,  5. 
Qui  vigilans.  —  II,  228.  —  Lucrèce,  III,  1061,  1059. 
Quia  etiam.  —  I,  476.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  V,  14. 
Quia  quidquid.  —  III,  418.  —  Valère  Maxime,  II,  2,  6. 
Quibus  desultorum.  —  I,  530.  —  Tite-Live,  XXIII,  29. 
Quibus  vivere.  —  III,  138.  —  Cicéron,  Tusc,  V,  38. 
Quicumque  Argolica.  —  III,  148.  —  Ovide,  Trist.,  I,  1,  83. 
Quid  brevi.  —  I,  118.  —  Horace,  Od.,  II,  16,  17. 
Quid  causas.  —  III,  222.  —  Virgile,  En.,  VIII,  395. 
Quid  dixi.  —  III,  592.  —  Térence,  Heaut.,  I,  1,  42. 
Quid  enim.  —  II,  368.  —  Juvénal,  Sat.,  X,  4. 
Quid  tas.  —  I,  252.  —  Perse,  III,  59. 
Quid  juvat.  —  II,  258.  —  Perse,  Sat.,  II,  61  et  62. 
Quid  moveant  *.  —  I,  254.  —  Properce,  IV,  1,  89. 
Quid  quisque.  —  I,  114.  —  Horace,  Od.,  II,  13,  13. 
Quid  terras.  —  I,  414.  —  Horace,  Od.,  H,  16,  18. 
Quid  vesani.  —  II,  556.  —  Prudence,  Cont.  Symm.,  II,  672. 
Quidquid  id  est  *.  —  II,  396.  —  Lucrèce,  V,  577. 
Quidquid  principes.  —  I,  498.  —  Quintilien,  Decl.,  3. 
Quin  etiam.  —  I,  120.  —  Silius  Italicus,  XI,  51. 
Quin  ut  aliquid.  —  III.  388.  —  Virgile,  Eglog.,  Il,  71. 


TABLE  DES  CITATIONS.      QUI.  C.8a 

Quippe  etenim.  — II,  3-20.  —  Lucrèce,  IH,  80L 

Quippe  ubi  fas.  —  III,  396.  —  Virgile,  Georg.,  I,  50  L 

Quippe  ubi  se.  —  I,  060.  —  Lucrèce,  V,  1157. 

Quippe  videbis.  —  II,  192.  —  Lucrèce,  IV,  988. 

Quis  accurate.  —  I,  278.  —  Sénèque,  Epist.  75. 

Quis  desiderio.  —  I,  310.  — Horace,  Od.,  L  24,  1. 

Quis  est  enim  iste.  —  I,  SOL  —  Cicf.ron,  Tusc,  IV,  3^1. 

Quis  est  enim  quem.  —  I,  180.  —  Cicéhox,  de  Divin.,  I.  10. 

Quis  est  enim  qui.  —  I,  76.  —  Cicéron,  de  Divin.,  II,  59. 

Quis  hominum.  —  I,  380.  —  Livre  de  la  Sagesse,  IX,  13. 

Quis  mediocris.  —  I,  458.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  17. 

Quis  non  malarum  *.  —  II,  100.  —  Horace,  Ëpod.,  II,  37. 

Quis  puer.  —  I,  550.  —  Horace,  Od.,  II,  11,  18. 

Quis  sub  Arcto.  —  II,  318.  —  Horace,  Od.,  I,  26,  3. 

Quis  tumidum.  —  III,  606.  —  Juvénai,,  XIII,  102. 

Quis  vetat  *.  —  III,  222.  — Ovide,  de  Arte  amandi,  III,  93. 

Quisquam  vix  *.  —  I,  32.  —  Lucrèce,  III,  890  et  895. 

Quisque  suos.  —  III,  460.  —  Virgile,  En.,  IV,  743. 

Quisquis  ubique  *.  —  I,  58.  —  Martial,  VII,  73. 

Quo  diversus.  —  III,  470.  —  Virgile,  En.,  V,  166.  , 

Quo,  haud,  —  I,  532.  —  Tite-Live,  IX,  22. 

Quo  in  plures.  —  III,  298.  —  Cicéron,  de  O/f'-,  H,  15. 

Quo  me  cumque.  —  III,  576.  —  Horace,  Epist.,  l,  1,  15. 

Quo  mihi  fortunas.  —  III,  496.  —  Horace,  Epist.,  I,  5,  12. 

Quo  quis.  —  II,  494.  —  Cicéron,  de  Off.,  II,  !». 

Quo  rapiat.  —  III,  196.  —  Virgile,  Georg.,  III,  137. 

Quo  timoris.  —  III,  290.  —  Tite-Live,  XXII,  5. 

Quod  beatum.  —  II,  280.  —  Cicéron,  deNat.  deor.,  I,  17. 

Quod  crebo.  —  II,  606.  —  Cicéron,  de  Divin.,  II,  31. 

Quod  est  ante  *.  —  II,  296.  —  Cicéron,  de  Divin,  II,  13. 

Quod  finxere.  —  II,  280.  —  Lucain,  I,  486. 

Quod  tutuit*.  —  II,  198.  —Martial,  Epigr.,  XI,  21,  3. 

Quod  licet.  —  II,  436.  —  Ovide,  Amor.,  II,  19,  3. 

Quod  me  jus  *.  —  III,  418.  —  Térence,  Adelph.,  111,5,  44. 

Quod  mutatur.  —  II,  260.  —  Lucrèce,  III,  756. 

Quod  pectus.  —  I,  546.  —  Martial,  Epigr.,  II,  62,  1. 

Quod  petiere.  —  II,  434.  —  Lucrèce,  IV,  1070. 

Quod  petiit.  —  I,  602.  —  Horace,  Epist.,  I,  1,  98. 

Quod  sit.  —  III,  626.  —  Martial,  X,  47,  12. 

Quorum  igitur.  —  II,  134.  —  Cicéron,  deNat.  deor.,  II,  51. 

Quos  tama.  —II,  460.  —  Virgile,  En.,\,  302. 

Quos,  quoniam.  —  II,  290.  —  Ovide,  Métam.,  I,  19L  -^ 

Quos  ultra.  —  I,  612.  —  Horace,  Sat.,  I,  1,  107. 

Quoties  non  modo.  —  I,  448.  —  Cicéron,  Tusc,  I,  37. 

Quoties  nos  descendentis.  —  III,  302.  —  Calpurnius,  Eclog,,  VII,  64. 

Quoties  pacem.  —  III,  424.  —  Lucain,  I,  255  ot  56,  251. 

Quum  de  religione.  —  I,  182.  —  Cicéron,  de  Xat.  deor.,  III,  2. 

Quum  in  se.  —  II,  574.  —  Source  inconnue. 

Quum  veritatem.  —  II,  290.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  IV,  31. 


R 

Rabie  jecur.  —  II,  008.  —  Juvénal,  VI,  647. 

Rapuitque.  —  II,  652.  —  Lucain,  IV,  151. 

Rari  quippe.  —  I,  410.  —  Juvénal,  13,  26. 

Rai^um  est  enim.  —  I,  418.  —  Quintilien,  X,  7. 

Rarus  enim.  —  III,  350.  —  Juvénal,  V^III,  73. 

Ratio  et  prudentia.  —  I,  412.  —  Horace,  Ep.,  I,  2,  25. 


C.86  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

JRe  succumbere.  —  II,  20G.  —  Cicéhon,  Tusc,  II,  13. 
Rébus  in  adversis.  —  I,  034.  —  Martial,  XI,  56,  15. 
Recte  facti.  —  II,  460.  —  Sénèque,  Episl.  81. 
Regibus  hic.  —  I,  482.  —  Horace,  Sat.,  I,  2,  86. 
Rem  gratissimam.  —  II,  322.  —  Sénèque,  Episl.  102. 
Rerum  natura.  —  III,  436.  —  Cicéron,  Acad.,  II.  29. 
Res  quae  in  *.  —  III,  G66.  —  Cicéron,  de  Divin.,  I,  22. 
Res...  quœque.  —  II,  150.  —  Lucrèce,  V,  921. 
Respice  enim.  —  I,  128.  —  Lucrèce,  III,  985. 
Rheni  mihi.  —  II,  650.  —  Lucain,  V,  289. 
Rhedarum  transitu.  —  III.  42.  —  Juvénai.,  III,  23G. 
Ridentem  dicere.  —  III,  250.  —  Horace,  Sat.,  I,  1,24. 
Rides  nos.  —  1,  574.  —  Martial,  VI,  55,  4. 
Rimula  dispeream.  —  III,  270.  —  Th.  de  Bèze,  Juvenilia. 
Risi  successu  *.  —  II,  454.  —  Ovide,  Heroïd.,  I,  18. 
Rupi  jam.  —  I,  414.  —  Perse,  Sat.,  V,  158. 


Saepe  duobus.  —  II,  178.  —  Virgile,  Georg.,  IV,  67. 
Saepe  etiam.  —  III,  224.  —  Catulle,  Carm.,  LXVIII,  141. 
Saspius  olim.  —  II,  268.  —  Lucrèce,  I,  83. 
Sanctius  est.  —  II,  222.  —  Tacite,  de  Mor.  Germ.,  34. 
Sanguineam.  —  II,  304.  —  Virgile,  En.,  IV,  349. 
Sanitatis.  —  111,530.  —  S.  Augustin,  deCiv.  Dei,  VI,  10. 
Sapere  aude.  —  I,  254.  —  Horace,  Epist.,  II,  I,  40. 
Sapiens  divitiarum.  —  III,  698.  —  Sénèque,  Epist.  119. 
Sapiens,  pol!  —  I,  482.  —  Plaute,  Trin.,  II,  2,  84. 
Sapiens,  sibique.  —  I,  482.  —  Horace,  Sat.,  Il,  7,  83. 
Satius  est.  —  II,  246.  —  Sénèque,  Epist.  88. 
Saxis  globosis.  —  I,  536.  —  Tite-Live,  XXXVIIl,  29. 
Scilicet,  avolsus.  —  II,  262.  —  Lucrèce,  III,  562. 
Scilicet  et  fluvius.  —  I,  290.  —  Lucrèce,  VI,  674. 
Scilicet  et  grandes.  —  I,  484.  —  Lucrèce,  IV,  1123. 
Scilicet  et  morbis.  —  II,  202.  —  Juvénal,  XIV,  156. 
Scilicet  ultima  *.  —  I,  102.  —  Ovide,  Met.,  III,  135. 
Secreti  celant.  —  II,  258.  —  Virgile,  En.,  VI,  443. 
Sed  nec  vocibus.  —  II,  566.  —  Martial,  XII,  98,  8. 
Sed  neque  quam  *.  —  III,  622.  —  Virgile.  Georg.,  II,  103. 
Sed  videat:—  III,  98.  —  Cicéron,  de  O/f'.,  III,  29. 
Segnius  homines.  —  II,  212.  —  Tite-Live,  XXX,  21. 
Semianimesque.  —  I,  674.  —  Virgile,  En.,  X,  396. 
Semper  Ajax.  —  II,  350.  —  Cicéron,  Tusc,  IV,  23. 
Semper  enim.  —  1,  477.  —  Tite-Live,  XXVII,  45. 
Sensus!  o  superi.  —  III,  392.  —  Source  inconnue. 
Sentit  enim.  —  II,  146.  —  Lucrèce,  V,  921. 
Seorsum  cuique.  —  II,  392.  —  Lucrèce,  IV,  490. 
Serpente  ciconia.  —  II,  154.  —  Juvénal,  XIV,  74,  81. 
Sers  top  mary.  —  III,  202.  —  Dicton  du  xv°  siècle. 
Servare  modum  *.  —  III.  546.  —  Lucain,  II,  381. 
Servitus  obedientia.  —  III,  392.  —  Cicéron,  Parad.,  V,  1. 
Seu  Libra.  —  II,  96.  —  Horace,  Od.,  II,  17,  17. 
Seu  plures.  —  III,  544.  —  Virgile,  Georg.,  I,  89. 
Sexme  vix.  —  III.  642.  —  Ovide,  Amor.,  III,  7.  26. 
Si  blando.  —  III.  266.  —  Virgile,  Georg.,  III,  127. 
Si  consilium.  —  II,  370.  --  Juvénal,  Sat.,X,  346. 
Si  contigerit.  —  III,  456.  —  Cicéron,  de  O/f.,  I,  43. 
Si  cum  bac.  —  III,  456.  —  Sénèque,  Epist.  6. 


TABLE  DES  CITATIONS.  SIC.  G. 87 

Sicupidus.  —I,  212.  —  Juvéxai,,  VIII,  14. 

Si  forte.  —  II,  238.  —  Cickron,  trad.  du  Timée,  3. 

Sifractus.  —  I,  634.  —  Horace,  Od.,III,3,  7. 

Sifurtiva.  —  III,  272.  —  Catulle,  Carm.,  LXVIII,  14.j. 

Si  gravis.  —  1,  454.  —  Cicéron,  de  An.,  II,  29. 

Si  in  corpus.  —  II,  314.  —  Lucrèce,  III,  671. 

Si  interminatam  *.  —  III,  304.  —  Cicéron,  de  Xal.  deor.,  I,  20. 

Si  Vespine.  —  I,  598.  —  Proverbe,  du  Dauphino. 

Si  melius.  —  II,  128.  —  Horace,  Epist.,  I,  5,  0. 

Si  modica.  —  III,  668.  —  Horace,  Epist.,  I,  5,  2. 

Si  munitae  *.  —  I,  624.  —  Horace,  Od.,  III,  28. 

Si  nocturnus.  —  I,  580.  —  Juvénal,  VIII,  144. 

Si  non  longa.  —  111,268.  —  Veterum  poetarum  catalecta,  Priapus. 

Si  non  prima.  —  III,  170.  —  Lucrèce,  IV,  1067. 

Si  nunc  primum.  —  I,  290.  —  Lucrèce,  II,  1021. 

Sinunquam  *.  —  II,  432.  —  Ovide,  Amor.,  II,  19,27. 

Si  qua  volet.  —  II,  434.  —  Ovide,  Amor.,  II,  19,  33. 

Si  quid  enim.  —  II,  474.  — Auteur  inconnu. 

Si  quid  Socrates.  —  I,  244.  —  Cicéron,  deOff.,  I,  4L 

Si  succederit  *.  —  I,  370.  —  Sénèque,  de  Prov.,  2. 

Si  ventri.  —  I.  488.  —  Horace,  Epist.,  I,  12,  5. 

Si  vitiis.  —  II,  96.  —  Horace,  Sat.,  I,  6,  65. 

Sibi  arma.  —  III,  182.  —  Cicéron,  de  Senect.,  c.  HJ. 

Sic  abiit.  —  II,  90.  — Cicéron,  Tusc.  Qusest.,l,  30. 

Sic  est.  —  III,  460.  —  Cicéron,  de  Off.,  I,  31. 

Sic  fatur.  —  I,  624.  —  Virgile,  En.,  VI,  1. 

Sic  rerum.  —  III,  582.  —  Lucrèce,  II,  74. 

Sic  tauriformis.  —  III,  654.  —  Horace,  Od.,  IV,  14,  25. 

Sic  ubi.  —  III,  120.  —  LucAiN,  IV,  237. 

Sic  voluenda.  —  II,  356.  —  Lucrèce,  V,  1275. 

Sicut  aquœ.  —  I,  5S.  —  Virgile,  En.,  VIII,  22. 

Sigillatim.  —  II,  362.  — Apulée,  de  Deo  Socratis. 

Simia  quam.  —  II,  196.  —  Ennius,  ap.  Cic,  de  Nnt.  deor.,  I,  ;i5. 

Simplex  illa.  —  III,  554.  —  Sénèque,  Epist.  95. 

Simpliciora.  —  III,  410.  —  Quintilien,  Inst.  Orat.,  XI,  1. 

Simul  œvo.  —  II,  320.  —  Lucrèce,  III,  459. 

Sincerum  est.  —  III,  684.  —  Horace,  Epist.,  I,  2,  51. 

Singula  de.  —  II,  482.  —  Horace,  Epist.,  II,  2,  55. 

Sinistras  sagis.  —  I,  546.  —  Cé.sar.,  de  Bello  civ.,  I,  75. 

Siquidem  Tyrio.  —  II,  164.  —  Juvénal,  XII,  107. 

Sit  Cato.  —  I,  404.  —  Martial,  VI,  32. 

Sit  mese.  —  II,  388.  —  Horace,  Od., II,  6, 6. 

Sit  mihi.  —  III.  562.  —  Horace,  Epist.,  I,  18,  107. 

Sit  tandem.  —  III,  206.  —  Martial,  XII,  90,10. 

Smyrna  *.  —  III,  14.  —  Aulu-Gelle,  III,  II. 

Sola  sapientia.  —  III,  622.  —  Cicéron,  de  Ein.  bon.  et  mal.,  III,  7. 

Solum  certum  *.  —  II,  430.  —  Pline,  Nat.  HisL,  II,  7. 

Solve  senescentem.  —  II,  30.  —  Horace,  Epist.,  I,  1,  8. 

Somnia  sunt.  —  II,  322.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  38. 

Somnia  terrores.  —  I,  290.  —  Hor.,  Ep.,  II,  2,  208. 

Sors  cecidit.  —  II,  506.  —  Ad.  Apost.,  I,  26. 

Speciosus  forma.  —  II,  482.  —  Psaume  XVL,  3. 

Speculataque.  —  II,  134.  —  Manilius,  I,  GO. 

Spempretio.  —  II,  488.  —  Térence,  Adelph.,  II,  3,  11. 

Sperat  et.  —  I,  036.  —  Pentadius,  de  Spe. 

Spero  equidem.  —  III,  1()8.  —  Virgile,  Enéide.  IV,  382,  387. 

Spondam  régis.  —  I,  550.  — Suétone,  César.,  29. 

Spumantemque*.  —  I,  626.  —  Virgile,  En.,  IV,.  158. 

Stercus  cui  que.  —  III,  346.  —  Proverbe  latin. 


C.88  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Sterilisque.  —  I,  351.  —  IIouace,  Art  poét.,  05. 

Stetit  agere.  —  I,  1!»8.  —  Lucain,  V,  316. 

Stillicidi  casus.  —  III,  386.  —  Lucrèce,  I,  314. 

Stultequid.  —  III.  648.  —Ovide,  TrisL,  III,  8,  11. 

Stulti  vita.  —  III,  694.  —  Sénèque,  Epist.  15. 

Stultitise  proprium.  —  III,  700.  —  Séxèqle,  Epist.  74. 

Suave  mari.  —  III,  80.  —  Lucrèce,  II,  1. 

Suavis  laborum.  —  II,  216.  —  Euripide,  ap.  Cic,  de  Fin.,  II,  Si. 

Sub  aliéna  *.  —  III,  342.  —  Séxèque,  Episl.  33. 

Sudores  itaque.  —  I,  624.  —  Lucrèce,  III,  155. 

Sutticit  ad  id.  —  III,  496.  —  Sénèque,  Epist.  90. 

Suftundere  malis  *  —  I,  90.  —  Tertullikn,  Apologétique. 

Sulmone  Creator.  —  II,  264.  —  Virgile,  En.,  X,  517. 

Summum  nec.  —  III,  26.  —  Martial,  X,  47. 

Sunt  qui  *.  —  I,  398.  —D'après  Cicéron,  Tusc,  II,  I. 

Sursum  corda.  —  II,  72.  —  Tiré  de  l'ordinaire  de  la  messe. 


Tacito  mala.  —  I,  592.  —  Lucain,  V,  104. 

Tacitum  sylvas.  —  I,  426.  —  Horace,  Ep.,  I,  4,  4. 

Tala  facit.  —  III,  10.  —  Properce,  II,  34,  79. 

Taies  sunt  *.   —  I,  604;  II,  346.  —Traduits  de  VOdyssée,  XVIII,  135. 

Tam  blanda.  —  II,  286.  —  Cicéron,  deNat.  deor.,  I,  27. 

Tarn  multse.  —  III,  426.  —  Virgile,  Georg.,  I,  506. 

Tandem  efticaci.  —  III,  628.  —  Horace,  Epod.,  XVII,  1. 

Tanquam  thura.  —  III,  260.  —  Martial,  XI,  103,  12,  et  59,  8. 

Tanta  vis.  —  III,  476.  —  Cicéron,  de  Fin.,  V,  I  et  2. 

Tantaque  in.  —  II,  406.  —  Lucrèce,  IV,  638. 

Tanti  mihi.  —  II,  484.  —  Juvénal,  Sat.,  III,  54. 

Tantum  cura.  —  II.  562.  —  Martial,  VII,  39,  8. 

Tantum  doluerunt  *.  —  I,  456.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  I,  10. 

Tantum  ex  publicis.  —  III,  564.  —  Tite-Live,  XXX,  44. 

Tantum  religio.  —  II,  266.  —  Lucrèce,  I,  102. 

Tantum  se  fortunse.  —  III,  500.  —  Quinte-Curce,  III,  2,  18. 

Tantus  est.  —  II.  268.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  VI,  10. 

TauT6(xaTov  *.  —  I,  386.  —  Ménandre. 

T^  yE<.ç.\  Seï  *.  —  III,  296.  —  Plutarque,  Siles  Athéniens  ont  été  plus  excellents  en 

armes  qu'en  lettres. 
Te  tenet.  —  III,  260.  —  Tibulle,  I,  6,  35. 
Tegmina.  —  II,  54.  —  Virgile,  E7i.,  VII,  742. 
Temo  aureus  *.  —  I,  292.  —  Ovide,  Mètam.,  II,  107. 
Tempora  certa.  —  I,  276.  —  Hor.,  Sat.,  I.  4,  58. 
Tenez  chaults.  —  II,  172.  —  Aphorisme  populaire. 
Tentatum.  —  II,  54.  —  Ovide,  Métam.,  X,  289. 
Terramque.  —  II,  270.  —  Lucrèce,  II,  1085. 
Terrigenam'^.  —  III,  44.  —  Cicéron,  de  Divin.,  II,  64. 
Tetrica  sunt.  —  III,  186.  —  Sidoine  Apollinaire,  Epist..  I,  9. 
T{  n),£tào£(7(7t.  —  I,  254.  —  Anacréon,  Od.,  XXVH,  10. 
Tibi  quod  —  II,  434.  —  Térence,  Phorm.,  I,  3,  9. 
Tibi  si  datur.  —  III,  260.  —  Catulle,  LXVIIl,  147. 
Tt;  8'oîÔev*.  —  II,  274.  —  Platon,  Gorgias. 
Tôt  circa.  —  II,  420.  —  Sénèque,  Suasor,  I,  4. 
Tôt  Galatœ.  —  II,  560.  —  Claudien,  in  Eutr.,  I,  203. 
Tôt  per  impotentia.  —  I,  466.  —  Catulle,  IV,  18. 
Tôt  qui.  —  III,  23-1.  —  Lucrèce,  III,  1039,  I04I. 
Tota  philosophorum.  —  III,  57*4.  —  Cicéron,  Tusc.,  I,  30. 
Totus  et  argento.  —  I,  488.  -'  Tibulle,  I,  2,  70. 


TABLE  DES  CITATIONS.  TOT.  C.89 

Totus  bic  locus.  —  I,  38.  —  Cicéron,  Tusc,  I,  45.    '  « 

Transcurramus  —  I,  108.  —  Sénèque,  Episl.  117. 

Transvolat.  —  II,  434.  —  Horace,  Sat.,  I,  2,  108. 

Très  mihi.  —  II,  370.  —  Horace,  E])ist.,  H,  2,  Gl. 

Tristemque.  —  III,  186.  —Auteur  inconnu. 

Tu  dea.  —  III,  192.  —  Lucrèce,  1,  22. 

Tu  sapientium.  —  I,  614.  —  Horace,  Od.,  111,  21,  14. 

Tu  secanda.  —  II.  588.  -  Horace,  Od.,  II,  18,  17. 

Tum  pavor.  —  I,  100.  —  Enmus,  ap.  Cic,  Tusc,  IV,  8. 

Tum  porro.  —  II,  144.  —  Lucrèce,  V,  223. 

Tum  quoque.  —  III.  424.  —  Ovide,  Trist.,  111,  10,  67. 

Tum  vero  in.  —  II,  386.  —  Virgile,  En.,  V,  720. 

Tum  vertice.  —  I,  394.  —  Silius  Italicus,  1,  250. 

Tun\  vetule.  —  I,  428.  —  Perse,  SaL,  1,  22. 

Tune  animis.  —  III,  594.  —  Virgile,  En.,\l,  261. 

Tuo  tiJbi.  —  III,  114.  —Cicéron,  Tusc.,l,2oet  deNat.  deorum,lU,  35. 

Turpe  est.  —  II,  1!X).  —  Properce,  III,  9,  5. 

Turpis  Romano.  —  II,  192.  —  Properce,  H,  17,  26. 

Tuta  et  parvula.  —  I,  420.  —  Horace,  Ep.,  1,  15,  42. 

Tutumque.  —  I,  406.  —  Lucain,  IX,  1037. 


U 

Cherdier  par  V  les  citations  qui  ne  se  trouveraient  pas  ici. 

Uberibus.  —  III,  158.  —  Juvésal,  Sat.,  VI,  272. 

Ubi  ii^atos*.  —  II,  268.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  VI,  10. 

Ubi  jam.  —  I,  598.  —  Lucrèce,  111,  452. 

Ubi  non.  —  III,  552.  —  Sénèque,  Epist.  75. 

Ubi  velis.  ~  III,  236.  —  Térence,  Eun.,  IV,  8,  43. 

Un  vit.  —  III,  270.  —  Saint-Gelais,  Œuv.  poét. 

Ubi  mortifero.  —  II,  594.  —  Properce,  111,  13.  17. 

Ubique  mors.  —  I,  630.  —  Sénèque,  Théb.,  I,  1,  151. 

Udum  et  molle.  —  I,  262.  —  Perse,  III,  23. 

Unde  rigent.  —  II,  482.  —  Martial,  II,  36,  5. 

Undique  totis.  —  111,560.  —  Virgile,  Eglog.,  1,  U. 

Unicuique  ista.  —  II,  248.  —  Sénèque,  Suasor,4. 

Unusquisque  *.  —  I,  426.  —  Properce,  II,  25,  28. 

Ure  meum.  —  II,  154.  —  Tirulle,  I,  9,  21. 

Usque  adeo  mortis.  —  I,  634.  —  Lucrèce,  111,  79. 

Usque  adeo  res.  —  I,  104.  —  Lucrèce,  V,  1231. 

Usque  adeone.  —  I,  422.  —  Perse,  Sat.,  1,  23. 

Usuram  nobis.  —  I,  324.  —  Cicéron,  Tusc,  I,  31. 

Usus  efticacissimus.  —  I,  156.  —  Pline,  Nat.  hist.,  XXVI,  2. 

Ut  bona  saepe.  —  II,  306.  —  Lucrèce,  III,  103. 

Ut  cibus.  —  II.  410.  —  Lucrèce,  111,  103. 

Ut  despici.  —  II,  402.  —  Tite-Live,  XLIV,  6. 

Ut  enim.  —  II,  464.  —  Cicéron,  de  Fin.,  Il,  15. 

Ut  externus  *.  —  I,  61.  —  Pline,  Nat.  Hist.,  VU,  1. 

Ut  fuerit.  —  I,  216.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  4. 

Ut  haberent*.  —  II,  562.  —  Tacite,  Af/ricola,  14. 

Ut  homo.  —  II,  101.  —  Sénèque,  Epist.  90. 

Ut  Hymettia.  —  II.  338.  —  Ovide,  Métam.,  X,  284. 

Ut  magis.  — 111,  598.  —  Tite-Live,  XXIX,  21. 

Ut  maris.  —  II,  352.  —  Cicéron,  7\isc.,\,  6. 

Ut  me  conspexit.  —  I,  26.  —  Virgile,  En.,  III,  306. 

Ut  missum.  —  III,  286.  —  Catulle,  Carm.,  LXV,  19. 

Ut  necesse  est.  —  I,  288,  —  Cic,  Acad.,  II,  12. 


C.90  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Ut  ohm.  —  III,  6<)0.  —  Tacite,  Ann.,  III,  25. 

Ut  omnium.  —  III,  550.  —  Sénkque,  Epist.  lOG. 

Ut  palam.  —  III.  176.  —  Pi.ine,  Xal.  Hisl.,  III,  5. 

Ut  potero.  —  II.  238.  —  Cickron,  Tvsc,  1,9. 

Ut  quasi.  —  I,  134.  —  Lucrèce,  IV,  1029. 

Ut  quisque.  —  III,  356.  —  Plaute,  Pseud.,  II,  3,  13. 

Ut  quum  facta.  —  II,  604.  —  Cicéron,  de  Divin.,  II,  31. 

Ut  quum,  in  *.  —  II,  234.  —  Cicéros,  Acad.,  II,  33. 

Ut  satius  multo.  —  I,  488.  —  Lucrèce,  V,  1126. 

Ut  si  quis  *.  —  III,  44.  —  Cicéron,  de  Divin.,  II,  64. 

Ut  stultitia.  —  (I,  28).  —  Auteur  inconnu.  —(Cotte  citation  qui  existe  dans  l'ox. 

de  Bord,  est  remplacée  par  sa  traduction  dans  l'éd.  de  1595). 
Ut  tandem.  —  I,  676.  —  Ovide,  TrisL,  3,  14. 
Ut  tragici.  —  II,  462.  —  Cicéron,  de  Nat.  deor.,  I,  20. 
Ut  vinum.  —  II,  200.  —  Cicéron,  de  Nat.  deor.,  III,  27. 
Utatur  motu*.  —  III,  82;  III,  502.  —Cicéron,  T'use,  IV,  25. 
Uterque  bonus.—  111,448.—  Virgile,  £"«.,  XI,  658.  (V.  la  citation   Pacisque). 
Uxor  si.  —  III,  436.  —  Térence,  I,  1,  7. 


Chercher  par  U  les  citations  qui  ne  se  (trouveraient  pas  ici. 

Vah!  quemquamne.  —  I,  418.  — Térence,  Ad.,  I,  1,  13. 

Variseque.  —  II,  148.  —  Lucrèce,  V,  1077,  1090,  1082,  1083. 

Variam  semper.  —  I,  58.  —  Lucain,  IV,  704. 

Vascones  ut.  —  I,  366.  —  Juvénal,  Sal.,  XV,  93. 

Vellere  queis.  —  I,  460.  —  Tibulle,  I,  8,  45. 

Velut  asgri.  —  I,  58.  —  Horace,  Arlpoél.,  7. 

Valut  minuta.  —  II,  348.  —  Catulle,  Epigr.,  XXV,  12. 

Velut  rupes.  —  III.  508.  —  Virgile,  E71.,  X,  693. 

Venantumque.  —  II,  192.  —  Lucrèce,  IV,  992. 

Venit  et  epoto.  —  I,  540.  —  Martial,  Spect.  Lib.,  épig.  3,  v.  4. 

Ventus  ut.  —  I,  40.  —  Lucain,  III,  362. 

Venus  huic.  —  III,  204.  —  Ovide,  Métam.,  III,  323. 

Vera  et  sapiens.  —  II,  448.  —  Cicéron,  de  OJf.,  I,  19. 

Verbaque  previsam  *.  —  I,  274.  —  IIor.,  Art  poét.,  311. 

Verbis  indisciplinatis  *.  —  I,  588.  —  S.  Augustin,  de  Civ.  Dei,  X,  29. 

Verbis,  quae.  —  I,  606.  —  Horace,  Epist.,  Il,  2,  36. 

Veri  juris.  —  III,  90.  —  Cicéron,  de  Off-,  III,  17. 

Versamur  ibidem.  —  I,  128.  —  Lucrèce,  III,  1093. 

Vertuntur  species.  —  III,  3o6.  —  Virgile,  Georf/.,  I,  420. 

Verum  animo.  —  III,  418.  —  Lucrèce,  1,  403. 

Verum  nil.  —  II,  472.  —  Martial,  XII,  63,  13. 

Verum  ut.  —  III,  306.  —  Lucrèce,  V,  331. 

Vi  morbi.  —  II,  672.  —  Lucrèce,  III,  485. 

Via  qua  munita.  —  II,  390.  —  Lucrèce,  V,  103. 

Victor,  Marce.  —  II,  546.  —  Tite-Live,  II,  45. 

Victoria  nulla.  —  I,  370.  —  Claudien,  de  sexto  Consul.  Hon.,  218. 

Victrix  causa.  —  I,  404.  —  Lucain,  I,  128. 

Videantur  sane.  —  111,538.  —  Cicéron,  Academ.,  H,  27. 

Videas  desertaque.  —  III,  568.  —  Virgile,  Georg.,  III,  476. 

Videndum  est.  —  III,  302.  —Cicéron,  de  O/f.,  1,41. 

Vidi  ego  nuper.  —  III,  262.  —  Ovide,  Amor.,  III,  4,  13. 

Vidimus  et.  —  II,  422.  —  Lucain,  IV,  178. 

Vince,  Hannibal.  —  I,  518.  —  Pétrarque,  Sonnets,  III. 

Vincitur  haud.  —  1,  520.  —  Lucain,  IV,  275. 

Vires  ultra.  —  III,  430.   -  Virgile,  Enéid.,  VI,  114. 


TABLE  DES  CITATIONS.  VIR.  C.91 

Virga  tua.  —  II,  370.  —  Psaume  XXII,  4. 

Viri  a  diis.  —  (I,  362).  —  Sénè^ue,  Ep.  90.  (Cette  citation  ne  se  trouve  que  dans 

l'ex.  de  Bord.). 
Virtus  repulsœ.  —  II,  450.  —  Horace,  Od.,  III,  2,  17. 
Virtutem  verba.  —  I.  398.  —  Horace,  Episl.,  I,  6,  31. 
Vis...  animai.  —  II,  318.  —  Lucrèce,  III,  498. 
Vis  morbi.  —  II,  318.  —  Lucrèce,  III,  491. 
Visere  gestiens.  —  III,  456.  —  Horace,  Od.,  III,  3. 
Vitam  adolescentibus.  —  III,  674.  —  Cicéron,  de  Scnecl.,  19. 
Vitam  régit.  —  II,  452.  —  Cicéron,  Tmc,  V,  9. 
Vitamque  sub.  —  I,  242.  —  Horace,  Odes,  III,  2,  5. 
Vitasque  in.  —  I,  600.  —  ViRdii.E,  Geurg.,  IV,  238. 
Vitia  otij.  —  III,  136.  —  Sénèque,  Epis  t.  36. 
Vivere,  mi  Lucili.  —  III,  664.  —  Sénèque,  Epist.  9(i. 
Vivere  si  recte.  —  II,  218.  —  Horace,  Epist.,  II,  2,  21.3. 
Vivit,  et  est.  —  I,  672.  —  Ovide,  Trist.,  I,  3,  12. 
Vixere  fortes  *.  —  III,  304.  —  Horace,  Carm.,  IV,  9,  25. 
Vixi  et  quem.  —  II,  588.  —  Virgile,  En.,  IV,  653. 
Volucrem  sic  *.  —  I,  480.  —  Juvénal,  VIII,  57. 
Voluptatem  contemnunt.  —  (I,  608).  —  Semble  tirée  de  Sénèque.  (Cette  citation 

no  se  trouve  que  dans  l'e.x.  de  Bord.). 
Volutantibus  res.  —  II,  540.  —  Tite-Live,  XXXII,  20. 
Vos,  o  patritius.  —  I,  214.  —  Perse,  1,  61. 
Vosne  velit.  —  I,  46.  —  Ennius,  ap.  Cic,  de  0/f'.,  If  12. 
Vota  puer.  —  I,  134.  —  Ovide,  Met.,  IX,  793. 

Z 

Zon  sus  l'œil.  —  II,  524.  —  Ci..  Marot,  Ep.  de  Fripelippes  à  Sagon. 


INDEX  ALPHABETIQUE 

DES  AUTEURS  D'OU  SONT  TIRÉES  LES  CITATIONS  INSÉRÉES 
DANS  LES  ESSAIS. 


Actes  des  Apôtres,  I.  —  Livre  du  Nouveau  Testament,  rédigé  en  grec  par  S.  Luc, 
vers  l'an  63. 

Amvot,  6.  —  Évêque  d'Auxerre,  traducteur  de  Plutarque  (1513  à  1593). 

Anacréon,  1.  —  Célèbre  poète  lyrique  grec,  dont  les  poésies  exaltent  surtout  le 
plaisir  (560  à  478  av.). 

Apulée,  1.  —  Écrivain  latin  du  n»  s.,  auteur  de  VAne  d'6r. 

Arioste  (L'),  5.  —  Célèbre  poète  italien,  auteur  du  Roland  furicu.ic  (1574  à  1533). 

Attius,  2.  —  Ou  Accius;  poète  tragique  latin  (170  à  94  av.). 

Aijlu-Gelle,  3.  —  Écrivain  latin  du  ii"  s.,  auteur  des  Nuits  attiques. 

AusoNE,  1.  —  Poète  latin,  né  à  Bordeaux  (3(J9  à  394). 

Bellay  (Du),  1.  —  Fut  un  de  ceux  qui  s'efforcèrent  de  régénérer  la  poésie  fran- 
çaise; auteur  également  de  quelques  poésies  latines  (1524  à  1.560). 

Bèze  (Théodore  de),  1.  —  Un  des  principaux  chefs  de  la  Réforme  en  France;  au- 
teur dans  sa  jeunesse  de  poésies  élégantes,  mais  licencieuses  (I5I9  à  1605). 

Boétie  (La),  4.  —  Écrivain  français,  ami  de  Montaigne,  auteur  du  Discours  sur  la 
Servitude  volontaire  et  de  quelques  poésies  latines  (1530  à  1563). 


C.92  ESSAIS  DES  MONTAIGNE. 

Cai.purmnus,  3.  —  Poète  latin  du  ni'  s.,  on  a  de  lui  quelques  églogues. 

Catalecta  (Veterum  poetarum),  2.  —  Recueil  de  fragments  de  poètes  latins  an- 
ciens, édité  en  Hollande  au  .wi'  siècle. 

Catulle,  28.  —  Poète  latin,  né  vers  l'an  86  av.,  ses  poésies  sont  élégantes  et 
naïves. 

Cecilius  Statius,  1.  —  Poète  comique  latin,  dont  il  ne  reste  que  des  fragments, 
m.  en  174  av. 

César,  3.  —  Célèbre  général  romain,  l'un  des  plus  grands  capitaines  de  l'anti- 
quité; écrivain  militaire  distingué,  auteur  des  Commentaires  (101  à  44  av.). 

CicÉRox,  180.  —  Le  plus  célèbre  des  orateurs  romains;  le  premier  des  prosateurs 
latins,  auteur  de  plaidoyers  et  de  traités  philosophiques  remarquables  (100  à 
43  av.). 

CicÉRON  (QuiNTus),  3.  —  Frère  de  Cicéron,  i"  s.  av. 

Claudien,  12.  —  Poète  latin  du  iv  s. 

Cornélius  Nepos,  1.  —  Auteur  latin  du  i"  s.;  auteur  de  biographies. 

Dante  Alighieri,  2.  —  Célèbre  poète  italien,  auteur  de  la  Divine  Comédie;  est  re- 
gardé comme  le  père  de  la  poésie  italienne  (1265  à  1321). 

Ennils,  9.  —  Un  des  plus  anciens  poètes  latins,  grec  de  naissance  (239  à  169  av.). 

Épicharme,  1.  —  Poète  et  philosophe  pythagoricien  (540  à  450  av.). 

Euripide,  2.  —  Illustre  poète  tragique  grec,  élégant  et  pathétique  (480  à  406  av.). 

Fabricius,  1.  —  Bibliographe  allemand,  auteur  d'une  Bibliothèque  latine  et  d'une 
Bibliothèque  grecque  qui  sont  des  monuments  d'érudition  (1668  à  1736). 

Florus,  1.  —  Historien  latin  (ii'  s.),  auteur  d'un  Abrégé  d'histoire  romaine. 

Genèse,  1.  —  Le  premier  livre  de  la  Bible,  attribué  à  Moïse,  récit  de  la  création 
du  monde  et  histoire  primitive  jusqu'à  la  mort  de  Joseph. 

Grotius  (Hugues),  I.  —  Publiciste  hollandais,  auteur  du  célèbre  ouvrage,  Du 
droit  de  guerre  et  de  paix  (1583  à  1645). 

Hérodote,  2.  —  Célèbre  historien  grec,  dont  les  écrits  sont  un  des  monuments 
les  plus  précieux  de  l'antiquité  (484  à  406  av.). 

Homère,  3.  —  Poète  grec,  regardé  comme  le  plus  grand  de  tous  les  poètes,  auteur 
de  ['Iliade  et  de  VOdyssée  (x°  s.  av.). 

Horace,  150.  —  Célèbre  poète  latin  (64  av.  à  4)  ;  ses  poésies  :  odes,  épUres,  satires 
sont  des  modèles  de  déUcatesse  et  de  bon  goût. 

IsocRATE,  1.  —  Célèbre  orateur  athénien;  se  recommande  par  l'élégance  et  l'har- 
monie (436  à  338  av.). 

JuvÉNAL,  50.  —  Célèbre  poétique  satirique  latin;  se  distingue  par  son  énergie  (42 
à  120). 

Lactance,  1.  —  Écrivain  latin,  surnommé  le  «  Cicéron  chrétien  »  en  raison  de  l'é- 
légance de  son  style  (250  à  325). 

LucAiN,  39.  —  Poète  latin,  auteur  de  la  Pharsale  (39  à  65). 

LuciLius,  1.  —  Poète  satirique  latin  (180  à  103  av.). 

Lucrèce,  148.  —  Poète  latin,  auteur  du  poème  De  la  nature  des  choses  où  il  fait 
preuve  d'un  souffle  puissant  et  atteint  parfois  au  subhme  (95  à  51  av.). 

Macrobe,  1.  —  Écrivain  latin  du  v  s.,  auteur  des  Saturnales. 

Manilius,  12.  —  Poète  latin  de  la  fin  du  règne  d'Auguste;  on  ne  sait  rien  autre  de 
lui. 

Marot  (Clément),  1.  —  Poète  français;  son  style,  empreint  d'une  grâce  naïve,  a 
fait  école  (1495  à  1544). 

Martial,  42.  —  Poète  latin,  auteur  d'Épigrammes;  est  élégant,  spirituel,  mais  li- 
cencieux (43  à  104). 

Mécène,  1.  —  Favori  d'Auguste,  protecteur  des  lettres,  des  sciences  et  des  arts;  a 
composé  lui-même  quelques  poésies  dont  il  ne  reste  que  des  fragments  (m.  vers 
l'an  8  av.). 

MÉNANDRE,  1.  —  Poète  comique  grec  (342  à  290). 

NoNius,  1.  —  Grammairien  latin  (ni'  s.);  a  laissé  un  ti-aité  précieux  par  quelques 
fragments  d'auteurs  anciens  qui  s'y  trouvent  conservés. 

Ovide,  71.  —  Poète  latin;  auteur  des  Métamorphoses  (43  av.  à  17). 

Pacuvius,  2.  —  Un  des  plus  anciens  poètes  dramatiques  de  Rome  (220  à  \20  av.). 

Pausanias,  1.  —  Géographe  et  historien  grec  du  ii'  s. 


INDEX  DES  AUTEURS  D'OU  SONT  TIRÉES  LES  CITATIONS.        C.93 

Pentadius,  1.  —  Épigrammatiste  latin  du  commencement  du  vi»  s. 

Pekse,  22.  —  Poète  satirique  latin  (34  à  62);  de  principes  rigides,  style  éner- 
gique et  concis. 

PÉTRARQUE,  5.  —  L'un  dcs  créateurs  de  la  langue  italienne,  célèbre  par  les  Sonnets 
et  les  Chants  qu'il  écrivit  pour  Laure  de  Noves  (1304  à  1374). 

PÉTRONE,  3.  —  Écrivain  latin,  auteur  du  Salyricon;  m.  en  66. 

PiBRACQ  (de),  1.  —  Magistrat  français,  auteur  de  Quatrains  moraux  (1529  à  1584). 

Platon,  2.  —Célèbre  philosophe  grec,  fondateur  de  l'Académie;  consigna  dans  de 
nombreux  écrits,  la  plupart  sous  forme  de  dialogues,  sa  doctrine  et  celle  de  So- 
crate  son  maître  (430  à  317  av.). 

Pi.aute,  5.  —  Poète  comique  latin  ;  remarquable  par  sa  verve  et  son  originalité 
(227  à  184  av.). 

Pi.iNE  1,'Ancien,  8.  —  Célèbre  naturaliste  romain;  auteur  d'une  Histoire  naturelle, 
.sorte  d'encyclopédie  encore  estimée  de  nos  jours;  m.  en  79. 

Pi.iNE  le  Jeune,  1.  —  Littérateur  romain,  auteur  de  Lettres  célèbres  (62  à  115). 

PoRCius  Latro,  1.  —  Rhéteur,  ami  de  Sénèque  (i"  s.). 

Properce,  21.  —  Poète  latin,  auteur  d'Élégies  (51  à  14  av.). 

Proverbes  et  sentences,  13. 

Prudence,  4.  —  Poète  latin  chrétien  du  iv  s.,  d'origine  espagnole. 

Psalmiste,  5.  —  Le  roi  David  (x'  s.  av.),  auteur  du  livre  des  Psaumes,  cantiques  sa- 
crés de  l'Ancien  Testament,  considérés  comme  le  chef-d'œuvre  de  la  poésie  lyrique. 

Pseudo-Gallus,  7.  —  Pseudonyme  attribué  à  Maximianus,  poète  latin  du  v  ou 
vi"  s. 

PuBLius  Syrus,  3.  —  Poète  latin,  auteur  de  sentences  et  de  maximes  (i"  s.). 

Quixte-Curce,  7.  —  Historien  latin,  auteur  d'une  Histoire  d'Alexandre  le  Grand 
(I"  s.). 

QuiNTiLiEN,  12.  —  Célèbre  rhéteur  latin  (42  à  120). 

Rabelais,  1.  —  Écrivain  français,  auteur  de  Gargantua,  ouvrage  satirique  (1493 
à  1553). 

Ronsard,  1.  —  Célèbre  poète  français,  chef  d'une  école  littéraire  qui  infusa  à  la 
poésie  française  plus  de  verve,  d'harmonie  et  de  rythme  (1524  à  1585). 

Ruth.ius,  1.  —  Né  en  Gaule,  a  écrit  en  vers  elégiaques  un  voyage  dans  cette  con- 
trée (V  s;). 

Sagesse  (Livre  de  la),  3.  — L'un  des  livres  sapientiaux  de  la  Bible,  attribué  à 
Saloinon  (x"  s.  av.). 

S.  AuciusTiN,  17.  —  Un  des  Pères  de  l'Église  latine  (354  à  430)  ;  a  laissé  de  nombreux 
ouvrages  dont  La  Cité  de  Dieu  et  les  Confessions. 

S.-Gelais,  1.  —  Évéque  d'Angoulême;  auteur,  avant  son  entrée  dans  les  ordres, 
de  poésies  légères  (14(56  à  1502). 

S.  Jérôme,  2.  —  Docteur  de  l'Église  latine  (331  à  420)  ;  c'est  à  lui  que  l'on  doit  la 
traduction  de  la  Bible  appelée  Vulgate. 

S.  Luc,  2.  —  L'un  des  quatre  évangélistes,  auteur  des  Actes  des  Apôtres;  va. 
vers  70. 

S.  Matthieu,  1.  —  Apôtre  et  évangéliste. 

S.  Paul,  4.  —  Surnommé  l'Apôtre  des  Gentils,  auteur  A'Épiti^es  à  certaines  Églises 
primitives;  m.  en  66. 

S.  Pierre,  1.  —  Prince  des  Apôtres,  auteur  de  deux  Épîtres  aux  premiers  chré- 
tiens ;  m.  en  66. 

Salluste,  3.  —  Auteur  latin  (80  à  38  av.);  a  écrit  l'histoire  de  la  Conjuration  de 
Catilina  et  des  Guerres  de  Jugurtha. 

Sénèque  le  philosophe,  93.  —D'origine  espagnole;  célèbre  philosophe  latin,  auteur 
d'un  grand  nombre  de  traités  de  philosophie  morale  (2  à  65). 

;^ÉNÈQUE  le  rhéteur,  5.  —  D'origine  espagnole;  père  du  précédent;  professa  la  rhé- 
torique à  Rome  (61  av.  à  32). 

Sidoine  Apollinaire,  2.  —  Évéque  de  Clermont,  poète  et  écrivain  latin  (430  à  488). 

Sii.ius  Italicus,  2.  —  Poète  (i"  s.);  auteur  d'une  épopée  sur  la  seconde  guerre  pu- 
nique. 

Sophocle,  1.  —  Célèbre  tragique  grec,  dont  il  ne  nous  reste  que  sept  pièces,  con- 
sidérées toutes  comme  des  chefs-d'œuvre  (495  à  405  av.). 


C.94  ESSAIS  DE  MOiNTAIGNE. 

Source  inconnue,  36. 

Stace,  2.  —  Poète  lat'in  (61  à  90),  autour  do  la  Thèbaïde. 

Stobée,  3.  —  Savant  moine  et  compilateur  grec  (iv  s.). 

Suétone,  1.  —  Historien  latin,  auteui-  des  Vies  des  douze  Césars  (65  à  i;]5). 

Tacite,  9.  —  Historien  latin  des  plus  estimés,    auteur  des  Annales,  des  Histoires 

et  des  Mœurs  des  Germains  (54  à  140). 
Tasse  (Le),  7.  —  Torquato  Tasso;  illustre  poète  italien  (1544  à  1595),  auteur  de  la 

Jérusalem  délivrée,  chef-d'œuvre  de  poésie  épique. 
Tékence,  24.  —  Poète  comique  latin,  dont  il  ne  nous  reste  que  six  comédies  (194 

à  158  av.). 
Teiituixien,  2.  —  Célèbre  docteur  de  l'Église,  auteur  d'une  Apologétique  remar- 
quable (160  à  245). 
TiBui.i.E,  8.  —  Poète  latin,  auteur  (VÉlégies  empreintes  d'élégance  et  d'une  exquise 

sensibilité  (54  av.  à  18). 
TiTE-LivE,  38.  —  Historien  romain  (59  av.  à  19);  a  écrit  une  Histoire  romaine  en 

140  livres,  dont  il  ne  reste  que  35. 
Vai.ère  Maxime,  1.  —  Historien  latin  du  temps  de  Tibère  (i"  s.). 
Valerius  Soranus,  1.  —  Médecin,  orateur,  poète  et  écrivain  distingué,  ami  de  (]i- 

céron  (i"  s.  av.). 
Varrox,  1.  —  Poète  latin  épique  et  didactique  assez  estimé,  dont  il  ne  reste  que 

quelques  fragments  (82  à  37  av.). 
Végèce,  1.  —  Écrivain  latin,  auteur  d'un  Traité  d'art  militaire  (iv'  s.). 
VniGiLE,  118.  —  Le  plus  célèbre  des  poètes  latins,  esprit  délicat  faisant  appel  aux 

sentiments  les  plus  intimes,  style  noble  et  correct;  auteur  de  V Enéide,  des  Géor- 

giques  et  des  Bucoliques  (70  à  1  av.). 


FASCICULE  D^ 


VARIANTES 

DE   l'édition    de    1595    PAR    RAPPORT    AUX    ÉDITIONS    DE     1580 
ET    1588;     ET    DE    CETTE    DERNIÈRE    A    CELLE     DE     1580. 


Ce  relevé  a  été  établi  principalement  d'après  l'édition  de  1872-90  de  MM.  Cour- 
bet et  Royer  et  celle  de  1889  de  MM.  Motheau  et  Jouaust. 

Montaigne  a,  de  son  vivant,  publié  les  Essais  on  1580;  les  a  réédités  en  1582, 
1587,  1588,  et  en  avait  préparé  une  nouvelle  réédition  quand  il  est  mort  (1592). 
Cette  autre  a  été  mise  au  point  et  publiée  par  ses  exécuteurs  testamentaires  en 
1595.  En  outre,  l'un  des  exemplaires  de  l'édition  de  1588  annotés  par  lui,  qui  ont 
servi  à  cette  mise  au  point,  dit  «  Exemplaire  de  Bordeaux  »,  retrouvé  trois  siè- 
cles après,  et  depuis  imprimé  tel  que,  porte  à  six  le  nombre  des  éditions  ayant 
l'attache  de  l'auteur. 

De  ces  diverses  éditions,  la  moins  conaplète  est  naturellement  la  première  ;  elle 
n'en  a  pas  moins  un  intérêt  de  premier  ordre  parce  que,  de  toutes,  elle  est  celle 
qui,  dans  chacun  de  ses  chapitres  pris  isolément,  présente  le  plus  d'unité  et  même 
d'originalité  d'expressions  auxquelles  porte  atteinte,  dans  les  éditions  suivantes, 
le  grand  nombre  de  corrections,  d'additions,  intercalations,  transpositions  succes- 
sives, faites  continuellement  par  Montaigne  lui-même,  sans  que  souvent  ait  été  suf- 
fisamment modifié  en  conséquence  ce  qui  les  précède  ou  ce  qui  les  suit;  d'où  des 
interruptions  fréquentes  dans  le  cours  des  idées,  et  le  sens  rendu  parfois  obscur 
et  difficile  à  saisir. 

L'édition  de  1580  a  été  constituée  de  morceaux  détachés  sur  des  sujets  n'ayant 
aucun  rapport  entre  eux,  écrits  par  Montaigne  au  coure  de  son  existence,  suivant 
l'impression  du  moment,  pour  sa  seule  satisfaction,  sans  l'idée  préconçue  de  les 
faire  imprimer. 

Sa  traduction  de  l'ouvrage  de  Sebond  achevée,  il  en  avait  repris  le  thème  et 
l'avait  à  nouveau  traité  à  sa  façon,  en  manière  d'essai,  c'est  le  cas  de  le  dire,  et 
ce  commentaire  l'avait  satisfait.  D'autre  part,  son  éducation  première,  dirigée 
d'une  façon  qui  n'était  pas  celle  de  tout  le  monde,  les  mauvais  souvenirs  qu'il 
avait  conservés  de  certains  errements  suivis  en  la  matière,  avaient  été  pour  lui 
l'occasion  d'écrire  sur  ce  sujet  quelques  pages  dont  il  n'était  pas  mécontent,  non 
plus  que  de  quelques  autres  que  lui  avaient  inspirées  son  amitié  pour  la  Boétie, 
mort  récemment. 

La  publication  de  cette  traduction  de  Sebond  et  celle  des  œuvres  de  la  Boétie 
auxquelles  il  venait  de  s'adonner,  la  première  à  l'instigation  de  son  père,  la  se- 
conde comme  exécuteur  testamentaire  de  son  ami,  et  le  désœuvrement  et  la  va- 
nité aidant,  il  se  dit  qu'il  pourrait  bien  agir  vis-à-vis  de  lui-même  ainsi  qu'il 
l'avait  fait  pour  d'autres.  Réunissant  alors  ses  opuscules,  pour  en  former  autant 
de  chapitres  et  en  constituer  un  livre,  il  les  donne  à  imprimer. 

Le  succès  le  met  en  appétit,  et  ce  livre  devient  la  grande  distraction  de  sa  vie  : 
il  le  corrige,  y  ajoute,  le  réédite;  comme,  après  lui,  l'annoter,  le  débrouiller,  l'a- 
nalyser, le  commenter,  le  traduire  et  aussi  le  rééditer  sont  devenus  une  des 
grandes  occupations  des  générations  suivantes,  passées,  présentes  et  probable- 
ment futures;  car,  en  ces  temps  de  progrès  si  considérables  dans  les  sciences  et 
les  arts  industriels,  les  originalités  littéraires  se  font  de  plus  en  plus  rares,  les 
productions  de  ce  genre  étant  engendrées  par  notre  seule  imagination  qui  va 
sans  cesse  tournant  dans  le  même  cercle.  —  Toutefois  les  premières  rééditions 
des  Essais,  de  1582  et  1587,  ne  présentent  que  des  retouches  insignifiantes,  qui 
n'altèrent  sensiblement  ni  la  forme,  ni  le  fond  de  l'œuvre  primitive;  ce  sont  de 
nouveaux  tirages,  plutôt  que  des  éditions  nouvelles,  et  c'est  pourquoi  nous  ne 
nous  en  occuperons  pas  davantage. 

Tout  autre  est  l'édition  de  1588.  —  De  1580  à  1588,  la  guerre  civile  s'est  étendue; 
ses  excès  se  sont  aggravés,  Montaigne  a  eu  personnellement  à  en  pâtir.  Simulta- 
nément, il  a  joué  un  rôle  politique,  a  effectué  un  long  voyage  de  dix-huit  mois  dans 

ESSAIS  DE  MONTAIGNE.  —  T.   IV.  7 


Da.98  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

l'est  de  la  France,  en  Allemagne  et  en  Italie,  a  été  maire  de  Bordeaux;  la  vivacité 
de  ses  sentiments  généreux  se  ressent  de  la  connaissance  plus  approfondie  qu'il 
a  acquise  de  l'homme,  et  c'est  durant  cette  période  qu'il  compose  le  troisième  li- 
vre des  Essais  qui  jusqu'alors  n'en  avaient  compris  que  deux.  Aussi  ce  troisième 
livre  reflète-t-il  plus  particulièrement  cette  phase  de  sa  vie  et  l'impression  qu'il 
conserve  des  événements  auxquels  il  s'est  trouvé  mêlé,  à  quoi  s'ajoutent  aussi  beau- 
coup plus  de  confidences  personnelles  que  par  le  passé;  et  il  en  de  même  des 
additions,  déjà  importantes,  qu'il  fait  en  même  temps  à  ses  deux  premiers  livres. 

De  1588  à  1592,  malade,  fatigué,  désabusé,  confiné  chez  lui,  il  n'enfante  plus, 
mais  va  polissant  et  repolissant  (certaines  de  ses  phrases  ont  été  refaites  jusqu'à 
cinq  fois);  il  remanie  son  texte  où  il  intercale  citations,  anecdotes,  dissertations 
en  nombre  et  en  étendue  sensiblement  plus  considérables  que  par  le  passé,  pour 
aboutir  de  la  sorte  à  l'édition  de  1595,  à  laquelle  la  mort  l'empêche  de  mettre  la 
dernière  main.  Mais  sa  famille  confie  cette  tâche  à  deux  érudits,  en  communion 
intime  d'idées  avec  lui  :  à  Pierre  de  Brack  pour  la  mise  au  point,  à  M"'  de  Gour- 
naj'  pour  l'impression,  ce  dont  tous  deux  s'acquittent  avec  le  plus  grand  scrupule 
et  un  soin  tout  filial. 

En  somme,  ces  trois  éditions  essentielles  des  Es.sais  (1580,  1588  et  1595),  compa- 
rées les  unes  aux  autres,  accusent  de  nombreuses  retouches,  suppressions,  modi- 
fications, additions.  Nonobstant,  il  n'est  pas  une  suppression  ou  modification  qui 
présente  de  l'importance;  toutes  ne  consistent  qu'en  quelques  mots  supprimés  ou 
changés  en  vue  d'éviter  des  répétitions,  donner  plus  de  correction  à  la  phrase  et 
quelquefois,  mais  rarement,  en  préciser  ou  accentuer  davantage  le  sens;  les  pas- 
sages complètement  remaniés  sont  peu  fréquents.  Aussi,  les  reproduire  eût  cons- 
titué un  travail  d'impression  absolument  dépourvu  d'utilité  et  d'intérêt,  où  le 
lecteur,  à  moins  d'y  apporter  une  e.xtrême  attention,  n'eût  fait  que  se  perdre;  à 
très  peu  près,  personne  ne  l'eût  consulté.  11  a  paru  suffisant  de  consigner  dans 
les  notes  celles  qui  exceptionnellement  valent  d'être  signalées.  —  Il  n'en  est  pas 
de  même  des  additions  :  qu'elles  comprennent  des  pages  entières  ou  se  réduisent 
à  un  ou  plusieurs  mots,  toutes  ajoutent  au  sens,  et  par  les  idées  nouvelles 
qu'elles  introduisent,  et  par  la  précision  qu'elles  apportent,  donnant  ainsi  possi- 
bilité de  se  rendre  compte  de  l'évolution  que  l'âge  et  les  événements  ont 
amenée  chez  l'auteur.  Dans  l'édition  de  1580  on  le  voit  ayant  une  tendance  nette- 
ment accusée  au  stoïcisme,  alors  qu'il  écrit  étant  dans  la  force  de  l'âge  et  que, 
jusque-là,  des  épreuves  personnelles  n'ont  pas  encore  tempéré  la  fougue  de  la 
jeunesse  et  ébranlé  les  illusions.  Les  additions  de  1588  nous  le  montrent  envahi 
davantage  par  le  scepticisme,  né  de  l'impression  ressentie  durant  cette  période  si 
agitée  de  1580  à  1588.  Postérieurement,  de  1588  à  1592,  assoiffé  de  repos,  con- 
vaincu par  expérience  du  néant  des  choses  d'ici-bas,  son  parti  pris  de  s'accom- 
moder de  tout  ce  qui  peut  survenir,  pour  n'être  troublé  que  le  moins  possible 
dans  sa  tranquillité,  ressort  dans  les  additions  de  1595. 

C'est  ce  qui  nous  porte  à  ne  donner  ici,  en  ce  qui  touche  ces  éditions  de  80  et 
de  88,  que  les  additions  qui  y  ont  été  apportées;  nous  bornant  pour  les  autres  va- 
riantes, de  quelque  nature  qu'elles  soient,  de  ces  deux  éditions,  à  renvoyer  aux 
notes  (fascicules  Fa,  Fb,  Fc). 

Mais,  par  lui-même,  ce  relevé  ne  dit  rien,  et  à  qui  voudra  se  rendre  compte 
d'une  façon  effective  de  ces  transformations  successives,  nous  conseillons  l'emploi, 
avec  son  aide,  du  procédé  graphique  ci-après,  d'exécution  simple,  qui  les  fera  net- 
tement ressortir  : 

Le  volume  est  indique  au  litre  courant;  —  les  nombres  en  caractères  gras  mar- 
quent la  page;  —  ceux  en  caractères  ordinaires,  la  ligne. 

Les  indications  affectées  de  la  lettre  C  s'appliquent  aux  additions  faisant  défaut 
dans  V édition  de  i580; — celles  affectées  de  la  lettre  B  aux  additions  faisant  dé- 
faut à  la  fois  à  1580  à  1588;  —  enfin,  celles  réduites  à  des  nombres,  renvoient  aux 
notes  où  il  est  question  des  variantes  autres. 

Ceci  étant,  on  marquera  longitudinalement  en  marge  du  texte,  d'un  trait  au 
crayon,  les  variantes  affectées  d'un  C,  et  on  doublera  ce  trait  pour  celles  affectées 
d'un  B,  en  mémo  temps  que  pour  les  unes  et  les  autres  des  parenthèses,  égale- 


VARIANTES.  Da.99 

ment  au  crayon,  indiqueront  où  chacune  commence  et  où  elle  finit.  De  la  sorte, 
les  parties  du  texte  sans  trait  signaleront  le  texte  de  1580;  celles  sans  trait  ou 
affectées  d'un  trait  simple,  celui  de  1588;  et  le  tout,  marqué  ou  non,  celui  de 
1595;  à  quoi  des  astérisques  pourront  être  ajoutés  pour  les  variantes  simplement 
désignées  par  des  nombres. 

La  page  ci-après  des  Essais  (II,  432)  présente  un  spécimen   de  ce  que  l'on  ob- 
tiendra de  la  sorte  ; 


CHAPITRE   XY. 

Que  nostre  désir  s'accroist  par  la  malaisance, 

II.  n'y  a  raison  qui  n'en  aye  vne  contraire,  dit  le  plus  sage  party 
dos  philosophes.  le  remaschois  tantost  ce  beau  mot,  *  qu'vn  an- 
cien allègue  pour  le  mespris  de  la  vie  :  Nul  bien  nous  peut  ap- 
porter plaisir,  si  ce  n'est  celuy,  à  la  perte  duquel  nous  sommes 
préparez  :  |  In  wquo  est  dolor  amissse  rei,  et  iimor  amittendœ  | .  Vou- 
lant gaigner  par  là,  que  la  fruition  de  la  vie  ne  nous  peut  estre 
vrayement  plaisante,  si  nous  sommes  en  crainte  de  la  perdre.  Il 
se  pourroit  toutesfois  dire  au  rebours,  que  nous  serrons  et  embras- 
sons ce  bien,  d'autant  plus  estroit,  *  et  auecques  plus  d'affection, 
que  nous  le  voyons  nous  estre  moins  seur,  et  craignons  qu'il  nous 
soit  osté.  Car  il  se  sent  euidemment,  comme  le  feu  se  picque  à 
l'assistance  du  froid,  que  nostre  volonté  s'aiguise  aussi  parle  con- 
traste : 

I  Si  numquam  Danaen  habuisset  ahenea  turris, 
Non  esset  Danae  de  loue  facta  parens  :  | 

et  qu'il  n'est  rien  naturellement  si  contraire  à  nostre  goust  que  la 
satiété,  qui  vient  de  l'aisance  :  ny  rien  qui  l'aiguise  tant  que  la 
rareté  et  difficulté.  Omnium  rerum  voluptas  ipso  quo  débet  fugare 
periculo  crescit. 

Galla,  nega;  salialur  amor,  nisi  gaudia  torquent. 

Pour  tenir  l'amour  en  haleine,  Lycurgue  ordonna  que  les  mariez 
de  Lacedemone  ne  se  pourroiont  prattiquer  qu'à  la  desrobée,  et 
que  ce  seroit  pareille  honte  de  les  rencontrer  couchés  ensemble 
qu'auecques  d'autres.  La  difficulté  des  assignations,  le  danger  des 
surprises,  la  honte  du  lendemain, 

Et  languor,  et  silentium, 
Et  latere  petitus  imo  spiritux, 

c'est  ce  qui  donne  pointe  à  la  sauce.  |  Combien  de  ieux  tres-lasciue- 
ment  plaisants,  naissent  de  l'honneste  et  vergongneuse  manière 
de  parler  des  ouurages  de  l'Amour  ?  |  La  volupté  mesme  cherche  à 
s'irriter  par  la  douleur  | .  Elle  est  bien  plus  sucrée,  quand  elle  cuit, 
et  quand  elle  escorche  | .  La  courtisane  Flora  disoit  n'auoir  iamais 
couché  auec  Pompeius,  qu'elle  ne  luy  eust  faict  porter  les  merques 
de  ses  morsures. 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


VARIANTES 

DE   l'édition   de    1595    PAR   RAPPORT   AUX  ÉDITIONS    DE    1580 
ET    1588;    ET    DE    CETTE    DERNIÈRE    A    CELLE    DE     1580. 


AV  LECTEVR. 
14.  -  10.  —  13.  —  20. 

LIVRE  PREMIER. 

16.  —  Ch.  I.  — 3,  B,  par  submission.  —  18,  11  à  16,  C,  L'vn  et  l'autre...  auec 
eux.  —  38  à  20,  20,  B,  Dionysius...  la  mer. 

20,  29  à  22,  11,  C,  Et  directement...  moins?  —  8.  —  Il  à  29,  B,  ou  qu'il  l'esti- 
mast...  esclaues.  —  Gh.  II.  —  30,  C,  le  suis...  passion.  —  30  à  24,  5,  B,  et  ne  l'es- 
père... sages.  —26,  8,  C,  El  via...  dolure  est.  —  9  à  21,  B,  En  la  guerre...  par  terre. 

—  32 à  36,  C,  Aussi  n'est...  d'amour.  —  38,  C,  au  giron...  iouïssance.  —  39.  —  42 
à  47,  C,  La  surprise...  falur.  —  28,  lia  13,  C,  le  suis...  discours.  —  Ch.  III. —  14 
à  20,  C,  Ceux  qui...  ouurage.  —  20  à  22,  B,  nous  imprimant...  science.  —  22  à  26,; 
C,  Xous  ne  sommes...  serons  plus.  —  26  à  30,  4,  B,  Calamitosus...  l'aduenir. 

30,  5à  11,  C,  Entre  les...  Princes.  —  11  à  32,  16,  B,  qui  ont  à...  n'est  plus.  —  17  à 
21,  C,  Quisquam...  Vindical.  —  33  à  39,  C,  Do  vray...  Bœotiens.  —  41.  —  34,  11  à 
20,  C,  lean  Zischa...  d'encouragement.  —  36, 9  à  13,  B,  L'ordonnance...  religion. 

—  13  à  35,  C,  Ce  conte...  coust.  —  14.  — 35  à  38,2,  B,  S'il  estoit...  mechaniques.  — 
2  à  4,  C,  religion.  —  13  à  35,  C,  Ce  conte...  coust.  —  14.  —  35à  38,  2,  B,  S'il  estoit... 
le  lairrois...  charge.  —  5  à  10,  B,  Tutus...  respond-il.  —  10  à  15,  C,  Si  i'auois... 
mort.  —  15  à  40,  18,  B,  A  peu,  que...  qu'on  dit. 

40.  —  Ch.  IV.  —  30  à  31,  G,  V^entus...  inani.  —  42,  8  à  15,  C,  Ainsin...  haslam. 

—  21  à  25,  B,  Liuius...  le  deuil.  —  32  à  44,  6,  B,  Le  peuple...  bestise.  —  14.  —  16 
à  18,  B,  A  l'exemple...  flèche.  —  22,  C,  Mais  nous...  esprit.  —  Ch.  V.  —  46,  11.  — 
14  à  29,  B,  Les  Achaïeus...  Martinella.  —  48,  18  à  35,  C,  Eumenes...  demandoit.  — 
37  à  50,  2,  C,  le  me  fie...  loyauté. 

,  50.  _  Ch.  VI.—  11  à  26,  B,  Et  a  tousiours...  militaire.  —31  à 52,  13,  B,  Pendant 
le...  par  tout.  —  37  à  54,  6,  C,  Et  plus...  armis.  —  Ch.  VII.  —  56,  4  à  20,  B,  l'ay 
veu...  aperteiiient.  —  Gh.  VIII.  — 58,  1  à  4,  C,  Sicut...  tecli.  —  10,  C,  Quisquis... 
habitat.  —  Ch.  IX.  —  25.  —  30.  —  30,  B,  Platon...  déesse  :  —  32  à  60,  13,  C,  si  en 
mon...  sur  ce. 

60,  14  à  23,  B,  que  c'est...  mémoire.  —  23  à  25,  C,  Que  mon...  l'inuention.  —  25 
à  28,  B,  Si  elle...  discours.  —  28  à  33,  C,  C'est  pitié...  iugement.  —  33  à  62,  4,  B, 


Da.l02  ESSxVIS  DE  MONTAIGNE. 

Et  c'est...  fois.  —  4  à  5,  C,  secondement...  ancien.  —  5  à  9,  B,  il  me  faudroit... 
Athéniens.  —  9  à  10,  C,  et  que  les...  nouuelleté.  —  23  à  64, 7,  C,  Dequoy  i'ay...  estrc. 

—  7  à  32,  B,  En  vérité...  silence.  —  68.  -  Ch.  X. 

70,  5  à  7,  C,  La  part...  France.  —  24  à  26,  C,  ainsi  qu'il...  ouuert.  —  33  à  36,  B, 
le  ne  me...  à  part  moy.  — 38  à  72,  9,  B,  Cecy  m'aduient...  hésitation.  —  Ch.  XI.  — 
13  à  15,  B,  Et  ces  mots...  contemptius. —  15  à  18,  B,  ausquels  Platon...  d'icelles. — 
18,  B,  Aues...  pulamus.  —  19,  C,  des  fouldres...  riuieres.  —  20  à  22,  B,  Mulla...  por- 
tentis.  —  74,  1  à  5,  C,  Cur  hanc...  timenli.  —  6,  B,  A"e  ville...  angi.  —  39  à  76,  1,  B, 
Et  ceux...  cette  art.  —  1  à  2,  C,  Naissance...  songes.  —  3  à  13,  B,  Et  de  vray... 
adolescence.  —  13  à  15,  C,  l'en  voy...  mensonge.  —  15,  B,  Quis  est...  collineet.  — 
16  à  18,  C,  le  ne  les...  tousiours.  —  18  à  30,  B,  loint  que...  diuination.  —  30  à  32, 
C,  D'autant...  vanitez.  —  30  à  78,  10,  B,  le  voudrois...  plaira.  —  10  à  16,  C,  Le 
démon...  agitations.  —  16  à  18,  B,  d'vne  opinion...  prudence.  —  18,  C,  Et  en  ay 
eu.  —  18  à  20,  B,  de  pareillement...  Socrates. —  20  à  22,  C,  ausquolles  ie...  diuine. 

—  Ch.  XII.  —  32  à  80,  24,  B,  Plusieurs  nations...  saouL 

80.  —  82,  10  à  14,  C,  le  ne  me  puis...  que  moy.  —  14  à 30,  B,  N'y  entendent...  mo- 
dère. —  84.  —  Ch.  XIII.  —  10  à  16,  C,  Pour  moy...  tanière.  —  30  à  86, 14,  B,  Non 
seulement...  communicable. —  Ch.  XIIII(XL  dans  les  éd.  ant.).  [Le  chapitre  XIV 
des  éditions  de  1580  à  1588  est  le  chapitre  XL  de  celle  de  1595;  et  tous  les  chapi- 
tres de  XV  à  XXXIX  de  ces  premières  éditions  ont  leur  numéro  supérieur  d'une 
unité  à  celui  qu'ils  ont  dans  cette  dernière].  —  88,  16.  —  18  à  21,  B,  Etau  quartier... 
moi-cy.  —  22  à  23,  C,  Ainsi  sur...  et  armé.  —  Ch.  XV  (XVI  dans  les  éd.  ant.). 

90,  20,  B,  Suffundere...  effundere.  —  28  à  32,  B,  L'aspre...  ennemis.  —  92.  — 
Ch.  XVI  (XVll  dans  les  éd.  ant.).  —  9  à  11,  C,  Basti...  armenli.  —  17  à  30,  B, 
Voyez...  offense.  —94,  23.  —96,  7  à  37,  B,  Nous  nous...  décret.  —  98.  —  Ch.  XVII 
(XVIII  dans  les  éd.  ant.).  —  30  à  100,  1,  C,  Pareille  rage...  partoit. 

100,  7,  C,  Adeo...  formidat.  —  11  à  102,  16,  B,  Lors  exprime...  Paniques.  — 
Ch.  XVIII  (XIX  dans  les  éd.  ant.).  —104,  8  à  12,  B,  La  plus  belle...  cruauté.  —24. 

—  28.  —  106,  3  à  14,  C,  I'ay  veu...  perfection.  —  14  à  21,  B,  Il  est  des...  course.  — 
21  à  24,  C,  Au  iugement...  sourdement.  — Ch.  XIX  (XX  dans  les  éd.  ant.).  —  108, 
2,  B,  que  le  plaisir...  but.  —  5  à  110,  11,  B,  Les  dissentions.,,  barrière. 

110,  14.  —  26  à  29,  C,  Omnes...  cynibx.  —  31  à  34,  11  n'est...  impendet.  —  38  à  41, 
Non  Siculœ...  reducenl.  — 112,  1  à  2,  C,  Audit...  futura.  —  16  à  21,  C,  Par  ce  que... 
Maistre-Iehan.  —  114, 1.  —  22,  C,  le  capitaine  S.  Martin.  — 116,  6  à  7,  C,  puis  qu'il... 
homme.  — 11  à  13,  C,  et  que  nulle...  capul.  —  34à  36,  B,  11  n'y  a...  pas  mal.  — 118, 
10,  C,  lam  fmril...  licebil.  —  20,  B,  Et  me  rechante...  auiourd'huy.  —  26,  B, 
Nemo...  certior.  —  28,  C,  œuurè.  —  33  à  37,  B,  Comme  ccluy...  la  mort.  —  40,  C, 
Quid...  Milita. 

120,  5  à  11,  B,  le  suis...  saines.  —  12  à  13,  C,  Miser...  vitae.  —  19.  —27  à  28,  C, 
Illud...  vna.  —  36  à  39,  C,  Quin...  inensis.  —  40  à  42,  B,  Et  comme...  seras  tel.  — 
122,  2  à  7,  Il  y  paroist...  vtile  fin.  —  30  à  34,  C,  Voyons  à...  manet.  —  35  à  37,  B, 
Ccsar...  en  vie.  —  37  à  124,  7,  C,  Qui  y...  douloureux.  —  14  à  17,  C,  Non  vultus... 
manus. —  30  à  126,  12,  C,  Que  chaut-il...  ridicule.  —  17  à  18,  C,  Inter  se...  tradunt. 

—  25.  —  26  à  32,  B,  Tout  ce  que...  essentiellement.  —  32  à  39,  C,  Si  vous  auez... 
omne.  — 40  à  41,  B,  La  vie...  faictes.  —  128,  5,  B,  Non  alium...  aspicient.  —  13  à 
14,  C,  versamur...  annus.  —  17  à  20,  B,  L'équalité...  comprins.  —  25  à  36,  C,  Et  si 
vous...  videmus.  —  37,  B,  Elle  ne  vous...  estes  plus.  —  40  à  43,  C,  et  ne  vous... 
fueril.  —  44  à  47,  B,  L'vtilité...  vescu.  —  48  à  130,  1,  B,  encore  n'y...  issiie. 

130,  3,  C,  Omnia...  sequentur.  —  7  à  9,  C,  Nam  nox...  atri.  —  10  à  132,  1,  B,  A 
quoy  faire...  arriue.  —  14,  C,  et  de  prescheurs.  —  20.  —  Ch.  XX  (XXI  dans  les  éd. 
ant.).  —29  à  134,  12,  B,  Son  impression...  empirer  aussi.  —  136,  1  à  14,  C,  Pas- 
sant à...  aux  filles.  —  19  à  27,  B,  Sainct  Augustin...  haleine.  —  27.  —  35,  C,  De 
qui  ie...  moy-mesme.  —  138,  2,  B,  à  coup.  —  3  à  13,  B,  Et  de  là...  foiblesse.  —  16 
à  22.  —  12  à  140,  32,  B,  Il  vaut  mieux...  sacrifices. 

140,  32  à  34.  —  34  à  36,  B,  La  bru...  cotte.  —  36,  C,  de  l'assaillant.  —  142,  4  à 
5.  —  5  à  146,  II,  B,  Les  mariez...  mesmes.  —  21,  C,  domestique. 

150,  13  à  16,  C,  Les  discours...  accidens.  —  16  à  152,  29,  B,  Si  ie  ne  comme... 
ainsi.  —  154.  —  Ch.  XXI  (XXII  dans  les  éd.  ant.).  —  Ch.  XXII  (XXIII  dans  les 
éd.  ant.).  —  156,  8,  B,  Vous...  magister.  —  9,  B,  l'antre...  république,  ot.    -  13  à 


VAUIANTES  (1595-88  et  80.       LI V.  1,  CH.  XXU.       VOL.   I.  Da.l03 

•20,  C,  ot  en  ce  monde...  venimeuses.  —  20  à  160,  1,  B,  Consuetudinis...  respecte  plus, 
160,  8.  —  23  à  25,  B,  Et  est  très...  veritatis.  —  26  à  33,  C,  l'estime...  ordure.  — 
33  à  162,  15,  B,  Desrobons...  peuples.  —  15  à  164,  29,  C,  où  sauf  sa...  crud.  —  29 
H  166,  7,  B,  Où  le  grand...  noble.  —7  à  9,  C,  Où  Ion  vit...  efïroy.  —  9à  11,  B,  Où 
les  femmes...  pucellage.  —  11  à  32,  C,  Où  l'on  salue...  gentillesse.  —  32  à  35,  B, 
où  ils  nourrissent...  l'oposite.  —  35  à  38,  C,  Où  les  pères...  leurs  fils.  —  38  à  168,  2, 
B,  Où  au.x  assemblées...  aux  autres.  —  12.  —  15  à  17.  —  21  à  23,  C,  Fit  elle...  hon- 
neur. —  26  à  170,  4,  B,  Celuy  qu'on...  applaudissement. 

170,  4  à  6,  C,  Quand  ceux...  coustume.  —  C,  15  à  35,  B,  Par  où...  Thessalie.  — 
172,  M  à  3-1,  B,  C'est  cette...  fussent.  — 174, 9  à  14,  B,  Non  selon...  marchandise. 

—  176,  20  à  22,  C,  comme  ce...  inique.  —  178,  5  à  14,  C,  le  suis  desgouté...  sa 
ruine.  —  8.  —  14  à  15,  B,  Le  fruict...  pescheurs.  —  15  à  18,  C,  La  liaison...  iniures. 

—  18  à  24,  B,  La  maiesté...  effort.  —  25  à  34,  C,  Toutes  sortes...  dangereux.  —  35, 

B,  Adeo...  est. 

180,  1  à  6,  C,  Si  me  semble...  pays  propre.  —  6  à  18,  B,  Est-ce  pas...  estoit  pro- 
pre. —  18  à  33,  C,-  La  religion...  malheur. —  33  à  182,  2,  B,  Quis  est...  party.  —  2  à 
5,  G,  Car  qui...  introduit.  —  5  à  30,  B,  Cette  si...  sequor.  —  30  à  184,  4,  C,  Dieu  le... 
intestines.  —  7  à  13,  C,  Si  est-ce...  inequalité.  —  13.  B,  Aditum...  fides.  —  13  à  17, 

C,  D'autant  que...  obéissance,  —  17  à  19,  B,  L'aller...  effréné.  —  30,  C,  et  cet  au- 
tre... May.  —  186.  —  Gh.  XXIII  (XXIV  dans  les  éd.  ant.).  — 188,  8. 

190.  —  192,  34.  —  104,  6,  C,  le  suis...  Sylla.  —  23  à  24,  C,  et  puis...  droit.  —  31. 
— 196,  2 à  2.5,  C,  Et  puis  ce...  y  voye.  —  14.  —  25  à  30,  B,  l'en  sçay...  leué.  — 30  à  31, 
C,  La  prudence...  exécutions.  —  31  à  39,  B,  Scipion...  obligat.  —  39  à  198,  7,  C,  A 
vue  vie...  rebelle.  —8  à  10,  B,  Stetit...  meluens.  —  11  à  200,  16,  Mais  il  est...  con- 
fidence. —  198,  27.  —  28.  —  30.  —  40  à  200,  2. 

200, 18.  —24  à  202,  2,  C,  Vn  estranger...  vent.  —  2  à  8,  B,  Le  Duc...  domination. 

—  22.  — Ch.  XXVI  (XXV  dans  les  éd.  ant.).  —  204,  3  à6,  C,  Mais  en...  pedantesque. 

—  15  à  19,  C,  A  receuoir...  aux  autres.  — 20,  B,  et  les  lampes...  d'huile.  —  21,  B, 
et  de  matière.  —  31.  —31  à206,  11,  B,  leurs  opinions...  hommes.  —  18,  B,  Odi... 
sententia.  —  31à38,  B,  Maisaucuns...  compagnie.  —208, 1,  B,  Et  refusa...  offrirent. 

—  2.  —  9  à  15,  B,  Ce  qu'Aristote...  prudents.  —  16.  —  22  à  2.5,  B,  Criez  d'vn... 
testes.  — 30,  B,  et  la  conscience. 

210, 1  à  9,  B,  C'est  merueille...  future.  —  13  à  20,  B,  Apud...  sommes  là.  —  32  à  37, 
B,  l'en  cognoy...  derrière.  —  37.  —  212,  8.  —  9  à  14,  C,  Nous  nous...  mendiée.  —  17. 

—  18àl9,  B,Éx  quo...  quiret.  — 20à22,  C,Si  cupidus...  sapientia  est.  —  22à26,  B, 
Dionysius...  lafaire.  — 33à  214,  l,B,llen  deuoit...  e.xperience.  —  2,  B,ces  sçauan- 
taux.  — 20à22,  C,  Etqui  auoit...  sannœ.  —  32  à  34,  C,  Ethay...  il  est.  —  36.  —216, 
4  à 5,  C,  Quels...  Titan.  —  8.  —  21,  B,  Non  vitse...  discimus.  —  26,  B,  vt  fuerit...  didi- 
scissc.  —  218, 7  à  220, 1,  B,  Postquam...  exlre. 

220,  4  à  14,  B,  Platon...  craindre.  —21,  B,  Exemple...  ses  loix.  —  222,  33  à  224,  25, 
B,  11  est  très...  guerriers.  —  226.  —  Ch.  XXV  (XXVI  dans  les  éd.  ant.).  —  il  à  12,  B, 
Et  à  l'aduenture...  nostre  vie.  —  13.  —  15.—  16  à  24,  B,  Et  n'est  enfant...  rien.  — 
228,  2:3,  i'engendrerois  des  monstres  :  comme  font.  —  23  à  25,  B,  Il  faut...  gens- 
là.  —  30  à  36,  B,  c'estoient  deux...  allégation. 

230,  11  à  232,  7,  B,  Reprendre  en...  Politiques.  —25.  —  30  à 36,  B,  Tout  ainsi... 
nourrir.  —  234,  2  à  6,  C,  Voyez  Cimon...  facilement.  —  10.  —  16  à  17,  B,  Platon  en... 
d'autorité.  —  236,  5.  —  21  à  238,  1,  B,  Socrates,  et...  discipline.  —  7  à  8,  B,  prenant... 
Platon. —  11.  —  lia  15,  C,  Nostre  ame...  esteinte.  —  16,  B,Numq\Mm...  fiunt.  —  17à 
24, C, le  vy...  Rome.  — 25,  B,  simple.  —  29,  C,  Che  non...  m'aggrnda.  —  32 à  35,  B, 
Qui  suit..,  au  moins. 

240,  2  à  4,  B,  Ce  n'est...  mesme.  —  9  à  16,  B,  Qu'il  celé...  sage.  —  21  à  22,  C,  de  la 
Rhétorique  et  de  la  Grammaire.  —  24  à  31,  B,  Sçauoir  par...  fard.  —  32,  C,  de  mon 
temps.  — 35.  —  35  à  242,  12,  B,  ou  qu'on...  à  iuger.  —  30  à  31,  C,  Vitamque...  rébus. 

—  32  à  244,  12,  3,  Ce  n'est...  corde.  —  25  à  37,  B,  Qu'il  se...  assequebanlur .  —  246, 10 
à  25,  B,  yieque,  vl...  matière.  —  26.  —  26,  B,  et  n'ayent...  conduite.  —  30  à  34,  B,  Que 
l'opiniatrer...  philosophiques.  —  248, 15  à  16,  C,  Quœ  tellus...  ferai.  —  22.  —  23  à24, 
B,  et  le  seul...  part — 27  à  28,  B,  la  date  de...  ny  tant.  —30  à  37,  B,  C'est  à  mon,.,  pé- 
nètrent. 

250,  2.  — 6 à 9,  C,  Comme  ce...  volontaire. —  19  à 20,  B,  Ceux  qui...  paroles.  — 36 


Da.l04  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

à  252, 1,  C,  A  qui  il...  orage.  — 5à6,  C,  Nous  sommes...  preiudice.  —  29  à  35,  B,  Nos- 
tre  vie...  la  leur.  —  39  à43,  C,  Quid...  gignimus.  — 254,  7,  C,  Et  quo...  laborem.  —  12 
à  13,  B,  Entre  les...  l'vtililc.  —  29  à  31,  C,  Quid...  astres  et.  —  36  à  41,  B,  Anaxi- 
menes...  monde.  —256,  2.  —  3. —  12.  —  19,  B,  qui  se  treuue.  —  20,  B,  par  opinion  et 
par  effet.  — 258, 3  à  5,  C,  Deprendas...  faciès.  —  10  à  12,  B,  La  plus  expresse...  serein. 

—  15.  —  17  à  262, 3,  B,  Elle  a  pour...  leur  ame. 

260.  —  262, 7  à 8,  C,  Vdum...rola.  —  11  à  16,  B,  Cicero...  nécessaires. —  35  à  36,  C, 
Petite...  canis.—37  à  40,  C,  C'est  ce  que...  saison.  —  41.  —  264,  2  à  9,  B,  Ny  ne...  on- 
gles. —  266, 5,  B,  bonne.  —  6,  B,  la  musique.  —  8,  B,  et  la  disposition  de  la  personne. 

—  13  à  15,  Et  à  l'ouïr...  contraire.  —  16.  —  17.  — 25  à  268,  12,  B,  Enfant...  musique. 

—  13  à  15,  B,  Qui  ne...  soleil.  — 29,  B,  son  exercitation...  l'vsage. 

270, 1  à  2,  B,  multum...  nesciat.  —  19.  —  19  à  33,  B,  Celuy-là...  actions.  — 38  à  272, 
3,  B,  Quidisciplinam...  vies.  —  38,  B,  à  la  conception.  —  39.  —  274,  5,  B,  Et  c'est... 
rapiunl.—-23  à  28,  C,  Et  quoy...  feray.  —  32  à  33,  B,  S'il  n'est...  en  soy.  —  38,  C, 
Emunctœ...  versus.  —  276,2à5,C,  Tempora...  poetae.  —  11.  —  14,  B,  Plus sonat...  va- 
let. —  20  à  26,  B,  Qu'il  s'en...  d'aage.  —22,  C,  contorta...  sophismata.  —  31  à  36,  B, 
aul  qui...  quérir.  —  278,  2  à  4,  B,  non  tant...  feriet.  —  5.  — 8.  —  12,  B,  Et  si  ne...  ap- 
pelle. —  9  à  14,  C,  l'ay  volontiers...  parler.  —  14  à  18,  B,  Toute  affectation...  mespri- 
sant.  — 20 à  26,  B,  Quaex^erilati...  pensent  de  mesmes.  — 40. 

280.  —  282,  25.  —  35.  —  284,  25.  —  286,  7.  —  7  à  25,  B,  le  sens.. .  ne  fay.  —  26  à  27, 
B,  et  des  iugements...  cognoissoit.  —  30  à  288, 2,  0,  Mettray-ie...  louablement.  — 2à 
5,  B,  Il  estoit  loisible...  deformabat.  —  5  à  15,  C,  Car  i'ay...  paternelle.  —  15 à  17,  B,  et 
qu'aux...  occultes.  —  33,  C,  Pour  reuenir...  propo.s.  —  Ch.  XXVI  (XXVII  dans  les  éd. 
ant.).  —  28 à 290, 1 ,  B,  Vt necesse...  persuasion. 

290,  29  à  30,  C,  iam  nemo...  lempla.  —  41  à  44,  C,  scilicet...  videtur.  —  45  à  292,  1, 

B,  Consuetudine...  causes.  —  1.  —  2.  —  7  à  13,  B,  si  l'on  entendoit...  Chilon.  —  18, 

C,  à  Mante.  —  38.  —  294,  12,  B,  Qui  vt...  frangèrent.  —  39.  —  296.  —  Ch.  XXVII 
(XXVIII  dans  les  éd.  ant.).—  25.  —298,6,  C,  peut  estre.  —  7  à  9,  B,  (moy  qu'il... 
papiers).  —  13,  B,  longue  espace.  —  20  à  28,  B,  Et  dit  Aristote...  iustice.  —  22  à 
28,  B,  en  gênerai...  coniointement. 

300,  7.  —  10  à  11,  C,  que  nous...  vers.  —  34  à  35,  C,  El  ipse...  paterni.  —  302, 

25.  —  34  à  35,  B,  où  l'homme...  entier.  —  37,  B,  et  par  les...  reietté.  —  39  à  306, 
15,  B,  Laquelle  pourtant...  sunt.  —  23,  B,  qu'en  respondant...  c' estoit  moy.  —  26 
à  308,  6,  B,  Nous  nous  cherchions...  qu'à  soy.  —  9  à  11,  B,  qui  ayant...  pareille. 

—  24.  —  27  à  35,  B,  Ils  estoient...  eux  mesmes. 

310,  10  à  17,  C,  mais  ie  ne...  ordinaires.  —  17  à  19,  B,  coustumieres...  nul 
amy.  — 30  à  32,  B,  et  leur  conuenance...  d'Aristote.  —  312,  5.  —  7  à  8,  B,  Quand 
le...  demandoit.  — 35  à  314,  8,  B,  si  deux...  monde.  —  14  à  38,  B,  et  qui  me...  ail- 
leurs. —  316,  20.  —  34  à  38,  C,  Illam...  ruinam.  —  318,  8.  —  21,  C,  et  auec  rai- 
son. —  30.  —  Ch.  XXVIII  (XXIX  dans  les  éd.  ant.). 

320. 330. 

34o!  —  344.  —  Ch.  XXIX  (XXX  dans  les  éd.  ant.).  —  20.  —  22  à  346,  18,  B,  I'ay 
veu...  trace.  —  19.—  22  à  24,  B,  Bien  apprentis...  deffend.  —  25  à 26.  —  29  à  35, 
B,  Ces  encheriments...  simple.  —  38,  C,  prudente  et.  —  348,  1,  B,  C'est  vn...  Pla- 
ton. —  1  à6,  C,  Certaines  nations...  mariage.  —  7  à  14,  B,  C'est  de...  parents.  — 
20  à  25,  G,  Tous  plaisirs...  Capitaines.  —  25  à  30,  B,  Sophocles...  chastes.  —  34  à 
37,  B,  Et  nostre...  desbordez. 

350,  5,  C,  Fortunœ...  vias.  —  6  à  12,  B,  La  sagesse...  bornes.  —  20  à  25,  C,  et 
qu'il  y...  ressentiment.  —  34  à  37,  C,  Cette  impression...  religions.  —  37  à  40,  B, 
Encore  du...  trespassé.  —  40  à  352,  29,  C,  Et  en  ces...  voicy.  —  Ch.  XXX  (XXXI  dans 
les  éd.  ant.).  —354,2  à  3,  B,  et  Philippus...  Galba.  —  13.-31  à  33,  C,  Hœcloca... 
foret.  —  356,  7  à  23,  C,  Il  semble...  fourriers.  —  23  à  25,  B,  Et  voyons  de...  pais. 

—  358,  40  à 360,  2,  Et  si  pourtant...  culture. 

360,  8  à  10,  C,  Et  veniunl...  canunt.  —  13  à  16,  B,  Toutes  choses...  dernière.  — 
35.  —  362,  2,  C,  Nos  natura...  dédit.  —  20  à  21,  C,  comme  Suidas...  manger.  —364, 
27  à  37,  B,  C'est  don...  imposture"?  —  366,  7  à  8,  B,  par  le  bout...  offencé.  —  43  à 
44,  C,  Vascones...  animas.  —  368,  34. 

370,  1.  — 3  à  9,  B,   Victoria...  contre  eux. —  21,  B,  si  succideril...  pugnat.  — 

26,  C,  les  plus  vaillants...  infortunez.  —  26  à  372,  13,  B,  Aussi,  y  a-il...  battre.  — 


VARIANTES  (1595-88  et  80).      LIV.  I,  CH.  XXX.      VOL.  I.  Da.lOo- 

374,  4.  —  4  à  12,  B,  Les  nostres...  père.  —  376.  —  Ch.  XXXI  (XXXII  dans  les  éd. 
ant.).  —  26  à  30,  B,  A  cette  cause...  cachée.  —  378,  10  à  14,  C,  En  vne  nation... 
discours. 

380,  7  à  12,  B,  Dieu  nous...  raison.  —  20,  B,  Quis  hominum...  Dominus?  — 
Ch.  XXXII  (XXXIII  dans  les  éd.  ant.).  —  384.  -  Ch.  XXXIII  (XXXIV  dans  les  éd. 
ant.).  --386,  3.  —  6  à  8,  B,  Sembbe-il...  finit.  —  38.  —  42  à  388,  18,  B,  Icetes  auoit... 
prudence.  —  19  à  31,  C,  Pour  la  Un...  l'autre.—  Ch.  XXXIIII  (XXXV  dansles  éd. 
ant.).  —  34. 

390,  15,  B,  ou  secourus...  estoient.  —  24  à  39,  B,  En  la  police...  failly.  —  392.  — 
Ch.  XXXV  (XXXVI  dans  les  éd.  ant.).  —  25  à  36,  B,  et  soubs...  nostre.  —  27  à  29, 
B,  les  jeux...  ventre.  —  33  à  394,  3,  B,  Pourquoy  semble...  deuotion?  —  14  à  21, 
B,  ce  qu'on  dit...  descouuertes.  —  28  à  33,  B,  Vn  Vénitien...  a  mise.  —  33  à  43,  C, 
Celuy  que...  reuerence.  —  43  à  396,  1,  C,  (non  pas  moy...  père).  —  5.  —  8  à  11,  C, 
Les  gelées...  naualo.  —  lia  30,  B,  Les  Romains...  voir.  —  31  à  35,  A,  sur  le  sub- 
ject...  deux  fois.  —  398.  —  Ch.  XXXVI  (XXXVll  dans  les  éd.  ant.).  —  2.  —  2  à 
14,  B,  Pour  me  sentir...  exemples.  —  16,  B,  5'im<  qui...  confidunt.  —  18,  B,  inimi- 
table. —  21,  et  débauche. —  21.  — 27  à28,  C,  virtutem...  ligna.  —29  à  31,  B,  quam 
vereri...  parement.  —  31. 

400,  6,  B,  autre  cause  mouuante.  —  8  à  19,  B,  En  cette...  passe.  —  19.  —  21  à 
28,  C,  Grande  subtilité...  volonté., —  28  à  402,  2,  B,  Ils  ne  font...  le  font.  —  5.  — 
10.  —  10  à  11,  B,  Sottes  gens...  gloire.  —  16  à  404,  13,  B,  et  pour  l'interest...  car- 
rière. —  Ch.  XXXVII  (XXXVIII  dans  les  éd.  ant.).  —  408,  2  à  10,  B,  Quand  io... 
définition.  —  10  à  14,  C,  Qui  pour...  pitié.  —  17  à 22,  C,  Largus  enim...  impercep- 
tiblement. —  22  à  30,  B,  Artabanus...  larmes.  —  24  à  43,  C,  Nil  adeu...  videtur. 

410.  —Ch.  XXXVIII (XXXlXdans les  éd.  ant.).  —  17.  —  21  à 22,  C, Rari  quippe... 
\ili.  —  26  à  412,  8,  C,  Et  les  marchands...  à  bord.  —  13  à  15,  C,  Charondas.;. 
compagnie.  —  13  à  20,  B,  11  n'est  rien...  maladies.  —  414,  11  à  12,  C,  comme  les... 
secouant.  —  42  à  45,  B,  C'est  ce  que...  naufrage.  —  416,  20,  C,  In  solis...  lucis.  — 
21  à  22,  B,  La  vertu...  effects.  —  418,  7  à  9,  C,  La  solitude...  Thaïes.  —  22  à  35, 

B,  11  est  temps...  office. 

420,  31  à  35,  B,  le  n'estime...  libéralement.  —  422,  38  à  39,  C,  Vsque...  allers  — 
424,  1  à  20,  B,  Il  semble...  de  vie.  —  22.  —  426,  12  à  13,  C,  et  choisir...  ire  via.  — 
34.  —  428,  3, C,  Tun',  vetule...  escas?  —  35,  B,  obuersenlur...  animo. 

430.  —  Ch.  XXXIX  (XL  dans  les  éd.  ant.).  —  432, 11  à  12,  C,  et  me  feroit...  créance. 

—  22  à  27,  B,  l'ay  vcu...  qualitez.  —  27  à  38,  C,  Les  compagnons...  sciai..  — 434, 
10 à  14,  C,  Vn  Roy...  ceux-là.  —  16  à  35,  B,  le  sçais...  concinnitas.  —  436,  26  à  27, 

C,  Sur  ce  subiect...  chose.  —  28  à  438,  1,  B,  Et  eusse...  succédé.  —  1  à  21,  C,  l'ay 
naturellement...  conception.  —  15  à  19.  —  21  à  26,  B,  A  bienuiennor...   lasches. 

—  26  à  440,  19,  Ce  sont  grands...  imprimer. 

440.  —  Ch.  XL  (XLI  dans  les  éd.  ant.).  —  442,  22  à  29,  C,  Celui-là...  darel!  — 

26  à  29,  B,  Or,  laissons...  leur  mort.  —  30.  —  444,  21.  —  446, 1  à  9,  C,  Au  royaume... 
maistre.  —  18  à  448,  36,  B,  Toute  opinion...  fync«r7-enm/.  —  36  à  40,  C,  l'ay  veu... 
ardente. 

450,  20,  B,  si  nous  en  deuenons...  laschos.  —  28,  B,  Aristippus,  Hieronymus  et. 

—  29.  --  462, 20.  -  22  à  :35,  B,  Toutesfois...  la  douleur.  —  454,  6.  —  16  à  17,  B,  Non 
enim...  beati.  — 2.5,  si  grauis...  leuis.  —  27  à  30,  B,  Si  tu  ne  la...  exeamus.  —  35. 

—  33  à  456,  25,  B,  de  ne  nous...  desclouë.  —  30  à  31,  B,  Comme  le...  l'àme.  —  33. 

—  458,  7  à  11,  B,  Outre  tant...  iumeaux.  —  12  à  11.  —  20  à  25,  B,  Et  Cicero...  mol- 
lissimus.  —  41  à  460,  2,  B,  Quis...  contraxit? 

460,4.  —  10  à  11,  C,  Vellerc...  nouant.  —  16  à  32,  B,  11  est  ordinaire...  cuisses.  — 
462,  10  à  474,  21,  C,  Q.  Maximus...  glace.  —  462,  10,  Q.  Maximus...  œgriludinem. 

—  32  à  35,  B,  Caton  Consul...  armis  esse.  —  464,  14  à  29,  B,  La  plus  commune... 
(a  médecine.  —  11,  B,  à  m'acquiter.  —  468,  6  à  8,  B,  n'y  ayant...  frangiiur.  —  M 
à  15,  B,  Elles  viennent...  forlunœ.  —  16  à  21,  B,  In  diuitiis...  subiects?  —  21.  — 
32  à  36,  B,  l'enfaisoy...  prudence. 

470,  2,  B,  de  monnoye.  —  8,  B,  Tout  compté...  l'acquérir.  —  11,  B,  Pour  auoir... 
pas  moins.  —  16,  B,  vous  n'oseriez  l'escorner.  —  22,  B,  (elles  sont...  bonnes).  — 

27  à  33,  B,  Selon  cette...  prudence.  —  33.  —  472,  9  à  12,  B,  Et  est  follie...  faict.  — 
13,  B,  de  quoy  ie  n'ay  que  faire.  —  14,  B,  Non  esse...  vectigal  est.  —  16,  B,  Divilia- 


Da.lOO  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

rum...satielus.  —  20.  —  21  à  474,  0.  B,  Feraulez...  cœur.  —  9  à  10,  B,  Chascun  est... 
malheureuse.  —  30,  B,  diuersement  les  hommes.  — 476,  1  à  4,  B,  Opinio  est...  im- 
pares. —  6.  B,  humaine  faiblesse.  —  7.  —  9  à  11,  B,  Nul  n'est...  feroit-on.  — 
Ch.  XLI.  —  17  à  21,  C,  Lafama...  sgombra.  —  23  à  25,  C,  c'est  la  plus...  rencon- 
tre. —  23.  B,  Quia...  cessât.  —  478,  34  à  480,  16,  C,  Semper  enini...  aux  pieds.  — 
478,  12  à  480,  16,  B,  Comme  les...  aux  pieds. 

480.  —  Ch.  XLII.  —  18.  —20.  —  22.  —  23  à  25,  B,  Hem!...  innumerables.  —  20  à 
31,  C,  Volucrem...  circo.  —  482,  42.  —  43.  B,  Sapiens...  sibi.  —  484,  3.  —  8à  9,  B, 
vn  noble...  pauure.  —  11  à  16,  B,  En  Thrace...  essentielle.  —  21  à  23,  C,  Scilicel... 
polal.  —  25,  B,  nie  beat  us...  félicitas  est.  —  32  à  37,  C,  et  le  soing...  ab  auro.  — 
486,  18  à  24,  C,  Puellœ...  mala.  —  33.  —  36  à  39,  B,  Tout  ainsi...  rebours.  —  488, 
2  à  3,  C,  il  a  beau...  et  auro.  —  21  à  24,  C,  Vt  satius...  commande.  —  29  à  20, 
C,  Pinguis...  nocel. 

490,  6  à  11,  B,  Il  n'est...  fauconniers.  —  14  à  27,  C,  Et  ie  ne  sçay...  balafre.  — 
19  à  20,  B,  De  vray...  plaist.  —  35,  C,  parleurs  et.  —  36  à  39,  C,  Le  Roy...  serui- 
teur.s.  —  492, 3  à  20,  C,  Les auantages...  tenent.  —  20,  B,  Paucos...  tenenl.  —  29  à 31, 
C,  Maximum...  laudare.  —  494,  7.  —  14  à  28,  C,  Toutes  les...  au  vice.  —  496.  — 
Ch.  XLIII.  —  16,  C,  qui  mangent  du  turbot.  —  18.  —  20,  C,  tels  excez...  Prince. 

—  498,  1.  —  7.  —  23  à  500,  17,  C,  C'estoit  vne...  esté  autres.  —  498,  21,  B,  à  leur 
(leuoir  et.  —  24,  B,  Quicquid...  videnlur.  —  25. 

500,  5  à  17,  B,  Platon  en...  esté  autres.  —  Ch.  XLIIII.  —  502,  42.  —504,  21  à  24, 
B,  Chez  Hérodote...  de  suitte.  —  Ch.  XLV.  —  506,  17  à  32,  C.  En  cette...  sauuetO. 

—  508.  —  Ch.  XLVI.  —  19  à  23,  C,  11  est  autant...  des  autres.  —  26. 

510,  3à  5,  B,  Et  Socrates...  enfants. —  14  à  20,  C,  Cette  correction...  l'endormit. 

—  512,  12  à  514,  8,  C,  11  y  a  tant...  confusion.  —  13  à  18,  B,  0  la  courageuse... 
iouët.  —  516,  3  à  6,  B,  Et  en  diuerses...  cognu.  —  12.  C,  fd  cinerem...  sepultos?  — 
13  à  24,  B,  Quel  ressentiment...  le  sçait.  —  518.  —  Ch.  XLVII. 

520,  10  à  17,  C,  grauissimi...  malheur.  —  H,  B,  grauissimi...  necessitatis.  —  13 
à  17,  B,  Voyla  pourquoi...  malheur.  —  27  à  29,  B,  Raison...  choses.  —  34  à  39,  C, 
Antiochus...  soyent.  —  524,  1  à  5,  B,  Alexandre...  impérial.  —  25  à  31,  B,  En 
cette...  a  trait.  —528,  23.  —24  à  26,  B,  Nous  raisonnons...  hazard.  —  Ch.  XLVIII. 

530,  9  à  34,  B,  Les  Numides...  commande.  —  35.  —  532,  14,  B,  Platon...  santé. 

—  17.  —  23,  B,  institution...  Cyrus.  — 28  à  35,  B,  et  pour  l'aduantage...  empire.  — 
534,  2,  B,  la  plus  part  du  temps.  —  5,  B,  quoy  qu'en...  Xenophon.  —  12  à  15,  C, 
csedebant...  decernit.  —  14  à  15,  B,  Leurs  battailles...  routes.  —  23  à  27,  C,  On  as- 
sené... gladiis.  —  32  à  536,  31,  B,  Celle  dequoy...  inuentions.  — 32.  — 33.  —  538,  4. 

—  9,  C,  et  bardelies.  —  11  a  19,  C,  Ce  que  i'ay...  currentium.  — 17  à  19,  B,  Et 
Numidœ...  currentium.  — 24  à  544,  9,  C,  Le  Courtisan...  son  assiette.  —  538,  24  à 
36,  B,  Le  Courtisan...  exercice. 

540,  4  à  9,  B,  Pour  vérifier...  salent.  —  21  à  35,  B,  Quelcun  de...  transcurrerunt. 

—  542,  7  à  17,  B,  Bajazet...  Hérodote.  —  24  à  36.  B,  le  n'estime...  viuoit.  —  544,  h 
à  9,  B,  pour  montrer...  son  assiette.  —  Ch.  XLIX.  —  14.  —  546,  6  à  8,  B,  11  n'y  a... 
insen.siblement.  —  30.  —  548,  2,  C,  comme  font  les  Vénitiens.  —  4  à  8,  B,  Et  tou- 
choyent...  l'autre?  —  29,  B,  comme  l'en  ay  veu. 

550,  23.  —  28  à  39,  C,  Ils  prenoyent...  estois  creu.  —  552.  —  Ch.  L.  —  15.  — 15  à 
17,  B,  Car  ie  ne...  faire  veoir.  —  17  à  554,  1.  —  5  à  556,  12,  B,  Entre  les...  qu'vn 
autre.  —  17  à  19,  C,  Aller...  aller.  —  558,  2  à  7,  B,  Conformément...  risible.  — 
Ch.  LI.  —  9  à  10,  C,  C'est  vn...  pied.  —  12  à  17,  C,  et  croy...  gaigne.  —  23  à  31, 

B,  Ariston...  perorations. 

560,  9  à  15,  B,  contre  l'opinion...  dit-il.  —  15,  B,  à  Rome.  —  24,  B,  bonne  insti- 
tution et.  —  562,  1  à  2,  C,  Nec  minimo...  secetur.  —  20  à  23,  C,  Ovez  dire...  cham- 
brière. —  27.  —  27.  —  564.  —  Ch.  LU.  —  23  à  25,  C,  11  ne  fut...  Romains.  — 
Ch.  LUI.  —  566,  11  à  13,  C,  Dum  abest...  tenet.  —  20  à  28,  C,  Nam  cum...  venirent. 

—  35.  —  Ch.  LIIII  .  — 568,  14,  B,  merueilleux.  —  23  à  25,  C, Les  daiz...  Uuernes. 

—  30  à  37,  B,  Le  saubriquet...  aplat. 

570,  5  à  6,  B,  Le  désir...  volupté.  —21  à  572,  22,  C,  Il  se  peut...  prix.  —  570,  21 
à  24,  B,  il  y  a  ignorance...  première.  —  25.  —  26,  B,  simplement.  —  572,  8  à  22,  B, 
Les  païsants...  prix.  —  29.  —  29.  —  31.  —  574.  —  Ch.  LV.  —  10.  —  19  à  576,  30, 

C,  l'ayme...  sa  boue.  —  574,  25  à  30,  B,  les  senteurs...  parfumées.  —  576,  7  à  10, 


VARIANTES    loOîi-SS  cl  80).       LIV.  I,  Cil.  LV.       VOL.  1.  Da.i07 

B,  On  lit  do...  plus  mal.  —  16  à  27,  B,  le  voudrois...  soudain.  —  578.  —  Ch.  LVI. 

—  là  13,  C,  le  propose...  comme  icy.  —  6  à  10,  B,  tenant  pour...  suis  nay.  —  20. 

—  21,  B,  sinon...  tousiours.  —  22  à  24,  B,  C'est  l'vnique...  cette  lu. 

580,  5,  B,  et  peut...  ayder.  —  7  à  9,  B,  comme  il...  pouuoir.  —  9.  —  10  à  15, 
B,  Platon...  constance.  —  26 à  32,  C,  Si  noclumus...  malice.  —  28  à  32,  B,  Et  l'as- 
siette... malice.  —  34  à  584,  6,  C,  Et  me  desplaist...  part.  —  582,  2.  —  7  à  584,  G, 

B,  Quelle  prodigieuse...  part.  —  7.  —  15  à  590,  11,  C,  Ny  n'est...  taire.  —  584,  15. 

—  17,  B,  C'estoyent...  esbats.  —  23  à  33,  B,  Ce  n'est  pas...  témérité.  —  33.  —  586, 
10  à  588,  17,  B,  L'vn  de  noz...  le  nom.  —  36,  B,  verbis  indisciplinalis.  —  38.  — 
38  à  590,  5,  B,  le  propose...  non  instruisants. 

590,  11.  —  22.-25.  —  36,  B,  et  le  conuions  à  l'iniustice.  —  26,  C,  Quœ,  nisi... 
diuis.  —  33  à  38,  C,  Au  pied...  ipse.  —  33  à  35,  B,  Au  pied...  auarice.  — 592,  11. 

—  18  à  19,  C,  Tacito...  concipimus.  —  20.  —  31  à  35,  B,  Les  Dieu.x...  prudence. 
36,  B,  comme  d'vn  iargon,  et.  —  39,  C,  ou  de  nostre  contenance.  — 594,  2.  —  11 
à  16,  C,  Ny  les...  mica.  —  11  à  12,  B,  Ny  les...  meschant.  —  Ch.  LVIL  —  24.-598, 
3  à  5,  C,  Si  l'espine...  Daulphiné.  —  9  à  14,  B,  Ouy,  en...  d'eux-mesmes.  —  21  à  28, 

C,  Vbi  iam...  dangereux.  —  29. 


LIVRE  SECOND. 

600.  —  Ch.  L  —  18.  —  19  à  602,  9,  C,  Il  y  a...  vray.  —  8,  B,  et  distinctement...  à 
pièce.  —  37  à  39,  C,  iVomie...  possit.  —  604,  5  à 6,  B,  Nous  flottons...  constam- 
ment. —  9  à  12,  B,  (Empedocles...  mourir).  —  30.  —  38.  —  606,  11  à  18,  B,  Quand 
nous...  despit.  —  24  à  608,  4,  C,  Cette  variation...  Logique.  —  606,  24  à  29,  B, 
Cette  variation...  simple.  —  36,  B,  chaste,  luxurieux.  —  38,  B,  sçauant...  prodigue. 

—  608, 20  à  36,  C,  Quand  estant...  courage.  —  20  à  26,  B,  Quand  estant...  proficiscn- 
liir.  —  28  à  29,  B,  Toute  incomparable...  taches.  —  34  à  36,  B,  Et  l'excès...  courage. 

610,  4.  —  8,  B,  cui  viuendi...  prouisa  est.  —  25  à  32,  B,  Ny  ne  trouue...  publi- 
ques.—  34,  C,  chaque  moment.  —  36,  B,  Magnam...  agere.  —  612,  C,  Hac  duce... 
venit.  —  Ch.  IL  —  29  à  614,  3,  C,  La  confusion...  incognus.  —  612,  45  à  614,  3,  B, 
Comme  Socrates...  incognus.  —  10  à  16,  C,  et  estonne...  de  soy.  —  15  à  16,  B,  Le 
pire...  de  soy.  —  20  à  22,  C,  Tu  sapientium...  Lyseo.  —  31  à  34,  B,  Et  commit... 
vin!  —  36  à  616,  21,  C,  Nec  facilis...  ensemble.  —  1  à  21,  B,  le  n'eusse  pas...  en- 
semble. —  26  à  27,  C,  Hoc  quoque...  ferunl.  —  28.—  30  à  31,  C,Narratur...  virtus. 

—  38.  —  38  à  39,  C,  Et  escrit-on...  affaires.  —  618,  10  h  620,  30,  B,  Vn  homme... 
bouteilles. 

620,  33.  —  622,  2  à  3,  B,  Les  autres...  prix.  —  5  à  624,  5,  C,  le  ne  puis...  Arcesi- 
laiis.  —  622,  8  à  624,  5,  B,  Ma  constitution...  Arcesilaûs.  —  24  à  27,  C,  Sudores... 
videmus.  —  29  à  32,  B,  comme  vn...  fadeze.  —  33  à  34.  —  36,  B,  qui  feignent... 
poste.  —  626,  4  à  11,  Laissons...  pilez.  —  26,  B,  mot  d'Antisthcncz.  —  32,  C,  et 
dignes  do  luy.  —  628,  16  à 20,  C,  et  s'en  respond...  céleste.  —  16  à  20,  B,  Platon... 
céleste.  -  Ch.  in. -24. —31. 

630,  10  à  11,  B,  Et  à  Philippus...  mourir?  —  12  à  16,  C,  Nous  pouuons...  Romains. 

—  632,  2  à 5.  —  3  à  21,  B,  C'e.st  foiblesse...  de  vie.  —  22.  —27  h  29,  B,  que  nous 
ne  sommes...  contre  nous.  —  36,  B,  d'espreuue.  — 634,  22,  B,  Hic,  rogo...  mari? 

—  28.  —  32  à  37,  B,  Platon...  craintiue.  —  46,  B,  Il  n'en  vaudroit  de  rien  mieux. 

—  49  à  51,  C,  Débet...  accidere.  —  636,  32  à  33,  C,  Speral...  minax.  —  638,  9.  — 
13  à  22,  C,  A  la  iournée...  locauil.  —  13  à  19,  B,  A  la  iournée...  superstes  fuit.  — 
24.  —  25.  —  25  à  26,  B,  Seneque...  l'ame.  —  28  à  42,  B,  Damocritus...  les  siens. 

640,  28,  B,  par  l'vne...  playes.  —  30,  B,  sur  eux.  —  35  à  642,  1,  B,  L'histoire... 
conscience.  —  17  à  650,  2,  C,  Lucius  Aruntius...  testament.  —  642,  18  à  644,  16,  B, 
Gr'anius  Siluanus...  le  feu.  —35  à  646,  43,  B,  Vibius  Virius...  Consul.  —  49  à  648, 
28,  B,  Astapa...  iugements. 

650,  7  à  10,  B,  Par  où...  iugement.  —  16  à  25,  B,  En  certain...  partie.  —  25  à  26. 

—  652,  30  à  31,  C,  La  douleur...  incitations.  —  654.  —  Ch.  III.  —  1.  —  7.  —  656, 
5  à  6,  C,  vers  laquelle...  complexion;  et.  —  9  à  14,  C,  le  n'en...  d'autruy.  —  20. 

—  36.  —  658.  —  Ch.  V.  —  1  à  2.  —  7.  —  11  à  15,  C,  Comme  il...  espérance. 

660,  2.  —  13  à  15,  C,  l^ippe...  dédisse.  —  24  à  26,  C,  Et  ie  puis...  desseins.  — 


Da.108  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

662,  1  à  4,  il  auoit...  innocence.  —  6  à7,  B,  Et  celuy...  souffrir.  —  17 à  24,  C,  Que 
ne  diroit...  géhenne.  —  19  à  21,  B,  Eliam...  géhenne.  —  22.  —  25,  B,  dit-on.  — 
26  à  664,  5,  B,  bien  inhumainement...  instructiue.  —  Ch.  VI.  —  11.  —  666,2. 

—  16,  C,  Jus  hoc...  habebat.  —  25  à  33,  B,  Combien...  crainte.  —  38.  —  38.  —  668, 
9  à  13,  C,  Voicy  que...  ailleurs.  —  39. 

670,  18  à  19,  C,  Perché...  mente.  —  25  à 26,  C,  Corne...  deslo.  —  40.  —  672,  3  à  7, 
C,  vi  morbi...  fatigat.  —  14,  C,  Viuil...  suœ.  —  20  à  31,  C,  le  n'imagine...  misère. 

—  674,  10,  C,  Semianimésque...  retractant.  —  13  à  22,  C,  et  ont  des...  dolorem.  — 
23.  —  42,  C,  et  arrosée.  —  676,  13.  —  15,  C,  VI  tandem...  mei.  —  20.  —  38  à  682,  26, 
B,  Et  ne  me  doibt...  sa  bouche. 


SECOND   VOLUME 

10.  -  Liv.  II,  Ch.  VII.  —  12,  10  à  11.  -  12.  -  16.  —  25,  B,  non  plus...  mes- 
mes.  —  28.  —  14.  12  à  14,  C,  Et  qui...  militaire.  —  20,  B,  Neque  enim...  sunt.  — 
16,  11.  —  18.  —  Ch.  VIII.  -  17.  -  21.  B,  vostre  mari. 

20,  B,  vostre  fils.  —  24  à  36,  B,  loint  cette...  prendre.  —  22,  7,  B,  et  ne  les... 
de  moy.  —  17.  —  24,  B,  Comme...  pour  sortir.  —  27,  B,  nous  mesler  d'.  —  24,  22 
à  23,  C,  le  le  hay...  personne.  —  23.  —  27.  —  36  à  37,  B,  (de    vray...  d'auarice). 

—  26,  Il  à  29,  C,  l'accuse...  opiniastres.  —  18,  B,  Leonor.  —  32,  B,  nuUum... 
habet.  —  40  à  42,  le  me  maryai...  Aristote.  —  42  à  28,  7,  B,  Platon...  importune. 

—  10  à  19,  C,  d'autant...  dix  ans.  —  11,  B,  par  l'accouplage  des  femmes.  —  15  à 
22,  B,  Muleasses...  Vénérien.  —  37. 

30,  1,  C,  à  l'imitation...  qualibrc.  —  28.  —  32,  32,  B,  comme  nostre...   miliers. 

—  34,  5,  C,  vrais  epouuantails  de  cheneuierc.  — 6  à  38,  20,  C,  Quand  ie...  auanta- 
geusement.  —  34,  13,  B,  le  plus...  France.  —  31  à  36,  14,  B.  Ce  seroit...  effect.  — 
31  à  34,  B,  Le  vieil  Caton...  à  nous.  —  38,  2  à  20,  B,  Au  cas  que...  auantageuse- 
ment. 

40,  7.  —  9  à  17,  C,  0  mon  amy...  que  ce  soit.  —  9  à  13,  0  mon  amy...  priua- 
tion.  —34  à  42,  8,  C,  Pourtant...  belles.  —  19  à  46,  6,  B,  En  gênerai...  laissez.  — 
26.  —  48,  3,  B,  autour  de.  —  15  à  20,  B,  le  croy...  premiers  pas.  —  20.  —  32  à  34, 
B,  Platon...  Minos.  —  35  à  50,  5,  B,  Heliodorus...  façon. 

50,  33  à  37,  C,  Pareil...  manger.  —52,  22,  C,  Et'ie  ne...  que  moy.  —  22,  B, 
beaucoup.  —  24  à  31,  B,  A  cettuy-ci...  que  moy.  —  33.  —  34  à  35,  B,  Car  selon... 
ouurage.  —  39.  —  54.  —  Ch.  IX.  —  25  à  26,  B,  Tite  Liue...  gerebant.  —27  à  31,  C, 
ou  se  couuroient...  rarement.  —  56,  2,  B,  ou  autrement.  —  7  à  15,  C,  et  comme... 
victoire. —  24  à  28,  C,  Et  craignoit...  gauche. — 24  à  25,  B,Et  craignoit...  garder. 

—  36,  B,  L'Empereur...  armée.  —  40,  B,  arma...  dicunt.  —  58,  3  à  5,  C,  iusques 
à...  haste.  — 7  à  9,  B,  Le  ieune...  cuit.  —  17.  —  32 à  36,  C,  Flexilis...  armos. 

60.  —  Ch.  X.  —  1.5.  —  16.  —  17  à 62,  12.  —  31.  —  64,  2,  C,  Has  meus...  equus.  — 
5  à' 12,  C,  Si  ie  m'y...  réitérées.  —  7  à  8,  B,  et  contention...  ferme.  —  9,  B,  Ma 
veue...  dissipe.  —  20.  —  34,  B,  anciens.  —  34.  —  39,  C,  et  aduoue.  —  66,  13,  C, 
Et  le  cinquiesme...  parfaict.  —  19,  B,  à  toute  heure...  à  luy.  —  28,  C,  0  seclum... 
infacetum.i  —  30,  C,  cestuy-ci...  Gentil-homme.  —  31,  B,  et  préférence.  —  32  à  34, 
B,  fait  beaucoup...  compagnon.  —  68,  10.  —  26,  C,  ils  montent...  iambes.  —  26.  — 
29.  —  31  à  35,  C,  Et  les  dames...  ordinaire. 

70,  1.  —  14.  —  22,  B,  et  dépendance.  —  22.  —  31,  C,  selon  moy.  —  31,  B,  en 
particulier.  —  72,  2,  C,  il  nous...  pousse.  —  4.  —  7.  —  15,  B,  ou  éloquent.  —28, 
B,  à  qui  il...  portera.  —31,  que  nous...  corda  [manque  dans  88].  —  36  à  74,  6,  B, 
La  licence...  dressent.  —  10.  —  29,  B,  ambitieuse.  —  35.  —  76,  21  à  25.  —  28.  — 
30  à  34,  B,  ou  plus  entendu...  fantasies.  —  78,  8. 

80,  7.  -  16,  B,  ou  au  moins...  sorte.  —  20.  -  22.  -  84.  —  Ch.  XI.  —86,  12  à  16, 
B.  quoy  que  die...  iamais  des  coqs.  —  23,  B,  et  en  ses  mœurs.  —  25  à  27,  B,  et 
ijqui...  retinent.  —  34,  B,  multum...  lacessita.  —  88,  19,  B,  et  imperfections. 


VARIANTES  :io0o-88  et  80).      LIV.  II,  CH.  XI.      VOL.  II.         Da.109 

90,  8.  —  11,  B,  Sic  abijl...  gauderel.  —  23,  C,  et  d'vne...  virile.  —  26,  C,  Dellbc- 
rata...  ferocior.  —  20.  —  32  à  43,  B,  La  philosophie...  à  sa  vie.  —  92,  10  à  13,  B, 
A  ce  tressaillir...  adueiiir.  —  10  à  17,  B,  Aristippus...  fit-il.  —  94,  22  à  23,  C, 
Haud  iynarus... possit.  —  27  à  30,  C,  l'av  veu...  Au  deuieurant.  —  96,  12  à  15,  C, 
Seu  Libra...  vndœ.  —  17  à  19,  C,  La  responco...  en  horreur.  —  25  à  43,  C,  le  di- 
ray...  exemple.  —  20,  B,  par  là  en  plusieurs  choses.  —  28  à  43,  B,  Aristippus... 
exemple.  —98,  1  à  2.  —  9,  C,  nec  vllra...  f'oueo.  —  19  à  24,  B,  Ce  sont  incontinant. 

—  27  à 29,  B,  Et  les  familiers...  l'autio.  —  31  à  33,  C,  L'innocence...  d'art. 

100,  y  à  12.  —  12.  -  18  à  20.  —  22  a  2.').  —  25.  —  29.  —  31  à  33,  B,  Il  n'est...  peintes. 

—  102.  —  7.  —  12  à  31,  B,  Ces  iours...  changée.  —  'M'>  à  104,  17,  C,  comme  Dieu... 
essentielle.  — 30  à  104,  2,  B,  comme  Dieu...  diuexarur.  —  lia  17,  Les  ^tlgyptiens... 
essentielle.  —  28,  C,  en  angoisse.  —  30,  B,  VI  homo...  mc'ulul.  —  37  à  ;fô,  C,  quœ- 
stxiqite...  similis.  —  45  à  106,  5,  C,  Apres  qu'on...  desmembrer.  —  12,  C,  nations.— 
22à  37,  C,  Muta  ferrarum...  furrnœ.  —  42,  B,  Belluse...  comccrulœ.  —  108,  1  à  5, 
C,  Crocoddon...   venerantur.  —  10  à  11.  —  19.  —  20  à  30,  C,  le  ne  crain...  bestes. 

—  35  à  110,  3,  B,  Les  Agrigentins...  trespas. 

110.  —  Gh.  Xn.  —  28,  C,  non  plus...  prédécesseurs.  —  112,  12.  —  14.  —  22,  C, 
Nain  cupide...  melulum.  —  25,  B,  particulier.  —  28,  C,  comme  celuy-là.  —  31,  B, 
nommément...  foible.  —  32.  —  114,  9.  —  25.  —  116,  39  à  118,  2,  C,  Voulez  vous... 
Chrestiens.—  2  à  7,  B,  Toutes  autres...  vérité.  —  7  a  18,  C,  Pourtant  eut...  vicieu- 
ses. —  23  à  20,  B,  Breuis...  croire.  —  34.  —  30  à  120,  21,  B,  Sentez  si...  dire. 

120,  31,  B,  et  casuelles.  —  32  à  122,  2,  B,  le  voy  cela...  incite.  —  9  à  20,  B,  Le 
meilleur...  prestre.  —  30  à  32,  C,  Non  iam...  ceruus.  —  124,  0  à  7,  C,  Nous  sommes... 
.\lemans.  —  9.  —  13  à  15,  B,  Plaisante...  descroire.  —  17  à  126,  10,  B,  Ils  eslablis- 
sent...  peuuent.  —  10  à  15,  C,  L'erreur  du...  imbécillité.  —  30  à  128,  2,  C,  Car  ce 
monde...  intelligibles.  —  9. 

130,  3  à  7.  —  22  à  25,  B,  Abbattons...  aux  hommes.  —  3  à  132,  2,  B,  Car  Sainct 
Augustin...  entremise.  —  34  à  134,  4,  B,  Ont  elles...  accouplage.  —  41  à  43,  B,  qitœ 
molilio...  fuerunl?  —  136,  2  à  9,  B,  Dirons  nous...  angusliœ.  —  10  à  11,  B,  y  deui- 
ner...  Anaxagoras?  —  14  à  17,  B,  Inler...  cogitanlem.  —  19.  —  34  à  138,  12,  B, 
Quand  ie...  temps.  —  18  à  23,  C,  Toutestois...  mouuements.  —  25.  —  31  à  34,  C, 
Et  mufœ...  gliscunl.  —  34.  —  38,  B,  leurs  mouuemens...  traictent. 

140,  1  à  2,  C,  Non  alla...  lingux.  —  10  à  11,  C,  E'I  silentio...  parole.  —  12  à  37. 
C,  Quoy  des  mains...  intelligible.  —  12  à  32,  B,  Quoy  des  mains...  d'autre  langue. 

—  142,  0.  —  39.  —  144,  19  à  31,  C,  Tum  poivra...  rerum.  —  33.  —  30  à  39,  C, 
Nos  anciens...  froid.  —  40.  — 146,  12,  C,  Sentit...  abuti.  —  21.  —  148,  18  à  28,  C, 
Comment  ne...  rire  encore.  —  32  à  35,  C,  Variseque...  cantus. 

150,  7,  C,  Indupedita...  vincHs.  —  10  à  11,  C,  lies  quœque...  semant.  —  28,  B. 
et  de  plus  riches  effects  des  facultez  plus  riches.  —  30  à  31,  B,  ou  quelque... 
meilleure.  —  152,  30  à  33,  C,  et  les  Cliraacides...  en  coche?  —  35  à  30,  B,  Les 
femmes...  inary.  —  39  à  154,  15,  C,  Des  armées...  tombe.  —  10  à  15,  B,  Quand 
les...  tombe.  —  18à25,  B;  A  quel...  seruis.  — 32  à  41,  C,  Serpente...  ses  rets.  — 43, 
B,  des  colliers.  —  156,  34  à  35.  —  158,  30.^ 

160,  28  à  162,  1,  C,  Nous  pouuons...  harmonie.  —  164,  10.  —  18  à  19,  C,  qui 
tient...  ordonnée.  —  21  à  24,  C,  Si  quideni...  turrim.  —  34  à  39,  C,  comme  fai- 
soient...  aspreté.  —  166,  1,  B,  et  siècles.  —  1  à  3.  —  22.  —  22  à  24,  C,  et  i'ay... 
traictent.  —  168,  9. 

170,  0,  B,  desquelles...  à  nous.  — 38.  —  172,  K».  —  15  à  22,  C,  EtveieUent...ictiim. 

—  176,  20.  — 178.  7  à  9,  C,  Quando...  apri?  —  10,  B,  pourtant.  —  22  à  25,  C,  Ful- 
gitr...  ruundi. 

180,  2  à  7,  Quant...  tellus.  —  21  à  22,  C,  qui  ont...  Crassus.  —  25  à  44,  C, 
Qu'on...  éléphant.  —  25  à  33,  B,  Qu'on...  à  dire.  —  45,  B,  vifue.  —  43  à  186,  3,  C, 
Nous  pleurons...  les  nostres.  —  188,  23  à  27,  C,  Touchant...  mourir. 

190.  —  192,  38  à  40,  B,  de  laquelle...  appétit.  —  41,  C,  Turpis...  color.  —  43  à 
194,  19,  C,  et  chargent...  l'espaule.  —  0  à  9,  B,  Et  vn  homme...  d'oreille.  —  14  à 
lit,  B,  Non  seulement...  Pline.  —  23  à  26,  B,  Tout  ainsi...  boule.  —  31  à  35,  B,  ^ 
multis...  aërées.  —  196,  4  à  8,  B,  Quels  animaux...  bestes?  —  12,  B,  Simia...  nobis! 

—  13.  -  17.  —  20.  —  25.  —  31.  -  32.  —  33  à  39,  C,  Ce  n'est...  amore.  —  198,  5. 

—  38.  —  41  à  200,  4,  B,  Car  en  lin...  tantost. 


Da.no  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

200.  —  14  à  24,  C,  S'il  ne  nous...  dari.  —  15.  —  18  à  24,  B,  Vt  vinum...  darl.  — 
202,  1  à  20,  C,  A  on  trouué...  sa  vie.  —  11.  —  13,  B,  ou  pour...  richesse.  —  15  à 
20,  B,  Il  ne  nous...  à  sa  vie.  —  39  à  204,  2,  B,  d'autant...  péché.  —  5  à  7,  B,  Et  les 
Sereines...  science.  —  10  à  11,  B,  Cauele...  mundi.  —  11.  —  14.  —  20.  —  22  à  24, 
C,  Les  Dieux...  essence.  —  206,  1  à  9,  C,  Deus...  sapience.  —  14.  —  14  à  17,  B, 
Conformément...  surmonte.  —  19.  —  34.  —  28  à  208,  5,  B,  Se.succumbere...  Stoi- 
ques.  —  17.  —  18,  et  ceux  d'vn  cheual  [manque  à  88]. 

210,  10,  C,  à  présent.  —  14.  —  14  à  20.  B,  Ce  qu'on...  quelconque.  —  25  a  212, 

19,  C,  comme  elle...  guider.  —  18  à  19,  B,  11  nous  faut...  guider.  —  24.  —25,  B, 
Scgnius...  senthmt.  —  34.  —  36.  —  36  à  38,  B,  comme  disoit...  mali.  —  214,  7  à' 19, 
B,  Si  ne  la...  suiure.  —  26  à  27,  B,  retirer...  et  de.  —  30  à  31,  B,  Leuaiiones... 
ponit.  —  37  à  39,  C,  Ce  seroit...  la  noia.  —  216,  2  à  4,  B,  et  conseil...  memoria.  — 
13  à  16,  B,  Et  cela...  volo.—  17,  B,  ç-wi  se...  ausus.  —  22,  B,Iners...  est.  —  218, 15à 

20,  B,  Placet?...  V.  le  B.  —  35  à  220,  7,  C,  Et  Crates...  corps.  —  218,  35  à  36,  B. 
Et  Crates...  hart. 

220,  22,  B,  par  les  Espagnols.  —  222,  14  à  24,  B,  0  cuider...  sagesse.  —  3^4  à 

224. 1,  C,  Si  elle...  Ciceron.  —  222,  36  à  224,  1,  B,  Melius...  Ciceron.  —  3  à  7,  C. 
Nous  disons...  sienne.  —  8  à  22,  B,  et  le  fait...  omnia.  —  226,  11.  —  21  à  29,  B, 
C'est...  descouure.  —  31  à  37,  B^  Nous  sçauons...  vitœ.  —  39  à  228,  3,  B,  Et  pen- 
dant... diffidens.  —  14,  B,  de  sagesse.  —  21.  —37  à  40,  B,  de  qui...  Xenophanes. 

230,  16  à  21,  B,  Zenon...  science.  —  232,  10  à  234,  20,  C,  Pourquoy...  croyent.  — 
232,  20  à  21,  B,  ad  quamcumque...  adhxrescunl.  — 24  à  26,  B,  /Tôc...  autres.  —  30 
à  33,  B,  Qu'iray-ie...  ignorons.  — 234,  1  à  7,  B,  S'il  est...  professeur.  -  23  à  24,  B, 
Rien...  faux.  —  27,  B,  et  suspension.  — 236,  B,  non  enim...  voluit.  —  7.  —  14,  B, 
en  règle  et  droicture.  —  17  à  238,  2,  B,  Si  n'est-il...  humaines.  —  11  à  14,  C,  C'est 
vne...  valons.  —  12 à  13,  C,  Dominus...  sunt.  —24  à 37,  Bjquam  docli..  requiralis. 

240,  4  à5,  B,  Et  pourtant...  escrits.  —8.  —  10  à  32,  C,  Oyez  la...  di.sciplines.  — 
10  à  18,  B,  Oyez  la...  nota.  —  19.  —  22  à  23,  B,  Clytomachus...  estoit.—  31  à  37,  B, 
Cicero...  disciplines.  —  242,  4  à  9,  B,  De  quelque...  profuet-unt.  —  10.  — 9  à  31,  B, 
Le  conducteur...  d'autruy.  —32  à  36,  C,  comme...  autres.  — 38.  —  38  à  244,  20,  B, 
Et  les  reconciliateurs...  matière.  —  25 à  30,  C,  semblable...  prouidentiœ.  —  26.  —  29 
à  30,  B,  reuenant...  prouidentiœ.  —  35.  —  35,  B,  et  trouuent...  sçauoir.  —  246,  3. 

—  7  à  8,  B,  Et  volontiers...  supposé.  —  15  à  35,  C,  Satius...  après.  —  15  à  20,  B, 
Satius...  salutaire.  —  31.  —  248,  2.  —  7  à  9,  B,  pourueu...  vi.  —  15.  —  19  à  39,  B, 
Platon...  compte. 

250,  5  à  7,  B,  A'^on  lam...  volidsse.  —  22,  B,  soubs  quelque  nom.  —  24  à  34,  B,  Ju- 
piter... songes.  —  36.  —  39  à252,  20,  B,  Pythagoras...  effect.  —  21.  —  42  à  256,  30,  B. 
Thaïes...  inconsidérée.  —  32.  —  258,  B,  nos  morts  et  sépultures.  —  7  à  12,  C,  Quœpro- 
cul...iracundias. — 9àl2,B,  Formse...  iracundias.  —  13à  15,  B,  non-seulement...  mi- 
sère. —  16  à  25,  C,  Quid...  vénération.  —  19  à  25,  B,  Les  ^Egyptiens...  vénération. 

260,  2  à  4,  B,  Si  sont...  mondaines.  —  17.  —  30,  B,  Tout...  mortel.  —  27  à  28,  B. 
et  parfaitement...  expei'ience.  —  35  à  36,  C,  Hector...  equo.  — 40  à  41,  C,  Quod... 
migrant.  —  262, 4  à  8.  —  25  à  26,  C,  Scilicet...  toto.  —  31  à  32,  C,  Inter...  omnes.  —  45 
à264, 1,B,  s'il...  mortelle. —  13à  20,  C,  C'est...  cognoissance.  — 29à34.  B,  Comme... 
d'or.  — 33  à  266, 20,  C,  Sulmone...  contente.  —  1  à  17,  B,  Les  Getes...  malormn.  —  25. 

—  26  à  37,  C,  et  de  vouloir...  occidissent.  —  33  à  35.  ^  36  à  37,  B,  Quœ  fuit...  Occidis- 
sent.  —  38  à  268, 12,  C,  qui  ne...  prophète.  —  266,  39  à  268,  3,  B,  et  ne...  peine.  —  7 
àl2,B,  Et  elle...  prophète.  —  13àl4,B,en  la...  l'embonpoinct. —  15à25,B,  Tantus... 
intulit.  —  34  à  270,  2,  B,  Infirmum...  cela. 

270, 32.  —  38  à  39,  C,  Terra)nque...  innumerali.  —  272, 4  à  5,  C,  €um...  crescal.  —  10 
à  12,  C,  Quare...  sether.—  li  à  19,  B,  que  Platon...  créateur.  —  22à23,  B,  Epicurus... 
dissemblables. —  27  à  29,  B,  Et  au...  Ceres.— 31  à42,  C,Et  y  a...  est  ainsi.  —  39  à  41, 
des  nations...  noire.  — 274,  6 à  8,  B,  Cela...  ignorance.  —  14.  —  15 à  18,  B,  la  neige... 
Ou  si.  —  23  à  276,  3,  C,  Et  non...  vaine.  —  274,  26  à  27,  B,  la  mort...  moment.  — 
32  à  276,  B,  Protagoras...  vaine.  —  3.  —  16  à  22,  C,  Prenons...  embourbez.—  27, 
B,  assurentque.—  35à36,  C,  Cette  fantasie...  balance.  —  278,  6.  —  32  à  36  B,  Mi- 
rum...  similitude.  —40.  —41  à  280,  26,  C,  Et  est...  corps. 

280,  1  à  26,  B,  Magna...  corps.  —28  à  292,  14,  C,  Voyez...  familières.  —280,  40  à 

282.2.  B,  Quasi...  faict.  —  8,  B,  quand...  trouue. —  9  à  13,  B,  L'homme...  faire. — 


VARIANTES  (1595-88  et  80),       LIV.  [1,  CH.  XH.       VOL.  II.         Da.lli 

iO  à  37,  B.  Nous  sommes...  bonté.  —  39  à  284,  6,  Los  biens...  compagnons.  —  14  à 
15,  B,  Profecto...  camparant.  —27  à  286,  11,  B,  Varro...  langue.  —  13  à  14,  A,  (le 
lyon...  espèce).  —  19  à  25,  B,  D'où...  humana.  —  38  à  39,  B,  Tarn...  natura.  —  288, 
12  à  13,  B,  pour  nous...  des  leurs.  —  18  à  22,  B,  Les  Cauniens...  territoire.  —  24, 
B,  qui  la  peste.  —  24  à  25,  B,  qui  vne  sorte...  Deos.  —  27  à  28,  B,  à  chasque...  Dieu 

—  31  à  36,  B,  0  sancte...  vcnerandvs .  —  37  à  39,  B,  qui  loge...  mio. —  42  à  290,  8, 
B,  Trois  à...  mauuais. 

290,  11  à  18,  B,  L'homme...  fallUur.  —  20  à  23,  B,  Et  ne...  témérité.  —  26  à  27. 
B,  s'enquiert...  règlement.—  32  à  34,  B,  etvtile...  receuoit  :  et.  —  37  à  292,  14,  B, 
Socrates...  familières.  —  27  à  294,  10,  C,  et  ranger...  poétique.  —  292,  27  à  29,  B, 
et  ranger...  Platon.  —  35,  B,  et  fanatiques  folies.  —  34  à  294,  10,  B,  le  suis... 
poétique.  —  16  à  17.  C,  (et  nostre...  iustice).  —  24  à  29,  B,  Platon...  dire.  —  296. 
7  à  15,  B,  Et  ce  n'est...  faillent.  —  22  à  24,  Car...  plagas.—  27  à  32,  B,  Comme... 
hommes.  —  298,  5,  B,  à  telle...  basse.  —  8.  —  8  à  1 1.  B,  Omnia...  homo  est. 

300,  15.-302,7  à  9,  B,  La  persuasion...  Platon.  —  304, 11  à  21,  C,  non  de...  insi- 
nuelse.  —  11  à  16,  B,  non  de...  cognoistre.  —  38  à39,  C,  HabUum...dicunt. —  306, 
4  à6,  B,  Et  après...  Cicero.  —  8  à  11,  B,  Heraclitus...  essence.  —  15  à  16,  C,  Vl 
bona...  valentis.  — 18 à  19,  C,  Hic...  mulcenl.  —  24  à  29,  B,  Qua  facie...  ignorées. — 
39  à  308,  15,  B,  Que  craignons...  Dieu.x.  —  30  à  310,  2,  B,  Et  lors...  sage. 

310,  0.  —  6  à  9,  B,  Qui  fagoteroit...  modérées.  —  17.  —  28,  B,  et  les  falsifient.  — 
31,  B,  pour...  enfans.  —  33  à  312,  17,  C,  le  conseillois...  fortuit.  —  1,  B,  et  a  tant 
dict.  —  4  à  5,  B,  Nihil...  philosophoriim.  —  8  à  17,  B,  Mes  mœurs...  fortuit.  —  18. 

—  33  à  34,  B,  Médium...  lustrât.  —  37  à  38,  C,  Cxlera...  monetur.—  314,  33  à  3-5,  C, 
Siin...  tenemus?  —  37.  —  41.  —  316,  12à  14,  C,  Nam  si...  errai.  —  30à33,  B,  Platon... 
temporelles.  —  36.  —  318,  3  à  4,  C,  Gigni...  mentem.  —  10  à  11,  C,  Mentem...  vide- 
mus.—  15  à  16,  C,  Corpoream...  laborat.  —  25  à  27,  C,  Fis...  vetieno.—  32,  C,  ac- 
cablé. —  35  à  38,  C,  Vis  morbi-..  vndœ.  —  50  à  320,  2,  C,  Morbis...  cadenli. 

320,  4  H  11,  B,  non  plus...  première.  —  12.  —  25  à  28,  C,  Simul...  decidere.  — 
26  à  28,B,Ce  que...  decidere .  — '6^ k  40,  iVona/io... lumière?  — 41  à44,B, laquelle... 
d'autres).  —  322,  2,  B,  principalement.  —  4  à  6,  B,  non  plus...  probantium.—  11. 

—  13,  B,  comme  dit  Platon.  —  16  à  25,  B,  Vn  soing...  volontiers.  —  28  à  29,  B. 
Somnia...  ancien.  —324, 8  à  9,  B,  Perdam...  reprobabo.  —  22  à  33,  B,  Confessons. . 
persuasione.  —37  à  39,  B,  Laissons...  linie.  —  326,  7.  —  7  à  32,  B,  Et  luy...  en  luy. 

—  328,  11,  B,  desnostres  mesmes.  —  32,  C,  iusques  au  bout.  —  40  à  330,  5,  B, 
Car...  terre. 

330,  35  à  332,  8,  B,  Et,  qui...  impossible.  —  17  à  30,  C,  11  ne...  vaisseau.  —  22  à 
30,  B,  l'ay  veu...  vaisseau.  —  32  à  35,  C,  Tenez...  scauezza.  —  334,  6.  — 9  à  10,  B, 
Et  Platon...  bestes.  —  18  à  33,  C,  On  le...  tracent.  —  28.  —  30  à  33,  B,  Et  n'y... 
tracent.  —  35.  —  338,  9.  —  25  à  26,  C,  Non  polcsl...  comprehendendi.  —  33. 

340, 10.  —  27.  —  35  à  36,  B,  Inler...  inlerest.  —  342,  8.  —  344,  12  à  20,  C,  Quoy... 
supernaturelle.  —  36  à 40,  C,  Cleomones...  fantasios.  —  346, 1.—  7  à  8,  C,  Ce  véné- 
rable... iustice.  —  348,  16  à  18,  C,  Vn  mesmo...  aggrcable.  —  20  à  24,  C,  Il  se... 
l'allégresse.  —  21.  —  26.  —  28  à  350,  16,  C,  En  mes...  doigt.  —  348,  42. 

350,  23,  B,  suiuant...  Peripateticiens.  —  28  à  38,  B,  Semper...  politique.  —  38.  — 
38  à  352,  3,  C,  et  la  prudence...  présomption?  —  9.  —  9  à  14,  B,  ou  bien...  queat. 

—  18.  —  18  à  19,  B,  n'allant...  emprunté.  — 19.  —  20.  —  20.  —  22 à  354,  5,  B,  N'y  a... 
incroyable?  —  32  à  38,  C,  Autant...  relinquit.  —39.  —  356,6  à  9,  C,  Ainsi...  pro- 
duites. —  7.-  19.  —  20  à  21,  B,  par  le...  ai.xieu.  —  24  à  25.  —34.  —  37.  -358,  17 
à  18,  C,  II  ne...  choses.  —  39. 

360,  5,  C,  c'estoit....  Antipodes.  —  15.  —  15  à  368,  19.  C,  et  s'il...  mescompte?  — 
360,  15  à  362.  11,  B.  et  il...  Sais.  —  16  à  24,  B,  En  vérité...  choses.  — 37,  B,  l'absti- 
tincnce...  viure.  —  366, 30  à  35,  B,  Et  plaga...  valentes.  —  368.  1  à  2,  B,  icy  à  la  li- 
berté, icy  à  la  seruitude.  —  8  à  10,  B,  disant...  infertiles.  —  18  à  19,  B,  et  qu'en... 
mescompte?  — 27  à  36,  C,  Quid...  vxor?  —  '30îi  'M,  B,  C'est  pourquoi  d'icelles.  —37. 

370,  5  à  14,  C,  Disons...  nostres.  —  lia  14,  B,  Cleobis....  nostres.  —  18,  C,  Virga... 
sutit.  —  23  à  29,  C,  Siconsilium...  doubteux.  —  32  à  34,  B,  duquel...  disputât.  —  372, 
1,  B,  quia...  douleur.  —  3,  C,  de  l'ancien  Pythagoras.  —  6,  B,  Aristote...  n'admi- 
rer. —  16  à  26,  C,  Combien...  ce  seroit.  —  30,  C,  comme  est...  diuin.  —  374,  4 à  19, 
B,  Et  chez...  paroUe.  —  36.  B,  et  témérité  du  sort.  —  376.  20  à  24,  C,  Il  est...  incons- 


Da.H2  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

tance.  —  24,  B,  Nihil...  art'is  est.  —  378,  10  à  17,  B,  Ses  amis...  des  choulx.  —  17 
à  23,  C,  C'est  vn...  pacis.  —  23.  — *25  à  30,  B,  On  preschoit...  répliqua  il.  —  30  à 

33,  C,  Indefuror...  colit. 

380,  17,  B,  Aux  foibles  esprits.  —  13,  C,  Arcesilaus...  le  fust.  —  19  à  26,  B,  Et  ubs- 
cœnas...  excessiues.  —  382,  7,  B,  Et  la  plus...  obligation.  — 8.  —  10  à  19,  B,  A  peine... 
suiuy.  —  384.  8  à  20,  B,  C'est  comme...  sa  règle.  —  2ô.  —  386, 23  à  32,  B,  Pourtant... 
Landit.  —388,  13  à  20,  B,  Voyez...  l'interprète.  —  28  à  38,  B,  Les  Cyrenayens... 
cogitation. 

390,  8,  C,  Via...  menth.  —  13,  B,  Et  selon...  sentiment.  —  392,  2  à  4,  C,  An  pote- 
riinl...  r^uince?jL —20,  B,  laquelle...  conséquences. —  394,  11  à  21,  B,  Qui  apprend... 
tasté.  —  396, 10,  C,  Quicqitid...  videlur.  —  15,  C,  Nec  tamen...  noli.  —  21  à  24,  B,Ti- 
niagoras....  l'instrument.  —  38  à  47,  B,  Ce  conseil...  l'impudence.  —  42  à  398,  4,  C, 
Au  cas...  science.  —  10  à  16,  C,  Extanlèsque...  raplim.  —  31  à  41,  C,  Quant  à... 
bouche.  —  42  à  400,  9,  B,  Et  Zenon...  à  moy, 

400.  —  402,  15,  B,  Vldespici...  possit.  —  20  à  22,  C,  Que  Theophrastus...  changei-. 

—  25  à  27,  B,  Fit  etiam...  timoré.  —42  à  404,  1,  B,  Ils  mentent...  à  l'enuy.  —5,  C, 
Multimodis...  vigere.  —  18  à  31,  C,  Ceux  qui...  dormir?  —  25  à  31,  B,  Nous  veil- 
lons... dormir?  —406,  18  à  21,  C,  Quelque...  qualité?  —2S,Lurida...  Arquuli.  — 
41  à  408,  1,  C,  si  nous...  bina.  —  10  à  15,  Kl  vulgo...  colore.  —  28. 

410,  2  à  9,  C,  Ces  personnes...  desdaignables? —  14,  C,  VI  cibus...ex  se.  —  24.  — 
28  à  32,  B,  Pourquoy...  friandise.  —34.  —  414,  10  à  22,  B,  Estimant...  grand  cas. 

—  20  à39,  C,  Epicharmus...  autres.  —  416,  2  à  5,  C,  Mutât...  cogit.  —  418,  23.  — 
25,  B,  Extraordinairement.  —  28,  B,  C'est  à...  métamorphose. 

420.  —  Ch.  XIII.  —  17  à  25,  C,  Prouehimur...  auee  nous.  —  27,  B,  Tôt  circa... 
deos.  —  29  à  35,  B,  Comment...  qu'vn.  — 422,  11  à  18,  C,  Et  cette...  actions.  —  18. 

—  18,  B,.Xo7itanta...  fiUgor.—  25,  B,  D'autant...  dessein.—  33  à  35,  C,  Vidimus... 
morti. —  424,  5,  C,  Impiger...  coacta.  —  19  à  22,  B,  Pendant....  gens.  —  22  à  25, 
C,  Albucilla...  Sicile.  —  26  à  31,  B,  Et  C.  Fimbria...  transperça.  —  37,  C,  Si  Ca?- 
sar...  —  croire.  —  426,  8  à  13,  B,  Il  n'y  a  rien...  cogitation.  —  33  à  40,  B,  L'his- 
toire... auancé. 

430.  —  Ch.  XIV.  —  32.  —  432.  —  Ch.  XV.  —  2.  —  5,  B,  In  œquo...  amittendx.  — 
9. —  14,  C,Si  nunquam...  parens.  —  28  à  30,  B,  Combien...  l'Amour?  — 31,  C,  EUp 
est...  escorche.  —  434,  6  à  12,  C,  Ceux  de...  à  un  autre.  —  12  à  17,  B,  l'ay  chassé... 
deuant.  —  21,  C,  Nisi...mea.  —  26  à  35,  C,  La  rigueur...  heri.  —  26,  B,  Pourquoy 
inuenta...  amants.  —  43.  —  37  à  436,  20,  C,  Pourquoy  a...  languissante.  —  10.  — 
14.  —  2-3  à  31,  C,  C'est  vn...  dommage.  —  438,  2  à  5,  C,  Qu'ils...  serpunt.  —  8  à  14, 
B,  Les  histoires...  d'ailleurs.  —  14  à  17,  C,  Il  y  a...  hayes.  —  17  à  440,  29,  B,  Fu- 
rem...  trente  ans. 

440.  —  Ch.  XVI.  —  442,  32  à  36,  C,  Le  premier...  fleurisse.  —  40,  C,  Gloria...  est. 

—  446,  6  à  8,  B,  Aristote..  fuyr.  —  22  à  448,  5,  B,  N'y  va...  suam.  —  9,  B,  Pro- 
fecto...  obscurdtque.  —  12  à  18,  B,  C'est  le...  longueur.  —  19,  B,  Quasi...  sil.  —  28 à 

34,  B,  Vera...  particulier. 

450,  4  —  17  à  22,  Qui  tient...  nostrae.  —  43  à  46,  C,  Virtus...  nurse.  —  452,  5,  B, 
\on...  décore.  —  9  à  13,  C,  11  faut...  d'inconstance,  —  13  à  16,  B,  Est-ce...  vniuer- 
sos.  —  16,  C,  quiconque...  prise.  —  17  à  22,  B,  Nil  tam...  laudetur.  —  22  à  33,  C, 
NuU'art...  vtile.  —  33,  B,  Dédit...  iuuarent.  —  34  à  454,  4,  C,  Le  marinier...  dolos. 

—  5  à  12,  B,  Paul  ^mile...  consentement.  —  12  à  17,  C,  11  y  a...  belle.  —  27,  B,  en 
particulier.  —  31  à  36,  C,  Et  qui...  asseurez.  —  456,  2  à  10,  C,  En  celles...  extra.  — 
24,  B,  à  la.,,  ensoy.  —  27  à  29,  B,  Et  quand...  par  fois.  —  458, 1,  C,  surnom...  An- 
gleterre. —  6.  —  7.  —  10,  C,  Nunc...  violse.  —  22  à  23,  C,  Casus...  aceruo.  —  27  à  31, 
B,  Les  fortunes...  d'exemples.  —  35,  C,  Ad  nos...  aura.  —  37  à  460,  1,  C,  Les  Lacé- 
demoniens...  mémoire. 

460,  14,  B,  Et  ce...  demeurant.  —  17,  C,  Quos...  reco7ulit.  — 30,  B,  rectè...  est.  —  38  à 
462,  3,  C,  Si  le  peuple...  l'entreprend.  —  4  à  14,  B,  Et  Platon...  possunt.  —  26  à  35, 
B,  Et  l'authorité...  d'Egypte.  —  40,  C,  In  ferrum...  vitse.  —  464. 4  à  7,  C,  vt  enim...  re- 
fus. —  6,  B,  Ny.  —  17  à"^19,  B,  Toute...  conscience.  —  Ch.  XVII.  —  466,  16,  B,  Et  de 
qui...  parlent.  —  26,  B,  xXec  id...  fuit.  —  37.  —  42.  —  468,  1,  B,  On  peut...  gloire. 

—  2  à  9,  C,  le  suis...  n'oublions  pas.  —20  à470,  8,  B,  11  me  semble...  Pareillement. 
470.  9,  B,  en  gros.  —  18,  B,  qui  voient....  ciel.  —  34  à  472.  1,  B,  le  me...  teint. 


VARIANTES  (1595-88  et  80).       LIV.  II,  Cil.  XVII.       VOL.  II.         Da.ll3 

—  5.  —  IS.  15,  est.  —  19  à  474.  1,  15,  Que  nous  n'auons...  conceut.  — (i,  C,  Puisqu'on... 
soy-mesmes.  —6  à  lii,  B,  SpôcialemcMit...  maintenir.  —  li"),  C,  Cùm...  Uni.  —  18,  B, 
saisirnj-.  —  19.  —  22,  B,  et  souhaict.  —  25.  —  35  à  476,  1,  B,  Quand...  Rabirius.  —9 
à  11,  C,  Les  Princes...  comptes.  —  11.  —  12  à  10,  B,  Mauuais...  sagement.  —  28,  B, 
sinon...  inclination.  —  30.  —  34,  B,  Platon...  langage.  —"SG,  C,  lequable.  —  39  à 
41,  C,  Et  si...  Plutarque.  —  478,  15  à  17,  B,  C'est...  esfoiré.  —  18.  —  20  à  22,  B, 
Autant...  abondant.  —  21,  B.  Ouï...  lean. 

480,  7  à  IL  B,  La  secte...  Nature.  —  17  à  19,  C,  Agros...  vigebanl.  —  20,  C,  vn 
[teu.  —  21  à  33.  B<  C.  Marius...  liault.  —  38  à  482,  2,  C,  Ipse...  huminum.  —  2,  B, 
Et  Platon...  république.  —  G,  B,  à  vostre.  —  7.  —  11.  —  17,  C,  et  rondeur.  —  17. 
C,  cil  douceur.  —  20,  C,  ny  le  poil  releué.  —  22.  —  25,  C,  entre...  moyennement. 

—  31.  C,  pieça.  —  32,  C,  Minuta  tint...  œtas.  —  484,  B',  et  ne  ly...  clerc.  —  10,  C,  ny 
trancher...  vaille.  —  11  à  13,  B,  ny  equipper...  cheuau.x.  —  20,  B,  poùrquoy...  on- 
gles, et.  —  23,  C,  TanH...aurum.  —  25,  B,  Extrêmement  oisiL..  soing.  —  33  à  .30, 

B,  (vne  occasion...  inquiétude).  —  41.  —  41  à  486,  7,  B,  Qui  est...  patience.—  10  à 
14,  B,  ou,  si  l'en...  poussif.  —  32  à-35,  C,  l'ayme...  apparences.—  32  à  488,  11,  C, 
A  vn  danger...  souffrance. —  12,  B,Dulna...  mala.—  11  à  30,  C,  Aux  euenements... 
reproche.  —  37  à  490,  10,  C,  Spem...  Queste. 

490,  11,  B,  Capienda...  est.  —  12  à  14,  C,  Et  i'excuse...  peut.  —  14,  B,  point.  —  II, 

C,  voir...  faute.  —24,  C,  Turpe...  f/enu.—  35,  C,  J\'unc...  tousiours  tout.  —44  à  492, 
8,  B.  Les  marchans...  bonilas.  —9  à  12,  B,  grand...  homme.  [Le  reste  de  la  phrase 
est  modifié  en  conséquence  par  la  substitution  de  la  1"  personne  à  la  3"  :  mes  ven- 
geances, ma  parole,  ma  foy].  —  10,  C,  que  de  plier...  seruice.  —  22,  C,  Par  là... 
manquer.  —  26.  —  20  à  28,  B,  Aristote...  d'autruy.  —  28  à  30,  C,  Apollonius... 
vérité.  —  30  à  37,  B,  C'est  là...  impremeditement.  —  494,  3,  si  ce  n'est...  vérité. 

—  10  à  12,  B,  Quo...  quis  probilatis.  —  14,  C,  Comme...  Tibère.  —  17,  C,  Qui  est... 
men.songe.  —  18  à  496, 1,  B,  Ceux  qui...  preiudice.  —  2  à  4,  C,  l'aduoiie...  ouuert. 

—  1,  B,  comme  ie  suis.  —  4  à  17,  C,  sans  considération...  l'euenement.  —  17  à  19, 
B,  Aristippus...  chacun.  —  20,  B,  et  misérable.  —  26,  B.  mot  à  mot.  —  28  à  33, 
B,  Mais  ce...  autheur.  —  37  à  498,  31,  C,  Cecy  que...  dessein.  —  G,  B,  par  fois. 

500,  2  à  5,  C,  le  diray...  lettre.  —  6  à  12,  C,  Messala...  l'àme.  —  7,  B,  Ce  qu'on... 
Trapezonce.  —  13.  —  14  à  17,  C,  Il  m'est...  conlinel.  —  14,  B,  trois...  parauant.  — 
15  à  17,  B,  et  d'oublier...  conlinel.  —  26,  C,  les  mots.  —  26  à  34,  C,  Et  suis...  raison. 

—  34  à  37,  B,  Ce  n'est...  reçoy.  —  502,  5,  C,  et  profondement.  —  7,  B,long.  —  17, 
B,  si  non...  instruisables.  —  34  à  37,  C,  moins...  cliicn.  —39,  B,  et  que...  vin.  — 
44.  —  504,  4.  —  5,  B,  Qu'on...  non.  —  31,  C,  Ne  si...  choisir.  —  34  à  37,  B,  et  le 
philosophe...  mesme.  —  506,  9  à  11,  B,  La  raison...  baston.  —  17  à  20,  C,les  mien- 
nes... foibles.se.  —  20,  B,  Ipsa...  lubrica.  —  508,  12,  C,  Nunquam...  supersint.  — 
22  à  27,  B,  le  fay...  plaide.  —  32  à  35,  C'est  vne...  opaque.  —  39,  C,  du  courage. 

—  39,  C,  corporelle.  —  40. 

510,  5  à  8,  B,  si  ce  n'est...  le  sien.  —  9,  C,  et  vne...  nom.  —  10.  —  10  à  21,  B,  Et 
puis...  plaire.  —  23,  B,  n'est-ce...  veuë.  —  512,  7,  C,  Nemo...  descenderc.  —  10,  C, 
quelle  qu'elle...  moy.  —  13,  C,  elles  sont...  miennes.  —  19  à  23,  C,  La  recom- 
mandation... mœurs.—  23  à  26,  Omnino...  tuam.  —  514,  3  à  10,  C,  Voire...  d'hon- 
neur. —  10,  B,  Mon...  non.  —  11  à  13,  C,  Et  ne...  ce  soit.  —  13  à  23,  B,  le  me... 
vertu.  —  22,  C,  ou  vne...  excellence.  —  34.  —  516,  C,  qu'en...  piastre.  —  518,  B, 
La  moins...  sapit.  —  24  à  32,  C,  Les  vies...  temps.  —  32  à  520,  15,  B,  Comme... 
considération. 

520.  —  Ch.  XVIII.-  522,4,  B,  Caton.  —  14.  —  13  à  15,  C,  Non  equidem...  loqui- 
mur.  —  21,  C,  le  iuge...  nihilité.  —  22,  B,  le  ne...  rougis.  —  29.  —  30.  —  31,  B, 
Palerna...  affeclus.  —  37.  —  37,  B,  peut  estre...  marché.  —  40,  C,  Et  taxas... 
lunicas.  —  524,  1  à  526,  2,  B,  Et  quand...  seruir.  — 7,  B,  et  le  premier...  republique. 
27, à  30,  C,  Seroit-ce...  science?  —  4  à  11,  C,  Certaines...  prononcée.  —  Ch.  XIX. 

530.  —  532,  26.  —  534,  29  à  35,  B,  Ce  langage...  attache.  [Ce  passage  légèrement 
modifié  existe  dans  l'édition  de  1580,  après  le  mot  sang,  II,  532,  21].  —  536.  — 
Ch.  XX.  —  32.  —  538,  1  à  4,  B,  Ny  la  vertu...  Aristippique.  —  6  à  13,  C,  Medio... 
consubstantialité.  —  13  à  1.5,  B,  La  profonde...  masche.  —  19  à  23,  B,  Le  travail... 
queue.  —  23  à  31,  C,  Metrodorus...  voluplas.  —  32  à  36,  B,  Et  dit...  aigres.  —  36  à 
41,  C,  Nature...  larmes.  —  41  à  540,  7,  B,  Nullum...  d'enfondrer. 

ESS.'VIS  DE  MONTAIGNE.  —  T.   IV.  8 


Da.H4  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

540,  7  à  15,  C,  Quand  ie...  bigarrure.  —  12,  B,  (et  il  y  escoutoit  de  près).  —  20  à 
35,  C,  Il  est...  diuerses.  —  35,  B,  contraires.  —  35  à  542,  6,  B,  volulantibus...  vérité. 

—  6  à  18,  C,  Qui  en...  conte.  —  Ch.  XXI.  —  544,  1  à  37,  B,  Quand  quelqu'vn... 
présence.  —  546,  8  à  550,  10,  B,  C'est  vne.  ..  sa  main. 

550.  —  Ch.  XXII.  —  11  à  13,  C,  le  n'ay...  long  temps.  —  18,  B,  Et  disent...  grues. 

—  26,  B,  et  ne  se...  gué.  —  39  à  552,  4,  B,  En  la...  course.  —  4  à  17,  C,  L'inuen- 
tion...  vn  pas.  —  17  à  23,  B,  l'entends...  vsage.  —  Ch.  XXIII.  —  554,  32,  C,  Et... 
incumbit.  —  556,  14,  C,  Ail...  heris.  —  33  à  40,  C,  Quid...  armis.  —558,  12  à  17, 
C.  Les  filles...  rumpi.  —  20  à  26,  C,  iusques...  viriles.  —  Ch.  XXIV. 

560,  13.  —  18à  20,  C.  T<}1...  donnoit.  —  21  à  39,  B,  Si  en...  immortels.  —  39  à  41, 
C,  Tous  les...  estrangers.  —  562,  6  à  10,  B,  11  est...  acquis.  —  Ch.  XXV.  —  564,  13 
à  18,  B,  De  tout...  race.  —  566.  —  Ch.  XXVI.  -  26.  —  568.  15.  —  18,  B,  Les  Athé- 
niens... marine.  —  19,  C,  En  Lacedemone...  pouce.  —  Ch.  XXVII.  —  22  à  30,  C,  et 
si  ay...  e.xtremitez  ? 

570.  —  11,  C,  El  lupus...  fera  est.  — 20  à  36,  C,  Et  tout...  repentance.  —  40  à  42, 
B,  Et  luy...  insensiblement.  —  572,  3  à  5,  C,  C'est  vne...  d'entreprinse.  —  7  à  16, 
B,  Ce  n'est...  les  bras.  —  19.  —20 à 31,  B,  Et  cherchons...  soy  pas.  —32.  —  36  à 
580,  12,  C'est  aussi...  thème.  —  574, 4,  B,  Quum  in...  esset.  — 7,  B,  et  pour...  combat. 

—  34,  B,  trois  cents...  Curiatiens.  —  576,  37,  B,  et  l'exerçons...  sçauoir.  —  33  à  37, 
B,  vtile...  expérience.  —  578,  22,  B,  Cousus.  —  25  à  30,  B,  Escrime...  présent.  — 
38  à  580,  11,  B,  Aussi  y...  confèrent  point. 

580, 17,  B,  Doncq.  —  22  à  582,  34,  B,  Les  premières...  maistres.  —  584,  12,  B,  trois 
...  auoit.  —  14  à  586,  3,  B,  Chalcondyle...  suitte.  —  Ch.  XXVIII.  —  5.-18  à  21, 

B,  Comme  on...  gaigna.  —  24,  C,  Imponit...  honestis.  —  25  à  28,  C,  Et  Philopœ- 
men...  employer.  —  588,  7  à  9,  C,  Tu  seconda...  domos.  —  22,  B,  On  peut...  abé- 
cédaire. —  24,  C,  Diuersos...  conueniunt.  —  40  à  590,  2,  B,  La  nuict...  lut  vn. 

590.  —  Ch.  XXIX.  —  24  à  26,  B,  sauf...  gros.  —  592,  19,  B,  qu'on  le  puisse.  — 
594.  23  à  27,  C,  l'bi...  viris.  —  28  à  596,  24,  B,  Vn  homme...  enseuelis.  —  34  à  37, 

C,  Et  n'estoit...  terrestre.  —  598,  42  à  600,  29,  B,  Vn  jeune...  espaule. 

600,  29  à  602,  25,  C,  Il  n'est...  patience.  —  25  à  36,  B,  Les  Assassins...  d'œuure. 

—  604.  —  Ch.  XXX.  —33,  Vt  quum...  reuocentur.  —  34  à  606,  3,  C,  le  vien...  fem- 
mes. —  3  à  14,  B,  Ce  que...  apporte.  —  Ch.  XXXI.  —  19  à  23,  B,  La  plus  part.... 
l'enfance.  —  608,  3  à  7,  C,  liabie...  visage.  —  12  à  14,  C,  Gralum...  agendis.  —  22 
à  31,  C,  au  trauers...  soif.  —  40. 

610,  19.  —  30.  —  28  à  31,  C,  Car  les...  proposer.  —  612,  20.  —  Qi\,  5  à  618,  27, 
C,  Ceux  qui...  le  moins.  —  616,  7.  —  12,  B,  Omnia...  subsidunt. 

620.  —  Ch.  XXXII.  —  2,  B,  et  à  mon...  despouilles.  —  15.  —  622,  23.  —  624,  B, 
L'histoire...  miracle.  —  32  à  40,  C,  Vn  paysan...  s'y  tua.  —  40  à  626,  10,  B,  Epi- 
charis...  contre  luy?  —  27,  C,  (comme...  auant.  —  31  à  628,  2,  C,  l'ay  cogneu... 
fermeté.  —  5,  B,  ce  que...  Bodin.  —  7,  B  ou  ne  voudroient.  —  7  à  11,  B,  Il  semble 
...  insupportable!  —  14.—  18  à  21,  B  desquels...  se  monter. 

630.  -  29.  -  632.  —  Ch.  XXXIII.  —  634,  12.  —  28,  C,  s'il  en  faut...  peinture.  - 
636.  10  à  638,  2,  B,  Jle  ressouuenant...  Cœsar. 

640,  2.  C,  A  ce  que...  sobriété.  —  642,  28.  —  644,  11  à  14,  C,  Qualis...  ebur.  — 
16.  —  23  à  646,  13,  B  pour  en...  force.  —  Ch.  XXXIV.  —  16,  B,  Scipion...  Xeno- 
phon. 

650.  —  1.  —  8,  C,  Rheni...  sequal.  —  10.  —  13.  —  652,  3.  —  19  à  25,  Ocior...  se- 
cum.  —  37  à  654,  2,  C,  11  fit...  arlus.  —  7  à  10,  C,  Si...  agris.  —  36,  C,  et  disoit-il... 
entreprises.  —  656,  20.  —  21  à  35,  B,  Suiuant...  militaire.  —658.  4. 

660,  14  à  18,  B,  La  passion...  prenoient.  —  37.  —662.  —  Ch.  XXXV.  —  22  à  27, 
C,  La  touche...  perdus.  —  2'  à  664,  1,  B,  cherchent...  morts.  —  1  à  10,  C,  La  vie... 
la  vie.  —  10  à  12,  B,  Est-ce...  suis  plus?  —  13  à  30,  C,  S'il  v  a...  conséquence.  — 
666,  26.  -  668,  29.  —  44. 

670,  2.  —  672,  18.  —  20.  -  37.  -  674,  15.  —  20,  B,  excellens...  vsage. 


VARIANTES  (189b-88  et  80\       I.IV.  II,  CH.  XXXVI.       VOL.  III.       Da.Ii:i 


TROISIEME  VOLUME. 

10.  -  Liv.  II,  Ch.  XXXVI.  -  10.  C,  Taie-.,  arliculis.  —  21.  -  24,  B,  en  quelque... 
ce  soit.  —  12,  17.  —  24.  —  21,  B,  Que  n'estoit...  philosophes.  —  14,  20,  C,  Impet- 
lens...  ruina.  —  23  à  27,  C,  et  en  vne...  l'homme. —  32,  C,  iustice...  vaincus.  — 
34.  —  34  à  16,  14,  C,  ouj-  bien...  des  hommes.  —  o,  B,  et  a  esté...  vices.  —  15.  — 
15  à  19,  C,  ce  port...  resoluU.  —  21  à  25,  C,  et  qu'encore...  que  ce  soit.  —  25  à  28, 
B,  et  qu'encores...  priuilege.  —  30,  C,  Et  il  ne...  d'Alexandre.  —  32  à  41,  C,  Ce 
furent...  du  monde.  — 18,  13,  B,  facilement.  —  16  à  18,  B,  Car  il...  persuasif.'— 
20.  —  20à22,  B,  qui  seule...  ensemble.  —  23  à  20,  C,  En  cestuv-ci...  fortuite.  —  20 
à  20,  15,  B,  L'ancienneté...  Epaminondas. 

20.  10  à  20,  C,  Le  plus...  action.  —  20.  —  25  à  22,  2,  B,  Et  son...  par  luv.  — 
Ch.  XXXVII.  —  8,  B,  ouy  a...  oster.  —  30.  —  30  à  24,  1,  B,  Qu'à  celuy...  vsures.  — 

7  à  20,  B,  Oyi'z...  maux.  —  34,  B,  comme...  emploj'ons.  —26,  20.  —  21  à  28,  B, 
Qu'elle  condone...  semble.  —  29.  —  3tî,  B,  capable...  mesure.  —  35.  —  37.  —  28,  4 
à  9,  B,  Ne  commandons...  vehemenllor.  —  12.  —  13,  B,  et  me...  brailler.  —  19.  — 
19  à  32,  B,  comme  celuy-là...  estrangement.  —  33,  B,  lors  que...  ronger.  —  34.  —  30. 

—  38  à  40,  C,  Laborum...  peregi. 

30,  8.  —  28  à  30,  C,  et  comme...  ressemblance.  —  32,  9,  C,  le  troisiesme...  nais- 
sance. —  14,  C,  seul  iusques...  mère.  —  41,  B,  asteure.  —41,  B,  sain.  —  34,  10.  — 
13  à  19,  C,  Le  dernier...  Sainct  Michel.  —  18  à  31,  C,  Et  suyuant...  grandes.  —  35. 

—  40.  —  36,  2.  —  0.  —  6  à  18,  C,  l'entends...  limite.  —  18  à  20,  B,  Comme  nous... 
l'estime.  —  37.  —38,  20  à  24,  B,  Et  les  Lybiens...  rheume.  —  30  à  40,  24,  C,  Et  si 
ne  ...  estomach. 

40,  1  à  24,  B,  C'est  du...  estomach.  —  17  à  19,  Vn  mauuais...  autrefois.  —  33.  —  37. 

—  42,  21  à  23,  C,  Platon...  promesses.  —  27.  —  44, 2.  —  3  à  0,  C,  Nam...  vndas.  — 

8  à  10,  C,  Vn  médecin...  de  gens.  —  15  à  18,  B,  Quoy  qu'en...  cassam.  —  20.  —  24, 
B,  et  incognu.  —  48,  9.  —  25.  —  30. 

50,  1  à  7,  ^sope...  santé.  —  23.  —  52,  14.  —  15.  —  24.  —  54,  5  à  25,  B,  Comme 
nous...  dissentieuses.  — 56,  18  à  60,  14,  C,  11  est  bon...  cet  art.  [Voir  aux  notes]. 

60.  —  62,  2.  —  4.  —  40.  —  64,  15.  —  33.  —  37  à  66,  G,  C,  l'entens...  goust.  —  14.  — 
10  à  20,  B,  La  plus  part...  patience.  —  23  à  27,  B,  Les  Babyloniens...  autrement.  — 
32  à  35,  B,  Ce  qu'Homère...  croire. 

70,  14  à  23,  C,  Quand...  procuration.  —  23,  B,  déclarez.  —  72,  10  à  18,  C,  L'hu- 
meur... oreilles.  —  13  à  23,  B,  Si  i'estoy...  oreilles.  —  26.-28  à  36,  B,  Qui  a... 
seruist.  —  74.  21.  —  21.  —  76,6.  —  32,  B,  et  plus...  formes.  —  37. 

LIVRE  TROISIÈME. 

78.  -  Ch.  I. 

80,  24,  B,  et  qu'on  massacre.  —  82,  21,  B.  en  ce.  —  27  à  29,  B,  le  regarde...  bon  gré. 

—  34,  B,  Vtatur...potest.  —84,  7.  —  17  à  25,  B,  Ea  non...  nécessairement.  —88,  4  à 
6,  B,  Vn  parler...  l'amour.  —  21  à  24,  B,  Et  eux...  la  leur.  —  33,  B,  à  cette  heure. 

90,  29,  B,  Id  maxime...  maxime.  —  36,  B,  spéciale,  nationale.  —  37,  B,  Veri... 
vlimur.  —  92,  B,  Ex...  exercenlur.  —  94,  14  à  16,  B,  Si  la...  trahison.  —  18.  —  20, 
B,  par  après.  —  21,  B,  vn  seruage  et.  —  96,  10  à  20,  B,  L'esclaue...  chiens.  —  30  à 
33,  B,  loint...  menées.  —  98,  7  à  20,  B,  Quand  le...  homicide.  —  28,  B,  sed...  per- 
iurio.  —  30  à  100,  8,  B,  Quand  il...  iuste. 

100,  13  à  102,  31,  B,  Timoleon...  obligation.  —  104,  3,  B,  ou  ses  complices.  — 
16,  B,  bien.  —  18,  B,  toute.  —  22,  B,  et  la...  innocence.  —31,  B,  qu'il  y...  mesmes. 

—  33.  B.  manenle...  iuris.  —  38,  B,  de  son  Roy,  ny.  —  39,  B,  .Yon  enim...  parentes. 

—  106,  19.  B,  et  qu'elle...  chacun.  —  21,  Omnia...  apta.  —  24.  —  Ch.  II.  —  108,  24 
à  29,  B,  Les  autheurs...  à  soy. 

110,  6  à  8,  B,  ne  pénétra...  suittes  :  et.  —  18  à  21,  B,  Qui  a  vn...  mesme.  —  31 
à  34,  B,  et  que  ma...  homme.  —  37.  —  112,  5,  B,  La  malice...  empoisonne.  —  25,  B, 
et  apprinst.  —  33  à  114,  10,  B,  signamment...  mode.  —  20.  —  20  à  22,  B,  Tuo 
libi...  omnia.  —27,  B,  et  ancrez.  —  116,  17  à  27,  B,  Nul  a...  quitte.  — 118,  2  à  4, 


Da.116  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

B,  Et  les...  magistrat.  —  5  à  7,  B.  La  plus...  gloire.  —  15  à  'M,  B,  La  grandeur... 
viure. 

420.  19,  B,  Nature...  vsage.  —  25.  —26,  B,  à  bon  marché.  —  124.  16,  B,  ou 
péchez  de  profession.  —  17.  —21  à  27,  B,  le  ne...  office.  —  32,  B,  ny  d'interrup- 
tion. —  126,  33  à  128.5,  La  force...  limites.  —  6.  —  17.  —  18  à  130,  1,  B,  le  n'ay... 
gariement. 

130,  11.  B,  N^ec  tam...  sil.  —  21,  B,  Moy...  trouue  que.  —  24  à  27,  B,  Et  trouue... 
spirituelle.  —  30.  —  34.  —  34  à  132,  32,  B,  Misérable...  douloureuses.  —  35.  —  134, 
20  à  24,  A  voir...  accoustumee.  —  26.  —  136.  —  Ch.  III.  —  5  à  7,  B,  Yoyla...  age- 
ret.  —  16,  R,  bandée  et.  —  24,  B,  Les  liures...  estude.  —  27,  B,  se  range...  forti- 
fie. —  31.  —  31  à  138,  11,  B,  Le  méditer...  memoyre.  —  16.  —  19.  —  29,  B*-et 
toute...  commune. 

140,  23.  —  24.  —  142,  4  à  10,  B.  Et  le  conseil...  équitables.  —  144,  11,  B,  de  Cap- 
sula tolœ.  —  146,  7,  B,  et  non...  affaires.  —  148,  16.  —  22,  B,  belles  et.  —  22.  — 
22  à  23,  B,  nam...  habemus. 

150, 8  à  15,  B,  qui  ne...  vne  qui.  —22  à  25,  B,  Neque...  aymons.  — 152,  6  à  8,  B,  de 
la  santé...  preambulaires.  —  24.  —  24  à  29,  B,  elle  est...  deux  ans.  —  156,  3  à  38, 
B,  Elle  est...  estre.  —  158,  3,  B,  le  ieu  et  le  passetemps.  —7.—  8  à  10,  B,  non  pour... 
au  delà.  —  Ch.  IV. 

160,  14.  —  17.  —  19  à  26,  B,  Ny  n'allay...  Cicero.  —  34  à  162,  3.  B,  A  l'aduenture... 
histoires.  —  164,  6  à  8.  B,  Abducendus...  est.  —  19,  B,  et  si  dru...  discours.  —  166, 
3  à  12,  B,  Subrius...  subiect.  ->-  18.  —  21  à  27,  B.  Beaucoup...  destiné.  —  168,  5  à 

9,  B,  Xenophon...  teste.  —  10  à  15,  C,  Omnes...  dolorum.  —  17  à  26,  B.  Voire... 
hommes. 

170,  30  à  32,  B,  et  suiuant...  d'icelles.  —  172,  8.  —  8,  B,  Cela  c'est...  chausse.  — 
3  à  174,  10,  B,  L'opiniastreté...  m'attendrit.  —  12  à  16,  B,  c'est  vne...  iambe.  —  33 
à  176,  5,  B,  Quintilian...  douleur.  —  11  à  19,  B,  De  bien...  mort.  —  178,  1  à  5,  B, 
Quelles  grimaces...  persécute?  —  Ch.  V.  —  31,  B,  dit-on. 

180,  23.  —  27.  —  34  à  40,  B,  Platon...  d'entre  eu.x.  —  182, 14  à  17,  B,  le  ne  ...  auc- 
lori.  —  30  à  32,  B,  Sibi  arma...  tesseras.  —  41,  B,  in  f'ragili...  est.  —  184,  11.  — 
19.  —  26  à  37.  B,  Noz  maistres...  contraire.  — 186,  6,  Tristèmque...  arrogantiam.  — 
8  à  11,  B,  le  croy...  rire.  —  12  à  18,  B,  le  sçay...  sentire.  —  29  à  188,  9,  B,  Qui 
s'oblige roit...  confesser.  —  18,  B,  luy.  —  37  à  1^,  4,  B,  ny  à  la  malice...  blanchie. 

190.  7,  B,  encore.  —  22  à  24,  B,  Socrates...  disent.  —  31  à  33,  B,  On  me  pour- 
roit...  sottise.  —  192.  8  à  22,  B,  Car  il  ...  vieillesse.—  23,  B,  ses  vertus...  moindres. 
196.  21.  —  198,  4  à  26,  B,  De  vray...  fortune. 

200,  9  à  11.  B,  Socrates...  repentira.  —  202,  10.  —  11,  B,  c'est  trahison...  s'es- 
pouser.  —  20,  B,  Tel  valet...  pourtant.  —  32  à36,  B,  Et  iusques...  teste.  —  »)4,6.  — 

10.  —  14,  B,  Pour  fuir...  Platon.  —  206,  4.  —  14  à  16,  B,  considerans...  coniugale. 

—  16,  B,  dis-ie.  —  208,  3,  B,  Si  c'est...  vefues. 

210,  3,  B,  Seroit-cc...  autresfois?— 22.  —  30 à  212,  2,  B,  De  quel...  volupté.  —5. 

—  7,  B,  Nimirum...  extinguitur.  —  35  à  214,  3,  B,  11  me...  pied.  —  5  à  6,  B,  suy- 
uant...  corpora.  —  14à22,  B,  Les  Dieux...  matrice.  —  27  à  30,  B,Et  tel...  vsage.— 
33  à  216,  3,  B,  Que  .sçait-on...  à  cela.  —  4  à  12,  B,  Et  quoy...  yeux.  —  14  à  22,  B, 
Les  Lacedemoniennes...  estât.  —  30  à  218,  3,  B,  Inique...  cause.  —  24,  B,  DiaboH... 
lerosme. 

220,  5  à  13,  B,  Car  cette...  chasteté.  —  222.  11.  —  40.  —  224,  9,  B,  outre...  ré- 
publiques. —  19  à  21,  B,  c'est  des...  remède.  —  226.  6.  —  10  à  12,  B,  Les  femmes... 
couuertement.  —  228,  5,  B,  si  cuysant  et.  —  24,  B,  d'vn  visage  sérieux. 

230,  2  à  6,  B,  II  est...  l'a  tuée.  —  24  à  35,  B,  Mais...  Mecenas?  —  232,  10  à  16,  B, 
Phedon...  polices.  —  234,  23,  B,  Chacun...  vicissitude.  —  31  à  36,  B,  Les  aigreurs..^ 
en  sent.  —  236,  10  à  15,  B,  Le  Sénat...  très-difficiles.  —  27.  —  238,  6.  —  13,  B,  et 
qui...  l'incitast? 

240,  7,  B,  Contexlm...  occupati.  —  14,  B,  Peclus...  facil.  —  24,  B,  Elles...  disent. 

—  242,  15,  maniant  et.  —  244,  7  à  11,  B,  Et  auroy...  chantres.  —  16,  B,  ie  ne... 
aile.  —  31  à  33,  B,  tu  te...  feinte.  —  246,  4,  B,  A  Paris...  Montaigne.  —  11  à  27,  B, 
Imitation...  l'air.  —  248,  20.  —  21  à  25,  B,  en  vn...  beauté.  —  30,  B,  qu'on  ayt... 
ensemble. 

250,  4.  —  15  à  17,  B,  Ceux  qui...  deuantiere.  —  31,  B,  Sommes...  faict?  —  252, 


VARIANTES  (1395-88  et  80).      LIV.  III,  CH.  V.      VOL.  III         Da.ll7 

3  à  11,  B,  (à  cette...  sexe.  —  1-2.  —  IZ  à  15,  R,  Pour  le...  peut.  —  18  à  21,  B,  Les 
Athéniens...  ensemble.  —  -22.  —  23.  —  28  à  34,  B,  En  l'empire...  euipirement.  — 
35,  B,  à  qui...  mal-heur?—  254,  5,  B,  Il  en...  adorées.  —  7,  B,  dangereux...  desre- 
glement.  —  10.  —  13,  B,  Trouues...  fasche.  —  19,  B,  incertaines.  —  20,  B,  Les  or- 
donnances... point.  —  256,  35  à  258,  2,  B,  Et  Thrasonidez...  paissoit.  —  21.  —  31. 

—  33  à  260,  1,  B.  Ne  semble...  songe? 

260,  32.  —  262,  3  à  5,  B.  Et  ont...  resnes.  —  9.  —  10,  B,  pages.  —  19,  B,  de  soy. 

—  22.  —  23  à  25,  B,  C'est  à  ...  guerre.  —  27,  B,  et  à  nous  aussi  —  29  ta  31,  B,  Car, 
comme...  entrer.  —  264,  1  à  3,  B,  Platon...  tenants.  —  3.  —  14,  B,  Patl  nalœ.  —  17 
à  33.  B,  Il  faut...  Princesse.  —  266,  5.  —  15.  —  15  à  21,  B,  leanne...  abusée.  —  24 
à  27,  B,  Platon...  seulement.  —  268,  5.  —  13  à  16,  B,  Et  admire...  ieunesse.  —  36  à 
272,  4,  B,  et  d'vne...  Suiuons. 

270.  —  272,  10,  B,  Il  n'y...  volontaires.  —  274,  2.  —  7  à  15,  B,  l'ay...  difficulté.  — 
17,  B,  à  nos  gens.  —  33,  B,  L'insuffisance...  meslouable.  —276,  2,  B,  Nullum...  est. 

—  19.  —  23.  —  31.  —  40.  —  41,  B,  Pourquoy...  chose.  —  278,  4.  —  12.  —  29  à  280, 
3,  B,  En  pareil...  corps? 

280,  4.  —  7,  B,  la  grâce.  —  10  à  12,  B,  me  remettroit...  à  soy.  —  14,  B,  et  le;., 
santé.  —  17.  —  17,  B,  et  la...  la  vie.  —  33  à  39,  B,  Et  ce...  frais.  —  282,  3  à  5,  B, 
En  vérité...  fait.  —  6.  —  14,  B,  ou  à  la...  suiue.  —  19  à  23,  B,  Xenophon...  informe. 

—  29  à  36,  B,  Et  entre...  lissée.  —  284,  1  à  4,  B,  Et  la...  Harmodiens.  —  9  à' 12,  B, 
Et  Marguerite...  bonnes.  —  16,  B,  Amor...  nescit.  —  20.  —  30.  —  31  à  286,  1,  B, 
achetant...  à  vno.  —  16  à  20,  Platon...  nostre.  —  Ch.  VI.  —  288,  19,  B,  Comme... 
sucrurrerel.  —  27,  B,  sinon...  toutesfois. 

290,  7,  B,  Quo...  est.  —  18,  B,  ressoudre  et.  —  24  à  26.  B,  Epicurus...  sage.  — 
26,  B,me..—  292.  9  à  32,  Si  l'en...  bœufs.  —  294,  12  à  16,  B,Le  conseil...  mémoire. 

—  24  à  296,  3,  B,  Et  a  l'on...  seruice.  —  JO.  —  17  à  22,  B,  La  iurisdiction...  versa- 
tur.  —  29  à  32,  B,  Et  son...  libéraux.  —  39.  B,  il  faut...  respandre.  —  298,  10  à  12, 
B,  Quo  in...  possis?  —  15.  —  29  à  300,  18,  B,  Comment...  Princes. 

300,  24,  B,  principalement.  —  25  à  31,  B,  Pecitniarum...  coff're.  —  304,  24  à  31, 
B,  Et  la...  formarum.  —  32,  B,  par  rapport.  —  44,  B,  multiplication  et.  —  308,  .'38, 
B,  et  boucliers  de  bois. 

310.-314, 8.  B,  etiouyr...  reserré.  —  35.  —  316,  1,  B,  si  barbares.  —4.  —  12.  —24. 

320.  —  Ch.  VIL  —  322,  30  à  34,  B,  Et  ay...  aysee.  —  324,  1  à  18,  B,  Mais  si...  par- 
tis. —  19  à  25,  H,  Otanez...  commande.  —  326,  38,  B,  s'enialouser. 

330.  —  Ch.  VIII.  —  17.  —  17  à  20,  B,  De  les  condamner...  faute.  —  22,  B,  et  incor- 
rigibles. —  332,  5.  —  20.  —  21  à  24,  B,  le  me...  inuincibles.  —  336,  12  à  15,  B,  Elle 
n'est...  polesl.  — 17.-21.  —  26 à  338, 12,  B,  Etpourueu...  rabillent.  —  32,  B,  par  trop. 

—  26  à  33,  B,  Ce  n'est...  dits.  —  37  à  340, 10,  B,  Il  est...  nays. 

340,  18.  —  20.  —  22  à  24,  B,  ou  sur...  contention.  —  29  à  31,  B,  Cet  autre...  sien. 

—  342,  3,  B,  Xihil...  lilleris.  —  5,  B,  A'ec  ad...  di/ferendum.  —  27,  B,  sub...  latentes. 

—  30.  —  344,  4  à  10,  B,  Il  m'est...  exercer.  —  16,  B,  Le  monde...  inquisition.  — 
22  à  26,  Et  tous...  l'imite.  —  346,  12  à  14,  B,  Mison...  respondit-il.  —  16  à  19,  B,  Si 
ie...  altération.  —  24,  B,  Ce  que...  sain.  —  26  à  31,  B,  Non  seulement...  exemples. 

—  32,  B,  parceluy  qui  l'inuenta.  —  33.  —  34  à  348, 26,  B,  Nos  yeux...  conscience. 
350,  20  à  23,  B,  Comme...  amas.  —352,  15  à  17,  B,  Et  les...  estuyee.  —  354,  3,  B, 

Principis...  suos.  —  15  à  19,  B,  Les  Carthaginois...  bon  heur.  —  356,  4.  —  25,  B,  et 
casuelles.  —  .34,  B,  Et  y...  subtils.  —  36,  B,  Vt  qulsque...  dicimus. 

360,  18,  B,  Qu'on...  moy-mesme.  —  362,  2  à  20,  B,  Qu'ils...  sots.  —  364,  3,  B,  Le 
dogme...  ailleurs.  —  5,  B,  Mais  icy.  —  10  à  16,  B,  Et  pouuons...  institution.  —  22, 
B,  Mon^humeur...  principians.  —  36 à  366,  1,  B,  L'obstination...  l'asne.  —8,  B,  ny 
moins...  Lycurgus.  —  25,  B,  royal...  s'esbatant.  —368,  10,  B,etle  deuancer.  —  31,  B, 
Et  Seneque...  potest. 

370,  18.  —  18  à  25,  B,  Et  me...  longueur.  —  28.  —  374,  1.  —  5  à  12,  B,  l'ose... 
saoul.  —  30  à  35,  B,  et  l'autre...  antiquité.  —  376,  4,  B,  et  certaine...  oreilles.  —  8. 

—  Ch.  IX.  -  378,  37  à  380, 2,  B,  C'est  à...  vie.     - 

380,  6,  B,  et  iette...  coignee.  —  20,  B,  Comme  si...  mauuaise.  —  23,  B,  la  fc^ueur... 
roydit.  —  382,  28.  B,  ie  ne  pretens...  et  que.  —  24,  B,  au  demeurant.  —  36,  B,  Non 
.Tstimatione...  modus.  —  384,  2  à  22,  B,  Les  voyages...  richesses.  —  32  à  34,  B,  Et 
les...  cacher.  —  35.  —  386,  I,  B,  et  graisles.  —  3,  B,  la  tourbe...  soit.  —  6  à  10.  — 


Dans  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

12,  B.  nemo...  impellL  —  17  à  20,  B,  Les  inconuenients...  inséparables.  —  42.  B, 
Diogenes...  fait-il.  —  388,  8  à  11.  R,  Et  accuse...  main.  —  18,  B,  Elles  sont...  ag- 
greables.  —  24,  B,  le  nom...  m'abillo.  —  30  à  33,  B,  Nous...  l'homme. 

390,  B,  vne  fois.  —  2,  B,  comme  luy.  —  3.  —  3  à  5,  C,  Fruclus...  conferlur.  —  9, 
B,  et  Platon...  abstenir.  —  24,  B,  MuUi...  fecerunl.  —  31,  B,  de  cette...  larrecin.  — 
392.  2  à  4.  La  portion...  iniure.  —  12.  —  12  à  IH.  B,  Que  ne...  auachir.  —  23,  B, 
Seruitus...  suo.  —  25,  B.  et  cures...  maison.  —  31  à  33,  B,  Vne  rené...  eschec.  — 
394,  4  à  7,  B,  Cela...  fascheu.x.  —  22  à  27,  B,  l'en  parle...  iniustice.  —  398,  23  à  26, 
B,  V'arro...  nature. 

400,  15,  B,  non  tam...  cupidi.  —  20  à  402,  22,  B,  La  fin...  inexpérimenté.  —  35  à 
39,  B,  C'est  comme...  peuples.  —  42.  —  43  à  404,  2,  B,  C'est  nostre...  dessoubs.  — 
15  à  18,  B,  (et  me...  escheuës).  —  406,  28  à  32,  B,  Il  semble...  craintes.  —  41  à  408, 
3,  B,  Et  l'vsage...  vniuerselles.  —  34,  B,  d'accent...  visage.  —  38  à  410,  3,  B,  et 
chose...  expectatio. 

410,  10,  B,  Simptîciora...  décent.  —24  à  33,  B,  Mon...  aage.  —  412,  2.  —  3,  B.  qui 
furent...  vingts.  —  4  à  16,  B,  Moy  à...  qu'autre.  —  22.  —  414,  15  à  17,  B,  Et  tels... 
balance.  —  17.  —  416,  5  à  7,  B.  la  libre...  condonons. —  11,  B,  par  recompense  ny. 

—  27  à  418,  2,  B,  le  suis...  propositions.  —  6,  B,  Hoc...  voluntarium.  —  17.  —  21, 
B,  à  faire...  afl'ection.  —  23.  —  23,  B,  Est  prudentis...  beneuotenlise .  —  '.¥). 

420,  6.  — 9,  B,  me  donnent...  rien.  —13  à  16,  B,  Combien...  acheue.  —  17,  B,  fn 
me...  mihi.  —  23,  B,  et  en  courage...  fortune.  —  25  à  33,  B,  Eleus...  estranger.  — 
34.  —  36.  —  36  à  422,  37,  B,  le  me...  chacun.  —  424,  1,  B,  aussi...  Aristote.  —  7  à 
14,  B,  Cyrus...  amys.  —  29.  —  426,  9  à  11,  B,  Ils  disent...  longue.  —  24  à  32,  B,Les 
voleurs...  de  peu.  —  428,  19.  —  31  à  430,  11,  B,  Ce  que...  iugement. 

430,  15,  B,  fantasies  et  vsances.  —  24  à  27,  le  voudroy...  Xenophon.  —  432,  21 
à  24,  B,  Qu'on...  œconomique.  —  30  à  32,  B,  11  n'aduiendra...  quitte.  —  434,  4.-5 
à  8,  Ces  interruptions...  party.  —  16  à  22,  B,  Elle  embrasse...  occasion.  —  436,  1, 
B,  Rerum...  finium.  — 7  à  10,  B,  ou  comme...  besoing  est.  —  39  à  438,  5.  B,  leune... 
soi.xante.  —  8  à  11,  B,  et  me...  course. 

440,  35  à  442,  6,  B,  Qui  se...  femmes.  —  444,  2  à  12,  B,  l'embrasseroy...  l'iniure. 

—  16  à  22,  B,  le  me...  quittée.  —  29  à  33,  B,  Plaisante...  prœcordia.  —  37.  —  446, 
1  à  3,  B,  Si  estimons...  hideuses.  —  6  à  9,  B,  Pourtant...  pourroit.  —  24.  —  24  à 
30,  B,  La  décrépitude...  compagnie.  —  448,  16  à  21,  B,  Il  escoule...  estât. 

450,  4.  —  24,  B,  Tant...  l'effect.  —  35.  —  442,  8  à  25,  B,  Mon...  par  fois.  —  454, 
12  à  16,  B,  Quand...  d'estrangers.  —  456,  13.  —  13,  B,  extrême.  —  18  à  25,  B,  Si 
cum...  vita.  — 36  à  458,  1,  B,  La  majesté...  pompe.  —  14,  B,  Nulla...  composuil. — 
26.  —  38,  B,  sans...  particulière. 

460,  7,  B,  Dominus...  sunl.  —  14,  B,  Sic  est...  sequamur.  —  23  à  26,  B,  Celle  à... 
Porcie.  —  462,  7,  B,  Et  Xenophon...  Aristippique.  —  14  à  18,  B,  Antisthenes... 
nature.  —  19  à  21,  B,  Les  bons...  appétit.  —  27,  B,  vniuerselle.  —  40,  B,  et  que... 
foiter.  —  464,  5  à  10,  B,  L'homme...  pouuons  pas.  —  19  à  25,  B,  Mes  mœurs...  de 
luy.  —  466,  9  à  16,  B,  Platon...  à  soy.  —  25  à  27,  B,  La  liberté...  mestier  là.  —  32, 
B,  et  faicts...—  effects.  —  36  à  43,  B,  letrouue...  exemple.  —  468,  5.  —  suyuent... 
promesse.  * 

470,  24  à  28,  B,  l'ay...  sembler.  —  30,  B,  l'Andria...  ceux  cy.  —  31  à  472,  4,  B, 
C'est  vn...  serré. —  5.  B,  mon  stjie...  mesme.  —  7,  B,  disent...  exemples.  —  9,  B, 
■  et  ie  la...  vers.  —  12  à  18,  R,  Le  poète...  Dieux.  —  24  à  27,  B,  Nifiil...  ie  dy.  — 
36  à  474,  5,  B,  Par  ce...  discordantes.  —  9.  —  29.  —  476,  7  à  13,  B,  Est  ce...  poni- 
mus.  —  16,  B,  Ego...  assurgo.  —  32,  B,  Laudandis...  ruinis.  —  33,  B,  V't  palam... 
nnlurae.  —  478.  26,  B,  Bona...  semina.  —  34,  B,  particulièrement. 

480.  —  484.  —  Ch.  X.  —  15  à  17,  B,  On  se...  deux.  —  486,  21  à  26,  B,  In  negoliis 
...  dignité.  —  488,  2,  B,  et  le...  enfoncer.  —  18.  —  21. 

490,  10  à  15,  B,  La  vérité...  errent.  —  25  à  28,  B.  faulce...  amitié.  —  36,  B,  Qui 
ne...  esse.  —  38.  —  492,  25,  B,  et  me...  a  moy.  —  32,  B,  .Maie...  Impetus.  —  494,  5  à 
7,  B,  Non  seulement...  force.  —  17.  —  25,  B,  Ses  pertes...  triomphe.  —  30,  B,  et 
au  desordre.  —  496,  9  à  14,  B,  Nam  si;.,  point.  —  11  à  13,  B.  Suf'ficif...  Clean- 
thes.  —  29,  B,  ce  qui...  me  manque.  —  30.  —  31.  —  498.  8.  —  8  à  26,  B.  La  fin.  . 
l'issue. 

500,  9,  B,  C'est...  poictrine.  —  31.  —  502,  1  à  4.  B,  Ils  adorent...  moy.  —  5.  B. 


VARIAiNTES   (1595-88  et  80).       LIV.  III,  CH.  X.       VOL.  III.         Da.H9 

Neque...  gero.  —  10  à  17,  B,  C'est  qu'ils...  cnrpebanl.  —  18  à  504,  23,  B,  le  me... 
contraires.  —  506,  2,  B,  aiiec...  appétit.  —25  à  29,  B,  Pareillement...  dissocia- 
tion. —  34,  B,  qui  n'est...  consolation.  —  39,  B,  Melius...  desinent.  —  508,  18  à  22, 
B,  Zenon...  tumeurs.  —  23.  —  25  à  30,  B,  Et  son...  que  luy,  —  37  à  510,  8,  B, 
Ceux  qui...  iuste. 

510.  19.  ^  28  à  34,  B,  Qui  n'arreste...  consislendi.  —  43  à  512,  11,  C,  Coniœnit... 
droicts.  —  27,  B,  Les  poètes...  sang.  —  35,  B,  De  combien...  sortir.  —  514,  9  à  22, 
B,  Pourtant...  raison.  —  28,  B,  d'y  tenir  ferme.  —  30,  B,  Entreprenez...  ardam- 
ment.  —  516,  22,  Excindunlur...  temperanlur.  — 518,  8,  B,  Cùm...  quielus.  —  24. 

520,  9.  B,  Neque...  cfferentem.  —  14.  —  31  à  33,  B,  Alcibiades...  condition.  — 
522,  23  à  26,  B.  Ceu.x  qui...  siècle.  —  32,  Quœ  est...  peti.  —  524,  5,  B,  Mihi... 
monde.  —  10  à  12,  B,  L'abstinence...  espace.  —  36.  —  526.  —  Ch.  XI.  —  10,  B, 
obscure  et  obtuse.  —  33,  B,  Ils  passent...  conséquences.  —  528,  2.  —  2  à  13,  B, 
Plaisans...  coustume.  —  30.  —  32,  B,  lia...  committere. 

530,  7  à  12,  B,  et  vont...  particulière.  —  24,  B,  ou  par...  narration.  —  30  à  32, 
B,  La  parole...  l'hyperbole.  —  37,  Quasi...  lurba.  —  532,  16,  B,  Miramur...  fallen- 
lia.  —  534,  22,  B,  ou  pour  dire...  s'engendrent.  —  24,  B,  et  sommes...  réfuter.  — 
35,  B,  enquestente...  resolutiue.  —  39  à  41,  B,  Iris...  bout.  —  43,  B,  Ignorance... 
science.  —  538,  2,  B,  Videanlur...  modo.  —  30,  B,  au  moins. 

540,  8,  B,  Captisque...  visa.  —  14,  B,  l'expérience  et.  —  18  à  24,  B,  On  recite... 
.  iustice.  —  29  à  33,  B,  Car  en  ce...  nesciam.  —  38.  —  546.  —  Ch.  XII.  —  14.  —  16, 
B,  Il  n'a...  maisons.  —  20,  B,  qui  estimons...  releue.  —  548,  4.  —  14.  —  21,  B, 
créances.  —  22,  B,  C'est  luy...  besoigne. 

550,  5  à  20,  B,  Estendant...  empoisonnent.  —  25  à  27,  B,  Et  est...  l'esprit.  —  30, 
B,  à  peu  près.  —  32,  B,  Paucis...  bonarn.  —  37  à  552,  4,  B,  Pusse-ie...  Quoy,  si.  — 
11  à  19,  B,  Ce  no  sont...  agilur.  —  24  à  26,  B,  chaud...  estois.  —  33  à  554,  1,  B, 
Celuy  là...  résistance.—  16,  B,  Simples...  versa  est.  — 21,  B,  non  nrmis...  cerla- 
tur.  —  556.  24  à  558,  4,  B,  Qu'est  deuenu...  piller.  —  6  à  30,  B,  L'vsurpation... 
diuine.  —  35  à  37,  B,  Xihil...  iuste. 

560,  20.  —  23  à  37,  B,  l'ayde...  lors.  —  562,  6  à  20,  B,  En  toutes...  à  soy.  —  22, 
B,  comme  par...  droicteur.  —  564,  7,  B,  Polenlissimus...  poteslale.  —  8.  —  16  à 
566,  9,  B,  Comme  ie...  guerison.  —  36.  —  568,  8,  B,  alors.  —  36. 

570,  5  à  8,  B,  Comment...  heureuse.  —  11  à  15,  B,  D'vne...  suffoquant.  —  572, 
10,  B,  Exilia...  lyro.  —  14  à  16,  B,  Parem...  frappe.  —  18  à  20,  B,  et  prendre... 
Noël.  —  27  à  32,  B,  Ils  poiseront...  mots.  —  574,  2  à  10,  B,  11  fut...  fournir.  — 
19,  B,  L'vne  nous...  effraye.  —  21,  B,  Vn  quart...  particuliers.  —  29  à  39,  B,  Si 
nous...  poids.  —  576,  3,  B,  Quo  me...  hospes.  —  lia  17,  B,  Plus  solet...  souffre. 

—  19.  —  20.  —  20,  B,  Que  leur...  agitable.  —  30.  —  36  à  578,  5,  B,  Il  est  à...  songes. 

—  8à580,  3,  B,  Si  ie...  Dieux. 

580,3.  —  4  à  18,  B,  Vrayement...  façon.  —  34,  B,  en  vne...  enfantine.  —  582,  1. 

—  10,  B,  Mille...  dédit.  —  11  à  16,  B,  Nature...  mort.  —  35  à  38,  B,  le  m'en...  au- 
tre. —  584,  8  à  20,  B,  Ces  patissages...  faire.  —  22,  B,  En  le...  donnoit.  —  27  à  30, 
B,  Au  hazard...  estranger.  —  31  cà  îM,  B,  Nous  autres...  allégation.  —  33.  —  586, 
2  à  5,   B,  d'escrire...  perdre.  —  8.  —  15  à  18,  B,  Accessoirement...  l'inscience. 

—  22.  —  24,  B,  et  si...  iniustice.  —  27  à  588,  2,  B,  Ipsi...  pied.  —  2.  —  4,  B,  Mais 
en...  elle-mesme.  —  8,  B,  et  Platon...  nature.  —  11  à  28,  B,  Phryné...  beauté. 

590,  26  à  592,  6,  B,  Dirai-ie...  conscience.  —  11.  —  20,  B,  comme...  chacun.  — 
28.  —  34,  B,  Ce  mystère...  soupçon.  —  35.  —  594,  14  à  19,  B,  Nous  faillons...  am- 
plifions. —  34.  —  43,  B,  Tune...  firmo.  —  596,  12.  —  16,  B,  en  ce  temps  là.  —  23. 

—  598,  1,  B,  comme.  —  5  à  12,  B,  VI  magis...  imitation.  —  15.  —  Ch.  XIII.  —  25, 
B,  Per...  viam.  —  27,  B,  de  beaucoup. 

.600,  9,  B,  Et  y...  l'œuf.  —  16,  B,  Nature...  dissemblable.  —  28,  B,  Vt  olim...  la- 
boramus.  —602.  40,  B,  Confusum...  sectumest.  —  604, 7,  B,  Comme...  doctrina.  — 606, 
11  à  14,  B,  A  quoy...  suffoquast.  —  17,  B,  ouy...  mesme.  —  19  à24,  B,  C'est ...  demy. 

—  25.  —  40  à  608,  6,  B,  Tout...  pénultième.  —  7  à  18,  B,  Sottement...  prendre. 
610,  1  à  4,  B,  Ingénieux...  l'homme.  —  612,  II,  B,  Combien...  crime.  —  18  à  22, 

B,  Et  de  ce...  profitable.  —  29.  —  31  à  614,  6,  B,  En  la...  estrené.  —  24  à  28,  B, 
Qui  bien...  ordinairement.  —  616,  11,  B,  Sit...  arces.  —  13  à  34,  B,  En  cette... 
faicte.  —  35.  —  618,  19  à  21,  B,  D'apprendre...  importante.  —  27. 


Da.l20  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

620,  4  à  6,  B,  Platon...  Xenophon.  —  10  à  13,  B,  D'où...  s'enquiert.  —  16,  B, 
comme...  Euthydemo.  —  26,  B,  Niliil...  prœcurrere.  —  31.  —  11.  —  622,  2.  — 
2  à  7,  B,  Car  h;...  adioustoit-il.  —  21  à  26,  B,  Les  sçauans...  cecy.  —  30.  —  31,  B, 
Sola...  est.  —  624,  2  à  14,  B,  Ce  qu'on...  mcscognoissable.  —  16.  —  20,  B,  Platon... 
hardiesse.  —  35.  —  35.  —  626,  17  à  20,  B,  le  le...  silence.  —  628,  8  à  13,  B,  Et  le... 
mauuais.  —  36.  —  39  à  41,  B,  le  n'ay...  heure. 

630.  —  632,  8,  B,  Nous  mettons...  moule.  —  15  à  17,  B,  Et  comme...  sage.  —  22. 

—  33.  B,  Et  ce...  Lybie.  —  634,  11,  B,  Et  Seneque...  soy.  —  18  à  21,  B,  Socrates... 
l'eau. —  22  à  31,  B.  Senequo...  mollesse.  —  636,  6,  B,  aussi.  —  37,  B,  comme... 
heures.  —  638,  M  à  16,  B,  Tout  métail...  capacité.  —  31.  —  39,  B,  Fascheuse... 
iour. 

640,  7.  —  8.  —  17  à  18,  B,  A'atKrd...  interrompue.  —  642,  16,  B,  Le  vin...  inuin- 
cible.  —  646,  3,  B,  Est...  proprietale.  —  10  à  18,  B,  leurs  maladies...  nostre.  —  21. 

—  25.  —  26.  —  27  à  29,  B,  le  ne...  profit.  —  648,  4,  B,  Indujnare...  est.  —  9  à  16, 
B,  La  goutte...  l'vtilité.  —  17.  —  18,  B,  et  allongera...  misère.  —  37. 

650,  26  à  28,  B,  La  décence...  sain.  —  652,  11.  —  21  à  26,  B,  Mais...  salutaires. 

—  33  à  35,  B,  Et  qui...  t'appelle.  —  654,  5  à  9,  B,  Par  où...  inopinément.  —  13  à 
20,  B,  A  faute...  passée.  —  28.  —  29.  —  658,  37  à  660,  8,  Qu'il...  empeschant. 

660,  12  à  20,'  B,  Qui  craint...  diuination.  —  662,  2,  B,  Platon...  boire.  —  11,  B, 
et  m'accommode.  —  22,  B,  depuis...  aage.  —  36.  —  37  à  664,  1,  B,  que  Platon... 
enfants.  —  3,  B,  soldat  volontaire.  —  7,  B,  et  tout  vn  peuple.  —  17  à  21,  B,  Viuere... 
secousses.  —  21.  —  33,  B,  et  mes  yeu.x.  —  666,  16.  —  21.  —  '32  à  668,  8,  B,  lies... 
maison.  —  28,  B,  Per...  luclit. 

670,  8,  B,  Magna...  venter.  —  672,  1,  B,  et  me  nuisent.  —  3,  B,  quoy...  courtes. 

—  10  à  16,  B,  Les  anciens...  aggreables.  —  674,  11  à  26,  B,  A  la  vérité...  maluri- 
las.  —  "33. 

680,  13  à  17,  B,  Ils  disent...  ans.  —  24.  —  35.  —  682,  3  à  10,  B,  Voyla...  s'escoule. 

—  18.  —  18  à  25,  B,  Comme...  place.  —  29,  B,  11  y...  grâce.  —  36  à  684,  1,  B,  par 
la...  s'entrefestoj-er.  —  5  à  12,  B,  Ce  n'est...  trouue.  —  14,  B,  desdaigneux.  —  14. 

—  16  à  19,  B,  Xerxes...  trouuées.  —  22  à  686,  6,  B,  Nous  n'auons...  iustcs.  —  12. 

—  12,  B,  Chercheront...  femmes.  —  16  à  19,  B,  qu'il  s'y...  mieux.  —  32  à  688,  14, 
B,  Sages...  le  plus.  —  17,  B,  au  deuis.  —  17  à  20,  B,  Et  Brutus...  sécurité.  —  26. 

—  35  à  38,  B,  suiuant...  palalus. 

690,  3,  B,  de  chanter,  de  sonner.  —  7.  —  13.  —  13  à  16,  B,  Et  la...  Rome.  — 
21  à  32,  B,  Il  s'est...  abstinence.  —  32,  B,  et  fouler  la  glace.  —  35  à  38,  B,  Il  s'est... 
venin.  —  692,  4  à  8,  B,  Il  est...  correcteurs.  —  12  à  15,  B,  La  grandeur...  cminen- 
tes.  —  18.  —  24  à  29,  B,  L'intempérance...  exemplaii-e.  —  30  à  32,  B,  pareille- 
ment... conlractio  :  et.  —  34  à  694,  10,  B,  Le  voir...  vertu.  —  19.  —  22,  B,  Slulli... 
ferlur.  —  25,  B,  Aussi...  viure.  —  696,  10.  —  20,  B,  passée...  future.  —  48  à  698, 
2,  B,  Et  me...  acerrimus.  —  6,  B,  ains...  talons.  —  12,  B,  tout  bon...  sunt.  —  16  à 
31,  B,  Elle  faict...  voluptcz.  —  33,  B,  Intrandum...  peruidendum.  —  35  à  700,  2,  B, 
Et  ce...  nature. 

700,  5,  B,  auec...  tousiours.  —  10  à  13,  B,  Qui  vclul...  diuina.  —  15.  —  16.  —  16, 
B,  et  tres-principale.  —  18  à  22,  B,  L'authorité...  motus?  —  31.  —  34  à  702,  4,  B, 
lesquelles...  temporelles.  —4.-4  à6,  B,  Entre...  sousterraines.  —  6,  B,  ce  grand 
homme.  —  44  à  18,  B,  Ces  humeurs...  diuin.  —  18.  —  19,  B,  et  basses.  —  21.  — 
26,  B.  Diis...  imperas.  —  704,  1  à  4,  B,  Si  auons...  cul.  —  5,  B,  et  humain...  ordre. 


FASCICULE  Db 


VARIANTES 

DE    l'édition    de     1595    PAR    llVPPOttT    A    l'eXEMPLAIRE 
DE    BORDEAUX. 


Ce  relevé  a  été  établi  principalement  d'après  l'édition  de  1802  de  Pierre  et  Fir- 
rain  Didot  et  celle  de  1872-90  de  MM.  Courbet  et  Royer. 

Toutes  les  variantes,  ou  à  peu  près,  que  présente  l'édition  de  1595  par  rapport 
à  l'exemplaire  de  Bordeaux,  figurent  ici;  il  n'a  guère  été  laissé  de  côté  que  celles 
simplement  afférentes  à  l'orthograplie,  et  encore  pas  toujours. 

Ce  faisant,  nous  n'avons  pas  cru  le  moins  du  monde  faire  œuvre  de  quelque 
intérêt,  un  très  petit  nombre  de  ces  variantes  valant  seules  d'être  signalées^  ce 
à  quoi  les  notes  suffisaient;  nonobstant  nous  nous  sommes  imposé  cette  charge, 
uniquement  pour  que  chacun,  jugeant  par  lui-même,  puisse,  en  connaissance  de 
cause,  apprécier  de  la  différence  insignifiante  des  deux  textes  et  de  leur  valeur 
respective. 

L'exemplaire  de  Bordeaux  porte  beaucoup  de  ratures;  on  a  été  jusqu'à  en  faire 
le  relové.  Nous  ne  poussons  pas  jusque-là,  estimant  que  ce  que  l'auteur  a  sup- 
primé est  comme  non  avenu,  et  que  ce  n'est  pas  être  dans  le  vrai  que  d'en  tenir 
compte  quand  même. 

L'édition  de  1595  et  l'exemplaire  de  Bordeaux  diffèrent  essentiellement  par  cer- 
tains passages  souvent  étendus,  existant  dans  la  première  et  qui  ne  se  retrouvent 
pas  dans  le  second,  alors  que  l'inverse  n'a  pas  lieu  ;  et  aussi,  mais  cela  est  de 
beaucoup  moindre  importance,  par  un  assez  grand  nombre  de  variantes  insi- 
gnifiantes, suppressions,  modifications,  additions  limitées  à  quelques  mots.  11  est 
à  remarquer  que  les  tournures  de  phrase  légèrement  différentes  qui  résultent  de 
ces  modifications  sont  toutes,  à  très  peu  d'exceptions,  plus  correctes  ou  plus  ex- 
pressives dans  l'édition  de  1595;  le  peu  de  fois  que  nous  avons  estimé  le  con- 
traire, nous  avons  adopté,  dans  la  traduction,  la  variante  de  l'exemplaire  de 
Bordeaux  et  l'avons  signalé  ici  et  dans  la  traduction  elle-même  par  un  astérisque. 
Le  dit  exemplaire  de  Bordeaux  présente,  on  outre,  un  bien  plus  grand  nombre 
de  fautes  d'impression  et  d'orthographe  dans  sa  partie  typographiée  ;  et  ces  der- 
nières sont  encore  infiniment  plus  nombreuses  dans  la  partie  manuscrite  où  la 
ponctuation  fait  à  peu  près  complètement  défaut.  Ces  particularités  justifient 
bien  les  conjectures  qui  prévalent  sur  l'origine  de  ces  deux  textes. 

Il  semble  de  fait  que  l'auteur  des  Essais,  dans  les  dernières  années  de  sa  vie, 
travaillant  en  vue  d'une  nouvelle  réédition,  le  faisait  au  moyen  d'annotations 
inscrites  sur  un  exemplaire,  on  feuilles,  de  l'édition  de  1588  qui  n'est  autre  que 
l'exemplaire  de  Bordeaux;  cet  exemplaire  était  en  feuilles,  puisque,  relié  aujour- 
d'hui, nombre  des  notes  manuscrites  ont  été  tronquées  par  le  couteau  du  relieur. 
Lui  mort,  Pierre  de  Brack,  auquel,  à  Bordeaux,  s'adresse  la  famille  pour  la  réa- 
lisation de  ses  intentions,  chargé  de  la  révision  et  de  la  mise  au  net  de  ces  an- 
notations, le  fait  en  se  servant  d'un  second  exemplaire  de  cette  même  édition, 
vraisemblablement  aussi  en  feuilles  et  aujourd'hui  disparu,  qui  lui  est  remis 
à  cet  effet.  Peut-être  Montaigne  avait-il  déjà  commencé  lui-même  cette  mise  au 
net,  ou  encore  ce  second  exemplaire  lui  servait-il,  comme  l'autre,  à  consigner 
ses,  modifications,  l'un  demeurant  à  la  ville,  l'autre  à  la  campagne,  leurs  anno- 
tations respectives  devant  plus  tard  être  fusionnées  et  ne  former  qu'un  tout. 
Cette  existence  simultanée  ressort  de  ce  que  nombre  de  variantes  entre  les  édi- 
tions de  1595  et  1588  ne  se  retrouvent  pas  quand  on  compare  cette  dernière 
édition  avec  l'exemplaire  de  Bordeaux. 

Quoi  qu'il  en  soit,  de  Brack  a  mis,  ou  achevé  de  mettre,  l'ouvrage  au  point  en 
reportant  ou  continuant  à  reporter  sur  l'un  les  notes  et  retouches  de  l'autre;  et, 
pour  plus  de  célérité,  il  les  détachait  de  celui-ci  pour  les  rattacher  à  celui-là, 


Db.l24  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

quand  elles  étaient  écrites  sur  des  papillons  y  attenant  par  des  pains  à  cacheter 
dont,  en  de  nom  breux  endroits,  on  voit  trace,  constatant  leur  disparition  de  l'exem- 
plaire de  Bordeaux,  on  mémo  temps  qu'on  les  trouve  insérées  dans  l'édition  de 
n05.  Chemin  faisant,  de  Brack  rectifiait,  au  fur  et  à  mesure,  les  fautes  d'im- 
pression, de  grammaire  et  d'orthographe,  de  l'exemplaire  sur  lequel  il  travaillait 
et  des  notes  manuscrites  qu'il  y  transcrivait,  non  toutefois  sans  qu'il  lui  en 
échappât  quelques-unes,  car  il  s'en  trouve  encore  pas  mal,  bien  que  partie  de 
celles  qu'il  a  laissé  subsister  aient  dii  être  corrigées  par  U""  de  Gournay  lorsque 
ce  travail  achevé  lui  a  été  envoyé  à  Paris,  pour  l'impression  dont  elle  avait 
charge. 

En  résumé,  l'édition  de  1595  est  plus  complète  que  l'exemplaire  de  Bordeaux; 
et  les  très  légères  différences  que  présentent  leurs  parties  communes  sont  géné- 
ralement à  l'avantage  de  la  première  qui,  par  là,  continue  à  mériter  sans  con- 
teste la  qualification  de  «  vieil  et  bon  exemplaire  »  que  lui  donne  M'"  de  Gournay, 
dans  son  édition  de  1635,  et  d'être  appelée  «  la  Vulgate  ».  comme  la  dénomment 
MM.  Barckhausen  et  Dezeimeris;  —  par  contre  l'exemplaire  de  Bordeaux,  par  ses 
notes  manuscrites,  renseigne  incontestablement  au  mieux  de  ce  qui  est  possible 
sur  l'orthographe  personnelle  de  Montaigne  (voir,  en  particulier,  à  cet  égard, 
conmie  échantillons  de  quelque  étendue,  les  variantes  relatives  au  capitaine  Rais- 
ciac  (I,  26,  10  à  20)  et  à  une  tentative  de  suicide  d'un  condamné  à  mort  (II,  102, 
13  à  31);  et  aussi  le  fac-similé  de  la  page  151  dudit  exemplaire  qui  est  donné  en 
tète,  dont  il  est  question  dans  le  fascicule  A  (notice  sur  les  illustrations),  qui  ren- 
seignera également  sur  son  écriture).  L'orthographe  des  éditions  de  1580,  1582, 
1587,  1588  est,  en  efïet,  beaucoup  plus  celle  de  ses  imprimeurs  que  la  sienne,  car 
il  leur  avait  laissé  carte  blanche  :  «  le  ne  me  mesle,  ny  d'orthographe  et  ordonne 
seulement  qu'ils  suiuent  l'ancienne,  ny  de  la  punctuation,  »  dit-il  au  chap.  ix  du 
livre  III  (vol.  III,  p.  412).  Ceux-ci,  au  surplus,  ne  semblent  pas  sur  ce  point  avoir 
agi  à  sa  complète  satisfaction,  à  en  juger  par  les  reconmiandations  écrites  par 
lui-même  en  vue  de  la  réédition  projetée  que  l'on  retrouvera  en  tète  du  fasci- 
cule G  (Glossaire)  et  dont  ses  exécuteurs  testamentaires  ont  tenu  d'autant  plus 
compte  dans  l'édition  de  1595,  qu'ils  étaient,  plus  que  lui,  respectueux  de  ces  dé- 
tails; si  bien,  qu'à  cet  égard,  cette  édition  a  en  plus  ce  que  les  autres  ont  en 
moins. 

Qui  veut,  en  dehoT-s  du  procédé  graphique  que  nous  avons  donné  dans  le 
préambule  du  fascicule  précédent  (Da),  avoir  un  ensemble  complet  auquel  rien 
ne  manque  des  variantes  des  Essais  avec  leurs  transformations  successives,  l'ob- 
tiendra, mais  sous  une  forme  moins  simple  et  moins  saisissante,  par  la  réunion 
des  quatre  éditions  ci-après  mentionnées  dans  l'énumération  qui  clôt  la  notice 
placée  en  tète  de  ce  volume  :  —  La  rééditition  de  1580,  par  MM.  Barckhausen  et 
Dezeimeris.  avec  les  variantes  de  1582  et  de  1587;  — celle  de  1588  par  MM.  Motheau 
et  Jouaust  avec  les  variantes  de  1595;  —  celle  de  1595  par  MM.  Courbet  et  Rover; 
—  enfin  l'édition  municipale  de  Bordeaux,  qui,  à  l'instar  de  celle  de  MM.  Mo- 
theau et  Jouaust,  a  pour  point  de  départ  le  texte  de  1588,  mais  conjointement 
avec  celui  de  1580  et  les  additions  manuscrites  de  l'exemplaire  de  Bordeaux. 

Dans  le  présent  relevé,  le  volume  est  indiqué  au  titre  courant;  —  les  nombres  en 
caractères  gras  marquant  la  page;  —  ceux  en  caractères  ordinaires,  la  ligne. 

Les  indications  affectées  de  la  lettre  A  s'appliquent  aux  additions  que  présente 
l'édition  de  4595,  par  rapport  à  l'exemplaire  de  Bordeaux;  —  celles  affectées  de 
la  lettre  D,  à  ce  qui  fait  défaut  dans  celle-là  et  se  trouve  dans  celui-ci;  —  enfin, 
celles  affectées  de  la  lettre  R  marquent  que  ce  qui  précède  cette  lettre  et  fait  partie 
du  texte  du  premier  de  ces  deux  documents,  se  trouve  remplacé,  dans  le  second, 
par  ce  qui  la  suit. 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


VARIANTES 

DE    l'édition    de    1595    PA.R    RAPPORT    A    l'eXEMPLAIRE 
DE    BORDEAUX. 


LIVRE  I. 


16.  =  Ch.  I.  =  4,  la  constance  et  la  resolution,  R,  et  la  constance.  =  18,  24, 
pleui"s,  R,  prières. 

20,  18,  et  mesines,  R,  estant  à  mesmes.  —  37,  y,  D,  auoit.  =  22,  4,  l'obstination 
à  se  taire,  R*,  son  fier  et  obstine  silence.  —  G,  ce  silence,  R,  ta  taciturnite.  —  10,  force 
(le  courage,  R,  hardiesse.  —  10,  A,  naturelle  et.  —  22,  veu.  D,  si  abatu  de  blessures. 
=  24.  =  Ch.  II.—  1,  vilain,  R,  monstrueux.  —  28,  celuy,  D*,  d'vn.  —  3G,  vierge, 
R,  fille.  —  37,  rapporter,  R,  représenter.  =  26,  10  à  20,  vn  gendarme...  accablé, 
R,  Raïsciac,  capitaine  Alemand  volant  raportcr  le  corps  d'vn  home  de  cheual  à 
qui  chacun  auoit  veus  excessiuement  bien  faire  en  la  meslee  le  pleignoit  d'vne 
pleinte  commune  mais  curieus  aueq  les  autres  de  conoistre  qu'il  estoit  après  qu'on 
l'eut  desarme  trouua  que  c'estoit  son  filx  et  parmi  les  larmes  publiques  luy  seul 
se  tint  sans  espandre  ny  vois  ny  pleurs  debout  sur  ses  pieds  les  yeus  immobiles 
le  regardant  fixement  iusques  à  ce  que  l'effort  de  la  tristesse  venant  à  glacer.  = 

28.  =  Ch.  III.  =  28,  ces,  R,  ses.  —  34  à  30,  3,  Comme...  soy,  R,  Vt  sluUitia  etsi 
adepta  est  quod  concupuit  nunquam  se  tamen  satis  consecutam  pulat  :  sic  sapientia 
semper  eo  contenta  est  quod  adest,  neque  eam  vnquam  sui  pœnilet  (Cette  citation 
est  remplacée  par  sa  traduction  dans  l'édition  dé  1595). 

30,  4,  soucy,  R,  sollicitude.  —  29,  valeur,  R,  nature.  —  32,  de  luy,  R,  par  luy. 

—  33,  deuenu,  R,  venu.  — 35,  continuels  maléfices,  R,  continuelles  meschancctez. 

—  37,  A,  à  luy,  et  à  tous  meschans  comme  luy.  =  32,  9,  mourir,  R,  sa  mort.  — 
10,  à  souhait,  R,  selon  ordre.  —  41,  soing,  D,  que  nous  auons.  =  34,  12,  Zischa, 
R,  Vischa.  =  36,  37,  au  degré,  R,  à  la  forme. 

40,  2,  mer,  D,  des  Athéniens.  —  14  à  18,  A,  Tout...  dit.  =  Ch.  IV.  =  21,  fort, 
M,  plaisamment.  —42,  28,  mer,  D*,  de  l'Helespont,  l'enforgea  et  luy  (it  dire  mille 
vilanies.  =  44.  =  Ch.  V.  =  29,  vieux,  R,  vieils.  =  46,  3,  traistre,  R,  trahistre.  — 
3,  desloyal,  R,  meschant.  —  9,  franche,  II*,  loyale.  —  21,  l'auoir,  D,  premièrement. 

—  23  à25,  Mais  aussi...  vaincre,  R,  Mais  cela  faict  aussi  si  leurs  ennemis  ne  cèdent 
et  vienent  à  accort,  ils  donnent  loy  au  pis  faire  et  ne  pensent  pouuoir  estre  re- 
proches de  trahison  de  finesse  et  de  tout  moien  qui  sert  à  veincre.  =  48,  II,  du 
Bellay,  R,  Monsieur  du  Bellay.  —  20,  luy  parler,  alléguant,  R,  parler  à  luy  et  qui 
après  plusieurs  autres  entremises  alleguoit.  —  25,  en,  D,  ostage. 

50.  =  Ch.  VI.  =  52,  26,  à  Ligny,  R,  en  Ligny.  —  28,  parlementer,  R,  parler.  — 

29,  parlement,  R,  marché.  —39,  dit-il,  R,  fit-il.  =  54,  ),  de  chercher,  R,  d'em- 
ployer. =  Ch.  VII.  =  56,  20,  A,  et  apertetnent.  =  Ch.  VIII.  =  58,  20,  de  carrière, 
D,  d'affaire.  =  Ch.  IX.  —  27,  merueilleuse,  R,  znonstrueuse.—  29,  gaigner,  D,  pai' 
là. 


Db.l26  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

60.  10,  s'empestrc.  R,  s'empesche.  —  21,  d'autruy,  D*,  corne  faict  le  monde.  — 
3i,  A,  de  tant.  —  39,  défaillent  de,  R,  défaillent  "par,  =  64,  1,  ce  bel,  R,  cette 
belle.  =  66,  ce  fut,  R.  qui  fut.  =  68.  =  Ch.  X.  =  22,  reiettent,  D,  hore. 

70.  20.  à  j'iiuyle  et  à  la  lampe,  R.  l'hu\  le  et  la  lampe.  —  23,  entreprise,  D*,  la 
met  au  rouet.  '=  72.  =  Ch.  XI.  =  76,  30,  essayé.  A,  de.  =  78.  11,  sans.  D.  atan- 
dre.  =  Ch.  XII.  =  29,  de  pied  ferme,  R,  patiemment. 

80.  C.  pl.ace,  R,  face.  —  22,  d'en  manger,  R.  d'v  mordre.  —  24.  A,  tout  son  saoul. 
=  84.  =Ch.XIII.  =  12,  autant...  la.  R,  toute.  —  14.  à,  D.  moy.  =  86.  =  Ch.  XIIII. 
(XIlll,  R,  XV)  [Sous  ce  numéro  Xllll,  l'exemplaire  de  Bordeaux  insère  le  chapi- 
tre qui,  dans  la  présente  édition,  porte  le  numéro  XL;  par  suite,  ce  chapitre  Xllll 
est  le  chapitre  XV  du  dit  exemplaire,  dont  tous  les  chapitres  de  XV^  à  XXXIX 
ont  leur  numéro  supérieur  d'une  unité  à  celui  qu'ils  ont  dans  l'édition  de  1595]. 
=  88,  13,  semblant.  D,  point.  =  Ch.  XV  (XV,  R,  XVI). 

90,  22,  punissoient...  de,  R,  condamnoient...  à.  —  23,  dit,  R,  i-aconte.  —  24,  à  vno. 
R.  en  vne.  —  28,  chastiement.  R,  condamnation.  —  32,  A,  amis.  =  92.  =  Ch.  XVI 
(XVI,  R,  XVll).  —  12.  contraire,  R,  rebours.  —  15,  d'vn  bon,  R.  de  bon.  —24,  A. 
et  si  ne  scauoit  guère. —  25,  vacation,  R,  vocation.  —  29,  recognoissent,  R,  rencon- 
trent. —  30,  offenses,  D*,  et  si  n'y  rcauoit  rien.  —33,  A,  trauailler  de.  =  94.21, 
et  soldats,  R*,  soldats  et  subiects.  =  96,  5,  comme  en  authorité,  R*.  et  non  en 
authorite  seulement,  mais.  —  8,  si  volontiei-s,  R.  volontiers.  —  19,  A,  de  art.  — 
30,  A,  auiourd'hui.  =  98.  =  Ch.  XVII  (XVII,  R,  XVlll).  —  24,  lulle,  R*,  luille.— 
30,  rage  poulse,  R,  peur  saisit. 

400,21  à  31,  A,  Quelle  affection...  expectorât  =  [Dans  l'exemplaire  de  Bordeaux, 
existe  ici  un  renvoi  dont  l'objet  n'est  pas  indiqué  et  donne  à  penser  que  le  papil- 
lon sur  lequel  ce  passage  était  transcrit  s'est  ou  a  été  détaché].  =  102,8,  frappez, 
R,  sesis.  —  14,  fureur,  R*,  tumulte.  =  Ch.  XVIII  (XVIII,  R,  XI \).  =  104,  9,  par 
la  main  d'vn,  R,  par  main  de.  —  10,  A,  indigne  et  barbare  cruauté.  =  106.  = 
Ch.  XIX  (XIX,  R,  XX). 

110.  =  114,  9,  l'airte,  R,  l'airle.  —  44,  en  dessoude  et  au  descouuert,  R,  en  des- 
sous de  et  à  descouuert.  =  116,  22,  nous  efforçons,  R,  efforçons  nous.  —  '29,  homme, 
R,  corps  d'homme  mort.  =  118,  28,  A,  œuure. 

120, 5,  A,  Dieu  merci.  —  7,  quelconque,  D*,  si  ce  n'est  de  la  vie,  si  sa  perte  vient 
à  me  poiser.  =  10,  A,  Les  plus  mortes...  saines.  —  17,  désigner,  R,  desseigner. — 
18,  en  voir,  R,  n'en  voir.  =  122,  7,  la  pensée,  R,  l'imagination.  —  17,  A,  ie  n'ay. 
—  32,  la  veue,  R,  le  goust.  =  124,  30,  mais  aussi,  R,  Et.  =  126,  41,  la  leur,  R,  ie 
leur.  =  128,  34,  A,  que  rien.  —  38,  A,  D'auantage. 

130,  22,  le  luy,  R,  ie  vous.  —  32,  l'air.  A,  et.  =  132.  =  Ch.  XX  (XX,  R,  XXI).  — 
25,  par...  a,  R,  de.  =  134,  7,  A,  à  Thoulouze.  —  13,  A,  lors.  —  36,  Par  là,  R.  de 
la.  =  136,  27,  crédit,  D,  des  miracles.  —  31,  en  ce  double,  R,  de  cette  opinion.  = 
138,  3,  en  courut,  R,  en  encourut.  —  7,  se,  R,  le.  —  9,  luy.  À,  en.  —  12,  net,  D,  à 
l'endroit  de  ce  subiect.  —  16,  ou  les,  R,  si  les.  —  23,  comte,  R,  compte.  —  34,  A. 
viuant  chez  moi.  —  35,  comte.  R,  compte. 

140,  4,  A,  à  l'heure  susditte.  —  4,  A,  à  l'oreille.  — 9,  paroles,  R,  oraisons.—  13,  A,  à 
la  dernière  fois.  —  31,  d'après,  R,  d'empres.  —  35,  quant  et  quant,  R,  aussi.  -  36, 
sa  cotte,  R,  le  cotillon.  —  38,  ne  la  fait,  D*.  guiere.  =  142,  1,  ardantes,  R,  bouil- 
lantes. —  2,  A,  qu'on  donne  de  soy.  —  5,  mariez,  D,  le  temps  étant  tout  leur.  = 
144,  13,  la,  D,  toute.  —  15,  Viuez,  D,  son  glosatur.  —  16,  voix,  R,  vers.  —  18,  co- 
gnois,  R,  sçais.  —  21  à  25,  A,  Et  pleust..  lepouuoir!  =  146,  1,  charges...  son  dict. 
R,  charges  telles  veu  la  condition  des  parties  qu'elles  ne  peuuent  aucunement 
apartenir  ny  concerner  son  dict.  —  2  à  4,  A.  Car  l'effect...  quietement.  —  9. 
Ouurage...  Amour,  R.  pourtant  est  à  Socrates  action  diuine  que  la  génération  et 
amour.  — 12,  escrouelles,  R,  escruelles.  —  12,  reporte,  R,  rapporte.  —  16,  supplée, 
R,  supplisse.  —  38,  espingle,  R,  espingue, 

150, 3,  Heures,  R,  les  Heures.  —  16,  A,  assez.  —  17.  comme  pour  moy,  R*,  comme  : 
pour  moy,  ce  n'est  pas  mal  parler  que  mon  commer.  —  28,  fay,  R.  feis.  —  30,  A, 
leu.  —32,  mon  inscience,  R,  ma  science.  =  152,  24.  volontiers.  A.  de.  =154.  = 
Ch.  XXI  (XXI,  R,  XXll).  =  Ch.  XXII  (XXII,  R,  XXIII).  =  156,  10,  les  médecins, 
R,  croy  les  médecins.  —  27,  A,  polis.  —  31,  A.  de  ça  bas.  —  31.  demeurer.  R.  du- 
rer. —35,  les  perçoit,  R,  s'en  estonnoient.  —  38,  l'accoustumance,  R,  la  costumance. 


VARIANTES  (lo9a-E\.  de  Bordeaux).    ÙW  I,  CH.  XXII.     VOL.  I.    Db.l27 

=  158,  1,  estonne,  R,  effraie.  —  21,  naifiie,  R,  forte.  —22,  A,  et  plus  neufue.  —3, 
espingles,  R,  esplingues.  —  33,  tricotterie,  R,  frichoterie. 
160,  8,  donné,  D*,  car  il  gaigne  sa  vie  à  se  faire  voir.  —  28,  raison,  R,  discours. 

—  34,  François,  R,  Frances.  —  36,  bonnes,  R,  bons.  =  162,  1,  plus,  D,  de  horrur 
et.  —  2,  faisons...  ordures,  R,  faisons  tous  autres  excremans.  —  11,  loingtains,  R, 
nouueaux.  =  164,8,  que  l'on,  R,  qu'on.  —  24,  les  démons,  R,  leurs  démons.  —  25, 
qu'il,  R,  qui.  —  32,  estrennes,  D*,  annuelles.  —  33,  lequel...  esteint,  R*,  l'ambas- 
sadeur qui  l'apporte  aiTiuant,  l'antien  feu  est  esteint  tout  par  tout  en  la  maison. 

—  36,  deuotion,  D,  com'  ils  font  souuent.  —  36,  A,  ce  qui  auient  souuent.  =166. 
1,  semblent  le  requérir,  R*,  le  requièrent.  —  2,  A,  luy.  —  3,  gouuernail,  R,  gou- 
uernement.  —  7,  insociable,  R,  inciuile.  —  19,  à  nourrisse,  R,  en  nourrisse.  —  32, 
poil.  D,  du  corps.  =  168,  1,  A,  sans  distinction  de  parenté.  —  37,  plus,  R,  autant. 

170,  16,  les,  R,  hors  des.  —  16,  hors  les,  R,  hors  des.  —  33  à  35,  A,  C'est  par... 
Thessalie.  =  172,  15,  par  laquelle,  R,  de  quoy.  —  16,  A,  et  preposteres.  —  19, 
coustume;  là,  R,  coustume;  où.  —  32,  tesmoin,  R,  corne.  =  174,  12,  chargées,  R, 
les  chargeant.  —  13,  prodigieuse,  R,  monstrueuse.  =  176,  4,  fantasticques,  R, 
monstrueux.  —  18,  vie,  D*,  propre.  =  178,  19,  royalle,  D*,  dict  un  antien. 

180,  17,  souciassent.  R,  souignassent.  —  18,  prouuoir,  R,  pouruoir.  =  184,  24, 
vingt,  R,  vint  et.  =  186.  =  Gh.  XXIII  (XXIll,  R,  XXIV).  =  188,  8,  tuer,  R,  ho- 
micides. —  13,  L,  R,  Lucius.  —  19,  pourmener,  R,  promener.  —  31,  dit,  R,  fit.  — 
32,  luy,  R,  ly. 

190,  20,  n'as-tu.  A,  pas.  =  194,  31,  telle  humanité,  R*,  si  notable  bonté.  =  196, 
31,  des,  R,  de.  =  198,  12,  présenter,  R,  représenter.  —  14,  représenter,  R,  pré- 
senter. 

200,  16,  confidence,  R,  confiance.  —  18,  clémence,  D*,  et  douceur.  =  202,  6,  dit, 
R,  di.  —  8,  s'ennuïast...  domination,  R,  se  peut  ennuier  de  son  iuste  gouuerne- 
ment.  =  Ch.  XXIV  (XXIV,  R,  XXV).  —  31,  n'auoir,  R,  n'auoit.  —  32,  gouuerne- 
ment,  D,  et  en  garde.  =  204,  21,  A,  faict.  —22,  occupe,  R,  saisi.  —37,  vn  Prince, 
R,  leur  Prince.  —  39,  rudement,  D,  qu'vn  pastre.  =  206,  11,  hommes,  R,  gens. 

—  36,  qu'il,  R,  à  quoi  il.  =  208,  24,  destourner,  R,  de  tourner. 

210,  16,  naistre.  A,  souuent.  —  17,  d'esprit,  D,  souuent.  —  28,  suppléassent  en, 
R,  supplissent.  =  212,  8,  formèrent,  R,  formairent.  —  18,  Nequidquam,  R,  Ne- 
quicquam.  —  32,  sot  et  présomptueux,  R,  fier  et  plus  outrecuidé.  =  216,  5,  V,  R, 
cinquiesrne.  =  218,  13,  pris  appétit,  R,  prins  le  goût.  —  34,  et.  A,  coustumiere- 
ment.  —  35,  qu'vn,  R,  que  tout.  —  38,  aawxoy;,  R,  asotos. 

220,  10,  quatre,  D,  d'eus.  =  224,  4,  comptes,  R,  contes.  —  6,  vie.  A,  priuee,  — 
20,  huitième,  A,  quasi.  =  226.  =  Gh.  XXV  (XXV,  R,  XXVI).  —  13,  monarque,  R, 
monarche.  —  20,  leçon,  D*,  au  moins  selon  icelle.  —  25*,  c'est,  D,  plus.  —  25,  A, 
en  matière  de  Hures.  =  228,  19,  que  chacun,  R,  qu'vn  chacun. 

230,  8,  oncques  puis,  R,  onques  plus.  —  14,  sçay,  D,  bien.  —  24,  par  où,  R, 
où.  —  31,  A,  purement.  —  34,  cette,  R,  vostre.  =  232,  14,  nouuel,  R,  nouueau. 

—  18,  petit,  R,  peu.  —  31,  deuant,  R,  auant.  =  234,  3,  ours,  A,  et.  —  14,  Platon, 
D,  mesme.  —  15,  trop,  R,  beaucoup.  =  236,  8,  réussir,  R,  tirer  vn.  —  9, 
qu'homme,  R,  qu'vn  homme.  —  24,  deuant,  R,  d'auant.  =  238,  7,  à  son,  R,  de 
son.  —  21,  A,  sienne.  —  28,  double,  D*,  11  n'y  a  que  les  fols  certeins  et  résolus. 

240.  =242,  22,  ou  la...  harquebuse,  R,  ny  la...  harquebouse.  —23,  et.  A,  faut. 

—  34,  seule,  R,  suie.  =  244,  5,  collum,  R,  callum.  —  7,  dislocation,  R,  disloueure. 

—  11,  les  gens,  R*,  les  plus  gens.  —  28,  A,  du  monde.  —  30  à  32,  comme...  va- 
leur, R,  tirer  nom  par  reprehantion  et  nouueletez.  —  36,  fecerinl,  R,  fecerunt.  — 
38,  que.  A,  là.  =  246,  19,  Vn,  A,  pur.  —  25,  en  vn,  R,  d'vn.  —  27,  conduite,  R+, 
guide.  =  248,  3,  au,  L),  haut.  —  23,  estimable,  R*,  inestimable.  —  32.  l'ai  leu,  R, 
ie  lis.  —  36,  par  laquelle,  R,  en  laquelle.  —  36,  laquelle,  D,  philosophie. 

2|50, 8,  la  Botetie,  R,  la  Boitie.  —  25,  l'imagination,  R,  son  imagination.  =  252, 
30,  s'y  exercent,  R,  s'exercent.  —33,  aucun,  R'^,  autre.  =  254,  13,  voirement  en 
quelque  manière,  R,  aucunement.  —  15,  en  quelque  manière  aussi,  R,  aucune- 
ment. —  37,  aux  secrets,  R,  au  secret.  —  38,  Car...  pays  [Cette  phrase  dans 
l'exemplaire  de  Bordeaux  est  mise  entre  parenthèses].  =  256,  1,  appris,  R,  dict. 

—  16,  mordre,  D*,  et.  —  18,  philosophie,  D,  ce.  —  20.  pris,  D,  et.  =  258,  22, 
routtes,  R,  routes.  —  33,  d'affection,  A,  que. 


Db.l28  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

260,  10,  api)otit,  11,  p:oust.  —  19,  on,  R,  dans.  —  20,  beauU',  D,  et.  —  30,  victo- 
rieux, R,  gioi'itnix.  —  3::^,  sinon,  1),  qiio  de  bone  heure  son  gouuerneur  l'estrangle 
s'il  est  sans  témoins  ou.  =  262,  30,  miserique,  R,  ntiserisque.  —  37,  disoit,  R,  dict. 

—  42,  l'abandonne  à.  A,  la  colère  et.  —  42,  humeur,  R,  l'humeur.  —  264,  17, 
iardin,  R,  iardrin.  =  266,  15,  contraire,  R,  rebours.  =  268,  1,  pourtraire,  R,  por- 
traire.  —  3,  là  fust,  R,  ce  fut.  —  9,  aux  Muses,  R,  les  Muses.  —  13%  ennemie,  D, 
de  communication  et.  — 24,  corps.  A,  est. 

270,  1,  (/uis,  R,  nliquis.  —  33,  s'il  y  a,  R,  s'il  a.  —  34,  s'il  y  a,  R,  s'il  a.  —  34, 
bonté,  D,  et.  =  272,  14,  parties,  A,  et.  —  19,  voyois,  R,  descouuris.  —  39,  lécher, 
A,  encores.  =  274,  I,  dans,  R,  en.  —  7  harangere,  R,  liarangiere.  —  11,  bene- 
uolence,  R,  beniuolence.  =  276,  30,  qu'ils,  R,  qui.  —  33,  gui,  R,  Sunl  qui.  —  3^1 
belle,  R,  bone.  —  35,  destors,  R,  tors.  —  278,  10,  au  port,  R,  à  la  façon.  —  2fi*, 
scolastique,  R,  pedantesque. 

280,  IG,  c'en,  R,  ce  en.  —  282,  28,  faut,  D,  nullement.  —  30,  A,  en  premier.  = 
284,  13,  inaccoustumée,  R,  nouuelle.  =  286,  8,  comme  cela,  R,  de  mesmes.  —  9, 
sont  telles,  R,  comme  cela.  —  9,  A,  il  est.  —  10,  A,  trop  desdaigneux.  —  11,  A, 
mesmes.  —  12,  A,  pourquoi.  —  17,  la  gratitude,  R,  de  la  gratitude.  —  20,  A,  et 
de  moy,  que  ie  suis  plus  mien.  =  288,  3,  (Iréce,  R,  en  Grèce.  —  14*,  raisonnable 
que,  D,  le  magistrat,  et.  =  Ch.  XXVI  (XXVl,  R,  XXVII).  —  26,  estoit,  R,  c'estoit. 

290.  2î).  saturusque,  R,  saliale.  =  294.  2,  de.  A,  la.  —  296,  6*,  les,  D,  deux.  = 
Ch.  XXVII  (XXVll,  R,  XXVlll).  —  24,  le  Contre-vn,  R,  le  contre-vn.  —  298,  13,  es- 
pace. R,  pièce. 

300,  8,  Aristippus,  R,  qui.  =  302,  37*,  par  les,  R,  par  le  commun  consente- 
ment des. 

310.  =  312,  40*,  un  autre,  R,  nul  autre.  =  314,  20,  si  ie,  R,  si  t'en.  —  23, 
reste,  D.  certes.  —  28,  ne  doiuent,  R,  me  doiuent. —  37,  auant.  R,  aueq.  =  318.  = 
Ch.  XXVIII  (XXVlll,  R,  XXIX). 

320,  19,  sentant,  R,  sentent.  —  51,  desreglé,  D,  Ces  vers  se  voient  ailleurs.  = 
[L'exemplaire  de  Bordeaux  n'étant  autre  qu'un  exemplaire  de  l'édition  de  1588 
corrigé  et  annoté  par  l'auteur,  les  sonnets  y  figurent;  mais  ils  y  ont  été  rayés 
en  suite  de  l'annotation  indiquant  qu'ils  se  voient  ailleurs.  —  Dans  l'édition  de 
1595,  ils  ne  sont  pas  reproduits  et  une  mention  poi'te  :  ■■  Ces  vingt-neuf  sonnetz 
d'Estienne  de  la  Boëtie  qui  estoient  mis  en  ce  lieu  ont  esté  despuis  imprimez 
auec  ses  œuures.  »  Nous  les  avons  néanmoins  insérés  dans  la  présente  édition 
pour  conserver  à  l'ouvrage  la  physionomie  qu'il  a  dans  celle  de  1588,  la  dernière 
de  celles  exécutées  sous  les  yeux  de  IMontaigne,  estimant  préférable  d'en  agir 
ainsi,  plutôt  que  de  les  faire  figurer  aux  variantes  où  sans  cela  ils  devraient 
prendre  place]. 

330. 

340.  =  344.  =  Ch.  XXIX  (XXIX,  R,  XXX).  —  31,  ny  à  suiure,  R,  à  suiure.  —  346, 
G,  soy-mesme,  R,  à  soy.  —  10,  trace,  R,  a  tracé.  —  29,  A,  en  ce  subiect  là.  —  34, 
nosti-e  histoire  Ecclésiastique  a  conserué,  R,  nos  antiens  autheurs  ecclésiastiques 
font.  — 3G,  et  soustenir...  desbordez,  R,  ses  trop  lasciues  et  immodérées  amours. 

350, 11,  plus,  R,  que.  —  39,  luy.  M,  seruist.  =  352.  =  Ch.  XXX  (XXX,  R,  XXXI). 
=  354,  9,  de  grande,  R,  estre  de.  =  356,  24,  vne,  R,  d'vne.  —  29,  nauigé,  R,  naui- 
gué.  —  57,  qu'on,  R,  que  l'on.  —  358,  19,  du,  R,  de  ce.  —  29  à  30,  vray... 
vérité,  R,  vrfiy,  il  semble  que  nous  n'auons  auti-e  touche  de  la  vérité.  —  40,  les 
accommodant,  R,  et  les  auons  seulement  accommodées. 

360.  =  362,  1,  perfection,  D,  Vin  a  Diis  récentes  [Traduction  :  Ces  hommes 
semblent  être  formés  récemment  de  la  main  des  Dieux].  =  366,  23,  leur.  A, 
dont  ils.  —  26,  à  point,  R,  bien.  —  39,  d'Alexia,  R,  de  Alesia. 

370,  33.  du  combat,  R,  d'vn  combat.  =  374,  38,  dont,  R,  d'où.  =376,  11,  rien 
qui  vaille,  R,  guiere  de  plaisir.  —  Ch.  XXXI  (XXXI,  R,  XXXII^.  =  378,  19,  par 
la,  R,  par  le  bonheur  et.  —  31,  moultures,  R,  mouldures. 

380.  =  Ch.  XXXII  (XXXII,  R,  XXXllI).  —  25,  régies,  R,  lois.  =  384.  —  Ch.  XXXIII 
(XXXIll,  R,  XXXIV).  —  29,  fallut,  R,  fausit.  =  386,  19,  empenné,  R.  empanné. 

—  22,  aposteme,  R,  apostume.  —  25,  aposteme,  R,  apostume.  =  388.  3,  se  gui- 
gnoyent,  R,  le  guignoint.  —  17,  de  retirer,  R.  dauoir  retiré.  —  Ch.  XXXI II 
(XXXIV,  R,  XXXV). 


VARIANTES  (lo9o-Ex.  de  Bordeaux).     LTV.  I,  CH.  XXXIV.     VOL.  I.     Db.l29 

390,  27,  Notaire,  R,  Notere.  -  392.  —  Ch.  XXXV  (XXXV,  R,  XXXVI).  -  13,  est, 
D,  àla  vérité.  —25,  A,  et  soubs...  noslre.  —  34,  du,  R,  d'vn.  =  394,  1,  à  celle  d'vn 
homme,  R,  à  vn  home.  —  4,  scarbillat,  R,  scarrebillat.  —  5,  amitonné,  R,  emmi- 
tonné.  —  16,  Perses,  R,  Persiens.  —  34,  l'vn,  R,  vn.  =  396,5,  Ouide,  D,  à  deux 
doigts  prez.  —  16,  oignants,  R,  ouignant.  —  18,  couroit,  R,  tiroit.  —  23,  en  es- 
tants. R.  estant.  —  16,  estropies,  R,  stropiez.  —  30,  A,  et  nous...  voir.  =  398.  — 
Ch.  XXXVI  (XXXVI,  R,  XXXVII).  —  11,  et  les  aymc,  R,  et  si  les  ayme.  —  16, 
suadent,  R,  laudent  nisi. 

400,  11,  attribuèrent,  R,  attribuarent.  — 13,  A,  de  leur  nation.  —  30,  dotracter, 
R,  retracter.  —  32,  pour,  R,  a.  —35,  Et  il  faut,  R,  Mais  il  faut.  —  36,  inuention, 
R,  conceiJtion.  —  402,  5,  ny  dressée  à,  R,  pour.  —  G,  naifue,  D,  ny  dressée  à 
cela.  —  20,  il  estimera,  R,  estimer.  —  28,  la  suprême,  R,  l'e.xcessiue.  =  404,  23, 
cœur,  R,  chœur.  -  Ch.  XXXVII  (XXXVII,  R,  XXXVIII).  -  30,  pleingnit,  R. 
pleinsit.  —  3-1,  le  Duclié,  R,  la  duciié.  =  406,  23,  nostre  ame,  R,  nos  âmes.  —  35, 
despend,  R,  desprend.  =  408,5,  nommer,  R,  nomer.  —  5,  honeste  homme  tantost 
après,  R,  tantost  honeste  home.  —  8,  ny  heure  à  peine  en  laquelle,  R,  auquel. 

410.  —  Ch.  XXXVIII  (XXXVIII,  R,  XXXIX).  —  11,  au  contraire,  R,  au  rebours. 
=  412,  4,  Emanuel  Roy,  R,  le  Roy  Emanuel.  —  5,  péril.  A,  de  fortune.  —5,  péril, 
R,  fortune.  —  8,  bord,  R,  sauuete.  —  18,  viuent,  R,  viuoint.  =  416,  9,  establis- 
sions,  R,  estabUssons.  —  .12,  A,  de  chose.  —  21,  vertu,  D,  dict  Antisthenes.  = 
418,  8,  à  l't^xemple,  R,  suiuant  l'exemple.  —  27,  tant  d'amitiez,  R,  l'amitié.  —  32, 
hommes,  R,  homes.  —  33,  vieux,  R,  vieils.  —.34,  certain,  R,  nul  certein. 

420,  3.  et  ne,  R,  ny.  =  422,  2,  veux,  R,  puis.  —  9,  portent,  nonobstant,  R,  ne 
laissent  pas  de  porter.  =  424,  6,  cerchcnt,  R,  recherchent.  —  8,  bonté,  R,  et  en 
bonté.  —  9,  rassasier,  R,  ressasier.  —  20,  délicieuse,  R,  délicate.  —  20,  sorte,  R, 
forme. 

430,  2,  vous  remettra,  R,  les  remettra.  —  Ch.  XXXIX  (XXXIX,  R,  XL).  =  432, 
II,  et  me  feroit  on,  R,  on  me  feroit.  —  25,  vulgaire,  R,  vulguere.  —  29,  scauan- 
tes...  par,  R,  scauantes  :  se  recommandans  par.  =  434,  16,  comme,  D,  c'est.  — 
22,  A,  au  moins.  —  26,  curieusement,  R,  ingénieusement.  —  31,  sôuuent,  R, 
souent.  —  32,  A,  en  ce  lieu.  —  33,  Retournant,  R,  Reuenant.  —  436,  33,  A,  espèce 
de.  —  34.  que.  D,  ie  ne  suis. 

440.  —  Ch.  XL  (XL,  R,  XIV).  =  444,  II,  présente,  R,  présenta.  —21,  errer,  R, 
fallir.  =  446,  1  à  8,  Au  royaume...  leur  maistre,  R,  Au  royaume  de  Narsingue 
encores  auiourd'huy,  les  femmes  de  leurs  prestres  sont  viues  enseuelies  auec 
leurs  maris  morts.  Toutes  autres  femmes  sont  brûlées  viues  non  constammant 
sulement  maisgaïement  aus  funérailles  de  leurs  maris.  Et  quand  on  brûle  le  corps 
de  leur  Roy  trépassé  toutes  ses  femes  et  concubines  ses  mignons  et  toute  sorte 
d'ofliciers  et  scruitui's  qui  font  un  peuple  accourent  si  allègrement  à  ce  feu  pour 
s'y  ietter  quant  et  leur  maistre  qu'ils  semblent  tenir  à  honeur  d'estre  compai- 
gnons  de  son  trespas.  [En  outre,  au  lieu  d'occuper  la  place  qu'il  a  ici,  ce  passage 
est  transposé  et  mis  plus  haut  après  «  Viue  le  Roy  »,  page  444,  ligne  24].  —  13, 
des  Xanthiens,  R,  de  la  ville  des  Xanthiens.  —  16,  fuir  la  vie,  R,  finir  la  vie.  — 
17,  Brutus,  D,  à  tout  son  armée.  —  19,  courageux,  R,  bon.  —  29,  arriué,  R, 
venu.  —  35,  victuailles,  %  vittoailles.  —  35,  contreints,  R,  fussent  contreints.  — 
35  à  36,  A,  longuement...  du  tout.  =448,  3,  A,  successeur  de  lehan.  —  5,  or- 
donna de  sortir,  R,  dona  temps  de  vuider.  —  7,  non  méprisable  historien  latin, 
R,  le  meilleur  historien.  —  9,  à  la  volerie  des  mariniers,  R,  come  leurs  compai- 
gnons.  —  11  à  12,  en  reduisist...  amonceler,  R,  en  rauisast  aucuns  :  ou  pour  les 
amonceler.  —  20,  Il  dit,  R,  Ils  disent.  —  21,  enfants,  R,  les  enfants.  —  23,  Il  fut, 
R,  II  y  fut.  —  25,  ieunes,  R,  iunes.  —  31,  A,  à  telles  mutations.  —  32  à  34,  A,  En 
la  ville...  opinions.  —  40,  fin,  R,  faim. 

450,  20,  A,  si  nous  en  deuenons  i)lus  lasches.  —  34,  discourir,  D,  et  d'en  parler. 
=  452,  10,  accroire,  B,  à  croire.  —  14,  loy,  R,  habitude.  —  16,  offences,  D,  qu'on 
leur  faict.  —  20,  Aussi,  R,  Et  à  la  vérité.  =  454,  6,  crédit,  D,  parmi  nous.  —  34, 
condition,  D,  et  conduite.  =  456,  4,  vaille,  R,  puisse.  —  10,  comme  vue,  R,  en 
vne.  —  14,  ainsi  qu'elles  montrent,  R,  comme  nous  volons.  —  20,  A,  égal  et.  — 
26,  aspre,  R,  aigre.  —  31,  ainsin,  R,  aussi.  —  36,  doluerunl,  R,  doluerunt,  dict 
S.  Augu.stin.  =  458,  13,  craignons...  malice,  R,  craignons  sa  peine. 

ESSAIS   DE  MO.NTAIGSE.  —  T.    IV.  9 


Db.430  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

460,  15,  auec,  R,  à  tout.  —  21,  A,  quand  ie  veins...  de  Blois.  —  22,  A,  peu  au- 
pai'auant.  — 22,  A,  en  Picardie.  —  ;J9,  on  portoit...  de  nuict,  R,  il  portoit  touiours 
dans  vue  boite.  =462,  5,  S.,  R,  Sainct.  —  18,  A,  faueur  et.  —  18,  A,  singulière  du 
ciel.  —  19,  mais...  nouri'ice,  R,  et  l'en  ai  perdu  mais  en  nourri.sse.  =  464,  9,  mais, 
R,  et.  —  14,  leur  pris,  D,  et  valeur  =  466,  43,  eux,  R,  leur.  =  468,  23,  A,  pas. 

470,  2î,  et  n'en  vsoi'  point,  R,  et  à  n'en  vser.  —  33,  eut,  D,  sur  ce  propos.  = 
472,  5,  et  quand  ma,  R,  et  ma.  —  9,  suffire,  R,  baster.  —  13,  et  non,  R,  non.  — 
19,  folie,  R,  maladie.  —  31,  bourse.  A,  et.  =  474,  fj,  conuenables,  R,  sortables.  — 
21,  A,  en.  —  34,  vn,  R,  vne.  =  476,  G  humaine,  R,  l'humaine.  —  Ch.  XLI.  —  20, 
délégua,  R,  dileyua.  =478,  5,  pour,  R,d'.  —  9,  Quand,  D,  l'Empereur.  —  11,  l'Em- 
pereur, R,  son  maistre. 

480.  —  Ch.  XLII.  —  17,  inegualité,  R,  inequalitc.  =  484,  38,  migraine,  R,  mi- 
craine.  =  486,  21,  s'apperçoiuent,  R,  se  pcrcoiuent.  —  20,  le  sentiment  propre  à, 
R,  du  sentiment  pour.  —  39,  ame,  R,  esprit.  =  488,  25,  qu'à  la,  R,  qu'en  la. 

490,  20,  d'y,  R,  de.  =  494,  11,  m'enorgueillirois,  R,  m'en  orgueillirois.  —  28,  me- 
sureroit,  R,  mesuroit.  =  496.  =  Ch.  XLIII.  =  14,  qui,  R,  et  qui.  =  498,  15,  hors, 
R,  hors  de.  —  17,  homme,  R,  l'homme.  —  22,  A,  à  leur  deuoir  et. 

500,  6,  au,  R,  du.  —  9,  vne  autre,  R,  autre.  —  11,  les  anciennes,  R,  toutes  an- 
tiennes. =  Ch.  XLIIII.  =  504,  4,  fallut,  R,  fausit.  =  Ch.  XLV.  =  506,4,  de  Ma- 
chanidas,  R,  contre  Machanidas.  —  14,  l'heure,  R,  heure.  —  24,  aussi,  D,  y.  = 
508.  =  Ch.  XLVI.  =  7,  des  Henrys,  R,  de  Henris.  —  26,  nom,  D^^,  beau  et.  —  2(5, 
mettre  en  mémoire,  R,  retenir.  —  31,  pouuoir,  D,  iamais. 

510,  3,  diuers,  R,  reuers.  —  15,  A,  suiuante.  —  20,  ne  dira,  R,  dira.  —  30,  temps, 
A,  là.  =  512,  5,  cadet,  R,  cabdet.  —  27,  ayeulz,  R,  aïeuls.  =  514,  15,  immensité, 
D*,  l'œternité.  —  15  à  17,  A,  et  remplissant...  qu'elle  veut!  =  516,  (5,  pensez,  R, 
diuinez.  —  15,  A,  tant  de  siècles.  —  16,  atlrila,  R,  altonsa.  =  518.  =  Ch.  XLVII. 
=  3,  prou.  A,  de.  —  5,  vince,  R,  vinse.  —  28,  on,  R,  l'on. 

520,  38,  ouy,  R,  c'est  mon.  =  524,  27,  se,  R,  soy.  =  526,  10,  piller,  R,  do  pillei'. 

—  36,  d'eslargir,  R,  eslargir.  =  528,  25,  témérairement,  R,  inconsidérément.  — 
26,  à  la  témérité  du,  R,  au.  =  Ch.  XLVIII. 

530,  7,  coste  à  coste,  R,  costé  à  costé.  —  18,  ils.  A,  se.  —  20,  Artibius,  R,  Arti- 
l)ie_  _  26,  A,  Charles.  —  26,  pennades,  R,  de  coups  de  pied.  —  20  à  34,  faicts... 
commande,  R,  faicts  par  certoins  signes  et  voix  à  ramasser  aueq  les  dans  les  lan- 
ces et  les  darts  et  à  les  offrir  à  leur  maistre  en  pleine  meslée  et  à  conoistre  et 
discerner  l'enemi  sur  qui  il  fault  qu'ils  se  ruent  de  pieds  et  de  dents.  =  532,  14, 
Platon  la,  R,  Platon  le.  —  34,  soy,  D,  à  ceux  qui  sont.  =  534,  1,  es,  R,  en  tous  les. 

—  14,  à  cette  heure,  R,  asture.  —  22,  vienne,  R,  viendra.  =  536,  7,  dressoit,  g, 
adressoit.  —  17,  traistresses,  R,  trahistresses.  —  27,  vn  bouclier,  R,  le  bouclier.  — 
28,  tirer.  A,  des.  =  538,  3,  les  veoir,  R,  le  voir.  —  4,  ses  mots,  R,  ces  mots.  —  26 
à  28,  Les  Abyssins...  mules,  R,  Les  Abyssins  à  mesure  qu'ils  sont  plus  grands  et 
plus  auances  i)res  le  Pretteian  leur  maùstre  affectent  au  rebours  des  mules  à 
monter  par  honeur.  —  31,  longueur,  R,  longur  à  la  guerre.  —  32,  desordre,  R,  des- 
soude. —  33,  en,  R,  au. 

540,  2,  Crotte,  R,  Crète.  —  33,  fecisse,  R,  sua.  —  542,  8,  belle  erre,  R,  bellere.  — 
9,  à.  M,  son.  —  13,  l'eut,  D,  refrechic  et.  —  29,  Monsieur,  R,  le  sieur.  —  33,  de 
bons,  R,  des  bons.  =  544,  2,  piquoit,  R,  couroit.  —  4,  donnoient  carrière,  R,  cou- 
roient.  =  Ch.  XLIX.  —  546,  entre,  R,  d'entre.  —  24,  perfumée,  R,  parfumée.  — 
24,  tenoicnt,  R,  s'emploioint.  —  26,  perfumoyent,  R,  parfumoyent.  —  39,  vie,  D  *, 
plus.  =  548,  4,  et  saluer,  R  *,  ou  saluer.  — -  7  à  8,  cette...  l'autre,  R,  cecy  n'est-if 
pas  vostre  aussi  bien  que  les  genous.  —  9,  de.  A,  la.  —  27,  donner,  A,  du.  —  28, 
sur  les,  R,  sur  des.  —  40,  magnificence,  D,  de. 

550,  23,  naulage,  R,  nolleage.  =  552.  =  Ch.  L.  =  6,  ouy,  R,  voire.  —  7,  dont. 
R  de  quoy.  —  15,  traicter,  R,  produire.  —  16,  qui.  A,  nous.  —  22,  A.  et  me 
trompois  en  mon  impuissance.  =  554,  9,  ses,  R,  ces.  =  556,  1,  trouble,  R,  grossit 
et  espessit.  —  16,  triste,  R,  attristé.  —  32,  poingnant,  R,  pouignant.  =  558,  6, 
propre,  D,  et  peculiere.  =  Ch.  LI.  =  25,  art,  R,  est.  — 30,  fust,  R,  en  fut. 

560,  12, grands,  R,  grans.  — 23,  raison,  R,  la  raison.  =562, 22,  reproche...  indigne- 
ment, R,tesmoignaged'vne  singulière  vanité  de.  —  36,  fantastiques,  R,  fantasques. 

—  564.  — Ch.LII.  -Ch.  LUI.— 566,31,  A,  qu'il  tient.  — Ch.  LIV.  —568,18,  se  tin- 


VARIANTES  (Ib93-Ex.  de  Bordeaux).     LIV.  I,  OH.  LTV.     VOL.  L       Db.lHl 

sent,  R.  se  tiennent.  —  3-2  à  37,  peur...  plat,  R,  peur  font  tresmousser  nos  mem- 
bres. Et  coluy  à  qui  ses  ians  qui  larmoient  voiant  frissonner  la  peau,  s'essaioint 
de  le  rassurer  en  apetissant  le  hasard  auquel  il  s'aloit  presanter  leur  dict  Vous 
me  conessez  mal.  Si  ma  cher  sçauoit  ou  mon  corage  la  portera  tantost  elle  s'en 
transiroit  tout  à  plat. 

570.  ;>(),  niaiserie...  arrestez,  K,  simplicité  et  ignorance  de  nous  voir  arrester.  — 
572,  9,  selon...  natures,  R,  selon  nostre  temps  des  natures.  —  14,  ceux  cy,  R, 
cens  icy.  —  574.  —  Ch.  LV.  —  6,  parfaict,  R,  excellent.  —  10,  exquise,  R,  par- 
faicte.  —  10,  rien,  R,  à  rien,  comme  on  dict  que  la  meilleure  odeur  de  ses  ac- 
tions, c'est  qu'elles  soient  insensibles  et  sourdes.  —  14,  sentir,  R,  de  santir.  — 
576,  1,  accusent,  R,  occupent.  —  10,  ce  crois-ie,  R,  croi  le.  —  17,  ouurage,  R, 
art.  —  -.^3,  se  trouuerent...  reuenir,  R,  reuenoient.  —  21  à  27,  non  la...  soudain,  , 
R,  ils  remplissoient  non  sulcment  la  sale  mais  toutes  les  chambres  de  son  palais 
et  iusques  ans  maisons  du  voisinage  d'vne  très  souefue  vapur  qui  ne  se  perdoit 
pas  si  tost.  —  578.  —  Ch.  LVI.  —  7  à  9,  pour...  Catholique,  R,  pour  exécrable  s'il 
se  treuue  chose  dicte  par  moy  ignoramment  ou  inaduertement  contre  les  sainctos 
pi-escriptions  de  leglise  catholique.  —  12,  ainsi,  R,  ainsin. 

580,  3,  d'escrier,  R,  descrier.  —  582,  1,  quand  ie  baaille,  R,  au  bailler.  —  31, 
son,  R,  au.  —  584,  14,  ses,  R,  ces.  — 586, 13,  pouuoit,  R,  peut.  —  14,  nous  qui,  R,  qui. 

-  -  in,  de  personnes,  R,  des  personnes. — 30,  des  principaux,  R  *,  deux  grans.  —  588, 
1.  soit,  D,  pas.  —  14,  portoit,  R*,  commençoit.  —  22,  prendroient,  R,  tireroient. 

590,  4,  façon,  R,  manière.  —  9,  peut  estre,  R,  à  l'auenture.  —  25,  inuoquons, 
R,  appelions.  —  29,  fortune,  R,  passion.  —  35,  luxure.  A,  et.  —  592,  32,  ses,  R,  ces. 

—  594.  —  Ch.  LVII.  —  596,  34,  dixnouf,  R,  dix  et  neuf.  —  598,  l,  produisent,  R, 
iiLseignent.  —  9.  de  mesmcs,  R,  des  mesmes. 

LIVRE  SECOND. 

600.  —  Ch.  I.  —  9,  cruauté,  R,  la  cruauté.  —  602,  2,  renuoyent,  R,  vont  ron- 
uoyant.  —  17,  vice,  D,  ce.  —  604,  20,  fdle.  A,  de.  —  606, 11,  refuse,  R,  refusa.  —  11, 
Mahomet,  R,  Mechmet.  —  18,  tant,  D,  sa.  —  22,  n'est.  A,  pas.  —  608,  20,  pauureté, 
R,  poureté.  —  25,  tout  au,  R,  tout  le.  —  30,  légers  soupçons,  R,  legieres  soub- 
çons.  —  36,  rapportées,  D,  Voluplalem  conlemnnunt,  in  dotore  sunt  molliores; 
gtoriam  negligunt,  frangunlur  infamia.  [Traduction  :  «  Les  mêmes  hommes  qui 
méprisent  la  volupté,  se  montrent  faibles  vis-à-vis  de  la  douleur;  d'autres  qui 
n'ont  aucun  souci  de  la  gloire,  sont  terrassés  par  la  perte  de  l'estime  publique  »]. 

610,  20,  à,. \,  la.  —27,  Visitants  l'isle,  R,  Visitans  isle.  —  612.  — Ch.  II.  —  614,9, 
c'est,  R,est.  — 15,  ou,  R,  quand. — 23,  recite,  R,  conte. — '30,  Hesterno,  R,  Eslerno.-— 
616.  10,  fort,  R, singulièrement.  — 12,  des  premiers,  R,  les  premiers.  —20,  foyer,  R, 
foïer.  —  618,  9,  ny  malaisé,  R,  et  malaysé.  —  12,  A,  et  où...  naturelles.  —  11, 
friand.  R.  agréable.  —  15,  autre,  R,  parfois  désagréable.  —  21,  modereement,  D, 
en  creinte  de  sa  santé.  —  21,  11,  A,  y.  —  22,  des  nuits,  R,  les  nuits.  —  30,  allas- 
sions, R,  alissions.  —  37,  ce  peut  estre,  R,  c'est. 

620,  4,  vulgaires,  R,  vulgueres.  —  5,  estoit,  D,  le  plus.  —  G,  le  port,  R,  la  con- 
tenance. —  9,  et  religion,  R  *.  en  religion.  —  14,  on  dit...  bras,  R,  m'a  on  dict 
qu'il  exerçoit  .ses  bras.  —  25,  c'estoit...  en,  R,  auoit  eu  fort.  —  30,  sur  le...  retour. 
R.  retournant.  —  622,  10,  coup,  D  *,  quasi.  —  Il  à  15,  A,  Et  par...  goust.  —  21, 
pardonne,  R,  ordone.  —  22,  A,  vn  peu.  —  30,  choses  vtiles,  R.  chose  vtile.  —  624, 
9,  A,  et  la  plus  parfaicte.  —  10,  garder  de,  D,  ne.  —  33,  gémit  à  la,  R,  .se  pleint  à 
l'estrete  d'vne  verte.  —  626,  14,  de  tenaille,  R,  des  tenailles.  —  628,  15,  Sagesse,  D, 
c'.  -t  18,  qu'il,  D,  nous.  —  Ch.  III. 

630.  —  632,  2,  à  tuer,  R;  de  tuer.  —  2,  podagre,  R,  podagriques.  —  3,  qu'elles., 
insensibles,  R,  que  ce  fut  sans  sentiment.  —  12,  que  ie,  D  *,  me.  —  30,  punis,  D 
et  en  celui-cy  et.  —  634,  33,  soi-mesmes,  A,  et.  —  35,  Fortune,  A,  ny.  —  636,  31, 
disoit,  R,  dit.  —  638,  13  à  17,  A,  A  la...  victoire. 

640,  35  à  642,  I.  [La  phrase  commençant  par  ces  mots  :  «  L'histoire  ecclésias- 
tique... »,  est  intervertie  avec  la  suivante  :  •<  l'eiasgia  et  Sophronia...].  —  1,  A.  l'e- 
ligion  et.  —  31,  riuiere.  A,  de.  —  644.  3,  de  <|uantité,  U.  (I.'vne  quantité.  —  10, 


DbJ32  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

à  la,  II,  en.  —  12,  mesme;  que,  D,  la.  —  14,  de,  A,  ne.  —  29,  retourne,  R,  retourna. 

—  40,  sentiroit.  A,  de.  —  646,  28,  occis...  main,  R,  de  ma  main  occis.  —  35,  s'em- 
braiserent,  R,  s'embraisarent.  —  648,  2,  firent,  A,  vn.  —  4,  entouré,  R,  entourné.  — 
14,  en,  R,  dans.  — 22,  A,  auec  plus  d'ordre  et  plus. 

650.  —  652,  0,  vins,  A,  et.  —  30,  douleur,  D  ♦,  insupportable.  —  654.  —  Ch.  III. 

—  7,  sens,  D,  si  beau.  —  5  à  II,  car...  desdie  [est  mis  entre  parenthèses  dans 
l'exemplaire  de  Bordeaux].  —  658.  —  Ch.  V.  —  9,  r'encontrer,  R,  rencontrer. 

660.  —  662,  3,  sçauoir,  R,  qu'il  sceut.  —  13,  vient  de,  R,  est  appuie  sur.  —  21,  a 
géhenne,  R,  geiné.  —  37,  le  General,  R  *,  vn  gênerai.  —  58,  ce  peu  de,  R,  le  peu 
de  la.  —  39,  tout  l'auagé,  R,  rauagé  tous  les  villages  à  l'enuii-on.  —  664.  —  Ch.  VI. 

—  666,  1,  noble,  B,  homme.  —  668,  39,  au  delà,'D,  mort. 

670.  —  672.  2,  accident,  R,  l'accident.  —  36,  A,  quelquefois.  —  674,  7,  beaux, 
R,  belles.  —  40,  de  légers,  R,  des  legiers.  —  676,  12,  molle,  R,  douce.  —  IG,  ren- 
gager, R.  i''engager.  —  678,  1,  A,  pourtant.  —  1,  mauuais,  R,  mauués.  —  1,  gré, 
D,  pourtant.  —  16,  n'estudie,  R,  estudie. 

680,  5,  il.  A,  plus.  —  18,  ouurage,  R,  ouuragos.  —  25,  entier,  D,  et.  —  32,  tont 
à  fait,  R  *,  ou  près  de  là.  —  34,  vaut,  D,  là.  —  682,  10,  chéris,  D,  11  peut  estre.  — 
12,  oysiueté.  A,  de.  —  18,  de  Scipion,  d'Epaminondas,  R,  des  deux  Scipions.  — 
22,  en  luy,  R,  es  luy.  —  25,  nom.  R,  surnom. 


SECOND   VOLUME. 

10.  —  Liv.  II,  ch.  VII.  —  18,  excellens,  D,  sans  despance.  — 12,  G,  ne  charge, 
R,  ny  charge.  —  14,  6,  de  contraires  accidens,  R,  d'accidens  eneniis.  —  15,  la  vail- 
lance, R,  cette  considération.  —  16,  11,  Cecy,  R,  Mais  il.  —  18.  —  Ch.  VIII.  — 
12,  espèce,  A,  et. 

20,  6,  sa  puérilité,  R,  son  enfance.  —  36,  Et  donner...  prendre,  R,  et  il  est  plus 
difficile  de  doner  que  de  prendre.  —  22,  4,  duquel,  R,  de  quoy.  —  8,  noui-rir.  R. 
nourris.  —  H,  quant  et.  A,  quant.  —  31,  prouuoir,  R,  pouruoir.  —  24,  3,  prou- 
uoir,  R,  pouruoir.  —  36  à  37  (de  vray...  d'auarice).  [Les  parenthèses  sont  suppri- 
mées dans  l'exemplaire  de  Bordeaux].  —  37,  d'auarice,  R,  de  l'auarice.  —  26,  25. 
vers,  R,  enuers.  —  31,  peut,  R,  ne  peut.  —  28,  15  à  22,  Muleasses...  d'enfants. 
[Cette  phrase  est  intervertie  dans  l'exemplaire  de  Bordeaux,  avec  la  suivante  . 
L'histoire...  Vénérien].  —  16,  ses  Estais,  R,  son  estât.  —  16,  A,  Mahomet.  —  17,  de 
sa,  R.  pour  son.  —  17,  l'appellant,  R,  et  l'apeloit.  —  17,  engendreur,  R,  faisur. 
—  18,  lecus,  R,  Iccus.  —  21,  tels,  R,  autres. 

30.  —  32,  19,  l'incommodité,  R,  la  subiection.  —  20,  vingt,  D,  et.  —  25,  portoit. 
R,  apportoit.  —  31,  enuers...  nées,  R,  en  vne  nature  bien  née.  —  32,  miliers,  R, 
foison.  —  37,  A,  l'ay...  famille.  —  34,  4,  fieres  et,  D,  reimperieuses.  —  20,  prou- 
uoyance,  R,  pouruoyance.  —  24,  Quantes,  R,  Quant  de.  —  37,  lioubles,  R,  trou- 
blez. —  36,  II,  sa,  R,  mesme.  —  11,  fin,  D,  ses.  —  31,  vieil,  R,  vieus.  —  38,  3. 
m'eschappe,  R,  n'eschappe.  —  5,  à  compai-aison,  R,  et  de  combien  autre  chose 
que.  —  20,  A,  plus  auantageusement. 

40,  9  à  13,  A,  0  mon  amy!...  priuation?  —  19,  A,  l'vne.  —  37,  estrangiere,  R, 
estrangier.  —  42,  10,  l'aage,  R,  cet  aage  là.  —  23,  temeraii-ement,  R,  temerere- 
ment.  —  44,  15,  trompez,  R,  mescontez.  —  20,  dialogue,  R,  discours.  —  33,  de 
peur  que,  R,  si.  —  36,  maison,  R,  famille.  —  46,  2,  ioyeusement...  humaine,  R. 
doucement  et  de  bone  voglie  où  l'humaine  nécessité.  —  5,  soucy,  R,  souin.  — 
5  à  7,  Reuenant...  soit  deue,  R,  Mais  au  demeurant  il  me  semble,  ie  ne  sçay  com- 
ment, qu'en  toutes  façons  la  maistrise  n'est  aucunement  doue  aux  femmes.  — 
10,  aucunement,  R,  point. 

50.  —  52,  1,  s'approcher,  R,  approcher.  —  7,  la  doctrine,  R.  sa  doctrine.  —  39, 
d'eschanger,  R,  à  eschanger.  —  54,  8,  qu'ayant,  R,  qui  aj-ant.  —  Ch.  IX.  —  56, 
15,  mousquetaires,  R,  mosquetaires.  ^  16,  qu'on,  R,  que  l'on.  —  24,  craignoit,  R. 
craignant.  —  58,  4,  A,  marchant  en  bataille.  —  40,  fust.  D,  au. 

60.  —  Ch   X.  —  18,  ou  secourir...  de  moy,  R,  mon  propos.  —  19,  A.  non  à  ma... 


VARIANTES  (139o-Ex.  de  Bordeaux).      LIV.  Il,  CH.  X.     VOL.  II.    Db.l33 

suite.  —  21,  par,  R,  tantost.  —  ii,  ou  par,  R,  tantost.  —  25,  comparaisons,  argu- 
ments, R,  inuantions.  —  26,  A,  quelcun.  —  26,  à  escient...  cache,  R,  i'ay  à  escient 
ommis  parfois  d'en  merquer.  —  62,  4,  Plutarque,  R,  Platon.  —  5,  Senequo,  R,  Ci- 
ceron  ou  Aristote.  —  9,  recognoissance,  R,  cognoissance.  —  10,  connoistro,  R, 
sentir.  —  25,  ainsi,  R,  ainsin.  —  27,  souhaiterois,  D,  bien.  —  64,  8,  contention, 
R,  la  contantion.  —  9,  le  retire,  R,  la  retire.  —  32,  outrecuidé,  R,  sot.  —  66,  11, 
comparaison,  R,  la  comparaison.  —  68,  30,  basteleresque,  R,  bateleresquc. 

70,  18.  ainsi,  R,  comme.  —  22,  A,  et  dépendance.  —  32,  garde,  R,  targue.  — 
72,  9,  ces,  R  *,  ses.  —  26,  en  retrouuer  le  fil,  R,  rencontrer  le  ûl  du  propos.  — 
74,  18,  bel,  R,  beau.  —  27,  son  àme,  R,  luy.  —  33,  imperfection,  R,  à  luy  faute 
de  iugement.  —  76,  22,  variété,  R,  diuersité.  —  24,  diuersité.  R,  variété.  —  30,  ie 
suis...  fortunes,  R,  ie  ne  considère  pas  moins  curieusement  la  fortune.  —  32, 
comme  de  cognoistre,  R,  que. 

80,  12,  beaux,  R,  de  beaux.  —  3l,  par  là,  R,  par  cet  exemple.  —  82,  24,  le  ca- 
quet, R,  au  caquet.  —  84.  —  Ch.  XI.  —  86,  14,  et  iamais,  R,  mais  iamais.  —  16, 
des  chapons  il  ne  s'en,  R,  de  chapon  il  ne  se.  —  88,  23,  personnage,  R,  person- 
nage là.  —  25,  ny  aucune,  R,  et  aucune. 

90,30,  clair,  R,  à  clair.—  41,  m'en...  foible,  R,  me  la  recite  d'apparence  forte 
attachée  à  une  foible  vie.  —  43,  de  cause,  R,  d'vne  cause.  —  92,  13,  aduenir,  R,  à 
venir.  —  94,  20,  hazards,  R,  dangiers.  —  P.  96,  2,  grand'  mercy,  R,  granmercy. 

—  30,  Dionysiusle  tyran,  R,  du  tiran  Dionisius.  —  31,  afin,  R,  pour.  —  36,  versast 
et  ieta.st,  R,  iettat  et  versât.  —  39,  le  prie  de  luy  enuoyer,  R,  qu'il  luy  enuoie. 

—  40,  formage,  R,  fromage.  —  41,  A,  tout.  —  98,  2,  ic  les,  R,  il  les.  —  21,  que 
sçauroit...  vn  sainct,  R,  qu'vn  sainct  sauroit  faire.  —  27,  l'auoit,  R,  auoit. 

100,  18,  D,  du  plaisir.  —  20,  préparer,  D,  et  bander.  —  24,  A,  petite.  —  40,  qui 
l'auoient,  R,  qu'ils  auoient.  —102,  13  à  31,  que  le  peuple...  changée,  R,  qu'en  la 
place  des  charpantiers  commançoient  a  dresser  leurs  ouurages  et  le  peuple  a  s'y 
assembler  tint  que  c'estoit  pour  luy  et  entre  en  desespoir  n'ayant  autre  chose  a 
se  tuer  se  saisit  d'vn  viens  clou  de  charrette  rouillé  que  la  fortune  luy  présenta 
et  s'en  dona  deus  grands  coups  autour  de  la  gorge  :  et  volant  qu'il  n'en  auoit 
peu  esbranler  sa  vie  s'en  dona  vn  autre  tantost  après  dans  le  ventre  de  quoi  il 
tumba  en  euanouissement.  Et  en  cet  estât  le  trouua  le  premier  de  ses  gardes  qui 
entra  pour  le  voir.  On  le  fit  reuenir  et  pour  emploier  le  temps  auant  qu'il  dé- 
faillit on  luy  fit  sur  l'heure  lire  sa  santance  qui  estoit  d'auoir  la  teste  tranchée; 
de  laquelle  il  se  trouua  infiniement  resioui  et  accepta  a  prendre  du  vin  qu'il 
auoit  i-efuse  et  remerciant  les  iuges  de  la  douceur  inespérée  de  leur  condamna- 
tion dict  que  cette  deliberatiori  de  se  tuer  lui  estoit  venue  par  l'horrur  de  quelque 
plus  cruel  supplice  du  quel  luy  auoint  augmenté  la  crainte  des  apprêts  qu'il 
auoit  veu  faire  en  la  place  et  qu'il  auoit  prins  parti  d'apeler  la  mort  pour  en 
fuir  vne  j)lus  insupportable.  —  104,  16,  figure,  A,  et.  —  13,  abondons,  R,  foison- 
nons. —  23,  farouches,  R,  monstrueuses.  —  108,  13,  qu'ils,  R,  laquelle  ils. 

110.  —  Gh.  XII.  —  9,  de  Sebonde,  R  *,  Sebond.  [Les  variantes  de  ce  nom  : 
Sebon,  Sebond,  Sebonde,  Sabonde,  sont  très  fréquentes,  elles  ne  seront  plus  repro- 
duites]. —  18,  dés  long,  R,  de  long.  —  112,  5,  bien,  R,  vn  bien.  —  114,  2,  En  quoy, 
R,  Enquoy.  —  9.  Turnebus,  R,  Tournebu.  —  28,  priuilegiée,  R,  priuilegée.  —  116, 
26,  soustiendrions,  R,  soutienderions.  —  118,  6,  merque,  R,  marque. 

120,  22,  légitime,  D,  et  moïene.  —  38,  comme,  R',  corne.  —  122,  14,  bique,  R, 
troque.  —  18,  religion,  R,  relligion.  —  20,  quelle  enuie,  R,  quel  goût.  —  21,  l'en- 
uie,  R,  le  goût.  —  19,  A,  si  tu  le  crois.  —  21,  plus  loin,  R,  hors.  —  25,  A,  et  qui 
ne  fais  rien  qui  vaille.  —  33,  veux,  R,  veuil.  —  124,  6,  créance,  R,  croyance.  — 
31,  raison,  R,  amour.  — 126,  1,  conscience.  Pourtant  ils,  R,  consciance  pourtant. 
Ils,  —  1,  leurs  mains,  R,  les  mains.  —  3,  A,  et  appesanti.  —  4,  laissons,  A,  pas. 

—  12,  ame,  D  *,  de  Platon.  —  128,  16,  mais,  D,  c'est.  —  23,  parfaict,  R,  perfet. 
130,  4,  les  dicts...  d'autruy,  R,  le  sens  des  escris  d'autrui.  —  5,  A  vn...  infecte, 

R,  et  vn  atheïste  se  flate  à  ramener  tous  les  autheurs  à  l'athéisme  infectant.  — 
24,  point...  hommes,  R,  en  fort  peu  d'homes.  —  39,  A,  faict-il.  —  136,  10,  deuiner, 
R*,  songer.  —  19,  et  quant,  D  *,  dict  Pline.  —  34  à  138,  2,  A,  Nous  nous...  la 
sienne.  — 9,  impudence,  R,  imprudence.  —  16,  les,  D,  en.  — 25,  des  nostres,  R,  du 
nostre.  —  34,  abboyer  du  chien,  R,  abbayer. 


Db.l34  ESSAIS  DE  MONTAIGNE.  < 

140.  -M.  ivniioyons,  R,  renuoions.  —  25,  soubmettons,  R.  summetons.  —  31.  ot, 
A,  ne  s'.  --  142.  6,  priidcnco.  R.  prouidoncc.  —  3!),  par  art,  R,  à  l'industrio.  —  144. 
35,  plusieurs,  R.  tant  de.  ~  o(i,  ossaj-»S  R,  gousté.  —  40,  .souffrir,  D*,  le  visage, 
les  pieds,  les  mains,  les  iainhcs,  les  espaules.  la  teste,  selon  que  l'vsage  nous  y 
conuio.  —  40,  S'il,  R.  Car  s'il.  —  148,  3,  lesquelles  il,  i;.  qu'il.  —  (i,  l'ichneunioii. 
R.  l'ichneaumon.  —  13,  parlons.  R.  parlions. 

150,  4,  à  la  presse,  R,  au  nombre.  —  28,  A,  et  de  [)lus  riches  effects  des  facul- 
tez  plus  riches.  —  :>0,  œuurer...  tiennent 'les,  R.  ouurer.  c'est  aussi  celle  des.  — 
30,  A,  ou  quelqu'autre  meilleure.  —  152,  14,  glace.  A,  de.  —  156,  20,  fenoil,  R. 
fenouil.  —  20.  cicogues,  R,  cigoignes.  —  37,  vn,  R,  l'vn.  —  158,  36,  rationaci- 
nation,  D.  et  sans  discours. 

160. — 162.  11.  s'arresterent,  ii.'s'aii'rstaieiit.  —  1'.'.  d  exiiriuiei-.  11.  '!(■  ixpri- 
luer.  —  22,  d'alléguer,  R,  à  alléguer.  —  164,  43,  es  animaux.  R.  des  animaux.  — 
166.  13,  Il  nous...  ainsin,  R,  comme  il  nous  adulent.  —  168,  30.  la  condition...  11 
a.  R,  de  la  condition  de  l'hérisson,  qu'il  a. 

170,  34,  le  giste,  R,  leui'  giste.  —  176,  26,  vsage.  R,  d'vsage.  —  :'!•.  a  coustunie. 
R.  a  accoustumé. 

180,  2,  qui  semblent,  R,  qu'il  semble.  —  27,  assiegeans,  R,  pressans.  —  27,  Xia- 
tine,  R,  Xiatime.  —  28,  quantité,  R,  grande  quantité.  —  29,  auec,  R,  à  tout.  — 
30,  abandonnèrent  leur  entreprinse,  R.  les  mirent  en  route.  —  31,  piqueures, 
R,  leurs  pointures.  — 182.  25  ordonnèrent,  R.  ordonnarent.  —  13,  ie  m'embatis, 
R,  m'estahs  enbatu.  —  13,  et  me,  R,  ie  me.  -  28,  comme  ce  lyon  estoit,  R,  ce 
Lyon  s'enestant.  —  186.  19,  goujon,  R,  gayon.  —  31.  l'ichneumon,  R,  l'ichneau- 
mon. —  32.  s'approche,  R,  aproche. 

190,  21,  desmeut,  R,  desment.  —  38,  A,  de  laquelle.  —  40,  appétit,  R,  poste.  — 
194.  10.  Et  cette.  R.  Cette.  —  196,  20,  de  laine.  R,  laine.  —  20,  que  nous,  R,  qu'à 
nous.  —  198.  21,  ils  eussent,  R,  qu'ils  eussent.  —  41.  Car  en  fin.  R,  Enfin. 

200,  1,  n'est,  D,  pas.  —  l.  Dieu,  D*,  mesme.  —  14,  des  passions,  R,  de  passions. 

—  15,  butte,  R,  prise.  —  16,  bestes,  R*,  et  autres  animaux.  —  202,  1,  on,  R,  l'on. 

—  12.  plus  comme.  D,  la  beauté.  —  17.  formis.  R,  aux  fourmis.  —  12,  neantmoins. 
R,  ce  neantmoins.  —  39,  propre.  R,  principal.  — 40,  bien-facteur.  R,  bienfactur. 

—  204.  1,  De  l'obéir,  R,  D'obéir.  —  5,  Sereines,  R,  Sirènes.  —  206.  32,  mesmes.  R, 
les  mesmes.  —  36,  qui  le...  retournoit,  R,  l'estant  venu  visiti  r  it  s'en  retournant. 

—  208,  1,  estre,  R,  en  estre.  —  14,  douleurs,  R.  douleur.  —  24.  caterrousi\  R.  ca- 
tarreuse. 

210.  15,  on  r,  R.  ot  qu'on.  —  18,  pensée,  R,  et  pensée.  —  18.  comme  gent.s.  U. 
comme  gens.  —  21,  trouue,  R,  voit.  —  212,  19,  la  commodit<'.  R.  le  goust.  —  23, 
n'auons,  D.  pas.  —  214,  8,  sentiment,  R,  goust.  —  31,  qu'où,  R,  que  où.  —  216,  39, 
ceruelle,  R,  fantasie.  —  218,  5,  ioie,  R,  plein  de  lies.se. 

220,  10,  et.  A,  se.  —  36.  à  toute,  R.  toute.  —  222,  10,  nom,  R,  surnom.  —  21,  se 
tenoit  pas  tel,  R,  s'en  tenoit  pas.  —  28.  rien,  D,  à  la  vérité.  ~-  224,  24,  point,  R, 
pas.  —  34,  diuin,  R.  ce  diuin.  —  226,  7,  qu'il,  R,  qu'il  y.  —  17,  baisser,  R,  à  bais- 
ser. — 18,  tout,  R,  et  tout.  —  19,  de  ferme,  R,  ferme.  —  25,  te  porter,  R,  t'appor- 
ter.  —  28,  n'y  d'y,  R,  et  d'y.  —  228,  37,  de  qui,  R,  desquels.  —  38,  d'Archilochus, 
A,  et. 

230,  1,  ceux-là.  R,  ceux.  —  232,  32.  choisissiez,  R,  choisissez.  —  234.  du.  R.  dvn. 

—  6.  consentement,  R,  consenlemant.  -—  236.   16,  d'estalilii-.  D*.  l.i  v^riti'.       32. 
qu'il.  R,  qui.  —  238,  8,  contre  les.  A,  loix  et.  —  13,  d'y.  H.  y.    -  27,  ses.  U.  ces. 

240,  2,  approche,  R,  a  approché.  —  19,  ont.  A,  ils.  —  26,  ne  descouurir  la  va- 
nité, R,  descouurir  l'inanité.  —36,  la  republique,  R,  sa  republique.  —  242,  3,  A, 
les  autres.  —  3,  toutes,  D*,  aussi.  —  4,  celle,  D,  seulement.  —  11,  d'exercer,  D,  et 
esbattre.  —  12,  A,  mesmes.  —  25,  auoyent,  R,  ont.  —  25,  s'estoit,  R,  s'est.  —  20. 
se  contentant.  R,  et  se  contente.—  30,  l'emmailloter,  R.  le  mailloter.  —  30.  circon- 
cir.  R,  circoncire.  —  35,  dessein,  R,  vn  dessein.  -  37,  bien,  D,  et.  —  244,  1,  de- 
uovent,  R,  deuront.  —  35,  trouuent,  D.  qu'il  y  a.  —  248,  28,  estant.  R.  et  estant. 
— 'lO,  il'y,  R,  à  y. 

250,  3*3,  leur  donnoit,  R,  nous  adonné.  —  34,  leurs  songes,  K,  nos  songes.  — 
2j2,  9,  compiler  à,  R,  compiler  en.  —  254,  13,  A.  rien.  —  256,  7,  entourant.  R.  en- 
tournant.  —  14.  perlTàbles.  R.  perfilables.  ^  25,  m'humilient.  R.  me  humilient.— 


VARIANTES  (1595-Ev.  de  Bordeaux).     L[V.  II,  CH.  XII.     VOL.  il.     Db.l35 

27,  prérogatiuo,  l),  le  laisse  cà  part  los  troins  de  vie  monstrueux  et  contie  nature. 

—  258,  5.  nos  sépultures,  R,  et  sépultures.  —  25,  veneratioji,  D,  que  n'en  faisoient 
les  Romains  de  Testât  de  Hercules,  Pollux  Platon,  Esculapc  et  tant  d'autres. 

260,9,  d'applicable,  R,  applicable. —30,  prépare.  11,  a  préparé.  —  262,  lautiue, 
R,  fautiere.  —264,  31,  Sardeif^ne,  R,  Sardaigne.  —  266,  23,  par,  D,  le.  —268,  11, 
s'esbalatrrent  le  visage,  R,  se  balafrent  les  visages.  —  20,  grand,  R,  grande.  —  20, 
apparier,  R,  assortir. 

270,  32,  attaquent,  R*,  attachent.  —  272,  26,  ce  nouueau...  monde,  R,  ces  nou- 
uelles  terres.  —  37,  accouchent,  R,  s'accouchent.  —  40,  vsage,  D,  et  conoissance. 
--  274,  16.  la  disoit,  R,  disoit  estre.  —  17,  l'homme,  R,  ou  l'home  le.  —  34,  Mau- 
siphanes,  R*,  Nausipham^z.  —  276,  12,  Grammariens,  R,  Grammairiennes.  —  33, 
ny  moins,  R,  ne  moins.  —  278,  33,  rabrouent,  R,  rebrouent.  —  41,  attribué,  R, 
doné. 

280,  3,  à  ce  Roy  là  c'estoit,  R,  ce  lui  estoit.  —  8,  apporte,  R,  aporte.  —20,  rui- 
nent, R,  nuisent.  —  22,  elles  chacune,  R,  eus  chacun.  —  25,  deuinent.  H,  diuinent. 

—  282,  25,  sçachiez,  R,  saches.  —  284,  5,  accession,  R,  succession.  —  26,  trouue, 
R*,  trouua.  —  29,  secrestin,  R,  secretain.  —  286,  5,  les  pères,  R,  le  père.  —  9, 
trouue...  croyance,  R,  treuue  descriez  par  la  créance. 

290,6.  humaine,  R,  rhumainc.  — 12,  fausses,  R,  fauces.  — 21,  voulu,  R,  volu.  — 
24,  matière  est,  D,  le  ciel  et.  —  25,  et  de  pierre...  de  son,  R,  ou  auec  Anaxagoras 
de  pierre  et  telle  estoffe  de  nostre.  —  30,  produite  de,  I),  la  beauté  et.  —  32,  d'en 
sçauoir,  R,  en  scauoir.  —  38,  de  touts,  R,  tous.  —  294,  7,  ces,  R,  ses.  —  8,  des- 
cousu, D*,  Timon  l'apelle  par  iniure  grand  forgeur  de  mii'acles.  —  10,  A,  Toutes 
les...  poétique.  —  40,  d'estages,  R,  cstages.  —  296,  12,  feint,  R,  feinte.  —  12,  ou  au- 
tre, R,  vn.  —  20,  pourueu,  R,  prouueu.  —  29,  qu'il  ne,  R,  qui  ne. 

300.  —  302,  7,  la  persuasion,  R,  l'impression.  —  304,  27,  à  l'éloquence  altérer,  R, 
altérer  à  l'éloquence. — 29,  roides,  R,  roiddes.  —  308,  18,  alloyent  le,  R,  l'aloint.  — 
24,  qu'ils  se,  R,  qu'elles  se.  —  25,  l'vn  à,  R,  l'vne  à. 

310,  7,  sapience,  R,  prudance.  —  8,  volontiers,  R,  volantiers.  —  9,  vtile...  mo- 
dérées, R,  vtille  à  considérer  que  les  opinions  saines  et  modérées.  —  18,  dit,  R,  il 
dit.  —  23,  à  visage,  R,  en  visage.  —  316,  26,  qui  n'ont,  R,  qui  n'a. 

320,  12,  l'vsage,  R,  le  goust.  —  28,  decidere,  R,  considère.  —  43,  Syrius,  R,  Syrus. 

—  322,  7,  des  paroles,  R,  de  paroles.  —  14,  de  la  veuë  et  cognoissance,  R,  à  la  veuë 
obscure  et  incerteine.  —  18,  les  sépultures,  R,  des  sépultures. —  23,  et  des,  R,  ou 
des.  —  324,  4,  prenne,  R,  preigne.  — 7,  Nemroth,  R,  Nembrot.  —  326,  1,  fantaisie, 
R,  opinion.  —  1,  à  nous,  D*,  en  diuers  lieux.  —  10,  ces'mesmes,  R,  les.  —  11,  et 
en,  R,  et  après  en.  —  18,  A,  incognu  et.  —  33,  en  autre,  R,  a  vn'  autre.  —  328,  11, 
aussi.  A,  des  nostres  mesmes.  —  13,  diables,  D,  et  aucuns  des  nostres  l'ont  ainsi 
iugé. 

330.  —  332,  3,  iugement,  D,  en.  —  17,  A,  vouloir.  —  22  à  30,  l'ay  vcu...  vaisseau, 
R,  Il  est  des  armes  et  conditions  de  combat  si  desperées  qu'il  est  hors  de  créance 
que  l'vn  ny  lautre  se  puisse  sauuer  ie  les  ay  veu  condamner  aïant  este  offertes. 
Les  Portuguais  prindrent  14  Turcs  en  la  mer  des  Indes  les  quels  impatians  de 
leur  captiuite  sa  résolurent  et  leur  succéda  de  mettre  et  eus  et  leur  malstre  et  le 
vesseau  en  cendre  frottant  des  clous  de  nauire  l'vn  contre  l'autre  tant  qu'une  es- 
tincelle  de  feu  tumbat  sur  les  barrils  de  poudre  à  canon  qu'il  y  auoit.  —  334,  9  à 
11,  Platon...  bostes,  R,  Platon  à  deus  doits  près  que  sans  loix  nous  viucrions comme 
besles  brutes  essaie  à  le  vérifier.  — 28  à  29,  ôutrageux...  à  qui,  R,  outrageusglaiue 
que  l'esprit,  à  son  possessur  mesmes,  pour  qui. 

340,  21,  prendre,  R,  pendre.  —  342,  1,  gourdz,  R,  gourdes.  —  23,  comprendre 
aucune  chose,  R,  aucune  chose  comprendre.  —  35,  d'asseurance,  R.  de  force.  — 
344,  9,  l'honncui-,  R,  honneur.  —  12,  apprenions,  R,  aprenons.  —  22,  fautiue,  R, 
fautiere.  — 24,  reccuons,  R,  y  receuons.  — 346,  16,  atterrer,  R,  altérer,  —  22,  torte, 
R,  et  torte.  —  348,  4,  n'a,  R,  n'ay. 

350.  19,  prinse,  R,  en  prinsc.  —  352,  22,  hardiesse,  R,  la  hardiesse.  —  26,  assou- 
pissement, R,  assopissement.  —  32,  deuins,  R,  diuins.  — 354,3,  l'esprit  qui  est  en 
l'homme,  R,  l'esprit  qui  est  partie  de  l'home.  —  4,  ténébreux,  R,  tenebreus.  — 
356,  23,  astrologienncs,  R,  A.stronomiques.  —  358,  6,  son  ame,  R,  leur  ame.  — 21' 
notoirement,  R,  euidemment. 


Db.i36  ESSAIS  DE  MOISTAIGNE. 

360, 17.  dit,  R.  tient.  —  19,  à  l'Occident,  R,  en  Occident.  —  24,  l'vne,  R,  l'vn.  — 
31.  au  changement,  R.à  mutation.  —  38,  monstrans,  R,  se  monstrans.  —  39,  ores 
auant,  R,  ores  dauant.  —  362,  3,  monuments,  K,  mouuoments.  —  6,  Chaldéens 
tenoient,  R,  Chaldées  tenoint.  —  6,  registre,  R,  de  registre.  —  7,  autres,  R,  d'au- 
tres. —  19,  d'vn.  A,  si.  —  19,  populaires  sauuages  et  des  mœurs.  R.  populeres 
monstrueuses  des  mœurs.  —  23,  noms,  R,  nous  et  en  accidens.  —  25,  .\,  jamais. 

—  36.  deuiner,  R,  diuiner.  ^  364,  27,  cérémonies,  R,  cerimonies.  —  368,  10,  créance, 
R,  opinion.  —  26,  le  satisfaire,  R*,  se  satisfaire.  —  Sî,  de  la  puissance  suprême, 
R,  diuine. 

370,  2,  insupportable  commodité,  R,  commodité  insupportable.  —  21,  la  deuons, 
R,  le  devons.  —  27,  des  dez,  R,  de  dez.  —  33,  deux  cens  quatre  vingtz,  R,  288. 

—  34,  disputai,  R,  dissentil.  —  374,  12,  religion,  R,  la  religion.  —  14,  trépied.  R, 
trepié.  —  25,  A,  ne  l'estre.  —  26,  Quelle...  mensonge.  R,  Quelle  vérité  que  ces  mon- 
tagnes bornent  qui  est  mensonge.  —  31,  nommer...  sinon,  R,  autrement  nommer 
cela  que.  —  378,  28,  telle  circonstance,  R,  telles  circonstances.  —  33,  Scj-thes,  R, 
Schvtes. 

380,  24,  Diogarchus,  R*,  Dicearchus.  —  28,  s'annoblissent,  R,  s'ennoblissent.  — 
382,  26,  perdre.  C'est  chose,  R,  auilir.  C'est  vn'  espèce.  —  30,  quarrefour,  R,  car- 
refour. —  35,  A,  vagabonds  et  oisifs.  —  384,  5,  demanda,  R,  demandoit.  —  18,  de 
pouuoir,  R,  qu'il  peut.  —  386,  11  y  a,  R,  Car  11  y  a.  —  28,  ne  luy,  R,  il  ne  luy.  — 
29,  buletants,  R,  belutant.  —  388,  3,  diuersement,  R,  différemment.  —  5,  entre- 
prises, R,  entreprinses.  —  8,  y  faict,  R,  en  faict. 

390,  14,  A,  rien.  —  36,  est,  R,  c'est.  —  39,  à  nous.  R,  en  nous.  —  392,  à  voir,  R, 
y  voir.  —  394,  17,  miaulement,  R,  mieinement.  —  20,  formage,  R,  fromage.  — 
396,  25.  l'effect,  R,  effaict.  —  45,  faut,  R,  se  faut.  —  398,  17,  arquebuse,  R,  arque- 
bouse.  —  23,  functions,  R,  opérations. 

400,  6.  fascheux...  donner,  R,  fascheus  lequel  oiant  vn  doner.  —  7,  il  se  prini, 
R,  se  prit.  —  41,  couureurs,  R,  recouureurs.  —  45,  poultre,  R,  poutre.  —  402,  17, 
A,  fut  pourquoi  ce.  —  34,  flusteur,  R,  fleuteur.  —  404,  1,  A,  se  trompent.  —  28, 
endort,  D,  et.  —  33,  fait  celles,  R,  faict  ceux.  —  35,  penser,  D,  si.  —  408,  6,  le  son 
autre,  que,  R,  le  son,  autre  que.  —  18,  opération,  R,  action.  — 43,  elle  n'aille,  R, 
elles  n'aillent. 

410,  1,  la  roule,  R,  les  roule.  —  2,  elle  vous  semble  equable,  R,  elles  vous  sem- 
blent equables.  —  2,  pareille,  R,  pareilles.  —  5,  embesongner,  R,  embesoigner.  — 
414,  11,  Ainsi...  subjectes,  R,  Ainsin  estant  toutes  choses  subjectes.  —  12,  qui  y 
cherche,  R,  cherchant.  —  17,  estimant.  A,  qu'.  —  20.  seul,  R,  sul.  —41,  décré- 
pite, R,  décrépite.  —  416,  41,  partit,  R,  part. 

420.  —  Ch.  XIII.  — 29,  Comment,  R,  Cornant.  —  34,  place,  R,  places.  —  422,  13, 
actions,  R,  distinctions.  —  9,  c'a,  R,  çà.  —  424,  27,  pour  ne  se  pouuoir,  R,  ne  se 
pouuant.  —  33,  circonscriuist,  R,  circonscript.  —  37,  l'a  osé,  R,  la  osé.  —  426,40, 
auoit,  A,  si.  —  428,  31,  suyuant,  après  s'estre,  R,  après,  s'estant.  —  35,  ains,  R, 
voire.  —  41,  de  le,  R,  à  le. 

430.  —  Ch.  XIV.  —  14,  l'autre.  A*,  estant  tous  pareils  et.  —  20,  choix,  R,  plus. 

—  20,  A,  tente  et.  —432.  —  Ch.  XV.  —  434,  13,  vieil,  R,  vieus.  -  23.  à  vraydire. 
R,  à  dire  vérité.  —  38,  désire  montrer,  R*.  chacune  désire  montrer.  —  436,  8,  in- 
fantine,  R,  enfantine.  —  9,  froide,  R,  fiere.  —  10,  triompher,  D,  de  la  rigueur.  — 
gardoient,  R,  aymoient.  —  438,  7,  L'ordre  et,  D,  le.  —  31,  bien  à  poinct,  R.  par- 
faitement. 

440.  10,  A,  encore.  —  11,  perdez  vous,  R,  perdes  vous?  —  15.  cy,  D,  ne.  —  23, 
scache,  R,  sache,  en  France.  —  25,  vaisselle,  R,  cueillier.  —  25,  A,  ny  tapisserie. 

—  Ch.  XVI.  —444,  20,  merque,  R,  marque.  —  446,  30,  cela  que,  R,  ce  que.  —  32, 
que  nous  y  eussions,  R*,  qu'il  y  eut. 

450,  1,  naissance,  A,  mesmes.  —  10,  harquebuziers,  R,  harquebouziers.  —  12. 
A,  à  mon  aduis.  —  26,  personne.  R,  homme.  —452,  8,  A,  autre  chose.  —  M. 
raison,  A.  de.  —  27,  volage,  R,  vagabonde.  —  36,  si  tu  veux,  tu  me  perderas.  R, 
tu  me  perderas,  si  tu  veux.  —  454,  33,  doigt,  R,  doit.  —  34,  assez,  R,  asses.  —  34, 
souuent,  R,  souuant.  —  34,  présenter,  R,  presanter.  —  458,  7,  ossa,  R,  ossa?  — 
13,  l'on,  R,  on.  —  15,  harquebusier,  R,  harquebouzier. 

460.  2,  harquebusade,  R,  harquebousade.  —  462.  6.  bonne.  D  *,  réputation  et. 


VARIANTES  (159o-Ex.  de  Bordeaux).    LIV.  II,  CH.  XVI.     VOL.  II.     Db.l37 

—  8,  souuent,  R,  souuant.  —  11,  Et  pour...  estre,  R,  Pourtant  à  l'auanture.  — 
14.  VI...  possunt  *.  [Cette  citation  est  placée,  dans  l'e.x.  de  Bordeaux,  avant  la 
phrase  précédente  au  lieu  de  la  suivre].  —  43,  soit,  R,  puisse  estre.  —  464,  3,  A, 
ne  leur  conseille.  —  Ch.  XVII.  —  466.  De  qui,  R,  que.  —  468.  L'empereur  Cons- 
tantius,  R.  Constantius  TEmpereur.  —  '25  possède,  D,  de  ce  que  ie  les  possède. 

470,  4,  ma  force...  autre  force,  R,  moy  que  de  toute  autre  chose.  —  7,  mon 
industrie,  R,  ma  force.  —  îX),  Escriture,  R,  parole.  —  35,  seulement,  R,  sulement. 

—  472,3,  contentast,  R,  remplist.  — I,  iugement,  R,  goust.  —  5,  sens,  R*,  desad- 
uoue  sans  cesse;  et  me  sens  par  tout.  —  18,  A,  est.  —  22,  A,  des  musiciens.  — 
29,  ces  pauiilons,  R,  ses  pauillons.  —  "29,  ces  chariots,  R,  ses  chariots.  —  30,  la 
nauire,  R,  le  nauire.  —474,  7,  fort  et  foible,  R,  fors  foibles.  —  11,  ahurté,  R, 
fort.  --  11,  auis,  D  *,  et  plus  roide.  —  17,  lame,  D  *,  et  certeine  image  trouble. 

—  17,  présente,  D,  comme  en  songe.  —  18,  saisir  ny,  R,  sesir  et.  —  19,  ostage, 
n  *,  Ce  que.  —  32,  polissure,  R,  iantillesse.  —  31,  suiure  moy,  R  *,  suiure  a 
moy.  —  41,  façon.  R,  guise.  —  476,  13,  plus  extrêmes,  R,  dernières.  —  16,  A,  sa- 
gement. —  16,  sçauoir  relascher,  R,  conduire.  —  27,  fluide,  R,  poli.  —  27,  aspre, 
b  *,  et  desdeigneux.  —  30,  affection,  R  *,  affectation.  —  34,  ny.  A,  qui.  —  41, 
taire,  R  *,  faire.  —478,  12,  A,  qui  sont.  —16,  Angoulemoisin,  Il  *,  Angoumoisin. 

—  20,  A,  qu'autre. 

480,  6,  démérites,  R  *,  mérites.  —  6,  sociable,  R,  civilisée.  —  28,  doigt,  R, 
doit.  —  482,  21,  proportion,  R,  rondeur.  —  22,  iuste  proportion  de,  R,  propor- 
tion légitime  des.  ^  39,  dispost,  R  *,  très  dispost.  —  484,  25,  A,  libre  et.  — ^  33, 
arrester  *,  D,  et  en  tel  degré  de  sens  que  i'ay  senti  en  auoir  occasion.  —  33  à 
36,  A,  (une  occasion...  inquiétude).  —  486,  1,  toutesfois,  R,  pourtant.  —  3,  di- 
sette, R,  nécessité.  —  7,  besoin,  R,  disette.  —  15,  A,  lors  mesme.  —  15,  donné, 
R,  formé. 

490,  17,  A,  point.  —22,  soyent,R,  sont.  —  492,  2,  A,  présentes.  —  7,  attirer,  R, 
tant  flatter.  —  8,  les  plus  vtiles,  R,  bien  plus  vtiles  que  les  autres.  —  16,  plier, 
R,  tordre.  —  17,  dissimulation,  R,  de  dissimulation.  —  25,  tout  y  est  bon,  R,  où 
tout  y  est  bon.  —  33,  il  n'est,  R,  n'est.  —  494,  8,  et  qui,  R  *,  que  qui.  —  29, 
gain,  R,  guein.  —  36,  A,  par  ses  gents.  —  38,  apparence,  R,  quelque  apparence. 

—  496,  4,  ouuert,  R,  descouuert.  —  16,  dessein,  R,  discours.  —  30,  m'y,  R,  me. 

—  30,  propre,  R,  mien.  —  32,  arrester...  autheur,  R,  conceuoir.  — 498,  4,  sçais 
plus  le  faire,  R,  le  scais  plus. 

500,  8,  Trapezonce,  R,  Trapesonce.  —  12,  l'ame.  [L'ex.  de  Bord,  porte  ici  la 
citation  :  Memoi'ia...  conlinet.,  que  l'éd.  de  95  donne  quelques  lignes  plus  bas]. — 
13,  perftuo,  R,  ef'flao.  —  14,  mot,  D  *,  du  guet.  —  21,  ils  traictent,  R,  elles  traic- 
tent.  —  504,  6,  le  peu,  R,  ce  peu.  —  17,  suis,  R  *,  me  suis.  —  20,  guère  fortuite- 
ment, R,  iamais  fortuitement.  —  37,  il  en,  R,  qu'il  en.  — 506,  19,  A,  pourtant.  — 
508,  26,  A,  iamais. 

510,6  à  8,  A,  Et  qui...  sien.  — 9,  on  doit,  R,  ie  dois.  —  11,  appartient,  R,  tou- 
che. —  16,  grossières,  R  *,  communes.  —  16,  la  grâce,  D,  et  le  pois.  — 17,  discours, 
D  *,  hautain  et.  — 22,  de  grâces,  R,  ses  grâces.  —  512,  17,  exemples,  R,  discours. 

—  19,  claire,  R  *,  entière.  —  514,  3,  l'enrichis,  R  *,  i'encheris.  —  16,  parloient, 
R,  parlent.  —  17,  faisoyent  la,  R,  ifont.  —  18,  portoit,  R,  porte.  —  23,  le  doiue 
admirer,  R,  s'en  doiue  estonner.  —  25,  A,  au  vif.  —  35,  que  Ion,  R,  que  en.  — 
516,  11,  et  faisans,  R,  Ils  font.  —  12,  pour  se  rendre  eux,  R,  et  eux  se  rendent. 

—  518,  18,  abondance,  R,  foison.  —  32,  douceur,  R,  et  douceur.  —  33,  de  Mon- 
sieur, R,  du  sieur.  —  26  à  520,  15,  A,  I'ay  pris...  considération.  [Ici  l'ex.  de  Bord, 
porte  une  croix  qui  devait  signaler  un  renvoi  sur  feuille  volante  qui  a  disparu]. 

520.  —  Ch.  XVIII.  —  522,  25,  plus  comnmnes  paroles,  R,  paroles  communes. 

—  29,  seing,  D  *,  des  heures.  —  29,  peculiere,  D  *,  qui  leur  a  serui,  et.  —  524, 
4,  me  testonner,  R,  dresser.  —  16,  digèrent,  R,  dirigent.  —  28,  Quantes,  R, 
quant  de.  —  39,  pincer,  D,ou.  —  526,  13,  l'empereur  Valentinian,  R,  Valentinian 
l'Empereur.  —  528.  —  Ch.  XIX. 

530.  —  534,  II,  l'Apostatj  R,  apostat.  —  536,  8,  la  religion,  R  *,  sa  religion.  — 
Ch.  XX.  —  538,  34,  veteris,  R,  vetiili. 

540,  9,  à  quelque,  R,  de  la.  —9,  nette,  R,  verte.  —  542,  10,  comme,  R,  com- 
ment. —  Ch.  XX.  —  19,  dont,  R,  de  quoy.  —  544,  8,  dégradent,  D  ♦,  iustement. 


Db.l38  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

—  13,  raison,  R  *,  grande  raison.  —  19,  le  champ  et  au  propre,.  R,  la  place  et  au 
milieu  de.  —  546.  —  Ch.  XXI.  —  11  à  38,  A,  Fortune...  ennemies.  [Un  renvoi  sans 
objet  que  porte  ici  Ye\.  de  Bordeaux,  semble  indiquer  que  ce  passage  devait  être 
sur  une  feuille  volante  qui  a  disparu].  —  548,  l,  Portugalois,  R,  Portugaiz.  —  7, 
brauement,  U,  plus  glorieusement.  —  12,  glorieusement,  R,  laborieusement.  — 
"21,  consumer,  R,  consommer.  —  21,  son  armée,  R,  l'armée. 

550,  1,  affin  de,  R,  pour.  —  7,  soucy,  R  *,  soin.  —  8,  dedans,  R,  dans.  —  0, 
cœur,  D  *,  et  en  sa  teste.  —  Ch.  XXII.  —  20,  renient,  R,  vient.  —  23,  car.  D,  là. 

—  26,  destourna  iamais  pour,  R,  destournoit  du  droit  pour  aller.  —  552,  20, 
recreu.  Pour,  R,  recreu  et  que  pour.  —  22,  A,  comme  vsage.  —  Ch.  XXIII.  — 
554,  19,  d'Alemaigne,  R,  de  l'Aleniaigne.  —  37,  abondant,  R  *,  foisonnant.  —  556, 
3,  d'emmener,  R  *,  d'en  mener.  —  558,  1,  voire,  R,  et.  —  Ch.  XXIV. 

560,  14,  plusieurs,  D  *,  autres.  —  29,  auec,  R,  à  tout.  —  562,  9,  domination, 
R  *,  puissance.  —  9,  A,  que  sa  vertu...  acquis.  —  Ch.  XXV.  —  14,  la  mine.  I!, 
mine.  —  564.  12.  dessigné  de,  R,  entrepris  de  s'en.  —  15,  m'en,  R,  de  m'en.  — 
19,  le  premier.  R,  tout  le  premier.  —  20,  se  le.  R,  s'en.  —  27,  Harpasté.  R,  Har- 
paste.  —  31,  ris,  R,  me  ris.  —  566,  2.  l'emmener,  R,  l'en  emmener.  —  Ch.  XXVI.' 

—  568,  15,  dont,  R,  de  qui.  —  Ch.  XXVII.  —  21,  la  cruauté,  R,  cruauté.  —  22,  si 
ay,  R  *,  ay. 

570,  9,  deschiqueter,  R,  à  deschiqueter.  —  33,  souffrir,  R,  sentir.  —  35,  rece- 
uoir,  R,  souffrir.  —  572,  19,  vaincre,  D  *,  mais.  —  12,  A,  moins  excusable,  —  33, 
aduersaire,  R,  ennemy.  —  38.  espace,  R,  image.  —  574,  9,  s'engagent,  R,  s'y  s'enga- 
gent. —  39,  Matecoulon.  R,  Matecolom.  —  576,  34,  vieil,  R,  viens.  —  578,  5,  mes- 
tier,  R,  un  mestier.  —  22,  confus,  Il  *,  consul.  —  36,  dresse,  R  *,  exerce.  —  42  à 
480.  1.  A,  Ny  qu'vn...  poignard. 

580,  6,  tenir,  R.  dire.  —  9.  Epeius,  R,  Epicius.  —  9,  Cecyo,  R.  Cercyo.  —  11, 
bellique.  R,  des  guerres.  ,^-  32,  siesent  bien,  R  *.  tiennent  touiours  bien  leur  ranc. 

—  33  à  37.  A,  Quand  elles...  propos.  —  582.  14,  en  l'honneur,  R,  à  l'honur.  —  16. 
en  vn,  R,  dans  vn.  —  25,  A,  pleines.  —  584,  12,  recogneut,  R,  y  recogneut.  —  22, 
souffrance,  R,  sentiment.  —  29,  gratter,  R,  tant  gratter.  —  30,  ce  mestier  iusqu'à 
ce  quMl,  R,  ce  cardur  qu'il.  —  34,  A,  nud.  —  35,  apporter,  R.  inuanter.  —  35,  fit 
ieusner  plusieurs,  R.  ne  dona  ny  à  manger  ny  à  boire  ans.  —  36,  et  voyant,  R, 
voyant.  —  38,  A,  seul.  — 586,  1,  en  engloutissants,  R,  engloutissants.  —  Ch.  XXVIII. 

—  9,  nulle.  R.  nul  autre.  —  588.  2,  nous,  R,  nostre  nature.  —  22,  peut,  R,  veut. 
590.  —  Ch.  XXIX.  —  592.  21,  lui  estant,  R,  estant.  —  22,  Quoi,  R,  Comment.  — 

594.  i,  il  s'en,  R,  s'en.  —  10,  prit,  R  *,  prenant.  ^  13,  en  la,  R,  dans  la.  —  35,  va, 
R,  com'allant.  —  596,  1,  à  chanter,  R.  chanter.  —  6,  en  l'eau,  R,  dans  l'eau.  — 
37.  consommé,  R,  consumé. 

600,  27  à  29.  heureusement...  espaule,  R,  honorablement  son  profit  si  fortune 
continue  à  luy  faire  espaule.  —  602,  6,  eust  sceu,  R,  le  pouuoit.  —  12,  à  la  mort, 
R  *,  mortel.  —  12.  eust,  R.  en  eust.  —  13,  A,  tel.  —  13,  A,  estant.  —  17,  perdit, 
D,  et  troubla.  —  28,  court  chemin  à  gaigner,  R.  certein  moïen  de  mériter.  —  28, 
de  tuer,  R,  tuer.  —  29  à  34,  Parquoy...  saincte,  R,  Par  quoi,  mesprisants  tous 
les  dangiers  propres,  pour  vne  si  vtile  exécution  :  vn  ou  deus  se  sont  veus  son- 
nent, au  pris  d'vne  cerleine  mort,  se  presanter  à  assassiner  {nous  auons  em- 
prunté ce  mot  de  leur  nom)  leur  enemi  au  milieu  de  ses  forces.  Ainsi  fut  tué 
nostre  conte  Raymond  de  Tripoli,  en  sa  ville.  —  33  à  35,  A.  Et  pai'eillemeut... 
d'œuure.  —  604."^—  Ch.  XXX.  —  6,  enuiron,  R  *,  à  peu  près.  —  606.  —  Ch.  XXXI. 

—  21,  des  Cyclopes,  R,  de  Cyclopes.  —  608,  9,  estroppiez,  R,  stropiets.  —  Caius 
Rabirius,  R,  Lucius  Saturninus  [ce  qui  est  une  erreur]. 

610,  27,  actions,  R,  offices.  —  612,  1,  iniurier,  R,  à  iniurier.  —  614,  3,  esgaré, 
R,  escarté.  —  13,  dit,  R,  fit.  —  616,  16,  poids,  R,  poix. 

620.  —  Ch.  XXXII.  —  25.  outre,  D,  ce.  —  624,  32,  à  dire,  R.  de  dire.  —  40,  vne 
paroy,  R.  vn  fiaroy.  —  626,  6.  se  dérober,  R,  de  se  dérober.  —  8,  A,  du  jour 
précèdent.  —  628,  8,  A.  l'humaine.  —  8.  selon...  autres,  R,  touche  et  reporte  à 
cela  là  toutes  les  autres  formes.  —  9,  rapportent,  R,  règlent.  —  10,  fauces,  R.  ar- 
tificielles. —  10  à  13,  A,  Luy...  monde.  —  14,  0...  insupportable!  R,  Quelle  bes- 
tiale stupidité.  —  15,  notamment,  R,  nomement.  —  16,  mille  ♦,  R,  mes.  —  27,  la 
volonté,  R,  volonté... 


VARIAMES  (l59o-Ex.  de  Bordeaux  .     LIV.  II,  CH.  XXXIIl.    VOL.  U.     Db.l39 

630.  —  632.  —  Ch.  XXXIIl.  —  634,  30.  quatre,  R,  à  quatre.  —636.  2,  (Tappeller, 
R,  appeler.  —  5,  nay,  R,  issu.  —  17,  regaigna,  R,  regaigne.  ~  638,  28,  vint  ap- 
porter. R.  apporta. 

640.  15.  la  guerre,  II.  guerre.  -i~  16,  trois  et  quatre,  R.  à  trois  et  à  quatre.  — 
644.  8,  condamner,  R,  de  condamner.  —646.  —  Ch.  XXXIV.  —  16,  Aphricain,  R, 
l'Aphricain.  —  648,  10.  de  tel  interest,  R,  si  grande.  —  10  à  13,  de  les  trouuer... 
par  réputation,  R,  les  ayant  iugez  t'oibles  par  réputation,  les  trouuer  apr«>s,  à  la 
vérité  bien  forts.  —  30,  pas  fort,  R.  guiere. 

650,  30,  exhorter,  R,  enhorter.  -  652,  5,  son  coche,  R,.sa  coche.  —  15,  de  Pont, 
R,  du  Pont.  —  654,  25,  trauersé,  R,  traiecté.  —  20,  reprendre,  D,  luy  mesme.  — 
36,  falloit,  R,  failloit.  —  38,  comme  il  eust,  R,  ayant.  —  38,  passast,  R,  passant. 
—  658,  1.  prouuoir,  R,  poui'uoir.  —  13,  ainsin,  R,  ainsi. 

660,  25,  l'vne,  R,  vne.  —  30,  après  auoir,  R,  ayant.  -662,  3,  alTin  d'en.  H,  pour 
en.  —  8,  comme  ils  eurent,  R,  ayant.  -~  Ch.  XXXV.  —  22,  trop,  R,  prou.  —  664, 
5,  s'esgratigner,  R,  esgratigner.  —  10,  ie  ne  suis.  R,  ie  commence  à  n'estrc.  — 
666,  35,  l'ommenoient,  R,  l'en  amenoient.  —  668,  2,  ie  t'escoute,  à  toy,  R,  ie  t'es- 
couUî  toy.  —  16,  elle  s'alla.  R,  s'alla. 

670.  1,  enuoya,  R,  ayant  enuoyé.  —  20,  il  se  tourne,  R,  se  tournant.  —  34,  des- 
tourne, R,  destourna.  —  672,  30,  pai-,  R,  pour.  —  32,  en  outre,  R,  outre  cela.  — 
674.  1,  vesquit,  R,  vcscut.  —676,  9,  la  [)lus  grande,  R,  plus  grande.  —  15,  Paulina, 
R,  Pauline. 


TROISIÈME  VOLUME 


10.  —  Liv.  II,  ch.  XXXVI.  —  7,  seulement  dire  cela,  R,  par  dire  seulement 
cela.  —  12,  30,  guerrière,  R,  militaire.  —  14,  20,  imaginiez,  R,  imaginez.  —  16, 
28,  priuilege,  R,  priuiliege.  —  18,  4,  ambition,  R,  l'ambition.  —  33,  ny  forme,  R, 
nulle  règle. 

20,  1,  A,  en  la  forme  qu'elle  estoit  en  luy.  —  2,  donncroit,  R,  donrroit.  —  3, 
magnifique,  R,  illustre.  —  4,  se  pourroit...  balance,  R,  me  pourroit  mettre  en 
doubte  du  chois.  —  10,  mais  que...  homme,  R,  mais  galant  home  qu'ils  noment. 

—  31,  dependoit  de  luy,  R,  de  luy  dependoit.  —  22,  2,  A,  luy  mort.  —  Ch.  XXXVII. 

—  30.  menbre,  D,  Mais  c'estoient  vaines  propositions.  —  24,  17,  s'escriant,  R, 
l'escriant: —  26,  16,  ordonne  si.  D  *,  rigoreusement  et.  —  17,  souffrance,  R,  tolé- 
rance.—22,  ses, R*,  ces.  — 26, tordions, R,  tordons. — 27, tordions,  R,  tordons.  — 35, 
d'entretien...  occupation,  R,  de  commerce,  capable  d'entretien.  —28,  7,  pardonne, 
R,  permet.  —  13,  A,  et  me...  brailler.  —  19,  au  desespoir,  R,  à  me  perdre.  —  27,  A, 
leur.  —  33,  A,  lors.  —  33,  ronger,  R,  poindre  si  fort. 

30,  1,  apprenti,  R,  apprentis.  —  15,  y  ait,  R,  y  a.  —  32,  30,  par  leur  conduite, 
R,  soubs  leurs  règles.  —  34,  iniurieuse,  R  *,  pénible  et  iniuricuse.  —  40,  d'appe- 
ler à  son  secours  les,  R,  de  s'ayder  de  ces  nobles  et.  —  36,  20,  très  inepte  souuant, 
R,  souuant  très  inepte. 

40,  31,  auantageus(!  à,  R,  auantageuse  de.  —  42,  30,  vne  autre,  R,  à  vne  autre. 

—  31,  si  ay,  R,  ay.  — 44,2,  llypolitus,  R,  llelcine  [ce  qui  est  une  erreur].  —  20,  fa- 
natiques, R*,  fantastiques. —24,  et  incognu,  R.incognu.  — 46,4,  descouuertes,  R, 
descouuerts.  —  6,  y  retrancher,  R,  en  retrancher.  —  7,  adjouster  quelque  chose,  R, 
y  adjouster.  —  15,  à  tous,  R,  tous.  — 37,  n'estoit,  R,  n'y  auoit.  — 48,  6,  gaignerent, 
R*,  vindrent  aussi  en.  —  17,  l'vsage...  accoustumé,  R,  le  publique,  et  tant  de  siècles 
auparauantaccoustumé,  vsage  des  bains  chauds.  — 23,  des  Latiaeurs,  R,  les  Lati- 
neurs.  —  26,  d'esquine,  R,  desquine. 

50.  —  54,  6,  pourpointiers,  R,  prepouintiers.  —  6,  chacun,  R,  chaqun.  —  10, 
potagers,  R,  potagiers.  —  15,  cette  partie,  R,  elle.  —  58,  32,  spécialement,  R,  no- 
tamment. 

60,  11.  alla,  R. s'alla.—  lI,s*aduiser,R,  aduiser. — 62, 12,  apostemes,  R,  apostumes. 


Db.l40  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

—  33,  prôuuoir.  R,  garnir.  —  64,  33,  autre  sorte,  R,  vn  autre  sorte.  —  66,  17,  en- 
durent et  laissent  faire,  R,  souffrent. 

70,  9,  estoit.  R,  fut.  —  18,  y  verrions,  R,  verrions.  —  72,  17,  quand  ce,  R,  que  ce. 

—  29,  cognoistre,  R,  parestre.  —  31,  à  son  œconomie,  R  *,  et  œconomie  de  sa 
maison.  —  74,  20,  toutes,  R,  sont  toutes.  —  21,  A,  sorte  de.  —  30,  dit-il,  R,  fit-il. 

—  30,  montrant,  R,  en  montrant.  —  76,  M,  Aussi,  R,  Et  aussi.  —  14,  exhorte- 
niens,  R,  enhortemens.  —  16,  qu'il,  R  *,  ou  qu'il.  —  18.  Ce  seroit,  R,  qui  seroit. 

—  33,  susceptible  de  formes,  R,  plus  susceptible  de  plus  de  formes. 

LIVRE  TROISIÈME. 

78.  —  Gh.  I.  —  6,  ny.  A,  ne. 

80,  9,1a  sentent,  R,  le  sentent.  — 82,  8,  Fortune,  R,  la  fortune.  — 15,  qui  peuuent.R, 
peuuent. — 21,  A,  en  ce.  — 26,  d'obligation,  R,  obligation.  —34,  A,  Vtatur...  polesl.  — 
35,  légitimes,  D  *,  et  équitables.  —  36,  tempérées,  R  *,  equables  et  tempérées.  — 
84,  20,çuspendoit,  R,  suspendit.  —  22,  avec,  R,  à  tout.  —  22,  de  quel,  R,  du  quel. 

—  24,  aux  victorieux,  R,  victorius.  —  26,  party,  D  *,  par  application  de  dessein. 

—  86,  9,  vne  intestine  aspreté,  R,  aspreté  intestine.  —  17,  au  moins,  R,  mais  au 
moins. —  21,  aux  vus...  encore,  R,  à  ceux  là  et  à  ceux-ci  tient  encore.  —  88,  6,  A, 
à  mon  gré.— 21,  n'en  puis-ie,  R,  ne  puis-ie.  —  27,  n'est.  A,  ce.  —  33,  A,  à  cette  heure. 

—  33,  négotier,  D,  entre  nous. 

90,  25,  leur  asne,  R,  à  l'asne.  —  36,  nationale,  D,  locale.  —  94,  14,  trahison  doit. 
R,  perfidie  peut.  —  16,  chastier,  R,  punir.  —  16,  perfidies,  R,  trahisons.  —  20,  A, 
par  après.  —  30,  Visilicie,  R,  Vislicie.  —  96,  3,  luy  mesme  estre,  R,  estre  luy 
mesme.  —  13  à  16,  Et  nostre...  pratiquez.  [Dans  l'ex.  de  Bordeaux,  cette  phrase 
est  reportée  après  «  chiens  »,  lig.  26].  —  14,  A,  au  lieu  des  armes  d'or  qu'il  leur 
auoit  promis.  —  39,  employé,  tl,  y  employé.  —  98,  9,  fils,  D  *,  contre  luy.  —  17. 
de  Lithuanie,  R,  des  Lithuaniens.  —  17,  introduisit...  desfaire,  R,  fit  autresfois 
cette  loy,  que  les  criminels  condamnes,  eussent  à  exécuter  eus  mesmes  de  leurs 
mains  la  sentance  capitale  contre  eus  donée.  —  31,  guarison,  R,  guerison. 

100,  24,  propre  salut,  D  *,  oui.  —  27,  a,  R,  ha.  —  102,  1,  le  profit,  R,  l'vtilité.  — 
23,  suis  ie,  R,  y  suis  ie.  —  26.  abolir,  R,  renuerser.  —  27,  promesses,  D  *,  et  ser- 
mens.  — 104,  28,  A,  toute.  —  106,  4,  exhortements,  R,  enhortemens.  —  17,  l'hon- 
neur, R  *,  l'honnesteté.  —  Ch.  II.  —  108,  2,  fouruoyent,  R,  se  fouruoyent.  —  12, 
l'heure,  D,  presante.  —  25,  spéciale,  R,  particulière.  —  32,  et  crus,  R,  crus. 

110,  2,  science,  D  *,  sans  art.  —  7,  distinctement,  R,  particulièrement.  —  8. 
plus  pleinement,  R,  pleinement.  —  114,  8,  à  en  parler,  R,  à  qui  sauoit  a  répro- 
bation plus  tost  parler.  —  19,  naturel,  R,  nature.  —  118,  6,  pour  la,  R,  par.  —  21, 
A,  du  dehors.  —  30,  qu'il,  R,  qu'Erasme. 

120,  1,  en  leur,  R,  de  leur.  —  15,  A,  guère.  —  25,  externes,  D  *,  arbitreres.  — 
122,  9,  Si  se,  R,  Si  ce.  —  23,  emporté,  R,  rapporté.  —  27,  de  laquelle,  R,  De  quoy. 

—  124,  16,  complexion,  ou,  R,  complexion  voire.  —  20,  ainsin,  R,  ainsi.  —  23, 
approchent  des,  R,  approchent  les.  —  26,  la  nostre,  R,  la  leur.  —  30,  altérer... 
ame,  R,  estre  marris  et  desplaisants.  —  31,  grande  desplaisance,  R,  grand  regret. 

—  126,  8,  regret,  R,  regreter.  —  12,  l'imaginer,  R,  d'imaginer.  —  128,  25,  à  cette 
heure,  R,  asture.  —  29,  aussi  peu,  R,  encore  moins.  —  29,  suis,  D,  fort.  —  29,  et 
encore,  R,  mais  l'en  suis  encore.  —  33,  A  *,  qu'à  la  mienne.  —  33,  cil,  R,  celuy. 

130,  14,  A,  le  coup.  —  32,  à  part,  R,  apar.  —  132,  10,  l'infortune  de  ma  vieil- 
lesse, R,  la  desfortune  de  ma  décrépitude.  —  31,  cassée,  R,  croupie.  —  134,  6,  à  moy 
de,  R,  à  moy  à.  —  18,  l'aigre,  R,  à  l'aigre.  —  19,  le  moisi,  R,  au  moisi.  —  136.  — 
Ch.  III.  —6,  vieil,  R,  vieus.  —  24,  soy,  R,  à  soy.  —30,  des  subiects  propres,  R,  de 
subiects  siens.  — 138,  5,  l'a  nature,  R,  la  nature.  — 7,  addonnions,  R,  addonnons. 

—  29,  sapience.  A,  est. 

140,  25,  de  ieunesse,  R  *,  dés  ieunesse.  —  142,  6,  maistral,  R,  maestral.  —  146. 

11,  presse,  R,  foule.  —  28,  ceux  icy,  R,  ceux-cy.  — 148,  39,  pouruoir,  R,  pouruoyer. 

150,  9,  aage,  R,  eage.  —  9,  poil,  R,  ris.  —  23,  vtilement,  R  *,  plus  vtilement. 

—  25,  d'autant.  A,  plus.  —  152,  3,  auec,  R,  à  tout.  —  154,  13,  bel,  R,  beau.  —  16, 
oriller,  R,  oreiller.  —  28,  dis-ie,  R,  fais-ie.  —  33,  mon,  R,  à  mon.  — 156,  12,  i'y 
pourroy,  R,  ie  pouuois.  —  15,  proumenoir,  R,  promenoir.  —  16,  pas  seul  cojiime. 


VARIANTES  (159d-Ex.  de  Bordeaux).     UV.  III,  CH.  III.     VOL.  III.      Db.l4I 

R,  si.  —  IG,  l'agitent,  R,  ne  l'agitent.  —20,  A,  sur  des  pulpitres.  —30,  cour,  R, 
court.  —  158,  9,  pas,  R,  part.  —  Ch.  IV.  —21,  La  plus,  R  *,  car  la  plus. 

160,  7,  lamais,  R,  Et  jamais.  —29,  douloureuse,  R,  doulereuse.  —  162,  9,  com- 
mence, R,  print.  —  164,  4,  caterrhe,  R,  catarre.  —  4,  desuoyent,  R,  le  desnoj'ent. 

—  23,  l'eschaffaut,  R,  vn  escliaffaut.  —  166,  5,  champ,  R,  camp.  — ^  10,  deuina 
R,  diuina.  —  l.o,  comme  il  se  batoit,  R,  ou  combattant.  —  17,  crioit,  R,  criant. 

—  17,  A,  mais  il.  —  23,  il  so  rua,  R,  se  ruant. —  24,  A,  comme.  —25,  delendoit 
R,  défendant.  —  168,  7,  sa  couronne  i\  terre,  R,  à  terre  sa  corone.  —  10,  l'vtilité 
R,  vtilité.  —  21,  pas  donc,  R,  donc  pas.  —  36,  comme  l'on,  R,  comment  on. 

170,  22,  compagnie,  R,  compaignie.  — 172,  G,  accueils,  R,  acceuils.  —  24,  gram- 
mairienne, D  *,  et  voyelle.  —  34,  m'apporte,  R,  apporte.  —  174,6,  ie  voy,  R  io 
voioi.  —  6.  la  voy,  R,  la  voyois.  —  13,  vnc  exemple,  R,  vn  exemple. —  19,  part 
R,  leur  part.  —  176,  5,  port,  R,  teint.  —  30,  mette,  R,  iette.  —178.  —  Ch.  V. 

180,  37,  verdissant,  R,  fleurissant.  —  182,  7,  faudroit,  R  *,  y  laudroit.  —  7 
lucte,  R,  luicte.  —  28,  à  se  tenir,  R,  de  se  tenir.  — 184,  19,  affrété,  R,  affreré.  —  24 
puissances,  R,  opérations.  —  26,  le  morfondu,  R,  au  morfondu.  —  29,  à  vn  rauis- 
sement,  R,  au  rauissement.  —  33,  l'esprit,  R,  mon  esprit.  —  34,  clairté,  R,  portée. 

—  37,  tire,  R,  faict.  —  186,  10,  A,  fascheusement.  —  27,  deuroit,  R,  deuoit.  — 
188,  9,  au  faillir,  R,  aus  mesfaicts.  —  18,  Thaïes,  A,  luy.  —  33,  cache,  R,  couure. 

190,  4,  d'ostre  blanchie,  R,  ou  blanchie.  —  10,  fuis,  R,  crains. '—21,  Voyi-e    R 
Oui.  —  21,  fit-il,  R,  dict-il.  —  23,  dit-il,  R,  lit-il.  —  30,  qu'il  m'appartient,  R,  qui 
m'appartient.  —  192,  12,  A,  Et  le  sexe...  taire  ie  plus.  —  13,  C'est  vne,  R  *,  11  est 
bon  aussi,  que  c'est  vne.  —  14,  Non  pas,  D,  mesme.  —  39,  l'interest,  R,  interest. 

—  196,  6,  ne  la  face,  R,  la  face.  —  32,  emploite,  R,  en-ploite.  —  37,  alors,  R,  en  ce 
cas.  —  198,  2,  dit,  R,  fit.  —  6,  leurs  charges,  R,  leur  charge.  —  24,  vne  de,  R,  vn 

de.  —  24,  cordonnière,  R,  courdonniere.  —  27,  continuation,  R,  constance. 

34,  maistresse,  D,  et  d'amye. 

200,  7,  dehors,  R,  hors.  —  9,  prendre,  ou,  R,  du  prendre  ou.  —  202,  14  tra- 
hison, D,  de.  —  204,  6,  deuroient,  R,  deuoyent.  —  10,  chatouilleux,  R,  chatouil- 
lant. —  15,  voyez,  R,  voies.  —  38,  ce  mesme,  R,  cela  mesme.  —  206,  14,  Car... 
légiste,  R,  et  que  Solon,  chef  de  l'eschole  iuridique.  —  16,  D,  dis-ie.  —  208,  5  son 
interdiction,  R,  interdiction. 

210,  35,  temps,  D  *,  plus  hardies.  —  212,  1,  le  veux...  volupté,  R,  Car  il  faut 

laisser  à  part  ces  escris  des  philosofes  qui  ont  suiui  la  secte  Epicurienne  5 

temples,  R,  églises.  —5,  garses,  D  *,  et  des  garsons  à.  —  214,  1,  publicq,  D,  esga- 
lement.  —  216,  1,  hommes,  D,  et.  —  5,  du  Pegu,  R,  de  Pegu.  —  16,  peu  exactes... 
marchant,  R,  et  montroient  en  marcliant  leurs  cuisses  à  nud.  —  19,  parle  R 
tesmouigne.  —  30  à  218,  3,  Inique...  cause.  [Ce  passage  est  reporté  après  la  cita- 
tion Num  tu,  pag.  218,  lig.  16].  —  1,  plus  vicieuse,  R,  vicieuse.  —3,  Elles,  R  Et 
elles.  —  35,  renfrongnée,  R,  renfroignée. 

220,  9,  deuinant,  R,  diuinant.  —  12,  o'est,  R,  c'estoit.  —  29,  indiscrétion,  R  l'in- 
discrétion. —  36,  dames,  D,  de  bien  et.  —  222,  11,  et  mignardes  douceurs,  R,  o^i-a- 
ces.  —  40,  pourtant,  D,  pas.  —  40,  molles,  R  *,  douces.  —  224,  26,  l'aigre  et'  R  à 
l'aigre  et  à.  —  228,  23,  inepte,  D,  aux  danles.  —  23,  messeante,  A,  aux  dames.' 

230,  5,  adiré,  R,  esdiré.  —  13,  qualité  commune,  R,  commune  qualité.  —  25  A 
entre  nous.  —  30,  d'œiilades  et  de,  R,  par  cuillades  et.  —  32,  leurs  amours  r' 
leur  intelliiance.  —  32,  Ce  qu'il  aduoua,  R,  Et  laduoua.  —  34,  tout  franchement..! 
vois  tu  pas,  R,  Vois  tu  pas  coquin.  —  232,  15,  prouuoir,  R,  pouruoir.  —  234  33 
trouuent,  R,  treuuent.  —  236,  11,  intériner  sa,  R,  d'accorder  la.  —  26,  toute  r' 
tout.  —  33,  craignions,  R,  craignons. 

240,  19,  dans  les  choses,  R,  dans  la  chose.  —  242,  28,  artificielle,  R,  trop  arti- 
ficielle. —  31,  si  ny,  R,  sil  n'y.  —  31,  recognois,  D  *,  pas.  —  246,  4,  l'estranger, 
R,  à  l'estranger.  —  13,  il  eust  esté  autrement,  R,  autrement  il  eust  esté.  —  17' 
auec,  R,  à  tout.  —  19,  imprudemment,  R,  imprudamment.  —  21,  eux-mesmes' 
R  *,  d'elles  mesmes.  —  28,  que  si  l'ai,  R,  qu'ayant.  —  248,  15,  aussi  des,  R,  aussi 
de  ces.  —  19,  et  parlant,  R,  parlant.  —  22,  A,  comme...  parties.  —  30,  qu'on,  R, 
Et  qu'on. 

250,  4,  ce  que,  R,  car  ce  que.  —  4,  a  esté...  iouet,  R,  est  le  iouet  des  Dieus.  — 
11,  aff routeur,  R,  vn  affronteur.  —  17,  deuantiere,  R,  dauantiere.  —  18,  des  cir- 


Db.l42  ESSAIS  DE  MOiNTAIGXE. 

concisions,  R.  du  troneonement  du  prépuce  qui  en  est  vne  punition.  —  252,  3,  à 
celte  heure,  R,  asteure.  —  4,  honteuses,  D  *,  et  pcneuses.  —  7,  hazardé,  R.  ha- 
sarde. —  12,  court,  R,  suit.  —  i4,  A,  le  plus.  —  15,  cacher,  D  *,  et  rougir.  — 
17,  faueur,  R,  grâce.  —  2i,  pœnitet,  D,  Nous  estimons  à  vice  nostre  estre.  —  29, 
exceller,  D,  sur.  —30.  leur,  R,  leurs.  —  32,  Gens  fanatiques,  R,  Sottes  gens  qui. 
--  254,  13,  l'aise,  R,  ton  aise.  —  14,  A,  la  moitié  de.  —  M,  lasche,  R,  vient  à  des- 
plaisir. —  16,  soit,  1)  *,  manque  et.  —  22,  ordonnances...  monde,  R,  règles  posi- 
tiues  de  ton  inuantion  t'occupent  et  atachent  et  les  règles  de  ta  paroisse  :  celles 
de  Dieu  et  du  monde.  —  256,  2,  leur  larcin,  R,  le  larcin.  —  5,  sauourer,  R,  gon- 
fler. —  28,  A,  rien.  —  31,  d'vne,  R,  de  sa.  —  258,  2,  se  paissoit,  R,  paissoit.  — 
21.  saillir,  R,  salir.  —31,  merueilleusement,  R,  monstrueusement. 

260,  2,  sans  ame,  D  *,  ou  sans  sentiment.  —  262,  9,  liberté,  D  *,  Nous  courons 
à  peu  près  mesmc  fortune.  Ils  sont  trop  extrêmes  en  contrainte,  nous  en  licence. 

—  22,  tousiours,  D,  ostoyent.  —  23,  alfaires  aux  Sarmates,  R,  aux  Sauromatcs. 

—  27,  et  à  nous  aussi,  R,  corne  à  nous.  — 30,  ieunes  hommes,  R,  iunes  gens.  — 
264,  4,  tout  leur  art,  R,  toute  leur  art.  —  32,  peut,  R,  put.  —  33,  par  tout,  R,  en 
tout.  —  266,  lô,  sac,  R  *,  poche.  —  17,  auec,  R,  à  tout.  —  24,  loixr..  iuges,  R, 
loix  que  pour  décider  l'opportunité  des  mariages  les  iuges.  —  268,  8,  vndenum, 
R,  heu  denum  [Horace  dit  oclavum\.  —  37,  est  également  mienne,  R,  me  fait  éga- 
lement moi.  — 42,  générale,  R,  vniuerselle. 

270,  7,  de  la  raison  commune,  R,  et  communes.  —  9,  légères,  R  '^,  menues.  — 
10,  iustes,  R  *,  pressantes.  —  23,  d'autres  miennes  fautes,  R,  de  null'  autre  partie 
de  ce  traicté.  —  23,  l'estime,  R,  le  tiens.  —  26,  difficile,  R  *,  très  difficile.  —  28, 
jirendre,  D,  proprement.  —  31,  nostres,  D,  et  des  plus  cretez.  —  31,  deux.  A,  et 
des  plus  cretez.  —  272,  3,  circonstances...  particulières,  R,  particulières  et  gene- 
i"ales  circonstances.  —  274,  31,  de  recommencer,  R,  à  recommencer.  —  276,  23, 
disiaier,  R,  retarder.  —  278,  5,  farcir,  R  *,  que  farcir.  —  7,  breuuage,  R,  bois- 
son. —  18,  desmenbrons,  R,  dessirons.  —  35,  sa,  R,  leur. 

280,  17,  la  vie,  R,  l'ame.  —  19,  fort,  R,  bien.  —  24,  veu,  R,  sachant.  —  282,  5. 
qu'on  me  fait,  R  *,  que  ie  sens.  —  8,  ausquels,  R,  ausqueles.  —  13,  exhortoit,  R, 
enhortoit.  —  19,  contre,  R,  à  rencontre.  —  20,  embesongna,  R,  embesougnat.  — 

33,  fust,  R  *,  soit.  —  34,  La  laideur,  R,  Vne  laideur.  —  34,  d'vne  vieillesse,  R,  et 
vne  vieillesse.' —  284,  3,  laquelle,  D  *,  si  plaisamment.  —  16,  galbe,  R,  garbe.  — 
21,  sagesse,  R,  par  sagesse.  —  28,  rassis,  R,  prudent.  —  286,  22,  paele,  R,  poêle.  — 
Gh.  VÎ.  —  28,  pour  voir,  R,  voir.  —  288,  2,  ester nuent.  R,  estrenuent.  —  4,  ester- 
nuement,  R,  estrenuement.  —  16,  spécialement,  R,  et  notamment.  —  22,  m'ait, 
D,  au  moins. 

290,  18,  ressoudre,  R,  ressouder.  —  26,  Dieu,  A  *,  me.  — 31,  et  les...  ieunesse.  [Ce 
membre  de  phrase  est  mis  entre  parenthèses  dans  l'ex.  de  Bordeaux].  —  292,  8. 
lucter,  R,  luicter.  —  16,  mousquetaire,  R,  mosquetere.  —  20,  tirer,  D  *,  auant.  — 
23,  prendre,  R  *,  tirer.  —  30,  D,  comme..",  enseignes.  —  31,  par  païs  en,  R,  en 
païs  sur.  —  32,  mené,  R,  traine.  —  33,  traîner,  R,  mener.  —  294,  16,  cadet,  R. 
cabdet.  —  16,  seoit,  R,  sioit.  —  25,  qui  establit,  R,  d'auoir  establi.  —  26,  main- 
tient, R,  maintenu.  —  28,  souuenance,  R,  méraoii'e.  —  33,  de  rues,  R,  des  rues.  — 

34,  lairra,  R,  a  laissé.  —  34,  à  long,  R,  de  mon.  —  296,  6,  train  le  seruice,  R,  train 
lusage.  —  10,  porter,  R,  apoiter.  —  15,  main  souueraine,  R,  mains  souueraincs. 

—  25,  donront,  R,  donneront.  —  298,  2,  ont,  R,  l'ont.  —  15,  qu'ils,  R,  lesquels.  — 
17,  s'ils  montrent,  R,  en  montrant.  —  18,  duquel,  R,  de  qui.  —  18,  r'allient,  R, 
raliant.  —  25,  la  libéralité,  R,  libéralité.  —  29,  s'appaouurit,  R,  s'apouurit.  —  30, 
les  enuios,  R,  des  enuies.  —  36,  à  faire,  R,  de  faire.  —  36,  A,  après.  —  28,  et 
n'en,  R,  et  ne. 

300,  7,  seulement  autant,  R,  autant  seulement.  —  8,  propre,  R,  plus  propre.  — 
9,  A,  ne  disoit.  —  10,  Cyrus,  R,  luy  dict  Cyrus.  —  19,  au  moins  en  apparence. 
[Ce  membre  de  phrase  est  mis  entre  parenthèses  dans  l'ex.  de  Bordeaux].  —  21, 
d'excez,  R,  excez.  —  302,  9,  rares,  R,  plusieurs  rares.  —  16,  poussent.  R,  peut.  — 
21,  charioit,R,  charrioit.  —304,  13,  tourneuirons,  R,  tournoions.  —  306,  16,  à  cette 
heure,  R,  asture.  —  25,  très-fort,  R,  très  bien.  —  308,  15,  sceu,  R,  imaginé.  — 31. 
ostez,  dis-ie,  R,  contez,  dis-ie.  —  32,  à  cette,  R,  cette. 

310.  —  314,  19,  l'on  des,  R,  on  des.  —  26.  quand  ils  eurent.  R.  aju'cs  auoir.  — 


VARIANTES  (lo95-Ex.  de  Bordeaux).    LIV.  IIF,  CH.  VI.    VOL.  III.    Db.I43 

:16,  ils  se  mirent,  R,  so  niiront.  —  il,  géhennes,  R,  geines.  —  28,  pour  n'auoir, 
R,  n'ayant.    -  316,  1,  A,  si  bfii-bares.  —  28,  mangoz  entre  eux,  R,  entremangez. 

320,' 29,  les  épaules,  R,  leurs  épaules.  —  Ch.  VII.  —  28,  n'est,  A,  ce.  —  324.  3, 
donneroit,  R,  donroit.  —  8,  en  la,  R,  à  la.  —  326,  28,  feignit,  R;  feingnit.  —  33, 
par  terre,  R,  à  terre.  —  :î8,  s'(Miialouser.  R,  s'en  ialouser. 

330,  2,  pretondoit  à,  R,  euuioit.  —  Ch.  VIII.  —  22,  A,  et  irrémédiables.  —  332, 
7).  similitude.  R,  exemple,  —  17,  est,  R,  n'est.  —  18,  à  reculons,  R,  qu'à  reculons. 

—  18.  conuenance,  R,  accord.  —  19,  accord,  R,  sinulitude.  —  23.  A,  aussi  bon... 
iiie.schants.  —  27,  à  cette  lieure,  R,  asture.  —  334,  2,  Mais  comme,  R,  Comme.  — 
336,  1,  fuyons.  A,  à.  —  27,  impérieusement,  R,  impérieuse.  —  28,  le  prends... 
souuent,  R,  le  preste  l'espaule  aus  reprehantions  que  l'on  faict  en  mes  cscris  : 
et  les  ai  souuent  changez.  —  31,  céder,  D  *,  oui,  à  mes  despens.  —  31,  malaisé, 
R  *,  certes  malaisé.  —  338,  G,  opposoit,  R,  faisoit.  —  8,  victoire,  R,  gloire.  —  9, 
Toutesfois,  R,  Mais.  — 33,  à  ee  que  ie  dits,  R,  à  jiropos.  —  37,  traitter,  R,  treter. 

340,  27,  voylà.  A,  vn.  —  342,  18,  du  langage,  R,  de  langage.  —30,  nullement,  R, 
rarement.  -  344,  24,  poursuy,  R,  rechercherois.  —  25,  affm,  R,  pour.  —  25,  affin, 
R,  pour.  —  2G,  A,  que  le...  l'imite.  —  346,  13,  seul,  R,  tout  .seul.  —  13,  de  ce,  D, 
mesme.  —  13,  seul,  R,  tout  seul.  —  17,  la  riuiero  courre,  R,  courre  la  riuiere.  — 
1!>,  De  vray,  R,  Voyre  mais.  —  30,  retorquables  à,  R,  contournables  vers.  —  31, 
bien  dit,  R,  dit.  —  32,  bien,  R,  très.  —  3'4,  le  iour,  R,  du  iour.  —  38,  d'entende- 
ment, D.  et  gentil  personnage.  —  39,  autant,  R,  aussi.  —  348,  1,  A,  du  registre. 

—  5,  ennuyeux,  R,  enuieux. —  5,  la  prerogatiue,  R,  les  prcrogatiues.  —  7,  s'il... 
faudroit,  R,  S'ils  entandoint  latin  il  leur  faudroit.  —  10,  ne  dis,  R,  n'en  tans.  — 
11,  tache,  R,  coulpe.  —  13,  A,  et  seuere.  —  15,  ce  neantmoins  à  l'oster,  R,  à  l'os- 
ter  ce  neantmoins. 

350.  —  352,  12,  riche,  R,  noble.  —354,  5,  en  discerner,  R,  la  discerner  de  la.  — 
7.  meilleure,  R,  meillure.  —  26,  comme,  R,  comment.  —  356,  femmelettes,  R, 
femmes.  —  358.  7,  mesle,  R,  remesle.  —  30,  d'esgouster,  R,  desgouter. 

360,  10,  A,  bien. —  362,  16.  surmonte,  D,  par  où  il  se  rehausse.  — 17,  A,  et  ses 
diuerses  vertus. —  17,  l'vne,  R,  vne.  —  366,  1,  sérieux,  graue,  R,  graue,  sérieux. — 
16,  Il  n'est,  R,  N'est.  —  368,  1,  dis-ie,  R,  fais-ie.  —  10,  A,  et  le  deuancer.  —  11, 
cognoissance,  D,  et  le  deuancer.  —  12,  Essais,  R,  essais.  —  23,  ce  n'est,  R,  n'est. 

370,  3,  qu'il,  D,  y.  —  4,  s'il,  A,  y.  —33,  A,  quelque.  —  372,  35,  accuse,  R,  a.  — 
376,  10,  présente,  R.  représente.  —  Ch.  IX.  —  378,  24,  à,  A,  vn.  —  27,  de  qui,  R, 
duquel.  —  36,  abandonné  à,  R,  perdu. 

380, 1,  vont  précipiter,  R,  se  voient  ieter.  —  6,  Ion,  R,  on.  —  382,  4,  l'oppression, 
R,  oppression.  —  30,  A,  qui  vaille.  —384,  4,  aussi,  R,  encore.  —  8,  de  me  prome- 
ner, R.  du  promenei'.  —  8,  de  me  retirer,  R,  du  repos.  —  15,  méritera,  R,  mérite. 

—  21,  les  sots.  R,  les  simples.  —  386,  1,  lassent,  R,  lassent  et  offensent.  —  8,  plus, 
l'y,  R,  plus.  l'en.  —  9,  perspicacité,  R,  conoissance.  —  9,  si  i'y  ay,  R.  si  i  ay.  — 
l6,  me  poisent,  R,  m'offancent.  —  17,  D,  et  m'vlcerent.  —  19,  quand  ils,  R*,  no- 
meement  quand  ils.  —  42,  libre  et  pur,  R,  naif.  —  388,  3,  la  Dieu  me  permette,  R, 
la  à  Dieu  ne  plaise.  —  7,  i-egai'dant  plus,  R,  plus  regardant.  —  18,  A,  bien.  —  19, 
m'oyant,  R,  en  m'oyant.  —  20,  me  viennent  soufder,  R,  vont  me  soufflant.  —  24, 
prix,  R,  le  prix.  —  24,  m'habille,  R,  me  habille. 

390,  27,  que  ie  les  ai  veuz,  R,  les  auoir  veux.  —  392,  5,  manier,  D*,  poiser.  — 
33,  eschec,  R,  humeur.  —  394,  27,  paiticuliers,  R,  propres.  —  396,  7,  contraire,  R, 
'rebours.  —  9,  à  rauarice,  R,  son  auarice.  —  39,  farouches,  R,  monstrueuses.  — 
398.  6,  saunages,  R,  farouches.  —  17,  vn  monde...  formé,  R,  les  hommes  obligez 
(lesia  et  formez.  —  18,  l'engendrons,  R,  les  engendrons.  —  19,  le  redresser,  R,  les 
redresser.  —  20,  la  tordre  de  son,  R,  les  tordre  de  leur.  —  20,  accoustumé  plus, 
R,  plus  accoustumé.  —  21,  rompions,  R,  rompons.  —25,  receiie,  D*,  et  formée. 

400,  1,  vne  autre  coupple,  pareille,  R,  vn  autre  coupple,  pareil.  —  402,42,  misé- 
rable, R,  malotru.  —  404,  1,  dessus,  R,  dauant.  —  2,  dessoubs,  R,  après  nous.  — 
3,  remporter,  R,  raporter.  —  22,  plus  espesse,  R,  espèce.  —  406,  3,  croulle,  R, 
crolle.  —  408,  31,  A,  d'accent  et  de  visage. 

410,  7,  l'ay...  euité,  R,  le  me  suis  tousiours  bien  gardé.  —  13,  très  inepte,  R, 
monstrueux.  —  17,  aux  soudaines,  R,  à  soudaines.  —  33,  A,  à  cau.se.  —  412,  2  à  4, 
le  suis...  pouce.  R.  Mes  premières  publications  furent  l'an  1580.  Despuis,  d'vn  long 


Db.Ufe  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

trait  de  temps  ie  suis  enuieilli,  mais  assagi  ie  ne  le  suis  certes  pas  d'vn  pouce.  — 
4,  à  cette  heure,  R,  asture.  —  6,  bel,  R,  beau.  —  5,  yuroigne,  R,  yurouigne.  — 
8,  ionchez,  R*,  ioncs.  —  11,  seroit.  A,  ce.  —  414,  6,  mœurs,  R,  humeurs.  —  8,  com- 
mande, R.  fuit  à.  —  10,  empirer  meshuy,  R,  meshuy'empirer.  —  10,  vers,  R,  enuers. 

—  18,  laquelle,  R,  à  laquelle.  —  19,  vois  cherclier,  R,  me  mesle.  —  19,  le  plus,  R, 
la  plus.  —  51,  i'estime,  R,  estime.  —  26,^  telle,  R,  quelle.  —  416,  7,  désertées,  D*,  et 
ruinées.  —  32,  me  les,  R,  me  le.  —  418,  2,  roido,  R,  plus  roide.  —  19,  pour,  R,  à.  — 
24,  trop,  R,  vn  peu  bien.  —  26,  estre  aucunement,  R,  aucunement  estre.  —  34, 
iustice  exacte,  R,  exacte  iustice. 

420,  4,  A,  simplement.  —  31,  bragues,  R,  bagues.  — 38,  A,  enuere  moy.  —  422, 

15,  A,  s'ils  sauouroient...  liberté  et.  —  19,  d'affranchir,  R,  affranchir.  —  26,  A,  sol- 
licitant, requérant,  suppliant,  ny  moins.  —  29,  m'en,  R,  me.  —  30,  A,  ou  besoing. 

—  33,  m'engager,  D*,  pour  eus.  — 37,  et  prest  au  besoing,  R,  au  souin.  —  424,  12, 
sa  hardiesse,  R,  son  hardiesse.  — 29,  eschaugette,  R,  eschoguette.  —  426,  0.  ni'es- 
touffe,  R,  m'accable.  —  9,  crainte,  R*,  trouble.  —  25,  Fay-ie,  R,  Fais-ie.  —  26,  robes, 
R,  fortune.  —  29,  A,  et  iuridique.  —  36,  sont,  R*,  valent.  —  36,  A,  nettes.  —  428, 
37,  les  puis,  R,  puis. 

430,  14,  façonner,  R,  former. — 432,  3,  nommément,  R,  notamment.  — 3,  cours 
iours,  R,  iours  cours.  —  13,  maison,  R,  famille.  —  18,  mère  de  famille,  R,  femme. 

—  21,  douaire,  R,  doire. —  434,  9,  spécialement,  R,  notamment.  —  17,  A,  et  plus 
continuellement.  —  18,  touchons,  D,  plus  continuellement.  —  30,  à  dix,  R,  dix.  — 
32,  sçaura  prescripre,  R,  prescripra.  —  438,  5,  les  soixante,  R,  soixante.  —  29,  loing, 
R,  esloigné. 

440,  4,  ne  le  gratte,  R,  n'y  touche.  —  13,  l'interest,  R,  interest.  —  16,  ou  on,  R, 
ou  Ion.  —  26,  gouuerner,  R,  entretenir.  —  442,  7,  les  exclamations,  R,  exclama- 
tions. —  28,  A,  vray.  —  444,  2,  volontiers, R,  franchement.  —3,  Dion,  R*,  Dion.  — 
3,  Antigonus,  R,  Antigon.  —  7,  beau  et  aduenant,  R,  agréable.  —  18,  masles,  R*, 
homes.  —  23,  ay  espéré,  R,  espère.  —  23,  aduenoit,  R,  aduient.  —  24,  pleussent  et 
accordassent,  R,  plaisent  et  accordent.  —  25,  mon  trépas,  il  rechercheroit,  R,  que 
ie  meure,  il  recherchera.  —  25,  ay  donné,  R,  donne.  —  28,  l'a  veu,  R,  le  voit.  — 
28,  dans,  R,  en.  —  90,  l'eusse  sceu,  R,  ie  scauois.  —  34,  m'eust  esté,  R,  me  fut.  — 
35,  ie  l'eusses  esté,  R,  ie  l'irois.  —  37,  Eh...  amy,  R*,  0  vn  amy.  —  446,  8,  A,  de 
leurs.  —  24,  poisante,  D,  le  conseillerois  volontiers  Venise,  pour  la  retraicte  d'vne 
telle  condition  et  foiblesse  de  vie.  —  27,  moy,  R,  à  moy.  —  29.  le  leur,  R,  Ce.  — 
31,  ces  voyages,  R,  vn  si  long  voyage.  —  448,  8,  dislayer,  R,  deslaier.  —  17,  à  cette 
heure,  R,  asture.  —  19,  s'ira  difformant,  R,  se  difformera. 

450,  13,  maussade,  R,  sale.  —  31,  commourans,  R,  commorans.  — 452,4,  parmj', 
R,  mais  entre.  —  19,  La  fortune  ayde,  R,  Combien  ayde  la  fortune.  —  16,  aux 
miens,  R,  à  nul.  —  20,  leur  apporter,  R,  faire  guiere.  —  454,  3,  le  plus,  R,  plus.  — 
456,  15,  saueur,  R,  goust.  — 458,  22,  commune  sorte,  R,  basse  forme.  —  32,  quelque. 
R,  aucun. 

460,  26,  les  hommes,  R,  des  hommes.  —  462,  7,  vertu,  R,  volupté.  —  20,  se  ser- 
uent  simplement  des,  R,  suiuent  simplement  les.  —  464,  9,  condamnent  à,  R,  accu- 
sent elles  mesmes  de.  — 16,  raison,  R,  mesure.  —  20,  desconuienent,  R,  disconuie- 
nent.  —  466,  2,  A,  si.  —  15.  Et  vne  bonne,  R,  Comme  vn'.  —  34,  ou  vn  peuple, 
R,  vn  peuple.  —  468,  31,  A,  suyuant...  promesse. 

470,  26,  muances,  R,  nuances.  —  30,  aultres,  D,  tiltres.  —  ceux-ci,  R,  ces  autres 
noms.  —  32,  vn  art,  R,  vn'  art.  —  472,  H,  quelque  air,  R,  l'air.  —  12,  parlerie,  D,* 
C'est  l'originel  langage  des  Dieux.  [Membre  de  phrase  reporté  dans  le  texte  de  1595, 
même  page,  lig.  17,  après  «  philosophie  »].  —  16,  i-ompu,  D,  Luy  mesme  est  tout 
poétique.  —  16,  théologie,  A,  est  toute.  —  474,  7,  trop  incommode,  R,  incommode. 

—  29,  Ctesibius,  R,  vn  Ctesibius.  —  36,  de  moyen,  R,  moyen.  —  476,  20,  lesquels,  R, 
que.  —  478,  1 ,  outrageux,  D*,  au  moins  et.  —  8,  me  renuoyera,  R,  m'en  enuoyera, 

—  34,  il  y  est,  D,  plus  de  cent  ans.  —  34,  A,  et  au  delà  de  cent  ans. 

480.  —484.  —  Ch.  X.  —  21,  s'hypothéquer,  R,  se  hypothéquer.  —  486,  22,  boson- 
gne,  D*,  et  de  l'obligation.  —  488,  2,  et  le,  R,  il  le  faut.  —  2,  l'enfoncer,  R.  s'y  enfon- 
cer. —  9,  s'y  interposant  aussi,  R,  aussi  s'y  interposant.  —  9,  doit,  R,  en  doit.  — 

16,  Glorieux,  R,  Braue.  —  22,  comme,  R.  comment.  —  34,  lieu  mesme,  R,  mesme 
lieu.  —  38,  mesprisant,  R,  en  mesprisant. 


VARIANTES  (4o95-Ex.de  Bordeaux).    LIV.  III,  CH.  X.     VOL.  TH.     Db.I43 

490,  12,  trompions,  R,  trompons.  —  i:],  les  redresser,  R,  le  dresser.  —  21,  qu'eu 
ceux-cy,  R,  (^ue  en  ceux  icy.  —  492,  27,  désirs,  R,  désir.  —  494,  21,  ensuiure,  R, 
suyure.  —  2;>,  espineux,  R,  bien  espineux.  —  496,  30,  et  i'aymerois  presque,  R, 
i'a3'merois  quasi.  —  31,  l'essimoit,  R,  l'estimoit.  —  33,  ny  de,  R,  et  de.  —  498,  10, 
expirée,  R,  est  vuidée.  —  11,  A,  par  manière  d'exemple.  —  27,  après  d',  R,  à.  — 
27,  d'en,  R,  à  en. 

500,  18,  selon  la,  R,  à  la.  —  502,  2,  qui  sont  du,  R,  que  ie  vois  au.  —  4,  moy,  R, 
ma  cause.  —  7,  contraire,  D*,  Malur  molu  animi  qui  vli  ralione  non  potesl.  [Tra- 
duction :  «  Que  celuy-Ià  s'abandonne  à  sa  passion,  qui  ne  peut  suivre  la  raison  »].  — 
504,  1,  aueugle  ou,  R,  aueugle  et.  — 35,  m'estudiois,  R,  estudiois.  —  506,  29,  dis- 
sociation, R,  dissantion.  —  35,  excuse,  R,  sottise.  —  ;35,  consolation,  D,  de  sa  perte. 

—  35,  jirogrez,  D,  des  affaires  douteux  et.  —  508,  10,  })ouru6ir,  R,  pouruoer. 
510,  22,  prouuoit,  R,  pouruoit.  —  30,  temposte,  D,  Animus  nniHo  anlequam  ojt- 

primalur,  quatilur.  [Traduction  :  «  L'esprit  est  frappé  très  longtemps  avant  d'ê- 
tre abattu  »].  —  512,  10,  de  ne,  R,  à  ne.  —  14.  ni'cust  pieu  d',  R,  l'eusse  voulu.  — 
34,  grandes,  E,  de  grandes.  —  35,  est-il,  R,  il  est.  —  514,  11,  ad'aire,  R*,  de  la  peine. 

—  28,  A,  d'y  tenir  ferme.  —  30,  froidement,  R,  lâchement.  —  31,  ardemment,  R, 
chaudement.  —  516,  5,  A,  à  vn  autre.  —  9,  sont,  D*,  pas.  —  22,  Excindunlur,  R, 
abscindunlur.  —  518,  13,  d'ingratitude,  R,  ingratitude.  —  27,  vigueur,  R,  la  vi- 
gueur.   -  27,  liberté,  R,  la  liberté. 

520, 23,  eschafTaux,  R,  esciiauffaux.  —  32,  A,  tout  cela.  —  33,  cette  condition,  R,  sa 
fortune.  —  522,  17,  repetasser,  R,  repotasser.  — 24,  attribue,  R,  done.  —  25,  sienne, 
D,  propre.  —  20,  son,  R,  tout  son.  —  34,  ainsin,  R,  ainsi.  —  35,  sommes,  R,  ne 
sommes.  ~  524.  12,  cette  espèce,  R,  ce  costé  là.  —  29,  guarir,  R,  guérir,  —si  ay, 
R,  ay.  —  526.  —  Ch.  XI.  —2,  doiuent,  R,  deuoint.  —  29,  resuassoit,  R,  rauassois.  — 
528, 1 ,  pi-esuppositions,  R,  essais.  —  1,  examinant,  R,  en  examinant.  —  2,  laissent,  D, 
là.  —  2,  courent  aux,  R,  s'amusent  à  traiter  les.  —  3,  touche,  R,  appartient.  —  3,  ce- 
luy,  R,  à  celuy.  —  5,  A,  et  accomply.  —  5,  besoing,  R,  nature. — 9,  A,  et  de  soy 
mesmes.  —  10,  A,  Les  effects...  nullemejit.  —  10  à  12,  Le  déterminer...  l'accepter,  R, 
Le  déterminer  et  le  scauoir  comme  le  doner  apartient  à  la  régence  et  à  la  maîtrise  : 
à  l'infériorité,  subiection  et  aprantissage  appartient  le  iouyr,  l'accepter.  [En  outre 
l'ordre  des  phrases  où  se  trouvent  les  onze  variantes  qui  précèdent  est  modifié  ainsi 
qu'il  suit  :  ■■  lis  laissent...  causeurs  (lig.  2  à  3)  »  est  placé  après  :  «  vérité  (pag.  520, 
lig.  33)  »;—  «  Le  déterminer...  l'accepter  (lig.  10  à  12)  »  est  placé  après:  «  causeurs 
(lig.  2)  »";  —  «  Ils  passent...  conséquences  (pag.  520,  lig.  33  à  p.  528,  1.  1)  »  est 
placé  après  :  «  l'accepter  (lig.  12)  »].  —  13,  eoustumes,  R,  costume.  ~  30,  moyens, 
R,  causes. 

530.  —  534,  22,  dire,  R,  le  dire.  —  25,  sommes,  R,  que  ,nous  somes.  —  35,  en- 
questante,  R,  enquesteuse.  —  40,  L'admiration,  D,  dict  Platon.  —  43,  establir,  R, 
conceuoir.  —  44,  qu'à,  R,  que  pour.  —  44,  establir,  R,  conceuoir.  —  536,  14, 
offre,  R,  donne.  —  21,  du  sens,  R,  de  sens.  —  33,  impérieusement,  D,  Videanlur 
sane  ne  affirmenlur  modo.  —  538,  2,  A,  Videantur...  modo.  —  37,  ce  genre,  R, 
cette  nature.  —  .8,  ciguë,  R,  cicue.  —  22,  par  fois  se  pcuuent  ainsin,  R,  se  peu- 
uent  ainsi  par  fois.  —  24,  pas  iuge,  R,  ny  iuge.  —  31,  la  pensée,  R,  ma  pensée.  — 

540.  —  542,  1,  esleuees,  R,  si  esleuees.  —  544,  1,  accroire,  R,  à  croire.  —  2,  au 
compte,  R,  en  recette.  —  546.  —  Ch.  XII.  —  17,  maisons,  R  *,  maçons.  —  29, 
boutades,  R,  saillies. 

550,  4,  besoigne,  D,  et  plus  vtile.  —  11,  acquisition,  R,  emploite.  —  12,  ailleurs, 
R,  au  reste.  — 14,  vaisseau,  R,  vasseau.  —  14,  nous  auons,  R,  auons.  —  552,  3,  A, 
non  que.  —  3,  naturelle,  R,  populere.  — 16,  qu'aigu,  R,  que  aigu.  —  30,  aigu,  R, 
vif.  —  31,  nous  eslance,  R,  et  eslance.  —  32,  solide,  R,  rassis.  —  34,  combat,  R, 
conflit.  —  554,  28,  despece,  R,  desmenbre.  —  556,  40,  nécessaire,  R,  propre.  —  42 
à  558,  4,  les  beaux...  piller,  R,  les  admirables  iardins  qui  sont  autour  de  la  ville 
de  liamas  en  abondance  et  délicatesse,  restei'cnt  vierges  des  mains  de  ses  soldats 
tous  ouuers  et  non  clos,  com'ils  sont.  —  5,  Fauonius,  R,  Faonius  [suivant  Plutar- 
que].  —  G  republique,  R,  estât.  —  8,  A,  trouble  et  hazarde  tout,  et  qui.  —  11, 
prier,  R,  de  prier.  —  18,  sie,  R,  siese.  —  27,  colloque,  D  *,  desmenbrant  sa  mère  et 
en  douant  à  ronger  les  pièces  à  sesantiens  enemis.  —  27,  de  haines,  R,  de  haynes. 

—  30  loy,  R,  parole.  —  31,  amorçons,  R,  amorchons.  —  33,  estât,  R,  visage. 

ESSAIS   DE   MONTAIGNE.   —  T.   IV.  10 


Db.l46  ESSAIS  DE  MO>JTAIGNE. 

560,  6,  nioy,  R,  à  11103-.  —  28,  tiror,  D,  en.  —  32,  A,  de  mal.  —  3^1,  soummission, 
R,  siiinniission.  —  562,  couiiiio.  D,  à.  —  23,  droicteiir,  R,  droitur.  —  564,  17,  sans, 
R,  que  ie  n'a3'e.  —  20,  sçaurois,  R,  puis.  —  22,  euidemment,  R  *,  auidemant.  — 
38,  qu'il  est  vrai  à  demj-,  R,  que  certes  à  peu  près.  —  566,  5,  office,  R,  ordre.  — 

20,  falloit,  R,  me  falloit.  -  568,  8,  A,  alors.  —  26,  chauraa,  R,  chaume. 

570, 10,  auec,  R,  à  tout.  —  572,  à  la,  R,  la.  —  8,  ce  neantmoins,  R,  neantmoins. 

—  20,  de  tous  les  maux,  R,  des  maux.  —  574,  1,  torment,  R,  tourment.  —  8,  A. 
csloignée.  —  30,  total,  R,  tout.  —  31,  pourtant,  R,  jiortant.  —  576,  2.  sentiment, 
R,  goust.  —  9,  préméditation,  R,  preuoj'ance.  —  10,  préméditée,  R,  pourpensôe. 

—  16,  A,  hurt  et  au.  —  17,  coup,  D,  presant.  —  17,  en  souffre,  R,  se  en  sent.  — 

21,  A,  plus.  —  37,  autre,  R,  l'autre.  —  578,  1,  affaire,  R,  à  faire.  —  16,  ieunes,  R, 
iunos. 

580,  3,  puérile,  R,  sec  et  sain  mais  quand  et  quand  naïf  et  bas.  —  4,  inima- 
ginable, D*,  véritable  franc  efîuste  au  delà  de  tout  exemple.  —  17,  vne  oisiue, 
R,  vn'  oisiue.  —  34,  sécurité,  R,  niaise  en  vne  sécurité  —  34,  enfantine,  R,  pué- 
rile. —  582,  3,  d'elle,  D,  mesmes.  —  14,  encheuestrions  et  battions,  R,  encheues- 
trons  et  battons.  —  15,  tuions,  R,  tuons.  —37,  oisiueté,  R,  enhortemens  d'autruy. 

—  584,  10,  lié,  R,  empilé.  —  17,  incognues,  R,  inconues.  —  18,  Cela  c'est,  D  *,  en 
consciance.  —  23,  il  effaçoit,  R,  à  chacun  il  me  sembla  effacer.  —  25,  et  parmy, 
R,  parmy.  —  25,  suis,  R,  iesuis.  —  586,  1,  cettuy-ci,  R,  cettuy  ici.  —  2,  eusse,  R, 
en  eusse.  —  2  à  5,  Eh  quoy...  perdre,  R,  D'auantage,  telle  faueur  gratieuse  que  la 
fortune  peut  m'auoir  offerte  par  l'entremise  de  cet  ouurage  eut  lors  i-encontre 
vne  plus  seson.  —  13,  s'espessit,  R,  se  croupit.  —  21,  donrois-ie,  R,  dourrais-ie. 

—  22,  Socrates,  D.  qui.  —  24,  si  disgracié,  R  *,  et  vn  visage  si  vilain.  —  24,  si 
discouenable,  R,  disconuenable.  —  31  à 34,  et  nous...  bien,  R,  et  souuent  nous  des- 
goute  par  bien  legieres  causes  :  du  teint  d'vne  tâche  d'vne  rude  contenance  de 
quelque  cause  inexplicable  sur  des  menbres  bien.  —  36,  toutesfois,  R,  pourtant. 

—  36,  le  plus,  R,  très.  —  38,  qui,  D,  est.  —  38,  difformité,  R,  deformité.  —  588, 
16,  non  a,  R,  n'a.  —  18,  rang,  R,  ranc.  —  21,  appartenir  aux  beaux,  R,  aux  beaux 
appartenir.  —  25,  fait-il,  R,  dict-il. 

590,  27,  seule,  R.  la  seule.  —  30,  religions,  non,  R,  relligions  nous.  —  592.  6, 
vne  apparence,  R,  vn  port.  —  10,  celle,  R,  celuy.  —  33,  mon  soupçon,  R,  ma 
supçon.  —  594,  3,  l'interprétation,  R,  interprétation.  —  17,  enuieux,  R,  ialoux. 

—  20,  en,  R,  dans.  —  20,  dans,  R,  en.  —  26,  remonte,  R,  remonta.  —  36,  dis- 
persé, R,  desparti.  —  596,  6,  liarquebusier,  R,  harquebousier.  —  9,  harquebu- 
sade,  R,  harquebousade.  ^  28,  lendemain,  R,  l'endemain.  —  33,  indiscrète  li- 
berté, R,  Hberté  indiscrète.  —  598,  9,  punition,  R,  vengence.  —  11,  laideur,  R, 
haine.  —  12,  abhorrer,  R,  hayr.  —  18,  De  niesnie  qu',  R,  Comme.  —  Ch.  XIII. 

—  27,  A,  de  beaucoup.  —  27,  plus  vil,  R,  moins  digne. 

600,  2,  conférence,  R,  ressemblance.  —  602,  contrat,  R,  vn  contrat.  —  604,  9, 
et  redoutons,  R,  redoutons.  —  26,  sur  qui,  R,  auquel.  —  36,  contraire,  R,  rebours. 

—  606,  3,  à  soye,  R,  de  soye.  —  19,  raccourcissement,  R,  racourciment.  —  20, 
ou,  A,  signe.  —  23,  A,  et  tourneuire.  —  31,  on,  R,  l'on.  —  42,  commentaires,  R, 
commenteres.  —  608,  2,  s'entent,  R,  s'antent.  —  10,  leurs  ouurages,  R,  leur  ou- 
urage. —  29;  d'Hydra,  R,  de  Hydra.  —  30,  dist,  R,  fit.  —  33,  tu  nous  en  apportes, 
R,  en  voicy. 

610,  7,  bout,  R,  coin.  —  614,  6,  estrené,  R  *,  aussi  estrené.  —  616,  15,  peut,  R, 
sauroit.  —  19,  gouuernement,  R,  son  gouuernement.  —  24,  peint,  R,  trop  peint. 

—  28  robuste,  D,  vertu.  —  29,  A,  quiète. 

620,  10,  Euthydemc,  D,  en  Xenophon.  —  22,  de  cette,  R,  à  cette.  —  26,  Nihil, 
R,  Nil  hoc.  —  622,  28,  c'est,  R  *,  ainsi  que  de.  —  624,  14,  d'oreilles,  R,  des  oreil- 
les. —  626,  22,  pour,  D,  le  seruice  de.  —  36,  beaucoup,  R,  de  beaucoup.  —  628, 
9,  apprins,  R,  apris.  —  13,  niauuais,  R,  mauues.  —  41,  à  cette  heui'e,  R,  asture. 

630,  24,  moy,  R,  à  moy.  —  632,  8,  sottises,  R,  bestises.  —  9,  mettons,  R.  ietons. 

—  15,  tiennent,  R,  disent.  —  634,  18,  respondit,  R,  respondoit.  —  20,  ordinaire, 
R,  ordinere.  —  20,  bruit,  R,  son.  —  21,  de  l'eau,  R,  l'eau.  —  26,  déporta,  R, 
laissa.  —  27,  semo5ent,  R,  semoint.  —  29,  emploj'a,  R,  continua.  —  636,  6,  aussi 
au  changement,  R,  au  changement  aussi.  —  36,  trois,  D  *,  bones.  —  638.  32,  il  a, 
R,  il  m'a.  —  32,  ni'imprimer,  R,  imprimer.  —  34,  l'inquisition,  R,  inquisition. 


VARIANTES  (loGo-Ex.  de  Bordeaux).     LIV.  Ilf,  Cil.  XII.     VOL.  HT.     Db.J47 

640,  1(1.  oriifos.  R.  si'i'uic-cs.  —  20,  A,  Tandis  (|U(\  -  646,  M,  coiirso.  1».  iialii- 
relle.  —  648,  10,  l'vtilitt',  lî,  vtilit('>.  —  18,  allongcra-lon,  R,  alongera  tu.  —  18, 
vostre,  R,  nostre. 

650,  4,  cet  office,  R,  ce  service.  —  27,  compagnie,  D,  ordinaire.  —  28,  sain,  R, 
autre.  —  29,  dit-il,  R,  faict-il.  —  652,  33,  quoy,  R,  qui.  —  654,  16,  qu'à  cette 
heure,  R,  qu'asturc.  —  656,  17,  entr'engendrent,  R,  s'entr'engendrent. 

660,  11,  cognoistre,  R,  conestre.  — 664,  8,  A,  et  tout  vn  peuple.  —  21,  secous- 
ses, R,  sesons.  —  24,  l'aage,  R,  tantost  de  si.x  ans,  le  cinquantième.  —  33,  A,  et 
mes  yeux.  —  33,  incontinent,  D,  et  mes  yeux.  —  666,  16,  paisiblement,  D,  seule- 
ment. —  33,  sicut,  R,  si  oui.  —  668,  2,  leur  nourriture,  R,  nourriture. 

670,  28,  r'allie,  R,  r'allia.  —  32,  me  semble,  R,  semble.  —  672,  1,  m'ennuyent, . 
R,  me  fâchent.  —  10,  auoyent,  R,  auoint.  —  674,  15,  A,  ils  se  trompent,  et.  —  17, 
et  dix,  R,  dix.  —  18,  qui  ay,  R,  ay.  —  20,  prodigieuse,  R,  monstrueuse.  —  30, 
las,  R,  lasse.  —  678,  3,  A,  sur  tout  les  vieillards.  —  5,  d'almanachs,  D,  les  epho- 
merides  et  aux  médecins.  —  5,  A,  les  espérances  et  les  pronostiques.  —  18, 
galbe,  R,  garbe.  —  31,  contraire,  R,  rebours. 

680,  1,  et  ne  bois,  R,  ne  bois.  —  11,  vin,  D,  d'eau.  —  15,  ou  non,  R,  non.  — 
19,  buroit,  R,  boiroit.  —  682,  21,  ses  compagnons,  R,  les  autres.  —  24,  A,  natu- 
l'elle.  —  29,  des  hommes  à  Rome,  R,  à  Rome  des  gens.  —  35,  pour  quelle,  R,  à 
ce  qu'elle.  —  38,  aux  festins,  R,  à  leurs  festins.  —  684,  7,  desdaigné,  R,  refusé. 

—  9,  souueraine,  R,  principale.  —  10.  Mon...  forclost.  [Phrase  reportée  lig.  12 
après  «  il  se  trouue  »].  —  11,  pour  soy...  saueur,  R,  des  conuiez  y  apporte  la  prin- 
cipale grâce.  —  15,  de  prendre,  R,  prendre.  —686,4,  veulent  que,R,  tiennent.  —  5, 
A,  soyent.  —  0,  comme  dit  Aristote,  qui  d'vne  farouche  stupidité,  R,  qui  d'vne  fa- 
rouche stupidité,  comme  dit  Aristote.  —  7,  font  les  degoustés,  R,  sont  desgoutez. 

—  7,  A,  d'autres.  —  10,  ne  leur  coûtant,  R,  et  ne  leur  couste.  —  11,  substantent, 
R,  sustantent.  —  13,  leurs  femmes,  R,  les  famés.  —  23,  plus,  R  *,  bien  plus.  — 
34,  humains  et  corporels,  R,  naturels  et  par  conséquent  necesseres  et  iustes.  — 
38,  vocation,  R  *,  vacation.  —  688,  9  à  12,  avez-vous  sceu  composer...  villes,  R, 
Composer  nos  mœurs  est  nostre  office,  non  pas  composer  des  liures,  et  gaigner 
non  pas  des  batailles  et  prouinces,  mais  l'ordre  et  la  tranquillité  à  nostre  con- 
duite. —  12,  Le  glorieux...  c'est,  R,  Nostre  grand  et  glorieus  chef  d'euure  c'est. 

—  17,  au  deuis,  R,  à  son  deuis.  —  30,  dispensé,  R,  despansé.  —  35,  Bacchus,  D, 
mis  est  indulgendum  non  seruiendum.  [Traduction  :  «  11  faut  le  leur  pardonner,  et 
ne  pas  leur  en  faire  un  grief  »].  —  37,  voluptez,  D  -^j  naturelles. 

690,  5,  des  mœurs,  R,  de  meurs.  —  7,  vne  geniture,  R,  vn'origine.  —  24,  A, 
En  la...  clieual  [phrase  reportée  lig.  32].  —  25,  Et  emmy...  Et  le  premier  emmy.  — 
26,  A,  le  premier.  —  32,  abstinence,  D,  11  s'est  veu  en  la  bataille  Deliene  releuer 
et  sauner  Xenophon  renuersé  de  son  cheual.  —  692,  17,  bien,  D,  naturellement. 

—  696,  5,  afin,  R,  pour.  —  7,  chagrigne,  R,  chagreigne.  —  12,  l'amplifier,  R,  am- 
plifier. —  698,  2,  substanlassions,  R,  sustentissions.  —  0,  que  piustost...  produi- 
sist,  R,  plus  tost  qu'on  les  produisit  encore.  —  20,  la  volupté,  R,  volupté.  —  29, 
ne  va,  R,  va. 

700,  1,  expliquer,  R,  exprimer.  —  702,  10,  fâcheux  à  digérer,  R,  à  digérer  fa- 
cheus.  —  19,  les  plus,  R,  le  plus.  —  704,  5,  miracle,  D,  et. 


FASCICULE  E 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS. 

EXTRAITS,    CLASSÉS    PAR    MATIÈRE    ET    DANS    UN    ORDRE 
MÉTHODIQUE,    DES    IDÉES    CARACTÉRISTIQUES   QUI  Y    SONT    ÉMISES. 


«  Montaigne,  le  meilleur  philosophe  moral  que  nous  ayons,  plus  profond  que 
subtil,  a  dit  d'Aguesseau,  n'est  jamais  mieux  que  cité;  on  ne  lui  trouve  pas  tant 
de  génie  à  le  lire  de  suite,  ses  propos  saisissent  plus  que  les  développements  qu'il 
leur  donne  ».  —  Ses  propos,  on  les  trouvera,  en  majeure  partie,  énoncés  ici;  et, 
en  se  reportant  aux  indications  de  volume  et  de  page  qui  les  accompagnent,  il 
sera  aisé,  à  qui  voudra,  de  les  replacer  dans  leur  cadre  pour  en  mieux  juger  et 
méditer. 

Ces  extraits,  synthétisant  ■•  l'esprit  des  Essais  »,  sont  textuels,  en  dehors  des 
légères  retouches  qu'il  a  fallu  faire  à  quelques-uns  pour  les  rendre  compréhensi- 
bles tout  en  les  présentant  isolément.  —  Le  style  et  l'orthographe  en  ont  été  con- 
servés, pour  ne  rien  leur  enlever  de  leur  précision  et  de  leur  pittoresque. 

Ce  relevé,  joint  au  sommaire  des  Essais  (fascicule  B),  présente  de  fait  la  quin- 
tessence de  cet  ouvrage  :  l'un  dans  son  ensemble,  l'autre  dans  ses  idées  caracté- 
ristiques. 

La  pensée  n'en  est  pas  nouvelle;  elle  a  déjà  été  réalisée,  au  moins  à  deux  repri- 
ses au  xvni"  siècle,  d'une  manière  fort  judicieuse,  bien  que  dans  des  conditions 
ne  nous  donnant  pas  pleine  satisfaction,-ce  qui  nous  a  déterminé  à  la  reprendre, 
en  faisant  à  cet  égard  table  rase  du  passé. 

Le  difficile,  dans  un  travail  de  ce  genre,  est  de  ne  pas  se  laisser  entraîner,  tout 
en  n'écartant  rien  d'essentiel.  Mais  la  corrélation  entre  ce  relové  et  le  Répertoire 
analytique  des  principales  matières  traitées  ou  mentionnées  dans  les  Essais  (fas- 
cicule Hb)  et,  d'autre  part,  le  recours  immédiat  au  texte  que  rend  possible  la 
contexturc  de  «  Self-édition  »,  résolvent  ce  point  épineux. 

11  est  à  observer  que  cet  «  Esprit  des  Essais  »  diffère  entièrement  dos  <•  Extraits 
do  Montaigne  »  qui,  sous  ce  nom  et  en  assez  grand  nombre,  en  donnent  in  ex- 
tenso les  morceaux  les  plus  intéressants,  n'y  faisant  que  les  coupures  indispen- 
sables suivant  la  catégorie  de  lecteurs  auxquels  ils  sont  destinés. 

Le  titre  de  chaque  article  indique  le  sujet  auquel  il  est  plus  particulièrement 
afférent  et  souvent  aussi,  entre  parenthèses,  d'autres  articles  auxquels  il  y  a  lieu 
de  se  reporter  pour  ce  même  objet,  car,  ici  non  plus,  on  n'a  pu  se  garder  complè- 
tement de  la  confusion  qui  partout  existe  dans  les  Essais,  où  à  propos  de  tout  il 
est  question  de  tout. 

Dans  l'article  «  Divers  »,  plus  encore  que  dans  les  autres,  on  trouvera  un  pou 
de  ce  tout;  les  sujets  y  sont  classés  d'après  l'ordre  alphabétique  du  mot  qui,  dans 
l'alinéa,  attire  le  plus  l'attention. 

Nota.  —  Les  nombres  suivant  chaque  aUnéa,  indiquent  :  ceux  en  caractères 
romains,  le  volume;  ceux  en  caractères  arabes,  la  page  où  se  trouve  l'extrait  qu'il 
relate. 

Pour  chaque  sujet,  outre  l'article  qui  lui  est  propre,  consulter  également  ceux 
qui  accessoirement  sont  indiqués  dans  l'en-tcto,  et  aussi  l'article  «  Divers  ». 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS. 

EXTRAITS,    CLASSÉS    PAR    MATIÈRE    ET    DANS    UN    ORDRE 
MÉTHODIQUE,    DES   IDÉES    CARACTERISTIQUES    QUI    Y    SONT    ÉMISES. 


ABONDANCE. 
II  n'est  rien  si  empeschant,  si  desgouté  que  l'abondance,  I,  490. 

ABSENCE  (amitié,  mariage). 

Si  nous  ne  iouyssons  que  ce  que  nous  touchons,  adieu  noz  escus  quand  ils  sont 
on  noz  coffres,  et  noz  enfans  s'ils  sont  à  la  chasse,  III,  434. 

Vnc  faim  insatiable  de  la  présence  corporelle,  accuse  vn  peu  la  foiblesse  en  la 
iouissance  des  âmes,  III,  436. 

ACTIONS. 

le  hay  quasi  à  pareille  mesure  vne  oysiueté  croupie  et  endormie,  conmie  vn 
oinbesongnement  espineux  et  pénible.  L'vn  me  pince,  l'autre  m'assoupit,  III,  276. 

Toutes  actions,  dit  la  philosophie,  siéent  egaliement  bien  et  honnorent  egalle- 
ment  le  sage,  III,  692. 

Les  choses  moins  craintes  sont  moins  défendues  et  obseruees.  On  peut  oser 
plus  aysement,  ce  que  personne  ne  pense  que  vous  oserez,  qui  dénient  facile  par 
sa  difficulté,  III,  274. 

Est-ce  pas  erreur,  d'estimer  aucunes  actions  moins  dignes  de  ce  qu'elles  sont 
nécessaires?  Si  est  ce  vn  tres-conuenable  mariage,  du  plaisir  auec  la  nécessité, 
auec  laquelle,  dit  vn  ancien,  les  Dieux  complottent  tousiours,  111,-700. 

A  l'enfourner,  il  n'y  va  que  d'vn  peu  d'auisenient,  mais  depuis  que  vous  estes 
embarqué,  toutes  les  cordes  tirent,  III,  512. 

La  pluspart  de  nos  actions  ne  sont  que  masque  et  fard,  I,  406. 

Noz  plus  grandes  agitations,  ont  des  ressorts  et  causes  ridicules,  III,  512. 

L'insuffisance  et  la  sottise  est  loiiable  en  vne  action  meslouable,  III,  274. 

ADULTÈRE  (chasteté,  mariaoe). 

11  faut  estre  ingénieux  à  euiter  cette  ennuyeuse  et  inutile  cognoissance, 
III,  234. 

Mais  le  monde  en  parle.  Vn  galant  homme  en  est  pleint,  non  pas  desestimé.  Et 
puis,  de  qui  ne  parle  on  en  ce  sens,  depuis  le  petit  iusques  au  plus  grand? 
III,  234. 


E.lo4  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Chacun  de  vous  a  fait  quelqu'vn  coqu  :  or  nature  est  toute  en  pareilles,  en  com- 
pensation et  vicissitude.  La  fréquence  de  cet  accident,  en  doibt  mes-huy  auoir 
modéré  l'aigreur  :  le  voyla  tantôt  passé  en  coustume,  III,  '231. 

l'en  sçay  qui  à  leur  escient  ont  tiré  et  proflit  et  auancement  du  cocuage,  dc- 
quoy  le  seul  nom  effraye  tant  de  gens,  I,  464. 

La  curiosité  est  vicieuse  par  tout  :  mais  elle  est  pernicieuse  icy.  C'est  folie  de 
vouloir  s'esclaircir  d'vn  mal,  auquel  il  n'y  a  point  de  médecine,  qui  ne  l'empire 
et  le  rengrege  :  duquel  la  honte  s'augmente  et  se  publie  principalement  par  la 
ialousie  :  duquel  la  vengeance  blesse  plus  nos  enfans,  qu'elle  ne  nous  guérit. 
Vous  asséchez  et  rtiourez  à  la  queste  d'vne  si  obscure  vérification.  Combien  pi- 
teusement y  sont  arriuez  ceux  de  mon  temps,  qui  en  sont  venus  à  bout?  On  ne 
se  fnoque  pas  moins  de  celuy  qui  est  en  peine  d'y  pouruoir,  que  de  celuy  qui 
l'ignore.  Le  charactere  de  la  cornardise  est  indélébile  :  à  qui  il  est  vne  fois  atta- 
ché, il  l'est  tousiours.  Le  chastiement  l'exprime  plus,  que  la  faute.  Il  faict  beau 
voir,  arracher  de  l'ombre  et  du  doubte,  nos  malheurs  priuez,  pour  les  trompeter 
en  eschaffaux  tragiques  :  et  malheurs  qui  ne  pinseni,  que  par  le  rapport, 
III,  232. 

Misérable  passion,  a  cecy  encore,  d'estre  incommunicable.  Car  à  quel  amy 
osez  vous  fier  vos  doléances  :  qui,  s'il  ne  s'en  rit,  ne  s'en  serue  d'acheminement 
et  d'instruction  pour  prendre  luy  mesme  sa  part  à  la  curée?  I,  464. 

AFFAIRES  (fortune,  vie  pibliqie). 

Il  faut  manier  les  entreprises  humaines,  plus  grossièrement  et  superficielle- 
ment; et  en  laisser  bonne  et  grande  part,  pour  les  droits  de  la  Fortune.  II  n'est 
pas  besoin  d'esclairer  les  affaires  si  profondement  et  si  subtilement.  On  s'y  perd 
a  la  considération  de  tant  de  lustres  contraires  et  formes  diuerses,  II,  540. 

Qui  en  recherche  et  embrasse  toutes  les  circonstances,  et  conséquences,  il  em- 
pesche  son  eslection.  Vn  engin  moj'en,  conduit  esgallement,  et  suffit  aux  exécu- 
tions, de  grand  et  de  petit  poix,  II,  542. 

Nous  guidons  les  affaires  en  leurs  commencemens,  et  les  tenons  à  nostre 
mercy  :  mais  par  après,  quand  ils  sont  esbranlez,  ce  sont  eux  qui  nous  guident 
et  emportent,  et  auons  à  les  suyure,  III,  514. 

Vn  sage  homme  peut  pour  l'interest  d'autruy,  comme  pour  ne  rompre  indé- 
cemment compagnie  ou  pour  ne  discontinuer  vn  autre  affaire  d'importance,  re- 
mettre à  entendre  ce  qu'on  luy  apporte  de  nouueau  :  mais  pour  son  interest  ou 
plaisir  particulier,  mesmes  s'il  est  homme  ayant  charge  publique;  pour  ne  rom- 
pre son  disner,  voyre  ny  son  sommeil,  il  est  inexcusable  de  le  faire,  I,  656. 

AFFECTION  (enkants). 

Les  choses  nous  sont  plus  chères,  qui  nous  ont  plus  cousté.  Et  donner,  est  de 
plus  de  coust  que  le  prendre,  II,  20. 

Ce  n'est  pas  merucille,  si  à  reculons  l'affection  des  enfans  aux  pères,  n'est  pas 
si  grande.  loint  que  celuy  qui  bien  faict  à  quelcun,  l'aime  mieux,  qu'il  n'en  est 
aimé.  Et  celuy  à  qui  il  est  deu,  aime  mieux,  que  celuy  qui  doibt  :  et  tout  ouurier 
aime  mieux  son  ouurage,  qu'il  n'en  seroitaimé,  si  rouuragc  auoit  du  sentiment, 
II,  20. 

Au  demeurant  il  est  aisé  à  voir  par  expérience,  que  cette  affection  naturelle,  à 
qui  nous  donnons  tant  d'authorité,  a  les  racines  bien  foibles.  Pour  vn  fort  léger 
profit,  nous  arrachons  tous  les  iours  leurs  propres  enfans  d'entre  les  bras  des 
mères,  et  leur  faisons  prendre  les  nostres  en  charge.  Et  voit-on  en  la  plus  part 
d'entre  elles,  s'engendrer  bien  tost  par  accoustumance  vn'affection  bastarde,  plus 
véhémente  que  la  naturelle  et  plus  grande  sollicitude  de  la  conseruation  des  en- 
fants empruntez,  que  des  leurs  propres,  II,  46. 

La  seule  raison  doit  auoir  la  conduite  de  nos  inclinations,  II,  22. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        AGE.  E.i5o 

AGE. 

Nos  aines  sont  desnouôos  à  vingt  ans,  elles  sont  aiois  ce  qu'elles  doiuent  estre, 
ot  proniettont  tout  ce  qu'elles  pourront.  laniais  aine  qui  n'ait  donné  en  cet  aage 
là,  arie  bien  euidentc  de  sa  force,  n'en  donna  depuis  la  prcuue,  I,  596. 

En  la  vie  des  mesmes  hommes  souuent  la  belle  moitié,  ils  la  vescurent  de  la  gloire 
acquise  en  leur  ieunesse  :  grands  hommes  depuis  au  prix  de  touts  autres,  mais 
nullement  au  prix  d'eux-mesmes,  I,  598. 

Il  est  possible  qu'à  ceux  qui  employent  bien  le  temps,  la  science,  et  l'expé- 
rience croissent  depuis  cet  aage  (trente  ans)  auec  la  vie  :  mais  la  viuacité,  la 
promptitude,  la  fermeté,  et  autres  parties  bien  plus  nostres,  [)lus  imi)ortantes  et 
essentielles,  se  fanissent  et  s'allanguissenl,  I,  '6\È. 

AxMBASSADEURS. 

l'ay  trouué  bien  estrange,  qu'il  fust  en  la  puissance  d'vn  Ambassadeur  de  dis- 
penseï"  sur  les  aduertissemens  de  grande  conséquence  qu'il  doit  faire  à  son  mais- 
tre.  Et  m'cust  semblé  l'office  du  seruiteur  estre,  de  fidèlement  représenter  les 
choses  en  leur  entier,  comme  elles  sont  àduenuës  :  afin  que  la  liberté  d'ordonner, 
iuger,  et  choisir  demeurast  au  maistre.  Car  de  luy  altérer  ou  cacJier  la  vérité,  de 
peur  qu'il  ne  laprcigne  autrement  qu'il  ne  doit,  et  que  cela  ne  le  pousse  à  quel- 
que mauuais  party,  et  ce  pondant  le  laisser  ignorant  de  ses  affaires,  cela  m'eust 
semblé  appartenir  à  celuy,  qui  donne  la  loy,  non  à  celuy  qui  la  reçoit,  au  cura- 
teur et  maistre  d'eschole,  non  à  celuy  qui  se  doit  penser  inférieur,  conune  en 
authorité,  aussi  en  prudence  et  bon  conseil,  I,  91. 

AMBITION. 

Nous  ne  sommes  pas  naiz  pour  nostre  particulier,  ains  pour  le  publicq  ;  beau 
mot,  dequoy  se  couure  l'ambition  et  l'auarice,  I,  410. 

L'ambition  n'est  pas  vn  vice  de  petis  compaignons,  et  de  tels  clTorts  que  les 
nostres,  III,  520. 

Où  l'amour  et  l'ambition  seroient  en  esgalc  balance,  et  viendroient  à  se  cho- 
quer de  forces  pareilles,  ie  ne  fay  aucun  double,  que  ceste-cy  ne  gaignast  le  prix 
de  la  maistrise,  II,  (>42. 

L'ambition  ne  se  conduit  iamais  mieux  selon  soy,  que  par  vne  voyc  csgarec  et 
inusitée,  III,  322. 

L'ambition  paye  bien  ses  gents,  de  les  tenir  tousiours  en  montre,  comme  la 
statue  d'vn  marché.  Ils  n'ont  pas  seulement  leur  retraict  pour  retraitte,  III,  156. 

AME  (immortalité  de  l'ame). 

La  génération  de  l'ame  suyt  la  commune  condition  des  choses  humaines  : 
comme  aussi  sa  vie.  On  la  voyt  naistre  à  mesme  que  le  corps  en  est  capable;  es- 
leuer  ses  forces  comme  les  corporelles;  on  y  recognoit  la  foiblesse  de  son  enfance, 
et  auec  le  temps  sa  vigueur  et  sa  maturité  :  et  puis  sa  declination  et  sa  vieillesse, 
et  en  fin  sa  décrépitude.  On  l'appcrçoit  capable  de  diuerses  passions  et  agitée  de 
plusieurs  mouuemens  pénibles,  (l'oii  elle  tombe  en  lassitude  et  en  douleur,  capa- 
ble d'altération  et  de  cliangement,  d'allégresse,  d'assopissement,  et  de  langueur, 
subjecte  à  ses  maladies  et  aux  ofïences,  comme  l'estomach  ou  le  pied  :  esblouye 
et  troublée  par  la  force  du  vin  :  desmue  de  son  assiette,  par  les  vapeurs  d'vne 
fieure  chaude  :  endormie  par  l'application  d'aucuns  medicamens,  et  reueillée  par 
d'autres.  Dauantage  on  sent  l'ame  s'engager  en  la  mort,  comme  le  corps.  Ce  que 
l'image  du  sommeil  nous  montre  assez  :  car  c'est  vne  défaillance  et  cheute  de 
l'ame  aussi  bien  que  du  corps,  II,  .316. 

L'ame  loge  au  cerueau  :  ce  qui  appert  de  ce  que  les  blessures  et  accidens  qui 
touchent  cette  partie,  offensent  incontinent  les  facultez  de  l'ame,  II,  312. 

L'ame,  par  sa  faculté  ratiocine,  se  souuient,  comprend,  iugo,  désire  et  exerce 
toutes  ses  autres  opérations  par  diuers  instrumens  du  corps,  comme  le  nocher 
gouuerne  son  nauire  selon  l'expérience  qu'il  en  a,  II,  312. 


E.lo6      •  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Nos  aines  se  trouuent  souuent  airitoi^s  de  diuersos  passions.  D'où  nous  voyons 
les  enfans,  qui  vont  tout  naifuenient  après  la  nature,  pleurer  et  rire  souuent  de 
mesme  chose  :  Et  quelque  gentille  flamme  qui  eschauffe  le  cœur  des  filles  bien 
nées,  encore  les  despend  on  à  force  du  col  de  leurs  mères,  pour  les  rendre  à  leur 
espoux.  Ainsin  il  n'est  pas  estrange  de  plaindre  celuy-là  mort,  qu'on  ne  voudroit 
aucunement  estre  en  vie,  I,  406. 

Puisque  l'ambition  peut  apprendre  aux  hommes,  et  la  vaillance,  et  la  tempé- 
rance, et  la  libéralité,  voire  et  la  iustice  :  puis  que  l'auarice  peut  planter  au 
courage  d'vn  garçon  de  boutique,  nourri  à  l'ombre  et  à  l'oysiueté,  l'asseurance 
de  se  ietter  si  loing  du  foj'cr  domestique,  à  la  mercy  des  vagues  et  de  Neptune 
courroucé  dans  vn  fraile  bateau,  et  qu'elle  apprend  encore  la  discrétion  et  la 
prudence  :  et  que  Venus  mesme  fournit  de  resolution  et  de  hardiesse  la  ieunesse 
encore  soubs  la  discipline  et  la  verge;  et  gendarme  le  tendre  cœur  des  pucelles 
au  giron  de  leui*s  mères  :  ce  n'est  pas  tour  de  rassis  entendement,  de  nous  iuger 
simplement  par  nos  actions  de  dehors  :  il  faut  sonder  iusqu'au  dedans,  et  voir 
par  quels  ressors  se  donne  le  bransle,  I,  612. 

Ce  n'est  pas  pour  la  montre,  que  nostre  ame  doit  iouër  son  rolle,  c'est  chez 
nous  au  dedans,  où  nuls  yeux  ne  donnent  que  les  nostres  :  là  elle  nous  couure  do 
la  crainte  de  la  mort,  des  douleurs  et  de  la  honte  mesme  :  elle  nous  asseure  là, 
de  la  perte  de  nos  enfans,  de  nos  amis,  et  de  nos  fortunes  :  et  quand  l'opportu- 
nité s'y  présente,  elle  nous  conduit  aussi  aux  hazards  de  la  guerre.  Ce  profit  est 
bien  plus  grand,  et  bien  plus  digne  d'estre  souhaité  et  espéré,  que  l'honneur  et  la 
gloire,  qui  n'est  autre  chose  qu'vn  fauorable  iugement  qu'on  fait  de  nous,  II,  452. 

l'ordonne  à  mon  ame,  de  regarder  et  la  douleur,  et  la  volupté,  de  veuë  pareil- 
ment  réglée  :  et  pareillement  ferme  :  mais  gayement  l'vne,  l'autre  seuerement. 
Et  selon  ce  qu'elle  y  peut  apporter,  autant  soigneuse  d'en  esteindre  l'vne,  que 
d'estendre  l'autre,  III,  692. 

Il  n'est  point  ame  si  chetifue  et  brutale,  en  laquelle  on  ne  voye  reluire  quel- 
que faculté  particulière  :  il  n'y  en  a  point  de  si  enseuelie,  qui  ne  face  vne  saillie 
par  quelque  bout.  Et  comment  il  aduienne  qu'vne  ame  aueugle  et  endormie  à 
toutes  autres  choses,  se  trouue  vifue,  claire,  et  excellente,  à  certain  particulier 
efïect,  il  s'en  faut  enquérir  aux  maistres,  II,  502. 

Comme  les  âmes  vicieuses  sont  incitées  souuent  à  bien  faire,  par  quelque  im- 
pulsion estrangere?  aussi  sont  les  vertueuses  à  faire  mal.  Il  les  faut  doncq  iuger  par 
leur  estât  rassis  :  quand  elles  sont  chez  elles,  si  quelquefois  elles  y  sont  :  ou  au 
moins  quand  elles  sont  plus  voysines  du  repos  et  en  leur  naifue  assiette,  III,  118. 

La  pluspart  des  facultez  de  nostre  ame,  comme  nous  les  employons,  troublent 
plus  le  repos  de  la  vie,  qu'elles  n'y  seruent,  III,  24. 

Les  secousses  et  esbranlemens  que  nostre  ame  reçoit  par  les  passions  corporelles, 
peuuent  beaucoup  en  elle  :  mais  encore  plus  les  siennes  propres  :  ausqùelles  elle 
est  si  fort  prinse,  qu'il  est  à  l'aduanture  soustenable,  qu'elle  n'a  aucune  autre  al- 
leure  et  mouuement,  que  du  souffle  de  ses  vents,  II,  350. 

Nous  ne  sommes  iamais  sans  maladie  :  des  efTects  d'vne  passion  ardente,  nous 
retombons  aux  effects  d'vne  passion  frileuse,  II,  354. 

Les  maux  du  corps  s'esclaircissent  en  augmentant.  Nous  trouuons  que  c'est 
goutte,  ce  que  nous  nommions  rheume  ou  foulleure.  Les  maux  de  l'ame  s'obscur- 
cissent en  leurs  forces  :  le  plus  malade  les  sent  le  moins,  III,  188. 

Quand  les  médecins  ne  peuuent  purger  le  caterrhe,  ils  le  diuertissent,  et  âoa- 
uoyent  à  vne  autre  partie  moins  dangereuse.  C'est  aussi  la  plus  ordinaire  recepto 
aux  maladies  de  l'ame.  On  luy  fait  peu  choquer  les  maux  de  droit  fil  :  on  ne  luy 
en  fait  ny  soustenir  ny  rabatre  l'atteinte  :  on  la  luv  fait  décliner  et  gauchir. 
III,  164. 

Entre  les  functions  de  l'ame,  il  en  est  de  basses.  Qui  ne  la  void  encor  par  là, 
n'acheue  pas  de  la  connoistre.  Et  à  l'aduenture  la  remarque  Ion  mieux  où  elle  va 
son  pas  simple,  I,  554. 

Ny  n'entendent  les  Stoïciens,  que  l'ame  de  leur  sage  puisse  résister  aux  pre- 
mières visions  et  fantaisies  qui  lu\-  suruiennent  :  ains  comme  à  vne  subiection 
naturelle  consentent  qu'il  cède  au  grand  bruit  du  ciel,  ou  d'vne  ruine,  pour 
exemple,  iusques  à  la  palleur  et  contraction  :  ainsin  autres  passions,  pourueu 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        AME.  E.157 

que  son  opinion  demeure  sauue  et  entière,  et  que  l'assiette  de  son  discours  n'en 
souffre  atteinte  ny  altération  quelconque,  et  qu'il  ne  preste  nul  consentement  à 
son  effroy  et  souffrance.  Le  sage  Peripateticien  ne  s'exempte  pas  des  perturba- 
tions, mais  il  les  modère,  I,  82. 

11  est  malaisé  que  le  discours  et  l'instruction,  encore  que  nostre  créance  s'y  ap- 
plique volontiers,  soyent  assez  puissants  pour  nous  acheminer  iusques  à  l'action, 
si  outre  cela  nous  n'exerçons  et  formons  nostre  ame  par  expérience  au  train,  au- 
quel nous  la  voulons  renger  :  autrement  quand  elle  sera  au  propre  des  effets,  elle 
s'y  trouuera  sans  doute  empeschée,  I,  GOl. 

le  trouue  par  expérience,  qu'il  y  a  bien  à  dire  entre  les  boutées  et  saillies  de 
l'ame,  ou  vne  résolue  et  constante  habitude  :  il  n'est  rien  que  nous  ne  puissions, 
iusques  à  pouuoir  ioindre  à  l'imbécillité  de  l'homme,  vne  resolution  et  asseu- 
ranco  do  Dieu  :  mais  c'est  par  secousse,  II,  590. 

A  combien  de  vanité  nous  pousse  cette  bonne  opinion,  que  nous  auons  de  nous? 
la  plus  réglée  ame  du  monde,  et  la  plus  parfaicte,  n'a  que  trop  affaire  à  se  tenir 
en  pieds,  et  à  se  garder  de  s'emporter  par  terre  de  sa  foiblesse.  De  mille  il  n'en 
est  lias  vne  qui  soit  droite  et  rassise  vn  instant  de  sa  vie  :  et  se  pourroit  mettre 
en  doubte,  si  selon  sa  naturelle  condition  elle  y  peut  iamais  estre,  I,  021. 

Comme  le  corps  est  plus  ferme  à  la  charge  en  le  roidissant  :  ainsin  est  l'ame, 
I,  l.'jti. 

D'autant  que  l'ame  est  plus  vuide,  et  sans  contrepoids,  elle  se  baisse  plus  faci- 
lement souz  la  charge  de  la  première  persuasion,  I,  288. 

11  semble  que  l'ame  csbranlee  et  esmeuë  se  perde  en  soy-mesme,  si  on  ne  lu.y 
donne  prinse  :  et  faut  tousiours  luy  fournir  d'obiect  où  elle  s'abutte  et  agisse;  et 
voyons  qu'en  ses  passions  elle  se  pipe  plustost  elle  mcsme,  se  dressant  vn  faux 
subiect  et  fantastique,  voire  contre  sa  propre  créance,  que  de  n'agir  contre  quel- 
que chose,  I,  40. 

L'ame  qui  n'a  point  de  but  estably,  elle  se  perd  :  Car  comme  on  dit,  c'est  n'es- 
tre  en  aucun  lieu,  que  d'estre  par  tout,  I,  58. 

Le  prix  de  l'ame  ne  consiste  pas  à  aller  haut,  mais  ordonnément.  Sa  grandeur 
ne  s'exerce  pas  en  la  grandeur  :  c'est  en  la  médiocrité,  III,  1 18. 

La  grandeur  de  l'ame  n'est  pas  tant,  tirer  à  mont,  et  tirer  auant,  comme  sça- 
uoir  se  ranger  et  circonscrire.  Elle  tient  pour  grand,  tout  ce  qui  est  assez.  Et 
montre  sa  hauteur,  à  aimer  mieux  les  choses  moyennes,  queleseminentes,  III,  092. 

Le  relaschement  et  facilité  honore  ce  semble  à  merueilles,  et  sied  mieux  à  vne 
ame  forte  et  généreuse.  Epaminondas  n'estimoit  pas  que  de  se  mesler  à  la  dance 
des  garçons  de  sa  ville,  de  chanter,  de  sonner,  et  s'y  embesongner  auec  attention, 
fust  chose  qui  derogeast  à  l'honneur  de  ses  glorieuses  victoires,  et  à  la  parfaicte 
reformation  des  mœurs  qui  estoit  en  luy,  III,  690. 

Nostre  ame  s'eslargit  d'autant  plus  qu'elle  se  remplit,  I,  204. 

Aucune  ame  excellente,  n'est  exempte  de  meslange  de  folie,  I,  628. 

Les  âmes  à  mesure  qu'elles  sont  moins  fortes,  elles  ont  d'autant  moins  de  moyen 
de  faire  ny  fort  bien,  ny  fort  mal,  I,  550. 

Tout  mouuement  nous  descouure.  Cette  mesme  ame  de  Caesar,  qui  se  fait  voir 
à  ordonner  et  dresser  la  bataille  de  Pharsale,  elle  se  fait  aussi  voir  à  dresser  des 
parties  oysiues  et  amoureuses,  I,  552. 

Les  boiteux  sont  mal  propres  aux  exercices  du  corps,  et  aux  exercices  de  l'es- 
prit les  anies  boiteuses,  I,  218. 

Nous  ne  sommes  iamais  chez  nous,  nous  sommes  tousiours  au  delà.  La  crainte, 
le  désir,  l'espérance,  nous  eslancent  vers  l'aduenir  :  et  nous  desrobent  le  senti- 
ment et  la  considération  de  ce  qui  est,  pour  nous  amuser  à  ce  qui  sera,  voire 
quand  nous  ne  serons  plus,  I,  28. 


AMITIÉ. 

Il  n'est  rien  à  quoy  il  semble  que  nature  nous  aye  plus"  acheminés  qu'à  la  so- 
ciété; dont  le  dernier  point  de  perfection  est  l'amitié,  I,  298. 
L'amitié  est  iouye  à  mesure  qu'elle  est  désirée,  ne  s'esleue,  se  nourrit,  ny  ne 


E.daS  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

pronfl  acci'oissance  qu'en  la  iouyssanco,  comme  estant  spirituelle,  et  l'ame  s'affi- 
nant  par  l'vsage,  I,  302. 

Nostre  liberté  volontaire  n'a  point  de  production  qui  soit  plus  proprement 
sienne,  que  celle  de  l'afTection  ot  l'amitié,  I,  300. 

Oh!  vn  amy!  Combien  est  vraye  cette  ancienne  sentence,  que  l'vsage  en  est 
plus  nécessaire,  et  plus  doux,  que  des  éléments  de  l'eau  et  du  feu!  III,  444. 

Heureux,  qui  a  peu  rencontrer  seulement  l'ombre  d'vn  amy!  I,  316. 

En  la  vraye  amitié,  de  laquelle  ie  suis  expert,  ie  me  donne  à  mon  amy,  plus 
que  ie  ne  le  tire  à  moy.  le  n'ayme  pas  seulement  mieux,  luy  faire  bien,  que  s'il 
m'en  faisoit  :  mais  encore  qu'il  s'en  face,  qu'à  moy  :  il  m'en  faict  lors  le  plus, 
quand  il  s'en  faict.  Et  si  l'absence  luy  est  ou  plai.sante  ou  vtile,  elle  m'est  bien 
plus  douce  que  sa  présence  ;  et  ce  n'est  pas  proprement  absence,  quand  il  y  a 
moyen  de  s'entr'aduertir,  III,  430. 

L'vnique  et  principale  amitié  descoust  toutes  autres  obligations.  Le  secret  que 
i'ay  iuré  ne  deceller  à  vn  autre,  ie  le  puis  sans  pariure,  communiquer  à  celuy, 
qui  n'est  pas  autre,  c'est  moy,  I,  312. 

Ce  que  nous  appelions  ordinairement  amis  et  amitiez,  ce  ne  sont  qu'accoinc- 
tances  et  familiaritez  nouées  par  quelque  occasion  ou  commodité,  par  le  moyen 
de  laquelle  nos  âmes  s'entretiennent.  En  l'amitié  dequoy  ie  parle,  si  on  me  presse 
de  dire  pourquoy  ie  l'aymoys,  ie  sens  que  cela  ne  se  peut  expi'imer,  qu'en  respon- 
dant  :  Par  ce  que  c'estoit  luy,  par  ce  que  c'cstoit  moy,  I,  306. 

Les  amitiez  communes  on  les  peut  départir,  on  peut  aymer  en  cestuy-ci  la 
beauté,  en  cet  autre  la  facilité  de  ses  mœurs,  en  l'autre  la  libéralité,  en  celuj'4à 
la  paternité,  en  cet  autre  la  fraternité,  ainsi  du  reste  :  mais  l'anùtié  parfaite  est 
indiuisible  :  chacun  se  donne  si  entier  à  son  amy,  qu'il  ne  luy  reste  rien  à  dé- 
partir ailleurs,  I,  312. 

Si  en  cette  amitié  dequoy  ie  parle,  l'vn  pouuoit  donner  à  l'autre,  ce  seroit  ce- 
luy qui  receuroit  le  bien-fait,  qui  obligeroit  son  compagnon,  I,  312. 

Depuis  le  iour  que  ie  perdy  mon  amy,  faict  et  accoustumé  à  estre  deuxiesme 
par  tout,  il  me  semble  n'cstre  plus  qu'à  demy,  I,  316. 

La  mémoire  de  noz  amis  perdus  nous  aggrée  comme  l'amer  au  vin  trop  vieil, 
II,  538. 

Des  enfans  aux  pères,  c'est  plustost  respect.  L'amitié  se  nourrit  de  communica- 
tion, qui  ne  peut  se  trouuer  entre  eux,  pour  la  trop  grande  disparité,  et  offence- 
roit  à  l'aduenture  les  deuoirs  de  nature,  I,  298. 

De  comparer  à  l'amitié  l'affection  enuers  les  femmes,  quoy  qu'elle  naisse  de 
nostre  choix,  on  ne  peut.  Son  feu,  ie  le  confesse,  est  plus  actif,  plus  cuisant,  et 
plus  aspi'e.  Mais  c'est  vn  feu  téméraire  et  volage,  ondoyant  et  diuers,  feu  de  fieb- 
ure,  subiect  à  accez  et  remises,  et  qui  ne  nous  tient  qu'a  vn  coings  I,  300. 

En  ces  autres  amitiez  communes,  il  faut  marcher  la  bride  à  la  main,  auec 
prudence  et  précaution.  Aymez  le,  disoit  Chilon,  comme  ayant  quelque  iour  à  le 
haïr:  haïssez  le,  comme  ayant  à  l'aymer.  Ce  précepte  si  abominable  en  la  souue- 
raine  et  maistresse  amitié,  est  salubre  en  l'vsage  des  amitiez  ordinaires  et  cous- 
tumieres  :  à  l'endi'oit  desquelles  il  faut  employer  le  mot  d'Aristote,  0  mes  amys, 
il  n'y  a  nul  amy,  I,  310. 

le  tésmoigne  volonti(frs  de  mes  amis,  par  ce  que  l'y  trouue  de  loiiable.  Et  d'vn 
pied  de  valeur,  l'en  fay  volontiers  vn  pied  et  demy.  Mais  de  leur  prester  les  qua- 
litez  qui  n'y  sont  pas,  ie  ne  puis  :  ny  les  défendre  ouuertement  des  imperfections 
qu'ils  ont,  II,  514. 


AMOUR. 

L'amour  est  vue  passion  qui  mesle  à  bien  peu  d'essence  solide,  beaucoup  plus  de 
vanité  et  resuerie  fieureuse,  III,  256. 

Tout  le  mouuement  du  monde  se  resoult  et  rend  à  cet  accouplage  :  c'est  vue 
matière  infuse  par  tou't:  c'est  vn  centre  où  toutes  choses  regardent,  III,  210. 

Que  celuy  ayme  pou,  qui  ayme  à  la  mesui-e,  I,  3.30. 

Vn  galant  homme  n'abandonne  point  sa  poursuite,  pour  estre  refusé,  pourueu 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        AMO.  E.159 

que  ce  soit  vn  refus  de  chastetc",  non  de  choix.  Nous  auons  beau  iurer  et  menas- 
ser,  et  nous  plaindre  :  nous  mentons,  nous  les  en  a)  nions  mieux.  Il  n'est  point 
de  pareil  leurre,  que  la  sagesse,  non  rude,  et  renfrongnee,  III,  218. 

A  quoy  sert  l'art  de  celte  honte  virginalle?  cette  froideur  rassise,  cette  conte- 
nance seuere,  cette  profession  d'ignorance  des  choses,  que  les  femmes  sçauent 
mieux,  que  nous  qui  les  en  instruisons,  qu'à  nous  accroistre  le  désir  do  vaincre, 
gourmander,  et  soûler  à  nostre  appétit,  toute  cette  cérémonie,  et  ces  obstacles?  La 
beauté,  toute  puissante  qu'elle  est,  n'a  pas  dequoy  se  faire  sauourer  sans  cette 
entremise,  II,  43G. 

L'amour  est  vn  commerce  qui  a  besoin  de  relation  et  de  correspondance.  Les  au- 
tres plaisirs  que  nous  receuons,  se  peuuent  recognoistre  par  recompenses  de  nature 
diuei"se  :  mais  cettuj -cy  ne  se  paj'e  que  de  mesme  espèce  de  monnoye,  III,  282. 

L'amour  ne  me  semble  proprement  et  naturellement  en  sa  saison,  qu'en  l'aage 
voisin  de  l'enfance,  III,  282.  ,     , 

C'est  vne  agitation  esueillee,  viuo,  et  gaye.  Elle  n'est  nuisible  qu'aux  fols,  III, 
27G. 

Vieux,  nous  demandons  plus,  lors  que  nous  apportons  moins.  Nous  voulons  le 
plus  choisii-,  lors  que  nous  méritons  le  moins  d'estre  acceptez,  III,  280. 

Qui  no  sçait  en  son  eschole,  combien  on  procède  au  rebours  de  tout  ordre. 
L'ostude,  l'exercitation,  l'vsage,  sont  voyes  à  l'insuffisance  ;  les  nouices  y  régen- 
tent. Sa  conduicte  a  plus  de  galbe  quand  elle  est  meslee  d'inaduortance,  et  de 
trouble  :  les  fautes,  les  succez  contraires  y  donnent  polncte  et  grâce.  Pourueu 
qu'elle  soit  aspre  et  affamée,  il  chaut  peu,  qu'elle  soit  prudente.  Voyez  comme.il 
va  chancelant,  chopant,  et  folasti-ant.  On  le  met  aux  ceiis,  quand  on  le  guide  par 
art,  et  sagesse.  Et  contraint  on  sadiuine  liberté,  quand  on  le  submet  à  des  mains 
barbues  et  calleuses,  III,  284. 

L'amour  est  vn  désir  forcené  après  ce  qui  nous  fuit.  La  iouïssance  le'pcrd, 
comme  ayant  fin  corporelle  et  suiette  à  sacieté,  I,  302. 

L'amour  n'est  autre  chose,  que  la  soif  de  celte  iouyssance  en  vn  subiect  désiré: 
plaisir  que  nature  nous  donne  et  qui  deuient  vicieux  ou  par  immoderation,  ou~ 
par  indiscrétion,  III,  238. 

Le  désir  et  la  iouyssance  nous  mettent  pareillement  en  peine.  La  rigueur  des 
maistresses  est  ennuyeuse,  mais  l'aisance  et  la  facilité  l'est  encores  plus,  la  satiété 
engendre  le  dégoust,  II,  ^4. 

0  lo  furieux  aduantago  que  l'opportunité!  Qui  me  demandcroit  la  première 
partie  en  l'amour,  ic  respondrois,  que  c'est  sçauoir  prendre  le  temps  :  la  seconde 
de  mesme  :  et  encore  la  tierce.  C'est  vn  poinct  qui  peut  tout,  III,  226. 

En  amour,  qui  principallement  se  rapporte  à  la  veuë  et  à  l'atouchement,  on 
faict  quelque  chose  sans  les  grâces  de  l'esprit,  rien  sans  les  grâces  cor|)orellcs  :  si 
l'vne  ou  l'autre  des  deux  beautez  deuoit  nécessairement  y  faillir,  l'eusse  choisi  de 
quitter  plu.stost  la  spirituelle.  Elle  a  son  vsagn  en  meilleures  choses,  III,  152. 

Sans  espérance,  et  sans  désir,  nous  n'allons  plus  rien  qui  vaille.  Nostre  maistrise 
et  entière  possession,  est  infinieiuentà  craindre  pour  la  femme.  Depuis  qu'elle  est 
du  tout  rendue  à  la  mercy  de  nostre  foy,  et  constance,  elle  est  vn  peu  bien  hasar- 
dée :  soudain  qu'elle  est  à  nous,  nous  ne  sommes  plus  à  elle,  III,  256. 

D'où  peut  venir  cette  vsurpalion  d'authorité  souueraine,  que  vous  prenez  sur 
celles,  qui  vous  fauorisent  à  leurs  despens,  que  vous  en  inuestissez  incontinent 
l'interest,  la  froideur,  et  vne  auctorité  maritale?  C'est  vne  conuention  libre;  que 
ne  vous  y  prenez  vous,  comme  vous  les  y  voulez  tenir  ?  Il  n'y  a  point  de  pi-escription 
sur  les  choses  volontaires,  III,  272. 

En  Italie,  ils  font  les  poursuyuans  et  les  transis,  de  celles  mesmes  qui  sont  à 
vendre  :  et  se  défendent  ainsi  :  Qu'il  y  a  des  degrez  en  la  iouj'ssanco  :  ot  que  par 
seruices  ils  veulent  obtenir  pour  eux,  celle  qui  est  la  plus  entière.  Elles  ne  vendent 
que  le  corps.  La  volonté  ne  peut  estre  mise  en  vente,  elle  est  ti'op  libre  et  trop 
sienne.  Ainsi  ceux  cy  disent,  que  c'est  la  volonté  qu'ils  entreprennent,  et  ont  rai- 
son. C'est  la  volonté  qu'il  faut  seruir  et  practiquer,  III,  258. 

On  ayme  vn  corps  sans  ame,  quand  on  ayme  vn  corps  sans  son  consentement, 
et  sans  son  désir.  Toutes  iouyssances  ne  sont  pas  vues.  Il  y  a  des  iouyssancos  éthi- 
ques et  languissantes.  Mille  autres  causes  que  la  bien-vueillance,  nous  peuuent 


E.160  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

acquérir  cet  octroj'  des  dames.  Ce  n'est  suffisant  tesmoignage  d'affection.  Il  y  peut 
eschoir  de  la  trahison,  comme  ailleurs,  III,  '260. 

AMPLEUR  DE  VUE. 

A  voir  nos  guerres  ciuiles,  qui  no  crie  que  cette  machine  se  bouleuerse,  et  que 
le  ionrdu  iugement  nous  prent  au  collet:  sans  s'auiser  que  plusieurs  pires  choses 
se  sont  veuës,  et  que  les  dix  mille  parts  du  monde  ne  laissent  pas  de  galler  le  bon 
temps  cependant,  I,  25(). 

Quant  les  vignes  gèlent  en  mon  village,  mon  prebstre  en  argumente  l'ire  de  Dieu 
sur  la  race  humaine,  et  iuge  que  la  pépie  en  tienne  des-ia  les  Cannibales,  I,  250. 

ANIMAUX. 

Tout  ce  qui  nous  semble  estrange,  nous  le  condamnons,  et  ce  que  nous  niMiten- 
dons  pas.  Il  nous  adulent  ainsin  au  iugement  que  nous  faisons  des  bestes,  II,  lOfi. 

Nous  ne  sommes  ny  au  dessus,  ny  au  dessous  :  tout  ce  qui  est  sous  le  ciel,  dit  If 
sage,  court  vue  loy  et  fortune  pareille.  II  y  a  quelque  différence,  il  y  a  des  ordres 
et  des  degrez  :  mais  c'est  soubs  le  visage  d'vne  mesme  nature.  II,  1,7J. 

Pourquoy  les  priuons  nous  et  d'ame,  et  de  vie,  et  de  discours?  y  auons  nous  re- 
cognu  quelque  stupidité  immobile  et  insensible,  nous  qui  n'auons  aucun  com- 
merce auec  eux  que  d'obéissance?  Dirons  nous,  que  nous  n'auons  veu  en  nulle 
autre  créature,  qu'en  l'homme,  l'vsage  d'vne  ame  i-aisonnable?  Et  quoy?  Auons 
nous  veu  quelque  chose  semblable  au  soleil?  Laisse-il  d'esti-e,  par  ce  que  nous 
n'auons  rien  veu  de  semblable?  et  ses  mouuements  d'estre,  par  ce  qu'il  n'en  est 
point  de  pareils?  Si  ce  que  nous  n'auons  pas  veu,  n'est  pas,  nostre  science  est 
meruêilleusement  raccourcie,  II,  136. 

Quant  ie  rencontre  parmy  les  opinions  plus  modérées,  les  discours  qui  essayent 
à  montrer  la  prochaine  ressemblance  de  nous  aux  animaux:  et  combien  ils  ont 
de  part  à  nos  plus  grands  priuileges  ;  et  auec  combien  de  vray-semblance  on  nous 
les  apparie;  certes  l'en  l'abats  beaucoup  de  nostre  présomption,  et  me  démets  vo- 
lontiers de  cette  royauté  imaginaire,  qu'on  nous  donne  sur  les  autres  créatures. 
Quand  tout  cela  en  seroit  à  dire,  si  y  a  il  vn  certain  respect,  qui  nous  attache,  et 
vn  gênerai  deuoir  d'humanité,  non  aux  bestes  seulement,  qui  ont  vie  et  sentiment, 
mais  aux  arbres  mesmes  et  aux  plantes.  Nous  deuons  la  iustice  aux  hommes,  et 
la  grâce  et  la  bénignité  aux  autres  créatures,  qui  en  peuuent  estre  capables.  Il  y 
a  quelque  commerce  entre  elles  et  nous,  et  quelque  obligation  mutuelle,  II,  108. 

Nature  leur  a  empreint  le  soing  d'elles  et  de  leur  conseruation.  Elles  vont 
iusques-là,  de  craindre  leur  empirement  :  de  se  heurter  et  blesser  :  que  nous  les  en- 
cheuestrions  et  battions,  accidents  subiects  à  leur  sens  et  expérience.  IMais  que 
nous  les  tuions,  elles  ne  le  peuuent  craindre,  ny  n'ont  la  faculté  d'imaginer  et 
conclure  la  mort,  III,  582. 

Les  naturels  sanguinaires  à  l'endroit  des  bestes,  tesmoignent  vne  propension 
naturelle  à  la  cruauté,  II,  104. 

ART  MILITAIRE. 

La  guerre  est  la  plus  grande  et  pompeuse  des  actions  humaines,  et  tesmoignage 
de  nostre  imbécillité  et  imperfection,  II,  176. 

le  tiens  que  c'est  aux  Roys  proprement,  de  s'animer  contre  les  Roys,  III,  84. 

Le  tromper  peut  seruir  à  la  guerre  pour  le  coup  :  mais  celuy  seul  se  tient  pour 
surmonté,  qui  sçait  l'auoir  esté  ny  par  ruse,  ny  de  sort,  mais  par  vaillance  de 
troupe  à  troupe,  en  vne  franche  et  iuste  guerre,  I,  46. 

Les  victoires,  qui  se  gaignent  sans  le  maistre,  ne  sont  pas  complètes.  Ce  niaistic 
devroit  rougir  de  honte,  d'y  prétendre  part  pour  son  nom,  n'y  ayant  embesongné 
que  sa  voix  et  sa  pensée.  Ny  cela  mesme,  veu  qu'en  telle  besongne  les  aduis  et  com- 
mandemens,  qui  apportent  l'honneur,  sont  ceux-là  seulement,  qui  se  donnent  sur 
le  champ,  et  au  propre  de  l'affaire.  Nul  pilote  n'exerce  son  office  de  jued  fei-me, 
II.  544. 


I/ESPUIT  DES  ESSAIS.        ART.  E.i61 

Au  mestior  de  la  guerre,  les  apprentis  se  iettent  bien  souuent  aux  hazards, 
d'autre  inconsideration  qu'ils  ne  font  après  y  auoir  esté  escliauldez,  II,  ÏM. 

Arrester  son  armée  pied  coj-  attendant  l'ennemy  :  autant  cela  aflbiljlit  la  vio- 
lence, que  le  courir  donne  aux  premiers  coups  :  et  quant  et  quant  oste  l'eslance- 
ment  des  combattans  les  vus  contre  les  autres,  qui  a  accoustumé  de  les  remplir 
d'impétuosité,  et  de  fureur,  plus  qu'autre  chose,  quand  ils  viennent  à  s'entrechoc- 
quer  de  roideur,  leur  augmentant  le  courage  par  le  cry  et  la  course  ;  et  rend  la 
chaleur  des  soldats  en  manière  de  dire  refroidie  et  figée.  —  Mais  on  peut  aussi  bien 
dire  qu'au  contraire  la  plus  forte  et  roide  assiette,  est  celle  en  laquelle  on  se  tient 
planté  sans  bouger,  et  que  qui  est  en  sa  marche  arresté,  resserrant  et  espargnant 
pour  le  besoing,  sa  force  en  soj'-mesmes,  a  grand  aduantage  contre  celuy  qui  est 
esbranlé,  et  qui  a  desia  consommé  à  la  course  la  moitié  de  son  haleine?  outre  ce 
que  l'armée  estant  vn  corps  de  tant  de  diuerses  pièces,  il  est  impossible  qu'elle 
s'esmeuue  en  cette  furie,  d'vn  mouuement  si  iuste,  qu'elle  n'en  altère  ou  rompe 
son  ordonnance  :  et  que  le  plus  dispost  ne  soit  aux  prises,  auant  que  son  com- 
pagnon le  secoure.  —  Cloarchus  commandant  les  Grecs,  les  menoit  tout  bellement  à 
la  chargo,  sans  se  haster  :  mais  <à  cinquante  pas  près,  il  les  mettoit  à  la  course  :  es- 
pérant par  la  brieueté  de  l'espace,  mesnager  et  leur  ordre,  et  leur  haleine  :  leur 
donnant  cependant  l'auantage  de  l'impétuosité,  pour  leurs  personnes,  et  pour 
leurs  armes  à  trait.  D'autres  ont  réglé  ce  double  en  leur  armée  de  cette  manière  : 
Si  les  ennemis  vous  courent  sus,  attendez  les  de  pied  coy  :  s'ils  vous  attendent  de 
pied  coy,  courez  leur  sus,  I,  524. 

Attendre  l'ennemi  en  ses  terres  c'est  auantage,  de  conseruer  sa  maison  pure  et 
nette  des  troubles  de  la  guerre,  afin  qu'entière  en  ses  forces,  elle  puisse  conti- 
nuellement fournir  deniers,  et  secours  au  besoing  :  la  nécessité  des  guerres  porte 
à  tous  les  coups,  de  faire  le  gast,  ce  qui  ne  se  peut  faire  bonnement  en  nos  biens 
propres,  et  si  le  païsant  ne  porte  pas  si  doucement  ce  rauage  de  ceux  de  son 
party,  que  de  l'ennemy,  il  s'en  peut  ajsément  allumer  des  séditions,  et  des  trou- 
bles :  la  licence  de  desrober  et  piller,  qui  ne  peut  estre  permise  en  son  pais,  est 
vn  grand  support  aux  ennuis  de  la  guerre  :  et  qui  n'a  autre  espei-ance  de  gain 
que  sa  solde,  il  est  mal  aisé  qu'il  soit  tenu  en  office,  estant  à  deux  pas  de  sa 
femme  et  sa  retraicte  :  celuy  qui  met  la  nappe,  tombe  tousioursdes  despens;  il  y 
a  plus  d'allégresse  à  assaillir  qu'à  deffendre  :  la  secousse  de  la  perte  d'vne  bat- 
taille  dans  nos  entrailles,  est  si  violente,  qu'il  est  malaisé  qu'elle  ne  croulle  tout  le 
corps,  attendu  qu'il  n'est  passion  contagieuse,  comme  celle  de  la  peur,  ny  qui  se 
prenne  si  aisément  à  crédit,  et  qui  s'espande  plus  brusquement  :  et  les  villes  qui 
ont  ouy  l'esclat  de  cette  tempeste  à  leurs  portes,  qui  ont  recueilly  leurs  Capitaines 
et  soldats  tremblans  encore,  et  hors  d'haleine,  il  est  dangereux  sur  la  chaude, 
qu'ils  ne  se  iettent  à  quelque  mauuais  party.  —  De  voir  venir  l'ennemy,  on  peut 
imaginer  au  contraire,  qu'estant  chez  soy  et  entre  ses  amis,  on  ne  peut  faillir  d'auoir  " 
planté  de  toutes  commoditez;  les  riuieres,  les  passages  à  vostre  deuotion,  vous  con- 
duiront et  viures  et  deniers,  en  toute  seureté  et  sans  besoing  d'escorte  :  on  aura 
ses  populations  d'autant  plus  afïectionnez,  qu'elles  auront  le  danger  plus  près  : 
qu'ayant  tant  de  villes  et  de  barrières  pour  sa  seureté,  c'est  à  soy  de  donner  loy 
au  combat,  selon  son  opportunité  et  aduantage  :  et  s'il  plaisoit  de  temporiser,  à 
l'abry  et  à  son  aise,  on  pourra  voir  morfondre  son  ennemy,  et  se  deffaire  soy 
mesme,  par  les  difficultez  qui  le  combattroyent  engagé  en  vnc  terre  contraire, 
où  il  n'auroit  deuant  ny  derrière  luy,  ny  à  costé,  rien  qui  ne  luy  fist  guerre  : 
nul  moyen  de  rafraîchir  ou  d'cslargir  son  armée,  si  les  maladies  s'y  mettoient, 
ny  de  loger  à  couuert  ses  blessez;  nuls  deniers,  nuls  viures,  qu'à  pointe  de  lance; 
nul  loisir  de  se  reposer  et  prendre  haleine;  nulle  science  de  lieux,  nj'  de  pays, 
qui  le  .sceust  deffendi-e  d'embusches  et  surprises  :  et  s'il  venoit  à  la  perte  d'vne 
bataille,  aucun  moyen  d'en  sauuer  les  reliques.  —  Et  il  n'j-  a  pas  faute  d'exemples 
pour  l'vn  et  pour  l'autre  party,  I,  526. 

Qui  est  ouuert  d'vn  costé, l'est  partout.  Nez  pères  ne  pensèrent  pas  à  bastir  des 
places  frontières,  II,  438. 

Ce  n'est  pas  bien  procédé,  de  recognoistre  seulement  le  flanc  et  le  fossé  :  pour 
iuger  de  la  seureté  d'vne  place,  il  faut  voir,  par  où  on  y  peut  venir,  en  quel  estât 
est  l'assaillant,  III,  404. 

ESSAIS   DE   MONTAIGNE.  —  T.   IV.  Il 


E.162  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Celuy  qui  commande  à  tout  vn  pays  ne  se  doit  iamais  engager  qu'au  cas  de 
cette  extrémité,  qu'il  y  allast  de  sa  dernière  place,  et  qu'il  n'y  eust  rien  plus  à 
espérer  qu'en  la  deiTence  d'icelle.  Autrement  il  se  doit  tenir  libre,  pour  auoir 
moyen  de  prouuoir  en  général  à  toutes  les  parties  de  son  gouuernement,  II,  656. 

A  le  bien  prendre,  il  est  vray-semblable,  que  le  corps  d'vne  armée  doit  auoir 
vne  grandeur  modérée,  et  réglée  à  certaines  bornes,  soit  pour  la  difficulté  de  la 
nourrir,  soit  pour  la  difficulté  de  conduire  et  tenir  en  ordre.  Aumoins  est  il  bien 
aisé  à  vérifier  par  exemple,  que  les  armées  monstrueuses  en  nombre,  n'ont 
guère  rien  fait  qui  vaille.  Ce  n'est  pas  le  nombre  des  hommes,  ains  le  nombre  des 
bons  hommes,  qui  faict  l'aduantage  :  le  demeurant  seruant  plus  de  destourbier 
que  de  secours,  II,  652. 

Ceux  qui  assaillent,  doiuent  penser  à  entreprendre,  non  pas  à  craindre,  II,  56. 

Le  vray  veincre  a  pour  son  l'oolle  l'estour,  non  pas  le  salut,  I,  372. 

Trouuer  les  ennemis  par  effect  plus  foibles  qu'on  n'auoit  espéré  n'est  pas  de 
tel  interost  :  que  de  les  trouuer  à  la  vérité  hien  forts,  après  les  auoir  iugez  foi- 
bles par  réputation,  II,  648. 

Quintus  Fabius  Maximus  RutiHanus,  contre  les  Samnites,  voyant  que  ses  gents 
de  cheual  à  trois  ou  quatre  charges  auoient  failly  d'enfoncer  le  bataillon  des  en- 
nemis, print  ce  conseil  :  qu'ils  débridassent  leurs  cheuaux,  et  brochassent  a  toute 
force  des  espérons  :  si  que  rien  ne  les  pouuant  arrester,  au  trauers  des  armes  et 
des  hommes  renuersez,  ils  ouurirent  le  pas  à  leurs  gens  de  pied,  qui  parfirent 
vne  tres-sanglante  deffaite,  I,  540. 

Il  y  a  plusieurs  exemples  en  l'histoire  Romaine,  des  Capitaines  qui  comman- 
doient  à  leurs  gens  de  cheual  de  mettre  pied  à  terre,  quand  ils  se  trouuoient 
pressez  de  l'occasion,  pour  oster  aux  soldats  toute  espérance  de  suite,  et  pour 
l'aduantage  qu'ils  esperoient  en  cette  sorte  de  combat,  I,  532. 

Se  reietter  au  danger  après  la  victoire,  c'est  la  remetti'e  encore  vn  coup  à  la 
mercy  de  la  fortune  :  l'vne  des  plus  grandes  sagesses  en  l'art  militaire,  c'est  de 
ne  pous.ser  son  ennemy  au  desespoir,  I,  518. 

11  fait  dangereux  assaillir  vn  homme,  à  qui  vous  auez  osté  tout  autre  moyen 
d'eschapper  que  par  les  armes  :  car  c'est  vne  violente  maistresse  d'escole  que  la 
nécessité,  I,  520. 

D'autre  part,  quell'  espérance  peut-on  auoir  qu'il  ose  vn'  autre  fois  attaquer 
ses  ennemis  ralliez  et  remis,  et  de  nouueau  armez  de  despit  et  de  vengeance,  qui 
ne  les  a  osé  ou  sceu  poursuiure  tous  rompus  et  effrayez?  I,  518. 

Tant  que  l'ennemy  est  en  pieds,  c'est  à  recommencer  de  plus  belle  :  ce  n'est 
pas  victoire,  si  elle  ne  met  fin  à  la  guerre,  I,  518. 

La  vaillance  a  ses  limites,  comme  les  autres  vertus  :  lesquels  franchis,  on  se 
trouue  dans  le  train  du  vice  :  en  manière  que  par  chez  elle  se  peut  rendre  à  la 
témérité,  obstination  et  folie,  qui  n'en  sçait  bien  les  bornes,  malaisez  en  vérité  à 
choisir  sur  leurs  confins,  I,  86. 

Nous  qui  tenons  celuy  auoir  l'honneur  de  la  guerre,  qui  en  a  le  profit,  et  disons 
que.  Où  la  peau  du  Lyon  ne  peut  suffire,  il  y  faut  coudre  vn  lopin  de  celle  du 
Regnard,  les  plus  ordinaires  occasions  de  surprise  se  tirent  de  cette  praticque  : 
et  n'est  heure,  où  vn  chef  doiue  auoir  plus  l'œil  au  guet,  que  celle  des  parlemens 
et  traités  d'accord.  Et  pour  cette  cause,  c'est  vne  règle.  Qu'il  ne  faut  iamais  que 
le  Gouuerneur  en  vne  place  assiégée  sorte  luy  mesmes  pour  parlementer,  I,  46. 

A  la  guerre,  on  ne  se  doit  attendre  fiance  des  vns  aux  autres,  que  le  dernier 
seau  d'obligation  n'y  soit  passé  :  encores  y  a  il  lors  assés  affaire.  Et  a  tousiours 
esté  conseil  hazardeux,  de  fier  à  la  licence  d'vne  armée  victorieuse  l'obseruation 
de  la  foy,  qu'on  a  donnée  à  vne  ville,  qui  vient  de  se  rendre  par  douce  et  fauo- 
rable  composition,  et  d'en  laisser  sur  la  chaude,  l'entrée  libre  aux  soldats,  I,  50. 

ART  MILITAIRE  (quelques  façons  de  procéder  de  César). 

Caîsar  disoit  qu'il  falloit  exécuter,  non  pas  consulter  les  hautes  entreprises, 
II,  654. 
11  auoit  accoustumé  de  dire,  qu'il  aimoit  mieux  la  victoire  qui  se  conduisoit 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         AUT.  E.I63 

par  conseil  que  par  force  :  Et  en  la  guerre  contre  Petreius  et  Afranius,  la  For- 
lune  luy  présentant  vne  bien  apparente  occasion  d'aduantage  ;  il  la  refusa,  es- 
pérant auec  vn  peu  plus  de  longueur,  mais  moins  de  liazard,  venir  à  bout  de  ses 
ennemis,  II,  652. 

11  estoit  excellent  mesnager  du  temps  :  car  il  redit  maintes-fois,  que  c'est  la 
plus  souueraine  partie  d'vn  capitaine,  que  la  science  de  prendre  au  poinct  les 
occasions,  et  la  diligence,  qui  est  en  ses  exploicts,  à  la  vérité,  inouye  et  incroya- 
ble. II,  GW. 

Il  accoustumoit  sur  tout  ses  soldats  à  obeyr  simplement,  sans  se  mesler  de  con- 
treroUer,  ou  parler  des  desseins  de  leur  Capitaine;  lesquels  il  ne  leur  comuiuni- 
quoit  que  sur  le  poinct  de  l'exécution,  II,  G 18. 

C'estoit  sa  coustume,  de  se  tenir  nuict  et  iour  près  des  ouuriers,  qu'il  auoit  en 
besoigne,  II,  652. 

En  toutes  entreprises  de  conséquence,  il  faisoit  tousiours  la  descouuerte  luy- 
mesme,  et  ne  passa  iamais  son  armée  en  lieu,  qu'il  n'eust  premièrement  recognu, 
II,  652. 

Il  faisoit  grand  cas  de  ses  exhortations  aux  soldats  auant  le  combat,  II,  G50. 

Où  les  occasions  de  la  nécessité  se  presentoyent,  et  où  la  chose  le  requeroit,  il 
ne  fut  iamais  homme  faisant  meilleur  marché  de  sa  personne,  II,  654. 

Il  auoit  cette  opinion,  que  la  science  de  nager  estoit  tres-vtile  à  la  guerre,  et 
en  tira  plusieurs  commoditez  :  s'il  auoit  à  faire  diligence,  il  franchissoit  ordi- 
nairement à  nage  les  riuieres  qu'il  rencontroit,  II,  658. 

11  tenoit  la  bride  plus  estroite  a  ses  soldats,  et  les  tenoit  plus  de  court  estants 
près  des  ennemis,  II,  658. 

11  ne  requeroit  en  ses  soldats  autre  vertu  que  la  vaillance,  ny  ne  punissoit 
guère  autres  vices,  que  la  mutination,  et  la  desobeyssance,  II,  6^18. 

A  cette  courtoisie,  il  mesloit  toutefois  vne  grande  seuerité,  à  les  reprimer.  11 
les  rappaisoit  plus  par  authorité  et  par  audace,  que  par  douceur,  II,  650. 

AUTEURS. 

La  science,  le  stilc,  et  telles  parties,  que  nous  voyons  es  ouurages  estrangers, 
nous  touchons  bien  aysément  si  elles  surpassent  les  nostres  :  mais  les  simples 
productions  de  l'entendement,  chacun  pense  qu'il  estoit  en  luy  de  les  rencontrer 
toutes  pareilles,  et  en  apperçoit  malaisément  le  poids  et  la  difficulté,  si  ce  n'est, 
et  à  peine,  en  vne  extrême  et  incomparable  distance,  II,  510. 

Les  escriuains  indiscrets  de  nostre  siècle,  qui,  parmy  leui*s  ouurages  de  néant, 
vont  semant  des  lieux  entiers  des  anciens  autheurs,  pour  se  faire  honneur,  font 
le  contraire.  Car  cett'  infinie  dissemblance  de  lustres  rend  vn  visage  si  pasle,  si 
terni,  et  si  laid  à  ce  qui  est  leur,  qu'ils  y  perdent  beaucoup  plus  qu'ils  n'y  gai- 
gnent,  I,  228. 

N'ayans  rien  en  leur  vaillant,  par  où  se  produire,  ils  cherchent  à  se  présenter 
par  vne  valeur  purement  estrangere,  I,  2^30. 

le  voudroye  que  chacun  escriuist  ce  qu'il  sçait,  et  autant  qu'il  en  sçait  :  non 
en  cela  seulement,  mais  en  tous  autres  subiects.  Car  tel  peut  auoir  quelque  par- 
ticulière science  ou  expérience  de  la  nature  d'vne  riuiore,  ou  d'vne  fontaine,  qui 
ne  sçait  au  reste,  que  ce  que  chacun  sçait  :  il  entreprendra  toutesfois,  pour  faire 
courir  ce  petit  loppin,  d'escrire  toute  la  Physique,  I,  358. 

Quiconque  met  sa  décrépitude  soubs  la  presse,  faict  folie,  s'il  espère  en  es- 
preindre  des  humeurs,  qui  ne  sentent  le  disgratié,  le  resueui-  et  l'assoupy.  Au- 
tant est  la  vieillesse  incommode  à  cette  nature  de  besongne,  qu'à  toute  autre. 
Nostre  esprit  se  constipe  et  s'espessit  en  vieillissant,  III,  586. 

AVARICE. 

L'auarice  n'a  point  de  plus  grand  destourbier  que  soy-mesme.  Plus  elle  est 
tendue  et  vigoureuse,  moins  elle  en  est  feitile.  Communément  elle  attrape  plus 
promptement  les  richesses,  masquée  d'vn  image  de  libéralité^  III,  494. 


E.1G4  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Ce  n'est  pas  la  disette,  c'est  plustost  l'abondance  qui  produict  l'auarice,  I,  IGG. 

Non  la  vieillesse  seulement,  mais  toute  imbécillité,  est  promotrice  d'auarice, 
II,  24. 

L'auarice,  folie  si  commune  aux  vieux,  est  la  plus  ridicule  de  toutes  les  hu- 
maines folies,  I,  472. 

BEAUTÉ. 

La  beauté  estvne  pièce  de  grande  recommendation  au  commerce  des  hommes. 
C'e.st  le  premier  moyen  de  conciliation  des  vns  aux  autres;  et  n'est  homme  si  bar- 
bare et  si  rechigné,  qui  ne  se  sente  aucunement  frappé  de  sa  douceur,  II,  478. 

le  ne  puis  dire  assez  souuent,  combien  ie  l'estime  qualité  puissante  et  aduan- 
tageuse.  Nous  n'en  auons  point  qui  la  surpasse  en  crédit.  Elle  tient  le  premier 
rang  au  commerce  des  hommes.  Elle  se  présente  au  douant  :  seduict  et  préoc- 
cupe nostre  iugement,  auec  grande  authorité  et  merueilleuse  impression.  le  main- 
tiendroy  volontiers  le  rang  des  biens  :  La  santé,  la  beauté,  la  richesse,  III,  588. 

11  est  vray-semblable  que  nous  ne  sçauons  guerre,  que  c'est  que  beauté  en 
nature  et  en  gênerai,  puisque  à  l'humaine  nous  donnons  tant  de  formes  diuerses, 
de  laquelle,  s'il  y  auoit  quelque  prescription  naturelle,  nous  la  recognoistrions  en 
commun,  comme  la  chaleur  du  feu.  Nous  en  fantasions  les  formes  à  nostre  ap- 
pétit, II,  192. 

La  beauté  de  la  taille,  est  la  seule  beauté  des  hommes  :  les  autres  beautez,  sont 
pour  les  femmes,  II,  482. 

C'est  leur  vray  aduantage  :  elle  est  si  leur,  que  la  nostre,  quoy  qu'elle  désire 
des  traicts  vn  peu  autres,  n'est,  en  son  point,  que  confuse  auec  la  leur,  puérile 
et  imberbe,  II,  152. 

Il  y  a  des  beautez,  non  fieres  seulement,  mais  aigres  :  il  y  en  a  d'autres  douces, 
et  encores  au  delà,  fades,  III,  590. 

Il  est  saison  à  trente  ans,  qu'elles  changent  le  titre  de  belles  en  bonnes,  III,  284. 

BIEN,  BIENS. 

Les  Dieux  nous  vendent  tous  les  biens  qu'ils  nous  donnent  :  c'est  à  dire,  ils  ne 
nous  en  donnent  aucun  pur  et  parfaict,  et  que  nous  n'achetions  au  prix  de  quel- 
que mal,  II,  538. 

Il  n'est  point  de  combat  si  violent  entre  les  philosophes,  si  aspre,  que  celuy 
qui  se  dresse  sur  la  question  du  souuerain  bien  de  l'homme  :  Les  uns  disent 
nostre  bien  estre,  loger  en  la  vertu  :  d'autres,  en  la  volupté  :  d'autres,  au  con- 
sentir à  Nature  :  qui  en  la  science  :  qui  à  n'auoir  point  de  douleur,  II,  370. 

Nostre  bien  estre,  ce  n'est  que  la  priuation  d'estre  mal.  Voyla  pourquoy  la 
secte  de  philosophie,  qui  a  le  plus  faict  valoir  la  volupté,  encore  l'a  elle  rengée 
à  la  seule  indolence.  Le  n'auoir  point  de  mai,  c'est  le  plus  auoir  de  bien,  que 
l'homme  puisse  espérer,  II,  212. 

Nostre  bien  et  nostre  mal  ne  tient  qu'à  nous,  I,  551. 

L'aisance  et  l'indigence  dcspcndcnt  de  l'opinion  d'vn  chacun,  et  non  plus  la 
richesse,  que  la  gloire,  que  la  santé,  n'ont  qu'autant  de  beauté  et  de  plaisir,  que 
leur  en  preste  celuy  qui  les  possède,  I,  474. 

Le  voir  sainement  les  biens,  tire  après  soy  le  voir  sainement  les  maux,  II,  G92. 

BON  SENS. 

On  dit  communément  que  le  plus  iuste  partage  que  Nature  nous  aye  fait  de 
grâces,  c'est  celuy  du  sens  :  car  il  n'est  aucun  qui  ne  se  contente  de  ce  qu'elle 
luy  en  a  disti-ibué,  II,  510. 

Chascun  est  bien  ou  mal,  selon  qu'il  s'en  trouue,  I,  471. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        BON.  E.163 

BOxNHEUR. 

Non  de  qui  on  le  croid,  mais  qui  le  croid  de  soy,  est  content  :  et  en  cella  seul 
la  créance  se  donne  essence  et  vérité,  I,  474. 

Maintenons  en  la  mémoire  seulement  le  bonheur  passé,  pour  en  effacer  les 
desplaisirs  que  nous  auons  soufferts,  II,  214. 

Il  ne  faut  iuger  de  nostre  heur,  qu'après  la  mort,  I,  102. 

Nul  auant  mourir  ne  peut  estre  dict  heureux.  Celuy  la  mesme,  qui  a  vescu,  et 
qui  est  mort  à  souhait,  peut  il  estre  dict  heureux,  si  sa  renommée  va  mal,  si  sa 
postérité  est  misérable?  I,  32. 

BONTÉ. 
Toute  autre  science,  est  dommageable  à  celuy  qui  n'a  la  science  de  la  bonté,  1, 218. 

CARACTÈRE. 

le  loue  vn'ame  à  diuers  estagcs,  qui  sçache  et  se  tendre  et  se  desmonter  :  qui 
soit  bien  par  tout  où  sa  fortune  la  porte  :  qui  puisse  deuiser  auec  son  voisin,  de 
son  bastiment,  de  sa  chasse  et  de  sa  querelle  :  entretenir  auec  plaisir  vn  char- 
pentier et  vn  iardinier.  l'enuie  ceux,  qui  sçauent  s'apriuoiser  au  moindre  de  leur 
suitte,  et  dresser  de  l'entretien  en  leur  propre  train,  III,  140. 

le  hay  à  mort  de  sentu*  au  dateur,  I,  438. 

De  moy  i'ayme  mieux  estre  importun  et  indiscret,  que  dateur  et  dissimulé, 
II,  406. 

l'honnore  le  plus  ceux  que  i'iionnore  le  moins  :  et  où  mon  ame  marche  d'vne 
grande  allégresse,  i'oublie  les  pas  de  la  contenance  :  et  m'offre  maigrement  et 
fièrement,  à  ceux  à  qui  ie  suis  :  et  me  présente  moins,  à  qui  ie  me  suis  le  plus 
donné,  I,  438. 

le  congnois  mes  gens  au  silence  mesme,  et  à  leur  soubsrire,  et  les  descouure 
mieux  à  l'aduanture  à  table,  qu'au  conseil,  III,  148, 

CÉRÉMONIE. 

Nous  ne  sommes  que  cérémonie,  la  cérémonie  nous  emporte,  et  laissons  la  sub- 
stance des  choses  :  nous  nous  tenons  aux  branches  et  abandonnons  le  tronc  et 
le  corps.  Nous  auons  appris  aux  Dames  de  rougir,  oyants  seulement  nommer,  ce 
qu'elles  ne  craignent  aucunement  à  faire  :  nous  n'osons  appeller  à  droict  noz 
membres,  et  ne  craignons  pas  de  les  employer  à  toute  sorte  de  débauche.  La 
cérémonie  nous  deffend  d'exprimer  par  paroUes  les  choses  licites  et  naturelles,  et 
nous  l'en  croyons  :  la  raison  nous  deffend  de  n'en  faire  point  d'illicites  et  mau- 
uaises,  et  personne  ne  l'en  croit,  II,  466. 

CHANGEMENTS. 

En  toutes  choses,  sauf  simplement  aux  mauuaises,  la  nmtation  est  à  craindre, 
I,  .500. 

CHASSE. 

Les  poètes  font  Diane  victorieuse  du  brandon  et  des  flesches  de  Cupidon,  II,  100. 

CHASTETÉ. 

Certes  le  plus  ardu  et  le  plus  vigoureux  des  humains  deuoirs,  nous  l'auons  re- 
signé aux  dames,  et  leur  en  quittons  gloire,  III,  218. 

L'idée  mesme  que  nous  forgeons  à  leur  chasteté  est  ridicule.  Le  neud  du  iuge- 
ment  de  ce  deuoir,  gist  principallement  en  la  volonté.  Il  y  a  eu  des  maris  qui  ont 
souffert  cet  accident,  non  seulement  sans  reproche  et  offence  enuers  leurs  fem- 
mes, mais  auec  singulière  obligation  et  recommandation  de  leur  vei'tu.  Telle,  qui 


E.166  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

aynioit  iiiieiix  son  lionnour  que  sa  vie,  l'a  prostitué  à  l'appétit  forcené  d'vn  mor- 
tel enneni}',  pour  sauner  la  vie  à  son  mary  :  et  a  faict  pour  luy  ce  qu'elle  n'eust 
aucunement  faict  pour  soy,  III,  230. 

Cette  grande  et  violente  aspreté  d'obligation,  que  nous  leur  enioignons,  pro- 
duit deux  efl'ects  contraires  à  nostre  fin  :  elle  aiguise  les  poursuyuants,  et  faict 
les  femmes  plus  faciles  à  se  rendre,  car  la  delTence  les  incite  et  conuie,  III,  236. 

Le  prix  de  la  victoire  se  considère  par  la  difficulté.  Voulez  vous  sçauoir  quelle 
impression  a  faict  en  son  cœur,  vostre  seruitude  et  vostre  mérite?  mesurez-le  à 
ses  mœurs.  Telle  peut  donner  i)lus,  qui  ne  donne  pas  tant.  L'obligation  du  bien- 
faict,  se  rapporte  entièrement  à  la  volonté  de  celuy  qui  donne  :  les  autres  cir- 
constances qui  tombent  au  bien  faire,  sont  muettes,  mortes  et  casueles.  Ce  peu 
luy  couste  plus  à  donner,  qu'à  sa  compaigne  son  tout.  Si  en  quelque  chose  la 
rareté  sert  d'estimation,  ce  doit  estre  en  cecy.  Ne  regardez  pas  combien  peu 
c'est,  mais  combien  peu  l'ont,  III,  220. 

Telle  a  les  mœurs  desbordées,  qui  a  la  volonté  plus  reformée  que  n'a  cet' 
autre,  qui  se  conduit  soubs  vne  apparence  réglée.  Comme  nous  en  voyons,  qui 
se  plaignent  d'auoir  esté  vouées  à  chasteté,  auant  l'aage  de  cognoissance  :  l'en 
ay  veu  aussi,  se  plaindre  véritablement,  d'auoir  esté  vouées  à  la  desbauche, 
auant  l'aage  de  cognoissance.  Le  vice  des  parens  en  peut  estre  cause  :  ou  la  force 
du  besoing,  qui  est  vn  rude  conseiller,  III,  232. 

le  ne  sçay  si  les  exploicts  de  Cajsar  et  d'Alexandre  surpassent  en  rudesse  la  re- 
solution d'vne  belle  ieune  femme,  nourrie  à  nostre  façon,  à  la  lumière  et  com- 
merce du  monde,  battue  de  tant  d'exemples  contraires,  se  maintenant  entière, 
au  milieu  de  mille  continuelles  et  fortes  poursuittes.  Il  n'y  a  point  de  faire,  plus 
espineux,  qu'est  ce  non  faire,  ny  plus  actif.  le  trouue  plus  aysé,  de  porter  vne 
cuirasse  toute  sa  vie,  qu'vn  pucelage,  III,  218. 

C'est  donc  folie,  d'essayer  à  brider  aux  femmes  vn  désir  qui  leur  est  si  cuysant 
et  si  naturel.  Et  quand  ie  les  oye  se  vanter  d'auoir  leur  volonté  si  vierge  et  si 
froide,  ie  me  moque  d'elles.  Elles  se  reculent  trop  arrière.  le  suis  fort  seruiteur 
de  la  nayfueté  et  de  la  liberté  :  mais  il  n'y  a  remède,  si  elle  n'est  du  tout  niaise 
ou  enfantine,  elle  est  inepte,  et  messeante  aux  dames  en  ce  commerce  :  elle  gau- 
chit incontinent  sur  l'impudence.  Leurs  desguisements  et  leurs  figures  ne  trom- 
pent que  les  sots  :  le  mentir  y  est  en  'siège  d'honneur  :  c'est  vn  destour  qui  nous 
conduit  à  la  vérité;  par  une  fauce  porte,  III,  228. 

Refuser  tout  abbor,  c'est  tesmoignage  de  foi  blesse,  et  accusation  de  sa  propre 
facilité  :  vne  dame  non  tentée,  ne  se  peut  venter  de  sa  chasteté,  III,  220. 

Des  violences  qui  se  font  à  la  conscience,  la  plus  à  euiter  à  mon  aduis,  c'est 
celle  qui  se  faict  à  la  chasteté  des  femmes;  d'autant  qu'il  y  a  quelque  plaisir  cor- 
porel, naturellement  meslé  parmy  :  et  à  cette  cause,  le  dissentement  n'y  peut  es- 
tre assez  entier;  et  semble  que  la  force  soit  meslée  à  quelque  volonté,  I,  640. 

CHATIMENTS. 

Les  chastiemens,  qui  se  font  auec  poix  et  disci'etion,  se  reçoiuent  bien  mieux, 
et  auec  plus  de  fruit,  de  celuy  qui  les  souffre,  II,  608. 

CHOSES. 

Nous  sçauons  les  choses  en  songe,  et  les  ignorons  en  vérité,  II,  226. 

Combien  y  a  il  de  choses  peu  vraj -semblables,  tesnioignees  par  gens  dignes  de 
foy,  desquelles  si  nous  ne  pouuons  estre  persuadez,  au  moins  les  faut-il  laisser  en 
suspens,  I,  292. 

Assez  de  choses  peuuent  estre  et  auoir  esté,  desquelles  nostre  discours  ne  sçau- 
roit  fonder  la  nature  et  les  causes,  II,  130. 

La  foiblesse  de  nostre  condition,  fait  que  les  choses  en  leur  simplicité  et  pu- 
reté naturelle  ne  puissent  pas  tomber  en  nostre  vsage.  Les  elemens  que  nous 
iou\'SSons,  sont  altérez  :  et  les  métaux  de  mesme,  et  l'or,  il  le  faut  empirer  par 
quelque  autre  matière,  pour  l'accommoder  à  nostre  seruice,  II,  536. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        CIIO.  E.167 

Les  gloses  augmentent  les  doubles  et  l'ignorance  :  il  ne  se  voit  aucun  iiure,  soit 
humain  soit  diuin,  sur  qui  le  monde  s'embesongne,  duquel  l'interprétation  face 
tarir  la  difficulté  :  il  se  sent  par  expérience,  que  tant  d'interprétations  dissipent 
la  vérité  et  la  rompent,  III,  604, 

L'humaine  cognoissance,  acheminée  par  les  sens,  peut  iuger  des  causes  des 
choses  iusques  à  certaine  mesure,  mais  estant  arriuée  aux  causes  extrêmes  et 
premières,  il  faut  qu'elle  s'arreste  et  qu'elle  rebouche  :  à  cause  ou  de  sa  foiblesse, 
ou  de  la  difficulté  des  choses.  Elle  a  certaines  mesures  de  puissance,  outre  les- 
quelles c'est  témérité  de  l'employer,  II,  336. 

Les  choses  qui  sont  à  nostre  cognoissance  les  plus  grandes,  nous  les  iugcons 
estre  les  extrêmes  que  nature  face  en  ce  genre,  I,  290. 

Les  choses  dequoy  on  se  moque,  on  les  estime  sans  prix,  I,  556. 

Si  n'est-ce  pas  entièrement  mesdire  de  quelque  chose,  d'y  trouuer  des  deffauts: 
il  s'en  trouue  en  toutes  choses,  pour  belles  et  désirables  qu'elles  soyent,  III,  320. 

Les  hommes  sont  tourmentez  par  les  opinions  qu'ils  ont  des  choses,  non  par 
les  choses  mesmes,  I,  440. 

La  nouvelleté  des  choses  nous  incite  plus  que  leur  grandeur,  à  en  rechercher 
les  causes,  I,  290. 

De  toutes  choses  les  naissances  sont  l'oibles  et  tendres.  Pourtant  faut-il  auoirles 
yeux  ouuertsaux  commencements.  Car  comme  lors  en  sa  petitesse,  on  n'en  descou- 
ure  pas  le  danger,  quand  il  est  accreu,  on  n'en  descouure  plus  le  remède,  III,  516. 

Peu  de  gens  faillent  :  notamment  aux  choses  malaysées  à  persuader,  d'affermer 
qu'ils  l'ont  veu  :  ou  d'alléguer  des  tesmoins,  desquels  l'authorité  arreste  notre 
contradiction.  Suyuant  cet  vsage,  nous  sçauons  les  fondemens,  et  les  moyens,  de 
mille  choses  qui  ne  furent  onques.  Et  s'escarmouche  le  monde,  en  mille  questions, 
desquelles,  et  le  pour  et  le  contre,  est  faux,  III,  528. 

Combien  de  choses  nous  seruoyent  hyer  d'articles  de  foy,  qui  nous  sont  fables 
auiourd'huy?  I,  296. 

Pour  iuger  des  choses  grandes  et  haqltes,  il  faut  un'  ame  de  mesme,  autre- 
ment nous  leur  attribuons  le  vice,  qui  est  le  nostre.  Il  n'importe  pas  seulement 
qu'on  voye  la  chose,  mais  comment  on  la  voye,  I,  474. 

Les  choses  à  part  elles,  ont  peut  estre  leurs  poids  et  mesures,  et  conditions  : 
mais  au  dedans,  en  nous,  nostre  ame  les  leur  taille  comme  elle  l'entend.  La  mort 
est  effroyable  à  Cicero,  désirable  à  Caton,  indifférente  à  Socrates,  I,  554. 

Les  choses  ne  sont  pas  si  douloureuses,  ny  difficiles  d'elles  mesmes  :  mais  nos- 
tre foiblesse  et  laschcté  les  fait  telles,  I,  474. 

Des  choses  incommodes,  il  n'en  est  aucune  si  laide  et  vitieuse  et  euitable,  qui 
ne  puisse  deuenir  acceptable  par  quelque  condition  et  accident,  tant  l'humaine 
posture  est  vaine,  III,  200. 

CIVILITÉ. 

Non  seulement  chasque  pais,  mais  chasque  cité  et  chasque  vacation  a  sa  ciui- 
lité  particulière.  La  nostre  Françoise  a  quelques  formes  pénibles,  lesquelles 
pourueu  qu'on  oublie  par  discrétion,  non  par  erreur,  on  n'en  a  pas  moins  de 
grâce.  l'ay  veu  souucnt  des  hommes  inciuils  par  trop  de  ciuilité,  et  importuns 
de  courtoisie,  I,  84. 

Pour  moy  ie  retranche  en  ma  maison  autant  que  iepuis  de  la  cerimonie.  Quel- 
qu'vn  s'en  offence  :  qu'y  fcrois-ic  1  11  vaut  mieux  que  ie  l'offence  pour  vne  fois, 
que  moy  tous  les  iours  :  ce  seroit  vne  subiection  continuelle.  A  quoy  faire  fuit- 
on  la  seruitude  des  cours,  si  on  l'entraîne  iusques  en  sa  tanière?  I,  84. 

C'est  inciuilité  à  vn  Gentil-homme  de  partir  de  sa  maison,  comme  il  se  faict  le 
plus  sonnent,  pour  aller  au  deuant  de  celuy  qui  le  vient  trouuer,  pour  grand 
qu'il  soit  :  et  il  est  plus  respectueux  et  ciuil  de  l'attendre,  pour  le  receuoir,  ne  fust 
que  de  peur  de  faillir  sa  route;  il  suffit  de  l'accompagner  à  son  partement,  I,  84. 

C'est  vne  règle  commune  en  toutes  assemblées,  qu'il  touche  aux  moindres  de 
se  trouuer  les  premiers  à  l'assignation,  d'autant  qu'il  est  mieux  deu  aux  plus  ap- 
parens  de  se  faire  attendre,  I,  81. 

C'est  au  demeurant  vne  tres-vtilc  science  que  la  science  de  l'entregent.  Elle  est. 


E.168  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

comme  la  grâce  et  la  beauté,  conciliatrice  des  premiers  aboixls  de  la  société  et  l'a- 
miliarit»>,  I,  86. 

Entre  les  masles  dépuis  que  l'altercation  de  la  prerogatiue  au  marcher  ou  à  se 
seoir,  passe  trois  répliques,  elle  est  inciuile,  III,  444. 

COLÈRE. 

11  n'est  passion  qui  osbranle  tant  la  sincérité  des  iupenients,  que  la  cholere. 
Pendant  que  le  pouls  nous  bat,  et  que  nous  sentons  de  l'esmotion,  remettons  la 
partie:  les  choses  nous  sembleront  à  la  vérité  autres,  quand  nous  serons  r'accoi- 
sez  et  refroidis.  Au  trauers  d'elle,  les  fautes  nous  apparoissent  plus  grandes, 
comme  les  corps  au  trauers  d'vn  brouillas,  II,  (j08. 

La  tempeste  ne  s'engendre  que  de  la  concurrence  des  choleres,  qui  se  produi- 
sent volontiers  l'vne  de  l'autre,  et  ne  naissent  en  vn  poinct.  Donnons  à  chacune 
sa  course,  nous  voyla  tousiours  en  paix.  Vtile  ordonnance,  mais  de  difficile  exécu- 
tion, II,  618. 

C'est  vn'  arme  de  nouuel  vsage  :  nous  remuons  les  autres  armes,  ceste  cy  nous 
remue  :  nostre  main  ne  la  guide  pas,  c'est  elle  qui  guide  nostre  main  :  elle  nous 
lient,  nous  ne  la  tenons  pas,  II,  618. 

C'estvne  passion  qui  se  plaisten  soy,etqui  s(>  flatte.  Combien  de  fois  nous  estans 
esbranlez  soubs  vne  fauce  cause,  si  on  vient  à  nous  présenter  quelque  bonne  def- 
fence  ou  excuse,  nous  despitons  nous  contre  la  vérité  mesme  et  l'innocence,  II,  612. 

On  incorpore  la  cholere  en  la  cachant  :  Il  vaut  mieux  qu'elle  agisse  au  dehors, 
que  de  la  plier  contre  nous,  II,  616. 

La  philosophie  veut  qu'au  chastiement  desoffences  receuës,  nous  en  distrayons 
la  cholere:  non  afm  que  la  vengeance  en  soit  moindre,  ains  au  rebours,  afin 
qu'elle  en  soit  d'autant  mieux  assenée  et  plus  poisante.  A  quoy  il  luy  semble  que 
cette  impétuosité  porte  empeschement.  Non  seulement  la  cholere  trouble  :  mais 
de  soy,  elle  lasse  aussi  les  bras  de  ceux  qui  chastient.  Ce  feu  estourdit  et  consomme 
leur  force,  III,  494. 

L'espander  en  empesche  l'effect  et  le  poids.  La  criaillerie  téméraire  et  ordinaire, 
passe  en  vsage,  et  fait  que  chacun  la  mesprise,  II,  616. 

COMBAT. 

Le  but  et  la  visée,  non  seulement  d'vn  Capitaine,  mais  de  chasque  soldat,  doit 
regarder  la  victoire  en  gros;  et  que  nulles  occurrences  particulières,  quelque  in- 
terest  qu'il  ayt,  ne  le  doiuent  diuertir  de  ce  point  là,  I,  504. 

COMMANDEMENT. 

Il  n'appartient  de  commander  à  homme,  qui  ne  vault  mieux  que  ceux  à  qui  il 
commande,  1, 488. 

COMPASSION. 

La  plus  commune  façon  d'amollir  les  cœurs  de  ceux  qu'on  a  offencez,  lors  qu'ayans 
la  vengeance  en  main,  ils  nous  tiennent  à  leur  mercy,  c'est  de  les  esmouuoir  par 
submission,  à  commisération  et  à  pitié  :  toutesfois  la  brauerie,  la  constance,  et  la 
resolution,  moyens  tous  contraires,  ont  quelquesfois  scruy  à  ce  mesme  effet,  I,  17. 

CONDUITE  (fortune). 

C'est  vne  absolue  perfection,  et  comme  diuine,  de  sçauoir  iouyr  loyallement  de 
son  estre.  Nous  cherchons  d'autres  conditions,  pour  n'entendre  l'vsage  des  nostres  : 
et  sortons  hors  de  nous,  pour  ne  sçauoir  quel  il  y  faict.  Si  auons  nous  beau 
monter  sur  des  eschasses,  sur  des  eschasses  encores  faut-il  marcher  de  nos  Ïam- 
bes, III,  702. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         GOND.  E.169 

L'apretô  et  la  violence  des  désirs,  empesche  plus,  qu'elle  ne  sert  à  la  conduite 
de  ce  qu'on  entreprend.  Nous  remplit  d'impatience  enuers  les  euenemens,  ou 
contraires,  ou  tardifs  :  et  d'aigreur  et  de  soupçon  enuers  ceux,  auec  qui  nous 
negotions,  III,  492. 

Nous  ne  conduisons  iamais  bien  la  chose  de  laquelle  nous  sommes  possédez  et 
conduicts.  Celuy  qui  n'y  employé  que  son  iugement,  et  son  addresse,  il  y  procède 
plus  gayement  :  il  feint,  il  ployé,  il  diffère  tout  h  son  aise,  selon  le  besoing  des 
occasions  :  il  faut  d'atteinte,  sans  tourment,  et  sans  affliction,  prest  et  entier  pour 
vne  nouuelle  entreprise  :  il  marche  tousioui-s  la  bride  à  la  main.  En  celuy  qui  est 
enyuré  de  cette  intention  violente  et  tyrannique,  on  voit  par  nécessité  beaucoup 
d'imprudence  et  d'iniustice.  L'impétuosité  de  son  désir  l'emporte.  Ce  sont  mou- 
uements  téméraires,  et,  si  Fortune  n'y  preste  beaucoup,  de  peu  de  fruit,  III,  492. 

Le  jeune  doit  faire  ses  apprests,  le  vieil  en  iouïr,  disent  les  sages.  Et  le  plus 
grand  vice  qu'ils  remerquent  en  nous,  c'est  que  noz  désirs  raieunissent  sans 
cesse.  Nous  auons  le  pied  à  la  fosse,  et  noz  appetis  et  poursuites  ne  font  que  nais- 
tre,  II,  588. 

Ne  pouuant  régler  les  euencments,  ie  me  règle  moy-mesme  :  et  m'applique  à 
eux,  s'ils  ne  s'appliquent  à  moy,  II,  486. 

Qui  fait  bien  principalement  pour  sa  propre  satisfaction,  ne  s'altère  guère  pour 
voir  les  hommes  iuger  de  ses  actions  contre  son  mérite,  III,  510. 

Pour  me  sentir  engagé  à  vne  forme,  ie  n'y  oblige  pas  le  monde,  comme  chas- 
cun  fait,  et  croy,  et  conçoy  mille  contraires  façons  de  vie,  I,  398. 

l'ayme  les  malheui-s  tous  purs,  qui  ne  m'exercent  et  tracassent  plus,  après  l'in- 
certitude de  leur  rabillage  :  et  qui  du  premier  saut  me  poussent  droictement  eu 
la  souffrance.  L'horreur  de  la  cheute  me  donne  plus  de  fiebure  que  le  coup.  Le 
ialoux,  a  plus  niauuais  conte  que  le  cocu.  Et  y  a  moins  de  mal  souuent,  à  perdre 
sa  vigne,  qu'à  la  plaider.  La  plus  basse  marche,  est  la  plus  ferme  :  c'est  le  siège 
de  la  constance.  Vous  n'y  auez  besoing  que  de  vous.  Elle  se  fonde  là,  et  appuyé  toute 
en  soy,  II,  488. 

Pour  souffrir  l'importunité  des  accidents  contraires,  ausquels  nous  sommes 
subjects,  ie  nourris  autant  que  ie  puis  en  moy  cett'  opinion:  m'abandonnant  du 
tout  à  la  Fortune,  de  prendre  toutes  choses  au  pis;  et  ce  pis  là,  me  résoudre  à  le 
porter  doucement  et  patiemment,  II,  486. 

l'aiguise  mon  courage  vers  la  patience,  ie  l'affoiblis  vers  le  désir,  III,  322. 

le  m'attache  à  ce  que  ie  voy,  et  que  ie  tiens,  et  ne  m'eslongue  guerre  du  port, 
II,  490. 

En  tous  deuoirs  de  la  vie,  la  route  de  ceux  qui  visent  à  l'honneur,  est  bien  di- 
uerse  à  celle  que  tiennent  ceux  qui  se  proposent  l'ordre  et  la  raison,  III,  514. 

Qui  ne  participe  au  hasard  et  difficulté,  ne  peut  prétendre  interestà  l'honneur 
et  plaisir  qui  suit  les  actions  hazardeuses,  III,  328. 

Si  ce  qu'on  a,  suffit  à  maintenir  la  condition  en  laquelle  on  est  nay,  et  dressé, 
c'est  folie  d'en  lascher  la  prise,  sur  l'incertitude  de  l'augmenter,  II,  490. 

Celuy  à  qui  la  Fortune  refuse  dequoy  planter  son  pied,  et  establir  vn  estre  tran- 
quille et  reposé,  il  est  pardonnable  s'il  iette  au  hazard  ce  qu'il  a,  puis  qu'ainsi 
comme  ainsi  la  nécessité  l'enuoye  à  la  queste,  II,  490. 

CONFÉRENCE. 

Aux  disputes  et  conférences,  tous  les  mots  qui  nous  semblent  bons,  ne  doiuent 
pas  incontinent  estre  acceptez.  La  plus  part  des  hommes  sont  riches  d'vne  suffi- 
sance estrangere.  11  peut  bien  aduenir  à  tel,  de  dire  vn  beau  traict,  vne  bonne 
responce  et  sentence,  et  la  mettre  en  auant,  sans  en  cognoistre  la  force,  III,  360. 

CONFESSION. 

Comme  en  matière  de  biens  faicts,  de  mesme  en  matière  de  mesfaicts,  c'est  par 
fois  satisfaction.  Est-il  quelque  laideur  au  failhr,  qui  nous  dispense  de  nous  en 
confesser?  III,  188. 


E.170  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

La  pii'e  de  me  actions  ot  conditions,  ne  me  semble  pas  si  laide,  comme  ie 
trouue  laid  et  lasche,  de  ne  l'oser  aduouer.  Chacun  est  discret  en  la  confession, 
on  le  deuroit  estre  en  l'action.  La  hardiesse  de  faillir,  est  aucunement  compensée 
et  bridée, parla  hardiesse  de  le  confesser.  Qui  s'obligeroit  à  tout  dire  s'obligeroit 
à  ne  rien  faire  de  ce  qu'on  est  contraint  de  taire,  III,  186. 

CONFIANCE. 

La  fiance  de  la  bonté  d'autruy,  est  un  non  léger  tesmoignage  de  la  Vjonté  propre, 
I,  472. 

le  me  fie  aysement  à  la  foy  d'autruy  :  mais  mal-aysement  le  feroi-ie,  lors  que  ie 
donrois  à  iuger  l'auoirplustost  faict  par  desespoir  et  faute  de  cœur,  que  par  fran- 
chise et  fiance  de  sa  loyauté,  I,  48. 

CONNAISSANCE  DE  SOI-MÊME. 

Sauf  toy,  ô  homme,  chasque  chose  s'estudie  la  première,  et  a  selon  son  besoin, 
des  limites  à  ses  trauaux  et  désirs.  Il -n'en  est  vne  seule  si  vuide  et  nécessiteuse 
que  toy,  qui  embrasses  l'vniuers.  Tu  es  le  scrutateur  sans  cognoissance  :  le  magis- 
trat sans  iuridiction  :  et  après  tout,  le  badin  de  la  farce,  III,  482. 

Cette  opinion  et  vsance  commune,  de  regarder  ailleurs  qu'à  nous,  a  bien  pour- 
ueu  à  nostre  affaire.  C'est  vn  obiect  plein  de  mescontentement.  Nous  n'y  voyons 
que  misère  et  vanité.  Pour  ne  nous  desconforter.  Nature  a  reietté  bien  à  propos, 
l'action  de  nostre  veuë,  au  dehors,  III,  482. 

Si  l'homme  ne  se  cognoist,  comment  cognoist-il  ses  functions  et  ses  forces?  II,  338. 

Si  chacun  se  regardoit  attentiuement,  il  se  trouueroit  plein  d'inanité  et  de  fa- 
daise. Nous  en  sommes  tous  confits,  tant  les  vns  que  les  autres.  Mais  ceux  qui  le 
sentent,  en  ont  vn  peu  meilleur  compte.:  encore  ne  sçay-ie,  III,  482. 

Tous  les  iours  et  à  toutes  heures,  nous  disons  d'vn  autre  ce  que  nous  dirions 
plus  proprement  de  nous,  si  nous  sçauions  replier  aussi  bien  qu'estendre  nostre 
considération,  II,  38. 

De  l'expérience  que  i'ay  de  moy,  ie  trouue  assez  dequoy  me  faire  sage,  si  i'estoy 
bon  escholier.  Qui  remet  en  sa  mémoire  l'excez  de  sa  cholere  passée,  et  iusque  où 
cette  fieure  l'emporta,  voit  la  laideur  de  cette  passion,  et  en  conçoit  vne  haine 
plus  iuste.  Qui  se  souuient  des  maux  qu'il  a  couru,  de  ceux  qui  l'ont  menasse, 
des  légères  occasions  qui  l'ont  remué  d'vn  estât  à  autre,  se  prépare  par  là,  aux 
mutations  futures,  et  à  la  rccognoissance  de  sa  condition.  Escoutons  y  seulement  : 
nous  nous  disons,  tout  ce,  dequoy  nous  auons  principalement  besoing.  Qui  se 
souuient  de  s'estre  tant  et  tant  de  fois  mesconté  de  son  propre  iugement  :  est-il 
pas  vn  sot,  de  n'en  entrer  pour  iamais  en  deffiancc?  III,  616. 

Nulle  particulière  qualité  n'enorgueillira  celuy,  qui  mettra  quand  et  quand  en 
compte,  tant  d'imparfaites  et  foibles  qualitcz  autres,  qui  sont  en  luy,  et  au  bout, 
la  nihilité  de  l'humaine  condition,  I,  682. 

Ce  que  nous  rions  des  autres  adulent  à  chacun  de  nous  :  nul  ne  cognoist  estre 
auare,  nul  conuoiteux  :  ic  ne  suis  pas  sumptueux,  disons  nous,  mais  la  ville  re- 
quiert vne  grande  despence  :  ce  n'est  pas  ma  faute,  si  ie  suis  cholere,  c'est  la  faute 
de  la  ieunesse.  Ne  cherchons  pas  hors  de  nous  nostre  mal,  il  est  planté  en  nos 
entrailles.  Et  cela  mesme,  que  nous  ne  sentons  pas  estre  malades,  nous  rend  la 
guerison  plus  malaisée,  II,  566. 

En  toutes  nos  fortunes,  nous  nous  comparons  à  ce  qui  est  au  dessus  de  nous-, 
et  regardons  vers  ceux  qui  sont  mieux.  Mesurons  nous  à  ce  qui  est  au  dessous  : 
il  n'en  est  point  de  si  misérable,  qui  netrouue  mille  exemplesoù  se  consoler,  111,402. 

Si  quelcun  s'enyure  de  sa  science,  regardant  souz  soy  :  qu'il  tourne  les  jeux  au 
dessus  vers  les  siècles  passez,  il  baissera  les  cornes,  y  trouuant  tant  de  milliers 
d'esprits,  qui  se  foulent  aux  pieds,  I,  682. 

Quand  i'oy  reciter  Testât  de  quelqu'vn,  ie  ne  m'amuse  pas  à  luy  :  ie  tourne  in- 
contimenl  les  yeux  à  moy,  voir  comment  l'en  suis.  Tout  ce  qui  le  touche  me  re- 
garde. Son  accident  m'aduertit  et  m'esueille  de  ce  costé-là,  II,  38. 

La  coustume  a  faict  le  parler  de  soy,  vicieux  :  et  le  prohibe  obstinéement  en 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        CONxX.  E.171 

hayne  de  la  ventanco,  qui  semble  tousiours  estre  attachée  aux  propres  tesmoigna- 
ges.  le  trouue  plus  de  mal  que  de  bien  à  ce  remède,  I,  678. 

Quiseconnoistrabicn,  qu'il sedonnehardimentà  connoistre  parsa  bouche,  1,682. 

Il  n'est  description  pareille  en  difficulté,  à  la  description  de  soy-mesmes,  ny 
certes  en  vtilité.  Encore  se  faut  il  testonner,  encore  se  faut  il  ordonner  et  renger 
^pour  sortir  en  place,  I,  678. 

le  tien  qu'il  faut  estre  prudent  à  estimer  de  soy,  et  pareillement  conscientieux 
à  en  tesmoigner:  soit  bas,  soit  haut,  indifféremment,  I,  680. 

De  dire  de  soy  plus  qu'il  n'en  y  a,  ce  n'est  pas  tousiours  présomption,  c'est  en- 
core souuent  sottise,  I,  68*.?. 

De  dire  moins  de  soy,  qu'il  n'y  en  a,  c'est  sottise,  non  modestie  :  se  payer  de 
moins,  qu'on  ne  vaut,  c'est  lascheté  et  pusillanimité,  I,  680. 

CONSCIENCE. 

Les  loix  de  la  conscience,  que  nous  disons  naistre  de  nature,  naissent  de  la 
coustume,  I,  168. 

En  tout  et  par  tout,  il  y  a  assés  de  mes  yeux  à  me  tenir  en  office  :  il  n'y  en  a 
point,  qui  me  veillent  de  si  près,  ny  que  io  respecte  plus,  I,  158. 

11  n'y  a  que  vous  qui  sçache  si  vous  estes  lâche  et  cruel,  ou  loyal  et  deuotieux  : 
les  autres  ne  vous  voyent  point,  ils  vous  dcuinent  par  coniectures  incertaines:  ils 
voyent,  non  tant  vostre  naturel,  que  vostre  art.  Par  ainsi,  ne  vous  tenez  pas  à  leur 
sentence,  tenez  vous  à  la  vostre,  III,  114. 

Aucune  cachette  ne  sert  aux  meschans,  disoit  Epicurus,  par  ce  qu'ils  ne  se  peu- 
uent  asseurer  d'estre  cachez,  la  conscience  les  dcscouurant  à  eux  mesmes,  I,  660. 

Vue  ame  courageusement  vitieuse,  se  peut  à  l'aduenture  garnir  de  sécurité  : 
mais  de  satisfaction,  elle  ne  s'en  peut  fournir,  III,  112. 

Comme  la  conscience  nous  remplit  de  crainte,  aussi  fait  elle  d'asseurance  et  de 
confiance,  I,  660. 

Il  n'est  bonté,  qui  ne  resiouysse  vne  nature  bien  née.  Il  y  a  certes  ie  ne  sçay 
quelle  congratulation,  de  bien  faire,  qui  nous  resiouit  en  nous  mesmes,  et  vne 
fierté  généreuse,  qui  accompagne  la  bonne  conscience.  Ces  tesmoignages  plaisent, 
et  nous  est  grand  bénéfice  que  cette  esiouyssance  naturelle  :  et  le  seul  payement 
qui  iamais  ne  nous  manque.  De  fonder  la  recompence  des  actions  vertueuses, 
sur  l'approbation  d'autruy,  c'est  prendre  vn  trop  incertain  et  trouble  fondement, 
signamment  en  vn  siècle  corrompu  et  ignorant,  comme  cettuy-cy  :  la  bonne 
estime  du  peuple  est  iniurieuse.  A  qui  vous  fiez  vous,  de  veoir  ce  qui  est  louable? 
Dieu  me  garde  d'estre  homme  de  bien,  selon  la  description  que  je  voy  faire  tous 
les  iours  par  honneur  à  chacun  de  soy,  III,  112. 

Merueilleux  effort  de  la  conscience  :  elle  nous  fait  trahir,  accuser,  et  combattre 
nous  mesmes,  et  à  faute  de  tesmoing  estranger,  elle  nous  produit  contre  nous,  1, 658. 

Aussi  à  mesme  qu'on  prend  le  plaisir  au  vice,  il  s'engendre  vn  desplaisir  con- 
traire en  la  conscience,  qui  nous  tourmente  de  plusieurs  imaginations  pénibles, 
veillans  et  dormans,  I,  660. 

On  faut  autant  à  iuger  de  sa  propre  besongne,  que  de  celle  d'autruy.  Non  seu- 
■  lement  pour  l'affection  qu'on  y  mesle  :  mais  pour  n'auoir  la  suffisance  de  la  co- 
gnoistre  et  distinguer,  III,  368. 

C'est  office  de  charité,  que,  qui  ne  peut  ostervn  vice  en  soy,  cherche  ce  neant- 
moins  à  l'oster  en  autruy  :  où  il  peut  auoir  moins  maligne  et  rcuesche  semence. 
Tousiours  l'aduertissemcnt  est  vray  et  vtilc  :  mais  si  nous  auions  bon  nez,  nostrc 
ordure  nous  deuroit  plus  puïr,  d'autant  qu'elle  est  nostre,  III,  318. 

^e  ne  dis  pas,  que  nul  n'accuse,  qui  ne  soit  net  :  car  nul  n'accuseroit  :  voire  ny 
net,  en  mesme  sorte  de  tache.  Mais  i'entens,  que  nostre  iugement  chargeant  sur 
vn  autre,  duquel  pour  lors  il  est  question,  ne  nous  espargne  pas,  d'vne  interne  et 
seuere  iurisdiction,  III,  348. 

La  force  de  tout  conseil  gist  au  temps  :  les  occasions  et  les  matières  roulent  et 
changent  sans  cesse.  Il  y  a  des  parties  secrettes  aux  obiects,  qu'on  manie,  et 
indiuinables  :  signamment  en  la  nature  des  hommes  :  des  conditions  muettes, 
sans  montre  incognues  par  fois  du  possesseur  mesme  :  qui  se  produisent  et  es- 


E.172  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

iieillent  par  des  occasions  su  menantes.  Si  ma  prudence  ne  les  a  peu  pénétrer  et 
profetizer,  ie  ne  luy  en  sçay  nul  mauuais  gré  :  sa  charge  se  contient  en  ces  li- 
mites. Si  l'euenement  ine  bat,  et  s'il  fauorise  le  party  que  i'ay  refusé  :  il  n'y  a  re- 
mède, ie  ne  m'en  prens  pas  à  moy,  i'accuse  ma  fortune,  non  pas  mon  ouurage,  III,  1 2(3. 

CONSEIL. 

Nous  deuons  aux  nostres  assiduité  de  correction  et  d'instruction  :  mais  d'aller 
prescher  le  premier  passant,  et  régenter  l'ignorance  ou  ineptie  du  premier  ren- 
contré, c'est  vn  vsage  auquel  ie  veux  grand  malj  III,  364. 

CONSTANCE. 

Le  commencement  de  toute  vertu,  c'est  consultation  et  délibération,  et  la  fin  et 
perfection,  constance,  I,  602. 

CONTINENCE. 

Il  est  à  l'aduenture  plus  facile,  de  se  passer  nettement  de  tout  le  sexe,  que  de 
se  maintenir  deuëment  de  tout  poinct,  en  la  compagnie  de  sa  femme,  II,  M6. 

CONTRADICTION,  CONTRASTE. 

11  n'y  a  raison  qui  n'en  aye  vne  contraire,  II,  432. 

Nous  ne  goustons  rien  de  pur,  II,  536. 

Des  plaisirs,  et  biens  que  nousauons,  il  n'en  est  aucun  exempt  de  quelque  mes- 
lange  de  mal  et  d'incommodité,  II,  538. 

Nostre  extrême  volupté  a  quelque  air  de  gémissement,  et  de  plainte.  Diriez  vous 
pas  qu'elle  se  meurt  d'angoisse?  II,  538. 

L'extrémité  du  rire  se  mesle  aux  larmes,  II,  538. 

La  profonde  ioye  a  plus  de  seuerité,  que  de  gayetc.  L'extrême  et  plein  conten- 
tement, plus  de  rassis  que  d'enioué.  L'aise  nous  masche,  II,  538. 

Le  trauail  et  le  plaisir,  très  dissemblables  de  nature,  s'associent  pourtant  de  ie 
ne  sçay  quelle  ioincture  naturelle,  II,  538. 

Nostre  volonté  s'aiguise  par  le  contraste  :  et  il  n'est  rien  naturellement  si  con- 
traire à  nostre  goust  que  la. satiété,  qui  vient  de  l'aisance:  ny  rien  qui  l'aiguise 
tant  que  la  rareté  et  difficulté,  II,  432. 

Nostre  appétit  mesprise  et  outrepasse  ce  qui  luy  est  en  main,  pour  courir  après 
ce  qu'il  n'a  pas.  Nous  défendre  quelque  chose,  c'est  nous  en  donner  enuie.  Nous 
l'abandonner  tout  à  faict,  c'est  nous  en  engendrer  mespris.  La  faute  et  l'abondance 
retombent  en  mesme  inconuenient,  II,  434. 

CONTRAINTE. 

Sauf  la  santé  et  la  vie,  il  n'est  chose  pourquoy  ie  vueille  ronger  mes  ongles,  et 
que  ie  vueill'  acheter  au  prix  du  tourment  d'esprit  et  de  la  contrainte,  II,  484. 

CONVERSATION. 

Le  plus  fructueux  et  naturel  exercice  de  nostre  esprit,  c'est  à  mon  gré  la  confé- 
rence. Et  si  i'estois  à  cette  heure  forcé  de  choisir,  ie  consentirois  plustost,  ce 
crois-ie,  de  perdre  la  veuë,  que  l'ouyr  ou  le  parler,  III,  322. 

L'estude  des  liures,  c'est  vn  mouuement  languissant  et  foible  qui  n'eschaulTo 
point  :  là  où  la  conférence,  apprend  et  exerce  en  vn  coup,  III,  322. 

L'vnisson,  est  qualité  du  tout  ennuyeuse  en  la  conférence,  III,  334. 

Les  vieillards  sont  dangereux,  à  qui  la  souuenance  des  choses  passées  demeure, 
pt  ont  perdu  la  souuenance  de  leurs  redites.  I'ay  veu  des  récits  bien  plaisants,  de- 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        CONV.  E.n3 

uenir  tres-ennuyeux,  cliascun  de  l'assistance  en  ayant  esté  abbreuvé  cent  fois,  1, 00. 

le  festoyé  et  caresse  la  vérité  en  quelque  main  que  ie  la  trouue,  et  m'y  rends 
alaigrement;  et  pourueu  qu'on  n'y  procède  d's'ne  troigne  trop  impérieusement 
magistrale,  ie  prends  plaisir  à  estre  reprins,  III,  33G. 

Les  contradictions  des  iugemens,  ne  m'ofîencent,  ny  m'altèrent  :  elles  m'esueil- 
lent  seulement  et  m'exercent.  Nous  fuyons  la  correction,  il  s'y  faudroit  présenter 
et  produire  notamment  quand  elle  vient  par  forme  de  confei*ence,  non  de  ré- 
gence. A  chaque  opposition,  on  ne  regarde  pas  si  elle  est  iuste,  mais,  à  tort  ou  à 
droit,  conmie  on  s'en  deffera.  Au  lieu  d'y  tendre  les  bras,  nous  y  tendons  les 
griffes,  III,  334. 

Il  est  malaisé  d'attirer  les  hommes  de  mon  temps  à  céder.  Ils  n'ont  pas  le  cou- 
rage de  corriger,  par  ce  qu'ils  n'ont  pas  le  coui-age  de  souffrir  à  l'estre.  Et  par- 
lent tousiours  auoc  dissimulation,  en  présence  les  vns  des  autres,  III,  336. 

La  plus  part  changent  de  visage,  de  voi.x,  où  la  force  leur  faut  :  et  par  vne 
importune  cholere,  au  lieu  de  se  venger,  accusent  leur  foiblcsse,  ensemble  et  leur 
impatience,  III,  366. 

Quand  on  me  contrarie,  on  esueille  mon  attention,  non  pas  ma  cholere  :  ie 
m'avance  vers  celuy  qui  me  contredit,  qui  m'instruit.  La  cause  de  la  vérité,  de- 
uroit  estre  la  cause  commune  à  l'vn  et  à  l'autre,  III,  1^536. 

Il  faut  ne  se  formalizer  point  des  sottises  et  fables  qui  se  disent  en  notre  pré- 
sence :  car  c'est  vne  inciuile  importunité  de  choquer  tout  ce  qui  n'est  pas  de  nos- 
tre  appétit.  Contentons  nous  de  nous  corriger  nous  mesmes,  I,  244. 

Aux  disputes  et  conférences,  tous  les  mots  qui  nous  semblent  bons,  ne  doiuent 
pas  incontinent  estre  acceptez.  La  plus  part  des  liommes  sont  riches  d'vne  sufli- 
sance  estrangere.  Il  peut  bien  aduenir  à  tel,  de  dire  vu  beau  traict,  vne  bonne 
responce  et  sentence,  et  la  mettre  en  auant,  sans  en  cognoistre  la  force,  III,  360. 

l'oy  iournellement  dire  à  des  sots,  des  mots  non  sots.  Ils  disent  vne  bonne 
chose  :  sçachons  iu.sques  où  ils  la  cognoissent,  voyons  par  où  ils  la  tiennent,  III,  362. 

Ces  iugemens  vniuersels,  que  ie  voy  si  ordinaires,  ne  disent  rien,  l'ay  veu  plus 
souuent  que  tous  les  iours,  aduenir  que  les  esprits  foiblement  fondez,  voulants 
faire  les  ingénieux  à  remarquer  en  la  lecture  de  quelque  ouurage,  le  point  de 
la  beauté  :  arrestent  leur  admiration,  d'un  si  mauuais  choix,  qu'au  lieu  de  nous 
apprendre  l'excellence  de  l'autheur,  ils  nous  apprennent  leur  propre  ignorance, 
JII,  362. 

Le  silence  et  la  modestie  sont  qualitez  tres-commodes  à  la  conuersation,  I,  244. 

P'aire  à  l'enuy  parade  de  son  esprit,  et  de  son  caquet,  c'est  vn  mestier  ti'es-mes- 
seant  à  vn  homme  d'honneur,  III,  334. 

L'obstination  et  ardeur  d'opinion,  est  la  plus  seuere  preuue  de  bestise,  III,  364. 

COURAGE  (fermetk). 

Le  courage  et  la  hardiesse  sont  qualitez  qui  ne  tombent  aucunement  en  ceux 
qui  sont  exempts  de  danger,  III,  326. 

Quand  la  vertu  mesme  seroit  incarnée,  ie  croy  que  le  poux  luy  battroit  plus 
fort  allant  à  l'assaut,  qu'allant  disner  :  voire  [il  est  nécessaire  qu'elle  s'eschauffe 
et  s'esmeuue,  I,  500. 

Il  y  a  des  pertes  triomphantes  à  l'enui  des  victoires,  I,  370. 

Celuy  qui  tombe  obstiné  en  son  courage,  il  est  battu  non  pas  de  nous,  mais  de 
la  fortune  :  il  est  tué,  non  pas  vaincu  :  les  plus  vaillans  sont  par  fois  les  plus 
infortunez,  I,  370. 

L'estimation  et  le  prix  d'vn  homme  consiste  au  cœur  et  en  la  volonté  :  c'est  là 
où,  gist  son  vray  honneur,  I,  370. 

COUTUME  (habitude,  usage). 

C'est  une  violente  et  traistresse  maistresse  d'escole,  que  la  coustume.  Elle  establit 
en  nous,  peu  à  peu,  à  la  desrobée,  le  pied  de  son  authorité  :  mais  par  ce  doux  et 
humble  commencement,  l'ayant  rassis  et  planté  auec  l'ayde  du  temps,  elle  nous 


E.174  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

descouure  tantost  vn  furieux  et  tyrannique  visage,  contre  lequel  nous  n'auons 
plus  la  liberté  de  hausser  seulement  les  yeux,  I,  156. 

11  n'est  rien  qu'elle  ne  face,  ou  qu'elle  ne  puisse  :  et  auec  raison  l'appelle  Pin- 
darus.  la  Royne  et  Eniperiere  du  monde,  I,  1(38. 

Que  ne  peut  elle  en  nos  iugomens  et  en  nos  créances?  }'  a  il  opinion  si  bizarre  : 
ie  laisse  à  part  la  grossière  imposture  des  religions,  dequoy  tant  de  grandes  na- 
tions, et  tant  de  suffisants  personnages  se  sont  veuz  enyurez  :  car  cette  partie 
estant  hors  de  nos  raisons  humaines,  il  est  plus  excusable  de  s'y  perdre,  à  qui  n'y 
e.st  extraordinairement  esclairé  par  faueur  diuine  :  mais  d'autres  opinions  y  en  a 
il  de  si  estranges,  qu'elle  n'aye  planté  et  estably  par  loix  es  régions  que  bon  luy 
a  semblé  ?  I,  160. 

11  ne  tombe  en  l'imagination  humaine  aucune  fantasie  si  forcenée  qui  ne  ren- 
contre l'exemple  de  quelque  vsage  public,  et  par  conséquent  que  nostre  raison 
n'estaye  et  ne  fonde,  I,  160. 

Chasque  nation  a  plusieure  coustumes  et  vsances,  qui  sont  non  seulement  in- 
cognues,  mais  farouches  et  miraculeuses  à  quelque  autre  nation,  II,  632. 

Les  subiects  ont  diuers  lusti-es  et  diuerses  considérations  :  de  là  s'engendre 
principalement  la  diuersité  d'opinions.  Vne  nation  regarde  vn  subiect  par  vn  vi- 
sage, et  s'arreste  à  celuy  là  :  l'autre  par  vn  autre,  II,  376. 

Ce  qui  est  hors  les  gonds  de  la  coustume,  on  le  croid  hors  les  gonds  de  la  rai- 
son :  Dieu  sçait  combien  desraisonnablement  le  plus  souuent,  I,  170. 

Le  principal  effect  de  sa  puissance,  c'est  de  nous  saisir  et  empiéter  de  telle 
sorte,  qu'à  peine  soit-il  en  nous,  de  nous  r'auoir  de  sa  prinse,  et  de  r'entrer  en 
nous,  pour  discourir  et  raisonner  de  ses  ordonnances,  I,  170. 

C'est  merueille  comme  la  coustume  en  ces  choses  indifférentes  plante  aisément 
et  soudain  le  pied  de  son  authorité,  I,  496. 

La  pluspart  des  choses  qui  nous  sont  entre  mains,  c'est  plustost  accoustumance, 
que  science,  qui  nous  en  oste  l'estrangeté,  I,  290. 

Les  premières  et  vniuerselles  raisons  sont  de  difficile  pei-scrutation.  Qui  veut 
les  taster  se  iette  d'abordée  dans  la  franchise  de  la  coustume,  I,  172. 

Qui  voudra  se  deffaire  de  ce  violent  preiudice  de  la  coustume,  il  trouuera  phi- 
sieurs  choses  receuës  d'vne  resolution  indubitable,  qui  n'ont  appuy  qu'en  la 
barbe  cheniie  et  rides  de  l'vsage,  qui  les  accompaigne  :  mais  ce  masque  arraché, 
rapportant  les  choses  à  la  vérité  et  à  la  raison,  il  sentira  son  ingénient,  commei 
tout  bouleuersé,  et  remis  pourtant  en  bien  plus  seur  estât,  I,  172. 

Quand  ceux  de  Crète  vouloient  au  temps  passé  maudire  quelqu'vn,  ils  prioient 
les  Dieux  de  l'engager  en  quelque  mauuaise  coustume,  I,  170. 

11  n'est  rien  en  somme  si  extrême,  qui  ne  se  trouue  receu  par  l'vsage  de  quel- 
que nation,  II,  376. 

Chacun  appelle  barbarie,  ce  qui  n'est  pas  de  son  vsage,  et  nous  n'auons  autre 
mire  de  la  vérité  et  de  la  raison,  que  l'exemple  et  idée  des  opinions  et  vsances 
du  pais  où  nous  sommes,  I,  358. 

L'assuefaction  endort  la  veuë  de  nostre  iugement,  I,  162. 

C'est  la  coustume  qui  nous  fait  impossible  ce  qui  ne  l'est  pas,  I,  392. 

C'est  par  l'entremise  de  la  coustume  que  chascun  est  contant  du  lieu  où  na- 
ture l'a  planté,  I,  170. 

C'est  vn  commun  vice,  non  du  vulgaire  seulement,  mais  quasi  de  tous  hom- 
mes, d'auoir  leur  visée  et  leur  arrest,  sur  le  train  auquel  ils  sont  nais,  I,  544. 

Il  n'est  supportable,  qu'aux  grandes  âmes  et  illustres  de  se  priuilegier  au  des- 
sus de  la  coustume,  I,  244. 

CRÉDULITÉ  (prédictions,  miracles). 

II  s'engendre  beaucoup  d'abus  au  monde  :  ou  pour  dire  plus  hardiment,  tous 
les  abus  du  monde  s'engendrent,  de  ce,  qu'on  nous  apprend  à  craindre  de  faire 
profession  de  nostre  ignorance;  et  sommes  tenus  d'accepter,  tout  ce  que  nous 
ne  pouuons  réfuter,  III,  534. 

C'est  merueille,  de  combien  vains  commencemens,  et  friuoles  causes,  naissent 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         CRÉ.  E.175 

ordinairement  l'ameuses  impressions.  Cela  mesnies  en  empesclie  l'information. 
Car  pendant  qu'on  cherche  des  causes,  et  des  fins  fortes,  et  poisantes,  et  dignes 
d'vn  si  grand  nom,  on  pert  les  vrayes.  Elles  eschapent  de  nostre  veuë  par  leur 
petitesse,  III,  532. 

Peu  de  gens  faillent  :  notamment  aux  choses  malaysées  à  persuader,  d'affer- 
mer qu'ils  l'ont  veu  :  ou  d'alléguer  des  tesmoins,  desquels  l'authorité  arreste 
notre  contradiction.  Suyuant  cet  vsage,  nous  sçauons  les  fondemens,  et  les  moyens, 
de  mille  choses  qui  ne  furent  onques,  III,  528. 

Nous  ne  sommes  pas  seulement  lasches  à  nous  défendre  de  la  piperie  :  mais 
nous  cherchons,  et  conuions  à  nous  y  enferrer,  III,  528. 

Quiconque  croit  quelque  chose,  estime  que  c'est  ouurage  de  charité,  de  la  per- 
suader à  vu  autre.  Et  pour  ce  faire,  ne  craint  point  d'adiouster  de  son  inuention, 
autant  qu'il  voit  estre  nécessaire  en  son  compte,  pour  suppléer  à  la  résistance  et 
au  deffaut  qu'il  pense  estre  en  la  conception  d'autruy,  III,  530. 

L'erreur  particulière,  fait  premièrement  l'erreur  publique  :  et  à  son  tour  après, 
l'erreur  publique  fait  l'erreur  particulière,  III,  530. 

En  choses  de  pareille  qualité,  surpassant  nostre  cognoissance  :  ie  suis  d'aduis, 
que  nous  soustenions  nostre  iugement,  aussi  bien  à  reieter,  qu'à  receuoir,  III,  534. 

CRITIQUE. 

le  trouue  rude  de  iuger  celui  là,  en  qui  les  mauuaises  qualitez  surpassent  les 
bonnes.  Platon  ordonne  trois  parties,  à  qui  veut  examiner  l'ame  d'vn  autre  : 
science,  bienueillance,  hardiesse,  III,  624.  ^, 

11  faict  besoin  d'oreilles  bien  fortes,  poui'  s'ouyr  franchement  iuger.  Et  par  ce 
qu'il  en  est  peu,  qui  le  puissent  souffrir  sans  morsure  :  ceux  qui  se  bazardent 
de  l'entreprendre  enuers  nous,  nous  montrent  vn  singulier  effect  d'amitié.  C'est 
aimer  sainement,  d'entreprendre  à  blesser  et  offencer,  pour  profiter,  III,  624. 

La  vérité  mesme,  n'a  pas  ce  priuilege,  d'estre  employée  à  toute  heure,  et  en 
toute  sorte  :  son  vsage  tout  noble  qu'il  est,  a  ses  circonscriptions,  et  limites.  11 
adulent  souuent,  comme  le  monde  est,  qu'on  la  lasche,  non  seulement  sans  l'ruict, 
mais  dommageablement,  et  encore  iniustement,  III,  626. 

CROYANCE  (religion). 

Quiconque  est  creu  de  ses  presuppositions,  il  est  nostre  maistre  et  nostre  Dieu  : 
il  prendra  le  plant  de  ses  fondemens  si  ample  et  si  aisé,  que  par  iceux  il  nous 
pourra  monter,  s'il  veut,  iusques  aux  nues,  II,  300. 

Il  est  bien  aisé  sur  des  fondemens  auouez,  de  bastir  ce  qu'on  veut;  car  selon 
la  loy  et  ordonnance  de  ce  commencement,  le  reste  des  pièces  du  bastiment  se 
conduit  aisément,  sans  se  démentir.  Par  cette  voye  nous  trouuons  nostre  raison 
bien  fondée,  et  discourons  à  boule-veuë,  II,  300. 

Ce  qui  fait  qu'on  ne  doubte  de  guère  de  choses,  c'est  que  les  communes  im- 
pressions on  ne  les  essaye  iamais;  on  n'en  sonde  point  le  pied,  où  git  la  faute 
et  la  foiblesse  :  on  ne  débat  que  sur  les  branches  :  on  ne  demande  pas  si  cela 
est  vray,  mais  s'il  a  esté  ainsin  ou  ainsin  entendu.  Ainsi  se  remplit  le  monde 
et  se  confit  en  fadeze  et  en  mensonge,  II,  298. 

"  II  est  besoin  que  le  peuple  ignore  beaucoup  de  choses  vrayes,  et  en  croye 
beaucoup  de  fausses  »,  disoient  Sceuola  grand  pontife  et  Varron  grand  théolo- 
gien en  leur  temps,  II,  290. 

CRUAUTÉ. 

l'ay  souuent  ouy  dire,  que  la  couardise  est  mère  de  la  cruauté  :  et  si  ay  par 
expérience  apperçeu,  que  cette  aigreur,  et  aspreté  de  courage  malitieux  et  in- 
humain, s'accompagne  coustumierement  de  mollesse  féminine.  l'en  ay  veu  des 
plus  cruels,  subiots  à  pleurer  aiséement,  et  pour  des  causes  friuoles,  II,  568. 

Les  premières  cruautez  s'exercent  pour  elles  mesmes,  de  là  s'engendre  la  crainte 


E.17G  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

d'vne  iuste  reuanche,  qui  produict  après  vne  enfileure  de  nouuelles  cruautez. 
pour  les  estoulTer  les  vues  par  les  autres,  II,  bSO. 

La  vaillance  de  qui  c'est  l'effect  de  s'exercer  seulement  contre  la  résistance, 
s'arreste  à  voir  l'ennem}-  à  sa  mercy.  La  pusillanimité,  pour  dire  qu'elle  est  aussi 
de  la  feste,  n'ayant  peu  se  mesler  à  ce  premier  rolle,  prend  pour  sa  part  le  se- 
cond, du  massacie  et  du  sang,  II,  568. 

DEVOIR. 

11  ne  faut  pas  laisser  au  iugement  de  chacun  la  cognoissance  de  son  deuoir  : 
il  le  luy  faut  prescrire,  non  pas  le  laisser  choisir  à  son  discours  :  autrement 
selon  l'imbécillité  et  variété  infinie  de  nos  raisons  et  opinions,  nous  nous  for- 
gerions en  fin  des  deuoirs,  qui  nous  mettroient  à  nous  mander  les  vns  les  autres. 
II,  202. 

DÉVOTION  (Dieu,  prières). 

Il  ne  faut  mesler  Dieu  en  nos  actions  qu'auecque  reuerence  et  attention  pleine 
d'honneur  et  de  respect,  I,  581. 

Nous  deuons  plus  larement  le  prier  :  d'autant  qu'il  n'est  pas  aisé,  que  nous 
puissions  si  souuent  remettre  nostre  ame,  en  cette  assiette  réglée,  reformée,  et 
deuotieuse,  où  il  faut  qu'elle  soit  pour  ce  faire  :  autrement  nos  prieies  ne  sont 
pas  seulement  vaines  et  inutiles,  mais  vitieuses.  Pardonne  nous,  disons  nous, 
comme  nous  pardonnons  à  ceux  qui  nous  ont  olTencez.  Que  disons  nous  par  là, 
sinon  que  nous  luy  offrons  nostre  ame  exempte  de  vengeance  et  de  rancune? 
Toutesfois  nous  inuoquons  Dieu  et  son  ayde,  au  complot  de  nos  fautes,  et  le  con- 
uions  à  l'iniustice.  L'auaricieux  le  prie  pour  la  conseruation  vaine  et  superflue 
de  ses  thresors  :  l'ambitieux  pour  ses  victoires,  et  conduite  de  sa  fortune  :  le 
voleur  l'employé  à  son  ayde,  pour  franchir  le  hazard  et  les  difficulté?.,  qui  s'op- 
posent à  l'exécution  de  ses  meschantes  entreprinses  :  ou  le  remercie  de  l'aisance 
qu'il  a  trouué  à  desgosiller  vn  passant.  Au  pied  de  la  maison,  qu'ils  vont  eschel- 
1er  ou  petarder,  ils  font  leurs  prières,  l'intention  et  l'espérance  pleine  de  cruauté, 
de  luxure,  et  d'auarice,  I,  590. 

Aux  vices  leur  heure,  son  heyre  à  Dieu,  comme  par  compensation  et  compo- 
sition, I,  .582. 

11  semble,  à  la  vérité,  que  nous  nous  semons  de  nos  prières,  comme  d'vn  iar- 
gon,  et  comme  ceux  qui  emplojent  les  paroles  sainctes  et  diuines  à  des  sorcel- 
leries et  effects  magiciens  :  et  que  nous  facions  nostre  compte  que  ce  soit  de  la 
contexture,  ou  son,  ou  suitte  des  motz,  ou  de  nostre  contenance,  que  dépende 
leur  effect.  Car  ayans  l'ame  pleine  de  concupiscence,  non  touchée  de  repentance, 
ny  d'aucune  nouuelle  reconciliation  enuers  Dieu,  nous  luy  allons  présenter  ces 
parolles  que  la  mémoire  preste  à  nostre  langue  :  et  espérons  en  tirer  vne  ex- 
piation de  nos  fautes,  I,  592. 

C'est  erreur,  de  recourir  à  Dieu  en  tous  nos  desseins  et  entreprises,  et  l'ap- 
peller  à  toute  sorte  de  besoing,  et  en  quelque  lieu  que  nostre  foiblesse  veut  de 
l'aide,  sans  considérer  si  l'occasion  est  iuste  ou  iniuste;  et  d'escrier  son  nom,  et 
sa  puissance,  en  quelque  estât,  et  action  que  nous  soyons,  pour  vitieuse  qu'elle 
soit,  I,  578. 

Celuy  qui  appelle  Dieu  à  son  assistance,  pendant  qu'il  est  dans  le  train  du 
vice,  il  fait  comme  le  coupeur  de  bourse,  qui  appelleroit  la  iustice  à  son  ayde;  ou 
comme  ceux  qui  produisent  le  nom  de  Dieu  en  tesmoignage  de  mensonge,  I,  592. 

Sa  iustice  et  ,sa  puissance  sont  inséparables.  Pour  néant  implorons  nous  sa 
force  en  vne  mauuaise  cause.  Il  faut  auoir  l'ame  nette,  au  moins  en  ce  moment, 
auquel  nous  le  prions,  et  deschargée  de  passions  vitieuses  :  autrement  nous  luy 
présentons  nous  mesmes  les  verges  dequoy  nous  chastier,  I,  580. 

Quelle  prodigieuse  conscience  se  peut  donner  repos,  nourrissant  en  mesme 
giste,  d'vne  société  si  accordante  et  si  paisible,  le  crime  et  le  iuge?  I,  582. 

L'assiette  d'vn  homme  meslant  à  vne  vie  exécrable  la  deuotion,  semble  estre 
aucunement  plus  condemnable,  que  celle  d'vn  homme  conforme  à  soy,  et  dissolu 
par  tout.  I,  580. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         DIEU.  E.177 


DIEU    (dévotion.    PlUKliKS,    IfF.I.UIlUN). 

L'humaine  raison  ne  lait  que  loiiruoyoi'  par  tout,  mais  spécialement  quand 
elle  se  mesle  des  choses  diuinos,  II,  264. 

Rien  du  nostre  ne  se  peut  apparier  ou  rapporter  en  quelque  façon  que  ce  soit, 
à  la  nature  diuine,  qui  ne  la  tache  et  marque  d'autant  d'imperfection.  Cette 
infinie  beauté,  puissance,  et  bonté,  comment  peut  elle  soufl'rir  quelque  cor- 
respondance et  similitude  à  chose  si  abiecte  que  nous  sommes,  sans  vn  ex- 
trême interest  et  déchet  de  sa  diuine  grandeur?  II,  208.  • 

Timœus  ayant  à  instruire  Socrates  de  ce  qu'il  sçait  des  Dieux,  du  monde,  et 
des  honmies,  propose  d'en  parler  comme  vn  homme  à  vn  homme;  et  qu'il  suffit, 
si  ses  raisons  sont  probables,  comme  les  raisons  d'vn  autre  :  car  les  exactes  rai- 
sons n'èstre  en  sa  main,  ny  en  mortelle  main,  II,  2.38. 

le  connoy  par  moi,  dit  S.  Bernard,  combien  Dieu  est  incompréhensible,  puis 
que  les  pièces  de  mon  estre  propre,  ie  ne  les  puis  comprendre,  II,  30G. 

Nostre  arrogance  nous  remet  tousiours  en  auant  cette  blasphemeuse  apparia- 
tion,  II,  280. 

Qu'est-il  plus  vain,  que  de  vouloir  deuiner  Dieu  par  nos  analogies  et  coniec- 
tures  :  le  régler,  et  le  monde,  à  nostre  capacité  et  à  nos  loix?  et  nous  seruir 
aux  despens  de  la  diuinité,  de  ce  petit  eschantillon  de  suffisance  qu'il  luy  a  pieu 
despartir  à  nostre  natui'elle  condition?  et  par  ce  que  nous  ne  pouuons  estendrc» 
nostre  veuë  iusques  en  son  glorieux  siège,  l'auoir  ramené  ça  bas  à  nostre  cor-, 
ruption  et  à  nos  misères?  II,  250. 

Quand  nous  disons  que  l'infinité  des  siècles  tant  passez  qu'auenir  n'est  à  Dieu 
qu'vn  instant  :  que  sa  bonté,  sapience,  puissance  sont  mesme  chose  auecques 
son  essence;  nostre  parole  le  dit,  mais  nostre  intelligence  ne  l'appréhende  point. 
Et  toutesfois  nostre  outrecuidance  veut  faire  passer  la  diuinité  par  nostre  esta- 
mine.  Et  de  là  s'engendrent  toutes  les  resueries  et  erreurs,  desquelles  le  monde 
se  trouue  saisi,  ramenant  et  poisant  à  sa  balance,  chose  si  esloignée  de  son  poix, 
II,  278. 

De  toutes  les  opinions  humaines  et  anciennes  touchant  la  religion,  celle  là  me 
semble  auoir  eu  plus  de  vray-semblance  et  plus  d'excuse,  qui  recognoissoit  Dieu 
comme  vne  puissance  incompréhensible,  origine  et  conseruatrice  de  toutes 
choses,  toute  bonté,  toute  perfection,  receuant  et  prenant  en  bonne  part  l'hon- 
neur et  la  reuerence,  que  les  humains  luy  reudoient  soubs  quelque  visage,  soubs 
quelque  nom  et  en  quelque  manière  que  ce  fust,  II,  250. 

Pythagoras  adombra  la  vérité  de  plus  })res  :  iugeant  que  la  cognoissance  de 
cette  cause  première,  et  estre  des  estres,  deuoit  estre  indéfinie,  sans  prescrij)- 
tion,  sans  déclaration  :  que  ce  n'ostoit  autre  chose,  que  l'extrême  effort  de  nostre 
imagination,  vers  la  perfection  :  chacun  en  ajnplifiant  l'idée  selon  sa  capacité. 
Mais  l'esprit  humain  ne  se  sçauroit  maintenir  vaguant  en  cet  infini  de  pensées 
informes  :  il  les  luy  faut  compiler  a  certaine  image  à  son  modelle.  La  majesté 
diuine  s'est  ainsi  pour  nous  aucunement  laissé  circonscrire  aux  limites  corpo- 
rels, II,  250. 

A  chaque  chose,  il  n'est  rien  plus  cher,  et  plus  estimable  que  son  estre  et  cha- 
cune rafiporte  les  qualitcz  de  toutes  autres  choses  à  ses  propres  qualitez.  Les- 
quelles nous  pouuons  bien  estendre  et  racourcir,  mais  c'est  tout;  car  hors  de  ce 
rapport,  et  de  ce  principe,  nostre  imagination  ne  peut  aller,  ne  peut  rien  di- 
uiner  autre,  et  est  impossible  qu'elle  sorte  de  là,  et  qu'elle  passe  au  delà.  D'où 
naissent  ces  anciennes  conclusions.  De  toutes  les  formes,  la  plus  belle  est  celle 
de  l'homme  :  Dieu  donc  est  de  cette  forme.  Nulle  raison  ne  peut  loger  ailleurs 
qu'en  l'humaine  figure  :  Dieu  est  donc  reuestu  de  l'humaine  figure,  II,  286. 

Cette  attribution  à  la  diuinité  d'vne  forme  corporelle  est  cause  de  ce  qui  nous 
adulent  tous  les  iours,  d'attribuer  à  Dieu,  les  euenements  d'importance,  d'vne 
particulière  assignation.  Par  ce  qu'ils  nous  poisent,  il  semble  qu'ils  luy  poisent 
aussi,  et  qu'il  y  regarde  plus  entier  et  plus  attentif,  qu'aux  euenements  qui  nous 
sont  légers,  ou  d'vne  suitte  ordinaire.  Nostre  arrogance  .nous  remet  tousiours  en 
auant  cette  blasiihemeuse  appariation,  II,  278. 

ESSAIS   DE    MONTAIG.NK.    —   T.    IV.  12 


E.d78  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Los  hommes,  dit  sainct  Paul,  sont  deuenus  fols  cuidans  estre  sages,  et  ont 
mué  la  gloire  do  Diou  incorruptible,  en  l'image  de  l'homme  corruptible,  II,  280. 


DIEUX. 

11  est  bien  plus  aisé  de  satisfaire,  parlant  de  la  nature  des  Dieux,  que  de  la 
nature  des  hommes  :  par  ce  que  l'ignorance  des  auditeurs  preste  vne  belle  et 
large  carrière,  et  toute  liberté,  au  maniement  d'vne  matière  cachée.  Il  adulent 
de  là,  qu'il  n'est  rien.creu  si  ferme,  I,  376. 

Il  est  impossible  d'establir  quelque  chose  de  certain,  de  l'immortelle  nature, 
par  la  mortelle.  II,  262. 

L'homme  ne  peut  estre  que  ce  qu'il  est,  ny  imaginer  que  selon  sa  portée.  C'est 
grande  présomption,  dit  Plutarque,  à  ceux  qui  ne  sont  qu'hommes,  d'entrepren- 
dre de  parler  et  discourir  des  Dieux,  présumant  comprendre  par  quelque  légère 
coniecture,  des  effects  qui  sont  hors  de  sa  cognoissance,  II,  264. 

Sur  quoi  fondement  de  leur  iustico  les  Dieux  peuuent  ils  recognoistre  et  re- 
compenser à  riiomme  après  sa  mort  ses  actions  bonnes  et  vertueuses  :  puis  que 
ce  sont  eux  mesmes,  qui  les  ont  acheminées  et  produites  en  luy?  Et  pourquoy 
s'offencent  ils  et  vengent  sur  luy  les  vitieuses,  puis  qu'ils  l'ont  eux-mesmes  pro- 
duict  en  cette  condition  fautiue,  et  que  d'vn  seul  clin  de  leur  volonté,  ils  le 
peuuent  empescher  de  faillir?  II,  262. 

Platon  en  ses  loix  fait  trois  sortes  d'iniurieuse  créance  des  Dieux,  Qu'il  n'y  en 
ayt  point.  Qu'ils  ne  se  meslent  pas  de  noz  affaires.  Qu'ils  ne  refusent  rien  à  noz 
vœux,  offrandes  et  sacrifices.  La  première  erreur,  selon  son  aduis,  ne  dura 
iamais  immuable  en  homme,  depuis  son  enfance,  iusques  à  sa  vieillesse.  Les  deux 
suiuantes  peuuent  souffrir  do  la  constance,  I,  580. 

De  toutes  les  religions,  que  Sainct  Paul  trouua  en  crédit  à  Athènes,  celle  qu'ils 
auoyent  dédiée  à  vne  diuinité  cachée  et  incognue,  luy  sembla  la  plus  excu- 
sable, II,  250. 

DIRE  ET  FAIRE. 

Le  dire  est  autre  chose  que  le  faire,  il  faut  considérer  le  presche  à  part, 
et  le  prescheur  à  part.  C'est  sans  doubte  vne  belle  harmonie,  quand  le  faire,  et  le 
dire  vont  ensemble  :  et  ie  ne  veux  pas  nier,  que  le  dire,  lors  que  les  actions 
suyuent,  ne  soit  de  plus  d'authorité  et  efficace  :  mais  vn  homme  de  bonnes 
mœurs,  peut  auoir  des  opinions  faulces,  et  vn  meschant  peut  prescher  vérité, 
voire  celuy  qui  ne  la  croit  pas,  II,  610. 

Apprenons  non  à  bien  dire,  mais  à  bien  faire,  I,  436. 

DISSIMULATION. 

le  hay  capitalement  cette  nouuelle  vertu  de  faintise  et  dissimulation,  qui  est  à 
cett'heure  si  fort  en  crédit  :  et  de  tous  les  vices,  ie  n'en  trouue  aucun  qui  tesmoi- 
gne  tant  de  lascheté  et  bassesse  de  cœur,  II,  492. 

DIVERS. 

Tout  abbregé  sur  vn  bon  Hure  est  vn  sot  abbregé,  III,  368. 
L'accoustumance,  n'est  pas  chose  de  peu,  I,  158. 

L'accoustumance  est  vne  seconde  nature,  et  non  moins  puissante,  III,  496. 
L'accoustumance  à  porter  le  trauail,  est  accoustumance  à  porter  la  douleur,  I,  244. 
Tu  as  bien  largement  affaire  chez  toy,  ne  t'esloigne  pas,  III,  486. 
II  nefaut  pas  se  precipiteresperduement  après  nos  affectionset  interestz,  III, 50l. 
L'affirmation  et  l'opiniastreté,  sont  signes  exprez  de  bestise,  III,  620. 
A  combien  de  soties  âmes  sert  vne  mine  froide  et  taciturne,  de  tiltre  de  pru- 
dence et  de  capacité?  III.  352. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        DIV.  E.179 

Nostro  appétit  est  irrésolu  et  incertain  :  il  ne  sçait  rien  tenir,  ny  rien  iouyr  de 
bonne  façon,  I,  566. 

Il  luesprise  et  outrepasse  ce  qui  hiy  est  en  main,  pour  courir  après  ce  qu'il  n'a 
pas,  I,  434. 

Bien  apprentis  sont  ceux  qui  syndiquent  leur  liberté,  I,  31(5. 

0  le  vilain  et  sot  estude  d'estudier  sou  argent,  se  plaire  à  le  manier  et  recom- 
terî  c'est  par  là,  que  l'auai'iee  faict  ses  approches,  III,  392. 

Les  arts  qui  pi'omettent  de  nous  tenir  le  corps  en  santé,  et  l'anie  en  santé,  nous 
promettent  beaucoup  :  mais  aussi  n'en  est-il  point,  qui  tiennent  moins  ce  qu'elles 
promettent,  III,  628. 

L'auarice  et  la  profusion  ont  pareil  désir  d'attirer  et  d'acquérir,  I,  570. 

Les  Barbares  ne  nous  sont  de  rien  plus  merueilleux  que  nous  sommes  à  eux  : 
ny  auec  plus  d'occasion,  I,  162. 

La  bestise  et  la  sagesse  se  rencontrent  en  mesme  poinct  de  sentiment  et  de 
resolution  à  la  souffrance  des  accidens  humains  :  les  sages  gourmandent  et  com- 
mandent le  niai,  et  les  autres  l'ignorent,  I,  570. 

On  dit  :  Il  ne  sçauroit  estre  bon,  })uis  qu'il  n'est  pas  mauuais  aux  meschans.  Ou 
bien  ainsi  :  11  faut  bien  qu'il  soit  bon,  puis  qu'il  l'est  aux  mcschants  mesme,  III,  598. 
Chacun  en  sa  chacunicre,  I,  390. 

Quand  nous  voyons  vu  homme  mal  chaussé,  nous  disons  que  ce  n'est  pas  mer- 
ueillc,  s'il  est  chaussetier,  I,  218. 
Rien  ne  chatouille,  qui  ne  pince,  III,  564. 

La  plus  grande  chose  du  monde  c'est  de  sçauoir  estre  àsoy,  I,  418. 
La  maladie  se  sent,  la  santé,  peu  ou  point  :  ny  les  choses  qui  nous  oignent,  au 
prix  de  celles  qui  nous  poignent,  III,  520. 

Toutes  choses  ont  leur  saison,  les  bonnes  et  tout.  Et  le  puis  dire  mon  patenostro 
hors  de  propos,  II,  586. 
Nous  admirons  et  poisons  mieux  les  choses  estrangeres  que  les  ordinaires,  II,  104. 
La  difficulté  donne  prix  aux  choses,  II,  434. 
L'application  aux  légères  choses  nous  retire  des  iustes,  III,  270. 
La  plus  part  des  choses  du  monde  se  font  par  elles  mesmes,  III,  358. 
Toutes  choses  tombent  en  discrétion  et  modification,  III,  458. 
On  me  faict  haïr  les  choses  vray-semblabl(>s,  quand  on  me  les  plante  pour  in- 
faillibles, III,  534. 
Les  choses  se  guérissent  par  leurs  contraires  :  le  mal  guérit  le  mal,  I,  350. 
11  n'est  chose,  en  quoy  le  monde  soit  si  diuers  qu'en  coustumes  et  loix.  Telle 
chose  esticy  abominable,  qui  apporte  recommandation  ailleurs,  II,  370. 

On  commence  ordinairement  ainsi  :  Comment  est-ce  que  cela  se  fait?*mais,  se 
fait-il?  faudroit  il  dire,  III,  528. 

Qui  ne  peut  venir  à  bout  du  commencement,  ne  viendra  pas  à  bout  de  la  fin. 
Ny  n'en  soustiendra  la  cheute,  qui  n'en  a  peu  soustenir  l'esbranslement,  III,  510. 
Il  y  a  beaucoup  de  commodité. à  n'estre  pas  si  aduisé,  II,  218. 
L'issue  authorise  souuent  vue  tresinepte  conduite,  III,  354. 
La  confession  généreuse  et  libre,  encrue  le  reproche,  et  desarme  l'iniure,  III,  444. 
le  croy  des  hommes  plus  mal  aisément  la  constance  que  toute  autre  chose,  et 
rien  plus  aisément  que  l'inconstance,  I,  602. 
Pour  mesurer  la  constance,  il  faut  nécessairement  sçauoir  la  souffrance,  III,  506. 
Tous  les  iours  la  sotte  contenance  d'vn  autre,  m'aduertit  et  m'aduise,  111,332. 
Nous  nous  corrigeons  aussi  sottement  souuent,  comme  nous  corrigeons  les  au- 
tres, III,  412. 

Cqmme  si  nous  auions  l'attouchement  infect,  nous  corrompons  par  nostre  ma- 
niement les  choses  qui  d'elles  mesmes  sont  belles  et  bonnes,  I,  344. 
Il  ne  faut  pas  croire  à  chacun,  parce  que  chacun  peut  dire  toutes  choses,  II,  358. 
Encore  fau^il  du  courage  à  craindre,  III,  288. 

le  n'ay  point  l'authorité  d'estre  creu,  nyne  le  désire,  me  sentant  trop  mal  ins- 
truit pour  instruire  autruy,  I,  232. 

l'ay  peur  que  nous  ayons  les  yeux  plus  grands  que  le  ventre,  et  [)lus  de  curio- 
sité, que  nous  n'auons  de  capacité,  I,  354. 


E.180  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

La  curiosité  de  cognoistre  les  choses,  a  esté  donnée  aux  hommes  pour  fléau, 
dit  la  saincte  Escriture,  II,  470. 

La  défense  attire  l'entreprise,  et  la  deffiance  l'offense,  II,  438. 

Nous  défendre  quelque  chose,  c'est  nous  en  donner  enuie.  Nous  l'abandonner 
tout  à  faict,  c'est  nous  en  engendrer  mespris,  II,  43L 

Il  ne  faut  rien  designer  de  si  longue  haleine,  ou  au  moins  auec  telle  intention 
de  se  passionner  pour  en  voir  la  fin,  I,  120. 

Nostre  désir  s'accroist  par  la  malaisance,  II,  432. 

Au  pis  aller,  courez  tousiours  par  retranchement  de  despence,  deuant  la  pau- 
ureté,  III,  382. 

Qui  est  desloyal  enuers  la  vérité,  l'est  aussi  enuers  le  mensonge,  II,  194. 

Il  fait  bien  piteux,  et  hazardeux,  despendre  d'vn  autre,  III,  420. 

Nous  ne  prestons  volontiers  à  la  deuotion  que  les  offices,  qui  flattent  noz  pas- 
sions, II,  120. 

Les  dieux  s'esbatent  de  nous  à  la  pelote,  et  nous  agitent  à  toutes  mains,  III,  404. 

La  difficulté  donne  prix  aux  choses,  II,  434. 

Qui  establit  son  discours  par  brauerie  et  commandement,  montre  que  la  raison 
y  est  foible,  III,  r.36. 

Il  y  a  encore  plus  de  discours  à  instruire  autruy  qu'à  estre  instruit,  III,  160. 

Le  vray  miroir  de  nos  discours,  est  le  cours  de  nos  vies,  I,  272. 

La  dissimilitude  s'ingère  d'elle-mesme  en  nos  ouurages,  nul  art  peut  arriuer  à 
la  similitude,  III,  600. 

Il  ne  nous  faut  guère  de  doctrine,  pour  viure  à  nostre  aise,  III,  550. 

Comme  le  donner  est  qualité  ambitieuse,  et  de  prerogatiue,  aussi  est  l'accepter 
qualité  de  summission,  III,  422. 

La  douleur  a  quelque  chose  de  non  euitable,  en  son  tendre  commencement  :  et 
la  volupté  quelque  chose  d'euitable  en  sa  fin  excessiue,  III,  692. 

Platon  veut  plus  de  mal  à  l'excès  du  dormir,  qu'à  l'excès  du  boire,  III,  662. 

Les  effectz  nous  touchent,  mais  les  moyens,  nullement,  III,  528. 

L'éloquence  faict  iniure  aux  choses,  qui  nous  destourne  à  soy,  I,  278. 

Nous  embrassons  tout,  mais  nous  n'estreignons  que  du  vent,  I,  353. 

Enfant,  tu  es  venu  au  monde  pour  endurer  :  endure,  souffre  et  tais  toy,  III,  648. 

L'enfance  et  la  décrépitude  se  rencontrent  en  imbécillité  de  cerueau,  I,  570. 

Nous  ne  faisons  que  nous  entregloser.  Tout  fourmille  de  commentaires  :  d'au- 
theurs,  il  en  est  grand  cherté,  III,  606. 

Les  esprits  hauts,  ne  sont  de  guère  moins  aptes  aux  choses  basses,  que  les  bas 
esprits  aux  hautes,  III,  466. 

On  s'appriuoise  à  toute  estrangeté  par  l'vsage  et  le  temps,  III,  532. 

Où  cuidez-vous  pouuoir  estre  sans  empeschement  et  sans  destourbier?  111,458. 

Estant  peu  apprins  par  les  bons  exemples,  ie  me  sers  des  mauuais  :  desquels  la 
leçon  est  ordinaire,  III,  322. 

Ny  vne  estuue  nj-  vne  leçon,  n'est  d'aucun  fruict  si  elle  ne  nettoyé  et  ne  de- 
crasse,  III,  460. 

Les  euenemens,  sont  maigres  tesmoings,  de  nostre  prix  et  capacité,  III,  356. 

Autant  se  fâche  le  cheuelu  comme  le  chauue,  qu'on  luy  arrache  le  poil,  I,  470. 

Il  y  a  moyen  de  faillir  en  la  solitude,  comme  en  la  compagnie,  I,  428. 

Tout  ce  qui  peut  estre  faict  vn  autre  iour,  le  peut  estre  auiourd'huy,  I,  118. 

le  ne  me  mesle  pas  de  dire  ce  qu'il  faut  au  monde  :  d'autres  a.ssés  s'en  mes- 
lent  :  mais  ce  que  i'y  fay,  I,  214. 

Toute  femme  estrangere  nous  semble  honneste  femme,  III.  434. 

Les  femmes  qui  communiquent  tant  qu'on  veut  leurs  pièces  à  garçonner  :  à 
medeciner,  la  honte  le  deffend,  I,  346. 

La  fortune  a  meilleur  aduis  que  nous,  I,  386. 

La  fortune  se  rencontre  souuentau  train  de  la  raison,  I,  384. 

Plaisante  foy,  qui  ne  croid  ce  qu'elle  croid,  que  pour  n'auoir  le  courage  de  le 
descroire. 

La  gloire  et  la  curiosité,  sont  les  fléaux  de  nostre  ame.  Cette  cy  nous  conduit 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         DIV.  E.181 

à  mettre  le  nez  par  tout,  et  celle  là  nous  défend  de  rien  laisser  irrésolu  et  indécis, 

I,  296. 

Le  goust  des  biens  et  des  maux  despend  en  bonne  partie  de  l'opinion  que  nous 
en  auons,  I,  440. 

La  hastiueté  se  donne  elle  mesme  la  Ïambe,  s'entraue  et  s'arreste,  III,  494. 
L'homme  qui  présume  de  son  scauoir,  ne  seait  pas  encore  que  c'est  que  scauoir, 

II,  132.  '  . 

L'honmie  n'est  non  plus  instruit  de  la  cognoissance  de  soy,  en  la  partie  corpo- 
relle, qu'en  la  spirituelle,  II,  330. 

L'homme  forge  mille  plaisantes  societez  entre  Dieu  et  luy,  II,  290. 

L'honneur,  c'est  vn  priuilege  qui  tire  sa  principale  essence  de  la  rareté  :  et  la 
vertu  mesme,  II,  12. 

Qui  veut  guérir  de  l'ignorance,  il  faut  la  confesser,  III,  534. 

Combien  en  a  rendu  de  malades  la  seule  force  de  l'imagination,  II,  208. 

Nous  sommes  plus  ialoux  de  nostre  interest,  que  de  celuy  de  nostre  créateur, 

II,  206. 

le  ne  fav  qu'aller  et  venir  :  mon  iugement  ne  tire  pas  tousiours  auant,  il  flotte, 
il  vague.  II.  348. 

C'est  iniustice  de  se  douloir  qu'il  soit  aduenu  à  quelqu'vn,  ce  qui  peut  aduenir 
à  chacun,  III,  648. 

L'extrême  espèce  d'iniustice,  c'est  que,  ce  qui  est  iniuste,  soit  tenu  pour  iuste, 

III,  558. 

11  est  force  de  faire  tort  en  détail,  qui  veut  faire  droict  en  gros;  et  iniustice 
en  petites  choses,  qui  veut  venir  à  chef  de  faire  iustice  es  grandes,  III,  612. 
L'innocence  ciuile,  se  mesure  selon  les  lieux  et  saisons,  III,  468. 

Les  ieunes  se  doiuent  faire  instruire;  les  hommes  s'exercer  à  bien  faire  :  les 
vieux  se  retirer  de  toute  occupation  ciuile  et  militaire,  viuants  à  leur  discrétion, 
sans  obligation  à  certain  office,  I,  418. 

Il  ne  faut  pas  iuger  les  conseils  par  les  euenemens,  III,  358. 

C'est  vne  mauuaise  prouision  de  pais,  que  iurisconsultes,  et  médecins,  111,602. 

Nostre  licence  nous  porte  tousiours  au  delà  de  ce  qui  nous  est  loisible,  et  per- 
mis, III,  462. 

La  licence  des  iugements,  est  vn  grand  destourbier  aux  grands  affaires,  II,  454. 

Quiconque  combat  les  loix,  menace  les  gents  de  bien  d'escourgées  et  de  la 
corde,  I,  244. 

On  est  assez  à  temps  à  sentir  le  mal,  sans  l'allonger  par  le  mal  de  la  peur,  111,660. 

La  tourbe  des  menus  maux,  offence  plus,  que  la  violence  d'vn,  pour  grand  qu'il 
soit,  III,  386. 

Seruons  nous  pour  consolation  des  maux  presens,  de  la  souuenance  des  biens 
passez,  et  appelons  à  nostre  secours  vn  contentement  esuanouy,  pour  l'opposer  à 
ce  qui  nous  presse,  II,  214. 

De  nos  maladies  la  plus  saunage,  c'est  mespriser  nostre  estre,  III,  692. 

Il  n'est  pas  marchant  qui  tousiours  gaigne,  III,  366. 

La  maturité  a  ses  deffaux,  comme  la  verdeur,  et  pires,  III,  586. 

La  meschanceté  fabrique  des  tourmens  contre  soy,  I,  660. 

Ny  les  Dieux,  ny  les  gens  de  bien,  dict  Platon,  n'acceptent  le  présent  d'vn  mes- 
chant,  I,  594. 

Chacun  peut  faire  bonne  mine  par  le  dehors,  plein  au  dedans  de  fiebure  et  d'ef- 
froy,  II,  454. 

On  se  doibt  modérer,  entre  la  haine  de  ladouleur,  et  l'amour  de  la  volupté,  111,484. 

Le  monde  n'est  que  variété  et  dissemblance,  I,  612. 

Qui  se  faicl  mort  viuant,  est  subiect  d'estre  tenu  pour  vif  mourant,  III,  442. 

Il  est  incertain  où  la  mort  nous  attende,  attendons  la  par  tout,  I,  116. 

L'estre  mort  ne  fasche  pas,  mais  ouy  bien  le  mourir,  II,  426. 

La  moins  préméditée  mort^  est  la  plus  heureuse,  et  plus  deschargee,  II,  576. 


E.182  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Les  plus  mortes  morts  sont  les  plus  saines,  I,  120. 

La  plus  volontaire  mOrt,  c'est  la  plus  belle,  I,  630. 

Les  morts  le  ne  les  plains  guère,  et  les  enuierois  plustost;  mais  ie  plains  bien 
fort  les  mourans,  II,  100. 

Vne  mort  courte,  est  le  souuerain  heur  de  la  vie  humaine,  II,  421. 

Le  soing  des  morts  nous  est  en  recommandation,  III,  471. 

A  celuy  qui  disoit  à  Socrates  :  Les  trente  tyrans  t'ont  condamné  à  la  mort  :  Et 
nature  eux,  respondit-il,  I,  142. 

Nature  peut  tout,  et  fait  tout,  I,  218. 

La  vie  despend  de  la  volonté  d'autruy,  la  mort  de  la  nostre,  I,  630. 

Nature  nous  a  mis  au  monde  libres  et  desliez,  nous  nous  emprisonnons  en  cer- 
tains destroits,  III,  428. 

Les  loix  de  Nature  nous  apprennent  ce  que  iustemcnt  il  nous  faut,  III,  494. 

Tout  ce  qui  vient  au  reuers  du  cours  de  nature,  peut  estre  fascheux  :  mais  ce. 
qui  vient  selon  elle,  doibt  estre  tousiours  plaint,  III,  674. 

La  nécessité  compose  les  hommes  et  les  assemble.  Cette  cousture  fortuite  se 
forme  après  en  loix,  III,  398. 

Il  fait  bon  auoir  bon  nom,  c'est  à  dire  crédit  et  réputation,  I,  508. 

Le  meilleur  prétexte  de  nouuelleté  est  tres-dangereux,  I,  177. 

De  l'obeyr  et  céder  naist  toute  autre  vertu,  comme  du  cuider,tout  péché,  II,  204. 

L'offence  a  ses  droits  outre  la  iustice,  III,  442. 
L'offence  a  sans  mesure  plus  d'aigreur,  que  n'a  la  perte,  III,  562. 
L'ordre  est  vne  vertu  morne  et  sombre,  III,  116. 

L'orgueil  gist  en  la  pensée  :  la  langue  n'y  peut  auoirqu'vne  bien  légère  part,  1,682. 
Est  l'opiniastreté  sœur  de  la  constance,  au  moins  en  vigueur  et  fermeté,  11,628. 
L'opiniastreté  est  plus  excusable,  que  la  pusillanimité,  III,  516. 
Toute  opinion  est  assez  forte,  pour  se  faire  cspouser  au  prix  de  la  vie,  I,  446. 
11  est  impossible  de  voir  deux  opinions  semblables  exactement  :  non  seulement 
en  diuers  hommes,  mais  en  uîesme  homme,  à  diuersos  heures,  III,  604. 
Il  faut  refuser  l'opportunité  à  toute  action  importune,  II,  28. 

Il  y  a  prou  de  loy  de  parler  par  tout,  et  pour  et  contre,  I,  518. 

Le  n'oser  parler  rondement  de  soy,  accuse  quelque  faute  de  cœur,  III,  372. 

Qui  n'arreste  le  partir,  n'a  garde  d'arrester  la  course,  III,  510. 

La  passion  nous  commande  bien  plus  viuement  que  la  raison,  II,  660. 

Lapauuretédes  biens,  est  aisée  à  guérir;  lapauureté  de  l'ame,  impossible,  111,496. 

Chacun  poise  sur  le  péché  de  son  compagnon,  et  esleue  le  sien,  I,  612. 

La  peur  extrême,  et  l'extrême  ardeur  de  courage  troublent  également  le  ventre, 
et  le  îaschent,  I,  568. 

Qui  a  sa  pensée  à  prendre,  ne  l'a  plus  à  ce  qu'il  a  prins.  La  conuoitise  n'a  rien 
si  propi'e  que  d'estre  ingrate,  III,  298. 

Qui  ne  peut  d'ailleurs,  si  se  paye  de  sa  bourse,  III,  522. 

Ce  qui  poiucte,  touche  et  esueille  mieux,  que  ce  qui  plaist,  III,  332. 

Tout  ce  qui  plaist,  ne  paist  pas,  III,  552. 

C'est  vne  sotte  présomption,  aller  desdeignant  et  condamnant  pour  faux,  ce  qui 
ne  nous  semble  pas  vray-semblable,  I,  290. 

Il  se  faut  prester  à  auti-uy,  et  ne  se  donner  qu'à  soy-mesme,  III,  484. 

La  prière  me  gaigne,  la  menace  me  icbute,  la  faueur  me  plove,  la  crainte  me 
roydit,  III,  380. 

La  prudence  et  l'amour  ne  pcuuent  ensemble,  III,  276. 

La  prudence  si  tendre  et  circonspecte,  est  mortelle  enncmye  des  hautes  exécu- 
tions, I,  196. 

La  raison  nous  ordonne  bien  d'aller  tousiours  mesme  chemin,  mais  non  toutes- 
fois  mesme  train,  I,  500. 

La  raison  va  tousiours  torte,  boiteuse,  et  deshanchée  :  et  auec  le  mensonge 
comme  auec  la  vérité.  Par  ainsin,  il  est  malaisé  de  descouurir  son  mescompte,  et 
desreglement,  II,  316. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         DIV.  E.183 

^'ul  ne  mot  en  compte  publique  sa  recette  :  chacun  y  met  son  acquest,  I, 
•240. 

Nostre  religion  est  faite  pour  extirper  les  vices  :  elle  les  couure,  les  nourrit,  les 
incite,  II,  122. 

La  ressemblance  ne  faict  pas  tant,  vn,  comme  la  différence  faict,  autre.  Nature 
s'est  obligée  à  ne  rien  faire  autre,  qui  ne  fust  dissemblable,  III,  600. 

le  veux  estre  riche  par  nioy,  non  par  emprunt,  II,  451. 

Rien  de. noble  ne  se  faict  sans  hazard,  I,  lOli. 

Rien  n'est  extrême,  qui  a  son  pareil,  I,  'M\. 

Il  en  est  sur  qui  les  belles  robes  pleurent,  III,  291. 

Nostre  sagesse  n'est  que  folle  deuant  Dieu  :  et  de  toutes  les  vanitez  la  plus  vaine 
c'est  l'homme,  II,  132. 

En  beaucoup  de  sagesse,  beaucoup  de  desplaisir,  II,  218. 

Ce  n'est  pas  sagesse  d'écrire  à  l'enuy  de  celuy,  qui  peut  proscrire,  III,  330. 

Il  n'est  science  si  ardue  que  de  bien  sçauoir  viure  cette  vie,  III,  692. 

La  plus  belle  science  qui  soit,  c'est  la  science  d'obéir  et  de  coninifOider,  I,  222. 

L'estude  des  sciences  amollit  et  efféminé  les  courages,  plus  qiPil  ne  les  fermit  et 
aguerrit,  I,  224. 

Combien  a\'-ie  veu  de  mon  temps,  d'hommes  abestis,  par  temei-aire  auidité  de 
science,  I,  264. 

A  quoy  la  science,  à  qui  n'a  plus  de  teste?  III,  498. 

Toute  cognoissance  s'achemine  en  nous  par  les  sens,  ce  sont  nos  maistres,  II, 
390. 

On  se  met  souuent  sottement  en  pourpoinct,  pour  ne  sauter  pas  mieux  qu'en 
saye,  111,410. 

D'apprendre  qu'on  a  dit  ou  fait  vne  sottise,  ce  n'est  rien  que  cela.  Il  faut  ap- 
prendre, qu'on  n'est  qu'vn  sot.  Instruction  bien  plus  ample,  et  importante,  111,618. 

Qui  craint  de  souffrir,  il  souffre  desia  de  ce  qu'il  craint,  III,  660. 

C'est  folie  de  rapporter  le  vray  et  le  faux  à  nostre  suffisance,  I,  288. 

II  est  bien  plus  aisé  et  pUis  plaisant  de  suiure,  que  de  guider,  I,  488. 

Le  temps  me  laisse  :  sans  luy  rien  ne  se  possède,  III,  498. 
L'achat  donne  tiltre  au  diamant,  la  difficulté  à  la  vertu,  la  douleur  à  la  deuotion, 
l'aspreté  à  la  médecine,  I,  464. 

Chaque  vsage  a  sa  raison,  III,  454. 

L'vsage,  conduit  selon  raison,  a  plus  d'aspreté,  que  n'a  l'abstinence,  II,  646. 
L'vsage  nous  faict  veoir,  vne  distinction  énorme,  entre  la  deuotion  et  la  con- 
science, III,  592. 

La  vérité  et  le  mensonge  ont  leurs  visages  conformes,  le  port,  le  goust,  et  les 
alleures  pareilles  :  nous  les  regardons  de  mesme  œil,  III,  528. 

La  vertu  est  qualité  plaisante  et  gaj'e,  III,  186. 

La  vertu  n'est  pas  plus  grande,  pour  estre  plus  longue  :  la  vérité,  pour  estre  plus 
vieille,  n'est  pas  plus  sage,  II,  632. 

Tel  a  la  veuë  claire,  qui  ne  l'a  pas  droitte  :  et  par  conséquent  void  le  bien,  et 
ne  le  suit  pas  :  et  void  la  science,  et  ne  s'en  sert  pas,  I,  218. 

Le  vice,  n'est  que  des-reglement  et  faute  de  mesure;  et  par  conséquent,  il  est 
impossible  d'y  attacher  la  constance,  I,  602. 

C'est  nostre  vice,  que  nous  voyons  plus  ce  qui  est  dessus  nous,  que  volontiers, 
ce  qjni  est  dcssoubs,  III,  402. 

C'est  chose  tendre  que  la  vie,  et  aysee  à  troubler,  III,  386. 

La  deffaillance  d'vne  vie,  est  le  passage  à  mille  autres  vies.  Prenons,  sur  tout 
les  vieillards  :  le  premier  temps  opportun  qui  nous  vient,  III,  582. 

On  peut  continuer  à  tout  temps  l'estude,  non  pas  l'escholage.  La  sotte  chose, 
qu'vn  vieillard  abécédaire,  II,  588. 

La  laideur  d'vne  vieillesse  aduouee,  est  moins  vieille,  et  moins  laide  à  mon  gré, 
qu'vne  autre  peinte  et  lissée,  III,  282. 


E.184  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Qui  abandonne  en  son  propre,  le  sainement  et  gayement  viure  pour  en  seruir 
atitruy,  prent  à  mon  gvé  vn  mauuais  et  desnaturé  party,  III,  492. 
Le  viure,  c'est  seruir,  si  la  liberté  de  mourir  en  est  à  dire,  I,  630. 
Qui  ne  vit  aucunement  à  aulruy,  ne  vit  guère  à  soy,  III,  490. 

DIVERSION. 

Peu  de  chose  nous  diuertit  et  destourne  :  car  peu  de  chose  nous  tient.  Nous  ne 
regardons  gueres  les  subiecis  en  gros  et  seuls  :  ce  sont  des  circonstances  ou  des 
images  menues  et  superficielles  qui  nous  frappent  :  et  des  vaines  escorces  qui 
reiallissent  des  subiects,  III,  172. 

DOULEUR. 

La  douleur  ne  tient  qu'autant  de  place  en  nous,  que  nous  luy  en  faisons,  I,  456. 

Tout  ainsi  que  l'ennemy  se  rend  plus  aspre  à  nostre  fuite,  aussi  s'enorgueillit 
la  douleur,  à  nous  voir  trembler  soubs  elle.  Elle  se  rendra  de  bien  meilleure  com- 
position, à  qui  luy  fera  teste  :  il  se  faut  opposer  et  bander  contre,  I,  456. 

D'auantage  cela  nous  doit  consoler,  que  naturellement,  si  la  douleur  est  vio- 
lente, elle  est  courte  :  si  elle  est  longue,  elle  est  légère,  I,  454. 

Mon  iugement  m'empesche  bien  de  regimber  et  gronder  contre  les  inconue- 
nients  que  Nature  m'ordonne  à  souffrir,  mais  non  pas  de  les  sentir,  III,  184. 

l'ay  tousiours  trouué  ce  précepte  cérémonieux,  qui  ordonne  si  exactement  de 
tenir  bonne  contenance  et  vn  maintien  desdaigneux,  et  posé,  à  la  souffrance  des 
maux.  Pourquoi  la  philosophie  se  va  elle  amusant  à  ces  apparences  externes? 
Qu'elle  laisse  ce  soing  aux  farceurs  et  maistres  de  rhetoi'ique,  qui  font  tant  d'es- 
tat  de  nos  gestes.  Qu'elle  condone  hardinjent  au  mal,  cette  lascheté  vojelle,  si 
elle  n'est  ny  cordiale,  ny  stomacale  :  et  preste  ses  pleintes  A'olontaires  au  genre 
des  souspirs,  sanglots,  palpitations,  pallissements,  que  nature  a  mis  hors  de  nos- 
tre puissance.  Pourueu  que  le  coui-age  soit  sans  effroy,  les  parolles  sans  deses- 
poir, qu'elle  se  contente.  Qu'importe  que  nous  tordions  nos  bras,  pourueu  que 
nous  ne  tordions  nos  pensées?  Si  le  corps  se  soulage  en  se  plaignant,  qu'il  le  face  : 
se  tracasse  à  sa  fantasie,  qu'il  crie  tout  à  faict,  III,  26. 

Ce  que  nous  deuons  craindre  principalement  en  la  mort,  c'est  la  douleur  son 
auant-coureuse  coustumiere.  Toutesfois  ny  ce  qui  va  deuant,  ny  ce  qui  vient 
après,  n'est  des  appartenances  de  la  mort.  Nous  nous  excusons  faussement.  C'est 
plustost  l'impatience  de  l'imagination  de  la  mort,  qui  nous  rend  impatiens  de  la 
douleur  :  nous  la  sentons  doublement  grieue,  de  ce  qu'elle  nous  menace  de  mou- 
rir, I,  452. 

DUEL  (escrime). 

Qu'est-il  plus  farouche  que  de  voir  vne  nation,  où  par  légitime  coustume  il  y 
ayt^^oubles  loix,  celles  de  l'honneur,  et  celles  de  la  iustice,  en  plusieurs  choses  fort 
contraires  :  aussi  rigoureusement  condamnent  celles-là  vn  demanti  souffert, 
comme  celles  icy  vn  demanti  reuanché  :  par  le  deuoir  des  armes,  celuy-là  soit 
dégradé  d'honneur  qui  souffre  vn'iniure,  et  par  le  deuoir  ciuil,  celuy  qui  s'en 
venge  encoure  vne  peine  capitale?  qui  s'adresse  aux  loix  pourauoir  raison  d'vne 
offense  faicte  à  son  honneur,  il  se  deshonnore  :  et  qui  ne  s'y  adresse,  il  en  est 
puny  et  chastic  par  les  loix,  I,  174. 

L'escrime  est  vn  art  vtile  à  sa  fin.  Mais  ce  n'est  pas  proprement  vertu,  puis 
qu'elle  tire  son  appuy  de  l'addresse,  et  qu'elle  prend  autre  fondement  que  de 
soy-mesme.  L'iionneur  des  combats  consiste  en  la  ialousie  du  courage,  non  de 
la  science,  II,  576. 

C'est  aussi  vne  espèce  de  lascheté,  qui  a  introduit  en  nos  combats  singuliers,  cet 
vsage,  de  nous  accompagner  de  seconds,  et  tiers,  et  quarts.  La  solitude  faisoit 
peur  aux  premiers  qui  l'inuenterent  :  car  naturellement  quelque  compagnie  que 
ce  soit,  apporte  confort,  et  soulagement  au  danger.  On  se  seruoit  anciennement 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        DUEL.  E.I80 

de  personnes  tierces,  pour  garder  qu'il  ne  s'y  fist  desordre  et  desloyauté,  et  pour 
tesmoigner  de  la  fortune  du  combat.  Mais  depuis  qu'on  a  pris  ce  train,  qu'ils 
s'engagent  eux  mesmes,  quiconque  y  est  conuié,  ne  peut  honnestement  s'y  tenir 
comme  spectateur,  de  peur  qu'on  ne  luy  attribue,  que  ce  soit  faute  ou  d'affection, 
ou  do  cœur.  Outre  l'iniustice  d'vne  telle  action,  et  vilenie,  d'engager  à  la  protec- 
tion de  vostre  honneur,  autre  valeur  et  force  que  la  vostre,  ie  trouue  du  desad- 
uantagc  à  vn  homme  de  bien,  et  qui  pleinement  se  fie  de  soy,  d'aller  meslcr  la 
fortune,  à  celle  d'vn  second  :  chacun  court  assez  de  hazard  pour  soy,  sans  le 
courir  encore  pour  vn  autre  :  et  a  assez  à  faire  à  s'asseurer  en  sa  propre  vertu, 
pour  la  deffence  de  sa  vie,  sans  commettre  chose  si  chère  en  mains  tierces.  Car 
s'il  n'a  esté  expressément  marchandé  au  contraire,  des  quatre,  c'est,  vne  partie 
liée.  Si  vostre  second  est  à  terre,  vous  en  auez  deux  sus  les  bras,  II,  572. 

Nos  pères  se  contentoyent  de  reuencher  vne  iniure  par  vn  démenti,  vn  démenti 
par  vn  coup,  et  ainsi  par  ordre,  lis  estoient  assez  valeureux  pour  ne  craindre  pas 
leur  aduersaire,  viuant,  et  outragé.  Nous  tremblons  de  frayeur,  tant  que  nous 
le  voyons  en  pieds,  II,  572.  ^ 

>  ÉCONOMIE. 

le  vis  du  iour  à  la  iournée,  et  me  contente  d'auoir  dequoy  suffire  aux  besoings 
presens  et  ordinaires  :  aux  extraordinaires  toutes  les  prouisions  du  monde  n'y 
sçauroyont  suffire.  Et  est  follie  de  s'attendre  que  fortune  elle  mesmes  nous  arme 
iamais  suffisamment  contre  soy.  C'est  de  noz  armes  qu'il  la  faut  combattre.  Les 
fortuites  nous  trahiront  au  bon  du  faict,  I,  472. 

Tout  compté,  il  y  a  plus  de  peine  à  garder  l'argent  qu'à  l'acquérir,  I,  470. 

Mal  aysément  peu^on  establir  bornes  certaines  au  désir  d'amasser  et  arrester 
vn  poinct  à  l'espargne  :  on  va  tousiours  grossissant  cet  amas,  iusques  à  se  priuer 
vilainement  de  la  iouyssance  de  ses  propres  biens  :  et  l'establir  toute  en  la  garde, 
et  n'en  vser  point,  I,  470. 

Tout  homme  pecunieux  est  auaricieux  à  mon  gré,  I,  470. 


EDUCATION. 

La^  plus  grande  difficulté  et  importance  de  l'humaine  science  semble  estre  en 
cet  endroit,  où  il  se  traitte  de  la  nourriture  et  institution  des  enfans,  I,  232. 

Ce  n'est  pas  raison  de  nourrir  vn  enfant  au  giron  de  ses  parens.  Cette  amour 
naturelle  les  attendrit  trop,  et  relasche,  voire  les  plus  sages,  I,  242. 

Ne  prenez  iamais,  et  donnez  encoi'c  moins  à  vos  femmes,  la  charge  de  leur 
nourriture  :  laissez  les  former  à  la  fortune,  souz  des  loix  populaires  et  naturelles  : 
laissez  à  la  coustume,  de  les  dresser  a  la  frugalité  et  à  l'austérité;  qu'ils  ayent 
plustot  à  descendre  de  l'aspreté,  qu'à  monter  vers  elle,  III,  670. 

Noz  plus  grands  vices  prennent  leur  ply  dés  nostre  plus  tendre  enfance,  et  nos- 
tre  principal  gouuerhement  est  entre  les  mains  des  nourrices.  C'est  passetemps 
aux  mères  de  veoir  vn  enfant  tordre  le  col  à  vn  poulet,  et  s'esbatre  à  blesser  vn 
chien  et  vn  chat.  Et  tel  père  est  si  sot,  de  prendre  à  bon  augure  d'vne  ame  mar- 
tiale, quand  il  voit  son  fils  gourmer  iniurieusement  vn  païsant,  ou  vn  laquay,  qui 
ne  se  défend  point  :  et  à  gentillesse,  quand  il  le  void  affiner  son  compagnon  par 
quelque  malicieuse  desloyauté,  et  tromperie.  Ce  sont  pourtant  les  vrayes  semen- 
ces et  racines  de  la  cruauté,  de  la  tyrannie,  de  la  traliyson.  Elles  se  germent  là,  et 
s'esleuent  après  gaillardement,  et  profitteut  à  force  entre  les  mains  de  la  cous- 
tume. Et  est  vne  tres-dangereuse  institution,  d'excuser  ces  villaines  inclinations, 
par  la  foiblesse  de  l'aage,  et  légèreté  du  subiect,  I,  158.       .     - 

La  laideur  de  la  piperie  ne  dépend  pas  de  la  différence  des  escutz  aux  espin- 
gles  :  elle  dépend  de  soy.  le  trouue  bien  plus  iuste  de  conclurre  ainsi  :  Pourquoy 
ne  tromperoit  il  aux  escutz,  puisqu'il  trompe  aux  espingles?  que,  ce  n'est  qu'aux 
espingles  :  il  n'auroit  garde  de  le  faire  aux  escutz,  I,  158. 

Les  ieux  des  enfants  ne  sont  pas  ieux  :  et  les  faut  iuger  en  eux,  comme  leurs 
plus  sérieuses  actions,  I,  158. 


EJ86  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Les  mères  ont  raison  de  tancer  leurs  enlans,  quand  ils  contrefont  les  borgnes, 
les  boiteux,  et  les  bicles,  et  tels  autres  défauts  de  la  personne  :  car  outre  ce  que 
le  corps  ainsi  tendre  en  peut  receuoir  vn  niauuais  ply,  il  semble  que  la  Fortune 
se  ioiie  à  nous  prendre  au  mot  :  et  i'ay  ouy  reciter  plusieui-s  exemples  de  gens 
deuenus  malades  ayant  dessigné  de  feindre  l'estre,  II,  5o4. 

Ce  nous  est  grande  simplesse  d'abandonner  les  enfans  au  gouuernement  et  à 
la  charge  de  leurs  pères,  au  lieu  d'en  commettre  aux  ioix  la  discipline,  tout  en  vn 
Estât  despendant  de  leur  éducation  et  nourriture?  II,  606. 

A  vn  enfant  de  maison,  qui  rechercfie  les  lettres,  non  pour  le  gaing  ny  tant 
pour  les  commoditez  externes,  que  pour  les  sienes  propres,  et  pour  s'en  enrichir 
et  parer  au  dedans,  ayant  plustost  enuie  d'en  réussir  habiThomme,  qu'homme 
sçauant,  ie  voudrois  qu'on  fust  soigneux  de  luy  choisir  vn  conducteur,  qui  cust 
plustot  la  teste  bien  faicte,  que  bien  pleine  :  et  qu'on  y  requist  tous  les  deux, 
mais  plus  les  moeurs  et  l'entendement  que  la  science,  I,  236. 

A  son  eleue,  il  dira  ce  que  c'est  que  seauoir  et  ignorer,  qui  doit  estre  le  but  de 
l'estude  :  que  c'est  que  vaillance,  tempérance,  et  iustice  :  ce  qu'il  y  a  à  dire  entre 
l'ambition  et  l'auarice  :  la  seruitude  et  la  subiectioii,  la  licence  et  la  liberté  :  à 
quelles  marques  on  congnoit  le  vray  et  solide  contentement  :  iusques  où  il  faut 
craindre  la  mort,  la  douleur  et  la  honte.  Quels  ressors  nous  meuuent,  et  le  moyen 
de  tantdiuers  branles  en  nous.  Car  il  me  semble  que  les  premiers  discours,  de- 
quoy  on  luy  doit  abreuuer  l'entendement,  ce  doiuent  estre  ceux,  qui  règlent  ses 
mœurs  et  son  sens,  qui  luy  apprendront  à  se  cognoistre,  et  à  sçauoir  bien  mou- 
rir et  bien  viure,  I,  254. 

Puis  que  la  Philosophie  est  ce  qui  instruict  à  viure,  et  que  l'enfance  y  a  sa  le- 
çon, comme  les  autres  aages,  pourquoy  ne  la  luy  communique  Ion?  On  nous  ap- 
prend à  viure,  quand  la  vie  est  passée.  Cent  escoliers  ont  pris  la  verolle  auant 
que  d'estre  arriuez  à  leur  leçon  d'Aristote  de  la  tempérance,  I,  262. 

Vn  enfant  en  est  capable  au  partir  de  la  nourrisse,  beaucoup  mieux  que  d'ap- 
prendre à  lire  ou  escrire.  La  philosophie  a  des  discours  pour  la  naissance  des 
hommes,  comme  pour  la  décrépitude,  I,  262. 

Les  Perses  apprenoient  la  vertu  à  leurs  enfans,  comme  les  autres  nations  font 
les  lettres,  I,  220. 

On  demandoit  à  Agesilaus  ce  qu'il  seroit  d'aduis,  que  les  enfans  apprinsent  : 
Ce  qu'ils  doiuent  faire  estans  hommes,  respondit-il,  I,  222. 

C'est  vne  grande  simplesse  d'aprendre  à  nos  enfans,  la  science  dés  astres  et  le 
mouuement  de  la  huictiesme  sphère,  auant  que  les  leurs  propres,  I,  254. 

On  ne  cesse  de  criaillera  leurs  oreilles  comme  qui  verseroit  dans  vn  antonnoir; 
et  leur  charge  ce  n'est  que  redire  ce  qu'on  leur  a  dit.  le  voudroisque  nostre  gou- 
uerneurcorrigeast  cette  partie;  et  que  de  belle  arriuee,  selon  la  portée  de  l'ame, 
qu'il  a  en  main,  il  commençast  à  la  mettre  sur  la  montre,  luy  faisant  gouster  les 
choses,  les  choisir,  et  discerner  d'elle  mesme.  Quelquefois  luy  ouurantle  chemin, 
quelquefois  le  luy  laissant  ouurir.  le  ne  veux  pas  qu'il  inuente,  et  parle  seul  :  ie 
veux  qu'il  escoute  son  disciple  parler  à  son  tour.  Socrates,  et  depuis  Arcesilaus, 
faisoient  premièrement  parler  leurs  disciples,  et  puis  ils  parloient  à  eux,  I,  236. 

Qu'il  ne  luy  demande  pas  seulement  compte  des  mots  de  sa  leçon,  mais  du 
sens  et  de  la  substance.  Et  qu'il  iuge  du  profit  qu'il  aura  fait,  non  par  le  tesmoi- 
gnage  de  sa  mémoire,  mais  de  sa  vie.  Que  ce  qu'il  viendra  d'apprendre,  il  le  luy 
face  mettre  en  cent  visages,  et  accommoder  à  autant  de  diuers  subiects,  pour 
voir  s'il  l'a  encore  bien  pris  et  bien  faict  sien,  I,  238. 

Les  abeilles  pillotent  deçà  delà  les  fleurs,  mais  elles  en  font  après  le  miel  qui 
est  tout  leur;  ce  n'est  plus  thin,  ny  mariolaine.  Ainsi  les  pièces  empruntées  d'au- 
truy,  il  les  transformera  et  confondra,  pour  en  faire  vn  ouurage  tout  sien  :  à 
sçauoir  son  iugementyson  institution,  son  trauail  et  estude  ne  vise  qu'à  le  for- 
mer, I,  240. 

Pour  nous  apprendre  à  bien  iuger,  et  à  bien  parler,  il  nous  faut  exercer  à  par- 
ler et  à  iuger.  A  cet  apprentissage  tout  ce  qui  se  présente  à  nos  yeux,  sert  de 
liure  suffisant  :  la  malice  d'vn  page,  la  sottise  d'vn  valet,  vn  propos  de  table;  le 
commerce  des  hommes  y  est  merueilleusement  propre,  et  la  visite  des  pays  estran- 
gers,  I,  242. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        EDU.  E.187 

Ce  n'est  pas  à  dire  que  ce  ne  soit  vne  belle  et  bonne  chose  que  le  bien  dire  : 
mais  non  pas  si  bonne  qu'on  la  faict,  et  suis  despit  dequoy  nostrc  vie  s'embeson- 
gne  toute  à  cela.  le  voudrois  piemiei'enient  bien  sçauoir  ma  langue,  et  celle  de 
mes  voisins,  où  i'ay  plus  ordinaire  commerce.  C'est  vn  bel  et  grand  agencement 
sans  double,  que  le  Grec  et  Latin,  mais  on  l'acheptc  trop  cher,  I,  280. 

Qu'on  le  rende  délicat  aux  chois  et  triage  de  ses  raisons,  et  aymant  la  perti- 
nence, et  par  conséquent  la  briefueté.  Qu'on  l'instruise  sur  tout  à  se  rendre,  et  à 
quitter  les  armes  à  la  vérité,  tout  aussi  tost  qu'il  l'apperceura  :  soit  qu'elle  naisse 
es  mains  de  son  aduersaire,  soit  qu'elle  naisse  en  luy-mesmes  par  quelque  raui- 
sement,  I,  246. 

Qu'on  luy  mette  en  fantasie  vne  honneste  curiosité  de  s'enquérir  de  toutes 
choses  :  tout  ce  qu'il  y  aura  de  singulier  autour  de  luy,  il  le  verra,  I,  2-18. 

La  sottise  mesmes,  et  foiblesse  d'autruy  luy  sera  instruction  :  à  contreroUer  les 
grâces  et  façons  d'vn  cliacun,  il  s'engendrera  enuie  des  bonnes,  et  me»pris  des 
mauuaises,  I,  248. 

Qu'il  luy  l'ace  tout  passer  par  l'estamine,  et  ne  loge  rien  en  sa  teste  par  simple 
authorité,  et  à  crédit.  Dans  cette  diuersité  de  iugemens,  il  choisira  s'il  peut  :  si- 
non il  en  demeurera  en  doubte,  I,  238. 

S'il  embrasse  les  opinions  de  Xenophon  et  de  Platon,  par  son  propre  discoure, 
ce  ne  seront  plus  les  leurs,  ce  seront  les  siennes.  Qui  suit  vn  autre,  il  ne  suit 
rien  :  il  ne  trouue  rien  :  voire  il  ne  cerche  rien,  I,  238. 

Nous  nous  laissons  si  fort  aller  sur  les  bras  d'autruy,  que  nous  anéantissons  nos 
forces,  I,  122. 

La  vérité  et  la  raison  sont  communes  à  vn  chacun  et  ne  sont  plus  à  qui  les  a 
dites  premièrement,  qu'à  qui  les  dit  après.  Qu'il  oublie  hardiment  s'il  veut,  d'où 
il  les  tient,  mais  qu'il  se  les  sache  approprier,  I,  23^. 

Qu'il  celé  tout  ce  dequoy  il  a  esté  secouru,  et  ne  produise  que  ce  qu'il  en  a 
faict.  Nul  ne  met  en  compte  publique  sa  recette  :  chacun  y  met  son  acquest,  1, 240. 

Il  ne  dira  pas  tant  sa  leçon,  comme  il  la  fera.  Il  la  répétera  en  ses  actions.  On 
verra  s'il  y  a  de  la  prudence  en  ses  entreprises  :  s'il  y  a  de  la  bonté,  de.  la  iustice 
en  ses  deportemcnts  :  s'il  a  du  iugement  et  de  la  grâce  en  son  parler  :  de  la  vi- 
gueur en  ses  maladies  :  de  la  modestie  en  ses  ieux  :  de  la  tempérance  en  ses  vo- 
luptez  :  de  l'ordre  en  son  œconomie  :  de  l'indifférence  en  son  goust,  1,270. 

Que  sa  conscience  et  sa  vertu  reluisent  en  son  parler,  et  n'ayent  que  la  raison 
pour  conduite.  Qu'on  luy  face  entendre,  que  de  confesser  la  faute  qu'il  descou- 
urira  en  son  propre  discours,  encore  qu'elle  ne  soit  apperceuë  que  par  luy,  c'est 
vn  elfet  de  iugement  et  de  sincérité,  qui  sont  les  principales  parties  qu'il  cher- 
che. Que  l'opiniatrer  et  contester,  sont  qualitez  communes  :  plus  apparentes  aux 
phis  basses  âmes.  Que  se  r'aduiser  et  se  corriger,  abandonner  vn  mauuais  party, 
sur  le  cours  de  son  ardeur,  ce  sont  qualitez  rares,  fortes  et  philosophiques,  1, 246. 

Si  son  gouuerneur  tient  de  mon  humeur,  il  luy  foi-mera  la  volonté  à  estre 
tres-loyal  seruiteur  de  son  Prince,  et  tres-affectionné,  et  tres-courageux  :  mais  il 
luy  i-efroidira  l'enuie  de  s'attacher  autrement  que  par  vn  deuoir  publique,  I,  246. 

Que  notre  disciple  soit  bien  pourucu  de  choses,  les  parolles  ne  suiuront  que 
trop  :  il  les  traînera,  si  elles  ne  veulent  suiure.  l'en  oy  qui  s'excusent  de  ne  se 
pouuoir  exprimer;  et  font  contenance  d'auoir  la  teste  pleine  de  plusieurs  belles 
choses,  mais  à  faute  d'éloquence,  ne  les  pouuoir  mettre  en  euidence  :  c'est  vne 
baye.  Sçauez  vous  à  mon  aduis  que  c'est  que  cela?  ce  sont  des  ombrages,  qui 
leur  viennent  de  quelques  conceptions  informes,  qu'ils  ne  peuuent  démesler  et 
esclarcir  au  dedans,  ny  par  conséquent  pi-oduire  au  dehors,  I,  272. 

Cette  institution  se  doit  conduire  par.  vne  seucre  douceur,  non  comme  il  se 
fait.  Au  lieu  de  conuier  les  enfans  aux  lettres,  on  ne  leur  présente  à  la  vérité, 
qu'hdrreur  et  cruauté.  Ostez  moy  la  violence  et  la  force;  il  n'est  rien  à  mon 
aduis  qui  abâtardisse  et  estourdisse  si  fort  vne  nature  bien  née.  Si  vous  auez 
enuie  qu'il  craigne  la  honte  et  le  chastiement,  ne  l'y  endurcissez  pas.  Endur- 
cissez le  à  la  sueur  et  au  froid,  au  vent,  au  soleil  et  aux  hazards  qu'il  luy  faut 
mespriser.  Ostez  luy  toute  mollesse  et  délicatesse  au  vestir  et  coucher,  au  man- 
ger et  au  boire  :  accoustumez  le  à  tout  :  que  ce  ne  soit  pas  vn  beau  garçon  et 
dameret,  mais  vn  garçon  vert  et  vigoureux,  I,  266. 


E.188  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

l'axiciise  toute  violence  en  l'éducation  d'vne  ame  tendre,  qu'on  dresse  pour 
l'honneur,  et  la  liberté  :  et  tiens  que  ce  qui  ne  se  peut  faire  par  la  raison,  et  par 
prudence,  et  addresse,  ne  se  fait  iamais  par  la  force,  II,  26. 

le  n'ay  veu  autre  effect  aux  verges,  sinon  de  rendre  les  âmes  plus  lasches,  ou 
plus  malitieusement  opiniastres,  II,  26. 

11  faut  régler  l'ame  à  son  deuoir  par  raison,  non  par  nécessité  et  par  le  besoin, 
ny  par  rudesse  et  par  force,  II,  26. 

Pour  tout  cecy,  ie  no  veux  pas  qu'on  emprisonne  ce  garçon,  ie  ne  veux  pas 
qu'on  l'abandonne  à  la  colère  et  humeur  melancholique  d'vn  furieux  maistre 
d'escole  :  ie  ne  veux  pas  corrompre  son  esprit,  à  le  tenir  à  la  géhenne  et  au 
trauail,  quatorze  ou  quinze  heures  par  iour,  comme  vn  portefaiz.  Ny  ne  trou- 
ueroye  bon,  quand  par  quelque  complexion  solitaire  et  melancholique,  on  ie 
verroit  adonné  d'vne  application  trop  indiscrette  à  l'estude  des  Hures,  qu'on  la 
luy  nourrist.  Cela  les  rend  ineptes  à  la  conuersation  ciuile,  et  les  destourne 
de  meilleures  occupations.  Et  combien  ay-ie  veu  de  mon  temps,  d'hommes 
abestis,  par  téméraire  auidité  de  science?  I,  261. 

A  la  vérité  nous  voyons  encores  qu'il  n'est  rien  si  gentil  que  les  petits  enfans 
en  France  :  mais  ordinairement  ils  trompent  l'espérance  qu'on  en  a  conceuë 
et  hommes  faicts,  on  n'y  voit  aucune  excellence.  l'ay  ouy  tenir  à  gens  d'enten- 
dement, que  ces  collèges  où  on  les  enuoie,  les  abrutissent  ainsin,  I,  264. 

Au  nostre,  vn  cabinet,  vn  iardin,  la  table,  et  ie  lict,  la  solitude,  la  compa- 
gnie, le  matin  et  le  vespre,  toutes  heures  luy  seront  vues  :  toutes  places  luy 
seront  estude  :  car  la  philosophie,  qui,  comme  formatrice  des  iugements  et  des 
meurs,  sera  sa  principale  leçon,  a  ce  priuilege,  de  se  mesler  par  tout,  I,  2ô4. 

le  retombe  volontiers  sur  ce  discours  de  l'ineptie  de  nostre  institution.  Elle  a 
eu  pour  sa  fin,  de  nous  faire,  non  bons  et  sages,  mais  sçauans  :  elle  y  est  arriuée. 
Elle  ne  nous  a  pas  appris  de  suyure  et  embrasser  la  vertu  et  la  prudence  :  mais 
elle  nous  en  a  imprimé  la  deriuation  et  l'etymologie.  Nous  sçauons  décliner 
vertu,  si  nous  ne  sçauons  l'aymer.  Si  nous  ne  sçauons  que  c'est  que  prudence 
par  effect,  et  par  expérience,  nous  le  sçauons  par  iargon  et  par  cœur,  II,  516. 

Ceux  qui,  comme  nostre  vsage  porte,  entreprenent  d'vne  mesme  leçon  et  pa- 
reille mesure  de  conduite,  régenter  plusieurs  esprits  de  si  diuerses  mesures  et 
formes  :  ce  n'est  pas  merueille,  si  en  tout  vn  peuple  d'enfants,  ils  en  rencontrent 
à  peine  deux  ou  trois,  qui  rapportent  quelque  iuste  fruit  de  leur  discipline,  I,  236. 

Il  faut  s'enquérir  qui  est  mieux  sçauant,  non  qui  est  plus  sçauant.  Nous  ne 
trauaillons  qu'à  remplir  la  mémoire,  et  laissons  l'entendement  et  la  conscience 
vuide,  I,  208. 

Que  mon  guide  se  souuienne  où  vise  sa  charge;  et  qu'il  n'imprime  pas  tant  à 
son  disciple,  la  date  de  la  ruine  de  Carthage,  que  les  mœurs  de  Hannibal  et  de 
Scipion  :  ny  tant  où  mourut  Marcellus,  que  pourquoy  il  fut  indigne  de  son  de- 
uoir, qu'il  mourust  là.  Qu'il  ne  luy  apprenne  pas  tant  les  histoires,  qu'à  en  iuger, 
I,  248. 

Les  inclinations  naturelles  s'aident  et  fortifient  par  institution  :  mais  elles  ne 
se  changent  gueres  et  surmontent.  Mille  natures,  de  mon  temps,  ont  eschappé 
vers  la  vertu,  ou  vers  le  vice,  au  trauers  d'vne  discipline  contraire.  On  n'ex- 
tirpe pas  ses  qualités  originelles,  on  les  couure,  on  les  cache,  III,  120. 

Les  ieux  mesmes  et  les  exercices  seront  vne  bonne  partie  de  l'estude  :  la  course, 
la  lucte,  la  musique,  la  danse,  la  chasse,  le  maniement  des  chenaux  et  des  armes, 
le  veux  que  la  bien-seance  extérieure,  et  l'entre-gent,  et  la  disposition  de  la  per- 
sonne se  façonne  quant  et  quant  l'ame.  Ce  n'est  pas  vne  ame,  ce  n'est  pas  vn 
corps  qu'on  dresse,  c'est  vn  homme,  il  n'en  faut  pas  faire  à  deux.  Et  comme  dit 
Platon,  il  ne  faut  pas  les  dresser  l'vn  sans  l'autre,  mais  les  conduire  également, 
comme  vne  couple  de  chenaux  attelez  à  mesme  timon,  I,  266. 

Ce  n'est  pas  assez  que  nostre  institution  ne  nous  gaste  pas,  il  faut  qu'elle  nous 
change  en  mieux,  I,  216. 

Ce  sont  natures  belles  et  fortes  qui  se  maintiennent  au  trauers  d'vne  mauuaise 
institution,  I,  216. 

Vne  bonne  institution  change  le  iugement  et  les  mœurs,  II,  516. 

Il  faut  apprendre  soigneusement  aux  enfants  de  haïr  les  vices  de  leur  propre 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        ÉDU.  E.189 

contexture,  et  leur  en  faut  apprendre  la  naturelle  difformité,  à  ce  qu'ils  les 
fuient  non  en  leur  action  seulement,  mais  sur  tout  en  leur  cœur  :  que  la  pensée 
mesme  leur  en  soit  odieuse,  quelque  masque  qu'ils  portent,  I,  158. 

Le  corps  est  encore  souple,  on  le  doit  à  cette  cause  plier  à  toutes  façons  et 
coustumes  :  et  pourueu  qu'on  puisse  tenir  l'appétit  et  la  volonté  soubs  boucle, 
qu'on  i-ende  hardiment  vn  ieune  homme  commode  à  toutes  nations  et  con»pa- 
gnies,  voire  au  desreglement  et  aux  excès,  si  besoing  est.  Son  exercitation  suiue 
l'vsage.  Qu'il  puisse  faire  toutes  choses,  et  n'ayme  à  faire  que  les  bonnes,  1, 268. 

Il  n'est  rien  qu'on  doiue  tant  recommander  à  la  ieunesse,  que  l'actiueté  et  la 
vigilance.  Nostre  vie  n'est  que  mouuement,  III,  660. 

Qui  par  souhait  ne  trouue  plus  plaisant  et  plus  doux,  reuenir  poudreux  et  vic- 
torieux d'un  combat,  que  de  la  paulme  ou  du  bal,  auec  le  prix  de  cet  exercice  : 
ie  n'y  trouue  autre  remède,  sinon  qu'on  le  mette  pâtissier:  fust  il  fils  d'vn  Duc, 
I,  260. 

Vn  ieune  homme,  doit  troubler  ses  règles,  pour  esueiller  sa  vigueur  ;  la  garder 
de  moisir  et  de  s'apoltronir.  Et  n'est  train  de  vie,  si  sot  et  si  débile,  que  celuy 
qui  se  conduict  par  ordonnance  et  discipline.  Il  se  reiettera  souuent  aux  excez 
mesme,  s'il  m'en  croit  :  autrement,  la  moindre  desbauche  le  ruyne.  Il  se  rend 
incommode  et  des-aggreable  en  conuersation.  La  plus  contraire  qualité  à  vn 
honneste  homme,  c'est  la  délicatesse  et  obligation  à  certaine  façon  particulière. 
Et  elle  est  particulière,  si  elle  n'est  ployable,  et  soupple.  Il  y  a  de  la  honte,  de 
laisser  à  faire  par  impuissance,  ou  de  n'oser,  ce  qu'on  voit  faire  à  ses  compai- 
gnons.  Par  tout  ailleurs,  il  est  indécent  :  mais  il  est  vitieux  et  insupportable  à 
vn  homme  de  guerre,  lequel  se  doit  accoustumer  à  toute  diuersité,  et  inégalité 
de  vie,  III,  636. 

Voicy  mes  leçons  :  Celuy-là  y  a  mieux  proffité,  qui  les  fait,  que  qui  les  sçait. 
Si  vous  le  voyez,  vous  l'oyez  :  si  vous  l'oyez,  vous  le  voyez,  I,  270. 

Le  guain  de  nostre  estude,  c'est  en  estre  deuenu  meilleur  et  plus  sage,  I,  240. 

ÉLOQUENCE. 

En  la  vertu  parliere,  ie  ne  trouue  pas  gi-and  choix,  entre  ne  sçauoir  dire  que 
mal,  ou  ne  sçauoir  rien  que  bien  dire,  I,  434. 

Vn  rhetoricien  du  temps  passé,  disoit  que  son  mestier  estoit,  de  choses  petites 
les  faire  paroistre  et  trouuer  grandes.  C'est  vn  cordonnier  qui  sçait  faire  de 
grands  souliers  à  vn  petil  pied,  I,  558. 

Au  don  d'éloquence,  nous  voyons  que  les  vus  ont  la  facilité  et  la  promptitude, 
et  ce  qu'on  dit,  le  boutehors  si  aisé,  qu'à  chasque  bout  de  champ  ils  sont  prests  : 
les  autres  plus  tardifs  ne  parlent  iamais  rien  qu'elabouré  et  prémédité.  En  ces 
deux  diuers  aduantages,  le  tardif  seroit  mieux  mieux  Prescheur,  ce  me  semble,  et 
l'autre  mieux  Aduocat,  I,  68. 

La  part  de  l'Aduocat  est  plus  difficile  que  celle  du  Prescheur  :  et  nous  trou- 
uons  pourtant  ce  m'est  aduis  plus  de  passables  Aduocats  que  Prescheurs,  au 
moins  en  France.  Il  semble  que  ce  soit  plus  le  propre  de  l'esprit,  d'auoir  son 
opération  prompte  et  soudaine,  et  plus  le  propre  du  iugement,  de  l'auoir  lente 
et  posée,  I,  70. 

Fy  de  l'éloquence  qui  nous  laisse  enuie  de  soy,  non  des  choses,  I,  436. 

C'est  vn  vtil  inuenté  pour  manier  et  agiter  vue  tourbe,  et  vne  commune  desre- 
glée  :  et  est  vtil  qui  ne  s'employe  qu'aux  Estais  malades,  comme  la  médecine,  1, 558. 

En  ceux  où  le  vulgaire,  où  les  ignorans,  où  tous  ont  tout  peu,  comme  celuj' 
d'Athènes,  de  Rhodes,  et  de  Rome,  et  où  les  choses  ont  esté  en  perpétuelle  tem- 
peste,  là  ont  afflué  les  orateurs,  I,  560. 

Les  republiques  qui  se  sont  maintenues  en  vn  estât  réglé  et  bien  policé,  elles 
n'ont  pas  faict  grand  compte  d'orateurs.  Ariston  définit  sagement  la  rhétorique, 
science  à  persuader  le  peuple  :  Socrates,  Platon,  art  de  trompei-  et  de  flatter.  Et 
ceux  qui  le  nient  en  là  générale  description  le  vérifient  par  tout,  en  leurs  pré- 
ceptes :  ils  font  estât  de  tromper  nostre  iugement,  et  d'abastardir  et  corrompre 
l'essence  des  choses,  I,  558. 

L'éloquence  a  fleury  le  plus  à  Rome  lors  que  les  affaires  ont  esté  en  plus  mau- 


E.190  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

uais  estât,  et  que  l'oi-age  des  guerres  ciuiles  les  agitoit;  comme  vn  champ  libre 
et  indompté  porte  les  herbes  plus  gaillardes.  Il  semble  par  là  que  les  polices, 
qui  dépendent  d'vn  Monarque,  en  ont  moins  de  besoin  que  les  autres  :  car  la 
bestise  et  facilité,  qui  se  trouue  en  la  commune,  et  qui  la  rend  subiecte  à  estre 
maniée  et  contournée  par  les  oreilles,  au  doux  son  de  cette  harmonie,  sans  venir 
à  poiser  et  connoistre  la  vérité  des  choses  par  la  force  de  raison;  cette  facilité, 
dis-ie,  ne  se  trouue  pas  si  aisément  en  vn  seul,  et  est  plus  aisé  de  le  garentir 
par  bonne  institution  et  bon  conseil,  de  Timpression  de  cette  poison,  I,  569. 

ENFANTS. 

Une  vraye  affection  et  bien  réglée  pour  nos  enfants  deuroit  naistre,  et  s'aug- 
menter auec  la  cognoissance  qu'ils  nous  donnent  d'eux,  II,  22. 

le  n'aj'  iamais  estimé  qu'estre  sans  enfans,  fust  vn  défaut  qui  deust  rendre  la 
vie  moins  complète,  et  moins  contente.  La  vacation  stérile,  a  bien  aussi  ses  com- 
moditez.  Les  enfans  sont  du  nombre  des  choses,  qui  n'ont  pas  fort  dequoy  estre 
désirées.  Et  si  ont  iustement  dequoy  estre  regrettées,  à  qui  les  perd,  après  les 
auoir  acquises,  III,  478. 

Il  faut  eolloquer  les  enfans,  non  selon  les  facultez  de  leur  pcre,  mais  selon  les 
facultez  de  leur  ame,  I,  262. 

ESCRIME  (duel). 

L'escrime  est  vn  art  vtile  à  sa  fin,  duquel  la  cognoissance  a  grossi  le  cœur  à 
aucuns,  outre  leur  mesure  naturelle.  Mais  ce  n'est  pas  proprement  vertu,  puis 
qu'elle  tire  son  appuy  de  l'addresse,  et  qu'elle  prend  autre  fondement  que  de  soy- 
mesme.  En  mon  enfance,  la  noblesse  fuyoit  la  réputation  de  bon  escrimeur 
comme  iniurieuse  :  et  se  desroboit  pour  l'apprendre,  comme  mestier  de  subtilité, 
desrogeant  à  la  vraye  et  naïfue  vertu.  Cet  exercice,  est 'd'autant  moins  noble, 
qu'il  ne  regarde  qu'vne  fin  priuée  :  qui  nous  apprend  à  nous  entreruyner,  contre 
les  loix  et  la  iustice  :  et  qui  en  toute  façon,  produict  tousiours  des  effects  dom- 
mageables, II,  576. 

ESPÉR-INCE. 

Toutes  choses  sont  esperables  à  vn  homme  pendant  qu'il  vit,  I,  (i36. 

0  la  courageuse  faculté  que  l'espérance  :  qui  en  vn  subiect  mortel,  et  en  vn 
moment,  va  vsurpant  l'infinité,  l'immensité,  et  remplissant  l'indigence  de  son 
maistre,  de  la  possession  de  toutes  les  choses  qu'il  peut  imaginer  et  désirer, 
autant  qu'elle  veut!  Nature  nous  a  là  donné  vn  plaisant  iouët,  I,  514. 

ESPRIT. 

C'est  vn  grand  ouurier  de  miracles  que  l'esprit  humain,  II,  362. 

Il  est  malaisé  de  lui  donner  bornes  :  il  est  curieux  et  auide,  et  n'a  point  oc- 
casion de  s'arrester  plus  tost  à  mille  pas  qu'à  cinquante,  II,  338. 

Sur  ce  mesme  fondement  qu'auoit  Heraclitus,  et  cette  sienne  sentence,  Que 
toutes  choses  auoyent  en  elles  les  visages  qu'on  y  trouuoit,  Democritus  en  tiroit 
vue  toute  contraire  conclusion  :  c'est  que  les  subiects  n'auoient  du  tout  rien  de 
ce  que  nous  y  trouuions  :  et  de  ce  que  le  miel  estoit  doux  à  l'vn,  et  amer  à 
l'autre,  il  argumentoit,  qu'il  n'estoit  ny  doux,  ny  amer,  II,  387. 

C'est  vne  espineuse  entreprinse,  et  plus  qu'il  ne  semble,  de  suyure  vne  alleure 
si  vagabonde,  que  celle  de  nostre  esprit  :  de  pénétrer  les  profondeurs  opaques  de 
ses  replis  internes  :  de  choisir  et  arrester  tant  de  menus  aii"s  de  ses  agitations, 
I,  678. 

Ce  que  ma  force  ne  peut  descouurir,  ie  ne  laisse  pas  de  le  sonder  et  essayer  : 
et  en  retastant  et  pestrissant  cette  nouuelle  matière,  la  remuant  et  l'eschauf- 
fant,  i'ouure  à  celuy  qui  me  suit,  quelque  facilité  pour  en  iouyr  plus  à  son  ayse, 
et  la  luy   rends  plus  soupple,  et  plus  maniable.  Autant  en  fera  le  second  au 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        ESP.  E.191 

tiers  :  qui  est  cause  que  la  difficulté  ne  me  doit  pas  désespérer;  ny  aussi  peu 
mon  impuissance,  car  ce  n'est  que  la  mienne.  L'homme  est  capable  de  toutes 
choses,  comme  d'aucunes,  II,  338. 

Les  hommes  mescognoissent  cette  maladie  naturelle  de  leur  esprit.  Il  ne  faict 
que  fureter  et  quester;  et  va  sans  cesse,  tournoyant,  bastissant,  et  s'empestrant, 
en  sa  besogne  :  comme  nos  vers  à  soye,  et  s'}-  estouffe.  Ce  n'est  rien  que  foiblesse 
particulière,  qui  nous  faict  contenter  de  ce  que  d'autres,  ou  que  nous  mesmes 
auons  trouué  en  cette  chasse  de  cognoissance  :  vn  plus  habile  ne  s'en  contentera 
pas.  11  y  a  tousiours  place  pour  vn  suiuant,  ouy  et  pour  nous  mesmes,  et  route  par 
ailleurs.  11  n'y  a  point  de  fin  en  nos  inquisitions.  Nostre  fin  est  en  l'autre 
monde,  III,  606.  ■• 

C'est  vn  outrageux  glaiue  à  son  possesseur  mesme,  que  l'esprit,  à  qui  ne  sçait 
s'en  armer  ordonnément  et  discrettement.  Et  n'y  a  point  de  beste,  à  qui  il  faille 
plus  iustement  donner  des  orbieres,  pour  tenir  sa  veuë  subjecte,  et  contrainte  de- 
uant  ses  pas;  et  la  garder  d'e.xtrauaguer  ny  çà  ny  là,  hors  les  ornières  que  l'vsage 
et  les  loix  luy  tracent,  II,  334. 

C'est  un  vtil  vagabond,  dangereux  et  téméraire  :  il  est  malaisé  d'y  ioindre  l'or- 
dre et  la  mesure  :  il  s'empesche  soy  mesmes,  II,  334. 

Nous  ne  sommes  ingénieux  qu'à  nous  mal  mener  :  c'est  le  vray  gibbier  de  la 
force  de  nostre  esprit  :  dangereux  vtil  en  desreglement,  III,  254. 

le  hay  vn  esprit  hargneux  et  triste,  qui  glisse  par  dessus  les  plaisirs  de  sa  vie, 
et  s'empoigne  et  paist  aux  malheurs,  III,  186. 

Les  esprits,  voire  pareils  en  force,  ne  sont  ])as  tousiours  pareils  en  application 
et  en  goust,  III,  376. 

ESSAIS. 

Si  ces  Essays  estoient  dignes,  qu'on  en  iugeast,  il  en  pourroit  aduenir  à  mon 
aduis,  qu'ils  ne  plairoient  guère  aux  esprits  communs  et  vulgaires,  ny  guère  aux 
singuliers  et  excellens  :  ceux-là  n'y  entendroient  pas  assez,  ceux-cy  y  entendroient 
trop  :  ils  pourroient  viuoter  en  la  moyenne  région,  I,  572. 

Et  quand  personne  ne  me  lira,  ay-ie  perdu  mon  temps,  de  m'estre  entretenu 
tant  d'heures  oisiues,  àpensemenls  si  vtiles  et  aggrcables?  II,  524. 

Combien  de  fois  m'a  cette  besongne  diuerty  de  cogitations  ennuieuses?  Et  doi- 
uent  estre  comptées  pour  ennuyeuses  toutes  les  friuoles,  II,  524. 

Il  n'est  subiect  si  vain,  qui  ne  mérite  vn  rang  en  cette  rapsodie,  I,  84. 

le  parle  de  tout,  et  de  rien  par  manière  d'aduis.  le  ne  serois  pas  si  hardy  à 
parler,  s'il  m'appartenoit  d'en  estre  creu,  III,  540. 

le  discours  selon  moy,  non  ce  que  ie  croy  selon  Dieu,  d'vne  façon  laïque,  non 
cléricale  :  mais  tousiours  tres-religieuse.  Comme  les  enfants  proposent  leurs  es- 
says, instruisables,  non  instruisants,  I,  590. 

le  sçay  bien  que  fort  peu  de  gens  rechigneront  à  la  licence  de  mes  escrits,  qui 
n'ayent  plus  à  rechigner  à  la  licence  de  leur  pensée.  le  me  conforme  bien  à  leur 
courage  :  mais  i'offence  leurs,  yeux,  III,  186. 

ÉTAT  (gouvernement). 

Toute  domination  populaire  me  semble  la  plus  naturelle  et  équitable,  I,  38. 

A  l'aduis  d'Anacharsis  le  plus  heureux  estât  d'vne  police,  seroit  où  toutes  au- 
tres choses  estants  esgales,  la  precedence  se  mesureroit  à  la  vertu,  et  le  rebut  au 
vice,  I,  494. 

Non  par  opinion,  mais  en  vérité,  l'excellente  et  meilleure  police,  est  à  chacune 
nation,  celle  soubs  laquelle  elle  s'est  maintenue.  Sa  forme  et  commodité  essen- 
tielle dépend  de  l'vsage.  Nous  nous  desplaisons  volontiers  de  la  condition  pré- 
sente. Mais  ie  tiens  pourtant,  que  d'aller  désirant  le  commandement  de  peu,  en 
vn  estât  populaire  :  ou  en  la  monarchie,  vne  autre  espèce  de  gouuernement,  c'est 
vice  et  folie,  III,  398. 

Les  maladies  et  conditions  de  nos  corps,  se  voyent  aussi  aux  estats  et  polices  : 
les  royaumes,  les  republiques  naissent,  fleurissent  et  fanissent  de  vieillesse, 
comme  nous,  II,  554. 


E.192  ESSAIS  DE  MONTAIGNE 

Nostre  police  se  porte  mal.  Il  en  a  esté  pourtant  de  plus  malades,  sans  mourir, 
III,  404. 

Il  est  bien  aysé  d'accuser  d'imperfection  vne  police  :  car  toutes  choses  mortel- 
les en  sont  pleines  :  il  est  bien  aysé  d'engendrer  à  vn  peuple  le  mespris  de  ses 
anciennes  obseruances  :  iamais  homme  n'entreprint  cela,  qui  n'en  vinst  à  bout  : 
mais  d'y  restablir  vn  meilleur  estât  en  la  place  de  celuy  qu'on  a  ruiné,  à  cecy 
plusieurs  se  sont  morfondus,  de  ceux  qui  l'anoient  entreprins,  II,  508. 

Rien  ne  presse  vn  estât  que  l'innouation  :  le  changement  donne  seul  forme  à 
l'iniustice,  et  à  la  tyrannie.  Quand  quelque  pièce  se  démanche,  on  peut  l'estayer  : 
on  peut  s'opposer  à  ce  que  l'altération  et  corruption  naturelle  à  toutes  choses,  ne 
nous  esloigne  trop  de  nos  commencemens  et  principes.  Mais  d'entreprendre  à 
refondre  vne  si  grande  masse,  et  à  changer  les  fondements  d'vn  si  grand  basti- 
ment,  c'est  à  faire  à  ceux  qui  pour  desci-asser  effacent  :  qui  veulent  amender 
les  defîauts  particuliers,  par  vne  confusion  vniuerselle,  et  guarir  les  maladies 
par  la  mort,  III,  400. 

Au  reste,  ie  me  suis  ordonné  d'oser  dire  tout  ce  que  i'ose  faire  :  et  me  deplaist 
des  pensées  mesmes  impubliables,  III,  186. 

Ceux  qui  donnent  le  branle  à  vn  Estât,  sont  volontiers  les  premiers  absorbez 
en  sa  ruine.  Le  fruict  du  trouble  ne  demeure  guère  à  celuy  qui  l'a  esmeu  ;  il  bat 
et  brouille  l'eaue  d'autres  pescheurs,  I,  178. 

Tout  ce  qui  branle  ne  tombe  pas.  La  contexture  d'vn  si  grand  corps  tient  à 
plus  d'vn  clou.  Il  tient  mesme  par  son  antiquité  :  comme  les  vieux  bastimens, 
ausquels  l'aage  a  desrobé  le  pied,  sans  crouste  et  sans  cyment,  qui  pourtant 
viuent  et  soustiennent  en  leur  propre  poix,  III,  404. 

Heureux  peuple,  qui  fait  ce  qu'on  commande,  mieux  que  ceux  qui  comman- 
dent, sans  se  tourmenter  des  causes,  II,  508. 

Le  monde  est  inepte  à  se  guarir.  11  est  si  impatient  de  ce  qui  le  presse,  qu'il 
ne  vise  qu'à  s'en  deffaire,  sans  regarder  à  quel  prix.  II  se  guarit  ordinairement  à 
ses  despens  :  la  descharge  du  mal  présent,  n'est  pas  guarison,  s'il  n'y  a  en  gêne- 
rai amendement  de  condition,  III,  400. 

Quiconque  propose  seulement  d'emporter  ce  qui  le  masche,  il  demeure  court  : 
car  le  bien  ne  succède  pas  nécessairement  au  mal  :  vn  autre  mal  luy  peut  succé- 
der; et  pire,  111,400. 

Qui  se  doit  désespérer  de  sa  condition,  voyant  les  secousses  et  mouuemens  de- 
quoy  Testât  de  Rome  fut  agité,  et  qu'il  supporta?  III,  404. 

La  foiblesse  de  nostre  condition,  nous  pousse  souuent  à  cette  nécessité,  de  nous 
seruir  de  mauuais  moyens  pour  vne  bonne  fin,  II,  55C. 

Epaminondas  ne  pensoit  pas  qu'il  fust  loisible  pour  recouurer  mesmes  la  li- 
bellé de  son  pays,  de  tuer  vn  homme  sans  cognoissance  de  cause,  III,  20. 

Nous  sommes  subiects  à  vne  repletion  d'humeurs  soit  de  bonnes,  soit  de  mauuaises, 
qui  est  l'ordinaire  cause  des  maladies.  De  semblable  repletion  se  voj  ent  les  estats 
souuent  malades  :  et  a  Ion  accoustumé  d'vser  de  diuerses  sortes  de  purgation  : 
tantost  on  donne  congé  à  vne  grande  multitude  de  familles,  pour  en  descharger 
le  pais,  lesquelles  vont  chercher  ailleurs  où  s'accommoder  aux  despens  d'autruy, 
tantost  on  se  rejette  en  la  guerre  estrangere,  II,  554. 

Vne  guerre  estrangere  est  vn  mal  bien  plus  doux  que  la  ciuile  :  mais  ie  ne 
croy  pas  que  Dieu  fauorisast  vne  si  iniuste  entreprise,  d'offencer  et  quereler  au- 
truy  pour  nostre  commodité,  II,  550. 

ÉTAT  MILITAIRE  (profession). 

11  n'est  occupation  plaisante  comme  la  militaire  :  occupation  et  noble  en  exé- 
cution (car  la  plus  forte,  généreuse,  et  superbe  de  toutes  les  vertus,  est  la  vail- 
lance) et  noble  en  sa  cause.  II  n'est  point  d'vtilité,  ny  plus  iuste,  ny  plus  vniuer- 
selle, que  la  protection  du  repos,  et  grandeur  de  son  pays,  La  compagnie  de  tant 
d'hommes  vous  plaist,  nobles,  ieunes,  actifs  :  la  veuë  ordinaire  de  tant  de  specta- 
cles tragiques  :  la  liberté  de  cette  conuersation,  sans  art,  et  vne  façon  de  vie, 
masle  et  sans  cérémonie;  la  variété  de  mille  actions  diuerses  :  cette  courageuse 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         ÉTAT.  E.193 

harmonie  de  la  musique  guerrière,  qui  vous  entretient  et  escliauffe,  et  les  oreilles 
et  l'ame  :  l'honneur  de  cet  exercice  :  son  aspreté  mesme  et  sa  difficulté,  III,  662. 
La  mort  est  plus  abiecte,  plus  languissante,  et  pénible  dans  vn  lict,  qu'en  vn 
combat  :  les  fiebures  et  les  caterrhes,  autant  douloureux  et  mortels,  qu'vne  har- 
quebuzade,  III,  664. 

EXPÉRIENCE. 

Il  n'est  désir  plus  naturel  que  le  désir  de  cognoissance.  Nous  essayons  tous  les 
moyens  qui  nous  y  peuuent  mener.  Quand  la  raison  nous  faut,  nous  y  employons 
l'expérience  qui  est  vn  moyen  de  beaucoup  plus  foible  et  plus  vil,  III,  598. 

Comme  nul  euenement  et  nulle  forme,  ressemble  entièrement  à  vue  autre, 
aussi  ne  ditl'ere  l'vne  de  l'autre  entièrement.  Ingénieux  meslange  de  Nature.  Si 
nos  faces  n'estoient  semblables,  on  ne  sçauroit  discerner  l'homme  de  la  beste  : 
si  elles  n'estoient  dissemblables,  on  ne  sçauroit  discerner  l'homme  de  l'homme. 
Toutes  choses  se  tiennent  par  quelque  similitude.  Tout  exemple  cloche.  Et  la  re- 
lation qui  se  tire  de  l'expérience,  est  tousiours  défaillante  et  imparfaicte.  On 
ioinct  toutesfois  les  comparaisons  par  quelque  bout,  III,  608. 

Mais  la  conséquence  que  nous  voulons  tirer  de  la  conférence  des  euenements, 
est  mal  seure,  d'autant  qu'ils  sont  tousiours  dissemblables.  Il  n'est  aucune  qualité 
si  vniuerselle,  en  cette  image  des  choses,  que  la  diuersité  et  variété,  III,  6(X). 

Quel  que  soit  doncq  le  fruict  que  nous  pouuons  auoir  de  l'expérience,  à  peine 
seruira  beaucoup  à  nostre  institution,  celle  que  nous  tirons  des  exemples  estran- 
gers,  si  nous  faisons  si  mal  nostre  profit,  de  celle,  que  nous  auons  de  nous  mesme, 
qui  nous  est  plus  familière  :  et  certes  suffisante  à  nous  instruire  de  ce  qu'il  nous 
faut,  III,  644. 

FATALITÉ. 

Parmy  noz  autres  disputes,  celle  du  fatum,  s'y  est  meslée  :  et  pour  attacher 
les  choses  aduenir  et  nostre  volonté  mesme,  à  certaine  et  ineuitable  nécessité, 
on  est  encore  sur  cet  argument,  du  temps  passé  :  Puis  que  Dieu  preuoit  toutes 
choses  deuoir  ainsin  aduenir,  comme  il  fait,  sans  double  :  il  faut  donc  qu'elles 
aduiennent  ainsin.  A  quoy  noz  maistres  respondent,  que  le  voir  que  quelque 
chose  aduienne,  comme  nous  faisons,  et  Dieu  de  mesmes  (car  tout  luy  estant 
présent,  il  voit  plustost  qu'il  ne  preuoit)  ce  n'est  pas  la  forcer  d'aduenir  :  voire 
nous  voyons,  à  cause  que  les  choses  aduiennent,  et  les  choses  n'aduiennent  pas, 
à  cause  que  nous  voyons.  L'aduenement  fait  la  science,  non  la  science  l'aduene- 
ment.  Ce  que  nous  voyons  aduenir,  adulent  :  mais  il  pouuoit  autrement  aduenir  : 
et  Dieu,  au  registre  des  causes  des  aduenements  qu'il  a  en  sa  prescience,  y  a 
aussi  celles  qu'on  appelle  fortuites,  et  les  volontaires,  qui  despendent  de  la  liberté 
qu'il  a  donné  à  nostre  arbitrage,  et  sçait  que  nous  faudrons,  par  ce  que  nous 
auons  voulu  faillir,  II,  598. 

FEMME  (amour,  mariage,  ménage). 

C'est  vn  doux  commerce,  que  celuy  des  belles  et  honnestes  femmes  :  mais  c'est 
commerce  où  il  se  faut  tenir  vn  peu  sur  ses  gardes  :  et  notamment  ceux  en  qui 
le  corps  peut  beaucoup.  C'est  folie  d'y  attacher  toutes  ses  pensées,  et  s'y  engager 
d'vne  affection  furieuse  et  indiscrète,  III,  148. 

C'est  vne  desplaisante  coustume,  et  iniu rieuse  aux  dames,  d'auoir  à  prester 
leurs  leures,  à  quiconque  a  trois  valets  à  sa  suitte,  pour  mal  plaisant  qu'il  soit.  Et 
nous  mesme  n'y  gaignons  guère  :  car  comme  le  monde  se  voit  party,  pour  trois 
belles,  il  nous  en  faut  baiser  cinquante  laides.  Et  à  vn  estomach  tendre,  vn  mau- 
uâis  baiser  en  surpaie  vn  bon,  III,  258. 

Cette  loy  qui  leur  commande  de  nous  abominer,  par  ce  que  nous  les  adorons, 
et  nous  havr  de  ce  que  nous  les  aymons,  est  cruelle,  ne  fust  que  de  sa  difficulté, 
III,  220. 

Qu'elles  se  dispensent  vn  peu  de  la  cérémonie,  qu'elles  entrent  en  liberté  de 
discours  sur  l'amour,  nous  ne  sommes  qu'enfans  au  prix  d'elles,  en  cette  science. 

essais    de  MONTAIGNE.  —  T.    IV.  13 


E.194  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Oyez  leur  représenter  nos  poursuittes  et  nos  entretiens  :  elles  vous  font  bien  co- 
gnoistre  que  nous  ne  leur  apportons  rien,  qu'elles  n'ajent  sçeu  et  digéré  sans 
nous  :  il  n'est  ny  parole,  ny  exemple,  ny  démarche  qu'elles  ne  sçachent  mieux 
que  nos  Hures.  C'est  vne  discipline  qui  naist  dans  leurs  veines,  que  ces  bons 
maistrcs  d'escole,  nature,  ieunesse,  et  santé,  leur  soufflent  continuellement  dans 
l'ame.  Elles  n'ont  que  faire  de  l'apprendre,  elles  l'engendrent,  III,  208. 

Celle  qui  est  eschappee  bagues  sauues,  d'vn  escolage  libre,  apporte  bien  plus 

défiance  de  soy,  que  celle  qui  sort  saine,  d'vne  escole  seuere  et  prisonnière,  III,  262. 

A  vne  femme  desraisonnable,  il  ne  couste  non  plus  de  passer  par  dessus  vne 

autre.  Elles  s'ayment  le  mieux  où  elles  ont  plus  de  tort.  L'iniustice  les  allèche  : 

comme  les  bonnes,  l'honneur  de  leurs  actions  vertueuses,  II,  42. 

l'en  ay  veu,  qui  desrobboit  gros  à  son  mary,  pour,  disoit-elle  à  son  confesseur, 
faire  ses  aulmosnes  plus  grasses.  Fiez  vous  à  cette  religieuse  dispensation,  II,  36. 
Il  n'y  a  aucune  d'elles,  pour  malotrue  qu'elle  soit,  qui  ne  pense  e.stre  bien  ay- 
mable,  et  ne  se  recommande  par  son  aage,  ou  par  son  poil,  ou  par  son  mouue- 
ment  (car  de  laides  vniuei-sellement,  il  n'en  est  non  plus  que  de  belles),  III,  150. 
Elles  n'ont  pas  tort  du  tout,  quand  elles  refusent  les  règles  de  vie,  qui  sont  in- 
troduites au  monde  :  d'autant  que  ce  sont  les  hommes  qui  les  ont  faictes  sans 
elles,  III,  204. 

Nos  pères  dressoient  la  contenance  de  leurs  filles  à  la  honte  et  à  la  crainte  (les 
courages  et  les  désirs  tousiours  pareils),  nous  à  l'asseurance  :  nous  n'v  entendons 
rien,  III,  262. 

Vne  femme  estoit  alors  estimée  assez  sçauante,  quand  elle  sçauoit  mettre  diffé- 
rence entre  la  chemise  et  le  pourpoint  de  son  marj-,  I,  216. 

Les  anciens  Gaulois  estimoient  à  extrême  reproche  d'auoir  eu  accointance  de 
femme,  auant  l'aage  de  vingt  ans  :  d'autant  que  les  courages  s'amollissent  et  di- 
uertissent  par  l'accouplage  des  femmes,  II,  28. 

Ce  n'est  pas  tant  pudeur,  qu'art  et  prudence,  qui  rend  nos  dames  si  circons- 
pectes, à  nous  refuser  l'entrée  de  leurs  cabinets,  auant  qu'elles  soyent  peintes  et 
parées  pour  la  montre  publique,  II,  196. 

EIIqs  couurenl  leur  sein  d'vn  reseul,  les  prestres  plusieurs  choses  sacrées,  les 
peintres  ombragent  leur  ouurage,  pour  luy  donner  plus  de  lustre.  Il  y  a  certaines 
autres  choses  qu'on  cache  pour  les  montrer,  III,  254. 

Les  femmes  ont  tort  de  nous  recueillir  de  ces  contenances  mineuses,  querelleu- 
ses et  fuyardes,  qui  nous  esteignent  en  nous  allumant.  La  femme  qui  couche 
auec  vu  homme,  doit  auec  sa  cotte  laisser  quant  et  quant  la  honte,  et  la  reprendre 
auec  sa  cotte,  I,  140. 

Selon  la  loy  que  Nature  leur  donne,  ce  n'est  pas  proprement  à  elles  de  vouloir 
et  désirer  :  leur  roUe  est  souffrir,  obeyr,  consentir.  Nature  leur  a  donné  vne  per- 
pétuelle capacité;  à  nous,  rare  et  incertine.  Elles  ont  tousiours  leur  heure,  afin 
qu'elles  soyent  tousioure  prestes  à  la  nostre,  III,  264. 

le  loue  la  gradation  et  la  longueur,  en  la  dispensation  de  leurs  faueurs  :  en 
toute  espèce  d'amour,  la  facilité  et  promptitude  est  interdicte  aux  tenants,  111,264. 
Se  conduisant  en  leur  di.spensation,  ordonnement  et  mesurement,  elles  pipent 
bien  mieux  nostre  désir,  et  cachent  le  leur.  Qu'elles  fuyent  tousiours  deuant 
nous,  ie  dis  celles  mesmes  qui  ont  à  se  laisser  attraper  :  elles  nous  battent  mieux 
en  fuyant,  comme  les  Scythes,  III,  204 . 

Ce  que  nous  craignons  le  moins  chez  la  femme,  est  à  l'auanture  le  plus  à 
craindre.  Leurs  péchez  muets  sont  les  pires,  III,  228. 

Tout  beau  et  honneste  que  vous  estes,  quand  vous  aurez  faillj'  vostre  pointe, 
n'en  concluez  pas  incontinent  vne  chasteté  inuiolable  en  vostre  maistresse  :  ce 
n'est  pas  à  dire  que  le  muletier  n'y  trouue  son  heure,  I,  60-1. 

Vne  femme  se  peut  rendre  à  tel  personnage,  que  nullement  elle  ne  voudroit 
auoir  espousé  :  ie  ne  dy  pas  pour  les  conditions  de  la  fortune,  mais  pour  celles 
mesmes  de  la  personne,  III,  202. 

C'est  vn  vilain  desreglement,  qui  les  pousse  si  souuent  au  change,  et  les  em- 
pesche  de  fermir  leur  affection  en  quelque  subiect  que  ce  soit  :  mais  si  est-il  vra)', 
que  c'est  contre  la  nature  de  l'amour,  s'il  n'est  violant,  et  contre  la  nature  de  la 
violance,  s'il  est  constant,  III,  264. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        FEM.  E.195 

le  ne  conseille  aux  Dames,  d'appeler  honneur,  leur  deuoir.  Leur  deuoir  est  le 
marc  :  leur  honneur  n'est  que  l'escorce.  Et  ne  leur  conseille  de  nous  donner  cette 
excuse  en  paiement  de  leur  relus  :  l'oflence  et  onuers  Dieu,  et  en  la  conscience, 
seroit  aussi  grande  de  le  désirer  que  de  l'effectuer.  Toute  personne  d'honneur 
choisit  de  perdre  plus  tost  son  honneur,  que  de  perdre  sa  conscience,  II,  464. 

Il  est  tousiours  procliue  aux  femmes  de  disconuenir  à  leurs  maris.  Elles  saisis- 
sent à  deux  mains  toutes  couuertures  de  leur  contraster  :  la  première  excuse  leur 
sert  de  pleniere  iustification,  II,  3G. 

Ceux  qui  ont  à  négocier  auec  des  l'enmies  testues,  peuuent  auoir  essayé  à  quelle 
rage  on  les  iette,  quand  on  oppose  à  leur  agitation,  le  silence  et  la  froideur,  et 
qu'on  desdaigne  de  nourrir  leur  courroux.  Elles  ne  se  courroucent,  qu'affin  qu'on 
se  contre-courrouce,  à  l'imitation  des  loix  de  l'amour,  II,  614. 

Nul  maniement  leur  semble  auoir  assez  de  dignité,  s'il  vient  de  la  concession 
du  mary.  11  faut  qu'elles  l'vsurpent  ou  finement  ou  fièrement,  et  tousiours  iniu- 
rieusement,  pour  luy  donner  de  la  grâce  et  de  l'authorité,  II,  36. 

Il  faut  laisser  bonne  partie  de  leur  conduite,  à  leur  propre  discrétion  :  car  ainsi 
comme  ainsi  n'y  a  il  discipline  qui  les  sçeut  brider  de  toutes  parts,  II,  262. 

En  nostre  siècle,  elles  reseruent  plus  communément,  à  estaller  leur's  bons  of- 
fices, enuers  leurs  maris  perdus  :  Tardif  tesmoignage,  et  hors  de  saison.  Elles 
prennent  plustost  par  là,  qu'elles  ne  les  ayment  que  morts.  La  vie  est  pleine  de 
combustion,  le  trespas  d'amour,  et  de  courtoisie.  Elles  ont  beau  s'escheueler  et 
s'esgratigner.  Leur  rechigner  est  odieux  aux  viuans,  et  vain  aux  morts.  Nous 
dispenserons  volontiers  qu'on  rie  après,  pourueu  qu'on  nous  rie  pendant  la  vie. 
Est-ce  pas  de  quoy  resusciter  de  despit  :  qui  m'aura  craché  au  nez  pendant  que 
i'estoy,  me  vienne  frotter  les  pieds,  quand  ie  ne  suis  plus?  S'il  y  a  quelque  hon- 
neur à  pleurer  les  maris,  il  n'appartient  qu'à  celles  qui  leur  ont  ry  :  celles  qui  ont 
pleuré  en  la  vie,  qu'elles  rient  en  la  mort,  au  dehors  comme  au  dedans.  Aussi,  ne 
regardez  pas  à  ces  yeux  moites,  et  à  cette  piteuse  voix  :  regardez  ce  port,  ce 
teinct,  et  î'embonpoinct  de  ces  iouës,  soubs  ces  grands  voiles  :  c'est  par  là  qu'elle 
parle  François.  Il  en  est  peu,  de  qui  la  santé  n'aille  en  amendant,  qualité  qui  ne 
sçait  pas  mentir.  Cette  cérémonieuse  contenance  ne  regarde  pas  tant  derrière 
soy,  que  deuant;  c'est  acquest,  plus  que  payement,  II,  662. 

La  plus  part  de  leurs  deuils  sont  artificiels  et  cérémonieux.  On  y  procède  mal, 
quand  on  s'oppose  à  cette  passion  :  car  l'opposition  les  pique  et  les  engage  plus 
auant  à  la  tristesse.  On  exaspère  le  mal  par  la  ialousie  du  débat,  III,  158. 

Nous  sommes  quasi  par  tout  iniques  luges  de  leurs  actions,  comme  elles  sont 
des  nostres,  lit,  264. 

Il  n'est  passion  plus  pressante,  que  cette  cy,  à  laquelle  nous  voulons  qu'elles 
résistent  seules  :  non  simplement,  comme  à  vn  vice  de  sa  mesure  :  mais  comme 
à*  l'abomination  plus  qu'à  l'irréligion  et  au  parricide  :  et  nous  nous  y  rendons  ce- 
pendant sans  coulpe  et  reproche,  III,  206. 

On  les  leurre  en  somme,  et  achai'ue,  par  tous  moyens.  Nous  eschauffons  et  in- 
citons leur  imagination  sans  cesse,  et  puis  nous  crions  au  ventre,  III,  216. 

Nous  les  traictons  inconsidérément  en  cecy,  après  que  nous  auous  cogneu, 
qu'elles  sont  sans  comparaison  plus  capables  et  ardentes  aux  effects  de  l'amour 
que  nous,  III,  204, 

De  la  trahison  commune  et  ordinaire  des  hommes  d'auiourd'huy,  il  aduient,  ce 
que  nous  montre  l'expérience  :  c'est  qu'elles  se  r'allient  et  reiettent  à  elles  mesmes, 
ou  entre  elles,  pour  nous  fuyr  :  ou  bien  qu'elles  se  rengent  aussi  de  leur  costé,  à 
cet  exemple  que  nous  leur  donnons  :  qu'elles  louent  leur  part  de  la  farce,  et  se 
prestent  à  cette  négociation,  sans  passion,  sans  soing  et  sans  amour,  III,  150. 

Il  en  est,  qui  ayment  mieux  prester  cela,  que  leur  coche  :  et  qui  ne  se  conmiu- 
niquent,  que  par  là,  III,  260. 

Les  masles  et  femelles,  sont  iettez  en  mesme  moule,  sauf  l'institution  et  l'vsage, 
la  différence  n'y  est  pas  grande.  Il  n'y  a  pas  de  distinction  entre  leur  vertu  et  la 
nostre.  11  est  bien  plus  aisé  d'accuser  l'vn  sexe,  que  d'excuser  l'autre,  III,  286. 


E.d90  ESSAIS  DE  MOiNTAIGNE. 

FERMETÉ  (COURAGE). 

La  loy  de  la  resolution  et  de  la  constance  ne  porte  pas  que  nous  ne  nous  dénions 
couurir,  autant  qu'il  est  en  nostre  puissance,  des  maux  et  inconueniens  qui  nous 
menassent,  ny  par  conséquent  d'auoir  peur  qu'ils  nous  surpreignent.  Au  rebours, 
tous  moyens  honnestes  de  se  garentir  des  maux,  sont  non  seulement  permis, 
-  mais  louables.  Et  le  ieu  de  la  constance  se  iouë  principalement  à  porter  de  pied 
ferme,  les  inconueniens  où  il  n'y  a  point  de  i-emede,  I,  78. 

FESTIN. 

En  vn  festin  il  ne  faut  pas  tant  regarder  ce  qu'on  mange,  qu'auec  qui  on 
mange.  Il  n'est  point  de  si  doux  apprest,  ny  de  sauce  si  appétissante,  que  celle  qui 
se  tire  de  la  société,  III,  676. 

Varro  demande  cecy  au  conuiue  :  l'assemblée  de  personnes  belles  de  présence, 
et  aggreables  de  conuersation,  qui  ne  soyent  ny  muets  ny  bauards  :  netteté  et  dé- 
licatesse aux  viures,  et  au  lieu  :  et  le  temps  serein,  III,  684. 

FLATTERIE. 

C'est  vn  plaisir  fade  et  nuisible,  d'auoir  affaire  à  gens  qui  nous  admirent  et 
facent  place,  III,  338. 

FOLIE. 

On  a  raison  d'appeller  folie  tout  eslancement,  tant  loUable  soit-il,  qui  surpasse 
nostre  propre  Jugement  et  discours.  D'autant  que  la  sagesse  est  vn  maniment  réglé 
de  nostre  ame,  et  qu'elle  conduit  auec  mesure  et  proportion,  et  s'en  respond,  1,628. 

Qui  ne  sçait  combien  est  imperceptible  le  voisinage  d'entre  la  folie  auec  les 
gaillai'des  eleuations  d'vn  esprit  libre;  etleseffects  d'vne  vertu  suprême  et  extraor- 
dinaire, II,  210. 

Dequoy  se  fait  la  plus  subtile  folie  que  de  la  plus  subtile  sagesse?  Comme  des 
grandes  amitiez  nais.sent  des  graîndes  inimitiez,  des  santez  vigoreuses  les  mortel- 
les maladies:  ainsi  des  rares  et  vifuos  agitations  de  noz  âmes,  les  plus  excellentes 
manies,  et  plus  détraquées  :  il  n'j-  a  qu'vn  demy  tour  de  chenille  à  passer  de 
l'vn  à  l'autre,  II,  210. 

l'ay  quelque  opinion  de  l'enuers  de  cette  sentence,  que  qui  aura  esté  vne  fois 
bien  fol,  ne  sera  nulle  autre  fois  bien  sage,  III,  290. 

FORTUNE. 

La  fortune  ne  nous  fait  ny  bien  ny  mal  :  elle  nous  en  offre  seulement  la  ma- 
tière et  la  semence  laquelle  nostre  ame,  plus  puissante  qu'elle,  tourne  et  applique 
comme  il  luy  plaist  :  seule  cause  et  maisti-esse  de  sa  condition  heureuse  ou  mal- 
heureuse, I,  47-4. 

Il  est  malaisé  es  actions  humaines,  de  donner  règle  si  iuste  par  discours  de  rai- 
son, que  la  Fortune  n'y  maintienne  son  droict,  I,  650. 

Et  de  vray  en  toutes  republiques  on  a  tousiours  laissé  bonne  part  d'auctorité  au 
sort,  I.  76. 

Les  biens  de  la  fortune  tous  tels  qu'ils  sont,  encores  faut  il  auoir  le  sentiment 
propre  aies  sauourer.  C'est  le  iouïr, non  le  posséder, qui  nous  rend  heureux,  I,  186. 

L'inconstance  du  bransle  diuers  de  la  fortune,  fait  qu'elle  nous  doiue  présenter 
toute  espèce  de  visages,  I,  384. 

On  s'apperçoit  ordinairement  aux  actions  du  monde,  que  la  fortune,  pour  nous 
apprendre,  combien  elle  peut  en  toutes  choses  :  et  qui  prent  plaisir  à  rabattre 
nostre  présomption  :  n'ayant  peu  faire  les  mal-habiles  sages,  elle  les  fait  heureux  : 
àl'enuy  de  la  vertu.  Et  se  mesle  volontiei's  à  fauoriser  les  exécutions,  où  la  ti'ame 
est  plus  purement  sienne,  III,  358. 

Il  semble  que  la  fortune  quelquefois  guette  à  point  nommé  le  dernier  iour  de 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        FOR.  E.197 

nostre  vio,  pour  montrer  sa  puissance,  de  renuerser  en  vn  moment  ce  qu'elle 
auoit  basty  en  longrues  années,  I,  104. 

C'est  iniure  et  deffaueur  de  Fortune,  de  nous  ofTrirdes  présents,  qui  nous  rem- 
plissent d'vn  iuste  despit  do  nous  auoir  lailly  en  leur  saison,  III,  498. 

Plus  nous  amplifions  nostre  besoing  et  possession,  d'autant  plus  nous  engageons 
nous  aux  coups  de  la  Fortune,  et  des  aduersitoz,  III,  498. 

L'heur  et  le  mal'heur  sont  à  mon  gré  deux  souueraines  puissances.  C'est  im- 
prudence, d'estimer  que  l'humaine  prudence  puisse  remplir  le  roUe  de  la  fortune. 
Et  vaine  est  l'entreprise  de  celuy,  qui  présume  d'embrasser  et  causes  et  consé- 
quences, et  mener  paT  la  main,  le  progrès  de  son  l'aict,  III,  356. 

C'est  chose  vaine  et  friuole  que  l'humaine  prudence  :  et  au  trauers  de  tous  nos 
proiects,  de  nos  conseils  et  précautions,  la  fortune  maintient  tousiours  la  posses- 
sion des  euenements,  I,  19(). 

Les  euenemens  et  issues  dépendent,  notamment  en  la  guerre,  pour  la  ])lus  part, 
de  la  fortune  :  laquelle  ne  se  veut  pas  renger  et  assuiettir  à  nostre  discours  et  pru- 
dence. Mais  à  le  bien  prendre,  nos  conseils  et  délibérations  en  despendent  bien 
autant  ;  et  la  fortune  engage  en  son  trouble  et  incertitude,  aussi  nos  discours,  1, 528. 

l'ay  veu  de  mon  temps  mill'  hommes  soupples,  mcstis,  ambigus,  et  que  nul  ne 
doubtoit  plus  prudens  mondains  que  moy,  se  perdre  où  ie  me  suis  sauué,  11,454. 

Qu'on  regarde  qui  sont  les  plus  puissans  aux  villes,  et  qui  font  mieux  leuPS  be- 
songnes  :  on  trouuera  ordinairement,  que  ce  sont  les  moins  habiles.  Il  est  aduenu 
aux  femmelettes,  aux  enfans,  et  aux  insepsez,  de  commander  de  grands  estats,  à 
l'esgal  des  plus  sulïisans  Princes.  Et  y  rencontrent,  plus  ordinairement  les  gros- 
siers que  les  subtils.  Nous  attribuons  les  effects  de  leur  bonne  fortune  à  leur  pru- 
dence, III,  356. 

le  suis  homme,  qui  me  commets  volontiers  à  la  Fortune,  et  me  laisse  aller  à 
corps  perdu,  entre  ses  bras.  Dequoy  iusques  à  cette  heure  i'ay  eu  plus  d'occasion 
de  me  louer,  que  de  me  plaindre.  Et  l'ay  trouuée  et  plus  auisée,  et  plus-  amie  de 
mes  affaires,  que  ie  ne  suis.  11  y  a  quelques  actions  en  ma  vie,  desquelles  on  peut 
iustement  nommer  la  conduite  difficile;  ou,  qui  voudra,  prudente.  De  celles-là 
posez,  que  la  tierce  partie  soit  du  mien,  certes  les  deux  tierces  sont  richement  à 
elle.  Nous  faillons,  ce  me  semble,  en  ce  que  nous  ne  nous  fions  pas  assez  au  ciel 
de  nous.  Et  prétendons  plus  de  nostre  conduite,  qu'il  ne  nous  appartient.  Pour- 
tant fouruoyent  si  souuent  nos  desseins.  11  estenuieuxde  l'estenduë,  que  nous  at- 
tribuons aux  droicts  de  l'humaine  prudence,  au  preiudice  des  siens.  Et  nous  les 
racourcit  d'autant  plus,  que  nous  les  amplifions,  III,  594. 

le  trouue  l'effort  bien  difficile  à  la  souffrance  des  maux,  mais  au  contentement 
d'vne  médiocre  mesure  de  fortune,  et  fuite  de  la  grandeur,  i'y  trouue  fort  peu 
d'affaire,  III,  322. 

FOULE. 

La  contagion  est  tres-dangereuse  en  la  presse,  I,  410. 

11  y  a  infinis  exemples  de  conclusions  populaires,  qui  semblent  plus  aspres,  d'au- 
tant que  l'effect  en  est  plus  vniuersel.  Elles  le  sont  moins  que  séparées.  Ce  que  le 
discours  ne  seroit  en  chacun,  il  le  fait  en  tous  :  l'ardeur  de  la  société  rauissant 
les  particuliers  iugements,  I,  648. 

11  n'est  rien  moins  esperable  de  ce  monstre  ainsin  agité,  que  l'humanité  et  la 
douceur,  il  receura  bien  plustost  la  reuerance  et  la  crainte,  I,  198. 

FRANÇAIS. 

I'ay  honte  de  voir  nos  hommes,  enyurez  de  cette  sotte  humeur,  de  s'effaroucher 
des  formes  contraires  aux  leurs.  Il  leur  semble  estre  hors  de  leur  élément,  quand 
ils  sont  hors  de  leur  village.  Où  qu'ils  aillent,  ils  se  tiennent  à  leurs  façons,  et 
abominent  les  estrangeres.  Pourquoy  non  barbares,  puis  qu'elles  ne  sont  Fran- 
çoises?  La  pluspart  ne  prennent  l'aller  que  pour  le  venir.  Ils  voyagent  couuerts  et 
resserrez,  d'vne  prudence  taciturne  et  incommunicable,  se  defendans  de  la  conta- 
gion, d'vn  air  incogneu,  III,  454. 


E.198  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


FUNÉRAILLES. 

S'il  esloit  besoin  d'en  ordonner,  ie  seroy  d'aduis,  quant  aux  funérailles,  comme 
en  toutes  actions  de  la  vie,  que  chascun  en  rapportast  la  règle,  au  degré  de  sa  for- 
tune, de  ne  les  faire  ny  superflues  ny  mechaniques;  et  lairrois  purement  la  cous- 
tume  ordonner  de-cette  cérémonie,  et  m'en  remeltrayàla  discrétion  des  premiers 
à  qui  ie  tomberay  en  charge,  I,  36. 

GENS  DE  LETTRES. 

le  ne  sçay  comment  il  aduient,  et  il  aduient  sans  doubte,  qu'il  se  trouue  autant 
de  vanité  et  de  foiblesse  d'entendement,  en  ceux  qui  font  profession  d'auoir  plus 
de  suffisance,  qui  se  meslent  de  vacations  lettrées,  et  décharges  qui  despendent  des 
Hures,  qu'en  nulle  autre  sorte  de  gens,  II,  514. 

GLOIRE  (réputation). 

De  toutes  les  resueries  du  monde,  la  plus  receuë  et  plus  vniuerselle,  est  le  soing 
de  la  réputation  et  de  la  gloire,  que  nous  espousons  iusques  à  quitter  les  riches- 
ses, le  repos,  la  vie  et  la  santé,  qui  sont  biens  effectuels  et  substantiaux,  pour 
suyure  cette  vaine  image,  cette  simple  voix,  qui  n'a  ny  corps  ny  prise,  I-,  476. 

C'est  à  Dieu  seul,  à  qui  gloire  et  honneur  appartient.  Et  n'est  rien  si  esloigné 
de  raison,  que  de  nous  en  mettre  en  queste  pour  nous,  II,  442. 

Toute  la  gloire  du  monde  ne  mérite  pas  qu'vn  homme  d'entendement  estende 
seulement  le  doigt  pour  l'acquérir,  II,  142. 

Toutes  autres  choses  tombent  en  commerce.  Nous  prestons  nos  biens  et  nos 
vies  au  besoin  de  nos  amis  :  mais  de  communiquer  son  honneur  et  d'estrener 
autruy  de  sa  gloire,  il  ne  se  voit  gueres,  I,  478. 

Combien  auons  nous  veu  d'hommes  vertueux,  suruiure  à  leur  propre  réputa- 
tion, qui  ont  veu  et  soulïert  esteindre  en  leur  présence,  l'honneur  et  la  gloire 
tres-iustement  acquise  en  leurs  ieunes  ans?  II,  460. 

C'est  le  sort  qui  nous  applique  la  gloire,  selon  sa  témérité.  le  l'ay  veuë  fort  sou- 
uent  outrepasser  le  mérite  d'vne  longue  mesure.  Comme  l'ombre,  elle  va  quelque 
fois  deuant  son  corps:  et  quelque  fois  l'excède  de  beaucoup  en  longueur,  II,  448. 

Nous  appelions  aggrandir  nostre  nom,  l'estendre  et  semer  en  plusieurs  bou- 
ches :  nous  voulons  qu'il  y  soit  receu  en  bonne  part  et  que  cette  sienne  accrois- 
sance  luy  vienne  à  profit  :  voyla  ce  qu'il  y  peut  auoir  de  plus  excusable  en  ce 
dessein.  Mais  l'excès  de  cette  maladie  en  va  iusques  là,  que  plusieurs  cherchent 
de  faire  parler  d'eux  en  quelque  façon  que  ce  soit,  plus  désireux  de  grande  que 
de  bonne  réputation.  Ce  vice  est  ordinaire.  Nous  nous  soignons  plus  qu'on  parle 
de  nous,  que  comment  on  en  parle  :  et  nous  est  assez  que  nostre  nom  coure  par 
la  bouche  des  hommes,  en  quelque  condition  qu'il  y  coure,  II,  456. 

Qui  ne  contrechange  volontiers  la  santé,  le  repos,  et  la  vie,  à  la  réputation  et  à 
la  gloire?  la  plus  inutile,  vaine  et  fauce  monnoye,  qui  soit  en  nostre  vsage,  1,416. 

De  ceux  mesme,  que  nous  voyons  bien  faire  :  trois  mois,  ou  trois  ans  après,  il 
ne  s'en  parle  non  plus  que  s'ils  n'eussent  iamais  esté,  II,  460. 

Infinies  belles  actions  se  doiuent  perdre  sans  tesmoignage,  auant  qu'il  en  vienne 
vne  à  profit.  Et  si  on  prend  garde,  on  trouuera,  à  mon  aduis,  qu'il  aduient  par 
expérience,  que  les  moins  esclattantes  sont  les  plus  dangereuses  :  et  qu'aux  guer- 
res, qui  se  sont  passées  de  notre  temps,  il  s'est  perdu  plus  de  gens  de  bien,  aux 
occasions  légères  et  peu  importantes,  et  à  la  contestation  de  quelque  bicoque, 
qu'es  lieux  dignes  et  honnorables,  II,  450. 

Tuer  vn  homme,  ou  deux,  ou  dix,  se  présenter  courageusement  à  la  mort,  c'est 
à  vérité  quelque  chose  à  chacun  de  nous,  car  il  y  va  de  tout  :  mais  pour  le 
monde,  ce  sont  choses  si  ordinaires,  il  s'en  voit  tant  tous  les  iours,  et  en  faut 
tant  de  pareilles  pour  produire  vn  effect  notable,  que  nous  a'en  pouuons  attendre 
aucune  particulière  recommendation,  II,  458. 

Au  demeurant,  en  toute  vne  bataille  où  dix  mill'  hommes  sont  stropiez  ou  tuez, 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        GLO.  E.199 

il  n'en  est  pas  quinze  dequoy  Ion  parle.  De  tant  de  niiliasses  de  vaillans  liommes 
qui  sont  morts  depuis  quinze  cens  ans  en  France,  les  armes  en  la  main,  il  n'y  en 
a  pas  cent,  qui  soyent  venus  à  nostre  cognoissance.  La  mémoire  non  des  chefs 
seulement,  mais  des  battailles  et  victoires  est  enseuelie,  II,  458.  f 

Il  faut  trier  de  toute  vne  nation,  vne  douzaine  d'hommes,  pour  iuger  d'vn  ar- 
pent de  terre,  et  le  ingénient  de  nos  inclinations,  et  de  nos  actions,  la  plus  diffi- 
cile matière,  et  la  plus  importante  qui  soit,  nous  la  remettons  à  la-A^oix  de  la 
commune  et  de  la  tourbe,  mère  d'ignorance,  d'iniustice,  et  d'inconstance.  Est-ce 
raison  de  faire  dépendre  la  vie  d'un  sage,  du  iugement  des  fols?  II,  452. 

Entre  toutes  les  voluptez,  il  n'y  en  a  point  de  plus  dangereuse,  ny  plus  à  fuir 
que  celle  qui  nous  vient  de  l'approbation  d'autru'y.  11  n'est  chose  qui  empoisonne 
tant  que  la  flatterie,  rien  par  où  les  meschans  gaignent  plus  aiséement  crédit  :  ny 
maquerelage  si  propre  et  si  ordinaire  à  corrompre  la  chasteté  des  femmes,  que 
de  les  paistre  et  entretenir  de  leurs  louanges,  II,  442. 

Celuy  qui  fait  tout  pour  l'honneur  et  pour  la  gloire,  que  pense-il  gaigner,  en  se 
produisant  au  monde  en  masque,  desrobant  son  vray  estre  à  la  cognoissance 
du  peuple  ?  Louez  un  bossu  de  sa  belle  taille,  il  le  doit  receuoir  à  iniure  :  si  vous 
estes  couard,  et  qu'on  vous  honnore  pour  vn  vaillant  homme,  est-ce  de  vous 
qu'on  parle?  On  vous  prend  pour  vn  autre,  III,  190. 

La  gloire  est  pour  elle  mesme  désirable  :  mais  il  faut  éviter  comme  deux  ex- 
trêmes vicieux,  l'immoderation,  et  à  la  rechercher,  et  à  la  fuyr,  II,  446. 

La  vertu  elle  mesme  est  chose  bien  vaine  et  friuole,  si  elle  tire  sa  recommen- 
dation  de  la  gloire,  II,  418. 

Les  actions  de  la  vertu  sont  trop  nobles  d'elles  mesmes,  pour  rechercher  autre 
loyer,  que  de  leur  propre  valeur  :  et  notamment  pour  la  chercher  en  la  vanité 
des  iugemens  humains,  II,  460. 

Qui  n'est  homme  de  bien  que  par  ce  qu'on  le  sçaura,  et  par  ce  qu'on  l'en  esti- 
mera mieux,  après  l'auoir  soeu,  qui  ne  veut  bien  faire  qu'en  condition  que  sa 
vertu  vienne  à  la  cognoissance  des  hommes,  celuy-là  n'est  pas  personne  de  qui 
on  puisse  tirer  beaucoup  de  seruice,  11,450. 

Toute  la  gloire,  que  ie  pretens  de  ma  vie,  c'est  de  l'auoir  vescue  tranquille,  et 
tranquille  selon  moy,  II,  418. 


GUERRE  CIVILE  (troubles  intérieurs). 

Monstrueuse  guerre.  Les  autres  agissent  au  dehors,  ceste-cy  encore  contre  soy  : 
se  ronge  et  se  defaict,  par  son  propre  venin.  Elle  est  de  nature  si  maligne  et  rui- 
neuse, qu'elle  se  ruine  quand  et  quand  le  reste  :  et  se  deschire  etdespece  de  rage. 
Nous  la  voyons  plus  souuent,  se  dissoudre  par  elle  mesme,  que  par  disette  d'au- 
cune chose  nécessaire,  ou  par  la  force  ennemie.  Toute  discipline  la  fuit.  Elle  vient 
guérir  la  sédition,  et  en  est  pleine.  Veut  chastier  la  désobéissance,  et  en  n^ontre 
l'exemple  :  et  employée  à  la  deffence  des  loix,  faict  sa  part  de  rébellion  à  rencon- 
tre des  siennes  propres.  Où  en  sommes  nous?  Nostre  médecine  porte  infection.  — 
En  ces  maladies  populaires,  on  peut  distinguer  sur  le  commencement,  les  sains 
des  malaies  :  mais  quand  elles  viennent  à  durer,  comme  la  nostre,  tout  le  corps 
s'en  sent,  et  la  teste  et  les  talons  :  aucune  partie  n'est  exempte  de  corruption. 
Car  il  n'est  air,  qui  se  hume  si  gouluement  :  qui  s'espande  et  pénètre,  comme 
faict  la  licence.  Nos  armées  ne  se  lient  et  tiennent  plus  que  par  simant  estranger  : 
des  François  on  ne  sçait  plus  faire  vn  corps  d'armée,  constant  et  réglé.  Quelle 
honte!  11  n'y  a  qu'autant  de  discipline,  que  nous  en  font  voir  des  soldats  emprun- 
tez. Quant  à  nous,  nous  nous  conduisons  à  discrétion,  et  non  pas  du  chef;  chacun 
selon  la  sienne  :  il  a  plus  affaire  au  dedans  qu'au  dehors.  C'est  au  commande- 
ment de  suiure,  courtizer,  et  plier  :  à  luy  seul  d'obeïr  :  tout  le  reste  est  libre  et 
dissolu.  Il  me  plaist  de  voir,  combien  il  y  a  de  lascheté  et  de  pusillanimité  en  l'am- 
bition :  par  combien  d'abiection  et  de  seruitude,  il  luy  faut  arriuer  à  son  but. 
Mais  cecy  medeplaist  de  voir,  des  natures  débonnaires  et  capables  de  iustice,  se 
corrompre  tous  les  iours,  au  maniement  et  commandement  de  cette  confusion.  La 
longue  souffrance,  engendre  la  coustume;  la  coustume,  le  consentement  et  l'imi- 


E.200  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

tation.  Nous  auions  assez  d'ames  mal  nées,  sans  gaster  les  bonnes  et  généreuses, 
III,  354. 

Les  guerres  ciuiles  ont  cela  de  pire  que  les  autres  guerres,  de  nous  mettre 
chacun  en  echauguette  en  sa  propre  maison.  C'est  grande  extrémité,  d'estre 
pressé  iusques  dans  son  mesnage,  et  repos  domestique,  III,  421. 

En  ces  temps,  on  battisoit  les  vices  publiques  do  mots  nouueaux  plus  doux  pour 
leur  excuse,  abastardissant  et  amollissant  leurs  vrais  litres,  1, 178. 

Ce  qui  fait  voir  tant  de  cruautez  inouies  aux  guerres  populaires,  c'est  que  cette 
canaille  de  vulgaire  s'aguerrit,  et  se  gendarme,  à  s'ensanglanter  iusques  aux 
coudes,  et  deschiqueter  vn  corps  à  ses  pieds,  n'ayant  resentiment  d'autre  vail- 
lance. Comme  les  chiens  couards,  qui  deschirent  en  la  maison,  et  mordent  les 
peaux  des  bestes  saunages,  qu'ils  n'ont  osé  attaquer  aux  champs,  II,  570. 

La  cause  des  loix,  et  defence  de  l'ancien  estât,  a  tousiours  cela,  que  ceux 
mesmes  qui  pour  leur  dessein  particulier  le  troublent,  en  excusent  les  défenseurs, 
s'ils  ne  les  honorent,  III,  86. 

Mais  il  ne  faut  pas  appeler  deuoir,  vue  aigreur  et  vnc  intestine  asprotc,  qui 
naist  de  l'interest  et  passion  pi-iuee,  ny  courage,  vne  conduitte  traistresse  et  mali- 
tieuse.  Ils  nomment  zèle,  leur  propension  vers  la  malignité,  et  violence.  Ce  n'est 
pas  la  cause  qui  les  eschauffe,  c'est  leur  interest.  Ils  attisent  la  guerre,  non  par  ce 
qu'elle  est  iuste  :  mais  par  ce  que  c'est  guerre,  III,  86. 

Sur  tout  il  se  faut  garder  qui  peut,  de  tomber  entre  les  mains  d'vn  luge  en- 
nemy,  victorieux  et  armé,  I,  88. 

Confessons  la  vérité,  qui  trieroit  de  l'armée  mesme  légitime,  ceux  qui  y  mar- 
chent par  le  seul  zèle  d'vne  affection  religieuse,  et  encore  ceux  qui  regardent 
seulement  la  protection  des  loix  de  leur  pays,  ou  seruice  du  Prince,  il  n'en  sçau- 
roit  bastir  vne  compagnie  de  gens-darmes  complète.  D'où  vient  cela,  qu'il  s'en 
trouue  si  peu,  qui  ayent  maintenu  mesme  volonté  et  mesme  progrez  en  nos  niou- 
uemens  publiques,  et  que  nous  les  voyons  tantost  n'aller  que  le  pas,  tantost  y  cou- 
rir à  bride  aualéc?  et  mesmes  hommes,  tantost  gaster  nos  affaires  par  leur  vio- 
lence et  aspreté,  tantost  par  leur  froideur,  mollesse  et  pesanteur;  si  ce  n'est  qu'ils 
y  sont  poussez  par  des  considérations  particulières  etcasuelles,  selon  la  diuersité 
desquelles  ils  se  remuent  ?  II,  120. 

HABITUDES  (coutumes,  us.vges). 

L'accoustumancc  nous  peut  duirc  non  seulement  à  telle  forme  qu'il  luy  plaist, 
mais  aussi  au  changement  et  à  la  variation  :  qui  est  le  plus  noble,  et  le  plus  vtile 
de  ses  apprentissages,  III,  636. 

Les  gueux  ont  leurs  magniticences,  et  leurs  voluptez,  comme  les  riches  :  ce  sont 
effects  de  l'accoustumance,  III,  636. 

HISTOIRE. 

Les  historiens  sont  ma  droitte  baie  :  car  ils  sont  plaisans  et  aysez  :  et  quant  et 
quant  l'homme  en  gênerai,  de  qui  ie  cherche  la  cognoissance,  y  paroist  plus  vif 
et  plus  entier  qu'en  nul  autre  lieu  :  la  variété  et  vérité  de  ses  conditions  internes, 
en  gros  et  en  détail,  la  diuersité  des  moyens  de  son  assemblage,  et  des  accidents 
qui  le  menacent,  II,  76. 

C'est  la  matière  à  laquelle  nos  esprits  s'appliquent  de  plus  diuerse  façon.  l'ay 
leu  en  Tite  Liue  cent  choses  que  tel  n'y  a  pas  leu.  Plutarche  y  en  a  leu  cent;  ou- 
tre ce  que  i'y  ay  sceu  lire  :  et  à  l'aduenture  outre  ce  que  l'autheur  y  auoit  mis, 
I,  248. 

l'aymeles  historiens,  ou  fort  simples,  ou  excellens.  Les  simples,  qui  n'ont  point 
dequoy  y  mesler  quelque  chose  du  leur,  et  qui  n'y  apportent  que  le  soin,  et  la  dili- 
gence de  r'amasser  tout  ce  qui  vient  à  leur  notice,  et  d'enregistrer  à  la  bonne  foy 
toutes  choses,  sans  chois  et  sans  triage,  nous  laissent  le  iugement  entier  pour  la 
cognoissance  de  la  vérité,  II,  78. 

Ixs  bien  excellens  ont  la  suffisance  de  choisir  ce  qui  est  digne  d'estre  sçeu. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        HIS.  E.201 

peuuent  trier    de   deux   rapports  celuy  qui   est  plus  vray-sembiable,    II,   78. 

Ceux  d'entre-deux,  qui  est  la  plus  commune  façon,  nous  gaslent  tout  :  ils  veu- 
lent nous  mascher  les  morceaux;  ils  se  donnent  loy  de  iuger  et  par  conséquent 
d'incliner  l'Histoire  à  leur  fantasie  :  car  depuis  que  le  iugoment  pend  d'vn  costé, 
on  ne  se  peut  garder  de  contourner  et  tordre  la  narration  à  ce  biais.  Ils  entre- 
prennent de  choisir  les  choses  dignes  d'estre  sçeues,  et  nous  cachent  souuent 
telle  parole,  telle  action  priuée,  qui  nous  instruiroit  mieux  :  obmettent  pour 
choses  incroyables  celles  qu'ils  n'entendent  pas,  II,  78.  — 

Les  seules  bonnes  Histoires  sont  celles,  qui  ont  esté  escrites  par  ceux  mesmes 
qui  commandoient  aux  affaires  ou  qui  estoient  participans  à  les  conduire,  ou  au 
moins  qui  ont  eu  la  fortune  d'en  conduire  d'autres  de  mesnie  sorte,  II,  80. 

Que  peut  on  espérer  d'vn  médecin  traictant  de  la  guerre,  ou  d'vn  eschoiier 
traictant  les  desseins  des  Princes?  11,80. 

le  voudroye  que  chacun  escriuist  ce  qu'il  sçait,  et  autant  qu'il  en  sçait  :  non  en 
cela  seulement,  mais  en  tous  autres  subiects,  I,  358. 

Un  homme  simple  et  grossier,  est  en  condition  propre  à  rendre  véritable  tes- 
moignage;  les  lines  gens  remarquent  bien  plus  curieusement,  et  plus  de  choses, 
mais  ils  les  glosent,  et  pour  faire  valoir  leur  interprétation,  et  la  persuader,  ils 
ne  se  peuuent  garder  d'altérer  vn  peu  l'Histoire,  I,  358. 

le  tien  moins  hazardeux  d'escrire  les  choses  passées,  que  présentes  :  d'autant 
que  l'escriuain  n'a  à  rendre  compte  que  d'vne  vérité  empruntée,  I,  152. 

HOMME. 

Certes  c'est  vnsubiect  merueilleusement  vain,  diuers,  et  ondoyant,  que  l'homme  : 
il  est  malaisé  d'y  fonder  iugement  constant  et  vniforme,  I,  20.  ^ 

Moy  à  cette  heure,  et  moy  tantost,  sommes  deux.  Quand  meilleur,  ie  n'en  puis 
rien  dire.  Il  feroit  bel  estre  vieil,  si  nous  ne  marchions,  que  vers  l'amendement, 
III,  412. 

le  connoy  des  hommes  assez,  qui  ont  diuerses  parties  belles  :  qui  l'esprit,  qui 
le  cœur,  qui  l'adresse,  qui  la  conscience,  qui  le  langage,  qui  vne  science,  qui 
vn'  autre  :  mais  de  grand  homme  en  gênerai,  et  ayant  tant  de  belles  pièces  en- 
semble, ou  vne,  en  tel  degré  d'excellence,  qu'on  le  doiue  admirer,  ou  le  comparer 
à  ceux  que  nous  honorons  du  temps  passé,  ma  fortune  ne  m'en  a  faict  voir  nul, 
II,  514. 

Il  semble  que  considérant  la  foiblesse  do  nostre  vie,  et  à  combien  d'escueils  or- 
dinaires et  naturels  elle  est  exposée,  on  n'en  deuroit  pas  faire  si  grande  part  à  la 
naissance,  à  l'oisiueté  et  à  l'apprentissage,  I,  598. 

Les  hommes  sont  diuers  en  sentiment  et  en  force  :  il  les  fairt  mener  à  leur 
bien,  selon  eux  :  et  par  routes  diuerses,  III,  576. 

Nous  sommes  tous  de  lopins,  et  d'vne  contexturc  si  informe  et  diuerse,  que 
chaque  pièce,  chaque  moment,  faict  son  ieu.  Et  se  trouue  autant  de  différence 
de  nous  à  nous  mesmes,  que  de  nous  à  autruy,  I,  610. 

A  nous  autant  d'actions,  autant  faut-il  de  iugemens  particuliers.  Le  plus  seur, 
à  mon  opinion,  seroit  de  les  rapporter  aux  circonstances  voisines,  sans  entrer  en 
plus  longue  recherche,  et  sans  en  conclurre  autre  conséquence,  I,  604. 

Si  par  expérience  nous  touchons  à  la  main  que  la  forme  de  notre  estre  des- 
pend de  l'air,  du  climat,  et  du  terroir  où  nous  naissons  :  non  seulement  le  tainct, 
la  taille,  la  complexion  et  les  contenances,  mais  encore  les  facultez  de  l'ame  :  que 
deuiennent  toutes  ces  belles  prerogaliues  de  quoy  nous  nous  allons  (lattans?  11,366. 

Pourquoy  n'estimons  nous  vn  homme  par  ce  qui  est  sien?  Il  a  vn  grand  train, 
v^  beau  palais,  tant  de  crédit,  tant  de  rente  :  tout  cela  est  autour  de  luy,  non  en 
luy,  I,  482. 

Pourquoy  estimant  vn  homme  l'estimez  vous  tout  enueloppé  et  empacqueté? 
C'est  le  prix  de  l'espée  que  vous  cerchez,  non  de  la  guaine.  Il  le  faut  iuger  par 
luy  mesme,  non  par  ses  atours.  Et  comme  dit  tres-plaisamment  vn  ancien  : 
Sçauez  vous  pourquoy  vous  l'estimez  grand?  vous  y  comptez  la  hauteur  de  ses 
patins.  La  base  n'est  pas  de  la  statue.  Mesurez  le  sans  ses  eschaces.  Qu'il  mette 
à  part  ses  richesses  et  honneurs,  qu'il  se  présente  en  chemise.  A  il  le  corps  pro- 


E.202  ESSAIS  DES  MONTAIGNE. 

pre  à  ses  functions,  sain  et  allègre?  Quelle  ame  a  il?  Est  elle  belle,'  capable,  et 
heureusement  pourueue  de  toutes  ses  pièces?  Est  elle  riche  du  sien,  ou  de  l'au- 
tru}'?  La  fortune  n'y  a  elle  que  voir?  Si  les  yeux  ouuerts  elle  attend  les  espées 
traites  :  s'il  ne  luy  chaut  par  où  luy  sorte  la  vie,  par  la  bouche,  ou  par  le  gosier  : 
si  elle  est  rassise,  cquable  et  contente  :  c'est  ce  qu'il  faut  veoir,  I,  482. 

Plutarquedit  qu'il  ne  trouue  point  si  grande  distance  de  beste  à  beste,  comme 
il  trouue  d'houmie  à  homme.  11  parle  de  la  suffisance  de  l'ame  et  qualitez  internes, 
l'encherirois  volontiers  :  et  dirois  qu'il  y  a  plus  de  distance  de  tel  à  tel  homme, 
qu'il  n'y  a  de  tel  homme  à  telle  beste,  I,  480. 

Là  où,  si  nous  considérons  vn  paisan  et  vn  Roy,  vn  noble  et  vn  villain,  vn  ma- 
gistrat et  vn  homme  priué,  vn  riche  et  vn  pauure,  il  se  présente  soudain  à  nos 
yeux  vn'  extrême  disparité,  qui  ne  sont  différents  par  manière  de  dire  qu'en 
leurs  chausses.  Ce  ne  sont  pourtant  que  peintures,  qui  ne  font  aucune  dissem- 
blance essentielle.  Car  comme  les  loueurs  de  comédie,  vous  les  voyez  sur  l'eschaf- 
faut  faire  vue  mine  de  Duc  et  d'Empereur,  mais  tantost  après,  les  voyla  deuenuz 
valets  et  crocheteurs  misérables,  qui  est  leur  nayfue  et  originelle  condition,  1,484. 

Si  nous  nous  amusions  par  fois  à  nous  considérer,  et  le  temps  que  nous  met- 
tons à  contreroller  autruy,  et  à  connoistre  les  choses  qui  sont  hors  de  nous,  que 
nous  l'employissions  à  nous  sonder  nous  mesmes,  nous  sentirions  aisément  com- 
bien toute  cette  nostre  contexture  est  bastie  de  pièces  foibles  et  défaillantes,  1,564. 

le  croy  des  hommes  plus  mal  aisément  la  constance  que  toute  autre  chose,  et 
rien  plus  aisément  que  l'inconstance.  Qui  en  iugeroit  on  détail  et  distinctement, 
pièce  à  pièce,  rencontreroit  plus  souuent  à  dire  vray,  I,  602. 

Il  y  a  quelque  apparence  de  faire  ingénient  d'vn  homme,  par  les  plus  com- 
muns traicts  de  sa  vie;  mais  veu  la  naturelle  instabilité  de  nos  mœurs  et  opi- 
nions, il  m'a  semblé  souuent  que  les  bons  autheurs  mesmes  ont  tort  de  s'opinias- 
trer  à  former  de  nous  vne  constante  et  solide  contexture.  Ils  choisissent  vn  air 
vniuersel,  et  suyuant  cette  image,  vont  rengeant  et  interprétant  toutes  les  ac- 
tions d'vn  personnage,  et  s'ils  ne  les  peuuent  assez  tordre,  les  renuoyent  à  la  dis- 
simulation, I,  600. 

Pour  iuger  d'vn  homme,  il  faut  suiure  longuement  et  curieusement  sa  trace  : 
si  la  constance  ne  s'y  maintient  de  son  seul  fondement,  si  la  variété  des  occurren- 
ces luy  faict  changer  de  pas,  (ie  dy  de  voye  :  car  le  pas  s'en  peut  ou  haster,  ou 
appesantir)  laissez  le  courre  :  celuy  là  s'en  va  auau  le  vent,  I,  610. 

Sauf  l'ordre,  la  modération,  et  la  constance,  i'eslime  que  toutes  choses  soient 
faisables  par  vn  homme  bien  manque  et  deffaillant  en  gros.  A  cette  cause,  il  faut 
pour  iuger  bien  à  poinct  d'vn  homme,  principalement  contreroller  ses  actions 
communes,  et  le  surprendre  en  son  à  tous  les  iours,  II,  590. 

Ce  n'est  pas  tour  de  rassis  entendement,  de  nous  iuger  simplement  par  nos  ac- 
tions de  dehors  :  il  faut  sonder  iusqu'au  dedans,  et  voir  par  quels  ressors  se  donne 
le  bransle,  I.  612. 

Chaque  parcelle,  chasque  occupation  de  l'homme,  l'accuse,  et  le  montre  égale- 
ment qu'vn  autre,  I,  556. 

La  sagesse  ne  force  pas  nos  conditions  naturelles.  Tant  sage  qu'il  voudra, 
c'est  vn  homme  :  qu'est  il  plus  caduque,  plus  misérable,  et  plus  de  néant?  II 
faut  qu'il  sille  les  yeux  au  coup  qui  le  menasse  :  il  faut  qu'il  frémisse  planté  au 
bord  d'vn  précipice,  comme  vn  enfant  :  Nature  ayant  voulu  se  reseruer  ces  légè- 
res marques  de  son  authorité,  inexpugnables  à  nostre  raison,  et  à  la  vertu  Stoique  : 
pour  luy  apprendre  sa  mortalité  et  nostre  fadeze.  Il  pallit  à  la  peur,  il  rougit  à 
la  honte,  il  gémit  à  la  colique,  sinon  d'une  voix  désespérée  et  esclatante,  au 
moins  d'vne  voix  cassée  et  enrouée,  I,  624. 

Comme  si  la  bonne  fortune  estoit  incompatible  auec  la  bonne  conscience  :  les 
hommes  ne  se  rendent  gents  de  bien,  qu'en  la  mauuaise,  III,  380. 

L'homme  en  tout  et  partout,  n'est  que  rappiessement  et  bigarrure,  II,  .540. 

Nostre  estre  est  simenté  de  qualitez  maladiues  :  l'ambition,  la  ialousie,  l'enuie, 
la  vengeance,  la  superstition,  le  desespoir,  logent  en  nous,  d'vne  si  naturelle 
possession,  que  l'image  s'en  recognoist  aussi  aux  bestes.  Desquelles  qualitez,  qui 
osteroit  les  semences  en  l'homme,  destruiroit  les  fondamentales  conditions  de 
nostre  vie,  III,  80. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        HOM.  E.203 

La  peste  de  l'homme  c'est  l'opinion  de  sçauoir,  II,  204. 

Voulez  vous  vn  homme  sain,  lo  voulez  vous  réglé,  et  en  ferme  et  seure  posture? 
affublez  le  de  ténèbres  d'oisiueté  et  de  pesanteur.  11  nous  faut  abestir  pour  nous 
assagir:  et  nous  esblouir,  pour  nous  guider,  II,  212. 

Pa.rmy  les  conditions  humaines,  cette-cy  est  assez  commune,  de  nous  plaire 
plus  des  choses  estrangeres  que  des  nostres,  et  d'aymer  le  remuement  et  le  chan- 
gement, III,  380. 

En  aucune  chose  l'homme  ne  sçait  s'arrester  au  poinct  de  son  besoing.  De  vo- 
lupté, de  richesse,  de  puissance,  il  en  embrasse  plus  qu'il  n'en  peut  estreindre. 
Son  auidité  est  incapable  de  modération,  III,  550. 

Les  hommes  sont  si  formez  à  l'agitation  et  ostentation,  que  la  bonté,  la  mode- 
ration,  l'equabilité,  la  constance,  et  telles  qualitez  quiètes  et  obscures,  ne  se  sen- 
tent plus,  III,  520. 

La  saincte  Parole  déclare  misérables  ceux  d'entre  nous,  qui  s'estiment  :  Bourbe 
et  cendre,  leur  dit-elle,  qu'as-tu  à  te  glorifier?  11,222. 

le  ne  pense  point  qu'il  y  ait  tant  de  malheur  en  nous,  comme  il  y  a  de  vanité, 
ny  tant  de  malice  comme  de  sotise  :  nous  ne  sommes  pas  si  pleins  de  mal,  comme 
d'inanité  :  nous  ne  sommes  pas  si  misérables,  comme  nous  sommes  vils,  I,  556. 

Il  suffit  à  l'homme  de  brider  et  modérer  ses  inclinations  :  car  de  les  emporter, 
il  n'est  pas  en  luy,  I,  B24. 

Nous  faisons  trop  de  cas  de  nous,  il  semble  que  l'vniuersité  des  choses  souffre 
aucunement  de  nostre  anéantissement,  II,  420. 

Dieu  a  faict  l'homme  semblable  à  l'ombre,  de  laquelle  qui  iugera,  quand  ipav 
l'esloignement  de  la  lumière  elle  sera  esuanouye?  II,  222. 

Les  hommes  vont  ainsin.  On  laisse  les  loix,  et  préceptes  suiure  leur  voye,  nous 
en  tenons  vne  autre,  III,  460. 

Il  n'y  a  point  de  beste  au  monde  tant  à  craindre  à  l'homme,  que  l'homme,  II,  536. 

l'ay  veu  des  coquins,  pour  garantir  leur  vie,  accepter  de  pendre  leurs  amis  et 
consorts,  ie  les  ay  tenus  de  pire  condition  que  les  pendus,  III,  98. 

Il  n'est  rien  si  beau  et  légitime,  que  de  faire  bien  l'homme  et  deuëment,  111,692. 

Le  pire  estât  de  l'homme,  c'est  où  il  pert  la  connoissance  et  gouuernement  de 
soy,  I,  644. 

HONNÊTETÉ. 

Vn  cœur  généreux  ne  doit  point  desmentir  ses  pensées  :  il  se  veut  faire  voir 
iusques  au  dedans:  tout  y  est  bon,  ou  aumoins,  tout  y  est  humain,  II,  492. 

On  argumente  mal  l'honneur  et  la  beauté  d'vne  action,  par  son  vtilité  :  et  con- 
clud-on  mal,  d'estimer  que  chacun  y  soit  obligé,  et  qu'elle  soit  honeste  à  chacun, 
si  elle  est  vtile,  III,  106. 

Ne  craignons  point  d'estimer  qu'il  y  a  quelque  chose  illicite  contre  les  ennemys 
mesmes  :  que  l'interest  commun  ne  doibt  pas  tout  requérir  de  tous,  contre  l'inte- 
rest  priué  :  et  que  toutes  choses  ne  sont  pas  loisibles  à  vn  homme  de  bien,  pour 
le  seruice  de  son  Roy,  ny  de  la  cause  générale  et  des  loix,  III,  104. 

Voyla  pourquoy  en  cette  incertitude  et  perplexité,  que  nous  apporte  l'impuis- 
sance de  voir  et  choisir  ce  qui  est  le  plus  commode,  pour  les  difficultez  que  les 
diuei-s  accidens  et  circonstances  de  chaque  chose  tirent:  le  plus  seur,  quand  autre 
considération  ne  nous  y  conuieroit,  est  à  mon  aduis  de  se  rejetterau  party,  où  il 
y  a  plus  d'honnesteté  et  de  iustice  :  et  puis  qu'on  est  en  doute  du  plus  court  che- 
min, tenir  tousiours  le  droit,  I,  194. 

Il  est  loysible  à  vn  homme. d'honneur,  de  parler  ainsi  que  les  Lacedemoniens, 
deffaicts  par  Antipater,  sur  le  poinct  de  leurs  accords  :  Vous  nous  pouuez  com- 
mander des  charges  poisantes  et  dommageables  autant  qu'il  vous  plaira  :  mais 
de  honteuses,  et  deshonnestes,  vous  perdrez  vostre  temps  de  nous  en  comman- 
der. Chacun  doit  auoir  iuréàsoy  mesme,  ce  que  les  Roys  d'iEgypte  faisoient  so- 
lennellement iurer  à  leurs  iuges,  qu'ils  ne  se  desuoyeroient  de  leur  conscience, 
pour  quelque  commandement  qu'eux  mesmes  leur  en  fissent.  A  telles  commissions 
il  y  a  note  euidente  d'ignominie,  et  condemnation,  III,  92. 


E.204  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


IGNORANCE. 

L'ignorance  qui  se  scait,  qui  se  iuge,  et  qui  se  condamne,  ce  n'est  pas  vne  en- 
tière ignorance.  Pour  l'estro,  il  faut  qu'elle  s'ignore  soy-mesme,  II,  ^iO. 

Ce  n'est  pas  sans  raison,  que  nous  attribuons  à  simplesseet  ignorance,  la  facilité 
de  croire  et  de  se  laisser  persuader,  I,  288. 

IMAGINATION. 

La  iouyssance,  et  la  possession,  appartiennent  principalement  à  l'imagination. 
Elle  embrasse  plus  chaudement  et  plus  continuellement  ce  qu'elle  va  quérir,  que 
ce  que  nous  touchons,  III,  434. 

Nostre  discours  est  capable  d'estoffer  cent  autres  mondes,  et  d'en  trouuer  les 
principes  et  la  contexture.  Il  ne  luy  faut  ny  matière  ny  baze.  Laissez  le  courre  : 
il  bastit  aussi  bien  sur  le  vide  que  sur  le  plain,et  de  l'inanité  que  de  matière, 
III,  528. 

Que  de  choses  nous  semblent  plus  grandes  par  imagination,  que  pareffect,  1,668. 

Nous  embrassons  et  ceux  qui  ont  esté,  et  ceux  qui  ne. sont  point  encore,  non  que 
les  absens,  III,  436. 

Nous  tressuons,  nous  tremblons,  nous  pallissons,  et  rougissons  aux  secousses  de 
nos  imaginations.  Chacun  en  est  heurté,  aucuns  en  sont  renuersez,  I,  134. 

Nous  auons  raison  de  faire  valoir  les  forces  de  nostre  imagination  :  cartons  nos 
biens  ne  sont  qu'en  songe,  II,  204. 

Les  bestes  mesmes  se  voyent  comme  nous,  subiectes  à  la  force  de  l'imagination, 
I,  148. 

IMMORTALITÉ  DE  L'AME. 

Sans  l'immortalité  des  âmes,  il  n'y  auroit  plus  dequoy  asseoir  les  vaines  espé- 
rances de  la  gloire,  qui  est  vne  considération  de  merueilleux  crédit  au  monde  : 
et  c'est  vne  tres-vtile  impression,  que  les  vices,  quand  ils  se  desroberont  de  la  veur 
et  cognoissance  de  l'humaine  iustice,  demeurent  tousiours  en  butte  à  la  diuinc, 
qui  les  poursuyura,  voire  après  la  mort  des  coupables,  II,  322. 

Le  fruict  de  l'immortalité,  consiste  en  la  iouyssance  de  la  béatitude  éternelle. 
Confessons  iugenuement,  que  Dieu  seul  nous  l'a  dict,  et  la  foy  :  car  leçon  n'est-ce 
pas  de  Nature  et  de  nostre  raison.  Et  qui  retentera  son  estre  et  ses  forces,  et  de- 
dans et  dehors,  sans  ce  priuilege  diuin  :  qui  verra  l'homme,  sans  le  flatter,  il  n'y 
verra  ny  efficace,  ny  faculté,  qui  sente  autre  chose  que  la  mort  et  la  terre,  II,  324. 

IMPOSTURE. 

Le  vray  champ  et  subiect  de  l'imposture,  sont  les  choses  inconnues  :  l'estrangeté 
mesme  donne  crédit,  I,  376. 

Il  n'est  rien  creu  si  fermement,  que  ce  qu'on  sçait  le  moins,  ny  gens  si  asseurez, 
que  ceux  qui  nous  content  des  fables,  I,  376. 

INDÉPENDANCE. 

l'essaye  à  auoir  exprès  besoing  de  nul,  III,  420. 

le  hay.  les  morceaux  que  la  nécessité  me  taille.  Toute  commodité  me  tiendroit 
à  la  gorge,  de  laquelle  seule  i'aurois  à  despendre,  III,  460. 

On  iouyt  bien  plus  librement,  et  plus  gayement,  des  biens  empruntez  :  quand 
ce  n'est  pas  vne  iouyssance  obligée  et  contrainte  par  le  besoing  :  et  qu'on  a,  et 
en  sa  volonté,  et  en  sa  fortune,  la  force  et  les  moyens  de  s'en  passer,  III,  420. 

le  fuis  à  me  submettre  à  toute  sorte  d'obligation.  Mais  sur  tout,  à  celle  qui 
m'attache,  par  deuoir  d'honneur.  le  ne  trouue  rien  si  cher,  que  ce  qui  m'est 
donné  :  et  ce  pourquoy,  ma  volonté  demeure  hypothéquée  par  tiltre  de  gratitude. 
Et  reçois  plus  volontiers  les  offices,  qui  sont  à  vendre.  Pour  ceux-cy,  ie  ne  donne 
que  de  l'argent  :  pour  les  autres,  ie  me  donne  moj'-mesme,  III,  416. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         INI).  E.205 

La  subiection  essentielle  et  effectuelle,  ne  regarde  d'entre  nous,  que  ceux  qui 
s'y  conuient,  et  qui  ayment  à  s'honnorer  et  enricher  par  tel  s^eruice  :  car  qui  se 
veut  tapir  en  son  foyer,  et  sçait  conduire  sa  maison  sans  querelle,  et  sans  pro- 
cès, il  est  aussi  libre  que  le  Duc  de  Venise,  I,  492. 

Mes  amis  m'importunent  estrangement,  quand  ils  me  requierent^do  requérir 
vn  tiers.  Et  ne  me  semble  guère  moins  de  coust,  desengager  celuy  qui  me  doibt, 
vsant  de  luy  :  que  m'engager  enuers  celuy,  qui  ne  me  doibt  rien,  111,422. 

l'ayme  tant  à  me  descharger  et  desobliger,  que  iay  parfois  compté  à  profit,  les 
ingratitudes,  offences,  et  indignitez,  que  i'auois  reçeu  de  ceux,  à  qui  ou  par  na- 
ture, ou  par  accident,  i'auois  quelque  deuoir  d'amitié  :  prenant  cette  occasion  de 
leur  faute,  pour  autant  d'acquit,  et  descharge  de  ma  debte,  111,418. 

INDIGENCE. 

Par  diuerses  causes  l'indigence  se  voit  autant  ordinairement  logée  chez  ceux 
qui  ont  des  biens,  que  chez  ceux  qui  n'en  ont  point,  I,  4G8. 

Et  me  semble  plus  misérable  vn  riche  malaisé,  nécessiteux,  affaireux,  que  celuy 
qui  est  simplement  panure,  I,  4G8. 

INITIATIVE. 

En  toutes  choses  les  hommes  se  ietteni;  aux  appuis  estrangers,  pour  espargnel' 
les  propres  :  seuls  certains  et  seuls  puissans,  qui  sçait  s'en  armer,  III,  562. 

Nous  sommes  chacun  plus  riche,  que  nous  ne  pensons  :  mais  on  nous  dresse  à 
l'emprunt,  et  à  la  queste  :  on  nous  duict  à  nous  seruir  plus  de  l'autruy,  que  du 
nostre,  III,  548. 

INSATIABILITÉ  DE  L'HOMME. 

Ceux  qui  accusent  les  hommes  d'aller  tousiours  béant  après  les  choses  futures, 
et  nous  apprennent  à  nous  saisir  des  biens  presens,  et  nous  rassoir  en  ceux-là, 
comme  n'ayants  aucune  prise  sur  qui  est  à  venir,  voire  assez  moins  que  nous 
n'auons  sur  ce  qui  est  passé,  touchent  la  plus  commune  des  humaines  erreurs  : 
s'ils  osent  appeller  erreur,  chose  à  quoy  nature  mesme  nous  achemine,  pour  le 
seruice  de  la  continuation  de  son  ouurage,  I,  28. 

INSPIRATION. 

Chacun  sent  en  soy  quelque  image  d'agitations  d'vne  opinion  prompte,  véhé- 
mente et  fortuite.  C'est  à  moy  de  leur  donner  quelque  authorité,  qui  en  donne  si 
peu  à  nostre  prudence.  Et  en  ay  eu  de  pareillement  foibles  en  raison,  et  violentes 
en  persuasion,  ou  en  dissuasion,  ausquelles  ie  me  laissay  emporter  si  vtilement  et 
heureusement,  qu'elles  pourroyent  estre  iugees  tenir  quelque  chose  d'inspiration 
diuine,  I,  78. 

INTOLÉRANCE. 

Fascheuse  maladie,  de  se  croire  si  fort,  qu'on  se  persuade,  qu'il  ne  se  puisse 
croire  au  contraire,  I,  582. 

IRRÉSOLUTION. 

L'irrésolution  me  semble  le  plus  comumn  et  apparent  vice  de  nostre  nature, 
1,600. 

,  Nous  dotions  entre  diuers  aduis  :  nous  ne  voulons  rien  librement,  rien  abso- 
luëment,  rien  constamment,  I,  604. 

IVROGNERIE. 

L'yurongnerie  entre  les  autres,  me  semble  vn  vice  grossier  et  brutal,  l'esprit 
a  plus  (le  part  ailleurs  :  cestuy-cy  est  tout  corporel  et  terrestre.  Les  autres  vices 
altèrent  l'entendement,  cestuy-cy  le  renuerse,  et  estonne  le  corps,  I,  644. 


E.206  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Mon  goust  et  ma  complexion  est  plus  ennemie  de  ce  vice  que  mon  discours, 
le  le  trouue  bien  vn  vice  lasche  et  stupide,  mais  moins  malicieux  et  dommagea- 
ble que  les  autres,  qui  choquent  quasi  tous  de  plus  droit  fil  la  société  publique.  Il 
couste  moins  à  nostre  conscience  que  les  autres  :  outre  qu'il  n'est  point  de  dif- 
ficile apprest,  ny  malaisé  à  trouuer  :  considération  non  mesprisable,  I,  618. 

Le  vin  redonne  aux  hommes  la  gayeté,  et  la  ieunesse  aux  vieillards,  I,  622. 

Boire,  c'est  quasi  le  dernier  plaisir  que  le  cours  des  ans  nous  desrobe,  I,  620, 

Le  vin  est  capable  de  fournir  à  l'ame  de  la  tempérance,  au  corps  de  la  santé. 
Toutesfois  :  on  s'en  espargne  en  expédition  de  guerre.  Que  tout  magistrat  et 
tout  iuge  s'en  abstienne  sur  le  point  d'exécuter  sa  charge,  et  de  consulter  des  af- 
faires publiques.  Qu'on  n'y  employé  le  iour,  temps  deu  à  d'autres  occupations  : 
ny  celle  nuict,  qu'on  destine  à  faire  des  enfants,  I,  622. 

11  y  en  a  qui  conseillent  de  se  dispenser  quelquefois  à  boire  d'autant,  et  de 
s'enyurer  pour  relascher  l'ame,  I,  616. 

Le  vin  faict  desbonder  les  plus  intimes  secrets,  à  ceux  qui  en  ont  pris  outre 
mesure,  I,  614. 

JALOUSIE. 

La  ialousie  est  la  plus  vaine  et  tempesteuse  maladie  qui  afflige  les  âmes  hu- 
maines, III,  222. 

Lors  que  la  ialousie  saisit  ces  panures  âmes,  foibles,  et  sans  résistance,  c'est 
pitié,  comme  elle  les  tirasse  et  tyrannise  cruellement.  Elle  s'y  insinue  sous  titre 
d'amitié  :  mais  depuis  qu'elle  les  possède,  les  mesmes  causes  qui  seruoient  de 
fondement  à  la  bien-vueillance,  seruent  de  fondement  de  hayne  capitale  :  c'est 
des  maladies  d'esprit  celle,  à  qui  plus  de  choses  seruent  d'aliment,  et  moins  de 
choses  de  remède.  La  vertu,  la  santé,  le  mérite,  la  réputation  du  mary,  sont  les 
boutefeux  de  leur  maltalent  et  de  leur  rage.  Cette  fiéure  laidit  et  corrompt  tout 
ce  qu'elles  ont  de  bel  et  de  bon  d'ailleurs.  Et  d'vne  femme  ialouse,  quelque 
chaste  qu'elle  soit,  et  mesnagere,  il  n'est  action  qui  ne  sente  l'aigre  et  l'impor- 
tun, III,  224. 

A  dire  vray,  ie  ne  sçay  si  on  peut  souffrir  d'elles  pis  que  la  ialousie.  C'est  la 
plus  dangereuse  de  leurs  conditions,  comme  de  leurs  membres,  la  teste,  III. 
236. 

JEUX  PUBLICS. 

Les  bonnes  polices  prennent  soing  d'assembler  les  citoj'ens,  et  les  r'allier, 
comme  aux  offices  sérieux  de  la  deuotion,  aussi  aux  exercices  et  ieux.  La  so- 
ciété et  amitié  s'en  augmente,  et  puis  on  ne  leur  sçauroit  concéder  des  passe- 
temps  plus  réglez,  que  ceux  qui  se  font  en  présence  d'vn  chacun,  et  à  la  veuë 
mesme  du  magistrat,  diuertissement  de  pires  actions  et  occultes,  I,  288. 

JUGEMENT. 

Le  iugement  est  vn  vtil  à  tous  subiects,  et  se  mesle  par  tout,  I,  552. 

Nature  enserre  dans  les  termes  de  son  progrez  ordinaire,  comme  toutes  au- 
tres choses,  les  créances,  les  iugemens,  et  opinions  des  hommes  :  elles  ont  leur 
reuolution,  leur  saison,  leur  naissance,  leur  mort,  comme  les  choux  :  le  ciel  les 
agite,  et  les  roule  à  sa  poste,  II,  366. 

Le  sçauoir  est  moins  prisable,  que  le  iugement;  cestuj-cy  se  peut  passer  de 
l'autre,  et  non  l'autre  de  cestuy-cy,  I,  216. 

La  science  et  la  vérité  peuuent  loger  chez  nous  sans  iugement,  et  le  iuge- 
ment y  peut  aussi  estre  saos  elles  :  voire  la  reconnoissance  de  l'ignorance  est 
l'vn  des  plus  beaux  et  plus  seurs  tesmoignages  de  iugement  que  ie  trouue, 
II,  62. 

Combien  diuersement  iugeons  nous  des  choses?  combien  de  fois  changeons 
nous  noz  fantasies?  Ce  que  ie  tiens  auiourd'huy,  et  ce  que  ie  croy,  ie  le  tiens, 
et  le  croy  de  toute  ma  croyance;  ie  ne  sçaurois  embrasser  aucune  vérité  ny  con- 
seruer  auec  plus  d'asseuraace,  que  ie  fay  cette-cy.  l'y  suis  tout  entier;  i'y  suis 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        JUG.  E.207 

voyrement  :  mais  ne  m'est-il  pas  aduenu  non  vne  fois,  mais  cent,  mais  mille,  et 
tous  les  iours,  d'auoir  embrassé  quelque  autre  chose  en  cette^mesme  condition, 
que  depuis  i'ay  iugé  fauce?  II,  34"2. 

Nostre  appréhension,  nostre  iugement  et  les  facultez  de  nostré  ame  en  gê- 
nerai, souffrent  selon  les  mouuements  et  altérations  du  corps,  lesquelles  altéra- 
tions sont  continuelles.  N'auons  nous  pas  l'esprit  plus  esueillé,  la  mémoire  plus 
prompte,  le  discours  plus  vif,  en  santé  qu'en  maladie?  La  ioye  et  la  gayeté  ne 
nous  font  elles  pas  receuoir  les  subjects  qui  se  présentent  à  nostre  amc,  d'vn 
tout  autre  visage,  que  le  chagrin  et  la  melancholie?  II,  344. 

Ce  ne  sont  pas  seulement  les  fieures,  les  breuuages,  et  les  grands  accidens, 
qui  renuersent  nostre  iugement  :  les  moindres  choses  du  monde  le  tourneuirent. 
Par  conséquent,  à  peine  se  peut-il  rencontrer  vne  seule  heure  en  la  vie,  où  nos- 
tre iugement  se  trouue  en  sa  deuë  assiette,  II,  346. 

Qui  se  souuient  de  s'estre  tant  et  tant  de  fois  mesconté  de  son  propre  iuge- 
ment :  est-il  pas  vn  sot,  de  n'en  entrer  iamais  en  deffiance?  III,  018. 

Si  nostre  iugement  est  en  main  à  la  maladie  mesmes,  et  à  la  perturbation,  si 
c'est  de  la  folie  et  de  la  témérité,  qu'il  est  tenu  de  receuoir  l'impression  des 
choses,  quelle  seurté  pouuons  nous  attendre  de  luy?  II,  352. 

Il  se  tire  vne  merueilleuse  claité  poui-  le  iugement  humain,  de  la  fréquenta- 
tion du  monde.  Nous  sommes  tous  contraints  et  amonceliez  en  nous,  et  auons 
la  veuë  racourcie  à  la  longueur  de  nostre  nez  :  nous  ne  regardons  que  sous  ^ 
nous.  A  qui  il  gresle  sur  la  teste,  tout  l'hemisphere  semble  estre  en  tempeste  et 
orage,  I,  250. 

Nos  iugemens  sont  encores  malades,  et  suyuent  la  deprauation  de  nos  mœurs, 
le  voy  la  plupait  des  esprits  de  mon  temps  faire  les  ingénieux  à  obscurcir  la 
gloire  des  belles  et  généreuses  actions  anciennes,  leur  donnant  quelque  inter- 
prétation vile,  et  leur  controuuant  des  occasions  et  des  causes  vaines.  Grande 
subtilité.  Qu'on  me  donne  l'action  la  plus  excellente  et  pure,  ie  m'en  vois  y 
fournir  vraysemblablement  cinquante  vitieuses  intentions,  I,  400. 

Vous  recitez  simplement  vne  cause  à  l'aduocat,  il  vous  y  respond  chancellant 
et  doubteux  :  vous  sentez  qu'il  luy  est  indiffèrent  de  prendre  à  soustenir  l'vn  ou 
l'autre  party  :  l'auez  vous  bien  payé  pour  y  mordre,  et  pour  s'en  formaliser, 
commence-il  d'en  estre  intéressé,  y  a-il  escliauffé  sa  volonté?  sa  raison  et  sa 
science  s'y  eschauffent  quant  et  quant  :  voylà  vne  apparente  et  indubitable  vé- 
rité, qui  se  présente  à  son  entendement  :  il  y  descouure  vne  toute  nouuelle  lu- 
mière, et  le  croit  à  bon  escient,  et  se  le  persuade  ainsi,  II,  350. 

L'ardeur  qui  naist  du  despit,  et  de  l'obstination,  à  rencontre  de  l'impression 
et  violence  du  magistrat,  et  du  danger  :  ou  l'interest  de  la  réputation,  ont  en- 
uoyé  tel  homme  soustenir  iusques  au  feu,  l'opinion  pour  laquelle  entre  ses  amys, 
et  en  liberté,  il  n'eust  pas  voulu  s'eschauder  le  bout  du  doigt,  II,  350. 

Il  se  faut  garder  de  s'attacher  aux  opinions  vulgaires,  et  les  faut  iuger  par  la 
voye  de  la  raison,  non  par  la  voix  commune,  I,  354. 

Les  choses  ne  logent  pas  chez  nous  en  leur  foi-me  et  en  leur  essence,  s'il  estoit 
ainsi,  nous  les  recourions  de  mesme  façon  :  le  vin  seroit  tel  en  la  bouche  du  ma-* 
lade,  qu'en  la  bouche  du  sain;  tandis  qu'il  ne  se  void  aucune  proposition,  qui  ne 
soit  débattue  et  controuersee  entre  nous,  ou  qui  ne  le  puisse  estre,  ce  qui  montre 
bien  que  nostre  iugement  naturel  ne  saisit  pas  bien  clairement  ce  qu'il  saisit  : 
car  mon  iugement  ne  le  peut  faire  receuoir  au  iugement  de  mon  compagnon  : 
qui  est  signe  qui  ie  I'ay  saisi  par  quelque  autre  moyen,  que  par  vne  naturelle 
puissance,  qui  soit  en  moy  et  en  tous  les  hommes,  II,  340. 

Nous  recognoissons  aysément  es  autres,  l'aduantage  du  courage,  de  la  force 
corporelle,  de  l'expérience,  de  la  disposition,  de  la  beauté  :  mais  l'aduantage  du 
iugement,  nous  ne  le  cédons  à  personne.  Et  les  raisons  qui  partent  du  simple 
discours  naturel  en  autruy,  il  nous  semble  qu'il  n'a  tenu  qu'à  regarder  de  ce 
costé  là,  que  nous  ne  les  ayons  trouuees,  II,  508. 

Si  chascun  qui  oid  vne  iuste  sentence,  regardoit  incontinent  par  où  elle  luy 
appartient  en  son  propre  :  chascun  trouueroit,  que  cette  cy  n'est  pas  tant  vn 
bon  mot  comme  vn  bon  coup  de  fouet  à  la  bestise  ordinaire  de  son  iugement. 
Mais  on  reçoit  les  aduis  de  la  vérité  et  ses  préceptes,  comme  adressés  au  peu- 


E.208  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

pie,,  non  iamais  à  soy  :  et  au  lieu  de  les  coucher  sur  ses  mœurs,  chascun  les 
couche  en  sa  mémoire,  tres-sottement  et  tres-inutilement,  I,  170. 

Il  eschappe  souuent  des  fautes  à  nos  yeux  :  la  maladie  du  iugement  consiste 
à  ne  les  pouuoir  apperceuoir,  lors  qu'vn  autre  nous  les  descouure,  II,  62. 

11  est  peu  de  choses,  ausquelles  nous  puissions  donner  le  iugement  syncere, 
par  ce  qu'il  en  est  peu,  ausquelles  en  quelque  façon  nous  n'ayons  particulier  in- 
terest,  III,  321. 

C'est  vn  lesmoignage  merueilleux  de  la  foiblessc  de  nostre  iugement,  qu'il  re- 
commande les  choses  par  la  rareté  ou  nouuelleté,  ou  encore  par  la  difficulté,  si 
la  bonté  et  vtilité  n'y  sont  ioinctes,  I,  568. 

Il  ne  faut  pas  iuger  ce  qui  est  possible,  et  ce  qui  ne  l'est  pas,  selon  ce  qui  est 
croyable  et  incroyable  à  nostre  sens.  Et  est  vne  grande  faute,  et  en  laquelle 
toutesfois  la  plus  part  des  hommes  tombent  :  de  faire  difficulté  de  croire  d'au- 
truy,  ce  qu'eux  ne  soauroient  faire,  ou  ne  voudroient,  II,  628. 

Tout  ce  qui  nous  semble  estrange,  nous  le  condamnons,  et  ce  que  nous  n'en- 
tendons pas,  II,  166. 

C'est  vne  hardiesse  dangereuse  et  de  conséquence,  outre  l'absurde  témérité 
qu'elle  traine  quant  et  soy,  de  mespriser  ce  que  nous  ne  conceuons  pas,  I,  294. 

Condamner  résolument  vne  chose  pour  fausse,  et  impossible,  c'est  se  donner 
l'aduantage  d'auoir  dans  la  teste,  les  bornes  et  limites  de  la  volonté  de  Dieu,  et 
de  la  puissance  de  nosti-e  mère  nature  :  et  il  n'y  a  point  de  plus  notable  folie  au 
monde,  que  de  les  ramener  à  la  mesure  de  nostre  capacité  et  suffisance,  I,  290. 

L'incertitude  de  mon  iugement,  est  si  également  balancée  en  la  pluspart  des 
occurrences,  que  ie  compromottrois  volontiei-s  à  la  décision  du  sort  et  des  dets. 
II,  506. 

le  ne  fay  qu'aller  et  venir  :  mon  iugement  ne  tire  pas  tousiours  auant,  il  flotte, 
il  vague.  11  se  fait  mille  agitations  indiscrettes  et  casueles  chez  moy.  Ou  l'hu- 
meur melancholique  me  tient,  ou  la  cholérique;  et  de  son  authorité  priuée,  à 
cett'  heure  le  chagrin  prédomine  en  moy,  à  cette  heure  l'allégresse.  A  iun  ie  me 
sens  autre,  qu'après  le  repas  :  si  ma  santé  me  rid,  et  la  clarté  d'vn  beau  iour, 
me  voyia  honneste  homme  :  si  i'ay  vn  cor  qui  me  presse  l'orteil,  me  voylà  ren- 
froigné,  mal  plaisant  et  inaccessible.  Vn  mesme  pas  de  cheual  me  semble  tantost 
l'ude,  tantost  aysé;  et  mesme  chemin  à  cette  heure  plus  court,  vne  autre  fois 
plus  long  :  et  vne  mesme  forme  ores  plus  ores  moins  aggreable.  Maintenant  ie 
suis  à  tout  faire,  maintenant  à  rien  faire  :  ce  qui  m'est  plaisir  à  cette  heure, 
me  sera  quelquefois  peine.  Quand  ie  prens  des  Hures,  i'auray  apperceu  en  tel 
passage  des  grâces  excellentes,  et  qui  auront  féru  mon  ame;  qu'vn'  autre  fois 
i'y  retombe,  i'ay  beau  le  tourner  et  virer,  c'est  vne  masse  incognue  et  informe 
pour  mo}'.  Maintes-fois,  comme  il  adulent  de  faire  volontiers,  ayant  pris  pour 
exercice  et  pour  estât,  à  maintenir  vne  contraire  opinion  à  la  mienne,  mon  es- 
prit s'appliquant  et  tournant  de  ce  coste-là,  m'y  attache  si  bien,  que  ie  ne  trouue 
plus  la  raison  de  mon  premier  aduis,  et  m'en  despars.  le  m'entraine  quasi  où 
ie  panche,  comment  que  ce  soit,  et  m'emporte  de  mon  poix.  Chacun  à  peu  près 
en  diroit  autant  de  soy,  s'il  se  regai-doit  comme  moy,  II,  348. 

Ma  foiblesse  n'altère  aucunement  les  opinions  que  ie  dois  auoir  de  la  force  et 
vigueur  de  ceux  qui  le  méritent.  Rampant  au  limon  de  la  terre,  ie  ne  laisse  pas 
de  remarquer  iusques  dans  les  nues  la  hauteur  inimitable  d'aucunes  âmes  héroï- 
ques, I,  398. 

JUSTICE  (langage  judiciaire,  lois).  * 

Nous  appelions  iustice,  la  dispensation  et  pratique,  des  loix  très  ineptes  souuent 
et  très  iniques,  III,  36. 

Les  Stoïciens  tenoient  que  Nature  mesme  procède  contre  iustice,  en  la  plus- 
part  de  ses  ouurages. Les  Cyrenaïquès  qu'il  n'y  a  rien  iuste  de  soy:  que  les  cous- 
tumes  et  loix  forment  la  iustice,  III,  162. 

L'humaine  iustice  est  formée  au  modelle  de  la  médecine,  selon  laquelle,  tout  ci' 
qui  est  vtile  est  aussi  iuste  et  honneste,  III,  612. 

Considérez  la  forme  de  cette  iustice  qui  nous  régit;  c'est  vn  vray  tesmoignage 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        JUS.  E.209 

do  riiiiiuaiuc  iiiibocillité  :  tant  il  y  a  de  conti-adictiou  et  ilVii'ciir.  (i-  (|ui'  nous 
trouuons  faneur  et  rigueur  en  la  instice  :  et  y  en  trouuons  tailt,  que  ie  ne  sçay 
si  l'entre-deux  s'y  trouue  si  sonnent  :  ce  sont  parties  uialadiues,  et  fiienibres  in- 
iustes,  du  corps  niesmes  et  essence  de  la  iustice.  Combien  auons  nous  descou- 
uert  d'innocens  auoir  esté  punis  ;  ie  dis  sans  la  coulpe  des  iuges;  et  combien  en 
y  a-il  eu,  que  nous  n'auons  pas  descounert"?  Combien  aj'-ie  veu  de  condemna- 
tions,  plus  crimineuses  que  le  crime?  Il  n'y  a  remède.  l'en  suis  là  que  ie  ne  me 
representoray  iamais,  que  ie  ])uisse,  à  homme  qui  décide  de  ma  teste  :  où  mon 
honneur,  et  ma  vie,  dependt'  de  Tindusti-ie  et  soing  de  mon  procureur:  plus-que 
démon  innocence,  III,  <il(i. 

Qu'est-il  ])lus  farouche  (pi(>  de  voir  vue  nation,  où  par  légitime  coustume  la 
charge  de  iuger  se  vende;  les  iugements  soyent  payez  à  purs  deniers  contans; 
et  où  légitimement  la  iustice  soit  refusée  à  qui  n'a  dequoy  la  payer?  I,  171. 

De  ce  mesme  papier  où  il  vient  d'escrirc  l'arrest  de  condemnation  contre  vu 
adultère,  le  iuge  en  desrobe  vn  lopin,  pour  en  faire  vn  poulet  à  la  femme  de 
son  compagnon.  Celle  à  qui  vous  viendrez  de  vous  frotter  illicitement,  criera 
plus  asprement,  tantos't,  en  vosti'C  presiMice  mesme,  à  rencontre  d'vne  pareille 
faute  de  sa  compaigne,  que  ne  fei'oit  Porcie.  Et  tel  condamne  les  hommes  à  mou- 
rir, pour  des  crimes,  qu'il  n'estime  point  fautes,  III,  4G9. 

Tel  qui  rapporte  de  sa  maison  la  douleur  de  la  goutte,  la  ialousie,  ou  le  lari'o- 
cin  de  son  valet,  ayant  toute  l'ame  teinte  et  abbreuuée  de  colère,  il  ne  faut  pas 
doubter  que  son  ingénient  ne  s'en  altère  vers  cette  part  là,  II,  316. 

Quelque  bon  dessoin  qu'ait  vn  iuge,  s'il  ne  s'escoute  de  près,  à  quoy  pou  de 
gens  s'amusent;  l'inclination  à  l'amitié,  à  la  parenté,  à  la  beauté,  et  à  la  ven- 
geance, et  non  pas  seulement  choses  si  poisantes,  mais  cet  instinct  fortuite,  ipii 
nous  fait  fauoriser  vue  chose  plus  qu'vno  autre,  et  qui  nous  donne  sans  le  congé 
de  la  raison,  le  choix,  en  deux  pareils  subjects,  ou  quelque  vmbrage  de  pareille 
vanité,  peuuent  insinuer  insensiblement  en  son  iugement,  la  recommondation 
ou  deffaueur  d'vne  cause,  et  donner  pente  à  la  balance,  II,  340. 

l'ay  ouy  parler  d'vn  iuge,  lequel  où  il  rencontroit  vn  aspre  conflit  entre  Harto- 
lus  et  Baldus,  et  quelque  matière  agitée  do  plusieurs  contrarietez,  mcttoit  en 
marge  de  son  liure.  Question  pour  l'amy,  c'est  à  dire  que  la  vérité  estoit  si  oui- 
brouillée  et  debatue,  (|u'en  pareille  cause,  il  pourroit  fauoriser  celle  des  parties. 
que  bon  luy  sembloroit.  Il  ne  tenoit  qu'à  faute  d'esprit  et  de  suffisance,  qu'il  ne 
poust  mettre  par  tout,  Question  pour  l'amy.  Les  aduocats  et  les  iuges  de  nostre 
temps,  trouuentà  toutes  causes,  assez  de  biais  pour  les  accommoder  où  bon  leur 
semble,  II,  378. 

Receuons  quelque  forme  d'arrest  qui  die  :  La  Cour  n'y  entend  rien  ;  tels  les 
Areopagitos  :  lesquels  se  trouuans  pressez  d'vne  cause,  qu'ils  no  pouuoiont  dos- 
uelopper,  ordonneront  que  les  parties  en  vicndroiont  à  cent  ans,  I,  536. 

Certes  i'ay  eu  sonnent  despit,  de  voir  des  iuges,  attii'oi-  par  fraude  et  fauces 
espérances  do  faneur  ou  pardon,  le  criminel  à  descouurir  son  fait,  et  y  employer 
la  piperie  et  l'impudence.  C'est  vue  iustice  malicieuse  :  et  ne  l'estime  pas  moins 
blessée  par  soy-mesme,  que  par  autruy,  III,  80. 

La  cholere  et  la  hayno  sont  au  delà  du  douoir  de  la  iustice  :  et  sont  passions 
seruans  seulement  à  ceux,  qui  ne  tiennent  pas  assez  à  leur  deuoir,  par  la  raison 
simple.  Toutes  intentions  légitimes  sont  d'elles  mesmes  tempérées  :  sinon,  elles 
s'altèrent  en  séditieuses  et  illégitimes,  III,  82. 

C'est  vn  vsage  de  nostre  iustice,  d'en  condanmer  aucuns,  pour  l'aduertisso- 
ment  des  autres.  De  les  condamner,  par  ce  qu'ils  ont  failly,  ce  seroit  bestise,  car 
ce  qui  est  faict,  no  se  peut  defl'aire  :  mais  c'est  afin  qu'ils  ne  faillent  plus  de 
mesmes,  ou  qu'on  fuye  l'exemplo  do  leur  faute.  On  no  corrige  pas  celuy  qu'on 
pdnd,  on  corrige  les  autres  par  luy,  III.  330. 

C'est  raison  qu'on  face  grande  différence  entre  les  fautes  ([ui  viennent  do  nos- 
tre foiblesse,  et  celles  qui  viennent  de  nostre  malice.  Car  en  celles  icy  nous  som- 
mes bandez  à  nostre  escient  contre  les  règles  de  la  raison,  que  nature  a  em- 
preintes en  nous  :  et  en  celles  là,  il  semble  que  nous  puissions  appeller  à  ga- 
rant cotte  mesme  nature  pour  nous  auoir  laissé  en  telle  imperfection  et  deffail- 
lance,  I,  88. 

ESSAIS    L)l',   MONTAIGM..   —   T.    I\  .  14 


E.210  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

le  hay  moins  l'iniure  j)iofesse  quo  trahitresse;  guerrière  que  pacifique  et  iuri- 
(lique,  ill,  426. 

i.os  supplices  aiguisent  les  vices  plustost  qu'ils  no  les  amortissent  :  ils  n'en- 
^'ondrent  point  le  soing  de  bien  faire,  c'est  l'ouurage  de  la  raison,  et  de  la  disci- 
jiline  :  mais  seulement  vn  soing  do  n'estre  surpris  en  faisant  mal,  II,  438. 

C'est  mettre  ses  coniectures  à  bien  haut  prix,  que  d'en  faire  cuire  vn  homme 
tout  vif,  III,  5-10. 

A  tuer  les  gens  :  il  faut  vne  clairté  lumineuse  et  nette,  III,  538. 

Quant  à  uioy,  en  la  iustice  mesme,  tout  ce  qui  est  au  delà  de  la  mort  simple, 
me  .semble  pin-e  cruauté,  II,  102. 

Nostre  iustice  no  nous  présente  que  l'vne  de  ses  mains;  et  encore  la  gaucho. 
Quiconque  il  soit,  il  en  sort  auecques  perte,  III,  612. 

LÂCHETÉ  (peur). 

La  plus  commune  façon  de  chastier  la  couardise,  est  par  lionte  et  ignominie. 
Toutesfois  quand  il  y  auroit  vne  si  grossière  et  apparente  ou  ignorance  ou 
couardise,  qu'elle  surpa.ssast  toutes  les  ordinaiies,  co  soroit  l'aison  do  la  prondi-e 
l)0ur  suffisante  prouue  de  meschanceté  ot  de  malice,  et  de  la  chastier  pour  telle, 
I.  ÎMJ. 

LAIDEUR. 

Entre  les  laideurs,  ie  compte  les  beautez  artificielles  et  forcées.  La  laideur  d'vno 
vieillesse  aduouoc,  est  moins  vieille,  ot  moins  laide  à  mon  gré,  qu'vne  autre 
pointe  et  lissée,  III,  282. 

LANGAGE. 

Nostre  parler  a  ses  foiblesses  ot  ses deffaults,  comme  tout  le  reste.  La  plus  paît 
des  occasions  dos  troubles  du  monde  sont  Grammariens.  Noz  proQez  ne  naissent 
que  du  débat  de  l'interprétation  des  loix;  ot  la  plus  part  des  guerres,  de  cette 
impuissance  do  n'auoir  sçeu  clairement  exprimer  les  conucntions  et  traictez 
d'accord  des  Princes,  II,  276. 

Le  parler  que  i'aymc,  c'est  vn  parler  simple  et  naif,  tel  sur  le  paiiier  qu'à  la 
bouche  :  vn  parler  succulent  ot  neruoux,  court  et  serré,  non  tant  délicat  et  pei- 
gné, comme  véhément  et  brusque.  Plustost  difficile  qu'ennuieux,  esloigné  d'af- 
fectation :  desreglé,  descousu,  et  hardy  :  chaque  loppin  y  face  son  corps  :  non 
pedantesque,  non  fratesque,  non  pleideresque,  mais  plustost  soldatesque,  I,  278. 

En  nostre  langage  ie  trouuo.  assez  d'estofïe,  mais  vn  peu  faute  do  façon.  Car  il 
n'est  rien,  qu'on  ne  fist  du  iargon  do  nos  chasses,  et  do  nostre  guerre,  qui  est 
vn  généreux  teri-ein  à  emprunter.  Et  les  formes  do  parler,  comme  les  herbes, 
s'amendent  et  fortifient  en  les  transplantant.  le  le  trouuo  suffisamment  abondant, 
mais  non  pas  maniant  ot  vigoureux  suffisamment.  Il  succombe  ordinairement  à 
vne  puissante  conception.  Si  vous  allez  tendu,  vous  sentez  souuent  qu'il  languit 
soubs  vous,  et  floschit  :  et  qu'à  son  delfaut  le  Latin  se  présente  au  secours,  et  le 
Grec  à  d'autres,  III,  242. 

Personne  n'est  exempt  de  dire  des  fadaises  :  le  malheur  est,  de  les  dire  cu- 
rieusement, III,  78. 

Il  en  est  de  si  sots,  qu'ils  se  destournent  de  leur  voj^e  vn  quart  de  lieue,  pour 
courir  après  vn  beau  mot.  Au  rebours,  c'est  aux  paroles  à  seruir  ot  à  suiuro,  et 
que  le  Gascon  y  arriue,  si  le  François  n'y  peut  aller,  I,  270. 

Qui  a  dans  l'esprit  vne  viue  imagination  et  claire,  il  la  produira,  soit  en  Bor- 
gamasquo,  soit  par  mines,  s'il  est  muet,  I,  274. 

Le  maniement  ot  employte  des  beaux  esprit,  donne  prix  à  la  langue  :  non  pas 
l'innouant,  tant,  comme  la  remplissant  de  plus  vigoreux  et  diuers  seruices,  l'os- 
tirant  et  ployant,  III,  240. 

Le  long  ou  le  court,  ne  sont  proprietez  qui  ostent  ny  qui  donnent  prix  au  lan- 
gage, II,  476.  ^ 

Les  Athéniens  ostoient  à  choisir  de  deux  architectes,  à  conduire  vne  grande 


L'ESPKIT  DKS  ESSAIS.         LAN.  E.211 

fabrique;  lo  premier  se  présenta  auec  vn  beau  discours  jiremedité  :  mais  l'autre 
on  trois  mots  :  Seigneurs  Athéniens,  ce  que  cettuy  a  dict,  ie  le  feray,  I,  274. 

LANGAGE  JUDICIAIRE. 

Quelle  chose  peut  estre  plus  estrange,  que  de  voir  vn  peuple  obligé  à  suiuro 
des  loix  qu'il  n'entendit  oncques  :  attaché  en  tous  ses  affaires  domesticquos,  ma- 
riages, donations,  testaments,  ventes,  et  achapts,  à  des  règles  qu'il  ne  peut 
sçauoir,  n'estans  escrites  ny  publiées  en  sa  langue,  et  desquelles  par  nécessité  il 
luy  faille  acheter  l'interprétation  et  l'vsage,  I,  174. 

Pourquoy  est-ce,  que  notre  langage  commun,  si  aisé  à  tout  autre  vsage,  dé- 
nient obscur  et  non  intelligible,  en  contract  et  testament  :  et  que  celuy  qui  s'ex- 
prime si  clairement,  quoy  qu'il  die  et  escriue,  ne  trouue  en  cela,  aucune  manière 
de  se  déclarer,  qui  no  tombe  en  doute  et  contradiction?  Si  ce  n'est,  que  les  Prin- 
ces de  cet  art  s'appliquans  d'vne  peculiere  attention,  à  trier  des  mots  solemnes, 
et  former  des  clauses  artistes,  ont  tant  poisé  chasque  syllabe,  espluché  si  prime- 
ment  chasque  espèce  de  cousture,  que  les  voila  enfrasquez  et  embrouillez  en  l'in- 
linité  des  ligures,  et  si  menues  partitions:  qu'elles  ne  peuuent  plus  tomber  soubs 
aucun  règlement  et  prescription,  ny  aucune  certaine  intelligence,  III,  002. 

La  libéralité  n'est  pas  bien  en  son  lustre  en  main  souueraine  :  les  priuez  y  ont 
plus  de  droict.  Car  à  le  prendre  exactement,  vn  Roy  n'a  rien  proprement  sien; 
il  se  doibt  soy-mesmes  à  autruy,  III,  293. 

Comment  assouuiroit  il  les  enuios,  qui  croissent,  à  mesure  qu'elles  se  remplis- 
sent? Qui  a  sa  pensée  à  prendre,  ne  l'a  plus  à  ce  qu'il  a  prins.  La  conuoitise  n'a 
l'ien  si  propre  que  d'estre  ingrate,  III,  298. 

A  nostre  mode,  ce  n'est  iamais  l'aict  :  le  reçcu  ne  se  met  i)lus  en  compte  :  on 
n'ayme  la  libéralité  que  future.  Par  quoy  plus  vn  Prince  s'espuise  en  donnant, 
plus  il  s'appaourit  d'amys,  III,  298. 

Il  faut  à  qui  en  veut  retirer  fruict,  semer  de  la  main,  non  pas  verser  du  sac  : 
il  faut  espandre  le  grain,  non  pas  le  respandre,  III,  293. 

Il  est  trop  ays('  d'imprimer  la  libéralité,  en  celuy,  qui  a  dequoy  y  fournir  au- 
tant qu'il  veut,  aux  despens  d'autruy.  Et  sou  estimation  se  réglant,  non  à  la 
mesure  du  présent,  mais  à  la  mesure  des  moyens  de  celuy  qui  l'exerce,  elle 
vient  à  estre  vaine  en  mains  si  puissantes.  Us  se  trouuent  prodigues,  auant- 
qu'ils  soient  libéraux,  III,  295. 

LIBERTÉ. 

La  vraye  liberté  c'est  pouuoir  toute  chose  sur  soy,  III,  50 1. 
La  i)remeditation   de  la  moi't,  est  préméditation  de  la  liberté.  Qui  a  apris  à 
mourir,  il  a  desapris  à  seruir,  I,  110. 
Le  sçauoir  mourir  nous  afranchit  de  toute  subiection  et  contraincte,  I,  IIO. 

•  LIVRES. 

Les  Mures  ont  beaucoup  de  qualit(!Z  aggreables  à  ceux  qui  les  sçavent  choisir. 
Mais  aucun  bien  sans  peine.  C'est  vn  plaisir  qui  n'est  pas  net  et  pur,  non  plus 
(lue  les  autres  :  il  a  ses  incommoditez,  et  bien  poisantes.  L'ame  s'y  exerce,  mais 
le  corps  demeure  ce  pendant  sans  action,  s'atterre  et  s'attriste,  le  ne  sçaclie 
'wcez  plus  dommageable,  ny  plus  à  euiter,  en  la  déclinaison  d'aage,  III,  158. 

LOIS   (justice,    LANCiAGE  JUDICIAUIE). 

Les  loix  prennent  leui-  authorité  de  la  possession  et  de  l'vsage  :  il  est  dange- 
reux de  les  ramener  à  leur  naissance  :  elles  grossissent  et  s'annoblissent  en  rou- 
lant, comme  nos  riuieres,  II,  380. 

Elles  se  maintiennent  en  crédit,  non  par  ce  qu'elles  sont  iustes,  maià  |)ar  ce 
•  lu'elles  .sont  loix.  C'est  le  fondement  mystique  de  leur  authorité  :  elles  n'en  ont 
puint  «l'aiilre.   (){\i   liicii   h-ui'  scrl.  Elles  sont    souucMit    faicics  par  des   suis.  Plus 


E.212  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

souuent  par  des  gons,  qui  en  liaine  d'equalité  ont  faute  d'oquité.  Mais  tousiours 
par  dos  liomnies,  autliours  vains  ot  irrésolus.  III,  G14. 

Il  n'est  rien  si  lourdement,  et  largement  fautier,  (jue  les  loix  :  ny  si  ordinaire- 
ment. Quiconque  leur  obéit  par  ce  qu'elles  sont  iustes,  ne  leur  obeyt  pas  iustc- 
ment  par  où  il  doit,  III,  014. 

Il  n'est  si  homme  de  bien,  qu'il  mette  à  l'examen  des  loix  toutes  ses  actions  et 
pensées,  qui  ne  soit  pendable  dix  fois  en  sa  vie.  Voire  tel,  qu'il  seroit  très-grand 
dommage,  et  très-iniuste  de  punir  et  de  perdre,  III,  402. 

Tel  pourroit  n'offencer  point  les  loix,  qui  n'en  meriteroit  point  la  louange 
d'homme  de  vertu  :  et  que  la  philosophie  feroit  tres-iustemcnt  foiter.  Tant  cette 
relation  est  trouble  et  inégale,  III,  402. 

Quelle  bonté  est-ce  que  ie  voyois  hyer  en  crédit,  et  demain  ne  l'estre  plus  : 
et  que  le  traiect  d'vne  riuierc  fait  crime?  Quelle  vérité  est-ce  que  ces  montai- 
gnes  bornent  mensonge  au  monde  qui  se  tient  au  delà?  II,  374. 

Poui"  la  reuerence  des  lois  la  vraye  vertu  a  beaucoup  à  se  desmettre  de  sa  vi- 
gueur originelle  :  et  non  seulement  par  leur  permission,  plusieurs  actions  vitieu- 
sesont  lieu,  mais  encores  à  leur  suasion,  III,  92. 

Les  loix  mesmes  de  la  iustice,  ne  peuuent  subsister  sans  quoique  meslange 
d'iniustico.  Et  ceux-là  entreprennent  de  couper  la  teste  de  Hydra,  qui  prétendent 
oster  dos  loix  toutes  incommoditez  et  inconueniens,  II,  540. 

Los  pires  nous  sont  si  nécessaires,  que  sans  elles,  les  hommes  s'entre-mange- 
roient  les  vns  les  autres  ;  sans  loix,  nous  viurions  comme  bestos,  II,  334. 

Quiconque  combat  les  loix,  menace  les  gents  de  bien  d'oscourgees  et  de  la 
corde,  I,  244. 

Le  pis  que  ie  trouue  en  nostre  estât,  c'est  l'instabilité  :  et  que  nos  loix  ne  peu- 
uent prendre  aucune  forme  arrestée,  II,  508. 

Il  n'est  rien  subiect  à  plus  continuelle  agitation  que  les  loix.  Depuis  que  ie 
suis  nay,  i'ay  veu  telle  chose  qui  nous  estoit  capitale,  deuenir  légitime  ;  prenant 
vue  essence  contraire  en  l'espace  de  peu  d'années  de  possession,  II,  .372. 

L'opinion  de  celuy-là  ne  me  plaist guère,  qui  pensoit  parla  multitude  des  loix, 
brider  l'authorité  des  iuges,  en  leur  taillant  leurs  morceaux.  Il  ne  sentoit  point, 
qu'il  v  a  autant  de  liberté  et  d'estenduë  à  l'interprétation  des  loix,  qu'à  leur  fa- 
çon, III,  000. 

Toutes  choses  se  tiennent  par  quelque  siinilitude.  Tout  exemple  cloche.  Et  la 
relation  qui  se  tire  de  l'expérience,  est  tousiours  défaillante  et  imparfaicte.  On 
ioinct  toutesfois  les  comparaisons  par  quelque  bout.  Ainsi  seruent  les  loix;  et 
.s'assortissent  à  chacun  de  nos  affaires,  par  quelque  interprétation  destournéo, 
contrainte  et  biaise,  III,  010. 

Les  hommes  vont  ainsin.  On  laisse  les  loix,  et  préceptes  suiure  leur  voyo,  nous 
en  tenons  vne  autre.  Non  par  desreglement  de  mœurs  seulement,  mais  par  opi- 
nion souuent,  et  par  iugement  contraire,  III,  400. 

Nous  auons  en  France,  plus  de  loix  que  tout  le  reste  du  monde  ensemble;  et 
plus  qu'il  n'en  faudroit  à  régler  tous  les  mondes  d'Epicurus  :  et  si  auons  tant 
laissé  à  opiner  et  décider  à  nos  iuges,  qu'il  ne  fut  iamais  liberté  si  i)uissante  et 
si  licencieuse.  Qu'ont  gaigné  nos  législateurs  à  choisir  cent  mille  espèces  ot  faicts 
particuliers,  et  y  attacher  cent  mille  loix?  Ce  nombre  n'a  aucune  proportion, 
auec  l'infinie  diucrsité  des  actions  humaines.  La  multiplication  de  nos  inuen- 
tions,  n'arriuera  pas  à  la  variation  dos  exemples.  Adioustez  y  en  cent  fois  au- 
tant :  il  n'aduiendra  pas  pourtant,  que  des  euenemens  à  venir,  il  s'en  trouue 
aucun,  qui  en  tout  ce  grand  nombre  de  milliers  d'euenemens  choisis  et  enre- 
gistrez en  rencontre  vn,  auquel  il  se  puisse  ioindre  et  apparier,  si  exactement, 
qu'il  n'y  reste  quelque  circonstance  et  diuersité,  qui  requière  diuerse  considé- 
ration de  iugement,  III,  000. 

Il  y  a  peu  de  relation  de  nos  actions,  qui  sont  en  perpétuelle  nmtation,  auec 
les  loix  fixes  et  immobiles.  Les  plus  désirables,  ce  sont  les  plus  rares,  plus  sim- 
ples, et  générales.  Et  encore  crois-ie,  qu'il  vaudroit  mieux  n'en  auoir  point  du 
tout,  que  de  les  auoir  en  tel  nombre  que  nous  auons,  III,  002. 

Il  y  a  grand  doute,  s'il  se  peut  trouuer  si  euidont  profit  au  changement  d'vne 
loy  receïie  telle  qu'elle  soit,  qu'il  y  a  de  mal  à  la  remuer,  I.  170. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         LOIS.  E.2I3 

La  foi-tuiie  nous  présente  aucunes-fois  la  nécessité  si  vrgento,  qu'il  est  besoin 
que  les  loix  luy  lacent  quelque  place.  Quand  on  résiste  à  l'accroissance  d'vne  iu- 
nouation  qui  \dent  par  violence  à  s'introduire,  de  se  tenir  en  tout  et  ])ar  tout  en 
bride  et  on  règle  contre  ceux  qui  ont  la  ciel'  des  champs,  ausqiiels  tout  cela  est 
loisible  qui  peut  auancev  leur  dessein,  qui  n'ont  n.v  loy  ny  ordre  que  de  suiure 
leur  aduantage,  c'est  vue  dangereuse  obligation  et  ine((ualité.  Il  est  encore  re- 
proché à  ces  deux  grands  personnages,  Octauius  et  Caton,  aux  guerres  ciuiles, 
l'vn  do  Sylla,  l'autre  de  Ciesar,  d'auoir  plustost  laissé  encourir  toutes  oxtreniitez 
à  leur  patrie,  que  de  la  secourir  aux  dospens  de  ses  loix,  ot  que  de  rien  remuer. 
Mieux  vault  faire  vouloir  aux  loix  ce  qu'elles  peuuent,  lors  qu'elles  ne  pouuent 
ce  qu'elles  veulent.  C'est  ce  dequoy  Plutarque  loiie  Philoi)femon,  qu'estant  né 
pour  commander,  il  sçauoit  non  seulement  commander  selon  les  loix,  mais  aux 
loix  mesmes,  quand  la  nécessité  publique  le  requeroit,  I,  181. 

Il  y  a  ie  ne  sçay  quelle  douceur  naturelle  à  se  sentir  louor,  mais  nous  luy  pres- 
lons  trop  de  beaucoup.  le  no  me  soucie  pas  tant,  quel  ie  sois  chez  autruy, 
comme  ie  me  soucie  quel  ie  sois  en  moy-mesme.  Les  estrangers  ne  voyent  que 
les  euenemens  et  apparences  externes  :  chacun  peut  faire  bonne  mine  par  le 
dehors,  plein  au  dedans  de  fieburo  et  d'effroy.  Ils  ne  voyent  pas  mon  cn>ur,  ils 
ne  voyent  que  mes  contenances,  II,  151. 

LOUANGE  (ki.attf.hie,  (ii.oun;,  réputation). 

La  louange  est  tousiours  i)laisante,  de  qui,  et  pourquoy  elle  vienne.  Si  faut-il 
pour  s'en  aggreer  iustement,  cstre  informé  de  sa  cause,  III,  4L2. 

Louez  un  bossu  de  sa  belle  taille,  il  le  doit  receuoir  à  iniure  :  si  vous  estes 
couard,  et  qu'on  vous  honnore  pour  vn  vaillant  homme,  est-ce  do  vous  qu'on 
parle?  On  vous  prend  pour  vn  autre,  III,  190. 

MAL. 

Le  mal  est  à  riionuao  bien  à  son  tour.  Ny  la  douleur  ne  hiy  est  tousiours  à 
fuir,  ny  la  volupté  tousiours  à  suiure,  II,  214. 

En  toutes  nos  fortunes,  nous  nous  comparons  à  ce  qui  est  au  dessus  de  nous, 
et  regardons  vers  ceux  qui  sont  mieux.  Mesurons  nous  à  ce  qui  est  au  dessous  : 
il  n'en  est  point  de  si  misérable,  qui  ne  trouue  mille  exemples  où  se  consoler. 
C'est  nostre  vice,  que  nous  voyons  plus  mal  volontiers,  ce  qui  est  dessus  nous, 
que  volontiers,  ce  qui  est  dessoubs,  III,  102. 

Qui  dresseroit  vn  tas  de  tous  les  maux  ensemble,  il  n'est  aucun,  qui  ne  choisist 
plustost  de  remporter  auec  soy  les  maux  qu'il  a,  que  de  venir  à  diuision  légi- 
time, auec  tous  les  autres  hommes,  de  ce  tas  de  maux.  H  on  [irendre  sa  quotte 
part,  III,  404. 

Les  plus  griefs  et  ordinaires  maux,  sont  ceux  (pie  la  fantasie  nous  charge, 
III,  042. 

Qui  se  faict  plaindre  sans  raison,  est  homme  pour  n'estre  pas  plaint,  quand  la 
raison  y  sera.  C'est  pour  n'estre  iamais  plaint,  que  se  plaindre  tousiours,  faisant 
si  souuent  le  piteux,  qu'on  ne  soit  pitoyable  à  personne,  III,  440. 

Le  plus  vieil  et  mieux  cogneu  mal,  est  tousiours  plus  supportable,  que  le  mal 
récent  et  inexpérimenté,  III,  402. 

Tous  les  maux  qui  n'ont  autre  danger  que  du  mal,  nous  les  disons  sans  danger. 
Celuy  si  grief  qu'il  soit,  d'autant  qu'il  n'est  pas  homicide,  qui  le  met  en  conte  de 
maladie?  I,  152. 

M  AL  A  DIB» 

On  n'a  point  à  se  plaindre  des  maladies,  qui  partagent  loyallemeat  le  toinps 
auec  la  santé,  III,  ihl. 

Nous  nous  perdons  d'impatience.  Les  maux  ont  leur  vie,  ot  leurs  bornes, 
leurs  maladies  et  leur  santé.  Les  maladies  ont  leur  fortune  limitée  dés  leur  nais- 
sance :  et  leurs  iours.  Qui  essaye  de  les  abbreger  impérieusement,  par  force,  au 


E.214  ESSAIS  DE  MONTAIGNE.    • 

trauers  de  leur  course,  il  les  allonge  ot  multiplie  :  et  les  harselle.  au  lieu  de  les 
appaiser.  Il  ne  faut  ny  obstinéenicnt  s'opposer  aux  maux,  et  a  l'estourdi  :  ny 
leur  succomber  de  mollesse  :  mais  il  leur  faut,  céder  naturellement,  selon  leur 
condition  et  la  nostre.  On  doit  donner  passage  aux  maladies  :  elles  arrestent 
moins  chez  qui  les  laisse  faire.  Laissons  faire  vn  peu  à  Nature  :  elle  entend  mieux 
ses  affaires  que  nous.  Mais  vn  tel  en  mourut.  Si  ferez  vous  :  sinon  de  ce  mal  là, 
d'vn  autre.  Et  combien  n'ont  pas  laissé  d'en  mourii-,  ayants  trois  médecins  à  leur 
costé?  III,  04(). 

le  n'ayme  pointa  guarir  le  mal  parle  mal.  le  hay  les  remèdes  qui  importunent 
|)lus  que  la  maladie.  D'estre  subiect  à  la  colique,  et  subiect  à  m'abstenir  du  plai- 
sir de  manger  des  iiuitres,  ce  sont  deux  maux  pour  vn.  Le  mal  nous  pinse  d'vn 
costé,  la  règle  de  l'autre.  Puis-qu'on  est  au  hazard  de  se  mesconter,  hasardons 
nous  plustost  à  la  suitte  du  plaisir.  Le  monde  faict  au  rebours,  et  ne  pense  rien 
vtile,  qui  ne  soit  pénible.  La  facilité  luy  est  suspecte,  III,  (i)42. 

Sinon  l'allégresse,  aumoins  la  contenance  rassise  des  assistans,  est  propr(\ 
près  d'vn  sage  malade.  Pour  se  voir  en  vn  estât  contraire,  il  n'entre  point  en 
querelle  auec  la  santé.  Il  luy  plaist  de  la  contempler  en  autruy,  forte  et  entière: 
et  en  iouyr  au  moins  par  compagnie.  Pour  se  sentir  fondre  contre-bas.  il  ne 
reiecte  pas  du  tout  les  pensées  de  la  vie,  ny  ne  fuit  les  entretiens  communs,  III,  14:1. 

Les  maladies  se  coniurent  mieux  par  courtoisie,  que  par  brauerie.  Il  faut  souf- 
frir doucement  les  loix  de  nostre  condition.  Nous  sommes  pour  vieillir,  pour 
alToiblir,  pour  estre  malades,  en  despit  de  toute  médecine,  III,  646. 


MARIAGE. 

Le  mariage,  outre  ce  que  c'est  vn  marché  qui  n'a  que  l'entrée  libre,  de  durée 
contrainte  et  forcée,  dépendant  d'ailleurs  que  de  nostre  vouloir  :  il  y  suruient 
mille  fusées  estrangeres  à  desnieler  parmy,  suffisantes  à  l'ompre  le  lil  et  troubler 
le  cours  d'vne  viue  affection,  I,  302. 

Il  n'est  plus  temps  de  regimber  quand  on  s'est  laissé  entrauer.  II  faut  prudem- 
ment mesnager  sa  liberté  :  mais  depuis  qu'on  s'est  submis  à  l'obligation,  il  s'y 
faut  tenir  soubs  les  loix  du  debuoir  commun,  aumoins  s'en  efforcer,  III,  200. 

Vn  mariage  plein  d'accord  et  de  bonne  conuenance,  peut  ne  pas  tousiours  pi-e- 
senter  beaucoup  de  loyauté  :  il  n'est  pas  impossible  de  se  rendre  aux  efforts  de 
l'amour,  et  ce  neantmoins  reseruer  quelque  deuoir  enuers  le  mariage  :  on  le 
peut  blesser,  sans  le  rompre  tout  à  faict,  II,  202. 

La  beauté,  l'oportunité,  la  destinée  (car  la  destinée  y  met  aussi  la  main)  l'ont 
attachée  à  vn  cstranger  :  non  pas  si  entière  peut  estre,  qu'il  ne  luy  puisse  rester 
quelque  liaison  par  où  elle  tient  encore  à  son  mary,  III,  202. 

On  ne  se  marie  pas  pour  .soy,  quoy  qu'on  die  :  on  se  marie  autant  ou  plus, 
pour  sa  postérité,  pour  sa  famille.  L'vsage  et  l'interest  du  mariage  touche  no-stre 
race,  bien  loing  par  delà  nous.  Pourtant  me  plaist  cette  façon,  qu'on  le  conduise 
plustost  par  main  tierce,  que  par  les  propres  :  et  par  le  sens  d'autruy,  que  par  le 
sien.  Tout  cecy,  combien  à  l'opposite  des  conuentions  amoureuses?  III,  194. 

le  frouue  peu  d'aduancement  à  vn  homme  de  qui  les  affaires  se  portent  bien, 
d'aller  chercher  vue  femme  qui  le  charge  d'vn  grand  dot;  il  n'est  point  de  debte 
estrangere  qui  apporte  plus  de  ruyne  aux  maisons,  II,  40. 

C'est  vne  religieuse  liaison  et  deuote  que  le  mariage  :  voyia  pourquoy  le  plaisir 
qu'on  en  tire,  ce  doit  estre  vn  plaisir  retenu,  sérieux  et  meslé  à  (juelque  seue- 
rité  :  ce  doit  estre  vne  volupté  aucunement  prudente  et  consciencieu.se,  I,  346. 

Confessons  le  vray,  il  n'en  est  guère  d'entre  nous,  qui  ne  craigne  jilus  la 
honte,  qui  luy  vient  des  vices  de  sa  femme,  que  dos  siens  :  qui  ne  se  soigne  plus, 
(esmerueillable  charité)  de  la  conscience  de  sa  bonne  espouse,  que  de  la  sienne 
propre  :  qui  n'aymast  mieux  estre  voleur  et  sacrilège,  et  que  sa  femme  fust 
meurti'iere  et  hérétique,  que  si  elle  n'estoit  plus  chaste  que  son  mary.  Inique  es- 
timation de  vices,  III,  216. 

Celuy  là  s'y  entendoit,  ce  me  semble,  qui  dit  qu'vn  boa  mariage  se  dressoit 
d'vne  femme  aueugle,  auec  vn  mary  sourd,  III,  236. 


|;ESPRIT  des  essais.         MAR.  E.21Ij 

L«>s  aigi-eiii's  comme  les  douceurs  du  mariage  se  tiimneiit  secrettes  par  les 
sages,  III,  234. 

Bonne  femme  et  bon  mariage,  se  dit,  non  de  qui  l'est,  mais  duquel  on  se 
taist,  II,  -234. 

Fay  auec  despit,  veu  des  maris  hayr  leurs  femmes,  de  ce  seulement,  (|u"ils  leur 
l'ont  tort.  Aumoins  ne  les  faut  il  pas  moins  aymer,  de  nostre  faute  :  par  repen- 
tance  et  compassion  aumoins,  elles  nous  en  deuroient  estre  plus  chères,  111,201. 

Le  mariage  e.st  vn  marché  plein  de  tant  d'espineuses  ciconstances,  qu'il  est 
malais(!  que  la  volonté  d'vne  femme,  s'y  maintienne  entière  long  temps.  Les 
hommes,  quoy  qu'ils  y  soyent  auec  vn  peu  meilleure  condition,  y  ont  trop  af- 
faire. La  touche  d'vn  bon  mariage,  et  sa  vraye  preuue,  regarde  le  temps  que  la 
société  dure;  si  elle  a  esté  constamment  douce,  loyalle, et  commode,  II,  Wti. 

Ce  qu'il  s'en  voit  si  peu  de  bons,  est  signe  de  son  prix  et  de  sa  valeur.  A  le 
bien  façonner  et  à  le  bien  prendre,  il  n'est  point  de  plus  belle  pièce  en  notre;  so- 
ciété. Nous  ne  nous  en  pouuons  passer,  et  Talions  auillissant.  Il  en  adulent  ce  qui 
se  voit  aux  cages,  les  oyseaux  qui  en  sont  dehors,  désespèrent  d'y  entrer;  et  d'vn 
pareil  soing  en  sortir,  ceux  qui  sont  au  dedans,  III,  200. 

Socrates,  enquis,  qui  estoit  plus  commode,  prendre,  ou  ne  prendre  point  de 
feumie  :  Lequel  des  deux,  dit-il,  on  face,  on  s'en  repentira,  III,  200. 

le  ne  voy  point  de  mariages  qui  faillent  plustost,  et  se  troublent  que  ceux  qui 
s'acheminent  par  la  beauté,  et  désirs  amoureux.  Il  y  faut  des  fondemens  plus  so- 
lides, et  plus  constans,  et  y  marcher  d'aguet  :  cette  boi'iillante  allégresse  n'y 
vaut  rien,  III,  190. 

Peu  de  gens  ont  espousé  des  amies  qui  ne  s'en  soient  repentis,  III,  202. 

l'ay  veu  de  mon  temps  en  quelque  bon  lieu,  guérir  honteusement  et  deslion- 
nestement,  l'amour,  par  le  mariage  :  les  considérations  sont  trop  autres,  111,202. 

Le  mariage  est  vn  nom  d'honneur  et  dignité,  non  de  folastre  et  lasciue  concu- 
piscence, I,  348. 

II  faut,  dit  Aristote,  toucher  sa  femme  prudemment  et  seuerement,  de  peur 
qu'en  la  chatouillant  trop  lasciuêment,  le  plaisir  ne  la  face  sortir  hors  des  gons 
de  raison,  III,  19(j. 

Les  plaisirs  mesmes  des  maris  à  l'accointance  de  leurs  femmes,  sont  reprou- 
uez,  si  la  modération  n'y  est  obseruée  :  il  y  a  dequoy  faillir  en  licence  et  des- 
bordement  en  ce  subiect  là,  comme  en  vn  subiect  illégitime.  Ces  encherimcnts 
deshontez,  que  la  chaleur  première  nous  suggère  en  ce  ieu,  sont  non  indécem- 
ment seulement,  mais  dommageablement  employez  enuers  noz  femmes.  Qu'elles 
apprennent  l'impudence  jiu  moins  d'vne  autre  main.  Elles  sont  tousiours  assez 
esueillées  pour  nostre  besoing,  I,  346. 

Les  mariez,  le  temps  estant  tout  leur,  ne  doiuent  ny  presseï"  ny  taster  leur 
entreprinse,  s'ils  ne  sontprests.  Et  vault  mieux  faillir  indécemment,  à  estreinei' 
la  couclie  nuptiale,  pleine  d'agitation  et  de  fieure,  attendant  vne  et  vue  autre 
commodité  plus  priuée  et  moins  allarmée,  que  de  tomber  en  vne  perpétuelle  mi- 
sei-e,  pour  s'estre  estonné  et  désespéré  du  premier  refus,  I,  142. 

La  libéralité  des  dames  est  trop  profuse  au  mariage,  et  esmousse  la  poincte  de 
l'affection  et  du  désir,  III,  204. 

Vne  trop  continuelle  assistance,  et  l'assiduité  blesse  :  chacun  sent  par  (expé- 
rience, que  la  continuation  de  se  voir,  ne  peut  représenter  le  plaisir  qu(;  Ion  sent 
à  se  desprendre,  et  reprendre  à  secousses,  III,  431. 

L'amitié  a  les  bras  assez  longs,  pour  se  tenir  et  se  ioindre,  d'vn  coin  de  monde 
à  l'autre  :  et  spécialement  celle  de  mari  à  femme,  où  il  y  a  vne  continuelle  com- 
munication d'offices,  qui  en  reueillent  l'obligation  et  la  souuenance,  III,  431. 

Le  mariagt!  a  pour  sa  part,  l'vtilité,  la  iustice,  l'honneui-,  et  la  constance  :  vn 
plaisir  plat,  mais  plus  vniuersel.  L'amour  se  fonde  au  seul  plaisir:  et  l'a  de  vray 
plus  chatouilleux,  plus  vif,  et  plus  aigu  :  vn  plaisir  attizé  par  la  difliculté  :  il  }• 
faut  de  la  piquourc  et  de  la  cuison.  Ce  n'est  plus  amour,  s'il  est  sans  flèches  et 
sans  feu,  111,201. 

Vn  bon  mariage,  s'il  en  est,  refuse  la  compagnie  et  conditions  de  l'amour  :  il 
tasche  à  représenter  celles  de  l'amitié.  C'est  vne  douce  société  de  vie,  pleine  de 
constance,  de  liance,  et  d'vn  nombre  inliny  d'vtiles  et  solides  offices,  et  obliga- 


E.216  ESSAIS  DE  MONTAir.NE. 

lions  mutuelles.  Aucune  femme  qui  en  sauourc  le  goust,  ne  voudroit  tenir  lieu 
de  maistresse  à  son  mary.  Si  elle  est  logée  en  son  affection,  comme  femme,  elle 
y  est  bien  plus  honorablement  et  seurement  logée.  Quand  il  fera  l'esmeu  ailleurs, 
et  l'ompressé,  qu'on  luy  demande  pourtant  lors,  à  qui  il  aymeroit  mieux  arriuer 
vne  honte,  ou  à  sa  femme  ou  à  sa  maistresse,  de  qui  la  desfortune  l'affligeroit  le 
.  plus,  a  qui  il  désire  plus  de  grandeur  :  ces  demandes  n'ont  aucun  double  en  va 
mariage  sain,  III,  l!t8. 

L'amour  hait  qu'on  se  lionne  par  ailleurs  que  par  luy,  et  se  mesle  laschemont 
aux  accointances  qui  sont  dressées  et  entretenues  soubs  autre  titre  :  comme  est 
le  mariage,  III.  191. 

le  me  mariay  à  trente  trois  ans,  et  loue  l'opinion  de  trente  cinq,  qu'on  dit  estre 
d'Aristote.  Platon  ne  veut  pas  qu'on  se  mai-ie  auant  les  trente,  II.  Ht. 

MÉDECIN.  xMÉDECIXE  (mai  x.  maladie). 

Il  y  auoit  en  .-Egypte  vno  loy  plus  iuste,  par  laquelle  le  médecin  ])renoit  son 
patient  en  cliargo  les  trois  premiers  iours,  aux  périls  et  fortunes  du  patient  : 
mais  les  trois  iours  passez,  c'estoit  aux  siens  propres,  III,  42. 

L'expérience  est  proprement  sur  son  fumier  au  subiect  de  la  médecine,  où  la 
raison  luy  quitte  la  place.  Tybère  disoit.  que  quiconque  auoit  vescu  vingt  ans, 
se  deuoit  respondre  des  choses  qui  luy  estoient  nuisibles  ou  salutaires,  et  se  sça- 
uoir  conduire  sans  médecine.  Et  le  pouuoit  auoir  apprins  de  Socrates  :  lequel 
conseillant  à  ses  disciples  soigneusement,  et  comme  vn  très  principal  estude, 
l'estude  de  leur  santé,  adioustoit,  qu'il  estoit  malaisé,  qu'vn  homme  d'entende- 
ment, prenant  garde  à  ses  exercices  à  son  boire  et  à  son  manger,  ne  discernasl 
mieux  que  tout  médecin,  ce  qui  luy  estoit  bon  ou  mauuais,  III,  628. 

C'est  de  mal'heur  que  la  science  la  plus  importante  qui  soit  en  noslre  vsagc, 
comme  celle  qui  a  charge  de  nostre  conseruation  et  santé,  soit  la  plus  incertaine, 
la  plus  trouble,  et  agitée  de  plus  de  changemens,  III,  46. 

Les  ^Egyptiens  auoient  raison  de  reiecter  ce  gênerai  mestier  de  médecin,  et 
descoupper  cette  profession  à  chaque  maladie,  à  chasque  partie  du  corps  son 
œuurier.  Cette  partie  en  estoit  bien  plus  proprement  et  moins  confusément  traic- 
tée,  de  ce  qu'on  ne  regardoit  qu'à  elle  spécialement.  Les  nostres  ne  s'aduisent 
pas,  que,  qui  pouruoid  à  tout,  no  pouruoid  à  rien  :  que  la  totale  police  de  ce  pe- 
tit monde,  leur  est  indigestible,  III,  51. 

L'art  de  medef ine,  n'est  pas  si  résolue,  que  nous  soyons  sans  authorité,  quoy 
que  nous  facions.  Elle  change  selon  les  climats,  et  selon  les  Lunes  :  selon  Fernel 
et  selon  l'Escale.  Si  vostre  médecin  ne  trouue  bon,  que  vous  dormez,  que  vous 
vsez  devin,  ou  do  telle  viande  :  ne  vous  chaille  :  io  vous  en  Irouueray  vn  autre 
qui  ne  sera  pas  de  son  aduis.  Ladiuersité  dos  arguments  et  opinions  médicinales, 
embrasse  toute  sorte  de  formes,  III,  611. 

Qui  vid  iamais  médecin  se  seruir  de  la  recepte  de  son  compagnon,  sans  y  re- 
tranchei'ou  adiouster  quelque  chose?  Ils  trahissent  assez  par  là  leur  art  :  et  nous 
font  voir  qu'ils  y  considèrent  plus  leur  réputation,  et  par  conséquent  leur  profit. 
que  l'interest  de  leurs  patiens.  Celuy  là  de  leurs  docteurs  est  plus  sage,  qui  leur 
a  anciennement  prescript,  qu'sn  seul  se  mesle  de  traicter  vn  malade  :  car  s'il  ne 
fait  rien  qui  vaille,  le  reproche  à  l'art  de  la  médecine,  n'en  sera  pas  fort  grand 
pour  la  faute.d'vn  homme  seul  :  et  au  rebours,  la  gloire  en  sera  grande,  s'il  vient 
à  bien  rencontrer  :  là  où  quand  ils  sont  beaucoup,  ils  descrient  à  tous  les  coups 
le  mestier  :  d'autant  qu'il  leur  adulent  de  faire  plus  souuent  mal  que  -bien,  III,  46. 

Platon  auoit  raison  dédire,  que  pour  estre  vray  médecin,  il  seroit  nécessaire 
que  celuy  qui  l'entreprendroit,  eust  passé  par  toutes  les  maladies,  qu'il  veut  gué- 
rir, et  par  tous  les  accidens  et  circonstances  dequoy  il  doit  iuger.  C'est  raison 
qu'ils  prennent  la  vérole,  s'ils  la  veulent  seauoir  penser.  Vi-ayment  ie  m'en  fierois 
à  celuy  là.  Car  les  autres  nous  guident,  comme  celuy  qui  peint  les  mers,  les 
escuoils  et  les  ports,  estant  assis,  sur  sa  table,  et  y  faicl  promener  le  modèle  d'vn 
nauireen  toute  seurté.  lettez-le  à  l'effect,  il  ne  sçait  par  où  s'y  prendre,  111,628. 

C'est  vne  bonne  règle  en  leur  art,  qu'il  faut  que  la  foy  du  patient,  préoccupe 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         MED.  E.217 

par  bonne  csiuM'ance  et  asseurance,  leur  effect  et  opération.  Laquelle  règle  ils 
tiennent  iusques  là,  que  le  plus  ignorant  et  grossier  médecin,  ils  le  Irouuent  plus 
propre  à  celuy  qui  a  fiance  en  luy,  que  le  plus  expérimenté,  et  incognu,  III,  41. 

Les  médecins  ployent  ordinairement  auec  vtilité,  leurs  règles,  à  la  violence  des 
enuies  aspres,  qui  suruiennent  aux  malades.  Ce  grand  désir  ne  se  peut  imaginer, 
si  cstranger  et  vicieux,  que  Nature  ne  s'y  applique.  Et  puis,  combien  est-ce  de 
contenter  la  fantasie?  III,  G 12. 

Il  n'appartient  qu'aux  médecins  de  mentir  en  toute  liberté,  puis  que  notre  sa- 
lut despend  de  la  vanité,  et  fauceté  de  leurs  promesses,  III,  42. 

Nous  ne  receuons  pas  aisément  la  médecine  que  nous  entendons;  non  plus  que 
la  drogue  que  nous  cueillons.  Si  les  nations,  desquelles  nous  retirons  le  gayac,  la 
salseperille,  et  le  bois  d'csquine,  ont  des  médecins,  combien  pensons  nous  par 
cette  mesme  recommendation  de  Testrangeté,  la  raret('',  et  la  cherté,  qu'ils  ITiçent 
feste  de  noz  clioulx,  et  de  nostre  persil?  car  qui  oseroit  mespriser  les  choses  re- 
cherchées de  si  loing,  au  hazardd'vne  si  longue  pérégrination  et  si  périlleuse?  III,  48. 

C'est  la  crainte  de  la  mort  et  de  la  douleur,  l'impatience  du  mal,  vne  furieuse 
et  indiscrète  soif  de  la  guerison,  qui  nous  aueugle.  C'est  pure  lascheté  qui  rend 
croyance  à  la  médecine  si  molle  et  maniable.  La  plus  part  pourtant  ne  croyent 
pas  tant,  comme  ils  endurent  et  laissent  faire,  III,  06. 

On  se  doit  adonner  aux  meilleures  règles,  mais  non  pas  s'y  asseruir  :  si  ce  n'est 
à  celles,  s'il  y  en  a  quelqu'vne,  ausquelles  rol)ligation  et  seruitude  soit  vtile.  Il 
n'est  l'ien,  où  les  malades  se  puissent  mettre  mieux  en  scurté,  qu'en  se  tenantcoy, 
dans  le  train  de  vie,  où  ils  sont  esleuez  et  nourris.  Le  changement,  quel  qu'il  soit, 
estonne  et  blesse.  Estendons  nostre  possession  iusques  aux  dei-niers  moyens.  Le 
plus  souucnt  on  s'y  durcit,  en  s'opiniastrant,  et  corrige  Ion  sa  complexion,  III,  (ild. 

MÉDITATION. 

Le  méditer  est  vn  puissant  estude  et  plein  à  qui  sçait  se  taster  et  employer  vi- 
goureusement, l'aime  mieux  forger  mon  amc,  que  la  meubler.  Il  n'est  point  d'oc- 
cupation ny  plus  foible,  ny  plus  forte,  que  celle  d'entretenir  ses  pensées,  selon 
l'ame  que  c'est,  III,  ISG. 

MÉiMOIRE. 

C'est  vn  outil  de  moruoillcux  seruice,  que*  la  mémoire,  et  sans  lequel  le  iuge- 
ment  fait  bien  à  peine  son  office,  II,  490. 

C'est  le  réceptacle  et  l'estuy  de  la  science,  II,  500. 

La  mémoire  nous  représente,  non  pas  ce  que  nous  choisissons,  mais  ce  qui  luy 
plaist.  Il  n'est  rien  qui  imprime  si  viuement  quelque  chose  en  nostre  souuenance, 
que  le  désir  de  l'oublier.  C'est  vne  bonne  manière  de  donner  en  garde,  et  d'em- 
preindre en  nostre  ame  quelque  chose,  que  de  la  solliciter  de  la  perdre,  II,  210. 

Ce  n'est  pas  sans  raison  qu'on  dit,  que  qui  ne  se  sent  point  assez  ferme  de  nie- 
moire,  ne  se  doit  pas  mesler  d'estre  menteur,  I,  02. 

Le  manque  de  mémoire  est  vn  mal  duquel  principallement  i'ay  tiré  la  raison 
de  corriger  vn  mal  pire,  qui  se  fust  facilement  produit  en  moy  :  sçauoir  est  l'am- 
bition, car  cette  deffaillance  est  insuportable  à  qui  s'empestre  des  negotiations 
du  monde,  I,  00. 

MÉNAGE  (femme,  maiua(;e). 

La  plus  vtile  et  honnorablc  science  et  occupation  à  vne  mère  de  famille,  c'est 
la  science  du  mesnage.  l'en  vois  quelqu'vne  auare;  de  mcsnagere,  fort  peu.  C'est 
sa  maistresse  qualité,  et  qu'on  doibt  chercher,  auant  toute  autre  :  conmie  le  seul 
douaire  qui  sert  àruynerou  sauuer  nos  maisons,  III,  432. 

Il  est  ridicule  et  iniuste,  que  l'oysiueté  de  nos  femmes,  soit  entretenue  de  nos- 
tre sueur  et  trauail.  le  vois  auec  despit  en  plusieurs  mesnages,  monsieur  reue- 
nir  maussade  et  tout  marmiteux  du  tracas  des  affaires,  enuiron  mid}',  que  ma- 
dame est  encore  après  à  se  coiffer  et  attiffer,  en  son  cabinet,  III,  432. 

Les  inconuenicnts  ordinaires  ne  sont  iamais  légers.  Ils  sont  continuels  et  irre- 


E.2i8  ESSAIS  l)K  MONTAKiM-:. 

parablos,  quand  ils  naissent  dos  membres  du  mesnapo,  continuels  cl  insi-paraljlt^s, 
III,  380. 

A  mesure  que  ces  espines  domestiques  sont  drues  et  desliees,  elles  nous  inci- 
dent plus  aigu,  et  sans  menace,  nous  surprenant  facilement  à  l'impourueu,  III,  :M). 

Il  y  a  quelque  commodité  à  commander,  fust  ce  dans  vne  grange,  et  à  estre 
obey  des  siens.  Mais  c'est  vn  plaisir  trop  vniformc  et  languissant.  Et  puis  il  est 
par  nécessité  meslc  do  plusieurs  pensements  fascheux,  III,  382. 

le  suis  chez  moy,  respondant  de  tout  ce  qui  va  mal,  III,  394. 

Il  y  a  tousiours  quelque  pièce  qui  va  de  trauers.  Les  négoces,  tantost  d'vnc 
maison,  tantost  d'vne  autre,  vous  tirassent.  Vous  esclairez  toutes  choses  de  trop 
près.  Votre  perspicacité  vous  nuict  icy  comme  si  fait  elle  assez  ailleurs.  le  me 
desrobe  aux  occasions  de  me  fascher  :  et  me  destourne  de  la  cognoissance  des 
choses,  qui  vont  mal.  Et  si  ne  puis  tant  faire,  qu'à  toute  heure  ie  ne  heurte  choz 
moy,  en  quelque  rencontre,  qui  me  desplaise.  Et  les  fripponneries,  qu'on  me  cache 
le  plus, sont  celles  queiesçay  le  mieux.  lien  est  que  pour  faire  moins  mal,  il  faut 
ayder  soy  mesme  à  cacher.  Vaines  pointures  :  vaines  par  fois,  mais  tousiours 
pointures.  Les  plus  menus  et  graisles  empeschemens,  sont  les  plus  persans,  III,  38  L 

C'est  pitié,  d'estre  en  lieu  où  tout  ce  que  vous  voyez,  vous  embesongne,  et 
vous  concerne,  IIÏ,  186. 

La  plus  sotte  contenance  d'vn  Gentilhomme  en  sa  maison,  c'est  lors  do  la  Visi- 
tation et  assemblée  de  ses  amis,  âe  le  voir  empesché  du  train  de  sa  police  :  par- 
ler à  l'oreille  d'vn  valet,  en  menacer  vn  autre  des  yeux.  Elle  devroit  couler  insen- 
siblement, et  représenter  vn  coure  ordinaire,  III,  39t. 

MKXSOXGE. 

En  vérité  le  mentir  est  vn  maudit  vice.  Nous  ne  sommes  hommes,  et  ne  nous 
tenons  les  vns  aux  autres  que  par  la  parole,  I,  64. 

C'est  vn  vilain  vice,  c'est  donner  tesmoignage  de  mespriscr  Dieu,  et  quand  et 
quand  de  craindre  les  hommes.  Car  que  peut  on  imaginer  plus  vilain,  que  d'estre 
couart  à  l'endroit  des  hommes,  et  braue  à  l'endroit  de  Dieu  ?  II,  526. 

Nostre  intelligence  se  conduisant  par  la  seule  voye  de  la  paroUe,  celuy  qui  la 
fauce,  trahit  la  société  publique.  C'est  le  seul  vtil,  par  le  moyen  duquel  se  com- 
muniquent noz  volontez  et  noz  pensées  :  c'est  le  truchement  de  nostrc  ame  :  s'il 
nous  faut,  nous  ne  nous  tenons  plus,  nous  ne  nous  entrecognoissons  plus.  S'il  nous 
trompe,  il  rompt  tout  nostre  commerce,  et  dissoult  toutes  les  liaisons  de  nostr" 
police,  II,  526. 

La  menterie  seule,  et  vn  peu  au  dessous,  l'opiniastreté,  me  semblent  estre  celles 
desquelles  on  douroit  à  toute  instance  combattre  la  naissance  et  le  progrez,  elles 
croissent  quand  et  eux  :  et  depuis  qu'on  a  donné  ce  faux  ti-ain  à  la  langue,  c  rst 
merueille  combien  il  est  impossible  de  l'en  retirer,  I,  64. 

Le  premier  traict  de  la  corruption  des  mœurs,  c'est  le  bannissement  de  la  vé- 
rité; l'estre  véritable,  est  le  commencement  d'vne  grande  vertu,  II,  526. 

C'est  office  de  magnanimité,  hayr  et  aymer  à  descouuert  :  iuger,  parler  auec 
toute  franchise  :  et  au  prix  delà  vérité,  ne  faire  cas  de  l'approbation  ou  réproba- 
tion d'autruy,  II.  492. 

Nostre  vérité  de  maintenant,  ce  n'çst  pas  ce  qui  est,  mais  ce  qui  se  persuade  à 
autruy  :  comme  nous  appelions  monnoye,  non  celle  qui  est  loyallc  soulemont, 
mais  la  fauce  aussi,  qui  a  mise,  II,  526. 

le  ne  sçay  quelle  commodité  ils  attendent  de  se  faindre  et  contrefaire  sans 
cesse  :  si  ce  n'est,  de  n'en  estre  pas  creus,  lors  mesmes  qu'ils  disent  voriti'.  Cola  peut 
tromper  vne  fois  ou  deux  et  tient  advertis  ceux  qui  ont  aies  pratiquer,  que  cr 
n'est  que  piperie  et  mensonge  qu'ils  disent,  II,  494. 

Il  ne  faut  j)as  tousiours  dire  tout,  car  ce  seroit  sottise.  Mais  ce  qu'on  dit,  il  faut 
qu'il  soit  tel  qu'on  le  pense:  autrement,  c'est  meschanceté,  II,  492. 

Celui  qui  dit  vray,  par  ce  qu'il  y  est  d'ailleurs  obligé,  et  par  ce  qu'il  sert  :  et 
qui  ne  craind  point  à  dire  mensonge,  quand  il  n'importe  à  personne,  il  n'est  pas 
véritable  suffisamment,  II,  492. 

La  vérité  n'a  qu'\  n  visage,  le  reuers  de  la  vérité  à  cent  mille  ligures,  et  vn 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         MEN.  E.219 

cliamp  indefîny;  le  bien  est  certain  et  finj-,  le  mal  infiny  et  incertain  ;  mille  routtes 
flesuoyent  flu  blanc  :  vne  y  va,  I.  <>1. 

lemefay  plusd'iniure  en  mentant, que  ie  n'en  fayàceluy,  dequiie  mens,  11,511. 

Nous  sommes  mieux  en  la  compagnie  d'vn  chien  cognu,  qu'en  celle  d'vn 
homme,  duquel  le  langage  nous  est  inconnu  ;  combien  est  le  langage  faux  moins 
sociable  que  le  silence?  I,  64. 

MIRACLES  (ciiKDUi.iTÉ,  croyances). 

Si  nous  ai)pelons  monstres  ou  miracles,  ce  où  nostre  raison  ne  peut  aller,  com- 
bien s'en  présente  il  continuellement  à  nostre  veuë,  1,200. 

Les  miracles  sont,  selon  l'ignorance  en  quoy  nous  sommes  de  la  nature,  non 
selon  l'estre  de  la  nature,  I,  162.  ' 

Nous  n'auons  que  faire  d'aller  trier  des  miracles  et  des  difficulté/  estrangeres  :  il 
me  semble  que  parmj-  les  choses  que  nous  voyons  ordinairement,  il  y  a  des  es- 
trangetez  si  incomprehensil)les,  qu'elles  surpassent  toute  la  difficulté  des  miracles, 
III,  40. 

l'ay  veu  la  naissance  de  plusieurs  miracles  de  mon  temps.  Encore  qu'ils  s'es- 
toulfent  en  naissant,  nous  ne  laissons  pas  de  preuoir  le  train  qu'ils  eussent  pris, 
s'ils  eussent  vescu  leur  aage.  Car  il  n'est  que  de  trouuer  le  bout  du  fil,  on  en  des- 
uide  tant  qu'on  veut.  Et  y  a  plus  loing,  de  rien,  à  la  plus  petite  chose  du  monde, 
qu'il  \-  a  de  celle  là,  iusques  à  la  plus  grande,  III,  528. 

On  est  pardonnable,  de  mescroire  vne  merueille,  autant  au  moins  qu'on  peut 
en  destourner  et  elider  la  vérification,  par  voye  non  merueillcuse  :  et  il  vaut  mieux 
pancher  vers  le  doute,  que  vers  l'asseurance,  es  choses  de  difficile  preuue,  et 
dangereuse  créance,  III,  538. 


MODERATION. 

La  modération  est  vertu  bien  plus  affaireuse,  que  n'est  la  souffi-ance,  II,  646. 

Au  mesnage,  à  l'estude,  à  la  chasse,  et  tout  autre  exercice,  il  faut  donner  ius- 
(jues  aux  derniers  limites  du  plaisir;  et  garder  de  s'engager  plus  auant,  ou  la  peine 
commence  à  se  mesler  parmy,  I,  426. 

La  tempérance  est  modératrice,  non  aduersaire  des  voluptés,  III,  698. 

Mon  mestier  et  mon  art,  c'est  viure,  I,  680. 

l'ayme  la  vie,  et  la  cultiue,  telle  qu'il  a  pieu  à  Dieu  nous  l'octroyer,  III,  6!)6. 

Pour  me  sentir  engagé  à  vne  forme,  ie  n'y  oblige  pas  le  monde,  comme  chas- 
cun  fait,  et  croy,  et  conçoy  mille  contraires  façons  de  vie  :  et  au  rebours  du 
commun,  reçoy  plus  facilement  la  différence,  que  la  ressemblance  en  nous,  1, 198. 

h;  m'attache  à  ce  que  ie  vov,  et  que  ie  tiens,  et  ne  m'eslongne  guère  du  port, 

II,  490. 

Où  ma  volonté  se  prend  auec  trop  d'appétits,  ie  me  penche  à  l'opposite  de  son 
inclination.  Comme  ie  la  voy  se  plonger  et  enyurer  de  son  vin,  ie  fuis  à  nourrir 
son  plaisir  si  auant,  que  ie  ne  l'en  puisse  plus  r'auoir  sans  perte  sanglante,  III,  504. 

Pour  nioy,  ie  loue  vne  vie  glissante,  sombre  et  muette,  III,  520. 

M'aymerois  à  l'auanture  mieux,  deuxième  ou  troisiesme  à  Perigueux,  que  pre- 
mier à  Paris  :  au  moins  sans  mentir,  mieux  troisiesme  à  Paris,  que  premier  en 
charge,  lïl,  322. 

Les  passions,  me  sont  autant  aisées  à  euiter,  comme  elles  me  sont  difficiles  à 
modérer,  III,  516. 

Mes  humeurs  sont  contradictoires  aux  humeurs  bruyantes.  l'arresterois  bien 
vn  trouble,  sans  me  troubler,  et  chastierois  vn  desordre  sans  altération.  Ay-ie 
bosoing  de  cholere,  et  d'innammation?  ie  l'cmpruntf!,  et  m'en  masque,  III,  .520. 

Le  bon  heur  m'est  vn  singulier  aiguillon,  à  la  modération,  et  modestie.  La 
|)riere  me  gaigne,  la  menace  me  rebute,  la  faneur  me  ployé,  la  crainte  me  roydit, 

III,  380. 

Si  quelquefois  on  m'a  poussé  au  maniement  d'affaires  estrangeres,  i'ay  promis 
de  les  i)rendre  en  main,  non  pas  au  poulmon  et  au  foye;  de  m'en  charger,  non 


E.220  ESSAIS  DE  MONTAIGNE, 

de  les  incorporer  :  de  m'en  soifrncr,  ouy;  de  m'en  passionner,  nullenieiii  :  iy  re- 
garde, mais  ie  ne  les  couue  point,  III,  484. 

Vax  peu  me  mesler  des  cliarges  publiques,  sans  me  despartir  de  raoy.  de  la 
lai'geur  d'vne  ongle,  et  me  donner  à  autruy  sans  m'oster  à  moy,  III,  492. 

Le  Maire  et  Slontaigne  ont  tousiours  esté  deux,  d'vne  séparation  bien  claire. 

Mon  père  auoit  ouy  dire,  qu'il  se  falloit  oublier  pour  le  prochain;  que  le  par- 
ticulier ne  venoit  en  aucune  considération  au  prix  du  gênerai.  La  plus  part  des 
legles  et  préceptes  du  monde  prennent  ce  train,  de  nous  pousser  hors  de  nous, 
et  chasser  en  la  place,  à  l'vsage  de  la  société  publique.  Ils  ont  pensé  faire  vn  bel 
eflect,  de  nous  destourner  et  distraire  de  nous;  presupposans  que  nous  n'y  tin- 
sions  que  trop,  et  d'vne  attaciie  trop  naturelle;  et  n'ont  espargné  rien  à  dire  pour 
cette  fin.  Car  il  n'est  pas  nouueau  aux  sages,  de  prescher  les  chosos  comme  elles 
seruent,  non  comme  elles  sont,  III,  490. 

Sauf  la  santé  et  la  vie,  il  n'est  chose  pourquoy  ie  vueille  ronger  mes  ongles,  et 
que  ie  vueiir  acheter,  au  prix  du  tourment  d'esprit  et  de  la  contrainte,  II,  484. 

L'absence  de  mémoire  est  vn  mal  duquel  principallement  i'ay  tiré  la  raison 
de  corriger  vn  mal  pire,  qui  se  fust  facilement  produit  en  moy  :  sçauoir  est  l'am- 
bition, car  cette  deffaillfince  est  insuportablo  à  qui  s'empestre' des  ncgotiations 
du  monde,  I,  00. 

Les  Princes  me  donnent  prou,  s'ils  ne  m'ostent  lien  :  et  me  font  as.sez  de  bien. 
quand  ils  ne  me  font  point  de  mal:  c'est  tout  ce  que  i'en  demande,  III,  420. 

le  ne  veux  estre  tenu  seruiteur,  ni  si  affectionné  ny  si  loyal,  qu'on  me  trouue 
bon  à  trahii-  personne.  Qui  est  infidelle  à  soj-mesme,  l'est  excusablement  à  son 
raaistre,  III,  88. 

le  ne  trouue  rien  si  cher,  que  ce  qui  m'est  donné:  ot  ce  pourquoy,  ma  volonté 
demeure  hj-pothequee  par- filtre  de  gratitude.  Et  reçois  plus  volontiers  les  offices, 
qui  sont  à  vendre.  le  crois  bien.  Pour  ceux-cj-,  ie  ne  donne  que  de  l'argent  :  pour 
les  autreSj  ie  me  donne  mo3'-mesme,  III,  416. 

Ce  qui  a  esté  fié  à  mon  silence,  ie  le  celé  religieusement  :  mais  ie  prens  à  celer 
ie  moins  que  ie  puis.  C'est  vne  importune  garde,  du  .secret  des  autres,  à  qui  n'en 
a  que  faire,  III,  80. 

le  ne  dis  rien  à  l'vn,  que  ie  ne  puisse  dire  à  l'autre,  à  son  heure,  l'accent  seu- 
lement vn  peu  changé  :  et  ne  rapporte  que  les  choses  ou  indifférentes,  ou  cogneuës, 
ou  qui  seruent  en  commun,  III,  88. 

le  ne  hay  pas  seulement  à  piper,  mais  ie  hay  aussi  qu'on  se  pipe  en  moy  :  ie 
n'y  veux  pas  seulement  fournir  de  matière  et  d'occasion,  III,  80. 

le  sçay  bien  dire  :  Il  faict  meschamment  cela,  et  vertueusement  cecy,  III,  502. 

Quantes-fois,  estant  marry  de  quelque  action,  que  la  ciuilité  et  la  raison  me 
prohiboient  de  reprendre  à  descouuert,  m'en  suis-ie  desgorgé,  non,  sans  dessein 
de  publique  instruction  en  ces  verges  poétiques  qui  s'impriment  encore  mieux  en 
papier,  qu'en  la  chair  viue,  III,  524. 

Quand  pour  sa  droiture  ie  ne  suyurois  le  droit  chemin,  ie  le  suyurois  pour  auoir 
trouue  par  expérience,  qu'au  bout  du  compte,  c'est  communément  le  plus  heureux, 
et  le  plus  vtile,  III,  4.52. 

l'aymeroy  bien  plus  cher,  rompre  la  pri.son  d'vne  muraille,  et  des  loix,  que  de 
ma  parole,  III,  410. 

le  promets  volontiers  vn  peu  moins  de  ce  que  ie  puis,  et  de  ce  que  i'espere  te- 
nir, III,  524. 

le  me  contente  de  iouïr  le  monde,  sans  m'en  empresser  :  de  viure  vne  vie,  seu- 
lement excusable  :  et  qui  .seulement  ne  poise,  ny  à  moy,  ny  à  autruy,  III,  oOf». 

Ma  forme  essentielle,  est  propre  à  la  communication,  et  à  la  production  :  ie  suis 
tout  au  dehors  et  en  euidence,  nay  à  la  société  et  à  l'amitié,  III,  146. 

Les  hommes,  de  la  société  et  familiarité  desquels  ie  suis  en  queste,  sont  ceux 
'qu'on  appelle  honnosteset  habiles  hommes,  III,  146. 

le  cherche  à  la  vérité  plus  la  fréquentation  de  ceux  qui  me  gourment,  que  de 
ceux  qui  me  craignent.  C'est  vn  plaisir  fade  et  nuisible,  d'auoir  affaii'e  à  gens  qui 
nous  admirent  et  facent  place,  III,  33?!. 

l'ayme  entre  les  galans  hommes,  qu'on  s'exprime  courageusement  :  que  les  mots 
aillent  où  va  la  pensée.  Il  nous  faut  fortifier  l'ouye,  et  la  durcir,  contre  cette  ten- 


I/ESPRIT  DES  ESSAIS.        MOL).  E.221 

tireur  du  sou  cerouionioux  des  paroUes.  l'aynie  vne  société,  et  fauiiliarité  forte,  et 
virile  :  vue  auiitio,  qui  se  llatte  en  l'asprcté  et  vigueur  de  son  commerce  :  connue 
l'amour,  es  morsures  et  esgratigneures  sanglantes,  III,  336. 

Aux  pro[)os  que  ie  ne  puis  traicter  sans  interest,  et  sans  émotion,  ie  ne  m'y 
mesle,  si  le  deuoir  ne  m'y  force,  III,  50C. 

On  a  dcquoy  couler  plus  incurieusement,  en  la  pauureté,  qu'en  l'abondance, 
iustement  dispensée,  II,  016. 

L'immoderation  vers  le  bien  mesme,  si  elle  ne  m'offense,  elle  m'estonne,  I,  3lt. 

L'archer  qui  outrepasse  le  blanc,  faut  comme  celuy,  qui  n'y  arriue  pas,  1, 311. 

Les  yeux  me  troublent  à  monter  à  coup,  vers  vne  grande  lumieie  également 
comme  à  deualler  à  l'ombre,  I,  344. 

Celuy  qui  se  porte  plus  modérément  enuers  le  gain,  et  la  perte,  il  est  tousiours 
chez  soy.  Moins  il  se  pique  et  passionne  au  ieu,  il  le  conduit  d'autant  plus  auan- 
tageusement  et  seurement,  III,  494. 

11  est  ordinaire,  de  voir  les  bonnes  intentions,  si  elles  sont  conduites  sans  mo- 
dération, pousser  les  honunes  à  des  elïects  tres-vitieux,  II,  528. 

le  vous  conseille  en  vos  opinions  et  en  vos  discours,  autant  qu'en  vos  mœurs,  et 
en  toute  autre  chose,  la  modération  et  l'attrempance,  et  la  fuite  de  la  nouuelleté 
et  de  l'estrangeté.  Toutes  les  voyes  extrauagantes  me  faschent,  II,  322. 

MODES. 

^'os  Roys  peuuent  tout  en  telles  reformations  externes  :  leur  inclination  y  sert 
de  loy.  Le  reste  de  la  France  prend  pour  règle  la  règle  de  la  Cour,  I,  498. 

le  me  plains  de  la  particulière  indiscrétion,  de  notre  peuple,  de  se  laisser  si  fort 
piper  et  aueugler  à  l'authorité  de  l'vsage  présent,  qu'il  soit  capable  de  changer 
d'opinion  et  d'aduis  tous  les  mois,  s'il  plaistà  la  coustume  :  et  qu'il  iugesi  diuer- 
sement  de  soy-mesme,  I,  544. 

MŒURS. 

La  moins  dedeignable  condition  de  gents,  me  semble  estre,  celle  qui  par  sim- 
plesse  tient  le  dernier  rang  :  et  nous  olfrir  vu  commei'ce  plus  réglé.  Les  mœurs 
et  les  propos  des  paysans,  ie  les  trouuc  communément  plus  ordonnez  selon  la 
prescription  de  la  vraye  philosoi)hie,  que  ne  sont  ceux  de  noz  philosophes,  II,  518. 

Ceux  qui  ont  essaie  de  r'auiser  les  mœurs  du  monde,  de  mon  temps,  par  nou- 
uelles  opinions,  reforment  les  vices  de  l'apparence,  ceux  do  l'essence  ils  les  laissent 
là,  s'ils  no  les  augmentent.  Et  l'augmentation  y  est  à  craindre,  III,  120. 

Toute  estrangeté  et  particularité  en  noz  ma'urs  et  conditions  est  euitable,  comme 
ennemie  de  société,  I,  268. 

On  dict  bien-vray,  qu'vn  honneste  homme,- c'est  vn  homme  meslé,  111,454. 

Entre  nous,  ce  sont  choses  en  ce  monde  que  i'ay  tousiours  veuës  de  singulier 
accord  :  les  opinions  suporcclestes,  et  les  mœurs  sonsterraines,  III,  702. 

MONDE. 

Si  nous  voyions  autant  du  monde,  comme  nous  n'en  voyons  pas,  nous  apperce- 
urions,  comme  il  est  à  croire,  vne  perpétuelle  multiplication  et  vicissitude  de 
formes.  11  n'y  a  rien  de  seul  et  de  rare,  eu  esgard  à  Nature,  ouy  bien  eu  esgard  à 
nostre  cognoissance,  III,  30 1. 

Quand  tout  ce  qui  est  venu  par  rapport  du  passé,  iusqucs  à  nous,  seroit  vray, 
et  seroitsceu  par  quelqu'vn,  ce  seroit  moins  que  rien,  au  prix  de  ce  qui  est  ignoré 
III,  304.  ' 

MONTAIGNE  (MK.SAdE,  moût,  etc.). 

Si  ma  fortune  m'eust  faict  naistre  pour  tenir  quelque  rang  entre  les  hommes, 
j'eusse  esté  ambitieux  de  me  faire  avmer  :  non  de  me  faire  craindre  ou  admirer, 
III,  12 1. 


E.222  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Les  Princes  n'avment  guère  les  discours  rernu's.  nv  moy  à  faire  des  comptes. 

II,  176. 

11  n'y  a  point  d'vtilité,  pour  laquelle  ie  me  permette  de  mentir,  III,  86. 

Ceux  qui  ont  mérité  de  moy,  de  l'amitié  et  de  la  recognoissance,  ne  l'ont  iamais 
perdue  pour  n'y  estre  plus  :  ie  les  ay  mieux  payez,  et  plus  soigneusement,  absens 
et  ig:norans.  le  parle  plus  affectueusement  de  mes  amis,  quand  il  n'y  a  plus  do 
moyen  qu'ils  le  sçachent,  III,  474. 

le  sçay  bien  ce  que  ie  fuis,  mais  non  pas  ce  que  ie  cherche,  III,  426. 

La  médecine  se  forme  par  ('\(Miipl(>s  (>t  expérience  :  aussi  fait  mon  opinion, 

III,  32. 

le  hay  la  pauureté  à  pair  de  la  douleur,  III,  392. 

le  fay  peu  de  part  à  ma  prudence,  de  ma  conduite  :  ie  me  laisse  volontiers 
mener  à  l'ordre  public  du  monde,  II,  508. 

l'ay  veu  quelque  fois  mes  amis  appeller  prudence  en  moy,  ce  qui  estoit  for- 
tune; et  estimer  aduantage  de  courage  et  de  patience,  ce  qui  estoit  aduantage 
de  iugement  et  opinion;  et  m'attribuer  vn  tiltre  pour  autre;  tantost  à  mon  gain, 
tantost  à  ma  perte,  II,  94. 

Ma  consultation  esbauche  vn  peu  la  matière,  et  la  considère  légèrement  pai-  ses 
l)remiers  visages  :  le  fort  et  principal  de  la  besogne,  i'ay  accoustumé  de  le  re- 
signer au  ciel,  III,  356. 

le  pense  auoir  les  opinions  bonnes  et  saines,  mais  qui  n'en  croit  autant  des 
siennes?  II,  510. 

le  n'ay  point  cette  erreur  commune,  de  iuger  d"vn  autre  selon  que  ie  suis, 
l'en  croy  aysément  des  choses  diuerses  à  moy,  I,  398. 

le  suis  diuers  à  cette  façon  commune  :  et  me  défile  plus  de  la  suffisance  quand 
ie  la  vois  accompagnée  de  grandeur  de  fortune,  et  de  i-ecommandation  po])ulaire, 
111,358. 

le  ne  présume  les  vices  qu'après  que  ie  les  aye  veuz  :  et  m'en  fie  plus  aux 
ieunes,  que  i'estime  moins  gastez  par  mauuais  exemple,  III,  390. 

le  demande  en  gênerai  les  liures  qui  vsent  des  sciences,  non  ceux  qui  les  dres- 
sent, I,  74. 

Les  paroles  redites,  ont  comme  autre  son,  autre  sens.  Aussi  no  hay-io  poi'- 
sonne,  III,  598. 

le  ne  cherche  aux  liures  qu'à  m'y  donner  du  plaisir  par  vn  honnosto  amuse- 
ment :  ou  si  i'estudie,  ie  n'y  cherche  que  la  science,  qui  traicte  de  la  connois- 
sance  de  moy-mesmes,  et  qui  m'instruise  à  bien  mourir  et  à  bien  viui-e,  II,  62. 

l'ayme  l'ordre  et  la  netteté,  au  prix  de  l'abondance  :  et  regarde  chez  moy  exac- 
tement à  la  nécessité,  peu  à  la  parade,  III,  394. 

le  treuue  laid,  qu'on  entretienne  ses  hostos,  du  traicteniont  (|u'on  loin-  fait. 
autant  à  l'excuser  qu'à  le  vanter,  III,  394. 

Les  voyages  ne  me  blessent  que  par  la  despence,  qui  est  grande,  et  outn^  hk^s 
forces,  III,  384. 

Qui  désirera  du  bien  a  son  païs  comme  moy,  sans  s'en  vlcerer  ou  maigrir,  il 
sera  desplaisant,  non  pas  transi,  do  le  voir  menas.sant,  ou  sa  ruine,  ou  vue  durc'o 
non  moins  ruineuse,  III,  510. 

Absent,  ie  me  despouille  de  tous  tels  pensemens  :  et  sentirois  moins  lors  la 
ruyne  d'vne  tour,  que  ie  ne  fais  présent,  la  cheute  d'vne  ardoyse.  Mon  àme  si' 
démesle  bien  ayséement  à  part,  mais  en  présence,  elle  souffre,  comme  celle  d'vn 
vigneron.  Une  rené  de  trauers  à  mon  cheual,  vn  bout  d'estriuiere  qui  batte  ma 
iambe,  me  tiendront  tout  vn  iour  en  eschec.  l'esleue  assez  mon  courage  à  ren- 
contre des  inconueniens,  les  yeux,  ie  ne  puis,  III,  392. 

Mon  élection  est  d'eschapper,  et  me  desrober  à  cette  tempeste.  Qu'il  laillo  se 
cacher,  ou  suyure  le  vent  :  ce  que  i'estime  loisible,  quand  la  raison  no  -iiidc 
plus,  III,  470. 

l'eschappe.  Mais  il  me  dosplaist  que  ce  soit  plus  par  fortune  :  voire,  et  par  ma 
jirudence,  que  par  iustice  :  et  me  desplaist  d'estre  hors  la  protection  des  loix, 
et  soubs  auti-e  sauuegarde  que  la  leur,  III,  414. 

Non  sans  quelque  cxcoz,  i'estime  tous  les  hommes  mes  compatriotes  :  ii  em- 
brasse vu  l'olonois  oijiiiuii'  vu  Fi-ani;ois,  postposant  cette  lyaisou  iialit,ii;,le.  ,;  l'\- 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        MON.  E.223 

niuerselle  et  commune.  le  ne  suis  guère  l'eru  de  la  douceur  d'vn  air  naturel, 
III,  428. 

Socrates  estimoit  vne  sentence  d'exil  pire,  qu'vne  sentence  de  mort  contre  soy  : 
ie  ne  serav,  iamais  ny  si  cassé,  ny  si  estroittement  habitué  en  mon  pais,  que  ie 
le  feisse,  III,  428. 

Mon  iugement  m'empesche  bien  de  regimber  et  gronder  contre  les  inconue- 
nients  que  Nature  m'ordonne  à  souffrir,  mais  non  i)as  de  les  sentir.  le  courrois 
d'vn  bout  du  monde  h  l'autre,  chercher  vu  bon  an  de  tranquillité  plaisante  et 
eniouee,  nioy,  qui  n'ay  autre  fin  que  viure  et  me  resiouïr,  III,  184. 

Tout  au  commencement  de  mes  fleures,  et  des  maladies  qui  m'atterrent,  entier 
encores,  et  voisin  de  la  santé,  ie  me  reconcilie  à  Dieu,  par  les  derniers  offices 
Chrestiens.  Et  m'en  trouue  plus  libre,  et  deschargé;  me  semblant  en  auoir  d'au- 
tant meilleure  raison  de  la  maladie,  III,  416. 

Il  ne  me  faut  rien  d'extraordinaire,  quand  ie  suis  malade.  Ce  que  Nature  ne 
peut  en  moy,  ie  ne  veux  pas  qu'vn  bolus  le  face,  III,  446. 

De  notaire  et  de  conseil,  il  m'en  faut  moins  que  de  médecins.  Ce  que  ie  n'au- 
ray  estabh'  de  mes  affaires  tout  sain,  qu'on  ne  s'attende  point  que  ie  le  face 
malade.  Ce  que  ie  veux  faire  pour  le  seruice  de  la  mort,  est  tousiours  faict.  h) 
n'oserois  le  dislayer  d'vn  seul  iour.  Et  s'il  n'y  a  rien  de  faict,  c'est  à  dire,  ou  que 
le  double  m'en  aura  retardé  le  choix  :  car  par  fois,  c'est  bien  choisir  de  ne  choi- 
sir pas  :  ou  que  tout  à  faict,  ie  n'auray  rien  voulu  faire,  III,  446. 

Engagé  dans  les  auenues  de  la  vieillesse,  ce  que  ie  seray  doresnauant,  ce  ne 
sera  plus  qu'vn  demy  estre  :  ce  ne  sera  plus  moy.  le  m'eschappe  tous  les  iours, 
et  me  desrobbe  à  moy,  II,  482. 

A  chaque  minute,  ie  me  rechante  sans  cesse,  Tout  ce  qui  peut  estre  faict  vu 
autre  iour.  Je  peut  estre  auiourd'huy.  Ce  que  i'ay  affaire  auant  mourir,  pour 
l'aciieuer  tout  loisir  me  semble  court,  fust  ce  œuure  d'vne  heure,  I,  118. 

le  nu^  garderay,  si  ie  puis,  que  ma  mort  die  chose,  que  ma  vie  n'ayt  premiè- 
rement dit  et  apertement,  I,  56. 

La  mort  n'est  qu'vn  instant;  mais  il  est  de  tel  poix,  que  ie  donneroy  volontiers 
plusieurs  iours  de  uia  vie,  pour  le  passer  à  ma  mode,  III,  150. 

MORT  (maux,  suicide,  vie). 

Le  pi-emier  iour  de  vostre  naissance  vous  achemine  à  mourir  comme  à  viure. 
Tout  ce  que  vous  viués,  vous  le  desrobés  à  la  vie  :  c'est  à  ses  despens.  Le  con- 
tinuel ouurage  de  vostre  vie,  c'est  bastir  la  mort,  I,  120. 

La  mort  se  mesle  et  confond  par  tout  à  noslre  vie  :  le  déclin  pra^occupe  son 
heure,  et  s'ing(>re  au  cours  de  nostre  auancement  mesme,  III,  674. 

Faictes  place  aux  autres,  comme  d'autres  vous  l'ont  faite.  L'équalité  est  la  pre- 
mière pièce  de  l'équité.  Qui  se  peut  plaindre  d'estre  comprins  où  tous  sont  com- 
pi'ins?  Aussi  auez  vous  beau  viure,  vous  n'en  rabattrez  rien  du  temps  que  vous 
auez  à  estre  mort  :  c'est  pour  néant:  aussi  long  temps  serez  vous  en  cet  estât  là, 
que  vous  craingnez,  comme  si  vous  estiez  mort  en  nourrisse,  I,  128. 

Nul  ne  meurt  auant  son  heure.  Ce  que  vous  lais.sez  de  temps,  n'estoit  non  plus 
vosti-e  que  celuv  qui  s'est  passé  auant  vostre  naissance  :  et  ne  vous  touche  non 
plus,  I,  128. 

Le  sault  n'est  pas  si  lourd  du  mal  estre  au  non  estre,  comme  il  est  d'vn  estre 
doux  et  (leurissant,  à  vn  estre  pénible  et  douloureux,  I,  124. 

Et  ce  n'est  pas  la  recepte  à  vne  seule  maladie,  la  mort  est  la  recei)te  à  tous 
maux.  C'est  vn  port,  tresasseuré,  qui  n'est  iamais  à  craindre,  souuent  à  recher- 
cher, I,  630. 

Quelle  sottise,  de  nous  peiner,  sur  le  point  du  passage  à  l'exemption  de  toute 
peine!  I,  142. 

La  mort,  dit-on,  nous  acquitte  de  toutes  nos  obligations.  l'en  sçay  qui  l'ont 
prins  en  diuersc  façon,  I,  54. 

Elle  s'appesantit  souuent  en  nous,  de  ce  qu'elle  poise  aux  autres  :  et  nous  inttV 
resse  de  leur  iutcrest,  quasi  autant  que  du  nostre  :  et  plus  et  tout  par  fois.  III,  152. 


E.224  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Nous  i)onsons  tousiours  ailleurs  quand  elle  vient  :  l'espérance  d'vne  meilleure 
vie  nous  arreste  et  appuyé  :  ou  l'espérance  de  la  valeur  de  nos  enfans  :  ou  la 
gloire  future  de  nosti'e  nom  :  ou  la  iuitte  des  maux  de  cette  vie  :  ou  la  veniioaurc 
qui  menasse  ceux  qui  nous  causent  la  mort,  III,  160. 

La  mort  ne  se  sent  que  par  le  discours,  d'autant  que  c'est  le  mouuement  d'vu 
instant.  Mille  bestes,  mille  hommes  sont  plustost  moi'ts,  que  menasses,  I,  lôJ. 

La  mort  est  moins  à  craindre  que  rien,  s'il  j-  auoit  quelque  chose  de  moins, 
que  rien.  Elle  ne  vous  concerne  ny  mort  ny  vif.  Vif,  par  ce  que  vous  estes  : 
mort,  par  ce  que  vous  n'estes  jtlus,  I,  1^8. 

Combien  a  la  mort  de  façons  de  surprise?  Ces  exemples  si  fréquents  et  si  or- 
dinaires nous  passans  deuant  les  yeux,  comme  est-il  possible  qu'on  se  iiuissc 
delï'aire  du  pensement  de  la  mort,  et  qu'à  chasque  instant  il  ne  nous  semble 
qu'elle  nous  tienne  au  collet?  Qu'impoi'te-il,  me  dirc/î  vous,  comment  que  ce  soit, 
pourueu  qu'on  ne  s'en  donne  point  de  peine?  Tout  cela  est  beau  :  mais  aussi 
quand  elle  arriue,  ou  à  eux  ou  à  leurs  femmes,  enfans  et  amis,  les  surprenant  en 
dessoude  et  au  descouuert,  quels  tourments,  quels  cris,  quelle  rage  et  quel  de- 
sespoir les  accable?  Vistes  vous  iamais  rien  si  rabaissé,  si  changé,  si  confus?  11 
y  faut  prouuoir  de  meilleure  heure  :  et  cette  nonchalance  bestiale,  quand  elle 
pourroit  loger  en  la  teste  d'vn  Jiomme  d'entendement,  ce  que  ic  trouue  entière- 
ment impossible,  nous  vend  trop  cher  ses  denrées,  I,  111. 

Les  ieunes  et  les  vieux  laissent  la  vie  de  mesme  condition.  Nul  n'en  sort  au- 
trement que  si  tout  présentement  il  y  entroit,  ioinct  qu'il  n'est  Iiomme  si  (li'crc- 
pite  tant  qu'il  voit  Mathusalem  deuant,  qui  ne  pense  auoir  encore  vingt  ans  dans 
le  corps,  I,  112. 

Quand  nous  iugeons  de  l'asseurance  d'autruy  en  la  mort,  il  se  l'aut  prendre 
garde  d'vne  chose,  que  mal-aisément  on  croit  estre  arriué  à  ce  poinct.  Peu  de 
gens  meurent  résolus,  que  ce  soit  leur  heure  dernière,  II,  420. 

Or  de  iuger  la  resolution  et  la  constance,  en  celuy  qui  ne  croit  pas  encore  cer- 
tainement estre  au  danger,  quoy  qu'il  y  soit,  ce  n'est  pas  raison  :  et  ne  suffit 
pas  qu'il  soit  mort  en  cette  desmarche,  s'il  ne  s'y  estoit  mis  iustement  pour  cet 
effect,  II,  422. 

La  veue  esloignee  de  la  mort  aduenir,  a  besoing  d'vne  fermeté  lente,  et  diffi- 
cile par  conséquent  à  fournir.  Si  vous  ne  sçauez  pas  mourir,  ne  vous  chaille. 
Nature  vous  en  informera  sur  le  champ,  plainement  et  suffisamment;  elle  fera 
exactement  cette  besongne  pour  vous,  n'en  empeschez  vostre  soing,  III,  574. 

Nous  faisons  trop  de  cas  de  nous.  Il  semble  que  l'vniuersité  des  choses  souffre 
aucunement  de  nostre  anéantissement,  et  qu'elle  soit  compassionnée  à  nostre  estât. 
II,  420. 

Et  n'est  rien  dequoy  ie  m'informe  si  volontiers,  que  de  la  mort  des  liomnies  : 
quelle  parole,  quel  visage,  quelle  contenance  ils  y  ont  eu  :  ny  endroit  des  his- 
toires, que  ie  remarque  si  attentifuement.  Si  i'estoy  faiseur  de  liur.es,  ie  feroy 
vn  registre  commenté  des  morts  diuerses  :  qui  apprendroit  les  hommes  à  mou- 
rir, leur  apprendroit  à  viure,  I,  120. 

Comme  la  vie  n'est  pas  la  meilleure,  pour  estre  longue,  la  mort  est  la  meil- 
leure, pour  n'estre  pas  longue,  III,  426. 

La  plus  souhaitable  est  la  moins  préméditée  et  la  plus  coui'tc,  II,  42 1. 

Tout  ainsi  que  les  choses  nous  paroissent  souuent  plus  grandes  de  loing  que 
de  près  :  i'ai  trouué  que  sain  i'auois  eu  les  maladies  beaucoup  plus  en  horreur, 
que  lors  que  ie  les  ay  senties.  Par  imagination  ie  gi'ossis  ces  incommoditez  de  la 
moitié,  et  les  conçoy  plus  poisantes,  que  ie  ne  les  trouue,  quand  ie  les  ay  sur  les 
espaules.  l'e-spere  qu'il  m'en  aduiendra  ainsi  de  la  mort,  I,  122. 

le  croy  à  la  vérité  que  ce  sont  ces  mines  et  appareils  effroyables,  dequoy  nous 
l'entournons,  qui  nous  font  plus  de  peur  qu'elle  :  vne  toute  nouuelle  forme  de 
viure  :  les  cris  des  mères,  des  femmes,  et  des  enfans  :  la  Visitation  des  personnes 
i^stonnees,  et  transies  :  l'assistance  d'vn  nombre  de  valets  pasles  et  éplorés  :  vne 
chambre  sans  iour  :  des  cierges  allumez  :  nostre  cheuet  assiégé  de  médecins  et 
de  prescheurs  :  somme  tout  horreur  et  tout  effroy  autour  de  nous.  Nous  voyla 
des-ia  enseuelis  et  enterrez.  Les  enfans  ont  i>eur  de  leurs  amis  mesmes  quand  ils 
les  voyent  masquez;  aussi  auons  nous.  11  faut  oster  le   masque  aussi  bien  des 


I/ESPRIT  DES  ESSAIS.        MOR.  E.225 

choses,  que  des  personnes.  Osté  qu'il  sera,  nous  ne  irouuerons  au  dossoubs,  que 
cette  mesme  mort,  qu'vn  valet  ou  simple  chambrière  passèrent  dernièrement 
sans  peur.  Heureuse  la  mort  qui  oste  le  loisir  aux  apprests  de  tel  équipage!  I,  132. 
Quoique  la  philosophie  nous  conduise  aussi  à  mespriser  la  douleur,  la  pauureté, 
et  autres  accidens,  à  quoy  la  vie  humaine  est  subiecte,  ce  n'est  pas  d'vn  pareil 
seing  :  ces  accidens  ne  sont  pas  de  telle  nécessité,  la  pluspart  des  hommes  pas- 
sent leur  vie  sans  gouster  de  la  pauureté,  et  tels  encore  sans  sentiment  de  dou- 
leur et  de  maladie,  et  au  pis  aller,  la  mort  peut  mettre  fin,  quand  il  nous  plaira, 
et  coupper  broche  à  tous  autres  inconuenients,  tandis  que  la  mort  est  ineuitable; 
par  conséquent,  si  elle  nous  faict  peur,  c'est  vn  subiect  continuel  de  tourment, 
et  qui  ne  se  peut  aucunement  soulager.  11  n'est  heu  d'où  elle  ne  nous  vienne, 
I,  110. 

Pourquoy  craindrions  nous  de  perdre  vne  chose,  laquelle  perdue  ne  peut  estre 
regrettée?  Puis  que  nous  sommes  menacez  de  tant  de  façons  de  mort,  que  chaut- 
il,  quand  ce  soit,  puis  qu'elle  est  ineuitable?  Quelle  sottise,  de  nous  peiner,  sur 
le  point  du  passage  à  l'exemption  de  toute  peine?  Comme  nostre  naissance  nous 
apporta  la  naissance  de  toutes  choses  :  aussi  fera  la  mort  de  toutes  choses,  nostre 
mort.  Parquoy  c'est  pareille  folie  de  pleurer  de  ce  que  d'icy  à  cent  ans  nous  ne 
viurons  pas,  que  de  pleurer  de  ce  que  nous  ne  viuions  pas,  il  y  a  cent  ans.  La 
mort  est  origine  d'vne  autre  vie  :  ainsi  pleurasmes  nous,  et  ainsi  nous  cousta-il 
d'entrer  en  cette-cy.  Rien  ne  peut  estre  grief,  qui  n'est  qu'vne  fois.  Est-ce  raison 
de  craindre  si  long  temps,  chose  de  si  brief  temps?  Le  long  temps  viure,  et  le 
peu  de  temps  viure  est  rendu  tout  vn  par  la  mort;  Car  le  long  et  le  coui't  n'est 
point  aux  choses  qui  ne  sont  plus,  I,  124. 

L'extrême  degré  de  traittcr  courageusement  la  mort,  et  le  plus  naturel,  c'est 
la  veoir,  non  seulement  sans  estonnement,  mais  sans  soucy  :  continuaht  libre  le 
train  de  la  vie,  iusques  dedans  elle,  II,  550. 

Nul  ne  se  peut  dire  estre  résolu  à  la  mort,  qui  craint  à  la  marchander,  qui 
ne  peut  la  soutenir  les  yeux  ouuerts,  II,  424. 

Quelquefois  la  fuitte  de  la  mort,  faict  que  nous  y  courons  :  Comme  ceux  qui 
de  peur  du  précipice  s'y  lancent  eux-mesmes,  I,  634, 

A  combien  peu,  tient  la  resolution  au  mourir?  La  distance  et  différence  de 
quelques  heures  :  la  seule  considération  de  la  compagnie,  nous  en  rend  l'ap- 
préhension diuerse,  III,  5(38. 

Pour  euiter  vne  pire  mort,  il  y  en  a  qui  sont  d'aduis  de  la  prendre  à  leur 
poste,  I,  638. 

Les  tyrans  Romains  pensoient  donner  la  vie  au  criminel,  à  qui  ils  donnoient 
le  choix  de  sa  mort,  III,  452. 

Le  but  de  nostre  carrière  c'est  la  mort,  c'est  l'obiect  nécessaire  de  nostre 
visée  :  si  elle  nous  effraye,  comme  est-il  possible  d'aller  vn  pas  auant  sans  fiebure? 
Le  remède  du  vulgaire  c'est  de  n'y  penser  pas.  Mais  de  quelle  brutale  stupidité 
luy  peut  venir  vn  si  grossier  aueuglement?  I,  112. 

On  se  peut  par  vsage  et  par  expérience  fortifier  contre  les  douleurs,  la  honte, 
l'indigence,  et  tels  autres  accidens  :  mais  quant  à  la  mort  nous  ne  la  pouuons 
essayer  qu'vne  fois  :  nous  y  sommes  tous  apprentifs,  quand  nous  y  venons,  I,  66'4. 
Ce  n'est  pas  sans  raison  qu'on  nous  fait  regarder  à  nostre  sommeil  mesme, 
pour  la  ressemblance  qu'il  a  de  la  mort.  Combien  facilement  nous  passons  du 
veiller  au  dormir,  auec  combien  peu  d'intcrest  nous  perdons  la  connoissance  de 
la  lumière  et  de  nous!  A  l'aduenture  pourroit  sembler  inutile  et  contre  Nature 
la  faculté  du  sommeil,  qui  nous  priue  de  toute  action  et  de  tout  sentiment,  n'es- 
toit  que  par  iceluy  Nature  nous  instruict,  qu'elle  nous  a  pareillement  faicts  pour 
mourir,  (|^ue  pour  viure,  et  dés  la  vie  nous  présente  l'éternel  estât  qu'elle  nous 
garde  après  icelle,  pour  nous  y  accoustumer  et  nous  en  oster  la  crainte,  I,  666. 
Nous  troublons  la  vie  par  le  soing  de  la  mort.  Vn  quart  d'heure  de  passion  sans 
conséquence,  sans  nuisance,  ne  mérite  pas  des  préceptes  particuliers,  III,  574. 

Toute  mort  doit  esti-e  de  mesmes  sa  vie.  Nous  ne  deuenons  pas  autres  pour 
mourir.  l'interprète  tousiours  la  mort  par  la  vie.  Et  si  on  m'en  récite  quelqu'vne 
forte  par  apparence,  attachée  à  vne  vie  foible  :  ie  tiens  qu'ell'  est  produitte  de 
cause  foible  et  sortable  à  sa  vie,  II,  90. 

ESSAIS   DE  MONTAIGNE.  —  T.    IV.  15 


E.226  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

La  mort  a  des  formes  plus  aisées  les  vnes  que  les  autres,  et  prend  diuerses 
qualité/,  selon  la  fantasie  de  chacun,  III,  450. 

Il  n'y  a  pas  beaucoup  de  mal  de  mourir  de  loing,  et  à  part.  Si  estimons  nous 
à  deuoir  de  nous  retirer  pour  des  actions  naturelles,  moins  disgratiées  que  cette- 
cy,  et  moins  hideuses.  Ceux  qui  en  viennent  là,  de  traîner  languissans  vn  long 
espace  de  vie,  ne  deuroient  à  l'aduanture  souhaiter,  d'empescher  de  leur  misère 
vne  grande  famille.  A  qui  ne  se  rendent-ils  en  fin  ennuyeux  et  insupportables? 
les  offices  communs  n'en  vont  point  iusques  là.  Vous  apprenez  la  cruauté  par 
force,  à  vos  meilleurs  amis  :  durcissant  et  femme  et  enfans,  par  long  vsage,  à  ne 
sentir  et  plaindi-e  plus  vos  maux.  Et  quand  nous  tirei-ions  quelque  plaisir  de  leur 
conuei-sation  (ce  qui  n'aduiont  pas  tousiours,  i)Our  la  disparité  des  conditions), 
n'est-ce  pas  trop,  d'en  abuser  tout  vn  aage?  Plus  ie  les  verrois  se  contraindre 
de  bon  cœur  pour  mo\',  plus  ie  plaindrois  leur  peine.  Nous  auons  loy  de  nous 
appuyer,  non  pas  de  nous  coucher  si  lourdement  sur  autru}-  :  et  nous  estayer 
en  leur  ruyne.  La  décrépitude  est  qualité  solitaire,  III,  446. 

Si  ie  craingnois  de  mourir  en  autre  lieu,  que  celuy  de  ma  naissance  :  si  ie 
pensois  mourir  moins  à  mon  aise,  esloingné  des  miens  :  à  peine  sortiroy-ie  hors 
de  France,  ie  ne  sortirois  pas  sans  elïroy  hors  de  ma  paroisse.  Mais  la  mort 
m'est  vne  par  tout.  Si  toutesfois  i'auois  à  choisir  :  ce  seroit  plustost  hors  de  ma 
maison,  et  loing  des  miens.  11  y  a  plus  de  creuecœur  que  de  consolation,  à 
prendre  congé  de  ses  amis.  Des  offices  de  l'amitié,,  celuy-là  est  le  seul  desplai- 
sant :  et  oublierois  ainsi  volontiers  à  dire  ce  grand  et  éternel  adieu.  S'il  se  tire 
quelque  commodité  de  cette  assistance,  il  s'en  tire  cent  incommoditez.  l'ay  veu 
plusieurs  mourans  bien  piteusement,  assiégez  de  tout  ce  train;  cette  presse  les 
estoufïe.  C'est  contre  le  deuoir,  et  est  tesmoignage  de  peu  d'affection,  et  de  peu 
de  soing,  de  vous  laisser  mourir  en  repos.  L'vn  tourmente  vos  yeux,  l'autre  vos 
oreilles,  l'autre  la  bouche  :  il  n'y  a  sens,  ny  membre,  qu'on  ne  vous  fracasse.  Le 
cœur  vous  serre  de  pitié,  d'ouïr  les  plaintes  des  amis;  et  de  despit  à  l'aduanture, 
d'ouïr  d'autres  plaintes  feintes  et  masquées,  III,  438. 

Lors  de  ma  santé,  ie  plains  les  malades  beaucoup  plus,  que  ie  ne  me  trouue 
à  plaindre  moy-mesme,  quand  l'en  suis;  la  force  de  mon  appréhension  enchérit 
près  de  moitié  l'essence  et  vérité  de  la  chose.  l'espere  qu'il  aduiendra  de  mesme 
de  la  mort,  I,  668. 

Ceux  qHi'on  void  défaillans  de  foiblesse,  en  l'agonie  de  la  mort,  ie  tiens  que 
nous  les  plaignons  sans  cause,  estimans  qu'ils  soyent  agitez  de  griéues  douleurs, 
ou  auoir  l'ame  pressée  de  cogitations  pénibles.  C'a  esté  tousiours  mon  aduis, 
contre  l'opinion  de  plusieurs,  que  ceux  que  nous  voyons  ainsi  renuei-spz  et  as- 
soupis auoient  et  l'ame  et-le  corps  enseueli,  et  endormy  :  et  que  par  ainsin  ils 
n'auoient  aucun  discours  qui  les  tourmentast,  et  qui  leur  pcust  faire  iuger  et 
sentir  la  misère  de  leur  condition,  et  que  par  conséquent,  ils  n'estoient  pas  fort 
a  plaindre,  I,  670. 

le  me  contente  d'vne  mort  recueillie  en  soy,  quiète,  et  solitaire,  toute  mienne, 
conuenable  à  ma  vie  retirée  et  priuée.  Au  rebours  de"  la  superstition  Romaine,  où 
on  estimoit  malheureux,  celuy  qui  n'auoit  ses  plus  proches  à  luy  clorre  les  yeux, 
l'ay  assez  affaire  à  me  consoler,  sans  auoir  à  consoler  autruy  ;  assez  de  pensées 
en  la  teste,  sans  que  les  circonstances  m'en  apportent  de  nouuelles  :  et  assez  de 
matière  à  m'entretenir,  sans  l'emprunter.  Cette  partie  n'est  pas  du  rolle  de  la 
société  :  c'est  l'acte  à  vn  seul  personnage.  Viuons  et  rions  entre  les  nostres,  al- 
lons mourir  et  rechigner  entre  les  inconnuz.  On  trouue  en  payant,  qui  vous 
tourne  la  teste,  et  qui  vous  frotte  les  pieds  :  qui  ne  vous  presse  qu'autant  que 
vous  voulez,  vous  présentant  vn  visage  indiffèrent,  vous  laissant  vous  gouuerner, 
et  plaindre  à  vostre  mode.  le  me  deffais  tous  les  iours  par  discours,  de^cette  hu- 
meur puérile  et  inhumaine,  qui  faict  que  nous  desirons  d'esmouuoir  par  nos 
maux,  la  compassion  et  le  dueil  en  nos  amis.  Nous  faisons  valoir  nos  inconue- 
niens  outre  leur  mesure,  pour  attirer  leurs  larmes.  Et  la  fermeté  que  nous  louons 
en  chacun,  à  soustenir  sa  mauuaise  fortune,  nous  l'accusons  et  reprochons  à  nos 
proches,  quand  c'est  en  la  nostre.  Nous  ne  nous  contentons  pas  qu'ils  se  ressen- 
tent de  nos  maux,  si  encores  ils  ne  s'en  affligent.  Il  faut  estendre  la  ioye,  mais 
retrancher  autant  qu'on  peut  la  tristesse,  III,  410. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        MOR.  E.227 

Mourir  de  vieillesse,  c'est  vne  mort  rare,  singulière  et  extraordinaire,  et  d'au- 
tant moins  naturelle  que  les  autres  :  c'est  la  dernière  et  extrême  sorte  de  mou- 
rir :  c'est  bien  la  borne,  au  delà  de  laquelle  nous  n'irons  pas,  et  que  la  loy  de 
Nature  a  prescript,  pour  n'estre  point  outre-passée  :  mais  c'est  vn  sien  rare  pri- 
uilege  de  nous  faire  durer  iusques  là.  C'est  vue  exemption  qu'elle  donne  par 
faueur  particulière,  à  vn  seul,  en  l'espace  de  deux  ou  trois  siècles,  I,  590. 

Celuy  qui  meurt  en  la  meslee,  les  armes  à  la  main,  il  n'estudie  pas  lors  la  mort, 
il  ne  la  sent,  ny  ne  la  considère  :  l'ardeur  du  combat  l'emporte,  III,  166. 

C'est  vne  généreuse  enuie,  de  vouloir  mourir  mesme  vtilement  et  virilement  : 
mais  l'efloct  n'en  gist  pas  tant  en  nostre  bonne  resolution  qu'en  nostre  bonne 
fortune.  Mille  ont  proposé  de  vaincre,  ou  de  mourir  en  combattant,  qui  ont  failli 
à  l'vn  et  à  l'autre  :  les  blessures,  les  prisons,  leur  trauersant  ce  dessein,  et  leur 
prestant  vne  vie  forcée.  11  y  a  des  maladies,  qui  atterrent  iusques  à  noz  désirs, 
et  nostre  cognoissance,  II,  5 16. 

Pourquoy  crains-tu  ton  dernier  iour?  Il  ne  confère  non  plus  à  ta  mort  que 
chascun  des  autres.  Le  dernier  pas  ne  faict  pas  la  lassitude  :  il  la  declaire.  Tous 
les  iours  vont  à  la  mort  :  le  dernier  y  arriue,  I,  130. 

Les  faneurs  et  disgrâces  de  la  fortune  ne  tiennent  rang,  ny  d'heur  ny  de  mal-  • 
heur,  et  sont  les  grandeurs,  et  puissances,  accidens  de  qualité  à  peu  près  in- 
dilfrrente  :  le  bon-heur  de  nostre  vie  dépend  de  la  tranquillité  et  contentement 
d'vn  esprit  bien  né,  et  de  la  resolution  et  asseurance  d'vne  ame  réglée  et  ne  se 
doit  iamais  attribuer  à  l'homme,  qu'on  ne  luy  ayt  veu  ioiier  le  dernier  acte  de 
sa  comédie  :  et  sans  doute  le  plus  difficile,  I,  104. 

Il  est  certain,  qu'à  la  plupart,  la  préparation  à  la  mort,  a  donné  plus  de  tor- 
ment,  que  n'a  faict  la  souffrance.  Le  sentiment  de  la  mort  présente,  nous  anime 
l)ar  fois  de  soy  mesme,  d'vne  prompte  resolution,  de  no  plus  euiter  chose  du 
tout  ineuitable,  III,  572.  • 

En  tout  le  reste  il  y  peut  auoir  du  masque  :  mais  à  ce  dernier  rolle  de  la  mort 
et  de  nous,  il  n'y  a  plus  que  faindre,  il  faut  parler  François;  il  faut  montrer  ce 
qu'il  y  a  de  bon  et  de  net  dans  le  fond  du  pot.  Voyla  pourquoy  se  doiuent  à  ce 
dernier  Iraict  toucher  et  espi'ouuer  toutes  les  autres  actions  d(>  nostre  vie.  C'est 
le  maistre  iour,  c'est  le  iour  iugc  de  tous  les  autres,  II,  101. 

On  a  tort,  de  dire,  celuy-là  craint  la  mort,  quand  il  veut  exprimer,  qu'il  y 
songe,  et  qu'il  la  preuoit.  La  preuoyance  conuient  egallement  à  ce  qui  nous 
touche  en  bien  et  en  mal.  Considérer  et  iuger  le  danger,  est  aucunement  le  re- 
bours de  s'en  estonner,  III,  290. 

Si  nous  auons  sçeu  viure,  constamment  et  tranquillement,  nous  sçaurons  mou- 
rir de  mesme,  III,  571. 
La  vie  desi)end  de  la  volonté  d'autruy,  la  mort  do  la  nostre,  I,  630. 

NATURE  (puii.osopiue)- 

Tout  ce  qui  est  sous  le  ciel,  dit  le  sage,  court  vne  loy  et  fortune  pareille.  Il  y 
a  quelque  différence,  il  y  a  des  ordres  et  des  degrez  :  mais  c'est  soubs  le  visage 
d'vne  mesme  nature,  II,  150. 

Toutes  choses,  dit  Platon,  sont  produites  ou  par  la  nature,  ou  par  la  fortune, 
ou  par  l'art.  Les  plus  grandes  et  plus  belles  par  l'vne  ou  l'autre  des  deux  pre- 
mières :  les  moindres  et  imparfaictes  par  la  dernière,  I,  360. 

Nature  est  vn  doux  guide  :  mais  non  pas  plus  doux,  que  prudent  et  iuste,  III, 
098. 

Nous  ne  sçaurions  faillir  à  suiure  Nature  :  le  souuerain  précepte,  c'est  de  se 
conformer  à  elle,  III,  590. 

Oui  se  présente  comme  dans  vn  tableau,  cette  grande  image  de  nostre  mère 
nature,  en  son  entière  maiesté  :  qui  remarque  en  son  visage,  vne  si  générale  et 
constante  variété,  et  non  soy,  celuy-là  seul  estime  les  choses  selon  leur  iuste  gran- 
deur, I,  252. 

Ce  que  toute  la  philosophie  ne  peut  planter  en  la  teste  des  plus  sages,  ne  l'ap- 
prend elle  pas  de  sa  seule  ordonnance  au  plus  grossier  vulgaire?  I,  1^. 

Nature  a  maternellement  obserué  cela,  que  les  actions  qu'elle  nous  a  enioinctes 


E.228  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

pour  nostre  besoing,  nous  fussent  aussi  voluptueuses.  Et  nous  j-  conuie,  non 
seulement  par  la  raison  :  mais  aussi  par  l'appétit  :  c'est  iniustice  de  corrompre 
ses  règles,  III,  686. 

Les  cupiditez  sont  ou  naturelles  et  nécessaires,  comme  le  boire  et  le  manger; 
ou  naturelles  et  non  nécessaires,  comme  l'accointance  des  femelles;  ou  elles  ne 
sont  ny  naturelles  ny  nécessaires  :  de  cette  dernière  sorte  sont  quasi  toutes  celles 
des  hommes,  ollos  sont  toutes  superflues  et  artificielles.  Car  c'est  merueille  com- 
bien peu  il  faut  à  Nature  pour  .se  contenter,  combien  peu  elle  nous  a  laissé  à 
désirer.  Ces  cupiditez  estrangeres,  que  l'ignorance  du  bien,  et  vue  fauce  opinion 
ont  coulées  en  nous,  sont  en  si  grand  nombre,  qu'elles  chassent  presque  toutes 
les  naturelles,  II,  174. 

Nostre  bastiment  et  public  et  priué,  est  plein  d'imperfection  :  mais  il  n'y  a  rien 
d'inutile  en  Nature,  non  pas  l'inutilité  mesmes,  rien  ne  s'est  ingéré  en  cet  vni- 
uers,  qui  n'y  tienne  place  opportune,  III,  80. 

Nous  appelions  contre  Nature,  ce  qui  adulent  contre  la  coustume.  Rien  n'est 
que  selon  elle,  quel  qu'il  soit.  Que  cette  raison  vniuerselle  et  naturelle,  chasse  de 
nous  l'erreur  et  l'estonnement  que  la  nouuelleté  nous  apporte,  II,  606. 

NOBLESSE  (noms). 

La  noblesse  est  vne  belle  qualité,  et  introduite  auec  raison  :  mais  d'autant  que 
c'est  vne  qualité  dépendant  d'autruy,  et  qui  peut  tomber  en  vn  homme  vicieux 
et  de  néant,  elle  est  en  estimation  bien  loing  au  dessoubs  de  la  vertu.  La  science, 
la  force,  la  bonté,  la  beauté,  la  richesse,  toutes  autres  qualitez,  tombent  en  com- 
munication et  en  commerce  :  cette-cy  se  consomme  en  soy,  de  nulle  emploite  au 
seruice  d'autruy,  III,  196. 

De  mon  temps  ie  n'ay  veu  personne  esleué  par  la  fortune  à  quelque  grandeur 
extraordinaire,  à  qui  on  n'ait  attaché  incontinent  des  filtres  généalogiques,  nou- 
ueaux  et  ignorez  à  son  père,  et  qu'on  ait  anté  en  quelque  illustre  tige.  Et  de 
bonne  fortune  les  plus  obscures  familles,  sont  plus  idoynes  à  falsification.  Com- 
bien auons  nous  de  Gentils-hommes  en  France,  qui  sont  de  Royalle  race  selon 
leurs  comptes? plus  ce  crois-ie  que  d'autres,  I,  512. 

Contentez  vous  de  par  Dieu,  de  ce  dequoy  nos  pères  se  sont  contentez  :  et  de 
ce  que  nous  sommes;  nous  sommes  assez  si  nous  le  sçauons  bien  maintenir  :  ne 
desaduouons  pas  la  fortune  et  condition  de  nos  ayeulx,  I,  512. 

NOMS  (noblesse). 

C'est  vn  vilain  vsage  et  de  tres-mauuaise  conséquence  en  nostre  France,  d'ap- 
peller  chacun  par  le  nom  de  sa  terre  et  Seigneurie,  et  la  chose  du  monde,  qui 
faict  plus  mesler  et  mescognoistre  les  races,  I,  512. 

le  sçay  bon  gré  à  Jacques  Amiot  d'auoir  laissé  dans  le  cours  d'vn'  oraison 
Fj-ançoise,  les  noms  Latins  tous  entiers,  sans  les  bigarrer  et  changer,  pour  leur 
donner  vne  cadence  Françoise,  I,  510. 

NOUVEAUTÉ. 

le  suis  desgousté  de  la  nouuelleté,  quelque  visage  qu'elle  porte;  et  ay  raison, 
car  i'en  ay  veu  des  effects  très-dommageables,  I,  178. 

Quand  il  se  présente  à  nous  quelque  doctrine  nouuelle,  nous  auons  grande  oc- 
casion de  nous  deffier,  et  de  considérer  qu'auant  qu'elle  fust  produite,  sa  con- 
traire estoit  en  vogue  :et  comme  elle  a  esté  renuersée  par  cette-cy,  il  pourra  nais- 
tre  à  l'aduenir  vne  tierce  inuention,  qui  choquera  de  mesme  la  seconde,  II,  356. 

OBÉISSANCE. 

L'obeyssance  n'est  iamâis  pure  nv  tranquille  en  celuy  qui  raisonne  et  qui 
plaide,  II,  508. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        OBE.  E.229 

Nous  nous  soustrayons  si  volontiers  du  commandement  sous  quelque  prétexte, 
et  vsurpons  sur  la  niaistrise  :  chascun  aspire  si  naturellement  à  la  liberté  et  au- 
thorité,  qu'au  supérieur  nulle  vtilité  ne  doibt  estre  si  chère,  venant  de  ceux  qui 
le  seruent,  comme  luy  doit  estre  chère  leur  simple  et  naifue  obéissance,  I,  96. 

On  corrompt  l'office  du  commander,  quand  on  y  obéit  par  discrétion,  non  par 
subietion.  Pourtant  cette  obéissance  si  contreinte,  n'appartient  qu'aux  comman- 
dements précis  et  prefix.  l'ay  veu  en  mon  temps  des  personnes  du  commande- 
ment, reprins  d'auoir  plustost  obey  aux  paroles  des  lettres  du  Roy,  qu'à  l'occa- 
sion des  affaires  qui  estoient  près  d'eux,  I,  90. 

ODEURS. 

La  commune  façon  des  corps  et  la  meilleure  condition  qu'ils  ayent,  c'est  d'estre 
exempts  de  senteur.  La  douceur  mesme  des  haleines  plus  pures,  n'a  rien  de  plus 
parfaict,  que  d'estre  sans  aucune  odeur,  qui  nous  offence  :  corne  sont  celles  des 
enfans  bien  sains.  La  plus  exquise  senteur  d'vne  femme,  c'est  ne  sentir  rien,  1, 574. 

Les  médecins  pourroient,  ce  crois-ie,  tirer  des  odeurs,  plus  d'vsage  qu'ils  ne 
font  :  car  i'ay  souuent  apperçeu  qu'elles  me  changent,  et  agissent  en  mes  esprits, 
selon  qu'elles  sont,  I,  576. 

OPINION. 

L'opinion  est  vne  puissante  partie,  hardie,  et  sans  mesure,  I,  462. 

Il  se  faut  garder  de  s'attacher  aux  opinions  vulgaires,  et  les  faut  iuger  par  la 
voye  de  la  raison,  non  par  la  voix  commune,  I,  354. 

Quasi  toutes  les  opinions  que  nous  auons,  sont  prinses  par  authorité  et  à  cré- 
dit. III,  51(;. 

Nos  opinions  ë'entent  les  vnes  sur  les  autres.  La  première  sert  de  tige  à  la  se- 
conde :1a  seconde  à  la  tierce.  Nous  eschellons  ainsi  de  degré  en  degré.  Et  aduient 
de  là,  que  le  plus  monté,  a  souuent  plus  d'honneur,  que  de  mérite.  Car  il  n'est 
monté  que  d'vn  grain,  sur  les  espaules  du  penultime,  III,  608. 

Nostre  opinion  donne  prix  aux  choses  ;  pour  les  estimer,  nous  ne  considérons 
ny  leurs  qualitez,  ny  leurs  vtilitez,  mais  seulement  nostre  coust  à  les  recouurer  :  et 
appelions  valeur  en  elles,  non  ce  qu'elles  apportent,  mais  ce  que  nous  y  appor- 
tons, 1,416. 

La  diuersité  des  opinions,  que  nous  auons  des  choses,  montre  clairement  qu'elles 
n'entrent  en  nous  que  par  composition,  I,  442. 

Et  ne  fut  Jamais  au  monde,  deux  opinions  pareilles,  non  plus  que  deux  poils, 
ou  deux  grains.  Leur  plus  vniuerselle  qualité,  c'est  la  diuersité,  III,  76. 

Nous  tenons  la  mort,  la  pauureté  et  la  douleur  pour  nos  principales  parties.  Or 
cette  mort  que  les  vns  appellent  des  choses  horribles  la  plus  horrible,  qui  ne 
sçait  que  d'autres  la  nomment  l'vnique  port  dos  tourmens  de  cette  vie?  le  souue- 
rain  bien  de  nature?  .seul  appuy  de  nostre  liberté?  et  commune  et  prompte  re- 
cepte  à  tous  maux  ?  Et  comme  les  vns  l'attendent  tremblans  et  effrayez,  d'autres 
la  supportent  plus  aysement  que  la  vie,  I,  442. 

L'aisance  et  l'indigence  despendent  de  l'opinion  d'vn  chacun,  et  non  plus  la  ri- 
chesse, que  la  gloire,  que  la  santé,  n'ont  qu'autant  de  beauté  et  de  plaisir, que  leur 
en  preste  celuyqui  les  possède.  Chascun  est  bien  ou  mal,  selon  qu'il  s'en  trouue,  1,474. 

11  n'est  rien  à  quoy  communément  les  hommes  soyent  plus  tendus,  qu'à  don- 
ner voye  à  leurs  opinions.  Où  le  moyen  ordinaire  nous  faut,  nous  y  adioustons, 
le  commandement,  la  force,  le  fer,  et  le  feu.  Il  y  a  du  mal'heur,  d'en  estre  là,  que 
là  meilleure  touche  de  la  vérité,  ce  soit  la  multitude  des  croyans,  en  vne  presse 
où  les  fols  surpassent  de  tant,  les  sages,  on  nombre,  III,  530. 

C'est  chose  difficile  de  resouldre  son  iugement  contre  les  opinions  communes. 
La  première  persuasion  prinse  du  subiect  mesme,  saisit  les  simples  :  de  là  elle 
s'espand  aux  habiles,  soubs  l'authorité  du  nombre  et  ancienneté  des  tesmoi- 
gnages.  Pour  moy,  de  ce  que  ie  n'en  croii'ois  pas  vn,  ie  n'en  croirois  pas  cent 
vns.  Et  ne  luge  pas  les  opinions,  par  les  ans,  III,  530. 


B  230  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


PARENTÉ. 

C'est  il  lii  vcritc  vn  beau  nom,  et  plein  de  clilcction  i|uc  le  nom  (h;  {wni,  I,  oCK). 

Le  père  et  le  (ils  peiuienl  cstrc  de  complexion  entièrement  eslongnec,  et  les 
frères  aussi.  C'est  mon  (ils,  c'est  mon  parent  :  mais  c'est  vn  homme  Carouche,  vn 
mescliant,  ou  vn  sot,  I.  î^XJ. 

l'ayme  Paris  tendrement,  iusques  à  ses  verrues  et  à  ses  taches  :  elle  e.st  la 
gloire  de  la  France,  et  l'vn  des  plus  nobles  ornements  du  monde.  Dieu  en  chasse 
loing  nos  diuisions  :  entière  et  vnie,  ie  la  trouue  delTendue  de  toute  autre  vio- 
lence. De  tous  les  partis,  le  pire  sera  celuy  qui  la  mettra  en  discorde.  Et  ne  crains 
l>our  elle,  qu'elle  mcsme,  III,  128. 

l'AROLE. 

La  parole  est  moitié  à  celuj'  qui  parle,  moitié  à  celuj-  qui  l'escoute,  III,  646. 

Il  n'e.*;t  aucun  sens  nj'  visage,  ou  droict,  ou  amer,  ou  doux,  ou  courbe,  que  l'es- 
prit humain  ne  trouue  aux  escrits,  qu'il  entrej)rend  de  fouiller.  En  la  parole  la 
plus  nette,  pure  et  parfaicte,  qui  puisse  estre,  combien  de  fauceté  et  de  men- 
songe a  Ion  faict  naistrc?  III,  386. 

PAROLE  DONNÉE. 

Le  neud,  qui  me  tient  par  la  loy  d'honncstetc,  me  semble  bien  plus  pressant  et 
])lus  poisant,  que  n'est  celuy  de  la  contrainctc  ciuile.  On  me  garotte  plus  douce- 
ment par  vn  notaire,  que  par  moy,  III,  116. 

Nous  ne  pouuons  estre  tenus  au  delà  de  nos  forces  et  de  nos  moyens.  A  cette 
cause,  par  ce  que  les  elïects  et  exécutions  ne  sont  aucunement  en  nostre  puis- 
sance, et  qu'il  n'y  a  l'ien  en  bon  escient  en  nostre  puissance,  que  la  volonté  :  en 
celle  là  se  fondent  par  nécessité  et  s'establissent  toutes  les  règles  du  dcuoir  de 
l'homme,  I,  5L 

On  nous  propose  cet  exemple,  pour  faire  prcualoir  l'vtilité  priuee,  à  la  foy  don- 
née. Des  voleui's  vous  ont  prins,  ils  vous  ont  remis  on  liberté,  ayans  retiré  de 
vous  serment  du  paiement  de  certaine  somme.  Vn  homme  de  bien,  sera  il  quitte 
de  sa  foy,  sans  payer,  estant  hors  de  leurs  mains?  11  n'en  est  rien.  Ce  que  la 
crainte  m'a  fait  vne  fois  vouloir,  ie  suis  tenu  de  le  vouloir  encore  sans  crainte. 
Et  quand  elle  n'aura  forcé  que  ma  langue,  sans  la  volonté  :  encore  ie  suis  tenu 
de  faire  la  maille  bonne  de  ma  parole.  Autrement  de  degré  en  degré,  nous  vien- 
drons à  abolir  tout  le  droit  qu'vn  tiers  prend  de  nos  promesses.  En  cecy  seule- 
ment a  loy,  l'interost  priué,  de  nous  excuser  de  faillir  à  nostre  promesse,  si  nous 
auons  promis  chose  meschante,  et  inique  de  soy.  Car  le  droit  de  la  vertu  doibt 
preualoir  le  droit  de  nostre  obligation,  III,  KW. 

Ceux  qui  par  le  vice  de  la  mauuaise  honte,  sont  mois  et  faciles,  à  accorder  quoy 
qu'on  leur  demande,  sont  faciles  après  à  faillir  de  .parole,  et  à, se  desdire,  111,514. 

PASSIONS. 

L'ameen  ses  passions  se  pipe  plustost  elle  mesme,  se  dressant  vn  faux  subiect 
i!t  fantastique,  voire  contre  sa  propi'e  créance,  que  de  n'agir  contre  quelque 
chose,  I,  42. 

Qui  ne  sçait  leur  fermer  la  porte,  ne  les  chassera  pas  entrées,  III,  510. 

Les  passions  qui  sont  toutes  en  l'ame,  comme  l'ambition,  l'auarice,  et  autres, 
donnent  l)ien  plus  à  faire  à  la  raison  :  que  celles  qui  tiennent  au  corps  et  à- 
l'ame,  laquelle  n'y  peut  estre  secourue,  que  de  ses  propres  moyens  :  ny  ne  sont 
ces  appétits  là,  capables  de  satiété  :  voire  ils  s'esguisent  et  augmentent  par  la 
iouyssance,  II,  631. 

Toutes  passions  qui  se  laissent  gouster,  et  digérer,  ne  sont  que  médiocres,!,  26. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        VÈD.  E.231 


PÉDANTISME. 


l'ayme  et  honore  le  sçauoir,  autant  que  ceux  qui  l'ont.  Et  on  son  vray  vsagc, 
c'est  le  plus  noble  et  puissant  acquest  des  hommes.  Mais  en  ceu.x,  et  il  en  est  vn 
nombre  infiny  de  ce  genre,  qui  en  establissent  leur  fondamentale  suffisance  et 
valeur  :  ie  le  hay,  alors  si  ie  l'ose  dire,  vn  peu  plus  que  la  bostise.  En  mon  pays, 
et  de  mon  temps,  il  amande  assez  les  bourses,  nullement  les  âmes,  III,  3  li. 

PEINE  (punition). 

La  peine  suit  de  bien  prés  le  pech6  :  elle  naist  en  l'instant  et  quant  et  quant  le 
peclic  luy  mesme,  I,  658. 
Quiconque  attent  la  peine,  il  la  souffre,  et  quiconque  l'a  méritée,  l'attend,  1, 6<30. 

PÉNITENCE. 

A  qui  le  ieune  aiguiseroit  la  santé  et  l'allégresse,  ce  ne  seroit  plus  recepte  salu- 
taire :  non  plus  qu'en  l'autre  médecine,  les  drogues  n'ont  point  d'effectà  l'en- 
droit de  celuy  qui  les  prent  auec  appétit  et  plaisir,  I,  350. 

PENSÉES. 

Nous  empeschons  noz  pensées  du  gênerai,  et  des  causes  et  conduittes  vniuer- 
selles  :  qui  se  conduisent  trosbien  sans  nous  :  et  laissons  en  arrière  nostre  faict  : 
et  Michel,  qui  nous  touche  encore  de  plus  près  que  l'homme,  III,  388. 

PÈRES. 

le  ne  vis  iamais  perc,  pour  bosse  ou  teigneux  que  fust  son  fils,  qui  laissast  de 
l'aduoiier  :  non  pourtant,  s'il  n'est  du  tout  enyuré  de  cet'  affection,  qu'il  ne  s'ap- 
perçoiue  de  sa  défaillance  :  mais  tant  y  a  qu'il  est  sien,  I,  226. 

le  veux  mal  à  cette  coustume,  d'interdire  aux  enfants  l'appellation  paternelle, 
et  leur  en  e«ioindre  vn'  estrangere,  comme  plus  reuerentiale,  II,  32. 

C'est  aussi  folie  et  iniustice  de  priuer  les  enfans  qui  sont  en  aage,  de  la  fami- 
liarité des  pères,  et  vouloir  maintenir  en  leur  endroit  vne  morgue  austère  et  des- 
daigncuse,  espérant  par  là,  les  tenir  en  crainte  et  obéissance.  C'est  vne  farco 
tres-inutile,  qui  rend  les  percs  ennuieux  aux  enfans,  et  qui  pis  est,  ridicules.  Ils 
ont  la  ieunesse  et  les  forces  en  la  main,  et  par  conséquent  le  vent  et  lafaueur  du 
monde;  et  reçoiuent  auecques  mocqucrie,  ces  mines  fieres  et  tyranniques,  d'vn 
homme  qui  n'a  plus  de  sang,  ny  au  cœur,  ny  aux  veines  :  vrais  espouuantails 
de  cheneuiere,  II,  32. 

Vn  père  est  bien  misérable,  qui  ne  tient  l'affection  de  ses  enfans,  que  par  le 
besoin  qu'ils  ont  de  son  secours,  si  cela  se  doit  nommer  affection  :  il  faut  se 
rendre  respectable  par  sa  vertu,  et  par  sa  suffisance,  et  ayn.able  par  sa  bonté 
et  douceur  de  ses  mœurs,  II,  24. 

Voulons  nous  estre  aymez  de  nos  er^fans?  leur  voulons  nousoster  l'occasion  de 
souhaiter  nostre  mort  1  accommodons  leur  vie  raisonnablement,  de  ce  qui  est  en 
nostre  puissance,  II,  26. 

le  treuue  que  c'est  cruauté  et  iniustice  de  ne  les  receuoir  au  partage  et  société 
de  noz  biens,  et  compagnons  en  l'intelligence  de  nOz  affaires  domestiques,  quand 
ils  en  sont  capables,  et  de  ne  retrancher  et  resserrer  noz  commoditez  pour 
prouuoir  aux  leurs,  puis  que  nous  les  auons  engendrez  à  cet  effect,  II,  22. 

Vn  père  attern;  d'années  et  de  maux,  priué  par  sa  foiblesse  et  faute  de  santé, 
de  la  commune  société  des  hommes,  il  se  faict  tort,  et  aux  siens,  de  couuer  inu- 
tilement vn  grand  tas  de  richesses.  Il  est  assez  en  estât,  s'il  est  sage,  pour  auoir 
désir  de  se  despouiller  pour  se  coucher,  non  pas  iusques  à  la  chemise,  mais 
iusques  à  vne  robbe  de  nuict  bien  chaude  :  le  reste  des  pompes,  dequoy  il  n'a 


E.232  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

plus  que  faire,  il  doit  en  estrener  volontiers  ceux,  à  qui  par  ordonnance  natu- 
relle cela  doit  appartenir.  C'est  raison  qu'il  en  laisse  l'vsage,  puis  que  Nature  l'en 
priue  :  autrement  sans  doute  il  y  a  de  la  malice  et  de  l'enuie,  II,  28. 

PEUPLES. 

Les  peuples  nourris  à  la  liberté  et  à  se  commander  eux  mesmes,  estiment  toute 
autre  forme  de  police  monstrueuse  et  contre  nature.  Ceux  qui  sont  duits  à  la 
monarchie  en  font  de  mesme.  Et  quelque  facilité  que  leur  preste  fortune  au 
changement,  lors  mesme  qu'ils  se  sont  auec  grandes  difficultez  deffaitz  de  l'im- 
portunité  d'vn  maistre,  ils  courent  à  en  replanter  vn  nouueau  auec  pareilles  dif- 
ficultez, pour  ne  se  pouuoir  résoudre  de  prendre  en  haine  la  maistrise,  III,  170. 

C'est  merueille  que  Tindiscrette  et  prodigieuse  facilité  des  peuples,  à  se  laisser 
mener  et  manier  la  créance  et  l'espérance,  où  il  a  pieu  et  seruy  à  leurs  chefs  : 
par  dessus  cent  mescomtes,  les  vns  sur  les  autres  :  par  dessus  les  fantosmes,  et 
les  songes.  Leur  sens  et  entendement,  est  entièrement  estouffé  en  leur  passion. 
Leur  discrétion  n'a  plus  d'autre  choix,  que  ce  qui  leur  rit,  et  qui  conforte  leur 
cause  :  c'est  vne  qualité  inséparable  des  erreurs  populaires.  Apres  la  première  qui 
part,  les  opinions  s'entrepoussent,  suiuant  le  vent,  comme  les  flotz.  On  n'est  pas 
du  corps,  si  on  s'en  peut  desdire  :  si  on  ne  vague  le  train  commun,  III,  504 

PEUR. 

C'est  ce  dequoy  i'ay  le  plus  de  peur  que  la  peur.  Aussi  surmonte  elle  en  aigreur 
tous  les  autres  accidents,  I,  100. 

La  peur  naist  par  fois  de  faute  de  iugement,  comme  de  faute  de  cœur,  II,  288. 

Il  n'est  rien  qui  nous  iette  tant  aux  dangers,  qu'vne  faim  inconsidérée  de  nous 
en  mettre  hors,  III,  290. 

Ceux  qui  sont  en  pressante  crainte  de  perdre  leur  bien,  d'estre  exilez,  d'estre 
subiuguez,  viuent  en  continuelle  angoisse,  en  perdent  le  boire,  le  manger,  et  le 
repos;  là  où  les  panures,  les  bannis,  les  serfs  viuent  souuent  aussi  ioyeusement 
que  les  autres.  Tant  de  gens,  qui  de  l'impatience  des  pointures  de  la  peur,  se  sont 
pendus,  noyez,  et  précipitez,  nous  ont  bien  apprins  qu'elle  est  encores  plus  im- 
poi'tune  et  plus  insupportable  que  la  mort,  I,  100. 

le  ne  suis  pas  bon  naturaliste  et  ne  sçai  guiere  par  quels  ressors  la  peur  agit 
en  nous,  mais  tant  y  a  que  c'est  vne  estrange  passion  :  et  disent  les  Médecins 
qu'il  n'en  est  aucune,  qui  emporte  plustost  nostre  iugement  hors  de  sa  deuë  as- 
siete,  I,  98. 

Les  Grecs  en  recognoissent  vne  autre  espèce,  qui  est  outre  l'erreur  de  nostre 
discours  :  venant,  disent-ils,  sans  cause  apparente,  et  d'vne  impulsion  céleste.  Des 
peuples  entiers  s'en  voyent  souuent  frappez,  et  des  armées  entières,  lis  nomment 
cela  terreurs  Paniques,  I,  102. 

PHILOSOPHIE,  VÉRITÉ. 

Quiconque  cherche  quelque  chose,  il  en  vient  à  ce  poinct,  ou  qu'il  dit,  qu'il 
l'a  trouuée;  ou  qu'elle  ne  se  peut  trouuer;  ou  qu'il  en  est  encore  en  queste.  Toute 
la  Philosophie  est  despartie  en  ces  trois  genres.  Son  dessein  est  de  chercher  la 
science,  et  la  certitude.  Les  Peripateticiens,  Epicuriens,  Stoïciens,  et  autres,  ont 
pensé  l'auoir  trouuée  :  ils  ont  estably  les  sciences,  que  nous  auons,  et  les  ont 
traictées,  comme  notices  certaines.  Les  Académiciens  ont  désespéré  de  leur  queste  ; 
et  iugé  que  la  vérité  ne  se  pouuoit  conceuoir  par  nos  moyens.  La  fin  de  ceux-cy, 
c'est  la  foiblesse  et  humaine  ignorance.  Ce  party  a  eu  la  plus  grande  suitte,  et 
les  sectateurs  les  plus  nobles.  Les  Sceptiques  ou  Epechistes  disent,  qu'ils  sont 
encore  en  cherche  de  la  vérité.  Ils  iugent,  que  ceux-là  qui  pensent  lauoir  trouuée, 
se  trompent  infiniement;  et  qu'il  y  a  encore  de  la  vanité  trop  hardie,  en  ce  se- 
cond degré,  qui  asseure  que  les  forces  humaines  ne  sont  pas  capables  d'y  attein- 
dre. Car  cela,  d'establir  la  mesure  de  nostre  puissance,  de  cognoistre  et  iuger  la 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        PHI.  E.233 

difficulté  des  choses,  c'est  vne  grande  et  extrême  science,  de  laquelle  ils  doubtent 
que  l'homme  soit  capable,  II,  228. 

Prenez  los  simples  discours  de  la  philosophie,  srachez  les  choisir  et  traitter  à 
point,  ils  sont  plus  aisez  à  conccuoir  qu'vn  conte  de  Boccace.  Vn  enfant  en  est 
capable  au  partir  de  la  nourrisse,  beaucoup  mieux  que  d'apprendre  à  lire  ou  es- 
crire,  I,  262. 

La  plus  part  des  âmes  ne  se  trouuent  propres  à  faire  leur  profit  de  telle  instruc- 
tion :  qui,  si  elle  ne  se  met  à  bien,  se  meta  mal,  I,  218. 

La  philosophie  a  pour  son  but,  la  vertu  :  qui  n'est  pas,  comme  on  le  dit,  plantée 
à  la  teste  d'vn  mont  coupé,  rabolteux  et  inaccessible.  Ceux  qui  l'ont  approchée,  la 
tiennent  au  rebours,  logée  dans  vne  belle  plaine  fertile  et  (leurissante  :  d'où  elle 
void  bien  souz  soy  toutes  choses;  ayant  pour  guide  nature,  fortune  et  volupté 
pour  compagnes.  Les  autres  sont  allez  selon  leur  foiblesse,  faindre  cette  sotte 
image,  triste,  querelleuse,  despite,  menaceuse,  njineuse,  et  la  placer  sur  vn  rocher 
à  l'escart,  emmy  des  ronces  :  fantosme  à  estonner  les  gents,  I,  258. 

La  philosophie  n'estriue  point  contre  les  voluplez  naturelles,  pourueu  que  la 
mesure  y  soit  ioincte  et  en  iiresche  la  modération,  non  la  fuite.  Elle  dit  que  les 
appétits  du  corps  ne  doiuent  pas  estre  augmentez  par  l'esprit.  Et  nous  aduertit 
ingénieusement,  de  ne  vouloir  point  esueiller  nostre  faim  par  la  saturité  :  de  ne 
vouloir  farcir,  au  lieu  de  remplir  le  ventre  :  d'euiter  toute  iouyssance,  qui  nous 
met  en  disette  :  et  toute  viande  et  breuuage,  qui  nous  altère,  et  afiame,  111,276. 

La  philosophie  a  tant  de  visages  et  de  variété,  et  a  tant  dict,  que  tous  nos  son- 
ges et  resueries  s'y  trouuent.  L'iiumaine  phantasie  ne  peut  rien  conceuoir  en  bien 
et  en  mal  qui  n'y  soit,  II,  312. 

Ce  grand  monde,  c'est  le  miroïier,  où  il  nous  faut  regarder,  pour  nous  cognois- 
tre  de  bon  biais.  Tant  d'humeurs,  de  sectes,  de  iugemens,  d'opinions,  de  loix,  et 
de  coustumcs,  nous  apprennent  à  iugcr  sainement  des  nostres,  et  apprennent 
nostre  ingénient  à  recognoistre  son  imperfection  et  sa  naturelle  foiblesse.  Tant 
de  remuements  d'estat,  et  changements  de  fortune  publique,  nous  instruisent  à 
ne  faire  pas  grand  miracle  de  la  nostre.  Tant  de  noms,  tant  de  victoires  et  con- 
questes  enseuelis  soubs  l'oubliance,  rendent  ridicule  l'espérance  d'éterniser  nostre 
nom  par  la  prise  de  dix  argoulets,  et  d'vn  pouillier,  qui  n'est  cognu  que  de  sa 
cheute.  L'orgueil  et  la  liereté  de  tant  de  pompes  estrangeres,  la  maiesté  si  enflée 
de  tant  de  cours  et  de  grandeurs,  nous  fermit  et  asseure  la  veue,  à  soustenir  l'es- 
clat  des  nostres,  sans  siller  les  yeux.  Tant  de  milliasses  d'hommes  enterrez  auant 
nous,  nous  encouragent  à  ne  craindre  d'aller  trouuer  si  bonne  compagnie  en 
l'autre  monde  :  ainsi  du  reste,  I,  252. 

C'est  grand  cas  que  les  choses  en  soyent  là  en  nostre  siècle,  que  la  philosophie 
soit  iusques  aux  gens  d'entendement,  vn  nom  vain  et  fantastique,  qui  se  treuue 
de  nul  vsage,  et  de  nul  pris  par  opinion  et  par  efl"cct.  le  croy  que  ces  ergotismes 
en  sont  cause,  qui  ont  saisi  ses  auenues.  On  a  grand  tort  de  la  peindre  inacces- 
sible aux  enfans,  et  d'vn  visage  renfroigné,  sourcilleux  et  terrible  :  qui  me  l'a 
masquée  de  ce  faux  visage  pasle  et  hideux?  Il  n'est  rien  plus  gay,  plus  gaillard, 
plus  enioué,  et  à  peu  que  ie  ne  die  follastre.  Elle  ne  presche  que  teste  et  bon  temps. 
Vne  mine  triste  et  transie  montre  que  ce  n'est  pas  là  son  giste,  I,  256. 

La  philosophie  ne  pense  pas  auoir  mal  employé  ses  moyens,  quand  elle  a  rendu 
à  la  raison,  la  souueraine  maistrise  de  nostre  ame,  et  l'authorité  de  tejiir  en  bride 
nos  appétits,  II,  632. 

L'ame  qui  loge  la  philosophie,  doit  par  sa  santé  rendre  sain  encores  le  corps  : 
elle  doit  faire  luyre  iusques  au  dehors  son  repos,  et  aise,  I,  258. 

On  attache  aussi  bien  toute  la  philosophie  morale,  à  vne  vie  populaire  et  pri- 
uee,  qu'à  vne  vie  de  plus  riche  estolfe.  Chaque  homme  porte  la  forme  entière,  de 
l'humaine  condition,  III,  108. 

PHYSIONOMIE. 

C'est  vne  foible  garantie  que  la  mine,  toutefois  elle  a  quelque  considération. 
Et  si  i'auois  à  les  foyter,  ce  seroit  plus  rudement,  les  meschans  qui  démentent  et 
trahissent  les  promesses  que  Nature  leur  auoit  plantées  au  front.  le  punirois  plus 


B.234  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

aigrement  la  malice,  en  vno  apparence  débonnaire.  11  semble  qu'il  y  ait  aucuns 
visages  heureux,  d'autres  malencontreux,  III,  51)0. 

En  vne  face  qui  ne  sera  pas  trop  bien  composée,  il  peut  loger  quelque  air  de 
probité  et  de  fiance.  Comme  au  rebours,  i'ai  leu  parfois  entre  deux  beaux  yeux, 
(les  menasses  d'une  nature  maligne  et  dangereuse,  III,  588. 

PLAISIRS  (volupté). 

Il  n'est  aucune  si  iuste  volupté,  en  laquelle  l'excez  et  l'intempérance  ne  nous 
soit  reprochable,  I,  348. 

Tous  plaisirs  et  toutes  gratifications  ne  sont  pas  bien  logées  en  toutes  gens,  1, 348. 

Les  sages  nous  apprennent  assez,  à  nous  garder  de  la  trahison  de  noz  appétits  ; 
et  à  discerner  les  vrays  plaisirs  et  entiers,  des  plaisirs  meslez  et  bigarrez  de  plus 
de  peine  :  car  la  pluspart  des  plaisirs,  disent  ils,  nous  chatouillent  et  embrassent 
pour  nous  eslrangler,  I,  424. 

Si  la  douleur  de  teste  nous  venoit  auant  l'yuresse,  nous  nous  garderions  de  trop 
boire;  mais  la  volupté,  pour  nous  tromper,  marche  deuant,  et  nous  cache  sa  suitte, 
I,  424. 

PLURALITÉ  DES  MONDES. 

La  raison  n'a  en  aucune  autre  chose  plus  de  verisimilitude  et  de  fondement, 
qu'en  ce  qu'elle  persuade  la  pluralité  des  mondes.  Il  semble  n'estre  pas  vray-sem- 
blable,  que  Dieu  ait  faict  ce  seul  ouurage  sans  compaignon?  et  que  la  matière  de 
cette  forme  ayt  esté  toute  espuisée  en  ce  seul  indiuidu,  II,  270. 

POÉSIE. 

Nous  auons  bien  plus  de  poètes,  que  de  iuges  et  interprètes  de  poésie.  II  est  plus 
aisé  de  la  faire,  que  de  la  cognoistre,  I,  402. 

La  poésie  populaire  et  purement  naturelle,  a  des  naïuetésot  grâces,  par  où  elle 
se  compare  à  la  principale  beauté  de  la  poésie  parfaite  selon  l'art.  La  poésie  mé- 
diocre, qui  s'arreste  entre  deux,  est  desdaignée,  et  sans  prix,  I,  572. 

Pour  néant  hurte  à  la  porte  de  la  poésie,  vn  homme  rassis,  I,  628. 

PRÉDICTIONS   (CRÉDULITÉ), 

La  faculté  de  prophetizer  est  au  dessus  de  nous,  I,  628. 

C'est  don  de  Dieu,  que  la  diuination  :  voyla  pourquoy  ce  deuroit  estre  vne  im- 
posture punissable  d'en  abuser,  I,  364. 

Le  vray  champ  et  subiect  de  l'imposture,  sont  les  choses  inconnues  :  d'autant 
qu'en  premier  lieu  l'estrangeté  mesme  donne  crédit,  et  puis  n'estants  point  sub- 
iectes  à  nos  discours  ordinaires,  elles  nous  estent  le  moyen  de  les  combattre,  1, 376. 

Les  moyens  de  diuination  es  astres,  es  esprits,  es  figures  du  corps,  es  songes, 
et  ailleurs,  qui  restent  encore  entre  nous,  sont  un  notable  exemple  de  la  forcenée 
curiosité  de  nostre  nature,  s'amusant  à  préoccuper  les  choses  futures,  comme  si 
elle  n'auoit  pas  assez  affaire  à  digérer  les  présentes,  I,  72. 

l'en  voy  qui  estudient  et  glosent  leurs  Almanacs,  et  nous  en  allèguent  l'autho- 
rité  aux  choses  qui  se  passent.  A  tant  dire,  il  faut  qu'ils  disent  et  la  vérité  et  le 
mensonge.  le  ne  les  estime  de  rien  mieux,  pour  les  voir  tomber  en  quelque  rencon- 
tre, I,  76. 

PRÉSOMPTION. 

La  mère  nourrice  des  plus  fausses  opinions,  et  publiques  et  particulières,  c'est 
la  trop  bonne  opinion  que  l'homme  a  de  soy,  II,  470. 

La  présomption  est  nostre  maladie  naturelle  et  originelle.  La  plus  calamiteuse 
et  fragile  de  toutes  les  créatures  c'est  l'homme,  et  quant  et  quant,  la  plus  orgueil- 
leuse, II,  136. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        PRÉ.  E.235 

Fascheuse  maladie,  do  se  croire  si  fort,  qu'on  se  persuade,  qu'il  ne  se  puisse 
croire  au  contraire  :  et  plus  fascheuse  encore,  qu'on  se  persuade  d'vn  tel  esprit, 
qu'il  préfère  ie  ne  sçay  quelle  disparité  de  fortune  présente,  aux  espérances  et 
menaces  de  la  vie  éternelle!  1,582. 

Il  y  a  deux  parties  en  la  presumption  :  sçauoir  est,  de  s'estimer  trop,  et  n'esti- 
mer pas  assez  autruy,  II,  468. 

Il  ne  faut  pas  iuger  ce  qui  est  possible,  et  ce  qui  ne  l'est  pas,  selon  ce  qui  est 
croyable  et  incroyable  à  nostre  sens.  Et  est  vue  grande  faute,  et  en  laquelle  tou- 
tesfois  la  plus  part  des  hommes  tombent  :  de  faire  difliculté  de  croire  d'autruy, 
ce  qu'eux  ne  S(;auroient  faire,  ou  ne  vôudroicnt.  Il  semble  à  chacun  que  la  mais- 
tresse  forme  de  l'humaine  nature  est  en  luy  :  selon  elle,  il  faut  régler  tous  les  au- 
ti'es.  Les  allures  qui  ne  se  rapportent  aux  siennes,  sont  faintes  et  fauces.  Luy  pro- 
pose Ion  (luelque  chose  dos  actions  ou  facultez  d'vn  autre?  la  première  chose 
qu'il  appelle  à  la  consultation  do  son  iugoment,  c'est  son  exemple  :  selon  qu'il  on 
va  chez  luy,  selon  cela  va  l'ordre  du  monde.  0  l'asncrie  dangereuse  et  insuppor- 
table, II,  628. 

Il  est  d'autre  part  certaine  façon  d'hunulité  subtile,  qui  naist  de  la  présomption  : 
nous  recognoissons  nostre  ignorance,  en  plusieurs  choses,  et  sommes  si  courtois 
d'auoiier,  qu'il  y  ait  es  ouurages  de  Nature,  aucunes  qualitez  et  conditions,  qui 
nous  sont  imperceptibles,  et  desquelles  nostre  suffisance  ne  peut  descouurir  les 
moyens  et  les  causes.  Que  par  cette  honneste  et  conscientieuse  déclaration,  nous 
espérons  gaigner  qu'on  nous  croira  aussi  de  celles,  que  nous  dirons  entendre, 
III,  40. 

Il  semble  à  la  vérité,  que  Nature,  pour  la  consolation  de  nostre  estât  misérable 
et  chetif,  ne  nous  ait  donné  en  partage  que  la  presumption.  Nous  n'auons  que 
du  vent  et  de  la  fumée  en  partage,  II,  204. 

PRÉVOYANCE. 

La  preuoyance  conuient  egallenient  à  ce  qui  nous  touche  en  bien,  et  en  mal. 
Considérer  et  iuger  le  danger,  est  aucunement  le  rebours  de  s'en  estonner,  III,  390. 

PRIÈRES  (dévotion,  Dieu). 

le  ne  loue  pas  volontiers  ceux,  que  ie  voy  prier  Dieu  plus  souuent  et  plus  or- 
dinairement, si  les  actions  voisines  de  la  prière,  ne  me  tesmoignent  quelque 
amendement  et  reformation,  I,  580. 

Nous  prions  par  vsage  et  par  coustume  :  ou  pour  mieux  dire,  nous  lisons  ou  pro- 
nonçons noz  prières  :  ce  n'est  en  fin  que  mine,  I,  580. 

C'est  de  la  conscience  que  la  prière  doit  estro  produite,  et  non  pas  de  la  langue, 
I,  584. 

II  ne  faut  pas  demander  à  Dieu  que  toutes  choses  suiuont  nostre  volonté,  mais 
qu'elles  suiuent  la  prudence,  I,  592. 

La  prière  dos  Lacedemoniens  publique  et  priuée  portoit,  simplement  les  choses 
bonnes  et  belles  leur  estre  octroyées  :  remettant  à  la  discrétion  de  la  puissance 
suprême  le  tirage  et  choix  d'icelles,  II ,  368. 

Il  est  peu  d'hommes  qui  ozassent  mettre  en  euidence  les  requestes  secrettes  qu'ils 
font  à  Dieu,  I,  592. 

L'Eglise  peut  estendreet  diuersifier  les  prières  selon  le  besoin  de  nostre  instruc- 
tion :  c'est  tousiours  mesme  substance,  et  mesmc  chose.  Mais  le  patenostre  dit 
tout  ce  qu'il  faut,  et  est  trespropre  à  toutes  occasions.  C'est  l'vnique  prière,  dequoy 
ie  me  sers  par  tout,  et  la  répète  au  lieu  d'en  changer,  I,  578. 

PROCÈS. 

De  combien  est  il  plus  aisé,  de  n'y  entrer  pas  que  d'en  sortir,  III,  512. 

Si  nous  estions  sages,  nous  nous  deurions  resiouir  et  venter,  ainsi  que  i'ouy  vn 
iour  bien  naïuement,  vn  enfant  de  grande  maison,  faire  feste  à  chacun,  dequoy  sa 
mère  venoit  de  perdre  son  procès  :  comme  sa  toux,  sa  liebure,  ou  autre  chose 
d'importune  garde,  III,  512. 


E.236  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

A  combien  do  fois  me  suis-ie  faict  vne  bien  euidente  iniustice,  pour  fuyr  le 
hazard  de  la  receuoir  encore  pire  des  luges,  après  vn  siècle  d'ennuys,  et  d'or- 
dres et  viles  practiques,  plus  ennemies  de  mon  naturel,  que  n'est  la  géhenne  et  le 
feu,  m,  510. 

PRODUCTIONS  LITTÉRAIRES. 

Des  cnfans,  ie  ne  sçay  si  ie  n'aymerois  pas  mieux  beaucoup  en  auoir  produict 
vn  parfaictement  bien  formé,  de  l'accointance  des  Muses,  que  de  l'accointance  de 
ma  femme,  II ,  52.  i 

Ce  que  nous  engendrons  par  l'ame,  les  enfantements  de  nostre  esprit,  de  nostre 
courage  et  suffisance,  sont  produits  par  vne  plus  noble  partie  que  la  corporelle, 
et  sont  plus  nostres.  Nous  sommes  père  et  mère  ensemble  en  cette  génération  : 
ceux-cy  nous  coustent  bien  plus  cher,  et  nous  apportent  plus  d'honneur,  s'ils  ont 
quelque  chose  de  bon.  Car  la  valeur  de  nos  autres  enfants,  est  beaucoup  plus  leur, 
que  nostre  ;  la  part  que  nous  y  auons  est  bien  légère  :  mais  de  ceux-cy,  toute  la 
beauté,  toute  la  grâce  et  prix  est  nostre,  II,  48. 

Nous  disons  d'aucuns  ouurages  qu'ils  puent  à  l'huylc  et  à  la  lampe,  pour  cer- 
taine aspreté  et  rudesse,  que  le  trauail  imprime  en  ceux  où  il  a  grande  part. 
Mais  outre  cela,  la  solicitude  de  bien  faire,  et  cette  contention  de  l'ame  trop 
bandée  et  trop  tendue  à  son  entreprise,  la  rompt  et  l'empesche,  1,70. 

PROLÉTAIRES. 

A  quoy  faire  nous  allons  gendarmant  par  les  efforts  de  la  science?  Regardons 
à  terre,  les  panures  gens  que  nous  y  voyons  espandus,  la  teste  panchante  après 
leur  besongne.  De  ceux-là,  tire  Nature  tous  les  iours,  des  effects  de  constance  et 
de  patience,  plus  purs  et  plus  roides,  que  ne  sont  ceux  que  nous  estudions  si  cu- 
rieusement en  l'escole.  Combien  en  vois  ie  ordinairement,  qui  mescognoissent  la 
pauureté  ;  combien  qui  désirent  la  mort,  ou  qui  la  passent  sans  alarme  et  sans 
affliction?  Celui  là  qui  fouît  mon  iardin,  il  a  ce  matin  enterré  son  père  ou  son 
fils.  Les  noms  mesme,  dequoy  ils  appellent  les  maladies,  en  adoucissent  et  amol- 
lissent l'aspreté.  La  phthysie,  c'est  la  toux  pour  eux  :  la  dysenterie,  deuoyement 
d'estomach  :  vn  pleuresis,  c'est  vn  morfondement  :  et  selon  qu'ils  les  nomment 
doucement,  ils  les  supportent  aussi.  Elles  sont  bien  griefues,  quand  elles  rompent 
leur  trauail  ordinairement  :  ils  ne  s'allitent  que  pour  mourir,  III,  554. 

le  ne  vy  iamais  paysan  de  mes  voisins,  entrer  en  cogitation  de  quelle  conte- 
nance, et  asseurance,  il  passeroit  son  heure  dernière.  Nature  luy  apprend  à  ne 
songer  à  la  mort,  que  quand  il  se  meurt,  III,  576. 

PROVIDENCE. 

Dieu  pourroit  nous  ottroyer  les  richesses,  les  honneurs,  la  vie  et  la  santé  mesme, 
quelquefois  à  nostre  dommage  :  car  tout  ce  qui  nous  est  plaisant,  ne  nous  est  pas 
tousiours  salutaire  :  si  au  lieu  de  la  guerison,  il  nous  enuoye  la  mort,  ou  l'empi- 
rement  de  nos  maux  :  il  le  fait  par  les  raisons  de  sa  prouidence,'-qui  regarde  bien 
plus  certainement  ce  qui  nous  est  deu,  que  nous  ne  pouuons  faire  :  et  la  deuons 
prendre  en  bonne  part,  comme  d'vne  main  tres-sage  et  tres-amie,  II,  370. 

QUALITÉS. 

C'est  vne  espèce  de  mocquerie  et  d'iniure,  de  vouloir  faire  valoir  vn  homme, 
par  des  qualitez  mes-aduenantes  à  son  rang;  quoy  qu'elles  soient  autrement 
louables;  et  par  les  qualitez  aussi  qui  ne  doiuent  pas  estre  les  siennes  principales, 
I,  432. 

QUERELLES. 

Regardez  pourquoy  celuy-là  s'en  va  courre  fortune  de  son  honneur  et  de  sa 
vie,  à  tout  son  espée  et  son  poignard;  qu'il  vous  die  d'où  vient  la  source  de  ce 


i;esprtt  des  essais,     que.  E.237 

débat,  ilne  le  peutfaire  sans  rougir;  tant  l'occasion  en  est  vaine  etfriuole,  III,  512. 

Qu'est-ce  qui  faict  en  ce  temps,  nos  querelles  toutes  mortelles? et  que  là  où  nos 
pères  auoyent  quelque  degré  de  vengeance,  nous  commençons  à  cette  heure  par 
le  dernier  :  et  ne  se  parle  d'arriuée  que  de  tuer?  Qu'est-ce,  si  ce  n'est  coiiardie, 
II,  570. 

Qui  entre  légèrement  en  querelle,  est  subiect  d'en  sortir  aussi  légèrement.  C'est 
une  mauuaise  façon.  Depuis  qu'on  y  est,  il  faut  aller  ou  creuer.  Entrejjrenez  froi- 
dement, mais  poursuiuez  ardamment.  De  faute  de  prudence,  on  retombe  en  faute 
de  cœur;  qui  est  encore  moins  supportable,  III,  514. 

Les  excuses  et  réparations,  que  ie  voy  faire  tous  les  ioui-s,  pour  purger  l'indis- 
crétion, me  semblent  plus  laides  que  l'indiscrétion  mesme,  III,  516. 

Vn  homme  d'honneur,  qui  doit  sentir  vn  desmenti,  et  vue  ofTence  iusques  au 
cœur,  qui  n'est  pour  prendre  vne  mauuaise  excuse  en  payement  et  consolation, 
qu'il  euite  le  progrez  des  altercations  contentieuses,  III,  500. 

Aucun  dire  n'est  si  vicieux,  comme  le  desdire  est  honteux,  quand  c'est  vn  des- 
dire, arraché  par  authorité,  III,  516. 

La  plus  part  des  accords  de  noz  querelles  du  iourd'hui,  sont  honteux  et  menteurs. 
Nous  ne  cherchons  qu'à  sauuer  les  apparences  et  trahissons  cependant,  et  desad- 
uouons  noz  vrayes  intentions  aux  despens  de  nostre  franchise,  et  de  l'honneur 
de  nostre  courage,  et  cherchons  des  conillieres  en  la  fauceté,  pour  nous  accorder. 
Il  ne  faut  pas  regarder  si  vostre  action  ou  vostre  parole,  peut  auoir  autre  inter- 
prétation, c'est  vostre  vi'aye  et  Sincère  interprétation,  qu'il  faut  mes-huy  mainte- 
nir, quoy  qu'il  vous  couste,  III,  514. 

RAISON. 

La  raison  humaine  est  un  glaiue  double  et  dangereux,  II,  500. 

Oserons  nous  dire  que  cet  aduantage  de  la  raison,  dequoy  nous  faisons  tant  de 
feste,  et  pour  le  respect  duquel  nous  nous  tenons  maistre  et  Empereurs  du  reste 
des  créatures,  ait  esté  mis  en  nous,  pour  nostre  tourment,  I,  450. 

Nostre  raison  est  flexible  à  toute  sorte  d'images,  II,  000. 

Nos  rai&ons  anticipent  souuent  l'elTect,  et  ont  l'estenduë  de  leur  iurisdiction  si 
infinie,  qu'elles  iugent  et  s'exercent  en  l'inanité  mesme,  et  au  non  estre,  III,  542. 

L'humaine  raison  est  vn  instrument  libre  et  vague.  Les  hommes,  aux  faicts  qu'on 
leur  propose,  s'amusent  plus  volontiers  à  en  cliercher  la  raison,  qu'à  en  cherciier 
la  vérité.  Ils  passent  par  dessus  les  presuppositions,  mais  ils  examinent  curieuse- 
ment les  conséquences.  Ils  laissent  les  choses,  et  courent  aux  causes.  Plaisans 
causeurs.  La  cognoissance  des  causes  touche  seulement  celuy,  qui  a  la  conduitte 
des  choses  :  non  à  nous,  qui  n'en  auons  que  la  souffrance,  III,  520. 

A  quoy  faire  la  cognoissance  des  choses,  si  nous  en  deuenons  plus  lasches?  si 
nous  en  perdons  le  repos  et  la  tranquilité,  où  nous  serions  sans  cela?  I,  450. 

Quelles  difl'erences  de  sens  et  de  raison,  quelle  contrariété  d'imaginations  nous 
présente  la  diuersité  de  nos  passions?  Quelle  assourance  pouuons  nous  prendre 
de  chose  si  instable  et  si  mobile,  subjecte  par  sa  condition  à  la  maistrise  ^u  trou- 
ble, n'allant  iamais  qu'vn  pas  forcé  et  emprunté?  II,  352. 

La  raison  humaine  est  vne  teinture  infuse  enuiron  de  pareil  pois  à  toutes  nos 
opinions  et  mœurs,  de  quelque  forme  qu'elles  soient  :  infinie  en  matière,  infinie 
en  diuersité,  I,  102. 

J'appelle  tousiours  raison  cette  apparence  de  discours  que  chacun  forge  en  soy: 
cette  raison,  de  la  condition  de  laquelle,  il  y  en  peut  avoir  cent  contraires  autour 
d'un  même  subject  :  c'est  un  instrument  de  plomb,  et  de  cire,  alongeable,  ploya- 
ble,  accommodable  à  tout  biais  et  à  toutes  mesures  :  il  ne  reste  que  la  suffisance 
de  le  sçauoir  contourner,  II,  346. 

11  n'est  rien  si  soupple  et  erratique.  C'est  le  soulier  de  Theramenez,  bon  à  tous 
pieds,  III,  544. 


E.238  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

RAISON  D'ÉTAT. 

Le  Prince,  quand  vne  vrgente  circonstance,  et  quelque  impétueux  et  inopiné 
accident,  du  besoing  de  son  estât,  luy  fait  gauchir  sa  parolle  et  sa  foy,  ou  autre- 
ment le  iette  hors  de  son  deuoir  ordinaire,  c'est  malheur.  A  cela,  nul  remède  : 
nous  ne  pouuons  pas  tout.  Ce  sont  dangereux  exemples,  rares,  et  maladifues 
exceptions,  à  nos  règles  naturelles  :  il  y  faut  céder,  mais  auec  grande  modéra- 
tion et  circonspection.  Aucune  vtilité  priuee,  n'est  digne  pour  laquelle  nous  fa- 
cions  cet  effort  à  nostre  conscience  :  la  publique  bien,  lors  qu'elle  est  et  tres-ap- 
parente,  et  très-importante,  III,  98. 

RÉCOMPENSES  HONORIFIQUES. 

C'a  esté  vne  belle  inuention,  et  receuë  en  la  plus  pai't  des  polices  du  monde, 
d'establir  certaines  nierques  vaines  et  sans  piix,  pour  en  honnorei-  et  recompen- 
ser la  vertu,  II,  10. 

C'est  à  la  vérité  vne  bien  bonne  et  profitable  coustume,  de  trouuei-  moyen  de 
recognoistre  ainsi  la  valeur  des  hommes  rares  et  excellons,  et  de  les  contenter  et 
satisfaire  par  des  payemens,  qui  ne  chargent  aucunement  le  publiq,  et  qui  ne 
coustent  rien  au  Prince,  II,  10. 

Ces  lojers  d'honneur,  n'ont  autre  prix  et  estimation  que  cette  là,  que  peu  de 
gens  en  iouyssent,  il  n'est,  pour  les  anéantir,  que  d'en  faire  largesse,  II,  12. 

Aucun  homme  de  cœur  ne  daigne  s'auantager  de  ce  qu'il  a  de  commun  auec 
plusieurs,  II,  14. 

RELIGION  (dévotion.  Dieu,  dieux). 

0  la  vile  chose,  et  abiecte,  que  l'homme,  s'il  ne  s'esleue  au  dessus  de  l'huma- 
nité! C'est  à  nostre  foy  Chrestienne,  non  à  la  vei'tu  Stoïque,  de  prétendre  à  cette 
métamorphose,  II,  418. 

C'est  la  foy  seule  qui  embrasse  viuement  et  certainement  les  hauts  mystères  de 
nostre  religion,  II,  114. 

Combien  et  aux  loix  de  la  religion,  et  aux  loix  politiques  se  trouuent  plus  doci- 
les et  aisez  à  mener,  les  esprits  simples  et  incurioux,  que  ces  esprits  surueillants 
et  pédagogues  des  causes  diuines  et  humaines?  II,  230. 

La  peste  de  l'homme  c'est  l'opinion  de  sçauoir.  Voyla  pourquoy  l'ignorance 
nous  est  tant  recommandée  par  nostre  religion,  comme  pièce  propre  à  la  créance 
et  à  l'obeyssance,  II,  204. 

La  participation  que  nous  auons  à  la  cognoissance  de  la  vérité,  quelle  qu'elle 
soit,  ce  n'est  point  par  nos  propres  forces  que  nous  l'auons  acquise.  Dieu  nous  a 
assez  appris  cela  par  les  tesmoings,  qu'il  a  choisi  du  vulgaire,  simples  et  igno- 
rans,  pour  nous  instruire  de  ses  admirables  secrets,  II,  224. 

Nostre  foy  ce  n'est  pas  nostre  acquest,  c'est  vn  pur  présent  de  la  libéralité 
d'autruy.  Ce  n'est  pas  par  discours  ou  par  nostre  entendement  que  nous  auons 
receu  nostre  religion,  c'est  par  authorité  et  par.  commandement  cstranger.  La 
foiblesse  de  nostre  iugement  nous  y  aide  plus  que  la  force,  et  nostre  aueuglement 
plus  que  nostre  clair-voyance.  C'est  par  l'entremise  de  nostre  ignorance,  plus 
que  de  nostre  science,  que  nous  sommes  sçauans  de.  diuin  sçauoir,  II,  224. 

Si  nous  auions  vne  seule  goutte  de  foy,  nous  remuerions  les  montaignes  de 
leur  place,  dict  la  saincte  parole  :  nos  actions  qui  seroient  guidées  et  accompai- 
gnées  de  la  diuinité,  ne  seroient  pas  simplement  humaines,  elles  auroient  quel- 
que chose  de  miraculeux,  comme  nostre  ci-oyance,  II,  118. 

Si  nos  moyens  naturels  et  terrestres  ne  peuuent  conceuoir  cptte  cognoissance 
supernaturelle  et  céleste:  apportons  y  seulement  du  nostre,  l'obéissance  et  lasub- 
iection,  II,  224. 

Ou  il  faut  se  submettre  du  tout  à  l'authorité  de  nostre  police  ecclésiastique,  ou 
du  tout  s'en  dispenser.  Ce  n'est  pas  à  nous  à  establir  la  part  que  nous  luy  deuons 
d'obéissance,  I,  294. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.       UEL.  E.239 

En  conscience  tout  l'acquest  que  riionime  a  retiré  d'\ne  si  longue  poursuite, 
de  la  vérité  religieuse  c'est  d'auoir  appris  à  recognoistre  sa  foiblesse.  L'igno- 
rance qui  estoit  naturellement  en  nous,  nous  l'auons  par  longue  estude  confir- 
mée et  auerée.  11  est  aduenu  aux  gens  véritablement  sçauans,  ce  qui  adulent  aux 
espics  de  bled  :  ils  vont  s'esleuant  et  se  haussant  la  teste  droite  et  liere,  tant  qu'ils 
sont  vuides;  mais  quand  ils  sont  pleins  et  grossis  de  grain  en  leur  maturité,  ils 
commencent  à  s'humilier  et  baisser  les  cornes.  Pareillement  les  hommes,  ayans 
tout  essayé,  tout  sondé,  n'ont  trouué  en  cet  amas  de  science  etprouision  de  tant 
de  choses  diuerses,  rien  de  ferme,  et  rien  que  vanité,  II,  226. 

Les  simples,  dit  S.  Paul,  et  les  ignorans,  s'esleuent  et  se  saisissent  du  ciel;  et 
nous,  à  tout  nostre  sçauoir,  nous  plongeons  aux  abismes  infernaux,  II,  220. 
Il  faut  sobrement  se  mesler  de  iuger  des  ordonnances  diuines,  I,  376. 
le  trouue  niauuais  ce  que  ie  voy  en  vsage,  de  chercher  à  fermir  et  appuyer 
nostre  religion  par  la  prospérité  de  nos  entreprises,  I,  378. 

11  est  mal-aisé  de  ramener  les  choses  diuines  à  nostre  balance,  qu'elles  n'y 
soufîï'ent  du  deschet,  I,  378. 

Rien  du  nostre  ne  se  peut  apparier  ou  rapporter  en  quelque  façon  que  ce  soit, 
à  la  nature  diuine,  qui  ne  la  tache  et  marque  d'autant  d'imperfection.  Cette  in- 
fmie  beauté,  puissance,  et  bonté,  comment  peut  elle  souffrir  quelque  correspon- 
dance et  similitude  à  ce  que  nous  sommes,  sans  vn  extrême  interest  et  déchet  de 
sa  diuine  grandeur?  II,  208. 

11  se  faut  contenter  de  la  lumière  qu'il  plaist  au  Soleil  nous  communiquer  par 
ses  rayons;  et  qui  esleue  ses  yeux  pour  en  prendre  vne  plus  grande  dans  son 
corps  mesme,  il  y  ))erd  la  veuë,  I,  380. 

Combien  y  a  il  d'arts,  qui  font  profession  de  consister  en  la  coniecture,  plus 
qu'en  la  science?  qui  ne  décident  pas  du  vray  et  du  faulx,  et  suiuent  seulement 
ce  qu'il  semble?  II,  236'. 

Nous  en  valons  bien  mieux,  de  nous  laisser  manier  sans  inquisition,  à  l'ordre 
du  monde.  Vne  ame  garantie  de  preiugé,  a  vn  merueilleux  auancement  vers  la 
tranquillité,  11,236. 

Nous  disons  que  Dieu  craint,  que  Dieu  se  courrouce,  que  Dieu  aime,  ce  sont 
toutes  agitations  et  esmotions,  qui  ne  peuuent  loger  en  Dieu  selon  nostre  forme, 
ny  nous  l'imaginer  selon  la  sienne,  II,  224. 

C'est  vne  estrange  fantasie,  de  vouloir  payer  la  bonté  diuine,  de  nostre  afflic- 
tion, loint  que  ce  n'estpas  au  criminel  de  se  faire  fouëter  à  sa  mesure,  et  à  son 
heure  :  ce  qui  vient  à  gré  àceluy  qui  le  souffre,  ne  se  peut  attribuera  punition,  II,  266. 
Le  Sainct  liure  des  sacrez  mystères  de  nostre  créance  n'est  pas  l'estude  de  tout 
le  monde  :  c'est  l'estude  des  personnes  qui  y  sont  vouées,  que  Dieu  y  appelle. 
Les  meschans,  les  ignorants  s'y  empirent.  Ce  n'est  pas  vne  histoire  à  compter  : 
c'est  vne  histoire  à  reuerer,  craindre  et  adorer.  L'ignorance  pure,  et  remise  toute 
en  autruy,  estoit  bien  plus  salutaire  et  plus  sçauante,  que  n'est  cette  science 
verbale,  et  vaine,  nourrice  de  présomption  et  de  témérité,  I,  584. 

Des  esprits  simples,  moins  curieux  et  moins  instruits,  il  s'en  fait  de  bons 
Chrestiens,  qui  par  reuerence  et  obéissance,  croyent  simplement,  et  se  maintien- 
nent sous  les  loix.  Les  grands  esprits  plus  rassis  et  clairuoyans,  font  un  autre 
genre  de  bien  croyans  :  lesquels  par  longue  et  religieuse  inuestigation,  pénètrent 
vne  plus  profonde  et  abstruse  lumière,  es  escritures,  et  sentent  le  mystérieux  et 
diuin  secret  de  nostre  police  ecclésiastique.  En  la  moyenne  vigueur  des  esprits, 
et  moyenne  capacité,  s'engendre  l'erreur  des  opinions  :  ils  suiuent  l'apparence  du 
premier  sens,  I,  570. 

Nous  ne  receuons  nostre  religion  non  autrement  que  comme  les  autres  religions 
se  reçoiuent.  Nous  nous  sommes  rencontrez  au  pays,  où  elle  estoit  en  vsage,  ou 
nous  regardons  son  ancienneté,  ou  l'authorité  des  hommes  qui  l'ont  maintenue, 
ou  craignons  les  menaces  qu'elle  attache  aux  mécréants  ou  suAuons  ses  promesses. 
Nous  sommes  Chrestiens  à  mesme  filtre  que  nous  sommes  ou  Perigordins  ou 
Alemans,  II,  122. 

Plaisante  foy,  qui  ne  croid  ce  qu'elle  croid,  que  pour  n'auoir  le  courage  de  le 
descroire,  II,  124. 
Nous  deurions  auoir  honte,  qu'es  sectes  humaines  il  ne  fut  iama'is  partisan, 


E.240  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

quoique  difficulté  et  estrangeté  que  maintinst  sa  doctrine,  qui  n'y  conformast 
aucunement  ses  deportemens  et  sa  vie  :  et  vne  si  diuine  et  céleste  institution  ne 
marque  les  Chrostiens  que  par  la  langue,  II,  116. 

Si  nous  tenions  à  Dieu  par  l'entremise  d'vne  foy  viue  :  si  nous  tenions  à  Dieu 
par  luy,  non  par  nous  :  si  nous  auions  vn  pied  et  vn  fondement  diuin,  les  occa- 
sionshumainesn'auroientpas  le  pouuoirdenousesbranler,  comme  elles  ont,  II,  116. 

Le  meilleur  do  nous  ne  craind  point  de  l'outrager,  comme  il  craind  d'outrager 
son  voisin,  son  parent,  son  maistre,  II,  122. 

Les  vns  font  accroire  au  monde,  qu'ils  croycnt  ce  qu'ils  ne  croyent  pas.  Les 
autres  en  plus  grand  nombre,  se  le  font  accroire  à  eux  mosmes,  ne  sçachants  pas 
.pénétrer  quo  c'est  que  croire,  II,  118. 

Toutes  polices  ont  tiré  fruit  de  leur  deuotion,  II,  ii50. 

La  religion  Chrestienne  a  toutes  les  marques  d'extrême  iustice  et  vtilité  :  mais 
nulle  plus  apparente  que  l'exacte  recommandation  de  l'obéissance  du  magistrat, 
et  manutention  des  polices,  I,  180. 

Nostre  religion  n'a  point  eu  de  plus  asseuré  fondement  humain,  que  le  mes- 
pris  de  la  vie,  I,  124. 

REPENTIR. 

Le  repentir  n'est  qu'vne  desdicte  de  nostre  volonté,  et  opposition  de  nos  fan- 
tasies,  qui  nous  pourmene  à  tout  sens.  Il  faict  desaduouër  à  celuy-là,  sa  vertu 
passée  et  sa  continence,  III,  114. 

Le  vice  laisse  comme  vn  vlcere  en  la  chair,  vne  rcpentanco  en  l'ame,  qui  tous- 
iours  s'esgratigne,  et  s'ensanglante  elle  mesme.  Car  la  raison  efface  les  autres 
tristesses  et  douleurs,  mais  elle  engendre  celle  de  la  repentance  :  qui  est  plus 
griefue,  d'autant  qu'elle  naist  au  dedans,  III,  112. 

le  ne  cognoy  pas  de  repentance  superficielle,  moyenne,  et  de  cérémonie.  11  faut 
qu'elle  me  touche  de  toutes  parts  auant  que  le  la  nomme  ainsin  :  et  qu'elle  pinso 
mes  entrailles,  et  les  afflige  autant  profondement,  que  Dieu  me  voit,  et  autant 
vniuersellement,  III,  126. 

Si  n'est-ce  pas  guerison,  si  on  ne  se  descharge  du  mal.  Si  la  repentance  pesoit 
sur  le  plat  de  la  balance,  elle  emporteroit  le  péché,  III,  124. 

Mais  ce  qu'on  dit,  que  la  repentance  suit  de  près  le  péché,  ne  semble  pas  re- 
garder le  péché  qui  est  en  son  haut  appareil  :  qui  loge  en  nous  comme  en  son 
propre  domicile.  On  peut  desauouor  et  desdire  les  vices,  qui  nous  surprennent,  et 
vers  lesquels  les  passions  nous  emportent  :  mais  ceux  qui  par  longue  habitude, 
sont  enracinez  et  ancrez  en  vne  volonté  forte  et  vigoureuse,  ne  sont  subiects  à 
contradiction,  III,  114. 

Il  y  a  des  pochez  impétueux,  prompts  et  subits,  laissons  les  à  part  :  mais  en 
ces  autres  péchez,  à  tant  de  fois  reprins,  délibérez,  et  consultez,  ou  péchez  de 
complexion,  ou  péchez  de  profession  et  de  vacation  :  ie  ne  puis  pas  conceuoir, 
qu'ils  soient  plantez  si  long  temps  en  vn  mesme  courage,  sans  que  la  raison  et  la 
conscience  de  celuy  qui  les  possède,  le  vueille  constamment,  et  l'entende  ainsin. 
Et  le  repentir  qu'il  se  vante  luy  en  venir  à  certain  instant  prescrit,  m'est  vn  peu 
dur  à  imaginer  et  former,  III,  124. 

RÉPUTATION  (AME,  gloire). 

Los  iugemens  qui  se  font  des  apparences  externes,  sont  merueilleusement  incer- 
tains et  douteux  :  et  n'est  aucun  si  asseuré  tesmoing,  comme  chacun  à  soy- 
mesme,  II,  454. 

Des  viuans  mesme,  ie  sens  qu'on  parle  tousiours  autrement  qu'ils  ne  sont.  Et 
si  à  toute  force,  ie  n'eusse  maintenu  vn  amy  que  i'aj'  perdu,  on  me  l'eust  deschiré 
en  mille  contraires  visages,  III,  450. 

Le  bruit  ne  suit  pas  toute  bonté,  si  la  difficulté  et  estrangeté  n'y  est  ioincte. 
Voyre  la  simple  estimation,  n'est  deuë  à  toute  action,  qui  n'ait  de  la  vertu,  III,  522. 

Le  marbre  esleuera  vos  titres  tant  qu'il  vous  plaira,  pour  auoir  faict  repetasser 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.       RÉP.  E.241 

vn  pan  de  mur,  ou  descroter  vn  ruisseau  public  :  mais  non  pas  les  hommes,  qui 
ont  du  sens  :  La  renommée  ne  se  prostitue  pas  à  si  vil  comte,  III,  522. 

Celuy  qui  se  tient  ferme  dans  vue  francliée  descouuerte,  que  fait  il  en  cela, 
que  ne  facent  deuant  luy  cinquante  pauuros  pionniers,  qui  luy  ouurent  le  pas,  et 
le  couurent  de  leurs  corps,  pour  cinq  sols  de  paye  par  iour?  II,  456. 

Qui  tient  sa  mort  pour  mal  employée,  si  ce  n'est  en  occasion  signalée  :  au  lieu 
d'illustrer  sa  mort,  il  obscurcit  volontiers  sa  vie  :  laissant  eschapper  ce  pendant 
plusieurs  iustes  occasions  de  se  bazarder.  Et  toutes  les  iustes  sont  illustres  assez  : 
sa  conscience  les  trompettant  suffisamment  à  chacun,  II,  450. 

Desdaignons  cette  faim  de  renommée  et  d'honneur,  basse  et  belistressc,  qui 
nous  le  faict  coquiner  de  toute  sorte  de  gens  :  par  moyens  abiects,  et  à  quelque 
vil  prix  que  ce  soit.  C'est  deshonneur  d'estre  ainsin  honnoré.  Apprenons  à  n'estre 
non  plus  auides,  que  nous  sommes  capables  de  gloire.  De  s'enfler  de  toute  action 
vtile  et  innocente,  c'est  à  faire  à  gens  à  qui  elle  est  extraordinaire  et  rare,  III,  522. 

RESSEMBLANCE,  DISSE3IBLANCE. 

Ingénieux  meslange  de  Nature.  Si  nos  faces  n'estoient  semblables,  on  ne  sçau- 
roit  discerner  l'homme  de  la  beste  :  si  elles  n'estoient  dissemblables,  on  ne  sçau- 
roit  discerner  l'homme  de  l'homme,  III,  GIO. 

RETRAITE. 

Il  est  temps  de  nous  desnoïier  de  la  société,  lors  que  nous  n'y  pouuons  rien 
apporter.  Et  qui  ne  peut  proster,  qu'il  se  delTende  d'emprunter.  Nos  forces  nous 
faillent  :  retirons  les,  et  resserrons  nous  en  nous,  I,  418. 

Puis  que  Dieu  nous  donne  loisir  de  disposer  de  notre  deslogement;  préparons 
nous  y;  plions  bagage;  prenons  de  bon'heure  congé  de  la  compagnie;  despétrons 
nous  de  ces  violentes  prinses,  qui  nous  engagent  ailleurs,  et  esloignent  de  nous. 
Il  faut  desnoiier  ces  obligations  si  fortes  :  et  meshuy  aymer  cecy  et  cela,  mais 
n'espouser  rien  que  soy.  C'est  à  dire,  le  reste  soit  à  nous  :  mais  non  pas  ioint  et 
colé  en  façon,  qu'on  ne  le  puisse  desprendre  sans  nous  escorcher,  et  arracher 
ensemble  quelque  pièce  du  nostre,  I,  418. 

Noz  affaires  nous  donnent  assez  de  peine,  pourquoi  encores  nous  tourmenter, 
et  rompre  la  teste,  de  ceux  de  noz  voisins  et  amis,  I,  418. 

La  solitude  que  i'ayme,  et  que  ie  presche,  ce  n'est  principallement,  que  rame- 
ner à  moy  mes  alTections,  et  mes  pensées  :  restreindre  et  resserrer,  non  mes  pas, 
ains  mes  désirs  et  mon  soucy,  resignant  la  solicitude  estrangere,  et  fuyant  mor- 
tellement la  seruitude,  et  l'obligation  :  et  non  tant  la  foule  des  houmies,  que  la 
foule  des  aft'aires,  III,  146. 

Celuy  qui  se  retire  ennuie  et  desgousté  de  la  vie  commune,  doit  former  cette- 
cy,  aux  règles  de  la  raison;  l'ordonner  et  renger  par  préméditation  et  discours. 
11  doit  auoir  prins  congé  de  toute  espèce  de  trauail,  quelque  visage  qu'il  porte; 
et  fuir  en  gênerai  les  passions,  qui  empeschent  la  tranquillité  du  corps  et  de 
l'ame;  et  choisir  la  route  qui  est  plus  selon  son  humeur,  I,  420. 

La  plus  contraire  humeur  à  la  retraicte,  c'est  l'ambition  :  la  gloire  et  le  repos 
sont  choses  qui  ne  peuuent  loger  en  mesme  giste,  I,  426. 

C'est  vne  lâche  ambition  de  vouloir  tirer  gloire  de  son  oysiueté,  et  de  sa  ca- 
chette. Il  faut  faire  comme  les  animaux,  qui  effacent  la  trace,  à  la  porte  de  leur 
tanière,  I,  428. 

Quittez  auecq  les  autres  voluptez  celle  qui  vient  de  l'approbation  d'autruy,  1, 428. 

Pour  nous  estre  deffaicts  de  la  Cour  ef  du  marché,  nous  ne  sommes  pas  def- 
faits  des  principaux  tourmens  de  nostre  vie,  I,  412. 

Si  on  ne  se  descharge  premièrement  et  son  ame,  du  faix  qui  la  presse,  le  remue- 
ment la  fera  fouler  dauantage.  Parquoy  ce  n'est  pas  assez  de  s'estre  escarté  du 
peuple;  ce  n'est  pas  assez  de  changer  de  place,  il  se  faut  escarter  des  conditions 
populaires,  qui  sont  en  nous:  il  se  faut  séquestrer  et  r'auoir  de  soy  :  sinon  nous 
emportons  nos  fers  quand  et  nous,  I,  414. 

ESS.^lS  DE   MOMAIGNE.  —  T.  IV.  16 


E.242  ESSATS  DE  MONTAIGNE. 

L'occupation  qu'il  faut  choisir  à  vne  telle  vie,  ce  doit  ostro  vne  occupation  non 
pénible  nj'  onnujouse;  autrement  pour  néant  ferions  nous  estât  d'y  estre  venu/, 
chercher  le  seiour,  I,  42?. 

Souuent  on  j)ense  auoir  quitté  les  affaires,  on  ne  les  a  que  changez.  Il  n'y  ;i 
guère  moins  de  tourment  au  gouuernement  d'vne  famille  que  d'vn  estât  entier. 
Où  que  l'anie  soit  empeschée,  elle  y  est  toute.  Et  pour  estre  les  occupations 
domestiques  moins  importantes,  elles  n'en  sont  pas  moins  importunes,  I,  41"i. 

Ce  n'est  pas  que  le  sage  ne  puisse  par  tout  viure  content,  voire  et  seul,  en  la 
foule  d'vn  palais  :  mais  s'il  esta  choisir,  il  en  fuira,  mesmes  la  veue,  I,  41<J. 

Vous  auez  donné  vostre  vie  à  la  lumière;  donnez  le  reste  à  l'ombre,  I,  428. 

RICHESSES. 

Epicurus  dit  que  l'estre  riche  n'est  pas  soulagement,  mais  changement  d'af- 
faires, I,  4G1. 

Tout  soing  curieux  autour  des  richesses  sent  à  l'auarice.  Leur  dispensation 
mesmc,  et  la  libéralité  trop  ordonnée  et  artificielle  ne  valent  Y)as  vne  aduei'tance 
et  sollicitude  pénible.  Qui  veut  faire  sa  despense  iuste,  la  fait  estroitte  et  con- 
trainte. La  garde,  ou  l'emploitte,  sont  de  soy  choses  indifférentes,  et  ne  prennent 
couleur  de  bien  ou  de  mal,  que  selon  l'application  de  nostre  volonté,  III,  396. 

ROIS  (vie  publique). 

Le  plus  aspre  et  difficile  mestier  du  monde,  à  mon  gré,  c'est  faire  dignement  le 
Roy.  II  est  difficile  de  garder  mesure,  à  vne  puissance  si  desmcsuree,  III,  324. 

Ce  n'est  pas  peu  de  chose  que  d'auoir  à  régler  autruy,  puis  qu'à  régler  nous 
mesmes,  il  se  présente  tant  de  difficultez,  I,  488. 

Vn  Roy  doit  pouuoir  respondre,  comme  Iphicrates  re.spondit  à  l'orateur  qui 
le  pressoit  en  son  inuectiue  de  cette  manière  :  Et  bien  qu'es-tu,  pour  faire  tant 
le  braue?  es-tu  homme  d'armes,  es-tu  archer,  es-tu  piquier?  le  ne  suis  rien  de 
tout  cela,  mais  ie  suis  celuy  qui  sçait  commander  à  tous  ceux-là,  I,  434. 

Paroistré  excellent  en  des  parties  moins  nécessaires,  c'est  produire  contre  soy 
le  tesmoignage  d'auoir  mal  dispencé  son  loisir,  et  l'estude,  qui  deuoit  estre  em- 
ployé à  choses  plus  nécessaires  et  vtiles,  I,  434. 

Le  jugement  d'vn  Empereur,  doit  estre  au  dessus  de  son  empire  ;  et  le  voir  et 
considérer,  comme  accident  estranger.  Et  luy  doitsçauoir  iouyr  de  soy  à  part;  et 
se  communicquer  comme  lacques  et  Pierre  :  au  moins  à  soy-mesmes,  III,  500. 

Toutes  les  vraies  comraoditez  qu'ont  les  Princes,  leurs  sont  communes  aucc  les 
hommes  de  moyenne  fortune,  ils  n'ont  point  d'autre  sommeil  et  d'autre  appétit 
que  le  nostre  :  leur  couronne  ne  les  couure  ny  du  soleil,  ny.de  la  pluie,  I,  494. 

La  royauté  adiouste  peu  au  bon  heur  :  ce  n'est  que  biffe  et  piperie,  I,  488. 

L'Empereur,  duquel  la  pompe  vous  esblouit  en  public  :  voyez  le  derrière  le  ri- 
deau, ce  n'est  rien  qu'vn  homme  commun,  et  à  l'aduenture  plus  vil  que  le  moin- 
dre de  ses  subiects.  La  couardise,  l'irrésolution,  l'ambition,  le  despit  et  i'enuie 
l'agitent  comme  vn  autre  :  et  le  soing  et  la  crainte  le  tiennent  à  la  gorge  au  mi- 
lieu de  ses  armées.  La  fiebure,  la  migraine  et  la  goutte  l'espargnent  elles  non  plus 
que  nous?  Quand  la  vieillesse  luy  sera  sur  les  espaules,  les  archers  de  sa  garde 
l'en  deschargeront  ils?  Quand  la  frayeur  de  la  mort  le  transira,  se  r'asseurera  il 
par  l'assistance  des  Gentils-hommes  de  sa  chambre  ?  Quand  il  sera  en  ialousie  et 
caprice,  nos  bonnettades  le  remettront  elles?  Ce  ciel  de  lict  tout  enflé  dor  et  de 
perles,  n'a  aucune  vertu  à  rappaiser  les  tranchées  d'vne  verte  colique.  C'est  vn 
homme  pour  tous  potages.  Et  si  de  soy-mesmes  c'est  vn  homme  mal  né,  l'empire 
de  l'vniuers  ne  le  sçauroit  rabiller,  I,  484. 

Les  taches  s'agrandissent  selon  l'eminence  et  clarté  du  lieu,  où  elles  sont  assi- 
ses :  et  vn  seing  et  vne  verrue  au  front,  paroissent  plus  que  ne  faict  ailleurs  vne 
balafre,  ce  qui  est  à  nous  indiscrétion,  à  eux  le  peuple  iuge  que  ce  soit  tyrannie, 
mespris,  et  desdain  des  loix,  I,  490. 

C'est  peu,  au  seruice  des  Princes,  d'estre  secret,  si  on  n'est  menteur  encore, 
III,  188. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.      UOIS.  E.243 

Sans  compter  qu'il  se  faut  bien  garder  de  faire  tant  de  seruice  à  son  maistre, 
qu'on  IVnnpesche  d'en  trouuer  la  iuste  recompence,  III,  368. 

Les  anies  des  Empereurs  et  des  sauatiers  sont  iettees  à  mesme  moule.  Les 
Princes  sont  menez  et  ramenez  en  leurs  mouuemens,  par  les  mesmes  ressers, 
que  nous  sommes  aux  nostres.  Ils  veulent  aussi  légèrement  que  nous,  mais  ils 
peuuent  plus,  II,  180. 

Le  langage  des  honnnes  nourris  sous  la  Royauté,  est  tousiours  plein  de  vaines 
ostentations  et  faux  tesmoignages  :  chascun  esleuant  indifleremment  son  Roy,  à 
l'extrême  ligne  de  valeur  et  grandeur  souueraine,  I,  liO. 

Vn  pur  courtisan  ne  peut  auoir  ny  loy  ny  volonté,  de  dire  et  penser  que  fauo- 
rablement  d'vn  lïiaistre,  qui  parmi  tant  de  milliers  d'autres  subiects,  l'a  choisi 
poui'  le  nourrir  et  eleuer  de  sa  main.  Cette  faneur  et  vtilité  corrompent  non  sans 
quelque  raison,  sa  franchise,  et  l'osblouiKsent,  I,  21G. 

L'immodérée  largesse,  est  vn  moyen  foible  à  leur  acquérir  bien-vueillance  :  car 
elle  rebute  plus  de  gens,  qu'elle  n'en  practique,  III,  298. 

Les  subiects  d'vn  Prince  excessif  en  dons,  se  rendent  excessifs  en  demandes  : 
ils  se  taillent,  non  à  la  raison,  mais  à  l'exemple,  III,  298. 

Si  la  libéralité  d'vn  -Prince  est  sans  discrétion  et  sans  mesure,  ie  l'ayme  mieux 
auai'e.  La  vertu  Royallo  semble  consister  le  plus  en  la  iustice,  III,  298. 

Les  enfans  des  Princes  n'apprennent  rien  à  droict  qu'à  manier  des  cheuaux  :  en 
tout  autre  exercice,  chacun  fleschit  soubs  eux,  et  leur  donne  gaigné  :  mais  vn 
cheual  qui  n'est  ny  flatcur  ny  courtisan,  verse  le  fds  du  Roy  par  terre,  comme 
il  feroit  le  fils  d'vn  crocheteur,  III,  32G. 

Nous  deuons  la  subiection  et  obéissance  également  à  tous  Rois  :  car  elle  regarde 
leur  office  :  mais  l'estimation,  non  plus  que  l'affection,  nous  ne  la  deuons  qu'à 
leur  vertu,  I,  3. 

,  ■Qui  ne  bee  point  après  la  faneur  des  Princes,  comme  après  chose  dequoy  il  ne 
se  sçauroit  passer;  ne  se  picque  pas  beaucoup  de  la  froideur  de  leur  recueil,  et 
de  leur  visage,  ny  de  l'inconstance  de  leur  volonté,  III,  510. 

ROME. 

l'ay  veu  ailleurs  des  maisons  ruynées,  et  des  statues,  et  du  ciel  et  de  la  terre  : 
ce  sont  tousiours  des  hommes.  Tout  cela  est  vray  :  et  si  pourtant  ne  sçauroy 
reuoir  si  souuent  le  tombeau  de  cette  ville,  si  grande,  et  si  puissante,  que  ie  ne 
l'admire  et  reuere.  Le  soingdes  morts  nous  est  en  recommandation.  Or  i'ay  esté 
nourrydesmon  enfance,  auec  ceux  icy.  Payeu  cognoissance  des  affaires  de  Rome, 
long  temps  auant  que  ie  l'ay  eue  de  ceux  de  ma  maison.  le  sçauoisle  Capitole  et 
son  plant,  auant  que  ie  sceusse  le  Louure  :  et  le  Tibre  auant  la  Seine.  J'ay  eu 
plus  en  teste,  les  conditions  et  fortunes  de  Lucullus,  Metellus,  et  Scipion,  que  ie 
n'ay  d'aucuns  hommes  des  nostres.  Ce  seroit  ingratitude,  de  mespriser  les  reliques, 
et  images  de  tant  d'honnestes  hommes,  et  si  valeureux  lesquels  i'ay  veu  viure  et 
mourir  :  et  qui  nous  donnent  tant  de  bonnes  instructions  par  leur  exemple,  si 
nous  les  sçauions  suyure.  Et  puis  cette  mesme  Rome  que  nous  voyons,  mérite 
qu'on  l'ayme.  Il  n'est  lieu  çà  bas,  que  le  ciel  ayt  embrassé  auec  telle  influence  de 
faneur,  et  telle  constance.  Sa  ruyne  mesme  est  glorieuse  et  enflée.  Encore  retient 
elle  au  tombeau  des  marques  et  image  d'empire,  III,  47 1. 

SAGESSE. 

La  plus  expresse  marque  de  la  sagesse,  c'est  vno  esiouissance  constante  :  son 
estât  est  tousiours  serein,  I,  258. 

Mais  tant  sage  qu'il  voudra,  le  sage  en  fin  c'est  vn  homme  :  La  sagesse  ne  force 
pas  nos  conditions  naturelles  :  Il  faut  qu'il  sille  les  yeux  au  coup  qui  le  me- 
nasse :  il  faut  qu'il  frémisse  planté  au  bord  d'vn  précipice,  comme  vn  enfant  : 
Nature  aj'ant  voulu  se  reseruer  ces  légères  marques  de  son  authorité,  inexpugna- 
bles à  nostre  raison,  et  à  la  vertu  Stoique,  pour  luy  apprendre  sa  mortalité  et 
nostre  fadeze.  Il  |)allit  à  la  peur,  il  rougit  à  la  honte,  il  gémit  à  la  colique,  sinon 
d'vne  voix  désespérée  et  esclatante,  au  moins  d'vne  cassée  et  enroiiée.  Luy  suf- 


E.244  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

fise  do  brider  et  modoror  ses  inclinations  :  car  de  les  emporter,  il  n'est  pas  en 
lu  y.  I,  624. 

La  bestise  et  la  sagesse  se  renconti-ent  en  mesme  poinct  de  sentiment  et  de 
i-esolution  à  la  souffrance  des  accidens  humains  :  les  sages  gourmandent  et  com- 
mandent le  mal,  et  les  autres  l'ignorent  :  ceux-cy  sont,  par  manière  de  dire,  au 
deçà  des  accidens,  les  auti-es  au  delà,  I,  570. 

Ce  grand  pi-ecepte  est  souuent  allégué  en  Platon,  Fay  ton  faict,  et  te  eongnoy. 
Cliascun  de  ces  deux  membres  enueloppe  generallement  tout  nostre  deuoir  :  et 
semblablcment  enueloppe  son  compagnon.  Qui  auroit  à  faire  son  faict,  vorroit 
que  sa  première  leçon,  c'est  cognoistre  ce  qu'il  est,  et  ce  qui  luy  est  propre.  Et 
qui  se  cognoist,  ne  prend  plus  l'estranger  faict  pour  le  sien  :  s'ayme,  et  se  cul- 
tiue  auant  toute  autre  chose  :  refuse  les  occupations  superflues,  et  les  pensées, 
et  propositions  inutiles,  I,  28. 

Quand  bien  nous  pourrions  estre  sçauans  du  sçauoir  d'autruy,  au  moins  sages 
ne  pouuons  nous  estre  que  de  nostre  propre  sagesse,  I,  212. 

Les  Stoïciens  disent,  le  sage  œuurer  quand  il  œuure  par  toutes  les  vertus  en- 
semble, quoy  qu'il  y  en  ait  vne  plus  apparente  selon  la  nature  de  l'action,  II,  98. 

La  sage-sse  faict  vn  bon  office  à  ceux,  de  qui  elle  renge  les  désirs  à  leur  puis- 
sance! 11  n'est  point  de  plus  vtile  science.  Selon  qu'on  peut  :  Mot  de  grande  subs- 
tance :  il  faut  adresser  et  arrester  nos  désirs,  aux  choses  les  plus  avses  et  voy- 
sines,  III,  140. 

Comme  la  folie  quand  on  luy  octroyera  ce  qu'elle  désire,  ne  sera  pas  contente  : 
aussi  est  la  sagesse  contente  de  ce  qui  est  présent,  ne  se  desplait  iamais  de  sov. 

I,  28.  . 

Si  l'homme  estoit  sage,  il  prendroit  le  vray  prix  de  chasque  chose,  selon  qu'elle 
seroit  la  plus  vtile  et  propre  à  sa  vie,  II,  202. 

Ne  soyez  pas  plus  sages  qu'il  ne  faut,  mais  soyez  sobrement  sages,  I,  344. 

La  sagesse  humaine  faict  bien  sottement  l'ingénieuse,  de  s'exercer  à  rabattre  le 
nombre  et  la  douceur  des  voluptez,  qui  nous  appartiennent  :  comme  elle  faict 
fauorablement  et  industrieusement,  d'employer  ses  artifices  à  nous  peigner  et 
farder  les  maux,  et  en  alléger  le  sentiment,  I,  550. 

Antisthenes  permet  au  sage  d'aimer,  et  faire  à  sa  mode  ce,  qu'il  trouue  estre 
opportun,  sans  s'attendre  aux  loix  :  d'autant  qu'il  a  meilleur  aduis  qu'elles,  et 
plus  de  cognoissance  de  la  vertu.  Son  disciple  Diogenes,  disoit,  opposer  aux  per- 
tuibations,  la  raison  :  à  fortune,  la  confidence  :  aux  loix,  nature,  III,  462. 

Le  sage  doit  au  dedans  retirer  son  ame  de  la  presse,  et  la  tenir  en  liberté  et 
puissance  de  iuger  librement  des  choses  :  mais  quant  au  dehors,  il  doit  suiure 
entièrement  les  façons  et  formes  receuës,  I,  170. 

Je  hais  le  sage  qui  n'est  pas  sage  par  soy-même,  I,  212. 

Nos  folifes  ne  me  font  pas  rire,  ce  sont  nos  sapienccs,  III,  146. 

Le  sage  vit  tant  qu'il  doit,  non  pas  tant  qu'il  peut,  I,  63(J. 

SANTÉ. 

La  santé,  le  plus  beau  et  le  plus  riche  présent,  que  Nature  nous  scache  faire, 

II,  198. 

C'est  vne  pretieuse  chose,  que  la  santé  :  et  la  seule  qui  mérite  à  la  vérité  qu'on 
y  employé,  non  le  temps  seulement,  la  sueur,  la  peine,  les  biens,  mais  encore  la 
vie  à  sa  poursuite  :  d'autant  que  sans  elle,  la  vie  ^lous  vient  à  estre  iniurieuse. 
La  volupté,  la  sagesse,  la  science  et  la  vertu,  sans  elle  se  ternissent  et  esuanouys- 
sent,  III,  'M.  , 

C'est  à  la  coustume  de  donner  forme  à  nostre  vie,  telle  qu'il  luy  plaist,  elle  peult 
tout  en  cela.  C'est  le  breuuage  de  Circé,  qui  diuersifie  nostre  nature,  comme 
bon  luy  semble  :  et  toute  voye  qui  nous  meneroit  à  la  santé,  ne  se  peut  dire  nj' 
aspre,  ny  chère,  le  ne  crois  rien  plus  certainement  que  cecy  :  que  ie  ne  sçaui'oy 
estre  olTencé  par  l'vsage  des  choses  que  i'ay  si  long  temps  accoustumees,  III.  630. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.      .  SAV.  E.24o 

SAVANTS. 

Le  sauoir  est  chose  de  qualité  à  peu  près  indifférente  :  tres-vtile  accessoire,  à 
vne  ame  bien  née,  pernicieux  à  vne  autre  ame  et  dommageable  :  en  quelque 
main  c'est  vn  sceptre,  en  quelque  autre,  vne  marotte,  III,  342. 

Les  sçauants,  à  qui  appartient  la  iurisdiction  liuresque,  ne  cognoissent  autre 
prix  que  de  la  doctrine;  et  n'aduoiicnt  autre  procéder  en  noz  esprits,  que  celuy 
de  l'érudition,  et  de  l'art,  II,  510. 

Ils  chopont  volontiers  à  cette  pierre  :  ils  font  tousiours  parade  de  leur  magis- 
tère, et  sèment  leurs  liures  par  tout,  I,  142. 

Ceux  qui  ont  le  corps  gresle,  le  grossissent  d'embourrures  :  ceux  qui  ont  la 
matière  exile,  l'enflent  de  paroles,  I,  250. 

Qui  nous  contera  par  nos  actions  et  deportemens,  il  s'en  trouuera  plus  grand 
nombre  d'excellens  entre  les  ignorans,  qu'entre  les  sçauants:  ie  dy  en  toute  sorte 
de  vertu,  II,  202. 

Ils  scauent  la  Théorique  de  toutes  choses,  cherchez  qui  la  mette  en  praciique, 
I,  214.' 

SAVOIR,  SCIENCE. 

C'est  vn  grand  ornement  que  la  science,  et  vn  vtil  de  merueilleux  seruice,  no- 
tamment aux  personnes  esleuees  en  certain  degré  de  fortune  :  elle  n'a  point  son 
vray  vsage  en  mains  viles  et  basses,  I,  234. 

Le  plus  sage  homme  qui  fut  onques,  quand  on  luy  demanda  ce  qu'il  sçauoiL 
respondit,  qu'il  sçauoit  cela,  qu'il  ne  sçauoit  rien.  11  verifioit  ce  qu'on  dit,  que  la 
plus  grand  part  de  ce  que  nous  sçauons,  est  la  moindre  de  celles  que  nous  igno 
rons  :  c'est  à  dire,  que  ce  mesme  que  nous  pensons  sçauoir,  c'est  vne  pièce,  et" 
bien  petite,  de  nostre  ignorance,  II,  226. 

C'est  à  la  vérité  vne  tres-vtile  et  grande  partie  que  la  science  :  ceux  qui  la  mes- 
prisent  tesmoignent  assez  leur  bestise  :  mais  ie  n'estime  pas  pourtant  sa  valeur 
iusqucs  à  cette  mesure  extrême  qu'aucuns  luy  attribuent.  Comme  Herillus  le  phi- 
losophe, qui  logeoit  en  elle  le  souuerain  bien,  et  tenoit  qu'il  fust  en  elle  de  nous 
rendre  sages  et  contens  :  ce  que  ie  ne  croy  pas  :  ny  ce  que  d'autres  ont  dict,  que 
la  science  est  mère  de  toute  vertu,  et  que  tout  vice  est  produit  par  l'ignorance. 
Si  cela  est  vray,  il  est  subicct  à  vne  longue  interprétation,  II,  110. 

La  science  est  vn  bien,  à  le  regarder  d'yeux  fermes,  qui  a,  comme  les  autres 
biens  des  hommes,  beaucoup  de  vanité,  et  foiblesse  propre  et  naturelle  :  et  d'vn 
cher  coust.  L'acquisition  en  est  bien  hazardcuse.  Nous  auallons  les  sciences  en  les 
achettans,  et  sortons  du  marché  ou  infects  dcsia,  ou  amendez.  Il  y  en  a,  qui  ne 
font  que  nous  empescher  et  charger,  au  lieu  de  nourrir  :  et  telles  encore,  qui 
sous  liltre  de  nous  guarir,  nous  empoisonnent,  III,  550. 

Les  païsants  simples,  sont  honnestes  gents  :  et  honnestes  gents  les  Philosophes  : 
ou,  selon  que  nostre  temps  les  nomme,  des  natures  fortes  et  claires,  enrichies 
d'vne  large  instruction  de  sciences  vtiles.  Les  mestis,  qui  ont  dédaigné  le  pre- 
mier siège  de  l'ignorance  des  lettres,  et  n'ont  peu  ioindre  l'autre,  le  cul  entre 
deux  selles  (desquels  ie  suis,  et  tant  d'autres)  sont  dangereux,  ineptes,  impor- 
tuns :  ceux-cy  troublent  le  monde,  I,  572. 

La  science  n'est  pas  pour  donner  iour  à  l'aïue  qui  n'en  a  point  :  uy  pour  faire 
voir  vn  aueugle.  Son  niestier  est,  non  de  luy  fournir  de  veuë,  mais  de  la  luy 
dresser,  de  luy  régler  ses  allures,  pourueu  qu'elle  aye  de  soy  les  pieds,  et  les 
iambes  droites  et  capables.  C'est  vne  bonfic  drogue,  mais  nulle  drogue  n'est  assés 
forte,  pour  se  preseruer  sans  altération  et  corruption,  selon  le  vice  du  vase  qui 
l'estuye,  I,  218. 

Or  il  ne  faut  pas  attacher  le  sçauoir  à  l'ame,  il  l'y  faut  incorporer  :  il  ne  l'en 
faut  pas  arrouser,  il  l'en  faut  teindre  ;  et  s'il  ne  la  change,  et  meliore  son  estât 
imparfaict,  certainement  il  vaut  beaucoup  mieux  le  laisser  là.  C'est  vn  dange- 
reux glaiue,  et  qui  empesche  et  offence  son  maistre  s'il  est  en  main  foible,  et  qui 
n'en  sçache  l'vsagc,  I,  216. 


E.245  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

La  plus  part  des  amos  ne  se  trouuent  propres  à  l'aire  leur  profit  (\r  h\  •^ciiMicc  : 
qui,  si  elle  ne  se  met  à  bien,  se  met  à  mal,  I,  218. 

Qui  acquiert  science,  s'acquiert  du  trauail  et  tourment,  II,  218. 

Les  difficultez  et  l'obscurité,  ne  s'apperçoyuent  en  chacune  science,  que  par  ceux 
qui  y  ont  entrée.  Car  encore  faut  il  quelque  degré  d'intelligence,  à  pouuoir  re- 
marquer qu'on  ignore  :  et  faut  pousser  à  vne  porte,  pour  sçauoir  qu'elle  nous 
est  close.  D'où  naist  cette  Platonique  subtilité,  que  ny  ceux  qui  sçauent,  n'ont  à 
s'enquérir,  d'autant  qu'ils  sçauent  :  ny  ceux  qui  ne  sçauent,  d'autant  que  pour 
s'enquérir,  il  faut  sçauoir,  dequoy  on  s'enquiert,  III,  620. 

11  se  peut  dire  auec  apparence,  qu'il  y  a  ignorance  abécédaire,  qui  va  deuant 
la  science  :  vne  autre  doctorale,  qui  vient  après  la  science  :  ignorance  que  la 
science  lait  et  engendre,  tout  ainsi  comme  elle  deffait  et  destruit  la  première, 
I,  570. 

Nous  ne  sommes,  ce  croy-ic,  sçauants,  que  do  la  science  présente  :  non  de  la 
passée,  aussi  peu  que  de  la  future,  I,  210. 

Qui  fagoteroit  suffisamment  vn  amas  des  asneries  de  l'humaine  sapience,  il  di- 
roit  merueilles,  II,  310. 

Mais  quand  la  science  feroit  par  effect  d'émousser  et  rabattre  l'aigreur  des  in- 
fortunes qui  nous  suyuent,  que  fait  elle,  que  ce  que  fait  beaucoup  plus  purement 
l'ignorance  et  plus  euidemment,  II,  208. 

Lors  que  les  vrais  maux  nous  faillent,  la  science  nous  preste  les  siens,  II,  208. 

Si  ce  que  nous  n'auons  pas  veu,  n'est  pas,  nostre  science  est  merueilleusement 
raccourcie,  II,  136. 

Nous  sçauons  dire,  Cicero  dit  ainsi,  voila  les  meui-s  de  Platon,  ce  sont  les  mots 
mesmes  d'Aristote  :  mais  nous  que  disons  nous  nous  mesmes?  que  faisons  nous? 
que  iugeonsnous?  Autant  en  diroitbien  vn  perroquet,  I,  210. 

Nous  nous  laissons  si  fort  aller  sur  les  bras  d'autruy,  que  nous  anéantissons 
nos  forces,  I,  212. 

Nous  prenons  en  garde  les  opinions  et  le  sçauoir  d'autruy,  et  puis  c'est  tout  : 
il  les  faut  faire  nostres,  I,  210. 

Sçauoir  par  cœur  n'est  pas  sçauoir  :  c'est  tenir  ce  qu'on  a  donné  en  garde  à  sa 
mémoire,  I,  240. 

Fascheuse  suffisance,  qu'vne  suffisance  pure  liuresque!  I,  240. 

A  quoy  faire  la  science,  si  l'entendement  n'y  est?  I,  216. 

Pour  bien  faire,  il  ne  faut  pas  seulement  loger  Ja  science  chez  soy,  il  la  faut 
espouser,  I,  288. 

La  plus  part  des  instructions  de  la  science,  à  nous  encoui-ager,  ont  plus  de 
montre  que  de  force,  et  plus  d'ornement  que  de  fruict,  III,  570. 

11  y  a  des  sciences  stériles  et  épineuses,  et  la  plus  part  forgées  pour  la  presse  : 
il  les  faut  laisser  à  ceux  qui  sont  au  seruice  du  monde,  I,  426. 

Toute  cette  nostre  suffisance,  qui  est  au  delà  de  la  naturelle,  est  à  peu  près 
vaine  et  superflue.  C'est  beaucoup  si  elle  ne  nous  charge  et  trouble  plus  qu'elle 
ne  nous  sert,  III,  550. 

A  on  trouué  que  la  volupté  et  la  santé  soient  plus  sauoureuses  à  celuy  qui  sçait 
l'astrologie,  et  la  grammaire  :  et  la  honte  et  la  pauureté  moins  importunes?  l'ay 
veu  en  mon  temps,  cent  artisans,  cent  laboureurs,  plus  sages  et  plus  heureux 
que  des  recteurs  de  l'vniuersité  :  et  lesquels  i'aimerois  mieux  ressembler,  II,  202. 

0  que  c'est  vn  doux  et  mol  cheuet,  et  sain,  que  l'ignorance  et  l'incuriosité,  à 
reposer  vne  teste  bien  faicte,  III,  616. 

SECRETS. 

l'euite  de  prendre  les  secrets  d'autruy  en  garde,  n'ayant  pas  bien  le  cœur  de 
desaduouer  ma  science,  le  puis  la  taire,  mais  la  nyer,  ie  ne  puis  sans  effort  et 
desplaisir.  Pour  estre  bien  secret,  il  le  faut  estre  par  nature,  non  car  obligation, 
III,  188. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         SEN.  E.247 

SENS  (des). 

La  première  considération  que  i'ay  sur  le  subiect  des  sens,  est  que  ie  mets  en 
double  que  l'homme  soit  prouueu  de  tous  sens  naturels.  le  voy  plusieurs  ani- 
maux, qui  viuent  vnc  vie  entière  et  parfaicte,  les  vns  sans  la  veuë,  autres  sans 
l'ouye  :  (jui  sçait  si  à  nous  aussi  il  ne  manque  pas  encore  vn,  deux,  trois,  et  plu- 
sieui-s  autres  sens?  Car  s'il  en  manque  quolqu'vn,  nostre  discours  n'en  peut  dé- 
couurir  le  défaut,  II,  390.  \ 

■  11  est  impossible  de  faire  conceuoir  à  vn  homme  naturellement  aueugle,  qu'il 
n'y  void  pas,  impossible  de  luy  faire  désirer  la  veuë  et  regretter  son  défaut.  Que 
sçait-on  si  à  faute  de  quelque  sens,  la  plus  part  du  visage  des  choses  nous  soit 
caché?  Si  les  diflicultez  que  nous  trouuons  en  plusieurs  ouurages  de  Nature, 
viennent  de  là?  II,  390. 

Les  proprietez  que  nous  appelions  occultes  en  plusieurs  choses,  comme  à  l'ay- 
mant  d'attirer  le  fer,  n'est-il  pas  vraysemblable  qu'il  y  a  des  facultez  sensitiues 
en  Nature  propres  à  les  iuger  et  à  les  apperceuoir,  et  que  le  défaut  de  telles  fa- 
cultez, nous  apporte  l'ignorance  de  la  vraye  essence  de  telles  choses?  II,  391. 

Les  sectes  qui  combatent  la  science  de  l'homme,  elles  la  combatent  principale- 
ment par  l'incertitude  et  foiblesse  de  nos  sens,  II,  394. 

Les  sens  sont  le  commencement  et  la  fin  de  l'humaine  cognoissance.  Qu'on  leur 
attribue  le  moins  qu'on  pourra,  tousiours  faudra  il  leur  donner  cela,  que  par 
leur  voye  et  entremise  s'achemine  toute  nostre  instruction.  La  science  commence 
par  .eux,  et  se  résout  en  eux,  II,  390. 

De  l'erreur  et  incertitude  de  l'opération  des  sens,  chacun  s'en  peut  fournir  au- 
tant d'exemples  qu'il  luy  plaira  :  tant  les  faultes  et  tromperies  qu'ils  nous  font, 
sont  ordinaires,  II,  598. 

Nous  receuons  les  choses  autres  et  autres  selon  que  nous  sommes,  et  qu'il  nous 
semble.  Pour  iuger  des  apparences  que  nous  receuons  des  subjccts,  il  nous  fau- 
droit  vn  instrument  iudicatoire  :  pour  vérifier  cet  instrument,  il  nous  y  faut  de 
la  démonstration  :  pour  vérifier  la  démonstration,  vn  instrument,  nous  voila  au 
rouet,  II,  408. 

Cette  mesme  pipperie,  que  les  sens  apportent  à  nostre  entendement,  ils  la  re- 
çoiuent  à  leur  tour.  Nostre  ame  par  fois  s'en  reuenche  de  mesme,  ils  mentent,  et 
se  trompent  à  l'enuy.  Ce  que  nous  voyons  et  oyons  agitez  de  colère,  nous  ne 
l'oyons  pas  tel  qu'il  est.  L'obiect  que  nous  aymons  nous  semble  plus  beau  qu'il 
n'est  :  et  plus  laid  ccluy  que  nous  auons  à  contre-cœur.  A  vn  homme  ennuyé  et 
affligé,  la  clarté  du  iour  semble  obscurcie  et  ténébreuse.  Noz  sens  sont?  non  seu- 
lement altérez,  mais  souuent  hebetcz  du  tout,  par  les  passions  de  l'ame.  Com- 
bien de  choses  voyons  nous,  que  nous  n'apperceuons  pas,  si  nous  auons  nostre 
esprit  empesché  ailleurs?  Il  semble  que  l'ame  retire  au  dedans,  et  amuse  les  puis- 
sances des  sens.  Par  ainsin  et  le  dedans  et  le  dehors  de  l'homme  est  plein  de  foi- 
blesse et  de  mensonge,  II,  402. 

SOCIÉTÉ. 

Il  n'est  rien  si  dissociable  et  sociable  que  l'homme  :  l'vn  par  son  vice,  l'autre 
par  sa  nature,  I,  412.. 

La  société  des  hommes  se  tient  et  se  coust,  à  quelque  prix  que  ce  soit.  En 
quelque  assiette  qu'on  les  couche,  ils  s'appilent,  et  se  rengent,  en  se  remuant  et 
s'entassant  :  comme  des  corps  mal  vnis  qu'on  empoche  sans  ordre,  trouuent 
d'eux  mesmes  la  façon  de  se  ioindre,  et  s'emplacer,  les  vns  parmy  les  autres  : 
souuent  mieux,  que  l'art  ne  les  eust  sçeu  disposer,  III,  396. 

En  cette  escole  du  commerce  des  hommes,  i'ay  souuent  remarqué  ce  vice, 
qu'au  lieu  de  prendre  cognoissancte  d'autruy,  nous  ne  trauaillons  qu'à  la  donner 
de  nous  :  et  soijimes  plus  en  peine  d'emploiter  nostre  marchandise,  que  d'en  ac- 
quérir de  nouuelle,  I,  244. 

En  compagnie,  il  faut  auoir  les  yeux  par  tout  :  car  les  premiers  sièges  sont 
communément  saisis  par  les  hommes  moins  capables,  et  les  grandeurs  de  fortune 
ne  se  trouuent  gueres  meslees  à  la  suffisance,  I,  246. 


E.248  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Il  nous  fault  prendre  garde,  combien  c'est,  de  parler  à  son  heure,  de  choisir  son 
poinct.  de  rompre  le  propos  ou  le  changer,  d'vne  authorité  magistrale  :  de  so 
deffendre  des  oppositions  d'autruy,  par  vn  mouuement  de  teste,  vn  sous-ris,  ou 
vn  silence,  deuant  vne  assistance,  qui  tremble  de  reuerence  et  de  respect,  I,  360. 

Le  masque  des  grandeurs,  qu'on  représente  aux  comédies,  nous  touche  aucu- 
nement et  nous  pippe,  III,  358. 

La  douceur  d'vne  sortable  et  aggreable  compagnie,  ne  se  peut  assez  acheter  à 
mon  gré,  III,  444. 

Vne  ame  bien  née,  et  exercée  à  la  practique  des  hommes,  se  rend  plainemont  • 
aggreable  d'elle  mesme.  L'art  n'est  autre  chose  que  le  contrerolle,  et  le  registre 
des  productions  de  telles  âmes,  III,  148. 

le  fuis  les  complexions  tristes,  et  les  hommes  hargneux,  comme  les  em- 
pestez, III,  506. 

Nul  plaisir  n'a  saueur  pour  moy  sans  communication.  Il  ne  me  vient  pas  seu- 
lement vne  gaillarde  pensée  en  l'ame,  qu'il  ne  me  fasclie  de  l'auoir  produit  seul, 
et  n'ayant  à  qui  l'olTrir.  Mais  il  vaut  mieux  encore  estre  seul,  qu'eu  compagnie 
ennuyeuse  et  inepte,  III,  456. 

SOTTISE. 

La  sottise  et  desreglement  de  sens,  n'est  pas  chose  guérissable  par  vn  traict 
d'aduertissement.  Ce  sont  apprentissages,  qui  ont  à  estre  faicts  auant  la  main, 
par  longue  et  constante  institution.  Nous  deuons  ce  soing  aux  nostres,  et  cette 
assiduité  de  correction  et  d'instruction  :  mais  d'aller  prescher  le  premier  pas- 
sant, et  régenter  l'ignorance  ou  ineptie  du  premier  rencontré,  c'est  vn  vsage  au- 
quel ie  veux  grand  mal,  III,  364. 

La  sottise  est  vne  mauuaise  qualité,  mais  de  ne  la  pouuoir  supporter,  et  s'en 
despiter  et  rouger,  c'est  vne  autre  sorte  de  maladie,  qui  ne  doit  guère  à  la  sot- 
tise, en   importunité,  III,  334. 

Il  est  impossible  de  traitter  de  bonne  foy  auec  vn  sot,  III,  338. 

SOUVENIR. 

Est-ce  par  nature,  ou  par  ei-reur  de  fantasie,  que  la  veuë  des  places,  que  nous 
sçauons  auoir  esté  hantées  et  habitées  par  personnes,  desquelles  la  mémoire  est 
en  recommendation,  nous  émeut  aucunement  plus,  qu'ouïr  le  récit  de  leurs  faicts, 
ou  lire  leurs  escrits?  III,  476. 

SUICIDE. 

Il  est  heure  de  mourir  lorsqu'il  y  a  plus  de  mal  que  de  bien  à  viure,  I,  380. 

Le  présent  que  Nature  nous  ait  faict  le  plus  fauorable,  et  qui  nous  oste  tout 
moyen  de  nous  pleindre  de  nostre  condition,  c'est  de  nous  auoir  laissé  la  clef  des 
champs.  Elle  n'a  ordonné  qu'vne  entrée  à  la  vie,  et  cent  mille  yssuës,  I,  630. 

S'il  est  mauuais  de  viure  en  nécessité,  au  moins  de  viure  en  nécessité,  il  n'est 
aucune  nécessité.  Nul  n'est  mal  long  temps  qu'à  sa  faute,  I,  476. 

Dieu  nous  donne  assez  de  congé,  quand  il  nous  met  en  tel  estât,  que  le  viure 
nous  est  pire  que  le  mourir.  C'est  foiblesse  de  céder  aux  maux,  mais  c'est  folie 
de  les  nourrir,  I,  632. 

La  Fortune  peut  toutes  choses  pour  celuy  qui  est  viuant;  elle  ne  peut  rien  sur 
celuy  qui  sçait  mourir?  I,  638. 

Pourquoy  te  plains  tu  de  ce  monde?  il  ne  te  tient  pas  :  si  tu  vis  en  peine,  ta 
lascheté  en  est  cause  :  A  mourir  il  ne  reste  que  le  vouloir,  I,  630. 

Il  n'y  a  homme  si  coiiard  qui  n'ayme  mieux  tomber  vne  fois,  qjie  de  demeurer 
tousiours  en  bransle,  I,  382. 

L'Histoire  est  toute  pleine  de  ceux  qui  en  mille  façons  ont  changé  à  la  mort 
vne  vie  peneuse,  I,  642. 

Comme  ie  n'offense  les  loix,  qui  sont  faictes  contre  les  larrons,  quand  i'em- 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.         SUI.  E.249 

porte  le  tiiion,  ot  que  ie  coupe  ma  bourse  :  ny  des  bout(>feuz,  quand  ie  brusle 
mon  bois  :  aussi  ne  suis  ie  tenu  aux  loix  laictes  contre  les  meurtriers,  pour  m'a- 
uoir  osté  ma  vie,  I,  632. 

Il  y  a  des  polices  qui  se  sont  meslées  de  régler  la  iustice  et  opportunité  deâ 
morts  volonfaii-es,  I,  650. 

De  vray,  ce  n'est  pas  si  grande  chose,  d'establir  tout  sain  et  tout  rassis,  de  se 
tuer;  il  est  bien  aisé  de  faire  le  mauuais,  auantque  de  venir  aux  prises.  De  ceux 
mesmes,  qui  se  sont  résolus  à  l'exécution,  il  faut  voir,  si  <;'a  este  d'vn  coup,  qui 
estait  le  loisir  d'en  sentir  J'elTect.  Car  il  est  aduenu  que  tel  résolu  de  mourir,  et 
de  son  pi-emier  essay  n'ayant  donné  assez  auant,  la  dcniangéson  de  la  chair  luy 
repoussant  le  bras,  se  reblessa  bien  fort  à  deux  ou  trois  fois  après,  mais  ne  peut 
iainais  gaigner  sur  luy  d'enfoncer  le  coup,  II,  422. 

Il  y  a  des  humeurs  fantastiques  et  sans  discours,  qui  ont  poussé,  non  des  hom- 
mes particuliers  seulement,  mais  des  ])euples  à  se  deffaire,  I,  636. 

C'est  vue  recepte,  qui  ne  peut  iamais  manquer,  et  de  laquelle  il  ne  se  faut  ser- 
uir  tant  qu'il  y  a  vn  doigt  d'espérance  de  reste  :  le  viure  est  quelquefois  cons- 
tance et  vaillance,  I,  636. 

Celuy  qui  n'estime  pas  tant  sa  femme  ou  vn  sien  amy,  que  d'en  allonger  sa 
vie,  et  qui  s'opiniastre  à  mourir,  il  est  trop  délicat  et  trop  mol  :  il  faut  que  l'ame 
se  commande  cela,  quand  l'vtilité  des  nostres  le  requiei't  :  il  faut  par  fois  nous 
prester  à  noz  amis  :  et  quand  nous  voudrions  mourir  pour  nous,  interrompre 
nostre  dessein  pour  eux,  I,  674. 

Plusieurs  tiennent,  que  nous  ne  pouuons  abandonner  cette  garnison  du 
monde,  sans  le  commandement  exprès  de  celuy,  qui  nous  y  a  mis;  et  que  c'est  à 
Dieu,  qui  nous  a  icy  enuoyez,  non  pour  nous  seulement,  ains  pour  sa  gloire  et 
seruice  d'autruy,  de  nous  donner  congé,  quand  il  luy  plaira,  non  à  nous  de  le 
prendre  :  que  nous  ne  sommes  pas  nays  pour  nous,  ains  aussi  pour  nostre  païs  : 
les  loix  nous  redemandent  compte  de  nous,  pour  leur  interest,  et  ont  action 
d'homicide  contre  nous,  I,  632. 

C'est  contre  Nature,  que  nous  nous  mesprisons  et  mettons  nous  mesmes  à  nôn- 
chaloir;  c'est  vne  maladie  particulière,  et  qui  ne  se  voit  en  aucune  autre  créa- 
ture de  se  hayr  et  desdaigner,  I,  644. 

11  y  a  bien  plus  de  constance  à  vser  la  chaîne  qui  nous  tient,  qu'à  la  rompre  : 
C'est  l'indiscrétion  et  l'impatience,  qui  nous  haste  le  pas,  I,  632. 

C'est  le  rolle  de  la  couardise,  non  de  la  vertu,  de  s'aller  tapir  dans  vn  creux, 
souz  vne  tombe  massiue,  pour  euitor  les  coups  de  la  Fortune.  Elle  ne  rompt  son 
chemin  et  son  train,  pour  orage  qu'il  face,  I,  634. 

Tous  les  inconueniens  ne  valent  pas  qu'on  vueille  mourir  pour  les  euiter.  Et 
puis  y  ayant  tant  de  soudains  changemens  aux  choses  humaines,  il  est  malaisé 
à  iuger,  à  quel  poinct  nous  sommes  iustement  au  bout  de  nostre  espérance,  I,  636. 

Il  y  a  grand  doubte  sur  ce,  quelles  occasions  sont  assez  iustes,  pour  faire  en- 
trer vn  homme  en  ce  party  de  se  tuer  :  Car  quoy  qu'ils  dient,  qu'il  faut  souuent 
mourir  pour  causes  légères,  puis  que  celles  qui  nous  tiennent  en  vie,  ne  sont 
gucros  fortes,  si  y  faut-il  quelque  mesure,  I,  636. 

La  douleur,  et  vne  pire  mort,  me  semblent  plus  excusables  incitations,  I,  652. 

On  désire  quelquefois  la  mort,  pour  l'espérance  d'vn  plus  grand  bien,  par  vn 
grand  appétit  de  la  vie  aduenir,  par  où  il  appert  combien  improprement  nous 
appelions  desespoir  cette  dissolution  volontaire,  à  laquelle  nous  porte  souuent, 
vne  tranquille  et  rassise  inclination  de  iugement,  I,  650. 

L'histoire  Ecclésiastique  a  en  reuerence  plusieurs  tels  exemples  de  personnes 
dénotes  qui  appelèrent  la  mort  à  garant  contre  les  outrages  que  les  tyrans  pre- 
paroient  à  leur  religion  et  conscience,  I,  610. 

TESTAMENT. 

En  gênerai,  la  plus  saine  distribution  de  noz  biens  en  mourant,  me  semble  estre 
les  laisser  distribuer  à  l'vsage  du  pais.  Los  loix  y  ont  mieux  pensé  que  nous  :  et 
vaut  mieux  les  laisser  faillir  en  leur  eslection,  que  de  nous  hazarder  de  faillir  té- 
mérairement en  la  nostre.  Ils  ne  sont  pas  proprement  nôstres,  puis  que  d'vne 


E.230  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

prescription  ciuile  et  sans  nous,  ils  sont  destinez  à  certains  successeurs.  Et  en- 
core que  nous  ayons  quoique  liberté  audelà,  ie  tien  qu'il  faut  vne  f^rande  cause 
et  bien  apparente  pour  nous  faire  oster  à  vn,  ce  que  sa  Fortune  luy  auoit  ac- 
quis, et  à  quoy  la  iustice  commune  rapi)elloit  :  et  que  c'est  abuser  contre  raison 
de  cette  liberté,  d'en  seruir  noz  fantasies  friuoles  et  priuées,  II,  42. 

l'ay  veu  plusieurs  do  mon  temps  conuaincus  par  leur  conscience  retenir  de 
l'autruy,  se  disposer  à  satisfaire  par  leur  testament,  et  après  leur  decés.  Ils  no 
font  rien  (jue  vaille.  Ny  de  prendre  terme  à  chose  si  pressante,  ny  de  vouloir 
restablir  vne  iniure  auec  si  peu  de  leur  ressentiment  et  interest.  Ils  doiuent  du 
plus  leur,  I,  5(3. 

Ceux  là  font  encore  pis,  qui  reseruent  la  déclaration  de  quelque  haineuse  vo- 
lonté enuers  le  procjie  à  leur  dernière  volonté,  l'ayants  cachée  pendant  la  vie, 
I,  56. 

TORTURE. 

C'est  vne  dangereuse  inuention  que  celle  des  géhennes,  et  semble  que  ce  soit 
plustost  vn  essay  do  patience  que  de  vérité.  Et  celuy  qui  les  peut  souffrir,  cache 
la  vérité,  et  celuy  qui  ne  les  peut  souffrir,  I,  662. 

Pour  dire  vray,  c'est  vn  moyen  plein  d'incertitude  et  do  danger.  Que  ne  diroit 
on,  que  feroit  on  pour  fuyr  à  si  griefues  douleurs?  D'où  il  adulent,  que  celuy 
que  le  iuge  a  géhenne  pour  ne  le  faire  mourir  innocent,  il  le  face  mourir  et  in-^ 
nocent  et  géhenne.  Mille  et  mille  en  ont  chargé  leur  teste  de  faulces  confessions, 
1,662. 

TRAHISON. 

Celuy  enuers  qui  vous  en  trahissez  vn,  duquel  vous  estes  pareillement  bien 
venu  :  sçait-il  pas,  que  de  soy  vous  en  faites  autant  à  son  tour?  Il  vous  lient 
pour  vn  meschant  homme  :  ce  pendant  il  vous  oit,  et  tire  de  vous,  et  fait  ses  af- 
faires de  vostre  desloyauté.  Car  les  hommes  doubles  sont  vtiles,  en  ce  qu'ils  ap- 
portent :  mais  il  se  faut  garder,  qu'ils  n'emportent  que  le  moins  qu'on  peut, 
III,  86. 

Si  la  trahison  doit  estre  en  quelque  cas  excusable  :  lors  seulement  elle  l'est, 
qu'elle  s'employe  à  chastier  et  trahir  la  trahison,  III,  94. 

TRISTESSE. 

le  suis  des  plus  exempts  de  cette  passion,  et  ne  l'ayme  ny  l'estime  :  quoy  que 
le  monde  ayt  entrepris,  comme  à  prix  faict,  de  l'honorer  de  faneur  particulière. 
Ils  en  habillent  la  sagesse,  la  vertu,  la  conscience.  Sot  et  vilain  ornement,  I,  22. 

TROUBLES  POLITIQUES  (guerres  civiles). 

Est-il  quelque  mal  en  vne  police,  qui  vaille  estre  combatu  par  vne  drogue  si 
mortelle  que  la  guerre  ciuile?  Non  pas,  disoit  Fauonius,  l'vsurpation  de  la  pos- 
session tyrannique  d'vne  republique.  Platon  de  mesme  ne  consent  pas  qu'on  face 
violence  au  repos  de  son  pais,  pour  le  guérir  :  et  n'accepte  pas  l'amendement 
qui  trouble  et  hazarde  tout,  et  qui  couste  le  sang  et  ruine  des  citoyens,  III,  558. 

De  se  tenir  chancelant  et  mestis,  de  tenir  son  affection  immobile,  et  sans  in- 
clination aux  troubles  de  son  pays,  et  en  vne  diuision  publique,  ie  ne  le  trouue 
ny  beau,  ny  honneste  :  Cela  peut  estre  permis  enuers  les  affaires  des  voysins  : 
ce  seroit  vne  espèce  de  trahison,  de  le  faire  aux  propres  et  domestiques  affaires, 
ausquels  nécessairement  il  faut  prendre  party  :  mais  de  ne  s'embesongner  point, 
à  homme  qui  n'a  ny  charge,  ny  commandement  exprez  qui  le  presse,  ie  le 
trouue  plus  excusable  qu'aux  guerres  estrangeres  :  desquelles  pourtant,  selon 
nos  loix,  ne  s'empesche  qui  ne  veut.  Toutesfois  ceux  encore  qui  s'y  engagent  tout 
à  faict,  le  peuuent,  auec  tel  ordre  et  attrempance,  que  l'orage  debura  couler  par 
dessus  leur  teste,  sans  offence,  III,  84. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        TRO.  B.251 

Quand  ma  volonté  nie  donne  à  vn  party,  ce  n'est  pas  d'vne  si  violente  obliga- 
tion, que  mon  entendement  s'en  infecte.  Aux  presens  brouillis  de  cet  estât,  mon 
interest  ne  m'a  faict  mescognoistre,  ny  les  qualitez  louables  en  noz  aduersaires, 
ny  celles  qui  sont  reprochables  en  ceux  que  i'ay  suiuy.  Ils  adorent  tout  ce  qui 
est  de  leur  costé  :  moy  ie  n'excuse  pas  seulement  la  plus  part  des  choses,  qui 
sont  du  mien.  Vn  bon  ouurage,  ne  perd  pas  ses  grâces,  pour  plaidei^contre  moy. 
Hors  le  nœud  du  débat,  ie  me  suis  maintenu  en  equanimité,  et  pure  indirt'eronce, 

•  III,  m). 

Rien  n'empesche  qu'on  ne  se  puisse  comporter  commodément  entre  des  hom- 
mes qui  se  sont  ennemis,  et  loyalement  :  conduisez  vous  y  d'vne,  sinon  par  tout 
esgale  aflection  (car  elle  peut  soulfrir  différentes  mesures)  au  moins  tempérée,  et 
qui  ne  vous  engage  tant  à  l'vn,  qu'il  puisse  tout  requérir  de  vous.  Et  vous  con- 
tentez aussi  d'vne  moienne  mesure  de  leur  grâce  :  et  de  couler  en  eau  trouble, 
sans  y  vouloir  pescher,  III,  86. 

le  veux  que  l'aduantage  soit  pour  nous  :  mais  ie  ne  forcené  point,  s'il  ne  l'est. 
le  me  prens  fermement  au  plus  sain  des  partis.  Mais  ie  n'affecte  pas  qu'on  me 
remarque  spécialement,  ennemy  des  autres,  et  outre  la  raison  generalle,  III,  502. 

Ceux  qui  allongent  leur  cholere,  et  leur  haine  delà  des  affairesj  comme  faict  la 
plus  part,  montrent  qu'elle  leur  part  d'ailleurs,  et  de  cause  particulière,  III,  502. 

A  nous  autres  petis,  il  faut  fuyr  l'orage  de  plus  loing  :  il  faut  pouruoir  au  sen- 
timent, non  à  la  patience;  et  escheuer  aux  coups  que  nous  ne  scaurions  parer, 
III,  508. 

Il  faut  viurc  par  droict,  et  par  auctorilé,  non  par  recompense  ny  par  grâce. 
Combien  de  galans  hommes  ont  mieux  aymé  perdre  la  vie,  que  la  deuoir?  III,  416. 

On  peut  regretter  les  meilleurs  temps  :  mais  non  pas  iuyr  aux  presens  :  on 
peut  désirer  autres  magistrats,  mais  il  faut  ce  nonobstant,  obeyr  à  ceux  icy.  Et 
à  l'aduanture  y  a  il  plus  de  recommendation  d'obeyr'  aux  mauuais,  qu'aux  bons, 
III,  470. 

Les  dissentions  intestines  produisent  souuent  ces  vilains  exemples  :  Que  nous 
punissons  les  priuez,  de  ce  qu'Hs  nous  ont  creu,  quand  nous  estions  autres.  Et 
vn  mesme  magistrat  fait  porter  la  peine  de  son  changement,  à  qui  n'en  peut 
mais.  Le  maistre  foitte  son  disciple  de  docilité,  et  la  guide  son  aueuglc.  Horrible 
image  de  iustice,  III,  102. 

VANITÉ  (présomption). 

Nostre  monde  n'est  formé  qu'à  l'ostentation.  Les  hommes  ne  s'enflent  que  de 
vent  :  et  se  manient  à  bonds,  comme  les  balons,  III,  546. 

Que  nous  presche  la  vérité  :  que  nostre  sagesse  n'est  que  folie  deuant  Dieu  : 
que  de  toutes  les  vanitez  la  plus  vaine  c'est  l'homme  :  que  l'homme  qui  présume 
de  son  seauoir,  ne  sçait  pas  encore  que  c'est  que  sçauoir  :  et  que  l'homme,  qui 
n'est  rien,  s'il  pense  estre  quelque  chose,  se  séduit  soy-mesmes,  et  se  trompe? 
I,  132. 

C'est  par  la  vanité  qu'il  s'égale  à  Dieu,  qu'il  s'attribue  les  conditions  diuines, 
qu'il  .se  trie  soy-mesme  et  sepaji'e  de  la  presse  des  autres  créatures,  taille  les  parts 
aux  animaux  ses  confrères  et  compagnons,  et  leur  distribue  telle  portion  de  fa- 
cultez  et  de  forces,  que  bon  luy  semble,  II,  136. 

VENGEANCE. 

Chacun  sent  bien,  qu'il  y  a  plus  de  brauerie  et  desdain,  à  battre  son  ennemy, 
qu'à  l'acheuer,  et  de  le  faire  bouquer,  que  de  le  faire  mourir.  D'auantage  que 
l'appétit  de  vengeance  s'en  assouuit  et  contonte  mieux  :  car  elle  ne  vise  qu'à  don- 
ner ressentiment  de  soy.  Voyla  pourquoy,  nous  n'attaquons  pas  vne  beste,  ou 
vne  pierre,  quand  elle  nous  blesse,  d'autant  qu'elles  sont  incapables  de  sentir 
nostre  reuenche.  Et  de  tuer  vn  homme,  c'est  le  mettre  à  l'abry  de  nostre  offence 
et  lui  prêter  le  plus  fauorable  de  touts  lys  offices  de  la  vie^  qui  est  de  mourir 
promptement  et  insensiblement,  II,  570. 


E.2o2  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Tuer  son  ennemi  est  bon  pour  euiter  l'offonce  à  venir,  non  pour  venger  celle 
qui  est  laicte.  C'est  vne  action  plus  de  crainte,  que  de  brauerie  :  de  précaution, 
que  de  courage  :  Nous  quittons  par  là  la  vraye  fin  de  la  vengeance  et  auons  à 
conniller,  à  trotter  et  à  fuir  les  officiers  de  la  iustice  qui  nous  suyuent  et  luy  est 
en  repos,  II,  572. 

Tout  ainsin  est  à  plaindre  la  vengeance,  quand  celuy  enuers  lequel  elle  s'eni- 
ploye,  pert  le  moyen  de  la  souffrir.  Car  comme  le  vengeur  y  veut  voir,  pour  eu 
tirer  du  plaisir,  il  faut  que  celuy  sur  lequel  il  se  venge,  y  voye  aussi,  pour  en 
receuoir  du  dcsplaisir,  et  de  la  repentance,  II,  570. 

VÉRITÉ  (philosophie). 

La  voye  de  la  vérité  est  vne  et  simple,  celle  du  profit  particulier,  et  de  la  com- 
modité des  affaires,  qu'on  a  en  charge,  double,  inégale,  et  fortuite,  III,  90. 

Pour  le  profit  des  hommes,  il  est  souuent  besoin  de  les  piper,  II,  248. 

La  vérité  a  ses  empeschements,  incommoditez  et  incompatibilitez  auec  nous. 
Il  nous  faut  souuent  tromper,  afin  que  nous  ne  nous  trompions.  Et  siller  nostre 
veuë,  estourdir  nostre  entendement,  pour  les  redresser  et  amender,  III,  490. 

Nous  ne  sentons  rien,  nous  ne  voyons  rien,  toutes  choses  nous  sont  occultes, 
il  n'en  est  aucune  de  laquelle  nous  puissions  establir  quelle  elle  est,  II,  244. 

VERSATILITÉ. 

Ceux  qui  s'exercent  à  contreroller  les  actions  humaines,  ne  se  trouuent  en  au- 
cune partie  si  empeschez,  qu'à  les  r'apiesser  et  mettre  à  mesme  lustre  :  car  elles 
se  contredisent  communément  de  si  estrange  façon,  qu'il  semble  impossible 
qu'elles  soient  parties  de  mesme  boutique,  I,  600. 

Non  seulement  le  vent  des  accidens  me  remue  selon  son  inclination  :  mais  en 
outre,  ie  me  remue  et  trouble  moy  mesme  par  l'instabilité  de  ma  posture,  et  qui 
y  regarde  primement,  ne  se  trouue  guère  deux  fois  en  mesme  estât.  le  donne 
à  mon  ame  tantost  vn  visage,  tantost  vn  autre,  selon  le  costé  où  ie  la  couche. 
Si  ie  parle  diuersement  de  moy,  c'est  que  ie  me  regarde  diuersement.  Toutes 
les  contrarietez  s'y  trouuent,  selon  quelque  tour,  et  en  quelque  façon  :  Honteux, 
insolent,  chaste,  luxurieux,  bauard,  taciturne,  laborieux,  délicat,  ingénieux,  hé- 
bété, chagrin,  débonnaire,  menteur,  véritable,  sçauant,  ignorant,  et  libéral  et 
auare  et  prodigue  :  tout  cela  ie  le  vois  en  moy  aucunement,  selon  que  ie  me 
vire  :  et  quiconque  s'estudie  bien  attentifuement,  trouue  en  soy,  voire  et  en  son 
iugement  mesme,  cette  volubilité  et  discordance.  le  n'ay  rien  à  dire  de  moy, 
entièrement,  simplement,  et  solidement,  sans  confusion  et  sans  meslange,  ny  en 
vn  mot.  Distinguo,  est  le  plus  vniuersel  membre  de  ma  Logique,  I,  606. 

Qui  pour  me  voir  une  mine  tantost  froide,  tantost  amoureuse  enuers  ma  femme, 
estime  que  l'vne  ou  l'autre  soit  feinte,  il  est  vn  sot,  I,  408. 

Il  n'est  pas  estrange  de  plaindre  celuy-là  mort,  qu'on  ne  voudroit  aucunement 
estre  en  vie,  I,  406. 

Nous  auons  poursuiuy  auec  résolue  volonté  la  vengeance  d'vne  iniure,  et  res- 
senty  vn  singulier  contentement  de  la  victoire;  nous  en  pleurons  pourtant  ;  ce 
n'est  pas  de  cela  que  nous  pleurons  :  il  n'y  a  rien  changé:  mais  nostre  ame  re- 
garde la  chose  d'vn  autre  œil,  et  se  la  représente  par  vn  autre  visage  :  car  chasque 
chose  a  plusieurs  biais  et  plusieurs  lustres,  I,  408. 

Nulle  qualité  nous  embrasse  purement  et  vniuersellement,  I,  408. 

En  nostre  ame,  bien  qu'il  y  ait  diuers  mouuements,  qui  l'agitent,  si  faut-il 
qu'il  y  en  ayt  vn  à  qui  le  champ  demeure  :  mais  pas  auec  si  entier  auantage, 
que  les  plus  foibles  par  occasion  ne  regaignent  encores  la  place,  I,  406. 

Nostre  façon  ordinaire  c'est  d'aller  après  les  inclinations  de  nostre  appétit,  à 
gauche,  à  dextre,  contremont,  contre-bas,  selon  que  le  vent  des  occasions  nous 
emporte  :  comme  les  choses  qui  flottent,  ores  doucement,  ores  auecques  violence, 
selon  que  l'eau  est  ireuse  ou  bonasse.  Nous  ne  pensons  ce  que  nous  voulons,  qu'à 
l'instant  que  nous  le  voulons  :  et  ce  que  nous  auons  à  cett'heure  proposé,  nous  le 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        VER.  E.253 

changeons  tantost,  et  tantost  encore  retournons  sur  nos  pas  :  ce  n'est  que  branle 
et  inconstance,  I,  G02. 

N'est-ce  pas  vn  singulier  tesraoignage  d'imperfection,  ne  pouuoir  r'assoir  nostre 
contentement  en  aucune  chose,  et  que  par  désir  mesme  et  imagination  il  soit 
hors  de  nostre  puissance  de  choisir  ce  qu'il  nous  faut?  I,  566. 

Non  par  iouj'ssance,  mais  par  imagination  et  par  souhait,  nous^ne  pouuons 
estre  d'accord  de  ce  dequoy  nous  auons  besoing  pour  nous  contenter.  Laissons 
à  nostre  pensée  tailler  et  coudre  à  sou  plaisir  :  elle  ne  pourra  pas  seulement  dé- 
sirer ce  qui  luy  est  propre,  et  le  satisfaire,  II,  368. 

VERTU. 

La  douleui",  la  volupté,  l'amour,  la  haine,  sont  les  premières  choses,  que  sent 
vn  enfant  :  si  la  raison  suruenant  elles  s'appliquent  à  elle:  cela  c'est  vertu,  III,  694. 
La  vertu  présuppose  de  la  difficulté  et  du  contraste,  elle  ne  peut  s'exercer  sans 
partie.  C'est  à  l'auenture  pourquoy  nous  nommons  Dieu  bon,  foi't,  et  libéral,  et 
iuste,  mais  nous  ne  le  nommons  pas  vertueux.  Ses  opérations  sont  toutes  naifues 
et  sans  effort,  II,  86. 

La  vertu  est  chose  autre,  et  plus  noble,  que  les  inclinations  à  la  bonté,  qui 
naissent  en  nous.  Les  âmes  réglées  d'elles  mesmes  et  bien  nées,  elles  suyuent 
mesme  train,  et  représentent  en  leurs  actions,  mesme  visage  que  les  vertueuses. 
Mais  la  vertu  sonne  ie  ne  sçay  quoy  de  plus  grand  et  de  plus  actif,  que  de  se 
laisser  par  vne  heureuse  complexion,  doucement  et  paisiblement  conduire  à  la 
suite  de  la  raison,  II,  84. 

Les  principaux  bienfaicts  de  la  vertu,  le  mépris  de  la  mort  est  le  moyen  qui 
fournit  nostre  vie  d'vne  molle  tranquillité,  et  nous  en  donne  le  goust  pur  et 
amiable  sans  qui  toute  autre  volupté  est  esteinte,  I,  110. 

Si  la  fortune  comnmne  luy  faut,  la  vertu  luy  esc  happe;  ou  elle  s'en  passe,  et 
s'en  forge  vne  autre  toute  sienne  :  non  plus  flottante  et  roulante  :  elle  sçait  estre 
riche,  et  puissante,  et  sçauante,  et  coucher  en  des  matelats  musquez.  Elle  aime 
la  vie,  elle  aime  la  beauté,  la  gloire,  et  la  santé.  Mais  son  office  propre  et  parti- 
culier, c'est  sçauoir  vser  de  ces  biens  là  regléement,  et  les  sçauoir  perdre  cons- 
tamment, I,  260. 
La  vertu  se  contente  de  soy  :  sans  discipline,  sans  paroles,  sans  effects,  I,  416. 
La  vertu  n'aduoiie  rien,  que  ce  qui  se  faict  par  elle,  et  pour  elle  seule,  I,  400. 
11  faut  aymer  la  vertu  pour  elle  mesme,  II,  492. 

11  n'eschoit  pas  de  recompense  à  vne  vertu,  pour  grande  qu'elle  soit,  qui  est 
passée  en  coustume  :  et  ne  sçay  auec,  si  nous  l'appellerions  iamais  grande,  estant 
commune,  II,  12. 

Nous  pouuons  saisir  la  vertu,  de  façon  qu'elle  deuiendra  vicieuse  :  si  nous  l'em- 
brassons d'un  désir  trop  aspre  et  violant,  I,  344. 

On  peut  et  trop  aymer  la  vertu,  et  se  porter  excessiuement  en  vne  action  iuste, 
I,  344. 

Voyla  pourquoy  quand  on  iuge  d'vne  action  particulière,  il  faut  considérer 
plusieurs  circonstances,  et  l'homme  tout  entier  qui  l'a  produicte,  auant  la  bap- 
tizer,  II,  94. 

L'estrangeté  de  nostre  condition,  porte  que  nous  soyons  souuent  par  le  vice 
mesme  poussez  à  bien  faire;  si  le  bien  faire  ne  se  iugeoit  par  la  seule  intention. 
Parquoy  vn  fait  courageux  ne  doit  pas  conclurre  vn  homme  vaillant  :  celuy  qui 
le  seroit  bien  à  poinct,  il  le  seroit  tousiours,  et  à  toutes  occasions.  Si  c'estoit 
vne  habitude  de  vertu,  et  non  vne  saillie,  elle  rendroit  vn  homme  pareillement 
résolu  à  tous  accidens  :  tel  seul,  qu'en  compagnie  :  tel  en  camp  clos,  qu'en  vne 
bataille  :  car  quoy  qu'on  die,  il  n'y  a  pas  autre  vaillance  sur  le  paué  et  autre  au 
camp.  Aussi  courageusement  porteroit  il  vne  maladie  en  son  lict,  qu'vnc  bles- 
sure au  camp  :  et  ne  craindroit  non  plus  la  mort  en  sa  maison  qu'en  vn  assaut. 
Nous  ne  verrions  pas  vn  mesme  homme,  donner  dans  la  bresche  d'vne  braue 
asseurance,  et  se  tourmenter  après,  comme  vne  femme,  de  la  perte  d'vn  procez 
ou  d'vn  fils.  Quand  estant  lasclie  à  l'infamie,  il  est  ferme  à  la  pauureté  :  quand 


E.254  ESSAIS  DES  MONTAIGNE. 

estant  mol  contre  les  rasoirs  des  barbiers,  il  se  troiiue  roide  contre  les  espées  des 
aduei'saires  ;  l'action  est  louable,  non  pas  l'homuie,  I,  008. 

Nostre  vertu  mesine  est  fautiere  et  repentable,  I,  G80. 

La  vertu  refuse  la  facilité  pour  compagne;  cette  aisée,  douce,  et  pancliante 
voie,  par  où  se  conduisent  les  pas  réglez  d'vne  bonne  inclination  de  nature, 
n'est  pas  celle  de  la  vraje  vertu.  Elle  demande  vn  chemin  aspre  et  espineux, 
elle  veut  auoir  des  diflicullez  estrangeres  à  luicter,  II,  88. 

Nuls  accidens  ne  font  tourner  le  dos  à  la  viue  vertu  :  elle  cherche  les  maux  et 
la  douleur,  comme  son  aliment.  Les  menasses  des  tyrans,  les  géhennes,  et  les 
bouireaux,  l'animent  et  la  viuifient,  I,  632. 

Quoy  qu'ils  «lient,  on  la  vertu  mesmo,  le  dei-nier  but  de  nostre  visée,  c'est  la 
volupté  :  mot  qui,  signifiant  quelque  suprême  ))laisir,  et  excessif  contentement, 
est  mieux  dçu  à  l'assistance  de  la  vei-tu,  qu'à  nulle  autre  assistance,  I,  108. 

Le  prix  et  hauteur  de  la  vraye  vertu,  est  en  la  facilité,  vtilité  et  plaisir  de  sou 
exercice  :  si  esloigné  de  difficulté,  que  les  enfans  y  peuuent  comme  les  hommes, 
les  simples  comme  les  subtilz.  Le  règlement  c'est  son  vtil,  non  pas  la  force.  C'est 
la  mère  nourrice  des  plaisirs  humains.  En  les  rendant  iustes,  elle  les  rend  seurs  et 
purs.  Les  modérant,  elle  les  tient  en  haleine  et  en  appétit.  Retranchant  ceux 
qu'elle  refuse,  elle  nous  aiguise  enuers  ceux  qu'elle  nous  laisse  :  et  nous  laisse 
abondamment  tous  ceux  que  veut  nature  :  et  iusques  à  la  satiété,  sinon  iusques  à 
la  lasseté;  maternellement,  I,  260. 

Nous  auons  grand  tort  de  dire,  quand  nous  venons  à  la  vertu,  que  les  suittes 
et  difficultez  qui  l'accablent,  la  rendent  austère  et  inaccessible.  Elles  anoblissent, 
aiguisent,  et  rehaussent  le  plaisir  diuin  et  parfaict,  qu'elle  nous  moienne,  et  ce- 
luy  là  est  certes  bien  indigne  de  son  accointance,  qui  contrepoise  son  coust,  à 
son  fruict  :  il  n'en  cognoist  ny  les  grâces  ny  l'vsage,  I,  108. 

le  voy  que  plusieurs  vertus,  comme  la  chasteté,  sobriété,  et  tempérance,  peuuent 
arriuer  à  nous,  par  deffaillance  corporelle.  La  fermeté  aux  dangers,  si  fermeté 
il  la  faut  appcUei-,  le  mcspris  de  la  mort,  la  patience  aux  infortunes,  peut  venir 
et  se  treuue  souuent  aux  hommes,  par  faute  de  bien  iuger  de  tels  accidens,  et  ne 
les  conceuoir  tels  qu'ils  sont.  La  faute  d'appréhension  et  la  bestise,  contrefont 
ainsi  par  fois  les  effects  vertueux.  Comme  i'ay  veu  souuent  aduenir,  qu'on  a 
loué  des  hommes,  de  ce,  dcquoy  ils  meritoyent  du  blasrae,  II,  92. 

A  quelque  chose  sert  le  mal'heur.  Il  fait  bon  naistre  en  vn  siècle  fort  depraué  : 
car  par  comparaison  d'autruy,  vous  estes  estimé  vertueux  à  bon  marché.  Qui 
n'est  que  parricide  en  nos  iours  et  sacrilège,  il  est  homme  de  bien  et  d'honneur, 
II,  490. 

C'est  chose  facile  et  lasche  que  de  mal  faire;  de  faire  bien,  où  il  n'y  eust  point 
de  danger,  c'est  chose  vulgaire  :  de  faire  bien,  où  il  y  ayt  danger,  c'est  le  pro- 
pre office  d'vn  homme  de  vertu,  II,  88. 

VICES. 

Socrates  disoit,  que  le  principal  office  de  la  sagesse  est  distinguer  les  biens  et 
les  maux:  Nous  autres,  à  qui  le  malheur  est  tousiours  en  vice,  deurions  de  mesmo 
auoir  la  science  de  distinguer  les  vices  :  sans  laquelle,  bien  exacte,  le  vertueux 
et  le  meschant  demeurent  meslez  et  incognus,  I,  612. 

Il  faut  voir  son  vice,  et  l'estudier,  pour  le  redire  :  ceux  qui  le  cèlent  à  autruy, 
le  cèlent  ordinairement  à  eux  mesmes  ;  et  ne  le  tiennent  pas  pour  assés  couuert, 
s'ils  le  voyent.  Ils  le  soustrayent  et  desguisent  à  leur  propre  conscience,  III,  186. 

Les  vices  sont  tous  pareils  en  ce  qu'ils  sont  tous  vices  :  mais  encore  qu'ils  soyent 
également  vices,  ils  ne  sont  pas  égaux  vices.  Et  que  celuy  qui  a  franchi  de  cent 
pas  les  limites,  ne  soit  pas  de  pire  condition,  que  celuy  qui  n'en  est  qu'à  dix 
pas,  il  n'est  pas  croyable  :  et  que  le  sacrilège  ne  soit  pire  que  le  larrecin  d'vn 
chou  de  nostre  iardin  :  Il  y  a  autant  en  cela  de  diuersité  qu'en  aucune  autre  chose, 
I,  012. 

le  tiens  pour  vices,  mais  chacun  selon  sa  mesure,  non  seulement  ceux  que  la 
raison  et  la  nature  condamnent,  mais  ceux  aussi  que  l'opinion  des  hommes  a 
forgé,  voire  fauce  et  erronée,  si  les  loix  et  l'vsage  l'auctorise,  III,  112. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.  VIC.  E.2o5 

Il  n'est  véritablement  vice  qui  n'offence,  et  qii'vn  iugement  entier  n'accuse. 
Car  il  a  de  la  laideur  et  incommodité  si  apparente,  qu'à  l'aduanture  ceux-là  ont 
raison,  qui  disent,  qu'il  est  principalement  produict  par  bestise  et  ignorance  : 
tant  est-il  mal-aisé  d'imaginer  qu'on  le  cognoisse  sans  le  haïr.  La  malice  hume 
la  pluspart  de  son  venin,  et  s'en  empoisonne,  III,  IIJ. 

Aucuns,  ou  poyr  estre  collez  au  vice  d'vne  attache  naturelle,  0l^  par  longue 
accoustumauce,  n'en  trouueut  plus  la  laideur.  A  d'autres,  le  vice  poise,  mais  ils  le 
contrebalancent  auec  le  plaisir,  ou  autre  occasion  :  et  le  souffrent  et  s'y  prestent, 
à  certain  i)rix.  Vitieusement  pourtant,  et  lasehement,  III,  122. 

L'aml>ition,  l'auarice,  l'irrésolution,  la  peur  et  les  concupiscences,  ne  nous  aban- 
donnent jjoint  pour  changer  de  contrée  :  Elles  nous  suiuent  sonnent  iusques 
dans  les  cloistres,  et  dans  les  escoles  de  Philosophie.  Ny  les  dcsers,  ny  les  rochers 
creusez,  ny  la  hère,  ny  les  ieusnes,  ne  nous  en  démeslent,  I,-412. 

C'est  vne  tres-vtile  impression,  que  les  vices,  quand  ils  se  desroberont  de  la 
veuë  et  cognoissance  de  l'humaine  iustice,  demeurent  tousiours  en  butte  à  la  di- 
uine,  qui  les  poui-suyura,  voire  après  la  mort  des  coulpables,  II,  322. 

Ny  les  Dieux,  ny  les  gens  de  bien,  dict  Platon,  n'acceptent  le  présent  d'vn  mes- 
chant,  I,  594. 

Combien  auons  nous  de  mestiers  et  vacations  receuës,  dequoy  l'essence  est  vi- 
cieuse? I,  582. 

Il  y  a  des  vices  légitimes,  comme  plusieurs  actions,  ou  bonnes,  ou  excusables, 
illégitimes.  La  iustice  en  soy,  naturelle  et  vniuerselle,  est  autrement  réglée,  et 
plus  noblement,  que  n'est  cette  autre  iustice  spéciale,  nationale,  contrainte  au 
besoing  de  nos  polices,  III,  90. 

La  corruption  du  siècle  se  fait,  par  la  contribution  particulière  de  chacun  de 
nous.  Les  vns  y  confèrent  la  trahison,  les  autres  l'iniustice,  l'irréligion,  la  tyran- 
nie, l'auarice,  la  cruauté,  selon  qu'ils  sont  plus  puissans  :  les  plus  foibles  y  ap- 
portent la  sottise,  la  vanité,  l'oisiueté,  III,  378. 

C'est  dommage  qu'vn  meschant  homme  ne  soit  encore  vn  sot,  et  que  la  décence 
pallie  son  vice,  III,  190. 


VIE. 

Ceux  qui  ont  apparié  nostre  vie  à  vn  songe,  ont  eu  de  la  raison,  à  l'aduanture 
plus  qu'ils  ne  pensoyeut.  Quand  nous  songeons,  nostre  ame  vit,  agit,  exerce 
toutes  ses  facultez,  ne  plus  ne  moins  que  quand  elle  veille  ;  mais  si  plus  moUe- 
lement  et  obscurément:  là  elle  dort,  icy  elle  sommeille  plus  et  moins;  ce  sont 
tousioui's  ténèbres,  et  ténèbres  Cynimeriennes.  Nous  veillons  dormants,  et  veil- 
lants dormons  :  pourquoy  ne  mettons  nous  en  doul>te,  si  nostre  i)enser,  nostre 
agir,  est  pa.s  vn  autre  songer,  et  nostre  veiller,  quelque  espèce  de  dormir?  II,  404. 

La  vie  est  vn  mouuement  inégal,  Irregulier,  et  multiforme,  III,  13G. 

La  raison  nous  ordonne  bien  d'aller  tousiours  mesme  chemin,  mais  non  toutes- 
fois  mesme  train.  Quand  la  vertu  mesme  seroit  incarnée,  ie  croy  que  le  poux 
luy  battroit  plus  fort  allant  à  l'assaut,  qu'allant  disner  :  voire  il  est  nécessaire 
qu'elle  s'eschaulfe  et  s'csmeuue,  I,  500. 

Les  plus  belles  vies,  sont  à  mon  gré  celles,  qui  se  rangent  au  modelle  commun 
et  humain  auec  ordre  :  mais  sans  miracle,  sans  extrauagance,  III,  704. 

Les  ieunes  se  doiuent  faire  instruire;  les  hommes  s'exercer  à  bien  faire  :  les 
vieux  se  retirer  de  toute  occupation  ciuile  et  militaire,  viuants  à  leur  discré- 
tion, sans  obligation  à  certain  office,  I,  418. 

Si  vous  auez  vescu  vn  iour,  vous  auez  tout  veu  :  vn  iour  est  égal  à  tous  iours. 
Il  n'y  a  point  d'autre  lumière,  ny  d'autre  nuict.  Ce  Soleil,  cette  Lune,  ces  Estoil- 
les,  cette  disposition,  c'est  celle  mesme  que  vos  ayeuls  ont  iouj^e,  et  qui  entretien- 
dra vos  arriere-nepueux  :  au  pis  aller,  la  distribution  et  variété  de  tous  les  actes 
de  ma  comédie,  se  parfournit  en  vn  an.  Si  vous  auez  pris  garde  au  branle  de 
mes  quatre  saisons,  elles  embrassent  l'enfance,  l'adolescence,  la  virilité,  et  la 
vieillesse  du  monde.  11  a  ioiié  son  ieu  :  il  n'y  sçait  autre  finesse,  que  de  recom- 
mencer; ce  sera  tousiours  cela  mesme,  I,  126. 


E.2[i6  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Où  que  vostre  vie  finisse,  elle  y  est  toute.  L'vtilité  du  viure  n'est  pas  en  l'es- 
pace :  elle  est  en  l'vsage.  Tel  a  vescu  long  temps,  qui  a  peu  vescu,  I,  128. 

11  faut  apprendre  à  souffi-ir,  ce  qu'on  ne  peut  euiter.  Nostre  vie  est  composée, 
comme  l'harmonie  du  monde,  de  choses  contraires,  les  biens  et  les  maux  j-  sont 
consubstantiels.  Nostre  estre  ne  peut  sans  ce  meslange;  et  y  est  l'vne  bande  non 
moins  nécessaire  que  l'autre,  III,  648. 

Le  glorieu.v  chef-d'œuvre  de  l'homme,  c'est  viure  à  propos.  Toutes  autres 
choses  :  régner,  tliesauriser,  bastir,  n'en  sont  qu'appendicules  et  adminicules, 
pour  le  plus.  C'est  aux  petites  âmes  enseuelies  du  i)oix  des  affaires,  de  ne  s'en 
sçauoir  purement  desmesler  :  de  ne  les  sçauoir  et  laisser  et  reprendre,  III,  688. 
Nostre  principalle  suffisance,  c'est  sçauoir  s'appliquer  à  diuers  vsages.  C'est 
estre,  mais  ce  n'est  pas  viure  que  se  tenir  attaché  et  obligé  par  nécessité,  à  vn 
seul  train.  Les  plnS  belles  âmes  sont  celles  qui  ont  plus  de  variété  et  de  .sou- 
plesse. III,  136. 

Qui  oublieroit  de  bien  et  saintement  viure;  et  penseroit  estre  quitte  de  son 
deuoir,  en  y  acheminant  et  dressant  les  autres;  ce  serait  vn  sot.  De  mesnie,  qui 
abandonne  en  son  propre,  le  sainement  et  gayement  viure,  pour  en  seruir  au- 
truy,  prent  à  mon  gré  vn  mauuais  et  desnaturé  pai-ty,  III,  492. 

La  vie  n'est  de  soy  ny  bien  ny  mal  :  c'est  la  place  du  bien  et  du  mal,  selon  que 

vous  la  leur  faictes,  I,  126. 

Aucun  ne  fait  certain  dessein  de  sa  vie,  et  n'en  délibérons  qu'à  parcelles,  1,610. 

Ce  n'est  pas  merueille  que  le  hazard  puisse  tant  sur  nous,  puis  que  nous  viuons 

par  hazai'd  :  à  qui  n'a  dressé  en  gros  sa  vie  à  vne  certaine  fin,  il  est  impossible 

de  disposer  les  actions  particulières,  I,  610. 

Il  faut  estre  tousiours  botté  et  prest  à  partir,  en  tant  que  en  nous  est,  et  sur 
tout  se  garder  qu'on  n'aye  lors  affaire  qu'à  soy  :  car  nous  y  aurons  assez  de  be- 
songne,  sans  autre  surcrois,  I,  118. 

L'opinion  qui  desdaigne  nostre  vie,  est  ridicule  :  car  en  fin  c'est  nostre  estre, 
c'est  nostre  tout.  C'est  de  pareille  vanité,  que  nous  desirons  estre  autre  chose,  que 
ce  que  nous  sommes,  I,  634. 

Nostre  vie  est  partie  en  folie,  partie  en  prudence.  Qui  n'en  escrit  que  reuerem- 
ment  et  régulièrement,  il  en  laisse  en  arrière  plus  de  la  moitié,  III,  270. 

Il  y  a  tant  de  mauuais  pas,  que  pour  le  plus  seur,  il  faut  vn  peu  légèrement  et 
superficiellement  couler  ce  monde  :  et  le  glisser,  non  pas  l'enfoncer.  La  volupté 
mesme,  est  douloureuse  en  sa  profondeur,  III,  488. 

La  carrière  de  noz  désirs  doit  estre  circonscripte,  et  restraincte,  à  vn  court  li- 
mite, des  commoditez  les  plus  proches  et  contigues,  III,  498. 

Le  ieune  doit  faire  ses  apprests,  le  vieil  en  iouïr,  disent  les  sages.  Et  le  plus 
grand  vice  qu'ils  remerquont  en  nous,  c'est  que  noz  désire  raieunissent  sans 
cesse.  Nous  recommençons  tousiours  à  viure,  II,  586. 

Nous  sommes  nés  pour  agir  :  ie  veux  qu'on  agisse,  et  qu'on  allonge  les  offices  de 
la  vie,  tant  qu'on  peut  :  et  que  la  mort  me  treuue  plantant  mes  choux;  mais 
nonchallant  d'elle,  et  encore  plus  de  mon  iardin  imparfait,  I,  120. 

11  n'y  a  rien  de  mal  en  la  vie,  pour  celuy  qui  a  bien  comprins,  que  la  pri na- 
tion de  la  vie  n'est  pas  mal,  I,  116. 

C'est  le  viure  heureusement,  non  le  mourir  heureusement,  qui  fait  l'humaine 
■félicité,  III,  132. 

Il  faut  souffrir  doucement  les  loix  de  nostre  condition.  Nous  sommes  pour  vieil- 
lir, pour  affoiblir,  pour  estre  malades,  en  despit  de  toute  médecine,  III,  646. 
11  y  a  en  la  vie  plusieurs  accidens  pires  à  souffrir  que  la  mort  mesme,  1,630. 
Tant  les  hommes  sont  accoquinez  à  leur  estre  misérable,  qu'il  n'est  si  rude  con- 
dition qu'ils  n'acceptent  pour  s'y  conseruer,  III,  24. 

Les  Stoïciens  disent,  que  c'est  viure  conuenablement  à  Nature,  pour  le  sage,  de 
de  se  départir  de  la  vie,  encore  qu'il  soit  en  plein  heur,  s'il  le  faict  opportuné- 
ment :  et  au  fol  de  maintenir  sa  vie,  encore  qu'il  soit  misérable,  pourueu  qu'il 
soit  en  la  plus  grande  part  des  choses,  qu'ils  disent  estre  selon  Nature,  1, 632. 

La  loy  de  viure  aux  gens  de  bien,  ce  n'est  pas  autant  qu'il  leur  plaist,  mais 
autant  qu'ils  doiuent,  III,  67  L 
C'est  tesmoignage  de  grandeur  de  courage,  de  rotournei-  en  la  vie  pour  la  con- 


LESPRIT  DES  ESSAIS.  VIE.  E.2HT 

sideratioii  d'autruy,  comme  plusieurs  excellens  personnages  ont  faict  :  et  est  vn 
traict  de  bonté  singulière,  de  conseruer  la  vieillesse,  (de  laquelle  la  commodité  la 
plus  grande  c'est  la  nonchalance  de  sa  durée,  et  vn  plus  courageux  et  desdai- 
gneux  vsage  de  la  vie,)  si  on  sent  que  cet  office  soit  doux,  aggreable,  et  profitable 
à  jquelqu'vn  bien  affectionné  :  c'est  quelquefois  magnanimité  que  viure,  II,  676. 
Au  iugement  de  la  vie  d'autruy,  ie  regarde  tousiours  comment  s'eh  est  porté 
le  bout,  et  des  principaux  estudes  de  la  mienne,  c'est  qu'il  se  porte  bien,  c'est  à 
dire  quietemont  et  sourdement,  I,  lOG. 

VIE  PRIVÉE. 

La  forme  de  viure  plus  vsitée  et  commune,  est  la  plus  belle  :  toute  particula- 
rité, semble  à  euiter  :  l'vsage  publiq  donne  loy,  III,  680. 

C'est  vne  vie  exquise,  celle  qui  se  maintient  en  ordre  iusques  en  son  priué,  III,  1 11. 

Heureux,  qui  ait  réglé  à  si  iuste  niesure  son  besoin,  que  ses  richesses  y  puis- 
sent suffire  sans  son  soing  et  empeschement  :  et  sans  que  leur  dispensation  ou 
assemblage,  interrompe  d'autres  occupations,  qu'il  suit,  plus  conuenables,  plus 
tranquilles,  et  selon  son  cœur,  I,  474. 

11  faut  auoir  femmes,  enfans,  bien,  et  sur  tout  de  la  santé,  qui  peut,  mais  non 
pas  s'y  attacher  en  manière  que  nostre  heur  en  despendc,  I,  416. 

Qui  ne  couue  point  ses  enfans,  ou  ses  honneurs,  d'vne  propension  osclauo,  ne 
laisse  pas  de  viure  commodément  après  leur  perte,  III,  510. 

Pourquoy  asseruir  nostre  contentement  à  la  puissance  d'autruy?  Anticiper  les 
accidens  de  fortune,  se  priuer  des  commoditez  qui  nous  sont  en  main,  comme 
plusieurs  ont  fâict  par  deuotion,  se  seruir  soy-mesnies,  coucher  sur  la  dure,  ietter 
ses  richesses,  reciierclier  la  douleur,  c'est  l'action  d'vne  A-ortu  excessiue;  ny  la 
raison,  ny  la  nature  ne  le  veulent.  Il  y  a  pour  moy  assez  affaire  sans  aller  si 
auant  :  il  me  suffit  souz  la  faueur  de  la  fortune,  me  préparer  à  sa  défaueur,  I,  420. 

Gaigner  vne  brèche,  conduire  vne  ambassade,  régir  vn  peuple,  ce  sont  actions 
esclatantes  :  tancer,  rire,  vendre,  payer,  aymer,  hayr,  et  conuerser  auec  les 
siens,  et  auec  soy-mesme,  doucement  et  iustement  :  ne  relascher  point,  ne  se 
desmentir  point,  c'est  chose  plus  rare,  plus  difficile,  et  moins  remerquable,  III,  1 16. 

Tel  a  esté  miraculeux  au  monde,  auquel  sa  femme  et  son  valet  n'ont  rien  veu 
seulement  de  remercable.  Peu  d'hommes  ont  esté  admirez'  par  leurs  domesti- 
ques. Nul  a  esté  prophète  non  seulement  en  sa  maison,  mais  en  son  pais,  dit 
l'expérience  des  histoii'es.  De  mesmes  aux  choses  de  néant,  III,  116. 

Misérable  à  mon  gré,  qui  n'a  chez  soy,  où  estre  à  soy  :  où  se  faire  particuliè- 
rement la  cour  :  où  se  cacher,  III,  156. 

Il  se  faut  reseruer  vne  arrière  boutique,  toute  nostre,  toute  franche,  en  laquelle 
nous  establissions  nostre  vraye  liberté  et  principale  retraicte  et  solitude,  I,  416. 

VIE  PUBLIQUE 

0  que  je  feroy  peu  d'estat  de  ces  grandes  dignitez  electiues,  que  ie  voy  au 
monde,  qui  ne  se  donnent  qu'aux  hommes  jjrests  à  partir  :  ausquelles  on  ne 
regarde  pas  tant,  combien  deuement  on  les  exercera,  que  combien  peu  longue- 
ment on  les  exercera  :  dés  l'entrée  on  vise  à  l'issue,  I,  498. 

Nous  nous  préparons  aux  occasions  eminentes,  plus  par  gloire  que  par  cons- 
cience. La  plus  courte  façon  d'arriuer  à  la  gloire,  ce  seroit  faire  pour  la  cons- 
cience ce  que  nous  faisons  pour  la  gloire,  III,  118. 

La  vie  commune  doibt  auoir  conférence  aux  autres  vies.  La  vertu  de  Caton 
estoit  vigoureuse,  outre  la  raison  de  son  siècle  :  et  à  vn  homme  qui  se  mesloit 
de  gouuerner  les  autres,  destiné  au  seruice  commun;  il  se  pourroit  dire,  que 
c'estoit  vne  iustice,  sinon  iniuste,  au  moins  vaine  et  hors  de  saison!  111,464. 

A  ceux,  qui  nous  régissent  et  commandent,  qui  tiennent  le  monde  en  leur 
main,  ce  n'est  pas  assez  d'auoir  vn  entendement  commun  :  de  pouuoir  ce  que 
nous  pouuons.  Ils  sont  bien  loing  au  dessoubs  de  nous,  s'ils  ne  sont  bien  loing 
au  dessus.  Comme  ils  promettent  plus,  ils  doiuent  aussi  plus  :  et  pourtant  !  III,  352. 

ESSAIS   i)E  MONTAIGNE.  —  T.    IV.  17 


E.2o8  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

La  iurisdiction  ne  se  donne  point  en  faneur  du  iuridiciant  :  c'est  en  faueur  du 
iuridicié.  On  fait  vn  supérieur,  non  iamais  pour  son  profit,  ains  pour  le  profit 
de  l'inférieur  :  et  vn  médecin  pour  le  malade,  non  pour  soj'.  Toute  magistrature, 
comme  tout  art,  iette  sa  fin  hors  d'elle,  III,  293. 

Nous  ne  sçauons  pas  distinguer  les  facultez  des  hommes.  De  conclurre  par  la 
suffisance  d'vne  vie  particulière,  quelque  suffisance  à  l'vsage  public,  c'est  mal 
conclud.  Tel  se  conduict  bien,  qui  ne  conduict  pas  bien  les  autres,  III,  4G6. 

Les  dignitez,  les  charges  se  donnent  nécessairement,  plus  par  fortune  que  par 
mérite:  et  a  Ion  tort  souuent  de  s'en  prendre  aux  Roys.  Au  rebours  c'est  merueille 
qu'ils  y  ayent  tant  d'heur,  y  ayans  si  peu  d'adresse,  III,  354. 

Qui  pourroit  trouuer  moyen,  qu'on  en  peust  iuger  par  iustice,  et  choisir  les 
hommes  par  raison,  establiroit  de  ce  seul  trait,  vne  parfaite  forme  de  police, 
III,  358. 

Toutes  actions  publiques  sont  subiectes  à  incertaines,  et  diuerses  interpréta- 
tions :  car  trop  de  testes  en  iugent,  III,  518. 

Toutes  charges  importantes  ne  sont  pas  difficiles,  III,  518. 

le  n'aclîuse  pas  vn  magistrat  qui  dorme,  pourueu  que  ceux  qui  sont  soubs  sa 
main,  dorment  quand  et  luy.  Les  loix  dorment  de  mesme,  III,  520. 

C'est  agir,  pour  sa  réputation,  et  proffit  particulier,  non  pour  le  bien,  de  re- 
mettre à  faire  en  la  place,  ce  qu'on  peut  faire  en  la  chambre  du  conseil  :  et  en 
plain  midy,  ce  qu'on  eust  faict  la  nuict  précédente,  III,  520. 

L'innouation  est  de  grand  lustre.  L'abstinence  de  faire,  est  souuent  aussi  gé- 
néreuse, que  faire  :  mais  elle  est  moins  au  iour,  III,  524. 

le  serois  d'aduis  qu'on  estendist  nostre  vacation  et  occupation  autant  qu'on 
pourroit,  pour  la  commodité  publique  :  et  ie  trouue  la  faute  en  l'autre  costé  de  ne 
nous  y  embesongner  pas  assez  tost,  I,  596. 

le  ne  veux  pas  qu'on  refuse  aux  charges  qu'on  prend,  l'attention,  les  pas,  les 
parolles,  et  la  sueur,  et  le  sang  au  besoing  :  mais  c'est  par  emprunt  et  acciden- 
talement;  l'esprit  se  tenant  tousiours  en  repos  et  en  santé  :  non  pas  sans  action, 
mais  sans  vexation,  sans  passion,  III,  492. 

Combien  de  gens  se  bazardent  tous  les  iours  aux  guerres,  dequoy  il  ne  leur 
chault  :  et  se  pressent  aux  dangers  des  batailles,  desquelles  la  perte,  ne  leur  trou- 
blera pas  le  voisin  sommeil,  III,  492. 

Qui  se  vante,  en  vn  temps  malade,  comme  cestuy-cy,  d'employer  au  seruice 
du  monde,  vne  vertu  naifue  et  sincère  :  ou  il  ne  la  cognoist  pas,  les  opinions  se 
corrompans  auec  les  mœurs,  ou  s'il  la  cognoist,  il  se  vante  à  tort  :  et  qu'il  die, 
faict  mille  choses,  dequoy  sa  conscience  l'accuse,  III,  468. 

La  plus  part  de  noz  vacations  sont  farcesques.  Il  faut  iouer  deuement  nostre 
roUe,  mais  comme  roUe  d'vn  personnage. emprunté.  Du  masque  et  de  l'apparence, 
il  n'en  faut  pas  faire  vne  essence  réelle,  ny  de  l'estranger  le  propre.  Nous  ne 
sçauons  pas  distinguer  la  peau  de  la  chemise,  III,  500. 

Il  faut  apprendre  à  distinguer  les  bonnetades,  qui  nous  regardent,  de  celles  qui 
regardent  nostre  commission,  ou  nostre  suitte,  ou  nostre  mule,  III,  500. 

VIE  SOCIALE. 

Considérant  la  foiblesse  de  nostre  vie,  et  à  combien  d'escueils  ordinaires  et 
naturels  elle  est  exposée,  on  n'en  deuroit  pas  faire  si  grande  part  à  la  naissance, 
à  l'oisiueté  et  à  l'apprentissage,  I,  598. 

En  noz  actions  accoustumees,  de  mille  il  n'en  est  pas  vne  qui  nous  regarde, 
I,  416. 

La  plus  part  des  règles  et  préceptes  du  monde  prennent  ce  train,  de  nous  pous- 
ser hors  de  nous,  et  chasser  en  la  place,  à  l'vsage  de  la  société  pubhque,  III,  490. 

La  société  publique  n'a  que  faire  de  nos  pensées  :  mais  le  demeurant,  comme 
nos  actions,  nostre  trauail,  nos  fortunes  et  nostre  vie,  il  la  faut  prester  et  aban- 
donner à  son  seruice  et  aux  opinions  communes,  I,  176. 

La  volonté  et  les  désirs  se  font  loy  eux  mesmes,  les  actions  ont  à  la  receuoir  de 
l'ordonnance  publique,  III,  88. 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        VIE.  E.259 

Les  hommes  se  donnent  à  louage.  Leurs  facultez  ne  sont  pas  pour  eux;  elles 
sont  pour  ceux,  à  qui  ils  s'asseruissent;  leurs  locataires  sont  chez  eux,  ce  ne  sont 
pas  eux.  Il  faut  mesnager  la  liberté  de  nostre  ame,  et  ne  l'hypotequer  qu'aux 
occasions  iustes;  lesquelles  sont  en  bien  petit  nombre,  si  nous  iugeons  saine- 
ment, III,  486.  .  V 

L'occupation  est  à  certaine  manière  de  gents,  marque  de  suffisance  et  de  di- 
gnité. Leur  esprit  cherche  son  repos  au  bransle,  comme  les  enfans  au  berceau.  Ils 
se  peuuent  dire  autant  seruiables  à  leurs  amis,  comme  importuns  à  eux  mesmes. 
Personne  ne  distribue  son  argent  à  autruy,  chacun  y  distribue  son  temps  et  sa 
vie.  H  n'est  i-ien  dequoy  nous  soyons  si  prodigues,  que  de  ces  choses  là,  desquelles 
seules  l'auarice  nous  seroit  vtile  et  louable.  Pour  l'vsage  de  la  vie,  et  seruice  du 
commerce  public,  il  y  peut  auoir  de  l'o.xcez  en  la  pureté  et  perspicacité  de  noz 
esprits.  Cette  clarté  pénétrante,  a  trop  de  subtilité  et  de  curiosité.  Pourtant  se 
trouuent  les  esprits  communs  et  moins  tendus,  plus  propres  et  plus  heureux  à 
conduire  affaires.  Et  les  opinions  de  la  philosophie  esleuées  et  exquises,  se  trou- 
uent ineptes  à  l'exercice,  III,  48G. 

La  granité,  la  robbe,  et  la  fortune  de  celuy  qui  parle,  donne  souuent  crédit  à 
des  propos  vains  et  ineptes.  Il  n'est  pas  à  présumer,  qu'vn  monsieur,  si  suiuy,  si 
redouté,  n'aye  au  dedans  quelque  suffisance  autre  que  populaire  :  et  qu'vn  homme 
à  qui  on  donne  tant  de  commissions,  et  de  charges,  si  desdaigneux  et  si  mor- 
guant,  ne  soit  plus  habile,  que  cet  autre,  qui  le  salue  de  si  loing,  et  que  personne 
n'employé,  III,  350. 

Celuy  qui  va  en  la  pres-se,  il  faut  qu'il  gauchisse,  qu'il  serre  ses  couddes,  qu'il 
recule,  ou  qu'il  auance,  voire  qu'il  quitte  le  droict  chemin,  selon  ce  qu'il  rencon- 
tre. Qu'il  viue  non  tant  selon  soy,  que  selon  autruy  :  non  selon  ce  qu'il  se  pro- 
pose^  mais  selon  ce  qu'on  luy  propose  :  selon  le  temps,  selon  les  hommes,  selon  les 
affaires?  Somme,  il  faut  viure  entre  les  viuants,  et  laisser  la  riuiere  courre  sous 
le  pont,  sans  nostre  seing  :  ou  à  tout  le  moins,  sans  nostre  altération,  III,  316. 

De  vray,  pourquoy  sans  nous  esmouuoir,  rencontrons  nous  quelqu'vn  qui  ayt 
le  corps  tortu  et  mal  basty,  et  ne  pouuons  souffrir  le  rencontre  d'vn  esprit  mal 
rengé  sans  nous  mettre  en  cholere?  Cette  vitieuse  aspreté  tient  plus  au  iuge, 
qu'à  la  faute,  III,  346. 

Ceux,  qui  se  desrobent  aux  offices  communs,  et  à  ce  nombre  infini  de  règles 
espineuses,  à  tant  de  visages,  qui  lient  vn  homme  d'exacte  preud'hommie,  en  la 
vie  ciuilo  :  font,  à  mon  gré,  vne  belle  espargne  :  quelque  pointe  d'aspreté  pecu- 
liere  qu'ils  s'enioignent.  C'est  aucunement  mourir,  pour  fuir  la  peine  de  bien 
viure.  Ils  peuuent  auoir  autre  prix,  mais  le  prix  de  la  difficulté,  il  ne  m'a  iamais 
semblé  qu'ils  l'eussent.  Ny  qu'en  malaisanco,  il  y  ait  rien  audelà,  de  se  tenir 
droit  emmy  les  flots  de  la  presse  du  monde,  respondant  et  satisfaisant  loyalement 
à  touts  les  membres  de  sa  charge,  II,  frW. 

Indiscrette  nation.  Nous  ne  nous  contentons  pas  de  faire  sçauoir  nos  vices,  et 
folies,  au  monde,  par  réputation  :  nous  allons  aux  nations  estrangeres,  pour  les 
leur  faire  voir  en  présence.  Mettez  trois  François  aux  déserts  de  Lybie,  ils  ne 
seront  pas  vn  mois  ensemble,  sans  se  harceler  et  esgratigner.  Vous  diriez  que 
cette  pérégrination,  est  vne  partie  dressée,  pour  donner  aux  estrangers  le  plaisir 
de  nos  tragédies  :  et  le  plus  souuent  à  tels,  qui  s'esiouyssent  de  nos  maux,  et  qui 
s'en  moquent,  II,  576. 

La  naifueté  et  la  vérité  pure,  en  quelque  siècle  que  ce  soit,  trouuent  encore 
leur  opportunité  et  leur  mise,  III,  82. 

C'est  vn  excellent  moyen  de  gaigner  le  cœur  et  volonté  d'autruy,  de  s'y  aller 
soubsmettre  et  fier,  pourueu  que  ce  soit  librement,  et  sans  contrainte  d'aucune 
nécessité,  et  que  ce  soit  en  condition,  qu'on  y  porte  vne  fiance  pure  et  nette;  le 
front  au  moins  deschargé  de  tout  scrupule,  I,  198. 

La  crainte  et  la  deffiance  attirent  l'offence  et  la  conuient,  I,  196. 

Le  monde  n'est  que  babil,  et  ne  vis  iamais  homme,  qui  ne  die  plustost  plus, 
que  moins  qu'il  ne  doit,  I,  272. 

On  ne  parle  iamais  de  soy,  sans  perte.  Les  propres  condemnations  sont  tous- 
iours  accreuës,  les  louanges  mescruës,  III,  332. 

La  plus  honorable  vacation,  est  de  seruir  au  pubiiq,  et  estre  vtile  à  beaucoup 
III,  390. 


E.260  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

La  plus  heureuse  occupation  à  chascun,  faire  ses  particuliers  affaires  sans 
iniustice,  III,  394. 

Vn  honneste  iiomme  n'est  comtable  du  vice  ou  sottise  de  son  mestier;  et  ne  doit 
pourtant  en  refuser  l'exercice.  C'est  l'vsage  de  son  pays,  et  il  y  a  du  proffit.  Il 
faut  viure  du  monde,  et  s'en  preualoir,  tel  qu'on  le  trouue,  III,  500. 

Pour  estre  aduocat  ou  financier,  il  n'en  faut  pas  mescognoistre  la  fourbe,  qu'il 
y  a  en  telles  vacations,  III,  500. 

En  toute  police,  il  y  a  des  offices  nécessaires,  non  seulement  abiects,  mais  en- 
cores  vicieux.  Les  vices  y  trouuent  leur  rang,  et  s'employent  à  la  cousture  de 
nostre  liaison  :  comme  les  venins  à  la  conseruation  de  nostre  santé.  S'ils  deuien- 
nent  excusables,  d'autant  qu'ils  nous  font  besoing,  et  que  la  nécessité  commune 
efface  leur  vraye  qualité  :  il  faut  laisser  iouer  cette  partie,  aux  citoyens  plus  vi- 
goureux, et  moins  craintifs,  qui  sacrifient  leur  honneur  et  leur  ,'conscience,  comme 
ces  autres  anciens  sacrifièrent  leur  vie,  pour  lo  salut  de  leur  pays.  Nous  autres 
plus  foibles  pi-enons  des  rolles  et  plus  aysez  et  moins  hazardeux.  Le  bien  public 
requiert  qu'on  trahisse,  et  qu'on  mente,  et  qu'on  massacre  :  resignons  cette  com- 
mission à  gens  plus  obeissans  et  soupples,  III,  80. 

Il  ne  se  faict  aucun  profit  qu'au  dommage  d'autruy.  et  à  ce  compte  il  faudroit 
condamner  toute  sorte  de  guain.  Le  marchand  ne  faict  bien  ses  affaires,  qu'à  la 
débauche  de  la  ieunesse  :  le  laboureur  à  la  cherté  des  bleds  :  l'architecte  à  la 
ruine  des  maisons  :  les  officiers  de  la  lusticeaux  procez  et  querelles  des  hommes  : 
l'honneur  mesme  et  pratique  des  Ministres  de  la  religion  se  tii-e  de  nostre  mort  et 
de  noz  vices.  Nul  Médecin  ne  prent  plaisir  à  la  santé  de  ses  amis  mesmes.'dit  l'an- 
cien Comique  Grec;  ny  soldat  à  la  paix  de  sa  ville  :  ainsi  du  reste.  Et  qui  pis  est, 
que  chacun  se  sonde  au  dedans,  il  trouuera  que  nos  souhaits  intérieurs  pour  la 
plus  part  naissent  et  se  nourrissent  aux  despens  d'autruy.  Nature  ne  se  dément 
point  en  cela  de  sa  générale  police  :  la  naissance,  nourrissement,  et  augmentation 
de  chasque  chose,  est  l'altération  et  corruption  d'vn'  autre,  I,  154. 

Cent  fois  le  iour,  nous  nous  moquons  de  nous  sur  le  subiect  de  nostre  voysin, 
et  détestons  en  d'autres,  les  défauts  qui  sont  en  nous  plus  clairement  :  et  les  ad- 
mirons d'vne  merueilleuse  impudence  et  inaduertence,  III,  346. 

Ayons  tousiours  en  la  bouche  ce  mot  de  Platon  :  Ce  que  ie  treuue  mal  sain, 
n'est-ce  pas  pour  estre  moy-mesmes  mal  sain?  Ne  suis-ie  pas  moy-mesmes  en 
coulpe?  mon  aduertissement  se  peut-il  pas  renuerscr  contre  moy?Sage  et  diuin 
refrein,  qui  fouete  la  plus  vniuerselle,  et  commune  erreur  des  hommes.  Non  seu- 
lement les  reproches,  que  nous  faisons  lesvns  aux  autres,  mais  noz  raisons  aussi, 
et  noz  arguments  et  matières  controuerses,  sont  ordinairement  retorquables  à 
nous  :  et  nous  enferrons  de  noz  armes,  III,  346. 

VIEILLESSE. 

Nulle  vieillesse  peut  estre  si  caducque  et  si  rance,  à  vn  personnage  qui  a  passé 
en  honneur  son  aage,  qu'elle  ne  soit  vénérable,  II,  26. 

C'est  faute,  de  ne  se  sçauoir  recognoistre  de  bonne  heure,  et  ne  sentir  l'im- 
puissance et  extrême  altération  que  l'aage  apporte  naturellement  et  au  corps  et 
à  l'ame,  II,  30. 

Quelle  resuerie  est-ce  de  s'attendre  de  mourir  d'vne  défaillance  de  forces,  que 
l'extrême  vieillesse  apporte,  et  de  se  proposer  ce  but  à  nostre  durée  :  veu  que 
c'est  l'espèce  de  mort  la  plus  rare  de  toutes,  et  la  moins  en  vsage  ?  Nous  l'appel- 
ions seule  naturelle,  comme  si  c'estoit  contre  nature,  de  voir  vn  homme  se  rom- 
I)re  le  col  d'vne  cheute,  s'estoufer  d'vn  naufrage,  se  laisser  surprendre  à  la  peste 
ou  à  vne  pleurésie,  et  comme  si  nostre  condition  ordinaire  ne  nous  présentoit  à 
tous  ces  inconuenients.  Ne  nous  flattons  pas  de  ces  beaux  mots  :  on  doit  à  l'auen- 
ture  appeler  plustost  naturel,  ce  qui  est  gênerai,  commun  et  vniuersel,  I,  594. 

C'est  vne  puissante  maladie,  et  qui  se  coule  naturellement  ot  imperceptiblement  : 
il  y  faut  grande  prouision  d'estude,  et  grande  précaution,  pour  euiter  les  imper- 
fections qu'elle  nous  charge  :  ou  aumoins  affoiblir  leur  progrez,  III,  134. 

Tantost  c'est  le  corps  qui  se  rend  le  premier  à  la  vieillesse  :  par  fois  aussi  c'est 
l'ame  :  et  en  ay  assez  veu,  qui  ont  eu  la  ceruelle  affoiblie,  auant  l'estomach  et  les 


L'ESPRIT  DES  ESSAIS.        VIE.  E.261 

iambes.  Et  d'autant  que  c'est  vn  mal  peu  sensible  à  qui  le  souffre,  et  d'vne  obs- 
cure montre,  d'autant  est-il  plus  dangereux,  I,  598. 

Dieu  faict  grâce  à  ceux  à  qui  il  soustrait  la  vie  par  le  menu.  C'est  le  seul  béné- 
fice de  la  vieillesse.  La  dernière  mort  en  sera  d'autant  moins  plaine  et  nuisible  : 
elle  ne  tuera  plus  qu'vn  domy,  ou  vn  quart  d'iiomiue,  III,  674.         ^ 

Bien  sert  à  la  décrépitude  de  nous  fournir  le  doux  bénéfice  d'inappcrceuance 
et  d'ignorance,  et  facilité  à  nous  laisser  tromper.  Si  nous  y  mordions,  que  seroit- 
ce  de  nous?  II,  36. 

La  raison  nous  commande  de  nous  dospouiller,  quand  nos  robbcs  nous  char- 
gent et  empeschent,  et  de  nous  coucher  quand  les  iambes  nous  faillent,  II,  30. 

En  la  vieillesse,  nos  âmes  sont  subiectes  à  des  maladies  et  imperfections  plus 
importunes,  qu'en  la  ieunesse.  La  sagesse,  en  elle,  est  le  desgout  des  choses  pré- 
sentes deu  à  l'impuissance.  Outre  vue  sotte  et  caduque  fierté,  vn  babil  ennuyeux, 
ces  humeurs  espineuses  et  inassociables,  vn  soin  ridicule  des  richesses,  lors  que 
l'vsage  en  est  perdu,  i'y  trouue  plus  d'enuie,  d'iniusticcet  de  malignité.  Elle  nous 
attache  plus  de  rides  en  l'esprit  qu'au  visage  :et  ne  se  void  point  d'amcs,  ou  fort 
rares,  qui  en  vieillissant  ne  sentent  l'aigre  et  le  moisi,  III,  134. 

Nostre  estude  et  nostre  cnuie  deuroyent  quelque  fois  sentir  la  vieillesse.  Nous 
auonsie  pied  à  la  fosse,  et  noz  appétits  et  poursuites  ne  font  que  naistre,  II,  588. 

Voyez  vn  vieillart,  qui  demande  à  Dieu  qu'il  luy  maintienne  sa  santé  entière 
et  vigoureuse;  c'est  à  dire  qu'il  le  remette  en  ieune.sse.  N'est-ce  pas  folie?  Sa 
condition  ne  le  porte  pas,  III,  648. 

Le  soulagement  que  ie  trouue  en  ma  vieillesse,  c'est  qu'elle  amortist  en  moy 
plusieurs  désirs  et  seings,  dequoy  la  vie  est  inquiétée.  Le  seing  du  cours  du 
monde,  le  seing  des  richesses,  de  la  grandeur,  de  la  science,  de  la  santé,  de  moy, 

II,  588. 

C'est  grand  simplesse,  d'alonger  et  anticiper,  comme  chacun  fait,  les  incom- 
moditez  humaines.  l'ayme  mieux  estre  moins  long  temps  vieil,  que  d'estre  vieil, 
auant  que  de  l'estre,  III,  182. 

A  mesure  que  les  commoditez  naturelles  nous  faillent,  soustonons  nous  par  les 
artificielles.  C'est  iniustice,  d'excuser  la  ieunesse  de  suyure  ses  plaisirs,  et  deffen- 
dre  à  la  vieillesse  d'en  rechercher,  III,  136. 

Il  faut  retenir  à  tout  nos  dents  et  nos  griffes,  l'vsage  des  plaisirs  de  la  vie,  que 
nos  ans  nous  arrachent  des  poings,  les  vns  après  les  autres,  I,  426. 

le  hay  cet  accidentai  repentir  que  l'aage  apporte.  Le  chagrin,  et  la  foiblesse 
nous  impriment  vne  vertu  lasche^  et  caterreuse.  Il  ne  nous  faut  pas  laisser  em- 
porter si  entiers,  aux  altérations  naturelles,  que  d'en  abastardir  notre  iugement, 

III,  130. 

Qui  vit  iamais  vieillesse  qui  ne  louast  le  temps  passé,  et  ne  blasmast  le  présent, 
chargeant  le  monde  et  les  mœurs  des  hommes,  de  sa  misère  et  de  son  chagrin? 
II,  420. 

L'esprit  parfois  a  le  priuilege,  de  se  r'auoir  de  la  vieillesse,  ie  luy  conseille 
autant  que  ie  puis,  de  le  faire  :  qu'il  verdisse  ce  pendant,  s'il  peut,  comme  le  guy 
sur  vn  arbre  mort,  III,  184. 

Quand  ie  pourroy  me  faire  craindre,  i'aimeroy  encore  mieux  me  faire  aymer. 
Il  y  a  tant  de  sortes  de  deffauts  en  la  vieillesse,  tant  d'impuissance,  elle  est  si 
propre  au  mespris,  que  le  meilleur  acquest  qu'elle  puisse  faire,  c'est  l'affection  et 
amour  des  siens  :  le  commandement  et  la  crainte,  ce  ne  sont  plus  ses  armes,  II,  34. 

La  vieillesse  a  vn  peu  besoin  d'estre  traictee  plus  tendrement.  Recommandons 
la  à  ce  Dieu  protecteur  de  santé  et  de  sagesse  :  mais  gaye  et  sociale,  III,  704. 


VOLUPTÉ  (pi,.usnis). 

l'estime  pareille  iniustice,  de  prendre  à  contre  cœur  les  voluptez  naturelles,  que 
de  les  prendre  trop  à  cœur,  III,  684. 

Qui  ne  se  donne  loisir  d'auoir  soif,  ne  sçauroit  prendre  plaisir  à  boire,  I,  488. 

La  volupté  est  qualité  peu  ambitieuse;  elle  s'estime  assez  'riche  de  soy,  sans  y 
mesler  le  prix  de  la  réputation  :  et  s'ayme  mieux  à  l'ombre,  III,  182. 


E.262  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

L'intempérance  est  peste  de  la  volupté  :  et  la  tempérance  n'est  pas  son  fléau  : 
c'est  son  assaisonnement,  III,  692. 

La  iouissance  des  voluptez  mesmes,  l'aysance  et  la  facilité,  este  aux  roys  l'ai- 
gredouce  pointe  que  nous  y  trouuons,  I,  488. 

VOYAGES. 

Le  voyager  me  semble  vn  exercice  profitable.  L'ame  y  a  vne  continuelle  exerci- 
tation,  à  remarquer  des  choses  incogneuës  et  nouuelles.  Et  ie  ne  sçache  point 
meilUeure  escole,  à  façonner  la  vie,  que  dé  luy  proposer  incessamment  la  diuer- 
sité  de  tant  d'autres  vies,  fantasies,  et  vsances  :  et  luy  faire  gouster  vne  si  perpé- 
tuelle variété  de  formes  de  nostre  nature.  Le  corps  n'y  est  ny  oisif  ny  trauaillé  : 
et  cette  modérée  agitation  le  met  en  haleine,  III,  430. 

l'observe  en  mes  voyages  cette  praticque,  pour  apprendre  tousiours  quelque 
chose,  par  la  communication  d'autruy,  qui  est  vne  des  plus  belles  escholes  qui 
puisse  estre,  de  ramener  tousiours  ceux,  auec  qui  ie  confère,  aux  propos  des 
choses  qu'ils  sçauent  le  mieux.  Car  il  adulent  le  plus  souuent  au  contraire,  que 
chacun  choisit  plustost  à  discourir  de  mestier  d'un  autre  que  du  sien  :  estimant 
que  c'est  autant  de  nouuelle  réputation  acquise  :  par  ce  train  vous  ne  faictes 
iamais  rien  qui  vaille.  Ainsin,  il  faut  trauailler  de  reietter  tousiours  l'architecte, 
le  peintrcj  le  cordonnier,  et  ainsi  du  reste  chacun  à  son  gibier,  I,  92. 


TABLE  DES  MATIERES 

OBJET    DE    CE    FASClCtlLE. 


Abondance. 

Absence  (Amilié,  Ma- 
riage). 

Actions. 

Adultère  {Chasteté,  Ma- 
riage). 

Affaires  (Fortune ,  Vie 
publique). 

Affection  {Enfants). 

Age. 

Ambassadeurs. 

Ambition. 

Ame  {Immortalité  de 
Vâme). 

Amitié. 

Amour. 

Ampleur  de  vue. 

Animaux. 

Art  militaire. 

Art  mil.  {Quelques  façons 
de  procéder  de  Jules 
César). 

Auteurs. 

Avarice. 

Beauté. 
Bien,  Biens. 
Bon  sens. 
Bonheur. 
Bonté. 

Caractère. 

Cérémonie. 

Changements. 

Chasse. 

Chasteté. 

Châtiment. 

Choses. 

Civilité. 

Colère. 

Combat. 

Commandement. 

Compassion. 

Conduite  {Fortune). 

Conférence, 


Confession. 

Confiance. 

Connaissance  de  soi- 
même.  ' 

Conscien  ce. 

Conseil. 

Constance. 

Continence. 

Contradi  ction  {Con- 
traste). 

Contrainte. 

Conversation. 

Courage  (Fermeté). 

Coutume  (Habitude). 

Crédulité  (Prédictions, 
Miracles). 

Critique. 

Croyances  (Religion). 

Cruauté. 

Devoir. 

Dévotion  {Dieu,  Prières). 

Dieu  (Dévotion,  Prières, 

Reliques). 
Dieux. 

Dire  et  faire. 
Dissimulation. 
Divers. 
Diversion. 
Douleur. 
Duel  (Escrime). 

Économie. 
Éducation. 
Éloquence. 
Enfant. 

Escrime  (Duel). 
Espérance, 
Esprit. 
Essais. 

État  (Gouvernement). 
État  militaire  (Profes- 
sion). 
Expérience. 


Fatalité. 

Femme    (Amour,     Ma- 
riage, Ménage). 
Fermeté  (Courage). 
Festin. 
Flatterie. 
Folie. 
Fortune. 
Foule. 
Français. 
Funérailles: 

Gens  de  lettres. 
Gloire  (Réputation). 
Guerre  civile  (Troubles 
intérieurs). 

Habitudes  (Coutumes). 

Histoire. 

Homme. 

Honnêteté 

Ignorance. 

Imagination. 

Immortalité  de  l'âme. 

Imposture. 

Indépendance. 

Indigence. 

Initiative. 

Insatiabilité  de  l'homme. 

Inspiration. 

Instruction. 

Irrésolution. 

Ivrognerie. 

Jalousie. 
Jeux  publics. 
Jugement. 

Justice   (Langage  judi- 
ciaire. Lois). 

Lâcheté  (Peur). 

Laideur. 

Langage 


E.264 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


Langage  judiciaire. 

Libéralité. 

Liberté. 

Livres. 

Lois    (Jnslice,    Langage 

judiciaire). 
Louange    (Flatterie, 

Gloire,  Répulalion). 

Mal,  maux. 

Maladie. 

Mariage. 

Médecin,  médecine 

[Maujc,  Maladie). 
Méditation. 
Mémoire. 

Ménage  [Femme,  Ma- 
riage). 

Mensonge. 

Miracles  {Crédulité, 
Croyances). 

Modération. 

Modes. 

Mœurs. 

Monde. 

Montaigne  (Ménage, 
Mort,  etc.). 

Mort  (Maux,  Suicide, 
Vie). 

Nature  (Philosophie). 
Noblesse  (Noms). 
Noms  (Noblesse). 
Nouveauté. 

Obéissance. 

Odeurs. 

Opinion. 


Parenté. 

Paris. 

Parole. 

Parole  donnée. 

Passions. 

Pédantisme. 

Peine  (Punition). 

Pénitence. 

Pensées. 

Pères. 

Peuples. 

Peur 

Philosophie  (  Vérité). 

Physionomie. 

Plaisirs  (  Volupté). 

Pluralité  des  mondes. 

Poésie. 

Politique. 

Prédictions  (Crédulité). 

Présomption. 

Prévoyance. 

Prières  (Dévotion,  Dieu). 

Procès. 

Productions  littéraires. 

Prolétaires. 

Providence. 

Qualités. 
Querelles. 

Raison. 

Raison  d'État. 

Récompenses  honori- 
fiques. 

Religion  (Dévotion,  Dieu, 
Dieux). 

Repentir. 

Réputation  (Ame, 
Gloire). 


Ressemblance,  Dissem- 
blance.   , 
Retraite. 
Richesses. 
Rois  (Vie  publique). 
Rome. 

Sagesse. 

Santé. 

Savants. 

Savoir,  science. 

Secrets. 

Sens  (Des). 

Société. 

Sottise. 

Souvenir. 

Suicide. 

Testament. 
Torture. 
Trahison. 
Tristesse. 

Troubles     politiques 
(Guerre  civile). 

Vanité  (Présomption). 

Vengeance. 

Vérité  (Philosophie). 

Versatilité. 

Vertu. 

Vices. 

Vie. 

Vie  privée. 

Vie  publique. 

Vie  sociale.  v 

Vieillesse. 

Volupté  (Plaisirs). 

Voyages 


FASCICULE   F 


NOTES 


«  II  faut  des  notes  aux  Essais. 

«  II  en  faut,  parce  qu'on  y  trouve  en  grand  nombre  des  mots  hors  d'usage,  des 
"  faits  historiques  altérés  ou  qu'on  ne  sait  à  quelles  époques  rapporter,  des  allu- 
«  sions  obscures  à  des  événements  politiques  du  temps,  des  noms  propres  qui  ne 
■<  disent  rien  par  eux-mêmes,  et  aussi  parce  que  souvent  l'auteur  se  borne  à 
«  dire  :  un  ancien,  un  de  nos  rois,  etc.;  dans  tous  ces  cas,  il  faut  aider  le  lec- 
«  teur  et  rectifier  l'auteur  s'il  y  a  Heu. 

«  Il  en  faut  pour  commenter  Montaigne  par  lui-même,  pour  renvoyer  d'un 
"  passage  où  il  cxpi'ime  une  pensée,  à  un  autre  endroit  où  il  dit  le  contraire,  ou 
«  exprime  la  même  opinion  en  d'autres  termes.  II  en  faut  pour  signaler  les  lar- 
«  cins  qu'il  a  faits  à  une  foule  d'auteurs,  et  rappi-ocher  leur  phrase  de  la  sienne. 

«  Il  en  faut  encore  pour  citer  les  emprunts  que  les  modernes  se  sont  permis 
'<  si  souvent  à  son  égard,  souvent  sans  le  nommer,  et  les  idées  dont  ils  lui  sont 
«  redevables. 

«  Enfin,  pour  indiquer  les  principaux  changements  qu'il  a  apportés  à  son  ou- 
«  vrage  dans  ses  éditions  successives,  et  suivre  les  modifications  d'opinions 
«  qu'ont  pu  causer  chez  lui  l'âge,  les  voyages,  l'expérience  des  afïaires,  etc. 

«  Docteur  Payen.  » 

Les  nombres  en  marge,  en  caractères  gras,  indiquent  les  pages;  les  autres,  les 
lignes.  Le  mot  qui  suit  chacun  de  ces  derniers  sert  de  renvoi  au  passage  du  texte 
auquel  la  note  est  afférente. 

Dans  le  corps  du  texte,  les  groupes  de  nombres  indiquent,  le  premier  en 
chiffres  romains  et  en  caractères  gras,  le  volume;  le  second,  en  caractères  ordi- 
naires, la  page. 

La  lettre  N  signifie  note  ;  les  nombres  et  mots  qui  la  suivent  indiquent  le  vo- 
lume, la  page  et  la  note  auxquels  il  faut  se  reporter. 

Les  dates  en  caractères  gras  se  rapportent  aux  temps  antérieurs  à  notre  ère. 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


NOTES. 


PREMIER  VOLUME. 

Titre.  Essais.  —  Ce  titre,  donné  par  Montaigne  à  son  ouvrage,  semble  de  prime 
abord  assez  singulier.  La  signification  en  est  controversée.  Généralement 
on  l'explique  en  disant  qu'en  écrivant  son  livre,  l'auteur  s'essayait  à  écrire 
et  l'on  s'est  appuyé  à  cet  effet  sur  ce  que  lui-même  dit,  en  parlant  du  Discours 
de  la  Boétie'  sur  la  Servitude  volontaire  :  «  11  l'écriuit  par  manière  d'essay 
en  sa  première  ieunesse  (I,  298)  ».  —  II  y  a  plutôt  lieu  d'en  rechercher 
l'explication  dans  ce  membre  de  phrase  du  dernier  chapitre  de  son  pre- 
mier livre  :  «  Toute  cette  fricassée  que  ie  barbouille  icy,  n'est  qu'vn  re- 
gistre des  es-sais  de  ma  vie  (III,  626)  »,  d'après  quoi  son  ouvrage  serait 
l'exposé  des  essais,  c'est-à-dire  des  conceptions  morales  et  physiques,  au- 
trement dirdes  idées  qu'il  s'était  faites  au  cours  de  sa  vie,  sur  les  hommes 
et  les  choses. 

Montaigne.  —  On  a  beaucoup  discuté  sur  la  prononciation  du  nom  de 
Montagne  :  les  uns  opinant  pour  dire  «  Montègne  »,  comme  il  se  dit  ac- 
tuellement le  plus  ordinairement;  les  autres  pour  dire  «  Montagne  », 
comme  il  so  dit  couramment  dans  le  Périgord  et  le  Bordelais.  —  Les  pre- 
miers invoquent  Catherine  de  Médicis  dont  on  a  un  autographe  ou  il  est 
écrit  «  Montègne  »,  comme  vraisemblablement  on  a  pu  dire  à  la  cour;  les 
autres  se  réclament  notamment  de  Voltaire,  qui  a  écrit  <■  Montagne  »,  ce 
qui  indique  que  le  débat  remonte  loin. 

11  est  hors  de  doute  que  le  premier  mode  a  aujourd'hui  tendance  à  préva- 
loir, mais  le  second  se  justifie  par  les  considérations  ci-après  :  Le  village 
origine  de  ce  nom  était  ainsi  appelé  en  raison  do  son  site  élevé  (élévation, 
très  relative  du  reste),  et  il  se  nommait  et  se  nomme  encore  Montagne  », 
alors  qu'on  écrivait  «  Montaigne  »,  comme  on  prononçait  ménage,  dom- 
mage, image,  sauvage,  campagne,  Espagne,  Allemagne,  gagner,  tout  en 
écrivant  menaige,  domaige,  ymaige,  sauluaigc,  campaigne,  Espaigne,  AI- 
iemaigne,  gaigner;  comme  on  écrit  encore  Saint-Aignan,  Cavaignac,  bien 
que  l'on  prononce  Saint-Agnan,  Cavagnac. 

Dans  une  lettre  parvenue  jusqu'à  nous,  adressée  en  1585  par  Henri  IV  au 
maréchal  de  Matignon,  le  nom  de  Montaigne,  qui  s'y  trouve  deux  fois,  est 
écrit  une  première  fois  «  Montaigne  »  et  la  seconde  «  Montagne  ».  —  Sca- 
liger,  avec  lequel  il  était  en  assez  mauvaises  relations,  a  écrit  un  article 
assez  malintentionné  à  son  endroit  qu'il  a  intitulé  :  «  Monsieur  de  Mon- 
tagne ».  Cette  prononciation  ressort  encore  de  cette  recommandation  ty- 
pographique que  lui-même  avait  rédigée  en  vue  de  la  réédition  des  Es- 
sais :  Écrire  campaigne  espaigne  gascouigne  etc.  mettez  un  (/)  devant  le  (g) 
corne  a  monlaigne  non  pas  sans  (i)  campagne  espagne  (V.  Note  sur  la  lan- 
gue de  Montaigne,  fasc.  G);  et  aussi  de  la  teneur  du  diplôme  de  bourgeoi- 
sie romaine  qui  lui  a  été  délivré  (III.  480)  où  il  est  désigné  sous  le  nom  de 


F.270  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Montanus,  traduction  littérale  de  Montagnard,  dont  Montaigne  n'est  qu'une 
forme  dérivée.  Enfin  nombre  d'auteurs  du  xvii'  siècle,  Bayle  entre  autres, 
l'écrivent  exclusivement  de  cette  dernière  façon;  V.  N.  II,  136,  D'elle.  — 
Une  anecdote  à  ce  propos  :  Pendant  la  Terreur,  dit-on,  un  administrateur 
des  prisons,  en  tournée,  voyant  un  détenu  lisant  un  livre,  l'interpella  : 
«  Que  lis-tu  là?  •  —  «  Montaigne,  »  répondit  celui-ci  en  prononçant  à  la 
Bordelaise.  —  «  Montagne  J  bravo.  »  s'écria  son  interlocuteur  qui,  peu 
lettré,  s'imaginait  qu'il  s'agissait  d'une  œuvre  de  propagande  ou  d'une  apo- 
logie du  parti  révolutionnaire  de  ce  nom  aloi's  au  pouvoir  et  omnipotent. 
D'  Payes. 


14, 


Dans  l'édition  originale  de  1595,  le  texte  est  précédé  d'une  longue  préface,  do 
style  diffus  et  ampoulé,  de  Mademoiselle  de  Gournav;  nous  l'avons  suppri- 
mée comme  n'émanant  pas  de  Montaigne.  Dans  l'édition  qui  suivit,  portant 
la  date  de  1598,  son  auteur  la  remplaçait  par  une  autre  de  quelques  lignes, 
s'excusant  de  la  première  par  l'état  d'âme  où  il  s'était  trouvé,  en  se  voyant 
en  possession  et  chargé  de  la  réédition  de  cet  ouvrage  qui  l'avait  si  fort 
séduit.  Toutefois,  en  1635,  à  quarante  ans  d'intervalle,  Mademoiselle  de 
Gournay  rééditait  cette  préface,  mais  remaniée.  Les  défauts  dont  on  lui 
avait  fait  reproche  ont  alors  disparu  ;  comme  auparavant  elle  y  discute  et 
réfute,  mais  cette  fois  avec  assez  de  bonheur,  les  critiques  principales  dont 
déjà,  dès  leur  apparition,  les  Essais  avaient  étç  l'objet.  —  Cette  édition  ori- 
ginale de  1595,  imprimée  à  Paris,  par  Abel  L'Angelier,  a  été  éditée  par  lui 
et  simultanément  par  Michel  Sonnius  également  à  Paris;  l'impression  est 
unique,  sauf  la  partie  inférieure  du  frontispice  où  chacun  a  apposé  sa  mar- 
que et  son  nom. 

Av  Lectevr.  —  Cette  même  édition  originale,  sauf  quelques  exemplaires 
tirés  en  dernier  lieu,  ne  porte  pas  cet  avis  qui  existe  dans  toutes  les  édi- 
tions qui  l'ont  précédée.  Cette  particularité  proviendrait  de  ce  que  la  copie 
en  aurait  été  égarée  au  moment  de  l'impression,  qu'on  ne  s'en  serait  aperçu 
que  lorsque  le  tirage  était  presque  terminé,  et  qu'à  ce  moment  il  y  a  été 
pourvu  à  la  hâte.  D'  Payex.  —  Celui  donné  ici  est  tel  que  le  porte  l'exem- 
plaire de  Bordeaux,  avec  les  corrections  que  l'auteur  y  a  apportées  de  sa 
main. 

1,  Liure.  —  A  l'origine  l'u  et  le  v  se  confondaient  dans  l'imprimerie,  proba- 
blement par  suite  des  inscriptions  lapidaires  où  celte  confusion  se  re- 
trouve. Au  xvi'  siècle,  dans  les  lettres  majuscules,  on  ne  faisait  usage  que 
du  v;  dans  les  minuscules,  le  v  s'employait  toujours  au  commencement  des 
mots,  tandis  que  dans  le  corps  il  était  fait  exclusivement  emploi  de  l'u; 
c'est  Voltaire  qui,  finalement,  dans  son  dictionnaire,  établit  la  distinction 
actuellement  existante  entre  ces  deux  lettres,  le  v  consonne,  et  l'u  voyelle. 
—  L'i  et  le  j  s'employaient  pareillement  l'un  pour  l'autre  ;  toutefois  le  j  ne 
se  rencontre  guère  que  dans  le  cas,  assez  rare,  de  deux  ou  plusieurs  i  mi- 
nuscules consécutifs,  le  dernier  est  alors  figuré  par  un  j  :  Dij,  viij. 

10,  Fusse.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  paré  de  beautez  empruntées  ou  me  fusse 
tendu  et  bandé  en  wm  meilleure  démarche,  au  lieu  de  :  «  mieus...  estudiée  ». 

13,  Vit.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  mes  imperfections. 

20,  Vins.  —  Déjà  au  temps  de  Montaigne,  on  disait  quatre-vingts  au  lieu 
d'octante;  et  aussi  soixante-dix  et  quatre-vingt-dix  pour  septante  et  no- 
uante qui,  encore  d'usage  courant  en  Belgique,  ne  se  disent  plus  guère  en 
France  que  dans  quelques  localités  du  midi  ;  la  disparition  de  ces  expres- 
sions est  aussi  regrettable  qu'illogique.  —  L'édition  de  1588  est  datée 
i2  juin  1588;  l'exemplaire  de  Bordeaux,  premier  mars  mille  cinq  cens 
quattre  vins,  écrit  de  la  main  de  Montaigne  ;  c'est  cette  même  date,  mais 
avec  le  millésime  en  chiffres  arabes,  que  portent  les  éditions  de  1580,  82 
et  87. 


16, 


18. 


NOTES.        UV   I,  CH.  T.        VOL.  I,  PAG.  16.  F.271 


PREMIER  LIVRE 

CHAPITRE  I.  ^ 

6,  Galles.  —  Connu  sous  le  nom  de  «  Prince  Noir  »,  de  la  couleur  de  l'ar- 
mure qu'il  portait;  le  môme  qui  gagna  la  bataille  de  Poitiers  (1356)  où  il  (it 
pi'isonnier  le  roi  Jean  le  Bon.  Son  père,  Edouard  III,  roi  d'Angleterre,  avait 
érigé  pour  lui  la  Guyenne  en  principauté  (1363);  il  fixa  sa  résidence  à  Bor- 
deau.x  où  il  tint  une  cour  vraiment  royale  et  y  demeura  jusqu'à  sa  mort,  y 
laissant  la  mémoire  de  grands  exploits,  de  grandes  vertus  et  d'une  vie  sans 
tache. 

17,  Ville.  —  En  1370,  lors  de  la  gueri-e  de  Cent  Ans.  Les  trois  gentilshommes 
en  question  étaient  Messires  de  Villemur,  de  la  Roche  et  de  Beaufort,  ca- 
pitaines delà  cité  :  «  Nous  sommes  morts,  se  dirent-ils,  si  nous  ne  nous  dé- 
fendons et  vendons  chèrement  notre  vie,  ainsi  que  tout  chevalier  doit 
faire.  Et  ainsi  firent;  le  prince,  de  son  char,  les  vit  et  y  applaudit  fort.  » 
Fkoissart,  I.  —  Limoges,  pillée  et  brûlée,  fut  presque  complètement  dé- 
truite. 

18,  Scanderberch.  —  Autrement  dit  Alexandre  bey;  c'était  le  surnom  de 
Georges  Castriot,  roi  d'Albanie  (anc.  Epire),  qui  reconquit  son  royaume 
dont  son  père  avait  été  dépouillé  par  les  Turcs,  desquels  il  devint  la  terreur. 
Les  Albanais  le  chantent  encore  dans  leurs  chants  nationaux. 

Assiégé.  —  En  1140,  dans  Weinsberg,  ville  de  la  haute  Bavière.  Calvitius, 
Opiis  chronolvgicum.  —  V.  N.  III,  560,  Gibelin. 

12,  Lascheté.  —  Singulière  propension. 

15,  Stoiques.  —  Secte  de  philosophie  dont  les  adeptes  se  distinguaient  par- 
ticulièrement par  leur  fermeté  d'àme  et  l'austérité  de  leur  morale;  ils  esti- 
maient la  vertu  comme  le  souverain  bien,  niaient  que  la  douleur  fût  un 
mal,  croyaient  à  la  Providence  et  insistaient  sur  les  causes,  comme  étant 
plus  à  considérer  que  les  effets.  Les  Stoïciens  les  plus  célèbres  après  Zenon, 
furent  :  chez  les  Grecs,  Chrysippe  et  Epictète;  chez  les  Romains,  Caton 
d'Utique,  Sénèque  et  l'empereur  Marc-Aurèle;  chez  les  modernes,  .Juste- 
Lipse. 

22,  Enfans.  —  Par  contre,  La  Fontaine  dit  de  l'enfance  :  «  Cet  âge  est  sans 
pitié  »  ;  et  au  chapitre  XXII  de  ce  même  livre  (I,  158),  Montaigne  semble 
avoir  changé  d'avis. 

25,  Vertu.  —  Sous-entendu  :  «  il  peut  se  dire  »,  comme  on  lit  quelques  li- 
gnes plus  haut. 

31,  Peine.  —  Avec  beaucoup  de  peine. 

36,  Arrogante.  —  Scipion  Émilien,  accusé  de  concussion,  agit  à  peu  près 
de  même  et  avec  autant  de  succès,  V.  I,  660  et  N.  Pièces. 

36,  Balotes.  —  Petites  balles  ou  bulletins  employés  pour  aller  aux  voix  dans 

les  jugements  ou  les  élections. 
38,  Personnage.  —  Plutahqce,  Comment  on  peut  se  louer  soi-même.  —  Épa- 
minondas  avait  prolongé  de  quatre  mois  son  commandement  pour  avoir  le 
temps  de  réduire  les  Spartiates,  ses  ennemis,  à  l'impuissance  et  de  relever 
de  ses  ruines  et  repeupler  Messène,  leur  ennemie  séculaire.  Il  termina  son 
plaidoyer,  en  cette  circonstance,  en  demandant  qu'on  inscrivît  sur  sa 
tombe  qu'il  avait  été  condamné  pour  avoir  contraint,  malgré  eux,  les  Thé- 
bains  à  prendre  leur  revanche  des  Lacédémoniens  qui  les  avaient  pillés 
et  brûlés  cinq  cents  ans  auparavant,  rebâti  Messène  deux  cent  trente  ans 
après  sa  destruction  par  ces  mêmes  Lacédémoniens,  remis  les  peuples  de 
l'Arcadie  en  confédération  et  restitué  aux  Grecs  leur  liberté. 
20, 

4,  Vengeance.  —  Le   siège  de  Reggium  (368)  avait  été  motivé  par  une 


F.272  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

demande  que  Denys  l'Ancien,  tyran  de  Syracuse,  avait  adressée  pour  ob- 
tenir en  mariage  une  fille  de  cette  cité,  demande  à  laquelle  il  fut  répondu 
qu'on  n'avait  à  lui  donner  que  la  fille  du  bourreau;  le  siège  dura  onze 
mois,  la  famine  seule  eut  raison  de  la  résistance  des  habitants.  Diodore  de 
Sicile,  XIV,  29. 

22,  Homme.  —  Cette  idée  si  juste  et  les  termes  employés  à  la  rendre  si 
heureux  sont  passés  à  l'état  d'aphorisme  que  l'on  entend  dire  sans  cesse. 
Charron  s'en  est  emparé  comme  de  tant  d'autres  de  Montaigne  ;  le  chapitre  1 
du  premier  livre  de  son  ouvrage  sur  la  Sagesse  commence  ainsi  : 
«  L'homme  est  un  sujet  merveilleusement  divers  et  ondoyant,  et  sur  lequel 
il  est  très  malaisé  d'y  avoir  un  jugement  assuré.  »  —  «  L'inconstance  des 
hommes  est  si  variée  dans  ses  effets,  qu'on  peut  essayer  de  la  peindre, 
même  après  Pascal  •  (Chateaubriand).  —  Ondoyant  et  divers  est  du  reste  une 
expression  qu'affectionne  Montaigne,  on  la  retrouve  à  diverses  reprises  dans 
les  Essais,  I,  300:  II,  70. 

22,  Vniforme.  —  Pensée  à  rapprocher  du  ch.  I  du  liv.  II,  où  Montaigne 
traite  de  l'inconstance  de  nos  actions. 

27,  Peine.  —  En  79.  Les  Mamertins  étaient  les  descendants  des  mercenaires 
employés,  lors  de  leurs  guerres,  par  les  Syracusains  et  les  Carthaginois. 
Ramassis  de  gens  sans  aveu  et  de  tous  les  pays,  ils  s'étaient  établis  par  les 
armes  aux  environs  de  Messine,  en  Sicile,  dont  ils  avaient  fait  leur  place 
d'armes,  prenant  pour  nom  celui  de  leur  dieu  Mamers  ou  Mars  confirmant 
par  là  leur  résolution  de  faire  ia  guerre  pour  la  guerre,  et,  de  fait,  ne  vi- 
vant que  de  brigandage.  —  Lors  de  la  guerre  civile  entre  Marins  et  Sylla, 
ils  avaient  embrassé  le  parti  du  premier  à  l'instigation  de  l'un  de  leurs 
orateurs  (que  Plutarque  nomme  Stenon  dans  Vlnstmœiion  pour  ceux  qui 
manient  affaires  d'état,  Stennius  dans  les  Apoihthegmes,  Stenis  dans  la  Vie 
de  Pompée),  ce  qui  avait  attiré  sur  eux  Pompée,  lieutenant  du  second. 
S'étant  tout  d'abord  réclamés  de  leur  privilège,  ils  s'étaient  attiré  cette  ré- 
ponse :  «  Que  parlez-vous  de  lois  à  qui  porte  l'épée?  »  —  Lors  de  la  reddi- 
tion de  Calais  aux  Anglais,  en  1347,  Eustache  de  S. -Pierre  a  renouvelé 
l'acte  de  dévouement  de  Sténon  à  l'égard  de  ses  concitoyens. 

27,  Peruse.  —  En  82.  Le  jeune  Marins,  battu,  s'était  réfugié  à  Preneste  (et 
non  Pérouse),  dans  le  Latium,  contrée  d'Italie  avoisinant  Rome.  La  ville, 
assiégée  par  les  troupes  de  Sylla,  dut  capituler.  Cetliegus,  lieutenant  de 
Sjflla,  avait  promis  la  vie  sauve  à  la  population  ;  mais  le  dictateur,  s'y  étant 
rendu  en  personne,  fit  d'abord  juger  et  exécuter  chacun  des  habitants  en 
particulier;  puis  trouvant  que  ces  formalités  lui  prenaient  trop  de  temps, 
il  les  fit  tous  rassembler  en  un  même  lieu  au  nombre  de  12.000,  et  égorger 
en  sa  présence.  Il  ne  voulut  faire  grâce  de  la  vie  qu'à  son  hôte,  mais  celui-ci 
lui  dit  qu'il  ne  voulait  pas  devoir  son  salut  au  bourreau  de  sa  patrie,  et, 
se  jetant  au  milieu  de  ses  compatriotes,  il  se  fit  tuer  avec  eux.  Plutarque, 
Instruction  pour  ceux  qui  manient  affaires  d'état. 
22, 

8,  Talons.  —  •  Et  qu'on  y  trauersast  vue  corde  ».  Add.  de  1558. 

15,  Opposition.  —  En  332.  Outre  que  la  résistance  prolongée  de  Gaza  avait 
contrarié  les  projets  d'Alexandre  en  retardant  son  entrée  en  Egypte,  ce  siège 
avait  coûté  beaucoup  de  sang  aux  Macédoniens,  lui-même  y  avait  été 
blessé.  De  là  son  ressentiment  contre  Bétis  qui  avait  été  l'àme  de  la  défense, 
à  quoi  il  faut  ajouter,  dit  Quinte-Curce,  IV,  6,  qu'en  cela  il  se  glorifiait 
d'imiter  en  quelque  sorte  dans  sa  vengeance  Achille,  l'auteur  de  sa  race, 
traînant  le  cadavre  d'Hector  ainsi  attaché  derrière  son  char. 

29,  Esclaues.  —  En  335.  Les  Thébains  avaient  pris  occasion  de  donner  le 
signal  du  soulèvement  de  la  Grèce  asservie  par  Philippe  de  Macédoine,  alors 
qu'Alexandre  son  successeur  combattait  les  Barbares  sur  l'Ister  (Danube). 
Revenant  en  hâte,  et  ses  offres  de  conciliation  ayant  été  repoussées,  le 
nouveau  l'oi  assiège  Thèbes,  s'en  empare  après  une  défense  acharnée  qui 
coûte  6.000  h.  à  ses  adversaires,  et  la  fait  raser.  A  l'exception  des  prêtres, 
de  ses  partisans  et  des  descendants  de  Pindare  dont  il  avait  respecté  la 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  I.         VOL.  I,  PAG.  22.  F.273 

maison,  tout  le  reste  fut  vondu  comme  esclaves.  Sa  colère  passée,  Alexan- 
di'e  lit  bon  accueil  à  tous  les  Thébains  échappés  au  désastre,  qui  s'adres- 
sèrent à  lui  ;  et,  par  la  suite,  il  marqua  à  diverses  reprises  son  regret  de 
s'être  montré  si  dur  en  cette  circonstance.  Il  attribua  le  meurtre  de  Clitus. 
le  refus  de  son  armée  de  le  suivre  au  delà  de  l'indus,  à  la  rancune  de  Bac- 
chus,  dieu  tutélairc  de  T)icbes.  Diodoue  de  Sicile,  XVII,  4. 


CHAPITRE  II. 

24. 

•,>,  Malignité.  — .  'fristi'y.in,  eu   italien,  signifie  malignité,  méchanceté;  ot 
Irislilia,  tristesse,  ennui. 
0,  Perse.  —En  525;  11i';i!uijoti:,  III,  14. 

H,  Domestiques.  —  Ne  signilie  pas  ici  serviteur,  mais  ami  de  la  maison, 
familier,  sens  que  ce  mot  avait  en  latin  et  au  temps  de  Montaigne,  et  qu'il 
a  conservé  longtemps  encore  après.  Hérodote  dit  que  cet  homme  était  un 
vieillard  qui  mangeait  ordinairement  à  la  table  du  roi  (Le  Clerc). 
11,  Nostres.  —  Un  prince  des  nôtres,  c'est-à-dire  un  prince  français,  mais 
n'appartenant  ni  à  la  maison  royale  de  France,  ni  à  celle  des  Bourbons.  — 
Il  est  question  ici  du  cardinal  Charles  de  Lorraine  qui,  en  LjG3,  était  au 
concile  de  Trente  (Tyrol),  lorsqu'il  apprit  l'assassinat  du  duc  de  Guise  par 
Poltrot  de  Méré  et  la  mort,  à  la  suite  de  la  bataille  de  Dreux,  d'un  autre 
frère  bâtard,  abbé  de  Cluny. 
31,  Exprimer.  —  Cette  disposition  d'esprit  si  contradictoire  existe  en  moi  et 
probablement  chez  beaucoup  d'autres  :  Toute  histoire  touchante  que  je  lis, 
tout  drame  que  je  vois  représenter  au  théâtre,  me  font  venir  les  larmes 
aux  yeux,  tandis  que  les  faits  analogues  de  la  vie  réelle  dont  je  suis  té- 
moin, si  tragiques  soient-ils  et  lors  même  que  j'y  suis  directement  inté- 
ressé, me  laissent  impassible.  La  nouvelle  de  la  mort  de  mon  fils  aîné,  sur- 
venue au  Tonkin  et  apprise  par  la  voie  des  journaux,  ne  m'a  causé  sur  le 
moment  nulle  émotion  apparente,  tandis  que  depuis,  et  aujourd'hui  encore, 
après  bien  des  années,  ma  pensée  ne  se  reporte  jamais  sur  lui  sans  un  at- 
tendrissement manifeste.  G.  I\I.  —  A  la  suite  de  cette  réponse  de  Psam- 
méjiite,  Cambyse  donna  ordre  de  délivrer  son  fils  et  .«.a  fille;  mais  déjà  le 
premier,  conduit  au  supplice  un  mors  dans  la  bouche,  ce  qui  était   un 
signe  de  servage,  n'était  plus,  et  lui-même,  il  le  traita  avec  bonté.  Dans 
la  suite,  Psamménite  ayant  incité  les  Égyptiens  à  la  révolte,  fut  condamné 
à  boire  du  sang  de  taureau,  ce  dont  il  mourut  sur-le-champ.  Hérodote, 
III,  14. 
o7,  Dueil.  —  Lors  de  la  guerre  de  Troie  (XIV''  siècle),  des  vents  contraires 
persistants  empêchant  la  flotte  des  Grecs  de  mettre  à  la  voile,  les  devins 
déclarèrent  que  c'était  du  fait  de  Diane  irritée  contre  Agamemnon  leur 
chef  et  que  la  déesse  ne  pouvait  être  apaisée  que  par  le  sang  d'une  prin- 
cesse de  la  famille  royale.  Après  avoir  longtemps  lutté,  Agamemnon,  cédant 
aux  sollicitations  de  ses  alliés,  consentit  au  sacrifice  d'Iphigénie  sa  fille. 
Diane  satisfaite  substitua  à  la  victime  une  biche  qui  lui  fut  immolée  et 
transporta  la  princesse  en  Tauride  où  elle  en  fit  une  prétresse  de  son  culte. 
—  Le  peintre  qui  peignit  cette  scène,  Timanthe  (IV"  siècle),  donnait  au 
grand  prêtre  Calchas,  qui  avait  réclamé  le  sacrifice,  l'air  abattu  ;  il  repré- 
sentait Ulysse  consterné,  Ajax  frémissant  de  rage  d'une  telle  cruauté,  Mé- 
nélas  poussant  des  cris  lamentables,  un  aruspice,  des  amis,  un  frère  en 
pleurs,  et  Agamemnon,  le  père  de  la  victime,  la  tête  couverte  d'un  voile, 
laissant,  a-t-on  dit,  à  la  sensibilité  du  spectateur  à  juger  de  sa  douleur 
peut-être  aussi  n'était-il  affublé  de  ce  voile  qu'en  suite  du  rite  en  pareille 
circonstance,  ainsi  que  cela  se  voit  dans  certaines  cérémonies  de   l'Église 
catholique,   lors   des  relevailles   par    exemple.  Cicérox,  Orat.,  22;  Valéke 
Maxime,  VllI,  II.  —  Plutarque  raconte  un  fait  identique  au  sacrifice  d'Iphi- 
génie :  le  consul  romain  Métellus,  devant  passer  en  Sicile  avec  son  armée, 

ESSAIS   DE    MO.NTAIGNE.    —   T.    IV.  18 


F.274  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

avait  sacrifié  aux  Dieux,  mais  en  omettant  Vesta.  Celle-ci  pour  se  venger 
fit  également  souffler  des  vents  contraires  qui  mettaient  obstacle  au  départ. 
Pour  l'apaiser,  Métellus,  sur  le  conseil  des  devins,  consentit  également 
à  lui  sacrifier  sa  fille  et  Vesta,  comme  Diane  prise  de  compassion,  substi- 
tua une  génisse  à  la  victime  qu'elle  transporta  à  Lavinium  et  attacha  à 
ses  autels.  —  Ce  passage  des  Essais  est  peut-être  ce  qui  a  inspiré  à  Robert 
Fleury  de  représenter,  dans  son  tableau  de  la  mort  de  Montaigne,  sa  veuve 
la  figure  masquée  par  un  mouchoir  qu'elle  tient  à  la  main. 

40,  Rocher.  —  Niobé,  glorieuse  de  ses  sept  garçons  et  de  ses  sept  filles,  en 
vint  à  mépriser  Latone  qui  n'avait  d'enfants  qu'Apollon  et  Diane.  La 
déesse  offensée  leur  remit  le  soin  de  la  venger;  ils  firent  périr  sous  leurs 
flèches  tous  ceux  de  Niobé,  tandis  que  la  mère  elle-même  était  changée  en 
rocher.  Mythologie. 

11,  Malis.  —  Le  texte  d'Ovide  porte  :  DiriguUque  malis. 
26, 

9,  Mena.  —  Mena,  dans  cette  acception,  est  purement  latin;  on  dit  dans 
cette  langue  ducere  bellum,  faire  la  guerre.  Naigeon. 
•  10,  Hongrie.  —  En  1560,  à  propos  de  la  couronne  de  Hongrie  que  Ferdi- 
nand 1,  empereur  d'Allemagne,  disputa  d'abord  à  Jean  I  Zapoix',  puis  à 
son  fils  Jean  11,  dont  les  droits  étaient  défendus  par  sa  mère  Isabelle,  con- 
flit qui  se  termina  par  le  mariage  de  Jean  II  avec  la  fille  de  Ferdinand. 

31,  Nocte.  —  Ces  vers  de  Catulle  sont  une  imitation  d'une  ode  de  Sappho, 
que  Boileau  a  traduite.  Delille  a  fait  quelques  changements  à  cette  traduc- 
tion, pour  se  rapprocher  davantage  de  la  forme  de  l'ode  sapphique  : 

«  De  veine  en  veine,  une  subtile  flamme 
Court  dans  mon  sein,  sitôt  que  je  te  vois; 
Et,  dans  le  trouble  où  s'égare  mon  ame, 

Je  demeure  sans  voix. 
Je  n'entends  plus,  un  voile  est  sur  ma  vue; 
j         Je  rêve,  et  tombe  en  de  douces  langueurs; 
Et,  sans  haleine,  interdite,  éperdue. 

Je  tremble,  je  me  meurs!  » 

39,  louïssance.  —  Add.  de  1588  :  accidenl  qui  ne  m'est  pas  incoqneu. 
28, 

1,  Routte.  —  Déroute,  de  l'italien  rotta  qui  a  même  signification. 
1,  Cannes.  —  Le  fait  est  affirmé  par  Pline,  VII,  54.  —  Tite-Live  en  raconte 
un  semblable  arrivé  après  la  bataille  de  Trasimène,  perdue  l'année  précé- 
cédente  (217)  également  par  les  Romains  contre  Annibal. 

1,  Sophocles.  —  Sophocle  serait  mort  de  joie,  disent  les  uns,  en  apprenant 
le  succès  d'une  de  ses  pièces;  selon  d'autres,  en  avalant  un  grain  de  raisin, 
comme  il  arriva  à  Anacréon.  On  attribue  à  Sophocle,  mort  à  90  ans  en- 
viron, 120  à  130  pièces  de  théâtre;  vingt  fois,  il  avait  remporté  la  palme 
de  la  tragédie.  —  Chilon  serait  également  mort  .de  joie,  en  embrassant  son 
fils  couronné  aux  Jeux  Olympiques. 

2,  Tyran.  —  Pline  (VII,  54)  dit  que  ce  fut  la  joie  d'avoir  remporté  le  prix 
de  tragédie  qui  causa  la  mort  de  Denys;  Diodore  de  Sicile,  que  ce  furent 
les  excès  de  table  auxquels  il  se  livra  en  suite  de  la  satisfaction  qu'il  en 
éprouva.  —  Cette  épithète  de  «  tyran  »  n'impliquait  pas,  dans  l'antiquité 
comme  de  nos  jours,  une  idée  de  cruauté;  chez  les  Grecs,  comme  chez  les 
Romains,  elle  désignait  un  souverain  de  pouvoir  absolu  et  le  plus  souvent 
usurpé. 

4,  Décernez.  —  En  Corse,  en  163,  Thalva,  ou  mieux  Thalna,  offrait  un  sa- 
crifice quand  il  reçut  le  décret  du  Sénat  qui  lui  accordait  les  honneurs  du 
triomphe;  il  l'ouvrit,  le  lut  et  tomba  expirant  de  l'autel.  Vau:re  Maxime, 
IX,  12.  —  Pour  obtenir  les  honneurs  du  triomphe,  il  fallait  avoir  vaincu 
dans  une  bataille  où  cinq  mille  ennemis  au  moins  avaient  été  tués,  ce  qui 
amenait  souvent  à  continuer  le  carnage,  lors  même  que  déjà  on  était  vic- 
torieux. 


NOTES.         LIV.  1,  CH.  II.         VOL.  I,  PAG.  28.  P.27S 

7,  Mourut.  —  En  1521;  Léon  X  venait  d'apprendre  coup  sur  coup  la  reprise 
de  Milan,  de  Plaisance  et,  le  jour  même  de  sa  mort,  celle  de  Parme  sur  les 
Français  qu'il  abhorrait.  Sa  fin  inopinée  donna  lieu  à  des  soupçons  d'em- 
poisonnement que  discrètement  on  s'abstint  d'élucider.  Glicciardin,  Hist. 
d'Ilalic,Xl\.  —  Martin  du  Bellay  (1.  Il)  dit  ;issez  plaisamment  à  cette  occa- 
sion :  •<  Le  pape  Léon  X  fut  bien  aise  de  mourir  de  joie.  » 

11,  Faict.  —  Diodore  mourut  de  honte  de  n'avoir  pu  répondre  sur  le  moment 
même  à  des  raisonnements  captieux  que  lui  proposait  Stilpon.  Pline,  VII,  53 


CHAPITRE  III. 

14,  Béant.  —  Béer,  verbe  qui  avait  le  sens  du  mot  latin  inliiare;  n'est  plus 
aujourd'hui  usité  qu'aux  participes  :  bouche  bée,  bouche  béante. 

26,  Plus.  —  «  Le  présent  n'est  jamais  notre  but;  le  seul  avenir  est  notre  objet; 
ainsi  nous  ne  vivons  jamais,  mais  nous  espérons  vivre.  »  Pascal.  —  «  La 
nature  nous  rendant  malheureux  en  tous  états,  nos  désirs  nous  figurent 
un  état  heureux;  et,  quand  nous  arriverions  à  les  satisfaire,  nous  n'en  se- 
rions pas  plus  heureux  pour  cela,  parce  que  nous  en  aurions  d'autres  con- 
formes à  notre  nouvel  état.  »  La  Bruyère.  —  «  La  vie...  se  passe  toute  à 
désirer;  l'on  remet  à  l'avenir  son  repos  et  ses  joies...  Ce  temps  arrive  qui 
nous  surprend  dans  les  désirs...;  on  en  est  là  quand  la  fièvre  nous  saisit  et 
nous  éteint;  si  on  eût  guéri,  ce  n'eût  été  que  pour  désirer  plus  longtemps.  » 
La  Bruyère. 

il,  Anxius.  «  Tant  de  prudence  entraîne  trop  de  soin, 

Je  ne  sais  pas  prévoir  les  malheurs  de  si  loin.  • 

Racine,  Andromaque. 

...  «  La  prévoyance!  La  prévoyance  qui  nous  porte  sans  cesse  au  delà  de 
nous,  souvent  nous  place  où  nous  n'arriverions  point  ;  voilà  la  véritable 
source  de  toutes  nos  misères.  »  J.-J.  Rousseau,  Emile. 

28,  Congnoy.  —  «  Un  beau  mot,  dit  Platon  dans  Timée,  court  depuis  long- 
temps dans  le  monde,  c'est  que  seul  le  sage  s'attache  uniquement  à  ses 
propres  affaires  et  arrive  .'  se  connaître  lui-même.  »  —  Cette  même  idée  se 
retrouve  dans  ces  sentences  si  souvent  reproduites  :  rvwôl  asauTÔv  et  Nosce 
le  ipsum  (Connais-toi  toi-même). 
30, 

4,  L'aduenir.  —  Épicure  enseignait  que  le  plaisir  est  le  souverain  bien  de 
l'honmie  et  que  tous  ses  efforts  doivent  tendre  à  l'obtenir;  mais  il  faisait 
consister  le  plaisir  dans  la  culture  do  l'esprit  et  la  pratique  de  la  vertu. 
Après  lui,  ses  disciples  dénaturèrent  sa  doctrine  en  l'étendant  aux  plaisirs 
des  sens,  que  ses  adversaires  ont  alors  présentés  comme  étant  son  unique 
but,  ce  qu'avec  eux  la  postérité  a  trop  facilement  admis.  11  expliquait  tout 
par  le  concours  fortuit  des  atomes,  rejetait  l'immortalité  de  l'àme,  admet- 
tait des  dieux,  êtres  d'une  nature  supérieure  à  l'homme,  mais  leur  refusait 
toute  action  sur  le  monde  et  niait  la  Providence,  prétendant  détruire  ainsi, 
par  la  racine,  toute  superstition. 

6,  Mort.  —  Il  en  était  ainsi  dans  l'Egypte  ancienne  à  l'égard  des  rois  et  même 
des  simples  particuliers.  Tout  le  monde  avait  le  droit  d'accusation,  et,  si  le 
fait  incriminé  était  prouvé,  il  entraînait  la  privation  de  sépulture  légale, 
c'est-à-dire  en  rapport  avec  le  rang  que  le  mort  avait  occupé  et  dans  le 
lieu  que  ce  rang  lui  assignait.  Diodore  de  Sicile,  I,  6.  —  ••  Il  est  étonnant  et 
regrettable,  lit-on  dans  rEnc}xlopédie  du  xvin"  siècle,  que  ceux  qui  ont  ima- 
giné le  dogme  de  l'immortalité  de  l'àme,  ne  s'en  soient  pas  servis  pour,  en 
même  temps,  persuader  aux  hommes  qu'ils  entendront  dans  l'autre  monde  les 
jugements  divers  qu'on  portera  sur  eux  lorsqu'ils  ne  seront  plus.  >•  Dans  ces 
jugements  il  ne    faut   probablement  pas  comprendre   ces  panégyriques 


F.276  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

d'usage,  toujours  exagérés,  quand  ils  ne  sont  pas  complètement  menson- 
gers, prononcés  aujourd'hui  sur  nos  tombes. 

•  Quand  un  roi  fainéant,  la  vergogne  des  princes, 

Laissant  à  ses  flatteurs  le  soin  de  ses  provinces, 

Entre  les  voluptés  indignement  s'eodort. 

Quoique  l'on  dissimule,  on  n'en  l'ait  point  d'estime. 

Et  si  la  vérité  se  peut  dire  sans  crime, 

C'est  avecque  plaisir  qu'on  survit  à  sa  mort.  » 

Malherbe. 

On  ne  saurait  dire  toutefois  que,  même  de  nos  jours,  la  mémoire  des  Chefs 
d'État  qui,  abusant  de  leur  irresponsabilité  constitutionnelle,  laissent  tout 
faire,  échappe  à  toute  sanction.  La  simple  énonciation  d'une  quelconque  de 
ces  mentions,  suivant  le  cas  :  <■  Panama,  Fachoda,  Algésiras,  Grèves  uni- 
verselles. Expulsion  des  congrégations,  Suppression  de  l'enseignement  reli- 
gieux. Confiscation  des  biens  de  l'Église,  Accroissement  des  monopoles,  Dé- 
ficit,etc...  »,  au  revers  d'une  médaille  à  leur  effigie,  en  dira  plus  à  la  posté- 
rité que  toutes  les  polémiques  de  l'époque. 

7,  Loix.  —  Comparaison  tirée  des  corporations  de  métiers  :  le  maître  et  le 
compagnon. 

9,  Successeurs.  —  A  Venise,  après  la  mort  d'un  doge,  on  nommait  trois 
inquisiteurs  chargés  de  recevoir  les  plaintes  de  ceux  auxquels  il  avait  pu 
faire  quelque  dommage  pécuniaire  ;  ses  héritiers  en  devaient  réparation, 
quelquefois  même  avec  amende.  —  Il  devrait  bien  en  être  actuellement  ainsi 
en  France,  non  seulement  à  l'égard  des  Chefs  de  l'État,  mais  de  tout  minis- 
tre, et  cette  instruction  s'ouvrir  dès  qu'ils  sortiraient  de  charge  et  s'éten- 
dre «ans  que  jamais  il  y  ait  prescription  à  tous  les  dénis  de  justice,  quels 
qu'ils  soient,  commis  aussi  bien  par  action  que  par  omission,  c'est-à-dire 
qu'Usaient  commis  soit  par  abus  d'autorité,  faiblesse, compromis  politique  et 
même  par  ignorance,  ou  laissés  s'accomplir  quand  leur  devoir  eût  été  de  s'y 
opposer;  on  évincerait  peut-être  de  la  sorte  de  ces  fonctions,  pour  le  plus 
grand  bien  de  la  chose  publique,  nombre  de  gens  sans  caractère  ou  inca- 
pables que  nous  voyons  journellement  briguer  ou  accepter  ces  mandats. 

13,  Leur.  —  Au  ch.  XLII  de  ce  même  livre  (I,  492),  Montaigne  reprend  cette 
même  idée  :  «  ...  le  méchant,  le  bon  roy...  autant  en  a  l'vn  que  l'autre  ». 

14,  Roys.  —  A  moins  qu'ils  ne  commandent  le  crime,  comme  fit,  en  1572, 
le  vicomte  d'Orthez  refusant  de  se  prêter,  à  Rayonne,  aux  massacres  de  la 
Saint-Barthélémy  :  «  Sire,  répondit-il  à  Charles  IX,  j'ai  communiqué  le 
commandement  de  V.  M.  à  ses  fidèles  habitants  et  gens  de  guerre  de  la 
garnison;  je  n'y  ai  trouvé  que  bons  citoyens  et  fermes  soldats,  mais  pas 
un  bourreau.  C'est  pourquoi  eux  et  moi  vous  supplions  de  ne  vouloir  em- 
ployer nos  bras  et  nos  vies  qu'en  choses  possibles,  quelque  hasardeuses 
qu'elles  soient.  »  —  D'autres  encore  se  refusèrent  à  l'exécution  des  ordres 
relatifs  à  ces  massacres  :  parmi  lesquels  Éléonor  de  Chabot,  gouverneur  de 
la  Bourgogne  ;  le  marquis  de  la  Guiche,  à  Maçon  ;  le  duc  de  Longueville,  en 
Picardie;  Matignon,  en  Normandie;  Saint-IIéran,  en  Auvergne.  — Le  nom- 
bre des  victimes  fut,  dans  les  principales  localités  :  à  Paris,  2.500  à  3.000;  à 
Orléans,  500;  à  Meaux,  200;  à  Lyon,  7  à  800. 

28,  Tesmoignages.  —  TrrE-LivE,  XXXV,  48. 

32,  Mal.  —  Le  premier  était  le  tribun  militaire  Subrius  Flavius,  le  même 
dont  il  est  question  II,  145,  le  second  le  centurion  Sulpitius  Afer,  tous  deux 
inculpés  dans  la  conspiration  de  Pison  (65).  Tacite,  Ann.,  XV,  67  et  08. 


32, 


1,  Police.  —  Est  employé  ici  et  à  maintes  reprises  dans  les  Essais  avec  sa 
signification  grecque  :  tcôXi;,  ville,  et  iio),iT£ta,  république. 

6,  Leurs.  —  Hérodote,  VI,  68. 

8,  Dernier.  —  Hérodote,- VI,  68.  —  Postrême  et  dernier  sont  synonymes;  le 
premier  vient  du  latin  poslremus  et  en  a  retenu  le  sens. 


34. 


NOTES.         LIV.  I,  CM  Ul.         VOL.  I,  PAG.  32.  F.277 

S,Aristote.  —  Ai-istoto  fut  lo  génie  le  plue  vaste  de  l'antiquité  (IV  siècle).  Il 
a  embrassé  toutes  les  sciences  connues  de  son  temps  et  en  a  même  créé 
plusieurs.  Pendant  un  grand  nombre  de  siècles,  ses  écrits  posèrent  la  borne 
du  savoir  humain  et  jouirent  d'une  autorité  absolue;  au  moyen. âge,  no- 
tamment, il  lut  l'oracle  des  philosophes  et  des  théologiens  scolastiques.  Il 
est  l'auteur  d'un  grand  nombre  de  traités,  dont  les  progrès  de  la  science 
moderne  ont  démontré  la  valeur;  les  principaux  portent  sur  la  Logique,  la 
Rhétorique,  la  Politique,  l'Histoire  des  animaux,  la  Physique,  le  Ciel,  la 
génération,  le  Monde,  la  Métaphysique.  En  philosophie,  il  donne  comme 
base  à  la  science  tout  à  la  fois  l'expérience  et  la  raison  ;  il  démontre  l'exis- 
tence de  Dieu  qu'il  présente  comme  le  centre  auquel  tout  aspire;  dans 
l'art,  il  ramène  le  beau  à  l'imitation  de  la  nature;  en  morale,  il  fait  consis- 
ter la  vertu  dans  l'équilibre  entre  les  passions,  gardant  un  juste  milieu  pré- 
venant tout  excès;  en  politique,  il  assigne  l'utilité  comme  but  à  la  société. 
V.  N.  II,  -202  :  Sienne. 

10,  Heureux.  —  Hérodote,  I,  32;  Aristote,  Morale  à  Nicomaque,  I,  10. 

21,  Vindicat.  —  Montaigne  a  fait  quelque  changement  aa  texte  latin. 

23,  Auuergne.  —  Brantôme,  Mémoires,  H.  —  En  1380;  sa  mort  fut  cachée  aux 
assiégés  qui  ne  la  connurent  que  le  lendemain  quand  ils  vinrent  se  rendre; 
celui  qui  les  en  avait  sommés  en  son  nom,  ayant  eu  la  présence  d'esprit  de 
leur  déclarer  que  s'ils  ne  se  décidaient,  il  était  résolu  à  ne  plus  avoir  de 
communication  avec  eux.  —  Duguesclin,  attaché  au  parti  de  Charles  de 
Blois  qui  revendiquait  le  duché  de  Bretagne;  à  la  mort  de  celui-ci,  il  se 
mit  au  service  de  Charles  V  qui  le  soutenait.  Vainqueur  du  roi  de  Navarre  à 
Cocherel  (1364),  il  fut  cette  même  année  battu  et  fait  pr^onnier  à  Auray. 
Rendu  à  la  liberté,  il  délivre  la  France  des  grandes  compagnies  en  les  con- 
duisant en  Espagne  où  il  est  battu  et  fait  à  nouveau  prisonnier  (1367).  H  se 
i-achète  une  seconde  fois,  et,  rentré  en  France,  il  se  remet  à  guerroyer, 
cette  fois  avec  plein  succès,  contre  les  Anglais  qu'il  avait  toujours  eus  en 
face  de  lui,  à  Auray  comme  en  Espagne;  il  les  chasse  de  la  Normandie  et  du 
Poitou  et  meurt  au  siège  de  Chàteau-Rendon  (1380).  Ce  fut  un  des  plus 
grands  hommes  de  guerre  de  France;  il  avait  été  fait  connétable  en  1370 
et  fut  enterré  à  Saint-Denis. 

33,  Craindre.  —  En  1515.  Brantôme,  II;  Guicciardin,  XII. 

38,  Corinthiens.  —  En  425,  durant  la  guerre  du  Péloponnèse.  La  discussion 
qui  s'éleva  à  ce  propos  entre  Niciaset  ses  adversaires  portait  sur  ce  que  les 
coi'ps  de  deux  des  siens  avaient  échappé  aux  recherches  de  ceux  qui,  après  lo 
combat,  avaient  été  chargés  de  les  enlever,  et  avaient  dû  leur  être  réclamés; 
cela  ne  changeait  du  reste  rien  au  résultat,  seule  la  réputation  du  général 
athénien  eut  à  en  souffrir.  Pi.utarque,  Nicias,  2. 

39,  Bœotiens.  —  En  394.  Le  lendemain  de  la  bataille  de  Coronée  qui  avait  été 
indécise,  les  Thébains  demandèrent  une  trêve  pour  relever  et  ensevelir 
leurs  morts;  Agésilas  la  leur  accorda,  considérant  cette  demande  comme 
une  confirmation  de  sa  victoire.  Plutarque,  Agésilas,  6. 

41,  Soing.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  que  nous  auons. 

6,  Mourant.  —En  1307.  André  du  Chesne,  Hist.  d'Angleterre,  XIV. 

12,  Zischa.  —  Ou  mieux  Ziska;  héros  national  de  la  Bohême,  avait  perdu  l'un 
après  l'autre  les  deux  yeux  dans  différents  conibats. 

13,  Wiclef.  —  Un  des  prixurseurs  de  la  Réforme;  niait  la  transsubstantia- 
tion, repoussait  la  confession,  la  primauté  du  Pape  et  la  hiérarchie  ecclé- 
siastique. ,Iean  IIuss,  en  Bohême,  adoptant  ses  idées,  fit  des  prosélytes  qui 
engendrèrent  une  guerre  civile  de  1174  à  1434. 

26,  Corps.  —  En  1524,  au  combat  de  Romagnano  (Italie),  où,  franchissant  la 
Sesiâ,  il  était  demeuré  le  dernier  pour  couvrir  la  retraite.  —  Bayard,  sur- 
nommé le  Chevalier  sans  peur  et  sans  reproche,  réunissait  en  lui  les  vertus 
qu'on  admire  séparément  dans  plusieurs  hommes  de  l'antiquité.  II  s'illustra 
dans  les  guerres  de  Charles  VII,  Louis  XII  et  François  I";  ce  dernier,  pour 
lui  témoigner  sa  haute  estime,  voulut  être  armé  chevalier  de  sa  main,  sur 


F.278  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

le  champ  de  bataille  de  Marignan.  —  Les  détails  rapportés  par  Montaigne 
sont  tirés  des  Mémoires  de  du  Bellay,  II. 

34,  Présent.  —  Philippe  II,  roi  d'Espagne,  (ils  de  Charlos-Quint,  né  lui-même 
do  Pliilippe  le  Beau,  fils  de  Maximilien. 

38,  Percée.  —  Cette  critique  n'a  pas  empêché  cette  façon  de  faii'e  do  se  con- 
tinuer chez  certains  grands  seigneurs,  dont  les  plus  titrés,  j)armi  ceux  on 
agissant  ainsi,  furent  le  duc  de  Vendôme  sous  Louis  XIV  et  le  duc  d'Or- 
léans, régent  de  France,  sous  Louis  XV. 


36, 


38, 


5,  Profession .  — La  profession  d'homme  de  guerre  qu'à  diverses  reprises,  au 
cours  do  son  livre,  Montaigne,  sans  rien  préciser  et  sans  que  renseigne  da- 
vantage aucun  document  autre  que  son  tombeau,  laisse  entendre  comme 
ayant  été  la  sienne. 

7,  Mort.  —  Ce  ne  furent  pas  les  seules  excentricités  de  co  prince,  rocom- 
mandable  du  reste  sous  bien  des  rapports.  Il  avait  fait  faire  son  cercueil,  y 
avait  joint  le  drap  mortuaire  et  tous  les  objets  nécessaires  à  ses  funérailles, 
le  tout  disposé  dans  un  coffre  dont  il  avait  la  clef  et  que,  dans  les  dernières 
années  de  sa  vie,  on  portait  à  sa  suite  dans  tous  ses  voyages.  A  sa  mort^ 
occasionnée,  comme  celle  de  son  père,  pour  avoir  mangé  immodérément 
du  melon,  il  ordonna  qu'on  lui  coupât  les  cheveux,  qu'on  lui  arrachât  les 
dents,  qu'on  les  broyât  et  les  r<;duisît  en  cendres,  et  que  son  corps  fût  en- 
fermé dans  un  sac  rempli  do  chaux  vive. 

13,  Religion.  —  Cyrus,  fils  de  Cambyse,  seigneur  perse,  et  de  Mandanc,  fdle 
d'Astyage,  roi  des  Mèdes,  commanda  d'abord  les  armées  de  Cyaxare,  fils 
et  successeur  d'Astyage;  puis,  se  rendant  indépendant,  se  fit  nommer  roi 
des  Perses  qui  depuis  longtemps  étaient  sous  la  domination  des  Mèdes 
(560).  Peu  à  peu,  il  agrandit  son  empire,  défit  Crésus,  roi  de  Lydie,  à  la 
iDataille  de  Thynabrée  (548),  et  s'annexa  ses  états;  s'empara  de  Babylone 
(538);  hérita  de  la  Médie,  et  devint  ainsi  le  maître  d'un  empire  qui  em- 
brassait la  majeure  partie  de  l'Asie.  C'était  un  prince  brave,  énergique, 
qui  ne  demandait  aux  vaincus  qu'obéissance  et  tribut,  et  respectait  leurs 
institutions.  On  ignore  quelle  fut  sa  fin;  Xénophon,  dont  Montaigne  adopte 
la  version,  le  fait  mourir  âgé,  entouré  de  ses  enfants;  selon  Hérodote,  il 
fut  tué  dans  une  expédition  contre  les  Massagètes,  peuple  de  la  Scythie,  et 
son  corps  étant  resté  entre  leurs  mains,  Thomyris  leur  reine,  dont  le  fils 
avait  péri  peu  auparavant,  lui  fit  couper  la  tête  et  plonger  dans  une  outre 
pleine  de  sang,  en  disent  :  «  Monstre,  abreuve-toi  de  ce  sang  dont  tu  as 
toujours  été  altéré  »  (530).  —  Le  fait  mentionné  ici  dans  les  Essais  est  re- 
laté par  Xénophon  [Cyropédie,  VIII,  7). 

14,  Grand.  —  L'éd.  de  88  porte  «  grand  prince  »,  ce  que  confirme  la  suite 
du  récit. 

20,  Traicts.  —  C.-à-d.  sur  le  point  de  rendre  l'esprit. 

25,  Montre.  —  De  la  cérémonie,  c.-à-d.  la  manière  dont  serait  formé  le 
cortège. 

33,  Choses.  —  Emilius  Lepidus  était  grand  pontife  et  prince  du  sénat  depuis 
six  ans;  il  prescrivit  à  ses  fils,  avant  de  mourir,  de  ne  consacrer  à  ses  ob- 
sèques qu'une  somme  modique,  ne  dépassant  pas  pour  chacun  dix  pièces 
de  bronze,  de  n'y  produire  ni  son  image,  ni  celles  de  .ses  ancêtres  et  de 
ne  faire  montre  de  luxe  d'aucune  sorte.  TriE-LivE,  EpUome  du  liv.  XLVIII. 

2,  Mechaniques.  —  Diogène  Laerce,  V. 

4,  Charge.  —  Var.  88  :  «  Plustost  la  coustumc  ordonner  de  ceste  cerimonie, 
et  sauf  les  choses  requises  au  seruice  de  ma  religion,  si  c'est  en  lieu  où  il 
soit  besoing  de  l'enioindre,  m'en  remettray  volontiers  à  la  discrétion  des 
premiers  à  qui  cette  sollicitude  tombera  on  partage  »,  au  lieu  de  :  «  pure- 
ment... charge  ». 
10,  Voudrez.  —  Platon,  vers  la  fin  du  Phédon. 
31,  Soin.  —  Ne  s'occupa  que  du  soin. 
33,  Rendre.  —  Accomplir. 


40. 


42, 


NOTES.         r.IV.   I,  CIL  III.        VOL.  L  PAG.  :{8.  F.279 

57,  Supplice.  —  En  406,  à  l'accusation  portée  contre  eux,  en  vain  ils  oppo- 
sèrent qu'une  violente  tempête  étant  survenue,  ils  avaient  été  empêchés  de 
recherciier  et  recueillir  leurs  morts;  ils  n'en  furent  pas  moins  condamnés. 
Socrate  se  trouvant  alors  être  du  Sénat  auquel  il  appartenait  de  sanction- 
ner les  arrêts  du  peuple,  ni  les  clameui's  les  plus  liruyantes,  ni  hîs  me- 
naces les  plus  terribles  ne  purent  le  contraindre  à  autoriser  de  son  appro- 
bation cet  acte  de  démence  publique;  son  opposition  ne  put  empêcher  le 
peuple  de  se  souiller  d'un  sang  innocent.  Ils  étaient  dix  :  six  furent  mis 
à  mort;  deux  s'étaient  exilés  volontairement;  un  était  prisonnier  des  La- 
cédémoniens;  Conon,  le  dixième,  n'avait  pas  été  compris  dans  l'accusation. 
—  En  cette  circonstance,  comme  en  tant  d'autres,  le  peuple  athénien  se 
prit  peu  après  à  avoir  honte  de  sa  conduite;  celui  qui  avait  porté  l'ac- 
cusation fut  mis  en  jugement  et  condamné  à  son  tour  sans  qu'on  voulût 
seulement  entendre  sa  défense;  exemple  bien  typique  de  la  versatilité  des 
foules.  DiODOKE  DE  Sicile,  XIII,  31  et  32. 

1,  Souppe.  —  C.-à-d.  de  la  môme  façon. 

8,  Superstition.  —  Diodore  de  Sicile,  XV,  9.  —  Sous  le  règne  de  Constantin 
Copronyme,  empereur  d'Orient,  une  flotte  de  2.600  barques  qu'en  766  ce 
prince  avait  équipées  contre  les  Bulgares,  fut  assaillie  par  un  ouragan  qui 
brisa  une  partie  des  navires  et  en  submergea  une  autre;  l'empereur  passa 
quatre  mois  à  recueillir  les  corps  flottants  sur  les  eaux  et  à  leur  rendre  les 
devoirs  funèbres.  Lebeau. 
10,  lacent.  —  Cyrano  de  Bergerac  a  dit  dans  le  même  sens  : 

«  Une  heure  après  ma  mort,  mon  âme  évanouie 
Sera  ce  qu'elle  était,  une  heure  avant  ma  vie.  ■ 

18,  Dit.  —  La  manière  dont  Montaigne  use  des  documents  qu'il  met  en  œu- 
vre, se  révèle  tout  entière  dans  cette  restriction  :  Le  public  ou  un  auteur 
croit  ou  dit  telle  chose.  Lui-même  n'en  est  pas  aussi  sûr,  qu'importe?  il  suf- 
fit que  cela  se  prête  à  sa  thèse  pour  qu'il  en  use,  en  laissant  la  responsa- 
bilité à  celui  de  qui  émane  cette  croyance  ou  cette  assertion. 


CHAPITRE  IV. 

26,  Deult.  —  Fait  mal,  endolorit,  du  latin  dolel  qui  a  cette  même  significa- 
tion. 

26,  Vent  —  N'atteint  que  le  vide.  Image  tirée  d'un  terme  employé  au  jeu 
de  paume. 

2,  Dit.  —  Dans  la  Vie  de  Périclès,  au  commencement. 

5,  Vain.  —  Oisive. 

8,  Que.  —  Sous-entendu  «  plustôt  »,  qui  se  trouve  quelques  lignes  plus  haut, 

et  éviter  la  répétition;  ces  élisions  sont  fréquentes  dans  Montaigne. 
22,  Frères.  —  En  211,  Publius  et  Cneius  Scipion,  l'un  et  l'autre  à  la  tète 
d'armc-es  romaines  opérant  en  Espagne  contre  les  Carthaginois,  après  huit 
années  de  hauts  faits  et  de  triomphes,  abandonnés  de  leurs  alliés,  furent 
tous  deux,  à  un  mois  d'intervalle,  défaits  et  tués,  et  leurs  troupes  sérieu- 
sement compromises.  Tite-Live,  XXV,  37. 
25,  Dueil.  —  Cicéron,  T'use,  III,  26. 

28,  Athos.  —  En  480,  Xerxès  fit  fouetter  l'HelIespont  parce  que  la  tempête 
avait  rompu  un  pont  de  bateaux  qu'il  y  avait  fait  établir,  et  percer  le  mont 
Athos  pour  donner  passage  à  sa  flotte  et  n'avoir  pas  à  le  doubler.  Héro- 
dote, VII,  24  et  35;  Plutarque,  De  la  colère. 
30,  Passant.  —  Séxèque,  De  Ira,  III,  21.  —  Cyrus,  irrité  de  ce  qu'il  avait  failli 
périr  au  passage  de  ce  fleuve,  où  un  de  ses  chevaux  s'était  noyé,  entreprit 


F.280  ESSAIS  DE  MONTAIGNE 

de  le  dessécher  et  à  cet  effet  fit  creuser  trois  cent  soixante  canaux  par  les- 
quels ses  eaux  devaient  se  perdre.  Hérodote  (I,  189)  dit  qu'il  consacra  tout 
un  été  à  cette  œuvre  de  folie  et  Orose  qu'il  y  employa  toutes  ses  troupes 
durant  une  année  entière. 

31,  Plaisir.  —  C'est  déplaisir  qu'il  y  a  lieu  do  lire,  faute  «l'impression  com- 
mise dans  la  première  édition  et  qui  a  toujours  été  reproduite  depuis  : 
«  Caligula,  dit  Sénèque  (De  Ira,  III,  22),  lit  démolir  une  très  belle  maison, 
dans  le  quartier  d'Heirule,  parce  que  sa  mère  y  avait  été  détenue  en  quelque 
sorte  on  prison.  » 

32,  Voysins.  —  Probablement  Alphonse  XI,  roi  de  Castille.  Chari.es  de  Bo- 
vELi.Es,  Géométrie  pratique. 


44, 


46, 


6,  Mer.  —  En  37,  lors  de  sa  guerre  contre  Sextus  Pompée,  durant  laquelle, 
la  tempête  ayant  dispersé  sa  flotte,  il  fut  battu  près  du  cap  Scylla  (pointe 
S.-O.  do  ritalie).  SvÉTOîiE,  Auguste,  IG. 

11,  Allemagne.  —  En  l'an  9,  VarHS,  attiré  dans  une  embuscade  par  les  Ger- 
mains, y  périt  avec  trois  légions  romaines. 

14,  Mesmes.  —  80  et  88  aj.  :  à  belles  iniures. 

18,  Titanienne.  —  C.-à-d.  comme  avaient  fait  les  Titans  révoltés  contre  les 
dieux. 

18,  Flèche.  —  Héhodote,  IV,  0-4. 

lu,  Plutarque.  —  Dans  son  traité  Du  Contentement  ou  Repos  de  respril.  1. 


CHAPITRE  Y. 

23,  Parlementer.  —  C'est  deviser,  conférer,  entre  doux  ou  plusieurs,  sur 
quelque  affaire;  se  dit  ordinairement  des  pourparlers  en  vue  de  la  capi- 
tulation d'une  place  assiégée. 

30,  Sénat.  —  Constituait  à  Rome  le  premier  corps  de  l'État.  Institué  par  Ro- 
mulus,  il  comprit  d'abord  cent  membres,  dont  le  nombre  s'éleva  progres- 
sivement jusqu'à  mille  sous  César,  mais  qui  avant  et  après  lui  n'était  que 
de  six  cents,  ce  qui  semble  avoir  été  le  plus  généralement.  Les  sénateurs 
étaient  nommés  à  l'élection,  mais  le  furent  aussi  parfois  par  les  consuls, 
les  censeurs  ou  tout  autre  exerçant  le  pouvoir  suprême;  ils  devaient  avoir 
une  fortune  de  800.000  sesterces  (163.000  fr.)  sous  la  République  et  de 
1. 200.000  (241.000  fr.)  sous  l'Empire;  le  sénateur  porté  le  premier  sur  la  liste 
était  appelé  Prince  du  Sénat. 

2,  Bataille.  —  En  170.  Le  procédé  de  L.  Marcius  n'en  fut  pas  moins  finale- 
ment approuvé  par  le  sénat;  .ses  atermoiements  avaient  empêché  Persée  de 
profiter  de  l'avance  considérable  de  ses  préparatifs  et  firent  que  l'année 
suivante  la  guerre  se  terminait  par  sa  ruine  complète.  Tite-Live,  XLII,  37; 
il  le  nomme  Quintus,  au  lieu  de  Lucius. 

3,  Médecin.  —  En  275.  Pyrrhus,  venu  en  Italie  au  secours  des  Tarentins, 
avait  déjà  remporté  une  victoire  sur  les  Romains,  quand  son  médecin  leur 
ofi'rit  de  les  débarrasser  de  leur  ennemi  en  l'empoisonnant.  Le  consul  Va,- 
bricius  dénonça  au  roi  cette  offre  de  trahison,  et  celui-ci,  plein  d'admira- 
tion, lui  renvoya  sans  rançon  les  prisonniers  qu'il  avait  faits,  y  joignant 
des  propositions  de  paix.  Les  Romains  lui  renvoyèrent  le  même  nombre 
de  Samnites  et  de  Tarentins,  ses  aUiés,  qui  étaient  en  leur  pouvoir,  et,  pour 
le  reste,  lui  déclarèrent  qu'ils  ne  pouvaient  traiter,  tant  qu'il  n'aurait  pas 
évacué  l'Italie.  Plutarque,  Pyrrhus. 

4,  D'escole.  —  En  394,  se  trouvant  en  guerre  avec  les  Romains,  et  ceux-ci 
assiégeant  leur  ville  Paieries  (auj.  Sainte-Marie  de  Falari),  leur  maître  d'é- 
cole amena  à  leurs  ennemis  pour  les  leur  livrer  et  contraindre  ainsi  la 
ville  à  se  rendre,  les  enfants  des  principaux  citoyens  confiés  à  ses  soins. 
Camille  qui,  en  qualité  de  dictateur,  commandait  l'armée  romaine,  refusa 
cette  offre  criminelle,  fit  dépouiller  le  traître  de  ses  vêtements  et  ramener 


NOTES.         LiV.  1,  Cil.  IV.         VOL.  1,  PAG.  46.  F.281 

par  ses  élèves  à  coups  de  verge;  touchés  de  cette  noble  actiou,  les  Phalis- 
ques  firent  leur  soumission.  Pi.ltahque,  Camille. 

11,  Sentence.  —  8f)  et  88  port.  :  .Si  e.'it-ce  que  le  Sénat  Romain  à  qui  le  seul 
aduantage  de  la  vertu  sembloit  moyen  iuste  pour  acquérir  la  vi«toire,  Irouua 
celle  pratique  laide  et  deshonneste,  n'ayant  encore  ouy  sonner  à  ses  oreilles 
celle  belle  sentence,  au  lieu  de  :  «  Si  est-ce...  sentence  ». 

13,  Polybe.  —  Liv.  XIII,  ch.  I. 

2ô,  Vaincre.  —  Plus  conséquentes  que  les  gens  de  Ternate,  et  tenant  qu'à  la 
gueri-e  le  succès  seul  est  à  considérer  et  que  rien  ne  doit  être  négligé  pour 
l'obtenir,  les  nations  modernes,  dites  civilisées,  non  seulement  mettent  en 
œuvre  à  cet  eftet  tous  leurs  moyens,  mais  cherchent  encore  à  en  dérober 
la  connaissance  à  toutes  autres,  nos  amis  d'aujourd'hui  pouvant  être  nos 
ennemis  de  demain.  —  Pour  en  atteindre  le  but  qui  est  l'anéantissement 
aussi  rapide  et  aussi  complet  que  possible  de  l'ennemi,  tout  est  bon  sauf 
la  déloyauté;  et  encore,  si  chacun,  à  cet  égard,  est  d'accord  en  théorie,  la 
divergence  est  immense  dans  la  pratique;  et  seul  a  tort  celui  qui  sera 
vaincu,  au  point  que  s'accentue  chaque  jour  davantage  la  tendance  d'at- 
taquer sans  même  faire  de  déclaration  de  guerre.  Cela,  à  la  vérité,  s'est  vu 
de  tous  temps  :  en  Europe,  dans  ces  deux  derniers  siècles,  on  ne  compte 
pas  moins  de  110  cas  où  les  hostilités  ont  commencé  sans  déclaration  ou 
avant  toute  déclaration;  c'est  notamment  dans  ces  conditions  que  les  An- 
glais, coutumiers  du  fait  plus  que  tous  autres,  détruisirent  en  1718  la  flotte 
espagnole,  en  1807  bombardèrent  Copenhague,  et  en  1900  ont  failli  en  user 
à  notre  endroit  lors  de  l'incident  de  Fachoda;  c'est  aussi  ce  qu'ont  fait  les 
Japonais  à  l'égard  des  Russes  en  1904.  Cette  pratique  est  éminemment  re- 
grettable pour  la  paix  du  monde  et  la  fortune  publique;  elle  ruine  les  États 
en  les  obligeant  à  être  constamment  en  armes  et  risque  de  faire  dégénérer 
toute  question  en  éventualité  de  guerre.  Elle  est  une  tentation  continue 
pour  ceux  sans  scrupule,  par  l'avantage  que  peut  donner  un  jour  ou  deux 
d'avance  sur  l'adversaire  dont  cela  déroute  les  prévisions,  trouble  la  mo- 
bilisation, restreint  les  ressources,  en  livrant  à  l'envahisseur  celles  des  ter- 
ritoires sur  lesquels  il  a  inopinément  pénétré.  Aussi  quelle  infériorité  pour 
ceux  chez  lesquels  le  droit  de  déclarer  la  guerre  est,  à  si  juste  titre,  sou- 
mis à  l'assentiment  du  pouvoir  législatif!  —  Étant  donné  qu'elle  est  sans 
cesse  menaçante  et  peut  aboutir  à  la  ruine,  il  nous  faut  être  forts,  très 
forts,  le  plus  forts  possible  et  toujours  j)rêts,  mais  en  outre  il  serait  à  sou- 
haiter que  la  responsabilité  de  ceux  investis  du  pouvoir  de  l'engager  fût 
rendue  aussi  effective  et  afflictive  que  possible.  Pour  cela,  nous  souhai- 
terions qu'il  s'introduisît  dans  nos  idées  que  les  chefs  d'État  et  membres  de 
gouvernement,  dont  les  agissements  l'ont  amenée,  méritent  de  payer  de 
leur  vie  ce  forfait,  sont  de  ce  fait  voués  à  tout  jamais  à  la  .vindicte  pu- 
blique, et  que  tout  attentat  contre  eux  est  œuvre  pie.  Puissions-nous  voir 
des  associations  (voire  même  internationales,  ce  serait  bien  ici  le  cas),  sorte 
de  Tugend-bund,  se  former  et  propager  cette  doctrine  et  faire  des  prosé- 
lytes, et  il  n'en  manquerait  pas,  que  n'arrêteraient  point  sa  mise  en  ap- 
plication, rendue  facile  avec  les  progrès  de  la  science  à  qui  a  fait  le  sa- 
crifice de  sa  vie  !  Devant  les  risques  personnels  auxquels  ces  mandataires 
des  peuples,  abusant  de  leurs  mandats,  se  trouveraient  de  la  sorte  exposés, 
il  est  à  croire  qu'ils  se  montreraient  plus  circonspects.  C'est  là,  dira-t-on, 
une  provocation  à  l'assassinat;  j'en  conviens,  mais  c'est  le  seul  moyen  de 
conjurer  ce  fléau,  la  plupart  du  temps  déchaîné  ou  accepté  d'un  cœur 
léger  et  sans  raison  suffisante,  en  admettant  qu'il  en  existe  en  dehors  d'une 
invasion;  de  'plus,  qu'est-ce  que  le  meurtre  d'une  douzaine  de  grands 
coupables,  auprès  de  celui  de  cent,  deux  cent  mille  innocents  tombant  de 
part  et  d'autre  par  la  faute  de  ces  criminels  et  des  ruines,  quelle  que 
soit  l'issue  de  la  lutte,  si  considérables  et  de  toute  nature  pour  le  pays  et 
les  individus  dont  ils  sont  cause!  Guerre  à  la  guerre  !  G.  M.  —  En  ces  der- 
nières années,  un  Congrès  international  permanent  de  la  paix,  auquel 
toutes  les  nations  ont  adhéré  par  pudeur  plutôt  que  par  conviction,  s'est 


F. 282  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

constitué  à  La  Flayc  sur  l'initiative  de  Nicolas  II,  empereur  de  Russie. 
L'intention  est  excellente,  mais  faute  de  sanction  efficace  possible,  il  est 
douteux  que  les  résultats  en  soient  jamais  de  quelque  importance.  De  fait, 
on  n'y  a  guère  obtenu  jusqu'ici  que  la  consécration  du  principe  de  l'ar- 
bitrage, auquel  on  avait  déjà  recours  auparavant,  et  qui  n'a  chance  de 
prévaloir  que  pour  des  questions  de  peu  d'importance.  — On  a  proposé  qu'en 
cas  de  conflit  arrivant  à  l'état  aigu,  les  hostilités  ne  puissent  s'ouvrir  avant 
un  délai  de  quinze  ou  vingt  jours,  durant  lequel  les  gouvernements  amis 
[)Ourraient  intervenir  et  essayer  de  régler  le  litige  à  l'amiable.  En  cas  de 
non-consentement  à  cet  ajournement  des  hostilités,  la  nation  opposante 
serait  mise  à  l'index,  ce  qui  comporterait  l'impossibilité,  pour  elle,  de  re- 
cevoir, pendant  toute  la  durée  de  la  guerre,  aucune  aide  financière  ou  com- 
merciale, de  la  part  des  autres  puissances  signataires.  L'adoption  de  cette 
proposition  constituerait  assurément  un  grand  progrès  humanitaire,  mais 
outre  qu'elle  ralliera  difficilement  l'unanimité  des  suffrages,  la  pénalité  qui 
s'y  trouve  introduite,  en  supposant  qu'elle  ait  l'efficacité  qu'on  lui  prête, 
ne  serait-elle  pas  aisément  éludée?  —  D'autres  prônent  la  réduction  des 
armements;  il  est  peu  probable  que  cette  proposition  chimérique  puisse 
même  être  présentée.  Sur  quelles  bases  opérer  avec  tant  d'éléments  et 
d'intérêts  dont  il  faudrait  tenir  compte  et  sur  lesquels  l'accord  ne  se  fera 
jamais?  Et  puis,  il  est  si  facile  par  des  dispositions  accessoires  de  modifier 
le  fond  des  choses  :  la  Prusse  limitée  dans  ses  armements  par  le  traité  de 
Tilsitt  n'est-elle  pas  arrivée  à  mettre  en  ligne,  cinq  ans  après,  des  effectifs 
bien  supérieurs  à  ceux  qu'elle  avait  présentés  jusqu'alors? 

28,  Exercite  —  Armée,  du  latin  exercitus. 

29,  Martinella.  —  Du  nom  de  Saint-Martin,  dérivé  lui-même  de  Jlars,  dieu 
de  la  guerre;  maîtresse  cloche  dont  on  usait  en  cas  d'alarme.  —  De  là,  le 
mot  de  Pierre  Capponi,  premier  secrétaire  de  la  république  de  Florence, 
qui,  déchirant  le  papier  où  étaient  écrites  les  conditions  que  lui  faisait 
Charles  VIII,  s'écria:  •<  Eh  bien!  s'il  en  est  ainsi,  sonnez  vos  trompettes, 
nous  sonnerons  nos  cloches!  «  Sismondi,  Hisl.  des  républiques  italiennes,  XII. 

32,  Regnard.  —  Plutarque,  Lysandre,  4.  —  Coudre  la  peau  du  renard  à  celle 
du  lion,  c'est  ajouter  la  ruse  à  la  force. 


48, 


7,  Mousson.  —  Pont-à-Mousson,  contre  le  duc  de  Nassau,  en  1521.  Cette  red- 
dition eut  lieu  dès  que  l'artillerie  de  l'assiégeant  se  fit  entendre;  la  gar- 
nison, composée  de  nouvelles  levées,  effrayée,  ayant  obligé  ses  deux  chefs 
à  entrer  en  pourparlers.  Non  seulement  ceux-ci  eurent  la  faiblesse  d'y  con- 
sentir, mais  ils  commirent  encore  la  faute  qui  leur  est  reprochée  ici  de 
sortir  tous  deux  de  la  place  et  de  se  rendre  au  camp  ennemi  pour  parle- 
menter. Du  Bellay,  I. 

18,  Ville.  —  En  1521,  alors  que  nous  étions  maîtres  du  duché  de  Milan.  Regge, 
ville  des  États  de  l'Église,  à  peu  de  distance  de  là,  était  le  refuge  de  tous 
ceux  que  nous  avions  bannis;  ils  devaient  nous  être  livrés.  Pour  les  obte- 
nir, le  maréchal  de  Foix,  seigneur  de  l'Escut,  vint  sommer  Guy  de  Ran- 
gon,  qui  était  gouverneur  de  la  place,  de  les  lui  remettre;  c'est  pendant  les 
pourparlers  que  se  produisit  cette  échauffourée  dont  le  résultat  fut  que  nous 
n'obtînmes  pas  satisfaction.  Du  Bellay,  I;  Ctuiccl\rdim,  XIV. 

28,  Anglais.  —  En  1359.  Le  château  était  abondamment  pourvu  et  les  as- 
siégés ne  se  doutaient  pas  qu'il  fût  si  complètement  sapé.  Froissart,  I,  209, 
où  le  capitaine  anglais  a  nom  de  Brunes. 


.NOTES.         LIV.  I,  eu.  VI.         VOL.  I,  PAG.  50.  F.283 

CHAPITRE  VI. 

50, 

3,  Chapitre  VI.  —  Ce  chapitre  n'est  qu'une  suite  du  précédent. 

7,  Pièces.  — En  1569.  La  ville  était  assiégée  par  les  Catholiques  coniriiandés 
par  le  comte  de  Brissac  qui  y  lut  tué.  La  capitulation  portait  que  la  gar- 
nison aurait  la  vie  sauve  ;  mais,  furieux  de  la  mort  de  leur  chef,  les  vain- 
queurs la  massacrèrent  dès  qu'elle  fut  hors  de  vue  de  la  place. 
26,  Militaire  —  En  190.  La  ville  avait,  quelques  jours  avant,  subi  un  assaut 
(lu'elle  avait  repoussé.  Régillus,  voyant  ses  efforts  impuissants  à  arrêter  le 
pillage,  s'efforça  de  sauvegarder  la  vie  des  habitants;  et,  quand  l'ordre  l'ut 
rétabli,  il  s'appliqua  à  réparer  de  son  mieux  le  préjudice  qu'ils  avaient 
subi.  TiTE-LivE,  XXXVII,  31 
31,  Subtilité  —  Vers  l'an  600.  Cléomène  avait  conclu  avec  les  Argiens  une 
trêve  de  huit  jours;  la  troisième  nuit,  il  reprit  les  hostilités.  Sa  mauvaise 
foi  ne  lui  fut  en  effet  d'aucune  utilité;  il  avait  pensé,  ay)rès  ce  mauvais 
coup,  surprendre  la  ville  d'Argos,  mais  les  femmes,  détachant  des  temples 
les  ai'mes  qui  s'y  trouvaient  en  trophée,  coururent  aux  murailles  et  le  re- 
poussèrent. Plutarque,  Apophlhegmes  des  Lacédémoniens, 
52, 

;!.  Romaine.  —  L'an  214.  Casilinum  était  assiégée  par  les  consuls  Fabius 
et  Marcellus;  l'année  précédente,  Annibal  s'en  était  rendu  maître  à  la  suite 
d'un  siège  mémorable.  Tite-Live,  XXXIV,  19. 

9,  Xénopbon.  —  Dans  la  Cyropédie.  —  Xénophon  débuta  dans  la  guerre  du 
Péloponnèse,  où  il  se  distingua;  il  lit  partie  des  contingents  grecs  à  la  solde 
de  Cyrus  le  .leune  contre  son  frère  Artaxerxès  et  il  en  dirigea  la  retraite, 
connue  sous  le  nom  de  ■<  Retraite  des  dix  mille  »;  plus  tard,  il  combattit  à 
Coronée  contre  ses  concitoyens  qui  l'avaient  banni  et  ne  le  rappelèrent  que 
25  ans  après,  ce  qu'il  n'accepta  pa-s.  Il  est  l'auteur  de  nombreux  ouvrages 
historiques,  politiques  et  philosophiques,  parmi  lesquels  :  l'Anabase  ou 
Retraite  des  dix  mille,  la  Cyropédie,  les  dits  mémorables  de  Socrate;  c'est 
lui  qui  publia  l'histoire  de  Thucydide,  restée  jusque-là  inconnue,  et  qu'il  a 
continuée.  Son  style  est  d'une  élégance  et  d'une  douceur  exquises,  parfois 
cependant  diffus  et  languissant.  Comme  philosophe,  il  est  l'interprète  le 
plus  fidèle  des  doctrines  de  Socrate,  dont  il  avait  été  un  des  disciples  pré- 
férés. 
14,  Cappoûe  — En  1501.  La  ville  avait  résisté  à  une  première  attaque.  Assié- 
gée une  seconde  fois,  elle  se  résolut  à  capituler;  mais,  pendant  les  pour- 
parlers, la  garnison  épuisée  par  de  longues  veilles  s' étant  relâchée  de  sa  sur- 
veillance, les  Français  surprirent  une  des  portes  et  pendant  plusieurs  jours 
ce  ne  fut  que  meurtre  et  pillage.  Un  grand  nombre  de  femmes  s'étaient  ré- 
fugiées dans  une  tour.  César  Rorgia,  fils  naturel  du  pape  Alexandre  Vl, 
qui  marchait  avec  nous,  se  les  fit  toutes  amener  et  choisit  les  quarante 
plus  belles  qu'il  envoya  à  son  palais,  à  Rome,  pour  y  constituer  son  sérail. 
SiSMONDi,  Hisl.  des  républiques  italiennes.  —  En  1705,  à  Barcelone,  lord  Pé- 
terboroug,  en  pareille  occurrence,  agit  tout  autrement  :  Il  traitait  de  la 
capitulation  de  la  ville,  lorsque  les  Anglais,  profitant  du  moment,  s'y  in- 
troduisirent par  surprise.  Lord  Péterboroug  aussitôt,  suspendant  les  pour- 
parlers, entre  dans  la  ville,  court  à  ses  troupes,  leur  fait  honte,  parvient  à 
les  ramener  et  reprend  les  négociations.  Servan. 
20,  Saisie.  —  En  1542.  Yvoy  fut  pris  par  le  duc  d'Orléans,  un  pan  de  mur 
étant  venu  à  s'écrouler.  Cet  accident,  dont  les  assiégeants  profitèrent  sur-le- 
champ,  s'est-il  produit  pendant  les  pourparlers  et  est-ce  à  cela  que  se  rap- 
porte le  fait,  je  ne  saurais  le  dire. 
22,  Gènes.  —  En  1522.  Les  habitants,  réduits  à  peu  près  à  eux-mêmes,  dès 
l'approche  de  l'ennemi,  demandèrent  à  traiter;  pendant  qu'on  était  en 
conférence,  les  Espagnols,  ayant  en  connaissance  d'un  endroit  où  le  mur 
était  en  mauvais  état  et  qui  n'était  pas  gardé,  s'y  portèrent  et,  l'escaladant. 


F. 284  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

pénétrèrent  dans  la  villo  où  ils  passèrent  au  fil  (!<■  !(  |.<  .■  tout  ce  qu'ils  ren- 
contrèrent. Du  Beli.ay,  II. 

26,  Barrois.  —  En  I.o44.  Les  Impériaux  ])('uétrèrent  dans  le  château  par  la 
porte  de  secours,  pendant  que  l'on  discutait  les  conditions  de  la  capitula- 
tion. Du  Bei,i,ay,  IX. 

32,  Chrysippus.  —  Cicéuon,  De  Off.,  III,  10. 
54, 

I,  Desrobées.  —  Quinte-Curce,  IV,  13.—  Conseil  donné  à  Alexandre  la  veille 
de  la  bataille  d'Arbelles  au  succès  de  laquelle  Polyporchon  eut  grande 
part  (331). 

CHAPITRE  VII. 

II,  Ginquiesme.  —  Ceci  rappelle  l'épitaphe  de  Pépin  le  Bref:  «  Ci-glt  Pé- 
pin, père  de  Charlemagne  »  ;  et  cette  autre  inscription  gravée  sur  le  socle 
d'une  statue  de  Louis  XIV  à  Pau  :  «  Celuy  cy  est  le  petit-fils  de  nostre  bon 
roy  Henry  ». 

lo,  Décédé.  —  En  1509.  Le  duc  de  Suffolk  était  de  la  maison  rivale  de  Lan- 
castro  et  Henry  VII,  malgré  de  très  grands  services  rendus,  le  redoutait. 
Le  duc,  averti  des  mauvaises  disposition  du  roi  à  son  égard,  s'était  réfugié 
en  Flandre;  et,  lors  d'une  traversée  de  Flandre  en  Espagne,  Dom  Philippe 
ayant  été  contraint  de  relâcher  en  Angleterre,  Henry  VII  ne  le  laissa  se 
rembarquer  qu'après  qu'il  eut  livré  le  duc  de  Suffolk,  sous  promesse,  il  est 
vrai,  d'épargner  sa  vie,  engagement  qu'il  tint  ainsi  qu'il  est  rapporté  ici.  Du 
Bellay,  L  —  Durant  cette  guerre  civile,  dite  des  Deux  Roses,  qui  désola  l'An- 
gleterre aux  xv""  et  xvi»  siècles,  causée  par  la  rivalité  des  maisons  de  Lan- 
castre  et  d'York  se  disputant  le  trône,  lès  partisans  du  duc  d'York  avaient 
adopté  une  rose  blanche  comme  signe  de  ralliement,  les  Lancastre  une 
rose  rouge.  —  Dans  cette  déloyale  manière  de  faire,  Henry  VII  avait  eu 
un  précurseur  dans  David  qui,  aux  approches  de  sa  fin,  donna  ordre  à 
Salomon,  son  fils,  «  de  ne  pas  laisser  les  cheveux  blancs  ni  de  Joab  ni  de 
Séméï  descendre  en  paix  dans  le  séjour  des  morts  ».  Joab  avait,  malgré 
ses  recommandations,  tué  Absalon  son  fils,  qui  s'était  révolté;  Séméï  l'a- 
vait insulté,  tandis  qu'il  fuyait  devant  ce  même  Absalon,  et  il  lui  avait 
promis  la  vie  sauve  (X^  siècle).  Livre  des  Rois,  I,  2. 

19,  D'Aiguemond.  —  En  1568.  Les  comtes  de  Horn  et  d'Egmont,  tous  deux 
de  là  plus  haute  noblesse  des  Pajs-Bas  alors  sous  la  domination  de  l'Espagne, 
avaient,  dans  les  rangs  de  l'armée  espagnole,  puissamment  contribué  aux 
victoires  de  Saint-Quentin  et  de  Gravelines.  Lors  des  troubles  qui  éclatè- 
rent peu  après  dans  leur  patrie  pour  secouer  le  joug  de  l'étranger,  d'Egmont 
étant  entré  en  relations  avec  Guillaume  d'Orange  et  les  confédérés,  le  duc 
d'Albe,  gouverneur  des  Pays-Bas  pour  le  roi  d'Espagne  Pàilippe'  II,  le  fit 
arrêter,  et  avec  lui  de  Horn  son  ami,  dont  la  connivence  était  mojns  prou- 
vée, et  après  neuf  mois  de  détention,  les  fit  décapiter;  leur  véritable  crime 
était  d'appartenir  à  la  religion  réformée.  —  Cet  épisode  a  fait  le  sujet 
d'un  drame  de  Gœthe,  plein  d'émotion  et  d'intérêt;  et  plus  i-écemment 
en  France  d'une  tragédie  :  Patrie!  de  Mctorien  Sardou,  depuis  mis  en 
opéra. 

27,  Puissance.  —  Saint  Bernard  dit  que  «  l'homme  est  si  peu  d'accord  avec 
lui-même,  qu'on  ne  peut  bien  juger  de  ses  actions  par  ses  intentions,  ni  de 
celles-ci  par  celles-là  ». 


56, 


4.  Enfans.  —  Au  XII°  siècle.  L'architecte  n'est  pas  nommé  par  Hérodote 
(II,  121);  le  roi  s'appelait  Rhampsinit  ou  Rhamsès  et  passait  pour  posséder 
des  trésors  incalculables.  Abusant  du  secret  que  leur  avait  livré  leur  père, 
les  deux  fils  de  cet  architecte  puisaient  dans  ces  trésors;  s'étant  aperçu 
qu'on  le  volait,  le  roi  dressa  un  piège  dans  lequel  donna  l'un  de  ses  voleurs 
qui,  se  voyant  pris,  en  avertit  son  frère,  l'avisant  de  lui  couper  la  tète  et 
de  l'emporter,  pour  qu'on  ne  le  reconnût  pas. 


NOTES.        LIV.  I,  CH.  VII.         VOL.  I,  PAG.  56.  F.28b 

9,  Leur.  —  C.-à-d.  ils  doivent  faire  de  plus  grands  sacrifices  personnels  et 
ne  pas  se  iiorner  à  une  réparation  qui  de  fait  ne  leur  coûte  rien. 


CHAPITRE  VIII. 

58, 

10,  Habitat.  —  Montaigne  a  traduit  ce  vers  avant  de  le  citer. 

16,  Meshuy.  —  Désormais.  Moshuy  est  mis  pour  mais  liuy,  du  latin  magis 
hodie,  au  delà  d'aujourd'liuy. 

:^l,  Mesmes.  —  C'est  l'idée  qui  a  donné  naissance  aux  Essais.  L'a  date  à 
laquelle  cette  idée  a  éclos  se  trouve  déterminée  par  ce  i)assage  du  début 
du  dernier  chapitre  du  second  livre  :  «  Jo  me  suis  envieilli  de  sept  ou  huit 
ans  depuis  que  ie  commençay  »...  Comme  ce  livre  terminait  la  preunère 
édition  de  l'ouvrage,  dont  l'yVvis  au  lecteur  est  daté  du  l"  mai  1580,  on  est 
conduit  à  penser  qu'il  a  été  commencé  en  1571.  C'est  au  surplus  ce  que 
corrobore  une  inscription  de  la  bibliothèque  de  l'auteur  qui  porte  qu'au 
jour  anniversaire  de  ses  trente-huit  ans,  le  28  février  1571,  las  de  toute 
servitude,  il  s'est  réfugié  dans  l'intimité  des  vierges  du  Parnasse. 


CHAPITRE  IX. 

25,  Mémoire.  —  Add.  de  80  et  88  :  que  moy. 

;W,  Réputation.  —  Add.  de  80  :  l'en  pourvois  faire  des  comités  merueilleux,  mais 

pour  cesle  lieure  il  vaut  mieus  suyure  mon  thème. 
32,  Déesse.  —  Platon,  dans  Çritias. 

34,  Mienne.  —  Montaigne  se  plaint  encore  de  sa  mémoire  au  chap.  XVII  du 
second  livre.  Malebranche  et  quelques  autres  l'accusent  d'avoir  prétendu 
faussement  n'en  pas  avoir;  ils  en  donnent  pour  preuve  ses  nombreuse  ci- 
tations. Mais  outre  qu'elles  ne  sont  pas  toujours  exactes  et  qu'il  lui  arrive 
de  se  contredire,  ceux  qui  ont  écrit  savent  qu'il  ne  faut  pas  beaucoup  de 
mémoire  pour  citer,  et  citer  souvent  :  «  à  faute  de  mémoire  naturelle, 
l'en  forge  de  papier  »,  dit-il,  liv.  111,  chap.  XLIII;  là  est  tout  le  secret.  Le 
Clf.iîc. 

60, 

35,  Arrouté.  —  C.-à-d.  une  fois  qu'on  est  en  train. 

30,  Pertinents.  —  C.-à-d.  les  gens  habiles,  qui  ont  du  tact. 
62, 

5,  Ancien.  —  Cet  ancien,  c'est  Cicéron  qui,  dans  sa  défense  de  Ligarius, 
ch.  Xll,  dit  à  César  :  «  Jamais  tu  n'oublies,  si  ce  n'est  les  injures  ». 
G,  Protocole.  —  Y.  N.  II,  402,  Protocole. 

7,  Athéniens.  —  En  499.  Les  Athéniens,  soutenant  les  Ioniens  révoltés 
contre  les  l'erses,  s'étaient  emparés  de  Sardes,  chef-lieu  d'une  des  satrapies 
(gouvernements)  de  leur  empire,  et  l'avaient  brûlée.  Hérodote,  V. 

12,  Menteur.  —  •-  Il  faut  qu'un  menteur  ait  de  la  mémoire  ».  Ai'ui.ée. 

13,  Grammairiens.  —  En  particulier  Nigidius  dans  Aulu-Gelle,  XI,  et  Nonius, 
V;  Montaigne  ne  fait  ici  que  traduire  ce  dernier.  Le  Clerc. 

19,  Tout.  —  Cette  locution  «  marc  et  tout  »  n'est  pas  claire,  bien  que  la 
pensée  le  soit.  Elle  semble  vouloir  dire  :  principal  et  accessoires,  ce  que 
confirme  ce  passage  du  ch.  XVll  du  liv.  II  (II,  464),  où  Montaigne  dit  : 
■•  le  ne  conseille  non  plus  aux  dames  d'appeler  honneur  leur  deuoir. ..  leur 
deuoir  est  le  marc,  leur  honneur  n'est  que  l'escorce.  » 


64, 


1,  Art.  —  Ce  mot  est  d'emploi  fréquent  dans  les  Essais,  et,  sauf  dans  doux 
ou  trois  passages,  toujours  au  féminin. 

7,  Vice.  —  Homère,  dans  l'Iliade,  fait  dire  a  Achille  :  «  Je  hais,  à  l'égal  des 
portes  de  l'enfer,  celui  qui  pense  d'une  façon  et  i)arle  d'une  autre  ».  ~  Il 
esta  regretter  que  nous  n'ayons,  en  bon  français,  <[u'un  seul  mot  pourqua- 


C.286  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

lifier  toute  altération  de  la  vérité  sciemment  faite,  qu'elle  ait  lieu  ou  non 
avec  le  désir  ou  la  volonté  de  nuire.  Dans  le  premier  cas,  elle  est  réellement 
coupable  et  mérite  toute  réprobation;  dans  le  second  au  contraire,  elle 
s'impose  parfois,  quand  elle  a  pour  objet  d'éviter  à  quelqu'un  une  déception, 
une  désillusion,  un  chagrin  ;  elle  est  excusable,  lorsqu'elle  n'a  d'autre  but 
que  de  plaisanter,  ou  de  donner  plus  de  piquant  à  un  récit  fait  uniquement 
pour  divertir.  Menterie  (mensonge  léger,  sans  conséquence),  employé  par 
atténuation  dans  le  style  familier,  est  lui-même  un  ternie  éveillant  toujours 
à  l'égard  du  propos  auquel  il  s'applique  quelque  idée  de  blâme  ou  de  cri- 
tique. Ces  distinctions,  dans  l'altération  volontaire  de  la  vérité  suivant 
l'intention,  faisaient  dire  à  Voltaire  :  «  Le  mensonge  n'est  un  vice  que 
lorsqu'il  fait  du  mal;  c'est  une  grande  vertu  quand  il  fait  du  bien  ».  Elles 
sont  admises  des  théologiens  et  sont  l'origine  de  ces  restrictions  mentales 
qui  créent  des  excuses  à  qui  est  ainsi  amené  à  mentir,  restrictions  que 
certains,  auxquels  le  reproche  en  est  souvent  fait,  ont  érigées  en  système.  — 
Quelque  chose  d'analogue  se  produit  pour  la  délation  et  l'espionnage,  qui 
emportent  constamment  une  idée  de  réprobation  parce  que  nous  n'avons 
pas  de  mots  distincts  pour  la  désignation  de  faits  de  ces  caractères,  soit 
qu'ils  constituent  des  actes  justifiant  la  réprobation  publique,  soit  qu'ils 
témoignent  au  contraire  de  la  plus  haute  vertu.  Commettent  on  effet  tous 
deux  de  la  délation  l'être  méprisable  qui,  dans  un  but  d'intérêt  personnel 
ou  pour  lui  porter  préjudice,  dénonce  son  prochain  sans  nécessité,  et 
l'homme  de  cœur  qui  signale  des  crimes  qui  sans  lui  échapperaient  à  la 
vindicte  de  la  société,  ou  de  belles  actions  qui,  sans  son  intervention,  de- 
meureraient inconnues;  de  même  tous  deux  font  de  l'espionnage,  le  traître 
qui  vend  à  l'ennemi  les  secrets  de  sa  patrie,  et  le  héros  qui  expose  sa  vie 
pour  surprendre  ceux  de  l'adversaire  et  en  faire  profiter  les  siens.  —  Ce 
sont  là  des  lacunes  regrettables  de  notre  langue. 

26,  Blanc.  —  C.-à-d.  détournent  du  but.  Expression  qui  vient  de  ce  que  les 
buts  sur  lesquels  on  tirait,  et  on  tire  encore  en  certains  pays  de  France, 
à  l'arc  et  à  l'arbalète,  sont  constitués  par  des  cercles  peints  en  blanc. 

29,  Père.  —  Saint  Augustin. 

31,  Vice.  —  Passage  de  Pline,  Hist.  nat.,  VII,  I,  que  Montaigne  a  modifié 
pour  mieux  l'adapter  à  sa  thèse  ;  l'auteur  latin  dit  :  «  alieiio  pêne  non  sit  (ne 
sont  presque  point)  ». 


66, 


68, 


1,  Rouet.  —  Mettre  au  rouet,  c'est  fermer  la  bouche  à  quelqu'un,  lui  ôter  le 
moyen  de  répondre,  l'embarrasser. 

12,  Niepce.  —  Cette  princesse,  peu  après  cet  épisode,  épousa  en  effet  le  duc 
de  Milan,  et,  postérieurement,  le  duc  de  Lorraine  François  II. 

14,  Interest.  —  Signifie  ici  dommage,  préjudice.  Ce  mot  se  prend  encore  au- 
jourd'hui dans  ce  sens,  quand  en  langage  juridique  on  dit  de  quelqu'un 
qu'il  est  «  condamné  aux  dépens,  dommages  et  intérêts  ». 

41,  François.  —  En  1534,  l'incident  Merveille  s'était  produit  l'année  précé- 
dente. Du  Bellay,  IV.  —  Ainsi  que  permettent  de  le  constater  les  por- 
traits de  ce  prince,  le  roi  François  I  avait  le  nez  d'une  longueur  peu  ordi- 
naire. 

7,  Vie.  —  En  1513.  Erasme,  IV.  Le  roi  d'Angleterre  était  Henry  VIII;  le  roi  de 
France  Louis  XII  et  non  François  P'  qui  ne  monta  sur  le  trône  qu'en  1515, 
après  la  mort  de  Jules  II  survenue  l'année  où  le  fait  en  question  s'est 
passé. 

CHAPITRE  X. 

8,  Données.  —  Ce  vers  est  de  la  Boétie. 

10,  Boutebors.  —  Présence  d'esprit  ou  faculté  d'exprimer  plus  ou  moins  fa- 
cilement et  sur-le-champ  sa  pensée. 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  X.         VOL.  I,  PAG.  68.  F.287 

11,  Beau.  —  Il  existe,  datant  du  xvi'  siècle,  un  livre  espagnol,  traitant  de 
la  gymnastique,  à  l'usage  du  beau  sexe. 

22,  Lice.  —  Le  poète  Accius,  auquel  on  demandait  pourquoi  il  ne  plaidait 
pas,  lui  qui  réussissait  si  bien  au  théâtre,  répondait  ?  «  Dans  mes  tragé- 
dies, je  dis  tout  ce  qui  me  plaît;  à  la  barre,  je  serais  obligé  d'entendre 
tout  ce  que  je  ne  voudrais  pas.  »  —  Bayle,  qui  donne  cette  réponse,  dit  qu'il 
connaît  un  homme  d'espiit  qui  ont  recours  à  cette  raison  pour  détourner 
son  (Ils  do  la  jurisprudence  et  le  pousser  vers  la  théologie  :  -  Quoi  de  plus 
commode,  lui  disait-il,  que  de  parler  devant  des  gens  qui  ne  vous  contre- 
disent pas?  c'est  l'avantage  des  prédicateure  (il  pourrait  ajouter  aujour- 
d'hui et  des  conférenciers  on  général,  car  tout  maintenant  est  matière  à 
conférence,  où  parfois  à  la  vérité,  mais  bien  exceptionnellement,  la  con- 
trovei"se  est  admise);  et  quoi  de  plus  incommode  que  d'être  obligé  d'enten- 
dre, dès  que  vous  avez  parlé,  quelqu'un  vous  réfuter,  en  passant  au  crible 
tout  ce  que  vous  avez  dit?  ce  qui  est  la  condition  de  l'avocat.  »  Il  faut  con- 
venir du  reste  que  beaucoup  de  ceux-ci  se  soucient  fort  peu  de  ces  réfuta- 
tions qu'ils  n'écoutent  pas  toujours,  comme  font  en  particulier  nos  parle- 
mentaires qui,  n'ayant  souvent  ni  compétence  ni  conviction,  ne  parlent  que 
pour  donner  des  gages  à  leur  parti,  signe  de  vie  à  leurs  électeurs,  pronon- 
çant des  discours  fréquemment  vides  de  sens  auxquels  personne  ne  prête 
attention,  chacun  ayant,  la  plupart  du  temps,  son  siège  fait  à  l'avance.  G.  M. 

25,  Marseille.  —  Clément  VII  et  François  V%  en  1533.  Le  pape,  venu  par  mer, 
séjourna  un  mois  entier  à  Marseille;  cette  entrevue  avait  pour  objet  une 
entente  contre  l'empereur  Charles-Quint;  l'accord  fut  scellé  parles  fiançail- 
les de  Catherine  de  Médicis,  duchesse  d'Urbin,  nièce  du  pape,  qui  l'avait 
amenée  avec  lui,  avec  le  second  lîls  du  roi,  depuis  Henri  II.  Du  Bellay,  IV. 
70, 

7,  Prescbeurs.  —  On  naît  oi-ateur,  tandis  qu'on  devient  prédicateur;  et  ce 
qui  est  don  de  nature  prévaut  toujours. 

7,  France.  —  «  Les  Français,  dit  Stern  (et  Arthur  Young  est  du  même  avis), 
conçoivent  mieux  qu'ils  ne  combinent.  » 

12,  Cassius.  —  Orateur  célèbre  du  temps  d'Auguste,  que  son  humeur  sati- 
rique finit  par  faire  bannir.  Il  se  distinguait  par  la  violence  de  ses  écrits  et 
de  ses  discours,  ne  gardant  aucune  mesure,  aucune  décence  dans  l'expres- 
sion, et,  dans  l'ardeur  de  frapper  ses  adversaires,  querellait  plus  qu'il  ne 
combattait.  Sénèque  le  Rhéteur,  III.  (V.  II,  50,  et  N.  II,  72  :  Fil). 

13,  Pense.  —  On  en  disait  autant  de  Cazalis,  député  de  la  noblesse  aux  États 
généraux  de  1789. 

21,  Part.  —  Le  même  reproche  de  «  sentir  l'huile  •  fut  fait  à  Démosthène 
par  Pythéas,  autre  orateur,  critiquant  par  là  en  lui  la  préparation  excessive 
de  ses  discours,  ce  qui  ne  l'empêchait  pas  d'être  le  premier  orateur  de  son 
temps  et  peut-être  de  tous  les  temps.  —  «  L'improvisation  ne  s'improvise 
pas;  il  faut  une  longue  préparation  et  des  méditations  approfondies  pour 
parler  d'abondance.  » 

31,  Fortuites.  —  C'était  le  cas  de  Mirabeau,  le  grand  orateur  de  ces  mêmes 
États  généraux  de  1789;  la  contradiction  l'enflammait.  Au  début  ses  vues 
étaient  confuses,  sa  parole  entrecoupée,  mais,  peu  à  peu,  avec  la  discus- 
sion et  les  interruptions,  la  lumière  se  faisait  dans  son  esprit,  ses  expres- 
sions se  précisaient,  s'accentuaient,  et  son  génie  oratoire  et  politique  se  fai- 
sait jour  et  s'imposait. 
72, 

8,  Jour.  —  C.-à-d.  le  hasard  m'en  offrira  le  sens. 


F.288  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


CHAPITRE  XI. 

10,  Pièce.  —  Dès  longtemps,  comme  poi'tent  certaines  éditions;  c'est  un 
italianisme,  im  buonpezzo,  dit-on  en  italien;  ailleurs  Montaigne  écrit  pieça. 

11,  Crédit.  —  «  Notre  ignorance  générale  des  causes  premières  nous  interdit 
toute  pr(;diction.  La  plupart  du  temps  ce  ne  sont  que  des  hypothèses  ba- 
sées sur  des  analogies,  et  ne  devraient  se  borner  qu'à  un  avenir  fort  rap- 
proché; toujours  elles  sont  de  réussite  assez  douteuse.  Les  prédictions  des 
rêveurs  que  rien  n'autorise,  se  confirment  parfois,  mais  ce  n'est  que  par 
liasard  ;  combien  infinie  la  quantité  d'autres,  émanant  de  même  source,  qui 
ne  se  réalisent  pas  et  dont  personne  ne  parle!  »  G.  Leison. 

M,  Delphis.  —  Delphes  était  regardée  par  l'antiquité  grecque  comme  une 
ville  sainte;  on  la  tenait  comme  occupant  le  centre  de  la  terre;  son  temple 
d'Apollon  et  les  oracles  qui  s'y  rendaient  étaient  en  gi-ande  vénération.  Tou- 
jours obscurs  et  ambigus,  ces  oracles  étaient  rendus  par  la  Pythie,  prê- 
tresse du  dieu,  qui,  à  cet  effet,  mâchait  dos  feuilles  de  laurier,  arbi'e  qui 
lui  était  consacré,  et  se  tenait  sur  un  trépied  au-dessus  d'une  ouverture  d'où 
s'échappaient  des  vapeurs  qui  lui  communiquaient  une  certaine  exaltation. 

21,  Abolies.  —  Les  aruspices  étaient  des  sacrificateurs  qui  révélaient  l'ave- 
nir par  l'inspection  des  entrailles  des  victimes;  les  augures,  d'ordre  plus 
relevé,  le  révélaient  d'après  le  vol,  le  chant  et  l'appétit  des  oiseaux.  Les 
devins  émettaient  des  prédictions,  interprétaient  les  songes,  les  présages  à 
la  façon  de  nos  diseurs  de  bonne  aventure;  il  en  était  à  peu  près  de  même 
des  oracles,  mais  rendus  en  un  lieu,  dans  des  formes  et  au  nom  d'une  di- 
vinité déterminée,  ils  avaient  un  caractère  plus  offici-el  et  inspiraient  da- 
vantage créance. 

27,  Préoccuper. —  Anticiper;  ne  s'emploie  plus  dans  ce  sens  déi'ivé  de  son 
étymologie  latine. 
74, 

I,  Olympi.  —  L'Olympe,  sur  les  confins  de  la  Macédoine  et  de  la  Thessalie, 
montagne  la  plus  élevée  (environ  2.5C)0)  de  la  péninsule  hellénique.  Les  an- 
ciens en  avaient  fait  la  résidence  de  leurs  dieux;  Jupiter,  souverain  maître 
des  dieux  et  des  hommes, 'l'était  aussi  de  l'Olympe. 

8,  Salusse.  —  Une  fille  de  celte  famille  s'est  alliée  en  158G  à  un  Lur  des  en- 
virons de  Bordeaux,  fondant  la  branche  des  Lur-Saluces  qui  y  existe  en- 
core, et  deux  de  leurs  petits-fils  ont  épousé  les  deux  petites-filles  de  Mon- 
taigne. V.  N.  II,  44  :  Masculines. 

12,  Faire.  —  C.-à-d.  «  de  changer  de  parti  »,  comme  il  est  dit  quelques  li- 
gnes plus  bas.  Certains  éditeurs,  choqués  de  cette  longue  suspension  de 
sens,  ont  substitué  :  «  de  tourner  sa  robe  •>,  autrement  dit  «  tourner  ca- 
saque ».  COSTE. 

IG,  Dauantage.  —  «  Il  était  homme,  écrit  du  Bellay,  qui  ajoutait  foi  aux 
devins,  lesquels  lui  avaient  prédit  que  l'Empereur  devait  cette  année  dé- 
trôner le  roi  de  son  royaume.  » 

27,  Contestée.  —  En  1536.  Cette  trahison  eut  aussi  pour  cause  le  désir  qu'a- 
vait le  marquis  de  Saluées  d'obtenir  de  Charles-Quint  le  marquisat  de 
Montferrat  auquel  il  prétendait;  c'était  déjà  pour  recevoir  des  territoires 
qui  étaient  en  notre  possession  et  qu'il  revendiquait,  qu'il  était  passé  dans 
nos  rangs.  11  fut  tué  l'année  suivante  au  siège  de  Carmagnoles.  Du  Bei.i.av. 
•  VI  et  VIII. 

39,  Tort.  —  C.-à-d.  au  contraire,  ceux-là  sont  dans  l'erreur  qui  croient  la 
maxime  que  voici. 

1,  Art.  —  GicÉRON,  De  Divin.,  II,  23.  — Les  Etrusques  (auj.  Toscans)  étaient 
les  grands  magiciens  de  l'Italie,  comme  les  Thessaliens  ceux  de  Grèce,  les 
Chaldéens  ceux  de  l'Asie.  L'empereur  Juhen,  lors  de  son  expédition  en 
Perse,  avait  avec  lui  des  aruspices  toscans. 


78, 


NOTES.         LIV.   I,  (".H.  XI.         VOI,.  I,  PAC.  7G.  F.289 

7,  Fortuite.  —  Platon,  dans  sa  République,  V,  8,  etc.,  veut  en  effet  que  les 
chefs  du  gouvernement  fassent  en  sorte  que  les  plus  excellents  hommes 
soient  mariés  avec  les  plus  excellentes  femmes,  et  de  même  les  hommes  les 
plus  méprisables  avec  des  femmes  de  leur  caractère;  mais  que  la  chose 
soit  décidée  par  une  espèce  de  sort,  ménagé  avec  tant  d'artifice,  que  ces 
derniers  s'en  prennent  à  la  fortune,  dont  la  part  dans  son  système  est 
pourtant  faite  très  restreinte,  et  non  à  leurs  gouvernants. 

28,  Nombre.  —  Diagoras,  disciple  de  Démocrite,  très  pieux  au  début  de  sa 
vie,  en  vint,  à  la  suite  d'un  parjure  dont  il  avait  été  victime,  à  nier  l'exis- 
tence des  dieux,  ce  qui  le  fait  appeler  d'ordinaire  Diagoras  l'Athée.'  Pour- 
suivi par  les  Athéniens  pour  ses  tendances  antireligieuses,  il  s'enfuit,  et  sa 
tête  fut  mise  à  prix  :  un  talent  à  qui  le  tuerait  et  deux  à  qui  le  livrerait 
vivant  (le  talent  avait  une  valeur  variant  entre  2.G0O  et  5.000  fr.,  le  talent 
attique  était  de  5.000).  —  Sa  réponse,  dans  la  circonstance  présente,  est  re 
lalée  d'une  manièi'e  un  peu  différente  par  Diogène  Laërce  :  «  Vous  en 
verriez  bien  davantage,  lui  fait-il  dire,  si  c'étaient  là  les  images  de  ceux 
qui  ont  péri!  »  Cicéron,  De Xal.  deor.,  I,  37,  cite  do  lui  cette  autre  réponse  : 
«  H  était  à  bord  d'un  vaisseau  qui  essuya  une  forte  tempête  ;  pendant  le 
gros  temps,  quelqu'un  dit  qu'on  avait  bien  méi-ité  ce  qui  arrivait  pour 
avoir  embarqué  un  impie  comme  lui  :  ■<  Regardez,  répondit  Diagoras,  le 
«  grand  nombre  do  navires  qui  souffrent  de  la  même  tempête  que  nous, 
«  crojez-vous  que  je  sois  aussi  dans  chacun  de  ces  bâtiments?  » 

28,  Cicero.  —  I)e  Divinat.,  I,  3. 

32,  Principesques.  —  Catherine  de  Médicis,  entre  autres,  qui  avait  un  astro- 
logue attitré,  Ruggieri,  qu'elle  avait  amené  d'Italie  et  pour  lequel  elle 
avait  fait  construire  un  observatoire.  Il  lui  avait  prédit  qu'il  y  avait  dan- 
ger pour  le  roi  son  mari  (Henri  II)  à  prendre  part  au  tournoi  où  il  fut 
blessé  mortellement,  et  elle  avait  fait  en  suite  de  cette  prédiction  tous  ses 
efforts  pour  détourner  ce  prince  d'entrer  en  lice. 

32,  Vanitez.  —  Chez  les  Romains,  on  punissait  quelquefois  un  général  vaincu 
de  ne  pas  avoir  tenu  compte^des  présages;  c'était  un  effet  de  leur  politi- 
que, voulant  montrer  ainsi  au  peuple  que  les  revers  qu'ils  éprouvaient  ne 
provenaient  pas  de  la  mauvaise  constitution  de  l'État,  ou  de  sa  faiblesse,  mais 
de  l'impiété  d'un  citoyen  contre  lequel  lesdieux  étaient  irrités. 

30,  Grèce.  —  Ces  prédictions  de  l'empereur  Léon  concernaient  la  chute  du 
Bas-Empire  et  les  malheurs  de  Constant! nople;  elles  sont  consignées  dans 
un  manuscrit  grec  de  la  bibliothèque  de  l'Escurial  (résidence  ordinaire  des 
rois  d'Espagne). 

10,  Plaira.  —  Parmi  ces  prophéties,  les  plus  célèbres  sont  celles  sur  les  pa- 
pes, de  Malachie,  archevêque  d'Arnagh,  en  Irlande  (xi°  siècle),  qui,  du 
reste,  sont  considérées  comme  apocryphes;  et  celles  de  Nostradamus 
(xvi"  siècle),  dont  Henri  II  et  Catherine  de  Médicis  faisaient  grand  cas  et 
qui  sont  formulées  en  quatrains  extravagants  où  l'on  peut  voir  tout  ce  que 
l'on  veut. 

12,  Discours.  —  De  sa  raison.  —  Ce  mot  «  discours  »,  qui  revient  souvent 
dans  Montaigne,  y  est  pris  dans  les  acceptions  les  i)lus  variées.  Outre  son 
acception  ordinaire  en  tant  qu'expression  de  la  pensée,  entretien,  conver- 
sation, il  est  pris  souvent  an  cours  des  Essais  dans  le  sens  de  raison,  in- 
telligence, entendement,  comme  il  arrive  ici,  et  dans  bien  d'autres,  signi- 
liant  :  Raisonnement,  jugement  :  «  l'ay  veu  quelqu'vn...  courre  la  mort 
à  force...  par  diuers  visages  de  discours  que  ie  ne  luy  scéu  rabattre  »  (I, 
418);  —  Sagesse:  «  Gallus  Vibius...  se  pouuoit  vanter  d'estre  deuenu  fol 
par  discours  »,  porte  l'f'dition  de  1588;  «  par  sagesse  »,  porte  celle  de  1595 
(I,  134); —  Dessein  :  «  le  m'abandonne...  à  tousiours  dire  ce  que  ie  pense,  et 
par  complexion  et  par  discours  »,  porte  l'édition  do  1588;  «  et  par  des- 
sein »,  porte  cellede  1598  (II,  490):  —Opinion  :  «  lia  cuidé  m'imprimer  non 
tant  son  discours,  que  son  sentiment  »  (III,  038);  —  Volonté  :  «  II  y  a  phi- 
sieurs  mouuemens  en  nous  qui  ne  se  partent  pas  de  nostre  discoure  », 

ESSAIS  DE  MONTAIGNE.  —  T.    IV  19 


F.290  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

porte  l'édition  do  1588,  ■<  de  nostre  ordonnance  »,  porte  celle  de  1595 
(1,392);  — Supériorité,  dilTiculté;  «  Il  y  a  encore  plus  de  discours  à  instruire 
autruy  qu'à  estif  instruit  »  (II,  160);  —  Art,  artifice,  ingéniosité,  parti  pris  : 
■•  A  peine  est-il  en  son  pouuoir...  de  gouster  un  seul  plaisir...  encore  se  met- 
il  en  peine  de  le  retrancher  par  discoui-s  »  (I,  350).  Motheau  et  Jouaust, 
Glossaire. 

15,  Suiuies.  —  Socrate  prétendait  entendre  constamment  en  lui  une  voix 
intérieure,  qu'il  appelait  son  démon  familier,  l'inspirant  et  en  lequel  il 
manifestait  une  confiance  aveugle.  En  cela,  il  semble  avoir  été  de  la  plus 
entière  bonne  foi;  il  n'y  a  pas  apparence  que  c'ait  été  de  sa  part  une  im- 
posture pour  donner  plus  de  crédit  à  sa  parole  et  aidera  son  rôle  de  réfor- 
mateur; du  i-este,  Montaigne  ne  le  met  pas  en  doute  et  ne  fait  qu'en  don- 
ner une  exj)lication.  Voir  sur  Socrate  N.  III,  576  :  L'vn.  —  On  retrouve 
l'analogue  dans  les  voix  de  Jeanne  d'Arc  la  sollicitant  sans  cosse,  d'après 
son  dire  que  nous  ne  contestons  pas  davantage,  à  s'employer  à  jeter  les 
Anglais  hors  de  France. 

17,  Fortuite.  —  Daniel  de  Foë,  l'auteur  de  Robinson  Critsoé,  a  écrit,  comme 
suite  à  cet  ouvrage,  sur  l'importance  qu'il  y  a  à  ne  pas  négliger  ces  sortes 
de  pressentiments  qu'il  attribue  à  des  avei'tissements  donnés  par  des  intel- 
ligences célestes;  peut-être  n'est-ce  simplement  que  le  fait  du  travail  in- 
conscient de  l'esprit  préoccupé  d'une  idée  qui  nous  fait  entrevoir  des  éven- 
tualités qtie  nous  retenons  loi'squ'elles  ont  de  l'à-propos,  et  dont  nous  ne 
nous  souvenons  même  pas  quand,  ce  qui  arrive  le  plus  souvent,  elles  ne  se 
réalisent  pas  et,  par  suite,  n'éveillent  pas  notre  attention. 

20,  Socvates.  —  Plato.n,  dans  Théagès. 


80. 


CHAPITRE  XII. 

3,  Visage.  —  On  assure  que  les  Parthes^les  Scythes  combattaient  ainsi;  et 
Corneille  s'est  servi  de  cette  tradition  dans  ce  vers  de  Rodogune  :  «  Elle 
fuit,  mais  en  Partlïe,  en  nous  perçant  le  cœur.  »  —  Les  Indiens  bravos  des 
Attakapas  (Amérique  du  Nord)  se  défendaient  de  même,  lançant  aussi 
adroitement  leurs  llèches  en  fuyant  que  s'ils  avaient  regardé  l'ennemi  en 
face. 

12,  Sier.  —  Terme  de  marine  de  l'époque  employé  pour  «  tourner,  virer  »  : 
vient  du  latin  sedere  (%g  placer);  signifie,  ici,  se  reporter. 

14,  Victoire.  —  En  479.  Les  Perses,  au  nombre  de  plus  de  3(X).00U,  sous  les 
ordres  de  Mardonius,  qui  y  fut  tué,  y  furent  vaincus  par  les  Grecs,*  com- 
mandés par  Pausaniasroi  de  Sparte,  et  forts  seulement  de  110.000  hommes, 
et  cependant  l'armée  la  plus  considérable  peut-être  que  jamais  ils  aient 
réunie.  A  en  croire  Hérodote,  sauf  un  corps  de  40.000  hommes  qui  ne  fut 
pas  engagé,  à  peine  3.000  parmi  les  vaincus  auraient  sui'vécu,  tandis  que 
la  perte  des  vainqueui-s  n'aurait  été  que  de  quelques  centaines  d'iiommes. 
—  Le  propos  que  tient  ici  Socrate  est  tiré  de  Platon,  dialogue  de  Zachès. 

22,  Manger.  —  •<  D'y  mordre  »,  porte  l'exemplaire  de  Bordeaux,  auti-ement 
dit  :  d'en  tàtcr,  pour  juger  ce  dont  nous  sommes  capables. 

24,  Saoul.  —  Le  fait  est  conté  par  Hérodote,  IV,  127,  qui  nomme  ce  roi  des 
Scythes,  Idanthryse.  Cette  expédition  (508)  se  termina  à  la  confusion  des 
Perses  qui  furent  obligés  de  se  retirer  pour  échapper  à  la  famine  dont  ils 
étaient  menacés  par  le  vide  que  les  Scythes  faisaient  devant  eux  et  aussi 
par  la  crainte  de  se  voir  la  retraite  coupée.  Elle  fut  la  cause  originelle  des 
gueri'es  médiques,  le  roi  des  Perses  voulant  se  venger  de  Miltiade  qui,  chef 
d'un  des  contingents  grecs  à  sa  solde,  préposés  à  la  garde  du  pont  qu'il 
avait  jeté  sur  l'isler  (auj.  le  Danube)  pour  assurer  ses  communications, 
avait  proposé  à  ses  congénères  de  le  rompre. 

21),  Compagnons.  —  En  1805,  à  un  combat  sur  l'IUor  (Tyrol),  au  moment  où 
un  de  ses  officiers,  sa  coiffure  à  la  main,  rendait  compte  au  maréchal  Ney 


82. 


NOTES.         LIV.  I,  CM.  Xd.         VOL.  I,  PAO.  80.  F.291 

d'une  mission  qu'il  venait  de  remplir,  un  boulet  pa-ssa  si  près  d'eux,  que 
l'officier  baissa  instinctivement  la  tête,  tout  en  continuant  son  rapport  : 
«  Cest  très  bien,  lui  dit  Ney,  quand  il  eut  aciievc  de  parler,  seulement,  une 
autre  fois,  ne  saluez  pas  si  bas.  »  Marco  Saint-Hilaire.  —  Le  bailli  de  SufTren 
disait  que  lorsqu'il  rencontrait  l'ennemi  en  raer,  il  en  éprouvait  tout  d'a- 
bord un  dérangement  d'entrailles  au  point  d'en  maculer  ses  culottes,  mais 
qu'ensuite  il  ne  songeait  qu'à  la  besogne. 

31,  Prouence.  —  En  1536;  cette  invasion  échoua  par  la  résistance  de  Mar- 
seille qui  obligea  les  Impériaux  à  une  retraite  difficile. 

38,  Corps.  —  La  ville  d'Arles  n'était  point  en  état  de  défense  et  l'Empereur 
délibérait  s'il  s'y  porterait  ou  non.  Ses  hésitations  donnèrent  le  temps  d'y 
constituer  une  garnison  et  d'armer  la  place;  ce  fut  alors  qu'il  procédait  à  la 
reconnaissance  des  travaux  en  cours  d'exécution  que  le  marquis  du  Guast 
faillit  être  tué.  Du  Bellay,  YIIL 

1,  Roy.  —  En  1517;  sa  blessure  lui  fit  lover  le  siège.  C'était  le  père  de  Cathe- 
rine de  Médicis,  mère  de  François  II,  de  Charles  IX  et  de  Ileni'i  III,  qui 
i-égnait  quand  Montaigne  écrivait  ce  passage. 

i,  Regardait.  —  Actuellement  qu'on  se  sert  d'étoupilles  au  lieu  de  mèche 
à  canon  pour  mettre  le  feu  aux  pièces  d'artillerie,  et  que  les  projectiles  sont 
à  éclatement,  des  faits  de  cette  nature  ne  sont  plus  susceptibles  de  se  pro- 
duire, parce  qu'on  ne  voit  plus  mettre  le  feu,  que  la  vitesse  du  projectile 
est  trop  gi-ande  et  la  gerbe  des  éclats  trop  étendue  pour  pouvoir  se  garer, 
quand  on  aperçoit  la  lueur  du  coup,  si  déjà  on  n'est  à  l'abri.  —  Au  siège 
de  Sébastopol  (185.5-56),  où  assiégés  et  assiégeants  faisaient  usage  de  bom- 
bes, étant  donné  leur  volume,  leur  peu  de  vitesse  et  la  durée  de  leur 
parcours,  il  était  encore  possible  de  s'en  préserver,  dans  une  certaine  me- 
sure, en  se  terrant  à  temps,  ce  que  chacun  faisait,  quand  on  entendait  le 
cri  :  «  Gare  la  bombe!  »  pqussé  par  l'un  des  observateurs  placés  à  cet  effet, 
apercevant  le  projectile  développant  sa  courbe  dans  les  airs. 

21,  Souffrance.  —  Charles  V,  roi  de  France,  disait  d'un  homme  «  qui,  dans 
son  épitaphe,  était  mentionné  comme  n'ayant  jamais  eu  peur,  qu'apparem- 
ment il  n'avait  jamais  mouché  une  chandelle  avec  les  doigts  ».  —  A  cette 
époque,  on  s'éclairait  avec  des  chandelles,  et  leur  mèche  ne  se  consumait 
pas  à  mesure  qu'elle  brûlait;  il  fallait  les  moucher,  ce  qui  se  faisait  avec  des 
ciseaux  ou  d^îs  mouchettes,  et  lorsqu'on  n'en  avait  pas,  avec  les  doigts, 
non  sans  grand  risque  de  se  brider. 

26,  Conforme.  —  Ces  pensées  sont  traduites  presque  textuellement  d'Aulu- 
Gelle  (XIX,  I),  qui  les  avait  traduites  lui-même  du  cinquième  livre,  aujour- 
d'hui perdu,  des  Mémoires  d'Arrien  sur  Epictète.  Le  Clerc. 

20.  Péripateticien.  —  Les  péripatéticiens  (ou  promeneurs)  étaient  les  disci- 
ples d'Aristote,  ainsi  nommés  parce  qu'ils  se  réunissaient  au  Lycée,  prome- 
nade d'Athènes,  pour  y  entendre  leur  maître,  et  que  l'enseignement  se  don- 
nait d'ordinaire  tout  en  se  promenant.  Leur  doctrine  est  indiquée  dans  la 
note  relative  à  Aristote,  V.  I,  32;  au  moyen  âge,  elle  fit  le  -fond  de  la  phi- 
losophie scolastique  et  domina  sans  partage  jusqu'au  xvi'  siècle. 


84. 


CHAPITRE  XIII. 

5,  Marguerite.  —  Marguerite  d'AngouIéme,  sœur  de  François  I"',  épouse 
,     de  Henri  d'AIbret,  roi  de  Navarre,  grand'mère  de  Henri  IV. 
)9,  Attendre.  —  «  L'exactitude  est  la  politesse  des  Rois  »,  dit  un  adage;  elle 
est  également  aujourd'hui  celle  des  particuliers  grands  et  petits  et  il  n'y  a 
que  les  malotrus  et  les  parvenus  qui  l'oublient. 
21.  Ville.  —  Il  alla  attendre  à  Nice. 
2;îi  Trouuer.  -  V.  N.  I,  68  :  Marseille. 
25,  Luy.  —  En  1532,  entre  ce  même  pape  Clément  \'lll  et  l'empereur  Charles- 


P.292  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Quint,  qui  poursuivait  la  convocation  d'un  concile  oecuménique  qui  fut 
placé  sous  la  protection  impériale,  la  papauté  menacée  par  la  Réforme. 
oO,  Eux.  —  Actuellement,  comme  autrefois,  ces  questions  sont  minutieu- 
sement réglées  d'avance,  dans  tous  leurs  détails,  par  le  service  dit  du 
«  Protocole  ».  —  Bien  que  les  rapports  personnels  des  souverains  entre  eux 
soient  toujours  suscoj^ibles  d'y  introduire  des  modifications,  généralement 
quand  un  .souverain  vient  en  visiter  un  autre,  celui-ci  envoie  à  la  limite 
de  ses  états  un  service  d'honneur  poui-  le  saluer  et  l'a-ssister  durant  tout  le 
temps  de  son  séjour  et  lui-même  l'attend  au  lieu  de  sa  résidence;  d'ordi- 
naire à  son  arrivée  il  se  trouve  à  la  gare  où  a  été  fait  un  déploiement  plus 
ou  moins  grand  de  troupes,  le  reçoit,  l'accompagne  où  il  doit  loger  et  ren- 
tre chez  lui,  où  il  attend  sa  première  visite  qu'il  lui  rend  aussitôt  après. 
C'est  surtout  dans  le  plus  ou  moins  d'importance  du  service  d'honneur, 
dans  les  honneurs  plus  ou  moins  grands  rendus  à  l'arrivée,  dans  l'étendue 
et  l'éclat  plus  ou  moins  considérables  des  têtes  qui  suivent,  et  surtout  dans 
la  participation  plus  ou  moins  enthousiaste  des.  populations  avec  lesquelles 
il  faut  compter  plus  qu'auti'efois,  que  consistent  les  nuances. 


86, 


10,  Entregent.  —  Façon  convenable  de  converser  et  d'agir  selon  les  per- 
sonnes, le  sujet,  le  temps  et  le  lieu  ;  art  de  se  pousser  dans  le  monde,  était 
à  l'époque  pris  exclusivement  en  bonne  part. 

11,  Familiarité.  —  Auch.  XVII  du  liv.  II,  l'auteur  redit  à  peu  près  la  même 
chose  de  la  beauté  :  «  C'est  vne  pièce  de  grande  recommandation  au  com- 
merce des  honmies,  elle  est  le  premier  moyen  de  conciliation  des  vns  auec 
les  autres.  • 

14,  Communicable.  —  «  La  civilité  est  une  envie  de  plaire  ;  la  nature  la 
donne,  mais  l'éducation  l'augmente.  »  M.\dame  de  Laaibert.  —  «  La  politesse 
n'est  qu'une  forme  de  la  bonté,  de  la  charité,  de  la  bienveillance,  et  une 
imitation  de  l'amitié.  »  Al.  Karu.  —  «  La  politesse  ne  coûte  rien,  ne  nuit 
jamais  et  rapporte  beaucoup.  » 

CHAPITRE  XIV. 

Chapitre  XIII.  —  Sous  ce  numéro,  les  éditions  antérieures  et  l'exemplaire 
de  Bordeaux  donnent  ici  le  chapitre  XV  de  la  présente  édition  :  «  Que  le 
goust  des  biens  et  des  maux,  despend,  en  bonne  partie  de  l'opinion  qu(> 
nous  en  auons  »  ;  celui-ci  y  porte  le  numéro  XV  et  tous  ceux  de  XV  à  XXXIX 
se  trouvent  y  avoir  leurs  numéros  accrus  chacun  d'une  unité. 

Raison.  —  La  thèse  émise  dans  ce  chapitre  est  absolument  l'opposé  des 
idées  actuelles  qui  veulent  qu'en  toutes  sitiïations  de  guerre,  un  soldat 
combatte  jusqu'à  ce  qu'il  soit  réduit  à  l'impuissance  la  plus  absolue,  que  ce 
soit  dans  une  place  ou  en  rase  campagne,  ce  que. notre  grand  Corneille  a 
si  noblement  et  magnifiquement  exprimé  dans  Horace  : 

«  Que  vouliez- vous  qu'il  fît  contre  trois? 

—  Qu'il  mourût, 
Ou  qu'un  beau  désespoir  alors  le  secourût.  • 

Cette  obligation,  nos  lois  la  sanctionnent,  mais  pas  aussi  sévèrement  encore 
qu'elles  le  devraient,  quoi  qu'en  disent  les^ philanthropes  et  les  internationa- 
listes, parce  que  c'est  là  une  question  de  salut  public.  Les  Anglais  ont  eu  rai- 
son de  fusiller  en  1756  leur  amiral  Bing  qui  avait  laissé  reprendre  Mahon  ; 
Napoléon  a  regretté  de  n'avoir  pas  agi  de  même  en  1808  à  l'égard  de  Dupont 
qui  avait  signé  la  capitulation  de  Baylen;'avoir  fait  grâce  à  Bazaine  ca- 
pitulant à  Metz  en  1870,  a  été  une  grosse  faute. 

27,  Bâfre.  —  Battre  en  brèche. 

27,  Dedans.  —  En  1524.  Cet  acte  de  cruauté  ne  fit  qu'irriter  les  assiégés  et  les 
inciter  à  se  défendre  avec  plus  d'opiniâtreté,  ce  qui  donna  le  temps  aux 


NOTES.         LIV.  r,  Cil.  XIV.         VOL.  I,  PAG.  86.  F.293 

Impériaux,  surpris  par  notre  brusque  entrée  en  campagne,  de  rassembler 
leurs  forces  et  de  venir  au  secours  de  la  ville  qui  fut  sauvée  par  la  bataille 
livrée  sous  ses  murs  (bataille  de  Pavie,  1525);  les  assiégeants  durent  sus- 
pendre le  siège  pour  y  participer  et  ne  purent  le  reprendre.  Du  Bellay,  II. 

28,  Dauphin.  —  François,  fils  aine  de  François  I",  qui  mourut  cette  même 
année  (1536),  par  suite  d'une  imprudence.  Échauflé  par  une  partie  de 
jeu  de  paume,  il  but  de  l'eau  glacée;  il  en  résulta  une  fluxion  de  poi- 
trine qui  eut  vite  raison  d'un  tempérament  délabré  par  un  abus  précoce  des 
plaisirs.  Le  roi,  dans  sa  douleur,  crut  à  un  empoisonnement,  on  ouvrit  une 
instruction;  l'empoisonneur  présumé  fut  écartelé  et  on  accusa  ouvertement 
l'empereur  Charles-Quint,  et  même  Catherine  de  Médicisi,  femme  du  fils  ca- 
det du  roi,  d'avoir  inspiré  le  crime;  mais  ces  soupçons  ne  reposaient  sur 
rien  et  on  dut  les  abandonner. 

28,  Monts.  —  Au  delà  des  Alpes,  en  Italie. 
88, 

2,  Raison.  —  En  1536.  Le  château  de  Villane,  perché  sur  un  roc,  est  d'a- 
bords inaccessibles;  la  garnison,  d'environ  200  Espagnols,  s'y  croyait  à  l'a- 
bri de  toute  entreprise  ;  mais  les  Français,  avisant  un  rocher  voisin  et  y  his- 
sant à  l'aide  de  cordages  quelques  pièces  d'artillerie,  parvinrent  à  prati- 
quer une  brèche,  par  laquelle,  à  grand  renfort  d'échelles,  ils  pénétrèi-ent 
par  escalade.  Du  Bellay,  VIII. 
5,  Place.  —  En  1543.  La  tour  de  Saint-Bony  interceptait  nos  communica- 
tions avec  Turin.  L'exemple  du  reste  profita  et  l'armée  française  n'é- 
prouva plus  aucune  résistance  des  forts  d'arrêt  assez  nombreux  dans  la  ré- 
gion. Du  Bellay,  IX. 

16,  Orient.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  les  Tamburlans,  Mahumets. 


CHAPITRE  XV. 

Ce  chapitre  a  le  n"  XVI  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

24,  Capitaine.  —  Probablement  François,  duc  de  Guise. 
27,  Bouloigne.  —  En  1546,  au  roi  d'Angleterre  Henry  VllI,  qui  l'assiégeait 
en  personne  ;  de  Vervins  eut  la  tète  tranchée.  Du  Bellay,  X. 


90. 


12,  Charge.  —  «  Qui  donna  jamais  à  l'erreur  le  nom  de  crime"?  »  Séxèque. 
—  Plutarque  rapporte  à  ce  propos  ce  mot  d'Archélaiis,  roi  de  Macédoine. 
On  l'animait  un  jour  contre  quelqu'un  qui,  par  mégarde,  avait  jeté  de  l'eau 
sur  lui  :  k  Ce  n'est  pas  moi  qu'il  a  mouillé,  dit  le  Prince,  mais  celui  pour 
qui  il  m'a  pris.  » 

18,  Emmy.  —  Au  milieu,  du  latin  in  medio,  d'où  vient  aussi  midi,  médius 
dies,  et  même  minuit,  média  nox. 

20,  Honte.  —  Diodore  de  Sicile,  XII,  4.  —  L'empereur  Juhen,  dont  il  va  être 
question,  se  trouvant  dans  les  Gaules,  obligea  pareillement  600  soldats  qui 
n'avaient  pas  bien  fait  leur  devoir  devant  l'ennemi  à  traverser  le  camp 
accoutrés  en  femmes,  ce  qui  leur  fut  si  sensible  qu'au  premier  combat  qui 
suivit,  ils  effaceront  leur  honte  par  dos  prodiges  de  valeur.  Lebeau. 

26,  Effundere.  —  Tertullien,  Apologétique,  à  propos  de  la  loi  romaine  qui 
punissait  de  mort  les  débiteurs,  peine  à  laquelle  l'empereur  ^eptime-Sévère 
substitua  la  vente  de  leurs  biens. 

26,  Anciennes.  —  En  363.  L'empereur  Julien  étant  en  opérations  contre  les 
Parthes  et  trois  de  ses  escadrons  ayant  fui  après  un  combat  insignifiant, 
en  abandonnant  à  l'ennemi  un  de  leurs  étendards,  leur  fit  appUcation 
des  lois  anciennes  et  les  décima,  dégradant,  avant  de  les  faire  mettre  à 
mort,  ceux  que  le  sort  avait  désignés.  Ce  fut  là  un  acte  exceptionnel  de  sa 
part;  en  d'autres  cas  analogues,  il  s'était  montré  beaucoup  moins  rigou- 
reux (V.  N.  I,  90  :  Honte).  Peut-être  la  gravité  des  circonstances  néces- 
sitait-elle un  exemple.  Ammien  Marcellin,  XXIV  ot  XXV. 


F.294  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

31,  Mort.—  Ce  Cn.  Fulvius  était  préteur;  lui  aussi  en  215,  peu  après  la  ba- 
taille de  Cannes  (216),  subit  en  Apulio,  du  fait  d'Annibal,  une  sanglante 
défaite  dans  laquelle  il  perdit  16.000  h.  sur  18.</J0  qu'il  commandait;  lui- 
même  s'('tait  enfui  avec  à  peine  2(X)  cavaliers.  Aux  soldats  échappés  à  ces 
deux  désastres  le  Sénat  romain  infligea,  comme  châtiment,  d'être  relé- 
gués en  Sicile  et  d'y  servir  jusqu'à  la  fin  de  la  guerre,  avec  défense  d'hi- 
verner dans  les  places  fortes  et  de  camper  à  moins  de  dix  milles  (20  kil.)  de 
quelque  ville  que  ce  fût.  Tite-Live,  XXV  et  XXVI,  2  et  3. 

37,  Espagnols.  —  En  15*23.  Franget  allégua,  pour  sa  défense,  une  conspira- 
tion qui  s'était  formée  dans  le  but  de  livrer  la  ville;  admis  à  le  prouver, 
il  n'y  parvint  pas.  Dr  Bellay,  II. 

41,  Entra.  —  En  1530.  La  ville  de  Guise  devait  être  évacuée,  et  le  château 
demeurer  seul  occupé.  Les  Espagnols  la  surprirent  pendant  que  l'i-vacua- 
tion  s'effectuait,  et  bien  que  le  château  eût  eu  le  temps  de  fermer  ses  portes, 
il  n'en  capitula  pas  moins  à  première  sommation.  Du  Bellay,  VII. 


92, 


CHAPITRE  XVI. 
Ce  chapitre  porte  le  n°  XVII  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 


5,  Voyages.  —  Montaigne  aimait  beaucoup  les  voyages;  il  en  a  fait  d'as- 
sez fréquents  en  France,  et  en  a  accompli  un  de  dix-huit  mois  en  1580-81 
cn  Italie  par  la  Suisse  et  l'.^rilemagne,  dont  il  a  laissé  un  journal  écrit  partie 
en  français,  partie  en  italien;  en  partie  dicté,  en  partie  de  sa  main. 

8,  Mieux.  —  De  Sacy  (anagramme  d'isaac),  de  Port-Royal  (1612  à  1684),  avait 
mis  à  profit  cette  leçon  de  Montaigne,  et  toujours  il  ramenait  la  conversa- 
tion sur  ce  qui  était  l'occupation  de  son  interlocuteur,  parlant  peinture 
avec  Pnilippe  de  Champagne,  philosophie  avec  Pascal,  etc.  —  Le  général 
Desvaux  (1810  à  1887)  qui,  en  Algérie,  développa  si  grandement  la  coloni- 
sation dans  la  province  de  Constantine  et  y  introduisit  la  construction  des 
puits  artésiens  d'après  nos  procédés,  le  même  qui,  en  1870,'  à  Metz,  chef 
par  intérim  de  la  Garde  impériale,  dont  il  commandait  la  cavalerie,  fut  le 
seul  à  se  déclarer  contre  la  capitulation,  dans  le  conseil  de  guerre  où  elle 
fut  décidée,  agissait  de  même. 

II,  Armenti.  — Traduction  itahenne  d'un  passage  de  Propercc,  II,  i,  43,  dont 
le  texte  latin  est  : 

Navita  de  verûis,  de  lauris  narrât  aralor  : 
Enumerat  miles  vulnera,  paslor  oves. 

16,  Poète.  —  Plutarqle,  Apophthegmes  des  Lacédémoniens .  —  Voltaire  était 
plus  porté  à  ije  targuer  de  ses  connaissances  assez  faibles  en  géométrie  et  en 
astronomie  (lue  de  ses  talents  littéraires;  Diderot  était  dans  le  même  cas; 
le  peintre  David  se  croyait  législateur;  l'abbé  Delille  voulait  parler  d'his- 
toire naturelle;  le  Jésuite  Daniel,  se  connaître  en  détails  stratégiques;  Fré- 
déric II,  être  poète;  le  peintre  Carteaux  et  le  médecin  Doppet,  sous  la  Ré- 
volution, être  généraux  en  chef. 

21,  Ingénieur.  —  Allusion  au  pont  que  César  fit  construire  sur  le  Rhin,  pour 
le  passage  de  ses  troupes  en  Allemagne,  construction  sur  laquelle  il  s'étend 
volontiers  dans  ses  Commentaires,  De  Bello  Gallico,  IV,  17;  Montaigne  v  re- 
vient au  ch.  XXXIV  du  liv.  II  (V.  N.  II,  650  :  Rhin). 

24,  Guère.  —  Diodoue  de  Sicile,  XV,  6.  —  Ce  fut  aussi  le  travers  du  cardinal 
de  Richelieu. 

26,  Estude.  —  Cabinet  de  travail;  le  mot  étude  est  employé  ici  dans  le 
même  sens  que  l'on  dit  aujourd'hui  :  étude  d'avoué,  de  notaire. 

Vis.  —  3Iontaigne  avait  d'abord  écrit:  «  la  vis  par  où  il  estoit  monté  », 
texte  qu'il  a  ensuite  modifié,  mais  qui  ne  laisse  aucun  doute  sur  la  signi- 
fication du  mot  «  vis  •>  qui  n'est  autre  ici  qu'un  escalier  tournant. 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  XVT.         VOL.  1,  PAG.  04.  F.29d 


94, 


96, 


14,  Conduire.  —  Si  Montaigne  eût  vécu  de  notre  temps,  il  eût  pu  ajouter  : 
«  Quant  à  ceux,  si  nombreux  aujourd'hui,  qui  font  profession  d'écrire 
sur  tout,  leur  style  est  souvent  leur  seul  mérite;  la  plupart  du  temps  il  n'y 
a  rien  à  puiser  dans  leurs  écrits;  bien  plus,  il  faut  s'en  défier.  Ne  connais- 
sant rien  à  fond  de  ce  dont  ils  parlent,  ils  ne  peuvent  en  juger  que  su- 
perliciellement:  la  compétence  leur  fait  défaut,  si  grande  que  soit  leur 
assurance,  sans  compter  qu'ils  n'ont  pas  plus  souci  de  la  vérité  et  de  l'exac- 
titude, que  du  mal  qu'ils  font  sciemment  ou  inconscienmient.  • 

16,  Langey.  —  Guillaume  du  Bellay,  seigneur  de  Langeais. 

•i:î,  Soldats.  —  «  Et  subjects  »  =  Add.  des  éd.  ant.  et  de  l'ex.  de  Bordeaux. 

27,  Batteau.  —  En  1536.  Ce  consistoire  ne  fut  à  proprement  parler  qu'une 
audience  publique  du  Pape,  où  l'Empereur  arriva  inopinément,  mais  avec 
l'idée  préméditée  d'y  défier  François  I".  Ce  défi  était  un  des  trois  moyens 
qu'il  suggérait  pour  terminer  leurs  différends  :  la  guerre,  l'accession  à  ses 
revendications,  le  combat  singulier;  les  duchés  de  Bourgogne  et  de  Milan, 
qu'il  réclamait,  devaient  être  dans  ces  diverses  éventualités  le  prix  du 
vainqueur.  Du  Bellay,  V.  —  Quel  malheur  que  les  chefs  d'États  ne  règlent 
pas  toujours  leurs  différends  en  combat  singulier,  comme  le  proposait 
Charles-Quint,  au  lieu  de  recourir  à  la  guerre!  ce  serait  au  moins  un 
cas  où  le  duel  aui-ait  du  bon  et  il  n'en  serait  pas  pour  cela  beaucoup  plus 
fréquent. 

13,  Subiectioa.  —  Pensée  traduite  d'Aulu-Gelle,  I,  13,  auquel  est  aussi  em- 
prunté le  fait  suivant. 
11,  Heureux.  -—  Parce  qu'il  était  très  riche,  très  noble,  très  éloquent,  fort 

savant  sur  le  droit  et  souverain  pontife.  Aulu-Gelle. 
37,  Décret.  —  Cette  observation  de  Montaigne  est  juste.  C'est  ainsi  qu'à  la 
guerre,  il  est  de  principe  que  celui  qui  est  sur  place  est  maître  absolu  de 
ses  faits  et  gestes,  tout  en  se  conduisant,  dans  les  limites  du  possible,  sui- 
vant les  instructions  qu'il  a  reçues;  et  c'est  à  l'inobservation  de  cette  règle 
que,  dans  la  deuxième  partie  du  xvni»  siècle,  les  armées  autrichiennes,  re- 
cevant leur  direction  du  Conseil  aulique  siégeant  à  Vienne,  ont  dû  d'é- 
prouver de  nombreux  revers.  Le  maréclial  Pélissier,  à  Sébastopol,  en  1855, 
harcelé  par  les  recommandations  et  instructions  qui  lui  venaient  pareil- 
lement de  Paris,  y  mit  fin  en  menaçant  de  couper  le  cable  télégraphique 
qui  le  reliait  à  ceux  qui  avaient  la  prétention  de  le  tenir  ainsi  en  lisière. 
Ceci  nous  amène  à  cette  question  si  délicate  de  l'emploi  souvent  abusif 
qui  est  fait  de  l'armée  en  temps  de  paix  et  des  droits  et  devoirs  de  chacun 
en  pareil  cas  : 

«  On  ne  peut  commander  et  on  ne  doit  obéir  que  pour  le  bien  du  service 
<■  et  l'exécution  des  règlements  militaires;  cette  règle  régit  tous  les  échelons, 
"  y  compris  le  Ministre  de  la  guerre  et  le  Gouvernement  lui-même. 

«  L'obéissance  indiscrète  outrepasse  les  ordres;  l'obéissance  imparfaite  s'y 
"  tient  strictement;  l'obéissance  parfaite  obéit  en  tout  ce  qui  est  permis; 
•■  or,  il  n'est  permis  à  personne,  non  plus  qu'au  Gouvernement  et  à  ses 
«  représentants,  d'enfreindre  les  lois  fondamentales  de  l'humanité,  de  rien 
«  faire  au  delà  des  limites  assignées  par  les  règlements,  ni  au  delà  de  ce 
«  que  permet  l'honneur. 

«  L'armée  n'a  pas  à  assurer  en  temps  habituel  l'exécution  des  lois;  ses 
•■  occupations,  comme  ses  devoirs,  sont  autres  :  la  cavalerie  n'est  pas  lancée 
■•  à  la  poursuite  des  voleurs,  caissiers  et  autres;  l'infanterie  ne  procède  ni 
•■  aux  arrestations,  ni  aux  transferts  de  prisonniers;  l'artillerie  ni  le  génie 
"  ne  détruisent  les  bâtiments  destinés  à  disparaître:  rien  de  tout  ceja  ne 
■  regarde  les  militaires;  pour  toutes  ces  besognes,  il  y  a  des  agents  spé- 
•■  ciaux. 

«  Dans  cet  emploi  irrégulier  de  l'armée,  sa  participation  à  toutes  les  inau- 
■•  gurations,  à  toutes  les  fêtes,  à  toutes  les  expositions,  est  pour  beaucoup; 
•  on  est  arrivé  à  la  considérer  comme  bonne  à  tout  faire.  »  G"'  Donop. 


F.296  ESSAIS  DE  MOiNTAIGNE. 

Notons  encore  que  chacun,  dans  raccomplissemciit  de  la  mission  qu'il  a 
reçue,  n'a  d'instructions  à  l'ecevoirque  de  son  cJiet  direct;  nul  autre  n'a  à 
s'immiscer  dans  les  moyens  d'exécution. 

Ces  principes  consacres  par  le  bon  sens,  étaient  jadis  confirmés  d'une  façon 
péremptoire  par  les  règlements;  mais  ceux-ci  ont  été  à  cet  égard  quelque 
peu  modifiés  récemment  pour  avoir  raison  des  résistances  que  rencon- 
traient des  exigences  abusives;  ici  comme  ailleurs,  quand  la  politique  sec- 
taire s'en  môle,  rien  de  ce  qui  devrait  l'être,  n'est  plus  respecté. 


98, 


CHAPITRE  XVII. 
Ce  chapitre  porte  le  n"  XVIII  dans  les  éd.  ant.  et  l'cx.  de  Bordeaux. 


4,  Passion.  —  La  peur  est  naturelle  à  l'homme,  peu  d'entre  eux  l'ignorent; 
le  plus  grand  nombre  finit  par  en  triompher,  le  lâche  est  celui  qui  s'3^ 
abandonne. 

8,  Esblouissements.  —  «  De  tous  les  animaux,  a  dit  le  prince  de  Ligne, 
l'homme  est  le  plus  peureux.  » 

8,  Vulgaire.  —  Il  n'y  a  pas  que  le  vulgaire  à  subir  des  impressions  irrai- 
sonnées; les  esprits  forts  n'en  sont  point  exempts.  Hobbes,  qui  s'est  élevé  si 
énergiquement  contre  l'existence  de  Dieu  et  l'immortalité  de  l'àme,  telles 
que  la  religion  nous  les  présente,  ne  pouvait  sans  crainte  des  revenants 
traverser  un  cimetière;  à  cette  époque,  xvii"  siècle,  pas  plus  en  Angleterre 
qu'en  France,  les  cimetières  n'étaient  clôturés. 

13,  Corselets.  —  Petites  cuirasses  que  portaient  les  piquiers  dans  les  régi- 
ments dos  gardes  et  dont  le  nom  s'étendait  à  ceux  qui  en  étaient  revêtus. 

14,  Rouge.  —  Croix  blanche  et  croix  rouge.  La  croix,  depuis  les  croisades, 
était  fréquemment  employée  en  guerre,  dans  la  catholicité,  par  les  nations 
adverses  pour  distinguer  les  belligérants.  A  la  bataille  de  Bouvines  (1214), 
les  Flamands  et  les  Allemands,  opposés  aux  Français,  avaient,  pour  se 
distinguer,  adopté  une  croix  rouge;  au  xvr  siècle,  la  croix  blanche  était 
le  signe  distinctif  des  Français,  la  croix  rouge  celui  des  Espagnols. 

23,  Campaigne.  —  En  1527.  Le  connétable  de  Bourbon,  opérant  pour  son 
propre  compte  à  la  tète  de  partisans  auxquels  il  avait  promis  le  pillage  de 
Rome,  exécutait  la  reconnaissance  de  la  place  ;  l'acte  de  cet  enseigne  lui 
révéla  l'existence  de  cette  brèche,  par  laquelle  il  fit  immédiatement  donner 
l'assaut  qui  réussit,  mais  où  il  trouva  la  mort.  Du  Bellay,  III. 

27,  Canonnière.  —  Embrasure  ou  ouverture  ménagée  pour  le  tir  du  canon. 
II  est  vraisemblable  que  c'est  là  une  faute  d'impression  commise  en  1580, 
qui  s'est  reproduite  d'édition  en  édition  et  qu'il  faut  lire  «  caponière  >■, 
sorte  de  retranchement  élevé  pour  couvrir  un  passage  ou  une  sortie  dans 
les  ouvrages  de  fortification. 

27.  Assaillans.  —  En  1537.  Il  s'agit  ici  du  siège  de  Saint-Pol,  en  Artois.  La 
ville  fut  emportée  d'assaut;  cinq  mille  personnes,  tant  de  la  garnison  que 
des  habitants,  périrent  dans  les  massacres  qui  suivirent.  Guillaume  du  Bellay, 
qui  raconte  le  fait  (liv.  .VIII),  dit  :  «  Et  celuy-cy  ie  le  vey  »  ;  il  fut  également 
témoin  du  suivant  qui  se  trouve  consigné  au  même  livre  de  ses  Mémoires. 
100, 

I,  Partoit.  —  L'an  3.  Germanicus,  après  avoir  rendu  les  derniers  devoirs 
aux  légions  de  Varus  détruites  en  ce  même  endroit  six  ans  auparavant, 
continuait  la  poursuite  des  Germains,  lorsque,  arrivée  à  une  forêt  où  Ar- 
minius  avait  fait  cacher  les  siens,  la  cavalerie  romaine  fut  assaillie  à  l'im- 
proviste  et  rejetée  sur  l'infanterie  qui  la  soutenait;  le  désordre,  se  propa- 
geant, menaçait  de  se  transformer  en  désastre,  quand  Germanicus,  arrivant 
avec  le  corps  de  bataille,  parvint  à  l'arrêter.  Tacite,  Annales,  I,  63. 

10,  L'empire.  —  En  832,  en  Cappadoce.  ■<  Il  vaut  mieux,  lui  dit-il,  que  vous  per- 
diez la  vie  que  si,  étant  prisonnier,  vous  faisiez  éprouver  un  si  grand  dés- 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  XVII.         VOL.  I,  PAG.  100.  F. 297 

honneur  à  la  République.  »  (iràco  à  cette  intervention  do  Manuel,  l'empe- 
reur échappa  aux  mains  de  l'ennemi;  mais,  à  rencontre  de  Montaigne, 
Zonaras  (\iv-  III),  d'où  le  fait  est  tiré,  donne  ce  parti  pris  de  ne  point  fuir, 
comme  un  trait  de  valeur  inconsidéré  de  Théophile,  et  non  de  frayeur. 

12,  Vaillance.  —  «  Son  courage  est  peut-être  un  effet  de  la  peur.  •  Corneille, 
Théodore. 

1 J,  Hannibal.  —  Son  père  lui  avait  fait  jurer  une  haine  implacable  aux  Ro- 
mains. En  219,  il  ralluma  la  guerre  contre  eux  en  prenant  et  saccageant 
en  pleine  paix  la  ville  de  Sagontc  (Espagne),  leur  alliée.  Puis,  franchissant 
les  Pyrénées,  le  midi  de  la  Gaule  et  les  Alpes,  il  les  vainc  à  la  Trébie,  au 
Tessin,  au  lac  Trasimène  (Italie  septentrionale),  enfin  à  Cannes  (Italie  mé- 
ridionale) en  216.  La  fortune  cessa  dès  lors  de  lui  être  favorable,  et,  après 
s'être  maintenu  quatorze  ans  en  Italie,  sans  autres  hauts  faits,  il  dut  re- 
passer en  Afrique  pour  aller  défendre  Carthage  menacée.  Vaincu  à  Zama 
(202),  pour  ne  pas  tomber  aux  mains  des  Romains,  il  s'exile  en  Asie  Mi- 
neure, où  il  ne  cesse  do  leur  fomenter  des  ennemis,  et  finalement  s'em- 
poisonne pour  ne  pas  leur  être  livré. 

10,  Victoire.  —  Bataille  de  la  Trébie,  en  218.  Tite-Live,  XXI,  56. 

30,  Suspendues.  —  Cicéron,  Tu.'ic.,  III.  —  En  48.  Fuyant  en  Egypte,  après  sa 
défaite  à  Pharsale,  Pompée  y  fut  assassiné,  au  moment  où  il  débarquait, 
par  des  soldats  du  roi  Ptolémée  envoyés  à  sa  rencontre  comme  pour  lui 
faire  honneur;  sa  tête  fut  portée  à  César  qui  versa  des  larmes  à  cet  as- 
pect, et  peu  après  punit  les  meurtriers. 
102, 

7,  Discours.  —  C.-à-d.  qui  n'est  pas  causée  par  une  erreur  de  notre  juge- 
ment, en  est  indépendante  et  se  produit  en  dépit  de  lui. 

15,  Ire.  ~  Colère,  du  latin  ira  qui  a  même  signification. 

lo,  Dieux.  —  Ces  paniques  qui  furent  assez  fréquentes  à  Carthage,  notam- 
ment durant  ses  guerres  avec  les  Syracusains  qui,  passés  inopinément  en 
Afrique,  avaient  failli  surprendre  la  ville  (vers  l'an  400),  étaient  considé- 
rées par  elle,  concurremment  avec  les  défaites  qu'elle  éprouvait,  comme 
autant  de  manifestations  de  la  colère  des  dieux  qu'ils  cherchaient  à  apai- 
ser par  des  sacrifices  humains.  Diodore  de  Sicu.e,  XV,  7. 

16,  Paniques.  —  Ainsi  nommées  de  ce  qu'elles  passaient  comme  inspirées, 
le  plus  ordinairement,  par  Pan,  le  dieu  des  champs  par  excellence.  —  Les 
paniques  sont  des  défaillances  collectives  qui  se  produisent  sans  même 
qu'on  sache  pourquoi;  parfois  elles  sont  amenées  par  une  surprise  de  l'en- 
nemi, très  souvent  elles  naissent  sur  les  derrières  de  l'armée,  elles  sont  de 
tous  les  temps;  on  en  constate  chez  tous  les  peuples,  quoique  l'histoire  ne 
les  énumère  guère,  mais  on  n'aime  pas  à  parler  des  siennes  et  on  ignore 
celles  survenues  chez  l'adversaire.  Chez  nous,  durant  les  vingt-trois  ans 
qu'a  duré  l'épopée  révolutionnaire,  on  en  a  relevé  jusqu'à  trois  cents.  Sou- 
vent elles  sont  l'effet  d'un  énervement  prolongé  et  c'est  ce  qui  fait  qu'elles 
se  produisent  fréquemment  le  soir  ou  le  lendemain  d'une  action,  même 
chez  le. vainqueur,  comme  chez  nous  à  Wagram  à  la  fin  de  la  bataille,  et 
le  lendemain  à  Solférino  (1850);  chez  les  Prussiens,  le  soir  du  18  août  70;  à 
léna,  en  1806,  les  mêmes  en  éprouvèrent  une  deux  ou  trois  jours  avant  la 
bataille.  —  Le  cheval  y  est  sujet  plus  encore  que  l'homme.  (Général  Dau- 
dignac). 

CAPITRE  XVIII. 

Ce  chapitre  porte  le  n"  XIX  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

17,  Mort.  —  Montaigne  a  déjà  effleuré  ce  sujet  au  ch.  III  de  ce  même  livre. 
19,  Débet.  —  Saint-Ange  à  donné  de  ces  vers  d'Ovide  la  traduction  suivante  : 

■  ...  Nul  homme,  certain  d'un  bonheur  sans  retour, 
.\c  peut  se  croire  heureux  avant  son  dernier  jour,  » 


F.2'J8  ESSAIS  m  MONTAIGNE. 

•20,  Propos.  —  HÉRODOTE,  I,  86. 

29,  Diuers.  —  C'est  ce  qu'après  Solon,  Sophocle  a  donné  comme  conclusion 
do  sa  tragédie  cVŒdipe  à  Colone,  et  que  Ducis  a  rendu  de  la  sorte  : 

«  c'est  pourquoi,  jusqu'au  jour  qui  termine  la  vie, 
Ne  regardons  personne  avec  un  œil  d'envie  ; 
Peut-on  jamais  prévoir  les  derniers  coups  du  sort? 
Ne  proclamons  heureux  nul  homme  avant  sa  mort.  » 

Un  proverbe  italien  dit  dans  le  même  sens  :  «  Louez  la  vie  après  la  mort, 
et  le  jour  quand  il  est  nuit.  »  —  Un  autre,  français  celui-là,  dit  de  même  : 
«  Attends  le  soir  pour  louer  un  beau  jour,  attends  la  mort  pour  louer  une 
belle  vie.  » 

32,  Malheureux.  —  Plutarque,  Apophlh.  des  Lacédémoniens . 

33,  Rome.  —  Philippe,  un  des  fils  de  Perséé,  roi  de  IMacédoino,  fut  réduit, 
après  la  conquête  de  ce  royaume  par  les  Romains  (167),  à  se  faire  menui- 
sier, et  postérieurement  devint  greffier  à  Rome  ;  ce  qui  fait  attribuer  par 
Montaigne  ce  double  changement  de  fortune  à  deux  individus  différents. 

104, 

1,  Corinthe.  —  Den}s  le  Jeune,  tyran  de  Syracuse,  en  ayant  été  chassé,  se 
retira  à  Corinthe.  où,  pour  subsister,  il  se  fit  maître  d'écolo,  343.  —  En 
1793,  lors  de  la  Révolution,  le  duc  d'Orléans,  depuis  Louis-Philippe  roi  de 
France,  donna  pendant  huit  mois,  pour  pouvoir  vivre,  des  leçons  de  ma- 
thématiques et  de  géographie,  à  Reiguenau  (Suisse). 
8,  Marché.  —  Sous  le  règne  de  Louis  XII,  qui  l'y  avait  fait  enfermer  (1500); 
on  montre  encore  dans  les  ruines  du  château  la  chambre,  on  contre-bas 
du  sol,  où  il  fut  détenu. 

10,  Cruauté.  —  Marie  Stuart,  reine  d'Ecosse,  qui  passait  pour  la  plus  belle 
femme  do  son  temps.  Veuve  de  François  II,  roi  de  P'rance,  elle  fut  décapi- 
tée par  ordre  d'Elisabeth,  reine  d'Angleterre,  après  dix-huit  ans  de  capti- 
vité (1587),  alors  que  son  fils,  qui  devait  succéder  à  Elisabeth  sur  le  trône 
d'Angleterre,  occupait  celui  d'Ecosse;  du  reste,  au  point  de  vue  de  la  mora- 
lité, la  victime  valait  encore  moins  que  le  bourreau,  mais  le  malheur  lui  a 
fait  une  auréole. 

25,  Fuit!  —  Laborius,  chevalier  romain,  sur  les  instances  de  César  auquel  il 
n'osa  refuser  et  moyennant  une  somme  de  500.000  sesterces  (10.000  fr.,  le 
petit  sesterce  valait  0  fr.  20),  dut  jouer  lui-même,  sur  le  théâtre,  certaines 
des  pièces  qu'il  avait  composées.  Il  se  vengea  do  cotte  humiliation  dans  un 
prologue  (dont  est  tirée  la  citation  de  Montaigne),  où  il  déplore  ce  caprice 
d'un  homme  puissant  qui  commande  non  seulement  quand  il  invite,  mais 
encore  quand  il  prie,  et,  en  lançant  cette  épigramme  mise  dans  la  bouche 
d'un  de  ses  personnages  :  «  Désormais,  Romains,  nous  avons  perdu  la  li- 
berté! »  dite  en  public,  en  présence  même  de  César. 

28,  Réglée.  —  «  Le  bonheur  n'est  pas  chose  aisée;  il  est  très  difficile  de  le 
trouver  en  nous,  et  impossible  de  le  trouver  ailleurs.  »  Chamfort.  —  L'éd. 
de  80  porte  :  bien  assenée.  i 

41,  Ancien.  —  Sénèque,  Epist.  102. 
106, 

I,  Passées.  — -  Voltaire  appelle  le  moment  de  la  mort  :  «  celui  où  les  men- 
teurs disent  vrai  ».  Lettre  à  d'Alemberl. 

6,  Alors.  —  Scipion,  beau-père  de  Pompée,  auquel  une  vie  de  débauche  ot 
de  nombreuses  exactions  étaient  à  reprocher,  se  trouva  par  des  vents  con- 
traires rejeté  sur  la  côte  d'Afrique  et  son  bateau  bientôt  envahi  par  les 
ennemis  qu'il  fuyait.  Ceux-ci,  qui  ne  le  connaissaient  pas,  le  cherchant  et 
demandant  où  était  le  général  :  «  Le  Général,  leur  répondit-il,  est  en 
sûreté  »,  et  sur  ces  mots,  il  se  perça  de  son  épée  (46).  —  Ce  que  Montaigne 
dit  ici  de  ce  Scipion,  d'après  Sénèque,  Epist.  24,  on  pourrait  le  dire  égale- 
ment de  l'empereur  Othon  dont  la  mort,  après  la  bataille  de  Bebriac  (69),  fait 
presque  pardonner  la  mollesse  et  les  débauches  de  sa  vie  et  dont  Tacite 


NOTES.         LIV.  I,  CM.  XVJII.         VOI..  I,  PAG.   106.  F.299 

dit  :  «  Los  autres  ont  conservé  plus  longtemps  le  pouvoir,  personne  ne  l'a 
quitte  avec  plus  de  courage  et  de  sérénité.  »  —  Ces  exemples  témoignent 
de  la  justesse  de  cette  observation  de  Vauvenargues  :  «  On  ne  peut  juger 
de  la  vie  par  une  plus  fausse  règle  que  la  mort.  » 
9,  Résoudre.  —  Plltarque,  Apophlhegmcs. 

16.  Croist.  —  De  sa  croissance,  à  la  fleur  de  son  âge,  disons-  nous  aujour- 
d'hui. —  ■<  Celui  qu'aiment  les  dieux,  meurt  jeune.  •>  Menandre. 

■Jl,  Course.  —  Il  semble  qu'il  soit  ici  question  de  Uenri  de  Lorraine,  dit  le 
Balafré,  duc  de  Guise,  qui  aspii-ait  au  trône  de  France  et  était  sur  le  point 
d'y  parvenir,  quand  il  fut  assassiné  à  Blois,  par  ordre  de  Henri  III  (1588); 
précisément  à  l'époque  ou  peu  après,  Montaigne  a  dû  licrire  ces  lignes  qui 
ne  se  trouvent  i)as  dans  l'édition  parue  celte  même  année. 


CHAPITRE  XIX. 

Ce  chapitre  porte  le  n'  XX  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

i\,  Mourir.  —  Charron  qui,  dans  tout  le  cours  de  son  traité  de  la  Sagesse,  a 
copié  Montaigne,  ne  lui  a  fait  nulle  part  des  emprunts  aussi  étendus  et 
aussi  multipliés  que  dans  ce  chapitre  et  dans  le  chapitre  III  du  livre  II 
(Coustume  de  l'isle  de  Cea);  on  peut  s'en  assurer  enlisant  particulièrement 
son  ch.  XI  du  liv.  II,  intitulé  :  «  Se  tenir  toujours  prêt  à  la  mort,  fruit  de 
la  sagesse.  » 

26,  Mort.  —  «  Toute  la  vie  des  philosophes,  disait  Socrate,  est  une  continuelle 
méditation  de  la  mort.  »  Platon,  dans  le  Phédon;  Cicékon,  Tusc,  I,  31. 
108, 

I,  Escriture.  —  «  J'ai  reconnu  que  rien  ne  vaut  mieux  que  de  se  réjouir  et 
de  se  donner  du  bien-être  pendant  la  vie.  •  Ecclésiaste,  III,  12. 

10,  Mesme.  —  «  La  vertu  est  la  disposition  ferme  et  continue  de  l'àme  à 
faire  le  bien  et  à  fuir  le  mal;  mais  de  même  que  le  soleil  a  des  taches,  la 
vertu  a  des  défaillances,  ce  qui  justifie  ce  mot  prêté  à  Brutus,  se  tuant  de 
désespoir  :  0  vertu,  tu  n'es  qu'un  mot!...  Vertu  et  vice  sont  deux  mots 
dont  ne  se  sert  jamais  l'Écriture  sainte  (l'assertion  n'est  pas  tout  à  fait 
exacte,  car  le  ch.  XXVI  de  l'Ecclésiastique  débute  aussi  :  «  Heureux  est  le 
mari  d'une  femme  vertueuse  »);  elle  dit  partout  et  toujours:  les  bons  et  les 
méchants.  C'est  que  c'est  là  la  vraie  division.  Combien  sont  bons,  malgré 
leurs  fautes,  et  quelquefois  à  cause  de  leurs  fautes,  et  trouveront  là-haut 
le  père  souriant.  Combien  sont  méchants  et  mauvais,  malgré  leur  vertu,  et 
quelquefois  à  cause  de  leur  vertu,  et  trouveront  là-haut  le  juge  sévère.  » 
Victor  Hugo. 

11,  Volupté.  —  ■<  Le  plaisir  est  la  vertu  sous  un  nom  plus  gai.  »  Young. 

U3,  Fruict.  —  C.-à-d.  qui  calcule  si  les  avantages  de  la  vertu  peuvent  dédom- 
mager des  peines  qu'il  en  coûte  pour  devenir  vertueux;  autrement  dit,  qui 
met  en  balance,  d'un  côté  ce  qu'elle  coûte  à  acquérir,  de  l'autre  les  avan- 
tages qu'elle  procure,  n'est  pas  de  ses  adeptes. 
110, 

14,  Règles.  —  Var.  des  éditions  antérieures  :  sectes  des  Philosophes,  au  lieu 
de  :  «     règles  ». 

22,  Santé.  —  «  Ignorant  toutes  les  incommodités  de  l'humanité,  il  mourut 
dans  des  conditions  telles  qu'on  ne  saurait  en  souhaiter  de  meilleures  », 
dit  Valère  Maxime,  VIH,  13,  en  parlant  de  Xénophyle  de  Chalcis,  philo- 
sophe pythagoricien,  que  Montaigne  qualifie  musicien. 

24,  Broche.  —  Couper  broche,  c'est  mettre  fin,  interrompre.  V.  N.  III,  444  : 
Broche. 

33,  Tantale.  —  Tantale,  roi  de  Lydie,  ayant  reçu  la  visite  des  dieux,  leur  lit 
servir,  pour  éprouver  leur  divinité,  les  membres  de  son  propre  fils.  Pour  ce 
forfait,  il  fut  précipité  dans  le  Tartare  et  condamné  à  une  soif  et  à  une 
faim  inextinguibles;  on  le  représente  au  milieu  d'un  fleuve  dont  l'eau  s'a- 


F-300  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

baisse  dès  qu'il  on  approche  les  lèvres,  et  sous  des  arbres  dont  les  branches 
s'élèvent  dès  qu'il  veut  en  détacher  les  fruits.  —  Cicéron  et  Montaigne, 
avec  lui,  le  confondent  ici  avec  Sisyphe,  roi  do  Corinthe,  qui,  en  punition 
de  ses  brigandages  et  de  ses  cruautés,  fut  condamné,  après  sa  mort,  à  rou- 
ler dans  les  Enfers,  au  sommet  d'une  montagne,  un  rocher  qui  redes- 
cendait sans  cesse  au  bas  des  pentes,  dès  qu'il  atteignait  le  faîte.  Mytho- 
logie. 
35,  Commis.  —  Ceci  se  pratique  encore  fréquemment  en  France;  l'acte  de 
condamnation  porte  toujoui-s  où  se  fera  l'exécution. 
112, 

3,  Mort.  —  ■<  La  mort  est  bien  le  bout,  non  pourtant  le  but  de  la  vie,  »  dit 
ailleurs  Montaigne  avec  beaucoup  plus  de  raison.  V.  N.  111,574:  But. 

4,  Comme.  —  Comment.  Corneille  l'emploie  parfois  aussi  dans  ce  sens,  il 
dit  dans  Horace  : 

J'ai  su  par  son  rapport... 

Comme  de  vos  deux  fils  vous  portez  le  trépas. 

8,  Queue.  —  Brider  l'àne  par  la  queue,  c'est  s'arranger  mal,  mal  prendre  ses 
mesures,  un  âne  ne  se  bridant  pas  de  la  sorte. 
12,  Seignent.  —  Font  le  signe  de  la  croix. 

19,  Vescu.  —  Plutarque,  Vie  de  Cicéron,  12. 

20,  Consolent.  —  Ils  disaient  de  même  et  pour  le  même  motif  :  semiani- 
mis  (à  demi  vivant),  tandis  que  nous  disons  :  «  à  demi-mort  ». 

21,  Feu.  —  Défunt,  se  dit  de  quelqu'un  récemment  décédé;  semble  venir  du 
latin  fuit  (il  a  été);  cette  étymologie  assez  naturelle  est  cependant  contestée. 

21,  Maistre  leban.  —  Appellation  qui  se  donnait  aux  pédants,  aux  savants 
et  aux  docteurs.  V.  N.  II,  478  :  Maistre;Iean. 

22,  L'argent.  —  Proverbe;  quand  on  a  du  temps  devant  soi,  on  a  possibilité 
de  se  procurer  de  quoi  se  tirer  d'embarras.  Les  Anglais  disent  avec  un 
sens  analogue  :  Time  is  money  (le  temps,  c'est  de  l'argent). 

25,  lanuier.  —  En  France,  l'année  a  eu  différents  points  de  départ  :  le 
\"  mars,  sous  les  rois  de  la  première  race  ;  le  jour  de  Noël,  sous  ceux  de  la 
deuxième;  le  jour  de  Pâques,  sous  ceux  de  la  troisième  jusqu'à  Charles  IX 
qui,  par  une  ordonnance  rendue  en  1563,  en  fixa  le  commencement  au 
1"  janvier.  Par  suite,  le  1"  janvier  1563  devint  le  premier  jour  de  l'an  1564; 
le  parlement  ne  se  conforma  à  cette  ordonnance  que  trois  ans  après,  en 
1567.  —  Ajoutons  qu'en  1793,  le  début  de  l'année  fut  fixé  au  22  septembre, 
en  même  temps  que  cette  même  année  était  dénommée  an  2  de  la  Répu- 
blique; cette  manière  de  compter  prit  fin  le  1"  janvier  1806. 

26,  Autant.  —  Montaigne  aj-ant  trente-neuf  ans  à  ce  moment,  devait  à  son 
compte  aller  jusqu'à  soixante-dix-huit;  c'est  beaucoup.  D'après  les  tables 
de  mortalité  étabUes  par  Déparcieux  en  1746,  les  premières,  croyons-nous, 
qui  aient  été  faites,  il  pouvait  espérer  arriver  à  l'âge  de  soixante  à  soixante- 
cinq  ans;  de  fait  cette  probabilité  s'est  réalisée,  puisqu'il  est  mort  en  1592, 
dans  sa  soixantième  année  V.  N.  I,  596  :  Esperable. 

114. 

1,  Terme.  —  Les  éditions  antérieures  à  1588  ajoutent  :  «  et  ce  fameux  Ma- 
humet  aussi.  »  Ce  membre  de  phrase  a  disparu,  Montaigne  s'étant  vraisem- 
blablement aperçu  de  l'inexactitude  qu'il  commettait,  Mahomet  n'ayant 
commencé  à  prêcher  qu'à  quarante  ans  et  étant  mort  à  soixante-deux. 

6,  Lyon.  —  En  1305.  Le  pape  Clément  V  (Bertrand  de  Got),  que  Montaigne 
appelle  son  voisin  parce  qu'il  était  gascon  et  qu'il  avait  été  archevêque  de 
Bordeaux,  venait  d'être  couronné  à  Lyon.  Après  la  cérémonie,  retournant 
à  son  logis,  il  traversait  la  ville  à  cheval,  la  tiare  sur  la  tête.  Le  roi  (Phi- 
lippe le  Bel)  et  successivement  ses  deux  frères  avaient  tenu  la  bride  de  sa 
monture,  et  cet  honneur  venait  d'échoir  au  duc  Jean  II  de  Bretagne,  quand 
passant  près  d'un  mur  surchargé  de  spectateurs,  le  mur  s'écroula,  le  pape 
fut  renversé  de  cheval,  sa  tiare  tomba;  il  y  eut  douze  morts,  dont  le  duc 


NOTES.         UV.  I,  CH.  XIX.        VOL.  I,  PAG.  114.  F.301 

de  Bretagne,  et  un  grand  nombre  de  blessés,  dont  le  duc  de  Lorraine  qui 
eut  un  bras  et  une  cuisse  cassés. 

7,  louant.  —  Henri  II,  blessé  à  mort,  en  1559,  dans  un  tournoi,  par  le  cotnte 
de  Montgommery,  capitaine  de  ses  gardes. 

8,  Pourceau.  —  En  1131.  Philippe,  Hls  aîné  de  Louis  le  Gros,  âgé  de  seize 
ans,  qui  avait  été  couronné  du  vivant  de  son  père,  comme  il  était  de  règle 
à  cette  époque,  pour  mieux  assurer  l'hérédité.  Se  promenant  k  cheval,  un 
pourceau  vint  à  se  jeter  dans  les  jambes  de  l'animal  qui  s'abattit,  brisant 
la  tète  de  son  cavalier  contre  une  borne  et  l'étouffant  de  son  poids. 

9,  L'airte.  —  Sur  ses  gardes.  On  écrit  aujourd'hui  «  alerte  »  ;  les  Italiens 
disent  encore  «  /are  ail'  erta  »,  être  alerte,  être  au  guet,  prendre  garde  à  soi. 
Le  Clerc. 

10,  L'air.  —  En  406.  D'après  la  tradition,  il  avait  été  prédit  à  Eschyle  qu'il 
périrait  en  plein  air.  VAii^iiE  Maxime,  IX,  12,  2. 

11,  Raisin.  —  Anacréon  suçant  le  jus  d'un  grain  de  raisin,  un  pépin  s'arrêta 
dans  sa  gorge  et  il  en  mourut.  Valèke  Maxime,  IX,  12,  8. 

VS,  Huis.  —  Pline,  Hist.  nat.,  VII,  33;  les  deux  exemples  qui  suivent  se  trou- 
vent aussi  en  cet  endroit. 

14,  Conseil.  —  Ce  fut  un  accident  analogue  qui  causa  la  mort  du  roi  de 
France  Charles  VIII;  se  rendant  à  une  partie  de  jeu  de  paume,  il  se  heurta 
le  front  contre  le  haut  d'une  porte  basse,  et  quelques  heures  après  n'était 
plus  (1498). 

10,  Mantoue.  —  Guy  de  Gonzague,  père  de  ce  Ludovic,  avait  été  condamné  par 
ses  concitoyens  àperdre  la  tête  sur  l'échafaud,  pour  cause  d'adultère  (1382). 

17,  Platonicien.  —  Tertuilien  (Apologétique,  46)  rapporte  le  fait,  mais  seule- 
ment comme  un  on-dit.  Diogène  Laërce  conte  au  contraire  que  Speusip- 
pus,  perclus  depuis  déjà  quelques  années  par  suite  de  paralysie,  et  accablé 
de  douleurs,  se  donna  la  mort  dans  un  âge  avancé,  version  que  Montaigne 
reproduit,  I,  632. 

18,  Papes.  —  Le  pape  Jean  XII  fut,  dit-on,  assassiné  dans  les  bras  de  sa 
maîtresse  (964). 

21,  Siens.  —Cet  exemple  et  le  précédent  sont  tirés  de  Pline,  VII,  33. 

22,  Frère.  —  Montaigne  eut  quatre  frères  et  trois  sœurs.  —  Ses  frères 
étaient  :  Thomas,  seigneur  de  Beauregard,  qui  épousa  Mademoiselle  Carie, 
belle-fille  de  la  Boétie,  qui  était  mort  depuis  quelques  années  quand  le  ma- 
riage eut  lieu;  Mademoiselle  Carie  possédait  la  propriété  d'Arsac  en  Médoc, 
dont  son  mari  prit  le  nom.  Pierre,  seigneur  de  la  Brousse,  propriété  de  la 
famille,  non  loin  de  Montaigne.  Arnaud,  dit  le  capitaine  Saint-Martin,  dont 
il  est  question  ici.  Bertrand,  seigneur  de  Mattecoulom,  petite  propriété  près 
de  Bordeaux.  —  Ses  sœurs  :  Jeanne,  mariée  à  Richard  de  Lestonna,  con- 
seiller au  parlement  de  Bordeaux.  Léonor,  mariée  à  Thiébaud  de  Camain, 
également  conseiller.  Marie,  mariée  à  Bernard  de  Cazalis.  V.  N.  III,  32  : 
Mère. 

24,  Esteuf.  —  Balle  dont  il  était  et  est  encore  fait  usage  pour  jouer  à  la 
paume. 

27,  Causa.  — Les  cas  de  mort  subite  sont  journahers  et  se  produisent  en  toutes 
circonstances;  Rabelais  en  cite  plusieurs,  en  outre  de  quelques-unes  des 
précédentes  :  Spurius  Saufeius  mourut,  dit.il,  en  humant  un  œuf  mollet  en 
sortant  du  bain;  Fabius,  préteur  romain,  fut  suffoqué  par  un  poil  de  chè- 
vre en  buvant  une  tasse  de  lait;  Philomènes,  par  un  fou  rire  que  lui  causa 
la  vue  d'un  àne  mangeant  des  figues  nouvelles  qu'on  avait  apportées  pour 
lui-même;  Zeuxis,  le  peintre,  en  se  pcàmant  de  rire,  en  considérant  le  mi- 
nois d'une  vieille  dont  il  venait  de  faire  le  portrait,  et  autres.  —  De  nos 
jours  en  1904,  la  mère  d'un  cardinal  mourait  à  la  nouvelle  que  son  fils 
venait  d'être  promu  patriarche  de  Venise;  une  servante  du  Limousin,  en 
apprenant  qu'elle  venait  de  gagner  25.000  fr.  à  une  loterie  ;  en  Champagne, 
un  candidat  à  la  députation,  à  l'annonce  de  son  élection.  —  La  plupart  du 
temps  cependant,  les  circonstances  extérieures  dans  lesquelles  les  morts 
subites  se  produisent  et  qui  font  qu'on  les  remarque,  n'y  sont  i)our  rien. 


F.302  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

34,  Veau.  —  Niais;  celte  qualification  de  veau  était  souvent  appliquée  aux 
gens  par  trop  simples  d'esprit. 

44,  Dessoude.  —  Soudainement,  du  latin  de  subito,  à  l'imprévu,  comme  por- 
tent les  éditions  antérieures. 
116, 

17,  Accoustumons-le.  —  «  Il  n'est  point  d'objet  si  effra}'ant  qu'on  ne  puisse 
envisager  sans  crainte,  quand  on  s'est  familiarisé  avec  lui;  plus  on  s'oc- 
cupe de  la  mort,  moins  on  la  redoute.  »  De  Séguk.  —  «  C'est  un  accident  si 
banal,  si  inévitable,  si  peu  à  redoutei-  pour  qui  a  la  conscience  tranquille,  que 
ce  n'est  vraiment  pas  la  peine  d'y  penser,  si  on  amis  ordre  à  ses  affaires  et 
si  rien  de  particulier  ne  vous  porte  à  désirer  une  prolongation  d'exis- 
tence. »  G.  M. 

27,  Egyptiens.  —  Héuodote,  II,  78. 

29,  Secbe.  —  Un  squelette. 

32,  Attende. 

<>  C'est  un  arrêt  du  ciel,  il  faut  que  l'iiomme  meure. 

Tel  est  son  partage  et  son  sort. 

Rien  n'est  plus  certain  que  la  mort, 
El  rien  plus  incertain  que  cette  dernière  heure.  »  AnnÉ  Testc. 

3G,  Mal.  —  ■<  Le  jour  de  la  mort  vaut  mieux  que  le  jour  de  la  naissance: 
mieux  vaut  la  fin  d'une  chose  que  son  commencement.  »  Ecclésiaste,  Vil, 
1  et  8. 

40,  Mesme.  —  Persée,  qui  n'eut  pas  le  courage,  en  se  tuant,  de  suivre  le 
conseil  qui  lui  était  implicitement  donné  et  qu'on  fit  mourir  dans  sa  pri- 
son, de  faim,  disent  les  uns,  en  le  privant  de  sommeil,  disent  les  autres, 
après  avoir  servi  d'ornement  au  triomphe  de  son  vainqueur.  Plutarqle, 
Paul  Emile,  17;  Cicéro.\,  T'use,  V,  40. 
118, 

3,  Ageret.  —  Mademoiselle  de  Gournay  a  donné  de  ce  vers  de  Catulle  la 
traduction  suivante  :  «  Quand  mon  âge  fleuri  roulait  son  gai  printemps  », 
qui  mérite  d'être  conservée  pour  sa  grâce  et  la  fidélisé  originale  de  la  tra- 
duction. Le  Clerc. 

11,  Non  plus.  —  Pas  davantage.  On  trouve  dans  V Horace  de  Corneille  cette 
expression  avec  la  même  signification  : 

•  Quel  malheur  si  l'amour  de  sa  femme 

Ne  peut  non  plus  sur  lui,  que  le  mien  sur  ton  âme.  » 

2G,  Près.  —  Le  6'  paragraphe  du  ch.  XXIII  du  liv.  I  de  l'Imitation  de  Jésus- 
Christ  résume,  ainsi  que  l'a  fait  Montaigne,  ici  et  ailleurs,  les  divers  genres 
de  mort  qui  nous  menacent  continuellement;  Corneille  le  traduit  ainsi  : 

•  Combien  de  fois  entends-tu  dire  :  Dans  les  débris  d'un  bâtiment 

Celui-ci  vient  d'être  égorgé;  A  fini  ses  jours  et  ses  vices; 

Celui-là  d'être  submergé;  L'autre  au  milieu  d'un  bon  repas. 

Cet  autre,  dans  les  fers,  expire.  L'autre  parmi  d'autres  délices 

L'un,  écrasé  subitement.  Se  sont  vus  surpris  du  trépas.  » 

37,  Mort. 

«  Que  l'homme  connaît  peu  la  mort  qu-'il  appréhende. 

Quand  il  dit  qu'elle  le  surprend! 
Elle  naît  avec  lui;  sans  cesse  lui  demande 
Un  tribut  dont  en  vain  son  orgueil  se  détend: 
Il  commence  à  mourir,  longtemps  avant  qu'il  meure. 
Et  périt  en  détail  imperceptiblement; 
Le  nom  de  mort  qu'on  donne  à  notre  lieure  dernière, 

N'en  est  que  l'accomplissement.  "  M""'  DEsiiouLiÈr.Es. 
120, 

5,  Estre.  —  Dans  sa  fable  «  La  mort  et  le  mourant  »,  La  Fontaine  a  déve- 
loppé cotte  môme  pensée  de  Montaigne,  si  bien  résumée  parle  dernier  vers 


NOTES.        LIV.  I,  Cil.  XIX.         VOL.  I,  PAG.  120.  F.303 

de  cette  fable  :  «  Le  plus  semblable  aux  morts,  meurt  le  plus  à  regret.  » 

Cette  fable  se   retrouve  du   reste  dans  Abstemius,  fabuliste  italien   du 

w"  siècle. 
10,  Mortes  morts.  —  Les  morts  où  tout  meurt  à  la  fois  chez  l'homme,  par 
-  opposition  à  celles  où  il  s'éteint  graduellement,  perdant  tout  ou  partie  de 

ses  facultés  avant  de  perdre  la  vie. 
l;},  Manent.  —  Le  texte  de  Virgile  porte  Pendent. 
19,  Agir.  —  Les  éditions  antérieures  ajoutent  :  El  ie  suis  d'aduis  que  non 

seulement  vu  Empereur,  comme  disoit  Vespasien,  mais  que  luiili/allant  homme 

doit  mourir  debout. 

32,  Lycurgus.  —  Plupauque,  Vie  de  Lycurgue,  20. 

35,  Condition.  —  Actuellement,  par  mesure  d'hygiène,  les  cimetières  sont 
établis  loin  des  groupes  d'habitations;  le  souvenir  et  le  culte  des  morts  y 
ont  perdu.  Être  inhumé  au  pied  de  son  clocher,  au  centre  même  du  lieu 
où  l'on  avait  vécu,  de  ses  affections,  avait  autrement  de  poésie  que  d'être, 
comme  aujourd'hui,  relégué  au  loin  et  à  l'écart. 

42,  Tel.  —  Cette  exhibition,  au  dire  même  d'Hérodote  qui  la  rapporte,  n'a- 
vait nullement  pour  objet,  comme  Montaigne  le  donne  à  entendre,  une 
pensée  morale,  mais,  au  contraire,  celui  de  s'exciter  à  boire  et  à  mener 
joyeuse  vie,  bannissant  peines  et  soucis,  se  rappelant  le  peu  de  temps  durant 
lequel  il  est  donné  à  l'homme  d'en  jouir. 
122, 

1,  Diuerses.  —  Ce  registi-e,  à  la  vérité  non  commenté,  et  c'est  là  le  point  es- 
sentiel de  l'idée  de  Montaigne,  existait  de  son  temps,  établi  par  de  Ravisi 
(Bàle,  1552);  d'autres  depuis,  toujours  sans  commentaires,  en  ont  pareille- 
ment donné  des  relevés.  Parmi  les  auteurs  mômes  qu'il  avait  dans  sa  biblio- 
thèque, Pline,  Valère  Maxime,  Boccace  y  ont  consacré  des  chapitres  entiers 
de  leurs  ouvrages. 

7,  Fin.  —  CicÉROX,  De  01]'.,  11,  5.  Dicearchus,  dans  son  livre,  énumère  tout 
ce  qui  concourt  à  la  destruction  de  l'homme  :  épidémies,  cataclysmes  de 
toutes  sortes,  et  termine  en  montrant  que  les  guerres,  les  séditions,  en  un 
mot  la  fureur  de  l'homme  contre  ses  semblables,  en  fait  périr  plus  que 
toutes  les  autres  calamités  réunies. 

23,  César.  —  De  Bello  Gallico,  Vil,  81. 

30,  Mort.  —  Montaigne  mourut,  comme  il  en  manifeste  l'espoir,  avec  cou- 
rage et  résignation.  Il  s'éteignit  lentement  le  13  septembre  1592.  «  Depuis 
trois  jours  déjà,  il  ne  pouvait  plus  parler,  mais  était  plein  d'entendement. 
Sentant  sa  fin  approcher,  il  fit  mander  à  quelques  gentilshommes  ses  voi- 
sins de  venir,  pour  qu'il  prît  congé  d'eux;  et,  alors  qu'on  était  réuni  et 
tandis  qu'on  disait  la  messe  dans  sa  chambre,  à  l'élévation,  par  un  effort 
suprême  il  joignit  les  mains,  tenta  de  se  dresser  sur  son  séant  et  rendit 
l'àme.  •'  Pasquif.[{. 

33,  Manet!  —  Citation  tirée  de  Pseudo-Gallus.  Galius,  contemporain  d'Au- 
guste, prit  part  aux  grandes  affaires  de  l'État,  et  composa  des  élégies  qui  ne 
nous  sont  pas  parvenues.  Il  en  a  été,  nonobstant,  publié  sous  son  nom,  en 
1501;  elles  semblent  lui  avoir  été  faussement  attribuées  et  être  d'un  poète 
inconnu  du  vi'  siècle  que  certains  dénomment  Maximianus  et  que  l'on  a 
pris  le  parti  de  désigner  sous  l'appellation  de  Pseudo-Gallus. 

37,  Vie.  —  SKNi:(>ri;.  J-:/>isl.  70. 
124, 

5,  Vieillesse.  —  Curius  Dentatus,  i'a])porte  Sénèque,  disait  "  préférer  être 
mort  que  vivre  mort  ». 
,  21,  Figue.  —  «  Faire  la  figue  »,  expression  italienne.  C'est  se  moquer  de 
quelqu'un  en  lui  faisant  un  geste  indécent  avec  les  doigts,  lui  montrant  le 
bout  du  pouce  entre  l'index  et  le  médius.  En  1162,  Frédéric  Barberousse, 
empereur  d'Allemagne,  pour  se  venger  des  IMilanais,  qui  avaient  promené 
ignominieusement  sa  femme  sur  une  mule,  les  ayant  battus,  fit  placer  une 
figue  dans  les  parties  génitales  de  la  mule  et  chacun  de  ses  prisonniers  dut, 
à  tour  de  rôle,  sous  peine  de  mort,  la  retirer  avec  les  dents,  d'où  ce  geste 


F. 304  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

et  cette  expression,  rappelant  cette  aventure  aux  Milanais  et  tenu  par  eux 
comme  une  injure. 
■  34,  Mort.  —  Dior.KNE  Laerce,  II,  15;  Cicéros,  Tusc,  1,  40.  —  Socrate  no  fut 
pas  condamné  à  mort  par  les  ti'ente  tyrans,  mais  api'ès  leur  expulsion,  pai- 
les  Athéniens  eux-mêmes  (400),  ou  n)ieux  par  le  conseil  des  Iléliastes.  Ce 
conseil,  ainsi  nommé  parce  qu'il  siégeait  en  plein  air,  et  dont  le  nombre 
des  membres  variait  de  200  à  600,  était  composé  de  sénateurs.  Pour  Socrate, 
556  membres  étaient  présents;  il  fut  déclaré  coupable  à  la  majorité  de 
3  voix,  et  condamné  à  mort  à  celle  do  33;  il  est  vraisemblable  que  la  har- 
diesse de  sa  défense  indisposa  d'un  scrutin  à  l'autre  quelques-uns  de  ceux 
qui,  de  prime  abord,  s'étaient  prononcés  pour  la  non-culpabilité.  Y. 
N.  III,  570  :  L'vn. 
40,  Ans.  —  Allusion  au  sentiment  éprouvé  par  Xerxès  voj'ant  défiler  son  ar- 
mée et  songeant  que,  dans  cent  ans,  de  tous  ces  êtres  humains,  pas  un  no 
demeurerait,  fait  mentionné  ci-après,  I,  408.  —  Un  jour,  en  présence  du 
peuple  romain  auquel  il  dçnnait  des  jeux,  Titus  versa  des  larmes  provo- 
quées par  de  semblables  réflexions.  ' 
126, 

7,  Décrépitude.  —  Cicéron,  Tusc,  I,  39. 

10,  Éternité.  —  •<  L'éternité  commencée  tout  à  l'heure,  est  aussi  ancienne  que 
l'éternité  datée  de  la  première  mort,  du  meurtre  d'Abel.  ».  Chateaubriand. 

11,  Arbres.  —  11  existerait  au  Mexique,  encore  actuellement  en  1907,  près  d'un 
village  appelé  Chepultepec,  un  cyprès  qui  aurait  trente-cinq  mètres  de  tour 
et  qui,  d'après  les  botanistes,  serait  âgé  de  plus  de  six  mille  ans.  On  trouve 
également  en  Amérique,  notamment  en  Californie,  des  séquoias  qui  auraient 
de  3000  à  3500  ans  d'existence;  en  Judée,  au  jardin  de  Gethsémani,  sont 
nombreux  les  oliviers  qui  ont  été  témoins  de  l'agonie  de  .lésus-Christ;  en 
Angleterre  existe  un  chêne  de  toute  beauté  auquel  on  attribue  une  exis- 
tence de  douze  siècles.  11  y  a  en  Normandie  un  chêne  qui  serait  contempo- 
rain de  Guillaume  le  Conquérant;  en  Sar daigne  se  trouveraient  des  oran- 
gers qui  auraient  sept  cents  ans;  à  l'orangerie  de  Versailles  en  existe  un,  en 
fort  bon  état,  planté  au  xv®  siècle  par  Éléonore  de  Castille.  Larousse. 

11,  Animaux.  —  L'éléphant  serait  de  tous  les  animaux  celui  qui  vivrait  le 
'plus  longtemps;  on  en  cite  un  qui,  pris  par  Alexandre  le  Grand,  lors  de  la 

défaite  de  Porus,  pouvant  avoir  à  ce  moment  une  cinquantaine  d'années, 
existait  encore  à  Alexandrie  trois  siècles  après.  La  tortue,  la  corneille,  le 
perroquet  atteindraient  cent  ans;  l'aigle,  cent  cinquante  ans.  Les  estur- 
geons, les  squales,  passent  pour  vivre  plusieurs  siècles;  on  prétend  que  dans 
les  pièces  d'eau  du  château  de  Fontainebleau,  se  trouvent  des  carpes  da- 
tant de  la  fondation  par  François  I",  il  y  a  quatre  cents  ans.  Larousse. 

12,  Ridicule.  —  Sénèque,  Consol.  ad  Marciam,  20. 

16,  Monde.  —  «  Il  est  aussi  naturel  de  mourir  que  de  naître.  »  Bacon. 
20,  Création. 

«  Homme,  contre  la  mort,  quoi  que  l'art  le  promette, 

Il  ne  saurait  te  secourir. 
Prépares-y  ton  cœur;  dis-toi  :  C'est  une  dette 

Qu'en  recevant  le  jour  j'ai  faite; 

Nous  ne  naissons  que  pour  mourir.  •  M'  Desboulièhes. 

«  L'enfant  naît  pour  mourir,  la  maison  s'élève  pour  tomber.  «  Adage  arabe. 
23,  Viure. 

«  ...  Tout  passe  et  tout  meurt  :  tel  est  l'arrêt  du  sort. 
L'instant  où  nous  naissons  est  un  pas  vers  la  mort.  » 

VoLTAmE,  Exhortation  villageoise  du  Curé  de  C. 

25,  Pendet.  —  Add.  de  80  :  Et  ne  maures  iamais  trop  lost. 

27,  Mort.  —  «  Nous  allons  sans  cesse  au  tombeau,  ainsi  que  des  eaux  qui  se 

perdent  sans  retour.    »  Bossuet,  Oraison  funèWe  de  Madame  la  ducltesse 

d'Oiléans. 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  XIX.         VOL.  1,  PA.G.  126.  F. 305 

«  Le  moment  où  je  parle  est  dôjà  loin  de  moi.  •  Boileau. 

•  Dans  tout  berceau  germe  une  tombe.  »  Victor  Hugo. 
128, 

^,  Disposition. —  Terme  d'astronomie;  c'est  l'état  des  astres  et  leur  aspect. 
11,  Mesme.  —  «  Ce  qui  a  été,  c'est  ce  qui  sera,  et  ce  qui  s'est  fait,  c'est  ce  qui 

se  fei'a;  il  n'y  a  rien  de  nouveau  sous  le  soleil.  »  Ecclésiaste,  I,  9. 
38,  Videmus.  —  La  phrase  qui  précède  est  la  traduction  de  ces  deux  vers. 
45,  Vsage.  —  ■•  La  durée  de  la  vie  se  compte  l'éellement,  non  par  le  nombre 

des  années,  mais  par  celui  des  pensées  et  des  actions.  »  De  Ségur. 
4C,  Vescu.  —  «  Quelque  jeune  qu'on  soit,  quand  on  a  bien  su  vivre,  on  a 
toujours  assez  vécu.  »  M"""  Deshoulifikes.  * 

130. 

1,  Issue.  — A  Saint-Antoine  de  Padoue  (Italie),  on  voit  dans  le  cloîti-o  une 
tombe  française,  datant  de  1595,  dont  l'épitaphe  se  termine  par  ce  vers  : 

0  Car  il  n'est  si  beau  jour  qui  n'amène  sa  nuit.  » 

i'I,  Donnée.  —  «  Si  Dieu  avait  donné  le  choix,  ou  de  mourir,  ou  de  toujours 
vivre;  après  avoir  médité  profondément  ce  que  c'est,  que  de  ne  voir  nulle 
fin  à  la  pauvreté,  à  la  dépendance,  à  l'ennui,  à  la  maladie;  ou  de  n'essayer 
des  richesses,  des  plaisirs  et  de  la  santé  que  pour  les  voir  changer  inévita- 
blement en  leurs  contraires  par  la  révolution  du  temps,  et  être  ainsi  le 
jouet  des  biens  et  des  maux,  l'on  ne  saurait  guère  à  quoi  se  résoudre.  La 
nature  nous  fixe  et  nous  ôte  l'embarras  de  choisir;  et  la  mort  qu'elle  nous 
rend  nécessaire,  est  encore  adoucie  par  la  religion.  »  La  Bruyère.  —  «  Si 
nous  étions  immortels,  nous  serions  des  êtres  très  misérables.  Il  est  dur, 
sans  doute,  de  mourir;  mais  il  est  doux  d'espérer  qu'on  ne  vivra  pas  tou- 
jours et  qu'une  meilleure  vie  finira  les  peines  de  celle-ci.  Si  on  nous  offrait 
l'immortalité  sur  la  terre,  qui  est-ce  qui  voudrait  accepter  ce  triste  pré- 
sent? quelles  ressources,  ciuels  espoirs,  quelles  consolations  nous  resteraient 
contre  les  rigueui'S  du  sort  et  les  injustices  des  hommes?»  J.-J.  Rousseau, 
Emile,  11. 

24,  Priué.  —  Le  Tasse,  près  de  rendre  le  dernier  soupir,  disait  :  «  Si  la  mort 
n'était  pas,  il  n'y  aurait  au  monde  rien  de  plus  misérable  que  l'homme.  » 

«  La  vie  n'est  qu'un  amas  de  craintes,  de  douleurs. 
De  travaux,  de  soucis,  de  peines; 
Pour  qui  connaît  les  «lisères  humaines, 
Mourir  n'est  pas  le  plus  grand  des  mallieurs.  »  M"""  Deshoiilikues. 

"  Celui-là  qui  meurt  jeune,  est  aimé  des  dieux.  »  —  «  J'aurais  bien  aimé  à 
mourir  entre  les  bras  de  ma  nourrice,  cela  m'aurait  ôté  bien  des  ennuis  et 
m'aurait  donné  le  ciel  bien  sûrement  et  bien  aisément  »  (M""  de  Savigné). 
30,  Indifférent.  —  Diouène  Laerce,  I,  35. 
132, 

1,  Arriue.  —  C'est  de  cette  niètye  idée  que  s'inspire  cette  inscription  qui  se 
lit  fréquemment  sur  les  cadrans  solaires  :  <•  Vulneranl  omnes,  ultima  necat 
[Toutes  lex  heures  nous  bl'ssent,  la  dernière  nous  lue)  »,  que  certains  trouve- 
raient plus  juste  si  elle  était  ré(lig(!'e  :  «  \'ulneranl  omnes,  ullima  sanal  (la 
dernière  guérit)  »,  puisque  cette  dernière  met  fin  à  nos  maux. 

2,  Nature.  —  Tout  ce  discours  de  la  nature  est  imité  de  Lucrèce,  III,  du 
vers  915  jusqu'à  la  fin  du  livi'e.  Les  deux  dernières  phrases  sont  traduites 

,    de  SÉNÈQUE,  Episl.  20;  le  traité  de  ce  même  philosophe.  De  brevilale  vilœ,  a 

aussi  fourni  à  Montaigne  quelques  imitations.  Le  Clerc. 
14,  Prescheurs.  —  «  Qui  demandent  :  Où  voulez-vous,  Monsieur,  qu'on  vous 

enterre?  »  VoltauieJ  La  PuccUe. 
17,  Nous.  —  Cette  idée  et  celle  de  la  phrase  suivante  appartiennent  à  Si> 

NÈQUE,  Episl.  24.  —  «  C'est  moins  la  mort  qui  est  horrible,  que  le  fantôme 

sous  lequel  on  nous  la  fait  envisager.  »  Chu.ox. 

essais   de   .MONTAIGNE.   —  T.   IV.  20 


F.306  ESSAIS  DE  MONTAIGNE.. 

17,  Masque.  —  «  La  mort  est  belle  ;  elle  est  notre  amie.  Néanmoins,  nous 
ne  la  reconnaissons  pas,  parce  qu'elle  se  présente  à  nous  masquée  et  que 
son  masque  nous  épouvante.  »  Chateaubhiand. 

20,  Mort.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  el  heureuse  trois  fois. 

21,  Equipage.  —  «  Mon  ami,  je  mourrai  aujourd'hui.  Quand  on  en  est  là,  il 
ne  reste  plus  qu'une  chose  à  faire,  c'est  de  se  parfumer,  de  se  couronner  ()e 
Heurs,  de  s'environner  de  musique,  afin  d'entrer  agréablement  dans  ce 
sommeil  dont  on  ne  se  réveille  plus.  »  Paroles  de  JIirabeau  à  Cabanis,  le 
jour  de  sa  mort.  —  •<  Le  dernier  plaisir  de  la  vie.  a  dit  Cksah,  est  de  mou- 
rir sans  y  penser.  » 


CHAPITRE  XX. 

Ce  chapitre  porte  le  n"  XXI  dans  les  éd.  ant.  et  lex.  de  Bordeaux. 

2,3,  L'imagination.  —  Charron  a  puisé  dans  ce  chapitre  la  plupart  des  idées 
qu'il  exprime  au  ch.  17  du  liv.  I  de  son  Traité  sur  la  Sagesse. 
134, 

18,  Sagesse.  — Ce  Vibius  Gallus  était  rhétoricien  de  profession.  11  s'imagina 
que  les  emportements  de  la  raison,  représentés  devant  ses  auditeurs,  cap- 
tiveraient leur  esprit;  et,  par  le  soin  qu'il  prit  à  contrefaire  le  fou,  il  le 
devint  effectivement.  «  C'est  le  seul  homme  que  je  sache,  dit  Sénkque  i.e 
Rhéteur,  Controv.,  Il,  9,  à  qui  il  est  arrivé  de  devenir  fou,  non  par  acci- 
dent, mais  par  acte  de  jugement.  » 

21,  Imagination.  —  On  a  vu  maintes  fois  des  patients  mourir  sur  la  table 
d'opération,  avant  même  que  le  chirurgien  eût, commencé.  —  En  1794,  Hé- 
bert, ce  terroriste  qui  avait  envoyé  de  si  nombreuses  victimes  à  l'échafaud, 
appelé  à  son  tour  à  y  monter,  fut  si  faible  devant  la  mort  que  ses  jambes 
ne  le  portaient  plus;  il  fallut,  lorsqu'on  le  descendit  de  la  charrette,  l'asseoir 
sur  le  pavé.  A  la  vue  de  la  fatale  machine,  il  s'évanouit;  il  était  sans  vie, 
lorsqu'on  l'attacha  sur  la  bascule;  on  ne  guillotina  qu'un  mort.  —  Au  col- 
lège royal  d'Aberdeen,  en  Angletei-re,  des  étudiants  ayant  à  se  plaindre  du 
portier,  s'en  saisissent  et  lui  annoncent  qu'ils  vont  lui  trancher  la  tête;  ils 
i'agenouillent  les  yeux  bandés  et  le  frappent  à  la  nuque  avec  une  serviette 
mouillée;  quand  on  le  relève,  il  a  cessé  de  vivre.  —  Lors  du  catacljsme 
qui,  en  1902,  ravagea  la  Martinique  et  détruisit  la  ville  de  Saint-Pierre,  tous 
les  navires  qui  étaient  dans  la  rade  périrent  consumés  par  les  flammes. 
Un  seul, le  «  Roddus  »,  parvint  à  s'échapper  indemne;  on  n'y  découvrit  pas 
moins,  une  fois  en  sûreté,  dans  le  salon  du  bord,  'les  cadavres  de  plusieurs 
matelots  qui,  effrayés  par  la  soudaineté  de  l'éruption  et  la  pluie  de  feu, 
avaient  dû  se  réfugier  en  toute  hâte  dans  cette  pièce  et  y  étaient  morts  de 
peur,  car  ils  ne  portaient  aucune  trace  de  blessure.  Fulbert  Dumo.nteil. 

28,  Cruentent.  —  Montaigne  a  rendu  lui-même,  avant  de  les  citer,  l'idée  ex- 
j)rimée  dans  ces  deux  vers  de  Lucrèce,  dont  la  traduction  textuelle  est  la 
suivante  :  «  Semblables  aux  (lots  tumultueux  d'un  fleuve  franchissant  toute 
limite,  les  amoureux  inondent  leurs  ^^tements.  » 

31,  Italie.  —  Valère  Maxime,  V,  6,  qualifie  Cippus  de  préteur  et  dit  qu'étant 
sorti  de  Rome  en  habit  de  général  et  l'accident  dont  parle  Montaigne  lui 
étant  arrivé,  les  devins  déclarèrent  qu'il. serait  roi,  s'il  retournait  à  Rome: 
sur  quoi,  il  se  condamna  volontairement  à  un  exil  éternel.  V.  aussi  Pi.ine, 
XI,  58.  -, 

35,  Refusée.  —  En  546,  Crésus,  roi  de  Lydie  (Asie  Mineure),  avait  un  fils 
muet  de  naissance.  Lors  de  la  prise  de  sa  capitale  par  les  Perses,  l'un  d'eux 
allait  tuer  le  roi  qu'il  ne  connaissait  pas,  lorsque  son  fils  qui  était  à  ses 
côtés,  saisi  d'effroi,  fit  un  effort  qui  lui  rendit  la  voix  :  •  Soldat,  se  serait- 
il  écrié,  ne  tue  pas  Crésus!  »  et,  pour  le  reste  de  sa  vie,  il  conserva  la  fa- 
culté de  parler.  Hérodote,  I,  85. 

37,  Ame.  —  Antiochus,  fils  de  Séleucus  Nicator  roi  de  Syrie,  dépérissait.  Era- 
sistrate,  son  médecin,  ne  pouvant  en   pénétrer  la  cause,  pensa  qu'il  se 


NOTES.         LIV.  I,  Cil.  XX.         VOL.  I,  PAG.  134.  F.307 

mourait  d'amour,  et,  pour  connaître  l'objet  de  sa  passion,  imagina  de 
mettre  la  main  sur  le  cœur  du  malade  et  de  faire  défiler  devant  lui  toutes 
les  personnes  de  son  entourage.  A  l'entrée  de  chacune,  le  jeune  homme 
resta  parfaitement  calme,  jusqu'à  l'arrivée  de  Stratonice,  sa  belle-mère;  à 
ce  moment,  il  change  de  couleur,  une  sueur  froide  l'envahit,  un  frisson 
s'empare  de  lui,  son  cœur  palpite;  ces  mouvements  révèlent  au  médecin  ce 
qu'il  voulait  connaître  et  il  déclare  au  roi  que  le  seul  moyen  de  sauver  son 
fils  est  de  l'unir  à  la  princesse;  Séleucus  consentit  à  la  lui  céder.  Lcgien, 
Traité  de  la  déesse  de  Syrie. 
38,  Nopces.  —  Outre  cet  exemple  de  changement  de  sexe,  Pline,  Hist.  nul., 
VII,  1.  en  cite  plusieurs  autres,  mais  aucun  en  sens  inverse  d'homme 
changé  en  femme;  Ausone  leur  consacre  une  de  ses  épigrammes.  —  Le  fait 
se  présente  de  temps  à  autre,  mais  plus  apparent  que  réel,  ne  tenant  en 
quoi  que  ce  soit  du  merveilleux  ;  chez  la  plupart,  il  n'est  que  le  fait  de  faus- 
ses déclarations,  faites  à  la  naissance  par  les  parents  qui  espèrent  de  la  sorte 
éviter  à  leur  fils  le  service  militaire.  Cependant,  en  dehors  de  toute  super- 
cherie, il  naît  parfois  des  hermaphrodites;  les  Romains  avaient  pour  prin- 
cipe de  les  détruire;  de  nos  jours,  on  les  admet  à  l'existence  comme  tous 
autres.  Cette  année  même  (1906),  à  Charlottenbourg  (Prusse),  un  nouveau- 
né  aurait  été  insciit  à  l'état  civil  sans  indication  de  sexe,  l'accord  n'ayant 
pu  se  faire  sur  sa  détermination,  et  l'on  aurait  remis  à  l'avenir  de  décider 
la  question. 
41,  Ipbis.  —  Lors  de  la  naissance  d'Iphis,  son  père,  partant  en  voyage,  avait 
ordonné  que  si  c'était  une  fille,  ce  qui  arriva,  elle  fût  exposée.  Sa  mère, 
pour  la  sauver,  déguisa  son  sexe  et  l'éleva  comme  un  garçon.  Quand  vint 
le  moment  de  la  marier,  durant  la  cérémonie  nuptiale,  les  dieux,  cédant  à 
ses  prières  et  à  celles  de  sa  mère,  la  changèrent  en  garçon  ;  et,  par  recon- 
naissance, Iphis  offrit  un  sacrifice  à  Isis  (une  des  divinités  principales  de 
l'Egypte,  personnification  de  la  nature),  inscrivant  sur  un  e.x-voto  le  vers 
que  cite  Montaigne.  Myth. 
136, 

1,  François.  —  Vitry-le-François  s'écrit  et  se  prononce  encore  avec  un  0. 
Cette  ville  a  été  bâtie  par  François  I",  pour  recevoir  les  habitants  de  Vitry- 
le-Brûlé,  bourg  distant  d'environ 5  kil.,  que  Charles-Quint  venaitde  détruire 
(1554). 

2,  Soissons.  — En  1580.  Dans  son  journal  de  voyage,  Montaigne  écrit  :  «  Nous 
ne  le  sceumes  voir,  parce  qu'il  cstoit  au  village  ».  Il  y  est  dit  aussi  que  ce 
fut  l'évêque  de  Chàlons,  et  non  de  Soissons,  le  cardinal  de  Lenoncourt,  qui 
lui  donna  ce  nom  de  Germain.  Le  Clerc 

9,  Marie  Germain.  —  Le  fait  est  mentionné  par  Ambroise  Paré;  c'était, 
dit-il,  une  jeune  paysanne  du  nom  de  Marie  Garnier  qui,  à  l'âge  de  quinze 
ans,  gardant  les  moutons  et  ayant  sauté  un  fossé,  éprouva  une  vive  douleur 
et  se  trouva  avoir  changé  de  sexe;  on  lui  donna  alors  le  nom  de  Germain. 
Ce  devait  être,  ajoute  le  célèbre  chirurgien  de  l'époque,  un  véritable  gar- 
çon, dont  les  organes  étaient  jusque-là  demeurés  à  l'intérieur.  Cuvier.  — 
En  1907,  à  Savia  (Italie),  est  né  un  enfant  hermaphrodite,  chez  lequel  les 
médecins  n'ont  pas  été  d'accord  sur  le  sexe  prédominant.  —  La  duchesse 
d'Orléans,  mère  du  Régent,  sous  Louis  XV,  parle  dans  ses  IMémoires  de 
Marie  Germain,  et  avoue  avoir,  dans  l'espoir  de  devenir  homme  comme 
elle,  fait,  elle  aussi;  des  sauts  si  terribles  que  c'est  miracle  si,  cent  fois,  elle 
ne  s'est  pas  rompu  le  cou. 

16,  Daçfobert.  —  Ce  roi,  dit  la  légende,  était  couvert  de  lèpre;  s'étant  dévo- 
tieusement  frictionné  avec  la  rosée  de  certain  lieu  d'une  vénération  par- 
ticulière, il  en  fut  miraculeusement  guéri,  ne  conservant  que  les  cicatrices 
de  ses  plaies. 

16,  Saint  François.  —  Deux  ans  avant  sa  mort  (1224),  saint  François  d'As- 
sise étant  en  prière,  tomba  en  extase;  le  Christ  sur  la  croix  lui  apparut, 
et,  en  même  temps,  il  se  sentit  comme  percé  de  trous  dans  tous  les  mem- 
bres où  les  clous  avaient  été  enfoncés  dans  ceux  deNotre-Seigneur;  et  de- 


P.308  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

puis  il  en  conserva  les  cicatrices.  — Ce  fait  de  stigmates  a  été  relevé  à  di- 
verees  reprises;  en  des  temps  rapprochés,  en  1843,  il  a  été  assez  longue- 
ment question  d'un  cas  semblable,  cliez  trois  vierges,  dans  le  Tyroi.  En 
ce  qui  touche  saint  François  d'Assise,  le  fait  a  été  accepté  par  l'Église  qui 
a  institué  une  fête  en  cet  honneur;  ce  qui  n'a  pas  empêché  un  incrédule 
d'avancer  qu'au  dire  des  Jacobins,  advereaires  des  Cordeliors  dont  saint 
Fi-ançois  est  le  fondateur,  ces  stigmates  avaient  été  produits  par  saint 
Dominique  ai'nié  d'une  broche,  loi's  d'un  différend  survenu  entre  eux. 

19.  Autre.  —  Cet  autre,  c'est  Kestittitus.  Cilé  de  Dieu,  XIV,  21. 

2i,  Haleine.  —  Les  extases,  plus  ou  moins  prolongées,  sont  un  fait  courant 
que  la  science  explique  dans  une  certaine  mesure  et  qu'on  arrive  même 
assez  aisément  à  provoquer  cliez  certaines  personnes,  par  le  magnétisme. 

27,  Visions.  —  «  Des  miracles  »,  ajoutent  toutes  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bor- 
deaux. 

32,  Liaisons.  —  «  Dos  mariages  »,  ajoutent  les  éditions  antérieures.  Il  s'agit 
ici  de  nouement  d'éguillettes,  ou  impuissance  momentanée  empêchant  la 
consommation  du  mariage,  attribuée  alors  à  des  maléfices  et  qui  jadis  était 
l'objet  de  bien  des  préoccupations:  Virgile  semble  y  faii'e  allusion  ;  l'Écriture 
sainte  relate  la  peine  de  mort  contre  ceux  .se  livrant  à  des  enchantements 
pour  les  produire;  la  loi  salique  leur  inflige  une  amende  de  quarante 
sous  d'or. 
138, 

IC  à  22,  On  n'a  pas...  préseruer.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  .1  r/ui  a  assez  de 
loisir  pour  se  rauoir  el  se,  remellre  de  ce  trouble,  mon  conseil  est  qu'il  diuer- 
lisse  ailleurs  son  pensemenl  ou  qu'on  luy  persuade,  qu'on  luy  fournira  des 
contrencltanlcmens  d'vn  e/fecl  merueilleux  et  certain. 

31,  Test.  —  A  la  base  du  crâne. 
140, 

1,  Resueillon.  —  Collation  faite  au  milieu  do  la  nuit,  quand  on  veillait,  fré- 
quemment pratiquée  alors,  le  souper  avant  lieu  d'ordinaire  à  5  heures  du 
soir;  est  encore,  de  nos  jours,  de  pratique  coui'ante  la  nuit  de  Noël,  mais 
avec  en  plus  une  idée  de  divertissement  qui  à  l'époque  n'en  faisait  pas 
partie  intégrante. 
'  32,  Sacrifices.  —  Hérodote,  II,  81,  d'où  le  fait  est  tiré,  dit  que  ce  fut  Laodice 
qui  s'avisa  de  faire  vœu  à  Vénus  de  lui  ériger  une  statue,  ce  dont  elle  s'ac- 
quitta très  lidolement. 

31,  Mineuses. —  Qui  font  des  mines,  des  manières;  minaudières. 

35,  Allumant.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  «  Mais  il  faut  aussi  que  colles,  à  qui  lé- 
gitimement on  le  peut  demander,  ostent  ces  façons  cérémonieuses  et  affec- 
tées de  rigueur  et  de  refus,  et  qu'elles  se  contraignent  vn  peu,  pour  s'ac- 
commoder à  la  nécessité  de  ce  siècle  malheureux  »,  au  lieu  de  :  «  Or  elles 
ont...  allumant  ». 

35,  Cotte.  —  Ce  propos  émane  de  Théano.  Cf.  Hérodote,  1,  8. 
142, 

4  à  5,  Qui  luy...  suiuantes.  —  Var.    des  éd.   ant.  :   que    celle   frayeur  s'en 
augmente  et  redouble  à  toutes  tes  occasions  suiuanles  :  el  sans  quelque  con- 
tremine  on  n'en  vient  pas  aisément  à  bout. 
144, 

13,  Saint  Augustin.  —  Dans  la  Cité  de  Dieu,  W\,  21;  voir  aussi  le  commen- 
taire de  Vives  sur  ce  passage.  —  Il  y  a  vingt  ou*  trente  ans,  un  individu, 
tirant  parti  de  cette  même  affection,  afflublé  de  la  qualité  de  Peptomane. 
se  donnait  en  spectacle  à  Paris;  il  en  était  arrivé  à  jouer  certains  airs. 

25,  Pouuoir.  —  Claude,  empereur  romain.  Slkto.ne  (C/ourfe,  32)  dit  seulement: 
11  méditait,  assure-t-on,  de  rendre  un  édit  «  pour  permettre  de  lâcher  des 
vents  à  sa  table  »,  parce  qu'il  avait  appris  qu'un  de  ses  convives  avait 
pensé  mourir  pour  s'être  retenu  devant  lui.  •  Ne  vous  étonnez  pas  davan- 
tage, dit  Rabelais,  de  celui-ci  qui,  pour  retenir  son  vent  et  défaut  de  péter 
un  mauvais  coup,  mourut  subitement  en  présence  de  Claudius  ■■,  origine 
probable  de  cette  intention. 


NOTES.         LIV.  I,  Cil.  XX.         VOL.  I,  PAG.  146.  F.309 

146. 

12,  Espaigne.  —  Les  éciouolles,  aflection  clironique  des  glandes  du  cou, 
vulgairement  appelées  ••  humeurs  froides  -.  —  Les  rois  de  France  passaient 
jadis  pour  avoir  le  don  de  guérir  cette  maladie.  A  cet  effet,  ils  faisaient 
sur  la  face  du  malade  un  signe  de  croix,  en  le  touchant  du  fi'ont  au  men- 
ton et  d'une  oreille  à  l'autre,  en  disant  :  «  Le  loi  te  touche.  Dieu  te  guérit.  » 
Us  procédaient  à  cette  opération,  plus  particulièrement  le  jour  de  leur 
sacre  et  à  difl'érentes  fêtes  annoncées  à  l'avance,  pour  que  ceux  qui  le  vou- 
laient pussent  se  présenter.  Le  jour  de  son  sacre,  Louis  XIV  en  toucha 
près  de  2.000.  Les  étrangers  se  présentaient  en  grand  nombre,  notamment 
les  Espagnols,  chez  lesquels  cette  maladie  était,  parait-il,  assez  répandue; 
caseraient  eux  qui,  pour  cacher  ce  mal,  auraient  inventé  ces  grandes  fraises, 
en  usage  autrefois,  ))articulièrement  au  xvr  siècle.  —  L'antiquitc-  est  fer- 
tile en  supei-stitions  de  ce  genre  :  l'yrrhus,  roi  d'Épire,  guérissait  les  gens 
malades  de  la  i-ate  en  leur  touchant  le  liane  gauche  avec  son  orteil  droit; 
ils  devaient  au  préalable  avoir  sacrifié  un  coq  blanc.  Montaigne,  d'après 
Plutarque,  cite  ailleurs  le  fait  de  Vespasien  rendant  la  vue  à  deux  aveugles 
en  leur  humectant  la  paupière  avec  sa  salive. 

17,  Aposéme.  —  Apozème,  terme  de  médecine;  potion  faite  d'une  décoction 
d'herbes. 

37,  Façon.  —  Ce  trait  est,  après  Montaigne,  rapporté  dans  les  anecdotes  de 
médecine  de  Dumonchau.  —  De  cet  effet  d'imagination  vrai  ou  faux,  on 
peut  rapprocher  celui  bien  réel  qui  se  produit  iourneUement  quand  on  souf- 
fre des  dents  et  qu'on  se  décide  à  s'en  faire  arracher;  l'appréhension  de 
la  douleur  fait  que  très  fréquemment  le  mal  disparait,  quand  le  dentiste  se 
dispose  à  opérer. 
148, 

7,  Douleur.  —  Des  faits  semblables  sont  assez  fréquents  dans  les  annales 
médicales.  —  L'illustre  chirurgien  Vei.peau  eut  jadis  à  traiter  un  malade 
persuadé  qu'il  avait  avalé  une  couleuvre  et  le  guérit  en  procédant  de  la 
même  façon.  —  Tout  récemment  le  docteur  Richolot,  à  l'hôpital  Cochin,  à 
Paris,  avait  affaire  à  une  femme  prétendant  avoir  avalé,  en  buvant  à  un 
ruisseau,  il  y  avait  une  quarantaine  d'années,  un  œuf  de  lézard,  qui  avait 
éclos  en  elle  et  produit  un  lézard  qui  la  gênait  de  plus  en  plus  et  était  de- 
venu intolérable.  Il  l'endormit,  lui  fit  une  incision  superficielle  et,  à  son 
réveil,  lui  produisit  un  magnifique  lézard  vert,  d'une  trentaine  de  centi- 
mètres de  long,  dont  il  s'était  nanti  au  préalable.  La  femme  fut  convain- 
cue et  guérie,  jusqu'à  ce  que  quelque  temps  après,  apprenant  la  super- 
cherie par  les  journaux,  les  marnes  effets  se  reproduisirent  en  elle.  —  Ces 
effets  sont  le  résultat  de  troubles  nerveux  très  connus  aujourd'hui,  qui 
affectent  parfois  une  forme  -plus  curieuse  encore  dans  le  cas  de  la  grossesse 
nerveuse,  où  la  femme  se  figure  être  enceinte,  en  présente  tous  les  symp- 
tômes, a  dès  les  premiers  mois  des  vomissements,  s'imagine  plus  tard  sentir 
remuer  l'enfant  qui  n'existe  pas,  jusqu'à  ce  que  vers  le  neuvième  mois  tout 
rentre  insensiblement  de  soi-même  dans  l'ordre. 

20,  Regard.  —  C'est  la  croyance  au  mauvais  œil,  dont,  quelques  lignes  plus 
loin,  Montaigne  gratifie  les  sorciers.  La  Scythie  n'était  pas  le  seul  pays  où 
pareille  croyance  existait,  et  nous  la  trouvons  encore  aujourd'hui  dans 
bien  des  pays  se  disant  civilisés,  notamment  en  Italie,  où  le  «  jettatore  » 
(jeteur  de  sorts)  est  un  être  redouté,  faisant  le  mal  sans  même  en  avoir 
I'int(întion.  Au.ssi,  s'en  garde-t-on  avec  grand  soin;  heureusement,  il  est 
,  facile  à  reconnaître;  du  reste,  pour  s'en  protéger,  il  existe  des  préservatifs  : 
pour  conjurer  le  mauvais  sort  les  dames  romaines  portaient  à  cet  effet, 
dans  l'antiquité,  des  priapes  de  bronze  d'or,  que  les  modernes  remplacent 
par  des  cornes  en.  corail  ou  en  jais;  les  Orientaux  donnent  la  préférence  à 
des  mains  en  argent,  assez  grossièrement  imitées,  les  cinq  doigts  ouverts; 
à  la  rigueur,  si  on  est  surpris,  la  main  ainsi  étendue,  les  doigts  écartés  et 
dirigés  vers  celui  qui  vous  menace  ainsi,  d'une  façon  consciente  ou  incons- 
ciente, suffit  pour  vous  en  défendre. 


F.310  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

37,  More.—  Ludovic  Sforza,  duc  de  Milan,  dont  il  a  ôté  question,  I,  104,  dit 
le  More  ou  le  Maure,  en  raison  de  son  teint  basané. 
150, 

2,  lacob.  —  Jacob  était  convenu  avec  Laban,  son  beau-père,  qu'il  garderait  ses 
troupeaux  et  que  comme  salaire  tout  agneau  ou  chevreau  tacheté  serait  sa 
propriété.  11  prit  alors,  dit  la  Genkse,  XXX,  37,  des  baguettes  vertes  de 
peupHer,  d'amandier  et  de  platane,  il  y  pela  des  bandes  en  mettant  à  nu  le 
blanc  des  baguettes,  et  plaça  ces  baguettes  dans  les  abreuvoirs,  et  quand  les 
brebis  s'accouplaient  devant  les  baguettes,  elles  faisaient  des  petits  rayés, 
tachetés  et  marqués;  et  comme  en  outre  il  prenait  la  précaution  d'agir  ainsi 
à  l'égard  des  brebis  les  plus  vigoureuses,  Laban  n'avait  que  des  agneaux 
peu  nombreux  et  chétifs,  tandis  que  les  siens  étaient  en  bien  plus  grand 
nombre  et  vigoureux,  et  de  la  sorte,  ajoute  l'Écriture  sainte,  il  devint  ex- 
trêmement riche. 

17,  Moy.  —  De  nombreuses   éditions   postérieures  à  celle  de    1595,  portent 
«  conte  »,  au  lieu  de  «  comme  »,  indicatif  du  verbe  conimer  (faire  applica- 
tion); le  sens  ne  justifie  pas  cette  modification. 
152, 

13,  Partis.  —  Quoique  catholique  et  partisan  de  l'autorité  royale,  Montaigne 
conserva  toujours  de  bonnes  relations  avec  les  chefs  de  tous  les  partis,  la 
politique  n'eut  jamais  très  grande  action  sur  lui. 

23,  Punissables.  —  Montaigne  cherche  plus  en  effet  dans  les  contes  et  anec- 
dotes qu'il  présente,  des  occasions  d'exprimer  sa  façon  de  penser,  que  d'en 
tirer  des  déductions,  ce  qui  le  porte  à  se  préoccuper  fort  peu  de  leur  exac- 
titude qui  souvent  laisse  fort  à  désirer. 

28,  Ainsi.  —  Les  poètes  de  cette  époque  écrivaient  «  ainsii^  »  pour  éviter  des 
liiatus,  quand  le  mot  suivant  commençait  par  une  voyelle,  ce  dont  ce  pas- 
sage semble  une  critique. 

CHAPITRE  XXI. 

Ce  chapitre  porte  le  n°  XXII  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 
154. 

1,  Demades.  —  Sk.nèque,  De  Beneficiis,\l,  d'où  presque  tout  ce  chapitre  a 
été  pris. 

6,  D'autruy.  —  «  C'est  ce  qui  fait  qu'il  est  si  difficile  de  détruire  les  abus;  il 
n'y  en  a  pas  qui  ne  profitent  à  quelques-uns.  » 

8,  Guain.  —  Ceci  a  été  et  sera  de  tous  temps,  et  l'on  peut  ajouter  que  cha- 
cun cherche  à  vendre  le  plus  cher  possible  et  à  acheter  au  prix  le  moins 
élevé;  c'est  ce  que  de  nos  jours  on  appelle  «  la  lutte  pour  la  vie  ».  d'autant 
plus  ardente  que  la  civilisation  va  sans  cesse  augmentant  les  appétits,  créant 
de  nouveaux  besoins.  C'est  ce  qui  fait  que  le  patron  veut  la  journée  de 
travail  la  plus  longue  et  l'ouvrier  la  moins  longue  possible;  que  les  comp- 
tables, les  professeurs  réclament  contre  les  emploj'és  des  ministères  qui,  à 
temps  perdu,  et  Dieu  sait  s'ils  en  ont,  s'occupent  de  travaux  de  comptabi- 
lité, donnent  des  leçons;  que  les  tailleurs  et  cordonniers  réclament  contre 
les  maîtres  ouvriers  des  corps  de  troupe,  qui  travaillent  pour  le  dehors,  etc.  ; 
et  aussi  que  les  produits  similaires  de  l'étranger  sont  frappés  de  droits 
protecteurs  pour  permettre  à  nos  producteurs  de  mieux  écouler  leurs  pro- 
duits, à  notre  détriment  à  nous  consommateurs;  l'acharnement  des  méde- 
cins contre  les  rebouteurs,  des  pharmaciens  contre  les  herboristes  dont 
pâtissent  les  malades  n'a  pas  d'autre  cause.  — Mais  ce  qui  se  justifie  moins 
encore,  c'est  l'exagération  apportée  dans  la  pratique  de  cette  loi  de  «  l'offre 
et  de  la  demande  »  qui  n'est  autre  qu'une  variante  de  la  loi  du  plus  fort 
aussi  inique  qu'elle  et  qui  fait  que  souvent  le  gain  d'un  homme  occupé 
durant  la  journée  entière  ne  suffit  pas  à  le  faire  vivre,  parce  que  l'em- 
ployeur abuse  des  facilités  qu'il  trouve  à  faire  exécuter  ce  travail  pour  le 
rémunérer  d'une  façon  insuffisante;  cela  a  lieu  surtout  à  l'égard  de  la 


NOTES.         IJV.  1,  en.  XXr.         VOL.  I,  PAG.   lo4.  F.3H 

femme  dont  le  travail  est  souvent  payé  d'un  prix  dérisoire,  notamment 
celles  que  font  travailler  à  domicile  les  grands  magasins,  dont  la  fortune 
est  faite  de  leur  misère.  C'est  cette  même  loi  qui  fait  que  dès  qu'une 
plus  grande  affluence  de  monde  par  suite  d'une  circonstance  quelconque 
survient  dans  une  localité,  on  voit  du  môme  coup  s'élever  le  prix  de 
toutes  les  denrées  de  première  nécessité.  —  Dans  ce  même  ordre  d'idées 
rentre  la  question  du  repos  hebdomadaire  dans  laquelle  il  a  fallu  que  la  loi 
intervienne,  pour  que  ceux  qui  l'accordent  ne  pâtissent  pas  de  ce  que 
d'autres  refusent  à  l'accordei'.  En  bonne  conscience  iî  devrait,  sauf  le  cas 
de  nécessité  absolue,  avoir  lieu  le  dimanche  parce  que  c'est  dans  les  habi- 
tudes que,  ce  jour-là,  les  échéances  soient  prorogées,  les  grandes  administra- 
tions fermées;  les  enfahts  ne  vont  pas  à  l'école;  c'est  le  jour  habituel  des 
grandes  manifestations  de  la  vie  sociale  et  politique;  certainement  il  peut 
y  avoir  inconvénient  pour  quelques-uns,  mais  c'est  l'avantage  du  plus  grand 
nombre.  Quant  au  salaire,  il  no  saurait  actuellement  être  payé  par  le  pa- 
tron pour  les  journées  où  l'on  chôme,  .mais  forcément  le  prix  de  la  journée 
de  travail  s'élèvera  d'autant,  ce  qui  reviendra  au  même  pour  l'ouvrier  ou 
l'employé,  l'employeur  tout  naturellement  aussi  se  rattrapera  en  surélevant 
d'autant  ses  prix:  finalement  ce  sera  le  consommateur  qui  paiera,  et  il  ne 
saurait  en  être  autrement. 

i;^,  Grec.  —  Ce  comique,  c'est  Philémon,  poète  du  IV''  siècle,  qui  mourut, 
dit-on,  dans  un  accès  de  rire,  à  97  ans.  —  Un  autre  auteur  gr?c,  abondant 
dans  le  même  sens,  raconte  que  quelqu'un,  rencontrant  son  médecin,  lui 
demanda  pardon  de  la  bonne  santé  dont  il  jouissait  depuis  longtemps. 

13,  Reste.  —  «  Le  précepte  de  ne  jamais  nuire  à  autrui,  emporte  celui  de 
tenir  à  la  société  humaine  le  moins  qu'il  est  possible;  car,  dans  l'état  so- 
cial, le  bien  de  l'un  fait  nécessairement  le  mal  de  l'autre.  »  J.-J.  Rousseal", 
Emile,  III.  —  «  Ce  qui  nuit  à  l'un,  duit  à  l'autre.  >•  (Proverbe  ancien). 

16,  D'autruy.  —  La  Rochefoucault  fait  de  l'amour-propre  et  de  l'intérêt  per- 
sonnel la  base  de  toutes  nos  actions,  et  chacune  de  ses  maximes  n'est  que 
le  développement  de  ce  principe,  dont  il  a  pu  trouver  dans  Montaigne  l'idée 
première. 

CHAPITRE  XXII. 

Ce  chapitre  poi-te  le  n"  XXIII  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

23,  Receûe.  —  Ce  chapitre  est  un  de  ceux  méritant  le  plus  d'attention;  il  offre 
un  champ  très  vaste  aux  réflexions  et  renferme  un  assez  grand  nombre 
d'idées  fortes  et  peu  communes.  On  y  trouve  entre  autres  des  observations 
très  judicieusessur  la  nécessité  de  corriger  de  bonne  heure,  chez  les  enfants, 
plusieurs  vices,  défauts  ou  penchants  qui  pi'ennent  racine  en  eux  dès  la  plus 
tendre  enfance.  Naigeon. 
156, 

2,  Encore.  —  Chez  les  Romains,  ce  conte  avait  donné  lieu  à  un  proverbe 
que  PÉTRONE,  XXV,  exprime  ainsi  :  «  Qui  l'a  pu  porter  veau,  peut  le  porter 
bœuf.  »  On  le  trouve  aussi  dans  Stobée  qui  le  cite  d'après  Favorinus  et  dans 
les  Adages  d'ERASME. 

3,  Coutume.  —  Le  fait  cité  est  plus  ici  une  question  d'habitude  que  de  cou- 
tume; la  conclusion  émise  n'en  est  pas  moins  juste  pour  l'une  comme  pour 
l'autre  :  «  En  amour  notamment  le  lien  de  l'habitude  est  bien  fort;  pour 
s'en  apercevoir,  il  faut  être  sur  le  point  de  rompre;  combien  de  gens  vi- 
vent ensemble  comme  s'ils  s'aimaient,  faute  de  pouvoir  se  passer  l'un  de 
l'autre.  •>  M""  de  Rieux.  —  «  Le  mariage  doit  combattre  sans  trêve,  ni  repos, 
ce  monstre  qui  dévore  tout,  l'habitude.  »  Balzac. 

10,  République.  —  Cet  antre  est  aux  Enfers,  un  lieu  où,  selon  Platon^  Répu- 
blique, YII,  toutes  les  âmes  séjournaient  après  la  mort,  en  attendant  qu'il 
fût  statué  sur  leur  sort.  Celles  d'entre  elles  appelées  à  retourner  sur  la  terre, 


P.312  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

libres  de  choisir  tel  ou  tel  genre  de  vie,  choisissaient  toujours  immanqua- 
blement, et  c'est  ce  à  quoi  il  est  fait  ici  allusion,  d'après  leurs  anciennes 
habitudes. 

1*2,  Poison.  —  Mithridate,  roi  du  Pont,  s'était  habitué  au  poison,  on  en  pre- 
nant régulièronient  à  petites  doses,  dans  le  but  de  déjouer  les  tentatives 
d'empoisonnement,  si  bien  que,  dans  sa  vieillesse,  réduit  par  les  circons- 
tances à  se  tuer,  il  essaya  en  vain  de  ce  moyen.  —  C'est  sur  un  principe 
analogue  que  repose  la  vaccination,  dont  la  découverte  fut  duo  au  hasard, 
et  aussi  l'emploi  do  tous  les  sérums  que  la  science  de  Pasteur  a  par  déduc- 
tions créés  contre  la  rage,  le  croup,  etc.,  ouvrant  un  champ  aux  recherches 
de  ses  élèves  et  successeurs,  méi'itant  par  là  d'être  considéré  comme  l'un 
des  bienfaiteurs  de  l'huftianité.  —  Cette  accoutumance  toutefois  ne  s'ap- 
plique pas  à  tout,  et  le  czar  Pierre  le  Grand  voulut  en  vain  habituer  les 
enfants  do  ses  matelots  à  ne  boire  que  de  l'eau  de  mer,  tous  moururent. 

14,  Indes  Nounelles.  —  Dénomination  sous  laquelle  on  désigna  tout  d'abord 
l'Amérique.  —  Ici  et  dans  tout  le  cours  des  Essais,  Montaigne  se  fait  l'écho 
des  contes.de  toute  nature,  et  pour  la  plupart  faux  ou  exagérés,  qui  circu- 
laient alors  sur  cette  partie  du  monde,  qu'on  venait  de  découvrir  (1 192),  il 
n'y  avait  pas  encore  un  siècle. 

17,  Viures.  —  En  certaines  circonstances,  les  choses  n'ont  plus  de  prix.  — 
En  1871,  lors  du  premier  siège  de  Paris,  les  stocks  do  denrées  alimentaires 
s'épuisant  de  plus  en  plus,  le  dernier  jour  du  siège,  un  poulet  se  vendait 
50  fr.;  un  lapin,  45  fr.;  les  œufs,  2  fr.  50  pièce;  les  haricots,  8  fr.  le  litre. 
Depuis  six  semaines,  on  était  rationné  à  300  gr.  de  pain  fait  partie  de  fa- 
rines de  toute  nature  et  de  toutes  qualités,  partie  de  toutes  autres  subs- 
tances plus  ou  moins  comestibles,  telles  que  la  paille,  etc.  ;  et,  depuis  quinze 
jours,  à  30  gr.  de  viande  de  cheval;  de  chiens,  de  chats,  il  n'en  existait 
plus  dans  Paris  et  sa  banlieue;  le  rat  d'égout  même  avait  presque  complè- 
tement disparu. 

23,  Essayons.  —  C.-à-d.  nous  éprouvons.  Montaigne  emploie  souvent  le  mot 
«  essayer  »  dans  ce  sens  :  «  Comme  essayent  les  voysins  des  clochiers  »,  dit- 
il  quelques  lignes  plus  bas. 

25,  Nil.  —  La  cataracte  du  Niagara  (Amérique  du  Nord)  qui ,  à  la  vérité, 
passe  pour  la  plus  belle  et  la  .plus  grande  du  globe  (la  largeur  du  cours 
d'eau,  qui  est  de  4  kil.  en  amont,  s'y  réduit  à  un,  et  la  hauteur  de  la  chute 
est  de  50'"),  s'entend  à  70  ou  80  kil.  de  distance;  ceux  qui,  habitant  aux  en- 
virons, sont  faits  au  bruit  qu'elle  produit,  n'y  prennent  pas  garde. 

30,  CaroUes.  —  Vieux  mot  qui  signifie  <■  danse  en  rond  »,  et,  dans  le  cas 

présent  :  mouvement  de  révolution  des  astres. 
33,  Soit.  —  Tout  ce  passage,  depuis  l'exemple  des  «  cataractes  du  Nil  »,  est 

imité  de  Cicéron,  Songe  de  Scipion. 
35,  Fleurs.  —  Ce  qu'on  a  appelé  plus  tard  «  collet  de  senteur  »,  espèce  de 

pourpoint  de  peau  parfumée,  à  petites  basques  et  sans  manches.  Coste. 
41,  Diane.  — A  la  pointe  du  jour.  Vient  du  latin  dies,  jour;  en  espagnol  dià; 

c'était  le  temps  de  la  dernière  veillée  de  la  sentinelle  de  nuit  et  le  signal 

de  l'heure  où  cette  veillée  prenait  fin,  donné  par  le  tambour,  le  fifre  ou  la 

trompette;  aujourd'hui  c'est,  aux  armées,  le  signal  du  réveil  sonné  ou  battu 

au  point  du  jour. 
158, 

1,  Aue  Maria.  —  On  dit  aujourd'hui  VAngelus.  —  Cette  prière  se  récitait 

déjà  chaque  soir,  au  coucher  du  soleil,  depuis  le  xr  siècle,  quand  Louis  NI 

introduisit  à  Paris  l'usage  de  la  dire  en  outre  le  matin  et  à  midi,  et  do 

sonner  les  cloches  pour  en  avertir  les  fidèles. 
6,  Peu.  —  DioGÈNE  Laerce,  III,  38,  d'où  cette  anecdote  est  tirée,  met  en  scène, 

au  lieu  d'un  enfant  jouant  aux  noix,  un  homme  jouant  aux  dés,  ce  qui 

donne  plus  de  portée  à  l'observation  de  Platon. 
8,  Nourrices.  —  «  Au  moral,  l'homme  est  déjà  formé  à  dix  ans,  il  se  forme 

sur  les  genoux  de  sa  mère.  »  Joseph  de  Maistre. 

26,  Escutz.  —  Locution  proverbiale  dont  l'explication  est  donnée  par  la  phrase 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  XXII.         VOI..  I,  P.VG.  158.  F.3J3 

qui  précède.  Le  dicton  populaire  «  Qui  vole  un  œuf,  vole  un  bœul»  ti-aduit 
la  même  manière  de  voir  que  Montaigne,  à  laquelle  se  range  également 
Racine,  estimant  que  l'un  mène  à  l'autre  : 

'  €  Quelques  crimes  toujours  prccèdenl  les  i;rau<ls  crimes.  » 

•  Ainsi  que  la  vertu,  le  crime  a  ses  dcgrcs.  » 

31,  Duict.  —  Accoutumé  dès  mon  enfance. 

38.  Doubles.  —  Le  double  était  une  petite  monnaie  qui  ne  valait  qu'un  dou- 
ble denier  (un  peu  moins  qu'un  centime).  Le  doublon  était  une  monnaie 
d'Espagne,  de  la  valeur  d'une  double  i)istole  (environ  vingt  francs);  le  dou- 
ble doublon  représentait  par  suite  environ  quarante  francs. 
160, 

8,  Donné.  —  C(ir  il  r/aii/ne  sa  vie  à  se  faire  voir.  Add.  des  éditions  an- 
térieures. 
13,  France.  —  En  1773,  on  a  vu  à  Paris  un  maître  d'école  liégeois,  né  sans 
bras,  qui,  avec  le  pied,  écrivait  et  taillait  ses  plumes  (on  faisait  alors  usage 
de  i)lumes  d'oie).  —  En   1840,  à  Paris,  un  peintre,  César  Ducornet,  égale- 
ment sans  bras,  peignait  avec  le  pied  et  a  exposé  des  tableaux  au  salon, 
alors  qu'à  cette  époque  il  fallait  notablement  plus  de  talent  qu'aujour- 
d'hui pour  y  être  admis. 
25,  Veritatis.  —  Le  texte  latin  porte  pelere,  au  lieu  de  quœrcre. 
27,  Public.  —  C'est  ce  qui  fait  que,  même  de  nos  jours,  des  usages  très  dis- 
semblables, dus  aux  mœurs  et  coutumes  d'antan,  subsistent  souvent  entre 
deux  localités  parfois  très  rapprochées,  particulièrement  si  elles  sont  de 
nationalités  différentes.  Prenons  par  exemple  Londres  et  Paris  pourtant 
voisines  et  en  rapports  continus  : 

Londres  est  individualiste,  Paris  collectiviste;  Londres  respire,  Paris 
étourte;  Londres  est  bâti  en  briques,  Paris  en  pierres;  les  maîson  de  Lon- 
dres sont  basses,  celles  de  Paris  sont  hautes;  Londres  fixe  les  persiennes  à 
l'intérieur,  Paris  à  l'extérieur;  Londres  a  des  fenêtres  à  guillotine,  Paris 
à  espagnolette;  à  Paris  les  rues  ont  des  arbres,  celles  de  Londres  en  sont 
dépourvues. 

A  une  heure  du  matin  Paris  est  dans  l'obscurité,  Londres  est  inondé  de 
lumière;  Londres  a  son  trousseau  de  clefs,  Paris  son  concierge;  Londres 
quitte  son  lit  très  tard,  Paris  se  lève  de  bon  matin;  Londres  s'embrasse  sur 
la  bouche,  Paris  sur  les  joues;  Londres  s'amuse  le  .samedi  après-midi,  Pa- 
ris travaille;  le  dimanche,  Londres  reste  chez  lui,  prie  ou  boit,  Paris 
s'amuse  et  se  promène;  Londres  a  des  bars  intérieurs  ou  l'on  boit  du 
whisky,  Paris  a  des  cafés  qui  débordent  sur  les  trottoirs  et  où  l'on  cause. 

Le  dimanche,  Londres  dîne  pendant  que  Paris  déjeune.  Londres  mange 
peu  de  pain,  Paris  beaucoup;  Londres  boit  de  l'eau,  Paris  du  vin. 

A  Londres  la  nourriture  est  mauvaise,  à  Paris  elle  est  excellente;  Lon- 
dres fume  la  pipe,  Paris  la  cigarette. 

Londres  est  triste.  Paris  est  gai;  Londres  voit  le  brouillard,  Paris  le  soleil; 
Londres  est  toujours  pressé,  Paris  jamais;  Londres  est  commerçant,  Paris 
industriel;  Londres  a  peu  de  soldats,  Paris  en  a  trop;  à  Londres  les  sol- 
dats portent  la  tunique  rouge  et  le  pantalon  noir,  à  Paris  ils  portent  la 
tunique  bleue  et  le  pantalon  rouge.  A  Londi-es  la  Tamise  est  un  bras  de 
mer,  à  Paris  la  Seine  est  une  simple  i-ivière;  à  Londres  la  Tamise  est 
toujours  sale,  à  Paris  la  Seine  est  souvent  propre;  à  Londres,  dans  les 
piscines  ou  dans  la  rivière,  on  se  baigne  souvent  nu,  à  Paris  toujours  en 
caleçon. 

A  Londres  les  cochers  conduisent  à  gauche,  à  Paris  à  droite.  L'automé- 
don  à  Londres  prend  place  sur  le  derrière  de  son  véhicule,  celui  de  Paris 
sur  le  devant.  A  Londres  le  «  hooligan  »  se  bat  à  coups  de  poing,  à  Paris 
r  -  apache  »  se  bat  à  coups  de  couteau  et  de  revolver.  A  Londres  le  mont- 
de-piété  s'appelle  «  mon  oncle  »,  et  à  Paris  «  ma  tante  ».  Londres  a  le  sys- 
tème duodécimal,  Paris  a  le  système  décimal.  La  fenmie  à  Londres  aime 


F.314  ESSAIS  DK  MONTAIGNE. 

la  politique,  à  Paris  elle  s'en  désintéresse.  A  Londres  c'est  le  père  qui  lève 
l't  couche  ses  enfants,  à  Paris  c'est  la  mère. 

Londi'es  ferme  ses  théâtres  le  dimanche,  Paris  les  laisse  ouverts.  A  Lon- 
dres le  derby  est  un  mercredi,  à  Paris  lo  grand  prix  est  un  dimanche. 

A  Londres  la  femme  salue  la  première,  à  Paris  c'est  l'homme  qui  com- 
mence. A  Paris  le  mariage  donne  à  la  femme  la  liberté,  à  Londres  le  ma- 
riage la  lui  enlève.  A  Londres  les  clergymen  se  marient,  à  Paris  les  prêtres 
se  contentent  de  célébrer  les  mariages  des  autres. 
Et  cette  énumération  humouristiquo  jjourrait  être  notablement  allongée. 

;iO,  Honorer.  —  Dans  le  midi  de  la  France,  notamment  en  Périgord,  on  se 
dit  •  Adieu  »  quand  on  se  rencontre  ou  qu'on  arrive  en  visite,  ce  qui  ail- 
leurs ne  se  dit  généralement  que  lorsqu'on  se  sépare. 
162. 

Ki,  Sarbatane.  —  On  dit  aujourd'hui  sarbacane  :  long  bâton  pei'cé  d'un 
bout  à  l'autre  avec  lequel  on  projette,  en  soufflant,  de  petites  balles  contre 
les  oiseaux  ;  par  extension,  parler  par  sarbatane,  c'est  parler  par  personnes 
interposées. 

18,  Soigneusement.  —  En  Guinée,  à  la  Côte-d'Or  notamment,  pays  qui,  il  est 
vrai,  sont  sous  l'équateur,  les  deux  sexes  vont  complètement  nus  jusqu'à 
l'âge  de  neuf  à  dix  ans.  Dans  plusieurs  cantons,  les  filles  n'y  portent  même 
pas  de  pagne  (morceau  d'étolïe  dont  les  nègres  et  les  Indiens  se  couvrent 
de  la  ceinture  aux  genoux),  jusqu'au  jour  de  leur  mariage:  celles  qui  ne 
trouvent  pas  de  maris  sont  aussi  nues  à  trente  ans  qu'à  quinze.  Payen. 

21,  Poste.  —  A  leur  gré,  à  leur  fantaisie,  selon  leur  goût.  —  Dans  l'île  de 
Chypre,  dit  Justin,  c'était  une  coutume  d'envoyer  sur  le  bord  de  la  mer,  à 
certains  jours  fixes,  les  jeunes  filles  nubiles,  sans  dot,  en  gagner  une,  en 
sacrifiant  à  Vénus  leur  virginité;  cet  usage,  d'après  Valère  Maxime,  aurait 
également  existé  à  Carthage,  et  aussi  chez  les  Lydiens  et  les  Babyloniens, 
au  dire  d'Hérodote. 

28,  Faire.  —  Dans  nombre  de  pays  d'Europe,  au  moyen  âge,  princes,  sei- 
gneurs et  même  abbés  et  chanoines,  entre  autres  les  chanoines  de  Lyon, 
avaient,  sur  leurs  vassaux,  le  droit  de  se  substituer  au  marié,  la  première 
nuit  des  noces,  droit  dénommé  «  Jus  luxanda  cosù  {droit  d'effraction)  ».  Ce, 
droit  existait  notamment  en  Ecosse,  où  il  avait  été  établi  par  le  roi  Eve- 
nus  III,  au  début  de  l'ère  chrétienne;  «  de  telle  sorte,  dit  Blchanax,  que 
le  roi  ne  ménageant  pas  plus  la  chasteté  des  femmes  de  ses  nobles  que 
ceux-ci  celle  des  femmes  do  ses  serfs,  les  uns  et  les  autres  se  trouvaient  à 
cet  égard  sur  un  piedéd'égalité  absolue  »;  il  y  subsistait  encore  dans  la 
deuxième  moitié  du  xi'  siècle,  époque  à  laquelle  Malcolm  III,  aux  pieuses 
sollicitations  de  sa  femme  Marguerite,  l'abolit  et  lui  substitua  une  rede- 
vance d'un  demi-marc  d'argent  qui  fut  payée  jusqu'au  xvr  siècle.  —  Aux 
îles  Canaries,  on  offrait  aux  chefs  les  prémices  de  toutes  les  vierges  qui  se 
mariaient  et  celles  qui  se  trouvaient  acceptées,  en  étaient  très  honorées. 

32,  Guerre.  —  J.-J.  Rousseau,  dans  une  lettre  à  d'Alembert,  n'émet-il  pas 
l'idée  d'envoyer  les  femmes  à  la  guerre  et  de  les  faire  entrer  dans  les  con- 
tingents à  fournir  aux  armées,  dans  la  même  proportion  que  les  hommes 
dont  le  nombre  serait  de  la  sorte  réduit  de  moitié? 


164. 


5,  Vieillarts.  —  Coutume  de  certains  peuples  de  Thrace. 

6,  Femmes.  —  Au  moyen  âge,  en  France,  on  faisait  usage  de  couches  et  de 
couchettes.  Les  couchettes  étaient  des  lits  de  proportions  égales  aux  nôtres 
à  deux  places;  les  couches  avaient  dix  à  onze  pieds  (3°"  1/2  environ),  dans 
les  deux  sens,  sorte  de  lits  de  camp  où  l'on  couchait  sur  deux  rangs,  les 
pieds  de  chaque  rang  vers  le  milieu  du  lit;  on  en  trouvait  encore  de  la 
sorte,  il  y  a  un  siècle,  dans  quelques  vieux  châteaux  de  province.  Le  châ- 
telain, sa  dame,  ses  frères  d'armes,  ses  hôtes,  ses  cliiens  de  chasse  y  cou- 
chaient tous  ensemble.  Souvent,  en  outre,  on  faisait  coucher  ses  serviteurs 
dans  ses  chambres  et  cela  encore  aux  xvr  et  xyii'  siècles  ;  c'est  ainsi  que  le 
soi»'  de  la  Saint-Barthélémy,  Charles  IX,  qui  voulait  sauver  Coligny,  le 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  XXll.         VOL.   I,  PAG.  164.  F.315 

garda  longtemps  au  Louvre,  et  comme  il  s'en  allait,  cherchant  à  le  retenir, 
lui  dit  :  -  Reste  donc  ce  soir,  tu  coucheras  avec  mon  valet  de  chambre.  » 
—  «  Ma  foi  non,  il  est  trop  tard,  je  m'en  vais,  »  reprit  Coligny. 

10,  Besoing.  —  Les  Cosaques  Zaporogues,  qui  habitaient  les  îles  du  Dnieper, 
n'admettaient  parmi  eux  aucune  femme;  pour  se  reproduire,  ils  usaient 
de  captives  qu'ils  reléguaient  hors  de  leur  camp;  ils  en  élevaient  les  en- 
fants mâles,  et  chassaient  les  filles.  Payen.  —  En  Mongolie,  se  trouve  une 
ville  sans  femmes  «  Maïtmachin  »,  dont  le  nom  signifie  marclié;  elle  compte 
70.000  habitants,  est  située  sur  le  chemin  des  caravanes,  sur  les  confins  de 
la  Sibérie,  et  n'est  peuplée  que  de  commerçants;  le  gouvernement  chinois 

'  en  interdit  l'accès  aux  femmes,  pour  empêcher  ses  sujets  de  s'établir  à 
peu  de  distance  de  la  frontière.  G"  Niox. 

10,  Oyseaux.  —  Chez  les  (luèbi-es  ou  Parsis,  dans  les  Indes,  les  cimetières  sont 
des  tours  à  ciel  ouvert  de  douze  à  quinze  pieds  (  t  à  5'"  de  haut),  sans  ou- 
vertures latérales;  la  partie  supérieure  est  garnie  de  barres  de  fer  qui  for- 
ment une  sorte  de  grille  liorizontale  sur  laquelle  on  place  les  corps  pour  y 
servir  de  pâture  aux  oiseaux  de  proie,  jusqu'à  ce  que  les  os  tombent  d'eux- 
mêmes  sur  lo  sol,  où  ils  s'accumulent,  constituant  un  véritable  charnier. 

"21.  Roy.  —  11  en  est,  encore  aujourd'hui,  de  même  dans  les  mosquées;  on 
n'y  entre  qu'après  avoir  ùté  ses  sandales,  si  on  est  musulman,  ou  chaussé 
de  baboj^hes  par-dessus  ses  chaussures,  si  on  est  chrétien  et  qu'on  soit 
autorisé  à  y  pénétrer.  Dans  les  synagogues,  les  Juifs  ne  se  découvrent  pas, 
et  il  est  malséant  de  le  faire.  A  Rome,  ceux  auxquels  il  est  accordé  d'assister 
<à  la  messe  du  Pape,  à  la  chapelle  Sixtine,  le  font  les  hqmmes  en  habit,  les 
fennnes  en  mantille,  les  uns  et  les  autres  sans  gants. 

'22,  Eunuques.  —  De  sOvtî,  lit,  et  êxw,  je  garde.  Nom  donné  aux  hommes 
auxquels  on  a  ùté  la  faculté  d'engendrer  et  dont  on  se  sert  en  Orient  pour 
garder  les  femmes  dans  les  sérails;  cette  opération  rend  l'homme  imberbe, 
modifie  sa  voix,  lui  donne  des  allures  féminines  et  généralement  porte  à 
l'embonpoint.  Elle  se  pratique  également  sur  la  femme,  en  llindoustan,  en 
vue  du  même  i-ùle,  et  s'effectue  en  piquant  les  ovaires  avec  une  aiguille 
trempée  dans  un  liquide  caustique,  ce  qui  amène  l'ati'ophie  de  cet  organe 
et  aussi  des  transformations  physiques,  dit-on,  qui  font  que  ces  femmes 
ressemblent  à  des  hommes. 

23,  A  dire.  —  Vieille  locution  qui  subsiste  encore  dans  le  midi  et  signifie  :  de 
moins,  manquer,  faii-e  défaut;  de  là  vient  le  mot  «  adiré  »,  une  pièce  adirée, 
c.-à.-d.  perdue,  employé  dans  le  langage  du  palais.  V.  N.  111,230  :  Adiré. 

21,  Démons.  —  Se  rendre  les  démons  favorablet.  Accointer,  c'est  rechercher 
quelqu'un  pour  se  le  concilier,  le  gagner  à  soi. 

2.J,  Lyon.  —  Les  Hottentots  (Afrique  australe)  adoraient  le  lion. 

31,  Leze-maiesté.  —  Cet  usage  existait  en  Pologne,   et  aussi  en  d'autres 
pays  du  Nord. 
166, 

1,  Police.  —  Du  gouvernement;  cette  acception  du  mot  «  police  »  est  presque 
constante  dans  les  Essais. 

9,  Eftroy.  —  Cette  facilité  dans  l'accouchement  n'est  pas  rare,  chez  nous, 
parmi  les  femmes  de  la  campagne  ;  elle  a  été  signalée  comme  habituelle 
chez  les  négresses  et  aussi  chez  les  indiennes  de  l'Amérique  du  Nord. 

10,  Greues.  —  Des  jambières  ou  armures  de  jambe. 

15,  Accroupis.  —  Dans  les  pays  mdsulmans,  les  deux  sexes  généralement 
urinent  accroupis;  en  Guinée,  dit  Suidas,  il  est  défendu  aux  hommes,  sous 
peine  d'amende,  d'uriner  debout. 

20,  Douze.  —  Les  Ilurons,  les  Hottentots  passent  pour  nourrir  les  enfants  au 
sein  pendant  quatre  ou  cinq  ans;  les  femmes  sauvages  de  la  Louisiane, 
jusqu'à  six  ou  sept  ans;  les  Mexicaines,  plus  encore.  Suivant  Amlsdse.n, 
explorateur  du  pôle  arctique  de  1900  à  1903,  chez  les  Esquimaux  les  fem- 
mes donneraient  le  sein  à  leurs  enfants  jusqu'à  dix  ans. 

25,  Senteur.  —  Il  en  était  ainsi  chez  les  Mexicains,  d'après  Gomara;  les  Chi- 
nois, dit-on,  sont  également  peu  délicats  sous  ce  rapport. 


F.316  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

30,  Ongle.  —  En  Chine,  les  lettrés  et  les  docteurs,  surtout  ceux  qui  sont  de 
basse  extraction,  ne  se  coupent  jamais  les  ongles  ;  ils  affectent  de  les  laisser 
croiti'e  jusqu'à  la  longueur  d'un  pouce.  Du  Halde.  —  Les  négresses  de  la 
Cùte-d'Or  les  laissent  croître  jusqu'à  les  avoir  quelquefois  aussi  longs 
qu'une  phalange  ;  elles  les  entretiennent  fort  propres  et  s'en  servent,  le  cas 
échéant,  pour  prendre  de  la  poudre  d'or.  Aktls. 

82,  Gentillesse.  —  De  nos  jours,  certains  font  de  même,  laissant  croître  par 
coquetterie,  par  snobisnie  pour  pailer  l'argot  <le  nos  gens  à  la  mode,  d'un 
centimètre  à  un  centimètre  et  demi  l'ongle  du  petit  doigt  de  la  main  droite. 

38,  Fils.  —  Au  Gabon,  la  mère  reçoit  ouvertement  les  cai-esses  de  son  fils,  et 
les  filles  celles  de  leurs  pères.  Artus. 
168, 

i,  -Humaine.  —  Les  Munbos,  tribu  de  l'Afrique  équatoriale,  mangeaient  de  la 
chair  humaine.  Fakio.  —  Les  Anzikos,  autre  tribu  africaine,  tuaient  et  man- 
geaient tous  les  prisonniers  qu'ils  faisaient  à  la  guerre;  ils  se  mangeaient 
même  les  uns  les  autres,  sans  en  excepter  leurs  propres  parents;  la  chair 
humaine  se  vendait  sur  leurs  marchés,  comme  le  bœuf  dans  les  boucheries 
d'Europe.  Picafetta. 

3,  Aage.  —  «  Que  la  lie  de  l'esprit  et  du  corps  est  humiliante  à  supporter; 
j'aimerais  les  pajs  où  par  amitié  on  tue  ses  vieux  parents,  si  cela  pouvait 
s'accommoder  avec  le  Christianisme  •  (M""  de  Sévigné).         , 

5,  Tuez.  —  A  Sparte  notamment. 

7.  Seruir.  —  Lycurgue,  à  Sparte,  avait  admis  qu'un  mari  ayant  des  en- 
fants, prêtât  sa  femme  à  un  autre  qui  n'en  pouvait  avoir  de  la  sienne. 

9,  Masles.  —  On  lit  dans  Hérodote,  à  propos  des  Guidanes,  peuplade  de 
Libye  :  «  On  dit  que  leurs  femmes  portent  chacune  autour  de  la  cheville 
du  pied  autant  de  bandes  de  peau  qu'elles  ont  connu  d'hommes;  celle  qui 
en  a  davantage  est  la  plus  estimée,  comme  ayant  été  aimée  d'un  plus  grand 
nombre.  •  —  Hérodote,  du  reste,  dit  bien  d'autres  choses  :  «  Dans  la  Baby- 
lonie,  les  mariages  se  font  à  la  criée  :  Une  fois  l'an,  dans  chaque  bourgade, 
toutes  les  filles  nubiles  sont  réunies  et  on  en  forme  deux  groupes,  les  belles 
et  celles  qui  ne  le  sont  pas.  Les  premières  sont  alors  mises  aux  enchères, 
en  commençant  par  la  plus  belle;  on  passe  ensuite. aux  autres  en  commen- 
çant par  la  plus  laide.  Les  prix  d'adjudication  des  filles  du  premier  groupe 
sont  payés  par  les  acheteure  ;  pour  celles  du  second,  ils  le  sont  aux  acqué- 
reurs sur  l'argent  qui  vient  d'être  versé  pour  celles-là,  qui  sert  de  la  sorte  à 
constituer  la  dot  de  celles-ci. 

11,  Main.  —  Les  Amazones,  peuplade  fabuleuse  de  la  Scythie,  qui  se  perpé- 
tuaient, dit-on,  par  un  commerce  passager  avec  les  habitants  des  pays 
voisins,  et  exposaient  leurs  enfants  mâles.  —  En  Bohème,  au  vm°  siècle, 
il  a  existé  de  véritables  Amazones  qui,  pendant  plusieurs  années,  répandi- 
rent la  terreur  dans  la  région,  et  qui  ne  purent  être  exterminées  qu'à 
grand'peine. 

12,  Et  ce  que.  —  Add.  des  éd.  ant.  h  88  :  la  raison  et. 

15,  Festoyée.  —  Les  Thraces,  d'après  Vai.èke  Maxime;  on  ne  peut  que  louer, 
dit  cet  auteur,  la  sagesse  de  ce  peuple  qui  accueille  par  des  pleurs  la  nais- 
.sance  de  l'homme,  et  célèbre  ses  funérailles  par  des  réjouissances,  ayant, 
sans  les  leçons  des  philosophes,  deviné  notre  véritable  condition.  —  Les  édi- 
tions antérieures  présentent  la  variante  ci-après  :  L'horreur  de  la  mort  esloit 
mesprisée,  mais  l'heure  de  sa  veniie,  à  l'endroit  des  plus  chères  personnes  qu'on 
eut,  festoyée  auec  grande  allégresse  :  et  quant  à  la  douleur,  7wus  en  sçauons 
d'autres  où  les  enfans  de  sept  ans  souffroyent  pour  l'essay  de  leur  constance, 
à  estre  foëltez  iusques  à  la  mort  sans  changer  de  démarche  ny  de  visage. 

17,  Visage.  —  A  Lacédémone,  d'après  Plutarque. 

21,  Nasitort.  —  Nom  du  cresson  alénois  (à  feuilles  découpées). 

21,  Eau.  —  En  Perse,  au  temps  de  Cyrus,  suivant  Xénophox. 

22,  Cio.  —  Auj.  Céos;  les  habitants  de  cette  île  étaient  réputés  par  leur  mo- 
ralité, autant  que  ceux  de  Chio  (île  de  l'Archipel,  auj.  Scio)  passaient  pour 
être  de  mœurs  dissolues. 


NOTES.         LIV.  I,  Cil.  XXII.        VOL.  I,  PAG.  168.  F.317 

23,  Honneur.  —  Ces  nombreux  exemples,  dont  pour  quelques-uns  nous  avons 
indiqué  la  source,  sont  empruntés- d'IlKRODOTE,  de  Xénophon,  de  PixrAKQUEy 
de  Sextls  Empuucus,  de  Vai.kke  Maxime  et  des  ouvrages  publiés  alors  sur 
l'Asie,  l'Afrique  et  l'Amérique. 

2G,  Monde.  —  Pindare  dit  cela  de  la  loi  (v6(aoç)  ;  mais  Hérodote,  III,  38,  en 
citant  ses  paroles,  donne  à  vô(xo;  le  sens  de  coutume.  —  On  en  dit  autant, 
et  avec  non  moins  de  raison,  de  l'opinion. 

34,  Famille.  -  Les  Hottentots,  une  l'ois  reçus  hommes  en  céi-émonie  publi- 
que, peuvent,  sans  scandale,  maltraiter  et  battre  leur  mère.  Koi.ba. 

31,  Avislote.  —  .Matale  à  Xicumm/ue,  VII,  G. 
170, 

I,  Coustume.  —  On  ne  saurait  disconvenir  de  celte  as.sertion.  Le  milieu  am- 
biant, la  mentalité  du  mSment  exercent  une  action  pi-épondi'rante  sur  la 
façon  dont  on  envisage  toutes  choses.  A  la  guerre,  l'homme  le  moins 
rapace  ti'ouve  parfois  tout  naturel  de  s'emparer  du  bien  d'autrui;  le  plus 

-  sensible,  de  tuer  sans  nécessité.  Les  moins  cruels,  les  |)lus  délicats  finissent 
par  prendre  goût  aux  courses  de  taureaux  et  voient  sans  dégoût  éven- 
trer  les  malheureux  chevaux  sans  défense  qu'on  y  sacrifie.  Tout  Rome 
assistait  avec  ti'ansports  aux  combats  de  gladiateurs.  Ne  voit-on  pas  jour- 
nellement, dans  les  pays  non  civilisés,  les  gens  de  nations  tenant  la  tète 
de  la  civilisation,  qui  y  résident,  commettre  ou  voir  exercer  sans  en  êti-e 
révoltés  leà  pires  cruautés  sur  les  indigènes?  Sous  la  Terreur,  familia- 
risé avec  la  guillotine,  on  n'y  prêtait  plus  attention  ;  on  n'était  plus  guère 
émotionné  par  le  passage  des  charrettes  de  condamnés;  parmi  les  victimes 
elles-mêmes  destinées  à  y  monter  le  lendemain,  la  plupart  n'en  étaient 
pas  autrement  troublées,  pas  plus  qu'en  temps  d'épidémie,  oii  la  mort  est 
l'affaire  de  quelques  heures,  on  ne  se  tourmente  outre  mesure.  Il  en  est 
de  même  a  fortiori  de  la  coutume  et  ce  sont  bien  en  réalité'  les  lois  de  la 
société,  du  pays  et  du  moment,  c'est-à-dire  les  mœurs,  qui  créent  les  no- 
tions éminemment  relatives  et  variables  du  bien  et  du  mal,  et  font  que 
tels  on  tels  actes  sont  aujourd'hui  vice  ou  vertu,  caractère  qu'ils  n'avaient 
pas  hier,  au  moins  au  même  degré  et  qui  se  modifiera  probablement  de- 
main. 
4,  Crète.  —  Valère  Maxime,  VIL 

33,  Maistrise.  —  Le  cas  est  fréquent.  Il  n'en  est  guère  de  plus  caractéris- 
tique dans  les  temps  modernes  que  celui  des  Anglais  mettant  à  mort  leur 
roi  Charles  I"  parce  qu'il  voulait,  disaient-ils,  attenter  à  leur  liberté  et  à  leurs 
privilèges  et  qui  se  rangèrent,  au  même  moment,  aux  lois  autrement  dures 
et  tyranniques  de  Cromwell,  dont  ils  portèrent  le  joug  patiemment  et, 
après  lui,  supportèrent  sans  se  plaindre  celui  presque  aussi  despotique  de 
Charles  II.  —  Chez  nous,  la  période  de  Louis  XVI,  la  Révolution,  Napo- 
léon, Louis  XVIII,  nous  représentent  quelque  chose  d'analogue.  En  1815, 
nous  nous  sommes  retrouvés  presque  exactement  au  même  point  qu'en  1789, 
après  être  passés  par  les  phases  les  plus  aiguës:  et  ce  n'est  qu'en  1830  qu'un 
nouvel  à-coup  d(?  protestation  s'est  produit.  Tout  régime  succédant  à  un 
autre  emporté  par  le  flot  populaire,  peut,  sous  une  autre  forme,  reprendre 
les  mêmes  errements,  avec  grande  chance  de  ne  pas  voir  se  renouveler 
d'un  certain  temps  semblable  manifestation;  toutefois,  moins  que  parle 
passé  ces  à-coups  interrompent  l'évolution  de  l'humanité  :  le  sufl'rage  uni- 
versel, les  progrès  de  l'instructioi'i,  l'émancipation  des  masses  de  plus  en 
plus  avides  de  libéralisme,  de  socialisme,  l'instantanéité  de  communica- 
tions, la  rapidité  et  la  facilité  des  transports,  l'action  continue  et  pénétrante 
de  la  presse,  font  que  chacun  a  une  part  beaucoup  plus  efl'ective,  bien 
qu'encore  souvent  inconsciente  et  passive,  aux  questions  d'ordre  politique 
dont  la  généralité  se  désintéressait  jadis.  A  l'autorité  d'un  seul,  s'est  subs- 
tituée celle  non  moins  intolérable,  ni  plus  stable,  des  groupes;  les  trans- 
formations s'opèrent  par  la  force  môme  des  choses,  mais  sous  le  couvert 
de  la  légalité;  elles  sont  peut-être  moins  apparentes,  mais  tout  aussi 
réelles  que  par  le  passé  et  acheminent  fatalement  aux  mômes  revirements. 


F.318  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

35,  Ecosse.  —  Les  Ilighlaiidei's.  ou  Montagnards,  ainsi  qu'on  les  appelle  au- 
joufd'liui. 

39.  Eux-mesmes.  —  Ceci  est  tiré  d'IIÉRODOTE,  III,  38.  <•  Chez  les  Padéens, 
dit-il,  peuplade  de  l'Inde,  ses  plus  proches  parents  et  ses  meilleurs  amis 
tuent  quiconque  tombe  malade,  donnant  pour  raison  que  la  maladie  le 
ferait  maigrir  et  que  sa  chair  serait  moins  bonne  ;  il  a  beau  nier  qu'il  soit 
malade,  ils  l'égorgent  impitoj'ablement  et  se  régalent  de  sa  chair.  Ils  tuent 
de  même  et  mangent  ceux  arrivés  à  un  grand  âge;  mais  il  s'en  trouve 
peu  dans  ce  cas,  en  raison  des  risques  d'un  sort  semblable  que  chacun 
court  dès  qu'il  est  malade.  V.  N.  II,  376  :  Coustume. 
172. 

1,  Horreur.  —  Nous  voyons  se  reproduire  ce  même  fait  pour  la  mémo 
cause,  c'est-à-dire  la  force  de  l'habitude,  et' aussi  quelque  peu  à  la  répro- 
bation dont,  on  ne  sait  pourquoi,  la  frappe  l'Église  catholique,  qu'il  faut 
attribuer  le  peu  de  progrès  que  fait  en  France  la  crémation,  en  dépit  des 
appréhensions  qu'inspirent  les  inhumations  précipitées.  Ces  appréhensions 
sont  cependant  des  pJus  justifiées;  en  Angleterre,  rien  que  par  le  fait  des 
exluimations  pratiquées  de  1900  à  1905,  dans  les  cimetières,  il  aurait  été 
relevé  que  149  personnes  ainsi  exhumées  avaient  été  enterrées  vivantes.  — 
La  crémation  est  aujourd'hui  admise  à  peu  près  partout  en  Europe,  mais 
pourtant  encore  peu  en  faveur  surtout  par  les  raisons  sus-indiquées.  En 
France,  il  existe  des  fours  crématoires  à  Paris,  Lyon,  Rouen,  Reims: 
d'autres  sont  en  construction  ou  en  projet  à  Marseille,  Dijon,  Nîmes.  Nice. 
A  Paris,  de  1889  à  la  fin  de  1905,  3.825  incinérations  ont  été  effectuées;  en 
cette  dernière  année,  il  y  en  a  eu  311.  La  durée  de  l'opération  est  d'une 
heure  environ,  la  redevance  de  50  fr.,  le  poids  des  cendres  recueillies  à 
peu  près  le  douzième  de  celui  des  corps  incinérés. 

15,  Platon.  —  Lois,  VIII,  6. 

10,  Preposteres.  —  A  rebours,  à  contre-sens;  par  extension  :  autrement 
qu'il  ne  faut,  contre  nature. 

23,  Entants.  —  Un  oracle  avait  prédit  à  Thyeste,  frèi-e  du  roi  d'Argos,  qu'il 
aurait  un  fils  de  sa  propre  fille;  pour  éviter  ce  crime,  Thyeste,  à  la  nais- 
sance de  celle-ci,  la  fit  élever  loin  de  lui.  Dans  la  suite,  l'ayant  rencontrée 
dans  un  bois  sans  la  connaître,  il  lui  fit  violence  et  la  rendit  mère.  —  Une 
prédiction  avait  été  faite  à  Laïus,  roi  de  Thèbes,  que  l'enfant  qu'il  atten- 
dait de  Jocaste,  sa  femme,  lui  donnerait  la  mort.  Pour  échapper  à  ce  sort, 
dès  la  naissance  de  l'enfant,  il  le  fit  exposer.  Un  berger  de  Corinthe  l'ayant 
trouvé,  le  porta  à  la  reine,  qui  le  nomma  Œdipe  et  le  fit  élever.  Devenu 
grand,  Œdipe  consulta  l'oracle  sur  sa  destinée  et  apprit  qu'il  serait  le 
meurtrier  de  son  père  et  époux  de  sa  mère.  Se  croyant  fils  de  la  reine 
de  Corinthe,  pour  déjouer  la  fatalité  il  s'expatria.  Chemin  faisant,  il  fit 
rencontre  de  Laïus,  se  prit  de  querelle  avec  lui  et  le  tua.  Quelque  temps 
après,  il  arriva  à  Thèbes,  et  trouva  la  ville  désolée  par  le  Sphinx;  il  le  vain- 
quit et,  pour  prix  de  sa  victoire,  obtint  la  main  de  Jocaste,  promise  à  qui 
délivrerait  la  ville  de  ce  monstre,  et  réalisa  ainsi,  sans  le  savoir,  la  prédic- 
tion dont  il  avait  été  l'objet.  —  Macareus  eut  un  fils  de  sa  propre  sœur: 
leur  père,  instruit  de  cet  inceste,  envoya  à  sa  fille  une  épée  avec  laquelle 
elle  se  tua;  son  frère  échappa  par  la  fuite  au  châtiment  qui  l'attendait,  et 
se  réfugia  à  Delphes,  où  il  fut  admis  au  nombre  des  prêtres  d'Apollon. 
Myth. 

32,  Chrysippus.  —  Sextus  Empiricus,  Pyrrh.  /lypoL,  I,  1 1. 

35,  Preiudice.  —  Signifie  ici  préjugé. 
174, 

3,  Etat.  —  Certains  ont  pensé  voir,  nonobstant  ce  qui  suit,  une  allusion  aux 
préjugés  religieux;  il  est  hors  de  doute  que  telle  na  pas  été  l'intention  de 
Montaigne  qui,  de  parti  pris,  s'en  tient  sans  discussion  aux  enseignements 

■    de  l'Église. 

G,  Oncques.  —  Le  droit  romain  qui  était  d'application  courante  et  qui  alors 
n'existait  écrit  qu'en  latin. 


NOTES.         LIV.  f,  Cli.  XXII.         VOL.   I,  PAG.  174.  F.319 

(H,  Langue.  —  Au  moyen  âge,  il  était  fait  usage  du  latin  pour  la  rédaction 
des  actes  judiciaires  et  notariés.  En  1580,  une  ordonnance  de  François  I", 
datée  de  Villers-Cotterets,  prescrivit  que  dorénavant  tout  acte,  etc.  serait 

"  prononcé,  enregistré  et  délivré  aux  parties  en  leur  langue  maternelle.  De- 
puis, cette  langue  s'est  transformée,  mais  les  grimoires  de  la  Basoche, 
continuant  à  être  écrits  dans  le  langage  d'il  y  a  quatre  siècles,  sont  rede- 
venus presque  incompréhensibles  pour  la  génération  actuelle  en- attendant 
qu'une  nouvelle  ordonnance  intervienne. 
9,  Isocrates.  —  Discoui'n  à  Nicoclès. 

17,  Impériales.  —  Peut-être  VVaifre  ou  Hunoid,  ducs  d'Aquitaine  à  l'époque 
de  Charlemagne...  Paul  Ému-e,  historien  latin  du  xv siècle,  dit:  «  Charlema- 
gne  projetait  de  donner  une  nouvelle  législation  à  ses  peuples,  en  commen- 
çant par  ceux  de  France;  un  de  ceux,  gascon,  qui  l'avaient  suivi  en  Espa- 
gne, se  prononça  et  devant  l'opposition  des  conseils  tenus  à  cet  effet,  ce 
projet  fut  abandonné.  • 

19,  Vende.  —  La  vénalité  des  charges  de  juge,  introduite  en  France  en  152G, 
sous  François  I",  par  le  chancelier  Duprat,  comme  moyen  de  subA'enir  à 
la  pénurie  du  Trésor,  a  subsisté  jusqu'à  la  Révolution.  —  Sans  demander 
que  ces  errements  soient  rétablis,  les  juges  s'en  trouvaient  incontestable- 
ment plus  indépendants,  et  il  serait  à  désirer  aujourd'hui  que  par  mode  de 
recrutement  et  d'avancement,  ils  fussent  à  nouveau  affranchis  des  pouvoirs 
publics  et  des  pressions  que  trop  souvent  ceux-ci  exercent  sur  eux,  cher- 
chent à  exercer  ou  passent  pour  le  faire;  l'inamovibilité  qui  leur  avait  été 
donnée  comme  garantie  est  insuffisante  à  cet  effet,  d'autant  qu'on  ne  la 
respecte  même  plus.  Il  faudrait  que,  du  haut  en  bas  de  la  hiérarchie,  le 
corps  judiciaire  se  recrutât  exclusivement  par  lui-même  dans  des  conditions 
déterminées  par  la  loi  ;  peut-être  alors  cours  et  tribunaux  en  reviendraient, 
comme  jadis,  à  ne  rendre  que  des  arrêts  et  non  plus  des  services,  alors  que 
les  parlements  tenaient  tête  à  l'occasion  à  l'autorité  royale  et  qu'en  dépit 
de  la  prison  et  de  l'exil,  ils  se  refusaient  à  l'enregistrement  de  ses  édits 
quand  ils  estiTnaient  qu'il  y  avait  abus  ou  déni  de  justice. 

'20,  Payer.  —  Nous  n'en  sommes  plus  tout  à  fait  là,  mais  pas  loin.  Dans  les 
procès  civils,  les  deux  parties  ne  sont-elles  pas  condamnées  fréquemment 
aux  frais,  celle  qui  gagne  comme  celle  qui  perd,  la  première  ayant  simple- 
ment recours  sur  l'autre?  —  Ce  n'est  pas  là  du  reste  le  seul  grief  que  dans 
les  temps  actuels  on  articule  contre  la  magistrature,  en  voici  quelques-uns  : 
L'omnipotence,  le  sans-gêne  et  l'arbitraire  des  juges  d'instruction  qui 
prolongent  la  détention  préventive  au  delà  de  toute  raison;  n'a-t-on  pas  cité, 
en  l'an  1906,  un  honorable  négociant,  accusé  d'avoir  soustrait  la  valeur 
d'une  lettre  chargée,  détenu  ainsi  pendant  treize  mois,  sans  qu'il  fût  pro- 
cédé à  l'examen  de  l'affaire? 

La  lenteur  avec  laquelle  se  jugent  les  affaires  civiles.  C'est  ainsi  que,  dans 
le  ressort  de  Paris,  de  simples  procès  en  séparation  attendent  de  longs  mois 
avant  d'être  appelés.  A  cela  on  objecte  le  grand  nombre  d'affaires;  mais  si, 
quand  l'encombrement  le  comporte,  les  audiences  commençaient  plus  tôt 
et  finissaient  plus  tard,  si  elles  avaient  lieu  tous  les  jours  au  lieu  de  trois 
fois  par  semaine,  si  les  tribunaux  ne  prenaient  pas  chaque  année  de  si 
longues  vacapces  et  même  s'en  passaient  quand  le  service  l'exige,  les  re- 
tards seraient  infiniment  moins  considérables.  On  pourrait  encoie  aug- 
menter leur  nombre,  ou  mieux  lea  réduire  à  un  juge  unique,  comme  en 
Angleterre,  aux  États-Unis,  ce  qui  permettrait  avec  le  même  personnel  do 
faire  triple  besogne  et  aurait  en  outre  l'immense  avantage  de  substituer 
une  responsabilité  individuelle  à  une  trinité  anonyme,  d'où  une  plus  grande 
attention  apportée  à  l'étude  des  affaires  et  plus  d'équité  dans  le  jugement 
à  intervenir. 

Les  ajournements  fréquents  à  huit,  quinze  jours  pour  le  prononcé  du 
jugement  dans  les  affaires  correctionnelles,  ce  qui  prolonge  les  angoisses 
des  inculpés  et  prête  à  ce  que  dans  l'intervalle  les  juges  prennent  langue  au 
dehors;  le  jugement  devrait  toujours  être  rendu  séance  tenante  comme  aux 


F.320  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

assises,  et  seule  sa  rédaction  ôtre  ajournée  quand  cela  est  nécessité  par  les 
considérants  à  exposer. 

De  ne  pas  cliercher  à  s'éclairer  suffisamment  et  de  trop  s'en  rapporter  à 
la  parole  des  divers  agents  qui  portent  l'accusation,  alors  que  leurs  téflioi- 
j?nages  sont  contestés,  sous  prétexte  qu'ils  sont  assermentés,  ce  n'est  pas 
toujours  une  garantie  suffisante. 

Enfin  d'avoir  intérêt  a  la  multiplication  des  affaires,  ce  qui  porte  à  exer- 
cer des  poursuites  i)our  des  vétilles  qui  n'en  valent  jias  la  peine,  pour  don- 
ner plus  d'im])ortance  au  ressort. 

27,  Contraires.  —  Une  distinction  analogue,  non  moins  farouche,  comme  dit 
Montaigne,  subsiste,  suivant  que  le  dommage  causé  à  autrui,  l'est  par  un 
fonctionnaire  dans  l'exercice  de  ses  fonctions,  ou  partout  autre.  Sans  parler 
des  pouvoirs  exorbitants  dévolus  en  France,  par  le  code  lui-même,  aux 
préfets  qui  ont  qualité  pour  pratiquer  des  actes  qui  devraient  être  l'apa- 
nage exclusif  de  l'autorité  judiciaire,  dans  toutes  les  branches  de  l'adminis- 
tration, les  abus,  quels  qu'ils  soient,  échappent  à  toute  répression.  —  Outre 
que  ceux  qui  les  commettent  ne  font  souvent  qu'appliquer  les  instructions 
de  leurs  supérieui-s,  les  unsetlesauti-es  n'ont  à  répondre  en  dernier  ressort 
de  leurs  faits  et  gestes  que  vis-à-vis  du  Ministi-e  dont  ils  i-elèvent,  lequel  est 
toujours  prêt  à  les  couvrir  de  sa  responsabilité,  chose  illusoire  entre  toutes. 
Seule  la  justice,  unique  pour  tous,  devrait  connaître  de  ces  abus  et  des 
dommages  en  résultant,  comme  de  tous  autres;  la  tâche  des  fonctionnaires 
en  deviendrait  assurément  iihis  difficile  et  plus  délicate,  mais  en  somme 
ils  sont  faits  pour  le  public,  et  devant  une  responsabilité  effective,  ils  s'ob- 
servei'aient  davantage. 

30,  Vertu.  —  La  vertu  militaire,  le  courage. 
176, 

1,  Partage.  —  .lusqu'au  xvn"  siècle,  robe  longue  s'est  dit  de  la  magistrature 
et  du  clergé,  robe  courte  de  l'armée. 

11,  Commun.  — Dans  le  ch.  111  du  liv.  111,  Montaigne  revient  sur  ces  idées 
et  les  développe. 

16,  Receûes.  —  Saint  Augustin  était  de  cet  avis  lorsqu'il  répondait  à  un  prê- 
tre qui  lui  demandait  s'il  valait  mieux  suivre  la  liturgie  de  Rome  ou  celle 
de  Milan  :  •<  A  Rome,  suivez  la  liturgie  de  Rome;  à  Milan,  celle  de  Milan.  » 
Par  contre,  La  Bruyèke  dit  à  ce  sujet  :  «  Il  faut  faire  comme  les  autres,  » 
maxime  suspecte  qui  signifie  presque  toujours  :  «  Il  faut  mal  faire  »,  dès 
qu'elle  s'applique  au  delà  de  ces  choses  purement  extérieures,  qui  n'ont  point 
de  suites  et  dépendent  de  l'usage,  de  la  mode  ou  de  la  bienséance.  — 
■<  Différence  complète  au  dedans,  dit  Sénèque  à  ce  même  propos,  mais  res- 
semblance entière  au  dehors.  »  —  «  Pour  ne  pas  rompre  l'harmonie,  le 
sage  doit  parler  la  langue  des  fous.  «  Abbé   des  Fontaines. 

23,  Est.  —  En  disant  que  la  première  loi  est  de  se  conformer  à  celles  du  pajs 
dans  lequel  on  se  trouve,  Montaigne  l'entend  sous  tous  rapports,  sous  ce- 
lui des  usages  tout  aussi  bien  que  des  lois  proprement  dites;  de  fait,  pour 
ne  parler  que  de  l'hygiène,  de  l'alimentation,  de  l'habillement,  la  plupart 
de  ceux  qui,  en  pays  étranger,  ont  voulu  faire  mieux  que  les  indigènes, 
ont  eu  à  s'en  repentir. 

26,  Remuer.  —  S'il  en  était  ainsi,  toute  réforme,  tout  progrès  seraient  impos- 
sibles et  les  abus  se  perpétueraient.  11  est  des  cas  où  l'expérience  révèle  des 
inconvénients  sérieux  pour  les  intérêts  généraux,  à  s'en  tenir  aux  anciennes 
pratiques.  Quand  le  fait  est  bien  démontré,  il  n'y  a  pas  d'hésitation  à  avoir  : 
ce  qui  existe,  esta  modifier,  sans  avoir  égard  aux  intérêts  de  moindre  impor- 
tance qui  s'en  trouveront  lésés;  car,  comme  le  disait  Caton,  il  n'y  a  aucune 
bonne  loi  qui  soit  avantageuse  à  tout  le  monde.  11  est  incontestable,  en  outre, 
qu'il  y  a  des  circonstances  où  la  nécessité  presse  au  point  qu'il  faut  que  les 
lois  lui  fassent  place.  Mais  de  là  à  tout  bouleverser,  comme  cela  avait  lieu  à 
l'époque  où  écrivait  Montaigne,  et  ainsi  que  cela  existe,  de  parti  pris,  en  ce 
moment  en  France,  à  l'effet  d'y  introduire  le  socialisme  d'État,  il  y  a  un 
abîme. 


NOTES.         LIV.  I,  CIT.  XXH.         VOL.  I,  PAG.  17G.  P.32t 

29,  Tburiens.  —  Cliarpndas.  Diodore  de  Sicile,  XII,  24. 

34,  Ordonnances.  —  Lycurgue  qui,  après  avoir  donné  à  sa  patrie  une  légis- 
lation à  laquelle  longtemps  elle  dut  sa  gloire  et  sa  force,  fit  jurer  à  ses  con- 
citoyens de  n'y  rien  changer  pendant  son  absence,  puis  entreprit  un  long 
voyage  duquel,  de  propos  délibéré,  il  ne  revint  jamais.  Plutarque,  Lycur- 
gue, 22. 

178, 

1,  Façon.  —  Phrynis  ajouta  deux  cordes  à  la  citiiare  qui  n'en  avait  alors 
que  sept.  Aristophane,  dans  sa  comédie  des  Nuées,  lui  reproche  d'avoir  sub- 
stitué à  la  musique  noble  et  mâle  de  ce  temps,  des  aire  mous  et  efféminés. 
'.).  Marseille.  —  Cette  épée,  suivant  Valère  Maxime,  II,  G,  7,  avait  servi  à 
trancher  la  tète  aux  criminels;  elle  existait  depuis  la  fondation  de  la  ville, 
était  rongée  de  rouille  et  presque  hors  de  service. 

7,  Dommageables.—  Que  dirait  aujourd'hui  Montaigne,  en  voyant  l'action 
inconsciente  des  foules  se  substituant  de  plus  en  2)lus  dans  le  domaine  so- 
cial et  politique  à  l'activité  consciente  des  individus?  «  nouuelleté  »,  Tune 
des  caractéristiques  principales  de  l'âge  actuel,  absolument  en  dehors  de 
celles  auxquelles  il  fait  allusion,  et  qui,  nous  conduisant  insensiblement  au 
socialisme,  dépasse  si  fort  ses  prévisions  les  plus  pessimistes. 

8,  Ans.  —  La  réforme,  qui  avait  été  introduite  en  France  vingt-cinq  ou  trente 
ans  auparavant,  comme  le  porte  l'éd.  de  88. 

11,  Nez.  —  S'en  prendre  au  nez;  ne  pouvoir  s'en  prendre  qu'à  soi.  Cette  lo- 
cution viendrait,  dit-on,  d'une  ancienne  coutume  qui  obligeait  celui  qui 
avait  accusé  quelqu'un  à  faux,  à  lui  faire  réparation  publique,  en  se  tenant 
soi-même  le  nez. 

20,  Fons.  —  Charles  I"'  d'Angleterre,  Louis  XVI  et  en  général  la  chute  de 
tous  les  souverains  victimes  de  révolution,  témoignent  de  la  justesse  de  cette 
assertion.  —  Chez  ceux  auxquels  l'ambition  fait  concevoir  l'idée  de  dépos- 
séder un  roi  pour  prendre  sa  place,  c'est  plutôt,  d'après  l'auteur  même  des 
Essais,  l'inverse  qui  se  produit  :  «  Michel  Montaigne  me  dit  un  jour,  rap- 
porte d'Aubigxé  dans  son  Histoire  umverselle,  que  les  prétendants  à  la  cou- 
ronne trouvent,  jusqu'au  marchepied  du  trône,  tous  les  échelons  petits  et 
aisés,  mais  que  le  dernier  ne  peut  se  franchir,  en  raison  de  sa  hauteur.  >• 
■■  Cromwell  lui-même,  ajoute  d'Aubigné,  n'osa  se  parer  du  titre  de  roi.  •• 
Nombreux  en  effet  sont  ceux  qui,  comme  les  maires  du  palais,  à  la  fin  de  la 
race  mérovingienne,  s'étant  emparés  du  pouvoir,  l'ont  exercé  en  demeu- 
rant au  second  plan.  Napoléon,  dans  les  temps  modernes,  a  montré  moins 
d'hésitation. 

22,  Mal.  —■  Allusion  aux  excès  des  catholiques  tombant  dans  la  rébellion,  à 
l'imitation  des  protestants. 

25.  Heureusement.  —  Facilement,  sans  peine. 

29.  Tbucydides.  —  Liv.  III,  52. 

35,  Est.  —  TiTE-LivE,  XXXIV,  54,  dit  cela  à  propos  d'un  règlement  nouveau 
prescrivant  que,  dans  certains  spectacles,  le  peuple  devait  être  séparé  des 
Sénateurs,  qui  jusqu'alors  avaient  été  assis  avec  lui  sans  aucune  distinc- 
tion, et  il  ajoute  :  ■<  Les  hommes  aiment  mieux  qu'on  s'en  tienne  aux  an- 
ciennes pratiques,  si  l'on  en  excepte  celles  où  l'expérience  fait  voir  des 
inconvénients  palpables.  » 

180,  I 

13,  Polluantur.  —  En  301.  Le  peuple  romain  réclamait  que  des  pontifes  et 
des  augures  qui  étaient  à  nommer,  fussent  pris  parmi  les  plébéiens,  ce  à 
quoi  le  Sénat  se  refusait,  ne  voulant  pas  abandonner  le  privilège  de  rem- 
plir les  fonctions  sacerdotales,  les  seules  auxquelles  le  peuple  n'eût  pas 
accès  à  cette  époque.  Tite-Live,  X,  6. 

18,  Propre.  —  Hérodote,  VIII,  36. 

25,  Politique.  —  Il  est  assez  curieux  de  voir  ici  Montaigne  donner  le  pas  aii 
pouvoir  temporel  sur  le  spirituel,  et  mettre  l'autorité  politique  quelle  qu'elle 
soit,  au-dessus  de  l'autorité  ecclésiastique;  il  y  a  là  en  germe  la  doctrine  de 
l'église  gallicane. 

ESSAIS    de   MONTAIGNE.  —   T.   IV.  21 


P.322  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

182. 

l,  Isocrates.  —  Discouts  à  Nicoclès. 

i,  Party.  —Le  passage  qui  suit,  «  car  qui...  sequor  (lig.  2  à  30)»,  ne  figure 
pas  sur  la  majeure  partie  des  exemplaires  de  l'édition  originale  de  1595;  il 
a  été  ajouté  seulement  sur  les  derniers  tirés,  M"'  de  Gournay  s'étant  pro- 
bablement aperçue  de  l'omission  en  cours  de  tirage, 
184, 

13,  Inequalité.  —  Il  est  certain  qu'un  homme  placé  dans  une  circonstance 
critique  se  trouve  dans  le  cas  du  chien  de  La  Fontaine  qui  porte  à  son  cou 
le  dîner  do  son  maître,  qui  après  l'avoir  défendu  de  son  mieux,  trop  faible 
contre  ceux  qui  l'attaquaient,  voulut  au  moins  en  avoir  sa  part  et  fut  le 
premier  à  prendre  un  morceau;  du  reste  c'est  toujours  l'homme  que  peint 
notre  fabuliste,  quand  il  fait  parler  ou  agir  ses  animaux. 
24,  Remuer.  —  Tiberius  Gracchus  proposait  aux  Patriciens  de  se  dessaisir 
en  faveur  des  citoyens  pauvres,  et  moyennant  indemnité,  de  terres  qu'ils 
détenaient  contrairement  à  la  loi;  Octavius  son  collègue  au  tribunat,  usant 
de  son  droit,  mit  opposition  à  cette  proposition,  ce  qui  conduisit  T.  Grac- 
chus à  en  formuler  de  plus  dures,  accentua  la  division  entre  l'oligarchie  et 
le  peuple  et  amena  les  désordres  qui  conduisirent  à  la  guerre  civile  entre 
Marins  et  Sylla  et  à  la  dictature  de  ce  dernier.  —  Caton  le  Jeune,  par  son 
opposition  à  la  loi  qui  rappelait  à  Rome  Pompée  et  son  armée,  et  cela  par 
crainte  del'inlluence  que  celui-ci  en  retirerait,  le  porta  à  s'unir  à  César,  ce 
qui  les  rendit  tout-puissants,  puis  rivaux,  et  engendra  entre  eux  la  guerre 
civile  qui  mit  fin  à  la  République  romaine.  —  De  nos  jours,  en  France,  la 
résistance  du  Pape  Pie  X  à  la  constitution  des  associations  cultuelles  de  la  loi 
de  séparation  de  1905  de  l'Église  et  de  l'État,  que  beaucoup  de  bons  esprits 
et  excellents  catholiques  de  France,  y  compris  nombre  de  membres  de  tous 
rangs  du  clergé,  estimaient  acceptable,  donna  lieu  en  1906  à  une  nouvelle 
loi  qui  enleva  au  clergé  les  immeubles  dont  la  jouissance  lui  avait  été  con- 
servée et  lui  fit  une  situation  beaucoup  plus  précaire,  dont  en  ces  temps 
d'indifférence  religieuse  il  est  plus  difficile  de  prévoir  l'issue. 

28,  Veulent.  —  «  Il  faut  vouloir  ce  qu'on  ne  peut  empêcher  »,  dit  le  proverbe. 

29,  Heures.  —  Après  la  bataille  de  Leuctres,  371,  qui  enleva  à  tout  jamais 
aux  Spartiates  la  prééminence  en  Grèce,  le  nombre  des  fuyards  fut  consi- 
dérable, et  les  lois  de  Lacédémone  les  notaient  d'infamie;  devant  l'inconvé- 
nient d'avoir  un  aussi  grand  nombre  de  citoyens  frappés  d'incapacité,  alors 
qu'on  avait  tant  besoin  de  soldats,  Agésilas  proposa  et  fit  adopter  de  laisser 
dormir  les  lois  ce  jour-là,  et  de  leur  rendre  toute  leur  autorité  le  lendemain. 
PwTARQVE,  Agésilas  et  Apophlh.  des  Lacédémoniens.  C'était  en  fait  l'amnistie 
que  nous  appliquons  si  fréquemment  à  tout  propos  et  souvent  hors  de 
propos,  accommodée  suivant  les  convenances  du  parti  au  pouvoir. 

30,  Calendrier.  —  Alexandre  assiégeait  Tyr,  332.  Le  devin  Aristandre  lui 
annonça  à  la  suite  d'un  sacrifice  que,  d'après  l'examen  des  entrailles  des 
victimes,  la  ville  tomberait,  dans  le  mois,  on  son  pouvoir.  On  était  au  dei'- 
nier  jour  du  mois,  et  les  assistants  se  moquaient  de  cette  impossibilité  fla- 
grante. Alexandre,  ne  voulant  pas  que  la  science  du  devin,  dont  il  usait 
fréquemment  pour  faire  accepter  ses  projets  par  son  armée,  se  trouvât  en 
défaut,  ordonna  que  ce  jour,  qui  était  le  trentième  du  mois,  fût  compté 
comme  seulement  le  vingt-septième,  et  sur  l'heure  il  fit  sonner  les  trom- 
pettes et  donner  l'assaut;  la  ville,  assiégée  depuis  sept  mois,  fut  emportée 
le  jour  même.  Plutarqle,  Alexandre. 

31,  May.  — Cet  autre,  c'est  encore  Alexandre.  Les. Grecs  et  les  Perses  se 
trouvaient  en  présence  sur  les  bords  du  Granique;  on  était  au  mois  de  juin 
(en  grec  Daisios),  et  un  ancien  usage  voulait  que  les  rois  de  Macédoine  n'ou- 
vrissent pas  les  hostilités  ce  mois-là.  Alexandre,  pour  n'être  pas  arrêté  par 
cette  superstition,  déclara  qu'à  l'avenir  ce  mois  serait  appelé  «  second  mai  » 
(en  grec  Artemisios),  et,  passant  outre,  livra  sa  première  grande  bataille  con- 
tre les  Perses,  334.  Plutarque,  Alexandre.  —  Une  superstition  analogue,  qui 
ne  leur  permettait  pas  de  se  mettre  en  marclie  avant  la  pleine  lune,  avait 


■  NOTES.        UV.   I,  CM.  XXrr.         V0[..  I,  PAG.  184.  F.323 

empêclu'  les  Spartiates  de  prendre  part  à  la  bataille  de  Mai-atlion,  490. 
36,  Marine.  —  Vers  la  fin  de  la  guerre  du  Péloponnèse,  431  à  404,  les  alliés 
de  Lacédémone  redoutant  de  voir  le  commandement  de  la  flotte  confédérée, 
alors  exercé  par  Lysandre,  en  lequel  ils  avaient  toute  confiance,  passer  en 
d'autres  mains,  députèrent  à  Sparte,  pour  qu'il  lui  fût  maintenu.  Les  lois 
ne  permettant  pas  de  lui  continuer  une  seconde  année  la  charge  d'ami  rai, 
les  Lacédémoniens,  pour  satisfaire  aux  désirs  de  leurs  alliés,  en  investiront 
un  certain  Aracus,  auquel  Lysandre  fut  adjoint  à  titre  de  lieiitenant,  mais 
ayant  seul  toute  l'autorité.  Plutauque,  Lysandre,  4. 
186, 

:*,  Deffendu.  —  Ces  ambassadeurs,  en  vue  de  rétablir  la  bonne  harmonie 
entre  les  Athéniens  et  les  Mégariens,  poursuivaient  l'annulation  d'un  décret 
i-endu  par  les  premiers  contre  les  seconds;  malgré  l'ingéniosité  de  la  ré- 
plique, ils  n'obtinrent  pas  satisfaction.  Plutauque,  Périclès,  18. 

i,  Plutarque.  —  Parallèle  de  Flaminius  avec  Philopœmen,  vers  la  fin. 

5,  Requérait.  —  C'est  presque  toujours  en  se  retranchant  derrière  la  léga- 
lité, devenue  injuste  ou  oppressive,  et  ne  la  faisant  pas  fléchir  en  temps 
opportun,  que  les  gouvernements  provoquent  les  émeutes,  et  parfois  les  ré- 
volutions. 


CHAPITRE  XXIII. 

7,  Nostres.  —  En  1562;  Fcançois  de  Guise,  surnommé  le  Balafré,  do  la 
maison  de  Lorraine.  V.  N.  I,  2-4  :  Nostres. 

:il,  Propos.  —  Récit  tiré  de  La  Fortune  de  la  Cour,  par  de  Dampmaktin,  cour- 
tisan du  règne  de  Henri  III. 
188, 

8,  Tuer.  —  Les  éd.  ant.  etl'ex.  de  Bordeaux  portent  :  homicider. 

9,  Raison.  —  Voi.tauie  a  mis  en  vers  cette  pensée  dans  sa  tragédie  d'Alzirc, 
et  Guznian,  par  la  bouche  de  qui  il  l'exprime,  est  en  même  situation  que 
le  duc  de  Guise  : 

«  Des  dieux  que  nous  servons,  connais  la  différence. 
Les  tiens  l'ont  commandé  le  meurtre  et  la  vengeance. 
Et  le  mien,  quand  ton  liras  vient  de  m'assassin<'r. 
M'ordonne  de  te  plaindre  el  de  te  pardonner.  » 

11,  Auguste.  —  Ijc,  récit  qui  suit  est  traduit,  presque  mot  pour  mot,  de  Sé- 
NÈyuE,  De  la  Clémence,  I,  9;  il  a  été  reproduit  presque  textuellement  par 
CoRNEuj.E  dans  sa  tragédie  de  Cinna;  le  fait  se  passait  en  l'an  4. 

35,  Caepio.  —  Ces  conspirations  eurent  lion  :  celle  de  Lépide  en  28  (ce  Lépide 
était  fils  du  triumvir  et  neveu  de  Brutus)  ;  celle  de  Murena  (celui-ci  était 
beau-frère  do  Mécènes)  et  de  Cœpio  en  21;  colle  d'Egnatius  on  18.  Eux  et 
leurs  complices  furent  mis  à  mort. 
190, 

20,  Libertin.  — Affranchi,  du  latin  liberlus  ou  libertinus;  l'afiranchi  était 
l'esclave  rendu  à  la  liberté. 

38,  Trahison.  —  Ce  même  duc  dé  Guise  dont  il  est  parlé  au  commencement 
du  chapitre  et  qui,  après  avoir  échappé  à  l'attentat  médité  contre  lui  à 
Rouen,  fut  assassiné  l'année  suivante,  1563,  au  siège  d'Orléans. 

G,  Euenemens.  —  Comme  contre-partie  de  ce  qui  advint  entre  Auguste  et 
Cinna,  et  i)our  confirmer  l'intitulé  que  Montaigne  a  donné  à  ce  chapitre, 
on  peut  en  rapprocher  le  récit  ci-après  qu'on  trouve  dans  LunPKAND,  relatif 
à  l'empereur  Bcranger  I,  roi  d'Italie,  arrière -petit- fils  de  Charlemagne  : 
■>  Dans  l'enceinte  mémo  de  "Vérone,  cette  ville  jusque-là  si  fidèle  à  Béran- 
ger,  des  traîtres  complotèrent  sa  mort.  Leur  chef  était  Flambert,  comblé 
de  bienfaits  par  Béranger,  qui  avait  même  voulu  être  le  parrain  de  son  fils. 


F. 324  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Le  vieil  oniporour  (Il  avait  déjà  36  ans  :1e  règne)  eut  connaissance  de  la 
conspiration  et  voulut  cette  fois  encore  pardonner.  Il  lit  venir  Flambeit, 
lui  rappela  en  termes  pathétiques  tout  ce  qu'il  avait  fait  pour  lui  :  <■  On 
«  m'a  pourtant  dit,  ajouta-t-il,  que  tu  en  voulais  à  ma  vie  :  c'est  impossible! 
•  Tu  me  dois  tout,  dignités  et  richesses;  j'ai  fait  pour  toi  ce  que  je  n'avais 
«  fait  pour  personne,  et  ne  m'en  tiendrai  pas  là,  si  tu  persistes  dans  la  fidé- 
«  lité  que  tu  m'as  jurée.  »  Puis,  lui  présentant  une  coupe  d'or,  pleine  d'un 
vin  précieux  :  »  Bois  à  ma  santé,  lui  dit-il,  et  garde  la  coupe  pour  l'amoui- 
"  de  moi.  »  Cette  magnanimité  fut  sans  effet  sur  l'âme  du  traître,  qui  ne 
profita  de  la  clémence  du  roi  que  pour  hâter  su  mort,  924. 
22,  Part.  —  Dans  le  domaine  de  l'électricité,  pai-  exemple,  cette  fée  des  temps 
modernes,  que  de  découvertes  primordiales  dues  au  hasard,  mais  obser- 
vées par  des  honmies  de  génie!  —C'est  ainsi,  pour  ne  relever  que  les  prin- 
cipales, qu'une  grenouille  dépouillée  pour  en  étudier  la  structure  anato- 
mique,  suspendue  à  un  balcon  par  un  fil  de  cuivre  et  dont  les  cuisses 
éprouvent  un. mouvement  de  contraction  chaque  fois  que  le  balancement 
produit  par  le  vent,  lui  fait  toucher  le  fer  du  balcon,  observée  par  Galvani, 
étudiée  par  Volta,  amène  ce  dernier  à  imaginer  la  pile  électrique.  — 
Œrstedt  démontrant  que  le  courant  d'une  pile  peut  faire  rougir  un  fil  de 
platine,  remarque  que  toutes  les  fois  qu'il  ouvre  ou  ferme  le  circuit,  une 
aiguille  aimanti'e  qui  se  trouve  dans  le  voisinage  est  actionnée;  Arago  lais- 
sant traîner  le  conducteur  d'une  pile  sur  de  la  limaille  de  fer,  s'aperçoit 
qu'elle  s'y  attache,  et  voilà  l'électro-magnétisme  découvert. —  Le  hasard  fait 
constater  par  Rœtgen  que  certains  corps,  considérés  jusqu'ici  comme  ab- 
solument opaques,  se  laissent  dans  certaines  conditions  traverser  par  des 
effluves  électriques  qui  ont  reçu  le  nom  de  rayons  X,  d'où  la  radiographie. 
—  C'est  par  le  dépôt  de  cuivre  qu'il  aperçoit  se  former  sur  le  zinc  d'une 
pile,  que  Jacobi  doit  d'avoir  inventé  la  galvanoplastie.  —  La  constatation 
accidentelle  par  Branly  des  ondes  électriques  sur  une  poudre  métallique, 
dont  elles  agglutinent  passagèrement  les  molécules,  rendant  ainsi  momen- 
tanément continu  un  circuit  dont  les  extrémités  y  aboutissent,  est  le  dé- 
part de  la  télégraphie  sans  fil.  —  Et  il  en  est  ainsi  de  la  genèse  de  la 
plupart  des  découvertes  et  progrès  tant  soit  peu  importants,  dans  toutes  les 
sciences  humaines  à  tous  les  âges. 
34,  Intention.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  invention. 
194, 

1,  Militaires.  —  Cornélius  Nepos  affirme  que  dans  l'attribution  delà  gloire 
militaire,  la  part  de  la  fortune  est  prédominante.  —  Quinte-Curce  dit  nette- 
ment que  les  conquêtes  d'Alexandre  sont  moins  l'ouvrage  de  la  valeur  que 
celui  de  la  fortune.  —  Timoi.kon  avouait  que  ses  grands  succès  étaient 
l'œuvre  des  dieux,  une  grâce  de  la  fortune,  du  bonheur,  bien  plus  que  le 
fait  de  sa  prudence.  —  La  victoire  de  Marengo  (bSOO),  un  instant  perdue, 
fut  due  à  l'arrivée  inopinée  de  Desaix;  la  défaite  de  Waterloo  (1815),  l'une 
des  batailles  les  mieux  ordonnées  de  Napoléon,  au  mauvais  temps  et  à  l'ar- 
rivée imprévue  de  Bulow,  puis  à  celle  de  Blucher;  à  Gravelotte,  1870,  sans 
l'inaction  de  parti  pris  et  injustifiable  de  Bazaine,  les  Allemands  eussent 
éprouvé  un  désastre  irréparable,  qui  dès  le  début  de  la  campagne  eût 
changé  du  tout  au  tout  l'issue  de  la  guen*e. 

10,  Fortune.  —  «  Sylla  désarma  l'envié  en  se  louant  souvent  de  sa  bonne  for- 
tune, et  finalement  en  prenant  le  nom  de  Faustus  (heureux).  Plutarque,  Com- 
ment on  peut  ne  louer  soi-même.  —  D'autres  estiment  qu'en  ajoutant  cette 
épithète  à  son  nom,  Sylla  avait  plutôt  en  vue  d'inspirer  plus  de  hardiesse 
à  ses  partisans  et  de  crainte  à  ses  adversaires,  la  fortune  étant  un  don  de 
la  Providence  dont  les  effets  sont  sans  limites. 

11,  Discours.  —  Sylla,  dit  Plutarque,  a  écrit  dans  ses  commentaires  que  les 
entreprises  qu'il  hasardait  selon  l'occasion,  s'y  lançant  à  corps  perdu  aloi's 
qu'auparavant  ses  résolutions  étaient  contraires,  étaient  celles  qui  lui  i-éus- 
sissaient  le  mieux. 

31,  Humanité.  -—  L'éd.  de  88  porte  :  si  notable  bonté. 


NOTES.         LIV.   l,  CH.  XXIII.         VOL.  I,  PAG.  196.  F.325 

196, 

2,  Autruy.  —  Sénèque,  Epist.  4.  —  C'est  ce  que  prouva  d'une  façon  bien 
énergique  ce  major  prussien  dont  parle  J.-J.  Rousseau,  qui,  bàtonné  à  la 
tête  de  son  bataillon  par  Frédéric-Guillaume  I",  déchargea  l'un  de  ses  pis 
tolets  aux  pieds  du  roi  et  de  l'autre  se  brûla  la  cervelle. 
7,  Amis.  —  Cette  confiance  de  Dion  ne  lui  réussit  pas.  Calippus,  dont  il 
avait  été  l'hôte  à  Athènes  et  qui  l'avait  suivi  en  Sicile,  mit  à  exécution 
contre  lui  les  mauvais  desseins  qu'on  lui  prêtait,  354.  Plutarque,  Apophlh. 

\iy  Présente.  —  Quixte-Curce,  III,  6. 

1 1,  Faire.  —  L'éd.  de  88  aj.  :  Z^a  vaillance  n'est  pas  seulement  à  la  guerre. 

■.'0,  Vn.  —  Henri  III. 

■Jt),  Contraire.  —  Henri  de  Navarre,  plus  tard  Henri  IV. 

'SS,  Espérances.  —  Sjphax,  roi  de  la  Numidie  occidentale,  était  hésitant  en- 
tre l'alliance  de  Rome  et  celle  de  Carthage;  Scipion,  qui  venait  d'expulser 
les  Carthaginois  de  l'Espagne,  au  risque  de  tomber  entre  leurs  mains  ou 
d'être  retenu  prisonnier  par  Syphax,  franchit  la  mer,  avec  deux  vaisseaux 
seulement,  pour  avoir  une  entrevue  avec  lui  et  le  décider  en  sa  faveur,  ce 
à  quoi  il  réussit,  207.  Tite-Live,  XXVIII,  17.  —  On  raconte  un  fait  ana- 
logue du  général  russe  Skobelew  :  En  1881,  après  la  prise  de  Geok-Tépé, 
réduit  de  la  résistance  du  Turkestan,  faisant  une  reconnaissance  avec  une 
sotnia  de  cosaques,  il  tomba  sur  un  parti  de  cavaliers  Turkmènes;  ceux-ci 
protestant  de  leur  soumission,  Skobelew  renvoya  ses  cosaques  et  les  prit 
pour  escorte,  acte  d'audace  et  de  confiance  qui  acheva  ce  qu'avait  com- 
mencé la  force  des  armes.  G"'  Niox. 

[0,  Rebours.  —  Au  rebours  se  rapporte  à  ces  mots:  «  La  prudence  si  tendre 
et  circonspecte...  »;  Montaigne  eût  dû  l'effacer,  lorsque  postérieurement  il 
a  ajouté  le  trait  relatif  à  Scipion  qui  ne  se  trouve  pas  dans  les  éditions 
antérieures.  Ces  intercalations  nombreuses  dans  les  Essais,  sont  une  des 
causes  de  la  difficulté  qu'on  a  parfois  à  comprendre. 
198, 

3,  Luy.  —  Louis  XI,  qui,  en  1468,  se  mit  en  grand  danger,  ainsi  que  le 
rapporte,  en  l'en  blâmant,  Phh.ippe  de  Comines,  son  historien, 'dans  sqs  Mé- 
moires, II,  5  à  7.  Lors  de  son  entrevue  avec  Charles  le  Téméraire,  duc  de 
Bourgogne,  à  Péronne,  place  appartenant  à  ce  dernier,  la  ville  de  Liège 
sétant  révoltée  conti-e  le  duc,  à  l'instigation  du  roi  qui  ne  pensait  pas  que 
l'événement  fût  si  prompt,  Louis  XI.  retenu  prisonnier  par  son  vassal 
irrité,  courut  risque  de  la  vie,  et,  pour  sortir  de  ce  mauvais  pas,  dut  subir 
de  très  humiliantes  conditions,  grâce  auxquelles,  sur  le  moment,  il  réussit 
à  tromper  son  adversaire  par  la  confiance  qu'il  lui  témoigna,  et  en  arriva 
à  le  détacher  de  ses  ennemis  comme  c'était  son  dessein.  Une  fois  hoi-s  de 
danger,  en  fin  renard  qu'il  était,  il  éluda  pou  à  peu  toutes  les  concessions 
qui  lui  avaient  été  arrachées. 

1,  Cxsar.  —  II  est  souvent  question  de  César  dans  les  Essais,  c'est  pourquoi 
nous  ri'sumons  ici  la  partie  la  plus  saillante  de  la  vie  de  ce  grand  capi- 
taine. —  Après  quelques  succès  en  Espagne,  il  conquiert  la  Gaule  (58 
à  49)  et  pénètre  jusque  dans  la  Bretagne  (auj.  l'Angleterre).  Arrivé  au 
terme  de  son  commandement,.  Pompée,  jusqu'alors  son  allié,  jaloux  de  ses 
succès,  empêche  qu'il  lui  soit  continué.  Irrité  de  ce  qu'il  considère  comme 
une  injustice.  César  passe  les  Alpes  avec  son  armée,  franchit  avec  elle  le 
Rubicon,  ce  que  les  lois  interdisaient,  et  marche  sur  Rome,  d'où  Pompée 
s'enfuit  avec  le  Sénat,  49.  César  entre  à  Rome,  se  fait  décerner  la  dicta- 
ture, bat  en  Italie  et  en  Espagne  les  lieutenants  de  Pompée,  l'atteint  lui- 
même  en  .Macédoine  et  remporte  sur  lui  une  bataille  décisive  dans  les 
plaines  de  Pharsale,  48.  Pompée  s'enfuit  en  Egypte  où  il  est  assassiné.  Cé- 
sar y  arrive  après  lui;  de  là  il  va  en  Asie  où,  en  trois  jours,  il  détrône  le  roi 
du  Pont  qui  s'était  révolté;  passe  en  Afrique,  }' détruit  à  Thapsus  l'armée 
républicaine  commandée  par  Métellus,  Scipion  et  Caton,  46;  puis  en  Espa- 
gne où,  battant  à  Munda,  45,  le  fils  de  Pompée,  il  achève  d'anéantir  le 
parti.  Revenu  à  Rome,  il  se  fait  décerner  la  dictature  à  vie,  et,  maître  du 


^.326  ESSAIS  IlE  MONTAIGNE. 

pouvoir  absolu,  n'en  use  que  i)OMr  le  bien.  Accusé  par  ses  ennemis  d'as- 
pirer à  la  royauté,  il  est- assassiné  en  plein  Sénat,  44.  —  Grand  guerrier 
et  grand  homme  d'État,  César  était  aussi  un  excellent  orateur  et  un  écri- 
vain élégant;  de  ses  écrits,  il  ne  nous  reste  que  ses  Commentaires  sur  la 
guerre  des  Gaules  et  les  guerres  civiles,  simples  souvonir's  d'un  soldat,  qui, 
par  le  mouvement,  la  netteté,  la  concision,  sont  un  modèle  du  genre  des 
mémoires  historiques. 
10.  Metuens.  —  En  48,  à  Plaisance.  Les  soldats  accusaient  leurs  chefs  de  traî- 
ner la  guen-e  eu  longueur;  César,  alors  à  Marseille,  revenant  d'Espagne, 
accoui'ut  en  hâte.  Ayant  apaisé  la  sédition,  il  livra  au  supplice  douze  des 
plus  mutins  tirés  au  sort  sur  120  des  plus  coupables;  un  d  eux  prouva  son 
innocence,  le  centurion  qui  l'avait  dénoncé  fut  exécuté  place.  Dans 
ses  Commentaires,  César  ne  mentionne  pas  cette  nmtinerie. 
20,  Scrupule.  —  ■•  De  toute  marque  de  crainte  et  de  défiance.  » 
25,  Tué.  —  En  1548,  à  Bordeaux,  lors  d'un  soulèvement  occasionné  pas  l'im- 
pôt de  la  gabelle  (impôt  sur  le  sel,  dont  chacun  était  tenu  d'acheter  une 
quantité  déterminée),  imposé  à  la  ville  qui,  jusqu'alors,  n'y  avait  pas  été 
soumise.  Tristan  de  Monnaisis,  qui  en  était  gouverneur  et  dont  il  est  ques- 
tion ici,  périt  dans  cette  émeute. 

27,  Soubsmission.  —  88  port.  :  d'humilité. 

28,  Suyuant  qu'en  guidant.  —  Var.  de  88  :  flatlanl  que  commandant . 

30,  Vne  gracieuse...  confiance.  —  Var.  de  88  :  la  fermeté,  l'aulhorilé  et  vne 
contenance  de  paroles. 

34.  Bienséance.  —  Autrement  dit  :  «  11.  n'y  a  l'ien  qu'on  ne  puisse  moins 
attendre  d'une  populace  surexcitée  que  l'humanité  et  la  douceur  :  elle  est 
bien  plutôt  susceptible  de  respect  et  de  crainte  »  ;  ce  qui  est  de  toute  vérité, 
les  foules  étant  aussi  lâches  que  cruelles. 

38,  Aualer  toute.  —  Soutenir  jusqu'au  bout  sa  première  résolution. 

40,  Démise.  —  Soumise,  du  latin  demissus. 

40,  De  saigner...  sur  soy.  —  Var.  de  88  :  de  se  remplir  l'âme  et  le  front  de  re- 
pentance,  n'ayant  plus  autre  soing  que  de  sa  conseruation;  si  qu'abandon- 
nant son  premier  rolle  de  régler  et  de  guider,  et  cédant  plustot  que  s'oppo- 
sant,  il  attira  cet  orage  sur  soy,  employant  tous  les  moyens  de  le  fuir  et  es- 
cnaper. 
200, 

1,  Conniller.  —  Esquiver,  se  dérober.  Ce  terme,  jadis  d'usage  courant  dans 
le  S.-O.  de  la  France,  a  tendance  à  disparaître;  vient  de  connil,  nom  du 
lapereau,  dérivé  du  latin.  Le  connil,  peu  enclin  à  la  bravoure,  va,  à  la 
moindre  alerte,  se  cachant  dans  les  haies  ou.  dans  ses  terriers  appelés  égale- 
ment de  ce  nom,  connilières. 

2,  Soy.  —  Le  triomphe  des  révoltés  fut  de  courte  durée;  le  connétable  de 
Montmorency,  dirigé  sur  Bordeaux,  les  contraignit  à  rentrer  dans  le  de- 
voir; plusieurs  exécutions  suivirent  et  la  ville  se  vit  enlever  nombre  de  ses 
privilèges.  —  Parlementer  avec  l'émeute,  et  par  surQroît  le  faire  en  per- 
sonne, ne  réussit  jamais.  Le  fait  du  général  de  Bréa,  à  Paris,  en  juin  1848, 
assassiné  pareillement  par  les  insurgés,  en  est  encore  une  preuve,  outre 
bien  d'autres;  seule  une  attitude  résolue  en  impose  aux  foules  en  délire, 
tout  le  reste  est  pris  pour  de  la  faiblesse.  Faire  tirer  à  blanc,  ou  tirer  en 
l'air  notamment,  ne  fait  que  les  surexciter;  ce  n'est  qu'en  inspirant  de  la 
crainte  qu'on  empêche  le  désordre  de  prendre  de  l'extension,  qu'on  en 
triomphe,  en  prévient  le  retour  et  évite  de  plus  grands  malheurs;  et  cela,  sans 
que  le  plus  souvent  on  soit  contraint  d'en  venir  aux  pii'cs  extrémités  de- 
vant lesquelles  toutefois  il  ne  faut  pas  reculer  mais  qu'il  est  presque  tou- 
jours possible  d'atténuer  en  prenant  quelques  précautions.  Les  difficultés 
ne  proviennent  guère,  en  pareil  cas,  que  de  ce  que  les  émeutiers  espèrent 
que  la  loi  sur  les  attroupements,  demeurée  si  fréquemment  à  l'état  de  lettre 
morte,  le  sera  une  fois  de  plus -en  la  circonstance. 

2,  Montre  générale.  —  Une  grande  revue.  Le  fait  se  passait  en  1583.  Le  com- 
mandant du  Château  Trompette  à  Bordeaux,  Vaillac,  avait  promis  au  duc 


NOTES.        UV.  I,  eu.  XXIII.         VOL.  I,  PAG.  200.  F.327 

de  Guise  de  le  lui  livrer;  le  maréchal  de  Matignon,  lieutenant  du  roi  en 
Guyenne,  déjoua  ce  projet,  en  contraignant  Vaillac  à  cesser  ses  fonctions. 
Mais  celui-ci,  demeuré  à  Bordeaux,  continua  ses  menées;  et,  le  maréchal 
s'étant  absenté,  il  crut  le  moment  favorable  pour  y  faire  se  prononcer  un 
mouvement  en  faveur  de  la  Ligue.  C'est  à  ce  propos  que  Montaigne,  qui 
était  alors  maire  do,  la  ville,  fit  faire,  pour  tenir  les  suspects  en  crainte,  cette 
revue  qui  rassura  la  population. 

14,  Poudre.  —  Salves  d'artillerie  ou  de  mousqueterie  tirées  en  manière 
d'honneurs  militaires  dans  des  circonstances  particulières,  et  notamment 
lors  d'une  revue  passée  par  un  haut  personnage,  à  son  arrivée  devant  les 
troupes,  ainsi  que  cela  se  pratique  encore. 

16,  Confidence.  —  Confiance,  ainsi  que  portent  plusieurs  éditions  postérieures. 
C'est  là  l'attitude  constante  dos  hommes  politiques  de  tous  les  partis  au 
pouvoir,  vis-à-vis  de  l'armée  :  «  Vous  êtes  admirables  de  dévouement,  lui 
disent-ils  sur  tous  les  tons  et  à  tous  propos,  vous  avez  notre  sympathie, 
notre  confiance,  et  toute  notre  bienveillance  vous  est  acquise.  ••  La  pre- 
mière de  ces  assertions  est  constamment  vraie,  la  seconde  l'est  beaucoui) 
plus  rarement,  quelle  que  soit  l'emphase  de  l'expression;  seul  le  peuple, 
quand  il  est  libre  de  toutes  suggestions,  l'acclame  toujours  sans  restriction 
mentale,  parce  qu'elle  émane  de  lui  et  le  personnifie  en  ce  qu'il  y  a  de 
plus  généreux  en  lui. 

18,  Clémence.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  douceur'. 

33,  Escus.  —  Plutarque,  Apophth. 
202, 

5,  Monopoles.  —  Conjurations,  conspirations.  —  Rabelais,  I,  17,  s'est  servi 
de  ce  mot  dans  le  mémo  sens  :  «  Plût  à  Dieu,  dit-il  en  parlant  des  mutine- 
ries du  peuple  de  Paris,  que  ie  susse  l'officine  en  laquelle  sont  formés  ces 
schismes  et  monopoles  pour  les  mettre  en  évidence  es  confrairies  de  ma 
paroisse.  » 

8,  Domination.  —Gauthier  de  Brienne,  duc  d'Athènes,  descendant  d'anciens 
croisés  auxquels  avait  été  donné  ce  duché  qui,  en  1312,  fut  enlevé  à  son 
pore  au  profit  des  rois  de  Sicile.  Gauthier,  ajant  pris  du  service  dans  l'ar- 
mée de  Florence  et  s'étant  fait  remarquer  contre  les  Pisans,  avait  acquis 
une  grande  autorité;  profitant  de  la  lutte  des  factions  qui  se  disputaient  le 
pouvoir,  il  s'attribua  lui-môme  la  seigneurie  à  vie  (1342);  mais  son  despo- 
tisme et  ses  cruautés  soulevèrent  la  population  contre  lui,  et,  l'année  sui- 
vante, il  dut  se  dérober,  par  la  fuite,  au  mécontentement  général. 

9,  Autrefois.  —  Appiex,  liv.  IV  des  Guerres  civiles. 
22,  Gaillard.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  hardy. 


CHAPITRE  XXIV. 

Ce  chapitre  est  numéroté  XXV  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

28,  Pédantisme.  —  Ce  chapitre  contient  des  observations  très  judicieuses  sur 
la  mauvaise  manière  d'enseigner  et  d'élever  les  enfants,  et  forme  avec  le 
suivant  un  traité  presque  complet  d'éducation,  très  supérieur  à  VÉmile  de 
J.-J.  Rousseau,  qui  en  a  tiré  ce  qu'il  a  dit  de  mieux  sur  la  matière.  —  A 
proprement  parler,  le  pédantisme  consiste  dans  une  haute  opinion  de  son 
savoir  et  un  ridicule  étalage  de  science  empruntée.  Naioeon. 

30.  Italiennes.  —  En  fait  de  comédies  de  ce  genre,  on  peut  citer  :  El  Pé- 
dante, de  F.  Balo,  1538;  mais  comme  le  dit  Montaigne,  on  trouve  des  rôles 
de  pédant  dans  une  foule  de  pièces  du  théâtre  italien  du  xvi»  siècle. 

30,  Pédante.  —  N'est  pas  le  féminin  de  pédant,  mais  le  nom  italien,  qui  est 
à  prononcer  :  Pédante,  avec  un  accent  l'e  final. 

30,  Badin.  —  Aujourd'hui  adjectif;  était  un  personnage  ridicule  de  l'ancienne 
farce  française,  tels  actuellement  Jocrisse,  Polichinelle,  etc. 


F.328  KSSAIS  DE  MONTAIGNE. 

204. 

7,  Dit.  —  Plutarque,  Cicéron,  2.  —  Longtemps  à  Rome,  les  pédagogues  fu- 
rent pour  la  plupart  des  Grecs. 

11.  Sapientes.  —  C'est  une  sentence  que  Rabelais,  Gargantua,  I,  39,  met  dans 
la  bouche  de  Frère  Jean,  fidèle  portrait  des  moines  de  ce  temps  et  qui 
s'excuse  de  la  sorte  de  son  ignorance,  ce  que  Reonier,  Sat.  III,  a  traduit  par 
ce  vers  :  «  Pardieu,  les  plus  grands  clercs  ne  sont  pas  les  plus  fins  ».  —  Il 
y  a  dans  ce  chapitre  quelques  autres  imitations  de  Rabelais.  Le  Clerc. 

17,  Princesses.  —  Probablement  Marguerite  de  Valois,  fille  de  Henri  11, 
dont  Montaigne  parle  souvent  et  qui  n'étant  pas  encore  mariée  était,  de 
par  son  rang,  la  première  des  princesses  de  France. 

ol,  Temps.  —  Allusion  aux  comédies  d'Aristophane,  dans  lesquelles  Socrat(> 
notamment  était  cruellement  ridiculisé.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  wais  au  re- 
bours des  nostres. 

1)3,  Prests.  —  Est  dit  ici  par  ironie,  il  faut  entendre  :  «  Ils  en  sont  bien  loin.  » 

31,  C'est.  —  Cette  façon  de  parler  était  encore  d'usage  du  temjjs  de  Con- 
NEu,LE,  où,  dans  Horace,  il  est  dit  :  «  Le  roi  ne  sait  que  c'est  d'honorer  a 
demi.  »  Aujourd'hui  nous  disons  :  «  ce  que  c'est  ». 
206, 

10,  Insolents.  —  Tout  ce  passage  depuis  :  «  Et  quant  aux  philosophes...  »  est 
traduit  du  Théélèle  de  Platon.  Le  Clerc. 

27,  louet.  —  Archimède  qui,  par  ses  inventions,  tint  en  échec,  pendant 
trois  ans,  214  à  212,  les  Romains  assiégeant  Syracuse,  Plutarque,  Marcel- 
lus,  6. 

35,  Armées.  —  Diogène  Laerce,  VI,  92. 

36,  Frère.  —  Il  faut  entendre  ici,  non  la  royauté  proprement  dite,  mais  une 
charge  particulière  qui  en  portait  le  nom  à  Éphèse,  comme  chez  les  Athé- 
niens, et  les  Romains  après  qu'ils  eurent  renoncé  au  gouvernement  monar- 
chique. Payen. 

38,  Compagnie.  —  Diogène  Laerce,  IX,  6. 
208, 

2,  Offrirent.  —  Diogène  Laerce,  VIII,  63.  —  Les  éd.  ant.  continuent  :  Vn 
d'entre  eux,  Thaïes. 

6,  Trafique.  —  II  prit  à  ferme  tous  les  pressoirs  à  huile  autour  de  Milet,  dans 
la  prévision  d'une  bonne  récolte  et  alors  que  les  oliviers  étaient  encore  en 
fleurs;  la  récolte  fut  excellente,  et,  de  sa  spéculation,  Thaïes  retira  un  bé- 
néfice considérable.  Diogène  Laerce,  I,  26. 

16,  Vienne.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  à  nos  maistres  d'école. 

17,  Sciences.  —  Ce  mot  «  sciences  »,  qui  se  retrouve  fréquemment  dans 
Montaigne,  signifie  chez  lui  les  connaissances  philosophiques  et  littéraires, 
ou  lettres,  dont  on  s'occupait  à  peu  près  exclusivement  à  son  époque,  et 
nullement  les  sciences  dans  la  signification  actuelle  de  ce  mot,  dont  le 
domaine  est  devenu  si  vaste,  par  suite  des  découvertes  et  de  leurs  appli- 
cations faites  depuis  un  siècle  et  demi.  La  distinction  entre  lettres  et 
sciences,  si  nette  aujourd'hui,  n'existait  pas  alors;  les  lettres  étaient  tout,  les 
sciences  à  peu  près  rien. 

23,  Homme.  —  Passage  imité  de  Sénèque,  Episl.  88. 

29,  Plus  sçauant.  —  «  Une  tète  bien   faite  vaut  mieux  qu'une  tète  bien 
pleine.  » 
210, 

1,  Vent.  —  «  Nous  ne  pensons  pas;  mais  écrivons  de  point  en  point  ce  que 
les  autres  ont  pensé.  »  Voltaire. 
13,  letter.  —  Jusqu'au  viii«  siècle,  on  faisait  souvent  usage  dé  jects  ou  je- 
tons pour  compter;  et  même  jecter  ou  jetter  se  disait  pour  calculer. 

18,  Cbalemie.  —  C'est  à  proprement  parler  une  flûte  de  pâtre,  faite  de  paille, 
de  chalumeau  de  blé;  il  signifie  ici  une  de  ces  chansons  chantées  par  les 
pâtres  au  son  du  chalumeau. 

19,  âu'em.  —  Montaigne  traduit  ce  proverbe,  après  l'avoir  cité. 

20,  Sommes  là.  —  Un  proverbe  cité  dans  le  dictionnaire  de  Leroux,  disait 


NOTES.         LIV.  1,  Cil.  XXIV.         VOL.  1,  PAG.  210  F. 329 

pareillement  :  «  Il  n'y  a  qu'à  siffler  et  remuer  les  dofgts  »,  pour  exprimer 
d'une  chose  qu'elle  est  facile  à  faire. 
23.  Perroquet.  —  Lord  Chesterfield  (1694  à  1779)  avait  bien  senti  le  vice  de 
cette  instruction  que  lui-même  avait  reçue  à  l'université  de  Cambridge,  et 
qui  à  ce  moment  n'avait  fait  do  lui  qu'un  petit  pédant,  vain  et  superficiel; 
et  dans  ses  Lettres  à  son  (ils,  il  en  dépeignait  ainsi  le  résultat  :  «  Quand 
je  voulais  bien  parler,  je  copiais  Horace;  quand  je  voulais  faire  le  plaisant, 
Martial;  et  pour  paraître  homme  du  monde,  je  copiais  Ovide.  » 
31.  Gens.  —  Cet  original  s'appelait  Calvitius  Sabinus  et  vivait  au  temps  de 
Sénèque  qui  rapporte  le  fait,  Episl.  27.  —  Chacun  des  esclaves  en  question 
lui  avait  coûté  400.000  sesterces,  soit  80.000  fr.  (il  s'agit  ici  du  petit  ses- 
terce qui   valait  0  fr.  20,  tandis  que  la  valeur  du  grand  sesterce  était  de; 
0  fr.  80),  il  on  avait  neuf;  il  ne  les  avait  pas  trouvés  tout  faits,  il  lui  avait 
fallu  les  commander.  —  Ce  prix  de  400.000  sesterces  pour  un  esclave  a 
parfois  été  dépassé;   I'i.ine,   VII,  39,  cite  Daphnus,  grammairien,  qui  fut 
payé  700.000  sesterces  (140.000  fr.),  et  Pœson,  eunuque  de  Sylla,  qui  attei- 
gnit 50.000.000  de  sesterces  (10.000.000  de  fi*.)',  mais,  pour  ce  dernier,  la 
passion  s'en  mêlait. 
37,  Nous.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  de  mesmes. 
212, 

5,  Soy.  —  Comparaison  tirée  do  Plutarqle,  Comment  il  faut  ouïr,  à  la  lin. 

8,  Capitaine.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  siadiiisé  sans  l'essay  et. 

9,  Mode.  —  Quand  il  fut  envoyé  pour  combattre  Mithridato,  73,  dit  CicÉ- 
Kox,  Acad.,  II,  I,  Lucullus  passa  tout  le  temps  do  la  route  et  de  la  traver- 
sée, soit  à  s'enquérir  auprès  de  gens  experts  en  l'art  do  la  guerre,  soit  à 
lire  les  comptes  rendus  do  faits  y  afférents;  si  bien  qu'il  arriva  en  Asie,  gé- 
néral consommé,  que  la  victoire  couronna,  alors  qu'il  était  parti  de  Rome 
ignorant  les  premiers  rudiments  de  cet  art.  —  L'empereur  Julien,  alors 
César,  se  révéla  lui  aussi,  à  son  arrivée  on  Gaule  (3.Ô5J,  tout  d'un  coup 
grand  capitaine.  —  L'eunuque  Narsès  (552)  se  montra  de  même  habile  gé- 
néral, sans  jamais  avoir  été  militaire  auparavant.  —  II  est  certain  que  le 
génie  de  la  guerre  et  la  science  militaire  sont  distincts  l'un  de  l'autre.  Le 
génie  est  inné,  se  rencontre  rarement,  et  pour  se  produire  a  besoin  que 
les  événements  s'y  prêtent;  en  dehors  d'une  disposition  d'esprit  toute  spé- 
ciale, il  comjjorto  un  ensemble  de  facultés  portées  à  un  haut  degi'é  :  du  ca- 
ractère, un  grand  bon  sens,  de  la  volonté,  de  l'initiative,  de  la  décision,  de 
l'audace,  do  la  prudence,  du  sang-froid,  du  coup  d'œil,  une  grande  acti- 
vité physique,  une  santé  robuste,  le  mépris  de  la  vie  humaine,  une  con- 
naissance approfondie  dos  hommes  et  des  choses.  La  science  en  est  le  com- 
plément, mais  elle,  elle  s'acquiert  voire  même  assez  facilement,  et  celui 
chez  lequel  le  génie  existe  a  tôt  fait  de  se  l'assimiler.  A  défaut  de  génie, 
mais  unie  à  l'expérience,  ce  qui  est  le  cas  le  plus  ordinaire,  la  science  n'est 
pas  sans  conduire  à  des  résultats  souvent  considérables  ;  seulement  rare- 
ment alors  elle  en  arrive  à  tirer  aussi  complètement  parti  que  le  génie  des 
circonstances  imprévues  si  fréquentes  à  la  guerre  et  à  triompher  quand 
même  dans  les  cas  difficiles. 

17,  loçé;.  —  Dans  les  éditions  antérieures,  Montaigne  faisait  suivre  cette  ci- 
tation de  sa  traduction  que  nous  donnons  d'après  lui  :  Je  haï,  dict-il,  le 
sage  qui  n'est  pas  sage  pour  soy-mesmes. 

19,  Quiret.  —  Les  mots  :  «  Ex  quo  Ennius  »  qui,  dans  les  Essais,  sont  détachés 
de  la  citation  qui  les  suit,  en  font  partie  dans  le  texte  do  Cicéron. 
■  23.  Dionysius.  —  Los  sages  réflexions  attribuées  ici  à  un  Donys  quelconque, 
sont  de  Diogène  le  Cynique,  comme  on  peut  le  voir  dans  la  vie  de  ce  phi- 
losophe écrite  par  Diogène  Laërce,  VI. 

28,  Cher.  —  J'aimerais  autant. 

35,  Grossir.  —  Volt.\ire,  dans  le  conte  de  la  Bégueule,  dit  pareillement  en 
parlant  de  l'orgueil  ; 

«  Boufû,  mais  sec,  ennemi  des  ébats, 
Il  renfle  l'àme  et  ne  la  nourrit  pas.  » 


F.  330  ESSAIS  DE  MONTAIG>E. 

11,  Peine.  —  Platon,  Prolagoras.  —  Parmi  ces  disciples,  Protagoras  comp- 
tait Evathlus,  qui  s'était  engagé  à  lui  solder  le  prix  de  ses  leçons,  loi's- 
qu'il  aurait  gagné  sa  première  cause;  le  moment  venu,  il  déclara  n'avoir 
rien  à  payer,  et  sur  la  menace  d'être  cité  en  justice,  dit  à  son  maître  . 
•  Allons,  si  les  juges  se  prononcent  pour  moi,  d'après  la  sentence,  je  ne 
devrai  rien;  si  c'est  toi  qui  l'emportes,  ayant  perdu,  je  ne  devrai  pas  da- 
vantage, du  fait  même  du  pacte  que  nous  avons  conclu.  »  A  quoi  le  maître 
répondit  :  •<  S'ils  se  prononcent  pour  moi.  tu  devras  me  payer  selon  la 
sentence;  si  tu  l'emportes,  ayant  gagné,  tu  le  devras  pareillement,  aux 
termes  mêmes  de  notre  convention.  »  Maître  et  disciple  étaient  aussi  retors 
et  fripons  l'un  que  l'autre.  V.  N.  III,  344  :  Protagoras. 

41,  Cbouez.  —  Frustrés,  déchus  de  leurs  espérances.  —  De  chouer.  qui  n'est 
plus  d'usage,  est  venu  échouer. 
214. 

16,  Galimatias.  —  IMélange  confus  de  paroles  et  d'idées  incohérentes  que  l'on 
ne  saurait  comprendre,  quoiqu'elles  semblent  signifier  quelque  chose.  — 
Vient  des  mots  latins  galli  et  Mathias  que  prononça,  s'embrouillant,  au  lieu 
de  dire  gallus  Malhise,  l'avocat  d'une  cause  où  il  s'agissait  d'un  coq  ap- 
partenant à  un  Mathias. 

2(t,  Robbe.  —  Xicole  a  dit  que  la  pédanterie  est  un  vice  de  l'esprit  et  non  de 
la  robe.  —  On  naît  pédant,  même  sur  les  marches  d'un  trône.  Joachim  di 
Bellay,  dans  un  sonnet,  dit  que  pédant  ou  roi  se  touchent  de  près,  que 
l'un  et  l'autre  régentent  et  ont  état  et  sujets,  et  termine  en  disant  de  Denys 
le  Jeune  : 

•  Et  c'est  pourquoi,  jadis,  le  roi  syracusain 
Voulut  être  pédant,  ne  pouvant  être  prince.  » 

26,  Creux.  —  C'est  le  cas  des  intellectuels  de  nos  jours  chez  lesquels,  comme 
chez  le  pédant  de  Montaigne  que  La  Fontaine  a  aussi  connu  et.stigmatisé, 
l'instruction  et  le  jugement  vont  rarement  de  pair,  et  qui,  mécontents  de 
la  société  où  la  place  qu'ils  occupent,  pour  si  honorable  qu'elle  soit  bien 
que  modeste,  ne  leur  semble  pas  en  rapport  avec  le  mérite  qu'ils  s'attri- 
buent; et  partant  de  là,  ils  se  font  en  France,  à  la  remorque  des  socialistes, 
les  apôtres  de  '  l'internationalisme  et  de  l'antimilitarisme  et  s'appliquent  à 
renverser  l'état  social  actuel,  en  sapant  chez  la  jeunesse  confiée  à  leurs 
soins  la  religion  et  l'armée  qui  en  constituent  les  bases  essentielles,  s'y 
adonnant  avec  une  ardeur  qui  n'a  d'égale  que  celle  que  leurs  congénères  de 
l'Allemagne  ont,  en  sens  inverse,  apportée  à  son  relèvement  après  léna  et 
Wagram.  Ceux-ci  ont  abouti  aux  succès  de  1815  et  à  ceux  plus  éclatants 
encore  de  1870-71;  à  quels  nouveaux  désastres  ceux-là,  qui  ont  déjà  à  leur 
actif  la  Commune  et,  ce  qui  nous  a  fait  plus  de  mal  encore,  les  troubles 
démoralisateurs  dont  l'afTaire  Dreyfus  a  été  le  prétexte,  ne  nous  exposent- 
ils  pas  dans  leur  aveuglement  et  malgré  leur  infime  minorité,  secondés 
qu'ils  sont,  il  faut  bien  le  reconnaître,  par  l'inertie  non  moins  regrettable 
de  tous  les  autres  que  le  patriotisme  et  les  leçons  de  l'expérience  devraient 
rendre  plus  clairvoyants  ! 

32.  Courtisane.  —  A  la  manière  des  courtisans,  des  gens  qui  fréquentent  la 
cour. 

33,  Trauers.  —  C'est  à  peu  près  la  même  idée  qu'exprime  Molikre  dans  ce 
passage  des  Femmes  savantes  : 

•  Le  moindre  solécisme  en  parlant  vous  irrite. 
Mais  vous  en  faites,  vous,  d'étranges  en  conduite.  • 

36,  De  son.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  gibier  et  de  son. 
216, 

5,  Titan.  —  Prométhée,  l'un  des  Titans  (branche  collatérale  de  celle  dont 
était  issu  Jupiter,  avec  lequel  les  Titans,  étant  entrés  en  lutte,  furent  frap- 
pés de  la  foudre  et  précipités  du  ciel).  Ayant  formé  l'homme  du  limon  de 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  XXIV.         VOL.  I,  PAG.  216.  F.331 

la  terre,  et  l'ayant  animé  avec  le  feu  du  ciel  dérobé  à  cet  effet,  Pi-oniéthée 
fut  en  punition,  par  ordre  de  Jupiter,  lié  sur  le  Caucase,  où  continuelle- 
ment un  vautour  lui  déchirait  le  foie  sans  cesse  renaissant,  supplice  dont 
le  délivra  Hercule.  Mythologie. 
8,  Mieux.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  qu'elle  nous  amende,  ou  elle  est  vaine  cl 

inutile. 
0.  Officiers.  —  On  désignait  sous  ce  nom,  d'une  façon  générale,  tous  ceux 
qui  étaient  pourvus  de  charges  publiques  ou  offices;  il  est  question  ici  des 
officiers  de  justice  :  conseillers  au  parlement,  au  Chàtelet,  etc. 
19,  Est.  —  Traduction  de  la  citation  qui  précède.  —  Molièke,  dans  les  Fem- 
mes savantes,  exprime  la  même  idée,  mais  en  l'accentuant  :  ■•  Un  sot  savant 
est  sot  plus  qu'un  sot  ignorant.  »  —  «  On  est  quelquefois  sot  avec  de 
l'esprit,  a  dit  un  autre,  jamais  avec  du  jugement.  •  • 

28,  Femmes.  —  «  La  sciei\ce  des  femmes,  comme  celle  des  hommes,  doit  se 
borner  à  s'instruire  par  rapport  à  leurs  fonctions;  la  différence  de  leurs 
emplois  doit  faire  celle  de  leurs  études  »  (Fénelon). 

Les  temps  ont  bien  changé  ;  et  au  nom  de  l'égalité,  la  femme  moderne 
réclame  aujourd'hui  même  instruction  que  l'homme  et  l'admission  à  des 
fonctions  que  jusqu'ici  il  était  seul  à  remplir.  C'est  là  quand  même  une 
erreur;  la  mentalité  de  l'homme  et  celle  de  la  femme  ne  sont  pas  iden- 
tiques, même  lorsque  celle-ci  est  très  instruite.  Ils  peuvent  avoir  des  inté- 
rêts communs,  des  sentiments  communs,  ils  ne  sont  pas  impressionnés  de 
la  même  façon  par  les  mêmes  choses,  n'ont  pas  des  enchaînements  de  pen- 
sées semblables,  leur  logique  diffère.  En  dehors  de  cette  raison,  déjà  suf- 
(isante  à  elle  seule,  les  malaises  fréquents  de  la  femme,  les  troubles  de 
santé  qu'elle  éprouve  périodiquement,  les  devoirs  de  la  maternité,  les  soins 
qui  lui  incombent  dans  l'intérieur  de  la  famille,  dont  à  la  v.érité  beaucoup 
s'affranchissent,  doivent  de  par  la  nature  elle-même  les  faire  exclure  de 
tou^s  les  occupations  physiques  ou  intellectuelles  susceptibles  de  les  ac- 
caparer tout  entières  à  un  moment  donné,  telles  les  professions  d'avocat, 
de  médecin,  etc.  —  Quant  à  la  revendication  de  leurs  droits  politiques,  elle 
est  plus  justifiée;  du  reste  ce  n'est  pas  chose  nouvelle  et,  dit-on,  en  1793  Con- 
dorcet  avait  été  chargé  par  la  Convtmtion  d'élaborer  un  projet  dé  consti- 
tution admettant  le  vote  des  femmes.  Il  ne  serait  cependant  pas  sans  incon- 
vénient, et  ce  pour  les  mêmes  causes,  qu'elles  exerçassent  elles-mêmes 
ces  droits;  et  il  semble  qu'il  en  serait  suffisamment  tenu  compte,  en  at- 
tribuant dans  ces  questions  double  vote  au  mari  ou  au  père  de  famille. 

Sur  un  autre  terrain,  leurs  revendications  sont  plus  sérieuses  et  méritent 
considération.  Elles  demandent  : 

Que  la  femme  mariée  demeure  propriétaire  de  son  salaire  et  que  l'éva- 
luation du  travail  ménager  lui  donne  un  droit  de  pourcentage  sur  le  sa- 
laire du  mari.  L'homme  se  fait  si  souvent  la  part  du  lion  et  si  souvent  né- 
glige de  pourvoir  aux  besoins  de  la  famille,  qu'il  n'y  a  là  rien  qui  étonne. 

Qu'à  travail  égal  masculin  ou  féminin,  le  salaire  soit  égal;  ce  n'est  que 
justice,  surtout  quand  on  constate  que  la  majorité  des  métiers  féminins 
ne  rapporte  en  moyenne  cpie  la  somme  dérisoire  de  I  fr.  25  par  jour. 

Que  le  travail  à  domicile  soit  réglementé  :  ce  travail  en  effet,  par  voie 
de  concurrence,  préjudicie  à  l'extrême  aux  intérêts  de  toutes,  de  celles 
qui  le  pratiquent  tout  comme  à  ceux  de  celles  qui  travaillent  au  dehors, 
par  l'exploitation  éhontée  dont  il  est  l'objet.  Sait-on  que  la  confection  de 
chemises  d'homme  arrive  à  n'être  payée  que  0  fr.  90  à  1  fr.  la  douzaine; 
celle  d'un  pantalon  d'homme  0,25,  etc.,  et  encore  faut-il  que  l'ouvrière 
fournisse  (il.  aiguille,  machine  à  coudre!  Des  vachères  travaillant  la  jour- 
née entière  à  coudre  des  gants,  en  gardant  leur  troupeau,  gagnent  0  fr.  40 
par  jour;  des  femmes  de  pêcheurs,  en  Bretagne,  la  passant  à  faire  des 
broderies,  n'arrivent  qu'à  trois  francs  par  semaine.  Dans  ces  abus,  rentre 
le  travail  de  certaines  communautés  subventionnées  d'autre  part,  dans 
des  conditions  qui  ne  leur  laissent  pour  ainsi  dire  aucunes  charges  aux- 
quelles elles  aient  à  pourvoir,  et  peuvent  produire  à  des  prix  dérisoires- 


F.332  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Question  compliquée,  mais  qui  vaut  la  peine  d'être  étudiée,  si  difficile 
qu'il  paraisse  d'espérer  une  solution  satisfaisante. 

Et  si  des  faits  nous  remontons  aux  causes  et  que  nous  recherchions 
pourquoi  ce  qui  jadis  a  été  à  l'état  d'exception  a  tendance  à  devenir  au- 
jourd'hui de  pratique  courante,  cela  tient  au  bouleversement  de  la  société 
et  à  ce  que  chacun  recherche  de  plus  en  plus  le  confort  et  sacrifie  au  luxe. 
Pour  satisfaire  à  ces  appétits,  le  gain  de  l'homme  devient  insuffisant  aux  be- 
soins du  ménage  et  la  femme  est  conduite  à  chercher  du  travail  qui  ajoute 
au  salaire  du  père  de  famille;  tandis  que,  d'autre  part,  chez  l'homme,  beau- 
coup par  veulerie,  en  quête  de  besognes  faciles,  envahissent  les  métiers 
de  la  femme,  se  font  couturiers,  modistes,  fleuristes*  etc.,  obligeant  celle-ci 
à  se  tourner  vers  ceux  qu'ils  abandonnent  et  à  se  faire  avocat,  médecin, 
emplojé  d'administration,  cocher,  manœuvre,  etc. 
3-1,  Mary.  —  Cette  réponse  se  retrouve  égalepient  dans  les  Femmes  savantes 
de  MoLiÈKE  : 

«  Nos  pères,  sur  ce  point,  étaient  gens  bien  sensés. 
Qui  disaient  qu'une  femme  en  sait  toujours  assez, 
Quand  la  capacité  de  son  esprit  se  hausse 
A  connaître  un  pourpoint  d'avec  un  haut-de-chausses.  » 
218, 

0,  Pedantisme.  —  Signifie  ici  pédagogie. 

6,  ladis.  —  Science  et  sagesse  se  confondaient,  l'un  menait  à  l'autre.  Char- 
les V,  dit  le  Sage,  roi  de  France,  dut  à  son  savoir  (sage  dit  pour  savant] 
cette  appellation  que  de  nos  jours  nous  sommes  portés  à  attribuer  a  la  sa- 
gesse, pourtant  si  remarquable,  avec  laquelle  il  gouverna,  tant  pendant  la 
captivité  de  son  père  que  durant  son  propre  règne. 

7,  Desunt.  —  J.-J.  Rousseau,  dans  son  Discours  sur  les  lettres,  traduit  ainsi 
cette  phrase  de  Sénèque  :  «  Depuis  que  les  savants  ont  commencé.à  paraître 
parmi  nous,  les  gens  de  bien  se  sont  éclipsés  ». 

11,  Ceux.  —  A  l'exception  de  ceux. 

13,  Science.  —  Idée  qui,  ainsi  généralisée,  n'est  pas  juste  et  que  l'on  s'étonne 
de  rencontrer  chez  Montaigne  :  il  y  revient  parfois  (I,  234);  par  contre, 
il  l'infirme  dans  différents  passages  (I,2'48)  et  particulièrement  au  ch.  XLII 
do  ce  même  premier  livre. 

32,  Cbaussetier.  —  On  montrait  à  un  savant  anglais  les  fabriques  de  drap 
de  Norwich;  les  ouvriers  y  étaient  tout  déguenillés;  on  lui  disait  :  «  Voici 
les  draps  pour  le  Nord,  ceux  pour  l'Allemagne,  pour  l'Italie,  pour  l'Amé- 
rique. »  —  «  Fort  bien,  dit-il,  mais  je  ne  vois  pas  où  sont  les  draps  pour 
les  ouvriers  de  Norwich  !  » 

35,  Suffisant.  —  Capable.  Les  mots  suffisance,  suffisant,  sont  toujoui*s  em- 
ployés, dans  les  Essais,  dans  le  sens  de  capacité,  capable,  et  en  bonne  part, 
à  l'exclusion  de  toute  idée  de  vanité,  de  présomption  qu'ils  comportent  par- 
fois aujourd'hui. 
220, 

4,  Dit.  —  Dans  le  premier  Alcibiade. 

25,  Dire.  —  Donner  la  raison  du  parti  qu'ils  prenaient. 

26,  Xénophon.  —  Cyropédie,  I,  3. 
222, 

1,  T-jTTTw.  —  Je  frappe.  Ce  verbe  est,  dans  la  plupart  des  grammaires  grec- 
ques, donné  pour  modèle  des  verbes  de  la  première  conjugaison. 

4,  Ils.  —  Les  Lacédémoniens,  dont  il  est  question  avant  cette  histoire  inci- 
dente de  Cyrus,  qui  interrompt  le  sens  général  de  ce  passage. 

14,  Respondit-il.  —  Plutakque,  Apophlh.  des  Lacédémoniens.  —  J.-J.  Rousseau 
s'est  approprié  ce  mot  dans  &Qn  Discours  sur  les  lettres  :  «  Que  faut-il  donc 
qu'ils  apprennent?  Voilà,  certes,  une  belle  question!  Qu'ils  apprennent  ce 
qu'ils  doivent  faire  étant  hommes.  » 

15,  Admirables.  —  C'est  en  cela  que  l'on  a  pu  dire  que  c'était  le  maître  d'é- 
cole qui,  en  Prusse,  avait  fait  Sadowa,  et  plus  tard  les  succès  de  1870-71. 
Mais  cette  métaphore,  répétée  à  satiété  en  France,  après  nos  revers,  y  a 


NOTES.  LIV.  I,  CH.  XXIV.         VOL.  I,  PAG.  222.  F.333 

été  intei-pi-étée  de  singulière  façon.  —  Au  lieu  do  voir  là  un  résultat  dû  au 
sentiment  patriotique  insufflé  à  l'enfant,  dès  le  bas  âge,  par  ces  humbles 
éducateurs  de  la  jeunesse,  obéissant,  en  vue  du  relèvement,  à  un  mot  d'or- 
dre venu  à  la  suite  de  l'effrondrement  de  la  monarchie  prussienne  au  com- 

-  mencement  du  siècle  dernier,  et  se  poursuivant  sans  trêve  chez  l'homme 
après  s'être  exercé  sur  l'enfant,  grâce  à  un  ensemble  d'institutions  con- 
courant à  leur  inspirer  par-dessus  tout  la  haine  du  Français  auteur  de  ces 
désastres,  nous  n'y  avons  vu  que  l'à-côté  :  l'instruction  primaire  plus  ré- 
pandue et  donnée  à  un  degré  plus  élevé.  —  Fatale  erreur!  elle  a  fait  que 
tout  en  donnant  à  cette  instruction  une  extension  exagérée  peut-être,  mus 
par  un  état  d'âme  qui  nous  est  particulier,  nous  inculquons  à  l'enfant, 
non  des  sentiments  de  patriotisme  surchauffé  comme  en  Allemagne,  mais 
des  idées  de  confraternité  universelle  qui  en  sont  presque  l'opposé,  eu 
même  temps  qu'une  connaissance  approfondie  des  droits  de  l'homme,  mais 
sans  insister  simultanément  sur  ses  devoirs,  ce  qui  eût  été  logique  et  un 
palliatif  des  exagérations  auxquelles  peut  aboutir  la  revendication  des  uns 
sans  l'observance  des  autres;  laissant  en  outre  jeter  le  discrédit  sur  ces 
doux  bases  essentielles  des  sociétés,  factices  comme  elles  si  on  le  veut, 
mais  sans  lesquelles  elles  ne  sauraient  avoir  le  calme  et  la  sécurité  :  la  re- 
ligion qui  prêche  ces  devoirs  et  l'armée  qui  en  impose  l'exécution,  qui  sont 
leurs  sauvegardes  tant  à  l'intérieur  qu'à  l'extérieur.  —  De  là  cette  situa- 
tion si  troublée  en  laquelle  nous  vivons,  en  butte  à  des  désordres  intérieurs 
continus,  à  ces  grèves  sans  cesse  renaissantes,  qui  se  produisent  partout 
et  en  tout,  solidaires  les  unes  des  autres  et  qui  portent  de  si  profondes  at- 
teintes à  notre  industrie  et  à  notre  commerce,  tandis  que,  d'autre  part, 
malgré  les  charges  écrasantes  de  notre  état  militaire  et  la  volonté  de  nos 
gouvernants  d'éviter  la  guerre  à  tout  prix,  sans  en  avoir  l'air,  nous  som- 
mes constamment  anxieux  dos  faits  et  gestes  de  nos  voisins  qu'inquiète 
également  notre  attitude  imprécise. 

18,  D'armée.  —  Le  titre  d'imperator  était  donné,  à  l'origine,  aux  seuls  géné- 
raux victorieux. 

29,  Pays.  —  Pixt.a.rqle,  Apophth.  des  Lacédémoniens.  —  En  330,  à  la  suite  de 
la  défaite  qu'Antipater  roi  de  Macédoine  venait  de  leur  infliger  et  dans  la- 
quelle avait  péri  Agis  II,  leur  roi,  après  des  prodiges  de  valeur. 

33,  Commander.  —  Plutarque,  Agésilas,  7. 

31,  Hippias.  —  Platon,  Ilippias  major. 
224, 

12,  Lettres.  —  Aujourd'hui  et  depuis  des  siècles,  les  Turcs  constituent  un 
dos  Etats  les  plus  faibles  d'Europe,  où  ils  ne  se  maintiennent  que  parce  que 
les  autres  ne  veulent  voir  aucun  d'entre  eux  se  substituer  à  eux.  Cette  dé- 
chéance est  due  en  grande  partie  à  l'ignorance  et  à  la  stagnation  en  les- 
quelles ils  sont  demeurés  alors  que  tout  autour  d'eux  progressait.  On  ne 
saurait  cependant  nier  chez  eux  une  légère  tendance  à  un  relèvement  auquel 
la  femme,  si  paradoxal  que  cela  paraisse,  n'est  pas  étrangère.  Celle-ci,  en 
effet,  dans  les  classes  élevées,  n'est  pas  l'être  avili  et  annihilé  qu'on  ne  cesse 
(le  se  représenter,  son  inlluence  dans  l'intérieur  des  familles  est  moins 
olfacée  qu'on  le  suppose:  dans  certaines,  elle  reçoit  de  l'éducation  ;  les  pro- 
ductions littéraires  de  l'Occident  pénètrent  dans  le  harem  et  avec  elles  les 
idées  modernes,  et  il  n'est  pas  déraisonnable  d'admettre  qu'à  la  longue 
l'effet  peut  s'en  faire  sentir  et  une  sorte  de  rénovation  morale  de  la  nation 
en  résulter.  G"'  Niox. 

16,  Grèce.  —  De  395  à  401,  sous  le  commandement  d'Alaric. 

'20,  Oysiues.  —  Pu.  Camerarius,  Médit,  hisl.,  III,  51.  —  C'était  aussi  l'opinion 
(les  Goths  du  royaume  d'Italie,  si  l'on  en  croit  Procope,  historien  grec  du 
m"  siècle  :  Le  grand  Théodoric  (489  à  526)  ne  voulait  pas,  pour  cette 
raison,  que  les  Goths  envoyassent  Icure  enfants  aux  écoles;  on  blâmait  la 
reine  Amalasonte  de  donner  à  son  fils  Attalaric  une  éducation  trop  litté- 
raire, prétendant  que  cela  l'amollissait.  — Quant  à  moi,  je  suis  sur  ce  point 
de  l'avis  tle  Montaigne,  mais  je  tiens  (jue  ce  n'est  pas  la  seule  cause  d'amol- 


p. 334  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

lisseinent  d'un  peuple;  l'excès  de  bien-être  pénétrant  toutes  les  classes  de  la 
société  en  est  une  bien  plus  grande  encore,  d'autant  plus  débilitante  que 
cette  jouissance  au  delà  du  nécessaire  est  plus  considérable  et  date  depuis 
plus  longtemps. 

22,  Toscane.  —  Cette  conquête  s'effectua  en  cinq  mois  (1495),  c'était  prompt 
à  une  époque  où  tous  les  bourgs  étaient  fortifiés  et  les  moyens  de  les  réduire 
bien  moins  puissants  que  de  nos  jours  et  où  les  armées  vaincues  se  refor- 
maient assez  rapidement;  elle  se  perdit  du  reste  la  même  année  avec. la 
même  rapidité,  par  suite  de  la  coalition  contre  nous  du  Pape,  des  Princes 
d'Italie  et  de  l'Espagne. 

25,  Guerriers.  —  Voir  sur  cette  question  assez  controversée  de  l'influence 
des  lettres,  la  Sayesse  de  Charhon,  111,  et  les  célèbres  paradoxes  de.I.-J.  Rous- 

SEAL. 

CHAPITRE  XXV. 

Ce  chapitre  est  numéroté  XXVI  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 
226, 

1,  Entans.  —  Ce  chapitre  est  un  des  plus  intéressants  des  Essais.  Mon- 
taigne y  développe  ses  idées  sur  l'éducation  des  enfants,  dont  une  grande 
partie  se  retrouve  dans  la  République  de  Platon.  Il  en  avait  jeté  les  bases 
dans  le  chapitre  précédent;  c'est  la  source  où  sont  venus  s'inspirer  Charron, 
J.-J.  Rousseau  et  tant  d'autres  après  eux,  non  sans  prêter  à  la  critique  en 
raison  des  points  importants  que  l'auteur  s'est  abstenu  de  traiter  et  du 
point  de  vue  par  trop  particulier  auquel  il  s'est  placé.  —  «  Il  ne  porte 
guère  son  attention,  dit  Margerie,  quB  sur  ce  qui  a  pour  objet  de  dévelop- 
per l'intelligence  et  de  fortifier  le  corps.  Mais  l'enfant  a  aussi  une  âme  à 
élever,  un  caractère  à  former;  et  cette  éducation  morale,  importante  au 
même  degré  que  l'autre,  est  sans  contredit  plus  délicate  et  plus  difficile.  A 
cet  égard,  Montaigne  ne  se  préoccupe  que  des  vertus  faciles  qui  naissent 
et  grandissent  d'elles-mêmes  et  coûtent  peu  à  acquérir  et  à  pratiquer,  mais 
les  autres?  11  ne  dit  mot,  par  exemple,  du  dévouement,  non  plus  que  des 
devoirs  sociaux  et  politiques  et  pas  davantage  de  la  lutte  contre  les  passions 
sensuelles  qu'il  dépeint  cependant  si  bien.  •  —  Déjà  auparavant  G.  Guizot, 
après  avoir  relevé  que  la  religion  n'a  point  de  place  dans  le  système  d'édu- 
cation de  Montaigne,  ajoutait  :  «  11  est  à  observer  que  sa  visée  est  très 
générale  et  le  cas  qu'il  pose  très  particulier  :  il  veut  former  un  homme  et 
ne  parle  que  pour  un  jeune  seigneur;  malgré  l'apparente  étendue  des  idées, 
ce  qu'il  dit  ne  vient  que  de  son  éducation  personnelle  et  ne  va  qu'à  celle 
de  son  petit  voisin  du  château  de  Ourson.  »  —  La  pédagogie  de  Montaigne 
est  en  effet  émineniiîient  aristocratique;  il  n'en  est  pas  moins  un  précur- 
seur en  fait  d'instruction.  Devançant  de  plusieurs  siècles  la  marche  du 
progrès,  en  outre  de  la  simultanéité  de  l'éducation  morale  et  de  l'éduca- 
tion physique,  il  préconise  de  restreindre,  dans  les  procédés  d'instruction,  le 
recours  à  la  mémoire  à  laquelle  on  fait  jouer  un  trop  grand  rôle  au  pré- 
judice de  la  raisd^,  de  développer  l'esprit  d'initiative  et  de  décision,  de 
consacrer  moins  de  temps  à  l'étude,  et  d'en  donner  davantage  à  celle  des 
langues  vivantes,  toutes  choses  encore  aujourd'hui  presque  à  l'état  de  de- 
siderata, en  France  tout  au  moins. 

A  la  vérité  aussi,  ces  principes  ne  sont  pas  émis  en  vue  ûo  l'instruction 
primaire  parce  qu'alors  elle  n'existait  pour  ainsi  dire  pas  et  que  le  besoin 
ne  s'en  faisait  pas  sentii-;  mais,  étant  donné  son  immense  bon  sens,  il  n'y 
a  pas  doute  que  s'il  eût  eu  à  en  parler,  il  se  fût  élevé  aussi  contre  la  di- 
rection qui  lui  est  donnée  chez  nous  et  dont  les  résultats  sont  si  pernicieux 
en  faisant  naître,  chez  la  plupart,  des  espérances  qu'il  ne  sera  pas  donné  au 
plus  grand  nombre  de  pouvoir  réaliser.  Son  but  devrait  être  uniquement  de 
coopérer  à  ce  que  les  enfants,  les  jeunes  gens  des  classes  dites  laborieuses 
(dont  malgié  cette  éj)ithète  le  travail  est  bien  loin  d'être  l'apanage  exclusif 
et  qui  dans  leur  sphère,  si   l'envie   ne  s'en  mêle,  ont  ici-bas  autant   de 


NOTES.        LIV.  I,  CH.  XXIV.         VOL.  I,  PAG.  220.  F. 335 

chances  de  bonheur  que  tous  autres),  deviennent,  eux  aussi,  des  êtres  forte- 
ment trempés  au  physique  et  au  moral,  de  les  préparer  aux  réalités  et  aux 
devoirs  de  ce  monde  en  les  rendant  propres  à  participer  pleinement  à  la 
vie  sociale  et  à  satisfaire  pour  le  mieux  aux  conditions  du  milieu  où  la 
Providence  les  a  placés,  tel  Cincinnatus  tiré  à  diverses  reprises  de  sa  charrue 
pour  exercer  la  dictature  et  n'aspirant  qu'à  y  retourner,  sans  éveiller  ni 
encourager  en  eux  le  désir  d'en  sortir  en  croyant  s'élever,  grosse  erreur, 
malheureusement  si  i-épandue  et  qui  la  plupart  du  temps  fait  leur  malheur, 
sans  que  la  société  y  ait  bénéfice. 

Pour  ce  faire,  il  faudrait  ici  encore  s'adresser  moins  à  la  mémoire  qui, 
à  elle  seule,  ne  conduit  à  rien  de  bon,  qu'à  la  raison  et  à  la  réflexion; 
réduire  au  minimum  l'instruction  primaire  proprement  dite,  les  connais- 
sances générales  qu'elle  comporte  et  le  temps  passé  à  les  acquérir,  sans 
cesser  de  maintenir  le  contact  journalier  de  l'enfant  d'abord,  de  l'adoles- 
cent ensuite  avec  la  ferme,  l'atelier,  le  magasin,  l'usine  et  la  participation  à 
leurs  travaux  suivant  la  condition  de  chacun,  et  affirmant  la  pratique  dans 
dos  cours  techniques  annexes,  appropriés  aux  populations  ambiantes,  déve- 
loppant à  la  fois  l'habileté  professionnelle,  l'initiative,  et  tenant  au  courant 
du  progrès.  En  généralisant  cette  méthode,  aujourd'hui  limitée  à  quelques 
grands  centres,  en  la  mettant  à  portée  du  plus  grand  nombre,  on  augmen- 
tera les  chances  de  prospérité  de  chacun  et  de  tous  et  on  réagira  contre 
l'exode  si  fâcheux  des  campagnes  sur  les  villes. 

1,  Gurson.  —  Diane  de  Foix,  fille  du  comte  de  Candalle,  avait  épousé,  en 
1579,  son  cousin  Louis  de  Foix,  comte  de  Gurson,  qui  fut  tué  avec  deux 
de  ses  frères,  en  1586,  au  combat  de  Monterabeau,  près  de  Nérac  :  quoique 
catholiques,  ils  suivaient  le  parti  de  Henri  IV,  dont  ils  étaient  proches 
parents. 

1.  Françoise. 

Pour  l'érudition  donl  la  lourdeur  accable, 

Si  nous  la  négligeons,  le  mal  n'est  pas  bien  grand  ; 

Le  gros  savoir  fait  un  pédant. 

L'esprit,  lui  seul,  fait  l'hamme  aimable 

Qui,  chez  nous,  est  le  vrai  savant.  »  De  Boissy. 

10,  Mathématique.  —  On  entendait  par  mathématiques  toutes  les  sciences 
où  interviennent  les  théories  des  nombres;  elles  comprenaient  quatre 
parties  :  l'arithmétique,  la  géométrie,  la  musique  et  l'astronomie. 

13,  D'Aristote...  moderne.  — Var.,des  éd.  ant.  :  de  Platon  ou  d'Arislote. 

15,  Faict.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  ce  n'eut  pas  mon  occupation. 

'Z3,  Danaïdes.  —  Filles  de  Danaiis,  roi  d'Argos.  Elles  étaient  au  nombre  de 
cinquante;  contraintes  d'épouser  les  cinquante  fils  du  roi  d'Egypte  leur 
oncle,  et  ce  mariage  leur  paraissant  une  impiété,  elles  les  massacrèrent  la 
nuit  même  de  leurs  noces.  Pour  ce  crime,  précipitées  dans  les  Enfers,  elles 
y  furent  condamnées  à  y  remplir  éternellement  un  tonneau  sans  fond. 
Myth. 
228, 

3,  Fiert.  —  Frappe,  du  latin  ferit.  —  C'est  une  i-éminiscence  de  ce  passage 
de  Montaigne,  qui  permit  à  J.-J.  Rousseau  d'être  l'heureux  interprète  de  la 
devise  de  la  maison  de  Solar  :  «  Tel  fiert  qui  ne  tue  pas  ».  Le  Clerc. 

19,  Voyre.  —  Disant  que  c'est  vrai,  que  vraiment.  —  Voyre  signifie  quelque- 
fois même;  d'autres  fois  oui,  ce  qui  est  ici  le  cas.  Il  a  le  sens  de  même  dans 
ces  vers  de  La  Fontaine  : 

«  Cliapilre,  non  de  rals,  mais  chapitre  de  moines, 
Voyre  chapitre  de  chanoines.  » 

Il  signifie  oui,  dans  ces  deux  vers  de  l'épitaphe  de  S.  Innocent  : 

«  Que  disons-nous  de  ce  grand  purgatoire? 
U  en  est  un,  ony  dea,  tredani  voyre!  • 


F.336  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

23,  Descouuei^t.  —  Add.  des  M.  aiit.  :car  autrement  {'engendrerais  des  mons- 
tres :  comme  font. 

3G,  Allégation.  —  Diogène  Laerce,  Chrysippe,  VIII;  Épicure,  X.  —  Allégation 
signifie  ici  citation. 

37,  Passage.  —  C.-à-d.  sur  un  de  ces  beaux  passages  des  anciens,  copiés  par 
les  écrivains  indiscrets  du  siècle  de  Montaigne. 
230, 

14,  Franchise.  —  D'asile.  Pris  ici  au  figuré  :  endroits  tels  que  les  temples, 
les  églises,  les  palais  des  ambassadeui-s  où  il  n'était  pas  permis  de  procéder 
à  des  arrestations. 

23,  Pâlot.  —  Pâlot  était  le  nom  que  l'on  donnait  à  la  bêche;  «  tenir  pâlot  ■• 
d'après  certains  signifierait  :  avoir  possibilité,  ayant  une  bêche,  de  creuser 
un  fo-ssé,  en  signe  de  défi  ou  pour  se  défendre  entre  soi  et  quelqu'un,  d'où 
lui  t(Mur  tête,  aller  de  pair  avec  lui. 
232, 

3.  Dire.  —  C.-à-d.  :  «  Je  n'cni|)loie,  je  ne  cite  les  pensées  des  anciens 
que  pour  avoir  plus  d'occasions  de  produire  mes  propres  pensées;  bien 
différent  en  cela  de  ceux  qui  se  couvrent  des  armes  d'autrui,  jusqu'à  ne 
pas  montrer  seulement  le  bout  de  leurs  doigts  ».  —  Ou  encore  :  «  Je  n'em- 
ploie les  idées  des  autres  que  pour  rendre  d'autant  mieux  les  miennes  », 
ainsi  qu'on  peuten  juger  en  se  reportant  au  ch.  X  du  liv.  II  (I,  252),  où 
il  est  dit  :  «  car  le  fay  dire  aux  autres...  ce  que  ie  ne  puis  si  bien  dire  par 
foiblesse  de  mon  langage  ou  par  foi  blesse  de  mon  sens  ». 

3,  Cantons.  —  Mot  venant  du  grec  et  signifiant  -k  proprement  parler  un 
manteau  fait  de  pièces  d'étoffes  rapportées,  un  habit  d'Arlequin.  —  Le 
centon  est  une  pièce  en  vers  le  plus  généralement  composée  de  vers  entiers 
ou  de  passages  pris  de  côté  et  d'autre  dans  un  même  auteur,  comme  les 
centons  d'Ausone,  composés  de  vers  de  Virgile,  soit  chez  divei'S  et  disposés 
dans  un  ordre  autre,  ce  qui  donne  à  ces  fragments  un  sens  tout. différent 
de  celui  qu'ils  ont  dans  l'original.  Quoi  qu'en  dise  Montaigne,  le  style  de 
ces  sortes  d'ouvrage  est  par  trop  plein  d'expressions  dures,  impropres  et 
énigmatiques;  en  français,  il  n'en  existe  guère  qu'en  prose  et  ce  ne  sont 
pour  la  plupart  que  des  assemblages  de  proverbes,  sans  intérêt  aucun. 

7,  Politiques.  —  Vaste  compilation  de  Juste  Lipsc  sur  le  droit  et  la  poli- 
tique, publiée  en  1589  et  qui,  à  l'époque,  eut  un  grand  retentissement.  Cet 
ouvrage  a  en  effet  tous  les  caractères  d'un  centon,  était  composé  de  sen- 
tences et  de  maximes  tirées  des  historiens,  poètes,  philosophes,  orateui-s 
grecs  et  latins,  auxquelles  l'auteur  n'a  ajouté  que  le  fil  qui  les  unit,  ce 
qui,  joint  au  mérite  de  les  avoir  recueillies  et  présentées  d'une  façon  in- 
téressante, n'en  dénote  pas  moins  beaucoup  d'érudition  et  de  patience.  — 
Montaigne  se  montre  ici  reconnaissant,  car  Juste  Lipse,  lui  envoyant  son 
livre,  lui  écrivait  :  «  0  tui  similis  mihi  leclor  sit  [Que  ne  sont-ils  tous  sem- 
blables à  toi,  mes  lecteurs)!  » 

16,  Autruy.  —  «  Scienter  nesciens  et  sapienter  indoclus  [savant  dans  son  igno- 
rance, simple  dans  sa  sagesse)  »,  a-t-on  dit  de  Montaigne,  lui  appliquant 
ces  paroles  du  pape  Grégoire  II  à  l'adresse  de  saint  Benoît.  Jamet. 
25,  Viendra.  —  Le  mariage  de  Diane  de  Foix  (V.  N.  I,  220  :  (jurson)  avait  été 
négocié  par  IMontaigne  ;  le  premier-né  de  cette  union  fut  en  effet,  en  1582, 
un  fils,  Frédéric  de  Foix,  qui  devint  maréchal  de  camp  et  grand  .sénéchal  de 
Guyenne. 

25,  Auez.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  de  tout  temps. 

26,  Seruitude.  —  Peut-être  la  teiTe  de  Montaigne  qui,  depuis  qu'elle  était 
dans  la  famille  Eyquem,  relevait  de  l'archevêque  de  Bordeaux,  avait-elle,  à 
une  époque  antérieure,  relevé  des  comtés  de  Gurson,  dont  le  château  se 
trouvait  à  peu  de  distance,  et  dont  était  Diane  de  Foix  dont  il  est  ici 
question. 

33,  Difficulté.  —  C'est  le  langage  que,  dans  Platon,  Théagès,  tient  à  Socrate 
un  père  qui,  accompagné  de  son  fils,  vient  le. consulter  pour  savoir  à  qui 
en  confier  l'éducation. 


NOTES.         MV.   I,  Cil.  XXV.         VOf-.  î,  PAG.  234.  F. 337 

234, 

3,  Eux-mesmes.  —  C.-à-d.  combien  dans  l'âge  mûr  ils  ont  été  différents 
de  ce  qu'ils  étaient  dans  leur  enfance. 

10,  Pied.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  goust. 

18,  Basses.  —  Cette  infériorité  d'une  partie  de  la  race  humaine,  déjà  men- 
tionnée par  Montaigne  (N.  I,  218  :  Science),  si  attentatoire  à  la  doctrine  de 
l'Evangile,  est  soutenue,  dans  toute  son  amplitude,  par  S.  Thomas  d'Aquin, 
dont  l'ouvrage  de  Sobond,  qui  est  analysé  ici,  est  considéré  comme  résu- 
mant les  opinions.  «  Quant  aux  laboureurs,  dit  saint  Thomas,  aux  indus- 
triels et  aux  marchands,  il  est  manifeste  qu'il  ne  faut  pas  les  considérer 
comme  des  citoyens,  ni  comme  faisant  partie  eux-mêmes  d'une  société 
bien  organisée...  Ces  hommes  vils,  en  raison  de  leurs  occupations  abjectes, 
ne  sauraient  se  livrer  à  la  contemplation  de  la  vérité  et  à  la  pratique  des 
arts  libéraux.  » 
236, 

1,  Maison.  —-  Enfant  noble,  de  bonne  famille. 

1,  Lettres.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  :  et  la  discipline. 

8,  Réussir.  —  Est  employé  ici  dans  le  sens  de  l'italien  riuscire,  aboutir, 
conclure,  arriver  à  un  résultat  bon  ou  mauvais. 

17,  Montre.  —  Lui  donner  occasion  de  se  montrer.  —  Terme  de  maquignon- 
nage ;  c'était  le  lieu  où  l'on  essayait  les  chevaux.  Montaigne  continue  cette 
môme  figure  quelques  lignes  plus  loin  :  «  Il  est  bon  qu'il  le  fasse  trotter 
deuant  luy,  pour  iuger  de  son  train  ». 

22,  Eux.  —  DiOGÈNE  Laerce,  IV,  36. 
238, 

8,  Platon.  —  Par  des  interrogations;  d'après  la  méthode  suivie  par  Socrate 
dans  les  dialogues  de  Platon. 

II,  Cuire.  —  Add.  de  88  :  «  On  ne  cherche  réputation  que  de  science. 
Quand  ils  disent,  c'est  vn  homme  sçauant,  il  leur  semble  tout  dire.  » 

24,  Estamine.  —  Qu'il  lui  fasse  tout  exaniiner,  analyser.  —  Expression  pro- 
verbiale qui  vient  du  tissu  peu  serré  de  crin,  de  soie  ou  de  fil,  appelé  de 
ce  nom,  dont  sont  garnis  les  tamis  servant  à  passer  les  matières  pulvéri- 
sées, quand  on  veut  en  séparer  les  parties  ténues  d'avec  les  parties  grossières. 

28,  Double.  —  Dans  l'exemplaire  dé  Bordeaux,  Montaigne  ajoutait  :  «  II  n'y 
a  que  les  fols,  certains  et  résolus  »,  addition  qu'il  a  ensuite  rayée. 

34,  Imboiue.  —  «  Imboire  »  ne  se  trouve  pas  dans  les  dictionnaires,  où 
figure  seul  «  imbu  »  qui  semble  en  être  le  participe  passé. 
240, 

2,  Apres.  —  Cette  pensée  se  retrouve  dans  La  Bruyiîre  :  «  Horace  ou  Des- 
préaux l'ont  dit  avant  vous.  —  Je  le  crois  sur  votre  parole,  mais  je  l'ai  dit 
comme  mien;  ne  puis-je  pas  parler  après  eux  d'une  chose  vraie,  dont 
d'autres  encore  parleront  après  moi  ?  » 

0  Dis-je  quelque  chose  assez  belle  ;     C'est  une  plaisante  donzelle. 

L'antiquité  toute  en  cervelle  Que  né  venait-elle  après  moi, 

Me  dit  :  •  Je  l'ai  dit  avant  toi.  •  J'aurais  dit  la  chose  avant  elle.  »  Ch.  Nodu-r. 

•  Rien  n'appartient  à  rien,  tout  appartient  à  tous; 

Il  faut  être  ignorant  comme  un  maître  d'école 

Pour  se  flatter  de  dire  une  seule  parole 

Que  personne  ici-bas  n'ait  pu  dire  avant  vous; 

C'est  imiter  quelqu'un,  que  de  planter  des  choux.  »  A.  de  Musset. 

3,  Espices.  —  Salaire  des  vacations  de  juges,  d'expéditions  judiciaires,  etc., 
L'usage  de  qualifier  de  la  sorte  la  rémunération  officieuse  de  certains  ser- 
vices rendus,  était  fort  ancien  et  avait  pour  origine  la  rareté  des  épices  et 
le  cas  qu'on  en  faisait,  quand  le  commerce  avec  les  Indes  qui  les  produit, 
n'existait  pas;  on  en  offrait  aux  grands  seigneurs  et  en  général  à  ceux 
dont  on  avait  à  reconnaître  ou  se  ménager  les  bons  offices.  Cette  rede-, 
vance,  passée  dans  les  mœurs,  a  été  plus  tard  convertie  on  argent;  elle 
n'est  pa-s  à  confondre  avec  ce  que  nou;3  appelons  aujourd'hui  épingles  ou 

ESSAIS   DE  MONTAIGNE.  —  T.    IV.  22 


F.338  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

encore  pots  de  vin  qui  sont  des  dons  illicites,  soliicit(!'S  abusivement  ot 
consentis  pour  obtenir  des  passe-droits. 
IG,  Epicharmus.  —  Dans  les  Stromales  (mélanges)   de    Clément   d'Ai-f.xan- 

uKiE,  11  ;  et  dans  Plu tarque,  De  la  Sagacité  des  animaux. 
17,  Empennées.  -  Arrangées,  préparées  à  l'instar  des  flèches  que  l'on  garnit 
de  plumes,  ou  des  traits  qu'on  munissait  d'ailerons,  pour  les  empêcher  de 
tourner  sur  eux-mômes  et  faire  qu'ils  aient  plus  de  portée  et  de  justesse. 
25,  Sçauoir.  —  «  L'érudition  n'est  pas  la  .science,  de  même  que  les  maté- 
riaux ne  sont  ])as  le  bâtiment  »  (Proverbe  turc).  —  Cette  distinction  a  peu 
cours  en  France,  même  dans  l'Université,  d'où  nos  méthodes  d'in.struction 
encore  si  défectueuses. 
33,  Caprioles.  —  Du  latin  capra,  chèvre;  terme  de  danse  qui  désignait  alors 
un  rythme  particulier.  On  dit  maintenant,  mais  dans  une  acception  un  peu 
différente  «  cabrioles  »,  du  provençal  cabra,  signifiant  également  chèvfe. 
35,  L'esbranler.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  «  et  mettre  en  besongne  •. 
242, 

1,  Luth.  —  Instrument  à  cordes  des  plus  anciens,  aujourd'hui  disparu,  avait 
quelque  ressemblance  avec  une  harpe  de  très  petite  dimension. 
9,  Botanda.  — Le  Panthéon  qu'Agrippa  fit  construire  à  Rome,  sous  le  règne 
d'Auguste;  c'est  le  seul  des  temples  de  Rome  antique  qui  soit  conservé 
dans  son  intégrité. 
10,  Lima.  —  11  y  avait  à  Rome,  au  xvi^  siècle,  une  femme  remarquable  par 
sa  beauté  et  les  grâces  de  son  esprit;  c'était  Livia  Colonna,  fille  de  Marc- 
Antoine  Colonna.  Plusieurs  poètes  de  l'époque  l'ont  célébrée  et  nous  ap- 
prennent qu'elle  avait  pour  adorateur  tout  le  peuple  romain.  Un  jour  elle 
s'éloigna  de  Rome  et  des  pluies  diluviennes  suivirent  son  départ;  «  les 
eaux  qui  menacèrent  subitement  d'inonder  la  ville  éternelle,  venaient,  dit 
l'une  de  ces  poésies,  des  larmes  de  ses  amants  ».  Avait-elle  des  caleçons 
d'une  forme  et  d'une  richesse  exceptionnelles,  c'est  ce  que  les  madrigaux 
écrits  en  son  honneur  nous  laissent  ignorer.  Rostain. 
12,  Médaille.  —  Montaigne   se  moque  ici  quelque  peu  des  antiquaires  et 
même  des  érudits  dont  les  longues  et  ennuyeuses  dissertations  n'ont  sou- 
vent de  but  ni  utile,  ni  instructif. 
15,  Enfance.  —  «  Avant  de  voyager  pour  s'instruire,  il  faut,  dit-on  parfois, 
s'instruire  pour  voyager.  »  C'est  bien  dit,  mais  ce  n'est  pas  absolument 
exact  :  On  s'instruit  en  voyageant,  l'enfant  comme  tous  autres;  seulement 
les  voyages  profitent  bien  plus  à  qui  est  instruit  qu'à  celui  qui  ne  l'eist  pas. 
27,  Remède.  —  C-à-d.  pas  moyen  de  faire  autrement. 

35,  Compagnie.  —  C.-à-d.  unie  à  un  corps. 

36,  Leçon.  —  Dans  mes  lectures. 
244, 

9,  Geaule.  —  Geôle,  prison;  d'où  vient  geôlier;  viendrait  lui-même  du  latin 

(/abiola,  cage.  ■ 

10,  L'espreuue.  —  Nous  en  \oyons  tous  les  jours  la  preuve  et  quiconque... 
Ces  lignes  ont  été  écrites  pendant  les  gueri'es  civiles  sous  le  règne  de 
Henri  111  et  à  l'avènement  de  Henri  IV. 
23,  Fables.  —  Est  mis  ici  dans  le  sens  de  hâbleries,  propos  pleins  de  vantai'- 

dise  et  d'exagération. 
27,  Contraster.  —  Blâmer,  contredire,  censurer. 
246, 

9,  Mestier.  —  Les  procureurs  et  avocats,  qui,  trop  souvent,  par  situation, 
poursuivent  et  défendent  de  parti  pris,  quels  que  soient  leurs  convictions 
personnelles. 

26,  Reluisent.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  iusques. 

27,  Particulières.  —  Quoique  remplissant  fidèlement  ses  devoirs  de  citoyen, 
de  sujet  et  même  de  catholique,  Montaigne,  fidèle  à  ce  principe,  refusa  cons- 
tamment de  s'attacher  au  service  des  rois  par  des  obligations  particulières 
contractées  envei's  eux,  non  plus  qu'à  s'inféoder  à  l'un  quelconque  des 
partis  qui,  à  celte  époque,  divisaient  la  France. 


NOTES.        LIY.  l,  en.  XXV.         VOL.  I,  \\\G.  240.  F.339 

'•ii.  Ames.  —  Errare  humanum  est,  perseverarv  dlabolicum  (Faille  erreur  est  le 
fait  de  Vliommc,  s'y  obstiner  celui  du  démon)  »,  dit  uii  adage  bien  connu, 
dont  la  source  ne  l'est  pas. 
248, 

2.  Suffisance.  —  Langage  tout  différent  de  celui  tenu,  I,  218. 
■1.  Malttoisie.  —  Vin  grec  qui  a  pris  son  nom  de  Napoli  di  Malvasia  (auj. 
Xauplie).  ville  du  Péloponnèse. 
22.  Veut.  —  Add.  de  80  :  et  qui  ne  sejiropose  autre  fin  que  le  plaisir;  mais. 
21,  Platon.  —  Dans  Hippias  major. 

2.'i.  Nostre.  —  Plutarque  traduit  en  français  par  Amyot,  dont  la  traduction 
(les  Hommes  illustres  avait  paru  en  1559,  il  y  avait  donc  une  douzaine 
d'années,  et  celle  des  Œuvres  morales  était  en  cours  de  publication,  quand 
Montaigne  écrivait  son  premier  livre  des  Essais,  1574. 
29,  Là.  —  Annibal  et  Métellus  étaient  en  présence  près  de  Venouso  (Italie 
méridionale).  Une  colline  dont  l'occupation  importait  aux  deux  partis  était 
entre  les  deux  camps;  Annibal,  arrivé  premiei-,  ne  l'occupa  pas  et  préféra 
y  tendre^  une  embuscade,  persuadé  que  les  Romains  chercheraient  à  s'y 
établir.  C'est  ce  qui  arriva  :  Marcellus,  consul,  s'y  porta  avec  son  collègue 
pour  en  faire  la  reconnaissance,  et  y  fut  tué;  son  collègue  moui-ut  lui  aussi, 
peu  après,  de  ses  blessui'es,  208;  il  n'était  pas  encore  arrivé  aux  Romains 
de  perdre  leurs  deux  consuls  dans  un  môme  combat.  Plutarque  dit  de 
Marcellus,  à  cette  occasion,  qu'en  se  précipitant  inconsidérément  et  sans 
nécessité  dans  le  danger,  il  est  mort,  non  en  général  d'armée,  mais  en  en- 
fant perdu  ou  en  batteur  d'estrade. 
250, 

2,  Besongne.  —  Henri  IV  partageait  ce  sentiment  d'estime  que  Montaigne 
avait  pour  Plutarque  :  «  Il  me  sourit  toujours  d'une  fraîche  nouveauté, 
écrivait-il  à  Marie  de  Médicis;  c'est  un  ami;  il  m'a  dit  à  l'oreille  beaucoup 
de  maximes  excellentes  pour  ma  conduite  et  pour  le  gouvernement  de 
mes  affaires.  » 
2,  Mille.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  mille. 
0,  Mot.  —  Dans  son  traité  de  la  Mauvaise  honte. 
19,  Faut.  —  Plutarque,  Apophth.  des  Lacédémoniens. 

25,  Monde.  —  Cicéron,  Tusc.,  V,  37;  Plutarque,  De  l'Exil.  —  Socrate  pouvait 
être  internationaliste  au  point  de  vue  philosophique,  mais  nul  ne  connut 
et  ne  pratiqua  mieux  ses  devoirs  envers  sa  patrie,  n'en  observa  mieux  les 
lois,  ne  la  servit  avec  plus  de  dévouement  à  la  guerre,  V.  N.  III,  576  : 
L'vn. 
D'après  ce  même  traité  De  l'Exil,  de  Plutarque,  on  a  fait  dire  à  Hercule  : 

«  Quoiqu'on  me  fasse  Argien  ou  Thébain, 
Point  ne  me  vante  être  de  lieu  certain, 
Toute  cité  de  Grèce  est  ma  patrie.  » 

28,  Nous.  —  Montaigne  émet  ici  une  de  ces  id(';cs  au  mirage  enchanteur, 
mais  qui  tout  en  ayant  fait  fortune,  ne  sont  que  mirage.  —  Tous  les  hom- 
mes sont  frères  et  ils  devraient  s'aimer  en  tant  qu'hommes  et  non  comme 
Suisses  ou  Anglais.  Cette  conception  généreuse,  déjà  formulée  longtemps 
avant  notre  ère,  a  été  prônée  depuis  à  maintes  reprises;  elle  est  la  base  de 
la  religion  chrétienne;  Plutarque  s'en  est  fait  l'avocat;  Mirabeau  et  après 
lui  Ronald  ont  pronostiqué  que  l'Europe  ne  ferait  qu'une  famille;  Rallanche 
comme  avait  fait  Rousseau,  et  comme  firent  en  des  temps  plus  rappro- 

'  chés  de  nous  Lamennais,  Lamartine,  Emile  de  Girardin,  et  autres,  ont 
soutenu  la  même  doctrine,  en  même  temps  que  Bossuet  flétrissait  la  guerre 
qui  fait  périr  tant  d'innocents  et  que  Pascal  et  Voltaire  déclaraient  un 
acte  de  démence  inexcusable  de  tuer  un  homme  parce  qu'il  demeure  de 
l'autre  côté  de  l'eau.  Si  séduisantes  que  soient  ces  espérances,  si  justifié 
que  soit  cet  anathème,  en  attendant  que  ces  utopies  actuelles  deviennent 
dans  l'avenir  des  réalités,  il  faut  être  de  son  époque  et  ne  ])as  devenir  dupe 


F. 340  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

et  victime  par  trop  de  simplicité,  c'est  pourquoi,,  en  attendant  d'ètro  mis 
au  rang  des  bienfaiteurs  de  l'humanité,  ceux  qui  prêchent  à  la  France  le 
désarmement,  taxent  le  patriotisme  d'imbécillité,  s'appliquant  à  détruire 
en  elle  les  sentiments  et  les  institutions  dont  l'existence  est  nécessaire 
pour  assurer  son  indépendance,  sont  des  individus  coupables  au  premiei- 
chef,  alors  même  qu'ils  seraient  sincèi-es.  et  dangei-eux  au  même  titre  que 
ceux  qui  sapent  les  idées  religieuses  non  moins  indispensables  à  l'humanité 
pour  lui  faire  prendre  en  patience  les  misères  de  la  vie,  que  n'est  une  ar- 
mée forte  et  disciplinée  pour  la  sauvegarde  du  territoii-e;  tant  qu'il  y 
aura  des  loups,  il  faudra  des  chiens  de  garde,  et  des  médecins  tant  qu'il 
y  aura  des  malades. 

31,  Cannibales.  —  La  pépie  est  une  membrane  cornée  qui  croît  dans  le  bec 
des  oiseaux,  en  particulier  des  poules,  et  les  empêche  de  manger  et  de 
boire.  Le  curé  de  Montaigne  s'imagine  que  parce  qu'il  est  survenu  un  acci- 
dent dans  son  village,  le  monde  entier  va  s'en  ressentir;  et  que  jiarce  que 
les  vignes  y  ont  été  gelées,  que  le  vin  fera  défaut,  les  Cannibales  qui  habi- 
tent une  autre  partie  du  globe  et  auxquels  il  est  inconnu  souffriront  quand 
même  de  la  soif. 

34,  Galler.  —  Se  réjouir;  de  ce  mot  viennent  gala,  régaler. 

«  Je  plains  le  temps  de  ma  jeunesse. 
Auquel  est  plus  qu'en  autre  temps  galle.  »  Villon. 

252, 

23,  Argoulets.  —  Archers  à  cheval,  puis  arquebusiers  à  cheval,  qui  devin- 
rent plus  tard  les  dragons.  Au  temps  de  Montaigne,  était  le  nom  géné- 
rique du  soldat  de  peu  d'importance,  dont  on  ne  faisait  pas  cas,  pro- 
bablement parce  que  tirant  à  cheval,  leurs  coups  n'étaient  pas  fort  à  re- 
douter, et  que,  comme  cavaliers,  ils  étaient  empêchés  par  leur  arme  à  feu. 

^,  Pouillier.  —  Expression  bourguignonne  :  poulailler,  bicoque,  et  par  ex- 
tension, mauvaise  place  de  guerre  non  défendable. 

39,  Pytbagoras.  —  Cicéron,  T'use,  V,  3.  —  J.-J.  Rousseau,  dans  V Emile,  IV, 
parait  avoir  transcrit  ce  passage  d'après  les  Essais. 

39,  Retire.  —  Ressemble;  retirer  à  quelqu'un  c'est  lui  ressembler;  de  là  l'ex- 
pression «  tirer  un  portrait  »,  qui  se  dit  parfois  pour  «  faire  un  portrait  ». 
254, 

2,  Physique.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  Musique. 

3,  Desja.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  le  goust. 

13,  Elles.  —  On  a  déjà  vu  que  Montaigne  emploie  le  mot  «  art  »  au  féminin; 
mais  ici  c'est  assez  surprenant,  ayant  dit  à  la  ligne  précédente  les  «  arts 
libéi'aux  ».  —  La  pensée  est  de  Sénèque,  Episl.  88. 

23.  Vtilité.  —  Aux  sciences  qui  sont  d'utilité.  —  Diogkne  Laerce,  Socrate, 
II,  21,  dit  -<  :  Socrate  fut  le  premier  philosophe  qui  fit  porter  ses  études  rela- 
tives à  la  conduite  dans  la  vie  et  aux  mœurs,  sur  ce  qui  est  bien  et  ce  qui 
est  mal.  » 

30,  Aqua.  —  Les  Poissons,  le  Lion,  le  Capricorne  sont  trois  des  constellations 
du  Zodiaque,  zone  idéale  de  la  sphère  céleste  dont  l'écliptique,  plan  dans 
lequel  le  soleil  se  meut,  occupe  le  milieu.  Chacune  des  constellations  du  Zo- 
diaque, au  nombre  de  douze,  correspond  à  peu  près  à  un  mois  de  l'année 
durant  lequel  le  Soleil  semble  s'y  mouvoir  d'un  mouvement  continu,  ce 
sont  :  la  Vierge  (septembre),  la  Balance  (octobre),  le  Scorpion  (novembre), 
le  Sagittaire  (décembre),  le  Capricorne  (janviei*),  le  Verseau  (février),  les 
Poissons  (mars),  le  Bélier  (avril),  le  Taureau  (mai),  les  Gémeaux  (juin),  le 
Cancer  (juillet)  et  le  Lion  (août). 

Îi5,  BowTEw.  —  Les  Pléiades  et  le  Bouvier  sont  des  constellations  de  l'hémi- 
sphère boréal. 

36,  Pytbagoras.  —  Diocène  Laerce,  11,4. 
256, 

5,  Deuis.  —  En  forme  de  convei"sation.  Devis  n'est  plus  en  usage  dans  ce 
sens,  mais  on  le  retrouve  dans  le  mot  deviser  qui  se  dit  en  style  familiei-. 


NOTES.         LIV.  I,  Cil.  XXV.         VOL.  I,  PAG.  256.  F.341 

11,  Pour.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  après  sa  mode. 

12,  Leçon.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  qui  est  la  philosophie. 

14,  Gaza.  — Auteur  d'une  grammaire  grecque,  un  pou  obscure,  pour  les  com- 
mençants. 

27,  Grammairien.  —  Plutarque,  Des  oracles  qui  onl  cessé,  5.  —  Démétrius  re- 
venait d'Angleterre;  son  observation  n'avait  rien  de  critique,  c'était  une 
simple  entrée  en  matière,  à  la  suite  de  laquelle  il  se  lit  admettre  à  prendre 
part  à  la  conversation. 

oi,  BâX),ti).  —  Je  jette,  je  lance;  l'ait  au  futur  BaXbi,  avec  un  seul  X. 

o4,  BÉXTKrrov.  —  C.-à-d.  qui  perdent  leur  temps  à  chercher  d'où  peuvent  dé- 
river ces  comparatifs  et  superlatifs  (comparatifs  et  superlatifs  des  adjectifs 
XsCpeui;,  mal,  et  àYaÔô;,  bon),  dont  la  formation  est  irrégulière  ou  qui  dérivent 
de  mots  autres  que  leurs  positifs. 
258, 

13,  Baralipton.  —  Mots  barbares  qui,  dans  l'ancienne  logique  scolastique, 
servaient  à  distinguer  deux  des  dix-neuf  formes  de  syllogisme.  —  Ce  n'est 
|)as,  a  dit  Pascal,  Baroco  et  Baralipton  qui  forment  le  raisonnement...;  et 
1  une  des  principales  raisons  qui  éloignent  le  plus  ceux  qui  entrent  dans 
ces  connaissances,  du  véritable  chemin  qu'ils  doivent  suivre,  est  l'imagi- 
nation qu'on  prend  d'abord  que  les  bonnes  choses  sont  inaccessibles. 

15,  L'âme.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  la  fortune. 

17,  Epicycles.  —  Terme  d'astronomie;  cercle  dont  le  centre  est  sur  la  circon- 
férence d'un  autre  cercle,  servant  dans  le  système  planétaire  de  Ptoléméc, 
qui  n'a  plus  cours,  à  expliquer  les  irrégularités  apparentes  du  mouvement 
des  planètes  et  leurs  distances  variables  par  rapport  à  la  terre.  —  Pris  ici 
au  figuré,  a  le  sens  d'hypothèses. 

19,  Inaccessible.  —  L'école  d'Aristote  dont  les  enseignements  faisaient  loi  à 
l'école;  cette  thèse  avait  été  du  reste  celle  de  beaucoup  d'autres,  de  Simo- 
nide  entre  autres. 

"20,  Rebours.  —  Cette  divergence  d'opinions  subsiste  toujours.  D'Alembert, 
Portails  ont  dit  «  que  la  véritable  philosophie  est  à  la  portée  de  tous,  que 
le  vrai,  même  en  métaphysique,  se  trouve  en  germe  dans  tous  les  esprits 
qui  le  reconnaissent  dès  qu'on  le  leur  montre  »;  et  Cousin  déclare  que 
«  le  genre  humain  n'est  pas  philosophe  et  que  la  philosophie  est  l'aristo- 
cratie de  l'espèce  humaine  >■. 

23,  Doux  fleurantes.  —  Odoriférantes;  l'expression  paraît  forgée  par  Mon- 
taigne. 

21,  Célestes.  —  Il  semble  que  Jlontaigne  ait  eu  ici  une  réminiscence  des 
termes  d'une  traduction  d'un  passage  de  Xénophon,  exprimant  du  reste 
l'idée  contraire  à  la  sienne,  traduction  parue  en  1553  et  qu'il  possédait  : 

«...  Paré  des  plus  riches  couleurs. 
Le  vice  nous  conduit  par  des  chemins  de  fleurs; 
De  roses  sous  ses  pas  les  plaisirs  nous  enchaînent; 
Mais  des  sentiers  aigus  à  la  vertu  nous  mènent. 
Et  son  temple  est  fondé  sur  un  roc  sourcilleux.  • 

30,  Despite.  —  Courroucée,  qui  marque  du  dépit.  —  On  trouve  "dans  Cl. 
Marot  :  • 

«  Le  Tout-Puissant  de  leurs  façons  despites 
Se  moquera,  car  d'eux  il  ne  lui  chault.  • 

31,  Gents.  —  Quoi  qu'en  dise  ici  Montaigne,  ce  n'est  pas  là  le  chemin  de  la 
vertu,  qui,  d'après  Bossuet,  est  un  chemin  où  le  chrétien  grimpe  plutôt 
qu'il  ne  marche.  Du  reste  au  liv.  II,  ch.  XI  (II,  88),  il  dit  avec  plus  de  vé- 
rité que  «  la  vraye  vertu  demande  vn  chemin  aspre  et  épineux...  >>. 

34,  Poètes.  —  Hésiode,  "Epy.  xai  ^|x.,  v.  287. 

37,  Angélique.  —  Héroïnes  du  poème  de  l'Arioste  «  Roland  furieux  ». 

41,  Garce.  —  Jeune  fille.  V.  N.  I,  458:  Garces. 

Il,  Attifet.  —  Coiffure  du  temps;  à  proprement  parler,  carcasse  en  fil  de  fer 


F.342  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

soutenant  lo  haut  du  bonnet  et  lui  donnant  la  forme  figurant  d'ordinaire 

dans  les  portraits  de  Catherine  de  Médicis  et  de  Marie  Stuait. 
260, 

2,  Phrygie.  —  Paris,  qui  eut  à  décerner  le  prix  de  beauté  que  se  disputaient 

Junon,  Pallas  et  Vénus,  et  qui  l'attribua  à  cette  dernière. 
2,  Leçon.  —  «  Lo  passage  qui  suit  est  un  bel  éloge  de  la  vertu,  il  serait  dil- 

ficile  d'en  parier  plus  dignement  et  avec  plus  de  justesse.  »  P.vyen. 
13,  Lasseté.  —  Lassitude,  qui  en  dérive  et  l'a  remplacé  dans  la  langue. 
15,  Crudité.  —  Indigestion,  de  cruditas  qui,  en  latin,  a  même  signification. 
19,  Musqués.  —  ■•  La  vertu  humaine  la  plus  parfaite,  est  celle  qui  sait  réduire 

le  plus  ses  besoins.  »  Plutarque. 
02,  Sinon.  —  Addition  de  l'e.xemplaire  de   Bordeaux  écrite  de  la  main  de 

Montaigne  :  «  que  de  bone  jieure  son  gouuerneur  l'estrangle  s'il  est  sans 

tesmoins,  ou  ». 


262, 


8,  Rota.  —  Roue,  plateau  horizontal  que  le  potier  met  en  mouvement  avec 
les  pieds,  et  sur  lequel  il  place,  pour  la  façonner,  l'argile  qu'il  emploie  pour 
les  objets  qu'il  confectionne.  • 

11,  Disait.  —  Dans  un  passage  cité  par  SÉNf:QUE,  Epist.  49.  —  La  réflexion 
suivante  se  trouve  également  dans  Sénèque. 

16,  Action.  —  Ce  passage  rapproché  de  celui-ci  :  «  C'est  vn  bel  agencement 
que  le  grec  et  le  latin,  mais  que  l'on  acheté  trop  cher  »,  et  de  cet  autre  : 
'<  Fâcheuse  suffisance,  qu'vne  suffisance  pure  liuresque  »,  renferme  la  con- 
damnation de  notre  système  d'éducation. 

Dans  son  remarquable  ouvrage  -  la  Psychologie  de  l'éducation  »,  M.  G. 
Lebon  dit  en  substance  à  ce  propos  : 

Sous  ce  rapport,  nous  nous  en  tenons  opiniâtrement  à  ce  qui  existait 
au  XVII"  et  xvni°  siècle  et  qui,  déjà  critiqué  alors,  est  de  plus  en  plus 
funeste  en  ces  temps-ci  où  les  conditions  d'existence  ont  été  profondément 
modifiées  par  les  grandes  découvertes  modernes  et  les  transformations  in- 
cessantes qu'elles  amènent;  au  point  que  nous  en  arrivons  à  nous  trou- 
ver dans  un  état  d'infériorité  qui  nous  conduit  insensiblement  à  la  ruine, 
la  lutte  pour  la  vie  n'étant  pas  une  vaine  formule,  mais  bien,  pour  les 
peuples  comme  pour  les  individus,  une  réalité  qui,  de  jour  en  jour,  devient 
plus  aigué. 

En  France,  oublieux  de  cet  autre  passage  des  Essais  :  •■  Ce  n'est  pas  vue 
âme,  ce  n'est  pas  vn  corps  qu'on  dresse,  c'est  vn  homme;  il  ne  faut  pas 
les  dresser  l'vn  sans  l'autre,  mais  les  conduire  également  »  (I,  266),  dans 
les  programmes  d'instruction  secondaire,  on  n'attache  pas  aux  exercices 
physiques,  à  la  vie  au  grand  air,  une  importance  suffisante,  et  au  grand 
préjudice  du  développement  corporel  de  l'adolescent  on  exagère  la  durée 
des  classes  et  des  études;  son  éducation  morale  est  pareillement  nulle  ou 
à  peu  pi'ès  et  l'enseignement  intellectuel  à  la  fois  ti-op  étendu,  trop  super- 
ficiel, embrassant  trop  d'inutilité  et  mal  donné.  Partant  de  ce  principe 
faux  en  matière  d'éducation  que  la  théorie  doit  précéder  la  pratique  et 
que  les  connaissances  entrent  dans  l'entendement  par  la  mémoire,  l'en- 
seignement classique  s'adresse  uniquement  à  celle-ci,  gavant  ses  élèves 
d'autant  de  matières,  pour  la  plupart  inutiles,  que  le  temps  le  permet,  sans 
même  lui  donner  seulement  celui  de  les  digérer  et  sans  avoir  recours 
simultanément  à  l'enseignement  par  les  yeux  et  les  oreilles  qui  seul  fait 
naître  en  nous  l'esprit  d'observation,  l'habitude  de  réfléchir,  de  raisonner, 
la  faculté  de  déduire  l'inconnu  du  connu  et  est  de  nature  à  développer  sa 
volonté,  son  jugement,  son  initiative,  sa  valeur  morale,  de  former  en  un 
mot  des  caractères.  Aussi,  quand  cette  instruction  prend  fin,  que  l'étudiant 
devenu  homme,  livré  à  lui-même,  en  arrive  à  l'application,  ce  n'est  le  plus 
souvent  qu'un  incapable  chez  lequel  les  germes  de  ces  qualités  primor- 
diales sont  atrophiées,  de  là  le  naufrage  de  tant  d'intelligences  et  de  ca- 
ractères, une  tendance  à  éviter  ce  qui  peut  être  difficulté,  une  profonde 
indifférence  pour  ce  qui  se  passe  en  dehors  de  lui,  défauts  caractéristiques 


NOTES.         LIV.  I,  OH.  XXV.        VOL.  I,  PAG.  262.  F.343 

de  notre  race,  dont  la  décadence  est  fatalement  liée  à  ces  affaiblissements 
physiques,  intellectuels  et  moraux  de  l'individu,  qui  le  plus  souvent  n'est 
qu'un  mineur  que  toute  sa  vie  durant  il  faudra  diriger. 

Au  lieu  de  former  des  industriels,  des  agriculteurs,  des  commerçants,  des 
colonisateurs,  cet  enseignement,  dit  classique,  ne  peut  conduire  qu'aux 
professions  libérales  et  en  raison  de  l'énorme  disproportion  entre  le  nom- 
bre des  appelés  et  celui  des  élus,  il  crée  cette  multitude  de  déclassés  et  de 
mécontents  qui  végètent  et  parmi  lesquels  le  socialisme  recrute  ses  adeptes 
les  plus  fervents. 

Quelques  efforts  ont  bien  été  faits  pour,  concurremment  avec  l'enseigne- 
ment classique,  développer  en  France  l'enseignement  professionnel  qui  au.\, 
connaissances  générales  réduites  au  minimum  joint  l'enseignement  pra- 
tique d'une  quelconque  des  branches  des  arts,  des  sciences,  de  l'industrie, 
de  l'agriculture  ou  du  commerce  suivant  la  spécialité  de  l'école,  mais  ce 
progrès  s'est  effectué  sans  faire  la  place  plus  grande  à  l'éducation  physique 
et  morale,  et  là  encore  prévalent  l'instruction  théorique  et  la  récitation 
des  manuels;  aussi  ne  saurait-on  s'étonner  que  dans  de  semblables  condi- 
tions, cet  enseignement  dont  ont  si  fort  à  se  louer  les  peuples  qui  en  ont 
fait  la  base  de  l'éducation,  ne  produise  pas  en  France  les  mêmes  heureux 
résultats. 

Chez  les  Anglo-Saxons  notamment  le  système  suivi  est  le  contrepied  de 
celui  admis  en  France;  l'enseignement  professionnel  en  raison  de  son  uti- 
lité et  de  ses  avantages  prédomine.  Partant  de  ce  principe  que  l'expérience 
qui  seule  instruit  les  hommes,  est  aussi  seule  capable  d'instruire  la  jeu- 
nesse, on  en  déduit  que  la  pratique  doit  précéder  la  théorie,  par  suite  les 
langues  s'enseigner  tout  d'abord  en  les  parlant,  les  sciences  physiques  par 
les  manipulations,  un  métier,  une  profession  par  l'apprentissage,  donnant, 
de  ce  fait  même,  occasion  de  se  développer  à  l'esprit  d'observation,  à  la  ré- 
flexion, au  jugement,  à  la  volonté,  à  l'initiative,  à  la  persévérance.  Laissé 
libre  de  bonne  heure  et  ayant  possibilité  d'agir  de  lui-même,  c'est  par  les 
conséciuences  qui  résultent  pour  lui  de  ses  actes,  que  l'étudiant  arrive  à 
distinguer  le  bien  du  mal  et  contracte  cette  discipline  interne  qui  constitue 
la  moralité;  il  se  développe  au  physique  et  acquiert  du  coup  d'œil,  l'esprit 
de  solidarité,  l'empire  sur  soi,  le  dévouement  aux  intérêts  de  la  collectivité; 
quant  au  respect  de  l'ordre  public,  des  coutumes  établies,  à  l'obéissance 
à  l'autorité,  c'est  affaire  de  mœurs  et  de  mentalité  de  race.  Dans  ces  con- 
ditions, au  sortir  même  du  collège,  le  jeune  Anglais,  avec  une  instruction 
générale  restreinte,  n'a  aucune  difficulté  à  trouver  sa  voie,  et  est  à  mèmi! 
d'apprendre  en  peu  de  temps  le  complément  dont  il  peut  avoir  besoin  pour 
la  suivre  et  le  plus  souvent  devenir  quelqu'un. 

Aujourd'hui  que  le  télégraphe  et  la  vapeur  en  réduisant  les  distances  ont 
fait  du  monde  un  seul  et  même  théâtre  d'action,  le  succès  est  acquis  aux 
peuples  dont  les  individualités  sont  tout  à  la  fois  capables,  bien  trempées  au 
physique  et  au  moral,  dont  l'émancipation  est  complète,  et  l'esprit  de  so- 
lidarité absolue,  quand  il  s'agit  d'intérêts  collectifs  ;  cela  nous  place  incon- 
testablement dans  une  situation  désavantageuse  pour  le  présent  et  inquié- 
tante pour  l'avenir. 

Pour  y  remédier,  au  mieux  de  ce  qui  est  possible,  en  ce  qui  concerne 
l'éducation,  il  y  aurait  lieu  en  France,  de  : 

Transférer  lycées  et  collèges  des  villes  à  la  campagne,  ce  qui  est  relative- 
ment facile  en  raison  de  la  rapidité  des  communications. 

Réduire  dans  une  notable  proportion  la  durée  des  classes  et  des  études 
et  donner  aux  jeux  et  aux  exercices  physiques  la  même  importance  qu'aux 
autres  branches  de  l'éducation. 

Faire  de  même  touchant  l'éducation  morale;  donner  de  bonne  heure  et 
progressivement  aux  élèves  plus  de  liberté,  les  abandonnant  à  eux-mêmes 
dans  une  assez  large  mesure  afin  de  leur  apprendre  à  se  conduire. 

Pour  la  généralité,  réduire  l'enseignement,  classique  au  strict  nécessaire 
de  mnémonique,  le  rendre  expérimental;  à  l'étude  du  grec  et  du  latin  qui 


F.344  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

est  sans  profit,  substituer  des  traductions  et  une  étude  plus  sérieuse  des 
langues  vivantes.  Supprimer  les  concours,  les  classements,  les  diplômes, 
toutes  choses  où  la  chance  a  trop  de  part  et  qui  engendrent  la  jalousie  plus 
que  l'émulation,  crée  des  espérances  trop  souvent  chimériques,  et  les  rem- 
placer par  des  examens  de  passage  d'une  classe  à  une  autre. 

Mais  que  de  difficultés  pour  la  réalisation  de  pareilles  réformes,  qui  de- 
vraient commencer  par  celle  même  des  professeurs  qui,  dressés  à  une  mé- 
thode qu'ils  tiennent  pour  excellente,  dont  ils  ont  le  train-train  et  qui  les 
fait  vivip,  sont  incapables  d'en  concevoir  et  d'en  appliquer  une  autre;  en 
second  lieu,  il  faudrait  rendre  iri-esponsables  les  chefs  d'établissement, 
sauf  le  cas  de  lourde  faute,  des  quelques  inconvénients  et  accidents  qu'en- 
traine  inévitablement  de  temps  à  autre  le  système;  et  aussi  faire  que  les 
parents  acceptent  de  voir  leurs  enfants  retardés  dans  leurs  classes,  quand 
ils  ne  sont  pas  jugés  aptes  à  passer  à  la  classe  supérieure,  sans  qu'il  en 
résulte  du  discrédit  pour  l'établissement.  Enfin  et  par-dessus  tout,  il  y  au- 
rait à  modifier  l'esprit  public,  de  telle  sorte  que  l'enseignement  classique, 
qui  en  raison  de  son  inutilité  est  chose  de  luxe,  ne  soit  donné  qu'à  ceux 
auxquels  leur  état  de  fortune  permet  de  ne  rien  faire,  au  lieu  de  s'étendre 
de  plus  en  plus,  par  l'octroi  de  bourses,  si  bien  que  dans  notre  pays,  dont 
la  population  agricole,  commerciale  et  industrielle  est  les  9/10  de  la  po- 
pulation totale,  la  clientèle  de  l'enseignement  professionnel  n'est  que  le  1  s 
du  nombre  de  nos  étudiants;  et  ce,  parce  que  pour  la  plupart  des  emplois 
de  tout  repos  des  administrations  de  l'État,  dont  l'obtention  est  le  desi- 
deratum de  la  majorité  des  Français,  pour  lesquels  quelque  garantie  d'ins- 
truction est  demandée,  les  diplômes  de  l'enseignement  classique  sont  a 
peu  près  les  seuls  admis  ou  tout  au  moins  dont  il  soit  tenu  compte  ;  à  quoi 
s'ajoute  ce  préjugé  qui  longtemps  encore  pèsera  sur  nous,  par  suite  du- 
quel le  plus  infime  clerc,  le  plus  humble  fonctionnaire,  le  moindre  emplo}  é, 
le  plus  modeste  professeur  se  croient  d'une  caste  bien  supérieure  à  celle 
d'un  industriel,  d'un  commerçant,  d'un  artisan  ou  ^'un  paysan  dont  les 
travaux  cependant  exigent  beaucoup  plus  d'intelligence.  Malheureusement 
aussi,  avec  la  propension  de  l'Université  à  monopoliser  l'instruction,  et  de 
la  sorte  supprimer  la  concurrence,  il  est  à  craindre  que  ces  errements  né- 
fastes se  perpétuent  au  point  que  le  mal  devienne  irrémédiable. 

Notons  encore  que  l'enfant  ne  peut  plus  tout  apprendre,  qu'il  faut  choisir, 
et  nos  programmes,  nos  méthodes,  nos  établissements  d'instruction  ne  rt'- 
pondent  plus  à  la  diversité  des  vocations  et  des  mœurs,  aux  conditions 
changeantes  de  la  vie  moderne;  par  suite  aussi,  un  lycée,  un  collège  ne  sau- 
rait davantage  demeurer  un  froid  immeuble  administratif,  taillé  sur  un 
modèle  uniforme,  celui  si  peu  attrayant,  si  généralement  dénué  d'air  et 
de  lumière  que  nous  connaissons. 

39,  Lasse.  —  Diogèxe  Laerce,  X,  122. 

41,  Garçon.  —  Dans  un  collège,  comme  portent  les  éd.  ant.  ;  qu'on  l'y  mette 
interne. 
264. 

8,  Affolé.  —  DiOGÈxE  Laerce,  IV,  62. 

25,  Faire.  —  Plutarque,  Symposiaques  (mélanges),  I,  1. 

oo,  Conuiue.  —  Banquet,  festin,  repas  (en  latin  convivium)  ;  nom  d'un  dialo- 
gue de  Platon. 

38,  Autres.  —  C.-à-d.  il  n'y  a  pas  doute  qu'ainsi  dressé  à  la  recherche  et  à 
l'amour  de  la  vertu,  il  ne  soit  moins  désœuvré  que  les  autres. 
266, 

11,  Platon.  — Cité  par  Plutarque  dans  le  traité  Des  moyens  de  conserver  la 
santé. 

16,  Il  se  fait.  —  Var.  des  éd.  ant.  à  88  :  aux  collèges  où. 

17,  Lettres.  —  Add.  des  éd.  ant.  h  88:  et  leur  en  donne  goust. 

25,  Dameret.  —  Efféminé,  qui  fait  le  beau  et  cherche  à  plaire  aux  dames. 
31,  Office.  —  Leur  devoir  ;  pendant  les  classes,  les  études,  la  récitation  des  leçons. 
36,  Quintilian.  —  Jnstil.  oral.,  1,3. 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  XXV.         VOL.  J,  PAG.  268.  F.34b 

268, 

1,  Grâces  —  Étaient  dans  l'antiquité  la  personnification  de  ce  qu'il  y  a  de 
plus  séduisant  dans  la  beauté.  Elles  étaient  au  nombre  de  trois  :  Aglaé  (qui 
excite  l'admiration),  Thalie  (qui  inspire  la  joie),  Euphrosyne  (qui  réjouit 
l'àme)  ;  on  les  représentait  sous  la  ligure  de  trois  jeunes  vierges  nues,  sans 
ceinture,  les  mains  et  les  bras  entrelacés,  formant  des  danses  gracieuses 
autour  de  Vénus.  Myth. 

2,  Speusippus.  —  Diogène  Laekce,  IV,  1. 

15,  Soleil.  —  Sextus  Empiricus,  Pyrrh.  Hyp.,  1,  II. 

10,  Cocqs.  —  Plutarque,  De  l'envie  el  de  la,  haine,  vers  le  commencement. 

—  Alexandre  le  Grand  frémissait,  dit-on,  au  seul  toucher  d'une  pêche; 
Turenne  se  trouvait  mal,  assure-t-on,  s'il  voyait  une  araignée  :  petites  fai- 
blesses dé  grands  homme,  si  cela  est  exact.  —  Jacques  l"""  d'Angleterre, 
qu'on  ne  saurait  mettre  sur  le  même  rang,  se  trouvait  mal,  dit-on  encore, 
à  la  vue  d'une  épée  nue;  peut-être  était-ce  le  souvenir  de  sa  mère  qui 
l'obsédait.  —  Plusieurs  membres  de  la  famille  de  Candale,  avec  laquelle 
Montaigne  était  lie,  et  c'est  probablement  à  eux  qu'il  lait  allusion  ici,  ne 
pouvaient  supporter  l'odeur  de  la  pomme.  —  Ambroise  Paré  en  dit  autant 
de  Wladislas,  roi  de  Pologne,  et  cite  des  exemples  de  l'horreur  inspirée  par 
le  pain,  les  œufs,  les  légumes,  les  chats,  les  souris,  les  araignées,  etc..  — 
Les  cas  de  ces  singulières  antipathies  et  autres  analogues  sont  fort  nom- 
breux, en  voici  quelques  autres  :  Alaiis  Borrichius  cite  un  cabaretier  qui 
frémissait  et  se  couvrait  d'une  sueur  froide,  quand  il  voyait  du  vinaigre; 
une  demoiselle  qui  ne  pouvait  regarder  une  plume,  sans  jeter  des  cris;  un 
gentilhomme  écossais  qui  pleurait  à  l'aspect  d'une  anguille.  —  Le  maréchal 
de  Brézé  s'évanouissait  à  la  vue  d'un  lapin:  la  fièvre  s'emparait  d'Erasme, 
dès  qu'il  voyait  ou  sentait  du  poisson;  Joseph  Scaliger  tremblait  en  aper- 
cevant du  lait,  et  ne  pouvait  souffrir  davantage  le  cresson;  l'illustre  ma- 
thématicien Cardan  avait  horreur  des  œufs;  Ladislas  Jagellon  redoutait 
les  pommes;  si  l'on  faisait  sentir  ce  fruit  à  un  sieur  La  Chesnaye,  secré- 
taire de  François  P%  le  sang  s'échappait  en  abondance  de  ses  narines;  on 
cite  des  gens  que  le  froissement  d'une  robe  de  soie  fait  tomber  en  pâmoi- 
son. —  Samuel  Pelissius  parle  d'un  homme  qui  se  troublait  et  divaguait, 
(|uand  il  voyait  de  la  salade;  un  autre  éprouvait  une  douleur  aiguë  quand 
on  parlait  des  pieds  ou  de  ce  qui  s'y  rapporte,  bas,  souliers,  etc.,  et  cette 
douleur  cessait  dès  qu'on  parlait  do  la  tète  ou  de  ce  qui  s'y  rapporte,  che- 
veux, etc..  —  Henri  III  ne  pouvait  demeurer  dans  une  chambre  où  était 
un  chat;  le  maréchal  de  Schomberg  avait  la  même  aversion.  —  Un  con- 
seiller au  parlement  de  Bordeaux  avait  été  si  effrayé  à  la  vue  d'un  hérisson 
qu'il  crut,  pendant  plus  de  deux  ans,  que  ses  entrailles  étaient  dévorées  par 
cet  animal.  —  D'api'ès  Pierius  Valerianus,  l'odeur  des  roses  faisait  évanouir 
te  cardinal  Caraffa;  il  en  dit  autant  d'un  cardinal  de  Cordoue,  d'un  évêque 
de  Breslau;  et  ce  qui  est  plus  particulier,  il  cite  un  espagnol,  Dom  Juan 
Ruai  de  Polemaque,  sur  lequel  entendre  prononcer  le  mot  Lana  produisait 
le  même  effet.  —  Balzac  a  éci-it  :  «  La  rose  est  mon  inclination,  comme 
c'était  l'aversion  de  M.  le  chevalier  de  Guise  »  ;  Catlicrine  de  Médicis  ne 
pouvait  non  plus  en  supporter  l'odeur.  —  Le  chancelier  Bacon  tombait  en 
défaillance,  quand  il  y  avait  une  éclipse  de  lune;  le  duc  d'Epernon  quand, 

'        dans  un  repas,  on  lui  servait  du  levraut;  le  maréchal  d'Albret,  du  marcassin. 

—  II  existe  sur  ce  sujet  deux  ouvrages  publiés  l'un  en  1617,  l'autre  en  1665, 
le  premier  de  Sagittarius,  savant  allemand,  le  second  de  Martin  Schoo- 
ckius,  savant  hollandais.  Payen. 

26,  Boucle.  —  C.-à-d.  contenir.  Métaphore  tirée'  de  l'usage  où  l'on  est  de 
boucler  une  jument  par  l'interposition  d'un  anneau  pour  empêcher  qu'elle 
ne  soit  saillie,  ce  qui  était  également  le  principe  des  ceintures  de  chasteté 
du  moyen  âge,  dont  le  musée  de  Cluny,  à  Paris,  à  des  spécimens;  se  dit 
aussi  de  quelqu'un  jeté  en  prison. 

32,  D'autant.  —  Boire  d'autant,  c'est  faire  raison,  tenir  tête  à  quelqu'un  à 


F.346  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

table,  buvant  à  chaque  invitation  qu'il  vous  en  fait  en  buvant  lui-même. 
270, 

7,  Recita.  —  Peut-être  Gaspard  de  Schomberg,  qui  était  reçu  à  Montaigne 
et  qui  a  rempli  pour  la  France  diverses  missions  en  Allemagne,  et  avait 
été  notamment  chargé  par  Charles  IX  d'aller  justifier  auprès  des  seigneurs 
de  cette  contrée  les  massacres  de  la  Saint-Barthélémy  en  faisant  connaître 
les  nécessités  qui  avaient  motivé  cet  acte  politique. 
0,  Alcibiades.  —  Pixtakque,  Alcibiade,  14. 

18,  Vtramque.  —  Montaigne  emploie  ces  deux  vers  dans  un  sens  directe- 
ment opposé  à  celui  qu'ils  ont  dans  Horace,  d'où  ils  sont  tirés. 
1!>,  Leçons.  —  Var.  des  éditions  antérieures  :  Voicij  mes  leçons,  où  le  faire  va 
auec  le  dire.  Car  à  quoy  sert  il  qu'on  presche  l'esprit,  si  les  effccts  ne  vont 
quant  et  quant?  au  lieu  de  :  «  Voie}'...  escrites  »  (19  à  32). 

20,  Voyez.  —  ■<  Voulez-vous,  disait  S.  Ckégoire,  un  abrégé  de  la  règle  de  saint 
Benoît,  considérez  sa  vie;  voulez-vous  un  précis  de  sa  vie,  considérez  sa 
règle  :  l'une  est  l'expression  de  l'autre.  » 

21,  Platon.  —  Dans  le  dialogue  intitulé  Les  Rivaux. 

27,  Philosophe.  —  Ce  n'est  pas  Heraclite,  mais  Pythagore,  qui  fit  cette  ré- 
ponse; ce  fait  rapporté  par  Cicéron,  Tusc,  V,  3,  a  été  relevé  par  lui  dans 
un  livre  d'Heraclite. 

32,  Escrites.  —  Diogèxe  Laerce,  \1,  48. 
272, 

7,  Paroles.  —  Plutarque,  Apophth.  des  Lacédémoniens . 

9,  Babil.  —  Plus  encore  que  chez  toute  autre  race,  l'exubérance  de  paroles 
existe  chez  les  Latins,  dont  nous  sommes.  De  tous  temps,  ils  ont  été  grands 
discoureurs,  amis  des  mots  et  de  la  logique,  se  préoccupant  très  peu  des 
faits  et  faciles  à  gagner  à  toute  idée  présentée  dans  un  beau  langage.  Au- 
jourd'hui chacun  s'en  mêle  et  il  n'est  même  plus  besoin  de  logique;  pour 
l'éussir,  il  ne  suffit  plus,  en  France,  mais  c'est  uije  chose  à  laquelle  rien 
ne  supplée,  que  d'être  prêt  à  parler,  à  l'impromptu,  sur  quoi  que  ce  soit,  et 
à  même  de  trouver  de  suite  des  arguments,  tout  au  moins  brujants,  pour 
répondre  à  ses  adversaires;  la  compétence,  pas  plus  que  la  vérité  et  la 
sincérité,  ne  sont  nécessaires;  des  lieux  communs,  un  langage  tant  soit  peu 
amphigourique,  des  évocations  flattant  les  passions  de  l'auditoire  assurent 
le  succès;  et  cette  nécessité  d'être  à  môme  de  parler  sans  réfléchir  est  telle, 
qu'elle  élimine  des  affaires  publiques,  et  notamment  du  Parlement,  nom- 
bre d'hommes  de  val«ur  réelle  et  de  jugement  pondéré. 

33,  Ombrages.  —  Ombres,  apparences,  ou  encore  aperçus,  comme  on  dit  au 
jourd'hui. 

39,  Tiens.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  que  qui  en  a  l'esprit. 
274, 

2,  Bergamasque.  —  Le  patois  de  Bergame  passait,  du  temps  de  Montaigne, 
pour  le  langage  le  plus  grossier  de  l'Italie. 

7.  Pas.  —  C.-à-d.  pas  plus  que  ne  fait,  que  ne  sait.  —  Un  emploi  analogue 
du   verbe  faire  se  retrouve  dans  cette  expression  «  si  fait  »,  encore  en 
usage  :  «  Vous  ne  mangez  pas?  —  Si  fait  (si,  je  fais  l'action  de  manger)  ». 
7,  Petit  pont.  —  Aujourd'hui,  pont  du  Châtelel,  un  des  ti'ois  premiers  ponts 
de  Paris,  ainsi  nommé  par  opposition  au  Grand  pont,  devenu  le  Pont  au 
Change  et  actuellement  le  Pont-Neuf. 
10,  Maistre  es  arts.  —  Gradué  des  anciennes  universités  à  la  suite  d'épreu- 
ves soutenues  avec  succès,  qui  avait  qualité  pour  enseigner  les  humanités 
et  la  philosophie;  arts  était  alors  synonyme  de  lettres. 
15,  A  fer.  —  Tacite,  Dial.  des  Orateurs;  le  texte  latin  porte  Aper. 

22,  Faire.  —  Plutarque,  Apophth.  des  Lacédémoniens. 

28,  Feray.  —  Plut.arque,  Instruction  pour  ceux  qui  manient  les  affaires  d'É- 
tat, 4. 

30,  Consul.  —  Plutarque,  Caton.  —  Montaigne  donne  un  sens  trop  général  à 
la  réflexion  de  Caton  qui  ne  se  moquait  pas  de  l'éloquence  de  Cicéron. 
mais  de  l'abus  qu'il  en  fit,  dans  le  temps  de  son  consulat,  un  jour  que, 


.NOTES.         LIY.  I,  CH.  XXV.         VOL.  I,  PAG.  274  F.347 

plaidant  pour  Muréna  contre  lui  Caton,  il  se  mit  à  tourner  en  ridicule  les 
principes  essentiels  de  la  philosophie  stoïcienne,  d'une  manière  par  trop 
comique,  peu  digne  de  la  fonction  qu'il  occupait,  ce  qui  lui  attira  cette 
observation  de  son  adversaire  plus  piquante  que  tous  les  traits  qu'il  venait 
de  lui  décocher.  Coste.  —  Ciccron  était,  du  reste,  lui-même  fort  porté  à 
l'épigramme.  Dans  ses  Saturnales,  Mackobe  cite  quelques-unes  de  ses  plai- 
santeries. Parlant  de  César  :  «  La  ceinture  m'a  trompé  »,  dit-il,  faisant  al- 
lusion à  ce  qu'il  portait  sa  toge  à  la  mode  dos  jeunes  gens  efféminés,  fui 
qui  était  l'homme  d'action  par  excellence.  De  Pompée,  qui  venait  de  con- 
céder le  droit  de  cité  à  un  barbare  :  ■<  Il  le  donne  aux  autres  et  est  impuis- 
sant à  nous  le  rendre  à  nous-mêmes.  »  De  Caninius  Dibulus  fait  consul, 
on  45,  la  veille  du  jour  où  finissait  l'année,  avec  laquelle  sa  charge  prenait 
fin  :  «  Nous  avons  eu  en  Caninius  un  consul  vigilant;  de  tout  son  consu- 
lat il  n'a  pas  goûté  le  sommeil.  • 

35,  Force.  —  C.-à-d.  n'importe,  il  n'y  a  pas  lieu  de  s'y  opposer,  de  l'y  con- 
traindre. Cette  locution  se  retrouve  avec  le  même  sens  dans  Rabelais. 

276. 

10,  Vers.  —  Plutarque,  Si  les  Athéniens  ont  été  plus  excellents  en  armes  qu'en 
lettres,  4.  —  On  raconte  à  pou  près  la  même  chose  de  Racine  qui  écrivait 
d'abord  ses  pièces  en  prose  et  les  estimait  terminées,  lorsqu'il  ne  lui  res- 
tait plus  qu'à  les  mettre  en  vers. 

11,  Le  demeurant.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  les  mots,  les  pieds  et  les  césures  qui 
sont  d  la  vérité  de  fort  peu  au  pris  du  reste.  Et  qu'il  soit  ainsi... 

18,  Fera  il.  —  C.-à-d.  mais  que  fera  notre  jeune  élève,  si  on  le  presse...  — 
Montaigne  revient  ici  à  son  principal  sujet,  qu'il  semblait  avoir  entière- 
ment perdu  de  vue. 

•20,  Désaltère.  —  Parmi  les  singularités  de  ce  genre,  nous  rappellerons  en- 
core celle-ci  :  «  Vous  avez  des  cornes  ou  vous  n'avez  pas  de  cornes  :  Or 
vous  n'avez  pas  de  cornes,  donc  vous  avez  des  cornes.  » 

•21,  Respondre.  —  SÉNh:QUE,  Epist.  49. 

"23,  Empesche.  —  Diogène  Laerce,  II. 

"26,  Aage.  —  DiotiÈNE  Laerce,  VIL 

36,  Quérir.  —  Montaigne  détourne,  en  effet,  assez  fréquemment  le  sens  des 
citations  qu'il  donne;  il  était  capable  d'inventer  le  procédé;  mais  il  a  pu 
le  trouver  dans  saint  Paul,  ainsi  que  le  reconnaît  saint  Jérôme. 

36,  Suiure.  —  «  Qui  traite  un  beau  sujet,  est  sans  peineéloquent.  »  Euripide. 

37,  Aller.  —  J.-J.  Rousseau  a  dit  aussi  :  «  Toutes  les  fois  qu'à  l'aide  d'un  so- 
h'cismc,  jo  pourrai  me  faire  mieux  entendre,  ne  pensez  pas  que  j'hésite.  » 
Il  s'est  bien  fait  entendre  sans  avoir  besoin  de  solécismes;  mais  cette  phrase 
montre  qu'il  était  aussi  peu  esclave  que  Montaigne  des  exigences  de  la 
grammaire.  Le  Clerc. 


278, 


Brusque.  —  Montaigne  excelle,  en  effet,  à  user  du  laconisme,  témoin  le 
membre  de  phrase  qui  se  rencontre  quelques  lignes  plus  haut  :  «  Que  le 
(iascon  y  arrive,  si  le  François  n'y  peut  aller.  » 

4.  Feriet.  —  Épitaphe  de  Lucain,  citée  dans  la  Bibliothèque  latine  de  Fa- 
hricius. 

5,  Affectation.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  d'artifice.         • 

7,  Fratesque.  —  Monacal,  de  ritalien  fratre,  moine. 

8,  Gaesar.  —  Add.  des  éd.  de  80,  82  et  87  :  Qu'on  lui  reproche  hardiment  ce 
qu'on  reprochoit  à  Séneque,  Que  son  langage  estoit  de  chaux  viue,  mais  que 

,  le  sable  en  estoit  à  dire. 

9,  Appelle.  —  Suétone,  César,  55,  ne  dit  pas  que  l'éloquence  de  César  était 
soldatesque,  c.-à-d.  brève,  saccadée,  nerveuse,  comme  on  imagine  le  lan- 
gage du  soldat,  parce  que  la  devise  qui  lui  convient  est  «  acta  non  verba 
(des  actes  et  non  des  paroles)  »,  mais  que,  sous  ce  rapport  aussi  bien  que 
sous  celui  des  talents  militaires,-  il  est  hors  de  pair.  L'erreur  de  Montaigne 
vient  de  ce  que  certaines  éditions  de  l'auteur  latin  sont  mal  ponctuées  en 
ce  passage;  par  suite  sa  remarque  à  cet  égard  est  sans  objet. 


F.348  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

22,  Soy.  —  C.-à-d.  l'éloquence  qui  fixe  toute  l'attention  de  l'auditeur  fait  tort 
aux  choses  dont  on  parle,  elle  en  fait  en  quelque  sorte  la  critique. 

27,  Paris.  —  Quand  on  demandait  à  Malherbe  son  avis  sur  quelque  mot 
français,  il  renvoyait  ordinairement  aux  crocheteurs  du  Port  au  Foin,  di- 
sant que  c'étaient  ses  maîtres  pour  le  langage,  ce  qui  a  donné  lieu  à  cette 
protestation  de  Régnier  : 

«  Comment!  11  faudrait  donc  pour  faire  une  œuvre  grande, 

Qui  de  la  calomnie  et  du  temps  se  défende 

Et  qui  nous  donne  rang  parmi  les  bons  auteurs. 

Parler  comme  à  Saint-Jean  parlent  les  crocheteurs.  • 

II  y  a  toutefois  lieu  de  croire  que  cette  indignation  était  inspirée  à  Ré- 
gnier plus  par  son  esprit  de  contradiction  que  par  ses  convictions,  si  on 
s'en  rapporte  au  jugement  que  Bou.eau  a  porté  sur  lui  : 

Heureux  si  ses  discours,  craints  du  chaste  lecteur, 
Ne  se  sentaient  des  lieux  où  fréquentait  l'auteur. 

30,  Seulement.  —  Diogène  Laerce,  X,  13. 

37,  Platon.  —  Des  Lois,  I. 

40.  Meilleurs.  —  Les  éd.  ant.  port.  ;  miens. 

40,  Disait.  —  Stobée,  Serm.,  34. 
280. 

•25.  Latine.  —  Cet  Allemand  se  nommait  Horstanus;  il  professa  dans  la  suit«î 
au  collège  de  Guyenne.  Le  père  de  Montaigne  essaya  d'en  agir  de  même 
pour  ses  autres  enfants;  il  dut  y  renoncer  par  la  difficulté  de  trouver  à  qui 
en  donner  la  charge. 

28,  Moy.  -  Latiniser  ainsi,  c'est  bien:  mais  que  devient,  durant  ce  temps, 
la  douce  et  irremplaçable  éducation,  qui  ne  peut  se  donner  en  latin,  que 
nous  recevons  sur  les  genoux  de  nos  mères,  qui  forme  nos  premiers  élans 
vers  les  choses  généreuses,  notre  première  préparation  aux  combats  de  la 
vie?  A  l'égard  de  Montaigne,  cette  manière  de  faire  a  dû  favoriser  en  lui 
l'impatience  de  toute  règle  et  de  toute  discipline.  Margerie. 

282, 

4,  Romanorum  —  Ouvrage  estimé,  publié  en  1555. 

6.  Temps.  —  Dans  ses  ouvrages,  Muret  expose  en  un  parfait  latin  antique 
des  idées  toutes  modernes.  On  a  de  lui  des  notes  sur  les  auteurs  anciens, 
dont  ses  études  ont  beaucoup  contribué  à  épurer  les  textes,  des  Harangues, 
des  Poésies  et  des  Épîtres.  —  On  raconte  de  lui  qu'étant  en  Italie,  il  tomba 
gravement  malade  et  entra  dans  un  hôpital.  Là.  deux  médecins  délibérant 
près  de  lui  sur  le  traitement  à  suivre  à  son  égard,  et  le  prenant  pour  un 
homme  du  commun,  ils  se  dirent  en  latin  :  «  Faciamus  periculum  in  anima 
vili  (Que  risquons-nous  sur  un  être  de  rien)?  »  pensant  bien  n'être  pas 
compris;  et  Muret  de  leur  crier  aussitôt  :  «  Ati  vilis  anima  pro  qua  mor- 
luus  est  Christus  (Eh  quoi,  n'est-ce  rien,  un  être  pour  lequel  le  Christ  a 
donné  sa  vie)?  »  Et  il  sortit  au  plus  vite  de  ce  lieu  pour  échapper  aux  ex- 
périences. BolilCet. 

14,  Intelligence.  —  Si  Montaigne  ne  savait  pas  le  grec,  il  n'en  était  pas  de 
même  de  sa  sœur  Madame  de  Lestonna,  témoin  l'anecdote  suivante  qui 
n'est  pas  sans  analogie  avec  celle  de  la  note  précédente  :  M.  de  Lestonna 
reçut  un  jour  la  visite  d'un  ami  venant  lui  proposer  une  «  débauche  d'a- 
mourette »  ;  et  sa  femme  se  trouvant  là,  l'ami  pensant  n'être  pas  compris 
d'elle,  s'exprimait  en  grec  ;  il  se  trompait,  elle  le  lui  fit  bien  voir,  il  dut  dé- 
taler au  plus  vite. 

16,  Tablier.  —  Table  servant  aux  jeux  de  dames,  d'échecs  et  de  trictrac, 
comme  il  en  existe  encore  aujourd'hui. 

25,  Et  ne  tus...  seruist.  —  Var.  de  80  .et  auoil,  vn  ioueur  d'espinelte  pour 
cet  effect. 


NOTES.         MV.  I,  CH.  XXV.         VOL.  I,  PAG.  282.  F.349 

20,  Instrument.  —  Ce  soin  était  confié,  comme  l'indique  la  note  précédento, 
à  un  joueur  d'épinelte,  petit  clavecin  qui  est  devenu  le  piano.  —  Le  ré- 
veil de  Montaigne,  enfant,  a  fait  le  sujet  d'un  tableau  par  Ed.  Hamman, 
(lui  a  été  exposé  à  Paris,  au  salon  de  1847. 

:i5,  Bien.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  d'vn  higement  bien  seur  et  ouuert. 
284, 

(i,  Guienne.  —  A  Bordeaux. 

U),  Lire.  —  Les  Eléments  de  mathématiques  d'Euclido  furent  pour  Pascal 
ce  qu'avaient  été  poui'  Montaigne  les  Métamorphoses  d'Ovide. 

23,  Lancelot  du  Lac.  —  Un  des  principaux  chevaliers  do  la  Table  Ronde 
(ordre  do  chevalerie  fabuleux,  institué,  suivant  les  légendes  de  la  Grande- 
Hretagne,  à  la  fin  du  v  siècle)  ;  ses  exploits  ont  été  chantés  au  moyen  âge, 
dans  un  roman  de  ce  nom. 

2.'{,  Amadis.  —  Amadis  des  Gaules,  poème  espagnol  de  chevalerie  du  moyen 
âge,  écrit  par  divers  auteurs,  traduit  en  français  par  ordre  de  François  I". 

23,  Bordeaux.  —  Huon  de  Bordeaux,  clianson  de  geste,  autrement  dit  de  faits 
héroïques  du  xn"  siècle. 

25,  Discipline.  —  C.-à-d.  le  soinrj  qu'on  auoit  à'mon  institution  (qu'on  ai)por- 
tait  à  mon  éducation),  comme  le  portent  les  éditions  antérieures. 

29,  Conniuer.  —  Qui  eut  le  bon  esprit  d'être  de  connivence,  d'accord  avec 
moi,  en  ayant  l'air  de  ne  pas  s'en  apercevoir. 

30.  L'JEneide.  —  Poème  épique,  l'un  des  chefs-d'œuvre  de  Virgile,  ayant  pour 
héros  Enée,  un  des  chefs  de  Troie,  venu  en  Italie  pour  s'y  établir,  après 
la  ruine  de  cette  ville,  et  auquel  les  Romains  faisaient  remonter  leur  origine. 

286, 

2,  Parties.  —  Acception  tirée  de  l'anglais,  signifie  ici  :  qualités,  talents, 
moyens  intellectuels. 

7,  Fainéantise.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  Stupidité. 

27,  Cognoissait.  —  «  Sous  ses  airs  d'indolence,  l'esprit  de  Montaigne  n'en 
était  pas  moins,  en  effet,  plein  de  hardiesse,  couvant  bien  des  audaces.  » 
Sainte-Beuvk. 
288, 

5,  Deformabat.  —  Montaigne  s'élève  ici  contre  la  réprobation  qui,  à  cette 
époque  et  longtemps  encore  après,  pesait  sur  les  comédiens.  De  nos  jours 
ils  sont  estimés  à  juste  titre  à  l'égal  des  autres  suivant  la  conduite  privée 
de  chacun,  bien  qu'on  puisse  leur  reprocher  à  tous  en  général  que  la  ré- 
clame à  outrance  qui  se  fait  autour  de  leurs  noms  et  qu'excusent  les  né- 
cessités du  métier,  les  porte  trop  à  en  prendre  les  exagérations  pour  des 
réalités,  à  quoi  il  faut  ajouter  qu'une  différence  existe  entre  eux  plus 
accentuée  que  dans  n'importe  quelle  autre  carrière.  Les  artistes  de  second 
ordre  (acteurs  et  chanteurs)  qui  vont  pérégrinant  de  ville  en  ville,  peinant 
à  l'extrême  pour  arriver  à  jouer  presque  chaque  jour  des  pièces  différen- 
tes, gagnent  peu,  sont  parfois  obligés  pour  vivre  à  des  compromissions 
que  le  besoin  excuse,  et  leur  considération  s'en  ressent.  Combien  autre  est 
l'existence  des  coryphées  de  la  profession,  jouant  cent  fois  de  suite  et  plus 
la  même  pièce  !  Ils  ont  des  loisirs  que  les  précédents  ne  connaissent  pas  et 
en  outre  réalisent  des  bénéfices  qui  leur  permettent  la  vie  la  plus  large; 
à  cela  rien  à  dire.  Seulement  il  y  en  a  parmi  eux  qui  oublient  trop  que  le 
monde  dépense  sans  compter  pour  ses  plaisirs,  alors  qu'il  est  le  plus  re- 
gardant pour  ce  qui  est  de  première  nécessité,  et  ils  jaugent  leur  valeur 
d'après  l'argent  dont  on  les  comble  et  deviennent  encombrants,  s'estimant 
sans  vergogne  au-dessus  de  ceux-là  mêmes  dont  ils  interprètent  les  œuvres, 
ne  se  disant  pas  que  dans  Molière,  dont  ils  s'honorent,  c'est  l'observateur, 
le  moraliste,  l'écrivain  incomparables  qu'on  admire,  et  pas  du  tout  l'acteur 
depuis  longtemps  ignoré  de  beaucoup. 

8,  Valent.  —  Qui  méritent  d'y  être  admis. 

17,  Spectacles.  —  Le  premier  édifice  moderne,  complètement  clos,  spéciale- 
ment destine';  à  cet  usage,  a  été  élevé,  vers  1500,  par  le  Bramante,  dans  le 
Vatican,  à  Rome;  ce  n'est  (|u'à  partir  du  xvii"  siècle,  qu'il  a  été  construit 


F.3i>0  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

on  Franco  des  salles  porinanentos  do  tli(''âtre.  —  Tout  récemment,  on  a 
ciierché  à  faire  revivre  dans  le  midi,  à  Béziers,  à  Orange,  le  théâtre  on 
plein  air,  et  cela  a  réussi  surtout  par  l'originalité,  la  rareté  du  fait;  mais 
ces  immenses  scènes  antiques  à  ciel  ouvert  conviennent  bien  mieux  aux 
jeux  du  cirque,  aux  combats  de  gladiateurs,  aux  courses  de  taureaux,  qu'à 
des  représentations  littéraires. 

17.  Diuertissement.  —  Diversions,  qui  servent  à  détourner  les  gens  de  se  li- 
vrer en  secret,  à  l'écart,  à  des  actions  qui  ne  sont  pas  à  louer. 

17,  Occultes.  —  Tout  ce  passage  est  en  contradiction  avec  ce  qu'a  écrit  plus 
tard  .J.-.l.  Rousseau  sur  ce  même  sujet  dos  spectacles;  et  ce  que  Montaigne 
on  dit  est  incontestablement  plus  vrai,  plus  solide  et  mieux  pensé  que  les 
sophismos  éloquents  du  philosophe  de  Genève. 

22,  Espouser.  —  Ce  chapitre,  qui  ne  saurait  être  ni  trop  loué,  ni  trop  lu,  ni 
trop  médité,  fait  autorité  en  matière  d'éducation;  la  partie  de  V Emile  où 
J.-J.  Rousseau  ti-ait'î  cette  question,  n'en  est  qu'un  commentaire.  Ce  sont 
les  mêmes  vues,  les  mêmes  idées  plus  ou  moins  étendues  ou  resserrées, 
mais  présentées  d'une  manière  moins  piquante,  moins  originale,  avec 
une  éloquence  plus  iiTfposanto  sans  doute,  mais  moins  persuasive,  parce 
qu'elle  est  moins  naturelle.  11  est  à  observer  que  les  seuls  précoptes  vérita- 
blement utiles  et  pratiques  sur  l'éducation  des  enfants  qu'on  remarque 
dans  le  livre  do  Rousseau  sont  précisément  ceux  qu'il  doit  à  Montaigne  : 
pour  peu  qu'il  s'écarte  de  son  guide,  il  ne  dit  guère  que  des  lieux  com- 
muns, ou  bien  s'égare  et  se  perd  dans  un  dédale  d'idées  vagues,  incohé- 
rentes, chimériques. 


CHAPITRE  XXVI. 


Ce  chapitre  est  numéroté  XXVII  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

23,  Suffisance.  —  Rien  n'est  plus  vrai  du  fait  même  de  notre  raison  dont  la 
conception  est  des  plus  limitées,  qui  ne  peut  en  outre  juger  que  par  déduc- 
tion et  est  bien  loin  de  voir  les  choses  comme  elles  sont  et  en  ignore  tou- 
jours les  causes  premières,  et  plus  encore  par  les  influences  des  milieux 
ambiants  qu'elle  subit  jusqu'à  complet  anéantissement. 

Cet  effet  est  particulièrement  manifeste  quand  on  considèi-e  à  quelle 
omnipotence  atteignent  les  croyances  les  plus  contraires  à  la  raison  :  «  Credo 
quia  absurdum,  je  crois  par  cela  même  que  c'est  absurde  »,  aphorisme  émis 
par  Tertullien  en  matière  de  foi,  est  un  axiome  d'application  constante. 

De  fait,  une  croyance  ne  dépend  pas  de  la  part  de  vérité  ou  d'erreur 
qu'elle  peut  contenir,  mais  uniquement  des  sentiments  qu'elle  fait  naître 
et  des  sentiments  qu'elle  inspire.  Impérativo  au  suprême  degré,  elle  n'ad- 
met ni  analyse  ni  discussion  et  par  elle  les  erreurs  les  plus  évidentes  so 
transforment  en  vérités  éclatantes;  chez  les  convaincus,  l'intelligence  la 
plus  haute  est  impuissante  contre  l'entraînement  de  la  foi  ;  l'apôtre  ne 
doute  de  rien,  aucune  difficulté  ne  l'embarrasse. 

En  dépit  de  tout  l'aisonnement,  les  croyances  communes  constituent  une 
force  qui  donne  à  un  peuple  une  cohésion,  une  énergie  qui  contribuent 
dans  la  plus  large  mesure  à  sa  sauvegarde;  et  l'un  de  nos  plus  grands 
dangers  à  l'époque  actuelle  est  bien  certainement  de  n'avoir  plus  guère  do 
croyances  communes  (G.  Lebon). 
29,  Saturusque.  —  Le  texte  latin  porte  saliate;  saturus  mis  pour  satur  cons- 
titue un  barbarisme.  Le  Clerc. 
290, 

1,  Juger.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  des  choses. 

2,  Nature.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  Dieu. 


NOTES.         LIV.  T,  CH.  XXVI.         VOL.  I,  PAG.  292.  F. 351 

292. 

12.  Rien  trop.  —  Maxime  philosophique  célèbre  attribuée  par  Aristote  à 
Bias  ;  Pline  en  fait  honneur  à  Chilon  ;  Diogkne  Laerce  pareillement,  mais 
ensuite  il  en  dote  Solon;  on  l'a  attribuée  à  d'autres  encore.  —  Elle  a  été 
émise  à  maintes  reprises  ;  on  en  retrouve  le  sens  dans  Homère  ;  Térence, 
dans  son  Andrienne,  la  met  dans  la  bouche  d'un  esclave  :  «  .Je  pense,  dit-il, 
que  beaucoup  est  chose  utile  dans  la  vie,  pourvu  que  beaucoup  ne  soit  pas 
trop.  »  Horace,  dans  sa  satire  I,  la  développe  en  deux  vers  souvent  cités  : 
«  En  toutes  choses,  il  est  certain  tempérament,  il  y  a  des  limites  détermi- 
nées et  le  bien  ne  se  trouve  ni  en  deçà  ni  au  delà.  »  Abstemius  l'e.xprime 
de  la  sorte  :  •-  Nul  immodéré  ne  dure  longtemps.  »  «  Trop,  c'est  trop,  »  a 
dit  RivARoi..  «  Surtout,  Messieurs,  pas  de  zèle,  »  répétait  Tài.leyrand  à  ses 
diplomates.  «  L'excès  en  tout  est  un  défaut,  »  est  un  aphorisme  des  plus 
usités.  On  dit  encore  :  <■  De  peu  on  jouit,  de  trop  on  pàtit.  »  Dans  le  Para- 
dis perdu  de  Milton,  Adam  demande  à  l'ange  Gabriel  s'il  vivra  longtemps  : 
«  Oui,  dit  l'ange,  si  tu  observes  la  règle  :  Rien  de  trop.  »  La  Fontaine  en 
a  fait  le  titre  d'une  de  ses  fables  et  a  dit  d'elle  avec  vérité  » 

•  Uien  (le  trop  est  un  point 
Dont  on  parle  souvent  et  qu'on  n'observe  point.  » 

Enfin,  on  peut  en  dire  aussi  qu'elle  était  la  maxime  favorite  de  Montaigne, 
qui  aurait  pu  la  prendre  pour  devise  au  même  titre  que  «  Que  sçay-ie  », 
car  dans  ses  jugements  en  toutes  choses,  comme  dans  tous  les  actes  de  sa 
vie  politique  et  privée,  il  en  a  fait  une  application  constante. 

15,  Moquer.  — En  1385.  Froissaut,  III,  17,  dit  que  la  rapidité  avec  laquelle  la 
nouvelle  en  parvint  du  Portugal  en  France,  au  comte  de  Foix,  fut  attribuée 
à  ce  que  celui-ci  avait  à  son  service  un  malin  esprit  qui  lui  rapportait  la 
nuit  les  nouvelles  de  ce  qui,  présentant  de  l'intérêt  pour  lui,  s'était  passé 
la  veille  dans  le  monde  entier. 

25,  Perdue.  —  En  93.  Antonius  Saturninus,  qui  commandait  deux  légions 
dans  la  Germanie  supérieure,  s'était  soulevé  et  avait  été  battu  par  le  lieu- 
tenant de  l'empereur  en  Gaule.  La  distance  du  lieu  du  combat  à  Rome, 
évaluée  par  Plutarque,  Paul  Emile,  à  20.000  stades  (le  stade  valant  150  pas 
environ),  ce  qui  ferait  500  lieues,  est  en  réalité  de  250.  La  nouvelle  s'en  ré- 
pandit dans  la  capitale  de  l'empire,  le  jour  même  où  le  fait  se  produisit, 
et  Domitien,  parti  nonobstant  à  la  tète  d'une  armée  pour  le  combattre, 
rencontra,  chemin  faisant,  le  courrier  qui  lui  était  envoyé  pour  lui  annon- 
cer sa  défaite. 

20,  L'accident.  —  Guerre  civile,  III,  30. 

35,  Nature.  —  Il  est  exact  que  Pline  présente  comme  vrais,  nombre  de  faits 
qui  depuis  ont  été  controuvés,  mais  c'est  inévitable,  et  dans  le  domaine  de 
la  science  bien  des  vérités  du  jour  au  lendemain  perdent  cette  qualité  ;  c'est 
ainsi  qu'il  n'existe  plus  de  gaz  permanents,  alors  qu'il  n'y  a  pas  un  demi- 
siècle,  on  en  comptait  cinq.  Par  contre,  certaines  autres  do  ses  assertions 
que  nous  tenons  comme  invraisemblables,  ne  le  sont  sans  doute  que  parce 
que  nous  ne  les  avons  pas  encore  vériliées  :  telle  cette  propriété  qu'il  relate 
de  l'huile  maintenant  le  calme  dans  une  certaine  mesure  parmi  les  flots 
d'une  mer  agitée,  ce  que  longtemps  on  a  considéré  comme  une  fable,  jus- 
qu'à ce  qu'assez  récemment  le  hasard  l'ait  confirmé.  Pline,  qui  manquait 
des  moyens  d'investigation  si  nombreux  aujourd'hui,  a  composé  son  His- 
toire naturelle,  comme  Buffon  a  écrit  la  sienne  qui,  sous  le  rapport  de  l'exac- 
,  titude,  laisse  aussi  fort  à  désirer,  ce  dont  ce  dernier  est  peut-être  moins 
excusable,  vu  la  différence  des  temps  et  une  plus  grande  facilité  de  con- 
trôle; il  n'en  est  pas  moins  un  auteur  éminemment  précieux  qui  a  con- 
servé à  la  postérité  beaucoup  d'indications,  de  procédés  que  nous  avons 
utilisés  et  qui,  sans  lui,  ne  seraient  pas  parvenus  jusqu'à  nous. 

38,  Impudence.  -^  L'édition  de  1588  porte  :  imprudence. 

39,  Tesmoigne.  —  De  Cimtale.  Dei,  XXII.  —  Les  corps  de  ces  deux  frères, 


P.352  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

martyrisés  au  i"'  siècle,  découverts,  d'après  uite  tradition,  on  380,  par  saint 
Anibroise,  sur  l'indication  qu'eux-mêmes,  dans  une  apparition,  lui  avaient 
donnée  du  lieu  où  ils  avaient  été  ensevelis,  furent  transférés  par  ses  soins 
dans  la  cathédrale  qu'il  faisait  construire  à  Milan;  et  c'est  dans  le  cours  de 
cette  translation,  qu'un  aveugle  qui  avait  touché  le  brancard  portant  ces 
j'eliques  avait  i-ecouvré  la  vue. 
294, 

1-2,  Recors.  —  Témoins;  du  verbe  latin  rec-ordari,  se  souvenir.  D'où  cette 
appellation  donnée  couramment  à  ceux  qui  assistent  un  huissier  pour  lui 
servir  de  témoins  et  lui  prêter  main-forte  en  cas  de  besoin. 

IG,  Frangèrent.  —  On  s'étonne  de  voir  Montaigne,  surtout  après  avoir  dé- 
cliné la  cro3ance  aux  miracles  attribués  à  saint  Hilairo,  se  faire  le  dé- 
fensoui"  si  zélé  de  ceux  que  rapporte  saint  Augustin,  parmi  lesquels  se 
trouvent  quelques  cas  de  résurrection.  La  vertu  et  la  piété  des  témoins  ne 
sont  piis  en  pareille  matière  d'importance  primordiale,  elles  peuvent  même 
porter  à  se  délier  de  témoignages  de  personnes  dont  la  foi  a  pu  sur  ce  point 
troubler  le  jugement  et  faire  préférer  ceux  de  profanes  moins  portés  à  cé- 
der à  semblable  entraînement.  —  Il  y  a  du  reste  un  point  qui,  en  fait  de 
guérisons  miraculeuses,  donne  à  réfléchir  :  Pourquoi  tous  les  miracles 
de  cette  nature,  des  temps  anciens  comme  de  nos  jours,  prêtent-ils  tous  à 
être  expliqués  par  la  science  à  laquelle  il  arrive  de  résoudre  elle-même  des 
cas  semblables?  Que  n'a-t-on  vu  une  fois,  une  seule  fois,  une  impossibilité 
indiscutable  se  réaliser,  quelqu'un  amputé  d'un  membre,  par  exemple,  ne 
serait-ce  que  d'un  petit  doigt,  le  recouvrer  soudainement  et  en  user,  comme 
avant  l'accident  survenu;  ce  serait  là  un  miracle  idéniable  que  seraient 
obligés  de  reconnaître  les  plus  incrédules. 

26,  Créance.  —  C'est  ce  triage  entre  les  choses  à  ci'oire  et  celles  à  ne  pas 
croire  qui  dans  l'Église  a  donné  naissance  à  la  plupart  des  hérésies  et  des 
schismes,  ce  qu'indique  l'étymologie  même  du  mot  hérésie,  aîç-naiz,  qui 
signifie  proprement  choix;  quant  au  schisme,  de  ayiGiia.,  division,  il  n'en 
est  que  la  conséquence. 

34,  Obéissance.  —  C'est  le  principe  même  de  la  religion  catholique  et,  de 
fait,  une  religion  ne  saurait  être  une  sans  cela;  seulement  l'application  de 
cette  autorité  souveraine  est  chose  délicate  :  l'obligation  de  ne  pas  empié- 
ter sur  ce  qui  n'est  pas  de  son  domaine,  de  s'adapter,  dans  chaque  pays,  à 
ses  mœurs  et  à  ses  lois,  de  n'être  ni  oppressive  ni  opprimée,  est  de  bien 
grande  difficulté,  d'autant  que  toute  erreur,  toute  maladresse  préjudicie,  à 
tort  mais  d'une  façon  effective,  à  la  religion  elle-même,  surtout  en  des 
temps  comme  les  nôtres  de  libre  discussion  et  d'indifférence  religieuse. 

39,  Sçauans.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  bien  fondez. 

CAPITRE  XXYIl. 
Ce  chapitre  est  numéroté  XXVIIl  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 


296, 


en  a  transporté  des  passages  entiers  et  nombreux. 

10,  L'ensuiure.  —  Le  suivre  des  yeux,  le  regarder  travailler,  voir  comment 
il  s'y  prend. 

12,  Suffisance.  —  Élaboré,  travaillé  avec  tout  le  soin  dont  il  est  capable. 

24,  Ignoré.  —  Qui  ne  savaient  pas  qu'il  était  déjà  désigné  sous  ce  titre. 

24,  Contre-vn.  —  Le  Contre-un,  ou  Discours  sur  la  servitude  volontaire  (Con- 
tre-un veut  dire  :  contre  le  gouvernement  d'un  seul,  la  monarchie},  opus- 
cule d'une  trentaine  de  pages  in-octavo,  est  un  pamphlet  qui  s'élève  contre 
les  abus  du  despotisme.  Inspiré  par  les  troubles  de  l'époque,  il  n'a  pour- 
tant pas  trait  aux  événements  d'alors,  et  de  plus,  il  ne  conclut  pas.  — 
Montaigne  dans  les  éditions  antérieures  indique  que  La  Boétie  l'a  composé 
à  l'àgo  de  dix-huit  ans,  et  on  fin  de  ce  chapitre  il  dit  seize,  probablement 


NOTES.         LIV.  I,  en.  XXVII.         VOL.  T,  PAf..  290.  P.3:i3 

pour  mieux  faire  valoir  la  précocité  d'esprit  de  son  ami,  car  il  ne  se  piquo 
guère  en  général  d'exactitude.  Ce  serait,  d'après  cela,  vers  1548  (^uo  ce  dis- 
cours aurait  été  écrit;  mais  il  témoigne  d'une  maturité  de  talent  qui  donne 
à  penser  à  certains  qu'il  pourrait  bien  dater  de  1554,  alors  que  l'auteur 
avait  vingt-quatre  ans,  ou  tout  au  moins  qu'il  a  été  retouché  à  ce  mo- 
ment; ils  s'appuyent  pour  cela  sur  ce  qu'il  y  est  fait  mention  de  du  Bellay 
qui  n'avait  rien  publié  avant  1549,  de  la  Franciade  de  Ronsard  et.  d'autres 
poètes  de  la  Pléiade,  dont  les  poésies  commençaient  seulement  à  se  répandre. 
—  Ce  n'est  que  dix  ans  environ  après  la  mort  de  l'auteur,  en  1574,  que  cet 
('crit  fut  publié  pour  la  première  fois  à  Bàle,  et  encore  en  latin  et  par  ex- 
traits; il  ne  l'a  été  intégralement  et  en  français  qu'en  1576,  à  Genève,  in- 
séré, comme  du  reste  en  1574,  dans  un  recueil  comprenant  d'autres  pièces 
s'inspirant  de  la  même  idée.  Du  reste,  il  produisit  peu  d'effet  sur  le  mo- 
ment et  n'a  réellement  acquis  de  la  vogue  qu'aux  époques  révolutionnaires, 
en  1789,  1852,  où  on  le  remit  en  lumière,  adapté  aux  besoins  du  moment. 
Par  lui,  on  a  fait  de  La  Boétie  un  précurseur  des  révolutions  modernes  : 
de  telles  idées  étaient  bien  loin  de  son  caractère,  et  ce  discours  a  été  de  sa 
l)art  un  morceau  purement  littéraire  où  les  sentiments  généreux  et  la 
fougue  de  la  jeunesse  se  sont  donné  carrière,  plutôt  qu'une  œuvre  politique 
rélléchie:  Bonnekon.  V.  I,  318. 
25,  leunesse.  —  Les  éd.  ànt.  aj.  ;  N'ayant  pas  alleinl  le  dix-huitiesme  an  de 

son  aage. 
38,  Gentil.  — A  ici  le  sens  de  généreux  qui  se  retrouve  dans  «  gentilhomme  », 
mais  dans  lequel  il  n'est  plus  guère  employé  aujourd'hui,  sauf  dans  quel- 
ques rares  localités,  avec  tendance  à  disparaître  complètement. 
298, 

G,  Ciuiles.  —  L'édit  de  janvier  1562,  sous  le  règne  de  Charles  IX  encore  mi- 
neur. Cet  édit  accordait  aux  Huguenots  l'exercice  public  de  leur  religion. 
Le  parlement  refusa  d'abord  de  l'enregistrer,  en  disant  :  «  Nec  possumiis, 
nec  debemus  (nous  ne  pouvons  et  ne  devons)  »,  et  finit  par  s'exécuter  après 
deux  lettres  de  jussion.  Il  y  a  dans  cet  édit  une  sorte  de  règle  de  conduite 
pour  les  Protestants;  il  y  est  dit  qu'«  ils  n'avanceront  rien  de  contraire  au 
concile  de  Nicée,  au  Symbole  des  Apôtres,  ni  à  l'Ancien  et  au  Nouveau 
Testament  ». 

7,  Place.  —  Le  mémoire  de  La  Boétie  sur  cet  édit,  si  jamais  il  a  été  im- 
primé, n'existe  plus.  On  ignore  dans  quel  sens  il  était  écrit;  il  est  a  sup- 
poser toutefois,  étant  donné  le  caractère  de  l'auteur  et  l'opposition  que  cet 
édit  rencontrait,  qu'il  devait  en  approuver  la  teneur  et  constituer  un  plai- 
doyer en  faveur  de  la  tolérance  religieuse. 
10,  Lumière.  — A  Paris,  en  1571.  — Les  œuvres  de  La  Boétie  se  composent  : 
d'une  traduction  de  l'Économique  de  Xénophon,  parue  sous  le  titre  de  Mes- 
nageri<>  ;  de  celle  de  deux  petits  traités  de  Plutarque,  de  fragments  du  Dante  ; 
pièces  de  vers  latins,  de  vers  français,  du  Discours  sur  la  servitude  volon- 
taire et  de  Mémoires  sur  nos  troubles  résultant  de  l'édit  de  janvier  1562. 
Ces  deux  derniers  opuscules,  Jlontaigne  ne  les  publia  pas,  craignant  qu'ils 
ne  devinssent  une  arme  pour  les  fauteurs  de  désordre  de  l'époque;  la  note 
ci-dessus,  I,  296,  Contre-vn,  indique  ce  qui  advint  du  premier.  V.  N.  I,  320  : 
.Main. 

19,  Siècles.  —  A  l'appui  de  sa  thèse,  Montaigne  aurait  pu  indiquer  ceux  qui, 
dans  l'antiquité,  ont  eu  des  liaisons  de  cette  nature  :  Hercule  et  Philoctète, 
Thésée  et  Pirithoiis,  Oreste  et  Pylade,  Pythias  et  Damon,  Épaminondas  et 
Pélopidas,  Alexandre  et  Iléphestion,  Scipion  et  Lelius,  et  pour  clore  par  un 
mot  de  Phèdre  :  «  Rien  de  plus  commun  que  le  nom,  de  plus  rare  que  la 
chose.  » 

20,  Aristote.  —  Morale  à  Nicomaque,  VIII,  I. 
300, 

5,  Enîans.—  L'infanticide  est  commun  en  Chine;  il  y  a  nombi-e  de  gens, 
même  à  leur  aise  qui  ne  gardent  |>as  plus  de  deux  ou  trois  enfants.  Annales 
de  la  propagation  de  la  Foi. 

ESSAIS   UE  MONTAIGNE.    —  T.    IV.  2.J 


F.Hoi  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

7,  L'aultre.  —  Les  (jd.  ant.  aj.  :  L'amitié  n'en  vient  iamais  là. 

8,  Aristippus.  —  Diogkne  Laerce,  II. 
11,  Plutarque.  —  De  l'amitié  fraternelle. 

14.  Dilection.  — Tendresse,  affection,  du  latin  dileclio,  qui  a  même  significa- 
tion. 

15,  Alliance.  —  Ce  Xerme  de  «  frère  »  était  souvent  employé  à  cette  époque 
pour  marquer  les  relations  d'affection  entre  personnes  que  n'unissait  aucun 
lien  du  sang.  C'est  dans  ce  même  ordre  d'idées  que  Montaigne  appelait 
Mademoiselle  de  Gournay  sa  fille  d'alliance;  ne  dit-on  pas  dans  le  même 
sens  des  «  frères  d'armes  »  et  «  frères  »  et  ■<  sœurs  »  dans  les  communautés 
i-eligieuses.  Cette  appellation  est  d'usage  courant  chez  les  peuples  sémi- 
tiques, c'est  à  elle  qu'est  probablement  due  cette  assertion  de  Renan,  dans 
la  Vie  de  Jésus,  cette  si  charmante  idylle,  que  Notre-Seigneur  avait  des 
frères. 

18,  Fraternelle.  —  Allusion  probable  au  droit  d'aînesse  qui  subsistait  alors, 
d'après  lequel  l'aîné  avait  des  privilèges  et  était  favorisé,  souvent  de  la 
façon  la  plus  abusive,  dans  la  succession  des  parents,  et  qui  n'était  pas  sans 
avantage  au  point  de  vue  de  la  société.  Il  maintenait  la  famille  en  lui 
donnant  un  chef  et  à  ce  chef  une  situation  qu'il  devait  utiliser  pour  aider 
tous  autres  à  se  tirer  d'affaire.  Ce  droit,  aujourd'hui  aboli  en  France,  sur- 
vit encore  dans  quelques  majorats,  immeubles  ou  dotations  inaliénables 
attachés  à  la  possession  d'un  titre  de  noblesse  et  permettant  au  titulaire  de 
■  .  garder  son  rang.  L'idée  essentielle  sur  laquelle  reposait  le  droit  d'aînesse 
était  d'empêcher  la  noblesse  de  péricliter,  l'idée  de  la  famille  n'en  était 
qu'une  résultante;  c'est  au  contraire  exclusivement  cette  dernière  qui  a 
donné  naissance  à  la  pensée  récemment  émise  de  permettre  de  constituer 
des  biens  familiaux  destinés  à  parer  à  la  désagrégation  de  la  famille,  amenée 
par  les  exigences  de  l'existence  et  les  facilités  de  se  répandre  au  loin; 
biens  de  valeur  restreinte,  mais  qui,  bénéficiant  de  certaines  immunités, 
demeureraient,  quoi  qu'il,  arrive,  un  centre  à  l'abri  de  toute  éventualité. 
20,  Souuent.  —  <<  Rara  concordia  fratrum  (la  concorde,  chose  rare  chez  des 
frères)  »,  est  une  maxime  de  jurisconsultes. 

«  Le  frère  est  ami  de  nature. 
Mais  son  amitié  n'est  pas  sûre.  » 

28,  Amitié.  —  »  Le  sort  fait  les  parents,  le  choix  fait  les  amis  »  (Delille). 
302, 

\b,  Vsage.  —  L'abbé  Sagette  estime  trop  au-dessus  de  tout  autre  sentiment 
cçtte  amitié  bien  éthérée  pour  de  simples  mortels,  et  que  son  culte  pour  la 
mémoire  de  son  ami  emporte  l'auteur  des  Essais  au  delà  de  l'humaine  na- 
ture, incapable  d'un  sentiment  platonique  si  pur  et  si  désintéressé. 

2.0,  Fins.  —  L'éd.  de  80  aj.  :  comme  de  la  génération,  alliances,  richesses. 

:]l,  Durable.  —  Mais  inversement.  Les  femmes  haïssent  mortellement  pour 
des  sujets  très  légers.  M""  de  Genlis. 

:?7,  Reietté.  —  Contre  cette  opinion  qui  regarde  les  femmes  comme  peu  pio- 
pres  à  l'amitié,  Thomas,  littérateur  français  du  xvin»  siècle,  dans  son 
Essai  sur  les  femmes,  1773,  dit  :  «  Rien  ne  leur  échappe,  elles  devinent  l'ami- 
tié qui  se  tait,  encouragent  l'amitié  qui  souffre  »  ;  les  rapports  de  M""'  Ré- 
camier  (1778  à  1849)  avec  de  Chateaubriand  et  Ballanche  témoignent  de  la 
vérité  de  cette  appréciation;  en  amour,  Thomas  leur  accorde  les  mêmes 
délicatesses. 

38,  Grecque.  —  Passage  des  plus  curieux  où  est  fort  bien  expliqué  ce  que 
c'était  que  cet  amour  des  Grecs  pour  les  jeunes  gens,  dont  on  a  tant  et  si 
diversement  parlé. 
304, 

33,  Achilles.  —Achille,  roi  des  Myrmidons,  peuple  de  Thessalie  (anc.  Grèce): 
le  plus  fameux  des  héros  grecs  qui  prirent  part  à  la  guerre  de  Troie  et 
immortalisé  par  Homère  dans  l'Iliade;  célèbre  en  particulier  par  sa  liaison 


NOTES.        LIV.  I,  CM.  XXVII.         VOL.  I,  PAG.  304.  F.3;w 

avec  Patroclc,  tué    par  Hector  qu'AcliilIe  tue    à  son   tour  pour  venger  la 
mort  de  son  ami,  et   tué  lui-même  par  Paris  d'une  flèche  au  talon,  seule 
partie  de  son  être  qui  lût  vulnérable  (XIII°  siècle).  Son  nom,  dans  toutes 
les  langues,  est  synonjme  de  bravoure  et  d'intrépidité. 
306, 

7,  Aristogiton.  —  Aristogiton  était  l'amant  de  Harmodius.  Hipparque,  qui 
gouvernait  Athènes,  conjointement  avec  son  frère  Hippias,  cherchant  à 
s'imposer  à  Harmodius,  celui-ci  et  Aristogiton  le  tuèrent.  D'autres  disent 
qu'Hipparque,  insulté  par  Harmodius,  s'en  vengea  en  insultant  la  sœur  de  ce 
dernier,  qui  avec  l'aide  de  son  ami  tua  l'insulteur.  Ce  faisant,  Harmodius 
tomba  lui-même  sous  les  coups  des  gardes  do  son  ennemi,  tandis  qu'Aristo- 
giton,  arrêté,  périssait  peu  après  dans  les  tortures.  Leur  mort  fut  le  point  de  dé- 
part d'un  mouvement  populaire  qui  délivra  Athènes  du  joug  de  la  tyrannie, 
509. 

14,  Equable.  —  C.-à-d.  «  d'une  espèce  d'amitié  plus  juste  et  plus  égale  »  que 
celle  dont  il  vient  d'être  parlé. 

19,  Parle.  —Ce  qui  suit  est  une  peinture  des  plus  touchantes  de  l'amitié, 

condensée  en  quelques  lignes. 
25,  Fatale. 

«  Il  est  des  nœuds  secrets,  il  est  des  sympathies 

Dont,  par  le  doux  rapport,  les  âmes  assorties 

S'attachent  l'une  à  l'autre,  et  se  laissent  piquer 

Par  un  je  ne  sais  quoi  qu'on  ne  peut  expliquer,  e  Corneille. 

33,  L'autre.  —  Il  y  a  dans  saint  Ambroise  pleurant  la  mort  do  son  frère,  et 
répandant  sur  sa  tombe  les  fleurs  de  son  éloquence,  des  mots  d'une  ten- 
dresse charmante,  des  pensées  d'un  raffinement  de  sensibilité  bien  rare, 
que  rappellent  certaines  pansées  et  certaines  expressions  de  Montaigne. 
Payen.  —  Il  en  est  de  même  dans  les  lettres  de  saint  Jérôme  à  l'occasion 
de  la  mort  de  Népotien.  —  Quant  à  ce  passage  même  des  Essais,  on  en  re- 
trouve l'imitation  suivante  dans  Lamartine  : 

«  Par  l'infaillible  instinct,  le  cœur  soudain  frappé, 
Ne  craint  pas  de  retour,  ni  de  s'être  trompé. 
On  est  plein  d'un  attrait  qu'on  n'a  pas  senti  naître; 
Avant  de  se  parler,  on  croit  se  reconnaître; 
Pour  tous  les  jours  passés  on  n'a  plus  un  regard  ; 
On  regrette,  on  gémit  de  s'être  vus  trop  tard  ; 
On  est  d'accord  sur  tout  avant  de  se  répondre; 
L'âme,  de  plus  en  plus,  aspire  à  se  confondre.  » 

34,  Publiée.  —  Dans  le  recueil  déjà  cité  plus  haut,  Paris,  1574;  ot  plus  ré- 
cemment. 

36,  Durer.  — Montaigne  et  La  Boétie  avaient  lié  connaissance  en  1559;  leurs 
relations  durèrent  donc  quatre  ans,  ainsi  du  reste  qu'il  est  dit  un  peu  plus 
loin;   lorsqu'ils  se  connurent,  La  Boétie  avait   29  ans  et  Montaigne  en 
avait  26. 
308, 

11,  Pareille.  —  C.-à-d.  avec  un  désir  et  un  empressement  égaux  de  part  et 
d'autre. 

15,  Intelligence.  —  Tiberius  Gracchus  avait  obtenu  le  vote  d'une  loi  agraire 
qui  distribuait  aux  citoyens  pauvres  les  richesses  qu'Attale,  roi  de  Per- 
game,  avait  laissées  au  peuple  romain;  devant  la  résistance  qu'y  fit  le  sénat, 
un  mouvement  populaire  se  produisit  dont  les  adversaires  de  Tiberius,  qui 
redoutaient  son  influence,  profitèrent  pour  le  faire  assassiner  au  milieu 
de  ses  partisans,  contre  lesquels,  lui  mort,  des  poursuites  furent  exercées, 
133.  CicÉRON,  De  l'Amitié,  11;  Plutarque,  Vie  des  Gracques,  b;  Valère 
Maxime,  IV,  7. 

20,  Lselius.  —  A  semblables  questions  insidieuses,  que  dans  leur  ardeur 
judiciaire  les  accusateurs  publics  sont  trop  souvent  portés  à  adi'esser,  une 


F.336  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

seule  réponse  est  à  faire,  c'est  celle  que  fit  Monseigneur  Turinaz,  évêque 
de  Nancy,  poursuivi  en  justice  à  l'occasion  de  faits  amenés  en  France  par 
la  loi  de  séparation  de  l'Église  et  de  l'État.  Le  Président  du  tribunal  lui 
disant  à  un  moment  donné  :  «  Et  qu'auriez-vous  fait,  si  vous  n'aviez  été 
évêque  t  »  —  -La  question  ne  se  pose  pas,  répondit  le  prélat,  puisque  je 
suis  évèque.  «• 

ii4,  Gvaccbus.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  de  laquelle  il  se  poiiuoU  respondre  comme 
de  lu  sienne.  —  A  la  suite  de  cet  événement,  Blosius,  qui  ne  fut  pas  autre- 
ment inquiété,  quitta  Rome  pour  retoui-nor  en  Asie;  mais  peu  après,  il  se 
donna  la  mort. 

29,  Commis.  —  Abandonné,  confié  ;  du  latin  commillere,  s'en  remettre. 

3G,  Plus.  —  C.-à-d.  n'est  pas  plus  déplacée  que  ne  le  serait  la  mienne. 
310, 

13,  Déifier  —  «  L'advereité  est  la  pierre  de  touche  de  l'amitié.  »  Maxime 
indienne.  —  «  Les  faux  amis  sont  comme  les  hirondelles,  qui  paraissent 
dans  la  belle  saison,  et  disparaissent  dans  la  mauvaise.  »  Cicéron.  —  «Le 
faux  ami  ressemble  à  l'ombre  d'un  cadran  qui  se  montre  quand  le  soleil 
briQe  et  disparaît  quand  les  nuages  le  voilent.  »  — Réflexion  d'OviDE  exilé, 
que  Ponsard  traduit  ainsi  : 

«  Heureux,  vous  trouverez  des  amitiés  sans  nombre; 

Mais  vous  resterez  seul,  si  le  temps  devient  sombre.  » 
«  Les  amis  de  l'heure  présente  II  faut  en  essayer  cinquante, 

Ont  le  naturel  du  melon  ;  Avant  que  d'en  trouver  un  bon.  •  Mermet. 

'  «  L'ami  de  tous  et  d'aucun,  c'est  toui  un.  » 

15,  L'aymer.  —  Aulu-Gelle,  I,  3,  qui  attribue  cette  maxime  à  Chilon.  Elle 
l'est  à  Bias,  par  Aristote,  Diogène  Laërce  et  Cicéron;  elle  l'a  été  à  Thaïes; 
elle  se  retrouve  dans  YAjax  de  Sophocle.  —  Elle  a  donné  lieu  à  bien  des 
controverses  :  les  anciens,  en  général,  abondent  dans  ce  sens  :  <■  Je  blâme 
l'homme  qui,  en  exerçant  l'hospitalité,  fait  d'excessives  démonstrations 
d'amitié,  comme  aussi  celui  qui  traite  mal  son  visiteur;  toutes  choses  sont 
mieux  qui  demeurent  dans  la  mesure  convenable.  »  Homère,  Odyssée.  — 
«  Les  leçons  d'une  longue  expérience  nous  ont  appris  que  les  mortels  de- 
vraient nouer  leurs  amitiés  par  des  attaches  légères,  faciles  à  rompre  ou  à 
serrer,  et  qui  ne  pénètrent  pas  jusqu'à  l'àme  (mot  à  mot  :  jusqu'à  la  pire 
moelle  de  l'àme).  D'une  affection  trop  tendre  qui  trouble  la  vie,  naissent, 
dit-on,  plus  de  tourments  que  de  charmes;  aussi,  je  préfère  en  tout  la 
modération  à  l'excès  et  j'aurai  pour  moi  l'opinion  des  sages.  »  Euripide,  Hip- 
polyte.  —  Cicéron,  dans  son  dialogue  sur  l'amitié,  est  du  même  avis.  — 
•SIarc-Alrèle  disait  avoir  appris  de  son  père  à  «  éviter  les  fureurs  dans  les 
attachements,  même  les  plus  purs  ••.  —  Les  vers  suivants  sont  la  contrepartie 
de  cette  même  thèse  : 

•  Ah .'  périsse  à  jamais  ce  mot  affreux  d'un  sage, 
Ce  mot,  l'effroi  du  cœur  et  l'effroi  de  l'amour: 
«  Songez  que  votre  ami  peut  vous  trahir  un  jour.  » 
Qu'il  me  trahisse,  hélas!  sans  que  mon  cœur  s'offense, 
Sans  qu'une  douloureuse  et  coupable  prudence. 
Dans  l'obscur  avenir,  cherche  un  crime  douteux. 
S'il  cesse  un  jour  d'aimer,  qu'il  sera  malheureux  !  » 

—  De  Sacy  l'a  aussi  combattue  dans  son  traité  De  UAmilié.  —  De  Jolbert 
enfin  est  cette  pensée,  commentaire  en  quelque  sorte  de  celle  qui  nous  oc- 
cupe: «  Il  n'y  a  plus  aujourd'hui  d'inimitiés  irréconciliables,  parce  qu'il  n'y 
a  plus  de  sentiments  désintéressés;  c'est  un  bien  né  d'un  mal.  » 

En  somme  cette  maxime,  appliquée  à  la  vie  privée,  est  très  discutable; 
elle  l'est  beaucoup  moins  dans  la  vie  publique  et  doit  être  de  règle  absolue 
dans  les  relations  de  peuple  à  peuple  ;  ce  n'est  pas,  comme  dit  La  Bruyère, 
un  principe  moral,  c'est  un  axiome  politique.  —  C'est  ce  qui  fait  que  l'An- 
gleterre, malgré  l'entente  cordiale  que  présentement  on  s'efforce  d'établir 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  XXVII.         VOL.  I,  PAG.  310.  F. 357 

entre  ellft  et  nous,  et  les  grands  avantages  économiques  qu'elle  en  retirerait, 
se  refuse  obstinément  et  à  bien  juste  raison  à  laisser  construire  le  tunnel 
sous  la  Manche.  Ne  sachant  ce  que  sera  demain,  elle  ne  veut  pas  mettre 
une  chance  contre  elle,  une  chance  d'invasion,  si  faible  soit-elle,  alors  que 
de  par  sa  position  insulaire  elle  est  inexpugnable.  (Ce  tunnel  projeté  de 
Sangatte  (Pas-de-Calais)  à  Douvres  aurait  une  longueur  de  24  milles 
(44  kil.  1/2)  sous  la  mer  et  30  milles  (55  kil.  1/2)  avec  les  raccordements  à 
fleur  du  sol;  la  dépense  est  évaluée  approximativement  à  400  millions).  — 
C'est  en  vertu  de  ce  même  principe  que  notre  attitude  boudeuse  et 
hargneuse  depuis  1870-71  est  si  inepte;  nous  aurions  dû  accepter  de  bonne 
grâce  les  conditions  que  nous  avons  signées  à  Francfort,  jusqu'au  moment 
où  nous  nous  serions  crus  en  mesure  de  le  rompre  et  résolus  à  le  faire; 
c'était  ce  à  quoi  nous  invitait  Gambetta  quand  à  propos  de  la  revanche  il 
disait  qu'il  fallait  y  penser  sans  cesse  et  n'en  parler  jamais;  c'est  du  reste 
sous  cotte  rt'>serve  que  sont  conclus  tous  les  traités  de  paix  quels  qu'ils  soient. 
Nous  avons  fait  et  continuons  à  faire  tout  le  contraire;  sans  y  penser, 
c'est-à-dire  alors  que  nous  sommes  pour  la  paix  atout  prix,  que  si  la  guerre 
survient  c'est  qu'elle  nous  sera  imposée,  qu'il  nous  sera  impossible  de 
nous  y  dérober,  nous  en  parlons  toujours,  d'où  une  situation  constamment 
tendue,  et  nous  nous  étonnons  de  trouver  l'Allemagne,  que  par  surcroît  notre 
presse  est  -sans  cesse  à  exciter,  en  travers  de  toutes  nos  intentions.  Une 
semblable  attitude,  peu  digne,  n'a  que  des  inconvénients,  celui  entre  autres 
de  nous  mettre  à  la  remorque  de  quiconque  a  intérêt  à  attiser  notre  ran- 
cune. 

19,  Amy.  —  Diogène  Laerce,  V,  21.  —  Dans  Don  Quichotte  se  trouve  ce  pro- 
verbe espagnol  :  «  Il  n'y  a  point  d'ami;  pour  ami,  les  cannes  deviennent 
des  lances.  »  —  Autre  proverbe  :  «  Il  faut  se  dire  beaucoup  d'amis  et  s'en 
croire  peu.  » 

29,  Eux.  —  «  Tout  est  commun  entre  nous,  l'amitié  est  commerce  d'égalité.  » 

Maxime  pythagoricienne. 
32,  Aristote.  —  Diogène  Laerce,  V,  20. 
312, 

1,  Ensemble.  —  Cette  interdiction  a  pour  unique  objet  d'empêcher  que,  lors 
.     du  décès,  ces  donations  ne  lèsent  les  héritiers  naturels  du  défunt. 

5,  Le  libéral.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  l'honnesle  et  le  courtois. 
8,  Demandoit.  —  Diogène  Laerce,  VI,  16. 

10,  Singulier.  —  Extrait  du  Toxaris  de  Lucien,  22. 

16,  Suruiure.  —  Le  Poussin  a  consacré  par  son  pinceau  cette  action  sublime; 
il  a  représenté  Eudamidas  dictant  ses  dernières  volontés;  la  gravure  a  re- 
produit ce  tableau. 

21,  Talens.  —  Le  talent  n'avait  pas  une  valeur  uniforme,  celle  du  talent  at- 
tique  était  de  5.720  francs. 

2 1,  Jour.  —  «  On  chercherait  en  vain  dans  les  temps  modernes  un  pareil 
trait  à  citer,  et  les  filles  sans  dot  de  notre  époque  ne  sauraient  s'en  pré- 
valoir pour  concevoir  des  espéranc^es.  «Victor  Thierry.  —  On  cite  bien  un 
fait  s'en  rapprochant,  mais  déjà  les  conditions  sont  autres  :  Eulalius  qui, 
de  fort  riche,  était  devenu  fort  pauvre,  institua  son  héritier  .lustin  I,  em- 
pereur d'Orient;  i\  le  chargeait  de  faire  élever  ses  filles,  de  les  doter  et 
aussi  de  payer  ses  dettes;  Justin  accepta  et  remplit  les  clauses  du  testa- 
ment, v*  siècle.  —  Charlotte  Corday,  condamnée  à  mort,  chargea  son  dé- 
fenseur Chauveau-Lagarde  de  payer,  de  sa  bourse,  ce  qu'elle  devait  dans 

'  sa  prison,  1793. 
314, 

2,  Moy.  —  Cette  façon  de  penser  n'est  pas  celle  de  tous  :  <■  Une  confidence 
faite  à  un  ami,  sur  ce  qui  touche  l'honneur  d'autrui,  est  une  atteinte  à  la 
charité.  »  S.  Ambroise.  —  Bourdaloue  a  exprimé  la  même  idée  en  la  dé- 
veloppant. 

20,  Alliance.  —  Xénophon,  Cyropédie,  VIII,  3. 

24,  Reste.  —  C.-à-d.  sans  exception,  ni  restriction  aucune. 


F.358  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

28,  Doiuent.  —  Un  tivêquc  de  Crax;ovie  avait  pour  marchand  un  Juif;  pour 
fermier,  un  socinien  (adhérent  à  la  secte  de  Sozzini,  hérésiarque  italien 
du  XVI"  siècle,  qui  repoussait  le  dogme  de  la  Sainte  Trinité  et  en  particu- 
lier la  divinité  de  .lésus-Christ);  pour  intendant,  un  protestant,  et  disait  : 
"  Ces  gens -là  seront  damnée  dans  l'autre  monde,  mais  ils  me  sont  néces- 
saires dans  celui-ci.  • 

316, 

1,  Cil.  —  Celui;  cil  est  un  joli  mot  qu'on  aurait  dû  conserver,  quand  ce 
n'eût  été  qu'à  cause  des  services  qu'il  peut  rendre  à  la  poésie.  Coste. 

5.  Action.  —  11  s'agit  ici  d'Agésilas.  Plutarque,  Agésilas,  9.  —  On  raconte 
un  fait  analogue  de  Henri  IV  qui,  surpris  par  l'amba-ssadeur  d'Espagne,  à 
quatre  pattes,  promenant  ses  enfants  à  cheval  sur  son  dos.  lui  dit  :  «  Vous 
êtes  père,  Monsieur  l'Ambassadeur,  vous  me  comprenez  et  m'excusez.  » 

13,  Menander.  —  Le  même  Ç[ui  a  dit  :  «  Celui-là  meurt  jeune  qui  est  aimé 
des  dieux.  » 

14,  Amy.  —  Plutarque,  De  l'Amitié  fraternelle,  3. 

20,  Années.  —  De  1559  à  1563.  Les  éd.  ant.  port.  :  quatre  ou  cinq  années,  au 

lieu  de  «  quatre  ». 
31,  Particeps.  —  Montaigne,  comme  il  fait  souvent,  a  changé  plusieurs  mots 

dans  cette  citation. 
1^3,  Demy. 

«  Pleurez,  mes  yeux,  et  fondez-vous  en  eau  : 
La  moitié  de  moi-même  a  mis  l'autre  au  tombeau.  »  Corneille. 

318, 

7,  Amabo.  —  La  lecture  de  ce  chapitre  qui,  de  fait,  se  termine  ici,  est  à 
compléter  par  celle  du  chapitre  des  œuvres  de  Bourdalole  intitulé  des 
Amitiés  humaines,  dans  lequel  il  examine  le  danger  des  amitiés  trop  ar- 
dentes, aveugles,  partiales  ou  trop  tendres,  et  où  il  repousse  les  entraî- 
nements du  cœur  qui  offensent  la  justice,  faussent  la  conscience  et  perver- 
tissent la  charité. 

8,  Seize.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  dixhuict. 

9,  Ouurage.  —  Le  Discours  sur  la  servitude  volontaire  que  Montaigne  re- 
nonce à  insérer  contrairement  à  ce  qu'il  s'était  proposé  au  commencement 
de  ce  chapitre,  parce  qu'il  venait  d'être  partiellement  publié  en  Suisse  par 
les  Protestants  (1578),  dans  le  but  de  s'en  faire  une  arme  contre  la  royauté. 
V.  N.  I,  296  :  Contre-vn. 

18,  louant.  —  C'est  ce  que  dit  Cornélius  Nepos  d'Épaminondas  :  «  11  était 
tellement  respectueux  de  la  vérité,  qu'il  ne  mentit  jamais  même  en  jouant.  » 

29,  Autre.  —  Les  vingt-neuf  sonnets  qui  font  l'objet  du  chapitre  suivant. 

30,  Enioué.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  Ce  sont  29  sonnets  que  le  sieur  de  Poiferrc 
homme  d'affaires  et  d'entendement,  qui  le  connoissoit  long  temps  auanl  moy, 
a  retrouué  par  fortune  chez  lui,  parmy  quelques  autres  papiers,  et  me  les 
vient  d'enuoyer  :  dequoy  ie  luy  suis  1res  obligé,  et  souhaiterois  que  d'autres 
qui  détiennent  plusieurs  lopins  de  ses  escris,  par-cy,  par-là,  en  fissent  de 
mcsme. 

CHAPITRE  XXVllI. 

Ce  chapitre  est  numéroté  XXIX  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

31,  Chapitre  XXVIII.  —  Ce  chapitre  n'est  à  proprement  parler  que  la  dé- 
dicace à  Madame  de  Grammont  de  vingt-neuf  sonnets  de  La  Boétie,  élégie 
amoureuse  à  l'imitation  de  Pétrarque,  composée  dans  la  jeunesse  de  l'au- 
teur et  aussi  faible  dans  la  forme  que  dans  le  fond.  Us  ont  été  supprimés, 
comme  n'étant  pas  de  Montaigne,  dans  la  plupart  des  éditions  postérieures 
à  celle  de  1588.  Nous  en  aurions  fait  autant,  s'il  était  bien  prouvé  que  la 
mention  écrite,  à  la  vérité  de  sa  main,  sur  l'exemplaire  de  Bordeaux  : 
«  Ces  vingt  neuf  sonnets  d'Estienne  de  la  Boétie,  qui  estoient  mis  en  ce 
lieu,  ont  esté  despuis  imprimez  avec  ses  œuurcs  »,  et  qui  figure,  à  l'ex- 


iNOTES.         LIV.  1,  CH.  XXVIII.         VOL.  I,  PAG.  218.  F.3o9 

clusion  des  dits  sonnets,  sur  l'édition  originale  de  1595,  témoignait  incon- 
testablement qu'il  n'avait  pas  l'intention  de  les  reproduire,  auquel  cas  la 
dédicace  aurait  dû  disparaître  également  et  ce  chapitre  tout  entier  être 
supprimé.  La  conserver  seule  est,  comme  le  font  oberver  Courbet  et  Roj-er, 
une  anomalie. 
33,  Guissen.  —  Diane,  vicomtesse  de  Louvigny,  de  la  maison  de  Foix,  connue 
avant  son  mariage  sous  le  nom  de  la  Belle  Corisande  (rAndouihs,  avait 
épousé  le  comte  de  Grammont  et  de  Guiche,  qui  mourut  au  siège  de  La 
Fèi-e  en  1580.  Le  nom  exact  est  Guissen,  dont  par  corruption  on  a  fait  Gui- 
fhen,  puis  Guiche.  Devenue  veuve,  Madame  de  Grammont  devint  et  de- 
meura longtemps  la  maîtresse  de  Henri  de  Navarre  avant  son  avènement 
au  trône  de  France.  11  en  était  éperdument  amoureux  et  eut  même  l'in- 
tention de  l'épouser;  c'est  pour  aller  la  retrouver  qu'il  s'arrêta,  au  lieu  de 
pousser  de  l'avant,  après  la  bataille  de  Coutras  et  perdit  de  la  sorte  le  fruit 
de  sa  victoire.  Du  reste,  elle  le  payait  de  retour  et  lui  fut  dévouée  toute 
sa  vie;  pendant  les  guerres  de  la  Ligue,  elle  vendit  pour  lui  ses  diamants, 
engagea  ses  biens  et  alla  jusqu'à  lui  envoyer  des  levées  de  20  à  24.000  gas- 
cons qu'elle  avait  enrôlés  à  ses  frais. 
320. 

12,  Main.  —  Montaigne  est  ici  quelque  peu  aveuglé  par  son  affection  pour 
son  ami.  Cette  pièce  de  vers,  élégie  ayant  trait  à  quelque  aventure  de  jeu- 
nesse de  l'auteur,  n'offre  rien  d'intéressant;  ce  n'est  d'un  bout  à  l'autre 
qu'une  plainte  amodreusc  exprimée  en  style  assez  rude  et  confus,  où  écla- 
tent les  faiblesses  et  les  emportements  d'une  passion  inquiète  qui  se  nour- 
rit de  soupçons,  de  craintes,  de  défiances,  dont  elle  est  accablée.  En  voici 
le  thème  : 

«  L'auteur  constate  qu'il  est  amoureux.  Ce  sentiment,  auquel  jusqu'ici  il 
«  avait  été  étranger,  le  tient  tout  entier;  en  vain  il  a  cherché  à  s'en  dé- 
"  fendre,  il  s'avoue  vaincu,  un  regard  de  celle  qui  l'a  conquis,  a  suffi  pour 
"  le  mettre  à  sa  merci.  Il  ne  la  nomme  pas;  mais  en  disant  qu'elle  est  la  plus 
"  belle,  chacun  la  reconnaîtra;  elle  est  sa  Dordogne,  et  bientôt  ses  chants 

-  et  son  amour  feront  passer  son  nom  à  la  postérité.  —  Mais  est-il  payé 
«  de  retour?  Elle  demeure  sourde  à  ses  pi'ières,  et  lui  va  se  consumant.  11 
■<  perd  courage;  se  jouerait- elle  de  lui?  Qu'elle  prenne  garde;  s'il  sait 
«  aimer,  il  sait  liaïr  aussi!  —  Dieu!  quel  blasphème  et  combien  il  maudit 
•<  les  vers  qui  ont  pu  exprimer  une  telle  pensée!  Et  voilà  qu'au  lieu  du 
«  châtiment  mérité,  un  mot  d'elle  vient  l'assurer  de  son  pardon.  —  C'en 
«  est  fait,  c'est  pour  la  vie  qu'il  se  reprend  à  l'aimer." Mais,  hélas!  si  sa 
"  bienveillance  va  le  captivant  de  plus  en  plus,  c'est  sans  lui  rien  concé- 
»  der.  Aussi  quelle  douleur  est  la  sienne;  et  cependant  il  se  complaît  dans 
••  ses  souffrances;  il  en  mourra,  mais  est-il  possible  qu'il  en  soit  autre- 
«  ment?  Ses  vers,  du  moins,  en  révélant  son  triste  sort,  le  vengeront  de 

-  l'Amour,  en  même  temps  qu'ils  l'exalteront,  elle  dont  la  grâce  et  les  per- 
«  fections  sont  de  nature  à  asservir  tous  les  cœurs.  » 

La  Boétie  (N.  I,  208  :  Lumière)  a  composé  quelques  autres  pièces  de  vers 
français,  on  y  relève  les  passages  suivants  : 

•  J.e  premier  coing  duquel  l'or  fut  battu, 
En  t)atlanl  l'or  abattit  la  vertu.  » 

Ainsi  l'on  voit  en  vn  ruisseau  coulant.  Par  cette-ci  celle-là  est  poussée 

Sans  Dn  l'vne  eau  après  l'autre  roulant;  Et  cette-ci  par  vne  autre  auancee  : 

Kl  tout  de  rang  d'vn  éternel  conduit,  Tousiours  l'eau  va  dans  l'eau,  et  lousiours  est-ce 

l-'vne  suit  l'autre,  et  l'vne  l'autre  fuit;     .  Même  ruisseau  et  tousiours  eau  diuerse.  • 

17.  L'oreille.  — -  Ce  secret  a-t-il  été  révélé?  Toujours  est-il  que  le  nom  de  la 
personne  qui  a  inspiré  ces  vers,  ne  nous  est  pas  connu. 
326, 

27,  Dourdouigne.  —  Le  poète  personnifie  ici  la  dame  de  ses  pensées  en  la 
Dordogne  (N.  I,  328  :  Honte)  au  cours  placide;  plus  loin  (Sonnet  xiv),  dans 


P.360  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

un  moment  d"irritation,  il  l'assimilera  à  sa  sœur  la  Vézère,  au  cours  ca- 
pricieux. 

:î5,  Fidelle.  —  Ce  vers,  qui  exprime  très  heureusement  une  idée  fort  juste, 
a  pris  place  parmi  les  locutions  fréquemment  employées  :  «  Qu'est-il  plus 
beau  qu'vne  amitié  fidelle?  • 
328, 

8,  lumeaux.  —  Castor  et  Pollux,  qui  reçurent  le  don  d'immortalité  dont  ils 
jouissaient  alternativement;  la  belle  Hélène,  cause  de  la  guerre  de  Troie, 
était  leur  sœur. 

12;  Honte.  —  La  Dordogne,  formée  de  deux  ruisseaux  :  la  Dore  et  la  Dogne, 
prend  sa  .source  à  quelques  lieues  en  amont  de  Sarlat,  patrie  de  La  Boétie, 
et  se  termine  en  Guyenne.  A  cette  époque,  cette  province  et  la  France, 
dont  elle  avait  été  séparée  pendant  plus  d'un  siècle,  quoique  réunies,  con- 
ser\'aiont  encore  leurs  appellations  distinctes;  c'est  ce  qui  fait  dire  à  l'au- 
teur que  sa  Dordogne  a  honte  de  se  montrer  si  modeste  on  France,  alois 
que  lorsqu'elle  en  sort  et  devient  gasconne,  son  cours  est  beaucoup  plus 
important. 

13,  Sorgues.  —  Ruisseau  illustré  par  les  poésies  de  Pétrarque  en  l'honneur 
de  la  belle  Laure  de  Noves,  qu'il  avait  rencontrée  à  Avignon  qui  se  trouve 
à  proximité. 

15,  Loir.  —  Nommé  ici,  parce  qu'il  passe  à  Vendôme,  ville  aux  environs  de 
laquelle  est  né  Ronsard,  auquel  ce  passage  fait  allusion. 

18,  Mince.  —  Le  Mincio.  Mentionné  comme  rappelant  Virgile,  originaire  de 
ilantoue,  qu'arrose  cette  rivière. 

19,  Ame.  —  L'Arno,  qui  passe  à  Florence,  patrie  de  Pétrarque  dont  le  sou- 
venir a  été  évoqué  quelques  lignes  plus  haut  et  l'est  encore  dans  le  son- 
net suivant. 

31,  Migregeois. — A  moitié  grec.  Properce  est  ainsi  qualifié  en  raison  des 
tournures  grecques  qu'affecte  son  style,  bien  qu'il  écrive  en  latin. 
330, 

3,  Mesure.  —  Ces  quatre  derniers  vers  :  Chacun  sent...,  sont  sans  contredit 
les  meilleurs  de  la  pièce  ;  par  les  idées  qu'ils  expriment,  la  manière  dont 
ils  les  rendent,  ils  méritent  attention. 
17,  Leandre.  —  Se  noya  en  franchissant  à  la  nage  l'Hellespont,  ainsi  qu'il  le 
faisait  chaque  nuit,  pour  aller  voir  Héro,  son  amante,  prêtresse  de  Vénus, 
qui  de  désespoir  se  précipita  dans  les  Ilots.  Myth. 
25,  Sauuez.  —  .\lIusion  à  la  fable  d'Hellé,  fille  d"un  roi  de  Thcbes,  et  de  son 
frère.  Travei-sant  la  mer  sur  un  bélier  à  toison  d'or,  pour  fuir  les  fureurs 
de  leur  belle-mère,  Hellé  tomba  dans  les  flots  et  y  péril,  tandis  que  son 
frère  et  le  bélier  furent  saufs,  d'où  cette  mer  prit  le  nom  d'Hellespont  (ac- 
tuellement détroit  des  Dardanelles).  —  La  largeur  de  l'Hellespont  varie  de 
1.750  à  3.000  mètres;  il  est  donc  facilement  franchissable  à  la  nage,  par 
un  excellent  nageur;  lord  Byron,  en  1810,  l'a  franchi  dans  ces  conditions 
à  la  suite  d'un  pari.  On  ne  saurait  en  dire  autant  du  Pas-de-Calais,  dont  la 
traversée  à  la  nage  a  été  souvent  tentée  et  ne  semble  avoir  été  accomplie 
qu'une  fois,  au  siècle  dernier,  par  un  Anglais,  le  capitaine  Webb,  parti  de 
France  pour  atterrir  en  Angleterre  ;  il  est  vrai  que  sa  largeur  est  de  34  ki- 
lomètres et  que  des  courants  régnant  au  large  obligent  à  un  parcours 
notablement  plus  considérable  et  augmentent  les  difficultés. 
334, 

3,  Faux.  —  Les  sonnets  xiv  et  xv  que,  dans  son  repentir,  l'auteur  désavoue. 
21,  Breuet  —  Un  billet  qui  a  la  vertu  d'un  talisman. 
336, 

30,  Meleagre.  —  Les  destins  avaient  décidé  qu'il  vivrait  tant  que  durerait 
un  tison  qui  brûlait  dans  le  foyer  au  moment  de  sa  naissance.  Sa  mère 
éteignit  aussitôt  ce  tison  et  le  conserva  soigneusement.  Dans  la  suite,  une 
discussion  s'étant  élevée  entre  lui  et  ses  oncles,  dans  la  chaleur  de  la  dis- 
pute, il  les  frappa  d'un  coup  mortel;  sa  mère,  irritée  du  meurtre  de  ses 
frères,  jeta  au  feu  le  tison  fatal  et  son  fils  expira  aussitôt.  Myth. 


iNOTES.         LIV.  I,  CH.  XXIX.         VOL.  I,  PAG.  334.  F. 361 

CHAPITRE  XXIX. 

Ce  chapitre  est  numéroté  XXX  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

344, 

20,  Excessiuement.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  immodérément. 
•20,  luste.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  vertueuse. 

21,  Diuine.  —  Saint  Paul,  Ep.  aux  Romains,  XIII,  3.  —  «  Ne  sois  pas  juste  à 
l'excès  et  ne  te  montre  pas  sage  outre  mesure.  •  Ecclésiaste,  VII,  6. 

'12,  Sage.  —  Moi.ièhe,  dans  le  M isatilhrope, émet  la  même  pensée: 

La  parfaite  raison  fuit  toute  extrémité. 
Et  veut  que  l'on  soit  sage  avec  sobriété. 

C'est  là  encore  une  application  de  la  maxime  :  «  Rien  trop  »  (N.  I,  292).  - 

24,  Sorte.  —  Il  y  a  probabilité  que  Montaigne  veut  parler  ici  de  Henri  III, 
roi  de  France,  qui,  par  des  retours  de  conscience,  alliait  à  des  débauches 
sans  nom  les  pratiques  de  la  religion  la  plus  austère  et  duquel  le  cardinal 
d'Ossat  écrivait  à  sa  veuve  que  «  ce  prince  avait  vécu  une  vie  aussi  et 
même  plus  religieuse  que  royale  »  ;  tandis  que  Sixte-Quii^t  en  disait  :  «  Il 
n'est  rien  qu'il  n'ait  lait  et  ne  fasse  pour  être  moine,  ni  que  je  n'aie  fait, 
moi,  pour  ne  l'être  point.  » 

28,  Fils.  —  Pausanias,  roi  de  Sparte,  trahissant  la  Grèce  auprès  des  Per- 
ses et  ayant  été  dénoncé,  se  réfugia  dans  le  temple  de  Minerve,  pour 
échapper  à  une  condamnation  à  mort  prononcée  contre. lui.  Nul  n'osait 
violer  cet  asile  lorsque  Alcithée,  sa  mère,  se  présenta,  dit-on,  devant  le  tem- 
ple et,  sans  proférer  une  parole,  prenant  une  brique  qu'elle  avait  ap- 
portée, la  plaça  sur  le  seuil  de  l'entrée  et  revint  chez  elle.  Les  Lacédémo- 
niens,  adoptant  son  jugement,  l'imitèrent  et  murèrent  ainsi  la  porte  du 
temple.  Pausanias  fut  réduit  à  y  mourir  de  faim,  477.  Diodore  de  Sicile, 
XI,  45;  Cornélius  Nepos,  Pausanias,  5.  —  Plutarque,  citant  également 
ce  fait,  en  raconte  un  semblable  survenu  à  Rome,  lors  de  la  guerre  contre 
les  Latins,  341.  Un  nommé  Cassius  Brutus  avait  fait  marché  avec  l'ennemi 
pour  lui  ouvrir  les  portes  de  la  ville;  découvert,  il  s'enfuit  dans  le  temple 
de  Minerve  auxiliatrice,  où  son  père  le  tint  tant  enfermé  qu'il  l'y  fit  mou- 
rir de  faim  et  jeta  son  corps  sans  sépulture. 

30,  Reng.  —  Dans  une  guerre  entre  les  Romains  et  les  Volsques,  Posthumius, 
dictateur,  aurait  fait  tomber  sous  la  hache  la  tête  de  son  propre  fils  qui, 
séduit  par  l'espoir  du  succès,  aurait  quitté  son  poste  et  livré  un  combat 
d'où  il  était  sorti  vainqueur,  496.  En  relatant  lô  fait,  Tite-Live,  IV,  29,  dit 
ne  pas  y  croire  et  qu'il  doit  y  avoir  erreur  chez  les  historiens  antérieurs  à 
lui  qui  le  rapportent  et  auront  confondu  avec  l'acte  analogue  de  Manlius 
Torquatus.  —  Plutarque,  dans  sa  Collation  abrégée  d'histoires  romaines 
avec  autres  semblables  grecques,  prête,  d'après  Ctésiphon,  la  même  conduite 
à  Epaminondas,  en  la  mettant  en  parallèle  avec  celle  de  Manlius.  Se  trou- 
vant en  présence  des  Lacédémoniens  et  rentrant  momentanément  à  Thèbes 
pour  l'élection  des  magistrats,  Epaminondas  avait  remis  le  commandement 
de  l'armée  à  son  fils  Stesimbrotus,  en  lui  défendant  de  combattre.  Les  La- 
cédémoniens, avertis  de  son  absence,  vinrent  provoquer  son  fils,  lui  re- 
prochant de  n'oser,  faute  de  cœur,  se  mesurer  avec  eux,  si  bien  que,  pas- 
sant outre  aux  ordres  de  son  père,  il  accepta  le  défi  et  battit  l'ennemi. 
.  Epaminondas,  de  retour,  lui  aurait  ceint  le  front  d'une  couronne,  emblème 
de  sa  victoire,  et  trancher  la  tète  pour  sa  désobéissance. 

33,  A  coup.  —  Tout  à  coup.  Marot  a  dit  dans  le  même  sens  :  «  Si  tu  ne  veux 
qu'à  coup,  je  perde  l'àme.  » 

35,  Platon.  —  Dans  le  Gorgias. 
346, 

13,  Endroit.  —  Dans  la  Secunda  Secundse,  154,  9. 

19,  Raison.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  soit  en  l'amitié,  soit  aux  effets  de  la  iouis- 


F.362  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

sance.  —  C'est  là  une  raison  aussi  étrange  qu'inexacte.  Cette  prohibition, 
prononcée  par  nombre  de  législateurs  de  tous  les  temps,  est  motivée  par  la 
dégénérescence  physique  et  intellectuelle  qui  résulte  parfois  pour  les  enfants 
de  la  consanguinité  des  parents  à  un  degré  trop  rapproché,  ce  dont  il  existe 
de  nombreux  exemples.  Ces  mariages  de  nos  jours  se  font  rares  :  dispersé 
de  bonne  heure  par  les  nécessités  de  l'existence  moderne,  le  milieu  familial 
existe  et  dure  de  moins  en  moins  ;  et  versant  dans  l'extrême  opposé,  on  ne 
s'y  marie  plus  guère  ;  on  prend  femme  ailleurs  là  où  le  sort  vous  a  porté, 
sans  prendre  le  temps  de  se  connaître  autrement  que  d'une  façon  banale, 
sans  rien  savoir  généralement  des  tenants  et  des  aboutissants  l'un  de  l'au- 
tre, autrement  dit  sans  garantie  aucune;  qu'ils  sont  loin  de  nous  ces  dic- 
tons de  jadis  qui  cependant  n'ont  rien  perdu  de  leur  vérité  : 

«  Harie-toi  dans  ta  rue,  si  tu  veux;  dans  la  maison,  si  tu  peux.  . 

«  Qui  va  loin  se  marier,  sera  trompé  ou  veut  trompai-.  » 

•  Homme  de  passage  n'attrape  femme  sage.  » 

23,  Liberté.  —  Syndiquer  sa  liberté,  c'est  l'aliéner,  donner  à  un  autre  des 
droits  sur  elle,  d'où  syndicat,  mot  qui  aujourd'hui  rend  si  bien  la  chose; 
en  ce  que  ceux  qui  en  font  partie  abdiquent  toute  volonté  entre  les  mains 
de  quelques-uns  qui  se  font  les  porte-paroles  des  revendications  de  tous 
ceux  qui  les  suivent,  parfois  à  regret,  parfois  contre  leurs  intérêts,  jusque 
dans  leurs  exagérations  et  leure  violences,  au  risque  parfois  de  tuer  dans 
un  avenir  plus  ou  moins  proche  la  poule  aux  œufs  d'or,  autrement  dit  l'in- 
dustrie qui  les  fait  vivre.  —  Les  syndicats  qui,  en  France,  sont  présente- 
ment (1906)  au  nombre  de  12.000,  réunissant  2.000.000  d'adhérents,  consti- 
tuent un  mode  d'association  dont  la  puissance  est  énorme,  par  le  nombre  et 
l'unité  de  volonté.  C'est  une  force  aveugle  souvent,  redoutable  toujours, 
d'autant  qu'ils  sont  irresponsables,  qui  transforme  de  craintifs  mercenaires 
en  hommes  avec  lesquels  il  faut  discuter  sur  un  pied  d'égalité;  malheu- 
l'eusement  leurs  tendances  despotiques  dépassent  souvent  le  but,  les  excès 
qu'ils  provoquent  portent  trop  fréquemment  atteinte  à  notre  industrie  et  à 
notre  commerce  et  rendent  peu  enviable  le  sort  des  patrons.  La  nécessité 
finira  par  amener  une  détente  dans  ces  rapports,  on  arrivera  à  comprendre 
que  les  intérêts  de  ceux-ci  et  de  leurs  ouvriers  sont  de  même  ordi*e,  que 
les  uns  et  les  autres  ont  un  maître  commun,  la  clientèle  seule  régulatrice 
réelle  des  salaires,  mais  que  de  désastres  avant  d'en  être  arrivés  là!  En  at- 
tendant il  serait  indispensable  que  les  syndiqués  portassent  solidairement 
la  responsabilité  des  attentats  aux  personnes  et  aux  propriétés  qu'ils  com- 
mettent et  que  de  ce  fait  leui"s  chefs  soient  passibles  des  peines  portées  con- 
tre quiconque  a  incité  à  commettre  les  crimes  et  délits  dont  sont  l'occasion 
les  désordres  dont  ils  sont  la  cause  première. 

Leur  action  a  du  reste  parfois  jdes  effets  impi-évus,  bien  différents  de  ce 
qu'ils  espéraient;  c'est  ainsi  qu'en  voulant  réglementer  les  heures  de  tra- 
vail et  les  salaires,  ils  ont  amené  les  patrons  à  restreindre  le  nombre  de 
leurs  ouvriers,  à  ne  garder  que  les  plus  capables  et  les  payer  à  la  tâche. 
Les  autres  sont  allés  grossir  le  nombre  déjà  si  considérable  des  ratés  de 
toutes  sortes,  et  s'ils  cherchent  encore  à  demander  au  travail  quelques 
moyens  d'existence,  ils  sont  obligés  d'accepter  à  des  prix  dérisoires  celui 
qu'ils  arrivent  accidentellement  à  se  procurer  d'industriels  éhontés  qui  ex- 
ploitent leur  misère  et  contre  lesquels  leurs  syndicats  ne  peuvent  rien. 
G.  Lebon. 
25,  S'il  s'en...  acharnez.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  ■<  car  il  y  a  grand  dangicr 

qu'ils  ne  se  perdent  en  ce  débordement  ». 
28,  Obsernée.  —  Montaigne  traite  ce  même  sujet,  liv.  111,  ch.  V  (III,  196).  — 
Ce  précepte  devait  être  d'observation  difficile  dans  l'antiquité,  là  où  il  était 
dans  les  habitudes  que  les  époux  couchassent  nus  dans  leur  lit,  ce  que 
mentionne  Hérodote  et  dont  on  trouve  confirmation  dans  nombre  d'au- 
teui-s  anciens,  dans  S.  Cyprien  entre  autres.  Pavex. 


NOTES.         LIV.  I,  CM.  XXIX.         VOL.  I,  PAG.  346.  F.363 

20.  Illégitime.  —  C'est  dans  cet  esprit  que  l'Église  prônant  la  continence 
interdisait  tout'  rapprochement  entre  les  nouveaux  mariés  durant  les  trois 
premiers  jours  de  leur  union,  et  aussi  défendait  au  mari  de  voir  sa  femme 
nue  :  '■  Maritus  non  débet  uxorem  suam  nudam  videre.  »  Payen.  Cette  absti- 
nence durant  les  trois  premiers  jours,  l'ange  Raphaël  la  conseilla  pareille- 
ment, pour  conjurer  le  démon,  à  Tobie  épousant  Sara,  qui  déjà  avait  eu 
sept  maris,  morts  dès  la  première  nuit  de  leurs  noces,  sans  l'avoir  déflorée. 
Livre  de  Tobie. 

21),  Encheriments.  —  Caresses,  démonstrations  d'affection,  de  clierer  ou 
chérir,  caresser  : 

•  Ne  vous  forcez  de  nie  cherer. 

Chere  ne  quiert  point  violence.  »  Mauot. 

Chérir  est  seul  demeuré  dans  la  langue,  mais  avec  un  sens  plus  plato- 
nique. 

35,  Simple.  —  Dans  une  annotation  sur  un  exemplaire  des  Essais,  Florimond 
DE  RÉMON,  auquel  Montaigne  avait  vendu  sa  charge  de  conseiller  au  par- 
lement, avait  écrit  :  «  l'ai  ouy  dire  à  l'autour,  qu'encore  que  plein  d'ardeur 
et  de  ieunesse,  il  eut  épousé  sa  femme  très  belle  et  bien  aimable,  si  est  ce 
qu'il  ne  s'estoit  iamais  ioué  auec  elle,  (ju'auec  le  respect  et  l'honnesteté  que 
la  couche  maritale  requiert,  sans  auoir  vu  oncques  à  decouuert  que  la  main 
et  le  visage,  non  pas  mesme  son  sein,  quoique  parmi  les  autres  fenmies  il 
fut  extrêmement  folâtre  et  débauché.  » 

;37,  Seuerité.  —  Saint  Jérôme  regarde  la  chasteté  conjugale  comme  plus 
difficile  que  celle  de  l'état  de  virginité  ou  de  viduité.  Bourualoue. 

38,  Consciencieuse.  —  «  La  santé  et  la  disposition  morale  des  époux,  au 
moment  de  la  conception,  ont  l'influence  la  plus  grande  sur  la  santé,  le 
caractère  et  les  dispositions  des  enfants;  et  il  est  très  important  de  se 
pénétrer  de  la  grandeur,  de  la  sublimité  du  mystère  de  la  procréation  et 
de  ne  jamais  s'approcher  de  sa  femme  avec  indifférence  et  pensant  à  autre 
chose.  »  Sterne. 

11,  Embrassement.  —  Var.  des  éd,  ant.  :  celte  accoinlance  :  cela  tiens  ie  pour 
certain  qu'il  est  beaucoup  plus  saincl  (sain)  de  s'en  abstenir. 
348, 

1,  Platon.  —  Lois,  VIII. 

3,  Flueurs.  —  Du  latin  fluere,  couler;  d'où  par  corruption  et  ignorance  est 
venu  «  fleurs  »,  qui  n'a  aucun  sens.  —  La  loi  de  Moïse  punissait  ce  fait  de 
mort,  mémo  en  mariage  légitime  :  «  Si  un  liomme  couche  avec  une  femme 
qui  a  son  indisposition  menstruelle,  ils  seront  retranchés  tous  deux  du  mi- 
lieu du  peuple.  »  Lévitique,  XX. 

1,  Mariage. —  Épouse  d'Odenath,  un  de  ceux  qui,  de  la  captivité  de  l'empe- 
reur Valérien  à  la  mort  do  Gallien  son  lils,  se  proclamèrent  <^mpcreurs  et 
sont  connus  dans  l'histoire  sous  le  nom  dés  «  trente  tyrans  »,  bien  qu'ils 
fussent  loin  d'être  dos  tyrans  et  d'atteindre  ce  nombre.  Après  la  mort  de 
son  mari,  on  272,  Zénobie  poursuivit,  non  sans  éclat,  l'accomplissement  de 
ses  audacieux  projets,  déployant  un  grand  faste;  elle  finit  par  être  vaincue 
par  Aurélien,  successeur  de  Gallien,  275.  Trebei-liusPollion,  30. 
7.  Déduit.  —  Ce  poète  si.  mal  qualifié  c'est  Homère  {Iliade,  XIV,  294);  mais 
il  .se  borne  à  dire  que  Jupiter,  apercevant  Junon,  ressentit  la  même  ardeur 
que  celle  qu'il  avait  éprouvée  lorsqu'il  allait  jouir  d'elle  pour  la  première 
fois. 

îîO,  Respect.  —  Plutarque,  Préceptes  du  mariage. 

25,  Capitaine.  —  Pi.utarque,  Instructions  pour  ceux  qui  manient  affaires 
d'État. 

30,  Chastes.  —  Cicéron,  De  Officiis,  I,  -10. 

30,  Consciencieuse.  —  Par  motif  de  conscience. 

34,  Concupiscence.  —  Spartie.v,  Verus.  —  «  Dans  le  mariage  il  n'y  a  pas 
d'amour,  parce  qu'on  ne  peut  aimer  où  il  n'y  a  pas  d'obstacle  ;  si  Laure  eut 


F.364  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

clé  la  femme  de  Pétrarque,  il  n'aurait  point  passé  sa  vie  à  rimer  des  son- 
nets en  son  honneur.  »  Lord  Byron. 

37,  Desbordez.  —  Le  fait  est  rapporté  par  S.  Justin  et  se  serait  passé  sous 
Marc-Aurèle.  S.  Jérôme  cite  le  cas  de  Fabiola,  dame  romaine,  mariée  à 
un  homme  corrompu  au  point  qu'elle  le  prit  en  aversion  et  le  quitta;  en- 
core jeune,  elle  se  remaria  et,  après  sa  mort,  fut  canonisée.  Le'  fait  de  cette 
femme  de  Catalogne,  mentionné  par  Montaigne,  rentre  un  peu  dans  ce  cas. 
En  France,  en  19..,  le  tribunal  de  la  Seine  prononçait  un  divorce  pour 
oxcès  d'amour. 

350, 

20,  Gallio.  —  Tacite,  Annales,  VI,  3. 

38,  Isthme.  —  L'isthme  de  Corinthe,  vers  1445.  Amurat  II  fit  la  conquête 
de  la  Morée. 

352, 

1,  Aage.  —  L'Amérique,  que  venait  de  découvrir  Christophe  Colomb,  1492. 

7,  D'autres.  — Au  Mexique,  avant  la  conquête  espagnole.  On  fendait  la  poi- 
trine de  la  victime  avec  un  couteau  de  pierre,  et  on  en  retirait  le  cœur 
dont  on  frottait  le  visage  de  l'idole.  A  certaines  fêtes,  des  sacrifices  humains 
avaient  lieu  où  les  prêtres  écorchaient  les  victimes  et  revêtaient  de 
leurs  peaux  des  ministres  subalternes  qui  se  distribuant  dans  les  divers 
quartiers  de  la  ville,  allaient  chantant  et  dansant. 

20,  Guerre.  —  Il  s'agit  ici  de  Montézuma  qui  immolait  tous  les  ans  plus  de 
20.000  de  ses  ennemis  ou  de  ses  sujets  rebelles;  il  se  faisait,  à  Mexico,  des 
sacrifices  qui,  à  eux  seuls,  coûtaient  la  vie  à  ce  nombre  de  captifs. 

CHAPITRE  XXX. 
Ce  chapitre  est  numéroté  XXXI  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

29,  Cannibales.  —  A  proprement  parler,  peuplades  anthropophages  d'Améri- 
que; mais,  dans  les  Essais,  cette  dénomination  s'applique  indistinctement 
à  tous  les  indigènes  du  Nouveau  Monde,  en  dehors  du  Mexique  et  du  Pé- 
rou, dont  il  avait  eu  occasion  de  voir  quelques-uns  venus  en  France,  sous 
Charles  IX,  lesquels  font  en  majeure  partie  le  sujet  de  ce  chapitre. 

30,  Italie.  —  Plutarque,  Pyrrhus,  8.  —  Pyrrhus  guerroya  à  deux  reprises 
différentes  en  Italie  contre  les  Romains  :  en  280  et  en  274. 

354, 

I,  Pais.  —  L'an  197,  quand  Flaminius  vint  à  leur  secours  contre  Philippe, 
roi  de  Macédoine,  qu'il  vainquit  à  Cynocéphales,  196.  Plutarque,  Flami- 
nius, 3. 

3,  Galba.  —  L'an  200,  lors  de  la  guerre  suscitée  par  la  mise  à  mort,  par  les 
Athéniens,  de  deux  Araucaniens  qui,  par  imprudence,  avaient  surpris  les 
mj'stères  de  Cérès.  Les  Araucaniens,  pour  venger  la  mort  de  leurs  conci- 
toyens, firent  appel  à  Pliilippe  de  Macédoine;  les  Athéniens  demandèrent  et 
obtinrent  le  secours  de  Rome;  c'est  à  l'arrivée  de  ces  secours  qu'il  est  fait 
allusion  ici.  Cette  guerre  est  la  même  que  celle  à  laquelle  se  rapporte  la 
note  précédente;  la  venue  de  Sulpitius  Galba  en  marque  le  commencement, 
celle  de  Flaminius  la  fin.  Tite^Live,  XXXI,  34. 

8,  Antartique.  —  Villegaignon,  envoyé  par  Henri  II  pour  faire  une  explo- 
ration en  Amérique  et  y  fonder  une  colonie,  débarqua  au  Brésil  en  1555  ; 
l'établissement  qu'il  y  fit  ne  s'y  maintint  pas.  Bayle,  Villegaignon. 

13,  Ventre.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  coinme  on  dict,  le  et  dit  on  de  ceux,  ausquels 
Cappetit  et  la  faim  font  plus  désirer  de  viande,  qu'ils  n'en  peuuent  emj)Ocher. 
le  crains  aussi  que  nous  auons  beaucoup,  au  lieti  de  :  «  et  ». 

15,  Platon.  —  Dans  le  Timée. 

28,  Déluge.  —  Cette  croyance  des  anciens  qu'on  retrouve  dans  Platon,  Élien, 
Ammien  Marcellin,  S.  Grégoire,  a-t-elle  été  une  réalité,  ou  l'Atlantide 
n'a-t-elle  été  qu'une  île  imaginaire,  on  ne  saurait  dire;  certains  ont  voulu 
y  voir  le  continent  américain. 


NOTES.         LIV.  I,  Cil.  XXX.         VOL.  [,   PAG.  354.  F.36;> 

31,  Italie.  —  La  séparation  de  la  Graiide-Bretagno  d'avec  la  Gaule  s'est  pro- 
bablement elTectuée  aussi  de  la  même  façon. 

34,  Surie.  —  La  Syrie  (Asie  Mineure). 

35,  Bœoce.  —  La  Béotie  (Grèce  ancienne). 

4i,  Espaigne.  —  Platon  ne  dit  rien  de  semblable.  —  On  trouve  aussi  dans 
les  phrases  suivantes  quelques  erreurs  géographiques,  répandues  sans  doute 
[lar  les  premiers  voyageurs  qui  parcoururent  le  Nouveau  Monde. 
356, 

\\),  Contiennent.  —  Ces  modifications  dans  les  rives  des  cours  d'eau  qui  vont 
gagnant  et  se  retirant  tantôt  d'un  côté,  tantôt  d'un  autre,  sont  fréquentes: 
si  bien  que  les  conséquences  en  sont  réglées  juridiquement  :  les  terrains 
ainsi  détruits  par  l'érosion  des  eaux  sont  perdus  sans  donner  lieu  à  in- 
denmité;  ceux,  au  contraire,  provenant  d'alluvions  ou  de  retrait  des  eaux 
l)rofitent  au  riverain. 

•..'3,  Fourriers.  —  C.-à-d.  qu'ils  assignent  à  la  mer,  lui  marquent  en  quoique 
sorte  la  limite  dans  laquelle  elle  doit  se  contenir. 

■i'.\,  Montioies.  —  Ou  mieux  «  mont  joug  »,  du  latin  mons  jugum;  ce  sont  à 
proprement  parler  des  mouvements  de  terrain  dénommés  «  croupes  »  en 
topographie  ;  cette  appellation  est  fréquente  dans  les  régions  montagneuses, 
notamment  dans  le  Jura;  de  là  vient  le  nom  du  château  ou  fort  de  Joux, 
près  de  Pontarlier. 

2'),  Pais.  —  Arzac  est  une  localité  à  cinq  lieues  de  Bordeaux.  —  L'enva- 
liissement  des  sables  dans  le  Médoc  est  estimé  de  20  à  25  mètres  par  an. 
On  a  calculé  que  depuis  l'époque  à  laquelle  remonte  la  formation  de  ces 
dunes  (environ  ii.50O  ans),  l'Océan  a  empiété  sur  les  terres  de  80  kilo- 
mètres; le  fort  Cantin,  construit  en  1754,  à  plus  de  200"  en  arrière  du 
rivage,  est  depuis  plus  de  cinquante  ans  déjà  enseveli  sous  les  eaux;  dans 
deux  mille  ans,  les  sables  atteindraient  Bordeaux,  si  on  ne  les  arrêtait 
ou  s'ils  ne  s'arrêtaient  d'eux-mêmes;  on  les  combat  au  moyen  de  plantes 
à  racines  nombreuses  et  traçantes  qui  les  fixent  et  finissent  par  les  con- 
vertir en  terres  cultivables. 

29,  Gibaltar.  —  Gibraltar.  Selon  les  anciens,  ce  détroit  n'existait  primitive- 
ment pas;  d'après  la  fable,  ce  serait  Hercule  qui  aurait  ouvert  ce  pas- 
sage aux  eaux  de  l'Océan,  en  séparant  les  deux  monts  Abyla  et  Calpé  qui, 
depuis,  furent  dénommés  «  Colonnes  d'Hercule  ».  Le  nom  de  Gibraltar  qu'il 
porte  aujourd'hui,  dérive  de  l'arabe  «  Djebel  et-Tarik  (montagne  de  Tarik), 
le  premier  général  musulman  qui,  le  franchissant,  envahit  l'Espagne,  710. 

39,  Estât.  —  Le  fait  se  serait  passé  en  l'an  397.  Partie  de  l'équipage  qui  au- 
rait fait  cette  découverte,  se  serait  établie  sur  ce  nouveau  territoire,  tandis 
que  le  reste  revenait  à  Carthage  où  le  Sénat  les  fit  tous  mettre  à  mort, 
redoutant  pour  l'avenir  de  la  ville  les  conséquences  qu'elle  pouvait  avoir. 
358, 

3,  Tesmoignage.  —  Cette  assertion  est  discutable;  l'ignorance  et  la  simpli- 
cité d'esprit  portent  à  accepter  comme  vrai  tout  ce  qu'on  voit,  tout  ce 
qu'on  vous  dit;  on  n'observe  pas,  on  n'analyse  rien,  aussi  avec  elles  le 
merveilleux  s'accredite-t-il  facilement. 
360, 

8,  Entreprinses.  —  J.-J.  Rousseau  a  sans  doute  puisé  dans  ces  réflexions 
de  Montaigne  le  célèbre  morceau  qui  commence  VÉmile  :  «  Tout  est  bien, 
sortant  des  mains  de  l'Auteur  des  choses  ;  tout  dégénère  entre  les  mains 
de  l'homme,  etc.  »  Amaury  Duval. 
14,  Platon.  —  Lois,  X. 

19,  Originelle.  —  Le  caractère  essentiel  de  la  civilisation,  c'est  de  raisonner 
et  de  prévoir,  qui  fait  qu'aux  instincts  du  présent  qui  est  l'unique  préoc- 
cupation des  peuples  primitifs,  se  substitue  chez  les  peuples  civilisés  une 
conception  des  conséquences  pour  l'avenir.  G.  Lebon. 

35,   Vsage.  —  L'éd.  de  88  port.  :  gousL 
362, 

1,  Perfection.  —  L'exemplaire  de  Bordeaux  ajoute  ici  cette  citation:  «  Viri 


F.366  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

a  fins  récentes  (voilà  des  Jiommes  qui  sortent  de  la  main  des  dieux)  ».  Sk- 
NÈQUE,  Episl.  90.  Elle  a  probablement  été  supprimée  par  les  éditeurs  de 
1595,  comme  faisant  double  emploi  avec  la  suivante. 
19.  Flanq.  —  Les  Canadiens  habitent  dans  des  bâtiments  de  100  pieds  de 
long,  sur  15  à  20  de  lai-ge.  où  il  nV  a  ni  fenêtres,  ni  cheminées.  —  En  Gui- 
née, les  sauvages  ont  leurs  habitations  semblables  à  des  granges,  pouvant 
recevoir  plus  de  cent  personnes.  Wilson. 
.*7,  D'autant.  —  C-à-d.  dans  le  jour  et  abondamment. 

32,  Duit.  —  Du  verbe  duire  qui  vient  du  latin  decet,  il  sied,  il  convient.  — 
Le  breuvage  des  sauvages  brésiliens  est  fait  avec  la  racine  de  manioc  ou 
yucca  (plante  à  racine  charnue  comme  la  pomme  de  terre),  que  l'on  fait 
bouillii-  et  que  les  femmes  mâchent  ensuite  et  rejettent  dans  des  vases  où 
elle  bout  une  deuxième  fois.  Le  manioc  est  de  deux  espèces  :  l'une,  dont 
un  des  emplois  vient  d'être  indiqué,  se  mange  aussi  cuite  sous  la  cendre; 
l'autre  est  un  poison  violent.  —  11  se  fait  également  de  la  boisson  avec  du 
maïs. 
364, 

31,  Brusier.  —  Hérodote,  IV,  69. 
366, 

1,  Boutes.  —  Déroute,  défaite;  mis  pour  roupte,  du  latin  ruptus,  rompu. 
12,  Absens.  —  Dans  la  Nouvelle-Zélande  (grandes  îles  de  l'Océanie  au  nom- 
bre de  deux  et  qui  sont  l'antipode  de  la  France),  l'anthropophagie  est  re- 
gardée moins  comme  une  satisfaction  physique,  que  comme  une  excitation 
morale,  et  il  est  honorable  pour  le  vaincu  d'être  mangé  par  le  vainqueur, 
c'est  le  sort  des  armes;  un  prisonnier  qui  n'est  pas  mis  à  mort  est  désho- 
horé.  L'anthropophagie  ne  s'y  pratique  qu'entre  tribus  belligérantes  et 
seulement  durant  la  guerre.  Reybaud. 

38,  Nourriture.  —  Di0Gf:NE  Laerce,  VII,  188. 
368, 

2,  Dehors.  —  On  a  employé  en  médecine  la  momie  d'Egypte;  il  en  entrait 
dans  la  Thériaque  de  Venise  (préparation  pharmaceutique).  Ambroise  Paré, 
contemporain  de  Montaigne,  en  fait  souvent  mention,  mais  presque  tou- 
jours pour  en  blâmer  l'usage.  Payen. 

11,  Vberté.  —  Fertilité,  fécondité,  du  latin  uberlas,  qui  a  même  signification. 
34,  Liberté.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  leur  fournissent  de  toutes  les  commo- 
ditez  de  quoy  ils  se  peuuent  aduiser. 
370, 

1,  Loyer.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  vertu  et  à  leur. 
22,  Pugnat.  —  Le  texte,  latin  porte  :  etiam  si  ceciderit  (et  s'il  tombe). 

25,  Fortune.  —  Sésèque,  De  Constantia  sapientis,  6. 

26,  Vaincu.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  c'est  son  maVheur  qiCon  peut  accuser,  non 
pas  sa  lâcheté. 

29,  Sicile.  —  Salamine;  victoire  navale  remportée  par  les  Grecs  sous  Eury- 
biade,  roi  de  Sparte,  et  Thémistocle,  chef  des  Athéniens,  contre  les  Perses, 
480.  —  Platée;  les  Grecs,  sous  Pausanias,  roi  de  Sparte,  et  Aristide,  gé- 
néral des  Athéniens,  y  défirent  les  Perses,  479.  —  Mycale;  la  flotte  grec- 
que commandée  par  l'Athénien  Xantippe  y  vainquit  celle  des  Perees,  le 
même  jour  qu'avait  lieu  la  bataille  de  Platée.  —  Sicile  ;  il  s'agit  probable- 
ment de  la  défaite  qu'y  éprouvèrent  les  Athéniens,  en  414,  devant  Syra- 
cuse, du  fait  de  Gylippe,  général  lacédémonien. 

31,  Thermopyles.  —  En  480,  Léonidas,  roi  de  Sparte,  préposé  à  la  défense 
de  ce  défilé,  après  y  avoir  arrêté,  pendant  quelques  jours,  l'invasion  de 
Xerxès  à  la  tête  d'une  armée  incroyablement  plus  nombreuse,  apprenant 
quMl  allait  être  tourné  et  se  rendant  compte  que  tout  ce  qui  demeurerait 
serait  exterminé,  ne  conservant  avec  lui  que  300  Spartiates  et  les  contin- 
gents de  Platée  et  de  Thespie,  ensemble  4.000  hommes,  succomba  après 
une  défense  héroïque,  obéissant  aux  lois  de  Lacédémone  qui  lui  interdi- 
saient d'abandonner  un  poste  qui  lui  avait  été  confié  et.  du  même  coup, 
assurant  à  Sparte,  par  ce  .saci'ifice.  la  supériorité  morale  sur  toutes  les  au- 


NOTES.         IJV.  I,  CH.  XX.X.         VOL.  I,  PAG.  370.  P.367 

très  villes.  —  Los  historiens  grecs  estiment  à  deux  et  même  à  trois  mil- 
lions d'hommes  l'armée  des  Perses  en  présence  de  laquelle  se  trouvait  Léo- 
nidas.  Mais,  outre  que  dans  leurs  armées  le  nombre  des  non  combattants 
excédait  celui  des  combattants,  ce  n'est  que  par  les  Grecs  que  nous  con- 
naissons les  guerres  médiques,  et  il  y  a  lieu  de  penser  que  leur  amour- 
propre  et  leur  vanité  ont  de  beaucoup  exagéré  les  forces  de  leurs  ennemis, 
et  que  le  récit  de  leurs  hauts  faits,  par  manque  de  renseignements  con- 
tradictoires, est  lui-même  quelque  peu  sujet  à  caution.  —  Quoi  qu'il  en  soit, 
l'appréciation  qu'en  porte  Montaigne  est  pleinement  justifiée,  parce  que,  ne 
])ouvant  vaincre,  ils  sont  morts;  en  dehors  d'être,  jusqu'au  dernier,  dans 
limpossibilité  de  combattre,  il  n'est  pas  de  défaite  glorieuse. 

[)?,,  Perte.  —  En  364,  lors  de  la  guerre  entre  Sparte  et  Thèbes  dont  les  Ar- 
cadiens  étaient  les  alliés.  Diodore  de  Sicile,  XV,  64. 
372, 

15,  Tuition.  —  Défense,  mot  francisé  par  Montaigne,  du  latin  tuilio  qui  a 
même  signification. 

iO,  Trétous.  —  Ou  trestouts,  souvent  employé  dans  les  Essais,  semble  le  su- 
perlatif de  tous. 

34,  Nostre.  —  Ce  sentiment  d'admiration  pour  la  vie  primitive,  sorte  d'âge 
d'or,  se  retrouve  dans  tous  les  écrivains  de  cette  époque,  qui  n'ont  fait  que 
passer  dans  ces  nouveaux  continents.  Ceux  qui  y  ont  séjourné,  en  parlent 
tout  autrement  ;  en  vivant  au  milieu  de  ces  peuples,  disent-ils  alors,  on  y 
retrouve  tous  les  vices  et  les  mauvais  penchants  des  pavs  civilisés. 
374, 

4.  Vertu.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  valeur. 

7,  Maris.  —  La  mémoire,  ou  plutôt  l'attention  de  Montaigne  est  en  défaut; 
Sara  était  femme  non  de  Jacob,  mais  d'Abraham  ;  n'ayant  pas  d'enfant  et 
pensant  n'en  avoir  jamais,  elle  lui  donna,  pour  lui  en  procurer,  Agar,  ser- 
vante égyptienne,  qu'elle  chassa  ensuite,  elle  et  son  fils,  quand  elle-même 
vint  à  en  avoir.  —  Lia  et  Rachel,  femmes  de  Jacob,  agirent  à  peu  près 
de  même,  mais  avec  plus  d'humanité  :  Rachel,  jalouse  de  ce  que  Lia  sa 
sœur  avait  des  enfants,  donna  Bêla  sa  servante  à  son  mari  pour  en  avoir, 
et  Lia,  ayant  cessé  d'en  avoir,  se  fit  suppléer,  elle  aussi,  par  Zelplia  sa  ser- 
vante, et  elles  considérèrent  comme  leurs  les  enfants  nés  dans  ces  conditions. 
Des  douze  fils  de  Jacob  (il  eut  aussi  des  filles),  six  naquirent  de  Lia,  deux 
de  Rachel  (Joseph  et  Benjamin),  deux  de  Bêla  et  deux  de  Zelpha.  Genèse. 

8,  Auguste.  —  L'empereur  Auguste  fut  toujours  fort  adonné  aux  femmes, 
dit  Slétone  (Auguste,  71),  et,  avec  l'âge,  aima  surtout  les  vierges;  aussi  lui 
en  cherchait-on  de  tous  côtés,  même  sa  femme. pour  arriver  de  la  sorte  à 
conserver  son  ascendant  sur  lui.  Dans  le  même  but.  Madame  de  Pompa- 
dour  se  prêtait  pareillement  aux  caprices  amoureux  de  Louis  XV,  ce  fut 
l'origine  du  Parc  aux  cerfs. 

8,  Interest.  —  Contre  son  intérêt,  à  son  détriment,  à  ses  dépens;  cette  ac- 
ception, tout  opposée  à  celle  de  nos  jours,  est  fréquente  dans  les  Essais. 

12,  Père.  —  Ne  pouvant  avoir  d'enfant  de  Déjotarus  son  mari,  Stratonice, 
pour  ne  pas  laisser  le  trône  de  Galatie  sans  héritier,  le  pria  d'en  chercher 
auprès  d'une  autre  et  choisit  elle-même  à  cet  effet,  parmi  les  captives  faites 
à  la  guerre,  une  belle  jeune  fille  qui  avait  nom  Electra.  Plutarque,  Des 
vertueux  faits  des  femmes.  — Une  reine  de  Portugal,  Elisabeth,  prenait  sur 
ses  genoux  les  enfants  que  son  mari  avait  eus  de  diverses  maîtresses;  Diane 
de  Poitiers  le  faisait  pour  les  enfants  de  Catherine  de  Mêdicis. 

14,  Vsance.  —  Usage;  de  l'italien  usanza,  qui  a  même  signification. 

30,  Deçà.  —  De  ce  côté-ci  des  mers,  de  notre  pays. 

34,  Estait.  — •  En  1562,  après  la  reprise  de  cette  ville  par  le  duc  de  Guise  sur 
les  Protestants. 
376, 

8,  Maisons.  —  On  voit  que  ce  n'est  pas  chez  Proudhon  qu'est  née  l'idée  que 
la  propriété,  c'est  le  vol  ;  ce  paradoxe,  si  cher  aux  socialistes  et  base  de 
leurs  revendications,  émis  avant  lui  sous  une  autre  forme  par  ces  .sauvages. 


P.368  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

il  n'a  pas  davantage  été  lo  premier  à  le  soutenir;  on  le  trouve,  en  effet, 
exposé  et  développé  dans  un  dialogue  d'Estienne  Pasquier,  datant  de  156U. 
Payen. 

13,  Capitaine.  —  Chef;  du  latin  caput,  tête. 

17,  Espace.  —  C'est  de  cette  façon,  au  dire  d'Hérodote,  que  Xerxès  avait  pu 
faire  le  dénombrement  de  son  immense  armée. 

2^  Chausses.  —  «  Comment  saurait-on  être  Persan  '•,a  dit,  un  siècle  après, 
Montesquieu,  avec  la  même  ironie  narquoise.  Bonnefon.  —  «  La  prévention 
du  pays  et  l'orgueil  de  la  nation  (auxquels  nous  appartenons)  nous  font 
oublier  que  la  raison  est  de  tous  les  climats  et  que  l'on  pense  juste  partout 
où  il  y  a  des  hommes.  »  La  Brlvère.  —  Le  haut- de-chausses  était  la  partie 
du  vêtement  couvrant  depuis  la  ceinture  jusqu'au.x  genoux,  ce  qu'actuel- 
lement on  appelle  communément  culotte. 

CHAPITRE  XXXI. 

Ce  chapitre  est  numéroté  XXXII  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  do  Bordeaux. 

26,  Platon.  —  Dans  Critias. 
378, 

9,  Esteut.  —  Au  propre,  leur  balle;  est  ici  pris  au  figuré:  leur  jeu. 

29,  larnac.  —  En  mai  1569,  avait  eu  lieu  à  La  Roche  l'Abeille  une  échauf- 
fourée,  où  l'amiral  Coligny,  chef  des  Protestants,  avait  eu  le  dessus  sur 
l'armée  catholique  que  commandait  le  duc  d'Anjou  (depuis  Henri  III), 
lequel,  le  mois  précédent,  avait  été  vainqueur  à  Jarnac,  et,  quelques  mois 
après,  en  octobre,  gagnait  la  bataille  de  Montcontour. 

32,  Froid.  —  Prendre  d'un  sac  deux  moutures,  c'est  se  faire  indemniser 
deux  fois  pour  un  même  service  rendu.  —  Souffler  le  cliaud  et  le  froid, 
c'est  soutenir  indifféremment  le'  pour  et  le  contre,  c'est  avoir  la  langue 
double.  La  Fontaine,  dans  «  le  Satyre  et  le  Passant  »,  une  de  ses  fables  le 
moins  bien  réussies,  conclut  : 

«  Arrière  ceux  dont  la  bouche  Souffle  le  cliaud  et  le  froid.  • 

Avant  lui.  Le  Noble  avait  usé  de  cette  locution,  à  l'adresse  des  avocats  : 

•  Quoi,  coquin!...  Souffler  de  même  bouche  et  le  chaud  elle  froid.  • 

35,  D'Austria.  —  1571,  dans  le  golfe  de  Lépante,  où  la  flotte  turque  fut  dé- 
truite par  les  flottes  combinées  de  l'Espagne,  de  Venise  et  du  Pape.  — 
••  Dom  »  et  «  Don  »  viennent  de  Dominus  (seigneur).  Don  est  un  titre  d'hon- 
neur en  Espagne,  en  Autriche  et  en  Portugal,  et  se  place  devant  le  nom  ; 
en  France,  on  disait  Dom,  accolé  également  en  avant  du  nom,  on  parlant 
de  religieux  de  haut  rang  de  certains  ordres. 
380, 

1,  Hérésie.  —  Arius  n'admettait  ni  le  mystère  de  la  Sainte  Trinité,  ni  la 
divinité  de  Jésus-Christ. 

4,  Amo.  —  Arius,  nommé  patriarche  de  Constantinople,  malgré  l'opposition 
de  saint  Alexandre  évoque  d'Alexandrie,  allait  faire  son  entrée  solennelle 
dans  son  église,  quand  il  mourut  subitement  d'une  violente  colique;  ses 
partisans  prétendirent  qu'il  avait  été  empoisonné,  ses  adversaires  que  sa 
mort  était  un  miracle  accordé  par  Dieu  à  la  prière  du  saint  évéque,  336. 
Sandius,  Hisl.  ecctés.,  II.  —  Léon  avait  été  nommé  pape  en  364,  par  les 
évoques  hérétiques;  il  régna  vingt  mois,  mais  ne  figure  pas  sur  la  liste  des 
papes,  qui  porte  un  interrègne.  Au  concile  de  Poitiers,  discutant  avec 
saint  Hilaire,  il  fut  pris  de  mal  de  ventre,  alla  aux  lieux  où,  n'en  revenant 
pas,  on  alla  le  chercher  ;  on  le  trouva  les  entrailles  sorties  du  corps.  Atha- 
NASE,  EpUre  à  Sérapion. 

6,  Retraict.  —  En  222,  dans  une  sédition  de  sa  garde  prétorienne;  pour  lo 


NOTES.         I.IV.  T,  en.  XXXT.         VOL.  ï,  PAG.  378.  F.3G9 

cas  où  il  serait  contraint  par  un  cvcnonient  semblable  de  se  donner  la 
mort,  il  avait  fait  des  préparatifs  tout  autres  (V.  II,  424  et  N.  Mourii'j. 
Lampridius,  Héliogabale,  17. 

7,  Fortune.  —  Par  contre  l'empei'eur  Charles-Quint  n'est-il  pas  né  à  Gand, 
dans  des  lieux  d'aisance  où  sa  mère  Jeanne  la  Folle  s'est  trouvée  surprise 
par  les  douleurs  de  l'enfantement?  1500. 

CHAPITRE  XXXI I.    . 
380, 

^1,  Viure. 

"  Quand  on  a  tout  i)erdu  ol  qu'on  n'a  plus  d'espoir, 

La  vie  est  un  opprobre  et  la  mort  un  devoir.  »  Voltaire. 

29,  'AÔXiw;.  —  On  trouve  dans  Stobke,  .Ser»*.,  20,  des  .sentences  toutes  sembla- 
bles à  ces  trois-lcà. 
382, 

7,  Lucilius.  —  Sknkque,  Episl.  22.  —  Lucilius,  pei'sonnage  peu  important 
du  temps  de  Néron,  dont  le  nom  a  été  conservé  à  la  postérité,  à  la  faveur 
de  celui  de  Sénèque  qui  lui  a  adressé  de  nombreuses  lettres  qui  passent 
pour  son  chef-d'œuvre. 

23,  Syrie.  —  Il  s'y  trouvait  exilé  i)ar  l'empereur  Constance  à  la  sollicitation 
des  évoques  ariens. 

24,  Deçà.  —  De  ce  côté-ci  de  la  mer,  c.-à-d.  en  France. 

25,  Nourrie.  —  Élevée;  de  môme  on  rencontre,  dans  les  Essais,  nourritui-o 
pris  dans  le  sens  d'érducation. 

37,  loye.  —  Abra  avait  fait  vœu  de  chasteté,  et  son  père  craignait  que  si 
elle  venait  à  lui  survivre,  ce  qui  était  dans  les  lois  de  la  nature,  elle  ne 
pût  résister  aux  demandes  en  mariage  dont  elle  était  l'objet,  d'où  l'ardeur 
de  ses  prières  pour  qu'elle  mourût  avant  lui.  Bouciiet. 
42,  S.  Hilaire.  —  Le  mariage  n'était,  dans  le  principe,  interdit  aux  prêtres 
ni  avant,  ni  après  l'ordination.  Plus  tard,  les  règles  ecclésiastiques  ont 
beaucoup  varié  sur  ce  point,  et,  bien  que  condamné  par  différents  conciles, 
entre  autres  par  celui  de  Latran,  1139,  qui  défendit  d'entendre  la  messe 
de  prêtres  mariés,  on  en  voit  encore  longtemps  après  qui  le  sont,  l'indi- 
gne cardinal  Dubois  notamment  qui  fut  sacré  archevêque  de  Cambrai  par 
l'évoque  de  Nancy,  assisté  de  Massillon.  A  l'époque  actuelle,  chez  les  Maro- 
nites, chrétiens  d'Asie  Mineure,  rite  reconnu  par  Rome,  les  prêtres  ne  peu- 
vent se  marier;  mais  les  gens  mariés  sont  admis  à  l'exercice  du  sacerdoce. 
384, 

ij,  Commun.  —  «  C'est  égal,  dit  une  jeune  femme,  à  la  lecture  de  ce  pas- 
sage, saint  Hilaire  n'était  qu'un  égoïste  qui  n'aspirait  qu'à  sa  parfaite  tran- 
quillité; et  si  j'eusse  été  sa  femme,  j'aurais  demandé  la  même  grâce...  pour 
lui  d'abord.  »  Victor  Thierry. 

CHAPITRE  XXXIII. 

6,  Raison.  —  Dans  ce  chapitre  qui  est  l'analogue  du  chapitre  XXIII  de  ce 
même  livre,  Montaigne  semble  s'être  proposé  de  prouver  que  la  Providence 
dirige  parfois  les  événements  par  une  intervention  immédiate  et  directe. 
—  Le  mot  fortune  considéré  comme  ayant  le  sens  de  fatalité,  qui  se  trouve 
employé  ici  et  ailleurs  dans  bien  d'autres  passages  des  Essais  avec  cette 
acception  et  qu'il  eût  pu  remplacer  sans  rien  changer  à  son  idée  par  celui-là 

,  même  de  Providence,  est  un  de  ceux  qui,  à  Rome,  prêtèrent  à  la  censure, 
lorsque  le  livre  fut  examiné  par  les  docteurs  moines,  ainsi  que  les  appelle 
l'auteur  dans  son  journal  de  voyages,  lors  de  son  séjour  en  Italie  en  1581. 
Dans  les  pays  d'inquisition^  à  Rome  surtout,  il  était  défendu  de  dire  fatum 
ou  fala  (destin,  fatalité).  Montaigne  se  justifie  (I,  588)  d'avoir  employé 
quelques-uns  de  ces  mots  prohibés,  verba  indisciplinata,  plaidoyer  qu'il 
n'a  introduit  dans  son  ouvrage,  qu'après  son  retour  de  Rome.  Le  Clerc. 

ESSAIS    de    MONTAIGNE.  —  T.    IV.  24 


F. 370  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

19,  Fortune.  —  En  1Ij03.  Guicciardixi,  Uisl.  de  France,  YI.  —  Cette  autre 
pire  fortune  fut  qu'à  partir  de  ce  moment,  le  duc  de  Valentinois,  César  Bor- 
gia,  vit  renverser  sa  puissance  et  tout  tourner  contre  lui.  Le  pape  Jules  II. 
successeui'  de  son  père,  le  fit  arrêter  et  le  contraignit  à  livrer  toutes  ses 
forteresses;  à  peine  sorti  de  prison,  il  fut  arrêté  à  nouveau  par  Gonzalve 
de  Cordoue  et  envoyé  au  roi  d'Espagne  qui  avait  des  griefs  contre  lui. 
Étant  parvenu  à  s'échappei-,  il  .se  réfugia  auprès  du  roi  de  Navarre  son 
beau-frère,  et  l'ayant  accompagné  dans  une  expédition  contre  l'Espagne, 
fut  tué  au  siège  de  Viana,  1507. 

2^i,  Foungueselles.  —  Ou  plutôt  Fouquei"olles.  Du  Bellay,  II. 
386. 

3,  Amorem.  —  Dans  les  éd.  ant.  à  1588,  cette  citation  de  Catulle  se  continue 
par  ce  quatrième  vers  :  Posset  vl  abrupto  viuere  coniugio  {comme  s'il  était 
possible  de  vivre  étant  ainsi  séparés)  ? 

G,  Dames.  —  Du  Bellay,  II.  —  En  1525.  Les  Espagnols  s'étant  approchés  de 
Saint-Omer,  la  garnison  fit  une  sortie  qui  fut  repoussée;  le  sieur  de  Liques 
fut  pris  en  soutenant  la  retraite;  sa  mise  en  liberté,  à  laquelle  s'employa  le 
seigneur  d'Estrées,  fut  la  suite  d'un  renvoi,  sous  caution,  des  prisonniers 
dont  le  nombre  embarrassait  le  vainqueur. 
8.  Finit.  —  Constantin  le  Grand,  après  avoir  triomphé  de  ses  compétiteurs, 
mis  fin  aux  incursions  des  Barbares  et  fait  de  la  religion  catholique  la  re- 
ligion de  l'empire  romain,  transporta  le  siège  du  gouvernement  à  Byzance, 
qui  prit  de  lui  le  nom  de  Constantinople,  330.  Cet  état  de  choses  se  main- 
tint, avec  de  nombreuses  vicissitudes,  jusqu'en  1453,  date  à  laquelle  l'em- 
pire prit  fin  par  la  prise  de  Constantinople,  par  les  Turcs,  sur  Constan- 
tin XII,  qui,  après  uhe  défense  honorable,  mourut  en  héros  sur  la  brèche. 

11,  Diuine.  —  En  508.  Le  fait  est  rapporté,  sans  autre  détail,  par  S.  Grégoire 
DE  Tours  :  «  Le  Seigneur  accorda,  dit-il,  au  roi  Clovis,  une  si  grande  grâce, 
qu'à  sa  vue,  les  murs  s'écroulèrent  d'eux-mêmes.  <• 

15,  Ruine.  —  Vers  l'an  1002.  Le  règne  de  ce  roi  faible  et  dévot  à  l'excès,  est 
fécond  en  prodiges  de  toute  nature;  Bouchet,  qui  mentionne  celui-ci,  n'en 
dit  pas  davantage.  Au  roi  Robert  est  due  la  construction,  à  Orléans,  d'une 
église  consacrée  à  S.  Aignan  pour  lequel  il  avait  un  culte  particulier. 

19,  Empenné.  —  C.-à-d.  que  le  mur  soulevé  retomba  tout  d'une  pièce,  verti- 
calement sur  sa  base,  sans  que  ses  pierres  emboîtées  comme  les  barbes  d'une 
plume  se  soient  disjointes. 

20,  Moins.  —  En  1524;  Arone,  que  défendaient  les  Impériaux,  avait  déjà 
résisté  à  un  siège  de  vingt-cinq  jours  et  à  deux  ou  trois  assauts,  quand  le 
seigneur  de  Rence  s'avisa  de  ce  dernier  moyen  qui  échoua  par  suite  de  la 
circonstance  relatée  ici,  et  qui  le  détermina  à  la  retraite.  Du  Bellay,  II. 

26,  Guérit.  —  C'est  la  version  do  Pline,  Hist.  nat.,  VII,  50;  Valère  Maxime  ot 
Sénèque  disent  que  c'est  d'un  assassin  que  Jason  reçut  cet  important  service. 

33,  Attaindre. — Pline,  7/tsL  nat.,  XXXV.  Ce  chien  à  l'écume  faisait  partie  du 
tableau  «  le  chasseur  Jaljse  »,  chef-d'œuvre  de  ce  peintre.  Ce  tableau,  qui 
périt  à  Rome  dans  un  incendie,  sauva  Rhodes  que  Démétrius  Poliorcète 
assiégeait;  pour  ne  pas  livrer  aux  flammes  le  faubourg  où  Protogène  avait 
son  atelier  et  que  ce  tableau  ne  fût  pas  compromis,  ce  prince  attaqua  la  ville 
d'un  autre  côté  et  échoua. 

33,  Adresse.  —  Ne  redresse-telle  pas. 

38,  Fortune.  —  Les  éd.  ant.  à  88  aj.  :  to  print  en  mer. 

39,  Seureté.  —  Froissart.  En  1326;  la  reine  Isabelle  de  France,  fille  de  Phi- 
lippe le  Bel,  mariée  à  Edouard  II,  roi  d'Angleterre,  se  voyant  négligée  par 
son  mari,  livrée  à  d'indignes  favoris,  vint  sur  le  continent  solliciter  des  se- 
cours étrangers,  à  l'aide  desquels  repassant  en  Angleterre,  elle  s'empara  de, 
sa  personne,  fit  prononcer  sa  déchéance  et  proclamer  roi  son  fils  Edouard  111  ; 
c'est  d'elle  que  celui-ci  et  ses  successeurs  prétendaient  tenir  des  droits  à  la 
couronne  de  France. 

42,  BowUûeTai.  —  Ménandre.  Ce  vers  que  Montaigne  traduit  après  l'avoii-  cité, 
était  passé  en  proverbe  chez  les  Grecs. 


NOTES.        I.IV.  1,  CH.  XXXni.         VOT..  T,  PAG.  386.  F.37I 

43,  Icetes.  —  Vers  354,  après  l'expulsion  de  Dcnys  le  Jeune  par  Timoléon. 
Pi.uTARQUE,  Timoléon. 
388. 

15,  Attiques.  —  Le  mine  attique  valait  100  drachmes  (environ  50  francs). 

18,  Prudence.  —  N'a-t-on  pas  vu,  lors  du  cataclysme  qui,  en  septembre  1905, 
a  si  fortement  éprouvé  l'Italie  méridionale,  à  Stefanoconi,  dans  les  Calabres, 
une  famille  de  quatre  personnes  ensevelie  sous  l'effondrement  de  leur 
maison  ;  et,  quelques  heures  après,  une  nouvelle  secousse  de  tremblement 
de  terre  faire  crouler  le  clocher  voisin  qui,  tombant  sur  un  mur  resté 
debout,  ouvrit  une  issue  à  cette  famille  qui,  ainsi,  j)ut  sortir  saine  et 
sauve. 

21,  Fils.  —  Api'ies,  Guerres  civiles,  IV.  —  En  42,  sous  le  tri umvii-at  d'Octave, 
Antoine  et  Lépide;  Suétone  désigne  les  victimes  sous  le  nom  d'Aquilius 
Florus. 

CHAPITRE  XXXIV. 

Ce  chapitre  est  numéroté  XXXV  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 
390, 

10,  Nécessité.  —  La  réalisation  de  cette  idée  ne  s'est  pas  fait  trop  attendre, 
car  déjà  torsqu'en  1G31  Renaudot  fonda  le  premier  journal  français  la 
Gazelle,  il  y  introduit  1'  «  Inventaire  des  adresses  du  bureau  de  rencontre, 
où  chacun  peut  donner  et  recevoir  avis  de  toutes  les  nécessités  et  com- 
modités de  la  vie  ».  Et  depuis,  quels  progrès !' c'est  devenu  l'unique  objet 
des  Petites  affiches,  qui  datent  de  1752,  et  des  bureaux  de  placement;  en 
outre  il  n'est  pas  une  feuille  publique  de  nos  jours,  et  elles  sont  légion, 
qui  ne  lui  réserve,  contre  deniers  comptants,  une  grande  place  qui,  si  grande 
qu'elle  soit,  e.st  encore  insuffisante ,  puisque  ces  mentions  vont  s'étalant 
sur  tous  les  mure,  et  même  en  pleine  campagne,  au  grand  détriment  du 
pittoresque. 

17,  Soubaiteroit.  —  On  suppose  que  c'est  à  lui-même  que  Montaigne  fait 
allusion. 

34,  Qu'il  auoit.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  qu'es  commandemens  qui  lui  esloient 
tombés  en  main,  il  auoit. 

38,  Cbacuniere.  — Chez  soi.  Rabelais,  auquel  l'expression  semble  empruntée, 
a  dit  de  même  :  «  Ainsi  chascun  s'en  va  à  sa  chascuniere.  » 


CHAPITRE  XXXV. 

Ce  chapitre  est  numéroté  XXXVI  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 
392. 

G.  Mores.  —  Indiens  et  Jlores  (ou  Maures),  appellations  anciennes;  la  pre- 
mière des  peuplades  indigènes  de  l'Amérique,  la  seconde  de  la  population 
dominante  dans  l'Afrique  septentrionale  (Tripolitaine,  Tunisie,  Algérie  et 
Maroc). 
12,  Eguille.  —  Expression  proverbiale  signifiant  :  ■•  Etre  pourvu  de  tout  ce 

qu'il  faut  pour  se  suffire.  • 
25,  Nostre.  —  Sous  la  même  latitude  que  nous. 

28,  Contadins.  —  Paysans,  de  l'italien  contadino,  qui  a  même  signification. 
394, 

7,  Face.  —  Cette  réponse  fut  faite  à  Florimond  de  Rémon  (V.  N.  I,  340  : 
Simple).  —  Ei.iEN  prête  la  semblable  à  un  Scythe  dont  le  roi  des  Perses 
plaignait  la  nudité  en  temps  de  neige. 
12,  Moy.  —  Sainte  Thérèse,  alors  carmélite,  couchant  sur  la  paille,  une  nuit 
d'un  froid  excessif,  priait  ses  compagnes  de  lui  donner  de  quoi  mieux  se 
couvrir;  elles  lui  répondirent  avec  un  éclat-  de  rire  :  «  Comment,  notie 
Mère,  vous  avez  tout  ce  qu'il  y  a  de  couvertures  à  la  maison  et  vous  n'en 
avez  pas  encore  assez  !  •> 


p. 372  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

13,  Massinissa.  —  Cicéron.  De  Seneclule. 

10,  Dit.  —  Liv.  III,  12. 

21.  Agesilas.  —  Plutarque,  Agésilas. 

22,  Vesture.  —Vêtement,  habillement;  du  latin  veslitus  qui  a  même  signifi- 
cation. Ne  se  dit  aujourd'hui,  du  reste  avec  même  étymologie,  que  de  la 
prise  d'habit  dans  les  couvents,  cérémonie  où  l'on  revêt  pour  la  première 
fois  un  novice  de  l'habit  de  l'ordre. 

22,  Suétone.  —  Dans  sa  Vie  de  César,  58. 

31,  Cbeual.  —  Balbi,  joaillier  vénitien,  qui  visitait  les  Indes  en  1579. 

34,  Roy.  —  Etienne  Bathoi-y  qui,  en  1571,  succéda  sur  le  trône  de  Pologne 
au  l'oi  issu  de  la  maison  de  Franco  qui  l'y  avait  précédé  (le  duc  d'Anjou, 
depuis  Henri  111)  (V.  N.  I,  460  :  Luy-mesme).  —  C'est  à  lui,  et  non  à  son  pré- 
décesseur, que  se  rapportent  les  mots  qui  suivent  :  «  qui  est  à  la  vei'ité 
l'vn  des  plus  grands  princes  de  nostre  siècle  ». 

39,  Vari^o.  —  Pline,  Hist.  nal.,  XXVllI. 
396, 

1,  Père.  —  Cela  a  été  présenté  comme  une  bizarrerie;  mais,  à  l'époque, 
par  suite  de  la  bigarrure  dos  costumes  introduite  par  François  I",  cela 
n'avait  rien  de  singulier. 

2,  Luxembourg.  —  En  1513,  loi-s  du  i-avitaillement  de  cette  place  dont  nous 
nous  étions  emparés  et  que  s'efforçait  de  reprendre  Charles-Quint;  la 
réussite  de  ce  ravitaillement  décida  les  Impériaux  à  se  retirer.  Du  Bellay,  X. 

1,  Coignée.  —  Dans  l'hiver  de  1408,  les  choses  s'étaient  passées  de  même  à 
Paris;  DE  CoMiNES  parle  d'un  froid  pareil  survenu  en  son  temps,  en  1469, 
dans  le  pays  de  Liège;  en  1544,  par  toute  la  France,  le  vin  se  coupa  à  coups 
de  hache,  dans  les  tonneaux. 

5,  Ouide.  —  Les   éd.  ant.  aj.  :  à  deux  doigts  près. 

11,  Nauale.  —  Le  Palus  Mœotis,  dit  Strabon,  VII,  se  prend  à  l'époque  des 
grands  froids  et  l'on  vit,  dit-on,  Néoptolème,  l'un  des  lieutenants  de  Mi- 
thridate,  y  battre  les  barbares,  l'été  dans  un  combat  naval,  et  l'hiver  dans 
un  combat  de  cavalerie.  —  En  1658,  le  roi  de  Suède  traversa  le  Sund  sur  la 
glace,  pour  envahir  l'île  de  Seeland,  en  Danemark.  — A  une  époque  plus  ré- 
cente, en  janvier  1795,  la  cavalerie  française  s'empara  de  la  flotte  hollan- 
daise, immobilisée  par  les  glaces  à  l'entrée  du  Zuyderzée,  flotte  qui,  à  la 
vérité,  se  rendit  à  première  sommation. 

13,  Plaisance.  —  En  218,  à  la  .bataille  de  la  Trébie  où  Annibal  défit  le  con- 
sul Sempronius.  Tite-Live,  XX,  54. 

19,  Païs.  —  En  401,  lors  du  retour,  connu  sous  le  nom  de  Retraite  des 
Dix  mille,  sous  la  conduite  de  Xénophon,  à  travers  l'Asie  Mineure,  avec  des 
dangers  et  des  fatigues  inouïs,  des  Grecs  qui  avaient  combattu  à  Cunaxa 
pour  Cyrus  le  Jeune.  Xénophon,  Anabase,  IV,  5. 

30,  Gelée.  —  Quinte-Curce,  VII,  3.  ■-  La  nation  en  question  est  celle  des 
Parapamisades,  populations  clairsemées  dans  les  hautes  vallées  de  4  à 
5.000  mètres  d'altitude,  séparées  et  dominées  par  des  cimes  de  7  à  8.000  mè- 
tres qui  constituent  le  plateau  de  Pamir,  nœud  de  montagnes  d'où  partent 
les  chaînes  les  plus  puissantes  de  l'Asie. 

30,  Voir.  —Cela a  lieu  en  effet  en  France  :  dans  le  Roussillon  pour  les  oran- 
gers, dans  les  environs  de  Paris  pour  les  figuiers  où  ces  arbres  sont  du 
reste  en  petit  nombre. 

CHAPITRE  XXXVI. 

Ce  chapitre  est  numéroté  XXXVII  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 
398, 

1,  Gaton.  —  Dit  le  Jeune,  pour  le  distinguer  de  son  grand-oncle,  sur- 
nommé l'Ancien;  dit  aussi  d'Utique,  du  lieu  où  il  se  donna  la  mort  dans 
des  conditions  qui  en  font  un  des  actes  de  l'humanité  le  plus  admirés.  V.  N. 
III,  586  :  leune  Caton. 


NOTES.         LIV.  r,  GH.  XXXVI.         VOL.  I,  PAG.  398.  F.373 

2,  Moy.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  iuger  d'aulruy  selon  moy,  et  de  rapporter  la 
condition  des  autres  hommes  à  la  mienne  :  ie  croy  aysement  d'autruy  beaucoup 
de  choses,  où  mes  forces  ne  peuuent  altaindre ;  au  lieu  de  :  «  iuger...  moy  ». 

10,  Capucbins.  —  Les  Feuillants,  ordre  monastique  des  plus  rigoureux,  déri- 
vant de  l'ordre  de  S.  Benoît;  ils  devaient  avoir  la  tète  et  les  pieds  nus,  dor- 
mir sur  des  planches,  manger  à  genoux  et  boire  dans  des  crânes  humains; 
mais  l'austérité  de  la  règle  fut  bientôt  adoucie;  ils  prirent  une  grande  part 
aux  troubles  de  la  Ligue.  —  Les  Capucins,  religieux  de  l'ordre  de  S.  Fran- 
çois, ainsi  nommés  du  capuchon  ou  capuce  dont  ils  se  couvraient  la  tète, 
furent  introduits  en  France  par  Catherine  de  Médicis;  ils  s'y  multiplièrent 
rapidement,  vivant  d'aumônes  et  se  livrant  à  la  prédication. 

17,  Confidunt.  —  Citation  tirée  de  Cicéron,  Orator,.!,  ou  encore  des  Tusca- 
lanes,  l\,  1,  que  Montaigne,  on  raison  des  changements  qu'il  y  a  faits,  semble 
avoir  in.sérée  de  mémoire. 

21,  Corruption.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  débauche. 

21,  le  ne  dis...  l'imagination.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  le  goust. 

29,  Possent.  —  Montaigne  applique  ici  à  la  vertu  ce  que  Cicéron  dit  de  la 
philosophie  et  de  ceux  qui  la  blâment. 

31,  Action.  —  Add.  des  éd.  ant.  ;  purement. 
400, 

8,  Potidée.  —  En  479;  l'auteur  a  mis  par  méprise  «  Potidée  »  au  lieu  de 
Platée. 

19,  Passée.  —  Hérodote,  IX;  Cornélius  Nepos,  Pausanias.  —  Aristodème  et 
Eurylus,  tous  deux  du  corps  dos  trois  cents  Spartiates  qui  accompagnaient 
Léonidas  aux  Thermopyles,  étaient,  au  début  de  l'action,  retenus  dans  un 
bourg  voisin,  par  une  maladie  d'yeux.  Eurylus,  à  la  nouvelle  de  la  situation 
critique  dans  laquelle  allait  se  trouver  la  troupe  à  laquelle  il  appartenait, 
se  fit  armer  par  son  ilote,  conduire  au  lieu  du  combat  et  y  fut  tué;  Aris- 
todème n'en  fit  rien,  il  retourna  à  Sparte  où  il  fut  couvert  d'opprobres  jus- 
qu'à ce  qu'à  Platée  il  eût  réparé  ce  moment  de  faiblesse.  Que  les  Spartiates 
lui  aient  tenu  compte,  pour  lui  refuser  le  prix  de  la  valeur,  de  sa  conduite 
antérieure  aux  Thermopyles,  cela  se  conçoit;  que  le  désir  de  se  réhabiliter 
ait  été  le  mobile  auquel  lui-même  a  obéi,  c'est  probable  ;  mais  la  justesse 
du  motif  allégué  à  l'appui  de  son  éviction  est  discutable  :  pourvu  qu'on 
agisse  bien,  qu'importe  la  cause?  on  peut  même  ajouter  avec  Juvénal  : 
«  Qui  pratiquerait  la  vertu,  s'il  n'en  attendait  la  récompense?  » 

19,  Nos  iugemens.  —  Les  éd.  de  80,  85,  port.  :  Qui  plus  est,  nos  iugements. 
402, 

5,  Ny  dressée  à.  —  Remplacé  dans  les  éd.  ant.  par  :  «  pour  imaginer  et  ». 

10,  Ambition.  —  Les  éd.  ant.  à  88  aj.  :  et  de  ceux  qui  font  l'honneur,  la  fin 
de  toutes  actions  glorieuses. 

11,  Gloire.  —  C'est  dans  cet  esprit  critique  qu'en  1794,  lors  de  leur  procès 
devant  le  tribunal  révolutionnaire,  Fabre  d'Eglantine  faisait  application  à 
Danton  son  co-accusé  de  ces  vers  de  Campistrous,  dans  sa  tragédie  de 
Juba  : 

•  Tu  verras  que  Caton,  loin  de  nous  secourir. 
Toujours  fier,  toujours  dur,  ne  saura  que  mourir.  • 

lo.  Atteindre.  —  Velleius  Paterculus  dit  do  lui:  «  Il  n'a  jamais  fait  de  bonnes 

actions  pour  paraître  les  avoir  faites,  mais  parce  qu'il  n'était  pas  en  lui 

do  faire  autrement.  » 
16,  Latins.  —  Ces  cinq  poètes,  dont  il  est  donné  plus  loin  dos  citations,  sont, 

dans  l'ordre  où  ces  citations  sont  faites  :  Martial,  Manilius,  Lucain,  Horace 

et  Virgile. 
26,  Cognoistre.  —  Il  est  sûrement  plus  facile  de  faire  de  mauvais  vers,  et  même 

des  vers  médiocres,  que  do  se  connaître  en  beaux  vers;  mais  il  est  bien  plus 

difficile  do  faire  de  bons  vers  que  do  bien  juger  une  tragédie  ou  un  poème; 

et  quoique  à  vrai  dire  les  bons  juges  soient  fort  j'ares,  les  grands  poètes,  les 


F. 374  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

grands  orateurs,  les  grands  philosophes,  etc..  le  sont  plus  encore.  Naigeon. 
—  HuET  (savant  prélat  français,  1630  à  1721),  après  avoir  jugé  Corneille  et 
lui  avoir  refusé  l'équité  et  la  justesse  dans  l'appréciation  des  poèmes  et  des 
poètes  do  l'antiquité,  termine  en  disant  :  ■<  tant  est  vrai  ce  que  j'ai  osé  af- 
firmer ailleurs,  contrairement  à  l'opinion  commune,  qu'on  trouvera  plus 
de  poètes  excellents,  lesquels  sont  cependant  très  rares,  que  d'appréciateurs 
habiles  et  équitables  de  la  poésie  ». 
404, 

4,  L'autre.  —  Toutes  ces  images  sont  prises  de  Vlon  de  Platon. 
19,  Catoni. 

«  En  faveur  de  César  les  dieux  ont  combattu, 

Les  dieux  servaient  le  crime  et  Caton  la  vertu.  »  Lebuin. 

«  Devant  le  grand  Dandin,  l'innocence  est  hardie. 

Oui,  devant  ce  Caton  de  basse  Normandie, 

Ce  soleil  d'équité  qui  n'est  jamais  terni, 

Victrix  causa  Diis  placuit,  sed  vicia  Catoni.  »  Racine. 

CHAPITRE  XXXVII. 

Ce  chapitre  est  numéroté  XXXVIIl  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

30,  Pleurer.  —  En  273.  Deux  partis  divisaient  Argos,  qui  avaient  appelé, 
l'un  Antigone  roi  de  Macédoine,  l'autre  Pyrrhus  roi  d'Épire,  qui  tous  deux 
avaient  répondu  à  leur  appel.  Dans  un  combat  qui  se  livra  dans  la  ville 
même,  Pyrrhus  fut  tué,  frappé  d'une  tuile  que,  du  haut  d'un  toit,  une 
femme  lui  lança  pour  sauver  son  fils  que  ce  roi  menaçait;  témoin  du  fait, 
le  fils  d'Antigone  lui  coupa  la  tète  et  courut  la  présenter  à  son  père  demeuré 
hors  ville.  Plutarque,  Pyrrhus.  —  V.  I,  494  et  N.  Italie. 

31,  Deffaire.  —  Devant  Nancy,  en  1477. 
406, 

1,  Dueil.  —  En  1364,  près  de  Vannes.  —  Sophocle  porta,   dit-on,  le  deuil 
d'Euripide,  son  rival,  qui  mourut  quelque  temps  avant  lui. 

8,  Spectacle.  —  Plutarque,  César,  13.  V.  N.  I,  100  :  Suspendues. 
18,  Est.  —  La  traduction  qui  est  donnée  de  cette  citation,  est  de   M""  de 

Gournay. 
20,  Passions.  —  Rubens,  dans  un  tableau  de  la  naissance  de  Louis  XllI,  a 
su  exprimer  deux  sentiments  opposés  sur  le  visage  de  Marie  de  Médicis  : 
la  douleur  de  l'enfantement  et  la  satisfaction  de  l'orgueil  maternel. 
408, 

4,  Badin.  —  Écervelé  (V.  N.  I,  202  :  Badin).  — Veau  avait  parfois  et  a  ici  le 
sens  d'ignorant. 

0,  Bren.  —  Ou  bran,  Fi!  interjection  qui  marque  le  mépris.  —  Bran  est  un 
mot  gaulois  qui  signifiait  le  son,  la  partie  la  plus  grossière  du  blé. 
14,  Pitié.  —  Agrippine,  mère  de  Néron,  s'attachant  à  lui,  le  provoquant 
même  à  l'inceste  potir  conserver  son  pouvoir  sur  lui,  celui-ci,  fatigué  de 
ces  obsessions,  témoigna  le  désir  d'en  être  débarrassé  et  acquiesça  à  sa 
mort.  Une  tentative  fut  faite  pour  la  noyer  comme  par  accident,  elle 
échoua;  le  lendemain  même  il  la  fit  poignarder,  59.  —  Tacite,  Annales, 
XIV,  4,  en  racontant  la  dernière  entrevue  entre  la  mère  et  le  fils,  n'est  pas 
aussi  affirmatif  que  Montaigne  sur  la  cause  de  l'émotion  que  fit  paraître 
ce  dernier  et  donne  à  penser  que  ce  pouvait  bien  être  pour  endormir  les 
soupçons  de  sa  victime. 
30,  Larmes.  —  En  480,  au  commencement  de  la  deuxième  guerre  médique 
fV.  I,  42  et  N.  Athos;  N.  I,  370  :  Thermopyles).  Hérodote,  VIH,  45  et  46; 
Pi.iNE,  Episl.,  m,  7;  Valère  Maxime,  IX,  13. 


410, 


1,  Corps.  —  Faire  un  ouvrage  complet  et  tout  d'une  pièce. 

6,  L'autre.  —  Plutarque,  Timoléon;  Diodore  de  Sicile,  XVI.  —  Vers  365. 


NOTES.         LIV.  1,  Cir.  XXXVII.         VOL.  1,  PAG.  410.  F.37d 

Après  s'être  opposé  de  toutes  ses  forces  aux  entreprises  de  son  frère  Timo- 
phane  qui  voulait  usurper  le  pouvoir  à  Corinthe,  n'ayant  pu  le  détourner 
de  ses  projets  criminels,  Timoléon  le  lit  mettre  à  mort,  et,  s'exilant  volon- 
tairement après  ce  sacrifice,  resta  vingt  ans  éloigné  des  affaires. 

CHAPITRE  XXXVIII. 

Ce  chapitre  est  numéroté  XXXIX  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

7,  Solitude.  —  Les  pages  écrites  par  Madame  Périer  sur  les  mortifications  de 
Pascal,  son  frère^  sont  le  contrepied  complet  de  ce  chapitre  de  Montaigne; 
leur  lecture  simultanée  est,  à  cet  égard,  de  grand  intérêt.  Payen. 

10,  Publicq.  —  Traduction  d'un  vers  de  Lucain,  II,  383,  à  l'éloge  de  Caton 
d'Utique. 

1:?,  Recherche.  —  A  remarquer  trois  sujets,  dont  deux  au  pluriel,  et  le  verbe 
au  singulier. 

13,  Particulier.  —  Le  bien  public  a  été  de  tous  temps  le  prétexte  de  tous 
ceux  qui,  mus  par  une  ambition  et  un  intérêt  tout  personnels,  vont,  sur 
une  plus  ou  moins  grande  échelle,  soit  isolément,  soit  en  association,  agi- 
tant le  monde;  c'est  en  particulier,  de  nos  jours,  le  cas  de  la  plupart  de 
ceux  qui  s'adonnent  à  la  politique  :  bien  peu  dans  le  nombre,  quoi  qu'ils  en 
disent,  ont  un  mobile  désintéressé;  s'ils  sont  dc»valeur,  ils  visent  à  tout; 
ceux  de  peu  d'envergure  se  bornent  à  trafiquer  de  leurs  voix,  de  leurs  re- 
commandations et  à  pêcher  en  eau  trouble;  les  scrupules  et  la  conscience 
n'arrêtent  ni  les  uns,  ni  les  autres  ;  les  Verres  y  sont  nombreux,  les  Pho- 
cion  bien  rares. 

17,  Société.  —  «  La  plus  contraire  humeur  à  la  retraite,  c'est  l'ambition,  » 
dit  plus  loin  Montaigne  (I,  426),  en  contradiction,  mais  seulement  apparente, 
avec  lui-même  :  l'ambitieux,  veut-il  dire,  n'a  que  lui-même  en  vue,  et  ne 
peut  songer  à  abandonner  un  seul  instant  la  partie. 

17,  Franches.  —  Les  éd.  ant.  à  88  aj.  :  et  point  de  compagnon. 
10,  Grande.  —  Diogène  Laerce,  Bias. 

20,  Bon.  —  «  Ayez  beaucoup  d'amis  qui  vivent  en  paix  avec  vous,  mais 
choisissez  pour  conseil  un  homme  entre  mille.  »  Ecclésiastique,  VI,  6. 

23,  Presse.  —  La  contagion  chez  les  foules  est  constante  et  presque  irrésis- 
tible, les  exemples  en  sont  innombrables.  C'est  elle  qui  fait  qu'on  les  voit  si 
souvent  se  livrer  à  des  manifestations,  sans  que  le  plus  grand  nombre  de 
ceux  qui  y  prennent  part  sache  ce  dont  il  s'agit,  et  que,  si  fréquemment  sans 
motif  plausible,  elles  changent  de  caractère  et  de  pacifiques  en  viennent  à 
commettre  des  actes  criminels.  Les  paniques  n'ont  pas  d'autre  cause.  C'est 
également  à  la  contagion  que  l'on  doit  de  voir  parfois,  lorsqu'un  accident 
se  produit,  les  gens  et  jusqu'aux  parents  les  plus  proches  venir  successi- 
vement affirmer  l'identité  de  victimes  qu'on  voit  plus  tard  réapparaître 
saines  et  sauves,  que  les  incidents  les  plus  saillants  d'un  combat  sont 
inexactement  rapportés,  si  bien  qu'il  est  impossible  d'accorder  pleine 
(créance  au  témoignage  des  foules  et  que  l'unanimité  des  témoins  est  loin 
d'être  une  garantie  de  vérité. 

2(),  Dissemblables.  —  Réflexions  traduites  de  Sénèque,  Epist.  7. 
412, 

3,  Moy.  —  Diogène  Laerce,  Bias. 

8,  Bord.  —  Variante  de  l'exemplaire  de  Bordeaux  :  «  en  sauueté  »,  au  lieu 
de  «  à  bord  <>.  —  Singulière  idée  qu'eut  là  Albuquerque,  qui  aurait  plutôt 
l'air  d'une  plaisanterie  que  d'un  acte  religieux,  si  on  ne  savait  à  quel 
point  la  superstition  porte  le  trouble  dans  l'esprit  de  la  plupart  des  hom- 
mes. Naigeon. 

15,  Compagnie.  —  Diodore  de  Sicile,  XII,  4.  —  Nous  nous  bornons  présente- 
ment à  leur  dire  :  «  Dis-moi  qui  tu  hantes,  je  te  dirai  qui  tu  es.  » 

18,  Malades.  —  Diogène  Laerce,  Antisthène. 

28,  Marché.  —  Place  publique,  acception  du  mot  latin  fàrum. 


F.376  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

34,  Cura.  —  La  traduction  donnée  de  cette  citation  est  de  Boileau,  dont  le 
vers  élégant  est  passé  en  dicton. 
414, 

i,  Soy.  —  «  On  ne  s'amende  pas  pour  aller  à  Rome,  »  dit  un  proverbe.  —  La 
Fontaine  exprime  la  même  idée;  parlant  d'un  pèlerin,  il  dit  : 

«  Prou  de  pardons  il  auoit  rapporté. 
De  vertus  point,  chose  assez  ordinaire.  » 

30,  Vnquam.  —  Montaigne  a  traduit  lui-même  ce  vers  avant  de  le  citer. 

li?,  Sien.  —  Sénèque,  Epist.  9,  dont  Montaigne  a  adopté  la  vei-sion,  dit  bien 
que  Stilpon  avait  perdu  femme  et  enfants;  mais  il  est  seul  à  le  dire;  ni 
Diogène  Laërce,  ni  Plutarquc  n'en  font  mention,  en  rapportant  sa  réponse 
(jui  s'exprime  mieux  ainsi.  Dire  n'avoir  rien  perdu,  s'il  avait  perdu  tous  les 
siens,  eût  été  pousser  par  trop  loin  le  stoïcisme.  Naigeon. 

45,  Naufrage.  —  Diogène  Laerce,  VL 
416, 

3,  Entier.—  En  409,  lors  de  l'invasion  des  Goths.  S.  Grégoire  de  Tours  men- 
tionne qu'en  cette  circonstance,  S.  Paulin  racheta  de  sa  propre  liberté  le 
fils  d'une  pauvre  veuve  réduit  à  l'esclavage. 
8,  Despende.  —  On  peut  rendre  son  bonheur  indépendant  des  biens  de  la 
fortune  et  même  cela  est  sage  ;  mais  il  est  bien  difficile  d'avoir  pareille  in- 
différence pour  la  santé,  dont  on  peut  dire  aussi  ce  que  La  Fontaine  dit  de 
la  liberté  :  «  Ce  bien  sans  lequel  les  autres  ne  sont  rien  »  ;  ainsi  du  reste 
que  Montaigne  en  convient  plus  loin,  «  d'autant  que  sans  elle,  dit-il,  la  vie 
nous  vient  à  estre  pénible  et  iniurieuse  ». 

23,  Regarde.  —  Quiconque  réfléchit  et  observe,  peut,  à  tout  moment,  cons- 
tater la  vérité  de  cette  assertion  en  lui  et  chez  les  autres. 

29,  Délices.  —  «  Cette  citadelle  que  défend  un  soldat  et  qu'un  autre  attaque  ; 
et  le  fait  de  cet  érudit  acharné  à  l'étude  de  Plaute,  ces  deux  petits  ta- 
bleaux, ces  deux  toiles  de  Meissonier,  c'est  du  pur  La  Bruyère.  »  G.  Guizot. 

34,  Plaute.  —  Mélanchthon,  savant  théologien  du  xvi'  siècle,  a,  le  premier, 
reconnu  lamesure  des  vers  de  Térence;  jusqu'alors  tous  les  anciens  manus- 
crits de  cet  auteur  présentaient  un  texte  suivi,  comme  si  c'eût  été  de  la  prose. 

418, 

2,  Gens.  —  Ce  sentiment  est  indépendant  de  nous  :  on  est  bon  ou  méchant, 
vertueux  ou  vicieux  selon  qu'on  veut;  mais  on  n'est  pas  plus  sensible 
qu'insensible  à  volonté  et  à  moment  donné,  ce  que  Chaulieu  exprime  si 
bien,  à  propos  d'un  ami  que  la  mort  lui  a  enlevé  : 

«  J'appelle  à  mon  secours  raison,  philosophie; 
Je  n'en  reçois,  hélas.'  aucun  soulagement. 
A  leurs  belles  leçons  insensé  qui  se  fie  ! 
Elles  ne  peuvent  rien  contre  le  sentiment. 
J'entends  que  la  raison  me  dit  que  vainement 
Je  m'aiflige  d'un  mal  qui  n'a  point  de  remède, 
Mais  je  verse  des  pleurs  dans  le  même  moment 
Et  sens  qu'à  ma  douleur  toute  ma  vertu  cède.  » 

Tout  ce  que  l'on  peut  concéder,  c'est  que  le  premier  moment  passé,  la 
raison  est  à  même  de  reprendre  le  dessus  sur  la  nature,  et  qu'en  outre  de 
l'effet  du  temps,  en  s'évertuant  à  écarter  de  sa  pensée  les  sujets  pénibles, 
on  finit  dans  une  certaine  mesure  par  y  échapper. 
32,  Dit.  —  Cette  maxime  des  Pythagoriciens  n'est  pas  de  Socrate;  Montaigne 
la  lui  attribue  parce  que  dans  le  recueil  de  Stobée,  d'où  il  l'a  tirée,  elle 
suit  immédiatement  un  mot  de  Socrate. 

35,  Office.  —  La  rédaction  du  texte  grec  est  la  suivante  :  «  Chaque  âge  a 
ses  devoirs  particuliers  :  les  enfants  doivent  suivre  les  écoles  ;  les  jeunes  gens 
s'appliquer  à  connaître  les  lois  et  les  usages  de  la  société;  aux  hommes 
faits  incombe  d'agir  et  d'occuper  les  charges  publiques;  aux  vieillards  les 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  XXXVIU.  VOL.  I,  PAG.  418.         F.377 

fonctions  de  juge  et  l'entrée  dans  les  conseils  en  raison  de  leur  expé- 
rence.  »  —  Une  autre  sentence  grecque  dit  pareillement  :  «  Le  vieillard 
délibère,  l'homme  fait  agit,  l'adolescent  s'instruit.  » 
420, 

31,  Paix.  —  De  nos  jours,  ce  sont  les  manœuvres  dites  à  double  action,  que 
clôturent  les  manœuvres  d'automne,  qui  constituent  cette  préparation  à  la 
guerre  ;  mais  ici  encore  on  a  trop  tendance  à  donner  dans  l'extrême.  — 
C'est  sans  contredit  une  chose  excellente  que  tout  chef  fasse  manœuvrer  sur 
le  teri-ain  l'unité  qu'il  commande,  en  vue  de  la  conduite  à  tenir  à  une 
proximité  telle  de  l'ennemi,  qu'on  peut  en  venir  aux  mains  d'un  moment  à 
l'autre.  Or,  dans  ces  conditions,  le  conmiandement  immédiat  ne  saurait 
excéder  le  corps  d'armée  ;  par  suite,  doux  corps  d'armée  agissant  l'un  con- 
tre l'autre  est  le  maximum  d'envergure  qu'on  peut  raisonnablement  donner 
à  ces  manœuvres.  Cette  limite  imposée  dans  la  réalité  par  l'étendue  des 
fronts  à  la  guerre,  l'est  encore  ici  par  les  invraisemblances  du  temps  de 
paix  qui  augmentent  considérablement  avec  les  effectifs  en  présence  et  les 
espaces  sur  lesquels  on  opèi'e;  et  si  quand  même  on  veut  faire  concourir  à 
une  même  action  au  delà  de  deux  corps  d'armée  opposés,  on  en  arrive  au 
grotesque  et  chacun  y  désapprend  au  lieu  d'apprendre  ;  du  reste  c'est  sur- 
tout avec  des  effectifs  moyens,  composés  des  trois  armes  (régiment,  bri- 
gade, division),  qu'en  dehors  de  toute  autre  considération  les  manœuvres 
de  ce  genre  sont  le  plus  profitables. 

A  la  vérité,  il  est  non  moins  indispensable  de  former  le  commandement 
et  les  états-majors  à  la  manœuvre  et  à  l'établissement  des  ordres  de  mou- 
vement d'effectifs  comprenant  plusieurs  corps  d'armée  dans  la  péi-iode  qui 
prend  fin  au  moment  où  la  bataille  est  sur  le  point  de  s'engager,  alors  que 
par  exemple  la  distance  qui  sépare  les  masses  opposées  n'excède  pas  une 
journée  de  marche,  soit  une  vingtaine  de  kilomètres;  mais,  pour  cela,  les 
manœuvres  dites  sur  la  carte  satisfont  amplement;  les  hypothèses  suffi- 
sent, la  présence  des  troupes  n'ajoute  rien,  bien  plus  elle  est  nuisible  par 
les  conditions  différentes  du  temps  de  guerre  dont  il  faudrait  tenir  compte  ; 
la  vue  du  terrain  n'est  pas  indispensable;  il  ne  l'est  pas  davantage  que 
chefs  et  états-majors  soient  réunis,  chacun  peut  demeurer  à  son  poste  ha- 
bituel; le  travail  peut  se  faire  et  s'est  fait  (car  ce  n'est  point  là  une  innova- 
tion) par  correspondance,  les  participants  aux  quatre  coins  de  la  France; 
il  peut  prendre  des  mois,  cela  importe  peu,  d'autant  qu'il  faut  laisser  à  cha- 
cun le  temps  delà  réflexion,  point  capital  quand  il  s'agit  d'études. 

Quant  aux  manœuvres  d'automne,  limitées  quant  aux  effectifs  comme  il 
a  été  dit,  leur  durée  devrait  être  de  sept  à  neuf  jours,  coupée  par  une 
journée  de  repos  et  non  compris  l'aller  et  le  retour;  les  cantonnements, 
changés  le  moins  possible,  n'être  pas  distants  de  plus  de  8  à  10  kilomètres 
du  point  initial  de  la  manœuvre  et  de  celui  où  elle  doit  prendre  fin.  On  y 
arriverait  pai-  l'emploi  de  la  tente-abri,  concurremment  avec  le  cantonne- 
ment; la  saison  s'y  prête,  elle  ne  surchargerait  pas  outre  mesure  l'homme 
qui  ne  porte  à  peu  près  rien,  il  ne  perdrait  pas  l'habitude  d'en  faire  usage, 
le  temps  donné  à  la  manœuvre  s'en  trouverait  accru  et  bien  des  situations 
de  guerre  pourraient  être  envisagées  dont  il  n'est  pas  tenu  compte  actuel- 
lement. —  La  revue  finale  est  à  supprimer  ;  elle  donne  à  la  vérité  occasion 
aux  hommes  politiques  de  se  montrer,  de  prononcer  des  banalités,  de 
prodiguer  des  éloges  sans  v^aleur  parce  que  la  compétence  leur  fait  défaut; 
mais  en  dehors  de  cela  elle  est  sans  utilité,  influe  quelquefois  défavorable- 
ment sur  la  conduite  des  manœuvres  et  ajoute  à  la  dépense. 

Les  manœuvres  dites  de  forteresse,  comme  celles  du  service  de  santé,  sont 
de  la  plus  complète  inutilité  :  les  premières  par  l'impossibilité  d'exécuter 
les  travaux  de  terrassement  dans  les  conditions  et  avec  tout  le  développe- 
ment que  comporte  la  réalité,  les  secondes  parce  que  tout  y  est  fictif;  de 
simples  conférences  sur  le  terrain  les  remplaceraient  avantageusement.  De 
même  les  manœuvres  avec  tirs  réels  et  aussi  les  feux  de  guerre  consti- 
tuent des  superfluités  coûteuses,  dont  les  résultats  sont  absolument  nuls;  la 


F.378  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

détermination  des  effets  du  tir  dans  telles  et  telles  conditions  se  fait  dans 
les  polygones  ;  ces  expériences  sont  à  reproduire  de  temps  à  autre  dans  les 
garnisons  en  se  plaçant  dans  les  meilleures  conditions  de  réussite  pour 
que  chacun  puisse  en  juger,  tout  le  monde  sachant  du  reste  que  plus  on 
s'éloigne  de  ces  conditions  et  notamment  quand  la  distance  est  mal  appré- 
ciée, les  résultats  déclinent  rapidement  pour  en  arriver  facilement  à  être 
réduits  à  zéro  et  tout  exercice  réel  de  ce  genre  est  superflu. 

34,  Permettoit.  —  Diogène  Laerce,  IV,  38. 

35,  Demis.  —  Ses  détracteurs  ont  également  reproché  à  Sénèque  d'avoir  écrit 
sur  le  mépris  des  richesses,  alors  que  lui-même  en  avait  de  considérables; 
chez  n'importe  qui  le  luxe  n'a  rien  de  répréhensible,  s'il  a  été  bien  acquis. 
Le  mal,  en  pareil  cas,  n'est  pas  d'y  entrer  et  d'en  user,  mais  de  savoir  en 
sortir. 

422, 

2,  Patience.  —  On  juge,  en  effet,  de  tout  par  comparaison;  et  souvent,  on 
est  moins  malheureux  quand  on  voit  plus  malheureux  que  soi. 

5,  Accoustumance.  — Au  dernier  alinéa  du  ch.  XIX  de  ce  même  livre,  Mon- 
taigne a  déjà  dit  que  les  paysans  et  les  gens  du  commun  ont  plus  de  véri- 
table philosophie. 

22,  Saluste.  —  Catil.,  4. 

23,  Çyrus.  —  Xéxophon,  Économique,  IV,  20. 

30,  Rnfus.  —'Pline,  Epist.,  I,  3.  —  C'est  à  un  Caninius  Rufus,  au  lieu  de  Cor- 
nélius Rufus,  que  ce  conseil  est  adressé. 

37,  Immortelle.  —  Cicérox,  Orator,  43.  —  «  Si  tu  cherches  la  retraite,  que 
ce  soit  pour  parler  à  toi,  et  non  pour  faire  parler  de  toi  »,  dit,  au  con- 
traire, Séxèque,  Epist.  25.  V.  I,  428. 
424, 

5,  Contradiction.  —  N'en  déplaise  à  Montaigne,  il  n'y  a  pas  contradiction  à 
chercher  à  occuper  ses  loisirs,  quand  on  s'est  retiré  de  la  vie  publique. 
Outre  que,  sans  cela,  on  serait  le  plus  souvent  à  charge  à  soi-même  et  aux 
autres,  on  ne  saurait  blâmer  ceux  qui  emploient  au  mieux  de  ce  qui  leur 
est  possible  «  les  restes  d'une  vie  qui  s'en  va,  d'une  ardeur  qui  s'éteint  ». 
Du  reste,  développant  son  idée,  l'auteur  ne  critique  que  l'excès  que  l'on 
peut  apporter  dans  les  occupations  nouvelles-  auxquelles  on  se  livre,  ce  en 
quoi  il  a  raison;  mais,  là  où  tout  le  monde  peut  ne  pas  partager  son  en- 
thousiasme, c'est  quand  il  exalte  ceux  qui  se  confinent  dans  la  solitude, 
pour  y  mener  une  vie  exclusivement  contemplative  ;  leur  tranquillité  re- 
lative est  indéniable,  mais  pour  avoir  droit  au  repos,  il  faut  l'avoir  gagné, 
et  c'est  pourquoi,  en  ce  qui  les  concerne,  chaque  cas  est  à  juger  en  par- 
ticulier. 

21,  Conseil.  —  Le  conseil  de  Pline  à  Rufus. 

22,  Liures.  —  Les  éd.  ant.  à  88  aj.  -.si  elle  a  faute  de  règle  el  de  mesure,  elle. 

31.  Pbilistas.  —  Passage  traduit  de  Sénèque,  Epist.  51.  — ^  De  ce  nom  «  Phi- 
listas  »,  ou  mieux  de  celui  de  Phélestas  (en  grec  çï)),f,Tïi;)  que  les  anciens 
Égyptiens  donnaient  aux  voleui*s  de  grand  chemin  (d'où  viennent  le  mot 
latin  fallere  tromper  et  le  mot  français  filou),  a  pu  provenir  celui  de  Phi- 
listins, attribué  par  les  Hébreux  à  ces  tribus  qui  occupaient  une  partie  de 
la  côte  de  Syrie,  aux  dépens  desquels  ils  s'établirent,  avec  lesquels  ils 
furent  si  fréquemment  en  guerre,  et  le  nom  est  peut-être  l'origine  de  celui 
de  Palestine,  donné  par  les  Romains  à  cette  contrée. 

34,  Suitte.  —  Ésope  conte  que  Jupiter,  voulant  un  jour  mêler  ensemble  la 
volupté  et  la  douleur,  n'y  parvint  pas,  et  décida  alors  qu'elles  se  suivraient 
mutuellement,  règle  qui,  en  fait,  est  bien  loin  d'être  d'application  courante, 
aussi  Antisthène  recommandait-il  de  rechercher  les  plaisirs  qui  suivent  la 
peine  et  non  ceux  qui  la  précèdent. 
426, 

13,  Via.  —  Citation  que  Montaigne  a  fait  précéder  de  sa  traduction. 

21,  Presse.  —  Pour  le  monde,  au  bénéfice  de  la  société. 

34,  Autres.  —  Les  éd.  ant.  à  88  aj.  :  et  les  alonger  de  toute  nostre  puissance. 


NOTES.        LIV.  I,  CH.  XXXVTIl.         VOL.  I,  PAG.  426.  F. 379 

Quamcumque  Deus  libi  forlunaueril  horam,  Grata  sume  manu,  nec  dulcia 
differ  in  nnnum  (Quelle  que  soit  l'heure  à  laquelle  Dieu  se  montre  favora- 
ble à  toi,  accepte  avec  reconnaissance,  n'ajourne  pas  à  plus  tard  ce  qui  est 
doux  à  recevoir). 
38,  Ambition.  —  V.  I,  110  et  N.  Société. 
428, 

5,  Troupe.  —  C.-à-d.  se  jeter  j)lus  avant  dans  la  foule.  —  Faulsée  est  un  vieux 

mot  qui  signifie  choc,  charge,  incursion,  irruption. 
7,  Philosophes.  —  Épicure  etSénèque;  le  premier  chef  de  la  secte  qui  porte 
•son  nom,  le  second  appartenant  à  celle  des  épicuriens.  —  Sénèque  (Episl. 
21)  cite  un  passage  de  la  lettre  d'Épicure  à  Idoménée,  différente  de  celle 
que  nous  a  conservée  Diogène  Laërci;.  Le  Clerc. 

19,  Mesme.  —  Sknèque,  Episl.  7. 

23,  Vray.  —  Épicure  écrivait  à  Idoménée. 

25,  Peuple.  —  Cette  idée,  Sénèque  l'attribue  à  Déniocrile. 
27,  Tanière.  —  Sénèque,  Epist.  68. 
32,  Gouuerner.  —  Sénèque,  Epist.  25. 
430, 

2,  Train.  —  C;-à-d.  le  respect  que  vous  avez  pour  eux,  vous  remettra  sur  le 
droit  cliemin. 

5,  Cogitations.  —  Pensées;  du  latin  cogilatio  qui  a  même  signification, 
y.  Premiers.  —  Pline  le  Jeune  et  Cicéron. 

CHAPITRE  XXXIX. 

Ce  chapitre  est  numéroté  XL  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

10,  Couples.  —  Épicure  et  Sénèque  d'une  part,  Cicéron  et  Pline  le  Jeune  de 
l'autre. 

14,  Registres.  —  Pline  ne  mérite  pas  ce  reproche.  Cicéron,  Epist.  fam.,  V, 
12,  écrivant  à  Lucceius,  le  prie,  en  effet,  de  ne  pas  s'attacher  simplement 
à  son  endroit  aux  règles  de  l'histoire,  et  de  franchir  hardiment,  en  sa  fa- 
veur, les  bornes  de  la  vérité;  tandis  que  Pline,  Epist.,  VII,  33,  déclare  ex- 
pressément à  Tacitç  qu'il  ne  demande  pas  qu'il  donne  la  moindre  atteinte 
à  ce  qui  est  :  l'histoire",  ajoute-t-il,  doit  émaner  de  la  vérité  qui  suffit  pour 
que  soient  acceptés  tous  les  faits  qu'elle  relate. 

16,  Histoires.  —  Ce  désir  de  voir  leurs  faits  et  gestes  passer  à  la  postérité 
(toute  altération  de  la  vérité  mise  de  côté)  était  bien  excusable  chez  ces 
deux  pereonnages,  en  raison  des  services  qu'ils  avaient  conscience  d'avoir 
rendus.  Les  en  blâmer  serait  condamner  un  des  plus  puissants  stimulants, 
chez  l'homme,  du  bien  et  du  beau  ;  et  l'humanité,  s'il  en  était  ainsi,  sans 
y  rien  gagnei-,  pourrait  y  perdre  beaucoup. 

20,  Amis.  —  Les  lettres  de  Cicéron  ne  semblent  pas,  comme  Montaigne  le 
donne  à  entendre,  avoir  été  écrites  pour  le  public;  lui-même  n'en  avait 
conservé  que  soixante-dix,  les  autres  ont  été  recueillies  par  Tiron  après  sa 
mort;  il  suffit  de  lire  surtout  les  lettres  à  Atticus  pour  être  persuadé 
qu'elles  ne  s'adressaient  qu'à  lui.  A  l'égard  de  Pline  le  .leune,  l'assertion  est 
au  moins  douteuse. 

24,  Monde.  —  D'une  république  souveraine  du  monde. 
432, 

7,  Personnage.  —  Diderot  ne  partage  pas  cette  manière  de  voir  :  «  Le  ta- 
lent de  s'immortaliser  par  les  lettres  n'est  pas  une  qualité  malséante  pour 
personne  à  quelque  rang  que  ce  soit  :  la  guirlande  d'Apollon  s'entrelace 
sans  honte  sur  le  même  front  que  celle  de  Mars.  » 

9,  Atriquain.  —  Térence,  dont  il  est  ici  question,  était  d'origine  africaine  ; 
amené  à  Rome  comme  esclave,  il  avait  été  acheté  par  Scipion  Émilien  et 
rendu  par  lui  à  la  liberté. 

11,  Luy  mesme.  —  Il  ne  l'avoue  pas,  et  les  passages  du  prologue  de  sa  co- 
médie des  Ad'elphes  où  l'on  a  cru  en  voir  indice  ne  sont  autres  que  des 


F.380  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

marques  de  déférence  à  l'égard  de  protecteurs,  ne  comportant  nullement 
l'idée  de  coopération;  du  reste,  il  était  plus  âgé  que  Scipion  et  Lélius  et  sa 
notoriété  avait  précédé  la  leur.  Cicéron,  dont  on  invoque  aussi  le  témoi- 
gnage sur  ce  point,  ne  le  donne  que  comme  un  on  dit,  qu'il  ne  garantit 
pas.  Paven. 

14,  Louables.  —  Montaigne  reproduit  la  même  idée,  I,  356. 

17,  Arquebusier.  —  Cette  pratique  d'un  art  manuel  était  assez  fréquente 
cliez  les  grands.  Chez  les  Musulmans,  elle  est  de  règle,  ce  qui  ne  veut  pas 
dire  qu'elle  soit  toujours  observée;  le  Coran  les  y  incite  :  «  Prends  un  rabot, 
c'est  une  arme  qui  te  fera  combattre  cette  maladie  de  l'àme,  cet  affreux 
poison  de  la  vie,  qu'on  appelle  l'ennui.  »  Haroun  er-Raschid,  un  de  leurs 
plus  célèbres  khalifes,  excellait  dans  la  broderie  sur  cuir,  dit  la  chronique 
de  son  temps,  et  dut  à  ce  talent  de  ne  pas  perdre  la  vie;  il  s'était  aven- 
turé, incognito,  chez  un  malfaiteur  dont  il  avait  surpris  la  criminelle  in- 
dustrie et  dont,  sur  le  point  de  se  défaire  de  lui,  la  cupidité  se  laissa  sé- 
duire par  la  proposition  que  le  khalife  lui  fit  de  l'employer  à  des  travaux 
de  cette  nature  qu'il  trouverait  à  vendre  avantageusement,  ce  qui  donna 
possibilité  au  prisonnier,  par  les  arabesques  dont  il  composa  ses  dessins, 
de  faire  connaître  sa  situation  au  dehors  et  d'être  délivré.  —  Louis  XVI, 
excellent  géographe,  s'adonnait  aussi  à  la  serrurerie.  Un  jour  qu'il  faisait 
admirer  à  un  de  ses  valets  de  chambre  une  serrure  qu'il  venait  d'achever, 
celui-ci  lui  fit  cette  réponse  que  devaient  confirmer  si  tragiquement  les 
événements  qui,  déjà  peut-être,  la  lui  inspiraient  :  «  Quand  les  rois.  Sire, 
s'occupent  des  ouvrages  du  peuple,  le  peuple  s'empare  des  fonctions  des 
rois!  » 

17,  Bague.  —  Jeu  d'adresse,  où,  étant  à  cheval  et  au  galop,  ceux  qui  y  pren- 
nent part,  tâclicnt  d'enfiler  et  d'emporter  avec  le  bout  de  leur  lance  des 
anneaux  suspendus  de  place  en  place  sur  la  carrière  où  se  fait  la  course. 

19,  Propres.  —  Montaigne,  dans  tout  ce  chapitre,  s'est  montré  fort  sévère  à 
l'égard  de  Pline  et  de  Cicéron  qui  étaient  précisément  dans  le  cas  qu'il  ad- 
met :  l'éloquence  et  la  beauté  du  style  n'étaient  pas  leurs  seules  qualités, 
elles  se  trouvaient  unies  à  d'autres  talents  sinon  plus  rares  et  plus  estima- 
bles, du  moins  d'une  utilité  plus  générale  dans  les  situations  qu'ils  ont  oc- 
cupées, quoiqu'il  n'y  ait  peut-être  pas  eu  de  ville  au  monde  où  l'art  de 
bien  parler  ait  plus  importé  qu'à  Rome.  Naigeon. 

28,  Philippus.  —  Plutarqle,  Démosthène.  En  358,  avant  les  hostilités  entre 
Philippe  d'une  part  et  les  Athéniens  et  les  Thébains  de  l'autre,  qui  abou- 
tirent à  la  bataille  de  Chéronée. 

38,  Sciât.  —  Citation  tirée  de  Virgile,  mais  où  ]Montaigne  introduit  des  chan- 
gements. 
434, 

7,  Bien.  —  Pi.utakque,  Périclès,  I. 

10,  Moy.  —  Plutarque,  Comment  on  peut  discerner  le  flatteur  d'avec  Vami,  25. 

10,  Iphicrates.  —  Pixtarque,  De  la  Fortune.  —  Iphicrate  est  demeuré  fameux 
par  la  discipline  qu'il  exigeait  des  troupes.  Faisant  une  ronde  au  siège  de 
Corinthe  et  trouvant  une  sentinelle  endormie,  il  la  perça  de  son  javelot; 
et,  comme  on  le  blâmait  de  l'avoir  ainsi  tuée  :  «  Telle  je  l'ai  trouvée,  dit- 
il,  telle  je  l'ai  laissée.  »  C'est  lui  qui  créa  les  Peltastes,  soldats  armés  à  la 
légère. 

14,  Ceux-là.  —  Plltarque,  Traité  de  la  Fortune.  —  Au  moins  en  principe,  il 
était  admis  jadis,  dans  les  gouvernements  démocratiques  comme  dans  tous 
autres,  que  gouverner  c'est  conduire  et  non  être  conduit,  mais  ceux  qui 
conduisent  étant  effectivement  responsables  de  la  manière  dont  ils  s'en 
acquittent. 

Les  choses  ont  bien  change,  c'est  même  le  principe  contraire  que  con- 
sacre cette  institution,  créée  par  crainte  du  despotisme,  de  rois  constitu- 
tionnels et  autres  chefs  d'État  aux  dénominations  diverses  qui  sont  irres- 
ponsables et  dont  le  rôle,  dans  sa  partie  essentielle,  se  borne  à  la  repré- 
sentation, à  la  constitution  des  ministères  et  à  la  promulgation  des  lois  et 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  XXXIX.        VOL.  I,  PAG.  434.  F.381 

décrets  à  la  rédaction  desquels  ils  demeurent  étrangers.  Réduite  à  ce  qu'elle 
est,  leur  action  poui'rait  encore  être  de  quelque  efficacité  ;  mais,  pour  cela, 
il  faudrait  qu'ils  aient  du  caractère.  Il  est  bien  loin  d'en  être  toujours  ainsi; 
n'avons-nous  pas  vu  l'un  d'eux,  durant  les  sept  années  qu'il  a  occupé  ces 
fonctions,  désavouer  en  maintes  occasions  ce  que,  contre  le  gré  de  sa  cons- 
cience, il  ratifiait  de  sa  signature,  sans  jamais  user  du  droit,  peut-être  illu- 
soire, mais  dont  il  eût  dû  user  néanmoins,  que  lui  conférait  la  constitution 
d'en  appeler  à  une  seconde  délibération. 

Malheureusement,  on  France,  où,  Dieu  merci,  aucune  classe  privilégiée 
n'existe  plus  sur  laquelle  on  puisse  prendre  appui  pour  gouverner  sauf  à 
en  abuser  parfois  pour  opprimer  les  autres  classes,  mais  où  les  minorités 
ne  sont  pas  représentées  en  proportion  de  ce  qu'elles  sont,  la  passivité  du 
chef  de  l'État,  faute  de  contre-poids,  conduit  insensiblement  à  la  ruine. 
Tous  les  pouvoirs  se  trouvant  entre  les  mains  des  parlementaires  qui,  pour 
se  faire  nommer,  ont  promis  à  qui  mieux  mieux  tout  ce  qui  pouvait  ap- 
pâter les  électeurs;  une  fois  élus,  irresponsables  eux  aussi,  ils  ne  cherchent 
qu'à  préparer  leur  réélection  en  se  faisant  des  partisans,  et  vont  gaspillant 
à  cet  effet  la  fortune  publique  dont  ils  n'ont  cure. 

Les  causes  de  ces  accroissements  incessants  de  nos  budgets,  auxquels,  pour 
y  suffire,  pointe  à  l'horizon  l'impôt  sur  le  revenu  si  inquisitorial,  si  dange- 
reux par  son  élasticité  et  la  possibilité  qu'il  donne  de  dégrever  les  amis 
et  surcharger  les  adversaires  politiques,  sont  multiples.  En  dehore  des  dé- 
penses introduites  pour  donner  satisfaction  aux  intérêts  électoraux  parti- 
culièrement sous  forme  d'amendements  introduits  au  dernier  moment  lors 
du  vote  du  budget  et  qui  foisonnent  surtout  en  fin  de  législature,  des  gas- 
pillages résultant  de  la  pléthore,  également  en  progrès  incessants,  de  fonc- 
tionnaires, des  gestions  directes  de  l'État  si  onéreuses,  si  tyranniques  et  qui 
vont  aussi  s'étendant  de  plus  en  plus,  certains  errements  ajoutent  encore  au 
mal  dans  de  notables  proportions  :  c'est  la  défaveur  irréfléchie  attachée  aux 
demandes  de  crédits  supplémentaires  qui,  en  effet  fort  souvent  sujets  à 
caution,  devraient  être  examinés  sans  idée  préconçue  quand  elles  provien- 
nent d'évaluations  demeurées  au-dessous  des  prévisions,  ce  qui,  en  l'état 
actuel,  porte  à  demander  au  delà  du  nécessaire  pour  n'avoir  pas  à  faire  de 
nouvelles  demandes;  et  en  second  lieu,  aux  crédits  demeurés  sans  emploi, 
ce  qui,  trop  souvent,  entraîne  des  réductions  non  justifiées  sur  le  bud- 
get suivant  et  fait  qu'on  dépense  quand  même  la  totahté  des  allocations; 
ce  sont  là  des  abus  auxquels  remédierait  de  pouvoir,  sous  certaines  garan- 
ties, effectuer  des  virements  pour,  à  l'aide  de  fonds  demeurés  disponibles, 
solder  les  dépenses  insuffisamment  dotées. 

C'est  à  ces  errements  que  nous  devons  d'avoir,  pour  l'année  1906,  un 
budget  qui,  en  dehors  des  budgets  des  départements  et  des  communes  qui 
le  doublent,  s'élève  à  trois  miUiards  sept  cents  millions,  dans  lequel  même 
on  n'a  pas  tenu  compte  des  recettes  qui  feront  défaut  par  suite  de  la  ré- 
forme postale,  du  rétablissement  du  privilège  des  bouilleurs  de  crû,  etc., 
votés  au  dernier  moment.  En  1870,  après  les  désastres  de  1870-71  et  le 
paiement  de  l'indemnité  de  guerre  à  l'Allemagne,  le  budget  ne  s'élevait 
qu'à  deux  milliards  six  cents  millions,  soit  plus  d'un  milliard  en  moins. 
—  Et  simultanément,  notre  dette,  y  compris  les  dettes  départementales  (cinq 
cents  millionsl  et  les  dettes  communales  (quatre  milliards),  accrue  de  trois 
cent  soixante-six  millions  pendant  la  seule  législature  de  1902-1906,  atteint 
quarante-quatre  milliards.  —  Nous  avons  mentionné  la  marée  toujours 
croissante  de  fonctionnaires;  leur  nombre  (en  dehors  de  l'armée  et  des 
fonctionnaires  coloniaux)  s'élève  toujours  en  cette  même  année  1906  à  qua- 
tre cent  cinquante  mille,  alors  qu'ils  n'étaient  que  deux  cent  quarante 
mille  en  1873!  la  moitié,  payée  moitié  plus,  suffirait;  eux-mêmes,  les  ser- 
vices auxquels  ils  sont  attachés  et  aussi  le  budget  y  gagneraient. 

Comment  en  serait-il  autrement?  Les  ministres  ne  sont  que  des  délé- 
gués, choisis  non  d'après  leurs  aptitudes,  mais  en  raison  de  leur  verbiage 
effronté  et  de  leurs  opinions  du  moment,  faits  et  défaits  au  caprice  d'une 


F.382  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

chambre  houleuse  où  chacun  n'a  en  vue  (jue  son  intérêt  personnel,  préoc- 
cupation à  laquelle  eux-mêmes  n'échappent  pas.  Ils  sont  par  suite  absolu- 
ment hoi's  d'état  de  résister  au  mandat  impératif  de  leurs  commettants, 
d'autant  que  leur  responsabilité  n'existe  pas  en  fait  et  se  borne  à  faire  place 
à  d'autres,  quand  ils  ont  cessé  de  plaire. 

Le  remède  à  pareil  état  de  choses  désastreux  pour  le  paj's,  ressort  de  cet 
exposé  même  : 

Il  y  aurait  lieu  de  donner  au  Chef  de  l'État  ])liis  d'indépendance  et  plus 
d'autorité  sans  cependant  lui  donner  possibilité  de  renverser  la  Constitu- 
tion. On  ne  saurait  en  effet  oublier  les  malheurs  et  la  misère  qui  marquè- 
i-ent  la  fin  du  l'ègne  de  Louis  XIV,  dont  les  débuts  avaient  été  si  glorieux 
la  corruption  et  les  hontes  de  celui  de  Louis  XV;  la  faiblcs.so  de  Louis  XVI 
à  laquelle  sont  dus  en  partie  les  excès  de  la  Révolution,  faiblesse  qu'il  a 
payée  de  sa  tête,  et  avec  lui,  bien  d'autres  qui  n'en  pouvaient  mais;  —  le 
despotisme  et  l'ambition  de  Napoléon  I"'  qui,  après  avoir  reconstitué  la 
France,  l'avoir  parée  d'une  gloire  éternelle,  l'a  finalement,  malgré  tout  son 
génie,  laissée  amoindrie;  — les  journées  de  1830,  auxquelles  conduisirent 
la  réaction  et  le  fanatisme  religieux  sous  Louis  XVIII  et  Charles  X;  Louis- 
Philippe  fuyant  comme  son  prédécesseur  à  la  première  manifestation  tu- 
multueuse; —  Napoléon  III,  pour  parer  à  des  agitations  intérieures,  abou- 
tissant à  Sedan,  après  25  années  de  prospérité. — Tout  cela,  qui  n'embrassa 
pas  moins  de  deux  siècles  de  malaises  et  de  crises,  ne  saurait  être  perdu 
de  vue,  non  plus  que  les  procédés  employés  en  1802  pour  transformer  le 
consulat  en  Consulat  à  vie,  et  deux  ans  après  convertir  le  titre  de  premier 
consul  en  celui  d'empereur,  escamotages  qui  se  renouvelèrent  en  1848,  1851 
et  1852,  et  il  n'est  que  sage  de  se  méfier  et  de  chercher  à  en  prévenir  le 
retour. 

On  donnera  plus  d'indépendance  au  Chef  de  l'État,  en  le  faisant  élire  non 
parla  représentation  nationale  dont  il  demeure  la  créature  et  qui  le  choisit 
à  sa  dévotion,  non  par  le  suffrage  universel  direct  trop  irraisonné  et  trop 
facile  à  s'emballer  et  à  être  trompé,  mais  par  ces  mêmes  collèges  électoraux 
qui  élisent  les  sénateurs.  Du  même  coup  on  aura  accru  son  autorité,  ce 
mode  d'élection  ayant  l'avantage  de  faire  arriver  à  ces  fonctions  des 
hommes  non  inféodés  à"\un  parti  et  qui  ne  craindront  pas  d'user,  en  cas 
de  divergence  de  vue  avec  les  pouvoirs  législatifs,  des  droits  qu'il  détient 
actuellement,  auxquels  devrait  être  ajouté  celui  d'ajourner  à  la  législature 
suivante  l'examen  de  tout  projet  de  loi  adopté  contre  sa  manière  de  voir, 
et  n'ayant  pas  obtenu  une  majorité  de  plus  des  deux  tiers;  et  aussi  de  pou- 
voir retirer  son  portefeuille  à  tout  ministre  dont  tels  ou  tels  actes  n'auraient 
ni  son  assentiment  ni  celui  de  la  majorité  de  ses  collègues  et  qui,  en  pa- 
reille situation,  persisterait  à  ne  pas  démissionner. 

Mais  cela  serait  encore  insuffisant  si  on  ne  modifiait  également  le  mode 
d'élection  des  membres  de  la  chambre  des  députés,  de  façon  à  les  rendre 
eux  aussi  plus  indépendants  de  leurs  électeurs  et  moins  dans  l'obligation, 
pour  assurer  leur  réélection,  de  sacrifier  l'intérêt  général  aux  intérêts  lo- 
caux et  particuliers,  ce  qui  conduit  à  substituer  le  scrutin  de  liste  au  scru- 
tin individuel,  avec  faculté  de  répéter  le  même  nom  sur  un  même  bulletin 
autant  de  fois  qu'il  y  a  de  candidats  à  élire.  On  assurerait  de  la  sorte  la 
représentation  des  minorités,  ce  qui  n'est  que  justice  et  serait  souvent  une 
ressource  précieuse  pour  le  Gouvernement,  contre  les  exagérations  et  les 
exigences  de  la  majorité.  En  outre,  les  sénateurs,  élus  pour  neuf  ans,  ne 
devraient  pouvoir  l'être  à  nouveau  qu'après  un  intervalle  de  trois  ans,  et 
les  députés  élus  pour  quatre  ans,  et  rééiigibles,  ne  pouvoir  après  ces  huit 
années  être  à  nouveau  réélus  qu'apfès  un  intervalle  de  quatre  ans;  de  la 
sorte  ils  se  retremperaient  de  temps  à  autre  auprès  de  leurs  électeurs,  et 
jugeraient  mieux  des  abus. 

Accessoirement,  il  serait  désirable  que  le  nombre  des  députés  fût  réduit 
à  un  ]iour  150.000  habitants,  au  lieu  de  100.000,  et  le  nombre  des  sénateurs 
diminué  pareillement  d'un    tiers.  Afin  de  permettre  une  représentation 


NOTES.    -    LIV.  I,  CH.  XXXIX.        VOL.  I,  PAG.  434.  F. 383 

des  minoi-ités,  chaque  circonscription  électorale  devrait  comporter  au  moins 
trois  sénateurs  et  quatre  députés  et  leur  remaniement  être  efTectué  en  con- 
séquence. Cette  réduction  dans  le  nombre  des  députés  et  sénateurs  com- 
penserait en  partie  les  5.000.000  dont  ils  viennent  de  grever  le  budget  déjà 
si  lourd  et  en  déficit,  en  augmentant  leur  indemnité,  bien  que  cela  ne  figurât 
sur  la  profession  de  Coi  d'aucun  d'eux,  quand  il  était  candidat. 

Un  projet  de  loi  a  été  déposé  en  UXKÎ,  et  même  adopté  par  la  Commission 
de  la  chambre,  ce  qui  ne  présage  malheureusement  pas  son  adoption  pro- 
chaine et  définitive,  proposant  la  division  de  la  France  en  dehors  de  Paris 
on  vingt-cinq  régions,  au  lieu  des  86  départements  actuels,  ce  que  justifient 
pleinement  les  immenses  progrès  réalisés  dans  les  facilités  (!t  la  prompti- 
tude des  communications.  Ces  régions  seraient  désignées  par  le  nom  de 
leurs  capitales  :  Lille,  Amiens,  Rouen,  Caen,  Orléans,  Versailles,  Reims, 
Troyes,  Nancy,  Besançon,  Dijon,  Boui'ges,  Tours,  Nantes,  Rennes,  Poitiers, 
Clormont-Ferrand,  Lyon,  Grenoble,  Marseille  avec  la  Corse,  Nîmes,  Mont- 
pellier, Toulouse,  Bordeaux  et  Pau.  —  Les  services  publics  actuellement 
organisés  par  départements,  le  seraient  par  régions;  préfectures  et  sous- 
préfectures  disparaîtraient,  cantons  et  communes  continueraient  à  subsis- 
ter tels  que.  l\  serait  fort  à  souhaiter  que  cela  aboutît,  et  qu'on  en  profitât 
pour  apporter  au  nombre  et  au  mode  d'élection  des  sénateurs  et  députés 
dos  modifications  dans  le  sens  sus-indiqué;  mais  si  logique  que  ce  soit,  cela 
léserait  trop  d'intérêts  locaux,  pour  qu'on  puisse  avant  bien  longtemps  en 
espérer  la  réalisation. 

Une  cour  suprême  élective  serait  à  créer,  permettant  d'en  appeler  des 
abus  de  pouvoir  des  ministres  et  de  leurs  agents. 

Contre  nos  mandataires  eux-mêmes  abusant  de  leur  mandat,  le  référen- 
dum devrait  être  admis  contre  tout  acte  d'un  conseil  municipal,  d'un  con- 
seil général  ou  du  pouvoir  législatif,  lorsqu'il  serait  demandé  par  un  quan- 
tum d'électeurs  déterminé,  la  moitié  par  exemple  du  nombre  de  votes  émis 
au  renouvellement  de  ces  corps  électifs. 

La  loi  des  candidatures  multiples  est  à  maintenir. 

Les  hommes  mariés  ou  veufs  avec  enfants  mineurs  devraient  avoir  double 
vote,  ils  déposeraient  dans  l'urne  deux  bulletins  au  lieu  d'un.  —  Les  abs- 
tentions devraient  constituer  un  délit,  entraînant  amende  et  affichage  à  la 
porte  des  mairies  quand  elles  ne  peuvent  être  justifiées  et  témoignent  parti 
pris  ou  négligence. 

Tout  projet  de  loi,  émanant  du  Gouvernement  ou  de  rinitiatiye  parle- 
mentaire, devrait  avant  discussion  être  soumis  soit  au  Conseil  d'État,  soit 
aux  Conseils  supérieurs  existants  dans  les  différents  ministèi'cs  que  la  ques- 
tion intéresse  et  leur  avis  être  joint;  si  le  projet  entraîne  des  conséquences 
budgétaires,  l'évaluation  de  la  dépense  en  résultant  serait  mentionnée  et 
aussi  les  ressources  disponibles  avec  lesquelles  on  se  propose  d'y  subvenir. 

Toute  loi  devrait  avoir  obtenu,  dans  chaque  chambre,  les  voix  des  trois 
cinquièmes  de  ses  membres.  —  L'indemnité  allouée  aux  membres  du  Par- 
lement, décomptée  à  raison  de  300  jours  par  année,  devrait  être  retenue 
aux  absents,  quel  que  soit  le  motif  de  l'absence,  à  raison  de  1/300,  soit 
cinquante  francs  par  journée  d'absence. 

La  loi  de  finance  devrait  comporter  comme  dépenses  obligatoires  toutes 
celles  résultant  de  lois  antérieures  non  abrogées  par  de  nouvelles  rendues 
dans  les  formes  ordinaires;  et  aucune  dépense  n'y  être  admise  en  cours  de 
discussion,  dont  le  .service  qu'elle  a  pour  objet  d'assurer  n'ait  été  au  préa- 
lable l'objet  d'une  loi  spéciale  ;  on  éviterait  de  la  sorte  ces  demandes 
éhontées  et  si  nombreuses  de  crédits  qui,  présentées  au  dernier  moment, 
passent  à  la  faveur  de  la  surprise  et  de  la  hâte  que  l'on  a  d'en  finir  et  qui 
pullulent  surtout  en  fin  de  lo'gislature. 

Enfin  que  d'économies  à  réaliser,  par  exemple  ces  affichages  de  discoui's 
qui  seraient  moins  répétés  s'ils  avaient  lieu  aux  frais  de  ceux  qui  les  votent; 
dépense  d'une  douzaine  de  mille  francs  chaque  fois,  bien  inutile,  car  per- 


F.384  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

sonne  ne  les  lit  sur  les  murs,  les  feuilles  publiques  renseignant  amplement 
chaque  int»!'ressé. 

Ces  propositions  ne  sont  pas  nouvelles,  voilà  beau  temps  que  l'opinion 
publique  les  réclame,  mais  elles  gêneraient  ceux  dont  elles  ont  pour  objet 
d'enrayer  les  abus,  et  c'est  à  eux  qu'il  appartient  de  prononcer! 
16,  Flustes.  —  Pi.uTARQUE,  Périclès. 

24,  Volume.  —  La  dernière  édition  des  Essais  publiée  du  vivant  de  l'auteur 
(celle  de  1588)  était  en  un  seul  volume  ;  en  1598,  ils  parurent  en  deux  volumes 
in-S";  en  1608  en  trois  volumes  in-12;  en  1617  en  quatre  volumes  in-4'>;  en 
1669  en  dix  volumes  in-12;  déjà  y  avaient  été  ajoutés  une  notice  sur  l'auteur, 
la  traduction  des  citations,  des  sommaires,  des  notes  et  une  table  analytique  ; 
toutefois  jusqu'en  ces  derniers  temps  cette  augmentation  dans  lo  nombre 
des  volumes,  qui  dans  les  éditions  modernes  varie  de  trois  à  six,  n'avait  pas 
tant  eu  pour  cause,  comme  actuellement,  l'accroissement  des  commentaires 
que  l'intention  de  réduire  le  foi-mat  de  manière  à  lo  rendi-e  plus  portatif. 

27,  Essais.  —  C'est  précisément  en  «'inspirant  de  cette  indication,  «  en  esplu- 
chantvn  peu  plus  curieusement  les  Essais»,  qu'est  résultée  l'extension  donnée 
aux  notes  qui  accompagnent  la  présente  édition. 

33,  Air.  —  En  disant  que  son  livre  «  porte  la  semence  d'vne  matière  plus 
riche  et  plus  hardie  et  souuent  à  gauche  vn  ton  plus  délicat  »,  Montaigne 
veut  probablement  parler  entre  autres  des  questions  afférentes  à  la  poli- 
tique intérieure  à  laquelle  il  ne  fait  que  des  allusions  très  indirectes,  suf- 
fisantes toutefois  pour  indiquer  qu'il  trouvait  que  tout  de  ce  côté  n'allait 
pas  à  son  gré,  et  à  la  religion,  dont  il  parle  à  maintes  reprises,  mais  avec 
des  réticences  continues  dénotant  un  antagonisme  profond,  sur  ce  point, 
.  entre  ses  croyances  de  parti  pris  et  sa  raison. 
436, 

'  3,  Philosophes.  —  Épicure  et  Sénèque. 

12,  Publiques. —  Sénèque,  Epist.  21. 

15,  Cadence.  —  Par  cette  critique,  Montaigne  donne  à  penser  que  dans  les 
lettres  écrites  par  Cicéron,  la  forme  seule  a  de  la  valeur.  Ce  n'était  pas  ce 
qu'en  pensaient  ses  contemporains;  Cornélius  Nepos  entre  autres,  dans  sa 
Vie  d  AUicus,  les  apprécie  comme  «  pouvant  en  quelque  sorte  remplacer 
l'histoire,  et  offrant  tant  de  détails  sur  les  hommes  célèbres  du  temps,  sur 
leurs  vertus  et  leurs  vices,  sur  les  révolutions  de  Rome,  qu'elles  semblent 
en  révéler  tous  les  secrets  ». 

27,  Chose.  —  Il  nous  reste  une  trentaine  de  lettres  de  Montaigne,  dont  deux 
seulement  sont  intéressantes  :  l'une,  écrite  à  son  père  pour  lui  raconter  la 
mort  de  La  Boétie;  l'autre,  très  courte,  adressée  à  sa  femme,  où  il  lui  d(''- 
clare  sans  ambage  que  le  temps  est  passé  de  la  courtiser  et  de  la  caressei- 
(il  y  avait  cinq  ans  qu'ils  étaient  mariés),  et,  pour  la  consoler  de  la  perte 
qu'elle  vient  de  faire  d'une  fille,  seule  enfant  qu'ils  avaient  eue  jusque-là, 
née  et  morte  en  son  absence,  n'ayant  vécu  que  deux  mois,  il  lui  envoie  la 
traduction  par  La  Boétie  d'une  lettre  de  Plutarque  se  rapportant  à  sembla- 
ble situation.  Toutes  les  autres  sont  dénuées  d'intérêt,  la  plupart  «  cerimo- 
nieuses  »,  s'accordant  peu  avec  son  caractère  et  son  talent. 

28,  Verues.  —  Les  Essais,  qu'ailleurs  leur  auteur  qualifie  de  rapsodie  (I,  84), 
et  ailleurs  encore  de  galimafrées. 

438, 

17,  Contenance.  —  Var.  de  1588  :  Ceux  que  i'aime  me  mette  en  peine,  s'il 
faut  que  ie  le  leur  die,  au  lieu  de  :  «  l'honnore...  contenance  ». 

21,  Bienuienner.  —  Complimenter,  féliciter  quelqu'un  sur  son  heureuse  ar- 
rivée, l'assurer  de  sa  bienvenue. 

32,  Embabouinée.  —  Niaisement  possédée,  adonnée  à. 

34,  Mal.  —  Montaigne  exagèi-e  lorsqu'il  dit  qu'il  peignait  (écrivait)  insup- 
portablement  mal;  les  spécimens  qu'on  a  de  lui  sont  d'une  écriture  très 
lisible,  bien  rangée,  qui  révèle  peu  la  vivacité  de  caractère  que  certains  lui 
attribuent;  même  ses  annotations  sur  l'exemplaire  de  Bordeaux  et  sur  dif- 
férents ouvrages  lui  ayant  appartenu,  sont  assez  facilement  déchiffrables. 


NOTES.         LIV.  1,  CH.  XL.         VOL.  I,  PAG.  440.  F.385 

CHAPITRE  XL. 

Ce  chapitre  est  luuiiéi'oté  XIV  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  do  Bordeaux. 
440, 

19,  Auons.  —  Ce  chapitre  est  très  beau,  mais  assez  diflicile  à  entendre. 
Montaigne  y  traite  avec  art  et  subtilité  le  thème  qu'il  lui  a  donné  pour 
titre,  on  y  trouve  entre  autres  une  digression  très  curieuse  et  très  philo- 
sophique sur  les  trois  (>tats  différents  dans  lesquels  lui-même  s'est  trouvé 
sous  le  rapport  di'  la  fortune.  Naigeon. 

20,  Ancienne.  —  Manuel  d'ÉPiCTÈTE,  10. 

21,  Mesmes.  —  Cette  maxime  est  um;  de  celles  qui,  dans  son  texte  grec, 
étaient  peintes  sur  les  solives  du  plafond  de  la  bibliothèque  de  Montaigne. 

27,  Cbeuiroms.  —  iN'en  profiterions-nous,  n'en  jouirions-nous?  —  Chevir  est 
un  vieux  mot  qui  signifie  venir  à  bout  d'un(>  chose,  en  jouir,  en  disposer; 
d'où  chevance,  bien  que  l'on  possède. 
442, 

17,  Parties.  —  Parties  adverses,  comme  on  dit  au  barreau;  autrement  dit 
«  ennemies  »,  mot  que  dans  quelques  éditions  on  a  substitué  à  celui  de 
parties. 

21,  Maux. 

«  La  mort  est  simplement  le  terme  de  la  vie.        Que  par  une  conduite  sage 
De  pensers  et  do  biens  elle  n'est  point  suivie;        La  loi  de  l'univers  engage 
Ce  n'est  qu'un  paisible  sommeil,  A  n'avoir  jamais  de  réveil.  . 

Abdé  de  Chaulieu. 

22,  La  supportent....  la  vie.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  Ne  la  recoiuent  ils  pas  de 
tout  autre  visage? 

27,  Tuer.  —  En  295,  alors  que  ce  philosophe  était  envoyé  près  de  lui,  à  titre 
de  négociateur,  par  Ptolémée  I,  roi  d'Egypte. 

28,  Cantbaride.  —  Cicéhon,  Tusc,  40.  —  Avec  la  cantharide,  insecte  dont 
on  fait  grand  usage  en  médecine  pour  les  vésicatoires,  on  composait  un 
poison  qui  était  assez  employé  chez  les  anciens. 

30,  Populaires.  —  Les  éd.  ant.  a].  :  et  communes. 
444, 

8,  leusne.  —  C'est  le  sujet  d'une  épigramme  d'OwEN,  I,  123. 

21,  Errer.  —'Les  éd.  ant.  port.  :  que  de  se  départir  de  ses  opinions  quelles 
qu'elles  fussent,  au  lieu  de  :  «  que  se  laisser...  errer  ». 

22,  Print.  —  En  1477,  lors  de  la  mainmise  sur  l'Artois,  par  Louis  XI,  à  la 
mort  de  Charles  le  Téméraire. 

26,  Gallee.  —  Locution  signifiant  :  «  Viv(î  le  plaisiri  »  ou  encore  :  «  Allons, 
tout  est  bien!  »  ■•  Vogue  la  galéo!  >•  dit  Panurge,  dans  Rabelais,  se  voyant 
sorti  sain  et  sauf  d'une  tempête  (V.  N.  I,  250  :  Galler).  Aujourd'hui  on  dit 
et  on  écrit  par  corruption  :  «  Vogue  la  galère  !  »  dont  l'étymologie  est  autre 
et  la  signification  :  «  Advienne  que  pourra!  »  différente. 
446, 

1,  Mesmes.  —  On  présentait  à   Mandrin,  voleur  fameux  du  xvni'  siècle, 
qu'on  allait  rouer,  un  religieux  pour  confesseur;  il  répondit  qu'«  il  le  trou- 
vait trop  gras,  pour  un  homme  qui  prêchait  l'abstinence  ».  —  Ce  mépris 
de  la  mort,  en  pareille  occurrence,  n'est  pas  l'apanage  exclusif  des  scélé- 
rats; les  honnêtes  gens,  victimes  des  fureurs  populaires,  se  sont  montrés 
maintes  fois  aussi  indifférents.  Les  exemples  en  ce  genre  abondent  sous  la 
terreur  :  le  général  Biron,  entre  autres,  condamné  par  le  tribunal  révolu- 
tionnaire, au  moment  d'être  conduit  à  l'échafaud,  se  fit  servir  des  huîtres 
et  offrit  un  verre  de  vin  au  bourreau,  en  lui  disant  :  «  Prenez,  cela  vous 
donnera  du  courage  ;  vous  devez  en  avoir  besoin  au  métier  que  vous  faites.  » 
4,  Des  leurs.  —  Il  en  était  de  même  en  Thrace,  au  dire  d'IIÉRODOTE. 
4,  Constamment.  —  Avec  constance,  courage,  résignation. 
9,  Rescousses.  —  De  prises  et  de  reprises.  —  Rescousse  signifiait  secours, 

ESSAIS   DE   MONTAIGNE.  —  T.   IV.  25 


F.386  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

délivrance,  d'où  l'expression  :  •■  A  la  rescousse  »  ;  ce  tei*me  est  encore  usité 
dans  la  jurisprudence  maritime  pour  i-eprise  d'un  navire  dont  on  s'est 
trouvé  dépossédé. 
13,  Sepmaiae.  —  En  1520;  sous  François  I",  alors  que  les  Français,  en  pos- 
session du  duché  de  Milan  depuis  cinq  ans,  et  depuis  le  même  temps  eu 
lutte  pour  s'j'  maintenir,  en  étaient  définitivement  chassés. 

18,  Nombre.  —  Plutarque,  Brutus,  8.  —  En  42.  Après  la  mort  de  César,  Bru- 
tus  et  Ca.ssius  cherchèrent  à  se  créer  un  centre  de  résistance  dans  l'Asie 
Mineure.  La  ville  de  Xanthe  n'accédant  pas  à  leurs  projets,  Brutus  l'assié- 
gea et  s'en  empara.  Les  Xanthiens  se  détendirent  avec  acharnement,  allant 
au-devant  de  la  mort,  se  sacrifiant,  eux,  leurs  femmes  et  leurs  enfants;  si 
bien  que,  touché  de  compassion,  Brutus  alla  jusqu'à  promettre  une  récom- 
pense à  tout  soldat  qui  sauverait  un  habitant.  A  peine  parvint-on  de  la 
sorte  à  en  sauver  cent  cinquante  qui  se  décidèrent  à  accepter  la  vie  à  la- 
quelle on  s'efforçait  de  les  retenir. 

19,  Vie.  —  ■<■  Toute  opinion  peut  être  préférée  à  la  vie,  dont  l'amour  cepen- 
dant parait  si  fort  et  si  naturel.  »  Pascal. 

22,  Aux  leurs.  —  Diodore  de  Sicile,  V,  19.  —  En  479.  Lors  de  la  deuxième 
guerre  médique,  les  différents  peuples  de  la  Grèce,  un  peu  avant  la  bataille 
de  Platée,  s'unirent  par  un  serment  demeuré  célèbre  dans  l'antiquité  et 
dont  voici  la  foi-mule  :  «  Je  n'estimerai  pas  la  vie  plus  que  la  liberté;  je 
n'abandonnerai  mes  chefs  ni  vivants,  ni  morts,  et  j'ensevelirai  mes  com- 
pagnons tués  dans  le  combat.  Vainqueur,  je  ne  contribuerai  jamais  à  la 
destruction  d'aucune  des  villes  qui  ont  pris  part  au  combat.  Je  ne  relève- 
rai aucun  des  temples  brûlés  ou  renversés;  je  laisserai  subsister  ces  ruines, 
comme  un  monument  qui  doit  rappeler  à  la  postérité  la  fureur  sacrilège 
des  Barbares.  » 

25,  Castille.  —  Ferdinand  et  Isabelle.  Expression  consacrée  par  les  Espa- 
gnols qui  ne  séparent  pas  ces  deux  noms  :  Isabelle  était,  de  fait,  reine  de 
Ca.stille,  mais  son  mari  Ferdinand  le  Catholique  y  régnait  en  son  nom. 
Après  l'expulsion  des  Maures,  en  J4U2,  ils  prirent  en  commun  le  titre  de 
rois  d'Espagne. 

25,  luifs.  —  En  1492.  Cette  expulsion  anéantit  le  commerce  et  l'industrie  de 
l'Espagne;  beaucoup  se  réfugièrent  en  Hollande  et  en  France. 

31,  Escbarcement.  —  Chichement,  avec  trop  d'épargne;  de  l'italien  scareo, 
qui  veut  dire  chiche. 
448, 

5,  Pais.  — En  1497.  Ce  revirement  chez  Emmanuel  fut  dû  à  la  reine,  fille 
d'Isabelle  de  Castille,  qui  en  avait  fait  une  condition  absolue  de  son  ma- 
riage; la  persécution  qui  s'ensuivit  fut  une  des  principales  causes  des  trou- 
bles et  divisions  qui  ont  agité  le  Portugal  pendant  trois  siècles. 

20,  Religion.  —  Le  P.  Jésuite  Marianna  dit,  dans  son  Histoire  d'Espagne. 
XXYI,  13,  qu'en  vertu  de  cet  édit,  les  enfants  devaient  être  baptisés  de 
force,  et  il  ajoute  :  «  édit  cruel,  tout  à  fait  contraire  aux  lois  et  maximes 
chrétiennes  ». 

27,  Prefix.  —  Qu'il  leur  avait  fixé;  du  latin  prœfijoere,  déterminer. 

34,  Opinions.  —  En  1225.  L'hérésie  des  Albigeois,  dérivée  de  celle  des  Mani- 
chéens, repoussait  entre  autres  choses  l'autorité  du  pape  et  des  prêtres. 
Née  dans  le  xi*  siècle,  elle  embrasa  tout  le  midi  de  la  France,  que  les  persé- 
cutions dirigées  contre  elle  mirent  à  feu  et  à  sang.  Cette  guerre  ne  prit  fin 
que  vers  1229;  mais  aux  croisades  auxquelles  elle  avait  donné  lieu,  .se 
substituèrent  alors,  dans  la  région,  pour  y  consolider  la  foi,  l'Inquisition  et 
toutes  ses  horreurs. 
450, 

2,  Mort.  —  Il  en  est  de  même  aujourd'hui  :  En  France,  du  1"  janvier  1895  au 
l"  janvier  1905,  on  n'a  pas  relevé  moins  de  695  enfants  de  16  ans  et 
au-dessous  qui  se  sont  donné  la  mort,  et  voici  quelques-unes  des  raisons 
alléguées  dans  les  billets  laissés  par  certains  d'entre  eux  ;  —  «  Je  me  noyé, 
mon  père  m'a  grondé.  »  —  .  Je  me  suicide  parce  que  je  n'ai  pas  eu  de 


iNOTES.         LIV.  I,  Cil.  XL.         VOL.  I,  PAG.  450.  F.387 

prix.  »  —  «  Je  nie  tue  parce  que  j'ai  trois  dents  cassés.  »  —  Il  en  est  qui 
se  tuent  par  simple  imitation  ou  bravade  :  «  Tiens,  dit  l'un,  en  apercevant 
un  pendu,  il  faut  que  je  me  pende  aussi  »  ;  et  il  le  lait  séance  tenante.  — 
«  Je  me  suis  brûlé  la  cervelle  exprès  »,  écrit  un  autre  qui  se  tue  pour  mon- 
trer qu'il  est  capable  d'agir  comme  un  homme.  —  En  janvier  1907,  à  Paris, 
un  collégien  de  dix-neuf  ans  se  noyait  dans  la  Seine  de  dépit  d'une  répri- 
mande; un  autre,  de  même  âge,  se  tuait  par  chagrin  d'amour. 

3,  Ancien.  —  Le  fond  de  cette  pensée  est  dans  Sénèque,  Epist.  70. 

10,  Orage.  —  Diogène  L.4erce,  IX,  68. 

29,  Dernier.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  souuerain. 

30,  Eftect.  —  CicÉRON,  Tusc;  II,  13. 
452, 

2,  Mal.  —  CicÉKON,  T'use,  11,25,  raconte  le  fait  un  peu  différemment  :  Pom- 
pée venant  de  Syrie  à  Rhodes,  où  se  trouvait  Posidonius,  désirait  l'enten- 
dre et  lui  exprimait  ses  regrets  de  ne  le  pouvoir  pas,  le  voyant  affecté  de 
douleurs  aiguës  :  «  L'état  de  souffrance  où  vous  me  trouvez,  lui  répondit 
le  philosophe,  ne  m'empêchera  pas  de  satisfaire  à  votre  désir;  il  ne  sera 
pas  dit  qu'un  aussi  grand  homme  soit  venu  inutilement  honorer  ma  re- 
traite de  sa  présence.  »  Réponse,  ajoute  Cicéron,  qui  fut  suivi  d'un  dis- 
cours, aussi  grave  qu'éloquent,  sur  cette  question  qu'il  n'y  a  rien  de  bon 
que  ce  qui  est  honnête. 

17,  Instant,  —  Louis  Racine  fait  dire  à  ce  propos  à  un  épicurien  : 

«  Plongeons-nous  sans  effroi  dans  ce  muet  abhnc 

Où  la  vertu  périt,  aussi  bien  que  le  crime; 

Et,  suivant  du  plaisir  l'aimable  mouvement, 

Laissons-nous  au  tombeau  conduire  mollement.  » 
» 

19,  H«bet.  —  C'est  là  une  des  assez  fréquentes  citations  qui  se  rencontrent 
dans  les  Essais,  composées  d'auteurs  différents  et  que  ne  distingue  même 
pas  la  ponctuation  :  le  premier  de  ces  deux  vers  est  de  La  Boétie,  le  second 
d'Ovide. 

21,  Craindre.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  Et  à  la  vérité,  ce  que  les  Sages  craignent, 
au  lieu  de  :  «  Aussi...  craindre». 

34,  Homicide.  —  Cela  est  vrai  du  mal  de  dents,  mais  non  de  la  goutte  qui 
Unit  fort  souvent  par  devenir  mortelle. 

39,  Estre.  —  Observer,  pour  la  compréhension  du  texte,  que,  dans  ce  qui 
précède,  Montaigne  a  fait  parler  ceux  qui  disent  que  la  douleur  est  un  mal; 
et  que,  maintenant,  il  va  répondre  à  leui-s  arguments,  en  s'efforçant  de 
prouver  qu'il  est  en  nous,  sinon  de  faire  que  nous  ne  la  ressentions  pas, 
du  moins  d'en  réduire  notablement  la  sensation. 
454, 

6,  Trampe.  —  Var.  de  80  et  88  :  ie  ne  le  croy  pas. 

13,  Vulgaire.  —  Cette  phrase  est  encore  une  de  celles  qui  témoignent  le  plus 
que  Montaigne  a  été  aux  armées  et  considérait  comme  sienne  la  profession 
des  armes. 

32,  L'ame.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  c'est  d'auoir  eu  trop  de  commerce  auec  le  corps. 

34,  Attendre.  —  De  ne  pas  compter  assez  sur  elle.  —  Certaines  éditions  por- 
tent :  fonder.  Attendre  est  employé  ici  dans  le  même  sens  que  dans  ces 
vers  de  La  Fontaine:  «  Ne  t'attends  qu'à  toi  seul,  c'est  un  commun  pro- 
verbe "  (L'alouette  et  ses  petits  avec  le  mailre  d'un  champ).  —  «  T'attendre 
aux  yeux  d'autrui,  quand  tu  dors,  c'est  erreur  »  {Le  fermier,  le  chien  et  le 
renard). 
456, 

23,  Craint.  —  dans  le  Phédon. 

25,  Desclouë.  —  Une  très  violente  douleur,  de  même  qu'une  volupté  exces- 
sive, détache  l'àme  du  corps,  en  ce  qu'elle  s'en  empare  en  entier  et  ne 
laisse  plus  à  celle-là  aucune  action  sur  celui-ci,  comme  s'il  n'existait  plus 
aucune  liaison  entre  eux. 


F.388  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

33,  Doluerunt.  —  Add.  des  ôd.  ant.  :  dicl  S.  Attr/uslin. 
37,  Jnseruerunt.  —  Montaigne  détourne  ici  le  sons  de  ce  passage  de  saint  Au- 
gustin. 
40,  Grandes.  —  «  Tu  engendreras  tes  Tds  dans  la  douleur,  »  dit  la  Genèse, 
m,  10. 
458, 

1,  .égyptiennes.  —  Que  nous  appelons  aujourd'hui  Bohémiennes,  nom  qui 
varie  suivant  les  pajs,  et  qui  se  donnent  elles-mêmes  comme  étant  de  celui 
des  Pharaons.  —  Les  Bohémiens  sont  des  bandes  nomades  d'aventuriers 
qui  se  trouvent  un  peu  partout  et  dont  la  véritable  origine  est  inconnue; 
les  premiers  qui  vinrent  en  France,  arrivaient  de  Bohême,  d'où  leur  nom. 
Ils  ont  une  phjsionomie  particulière,  parlent  entre  eux  un  argot  spécial, 
vivent  de  petits  métiers,  disent  la  bonne  aventure;  on  ne  sait  trop  quelle 
est  leur  religion;  leur  morale  est  très  relâchée  et  ils  pratiquent  volontiers 
le  vol. 
7,  Garces.  —Jeunes  filles.  Du  temps  de  Montaigne,  on  disait  une  jeune  garce 
pour  dire  une  jeune  fille,  et. garçon  pour  jeune  homme;  aujourd'hui  ce 
mot  garce  est  injurieux  et  ne  se  donne  qu'aux  fiUes  pubUques,  tandis  que 
celui  de  garçon  s'est  maintenu  dans  la  langue  avec  sa  signification  pri- 
mitive. 
11,  lumeaux.  —  Plltarque,  De  l'Amour,  34.  —En  78,  Sabinus,  seigneur  gau- 
lois, prit  le  titre  de  César,  au  commencement  du  règne  de  Vespasien,  et  fut 
vaincu.  Proscrit,  il  se  fit  passer  pour  mort  et  vécut  caché  dans  les  ruines 
de  sa  maison,  à  laquelle  il  avait  mis  le  feu.  Éponine,  sa  femme,  vint  l'y 
rejoindre  et  y  mit  au  monde  deux  jumeaux.  Découvert  au  bout  de  plu- 
sieurs années,  sa  femme  implora  vainement  sa  grâce;  ne  pquvant  l'obte- 
nir, elle  se  mit  à  invectiver  l'empereur,  demandant  à  partager  le  supplice 
de  son  mari,  ce  à  quoi  Vespasien  eut  la  cruauté  d'accéder. 
12    {Car  ils...   malice).  —  Var.  des  éd.  ant.  :  {car  le  larreçin   y  estoit  ac- 
tion de  vertu,  mais  par  tel  si,  qu'il  estoit  plm  vilain  qu'entre  nous  d'y  estre 
surpris). 

15,  Descouurir.  —  Plutarque,  Lycurgiœ,  14. 

18,  Mystère.  —  Valère  Maxime,  III,  3,  qui  cite  le  fait,  l'attribue  à  un  jeune 

Macédonien. 
21,  Cicero.  —  Dans  les  Tusculanes,  V,  27. 
34,  Brasier.  —  TriE-LivE,  II,  12.  —  En  503.  Porsenna,  roi  des  Étrusques, 

avait  pris  en  main  la  cause  des  Tarquins  chassés  de  Rome  qu'il  assiégeait. 

L'acte  de  Mucius  Scevola,  par  la  crainte  de  le  voir  se  renouveler,  le  décida 

à  lever  le  siège  et  à  faire  la  paix. 
36,  Incisait.  —  Sénèque,  Epist.  78. 
40,  Philosophe.  —  Sénèque,  Epist.  78.  —  Il   semble  être  question  ici   d'A- 

naxarque,  que  Nicocréon,  tyran  de  Chypre,  fit  torturer  et  finalement  broyer 

dans  un  mortier,  sans  pouvoir  vaincre  sa  constance  (IV«  siècle).  V.  I,  G2G. 
460, 

4,  Peau.  —  Les  éd.  ant.  à  88aj.  :  et  l'en  surnommoit  on  Madame  l'escorchée. 
14,  Espagnole.  —  Pour  avoir  une  taille  élégante  et  svelte,  comme  l'ont  les 

Espagnoles. 

16,  Mourir.  —  Catherine  de  Médicis,  dans  le  commencement  de  son  séjour 
en  France,  avait  inventé  de  nouvelles  parures,  entre  autres  le  corset,  «  sorte 
de  gaine  qui  emboîtait  la  poitrine  depuis  le  dessous  des  mamelles  jusqu'au 
défaut  des  côtes  et  qui  finissait  en  pointe  sur  le  ventre  »  {Galerie  des 
femmes  célèbres,  1827).  On  ne  faisait  pas  encore  usage  pour  cet  ajustement 
de  fanons  de  baleine,  qu'on  remplace  aujourd'hui  par  des  lamelles  d'acier; 
on  se  servait  d'éclisses  en  bois  qui,  pressées  fortement,  rendaient  à  la  lon- 
gue la  chair  insensible  et  aussi  dure  que  la  corne  ou  le  cal  qui  vient  aux 
mains  de  certains  ouvriers. 

20,  Luy  mesme.  —  Lorsque  Henri  III,  qui  était  roi  de  Pologne,  la  quitta 
secrètement  pour  venir  occuper  le  trône  de  France  à  la  mort  de  Charles  IX 
(1574),  le  grand  chambellan  de  sa  cour  le  suivit  et  l'atteignit  sur  les  fron- 


NOTES.  LIV.  I,  CH.  XL.         VOL.  I,  PAG.  460.  F. 389 

tièi'os  d'Autriche.  N'ayant  pu  le  déterminer  à  revenir,  au  moment  de  se 
séparer  de  lui,  il  lui  promit  une  fidélité  inviolable  et,  au  grand  étonnement 
du  roi,  il  se  donna  un  coup  de  poignard  dans  le  bras  et  suça  le  sang  de  la 
plaie,  voulant  par  là  attester  son  dévouement  et  la  sincérité  de  ses  paroles. 

21,  Blois.  —  Ces  États  généraux,  tenus  à  Blois  en  1576,  y  avaient  été  con- 
voqués par  Henri  III,  pour  en  obtenir  la  condamnation  du  Protestantisme 
et  des  subsides  pour  le  combattre,  ce  à  quoi  ils  se  refusèrent  d'une  façon 
absolue. 

24,  Poinçon.  —  Longue  épingle  à  cheveux  dont  usent  les  femmes,  encore 
actuellement,  pour  maintenir  l'échafaudage  de  leur  chevelure. 

30.  Aspres.  —  Monnaie  turque  qui  vaut  environ  un  sou. 

35,  Croix.  —  Loreque  l'empereur  Honorius  rapporta  à  Jérusalem  la  vraie 
croix  que  les  Perses  lui  avaient  rendue  et  que  leur  roi  Chosroès  II  avait 
enlevée  quatorze  ans  auparavant,  il  la  porta  lui-même  sur  ses  épaules  jus- 
qu'au haut  du  Calvaire  (622). 

36,  Foy.  —  Le  suie  de  Joinville,  dans  ses  Mémoires,  IL 

40,  Nuict.  —  On  montre  encore  à  Notre-Dame  de  Paris  la  discipline  de  saint 
Louis. 

42,  Angleterre.  —  Mariée  d'abord  avec  Louis  VII  (1137),  Éléonore  de  Guyenne 
lui  apportait  en  dot  le  duché  de  ce  nom  et  d'importantes  annexes.  Répu- 
diée pour  son  inconduite  (1152),  elle  épousa  peu  après  Henri,  comte  d'An- 
jou et  duc  de  Normandie,  qui,  en  II54,  devenait  roi  d'Angleterre  et,  tant 
par  lui-même  que  par  son  mariage,  se  trouvait  déjà  avoir  sur  le  continent 
une  puissance  territoriale  surpassant  notablement  en  étendue  les  domaines 
directs  de  son  suzerain  le  roi  de  France.  Cette  situation  a  été  le  point  de 
départ  de  la  rivalité  qui,  depuis,  n'a  cessé  d'exister  entre  la  France  et  l'An- 
gleterre et  qui  s'est  traduite  de  la  part  de  cette  dernière  par  une  opposi- 
tion constante  à  notre  endroit,  et  à  maintes  reprises  par  des  guerres  de 
plus  ou  moins  longue  durée;  notamment  : 

En  1159,  II60,  1173,  1177,  II88,  1194,  1198;  — de  1202  à  1206;  —  de  1213 
à  1217,  de  connivence,  marquée  par  la  bataille  de  Bouvines  ;  —  de  1328  à 
1340,  bataille  navale  de  l'Ecluse;  —  de  1345  à  1348,  bataille  de  Crécy,  prise 
de  Calais  ;  —  de  1350  à  1360,  bataille  de  Poitiers,  traité  de  Brétigny  ;  —  de 
1369  à  1375;  —  de  1378  à  1453,  bataille  d'Azincourl,  Jeanne  d'Arc,  combat 
de  Ca.stillon;  —  de  1521  à  1525  et  de  1544  à  1546,  de  connivence  avec  Char- 
les-Quint; —  de  1557  à  1559,  de  connivence  avec  Philippe  II,  roi  d'Espagne, 
marquée  par  la  reprise  de  Calais;  —  de  1627  à  1629,  pendant  la  guerre 
de  Trente  Ans,  marquée  par  le  siège  de  la  Rochelle;  —  de  1678  à  1679, 
jointe  à  la  Hollande,  à  l'Espagne,  à  l'empereur  d'Allemagne  et  à  l'électeur 
de  Brandebourg;  —  de  1692  à  1697,  faisant  partie  de  la  ligue  d'Augsbourg, 
durant  laquelle  eurent  lieu  les  batailles  navales  de  la  Hougue  et  du  cap 
Saint-Vincent;  —  de  1701  à  1712,  unie  à  l'Autriche,  la  Hollande,  le  Portu- 
gal, la  Savoie,  et  où  elle  s'empara  de  Gibraltar  sur  l'Espagne  notre  alliée; 
—  de  1742  à  1748,  où,  alliée  de  l'Autriche,  elle  ruina  notre  marine  et  notre 
commerce;  —  de  1755  à  1763,  où,  alliée  à  la  Prusse,  elle  nous  enleva  à  peu 
près  toutes  nos  colonies  dont  les  Indes  et  le  Canada;  —  de  1778  à  1783,  qui 
aboutit  à  l'indépendance  des  États-Unis  d'Amérique,  est  la  seule  où  nous 
ayons  été  agresseurs  vis-à-vis  d'elle;  —  1793  à  1802,  coalisée  avec  l'Au- 
triche, la  Russie  et  les  divers  États  d'Italie,  marquée  par  la  prise  de  Toulon, 
le  combat  de  Quiberon,  la  bataille  navale  d'Aboukir,  le  siège  de  Saint-Jean 
d'Acre,  la  convention  d'El-Arisch  ;  —  de  1803  à  1815,  avec  la  coopération 
successive  des  diverses  puissances  européennes,  marquée  par  la  bataille  de 
Trafalgar,  le  bombardement  de  Copenhague,  les  batailles  de  Vittoria,  de 
Toulouse,  de  V^^aterloo,  et  enfin  les  traités  de  1815. 

Et  depuis,  si  aucune  guerre  ouverte  n'a  plus  eu  lieu,  parce  que  toujours 
nous  avons  cédé,  soit  par  faible.sse,  soit  par  duperie,  ayant  la  trop  géné- 
reuse habitude  de  traiter  les  affaires  sans  arrière-pensée  comme  sans  mé- 
fiance, que  d'humiliations  ne  nous  a-t-elle  pas  imposées,  que  d'entraves  ne 
nous  a-t-elle  pas  créées?  —•  En  1823,  elle  nous  contraint  à  aller  combattre 


F.390  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

on  Espagne  les  principes  mêmes  de  notre  Révolution  ;  —  en  1830,  elle  nous 
oblige  à  presser  notre  expédition  d'Alger,  pour  qu'elle  ne  l'empêche  pas; 
—  Plus  tard,  elle  est  contre  nous  dans  rafîairo  dite  des  «  mariages  espa- 
gnols •  ;  —  en  1854-56,  elle  se  sert  de  nous  pour  contenir  la  Russie,  et  cette 
alliance  lui  pèse  tant,  qu'au  lendemain  d'inkeimann,  dans  un  conseil  tenu 
par  ses  généraux,  Tun  d'eux  émet  l'avis  que  «  l'ai'mée  anglaise  se  rem- 
barque, laissant  les  Français  recourir  à  la  miséricordieuse  générosité  de 
l'empereur  Nicolas  •  !  —  En  1860,  en  Syrie,  elle  paralyse  noti-e  action  et 
fait  qu'elle  n'aboutit  à  aucun  résultat  utile  ;  —  Puis  elle  nous  évince 
de  la  direction  des  douanes  chinoises;  —  au  Mexique,  elle  nous  aban- 
donne; —  elle  nous  élimine  de  l'accord  primitivement  conclu  pour 
la  gestion  des  finances  de  l'Égj'pte  en  vue  du  paiement  de  sa  dette; — 
elle  accapare  les  actions  du  canal  de  l'isthme  de  Suez,  construit  par 
nous  en  dépit  de  son  opposition  et  dont  elle  se  rend  ainsi  maîtresse;  — 
elle  nous  immobilise  en  Extrême-Orient,  durant  la  guerre  Russo- Ja- 
ponaise, par  le  traité  qu'elle  conclut  dans  ce  but  avec  le  .lapon;  — 
elle  nous  humilie  au  plus  haut  point  dans  l'affaire  de  Fachoda  et  par 
ses  prétentions  et  l'arrogant  procédé  qu'elle  emploie  pour  les  l'aire  triom- 
pher, qui  n'a  d'égal  que  la  facilité  avec  laquelle  nous  obtempérons  à  sa 
volonté  et  à  ses  menaces;  —  nos  difficultés  continues  avec  le  Siam  sont 
son  œuvre  ;  —  enfin,  elle  nous  pousse  dans  le  guêpier  d'Algésiras  avec  la 
pensée,  d'une  part,  que  nous  nous  userons  au  Maroc,  et  de  l'autre,  nous 
faisant  miroiter  une  alliance  sans  grande  valeur  réelle  dans  la  circonstance, 
que  nous  finirons,  sous  l'effet  de  ses  excitations,  à  en  venir  aux  prises  avec 
l'Allemagne,  et  que  s'entre-détruiront  pour  son  plus  grand  avantage  les 
deux  seules  puissances  qui,  pour  le  moment,  comptent  pour  elle  en  Europe, 
l'une  qu'elle  jalouse  et  exècre  depuis  des  siècles,  l'autre  qu'elle  redoute 
par  l'extension  que  prennent  son  commerce  et  sa  marine. 

Si  longue  que  soit  cette  énumération  sommaire  des  manifestations  des 
dispositions  de  l'Angleterre  à  notre  égard,  qui  ne  relate  que  ce  que  tout  le 
monde  connaît,  elle  serait  bien  autre  si  elle  était  dressée  en  toute  cons- 
cience par  notre  ministère  des  Affaires  étrangères! 

Et  cependant,  se  laissant  prendre  à  des  démonstrations  qui  seraient  flat- 
teuses, si  elles  n'étaient  aussi  intéressées,  si  on  pouvait  oublier  que  toujours 
dans  ses  alliances  l'Angleterre  n'a  en  vue  que  de  tirer  de  ses  alliés  le  maxi- 
mum de  services  possibles  et  s'évertue  à  leur  persuade)'  qu'elle  leur  fait  grand 
honneur  en  leur  accordant  sa  confiance  et  les  faisant  se  battre  pour  elle, 
nos  gouvernants  méconnaissant  ces  leçons  de  l'histoire,  hypnotisés  par  l'o- 
rage qui  peut  venir  de  l'autre  rive  du  Rhin  et  qu'ils  provoquent  sans  cesse, 
au  lieu  de  s'appliquer  à  le  conjurer,  donnent  en  plein  dans  le  piège,  rui- 
nant la  France  en  entretenant  un  état  militaire  qui  l'écrase  et  qui  ne  se 
justifierait  que  s'ils  étaient  résolus  à  en  user  à  bref  délai,  tandis  qu'au 
contraire,  ils  espèrent  bien  n'en  jamais  venir  là!  Au  lieu  de  maugréer  et 
de  surexciter  les  populations  par  l'idée  d'une  revanche  qui  n'est  pas  dans 
leur  pensée,  que  ne  se  résignent-ils,  tout  en  réservant  l'avenir,  ce  qui  est 
dans  l'ordre  naturel,  et  n'imitent-ils  l'Autriclie  après  Sadowa?  L'Allemagne 
détient  l'Alsace-Lorraine,  mais  n'oublions  pas  pour  cela  en  quelles  mains 
sont  le  Canada,  nos  anciennes  colonies  des  Antilles,  des  Indes  et  les  îles 
dit«s  Anglo-Normandes  ! 
462, 

4,  Seigneur.  —  Ce  pèlerinage  fut  entrepris  par  Foulques  en  expiation  de 
ses  fautes;  traîné  sur  une  claie,  il  criait  pendant  qu'on  le  flagellait  :  «  Sei- 
gneur, ayez  pitié  de  Foulques,  traître  et  parjure.  » 

14,  Deuil.  —  CicÉROx,  Tusc,  111,  28. 

19,  Nourrice.  —  Pendant lallaitement  fait  hors  de  chez  moi.  De  son  mariage 
avec  Françoise  de  Chassagne,  Montaigne  eut  six  filles,  dont  cinq  mouru- 
rent toutes  âgées  de  moins  de  trois  mois;  une  seule  survécut,  Léonor,  pour 
laquelle  il  n'était  pas  sans  tendresse.  —  Cette  phrase  lui  a  ét^  vivement  et 
souvent  reprochée,  et  probablement  à  tort.  Elle  ne  figure  pas  dans  les  édi- 


NOTES.  LIV.  I,  en.  XL.         VOL.  L  PAG.  462.  P.391 

tions  antérieures;  et  l'exemplaire  de  Bordeaux  porte  :  «  l'en  ay  perdu,  mais 
en  nourrice,  deux  ou  trois  »,  au  lieu  de  :  «  mais  i'en  ai  perdu  en  nourrice 
deux  ou  trois  ».  Elle  est  donc  postérieure  à  1588.  Or,  à  ce  moment  il  avait 
perdu  SCS  cinq  enfants  en  bas  âge;  par  suite  ces  mots  «  deux  ou  trois  »  ne 
s'appliquent  qu'au  nombre  de  ceux  qui  avaient  été  mis  en  nourrice,  ce 
placement  en  nourrice  n'étant  qu'un  détail  auquel,  avec  raison,  il  n'attache 
pas  d'importance;  si  toutefois  il  le  mentionne,  c'est  pour  expliquer  que  le 
regret  de  leur  perte  a  été  atténué,  ce  qui  s'explique  assez  naturellement, 
par  ce  fait  qu'ils  n'étaient  pas  élevés  sous  ses  yeux. 

31,  Pallefrenier.  —  Plutarque,  Apophth. 

35,  Esse.  —  TiTE-LivE,  XXXIV,  17.  —Cette  mesure  fut  appliquée  à  tout  le 
pays  entre  les  Pyrénées  et  l'Èbre  dont  Caton,  allant  entrer  en  opérations 
dans  le  raidi  de  l'Espagne,  redoutait  les  soulèvements  sur  ses  derrières. 

38,  Vilité.  —  Bassesse,  du  latin  vilitas  qui  a  cette  même  signification  et  d'où 
dérive  notre  adjectif  vil. 

40,  Desbaucbe.  —  Sous-entendu  :  qui  régnait  autour  de  lui. 

10,  Conuioyt.  —  Ce  verbe  est  au  singulier,  bien  qu'ayant  quatre  sujets,  dont 
un  au  pluriel;  ce  mode  est  fréquent  dans  Montaigne,  il  se  rencontre  sou- 
vent aussi  dans  Racan. 
464, 

12,  Mortelle.  —  Origène  se  fit  eunuque,  prenant  à  la  lettre  ce  passage  de  l'É- 
criture :  «  Beati  qui  se  castraverunt  propter  regnum  cœli  (Heureux  ceux  qui 
se  réduisent  à  l'impuissance  pour  l'amour  du  ciel)  ».  Matth.,  XIX,  12. 

14,  Creua.  —  Démocrite,  qui,  a-t-on  dit,  se  serait  rendu  aveugle  en  se  cre- 
vant les  yeux  par  la  réflexion  des  rayons  solaires  à  l'aide  d'un  miroir;  mais 
le  fait  est  controuvé.  Tertullien  l'accepte  et  dit  que  c'était  pour  se  défendre 
de  l'attrait  des  femmes;  Plutarque  le  nie  et  donne  comme  probable  que  la 
cécité  a  été  causée  par  l'âge  et  qu'il  a  fait  de  nécessité  vertu  ;  d'autre  part, 
S.  .Jérôme,  écrivant  à  Abigans  pour  le  consoler  d'être  devenu  aveugle, 
lui  dit  que  «  quelques  philosophes  se  sont  arraché  les  yeux,  afin  que  leur 
esprit,  dégagé  de  tous  les  objets  sensibles,  pût  former  des  idées  de  plus 
en  plus  pures  ».  —  En  Chine,  fréquemment  des  anachorètes  agiraient 
ainsi,  «  fermant  de  la  sorte,  disent-ils,  deux  portes  à  l'amour,  pour  en  ou- 
vrir mille  à  la  sagesse  ».  —  D'après  la  légende,  Somona  Codom,  le  légis- 
lateur des  Siamois,  aurait  eu  recours  à  ce  même  moyen,  pour  être  moins 
distrait  par  les  objets  extérieurs. 
-18,  Soy.  —  Au  dire  de  Diogène  Laerce,  I,  26,  la  réponse  de  Thaïes  aurait 
été  :  «  C'est  que  j'aime  les  enfants  »  ;  laquelle  prête  à  double  interprétation, 
étant  donné  ce  que  les  anciens  entendaient  par  aimer  les  enfants. 

lit,  Choses.  —  Non  moins  que  la  coutume  (V.  I,  170).  —  L'opinion  est  reine 
du  monde,  elle  l'est  si  bien  que  «  lorsque  la  raison  veut  la  combattre,  elle 
est  condamnée  à  mort;  il  faut  qu'elle  renaisse  vingt  fois  de  ses  cendres, 
pour  arriver  peu  à  peu  à  chasser  l'usurpatrice  »  (Voltauie).  —  «  Qui  dis- 
pense la  réputation,  donne  le  respect  et  la  vénération  aux  personnes,  aux 
grands,  sinon  l'opinion?  Elle  dispose  de  tout  »  (Bossuet). 

27,  Fret.  —  C.-à-d.  nous  prêtons  toujours  aux  choses  une  valeur  en  rapport  . 
avec  ce  qu'elles  nous  coûtent.  —  Le  fret  d'un  navire,  c'est  son  prix  de  location 
et  son  chargement;  courir  <à  faux  fret,  c'est  naviguer  avec  un  chargement 
au-dessous  de  ce  qu'il  pourrait  transporter  et  par  extension  à  perte. 

2t),  Tel.  —  Aristippe.  —  Dror.ÈNE  Laerce,  11,  77;  Horace,  Sat.,  II,  3,  100. 
.      31.  Dit.  —  SÉNÈQUE,  Epist.  17. 
466, 

1,  Soulagement.  —  «  Grande  foi^une,  grande  servitude  »:  —  «  Qui  n'a 
guère,  n'a  guerre  »;  —  «  Il  n'est  richesse  que  de  science  et  de  santé  »,  di- 
sent des  adages  bien  répandus. 

1.5,  Piperesse.  —  C.-à-d.  de  manière  que  par  loyauté,  je  devenais  économe 
et  inspirais  ainsi  plus  d(>  confiance  à  mes  créanciers.  Coste. 

21,  Iniurieusement.  —  Injustement;  du  latin  injuria,  qui  signifie  contre  le 
droit,  tort,  injustice. 


F.392  ESSAIS   DE   MONTAIGNE. 

32,  Sens.  —  C.-à-d.  à  ma  prévoyance  et  à  ma  raison. 

33,  Caesar.  —  Avant  d'occuper  aucune  charge  publique,  César  était  endetté 
de  1.300  talents,  près  de  six  millions  et  demi  de  notre  monnaie;  et  lorsqu'on 
qualité  de  préteur  il  reçut  le  gouvernement  de  l'Espagne,  il  devait  8.000  ta- 
lents, soit  environ  trente-huit  millions  (Pi.utarque). 

468, 

1,  Rente.  —  C'est  probablement  à  cela  que  s'élevaient  ses  revenus.  —  Deux 
mille  écus,  c'est  six  mille  francs,  l'écu  étant  de  trois  livres,  quand  il  n'est 
pas  spécifié  qu'il  est  de  six;  mais  la  valeur  de  l'argent,  à  cette  époque, 
était  environ  le  double  de  ce  qu'elle  est  aujourd'hui. 

8,  Frangitur.  —  Godeau,  évoque  de  Grasse,  a  donné  de  ce  vers  la  traduc- 
tion suivante,  que  Corneille  a  transportée  dans  Polyeucte  : 

Et  comme  elle  a  l'éclat  du  verre,  Elle  en  a  la  fragilité. 

9,  Poincte.  —  Renverser,  bouleverser,  mettre  sens  dessus  dessous.  —  Cette 
expression  «  cul  sur  poincte  »  vient  de  ce  qu'anciennement  on  appelait 
«  cul  »,  dans  l'aiguille,  la  partie  opposée  à  la  pointe,  qu'actuellement  nous 
appelons  «  tète  ». 

21,  De  l'argent...  prins.  —  Var.   de  88  :  de.s  biens,  ausquels  ie  me  prins  si 

chaudement,  que. 
24.  Ordinaire.  —  C.-à-d.  si  on  n'avait  une  avance  d'une  année  de  revenu. 
470, 

13,  Bion.  —  Sknèque,  De  la  Tranquillité  de  rame.  8. 

20,  Enuis.  —  C.-à-d.  «  et  moins  à  contre-cœur  »,  tournure  latine  minus  in- 

vitus. 

27,  Part.  —  »  L'argent  est  un  bon  serviteur,  mais  un  mauvais  maître  •  (Ba- 
con). 

30,  Platon.  —  Des  Lois,  I,  1. 

33,  Fils.  —  Plutarque,  Apophlh.  —  Le  fait  y  est  attribué  à  Denys  l'Ancien. 
33,  Eut.  —  Add.  de  88  :  sur  ce  propos. 
40,  Quelques.  —  L'éd.  de  88  aj.  :  quatre  ou  cinq. 
472, 

1,  Despence.  —  Probablement  celui  qu'il  fit  en  Allemagne  en  1580-81. 
12,  Faict.  —  C.-à-d.  précisément  au  moment  où  nous  en  aurons  le  plus  be- 
soin. 
16,  Terres.  —  Pourtant  il  en  acheta;  il  existe  trace,  à  cet  égard,  de  deux 
acquisitions  assez  importantes. 

20,  Vieux.  —  Add.  de  88  :  laquelle  i'ai  tousiours  tenu  la  moins  excusable. 

21,  Folies.  —  Il  ne  faudrait  pas  en  conclure  que  Montaigne  ait  dilapidé  son 
patrimoine,  il  l'a  plutôt  accru;  à  son  décès,  sa  succession  a  été  estimée 
90.000  livres  et  l'argent  avait  alors  une  valeur  bien  autrement  grande  que 
de  nos  jours. 

31,  Amy.  —  Xénophon,  Cyropédie,  VIII,  3.  —  Chateaubriand  écrivait  à  Jou- 
bert  :  «  Je  suis  ennuyé  de  toujours  courir  pour  mon  compte  les  chances 
de  la  vie;  et  si  quelqu'un  voulait  se  charger  de  me  nourrir,  de  me  vêtir 
et  de  m'aimer,  cela  me  ferait  grand  plaisir.  » 

474, 

10,  Trouue. 

«  Est  toujours  malheureux,  et  toujours  a  grand  tort, 
Celui-là  qui  jamais  n'est  content  de  son  sort.  • 

•  Rien  n'a,  qui  assez  n'a.  »  (Proverbe). 

12,  Vérité.  —  Qu'importe,  en  effet,  que  l'on  soit  fondé  ou  non  à  se  plaindre 
de  son  sort?  Du  moment  qu'on  se  trouve  malheureux  dans  une  position 
heureuse  ou  agréable,  on  l'est  réellement;  le  bonheur  ou  le  malheur  sont 
choses  purement  relatives,  et  il  est  aussi  absurde  d'en  vouloir  juger  chez 
autrui,  que  du  degré  de  sensation  de  froid  et  chaud  (|u'il  peut  éprouver. 

28,  Eau.  —  Tycho-Brahé  (astrologue  suédois  du  xvr  siècle)  est.  dit-on,  le 
premier  qui  ait  bien  connu  et  expliqué  la  réfraction. 


NOTES.        I,îV.  I,  CIL  XL.         VOL.  I,  PAG.  47t.  F.393 

29,  Voye.  —  Depuis  ces  mots  :  «  Certes,  tout  en  la  manière   »,  jusqu'ici, 
.     Montaigne  traduit  Sknèqle,  Epist.  8L 

;^,  Abstersiue.  —  Du  latrn  abstergere,  dissiper,  faire  disparaître,  nettoyer. 
476, 

7,  De  se  reietter...  reliques.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  nous  doniier  en  paiement 
cecy. 

8,  Nécessité.  —  Sénkque,  EpisL  li. 

CHAPITRE  XLL 

23,  Autre.  —  <  La  passion  de  la  gloire  est  la  dernière  dont  les  sages  eux- 
mêmes  se  dépouillent.  »  Tacite,  Hist.,  IV,  6. 

30,  L'encontre.  —  C.-à-d.  que  vous  ne  pouvez  guère  lui  résister. 

30,  Cicero.  —  Dans  le  Plaidoyer  pour  Archias,  IL  —  Cette  pensée  est  re- 
produite aussi  par  Pascal. 
478, 

0,  D'autruy.  —  Plutarque,  Marius.  —  En  102.  LesCimbres  descendant  d'Al- 
lemagne par  la  vallée  de  l'Adige,  Luctatius  qui  leur  était  opposé  abandonna 
la  région  montagneuse  pour  se  retirer  sur  le  cours  inférieur  de  ce  fleuve,  sur 
lequel  il  construisit  un  pont  lui  permettant  de  passer  à  volonté  d'une  rive 
sur  l'autre  et  de  conserver  ainsi  sa  liberté  de  manœuvres;  mais  les  barbares 
obstruèrent  le  cours  d'eau,  le  franchiront  ;  les  Romains  effrayés  s'enfui- 
rent. Le  consul  fit  alors  lever  l'aigle,  ce  qui  était  le  signal  de  la  retraite, 
et,  courant  aux  premiers  rangs,  se  mit  à  leur  tête,  aimant  mieux  que  la 
honte  de  ce  mouvement  rétrograde  tombât  sur  lui,  plutôt  que  sur  sa  patrie, 
et  que  les  soldats  eussent  l'air  non  de  prendre  la  fuite,  mais  de  suivre  leur 
général.  Marius,  son  collègue,  qui  venait  d'exterminer  les  Teutons,  alliés 
des  Cimbres,  qui  avaient  essayé  de  pénétrer  par  la  Ligurie,  en  suivant  le 
bord  de  la  mor,  l'ayant  rejoint,  ils  vainquirent  et  exterminèrent  les  Cim- 
bres à  leur  tour,  à  Verceil. 

17.  Despens.  —  Antoine  de  Lèves,  le  plus  habile  des  généraux  de  Charles- 
Quint,  qui  de  simple  soldat  s'était  élevé  aux  plus  hautes  dignités  militaires, 
croyait  tellement  cette  entreprise  immanquable,  dit  Brantôme,  Vies  des 
hommes  illustres,  qu'il  disait  à  l'empereur  qu'il  espérait  bien  que  cela  le 
mènerait  à  Paris,  et  demandait  pour  récompense  d'être  enterré  à  Saint- 
Denys.  Son  vœu  fut  e.xaucé,  en  ce  qu'il  mourut  de  chagrin,  dit-on,  de  voir 
cette  expédition  échouer,  et  qu'il  fut  enterré  à  Saint-Denys,  mais  non  près 
Paris,  dans  une  église  de  Milan,  placée  sous  ce  vocable.  —  D'autres  assu- 
rent, au  contraire,  que  ce  général  fut  entièrement  opposé  à  ce  dessein  rui 
devait  réussir  si  mal,  et  qu'il  alla  jusqu'à  se  jeter  aux  pieds  de  Charles-Quint 
pour  le  détourner  de  franchir  les  Alpes. 

22,  N'estoit.  —  Pi.ltahqle,  Apophth.  des  Lacédémoniens. 

34,  Exploit.  —  En  13 10.  «  Quoi  qu'il  arrive,  aurait,  au  dire  de  Froissart,  I,  30, 
ajouté  le  roi,  ne  vous  adressez  plus  à  moi  de  la  journée,  lant  que  mon  fils 
sera  vivant.  »  Ce  fait  est  d'autant  plus  remarquable,  <|u'on  ne  saurait  nier 
que,  chez  les  princes,  la  jalousie  contre  leurs  fils  ou  leurs  frères,  et,  en  gé- 
néral, contre  ceux  qui  doivent  leur  succéder,  ne  soit  un  mal  très  fréquent. 

37,  Sienne.  —  Plutarque,  Instructions  pour  ceux  qui  manient  les  affaires 
d'État. 

Il,  Obeyr.  —  Plutarque,  Apophth.  des  Lacédémoniens. 
480. 

4,  Personne. —  En  1591,  Grégoire  XIV  promulgua  un  bref,  à  l'occasion  de 
la  Réforme,  qui  permettait  à  tous  les  ecclésiastiques  de  porter  les  armes 
contre  les  hérétiques. 

8,  Raison.  —  C.-à-d.  les  fit  lui-même  prisonniers. 

11,  Salsberi.  —  Le  comte  de  Salisbury  commandait  les  Anglais;  c'était  un 
frère  bâtard  de  Jean  Sans-Terre,  roi  d'Angleterre  à  ce  moment. 

12,  Autre.  —  C.-à-d.  c'était  une  subtilité  de  conscience  à  celle  dont  il  va 
être  parlé,  car  il  s'agit  de  ce  même  évêque  à  la  môme  bataille. 


F.39i  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

11,  Masse.  —  De  la  sorte  il  mettait  les  gens  hors  de  combat  en  les  assom- 
mant, mais  sans  verser  le  sang-,  ce  qu'interdisait  aux  ecclésiastiquoii  un 
concile  tenu  à  Trente  en  1163,  dont  il  respectait  la  décision  en  la  tournant. 
Antoine  Guerara  parle  d'un  prêtre  espagnol  qui,  lors  de  la  conquête  de 
l'Amérique,  armé  d'une  arquebuse,  tirait  sur  les  Indiens,  les  bénissant  au 
préalable  en  faisant  un  signe  de  croix  avec  son  instrument  de  mort.  —  La 
masse  d'armes  tenait  de  la  massue  et  du  casse-tête;  elle  se  composait  d'une 
tige  de  fer,  d'environ  O^jSO  de  long,  terminée  par  une  masse  de  même  mé- 
tal, soit  sphérique,  soit  ovoïde,  de  la  dimension  d'une  grosse  orange,  soit 
unie,  soit  garnie  de  pointes. 

CHAPITRE  XLII. 

16,  Entre  nous.  —  Montaigne  ne  traite  cette  question  qu'en  ce  qui  touche 
l'individu  ;  elle  se  pose  aujourd'hui,  autrement  sérieuse,  au  point  de  vue 
des  collectivités. 

L'idée  de  remédier  aux  injustices  du  sort,  en  mettant  en  commun  tout 
ce  qui  constitue  les  richesses  d'un  paj's,  en  les  confisquant  ou  les  rachetant 
au  profit  de  l'État,  avec  charge  de  les  exploiter,  chacun  y  participant  sous 
son  contrôle,  et  d'en  répartir  les  revenus,  n'est  pas  nouvelle;  elle  était  la 
base  de  la  législation  à  Sparte,  et  les  Gracques  cherchèrent  à  la  faire 
triompher  à  Rome;  aujourd'hui  elle  prend  corps  de  plus  en  plus  en 
France. 

C'est  là  le  principe  fondamental  du  socialisme  qui,  avec  l'accaparement 
par  l'État  de  toutes  les  entreprises  et  de  toutes  les  industries-,  vise  à  faire 
disparaître  les  fortunes  grandes  et  moyennes  par  l'impôt  progressif  sur  le 
revenu,  l'élévation  des  droits  de  succession;  tarissant  du  même  coup  tout 
ce  qui  stimule  l'homme,  le  porte  aux  inventions,  aux  entreprises  hardies 
et  de  longue  haleine,  en  l'éloignant  de  toute  préoccupation  d'avenir  et  d'am- 
bition; nivelant  toutes  les  intelligences  par  une  éducation  identique,  gra- 
tuite et  obligatoire;  enfin,  par  la  puissance  du  nombre,  dépouillant  les 
classes  actuellement  dirigeantes  de  tout  pouvoir  politique  :  idéal  qui  n'est 
autre  que  celui  d'une  basse  égaliU;  et  humiliante  servitude. 

Le  socialisme  répugne  à  reconnaître  la  supériorité  intellectuelle,  à  laquelle 
l'humanité  doit  tous  les  progrès,  et  est  ennemi  du  capital  qui  n'est  en  somme 
que  le  résultat  du  travail  soit  matériel,  soit  intellectuel,  accumulé,  qui  seul 
permet  les  grandes  entreprises;  en  Russie  il  a  ua  champ  d'expérience,  le 
collectivisme  agraire  règne  dans  certaines  régions  et,  de  ce  fait,  le  perfec- 
tionnement de  la  culture  y  est  entravé,  le  rendement  est  moindre  et  le 
paysan  russe  n'aspire  qu'à  être  libéré  de  ce  joug  et  à  voir  se  constituer 
la  propriété  individuelle,  au  rebours  de  ce  que  chez  nous  rêve  le  socia- 
lisme ! 

C'est  surtout  parmi  les  manœuvres,  les  ouvriers  de  la  plus  infime  caté- 
gorie, mais  qui  sont  aussi  les  plus  nombreux,  et  les  déclassés,  qu'il  recrute 
ses  adeptes;  les  artisans,  les  populations  agricoles,  chez  lesquels  prévaut 
l'instinct  de  la  propriété,  y  sont  moins  accessibles.  Les  plus  ardents  sont 
le  produit  dégénéré  de  nos  universités  et  de  nos  écoles,  cette  cohue  de  li- 
cenciés et  de  bachehers  sans  emploi,  d'instituteurs  mécontents  de  leur 
sort,  professeurs  dont  le  mérite  est  méconnu.  A  ces  épaves  des  concours 
que  l'État  n'a  pu  caser,  viennent  se  joindre  quelques  âmes  candides  autant 
<|ue  peu  clairvoyantes  qui,  par  un  sentiment  non  raisonné,  accepté  par 
contagion,  voient  dans  la  réalisation  de  ce  programme  le  règne  de  la  jus- 
tice et  de  la  félicité  universelles,  comme  si  elles  étaient  de  ce  monde;  enfin 
il  a  pour  lui.  et  c'est  là  sa  plus  sûre  chance  de  réussite,  la  peur  et  l'indif- 
férence, ces  deux  grandes  infirmités  de  la  bourgeoisie  moderne;  sans 
compter  qu'il  se  trouve  en  terrain  tout  préparé  par  la  prédominance  que 
l'État  occupe  en  France,  où  chacun  recherche  sa  tutelle. 

Ce  concours  de  circonstances  fait  que  le  Socialisme  progresse  chez  nous 


NOTES.         LIV.  I,  CIT.  XLIT.         VOL.  I,  PAG.  480.  F.49b 

à  grands  pas;  déjà,  il  a  gangrené  les  sphères  parlementaires,  a  pris  place 
dans  le  gouvernement,  si  bien  qu'il  n'est  pas  chimérique  de  prévoir  qu'il  en 
arrivera  à  ses  fins  à  assez  bref  délai.  Mais,  vraisemblablement  aussi,  1  lieure 
de  son  avènement  sera  aussi  celle  de  son  déclin;  il  se  lieurtera  alors  à  des 
nécessités  économiques  et  psychologiques  qui  amèneront  de  sanglants  ca- 
tacljsmes,  et  la  foule  déçue  et  si  versatile  se  jettera,  en  l'acclamant,  au.x 
pieds  d'un  César  quelconque  qui  sera  parvenu  à  rétablir  l'ordre  intérieur, 
au  prix  de  la  liberté  et  peut-être  au  risque  des  pires  aventures,  continuant 
ainsi  le  cj'cle  perpétuel  des  événements  au.xquels  est  assujettie  l'hu- 
manité. 

Ce  socialisme  d'État  est  présenté  par  tous  ses  partisans  comme  l'unique 
solution  à  la  lutte  entre  le  travail  et  le  capital  qui,  avec  les  progrès  de  l'indus- 
trie, acquiert  d'autant  plus  d'acuité,  que,  du  fait  de  l'énorme  extension  donnée 
aux  affaires,  patrons  et  ouvriers  deviennent  de  plus  en  plus  étrangers  les  uns 
aux  autres  que  n'existe  plus  l'affection  familiale  d'antan  née  de  leurs  rap- 
ports continus,  lutte  qui,  au  grand  préjudice  de  leurs  intérêts  communs,  se 
traduit  par  des  grèves  répétées  de  plus  en  plus  longues  comme  durée,  don- 
nant lieu  à  des  incidents  de  plus  en  plus  graves.  — 11  est  indéniable  que  les 
revendications  ainsi  poursuivies,  qui  ne  sont  autres  qu'une  amélioration  du 
sort  des  travailleurs,  proportionnée  aux  bénéfices  qu'ils  contribuent  à  réa- 
liser, sont  des  plus  légitimes.  Depuis  longtemps  elles  ont  reçu  un  commence- 
ment de  satisfaction  dans  bien  des  cas  et  sous  bien  des  formes  :  caisses  de 
retraites,  assurances  diverses,  sociétés  de  secours  nmtuels,  sociétés  coopé- 
ratives d'alimentation,  maisons  ouvrières,  etc.;  mais  toutes  ces  institu- 
tions, quoique  d'efficacité  réelle,  ne  sont  que  des  palliatifs  entachés  d'un 
vice  originel  :  l'intrusion  du  patron.  Seules  sont  susceptibles  d'être  acceptées 
sans  froissement  d'amour-propre  celles  qui,  affranchies  de  tout  caractère 
de  dépendance,  mettent  l'employé  sur  un  pied  d'égalité  avec  celui  qui 
l'emploie  et  créent  au  premier  les  mêmes  droits  qu'il  réclame  sur  un  ton 
d'autant  plus  élevé  que  la  loi,  en  autorisant  des  syndicats  irresponsables 
et  des  grèves  sans  garantie  effective  contre  la  violence,  sans  sauvegarde 
réelle  pour  ceux  qui  veulent  continuer  le  travail,  lui  donne  une  force  dont, 
excité  par  des  meneurs  soudoyés  souvent  par  l'étranger  qui  a  intérêt  à  voir 
ruiner  les  industries  similaires  du  voisin,  soutenu  parfois  de  ses  subsides, 
il  ne  se  fait  pas  faute  d'abuser. 

Au  premier  abord,  la  participation  aux  bénéfices  semble  réaliser  cet  ac- 
cord si  désirable  pour  l'un  comme  pour  l'autre,  entre  l'ouvrier  et  le  patron  ; 
mais  la  pratique  n'a  pas  confirmé  la  théorie;  l'accord  existe  quand  il  y  a 
bénéfice  et  disparaît  quand  il  ya  perte.  Le  seul  mode  qui  a  donné  le  moins 
de  mécomptes,  est  l'exploitation  en  commun,  dont  il  existe  quelques  exemples 
de  différentes  genres,  tous  ceux  y  attachés  en  étant  copropriétaires  par  le 
moyen  d'actions  de  prix  peu  élevé,  25  fr.  par  exemple,  facilement  acquises 
par  chacun  au  moyen  d'un  léger  prélèvement  obligatoire  sur  son  salaire 
journalier  récupéré  à  la  longue  par  la  participation  au  dividende  (G. 
Lebon). 

17,  Lieu.  —  Dans  son  traité  Que  les  bêtes  vsent  de  raison,  vers  la  fin. 

18,  Internes.  —  Add.  de  l'éd.  de  80  :  Car  quant  A  la  forme  corporelle,  U  est 
bien  éuidenl  que  les  espèces  des  bestes  sont  distinguées  de  bien  plus  apparente 
différence  que  nous  ne  sommes  les  ims  des  autres. 

20,  Commun.  —  Add.  de  l'éd.  de  80  :  [car  les  folz  et  les  insensez  par  accidents 
ne  sont  pas  hommes  entiers). 

22.  Beste.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  c'est-à-dire  que  le  plus  excellent  animal  est 
plus  approchant  de  V homme  de  la  plus  basse  marclie,  que  n'est  cet  homme  d'vn 
autre  grand  et  excellent. 

35,  Brasses.  —  Longueur  de  l'étendue  des  deux  bras,  y  compris  le  travers  du 
corps,  d'où  son  nom  ;  exactement  cinq  pieds  de  0"',33,  Isoit  l'",65.  Est  encore 
employée  dans  la  marine  comme  mesure  de  profondeur  d'eau  et  de  la  lon- 
gueur des  cordages. 

41,  Circo.  —  Ce  passage  de  Ju vénal  a  été  imité  par  Boileau  ; 


F.  396  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

On  l'ait  cas  d'un  coursier  qui,  fier  et  plein  de  cœur, 
Fait  paraître,  en  courant,  sa  bouillante  vigueur; 
Qui  jamais  ne  se  lasse,  et  qui,  dans  la  carrière, 
S'est  couvert  mille  fois  d'une  noble  poussière. 

482, 

2,  Oyseau.  —  Un  oiseau  de  fauconnerie. 

2.  Longes.  —  Terme  de  fauconnerie;  laisse  de  cuir  à  l'aide  de  laquelle  on 
portE^it  et  maintenait  l'oiseau  sur  le  poing.  - 

5.  Poche.  —  «  Acheter  chat  en  poche  »,  c'est  acheter  une  ciiose  sans  la  voir, 
s'engager  sans  se  rendre  compte  de  ce  qu'on  fait;  on  disait  jadis  «  chat  en 
sac»,  de  ce  que  pour  dissimuler  le  gibier,  en  l'cnferiaait  dans  un  sac,  et 
que,  vendu  de  la  sorte,  le  lièvre  ou  lapin  qui  était  censé  s'y  trouver,  n'était 
souvent  qu'un  chat. 

6,  Cheual.  —  Sénkque,  Epist.  80. 

6,  Bardes.  —  Ornements,  caparaçons. 

2"i.  Quatrain.  —  Ancienne  monnaie  valant  un  liard  (un  peu  plus  d'un  cen- 
time); du  latin  quadrans,  également  pièce  de  monnaie  qui  était  le  quart  de 
l'as  romain. 
24,  Ancien.  —  SÉNi^:QUE,  Ejmt.  76. 

31,  Traictes.  —  Nues,  tirées  du  fourreau;  du  latin  destrictus. 

32.  Equale.  —  Égal;  du  latin  œqualis.  Mot  forgé  par  Montaigne. 

42,  Empire.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  ses  richesses  :  il  vit  satisfait,  content 
et  allègre. 
484, 

3,  Stupide...  seruile.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  ignorante,  stupide  et  endormie, 
basse,  seruile,  pleine  de  fiebure  et  de  fraieur. 

8,  Vilain.  —  Roturier;  un  vilain,  c'était  à  proprement  parler  un  serf;  ce 
mot  dérive  du  latin  villanus,  qui  lui-même  vient  de  villa,  métairie.  Il  est 
à  remarquer  que  ce  nom  de  villa,  ville,  qui  était  autrefois  uniquement  at- 
tribué aux  habitations  d'exploitation  en  pleine  campagne,  a  reçu  une  ac- 
ception opposée  à  son  étymologie  en  s'étendant  aux  agglomérations  impor- 
tantes. 

11.  Chausses.  —  On  désignait  sous  ce  nom  la  partie  du  vêtement  de  l'homme 
depuis  la  ceinture  jusqu'aux  genoux.  —  Ce  passage  a  été  pris  à  partie  par 
Pascai,  :  «  Cela  est  admirable,  dit-il  :  on  ne  veut  pas  que  j'honore  un  homme 
vêtu  de  brocatelle  et  suivi  de  sept  à  huit  laquais  !  Eh  quoi  !  il  me  fera  donner 
les  étrivïères,  si  je  ne  le  salue.  Cet  habit,  c'est  une  force,  il  n'en  est  pas  de 
même  d'un  cheval  bien  harnaché  à  l'égard  d'un  autre.  Montaigne  est  plaisant 
de  ne  pas  voir  quelle  différence  il  y  a,  d'admirer  qu'on  y  en  trouve  et  d'en 
demander  la  raison.  »  —  Cette  critique  a  aujourd'hui  bien  perdu  de  sa  va- 
leur; on  ne  risque  plus  d'être  battu,  à  ne  pas  saluer  qui  que  ce  soit;  et  la 
presse  notamment  respecte  aussi  peu  les  gens  que  la  vérité  ;  elle  en  est  ar- 
rivée, en  effet,  à  un  degré  de  licence  d'autant  plus  grand  que  la  protection 
de  la  justice  contre  ses  écarts  est  aussi  insignifiante  dans  la  répression  que 
douteuse,  difficile  et  coûteuse  à  obtenir;  c'est  bien  elle  qu'Ésope  qualifierait 
maintenant  la  meilleure  et  la  pire  de  toutes  les  choses. 

15,  Diane.  —  Hérodote,  V,  7,  d'où  cette  assertion  est  tirée,  dit  que  les  rois 
de  Thrace  adoraient  Mercure  à  l'exclusion  de  tout  autre  dieu  et  se  croyaient 
descendus  de  lui,  mais  il  n'ajoute  pas  qu'ils  méprisaient  les  autres. 

15,  Peintures.  —  Montaigne  en  revient  à  son  idée  que  les  rois  et  les  grands 
ne  sont  différents  des  autres  hommes  que  par  les  habits. 

29,  Lictor.  —  Licteur,  sorte  d'appariteur,  qui,  dans  l'ancienne  Rome,  mar- 
chait devant  les  premiers  magisti'als;  il  portait  une  hache  entourée  d'un 
faisceau  de  verges.  Le  préteur  en  avait  six,  le  consul  12,  le  dictateur-  24; 
la  vestale,  quand  elle  sortait,  était  également  précédée  d'un  licteur. 


486, 


2,  Bonnetades.  —  Salutations  en  ôtant  son  bonnet,  sa  coiffure. 
1.  Cohque.  —  Dans  les  lettres  attribuées  à  Diogène  le  Cynique,  on  lui  fait 
dire  :  -  Les  murailles  ne  te  défendront  pas,  les  maux  sautent  par-dessus; 


NOTES.        LIV.  1,  Cil.  XLll.         VOL.  I,  l'AG.  486.  P.397 

la  fièvre  n'est  pas  arivtée  par  un  mur,  ni  le  catarrhe  par  une  armée  d'alliés.  » 

12,  Dieux.  —  Plutauque,  Apolhlh.,  Alexandre.  —  Ce  fut  dans  un  combat  contre 
les  Assacéniens,  peuplad(>  du  cours  supérieur  de  l'Indus,  qu'Alexandre, 
atteint  par  un  trait  au  talon,  tint  ce  propos.  Toujours  avec  ses  troupes,  nul 
ne  se  prodigua  davantage,  et  nombreuses  furent  ses  blessures  :  En  Illyrie,  il 
faillit  être  assommé  d'une  pierre  et  reçut  un  coup  de  pilon  sur  la  nuque; 
au  passage  du  Granique,  il  eut  son  casque  fendu;  à  la  bataille  d'Issus,  la 
cuisse  traversée  d'un  coup  d'épée  que  lui  porta  Darius  lui-même;  au  siège 
de  Tyr,  il  fut  blessé  assez  grièvement  à  la  poitrine;  à  celui  de  Gaza,  un 

.  trait  le  frappa  au  pied,  un  autre  lui  transperça  l'épaule;  en  llyi-canîe,  sur 
les  bords  de  la  mer  Caspienne,  une  pierre  l'atteignit  à  la  figure  et  faillit  lui 
faire  perdre  la  vue  ;  au  pays  des  Maracandiens,  dans  la  Sogdiane,  il  fut 
blessé  à  la  jambe;  il  a  été  question  plus  haut  de  la  blessure  qu'il  reçut  chez 
les  Assacéniens;  chez  les  Malliens,  nation  du  cours  moyen  de  l'Indus,  un 
trait  l'atteignit  à  la  poitrine. 

15,  Rien.  —  Pi.utahqle,  Apophth.,  Antigone. 

20,  Cela.  —  C.-à-d.  qu'importe. 

33,  Podagram.  —  Les  éd.  ant.  aj.  cet  autre  vers  d'Horace,  que  l'édition  de 
1595  reporte  à  III,  684  :  Sincerum  est  nisi  vas,  quodcunque  infimdis,  acescit 
(dans  un  vase  impur,  tout  ce  que  vous  y  versez  se  corrompt). 

30,  Paré.  —  C'est  là  une  observation  qui,  tout  au  moins,  comporte  des  ex- 
ceptions. Pour  ma  part,  j'ai  longtemps  possédé  un  cheval  d'armes  qui, 
lorsqu'on  lui  mettait  son  harnachement  de  grande  tenue,  devenait  tout 
autre;  il  piaffait  pendant  qu'on  le  sellait  et,  une  fois  monté,  arrondissait  son 
encolure,  relevait  ses  allures  et  ne  souffrait  (ju'impatiemment  de  se  voir 
précédé  par  un  autre,  habitué  qu'il  était  en  pareil  cas  à  tenir  la  tête. 

30,  Platon.  —  Lois,  II. 
488. 

I,  Strette.  —  Pincement, élancement;  du  latin  sl)-ettus,  serré,  pressé. 
1,  Grandeurs.  — Dans  Don  Quichotte,  SanchoPança  dit  qu'  <■  un  pape  enterré 
ne  tient  pas  plus  de  place  qu'un  sacristain  ».  —  Un  dicton   populaire   : 
«  Mieux  vaut  goujat  debout,  qu'empereur  enterré.  »  —  Et  Malherbe  : 

•  Et  la  garde  qui  veille  à  la  porte  du  Louvre, 
.N'en  défend  point  nos  rois.  • 

10,  Biffe.  —  De  l'italien  beffa,  pierre  fausse,  et  par  extension  niche,  moquerie; 
signifie  ici  :  dehors  trompeurs,  fausse  apparence. 

12,  Terre.  —  Plutakque,  Si  l'homme  sage  doit  se  mêle)'  d'affaires  d'État. 

13,  Roy.  —  Depuis  Montaigne  des  changements  radicaux  se  sont  produits  en 
France  à  cet  égard.  A  l'autorité  efTective  des  rois,  s'est  d'abord  substituée 
l'action  dirigeante  des  classes  moyennes,  au  profit  surtout  desquelles  s'était 
faite  la  Révolution  de  1789.  Celles-ci,  abstraction  faite  de  quelques  rares 
individualités,  par  le  manque  de  caractère  qui  leur  est  propre,  méconnais- 
sant dans  leur  vue  courte  et  inconsciente  les  devoirs  que  cette  situation 
leur  imposait,  plus  préoccupées  de  ce  qui,  sur  le  moment,  les  touche  person- 
nellement que  de  l'avenir  et  de  l'intérêt  généi-al,  ont  laissé  s'implanter  le 
parlementarisme.  A  ce  régime,  de  chute  en  chute  et  aidés  dans  cette  évo- 
lution par  l'affaiblissement  des  croyances  religieuses  et  les  conditions  nou- 
velles d'existence  et  d'idées,  suite  des  découvertes  modernes  dans  les 
sciences  et  l'industrie,  nous  devons  d'en  être  arrivés  à  l'avènement  des 
classes  populaires  à  la  vie  pohtique,  et  à  leur  aspiration  à  la  direction  des 
affaires  pubUques;  à  ce  que  Le  Bon  appelle  l'ère  des  foules. 

Ce  n'est  plus,  dit-il  avec  bien  juste  raison,  dans  les  conseils  des  princes, 
mais  dans  l'àme  des  foules  que  se  préparent  les  destinées  des  nations. 
Leur  voix  est  devenue  prépondérante;  par  leur  organisation  actuelle,  main- 
tenant surtout  que  des  mains  imprévoyantes  ont  successivement  renvereé 
toutes  les  barrières  qui  pouvaient  les  contenir  et  que  déjà  une  partie  des 
pouvoirs  pul)lics  est  à  elles,  elles  constituent  uae  puissance  avec  laquelle  il 


F.398  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

faut  compter,  et  leure  revendications  qui  portent  sur  l'augmentation  de 
plus  en  plus  grande  des  salaires,  concurremment  avec  la  limitation  des 
heures  de  ti-avail,  l'expropriation  de  toutes  les  sources  de  revenus,  des  che- 
mins de  1er,  des  mines,  du  sol,  le  partage  égal  de  tous  les  produits,  l'élimi- 
nation de  toute  supériorité,  tendent  à  la  destruction  de  la  société  actuelle  et 
à  un  retour  au  communisme  primitif  des  groupes  humains. 

En  analysant  l'esprit  qui  les  anime,  on  constate  que  les  foules  ont  pour 
caractéristiques  essentielles  :  l'irréflexion;  souvent  les  mots  les  plus  vides 
de  sens,  frappant  leur  imagination,  suffisent  à  les  conduire;  une  crédulité 
excessive,  l'invraisemblance  n'existe  pas  pour  elles  ;  l'exagération,  la  soudai- 
neté de  leurs  résolutions;  une  intolérance  qui  fait  qu'elles  ne  supportent 
aucune  objection,  ne  se  laissant  arrêter  par  aucune  considération;  le  senti- 
ment de  leur  force  qui  est  devenue  immense  en  raison  de  leur  nombre  et 
de  ce  qu'elles  échappent  à  toute  responsabilité;  l'inconscience  de  leure  actes. 
Très  difficiles  à  gouverner,  elles  veulent  les  choses  avec  frénésie  et  sont 
surtout  propres  à  détruire;  la  justice  et  la  raison  sont  sans  prise  sur  elles; 
la  force  seule  leur  en  impose,  pour  elles  la  bonté  n'est  qu'un  signe  de  fai- 
blesse :  «  11  n'est  rien  moins  esperable  de  ce  monstre...  que  l'humanité  et 
la  douceur;  il  receura  bien  plustost  la  reuerancc  et  la  crainte  »  (I,  198). 

L'individu  en  foule  difl'ère essentiellement  de  l'individu  isolé;  du  moment 
qu'il  est  en  foule,  il'acquiert  le  sentiment  d'une  puissance  irrésistible,  s'ima- 
gine irresponsable  et  cède  à  des  instincts  que  seul  il  eût  forcément  refré- 
nés, car  par  une  sorte  d'hypnotisme  produit  par  les  effluves  qui  émanent 
du  milieu  dans  lequel  il  se  trouve,  sa  mentalité  s'altère,  le  plus  intelligent,  le 
plus  savant  descend  au  niveau  de  ceux  qui  le  sont  le  moins  :  il  n'a  plus 
de  volonté,  sa  raison  cesse  de  le  guidei-,  il  devient  inconscient  et  capable 
d'obéir  à  toutes  les  suggestions,  •  Tardeur  de  la  société  rauissant  les  particu- 
liers iugements  »  (I,  648).  Cet  effet  se  produit  que  la  foule  soit  homogène 
ou  non,  qu'elle  soit  composée  d'éléments  quelconques  ou  choisis;  c'est  à  cela 
qu'on  voit  des  jurys  rendre  des  verdicts  que  désapprouvent  chaque  juré 
individuellement,  des  assemblées  parlementaires  adopter  des  lois  et  des 
mesures  que  réprouvent  en  particulier  chacun  de  ses  membres  ;  sous  ces 
influences  ambiantes  l'avare  se  transforme  instantanément  en  prodigue,  le 
sceptique  en  croyant,  Thonnète  homme  en  criminel,  le  héros  en  poltron; 
«  la  contagion  est  très  dangereuse  en  la  presse  •  (I,  410). 

Les  foules  ne  sauraient  se  passer  de  meneurs.  Ce  sont  le  plus  souvent  des 
rhéteui-s  subtils  ne  poursuivant  que  des  intérêts  pereonnels,  cherchant  à 
persuader  en  flattant  de  bas  instincts,  agissant  fréquemment  en  sous-main, 
et  s'esquivant  quand  il  pourrait  y  avoir  danger.  Leur  autorité  très  despo- 
tique, ne  s'imposant  la  plupart  du  temps  que  par  ce  despotisme,  peut  à  un 
moment  être  très  grande,  et  de  plus  en  plus  ils  tendent  à  remplacer  les 
pouvoirs  publics  au  fur  et  à  mesure  que  ceux-ci  se  laissent  discuter,  sans 
cependant  que  pour  eux  la  Roche  Tarpéienne  soit  toujours  très  proche 
du  Capitole.  —  Parmi  les  meneurs,  il  en  est  parfois  qui  ont  foi  et  sacrifient 
tout,  intérêts,  famille,  à  leurs  convictions,  toujours  prêts  à  l'action;  leur  pa- 
role en  acquiert  d'autant  jilus  de  puissance;  mais  ceux-là  sont  rares  et 
presque  toujours  c'est  pour  d'autres  "qu'ils  retirent  les  mairons  du  feu. 

Les  foules  sont  au  plus  haut  degré  impressionnables,  et  qui  connaît  l'art 
de  les  impressionner,  connaît  aussi  celui  de  les  gouverner.  Ce  qui  frappe 
leur  imagination  affecte  toujours  une  forme  simple,  nette,  c'est-à-dire  dé- 
gagée de  toute  interprétation,  de  tout  commentaire  accessoires,  en  même 
temps  que  très  exagérée,  tels  :  une  grande  victoire,  un  grand  miracle,  un 
grand  accident,  un  grand  crime,  un  grand  espoir.  L'orateur  qui  veut  les 
séduire,  doit  s'imprégner  de  ces  idées  et  affirmer,  exagérer,  répéter,  sans 
se  laisser  aller  à  produire  de  preuve  ou  tenter  de  démontrer  quoi  que  ce 
soit  par  le  raisonnement,  —  Pour  acquérir  sur  elles  une  action  prolongée, 
il  faut  la  foi,  ou  le  prestige,  qu'il  vienne  du  nom,  de  la  situation  ;  et  encore 
faut-il  dans  l'un  ou  l'autre  cas  que  l'occasion  se  produise  et  que  les  cir- 
constances s'y  prêtent. 


NOTES.         I,IV.  1,  CH.  Xl.ll.        VOL.  I,  PAG.  488.  F.399 

l(j,  Imbécillité.  —  Faiblesse,  du  latin  imbecUlUas  qui  a  cette  même  signili- 
calion  atténuée.  C'est  dans  ce  sens  que  ce  mot  est  constamment  employé 
dans  les  Essais. 

25.  Xenophon.  —  Dans  le  traité  intitulé  Hiéron  ou  de  lu  condition  des  rois. 

32,  Ennuyeuse. 

«  Ne  soûlez  pas  voire  désir. 

Car  si  tôt  qu'un  plaisir  nous  lasse. 

C'est  moins  plaisir  que  déplaisir.  »  Ch.  d'Akcussia. 

490, 

1,  Démettre.  —  Rabaisser,  descendre;  du  latin  demillere  qui  a  ce  sens. 

14,  Butte.  —  C.-à-d.  les  princes  sont  trop  en  vue  et  trop  observés. 

21,  Mesme.  —  Cicéron,  De  Legibus,  III,  14. 

30,  Maiesté  —  Sémélé,  mère  de  Bacchus  qu'elle  tenait  de  Jupiter,  cédant  aux 
conseils  insidieux  de  Junon  qui,  jalouse  d'elle,  avait  pris  les  traits  de  sa 
nourrice  pour  la  perdre,  demanda  au  maître  des  dieux  de  se  montrer  à  elle 
dans  tout  l'éclat  de  sa  puissance.  Après  avoir  longtemps  résisté,  Jupitoi- 
céda  et  lui  apparut  au  milieu  des  foudres  et  des  éclairs;  le  palais  s'embrasa, 
et  Sémélé  périt  dans  les  flammes.  Mvth. 

33,  Pais.  —  Les  lois  fondamentales  de  certains  pays  interdisaient  aux  rois  de 
sortir  de  leurs  États.  Les  temps  sont  bien  changés,  les  souverains  de  nos 
jours  passent  leur  temps  à  voyagei',  et  Paris  ayant  l'honneur  de  leur  visite 
qui  fréquemment  leur  est  rendue  dans  leur  propre  pays,  ce  ne  serait  pas 
une  minime  économie  budgétaire  que  d'établir  en  principe  que,  sauf  circons- 
tances toutes  particulières,  l'incognito  est  de  rigueur  pour  tout  souverain 
qui  mot  le  pied  sur  le  sol  français  et  que,  comme  jadis  aux  doges  de  Ve- 
nise, il  est  interdit  au  Président  de  la  République,  pendant  la  durée  de  ses 
fonctions,  de  sortir  du  territoire;  sans  compter  que,  s'il  en  eût  été  ainsi, 
ne  se  serait  pas  produite,  lors  d'une  visite  rendue  à  Rome  au  roi  d'Italie, 
cette  grossièreté  (qu'il  eût  été  si  facile  d'éviter,  si  elle  n'avait  été  intention- 
nelle, en  choisissant  une  autre  ville  comme  lieu  de  rencontre)  faite  au  Pape, 
de  ne  pas  aller  le  voir,  de  sembler  l'ignorer,  alors  que  la  religion  catholi- 
que, dont  il  est  le  chef,  était  encore  reconnue  par  le  Gouvernement,  auprès 
duquel  il  n'avait  cessé  d'avoir  un  représentant  attitré;  la  question  de  la  sé- 
paration de  l'Église  et  de  l'État  était  déjà  à  la  vérité  dans  l'esprit  de  quel- 
ques-uns, cet  incident  a  pu  la  précipiter  parce  qu'on  en  veut  toujours  à  ceux 
envers  lesquels  on  a  des  torts;  on  reconnaîtra  qu'il  n'était  cependant  pas 
indispensable  pour  y  arriver. 

42,  Percée.  —  Louis  XIV,  à  Vei-sailles,  en  1685,  avait  sur  l'état  de  sa  maison 
un  office  de  cette  nature  qui  y  figurait  pour  une  dépense  de  15.000  livres. 
492, 

6,  Temps.  —  CÉSAK,  De  Bello  Cfallico,  VI,  23,  dit  simplement  que  chez  les 
Germains,  et  non  en  Gaule,  «  en  paix  il  n'y  a  pas  de  magistrats  dont  l'ac- 
tion s'étende  sur  l'ensemble  ;  ce  sont  les  chefs  qui,  dans  chaque  territoire 
et  dans  chaque  localité,  rendent  la  justice  et  veillent  au  bon  ordre  ».  Mais 
peut-êti-e  Montaigne  a-t-il  une  réminiscence  d'un  passage  de  Cicéron,  Ep. 
fam.,\ll,b,  qui  reproduit  ici  une  lettre  de  César  qui  écrit:  «Quant  à 
M.  Orfius  que  tu  me  recommandes,  j'en  ferai  un  roi  des  Gaules,  on  l'en- 
verrait quelque  part  autre  avec  une  délégation.  » 

20,  Venise.  —  Nous  disons  aujourd'hui  le  Doge  de  Venise;  quant  à  être  libre, 

il  no  l'i'tait  guère,  quoi  qu'en  dise  Montaigne. 
'32,  L'autre.  —  Idée  déjà  émise  liv.  1,  ch.  III  (I,  30). 
494, 

7,  Plus  tost...  la  leur.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  pour  en  tirer  leurs  agrandissemeiis 
et  commodilcs  particulières. 

7,  Fortune.  —  Montaigne  semble  s'être  inspiré  ici  du  souvenir  de  TAcrrE 
qui  fait  dire  par  l'empereur  Galba  à  Pison  qu'il  vient  d'associer  à  l'empire  : 
«  Toi  et  moi,  nous  nous  parlons  aujourd'hui  en  toute  franchise;  les  autres 
parlent  à  notre  fortune   i)lus  (|u'à  nous-mêmes  »;  et  il  ajoute  :  »  Ce  qui 


F. 400  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

coûte,  c'est  conseiller  aux  princes  de  taire  leur  devoir;  les  approuver  dans 
tout  ce  (ju'ils  font,  ce  n'est  pas  les  aimer.  » 

14,  Seroient.  —  Ammien  Marcelun,  XXII,  10. 

25,  Semez.  —  Aurel.  Victor,  Dioclétien.  —  L'empereur  Dioclétien  avait  abdi- 
qué. Les  affaires  de  l'empire  s'aggravant,  Maximien,  auquel  il  avait  cédé  le 
pouvoii',  l'envoya  solliciter  de  les  repreridie;  pour  toute  réponse  celui-ci 
l'invita  à  venir  voir  ses  jardins  à  Salone. 

25,  Anacharsis.  —  Pi.utarque,  Banquet  des  sept  sages,  13. 

28,  Precedence.  —  Supériorité;  du  latin  prsecedere,  précéder,  exceller,  sur- 
passer. 

29,  Italie.  —  Pi.utarque,  Pyrrhus.  —  En  280.  Pyrrhus,  roi  d'Épire,  avait  des 
talents,  mais  ambitieux  et  inconstant,  il  n'a  laissé  que  la  réputation  d'un 
aventurier;  il  conquit  la  Macédoine  qu'il  ne  put  conserver,  .combattit  les 
Romains,  guerroya  en  Sicile  et  fut  tué  à  Argos.  —  Dans  sa  première  Épître, 
BoiLEAU  a  imité  ce  passage.  —V.  N.  I,  1(3:  Médecin;  352:  Italie;  404  :  Pleu- 
rer; 524:  lournée. 

496, 

4,  Deux.  —  En  1815,  Bliicher,  le  vainqueur  de  Waterloo,  bivouaquant  quel- 
ques jours  après  dans  le  château  de  S.-Cloud,  disait,  en  en  admirant  les  ri- 
chesses :  "  Faut-il  qu'un  homme  soit  fou,  pour  avoir  été  courir  à  Moscou, 
quand  il  avait  toutes  ces  belles  choses  en  sa  possession!  » 


CHAPITRE   XLIIl. 

12,  Fin.  —  Philippe  le  Bel  fit  des  lois  pour  réprimer  le  luxe  qui  devenait  ex- 
cessif :  les  ducs,  les  comtes  et  les  barons  ne  pouvaient  donner  à  leurs 
femmes  que  quatre  robes  par  an  ;  les  dames  moins  riches  ne  devaient  en 
avoir  qu'une;  il  n'y  avait  que  les  femmes  de  grands  seigneurs  qui  pouvaient 
employer  des  étoffes  à  30  sols  l'aune  (I"",20);  les  boui-geoises  ne  pouvaient  y 
mettre  que  dix  sols,  ce  qui  équivalait  à  20  sous  de  notre  monnaie.  Ces  or- 
donnances tombèrent  bien  vite  en  désuétude. 

16,  Choses.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  vanitez. 

23,  Degrez.  —  C.-à-d.  nous  et  le  rang  que  nous  occupons. 
498, 

I,  Ville.  —  Les  éd.  ant.  port.  :   que  vous  en  faisiez  soudain  argument  que 
c'estoit  un  homme  de  néant  (éd.  ant.  à  88),  peu  (éd.  de  88). 

6,  Pollisseure.  —  Propreté,  du  latin  politura  qui  a  même  signification;  et 
par  extension,  éclat. 

7,  Roys.  —  Les  éd.  ant.  a}.  :  et  les  princes. 

12,  Locriens.  —  Diodore  de  Sicile,  XII,  20.  —  Une  des  lois  de  Zéleucus  portait 
que  l'adultère  aurait  les  yeux  crevés;  son  fils  ayant  été  convaincu  de  ce 
crime,  il  voulut  lui  appliquer  la  loi  ;  le  peuple  demanda  grâce.  Zéleucus 
condescendit  à  ses  instances,  en  ne  lui  faisant  crever  qu'un  œil,  dit-on, 
mais  en  s'en  faisant  crever  un  à  lui-même. 

17,  Putain.  —  Le  roi  saint  Louis  ne  permettait  qu'aux  courtisanes  de  porter 
des  ceintures  dorées,  d'où  le  proverbe  :  «  Bonne  renommée  vaut  mieux  que 
ceinture  dorée.  » 

17,  Ruffians.  —  Entremetteur,  proxénète,  de  l'italien  ruffians. 

20,  Diuertissoit.  —  Détourner,  du  latin  divertere  qui  a  même  sens. 

25,  Cour.  —  L'éd.  de  88  aj.:  ces  façons  vitieuses  naissent  près  d'eux.  —  «  Les 
citoyens  d'une  république  sont  tels  que  ceux  qui  les  gouvernent.  »  Platon. 
Toutefois  on  dit  plutôt  aujourd'hui  et  avec  juste  raison  :  <■  On  a  le  gouver- 
nement que  l'on  mérite.  »  —  «  A  l'exemple  des  rois,  un  chacun  se  gouverne.  » 
Lacroix  de  Maine.  Longtemps  avant  lui,  Claudie.n  avait  écrit  cet  hémi- 
stiche passé  en  proverbe  :  Régis  ad  exemplar  (à  l'exemple  du  roi).  —  «  Les 
exemples  des  rois  nous  font  ce  que  nous  sommes.  »  S.  Didier.  —  «  L'exemple 
du  monarque  est  la  loi  de  la  terre.  »  La  Hari'e.  —  Louis  XI  ne  voulait  pas 
que  son  fils  sût  un  mot  de  latin;  toute  la  cour  de  son  temps  méprisa  les 


NOTES.         I.IV.  I,  en.  XIJII.         VOL.  I,  PAG.  498.  F.401 

belles-lettres;  François  I"  les  fait  enseigner  à  ses  enfants,  toute  la  cour  s'y 
remet.  Henri  III  aime  la  débauche,  le  luxe,  toute  la  cour  s'y  livre.  —  De 
nos  jours,  un  président  do  la  Chambre  des  députés  (un  des  rois  du  moment 
en  France)  se  marie  en  redingote,  voilà  l'habit  de  cérémonie  démodé.  Le 
roi  d'Angleterre  arbore  un  chapeau  melon,  le  chapeau  haut  de  forme  est 
menacé.  —  Le  roi  Alphonse  comparait  ses  sujets  aux  plantes  qui,  toutes, 
se  tournent  toujours  vers  le  soleil. 

«  Communément  la  ville  et  la  province 

Règlent  leurs  mœurs  sur  celles  de  leur  prince.  »  M"''  Liieritier. 

■  L'exemple  est  plus  puissant  sur  les  esprits  vulgaires 
Que  toutes  les  raisons  et  tous  les  commentaires.  >  Pemcai'd. 

i?0,  Chaussure.  —  On  comprenait  sous  cette  appellation  le  vêtement  de  la 
partie  inférieure  du  corps,  qui  parfois  n'était  que  d'une  seule  pièce,  mais 
qui  plus  communément  se  subdivisait  en  haut-de-chausses,  culotte  s'arrê- 
tant  au  genou,  ot  bas-de-chausses  ou  simplement  bas.  Lo  reproclie  que  lui 
fait  ici  ftlontaigne  de  dessiner  la  forme  des  membres  occultes,  il  l'a  déjà  for- 
mulé I,  I7G. 
500, 

G.  Loix.  —  Liv.  VIII. 

CHAPITRE  XLIV. 
502, 

().  Pressant.  —  Pi.utahqle,  Alexandre,  7.  —  Dans  la  nuit  qui  précéda  la  ba- 
taille d'Arbelles  (331),  et  contrairement  à  ses  habitudes  en  pareil  cas.  — Le 
grand  Condé  dormit  également  la  veille  de  la  bataille  de  Rocroy  (1643).  «  Le 
lendemain  à  l'heure  marquée,  il  fallut  réveiller  d'un  profond  sommeil  cet 
autre  Alexandre.  »  Bossuet.  —  Napoléon  disait  que  ce  n'était  pas  là  une 
preuve  de  grandeur  d'esprit,  mais  de  lassitude;  lui-même  dormit  de  la  sorte 
la  nuit  qui  précéda  Austerlitz  (1805). 

12,  Ronfler.  —  Plutauque,  Othon,  8.  —  \'aincu  à  Bébriac  (69),  Othon,  quoi- 
qu'il n'eût  pas  encore  lieu  de  désespérer,  se  sacrifia,  contre  le  sentiment  de 
ses  soldats  qui  lui  étaient  tout  dévoués,  dans  la  pensée,  qui  ne  se  réalisa 
pas,  de  ramener  la  paix  et  l'union  dans  l'empire.  —  Louis  XVI  dormit  pai- 
siblement la  nuit  qui  précéda  son  supplice  (1793);  de  même  le  général  Bironj 
en  1794,  lo  maréchal  Ney,  en  1815. 

22,  Parlement.  —  Départ.  —  Pi.utarque,  Galon  d'Utique,  19.  V.  N.  II.  586  : 
leune  Caton. 

31,  Outrance.  —  Vraisemblablement  des  gladiateurs;  gens  qui  se  louaient 
pour  combattre  à  l'épée,  jusqu'à  ce  que  mort  s'ensuive,  pour  le  plaisir  du 
peuple,  ot  aussi  pour  tous  autres  qui  les  prenaient  à  leur  service,  sans  souci 
de  leur  propre  vie,  non  plus  que  de  celle  de  leur  advei^saire. 

40,  Escarmouche.  —  Plutarque,  Calon  d'Utique,  8.  —  Métellus  proposait  de 
rappeler  à  Rome,  sous  prétexte  do  la  protéger.  Pompée  et  ses  troupes  alors 
en  Asie;  c'était  en  réalité  pour  lui  donner  la  dictature.  Caton,  collègue  do 
Métellus  au  tribunat,  s'y  opposa;  et,  après  une  lutte  de  plusieurs  jours  où 
il  eut  à  résister  à  la  foule  qui  faillit  lo  lapider,  il  parvint  à  empêcher  que  la 
loi  ne  passât  (63).  V.  N.  II,  586  :  leune  Caton. 

41,  Cet  homme.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  ces  Iruis  /iommes,H  modifient  en  con- 
séquence la  contexturo  de  la  phrase. 

504, 

2,  Ordinaires.  —  Le  sommeil  répare  le  corps,  l'espérance  répare  l'esprit,  ce  qui 
faisait  dire  à  Platon  :  «  L'espérance  est  le  sommeil  de  l'homme  qui  veille.  ■- 

3,  Combat.  —  Suétone,  Auguste,  16. 

10,  Ennemis.  —  En  36.  Montaigne,  comme  Suétone  d'après  lequel  il  cite  ce 
fait,  dissimule  la  lâcheté  d'Auguste,  dont  toutes  les  victoires  qui  l'éievèrent 
à  l'empire  furent  l'œuvre  d'autrui;  celle  de  Philippes  fut  due  à  Antoine 

ESSAIS   DE  MONTAIGNE.  —  T.   IV.  26 


F.402  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

seul;  celle  d'Actium,  comme  la  défaite  do  Sextus  Pompée  dont  il  est  ques- 
tion ici,  furent  le  fait  d'Agrippa;  nonobstant,  il  s'acquit  l'affection  des 
soldats,  qui  faisaient  plus  de  cas  de  la  libéralité  de  leur  général  que  de  son 
courage. 

17,  Plus.  —  Pi.iTAKQUE,  Sylla,  13.  —  En  82,  près  de  Préneste;  Marius  le 
Jeune,  battu,  se  tua. 

20,  Sommeil.  —  En  186.  Suivant  les  uns,  Persée  se  laissa  mourir  de  faim 
dans  sa  prison.  Suivant  d'auti-es,  ayant  mécontenté  ses  gardiens,  ceux-ci 
pour  se  venger,  épiant  le  moment  où  le  sommeil  le  prenait,  employaient 
toutes  sortes  de  moyens  de  le  tenir  éveillé;  il  finit  par  mourir  de  cette  in- 
somnie continue. 

21,  Dormir.  —  Mécènes,  agité  d'une  fièvre  continue,  ne  dormit  pas  un  seul 
moment  durant  les  trois  dernières  années  de  sa  vie.  Pline,  Hist.  naf.,  VII, 
52:  c'est  le  seul  exemple  qu'il  en  donne. 

23,  Années.  —  Hérodote,  IV;  il  dit  n'en  parler  que  par  ouï  dire  et  ne  pas  y 
croire  ;  cela  .s'applique  probablement  aux  peuples  habitant  les  régions  po- 
laires, dont  l'année,  disait-on,  était  composée  d'un  jour  de  six  mois  et  d'une 
nuit  de  même  durée,  ce  qui  déjà  ne  voudrait  pas  dire  que  les  gens  y  de- 
meureraient éveillés  ce  jour  entier  et  dormiraient  d'un  seul  trait  toute  la 
nuit  qui  la  suit;  en  réalité  pendant  six  mois  les  jours  y  sont  excessivement 
courts,  tandis  que  pendant  les  autres  six  mois  ce  sont  les  nuits  dont  la  durée 
y  e.st  de  plus  en  plus  réduite. 

24,  Suitte.  —  DiooÈNE  Laerce,  I;  Pline,  VII,  52. 

CHAPITRE  XLV. 

25,  Dreux.  —  Livrée  en  1562,  sous  Charles  IX,  et  gagnée  par  les  catholiques 
sous  le  commandement  du  connétable  de  Montmorency  et  le  duc  de  Guise, 
contre  les  protestants  ayant  à  leur  tète  le  prince  de  Condé. 

506, 

4.  Macbanidas.  —  En  206,  à  Mantinée;  bataille  autre  que  celle  livrée  en 
ce  même  lieu  par  Epaminondas.  Celle  dont  il  est  ici  question  se  termina 
par  une  sorte  de  combat  singulier  entre  Philopœmen  et  Jlachanidas,  celui- 
ci  cherchant  à  fuir,  celui-là  à  l'arrêter,  et  dans  lequel  Machanidas  fut  tué. 
Plutarque,  Philopœmen,  6. 

18,  Bœotiens.  —  En  394,  à  Coronée.  Plutarque,  Agésilas. 

30.  Route.  —  En  pleine  déroute;  comme  si,  précipité  du  haut  d'une  mon- 
tagne, il  était  contraint  à  une  descente  rapide,  s'exécutant  en  désordre  et 
sans  arrêt  possible.  V.  N.  I,  366  :  Routes. 

CHAPITRE  XLVI. 
508, 

3,  Galimatrée.  —  Terme  de  cuisine  :  sauce  rapidement  faite,  dans  laquelle 
il  entre  de  la  moutarde  et  de  la  poudre  de  gingembre;  par  extension,  as- 
semblage, mélange,  galimatias. 

5,  Benoist.  —  Jehan  était  souvent,  au  moyen  âge,  employé  comme  synonyme 
de  sot,  innocent,  badaud;  on  dit  encore  de  nos  jours,  dans  le  même  sens: 
«  Jeanjean  »  ;  —  Guillaume  se  disait  parfois,  comme  terme  de  mépris,  des 
gens  dont  on  ne  faisait  pas  grand  cas  ;  —  Benoist  et  Benêt  se  prononçaient 
de  même  façon  et  avaient  même  signification,  qu'a  conservée  l'épithète  de 
-  benêt  »,  niais  ridicule. 

8,  Guillaumes.  —  Quatorze  rois  d'Egypte  portèrent  le  nom  de  Ptolémée; 
huit  rois  d'Angleterre  celui  de  Henri:  neuf  rois  de  France,  à  l'époque  de 
Montaigne,  s'étaient  appelés  Charles;  la  Flandre  a  eu  neuf  de  ses  comtes 
du  nom  de  Baudoin;  l'Aquitaine,  dix  de  ses  ducs  du  nom  de  Guillaume. 
10,  Venu.  —  Guienne  ne  vient  pas  de  Guillaume,  mais  de  l'ancien  nom  ro- 
main du  pays,  Aguilania,  dont  on  a  fait  d'abord  Aquienne,  et  ensuite  la 
Guyenne. 


NOTES.         [JV.  I,  CH.  XLVI.         VOL.  I,  PAG.  SOS.  F.403 

18,  Nom.  —  Guillaunio  le  Breton  (conseiller  intime  de  Philippe-Auguste), 
étant  venu  à  Rouen,  invita  à  manger  chez  lui,  le  jour  do  la  fête  de  son 
saint  patron,  tous  les  chevaliers  portant  ce  nom;  il  s'en  trouva  trois  cents. 

19,  Seruiteurs.  —  C'est  la  très  grande  afiluence  de  gens  du  même  nom,  se 
distinguant  parfois,  ma;is  pas  toujours,  par  des  surnoms  ou  des  sobriquets, 
qui,  lors  des  croisades,  au  xn-  siècle,  introduisit  en  France,  pour  permettre 
de  s'y  reconnaître,  l'usage  des  noms  de  famille.  Chez  les  anciens,  ce  nom 
n'existait  pas  davantage,  toutefois,  dans  les  grandes  familles,  le  nom  de  l'un 
des  ancêtres  qui  avait  marqué  était  quelquefois  conservé,  et  si  ses  descen- 
dants ne  le  portaient  pas  toujours,  il  servait  néanmoins  à  indiquer  qu'il  en 
faisait  partie,  tels  les  Séleucides  en  Grèce,  la  gens  Fabia  à  Rome,  et  même 
les  Mérovingiens,  les  Carlovingiens  dans  l'ancienne  France.  Cela  se  retrouve 
encore  chez  les  Orientaux;  mais,  en  outre,  au  nom  de  chacun  s'accole  d'une 
façon  indissoluble  l'indication  de  qui  il  est  fils  :  Atman  ben  Mohamed  (At- 
man  fils  de  Jlohamed). 

22,  Viandes.  —  Spartien,  Gela,  5. 

25,  Réputation.  —  «  Les  noms  ont  une  très  grande  vertu.  «  Platon.  —  «  11 
faut  donner  de  beaux  noms  aux  enfants;  un  beau  nom  vaut  mieux  qu'une 
fortune.  »  Pline. 

•  Les  noms  onl  efficace  et  puissante  vertu.  »  KoNSAnD. 

26,  Nom.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  beau  ef. 

31,  Droit.  — C.-à-d.  ne  pouvoir,  à  cause  de  son  nom,  nommer  à  un  grade  ou 
à  une  place  un  gentilhomme,  bien  qu'il  y  eùi  droit. 
510, 

1,  Gascongne.  —  Philippe  11,  roi  d'Espagne,  ne  voulut  jamais  rien  faire 
pour  un  ecclésiastique,  parce  qu'il  s'appelait  Luther,  du  même  nom  que  le 
célèbre  réformateur.  .  ' 

4,  Enfants.  —  Il  importe,  en  effet,  de  ne  pas  donner  aux  enfants  des  noms, 
c'est-à-dire  des  prénoms  ridicules  qui  dans  leur  jeune  âge  leur  attirent  des 
railleries  de  leurs  camarades  (cet  âge  est  sans  pitié),  ce  qui  peut  les  rendre 
malheureux,  leur  aigrir  le  caractère,  créer  des  inimitiés.  De  même  de  ceux 
qui  sont  susceptibles  de  donner  lieu  dans  l'avenir  à  des  contrastes  trop 
saillants;  combien  de  Blanche  sont  brunes,  de  Rose  sont  pâles.  —  On  conte 
à  ce  propos  l'anecdote  des  deux  filles  du  roi  d'Espagne  Alphonse  IX.  L'une 
s'appelait  Urraca  et  l'autre  Blanca.  Des  envoyés  de  Philippe,  roi  de  France, 
vinrent  demander  en  mariage,  pour  leur  maître,  l'une  ou  l'autre  de  ces 
princesses.  Urraca  était  l'aînée  et  beaucoup  plus  belle  que  sa  sœur;  celle-ci 
fut  pourtant  préférée  parce  que  le  nom  d'Urraca  avait  moins  bonne  grâce 
et  eût  été  moins  bien  accueilli  en  France.  L'auteur  qui  rapporte  ce  fait, 
ajoute  :  «  Qui  ignore  qu'en  France  le  nom  de  Henri  est  considéré  comme 
néfaste,  en  raison  de  la  fin  tragique  des  rois  qui  l'ont  porté  :  Henri  II,  tué 
dans  un  tournoi;  Henri  III  et  Henri  IV,  assassinés  »;  toujours  est- il 
qu'il  n'a  pas  porté  bonheur  à  celui  de  leurs  descendants  qui  a  pris  le  nom 
de  Henri  V  et  n'est  jamais  monté  sur  le  trône.  — -  On  cite  encore  à  ce  sujet 
une  remarque  assez  piquante  du  maréchal  Pélissier:  «  Voyez  quelle  bizar- 
rerie, dit-il,  en  parlant  de  quelques  maréchaux  ses  compagnons  d'armes  : 
Canrobert  s'appelle  Certain  (il  était  au  contraire  de  peu  de  décision);  Vail- 
lant, Alexandre,  et  Randon,  César  (tous  deux,  administrateurs  estimés,  ne 
passaient  pa-s  pour  des  foudres  de  guerre);  et  moi,  je  m'appelle  Aimable  (ce 
qu'il  était  fort  peu)!  —  Quant  à  l'importance  des  noms  patronymiques,  elle 
est  bien  autrement  grande  ;  ne  voit-on  pas,  en  effet,  journellement,  môme 
à  notre  époque,  nombre  de  grandes  familles  de  France  redorer  leurs  blasons 
et  revivifier  leur  race  par  des  alliances  avec  les  filles  de  financiers,  d'indus- 
triels et  de  commerçants  auxquels  la  fortune  a  souri,  comme  du  reste  leurs 
pères  avec  les  filles  de  fermiers  généraux,  alliances  dans  lesquelles  le  nom 
qu'ils  tiennent  d'illustres  aïeux  est  leur  seul  apport! 

M,  Voyons.  —  Bolchet,  de  qui  le  fait  semble  tiré,  dit  que  le  jeune  homme, 


F.404  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

presque  un  enfant,  était  le  neveu  du  dojen  de  Notre-Dame  la  Grande  qui 
s'appelait  alors  Saint-Nicolas.  Couché  avec  une  fille  de  joie,  ce  jeune  homme 
apprit  d'elle  qu'elle  se  nommait  Marie.  Saisi  de  honte,  il  s'abstint  de  la 
toucher  et  eut  une  si  grande  contrition  de  son  péché  qu'il  en  mourut  sur 
l'heure.  En  raison  de  la  circonstance,  il  fut  inhumé  en  terre  profane; 
mais  quelques  jours  après  apparut  sur  sa  tombe  <•  une  rose  blanche  sur 
branche  verte  nouvellement  venue  »,  bien  que  ce  ne  fût  pas  la  saison.  En 
raison  de  ce  prodige,  on  e.xhuma  le  corps  et  l'on  trouva  dans  la  bouche 
un  papier  portant  en  lettres  d'or  le  nom  de  Marie.  On  informa  et  a3ant 
acquis  la  conviction  qu'il  était  décédé  de  douleur  et  de  repentir,  on  le  mit 
en  terre  sainte,  et  en  commémoration  on  changea  le  vocable  de  l'église, 
qui  devint  Notre-Dame. 

14,  Voyelle.  —  Vocale,  orale. 

16,  Pythagoras.  —  Sextus  Empiricvs,  A  dver  sus  Mat  hem.,  IV. 

19,  Spondaïque.  —  Monotone;  ce  qualificatif  de  spondaïque  s'appliquait  à 
à  un  genre  de  musique^  usité  dans  l'antiquité,  composé  de  notes  longues 
et  d'égale  durée. 

22,  Foy.  —  Tout  ceci  est  dit  par  ironie  contre  les  Calvinistes  qui  affectaient 
une  piété  excessive  et  donnaient  à  leurs  enfants  des  prénoms  tirés  de  l'An- 
cien Testament,  au  lieu  de  ceux  en  usage  chez  les  catholiques. 
512, 

2,  Cognoissance.  —  Il  est  bien  regrettable  que  ce  souhait  exprimé  par 
Montaigne,  bien  souvent  renouvelé  depuis  lui,  soit  encore  à  l'état  de  de- 
sideratum, et  qu'on  continue  à  franciser  les  noms  propres  étrangers,  aussi 
bien  les  noms  d'hommes  que  les  noms  de  lieux,  tandis  que  par  contre  on 
a  une  tendance  prononcée  à  emplo3er  dans  le  langage  courant  nombre 
de  mots  exotiques  pour  désigner  des  choses  qui  souvent  ont  leur  nom  en 
français.  Pourquoi  nous  obstiner  à  dire  Londres  au  lieu  de  London,  Rome 
au  lieu  de  lîoma;  à  appeler  Guillaume,  Charles,  au  lieu  de  Wilhelm,  de 
Carie,  les  souverains  de  l'Allemagne,  du  Portugal!  Cette  manie  de  déna- 
turer les  no/ns  propres  n'a-t-elle  pas  transformé  en  «  Pas  des  lanciers  »  un 
lieu  dit  de  Provence  «  Pas  de  l'ansie  »  dont  l'appellation,  par  sa  significa- 
tion, «  pas  de  l'angoisse,  passage  difficile  »,  en  expliquait  la  nature,  et  com- 
bien d'autres  dans  le  même  cas. 

12,  Eschappé.  —  La  maison  régnante  de  France  était  celle  des  Valois  qui 
prit  fin  avec  Henri  III  et  descendait  de  Charles  de  Valois,  fils  cadet  de 
Philippe  .111,  petit-fils  par  conséquent  de  saint  Louis,  branche  indirecte  des 
Capétiens  dont  le  point  de  départ,  remontant  déjà  à  trois  siècles,  était  cer- 
tainement ignoré  alors  de  beaucoup.  Et  il  en  était  de  même  en  ce  qui 
concernait  Henri  IV  qui  allait  succéder  à  Henri  111  et  tenait  également  ses 
droits  de  saint  Louis  d'une  façon  tout  aussi  indirecte  du  fait  de  son  sixième 
fils  Robert  de  Clermont,  sire  de  Bourbon.  On  connaissait  les  Valois  et  les 
Bourbons,  on  n'avait  plus  guère  souvenir  de  la  manière  dont  ils  se  rat- 
tachaient aux  Capétiens. 

20,  D'autres.  —  Elles  sont  nombreuses,  en  effet,  les  familles  qui  se  croient 
ou  se  disent  issues  de  sang  royal:  rien  qu'en  Gascogne,  les  Montesquiou, 
les  Montlezun,  les  Pardailhan,  les  Comminges  se  font  descendre  de  la  pre- 
mière race.  Mais  il  y  en  a  ailleurs  en  France,  et  un  peu  partout  :  les  de 
Croy  se  disent  venir  des  rois  de  Hongrie;  les  Carrion  Nisas,  des  rois  d'A- 
ragon; les  Commène,  les  Lascaris,  des  empereurs  d'Orient;  lés  Montmo- 
rency ont  une  tradition  mérovingienne;  plusieurs  princes  russes,  d'origine 
lartare,  se  donnent  comme  descendants  de  Gengis  Khan,  etc.,  etc.,  car 
ils  sont  légion.  Qu'ils  soient  ou  non  de  bonne  foi,  en  dehors  des  origines 
qu'ils  avouent  et  de  celles  qu'ils  n'avouent  pas,  de  combien  d'autres  non 
moins  illustres,  tout  comme  un  chacun  du  reste,  ne  seraient-ils  pas  en  droit 
de  se  targuer,  s'ils  les  connaissaient?  Le  calcul  ne  démontre-t-il  pas  qu'en 
France,  à  raison  de  trois  générations  par  siècle,  tous  nous  avons  dans 
les  veines  le  sang  de  vingt  millions  de  contemporains  de  l'an  mil;  à  qui 
donc  à  ce  compte  peut-on  dénier  d'avoir  au  moins  un  prince  dans  ses 


NOTES.        LIV.  I,  CH.  XLVI.         VOF..  I,  PAG.  31 1.  F. 405 

alliances,  tout  on  laissant  de  côté  les  liens  de  parenté  que  nous  pouvons 
revendiquer  du  fait  d'Adam  et  Eve,  nos  ancêtres  communs? 
514, 

4,  Face.  —  Voir  pour  la  signification  de  ce  langage  héraldique  la  notice  sur 
les  illustrations.  —  Montaigne  était  fort  épris  de  ses  armoiries;  il  les  laissa, 
ainsi  qu'il  le  relate  dans  le  Journal  de  ses  voyages,  à  Plombières,  Augsbourg 
et  dans  plusieurs  autres  villes;  à  Pise,  il  les  fit  «  blasonner  et  dorer  avec 
de  belles  et  vives  couleurs  »,  les  encadra  et  les  cloua  au  mur  de  sa  cham- 
bre «  sous  la  condition  qu'elles  y  resteraient;  son  hôte  le  lui  promit  »  et 
en  fit  serment  ».  A  sa  mort,  n'ayant  point  d'héritier  mâle,  il  les  légua  à 
Charron,  devenu  son  ami. 

"23,  Procez.  —  Allusion  au  Jugement  des  voyelles  de  Lucien,  où  la  consonne 
grecque  2  (sigma)  porte  plainte,  devant  les  sept  voyelles,  contre  T  (tau), 
autre  consonne,  pour  vol  et  violence,  cette  dernière  la  dépouillant  de 
nombre  de  mots  dans  lesquels  T  s'est  introduite,  alors  qu'ils  se  pronon- 
cent comme  ^i  c'était  elle,  ï,  qui  entrait  dans  leur  composition,  ce  qui  se 
retrouve,  du  reste,  dans  notre  langue  où,  fréquemment,  t  se  prononce 
comme  c,  s  ou  z,  ce  qui  est  même  une  des  modifications  que  poursuivent 
ceux  qui,  de  nos  jours,  préconisent  la  réforme  de  l'orthographe. 

'26,  Bon.  —  C.-à-d.  ceci  est  important. 

2S,  Connestable.  —  Ce  nom  que  nous  écrivons  Gucsclin,  se  trouve  écrit  dans 
les  actes  publics  de  l'époque  :  Glecquin.  Gléaquin,  Glayaquin,  Glesquin, 
Gleyquin,  Claikin,  etc..  Mighei.et.  —  En  dehors  des  formes  que  signale 
Montaigne,  Ménage  en  a  relevé  nombre  d'autres  :  Guéclin,  Gayaquin,  Gues- 
quinius,  Guesclinius,  Guesquinas,  etc..  —  Dans  ses  Mémoires,  III,  70,  Frois- 
SART  rapporte,  sur  l'origine  de  Duguesclin  et  de  son  nom,  qu'un  chevalier 
breton  lui  conta  qu'au  temps  où  Charlemagne  combattait  en  Espagne  les 
rois  maures  qui  en  étaient  les  maîtres,  l'un  de  ces  rois,  du  nom  d'Aquin, 
passa  par  mer  en  Bretagne,  débarqua  à  Vannes,  conquit  le  pays  et,  pour 
afi'ermir  sa  conquête  et  au  besoin  assurer  sa  retraite,  construisit  non  loin 
de  là,  sur  le  bord  de  la  mer,  une  tour  «  moult  belle  »,  qu'on  appela  le  Glay. 
Charlemagne,  de  retour  de  son  expédition,  se  porta  contre  Aquin  qui, 
vaincu,  s'enfuit  en  si  grande  liàtc,  qu'en  se  rembarquant,  il  oublia  un  de 
ses  enfants  qui  dormait  dans  la  tour.  L'enfant  fut  porté  à  Charlemagne 
qui  le  fit  baptiser;  Roland  et  Olivier  furent  ses  parrains;  et,  en  souvenir 
de  ces  diverses  circonstances,  il  reçut  le  nom  d'Olivier  du  Glay-Aquin  et 
de  lui  serait  issu  Bertrand  du  Guesclin.  V.  N.  I,  32  :  Auvergne. 

30,  D'Alsinois.  —  François  I""^  avait  fait  à  son  sujet  cet  assez  mauvais  jeu 
de  mots  :  <■  Pauvre  comte  qui  ne  possède  que  six  noix.  » 

31,  Escrits.  —  Le  surnom  de  Lenis  (doux)  que  Suéto.ve,  Olhon,  10,  semble 
donner  à  son  père,  paraît  résulter  d'une  erreur  de  la  part  de  ceux  qui  ont 
lu  de  la  sorte.  Le  manuscrit  où  cela  se  lit,  est  avarié  en  cet  endroit  et 
certains  estiment  que  ce  qui  s'y  lit  n'est  que  la  fin  du  mot  Paulinus,  dont 
la  première  syllabe  a  disparu;  de  fait  un  Suétone  Paulinus,  personnage 
cité  par  d'autres  écrivains,  se  trouve  dans  les  conditions  à  être  le  père  de 
l'auteur  des  Douze  Césars.  —  Quant  au  surnom  de  Tranquillus,  c'était 
bien  effectivement  celui  de  Suétone;  Pline  le  Jeune,  dans  ses  lettres,  sui- 
vant l'usage  des  Romains,  le  désigne  souvent  par  ce  seul  surnom. 

516, 

16,  Laconum.  —  Ce  vers,  traduit  du  grec  par  Cicéron,  est  le  premier  de  quatre 

vers  élégiaques  qui  furent  gravés  au  bas  de  la  statue  d'Épaminondas.  V. 

N.  III,  18  :  Epaminondas. 
19,  Queat.  —  Fragment,  également  rapporté  par  Cicérox,  de  l'épitaphe  que 

fit  Ennius  pour  le  grand  Scipion,  le  premier,  l'Africain,  dont  il  était  le 

familier. 


F. 406  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

CHAPITRE  XLVII. 

518, 

3,  Parler.  —  C.-à-d.  on  a  toute  liberté  de  parler,  ou,  on  peut  parler  à  son 
aise. 
9,  Sainct  Quentin.  —  En  1577;  bataille  livrée  par  le  connétable  de  Mont- 
morency aux  Espagnols  assiégeant  Saint-Quentin.  Le  connétable  y  fut  liattu 
et  fait  prisonnier  avec  une  foule  de  seigneurs,  toute  son  artillerie  et  4.000 
hommes;  pareil  nombre  demeura,  en  outre,  sur  le  champ  de  bataille.  Le  duc 
de  Savoie,  qui  commandait  l'armée  ennemie,  voulait  marcher  sur  Paris. 
Philippe  11  s'y  opposa  et  fit  continuer  le  siège.  La  ville,  défendue  par  l'a- 
miral de  Coligny  avec  fort  peu  de  moyens,  fit  une  défense  admirable  et 
fut  prise  d'assaut  après  dix-sept  jours  d'attaque,  alors  que  son  enceinte 
était  percée  de  onze  brèches.  En  retenant  aussi  longtemps  l'adversaire,  elle 
sauva  le  royaume  en  permettant  de  reconstituer  la  résistance. 

2'1,  Guerre.  —  C'est  cette  même  idée  qui  faisait  dire  à  quelqu'un  qu' «  un 
général  qui  remporte  des  victoires  dont  tout  le  fruit  est  pour  ceux  qui 
vendent  des  crêpes  et  du  drap  noir,  n'a  pas  grand  mérite  et  ne  rend  pas 
grand  service  ». 

27,  Vaincre.  —  Pi.utarque,  César,  11.  —  En  48.  César  et  Pompée  s'y  ti-ou- 
vaient  en  présence,  mais  dans  des  conditions  bien  difi'érentes  :  Pompée, 
avec  toute  son  armée  et  dans  la  plus  complète  abondance,  |)arce  qu'il  était 
maître  de  la  mer;  César,  avec  peu  de  monde  et  en  proie  à  la  disette, 
parce  que,  pour  atteindre  son  adversaire  et  le  fixer,  il  avait  fait  diligence, 
devançant  le  gros  de  ses  troupes  demeuré  à  Brindisi,  de  l'autre  côté  de 
l'Adriatique,  prêt  à  s'embarquer  pour  le  joindre,  mais  attardé  par  le  mau- 
vais temps  et  le  manque  de  bateaux. 

db,  Sociale.  —  Cette  guerre  (91  à  87)  eut  lieu  entre  Rome  et  ses  alliés  d'I- 
talie, et  en  particulier  les  Marses,  qui  revendiquaient  le  bénéfice  de  leur 
alliance  et  entre  autres  le  droit  de  cité  qu'ils  obtinrent.  Tout  en  les  com- 
battant. Marins  était  avec  eux  de  cœur  et  les  épargnait  dans  la  mesure  du 
possible  pour  se  les  concilier,  car  déjà  sa  rivalité  avec  Sylla  avait  com- 
mencé. 
520, 

5,  Mort.  —  En  1512.  Bataille  gagnée  sur  les  Espagnols  et  les  troupes  du 
Pape,  par  les  Français  commandés  par  Gaston  de  Foix  qui  y  périt  en  di- 
rigeant une  charge  contre  l'infanterie  espagnole  qui  se  retirait  en  bon 
ordre;  elle  fut  une  des  plus  sanglantes  de  cette  époque  en  Italie.  Outre 
leur  général,  les  vainqueurs  y  perdirent  6.000  hommes;. les  vaincus  12.000, 
leur  artillerie  et  leurs  bagages.  Ses  résultats  furent  nuls  en  raison  de  la 
désorganisation  qui  régnait  dans  notre  armée,  en  proie,  faute  de  solde,  à 
l'indiscipline  et  à  la  désertion. 

7,  SerizoUes.  —  En  1544.  Cette  bataille  gagnée  avec  des  forces  inférieures 
par  les  Français,  commandés  par  le  duc  d'Enghien  sur  les  Impériaux  sous 
les  ordres  du  marquis  du  Quast,  qui  y  perdirent  12.000  hommes,  leurs  ca- 
nons et  leurs  bagages,  n'aboutit  qu'à  une  trêve  de  trois  mois,  l'invasion 
de  nos  frontières  de  Champagne  et  de  Picardie  ayant  obligé  au  pi-élèvo- 
ment  d'un  fort  contingent  sur  notr^  armée  de  Piémont. 

10,  Necessitatis.  —  C'est  ce  que  Montaigne  vient  de  dire  en  français. 

17,  Malheur.  —  L'an  419;  Agis  1"  était  roi  de  Lacédémone  etPharax,  un  des 
membres  du  conseil  de  Sparte,  l'assistait  plutôt  pour  lui  dicter  sa  conduite 
dans  les  cas  graves  que  pour  émettre  de  simples  avis.  Diodoke  de  Sicile, 
XllI,  25. 

20,  Mourut.  —  En  528.  Lancé  à  la  poursuite  de  son  adversaire  en  fuite,  Clo- 
domir  ne  s'aperçut  pas  qu'il  était  bien  en  avant  des  siQns,  et,  entendant 
à  quelque  distance  retentir  son  cri  de  guerre,  il  y  alla;  c'était  un  piège,  il 
tomba  au  milieu  d'ennemis  qui  le  massacrèrent  sur  place. 

24,  Cœsar.  —  Suétone,  César,  67. 


iNOTES.        LIV.  I,  CH.  XLVII.        VOL.  I,  PAG.  520.  F.40'7 

27,  Xenophon.  —  Cyropédie,  IV,  4. 

29,  Chères.  —  Justin  dit  des  Scythes  qu'ils  ne  faisaient  ugage  de  l'or  et  do 
l'argent  que  pour  en  ornementer  leurs  armes.  —  Cet  usage  des  Asiatiques,, 
notamment  des  Perses,  de  se  faire  ainsi  accompagner  de  leurs  familles  et 
do  leurs  serviteurs  à  la  guerre,  grossissait  considérablement  leurs  ar- 
mées, où  le  nombre  des  non  combattants  excédait  souvent  de  beaucoup  ce- 
lui des  combattants,  ainsi  que  ce  fut  également  le  cas  lors  des  invasions 
des  Barbares  dans  les  derniers  siècles  de  l'Empire  romain.  Cela  ralentissait 
leur  marche,  compliquait  leur  ravitaillement,  mais  n'influait  guère  sur  le 
gain  ou  la  perte  d(^  la  bataille,  parce  qu'on  combattait  toujours  de  front, 
sans  jamais  manœuvrer;  aujourd'hui  la  chose  serait  impossible.  Par  contre 
toute  défaite  sérieuse  se  transformait  alors  en  un  véritable  désastre,  ainsi 
qu'il  arriverait  immanquablement  aussi  en  ces  temps-ci,  à  qui  se  ferait 
suivre  de  pareils  impedimenta. 

34,  Samnites.  —  De  343  à  290.  Ces  peuples  ne  se  faisaient  cependant  pas 
remarquer  par  leur  luxe  et  l'affirmation  de  Montaigne  à  leur  sujet  est  ha- 
sardée; ils  étaient  surtout  adonnés  à  la  vie  pastorale  et  à  la  guerre;  comme 
caractéristique,  les  filles  les  plus  belles,  les  plus  vertueuses  et  les  plus  riches 
étaient  chez  eux  le  prix  de  services  rendus  à  la  patrie. 

35,  Antiochus.  —  Aulu-Geixe,  V,  5.  Après  avoir  repris  aux  Égyptiens  des 
provinces  perdues  par  ses  prédécesseurs  et  conquis  l'Asie  Mineure,  Antio- 
chus le  Grand,  roi  de  Syrie,  était  passé  en  Grèce,  quand  les  Romains,  qu'il 
avait  indisposés  en  donnant  asile  à  Annibal,  appelés  par  les  vaincus  à  leur 
secours,  le  battirent  auxThermophyles(191)  ot,  l'année  suivante,  à  Magné- 
sie (Asie  Mineure). 

522, 

3,  Battaille.  —  Plutarque,  Apophth.  des  Lacédémoniens. 
10,  Vitellius.  —  Plutarque,  Ollion,  3.  Ou  plutôt  à  ses  lieutenants  Cecina  et 
Valons  qui  commandaient  en  son  absence  et  gagnèrent  pour  lui  la  bataille 
de  Bébriac  (69),  que  les  troupes  de  son  adversaire  s'étaient  difficilement 
décidées  à  accepter  et  après  laquelle  Othon  se  donna  la  mort.  C'est  en  vi- 
sitant ce  champ  de  bataille,  quelques  jours  après  le  combat,  qu'il  prononça 
ces  horribles  paroles  :  «  Le  corps  d'un  ennemi  mort  sent  toujours  bon.  » 
26,  Meslée.  —  Cette  question  qui  pouvait  avoir  sa  raison  d'être  jadis,  alors 
que  le  corps  à  corps  était  à  peu  près  l'unique  mode  de  combat,  ne  se  pose 
plus  aujourd'hui  où  l'action  se  livre  la  plupart  du  temps  à  des  distances 
telles  que  l'on  se  distingue  à  peine,  si  bien  que  parfois  amis  et  ennemis 
se  prennent  les  uns  pour  les  autres,  agissent  en  conséquence  et  n'arrivent  à 
se  reconnaître  que  lorsque  le  mal  est  fait. 

524, 

I,  lournée.  —  Plutarque,  Pyrrhus,  8;  le  texte  grec  porte  Mégaclès.  —  En 
278,  à  la  bataille  d'Asculum.  Ayant  observé  qu'il  était  l'objet  d'attaques 
poi'sonnelles  de  l'ennemi,  Pyrrhus  avait  donné  son  manteau  et  ses  armes  à 
Mégaclos,  un  de  ses  amis,  dont  lui-même  avait  pris  .l'armure.  Ces  attaques 
se  poursuivant,  Mégaclès,  qu'on  prenait  pour  le  roi,  finit  par  succombei-,  ot 
la  nouvelle  de  la  mort  du  roi  se  répandant,  faillit  compromettre  le  succès 
de  la  journée  :  l'ardeur  des  Romains  s'en  accrut,  tandis  que  les  siens  s'en 
trouvaient  découragés,  ce  qui  amena  Pyrrhus  à  se  multiplier  en  combat- 
tant à  découvert  pour  que  chacun  fût  à  même  de  constater  qu'il  existait 
encore.  V.  I,  494  et  N.  Italie. 

3,  Particulière.  —  Nelson,  au  combat  de  Trafalgar  (1805),  paré  de  toutes 
ses  décorations,  était  facilement  reconnaissable.  —  Henri  IV  se  distinguait 
également  bien  au  milieu  des  siens  :  «  Si  vous  perdez  vos  enseignes,  cor- 
nettes ou  guidons,  ralliez-vous  à  mon  panache  blanc,  leur  disait-il,  à  la 
bataille  d'Ivry  (1.590);  vous  le  trouverez  toujours  au  chemin  de  l'honneur  et 
de  la  victoire.  » 

4,  Gilippus.  —  DioooRE  de  Sicu.e,  Xlll,  33.  —  Ce  qualificatif  de  grand  attri- 
bué à  Gylippe  ne  s'explique  guère,  à  moins  que  ce  ne  soit  par  ironie.  A  la 


F. 408  ESSAIS  DE  MO^NTAIGNE. 

vérité,  il  battit  les  Athéniens  à  Syracuse,  mais  condamné  à  mort  pour  s'être 
approprié  une  partie  des  contributions  de  guci're  qu'il  devait  transporter 
à  Sparte,  il  fut  contraint  de  s'expatrier  pour  échapper  au  supplice.  Son 
père,  Cléarque,  s'était  trouvé  dans  le  même  cas.  En  dehors  de  cela,  dit  Plu- 
tarque,  tenus  tous  deux  pour  d'excellents  hommes  (V«  siècle). 
5,  Pbarsale.  —  Plutarque,  Pompée,  19.  —  L'an  48.  César  y  remporta  sur 
Pompée  une  victoire  décisive  qui  fut  bientôt  suivie  du  meurtre  de  ce  der- 
nier en  Egypte,  où  il  allait  chercher  asile.  —  César,  De  Bello  civ.,  III,  17, 
blâme  aussi  Pompée  de  la  faute  qui  lui  est  reprochée  ici. 

21,  Haleine.  —  A  l'époque  actuelle  où  l'armement  est  tout  autre  et  où,  au 
combat,  on  manœuvre  beaucoup  plus  que  par  le  passé,  l'offensive  surex- 
cite le  soldat,  accroît  son  moral,  lui  masque  ses  pertes,  est  dans  le  cas  de 
surprendre  l'ennemi,  de  faire  que  ses  réserves  immobilisées  ou  retardées 
n'arrivent  pas  à  temps,  l'empêchent  de  modifier,  comme  il  conviendrait, 
son  ordre  de  bataille.  —  La  défensive-offensive  qui  consiste  à  laisser  venir 
l'adversaire  se  briser  contre  une  position  favorable,  dont  les  avantages  na- 
turels ont  pu  encore  être  accrus  par  les  travaux  qu'on  a  pu  exécuter,  puis 
à  prendre  à  son  tour  l'offensive  contre  lui,  quand  il  est  épuisé,  est  théori- 
quement ce  qu'il  y  aurait  de  mieux,  si,  à  la  guerre,  on  était  maître  des 
événements.  Mais  l'attaque  se  produit  si  souvent  dans  une  direction  autre 
que  celle  où  on  l'attend,  l'offensive  est  si  difficile  à  reprendre  au  moment 
précis  où  il  faudrait  qu'elle  se  produise,  que  ce  procédé  est  inférieur  à  l'of- 
fensive pure  et  simple.  —  Quant  à  la  défensive  de  parti  pris,  sans  la  ferme 
résolution  de  passer  à  l'offensive  en  cours  d'action,  elle  a  grande  chance 
d'insuccès,  et,  dans  les  cas  les  plus  favorables,  ne  mène  à  rien. 

Bien  des  facteurs,  du  reste,  entrent  en  ligne  de  compte  pour  décider  de 
l'attitude  à  prendre,  alors  même  qu'elle  n'est  pas  imposée,  entre  autres  par 
les  effectifs  dont  on  dispose,  l'état  moral  des  troupes,  les  conditions  de 
réapprovisionnement;  d'une  façon  générale,  le  mauvais  temps  favorise  la 
défensive  et  est  préjudiciable  à  l'offensive  :  un  terrain  facile  et  découvert 
également,  c'est  l'inverse  si  le  terrain  est  coupé  et  couvert,  sous  réserve 
cependant  qu'il  ne  soit  pas  tellement  difficile  qu'on  ne  puisse  s'y  mouvoir 
et  que  la  défense  n'ait  eu  le  temps  d'atténuer  les  inconvénients  qu'il  pré- 
sente pour  elle,  par  des  travaux  appropriés. 

Enfin,  il  esta  observer  qu'aujourd'hui,  avec  la  puissance  et  la  vitesse  du 
feu  de  l'infanterie,  il  est  presque  impossible  de  donner,  en  ayant  chance 
de  succès,  l'assaut  à  une  ligne  ennemie  qui  déjà  n'a  pas  été  notablement 
désorganisée  par  celui  auquel  elle-même  a  été  en  but,  pendant  un  temps 
plus  ou  moins  long,  en  vue  de  la  préparation  de  l'attaque. 

25,  Perses.  —  A  la  bataille  de  Cunaxa  (401),  entre  Artaxerxès  II  dit  Memnon, 
roi  des  Perses,  et  Cyrus  le  Jeune,  son  frère,  qui  voulait  le  détrôner  et  qui  y 
périt,  tué  de  sa  propre  main,  tandis  que  les  Grecs,  qu'il  avait  pour  auxi- 
liaires, remportaient  pour  lui  la  victoire,  que  sa  mort  rendit  stérile,  les 
obligeant,  pour  rentrer,  dans  leur  pays,  à  cette  retraite  célèbre  connue  sous 
le  nom  de  retraite  des  Dix  mille.  V.  N.  I,  396  :  Pais. 

31,  Trait.  —  Xénophon,  Anabase,  I,  8. 

33,  Sus.  —  Plutarque,  Préceptes  du  mariage,  34.  —  Ce  principe  est  encore 
vrai,  mais  son  application  délicate  ;  et   seul  peut  espérer  réussir  qui  sait 
apprécier  sainement  le  pour  et  le  contre  au  moment  même  de  l'exécution. 
526, 

1,  D'eslire.  —  C.-à-d.  dans  le  cas  de  choisir. 

2,  Terres.  —  C'est  à  ce  dernier  parti  qu'il  s'arrêta.  Charles-Quint  revenait 
d'Afrique,  et  François  I"  avait  profité  de  son  éloignement  pour  renouveler 
ses  tentatives  sur  le  Milanais.  L'empereur  entra  en  Provence  avec  50.000  h. 
Le  connétable  de  Montmorency,  chargé  de  lui  résister,  fit  le  vide  autour  de 
lui,  détruisant  tout  dans  le  pays,  attaquant  ses  convois,  si  bien  que  l'armée 
impériale,  en  proie  à  la  famine,  dut  lever  le  siège  de  Marseille  et  repasser 
la  frontière;  son  état  d'épuisement  fut  tel,  qu'ai'rivé  à  Nice,  Charles-Quint 
conclut  une  trêve  de  dix  ans,  qui,  de  fait,  n'en  dura  que  six  (1536). 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  XLVII.         VOL.  1,  PAG.  526.  F.409 

6,  Gast.  —  Desgast,  comme  portent  les  éditions  antérieures  à  1588. 

7,  Faisant.  —  L'habitant  du  pays,  la  population. 

23,  Est-ce.  —  Quoi  qu'il  en  soit,  toujours  est-il  que  le  roi  se  décida  à  rappe- 
ler. —  Tout  ce  qui  suit  est  tiré  'presque  mot  pour  mot  d'un  discours  que 
François  1"  tint  en  conseil  et  qui  est  rapporté  par  du  Bellay,  VI. 
26,  Planté.  —  Abondance,  du  latin  plenitas,  d'où  viennent  plein,  plénitude. 
528, 

1,  Party.  —  Attendre  l'ennemi  chez  soi,  peut  être  avantageux  quand  le 
territoire  qu'on  cède  ainsi  est  pauvre  et  vaste,  que  l'ennemi  ne  pourra  }' 
trouver  facilement  à  vivre,  que  ses  lignes  de  communication  s'allongeront 
outre  mesure,  comme  en  Russie  en  1812,  ou  encore  que,  de  peu  de  ressources, 
la  population  y  est  par  surcroît  fanatisée  comme  en  Espagne  en  1808;  dans 
le  cascontraii'e  c'est  presque  toujours  une  faute.  En  1536,  la  Provence  était 
peu  riche,  et  en  outre  elle  ne  mène  à  rien  ;  de  plus,  à  cette  époque  toutes 
ses  villes  étaient  fortifiées  et  en  état  de  résister  aux  moyens  d'attaque  d'a- 
lors. —  Mais  on  n'est  pas  toujours  libre  d'agir  comme  on  le  voudrait. 
Aujourd'hui,  il  faut  s'attendre  plus  que  jamais  à  voir  les  hostilités  éclater 
sans  déclaration  de  guerre  préalable,  comme  ont  eu  lieu  en  février  1904  les 
attaques  simultanées  des  Japonais  contre  Port-Arthur  et  Tchemulpo;  et, 
étant  donné  la  rapidité  avec  laquelle  on  peut  entrer  en  opérations,  on  est 
exposé  d'un  moment  à  l'autre,  en  pleine  paix,  à  une  invasion  que  rien  ne 
faisait  prévoir  alors  que  déjà  elle  s'est  produite.  En  présence  de  l'intérêt 
qu'il  y  a  à  n'être  point  surpris  de  la  sorte,  à  rendre  impossible  toute  tenta- 
tive de  cette  nature  qui  trouble  la  mobilisation,  stérilise  une  partie  de  vos 
ressources  en  hommes  et  vous  enlève  toutes  autres  que  présente  le  terri- 
toire envahi,  causant  en  outre  un  effet  moral  désastreux  dans  le  pays  tout 
entier;  quand  on  a  une  frontière,  comme  notre  frontière  de  l'Est,  ainsi  me- 
nacée de  l'irruption  soudaine  de  111.000  honîmes,  10.000  sabres,  888  pièces 
d'artillerie  dont  plus  de  150  de  grosse  artillerie  (obusiers  de  150  et  mortiers 
de  210)  capables  d'avoir  raison  de  nos  forts  les  plus  solidement  construits, 
à  laquelle  nous  ne  pouvons  opposer  que  52.000  hommes,  8.(X)0  sabres  et 
388  pièces  d'artillerie  de  petit  calibre  (165  bataillons,  72  escadrons,  148  bat- 
teries à  effectifs  renforcés  contre  104  bataillons,  68  escadrons,  89  batteries 
à  effectifs  réduits),  au  total  moitié  moins;  que  de  plus  la  forme  de  notre 
gouvernement  ne  nous  permet  pas  de  la  prévenir  et  qu'elle  ferait  tomber, 
sans  coup  férir,  dès  la  première  heure  entre  les  mains  de  l'adversaire  une 
ville  aussi  considérable  que  Nancy  et  un  territoire  aussi  populeux  et  riche 
que  ce  qui  nous  reste  de  la  Lorraine,  semblable  éventualité  est  à  prévoir  et 
le  devoir  est  de  parer  à  cette  situation,  en  augmentant  le  nombre  des  uni- 
tés de  combat  que  nous  avons  sur  cette  frontière,  en  portant  et  maintenant 
constamment  ces  unités  à  leurs  effectifs  de  guerre,  et  construisant  autour 
de  Nancy  quelques  ouvrages  non  pour  en  faire  une  place  forte,  mais  pour 
la  mettre,  vu  la  proximité  de  la  frontière,  à  l'abri  d'un  coup  de  main.  —  Pour 
Nancy,  c'est  uniquement  affaire  d'argent  ;  pour  le  relèvement  de  nos  forces, 
il  faudrait  supprimer  nombre  de  nos  garnisons  de  l'Ouest  et  du  Sud-Ouest 
et  réorganiser  en  partie  notre  état  militaire  en  réduisant  à  deux  dans  les 
régiments  d'infanterie  des  corps  d'armée  de  l'intérieur  le  nombre  des  ba- 
taillons, en  substituant  aux  brigades  de  cavalerie  de  corps  de  simples  ré- 
giments, réduisant  d'un  groupe  les  régiments  d'artillerie  de  corps,  et,  avec 
les  économies  en  hommes,  chevaux,  bataillons,  escadrons  et  batteries  ainsi 
réalisées,  renforcer  les  effectifs  des  troupes  de  l'Est  et  augmenter  le  nombre 
de  leurs  unités  de  combat.  Il  faut,  en  un  mot,  placer  à  demeure  sur  cette 
frontière  le  tiers,  la  moitié  si  le  tiers  ne  suffit  pas,  de  notre  armée  du  temps 
de  paix,  ne  laissant  à  l'intérieur  que  des  embryons  qui  ne  prendront  corps 
qu'à  la  mobilisation,  par  l'incorporation  des  réserves.  Le  fera-t-on?  Jamais, 
nous  sommes  trop  veules  pour  cela;  des  raisons  de  politique  intérieure 
interviendront  encore,  comme  toujours  :'on  fera  sonner  bien  haut  les  dé- 
penses résultant  de  la  construction  de  nouveaux  casernements;  les  engage- 
ments pris  vis-à-vis  des  localités  auxquelles  on  enlèverait  ou  dont  on  dimi- 


F.410  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

nuerait  los  garnisons;  on  redoutera  leur  mécontentement  et  les  consé- 
(|uences  que  cola  peut  avoir  pour  leurs  élus  du  moment.  Ce  sera  comme 
pour  les  sous-prefectures  :  tout  le  monde  est  d'accord  sur  l'inutilité  d'un 
aussi  grand  nombre,  mais  personne  ne  concède  que  la  sienne  soit  de  celles 
qui  sont  à  supprimer  et  toutes  demeurent. 

9,  Sien.  —  Pour  obliger  Annibal  à  évacuer  l'Italie  méridionale  qu'il  occu- 
pait depuis  quatorze  ans,-Scipion  l'Africain  passa  en  Afrique.  Carthage  me- 
nacée rappela  ses  troupes  d'Italie,  et  bientôt  après,  la  deuxième  guerre  pu- 
nique se  terminait  par  la  victoire  de  Zama  que  Scipion  remportait  .sur  An- 
nibal (202). 

11,  Contraire.  —  La  Sicile  était  peuplée  de  colonies  grecques.de  race  do- 
rienne  et  ionienne,  les  unes  clientes  de  Sparte,  les  autres  d'Athènes.  Pen- 
dant la  guerre  du  Péloponnèse,  les  premières  profitèrent  des  embarras  de 
celle-ci  pour  opprimer  les  secondes  ;  aussi  les  Athéniens,  qui  avaient  i'ar- 
rière-pensée  de  s'annexer  la  Sicile,  n'hésitèrent-ils  pas  à  intervenir  quand, 
en  421,  venant  de  signer  avec  Sparte  une  trêve  de  cinquante  ans,  ils  eu- 
rent leurs  coudées  franches;  mais  cela  ne  leqr  réussit  pas.  V.  N.  I,  524  : 
Gilippus;  N.  II,  424  :  Sicile. 

12.  Soy.  —  Agathocle,  assiégé  dans  Syracuse  par  les  Carthaginois,  équipa 
une  flotte,  en  déroba  la  sortie  à  ses  ennemis,  aborda  en  Afrique,  brûla  ses 
vaisseaux  pour  mettre  ses  soldats  dans  la  nécessité  de  vaincre,  et,  par  cette 
diversion,  obligea  Carthage  à  rappeler  ses  troupes  de  Sicile  (310).  —  Héra- 
clius,  empereur  d'Orient,  se  trouva  également  bien  de  quitter  Constanti- 
nople  menacé  par  les  Perses,  pour  aller  porter  la  guerre  chez  eux  (622). 

28,  Engage...  aussi.  — Var.  des  éd.  ant.  :  7i'est  pas  plus  incertaine  et  téméraire 
que. 

CHAPITRE  XLVIIl. 

530, 

4,  Romans.  —  C.-à-d.  les  auteurs  qui  écrivent  en  roman.  La  langue  romane 
a  pris  naissance  au  moyen  âge;  elle  était  alors  dénommée  «  le  nouveau  lan- 
gage »,  et  est,  à  proprement  parler,  l'origine  de  la  langue  française. 

5,  Equos.  —  Les  chars  romains  s'attelaient  généralement  à  trois  chevaux  de 
front  :  un  dans  les  brancards,  funalis  ou  d'attelage,  les  deux  autres  en  de- 
hors, à  droite  et  à  gauche;  ces  deux  derniers,  ou  l'un  d'eux  seulement, 
('taient  parfois  montés.  Montaigne  appelle  celui  de  droite  dextrarius;  ce 
mot  ne  se  trouve  que  chez  certains  auteurs  du  moyen  âge.  —  Les  desul- 
lorii  étaient  des  chevaux  de  selle  accouplés,  desquels' on  passait,  on  sau- 
tait, comme  l'indique  leur  nom,  de  l'un  sur  l'autre. 

9,  Gendarmes.  —  Le  gendarme  était  anciennement  l'homme  de  guerre,  à 
cheval,  armé  de  toutes  pièces  et  accompagné  de  ses  suivants;  ici  ce  mot 
désigne  les  cavaliers  numides. 

23,  Coustillier.  —  Valet  qui  portait  la  coustille  (sorte  d'épée  ou  de  long  poi- 
gnard) et  se  tenait  près  de  l'homme  d'armes. 

24,  Maistre.  —  Hérodote,  V.  —  La  manière  de  faire  du  cheval  d'Artibius 
était  connue,  et  l'écujer  d'Onésilus  l'avait  rassuré  en  lui  disant  qu'il  se 
chargeait  de  l'animal.  Le  fait  se  passait  en  493,  au  début  de  la  première 
guerre  médique;  Artibius  fut  tué,  mais  dans  ce  même  combat  périt  Onésilus. 

28,  Vray.  —  Ce  cheval  s'appelait  Savoye  ;  c'était,  dit  Philute  de  Comines,  le 
plus  beau  cheval  de  son  temps;  il  avait  29  ans;  un  poète  de  l'époque  lui  a 
consacré  des  vers.  A  cette  même  bataille  de  Fornoue  O'I^S),  le  ©ardinal 
archevêque  de  Lyon  demeura  constamment  près  du  roi,, à  cheval,  la  mitre 
eh  tête  et  la  croix  à  la  main. 

35,  Bons  hommes  de.  —  Var.  de  80  :  bien  à. 
532, 

2,  Carrière.  —  Faire  prendre  carrière  à  un  cheval,  c'était,  en  langage  des 
gens  de  cheval  du  temps,  le  faire  galoper  à  toute  vitesse.  —  Pi.ltauqif.. 
César,  5, 


NOTES.         LIV.  1,  CH.  XLVIII.         VOL.  I,  PAG.  o32.  F.4H 

7,  Toreau.  —  D'où  son  nom  «  Tète  de  taureau  ••.  Alexandre  était  de  pre- 
mière jeunesse  quand  ce  cheval  vint  en  sa  possession,  lui-même  le  dompta  et 
dressa;  l'animal  ne  se  laissait  monter  que  par  lui  et  à  plusieurs  reprises  il 
sauva  la  vie  à  son  maître  en  le  tirant  de  la  mêlée;  il  mourut  vers  17  ou 
18  ans,  de  fatigue  suivant  les  uns,  suivant  d'autres  de  blessures  reçues  à  la 
bataille  livi-ée  contre  Porus.  Alexandre  le  fit  enterrer  et  sur  l'emplacement 
éleva  une  ville  qu'il  appela  Bucéplialie.  Bucéphale  avait  été  acheté  treize 
talents  (65.000  fr.);  on  peut  rapprocher  ce  prix  de  ceux  payés  de  nos  jours 
pour  un  cheval  de  course,  Gladiateur,  et  un  taureau,  Duke  ofConnaugt,  ven- 
dus aux  enchères  le  premier  200.000  fr.,  le  second  118. 125  fr.  Disons  encore 
qu'il  y  a  un  siècle  et  demi,  en  1764,  d'Eclipsé,  le  père  de  tous  les  chevaux 
pur  sang  anglais,  il  a  été  refusé  300.000. 

12,  Venus.  —  Scktone,  César,  61. 

15,  Platon.  —  Lois,  Vil. 

15,  Pline.  —  Liv.  XXVIII,  1. 

17,  Xenophon.  —  Cyropédie,  IV,  3. 

17,  Loy.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  de  Cyrus. 

18,  lustinus.  —  Liv.  XLl. 

29,  Combat.  —  Quand  le  sort  des  armes  était  douteux,  dit  Suétone,  Césdr, 
60,  il  renvo3'ait  tous  les  chevaux,  à  commencer  par  le  sien,  afin  d'imposer 
à  ses  soldats  l'obligation  de  vaincre,  en  leur  ôtant  les  moyens  de  fuir.  — 
Dans  les  temps  modernes,  les  régiments  de  dragons  ont  été  créés  dans  ce 
double  but  de  pouvoir  combattre  soit  à  cheval,  soit  à  pied;  actuellement, 
toute  la  cavalerie  (les  cuirassiers  exceptés,  fiui  n'ont  d'autre  raison  d'être 
que  la  gloriole  des  potentats  du  jour  de  les  voir  leur  servir  d'escorte)  est 
dressée  en  vue  de  semblable  utilité. 

29,  Tite-Liue.  -  Liv.  IX,  22. 

33,  Grand  Seigneur.  —  Appellation  sous  laquelle  on  désignait  le  sultan  de 
Constantinople. 
534, 

1,  Anglois.  —  La  guerre  de  Cent  Ans,  commencée  en  1337  sous  Philippe  VI 
de  Valois,  à  l'occasion  de  la  protection  accordée  par  Edouard  111,  roi  d'An- 
gleterre, à  Robert,  comte  d'Artois,  condamné  par  les  Pairs  de  France  à  la 
perte  de  son  comté,  entremêlée  de  trêves,  et  terminée  après  de  nombreux 
combats  et  fortunes  diverses  par  l'expulsion  hors  de  France,  en  1453,  des 
Anglais  qui,  au  début,  y  possédaient  de  nombreux  fiefs,  l'Anjou,  la 
Guyenne,  etc.,  représentant  à  un  moment  beaucoup  plus  que  ce  qui  de- 
meurait à  la  France  elle-même. 

1,  Assignées.  —  Ayant  lieu  pour  ainsi  dire  de  commun  accord,  d'où  le 
nom  de  batailles  rangées  où  chacun  des  adversaires  avait  pris  ses  disposi- 
tions essentielles  de  combat  avant  le  commencement  de  l'action;  la  guerre 
de  Cent  Ans  en  fournit  de  nombreux  exemples  cités  par  Froissart.  Ce  qui 
jadis  était  presque  de  règle,  est  devenu  aujourd'hui  l'exception;  on  cher- 
che surtout  maintenant  à  surprendre  l'ennemi,  et  la  victoire  s'obtient  plus 
par  les  mouvements  subséquents  opérés  une  fois  l'action  engagée,  que  par 
suite  des  dispositions  préliminaires  conduites  fréquemment  davantage  en 
vue  de  tirer  profit  de  la  victoire  que  de  la  remporter. 
5,  Xenophon.  —  Cyropédie,  IV,  3.  —  Chrysanthe,  seigneur  perse,  fut,  auprès 
de  Cyrus,  le  promoteur  de  l'usage  qui  s'étabht  chez  ce  peuple,  de  ne  se  dé- 
placer qu'à  cheval,  au  point  de  trouver  déshonorant  d'aller  à  pied,  sauf  le 
cas  de  force  majeure. 

19,  Respondre.  —  C-à-d.  les  armes  les  plus  courtes  sont  les  meilleures,  ce 
que  corroborait  cet  adage  du  temps:  «  A  vaillant  homme,  courte  épée.  » 
Cette  assertion  n'est  vraie  que  pour  le  combat  corps  à  corps;  exacte  pour 
les  guerres  anciennes,  elle  ne  l'est  plus  pour  les  guerres  actuelles,  où  cette 
sorte  de  combat  se  fait  de  plus  en  plus  rare. 

22,  Rouët.  —  L'un  des  moyens  employés  à  cClte  époque  pour  rinflammation  de 
la  poudi'o  dans  les  armes  à  feu  portatives,  consistait  en  un  silex  (pierre  à  fusil), 
dont  on  liiait  des  étincelles  par  l'action  d'une  roue  en  acier,  dite  rouet, 


F.412  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

29,  Nostres.  —  L'auteur  avait  vraisemblablement  l'intention  de  traiter  ulté- 
rieurement en  détail  cette  question  des  armes;  il  ne  l'a  pas  fait  et  s'est 
borné  à  cette  addition  insérée  dans  l'édition  de  1595  qu'on  trouve  quelques 
lignes  plus  bas,  commençant  à  ces  mots  :  «  Celle  de  quoy  les  Italiens  -  pour 
se  terminer  à  ceux-ci  :  «  representoient  de  bien  près  nos  inuentions  ». 

32,  L'vsage.  —  On  ne  prévoyait  pas  à  ce  moment  à  quel  degré  de  puissance 
et  de  rapidité  de  tir  en  arriveraient  canons  et  fusils;  nul  doute  qu'aujour- 
d'hui Montaigne  ne  penserait  pas  ce  qu'il  dit  de  leurs  effets  et  de  leur 
abandon.  * 

32,  Italiens.  —  Les  Italiens  des  temps  anciens,  avant  même  la  fondation  de 
Rome,  ainsi  qu'il  ressort  de  la  citation  de  Virgile,  qui  se  rapporte  à  des 
'    événements  antérieurs  à  cette  fondation  et  fait  expressément  mention  de 
cet  engin  de  guerre. 

34,  laueline.  —  Sorte  de  trait  pouvant  être  lancé  à  la  main,  qui  se  distin- 
guait du  javelot  par  une  plus  grande  longueur  de  hampe  ou  hante,  comme 
on  disait  et  écrivait  alors. 
536, 

14,  Destinassent.  —  Cette  adresse  évoque  le  souvenir  d'Aster,  habile  archer 
qui,  au  siège  de  Méthone  (Alacédoine),  creva  l'œil  droit  de  Philippe  de  Ma- 
cédoine avec  une  flèche  sur  laquelle  était  écrit,  dit-on  :  «  Aster,  à  l'œil 
droit  de  Philippe.  »  A  quoi  le  roi  répondit  en  en  faisant  lancer  dans  la 
place  une  autre  portant  :  «  Si  Philippe  prend  la  ville,  Aster  sera  pendu  »  ; 
ce  qui  eut  lieu  (353).  —  Ou  encore,  celle  de  Guillaume  Tell  abattant  d'une 
flèche  une  pomme  placée  sur  la  tête  de  son  fils  (1307),  fait  discuté  qui  se 
retrouve  également  dans  les  légendes  du  Danemark. 

17,  Asie.  —  Les  Galates,  mélange  de  Gaulois  et  de  Grecs  qui,  en  l'an  278, 
envahirent  l'Asie  et  s'établirent  dans  la  partie  N.  de  l'Asie  Mineure. 

24,  Retraitte.  —  Effectuée  après  la  bataille  de  Cunaxa.  V.N.  I,  396  :  Pais;  I, 
524  :  Perses. 

28,  Armé.  —  Xénophon,  Anabase,  V,  2. 

28,  Engeins.  —  Catapultes  qui  lançaient  des  pierres  énormes  et  des  pièces 
de  bois  dont  la  tète  était  armée  de  fer  et  dont  la  longueur  atteignait  jus- 
qu'à 15  pieds  (5  mètres).  Euen,  Var.  Hist.,  VI,  12,  en  attribue  l'invention  à 
Denys;  Diodore  de  Sicile,  XIV,  42,  se  borne  à  dire  qu'elle  fut  inventée  de 
son  temps  à  Syracuse;  Pline,  Vil,  56,  dit  que  ce  furent  les  Syro-Phéniciens 
qui  s'en  servirent  les  premiers. 

31,  Inuentions.  —  Au  temps  de  Montaigne,  les  armes  à  feu  commençaient  à 
faire  leur  apparition.  L'arquebuse  n'excédait  guère  en  portée  l'arbalète, 
une  centaine  de  mètres,  sa  justesse  était  moindre,  elle  lui  était  encore  plus 
inférieure  sous  le  rapport  de  la  rapidité  du  tir;  le  canon  avait  un  effet  no- 
tablement supérieur  aux  balistes  et  ses  boulets  de  pierre  portaient  à  plu- 
sieurs centaines  de  mètres,  un  kilomètre,  tandis  que  les  quartiers  de  roche 
que  lançaient  celles-ci  allaient  à  peine  à  cent  ou  cent  cinquante  mètres.  — 
Aujourd'hui  le  fusil,  sous  un  angle  de  32°,  porte  à  3.600'";  avec  la  hausse 
de  400"°,  il  atteint  de  0'"  à  400'"  tout  homme  debout  ou  à  genou  ;  l'écart  à 
cette  distance  n'est  que  de  0"',12  (à  800'",  de  0"',30);  sa  balle,  à  cette  même 
distance  de  400"',  pénètre  de  0'",60  dans  de  la  terre,  traverse  une  lam- 
bourde de  sapin  de  même  épaisseur  et  une  plaque  de  fer  de  0'",005;  la  vi- 
tesse du  tir  peut  atteindre  12  coups  pai"  minute...  Le  canon  de  campagne, 
du  calibre  de  0'",075,  a  sous  un  angle  de  17  une  portée  de  6  kilomètres; 
son  écart  à  2  k.  est  de  10"  ;  à  la  même  distance  son  obus  à  mitraille  tra- 
verse sans  se  rompre  un  mur  de  maçonnerie  de  0°',50  d'épaisseur;  indépen- 
damment de  ses  fragments  d'enveloppe,  il  projette  en  éclatant  180  balles  qui, 
à  200"'  du  point  d'éclatement,  sont  encore  meurtrières;  sa  vitesse  de  tir 
peut  atteindre  seize  coups  par  minute.  Les  pièces  de  la  marine,  pour  ne 
prendre  que  le  canon  de  0,305,  et  il  en  est  de  calibre  supérieur,  ont 
une  portée  qui  atteint  12  kilomètres;  le  Variai,  lors  de  la  guerre  russo- 
japonaise,  a  été  coulé  à  la  distance  de  6  kilomètres;  leurs  projectiles  per- 
cent des  cuirasses  d'acier  de  0'",28  d'épaisseur  et  ils  peuvent  tirer  jusqu'à 


NOTES.         LIV.   I,  CH.  XLVIII.         VOL.  I,  PAG.  536.  F.413 

trois  coups  en  cinq  minutes.  —  Quant  aux  effects  de  destruction  des  engins 
dont  usèrent  les  anciens,  si  ingénieusement  conçus  et  si  puissants  qu'ils 
aient  été,  peuvent-ils  être  comparés  pour  leure  effets  aux  énormes  projec- 
tiles incendiaires  de  nos  jours,  qui,  chargés  de  cent  à  cent  cinquante  kilos 
de  mélinite  (la  mélinite  est  six  à  huit  fois  plus  brisante  que  la  poudre),  qui 
écrasent  les  voûtes  de  maçonnerie  de  plusieurs  mètres  d'épaisseur  lés  plus 
solidement  construites,  formant  en  éclatant  des  entonnoirs  qui  ont  jusqu'à 
cinq  ou  six  mètres  de  profondeur  et  dix  ou  douze  de  diamètre;  ou  à  ces 
torpilles  dont  une  seule  suffit  pour  anéantir  en  quelques  minutes  ces  colosses 
que  sont  les  cuirassés  d'escadre  dont  quelques-uns  jaugent  jusqu'à  18.000 
tonneaux,  portent  un  millier  d'hommes  et  coûtent  trente  millions  et  au  delà  ! 

32,  Sur  sa  mule.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  à  chenal. 

33,  Paris.  —  El  ailleurs,  aj.  les  éd.  ant. 
538, 

1,  Gascons.  —  Monstrelet,  I,  66;  il  y  joint  les  Lombards. 

4,  Mots.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  le  ne  sçay  quel  maniement  ce  pouuoit  eslre,  si 

ce  n'est  celuy  de  noz  passades  (les  carrousels  de  nos  jours). 
4,  Suéde.  —  César,  De  Bello  Gall.,  IV,  1.  —  Il  s'agit  des  Suèves,  peuple  de 

Germanie,  devenus  plus  tard  les  Souabcs.  Les  Bretoas,  dit  César  quelques 

lignes  plus  bas,  avaient  un  usage  semblable. 
11,  Autresfois.  — Dans  son  voyage  en  Italie,  en  1581,  à  Rome,  du  fait  d'un 

Italien  qui  avait  été  longtemps  esclave  en  Tt^rquie. 

19,  Alphonce.  —  Alphonse  XI,  roi  de  Léon  et  de  Castille. 

2"2,  D'argent.  —  Le  marc  de  Castille  était  de  230  gr.,  d'une  valeur  par  suite 
de  46  fr.  de  notre  monnaie,  abstraction  faite  de  la  plus-value  de  l'argent 
à  cette  époque. 

28,  Mules.  —  En  Judée,  au  temps  des  Hébreux,  l'àne  servait  de  monture 
aux  personnages  les  plus  considérés,  c'était  d'ailleurs  la  mieux  appropriée 
à  la  configuration  accidentée  du  pays;  c'est  sur  un  âne  que  Notre-Seigneur 
fit  à  Jérusalem  l'entrée  triomphale  que  l'Église  célèbre  le  dimanche  des 
Rameaux.  —  Par  contre,  dans  les  pays  musulmans  où  le  Juif  est  un  objet 
de  mépris,  monter  un  cheval  ou  un  mulet  lui  sont  interdits;  l'âne  est  la 
seule  monture  qui  lui  soit  tolérée.  Dans  ces  mêmes  pays,  il  n'y  a  pas  long- 
temps encore,  un  chrétien  ne  pouvait  davantage  aller  à  cheval. 

28,  Xenophon.  —  Cyropédie,  III.  3. 
540, 

2,  Metellus.  —  En  118.  «  Boire  leur  urine  et  celle  de  leurs  chevaux  ne  leur 
réussit  pas;  ils  excitaient  par  là  leur  soif  plus  qu'ils  ne  l'apaisaient,  et  cela 
leur  occasionna  des  souffrances  que  le  vainqueur  lui-même  ne  les  eût  pas 
contraints  à  endurer.  Valère  Maxime,  VII,  6. 

9,  Indes.  —  Les  Indes  occidentales;  nom  donné  à  l'Amérique  lors  de  sa  dé- 
couverte. 
13,  Viandes.  —  Vivres,  du  latin  vivandus,  qui  sert  à  vivre.  V.  N.  III,  550. 
10,  Deçà.  —  Los  Indes  orientales;  l'Hindoustan  actuel, 

20,  Seul.  —  Akriex,  Hist.  Ind.,  17. 

23,  Rutilianus.  —  Ou  plutôt  RuUianus,  Tite-Live/  VII,  30.  —  En  322,  Papi- 
rius  Cursor  étant  dictateur.  L'idée  première  d'enlever  leurs  brides  aux 
chevaux  vint  de  L.  Cominius,  tribun  militaire.  Ce  combat,  où  les  Romains 
eurent  l'avantage  et  où  périt,  dit-on,  20.000  ennemis,  fut  livré  par  Fabius, 
'  maître  de  la  cavalerie,  en  l'absence  et  contre  les  ordres  de  Papirius  Cursor 
qui,  à  l'exemple  de  Manlius,  voulut  punir  cette  désobéissance;  et,  malgré 
son  nom  et  sa  victoire,  Fabius  eût  payé  de  mort  ce  succès,  si  Rome,  toute 
entière,  ne  s'était  omploj'ée  à  fléchir  le  dictateur. 

34,  Transcurrerunt.  —  Tite-Live,  XL,  40.  —  L'an  180;  cette  mesure  pro- 
cura cette  fois  encore  le  résultat  attendu,  la  cavalerie  romaine  rompit  les 
Celtibériens  contre  lesquels  s'était  brisée  l'infanterie  et  fixa  la  victoire  en 
faveur  de  Rome.  —  A  Waterloo,  en  1815,  la  cavalerie  anglaise  chargeant 
la  nôtre  lors  de  notre  première  attaque  du  plateau  de  Mont  Saint-Jean, 
avait  aussi  enlevé,  dit-on,  les  gourmettes  à  ses  chevaux. 


F.414      .  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

542, 

1,  Délices.  — LcsTarlares  font,  avec  le  lait  de  jiniicnt  fermenté,  une  boisson 
enivrante  appelée  kiimisse,  qu'on  a  employée  parfois  en  Europe  comme 
médicament. 

:3,  Langue.  —  Cette  servitude,  qui  avait  commencé  vers  le  milieu  du 
\ur  siècle,  se  maintint  jusque  vers  la  fin  du  xv. 

7,  Vitale  —  Dans  la  campagne  de  Russie  de  1812,  on  a  vu  des  blessés  se 
réfugier  dans  l'intérieur  de  chevaux  morts. 

8,  Tamburlan.  —  En  1402,  à  la  bataille  d'Ancyre  (auj.  Angora),  en  Asie 
Mineure,  où  Bajazet,  sultan  de  Constantinople,  fut  battu  et  fait  prisonnier 
par  Tamerlan  I\Iogol  qui,  dit-on,  mais  le  fait  semble  controuvé.  l'enfei-ma 
dans  une  cage  de  fer  et  le  traîna  ainsi  à  la  suite  de  ses  hordes.  Dans  cette 
bataille,  qui  dura  trois  jours  et  deux  nuits,  un  million  d'hommes  se  com- 
battirent et  240.000  furent  mis  hoi"s  de  combat.  —  Bajazet  était  borgne; 
Tamerlan,  par  suite  de  blessures  reçues  à  la  main  et  au  pied,  était  manchot 
et  boiteux. 

8,  Belle  erre.  —En  grande  hâte;  on  retrouve  ce  mot  avec  ce  sens  dans  une 
ballade  de  La  Fontaine  : 
# 
«  Et  je  maintiens,  coranie  article  de  foi. 
Qu'en  débridant  matines  à  grand'erre. 
Les  Augustius  sont  serviteurs  du  roi.  » 

16,  Prodige.  —  Un  mauvais  présage  pour  lui.  Hérodote,  I,  78. 

18,  Oreille.  —  Montaigne  ne  parle  que  des  crins  et  de  la  queue;  contre  son 
habitude,  il  se  tient  sur  la  réserve;  pour  être  exact,  il  eiit  dû  ajouter:  et 
est  propre  à  la  reproduction. 

18,  Montre.  —  C.-à-d.  et  on  n'en  admet  pas  d'autres  dans  les  montres  ou 
revues. 

21,  Triomphe.  —  Plut  arque,  Nicins,  10.  V.  N.  I,  528  :  Contraire. 

24,  L'autre.  —  Quinte-Curce,  VII,  7.  , 

30.  Second.  —  Premier  écuyer  du  roi;  Montaigne,  lors  de  son  premier 
voyage  à  Paris,  vers  1555,  a  pu  le  voir,  dans  l'exercice  de  ses  fonctions, 
donnant  aux  fds  de  Henri  II  leur  leçon  d'équitation,  et  peut-être  est-ce  le 
souvenir  qu'il  en  a  conservéqui  lui  a  fait  écrire  au  ch.  Vil  du  liv.  III  (III, 
326)  :  «  Vn  chenal  qui  n'est  ny  flateur  ny  courtisan,  verse  le  fils  du  Roy  par 
terre,  comme  il  feroit  le  fils  d'vn  crocheteur.  » 

35,  Estrier.  —  Vers  1840,  en  Algérie,  le  commandant  de  Bonnemain,  alors 
sous-officier  de  spahis,  accomplit  un  tour  de  force  équestre  analogue,  mais 
plus  étonnant  encore.  Élevé  depuis  l'âge  de  onze  ans  parmi  les  indigènes, 
même  aux  yeux  des  Arabes,  c'était  un  cavalier  émérite.  Cheminant  un 
jour,  avec  une  troupe  nombreuse,  dans  la  plaine  des  Haractas,  un  lièvre 
fut  aperçu.  Si  Mustapha,  c'était  le  nom  qu'il  avait  reçu  des  indigènes,  se 
lança  à  sa  poursuite,  le  suivit  dans  tous  ses  tours  et  détours,  le  força  à  la 
course  et  sans  s'arrêter  ni  descendre  de  cheval,  vidant  d'un  pied  l'étrier  et 
y  conservant  l'autre,  il  le  saisit  et  l'enleva  à  la  main. 

36,  Viuoit.  —  C'est  ce  même  Italien  dont  il  est  question  plus  haut.  V.  N.  I, 
538  :  Autresfois. 

38.  A  tours.  —  Tour  à  tour. 
544. 

8,  Reaies.  —  Petite  pièce  de  monnaie  d'Espagne,  en  argent,  valant  environ 
25  centimes. 

CHAPITRE  XLIX. 

14.  Laelius.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  Scipion. 
546, 

16,  Sagos.  —  Rétablir  cette  citation  ainsi  qu'il  suit  :  Sinistras  sagis...  —  Le 
sagum  était  l'habit  militaire  des  Romains;  en  paix,  ils  portaient  la  toge. 


NOTES.         Ll\ .  I,  (.H.  XLIX.         VOL.  I,  PAG.  546.  F.415 

Chez  les  Gaulois,  c'était  le  vêtement  de  tout  temps;  nos  paysans  le  portent 
encore  sous  le  nom  de  saye  ou  blouse. 

18,  Respondre.  —  Cksak,  De  Bello  Gafl.,  IV,  5,  dit  que  les  Gaulois  aiiêtaient 
ceux  qu'ils  rencontraient,  non  pour  leur  demander  qui  ils  étaient,  mais 
pour  s'enquérir  des  nouvelles;  —  on  peut  ajouter  que  cela  leur  était  et 
est  encore  commun  avec  bien  d'autres;  ce  qui  l'était  moins  et  explique 
cette  remarque  de  César,  c'est  que  chez  eux  il  était  interdit  de  répandre 
des  nouvelles  dans  le  public,  et  cependant  le  journal  n'était  pas  chose 
inconnue  à  ce  moment.  Il  existe  trace  de  journaux,  en  quelque  sorte  of- 
ficiels, en  Egypte,  2(X)0  ans  avant  notre  ère;  ils  publiaient  également  tous 
les  laits  intéressants  et  notamment  les  scandales.  Les  Romains  eurent  d'a- 
bord les  Annales  tenues  par  h^s  pontifes,  et  qui,  du  temps  dq  César,  firent 
place  aux  Actes  diurnes  ou  .lournaux,  lesquels  comprenaient  à  peu  près 

■  tout  ce  qu'on  trouve  dans  les  feuilles  publiques  de  nos  jours,  partie  of- 
ficielle et  chronique.  Ils  prirent  fin  avec  l'empire,  pour  renaître  au  quin- 
zième siècle,  eu  Italie,  où  ils  se  vendaient  une  «  gazetta  »,  petite  pièce  de 
monnaie,  d'où  le  nom  que  Théophile  Renaudot  donna  à  sa  feuille  quand  il 
la  créa  en  1631.  V.  N.  I,  390  :  Nécessité. 

21,  ïambes.  —  Sénèque,  Episl.  86. 

28,  Front.  —  Les  femmes  du  temps  de  Montaigne  s'ép'ilaient  probablement 
le  front,  afin  d'en  augmenter  la  hauteur.  ' 

30,  Propres  à  cela.  — Add.  des  éd.  ant.  :  qui  seruoyent  à  cela  de  faire  tom- 
ber le  poil.  —  L'éd.  de  80  aj.  :  quHls  appelloient  «  psilotrum  ». 

37,  Caton.  —  Plutarque,  Caton  d'Utique,  15. 

39,  Assis.  —  Les  Grecs  et  les  Romains  dînaient  assis,  parce  que  ce  repas  était 
fort  court.  Au  souper,  qu'ils  prolongeaient  beaucoup,  étant  alors  débar- 
rassés de  leurs  affaires,  à  l'exception  des  femmes  qui  étaient  toujours  as- 
sises, ils  mangeaient  ordinairement  étendus  sur  des  sortes  de  divans,  les- 
quels, lorsqu'on  était  nombreux,  étaient  juxtaposés  autour  de  la  table,  dont 
un  côté  demeurait  libre  pour  le  service.  Sur  chacun  de  ces  lits  ou  di- 
vans, prenaient  généralement  place  trois  personnes;  on  s'y  étendait  la  têle 
du  côté  de  la  table,  la  poitrine  surélevée  par  des  coussins,  les  pieds  à 
l'opposé,'  en  contrebas.  On  s'appuyait  sur  le  coude  gauche  et  on  se  servait 
avec  la  main  droite;  on  pouvait  ainsi  facilement  poser  la  tète  sur  la  poi- 
trine de  son  voisin  de  gauche,  ainsi  que  fit  saint  Jean  sur  le  sein  de  Jésus- 
Christ  lors  de  la  cène.  De  nos  jours,  les  Arabes  en  agissent  encore  ainsi,  sauf 
que,  les  divans  n'existant  pas,  on  s'étend  à  même  le  sol  sur  des  tapis  ou 
des  nattes  et  que  l'élévation  de  la  table  est  réduite  en  conséquence. 
548, 

8,  L'autre.  —  Diogéne  Laerce,  VI,  89. 

9,  Table.  —  Ab  ovo  usque  ad  mala  (depuis  l'œuf  jusqu'à  la  pomme),  dit  Ho- 
race, Sat.,  l. 

Il,  Obscœne.  —  Sa!,  malpropre,  répugnant  en  raison  de  l'usage  qui  en  était 
fait. 

16,  Estoufta.  —  Sénèque,  Epist.  70. 

16,  Catze.  —  De  l'italien  cazzo,  pénis,  membre  viriL 

"^0,  Passans.  —  Dans  toutes  les  grandes  villes,  en  France,  il  est  actuellement 
pourvu  à  cette  nécessité;  avant,  c'était  une  servitude  des  couloirs  d'entrée 
des  maisons,  dont  nombre  comportaient  des  aménagements  à  cet  effet. 
C'est  à  M.  le  Préfet  de  police  de  Rambuteau,  dont  longtemps  ils  ont  gardé 
le  nom,  que  Paris  doit  depuis  moins  d'un  siècle  environ  les  édicules  dont 
certaines  de  ses  rues  sont  pourvues  pour  cet  objet;  mais  c'est  à  l'empereur 
Vespasien,  dont  ils  ont  également  porté  le  nom.  que  l'idée  première  ap- 
partient. En  les  établissant,  il  les  avait  frappés  d'un  impôt  et  son  fils  Titus 
l'en  ayant  plaisanté,  il  lui  mit,  dit-on,  sous  le  nez,  le  premier  argent  en 
provenant,  en  lui  disant  .•  «  Sent-il  mauvais?  »  —  A  Venise,  il  n'y  a  pas 
encore  longtemps,  aucune  disposition  particulière  n'existait  à  cet  égard  et 
en  certains  endroits  se  prêtant  le  plus  à  la  satisfaction  de  ce  besoin,  était 
parfois  tracée  sur  le  mur  une  croix  noire  bien  apparente  avec  cette  ins- 


F.416  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

cription  :  Rispetlo  (à  respecter),  que  Théophile  Gautier,  qui  narre  le  fait, 
rend  plaisamment  par  cette  traduction  du  vers  d'Horace  :  «  Enfants,  allez 
plus  loin;  cet  endroit  estsaci'é  »,  ajoutant  que  la  recommandation  est  loin 
d'être  pieusement  observée. 

20,  Trenchans.  —  Eschançons  et  trenchans  étaient  des  esclaves  dont  l'office 
était,  celui   des  premiers,  de  verser  à  boire;  celui  des  seconds,  de  dé- 
couper les  viandes. 
550, 

1,  Nous.  —  Montaigne  estimait  ses  contemporains  inférieurs  aux  anciens, 
en  vices  et  en  vertus;  était-ce  exact?  Les  hommes  semblent  à  cet  égard 
avoir  été,  être  et  devoir  être  toujours  à  peu  près  les  mêmes  dans  tous 
les  siècles;  et,  pour  un  observateur  consciencieux  qui.  ne  se  laisse  pas 
arrêter  par  les  apparences  et  va  au  fond  des  choses,  la  somme  des  vertus 
et  des  vices  dans  un  siècle  est  sensiblement  la  même  comparée  à  ce  qu'elle 
est  dans  un  autre  siècle.  Naioeon. 

3,  Mal.  —  La  Rochefoucault  a  exprimé  cette  même  pensée  de  la  sorte  : 
«  Un  sot  n'a  pas  assez  d'étoffe  pour  être  bon  ». 

14,  Estuues.  — Les  Romains,  du  moins  dans  le  courant  de  la  vie  ordinaire, 
ne  prenaient  que  des  bains  de  vapeur,  comme  cela  se  pratique  encore  dans 
les  pays  orientaux;  mais  ces  bains  étaient  d'usage  journalier,  ce  qu'ex- 
plique le  climat,  la  vie  passée  continuellement  au  grand  air  et  les  loisirs 
de  leur  existence.  Le  confort  moderne  n'avait  pas  encore  introduit  chez  eux 
l'eau  et  le  feu  à  domicile,  d'où,  à  peu  d'exceptions  près,  la  nécessité  de  ther- 
mes ou  établissements  de  bains  publics  dont  les  ruines  attestent  les  immen- 
ses proportions  et  la  magnificence;  entre  autres,  aux  Thermes  de  Caracalla,  à 
Rome,  trois  mille  personnes  pouvaient  se  baigner  à  la  fois  ;  il  y  avait  seize 
cents  sièges  de  marbre  et  de  porphyre,  et  des  baignoires  de  granit.  On  y 
accédait  par  des  portiques  somptueux  ;  à  l'intérieur  se  trouvaient  des  salles 
de  conversation,  des  bibliothèques,  des  jardins  décorés  de  statues  et  d'œu- 
vres  d'art,  c'était  quelque  chose  comme  les  étabhssements  thermaux  de 
nos  jours  dans  certaines  villes  d'eaux,  mais  ils  étaient  publics,  à  Rome,  du 
moins  pendant  l'empire;  tout  le  monde  y  avait  accès  et  il  en  existait  dans 
la  plupart  des  villes.  —  Les  bains  sont  bien  loin  d'être  aussi  en  faveur  en 
France;  Louis  XIV,  dit  Saint-Simon,  n'en  prit  jamais  que  sur  ordonnance 
de  médecin,  et  en  ces  derniers  temps,  il  nous  a  été  donné  d'entendre  une 
femme  d'âge,  venue  à  Lourdes  y  chercher  la  guérison,  justifier  son  ap- 
préhension à  descendre  dans  la  piscine  de  la  grotte,  en  disant  qu'elle  n'a- 
vait jamais  pris  de  bain  de  sa  vie.  Actuellement  on  a  tendance  à  y  venir; 
bains  et  bains-douches,  déjà  d'usage  courant  dans  l'armée,  s'introduisent 
dans  les  populations,  du  moins  dans  celles  de  quelques  grandes  villes;  des 
piscines  municipales  ont  même  été  créées  dans  quelques-unes  où  pour 
quinze  ou  vingt  centimes  chacun  peut  se  baigner;  mais  de  fait,  ce  ne  sont 
encore  que  de  rares  exceptions. 

14,  Hommes.  —  Jusque  sous  l'empereur  Adrien,  les  bains  des  femmes  n'é- 
taient pas  séparés  de  ceux  des  hommes. 

19,  Apollinaris.  —  Carm.  IV,  239. 

23,  Naulage.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  voiture.  —  La  question  est  de  peu  d'im- 
portance ;  actuellement  on  opère  de  deux  façons  :  généralement  on  paie 
d'avance  quand  le  prix  est  élevé  ou  qu'il  peut  y  avoir  grande  affluence 
(chemins  de  fer,  paquebots  à  destination  lointaine,  etc.),  en  cours  de  route 
ou  à  l'arrivée  dans  le  cas  contraire  (omnibus,  petites  voitures,  etc.). 

28,  Nicomedis.  —  Concubine;  littéralement  «  la  ruelle  de  Nicomède  ».  Sué- 
tone, César,  49.  —  César,  dans  sa  jeunesse,  avait  vécu  quelque  temps  à  la 
cour  de  ce  prince,  roi  de  Bithynie  (Asie  Mineure),  et  passait  pour  avoir 
été  de  la  plus  grande  intimité  avec  lui,  ce  qui,  en  ce  temps,  était  fréquent 
et  admis;  et  c'est  pourquoi  il  avait  été  gratifié  de  cette  épithète  dont  l'o- 
rigine provient  de  ce  que,  chez  les  Romains,  la  femme  au  lit  couchait 
d'ordinaire,  ainsi  que  le  dit  Montaigne,  du  côté  de  la  ruelle.  V.  N.  II,  634  : 
Nicomedes. 


NOTES.        LIV.  I,  CH.  XLIX.        VOF..  I,  PAG.  550.  F.417 

33,  Cbampisses.  —  Jlalignes,  goguenardes;  viendrait  de  «  champis  »  qui,  en 
Poitou,  signifie  enfant  naturel,  comme  qui  dirait  procréé  dans  les  champs, 
auquel  on  attribuait  plus  de  rnalice  qu'aux  autres. 

34,  lane.  —  Janus,  le  plus  ancien  roi  d'Italie,  XV°  siècle.  Établi  dans  le  La- 
tium,  il  y  fit  régner  la  paix.  Il  avait,  à  Rome,  un  temple  dont  les  portes 
étaient  ouvertes  en  temps  de  guerre  et  fermées  en  temps  de  paix  et  avant 
Auguste,  elles  ne  furent  closes  que  deux  fois,  l'une  sous  Numa,  l'autre 
après  la  première  guerre  punique.  C'est  de  Janus  que  le  mois  de  Janvier 
passe  pour  avoir  pris  son  nom. 

37,  Romaines.  —  Hérodien,  IV,  2,  6. 

39,  Creu.  —  Les  reines  de  France  portaient  jadis  le  deuil  en  blanc;  Anne 
de  Bretagne  fut  la  première  qui,  à  la  mort  de  Charles  VIII,  le  porta  en 
noir.  Les  Chinois  le  portent  également  en  blanc  et,  par  exception,  en  rouge 
éclatant,  pendant  le  premier  mois,  après  la  mort  d'un  père  ou  d'une  mère; 
les  Égyptiens  le  portaient  en  jaune:  les  Éthiopiens,  en  gris. 


CHAPITRE  L. 

552, 

7,  Ceux.  —  C.-à-d.  et  même  de  ceux. 
15,  Entiers.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  à  fons  de  tuue. 
■  17,  De  cent...  descouure.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  De  mille  visages  qu'ils  ont 
chacun,  l'en  prens  celuy  qui  me  plaît  :  ie  les  saisis  volontiers  par  quelque 
lustre  extraordinaire  et  fantasque  :  i'en  trieroy  bien  de  plus  riches  et  pleins 
si  i'auoy  quelque  autre  fin  proposée  que  celle  que  i'ay.  Toute  action  est  pro- 
pre à  nous  faire  connoistre. 
21,  Inusité.  —  «  Dans  la  plupart  des  auteurs,  je  vois  l'homme  qui  écrit;  dans 
Montaigne,  je  vois  l'homme  qui  pense.  »  Montesquieu. 
554, 

27,  Escbecs.  —  Le  jeu  d'échec  ayant  été  inventé,  dit-on,  par  Palamède,  lors 

de  la  guerre  de  Troie,  il  est  possible  qu'Alexandre  l'ait  pi-atiqué; 
32,  Autre.  —  Socrate. 
556, 

9,  Friuole.  —  C'est  la  même  idée  déjà  exprimée,  I,  432. 
24,  Mérite.  —  «  Il  ne  faut  pas  permettre  à  l'homme  de  se  mépriser  tout  en- 
tier, de  peur  que,  croyant,  avec  les  impies,  qiie  notre  vie  est  un  jeu  où 
règne  le  hasard,  il  ne  marche  sans  règle  et  sans  conduite  au  gré  de  ses 
aveugles  désirs.  »  Bossuet. 
34,  Hommes.  —  Le  mot  «  misanthrope  »  n'existait  pas  encore  du  temps  de 
Montaigne» 
558, 

2,  Peine.  —  Pi.utarque,  M.  Brutus,  3. 
4,  Face.  —  Dioc.ène  Laekce,  II,  95. 
(».  Fols.  —  DioGÈNE  Laekce,  II,  95. 


CHAPITRE  LI. 

8,  Paroles.  —  Ce  chapitre  a  été  traduit,  vers  1689,  en  langage  de  l'époque 
par  M.  DE  Pi.ASSAC. 

U),  Pied.  —  Ce  mot  est  d'Agésilas.  Pi.utarque,  Apophth.  des  Lacédénioniens. 

l'î,  Thucydidez.  —  Non  l'historien,  mais  le  chef  à  Athènes  du  parti  aristo- 
cratique contre  Périclès;  frappé  d'ostracisme  en  444,  c'est  alors  qu'il  se 
trouvait  à  Sparte;  le  fait  est  rapporté  par  Pi.utarque,  Périclès,  5. 

23,  Orateurs.  —  Sextus  Empiricus,  Adv.  Âfath.,  IL  —  «  Los  grands  diseurs  ne 
sont  [)as  les  grands  faiseurs  »,  dit  un  adage. 

24,  Peuple.  —  Quintiuien,  11,  16. 

25,  Flatter.  —  Dans  le  Gorf/ias. 

ESSAIS   DE   MONTAIGNE.   —   T.    IV.  27 


F. 41 8  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

560, 

15,  Rudes.  —  Du  latin  rudis,  ignorant,  grossier,  qui  n'est  pas  cultivé. 

.17,  Dit-il.  —  TriE-LivK,  X.  22. 

22,  Caratte.  —  D'une  illustro  famille  napolitaine  dont  la  mémoire  fut  abolie 
par  le  Sénat  i-oinain,  en  1560,  à  la  suite  d'un  procès  amené  par  les  exac- 
tions de  quelques-uns  de  ses  membres,  procès  qui,  en  1560,  fut  revisé  et 
suivi  de  la  réintégration  dans  leurs  titres  et  honneurs  des  survivants, 
parmi  lesquels  le  cardinal  dont  il  est  ici  question,  qui  personnellement 
avait  été  condamné  à  une  amende  de  100.000  écus. 
562, 

i:l.  Macédoine.  -—  Pi.ltaiique,  Paul-Émile,  15.  —  En  167.  Le  discernement, 
l'attention,  l'exactitude  qu'apporta  Paul-Émile  dans  les  fêtes  qu'il  donna  à  la 
(irèce,  après  sa  victoire  de  Pj'dna  sur  Persée  (jeux,  sacrifices,  festins,  fêtes 
de  toute  nature),  excitèrent  l'admiration  à  l'égard  de  cet  liommc  qui  mon- 
trait tant  de  diligence  et  de  soins  dans  ces  détails,  et  qui,  chargé  de  si 
grandes  affaires,  observait  dans  les  plus  petites  jusqu'à  la  moindre  bien- 
séance. Que  nous  sommes  donc  loin  ici  de  cet  adage  si  fort  en  lionneur 
maintenant  chez  nous  :  ■<  De  minimis  non  curât  prselor  (le  préteur  ne  porte 
pas  .son  attention  sur  les  détails)  »,  que  l'on  a  si  souvent  à  la  bouche,  et 
qui,  exact  quand  il  s'applique  à  des  cas  où  on  ne  sait  pas  faire  la  part 
des  nécessités,  blâmable  quand  il  constitue  des  empiétements  sur  les  de- 
voirs et  attributions  d'autrui  au  lieu  de  se  borner  à  en  être  le  contrôle, 
ne  fait  dans  toutes  les  autres  circonstances  que  favoriser  la  paresse  des 
uns,  les  abus  des  autres,  au  grand  détriment  des  affaires  publiques. 

18,  ApoUidon.  —  Palais  merveilleux  qu'éleva,  avec  le  secours  de  la  nécro- 
mancie, Apollidon,  un  des  personnages  du  roman  d'Amadis  des  Gaules. 

20,  Allégorie.  — Métonymie,  métaphore,  allégorie,  sont  des  termes  et  figures 
de  rhétorique. 

22,  Pellegrin.  —  Fin,  poli,  délicat;  de  l'italien  pcUegrlno  qui  a  cette  même 
signification. 

20,  Puissance.  —  C'est  ainsi,  pai-  exemple,  qu'à  Rome,  les  consuls  étaient  les 
premiers  magistrats  de  la  République;  qu'au  moj-en  âge,  c'étaient  dans 
quelques  villes  les  anciens  échevins  (conseillers  municipaux),  dont  le  man- 
dat avait  pris  fin  ;  qu'avant  la  Révolution,  on  appelait  ainsi  les  juges  des 
tribunaux  de  commerce;  et  qu'actuellement,  certains  de  nos  représentants 
à  l'étranger,  soit  diplomatiques,  soit  simplement  commerciaux,  portent  ce 
nom . 

27,  De  reproche  à.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  lesmoignage  d'vne  singulière  va- 
nité de. 

27,  Indignement.  —  Vai'.  des  éd.  ant.  :  vainement  et  sans  aucune  considéra- 
tion. 

CHAPITRE  LU. 

564, 

2,  Carthaginois.  —  Valèke  Maxime,  IV,  4,  6.  —  En  256,  alors  que,  consul, 
après  avoir  battu  les  Carthaginois  en  Sicile,  il  venait  de  passer  en  Afrique 
et  de  les  battre  à  nouveau.  - 

3,  Publique.  —  Au  gouvernement. 
5,  Terre.  —  Environ  trois  hectares. 

1!),  Dehors.  —  Pi.utarque,  Caton  le  Censeur.^  3.  —  Les  uns  i-egardaient  cette 
conduite  de  Caton  comme  un  effet  de  son  avai-ice,  les  autres  comme  le 
résultat  d'un  parti  pris  pour  corriger  ses  concitoyens  de  leur  luxe  et  les 
ramener  à  la  simplicité;  on  ne  saurait  cependant  excuser  qu'il  se  servît  do 
ses  esclaves  comme  de  bêtes  de  somme,  qu'il  les  chassât  et  les  vendît  quand 
ils  devenaient  vieux.  —  Cette  exagération  de  sa  part  fut  le  point  de  déj^art 
de  l'animosité  avec  laquelle  plus  tard  il  poursuivit  Scipion.  Il  avait  été 
désigné  comme  son  questeur,  lorsque  celui-ci  fut  envoyé  en  Sicile,  d'où  il 
devait  passer  en  Afrique.  Voyant  qu'il  vivait  avec  magnificence  et  ])i-odi- 


NOTES.         I.IV.   f,  en.  LIT.         VOL.  1,  PAf4.  564.  F.419 

guait  l'argent  à  ses  troupes  sans  ménagement,  il  l'en  reprit,  lui  disant  que 
le  plus  grand  mal  n'était  pas  dans  la  dépense  excessive,  mais  dans  l'alté- 
ration de  l'ancienne  simplicité  des  soldats,  qui  employaient  en  luxe  et  en 
plaisirs  le  superflu  de  leur  paye.  A  quoi  Scipion  répondit  qu'il  n'avait  pas 
Ijcsoin  d'un  questeur  si  exact;  que  dans  la  guerre,  il  allait  à  pleines  voiles, 
devant  compte  à  la  République  non  des  sommes  qu'il  aurait  dépensées, 
mais  des  exploits  qu'il  aurait  accomplis.  Sur  cette  réponse.  Caton  le  quitta 
dès  la  Sicile.  N.  II,  60  :  Caton  le  Censeur. 

21,  Légation.  —  L'an  130.  VAi.i^:uK  Maximk,  IV,  3,  13. 

23,  Vn.  —  SÉNÈQLE,  Conxol.  ad  Helv.,  12.      • 

25,  Romains.  —  Montaigne  détourne  le  fait  du  .sens  que  lui  donne  Pi.l- 
TARQUE,  Lcit  Gracques,  3,  qui,  en  l'exposant,  dit  bien  qu'une  allocation  aussi 
dérisoire  ne  fut  attribuée  à  Tiberius  Gracchus  que  i)0ur  lui  faire  honte 
et  dépit.  Tribun  du  peuple,  il  venait  de  faire  revivre  une  ancienne  loi 
agraire  interdisant  à  un  même  individu  de  posséder  ime  étendue  de  terres 
de  plus  do  cinq  cents  plèthres  (le  plèthre  valait  environ  six  ares);  et  ce 
qui  serait  ainsi  rendu  disponible  devait  être  affermé  à  ceux  ne  possédant 
aucun  fonds.  Lorsqu'il  dut  partir  pour  effectuer  cette  opération,  le  Sénat, 
pour  se  venger,  ne  lui  alloua  pour  sa  dépense  que  neuf  oboles  par  jour 
(un  franc -trente-cinq  centimes),  contrairement  à  ce  qui  se  faisait  d'or- 
dinaire, où  ces  commissions  étaient  largement  rétribuées. 

CHAPITRE  LUI. 
566, 

G,  Faut.  —  C'est  ce  qui  a  donné  lieu  à  col  aphorisme  :  -Fac  ul  credeft,  ri 
quod  prohiberi  non  potes,  accipe  (Fais  ce  que  dois  et  accepte  ce  que  tu  ne 
peux  empêcher)  »,  dont  la  deuxième  partie  est  corroborée  par  cet  autre  : 
"  Unquam  felix,  nisl  sua  sorte  contentus  (Qui  n'est  pas  satisfait  de  son  sort, 
n'est  jamais  heureux).  » 

30,  Façon.. —  S.  Jean  Chrysostome  nous  conseille  de  ■<  no  désirer  que  peu  de 
choses,  si  nous  voulons  être  heureux  ». 

33,  Reuerence.  —  S.  Ambroise  dit  que  «  la  concupiscence  s'imagine  une  in- 
finité de  besoins,  qu'elle  tâche  de  satisfaire  k  tout  prix  ». 

3.'j,  Exterreamur.  —  Dans  les  éd.  ant.,  cette  citation  est  suivie  de  sa  tra- 
duction :  Il  se  fait,  par  vn  vice  ordinaire  de  nature,  que  nous  ayons  et  plus 
de  fiance,  et  plus  de  crainte  des  choses,  que  nous  n'auons  pas  veu,  et  qui  sont 
cachées  et  inconnues. 

CHAPITRE  LIV. 
68, 

1,  Lettre.  —  C'était  une  manie  des  poètes  latins  du  moyen  âge,  surtout  aux 
xn"  ot  xui"  siècles. 

2,  Haches.  —  Et  fréquemment  aussi  des  autels,  des  chalumeaux. 

4,  Figure.  —  Comme  bizarrerie  analogue,  citons  entre  autres  que,  dans  un 
recueil  de  noëls  de  1740,  on  en  trouve  un  de  cent  deux  vers,  dont  tous  les 
mots  n'ont  qu'une  syllabe. 

Plutarque.  —  Xénocrate,  au  dire  de  Plutarque,  indiquait  le  nombre  û(^ 
cent  millions  deux  cent  mille  comme  celui  des  syllabes  que  forment  les  di- 
verses lettres  de  l'alphabet. 
■  II,  Exercice.  —  Il  semble  assez  difficile  do  faire  passer,  on  le  pi-ojetant  et 
môme  sans  le  projeter,  un  grain  de  mil  par  le  trou  d'une  aigudle.  Quix- 
TiLiEN,  II,  20,  d'où  le  fait  est  tiré,  et  qui  attribue  à  Alexandre  d'avoir  récom- 
pensé cette  adresse  on  proportion  do  son  utilité,  dit,  ce  qui  est  plus  ad- 
missible, qu'elle  consistait,  ayant  un  pois  chiche  dans  la  bouche  et  soufflant, 
à  le  lancer  sur  une  aiguille  à  certaine  distance  et  le  ficher  à  la  pointe  d<î 
cette  aiguille,  et  que  cet  homme  no  manquait  jamais  son  coup.  Le  minot 
valait  uu  jjeu  moins  d'un  litre. 
K,  loinctes.  ---  Platon,  dans  un  cas  analogue,  ne  fut  pas  plus  indulgent 


F.420  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

qu'Alexandre  :  seul,  il  n'admira  pas  un  certain  Anniceris,  si  bon  cocher 
qu'il  faisait  faire  cent  tours  à  son  char  sans  s'écarter  de  la  plus  petite  dis- 
tance de  la  morne  ornière;  Platon  jugeait  qu'un  homme  qui  s'était  appliqué 
avec  une  attention  si  soutenue  à  atteindre  une  perfection  si  inutile,  était 
incapable  de  grandes  choses.  A  quoi  on  peut  répondre  que  tout  le  monde 
n'est  pas  tenu  à  être  propre  aux  grandes  choses,  sans  pour  cela  cesser  d'être 
estimable. 

23,  Marche.  —  Le  titre  de  «  dame  »,  qui  se  donne  aujourd'hui  indistincte- 
ment à  toutes  les  femmes  mariées,  était  anciennement  affecté  aux  femmes 
de  chevaliers;  les  femmes  des  écujers  et  toutes  les  autres  femmes,  mariées 
ou  non,  étaient  simplement  qualifiées  de  -  Demoiselles  »  ;  c'est  ce  qui  ex- 
plique que  Montaigne  écrivant  à^sa  femme,  mettait  en  tète  de  sa  lettre  : 
«  A  Mademoiselle  Jlontaigne,  ma  femme.  »  Cette  appellation  de  «  Dame  » 
était  en  outre,  comme  il  le  dit,  appliquée  aux  femmes  de  basse  extraction, 
et  aussi  dans  le  sens  de  maîtresse,  etc..  Quand  il  s'agissait  de  femmes  de 
mauvaise  vie,  on  employait  indifféremment  l'une  ou  l'autre  expression. 

25,  Disait.  —  Plutarque,  De  Placil.  philosoph.,  IV,  10. 
34,  Appetissans.  —  Du  latin  appetitus,  rendant  désirable  et,  par  extension, 
diminuant,  affaiblissant,  autrement  dit  dans  le  cas  présent,  dorant   la 
pilule. 
570, 

1,  Desgoutement.  —  On  dit  aujourd'hui  dégoût. 

3,  Rôtissent.  —  Les  coups  de  chaleur  et  de  soleil  produisent,  en  effet,  sur 
les  plantes  et  les  animaux,  l'homme  compris,  les  mêmes  effets  que  les  grands 
froids;  dans  les  deux  cas,  les  plantes  sont  comme  brûlées  et  dépérissent,  et 
chez  les  êtres  animés  il  y  a  congestion  et  danger  de  mort. 
3,  Gueux.  —  Gueuses, de  l'allemand  ^tese?!,  fondre;  masses  ou  lingots  de  mé- 
tal sortant  de  la  première  fonte.  —  Montaigne  ne  rapporte  pas  exactement 
la  pensée  d'AnisTOTE  qiii  se  borne  à  dire  que  l'étain  fond  plus  tôt  que  le 
plomb,  puisqu'il  se  fond  même  dans  l'eau,  et  indique  ensuite  des  procédés 
de  fusion. 

C,  Volupté.  —  Dans  le  Phédon,  Platon  fait  dire  à  Socrate  que  «  le  plaisir  et 
la  douleur  se  tiennent  ». 
16,  Impression.  —  «  La  prospérité  fatigue  l'àme  du  sage,  l'adversité  l'affer- 
mit et  la  retrempe  par  les  coups  mêmes  dont  elle  la  frappe.  » 

24,  Engendre.  —  C.-à-d.  pour  savoir  qu'on  ignore,  il  faut  beaucoup  savoir; 
ce  qui  est  à  l'adresse  de  ceux  qu'en  langage  familier  nous  appeloùs  des 
«  demi-savants  ». 

24,  Première.  —  C'est  ce  que  Bacox  a  traduit  par  :  «  Un  peu  de  philosophie 
éloigne  de  la  religion,  beaucoup  y  ramène.  »  —  J.  de  Maistre,  dans  ses 
Soirées  de  S.-Pétersbourg,  a  reproduit  et  développé  cette  idée  de  l'ignorance 
qui  croit  savoir,  et  de  la  science  qui  s'ignore. 

25,  Instruits.  —  Sçauanls  (var.  de  ^). 

29,  Sens.  —  Allusion  à  ceux  qui,  sans  plus  ample  examen,  séduits  par  leur 
simplicité,  embrassèrent  les  doctrines  nouvelles  de  Luther  et  de  Calvin.  — 
Gresset,  dans  Verl-vert,  exprime  la  même  pensée,  appliquée  d'une  façon 
plus  générale  : 

«  L'homme  éclairé  suspend  l'éloge  et  la  censure.  » 

L'observation  de  Montaigne  est  d'application  constante.  De  son  temps, 
c'était  la  question  religieuse  qui  préoccupait  les  esprits,  depuis  elle  a  cédé 
le  pas  à  la  politique  ;  sauf  cela,  rien  n'est  changé  à  cet  égard  ;  peu  de  gens, 
aujourd'hui  comme  alors,  sont  capables  de  penser  par  eux-mêmes  et,  parmi 
ces  privilégiés,  peu  prennent  le  temps  de  réfléchir  et  s'astreignent  à  l'effort 
de  la  réflexion  ;  aussi  l'influence  du  journal  qui  fournit  sur  chaque  chose 
une  opinion  toute  faite  et  dont  chacun  fait  sa  lecture  quotidienne,  est  elle 
considérable,  on  finit  par  ne  plus  penser  et  ne  plus  voir  que  par  lui;  c'est 
pourquoi  la  mauvaise  presse  fait  tant  de  mal  et  pourquoi  aussi  la  bonne 


NOTES.        LIV.  I,  CH.  LIV.         VOL.  I,  PAG.  570.  F.421 

presse,  qui  seule  peut  compenser  l'induence  néfaste  de  la  première,  est  à 

soutenir  et  à  encourager. 
572, 

U.Mestis.  —  C.-à-(l.  ceux  cjui  tiennent  des  uns  et  des  autres.  —  Métis  vient 

du  latin  mixtus,  mélangé;  signilic  engendré  du  l'ait  d'espèces  différentes, 

tels  le  mulâtre,  né  d'un  blanc  et  d'une  négresse  ;  le  mulet,  d'un  âne  et  d'une 

jument. 
19,  Villaneles.  —  Poésies  pastorales,  dont  tous  les  couplets  sont  suivis  d'un 

même  refrain. 
29,  Vulgaires.  —  Ignorans  (var.  de  80). 

29,  Singuliers  et  excellens.  —  Délicatzet  sçauants  (var.  de  80). 
31,  Trop.  —  L'éd.  de  80  aj.  en  errata  :  adioules,  ils  trouueroient  place  entre 

ces  deux  extrémités . 
31,  Région.  —  Lucilius,  dans  Cicéron,  dit  qu'il  ne  veut  pour  lecteurs  de  ses 

ouvrages,  ni  savants,  ni  ignorants,  parce  que  les  uns  sont  trop  habiles  pour 

lui,  les  autres  pas  assez. 


CHAPITRE   LV. 

574, 

;>,  Plutarque.  —  Vie  d'Alexandre,  1. 

5,  D'estre...   senteur.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  de  ne  sentir  rien  de  mauuais. 
9,  Nihil  olet.  —  Plaute,  Mostell.,  I,  3,  116.  —  Montaigne,  après  avoir  cité 
ce  vers,  le  traduit  en  le  modifiant  quelque  peu  ;  «  L'odeur  de  la  femme, 
dit  exactement  le    poète,  est   normale,  est    bonne,    quand   elle  ne  sent 
rien.  » 

10,  Rien.  —  L'éd.  de  88  et  l'ex.  de  Bordeaux  aj.  :  comme  on  dict  que  la  Tneil- 
ieure  odeur  de  ses  actions,  c'est  qu'elles  soient  insensibles  et  sourdes.  —  «  Une 
bonne  réputation  vaut  mieux  qu'un  bon  parfum,  »  dit  I'Ecclésiaste,  VII,  I, 
mais  en  l'appliquant  à  tous,  hommes  et  femmes. 
576, 

5,  L'air.  —  La  science  moderne  attribue  la  contagion  à  l'existence  d'êtres 
réels  bien  qu'infiniment  petits  :  bacilles,  microbes;  ce  sont  eux  qui,  d'après 
elle,  sont  la  cause  et  produisent  l'effet;  l'odeur  n'est  jamais  qu'un  indice  et 
une  conséquence. 
7,  Socrates.  —  Diogi^ine  Laerge,  II,  25. 

16,  Contemplation.  —  L'encens,  brûlé  lors  des  sacrifices,  semble  plutôt  avoir 
eu  pour  objet  dans  le  principe  de  combattre  les  émanations  des  foules 
assemblées  dans  les  temples  et  aussi  l'odeur  du  sang  provenant  des  victimes 
immolées. 

20,  Thunes.  —  Muley  Haçan,  bey  de  Tunis,  qu'au  chap.  VIII  du  liv.  II, 
Montaigne  appelle  Muleasses.  Il  vint  à  Naples  en  1543,  mais  il  n'y  trouva 
pas  Charles-Quint  qu'il  venait  implorer  contre  les  Turcs  qui  le  menaçaient. 
A  son  retour,  son  lils,  qui  en  son  absence  s'était  emparé  du  pouvoir,  lui 
fit  crever  les  yeux. 

23,  Parties.  —  Ses  livres  de  compte,  ses  mémoires  de  dépense. 

23,  Ducats.  —   Monnaie  d'or  de  la  valeur  de  9  à  II  francs. 

30,  Boue.  —  Par  marais,  il  faut  entendre  les  lagunes  qui  entourent  Venise 
et  les  canaux  si  nombreux  qui  s'y  trouvent  et  qui  exhalent  souvent  des 
odeurs  pestilentielles.  —  A  Paris,  la  voirie  n'était  ni  établie,  ni  entretenue 
comme  aujourd'hui,  et  la  boue,  dans  la  mauvaise  saison,  était  une  des 
grandes  incommodités  do  Paris;  Boileau,  bien  que  de  son  temps  (1660)  elle 
se  fût  bien  améliorée,  nous  en  a  conservé  le  souvenir  dans  une  de  ses 
satires  : 

«  Six  chevaux  attelés  à  ce  fardeau  pesant, 
ont  peine  à  l'émouvoir  sur  le  pavé  glissant; 
D'un  carrosse,  en  tournant,  il  accroche  la  roue, 
Et  du  choc  le  renverse  en  un  grand  tas  de  boue.  » 


F. 422  ESSAIS  Dl'   MONTAIGNE. 

CHAPITRE  LVI. 

578, 

1,  Prières.  —  Ce  chapitre  est,  on  général,  difficile  à  comprendre;  on  y  est 
souvent  arrêté  et  pas  toujours  sûr  d'en  saisir  le  sens;  on  y  trouve  plusieurs 
traits  contre  les  calvinistes. 
13,  Icy.  —  Bien  des  auteurs,  plus  hardis  que  Montaigne,  ont,  au  moyen  âge 
et  dans  les  siècles  qui  ont  suivi,  comme  lui  désavoué  à  l'avance,  par  crainte 
des  persécutions,  ce  qui  dans  leurs  écrits  poui-rait  choquer  l'Église;  pré- 
caution inspirée,  la  plui)art  du  temps,  pUr  la  prudence  plus  que  par  les 
convictions.  —  Quoi  qu'il  en  soit,  la  déclaration  ici  est  formelle  et,  étant 
donné  que  l'auteur  la  renouvelle  assez  fréquemment  sous  une  forme  ou  sous 
une  autre  dans  le  cours  des  Essais,  elle  indique  nettement  que  la  différence 
qu'il  accuse  entre  Montaigne  et  le  mai)-e  de  Bordeaux  (III,  500)  subsiste 
également  chez  lui  entre  le  chi'étien  et  le  moraliste.  Comme  chrétien,  sa 
foi  est  voulue.  Entretenue  peut-être  par  le  désir  qui  chez  lui  primait  tout 
de  vivre  en  paix  avec  lui-même  comme  avec  tous  autres,  elle  n'admet 
ni  examen  ni  discussion;  tandis  que  les  l'éfiexions  qu'il  couche  en  sa  rap- 
sodie,  sont  telles  que  son  bon  sens  lui  suggère,  et  qu'elles  soient  ou  non 
contraires  aux  solutions  et  prescriptions  de  l'Église,  ce  qui  est  fréquent,  le 
naoraliste  n'en  a  cure. 
16,  Dieu.  —  L'oraison  dominicale,  laquelle  est  tirée  textuellement  de  YÉvan- 
gile  de  S.  Mathieu.  —  On  trouve  dans  le  second  Alcibiade  de  Platon  une 
prière  qui,  en  substance  et  tenant  compte  de  la  différence  des  temps,  n'en 
diffèi'e  pas  beaucoup.  Dans  ce  même  dialogue,  Socratc,  lui  aussi,  s'applique 
à  démontrer  qu'avant  de  prier,  il  faut  réfléchir  à  l'objet  de  sa  prière,  parce 
qu'on  risque,  sans  cela,  de  demander  aux  dieux  des  biens  qui  pourraient 
être  des  maux,  et  il  conclut  à  la  formule  suivante  :  «  Puissant  Jupiter,  donne- 
nous  les  biens,  soit  que  nous  les  demandions,  soit  que  nous  ne  les  deman- 
dions pas;  et  éloigne  de  nous  les  maux,  quand  même  nous  te  les  deman- 
derions! » 
20,  Fust  le.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  seul. 

'■29,  Cette  là.  —  S.  Cvpiuen  tient  l'oraison  dominicale  comme  la  prière  la  plus 
parfaite.  —  "  Le  Paternoster  est  ma  prière,  a  dit  Luther;  il  n'en  est  aucune 
qui.  lui  soit  comparable,  je  l'aime  mieux  qu'aucun  psaume.  » 
580, 

4,  Soit.  —  C'est  ce  qui  a  fait  dire  avec  quelque  exagération  à  Ch.  Lemesi.e 

que,  dans  de  telles  conditions,  la  prière  est  une  impiété. 
9,  D'icelle. ..  demandes.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  de  sa  iustice  non  selon  »o.s 

inclinations  et  volonté:-. 
10,  Loix.  —  Liv.  X. 

15,  Vieillesse.  —  Cette  assertion  prête  fort  à  la  controverse.  Que  Dieu  exist(% 
personne  ne  le  nie;  mais  qu'est-ce  que  Dieu,  personne  non  plus  ne  saurait  le 
dire;  tout  au  plus  peut-on  admettre  cette  vague  définition  :  qu'  -  Il  est  ce 
qui  préside  à  tout  ce  qui  existe  ».  Dire  qu'il  nous  a  faits  à  son  image  et 
,  par  conséquent  qu'il  est  à  la  nôtre,  aller  jusqu'à  lui  prêter  nos  passions,  c'est 
aller  trop  loin  ;  notre  raison,  qu'en  somme  nous  avons  pour  en  user,  se  refuse 
à  une  telle  proposition  que  rien  ne  ju.stifie  et  qui  est  de  la  part  de  l'homme 
d'une  outrecuidance  dépassant  toutes  les  bornes;  de  là  aussi  ce  malentendu 
entre  ceux  qui  sont  dits  croyants  et  ceux  dont  on  dit  qu'ils  ne  croient 
pas.  —  Ceci  posé,  il  ne  semble  pas  que  -Montaigne  soit  dans  le  vrai,  quand 
il  donne  comme  règle  générale  que  ceux  qui  doutent  en  leur  jeunesse, 
viennent  à  résipiscence  dans  leur  vieillesse.  Ce  qui  est  plus  vrai,  c'est  que 
chez  beaucoup  le  scrupule  de  combattre,  chez  cjui  a  le  bonheur  d'en  avoir, 
les  croyances  religieuses  toujours  si  réconfortantes  et  jamais  préjudiciables, 
le  respect  de  la  liberté  de  conscience  chez  autrui,  et  même  à  certains  mo- 
ments les  défaillances  de  notre  être,  comme  aussi  un  certain  esprit  de 
concession  à  l'égard  de  ceux  qu'ils  aiment,  font  qu'ils  ne  se  montrent,  pas 
toujours  aussi  récalcitrants  pour  des  pratiques  auxquelles  ils  n'attachent  pas 


NOTES.         MV.  I.  CH.  I.Vf.         VOL.  I,  PAG.  .o80.  F. 423 

autrcniont  d'importance,  (lui  en  (léliiiilive  font  généralenKMit  du  bien,  et 
même  à  ceux  auxquels  elles  n'en  l'ont  pas,  ne  font  jamais  de  mal. 
3:.',  Malice.   —  •-   La  prière  des  impies  est  un    nouveau  péché.    >•  Le   Père 
Qlesnei,. 
582, 

•,'.  La  haine...  l'iniustice.   —  ]'su7'es,  vcnin/ii-rs  ,'i  paillardises  (var.  de  88). 

0,  Dieu.  —  Autrement  dit  :  Il  faut  faire  tout  en  temps  et  lieu.  —  Dans  Paris 
ridicule  (édition  de  1666),  Le  Petit  dit  à  une  fille  galante  qui  l'invite  à  la 
débauche  : 

•  ...  Ce  sera,  s'il  plaît  à  Dieu, 

Pour  dimanche,  après  la  grand'messe. 

Il  faut  tout  faire  en  temps  et  lieu.  » 

16,  Quoy.    -  (].-;'i-d.,  mais  qui^  dire  do  ceux  qui  fondent    leur  vie  entière 

SUl'... 

584. 

7,  L'Eglise.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  t'al/ioliijue. 

1,  Promiscue.  —  Confus,  indifférent:  du  h^tiii  /inniiiscuiifs  qui  a  le  même 
sens. 

8,  Dauid.  —  Les  psaumes,  rlont  la  majeure  partie  est  de  David;  cantiques 
sacr(''S  des  Hébreux,  dont  un  gi-and  nombre  sont  passés  dans  notre  liturgie, 
et  que  les  Protestants  chantent  constamment. 

15,  Tracasser.  —  Traîner.  —  L'imI.  de  88  aj.  :  entre  les  mains  de  loules  per- 
sonnes. 

21,  Sursum  corda.  —  «  Haut  les  cieurs!  '  —  Paroles  que  le  prêtre  prononce 
à  la  messe,  au  moment  où,  après  l'Évangile,  et  immédiatement  avant  la 
Préface,  c'est-à-dire  lorsqu'il  va  commencer  à  procéder  au  Saint  Sacrifice 
proprement  dit.  —  Cette  même  interjection  se  dit  encore  à  propos  de  faits 
extraordinaires  qu'on  va  énoncer,  pour  \-  préparer  et  pour  qu'on  se  mette  à 
l'unisson.  Bossuet  l'affectionnait  d'une  façon  particulière,  comme  de  mise 
à  tous  les  moments  do  l'existence;  quand  le  cœur  souffre,  que  le  sort  est 
contraire;  aussi  bien  dans  la  vie  publique,  la  vie  sociale,  que  dans  la  vie 
privée.  C'est  par  elle  que  débutait  la  proclamation  qu'en  1870  (tamrett.v 
adressait  à  la  France,  lui  annonçant  la  capitulation  de  Metz  et  l'invitant  à 
un  nouvel  effort  [X.  X.  II,  'ri  :  Sursum  corda). 

ib.  Empirent.  —  "  Les  mauvais  esprits  font  de  la  parole  de  Dieu  ce  (|u'un 
méchant  lapidaire  fait  d'un  diamant.  »  S.  JiiKÔ.ME. 

27,  Gents.  —  Les  Protestants.  C'est  là  une  charge  à  fond  contre  le  Protestan- 
tisme qui  admet  le  libre  examen  et  les  prières  du  culte  dans  la  langue 
usuelle. 

:>j,  Chacun  de.  —  Le  traduire  el  ladd.  d(î  88). 
586. 

5,  Apparence.  —  En  novembre  1901,  des  protestations  unanimes,  qui  ont 
dégénéré,  dans  les  rues  d'Athènes,  en  une  émeute  sanglante,  ne  se  sont-glles 
pas  produites  en  Grèce,  parce  qu'une  tentative  a  été  faite  d'y  rendre  d'usage 
courant  une  traduction  en  grec  moderne  des  textes  sacrés;  troubles  causés 
précisément  par  les  difficultés  d'interprétation  qui  faisaient  que,  chacun 
appréciant  à  sa  façon,  la  traduction  donnée  ne  satisfaisait  personne.  — 
C'est  là,  en  effet,  la  raison  pour  laquelle  l'Église  maintient  les  langues 
mortes,  l'hébreu,  le  grec  et  le  latin,  pour  les  liturgies  de  Jérusalem,  de 
Constantinople  et  de  Rome,  qui  sont  actuellement  les  trois  principales  do 
la  Chrétienté;  elles  se  trouvent  delà  sorte  soustraites  aux  fluctuations  des 
langues  vivantes  qui,  chaque  fois  qu'une  adaptation  serait  terminée,  obli- 
geraient à  en  préparer  une  autre.  Du  reste  le  grand  nombre  de  livres  où, 
conjointement,  les  principales  prières  sont  traduites  en  langage  courant 
avec  le  texte  ancien  en  regard,  supplée  à  l'inconvénient  que  les  cérémonies 
aient  lieu  dans  une  langue  incomprise  des  fidèles.  —  A  titre  de  spécimen 
de  ce  à  quoi  on  arrive  par  les  traductions  ainsi  faites  par  chacun,  nous 


F.424  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

citerons  ce  veiset  du  Miserere,  relevé  dans  la  traduction  en  vers  des 
Psaumes  faite  à  l'instigation  de  Marguerite  de  Valois  en  1543  par  Clément 
Marot,  poète  de  valeur  et  zélé  protestant;  le  roi  David,  s'adressant  à  Dieu, 
lui  dit  :  «  Amptius  lava  me  ab  iniquitate  mea  cl  a  peccato  meo  munda  me 
(Seigneur,  purifiez-moi  de  plus  en  plus  de  mon  iniquité,  purifiez-moi  de 
mon  p(fché)  »  ;  ce  que  Marot  traduit  ainsi  : 

«  Lave-moi,  mon  Sire,  et  relave  bien  fort. 
Car  je  suis  un  gros  butor.  » 

7,  Langue.  —  Le  Nouveau  Testament  avait  déjà  été  traduit  en  basque  en 
1571. 

8,  Ardu.  —  Difficile,  du  latin  arduus,  qui  a  même  signification;  par  exten- 
sion, délicat,  qui  est  le  sens  dans  lequel  ce  mot  est  employé  ici. 

17,  Gentils.  •--  De  génies,  nations.  Nom  sous  lequel  les  païens  sont  désignés 
dans  l'Evangile  et  parles  premiers  chrétiens;  S.  Paul,  qui  les  a  évangélisés 
et  n'est  point  des  douze  apôtres,  est  appelé  l'Apôtre  des  Gentils. 

24,  Humaine.  —  Ce  sont  pareillement  les  passions  antireligieuses  qui,  de 
nos  jours,  ont  fait  prononcer  la  séparation  de  l'Église  et, de  l'État  :  loui'de 
faute  au  point  de  vue  politique,  qui  fait  que  l'Église  échappe  à  la  main  mise 
sur  elle,  grâce  au  Concordat.  Faute  d'autant  plus  grave  de  la  part  du  Gou- 
vernement actuel,  dont  les  tendances  ne  sont  rien  moins  que  conservatrices, 
(lue,  dans  quelques  années,  remise  de  la  secousse,  l'Église  rendue  à  elle- 
même,  sans  jouer  de  rôle  apparent,  sera  un  appoint  sérieux  dans  la  lutte 
des  partis,  en  groupant  contre  le  socialisme  et  l'anarchie  avouée  ou  dissi- 
mulée les  différents  partis  conservateurs  républicains  et  autres,  leur  four- 
nissant un  point  d'appui  et  de  concentration  qui  leur  fait  défaut  aujour- 
d'hui et  est  cause  que  chaque  jour  ils  vont  perdant  de  plus  en  plus  de 
terrain. 

25,  Théodose.  —  S.  Ambroise  ou  S.  Grégoire  de  Nazianze  qui,  tous  deux, 
ont  été  les  conseillers  de  Théodose  le  Grand. 

33,  Continuoyent.  —.  La  discussion,  au  dire  de  Nicétas,  II,  4,  historien 
d'Andronic  Comnène,  avait  lieu  dans  la  tente  de  celui-ci,  entre  Euthyme, 
évêque  de  Patras,  et  un  nommé  .Jean  Ciname;  elle  portait  sur  ces  paroles 
de  l'Évangile  de  S.  Jean  :  «  Paler  major  me  est  (Mon  père  est  plus  grand 
que  moi)  »  ;  il  n'y  est  pas  question  de  Lapodius. 

35.  Platon.  —  Lois,  liv.  L 
588, 

1,  Euesque.  —  Cet  évêque  est  Osorius  qui  ne  dit  pas  de  ses  habitants  qu'ils 
n'épousent  qu'une  seule  femme  dans  toute  leur  vie,  mais  seulement  qu'ils 
n'en  épousent  qu'une  à  la  fois,  autrement  dit  qu'ils  ne  sont  pas  polygames 
(V.  la  note  suivante). 

2,  Isle.  —  L'île  en  question  semble  celle  qui  aujourd'hui  a  nom  Socotora; 
elle  est  située  dans  l'océan  Indien,  à  la  sortie  du  golfe  d'Aden.  Occupée 
par  les  Portugais  au  xv"  siècle  pour  surveiller  le  détroit  de  Bab-el-Man- 
deb,  elle  est  depuis  1886  sous  le  protectorat  de  l'Angleterre;  c'est  un  rocher, 
prolongation  en  quelque  sorte  du  cap  Guardafui,  peuplé  d'indigènes  pil- 
lards, de  naturel  fourbe,  de  religion  musulmane,  ne  vivant  guère  que  des 
épaves  des  nombreux  navires  qui  y  font  naufrage,  par  suite  des  brouil- 
lards qui  y  régnent  six  mois  de  l'année. 

17,  Nom.  —  Plutauque,  De  l'Amour,  12.  —  Autant  en  peuvent  dire  tous  les 
honmies,  de  tous  les  temps,  de  tous  les  lieux,  en  parlant  de  la  divinité;  mais 
leur  orgueil  égale  leur  ignorance  sur  ce  point  et  les  empêche  d'en  convenir. 

33,  Sacraire.  —  Sanctuaire;  de  sacrarium  qui  en  latin  a  même  signification. 

36,  Indisciplinatis.  —  Non  orthodoxes.  Ces  deux  mots  verbis  indisciplinalis 
ne  figurent  pas  dans  les  éditions  antérieures;  ils  ont  été  ajoutés,  à  titre 
d'amende  honorable,  pour  satisfaire  aux  observations  qu'à  Rome,  la  cen- 
sure lui  avait  faites  sur  l'emploi  de  certains  mots  et  expressions.  V.  N. 
II,  528  :  Conscience;  III,  474  :  Reuere. 


NOTES.         LIV.  I,  CH.  LVI.         VOL.  I,  PAG.  588.  F. 425 

38,  Mode.  —  Vulf/atre  (add.  de  88). 
590, 

5,  Instruisants.  —  Nouvelle  déclaration  de  l'auteur,  confirmant  combien 
en  lui  chrétien  et  moraliste  sont  deux.  V.  N.  I,  578  :  Icy. 

11,  Nostres.  —  Autrement  dit  les  Protestants.  —  L'éd.  de  88  port.  :  de  noslre 
auis. 

17,  Xenopbon.  —  Xénoplion  semble  être  nommé  par  erreur;  c'est  proba- 
blement du  second  Alcibiade  de  Platon  qu'il  est  ici  question. 

22,  Vitieuses.  —  Et  détestables,  aj.  l'éd.  de  80. 

22,  Pardonne.  —  Montaigne,  peut-être  par  réminiscence  du  latin  qui  a  été 
la  langue  de  ses  jiremiers  ans  et,  en  tout  cas,  conséquent  avec  ses  idées 
sur  les  rapports  qui  doivent  exister  entre  les  parents  et  les  enfants,  est 
pour  le  tutoiement  vis-à-vis  de  Dieu,  ce  père  par  excellence;  les  Protes- 
tants en  agissent  de  même. 

25,  Toutesfois.  —  le  vois  qu'en  nos  vices  mesmes. 

27,  Diuis.  —  Sknèque  a  dit  de  même  :  «  A  voix  basse,  ils  font  aux  dieux  des 
prières  exécrables;  et  si  quelqu'un  vient  à  les  écouter,  ils  se  taisent,  dé- 
couvrant à  Dieu  ce  qu'ils  ne  veulent  pas  qu'il  soit  su  des  hommes.  » 

32,  Desgosiller.  —  Égorger;  on  disait  aussi  esgosiller,  qui  s'est  conservé, 
mais  avec  un  sens  autre. 

33,  Petarder.  —  Faire  sauter  à  l'aide  d'un  pétard  (grosse  cartouche  remplie 
de  poudre). 

35,  Auarice.  —  Épicure  disait  que  «  si  les  dieux  accordaient  aux  mortels  tout 
ce  qu'ils  demandent,  le  genre  humain  serait  bientôt  anéanti  ». 
592, 

1,  Marguerite.  —  Marguerite  d'Angoulème,  sœur  de  François  P"^  et  femme 
d'ilenri  d'Albret,  roi  de  Navari-e. 

9,  Deuotion.  —  La  reine  conte  qu'à  l'aller  il  ne  s'arrêtait  jamais,  mais  qu'au 
retour  il  ne  manquait  pas  d'entrer  et  de  demeurer  longtemps  en  oraison. 
—  Louis  XI  demandait  à  la  petite  image  de  la  Vierge  qu'il  portait  à  son 
bonnet,  pardon  de  ses  méfaits  qui,  pour  lui  être  inspirés  par  la  politique, 
n'en  étaient  pas  moins  grands  et  fort  nombreux. 

11,  Matières.  —  Var.  de  88  :  mystères. 

20,  Requestes.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  prières. 

34,  Mot.  —  Platon,  second  Alcibiade.  —  Œdipe,  en  apprenant  qu'il  était  le 
meurtrier  de  son  père  et  le  mari  de  sa  mère  (V.  N.  I,  172  :  Enfans),  se  creva 
les  yeux  et  vécut  caché  dans  son  palais;  mais  il  en  fut  chassé  par  ses  fils 
Étéocle  et  Polynice,  et,  dans  son  irritation,  forma  le  vœu  rapporté  ici  et 
qui  se  réalisa  :  l'accord  entre  les  deux  frères  ne  fut  que  de  courte  durée; 
ils  en  appelèrent  aux  armes  et  se  livrèrent  un  combat  singulier  où,  dans 
leur  acharnement,  ils  se  tuèrent  réciproquement,  XIV°  siècle. 

35,  Prudence.  —  «  Qui  sait  ce  qui  est  bon  pour  l'homme  dans  la  vie?  »  Ec- 

CLKSIASTE,   VI,   12. 

594, 

2,  Expiation.  —  Générale,  aj.  les  éd.  ant. 
il,  Platon.  —  Lois,  IV. 

15,  Pénates.  —  Les  Pénates;  dieux  qui,  chez  les  Romains,  présidaient  aux 
biens  domestiques;  ils  sont  souvent  confondus  avec  les  dieux  Lares  qui' 
étaient  plutôt,  dans  les  familles,  chargés  du  soin  des  personnes  que  de  ce- 
lui des  richesses. 


CHAPITRE  LVIl. 

22,  Huict  ans.  —  Plutarque,  Calon  d'U tique,  20. 
24,  S'entretiennent  de.  —  Se  consolant  en  (var.  des  éd.  ant.). 
596, 

4,  Espérable.  —  On  meurt  de  vieillesse,  ou  pour  mieux  dire  d'usure,  à  tout 
âge,  suivant  le  degré  de  force  vitale   que  l'on  a   reçus  en  naissant,  et  le 


F. 426  ESSAIS  DE  MONTA K.NE. 

éprcuvos  survenues  postérieurement.  Toutefois  on  piMii  adinrHif  (ju'au- 
cune  autre  cause  de  mortalité  n'intervenant,  ce  degré  do  force  est  normal, 
quand  il  fait  durer  l'homme  jusqu'à  70  ans,  et  a  fortiori  au  delà.  Les 
tables  de  mortalité  de  Duvillard  établissent  que  sur  un  million  d'êtres 
humains  qui  viennent  au  monde  viables  :  117.000  arrivent  à  l'âge  de 
70  ans;  35.000  à  celui  de  80  ans;  1.000  à  90;  -.^07  à  100;  1  à  109;  aucun  à 
110.  —  Des  cas  <le  longévité  plus  considérable  sont  cependant  accusés, 
même  en  assez  grand  nombre,  dans  les  temps  reculés,  mais  seule  la  tra- 
dition les  rapporte  et  nous  n'avons  rien  qui  permette  de  les  contrôler. 
Les  plus  saillants  .sont,  d'après  la  Bible  :  Adam,  qui  vécut  930 ans;  Mathu- 
salem,  969;  d'api'ès  les  auteurs  profanes  :  la  Sibylle  d'Erythrée,  1000  ans; 
Épiménide,  en  Crète,  157  ans.  On  cite  aussi,  et  celui-là  avec  un  certain 
caractère  d'authenticité,  le  cas  d'un  Anglais,  qui  serait  né  en  1 183  et  mort 
en  1651,  aj'ant  vécu  169  ans;  dix  rois,  dans  ce  laps  do  temps,  se  sont  suc- 
cédé sur  le  trône  d'Angleterre. 

19,  Durer.  —  Les  chances  théoriques,  mais  non  effectives,  que  nous  avons 
d'arriver  à  tel  ou  tel  âge,  varient  suivant  celui  auquel  nous  sommes  par- 
venus. Ces  cliances  sont  actuellement  assez  exactement  déterminées  par 
les  tables  de  mortalité  :  Montaigne,  par  exemple,  qui  avait  quarante-deux 
ans,  quand,  vers  1574,  il  écrivait  ce  chapitre,  avait  plus  de  chances  de 
longévité,  infirmités  à  part,  que  lorsque,  n'ayant  que  trente- neuf  ans,  il 
écrivait  le  ch.  XIX"  de  ce  môme  livre.  V.  I,  112  et  N.  Autant.  —  Toutefois 
ces  indications,  résultat  de  statistiques,  qui  vont  acquérant  de  jour  en  jour 
plus  d'exactitude,  ne  sont  pas  immuables;  elles  accusent  un  accrois-soment 
constant  de  longévité.  La  vie  moyenne  qui,  avant  la  Révolution,  était  de 
29  ans,  .semble,  en  Franco,  être  de  46  ans  (15  pour  les  hommes,  47  pour  les 
femmes),  grâce  surtout  aux  mesures  prises  pour  la  conservation  des  nou- 
veau-nés et  des  enfants  en  bas  âge,  aux  progrès  de  l'ingiène  et  à  une 
plus  grande  préoccupation  do  l'homme  ]jour  sa  conservation,  quelque 
peu  aussi  à  l'avancement  des  sciences  médicales,  mais  ce,  il  faut  bien  le 
dire,  au  détriment  de  la  santé,  de  plus  en  plus  compromise  par  le  maintien 
à  l'existence,  à  force  de  soins  et  de  précautions,  d'individus  chétifs  et  per- 
pétuellement souffreteux;  la  sélection  qui  s'opérait  jadis,  se  faisant  moins 
bien  aujourd'hui,  ils  vont  transmettant  à  ceux  qu'ils  engendrent  les  tares 
dont  ils  sont  eux-mêmes  affectés,  que  viennent  aggraver  à  chaque  géné- 
ration le  surmenage  intellectuel  et  physique,  moins  d'exercices  fortifiants, 
moins  de  grand  air,  l'abus  de  l'alcool,  les  excès  et  la  continuité  des  jouis- 
sances de  toute  nature,  et  aussi  les  falsifications  de  plus  en  i)lus  nom- 
breuses et  nocives  des  denrées  alimentaires.  En  somme,  la  durée  de  la  vie 
humaine  s'accroît,  mais  à  tous  les  âges  on  se  porte  notablement  plus  mal; 
est-ce  progrès"? 

25,  Trente  ans.  —  Scétone,  Auguste,  12.  —  Les  lois  fi.xaient  chez  les  Ro- 
mains l'âge  de  31  ans  pour  l'obtention  de  la  questure;  37,  pour  l'édilité; 
40,  pour  la  préture;  43,  pour  le  consulat;  mais  on  accordait  souvent  des 
dispenses,  témoin  Scipion  Émilien  postulant  le  consulat  et  répondant  à 
quelqu'un  qui  lui  objectait  qu'il  n'avait  pas  l'âge  :  «  Je  l'aurai,  si  je  suis 
nommé.  En  81,  Sjdla  fit  rendre  une  loi  complémentaire  interdisant  de 
commander  une  armée  avant  d'être  questeur,  et  cohsuI  avant  d'en  avoir 
commandé  une;  et  elle  interdisait  d'être  nommé  une  seconde  fois  à  une 
même  charge  avant  deux  ans  d'intervalle. 

27,  Guerre.  —  Aulu  Geli.e,  X,  28. 

28,  Seiour.  —  Repos,  retraite. 

32,  Cettuy-ci.  —  Auguste,  dont  il  vient  d'être  parlé. 

34,  Trente.  —  Cette  émancipation  des  souverains  est  générale,  et  partout 
on  les  voit  exercer  le  pouvoir  royal  à  un  âge  où,  simples  particuliers,  ils 
ne  pourraient  gérer  leurs  propres  intérêts.  11  semble  qu'il  y  ait  pour  la 
gestion  des  affaii-es  publiques  des  grâces  d'état,  car  indépendamment  de 
cette  anomalie,  en  partie  justifiée  par  l'éducation  spéciale  dont  ces  princes 
sont  l'objet,  combien  de  nos  hommes  politiques  gèrent  les  nôtres,  qui,  au 


NOTES.         LIV.  I,  en.  F.VII.         VOL.  I,  PAG.  b96.  F.427 

su  et  connu  (le  tuiit  le  monde,  iio  savent  pas  gérer  les  "leurs  et  auxquels 
nous  ne  confierions  pas  nos  intérêts  privés;  que  les  incrédules  aillent  se 
renseigner,  auprès  des  trésoriers  de  nos  deux  Chambres,  sur  les  opposi- 
tions dont  sont  l'objet  les  traitements,  au  début  de  leurs  mandats,  de  nos 
dijputés  et  sénateurs. 

35,  Estre.  —  iMontaiguo  se  prononce  ici  pour  l'émancipation  complète  de 
l'homme  à  20  ans.  De  son  temps,  les  coutumes,  sur  ce  point,  étaient  va- 
riables; cependant,  en  général,  la  majorité  légale  était,  à  pou  près  partout, 
li.xée  à  21  ans,  mais  les  droits  qu'elle  concédait  étaient  restreints;  la  majo- 
rité parfaite,  qui  seule  permettait  de  disposer  des  immeubles,  n'avait  lieu 
qu'à  26  ans.  Depuis  la  Révolution,  sauf  sous  le  rapport  du  mariage,  excep- 
tion dont  se  poursuit  l'abrogation,  on  est  absolument  hors  tutelle  à  21  ans. 

37,  Arre.  —  Arrhe,  marque,  témoignage.  —  Pim,u>i>E  dk  Comines  dit  de  même  : 
«  11  faut  noter  que  tous  les  hommes  qui  jamais  ont  (^té  grands  et  fait  de 
grandes  chc^ses,  ont  commencé  fort  jeunes;  cela  tient  à  l'éducation,  ou 
vient  de  la  grâce  de  Dieu.  » 
598. 

29,  Tard.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  longtemps. 


LIVRE    SECOND 

CHAPITRE  PREMIER. 

600, 

(3,  Venus.  —  Son  audace  el  son  intrépidité  dans  les  dangers  l'avaient  fait 
tout  d'abord  appeler  ■<  fils  de  Mars  »  ;  mais,  par  la  suite,  ses  actions  ayant 
témoigné  des  qualités  tout  opposées,  on  l'appela  «  fils  de  Vénus  ».  Pi.u- 
TAitQKE,  Marius,  à  la  fin. 

8,  Chien.  —  Boniface  VIII,  d'un  caractère  tout  à  la  fois  (in,  impérieux  et 
violent,  eut  de  vifs  démêlés  [avec  l'empereur  d'Allemagne  et  surtout  avec 
le  roi  de  France  Philippe  le  Bel,  parce  qu'il  voulait  élever  la  puissance 
spirituelle  du  pape  au-dessus  de  la  puis-ance  temporelle  des  souverains. 
Arrêté  par  ordre  du  roi  de  France  qui  voulait  le  faii-e  juger  par  un  con- 
cile, il  fut  délivré  quatre  jours  après  par  le  peuple;  mais,  tombé  malade, 
les  uns  disent  par  suite  des  mauvais  traitements  qu'il  avait  subis,  de  dépit 
suivant  d'autres,  il  mourut  (1303).  —  Le  Dante,  qu'il  avait  voulu  faire 
périr,  l'a  placé  dans  son  enfer. 

12,  Mort.  —  Sénkque,  De  Clemenlia,  II,  1.  —  Quand  Néron  fit  cette  réponse  h 
Burrhus,  préfet  du  prétoire,  qui  lui  présentait  à  signer  la  condamnation 
de  deux  voleurs,  il  était  jeune,  venait  à  peine  d'être  élevé  au  pouvoir,  n'é- 
tait pas  encore  corrompu  par  la  toute-puissance  et  les  tlatteurs  de  son  en- 
tourage, et  son  caractère  atrocement  cruel  ne  s'était  pas  encore  révélé. 

18,  Potest.  —  L'i'd.  deSOaj.  :  C'esl  vn  mauuais  conseil  qui  ne  se  peut  chanijer 
(traduction  de  la  citation  qui  précède). 
602, 

6,  luges.  —  C.-à-d.  que  les  juges  les  plus  hardis  n'ont  pu  porter  sur  son  • 
,     caractère  un  jugement  sûr  et  arrêté. 

12,  Ancien.  —  Sénèque,  Epist.  20. 

17,  Mesure.  —  Certains  vices  peuvent  faire  naître  des  quaUt»;s  :  l'avarice 
produit  la  sobriété;  la  peur,  la  prudence;  la  défiance,  l'ordre;  l'orgueil,  la 
charité. 

21,  Constance.  —  «  La  prudence  est  le  principe  de  toutes  les  vertus;  le  cou- 
rage en  est  la  perfection;  l'une  nous  enseigne  la  route,  l'autre  nous  y  af- 
fermit. »  DÉMOSTHÈNE,  daus  le  Discours  funèbre,  qui  lui  est  attribué,  sur  les 
guerriers  morts  à  Chéronée. 


F.428  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

29,  Couche.  —  Le  caméléon,  petit  lézard  inoffensif  qui  a  une  couleur  gri- 
sâtre assez  mal  définie  qui  lui  est  propre,  mais  dont  la  nuance  change 
sous  l'effet  de  la  présence  des  objets  ambiants  dont,  par  reflet,  il  prend  la 
coloration. 

604, 

6,  Librement.  —  Certains  ont  vu  là  une  réfutation  embrjonnaire  du  libre 
arbitre  attribué  à  l'homme  qui  ferait  librement  ce  qu'il  veut,  mais  qui 
invinciblement,  fatalement  serait  astreint  à  vouloir  telle  chose,  plutôt  que 
telle  autre,  ce  qu'en  d'autres  termes  on  nomme  la  carte  forcée.  —  La  phrase 
elle-même  est  traduite  de  Sénèqle,  Epist.  52. 

12,  Mourir.  —  Diogkne  Laerce,  Vlll,  83.  —  Élien  prête  ce  mot  à  Platon. 

12,  Discours.  —  Cette  phrase  est  la  suite  de  celle  qui  finit  trois  lignes  plus 
haut  par  ces  mots  :  des  choses  aux  autres.  La  phrase  intermédiaire,  qui 
n"cst  point  dans  les  éditions  antérieures,  rompt  la  liaison  des  idées,  cas 
assez  fréquent  dans  les  Essais. 

14,  Touché.  —  C.-à-d.  celui  qui  a  posé  le  doigt  sur  une  des  touches  d'un  cla- 
vier, les  fait  résonner  toutes.  —  On  donnait  autrefois  le  nom  de  marches 
aux  touches  des  clavecins,  des  orgues,  etc. 

19,  Estât.  —  C.-à-d.  les  désordres  engendrés  par  les  guerres  civiles  de  l'époque. 

20,  Lucrèce.  —  Femme  romaine,  épouse  de  Tarquin  CoUatin.  Violée  par 
Sextus,  fils  de  Tarquin  le  Superbe,  roi  de  Rome,  elle  fit  l'aveu  de  son 
malheur  à  ses  proches  et  se  tua  sous  leurs  yeux,  en  demandant  vengeance 
(509)  ;  ce  fut  l'occasion  du  renversement  de  la  royauté  et  de  l'établisse- 
ment de  la  République. 

30.  Non  si  difficile.  —  Bonne  et  amiable  (var.  de  l'éd.  de  80). 

32,  Pointe.  —  C.-à-d.  quand  vous  n'aurez  pu  réussir  à  obtenir  les  faveurs 
de  votre  maîtresse.  —  Certains  pensent  qu'il  y  a  ici  une  faute  d'impres- 
sion, qu'il  faut  «  sailly  •  au  lieu  de  failly  (1'  s  initial  et  1'  f  ne  différant 
dans  les  caractères  d'imprimerie  de  l'époque  que  par  le  trait  horizontal 
que  celle-ci  porte  en  son  milieu)  ;  le  sens  serait  alors  :  Parce  que  vous  aurez 
•satisfait  votre  maîtresse.  Ceux  qui  en  tiennent  pour  cette  version,  s'ap- 
puient sur  le  membre  de  phrase  qui  précède  :  «  Comme  dit  le  compte  », 
que  l'on  croit  être  la  deuxième  nouvelle  de  la  troisième  journée  de  Boccace, 
intitulée  «  Un  Palefrenier  »,  où  il  est  question  d'un  homme  de  cet  état,  qui 
s'introduit  près  de  la  reine  des  Lombards  avec  laquelle  il  couche,  celle-ci 
s'imaginant,  avant  comme  après,  qu'elle  a  affaire  à  son  mari. 

34,  Heure.  —  Voltaire  a  exprimé  la  même  idée  : 

«  Et  l'amant  maltraité  prend  souvent  pour  vertu 

Les  fiers  dédains  d'un  cœur  qu'un  autre  a  corrompu.  ■ 

38,  Froidement.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  lâchement. 
606, 

1,  Vie.  —  Plltarque,  Pélopidas,  1. 

17,  Englouti.  —  En  1456,  pendant  les  opérations  se  rapportant  au  siège  de 
Belgrade,  défendu  par  Hunyade  et  où  échoua  Mahomet  II  qui  y  fut  blessé 
et  faillit  y  être  fait  prisonnier. 

20,  Lendemain,  —  Les  Espagnols  ne  disent  pas  d'un  homme  qu'il  est  brave, 
ils  disent  qu'il  fut  brave  tel  jour. 
.      24,  Autre.  —  Lasche,  port,  les  éd.  ant. 

29,  Simple.  —  Ce  composé  d'idées  contraires  qu'est  l'homme  est  constaté  par 
les  philosophes  de  tous  les  temps,  et  bien  souvent  a  été  donnée  en  expli- 
cation l'existence  en  lui  de  deux  âmes,  l'une  végétative  gouvernant  l'or- 
ganisme, l'autre  intellectuelle;  cette  doctrine  a  même  été  condamnée  en 
divers  conciles  et  en  dernier  lieu  et  d'une  manière  formelle  dans  le  con- 
cile œcuménique  de  Latran  en  1513.  —  Pascal,  d'après  Montaigne,  a  dit 
comme  lui,  copiant  môme  ses  expressions  :  «  Suyvons  nos  mouvements,  ob- 
servons-nous nous-mêmes  et  voyons  si  nous  n'y  trouverons  pas  les  carac- 
tères vivants  de  ces  deux  natures.  Tant  de  contradictions  se  trouveraient- 


NOTES.  LIV.  II,  Cil.  T.         VOL.   I,  PAG.  606.  F.429 

elles  dans  un  sujet  simple?  Cette  duplicité  de  l'homme  est  si  visible,  qu'il 
y  en  a  qui  ont  pensé  que  nous  avions  deux  âmes,  une  seule  leur  sem- 
blant incapable  de  telles  et  soudaines  variétés  d'une  présomption  dé- 
mesurée à  un  horrible  abattement  de  cœur.  »  —  Bacon  l'admet  :  «  L'une 
d'ordre  divin,  l'autre  matérielle.  »  —  En  tout  cas,  il  y  a  bien  incontestable- 
ment en  nous  deux  principes,  celui  du  bien  et  celui  du  mal,  qui,  au  début, 
sont  en  conflit  continu;  leur  degré  de  puissance  n'est  pas  le  même  chez 
tous,  non  plus  qu'à  tous  moments  chez  un  même  individu,  et  suivant  que 
l'un  ou  l'autre  l'emporte,  nous  agissons  bien  ou  mal.  L'homme  vertueux 
est  celui  qui  d'ordinaire  triomphe  de  la  tentation,  et,  à  la  longue,  cela  lui 
devient  naturel  :  le  principe  du  mal  est  vaincu  ;  il  demeure  encore,  mais  à 
l'état  latent.  C'est  l'inverse  qui  se  produit  chez  celui  qui  d'ordinaire  n'é- 
coute pas  la  voix  de  sa  conscience  :  elle  se  fait  de  plus  en  plus  faible  au 
fur  et  à  mesure  qu'on  l'écouduit  davantage  et  fmit  par  somnoler,  le  prin- 
cipe du  mal  l'emporte  et  règne  alore  sans  conteste;  chez  l'un  comme  chez 
l'autre,  l'habitude  est  devenue  une  deuxième  nature. 

08,  Véritable.  —  Véridique.  » 

608, 

4,  Distinguo.  —  Terme  de  logique,  emprunté  du  latin,  signifiant  :  Je  dis- 
tingue, qui  se  retrouvait  à  tous  propos  dans  les  discussions  scolastiques, 
faisant  le  pendant  de  ces  deux  autres  :  Concedo  (j'accorde,  j'admets)  et  Nego 
(Je  nie,  je  n'admets  pas). 

17,  Assaut.  —  Devant  l'ennemi,  l'homme  est  retenu  par  l'honneur  et  le  de- 
voir; sa  mort  est  exaltée  à  l'avance;  s'il  recule,  c'est  l'infamie  et  il  a  pour 
témoin  l'armée  entière;  dans  son  lit,  aucun  de  ces  mobiles  ne  le  soutient, 
sa  pensée  le  reporte  vers  ce  qu'il  a  sujet  de  regretter,  son  entourage  gé- 
mit, l'au-delà  l'inquiète,  souvent  ses  idées  sont  affaiblies;  les  circonstances 
sont  absolument  différentes,  il  est  naturel  que  l'état  d'âme  s'en  ressente. 

21,  Barbiers.  —  La  lancette  du  chirurgien.  Les  barbiers,  jadis,  faisaient  en 
partie  office  de  chirurgiens;  jusqu'en  1789,  ils  continuèrent  de  saigner  et 
de  panser  certaines  blessures. 

23,  Cicero.  —  Tusc.  Quœst.',  II,  27. 

34,  Pusillanimité.  —  La  superstition  dont  fit  preuve  Alexandre  le  Grand 
a  été  expliquée  par  ce  fait  que,  confiant  en  sa  fortune,  il  tenait,  pour  sou- 
tenir le  courage  de  ses  soldats,  à  faire  ratifier  les  entreprises  qu'il  conce- 
vait par  les  devins  qui  l'accompagnaient  et  passaient  aux  yeux  de  la  foule 
pour  être  les  interprètes  de  la  volonté  des  dieux;  et  à  cette  fin,  il  fallait  se 
les  concilier  pour  s'en  faire  des  auxiliaires.  Cette  appréciation  se  trouve 
confirmée  par  l'apostrophe  qu'il  adressa  à  l'un  d'eux  qui  se  montrait  dé- 
favorable à  une  attaque  qu'il  préparait  :  «  Si,  quand  tu  te  livres  aux  pra- 
tiques de  ton  art,  quelqu'un  intervenait,  tu  le  considérerais  probablement 
comme  gênant  et  fort  mal  venu.  —  Sans  doute.  —  Eh  bien,  que  penses-tu 
d'un  devin  superstitieux  qui,  lorsque  je  suis  occupé  de  choses  autrement 
sérieuses,  vient  se  jeter  à  la  traverse  en  me  parlant  des  entrailles  des  vic- 
times? ■' 

36,  Courage.  —  «  En  voyant  Clitus  tomber  à  ses  pieds,  la  colère  d'Alexandre 
s'évanouit;  il  arrache  la  javeline  du  corps  de  sa  victime  et  veut  s'en  frap- 
per; ses  gardes  le  retiennent  et  l'emportent;  il  passe  toute  la  nuit  et  le 
jour  suivant  à  fondre  en  larmes;  épuisé,  n'ayant  plus  la  force  de  crier  ni 
de  se  lamenter,  il  reste  étendu  par  terre  sans  proférer  une  parole,  ne  pous- 
sant que  de  profonds  soupirs  jusqu'à  ce  qu'Aristandre,  lui  remémorant  un 
songe  se  rapportant  à  cette  mort,  lui  représenta  que  ce  malheur  était  écrit 
et  sa  victime  prédestinée  à  pareille  fin,  ce  qui  amena  l'apaisement  dans 
son  esprit.  •>  Plutarque,  Alexandre. 


610, 


1,  Rapportées.  —  L'ex.  de  Bordeaux  porte  ici  intercalée  la  citation  sui- 
vante :  •■  Voluplalcm  contemnunl,  in  dolore  sunt  molles,  gloriam  negligunt, 
franguntuv  infamia  (Les  mômes  hommes  qui  méprisent  la  volupté,  montrent 
une  extrême  faiblesse  quand  ils  souffrent,  négligent  le  soin  de  leur  réputa- 


F. 430  ESSAIS  HE  MONTAIGNE. 

lion  et  ne  peuvent  supporter  sans  en  être  profondément  affectés  In  perte  dr 
l'honneur  et  de  l'estime  publif/ue).  >• 
'  4,  Visage.  —  Des  poingts  (var.  des  éd.  ant.). 

11,  Auau  le  vent.  —  Commo  souffle  le  vent. 

12,  Talebot.  —  Général  anglais  qui  se  signala  pendant  les  guerres  des  i-é- 
gnes  de  Charles  VI  et  Charles  VII;  fut  défait  et  tué,  ainsi  que  son  fils,  à 
la  bataille  de  Castillon  (1453),  non  loin  du  château  de  Montaigne;  a  ét<' 
inhumé  à  la  place  où  il  est  tombé,  son  tombeau  s'y  voit  encore.  —  En  par- 
lant de  lui,  qui  pendant  60  ans  combattit  contre  nous,  Montaigne  dit  : 
«  Nostre  Talbot  »,  peut-être  parce  qu'il  était  d'une  famille  originaire  du 
Limousin;  peut-être  aussi  parce  que  nul  plus  que  ce  preux  n'a  laissé 
meilleur  souvenir  en  Guyenne,  où  il  s'est  toujours  comporté  avec  justice 
et  humanité,  ne  manquant  jamais  à  sa  parole,  dans  un  temps  où  on  ne  s'en 
faisait  pas  faute,  et  dont  la  mort  fut  celle  d'un  héros. —  La  bataille  de  Cas- 
tillon est  le  dernier  fait  de  la  guerre  de  Cent  Ans;  c'est  là  que  pour  la 
première  fois  nous  fîmes  usage  de  canons. 

12,  Ancien.  —  Sénèque,  Epist.  71  et  72. 

23,  Qu'on.  —  L'Aréopage.  Cicéron,  De  Senectule,  7. 

25,  Tragédies.  —  Le  procès  intenté  à  Sophocle  sur  le  déclin  de  sa  vie  par 
l'un  de  ses  fils  avait  pour  objet  de  s'opposer  à  la  reconnaissance  d'un  autre 
comme  enfant  légitime  :  «  Ou  je  suis  un  imbécile,  dit  le  poète  dans  sa  dé- 
fense, ou  je  suis  Sophocle;  et,  dans  ce  cas,  je  ne  suis  pas  un  imbécile  »  ;  et. 
pour  convaincre  ses  juges,  il  leur  récita  un  fragment  de  son  Œdipe  à  Co- 
lone  qu'il  venait  d'achever,  celui  de  l'arrivée  d'Œdipe  dans  la  forêt  saci'ée, 
où  se  trouvent  plusieurs  passages  applicables  à  sa  propre  situation  et  à  la 
conduite  de  son  fds,  et  l'enthousiasme  qu'il  souleva  emporta  leurs  suf- 
frages. —  Le  fait  toutefois  n'est  pas  absolument  établi,  et  le  serait-il  qu'il 
ne  prouverait  pas  grand'chose;  on  peut  être  grand  poète  et,  comme  tout 
le  monde,  avoir  des  faiblesses  à  certains  moments. 

27,  Tirèrent.  —  Hérodote,  V,  20. 
612. 

8,  Gendarme.  —  Remplit  de  courage,  de  hardiesse.  —  A  proprement  parler, 
gendarmer  signifie  braver.  Pasquier,  dans  son  jugement  sur  les  Essais,  re- 
proche à  Montaigne  d'avoir  employé,  comme  dans  le  cas  présent,  des  mots 
dans  un  sens  incorrect,  •■  auxquels,  si  je  ne  m'abuse,  dit-il.  malaisément 
l'usage  donnera  vogue  ». 

CHAPITRE  IL 

23,  Pas.  —  C'est  sur  le  principe  contraire,  si  inique  par  lui-même,  qu'est 
fondée  notre  législation  pénale  :  la  même  peine  atteint  le  malheureux  qui 
vole  un  objet  de  peu  de  valeur,  et  le  banqueroutier  éhonté  qui  réduit  à  la 
misère  nombre  d'individus  dont  il  a  capté  la  confiance;  l'étendue  du  pré- 
judice commis  n'entre  pas  en  considération.  De  ce  fait,  le  faible  et  le  pau- 
vre sont  bien  plus  frappés  que  le  riche  et  le  puissant  :  leurs  peines  finies, 
ceux-ci  jouissent  impunément  du  fruit  de  leurs  larcins,  ceu.x-là  se  trouvent 
dans  une  position  pire  qu'avant. 

31,  D'acquest.  —  A  gagner. 

34,  Sien.  —  C.-à-d.  cherche  à  rendre  le  sien  plus  léger,  à  l'atténuer;  le  sou- 
lève pour  qu'il  ne  pèse  pas  autant  dans  le  plateau  de  la  balance.  —  La  Fon- 
taine, dans  sa  fable  de  la  Besace,  commente  cette  mànie  idée  :  «  Lynx  en- 
vers nos  pareils,  et  taupes  envers  nous  »  ;  c'est,  autrement  dit,  la  question 
de  la  paille  et  de  la  poutre  de  l'Évangile. 

37,  Maux.  —  «  La  sagesse  vaut  mieux  que  la  force,  et  l'homme  prudent  que 
l'homme  robuste.  •  Ecclésiaste,  VI,  1. 
614, 

9,  Crefîit.  —  D'après  ce  que  Montaigne  dit  quelques  lignes  plus  loin  des  Al- 
lemands servant  dans  nos  l'angs,  de  l'usage  qu'ils  font  de  grands  verres  à 


NOTES.         \A\.  Il,  CH.  IF.         VOI..  T,  PAG.  614.  F.431 

la  lin  dos  repas,  de  leur  façon  do  boire,  il  se  pourrait  que  co  soit  eux  qu'il 
veuille  designer  ici.  —  L'ivrognorie,  qui  s'est  bien  généralisée,  est  plutôt 
un  vice  des  pays  froids  que  du  midi,  parce  que,  dans  les  pays  do  vigno- 
bles, on  s'enivre  avec  du  vin,  dont  il  faut  pour  produire  l'ivresse  une  cer- 
taine quantité  et  qui  n'est  pan  malfaisant  quand  il  n'est  pas  frelaté,  tandis 
que,  dans  le  nord,  on  a  recours  à  l'alcool  qui  agit  beaucoup  plus  sous  un 
bien  moindre. volume,  et  avec  d'autant  plus  de  force  qu'il  est  de  plus 
mauvaise  provenance,  ce  qui  est  le  cas  le  plus  fréquent  :  c'est  alors  un  v(''- 
l'itable  poison,  dont  l'action  délétère  s'exerce  sur  l'organisme,  l'intelligence 
ot  le  moi-al  de  l'individu.  La  chimie  moderne  en  augmentant  chaque  joui- 
la  production,  et  aussi  malheureusement  la  nocivité,  en  même  temps  qu'elle 
on  réduit  le  prix  do  revient,  l'alcoolisme,  inconnu  aux  temps  jadis,,  va  so 
développant  de  plus  en  plus,  mal  d'autant  plus  redoutable  que  l'intoxica- 
tion des  parents  est  héréditaire  et  pèse  lourdement  sur  la  constitution 
physique  et  les  facultés  intellectuelles  des  enfants  à  naître,  comme  font 
sur  ceux  déjà  existants  la  misère  et  le  mauvais  exemple  qu'elle  introduit 
au  foyer  domestique. 
10,  Renuerse.  —  «  L'ivresse  est  un  acheminement  vers  la  folie.  »  Pvtiiagore. 

24,  D'autant.  —  Aussi  fréquemment  et  aussi  copieusement  qu'on  vous  y 
convie  par  les  toasts,  sorte  de  défis  courtois  qu'on  vous  porte  et  dont  la  for- 
mule au  temps  de  Montaigne  était  :  «  Je  bois  à  vous  »;  à  quoi  l'on  répon- 
dait :  -  Je  pleige  d'autant  »,  qui  peut  se  traduire  :  Et  moi  de  même.  —  Les 
.Juifs,  à  l'époque  de  .losèphe  (67),  étaient  divisés  en  plusieurs  factions;  pour 
se  défaire  do  lui,  ses  ennemis  lui  ayant  envoyé  un  émissaire  pour  l'attirer 
dans  un  guet-apens,  il  enivi-a  cet  émissaire  et  apprit  de  lui  les  mauvais 
dessoins  (|u'on  avait  sur  sa  personne.  Josf;PHE,  De  Vita  sua. 

20,  Yure.  —  Ces  deux  exemples  sont  tirés  de  Sknkque,  Epist.  83,  auquel,  dans 
ce  chapitre,  plusieurs  idées  sont  empruntées. 

30,  More  Lyaso.  —  Ln  citation  diffère  un  peu  du  texte  de  Virgile  dont  elle 
est  tirée. 

31,  Cassius.  —L'instigateur  du  complot  contre  César,  par  haine  de  la  tyran- 
nie et  aussi  parce  que  celui-ci  ne  s'i'tait  pas  prononéé  pour  lui  quand  il 
briguait  le  consulat;  ce  fut  lui  qui  détermina  Brutus,  son  beau-frère,  à  se 
mettre  à  la  tète  des  conjurés  (44). 

;35,  Rang.  —  Du  quai-tior  où  ils  logent,  du   mot  d'ordre,  do  leur  place  dans 
les  rangs. 
616, 

1,  Macédoine.  —  .Justin,  IX,  6.  —  Pausanias,  jeune  gentilhomme  macé- 
donien, outragé  par  Attale,  grand  de  Macédoine  qui,  dans  un  foStin,  l'a- 
vait enivré  pour  abuser  de  lui,  poignarda  Philippe,  quelque  temps  après, 
pour  se  venger  de  ce  qu'il  n'avait  pu  obtenir,  de  lui,  justice  de  cette  of- 
fense; Olympias,  mère  d'Alexandre  le  (îrand,  que  Philippe  venait  de  r('>- 
pudier  pour  épouser  la  sœur  d'Attalo,  fut  soupçonnée  d'avoir-  poussé  à  ce 
meurtre  (336). 

16,  Consent.  —  Qui  se  sentirait  coupable  de  ce  fait. 

22,  Vice.  —  On  peut  même  dire  que  les  Livres  saints  n'y  sont  pas  abso- 
lument opposés  :  <■  Donnez  à  ceux  qui  sont  affligés,  lit-on  aux  Proverbes, 
XXXI,  6  et  7,  une  liqueur  qui  soit  capable  de  les  enivrer,  et  du  vin  à 
ceux  qui  sont  dans  l'amertume  du  cœur;  qu'ils  boivent  et  qu'ils  oublient 
leur  pauvreté  et  perdent  pour  jamais  la  mémoire  de  leur  douleur.  » 

25,  D'autant.  —  C.-à-d.  de  se  donner  liberté  de  boire  autant  qu'ils  veulent. 
La  suppression  de  ce  complément  «  d'autant  "  amènerait  un  sens  tout 
opposé  et  signifierait  s'exempter  de  boire. 

25,  L'ame.  —  Ce  reproche  de  s'adonner  à  l'ivrognerie  a  été  adressé  à  maints 
hauts  personnages,  entre  autres  :  à  Philippe  de  Macédoine;  à  son  fils 
Alexandre;  à  l'empereur  Trajan;  à  Michel  III,  empereur  d'Orient  (842  à  867), 
surnommé  l'Ivrogne;  à  Selim  II,  empereur  ottoman,  le  vaincu  de  Lé- 
pante,  auquel  fut  donné  ce  môme  sobriquet:  à  Pierre  le  (irand  de  Kussio 
(1672  à  1725). 


F.432  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

27,  Ferunt.  —  Ce  qui  ne  veut  pas  dire  que  Socrate  s'enivrât;  aussi  bien 
sous  ce  rapport  que  sous  tous  autres,  ses  mœurs  étaient  irréprochables,  et 
rien,  dans  les  accusations  portées  contre  lui  par  ses  ennemis,  ne  porte  à 
supposer  le  contraire.  V.  III,  690. 

■*'S.  Ce  censeur...  autres.  —  El  la  vraye  Image  de  la  verlu  sloique  (vai-.  des 
éd.  aut.). 

30,  Vertus.  —  .I.-H.  Rousseau  a  ainsi  paraphrasé  ces  deux  vers  d'Horace  :  ^ 

La  vertu  du  vieux  Galon,  Était  souvent,  nous  dit-on, 

(liiez  les  nomains  tant  prônée,  De  falerne  enluminée. 

«  On  a  reproche  à  Caton  l'Ancien  de  s'enivi'er;  ceu.x  qui  lui  adressent  ce 
reproche  me  feront  plus  facilement  voir  une  vertu  qu'un  vice  chez  Ca- 
ton; il  réjouissait  par  le  vin  son  esprit  fatigué  des  affaires  publiques.  » 
Sénkque.  —  Pi.uTAKQUE  ne  scmblc  pas  admettre  cette  sorte  de  réhabilitation  : 
«  Au  coniinencement,  dit-il,  Caton  l'Ancien  ne  consacrait  que  fort  peu  de 
temps  à  ses  repas,  ne  buvant  qu'un  seul  coup  ;  après  quoi,  il  se  levait;  mais, 
dans  la  suite,  il  prit  plaisir  à  boire  et  passait  souvent  une  grande  partie  de 
ses  nuits  à  table.  »  —  V.  N.  II,  586  :  Caton  le  Censeur. 

oii,  Cyrus.  —  Pi.utakque,  Artaxerxès,  2.  —  Il  s'agit  ici  de  Cyrus  le  Jeune.  V. 
N.  I,  324  :  Perses. 

36,  Paris.  —  Célèbre  par  son  avarice,  qui  lui  valut  de  Buchanan  une  épitaphe 
en  latin  dont  voici  la  traduction  :  •  Ci-gît  Silvius  qui  jamais  ne  donna  rien 
gratis;  mort,  il  gémit  de  ce  que,  gratis,  tu  peux  lire  ceci.  »  —  Silvius  pa.s- 
sait  pour  l'homme  de  son  temps  parlant  la  langue  latine  avec  le  plus  do 
pureté  et  d'élégance. 

38,  S'engourdir.  —  C'était  aussi,  paraît-il,  l'avis  d'Hippocrate.  Payf.n.  — 
L'éd.  de  8<S  aj.  :  Platon  luy  attribue  le  mesme  effect  au  sendce  de  l'esprit. 

.39,  Affaires.  —  Hékodote,  I,  133,  et  autres  auteurs.  —  Les  Perses  discutaient 
bien  le  verre  en  main  des  affaires  sérieuses,  mais  sans  prendre  de  décision, 
laquelle  était  toujoure  remise  au  lendemain  où  la  discussion  reprenait 
alors  qu'ils  étaient  de  sang-froid. 
618, 

27,  Lots.  —  Dix  bouteilles,  huit  litres. 

34,  Ressiners.  —  Goûter,  collation  qu'on  fait  après  le  diner;  vient  de  re- 
caenare,  fait  de  cwna,  dîner,  le  repas  du  milieu  de  la  journée.  —  «  U  n'est 
desjeuner  que  d'escholiei-s;  dipner  que  d'advocats;  ressiner  que  de  vigne- 
rons; souper  que  de  marchands.  • 

40,  L'amour.  —  «  Sans  Cerès  et  Bacchus,  Vénus  est  languissante.  »  Térence, 
Eunuque;  contradiction  qui  n'est  qu'apparente,  Montaigne  ne  parlant  ici 
que  de  l'abus  du  vin  poussé  jusqu'à  l'ivresse. 
620, 

6,  Marc  Aurele.  —  Cette  histoire  de  Marc-Aurèk  ou  \' Horloge  des  Princes, 
parue  en  1629  à  Valladolid  (Espagne),  est  présentée  par  les  critiques  de 
l'époque  comme  un  tissu  d'inventions  indignes  d'un  écrivain  qui  se  res- 
pecte et  a  fortiori  d'un  évoque  (Gueraha,  qui  en  était  l'auteur,  était  évoque 
de  Cadi.x);  cet  ouvrage,  nonobstant  très  estimé  en  Espagne  par  ses  contem- 
porains, a  été  traduit  en  français  deux  ans  après  sa  publication  et  en  plu- 
sieurs autres  langues. 

15,  Barre.  —Jeter  la  barre;  cet  exercice  a  été  remis  en  pratique  depuis 
qu'en  ces  derniei-s  temps  la  gymnastique  de  chambre  est  en  faveur;  c'est 
ce  qui  s'exécute  soit  avec  des  haltères,  soit  des  boules  accouplées  par  une 
barre. 

16,  Plombées.  —  Madame  i>e  Genlis  faisait  porter  de  semblables  souliers  à 
ses  élèves  Louis-Philippe  d'Orléans,  devenu  l'oi  de  France,  et  sa  sœur  Madame 
Adélaïde. 

16,  Prim-saut.  —  De  son  agilité;  littéralement  du  premier  saut.  —  Prin  ou 
prim  est  un  vieux  mot  qui  signifie  premier  ;  il  nous  reste  dans  «  printemps  ••. 


iNOTES.        LIV.  Il,  CH.  II.        VOL.  I,  PAG.  620.  F.433 

primum  tempus.  De  primsault  est  venu  «  prirasaultier  »,  dont  Montaigne 
se  sert  ailleurs  en  pariant  de  lui-même  et  qui,  encore  on  usage,  signifie  un 
homme  de  prompte  décision,  prenant  parti  d'après  sa  première  impression 
(V. X.  II,  <>4  :  Primsautier). 

17.  Miracles.  —  Au  nombre  de  ces  petits  miracles,  on  peut  ranger  la  nais- 
sance de  son  dernier  fils  Mathecoulom,  né  le -20  août  1560,  aloi-s  que  lui- 
même  était  du  29  septembre  1495;  ce  Benjamin  avait  donc  été  engendré  à 
plus  de  64  ans. 

18,  Alaigresses.  —  De  notre  agilité,  ou  plutôt  de  notre  peu  d'agilité;  vient 
du  latin  alacritas,  qui  a  même  sens  qu'agililas. 

21,  Propos.  —  De  la  chasteté. 

22,  Nommée.  —  Qui  méritât  d'être  mal  famée,  qui  eût  mauvaise  réputation. 
30,  Italie.  —  Le  père  de  Montaigne,  Pierre  Eyquem,   écuyer,  seigneur  de 

Montaigne,  était  né  à  Montaigne  en  1495  et  }•  mourut  en  1568.  11  demeura 
plusieui-s  années  aux  armées,  fit  la  guerre  en  Italie  sous  Charles  VII,  fut 
maire  de  Bordeaux  de  1554  à  1556;  occupa  un  siège  de  conseiller  à  la  cour 
des  aides  de  Périgueux  en  1.554,  quand  cette  cour  fut  créée,  et  le  transmit 
l'année  suivante  à  son  fils;  en  cette  même  année   1554,  il  reconstruisait 
l'habitation  de  son  domaine  qu'il  fortifia,  la  mettant  en  état  de  se  défendre, 
ce  qui    n'était  pa.s  superflu,  à  cette  époque  où  pour  sa  sûreté   il  fallait 
compter  plus  sur  soi-même  que  sur  les  pouvoirs  publics.  Pierre  Eyquem 
avait  épousé  en  1528  Antoinette  de  Louppes  qui  mourut  en  1597;  il  en  eut 
huit  enfants,  cinq  fils  dont  Michel  Montaigne  était  l'aîné  et  trois  filles:  elle 
était  protestante,  lui-même  était  catholique;  deux  de  leurs  enfants  (un  fils 
et  une  fille)  furent  protestants. 
30,  Bouteilles.  —  Au  sujet  qui  nous  occupe,  qui  a  ti'ait  à  l'ivrognerie. 
33,  Plaisir.  —  Nalurel  (add.  de  80). 
622, 

3,  Prix.  —  Quoique  plus  réservé  ici  que  dans  d'autres  passages  de  son 
livre,  Montaigne  n'en  reste  pas  moins  très  Compréhensible. 
10,  Manger.  —  Les  Orientaux  ne  boivent  pas  pendant  les  repas,  mais  seu- 
lement lorsqu'ils  ont  fini;  ils  étaient  étonnés  de  voir,  en  Egypte,  les  fran- 
çais faire  autrement.  Payen. 
13,  A  mesme.  —  Aussitôt  que,  lorsque. 
15,  Anacbarsis.  —  Diogène  L.\erce,  I,  104. 
lît,  Platon.  —  Lois,  liv.  II. 

20,  Ans.  —  Une  loi,  portée  par  Zaleucus,  défendait  aux  Locriens,  sous  peine 
de  mort,  de  boire  du  vin,  à  moins  que  ce  ne  fût  comme  médicament  et 
sur  l'ordre  d'un  médecin.  —  A  Marseille,  il  en  était  une  prescrivant  à  la 
femme  de  ne  boire  que  de  l'eau.  —  A  Rome,  le  vin  était  interdit  aux  es- 
claves, aux  femmes  libres  et  aux  adolescents  jusqu'à  trente  ans;  une  dame 
romaine  ayant  forcé  le  tiroir  où  son  mari  serrait  la  clef  du  vin,  fut  con- 
damnée à  mourir  de  faim;  Mécénius  tua  la  sienne  pour  en  avoir  bu  et  fut 
absous.  Salmuth. 
25,  Loix.  —  Liv.  II,  vers  la  fin. 

3,'>,  Publiques.  —  «  Ce  n'est  point  aux  rois  de  boire  du  vin,  ni  aux  puissants 
de  rechercher  les  liqueurs  fennentées,  de  peur  qu'en  buvant  ils  n'oublient 
la  loi  et  ne  faus.sent  le  droit  de  tous  les  malheureux.  »  Livre  des  Proverbes, 
XXX,  4  et  5. 
624, 

'   1,  Enfants.  —  Cette  exception  concernant  aussi  bien  les  femmes  que  les 
liommes,  pour  observer  le  précepte  de  Platon,  ils  auraient  donc  dû  se 
donner  le  mot,  quand  ils  étaient  dans  cette  intention.  Coste. 
.1,  Pur.  —  DlOGKNE  Laerce,  II,  120. 

5,  Arcesilaûs.  —  Diogène  Larhce,  IV,  44.  —  «  On  assure  que  Solon  et  Arcé- 
silas  se  livraient  au  plaisir  du  vin,  »  dit  aussi  Sénèque. 
7,  Sapientise.  —  Citation  donnée  comme  parodie. 

17,  Amoureux.  —  Lucrèce  était  sujet  à  des  accès  de  fi-énésie,  maladie  qui 
provenait,  dit-on,  d'un  philtre  que  lui  avait   fait    prondiV  une   maîtresse 

essais    de    MONTAIGNE.   —  T.    IV.  28 


F.434  ESSAIS  DE  MONTAIGNE, 

jalouse;  il  finit  par  so  donnor  la  mort  dans  un  de  ses  accès;  il  avait  44  ans. 

:>3,  Desespérée...  enrouée.  -  Les  éd.  ant.  port.  :  vaincue  du  mal,  au  moins 
oomme  estant  en  vne  aspre  meslée. 

35,  Putet.  —  Montaigne  détourne  ici  le  sens  de  ce  vers  de  Térence  pour 
l'adapter  à  sa  pensée. 

:!G,  Descharger.  —  Dispenser,  exempter. 

11,  lusques  là.  -  Plutarque,  Publicola,  3  —  Le  (ils  de  Brutus  et  son  neveu 
avaient  conspiré  pour  le  rétablissement  des  Tarquins  (509);  celui  de  Man- 
lius  Torquatus  avait,  contre  son  ordre,  dans  une  guei-re  contre  les  Latins, 
accepté  un  défi  d'un  ennemi  et  l'avait  vaincu  en  combat  singulier  (337). 
Tous  deux,  le  premier  consul,  le  .second  dictateur,  prononcèrent  eux-mêmes 
la  sentence  de  mort  et  la  firent  exécuter  en  leur  présence.  V.  N.  I,  311  : 
Reng.  —  Au  dire  de  Plutarque,  Darius,  roi  des  Perses,  aurait  agi  comme 
fit  Brutus  à  l'égard  de  son  fils  Ariobarzan  qui  entretenait  des  intelligences 
avec  Alexandre. 
626, 

4,  Secte.  —  Celle  des  Stoïciens.  V.  N.  I,  18  :  Stoiques. 

G,  Moite.  —  Celle  d'Épicure.  V.  N.  I,  30  :  L'aduenir. 

11,  Pilez.  ~—  DiÔr.KNE  Laeuce,  IX,  58. 

14,  L'autre.  —  C'est  ce  que  Prudence,  liv.  Des  Couronnes,  hymne  II,  401, 
fait  dire  à  S.  Laurent.  ^  Celui-ci  était  diacre  tt  trésorier  de  l'Église  de 
Rome,  quand  éclata  en  258  la  persécution  contre  les  Chrétiens  de  l'empe- 
reur S^alérien.  11  refusa  de  livrer  le  trésor  dont  il  était  gardien  et  le  dis- 
tribua aux  pauvres.  Pour  l'en  punir,  il  fut  d'abord  déchiré  à  coups  de  fouet 
par  le  bourreau,  puis  attaché  à  un  gril  sous  lequel  étaient  des  charbons 
ardents. 

14,  losephe.  —  De  Maccab.,  8. 

23,  Acharne  les.  —  Ces  paroles,  sans  être  textuelles  d'aptes  le  récit  qu'en  fait 
l'historien,  qui  donne  en  grand  le  supplice  des  sept  frères  Macchabées  et 
de  leur  mère  martyrisés  (167)  pour  s'être  refusés  à  manger  de  la  viande 
de  porc  proscrite  par  la  religion  juive  à  laquelle  ils  appartenaient,  repro- 
duisent ce  que  dans  l'ensemble  chacun  d'eux  a  dit  et  que  Montaigne  met 
dans  la  bouche  d'un  seul. 

27,  'Hffôeisiv.  —  Ari-u  (Jeli.e,  IX,  5;  Diot.i':.\E  Laerce,  VI,  3;  Montaigne  traduit 
ces  mots  avant  de  les  citer. 

32,  Luy.  —  Sénèque,  Epist.  66  et  92,  etc.  —  Ce  passage  confirme  au  sujet 
d'Epicure  ce  que  relate  la  note  citée  plus  haut,  I,  30  :  L'aduenir,  et  va  à 
rencontre  du  reproche  de  sensualité  que,  par  ignorance,  on  est  porté  à  lui 
adresser. 
628. 

1,  Siège.  —  Lorsqu'elle  est  dans  son  état  normal. 

8,  Premiers.  —  On  conte  qu'en  1756,  loi's  de  la  prise  de  Port-Mahon  par  le 
duc  de  Richelieu  sur  les  Anglais,  forteresse  qui  passait  pour  imprenable, 
ceux-ci  manifestant  leur  étonnement  que  l'assaillant  eût  pu  escalader  la 
muraille  rocheuse  qui  fermait  l'enceinte  là  où  elle  avait  été  forcée,  les 
mêmes  qui  avaient  pénétré  dans  la  place  par  ce  point,  essayèrent  de  re- 
nouveler cet  exploit,  mais  n'étant  plus  surexcités  parla  chaleur  du  combat, 
ne  purent  y  parvenir. 

10,  Dict.  —  Dans  son  dialogue  de  Vlun. 

12,  Aristote.  —  Problem.,  30. 

13,  Folie.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  fureur. 
17,  Argumente.  —  Dans  le  Timée. 

CHAPITRE  III. 

Il  n'est  question  qu'à  la  fin  de  ce  chapitre  de  ce  qui  fait  l'objet  de  son 
en-tête,  qui  ne  s'expliquerait  guère,  par  ce  seul  fait,  si,  se  rappelant  ce  pas- 
sage )tle  Str^bon  :  «  C'est  un  bel  usage  de  l'île  de  Ceos  que,  lorsqu'on  ne 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  III.        VOL.  I,  PAG.  628.  F.43a 

peut  plus  vivre  avec  honneur,  on  ne  vivo  pas  misérable  »,  on  ne  se  disait  que 
Montaigne  a  tout  simplement  intervei-ti  l'ordre  de  son  sujet  et  l'a  commenté 
avant  de  l'exposer. 

24,  Cathedrant.  —  Docteur,  celui  qui  enseigne  en  chaire. 

21,  Volonté.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  sacro-sainle  volonté. 

20,  Contestations.  —  Dans  ce  chapitre,  l'auteur  penche  visiblement  pour  le 
suicide;  mais  ne  voulant  pas  mettre  les  théologiens  contre  lui,  il  débute 
en  rééditant  son  adhésion  à  tout  ce  qui,  chez  eux,  est  de  princ|i>e,  ainsi 
qu'il  agit  chaque  fois  qu'il  va  émettre  une  proposition  tant  soit  peu  hardie 
et  en  opposition  avec  les  idées  en  cours,  déclarant  que  telle  n'est  ])as  sa 
croyance  et  qu'il  ne  fait  qu'enquérir  et  débattre.  — .I.-.I.  Rousseau,  dans  ses 
fameuses  lettres  pour  et  contre  le  suicide  (Nouvelle  Héloïse,  liv.  II,  lettres 
1  et  2),  a  puisé  ici  plusieurs  des  arguments  qu'il  met  en  avant. 

26,  Philippus.  —  En  338,  après  la  bataille  de  Chéronée.  —  Cet  exemple  et 
les  suivants  sont  tirés  de  Plutau^ue.  Apophth.   des  Lacédémoniens. 

:"î().  Agis.  —  Agis  I,  roi  de  Sparte. 

•  Qui  sait  mourir,  n'a  plus  de  maître.  »  Sit.Lv  Prudhomme. 

;{1,  Viiire.  —  Vraiement  (add.  des  (kl.  ant.). 
630, 

3,  Mesme.  —  Les  Romains  avaient  rendu  un  décret  autorisant  à  se  tuer 
quiconque  auijuel  la  vie  avait  cessé  de  plaire.  —  Montesquieu,  .I.-.I.  Rous- 
seau se  prononcent  en  faveur  du  suicide;  Madame  de  Staei,  le  présente 
comme  un  acte  héroïque.  V.  N.  I,  632  :  Contraste. 
7,  Maison.  —  Son  maître  lui  demandait  ■<  le  pot  à  pisser  »,  l'enfant  refusa; 
son  maître  insistant,  il  préféra  se  tuer  (|ue  d'accomplir  ce  qu'il  considérait 
comme  déshonorant. 

1(1,  Volontiers.  — En  330,  à  la  suite  du  refus  qu'ils  faisaient  de  lui  donner 
ciiKlMante  de  leurs  enfants  en  otage.  V.  N.  I,  226  :  Païs. 

12,  Dit.  —  Celui  qui  parle  ainsi,  c'est  Sé.ni^ique,  Epist.  70. 

1"),  Romains.  —  Tacite,  Annale.s,  XIII,  56.  —  Boiocalus,  chef  d'une  peuplade 
de  Germains,  revendiquait  des  terres  disponibles,  pour  prix  de  sa  fidélité 
envers  Rome;  déçu  de  sa  demande,  il  (it.  cette  réponse  et  tenta  d'acquérir 
parla  force  ce  qu'il  ne  pouvait  obtenir  autrement;  mais  le  sort  des  armes 
lui  fut  défavorable,  lui  et  ses  gens  furent  exterminés  (58). 

25.  Maladie.  —  La  plupart  dé  ces  idées  sont  de  Sé.nèque,  Epist.  di)  et  70. 
41,  Médiane.  —  C'est  la  veine  qui  paraît  dans  le  pli  du  coude. 

632, 

2,  A  tuer...  insensibles.  —  Elvescut  depuis  ayant  cette  partie  du  corps  morte 
(var.  des  éd.  ant.). 
:J,  Insensibles.  —  Pline,  Nal.  liist.,  XXV,  3.  —  Cicéron  le  cite  comme  un 
critique  émérite  qui  distinguait  aisément  de  quels  auteurs  étaient  tels  ou 
tels  vers  qu'on  lui  citait,  tellement  il  était  fait  à  la  manière  de  chacun, 
(j,  Stoïciens.  —  Ckéron,  De  Finibus,  III,  18. 
11,  Hegesias.  —  Diogène  Laekce,  94. 
20,  Speusippus.    -  Diogène  Laerce,  IV,  3. 

22,  Contraste.  —  Eurii>ide  attache  au  suicide  une  sorte  de  (létrissure;  —  Pv- 
iiiA(;0RE  dit  que  l'homme  est  à  son  poste  comme  une  sentinelle  et  qu'il  ne 
peut  l'abandonner  sans  l'ordre  de  son  général;  —  Platon  érigeait  en  prin- 
cipe que  nous  ne  devons  pas  quitter  le  poste  où  les  dieux  nous  ont  placé; 
—  Aristote  le  tient  pour  une  lâcheté  ;  —  Cicéron  met  ces  paroles  dans  la  bou- 
che de  Paul-Émile,  parlant  à  Scipion,  son  fils  adoptif  :  «  Vous  devez  cons- 
tamment retenir  votre  âme  dans  le  corps  où  elle  a  son  poste,  autrement 
vous  seriez  coupable  de  rébellion  envers  la  bonté  divine  »  ;  —  Martial  opine 
dans  le  même  sens  dans  plusieurs  de  ses  épigrammes  :  ■<  11  est  bien  facile 
de  mépriser  la  vie,  quand  on  est  dans  le  besoin;  le  véritable  courage  con- 
siste à  soutenir  dignement  sa  misère  ».  «  Tandis  que  Fannius  fuyait  son 
ennemi,  il  se  tue  lui-même;  n'est-ce  pas,  je  vous  le  demande,  une  étrange 


F.436    .  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

folie,  que  de  se  tuer  pour  échappera  la  mort?  »  «  Je  n'approuve  pas  un 
homme  qui  achète  la  renommée  au  prix  de  son  sang,  qu'il  lui  est  aisé  de 
répandre;  j'estime  celui  qui  peut  se  rendre  digne  de  louanges  sans  se 
donner  la  mort.  »  —  Sénèque  :  «  Mourir  ainsi,  c'est  s'avouer  vaincu.  »  — 
S.  Augustin  dit  que  c'est  à  tort  qu'on  a  exalté  Lucrèce,  Caton  et  d'autres 
qui  se  sont  abandonnés  au  suicide.  —  Napoléon  :  «  S'abandonner  au  cha- 
grin sans  y  résister,  se  tuer  pour  s'y  soustraire,  c'est  se  retirer  du  champ 
de  bataille  avant  d'avoir  vaincu.  »  —  Lamartine  :  «  Quant  à  moi,  je  serais 
déjà  mort  mille  fois  de  la  mort  de  Caton,  si  j'étais  delà  religion  de  Caton; 
mais  je  n'en  suis  pas,  j'adore  Dieu  dans  ses  desseins;  obéir  à  Dieu,  voilà 
la  vraie  gloire;  mourir,  c'est  fuir.  »  V.  N.  I,  630:  Mesme. 

er  II  est  plus  grand,  plus  difficile, 
De  souffrir  le  malheur  que  de  s'en  délivrer,  t  M""=  Deshodlières. 

22,  Plusieurs.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  outre  l'authorilé  qui  en  défendant  Vliomi- 
cide,  y  enueloppe  l'homicide  de  soy-mesme  :  d'autres  philosophes... 
'    30,  Caton.  —  V.  N.  III,  324  :  Regulus;  N.  II,  424  :  Premier. 
634, 

28,  Vsque.  —  Ssepc  vsque  (var.  de  80). 

32,  Loix.  —  Liv.  LX. 

42,  Desdaigner.  —  L'assertion  n'est  pas  établie  d'une  manière  absolue.  Cer- 
tains cas  de  suicide  semblent  avoir  été  constatés  chez  quelques  animaux. 
Outre  ce  qu'on  dit  du  scorpion  qui,  entouré  de  charbons  ardents,  se  pique 
de  son  propre  dard  pour  se  donner  la  mort,  Montaigne  donne  comme  exem- 
ple d'attachement  (II,  172)  le  fait  de  deux  chiens  se  jetant  d'eux-mêmes 
dans  les  bûchers  où  brûlaient  les  corps  de  leurs  maîtres.  On  cite  comme 
s'étant  laissé  mourir  de  faim  le  cheval  de  Nicomède,  roi  de  Bithynie,  après 
que  celui-ci  eut  été  tué  (N.  II,  184  :  Ora);  et  Varron  en  mentionne  (N.  II, 
170  :  Parenté)  un  autre  qui  se  serait  de  lui-même  précipité  et  brisé  la  tête, 
parce  qu'on  venait  de  lui  faire  sailhr  sa  mère. 
636, 

5,  'EîaYwyrjv.  —  «  Sortie  raisonnable  »  ;  c'était  l'expression  employée  par  les 
Stoïciens.  Diogène  Laerce,  VIII,  130. 

1 1 ,  Milesiennes.  —  Plutarque,  Des  Faits  vertueux  des  femmes. 

11,  Reliques.—  Restes;  du  latin  reliquiae  qui  a  même  signification.  Reliques 
en  français  ne  se  dit  plus  guère  que  des  saints  quç  l'on  conserve  et  propose 
à  la  dévotion  des  fidèles. 

15,  Ville.  —  En  Allemagne,  de  1880  à  1903,  on  a  relevé  1.152  cas  de  suicide 
de  garçons  et  de  fillettes  dans  les  écoles,  dont  812  âgés  de  moins  de  15  ans, 
soit  44  par  an,  sur  lesquels  un  tiers  par  peur  de  punition. 

28,  Fortune.  —  Plutarque,  Agis  el  Cléoméne,  14.  —  Cléomène  III,  roi  de 
Sparte,  qu'il  s'était  aliéné  par  ses  efforts  pour  y  rétablir  les  institutions  de 
Lycurgue,  battu  à  Seliasie  (222)  par  Antigone  roi  de  Macédoine,  s'embar- 
quait pour  passer  en  Egypte  où  il  allait  chercher  un  asile  et  sohiciter  des 
secours,  quand  eut  lieu  entre  lui  et  Therj^cion,  un  de  ses  plus  fidèles  parti- 
sans, le  fait  dont  il  est  ici  question.  Trois  ans  après,  malgré  toute  sa  téna- 
cité, Cléomène  suivit  l'exemple  de  Therycion,  le  roi  d'Egypte  qui  l'avait 
accueilli  étant  mort  et  son  successeur  ayant  manifesté  à  son  égard  des  dis- 
positions tout  autres. 

34,  Ancien.  —  Sénèque,  Epist.  13. 
638, 

9,  Si.  —  De  tel  biais  (var.  des  éd.  ant.  à  88). 

10,  Inconuenient.  —  En  67,  alors  que  Josèphe,  gouverneur  de  Galilée  au 
nom  du  grand  conseil  de  Jérusalem  en  insurrection  contre  les  Romains,  se 
trouvait  à  Tarichée  en  butte  à  une  sédition  excitée  contre  lui,  sous  prétexte 
qu'il  s'était  approprié  des  prises  qui  provenaient  d'extorsions  et  que,  pour 
cette  cause,  il  avait  fait  rendre  à  ceux  qui  en  avaient  été  dépouillés.  Etant 
parvenu  à  échapper  par  la  fuite  à  ceux  qui  avaient  dessein  de  le  tuer,  puis 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  III.         VOL.  I,  PAG.  6.38.  F.  437 

à  so  faire  ocoutor  par  le  peuple,  il  finit  par  le  mettre  de  son  côté.  Josèphe, 
De  Vita  sua. 

13,  L'occasion.  —  A  la  première  bataille  de  Philippes  (en  Macédoine)  qu'après 
la  mort  de  César,  Antoine  et  Octave  livrèrent  à  Cassius  et  à  Brutus  qu'ils 
poursuivaient,  Cassius,  qui  commandait  à  l'aile  gauche,  la  voyant  plier  et 
cro\'ant  à  tort  Brutus  battu  aussi  de  son  côté,  se  perça  de  son  épée.  Un 
mois  après,  Brutus,  vaincu  en  ce  même  lieu  où  il  venait  d'être  victorieux, 
en  fit  autant  (42).  On  dit  qu'en  mourant,  il  s'écria  :  «  Vertu,  tu  n'es  qu'un 
mot  -;  mais  cette  parole  désespérante  n'a  rien  d'authentique.  V.  N.  II, 
6^6  :  Brutus. 

17,  Victoire.  — Moxtllc,  Commentaires.  —  En  1544,  dans  le  courant  de  l'action, 
le  duc  d'Enghien,  voulant  arrêter  le  gros  de  l'infanterie  ennemie,  qui,  à  un 
moment  donné,  devenait  menaçant,  le  chargea  à  la  tête  dé  sa  gendarmerie, 
mais  ne  parvint  ni  à  le  rompre,  ni  à  l'arrêter,  et  éprouva  des  pertes  énor- 
mes :  «  Dans  son  désespoir,  M.  d'Angujen,  dit  Montluc,  voyant  ses  gens 
de  pied  en  fuite  et  qu'à  peine  lui  restait  cent  chevaux  pour  soutenir  le 
choc  de  cette  colonne  de  cinq  mille  piquiere  suivant  toujours  au  grand  trqt 
leur  victoire,  deux  fois  se  donna  de  l'espée  dans  son  gorgerin,  se  voulant 
offenser  soi-même.  »  Son  acte  do  désespoir,  comme  l'effort  de  cette  infan- 
terie adverse,  n'eurent  pas  de  suites  et  la  victoire  se  prononça  en  notre  faveur. 

24,  Tuer.—  Pline,  XXV,  3,  dit  qu'il  n'y  a  guère  que  trois  sortes  de  maladie 
pour  lesquelles  on  se  tue  :  la  pierre,  les  douleurs  d'estomac  et  les  douleurs 
de  tète.  Quant  au  droit  de  se  tuer,  qu'elles  peuvent  conférer,  il  n'en  parle 
pas;  du  reste,  les  éd.  ant.  port.  :  accouslumé,  au  lieu  de  :  «  droit  ». 

"25,  jRetenùe.  —  Maladie  dont  Montaigne  était  atteint,  c'est  pourquoi  il  la 
cite  à  l'exclusion  des  deux  autres  que  mentionnaient  cependant  les  éd.  ant.  : 
la  seconde,  la  douleur  d'estomach  :  la  tierce,  la  douleur  de  teste. 

25,  Seneque.  —  Epist.  58. 

31,  Corps.  —  TiTE-LivE,  XXX VII,  46.  —  En  190;  les  Étoliens  avaient  été 
défaits  par  le  consul  Acilius  Glabrio;  Damocrite  échappa  de  la  sorte  à  la 
honte  de  figurer  au  triomphe  qui  fut  décerné  au  vainqueur. 

35,  Couurir.  — -TrrE-LivE,  XLV,  2G.  —  En  167;  Antinoiis  et  Théodotus,  tous 
deux  citoyens  de  Passaron,  ville  d'Épire,  s'étaient  compromis  au  point  de 
no  pouvoir  espérer  trouver  grâce  auprès  des  Romains. 

42,  Siens.  —  Goze,  petite  île  à  l'occident  de  celle  de  Malte,  dont  elle  n'est  pas 
très  éloignée;  elle  avait  été  cédée  avec  cette  dernière  en  1530,  par  Charles- 

^  Quint,  aux  Chevaliers  de  S.-Jean  de  Jérusalem,  lorsque  l'île  de  Rhodes  leur 
avait  été  enlevée  par  les  Turcs;  ceux-ci  et  les  corsaires  d'Afrique  la  rava- 
gèrent à  diverses  reprises,  en  particulier  en  1551,  année  joù  se  passa  le  fait 
que  relate  Montaigne;  ils  l'abandonnèrent  peu  après,  ayant  préalablement 
rasé  le  château. 
640, 

1,  Antiocbus.  —  Antiochus  Épiphane,  roi  de  Syrie,  voulant  fusionner  les 
peuples  sous  sa  domination,  défendit  aux  Juifs  de  circoncire  leurs  enfants; 
ceux  qui  contrevenaient  étaient  crucifiés,  leurs  femmes  pendues  à  leur 
côté  avec  leur  enfant  pendu  au  cou  (167).  Josèphe,  Antiquités  judaïques, 
Xll,  5,  4. 

12,  Curée.  — Montaigne  renverse  ici  les  rôles:  Drusus  Libon  délibérait  s'il 
se  donnerait  la  mort  ou  s'il  l'attendrait;  Scribonia  lui  demanda  quel  plai- 
sir il  trouvait  à  faire  la  besogne  d'un  autre.  Cette  observation,  dit  Sénèque, 
Epist.  70,  ne  persuada  pas  Libon;  il  se  tua  et,  ajoute-t-il,  il  eut  raison. 

30,  Diuine.  —  Macchabées,  II,  14.  —  En  l'an  162;  Nicanor  était  général  de 
Démétrius  1,  roi  de  Syrie. 
642, 

1,  Pelasgia.  —  Pelagia  était  d'Antioche  (Asie  Mineure)  et  était  âgée  de 
15  ans  seulement.  Surprise  chez  elle  par  l'édit  de  persécution  et  mise  en 
demeure  de  choisir  entre  sa  virginité  ou  sa  religion,  elle  obtint  des  soldats 
qui  avaient  envahi  sa  demeure  un  répit  pour  mettre  ordre  à  sa  toilette, 
promettant  de  les  satisfaire;  et,  montant  à  l'étage  supérieur,  elle  se  précipita 


F-438  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

})nr  une  fenêtre.  Sa  more  et  ses  deux  sœurs  s'étaient  enfuies;  sur  le  point 
d'être  atteintes,  elles  se  dirigèrent  vers  la  rivière  qui  était  proche,  y  entrè- 
rent comme  pour  s'y  baigner,  et  s'avançant  jusqu'à  ce  qu'elles  perdissent 
pied,  s'y  noyèrent  volontairement.  S.  Amhkoise,  De  Virg.,  III. 
I,  Sophonia.  —  En  311,  loi-s  de  la  persécution  à  laquelle  mit  fui  la  victoire, 
.sous  les  murs  do  Rome,  de  Constantin,  qui  assura  le  triomphe  définitif  du 
Christianisme  (321).  Kuiin,  lïist.  ccrlés.,  VIII,  27;  Elskbe,  Hisl.  ccclés.,  VIII, 
M,  toutefois  celui-ci  ne  la  nomme  pas,  quoique  ce  soit  la  même. 
1.'),  Marot.  —  «  1)0  ouy  et  nenny  »,  poésie  de  Cl.  Mauot  : 

•  Un  doulx  nenny,  avec  un  doulx  sourire, 
Est  tant  honnestel  II  vous  le  faut  apprendre. 
Quant  est  d'ouy;  si  veniez  à  le  dire, 
D'avoir  trop  dict  je  vouldrois  vous  reprendre; 
Non  que  je  sois  ennuyé  d'entreprendre 
Le  duic^t  dont  le  désir  nie  poiiict; 
Mais  je  vouldrois  qu'en  me  le  laissant  prendre. 
Vous  me  disiez  :  Non,  vous  ne  l'aurez  point.  » 

18,  Passé.  —  T.^CME,  Ann.,  VI,  48.  —  En  36.  Aruntius,  impliqué  dans  un 
procès  d'adultère  imaginé  pour  le  perdre,  se  tua,  alors  que  ses  amis  cher- 
chaient à  lui  persuader  qu'il  s'en  tirerait  en  temporisant,  disant  que 
l'avènement  à  l'empire  de  Caligula  lui  faisait  prévoir  un  esclavage  pire  que 
celui  que  Tibère  avait  fait  peser  sur  eux  et  (|u'il  voulait  mettre  fin  à  la  fois 
au  passé  et  à  l'avenir.  L'estime  en  laquelle  on  le  tenait  était  telle,  que  l'em- 
pereur Auguste,  près  de  mourir,  l'avait  déclaré  digne  du  rang  suprême. 

18,  Proximus.  —  TAcrrE,  Ann.,  XV,  71. 

25,  Prinse.  —  S'étant  emparé  du  camp  des  Perses,  Spargapisez  et  ses  Scy- 
thes avaient  fait  main  basse  sur  ce  qui  s'y  trouvait,  s'y  étaient  enivrés  et 
endormis,  si  bien  que  surpris  parleurs  ennemis,  ils  avaient  été  faits  prison- 
niers ;  revenu  à  lui,  et  appi'onant  le  fâcheux  état  en  lequel  il  se  trouvait. 
Spargapisez  .sollicita  qu'on  lui  ûtât  .ses  liens  et  se  tua  (530).  IIéiiodote,  I. 

28.  Cbeuance.  —  On  comprenait  sous  ce  nom  l'ensemble  de  tout  ce  que  quel- 
qu'un possédait. 

35,  Soy-mesme.  —  En  475,  pendant  la  deu.xième  guerre  médiquo,  lors  des 
opérations  qui  suivirent  la  bataille  de  Platée.  Hérodote,  VII. 
644, 

16,  Feu.  —  Le  fait  s'est  passé  sous  la  domination  portugaise,  qui,  commen- 
cée en  151 1,  a  pris  fin  on  16^11,  date  à  laquelle  les  Hollandais  se  substituè- 
rent aux  Portugais  pour  faire  place  en  1824  à  l'Angleterre  à  laquelle  ce 
territoire  appartient  actuellement. 

20.  Compagnie.  —  Tacite,  Ann.,  VI,  29.  —  Scaurus  s'était  aliéné  Tibère  par 
une  tragédie  dont  le  sujet  (Atrée)et  quelques  vers  lui  avaient  été  dénoncés 
comme  une  critique;  ce  fut  la  cause  d'une  accusation  de  lèse-majesté,  que 
l'on  renforça  en  y  joignant  une  imputation  d'adultère  avec  Livie,  la  mère 
de  l'empereur,  et  de  sacrifices  magiques.  A  l'instigation  de  sa  femme,  qui 
partagea  sa  mort,  il  prévint  son  jugement,  en  .se  tuant  (34).  —  Labéon, 
gouvei'neur  de  Mysie  (Asie  Mineure),  était  accusé  de  malversations;  Tibère 
lui  lit  signifier  qu'il  lui  interdisait  sa  maison;  c'était  une  de  ses  formules 
de  disgrâce  et  de  proscription.  Devançant  la  venue  du  bourreau,  Labéon 
se  fit  ouvrir  les  veines;  Paxéa,  sa  femme,  imita  son  exemple  (34). 

21,  Nerua.  —  Tacite,  Ann.,  VI,  26. 

34,  Garde.  —  «  Une  femme  ne  cèle  que  ce  qu'elle  ne  sait  pas.  »  Proverbe.  — 
Caton  l'Ancien  disait  qu'il  fallait  se  repentir  de  trois  choses  seulement  :  vr- 
véler  son  secret  à  une  femme;  passer  un  jour  dans  l'oisiveté;  aller  par  mer 
dans  un  endroit  accessible  par  terre. 

35.  Corps.  —  Auguste  avait  exprimé  devant  Fulvius  ses  regrets  de  laisser 
l'empire  à  Tibère  son  beau-fils  et  l'idée  que,  parfois,  il  avait  de  revenir  sur 
sa  détermination.  Fulvius  rapporta  le  fait  à  sa  femme,  et  celle-ci  à  Livie. 
femme  d'Auguste  et  mère  de  Tibère,  qui  vint  récriminer.  Aussi,  le  lendemain, 


NOTES.         MV.  II,  CH.  III.         VOL.  I.  PAG.  644.  439 

quand  Fulvius  vint  le  s.alncr,  lui  disant  suivant  sa  coutume  :  ■•  Dieu  te 
garde,  César  »,  Auguste  lui  répondit  :  «  Dieu  te  fasse  sage,  Fulvius  ».  II 
comprit  de  suite  par  là  que  lui  d'abord,  sa  femme  ensuite,  avaient  trop 
parle.  Plutarque,  Du  trop  parler,  !).  —  Tacite,  Ann.,  I,  5,  rapporte  égale- 
ment le  fait;  mais  il  l'attribué  à  un  nommé  P'abius  Maximus  et  ne  dit  pas 
(|ue  sa  femme  se  tua.  mais  seulement  qu'à  ses  funérailles  on  l'entendit 
s'accuser  d'être  la  cause  de  sa  mort. 

36,  Virius.  —  Tite-Live.  XXVI,  13-15.  —  Après  la  défaite  de  Cannes,  Capoue, 
*  à  l'instigation  de  V'ibius  Virius,  s'était  détachée  de  Rome  et  avait  ouvert 
ses  portes  à  Annibal.  Trois  ans  après,  les  Romains  vinrent  mettre  le  siège 
devant  cette  ville;  il  durait  depuis  deux  ans  déjà,  et  ils  avaient  dû  l'inter- 
rompre à  diverses  reprises,  mais  enfin  la  résistance  était  à  bout,  quand  Vi- 
bius,  pour  échapper  à  leur  vengeance,  prit  la  détermination  dont  il  est  ici 
que.stion  (211). 
646, 

19,  Delà.  —  De  Capoue,  ou  de  la  Campanie.  comme  dit  TriE-LivE,  Ann., 
XXVI,  1.^). 

33,  Consul.  -  Lors  de  la  reprise  de  Capoue  par  les  Romains  (211).  —  D'a- 
près une  autre  version,  Jubellius  Taurea  ne  se  serait  pas  tué  lui-même; 
compris  au  nombre  de  ceux  condamnés  à  périr,  il  aurait  simplement  à  ce 
moment  apostrophé  le  consul  Quintus  FiUviûs.  Tite-Live  rapporte  égale- 
ment qu'au  moment  où  le  supidice  de  ces  sénateurs  s'apprêtait,  on  remit 
au  consul  un  courrier  an-ivanl  de  Rome,  contenant  un  sénatus-consulte 
leur  faisant  grâce,  et  que  Fulvius,  le  pressentant,  remit  à  l'ouvrir  jusqu'à 
ce  que  l'exécution  fût  terminée. 

39,  Vie  -  Ce  fait  semble  se  rappoi-ier  non  à  une  ville  des  Indes,  mais  à 
celle  d(,'S  Marmaréens,  peuplade  qui  occupait  sur  les  frontières  de  la  Lycie 
un  rocher  foi-lillé.  Ayant  attaqué  l'an-ière-garde  d'Alexandre,  celui-ci  revint 
sur  .ses  pas  et  mit  le  siège  devant  leur  forteresse;  convaincus  bientôt  de 
l'inutilité  de  toute  jésistance,  .ses  défenseurs  décidèrent  de  tuer  enfants, 
femmes  et  vieillards,  de  mettre  le  feu  aux  maisons,  d'exécuter  ensuite  une 
sortie  et  de  se  sauver  dans  les  montagnes  voisines,  ce  qu'ils  firent  (334). 

DiODOIlE  DE  SlCM.E,  XXVII,   18. 

648, 

17,  Suiuoit.  —  En  206.  Astapa  était  assiégée  par  Marcius,  chevalier  romain, 
qui,  après  la  mort  des  ileux  frères  Scipions,  avait  pris  le  commandement  de 
l'armée  (V.  I,  I-.J  et  N.  Frères);  fidèle  aux  Carthaginois  et  placée  sur  les 
communications  de  l'armée  romaine,  elle  en  interceptait  les  convois.  Tite- 
Live,  XXVIII,  22,23. 

24,  Soy.  —  En  348.  Abydos,  auj.  un  des  forts  des  Dardanelles,  était  une  co- 
lonie d'Athènes;  la  guerre  entre  Philippe  roi  de  Macédoine  et  les  Athé- 
niens avait  été  amenée  i)ar  la  mise  à  mort  par  ceux-ci  de  deux  Acarnaniens 
(l'Acarnanie  était  située  entre  l'Étolie  et  l'Épire),  peuple  allié  de  Philippe, 
qui  par  suite  d'une  erreur  dv;  leur  part,  bien  que  non  initiés,  étaient  entrés 
dans  le  temple  de  Cérès  pendant  la  célébration  des  mvstères  d'Eleusis. 
TiTE-I.ivE,  XXXI,  I7et  18. 

27,  Séparées.  -—  Que  lorsqu'elles  ont  été  prises  séparément. 

28,  lugements.  -  C'est  exactement  l'idée  qui  a  cours  aujourd'hui  sur  la 
mentalité  des  foules  et  la  modification  qu'y  subissent,  momentanément 
mais  inéluctablement,  les  facultés  intellectuelles  de  quicon(}ue  s'v  trouve 
mêlé.  V.  N.  I,  488  :  Roy. 


650. 


2,  Testament.  —  Tacite,  Ann.,  VI,  29.  —  Au  .lapon,  les  nobles  qui  sont 
condamnés  à  mort  peuvent  encore,  dit-on,  par  faveur  spéciale  obtenir  de 
s'exécuter  eux-mêmes  par  le  harikiri,  privilège  des  hautes  classes,  qui 
consiste  à  s'ouvrir  le  ventre  et,  simultanément,  être  décapité  par  un  ami, 
suivant  un  rite  particulier;  mourant  de  la  sorte,  ils  évitent  eux  aussi  la 
confiscation  de  leurs  biens  qui  passent  à  leurs  héritiers. 
4,  lesus-Christ.  —  Epist.  ad  P/tUipp..  I. 


F. 440  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

5,  Liens.  —  L'pisl.  ad  Rom.,  VII. 

5,  Ambraciota.  —  D'Ambracie.  Cicéron,  Tusc,  l,  34. 

6,  Phsedon.  —  Un  des  dialogues  de  Platon,  ainsi  appelé  du  nom  d'un  des 
disciples  de  Socrate  les  plus  fidèles  à  sa  doctrine;  dans  le  Phédon,  il  est 
traité  plus  particulièrement  de  l'immortalité  de  l'àme.  V.  N.  II,  72:  Platon. 

11,  Soissons.  —  En  1250,  quand,  après  la  bataille  de  Mansourah,  l'armée  se 
i-etirait  sur  Damielte,  retraite  dans  laquelle  saint  Louis  fut  fait  prisonnier. 

16,  Terres.  —  L'Amérique.  Cela  se  voit  aussi  dans  l'ancien  continent  :  au 
.Japon,  aux  Indes;  dans  cette  dernière  contrée,  au  royaume  d'Aracan,  on 
promène  chaque  année  l'idole  Guiay-Pora  dans  un  grand  char  sous  les 
roues  duquel  les  plus  dévots  du  pays  se  font  écraser. 

25,  La  iustice...  volontaires.  —  Ce  double  (var.  des  éd.  ant.). 

31,  Soy.  —  Yalère  Maxime,  II,  6,  7.  —  Ce  désir  de  mort  volontaire  y  était 
admis  pour  cause  soit  d'adversité,  soit  de  prospérité  :  l'une  si  elle  était  de 
durée  prolongée,  l'autre  de  peur  qu'elle  ne  vint  àces.ser;  le  fait  relaté  dans 
l'alinéa  suivant  rentre  dans  ce  dernier  cas. 

31,  Ailleurs.  —  Suivant  Amundsen,  explorateur  moderne  (1900),  le  suicide 
est  permis  chez  les  Esquimaux. 

35.  Compagnie.  — Yalère  Maxime,  11,6,  8.  —  Le  fait  se  passait  en  51. 
652, 

19,  Mercure.  —  Dieu  de  l'éloquence,  du  commerce  et  des  voleurs;  avait 
aussi  la  mission  de  conduire  les  âmes  aux  Enfers,  où  toutes,  indistincte- 
ment, allaient  après  la  mort:  les  unes  aux  Champs  Eh'sées,  séjour  des  bons; 
les  autres  au  Tartare,  réservé  aux  méchants. 

25,  Hyperborée.  —  Nation  que  Pi.ixe,  Hist.  nat.,  IV,  12,  place  au  delà  de 
l'Océan  glacial  arctique  qu'il  nomme  Aquilon  glacial,  où,  dit-il,  les  jours 
sont  de  six  mois,  les  nuits  de  même  durée;  nation  heureuse,  ajoute-t-il,  où 
la  discorde  est  ignorée  ainsi  que  toute  maladie,  où  on  ne  meurt  que  par 
satiété  de  la  vie. 

31,  Incitations.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  27.  —  Cette  opinion  est  conforme  à  la 
doctrine  des  Stoïciens,  qui  qualifiait  de  lâches  ceux  qui  s'attachaient 
quand  même  à  la  vie,  lorsque  les  infirmités  les  accablaient  ou  qu'ils 
étaient  l'objet  d'infortunes  flétrissantes.  —  En  somme,  indépendamment  des 
avis  particuliers,  dans  un  sens  ou  dans  un  autre,  déjà  cités  (V.  N.  I,  630  : 
Mesme;  N.  I,  632:  Contraste),  d'une  façon  générale  :  La  loi  de  Moyse  ré- 
prouve le  suicide;  les  suicidés  chez  les  Hébreux  étaient  privés  de  sépul- 
ture ou  tout  au  moins  enterrés  de  nuit,  la  Bible  mentionne  du  reste  fort 
peu  de  suicides.  Les  anciens  livres  sacrés  des  Hindous,  les  Védas,  le  con- 
damnent, mais  la  religion  de  Brahma  l'encourageant  à  titre  de  sacrifice 
religieux,  le  nombre  de  ceux  qui,  dans  les  Indes,  s'immolent  ainsi  par  fana- 
tisme est  inouï.  En  Chine,  le  suicide  est  fréquent;  au  Japon,  on  s'en  fait 
souvent  un  point  d'honneur.  Zoroastre  le  condamne;  de  même  Mahomet, 
et  les  suicides  sont  très  rares  chez  les  Musulmans.  Dans  l'antiquité  grecque 
où  Socrate  en  est  un  adversaire  déclaré,  il  se  produit  fréquemment  ;  et 
quoique  condamné  en  principe  par  les  lois,  comme  le  Sénat  à  Marseille, 
l'Aréopage  à  Athènes  l'autorisait  quand  il  en  approuvait  les  motifs.  Nous 
connaissons  l'opinion  des  Stoïciens  ;  les  Sceptiques,  eux,  se  désintéressaient 
de  la  question.  A  Carthage,  les  fluctuations  de  la  politique  firent  qu'il  était 
de  pratique  courante.  A  Rome,  rare  au  début,  il  l'est  beaucoup  moins  vers 
la  fin  de  la  République,  et,  sous  l'empire,  nombreux  sont  ceux  qui  ont  re- 
cours au  suicide  pour  échapper  à  la  tyrannie  du  prince  ;  mais  sous  tous 
régimes  il  est  réprimé  avec  une  extrême  rigueur  chez  le  soldat  dont 
toute  tentative  avortée  entraîne  la  peine  capitale.  II  est  fort  en  honneur 
chez  les  peuples  primitifs  de  la  Gaule,  les  vieillards  y  avaient  souvent  re- 
cours. Parmi  les  chrétiens,  saint  Augustin  est  le  premier  qui  se  prononce 
contre,  sans  restriction  aucune;  les  conciles  qui  suivent  le  frappent  d'excom- 
munication; sous  saint  Louis,  les  suicidés  sont  jugés  et  les  mesures  prises 
contre  leurs  restes  sont  empreintes  d'une  extrême  sévérité  et  leurs  biens 
sont  confisqués.  Le  protestantisme  le  réprouve  également;  J.-J.  Rousseau  et 


.NOTES,         IJV.  II,  Cil.  III.         VOL.  I,  PAG.  650.  F.441 

N'oltaire  se  déclarent  plutôt  pour  que  contre;  la  Révolution  abroge  les 
peines  qui  le  frappent.  —  Depuis,  en  France,  comme  partout  ailleurs  du 
reste,  il  tend  à  augmenter  d'année  en  année  particulièrement  dans  les 
grandes  villes,  motive  surtout  par  des  maladies  cérébrales,  les  souffrances 
physiques,  et  l'inconduite;  puis  encore  par  la  misère,  les  revers  de  for- 
tune, les  chagrins  domestiques,  des  amours  contrariés,  le  désir  d'éviter  des 
poursuites  judiciaires,  l'ivrognerie,  et  chez  quelques-uns  le  dégoût  du  ser- 
vice militaire.  De  1.700  par  an  qu'était,  en  moyenne,  on  France,  en  1827  le 
nombre  des  suicides,  il  s'est  élevé,  par  une  gradation  ininterrompue,  à 
7.267  en  1865;  sur  ce  nombre  qui  comprend  des  enfants  de  seize  ans 
et  au-dessous,  les  gens  mariés  entrent  pour  moitié,  les  femmes  pour  un 
quart.  Cette  progression  est  due  à  la  même  cause  qui  fait  que  la  crimina- 
lité va  croissant;  chacun  veut,  chaque  jour  davantage,  l'existence  meilleure 
et  plus  facile  et  en  supporte  d'autant  moins  les  déboires  inévitables,  ce 
qui  est  plutôt  veulerie;  on  ne  saurait  douter  non  plus  que  n'y  contribue 
chez  beaucoup  l'affaiblissement  de  la  foi  qui  seule,  qu'elle  repose  sur  la 
vérité  ou  l'erreur,  ce  qui  importe  peu,  donne,  quoi  qu'on  en  dise,  aux 
croyants  (heureuses  gens!),  patience  et  consolation  en  cette  vie.  —  Pour 
conclure,  on  peut  dire  du  suicide,  conime  de  tant  d'autres  choses  de  ce 
monde,  que  le  jugement  à  en  porter  est  essentiellement  variable  suivant 
chaque  cas  particulier;  s'il  est  en  général  à  condamner,  il  est  parfois  excu- 
sable et  dans  quelques  circonstances  être  le  fait  d'un  grand  caractère  et 
d'un  non  moins  grand  courage,  ne  prêtant  en  rien  à  la  critique  la  plus 
sévère. 

CHAPITRE  IV. 

654, 

1,  Auec.  —  Grande  (add.  des  éd.  ant.). 

7,  Grec.  —  Montaigne  avait  appris  le  grec,  il  n'y  a  pas  doute  à  ce  sujet; 

mais  il  ne  l'avait  jamais  su  à  beaucoup  près  comme  le  latin,  et  il  est  fort. 

croyable  qu'à  l'âge  où  il  était  arrivé  il  n'y  entendait  plus  grand'chose. 
7,  Sens.  —  Si  beau  (add.  des  éd.  ant.). 

16,  Breufaire. — "Livre  dont  les  ecclésiastiques  doivent  lire  journellement 
des  passages  déterminés;  par  extension,  livre  de  lecture  habituelle,  qui  ■<  ne 
quitte  point  nos  mains,  nuit  et  jour  feuilleté  »,  a  dit  Bou,eau. 

17,  Resigne.  —  Abandonne,  signale. 

21,  Soy.  —  Moins  embarrassé,  plus  naturel. 

23,  Plutarque.  —  Traité  de  la  Curiosité,  14. 
656. 

15,  De  Boutieres.  —  Du  Bei.i.ay,  IX.  —  En  1543.  Cet  avis  portait  qu'une  ten- 
tative allait  être  faite,  à  l'aide  de  voitures  de  foin  qu'on  chercherait  à  in- 
troduire dans  la  ville  dont  il  était  gouverneur,  pour  s'emparer  de  l'une  des 
portes.  De  Routières  négligea  d'en  prendre  connaissance  et  ce  ne  fut  que 
parle  fait  du  hasard  qu'échoua  ce  coup  demain  consistant  en  cinq  voitures 
de  foin,  portant  au-dessous  de  leur  fond  des  cages  très  ingénieusement 
aménagées,  dans  chacune  desquelles  avaient  pris  place  six  soldats  qui  de- 
vaient en  sortir  à  l'improviste  et,  avec  l'aide  des  conducteurs  qui  étaient 
également  des  soldats  déguisés,  assaillir  le  poste  et  s'en  emparer. 

20,  Présenta.  —  Plltarqle,  /.  César,  17.  —  Cet  ayis  fut  donné  à  César  par 
,    Artémidore  de  Cnido,  qui  enseignait  à  Rome  les  lettres  grecques  et  latines; 

voyant  habituellement  les  complices  de  Brutus,  il  était  en  partie  au  cou- 
rant de  la  conjuration.  «  Lisez  seul  et  promptement,  »  lui  dit-il  en  lui 
remettant  son  écrit.  César  essaya  de  lire  à  plusieurs  reprises,  mais  il  en  fut 
empêché  par  la  foule  de  ceux  q.ui  venaient  lui  parler;  d'autres  disent  que 
cette  même  foule  empêchant  Artémidore  d'approcher,  il  lui  fit  remettre 
ses  papiers  par  un  autre;  toujours  est-il  que  César  entra  au  Sénat  sans  en 
prendre  connaissance.  Les  éd.  ant.  aj.  ici  :  contenant  le  faict  de  l'entreprise. 

21,  Préparait.  —  Plitak^le,  De  l'esprit  familier  de  Socrate,  27.  —  En  378;  le 


F.442  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

promier  Arcliias  cHait  un  capitaine  thébain,  gouvernant  Thobes  au  nom  de 
Spaite  qui  l'y  avait  installé;  l'autre,  son  hôte  et  son  ami,  était  souverain- 
pontife  à  Athènes. 

o3,  Faire.  —  En  1846,  le  prince  de  Metternich.  chancelier  d'Autriche,  celui- 
là  même  qui  avait  tant  contribué  à  la  chute  de  Napoléon  1",  était,  dit-on, 
jouant  un  soir  aux  cartes,  quand  sui'vint  une  dépèche  de  Gallicie,  où  ré- 
gnait une  certaine  fermentation.  Tout  entier  à  son  jeu,  ce  ne  fut  que  trois 
heures  après  qu'il  décacheta  cette  dépèche,  pai-  lequelle  on  lui  transmettait 
des  propositions  qui  eussent  tout  arrangé.  C'était  trop  tard  :  il  y  avait  ur- 
gence, et  la  réponse  n'arrivant  pas,  un  conflit  s'était  pi'oduit,  faisant  deux 
mille  victimes.  Le  prince  gai-da  tout  le  restant  de  ses  jours  le  remords  de 
cet  instant  d'oubli. 

34,  Consulaire.  —  Plutarque,  Propos  de  table,  I,  3,  2. 

'.ib,  Deliure.  —  Plus  dégagé. 

36,  Pour  entretenir...  assis.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  ou  pour  potier  nouuelles 
à  reliiy  qui  serait  assis,  ou  pour  lui  donner  quelque  aduerlissemenl  à  l'oreille. 


658. 


CHAPITRE  V. 

* 

Conscience.  —  ••  11  est  au  fond  de  nos  âmes  un  principe  inné  de  justice 
et  de   vertu,  d'après  lequel,  malgré  nos   propres  maximes,  nous  jugeons 
nos  actions  et  celles  d'autrui   comme  bonnes  ou    mauvaises;  c'est  à  ce 
principe  que  je  donne  le  nom  do  conscience.  »  J.-J.  Rousseau. 
1,  Voyageant...  durant.  —  Var.  de  80  :  le  passois  vn  iour  pais  pendant. 
7,  Air.  —  Foyer  (var.  dos  éd.  ant.). 

19,  Masque.  —  Sur  sa  physionomie  et  malgré  la  croix,  signe  distinctif  des 
catholiques,  qu'il  portait  sui'  sa  casaque  (sorte  de  pardessus  à  manches 
largos),  bien  qu'il  n'appartint  pas  à  ce  parti.  —  Los  protestants  portaient 
l'écliarpo;  celle  des  partisans  de  Henri  IV  était  blanche. 

25,  Pœonien.  —  Ce  mot  signifie  à  la  fois  :  chargé  des  soins  à  donner  aux 
paons,  et  individu  originaire  de  la  Pœonie.  Les  doux  sons  ont  cours;  avec 
le  premier.  Dessus  serait  une  soi'te  de  valet  de  ferme;  nous  avons  adopté 
le  second,  l'anecdoto  étant  vraisemblablement  tirée'  de  Pi.utarque,  Pour- 
quoi la  justice  divine,  etc.,  8,  qui  le  qualifie  de  capitaine,  chef  d'une  troupe 
à  pied,  et  le  donne  comme  ayant  abattu  co  nid  avec  une  pique  qu'il  avait 
en  main. 

31,  Pénitence.  —  On  fait  souvent  allusion  à  ce  mode  d'intervention  imprévu 
de  la  Providence,  sous  le  nom  des  «  Grues  d'Ibycus  ».  Ibycus  -assassiné 
par  des  brigands,  au  milieu  d'une  forêt,  était  sur  le  point  d'expirer,  quand 
voyant  dans  les  aiis  un  vol  de  grues,  il  les  piit  à  témoin  de  l'attentat 
dont  il  était  victime.  Quelque  temps  après,  ses  assassins  se  trouvant  aux 
jeux  Olympiques,  l'un  d'eux,  voyant  passer  un  vol  de  grues,  s'écria  impru- 
demment :  «  Voilà  les  témoins  d'ibj'cus!  »  Ce  propos,  sur  lequel  il  fut  ap- 
pelé à  s'expliquer,  révéla  leur  culpabilité.  Erasme. 


660. 


1,  Péché.  —  Plutarque,  Pçiirquoi  la  justice  divine,  c\c.,  9. 

2.  L'attend.  —  Sknèque,  Epist.  105,  à  la  fin. 
2,  Meschanceté.  —  D'elle  mesme  (add.  de  80). 

8,  Cantbarides.  —  Plutarque,  Pourquoi  la  justice  divine,  etc.,  9.  —  La 
cantliaride  est  un  insecte  de  la  famille  des  coléoptères,  qui,  réduit  en 
poudre,  est  la  base  dos  vésicatoires.  Cette  poudre,  absorbée  à  l'intérieur, 
est  un  poison  violent  qui  était  assez  en  usage  chez  les  anciens.  Ils  attri- 
buaient en  outre  à  la  piqûre  même  de  l'insecte  la  propriété  de  donner  la 
mort  qui  se  produisait,  croyaient-ils,  dans  la  disposition  où  l'on  était  à 
l'instant  où  l'on  était  piqué  :  si  à  ce  moment,  par  exemple,  on  riait,  on 
mourait  en  riant.  La  science  moderne  assigne  le  camphre  comme  antidote 
des  empoisonnements  par  la  cantharido;  quant  à  receler  en  elle-même  son 
contrepoison,  Plutarque  ne  le  raj)porte  que  comme  un  on-dit. 


NOTES.         UV.  II.  r.ll.  V.         VOL.  K  PAG.  «60.  443 

18,  Maux.  —  Pi.UTVKQLE.  Pourquoi  la  justice  divine,  etc.,  H:  I'olyen,  IV,  6,  IS. 

20,  Mesmes.  —  SÉNÈyiE,  Epint.  97.  —  Sophocle  et  Lucien  énietteril  uiio  idée 
analogue  :  «  Rien  n'est  caché,  car  lo  temps  voit,  entend  et  révèle  tout,  » 
dit  le  premier.  «  Tu  pourras  peut-être,  dit  le  second,  dérober  aux  hom- 
mes la  connaissance  de  tes  actions  coupables;  tu  ne  le  pourras  envers  les 
dieux  malgré  tous  tes  calculs.  »  ~  La  formule  d'ÉpiCLKE  que  donne  Mon- 
taigne et  que  L.  Racine  a  traduite  dans  son  poème  de  La  Religion  : 

•  De  ses  remords  secrets  triste  et  lente  victime, 
Jamais  un  criminel  ne  s'absout  de  son  crime... 
l.e  cruel  repentir  est  le  premier  bourreau 
Qui  dans  un  sein  coupable  enfonce  le  couteau  », 

semble  moins  prêter  à  controverse,  et  cependant  on  peut  dire  que;  chez  le 
méchant,  c'est-à-dire  chez  celui  en  lequel  le  mal  prédomine,  la  conscience 
est  oblitérée;  soit  parce  qu'elle  a  toujours  été  telle,  soit  parce  que  trop 
souvent  il  a  négligé  de  l'écouter,  elle  ne  se  fait  plus  entendre,  le  remords 
n'existe  pas.  Aussi  sommes-nous  de  ceux  qui  n'en  voulant  pas  au  méchant, 
le  considérant  comme  inconscient,  voyons  en  lui  un  être  malfaisant  que 
la  société  a  le  devoii"  non  de  punir,  elle  n"a  guère  elle-même  la  faculté 
«l'en  juger  sainement,  mais  de  mettre  liors  d'état  de  lui  nuire,  comme 
elle  fait  d'un  fou,  d'un  pestiféré,  d'une  bête  fauve,  d'un  chien  enragé,  lors- 
qu'il est  avéré  qu'il  constitue  un  danger  public.  Contrairement  à  ce  qu'a 
introduit  la  chicane,  c'est  le  fait  qui  esta  apprécier  et  non  l'intention;  la 
constatation  du  premier  est  généralement  facile,  l'autre  est  toujours  im- 
possible, notre  état  mental,  à  tous,  à  un  moment  donné,  essentiellement 
variable,  échappant  à  toute  appréciation  :  principe  qui  est  la  base  de  la  loi 
du  talion  et  de  l'action  civile  ou  réparation  du  préjudice  causé.  11  est  à 
portée  dos  intelligences  les  plus  simples  et  a  suffi  dans  les  sociétés  primi- 
tives à  assurer  le  maintien  de  l'ordre,  à  protéger  les  personnes  et  les 
choses,  au  moins  aussi  bien  que  nous  y  parvenons  dans  nos  sociétés  mo- 
dernes avec  notre  légi.slation  si  prolixe,  où  tout  est  agencé  pour  jeter 
de  la  confusion  dans  les  esprits,  favorisant  les  mauvais  au  préjudice  des 
bons,  à  ro[)posé  de  ce  que  commandent  la  raison  et  l'équité. 

ol,  Importante.  —  Plltarque,  Comment  un  peut  se  louer  soi-même,  5.  —  En 
190.  Scipion  l'Africain,  la  loi  semblant  s'y  opposer  et  les  questeurs  hési- 
tant à  le  faire,  de  lui-même,  simx>le  particulier  à  ce  moment,  mais  déjà 
paré  des  lauriers  de  Zama,  avait  ouvert  le  trésor  public  réservé  pour  parer 
à  une 'guerre  contre  les  Gaulois,  et  y  avait  puisé  pour  faire  face  aux 
besoins  de  la  guerre  que  Rome  méditait  contre  Antiochus,  roi  de  Syrie, 
dont  les  progrès  commençaient  à  donnei-  do  l'inquiétude,  guerre  dont  son 
frère  allait  être  chargé. 

33,  Teste.  —  De  juger  dans  une  affaire  pouvant  entraîner  une  condamna- 
tion capitale. 

40,  Suitte.  —  ViUCKE  Maxime  111,  7,  1.  —  En  188.  11  avait  accompagné  son 
frère  en  Asie  en  qualité  de  lieutenant,  et,  en  réalité,  dirigé  la  guerre  qui 
avait  contraint  Antiochus  à  restituer  aux  allif'-s  de  Rome  toutes  les  con- 
quêtes qu'il  avait  faites  sur  eux,  quand,  à  leur  retour,  les  deux  frères  fu- 
rent accusés  par  le  tribun  Nevius  de  s'être  laissé  corrompre  par  l'ennemi. 

-17,  Pièces.  —  'Tite-Live,  XXXVIII,  54  et  55.  —  En  187.  Cette  accusation 
.  portée  contre  Scipion  l'.Africain  et  Scipion  l'Asiatique  est  la  même,  re- 
nouvelée, que  la  seconde  dont  Montaigne  vient  do  parler  et  à  laquelle  ils 
avaient  écliappé  l'année  précédente  en  évoquant  le  souvenir  do  Zama. 
Sommé  de  produire  ses  comptes,  Scipion  l'Africain  lacéra  le  registre  où  ils 
étaient  consignés,  disant  qu'  «  il  ne  s'abaisserait  pas  à  se  justifier  d'une 
dépense  de  4.000.000  de  sesterces  (800.000  fr.)  pour  une  expédition,  lui 
qui,  par  ses  victoires,  avait  enrichi  le  trésor  de  200.000.000  de  sesterces 
(40.000.000  de  fr.),  et  n'en  avait  rapporté  que  le  surnom  d'Africain,  et  que 
s'ils  étaient  riches,  c'était  en  ennemis  beaucoup  j)lus  qu'on  argent  ■■  ;  et  il 


F.444  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

s'exila  volontairement  à  Literne  en  Campanie,  où  il  mourut  en  184.  Son 
frère  fut  condamné  à  une  forte  amende;  ne  pouvant  la  payer  intégrale- 
ment, il  allait  être  conduit  en  prison,  quand  T.  Sempronius  Gracchus,  au- 
tre tribun  du  peuple,  qui  jusqu'alors  s'était  montré  l'ennemi  des  Scipions, 
s'y  opposa.  Ruiné  par  cette  amende,  Lucius  Scipion  n'accepta  de  ses  pa- 
rents et  amis,  qui  mirent  à  sa  disposition  des  sommes  immenses,  que  de 
quoi  racheter  ce  qui  était  strictement  nécessaire  à  son  existence. 
47,  Cauterizée.  —  Ulcérée,  torturée  par  le  remords. 
662, 

4,  Innocence.  —  «  La  vertu  s'avilit  à  se  justifier.  »  Voltaire,  Œdipe. 

5,  Géhennes.  —  La  torture,  appliquée  aux  accusés  pour  les  forcer  à  avouer 
leur  crime  ou  nommer  leurs  complices,  dite  question  préalable,  a  été  abo- 
lie en  France  par  Louis  XVI,  en  1780. 

11,  Guerdon.  —  Une  si  belle  récompense  que  celle. 

22,  Confessions.  —  Accusations,  porte  l'éd.  de  88. 

24,  Fit.  —  Quinte  Clkce,  VI.  —  En  329.  Accusé  d'avoir  trempé  dans  un 
complot  contre  Alexandre  le  Grand,  fut  mis  à  la  torture,  déclaré  coupable 
et  lapidé.  Le  fait  principal  à  sa  charge  était  que  pendant  deux  jours,  alors 
qu'à  diverses  reprises  il  avait  vu  le  roi,  de  l'intimité  duquel  il  était,  et 
ayant  toute  qualité  pour  l'entretenir,  il  ne  lui  avait  pas  donné  avis  d'une 
conjuration  dont  il  avait  été  averti  pour  l'en  prévenir,  et  à  deux  reprises 
différentes  avoir  répondu  à  celui  qui  l'en  avait  instruit,  que  l'occasion  lui 
avait  manqué  pour  le  faire;  ce  que,  pour  sa  défense,  il  expliquait  en  disant 
qu'il  n'avait  pas  attaché  d'importance  à  la  révélation  qui  lui  avait  été  faite, 
n'estimant  pas  vraisemblables  les  projets  qu'on  lui  dénonçait. 

35,  Conte.  —  Il  est  dans  Fkoissart,  IV,  87. 

37,  Justicier.  —  BajazetI,  appelé  aussi  l'Amorabaquin,  ce  qui  signifierait  fils 
d'Amurat. 

CHAPITRE  VI. 

664, 

6,  L'exercitation.  —  Montaigne  traite  dans  ce  chapitre  de  l'exercice  de  la 
vertu,  ou  plutôt  de  la  nécessité  de  ne  pas  se  borner  à  l'exalter  et  d'y  join- 
dre la  pratique. 

11,  Empescbée.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  Quelques  bonnes  opinions  qu'elle  ait. 

16,  Escient.  —  Exprès,  à  dessein;  c'est  un  sens  que  ce  mot  a  fréquemment 
dans  les  Essais. 
666, 

2,  Marault.  —  Monstre  (var.  des  éd.  ant.  à  88). 

12,  Amis.  —  SÉNÈQUE,  De  Tranq.  animi,  14. —  Allant  au  supplice,  ajoute  Plu- 
tarque,  il  dit  à  un  de  ses  amis  qui  l'accompagnait,  qu'il  viendrait  lui  parler  la 
nuit  suivante;  il  lui  apparut  en  effet  et  discourut  avec  lui  sur  l'immortalité 

.de  l'àme  et  la  lumière  pure  et  éclatante  dans  laquelle  la  sienne  se  trouva 
après  la  mort.  — Dans  un  autre  ordre  d'idées,  surtout  dans  un  but  humani- 
taire et  avec  l'arrière-pensée  d'y  trouver  un  argument  pour  la  suppression 
de  la  peine  de  mort,  on  s'évertue  aujourd'hui  à  reconnaître  si  un  individu 
décapité  conserve  encore  sa  connaissance  dans  l'instant  qui  suit  l'exécution  : 
si  par  exemple,  à  l'appel  de  son  nom,  un  indice  se  produit  qu'il  l'a  perçu  ; 
jusqu'ici  les  expériences  faites  à  cet  égard  n'ont  rien  donné  de  concluant. 

38,  Souffrances.  —  Actions,  port,  les  éd.  ant.,  à  quoi  celle  de  80  aj.  :  opéra, 
lions. 

668, 

1,  Insensible.  —  «  Qu'on  interroge  les  médecins  et  les  ministres  du  culte 
accoutumés  à  observer  les  actions  des  mourants  et  à  recueillir  leurs  der- 
niers sentiments,  ils  conviennent  qu'à  l'exception  d'un  petit  nombre  de 
maladies  aiguës  où  l'agitation  causée  par  des  mouvements  convulsifs  sem- 
ble indiquer  des  souffrances  chez  le  malade,  dans  toutes  les  autres  on 
meurt  doucement,  tranquillement  et  sans  douleur.  »   Blffon.  —  Cela  est 


NOTES.         LIV.  II,  Cil.  VI.         VOL.  I,  PAG.  668.  445 

vrai,  mais  en  tant  seulement  des  derniers  moments  où  l'organisme  brisé 
par  le  mal  qui  le  détruit  est  anéanti  et  va  cesser  d'être,  autrement  c'est 
assez  discutable;  la  plupart  du  temps  ce  n'est  qu'une  accalmie  et  ce  pas- 
sage de  vie  à  trépas  a  été  précédé  de  souffrances  dont  il  y  a  lieu  de  tenir 
compte  avant  de  conclure.  —  «  Une  douleur  très  vive,  ajoute  Buffon,  pour 
peu  qu'elle  dure,  conduit  à  l'évanouissement  ou  à  la  mort.  Nos  organes, 
n'ayant  qu'un  certain  degré  de  force,  ne  peuvent  résister  que  pendant  un 
certain  temps  à  un  certain  degré  do  douleur;  si  elle  devient  excessive,  elle 
cesse,  parce  qu'elle  est  plus  forte  que  le  corps,  qui,  ne  pouvant  la  suppor- 
ter, peut  encore  moins  la  transmettre  à  l'àme,  avec  laquelle  il  ne  peut  cor- 
respondre que  quand  les  organes  agissent,  etc..  »  —  En  écrivant  ce 
passage,  et  quelques  autres  que  nous  signalons  plus  loin,  Buffon  s'est  cer- 
tainement rappelé  plusieurs  idées  de  ce  chapitre  des  Essais.  Le  Clercq. 

21,  Mort.  —  Montaigne  a  déjà  dit  la  môme  chose,  à  peu  près  dans  les  mêmes 
termes.  V.  I,  122  et  N.  Mort. 

23,  L'effort.  —  Montaigne  est  ici  bien  dans  le  vrai,  quoiqu'il  agisse  tout  au- 
trement, car  son  livre  est  plein  de  l'attente  de  cet  événement.  A  quoi  bon 
en  effet  cette  préoccupation  continue  de  la  mort?  Avec  cette  pensée  tou- 
jours présente  à  l'esprit,  on  n'entreprendrait  jamais  rien,  on  ne  jouirait  de 
rien,  et  notre  existence  se  passerait  tout  entière  anxieuse  et  stérile.  Qu'on 
y  soit  constamment  préparé,  c'est-à-dire  qu'on  ait  toujours  ses  affaires  en 
ordre,  parce  qu'elle  peut  nous  surprendre,  c'est  raisonnable;  que  celui  qui 
croit  en  une  autre  vie,  où  il  renaîtra  avec  son  individualité,  et  recevra  la 
récompense  ou  le  châtiment  de  ses  faits  et  gestes  sur  cette  terre,  pense 
fréquemment  à  cette  fin  dernière  pour  y  j)uiser  une  aide  dans  la  voie  du 
bien  et  une  consolation  dans  l'affliction,  cela  se  conçoit,  mais  quelle  su- 
perlluité  que  do  s'en  préoccuper  sans  cosse!  Quelles  que  soient  les  disposi- 
tions en  lesquelles  nous  nous  sommes  ingéniés  à  être  pour  la  recevoir,  elle 
accomplit  son  œuvre  sans  que  la  pose  que  nous  y  mettons,  y  change  quoi 
que  ce  soit,  non  plus  que  si  elle  vient  sans  que  nous  nous  soyons  mis  en 
peine  pour  la  recevoir. 

25,  Deuxiesmes.  —  Il  y  eut,  en  ce  temps,  huit  guerres  de  religion  :  la  se- 
conde, de  15G(J  à  15G8,  fut  marquée  par  le  combat  de  S.-Denis  où  fut  tué  le 
connétable  de  ^Montmorency  ;  la  troisième,  de  1568  à  1570,  en  cette  dernière 
eurent  lieu  les  batailles  de  Jarnac  et  de  Montcontour. 

36,  Petit  homme.  —  C'est  Montaigne  lui-même;  voir  son  portrait  ch.  XVII 
du  liv.  II. 

38,  Contre-mont.  —  Ou,  comme  on  dit  familièrement,  les  quatre  fei's  en 
l'air. 

3(»,  Estendu.  —  Mort  eslendu,  port,  les  éd.  ant. 
670, 

15,  Menus.  —  Peu  à  peu. 

40,  Faiblesse.  —  L'éd.  de  80  aj.  :  et  de  longue  maladie. 

41,  Douleurs.  —  Les  plus  terribles  agonies  elles-mêmes  effraient  pli^  les 
spectateurs  qu'elles  ne  tourmentent  le  malade.  Combien  n'en  a-t-on  pas  vu 
qui,  après  avoir  été  à  cette  dernière  extrémité,  en  sont  revenus  n'ayant 
aucun  souvenir  de  ce  qui  s'était  passé,  de  ce  qu'ils  avaient  paru  sentir; 
ils  avaient  réellement  cessé  d'être  pour  oux-mèmes  pendant  ce  temps,  puis- 
qu'ils sont  obligés  de  rayer  de  leur  existence  les  moments  passés  dans  cet 
état  duquel  il  ne  leur  reste  aucune  idée;  c'est  qu'en  effet  la  douleur  que  peut 

'  endui'er  le  corps  est  proportionnée  à  sa  force  et  à  sa  faiblesse;  or,  dans 
l'instant  de  la  mort,  il  est  plus  faible  que  jamais,  il  ne  peut  donc  éprou- 
ver qu'une  très  petite  douleur,  si  même  il  en  éprouve  quelqu'une.  Buffon. 

42,  Pénibles.  —  La  douleur  de  l'àme  ne  peut  être  produite  que  par  la  trans- 
mission qu'elle  en  reçoit  du  corps;  une  douleur  excessive,  venant  à  excé- 
der ce  que  le  corps  peut  supporter,  l'anéantit  et  du  même  coup  le  fonction- 
nement de  ses  organes;  il  est  hors  d'état  de  continuer  à  transmettre  à 
l'àme"  ses  sensations,  dont  elle  cesse,  elle  aussi,  d'être  affectée,  n'en  recevant 
plus  communication.  Buffon. 


P.44fi  ESSAIS  l)K  MONTAIGNE. 

672, 

33,  Ego.  —  Ii'is,  messagère  des  dieux  et  en  paiticuliei-  de  Juiioii. 
674, 

1.  Sens.  —  Qui  sortent  au  hasard,  mais  n'ont  aucun  sens. 

•23,  Dressent  et  couchent.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  et  esmeuuenl. 

36,  Nue.  —  En  l'air. 

41,  Vsage.  —  Comme  par  habitude. 
676. 

13,  Moins  poisante  —  Les  éd.  ant.  port.  :  si  plaisante. 

20,  Encore.  —  Quatre  ans  après  (add.  de  80). 

33.  Léger.  —  J,-J.  Rousseau  nous  a  laissé,  lui  aus.si,  un  récit  de  ses  sensa- 
tions, loVs  d'une  chute  à  Menilmontant,  en  177(). 

:î5,  Pline.  —  Nat.  Hist.,XXU,  24. 
678, 

G,  Anciens. —  Dans  le  nombre  :  chez  les  Grecs,  Archiloque  et  Alcée;  chez 
les  Latins.  Lucilius,  et  plus  tard  Marc-Aurèle  et  S.  Augustin,  ce  derniei" 
dans  ses  Confessions.  En  des  temps  plus  rapprochés  :  .J.-.I.  Rousseau,  éga- 
lement dans  ses  Confessions  qui,  elles,  ne  sont  que  du  roman;  Restif  de  la 
Bretonne,  dans  S.  Nicolas  ou  le  cœur  humain  dévoilé  (1794). 

24,  Place.  —  C.-à-d.  faire  toilette  et  prendre  une  attitude  convenable  pour 
se  présenter,  se  produire  en  société. 

23,  Vicieux.  —  Pascal,  qui  prohibait  jusqu'au  mot  «  moi  »,  a  dit  au  sujet  des 
Essais  :  ••  Le  sot  projet  que  Montaigne  a  eu  de  se  peindre  lui-même.  »  Voir 
N.  II,  18  :  Extrauagant,  la  réponse  qu'y  l'ait  Voltaii-e. 

39,  Veaux.  —  Balivernes,  niaiseries,   contes  ridicules.  Cette  locution  vient 
de  ce  que  les  veaux  ne  se  bridant  pas.  les  brides  à  veaux  n'existent  pas,  que 
c'est  autant  dire  rien. 
680, 

1,  Trottoir.  —  C.-à-d.  sur  la  voie  pul)liquo,  si  bien  que  tout  h;  monde  en 
parle  ou  est  à  même  d'en  parler. 

9,  Voisins.  —  Les  protestants. 

\2,  Viure.  — «  Vivre,  est  le  métier  que  je  lui  veux  apprendre.  ■■  .I.-J.  Rolsseal, 
Emile,  I. 

15,  Gloire.  —  S'il  est  vain  et  présomptueux  de  proclamer  soi-même  ce  que 
l'on  vaut.  —  Le  mot  gloire  était  souvent  employé,  à  cette  époque,  dans  ce 
sens  de  vanité,  présomption 

10,  Hortense.  -r-  Mis  pour  Hortensius;  Montaigne  manque  à  son  parti  piis 
de  ne  pas  franciser  les  noms  propres  étrangers;  ce  qui,  par  habitude,  lui 
arrive  encore  parfois. 

'2.0,  Skeletos. —  Un  squelette,  ou  plutôt  un  écorché  pour  études  anatomiques. 

31,  Indifféremment.  —  Caton  l'Ancien  disait  qu'il  était  aussi  ridicule  de  se 
louer  soi-même,  que  de  se  blâmer. 

'.]ï),  Aristote.  —  Morale  à  j\icom.aque,  IV,  7. 

35,  Fausseté.  —  Nul  homme  vertueux  ne  cherche  à  se  faire  valoir  par  les 
qualités  qu'il  n'a  pas. 
682, 

22,  Nihilité.  —  Néant;  mot  forgé  par  Montaigne,  du  latin  ni/til.  rien. 

23,  A  certes.  —  Sincèrement,  sérieusement. 


FIN  DES  NOTES  DU  PREMIER  VOLUME. 


NOTES. 


DEUXIEME  VOLUME. 

LIVRE    SECOND 

[Suile). 

CHAPITRE  VII. 
10, 

1,  Cœsar.  —  Suétone,  Auguste,25. 

10,  Meurte.  —  Myrto;  ce  nom  de  meui'te  lui  l'tait  assez  général  dans  le  midi 
de  la  France. 

12,  Flambeau.  —  Lors  de  la  première  guerre  punique,  après  la  bataille  de 
Jlylos  (260),  la  première  victoire  navale  qu'ils  aient  remportée,  les  Romains 
décernèrent  au  consul  Duilius,  avec  les  honneurs  du  triomphe,  le  privilège 
de  se  faire  accompagner,  le  soir,  à  la  lueur  de  ilambeaux  et  au  son  des  flû- 
tes; de  plus,  une  colonne  rostrale  fut  élevée  sur  le  forum,  colonne  qui 
existe  encore,  restaurée  à  la  vérité,  et  sert  actuellement  de  support  à  un 
réverbèi'e  ! 

13,  Titres.  —  Après  la  Révolution  de  1793,  Napoléon  rétablit  la  noblesse  en 
France.  Déjà  en  18(M,  Masséna,  entre  autres,  avait  été  fait  duc  de  Rivoli  ; 
mais  de  1806  date  réellement  la  constitution  de  la  noblesse  impériale  qui, 
dès  le  début,  outre  les  royautés  des  Espagnes,  de  Hollande,  de  Naples  et  de 
Sicile,  la  vice-royauté  d'Italie,  comprit  les  duchés  de  Dalmatie,  d'istrie,  du 
Frioul,  de  Cadore,  de  Bellunc,  de  Conégliano,  de  Trévise,  de  Feltre,  de 
Rassano,  de  Vicence,  de  l'adoue  et  de  Rovigo;  auxquels  vinrent  s'ajouter 
plus  tard  et  successivement  ceux  de  Bénévent,  Gaètc,  Otranle,  Ponte-Coi-vo, 
Reggia,  Trente,  Massa,  Carrare,  Parme,  Plaisance,  Clèves  et  Berg,  d'Auer- 
stadt,  d'Elchingen,  les  principautés  de  Guastalla,  de  Neufchatel,  de  Wagi'am, 
d'Essling,  etc.  Les  Ministres,  Sénateurs,  Conseillers  d'État,  etc.,  devinrent 
comtes;  les  Présidents  des  diverses  cours,  les  évéques,  les  maires  des  52  vil- 
les les  plus  importantes  de  l'empire  devinrent  barons;  réserve  était  faite 
pour  les  généraux,  préfets,  officiers  civils  et  militai  res  des  titres  qui  pouvaient 
être  conférés  à  chacun.—  De  nombreuses  dotations  furent  jointes  à  certains 
de  ces  titres,  elles  arrivèrent  à  dépasser  30.000.000  fr.  de  revenus,  dont  par- 
tie constituaient  des  majorats,  c'est-à-dire  étaient  attribués  à  titre  perpétuel 
et  inaliénable  à  l'aîné  des  fils.  Ces  majorats  pouvaient  être  égalem(>nt  cons- 
titués, avec  ou  sans  le  concours  de  l'État,  par  le  dignitaire  lui-même  :  les 
grands  dignitaires  de  l'empire,  en  affectant  200.000  Ir.  de  revenus  à  ces 
majorats,  conféraient  à  leur  fils  le  di'oit  de  porter  le  titre  de  duc,  dèsle  vi- 
vant du  père;  les  comtes  ayant  30.000  fr.  de  revenus,  les  barons  en  ayant 

,  lû.fXX)  et  en  constituant  un  tiers  en  majorât,  dotaient  l'aîné  de  leurs 
enfants  du  titre  immédiatement  inférieur  au  leur  et  les  autres  étaient 
chevaliers;  de  ce  fait,  le  budget  est  aujourd'hui  encore  grevé  de  plus  d'un 
million.  —  En  tout.  Napoléon  I"  a  fait  9  princes,  32  ducs,  388  -comtes  et 
1..000  barons. 

Trois  générations  successives  dans  la  Légion  d'honneur  transmettaient  la 
noblesse  à  toute  la  descendance  ;  cette  disposition,  tombée  d'elle-même,  n'a 
pas  été  abrogée 

Enfin  en  1811,  on  procéda  à  la  régularisation  des  anciens  titres  féodaux. 


Pb.  448  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

qui  avaient  été  supprimés  i)ar  décret  du  17  juin  1790  de  l'Assemblée  cons- 
tituante. 

En  principe,  l'institution  des  titres  de  noblesse  se  justifie  parfaitement; 
mais  la  prodigalité  les  discrédite  et  leur  perpétuité,  qui  contribue  à  les 
multiplier  outre  mesure,  les  fait  tomber  dans  la  banalité  et  leur  enlève  tout 
stimulant.  Leur  transmission  semblerait  devoir  être  limitée  à  une,  deux, 
trois  ou  quatre  générations  au  plus,  chacune  ne  conservant  que  le  titre  im- 
médiatement inférieur  à  celui  delà  génération  précédente,  si  par  elle-même 
elle  n'en  a  acquis  un  plus  élevé.  C'est  le  système  inverse  qui  est  appliqué, 
aggravé  encore  par  les  substitutions,  abus  que  rien  ne  justifie,  qui  font  que 
sur  les  50.000  nobles  qu'on  peut  compter  en  Fi-ancc,  un  millier  à  peine  peut 
se  prévaloir  de  titres  qui  soient  indéniables. 

Quant  à  la  particule  de,  dite  nobiliaire  et  regardée  communément  comme 
attestant  une  noble  origine,  elle  n'a  jamais  eu,  par  elle-même,  ce  caractère 
et  n'est  pas  un  critérium  infaillible  de  noblesse. 

Abolis  à  nouveau  par  la  République  de  1848,  les  titres  de  noblesse  ont 
été  une  seconde  fois  rétablis  en  1852  par  le  prince  Louis  Napoléon. 

13,  Armoiries.  —  La  maison  d'Estaing,  par  exemple,  portait  des  fleurs  de 
lys  dans  ses  armoiries,  parce  qu'à  la  bataille  de  Bouvines  (1214),  l'un  des- 
siens avait  sauvé  la  vie  au  roi  Philippe-Auguste. 
12, 

3.  Sainct  Michel.  —  L'ordre  de  Saint-Michel,  institué  par  Louis  XI  en  14G9. 
Cet  ordre,  primitivement  destiné  à  la  haute  noblesse,  finit  par  être  accordé 
aux  gens  de  robe,  de  finance,  etc.;  supprimé  à  la  Révolution,  rétabli  à  la 
Restauration,  il  a  été  définitivement  aboli  en  1830. 

10,  Plustost...  vtile.  —  Var.  de  80  :  qu'à  nulle  autre. 

12,  D'occasions.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  c'est  vue  monnaye  à  toute  espèce  de 
marchandises. 

IG,  Trahison.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  autres  que  nous  employons  à  noslre 
vsage,  par  l'entremise  d'autruy. 

28,  Fidélité.  —  L'éd.  de  80  port.  :  frugalité. 

32,  D'honneur.  —  Ces  récompenses  honorifiques. 

34,  Largesse.  — Les  décorations  sont  en  effet  un  moyen  précieux  de  recon- 
naître le  mérite  et  les  services  rendus;  mais  l'abus  le  déconsidère;  et  ce 
que  constate  ici  Montaigne  pour  l'ordre  de  S.-Michel  est  presque  chose  faite 
pour  notre  ordre  de  la  Légion  d'honneur  qui  pendant  près  de  trois  quarts 
de  siècle  a  été  à  si  juste  titre  en  si  iiaute  estime;  si  bien  qu'aujourd'hui, 
nombre  de  ceux  qui  croient  l'avoir  mérité,  dédaignent  de  le  porter,  tant 
il  a  été  prodigué;  au  commencement  de  1907,  en  effet,  on  ne  comptait  pas 
moins,  en  France,  de  52.000  membres  de  la  Légion  d'honneur  et  220.000  dé- 
corés ou  médaillés  de  tous  ordres  nationaux  ;  jamais  il  n'avait  été  fait  pa- 
reille débauche  de  décorations  que  depuis  que  nous  sommes  en  République, 
gouvernement  qui  par  sa  nature  même  devrait  en  être  plus  sobre  que  tout 
autre.  —  Outre  l'abus  qu'on  fait  de  cette  décoration,  on  en  crée  journelle- 
ment de  toutes  sortes;  croix  et  médailles  pullulent,  sans  compter  les  dé- 
corations étrangères  pareillement  distribuées  avec  non  moins  de  profusion 
et  sans  plus  de  raison  ;  aussi  les  unes  comme  les  autres  ont-elles  perdu  tout 
prestige,  et  de  prime  abord  et  jusqu'à  plus  ample  informé,  elles  témoignent 
plutôt  de  l'intrigue  que  du  mérite.  —  Depuis  trente  ans,  certains  de  nos 
gouvernants,  inespéréraent  arrivés  au  pouvoir  dont  ils  ne  savent  que 
mésuser,  ne  voient  là  qu'une  ressource  facile  et  commode  de  donner  satis- 
faction, sans  qu'il  leur  en  coûte  rien,  à  ceux  qui  les  y  ont  portés  et  à  l'en- 
tourage qui  les  flatte  et  souvent  gouverne  en  leur  nom;  d'autres  entraînés 
par  les  théories  socialistes,  dont  ils  sont  les  apôtres  généralement  plus  in- 
téressés que  convaincus,  y  ajoutent  l'arrière-pensée  d'arriver  à  tuer»  par  le 
discrédit  une  institution  qu'ils  exècrent,  pai'ce  qu'elle  leur  vient  d'une  autre 
époque  et  qu'elle  porte  atteinte  à  l'égalité  qu'ils  poursuivent,  en  ramenant 
le  plus  pos.sible,  ici  comme  en  tant  d'autres  choses,  tout  ce  qui  a  tendance 
à  s'élever  à  leur  niveau  moral,  au  niveau  inférieur. 


NOTES.        LIV.  II,  CH.  VII.        VOL.  II,  PAG.  l±  Fb.449 

35,  Nostre.  —  Montaigne  dit  «  nostre  »,  parce  que  lui-même  était  chevalier 
de  S. -Michel;  l'ordre  du  S. -Esprit,  créé  vers  cette  époque,  l'était  quand  il 
écrivait  ce  chapitre,  puisqu'il  en  parle  un  peu  plus  loin,  seulement  il  ne 
l'ava-it  pas. 
14, 

10,  Parle.  —  La  vaillance  militaire. 

14,  Militaire.  —  C'était  l'idée  de  l'amiral  de  Coligny;  il  voulait  réunir  tous 
les  Français  dans  une  guerre  visant  la  conquête  des  Pays-Bas  espagnols; 
Charles  IX  semblait  goûter  ce  plan,  avant  de  s'engager  dans  la  S. -Barthé- 
lémy, et  ce  fut  le  motif  par  lequel,  à  la  cour,  on  retint,  à  ce  moment-là, 
Coligny  qui  se  méfiait.  11  se  peut  que  Montaigne  ait  écrit  ce  passage  sous 
une  réminiscence  do  ce  fait. 


16. 


18. 


i.  Dernière.  —  L'ordre  du  S.-Espi-it,  institué  par  Henri  111  en  1578.  —  Pour 
y  être  admis,  il  fallait  être  catholique  et  avoir  déjà  reçu  l'ordre  de  S. -Mi- 
chel. 11  est  passé  par  les  mêmes  vicissitudes  que  ce  dernier  (V.  N.  II,  12  : 
Sainct  Michel).  —  Ces  ordres  et  celui  de  S. -Louis,  créé  plus  tard,  disparus 
à  la  Révolution,  ont  fait  place  quelques  années  après  à  celui  de  la  Légion 
d'honneur,  qui  seul  subsiste  aujourd'hui.  Institué  par  décret  des  Consuls 
du  19  mai  180'2,  il  fut  inauguré  le  11  juillet  1804.  Le  Chef  de  l'État  en  est  le 
Grand-Maitre:  l'administration  en  est  confiée  à  un  Grand-Chancelier  qui 
travaille  directement  avec  lui;  cet  ordre  est  destiné  à  récompenser  les  ser- 
vices civils  et  militaires,  il  se  compose  de  80  grands-croix,  200  grands-of- 
ficiers, 1.000  commandeurs,  4.000  officiers  et  un  nombre  illimité  de  che- 
valiers (V.  N.  II,  10  :  Titres).  —  En  dehors  de  cet  ordre,  et  de  catégorie  tout 
autre,  nous  avons  encore  nombre  de  récompenses  honorifiques,  dont  la 
médaille  militaire  et  la  médaille  d'honneur  ou  de  sauvetage,  dont  le  pres- 
tige à  bien  juste  titre  est  intact,  parce  que  généralement  elles  sont  mé- 
ritées; les  Palmes  académiques,  le  mérite  agricole  qui  se  distribuent  par 
lu'assées,  les  médailles  commémoratives  et-  d'autres  de  toutes  natures,  sans 
compter  les  Ordres  coloniaux,  auxquels  il  faut  ajouter  les  Ordres  étrangers,  ■ 
qui  pullulent  également,  au  point  qu'aujourd'hui  en  France  est  décoré  qui 
veut,  et  que  seuls  se  remarquent  ceux  qui  ne  le  sont  pas. 

11.  Propos.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  nous  estant  si  familier  par  l'air  François 
quon  lui  a  donné  si  perf'ect  et  si  plaisant. 

19,  Force.  —  Virtus,  en  latin,  signifie  force,  courage;  de  là  est  venu  le  mot 
français  vertu,  ces  qualités  constituant,  chez  les  anciens,  la  vertu  par  ex- 
cellence. «  La  force,  dit  J.-J.  Rousseau,  Emile,  V,  est  la  base  de  toute  vertu; 
la  vertu  n'appartient  qu'à  un  être  faible  par  sa  nature  et  fort  par  sa  volonté  » 
(V.  N.  II,  8G  :  Vertueux). 

20,  Militaire.  —  Cela  était  encore  vrai  du  temps  de  Montaigne,  mais  a  cessé 
d'être.  Quand,  à  la  Révolution,  Napoléon  rétablit  les  titres  nobiliaires,  par 
une  pensée  bien  digne  de  son  génie,  il  s'en  servit  pour  récompenser  tous 
les  genres  de  mérites  et  de  services,  aussi  bien  ceux  rendus  dans  la  vie  mi- 
litaire que  dans  les  charges  civiles;  dans  les  lettres,  les  arts,  les  sciences 
le  commerce,  l'industrie,  l'agriculture  qu'à  la  guerre,  et  son  exemple  a  été 
suivi  depuis. 

CHAPITRE  VIII. 

Enfants.  —  Ce  chapitre  est  un  des  plus  beaux  des  Essais,  on  y  ti-ouve 
partout  du  bon  sens,  de  la  raison,  un  jugement  exquis.  Montaigne  y  parle 
en  philosophe  qui  a  beaucoup  observé,  et  ses  idées  sages  et  réfléchies  sur 
ce  sujet  de  première  importance  sont  exposées  d'une  manière  simple  et 
naturelle  dans  l'ordre  où  elles  se  sont  offertes  à  son  espi'it.  Naigeon. 
1,  D'Estissac.  —  Louise  de  la  Bcraudière,  veuve  du  baron  d'Estissac,  devint 
la  maîtresse  d'Antoine  de  Navarre  (le  père  de  Henri  IV),  et  épousa,  en  se- 
condes noces,  de  Combaut,  premier  maître  d'hôtel  du  roi.  Sa  lille.  mariée  à 

ESSAIS   DE   MONTAIGNE.  —   T.   IV.  29 


Fb.450  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

un  de  la  Rochefoucauld,  a  apporté  à  une  branche  cadette  de  cette  famille 
le  nom  d'Estissac  qu'elle  porte  encore. 

12,  Extrauaguant.  —  C'était  l'avis  de  Pascal  (V.  N.  I,  67B  :  Vicieux),  auquel 
Voltaire  répondait  :  «  Le  charmant  projet  que  Montaigne  a  eu  de  se  peindre 
naïvement,  comme  il  a  fait;  car  il  peint  la  nature  humaine.  Si  Nicole,  Ma- 
lehranciie  avaient  toujours  parlé  d'eux-mêmes,  ils  n'auraient  pas  réussi.  Mais 
un  gentilhomme  campagnard  du  temps  de  Henri  111,  qui  est  savant  dans 
un  siècle  d'ignorance,  philosophe  parmi  les  fanatiques  et  qui  peint,  sous 
son  nom,  nos  faiblesses  et  nos  folies,  est  un  homme  qui  sera  toujours  aimé.  » 

17,  L'honneur.  — El  reuerence  singulière  {aûd.  des  éd.  ant.). 


20, 


3,  Fils.  —  Fut  un  des  compagnons  de  Montaigne,  quand  celui-ci  lit  son 

voyage  en  Italie  en  1580-81  ;  tué  en  duel  en  1586. 
G,  Puérilité.  —  Jeunes.se,  ou  mieux  enfance,  comme  portent  les   éditions 

antérieures  et  l'exemplaire  de  Bordeaux;  vient  du  latin  puerilitas,  qui  a 

cette  même  signification. 
24,  Grande. 

«  L'affection,  comme  les  fleuves,  |  Descend  et  ne  remonte  pas.  »  Nadaud. 

24,  Aristotélique.  —  Aristote,  Morale  à  Nicomède,  IX,  7. 
28,  Estre.  —  D'autant  que  nous  régardons  l'être,   l'existence,  comme  une 
chose  précieuse. 
22, 

8,  Moy.  —  Je  préférais  les  voir  mis  en  nourrice  (V.  N.  I,  462  :  Nourrice). 

17,  Nostre.  .  hommes.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  le  plaisir  que  nous  en  receuions, 
non  pour  eitx-mesmes. 

22,  Mesme.  —  Au  moment,  sur  le  point  de  le  quitter. 

'Si,  Etfect.  —  En  Guyenne,  la  législation  sur  la  puissance  paternelle,  con- 
forme au  droit  romain,  admettait  que  ce  que  le  fils  mineur  et  non  marié 
acquérait,  appartenait  au  père  ;  dans  certaines  l'égions,  quel  que  fût  son 
âge,  fùt-il  marié  et  père  de  famille  lui-même,  il  demeurait  sous  l'autorité  pa- 
ternelle tant  qu'il  n'était  pas  émancipé  et  que,  du  consentement  du  père, 
la  vie  commune  n'avait  pas  été  interrompue  pendant  dix  ans. 
24, 

21,  Moins.  —  Les  Gascons  paraissent  avoir  eu  à  cette  époque  assez  mauvaise 
réputation  ;  ce  passage  de  Montaigne  implique  en  eux  une  certaine  ten- 
dance à  s'approprier  le  bien  d'autrui;  ce  que  confirme  Rabelais,  111,  42,  en 
y  ajoutant  encore  :  ■■  Le  Gascon  semble  vouloir  se  battre  avec  tout  le  monde  : 
il  est  enclin  à  dérober;  bonnes  femmes,  prenez  garde  à  votre  ménage.  » 
'    23,  En.  —  Var.  de  80  :  de  Gascogne. 

27,  Contrées.  —  Add.  de  80  :  .de  la  France. 

37,  Aristote.  —  Morale  à  .Nicomède,  IV,  3. 
26, 

16,  Coups.  —  A  deux  reprises  différentes. 

18,  Nourrisse.  —  Pendant  l'allaitement  (V.  N.  I,  462  :  Nourrice). 

19,  Infortune.  —  Léonor  de  Montaigne,  dont  il  est  encore  parlé  au  ch.  V  du 
liv.  III  (III,  208),  née  en  1571,  morte  en  1616,  épousa  en  premières  noces, 
en  1590,  un  seigneur  de  la  Tour,  mort  en  1594;  elle  en  eut  une  fille,  dont 
la  postérité  s'éteignit  à  la  première  génération.  Remariée  en  1608  à  un  vi- 
comte de  Gamaches,  de  cette  deuxième  union  naquit  une  deuxième  fille, 
dont  la  descendance  est  représentée  aujourd'hui  par  les  familles  de  Puyse- 
gur,  de  Segur  et  Pontac. 

38,  Questuaire.  —  C.-à-d.  dans  les  autres  états  où  l'on  est  obligé  de  travail- 
ler, de  rechercher  le  gain  pour  vivre;  du  latin  quwsluarixis,  mercenaire. 

41,  Ans.  —  <■  Le  vingt-trois  septembre  156.'),  i'espousai  Françoise  de  la  Chas- 
saigne  »,  a  inscrit  Montaigne  dans  ses  éphémérides. 

42,  Aristote.  —  Poliliq.,  Vil,  16;  porte  trente-sept,  et  non  trente-cinq. 

42,  Trente.  —  République,  VI;  de  trenle  à  trente-cinq,  y  est-il  dit.  —  «  Con- 
duis ta  femme  à  ta  maison  en  temps  opportun,  quand  tu  auras  ni  beau- 


NOTES.         LIV.  II,  en.   VMI.         VOL.  II,  PAG.  26.  Fb.4al 

coup  moins  ni  beaucoup  plus  de  trente  ans;  c'est  l'âge  convenable  pour  te 
marier.  »  Hésioue. 
28, 

■2,  Engeance.  —  Leur  lignée,  leur  progéniture;  ce  mot  ne  s'emploie  plus 
guère  qu'en  mauvaise  part  : 

•  Quand  de  ces  médisants  l'engeance  tout  entière 
Irait,  la  tête  en  bas,  rimer  dans  la  rivière.  »  Boii.eac. 

5,  Temps.  —  Diogknf.  Laeuce,  I,  26. 

G,  Gaulois.  —  Ce  que  Jlontaigne   attribue   ici   aux  Gaulois,  probablement 

d'après  Cksak,  celui-ci  le  dit,  non  des  habitants  de  la  Gaule,  mais  de  ceu.x 

de  la  Germanie,  De  Bello  GalL,  VI,  21. 

18,  D'enfants.  —  Mahomet,  le  père  de  ce  roi  de  Tunis  dont  il  a  déjà  été 
question  au  ch.  LV  du  liv.  1  (V.  N.  I,  576  :  Thunes),  avait  eu,  de  différentes 
femmes,  trente-quatre  enfaiits.  —  J'ai  connu,  en  1860,  un  cheikh  du  Fer- 
djoua  (Province  de  Constantine,  Algérie),  Bon  Akkas,  le  dernier  chef  arabe 
ayant  conservé  son  indépendance,  laquelle  a  pris  fin  à  cette  époqq^.  qui, 
alors  âgé  de  près  de  quatre-vingts  ans,  passait  pour  en  avoir  eu  soixante- 
douze  dans  les  mêmes  conditions. 

19,  D'autres.  —  F'laton,  Lois,  XL  —  Jecus,  Astylus,  etc.,  étaient  des  athlètes. 

20,  Olympiques.  —  Jeux  qui  se  donnaient  durant  les  fêtes  célébrées  dans 
l'ancienne  Grèce,  à  Olympie,  en  l'honneur  de  Jupiter  Olympien.  L'origine 
de  ces  fêtes  se  perd  dans  les  temps  fabuleux;  elles  revenaient  tous  les  qua- 
tre ans,  avaient  lieu  au  solstice  d'été  et  duraient  cinq  jours;  elles  servirent 
pendant  des  siècles,  pour  la  supputation  du  temps.  De  776  à  292,  les  Grecs 
ne  comptèrent  que  par  olympiades. 

21,  Palaistrine.  —  Lieu  public  chez  les  Grecs  et  les  Latins,  où  on  se  for- 
mait aux  exercices  du  corps;  se  disait  également  des  luttes  qui  consti- 
tuaient le  principal  de  ces  exercices. 

37,  Pompes.  —  Les  éd.  ant.  à  88  aj.  :  et  de  ses  riches  alours. 
30, 

r,  Acquise.  —  Charles-Quint,  empereur  d'Allemagne  et  roi  d'Espagne,  ab- 
diqua la  couronne  d'Espagne  en  1555  (il  avait  alors  55  ans),  en  faveur  de 
son  fils  Philippe  II;  et,  l'année  suivante,  il  céda  l'empire  à  son  frère  Ferdi- 
nand, se  retirant  au  monastère  de  S.-Just  en  Estramadure  (Espagne),  où  il 
demeura  jusqu'à  sa  mort  (1558);  on  dit  qu'il  regretta  vivement  le  pouvoir 
dont  il  s'était  démis, 
y,  Ducat.  —  Boileau  a  traduit,  ainsi  qu'il  suit,  ces  deux  vers  d'Horace  : 

«  Malheureux,  laisse  en  paix  ton  cheval  vieillissant, 
De  peur  que  tout  à  coup,  efflanqué,  hors  d'haleine, 
11  ne  laisse,  en  lombanl,  son  maître  sur  l'arène.  • 

14,  Monde.  —  «  Les  vieillards  ne  se  croient  jamais  vieux;  ils  parlent  de  leur 
passé,  parce  que  la  faiblesse  se  plaît  à  revivre  le  temps  de  la  force,  et  la 
souffrance  dans  le  temps  des  plaisirs;  de  leur  expérience,  qui  est  la  chose 
du  monde  à  laquelle  on  croit  le  moins.  Ils  exigent  des  respects  qui  sont  des 
aumônes;  tenus  dans  une  dépendance  universelle,  ils  n'obtiennent  qu'une 
compassion  sèche.  Un  homme  qui  a  vécu,  c'est-à-dire  observé,  réfiéchi, 
trouve  dans  le  mépris  de  toutes  choses  la  seule  consolation  du  vieil  âge.  » 
Lamennais. 

^2h,  Accoustumé.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  de  produire  librement  ce  qin  me  vient 
à  la  bouche. 


32, 


17,  Commodité.  —  Cette  cohabitation  des  parents  avec  les  enfants  à  même 
lie  vivre  de  leur  vie  propre  et  ainsi  tenus  en  tutelle,  aboutit  rarement  au 
résultat  qu'on  avait  espéré.  Montaigne  n'en  a  pas  fait  l'expérience:  il  n'a 
pas  vécu  jusqu'à  un  âge  où  une  vie  aussi  calme  que  possible  devient  un 
impérieux  besoin,  ce  que,  malgré  les  apparences,  les  conditions  qu'il  pré- 


36, 


Fb.452  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

conise  réalisent  rarement.  Chacun  chez  soi,  ou  à  sa  chacunière,  suivant  sa 
propre  expression,  est,  à  cet  égard,  ce  que  l'on  peut  faire  de  mieux. 

21,  Reume.  —  On  comprenait  alors  sous  ce  nom  de  rhume  :  les  catarrhes,  la 
goutte  et  plusieurs  autres  maladies.  Payen. 

37,  Authorité.  —  Comme  si  la  nature  n'avait  pas  assez  bien  pourvu  à  notre 
autoi'ité. 

38,  Famille.  —  Henri  lY  introduisit  pareillement  cette  réforme  dans  sa  fa- 
mille, <-  car  il  ne  voulait  pas,  dit  Pérkfixe,  que  ses  enfants  l'appellassent 
monsieur,  nom  qui  semble  rendre  les  enfants  estrangers  à  leur  père  et  qui 
marque  la  servitude  et  la  sujétion  ;  mais  qu'ils  l'appellassent  papa,  nom 
de  tendresse  et  d'amour  »  {Hist.  de  Henry  le  Grand). 

34, 

G,  Cheneuiere.  —  Mannequins  ou  drapeaux  servant  à  mettre  en  fuite  les 
oiseaux  qui  viennent  manger  les  graines  en  terre,  dans  les  champs  où  croît 
le  chanvre,  ou  tous  autres  ensemencés.  ' 

22,  Addonne.  —  S'attache  à  lui. 

12#  Desseignée.  —  Faite  à  dessein,  préparée  d'avance. 

M,  (Economies.  —  Soins  de  ménage,  administration  de  maison;  c'est  dans 

ce  même  sens  qu'on  dit  :  l'Économique  d'Aristote,  de  Xénophon. 
14,  Etfect.  —  C.-à-d.  j'ai  vu  assez  de  ménages  où  les  choses,  pendant  un 

temps  souvent  long  et  d'une  façon  continue,  se  passaient  exactement  ainsi. 
16,  Maris.  —  Montaigne  veut  dire  :  «  Les  femmes  ont  toujours  du  penchant 

à  contrarier  la  volonté  des  mai'is  »  et  sa  phrase  est  passée  à  l'état  de  dicton. 

•  Ci-gît  ma  femme...  Oh  I  quel  bien    |    Pour  son  repos  et  pour  le  mien!  » 

«  Qui  femme  a,  noise  a.  »  Proverbe. 

«  A  qui  Dieu  veut  aider,  sa  femme  lui  meurt.  •  Proverbe. 

«  Gai,  gai,  de  profundis!  i  Dieu,  faut-il  lui  survivre? 

Ma  femme  Me  laut-il  la  pleurer? 

A  rendu  l'âme.  l  Non,  non,  je  veux  la  suivre... 

Qu'elle  aille  en  Paradis.  |  Pour  la  voir  enterrer.  •  Bérangeu. 

16,  Couuertures.  —  Prétextes,  mojens  détournés. 

32,  D'ennemis. —  Sknèque,  Epist.  47;  Macrobe,  Saturnales,  1,  11,  etc. 
38, 

21,  De  Montluc. —  L'auteur  des  Commentaires.  —  Son  fils  Bertrand,  dit  le 
capitaine  Peyrot,  se  rendait  en  Afrique  avec  j^trois  vaisseaux  qu'il  avait 
équipés,  pour  y  tenter  aventure  et  s'y  créer  un  établissement.  Une  tempête 
le  porta  sur  l'île  de  Madère  où,  bien  qu'on  fût  en  paix  avec  les  Portugais,  ils 
firent  feu  sur  lui;  il  descendit  à  terre,  prit  la  place  et  se  fût  emparé  de  l'île, 
s'il  n'eût  été  blessé  à  mort  (1568). 


40, 


4,  Tyrannique.  —  «  Je  ne  puis  lire  qu'avec  les  larmes  aux  yeux  (dans  les 
Essais  de  Montaigne)  ce  que  dit  le  maréchal  de  Montluc  du  regret  qu'il  a 
de  ne  s'être  pas  communiqué  à  son  fils,  et  de  lui  avoir  laissé  ignorer  la 
tendresse  qu'il  avait  pour  lui.  Mon  Dieu,  que  ce  livre  est  plein  de  bon 
sens.  »  M""  de  Sévigné,  Lettre  à  sa  fille. 
7,  Science.  —  Les  éd.  ant.  à  88  port.  :  souuenance. 
9,  Amy.  —  Cette  invocation  s'adresse  au  souvenir  de  La  Boétie. 

12,  Obsèques.  —  De  m'en  remémorer  à  tout  jamais,  constamment,  le  souve- 
nir. —  «  11  devrait  y  avoir  dans  le  cœur  des  sources  inépuisables  de  dou- 
leur pour  certaines  personnes.  »  La  Bruyère. 

18,  Cœsar.  —  De  Bello  Gai.,  VI,  18. 

30,  Escus.  —  11  y  avait  le  petit  écu  et  l'écu  de  six  livres.  Quand  la  valeur  n'é- 
tait-pas spécifiée,  c'était  toujours  du  petit  écu  qu'il  était  question;  il  va- 
lait trois  livres,  soit  environ  trois  francs  de  notre  monnaie. 

36,  Dot.  —  Sa  femme,  Françoise  de  Chassaigne,  lui  avait  apporté  7.000  li- 
vres de  dot,  et  renoncé  à  tous  droits  sur  la  succession  de  ses  père  et  mère. 


42, 
44, 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  VIII.         VOL.  II,  PAG.  40.  Fb.453 

37,  Maisons.  —  La  maison  est  ce  qui  porte  le  nom.  —  La  «lot  apportée  par  la 
femme  demeurant  sa  propriété,  ce  pouvait  être,  dans  l'idée,  une  cause  de 
ruine,  si  elle  était  considérable,  parce  qu'elle  était  tenue  en  dehors  des 
dépenses  d'ordre  général,  qu'il  l'ailait  qu'elle  se  retrouvât  intacte  lors  de  la 
dissolution  du  mariage,  pendant  lequel  la  femme  avait  tendance  à  l'ac- 
croître au  préjudice  de  la  communauté  et  aussi  à  s'en  prévaloir  pour  aug- 
menter son  luxe  tout  en  en  laissant  la  charge  au  mari. 

19,  Mère.  —  Les  livres  saints  {Proverbes,  XXXI,  3)  disent  :  «  Ne  donnez  point 
votre  bien  aux  femmes.  » 


7,  Masculines.  — Attribution  à  des  héritiers  mâles,  d'héritages  qui  devraient 
i-ovonir  à  des  femmes,  afin  d'empêcher  que  par  elles  ils  ne  passent  dans 
des  maisons  étrangères.  —  A  sa  mort,  IMontaigne  n'a  pas  été  conséquent 
avec  lui-même;  cédant  précisément  à  ces  préoccupations  masculines  qu'il 
condamne  quelques  lignes  plus  bas,  mû  par  le  désir  de  perpétuer  son  nom, 
ce  à  quoi  son  livre  a  surabondamment  pourvu,  il  a  fait  un  testament  par 
lequel  il  disposait  de  plus  qu'il  ne  possédait  et  instituait  le  puîné  de  ses 
descendants  héritier  de  sa  terre  et  de  son  nom,  ce  qui  a  donné  lieu  à  un 
procès  qui  ne  s'est  terminé  que  deux  sièclesaprès;  le  seigneuret  le  philosophe, 
en  cette  circonstance,  se  sont  tenus  nettement  en  contradiction.  Le  fait 
s'est  produit  dans  les  conditions  ci-après  :  En  1590,  lors  du  mariage  de  sa 
fille  Eléonore  avec  François  de  la  Tour,  Montaigne  attribua  par  contrat  de 
mariage,  avec  substitution  graduelle  et  perpétuelle  au  second  des  enfants 
mâles  qui  naîtraient  de  ce  mariage,  la  terre  de  Montaigne,  ses  dépendances 
et  une  somme  de  30.000  livres.  François  de  la  Tour  mourut  en  1594,  lais- 
sant une  fille,  Françoise,  qui,  en  1600,  n'ayant  que  six  ans,  fut  fiancée  à  Ho. 
noré  de  Lur  qui  n'en  avait  que  neuf;  le  contrat  définitif  de  mariage  fut 
passé  en  1607.  L'année  suivante,  Eléonore  se  remariait  au  vicomte  de  Ga- 
maches,  et  dès  ce  moment  la  disposition  insérée  par  son  père  dans  son 
premier  contrat  devint  un  sujet  de  difficultés  entre  les  deux  branches. 
Françoise  de  la  Tour  était  moite  en  1613,  laissant  un  fils,  le  vicomte  d'O- 
rellian,  né  l'année  précédente;  Eléonore,  en  1616,  lorsqu'elle  mourut,  le 
nomma  à  la  substitution  de  la  terre  de  Montaigne.  De  son  second  mariage, 
elle  avait  eu  une  .seconde  fille,  Marie  de  Gamaches,  qui  épousa  Louis  de  Lur, 
baron  de  Fargues,  frère  d'Honoré,  le  mari  de  sa  sœur  Françoise  {V.  N.  I, 
74  :  Salusse).  Un  accord  survenu  en  1627  entre  les  deux  frères  régla  à  l'amia- 
ble le  différend  pendant  par  suite  de  la  substitution;  mais  la  mort  du  vi- 
comte d'Oreillan,  tué  en  1639,  au  siège  de  Salces,  dans  le  Roussillon,  rou- 
vrit les  revendications  de  la  branche  cadette  et  il  en  résulta  une  série  de 
procès  qui  durèrent  deu.x  cents  ans. 

-il,  Platon.  —  Lois,  XI. 

29,  Delphique.  —  «  rvwOl  aeauTÔv  (Connais- toi  toi-même)  »,  inscription  qui 
était  gravée  au  fronton  du  temple  d'Apollon  à  Delphes.  V.  N.  I,  28  :  Congnoj-. 
46, 

12,  Loy.  —  La  loi  salique,  code  civil  et  pénal  des  Francs  Saliens.  Un  de  ses 
articles  fixe  que  les  mâles  seuls  peuvent  succéder  au  fief  donné  au  guer- 
rier en  vue  du  service  militaire;  appliquée  jusqu'alors  uniquement  aux 
propriétés  particulières,  elle  le  fut,  pour  la  première  fois,  à  la  couronne 
de  France,  en  1316,  à  la  mort  de  Louis  le  Hutin. 
•  26,  Petits.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  ny  fjousl  de  parenté. 

31,  Charge.  —  Ce  qui  n'empêche  que  les  siens,  «  il  ne  les  souffrait  pas  vo- 
lontiers nourris  près  de  lui  »  (II,  22),  «  et  qu'il  en  a  mis  deux  ou  trois 
en  nourrice  »  (I,  462  et  N.  Nourrice).  —  Ce  qui  convient  sur  ce  point, 
en  ces  temps-ci  où  les  santés  et  les  constitutions  sont  si  délabrées  par 
'hérédité  de  parents  déjà  malingres  ou  avariés  dans  le  sens  général  du 
mot  comme  dans  celui  plus  spécial  dans  lequel  on  l'emploie  aujourd'hui, 
par  la  vie  à  outrance  que  chacun  mène  soit  pour  ses  plaisirs,  soit  par 
nécessité  de  situation  et  les  habitudes  nouvelles,  et  aussi  par  la  sophisti- 


Fb.4o4  ESSAIS  1)K  MONTAIGNK. 

cation  la  plus  (Hcnduc  et  la  plus  éhontce  de  toutes  les  denrées  alimen- 
taires, semble  être  que  l'enfant  est  à  mettre  en  nourrice  si  la  mère  est 
vraiment  hors  d'état  de  l'allaiter  dans  de  bonnes  conditions  et  qu'elle  est 
coupable  lorsqu'elle  s'affranehit  de  le  nourrir  elle-même,  étant  à  luêino  de 
le  faire. 
oti.  Nostres.  —  11  en  est  malheureusement  encore  ainsi;  pourtant  la  légis- 
lation est  récemment  intervenue  pour,  dans  une  certaine  mesure,  prévenir 
les  abus  :  elle  interdit  notamment  de  priver  tout  enfant  de  moins  de  trois 
mois,  du  lait  de  sa  mère  pour  le  donner  à  un  nourrisson.  Dans  sa  comédi<> 
des  «  Remplaçantes  »,M.  Brieux  combat  ces  mêmes  errements  si  contraires 
aux  lois  de  l'humanité;  mais  plus  nous  allons,  moins  on  a  de  propension 
à  faire  passer  avant  toute  autre  considération  l'intérêt  de  l'enfant,  d'après 
lequel  toute  femme  qui  peut  nourrir  son  enfant  et  ne  le  fait  pas  commet 
un  crime,  et  que  celle  qui,  ne  le  pouvant  pas,  s'y  obstine  pouvant  faire 
autrement,  tout  en  étant  excusable,  parce  qu'elle  obéit  à  un  sentiment  na- 
turel, n'en  commet  pas  moins  une  faute  grave. 
48. 

17,  Indifféremment.  —  Si  dans  certaines  contrées  les  femmes  étaient  en 
commun,  il  en  était  d'autres  où  les  mariages  se  faisaient  à  la  criée,  conte 
également  Hérodote.  En  Babylonie,  une  fois  l'an,  dans  chaque  bourgade, 
les  lilles  nubiles  étaient  réunies  et  divisées  en  deux  catégories  :  les  belles, 
et  celles  qui  ne  l'étaient  pas,  étaient  estropiées,  etc.  On  commençait  par 
les  premières  et  dans  celles-ci  par  la  plus  belle,  chacune  était  successive- 
ment attribuée  au  plus  offrant;  on  passait  ensuite  aux  autres  en  procédant 
par  la  moins  avenante.  Le  prix  d'adjudication  des  premières  était  payé  par 
les  acheteurs,  et  pour  les  secondes  remis  aux  acquéreurs,  l'argent  versé 
pour  les  belles  servant  de  la  sorte  à  constituer  des  dots  aux  laides. 

19,  Pas.  —  Hérodote,  IV,  180,  dit  que  l'on  regarde  alors  comme  le  père  de 
chaque  enfant  celui  auquel  il  ressemble  le  plus. 

21,  Autres  nous  mesmes.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  chair  de  nosire  chair  et  os 

de  nos  os. 
32,  Platon.  —  Dans  Phèdre. 
50, 

2,  Fille.  —  NiCrPHORE,  XII,  34.  —  Ses  histoires  éthiopiques  qui  comprennent 
entre  autres  l'histoire  amoureuse  de  Théagène  et  Charyclée,  qu'appréciait 
tellement  Racine  que,  dit-on,  il  la  savait  par  cœur.  Le  fait  raconté  par 
Montaigne  est  contredit  par  Bayle,  Héliodore. 

20,  Estudes.  —  Ce  genre  de  peine,  qui  ne  s'applique  plus  aujourd'hui,  s'est 
longtemps  maintenu  de  pratique  courante;  et,  jusqu'à  la  Révolution,  on 
condamnait  au  feu  et  on  brûlait  un  peu  partout,  en  France,  en  Angleterre, 
aussi  bien  qu'à  Rome,  les  livres  frappés  d'interdit  et  notamment  ceux  en- 
tachés d'hérésie.  —  En  1735,  Voltaire  eut  ses  Lettres  philosophiques,  ou 
Lettres  anglaises,  brûlées  à  Paris  par  la  main  du  bourreau;  et  en  1760.. il 
en  fut  de  même,  à  Genève,  de  VÉmile  de  J.-J.  Rousseau. 

28,  Ensemble.  —  Sénèque  le  Rhéteur,  Controverses,  V.  —  Ce  Labienus  n'est 
pas  le  fils,  mais  le  petit-fils  du  lieutenant  de  César,  qui,  devenu  son  ad- 
versaire, périt  à  la  bataille  de  Munda  (45).  Quintus  son  fils  alla,  après  la 
mort  de  César,  chez  les  Parthes  pour  les  décider  en  faveur  de  Brutus,  et 
fut  vaincu,  pris  et  mis  à  mort  par  Ventidius,  lieutenant  d'Antoine. 

37,  Manger.  —  Tacite,  Ann.,  IV,  31.  —  En  20;  c'était  la  première  fois  qu'une 
accusation  de  ce  genre  était  portée  ;  elle  le  fut  à  l'instigation  de  Séjan  : 
l'auteur  se  défendit  avec  énergie  en  présence  même  de  Tibère.  L'ouvrage 
condamné  échappa  nonobstant  à  la  destruction;  on  le  cacha  et  plus  tard 
il  reparut. 


52, 


L  Bouche.  —  Tacite,  An7i.,  XV,  70.  En  65;  Lucain  avait  participé  à  la  con- 
juration de  Pison  contre  Néron,  par  ressentiment  de  ce  que  ce  dernier, 
par  jalousie  littéraire,  cherchait  à  étouffer  la  gloire  de  ses  vers  et  lui  avait 
défendu  de  les  montrer.  Tandis  que,  les  veines  ouvertes,  son  sang  s'é- 


NOTES.         LIV.  If,  CFI.  vn[.         VOL.  II,  PAG.  52.  Fb.455 

chappait  et  qu'il  allait  s'affaiblissant,  il  so  rappela  un  passage  où  il  avait 
décrit  cliez  un  soldat  bless(''  une  mort  analogue  et  s'éteignit  en  les  récitant. 
V.  II,  (56  et  N.  Lucain. 
10,  Epicurus.  —  Diogène  Laehce,  X,  22;  Cicéko.n,  De  Finibus,  II,  30. 
22,  Entans.  —  Saint  Augustin,  d'après  ses  Confessions,  aurait  eu  des  enfants, 
avant  sa  conversion;  mais  cette  appréciation  de  Montaigne,  qui  est  de  celles 
qu'on  lui  a  reprochées,  ne  saurait  être  incriminée  que  par  des  critiques 
pai'  trop  superficiels,  ce  n'est  chez  lui  qu'une  manière  de  dire. 
;!:!,  Rome.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  France. 
'•y\,  Aristote.  —  Murale  à  Nicomaque,  IX,  7. 

3S,  Lacedemoniens.  —  Diodore  de  Sicile,  XV,  87.  —  Épaminondas  blessé 
niortellejnent  à  la  bataille  de  Maiitinée  (363),  ses  amis  l'entouraient  et  l'un 
d'eux  s'écria  en  pleurant:  «Ah!  Épaminondas!  faut-il  que  tu  meures  sans 
enfants!  >•  —  "  De  par  Jupiter,  répondit  celui-ci,  cela  n'est  pas;  je  laisse 
deux  tilles,  la  victoire  de  Leuctres  et  celle  de  Mantinée.  »  —  D'après  Corné- 
lius Népos,  Épaminondas,  10,  ce  grand  capitaine  n'aurait  parlé  que  d'une 
tille,  la  bataille  de  Leuctres,  ignorant  peut-être  à  ce  moment  que  son  nou- 
veau succès  qui  lui  coûtait  la  vie  fût  aussi  complet  (V.  N.  I,  314  :  Reng; 
N.  III,  18  :  Epaminondas). 
39,  D'eschanger...  gorgiasses.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  à  eschanger  celles-là 
aux  mieux  nées  et  mieux  coiffées. 
54, 

I,  Estre.  —  Tous  deux  en  eurent  :  Alexandre  en  eut  un.  Hercule,  de  Bar- 
sine,  fille  d'Artabase,  du  sang  des  rois  d'Arménie,  ce  fils  atteignit  l'âge  de 
dix-sept  ans;  et  un  autre  posthume,  Alexandre,  de  Roxane,  fille  d'un  satrape 
de  Pei-se.  Cassandrc,  fils  d'Antipater,  les  fit  mourir  tous  deux  avec  leurs 
mères  ("V.  N.  III,  14  :  Possession).  L'histoire  conserve  encore  le  souvenir 
d'un  troisième,  né  de  Cléophis,  reine  d'un  royaume  des  Indes,  qui  reçut 
son  nom  et  régna  sur  les  états  de  sa  mère.  —  De  César,  on  connaît  Césarion, 
qu'il  eut  de  Cléopàtre  (Y.  N.  II,  634  :  Cœsarion);  on  lui  attribuait  aussi  la 
paternité  de  Brutus,  l'un  de  ses  assassins,  fils  de  Servilia,  sœur  de  Caton 
d'Utique. 

1,  Phidias.  —  Ses  œuvres  les  plus  célèbres  sont  :  le  Jupiter  Olympien,  les 
sculptures  du  Parthénon,  dont  il  fut  l'architecte,  et  la  statue  de  Minerve, 
qui  en  surmontait  le  fronton. 
6,  Filles.  —  Attila  avait  un  grand  nombre  de  femmes  parmi  lesquelle's  se 
trouvait  une  de  ses  filles,  nommc-c  Esca;  ces  alliances  incestueuses  n'étaient 
pas  réprouvées  par  les  Huns.  —  Dans  des  conditions  particulières,  l'his- 
toire des  filles  de  Loth  nous  présente  quelque  chose  d'analogue  (Genèse, 
XIX). 
6,  Fils.  —  Cette  assertion  de  Montaigne  (ivoque  le  souvenir  de  la  réplique 
de  Maric-.\ntoinette  accusée,  devant  le  Tribunal  révolutionnaire,  d'avoir 
corrompu  son  fils,  dans  la  tour  du  Temple  :  >■  La  nature  se  refuse  à  pa- 
reille question  faite  à  une  mère;  j'en  appelle  à  toutes  celles  qui  sont  ici  •> 
(1793).  —  Et  cependant  on  a  accusé  Agrippine  d'avoir  cherché  à  retenir, 
par  ce  moyen,  son  influence  sur  son  fils  qu'elle  sentait  lui  échapper;  mais 
ce  fils  était  Néron,  et  l'une  comme  l'autre  étaient  des  prodiges  de  vice. 
8,  Pygmalion.  —  Devint  amoureux  de  la  statue  de  Galathée  qui  était  son 
propre  ouvrage,  obtint  de  Vénus  que  ce  marbre  s'animât  et  l'épousa.  Mylh. 
—  Cette  fable  est  le  sujet  d'un  charmant  opéra-comique  de  Massé,  paru 
•     en  1852. 

CHAPITRE  IX. 

20,  Salade.  —  Casque  léger  sans  cimier,  ou  arniet,  à  l'usage  des  hommes  à 
cheval  du  xv*^  au  xvir  siècle,  qui  venait  des  Italiens  qui  l'appelaient  celata, 
dont  par  corruption  on  a  fait  salade. 

24,  Esloigner.  —  S'éloigner  de;  cette  inènu!  construction  se  rencontre  en 
Corneille  dans  sa  tragédie  de  Pompée  : 


Fb.4o6  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

•  ...  Ses  vaisseaux  en  bon  ordre, 
Ont  éloigné  la  ville...  • 

29,  Cortex.  —  Il  s'en  fabrique  aujourd'hui  pour  les  colonies,  confirmant  le 
proverbe  que  rien  n'est  nouveau  sous  le  soleil;  il  est  vrai  que  ce  n'est  pas 
comme  défense  contre  le  plomb  ou  le  fer,  mais  contre  les  rayons  solaires. 
56, 

8,  Tacitus.  —  Annales,  III,  43. 

11,  LucuUus.  — Plutarque,  Lucullus,  13. 

12,  Garentir.  —  On  l'a  essayé;  les  cuirasses  des  navires,  les  tourelles  et  cou- 
poles cuirassées  en  acier  chromé  qui  prptègent  les  pièces  d'artillerie,  les 
bétonnages  épais  qui  revêtent  les  parapets  ou  recouvrent  les  abris,  réali- 
sent dans  une  certaine  mesure  cette  garantie  contre  le  canon;  on  a  été 
moins  heureux  pour  les  abris  mobiles  offrant  dans  la  guerre  de  campagne 
une  protection  tant  soit  peu  efficace,  où  les  tranchées-abris  et  les  boucliers 
métalliques  des  pièces  d'artillerie  d'usage  récent  donnent  seuls  des  résultats 
appréciables. 

19,  Èlepbans.  —  Les  éléphants  jouèrent  un  grand  rôle  dans  les  guerres  d'A- 
lexandre et  de  ses  successeurs,  dans  celles  de  Pyrrhus  en  Italie,  durant  les 
guerres  puniques  du  côté  des  Carthaginois.  On  leur  protégeait  la  tète  et 
le  poitrail,  on  garnissait  leurs  défenses  de  pointes  d'acier  et  on  les  sur- 
montait de  tours  portant  généralement  de  six  à  huit  hommes;  la  Bible 
parle  de  32,  cela  semble  exagéré.  —  Actuellement,  on  les  emploie  encore 
aux  armées,  dans  les  pays  où  on  peut  s'en  procurer  aisément,  dans  les 
Indes,  aux  transports,  voire  même  à  celui  de  pièces  d'artillerie  légères.  — 
En  certaines  autres  contrées,  notamment  en  Afrique,  dans  le  Sahara,  entre 
l'Algérie  et  Tombouctou,  on  utilise  de  même,  pour  les  expéditions  qui  s'y 
font,  le  méhari,  dromadaire  de  selle,  qui  peut  soutenir,  pendant  une  quin- 
zaine de  jours,  des  marches  quotidiennes  de  70  kilomètres  et  franchir  en 
cas  de  besoin  120  kilomètres  en  douze  heures;  le  méhari  est  la  monture 
habituelle  des  Touareg,  seuls  habitants  de  cette  région.  Déjà,  en  1798, 
lors  de  la  campagne  d'Egypte,  avait  été  constitué  un  régiment  de  droma- 
daires pour  pouvoir  excursionner  dans  le  désert  et  y  atteindre  l'ennemi 
en  fuite. 

21,  Cbausse-trapes.  —  Clou  de  12  à  15  centimètres  de  long,  formé  de  quatre 
'pointes  dont  une  se  trouve  toujours  en  l'air.  —  En  Espagne,  en  124. 
Valère  Maxime,  III,  7,  2,  dont  le  fait  est  tiré,  ne  le  présente  que  comme 
une  idée  proposée  à  Scipion  qui  la  repoussa;  aujourd'hui  on  n'en  agirait 
pas  de  même;  on  estime  avec  raison  que  tout,  en  dehors  de  ce  qui  est  dé- 
loyal, est  licite  à  la  guerre,  qui  de  fait  n'est  soumise  qu'à  la  loi  du  plus 
fort  et  à  celle,  fort  élastique  et  peu  précise,  de  la  conscience  des  belligé- 
rants. 

28,  Gauche.  —  Plutarque,  Apophth.  de  Scipion  le  Jeune,  18.  —  Allusion  à  ce 
que  le  bouclier,  arme  défensive,  se  portait  an  bras  gauche,  et  que  les  armes 
offensives,  armes  de  main  et  armes  de  jet,  se  maniaient  avec  la  main  droite 
et  qu'à  la  guerre  attaquer  vaut  mieux  que  se  défendre. 

36,  Caracalla.  —  Xiphilin,  Caracalla. 

38,  Morion.  —  Casque  à  l'usage  des  hommes  à  pied,  assez  semblable  à  celui 
du  nom  de  «  salade  »,  affecté  aux  gens  à  cheval  (V.  N.  II,  54  :  Salade). 

38,  Escu.  —  Bouclier;  vient  du  latin  scutum,  provenant  lui-même  du  grec 
sculos  (cuir),  parce  qu'anciennement  les  boucliers  étaient  en  cuir. 
58, 

2,  Paux.  —  Pieux,  palissades;  pluriel  de  pal,  du  latin  palus  qui  a  cette  si- 
gnification. 

3,  Poix.  —  Dans  nos  dernières  guerres,  le  chargement  du  fantassin  s'éle- 
vait à  une  vingtaine  de  kilos,  soit  un  tiers  de  moins  que  celui  du  soldat 
romain.  Malgré  cette  énorme  différence,  ce  poids  est  devenu  écrasant 
pour  notre  époque  où  tout  ce  qui  est  à  peu  près  valide  est  appelé  sous  les 
drapeaux,  et  n'a  pas  la  force  des  soldats  de  métier  des  temps  passés;  aussi 


NOTES.        LIV.  II    Cil.  IX.         VOL.  II,  PAG.  60.  Fb.457 

s'évertue-t-on  à  réduire  ce  chargement  à  l'indispensable,  ce  qui  permettra 
de  le  ramener  à  douze  ou  treize  kilo.s.  Mais,  au  lieu  de  supprimer  l'excé- 
dent, on  en  surcharge  les  trains  régimentaires,  perdant  de  vue  que  fré- 
quemment, avec  nos  armées  à  gros  effectifs,  ils  ne  rejoindront  pas  et  qu'en 
outre,  il  est  bien  inutile  de  les  encombrer  d'effets  de  remplacement,  alors 
qu'on  peut  si  facilement  en  assurer  le  renouvellement  par  les  services  de 
l'arrière  au  fur  et  à  mesure  des  besoins, 

5,  Haste.  —  Plutarque,  Marins,  4.  —  Ses  exigences  envers  ses  soldats  leur 
avaient  fait  donner  le  sobriquet  de  «  mulets  de  Marius  »  ;  toutefois  on  as- 
signe encore  une  autre  origine  à  cette  appellation  :  Au  siège  de  Numance, 
Scipion  examinait  les  chevaux  et  mulets  de  ses  troupes,  pour  vérifier  en 
quel  état  ils  se  trouvaient;  Marius  amena  les  siens  qu'il  soignait  lui-même 
et  les  présenta  en  si  bon  état  qu'il  passa  dès  lors  en  proverbe,  pour  louer 
avec  raillerie  un  homme  laborieux,  assidu  et  patient,  et  en  particulier  un 
soldat  présentant  ces  qualités,  de  dire  que  c'était  un  mulet  de  Marius. 
9,  Cuit.  —  Plutarque,  Apophth.  du  second  Scipion.  — En  133.  Scipion,  nommé 
consul  pour  la  seconde  fois,  vint  prendre  en  Espagne  le  commandement 
de  l'armée  qui,  devant  Numance,  était  depuis  dix  ans  tenue  en  échec.  Il 
y  trouva  un  grand  désordre.  11  chassa  du  camp  deux  mille  femmes  de 
mauvaise  vie,  les  aruspices,  les  devins  qui  la  transformaient  en  un  lieu 
d(>  débauche  et  un  champ  de  foire;  en  bannit  le  luxe;  ordonna  que  l'on 
dînât  debout,  sans  manger  de  viande  chaude;  au  souper,  on  pouvait  s'as- 
seoir, mais  on  devait  se  borner  à  de  la  soupe  et  un  plat  de  viande;  lui- 
même  s'était  mis  à  ce  régime  et,  vêtu  d'un  manteau  noir,  disait  qu'il  por- 
tait le  deuil  de  son  armée.  A  ses  soldats,  il  fit  élever  des  murailles,  creuser 
des  fossés  qu'il  renversait  et  comblait  ensuite  :  «  Qu'ils  se  couvrent  de 
boue,  disait-il,  puisqu'ils  ne  veulent  pas  se  couvrir  de  sang.  »  Il  temporisa 
pour  attaquer  à  nouveau  l'ennemi,  jusqu'à  ce  qu'il  se  crût  en  mesure  de 
l'emporter,  et  finit  par  les  réduire  à  s'entr'égorger.  Après  la  prise  de  la 
ville,  les  vieillards  reprochaient  à  leurs  défenseurs  de  s'être  laissé  battre  par 
des  gens  qu'ils  avaient  battus  tant  de  fois  ;  un  d'eux  leur  répondit  :  «  Les 
moutons  sont  bien  les  mêmes,  mais  le  berger  a  été  changé.  » 

14,  Marcellinus.  —  Ammien  Makcellin,  XXIV,  7.  —  Fit  longtemps  la  guerre 
en  Germanie,  dans  les  Gaules,  et  accompagna  l'e^tipereur  Julien  dans  son 
expédition  contre  les  Perses  (V.  N.  II,  532  :  Marcellinus). 

17,  Romaine.  -^  Les  éd.  ant.  aj.  :  Or,  par  ce  qu'elle  me  semble  bien  fort  ap- 
prochante de  la  nostre,  i'ay  voulu  retirer  ce  passage  de  son  autheur,  ayant 
pris  aulresfois  la  peine  de  dire  bien  amplement,  ce  que  ie  sçauois  sur  la  com- 
paraison de  nos  armes,  aux  armes  Romaines  :  mais  ce  lopin  de  mes  brouil- 
lars  m'ayant  esté  desrobé  auec  plusieurs  autres,  par  vn  homme  qui  me  ser- 
uoit,  ie  ne  le  priueray  point  du  profit,  qu'il  en  espère  faire  :  aussi  me  seroit- 
il  bien  malaisé  de  remascher  deux  fois  vne  mesme  viande. 

•il,  Lieu.  —  Ammien  Marcellin,  XXV,  1. 

38,  Bardes.  —  Avec  son  armure  et  celle  de  son  cheval. 

il,  Soixante.  —  Plutarque,  Démétrius,  6.  —  Montaigne  fait  quelque  change- 
ment au  récit  de  l'historien  qui  dit  qu'Alcymus  revêtait  une  armure  de 
cent  vingt  livres,  tandis  que  celles  de  Démétrius  et  de  tous  autres  n'étaient 
que  de  soixante  ;  et  que  le  roi  en  fit  faire  deux  pour  Alcymus  et  pour  lui- 
même,  qui  n'en  pesaient  que  quarante,  mais  se  distinguaient  par  la  trempe 
du  métal,  si  bien  qu'à  la  distance  de  vingt-six  pas,  un  trait  lancé  par  une 

'  machine  de  l'époque  n'y  produisait  qu'une  enipreinte  très  légère,  à  peine 
perceptible. 

CHAPITRE  X. 
60, 

Liures.  —  Dans  ce  chapitre,  Montaigne  passe  en  revue  les  principaux 
auteurs  latins  ou  français  dont  il  faisait  sa  lecture  habituelle  et  qui  ont 
fourni  la  majeure  partie  des  faits  ou  des  idées  qui  ont  servi  soit  de  point 


Fb.4oS  ESSAIS  T)E  MONTAIGNE. 

de  (lôpart,  soil  d'argiimonls  à  l'appui  des  réflexions  qui  composent  les  Essais. 
1.  Acquises.  «  Comment  Montaigne  peut-il  parler  ainsi,  après  les  lectures 
infinies  dont  son  ouvrage  même  est  la  preuve?  N'est-ce  pas  acquérir  que  de 
lire  beaucoup,  et  surtout  de  réfléchir,  comme  lui,  sur  tout  ce  qu'on  a  lu?  » 
Servan. 

14,  Rétention.  —  Je  suis  homme  qui  ne  retiens  rien  de  ce  que  j'ai  appris. 

15,  lusques...  i'en  ay.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  ce  que  ie  pense  :  Exculienda  dn. 
I  mua  praecordia  (donnant  nos  pensées  pour  ce  qu'elles  valent),  citation  qui 

n'est  donnée  que  par  l'éd.  de  88,  et  qui  est  rayée  en  cette  place  sur  l'ex.  de 
Bordeaux  et  reportée  sur  cet  exemplaire  et  la  présente  édition  liv.llI,ch.IX, 
III,  444  :  et  iusques  à  quel  poinct  monte,  pour  cette  heure,  la  rnnnoissance 
que  ray  de  ce  dequoy  ie  traitte. 

16,  S'attende.  —  Ne  s'arrête  pas 

16,  Matières...  i'y  donne.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  choses  de  quoi/  ie  parle, mais 
à  ma  façon  d'en  parler  et  à  la  créance  que  i'en  ay. 

17,  Qu'on  voye...  sçauroient  payer.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  Ce  que  ie  desrohe 
d'autruy,  ce  n'est  pas  pour  le  faire  mien  ;  ie  ne  prétends  icy  nulle  part  que 
celle  de  raisonner  et  de  iuger  :  le  demeurant  n'est  pas  de  mon  rolle.  le  n'y 
demande  rien  sinon  qu'on  voie  si  i'ay  sceu  choisir  ce  qui  ioignoit  iustemenl 
à  mon  propos.  Et  ce,  que  ie  cache  parfois  le  nom  de  l'autheur  à  escient  e'.s 
choses  que  Remprunte,  c'est  pour  tenir  en  bride  la  légèreté  de  ceux  qui  s'en- 
tremettent de  iuger  les  choses  par  elles-mesmes,  s'arrestenl  au  nom  de  l'ou- 
urier  et  à  son  crédit. 

26,  Solage.  —  Terroir,  terrain;  du  latin  solum  qui  a  cette  même  significa- 
tion et  dont  nous  avons  fait  sol. 

28,  Escrits.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  n'ayant  pas  le  nez  capable,  de  gousler  les 
choses  par  elles-mesmes,  s'arrestenl  au  nom  de  l'ouurier  et  de  son  crédit. 


62, 


1,  Vulgaire.  —  Qui  sont  en  langage  vulgaire,  ce  qui  met  tout  le  monde  à 
même  d'en  parler,  et  aussi  donne  à  croire  qu'il  n'y  a  rien  que  de  vulgaire 
dans  le  plan  et  les  pensées. 

3,  Veux.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  fe  veux  qu'ils  s'eschaudenl  à  condamner  Ci- 
ceron  et  Aristote  en  moy,  au  lieu  de  :  «  le  veux...  moy 

«  Le  critique  imprudent,  qui  se  croit  bien  habile, 

Donnera  sur  ma  joue  un  soufflet  à  Virgile  ; 

Et  ceci  (tu  peux  voir  si  j'observe  ma  loi), 

Montaigne,  il  t'en  souvient,  l'avait  dit  avant  moi.  »  Andrk  Ghémer. 

5,  Musser.  —  Cacher  par  de  belles  paroles  :  «  Louis  XI  savait,  par  de,  belles 
paroles,  donner  la  musse  à  ses  ennemis.  »  Pasquier. 

5,  Crédits.  —  «  Montaigne  a  commis  plagiats  sur  plagiats;  il  s'en  accuse  en 
particulier  envers  Sénèque,  Plutarque,  déclarant  que  s'il  ne  signale  pas  les 
emprunts  qu'il  leur  a  faits,  c'est  qu'il  est  bien  aise  que  ceux  qui  critique- 
ront les  Essais,*critiquent  ces  auteurs  et  autres  dont  il  s'est  inspiré,  en 
croyant  le  critiquer  lui-même;  mais,  au  moins  en  ce  qui  touche  Sénèque, 
il  est  plus  facile  que  Montaigne  ne  le  croit  de  reconnaître  la  phrase  courte, 
figurée,  sentencieuse,  presque  toujours  antithétique  de  l'auteur  latin,  au 
travers  de  la  riche  abondance  du  style  des  Essais,  étendue  sans  être  lâche, 
détaillée  sans  être  prolixe.  »  Ch.  Nodier. 

Quant  à  Cicéron,  vis-à-vis  duquel  il  est  très  sévère  et  qu'il  ne  nomme  pas 
parmi  ceux  auxquels  il  a  fait  des  emprunts  très  considérables  cependant, 
S.  DE  Sacy  écrivait  en  1865  :  «  Je  viens  de  relire  Cicéron  et  je  sais  Montaigne 
par  cœur;  j'affirme  que  les  traités  philosophiques  du  premier,  dont  celui- 
ci  dit  :  «  qui  me  peuvent  servir  chez  lui,  à  mon  desseing  »,  notamment  ceux 
de  la  Nature  des  dieux  et  de  la  Divinité,  ont  passé  presque  tout  entiers 
dans  les  Essais;  on  peut  même  y  joindre  les  Tusculanes  et  les  Questions 
académiques.  Non  seulement  Montaigne  a  pris  le  fond,  il  s'est  aussi  inspiré 
de  la  forme.  »    —  Par  contre,   Charron,  dans  son  traité  de  la  Sagesse, 


XOTKS.         IJV.  Il,  Cil.  X.         VOL.   Il,  PAG.  62.  Fb.-159 

a  copié  textuolleiTicnt  do  Montaigne  ses  plus  magnifiques  passages  et  d'au- 
tres aussi  que  Montaigne  a  tirés  de  Sénèque  ou  de  tel  autre.  La  Mothe  le 
Vayer,  La  Bruyère,  S-Evremond,  Fontenelle,  Bayle  et  Voltaire  ne  se  sont 
pas  montrés  plus  délicats;  mais  aucun  d'eux  cependant  n'approche  de 
Pascal  dans  l'audace  du  larcin.  Parmi  les  Pensées  de  ce  dernier  il  y  en  a 
qui  lui  appartiennent  en  propre,  ce  sont  celles  empreintes  de  mélancolie 
superstitieuse,  morose,  et  comme  illuminée,  qui  trahit  l'état  où  le  plongeait 
la  maladie;  mais  ces  élans  d'une  âme  forte,  ces  traits  grands  et  inattendus, 
dont  on  a  dit  qu'ils  tenaient  plus  des  dieux  que  de  l'homme,  c'est  Timéc 
de  Locres,  S.  Augustin,  Charron  et  spécialement  Montaigne  qui  les  ont 
fournis;  et  le  ton  tranchant  et  dédaigneux  dont  nonobstant  il  parle  des 
Essais,  comme  si,  non  content  de  s'en  être  enrichi,  il  voulait  les  perdi-e  de 
considération  pour  hériter  seul  de  leur  gloire,  impressionne  défavorable- 
ment. Ch.  Nodier. 

'.),  Nation.  —  C.-à-d.  d'où  ils  viennent. 
i\,  Bande.  —  Sergent  de  bande  ou  de  bataille;  celui  qui  les  jours  de  combat 

rangeait  les  troupes  en  bataille. 
•J7,  Témérairement.  —  C.-à-d.  dont  on  peut  parler  sans  préparation  et  har- 
diment. —  Personne  n'a  jamais  et  plus  exactement  rendu  le  pèie-mèle,  la 
demi-science,  le  jugement  qui  se  rencontrent  dans  les  Essais,  que  leur  au- 
teur ne  le  fait  ici. 
31,  Science.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  mesrne. 
64, 

6,  Primsautier.  —  Qui  fait  ses  plus   grands  eflorts  du  premier  coup,  de 
prime  saut;  du  latin  a  primo  saltu.  V.  N.  1,620  :  Prim-saut. 

9,  Dissipe.  —  L'exemplaire  de  Bordeaux  porte  ajouté,  puis  rayé  :  mon  es/iril 
pressé  se  ielle  au  rouet. 

18,  Intelligence.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  ne  se  satisfaicl  pas  d'vne  intelligence 
moyenne,  au  lieu  de  :  «  ne  sçait...  intelligence  ».  —  Montaigne  veut  dire 
qu'il  n'avait  qu'une  médiocre  connaissance  de  la  langue  grecque,  ce  qu'il 
a  déjà  indiqué  au  ch,  XXV  du  liv.  I  et  au  ch.  IV  du  liv.  II,  ce  qui  ne  l'em- 
pêche pas  d'en  citer  assez  souvent  des  passages. 

19,  Decameron.  —  Ouvrage  capital  de  Boccace,  publié  en  1352  et  qui  l'a  place 
à  la  tête  des  prosateurs  italiens  et  a  immortalisé  son  nom.  C'est  un  recueil 
(he  cent  nouvelles  pleines  de  gaité,  où  la  décence  n'est  pas  toujoure  respec- 
tée, mais  dont  le  style  original  n'a  été  égalé  par  aucun  des  écrivains  con- 
temporains de  l'auteur. 

19,  Rabelays.  —  Auteur  de  l'histoire  de  Gargantua  et  Pantagruel,  roman 
satirique  publié  de  1533  à  1534  (en  partie  après  la  mort  de  l'auteur),  rempli 
de  folies,  d'extravagances,  de  quolibets,  de  mots  barbares  et  forgés  à  plai- 
sir, de  passages  inintelligibles,  et,  en  même  temps,  plein  d'originalité,  de 
bon  sens  et  même  d'érudition  ;  c'est  un  ouvrage  où  le  fond  et  la  forme  sont 
tout  imagination,  mais  qui,  dans  certains  détails,  offre  d'utiles  leçons,  des 
allusions  piquantes  et  de  sévères  censures;  les  moines  et  le  clergé  y  sont 
surtout  fort  maltraités.  —  Rabelais,  disait  Boileau,  veut  toujours  être  plai- 
sant et  l'est  toujours.  —  Nul,  disait  J.-J.  Rousseau,  n'a  mieux  connu  les  ri- 
chesses et  l'énergie  de  la  langue  française  et  n'en  a  su  si  bien  tirer  parti. 

2i\  Second.  —  Poésie  latine  du  genre  élégiaque,  publiée  en  1511,  se  compo- 
sant d'épigrammes  sur  le  sujet  constituant  le  titre  de  l'ouvrage.  —  L'auteur, 
mort  n'ayant  pas  encore  vingt-cinq  ans,  un  des  meilleurs  poètes  latins  mo- 

•  dernes,  fut  qualifié  par  un  de  ses  contemporains,  par  ce  jeu  de  mots  : 
«  .lean  Second,  qui  fut  loin  d'être  le  second  parmi  ceux  de  son  époque  ». 

20,  Tiltre.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  des  siècles  vnpeu  au  dessus  du  nostre  l'His- 
toire jEthiopique. 

21,  Amadis.  —  Ce  roman  espagnol  de  chevalerie,  autrefois  très  célèbre,  a 
pour  héros  Amadis  de  Gaule,  dit  le  Chevalier  du  lion,  fils  de  Perion,  roi 
fabuleux  de  France,  qui  est  resté  le  type  des  amants  constants  et  respec- 
tueux, aussi  bien  que  de  la  chevalerie  errante  dans  ce  qu'elle  avait  de  no- 
ble et  de  beau  ;  on  pense  que  les  aventures  qui  y  sont  relatées,  n'ont  rien 


Fb.460  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

d'historique,  on  ne  sait  même  à  quelle  époque  les  rapporter.  La  traduction 
qui  en  a  été  faite  au  xm"  siècle  par  le  Sieur  des  Essarts  a  été  longtemps 
en  grande  faveur  et  fut  longtemps  classique:  on  peut  }■  cueillir,  disait  un 
écrivain  de  ce  temps,  toutes  les  belles  Heurs  de  notre  langue  française. 

24,  L'Arioste.  —  Auteur  italien  de  Roland  furieux  (Orlando  f'urioso),  épopée 
chevaleresque  publiée  en  1516,  dont  Roland,  neveu  de  Charlemagne,  est  le 
héros  et  où  les  exploits  des  paladins  sont  racontés  avec  un  art  inimitable 
qui  mêle  le  plaisant  et  le  sérieux,  le  gracieux  et  le  terrible,  et  fait  marcher 
de  front  une  foule  d'actions  diverses  qui  toutes  intéressent. 

25,  Ouide. —  Dont  le  chef-d'œuvre  est  sans  contredit  son  poème  des  Métamor- 
phoses, un  des  plus  brillants  monuments  de  la  poésie  latine,  vaste  épopée 
qui  embrasse  tous  les  faits  de  la  mytliôlogie  et  des  temps  fabuleux. 

'3\,  Axiocbe.  — Dialogue  d'une  très  haute  antiquité;  longtemps  attribué  à 
Platon,  bien  qu'il  n'en  reflète  pas  le  style,  et  qui  au  jugement  des  meilleure 
critiques  serait  d'Eschine,  disciple  de  Socrate. 

33,  Outrecuidé.  —  C.-à-d.  il  n'est  pas  si  vain,  comme  portent  les  éditions 
antérieures;  ou  :  il  n'est  pas  si  sot,  comme  il  y  a  dans  l'exemplaire  de 
Bordeaux. 

34,  Qu'il  tient...  faillir.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  nyne  se  donne  lémérairemenl  la 
loy  de  les  pouuoir  accuser. 


66, 


3,  Esope.  —  Ces  fables  ne  sont  pas  de  lui  ;  les  Grecs  se  sont  emparés  de  ses 
apologues  et  les  ont  arrangés  sous  diverses  formes,  soit  en  vers,  soit  en 
prose  ;  mises  en  recueil,  pour  la  première  fois,  200  ans  après  sa  mort,  elles 
ont  été  traduites  dans  toutes  les  langues  et  imitées  notamment  par  Phèdre 
et  La  Fontaine. 

8,  Virgile.  —  L'Enéide,  les  Géorgiqiies  et  les  Bucoliques  composent  l'œuvre 
de  Virgile.  —  Les  Bucoliques  sont  des  églogues  ou  pastorales  écrites  avec 
esprit  et  élégance,  quelquefois  vagues  et  obscures,  mais  où  se  révèle  déjà 
néanmoins  le  génie  de  leur  auteur,  alors  âgé  de  25  ans.  Les  Géorgiques,  qui 
suivirent,  sont  un  poème  didactique,  un  ouvrage  d'économie  rurale  où  se 
trouvent  décrits  les  travaux  des  champs  et  le  bonheur  de  la  vie  champê- 
tre; on  y  admire  une  infinie  variété  de  formes,  la  richesse  des  descrip- 
tions, une  sensibilité  pénétrante  qui  anime  tout,  enfin  une  excellence  litté- 
raire qu'il  est  impossible  de  trouver  une  seule  fois  en  défaut.  —  L'Enéide, 
poème  épique,  dont  le  héros  est  Énée,  prince  troyen  venu  d'après  les  tradi- 
tions s'établir  en  Italie,  dans  le  Latiuni,  après  la  chute  de  Troie  et  auquel 
les  Romains  faisaient  remonter  leur  origine.  L'auteur  y  chante  le  berceau  de 
Rome  et  les  antiquités  de  l'Italie  ;  c'est  une  composition  plutôt  faible  sous 
le  rapport  du  plan  et  des  caractères,  mais  on  y  admire  l'art  de  rendre  la 
passion,  l'exquise  délicatesse  des  vers,  la  perfection  du  style,  le  fini  de 
l'exécution.  Virgile,  quand  il  mourut,  n'avait  pas  entièrement  terminé 
l'Enéide  qu'il  travaillait  depuis  dix  ans,  et  par  son  testament,  il  ordonna  de 
jeter  au  feu  son  œuvre  inachevée;  l'empereur  Auguste  s'y  opposa. 

8,  Lucrèce.  —  Imbu  des  principes  d'Épicure,  Lucrèce  s'est  fait,  au  I"  siècle, 
l'apôtre  du  matérialisme  et  de  l'athéisme  dans  son  poème  philosophique 
célèbre  •  De  la  Nature  des  choses  »,  écrit  dans  un  langage  d'un  souffle  puis- 
sant et  parfois  sublime,  sans  égal  dans  aucune  langue,  comme  audace  de 
pensée,  amertume  de  sentiment  et  rigueur  de  logique. 

9,  Catulle.  —  Catulle  réussit  surtout  dans  l'épigramme  et  le  genre  erotique; 
on  a  aussi  de  lui  deux  poèmes  épiques  qui,  notamment  celui  des  Noces  de 
Pelée  et  de  Thétis,  révèlent  des  qualités  sérieuses  en  ce  genre;  tout  cela 
d'un  style  exquis,  achevé,  d'une  brièveté  raffinée  sous  un  air  de  simplicité 
extrême. 

9,  Horace.  —  Quatre  livres  d'odes,  un  d'épodes,  deux  de  satires,  deux  d'épi- 
tres,  et  une  épître  aux  Pisons  connue  sous  le  nom  d'Art  poétique,  com- 
posent l'œuvre  de  ce  poète  si  célèbre.  Dans  ses  odes,  il  se  montre  à  la  fois 
brillant,  énergique,  sublime  et  naïf,  délicat,  gracieux;  ses  satires  et  ses 
épitres  sont  des  modèles  d'urbanité,  de  raillerie  douce  et  bienveillante  ;  sou 


68, 


70, 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  X.         VOL.  II,  PAG.  66.  F.461 

Arl poétique  e&t  un  poème  didactique  que  Boileau  a  imité  en  le  développant 
et  qui  encore  aujourd'hui  est  le  code  des  hommes  de  goût.  Horace  est  le 
type  accompli  de  l'épicurien  latin;  c'est  un  poète  élégant  et  habile,  un  mo- 
raliste spirituel  et  savant  ;  il  est  aussi  courtisan,  sans  cesser  de  conserver 
une  certaine  liberté  de  langage  et  d'humeur;  de  caractère  indépendant,  il 
faisait  consister  le  bonheur  dans  l'usage  modéré  des  biens  de  la  vie. 

15,  Lucain.  —  Auteur  de  la  Pharsale,  poème  épique  où  il  raconte  la  guerre 
civile  entre  César  et  Pompée;  œuvre  brillante  et  élevée,  mais  pompeuse 
et  déclamatoire;  au  reste  le  poète  n'eut  guère  le  temps  de  la  polir  et  de  la 
terminer,  obligé  qu'il  fut  de  se  donner  la  mort  par  ordre  de  Néron.  V.  II, 
50,  et  N.  52  :  Bouche. 

17,  Terence.  —  11  ne  nous  reste  plus  de  lui  que  six  comédies,  parmi  les- 
(juelles  l'Andrienne.  Térence  était  l'ami  de  Scipion  Émilien  et  de  Lelius 
qui,  dit-on,  prirent  quelque  part  à  la  composition  de  ses  pièces;  son  stjle 
est  élégant  et  pur,  la  composition  chez  lui  est  régulière,  le  ton  parfait,  mais 
souvent  l'intérêt  est  presque  nul  et  on  y  trouve  peu  de  mouvement  et  de 
gai  té. 

■13,  Inégale.  —  Le  style  de  l'Enéide  est  beaucoup  plus  parfait  que  celui  do 
Lucrèce,  sa  poésie  plus  magnifique,  quoique  ennuyeuse  parfois;  mais  celui- 
ci  est  plus  plein,  pense  davantage,  est  par  moment  aussi  grand  poète,  et 
a  plus  d'originalité. 

30,  Plaute.  —  Il  nous  reste  de  lui  une  vingtaine  de  pièces  qui,  la  plupart, 
ont  ét('  imitées  par  nos  auteurs  français.  11  est  caractérisé  par  son  origina- 
lité, des  coups  de  théâtre  imprévus,  un  dialogue  rapide,  une  verve  étin- 
celante,  des  pointes,  des  jeux  de  mots,  des  charges  souvent  grossières, 
mais  vraies  au  fond;  il  est  franchement  comique  et  faisait  les  délices  du 
peuple. 

32,  Romaine.  —  Cicéron. 

34,  Compagnon.  —  Ce  juge,  c'est  IIouace  qui  dit  dans  son  .irt  poétique, 
V.  270  :  •■  Il  est  vrai  que  nos  pères  ont  goûté  les  vers  et  les  saillies  de 
Plaute;  à  mon  sens,  leur  admiration  a  été  excès  d'indulgence,  pour  ne  pas 
dire  sottise.  » 

10,  Oublions...  table.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  fuyons  la  fin  de  son  hisloire. 
15,  Petrarchistes.  —  A  l'imitation  de  Pétrarque,  l'un  des  créateurs  de  la 

langue  italienne,  célèbre  entre  autres  par  les  sonnets  et  les  contons  qu'il 

(?crivit  pour  Laure  de  Noves. 

10,  Martial.  —  Auteur  d'épigrammes  sur  toutes  sortes  de  sujets,  pièces  fugi- 
tives, élégantes,  acérées,  écho  fidèle  de  la  dépravation  de  l'empire  romain, 
et  dont  bien  des  traits,  encore  justes,  pourraient  s'appliquer  à  notre  épo- 
que; à  beaucoup  d'esprit,  joint  souvent  une  licence  excessive  et  parfois 
aussi  une  basse  adulation. 

26,  Sont  assez...  iambes.  —  Var.  de  88  :  peuuent  aller  à  pied. 

29,  Noblesse.  —  Add.  des  éd.  ant.  à  88  :  en  recompense  de  cette  grâce  qu'ils  ne 
peuuent  imiter. 

3G,  lours.  —  C.-à-d.  vêtus  des  habits  qu'ils  mettent  d'ordinaire,  comme  por- 
tent les  éditions  antérieures  ;  cette  expression  est  encore  en  usage  et  assez 
répandue  en  France. 

1,  Auoir  besoin...  saunages.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  il  faut  qu'ils  s'en- 
farinent  le  visar/e,  il  leur  faut  trouuer  des  veslemenls  ridicules,  des  mouue- 
ments  et  des  grimaces. 

11,  Furieux.  —  L'Orlando  furioso,  ou  le  Roland  furieux  de  l'Arioste,  œuvre 
capitale  de  ce  poète,  où  il  raconte  les  exploits  des  paladins,  mêlant  avec  art 
le  plaisant  et  le  sérieux,  le  gracieux  et  le  terrible,  faisant  marcher  de  front 
une  foule  d'actions  diverses  auxquelles  il  sait  également  intéresser. 

14,  Seruent.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  plus  ordinairement. 

14,  Plutarque.  —  Auteur  des  Vies  des  hommes  illustres  de  la  Grèce  et  de 
Home,  et  de  nombreux  traités  de  i)olitique,  d'histoii'e  ou  de  morale,  dits 


Fb.462  KSSAIS  DK  MONTAIGNE. 

Œuvres  morales,  que  quchjues  lignes  plus  bas  Montaigne  désigne  sous  le 
nom  d'Opuscules,  parmi  lescjucls  on  remarque  ceux  intitulés  :  L'Origine  de 
Came;  Du  dénie  de  Socrale:  Du  Silence  des  oracles:  Questions  de  table;  Des 
Contradictions  des  Stoïciens.  —  On  trouve  dans  ses  écrits  un  grand  jugement, 
des  connaissances  profondes  et  variées,  une  bonhomie  et  une  morale 
douce  qui  les  font  lire  avec  charme;  il  vous  fait  vivre  intimement  avec 
les  hommes  dont  il  raconte  la  vie.  La  qualification  de  parallèles  donnée  à 
certains  fragments  des  Vies  de  Plutarque,  vient  de  ce  qu'il  y  place  en  i-e- 
gard  un  (Jrec  et  un  Romain  dont  les  existences,  dans  leur  ensemble,  pré- 
sentent de  l'analogie,  et  les  comjjare,  semblant  s'être  proposé  de  montrer  que 
la  Grèce  n'était  point  inférieure  à  Rome.  —  Plutar(|ue  venait  d'être 'traduit 
en  français  pai'  Amyotet  publié  (les  \'ies  des  hommes  illustres  en  1555,  les 
Œuvres  morales  en  1574),  loi'sque  Montaigne  ('crivait  les  Essais. 

15,  Seneque.  —  On  a  de  lui  un  grand  nombre  d'écrits  sur  la  philosophie;  il 
y  prêche  la  morale  la  plus  austère  et  enseigne  surtout  le  mépris  des  riches- 
ses et  de  la  mort;  son  style  est  brillant  et  élégant,  mais  souvent  affété  et 
rempli  d'antithèses;  il  vise  beaucoup  à  l'effet.  Dans  s(!s  Lettres  à  Luciiius, 
le  penseur  déploie  toutes  les  ressources  de  son  esprit,  et  l'écrivain  tous  les 
charmes  de  son  style.  —  Montaigne  lui  a  souvent  fait  de  très  larges  em- 
prunts et  a  souvent  adopté  ses  idées. 

■A),  Profitable.  —  On  s'étonne  de  cette  préférence  pour  cette  partie  de  l'œu- 
vre de  Plutarque  qui,  malgré  son  mérite,  ne  saurait  être  comparée  à  ses 
«  Vies  des  hommes  illustres  »;  du  reste  au  ch.  XXXII  de  ce  même  livre  (N. 
II,  630),  Montaigne  revient  sur  son  jugement  et  dit  que  ses  «  Parallèles  », 
qui  sont  partie  intégrante  des  «  Vies  »,  constituent  «  la  pièce  plus  admi- 
l'able  de  ses  œuures  ». 

■^i,  Autres.  —  Add.  de  88  :  Vayme  en  général  les  liures  qui  vsent  des  scien- 
ces, non  ceux  qui  les  dressent.  (Cette  phrase  est  reportée  un  peu  plus  loin 
avec  variante  dans  la  présente  édition,  pag.  74,  5). 

iî),  Romains.  —  Sénèquc  fut  précepteur  de  Néron.  Plutarque  l'aurait  été'  de 
Trajan  suivant  les  uns,  d'Adrien  suivant  d'autres.  A  l'égard  de  Trajan,  on 
s'appuie  sur  une  lettre  dont  l'authenticité  est  contestée;  ce  qui  porterait 
en  outre  à  penseï'  que  cela  n'a  pas  été,  c'est  qu'ils  étaient  à  peu  près  du 
même  âge  ;  mais  Plutarque  a  fait  des  leçons  publiques  de  [ihilosophie  à 
Rome,  et  il  se  peut  très  bien  que  Trajan  ait  été  du  nombre  de  ses  audi- 
teurs. —  Sénèque  était  né  à  Cordoue  (Espagne)  :  Plutarque,  à  Chérouée,  en 
(Irèce.  —  Le  poète  anglais  Dkyden  {id'M  à  1701)  a  éci'it  un  parallèle  de 
Pliitar(|U('  et  de  Sénèque. 


72, 


■i,  Cicero.  —  V.  N.  II,  028.  Ce  fut  le  plus  éloquent  des  orateurs  romains; 
sans  rival  surtout  dans  l'éloquence  judiciaire,  par  la  richesse  de  son  ima- 
gination, la  souplesse  de  son  génie  plein  d'abondance,  de  grâce  et  de  sé- 
duction, et  par  l'habileté  de  sa  dialectique;  comme  écrivain,  s'est,  sans 
grand  succès,  adonné  dans  sa  jeunesse  à  la  poésie,  mais  est  sans  contredit 
le  premier  des  prosateurs  latins,  et  nul  n'a  jamais  dépassé  la  pureté,  la 
richesse,  l'harmonieuse  élégance  de  son  style.  11  ne  nous  est  parvenu 
(|u'une  partie  de  ses  ouvrages,  que  l'on  divise  en  quatre  groupes  :  1"  les 
Harangues,  parmi  lesquelles  on  admire  surtout  les  Catilinaires  et  les  Phi- 
lippiques;  2"  \g%  Livres  de  Rhétorique ,  dont  le  plus  beau  est  l'Orateur;  3''l(>s 
Traités  philosophiques,  dont  les  plus  estimés  sont  De  la  Nature  des  dieux 
et  les  Tusculanes;  4"  les  Lettres,  parmi  lesquelles  nombre  d'épîtres  fami- 
lièi-es;  elles  constituent  un  monument  incomparable  et  un  modèle  du  genre 
épistolaire;  on  y  distingue  surtout  celles  à  Atticus,  à  Quintus,  à  Rrutus: 
elles  fournissent  les  matériaux  les  plus- i)récieux  pour  l'histoire  du  temps 
(V.  N.  I,  430  :  Amis). 

4,  De  la  philosophie...  morale.  —  Var.  des  éd.  aiit.  :  des  meurs  et  règles  dr 
nostre  vie. 

4,  Morale.  —  Avant  Cicéroii,  les  Romains,  si  on  en  i'\re]>1i'  Lucrèce,  s'o 


74, 


NOTES.         IJV.  H,  eu.  X.         VOL.   II.  PAG.  72.  Fb.46;^ 

taient  peu  adonnes  à  la  piiilosopliie,  et  n'y  avaient  que  médiocrement 
réussi. 

6,  Impudence.  —  Allusion  à  la  lettre  de  Cicéron  par  laquelle  il  prie  Luc- 
ceius  d'écrire  l'histoire  de  son  consulat  de  manière  à  lui  mériter  les  éloges 
de  la  postérité  (V.  I,  430  et  N.  Registres). 

7,  Préfaces.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  digressions. 

10,  Apprêts.  —  Jlontaigne  parle  du  style  de  Cicéron  en  des  termes  qui  ne 
permettent  pas  de  douter  qu'il  en  fait  beaucoup  moins  de  cas  que  de  Sé- 
nèque;  le  cardinal  Duperkon  (1556  à  1618)  ne  pensait  pas  de  même  :  »  Il  y 
a  plus,  disait-il,  en  deux  ftages  de  Cicéron,  qu'en  dix  pages  de  Sénèque.  » 

•21,  Fil.  —  Il  est  en  efTet  peu  de  coure,  de  conférences,  de  plaidoyers  et  aussi 
de  sermons  dont  on  puisse  dire  ce  que  Sénèque  disait  des  harangues  de 
Cassius  Severus,  "  que  tout  y  portait  coup  et  que  les  plus  courtes  distrac- 
tions de  ses  auditeurs  leur  faisaient  toujours  perdre  quelque  chose  d'inté- 
ressant >■  (V.  I,  70  et  N.  Cassius,  et  II,  50).  De  combien  de  nos  hommes 
politiques  peut-on  en  dire  autant? 

:{(),  Or  oyez.  —  Ce  cri,  sorte  d'avertissement  d'avoir  à  prêter  attention  à  ce 
qui  allait  suivre,  est  encore  employé  en  Angleterre,  dans  certaines  solenni- 
tés, par  les  héraults  d'armes  dont  l'usage  s'est  conservé  et  qui,  lorsque  bien 
rarement  ils  remplissent  un  devoir  de  leur  charge,  le  font  en  observant  les 
traditions  du  passé. 

31,  Hoc  âge.  —  Sentence  philosophique  grecque  qui  se  complétait  par  ces 
mots  :  et  eris  beatus  (Fais  ainsi  et  tu  seras  heureux,  tu  y  trouveras  avantage, 
cela  te  réussira). 

32,  Sursum  corda.  —  Cette  formule,  dans  l'ancienne  Église,  précédait  tou- 
joui-s  la  célébration  de  ses  plus  augustes  cérémonies,  rappelant  les  assis- 
tants au  recueillement;  les  pa'iens,  dans  le  même  but,  disaient  :  Favete 
linr/uis  (Favorisez-nous  de  votre  silence),  pour  le  recommander  lors  de  la 
célébration  de  leurs  principaux  mystères. 

37,  Platon.  —  Célèbre  par  sa  philosophie,  qui  est  la  plus  haute  expression  de 
l'idéal  et  se  rapproche  parfois  des  idées  chrétiennes.  Platon  a  laissé  un  grand 
nombre  d'écrits,  presque  tous  sous  la  forme  de  dialogues;  Socrate  y  joue 
le  principal  rôle;  les  plus  importants  sont  :  Crilon,  ou  le  Devoir  des  ci- 
toyens; Phédon ,  ou  de  l'Ame;  V Apologie  de  Socrate;  Théétète,  ou  de  la 
Science;  le  Sophiste,  ou  de  l'Être;  la  Politique;  Parménide,  ou  des  Idées; 
le  Banquet,  ou  de  l'Amour;  Phèdre,  ou  du  Beau;  Théagès,  ou  de  la  Sa- 
gesse; Lâchés,  ou  du  Courage;  Lysis,  ou  de  l'Amitié;  Clorgias,  ou  de  la  Rhé- 
torique; .]fénon,  ou  de  la  Vertu;  Ion,  ou  de  l'Enthousiasme  poétique:  la 
République  ;  Timée,  ou  de  la  Nature;  Critias;  les  Lois.  —  Ses  écrits,  où  l'on 
admire  la  sublimité  de  ses  conceptions,  la  pureté  de  sa  morale,  la  noblesse 
de  son  style,  sont  le  monument  le  plus  important  de  la  dialectique  des  an- 
ciens; en  même  temps  qu'ils  sont  un  chef-d'œuvre  d'art,  ils  nous  offrent 
par  la  méthode  d'interrogation  et  de  réfutation  qui  y  est  partout  suivie, 
un  modèle  d'analyse  philosophique. 

6,  Premiers.  —  Sénèque  et  Plutarque. 

(i,  Pline.  —  Pline  l'Ancien  ou  le  naturaliste.  —  Certains  de  ses  ouvrages 
sont  perdus;  nous  ne  possédons  plus  de  lui  que  son  Histoire  naturelle  en 
37  livres,  sorte  d'encyclopédie  encore  estimée,  traitant  de  l'astronomie,  de 
la  géographie,  de  la  zoologie,  de  la  botanique,  de  la  minéi'alogie  et  acces- 
soirement de  questions  touchant  l'agriculture,  la  métallurgie,  les  moii- 
•  naies,  etc.;  son  style  a  de  la  vigueur  et  de  l'originalité. 
10,  Epistres.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  notamment  celles. 

18,  VeiHu.  —  Ce  traité  de  Brutussur  la  vertu  est  perdu;  il  subsistait  encon» 
du  temps  de  Sénèque  qui  en  cite  un  fragment. 

19,  Practique.  —  «  Les  vertus  comme  colles  de  Brutus  (Brutus  était,  dit-on, 
le  (ils  de  César  qui  l'aimait,  l'avait  appelé  à  lui  et  comblé  de  faveurs;  au 
moment  de  mourir,  le  voyant  au  nombre  des  conjurés,  il  s'écria  :  «  Et  toi 
aussi,  mon  fds!  »),  ces  vertus  sont  si  voisines  du  crime,  que  la  conscience 


Fb.464  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

des  républicains  eux-mêmes  se  trouble,  en  face  du  vote  du  duc  d'Orléans 
prononçant  la  mort  de  Louis  XVI.  >■  Lamartine,  Les  Girondins. 

30,  Beaucoup.  —  Dans  le  petit  nombre  d'erreurs  qu'on  peut  reprocher  à 
Montaigne,  est  le  jugement  qu'il  porte  sur  Cicéron;  il  qualifie  bien  son  élo- 
quence d'incomparable,  mais  il  estime  que  hors  la  science,  il  n'y  avait  pas 
beaucoup  d'excellence  en  son  âme.  Avait-il  donc  une  âme  commune,  cet 
orateur  que  ni  l'oi-,  ni  les  intrigues,  ni  la  violence  des  passions  ne  purent 
jamais  ni  corrompre,  ni  intimider  ;  qui  déconcerta,  par  l'autorité  de  son 
langage  et  la  fierté  de  ses  regards,  l'audace  môme  de  Catilina;  qui  sur  ses 
vieux  jours,  abandonnant  les  doux  loisirs  de  Tusculum,  reparut  avec  son 
génie  sur  le  théâtre  où  la  liberté  et  les  dépouilles  du  monde  romain  étaient 
le  prix  offert  aux  triomphes  de  l'ambition,  poursuivit  de  son  courroux 
éloquent  le  plus  implacable  des  triumvirs,  et  périt  avec  gloire,  victime  de 
son  amour  pour  la  patrie.  Abbé  Jay. 

32,  Vers.  —  «  On  peut  être  honnête  homme  et  mal  faire  des  vers.  »  Molièke. 

34,  Nom.  —  Ce  jugement  de  Montaigne  sur  les  vers  de  Cicéron,  n'est  pas 
celui  de  tous;  et  peut-être  sa  grande  réputation  d'orateur  a-t-elle  fait  tort 
à  celle  de  poète;  un  autre  que  lui  eût,  sans  doute,  été  plus  estimé  pour 
ses  poésies. 

35,  L'égalera.  —  Saint  .Jérôme  a  dit  de  lui  :  «  Démosthène  t'a  ravi  la  gloire 
d'être  le  premier  orateur;  toi,  tu  lui  as  ôté  celle  d'être  l'unique.  »  —  Les 
éd.  ant.  aj.  :  Si  est-ce  qu'il  n'a  pas  en  cela  franchi  si  net  son  aduantage, 
comme  Vergile  a  faict  en  la  poésie  :  car  bien  tosl  apr'es  luy,  il  s'en  est 
trouué  qui  l'ont  pensé  égaler  et  surmonter,  quoy  que  ce  fusl  à  bien  fauces 
enseignes,  mais  à  Vergile  nul  encore  depuis  luy  n'a  osé  se  comparer,  et  à  ce 
propos  l'en  veux  icy  adiouster  vne  histoire. 


76, 


78, 


8,  Présence.  —  Sénèque,  Suasor,  8. 
12,  Elumbem.  —  Cicéro.n,  De  Oratoribus,  18. 
15,  Souuent.  —  Se  reporter  à  ce  même  dialogue,  De  Oratoribus,  23. 

19.  Essem.  —  Pour  pouvoir,  en  dehors  de  la  négligence  de  style  résultant  de 
la  répétition  de  mots  que  présente  cette  phrase,  juger  exactement  de  la 
défectuosité  de  sa  prononciation  qu'incrimine  Montaigne,  il  faudrait  l'en- 
tendre dire  avec  celle  de  l'époque  que  nous  ne  connaissons  guère,  faute  de 
données  suffisantes  sur  ce  point. 

20,  Baie.  —  C.-à-d.  la  lecture  des  historiens  est  mon  passe-temps  le  plus 
agréable,  celui  où  je  me  complais  davantage;  métaphore  tirée  du  jeu  de 
paume,  où,  quand  la  balle  vous  arrive  de  côté  droit,  elle  est  plus  facile  à 
renvoyer.  —  Les  éditions  antérieures  présentent  cette  variante  .•  Les  hia- 
loriens  sont  le  vray  gibier  de  mon  estude,  car  ils  sont  plaisans  et  aysez  :  et 
quant  et  quant  la  considération  des  natures  et  conditions  de  diuers  homm£s, 
les  coustumes  des  nations  différentes,  c'est  le  vray  suiect  de  la  science  mo- 
rale, au  lieu  de  :  «  Les  historiens...  menacent  ». 

28,  Plutarque.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  le  recherche  bien  curieusement  non  seu- 
lement les  opinions  et  les  raisons  Muerses  des  philosophes  anciens  sur  le 
suiect  de  mon  enlreprinse,  et  de  toutes  les  sectes,  mais  aussi  leurs  meurs, 
leurs  fortunes  et  leur  vie. 

29,  Laërtius.  —  Diogène  Laërce,  historien  grec,  auteur  d'une  biographie 
des  principaux  philosophes;  toute  critique  en  est  absente  et  les  anecdotes  y 
tiennent  plus  de  place  que  les  vues  scientifiques,  l'ouvrage  n'en  est  pas 
moins  précieux  par  les  nombreux  renseignements  qu'il  contient. 

2,  Salluste.  —'A  écrit  l'histoire  de  Rome  depuis  la  mort  de  Sylla  jusqu'à  la 
conspiration  de  Catilina,  il  n'en  reste  que  des  fragments;  nous  avons  en- 
core de  lui  la  guerre  de  Catilina  et  celle  de  Jugurtha.  11  se  distingue  par  la 
précision  de  son  style,  sa  perspicacité,  sa  science  pratique;  mais  il  a  ten- 
dance à  la  partialité  et  présente  des  lacunes  et  de  fréquentes  digressions. 

7,  Dit  Cicero.  —  Cicéron,  Brutus,  4.  —  Voici  le  jugement  qu'il  en  porte,  et 
il  est  d'autant  plus  flatteur  qu'il  était  compétent  et  n'aimait  pas  César  : 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  X.         VOL.  II,  PAG.   78.  Fb.465 

«  Parmi  les  orateurs,  il  n'en  est  point  à  qui  César  doive  céder;  il  y  a  dans 
sa  manière  de  l'élégance  et  de  l'éclat,  de  la  magnificence  et  de  la  gran- 
deur; qui  pourrait  l'emporter  sur  lui  pour  l'abondance  et  la  vigueur  de  ses 
pensées?  »  Comme  historien  :  "  Ses  Comnlentaires  sont  un  livre  excellent; 
le  style  en  est  simple,  pur,  élégant,  dépouillé  de  toute  pompe  de  langage; 
c'est  une  beauté  sans  parure;  en  ne  chargeant  pas  d'ornements  frivoles 
ces  grâces  naturelles,  il  a  ôté  aux  gens  de  goût,  jusqu'à  l'onvie  de  traitei- 
le  môme  sujet.  •• 
H,  Ennemis.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  mesmes  et  tant  de  vérité. 

iO,  Froissard.  —  Chroniqueur  français.  Sa  chronique  de  France,  d'Angle- 
terre et  d'Ecosse,  de  131'6  à  1400,  est  une  suite  de  récits  sans  ordre,  qui 
offrent  beaucoup  d'incorrections,  mais  où  l'on  trouve  une  grâce  et  une 
naïveté  qui  charment;  ses  descriptions  sont  d'un  naturel  saisissant.  —  Le 
jugement  qu'en  porte  Montaigne  réduit  par  trop  son  mérite  :  le  siège  de 
Calais,  la  bataille  de  l'oitiers  par  exemple,  ne  se  composent  pas  seulement 
de  renseignements  recueillis  çà  et  là  et  rassemblés  sans  ordre,  ni  triage; 
c'est  de  l'histoire. 

36,  Biais.  —  «  Les  faits  changent  de  forme  dans  la  tète  de  l'historien  ;  ils  se 
moulent  sur  ses  intérêts;  ils  prennent  la  teinte  de  ses  préjugés.  »  J.-J.  Rous- 
seau, Emile,  IV. 
80, 

1,  Latin.  —  Antérieurement  à  Slontaigne  et  même  encore  de  son  temps,  le 
latin  était  la  langue  universelle  en  Europe,  et  les  érudits,  en  France,  écri- 
vaient beaucoup  plus  en  latin  qu'en  français;  ce  n'est  guère  qu'à  partir  de 
son  époque  que  la  langue  française  se  fixait  et  qu'on  en  fit  usage  dans  le 
monde  savant;  lui-même  est  un  de  ceux  qui  y  contribuèrent  le  plus. 
('».  Dimensions.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  Ceux-là  .^ont  aussi,  bien  plus  recoin- 
iiuindables  historiens,  qui  connoissent  les  choses,  dequoy  ils  escriuent,  ou  pour 
auoir  este  de  la  partie  à  les  faire,  ou  priuez  auec  ceux  qui  les  ont  conduiles. 

■20,  Et  le  sçauoir...  communément. — Les  éd.  ant.  port.  :  de  la  fortune  estait 
toiisiours  accompagnée  du  .sçauoir. 

22,  Douteux.  —  Les  éd.  ant.  aj.  -.S'ils  n'escriuoient  de  ce  qu'ils  auoient  veu, 
ils  auoient  aunioins  cela,  que  l'expérience  au  maniement  de  pareils  affaires, 
leur  rendoit  le  iuçiement  plus  sain. 

31,  Absence.  —  Suétone,  Cé.mr,  56.  —  «  Pour  ce  motif,  ajoutait  Asinius  Pollio, 
César  avait  été  dans  l'intention  de  refaire  ou  de  corriger  ses  Commen- 
taires. » 

36,  Accident.  —  C.-à-d.  si  l'on  ne  confronte  les  témoignages,  si  l'on  ne  re- 
çoit les  objections,  lorsqu'il  s'agit  de  prouver  les  moindres  détails  de  chaque 
fait.  —  Au  lendemain  même  de  la  bataille  de  Sedan  (1870),  il  n'a  pas  été 
possible,  malgré  une  polémique  longue  et  ardente,  de  déterminer  qui,  du 
général  de  Bauffremont  ou  du  général  de  Galliffet,  menait  ces  charges 
héroïques  de  cavalerie  qui  arrachèrent  à  l'empereur  Guillaume  cette  excla- 
mation :  «  Ah!  les  braves  gens!  »  si  bien  que  l'honneur  en  revient  à  tous 
^t  à  personne  en  particulier.  La  charge  avait  été  préparée  par  le  général 
Margueritte  qui,  au  dernier  moment,  avant  de  la  lancer,  se  portant  en  avant 
pour  bien  juger  de  la  direction  à  lui  donner,  fut  blessé  à  mort;  voyant 
leur  général  ramené,  déjà  ne  se  soutenant  plus,  les  tètes  de  colonne,  d'un 
mouvement  spontané,  se  précipitèrent,  brûlant  du  désir  de  le  venger;  les 
autres  suivirent. 

88,  Bodin.  -—  Dans  l'ouvrage  qu'il  a  publié  en  1566,  sous  le  titre  :  Méthode 
pour  faciliter  la  vérification  des  faits  historiques. 
82, 

9,  Lisant.  —  Parmi  les  livres  ainsi  annotés  par  Montaigne  se  trouve  un 
exemplaire  des  Commentaires  de  César  (V.  N.  II,  646  :  Militaire)  acheté 
sur  les  quais,  par  un  amateur,  au  prix  de  0  fr.  90;  ce  livre,  acquis  depuis 
par  le  duc  d'Aumale,  se  trouve  à  la  bibliothèque  de  Chantilly,  aujourd'hui 
propriété  de  l'Institut. 

ESSAIS  DE  MONTAIGNE.  —  T.   IV.  .30 


Fb.4fi6  KSSAIS  DE  MONTAIGNE. 

11,  Guicciardin.  —  A  écrit  une  histoire  de  l'Italie,  allant  de  1490  à  1534,  ou- 
vrage de  mérite  dans  lequel  l'auteur,  qui  avait  joué  un  rôle  considérable 
de  ce  temps-là,  se  montre  de  l'école  sceptique  de  Machiavel. 

36,  Soy.  —  Sur  l'exemplaire  de  Bordeaux.  Montaigne  avait  ajouté  :  «  très 
conuijune  et  très  dangereuse  corruption  du  iugement  humain  ■•;  mais  il  a 
bilTé  ensuite  cette  addition  qui,  pourtant,  exprime  une  vérité  très  réelle. 

'M,  Comines.  —  A  laissé  sui-  les  règnes  de  Louis  XI  et  de  Charles  MU  des 
mémoires  qui  parurent  en  1523;  il  s'y  montre  politique  profond,  chroni- 
queur fidèle,  écrivain  original;  mais  en  racontant  les  actes  les  plus  iniques, 
n'y  ajoute  pas  un  mot  pour  les  flétrir;  il  ne  juge  les  événements  que  par  le 
résultat. 
84, 

1,  Du  Bellay.  —  Les  Mémoires  des  Seigneurs  du  Bellay  (dix  livres,  dont  les 
quatre  premiers  et  les  trois  derniers  sont  de  IMartin  du  Bellay,  et  les  autres 
de  son  frère  Guillaume  de  Langey)  embrassent  les  événements  de  Franco 
de  1515  à  1547,  autrement  dit  le  règne  de  François  I",  dont  ils  sont  plutôt 
le  panégyrique  que  l'histoire. 

0,  De  louinuille.  —  Les  Mémoires  du  Sire  de  .loinville  constituent  une 
histoire  de  S.  Louis  et  des  Croisades  entreprises  par  ce  prince:  c'est  le 
récit  d'un  témoin  oculaire  plein  de  naturel,  de  sensibilité  et  de  charme 
(fin  du  xme  siècle).  —  Domestique  signifie  ici  qui  est  de  la  maison,  familier. 
V.  N.  I,  24  :  Domestiques. 

6,  Eginard.  —  Secrétaire  de  Charlemagne  dont  il  a  écrit  la  vie,  et,  y  faisant 
suite,  l'histoire  des  événements  pendant  les  premières  années  de  Louis  le 
Débonnaire,  ensemble  de  741  à  829. 

8,  Icy.  —  Dans  les  Mémoires  des  du  Bellay. 

14,  De  Montmorency.  —  Le  connétable  de  Montmorency,  que  des  intrigues 
de  cour  firent  exiler  dans  ses  terres,  en  1547,  par  François  1".  disgrâce  à 
laquelle  mit  fin  l'avènement  de  Henri  II. 

14,  De  Brion.  —  Philippe  de  Chabot,  amiral  de  France,  connu  sous  le  nom 
de  Seigneur  de  Brion,  chargé  en  1535  du  commandement  de  l'armée  en 
Piémont,  après  de  brillants  succès,  s'arrêta  court  à  Verceil,  ce  que  Fran- 
çois I"'  ne  lui  pardonna  pas,  condamné  en  1540  comme  concussionnaire, 
il  ne  fut  sauvé  que  par  la  protection  de  la  duchesse  d'Étampes,  maîtresse 
du  roi. 

CHAPITRE  XI. 

86, 

7,  Partie.  —  Sans  partie  adverse,  sans  opposition. 

9,  Vertueux.  —  J.-J.  Rousse.\u,  dans  son  Emile,  répète  Montaigne  en  le 
précisant:  ■<  Quoique  nous  appelions  Dieu  bon,  nous  ne  l'appelons  pas  ver- 
tueux, parce  qu'il  n'a  pas  besoin  d'effort  pour  bien  faire.  »  V.  N.  II,  16  : 
Force. 

10,  Des  philosophes.  —  Dans  la  traduction,  le  passage  du  texte  :  •  Des  phi- 
losophes, non  seulement  Stoïciens,  mais  encore  Epicuriens  (et  cette  en- 
chère... colunt,  et  retinent)  »,  a  été,  pour  plus  de  clarté,  placé  après  celui-ci  : 
••  Des  philosophes  Stoïciens  et  Epicuriens,  dis-je...  virlus  lacessila  ». 

13,  Rencontre.  —  Réplique.  —  Dioijkne  Laerce,  IV,  43. 

18,  Reconnaissant.  —  Montrant  plus  de  bonne  foi. 

27,  Retinent.  —  A  observer  l'insistance  que  Montaigne  apporte  à  réhabiliter 
la  secte  d'Épicure,  à  l'encontre  de  l'opinion  générale  qui  veut  que  les  Épi- 
curiens soient  moins  rigides  dans  leur  doctrine  que  les  Stoïciens,  ce  qui  au 
fond  n'est  pas  vrai. 

36,  Secte.  —  Cicérox,  De  Of'/lciis,  1,  44.  —  Épaminonda-s  était  de  l'école  de 
Pythagore.  Cette  école,  fondée  à  Crotone  en  Italie  (VI'  siècle),  formait  dans 
le  principe  une  sorte  de  congrégation  où  l'on  n'était  admis  qu'après  un 
long  noviciat  et  diverses  épreuves,  entre  autres  un  silence  de  plusieurs 
années.  Les  Pythagoriciens  menaient  la  vie  la  plus  fiugale  et  s'abstenaient 


88. 


NOTES.         r.IV.  H.  r.H.  Xr.         vol.  ÎI.  PAG.  86.  F.V6- 

de  luan^ei"  de  la  chair  des  animaux;  ils  croyaient  à  la  métempsycose  ou 
transmigration  des  âmes  d'un  corps  dans  un  autre.  On  ne  sait  rien  de  bien 
certain  sur  les  autres  points  de  leur  doctrine,  parce  qu'on  n'a  aucun  ('-cril 
de  Pythagore,  dont  l'esprit  cependant  embrassait  toutes  les  sciences  con- 
nues de  son  temps,  et  qu'il  exerçait  un  empire  absolu  sur  ses  disciples  qui 
admettaient  tous  ses  dogmes  sans  discussion. 


1.  Esmoulu.  —  Qui  est  une  rude  et  dangereuse  épreuve  pour  la  vertu. 
—  Combattre  à  fer  émoulu,  c'est  combattre  avec  des  armes  aiguisées,  pour 
tout  de  bon. 
28,  Commune.  —  Du  peuple  ou  des  plébéiens, 

3-1,  Vertu.  —  Plut.\rque,  Marins,  10.  —  Saturninus  proposait,  pour  un  par- 
tage de  tezres,  un  plébiscite  contraire  à  la  loi  et  qui,  en  outre,  portait  que 
tout  sénateur  jurerait  devant  le  peuple  de  concourir  à  son  exécution.  Mé- 
tellus  Numidicus  seul  refusa  d'y  acquiescer,  quelque  pression  qu'on  exerçât 
sur  lui,  et  les  partis  étant  sur  le  point  d'en  venir  aux  mains  par  suite  da  sa 
résistance,  il  préféra  s'exiler  que  d'être  cause  d'une  sédition  (102). 
90, 

'.i,  Très  certaines.  —  Cickron,  De  JnnibuK,  II,  30. 

5,  Entrailles.  —  V.  N.  II,  430  :  Premier. 

8,  Etfroy.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  de  la  mort. 

H»,  Brigand.  —  C'est  César  que  Montaigne  qualifie  de  la  sorte,  malgré  l'ad- 
miration qu'il  lui  témoigne  souvent;  mais  il  l'envisage  ici  comme  auteur 
du  plus  grand  des  crimes,  l'asservissement  de  sa  patrie.  Cickron,  dans  ses 
Lelires  à  Alticus,  VU,  18,  le  gratifie  de  la  même  épithète  perclilm  lalru  (bri- 
gand fieffé). 

25,  Ferocior.  —  C'est  en  parlant  de  Cléopâtre  qu'HoiucE  s'exprime  ainsi; 
Montaigne  en  fait  application  à  l'àme  de  Caton. 

26,  Populaires.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  vai)h<i. 
3i>,  Erat. 

•  Galon,  le  fer  en  uiain,  prêt  à  finir  son  sort. 
Rassure  par  ces  mois  ceux  qui  craignaient  sa  mort  : 
«  Cessez  de  me  flatter  d'une  làclie  espérance. 

•  .le  hais  tout  dans  César,  jusques  à  sa  clémence; 

«  Apprenez  aujourd'hui  qu'un  Uomàin,  qu'un  Caton, 

«  Fuit  bien  moins  son  courroux,  qu'il  ne  fuit  son  pardon.  • 

Épigramme  de  i.'.\r.i.AMANNi. 

92 

'l5,  Fit-il.  -  DiO(iÈNE  Laerce,  11,  76.  —  V.  N.  III,  576  :  I.'vn. 

16,  Personnages.  —  Socrate  et  Caton. 
94, 

16,  Tenue.  —  Ne  serait-ce  pas  de  la  constatation  et  du  fait  de  cet  état  que 
viendrait  ce  vieux  dicton  :  ■<  Français,  plus  qu'hommes  au  venir,  moins 
que  femmes  à  la  retraite  »,  cité  par  II.  Holssaye,  dans  son  ouvrage  intitulé 
Waterloo. 
96. 

15,  Vndsp.  —  La  Balance,  le  Scorpion,  le  Capricorne  sont  trois  des  constel- 
lations du  Zodiaque  (V.  N.  I,  254  :  Aqua). 

18,  Mal.  —  DiOGÈNE  Laerce,  VI,  17. 

84,  Taster.  —  Diogène  Laerce,  II,  67. 

36,  Faschoit.  —  Diogène  Laerce,  II,  17;  Horace,  SaL,  II,  3,  10. 

38,  Laborieusement.  —  Cet  exemple  et  beaucoup  d'autres  soit  dans  un  sens, 
soit  dans  l'autre,  prouvent  que  les  mœurs  sont  tout  à  fait  indépendantes  des 
opinions  religieuses. 

41,  Repas.  —  Diogène  Laerce,  X,  11. 


98, 


I,  Infecté...  autre.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  corrompu  par  le  dérèglement  de 
met)  meurs;  ains  au  rebours,  Il  luge  plus  exactement  et  plus  rigoureusement 


Fb.468  ESSATS  DE  MONTAIGNE. 

de  moy,  que  de  tout  (80  porte  nul)  autre  :  mes  débauches  quant  à  celle  partie 
là,  m'ont  depleu  comme  elles  deuoient. 
6,  Antres.  —  La  Fontaine  a  rendu  la  même  idée  dans  sa  fable  Les  deux 
chiens  et  l'âne  mort  : 

0  Les  vertus  devraient  être  sœurs, 

Ainsi  que  les  vices  sont  frères; 
Dès  que  l'un  de  ceux-ci  s'empare  de  nos  cœurs, 
Tous  viennent  à  la  file,  il  ne  s'en  manque  guère,  » 

24,  Incontinent.  —  Aristote  convient  que  tout  en  ne  mettant  pas  l'homme 
qui  en  est  imbu  à  l'abri  de  toutes  les  faiblesses  de  la  nature  humaine,  la 
justice  n'en  contient  pas  moins  le  principe  de  toutes  les  vertus  :  «  Elle  en 
est  la  plus  éclatante;  niHesperus  (l'étoile  du  soir), ni  Lucifer  (l'étoile  du  ma- 
tin), ne  sont  plus  admirables.  » 

27,  Discipline.  —  Cicéron,  Tusc,  IV,  37. 
29,  L'autre.  —  Cicéron,  De  Fato,  5. 

40,  Accez.  —  Cicéron,  De  Senectute,  12. 
100, 

3,  Venus.  —  Vénus,  déesse  de  la  beauté,  présidait  aussi  à  la  génération. 
Myth. 
9,  M'y  cognais  ...  miracle.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  encore  que  ie  lui  donne  plus 
de  crédit  sur  moy  que  ie  ne  deurôis,  si  est-ce  que  ie  ne  prens  aucunement 
pour  miracle. 

12,  Nauarre.  —  Add.  des  éd.  ant.,  :  Marguerite. 

13,  Heptameron.  —  Ouvrage  ainsi  nommé,  parce  qu'il  est  divisé  en  sept 
parties  ou  journées;  est  aussi  appelé  Nouvelles  de  la  reine  de  Navarre.  C'est 
un  recueil  de  contes  imités  de  Boccace,  écrit  par  Marguerite  de  Navarre, 
imprimé  en  1559;  on  y  trouve  beaucoup  d'imagination  et  d'esprit  et  aussi 
une  grande  licence. 

18,  Comme  il  y  ...  rencontre.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  auquel  il  semble  qu'il 
y  ait  plus  de  rauissement  :  non  pas  à  mon  aduis  que  le  plaisir  soit  si  f/rand 
de  soy,  mais  parce  qu'il  ne  nous  donne  pas  tant  de  loisir  de  nous  bander  et 
préparer  au  contraire,  et  qu'il  nous  surprend. 

20,  Attouchemens.  —  <■  Nous  connaissons,  dit  Sénèque,  ce  genre  de  conti- 
nence de  ces  nouveaux  mariés,  qui,  alors  même  que  la  première  nuit  de  leurs 
noces  ils  épargnent  la  pudeur  de  ces  vierges  timides  dont  ils  sont  les  époux, 
n'en  lutinent  pas  moins,  en  se  jouant,  les  parties  circonvoisines  de  l'objet 
de  leurs  désirs.  »  —  Ces  derniers  mots  répondent  à  cette  expression  «  s'en 
tenir  à  la  petite  vie  »  ;  ou,  suivant  Marot  :  «  S'en  tenir  aux  faubourgs  de 
la  cité  d'amour,  sans  entrer  dans  la  ville  »  ;  continence  qui  n'est  que  de 
l'onanisme  réciproque. 

22,  Cette  secousse  ...  ailleurs.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  Cette  secousse  de 
plaisir  nous  frappe  si  furieusement,  qu'il  seroit  malaisé  véritablement,  à 
ceux  qui  aymeat  la  chasse  de  retirer  en  cet  instant  l'âme  et  la  pensée  de  ce 
rauissement. 

25,  Poètes.  —  Diane  était  la  déesse  de  la  chasteté  et  de  la  chasse,  et  Cupidon, 
fils  de  Mars  et  de  Vénus,  était  le  dieu  de  l'amour.  —  L'amour  faict  place 
au  plaisir  de  la  chasse,  port,  les  éd.  ant.,  voyla  pourquoi  les  poêles  font 
Diane... 

28,  Obliuiscitur.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  C'est  icy  vn  fagotage  de  pièces  décousues; 
ie  me  suis  détourné  de  ma  voye,  pour  dire  ce  mot  de  la  chasse. 

102, 

2,  Estrangler.  —  En  81.  En  revenant  d'Asie,  après  la  mort  de  Sylla,  César 
fut  pris  par  des  pirates,  qui  lui  demandèrent  trente  talents  (environ 
160.000  fr.)  pour  sa  rançon;  il  leur  promit  le  triple.  Rendu  à  la  liberté, 
après  être  resté  un  mois  en  leur  pouvoir,  il  arma  quelques  bâtiments,  se 
mit  à  leur  poursuite,  s'en  empara  et  leur  fit  subir  le  sort  dont  il  les  avait 
menacés. 


NOTES.        UV.  11,  CH.  XI.         VOL.  II,  PAG.  102.  F.469 

4,  Latin.  — Cet  autour  est  Suétone,  César,  74,  qui  s'exprime  ainsi  à  l'occa- 
sion du  fait  de  Pliilonion,  esclave  et  secrétaire  de  César,  que  celui-ci, 
comme  le  rapporte  Montaigne,  fit  simplement  mettre  à  mort,  sans  le  livrer 
à  la  torture,  pour,  de  concert  avec  ses  ennemis,  avoir  conçu  le  projet  de 
l'empoisonner. 

G,  Deuiner.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  qu'il  n'estoil  pas  du  temps  de  la  bonne 
Home  et  qu'il  iuge  selon  les,  au  lieu  de  :  «  qu'il  est  frappé  des  ». 

7,  Mirent.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  depuis. 

9,  Cruauté.  —  Cette  appréciation,  émise  à  un  point  de  vue  plus  général, 
est  reproduite  dans  les  mémos  termes,  II,  584.  —  Déjà,  au  v°  siècle, 
saint  Augustin  s'était  élevé  contre  la  torture  «  qui  force  les  innocents  eux- 
mêmes  à  mentir  »  ;  elle  ne  fut  abolie  en  France  que  200  ans  après  que 
Montaigne  le  réclamait  ;  en  1780,  la  question  préparatoire,  qui  avait  pour 
objet  la  recherche  de  la  vérité,  fut  supprimée  et,  en  1788,  la  question  préa- 
lable, infligée  au  condamné  et  qui  constituait  ce  que  Montaigne  dénomme 
si  bien  l'au-delà  de  la  mort  simple;  la  marque  au  fer  rouge  et  le  carcan  ne 
l'ont  été  qu'en  1830,  le  pilori  en  1851. 

9,  Nous.  —  Nous,  chrétiens,  qui  croyons  à  l'immortalité  do  l'àme. 
31,  Changée.  —  L'exemplaire  de  Bordeaux  donne,  de  la  main  de  Montaigne, 
une  variante  de  cet  épisode  :  «  Ces  iours  passés...  l'avoir  changée  »  (lig.  12  à 
31),  lequel  n'existe  pas  dans  les  éditions  antérieures.  En  se  reportant  au  re- 
levé de  ces  variantes  (fasc.  E),  on  aura  un  spécimen  relativement  étendu 
de  l'orthographe  personnelle  de  l'auteur  des  Essais,  et  la  comparaison  des 
doux  textes  ne  laissera  aucun  doute  sur  la  supériorité  de  celui  de  1595. 
104, 

14,  Hault  chapeau.  —  Plutarque,  Apophth.  —  Sorte  de  tiare;  coiffure  monu- 
mentale portée  autrefois,  chez  les  Perses  et  d'autres  peuples  de  l'Orient,  par 
les  grands  et  les  pontifes;  la  tiare  du  pape,  la  mitre  des  évoques  en  sont 
des  restes. 
16,  Représentez.  —  Hérodote,  11,  dit  qu'il  n'j'  avait  que  les  pauvres  qui  on 
agissaient  ainsi  :  «  Par  indigence,  ils  font  des  pourceaux  de  pâte,  et  les 
offrent  on  sacrifice  après  les  avoir  fait  cuire.  »  —  En  ces  derniers  temps 
U905),  on  a  trouvé  des  poupées  dans  certaines  sépultures  de  la  Haute- 
Egypte,  et  on  on  a  donné  la  cause  suivante,  se  rattachant  à  la  même  idée  : 
Dans  les  temps  reculés,  il  était  d'usage  dans  ce  pays  d'égorger  le  bou- 
cher, le  boulanger  et  le  tailleur  qui  avaient  été  attachés  au  service  d'un 
illustre  personnage  passant  de  vie  à  trépas,  et  d'enterrer  leurs  cadavres 
autour  de  sa  momie;  ils  continuaient,  d'après  les  croyances  religieuses,  à 
le  servir  dans  l'autre  monde  ;  peut-être  aussi  était-ce,  d'après  les  idées  so- 
ciales d'alors,  comme  garantie  contre  toute  tentative  d'empoisonnement; 
quand  les  mœurs  s'humanisèrent,  les  artisans  et  les  esclaves  acquirent  peu 
à  peu  le  droit  de  se  faire  remplacer  dans  le  paiement  de  ce  suprême  im- 
pôt du  sang  par  des  statuettes  qui  leur  ressemblaient  plus  ou  moins  exac- 
tement, ce  sont  elles  que  l'on  retrouve  aujourd'hui. 
106, 

11,  Metempsychose.  —  Transmigration  des  âmes  d'un  corf)s  dans  un  autre. 
Ce  dogme  est  d'origine  indienne;  de  l'Inde,  il  passa  en  Egypte,  d'où  plus 
tard  Pythagore  l'importa  en  Grèce;  on  trouve  cette  croyance  mêlée  à  la 
religion  de  presque  tous  les  peuples  anciens;  elle  devait  conduire  ceux  qui 
l'admettaient  à  défendre  l'usage  des  viandes,  comme  exposant  l'homme  à 
se  nourrir  de  l'un  des  siens;  aussi  cette  abstention  est-elle  une  des  prescrip- 
tions fondamentales  de  la  i-eligion  des  Brahmes  et  de  la  philosophie  py- 
thagoricienne; cette  doctrine  est  une  ébauche  imparfaite  et  grossière  de 
l'immortalité  de  l'àme.  V.  II,  326. 

12,  Druides.  —  Ministres  de  la  religion  chez  les  anciens  Gaulois  ou  Celtes. 
Les  Druides  croyaient  à  la  métempsycose;  l'objet  de  leur  culte  était  sur- 
tout la  nature;  cependant  ils  reconnaissaient  plusieurs  dieux,  dont  Ten- 
tâtes, le  dieu  de  la  guerre;  ils  n'avaient  point  de  temples  et  se  réunissaient 
dans  les  forêts;  ils  se  livraient  à  nombre  de  pratiques  superstitieuses,  at- 


Fb.470  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

tacliaient  une  vertu  particulière  au  gui  de  cliêuc  qui.  à  certains  jours,  se 
cueillait  en  cérémonie,  avec  une  faucille  d'or;  dans  les  grandes  calamités, 
ils  immolaient  des  victimes  humaines  :  ces  énormes  pierres,  dolmens  et 
menhirs,  qui  se  rencontrent  parfois  en  grand  nombre  dans  certaines  ré- 
gions, passent  pour  avoir  servi  d'autels  à  ces  sacrifices  sanglants.  Ce  culte 
comportait  aussi  des  prêtresses  qui  prédisaient  l'avenir;  il  a  disparu  vers 
le  vi"  siècle. 

34,  Eram.  —  C'est  ce  que  Pythagore  disait  de  lui-même  et  c'est  dans  sa 
bouche  qu'OviDE,  Métam.,  XV,  60,  place  ces  paroles.  —  V.  N.  II,  326  :  Ans. 

108, 

6,  Plutarque.  —  Dans  son  traité  d'Isia  et  Osiris,  .39. 

7,  Enfermez.  —  Si  l'on  veut,  dit-on,  qu'un  chat  entre  librement  dans  une 
chambre,  il  faut  lui  procurer  et  qu'il  entrevoie  le  moyen  d'en  pouvoir  sor- 
tir de  même. 

10,  Et  rvtilité...  diuine.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  en  cet  autre,  ou  quelque  autre 

effect. 
19,  Royauté.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  vaine  et. 

28,  Feste.  —  Les  caresses. 

29,  Aumosnes.  —  Établissements  d'assistance;  on  disait  jadis  l'aumône  pu- 
ijlique  do  Paris  pour  l'administration  de  l'assistance  publique  de  cette 
ville. 

30,  Bestes.  —  Le  Coran  défend  de  surcharger  le  chameau  et  de  maltraiter 
le  cheval.  —  Chez  nous,  la  loi  Grammont  a  pareillement  pour  objet  d'em- 
pêcher l'abus  des  animaux  domestiques  et  de  les  protéger  contre  les  mau- 
vais traitements,  et  la  société  protectrice  des  animaux  s'est  donné  la  tâche 
de  veiller  à  son  application  et  d'en  propager  les  idées  humanitaires. 

32,  Sauué.  —  Cicéron,  Pro  Rose.  Am.,  20;  Tiïe-Live,  V,  47;  Pline,  X,  22.  — 
Le  Capitole,  temple  et  citadelle  de  l'ancienne  Rome.  —  En  390,  après  la 
bataille  de  l'Allia,  les  Gaulois  entrèrent  dans  Home  qu'ils  livrèrent  aux 
flammes  après  l'avoir  pillée  et  assiégèrent  le  Capitole.  Ils  étaient  sui"  le 
point  d'y  pénétrer  de  nuit,  quand,  excitées  par  le  bruit,  <ies  oies  qui  s'y 
trouvaient  par  hasard,  se  mirent  à  criei',  et,  par  leurs  cris,  réveillèrent  les 
défenseurs,  ce  qui  permit  de  repousser  l'assaut  et  fut  pour  Rome  le  salut. 

33,  Hecatompedon.  —  Plutarque,  Calun  le  Censeur,  3.  —  Le  Parthénon,  tem- 
ple de  Minerve  à  Athènes,  appelé  Hecatompedon  parce  qu'il  avait  cent 
pieds  de  large.  Sa  construction  en  était  due  à  Périclès.  L'exécution  en  avait 
été  dirigée  i)ar  Phidias  ;  une  statue  de  la  déesse  en  ivoire,  sculptée  par  lui, 
le  décorait. 

35,  Empescbement.  —  Les  Romains  en  usaient  de  même  à  l'égard  des  bètes 
de  somme,  employées  aux  travaux  de  fortifications  de  leur  ville. 

38,  Enfans.  —  A  Paris,  ou  mieux  dans  ses  environs  immédiats,  existent  sous 
le  patronage  de  la  société  protectrice  des  animaux  des  cimetières  pour  les 
chiens,  chats,  etc.,  que  leurs  maîtres  veulent  voir  inhumés;  àGennevilliers, 
notjimment,  s'en  trouve  un  assez  coquet  et  fort  bien  entreteau,  où  cer- 
tains ont  même  de  petits  monuments. 
110, 

1,  Depuis.  —  DiODORE  de  Sicile,  XIII,  17. 

3,  Trespas.  —  «  Si  dans  une  maison,  dit  Hérodote,  II,  65,  60,  etc.,  il  meurt 
un  chat  de  mort  naturelle,  quiconque  l'habite  se  rase  les  sourcils;  si  c'est 
un  chien,  on  se  rase  la  tète  et  le  corps  entier.  » 

5,  Olympiques.  —  Hérodote,  VI,  103;  Élie.n,  Hisl.  des  animaux,  XII,  40. 

6,  Chef.  —  Sur  un  cap,  un  promontoire. 

7,  Nom.  —  Plutarque,  Calon  le  Censeur,  3.  —  Lors  de  la  seconde  guerre 
médique,  l'évacuation  d'Athènes  ayant  été  résolue  (480),  le  chien  de  Xan- 
tippe,  père  de  Périclès,  se  jeta  à  la  mer,  lorsque  son  maître  se  fut  em- 
barqué, et  nagea  près  de  son  vaisseau  jusqu'à  Salamine,  où  il  aborda  épuisé 
de  fatigue  et  expira  sur  le  rivage;  l'endroit  où  il  fut  enterré,  a  porté  de- 
puis le  nom  de  Cynosséma  (sépulture  du  chien). 

9,  Seruy.  —  Plutarque,  Cal07i  le  Censeur,  3,  cite  cette  manière  de  faire  de 


NOTES.         MV.   II,  Cil.  \ll.         VOL.  H,  PAG.   HO.         Pb.471 

sa  part,  pour  l'opposer  v  celle  de  Caton  qui  faisait  vendre  ses  esclaves, 
lorsqu'ils  devenaient  vieux,  pour  n'avoir  pas  à  nourrir  des  bouches  inu- 
tiles. 

CHAPITRE  XII. 

Chapitre  XII.  —  Le  plus  long  et,  au  jugement  de  bien  des  gens,  le 
plus  important  et  le  plus  curieux  des  Essais.  —  Raymond  Sebond,  dans  son 
ouvrage  la  Théologie  naturelle,  ou  Livre  des  créatures,  paru  pour  la  première 
fois  en  1487,  écrit  en  un  latin  barbare,  et  qui  fut  condamné  au  concile  de 
Trente,  a  voulu  démontrer  que  les  seules  lumières  de  la  raison  suffisent, 
sans  la  révélation,  pour  admettre  les  bases  de  la  religion,  à  l'encontre  de 
ceux  qui  soutiennent,  au  contraire,  qu'on  ne  peut  prouver  par  des  moyens 
humains  l'existence  de  Dieu  et  de  sa  Providence.  11  voit  la  preuve  de  son 
assertion  dans  l'infériorité  et  la  soumission  de  tous  les  animaux  vis-à-vis  de 
l'homme,  qui  ne  peut  avoir  reçu  que  d'un  Dieu  cette  supériorité  en  toutes 
choses,  d'où  il  conclut  à  quels  devoirs  de  reconnaissance  il  est  tenu  envers 
son  Créateur  et  qu'il  peut  s'élever  jusqu'à  lui,  par  l'observation  de  ses 
commandements.  —  Montaigne,  lui,  dans  ce  chapitre,  fait  plus  l'apologie 
de  la  religion  révélée  que  celle  de  l'ouvrage  de  Sebond,  il  tient  à  l'encontre 
de  celui-ci  que  notre  première  illusion  est  de  nous  imaginer  supérieurs  aux 
autres  animaux;  leurs  actes  sont  de  fait  semblables  aux  nôtres  :  Nous  pré- 
tendons que  c'est  l'instinct  seul  qui  les  guide;  quel  avantage,  si  cela  est, 
n'ont-elles  pas  sur  nous,  de  faire  d'elles-mêmes  ce  à  quoi  notre  raison  nous 
conduit  d'un  pas  si  incertain  et  sans  toujours  aboutir?  Puis,  laissant  les 
bêtes,  il  s'attache  à  l'homme  lui-même;  nous  montre  les  mieux  doués,  ceux- 
là  mêmes  qui  ont  fait  de  la  raison  l'étude  de  toute  leur  vie,  en  arriver  à 
reconnaître  que  l'esprit  humain  est  hors  d'état  d'atteindre  à  la  vérité  et 
de  la  distinguer  de  l'erreur.  Passant  en  revue,  d'une  manière  succincte  et 
un  peu  confuse,  mais  cependant  complète,  les  systèmes  philosophique  des 
anciens  et,  sous  prétexte  de  défendre  Sebond  qu'il  a  traduit,  exposant  ses 
propres  idées,  il  va,  en  réalité,  directement  à  l'opposite  de  la  pensée  et  du 
dessein  de  l'auteur  qu'il  prétend  appuyer;  il  fait  ressortir  de  quelle  incer- 
titude est  empreint  le  témoignage  de  nos  sens,  par  lequel  nous  commu- 
niquons avec  ce  qui  est  en  dehors  de  nous;  combien  la  raison  est  elle- 
même  limitée  dans  ses  connaissances,  que  d'erreurs  elle  commet  dans  ses 
déductions;  et,  devant  son  impuissance  à  conduire  l'homme  à  aucune  vé- 
rité certaine,  il  conclut  que  dans  le  chaos  des  contradictions  humaines, 
la  foi  en  la  religion  chrétienne  apparaît  comme  le  parti  le  plus  simple  et 
le  plus  probable;  et  il  l'adopte,  non  par  conviction,  mais  par  esprit  de  con- 
duite et  par  insouciance,  s'y  abritant  comme  dans  un  port  tranquille  où 
il  cherche  le  repos  et  un  certain  engourdissement  de  l'àme.  En  somme,  il 
sacrilie  la  philosophie  à  la  théologie,  acceptant  et  mettant  hors  de  cause 
tout  ce  que  la  foi  nous  enseigne,  à  l'opposé  d'Abailard  qui  soutenait  «  qu'il 
ne  faut  croire  que  les  clioses  qui  se  peuvent  prouver  par  des  raisons  na- 
turelles »,  ce  qui,  du  reste,  le  fit  considérer  comme  hérétique;  mais  les 
motifs  qui  le  font  se  montrer  aussi  exclusivement  chrétien,  c'est  encore 
chez  lui  du  scepticisme,  c'est  uniquement  parce  que  la  raison  humaine 
courte  et  débile  ne  le  mène  à  rien  et  que  l'Église  assure  l'avenir,  sans  qu'il 
ait  à  s'en  inquiéter  davantage.  —  Scaliger,  qui  était  un  critique  de  parti 
pris  de  Montaigne,  dit  de  ce  chapitre  :  «  H  y  a  de  tout,  et  cela  pioduit  le 
même  elfet  que  Magnificat  à  matines.  » 

Sebonde.  —  Montaigne  écrit  indifféremment  Sebon,  Sebond,  Sebonde 
Sabonde. 

lô,  Contens.  —  Diolkne  Laekce,  Vil,  16ô. 

17.  L'ignorance. 

'  Du  vieux  Zenon  l'aiilique" confrérie 
Disait  tout  vice  être  issu  d'ânerie.  • 


Fb.472  ESSAIS  DE  MONïAIGiNE. 

112, 

8,  Luther.  —  A  la  suite  de  persécutions  amenées  par  une  protestation  de  sa 
part  contre  la  vente  des  indulgences,  Luther  se  sépara  de  l'Église  catho- 
lique, ne  reconnaissant  d'autre  autorité  que  celle  des  livres  saints,  atta- 
quant le  Pape  et  l'Église  romaine,  les  vœux  monastiques,  le  célibat  des 
prêtres,  la  hiérarchie  ecclésiastique,  la  possession  de  biens  temporels  par 
le  clergé,  rejetant  le  culte  des  saints,  le  purgatoire,  les  commandements 
de  l'Église,  la  confession,  le  dogme  de  la  transsubstantiation,  la  messe, 
la  communion  sous  une  seule  espèce,  ne  conservant  d'autres  sacrements 
que  le  baptême  et  l'eucharistie  sous  les  deux  espèces.  —  Excommunié  en 
1520,  il  n'en  devint  que  plus  ardent,  parcourut  l'Allemagne,  propageant  ses 
idées  nouvelles;  il  fit  de  nombreux  prosélytes  qui  résistèrent  aux  persécu- 
tions par  les  armes  et,  après  de  nombreuses  vicissitudes,  ses  sectateurs  ob- 
tinrent définitivement,  par  la  paix  de  Nimègue  (1582),  la  liberté  de  cons- 
cience. Conséquent  avec  lui-même,  Luther  s'était  marié  en  1526.  —  Vers 
1538,  Calvin  se  faisait,  en  Guyenne,  l'initiateur  de  cette  même  doctrine. 

.  12,  Athéisme.  —  En  matière  d'athéisme,  les  hommes,  à  peu  près  dans  tous 
les  temps,  ont  communément  traité  d'athées  ceux  qui  simplement  ne  pen- 
sent pas  comme  eux;  si  bien  que,  de  fait,  nous  en  sommes  arrivés  à  con- 
fondre dans  une  même  acception  ces  deux  termes  de  théiste  et  d'athée 
qui,  grammaticalement  parlant,  sont  tout  l'opposé  l'un  de  l'autre.  En  fait, 
l'athée  n'existe  pas;  il  n'est  personne  qui  nie  l'existence  d'un  principe 
inconnu,  qui  n'a  pas  eu  de  commencement,  qui  n'aura  pas  de  fin  et  qui 
fait  que  l'univers  existe;  mais  son  essence,  la  façon  dont  il  s'exerce,  la 
raison  d'être  de  toutes  ses  créatures,  des  mondes  et  des  êtres  animés  et 
inanimés  dont  ils  se  composent,  échappent  à  la  faiblesse  de  notre  intelli- 
gence, et  tous  nous  errons  quand  nous  cherchons  à  le  pénétrer,  parce 
qu'il  est  au-dessus  de  toute  conception  de  notre  part  et  que  nous  n'avons 
de  données  sur  ce  point  que  de  soi-disant  révélations  contestables  et  con- 
testées. En  cette  recherche  stérile  qui  ne  saurait  aboutir  et  qui  ne  conduit  à 
aucun  résultat  autre  que  le  doute,  non  sur  l'existence  de  Dieu,  mais  sur  sa 
nature  et  sur  notre  fin,  l'esprit  humain  s'égare  et  s'attriste;  reste  la  foi, 
mais  la  foi  ne  se  commande  pas. 
12,  Vulgaire.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  (et  tout  le  monde  est  quasi  de  ce  genre). 
14,  Mesmes.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  par  la  raison. 

32,  Foible.  —  C'est  le  cas  des  Essais  traduits  en  langage  de  nos  jours.  Le 
style  de  l'auteur  a  un  cachet,  un  charme  si  particuliers,  la  langue  fran- 
çaise de  son  époque,  surtout  sous  sa  plume,  avait  tellement  plus  d'énergie 
qu'actuellement,  que  toute  traduction,  quoi  qu'on  fasse,  sera  toujours  infé- 
rieure au  texte  primitif  pour  ceux  à  même  de  le  lire  à  peu  près  couramment. 
•37,  Mort.  —  Montaigne  commença  cette  traduction  en  1567;  il  l'avait  ter- 
minée en  1568.  Elle  fut  imprimée  une  première  fois  en  1569,  mais  d'une 
façon  si  incorrecte  que  les  éd.  ant.  des  Essais  aj.  ici  :  auec  la  nonchalance 
qu'on  void,  par  l'infiny  nombre  de  fautes,  que  Vimprimeur  y  laissa,  qui  en 
eust  la  conduite  luy  seul.  Elle  a  été  réimprimée,  en  1581,  dans  de  meilleures 
conditions. 

114, 

9,  Turnebus.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  Tournebeuf. 

11,  D'Aquin.  —  Le  plus  grand  théologien  de  l'Église  d'Occident  et  le  plus 
grand  philosophe  du  moyen  âge.  Ses  ouvrages  principaux  sont  :  la  Somme 
de  la  foi,  établissant  toutes  les  vérités  catholiques  d'après  les  Écritures,  et 
la  Somme  théologique  longtemps  classique,  où  l'auteur  discute  les  prin- 
cipales questions  de  la  théologie,  de  la  philosophie  et  de  la  morale  (somme, 
terme  de  théologie,  signifie  ouvrage  abrégé  d'un  plus  grand;  de  la  même 
étymologie  vient  sommaire). 

25,  Bonté.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  sacrosaincte  bonté. 
116, 

30,  Sua.  —  Vers  imités  de  Virgile,  faits  par  un  auteur  inconnu  à  la  louange 
de  Ronsard. 


NOTES.         IJV.  Il,  en.  XII.         VOL.  II,  PAG.  118.  Fb.473 

118, 

2,  Cbrestiens.  —  Socrate  n'était  pas  chrétien,  ce  qui  n'a  pas  empoché  qu'il 
soit  parvenu  à  un  si  haut  degré  de  vertu,  que  le  paganisme  peut  l'oppo- 
ser à  tous  ceux  que  le  christianisme  présente  en  ce  genre  :  sa  mort  excite 
l'admiration;  jusqu'à  son  dernier  soupir,  il  se  montra  aussi  grand  qu'il 
avait  vécu;  on  peut  apprendre  de  lui  à  bien  vivre  et  à  bien  mourir.  — 
Erasme,  cet  autre  sage  de  son  temps,  dit  quelque  part  :  «  Peu  s'en  faut 
que  je  ne  dise  :  Saint  Socrate,  priez  pour  nous  !  » 

4,  Martyres.  —  U  y  a  des  martyrs  dans  toutes  les  religions;  Tertulliex  di- 
sait :  «  Ce  n'est  pas  le  supplice  qui  t'ait  le  martyre,  mais  la  cause.  • 

8,  Tartare.  —  Joinvh.le,  19.  —  Le  pape  Innocent  VII  avait  envoyé,  pour 
y  prêcher  le  christianisme,  des  missionnaires  en  Tartarie,  dont  le  roi  pro- 
jeta d'envoyer  une  ambassade  à  Rome,  pour  vérifier  les  assertions  de  ces 
missionnaires;  mais  eux-mêmes,  par  crainte  de  la  mauvaise  impression 
qu'elle  pourrait  en  rapporter,  le  dissuadèrent  d'y  donner  suite.  Ce  qui  a 
pu  porter  Montaigne  à  penser  que  c'était  saint  Louis  qui  l'en  avait  dé- 
tourné, c'est  qu'à  ce  moment  il  était  en  Chypre,  se  rendant  en  Terre  sainte, 
et  l'ambassade  vint  l'y  saluer,  mais  ne  poussa  pas  plus  loin. 

18,  Vicieuses.  —  Montaigne  paraît  avoir  emprunté  cette  histoire  du  Déca- 
méron  de  Boccace,  2"  journée,  2°  nouvelle,  où  le  juif  Abraham,  pressé  par 
un  ami  de  se  faire  chrétien,  s'y  résout,  après  un  voyage  à  Rome,  par  les 
raisons  indiquées  ici. 

20,  Parole.  —  Évangile  selon  S.  JIatthieu,  XVII,  19  et  S.  Paul,  Épitre  aux 

Corinthiens. 
23,  Credas.  —  Cette  citation  est  de  Quintilien  qui  n'était  pas  chrétien,  c'est 

dire  que  Montaigne  la  détourne  du  sens  qu'elle  a  dans  le  texte  latin. 
■il,  A  nos  passions.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  aux  hommes. 
120, 

19,  Celle  là.  —  Allusion  à  la  situation  de  Henri  III  après  le  traité  de  Loches 
(1576).  Mécontents  des  concessions  faites  par  le  roi  aux  Protestants,  les 
Catholiques,  qui  jusqu'alors  avaient  marché  avec  lui,  se  liguent  contre 
lui,  tandis  que  ses  adversaires  de  la  veille  se  déclarent  pour  lui. 

20,  Besoing.  —  C.-à-d.  n'admettre  pour  vrai  que  ce  qu'il  est  de  notre  inté- 
rêt qu'on  croie  tel. 

21,  Dire.  —  Bayle,  dans  son  dictionnaire,  remarque  I  de  l'art.  Holman,  cite 
et  commente  ce  passage,  disant  :  "  Tant  que  le  monde  sera  monde,  il  y 
aura  partout  des  doctrines  ambulatoires  dépendantes  des  lieux  et  des 
temps.  »  C'est  ce  qu'à  notre  époque  nous  appelons  l'opportunisme,  qui, 
quoi  qu'on  en  puisse  dire,  est  l'une  des  lois  les  plus  sensées  de  la  politique, 
dont  les  principes  sont  tout  autres  que  ceux  de  la  morale  avec  lesquels  ils 
sont  rarement  du  tout  au  tout  conciliables;  celle-ci  est  la  théorie,  celle-là 
la  pratique. 

32,  Remuent.  —  Au  début  des  troubles  qui  agitèrent  la  France  à  cette  épo- 
que, les  Protestants,  visant  à  renverser  Charles  IX  et  à  faire  arriver  au 
trône  Henri  de  Navarre,  mettent  en  avant  le  droit  de  déposer  les  rois  et 
de  tuer  les  tyrans;  les  Catholiques,  au  contraire,  repoussent  tout  principe 
autre  que  la  légitimité.  A  la  mort  de  Henri  III,  le  roi  de  Xavarre  se  trou- 
vant, par  droit  d'hérédité,  ap[)elé  à  lui  succéder,  ce  sont  les  Catholiques  qui 
contestent  ce  principe  de  la  légitimité  qu'a  pour  lui  Henri  IV  et  qui  reven- 
diquent le  droit  de  passer  outre  et  de  lui  substituer  un  prétendant  de  leur 
choix;  chaque  parti  se  trouvait  ainsi  avoir  changé  de  thèse  et  adopté  celle 
de  SOS  adversaires. 

35,  Chrestienne.  —  Ç.-à-d.  il  n'est  point  d'hostilités  qui  se  prêtent  mieux  à 
la  satisfaction  de  nos  passions  que  celles  qui  ont  pour  cause  l'intérêt  de  la 
religion. 

37,  Detraction.  —  Larcin,  du  latin  detraclio  qui  a  même  signification. 
122, 

1,  Vices.  — Sous-entendu  :  et,  au  contraire. 

2,  Dict.  —  C.-à-d.  frauder  la  dîme,  en  ne  donnant  que  de  la  paille  sans 


Fb.474  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

grain;  Dieu  est  mis  ici  pour  les  ministres  du  culte,  par  un  toui-  d'expres- 
sion dont  l'usage  est  aussi  ancien  que  le  monde.  Coste.  —  De  ce  dicton 
qui  signifie  se  moquer,  aussi  bien  que  frustrer  quelqu'un  de  ce  qui  lui 
est  dû,  on  donne  encore  une  autre  explication,  cela  voudrait  dire  :  «  Faire 
la  barbe  avec  un  bouchon  de  paille.  »  P.wen.  —  Rabelais,  1,  11,  l'emploie 
avec  une  variante  :  «  Gargantua  faisoit  gerbe  de  feurre  au.x  Dieux.  • 

14,  Bigue.  —  C.-à-d.  voulut  échanger  l'un  pour  l'autre.  —  Bigue  signifiait 
échanger,  troquer. 

17,  Orpheus.  —  Diogène  Laerce,  VI,  4.  —  Les  initiés  composaient  une  secte 
dissidente  des  philosophes  pythagoriciens;  ils  avaient  en  vue  la  pratique 
de  la  vertu,  croyaient  à  l'expiation  des  crimes  dans  l'autre  monde  et  s'abs- 
tenaient de  manger  la  chair  des  animaux;  ils  prétendaient  avoir  reçu 
d'Orphée  les  dogmes  qu'ils  professaient. 

26,  Prestre.  —  Diooène  Laerce,  VI,  39. 

35,  lesus-Christ.  —  S.  Paul,  dans  son  ÉpUre  aux  Philipp.,  1,  23. 

36,  Donnait.  —  Cicéron,  Tusc,  I,  34;  Callimaque,  Epigr.,  24;  Ovide,  m  Ibin, 
V.  495;  S.  AuGUSTi.N,  De  Civil.  Dei,  I,  22. 

124, 

1.  Alemans.  —  Voltaire,  dans  Zaïre,  exprime  la  même  idée  : 

«  Je  le  vois  trop  :  les  soins  qu'on  prend  de  notre  enfance, 
Forment  nos  sentiments,  nos  mœurs,  notre  croyance. 
J'eusse  été,  près  du  Gange,  esclave  des  faux  dieux, 
Chrétienne  dans  Paris,  musulmane  en  ces  lieux: 
]>'instruction  tait  tout;  et  la  main  de  nos  pères 
Grave  en  nos  faibles  cœurs  ces  premiers  caractères.  • 

9,  ^e  ramené.  —  Var.  des  éd.  ant.  à  88  :  vne  extrême  douleur  ou  voisinage 
de  la  mort,  ne  ramènent  par  force... 

13,  Plato.  —  Lois,  au  commencement  du  liv.  X.  passage  déjà  cité  dans  les 
Essais,  I,  580. 

17,  Dit-il.  —  Plato.n,  République,  I. 

23,  Loix.  —  C'est  le  résultat  de  ce  que  dit  Platox  sur  la  fin  du  second  livre 
au  commencement  du  troisième  de  sa  République. 

29,  Bion.  —  Diogène  Laerce,  IV,  4.  —  Cette  réflexion  même,  si  juste  et  si  na- 
turelle, est  de  Diogène  Laerce,  qui  d'ordinaire  s'abstient  de  tout  commen- 
taire. 

31,  Force.  —  Les  sectateurs  d'Aristippe  et  d'Épicure  fondaient  la  religion 
sur  la  crainte;  la  loi,  sur  l'utilité;  la  justice,  sur  la  coutume. 

126, 

29,  Luy-mesmes.  —  S.  Paul,  Épilre  aux  Romains.  —  C'est  Dieu  qui  est  pré- 
senté comme  tenant  ce  langage  parce  que  l'apotre  est  considéré  comme 
pai-lant  en  son  nom. 

32,  Facteur.  —  «  Tout  ainsi  que  par  ce  peu  de  lumière  que  nous  auons  la 
nuict,  nous  imaginons  la  lumière  du  soleil  qui  est  esloignée  de  nous;  de 
inesme,  par  l'estre  du  monde  que  nous  connoissons,  nous  argumentons  l'es- 
tre  de  Dieu,  qui  nous  est  caché...  »  R.  Sebond,  Théologie  naturelle,  24,  tra- 
duction de  Montaigne. 

128, 

4,  Œuures.  —  Dans  VÉpitre  aux  Romains.  —  S.  Paul,  surnommé  l'apôtre  des 
Gentils  parce  qu'il  a  évangélisé  en  dehors  de  la  Judée,  n'est  ni  du  nombre 
des  douze  apôtres  proprement  dits,  quoiqu'il  soit  toujours  com  pté  comme 
tel,  ni  même  des  disciples  de  Jésus-Christ.  Né  de  parents  juifs,  il  se  nom- 
mait Saul  et  fut  d'abord  un  persécuteur  violent  du  christianisme  ;  mais, 
sur  le  chemin  de  Damas,  il  eut  une  vision,  se  convertit,  devint  un  des  plus 
ardents  propagateurs  de  la  religion  nouvelle  et  finit  par  obtenir  le  martyre 
à  Rome.  On  a  de  lui  les  Actes  des  apôtres  qui  sont  sa  propre  histoire  et 
quatorze  lettres  aux  Églises  avec  lesquelles  il  était  en  relation,  elles  se 
distinguent  par  la  logique  et  la  sagesse  des  principes  qu'il  expose.  — 
Godeau,  évêque  de  Grasse  (1605-1672),  dit  de  lui  : 


NOTES.         LIV.  Il,  Cil.  XII.         VOL.  II,  PAG.  128.         Fb.47o 

«  Et  la  grâce  en  son  cœur  ayant  fait  des  miracles, 
Sa  bouche  expliquera  les  plus  sacrés  oracles.  » 

0,  Leges.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  Si  mon  imprimeur  (de  la  Théologie  naturelle) 
estait  si  amoureux  de  ces  préfaces  guettées  et  empruntées,  de  quoy  par  i hu- 
meur de  ce  siècle  il  n'est  pas  liure  dii  bonne  maison,  s'il  n'en  a  le  front  garny, 
il  se  deuroit  seruir  de  tels  vers,  que  ceux  cy  qui  sont  de  meilleure  et  plus  an- 
cienne race  que  ceux  qu'il  est  allé  planter. 

130, 

3,  Couche.  —  Ou  incline,  on  penche  en  faveur.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  Celui 

qui  est  d'ailleurs  imbu  d'vne  créance  reçoit  bien  plus  aisément  les  discours  qui 

lui  seruoit,  que  ne  fait  celuy  qui  est  abreuué  d'vne  opinion  contraire,  comme 

font  ces  gens  icy,  au  lieu  de  :  «  On  couche...  en  soy  ». 

il,  'EayTÔv.  —  cette  pensée  est  d'HiiRODOTE,  qui  la  met  dans  la  bouche  d'Arta- 

ban  cherchant  à  détourner  Xerxès  de  son  expédition  contre  les  Grecs. 
21,  Platon.  —  Dans  le  Timée. 

d'2,  S.  Augustin.  —  De  civitale  Dei,  XXI,  5.  —  Le  premier  îles  Pères  de  l'É- 
glise. Eut  une  jeunesse  fort  dissipée,  se  convertit,  fut  baptisé  à  Si  ans  et 
devint,  par  la  parole  et  la  plume,  un  des  plus  ardents  et  solides  défenseurs 
du  christianisme.  Ses  principaux  ouviages  sont:  La  Cité  de  Dieu,  son  chef- 
d'œuvre,  admirable  peintui-e  de  la  religion  chrétienne;  ses  Confessions,  où  il 
fait  l'histoire  de  ses  eri-eurs  et  de  sa  conversion,  et  le  Traité  sur  la  grave 
et  le  libre  arbitre;  on  a  encore  de  lui  nombre  de  sermons,  de  lettres  et  d'é- 
crits contre  les  hérétiques  de  son  temps. 
132, 

3,  Philosophie.  —  S.  Paul,  .4ux  Colossiens,  IL  tS. 

5,  Dieu.  —  S.  Paul,  Aux  Corinthiens,  I,  3, 19. 

5,  Vanitez.  —  Pensée  tirée  de  VEcclésiaste  et  de  Pline. 

7,  Sçauoir.  —  Pensée  tirée  de  Lucrèce  et  de  VÉpitre  de  S.  Paul  aux  Corin- 
thiens. 

8,  Trompe.  —  Celte  pensée  se  trouve  également  dans  Lucrèce  et  dans 
S.  Paul,  Épltre  aux  Galates. 

134, 

1,  Cestuy-la.  —  Le  philosophe  stoïcien  Balbus  qui,  dans  Cicéron,  s'exprime 
comme  le  porte  la  citation  qui  suit. 

136, 

tj,  Mouuements.  —  On  croyait  encore  généralement  alors  que  le  soleil  tour- 
nait autour  de  la  terre,  etc. 
13,  Plutarque.  —  Plutarque  dit  bien  que,  peut-être,  la  Lune  est  habitée,  que 
ses  habitants  doivent  y  être  plus  dispos,  plus  légers  au  physique,  plus  fa- 
ciles à  nourrir  que  nous,  mais  il  ne  parle  pas  de  colonies. 
19,  Quant  et  quant.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  dict  Pline. 

23,  Trois.  —  C.-à-d.  avec  les  animaux  vivant  sur  terre,  et,  par  cela  même, 
^de  pire  condition  que  ceux  des  deux  autres  espèces  :  les  oiseaux  qui  volent 
dans  les  airs,  et  les  poissons  qui  nagent  dans  les  eaux. 
34,  D'elle.  —  Cette  pensée  a  été  traduite  en  vers  par  Senecé  : 

•  Mais  sait-on,  dit  Montaigne,  Si  le  chat  n'a  pas  eu  tète 

Quand  avec  son  chat  d'Espagne  Que  l'homme  est  une  bête 

Un  homme  prend  ses  ébats,  Propre  à  divertir  les  chats.  » 

Observons,  en  passant,  que  cette  rime,  dans  les  deux  premiers  vers,  de 
.Montaigne  avec  Espagne,  montre  bien  comment  encore  à  cette  époque 
(1717)  on  prononçait  le  nom  de  l'auteur  des  Essais.  —  A  propos  de  chat, 
Mahomet  en  avait  un  qu'il  aimait  au  point  qu'un  jour,  dit-on,  cet  animal 
dormant  sur  un  pan  de  son  caftan,  et  le  moment  de  la  prière  étant  venu, 
le  prophète  coupa  son  vêtement,  afin  de  ne  pas  troubler  le  sommeil  de  l'a- 
nimal. 


138. 


Saturne.  —  Dans  la  Politique.  —  Chassé  du  ciel  par  Jupiter,  et  accueilli 


Fb.476  ESSAIS  UE  MONTAIGNE. 

sur  terre  par  Janus,  roi  du  Latium,  auquel  il  succéda,  Satui-ne  apprit  aux 
Latins  l'art  des  semailles,  fit  fleurir  la  paix,  l'abondance,  la  justice,  et  son 
règne  fut  l'âge  d'or  pour  l'Italie.  Mylh. 

18,  Troglodytes.  —  Ancien  peuple  de  l'Afrique  qui  vivait  dans  des  cavernes 
ou  dans  des  trous  creusés  dans  la  terre.  Mais,  dans  bien  des  contrées, 
voire  même  en  France,  existent  des  vestiges  de  pareilles  habitations  éta- 
blies dans  des  anfractuosités  naturelles,  grossièrement  aménagées  et  qui 
remontent  aux  temps  préhistoriques;  on  a  qualifié  de  ce  môme  nom  de 
Troglodytes,  ceux  dont  elles  ont  été  la  demeure. 

20,  Thyaneus.  —  Philostrate,  Apollonius  de  Thyane,  1,  20. 

20,  Melampus.  —  Apollodore,  I,  9,  11. 

.20,  Tirasias.  — Apollodore,  III,  6,  7,  etc. 

22,  Roy.  —  Dans  l'intérieur  de  l'Afrique,  dit  Pline,  Hist.  7iat.,  IV,  30,  au 
delà  de  la  Nubie,  se  trouvent  les  Ptoemphanes,  qui  ont  pour  roi  un  chien, 
dont  ils  consultent  les  divers  mouvements.  —  Cette  erreur  ne  proviendrait- 
elle  pas  de  la  similitude  du  mot  latin  canis  (chien)  avec  les  mots  qui  dans 
plusieurs  langues  signilient  le  roi  ou  seigneur  comme,  par  e.xemple,  Khan 
chez  les  Tartares,  King  en  anglais,  Kœnig  en  Allemagne?  Payes. 

24,  Nous.  —  «  Les  enfants  des  hommes  sont  en  eux-mêmes  semblables  aux 
bêtes,  ils  ont  même  destinée;  l'homme  n'a  pas  d'avantage  sur  la  bête.  » 
Ecclésiasle,  III. 

25,  Intelligence.  —  Les  éd.  ant.  aj.  -.de  leurs  mouuemens  et. 
34,  Qu'il  y  a.  —  Add.  des  éd.  ant.  à  88  :  de  la  menasse  et. 

36,  Voix.  —  C.-à-d.  qui  ne  profèrent  aucun  son. 
140, 

27,  Cestuy-cy.  —  Ce  langage  par  gestes. 

32,  Langue.  —  Aux  extrémités  de  l'Ethiopie,  dit  Pline,  VI,  naissent  des  ani- 
maux et  des  hommes  de  formes  monstrueuses;  l'excessive  mobilité  des 
feux  solaires  varie  les  corps  et  les  multiplie  à  l'infini;  et,  parmi  ces  phé- 
nomènes, il  en  est  certains  qui  n'ont  d'autre  langage  que  les  gestes  et  les 
signes. 

37,  Mot.  —  Plutarque,  Apophlh.  des  Lacédémoniens. 
142, 

6,  Prudence.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  prouidence. 

39,  Par  art.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  jmr  industrie. 
144, 

33,  Vniforme.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  te  faiblesse  de  nosire  naissance  se  trouue 
à  peu  près  en  la  naissance  des  autres  créatures. 

40,  Souffrir.  —  Les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux  aj.  :  le  visage,  les  pieds,  les 
mains,  les  ïambes,  les  espaules,  la  teste,  selon  que  Vvsage  nous  y  conuie. 

146. 

3,  Nombril.  —  Louis  XIII  avait  une  profonde  répugnance  pour  cette  exa- 
gération qui  se  maintint  jusqu'au  milieu  de  xviii"  siècle;  on  cite  de  lui  à 
cet  égard  plusieurs  anecdotes.  —  Voulant,  un  jour,  s'emparer  d'une  lettre 
qu'une  dame  de  sa  cour  avait  cachée  dans  son  sein  et  qu'il  avait  intérêt  à 
connaître,  il  alla  l'y  chercher  avec  des  pincettes.  —  Une  autre  fois,  se  trou- 
vant à  table  et  voyant  s'approcher  de  lui  une  femme  habillée  et  découverte 
suivant  cette  mode,  il  retint  une  gorgée  de  vin  dans  la  bouche  et  la  lui 
lança  dans  le  sein,  ce  qui  la  fit  se  retirer  toute  honteuse. 
6,  Plier.  —  Plutarque,  Lycurgue,  13. 

21,  Labourage.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  sans  aucune  nostre  industrie. 

22,  Planté.  —  En  abondance.  —  Ce  mot  dérive  de  plénité,  qui  vient  du  latin 
plenitas  qui  a  ce  même  sens  :  saturation  complète,  plénitude. 

148, 

6,  Icbneumon.  —  Appelé  aussi  mangouste  et  rat  de  Pharaon  ;  carnassier 
de  la  grosseur  d'un  chat  et  de  la  forme  de  la  martre  ;  les  Égyptiens  le  révé- 
raient parce  qu'il  détruit  les  œufs  de  crocodile. 

7,  Crocodile.  —  Appelé  aussi  alligator,  reptile  de  l'ordre  des  sauriens,  am- 
phibie à  quatre  pattes  de  la  forme  d'un  énorme  lézard,  mais  atteignant 


NOTES.         LIV.  Il,  Cil.  XII.         VOL.  II,  P.\G.   148.         Fb.477 

jusqu'à  3  et  4  mètres  de  longueur;  se  rencontre  sur  les  bords  de  grands 
cours  d'eau  de  la  zone  tropicale  en  Afrique,  en  Asie  et  en  Amérique;  le 
crocodile  était  à  Thèbes,  en  Egypte,  l'objet  d'une  grande  vénération. 

13,  Faire.  —  Ce  l'ait  s'est  renconti-é  en  Allemagne  (Gaspard  Hauser),  en 
France  (le  sauvage  de  l'Aveyron),  et  on  pourrait  en  citer  d'autres.  — 
Gaspard  Hauser  qui,  de  1828  à  1833,  excita  vivement  l'attention  en  Bavière, 
fut  découvert  à  l'âge  apparent  de  15  à  16  ans;  il  semblait  n'avoir  jamais 
rien  vu.  rien, appris,  être  absolument  étranger  à  la  vie  commune;  il  n'a- 
vait aucune  idée  du  temps,  des  distances,  était  presque  inconscient  de  ses 
mouvements.  —  Le  sauvage  de  l'Aveyron,  enfant  trouvé  en  1800  dans  les 
forêts  de  cette  région,  pouvait  avoir  une  dizaine  d'années,  il  se  trouvait 
physiquement  et  moralement  en  même  état  que  Gaspard  Hauser;  il  fut 
placé  à  l'institution  des  sourds  et  muets,  où  plusieurs  années  de  soins 
assidus  parvinrent  à  éveiller,  mais  bien  faiblement,  son  intelligence  et  le 

,  langage. 

22,  Oyseaux.  —  C.-à-d.  ne  conversons-nous  pas  avec  eux  dans  un  autre  lan- 
gage et  en  employant  d'autres  termes  qu'avec  les  oiseaux. 

27,  Lactance.  — Insl.  div.,  111,  10. 

28,  Encore.  —  Quant  au  rire,  cela  se  rencontre  parfois  chez  le  chien  ;  on  en 
a  vu  riant  comme  fait  une  personne,  sans  éclat  de  voix  cependant.  Pour 
ce  qui  est  de  la  parole  proprement  dite,  il  en  est  qui  pensent  que  les  ani- 
maux, ou  au  moins  certains  d'entre  eux,  la  possèdent;  toujours  est-il  que 
jusqu'ici  on  n'en  trouve  que  trois  qui,  d'après  la  Bible  et  la  fable,  aient  usé 
de  la  même  langue  que  l'homme  :  l'ànesse  de  Balaam,  le  berger  de  Phryxus 
et  le  cheval  d'Achille.  —  Balaam,  dit  la  Bible,  était  un  prophète  madia- 
nite  ;  l'ànesse  qu'il  montait,  effrayée  par  la  vue  d'un  ange,  demeuré  invi- 
sible à  Balaam,  ayant  à  trois  reprises  fait  un  écart,  et  son  maître  la  frap- 
pant, elle  finit  par  protester  en  paroles  très  nettes;  et  ses  yeux  se  dessillant 
alors,  Balaam  aperçut  l'ange  et  reconnut  que  tout  cela  s'était  accompli, 
par  la  volonté  de  Dieu.  —  Phryxus,  fils  du  roi  de  Thèbes,  fuyant  une  accu- 
sation d'inceste,  avait  traversé  sur  un  bélier  à  toison  d'or  le  détroit  qui 
sépare  l'Europe  de  l'Asie,  et  abordant  sur  la  côte  opposée,  s'y  était  endormi. 
Les  habitants  le  découvrirent  et  se  disposaient  à  lui  faire  un  mauvais 
parti,  lorsque  son  bélier  le  réveilla  et  lui  apprit  avec  une  voix  humaine  le 
danger  auquel  il  était  exposé.  Mylh.  —  Dans  V Iliade,  lorsque  Achille  s'é- 
lance pour  venger  Patrocle,  Xanthe,  un  de  ses  chevaux,  avec  la  permission 
de  Junon,  lui  prédit  sa  mort  prochaine. 

30,  Aristote.  —  Hisl.  des  animaux,  IV,  9. 
37,  Deuination.  —  Conjecture. 

150, 

21,  Desespoir.  —  «  L'homme  n'a  qu'un  privilège,  celui  de  l'imagination,  et 
il  le  paie  cher.  ■>  Sainte-Beuve.  —  Est-il  prouvé  que  les  animaux  n'ont  pas 
d'imagination? 

31,  Meilleure.  —  Cette  question  de  l'àme  des  bêtes,  leur  connaissance,  leur 
raisonnement,  discutée  à  toutes  les  époques,  a  donné  lieu  à  de  nombreux 
ouvrages  où  sont  cités  à  l'appui  d'innombrables  exemples  dont  quelques- 
uns  sont  reproduits  dans  les  pages  suivantes.  Montaigne,  dans  cette  con- 
troverse, semble  pencher  pour  l'affirmative,  au  point  que  Bayle  prétend 
que  son  intention  a  été  que  l'apologie  de  Raymond  Sebond  fut  en  partie 
celle  des  bêtes.  Les  auteurs  qui  ont  agité  ce  problème,  inclinant  soit  dans 

,     un  sens,  soit  dans  un  autre,  abondent  aussi  bien  dans  l'antiquité  que  de 
nos  jours;  parmi  eux  :  Aristote,  PUne,  Descartes,  Leibnitz,  Locke,  Tous- 
senel. 
152, 

17,  S^auancer.  —  Plutaiique,  De  l'Industrie  des  animaux,  12. 

22,  Paix.  —  Argumentation  souvent  citée  en  logique  et  connue  sous  le  nom 
de  «  Sorite  du  renard  »  ;  sorite  signifie  une  série  de  propositions  si  bien 
liées  entre  elles,  que  la  dernière  est  ou  semble  la  conclusion  naturelle  do 
la  première. 


Fb.478  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

31.  Climacides.  —  Mot  dont  la  signification  est  écliellières.  —  Plutarque, 
Comnienl  un  penf  discerner  le  flatteur  d'avec  raini,  3. 

;J."j.  Concubines.  —  Ce  terme  n'éveillait  dans  l'antiquité  aucune  idée  d'im- 
moralité; c'était  une  femme  au  même  titre  que  l'épouse  dite  légitime, 
mais  de  condition  sociale  inférieure  à  celui  qui  l'épousait. 

36,  Mary.  —  Chacun,  dit  Hérodote,  V,  5,  a  plusieurs  femmes;  lorsqu'il  vient 
à  mourir,  il  s'élève  entre  elles  de  grandes  contestations  pour  savoir  celli» 
qu'il  aimait  le  mieu.x  ;  ses  amis  s'intéressent  vivement  à  la  dispute.  Celle 
en  faveur  de  qui  on  s'est  prononcé  reçoit  les  éloges  de  l'assistance;  son 
plus  proche  parent  l'immole  ensuite  sur  le  tombeau  de  son  mari  et  on 
l'enterre  avec  lui;  les  autres  femmes  sont  très  affligées  de  cette  préférence, 
qui  est  pour  elles  un  très  grand  affront.  —  Voii-  aussi  Pomponiis  Mêla, 
II,  3,  etc. 
10,  Capitaines.  —  Le  chef  des  Sotiates,  peuple  de  l'Aquitaine  (Gaule),  dit 
César,  De  Bello  Gali.,  III,  22,  était  accompagné  de  600  hommes  dévoués, 
liés  à  lui  par  un  pacte  tel  qu'ils  jouissaient  de  tous  les  biens  de  la  vie  dont 
ce  chef  lui-même  avait  la  jouissance,  mais  par  contre,  s'il  venait  à  périr 
de  mort  violente,  ils  participaient  à  son  sort  et  se  tuaient  de  leurs  propres 
mains:  institution  à  laquelle  certains  font  remonter  l'origine  du  régime 
féodal. 
154, 

5,  Seruice.  —  Pétrone,  SaL,  117. 

15,  Tombe.  —  Hérodote,  IV,  71  et  72. 

23,  Sert.  —  Diogène  Laerce,  VI,  75. 

36,  Partons.  —  Du  verbe  partir,  partager,  diviser  en  plusieurs  parts.  Ce 
mot  vieilli  n'est  plus  d'usage  que  dans  cette  phrase  proverbiale  :  <■  Ils  ont 
toujours  maille  à  i)artir  entn?  eux  »  ;  mais  on  le  retrouve  dans  ses  déri\és  : 
répartir,  répartition,  etc. 

38,  Chasseurs.  —  Pline,  X,  8. 

43,  Colliers.  —  Collets,  lacs  à  prendi-e  des  lièvres,  des  lapins,  etc. 

■14,  Secbe.  —  Plutarque,  De  l'Industrie  des  animaux,  28.  —  La  siche,  ou  seiche, 
mollusque  de  mer,  qui  projette  autour  de  lui  un  liquide  noirâtre,  quand  il 
cherche  à  se  dérober  à  un  ennemi,  liquide  duquel  on  extrait  la  sépia. 
156, 

10,  Sylla.  —  Allusion  à  la  maladie  pédiculaire  dont  il  mourut  (78),  consi'-- 
quence  des  débauches  auxquelles  il  se  livra  toute  sa  vie.  Cette  maladie, 
connue  sous  le  nom  de  phtiriase,  est  très  rare  ;  elle  est  caractérisée  par  la 
génération  rapide  d'une  telle  quantité  de  vermine,  qu'elle  finit  par  ronger 
vivant  le  malheureux  atteint  de  cette  affection.  Le  roi  Hérode,  l'empereur 
Galère  périrent  de  la  sorte,  et  les  premiers  chrétiens  y  virent-  une  punition 
céleste  du  premier  pour  le  massacre  des  innocents,  du  second  pour  la 
persécution  dont  eux-mêmes  furent  l'objet  sous  le  règne  de  Dioclétien  et 
dont  il  avait  été  le  principal  in.stigateur  :  il  s'en  produirait  encore  des 
cas,  particulièrement  chez  les  alcooliques  invétérés.  —  Pascal  a  exprimé 
d'une  façon  analogue  cette  fragilité  de  l'homme  :  «  Cromwell  allait  ra- 
vager toute  la  chrétienté;  la  famille  rojale  était  perdue  et  la  sienne  à 
jamais  puissante,  sans  un  petit  grain  de  sable  qui  se  mit  dans  son  urètre; 
Rome  même  allait  trembler  sous  lui,  mais  ce  petit  gravier  qui  n'était 
rien  ailleurs,  mis  en  cet  endroit,  le  voilà  mort,  sa  famille  abaissée  et  le  roi 
rétabli.  •  Seulement,  Pascal  a  fait  erreur  :  Crom\vell  n'est  pas  mort  de  la 
pierre,  mais  de  la  fièvre. 

11,  Empereur.  —  Du  latin  imperator,  titre  qui  se  décernait,  à  Rome,  aux 
généraux  victorieux;  c'est  le  sens  dans  lequel  il  est  employé  ici. 

15,  Rubarbe.  —  Rhubarbe;  plante  dont  la  racine  est  stomachique  et  purga- 
tive. 

15,  Polypode.  —  Sorte  de  fougère  qui  s'emploie  contre  la  toux. 

17,  Dictame.  —  Plante  aromatique  et  vulnéraire. 

19,  Origanum.  —  Origan:  plante  aromatique  qui  ne  croît  qu'aux  hautes  alti- 
tudes. 


NOTES.         IJV.  H.  (-11.  XII.         VOL.  II,  P.VG.   156.         Fb.4-9 

19,  Dragon.  —  Petit  lézard  inofïeiisif. 

20,  Fenoil.  —  Fenouil  ;  plante  aromatique  et  apéritive. 

21,  Elephans.  —  Le  plus  gros  des  animaux  de  notre  époque;  mammifère  de 
l'ordre  des  pachydermes,  i-cmarquable  par  sa  taille,  ses  défenses  et  sa 
trompe  ;  on  distingue  l'éléphant  d'Afrique  et  celui  d'Asie,  ce  dernier  nota- 
blement plus  grand  que  le  premier.  Dans  l'Inde,  on  emploie  l'éléphant 
comme  bête  de  trait  et  de  somme;  il  y  est  l'objet  d'une  grande  vénéra- 
tion; on  lui  prête  des  vertus  et  des  vices;  dos  mœurs  raisonnées,  jusqu'à 
l'observance  d'un  culte,  celui  du  soleil  et  de  la  lune;  il  vit  en  société.  An- 
ciennement il  était  fort  employé  à  la  guerre  par  certains  peuples  (V.  N.  II, 
50  :  Elephans);  plus  tard  à  Rome,  dans  les  divertissements  publics;  on  en 
cite  de  capables  de  tracer  des  caractères,  d'autres  se  distinguant  dans  la 
danse,  l'acrobatie. 

23,  Porus.  —  Plutarque,  De  Vlnduslrie  des  animaux,  13. 
31,  Chrysippus.  —  Sextus  Empmucus,  Pyrrh.  hypot.,  I,  14. 

31,  A  la  queste...  poursuite.  —  Var.  des  éd.  ant. .:  estant  à  la  suyte  de  son 
mahlre  (lequel  il  a  esgaré  pour  s'estre  endormy  et  ne  l'auoil  vu  partir  du 
logis)  ou  à  ta  queste. 

36,  Ratiocination.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  sans  discours. 
158, 

37,  Plutarque.  —  De  Clnduslrie  des  animaux,  18. 

38,  Père.  —  Vespasien  le  père  de  Titus  et  de  Domitien. 
160. 

8,  Reuenu.  —  Ranimé.  Se  revenir,  du  latin  se  recolligere,  a  cessé  d'être 
pronominal,  et  on  dit  aujourd'hui  :  revenir  d'un  profond  sommeil,  d'un 
évanouissement. 

12,  Languedoc.  —  C'étaient  des  roues  à  chapelet  ou  à  godets,  qu'en  Espagne 
on  nomme  norias,  appellation  qui  est  passée  dans  notre  langue  ;  leur  usage 
est  très  répandu  en  raison  même  de  la  l'usticité  du  système. 

16,  Court.  —  Plutarque,  De  l'Industrie  des  animaux,  20.  —  Les  paysans  ven- 
déens disaient  :  «  îs^os  bœufs  connaissent  le  dimanche  et  ne  veulent  pas 
travailler  ce  jour-là.  » 

20,  Democritus.  —  Plutarque,  De  l'Jnd.  des  anim.,  14. 

22,  Tistre.  —  Vieux  mot  qui  signifie  faire  quelque  ouvrage  de  fil,  de  soie  ou 
de  cheveux. 

24,  Aristote.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  18;  Pline,  Ilist.  nat.,  X,  29. 
;38,  Arrius.  —  Arrien,  Hist.  Indic.,  14.  —  Arrius  est  une  faute  d'impression 

qui  se  trouve  dans  toutes  les  éditions  originales,  qui  devraient  porter  Ar- 
rianus. 
162, 

4,  Apprendre.  —  Plutarque,  DeVhul.  des  anim.,  12. 

7,  Maistres.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  12;  Pline,  Vlll,  3.  —  Le  fait 
est  donne  comme  s'étant  produit  du  temps  de  l'empereur  Domitien;  battu 
pour  n'avoir  pas  bien  exécuté  sa  leçon,  un  de  ces  animaux  fut  vu  la  répé- 
tant de  lui-même,  la  nuit  suivante,  au  clair  de  lune. 

8,  Respondant.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  18. 

23,  Dit.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  12. 

32,  Barbarie.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  12.  —  La  Barbarie,  partie 
septentrionale  de  l'Afrique  depuis  Tripoli  jusqu'au  Maroc,  ainsi  nommée 
au  moyen  âge  des  Berbers,  ses  premiers  habitants,  qui  subsistent  encore 
sous  les  noms  de  Kabyles,  de  Touareg,  absolument  distincts  des  Arabes. 

34,  luba.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  10.  —  Juba  avait  passé  une  grande 
partie  de  sa  jeunesse  à  Rome,  et  s'était  adonné  à  l'étude  de  l'histoire  et  de 
la  nature;  il  a  écrit,  en  grec,  divers  ouvrages  aujourd'hui  perdus. 
164, 

12,  Cendre.  —  Plutarque,  Dé  l'Ind.  des  anim.,  10.  —  Dans  le  même  genre, 
on  cite  encore  ce  trait  d'un  éléphant  qu'un  peintre  voulant  peindre  la 
trompe  élevée,  son  cornac,  pour  le  maintenir  en  retto  position,  feignait  de 


Fb.480  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

lui  jeter  du  pain.  Ennuyé  d'être  ainsi  dupé,  l'animal  remplit  sa  trompe 
d'eau  et,  ne  se  trompant  pas  sur  la  cause  de  la  mauvaise  plaisanterie  qu'on 
lui  faisait,  en  aspergea  le  peintre  et  son  tableau  que  celui-ci  dut  renoncer 
à  terminer.  , 

16,  Elepbans.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  qu'on  y  mesloU. 

21,  Tyrio.  —  Annibal  est  qualifié  de  tyrien  par  le  poète,  comme  étant  de 
Carthago  fondée  elle-même  par  une  colonie  phénicienne  (870). 

IJ9,  Aspreté.  —  C'est  ce  que  plusieurs  peuples  de  l'antiquité  avaient  déjà 
pratiqué.  Pi.ixe,  VIII,  40,  conte  :  «  En  vue  de  la  guerre,  les  Colophoniens 
et  aussi  les  Castabalenses  organisent  des  troupes  de  chiens  qu'ils  font  com- 
battre en  première  ligne. et  qui  jamais  ne  cèdent;  ce  sont  là  des  auxiliaires 
qui  ne  le  cèdent  pas  aux  mercenaires.  »  —  Strabox  dit.  de  son  côté,  que 
les  anciens  Gaulois  se  servaient  à  la  guerre  do  chiens  d'Angleterre  aussi 
bien  que  de  ceux  de  leur  pays.  —  Cet  emploi  s'est  depuis  reproduit  souvent 
en  Amérique  et  en  Afrique,  dans  les  rencontres  d'Européens  avec  des  ad- 
versaires d'autre  race;  il  était  rendu  possible  surtout  par  la  quasi-nudité 
de  ceu.x-ci  et  la  différence  d'odeur  qu'ils  exhalent;  et,  dans  la  chasse  des 
nègres  fugitifs,  du  temps  où  l'esclavage  existait,  il  était  d'usage  courant. 
On  s'est  occupé,  en  ces  dernières  année*,  de  leur  utilisation  dans  la  guerre 
moderne  :  les  expériences  n'ont  pas  été  satisfaisantes;  en  tout  cas,  si  jadis 
il  a  pu  être  question  de  meutes  lâchées  sur  l'ennemi,  leur  action  ne  saurait 
être  aujourd'hui  qu'individuelle  et  fort  restreinte,  par  exemple,  comme 
auxiliaire  d'une  sentinelle  pour  éventer  l'approche  ou  la  présence  de  quel- 
qu'un. —  On  semble  devoir  éprouver  moins  de  déconvenue  dans  l'essai  que 
l'on  tente  aujourd'hui  de  les  adjoindre  à  la  police,  dans  ses  rondes  de  nuit; 
leur  concours  parait  devoir  être  précieux  contre  ces  rôdeurs  et  assassins 
dont  le  nombre  et  l'audace  vont  croissant  dans  des  proportions  excessives 

^    dans  les  grandes  villes  et  leurs  banlieues,  et  dont  on  n'aura  raison  que  par  lo 
rétablissement  des  peines  corporelles. 
166, 

3,  Passé.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  Xous  viuons,  et  eux  et  nous,  sous  même 
tact,  et  humons  vn  m£sme  air;  il  y  a,  sauf  le  plus  et  le  moiiis,  entre  nou^, 
vne  perpétuelle  ressemblance,  au  lieu  de  :  «  C'est  vne...  le  pas.sé  •  (lig.  I  à  3). 

20,  Murène.  —  Pllt.-vrque,  De  l'Ind.  des  anim.,  24.  —  La  murène  est  un  poisson 
de  mer  qui  ressemble  à  l'anguille;  il  était  fort  estimé  des  anciens  Romains 
qui  en  conservaient  dans  des  viviers. 

22,  Aretbuse.  —  Les  eaux  de  cette  source  passaient  pour  conserver  toute 
leur  pureté  à  travers  les  eaux  amères  et  fangeuses  dans  lesquelles  elles 
vont  se  perdre.  —  L'éd.  de  80  aj.  ici  :  et  d'autres  poissons. 

28,  Religion.  —  Pline,  VIII,  1.  —  Démocrite,  Xénocrate  et  plusieurs  autres 
philosophes  dans  l'antiquité  ont  accordé  une  religion  aux  animaux. 

35,  Part.  —  C.-à-d.  nous  ne  pouvons  prendre  ni  en  bonne  ni  en  mauvaise 
part  les  actions  dont  les  mobiles  nous  sont  absolument  inconnus. 

38,  Vid.  —  Pi.LTARQUE,  De  Vlnd.  des  anim.,  12. 

39,  Fourmis.  —  Fourmi,  aujourd'hui  féminin,  était  autrefois  masculin. 
168, 

9,  Par  là.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  (encore  qu'à  son  iugement  les  testes  soient 
incapables  de  raison). 

17,  Nauale.  —  Bataille  d'Actium  (auj.  Arta),  sur  la  côte  orientale  de  la  mer 
Ionienne;  bataille  gagnée  par  Agrippa,  qui,  en  donnant  la  supériorité  à 
Octave  (devenu  depuis  l'empereur  Auguste)  sur  Antoine  son  rival,  mit  lin 
de  fait  à  la  république  romaine  (31). 

29,  Dehors.  —  Pline,  XXXII,  I.  —  Rémora  signifie  en  latin  retardement, 
obstacle.  —  Le  rémora  est  un  petit  poisson  qui  s'attache  aux  vaisseaux,  aux 
rochers,  quelquefois  à  d'autres  poissons;  mais  qu'il  puisse  retarder  la 
marche  même  d'une  simple  barque,  et  a  fortiori  l'arrêter,  est  pure  fable.  — 
Les  anciens  lui  attribuaient  du  reste  bien  d'autres  propriétés  :  il  servait  à 
composer  des  poisons  capables  d'amortir  et  d'éteindre  les  feux  de  l'amour, 
d'arrêter  l'action  de  la  justice,  de  prévenir  les  accidents  chez  l(^s  femmes 


NOTES.        LIV.  H,  Cil.  XII.        VOL.  II,  PAG.  168.         Fb.481 

enceintes;  conservé  dans  du  sel,  il  avait  pouvoir  de  retirer  du  fond  d'un 
puits  l'or  qui  pouvait  y  être  tombé.  Quant  à  sa  propriété  capitale  d'arrêter 
la  marche  d'un  bateau,  il  la  partageait  avec  cette  coquille  du  genre  porce- 
laine, du  nom  de  conque  de  Vénus,  qui  lui  aurait  été  donné  en  mémoire  du 
fait  suivant  :  Périandre,  tyran  de  Corinthe,  ayant  envoyé  un  navire  portant 
l'ordre  de  mutiler,  en  vue  de  les  rendre  impropres  à  la  reproduction,  trois 
cents  enfants  nobles  de  Corcyre,  un  grand  nombre  de  ces  coquillages  s'at- 
tachèrent à  la  carène  du  vaisseau  qui  ne  put  avancer  malgré  toute  la  fureur 
du  vent. 

31,  Tirer.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  15. 

35,  Assis.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  28. 
170, 

6,  Nous.  —  Toute  cette  partie  de  l'apologie  de  Sebond,  dans  laquelle  Mon- 
taigne a  exalté  les  animaux  comparés  à  l'homme,  et  qui  a  eu  pour  objet 
de  rabaisser  ce  dernier  et  de  lui  faire  sentir  la  débilité  de  sa  nature  et  le 
ridicule  de  son  orgueil,  a  été  approuvée  par  Pascal  qui  a  soutenu  la  même 
thèse;  Bossuet,  au  contraire,  l'a  réfutée.  Dans  son  troisième  sermon  pour 
la  Toussaint,  prêché  devant  le  roi,  en  16G9,  après  avoir  nommé  Montaigne, 
il  l'apostrophe  ainsi  :  «  Mais  dites-moi,  subtil  philosophe,  qui  vous  riez  si 
finement  de  l'homme,  parce  qu'il  s'imagine  être  quelque  chose,  comptez- 
vous  donc  pour  rien  de  connaître  Dieu?  en  connaître  le  principe,  adorer 
son  éternité,  admirer  sa  toute-puissance,  louer  sa  sagesse,  s'abandonner  à 
sa  Providence,  obéir  à  sa  volonté,  n'est-ce  là  rien  qui  nous  distingue  des 
bêtes?  »  C'est  là  une  belle  période  oratoire  mais  qui,  au  fond,  n'est  qu'une 
manifestation  de  plus  de  l'immense  orgueil  de  l'homme  uniquement  ctayée 
sur  le  magnifique  langage  propre  à  Bossuet,  qui  en  outre  a  le  tort  de 
prendre  ainsi  de  la  sorte  Montaigne  à  partie  comme  entaché  d'athéisme, 
rien  dans  son  livre  ni  dans  sa  vie  ne  l'y  autorisant,  -r-  Cicéron,  beaucoup 
plus  rationnel,  concilie  ainsi,  dans  les  Tusculanes,  ces  opinions  si  diver- 
gentes :  «  Toutes  les  âmes  renferment  je  ne  sais  quoi  de  mou,  de  lâche,  de 
bas,  d'énervé,  de  languissant:  s'il  n'y  avait  que  cela  en  lui,  rien  ne  serait 
plus  hideux  que  l'homme;  mais,  en  même  temps,  il  s'y  trouve  bien  à  propos 
cette  maîtresse,  cette  reine  absolue,  la  raison,  qui,  par  les  efforts  qu'elle  a 
d'elle-même  le  pouvoir  de  faire,  se  perfectionne  et  devient  la  suprême  vertu. 
Or,  pour  être  vraiment  homme,  il  faut  lui  donner  pleine  autorité  sur  celte 
autre  partie  de  l'àme  dont  le  devoir  est  d'obéir.  »  Dans  le  même  ordre 
d'idées,  Cicéron  écrit  ailleurs  :  •  Quand  on  a  dit  à  l'homme  :  Connais-toi 
toi-même,  ce  n'était  pas  seulement  pour  rabaisser  son  orgueil,  c'était  aussi 
pour  lui  faire  sentir  ce  qu'il  vaut.  » 
8,  Oyseaux.  —  Sextus  Empiricus,  Pyrr.  hypof.,  I,  14. 

IG,  Torpille.  —  Poisson  du  genre  de  la  raie,  qui  présente  la  propriété  d'être 
une  source  d'électricité,  dont  la  décharge  engourdit  qui  la  touche,  et  se 
transmet  dans  l'eau,  en  raison  de  la  conductibihté  de  ce  liquide,  à  tout 
corps  à  distance  suffisamment  courte;  de  là  l'appellation  donnée  à  l'engin 
de  guerre  de  ce  nom,  destiné  à  couler  les  navires  ennemis. 

38,  Nostre.  — -  Les  éd.  ant.  aj.  :  Car  à  nos  enfans  il  est  certain  que  bien  auant 
en  l'aage,  nous  ny  découurons  rien  sauf  la  forme  corporelle,  par  où  nous  en 
puissions  faire  triage. 
172, 

G,  Beste.  —  Boerhaave,  médecin  célèbre  du  xvni'  siècle,  laissa  en  mourant 
un  gros  registre,  dans  lequel  on  comptait  trouver  de  précieux  renseigne- 
ments sur  son  art;  on  y  lut  seulement  ce  conseil,  aphorisme  populaire  dont 
l'origine  se  perd  dans  la  nuit  des  temps  :  «  Tenez-vous  la  tête  fraîche,  le 
ventre  libre,  les  pieds  chauds,  iît  moquez-vous  des  médecins.  »  Payen. 

10,  Ef factuelle.  —  Add.  des  éd.  ivnt.  :  et  plus  naturelle. 

30,  Hyrcanus.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  13. 

33,  Pyrrhus.  —  id.,  ibid. 
174. 

15,  Jour.  —  S'  Pierre,  dit-on,  à  un  moment  de  son  existence,  ne  mangeait 

essais  de  MONTAIGNE.   —  T.    IV.  31 


Fb.482  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

que  des  olives,  et  même  que  des  mauves  d'après  S'  Grégoire  de  Nazianze  ; 
mais  avec,  il  mangeait  du  pain.  Payen. 

25,  Saisissant.  —  La  présence  d'étrangers,  même  en  petit  nombre,  suffit  à 
altérer  l'àme  d'un  peuple.  Ce  fut  rintiltration  pacifique  des  Barbares,  bien 
plus  que  leurs  invasions  guerrières,  qui  amenèrent  la  transformation  de  la 
civilisation  romaine;  et  c'est  là  un  danger  pour  les  Etats-Unis  qu'envahit 
l'émigration  étrangère,  aujourd'hui  presque  entièrement  composée  d'élé- 
ments inférieurs;  de  1880  à  1890,  ils  ont  reçu  près  de  6.000.000  d'émigrants. 
—  11  en  est  de  même  de  la  France,  pays  riche  dont  la  population  ne  s'ac- 
croît plus  (l'excédent  des  naissances  sur  les  décès  n'a  été  en  1905  que  de  un 
sur  mille),  entouré  de  pays  pauvres  dont  la  population  s'accroît  constam- 
ment et  dont  les  tendances  à  l'émigration  sont  favorisées  par  les  exigences 
croissantes  de  nos  ouvriers  qui  les  rendent  nécessaires  pour  les  besoins  de 
l'agriculture  et  de  l'industrie.  Ils  n'étaient  pas  400.000,  il  y  a  cinquante  ans; 
ils  dépassent  aujourd'hui  un  million  et  demi  et  arrivent  en  rangs  chaque  jour 
plus  pressés.  —  Parmi  les  moyens  préconisés  pour  ralentir  ce  mouvement, 
sont  :  le  service  dans  la  légion  étrangère  pour  ceux  âgés  de  moins  de  vingt- 
cinq  ans  et  ayant  deux  ans  de  présence  ;  une  taxe  militaire  pour  ceux  plus 
âgés;  suppression  à  peu  près  absolue  de  la  naturalisation;  impôt  du  quart 
des  revenus  et  des  salaires  pour  tous  les  individus  d'origine  étrangère,  natura- 
lisés ou  non,  établis  en  France  depuis  moins  de  cinquante  ans  (G.  Lebon). 

26,  Sont.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  à  la  vérité. 

176, 

2,  Tettins.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  amm.,  17.  —  Les  éléphants  semblent 
prêter  volontiers  à  des  histoires  de  ce  genre  :  Jijba  en  mentionnait  un  qui 
aimait  une  marchande  de  parfums  et  lui  versait  dans  le  sein  les  pièces  de 
monnaie  qu'il  recevait;  on  en  cite  un  autre  qui,  passionné  pour  un  jeune 
syracusain  de  l'armée  de  Ptolémée,  refusait  de  manger  chaque  fois  qu'il  ne 
le  voyait  pas. 

4,  Glaucia.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  17. 

6,  Parenté.  —  Oppien,  Poème  de  la  chasse,  I,  236.  —  Varron  dit  :  «  Il  s'est 
produit  à  cet  égard  un  fait  incroyable.  On  vpulait  faire  saillir  à  un  cheval 
la  jument  de  laquelle  il  était  né;  ne  pouvant  l'y  amener,  on  lui  couvrit  les 
yeux;  quand,  après  la  monte,  on  les  lui  découvrit,  il  se  précipita  contre  un 
mur  et  se  tua  net  »  (V.  N.  I,  634  :  Desdaigner). 
22,  Finesse.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  15;  Elien,  Hist.  des  anim.,  V^ll, 
42.  —  La  Fontaine  a  traité  ce  sujet  à  peu  près  de  même  façon  dans  sa  fable 
«  L'àne  chargé  d'épongés  et  l'âne  chargé  de  sel  ». 
178, 

31,  Duello.  —  Il  s'agit  ici  de  la  guerre  de  Troie,  l'événement  le  plus  célèbre 
des  temps  mythologiques.  —  Cette  guerre  causée  par  l'enlèvement  par  Paris, 
prince  troyen,  d'Hélène  femme  de  Ménélas,  roi  de  Sparte,  dura  dix  ans  et 
se  termina  par  la  prise  de  la  ville  et  la  destruction  de  ce  royaume  par  les 
Grecs  confédérés,  sous  les  ordres  d'Agamemnon,  roi  d'Argos  (1200  av.). 
V.  N.  III,  512  :  Pomme. 
35,  Trouble.  —  La  Fontaine,  dans  sa  fable  des  Deux  coqs,  a  exprimé  la  même 
idée  à  sa  façon  : 

«  Deux  coqs  vivaient  en  paix  ;  une  poule  survint, 

Et  voilà  la  guerre  allumée! 
Amour,  tu  perdis  Troie;  et  c'est  de  toi  que  vint 

Cette  querelle  envenimée 
Où  du  sang  des  dieux  même  on  vit  le  Xanthe  teint.  » 

45,  Fntuam.  —  Subjonctif  de  fuluere,  qui  vient  du  grec  çuteuw  (je  plante), 
signifiait  accomplir  l'acte  de  génération  et  uniquement  entre  hommes  et 
femmes;  contrairement  à  pa?rf!ce7?i  qui  s'entendait  du  commerce  avec  les  gar- 
çons, parfaitement  admis  avant  le  christianisme;  mentula,  membre  indica- 
teur du  sexe  masculin,  est  souvent  employé  dans  Martial.  Le  grave  Théo- 
dore de  Bèze,  docteur  du  protestantisme,  s'est  laissé  aller  à  en  faire  le  sujet 
d'une  petite  pièce  qui  ne  manque  pas  d'agrément  (V.  N.  III,  208  :  Fouteau), 


NOTES.        LIV.  II,  CH.  XII.        VOL.  II,  PAG.  ilS.         Fb.483 

49,  Canant.  —  Cette  épigramme  est  de  l'empereur  Auguste;  elle  nous  a  ('ît<^ 
conservée  par  Martial,  qui  en  la  reproduisant  dit,  avec  juste  raison,  que 
ses  propres  vers  n'offrent  rien  de  pire.  Fontenelle  s'est  risqué  à  la  traduire, 
mais,  à  la  différence  du  poète  la,tin,  il  a  transformé  les  quelques  mots,  et 
particulièrement  ceux  relatifs  à  Manias,  qui  constituent  la  satire  la  plus 
mordante  à  l'égard  de  Fulvie  : 

•  Parce  qu'Antoine  est  cliarmé  de  Glaphyre, 
Fulvie  à  ses  beaux  yeux  pense  m'assujetlir. 
Antoine  est  infidèle  :  eh  bien,  serait-ce  à  dire 
Que  des  fautes  d'Antoine  on  me  fera  piUir? 

Qui?  moi!  Que  je  serve  Fulvie! 

Suffit-il  qu'elle  en  ait  envie? 
A  ce  compte,  on  verrait  se  retirer  vers  moi 

Mille  épouses  mal  satisfaites. 
Aime-moi,  me  dit-elle,  ou  combattons?  Mais  quoi, 
F.lle  est  bien  laide!  Allons,  sonnez  trompettes.  » 

180, 

1,  Donné.  —  Marguerite  de  France,  femme  du  roi  de  Navarre,  depuis 
Henri  IV,  à  laquelle,  croit-on,  Montaigne  adressait  cette  apologie  de  Sebond. 
—  Sœur  de  Charles  IX,  son  mariage,  né  de  la  politique,  ne  fut  pas  heureux  : 
mari  et  femme  étaient  aussi  dévergondés  l'un  que  l'autre  :  leur  union  se 
termina  par  une  annulation  prononcée  par  le  Pape  en  1599.  Longtemps 
Marguerite  (Margot  comme  on  l'appelait)  s'y  refusa,  «  ne  voulant  pas,  écri- 
vait-elle en  1593  à  Duplessis,  que  cette  bagasse  (ancienne  prostituée,  —  il 
s'agissait  de  Gabrielle  d'Estrées)  soit  mise  à  sa  place  sur  le  trône  de  France  ». 
Elle  (init  cependant  par  céder,  mais  sa  rivale  n'en  bénéficia  pas  :  la  demande 
d'annulation,  faite  en  février,  fut  prononcée  en  décembre;  dans  l'intervalle, 
en  avril,  la  favorite  était  morte  subitement. 

2,  Mouuements.  —  C.-à-d.  une  armée. 

3,  Lybico.  —  Les  anciens  donnaient  le  nom  de  mer  de  Libye  aux  deux 
golfes  formés  par  la  mer  Méditerranée  sur  les  côtes  de  la  Tripolitaine  et  de 
la  Tunisie  et  qui,  remplis  de  bas-fonds,  étaient  très  redoutés  des  navigateurs. 

9,  Brouée.  —  Brouillard  épais,  brume  qui  souvent  règne  l'hiver,  dans  la 
matinée. 

10,  Terre.  —  Pascal  s'est  inspiré  de  cette  idée  :  «  L'esprit  du  plus  grand 
homme  du  monde  n'est  pas  si  indépendant,  qu'il  ne  soit  sujet  à  être  troublé 
par  le  moindre  tintamarre  qui  se  fait  autour  de  lui  ;  il  ne  faut  pas  le  bruit 
du  canon  pour  empêcher  ses  pensées,  il  ne  faut  que  le  bruit  d'une  girouette 
ou  d'une  poulie.  » 

18,  Poëte.  —  Allusion  aux  abeilles  que  chante  Virgile,  et  aux  essaims  des- 
quels on  se  rend  maître  en  les  enfumant. 

21,  Armes.  —  Plutarque,  Sertorius,  6.  —  Ce  ne  fut  pas  contre  Pompée  que 
Sertorius  se  donna  l'avantage  de  combattre  un  adversaire  aveuglé  par  la 
poussière,  mais  contre  les  Caracitaniens,  peuple  d'Espagne,  qui  s'étaient 
réfugiés  dans  de  profondes  cavernes  creusées  dans  le  roc,  dont  il  parvint  à 
les  déloger  en  plaçant  devant  l'entrée  des  tas  de  terre  qu'il  avait  remarqués 
se  réduisant  facilement  en  poussière  qu'un  vent  contraire,  qui  persista 
pendant  deux  jours,  emporta  dans  le  repaire  de  l'ennemi  qui,  suffoqué, 
dut  capituler  (82).  —  Dans  les  guerres  d'Algérie,  le  maréchal  Pelissier, 
.  alors  colonel,  eut  recours  à  un  .procédé  analogue,  pour  avoir  raison  au 
Dahra  (1845)  d'insurgés  réfugiés 'avec  leurs  familles  et  leurs  biens  dans  des 
gorges  inaccessibles.  Il  les  y  enfuma  en  mettant  le  feu  à  des  broussailles 
amoncelées  à  l'entrée;  cinq  cents  périrent. 

21,  Antigonus.  —  Le  fait  s'est  bien  produit  dans  un  combat  entre  Eumène 
et  Antigone  et  où  le  premier  eut  l'avantage;  mais  il  fut  indépendant  de  sa 
volonté  et  profita  également  à  son  adversaire  qui,  grâce  à  cette  même  pous- 
sière produite  par  le  piétinement  des  chevaux  sur  un  sol  sablonneux  et  qui 
obscurcissait  la  vue,  sauva  ses  bagages  des  mains  de  l'ennemi. 


Pb.484  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

21 ,  Crassus.  —  A  la  bataille  de  Carrhes,  en  Mésopotamie  (Asie),  où  les  Romains, 
commandés  par  Crassus,  furent  vaincus  par  les  Parthes  et  perdirent 
30.000  h.  (55);  la  cavalerie  adverse  souleva  des  nuages  si  épais  de  poussière 
que  les  Romains,  sur  lesquels  le  vent  la  faisait  refluer,  ne  pouvaient  ni  se 
voir,  ni  se  parler;  mais  ce  fut  là  un  fait  qui  n'avait  pas  été  prémédité.  — 
Inversement  à  la  grande  bataille  de  Verceil  où  Marins  anéantit  les  Cimbres 
(101),  par  suite  des  mouvements  de  ces  multitudes,  une  poussière  intense 
s'éleva  protégeant  les  Romains  contre  les  efforts  de  leurs  adversaires,  sou- 
tenant leur  courage  en  leur  cachant  la  supériorité  numérique  considérable 
des  ennemis  qui  avaient  encore  ce  désavantage  d'avoir  le  soleil  en  face  et 
d'être  incommodés  par  une  chaleur  (on  était  à  la  fin  de  juillet)  à  laquelle 
ils  n'étaient  pas  habitués.  Plutarque. 

33,  Dire.  —  Le  roi  Emmanuel,  qui  dirigeait  ce  siège,  y  fut  blessé  d'une  flèche; 
cette  circonstance  et  le  peu  d'importance  de  la  place  le  décidèrent  à  lever 
le  siège  (1510).  —  Les  gens  de  Tamly  utilisant  les  abeilles  pour  se  défendre, 
eurent  recours,  certainement  à  leur  propre  insu,  à  un  procédé  mentionné 
dans  la  Bible  :  «  J'enverrai  devant  toi  les  frelons,  dit  Jéhovah  à  Moïse  sur 
le  Sinaï,  qui  chasseront  loin  de  ta  face  les  Hévéens,  les  Chananéens  et  les 
Héthéens  ».  Exode,  XXIIl,  28. 

34,  Sauatier.  —  Savetier.  Savatier,  qui  vient  plus  directement  de  savate, 
prévalait  jadis  ;  c'est  ainsi  qu'on  trouve  dans  Villon  :  «  Et  vous,  Blanche 
la  savatière.  » 

34,  Moule.  —  Cette  phrase  :  «  Les  âmes  des  empereurs  et  des  savetiers  sont 
jetées  dans  le  même  moule  »,  a  servi  d'épigraphe  en  1792  à  un  journal  de 
la  Révolution,  intitulé  «  Journal  des  Sans-culottes  ».  —  L'idée  s'en  retrouve 

•  dans  La  Servitude  volontaire  de  La  Boétie  :  «  Nature  le  ministre  de  Dieu  et 
la  gouvernante  des  hommes,  nous  a  tous  faits  de  même  forme,  et,  comme 
il  semble,  à  même  moule.  » 

37,  Importantes.  —  «  Quelquefois,  quand  les  rois  sont  en  conseil,  les  peuples 
croient  qu'ils  parlent  de  changer  le  pôle  arctique  de  l'antarctique;  et  le 
plus  souvent  ils  prennent  des  mouches  »  (Malherbe),  ainsi  que  faisait  Do- 
mitien  qui,  au  début  de  son  règne,  s'enfermait  des  heures  entières  dans 
son  cabinet,  se  livrant  à  cette  occupation.  Suétone.  —  «  Ces  grandes  et 
éclatantes  actions  qui  éblouissent  les  yeux,  sont  représentées  par  les  poli- 
tiques comme  les  effets  de  grands  desseins,  au  lieu  que  ce  sont  d'ordinaire 
les  effets  de  l'humeur  et  de  la  passion;  ainsi  la  guerre  d'Auguste  et  d'An- 
toine, qu'on  rapporte  à  Pambition  qu'ils  avaient  de  se  rendre  maîtres  du 
monde,  n'était  peut-être  qu'un  effet  de  jalousie  »  La  Rochefoucalxd.  On 
pourrait  inférer  de  l'épigramme  d'Auguste  :  Quod  futuit  Glaphyran.... 
qu'a  reproduite  Montaigne  à  la  page  précédente,  que  la  guen  e  entre  Antoine 
et  lui  a  été  amenée  par  un  caprice  de  Fulvie  auquel  il  s'est  dérobé,  mais 
il  y  a  lieu  d'observer  que  celle-ci  est  morte  en  40,  alors  que  n'avait  pas 
encore  éclaté  leur  rupture  définitive  dont  fournirent  l'occasion  les  amours 
d'Antoine  avec  Cléopàtre,  reine  d'Egypte,  qui  lui  firent  délaisser  Octavie, 
sa  seconde  femme,  sœur  d'Octave  (nom  de  l'empereur  Auguste  avant  son 
avènement  à  l'empire).  —  Pareillement,  cette  visite  de  l'empereur  d'Alle- 
magne à  Tanger  qui,  en  i905,  fit  de  la  question  marocaine  une  question 
européenne,  visite  attribuée  à  une  politique  préconçue,  est  née  d'une  simple 
boutade,  parce  qu'on  sç  trouvait  dans  le  voisinage,  et  que  la  mer  était 
quelque  peu  forte.  Si  elle  n'avait  pas  eu  lieu,  trois  grandes  puissances  ne 
seraient  pas  revenues  sur  des  accords  déjà  pris,  nous  ne  nous  retrouverions 
pas  avoir  les  mains  .iées  à  tout  jamais  à  l'égard  du  Maroc  et  nous  n'aurions 
pas  été  réduts  au  ridicule  d'accepter  d'y  exercer  en  coopération  la  police 
sous  le  contrôle  de  l'Europe,  tâche  qui  n'offre  que  des  difficultés  en  perspec- 
tive, et  où  notre  impuissance  n'aura  d'égale  que  la  responsabilité  que  nous 
assumons. 

43,  Plus.  —  •  Les  grands  et  les  petits'ont  mesmes  accidents,  mesmes  fascheries 
et  mesmes  passions;  mais  les  uns  sont  en  haut  de  la  roue,  les  autres  près 
du  centre  et  ainsi  moins  agités  par  les  mesmes  mouvements.  »  Pascal. 


.      NOTES.        LIV.  H,  CH.  XII.        VOL.  II,  PAG.  180.         Fb.485 

43^  Giron.  —  Très  petit  insecte  de  la  famille  des  parasites,  qui  s'attache  à  la 
peau. 
182, 

8,  lustice.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  12.  —  C'est  sur  un  acte  de 
même  nature  que  repose  la  légende  du  chien  de  Montargis  :  «  Sous 
Charles  V,  un  gentilhomme  aurait  été  assassiné  dans  la  forêt  de  Bondy;  ce 
"gentilhomme  avait  un  chien  qui,  témoin  du  meurtre,  après  l'avoir  fait  dé- 
couvrir en  s'obstinant  à  demeurer  près  du  corps,  s'acharnant  ensuite  contre 
l'assassin  chaque  fois  qu'il  l'apercevait,  fit  soupçonner  la  vérité.  Un  combat 
singulier  fut  ordonné  entre  eux,  et  l'homme,  vaincu,  avoua  son  crime.  » 
Mais  le  même  fait,  avec  des  acteurs  de  même  nom,  se  retrouvant  dans  une 
chanson  de  geste  du  temps  de  Charlemagne,  on  estime  aujourd'hui  que  la 
scène  finale  ne  s'est  pas  passée  à  Montargis,  comme  on  le  répète  générale- 
ment, et  que  ce  n'est  que  parce  qu'elle  a  été  reproduite  par  hasard,  en 
peinture,  dans  la  salle  du  château,  lors  de  sa  restauration  par  Charles  VIII, 
que  cotte  croyance  s'est  formée. 

10,  Maistre.  —  Plutarque,  ibid.  ;  Pausamas,  IX,  31. 

27,  Siècle.  —  Plutarque,  ibid.;  Elien,  De  Animal.,  VII,  13. 

30,  Spectateur.  —  C'est  Aulu-Gelle,  V,  14,  qui  rapporte  le  fait  comme  le 
tenant  d'Appion  qu'il  déclare  sujet  à  caution;  mais  il  est  confirmé  par 
Sénèque  qui  dit  :  «  Nous  avons  vu  dans  l'amphithéâtre  un  lion  qui,  ayant 
reconnu  un  homme  auquel  il  avait  appartenu  autrefois,  le  protégea  contre 
les  autres  bêtes  qui  allaient  fondre  sur  lui.  »  Elien,  De  Animal.,  VII,  48,  en 
nomme  le  héros  Androclès  au  lieu  d'Androdus.  —  Cet  épisode  a  été  mis  en 
vers  français. 
184, 

13,  Emhatis.  —  Je  rencontrai,  je  gagnai.  S'embattre,  c'était  arriver  fortuite- 
ment en  un  lieu,  et  aussi  intentionnellement. 

16,  Musse.  —  Caché,  blotti;  mot  d'étymologie  grecque. 
24,  En  hors.  —  Désormais,  depuis  ce  moment,  dès  lors. 

35,  L'empereur.  —  D'après  Appion,  cet  empereur  serait  Caracalla;  mais  si 
Sénèque  en  a  été  témoin,  ce  ne  peut  être  que  Néron  ou  l'un  de  ses  prédé- 
cesseurs. V.  N.  II,  182  :  Spectateur. 

46,  Ora.  —  Pline,  VIII,  42,  affirme  expressément  lui  aussi  que  les  chevaux 
pleurent  quelquefois  la  mort  de  leur  maître  et  assure  que  le  roi  Nicomède 
ayant  été  tué,  son  cheval  se  laissa  mourir  faute  de  manger. 
186. 

7,  Escare.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anitn.,  26. 

12,  Barbiers.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  26.  —  Le  barbier  est  un 
poisson  de  mer  du  genre  osseux. 

17,  Balaine.  —  Enorme  cétacé  qui  atteint  20  à  25  mètres  de  long  et  un  poids 
de  100.000  kilos;  sa  peau  a  jusqu'à  trois  centimètres  d'épaisseur.  Sa  pêche, 
à  peu  près  épuisée  dans  les  mers  du  Nord,  s'effectue  actuellement  plutôt 
dans  les  mers  australes  ;  l'espèce  tend  à  disparaître.  On  utilise  surtout,  dans 
la  baleine,  l'huile,  le  lard  et  les  fanons,  lames  cornées,  au  nombre  de  7  à 
800,  qui  garnissent  la  bouche. 

19,  Guide.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  32.  —  Le  requin  serait,  pareille- 
ment, constamment  accompagné  d'un  poisson,  qu'on  appelle  «  pilote  », 
jouant  le  même  rôle.  /< 

,  28,  Gouuernail.  —  Le  caracal,  carnassier  du  genre  chat,  qui  a  l'odorat  aussi 
développé  que  le  lion  l'a  peu,  en  agirait  à  peu  près  de  même  avec  celui-ci. 
Faible,  pas  plus  gros  qu'un  renard,  il  va  devant  le  lion,  lui  découvre  une 
proie  et  l'en  avertit;  le  lion  met  à  profit  l'avertissement  et  laisse  en  rému- 
nération une  partie  de  la  victime  à  son  batteur  d'estrade. 

39,  L'offenser.  —  Plutarque,  De  VInd.  dés  anim.,  32;  Pline,  VII,  25:  Elien,  De 
Animal.,  III,  II,  etc.  —Le  crocodile  (V.  N.  II,  148  :  Crocodile),  dans  l'eau, 
absorbe  des  sangsues;  à  terre,  des  fourmis  pénètrent  dans  sa  gueule  béante; 
les  unes  et  les  autres  s'y  attachent  sans  que,  en  raison  de  la  disposition  de 
sa  langue,  il  puisse  s'en  débarrasser;  le  pluvier  entre  dans  sa  bouche  et  lui 


Fb.486  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

rend  service,  becquetant  ses  dents,  son  palais,  ses  gencives.  Héroivîte.  — 
Un  autre  oiseau,  le  piquebœuf,  rend  au  buffle  les  mêmes  offices  :  avide  des 
tiques  qui  le  dévorent,  il  l'en  débarrasse  et  celui-ci  endure  patiemment  des 
coups  de  bec  dont  il  reconnaît  l'utilité;  de  plus,  si  l'oiseau  aperçoit  un 
chasseur,  il  pousse  un  cri  et  s'envole,  ce  qui  est  un  avertissement  pour  le 
buffle.  Cosmos. 

40,  Nacre.  —  La  nacre  n'est  pas  un  coquillage,  mais  une  matière  blanchâtre 
et  brillante  qui  forme  l'intérieur  de  beaucoup  de  coquilles  marines  univalves 
et  bivalves;  la  partie  est  ici  prise  pour  le  tout. 

40,  Pinnotbere.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  32;  Cicéron,  De  Nal.  deor., 
II,  48.  —  Le  pinnothère  est  une  espèce  de  crabe  qui  vit  ordinairement  dans 
les  coquilles  des  testacés  bivalves. 
188, 

4,  Tuns.  —  Plltarque,  De  VJnd.  des  anim.,  29,  31;  Aristote,  De  Animal.,  VIll. 
13;  Eliex,  De  Animât,  IX,  42.  —  Le  thon  est  un  gros  poisson  qui  va  par 
bande  et  se  trouve  principalement  sur  les  côtes  de  la  Méditerranée. 

5,  Mathématique.  —  Ailleurs  (I,  226  et  N.  Mathématique),  Montaigne  compte 
quatre  parties  dans  les  mathématiques;  ici,  il  en  distrait  la  musique  qu'on 
y  comprenait. 

16,  Longueur.  —  Les  oies  sauvages,  dans  leurs  migrations,  se  forment  bien 
géométriquement  en  triangle,  par  bandes  de  quarante  à  cinquante  indi- 
vidus. L'oie  qui  est  en  tête  fend  la  première  la  résistance  de  l'air  :  cette 
fonction  est  très  fatigante  et,  pour  la  remplir,  toutes  se  relèvent  succes- 
sivement, celle  qui  la  quitte  se  mettant  à  la  queue.  Lorsqu'elles  s'arrêtent, 
quelques-unes  font  sentinelle  et  chacune  y  passe  à  son  tour.  —  Les  canards 
sauvages  voyagent  aussi  par  troupes,  mais  moins  bien  organisées  et  ne 
s'élevant  pas  aussi  haut  dans  les  airs. 

23,  Luy.  —  Plutarque,  De  l'Ind.  des  anim.,  14. 

27,  Mourir.  —  Arries,  Hist.  indic,  14. 

32,  Hoste.  —  Plutarque,  De  VInd.  des  anim.,  19. 

37,  Halcyons.  —  Plutarqu-e,  De  l'Ind.  des  anim.,  34;  Pline,  X,  32;  Eliex,  De 
Animal.,  X,  17.  —  L'alcyon  est  un  oiseau  assez  semblable  à  l'hirondelle, 
qui  fréquente  la  mer  et  les  marécages. 
190, 

1,  Latone.  —  Neptune,  d'un  coup  de  son  trident,  lit  sortir  cette  île  du  fond 
de  la  mer,  pour  assurer  à  Latone,  persécutée  par  Junon,  un  lieu  où  elle 
pût  mettre  au  monde  Apollon  et  Diane.  Dans  la  suite,  par  reconnaissance, 
Apollon,  dont  elle  devint  le  sanctuaire  principal,  de  flottante  qu'elle  était, 
la  rendit  immobile.  Myth. 

21,  Desmeut.  —  Dérange,  disjoint;  du  latin  dimovere  qui  a  ce  même  sens. 

30,  Seulement.  —  Cette  description  du  nid  de  l'alcyon  rappelle  une  des  plus 
gracieuses  pages  de  saint  François  de  Sales.  Chez  Montaigne,  la  description 
est  plutôt  technique  et  scientifique,  d'une  grande  habileté,  exacte  et  pitto- 
resque; chez  saint  François  de  Sales,  elle  est  plutôt  poétique,  d'une  grâce 
et  d'une  fraîcheur  incomparables,  et  il  en  tire  des  inductions  mystiques, 
pleines  de  justesse,  de  charme  et  de  profondeur.  Abbé  Sagette. 
192, 

40,  Appétit.  —  La  Bruyère  est  d'un  avis  opposé:  il  dit  au  ch.  Des  femmes  : 
•  L'agrément  est  arbitraire;  la  beauté  est  quelque  chose  de  plus  réel  et  de 
plus  indépendant  du  goût  et  de  l'opinion.  » 

41,  Color.  —  Properce,  II,  17,  26.  —  Les  populations  du  N.  de  l'Europe  ont 
le  teint  plus  pâle  que  celles  du  Midi,  chez  lesquelles  il  est  plus  basané,  ce 
qui  peut  tenir  à  ce  qu'elles  vivent  davantage  au  grand  air,  sous  un  soleil 
plus  ardent,  et  à  un  efl"et  d'atavisme  se  joignant  à  cette  cause  première. 

194, 

9,  Oreille.  —  William  Daltox  rapporte  qu'il  est  de  coutume  chez  les  Bernias 
de  se  percer  dans  le  lobe  de  l'oreille  un  large  trou  que,  suivant  sa  richesse 
ou  sa  position,  chacun  remplit  par  un  ornement  d'or,  d'argent,  de  papier 
doré  et  de  boisj  et  qu'invariablement,  quand  cette  ouverture  n'est  pas  oc- 


NOTES.        LIV.  II,  CH.  XII.        VOL.  II,  PAG.  194.  Fb.487 

cupée  autnement,  hommes,  femmes  et  enfants  l'utilisent  comme  porte-ciga- 
rette lorsque,  pendant  qu'ils  fument,  ils  viennent  à  être  interrompus  dans 
cette  occupation,  y  plaçant  alors  machinalement  le  bout  non  allumé. 

10,  Soing.  -r-  L'usage  du  bétel,  plante  de  l'Inde,  dont  les  Hindous  mâchent  les 
feuilles,  produit  cet  effet. 

14,  Pline.  —  Livre  IV,  13. 

20,  Massiue.  —  Chez  les  Hollandais,  c'est  bien  autre  chose  encore;  on  peut  en 
juger  en  comparant  les  tableaux  de  Rubens,  Rembrant,  etc.,  avec  ceux  de 

•     Raphaël,  Léonard  de  Vinci,  etc. 

20,  Estrillée.  —  Mince  et  svelte,  ce  que  Montaigne  appelle  (I,  460)  un  corps 
bien  espagnole. 

26,  Aualler.  —  Comprendre,  admettre,  adopter;  'se  dit  encore  aujourd'hui 
dans  ce  sens  en  langage  trivial  :  Faire  avaler  quelque  chose  à  quelqu'un, 
lui  en  conter  ^ 

26,  Boule.  —  Dans  le  Timée;  voir  également  Cicéron,  De  Nat.  deor.,  I,  10. 
196, 

7,  CoDstitution.  —  Décrites  par  Platon  et  Cicéron  :  par  le  premier  dans  le 
Timée;  par  le  dernier  dans  son  traité  De  la  Nature  des  dieux,  II,  54  etc. 

13,  Vitales...  c'est.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  et  plus  nobles,  c'est  à  ce  que  disent 

les  médecins. 
17,  Excusables.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  puis  que  l'homme  n'auoit  pas  de  quoy  se 

présenter  nud  à  la  veue  du  monde. 
20,  Soye.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  autres  commoditez  empruntées. 
25,  Libre.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  connoissance. 

31,  Refroidie.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  desgoutée. 

32,  Cognoissance.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  iouyssance. 

33,  Autres.  —  C'est  ce  qu'exprime  cet  adage  ancien  : 

«  Après  trois  jours,  l'homme  s'ennuie 
De  femme,  d'hôte  et  de  pluie.  » 

198, 

4,  Ordre.  —  c.-à-d.  :  ce  que  je  dis  là  ne  concerne  que  le  commun  des 
hommes  et  des  femmes,  et  je  ne  serai  pas  sacrilège  au  point... 

5,  Sacrilège.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  Téméraire. 

8,  Terrestre.  —  Compliment  à  l'adresse  de  la  reine  Marguerite.  V.  N.  II, 
180  :  Donné. 

13,  Raison. 

«  De  tous  les  animaux  qui  s'élèvent  dans  l'air. 

Qui  marchent  sur  la  terre  ou  nagent  dans  la  mer. 

De  Paris  au  Pérou,  du  Japon  jusqu'à  Rome 

Le  plus  sot  animal,  à  mon  avis,  c'est  l'homme.  »  Boileau,  Sal.,  Vlll. 

17,  Faire.  —  Les  Latins  disaient  :  <•  Se  bien  porter,  est  la  première  des 
choses  »  ;  les  Grecs  :  «  Qui  n'a  santé,  n'a  rien  »  ;  c'est  ce  que  nous  disons 
tous  quand  nous  l'avons  perdue. 

18,  —  Stoïque.  —  Plutarque,  Des  communes  conceptions  contre  les  Stoïciens. 
23,  Circé.  —  A  fourni  à  l'Odyssée  d'HoMÈRE  un  de  ses  principaux  épisodes  : 
,  Ulysse  ayant  abordé  dans  son  île  (l'île  d'^Ea,  au  S.  de  l'Italie),  elle  trans- 
forma, par  ses  breuvages  enchantés,  tous  ses  compagnons  en  pourceaux; 
seul  il  échappa,  grâce  à  un  antidote  que  Mercure  lui  avait  donné.  Devenue 
éprise  de  lui,  Circé  rendit  à  ses  compagnons  leur  forme  première  et  les 
retint  près  d'elle  une  année  entière. 

36,  Abandon.  —  Cette  phrase,  ainsi  qu'en  témoigne  du  reste  sa  contexture, 

est  une  ironie  de  la  part  de  Montaigne. 
38,  Vaine  tantasie.  —  L'éd.  de  80  port.  :  biffe  et  piperie. 
41,  Insensé.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  C'est  donc  (bute  nostre  perfection  d'èstre 

homme. 


Fb.488  ESSAIS  DE  MONTAlGxNE. 

200,  I 

3,  Discours.  —  C.-à-d.  par  de  bonnes  raisons. 
5,  Société.  —  Voir  N.  II,  170  :  Nous. 

11,  Surpayé.  —  Exalté  cette  belle  raison. 

10,  Socrates.  —  Xénophon,  Mémoires  sur  Sacrale,  1,  1, 12.  —  L'éd.  de  88  port.  : 
la  philosophie. 

34,  Grecs.  —  Varron  et  Aristote.  —  Yarron,  homme  de  loi,  fut  aussi  tribun 
du  peuple,  exerça  un  commandement  militaire  en  Espagne;  d'une  immense 
érudition,  était  surnommé  par  ses  contemporains  «  le  plus  savant  des 
Romains  »  ;  a  écrit  plus  de  cinq  cents  volumes  dont  il  ne  nous  reste  que 
fort  peu.  —  Aristote,  V.  N.  I,  32  :  .Vristote. 
202, 

1,  SienDe.  —  Aristote  fut  l'objet  de  nombreuses  imputations,  mais  qui  sont 
loin  d'avoir  été  prouvées.  On  a  dit  que,  dans  sa  jeunesse,  il  avait  dissipé 
son  patrimoine;  qu'à  Athènes,  il  aurait  joué  le  rôle  d'espion,  lorsqu'en  348 
av.  J.-C.  la  guerre  éclata  entre  les  Athéniens  et  Philippe  de  Macédoine  ;  qu'il 
aurait  comploté  contre  Alexandre,  parce  que  Callisthène,  son  parent  et 
disciple,  s'était  attiré  la  haine  de  ce  prince;  enfin,  il  fut  accusé  d'impiété 
comme  aj'ant  rendu  un  culte  à  sa  femme,  en  l'érigeant  en  divinité  à  l'égal 
de  Cérès. 

4,  Rigent.  —  «  Au  jeu  d'amour,  le  muletier  fait  rage,  »  répond  La  Fontaine. 

11,  Tient...  choses.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  est  encore  moins. 

13,  Plus  comme.  —  L'ex.  de  Bordeaux  ajoute  :  la  beauté. 

36,  Epicurus.  —  Ou  plutôt  l'épicurien  Colotès,  ainsi  qu'on  peut  voir  dans  le 
traité  que  Pi.ltahquf.  a  éci;it  contre  lui.  —  Un  autre  philosophe  de  cette 
même  école  a  dit  :  «  Si  tous  les  hommes  pouvaient  voir  les  choses  de  la 
même  manière  et  se  i-essouvenir  à  propos  du  parti  le  plus  utile  à  prendre, 
ils  n'auraient  pas  besoin  de  lois.  » 
204, 

1,  Guider.  —  La  présomption,  la  prétention,  une  confiance  exagérée  en  soi. 

5,  Sereines.  —  Par  la  douceur  de  leur  chant,  les  Sirènes  entraînaient  les 
voyageurs  pour  lesquels  elles  étaient  invisibles  à  se  précipiter  dans  la  mer, 
où  ils  se  noyaient.  —  Dans  VOdyssée,  Xll,  188,  Ulysse,  prévenu,  ne  leur 
échappe  qu'en  bouchant  avec  de  la  cire  les  oreilles  de  ses  compagnons  et 
se  faisant  attacher  lui-même  au  mât  de  son  navire.  V.  aussi  Cicéron,  De 
Fin.,  V,  18. 

11,  Cecy.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  pour  le  moins. 

14,  Nous.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  La  science  ne  nous  décharge  point  de  douleur, 
de  crainte,  de  désir  et  de  reurne,  au  lieu  de  :  «  Mais...  nous  ». 

17,  Pituita.  —  Pituite;  humeur  blanchâtre  et  visqueuse  que,  dans  certaines 
indispositions,  on  i-ejette  par  la  bouche. 

2Q,  Presumption.  —  L'éd.  de  80  aj.  :  et  la  gloire. 

20,  Epictete.  —  Manuel,  11. 

26,  Braues.  —  C.-à-d.  :  entendez  ce  pauvre  et  malheureux  animal  faire  le 
brave,  se  pavaner. 

31,  Offense.  —  Cicéron,  Tusc,  l,  26. 
206, 

7,  Cestuy-cy.  —  Lucrèce.  Un  breuvage  que  lui  donna  sa  femme  ou  sa  mai- 
tresse  lui  troubla  la  raison  et  il  finit  par  se  donner  la  mort.  Chron.  d'EusÈBE. 
9,  Sapience.  —  «  Folie  et  génie  sont  congénères  »;  c'est  une  des  applications 
fréquentes  de  cet  autre  proverbe  :  «  Les  extrêmes  se  touchent  >•,  et  les  exem- 
ples à  l'appui  sont  nombreux.  En  tout  cas,  il  faut  reconnaître  que  beau- 
coup d'hommes  de  génie  et  de  personnages  illustres  se  sont  trouvés  affectés 
d'une  demi-aliénation  mentale  et  sujets  à  un  état  anormal  du  système  ner- 
veux :  Socrate,  Malebranche,  Newton,  Descartes,  J.-J.  Rousseau,  Le  Tasse, 
étaient  hallucinés  ;  Lucrèce,  Pierre  le  Grand,  Balzac,  Michel-Ange  étaient 
maniaques.  —  Cicéron  dit  qu'  «  il  ne  se  trouve  pas  d'esprit  sublime  sans 
quelque  mélange  de  folie,  et  que  la  mélancolie  est  le  propre  des  natures 
excellentes  ».  —  M""  de  Staël  :  «  La  mélancolie  est  le  sceau  du  génie.  » 


NOTES.         LIV.  II,  GH.  XII.         VOL.  II,  PAG.  206.  Fb.489 

10,  Choses.  —  CicÉRON,  Acad.,  II,  23. 

11,  Mortels.  —  Cicéron,  De  Fin.,  II,  13. 

12,  Dieu.  —  Plutarque,  Des  communes  conceptions,  etc.,  30. 
14,  De  soy.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  aquis  par  ses  estudes. 
17,  Surmonte.  —  Sénèque,  Epist.  23,  à  la  fin. 

19,  Il  n'y  a.  —  Les  éd.  ant.  font  précéder  ces  mots  de  :  et  toutes  fois  ie  re- 

connoy  qu'il. 
'27,  Poules.  —  11  usera  jusqu'à  épuisement  de  toutes  ses  ressources.  —  «  Faire 

de  ses  œufs  poules  »,  c'est  s'abuser  sur  sa  richesse,  ses  ressources;  c'est  un 

proverbe  qui  a  le  mémo  sens  que  le  proverbe  anglais  :  «  Tout  homme 

prend  ses  oies  pour  des  cygnes.  » 
28,  Chemise.  —  Proverbe;  c.-à-d.  le  réduire  à  la  pauvreté  la  plus  absolue, 

presque  à  la  nudité. 
o2.  Mal.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  25. 

34,  Secte.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  ce  n'est  que  vent  et  paroles. 

35,  Carneades.  —  Cicéron,  De  Fin.,  V,  31.  —  Un  des  familiers  d'Épicure,  par 
suite,  autre  que  le  fondateur  de  la  nouvelle  académie  qui  est  postérieure  de 
60  ans  à  ce  dernier. 

208, 

5,  Stoïques.  —  Le  fait  est  donné  par  Cicéron,  Tusc,  II,  25,  qui,  dans  un 
autre  passage,  dit  que  ce  même  philosophe,  aj^ant  mal  aux  reins,  criait  à 
tue -tête  que  tout  ce  qu'il  avait  jugé  auparavant  de  la  douleur  était  faux. 

6,  Rabattre.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  quelque  chose  des  pointes  de  la  douleur  et  de. 

8,  Pyrrho.  —  Diogène  Laerce,  IX,  69.  —  Pyrrhon,  clief  de  l'école  des  Scep- 
tiques, posait  en  principe  que  rien  n'est  certain;  qu'à  chaque  proposition 
on  peut  opposer  une  proposition  contraire  également  probable;  que,  par 
suite,  le  sage  doit  suspendre  son  jugement  et'  tout  soumettre  à  l'examen  (en 
grec  SxÉTiTn;).  On  a  prêté  à  Pyrrhon  mille  folies  que  dément  la  réputation 
de  sagesse  dont  il  jouissait  auprès  de  ses  contemporains. 

17j  Naturelle.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  Certes  la  cognoissance  nous  esguise  plutost 
au  ressentiment  des  maux  qu'elle  ne  les  allège. 

19,  Ignorance.  —  Certains  ont  voulu  voir  là  une  allusion  à  la  castration;  le 
texte  s'explique  cependant  très  bien  sans  semblable  hypothèse;  de  ce  que 
l'enfant  ne  s'attend  pas  à  une  opération  quelle  qu'elle  soit,  qu'on  va  lui 
faire  subir,  et  que  chez  un  cheval,  il  ne  s'en  rend  pas  compte  davantage, 
n'éprouvant  pas  d'appréhensions,  ils  s'en  Refendent  moins. 

22,  Discours.  —  Sorte  de  gens  sur  lesquels,  dans  Le  Malade  imaginaire, 
Molière  a  si  spirituellement  exerce  sa  verve  sati«'ique. 

23,  Science.  —  C'est  la  médecine  que  Montaigne  met  ici  en  cause;  ce  qu'il 
indique  lui-même  plus  loin,  en  ajoutant  du  reste  que  ce  qu'il  en  dit  s'ap- 
plique à  toutes  autres. 

27,  Indisposition.  —  Critique  à  l'adresse  de  la  chiromancie  qui,  ainsi  que 
l'astrologie,  avait  encore  nombre  d'adeptes  à  cette  époque. 
210, 

2,  Philosophes.  —  Des  philosophes  sceptiques.  V.  N.  II,  208  :  Pyrrho. 

13,  Viure.  —  Allusion  aux  avances  qui  lui  étaient  faites  pour  obtenir  qu'il 
rentrât  dans  la  vie  publique,  dont  il  s'était  déjà  retiré. 

14,  Maladies.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  de  foiblesse;  et  80  aj.  en  plus  :  Les 
hommes  engagés  au  seruice  des  Muses  m'en  sçauroient  bien  que  dire. 

,24,  Homme.  ~  Idée  qu'a  traduite  La  Fontaine.  V.  N.  II,  202  :  Rigent.  — 
Avant  Montaigne  et  lui,  Marot  avait  dit  : 

«  six  ou  sept  fois,  ce  n'est  point  le  mestier 
D'homme  d'honneur;  c'est  pour  le  muletier.  » 

212, 

14,  Ouurages.  —  Un  oratorien,  Thom^ssin  (I6I9  à  1695),  homme  d'une  éru- 
dition profonde,  qui  avait  fait  de  nombreuses  conférences  sur  les  Pères  de 
l'Église,  les  conciles,  l'histoire,  oublia  sur  la  fin  de  sa  vie  tout  ce  qu'il  avait 
su  et  ne  se  souvenait  même  plus. d'avoir  rien  écrit.  Payex. 


Fb.490  ESSAIS  DE  MOiNTAIGNE. 

15,  Informes.  —  Il  s'agit  ici  du  Tasse,  l'auteur  de  la  Jérusalem  délivrée, 
qui,  lorsque  Montaigne  voyageait  en  Italie,  en  1580,  était  enfermé  comme 
fou  dans  un  couvent  de  Ferrare  où  il  demeura  ainsi  pendant  sept  ans,  de 
1579  à  1586.  Le  texte  pris  à  la  lettre  implique  que  Montaigne  l'a  vu  dans  sa 
prison  et  la  gravure  a  reproduit  cette  visite;  néanmoins  il  ne  semble  pas 
qu'elle  ait  eu  lieu  et  il  n'en  dit  rien  dans  son  journal  de  voyage.  Le  mot 
«  voir  »  serait,  dans  ce  cas,  mis  pour  avoir  appris,  savoir,  sens  dans  lequel 
il  est  assez  fréquemment  emplo)'é,  en  parlant  d'un  fait  accompli. 

18,  Assagir.  —  S*  Paul,  Epilre  atix  Romains,  a  dit  de  même  en  renversant 
la  proposition  :  «  Ils  allaient  disant  vouloir  devenir  des  sages,  ils  sont  de- 
venus des  sots.  »  —  Assagir,  rendre  sage,  n'est  pas  demeuré  dans  la  langue 
française,  qui  a  retenu  abestir,  rendre  bête,  stupide  ;  dans  La  Boétie,  on 
trouve  de  même  formation  assotir,  pour  rendre  sot. 

19,  Guider.  —  «  Prenez  de  l'eau  bénite,  faites  dire  des  messes,  cela  vous  fera 
croire  et  vous  abêtira;  étrange  moyen  de  nous  rapprocher  de  Dieu,  que 
d'étouffer  la  raison  qui  est  un  don  de  lui  et  nous  fait  à  son  image.  »  Pascal. 
—  Tertullien  n'a-t-il  pas  dit  :  «  Credo  quia  absurdum  {j'y  crois  par  cela 
mêm£  que  c'est  une  absurdité)  »  ;  —  et  Bossuet  :  «  Nous  ne  sommes  capables 
d'entendre  Dieu,  que  par  une  entière  cessation  de  notre  intelligence  »  ;  — 
JouBERT  :  «  Ferme  les  yeux  et  tu  verras  »  ;  —  Hlet  :  «  Pour  arriver  à  croire, 
il  est  utile  de  ne  pas  croire  »  ;  —  Diderot  :  «  Le  premier  pas  vers  la  philo- 
sophie, c'est  l'incrédulité  »  ;  —  la  reine  Christine  :  «  En  matière  de  foi,  il 
faut  se  crever  les  yeux  pour  voir  clair  »  ;  —  enfin  l'Évangile  :  «  Heureux  les 
pauvres  en  esprit,  car  le  roj^aume  des  cieux  est  à  eux.  » 

24,  Fuir.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  à  désirer  qu'à  craindre,  au  lieu  de  :  «  à  coup 

qu'à  fuir  ». 
32,  Valentem.  —  Ces  vers  sont  tirés  de  la  satire  de  La  Boétie,  dont  il  a  été 

question  liv.  I,  ch.  XXVII,,  I,  306. 
34,  Volupté.  —  La  secte  d'Épicure.  —  Les  éd.  ant.  âj.  :  et  l'a  montée  à  son 

plus  haut  pris. 
36,  Auoir  de  bien.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  heureux  bien  estre. 
38,  Mali.  —  Citation  que  Montaigne  fait  précéder  de  sa  traduction. 
214, 

7,  Plombée.  —  Dans  un  tel  état  d'apathie. 
13,  Sentir.  —  Cicéron,  Tusc,  III,  7. 
216, 

1,  Soufferts.  —  Gigéron,  Tusc,  III,  45. 

2,  Oubly.  —  C'est  pourtant  là  le  moyen  le  plus  efficace,  peut-être  le  seul  de 
retrouver  le  calme  et  de  n'être  pas  trop  malheureux.  Ressasser  constam- 
ment, au  contraire,  en  son  esprit,  les  griefs  vrais  ou  imaginaires  que  l'on 
peut  avoir  contre  les  hommes  ou  contre  les  choses,  rend  l'existence  insup- 
portable. <•  Ce  qui  est  passé,  est  mort,  »  dit  un  proverbe  arabe;  et,  quand 
on  s'y  applique,  il  n'est  pas  si  malaisé  que  le  dit  Montaigne.  La  nature  nous 
y  aide,  en  atténuant  avec  le  tenips  nos  souvenirs;  mais  il  faut  pour  cela 
écarter  résolument  et  aussi  souvent  qu'ils  se  présentent  à  nous,  les  sujets 
dont  nous  voulons  nous  dégager;  et,  si  nous  y  joignons  une  occupation 
suivie  qui  empêche  que  nous  ne  demeurions  sans  cesse  en  tête-à-tête  avec 
nos  pensées,  sur  ce  point  comme  sur  bien  d'autres,  la  volonté  finit  par 
avoir  raison  de  toute  obsession,  quelle  qu'elle  soit. 

13,  Perdre.  —  «  On  s'en  souvient,  en  songeant  qu'il  faut  qu'on  l'oublie.  » 

MONCRIF. 

17,  Ausus.  —  D'Épicure. 

31.  Acceptassent.  —  Il  est  douteux  que  semblable  marché  soit  accepté  de 
quiconque  a  encore  du  sang  dans  les  veines.  Cette  vie  agréable  et  tranquille 
que  les  Italiens  qualifient  de  vita  del  bealo  porco  (vie  béate  du  porc)  ne 
saurait  convenir  à  qui  a  du  cœur  et  se  sent  capable  de  faire  mieux,  état 
d'àme  que  Raci.ne  a  mieux  su  rendre  que  Montaigne,  quand  il  fait  dire  à 
Achille  ; 


NOTES.        LIV.  II,  CH.  XII.        VOL.  II,  PAG.  216.  Fb.491 

•  Je  puis  choisir,  dit-ou,  ou  beaucoup  d'ans  sans  gloire, 

Ou  peu  de  jours  suivis  d'une  longue  mémoire; 

Mais,  puisqu'il  faut  enfin  que  j'arrive  au  tombeau, 

Voudrais-je,  de  la  terre  inutile  lardeau... 

Et  toujours  de  la  gloire  évitant  le  sentier, 

Ne  laisser  aucun  nom  et  mourir  tout  entier?  • 


218, 


7,  Desplaisir.  —  Cette  histoire  et  celle  de  Lycas  qui  précède  sont  tirées 

d'ATHÉNÉE,  XIII. 

9,  Bt'o;.  —  Montaigne  a  traduit  ce  vers  avant  de  le  citer. 

10,  Ecclesiaste.  —  Ch.  1,  versets  17  et  18. 

18,  Résiste.  —  Le  commencement  de  cette  citation  est  un  passage  altéré  de 
Sénèque;  le  reste  est  de  Cicéron. 

20.  Cette  réflexion  sur  la  transformation  du  B  en  V  ne  doit  s'appliquer  ici 
qu'à  bibat;  introduite  dans  abeat,  elle  n'aurait  aucun  sens;  le  proverbe 
latin  :  «  AiU  bibat,  aut  abeat  {qu'il  boive  ou  qu'il  s'en  aille)  »  qui  signifie  : 
«  Il  faut  s'accoutumer  à  l'humeur  de  ceux  avec  qui  on  vit  ou  s'en  séparer  », 
devient  alors  avec  la  prononciation  gasconne  :  «  Aut  vivat  aut  abeat  {qu'il 
vive  ou  qu'il  meure).  »  —  C'est  cette  même  transformation  de  lettres  fami- 
lière aux  Gascons  qui  a  fait  dire  d'eux  :  «  Beata  gens,  oui  bibere  idem  est  ac 
vivere  {Heureuses  gens  pour  qui  boire  et  vivre  ne  font  qu'un)  »  ;  ou  encore  : 
«  Felices  quibus  bibere,  vivere  est  {Heureux  ceux  pour  lesquels  boire,  c'est  vivre.  •> 

32,  Pendre.  —  Plutarqije,  Contredits  des  philosophes  stotques,  14. 

34,  Approcher.  —  Id.,  ibid. 

36,  Hart.  —  Diogène  Laerce,  VI,  86. 

37,  Plutarque.  —  Comment  on  pourra  apercevoir  si  on  s'amende,  etc.,  5.  — 
Sextus  le  pythagoricien  est  cité  fréquemment  par  Sénèqde  dans  ses  diffé- 
rents ouvrages,  en  particulier  dans  ses  lettres  59,  64,  etc. 

220, 

12,  Valentian.  —  L'empereur  Valens. 

14,  Mahumet.  —  Mahomet,  fondateur  de  l'Islamisme  qu'il  commença  à  prê- 
cher à  la  Mecque  vers  quarante  ans;  l'opposition  qu'il  rencontra  au  début 
l'obligea  à  s'enfuir  à  Yatreb  (622)  où  il  fut  accueilli  avec  transports  et  dont 
le  nom,  dans  la  suite,  a  été  changé  en  celui  de  Médine  (ville  du  prophète), 
en  souvenir  de  cette  fuite  ou  hégire,  d'où  date  l'ère  des  Musulmans  (Musul- 
man et  Islamisme  ont  même  étymologie  et  viennent  de  l'arabe  A^   selam , 

qui  signifie  abandon  complet  en  Dieu  de  sa  personne  et  de  ses  biens,  ré- 
signation). A  partir  de  ce  moment,  Mahomet  poursuivit  avec  succès  son 
œuvre  les  armes  à  la  main  ;  et,  à  sa  mort,  survenue  en  632  à  Médine  où 
est  sa  tombe,  dans  la  majeure  partie  de  l'Arabie,  y  compris  la  Mecque,  la 
religion  nouvelle  avait  remplacé  le  culte  des  idoles.  Ses  successeurs  ou  kh^ 
lifes  (lieutenants),  continuant  ses  conquêtes  et  son  prosélytisme,  ont  été  en 
progrès  constant  jusqu'au  xiv  siècle  ;  leurs  croyances  dominent  encore  au- 
jourd'hui sur  une  grande  partie  du  globe  :  l'Asie  occidentale,  l'Afrique 
septentrionale,  la  Turquie.  Les  dogmes  et  les  préceptes  de  la  religion  de 
Mahomet  sont  consignés  dans  le  Coran  (le  livre,  livre  par  excellence),  qui 
embrasse  à  la  fois  la  religion,  la  législation  pénale  et  civile,  ainsi  que  l'ad- 
ministration. Ses  principaux  dogmes  sont  :  l'unité  de  Dieu,  l'immortalité 
de  l'àme,  un  paradis  avec  des  jouissances  toutes  sensuelles;  le  fatalisme, 
n'excluant  pas  pourtant  la  responsabilité  de  nos  actes;  les  préceptes  sont  : 
la  circoncision,  la  prière,  l'aumône,  les  ablutions,  le  jeûne,  l'abstinence  du 
vin  et  de  toutes  les  liqueurs  fermentées;  la  polygamie  est  autorisée,  le  Coran 
autorise  quatre  femmes  légitimes.  —  Mahomet  n'a  nullement  interdit  ni  les 
sciences,  ni  les  lettres  à  ses  adeptes;  mais  dans  le  principe,  ses  lieutenants 
se  conduisirent  à  la  vérité  comme  si  elles  étaient  proscrites.  Un  revirement 
se  fit  plus  tard  et  pendant  un  temps  les  arts  et  les  sciences  ont  compté  des 
savants  émérites  parmi  ses  sectateurs,  mais  il  faut  convenir  qu'actuellement 
il  ne  semble  plus  guère  en  être  question  dans  le  monde  musulman. 


Fb.492  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

16,  Lycurgus.  —  Sa  législation,  qui  fit  de  Sparte  une  république  militaire  plus 
qu'une  monarchie,  et  à  laquelle  elle  dut  la  prépondérance  sur  toute  la 
Grèce,  tant  qu'elle  l'observa  fidèlement,  avait  principalement  pour  but 
d'établir  l'égalité  entre  tous  les  citoyens  et  de  former  un  état  guerrier  sans 
esprit  de  conquêtes.  Ses  dispositions  essentielles  étaient  :  le  partage  des 
terres  en  portions  égales,  avec  interdiction  d'accroître,  de  diminuer  et 
d'aliéner  tout  ou  partie  du  lot  échu  à  chaque  famille;  la  sulistitution  d'une 
monnaie  de  fer  a  la  monnaie  d'or  et  d'argent;  les  repas  pris  en  commun; 
une  éducation  austère,  toute  martiale,  et  exclusivement  dirigée  en  vue  do 
développer  la  moralité,  la  force  et  l'adresse,  donnée  en  public;  les  arts,  les 
sciences,  et  tous  les  métiers  en  général  abandonnés  aux  esclaves;  comme 
gouvernement  :  deux  rois,  ayant  l'initiative  des  lois,  présidant  à  tous  les 
actes  de  la  vie  publique,  commandant  les  armées,  mais  dont  l'autorité  était 
limitée  par  les  Ephores  ;  un  sénat  de  28  membres  décidant  de  la  paix  ou  de  la 
guerre  et  des  alliances;  l'assemblée  du  peuple  élisant  les  magistrats,  votant 
les  contributions,  ratifiant  les  lois.  —  D'après  la  tradition,  Lycurgue,  après 
avoir  fait  jurer  aux  Spartiates  l'observation  de  ses  lois  jusqu'à  ce  qu'il 
revînt,  se  serait  expatrié  sans  esprit  de  retour. 
37,  Vices.  —  Ce  passage  est  une  reproduction  d'une  idée  de  Varron,  qu'on 
trouve  consignée  dans  Nonius  Marcellus. 
222, 

11,  Droicturiere.  —  C'est  là,  bien  qu'il  ne  les  nomme  pas,  une  sortie  de 
Montaigne  contre  Luther  et  Calvin. 

13,  Aet(Ti8ai[jLovta!  —  Desdémone  (superstition);  c'est  le  nom  de  l'héroïne  de  la 
tragédie  d'Othello,  de  Shakespeare. 

14,  neiteTai.  —  Mot  attribué  à  Socrate  et  que  Montaigne  a  traduit  avant  de 
le  citer. 

15,  Empescbes.  —  Pascal  s'est  inspiré  de  cette  pensée  :  «  Il  y  a,  dit-il,  assez 
de  lumière  pour  ceux  qui  ne  désirent  que  voir,  et  assez  d'obscurité  pour 
ceux  qui  sont  en  disposition  contraire;  assez  de  clarté  pour  éclairer  les  uns 
et  assez  d'obscurité  pour  les  porter  à  s'humilier;  assez  d'obscurité  pour 
aveugler  les  autres  et  assez  de  clarté  pour  les  condamner  et  les  rendre 
inexcusables,...  c'est  pourquoi  il  est  juste  et  utile  que  Dieu  nous  soit  en 
partie  caché  et  en  partie  découvert.  »  —  «  La  vanité  et  l'orgueil  coûtent 
plus  que  la  faim  et  la  soif.  »  Jefferson. 

16,  Sage.  —  Platox,  Apologie  de  Socrate.  —  Chérophon,  disciple  et  ami  de 
Socrate,  étant  à  Delphes,  demanda  à  l'oracle  s'il  y  avait  sur  la  terre  un 
homme  plus  sage  que  Socrate;  la  prêtresse  lui  répondit  qu'il  n'y  en  avait 
aucun;  ce  que  Socrate  interpréta,  en  disant  que  la  réponse  de  l'oracle 
n'avait  d'autre  but  que  de  le  donner  pour  exemple,  parce  qu'il  reconnaissait 
qu'il  n'y  avait  véritablement  aucune  sagesse  en  lui.  V.  N.  III,  576  :  L'vn. 

24,  Sagesse.  —  «  La  vanité  est  l'amour-propre  qui  se  montre;  la  modestie, 
l'amour-propre  qui  se  cache.  •  Fontexelle. 

26,  Cendre.  —  «  Souviens-toi  que  tu  es  poussière  et  que  tu  retourneras  en 
poussière  »,  c'est  la  formule,  tirée  de  la  Genèse,  111,  19,  de  l'Église  à  la  céré- 
monie du  mercredi  des  cendres. 

«  Dieu  cunnait  le  néant  d'où  naissent  les  humains, 

Puisque  ses  propres  mains 
Les  ont  jadis  créés  de  poussière  et  de  boue; 
11  connaît  leur  faiblesse,  et  sait  de  quel  mépris 

La  fortune  se  joue 
De  tous  les  grands  desseins  que  forment  leurs  esprits.  »  Racan. 

27,  Ombre.  —  Cette  phrase  se  trouve  dans  les  Psaumes  de  David.  —  On  lit 
encore  dans  I'Ecclésiaste  :  «  Dieu  a  fait  l'homme  semblable  à  l'ombre  après 
le  coucher  du  soleil  »  ;  et  aussi  :  «  Pendant  les  jours  de  sa  vie  fugitive, 
l'homme  passe  comme  l'ombre.  »  —  Dans  l'oraison  funèbre  d'Henriette 
d'Angleterre,  Bossuet  dit  :  «  L'homme  que  Dieu  a  fait  à  son  image,  n'ost-i! 
qu'une  ombre?  • 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  XII.         VOL.  II,  PAG.  222.  Fb.493 

38.  Scire.  —  «  Dieu  t'a  fait  pour  l'aimer,  et  non  pour  le  comprendre.  »  L. 
Racine. 

224, 

4,  Aymé.  —  Ne  trouve-t-on  pas  dans  l'Ecriture  elle-même  que  Dieu  se  re- 
pent  :  «  Jéhovah  se  repentit  du  mal  qu'il  avait  parlé  de  faire  à  son  peuple  », 
Exode,  XXXIIl,  14;  qu'il  se  moque,  qu'il  se  rit,  etc. 

5,  Cognoistre. 

«  Qu'est-ce  que  Dieu? 
Loin  de  rien  décider  de  cet  être  suprême, 
Gardons,  en  l'adorant,  un  silence  profond; 
I,e  mystère  est  immense  et  l'esprit  s'y  confond. 
Foui"  dire  ce  qu'il  est,  il  faut  être  lui-même.  »  L.  Racine. 

lu,  Prudence.  —  Le  passage  qui  suit  est  une  traduction  intégrale  de  Cicérox, 
De  Nai.  deor.,  III,  15. 

20,  Aristote.  —  Morale  à  Nicomaque,  VII,  I. 
226, 

G,  Croyans.  —  S.  Paul,  Ep.  aux  Corinthiens,  1,  1,  19. 
11,  Recognoistre.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  sa  vililé  el. 
17,  Cornes.  —  L'idée  est  reproduite  de  Plutarque,  Contredits  des  philosophes 

stoïques,  10;  mais  l'expression  appartient  à  Montaigne. 
22,  Appris.  —  Cicéron,  De  Nal.  deor.,  I,  17. 
29,  Descouure.  —  Diogène  Laerce,  1,  122. 

29,  Onques.  —  Socrate  (V.  N.  II,  222  :  Sage).  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  (Et  qui  à 
Vauenture  n'eust  nulle  plus  viste  occasion,  d'estre  appelé  sage,  que  celte  sienne 
sentence).  , 

31,  Rien.  —  «  Je  ne  sais  qu'une  chose,  c'est  que  je  ne  sais  rien,  »  disait  aussi 
de  lui-même  Pline  l'Ancien. 

39,  Lettres.  —  Valère  Maxime,  II,  2,  3,  ne  dit  rien  de  semblable;  Montaigne 
a  été  ici  induit  en  erreur  par  une  incorrection  qui  subsiste  dans  quelques- 
éditions  de  cet  auteur. 

228, 

21,  Admirables.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  en  règlement  et  en  droicture. 

28,  Queste.  —  C'est  précisément  par  là  que  Sextus  Empiricus,  d'où  Montaigne 
a  tiré  bien  des  choses,  commence  son  livre  des  Hypotyposes  [expositions, 
hypothèses)  pyrrhoniennes,  et  en  déduit  d'une  façon  générale  la  caractéris- 
tique des  différentes  manières  de  philosopher  :  l'une  dogmatique,  c'est 
celle  qui  assure  avoir  trouvé  la  vérité;  une  autre  académique,  appliquée  par 
ceux  qui  déclarent  qu'elle  est  au-dessus  de  notre  compréhension;  la  troisième 
sceptique,  qui  est  le  propre  de  ceux  qui  la  cherchent  encore. 

30,  Stoïciens.  ■—  Péripatéiiciens,  V.  N.  I,  32  :  Aristote,  et  I,  82  :  Peripatéti- 
ciens;  —  Epicuriens,  V.  N.  1, 30  :  L'aduenir  ;  —  Stoïciens,  V.  N.  I,  18  :  Stoiques. 

.33,  Académiciens.  —  École  philosophique  fondée  à  Athènes,  par  Platon, 
vers  388;  elle  tirait  son  nom  d'un  jardin,  devenu  promenade  publique,  ayant 
appartenu  primitivement  à  un  certain  Acadwnus  et  dans  lequel  Platon 
donnait  ses  leçons.  —  On  compte  trois  Académies  :  la  première,  ou  Aca- 
démie ancienne,  avait  pour  base  les  enseignements  de  Socrate,  transmis 
et  érigés  en  système  par  Platon  :  elle  admettait  l'existence  d'un  Dieu,  d'une 
Providence,  l'immortalité  de  l'âme  ;  au  point  de  vue  moral,  elle  considérait 
la  raison  humaine  comme  impuissante  à  nous  donner  la  solution  précise 
de  toutes  les  questions  en  présence  desquelles  l'homme  se  trouve,  et  in- 
diquait dans  l'ordre  moral  la  pratique  du  bien,  comme  le  plus  sûr  moyen 
d'arriver  au  bonheur:  dans  les  arts,  le  beau,  comme  l'idéal  du  but  à  pour- 
suivre; Aristote,  qui  plus  tard  fonda  l'école  'les  Péripatéiiciens,  Speusippe, 
Xénocrate,  Crantor  en  firent  partie.  La  deuxième,  ou  Académie  mojenne, 
fondée  vers  244,  par  Arcési  as,  posait  en  principe  qu'en  rien  on  ne  peut 
arriver  à  la  certitude.  La  troisième,  ou  Académie  nouvelle,  fondée  par  Car- 
néade,  vers  160,  sans  tomber  dans  un  scepticisme  absolu,  enseignait  que 
l'on  ne  peut  atteindre  qu'au- probable,  — Ces  principes  se  modifièrent  encore 


Fb.494  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

par  la  suite,  avec  Philon  notamment  qui,  vers  l'an  88,  revint  à  la  doctrine 
de  Platon  et  s'efforça  de  la  concilier  avec  le  stoïcisme. 

37,  Epecbistes.  —  Qui  hésitent,  qui  s'abstiennent  de  juger;  qualification 
donnée  aux  sceptiques  et  que  Montaigne  explique  un  peu  plus  loin.  — 
V.  N.  II,  208  :  Pyrrho,  et  Lexique  au  mot  Sceptiques. 

38.  Homère.  —  Auteur  de  VIliade  et  de  ['Odyssée,  considérées  toutes  deux 
comme  les  chefs-d'œuvre  de  l'épopée.  On  ne  sait  que  peu  de  chose  de  lui; 
la  tradition  le  représente  vieux  et  aveugle,  errant  de  ville  en  ville  et  récitant 
ses  vers;  certains  ont  contesté  son  existence  et  émis  l'idée  que  ces  deux  poèmes 
résument  les  œuvres  éparses  d'une  époque  fabuleuse  de  la  Grèce.  —  Dans 
VIliade,  Homère  chante  les  effets  de  la  colère  d'Achille,  les  malheurs  des 
Grecs  au  siège  de  Troie  pendant  la  retraite  de  ce  héros  et  la  vengeance 
terrible  qu'il  tire  du  meurtre  de  Patrocle  son  ami.  On  y  admire  la  grandeur 
des  conceptions,  la  beauté  et  la  simplicité  du  plan,  la  hardiesse  de  l'imagi- 
nation, la  richesse  et  la  sublimité  des  images.  —  Dans  l'Odyssée,  il  raconte 
les  aventures  d'Ulysse  errant  de  contrée  en  contrée  après  la  prise  de  Troie, 
et  le  retour  de  ce  prince  dans  son  royaume  d'Ithaque.  Le  plan  en  est  ré- 
gulier, l'imagination  moins  éclatante,  mais  un  vif  intérêt  et  une  séduisante 
naïveté  vous  captivent.  —  Ces  deux  poèmes,  en  dehors  de  leur  beauté  in- 
trinsèque, avaient  pour  les  anciens  le  mérite  de  renfermer  les  traditions 
théologiques,  les  noms  et  l'origine  des  peuples,  la  description  et  la  situation 
des  pays,  et,  à  ce  titre,  jouissaient  chez  eux,  sous  ces  divers  rapports,  d'une 
grande  autorité. 

38,  Sages.  —  Thaïes,  Solon,  Bias,  Chilon,  Cléobule,  Pittacus,  Périandre; 
quelques-uns  substituent  à  ce  dernier  Myson,  d'autres  Anacharsis,  bien  que 
celui-ci  fût  scythe;  ils  s'occupaient  surtout  de  morale  et  de  politique. 

39,  Arcbilochus.  —  Aussi  méchant  que  licencieux  dans  ses  poésies;  il  fut 
banni  par  plusieurs  villes  qui  mirent  ses  écrits  en  interdit,  et  il  finit  par 
être  assassiné;  il  était  cependant  tellement  estimé  pour  ses  talents  poétiques, 
qu'on  le  regardait  presque  comme  l'égal  d'Homère;  il  ne  reste  de  lui  que 
quelques  fragments  de  poésie. 

39,  Euripide.  —  Son  style,  modèle  d'élégance,  brille  surtout  par  le  pathétique  ; 
il  fait  exprimer  à  ses  héros  des  maximes  philosophiques  d'une  grande 
hardiesse.  Il  avait  composé,  dit-on,  84  tragédies;  il  ne  nous  en  est  parvenu 
que  dix-neuf;  les  plus  estimées  sont  Hécube,  les  Troyennes,  Médée,  Iphigénie 
en  Tauride. 
230, 

21,  Science.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  47. 
232, 

27,  Intrasquer.  —  Du  latin  infrascare  qui  signifie  couvrir  de  feuillages,  d'où 

par  métaphore,  embrouiller,  embarrasser. 
31,  Choisissiez.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  43. 
234, 

1,  Panaetius.  —  Montaigne  continue  de  traduire  Cicéron,  Acad.,  11,  33. 
8,  Praeoccupé.  —  Prévenu,  rempli  de  préjugés. 

17,  Sustineatur.  —  Cicéron,  Acad.,  I,  2.  —  Le  texte  porte  assensio,  au  lieu  de 
asserlio,  qui  semble  une  erreur  de  copie. 
236, 

2,  Naturelles.  —  Sextus  Empiricus,  Pyrrh.  hypol.,  I,  6. 

7,  Pyrrbo.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  ce  que  Laerlius  dict  de  la  vie  de  Pyrrho 
et  à  quoy  Lucianus,  Aulus  Gellius  et  autres  semblent  incliner,  car  ils,  au 
lieu  de  :  «  ce  qu'on...  Ils  ».  —  Du  temps  de  Julien,  la  plupart  des  écrits  de 
Pyrrhon  avaient  déjà  péri,  et  cet  empereur  s'en  félicitait.  Lebeau. 

11,  Souche.  —  Montaigne,  qui  se  déclare  ici  ouvertement  et  avec  raison 
contre  cette  aveugle  insensibilité  qu'on  a  attribuée  à  Pyrrhon,  semble  la 
reconnaître  ailleurs  (liv.  II,  ch.  XXIX,  II,  592),  quoiqu'elle  lui  paraisse,  dit-il, 
quasi  incroyable. 

17,  Secte.  —  Ici  encore  l'auteur  copie  Cicéron,  Acad.,  II,  31. 

37,  Deuement.  —  La  complaisance  avec  laquelle  Montaigne  s'étend  ici  sur  le 


iNOTES.        LIV.  II,  CH.  XII.        VOL.  II,  PAG.  23G.         Fb.49a 

Pyrrhonisme  et  conclut  en  sa  faveur,  montre  bien  qu'il  est  de  cette  école. 

•  Tous  les  principes  qu'il  expose  comme  étant  ceux  de  ces  philosophes  sont 
les  siens;  cela  ne  fait  pas  doute  pour  qui  est  au  fait  de  sa  vie  et  auxquels 
les  Essais  sont  quelque  peu  familiers;  ce  sont  eux  qui  lui  ont  inspiré  sa 
devise  «  Que  sais-je?  »  que  l'on  retrouve  un  peu  plus  loin;  il  leur  a  même 
emprunté  la  leur  «  'Enéy^w  (je  m'abstiens)  ».  V.  N.  II,  276  :  Que  sçay-ie? 
238, 

14,  L'Ecclesiaste.  —  111,  22,  et  V,  17. 

20,  Troisiesme.  —  Les  deux  premières  comprennent  les  Académiciens  et  les 
Sceptiques;  la  troisième,  que  Montaigne  désigne  sous  le  nom  collectif  de 
Dogmatistes,  comprend  les  Péripatéticiens,  les  Stoïciens,  les  Epicuriens. 

29,  Sectateurs.  —  Des  sectateurs  de   Platon,  de  qui  est  le  Timée  dont  il 
vient  d'être  question,  et  non  des  Dogmatistes  dont  l'auteur  semble,  au 
début  de  l'alinéa,  vouloir  nous  entretenir  en  détail;  du  reste  le  philosophe 
qu'il  met  en  cause  est  Cicéron,  qui  était  de  l'école  des  Académiciens. 
240, 

6,  Et  si.  —  C.-à-d.  Aristote  est  le  prince  des  dogmatistes,  et  cependant 
nous  apprenons  de  lui. 

7,  Doubter.  —  Cette  pensée  n'est  pas  d'Aristote  ;  on  l'attribue  à  ^Eneas  Syl- 
vius,  qui  a  été  pape  en  1458,  sous  le  nom  de  Pie  IL 

8,  Escient.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  {comme  pour  exemple  sw  le  propos  de  l'im- 
morlalité  de  l'âme). 

19,  Difficulté.  —  L'obscurité,  —  pour  en  voiler  leurs  opinions  (add.  de  l'éd. 
de  1588). 

23,  Estait.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  45. 

24,  Facilité.  —  C.-à-d.  c'est  pourquoi  Epicure  a  évité  dans  ses  écrits  d'être 
clair  et  facile  à  entendre. 

25,  SxoTEivo;.  —  Le  ténébreux.  Cicéron,  De  Fin.,  II,  5. 
31,  Cicero.  —  De  Offic,  I,  6. 

35,  Cyrenaiques.  —  Diogène  Laekce,  II,  92.  —  Secte  de  philosophes  grecs 
qui  avaient  pour  chef  Aristippe  de  Cyrène  (Afrique  sept.),  qui,  après  la 
mort  de  Socrate,  dont  il  était  un  des  disciples,  fonda  cette  école,  qui  ne 
tarda  pas  à  se  fondre  avec  les  Epicuriens.  Dénaturant  la  morale  de  son 
maître,  il  plaçait  le  souverain  bien  dans  les  plaisirs  des  sens  modérés  par 
la  raison. 

37,  Disciplines.  —  Diogène  Laerce,  VIII,  32. 

39,  Exercice.  —  Chrysippe,  dans  Plutarque,  Contredits  des  philosophes  stoï- 
ques,  25,  dit  le  contraire  de  ce  que  Montaigne  lui  fait  dire  ici. 
242,  ^ 

9,  Profuerunt.  —  Ici,  comme  en  maintes  autres,  le  texte  de  la  citation  est 
altéré. 

10,  Sçauoir.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  par  la  philosophie. 

13,  Dubitateur.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  ne  rien  établissant. 

22,  Asseuerante.  —  Chancelante  et  n'assurant  rien. 

22,  L'est.  —  Pic  de  la  Mirandole,  un  des  disciples  les  plus  fervents  de 
Platon,  à  dix-huit  siècles  d'intervalle,  après  beaucoup  d'efforts  pour  dé- 
terminer le  but  de  chacun  des  dialogues  de  ce  philosophe,  fut  obligé  de 
convenir  qu'il  n'y  en  avait  pas.  Dans  le  traité  des  Lois,  il  est  parlé  de  la 
nature  de  l'àme,  de  sa  génération,  de  son  immortalité;  il  est  encore  ques- 
tion de  cette  immortalité  dans  Phédon,  le  Phèdre  et  le  Timée;  il  est  parlé 
de  géométrie  dans  le  dialogue  de  Menon,  qui  est  un  discours  sur  la  vertu, 
sur  laquelle  on  trouve  une  digression  dans  celui  d'Alcibiade,  etc.  etc. 
Payen.  —  On  s'étonne  quelque  peu  de  voir  cet  admirateur  sans  égal  de 
Montaigne  relever  chez  un  autre  ce  désordre  littéraire,  quand  c'est  là  une 
des  ^jaractéristiques  essentielles  de  son  auteur  de  prédilection. 

22,  Disait.  —  Dans  le  Théétèle  de  Platon. 

30,  Engin.  —  Esprit;  du  latin  ingenium. 

31.  D'autrui.  —  Socrate  résumait  son  rôle,  en  se  disant  «  Accoucheur  d'es- 


Fb.496  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

prits  »,  avouant  et  rappelant  ainsi  la  profession  de  sa  mère  qui,  elle- 
même,  était  sage-femme.  V.  N.  III,  576  :  L'vn. 

38,  Prez.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  Chez  qui  se  peut  voir  cela  plus  clairement, 
que  chez  noslre  Plularque?  combien  diuersemp.nt  discourt  il  de  mesme  chose? 
combien  de  fois  nous  présente  il  deux  ou  trois  causes  contraires  de  mesme  sub- 
iect,  et  diuerses  raisons,  sans  choisir  celle  que  nous  suons  à  suiure,  au  lieu 
de  :  -  Cela...  prez  »  (lig.  36  à  38). 
244, 

5,  Fantasies.  —  Socrate  entendant  Platon  lire  son  dialogue  de  Lysis,  ou 
de  l'Amitié,  se  serait  écrié  :  «  Dieux  !  que  de  choses  ce  jeune  homme  me 
prête!  •  Et,  en  effet,  Platon  a  mis  sous  le  nom  de  son  maître  beaucoup 
de  choses  que  celui-ci  n'a  jamais  dites.  Diocèse  Laerce. 

26,  Vérité.  —  Add.  de  88  :  Car  au  bout  de  ses  discours,  il  venoit  à  s'escrier... 

29,  Elle  est.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  5;  Sextus  Empiricus,  Adv.  mathem. 

35,  Bride.  —  Retenue;  modération,  comme  port.  les  éd.  ant. 

36,  Figues.  —  Le  texte  grec  de  Plutarque,  Propos  de  table,  I,  10,  porte  con- 
■  combre  au  lieu  de  figue  (ce  qui  du  reste  importe  peu  à  la  moralité  de 

l'histoire);  Montaigne  a  suivi  ici  la  version  française  d'Amyot  ou  le  latin 
de  Xylander.  Coste. 
246, 

3,  Despita.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  se  mit  en  cholere. 
26,  Profession.  —  Ainsi  s'exprime  Cicéron,  Acad.,  II,  41. 
31,  Soudainement.  —  Plutarque.  Qu'on  ne  saurait  vivre  joyeusement  selon 
la  doctrine  d'Épicure,  8.  —  L'éd.  de  88  aj.  :  comme  fut  Phaelon. 
248, 

1,  Nombres.  —  Les  Atomes,  les  Idées,  les  Nombres,  sont  des  hypothèses 
diverses  imaginées  par  ces  philosophes  pour  expliquer,  chacun  à  sa  façon, 
leurs  théories  sur  le  système  du  monde;  c'est  du  reste  ce  qu'indique  la 
citation  latine  qui  suit. 

2,  Sages.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  cleruoyans. 

8,  Contraires.  —  C'est  l'idée  du  proverbe  italien  :  «  Se  non  e  vero,  e  bene 

trovato  (si  ce  n'est  vrai,  c'est  bien  trouvé).  » 
15,  Religions.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  car  il  n'est  pas  de/fendu  de  faire  nostre 

profit  de  la  mensonge  mesme,  s'il  est  besoing. 
20,  A  certes.  —  C.-à-d.  comme  certain. 
26,  Loix.  —  Les  Lois,, de  Platon,  traité  sur  les  institutions  à  donner  à  un 

peuple. 

31,  Republique.  —  Liv.  V.  La  République  de  Platon,  traité  sur  la  meilleure 
forme  de  gouvernement. 

32,  Piper.  —  D'où  cette  coutume,  assez  généralement  existante  dans  les 
religions  anciennes,  de  s'entourer  de  mystères  et  d'en  tenir  les  profanes  à 
l'écart.  En  Gaule,  notamment,  les  Druides  agissaient  ainsi  :  ils  cachaient 
avec  soin  au  peuple  les  doctrines  qu'ils  s'étaient  faites  sur  la  terre  et  les 
cieux,  ne  les  enseignaient  qu'à  leurs  disciples  sans  les  écrire,  et  il  fallait 
à  ceux-ci  jusqu'à  vingt  années  d'études  pour  acquérir  toute  cette  science. 

38,  Académique.  —  V.  N.  II,  228  :  Académiciens. 

40,  Belutez.  —  Etudiés,  scrutés;  bluter,  c'est  passer  au  blutoir  (tamis  pour 
séparer  la  farine  du  son). 
250, 

28,  Sortables.  —  Montaigne  (liv.  I,  ch.  XXXI,  I,  378)  blâme  l'usage  «  de  cher- 
cher à  affermir  et  appuyer  nostre  religion  par  la  prospérité  de  nos  entre- 
prises; nostre  créance,  ajoute-t-il,  a  assez  d'autres  fonderaens,  sans  l'au- 
thoriser  par  les  euenemens  ». 

36,  Et.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  voy là  pourquoi. 

39,  Excusable.  —  Saint  Paul,  ayant  reçu  mission  du  Saint-Esprit  de  prêcher 
les  Gentils,  était  à  Athènes  (51).  Conférant  avec  quelques  philoBophes  épi- 
curiens et  stoïciens  sur  les  idées  qu'il  venait  propager,  ceu.x-ci  le  menèrent 
à  l'Aréopage  pour  qu'il  y  exposât  sa  doctrine,  et  là  il  s'exprima  de  la  sorte  : 
«  Athéniens,  lorsqu'en  passant  je  regardais  les  objets  de  votre  culte,  j'ai 


NOTES.        LIV.  11,  eu.  XII.        VOL.  lî,  PAG.  2liO.         Fb.497 

aperçu  un  autel  avec  cette  inscription  :  Au  dieu  inconnu;  ce  Dieu  que 
vous  adorez  sans  le  connaître,  c'est  lui  que  je  viens  vous  annoncer.'  »  Actes 
des  apôtres,  XVII,  23. 
40,  Près.  —  Approcha  la  vérité  de  plus  près,  en  traça  une  image  plus  Adèle 
—  Adombra,  mot  latin  francisé  par  Montaigne,  de  adumbrare,  imiter,  re- 
présenter. 
252, 

5,  Numa.  —  D'origine  sabine,  Numa  vivait  dans  la  solitude  et  avait  qua- 
rante ans,  quand  les  Romains  l'appelèrent  au  trône.  Pas  une  guerre  ne 
troubla  son  règne,  tout  entier  voué  à  la  législation  et  aux  institutions  reli- 
gieuses. Il  fonda  des  temples,  donna  des  lois  écrites,  régularisa  l'année 
qui  jusque-là  n'avait  que  dix  mois  et  à  laquelle  il  en  donna  douze,  et  ré- 
partit le  peuple  en  corps  de  métiere.  Pour  faire  adopter  ses  institutions, 
il  feignait  des  révélations  d'Egérie,  nymphe  révérée  des  Romains  comme 
déesse  des  fontaines.  Certains  critiques  modernes  pensent  que  Numa  n'a 
pas  existé  et  qu'il  n'est  que  la  personnification  de  la  législation  religieuse 
et  civile  des  Romains. 
20,  Ettect.  —  La  religion  de  Confucius  observée  en  Chine  est  la  religion  des 
lettrés,  ses  pratiques  extérieures  ne  sont  que  des  formalités  traditionnelles 
qui  au  fond  lui  sont  étrangères;  de  fait,  elle  reconnaît  un  Dieu  suprême, 
n'a  ni  dogmes,  ni  culte,  ni  prêtres,  consiste  uniquement  en  principes  de 
morale  qui  ne  le  cèdent  en  rien  à  ceux  de  la  religion  chrétienne,  et  est  peut- 
être  celle  qui  se  rapproche  le  plus  de  la  religion  idéale  philosophique.  Mais 
Montaigne  est  dans  le  vrai  quand  il  estime  qu'il  faut  aux  peuples  une  re- 
ligion qui  le  saisisse;  et  l'Église  catholique  avec  son  unité,  le  principe 
de  l'amour  du  prochain  qui  en  est  la  base  essentielle,  les  espérances  si 
consolantes,  si  bien  conçues,  pour  aider  l'homme  à  lutter  contre  ses  mau- 
vais instincts,  à  le  soutenir  contre  les  adversités  auxquelles  chacun  est  ou 
se  croit  plus  ou  moins  en  but  ici-bas,  la  confession  qui  lui  rend  la  paix 
de  la  conscience  quand  il  l'a  perdue,  ses  cérémonies  répétées,  si  bien 
ordonnées,  tout  à  la  fois  simples  et  grandioses,  si  propres  à  saisir  l'ima- 
gination et  en  même  temps  accessibles  à  tous,  est  incontestablement  sous 
ce  rapport  la  plus  parfaite  de  toutes,  lorsque  ses  ministres  s'abstiennent 
de  l'intolérance  si  peu  dans  l'esprit  du  Christ,  si  compatissant  au  contraire 
pour  toutes  les  faiblesses  humaines,  à  laquelle  certains  ont  quelque  pro- 
pension et  qui,  à  d'autres  époques,  en  ont  terni  l'histoire. 

D'une  façon  générale  la  religion  qui  répond  à  un  des  besoins  essentiels  ^ 

de  l'humanité  (car  à  qui  a  la  foi,  elle  donne  un  but  à  la  vie),  est  un  soutien 
et  une  consolation  dans  ses  épreuves,  en  est  aussi  l'agent  moralisateur  par 
excellence,  et  personne  jusqu'ici  n'a  rien  trouvé  en- approchant  qui  comme 
efficacité  soit  de  nature  à  lui  être  substitué.  •<  S'il  n'existait  pas,  il  faudrait 
l'inventer  »,  a-t-on  dit  de  Dieu;  on  peut  en  dire  autant  de  la  religion,  et 
bien  aveugles  sont  ceux  qui  le  nient,  bien  criminels  ceux  qui  la  com- 
battent. Si  son  action  est  bienfaisante,  et  en  conscience  le  contraire  n'est 
pas  soutenable,  qu'importe  ce  que  sont  ses  dogmes  et  ses  mystères!  ses 
ennemis  au  nom  de  la  raison  les  taxent  de  superstition,  de  mystifications, 
peut-être,  mais  qu'opposer  à  ce  fait  qu'il  y  a  parmi  les  croyants  autant 
d'intelligences  supérieures  que  parmi  ceux  qui  ne  le  sont  pas? 

De  nos  jours  ces  derniers,  l'emportant  dans  les  conseils  du  Gouverne- 
ment, dans  l'espoir  de  la  saper,  après  en  avoir  chassé  les  Congrégations 
religieuses  enseignantes  et  hospitalières  dont,  à  juste  titre,  ils  redoutaient 
rinfiuence  pour  le  triomphe  de  leurs  idées,  sont,  dans  leur  aveuglement, 
arrivés  à  faire  prononcer  en  France  la  séparation  do  l'Église  et  de  l'État. 
Envisagée  à  ce  seul  point  de  vue,  c'est  là  une  lourde  faute  politique  :  l'État 
y  perd  la  main-mise  sur  le  clergé,  qu'il  avait  du  fait  du  Concordat;  après 
quelques  années  d'épreuve,  l'Église,  devenue  indépendante,  sera  plus  forte 
que  jamais,  et  aura  acquis  de  pouvoir  jouer  un  rôle  politique  considérable 
alors  qu'auparavant  elle  n'en  avait  aucun.  Quel  sera  ce  rôle?  Il  est  dou- 
teux qu'elle  entre  dans  le  jeu  de  ceux  qui  ne  rêvent  que  ^a  ruine;  conser- 

ESSAIS   DE  MONTAIGNE.  —  T.   IV.  32 


Fb.498  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

vatrice  par  essence,  elle  apportera  aux  conservateurs  un  point  d'appui  qui 
leur  fait  actuellement  défaut,  et  son  action  pourra  devenir  prépondérante 
si  elle  a  la  sagesse  de  ne  s'inféoder  plus  particulièrement  à  aucun  des 
partis  (monarchiques  ou  républicains)  de  cette  nuance.  11  lui  suffira,  pour 
cela,  qu'après  avoir,  i)ar  les  moyens  dont  elle  dispose,  fait  de  la  propagande 
et  stimulé  le  zèle  électoral  de  tous  ses  fidèles,  restant  neutre  entre  tous  les 
partis  conservateurs  jusqu'après  le  premier  tour  de  scrutin,  de  propos 
délibéré  elle  agisse  au  second  tour,  avec  toute  son  énergie,  exclusivement 
en  faveur  de  celui  d'entre  eux,  quel  qu'il  soit,  qui,  au  premier,  aura  obtenu 
la  majorité,  lui  ralliant  tous  ceux. sur  lesquels  son  influence  a  action. 

20,  Celles.  —  Des  divinités.  —  Dans  les  éd.  ant.  cette  phrase  suit  immé- 
diatement celle  où  il  est  parlé  de  la  divinité  inconnue  à  Athènes,  ce  qui 
explique  l'interruption  d'idée  que  le  texte  présente. 

21,  Requis.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  pour  la  conception  du  peuple. 

23,  Soleil.  —  De  toutes  les  idolâtries,  celle  du  soleil  passe  pour  la  plus  an- 
cienne, et,  comme  le  dit  Montaigne,  c'est  la  plus  naturelle.  Encore  au 
vn*  siècle,  les  Perses  adoraient  le  Soleil;  son  culte,  d'où  découle  celui  du 
feu  observé  par  les  sectateurs  de  Zoroastre,  subsiste  encore  en  certains 
lieux  de  l'Asie  centrale;  dans  le  nouveau  monde  les  Péruviens,  les  Natchez 
le  pratiquaient;  par  contre  les  Ilottentots  adoraient  la  Lune. 

42,  Tbales.  —  Cette  analyse  de  la  théologie  païenne  est  extraite  surtout  de 
CicÉRON,  De  Nal.  deor.,  I,  10,  11,  12,  etc. 
256, 

1,  lupiter.  —  Ou  Zeus;  le  dieu  suprême,  père  et  maître  des  dieux  et  des 
hommes  chez  les  Romains,  comme  chez  les  Grecs.  II  était  fils  de  Saturne 
et  vainquit  les  Titans  qui  avaient  détrôné  son  père  qu'il  rétablit  sur  le 
trône,  et  qu'il  renversa  lui-même  plus  tard,  pour  se  partager  l'empire  du 
monde  avec  ses  frères  Neptune  et  Pluton,  donnant  au  premier  les  mers, 
au  second  les  enfers,  et  se  réservant  le  Ciel  et  la  Terre.  Il  épousa  sa  sœur 
Junon,  dont  le  caractère  altier  lui  causa  bien  des  ennuis,  et  eut  une  foule 
de  maîtresses  tant  parmi  les  déesses  que  parmi  les  mortelles.  Vulcain, 
Bacchus,  les  Muses,  Apollon  et  Diane,  Mercure,  Hercule,  Minerve  et  nombre 
d'autres  étaient  ses  enfants.  Il  est  représenté  sur  un  trône,  tenant  d'une 
main  un  sceptre,  de  l'autre  lançant  la  foudre;  à  ses  pieds  un  aigle  déployé. 
Le  chêne  lui  était  consacré;  ses  temples  les  plus  célèbres  étaient  ceux  de 
Dodone  et  d'Olympie  en  Grèce,  d'Ammon  en  Libye  et  le  Capitole  à  Rome. 

19,  Genus.  —  Exnius,  cité  par  Cicérox,  De  Divinat.,  II,  50. 

23,  Miennes.  —  Les  mœurs  et  les  idées  qui  diffèrent  des  miennes. 

32,  L'ancienneté.  —  Les  éd.  ant  port.  :  car  d'adorer  celles  de  nostre  sorte, 
maladiues,  con^ptibles  et  mortelles,  comme  faisoit  toute  V ancienneté,  des 
hom,mes  qu'elle  auoit  veu  viure  et  mourir,  et  agiter  de  toutes  nos  passions, 
au  lieu  de  :  <■  Parquoy...  ancienneté  ». 

33,  Discours.  —  C'est  ce  que  même  la  faiblesse  de  noti-e  raison  ne  peut 
excuser. 

258, 

20,  Isis.  —  Sérapis,  dieu  égyptien  en  lequel  ses  adorateurs  vo}'aient  le  dieu 
suprême,  celui  qui  ressuscite  et  donne  la  vie  et  la  santé  ;  on  l'identifie' 
parfois  avec  Osiris,  et  il  semble  que  ce  soit  le  cas  de  Montaigne.  Isis  était 
sœur  et  femme  d'Osiris;  l'Egypte  célébrait  en  son  honneur  des  mystères 
qui  se  répandirent  dans  la  Grèce  et  l'Italie.  —  En  réalité  Osiris  et  Isis, 
avant  d'être  déifiés,  auraient  été,  croit-on,  des  souverains  qui  avaient  régné 
sur  l'Egypte  et  y  avaient  fait  fleurir  l'agriculture;  le  bœuf  Apis,  qui  y  était 
adoré,  semble  n'avoir  été  qu'un  emblème  rappelant  ce  règne  bienfaisant. 

23,  Varro.  —  Cité  par  S.  Augustin,  De  Civ.  Dei,  XVIII,  5. 

26,  Cicero.  —  Tusc,  I,  26. 

33,  Pluton.  —  Ou  plutôt  prairie  où,  suivant  Platon,  au  sortir  du  corps, 
toutes  les  âmes  vont  séjourner  plus  ou  moins  longtemps  d'après  ce  qu'ont 
pu  rendre  nécessaire,  pour  se  purifier,  leurs  faits  et  gestes  en  ce  monde. 
Deux  chemins  en  partent  :  l'un  conduit  au  Tartare  (partie  de  l'Enfer  des 


NOTES.        LTV.  II,  CH.  XII.        VOL.  II,  PAG.  2;i8.  Fb.499 

anciens  où  les  méchants  subissaient  la  peine  due  à  leurs  crimes),  l'autre 
aux  îles  fortunées;  c'est  en  somme  la  conception,  sous  une  forme  plus 
anodine,  du  Purgatoire  de  la  religion  chrétienne.  Plutarque  appelle  de  ce 
même  nom  et  donne  cette  même  affectation  à  l'espace  entre  la  terre  et 
la  lune,  où,  suivant  lui.  les  âmes  viennent  après  la  mort  et  d'où,  après 
une  pénitence  suffisante,  celles  des  bons  se  rendent  dans  les  régions  visi- 
bles de  la  lune,  et  celles  des  méchants  dans  les  régions  invisibles. 
260. 

17,  Ce  qu'elle  peut.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  nous  arauom  la  faiblesse  cl  inca- 
pacité de  nos  forces. 

29,  S.  Paul.  —  Lettre  aux  Corinthiens,  I,  2,  9,  d'après  Isaie,  LXIV,  4. 

35,  Hector.  —  Participa  avec  gloire  au  siège  de  'Troie  où  il  soutint  de  nom- 
breux combats  contre  les  plus  redoutables  guerriers  grecs;  tua  plusieurs  de 
leurs  chefs,  entre  autres  Patrocle,  l'ami  d'Achille,  et  périt  lui-même  sous 
les  coups  de  ce  dernier,  sorti  de  son  inaction  pour  venger  son  ami.  Achille 
vainqueur  attacha  son  cadavre  à  son  char  et  le  traîna  trois  fois  autour  des 
mure  de  la  ville  ;  il  consentit  cependant  à  rendre  ce  corps  à  Priam  venu 
pour  l'implorer;  ces  faits  et  la  colère  d'Achille  qui  les  a  précédés  sont  le 
sujet  principal  de  l'Iliade. 
262. 

1,  Ny  que...  nous.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  et  qu'il  souffre  pour  luy?  et. 

IL',  Premier.  —  Pline,  A'aL  Hist.,  X,  2.  —  Le  phénix  était  un  oiseau  fabuleux 
qui,  suivant  les  anciens,  était  unique  en  son  espèce,  vivait  plusieurs  siècles, 
se  faisait  périr  sur  un  bûcher  et  renaissait  de  ses  cendres. 

40,  Luy.  —  Selon  l'expression  du  pape  S.  Calixte  et  de  S.  Augustin  que  le 
concile  de  Trente  a  adopté,  «  Dieu  couronne  ses  dons,  en  couronnant  nos 
mérites  ». 

13,  Faillir.  —  «  Pourquoi  nous  as-tu  fait  fourvoyer,  ô  Eternel,  hors  de  tes 
voyes,  pourquoi  as-tu  estrangé  nostre  cœur  de  ta  crainte?  •  Isaie,  traduc- 
tion de  Calvin. 

264, 

14,  Plutarque.  —  Dans  le  traité  :  Pourquoi  la  justice  divine  diffère  quelquefois 
la  punition  des  maléfices,  4. 

20,  Cognoissance.  —  De  nos  jours,  on  n'hésite  cependant  pas,  en  France,  à 
faire  de  pareils  gens  ministres  de  la  guerre  et  de  la  marine  et  eux-mêmes  ne 
doutent  pas  un  instant  être  à  hauteur  de  leur  tâche  et  les  voilà  jouant  avec 
la  plus  entière  conviction  le  rôle  de  la  mouche  du  coche,  avec  cette  diffé- 
rence toutefois  que  leur  action,  moins  anodine,  s'exerce  surtout  sur  le  per- 
sonnel qu'ils  bouleversent,  sans  la  moindre  conscience,  au  gré  de  leurs 
passions  politiques.  Pour  le  reste,  la  machine,  il  est  vrai,  continue  à  fonc- 
tionner en  vertu  de  la  vitesse  acquise;  les  conséquences  de  leur  direction 
nulle  ou  néfaste  ne  se  font  sentir  qu'à  la  longue,  alors  qu'en  a  déjà  disparu 
la  cause;  mais  le  mal  est  fait,  l'aiguillon  demeure  dans  la  plaie I  Puissent 
les  événements,  par  de  trop  cruelles  épreuves,  ne  pas  ouvrir  trop  tardive- 
ment nos  yeux  sur  le  danger  que  présentent  pour  le  pays  ces  atteintes 
flagrantes  au  bon  sens. 

21»,  Sempronius.  —  En  196.  —  Tite-Live,  XLI,  16. 

3ï,  Minerue.  —  Tite-Live,  XLV,  33.  A  Amphipolis,  en  168,  lors  des  fêtes 
données  pour  célébrer  la  défaite  de  Persée  et  la  pacification  de  la  Grèce; 
ipais  les  armes  seules  des  ennemis  furent  brûlées,  les  autres  dépouilles  furent 
envoyées  à  Rome  et  les  masses  de  numéraire,  lingots  et  objets  d'orfèvrerie 
versés  au  Trésor  étaient  si  considérables  que  les  citoyens  romains  ne 
payèrent  plus,  dit-on,  d'impôt  jusqu'à  l'an  44,  c.-à-d.  pendant  plus  d'un 
siècle. 

35,  Aussi.  —  "  A  l'embouchure  de  l'Indus,  Alexandre  s'avança  au  delà  et  en 

pleine  mer  sacrifia  aux  dieux  et  précipita  dans  les  flots  les  taureaux  im- 

•  moles  à  Neptune  et  les  coupes  d'or  qui  ont  servi  aux  libations,  demandant 

aux  dieux  de  protéger  le  voyage  que  Néarquo  va  entreprendre  dans  le  golfe 


Pb.oOO  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Persique.  •  Arrien,  VI,  19.  —  Aucun  historien  ne  parle  des  sacrifices  hu- 
mains ou  boucheries  d'hommes,  que  lui  prête  Montaigne. 
40,  Vmbris.  —  Pallas,  fils  d'Évandre,  roi  du  Latiura,  allié  d'Énée,  ayant  été 
tué  par  Turnus,  roi  des  Rutules,  que  la  jalousie  avait  armé  contre  ce 
dernier,  celui-ci,  après  lui  avoir  fait  de  magnifiques  funérailles,  com- 
prenant les  sacri  lices  dont  il  est  ici  question,  vengea  sa  mort  en  tuant 
Turnus.  Ce  sujet  est  le  thème  des  six  derniers  livres  de  l'Enéide. 
266, 

1,  Getes.  —  HÉRODOTE,  IV,  94. 

10,  Amestris.  —  Plutahque,  De  la  superstition,  13;  Hérodote,  VII,  114.  — 
Amestris  était  la  femme  et  non  la  mère  de  Xerxès;  celle-ci  était  Atossa,  fille 
de  Cyrus. 
14,  Themixtitan.  —  Ou  plutôt  Tenuxtitlan,  pris  souvent  pour  une  divinité, 
est  l'ancien  nom  de  Mexico;  ce  nom  de  Mexico  (source  d'eau)  n'était  alors 
•     lui-même  que  celui  d'une  partie  de  la  ville,  les  Espagnols  l'ont  appliqué  à 
la  ville  entière. 
16,  Innocence.  —  Ces  sacrifices  humains,  d'enfants  et  autres,  étaient  fré- 
quents chez  les  Mexicains;  en  une  seule  fois,  rapportent  les  chroniques, 
auraient  été  immolés  douze  mille  prisonniers  de  guerre.  Au  début  de  la 
conquête,  des  blancs,  faits  prisonniers  ou  dont  les  indigènes  s'étaient  em- 
parés par  surprise,  furent  sacrifiés  de  la  sorte.  «Dans  certains  temples,  on 
nourrissait   parfois  une  année  durant,  un  esclave  qui  représentait  l'idole 
principale  et   qui,  après  avoir  joui  tout  ce  temps  de  l'adoration,   était 
sacrifié  à  la  fin  de  son  règne.  Herrera  et  autres. 
18,  Carthaginois.  —  Pi.utarque.  De  la  superstition.  13. 
22,  Lacedemoniens.  —  Plutarque,  Apophth.  des  Lacédémoniens,  vers  la  fin. 
25,  Gratifier.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  l'ouurier  par  la  ruyne  de  son  ouarage,  et. 
27,  Coulpables.  —  Préserver  les  coupables  de  la  peine  qu'ils  avaient  méritée. 
30,  Commises.  —  V.  N.  I,  24  :  Dueil. 

33,  Et  ces  ...  ennemis.  —  Var.  de  88  :  Et  que  Decius  pour  acquérir  la 
bonne  grâce  des  dieux,  enuers  les  affaires  Romaines,  se  brulasl  tout  vif  en 
holocauste  à  Saturne,  entre  les  deux  armées. 
33,  Decius.  —  Décius,  consul  romain,  dans  une  bataille  qu'il  livra  aux  Latins, 
se  voua  aux  dieux  infernaux,  sur  la  foi  d'un  oracle,  pour  assurer  la  victoire 
à  son  armée,  et  se  jetant  au  milieu  des  rangs  ennemis,  y  périt  sous  le.urs 
coups  (341).  Son  fils  et  son  petit-fils  imitèrent  son  dévouement  :  le  premier, 
dans  une  bataille  livrée  aux  Samnites  (295);  le  second,  dans  la  guerre 
contre  Pyrrhus  (279).  —  Codrus,  le  dernier  roi  d'Athènes,  se  sacrifia  de 
même  dans  une  guerre  contre  les  Ioniens,  un  oracle  ayant  déclaré  que 
l'avantage  demeurerait  à  celui  des  deux  peuples  dont  le  chef  serait  tué 
(1132). 
268, 

9,  Poisson.  —  Hérodote,  III,  41  et  42.  —  La  mauvaise  fortune  que  Polycrate 
avait  si  infructueusement  tenté  de  conjurer,  finit  par  l'atteindre  :  alors 
qu'il  méditait  la  conquête  de  l'Ionie,  il  fut  pris  par  trahison  et  mis  en 
croix  (524). 
11,  Mabometans.  —  Les  Corybantes  étaient  les  prêtres  de  Cybèle  dont  ils 
célébraient  le  culte,  de  la  façon  la  plus  bruyante  et  la  plus  désordonnée, 
hurlant  et  allant  jusqu'à  se  déchirer  dans  leurs  accès  de  frénésie  (V.  N.  II, 
594)  —  Les  Ménades  ou  Bacchantes  célébraient  le  culte  de  Bacchus,  leur 
dieu,  par  des  orgies  oii  elles  se  livrai.ent  à  des  transports  furieux  de  même 
ordre.  —  De  nos  jours  encore,  chez  les  Mahométans,  les  Aissaoua  en 
Afrique,  les  Fakirs  en  Orient  et  surtout  dans  les  Indes,  se  soumettent  aux 
jeûnes  les  plus  austères  et  aux  tortures  les  plus  afi'reuses  pour  mériter  la 
félicité  éternelle  et  la  vénération  de  leurs  coreligionnaires. 
20,  Mastiner.  —  C.-à-d.  de  mutiler  son  corps,  le  rendre  incapable  des  fonc- 
tions qui  lui  appartiennent,  fonctions  purement  matérielles  et  soumises  par 
leur  nature  à  la  direction  de  l'àme,  et  cela  pour  épargner  à  celle-ci... 
33,  Jnterest.  —  Préjudice. 


NOTES.        LIV.  11,  CH.  XII.        VOL.  Il,  PAG.  270.  Fb.oOi 

270, 

2,  Cela.  —  DioGÈNE  Laerce,  II,  117. 

26,  Seiour.  —  Sans  jamais  se  reposer. 

32,  Attaquent.  —  Var.  des  éd.  ant.  et  de  l'ex.  de  Bordeaux  :  attachent. 
272, 

14,  L'asseure.  —  Dans  le  Timée. 

23,  Epicurus.  —  Diogène  Laerce,  X,  85. 

29,  Ceres.  —  Bacchus  répandit,  parmi  les  hommes,  la  culture  de  la  vigne; 
Cérès  leur  enseigna  l'agriculture. 

29,  Hérodote.  —  Les  dires  qui  suivent  sont  tirés  de  Pline,  Vil  et  Vlll,  et 
d'Hérodote,  111  et  IV;  mais,  en  les  rapportant,  ils  ne  les  présentent  que 
comme  des  on-dit,  et  déclarent  en  même  temps  ne  pas  y  croire;  Pline 
ajoute  même  que,  si  on  les  admettait,  il  faudrait  également  ajouter  foi  à 
tous  les  contes  dont  la  fausseté  a  été  avérée  depuis  tant  de  siècles. 

34,  Pâtes.  —  Pline  estime  que  ce  doit  être  une  espèce  de  singes. 

40,  Feu.  —  Dans  les  îles  Mariannes,  dans  le  Grand  Océan,  découvertes  par 
Magellan  en  1521,  les  habitants,  outre  quantité  de  choses  que  nous  croyons 
nécessaires  à  la  vie,  qui  leur  manquaient,  n'avaient  jamais  vu  de  feu;  ils 
ignoraient  également  qu'il  y  eût  d'autres  terres  et  se  regardaient  comme  les 
seuls  hommes  qui  fussent  dans  l'univers. 

41,  Noire.  —  Un  curieux  et  habile  anatomiste,  dit  Hérodote,  m'a  assuré  que 
le  fait  était  absolument  faux. 

42,  Hommes.  —  II  est  vraisemblable  que  ces  transformations  étaient  produites 
tout  simplement  parce  que  ces  gens  se  vètissaient  une  partie  de  l'année  de 
peaux  de  loup  et  de  cheval. 

43,  Plutarque.  —  Dans  son  traité  De  la  face  de  la  Lune;  Pline,  VII,  2. 

44,  Odeurs.  —  Plutarque  en  effet,  et  Pline  avec  lui,  parlant  sur  la  foi  de 
Mégasthène,  disent  qu'à  l'extrémité  des  Indes,  près  des  sources  du  Gange, 
il  y  a  une  peuplade  qui  n'a  point  de  bouche,  ce  qui  les  fait  nommer  «  As- 
tômes  »;  ils  sont  tout  velus,  et  ne  mangent  ni  ne  boivent;  ils  font  brûler 
une  certaine  racine  qui  se  trouve  dans  le  pays  et  se  nourrissent  du  parfum 
qui  s'en  exhale,  qu'ils  respirent  par  les  narines. 

274, 

14,  N'auoit.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  ny  force,  ny  cognoissance. 

16,  Noire.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  23  et  31  ;  Gauen,  II,  I  ;  Lactance,  Div.  Inslit., 
m,  23;  etc.  Dans  des  temps  plus  rapprochés,  un  Allemand,  Voigt,  a  publié 
aussi  une  dissertation  Adversus  alborem  nivis  (contre  la  blancheur  de  la 
neige). 

18,  Dire.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  23;  Sextus  Empiricl'S,  Hyp.  Pyrrh. 

21,  "EffTi.  —  Citation  que  Montaigne  a  fait  précéde1|,de  sa  traduction.  —  Cette 
pensée  d'Euripide  a  été  utilisée,  comme  forme  et  comme  fond,  par  Arnobe, 
Descartes,  Bossuet,  Pascal  et  d'autres  :  «  Ce  que  l'on  appelle  veiller  (être 
éveillé),  n'est  peut-être  qu'une  phase  du  sommeil  perpétuel.  »  Arnobe.  — 
«  Qui  sait  si  cette  autre  partie  de  la  vie  où  nous  pensons  veiller,  n'est  pas 
un  autre  sommeil,  peu  différent  du  premier.  » 

24,  Eloise.  —  Eclair.  Le  mot  est  encore  employé  couramment  dans  les  cam- 
pagnes du  S.-O.  de  la  France;  vient  du  latin  elucere,  briller,  comme  le  mot 
éclair  lui-même. 

29,  Melissus.  —  Diogène  Laerce,  IX,  24. 

32,  Protagoras.  —  Diogène  Laerce,  IX,  51  ;  Sénèque,  Episl.  99. 

35,  Mansiphanes.  —  Sénèque,  ^pist.  88.  —  Est  mis  ici,  par  erreur  de  typo- 
graphie, pour  Nausiphanez,  rectification  que  porte  l'ex.  de  Bordeaux. 
276 

2,  Comprins.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  37;  Sénèque,  Epist.  88. 

3,  Il  m'a.  —  Dans  les  éd.  ant.  ce  passage  commence  par  cette  précaution 
oratoire  :  le  ne  sais  si  la  doctrine  Ecclésiastique  en  iuge  autrement,  et  me 
soubs-mets  en  tout  et  par  tout  à  son  ordonnance,  mais  il  m'a. 

11,  Grammariens.  —  C.-a-d.  viennent  du  fait  des  grammairiens;  sont  «  ques- 
tion de  mots  -,  dirions-nous  aujourd'hui.  —  Cette  influence  omnipotente 


Fb.D02  ESSAIS  DE  MO.NTAlGiNE. 

de  la  grainiiKiiiT,  .Molière,  dans  Les   femmes  savantes,  la  signale   de   la 
sorte  : 

•  La  grammaire  qui  sait  régenter  juscju'aiix  rois. 
Et  les  fait,  la  main  haute,  obéir  à  ses  lois.  » 

«  Quelque  étrange  que  cette  assertion  puisse  paraître,  dit  de  son  côté 
M"  DupANLOUP,  Discours  de  réception  à  l'Académie  française,  je  ne  crains 
pas  d'aflirmer  que  la  grammaire  et  le  dictionnaire  sont  deux  colonnes  de 
la  raison  et  de  la  société  humaine.  • 
16,  Hoc.  —  Mot  latin  qui  signifie  «  ceci  »,  et  par  lequel  commence  la  l'or- 
mule  de  la  consécration  dans  le  sacrement  de  l'Eucharistie  :  «  Hoc  est  cor- 
pus meum  (ceci  est  mon  corps).  »  —  Allusion  de  Montaigne  à  la  querelle 
sur  ce  point  des  catholiques  et  des  protestants,  ceux-ci  niant  la  transsuli- 
stantiation,  autrement  dit  le  changement  qui  s'opère  en  ce  moment  du 
pain  et  du  vin  en  la  substance  même  du  corps  et  du  sang  de  N.-S.  Jésus- 
Christ. 

BoiLEAU,  dans  sa  Satire  XII,  Sur  l'Équivoque ,  qui  traite  précisément 
de  la  diversité  des  interprétations  auxquelles  prête  le  langage  (satire  qui 
fut  frappée  d'interdit  et  ne  parut  qu'après  la  mort  de  l'auteur),  celui-ci 
faisant  allusion  aux  disputes  religieuses  soulevées  au  iv  siècle,  entre  les 
orthodoxes  disant  que  le  Fils  est  de  même  substance  que  le  Père  «  homou- 
sios  »,  et  les  Ariens  soutenant  qu'il  est  d'une  substance  semblable  «  homoiou- 
sios  »,  mots  qui  ne  diffèrent  que  par  la  diphtongue  oi,  qui  manque  dans  le 
premier  et  se  trouve  dans  le  second,  a  dit  : 

«  El  l'Eglise  elle-même  eut  peine  à  s'en  sauver... 
Lorsque  attaquant  le  Verbe  et  sa  divinité, 
D'une  syllabe  impie,  un  seul  mot  augmenté 
Remplit  tous  les  esprits  d'aigreurs  si  meurtrières 
Et  fit  du  sang  chrétien  couler  tant  de  rivières!  » 

Il  avait  d'abord  écrit  : 

•  Tu  fis  dans  une  guerre  et  si  triste  et  si  longue, 
Périr  tant  de  chrétiens,  martyrs  d'une  diphtongue.  » 

21,  Donc  —  C'est  le  raisonnement  désigné  en  scolastique  sous  le  nom  de 
«  Sophisme  du  menteur  »,  attribué  par  les  uns  à  Zenon  (Cicéro.n,  Acad., 
II,  29;  Aulu-Gelle,  XVIII,  2;  etc.),  par  d'autres  à  Épaminondas,  et  qui  a 
été  le  sujet  de  discussions  innombrables  :  «  Tu  dis  que  tu  es  un  menteur: 
si  tu  dis  vrai,  tu  mens;  si  tu  mens,  tu  ne  dis  pas  vrai;  donc  tu  n'es  pas  un 
menteur.  » 

36,  Que  sçay-ie?  —  Cette  devise  et  la  balance  en  équilibre,  sont  devenues 
l'épigraphe  des  Essais.  Elles  figurent  pour  la  première  fois  dans  l'édition 
de  1635,  au-dessous  du  portrait  de  Montaigne.  Elles  caractérisent  du  reste 
parfaitement  sa  philosophie,  que  peint  également  bien  cette  maxime  qu'il 
avait  inscrite  en  grec  sur  les  solives  de  sa  bibliothèque  :  <■  11  n'est  point 
de  raisonnement  auquel  on  ne  puisse  opposer  un  raisonnement  con- 
traire. »  C'est  ce  «  Que  sçay-ie?  »  qui  indignait  si  fort  Pascal  et  lui  a  fait 
dire  en  parlant  de  Montaigne  :  «  Il  met  toutes  choses  dans  un  doute  si 
universel  et  si  général,  que  l'homme  doutant  même  s'il  doute,  son  incerti- 
tude roule  sur  elle-même  dans  un  cercle  perpétuel  et  sans  repos,  s'opposant 
également  à  ceux  qui  disent  que  tout  est  incertain  et  à  ceux  qui  disent 
que  tout  ne  l'est  pas,  parce  qu'il  ne  veut  rien  assurer.  C'est  dans  ce  doute 
qui  doute  de  soi,  et  dans  cette  ignorance  qui  s'ignore,  que  consiste  l'es- 
sence de  son  opinion.  Il  ne  peut  l'exprimer  par  aucun  terme  positif;  car, 
s'il  dit  qu'il  doute,  il  se  trahit  en  assurant  au  moins  qu'il  doute,  ce  qui 
étant  formellement  contre  ses  intentions,  il  en  est  réduit  à  ne  s'expliquer 
(jup  par  interrogations,  de  sorte  que,  ne  voulant  pas  dire  :  «  Je  ne  sais  »,  il 
dit  :  "  Que  sais-je?  »  de  quoi  il  a  fait  sa  devise,  en  la  mettant  sous  les  bassins 


NOTES.         LIV.  II,  eu.  XII.         VOL.  II,  PAG.  276.  Fb.b03 

d'une  balance,  lesquels  pesant  les  contradictions,  se  trouvent  dans  un  par- 
fait équilibre;  en  un  mot,  il  est  pur  Pyrrhonien.  •  —  Et,  ce  disant,  Pascal 
était  bien  dans  le  vrai,  car  non  seulement  Montaigne  était  pyrrhonien, 
mais  il  en  a  convenu  :  Lors  de  la  reconstruction  de  son  château,  après 
l'incendie  de  1885,  on  a  trouvé  dans  les  décombres  un  jeton  de  cuivre  dont 
l'empreinte  figure  au  Musée  de  Périgucux  et  porte  :  sur  une  face  les  armes 
de  Montaigne  entourées  du  collier  de  Saint-Michel  et  l'exergue  «  Michel, 
SEiGNEVR  DE  Mo.NTAiGNE  •  ;  au  rcvers,  dans  un  écu,  une  balance  dont  les  pla- 
teaux sont  horizontaux  et  la  légende  «  4?.  1576  'Enlxw  »  (Je  m'abstiens), 
qui  est  précisément  le  mot  d'ordre  et  le  principe  essentiel  de  l'école  des 
sceptiques  :  le  chiffre  42  indique  l'âge  que  Montaigne  avait  alors,  en  1576. 
—  Une  autre  épigraphe  :  «  Vires  acquinl  eundo  (ses  forces  s'accroissent  au 
fur  et  à  mesure  qu'il  va)  »,  se  trouve  sur  une  édition  de  1598  et  un  grand 
nombre  d'autres  subséquentes.  Elle  est  écrite  de  la  main  même  de  l'auteur 
sur  l'exemplaire  de  Bordeaux  qui  devait  servir  à  la  réimpression  de  l'ou- 
vrage, et  cependant  elle  n'a  été  reproduite  ni  sur  l'édition  de  1595,  ni  sur 
celle  de  1635,  ce  qui  porte  à  croire  que  les  éditeurs  posthumes  de  Mon- 
taigne, s'inspirant  .probablement  de  sa  pensée  qu'ils  avaient  été  à  même 
de  connaître,  ne  l'ont  considérée  que  comme  une  idée  à  laquelle,  à  la  ré- 
flexion, il  n'aurait  pas  été  donné  suite;  si  exacte  fût-elle,  puisque  le  texte 
primitif  allait  toujours  en  augmentant,  appliquée  à  son  œuvre  par  l'auteur 
lui-même,  elle  eût  dénoté  par  trop  de  prétention,  escomptant  par  avance 
une  vogue  qui  n'est  venue  que  notablement  plus  tard. 
278, 

2,  Irreuerence.  —  Dont  il  est  question  plus  haut  :  «  Dieu  ne  peut  faire  ceci 
ou  cela.  » 
6,  Ancien.  —  Cet  ancien  c'est  Pline,  II,  7,  dont  Montaigne,  dans  les  éd. 
ant.,  avait  inscrit  le  nom  que,  finalement,  il  a  rayé. 

28,  Point.  —  Ne  le  comprend  point.  —  Du  temps  de  Montaigne,  le  mot 
appréhender,  du  latin  apprehendere,  prendre,  saisir,  n'était  employé  que 
dans  ce  sens  et  absolument  inconnu  dans  celui  de  craindre  qui,  aujour- 
d'hui, a  tendance  à  prédominer.  ^ 

32,'  Poix.  —  Montaigne,  en  philosophe,  contredit  ici  l'auteur  qu'il  a  traduit 
et  qu'il  dit  défendre  :  «  L'homme,  dit  très  orthodoxement  Sebond,  est,  par 
sa  nature,  en  tant  qu'homme  la  véritable  et  vivante  image  de  Dieu;  de 
même  que  le  cachet  marque  son  empreinte  sur  la  cire,  Dieu  a  empreint  en 
l'homme  sa  ressemblance,  etc..  » 

38,  Encore.  —  C.-à-d.  et  je  désire  qu'aucun  chrétien  ne  fasse  comme  eux. 

40,  Yeux.  —  El  mesurer  à  nostre  mesure,  ajout,  les  éd.  préc. 

41,  Nostres.  —  C.-à-d.  chrétien  comme  nous.  Il  s'agit  ici  de  Tertullien,  dans 
ce  passage  si  connu  et  si  souvent  cité  dans  les  discussions  théologiques  : 
•<  Quis  negal  Deus  esse  corpus,  elsi  spirilus  sit?  (Qui  peut  nier  que  bien 
qu'espion,  Dieu  n'ail  aussi  un  corps?)  »  ce  qui,  à  tout  prendre,  n'est  qu'une 
assertion  de  rhéteur  qui  n'éclaire  en  rien  la  question. 


280, 


1,  Curant.  —  Cicéron,  De  \al.  deor.,  111,  35.  —  Ce  que  ce  même  auteur  a 
encore  exprimé  sous  cette  autre  forme  plus  connue  :  «  De  minimis,  non 
curât  prxlor  [le  préteur  [magistrat  romain  qui,  dans  les  provinces,  était 
investi  de  tous  les  pouvoirs]  ne  s'occupe  pas  des  détails)  »;  maxime  favorite 
de  bien  des  paresseux  et  de  bien  des  ignorants,  portés  à  en  faire  l'excuse 

'  de  leur  paresse  et  de  leur  ignorance,  par  une  application  abusive  et  aussi 
une  traduction  fautive,  pour  être  trop  littérale,  son  vrai  sens  étant  :  Le 
préteur  ne  se  laisse  ni  absorber  ni  arrêter  par  les  détails,  une  fois  sa  déci- 
sion prise  et  l'action  en  train, 
26,  S.  Paul.  —  Ep.  aux  Romains,  1,  22  et  23. 

34,  Faustine.  —  IIérodien,  IV.  —  C'est  par  ironie  que  Montaigne  l'appelle 
'■  honneste  femme  »;  ses  débauches  n'étaient  ignorées,  dans  l'empire,  que 
de  Marc-Aurèle,  son  mari. 

35,  Cbeuremorte.  —  Porter  quelqu'un  ainsi,  c'est  le  porter  sur  le  dos,  ses 


Fb.b04  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

bi'as  entourant  le  cou,  ses  jambes,  que  l'on  soutient,  enserrant  le  corps  de 
celui  qui  porte. 
282, 

9,  Offre.  —  Plutarque,  Apophth.  des  Lacédémoniens. 

10,  Douzaines.  —  La  Bruyère  a  exprimé  la  même  pensée  :  -  Faites  donc 
seulement  une  goutte  d'eau  »,  dit-il,  au  lieu  de  :  «  II  ne  sçauroit  forger  vn 
ciron  »  ;  seulement  l'assertion  de  Montaigne  est  toujours  vraie,  tandis  que 
les  progrès  de  la  science  ont  réduit  à  néant  le  défi  de  La  Bruyère. 

10,  Trismegiste.  —  Hermès  Trismégiste;  personnage  fabuleux  que  les  Égyp- 
tiens et,  d'après  eux,  les  Grecs,  regardaient  comme  le  père  de  toutes  les 
sciences,  le  législateur  et  le  bienfaiteur  de  l'Egypte,  et  que  l'on  place  dans 
le  XX«  siècle.  Il  existait  sous  son  nom  quai'ante-deux  livres  sacrés,  appelés 
••  livres  hermétiques  »,  confiés  aux  prêtres  seuls  et  qui  contenaient  toute 
l'encyclopédie  religieuse  et  scientifique  des  premiers  temps  de  l'Egypte. 

13,  Faire.  —  Asclepius  dialog.,  ap.  Apuleium. 

17,  Animal.  —  Animé.  —  Cicéron,  De  Nat.  deor.,  III,  13,  14;  tous  les  argu- 
ments qui  suivent  sont  tirés  du  même  ouvrage,  II,  6,  8,  11,  12,  16,  etc. 
284, 

1,  Imbécillité.  —  De  faiblesse,  d'imperfection. 

8,  Desbastiment.  —  Le  théisme  et  l'athéisme,  tous  ces  ai'guments  pour  et 
contre  la  divinité,  se  forgent... 
10,  Estirons.  —  Étendons,  allongeons. 

21,  Mont  Senis.  —  Montaigne  cite  ici  le  mont  Cenis,  au  pied  duquel  il  était 
passé  en  revenant  d'Italie,  comme  i-eprésentant  pour  lui  et  vraisemblable- 
ment son  époque,  le  point  le  plus  élevé  de  la  terre,  bien  qu'il  n'ait  que 
3.600  m.,  tandis  que  son  voisin  le  mont  Blanc,  sommet  culminant  de  l'Eu- 
rope, en  a  4.800.  Jlais  on  s'inquiétait  peu  alors  de  ce  dernier,  perdu  dans  le 
massif  des  Alpes,  non  plus  que  de  ces  autres  absolument  inconnus,  il  y  a 
à  peine  quatre-vingts  ans  :  le  Kilimandjaro  (6.130  m.)  en  Afrique;  le  Sorata 
(7.900  m.),  un  des  sommets  des  Andes  dans  l'Amérique  du  Sud;  le  Gauri- 
zankar  (8.840  m.)  dans  l'Himalaya,  en  Asie,  la  plus  haute  montagne  du 
globe.  —  Quant  à  la  profondeur  des  mers,  on  n'avait  pas  sur  elle  de  données 
plus  approchées;  ce  n'est  également  que  depuis  le  siècle  dernier  qu'on  a 
donné  à  cette  étude  une  extension  de  laquelle  il  résulte  qu'à  l'heure  actuelle 
la  plus  grande  profondeur  relevée  se  trouve  dans  l'océan  Pacifique,  en  un 
point  dénommé  «  Fosse  du  Néro  »,  où  a  été  constaté  un  fond  de  9.650  m. 

22,  Astrolabe.  —  Instrument  pour  mesurer  la  hauteur  des  astres  au-dessus 
de  l'horizon. 

27,  Temple.  —  Le  fait,  rapporté  par  Josèphe,  Anl.  jiid.,  XVIII,  4,  qui  parle 
d'Anubis,  au  lieu  de  Sérapis,  se  passa  en  l'an  32,  sous  le  règne  de  Tibère, 
qui  fit  crucifier  les  prêtres  qui  avaient  pris  part  à  ce  sacrilège,  détruire  le 
temple,  jeter  la  statue  du  dieu  dans  le  Tibre  et  exila  l'amoureux,  lui  accor- 
dant les  circonstances  atténuantes,  en  raison  de  la  violence  de  son  amour. 

38,  Diuins.  —  Plutarque,  Romulus,  3,  qui  donne  Taruncius,  qu'il  nomme 
Tarucius,  non  comme  un  jeune  homme,  ce  qui  eût  été  plus  généreux  de 
la  part  du  Dieu,  mais  comme  un  homme  déjà  fort  âgé. 

39,  Estoc.  —  Des  deux  côtés,  du  côté  paternel  et  maternel  —  Estoc,  ligne 
d'extraction,  source  d'une  lignée,  point  auquel  la  lignée  entière  rapporte 
son  commencement.  Nicox. 

286, 

2,  Neptune.  —  Platon  descendait  au  sixième  degré,  par  sa  mère,  de  Selon 
qui,  lui-même,  tirait  son  origine  de  Neptune. 

4,  Platon.  —  Plutarque,  Symposiaques,  VIII,  1,  rapporte  que,  d'après  une 
tradition,  Apollon  aurait  apparu  à  Ariston,  lui  défendant  d'avoir  commerce 
avec  sa  femme,  parce  qu'elle  était  enceinte  de  son  fait,  et  qu'elle  accoucha 
le  jour  même  de  l'anniversaire  de  ce  dieu,  dont  Platon  était  considéré 
comme  étant  fils.  Voir  aussi  Diogène  Laerce,  III,  2.  —  C'est  le  cas  identique, 
à  quatre  siècles  d'intervalle,  à  celui  de  Joseph  et  de  Marie,  au  dire  des 
saintes  Ecritures. 


NOTES.         LIV.    II,  CH.  XII.         VOL.  II,  PAG.  286.  Fb.SOa 

11,  Langue.  —  Ce  nom  de  «  merlin  »  donné  à  ces  enfants  supposés  nés  du 
fait  d'un  enchantement,  d'un  miracle,  est  probablement  une  allusion  au 
célèbre  enchanteur  de  ce  nom.  qui  vivait  au  v°  siècle  et  était  issu,  disait- 
on,  d'une  religieuse  et  d'un  démon  ayant  pris  forme  humaine  pour  la 
circonstance,  ce  que  l'Église  (S.  Cyprien,  S.  Augustin),  et  aussi  la  science 
(Ambroise  Paré),  ont  longtemps  admis;  aussi,  les  tribunaux  ecclésiastiques 
n'hésitaient-iis  pas  à  pourchasser  le  démon  en  livrant  au  feu  sa  victime, 
pour  la  débarrasser  de  son  persécuteur. 

2;i  Figure.  —  Cicéron,  De  Nat.  deor.,  I,  18. 

26,  Xenophanes.  —  Eusèbe,  Prép.  évang.,  XIII,  13. 

28,  Nous.  —  Cette  réflexion  de  Montaigne  rappelle  cette  boutade  de  Fonte- 
nelle,  répondant  à  quelqu'un  disant  devant  lui  que  Dieu  avait  fait  l'homme 
à  son  image  :  •  Celui-ci,  depuis,  le  lui  a  bien  rendu.  » 

36,  Mangent.  —  Dans  tout  ce  passage,  Montaigne,  qui  combat  les  idées  de 
ceux  qui  estiment  que  tout  a  été  fait  pour  l'homme,  est  en  opposition 
complète  avec  Sebosd,  ch.  97  :  «  Le  ciel  te  dit  (à  l'homme)  :  le  te  fournis  de 
lumière  le  iour,  à  fin  que  tu  veilles;  d'ombre  la  nuict,  à  fin  que  tu  dormes 
et  reposes;  pour  ta  récréation  et  commodité,  ie  renouuelle  les  saisons,  ie 
te  donne  la  fleurissante  douceur  du  printemps,  la  chaleur  de  l'esté,  la  fer- 
tilité de  l'automne,  les  froideurs  de  l'hyuer...  L'air  :  le  te  communique  la 
respiration  vitale,  et  offre  à  ton  obéyssance  tout  le  genre  de  mes  oyseaux. 
L'eau  :  le  te  fournis  de  quoy  boire,  de  quoy  te  lauer.  La  terre  :  le  te  sou- 
tiens; tu  as  de  moy  le  pain  de  quoi  se  nourrissent  tes  forces,  le  vin  de 
quoi  tu  esiouis  tes  esprits,  etc..  »  —  Bossuet,  critiquant  sur  ce  point  la 
manière  de  voir  de  l'auteur  des  Essais  et  son  mode  de  discussion,  prend 
notamment  à  partie  ce  passage  où  il  assimile  l'homme  à  l'oison  :  «  Les 
hotiimes  voudraient  se  persuader  qu'ils  ne  sont  que  corps,  et  ils  aspirent  à 
la  condition  des  bêtes  qui  n'ont  que  leur  corps  à  soigner;  ils  semblent 
vouloir  élever  les  animaux  jusqu'à  eux-mêmes,  afin  d'avoir  droit  de  s'a- 
baisser jusqu'aux  animaux  et  de  vivre  comme  eux.  Ils  trouvent  des  piiilo- 
sophes  qui  It^s  fiattent  dans  ces  pensées  :  Plutarque  a  fait  des  traités 
entiers  sur  le  raisonnement  des  animaux  qu'il  élève,  ou  p-u  s'en  faut,  au- 
dessus  des  hommes;  c'est  plaisir  de  voir  Montaigne  faire  raisonner  son  oie, 
qui,  se  promenant  dans  sa  basse-cour,  se  dit  à  elle-même  que  tout  est  fait 
pour  elle;  que  c'est  pour  elle  que  le  soleil  se  lève  et  se  couche;  que  la  terre 
ne  produit  ses  fruits  que  pour  la  nourrir;  que  la  maison  n'est  faite  que 
pour  la  loger;  que  l'homme  lui-même  n'existe  que  pour  prendre  soin  d'elle 
et  qu'enfin,  s'il  égorge  parfois  des  oies,  ainsi  fait-il  bien  de  son  semblable!  » 

38,  Région.  —  Un  poète  anglais  a  émis  la  même  idée  :  •-  Le  crabe,  au  fond 
de  la  mer,  dit  :  Dieu  est  trop  bon  de  me  traiter  aussi  magnifiquement  et 
de  tant  faire  pour  moi!  » 
288, 

11,  Veteris.  —  Telluris  iuvenes,  les  Enfants  de  la  Terre,  appelés  aussi  les 
Titans,  ou  les  Géants,  êtres  fabuleux,  de  taille  colossale,  qui  tentèrent,  en 
entassant  Ossa  sur  Pélion  (deux  montagnes  de  la  Grèce  anc),  d'escalader 
le  Ciel  pour  détrôner  Jupiter,  lequel,  aidé  d'Hercule,  les  terrassa  et,  les 
frappant  de  la  foudre,  précipita  les  uns  dans  les  Enfers,  et  ensevelit  les 
autres  sous  des  njontagnes  volcaniques.  Myth. 

17,  Tenet.  —  Neptune  avait  construit  les  murs  de  Troie;  mais  le  salaire  con- 

,  venu  lui  ayant  été  refusé,  il  se  déclara  contre  elle,  lors  de  la  guerre  qui 
éclata  entre  ses  habitants  et  les  Grecs;  Juaon  avait  également  pris  parti 
pour  ces  derniers  par  rancune  du  jugement  de  Paris.  V.  Lex.,  Scaees. 

22,  Territoire.  —  Hérodote,  I,  172. 

23,  Nécessité.  —  C.-à-d.  la  puissance  des  dieux  est  partagée  et  répartie 
suivant  nos  besoins;  l'un  guérit...  —  On  peut  en  dire  autSint  d'S  saints  de 
l'Église  romaine  où  beaucoup  sont  particulièrement  honorés  dans  certaines 
localités  et  certains  invoqués  d-ins  des  cas  spéciaux  comme,  par  exemple, 
S.  Antoine  de  Padoue  pour  retrouver  ce  qui  est  égaré,  pour  ne  parler  que 
de  l'un  de  ceux  le  plus  en  faveur  de  nos  jours. 


Fb.506  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

28,  Ponant.  —  Occident;  ce  terme  était  fréquemment  employé  au  xvr  siècle. 

35,  Venerandus.  —  Le  texte  d'Ovide  ajoute  erat,  addition  qui  figure  égale- 
ment sur  la  plupart  des  éditions  modernes. 

41,  Mille.  —  Ce  renseignement  parait  tiré  d'IlÉRODOTE,  Opéra  et  Dies,  252; 
toutefois  cet  auteur  n'en  compte  que  trente  mille;  par  contre,  son  assertion 
est  tenue  comme  beaucoup  trop  faible,  notamment  par  Maxime  de  Tyr,  qui 
dit  qu'ils  sont  innombrables,  et  par  Varron.  —  On  estime  à  vingt-cinq  mille 
environ  les  saints  de  l'Église  catholique. 
290, 

5,  Physiciens.  —  Médecins.  Celle  dénomination  leur  était  fréquemment 
donnée  jadis  dans  les  campagnes;  elle  leur  est  encore  appliquée  parfois, 
dit-on,  en  Angleterre.  Payen. 
9,  Cbrysippus.  —  Plutarque,  Des  communes  conceptions,  etc.,  27. 

13,  Creten.  —  Jupiter  avait  été  secrètement  élevé  dans  l'île  de  Crète,  par 
les  soins  de  sa  mère  et  à  l'insu  de  Saturne  son  père,  auquel  Titan,  frère 
aîné  de  ce  dernier,  avait  cédé  le  trône  sous  condition  qu'il  n'élèverait  pas 
d'enfant  mâle.  Myth. 

18,  Fallitur.  —  S.  Augustin  ajoute  que  Varron  estimait  que  "  là  était  tout 
le  secret  des  politiques  et  des  ministres  d'état  ».  Les  choses  ne  semblent 
guère  avoir  changé  depuis  :  l'homme  le  plus  honnête,  le  plus  courtois  dans 
la  vie  privée,  perd  absolument  toute  notion  de  probité  et  de  courtoisie  dès 
qu'il  est  mêlé  à  la  politique;  de  quelque  parti  qu'il  soit,  mentir,  tromper, 
manquer  à  ses  engagements,  caser  ser  créatures,  gaspiller  les  deniers 
publics,  n'avoir  d'autre  règle  en  quoi  que  ce  soit  que  son  intérêt  poli- 
tique et  cela  impudemment,  sans  la  moindre  vergogne,  sont  pour  lui 
une  seconde  nature;  les  débutants  et  les  naïfs  se  transforment  rapidement 
et  inconsciemment  de  la  sorte;  et,  dès  lors,  chez  eux  comme  chez  tous 
autres  plus  ou  moins  éhontés  ou  ayant  déjà  vécu  dans  cette  atmosphère  cela 
devient  calcul  et  parti  pris. 

21,  Pbaeton.  —  Avait  obtenu  d'Apollon,  son  père,  de  conduire  le  char  du 
Soleil;  mais,  l'entreprise  étant  au-dessus  de  ses  forces,  les  chevaux  mal 
dirigés  s'emportèrent,  la  surface  de  la  terre  fut  embrasée,  les  eaux  des- 
séchées, et  Jupiter  ne  put  mettre  fin  à  ces  désordres  qu'en  foudroyant  l'im- 
prudent conducteur. 

25,  Fer,  et.  —  L'ex.  de  Bordeaux  aj.  :  auecq  Anaxagoras.  —  Xénopho.n, 
Memor.,  IV,  7,  7;  Plutarque,  De  Plac.  phil.,  II,  20. 

26,  Dit-il.  —  Cicéron,  De  Nat.  deor.,  II,  22. 

32,  Socrates.  —  Xénophon,  Mém.  sur  Socr.,  IV,  7,  2. 
34,  Polyxnus.  —  Cicéros,  Acad.,  II,  38. 
37,  Xenopbon.  —  Mémoires  sur  Socrate,  IV,  7,  6  et  7. 
292, 

I,  Perscrutent.  —  Qui  recherchent,  scrutent;  mot  forgé  par  Montaigne, 
du  latin  perscrulari,  chercher,  rechercher  avec  soin,  examiner  à  fond. 

7,  Herbes.  —  Montaigne  semble  dire  que  le  soleil  ne  tue  ni  les  plantes,  ni 
les  herbes;  cela  se  produit  dans  certaines  conditions.  Pour  ce  qui  est  de  la 
pierre  qui,  dit-il,  «  ne  luit  point  au  feu  »,  on  rend  facilement  incandescent 
aujourd'hui  un  caillou  avec  les  hautes  températures  que  l'on  obtient  avec 
le  four  électrique,  et  on  ne  peut  pas  plus  fixer  ces  foyers  de  3000°  qu'on 
ne  peut  regarder  fixement  le  soleil. 

8,  Point.  —  Ce  n'est  pas  précisément  sur  les  questions  de  science,  au.\- 
quelles  il  était  étranger,  que  la  manière  de  voir  de*  Socrate  offre  de  l'in- 
térêt; toutefois  sur  ce  point  particuher,  lui  et  Montaigne  sont  bien  dans 
le  vrai.  Certaines  sciences,  en  effet,  qui  ont  donné  tout  ce  qu'elles  pou- 
vaient et  au.xquelles  il  n'y  a  pas  d'intérêt  réel  à  s'adonner  davantage,  sont 
encore  pratiquées  aujourd'hui  :  telles  sont  l'astronomie  poussée  à  outrance 
et  réduite  à  étudier  la  topographie  de  la  lune  et  les  taches  du  soleil,  et  ces 
explorations  des  régions  polaires  inabordables  actuellement,  suffisamment 
connues  pour  qu'on  sache  qu'il  n'y  a  présentement  aucun  parti  à  en  tirer. 
En  citant  l'astronomie  transcendante,  nous  n'avons  pas  entendu  y  com- 


NOTES.         LIV,  II,  CH.  XIl.         VOL.  II,  PAG.  292.         Fb.b07 

prendre  la  ni«Héorologie,  science  bien  autrement  importante,  dédaignée  de 
sa  grande  sœur  et  presque  encore  en  enfance. 

24,  Ordo.  —  Citation  empruntée  à  la  desci-iption  du  char  du  Soleil. 
29,  Platon.  —  République,  X,  3. 

'M,  Acceptât.  —  Ces  vers,  rapportés  par  le  grammairien  Valérius  Probus, 
sont  de  Varron  ;  leur  reproduction  n'est  toutefois  pas  textuelle.  —  Les  cinq 
zones  dont  il  est  ici  question,  environnant  le  monde,  sont  celles  détermi- 
nées par  les  deux  cercles  polaires  arctique  et  antarctique,  et  les  deux  tro- 
piques du  Cancer  et  du  Capricorne;  la  bordure  qui  les  traverse  oblique- 

•    ment,  c'est  le  zodiaque  avec  ses  douze  constellations.  V.  N.  I,  254  :  Aqua. 
294, 

1,  Ainigmatique.  —  Platon  ne  dit  ni  que  la  nature  est  une  poésie,  ni  même 
(Qu'elle  est  énigniatique,  ce  qui  néanmoins  est  de  toute  vérité;  il  dit  simple- 
ment, à  propos  d'un  vers  d'Homère  dont  le  sens  est  difficile  à  saisir,  que 
'<  toute  poésie  est,  de  sa  nature,  énigniatique  ». 
9,  Descousu.  —  Timon  l'appelle,  par  iniuve,  grand  f'oryeur  de  miracles; 
addition  de  l'ex.  de  Bord,  que  l'on  a  cru  devoir  insérer  dans  la  traduction. 
—  Timon  est  un  poète  satirique,  cité  par  Diogène  Laerce,  dans'sa  Vie  do 
Platon. 

16,  Empruntée.  —  Sous  François  II,  Montaigne  étant  encore  enfant,  les 
hommes  trouvèrent  qu'un  gros  ventre  donnait  un  air  de  majesté;  les  femmes 
s'imaginèrent  aussitôt  qu'il  en  seraii  de  même  d'un  gros  derrière  :  on  eut 
alors  de  gros  ventres  et  de  gros  derrières  postiches  et  cette  mode  ridicule 
•  dura  trois  ou  quatre  ans.  Essais  historiques  sur  Paris,  1757.  —  Qu'est-ce 
autre  chose  qu'un  de  ces  derrières  postiches,  généralement  dans  de  fort 
modestes  proportions,  il  est  vrai,  que  cet  ajustement,  du  nom  de  tournure, 
dont  font  usage  nos  femmes  pour  faire  bouffer  leurs  robes? 

19,  Epicycles.  —  Cercles  dont  les  centres  se  meuvent  sur  la  circonférence 
d'un  autre  de  plus  grand  diamètre.  En  faisant  décrire  aux  planètes  des 
orbites  de  cette  nature,  Ptolémée,  astronome  du  n'  siècle,  expliquait  leurs 
mouvements  et  les  irrégularités  apparentes  de  ces  mouvements. 

20,  Astrologie.  —  Du  temps  de  Montaigne,  on  entendait  par  là  l'astronomie. 
22,  Subject.  —  S.  Hilaiz^e  de  Poitiers  dit  que  l'orgueil  caché  des  prétendus 

sages  les  porterait,  s'ils  le  pouvaient,  à  aller  jusque  dans  le  ciel,  changer 
et  corriger  les  mouvements  des  astres.  —  Alphonse,  roi  de  Castille,  auquel 
le  système  de  Ptolémée  déplaisait,' disait  qu'il  se  croyait  de  taille  à  donner 
de  bons  conseils  à  Dieu. 

25,  Platon.  —  Dans  le  Timée. 

\M,  Rauissement.  —  Rétrogradation,  trépidation,  ascension  sont  autant  de 
termes  empruntés  au  système  astronomique  de  Ptolémée,  qui  tenait  la 
terre  comme  fixe  et  en  faisait  le  centre  du  monde  :  recuiement,  ravissement 
y  sont  ajoutés  par  plaisanterie. 
34,  Petit  monde.  —  En  grec  :  microcosme. 

39,  Ame.  —  Quelques  auteurs  ont  donné  à  l'homme  deux  âmes  :  l'une  ration- 
nelle, l'autre  sensitive;  Platon  en  compte  trois.  C.  de  M. 
296, 

1,  Imaginaire.  —  Une  république,  un  gouvernement  imaginaire. 
9,  Condonons.  —  leur  concédons;  mot  francisé,  par  Montaigne,  du  latin 
condonare,  accorder,  pardonner,  remettre. 

21,  Pieds.  —  Platon,  qui  dans  le  Théélèle  conte  ce  fait,  dit  seulement  que 
Thaïes,  marchant  les  yeux  levés  vere  le  ciel  pour  contempler  les  astres, 
tomba  dans  un  puits,  et  ne  fait  nullement  intervenir  sa  servante  comme 
cause  de  l'accident.  Cela  semble  avoir  fourni  à  La  Fontaine  le  sujet  de  sa 
fable  :  «  l'Astrologue  qui  se  laisse  tomber  dans  un  puits  »,  on  il  dit  : 

•  Tandis  qu'à  peine  à  les  pieds  tu  peux  voir, 
Penses-tu  lire  au-dessus  de  te  tête?  • 

et  encore  : 


Pb.508  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

«  C'est  l'image  de  cpux  qui  bâillent  aux  chimères 
Ce  pendant  qu'ils  sont  en  danger, 
Soit  pour  eux,  soit  pour  leurs  affaires.  » 

24,  Plagas.  —  Cette  critique  présentée  par  Montaigne,  comme  émise  par 
Démocrite  et  reproduite  par  Cicéron,  émane  au  contraire  de  celui-ci  et  est 
dirigée  contre  le  premier.  —  Dans  sa  fable  (liv.  II,  fabl.  13)  La  Fontaine 
reproduit  cette  citation  :  ••  Sans  rien  voir  sur  la  terre,  on  se  perd  dans  les 
cieux.  » 

27,  Platon.  —  Dans  le  Thééléle,  là  même  où  il  est  question  de  l'accident  de 
Thaïes. 

42,  Congé.  —  Autorisation,  permission. 
298, 

6,  Faucée.  —  Du  latin  fauces,  entrée,  avenue,  défilé,  brèche,  pénétration. 
—  Le  sens  de  la  phrase  est  :  «  Mais  savoir  comment  une  impression 
spirituelle  peut  exercer  une  action  si  intense  sur  la  partie  matérielle  de 
l'homme,  connaître  la  nature  des  rapports  et  de  la  connexité  de  ces  ad- 
mirables ressorts,  jamais  homme  ne  l'a  fait.  •  De  nos  jours,  les  médecins, 
les  physiologistes  disent  que  c'est  un  effet  de  sympathie,  ce  qui  signifie 
qu'ils  n'en  savt^nt  pas  plus,  à  cet  égard,  que  du  temps  de  Montaigne. 

8,  Sçeu.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  comme  dict  Salomon. 

9,  Pline.  —  Nal.  Hist.,  II.  37. 

9,  S.  Augustin.  —  De  Civ.  Dei,  XXI,  10. 

33,  Autre.  —  L'autorité  d'Aristote  fut  toute-puissante  pendant  des  siècles,  au 
point  qu'en  1624,  le  parlement  de  Paris  bannit  de  son  ressort  trois  hommes 
qui  avaient  voulu  soutenir  publiquement  des  thèses  contre  la  doctrine  de 
ce  philosophe,  et  qu'il  défendit  à  toute  personne  de  publier,  vendre  et 
débiter  les  propositions  contenues  dans  ces  thèses  à  peine  de  punition 
corport^Ue,  et  d'enseigner  aucune  maxime  contre  les  anciens  auteurs  ap- 
prouvés, à  peine  de  la  vie;  qu'en  1629,  cette  même  cour  édictait  qu'on  ne 
pouvait  choquer  les  principes  de  la  philosophie  d'Aristote,  sans  manquer  à 
ceux  de  la  théologie  scolastique  reçue  par  l'Église.  Bayle. 
300, 

1,  Diogenes.  —  Diogène  d'Apollonie.  Sextus  Empiricus,  Pyrr.  hypot.,  111,  4. 
9,  Priuation.  —  Montaigne  énumère  ici  les  principes  essentiels  que  chacun 
des  philosophes  qu'il  mentionne  avait  imaginés  pour  expliquer  le  système 
du  monde  :  —  Platon  admettait  l'existence  de  certains  types  ou  modèles 
qu'il  appelait  Idées;  —  Épicure  expliquait  tout  par  le  concours  fortuit  des 
Atomes;  —  Leucippe  et  Démocrite,  par  le  Vide  et  les  Atomes  en  nombre 
infini  doués  d'un  mouvement  éternel;  —  Thaïes  posait  comme  principe 
matériel  de  toutes  choses  l'Eau  ou  l'état  liquide,  et  y  ajoutait  l'esprit  comme 
principe  moteur;  —  pour  Anaximandre,  c'était  l'Infini;  —  pour  Diogène 
d'Apollonie,  c'était  l'Air;  —  pour  Pythagore,  les  Nombres;  le  monde  lui- 
même  n'était  qu'un  tout  harmonieusement  composé;  —  pour  Parménide,  il 
n'existait  qu'un  être,  unique,  immuable,  infini  ;  —  Anaxagore  estimait  qu'à 
l'origine,  tous  les  éléments,  en  nombre  infini,  étaient  confondus,  et  que 
c'est  par  l'intervention  d'une  intelligence  suprême  qu'avait  eu  lieu  la  sépa- 
ration des  éléments  hétérogènes  et  l'assemblage  des  éléments" similaires.  — 
Empédocle  admettait  quatre  éléments  :  le  feu,  la  terre,  l'air  et  l'eau,  et 
deux  causes  premières  :  l'amitié  qui  les  unit,  la  haine  qui  les  sépare;  — 
pour  Heraclite,  il  n'existait  qu'un  principe,  le  feu,  mais  un  feu  pur  et  subtil, 
bien  différent  de  celui  que  nous  voyons;  —  enfin  Aristote,  estimant  que  les 
points  de  vue  sous  lesquels  toute  chose  peut  être  envisagée  se  réduisent 
aux  éléments  dont  elle  est  composée,  à  sa  nature  intime  ou  essence,  à  sa 
cause  et  au  but  ou  fin  vers  laquelle  elle  tend,  distinguait  quatre  principes  : 
la  matière,  la  forme,  la  cause  efficiente  et  le  principe  final,  lesquels  doivent 
se  retrouver  partout  et  que  la  philosophie  a  pour  mission  de  déterminer. 

15,  L'escole.  —  Aristote,  dont  les  éd.  ant.  mettent  le  nom. 

21,  Boule-veuë.  —  A  première  vue;  comparaison  tirée  du  jeu  de  boules. 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  XH.         VOL.  II,  PAG.  300.  Fb.509 

Jouer  à  boule-vue,  c'est  agir  sur  un  simple  coup  d'œil  jeté  sur  le  jeu  sans 
se  donner  le  temps  d'apprécier  la  distance  ni  de  calculer  ce  qu'il  y  a  de 
mieux  à  faire. 

26,  Volonté.  —  «  Appartenir  à  une  école,  c'est  en  épouser  nécessairement 
les  préjugés  et  le  parti  pris.  »  Le  Bon.  Cela  est  vrai  aussi  bien  en  politique 
qu'en  scolastique. 

302, 

9,  Pbilodoxes.  —  Platon,  Rép.,  V  (vers  la  fin),  les  définit  ainsi  :  Gens  qui 
se  remplissent  d'opinions  dont  ils  ignorent  les  fondements,  qui  s'entêtent  de 
mots,  qui  n'aiment  et  ne  voient  que  les  apparences  des  choses. 
15,  Philosophique.  —  11  ne  saurait  cependant^à  de  semblables  propos,  être 

fait  de  réponses  plus  probantes. 
40,  Essais.  —  C'est  aller  un  peu  loin  que  de  vouloir  d'un  philosophe  qu'il 
connaisse  le  pourquoi  et  le  comment  de  toutes  choses;  il  observe,  cherche 
à  se  rendre  compte  de  tout,  mais  ne  saurait  être  tenu  d'en  donner,  quand 
même,  une  explication. 
304, 

15,  L'aimant.  —  Diogène  Laerce,  I,  24.  —  Combien  aujourd'hui  avec  ce  que 
nous  connaissons  de  l'électricité,  qui  n'est  du  reste  qu'une  forme  particulière 
du  magnétisme  ou  aimantation,  s'affermirait  en  eux  cette  idée,  bien  moins 
singulière  à  la  réflexion  qu'elle  ne  semble  de  prime  abord. 
22,  Dicœarchus.  —  C.-à-d.  la  rais  n  humaine  a  appris  à  Cratès  et  à  Dicéar- 
que  qu'il  n'y  avait  absolument  point  d'àme  et  que  le  corps  s'ébranlait,  etc. 
Sextus  Empiricus,  Pyrr.  hypot.,  II,  5;  Cicéron,  T'use,  I,  10. 

24,  Platon.  —  Lois,  X. 

25,  Repos.  —  Thaïes  ajoutait  :  -•  et  qui  se  meut  de  soi-même  ».  Plutarque, 
De  Plac.  pfiil.,  IV,  2;  là,  se  trouve  également  rapportée  l'opinion  d'As- 
clépiade. 

27,  Parmenides.  —  Macrobe,  in  Somn.  Scip.,  I,  14. 
27,  Empedocles.  —  Cicérox,  T'use,  I,  9. 

27,  Sang.  —  Certains  font  dériver  le  mot  latin  anima,  âme,  du  grec  alfia, 
qui  signifie  sang. 

29,  Posidonius.  —  Diogène  Laerce,  VIII,  156. 

30,  Chaleureuse.  —  Galien,  tout  en  admettant  cette  idée,  déclare  qu'en  fin 
de  compte  il  n'ose  rien  affirmer  sur  la  nature  de  l'âme. 

32,  Hippocrates.  —  Macrobe,  in  Somn.  Scip.,  I,  14. 

32.  Varro.  —  Lactance,  De  Opif.  Dei,  17. 

35,  Elemens.  —  Suivant  Zenon,  l'âme  est  du  feu;  et  cette  idée  qu'elle  est  la 
quintessence  des  quatre  éléments  que  lui  attribue  Montaigne,  est  d'Aristote 
qui,  au  dire  de  notre  auteur,  quelques  lignes  plus  loin,  se  serait  tu  sur  sa 
nature.  Cicéron,  Tusc,  I,  10. 

35,  Ponticus.  —  Stobée,  Eclog.  phys.,  I,  40. 

35,  Xenocrates.  —  Macrobe,  in  Somn.  Scip.,  I,  14. 

40,  Aristote.  —  S.-ent.  qui  définit  l'âme. 
.  41,  Entelechie.  —Mot  grec  signifiant  «  la  perfection  ».  Cicéron,  Tusc,  I,  10. 
306, 

2,  Lactance  —  De  Opif.  Dei,  47,  au  commencement. 

3,  Seneque.  —  Nat.  quaest.,  VII,  14. 
6,  S.  Bernard.  —  Lib.  de  anima,  1. 

8,  Heraclitus  —  Diogène  Laerce,  IX,  7. 

11,  Essence  —  Qu'est-ce  que  l'âme?  disons-nous  à  notre  tour.  C'est  le  prin- 
cipe lie  la  vie,  ou  encore,  d'après  nos  dictionnaires,  l'ensemble  des  facultés 
morales  et  intellectuelles  de  ce  qui  a  vie.  Mais  ce  ne  Sont  là  que  des  effets  et 
ils  n'en  expliquent  pas  la  production.  De  fait,  nous  nous  trouvons  en  pré- 
sence d'un  de  ces  infinis  problèmes  que  notre  intelligence  n'arrive  pas  à  ré- 
soudre, et  si  nous  tentons  de  l'élucider,  il  nous  faut,  comme  en  tant  d'autres 
choses,  déduire  l'inconnu  du  connu.  Or  les  manifestations  de  l'âme  ne  pren- 
nent naissance  en  nous  que  peu  à  peu;  au  début  de  l'existence,  rien  n'ap- 
paraît ;  c'est  ensuite  l'instinct,  c'est-à-dire  une  action  irréfléchie,  qui  se  montre 


Fb.tilO  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

seul;  puis,  en  germe,  chez  l'homme,  du  moins,  parce  que  son  organisme  le 
comporte,  tout  ce  qui  compose  l'âme  telle  que  nous  la  concevons  dans  l'être 
humain  :  la  notion  du  bien  et  du  mal,  les  vertus  et  les  vices,  toutes  les 
qualités  bonnes  ou  mauvaises,  les  affections,  les  répulsions  ainsi  que  la 
volonté,  la  mémoire,  l'intelligence,  la  raison,  la  rénexion  qui  les  mettront 
en  œuvre,  variables  chez  chaque  individu  suivant  la  conformation  de  son 
cerveau,  qui  est  l'organe  qui  en  est  le  point  de  départ  et  dont  un  rien 
congénital  ou  accidentel  suffit  à  différencier  toute  la  vie  durant  ou  momen- 
tanément l'homme  de  génie  de  l'imbécilo,  le  fou  du  sage,  le  criminel  de 
l'honnête  homme,  ce  que  du  reste  le  bon  sens  populaire  rend  si  exactement 
quand  il  dit  de  quelqu'un  qui  n'est  pas  comme  tout  le  monde,  qu'il  lui 
manque  une  case;  et  cet  ensemble  grandissant  ensuite  peu  à  peu,  s'épa- 
nouissant  au  fur  et  à  mesure  que  le  corps  lui-même  se  développe;  et,  chez 
tous,  reposant  quand  il  repose,  s'oblitérant  plus  ou  moins  quand  il  est 
malade,  mourant  quand  il  meurt,  l'abandonnant  la  plupart  du  temps 
partiellement  avant  même  que  la  vie  n'ait  pris  fin,  dès  que  la  désagréga- 
tion commence.  —  Qu'en  conclure,  sinon  que  l'àme  est  essentiellement 
fonction  de  l'être,  qu'elle  ne  fait  qu'un  avec  lui,  qu'elle  est  une  conséquence 
de  son  organisation  à  laquelle  elle  ne  survit  pas?  Pas  plus  que  lui  elle  ne 
vient  du  néant,  ni  n'y  retourne,  mais,  comme  lui,  elle  se  forme  et  se  trans- 
forme, telles  l'électricité,  la  chaleur,  la  lumière  qui  partout,  à  l'état  latent, 
apparaissent  ou  disparaissent  suivant  que  les  éléments  d'où  elles  naissent 
sont  dans  telles  ou  telles  conditions  ;  tel  encore  par  exemple  le  fer  qui,  dans 
le  minerai,  échappe  à  notre  vue  et  dont  certaines  transformations  le  dé- 
gagent, que  certaines  préparations  assimilent  aux  êtres  animés,  aux  végé- 
taux, que  la  rouille  réduit  en  poussière  et  rend  à  la  terre,  où  ses  molécules 
impalpables,  sans  jamais  cesser  d'exister,  demeurent  susceptibles  de  parti- 
ciper à  tout,  sans  jamais  redevenir  elles-mêmes  ;  ainsi  l'âme  qui,  en  nous, 
naît  dans  des  conditions  données,  se  transforme  avec  ces  conditions;  et 
quand  celles-ci  cessent  d'exister,  elle  se  désagrège  et  ses  éléments  retour- 
nent se  confondre  avec  l'universalité  des  choses,  où  de  toute  éternité  là 
aussi  tout  est  dans  tout,  à  l'état  embryonnaire. 

12,  Heropbilus.  —  Plutarqce,  Des  Opiv.  des  phil.,  IV,  5. 

13,  Aristote.  —  Sextus  Empiricls,  Adv.  Mathem. 

20,  Stoïciens.  —  Plutarqle,  Des  Opin.  des  phil..  IV,  5. 

20,  Erasistratus.  —  Id.,  ibid. 

21,  Empedocles.  —  Id.,  ibid. 

22,  Moyse.  —  Genèse,  IX,  4;  LéviL,  VII,  26;  Dealer.,  XII,  23:  etc. 
24,  Strato.  —  Plutarque,  Des  Opin.  des  phil.,  IV,  5. 

30,  Cbrysippus.  —  Galien,  De  Plac.  Hipp.  et  Plat.,  II,  2. 
39,  Stoïciens.  —  Sénèque,  Epist.  57. 

42,  Trapelle.  —  Souricière,  de  l'italien  (rappela,  qui  a  même  signification. 
308, 

8,  Plutarque.  —  Thésée,  préambule. 

8,  Chartes.  —  Cartes  géographiques;  du  latin  charla,  feuille  de  itapier. 

8,  Orée.  —  Bord,  extrémité;  du  latin  ora  qui  a  même  sens. 

14,  Bestise.  —  Pascal  a  dit  aussi  eç  parlant  de  l'homme  :  «  Trop  et  trop 
peu  d'instruction  l'abêtissent.  »  Et,  en  un  autre  passage  :  «  Les  sciences 
ont  deux  extrémités  qui  se  joignent  :  la  première  est  la  pure  ignorance 
naturelle  où  se  trouvent  tous  les  hommes  en  naissant;  l'autre  est  celle 
où  atteignent  les  grandes  âmes  qui,  ayant  parcouru  tout  ce  que  les 
hommes  peuvent  savoir,  trouvent  qu'ils  ne  savent  rien  et  se  rencontrent 
dans  cette  même  ignorance,  d'où  ils  sont  partis.  » 

19,  Platon.  —  Plaisanterie  que  l'on  attribue  à  Diogène  le  Cj-nique,  et  à 
lax]uelle  il  fut  répondu  en  ajoutant  à  la  définition  déjà  donnée  «  et  à  larges 
ongles  ».  Diogène  L.ierce,  IV,  40. 

35,  Iliade.  —  Cicéron,  De  Nat.  deor.,  Il,  37. 

36,  Zenon.  —  Id.,  ibid.,  III.  9. 
38,  Cotta.  —  Jd.,ibid.,  II,  12. 


NOTES.         IJV.  H,  CM.  XII.         VOL.  II,  PAG.  310.  Pb.Sli 

310. 

0,  Sectes.  —  Les   éd.  ant.  aj.  :  comme   il  s'en  voit  infinis  chez  Plutarque 
contre  les  Epicuriens  et  Stoïciens  :  et  en  Seneqtie  contre  les  Peripateticiens. 
8,  Montre.  —  Un  échantillon. 

17,  Lasches.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  combien  de  fois  leur  coyons-nous  dire  les 
choses  diuerses  et  contraires? 

18,  Ailleurs.  —  Dans  le  premier  Alcibiade.  C'est  Socrate  qui,  par  ses  ar- 
guments, réduit  Alcibiade  à  le  dirr. 

32,  Inconstante.  —  «  Montaigne  sut  ramener  sur  le  territoire  de  la  philo- 
soplùe  le  bon  sens  qui  en  avait  été  si  longtemps  exilé.  »  Déuerande. 

312, 

17,  Fortuit.  —  C.-à-d.  je  me  suis  trouvé  philosophe  sans  l'avoir  cherche' 
et  tout  à.  fait  par  hasard. 

18,  Ame.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  {car  i'ai  choisi  ce  seul  exemple  pour  le  plus 
commode  à  tesmoigner  nostre  f'oiblesse'et  vanité).  —  L'analyse  qui  suit  de 
la  doctrine  de  Platon  est  prise  dans  la  seconde  partie  du  Timée,  ou  sim- 
plement de  DiOGÈNE  Laerce,  111,  67. 

24,  Ratiocine.  —  Raisonne;  du  latin  ratiocinari  qui  signifie  la  même  chose. 
81,  Inconuenient.  —  Aussi  n'est-il  pas  étrange,  extraordinaire. 
•12,  Vniuerselle.  —  L'empereur  Julien  pensait  ainsi.  Payen. 
314, 

ti,  Locum.  —  Delille  a  donné  de  cette  citation  la  traduction  ci-après  : 

•  Dieu  remplit,  disent-ils,  le  ciel,  la  terre  et  l'onde  ; 
Dieu  circule  partout,  et  son  âme  féconde 
A  tous  les  animaux  prête  un  souffle  léger; 
Aucun  ne  doit  périr,  mais  tous  doivent  changer, 
Et,  retournant  aux  cieux,  en  globes  de  lumière. 
Vont  rejoindre  leur  être  à  la  masse  première.  » 

28,  Touche.  —  Plutarque,  Pourquoi  la  justice  div.,  etc.,  19. 

30,  Recordation.  —  Souvenir;  mot  francisé  par  Montaigne,  du  latin  re- 
cordaiio  qui  a  cette  même  signification. 

37,  Sçauantes.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  pleines  de  suffisance. 

41,  Sçauoir.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  de  cette  prudence  eLsapience. 

42,  Platon.  —  Dans  le  Phédon. 
316, 

15,  Nous.  —  Vivants. 

31,  Futurs.  —  Autant  de  mauvaises  actions  on  aurait  commises,  autant  de 
personnes  on  aurait  lésées  de  la  sorte,  seraient  d'après  Platon,  République, 
X,  punies  d'une  peine  de  dix  ans  chacune,  jusqu'à  concurrence  de  dix 
fois,  soit  cent  ans,  durée  de  la  vie  humaine. 

33,  Temporelles.  ~  Origène,  d'après  saint  Augustin,  rejetait  l'éternité  des 
peines. 

36.  Receue.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  aux  siècles  anciens. 
318, 

12,  Desmue.  —  Tirée  hors  de,  déplacée,  détournée;  participe  passé  de  des- 
mouvoir, qui  vient  du  latin  dimovere,  dont  c'est  la  signification. 

43,  Philosophe.  —  Ils  ne  remédient  pas  au  cas  où,  par  accident,  chez  un 
philosophe... 

320, 

12,  LWsage.  --  Var.  des  éd.  ant.  :  le  goust. 

28,  Decidere.  —  Montaigne  a  traduit  cette  citation  avant  de  la  transcrire. 

38,  Aristote.  —  Mctaphys.,  II,  1. 

43,  Syrius.  —  De  Syros.  Cicéron,  Tusq^.,  I,  16.  —  Le  texte  latin  porte  TuUius. 
322, 

11,  Gloire.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  de  la  réputation.  . 

13,  Platon.  —  Lois,  X,  13. 

20,  Estançonner.  —  Appuyer,  étayer;  s'estançonner  par  ses  inventions, 
c'est  assurer,  renforcer  son  existence  par  ses  propres  imaginations. 


Pb.5d2  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

324, 

7,  Nemrotb.  —  Il  semble  que  la  pyramide  dont  il  est  ici  question  soit  celle 
qui  existait  à  Barsippe  en  Chaidée,  pyramide  quadrangulaire  à  gradins, 
demeurée  inachevée  de  temps  immémorial  et  que  les  Chaldéens  identi- 
liaient  avec  la  tour  de  Babel. 

24,  Raison.  —  Car  cela  ne  nous  a  été  nullement  appris  par  la  nature,  non 
plus  que  par  la  raison. 

24,  Retentera.  —  Essayer,  éprouver  de  nouveau;  du  latin  retentare,  tenter 
derechef. 

29,  Stoïcien.  —  Sénèque. 
326, 

1,  Nous.  —  L'ex.  de  Bordeaux  aj.  :  en  diuers  lieux;  add.  dont  il  a  été 
tenu  compte  dans  la  traduction;  cette  croyance  existe  en  effet  en  Perse, 
en  Hindoustan  et  ailleurs. 

2,  Pytbagoras.  —  La  métempsycose,  que  Lucrèce  appelle  un  officieux 
mensonge  qui  délivre  des  frayeurs  de  la  mort  et  rassure  l'esprit  en  lui 
donnant  l'espérance  de  renaître  dans  un  autre  corps. 

7,  Maison.  —  Les  éd.  ant.  ajout.  :  Socrate,  Platon  et  quasi  tous  ceux  qui 
ont  voulu  croire  l'immortalité  des  «mes,  se  sont  laissez  emporter  à  cette 
inuention,  et  plusieurs  nations,  comme  entr'autres  la  noslre  et  nos  Druides. 
—  Ces  derniers  mots  :  et  nos  Druida  manquent  dans  l'éd.  de  1588. 

10,  Ans.  —  Montaigne  a  déjà  traité  ce  sujet  et  cite  (vol.  II,  pag.  106)  un 
passage  d'OvioE  à  ce  propos.  —  D'après  Hékaclide  de  Pont,  Pythagore 
racontait  avoir  été  Éthaiide  que  l'on  disait  fils  de  Mercure;  et  ce  Dieu 
lui  ayant  promis  de  lui  accorder  tout  ce  qu'il  voudrait,  excepté  l'immor- 
talité, il  lui  avait  demandé  à  conserver  pendant  sa  vie  et  après  sa  mort, 
la  mémoire  de  tout  ce  qui  lui  arriverait;  c'est  pourquoi  il  était  à  même 
d'affirmer  être  passé  dans  le  corps  d'Euphorbe  après  avoir  été  Éthaiide; 
être  ensuite  devenu  Ilermoline;  puis  Pyrrhus,  un  pêcheur  de  Déios,  et 
enfin  Pythagore.  D'autre  part,  Euphorbe,  blessé  par  Ménélas  au  siège  de 
Troie,  déclarait  avoir  été  Éthaiide  et  prétendait  se  rappeler  par  quelles 
plantes,  dans  quels  animaux  son  âme  avait  successivement  passé  depuis 
qu'il  avait  cessé  d'être  Éthaiide,  ce  qu'elle  avait  éprouvé  aux  enfers  et  ce 
qu'il  avait  vu  éprouver  aux  autres.  Hermotine  disait  avoir  été  Euphorbe 
et,  pour  le  prouver,  avait  été  au  temple  d'Apollon  et  avait  montré  son 
bouclier  que  Ménélas,  après  l'en  avoir  dépouillé,  avait  consacré  à  ce  Dieu, 
à  son  retour  de  Troie.  Pyrrhus,  le  pêcheur  de  Délos,  se  souvenait  d'avoir 
été  Éthaiide,  Euphorbe,  Hermotine  ;  et  Pythagore  avait  conservé  les  mêmes 
souvenirs,  en  y  ajoutant  celui  de  Pyrrhus.  —  V.  également  DioGf:.NE  Laerce, 
VIll,  4,  5. 

16,  Recite.  —  De  quelques  faiseurs  d'horoscope,  dit  S.  Augustin,  De  Civ. 
Dei,  XXII,  28. 

18,  Cbrysippus.  —  Lactance,  Div.  instil.,  VU,  23. 

19,  Platon.  —  Dans  le  Ménon. 

21,  Ailleurs.  —  Platon,  dans  le  Timée. 
328, 

17,  Dit-il.  —  Romulus,  14. 

28,   Socrates.  —  Ce  sont  là   deux  des  opuscules  des  œuvres  morales  de 
Plutarque,  intitulés,  l'un,  «  De  la  face  qui  apparaît  dedans  le  rond  de  la 
lune  •;  l'autre,  «  Du  démon  de  Socrate  ». 
330, 

3,  Physicien.  —  V.  N.  II,  290  :  Physiciens. 

4,  Disait.  —  Diogène  Laerce,  II,  17. 

6,  Dit.  —  Pi.utarque,  Des  Opin.  des  phil.,  V,  3.  Les  citations  qui  suivent 

sont  tirées  de  ce  même  chapitre. 
19,  Democritus.  .— •  Plutarque,  Des  Opin.  des  phil.,  V,  5,  dit  expressément 

que  Démocrite  était  d'une  opinion  contraire,  mais  que  Zenon  et  Aristote 

étaient  tous  deux  de  cet  avis  sur  ce  point. 
28,  Moys.  —  Ceci  porte  à  croire  que  la  mère  de  Montaigne  était,  ou  croyait 


NOTES.        LIV.  H,  Cil.  XII.         VOL.  Il,  PAG.  330.  Fb.513 

être  accouchôe  de  lui  au  onzième  mois  de  sa  grossesse.  En  ce  qui  me  touche, 
la  conception  d'une  de  mes  petites-filles  m'a  été  J».nnoncée  par  ses  parents 
un  premier  janvier,  et,  sous  la  direction  d'un  médecin  des  hôpitaux  de 
Paris,  la  mère,  qui  a  ressenti  successivement  tout  ce  que  la  femme  éprouve 
en  pareil  cas,  a  pris  les  précautions  d'usage,  et  l'enfant  n'est  venu  au 
monde  que  le  vingt-deux  décembre,  sans  que  rien  d'anormal,  sauf  sa 
durée,  se  soit  produit  dans  la  gestation.  —  En  pareille  matière,  rien  n'est 
moins  certain  que  la  supputation  du  temps,  la  question  n'a  jamais  été 
complètement  décidée  pour  l'espèce  humaine,  et  les  observations  faites 
sur  les  animaux  prouvent  qu'il  y  a  chez  eux  de  grands  écarts  (Cuvier). 
D'après  la  loi  française,  l'enfant  qui  vient  au  monde  avant  l'expiration 
du  300°  jour  (dix  mois)  après  la  mort  du  mari  est  seul  réputé  légitime; 
Plixe,  chez  les  anciens,  admettait  onze  mois;  Rabelais  également,  qui  cite 
de  nombreux  auteurs  à  l'appui  de  son  dire. 

37.  Protagoras.  —  Sextus  Empiricls,  Adv.  Math. 
332, 

6,  Thaïes.  —  Diogène  Laerce,  I,  36. 

8,  Vous.  —  La  personne  à  laquelle  ce  chapitre  est  dédié,  et  qu'ainsi  qu'il  a 
été  dit  plus  haut,  on  pense  être  Marguerite  de  France,  fille  de  Henri  II, 
reine  de  Navarre,  à  la  demande  de  laquelle  cette  apologie  de  Sebond  aurait 
été  écrite. 

9,  Corps.  —  De  m'étendre  si  longuement  sur  un  même  sujet. 

16,  Reseruément.  —  De  ce  passage  on  peut  conclure  que  Montaigne  est 
d'avis  que,  dans  les  disputes  philosophiques  en  général,  et  en  particulier 
dans  celles  où  la  religion  est  intéressée,  il  ne  faut  invoquer  l'incertitude 
de  nos  connaissances,  se  réfugier  dans  le  doute  et,  en  matière  religieuse, 
admettre  la  tradition,  que  lorsque,  pressé  de  toutes  parts,  on  n'a  plus 
aucune  bonne  raison  à  alléguer  en  faveur  de  son  opinion. 

21,  Deux.  —  HÉRODOTE,  III,  78.  —  En  522,  lore  de  la  conjuration  qui  donna 
le  trône  à  Darius  (V.  N.  III,  324  :  Perse).  Gobrias,  un  des  conjurés,  avait 
saisi  l'usurpateur  par  le  corps  et  luttait  avec  lui  dans  l'obscurité,  quand, 
de  crainte  de  voir  son  adversaire  lui  échapper,  il  dit  à  Darius,  son  complice, 
de  frapper  sans  souci  de  l'atteindre  lui-même. 

26,  Impatiens.  —  Ne  pouvant  supporter. 

33,  Mie.  —  Pas,  nullement. 

38,  Attrempance.  —  Mesure,  réserve  gardée  dans  ce  qu'on  fait  et  dans  ce 
qu'on  dit. 

334, 

3,  Plaist.  —  Ceci  confirme  ce  que  l'on  suppose  de  la  dédicace  de  ce  chapitre 
à  Marguerite  de  France  (N.  II,  332  :  Vous),  en  raison  de  son  rang,  de  son 
érudition  et  aussi  de  ce  qu'elle  était  une  des  plus  belles  personnes  de  son 
temps. 

6,  Fantasie.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  qui  se  fut  seruy  à  faire  son  amas, 
d'autres  que  de  noslre  Plutarque. 

7,  Epicurus.  —  Plutarque,  Contre  Colotès,  27. 
9,  Platon.  —  Lois,  IX. 

28,  Outrageux.  —  L'éd.  de  1588  port.  :  dangereux:. 

35,  Effrénée.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  iugemenl  à  cette  liberté  desreglée,  au  lieu 
de  :  •<  vol...  effrénée  ». 
336, 

'  14,  Vsage.  —  On  ne  plaide  plus,  on  ne  discute  pas  pour  savoir  si  cette  mon- 
naie est  de  bon  ou  de  mauvais  aloi»,  mais  seulement  si  elle  est  d'usage,  si 
elle  passe  ou  ne  passe  pas. 

16,  Liaisons.  —  Nouement  d'éguillettes.  V.  N.  I,  136  :  Liaisons. 

17,  Domitications.  —  Du  latin  domus,  maison,  et  facere,  faire.  Terme  d'as- 
trologie signifiant  le  partage  du  ciel  en  douze  zones,  en  vue  de  tirer  l'ho- 
roscope de  quelqu'un. 

18,  Pbilosopbale.  —  Substance  à  la  recherche  de  laquelle  s'adonnaient  les 

ESSAIS  DE   MONTAIGNE.  —  T.   IV.  33 


Fb.SU  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

alchimistes  «t  à  laquelle  on  prêtait  la  propriété  de  transformer  en  or  tous 
les  métaux. 
23,  Vif  aie.  —  Mensale,  vitale,  etc.,  sont  des  termes  de  chiromancie  (art  de 
prédire  la  destinée  par  l'inspection  de  la  main)  :  la  mensale  est  la  ligne  qui 
à  l'intérieur  de  la  main  va  de  dessous  le  petit  doigt  vers  l'index;  la  vitale, 
celle  qui  du  milieu  du  poignet  va  aboutir  entre  le  pouce  et  l'index;  la 
moyenne  naturelle,  celle  qui  a  son  point  de  départ  entre  le  pouce  et  l'index 
et  aboutit  entre  le  poignet  et  le  petit  doigt;  au  centi-e  de  la  main  est  le 
triangle  sur  lequel  Mars  a  action;  l'enseigneur,  c'est  l'index;  les  tubercles, 
appelés  monts,  sont  les  proéminences  formées  par  la  dernière  phalange  de 
chaque  doigt.  Chacune  est  plus  spécialement  soumise  à  l'action  d'un  dieu 
ou  d'une  déesse  et  son  plus  ou  moins  de  saillie  accuse,  plus  ou  moins 
accentués  chez  l'individu,  la  qualité  ou  le  vice  auxquels  préside  cette  di- 
vinité. 
338. 

y,  Lescbant.  —  Add.  de  80  :  e<  formant. 

33,  D'accord.  —  Add.   des  éd.  aut.  :  s'ils  ne  le  sont  meshuy  après  tant  de 
siècles  ! 
340, 

1,  lugement.  —  Les  académiciens  admettaient  quelques  modifications  à  ce 
jugement  sur  notre  complète  ignorance. 

5,  Spbere.  —  Eudoxe  estimait  le  monde  formé  de  sphères  concentriques 
dont  la  terre  était  le  centre  et  dans  chacune  desquelles  se  mouvaient  dans 
l'ordre  suivant,  d'après  leur  éloignement  de  la  terre  :  la  Lune,  le  Soleil, 
Mercure,  Vénus,  Mars,  Jupiter,  Saturne;  une  huitième  sphère  comprenait 
les  mouvements  de  tous  les  autres  astres,  système  qui  fut  adopté  par  Platon 
et  par  Aristote. 
10,  Plus  vray-semblables.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  beaucoup  plus  véritable  et 

plus  ferme. 
15,  Vray semblable.  —  Logique.  Montaigne  veut  dire  que  l'opinion  des  pyr- 

rhoniens  est  plus  liée,  se  soutient  mieux  que  celle  des  Académiciens. 
27,  Pas.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  le  corps  et. 
:30,  Vanter.  —  Jouer,  aller  au  gré  du  vent. 

342, 

8,  L'autre.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  car  la  vérité  n'est  iamais  qu'vne. 

344, 

19,  Pas.  —  Sous-entendu  :  habiter,  tenir;  ellipse  analogue  à  celle  que  pré- 
sente cette  locution  :  «  Il  n'en  peut  plus  ... 

3.Ô,  Sappbo.  —  Les  anciens  sont  unanimes  pour  admirer  la  verve  et  le  feu 
qui  brillaient  dans  ses  vers;  on  la  surnommait  la  dixième  muse;  il  ne 
nous  reste  d'elle  que  quelques  fragments.  Se  confond  souvent  avec  une 
autre  Sapho,  également  lesbienne,  courtisane  célèbre  qui  vécut  plus  tard. 

36   Cleomenes.  —  Plutarque,  Apophfh.  des  Lacédémoniens. 

346, 

1,  fortuna.  —  Add.  des  éd.  ant.  et  de  l'ex.  de  Bordeaux  :  qu'il  iouysse  de 
ce  bon  heur  (traduction  de  la  citation  qui  précède). 

7,  Part  là.  —  Le  code  criminel,  établi  lors  de  la  refonte  de  nos  codes,  après 
la  première  révolution,  était  très  dur  et  très  rigoureux,  et  était  tel,  disait-on, 
parce  qu'il  avait  été  rédigé  par  Treilhard  (1742  à  1810)  alors  tourmenté  de 
la  gravelle. 

7,  Aréopage.  —Ce  tribunal  était  composé  de  31  membres;  on  n'y  tolérait 
aucun  artifice  oratoire  susceptible  d'émouvoir  ou   d'attendrir  les  juges: 
longtemps  il  jouit  d'une  immense  réputation  de  sagesse  et  d'impartialité; 
il  siégeait  de  nuit  comme  l'indique  Montaigne  et  rendait  son  jugement 
séance  tenante,  nul  procès  à  Athènes  ne  pouvant  durer  plus  d'un  jour. 
15,  Tourneuirent.  —  Le  tournent  et  le  virent  en  tous  sens. 
21,  Vie.  —  Un  dicton  latin  résume  ain.si  l'existence  humaine  :  «  .Vasci,  pati,  ■ 
mort  (nailre,  souffrir,  mourir).  -> 


NOTES.         I.IV.  II,  OH.  XII.         VOL.  II,  P.\(;.  US.  Pb.ol!) 

348, 

14,  Homme.  —  Montaigne  dit  ailleurs  (III,  186)  :  «  le  croy  Platon  de  bon 
cœur,  qui  dit  les  humeurs  faciles  ou  difficiles,  ostre  vn  grand  preiudice  à 
la  bonté  ou  maunaistié  de  l'ame.  » 
•21,  Moy.  —  Add.  de  88  :  sans  le  congé  du  iugement. 
"26,  Viver.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  en  cent  visages. 
42,  Comme  moy.  —  Var.  de  l'éd.  de  88  :  bien. 
350, 

7,  Foi^maliser.  —  Pour  y  conformer  son  esprit,  son  jugement,  son  attention. 

31,  Cupiditez.  —  Passions. 

32,  Tbemistocles.  —  Prit  part  à  la  bataille  de  Marathon  (490)  et  porta  un 
coup  mortel  à  la  flotte  de  Xerxès  par  la  victoire  de  Salamine  (486)  ;  exilé 
par  suite  des  intrigues  de  Sparte,  il  se  réfugia  chez  les  Perses  et  s'empoi- 
sonna pour  n'être  pas  obligé  de  porter  les  armes  contre  la  Grèce. 

32,  Demostbenes.  —  Ce  [)rince  de  la  parole  n'acquit  son  grand  talent  ora- 
toire que  grâce  à  un  travail  long  et  opiniàti-e;  son  style  était  pur  et  concis; 
son  éloquence,  éminemment  persuasive,  était  absolument  dépouillée  d'arti- 
fice. Pendant  quinze  ans  il  s'employa  tout  entier  contre  Philippe  de  Macé- 
doine qui  voulait  asservir  sa  patrie,  et  prononça  contre  lui  ses  immortelles 
Philippiques  et  Olynthicnnes;  il  assista  à  la  bataille  de  Chéronée  (388); 
après  la  mort  d'Alexandre,  il  mit  son  éloquence  au  service  des  Grecs 
confédérés,  et  s'empoisonna  pour  échapper  à  Antipater. 

38,  Clémence.  —  Var.  de  l'éd.  de  80  :  libéralité  et  à  la  iuslice. 
352, 

9,  Vertueuses.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  Au  moins  cecy  ne  sçauons  nous  qiw 
trop,  que  les  passions  produisent  infinies  et  perpétuelles  mutations  en  nostre 
ame  et  la  tyrannisent  merueilleusemenl.  Le  iugement  d'vn  homme  courrouce 
ou  de  celuy  qui  est  en  crainte,  esH-ce  le  iugement  qu'il  aura  lantost  quand  il 
sera  rassis? 

18,  Trouble.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  desreglement  et  de  la  cécité? 

19,  Maladie.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  fauceté. 

20,  Perturbation.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  l'erreur. 

20,  La  témérité.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  le  mensonge. 
2Ô,  Insensez.  —  Platon,  Phèdre. 

28,  Sommeil.  —  Cicéron,  De  Divinat.,  1,  57. 

31,  Apporte.  —  Par  son  anéantissement  (l'anéantissement  de  la  raison),  causé 

par  la  fureur  ou  le  sommeil,  image  de  la  mort,  nous  devenons... 
•40,  Pas.  —  La  philosophie. 
354, 

5,  Infiable.  —  Infidèle,  peu  digne  de  foi. 

13,  Souffre.  —  «  Le  premier  soupir  de  l'amour  est  le  dernier  de  la  sagesse.  » 
22,  Planir.  —  Diminuer  et  s'aplanir. 

39,  Volubilité.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  imperfection. 

40,  Constance.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  fermeté. 
356, 

7,  Entier.  —  Var.  de  1588  :  pur  et  entier,  au  lieu  de  :  •<  entier  ■ . 
19,  Nicetas.  —  Cickron,  Acad.,  Il,  39,  où  suivant  l'édition  on  lit  Nicétas  ou 

Hicétas. 
19,  Syracusien.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  il  y  a  enuiron  18.  cens  ans  que  quel- 
qu'vn,  au  lieu  de  :  "  Cleanthe...  Syracusien  ». 

21,  Aixieu.  —  V.  N.  I,  254  :  Aqua.  -*  Cette  constatation  semble  due  au.x 
Assyriens,  desquels  l'auraient  tenue  Pythagore  et  son  école,  mais  contre 
laquelle  s'éleva  Aristote.  Pour  cette  théorie,  Cleanthe,  au  dire  de  Pll- 
T.AUQUE,  De  la  Face  de  la  Lune,  4,  sur  la  dénonciation  d'Aristarque,  qui 
demandait  qu'il  fût  poursuivi  comme  blasphémateur,  faillit  avoir  le  sort 
qui,  vingt  siècles  après,  menaça  Cxalilée  pour  avoir  soutenu  cette  même 
thèse  alors  que  déjà  deux  cents  ans  auparavant  elle  avait  été  rééditée  pai- 
Copernic.  Celui-ci  admettant  en  effet  le  double  mouvement  de  la  terre  sur 
elle-même,  mouvement  s'affectuant  suivant  im  plan  (celui  de  l'écliptique) 


Fb.516  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

incliné  par  rapport  à  la  ligne  des  pôles,  établit  sur  ce  principe  le  système 
planétaire  qui  porte  son  nom  et  qui  a  renversé  celui  de  Ptolémée  admis 
jusqu'alors.  —  Certains  toutefois  estiment,  en  ce  qui  concerne  Cléanthe, 
qu'une  erreur  a  dû  être  commise  dans  la  transcription  du  texte  de  Plu- 
tarque  et  que  les  rôles  \' sont  inversés:  d'après  eux  ce  serait  Aristarque 
qui  affirmait  le  mouvement  de  la  terre  et  Cléanthe  qui  lui  en  faisait  un 
crime. 
24,  JVe  nous...  deux.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  n'y  a  guiere  d'asseurance,  ny  en  Vvn 
ny  en  Vautre. 

34,  Vogue.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  crédit  et  aidhorilé. 

35,  Précédentes.  —  Les  Essais  venaient  à  peine  de  paraître,  quand  s'est  pro- 
duite cette  tierce  opinion,  émise  par  Tycho-Brahé  (1546  à  1601),  dont  le 
système  en  progrès  sur  celui  de  Copernic,  modifié  par  Kepler  (1571  à  1631) 
que  lui-même  avait  formé,  et  confirmé  par  Newton  (1642  à  1727),  est  la  base 
de  l'astronomie  moderne. 

37,  Introduicts.  —  V.  au  sujet  de  ces  principes  N.  Il,  300  :  Priuation.  — 
Les  éd.  ant.  aj.  :  de  matière,  forme  et  priuation. 

39,  Lettres.  —  S.»ent.  de  crédit. 

43,  Boute-hors.  —  D'être  déboutés,  jetés  dehors. 

43,  Beuanciers.  —  «  Y  a-t-il  une  chose,  dit  l'Ecclésiaste,  dont  on  puisse 
dire  ;  c'est  du  nouveau?  Non,  cette  chose  a  déjà  été  dans  les  siècles  qui 
furent  avant  nous;  on  ne  se  souvient  plus  des  choses  d'autrefois,  de  même 
on  ne  se  souviendra  plus  des  choses  à  venir,  parmi  ceux  qui  viendront 
plus  tard.  »  Ceci,  qui  était  déjà  vrai  du  temps  de  Salomon,  l'est  probable- 
ment encore  aujourd'hui;  car  nul  ne  peut  assurer  que  notre  civilisation 
ne  disparaîtra  pas  comme  d'autres  qui  l'ont  précédée;  et  des  hommes, 
dans  la  suite  des  siècles,  découvriront  encore  ce  que  nous  avons  découvert 
avant  eux  et  croiront  que  c'est  du  nouveau  (Harduin). 
358, 

36,  Toucher.  —  Telles  sont  en  effet  l'hyperbole  et  ses  asymptotes  :  la  pre- 
mière ligne  courbe,  de  la  nature  de  celles  que  l'on  obtient  en  sectionnant 
un  cône  par  un  plan  oblique  à  son  axe,  les  secondes,  lignes  droites  en 
corrélation  particulière  avec  la  première,  si  bien  que  toutes  trois  prolon- 
gées indéfiniment,  les  asymptotes  vont  approchant  toujours  de  plus  *en 
plus  J'hyperbole  sans,  comme  l'indique  leur  nom,  jamais  la  rencontrer, 
quoique  sises  dans  le  même  plan.  I\lais  leur  découverte  est  bien  antérieure 
à  Jacques  Peltier  ;  on  en  trouve  mention  dans  Apollonius,  géomètre  grec 
du  IIP  siècle. 

39,  Combattre.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  et  ruiner. 
360, 

7,  Antipodes.  —  L'existence  des  antipodes  a  été  fort  controversée  dans 
les  temps  passés  :  les  philosophes  anciens  ne  les  admettaient  pas  ;  l'Église 
primitive  pas  davantage.  Lactance  dit  à  cet  égard  :  «  Quel  est  l'homme 
assez  insensé,  pour  croire  qu'il  y  a  des  hommes  dont  les  pieds  sont  plus 
élevés  que  la  tête?  S.  Augustin  abondait  dans  le  même  sens,  parce  que, 
disait-il,  «  les  antipodes  seraient  au  delà  de  la  mer  et  que  la  mer  est  intra- 
versable  ».  Cette  idée  des  antipodes,  émise  par  Virgile  prêtre,  depuis  fait 
évêque  et  canonisé,  fut  même  qualifiée  d'hérésie  par  le  pape  Zacharie, 
comme  admettant,  sous  la  terre,  une  autre  terre,  un  autre  soleil,  une 
autre  lune  et  des  habitants  sur  cette  autre  terre,  ne  descendant  pas 
d'Adam. 

13,  Sçauojr  mon.  —  Il  reste  à  savoii-. 

15,  Bisent.  —  Add.  de  88  :  Aristote  dict  que  toutes  les  opinions  humaines  ont 
esté  par  le  passé  et  seront  à  Vaduenir,  infinies  autresfois.  Platon  qu'elles 
ont  à  renouueller  et  reuenir  en  estre  après  trente  six  mille  ans. 

17,  Platon.  —  Dans  le  dialogue  intitulé  la  Politique. 

20,  Hérodote.  —  Liv.  II,  142,  143,  etc. 

28,  Salomon.  —  «  Ce  qui  a  été,  est  encore;  ce  qui  doit  être,  a  déjà  été: 
Dieu  rappelle  ce  qui  est  passé.  ^  Ecclésiaste,  III,  15.  —  Outre  qu'il  bâtit 


NOTES.        LIV.  Il,  CH.  XII.        VOL.  II,  PAG.  360.  Fb.317 

le  temple  de  Jérusalem  et  les  murailles  de  cette  ville,  Saloraon  possédait 
un  savoir  immense;  on  lui  attribue  plusieurs  des  livres  saints  :  les  Pro- 
verbes, le  Cantique  des  Cantiques,  l'Ecclésiaste. 

28,  Isaïe.  —  «  Je  m'en  vais  créer  de  nouveaux  cieux,  une  terre  nouvelle,  et 
tout  ce  qui  a  été  auparavant  s'effacera  de  la  mémoire.  »  Isaie,  LXV,  17. 
Nombre  des  prophéties  d'Isaïe  nous  sont  parvenues;  elles  se  distinguent 
par  la  sublimité  des  idées,  l'énergie  des  tableaux  et  le  style  qui  est  d'une 
véhémence  extraordinaire;  on  admire  surtout  le  cantique  sur  la  ruine  de 
Babylone. 
;J1,  Changement.  —  Rien  ne  se  fait  avec  rien,  donc  l'univers  n'a  pas  eu  de 
commencement;  rien  ne  se  perd,  tout  se  transforme,  donc  il  ne  prendra 
jamais  fin.  Ce  dernier  principe,  nous  en  voyons  par  nous-mêmes  l'action 
incessante  en  ce  qui  touche  les  choses  de  la  terre;  il  n'est  pas  moins  vrai 
en  ce  qui  concerne  les  astres.  Ceux-ci,  en  raison  de  la  loi  de  la  gravita- 
tion universelle,  dont  la  réalité  est  vérifiée  par  le  mouvement  des  corps 
célestes  qu'elle  explique  jusque  dans  leurs  anomalies  apparentes  qu'elle 
arrive  h  prévoir,  ne  peuvent  résister  éternellement  à  la  désagrégation, 
ni  se  désagréger  sans  que  leurs  débris  aillent,  à  travers  les  espaces,  s'ag- 
glomérer à  la  longue  à  d'autres  existants. 
32,  Escholes.  —  Celle  de  Platon. 

39,  Derrière.  —  Cette  théorie  du  monde,  de  la  terre,  etc..  pourvus  d'une 
âme  en  même  temps  que  d'un  corps,  et  ayant  des  mouvements  propres, 
aurait  été  émise  .par  l'école  de  Pythagorc;  d'autres  la  trouvent  en  germe 
dans  certains  passages  du  Timée  de  Platon.  Corpet. 
39,  Heraclitus.  —  Di0Gh:NE  Laerce,  IX,  8. 
362, 

2,  Mère.  —  On  estime  que  cette  lettre  n'est  pas  d'Alexandre  le  Grand,  mais 
d'un  Alexandre,  écrivain  grec  du  r'  siècle.  S.  Augustin,  qui  la  relate, 
semble  avoir  fait  confusion. 

5,  Cicero.  —  De  Divinat.,  I,  19. 

5,  Diodorus.  —  Liv.  III,  31. 

7,  Pline.  —  Nat.  Hist.,  XXX,  1. 

7,  Zoroastre.  —  Sa  doctrine,  qui  constituait  la  religion  des  mages  et  pré- 
dominait en  Perse  avant  que  cette  contrée  ne  devînt  musulmane,  est  con- 
signée dans  le  Zend  Avesta.  Elle  admettait  deux  principes  opposés,  au-dessus 
desquels  s'élève  un  Dieu  suprême;  elle  prescrivait  le  culte  du  feu,  réglait 
la  vie  publique  comme  la  vie  privée,  annonçait  des  peines  et  des  récom- 
penses après  la  mort;  c'est  en  somme  un  dieu  unique,  l'immortalité  de 
l'âme  et  le  jugement  dernier.  On  ignore  si  Zoroastre  a  réellement  vécu, 
ou  si  on  a  simplement  rattaché  à  ce  nom  les  traditions  de  cette  religion 
des  mages  qui  dominait  dans  le  centre  de  l'Asie  du  XIII«  au  vi'  siècle. 

8,  Dit.  —  Dans  le  Timée. 

11,  Sais.  —  11  y  existait  un  temple  d'isis,  où  se  lisait  cette  inscription  : 
«  Je  suis  ce  qui  a  été,  ce  qui  est,  ce  qui  sera,  et  nul  n'a  encore  soulevé 
le  voile  qui  me  couvre.  » 

16,  Exemples.  —  Montaigne  entasse  ici,  comme  il  l'a  déjà  fait  précédem- 
ment, sans  les  avoir  contrôlés,  nombre  de  récits  relatés  dans  les  premiers 
ouvrages  écrits  par  les  Espagnols,  après  la  conquête  de  l'Amérique,  où 
l'ignorance  et  la  prévention  se  sont  donné  beau  jeu  et  dont  l'exactitude 
est  plus  que  douteuse. 
.  29,  Crédit.  —  Pierre  Meslie,  Diverses  ^eçons,  1,  3,  établit  que  le  signe  de  la 
croix  était  pratiqué  et  estimé  en  certaines  contrées  de  l'ancien  monde, 
bien  avant  que  N.-S.  Jésus-Christ  ne  fût  crucifié. 

30,  S.  André.  —  Croix  dont  les  deux  branches  sont  de  même  longueur  et 
ne  se  coupent  pas  à  angle  droit.  C'est  sur  une  croix  de  cette  nature,  par 
suite  les  jambes  écartées  à  l'égal  des  bras,  que  S.  André  fut  crucifié,  d'où 
son  nom;  c'est  également  sur  une  croix  de  cette  espèce,  au  lieu  de  roue, 
que  souvent  l'on  plaçait  les  grands  criminels  condamnés  à  être  roués,  les 
y  clouant  et  leur  rompant  ensuite  bras  et  jambes. 


ï'b.518  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

364, 

22,  Liberté.  —  Tacite  en  dit  autant  des  Germains. 

24,  Figures.  —  Dans  le  genre  de  l'écriture  hiéroglyphique,  ou  encore  de 
la  langue  chinoise.  Cette  langue,  remarquable  par  son  originalité,  son  an- 
tiquité, son  immutabilité,  son  extension  dans  les  contrées  les  plus  peu- 
plées de  l'Asie,  est,  de  toutes  les  langues  anciennes,  non  seulement  la 
seule  qui  soit  encore  parlée  de  nos  joure,  mais  la  plus  usitée  des  langues 
actuelles.  —  La  langue  écrite  n'est  pas  alphabétique;  c'est  la  réunion  d'une 
immense  quantité  de  caractères  plus  ou  moins  compliqués,  dont  chacun 
exprime  un  mot,  représente  une  idée  ou  un  objet.  Les  caractères  primi- 
tifs, qui  sont  des  signes  ou  plutôt  des  dessins  grotesques,  sont  au  nombre 
de  214.  11  y  a  quelques  caractères  pour  le  ciel,  l'homme,  les  parties  du 
corps,  les  animaux,  les  métaux,  les  plantes,  etc.  Ces  caractères  primitifs 
ont  servi  à  former  une  innombrable  quantité  de  signes,  composés  le  plus 
souvent  arbitrairement,  mais  qui  offrent  quelquefois  des  symboles  in- 
génieux, des  définitions  vives  et  pittoresques,  des  énigmes  d'autant  plus 
intéressantes  qu'on  en  a  perdu  la  clef.  Les  notions  abstraites  furent  très 
difficiles  à  exprimer  :  la  colère  est  peinte  par  un  cœur  surmonté  du  signe 
de  l'esclavage;  une  main  tenant  le  symbole  de  milieu,  désigne  l'historien, 
dont  le  devoir  est  de  n'incliner  d'aucun  côté;  le  caractère  de  la  rectitude 
indique  le.  gouvernement;  deux  images  de  perles  (il  est  si  difficile  d'en 
trouver  deux  bien  appareillées)  désignent  un  ami;  d'autres  mots  ont  des 
compositions  tout  arbitraires,  mais  un  grand  nombre  sont  intéressants 
à  analjser;  beaucoup  d'allusions  et  de  traits  piquants  sont  perdus,  les 
étymologies  ne  se  retrouvent  pas  toujours,  mais  bien  certainement  les 
Chinois  se  sont  peints  dans  leur  langue.  —  On  traçait  primitivement  les 
signes  avec  une  pointe  métallique  sur  un  bambou;  mais  trois  siècles  avant 
J.-C,  on  découvrit  l'art  de  faire  du  papier  et  de  l'encre,  et  le  pinceau 
remplaça  le  poinçon.  On  écrit  les  caractères  en  lignes  verticales  en  com- 
mençant par  la  droite  et  allant  vers  la  gauche.  Il  y  a  aujourd'hui  30  à 
40.0(X)  cai-actères,  mais  les  deux  tiers  seuls  sont  usités,  et,  en  retranchant 
les  synonymes,  on  trouve  que  la  connaissance  de  5  à  <jOO  caractères  suffit 
à  comprendre  les  textes  originaux.  —  La  langue  parlée  est  composée  d'un 
nombre  Hmité  d'intonations  monosyllabiques,  450  environ,  qui,  par  la 
variation  subtile  des  accents,  se  multiplient  jusqu'à  1.600  environ;  elle 
serait  très  facile  (G"  Niox). 

30,  Aspergez.  —  Goupillons;  le  mot  aspergez,  qui  vient  de  ce  à  quoi  sert 
la  chose,  existe  encore  â  l'état  de  substantif,  mais  est  peu  usité. 
366, 

10,  Deffubler.  —  Découvrir,  dégager,  ôter  un  affublement. 

25,  Poste.  —  A  son  gré;  c'est  une  expression  italienne  :  a  sua  posta. 

27,  Main.  —  Nous  sommes  à  même  de  nous  rendre  compte,  de  constater. 

30,  L'ame.  —  Chaque  race  possède  une  constitution  mentale  qui  lui  est  propre, 
née  à  la  longue  de  la  communauté  de  sentiments  et  d'idées,  créée  par  suite 
plus  du  fait  des  ancêtres  que  des  vivants,  car  l'homme  ne  se  forme  pas 
tout  seul,  et  la  race  dont  il  sort,  comme  le  milieu  où  il  vit,  lui  apportent 
leurs  divei-ses  influences.  De  cette  mentalité  procèdent  ses  croyances  et  ses 
institutions  qui  sont  plus  souvent  des  eflets  que  des  causes;  son  rôle  dans 
l'existence  de  la  race  est  prépondérant  par  l'influence  qu'elle  exerce  d'une 
façon  latente,  mais  continue,  sur  sa  moralité,  autrement  dit  sur  ses  règles 
fixes  de  conduite  et  sa  fidélité  à  les  observer,  ainsi  que  sur  ses  actes.  —  Les 
différences  dans  la  constitution  mentale  des  peuples  font  qu'ils  sentent, 
raisonnent  et  agissent  de  façons  fort  différentes,  de  sorte  qu'ils  se  trouvent 
fréquemment  en  dissentiment  sur  nombre  de  questions  dès  qu'ils  sont  en 
contact;  de  là  naissent  la  plupart  des  guerres.  —  Ces  mentalités  par 
exemple,  chez  les  races  latine  et  anglo-saxonne,  se  distinguent  en  ce  que 
la  première  est  beaucoup  plus  vaniteuse,  loquace,  superficielle,  mobile, 
l'imagination  y  prédomine,  elle  est  davantage  portée  à  l'agriculture,  la 
seconde  à  l'industrie,  au  commerce,  à  la  colonisation.  Les  Latins  se  soucient 


NOTKS.         MV.  II.  CH.  XII.         VOL.  II.  PAG.  .366.  Fb.519 

peu  de  la  liberté  (chaque  parti  estime  qu'elle  règne,  quand  il  est  le  plus 
fort),  mais  ils  sont  épris  d'égalité,  ce  qui  leur  fait  supporter  tous  les  des- 
potismes,  à  condition  qu'ils  soient  impersonnels:  et,  de  fait,  chez  eux, 
république,  monarchie,  socialisme  sous  des  étiquettes  différentes  ont  même 
effet,  l'absorption  de  l'individu  par  l'État;  les  Anglo-Saxons  sont  assoiffés 
de  liberté,  la  réalité  est  un  mj'the,  et  qu'ils  soient  en  monarchie  comme  en 
Angleterre,  ou  en  république  comme  aux  États-Unis,  l'action  de  l'État  est 
réduite  au  minimum,  celle  des  jmrticuliers  est  sans  limites. 

En  France  en  particulier,  où  les  idées  socialistes  gagnent  de  plus  en  plus 
et  viennent  ajouter  à  la  mentalité  latine,  s'accentue  cette  ingérence  de 
l'État  en  toutes  choses;  alors  qu'il  ne  devrait  pas  être  le  tuteur  et  le  pro- 
fesseur perpétuels  des  citoyens,  mais  uniquement  leur  protecteur,  parfois 
leur  initiateur  et  dans  certains  cas  leur  serviteur,  il  va  substituant  son  action 
à  celle  des  individus  et  des  associations  et  entrave  ainsi  leur  libre  dévelop- 
pement, en  dépit  de  l'expérience  qui  enseigne  combien  la  gestion  directe 
par  l'État  est  plus  onéreuse,  plus  routinière  et  moins  à  la  dévotion  du  public  ; 
c'est  ainsi  qu'il  monopolise  les  postes,  le  télégraphe,  le  téléphone,  les  tabacs, 
les  allumettes,  on  pourrait  même  dire  l'instruction,  convoite  les  chemins 
de  fei-,  a  une  imprimerie,  des  manufactures  (Sèvres,  les  Gobelins),  exploitant 
au  lieu  de  se  borner  à  contrôler.  II  est  vrai  que  c'est  un  moyen  de  se  pro- 
curer des  emplois  à  donner  à  soi-même  quand  la  roue  de  la  fortune  tour- 
nera, à  ses  adhérents  toujours  nombreux  à  la  curée,  et  d'augmenter  le 
nombre  des  fonctionnaires  et  des  employés  qui  sont  autant  d'électeurs  dont 
on  escompte  les  votes. 

Cette  intervention  de  l'État  s'étend  à  tout,  disons-nous  :  n'a-t-elle  pas  étt' 
s'immiscer  dans  les  détails  de  ces  fêtes  séculaires  qui  ont  lieu  chaque  année 
à  Orléans,  en  mémoire  de  la  levée,  en  1429,  du  siège  de  cette  ville,  par  le 
fait  de  .leanne  d'Arc! 

32,  Athènes.  —  Elle  était  consacrée  à  Minerve,  d'où  son  nom  Athéna  qui  est 
celui  en  grec  de  cette  déesse.  Pendant  des  siècles  elle  eut  dans  l'antiquité 
un  éclat  tout  particulier;  longtemps  elle'  domina  sur  mer  et  eut  de  nom- 
breux comptoirs  et  fonda  un  grand  nombre  de  colonies  :  plus  longtemps 
encore  y  fleurirent  les  lettres,  les  arts  et  l'esprit;  elle  fut  la  patrie  de  Phidias, 
de  Socrate,  de  Périclès,  de  Déniosthène  et  d'une  multitude  de  philosophes, 
d'hommes  d'état,  d'écrivains,  d'artistes  éminents:  on  y  admirait  une  foule 
de  monuments,  dont  quelques-uns  tels  que  le  Parthénon  étaient  des  chefs- 
d'œuvre  et  dont  les  ruines  dénotent  encore  la  splendeur. 

35,  Valentes.  —  Hésiode,  Pindare,  Épaminondas.  Plutarque,  nés  à  Thèbes 
ou  environs,  démentent  la  complète  exactitude  de  cette  réputation   de 
"  lourdauds  ■>  faite  aux  Béotiens. 
368, 

10,  Infertiles.  —  Hérodote,  IX,  d'où  le  fait  est  tiré,  prête  à  Cyrus  une  seconde 
raison  :  -  De  conquérants  qu'ils  étaient,  leur  dit-il.  ils  deviendraient  la 
proie  de  quelque  peuple  belliqueux  »;  argument,  ajoute  l'historien,  qui  leur 
fit  perdre  l'envie  qu'ils  avaient  eue  d'émigrer.  —  Cette  influence  du  climat, 
qu'Hérodote  constatait  il  y  a  vingt-deux  siècles,  disant  :  ■■  Les  pays  mous 
font  des  hommes  mous  »,  a  été  reconnue  de  tous  temps;  on  la  trouve  accu- 
sée, entre  autres,  par  Hippocrate,  Platon,  Galien,  Cicéron,  Sénèque,  Bodin, 
Malebranche,  Montesquieu,  J.-J.  Rousseau. 

22,  louyssance.  -  Qu'en  dehors  de  ce  que  nous  ne  pouvons  réaliser,  même 
en  imagination  nous  sonmies  incapables  de  désigner... 

32,  Lacedemoniens.  —  Platon,  Second  A  Icibiade. 

37,  Et  le  Cbrestien...  Dieu.  —  V^ar.  des  éd.  aut.  :  C'eut  pourquoy  le  chrestien 
plus  humble,  et  plus  sage,  et  mieux  recognoissant  que  c'est  que  de  luy,  se 
rapporte  à  son  créateur  de  choisir  et  ordonner  ce  qui  luy  faut.  Il  ne  le  supplie 
d'autre  chose,  sinon,  au  lieu  de  :  «  Et  le  Chrestien  supplie  Dieu  ». 
370, 

2,  Desprier.  —  Mot  créé  par  Montaigne;  on  n'en  saurait  trouver  de  plus 
clair,  de  plus  court,  de  plus  expressif  pour  rendre  l'idée  qu'il  exprime  ici; 


Fb.520  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

il  est  demeuré  dans  la  langue,  mais  avec  un  sens  plus  restrictif,  celui  de 
retirer  une  invitation. 
2,  Prières.  —  Pour  le  délivrer  de  ce  don  funeste,  dont  il  l'avait  gratifié  sur 
sa  demande,  Bacchus  fit  baigner  Midas  dans  le  Pactole  qui,  depuis,  dit  la 
fable,  roule  des  paillettes  d'or  dans  ses  flots. 

8,  Atteindre.  —  Atteindre;  se  disent  encore  l'un  pour  l'autre  dans  certaines 
parties  de  la  France. 
11,  Biton.  —  HÉRODOTE,  I,  31.  —  Un  jour  de  sacrifice,  alors  que  tardaient  à 
venir  les  bœufs  qui  devaient  traîner  au  temple  le  char  de  leur  mère  qui 
en  était  prêtresse,  ils  s'y  attelèrent  eux-mêmes.  Le  peuple  les  acclama; 
leur  mère,  ravie,  pria  la  déesse  de  leur  accorder  en  récompense  ce  qui 
leur  serait  le  plus  avantageux,  et,  quand  elle  sortit  du  temple,  elle  les  trouva 
tous  deux  endormis  pour  toujours  dans  les  bras  l'un  de  l'autre;  ■<  la  mort 
est  donc,  en  conclut  Plutarque,  qui  conte  aussi  le  fait,  ce  qu'il  y  de  plus 
heureux  ». 

11,  Agamedes.  — Plutarque,  Consolation  à  Apollonius,  14.  — Ayant  demandé 
à  Apollon  leur  salaire  pour  la  construction  du  temple  de  Delphes,  le  dieu 
leur  répondit  qu'il  le  leur  donnerait  le  septième  jour,  et  ils  moururent  ce 
jour-là.  —  Une  autre  version  raconte  leur  fin  d'une  façon  moins  honorable 
pour  eux  et  moins  probante  pour  la  morale  que  Montaigne  veut  en  tirer. 
Chargés  postérieurement  de  bâtir  pour  le  roi  d'Ôrchomène  un  édifice 
pour  y  conserver  ses  trésors,  ils  y  ménagèrent  une  entrée  secrète,  au  moyen 
de  laquelle  ils  venaient,  la  nuit,  y  puiser.  Ce  prince  s'étant  aperçu  qu'on 
le  volait,  tendit  un  piège.  Agamède  y  fut  pris.  Trophonius,  craignant  ses 
révélations,  lui  coupa  la  tête  et  s'enfuit  en  l'emportant,  ce  qui  est  une  réédi- 
tion de  l'histoire  de  l'architecte  de  Rhampsinit.  V.  N.  I,  56  :  Enfans. 

32,  Varro.  —  S.  Augustin,  De  Civ.  Dei,  XIX,  2. 

34,  Disputât.  — ^Au  lieu  de  disputât,  l'ex.  de  Bord,  porte  dissentit,  variante 
conforme  au  texte  de  Cicéron. 
372, 

1,  Apparences.  —  «  Le  corps  d'un  athlète  et  l'àme  d'un  sage,  voilà,  a  dit 
Voltaire,  à  propos  de  Buffon,  ce  qu'il  faut  pour  être  heureux  »  ;  c'est  le 
«  mens  sana  in  corpore  sano  [du  jugement  et  de  la  santé)  »  de  Juvéxal,  Sat., 
X,  152.  Mais  cela  ne  dépend  pas  de  nous  et,  d'un  moment  à  l'autre,  peut 
cesser  d'être;  seul,  celui  qui  sait  être  content  de  son  sort,  possède  les 
conditions  de  bonheur  en  ce  monde.  —  Le  bonheur  est  une  illusion,  le 
plaisir  souvent  une  duperie  ;  il  faut  arranger  sa  vie  de  manière  à  éviter  la 
douleur  et  se  garer  de  l'ennui  (d'après  Schopenhauer). 

6,  Aristote.  —  Morale  à  Nicomaque,  IV,  3. 

7,  Archésilas.  —  Sextus  Empiricus,  Pyrr.  Hypot.,  I,  33. 

12,  Ataraxie.  —  Mot  grec  qui  signifie  tranquillité,  sérénité  parfaite,  indif- 
férence absolue. 

17,  Lipsius.  —  Juste  Lipse  a  rempli  en  partie  ce  vœu  dans  un  ouvrage  assez 
considérable  sur  le  stoïcisme  qui  parut  en  1604,  douze  ans  après  la  mort 
de  Montaigne. 

31,  Diuin.  —  C.-à-d.  qu'ainsi  que  la  divinité,  au  dire  même  de  Socrate,  le 
lui  avait  elle-même  appris,  c'est  satisfaire  à  ses  devoirs  que  de  se  conformer 
aux  lois  de  son  pays. 

38,  Loix.  —  Cette  agitation  ne  semble  pas  s'être  calmée  depuis  l'époque  où 
Montaigne  écrivait.  En  France,  durant  la  législature  de  1898  à  1902,  la  der- 
nière pour  laquelle  ce  renseignement  subsiste,  en  quatre  ans,  ont  été 
présentés  :  2.781  projets  ou  propositions  de  loi,  dont  627  dits  d'intérêt 
général,  et  il  a  été  statué  sur  1.690  d'entre  eux;  à  quoi  il  y  a  lieu  d'ajouter 
la  discussion  de  130  interpellations,  118  questions  adressées  aux  Ministres, 
et  enfin  le  dépôt  de  3.597  pétitions;  ce  qui  ne  veut  pas  dire  que  la  législa- 
ture ait  été  plus  profitable  ou  plus  utile  qu'une  autre;  jamais,  au  contraire, 
nous  n'avons  été  plus  éloignés  de  la  pratique  de  cet  adage  :  «  acta,  non 
verba  »  qui  devrait  être  la  devise  d'un  état  bien  gouverné;  mais  chacun 
veut  avoir  l'air  de  faire. 


NOTES.         LTV.  II,  CH.  XII.         VOL.  II,  PAG.  372.  Fb.521 

39,  Voisins.  —  Montaigne  a  pu  voir  en  effet,  de  1534  à  1558,  les  Anglais  ou 
plutôt  la  cour  d'Angleterre  sous  Henri  VIII,  Edouard  VI,  Marie  Tudor  et 
Elisabetli,  changer  quatre  fois  de  religion. 
374, 

o,  Capitale.  —  Qui  nous  exposerait  à  une  peine  capitale. 
10,  Ancien.  —  Xénophon,  Mémoires  sur  Sacrale,  1,  3,  1.  —  Ce  Dieu,  c'est 
Apollon,  dont  la  Pythie,  sa  prêtresse,  rendait  à  Delphes  ses  oracles,  montée 
sur  un  trépied. 
15,  Estait.  —  Il  serait  peut-être  plus  exact  de  dire  :  «  celle  dans  laquelle  on 
a  été  élevé  »  ;  d'aucuns  diraient  :  à  quoi  bon?  ou,  avec  Renan  :  «  l'orthodoxie 
f)rocure  de  grandes  joies,  mais  elle  ferme  à  la  vérité  ».  Admirons  avec  quelle 
iiùte  après  avoir  risqué  cette  assertion,  sur  laquelle  du  reste  il  ne  se  pro- 
nonce pas,  Montaigne  fait  amende  honorable  ;  il  se  trouve  là  tout  entier. 
C'est  un  grand  tort,  à  mon  sens,  que  de  lier  d'une  manière  indissoluble  ces 
deux  idées  :  Dieu  et  la  Religion."  La  première,  pereonne  ne  la  discute,  et  le 
plus  souvent  ceux  qui  en  raisonnent,  déraisonnent,  parce  que  pour  tous 
c'est 'l'inconnu  ;  seule,  la  seconde  est  en  cause  :  elle  s'étaye  sur  la  première 
dont  elle  ne  saurait  se  passer,  tandis  que  celle-ci,  dans  son  infinité,  n'a  que 
faire  d'elle. 

Il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  la  Religion  est  une  idée  naturelle  à  l'homme 
dès  qu'il  est  à  même  de  juger  do  son  néant  en  face  de  l'Univers  et  de  ses 
merveilles  sans  cesse  renaissantes  qui  n'ont  point  eu  de  commencement  et 
n'auront  pas  de  fin,  et  ce  n'est  pas  sans  raison  que  la  Providence,  l'àme  de 
ce  tout  sans  limites,  tout  en  ne  faisant  pas  qu'elle  soit  identique  chez  tous, 
ce  qu'elle  n'a  pas  probablement  jugé  indispensable,  nous  l'ait  infusée, 
comme  elle  a  fait  de  la  raison,  de  la  conscience,  laissant  à  notre  libre  arbitre 
d'en  faire  l'estime  que  nous  croyons,  de  même  que,  dans  tous  nos  actes, 
nous  tenons  plus  ou  moins  compte  de  ce  que  nous  soufflent  la  raison  et  la 
conscience. 

La  religion,  chez  ses  adeptes  sincères,  nous  affermit  dans  l'observation  de 
nos  devoirs  envers  nous-mêmes  et  envers  le  prochain,  et  par  l'espérance  nous 
soutient  dans  l'adversité;  elle  ne  fait  que  du  bien,  jamais  de  mal;  par  elle 
la  morale  et  la  résignation  pénètrent  les  masses  sur  lesquelles  n'ont  point 
prise  les  dissertations  philosophiques  qui  ne  s'adressent  qu'à  la  raison;  il 
leur  faut  quelque  chose  qui  préférablement  agisse  sur  l'imagination,  ce  que 
leur  offrent  les  légendes  religieuses  et  les  cérémonies  du  culte. 

Chaque  religion  comporte  trois  choses  :  la  morale,  le  dogme  et  le  culte. 

Chez  les  peuples  civilisées  elles  n'ont  jamais  beaucoup  différé  sous  le 
premier  de  ces  rapports.  Entre  toutes  cependant,  la  religion  chrétienne  qui 
a  pour  base  essentielle  la  charité,  aimer  le  prochain  comme  soi-même,  faire 
à  autrui  ce  qu'on  voudrait  qu'il  soit  fait  pour  vous-même,  tient  incontes- 
tablement, par  cela  même,  le  premier  rang. 

Comme  dogmes,  toutes  se  valent.  Toutes  ont  pour  point  de  départ  l'exis- 
tence de  Dieu  que  tout  démontre,  que  personne  ne  nie,  que  chacune  dé- 
peint à  sa  manière,  y  joignant,  pour  le  rehausser,  comme  s'il  en  était  besoin, 
certains  faits  surnaturels  qui  relèvent  exclusivement  de  la  foi,  sorte  d'hypno- 
tisme, auquel  il  est  difficile  de  se  prêter  quand  on  ne  l'a  pas;  sur  ces  faits 
qu'elles  imposent  à  notre  croyance,  toute  discussion  est  stérile,  car  la  raison 
et  la  foi  sont  deux  antipodes,  et  entre  elles  nul  ne  sait  où  est  la  vérité. 

C'est  sous  le  rapport  du  culte  que  les  diverses  religions,  et  dans  chacune, 
ses  diverses  sectes,  diffèrent  le  plus.» —  Par  son  unité,  par  ses  cérémonies 
réellement  impressionnantes,  la  religion  catholique  l'emporte  de  beaucoup 
à  cet  égard  sur  toutes  les  autres.  Elle  l'emporte  aussi  par  la  confession  auri- 
culaire, qu'à  rencontre  de  bien  d'autres  je  prise  particulièrement;  très 
discutable  en  théorie,  bien  innocente  en  réalité,  elle  permet  à  l'homme,  être 
essentiellement  faible,  par  l'aveu  de  ses  fautes  et  l'absolution  qu'il  en  obtient, 
d'en  mesurer  l'étendue,  d'en  éprouver  des  regrets,  du  repentir,  d'être  en- 
couragé à  les  réparer,  à  résister  aux  tentations  qui  peuvent  se  reproduire, 
d'en  faire  en  quelque  sorte  pénitence  et  en  recevoir  l'absolution,  allège,  ré- 


Fb.522  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

conforte  et  amende,  à  l'instar  de  ce  qui  se  passe  quand  le  criminel  fait 
l'aveu  de  son  crime  au  juge  d'instruction  et  qu'il  paie  sa  dette  à  la  justice 
humaine;  l'idée  est  grande  et  l'effet  salutaire. 

Ce  sont  ces  considérations  qui  font  que,  personnellement,  je  place  la 
religion  catholique,  apostolique  et  romaine  au-dessus  de  toutes  les  autres. 
Mais  si  j'estime  d'effet  utile,  pour  le  maintien  de  l'unité,  l'autorité  du  pape, 
en  matière  de  dogme  et  de  culte,  je  tiens  pour  abusive  son  ingérence  dans 
les  questions  d'administration  diocésaine  et  les  rapports  du  clergé  avec  les  , 
fidèles,  et  ceux  des  uns  et  des  autres  avec  l'État;  ce  sont  là  des  affaires  du 
ressort,  en  cas  de  conflit,  de  conciles  provinciau.x  ou  nationau.x.  —  Les 
erreurs,  les  abus  si  monstrueux  commis  à  diverses  époques  par  ses  minis- 
tres, qui  se  sont  montrés  si  intolérants  chaque  fois  qu'ils  ont  eu  la  supré- 
matie, n'altèrent  en  rien  son  excellence;  ces  ministres  sont  hommes  et  en 
ont  les  imperfections,  il  faut  le  regretter,  sans  en  faire  porter  la  responsa- 
bilité à  l'institution;  et  c'est  pourquoi  je  suis  de  tout  cœur  de  l'Église 
catholique,  apostolique  et  romaine  en  ce  qui  touche  le  spiritue.l,  français 
en  ce  qui  est  afférent  au  temporel. 

27,  Au  delà.  —  Pascal,  qui  a  jugé  si  sévèrement  Montaigne  et  copié  en  tant 
d'endroits,  dit  :  «  On  ne  voit  presque  rien  de  juste  ou  d'injuste,  qui  ne 
change  de  qualité,  en  changeant  de  climat;  trois  degrés  d'élévation  du  pôle 
renversent  toute  la  jurisprudence,  un  méridien  décide  de  la  vérité;  à  quel- 
ques années  d'intervalle,  les  lois  fondamentales  modifient  le  droit;  plaisante 
justice  qu'une  rivière  ou  une  montagne  borne  :  qui,  vérité  en  deçà  des 
Pyrénées,  est  erreur  au  delàl...  Pourquoi  me  tuez-vous?  Eh  quoi  !  ne  demeu- 
rez-vous pas  de  l'autre  côté  de  l'eau?  »  —  Cette  même  idée,  Chateaubriam» 
l'exprime  lui  aussi  :  «  Un  homme,  écrit-il,  peut  être  pendu  de  ce  côté-ci 
d'un  ruisseau,  pour  des  principes  réputés  sacrés  de  l'autre  côté  de  ce  même 
ruisseau.  »  Payen. 
376, 

7,  Indifférentes.  —  Les  philosophes  de  la  secte  de  Zenon  et  de  Pyrrhon 
l'admettaient  aussi,  cela  et  bien  d'autres  choses;  en  le  relatant,  Sextus 
Empiricus  ajoute  que  toutefois  ils  se  fussent  bien  gardés  de  jamais,  dans  la 
pratique,  agir  à  rencontre  de  ce  qui  est  universellement  admis. 

7,  Platon.  —  De  la  République,  1. 

24,  Inconstance.  —  Autre  pensée  que  Pascal  s'est  encore  appropriée  et  qu'il 
rend  de  la  sorte  :  <■  Le  larcin,  l'inceste,  le  meurtre  des  enfants  et  des  pères, 
tout  cela  a  sa  place  entre  les  actions  vertueuses...;  il  y  a  sans  doute  des' 
lois  naturelles,  mais  cette  belle  raison  humaine  a  tout  corrompu.  »  Payen. 

•28,  Autre.  —  Ce  qui  gouverne  les  hommes,  ce  sont  les  idées,  les  sentiments, 
les  mœurs;  leur  ensemble  crée  à  chaque  race  une  mentalité  particulière; 
les  coutumes,  les  institutions,  les  lois  ne  sont  que  l'expression  de  cette 
mentalité;  aussi,  comme  elle,  sont-elles  variables  d'un  peuple  à  un  autre. 

30,  Coustume.  —  Les  Hindous.  Sextus  Empiricus,  Pyrr.  Hypot.,  III,  24.  — 
Strabon  l'attribuait  aussi  aux  Massagètes  (peuple  de  la  Scythie)  :  «  Ils  esti- 
maient, dit-il,  que  la  mort  la  plus  honorable,  quand  l'âge  les  a  rendus 
inutiles,  c'est  d'être  tués  et  mangés  avec  de  la  viande  de  mouton;  quant  à 
ceux  qui  étaient  usés  par  la  maladie,  ils  les  détruisaient  comme  impies  et  ne 
les  considéraient  que  comme  dignes  d'être  dévorés  par  les  bêtes  féroces.  »  Un 
autre  auteur  les  représente  comme  ne  tenant  rien  comme  plus  malheureux 
que  de  périr  autrement  que  par  le  fer,  et  c'est  pourquoi  ils  se  faisaient  une 
loi  de  tuer  ainsi  les  vieillards  et  de  les  manger.  V.  I.  170  et  N.  Eux-mesmes. 
378, 

10,  Courage.  —  Diocêne  Laerce,  II,  78. 

14,  Goujon.  —  Id.,  II,  67. 

17,  Choulx.  — DioGÈNE  L.4ERCE,  11,68;  Horace,  EpisL,  I,  17,  1. 

23,  Pacis.  —  Après  la  citation,  les  éd.  ant.  aj.  :  Il  aduient  de  cette  diversité 
de  visages,  que  les  iugements  s'appliquent  diuersement  au  choix  des  choses. 

27,  Impuissantes.  —  Diogène  Laerce,  I,  63. 

30,  Socrates.  —  Id.,  II,  ;fô. 


NOTES.         LIV.  Il,  en.  XII.         VOL.   Il,  PAG.  .378.  Fb.!)2.3 

32,  Seruitude.  —  Sextus  Empiricus,  Pyn\  Hypot.,  III,  24;  Plutarque,  Cicéron, 
26;  JuvÉNAi,,  I,  105,  etc. 

33,  Public.  —  Sextus  Empiricus,  Pyrr.  Hypot.,  I,  14;  III,  24. 

37,  Colit.  —   »  Les  chrétiens,  qui  adorent  un  seul  et  même  Dieu,  se  sont,  à 
diverses  reprises,  montrés  aussi  acliarnés  les  uns  contre  tes  autres  que 
ces  anciens  peuples,  parce  que   leurs  croyances  différaient  sur  certains 
points.  »  CosTE. 
380, 

5,  Semble.  —  Un  avocat  italien  disait  à  une  cour  devant  laquelle  il  plaidait  : 
-  Le  mois  dernier  vos  Excellences  ont  jugé  ainsi  ;  ce  mois-ci,  dans  le  même 
cas,  vous  jugez  d'une  façon  tout  opposée:  de  quelque  façon  que  ce  soit, 
c'est  parfait.  »  Payen. 

18,  Considérable.  —  A  considérer. 

19,  Fust.  C.-à-d.  qu'il  ne  fallait  pas  considérer  (qu'il  importait  peu),  dans 
la  paillardise,  de  quelle  manière  on  s'y  livrait.  —  Pi.utarque,  Règles  et  pré- 
ceptes de  santé,  5.  Mais  Arcésilas  entendait  condamner,  par  là,  la  débauche 
sous  quelque  forme  qu'elle  se  produisît  chez  l'un  aussi  bien  que  chez  l'autre, 
parce  que,  ajoute  Plutarque,  il  y  a  autant  de  mai  d'un  côté  que  de  l'autre. 

23,  Propos.  —  De  l'amour  des  garçons. 

24,  Diogarchus.  —  L'ex.  de  Bord,  porte  Dicearchus,  ce  qui  est  confoi-me  au 
texte  latin. 

382, 

8,  Cérémonies.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  Chacun  a  ouy  parler  de  la  deshuntéc 
façon  de  vivre  des  philosophes  cyniques. 

8.  Chrysippus.  —  Plutarque,  Contredits  des  philosophes  sloïques,  31. 
12,  Hippoclides.  —  Hérodote,  VI,  129. 

12,  Fourché.  —  Jeu  d'enfant  consistant  à  se  tenir  verticalement  sur  les  bras, 
contre  un  arbre  ou  un  mur,  la  tête  en  bas,  les  jambes  en  l'air  écartées  l'un(! 
de  l'autre. 

13,  Metrocles.  —  Diogèxe  Laerce,  VI,  94. 

24,  Affoler.  —  Ravaler,  déprécier. 

28,  Estimation.  —  Le  mystère,  la  réserve,  la  circonspection  dans  la  jouissance 
,     des  plaisirs  de  l'amour,  font  partie  de  leur  prix. 
35,  Oisifs.  —  Lex.  de  Bord,  raye  :  vagabonds  et  oisifs. 

35,  Malaisance.  —  Pie  V  voulut,  au  commencement  de  son  pontiticat,  sup- 
primer les  maisons  de  tolérance,  mais  il  se  vit  bientôt  dans  l'obligation  de 
les  rétablir.  —  Au  début  de  la  conquête  de  l'Algérie,  le  général  Bedeau, 
bien  que,  par  son  caractère  et  ses  sentiments  religieux,  fort  opposé  à  la 
prostitution,  favorisa  à  Sétif,  où  il  commandait,  l'établissement  de  maisons 
publiques,  comme  sauvegarde  de  la  tranquillité  des  femmes  honnêtes. 

36.  Coruine.  —  Le  texte  de  Martial  porte  Scaevine. 
384, 

8,  Aulx.  —  Ce  fait,  généralement  attribué  à  Diogène  le  Cynique,  n'est  fondé 
sur  le  témoignage  d'aucun  auteur  ancien.  Bayle,  Hipparchia. 

9,  Autheur.  —  S.  Augustin,  De  Cit^  Dei,  XIV,  20.  —  Le  passage  où  il  exprime 
cette  appréciation  est,  pour  le  moins,  aussi  licencieux  que  le  français  de 

'     Montaigne. 
19,  Frottant.  —  Diogène  Laerce,  VI,  69. 
21,  Rue.  -  fd.,  VII,  58.  • 

23,  Discrétion.  —  Sans  faire  de  distinction;  du  latin  discretio,  qui  a  cette 
'       signification;  aujourd'hui,  ce  mot  ne  s'emploie  plus  dans  ce  sens. 

25,  Règle.  —  Diogène  Laerce,  VI,  96.  —  L'ex.  de  Bord,  portait  :  s'accouploit 
à  lui  en  pjublic;  mais  cette  addition  a  ensuite  été  rayée.  —  Les  éd.  ant.  et 
l'ex.  de  Bord,  ajoutent  :  Solon  fut,  à  ce  qu'on  treuue,  le  premier  qui  donna 
par  ses  loix  liberté  aux  femmes,  de  faire  profit  publique  de  leurs  corps.  Cette 
phrase  rayée  depuis  sur  l'ex.  de  Bord,  y  avait  été  complétée  de  la  sorte  : 
toutefois,  si  te  ne  me  trompe,  Hérodote  recite  auant  lui  cet  vsage  receu  à  plu- 
sieurs polices,  addition  qui  a  pareillement  été  rayée. 

31,  Protagoras.  —  Sextus  Empiricus,  I,  29  et  32. 


Pb.*524  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

386, 

7,  Maintenir.  —  Luther  faisant  allusion  aux  interprétations  diverses  que 
chacun  en  tirait  à  l'appui  de  ses  dires,  appelait  l'Écriture  sainte  «  le  livre 
des  hérétiques  ».  —  Montesquieu  en  parle  de  même  :  «  C'est  un  pays  où 
les  chrétiens  de  toutes  sectes  font  des  descentes  et  vont  comme  au  pillage  ; 
c'est  un  champ  de  bataille  où  les  nations  ennemies  se  rencontrent,  se 
livrent  bien  des  combats;  où  l'on  s'attaque,  ou  l'on  escarmouche  de  bien 
des  manières;  la  plupart  des  interprètes  n'ont  point  cherché  dans  l'Écri- 
ture ce  qu'il  fallait  y  croire,  mais  ce  qu'ils  croyaient  en  eux-mêmes.  » 

23,  Pourtant.  —  C'est  pourquoi,  c'est  pour  cette  raison.  —  Montaigne,  qui 
fait  un  usage  fréquent  de  ce  mot,  l'emploie  presque  toujours  dans  ce  sens. 

32,  Landit.  —  Par  le  landit.  —  Le  landit  ou  lendit  était  le  salaire  de  leurs 
leçons  que  les  écoliers  donnaient  à  leurs  maîtres,  et  qu'il  était  d'usage  de 
remettre  lors  de  la  foire  dite  du  Landit,  qui  se  tenait  à  S.-Denis;  d'où  le 
nom  attribué  à  ce  paiement  fait  constamment  à  cette  époque  et  qui,  pour 
les  élèves  de  l'université,  consistait  en  six  ou  sept  écus  d'or  fichés  dans  un 
citron  et  qu'on  mettait  dans  un  verre  de  cristal;  les  écoliers  désignaient 
entre  eux,  sous  le  nom  de  «  frippelandis  »,  ceux  qui  frustraient  leurs  régents 
de  ce  présent.  Quant  au  nom  même  de  la  foire,  il  viendrait  du  latin  indic- 
tum,  comme  ayant  toujours  lieu  à  jour  dit,  fixé  d'avance  une  fois  pour 
toutes. 
37,  Dire.  —  Rabelais,  prologue  du  livre  I  de  Gargantua,  exprime  la  même 
idée  :  «  Croyez-vous,  en  vostre  foy,  qu'oncques  Homère,  escriuant  l'Iliade  et 
Odyssée,  pensast  es  allégories,  lesquelles  de  luy  ont  calfreté  Plutarche, 
Heraclides  Ponticq,  Eustatie,  Phornute,  et  ce  que  d'iceux  Potitian  a  desrobé? 
Si  le  croyez,  vous  n'approchez  ne  de  pieds  ne  de  mains  à  mon  opinion  qui 
décrète  icelles  aussi  peu  auoir  esté  songées  d'Homère  que  d'Ouide,  en  ses 
Métamorphoses,  les  sacremens  de  l'Euangile,  lesquels  vn  frère  Lubin,  vray 
croquelardon,  s'est  efforcé  demonstrer,  si  d'aduenture  il  rencontroit  gens 
aussi  fols  que  luv.  » 
388, 

16,  Mesmes.  —  Et  on  le  met  en  opposition  avec  lui-même. 
20,  Heraclitus.  —  Sextus  Empiricus,  Pyrr.  Hypot.,  I,  29. 
25,  Amer.  —  Sextus  Empiricus,  Adv.  Malh.,  163. 

28,  Cyrenayens.  —  Ou  Cyrénaïques.  Cicéron,  Acad.,  11,  7. 
34,  Chacun.  —  Cicéron,  Acad.,  11,  46. 

37,  Retirée.  —  Séparée,  disjointe. 

38,  Cogitation.  —  C'est  la  conclusion  que  Platon  poursuit  dans  le  Phédon  et 
le  Théétète. 

390, 

14,  Sentiment.  —  C'est  à  peu  près  la  même  idée  qu'exprime  Helv-etius,  quand 
il  dit  :  «  Juger,  c'est  sentir.  » 

17,  Cognoissance.  —  Descartes,  Lqcke,  Condillac  et  autres  philosophes  de 
temps  postérieure  à  Montaigne,  n'ont  fait  que  le  copier,  quand  ils  ont  dit 
et  répété  leur  fameux  :  «  Coffito,  ergo  sum  {Je  sens,  je  pense,  donc  j'existe).  » 

24,  Dit.  —Acad.,  U,  27. 

30,  Perdu.  —  Plutarque,  Contredits  des  phil.  stoïques,  9. 
392, 

22,  Appréhendent.  —  Ne  le  saisissent,  ne  le  conçoivent. 

31,  Bute.  —  Le  tir  à  l'arquebuse. 

40,  Costier.  —  Que  le  coup  a  porté  trop  haut,  ou  à  côté  du  but. 
394, 

1,  Dire.  —  Que  nous  ayons  à  regretter,  qui  nous  manque. 
4,  Sens.  —  Sextus  Empiricus,  Pyrr.  Hypot.,  1,  14. 

7,  Rapporter.  —  Que  peuvent  être  ces  vertus  d'assécher  ou  restreindre 
que  Montaigne  prête  à  la  pomme?  S'il  veut  dire  qu'elle  pourrait  être 
susceptible  de  se  dessécher  et  de  se  contracter,  ce  qui  est,  nous  le  con- 
statons par  la  vue  ;  s'il  entend  par  là  causer  de  l'altération  et  de  la  consti- 
pation, nous  sommes  à  même  de  le  constater  par  le  palais  et  les  intestins. 


NOTES.         LIV.  II,  Cil.  XII.         VOL.  II,  PAG.  394.  Fb.525 

Aussi,  tout  en  saisissant  parl'aitenient  l'idée  de  l'auteur  qui  veut  dire  que 
«  si  la  pomme  a  d'autres  propriétés  que  colles  que  nous  lui  connaissons, 
elles  nous  échappent  parce  que  peut-être  nous  ne  possédons  pas  les  sens 
nécessaires  pour  que  nous  nous  en  apercevions  »,  faute  de  pouvoir  pré- 
ciser plus  qu'il  ne  fait,  nous  le  reproduisons  textuellement. 
12,  Choses.  —  Cette  réflexion  de  Montaigne  se  confirme  de  plus  en  plus  de 
nos  jours,  avec  les  progrès  de  l'électricité  dont  nous  constatons  les  effets, 
les  produisant  et  même  en  tirant  parti,  alors  que  leur  explication  nous 
échappe  et  qu'eux-mêmes  vont  déroutant  complètement  notre  entende- 
ment, comme  il  arrive  encore  de  la  lélégrapltie  sans  fil,  des  rayons  X, 
du  radium,  etc.,  etc. 
396, 

11,  Videtur.  —  Montaigne  a  traduit  ces  deux  vers,  avant  de  les  citer. 
'21,  Timagoras.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  25. 

25,  Epicuriens.  —  Au  jugement  des  Épicuriens,  c'est  de. 
398, 

6,  Plaira.  —  Aux   exemples  qu'il  va   donner,  Montaigne   aurait   pu   en 

ajouter  beaucoup  d'autres,  particulièrement  en  ce  qui  touche  la  vue,  le 

plus  trompeur  de  nos  sens;  les  illusions  d'optique  dues  à  la  réflexion,  à 

la  réfraction,  au  mirage  etc.,  abondent  en  effet. 

34,  Vastité.  —  Etendue,   immensité;   mot   forgé   par  Montaigne,  du   latin 

vasHtas,  d'où  vient  notre  adjectif  vaste. 
41,  Zenon.  —  Diogène  Laerce,  IV,  23. 
400, 

6,  Fascheux.  —  Ne  fut  pas  blâmable,  n'eut  pas  tort. 
9,  Moy.  —  Diogène  Laerce,  IV,  36. 

19,  Espaigne.  —  Le  corail. 

20,  Oceane.  —  Les  perles. 

22,  Sien.  —  «  L'irréel  est,  dans  certains  cas,  plus  vrai  que  le  réel;  ainsi,  les 
objets  ont  des  états,  des  formes  nettement  déterminés;  états  et  formes 
qui  n'importent  pas  tant  que  ceux  sous  lesquels  nous  les  voyons  constam- 
ment, souvent  très  différents  de  la  réalité  »  (Le  Bon),  ainsi  qu'il  arrive, 
dans  les  effets  de  perspective,  au  théâtre,  par  exemple. 

27,  Narcisse.  —  Était  d'une  admirable  beauté;  s'éprit  de  sa  propre  image 
et,  de  chagrin  de  ne  pouvoir  la  posséder,  se  noya  dans  la  source  où  il 
l'apercevait  et  fut  changé  en  la  fleur  qui  porte  son  nom. 

34,  Sequiturque.  —  Le  texte  latin  porto  loquiturque. 

38,  Tours.  —  Leur  hauteur  est  de  68  m.  L'église  est  érigée  sur  l'emplacement 
de  l'ancienne  cathédrale  mérovingienne  qui  avait,  elle-même,  remplacé  un 
temple  païen;  sa  construction,  commencée  en  1163,  ne  fut  achevée  qu'en 
1230,  et  encore  seulement  dans  son  ensemble. 
402, 

3,  Terre.  —  Idée  reproduite  par  Pascal  :  «  Le  plus  grand  philosophe  du 
monde,  sur  une  planche  plus  large  qu'il  ne  faut  pour  marcher  à  son  ordi- 
naire, s'il  y  avait  dessous  un  précipice,  quoique  la  raison  le  convainque 
de  sa  sûreté,  son  imagination  prévaudra.  » 

4,  Deçà.  —  Les  Pyrénées,  de  ce  côté-ci  de  la  France. 

12,  Yeux.  —  Démocrite;  mais  le  fait  est  controuvé.  Cicéron,  De  Fin.  boit  et 
mal.,  29,  n'en  parle  que  comme  d*une  chose  incertaine,  et  Plutarque,  De 
la  Curiosité,  11,  dit  positivement  que  c'est  une  fausseté. 

20,  Tbeophrastus.  —  Plutarque,  Comment  il  faut  ouïr,  2. 

28,  Fureur.  —  L'inverse  se  produit  également  :  David,  jouant  de  la  harpe, 
calmait  Saul  tourmenté  par  le  mauvais  esprit;  Odette  de  Champdivers 
endormait  parfois,  en  touchant  de  son  luth,  la  sombre  folie  de  Charles  VI; 
et,  de  nos  jours,  des  médecins  parlent  de  traiter  par  la  musique  certaines 
maladies. 

34,  Protocole.  —  Protocole  était,  du  temps  de  Montaigne,  le  qualificatif 
appliqué  à  qui,  le  texte  d'un  discours  en  main  et  placé  derrière  celui  qui 
le  prononçait,  lui  soufflait  ce  qu'il  avait  à  dire  s'il  se  trompait  ou  demeu- 


Pb.526  ESSAIS  DK  MONTAIGNE. 

rait  court;  ((ui  en  un  mot  lemplissait  un  rôle  analogue  à  celui  du  soulfleur 
au  théâtre.  Ce  terme  ne  s'applique  plus  aujourd'iiui  qu'au  formulaire  suivi 
dans  l'accomplissement  d'actes  publics  et  aux  procès -verbaux  auxquels 
donnent  lieu  certains  d'entre  eux. 
34,  Gracchus.  —  Plltarque,  Comment  il  faut  refréner  la  colère,  6.  —  T.  Grac- 
chus  était  emporté,  violent  dans  sa  manière  de  dire,  et  avait  pour  le  cal- 
mer un  (le  ses  serviteurs  qui,  avec  une  petite  flûte,  jouant  sur  un  ton 
doux  et  mélodieux  quand  sa  voix  s'élevait,  l'en  avertissait.  «  Je  voudrais, 
quant  à  moi,  ajoute  Plutarque,  que  l'on  me  présentât  un  miroir  quand 
je  me  mets  en  colère  et  que  j'j'  visse  mes  traits  convulsés  par  cette  passion; 
ce  serait  aussi  utile  à  d'autres.  »  —  L'histoire  romaine  présente  un  autre 
cas  d'un  joueur  de  llùte  attaché  aux  pas  d'un  autre  personnage;  mais  c'est 
à  un  tout  autre  titre,  non  pour  le  l'appeler  à  lui-même,  mais  pour  le  si- 
gnaler aux  autres  :  à  Duilius,  vainqueur  à  la  première  bataille  navale  rem- 
portée sur  les  Carthaginois  (l'an  200,  lors  de  la  première  guerre  punique), 
le  Sénat  accorda,  à  titre  d'honneur,  d'être  reconduit  le  soir  à  la  lueur  de 
flambeaux  et  précédé  d'un  joueur  de  flùle.  A  celte  même  occasion  fut  érigée 
à  Rome  une  colonne  rostrale  qui,  restaurée  à  diverses  reprises,  existe  en- 
core; l'inscription  qu'elle  porte  est  un  des  monuments  les  plus  anciens  de 
la  langue  latine;  cette  coionn(!  est  aujourd'hui  surmontée  d'un  bec  de  gaz! 

404, 

1,  Enuy.  —  Pascal  a  reproduit  cette  même  idée,  en  employant  les  mêmes 
termes  :  «  Les  sens  abusent  la  raison  par  de  fausses  apparence^;  et  cette 
même  piperie  qu'ils  lui  apportent,  ils  la  reçoivent  d'elle  à  son  tour.  Elle 
s'en  revanche  :  les  passions  de  l'âme  troublent  les  sens  et  leur  font  des 
impressions  fâcheuses.  Ils  mentent  et  se  trompent  à  ^envJ^  » 
8,  Tbebas.  —  On  voit...,  comme  voyait  Penthée,  roi  de  Thèbes,  poursuivi 
par  les  Bacchantes  dont  il  avait  surpris  les  mystères  et  qui  le  mirent  en 
pièces. 
25,  Cymmeriennes.  —  Semblables  aux  ténèbres  au  milieu  desquelles  \  ivent 
les  Cimmériens,  peuple  mythologique  habitant  la  région  montagneuse  au 
Sud  de  Naples,  et  qui  passait  pour  vivre  sous  terre  dans  des  ténèbres  conti- 
nues; les  poètes  plaçaient  chez  eux  l'une  des  entrées  de  l'enfer. 

406, 

4,  Democritus.  —  Plutarque,  Des  Opinions  despliil.,  IV,  10. 

14,  Cherchons.  —  Pendant  longtemps,  la  salive  a  joui  d'une  grande  répu- 
tation contre  beaucoup  de  maladies,  en  particulier  contre  les  plaies  et  les 
ulcères.  Payen. 

15,  Marins.  —  Poisson  qu'on  nomme  aussi  cycloptère  ou  blême.  «  11  ne 
peut,  dit-on,  raconte  Pline  (.Va<.  Hist.,XXXU.,  1),  être  capturé  vivant;  par 
contre,  lorsqu'il  e.st  dans  son  élément,  il  suffit  de  le  toucher  du  doigt, 
pour  être  empoisonné  et  en  mourir.  • 

18,  Poisson.  —  C.-à-d.  :  Que  croire?  est-ce  le  poisson  qui  e.st  un  poison  ])our 

l'homme,  ou  l'homme  qui  est  un  poison  pour  le  poisson? 
25,  Hyposphragma.  —  Sextus  Empiricus,   Pyrr.  Hypot.,  I,  14.  —  L'Hypo- , 

sphragma  est  un  épancheraent  de  sang  sous  la  conjonctivite,  membrane 

qui  unit  les  paupières  au  globe  de  l'œil. 
408, 

4,  Ordinairement.  —  Sextus  Empiricus,  Pyrr.  Hypol.,  1,  14. 
28,  Choses.  —  Les  éd.  ant.  portent  :  Les  malades  prestent  de  l'amertume 

aux  choses  douces  :  par  où  il  nous  appert  que  nous  ne  receuons  pas  les  choses 

comm£  elles  sont,  mais,  au  lieu  de  :  «  Nous...  choses  ». 
34,  Quoy.   —  S'agit-il  maintenant  de  prouver  que  les  sens...;  ou  encore   : 

Veut-on  une  preuve  que  nos  sens... 
36,  Plate.  —  Sextus  Empiricus,  Pyrr.  Hypot.,  1,  14. 
38,  Sentiment.  —  Odorat. 

40,  Veue.  —  Sextus  Empiricus,  Pyrr.  Hypol..  1,  14. 

41,  Pennes  sans  fin.  —  Bague  en  métal  bruni  fort  en  usage  jadis  et  qui 
n'a  pas  complètoiaent  disparu,  qu'on  af)[)olle  parfois  aujourd'hui  ■•  bague 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  XII.         VOL.  II,  PAG.  408.  Fb.527 

sorcière  » ,  constituée  par  un  anneau  strié  extérieurement  comme  des 
barbes  de  plumes.  Les  stries  qui  forment  entre  elles  un  angle  obtus  sem- 
blent, par  un  effet  d'optique,  s'évaser  lorsqu'on  tourne  la  bague  sur  le 
doigt,  présentant  alors  quelque  ressemblance  avec  la  plume  d'oiseau;  si 
le  métal  n'est  pas  bruni,  l'illusion  est  moins  prononcée.  C'est  un  effet 
analogue  à  celui  qui  se  produit  quand  on  regarde  deux  colonnes  torses 
dont  les  hélices  sont  en  sens  contraire;  elles  paraissent  n'être  pas  paral- 
lèles, alors  même  que  toutes  deux  sont  dressées  verticalement. 
410, 

6,  Oculaire.  —  Sksèque,  JVat.  QuœsL,  l,  IG. 
11,  Humeur.  —  Sextls  Empiricus,  Pyrr.  Hypol.,  1,  14. 

24,  Veillent.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  puis  que  cet  estât  là,  a  force  de  donner  aux 
choses  vn  autre  estre,  que  celuy  qu'elles  ont  :  puis  qiCvne  humeur  iaunâlre, 
nous  change  toutes  choses  en  iaune. 

29,  Tempéré.  —  Sextls  Empiricls,  Pyrr.  Hypot.,  l,  14. 
34,  Vérité.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  ny  quelle  est  leur  nature. 
412, 

16,  Rouet.  —  C.-à-d.  au  bout  de  nos  moyens  d'action.  —  Être  au  i-ouet, 
terme  de  chasse,  se  dit  du  lièvre  qui,  pourchassé  ot  épuisé  par  une  longue 
course,  ne  fait  plus  que  tourner  autour  des  chiens. 
27,  Passions.  —  Sensations,  perceptions. 

29,  Discrepances.  —  Différences,  du  latin  discrepantia,  contradiction,  dis- 
convenance, diversité. 
414, 

15,  Platon.  —  Dans  le  Théétèle. 

18,  Fluxion.  —  Vicissitude;  du  latin  fluere,  couler,  s'échapper,  s'évanouir. 

18,  Muance.  —  Changement,  transformation,  du  latin  mvere  qui  a  même 
signification. 

22,  Labile.  —  Sujette  à  changer;  du  latin  labilis,  tombant,  caduc,  fragile. 

25,  Heraclitus.  —  Sénèque,  Epist.  58;  Plutarque,.  Traité  sur  le  mot  El. 

29,  Autres.  —  Tout  ce  qui  suit,  jusqu'aux  mots  «  et  sans  fin  »  (pag.  418, 
lig.  15),  excepté  les  vers  qui  s'y  trouvent  inclus,  est  un  passage  de  Plutarque, 
Traité  sur  le  mot  El,  transcrit  dans  les  propres  termes  d'Aniyot,  son  tra- 
ducteur. 

416, 

41,  Incontinent.  —  «  Le  moment  où  je  parle  est  déjà  loin  de  moi.  >•  Boileau. 
«  Le  présent  est  très  court;  si  court  que  quelques  hommes  ont  nié  son 
existence  ;  en  effet,  il  est  toujours  en  marche  :  il  vole,  se  précipite,  il  a 
cessé  d'être  avant  d'être  arrivé.  »  Sénèqite. 

418, 

9,  Sera.  —  Plutarque  ne  fait  ici  que  transcrire  et  développer  ces  paroles 
du  Timée  de  Platon  :  «  Nous  avons  tort  de  dire,  en  parlant  de  l'éternelle 
essence  :  Elle  fut,  Elle  sera;  ces  formes  du  temps  ne  conviennent  pas 
à  l'éternité;  elle  est,  voilà  son  attribut.  Notre  passé  et  notre  avenir  sont 
deux  mouvements;  or  l'immuable  ne  peut  être  de  la  veille,  ni  du  lende- 
main; on  ne  peut  dire  qu'il  fut,  nj,  qu'il  sera;  les  accidents  des  créatures 
sensibles  ne  sont  pas  faits  pour  lui,  et  des  instants  qui  se  calculent  ne 
sont  qu'un  vain  simulacre  de  ce  qui  est  toujours.  » 

19,  Payen.  —  Plutarque,  ou  peut-être  Platon  don^  Plutarque  vient  d'exprimer 
la  pensée. 

20,  Condition.  —  Païen  comme  le  premier,  c'est  Sénèque. 
'     21,  Dit-il.  —  Sénèque,  Nat.  Quaeàt.,  1,  préf. 

27,  Car.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  Il  n'est  mol  en  toute  la  secte  stoïque  plus 
véritable  que  celuy  la,  mais,  au  lieu  de  :  «  Voilà...  car  ». 

31,  Célestes.  —  Cette  conclusion  résume  bien  la  thèse  absolument  contraire 
à  celle  de  Sebond,  que  l'auteur  s'est  proposée  dans  ce  long  chapitre  :  que 
l'homme  ne  peut,  par  ses  propres  moyens,  arriver  à  rien  de  cei-tain  et 
qu'il  a  besoin   à  cet  effet,  d'être  éclairé  par  une  lumière  divine. 


Fb.528  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

CHAPITRE  XIII. 

420, 

2,  Humaine.  —  «  C'est  un  beau  cinquième  acte,  qu'une  bonne  mort.  • 
Sainte-Beuve. 

4,  Résolus.  —  Persuadés,  convaincus. 

35,  Qu'vn.  —  J.-J.  Rousseau  exprime  et  développe  cette  même  pensée,  qui 
chaque  jour  devient  de  plus  en  plus  vraie,  en  ce  temps  de  vie  à  outrance  : 
«  Nous  tenons  à  tout,  nous  nous  accrochons  à  tout;  les  temps,  les  lieux, 
les  hommes,  les  choses,  tout  ce  qui  est,  tout  ce  qui  sera,  importe  à  chacun 
de  nous;  notre  individu  n'est  plus  que  la  moindre  partie  de  nous- 
mêmes...  0  homme!  resserre  ton  existence  au  dedans  de  toi.  » 
422, 

5,  Mei.  —  César,  dans  sa  hâte  de  suivre  Pompée  passé  en  Grèce,  avait, 
faute  de  moyens  de  transport  suffisants,  laissé  la  majeure  partie  de  ses 
troupes  à  Brindisi.  Ne  les  voyant  pas  arriver  et  craignant  qu'elles  ne 
fussent  coupées  de  lui  par  la  flotte  dont  disposait  Pompée  alors  que  lui- 
même  n'avait  que  des  bâtiments  de  commerce,  voulant  presser  leur  venue, 
il  s'embarqua  incognito,  de  nuit,  sur  une  barque,  par  un  temps  affreux; 
et,  le  pilote  n'arrivant  pas  à  surmonter  les  difficultés.  César,  pour  stimuler 
ses  efforts,  lui  dit  :  «  Que  crains-tu?  tu  portes  César  et  sa  fortune.  »  Nonob- 
stant cette  confiance  en  lui-même,  il  ne  parvint  pas  à  effectuer  la  tra- 
versée qu'il  avait  en  vue,  les  flots  le  rejetèrent  à  son  point  de  départ. 

18,  Actions.  —  L'éd.  de  88  et  l'ex.  de  Bord.  aj.  -.et  qu'vn  grand  roy  lui  cousle 
plus  à  tuer  qu'vne  puce. 

29,  Temps.  —  Il  faut  encore  tenir  compte  si  c'est  une  mort  soudaine  ou  qui 
vienne  pour  ainsi  dire  à  pas  comptés. 

32,  Tourmens.  —  Le  cruel  empereur  qui  voulait  faire  sentir  la  mort  à  ses 
victimes,  c'est  Caligula  (Suétone,  Caligula,  30);  et  c'est  Tibère  qui  dit,  de 
l'une  des  siennes  qui  s'était  tuée  elle-même,  qu'elle  lui  avait  échappé 
(Suétone,  Tibère,  61);  mais  ces  deux  monstres  se  ressemblent  si  fort  en 
cruauté,  qu'il  est  aisé  de  les  prendre  l'un  pour  l'autre. 

39,  Desseignoit.  —  Avait  dessein,  projetait. 

43,  Planché.  —  Planchéié,  comme  il  se  dit  aujourd'hui. 
424, 

4,  Mourir.  —  Lampridius,  Heliog..,  33.  —  Héliogabale  fut  tué  dans  une 
sédition  militaire  par  des  soldats  qui  le  massacrèrent  dans  des  latrines 
où  il  s'était  Téfugié  :  son  cadavre  fut  traîné  par  les  rues  et  jeté  dans  un 
égout;  mais  l'égout  s'étant  trouvé  trop  étroit,  on  le  précipita,  une  pierre 
au  cou,  dans  le  Tibre  (222).  V.  I,  380  et  N.  Retraict. 
8,  Propre.  —  Si  on  l'eût  mis  dans  le  cas  de  se  tuer. 

14,  Prusse.  —  Les  Abruzzes,  province  de  l'Italie  méridionale.  —  On  a 
pensé  qu'il  y  avait  là  une  faute  d'impression  évidente  et  qu'il  faut  lire 
Prusse;  c'est  douteux,  du  moins  en  ce  qui  touche  la  substitution  d'un 
P  au  B  :  certains  auteurs,  en  effet,  écrivent  Apruzia,  d'où  Montaigne  a 
fait  la  Prusse,  comme  l'Apulia,  autre  province  de  la  même  région,  est 
devenue  la  Pouille. 

15,  Apres.  —  En  48,  à  Corfinium.  Désespérant  de  pouvoir  s'y  défendre, 
bomitius  demanda  du  poison  à  son  esclave  qui  était  médecin.  L'ayant 
absorbé  et  apprenant  avec  quelle  bonté  César  traitait  ses  prisonniers, 
il  regretta  son  acte,  mais  son  esclave  le  rassura  en  lui  avouant  que  ce 
n'était  qu'un  narcotique  qu'il  lui  avait  remis.  Satisfait  de  cette  assurance, 
il  alla  trouver  César  qui  l'accueillit  avec  beaucoup  d'amitié,  ce  qui  no 
l'empêcha  pas  de  passer,  peu  après,  à  nouveau  dans  le  camp  de  Pompée. 
Plutarque,  César,  10.  ^ 

22,  Gents.  —  Tacite,  Annales,  IV,  22.  —  Plautius  Sylvanus  était  sous  le 
coup  d'une  accusation  capitale  pour  avoir  précipité  sa  femme  du  haut 
de  sa  maison  (22). 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  XIII.         VOL.  II,  PAG.  424.  Pb.529 

24,  Parties.  —  A  ses  ennemis.  —  Tacite,  Ann.,  VI,  48.  Aibucilla  était  ac- 
cusée d'adultère  et  d'impiété  envers  le  prince  (36). 

25,  Sicile.  —  Plutarque,  .\Hcias,  10.  —  Lors  de  l'expédition  des  Athéniens  en 
Sicile,  en  413,  Démosthène,  l'un  de  leui-s  généraux,  se  voyant,  après  une 
résistance  opiniâtre,  hors  d'état  d'échapper,  se  perça  de  son  épée;  mais, 
ne  s'étant  pas  tué  du  coup,  il  fut  fait  prisonnier  et,  quelque  temps  après, 
lapidé  par  les  Syracusains. 

26,  Impetra.  —  Obtint  par  des  prières;  du  latin  impelrare  qui  a  cette  si- 
gnification; inipétrer  est  demeuré  dans  le  langage  judiciaire. 

27,  Acheuer.  —  Appien,  De  Bello  Mithrid.  —  Fimbria,  un  des  plus  fougueux 
et  plus  cruels  partisans  de  Marins.  Envoyé  en  Asie  Mineure,  il  y  assas- 
sina son  général  pour  se  substituer  à  lui  ;  pressé  par  Sylla,  il  se  donna 
la  mort  (85).  Un  de  ses  hauts  faits  fut  la  destruction  de  fond  en  comble 
d'Ilion  (l'ancienne  Troie),  et  le  massacre  de  tous  ses  habitants. 

31,  Transperça.  —  Tacite,  Ann.,  XVI,  15.  —  Ostorius,  qui  jouissait  d'une 
grande  réputation  militaire  et  de  l'éclat  d'une  coui'onne  civique  méritée 
en  Bretagne,  fut  réduit  à  se  tuer,  parce  que,  chez  lui,  avait  été  lu  un 
poème  satirique  contre  Néron  (68). 

35,  Tuer.  —  Xiphilin,  .Adrien.  — Cette  précaution  ne  lui  réussit  pas;  pressé 
par  la  maladie  et  voulant  en  finir,  il  ne  trouva  personne  qui  voulût  lui 
porter  le  coup  mortel,  ni  lui  donner  du  poison. 

37,  Courte.  —  Suétone,  César,  87.  —  César  tint  ce  propos  dans  un  repas,  la 
veille  de  sa  mort;  ce  disant,  il  faisait  allusion  aux  conspirations  journel- 
lement ourdies  contre  lui  et  dont  on  ne  cessait  de  l'entretenir,  et  il  ajouta  : 
«  Mieux  vaut  mourir  une  fois,  que  de  craindre  toujours.  » 

39.  Humaine.  —  Pline,  Hist.  nat.,  VII,  53,  dit  :  «  une  mort  .mbite  ».  —  «  Le 
dernier  plaisir  de  la  vie,  est  de  mourir  sans  y  penser.  • 
426, 

4,  Mourir.  —  De  là  cette  locution  si  répandue  :  «  Je  voudrais,  je  préférerais 
être  mort  »,  qui  se  dit  fréquemment  à  propos  de  toute  difficulté  ou  souf- 
france morale  ou  physique  dont  la  mort  vous  délivrerait.  Mais  avant  d'être 
mort,  ce  que  l'on  peut  souhaiter  de  fort  bonne  foi,  il  faut  mourir;  et  nos 
appels  à  la  mort  en  sont  moins  sincères,  ainsi  que  l'a  si  bien  rendu  La 
Fontaine,  dans  sa  fable  de  •<  la  Jlort  et  le  bûcheron  »  ;  parce  qu'entre  les 
deux,  pour  qui  est  en  pleine  possession  de  lui-même,  il  y  a  un  moment  re- 
doutable à  franchir  :  le  corps  s'y  trouve  généralement  aux  prises  avec  la 
douleur,  et  fi-équemment  Pâme  appréhende  l'inconnu  de  l'au-delà. 

5,  .Slstimo.  —  Le  vers  latin,  qui  est  do  Cicéron,  est  la  traduction  d'un  vers 
grec  d'Epicharme. 

18,  Cogitation.  —  Mesuré  et  calme,  plutôt  qu'aigri  et  surexcité  par  le  far- 
deau d'une  telle  pensée.  V.  N.  III,  576  :  L'vn. 

28,  Fois.  —  Cornélius  Nepos,  Atlicus,  22.  —  Nulle  mort  dont  le  récit  nous 
a  été  conservé  ne  témoigne  un  plus  grand  détachement  de  la  vie;  parmi 
les  plus  belles,  on  peut  dire  que  celle  de  Socrate  lui  était  imposée  par  sa 
condamnation,  celle  de  Caton  par  la  situation,  et  qu'ils  ont  eu  à  cœur  de 
se  montrer  à  hauteur  do  leurs  principes;  chez  Atticus,  aucun  motif  n'ex- 
cite son  courage,  il  meurt  parce  qu'il  est  las  de  la  vie,  sans  forfanterie,  à 
l'insu  de  tout  le  monde. 

33,  Cleantbes.  —  Diogène  Laerce,  VIII.       ^ 

40,  Marcellinus.  —  Tout  ce  récit  est  emprunté  de  Sénèque,  Epist.  11. 
428, 
'    13,  Rouons.  —  Tournons.  Ce  mot  est  encore  aujourd'hui  employé  comme 
terme  de  marine  :  Rouer  un  câble,  c'est  le  plier  en  l'enroulant  sur  lui- 
même. 

15,  Mort.  —  C'est  ce  que  les  Anglais  appellent  le  spleen. 

30,  Essayer.  —  La  goûter,  la  savourer. 
430, 

4,  Premier.  —  Après  la  bataille  de  Thapsus  (46),  Caton  qui  commandait  à 
Utiquo,  voyant  les  affaires  perdues,  après  avoir  pourvu  à  la  sûreté  de  tous 

ESSAIS   DE  MONTAIGNE.  —  T.    IV.  34 


Fb.530  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

ceux  qui  s'étaient  réfugiés  dans  la  place  et  se  trouvaient  compromis,  réso- 
lut de  se  tuor,  ne  voulant  pas  en  outre  devoir  de  grâce  à  César,  dont  on 
connaissait  les  dispositions  bienveillantes  à  son  égard.  Sa  résolution  avait 
transpiré;  pour  l'empêcher  de  la  mettre  à  exécution,  la  veille  on  lui  avait 
retiré  son  épée;  il  s'en  était  aperçu  et  l'avait  fait  rapporter,  observant  à 
ses  proches  et  amis  qui  le  pressaient  de  renoncer  à  son  dessein,  que  fina- 
lement une  épée  n'était  pas  indispensable  pour  mettre  fin  à  ses  jours.  Il 
passa  la  nuit  à  lire  et  méditer  le  Phédo7i,  dialogue  où  Platon  traite  de  l'im- 
mortalité de  l'âme.  Le  lendemain  matin,  jugeant  le  moment  venu,  il  fit 
-retirer  chacun  et  se  perça  de  son  épée;  le  bruit  qu'occasionna  sa  chute  fit 
accourir  son  fils'  et  ses  amis;  on  profita  de  son  évanouissement  pour  panser 
la  blessure  qu'il  s'était  faite,  mais  revenu  à  lui,  il  repoussa  le  médecin 
avec  violence,  arracha  le  pansement,  déchira  la  plaie  de  ses  propres  mains 
et  expira  sur-le-champ.  —  Ce  sujet  fut  le  premier  donné,  l'an  V  (1797)  de 
la  République,  par  l'Institut  national  de  France,  aux  élèves  de  peinture 
pour  le  concours  du  grand  prix,  aj)rès  l'interruption  causée  par  la  Révo- 
lution. V.  N.  II,  586  :  leune  Caton. 


CHAPITRE  XIV. 

7,  lustement.  —  Également. 

10,  Faim.  —  C'est  le  sophisme  dit  de  l'âne  de  Buridan  qui,  supposant  un 
âne  également  pressé  par  la  faim  et  la  soif,  placé  entre  une  mesure  d'avoine 
et  un  seau  d'eau  et  à  égale  distance,  demandait  :  «  Que  fera-t-il?  »  Si  on  lui 
répondait  qu'il  demeurerait  immobile  :  «  Il  se  laissera  donc  mourir?  •  disait 
Buridan.  On  lui  répliquait  qu'il  ne  serait  pas  bête  à  ce  point.  «  Alors, 
concluait-il,  se  tournant  d'un  côté  plutôt  que  d'un  autre,  il  a  donc  son 
libre  arbitre.  »  —  Ce  sophisme  embarrassa  fort,  paraiMl,  les  dialecticiens 
de  l'époque;  il  était  cependant  aisé  d'y  répondre  :  Comment  aurez- vous  la 
certitude  que  lorsqu'il  se  décidera  l'animal  sera  au  même  degré  pressé  par 
un  besoin  et  par  l'autre,  et  qu'il  ne  cède  pas  à  celui  qui,  à  votre  insu,  le 
presse  le  plus? 

11,  Stoïciens.  —  Plutarque,  Contredits  des  phil.  stoïques,  24. 

28,  Circonférence.  —  Ces  absurdités  sont  jeux  d'écoliers,  nous  ne  connais- 
sons pas  le  raisonnement  captieux  démontrant  que  «  le  contenu  est  plus 
grand  que  le  contenant  ».  —  Pour  prouver  que  «  le  centre  d'un  cercle  est  aussi 
grand  que  sa  circonférence,  on  suppose  le  cercle  se  déroulant  suivant  une 

ligne  droite  ;  sa  circonférence  se  développant  de  A  en  A     y'y yoy  > 

a'  a; 

le  centre  0  vient  en  0',  or  00'  =  AA'.  De  même  acabit  sont  les  problèmes 
suivants  : 

«  Le  diamètre  d'un  cercle  est  égal  à  sa  demi-circonférence.  "  Observons 
tout  d'abord  que  dans  un  cercle  les  deux  demi-circonférences  décrites  sur 
les  deux  moitiés  d'un  diamètre  sont  au  total  égales  à  la  demi-circonférence 

qui  les  englobe  r'V^  ;  appliquant  ce  principe  de  proche  en  proche  à 
toutes  les  demi-circonférences  intérieures  que  l'on  peut  construire  de  la 
sorte,  leur  total  reste  égal  à  la  demi-circonférence  extérieure  en  même 
temps  qu'elles  en  arrivent  à  se  confondi'e  avec  le  diamètre.  —  Si  on  con- 
sidère que  dans  le  problème  précédent  AA'  est  égal  à  trois  fois  le  diamètre, 
et  que  la  présente  démonstration  conclut  à  ce  que  le  diamètre  est  égal  à 
la  demi-circonférence,  on  en  arrive  à  ce  que  un  égale  deux. 

Si  un  égale  deux,  «  deux  égale  trois  ».  Supposons  trois  nombres  a,  b,  c, 
tels  4ue  :  a  =  b  -f  c.  Il  en  ressort  que  :  2  a  =  2  b  -f  2  c  et  aussi  3  a  =  3  b 
-t-  3  c;  de  ces  deux  additions  égales  en  inversant  les  deux  termes  de  la 
seconde,  ona:2a-|-3b-h3c  =  2b-f2c-f3a:de  chacun  des  deux 
termes  de  cette  dernière  retranchons  5  a,  elle  devient  3b-f3c  —  3a  =  2b 


iNOTES.         LIV.  II,  m.  XIV.         VOL.  Il,  PAG.  430.  Fb.53i 

+  '2  c  —  2  a  ou  o  (b  4-  c  —  a)  =  2  (b  +  c  —  a);  supprimant  le  facteur 
commun  b  +  c  —  a,  on  a  3  =  2. 

«  Une  bouteille  vide  égale  une  bouteille  pleine.  »  On  est  en  droit  de 
poser  :  1/2  bouteille  vide  =  1/2  bouteille  pleine;  supprimons  1/2  facteur 
commun,  et  l'énoncé  du  problème  est  démontré. 

«  Une  flèche  qui  atteint  le  but,  dit  Zenon  d'Élee,  n'a  pu  cependant  fran- 
chir la  dislance.  »  Divisons  cette  distance  en  deux  parties;  ce  qui  reste 
également,  continuons  de  la  sorte  indéfiniment,  il  restera  toujours  quelque 
chose  à  diviser,  et  par  suite  à  franchir.  —  C'est  une  démonstration  du 
genre  de  celle  qui  prouve  que  deux  courriers  se  pourchassant,  si  vite 
qu'aille  celui  qui  poursuit,  il  ne  peut  rattraper  l'autre,  si  lente  que  soit 
l'alluro  de  ce  dernier  et  si  faible  que  soit  la  distance  qui  les  séparait  au 
début. 

30,  Cercle.  —  La  recherche  de  la  i)ierre  philosophale  (alchimie)  et  de  la  qua- 
drature du  cercle  (construction  d'un  carré  de  surface  équivalente  à  celle 
d'un  cercle  donné)  sont  deux  problèmes  insolubles,  qui  occupaient  beau- 
coup les  esprits  aux  temps  jadis. 

32,  Pline.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  //  n'y  a  rien  de  certain  que  l'incerlilude  et 
rien  de  plus  miséraôle  et  plus  fier  que  l'homme.  Cette  addition  est  la  traduc- 
tion de  la  citation  qui  suit. 

CHAPITRE  XV. 
432, 

Malaisance.  —  Difficulté  d'avoir  les  choses. 
2,  Remaschois.  —  Au  figuré,  remâcher,  c'est  repasser  à  diverses  reprises 

dans  son  esprit. 
2,  Mot.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  très  véritable.  —  Cet  ancien,  c'est  Sénèque, 

Episl.  4. 

5,  Préparez.  —  Sénèque,  Epist.  4. 

0,  Fruition.  —  Jouissance;  mot  forgé,  par  Montaigne,  du  latin  frui,  jouir. 

9,  Estroict.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  ferme. 

15,  Parens.  —  Danaé,  (ille  d'Acrisius,  roi'd'Argos  (Grèce),  fut  enfermée  dans 
une  tour  d'airain  par  son  père,  auquel  l'oracle  avait  prédit  qu'il  serait  tué 
par  l'enfant  qui  naîtrait  d'elle.  Jupiter  pénétra  dans  cette  tour  sous  forme 
d'une  pluie  d'or  (la  toute -puissance  de  l'argent  a  été  connue  de  tous 
temps),  et  séduisit  Danaé.  De  cette  union  naquit  Persée,  qui  plus  tard,  en 
effet,  fut,  par  accident,  le  meurtrier  d'Acrisius.  Myth. 

24,  D'autre.  —  Plut.vrque,  Lycurgue,  11. 

28,  Sauce.  —  Dans  son  poème  Les  filles  de  Minée,  La  Fontaine  dit  : 

■  La  défense  esl  un  charme;  on  dit  qu'elle  assaisonne 
Les  plaisirs,  et  surtout  ceux  que  l'amour  nous  donne.  • 
• 
34,  Morsures.  —  Plutarque,  Pompée,  1. 
434, 

6,  Ancone.  —  La  marche  d'Ancône,  province  de  l'Italie  centrale,  où  est  le 
sanctuaire  de  N.-D.  de  Lorette  en  qui  l'on  croit  posséder  la  Santa  Casa  ou 
maison  de  la  S.  Vierge  et  une  statue  d'elle,  en  bois  de  cèdre,  sculptée  par 
l'apùtre  S.  Luc.  Cette  maison  de  la  Vierge  aurait  été  transportée  par  les 
saints  Anges  de  Nazareth  à  Lorette;  à  rencontre  de  cette  tradition  un  éru- 
dit,  le  chanoine  Ulysse  Chevalier,  a  publié  en  1906  que,  d'après  ses  études, 
elle  a  tout  simplement  été  construite  avec  les  pierres  d'une  carrière  voi- 
sine, par  des  architectes  nommés  Anges. 

7,  Sainct  laques.  —  S. -Jacques  de  Compostelle  à  Santiago  en  Galice 
(Espagne),  où  se  trouvait  le  corps  de  l'apôtre  S.  Jacques. 

8,  Liège.  —  A  Liège  (Belgique).  Non  loin  de  là  se  trouvent  les  eaux  de  Spa, 
appelées  ici,  par  Montaigne,  les  bains  d'Aspa. 

10,  François.  —  Par  application  du  proverbe  :  «  Nul  n'est  prophète  en  son 
pays.  - 

12,  Autre.  —  Pi.utakqle,  Caton  d'Ulique,  7.  —  Caton,  qui  avait  deux  enfants 


Fb.532  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

d'un  mariage  antérieur,  avait  consenti  à  se  séparer  de  sa  femme  Martia, 
dont  il  n'en  avait  pas,  pour  la  céder  à  Hortensius  son  ami,  qui  n'en  avait 
pas  non  plus,  ce  qui  était  admis  par  les  mœurs  romaines.  A  la  mort  d'Hor- 
tensius,  autant  par  afl'ection  que  pour  ne  pas  la  laisser  dans  une  position 
difficile,  Caton  reprit  Martia  par  un  second  mariage  en  règle,  toutes  choses 
qu'autorisait  à  Rome  la  faculté  illimitée  du  divorce;  César  néanmoins 
lui  en  faisait  de  vifs  reproches  dans  son  Anti-Calon  :  «  S'il  avait  besoin  de 
femme,  disait-il,  pourquoi  céder  la  sienne  à  un  autre;  et,  s'il  n'en  avait  pas 
besoin,  pourquoi  la  reprendre?  Cela  ne  montre-t-il  pas  une  arrière-pensée  : 
on  prêtait  une  femme  pauvre  à  Hortensius,  on  espérait  la  retrouver  riche  ». 
V.  N.  II,  586  :  leune  Caton. 
28,  Plus.  —  La  Fontaine  disait  à  une  courtisane  chez  laquelle  il  était  entré 
un  jour  par  hasard  et  qui  se  laissait  doucement  caresser,  sans  opposer  la 
moindre  résistance  à  ses  désirs  :  «  ,Je  t'en  prie,  repousse-moi  un  peu.  » 
37,  Amants.  —  Tacite,  Ann.,  XIII,  45.  —  Chez  les  Lacédémoniens,  les  filles 
sortaient  en  public  à  visage  découvert  et  les  femmes  voilées,  parce  qu'il 
faut,  disaient-ils,  que  les  filles  trouvent  mari  et  que  les  femmes  gardent 
celui  qu'elles  ont;  comme  quoi,  une  même  chose  peut  être  envisagée  à  deux 
.  points  de  vue  complètement  opposés. 

41,  Bastions.  —  Au  propre,  saillants  de  fortification;  ici,  pris  au  figuré, 
allusion  aux  vertugadins,  paniers  dont  les  dames  faisaient  alors  usage 
dans  leur  toilette,  sorte  de  jupons  garnis  de  cercles  de  baleine,  assez 
analogues  aux  crinolines  du  second  empire,  soutenant  les  jupes  et  rendant 
les  robes  bouffantes. 
43,  Appétit.  —  Par  la  difficulté,  aj.  l'éd.  de  88. 
436, 

8,  Desbaucher.  —  Porter  à  une  gaîté  licencieuse. 

10,  Triompher.  —  Add.  de  l'éd.  de  88  et  de  l'ex.  de  Bord.  :  de  la  rigueur. 
14,  Haissent.  —  Add.  de  l'éd.  de  88  :  mortellement. 

30,  Seruist.  —  Valère  Maxime,  II,  1,  4.  —  Cette  assertion  est-elle  exacte?  ce 
qu'il  y  a  de  certain,  c'est  qu'à  Rome  les  femmes  étaient  assez  libres  et  le 
divorce  appliqué  pour  la  moindre  cause.  —  Toujours  est-il  que  son  intro- 
duction en  France  est  loin  de  confirmer  la  thèse  de  Montaigne.  Il  y  a  été 
autorisé  en  1884;  de  1885  à  1890,  la  moyenne  annuelle  des  demandes  a  été 
de  9.300,  suivant  d'année  en  année  une  progression  ascendante  constante. 
En  1901,  10.500  instances  ont  été  introduites  se  répartissant  à  peu  près 
également  entre  gens  ayant  des  enfants  et  gens  n'en  ayant  pas,  9.000  ont  été 
accordées,  à  quoi  il  convient  d'ajouter  plus  de  2.000  séparations  de  corps. 
En  1904,  il  y  en  a  eu  9.860  prononcés  en  dehors  des  séparations  de  corps; 
en  1905,  10.019.  —  Il  est  à  observer  que  les  divorces  pour  cause  d'adultère 
sont  presque  en  nombre  double  pour  adultère  de  la  femme,  que  pour  cette 
même  faute  commise  par  l'homme;  ce  n'est  pas  que  celui-ci  soit  plus  res- 
pectueux de  la  foi  conjugale,  mais  outre  que  dans  son  cas  il  n'y  a  pas 
risque  d'un  enfant  pouvant  en  résulter,  cela  tient  encore  à  ce  que  pour  des 
raisons  diverses  la  femme  supporte  plus  facilement  d'être  trompée  et  aussi 
qu'elle  est  plus  facile  à  l'être.  Et  aujourd'hui  que  le  divorce  est  passé  dans 
les  mœurs,  l'idée  gagne  de  l'affranchir  des  fictions  judiciaires  qui  en  res- 
treignent l'obtention  :  les  motifs  légaux  n'existant  pas,  on  les  suppose,  on 
va  jusqu'à  en  créer  les  apparences  de  commun  accord;  d'où  la  tendance  à 
l'admettre  par  consentement  mutuel,  et  même  sur  la  volonté  d'un  seul 
avec  conditions  de  délai;  il  y  a  bien  la  question  des  enfants,  mais  n'a-t-on 
pas  déjà  passé  outre!  C'est  là  le  seul  point  intéressant;  et  à  rencontre 
de  ce  qui  se  pratique,  il  semble  qu'il  vaudrait  mieux  pour  eux,  quel  que 
soit  le  motif  du  divorce,  au  lieu  d'être  attribués  à  l'un,  sous  réserve  de 
certains  droits  concédés  à  l'autre,  que  celui  auquel  ils  sont  laissés,  les  ait 
sans  restriction  ni  obligation  vis-à-vis  de  la  partie  adverse;  les  obtiendrait 
celui  en  faveur  duquel  le  divorce  serait  prononcé  dans  les  cas  d'indignité, 
d'inconduite,  de  sévices  et  injures  graves;  celui  contre  lequel  la  demande 
en  divorce  aurait  été  introduite  dans  le  cas  d'incompatibilité  d'humeur 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  XV.         VOL.  II,  PAG.  436.  Pb.533 

quand  il  sera  admis,  ce  qui  avec  les  idées  actuelles  ne  saurait  tarder  beau- 
coup. —  Du  reste,  le  mariage  lui-même  tend  à  être  réduit  à  sa  plus  simple 
expression.  On  voudrait  le  rendre  aussi  facile  que  possible  à  contracter,  ne 
le  subordonner  à  aucun  consentement  autre  que  celui  de  ceux  qui  veulent 
s'unir;  supprimer  la  puissance  maritale,  diacun  des  conjoints  ayant  mêmes 
droits,  toute  liberté  et  toute  indépendance;  le  régime  de  la  séparation  de 
biens  deviendrait  la  règle  unique;  l'adultère  cessant  d'être  un  délit  ne  serait 
plus  qu'une  cause  de  divorce,  dont  l'obtention  serait  du  reste  grandement 
facilitée,  si  bien  que  les  seules  différences  qui  subsisteraient  encore  entre  le 
mariage  et  l'union  libre,  se  réduiraient  à  la  publicité  donnée  à  l'union 
contractée,  l'octroi  de  la  légitimité  aux  enfants  nés  pendant  sa  durée  et  la 
possibilité  de  liquider  les  intérêts  matériels  de  chacun  après  sa  dissolu- 
tion. 
438, 

5,  Serpunt.  —  L'auteur  parle  ici  des  Juifs  et  de  leur  religion;  Montaigne 
applique  son  dire  à  un  sujet  tout  autre. 

8,  Moyen.  —  Peut-être;  mais  l'excès  contraire  a  plus  d'inconvénients  en- 
core; et,  à  notre  époque,  la  peine  de  mort  est  tellement  atténuée,  la  prison 
si  bénigne  à  tous  ses  degrés,  la  grâce  et  les  réductions  de  peine  sont  telle- 
ment passées  dans  les  habitudes,  que  les  malfititeurs,  dont  le  nombre,  ainsi 
que  l'audace  et  la  fréquence  des  méfaits,  vont  croissant  en  proportion  du 
besoin  de  bien-être  et  de  luxe,  conséquence  des  progrès  de  la  civilisation, 
s'en  donnent  à  cœur  joie.  La  publicité  des  exécutions  n'a  plus  de  raison 
d'être,  n'amenant  plus  chez  le  spectateur  que  cette  simple  remarque  : 
«  Tiens!  ce  n'est  que  cela!  »  En  la  supprimant,  on  ferait  cette  peine  un  peu 
plus  redoutée;  en  n'abusant  pas  du  droit  de  grâce,  en  n'en  usant  que 
lorsqu'il  y  a  des  circonstances  atténuantes  dont  il  n'a  pas  été  tenu  compte, 
ou  qu'un  doute  peut  exister  sur  la  culpabilité,  en  un  mot  comme  correctif 
d'une  erreur  possible  du  jury  ;  en  rendant  beaucoup  plus  pénibles  les  divers 
genres  d'emprisonnement  et  réduisant  d'autant  la  durée  des  condamnations, 
on  modifierait  rapidement  l'état  d'esprit  de  nombre  de  criminels  qui, 
actuellement,  se  disent  que  ce  qui  peut  leur  arriver  de  pis,  c'est  de  vivre 
sans  rien  faire  aux  dépens  de  la  société,  dans  des  conditions  bien  moins 
pénibles  que  s'il  leur  fallait  gagner  leur  vie  par  le  travail,  ce  qui  est  bon 
seulement  pour  les  honnêtes  gens.  —  Et  pourtant,  l'expérience  est  faite  : 
Pour  parer  aux  recrudescences  de  crimes  à  certaines  époques  contempo- 
raines, les  Anglais,  qui  cependant  ont  beaucoup  plus  que  nous  le  respect  de 
la  liberté  individuelle,  n'ont  pas  hésité  à  rétablir  temporairement  des 
moyens  de  répression  tombés  en  désuétude  :  le  Treadmille  où  le  condamné 
est  mis  automatiquement  dans  l'obligation  de  coopérer,  à  l'aide  des  mains 
et  des  pieds,  à  faire  tourner  une  roue;  le  Cat  (le  chat  à  neuf  queues)  qui 
consiste  à  infliger  matin  et  soir,  pendant  un  nombre  de  jours  déterminé, 
un  certain  nombre  de  coups  dejfouet;  ces  procédés  depuis  mis  de  côté, 
sans  cesser  d'être  légaux  pour  le  cas  où  le  besoin  s'en  ferait  de  nouveau 
sentir,  eurent  vite  raison  de  ces  associations  de  bandits  qui  terrorisaient 
Londres  en  étranglant  les  passants,  etc.,  tout  comme  nos  apaches  parisiens 
en  agissent  actuellement  avec  le  couteau  et  le  revolver.  Mais,  chez  nous, 
gouvernants  et  législateurs  ont  plus  souci  de  jouir  de  la  situation  à  laquelle 
ils  sont  arrivés,  d'assurer  leur  réélection  pour  continuer  à  vivre  aux  dépens 
de  la  chose  publique,  que  de  satisfaire  à  leurs  devoirs  essentiels,  faire  régner 
la  liberté  et  refréner  la  licence,  favoriser  le  bien,  poursuivre  et  punir  le 
mal;  assoiffés  de  popularité,  imbus  par  calcul  d'idées  soi-disant  humani- 
taires, leurs  actes  démentent  leurs  paroles,  leurs  sympathies  vont  de  fait 
aux  scélérats  bien  plus  qu'à  leurs  victimes. 

9,  Argippées.  —  Hérodote,  I\^,  tS,  dit  qu'il  ne  les  connaît  que  par  ouï-dire; 
qu'ils  sont  chauves,  ont  le  nez  aplati  et  ne  se  nourrissent  que  de  fruits  et  de 
lait.  Chacun  habite  sous  un  arbre  que,  l'hiver,  il  recouvre  d'une  étoffe  de 
laine  blanche,  qu'il  a  soin  d'ôter  l'été.  Personne  ne  les  insulte,  ils  n'ont  pas 
d'armes  et  sont  considérés  comme  sacrés. 


Fb.534  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

19,  Violence.  —  C.-à-d.  peut-être  la  facilité  qu'on  a  Centrer  dans  ma  maison, 
contribue-t-ello  à  la  mettre  à  l'abri  de  la  violence. 

32,  Frontières.  —  Ce  n'est  pas  en  effet  des  places  frontières  qui  sont  à  cons- 
truire. La  défense  des  frontières  d'un  étal  est  le  propre  des  armées  elles- 
mêmes;  les  fortifications  ne  devraient  être  employées  que  pour  couvrir 
certains  points  en  nombre  très  restreint,  particulièrement  importants  en 
vue  de  l'offensive  beaucoup  plus  qu'en  vue  de  la  défensive,  ceux  où  sont 
nos  approvisionnements,  et  aussi  les  grandes  agglomérations  plus  particu- 
lièrement menacées  dont  il  importe,  en  raison  des  ressources  qu'elles  pré- 
sentent, de  ne  pas  laisser  l'ennemi  s'emparer  dès  le  début  sans  coup  férir. 
Les  murailles  de  Chine  n'ont  jamais  dans  le  passé  satisfait  à  ce  qu'on  en 
attendait,  et  y  satisferont  moins  encore  dans  l'avenir,  étant  donnés  les 
moyens  actuellement  mis  en  œuvre,  au  nombre  desquels  il  faut  compter 
l'envahissement  du  territoire  de  l'adversaire  sans  déclaration  de  guerre 
préalable.  Vauban,  qui  à  l'époque  de  Louis  XIV  avait  organisé  la  défense 
de  nos  frontières  sous  l'empire  de  ces  idées,  reconnut,  sur  la  fin  de  sa  vie, 
cette  erreur,  qu'après  1870  ses  élèves,  héritiers  de  sa  science  mais  non  de  son 
génie,  ont  commise  à  nouveau,  nous  amenant  à  fortifier,  une  fois  encore, 
outre  mesure  notre  frontière  de  l'Est  au  lieu  de  renforcer  ses  effectifs  dans 
toute  la  limite  du  possible,  avec  ceux  qui,  pour  des  raisons  de  clocher, 
demeurent  disséminés  dans  le  reste  de  la  P>ance  où  ils  n'ont  que  faire.  S'il 
en  eût  été  ainsi,  Nancy,  bien  que  sans  fortifications,  serait  à  l'abri  d'un  coup 
de  main;  et,  ayant  ces  troupes  stationnées  ailleurs,  on  n'aurait  pas  été 
tenté  de  les  emplojer  abusivement  à  des  œuvres  de  police,  pour  lesquelles 
l'armée  n'e.st  point  faite,  qui  la  discréditent,  où  se  perd  la  notion  du  devoir, 
auxquelles  la  nécessité  fait  que  la  masse  se  prête  à  contre-cœur,  non  sans 
que  cependant  se  produisent  quelques  rares  protestations,  qui  honorent 
leurs  auteurs,  mais  ruinent  leur  carrière. 

36,  Riches.  —  Pauvres  et  riches  s'intéressent  au  pillage  que  promet  une 
incursion  sur  un  territoire  étranger;  les  riches  seuls  le  sont  à  s'en  défendre 
sur  leur  propre  territoire. 

37,  Faitte.  —  Le  père  de  Montaigne  avait,  en  1554,  réédifié  sa  maison,  en  la 
fortifiant  selon  les  habitudes  et  les  nécessités  de  l'époque;  Montaigne  nous 
fait  connaître  ici  que  lui-même  ne  jugea  pas  à  propos  de  tirer  parti  de  ces 
dispositions  défensives.  Cette  maison  demeura  telle  jusqu'en  1859,  où  ses 
descendants  s'en  défirent.  Déjà  en  partie  transformée  par  les  changements 
que  les  acquéreurs  y  avaient  apportés,  elle  devint  la  proie  des  flammes 
en  1885,  à  l'exception  de  la  grosse  tour  et  de  quelques  communs  qui  furent 
épargnés;  elle  a  été  reconstruite  depuis,  mais  sur  un  plan  notablement 
différent  :  seules  la  tour  et  la  pièce  constituant  la  bibliothèque  de  Montaigne 
qu'il  décrit  III,  156,  ont  été  maintenues  dans  leur  état  primitif. 

440, 

2,  Defortitié.  —  Henri  IV  et  surtout  Richelieu  firent  en  effet  démanteler 
quantité  de  ces  forteresses  particulières. 

3,  Dangereux.  —  Regrettable,  triste,  fâcheux. 
6,,  Infiables.  —  Suspectes. 

12,  Impronidence.  —  Votre  défaut  de  vigilance  et  de  prévoyance  à  pourvoir 
à  votre  sûreté.  —  Montaigne  affectionne  ces  mots  négatifs  formés  avec  un 
préfixe  (dé,  il,  im,  in,  ir,  suivant  le  cas),  et  les  forge  fréquemment  quand  ils 
n'existent  pas. 

29,  Enregistrable.  —  La  maison  de  Montaigne,  épargnée  jusque-là,  finit  par 
être  pillée. 

29,  Ans.  —  Ces  troubles  avaient  commencé  en  1560. 


NOTES.         LIV.  II,  r.H.  XVI.         VOL.  II,  PAG.  442.         Fb.535 

CHAPITRE  XVI. 

442, 

19,  Hominibus.  —  Dans  l'Évangile  de  S.  Luc,  d'où  cette  citation  est  tirée,  la 
phrase  est  complétée  par  ces  mots  :  bonae  voluntatis  {aux  hommes  de  bonne 
volonté). 

•io,  Diogenes.  —  Cicéron,  De  Fin.,  III,  17. 

32,  Louanges.  —  «  L'art  de  louer  commença  l'art  de  plaire.  »  Voltaire. 

36,  Fleurisse.  —  Traduction  d'un  vers  d'Homère,  que  Cicéron  a  également 
traduit.  De  Fin.,  V,  18. 

39,  Acquérir.  —  Cicéron,  De  Fin.,  III,  17. 
444, 

5,  Cache  ta  vie.  —  Ce  précepte,  dû  à  Nicoclès  frère  d'Épicure,  devint  un 
des  principes  fondamentaux  de  l'école.  Dans  un  de  ses  traités,  intitulé  :  Si 
ce  mot  commun  «  cache  ta  vie  »  est  bien  dit?  Plutarque  s'élève  avec  force 
contre  cette  maxime  qu'il  considère  comme  destructive  de  tous  intérêts 
sociaux,  en  détournant  de  se  mêler  des  affaires  publiques,  dont  le  tracas 
est  incompatible  avec  la  tranquillité;  elle  est  plutôt  à  entendre  comme 
signifiant  qu'exposés  à  l'envie  comme  nous  le  sommes,  il  est  prudent  de 
cacher  ses  avantages  pour  pouvoir  en  jouir  à  l'aise. 

•  Pour  être  heureux,  n'excitez  point  l'envie. 
Le  secret  du  bonheur  est  de  cacher  sa  vie.  »  De  la  Booissk. 

8,  Celuy.  —  Épicurc. 
23,  Hermacbus.  —  Cette  lettre  d'Épicure  est  dans  Cicéron,  De  Fin.,  11,  30, 
qui  dit  Hermarchus;  Diogène  Laerce,  X,  22,  la  donne  comme  adressée  à 
Idoménée,  autre  disciple  de  ce  philosophe. 
446, 

1,  Metrodorus.  —  Cicéron,  De  Fin.,  11,  31. 

2,  Désirable.  —  Cicéron,  De  Fin.,  111,  17,  attribue  cette  doctrine  aux  Stoï- 
ciens, et  ajoute  qu'ils  ne  l'ont  admise  que  parce  que,  sur  ce  point,  ils 
n'ont  pu  répondre  à  Carnéade.  —  Carnéade,  député  à  Rome  par  ses  con- 
citoyens, s'y  était  fait  remarquer  par  son  éloquence  ;  mais  une  fois,  ayant 
parlé  au  Sénat  avec  un  égal  talent  pour  et  contre  une  même  question, 
Caton  fit  décider  de  renvoyer  au  plus  tôt  un  sophiste  aussi  dangereux. 

8,  Fuyr.  —  Aristote,  Morale  à  Nicomède. 

10,  Subiect.  —  Ce  traité  de  Cicéron  sur  la  gloire  est'  aujourd'hui  perdu  ; 
Pétrarque  semble  l'avoir  possédé.  C.  de  M. 

13,  Suitte.  —  Marcellus  avait  élevé  un  temple  à  la  Vertu,  un  autre  à  l'Hon- 
neur, et  il  fallait  passer  par  le  premier  pour  arriver  au  second,  sym- 
bolisant ainsi  que  la  vertu  est  le  principe  même  de  l'honneur. 

18,  Philosophe.  —  Montaigne,  dont  les  critiques  à  l'égard  de  Cicéron  sont 
jusqu'ici  pour  la  plupart  justifiées,  en  arrive  à  l'exagération  et  à  l'injus- 
tice. Cicéron  aimait  passionnément  la  gloire,  comme  il  aimait  la  justice 
et  aussi  la  liberté  à  laquelle  il  a  fait  le  sacrifice  de  sa  vie.  Il  n'a  pas  dit 
que  la  gloire  fût  préférable  à  la  vertu  :  «  Si  la  vertu,  lit-on  dans  son 
Discours  pour  Milon,  pouvait  envisager  un  prix,  le  plus  haut  de  tous 
serait  la  gloire;  elle  seule  nous  console  de  la  brièveté  de  la  vie  par  les 
longs  ressouvenirs  de  la  postérité;  elle  nous  rend  présent  où  nous  ne 
sommes  point,  elle  nous  fait  vivre  même  après  la  mort.  » 

26,  Toy.  —  Cicéron,  De  Fin.,  II,  18. 

31,  Richesses.  —  Plotius  avait  légué  toute  sa  fortune  à  Peduceus,  à  l'insu 
de  sa  veuve,  à  laquelle  celui-ci  la  restitua.  Cicéron,  De  Fin.,  Il,  18. 

34,  Cicero.  —  De  Fin.,  11,  18.  —  Un  nommé  Fadius  Gallus,  homme  extrême- 
ment riche,  pour  éluder  une  loi  qui  limitait  ce  dont  pouvaient  hériter  les 
femmes,  avait  institué  comme  son  légataire  S.  Rufus,  mais  en  le  priant  de 
transporter  tout  son  héritage  à  sa  fille  Fadia.  S.  Rufus  nia  cette  clause,  et. 


Fb.536  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

se  retranchant  derrière  la  loi.  se  borna  à  abandonner  à  Fadia  ce  à  quoi 
elle  avait  lég'alement  droit. 
36,  Hortensius.  —  Quelques  intrigants  avaient  apport<^  de  Grèce  à  Rome 
un  faux  testament  d'un  nommé  Minocius  Balbus,  homme  fort  riche.  Afin 
de  recueillir  plus  facilement  la  succession,  ils  s'étaient  donné  pour  cohé- 
ritiers Crassus  et  Hortensius,  deux  des  hommes  les  plus  puissants  de  l'é- 
poque. Ceux-ci  soupçonnaient  bien  la  fausseté  de  l'acte,  mais  ils  n'y  avaient 
pas  trempé  et  ils  ne  se  refusèrent  pas  à  profiter  du  crime  d'autrui.  Ci- 
CKRON,  De  OfT;  m,  18. 
448, 

16,  Vouloit.  —  »  La  gloire  sait  la  vertu,  comme  l'ombre  suit  le  corps.   » 

CiCÉRON. 

450, 

4,  Blessé.  —  L'éd.  de  88  aj.  :  mais  d'Hannibal  ie  sçay  bien  qu'on  le  dit,  et  de 
Scanderberg.  —  Alexandre  l'a  été  maintes  et  maintes  fois  (V.  N.  I,  486), 
parfois  assez  grièvement,  notamment  au  siège  de  Tyr,  et  dans  son  expédi- 
tion contre  les  Malliens  Oxydraques,  peuplade  du  bassin  de  l'Indus.  Na- 
poléon l'a  été  une  fois  à  la  cuisse  au  siège  de  Toulon,  une  autre  fois  au 
talon  à  Ratisbonne,  chaque  fois  sans  gravité.  —  Une  blessure  à  la  guerre 
ne  prouve  généralement  pas  grand'chose.  sinon  qu'on  y  était,  surtout 
actuellement  avec  la  longue  portée  des  armes;  bien  rares  sont  celles  re- 
çues dans  l'accomplissement  d'un  fait  méritant  une  mention  personnelle. 
Napoléon,  à  Waterloo,  avait  un  guide  pris  sur  place,  suivant  son  habi- 
tude, les  cartes  n'indiquant  que  d'une  façon  générale  et  sommaire  les 
mouvements  de  terrain;  ce  guide,  lié  sur  son  cheval,  faisait  mauvaise 
figure  aux  balles  et  aux  boulets,  il  s'agitait  sur  sa  selle,  détournait  la  tète, 
se  courbait  sur  l'encolure  de  sa  monture,  si  bien  que  l'empereur  lui  dit 
à  un  moment  :  «  Mais,  mon  ami,  ne  remuez  pas  tant;  un  coup  de  fusil 
vous  tuera  aussi  bien  par  derrière  que  par  devant  et  vous  fera  une  plus 
vilaine  blessure.  »  H.  Houssaye.  Dans  ma  jeunesse,  un  de  mes  camarades, 
fort  brave  du  reste,  qui  depuis  a  été  tué  en  1870  à  Frœschviller,  et  qui 
avait  fait  ses  premières  armes  en  Crimée  où  il  avait  été  blessé  deux  fois 
et  avait  été  décoré  de  la  médaille  militaire,  nous  contait,  en  toute  fran- 
chise, que  sa  première  blessure,  il  l'avait  reçue  alors  que  derrière  une 
haie  il  mettait  culotte  bas,  et  la  seconde,  alors  que  surpris  par  les  Russes 
dans  une  embuscade  il  fuyait  à  toutes  jambes;  pas  plus  dans  un  cas  que 
dans  l'autre,  il  ne  faisait  face  à  l'ennemi. 
40,  Faire.  —  C'est-à-dire  la  satisfaction  du  devoir  accompli.  Mais  l'homme 
est  homme;  et,  outre  qu'il  y  en  a  peu  qui  n'aient  besoin  d'être  encou- 
ragés dans  la  voie  du  bien,  c'est  un  impérieux  devoir  pour  ceux  auxquels 
cela  incombe,  que  de  rechercher  et  récompenser  ceux  qui  demeurent 
ainsi  dans  l'ombre  et  de  ne  pas  s'en  laisser  imposer  par  ces  autres,  tou- 
jours prêts  à  se  faire  valoir,  soit  en  s'exaltant  eux-mêmes,  soit  en  recou- 
rant à  autrui  à  charge  de  revanche;  lés  sociétés  d'admiration  mutuelle 
sont  un  des  plus  grands  obstacles  que  le  vrai  mérite  rencontre  sur  sa 
route. 

452, 

18,  Lemetrius.  —  Sénèque,  Epist.  91. 

454, 

1,  Timon.  —  Passage  de  Sénèque,  Epist.  85,  que  Montaigne  paraphrase. 
7,  Absence.  —  Tite-Live,  XLIV,  22.  —  En  168.  —  «  N'ajoutez  foi,  dit 
en  substance  Paul-Émile  au  peuple  romain,  qu'à  ce  que  je  vous  écrirai; 
n'accréditez  pas,  par  votre  crédulité,  des  rumeurs  vaines  et  sans  fonde- 
ment. 11  y  a  des  gens  qui  s'érigent  en  maîtres,  critiquent  tout  ce  qui  n'est 
pas  conforme  à  leur  manière  de  voir;  cette  habitude  est  funeste.  Je  ne 
me  crois  pas  infaillible,  mais  c'est  de  ceux  qui  ont  de  l'expérience,  qui 
sont  sur  les  lieux  et  connaissent  la  situation,  que  je  prends  avis.  Si  donc 
il  est  quelqu'un  parmi  vous  qui  se  croit  à  même  de  me  donner  quelque 
conseil  utile,  qu'il  vienne  avec  moi,  je  le  défrayerai  de  tout;  autrement 


NOTES.         LIV.  H,  CH.  XVI.         VOL.  II,  PAG.  4S4.  Pb.537 

qu'il  se  taise  et  saclie  que  les  avis  de  mes  compagnons  d'armes  me  suf- 
fisent. »  —  Semblable  propos  serait  également  de  mise  aujourd'hui  en 
France:  mais  ce  n'est  pas  à  un  personnage  ayant  le  courage  de  le  tenir 
que  l'on  confierait  le  commandement  de  nos  armées;  et  en  tout  cas,  si, 
y  étant  nommé,  il  se  révélait  tel,  de  semblables  exhortations  de  sa  part 
demeureraient  lettre  morte,  et  le  premier  prétexte  venu,  le  moindre  échec 
sans  conséquence,  toujours  possible,  le  feraient  indubitablement  tomber 
en  disgrâce.  —  Ce  discours  de  Paul-Émile  est  donné  par  l'avant-dernier 
chapitre  de  Tite-Live  qui  nous  ait  été  conservé,  car  nous  ne  possédons 
qu'une  faible  partie  de  son  Histoire  qui  allait  jusqu'à  l'ère  chrétienne,  et 
ce  qui  nous  en  reste  s'arrête  à  l'an  166.  Le  pape  Grégoire,  vers  la  fin  du 
vi"  siècle,  le  jugeant  dangereux  en  raison  des  fréquents  prodiges  qu'il 
rapporte,  le  comprit  dans  la  proscription  des  livres  profanes  qui  lui  est 
attribuée  et  fit  brûler  tous  les  manuscrits  qu'il  en  put  découvrir. 
8,  Destourbier.  —  Trouble,  obstacle,  empêchement;  du  latin  dislurbare, 
empêcher. 

12,  Consentement.  —  Fabius,  par  sa  prudence,  s'étant  attiré  beaucoup  de 
critiques  et  Minutius,  son  chef  de  cavalerie,  ayant  obtenu  quelques  légers 
succès  en  combattant  contre  la  défense  qu'il  lui  en  avait  faite,  avait  vu 
son  autorité  répartie  entre  eux  deux,  et  pour  ne  pas  l'afi'aiblir  avait  pro- 
posé à  son  ancien  lieutenant  de  commander  à  tour  de  rôle.  Celui-ci, 
pour  rester  maître  de  ses  actions,  avait  préféré  répartir  les  troupes  entre 
eux.  Peu  après,  il  se  faisait  battre  et  n'était  sauvé  que  par  Fabius,  auquel 
spontanément  il  fit  amende  honorable,  en  même  temps  qu'il  se  replaçait 
sous  ses  ordres  (217). 

34,  Main.  —  Il  est  ici  question  de  l'anneau  de  Gygès.  Platon,  République,  II, 
3;  CirÉRON,  De  Off'.,  III,  9.  —  Gygès  était  le  favori  de  Candaule,  roi  de  Lydie 
(Asie  Mineure).  Candaule,  fier  de  la  beauté  de  .sa  femme,  la  lui  fit  voir 
toute  nue;  celle-ci,  outragée,  mit  Gygès  dans  l'alternative  de  périr  lui- 
même  ou  de  tuer  le  roi  ;  il  prit  ce  dernier  parti  et  épousa  la  reine  et 
monta  lui-même  sur  le  trône  (VIP).  Platon  fait  de  Gygès  un  berger  et  ra- 
conte qu'ayant  trouvé  dans  les  fiancs  d'un  cheval  d'airain  un  anneau  ou 
bague  merveilleuse  qui,  en  tournant  le  chaton  à  l'intérieur  de  la  main, 
rendait  invisible  celui  qui  le  portait,  il  en  profita  pour  séduire  la  reine 
et  assassiner  le  roi;  et  il  ajoute  que  si  un  tel  anneau  était  en  la  posses- 
sion d'un  sage,  il  ne  s'en  prévaudrait  pas  pour  faire  le  mal,  les  honnêtes 
gens  considérant  si  une  chose  est  honnête  et  non  si  elle  est  ignorée. 
456, 

17,  Herostratus.  —  Le  temple  de  Diane  à  Éphèse  (Asie  Mineure),  qu'Éros- 
trate  brûla  (356),  dans  le  but  de  s'illustrer  par  quelque  moyen  que  ce  fût, 
était  regardé  comme  une  des  sept  merveilles  du  monde.  (On  désigne  com- 
munément sous  ce  nom,  sans  toutefois  que  l'accord  existe  à  cet  égard  : 
1°  les  jardins  suspendus  et  les  mwrs  de  Babylone;  2°  les  pyramides  d'E- 
gypte; 3»  le  phare  d'Alexandrie;  4°  le  colosse  de  Rhodes;  o°  le  Jupiter 
Olympien  de  Phidias;  6°  le  tombeau  de  Mausole;  7°  le  temple  d'Ephèse). 
L'incendie  de  ce  temple  eut  lieu  la  nuit  même  de  la  naissance  d'Alexandre 
le  Grand.  Les  Ephésiens,  pour  déjouer  les  calculs  du  fou  qui  en  était 
l'auteur,  rendirent  un  décret  qui  défendait  sous  peine  de  mort  de  pro- 
noncer son  nom;  c'était  le  meilleur  moyen  de  les  réaliser.  —  La  réflexion 
que  relate  Montaigne  à  son  sujet,  émane  de  Valère  Maxime,  VIII,  14,  et 
non  de  Trogue-Pompée. 

17,  Capitolinus.  —  Tite-Live,  VI,  II.  —  Après  la  bataille  de  l'Allia,  Man- 
lius,  voyant  Rome  au  pouvoir  des  Gaulois,  se  jeta  dans  le  Capitole.  Cette 
fortere.sse  elle-même  allait  tomber  aux  mains  des  Barbares  qui  déjà  en 
escaladaient  les  murs,  lorsque  Manlius,  éveillé  par  le  cri  des  oies  sacrées 
que  l'on  y  noumssait,  prit  les  armes  et  précipita  l'ennemi  du  haut  des 
murailles,  ce  qui  lui  valut  le  nom  de  Capitolinus  (390).  Dans  la  suite, 
aspirant  à  la  tyrannie  et  accusé  devant  le  peuple,  il  sut  se  faire  absoudre 
en  montrant  le  Capitole  qu'il  avait  sauvé;  mais  une  autre  fois  l'assemblée 


Fb.538  ESSAIS  DE  MONTAKINE. 

s'étant  réunie  dans  un  autre  lieu  d'où  on  ne  pouvait  apercevoir  ce  théâtre 

de  ses  exploits,  il  fut  condamné  à  être  précipité  du  haut  de  la  roche 

Tarpéienne  (384). 
',.'0,  Parle.  —  Nous  avons  plus  de  souci  qu'on  parle  de  nous,  (|ue  de  la  façon 

dont  on  en  parle. 
23,  Autruy.  —  Il  semble  que  pour  être  connu,  il  faille  en  quelque  sorte 

commettre  sa  vie... 
26,  Fantastique.  —  Boileau,  dans  une  de  ses  épitres,  blâme  égale ment^  cette 

tendance  à  trop  agir  avec  la  préoccupation  de  ce  que  les  autres  pourront 

en  penser  : 

«  C'est  là  de  tous  nos  maux  le  fatal  fondement; 
Des  jugements  d'aulrui  nous  tremblons  follement. 
Et  chacun,  l'un  de  l'autre,  adorant  les  caprices. 
Nous  cherchons  hors  de  nous  nos  vertus  et  nos  vices.  » 

456, 

1,  Surnom.  —  Ce  nom  d'Eyquem,  que  l'auteur  qualifie  de  surnom  (mais 
au  xvi"  siècle,  surnom  s'employait  souvent  comme  synonyme  de  nom),  était 
bel  et  bien  son  nom  de  famille,  et  il  est  le  premier  qui  l'ait  abandonné.  — 
Son  bisaïeul,  Ramon  Eyquem,  habitait  le  village  de  Blanquefort  en  Médoc, 
à  quelques  kil.  N.-O.  de  Bordeaux,  et  avait  dans  cette  dernière  ville  une 
maison  de  commerce  de  vins,  de  pastels  et  de  poissons  salés,  située  près 
du  fort  du  Ha  (actuellement  le  palais  de  justice),  dans  l'espace  existant  entre 
ce  fort  et  l'église  cathédrale  de  Saint-André.  Ce  Ramon  acheta,  en  1478, 
la  maison  noble  de  Montaigne  (à  environ  cinq  lieues  en  aval  de  Bergerac), 
dont  son  arrière-petit-fils  prit  le  nom  à  l'exclusion  du  sien,  ce  qui  se  fai- 
sait et  se  fait  encore  communément.  —  Ce  nom  d'Eyquem,  il  est  vraisem- 
blable que  Montaigne  ne  l'a  supprimé  qu'après  la  mort  de  son  père  et  après 
avoir  quitté  ses  fonctions  de  conseiller,  car  on  trouve  encore  les  deux 
noms  accolés  dans  le  passage  du  testament  de  La  Boétie  où  celui-ci  lègue 
ses  livres  et  papiers  à  M.  Michel  Ayquem  de  Montaigne,  conseiller,  etc. 

—  Ce  nom,  qui  semble  venir  du  flamand  Ecke  (chêne)  et  du  germain 
Heim  (hameau,  habilation),  existant  en  Gascogne  et  se  retrouvant  en  An- 
gleterre, il  est  probable  que  c'est  le  fait  des  alliances  contractées  entre 
Gascons  et  Anglais  durant  les  trois  siècles  pendant  lesquels  la  domination 
étrangère  s'est  maintenue  dans  cette  partie  du  midi  de  la  France. 

4,  Place.  —  L'autre  nom  de  Montaigne,  c'est  Michel,  son  prénom  qui,  en 
effet,  pouvait  et  a  dû  être  attribué  à  bien  d'autres. 

6,  Fauorir.  —  Favoriser,  donner  du  relief;  du  latin  favere  qui  a  le  même 
sens;  c'est  un  mot  que  comme  un  certain  nombre  d'autres  Montaigne  a 
fait  passer  de  son  chef  dans  notre  langue.  Favorir  l'inanité,  c'est  favoriser 
le  néant,  donner  de  l'importance  à  ce  qui  n'est  pas. 

7,  Inanité.  —  L'éd.  de  88  aj.  :  quel  proufit  m'en  reuient-il? 

9,  Violae.  —  Montaigne  change  ici  le  sens  de  la  citation,  où,  en  outre,  il 

substitue  les  mots  Laudat  posteritas  à  Laudant  convivfe. 
34,  Nous.  —  Combien  peu  de  Grecs  et  même  de  Romains,  malgré  tant  d'écri- 
vains... dont  les  noms  sont  parvenus  jusqu'à  nous  ! 

«  Un  redoutable  instant  nous  détruit  sans  réserve: 
On  ne  voit  au  delà  qu'un  obscur  avenir; 
A  peine  de  nos  noms  un  léger  souvenir 

Parmi  les  hommes  se  conserve.  »  M""  Deshoulières. 

37,  France.  —  Montaigne  ne  prévoyait  pas  les  progrès  que  devait  faire  l'im- 
primerie et  le  développement  que  prendraient  ses  moyens  de  vulgarisation. 

—  Une  autre  raison  du  reste  qui  a  fait  qu'à  rencontre  de  ses  prévisions,  le 
souvenir  de  ces  temps  troublés  est  de  ceux  de  notre  histoire  qui  se  sont 
le  moins  effacés,  c'est  qu'un  des  effets  des  guerres  civiles  est  de  faire  que 
plus  qu'en  toute  autre  situation,  chacun  se  montre  à  découvert,  avec  ses 


NOTES.         LIV.  II,  CM.  XVI.         VOL.  II,  PAC.  4;i8.  Fb.H.^O 

talents  et  ses  vices  i)rédominants,  et  qiae  les  bouleversements  profonds  et 
imprévus  qui  en  résultent,  modifient  souvent  du  tout  au  tout  la  fortune 
des  individus  et  parfois  aussi  celle  des  classes  de  la  société  et  des  partis 
qui  la  divisent.  Qui  connaîtrait  Cromwell,  sans  la  révolution  de  1649; 
Napoléon,  sans  celle  de  1793;  Gambotta,  sans  celle  de  1870?  —  Nonobstant, 
l'observation  de  Montaigne  est  très  juste;  aujourd'hui  les  noms  d'un  beau- 
coup plus  grand  nombre  reçoivent  de  la  publicité,  mais  combien  éphé- 
mère! Bientôt  enfouis  dans  les  bibliothèques,  ils,  y  dorment  du  plus  pro- 
fond sommeil,  à  jamais  ignorés  tout  comme  avant,  en  dépit  des  efforts, 
pour  de  bien  rares  exceptions,  de  quelque  érudit  en  mal  de  réputation 
pour  lui-même;  on  peut  même  dire  plus  :  notre  époque,  avec  ses  idées 
utilitaires,  plus  préoccupée  du  présent  et  de  l'avenir  que  ses  devancières,  en 
dehors  de  ceux  qui  y  ont  un  intérêt  direct,  se  soucie  au  fond  beaucoup 
moins  qu'elles  du  passé. 
38,  Muses.  —  Elles  étaient  au  nombre  de  neuf,  et  présidaient  :  Clio,  à  l'his- 
toire; Euterpe,  à  la  musique;  Thalie,  à  la  comédie;  Melpomène,  à  la  tra- 
gédie; Terpsichore,  à  la  danse;  Erato,  à  l'élégie;  Polymnie,  à  la  poésie 
lyrique;  Uranie,  à  l'astronomie;  et  Calliope,  à  l'éloquence  et  à  la  poésie 
héroïque. 
38,  Battaille.  —  Plutarque,  Apophth.  des  Lacédémoniens. 
460, 

8,  Faueur.  —  C'est  ce  qu'un  poète  latin  a  rendu  :  «  Habenl  sua  fala  libeUi 
{Les  livres  ont  leur  destinée).  »  Cet  aphorisme,  après  avoir  été  attribué  aux 
plus  célèbres  poètes  latins,  se  trouve  être  d'un  des  plus  obscurs,  Teiien- 
TiANUs  Maurus;  il  est  lui-même  un  exemple  de  la  vérité  de  sa  réflexion, 
car  on  ne  cite  guère  de  lui  que  ce  fragment  de  vers,  et  encore  en  le 
crojant  d'un  autre  (Larousse).  —  Ceux  qui  suivent,  assez  médiocres,  du 
reste,  d'un  auteur  non  moins  inconnu,  expriment  cette  même  idée,  en  la 
développant  davantage  : 

«  L'esprit  seul  ne  saurait  faire  vivre  un  écrit, 
Chaque  jour  nous  en  donne  une  nouvelle  preuve. 
Il  faut  plus,  si  du  temps  on  veut  franchir  l'épreuve. 
Que  d'auteurs  qu'on  a  lus,  que  de  livres  de  prix... 
Enveloppent  le  poivre,  ou  sont  mangés  des  vers! 
Seule  la  destinée  éternise  les  vers.  • 

12,  Assignées.  —  Rangées. 

40,  Traian.  —  Fils  d'un  soldat  de  fortune  élevé  aux  honneurs  par  Vespasien, 
Trajan  se  montra  lui-même  brave  et  habile.  Élevé  à  l'empire,  il  refréna 
les  Daces  et  les  Parthes,  qui  le  menaçaient;  à  l'intérieur,  il  fit  fleurir  la 
justice,  cesser  les  délatit)ns,  s'environna  de  capacités  de  tous  genres,  allégea 
les  impôts  et  mérita,  au  moins  par  sa  vie  publique,  d'être  considéré  comme 
le  meilleur  des  empereurs  romains.  ^ 

40,  Néron.  —  Empereur  grâce  aux  intrigues  d'Agrippine  sa  mère  qui  l'avait 
fait  adopter  par  Claude,  au  détriment  de  son  propre  fils,  il  affecta  beau- 
coup de  douceur  au  début  de  son  règne,  mais  bientôt  se  montra  cruel  et 
débauché,  s'entoura  de  courtisanes,  d'histrions,  prit  part  aux  jeux  du 
cirque  et  finit  par  se  livrer  aux  pires  atrocités,  ne  reculant  devant  aucun 
crime,  assa-ssinant  successivement  Britannicus,  sa  mère,  sa  femme;  accusé 
d'un  incendie  qui  consuma  la  moitié  de  Rome,  il  en  rejctg,  l'accusation  sur 
les  chrétiens  et  ouvrit  contre  eux  une  ère  de  persécutions  qui  fut  des  plus 
violentes;  fit  périr  quiconque  lui  déplaisait  ou  le  gênait,  et  lui-même,  ren- 
versé par  une  conspiration  amenée  par  ses  excès,  eut  à  peine  le  courage 
de  se  tuer.  Il  demeure,  dans  l'histoire,  le  type  le  plus  accompli  d'un  tyran 
exécrable,  d'un  monstre  de  cruauté. 
462, 

4,  Platon.  —  Lois,  XII. 

9,  Pédagogue.  —  Platon  et  Socrate.  —  La  plupart  des  ouvrages  de  Platon 


Pb,540  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

sont  présentés  sous  forme  de  dialogues.  Le  personnage  principal  expose  le 
fond  du  sujet:  ses  auditeurs,  par  leurs  questions  et  leurs  objections,  aident 
à  son  développement.  Dans  presque  tous,  c'est  Socrate  qui  est  ce  person- 
nage principal;  dans  les  Lois,  c'est  Platon  lui-même  qui,  par  modestie, 
dissimule  sa  personnalité  sous  celle  d'un  Athénien  étranger. 

13,  Miracles.  —  Diogène  Laerce,  Platon,  III,  26. 

23,  Numa.  —  V.  N.  II,  252  :  Numa. 

23,  Sertorius.  —Avait,  dans  la  guerre  civile  entre  Sylla  et  Marins,  embrassé 
le  parti  de  ce  dernier;  quand  il  fut  vaincu,  Sertorius  passa  en  Espagne 
(84),  s'y  rendit  indépendant  et  se  maintint  tel  jusqu'à  sa  mort.  Il  avait 
établi  dans  son  armée  un  simulacre  de  Rome  :  un  sénat,  des  consuls,  etc.; 
il  inspirait  à  ses  soldats  une  confiance  aveugle  et  leur  avait  persuadé  qu'il 
était  en  commerce  avec  les  dieux,  par  l'entremise  d'une  biche  blanche  dont 
il  se  faisait  suivre  partout;  il  fut  assassiné  par  un  de  ses  lieutenants  jaloux 
de  sa  supériorité, 

27,  Zoroastre.  —  V.  N.  II,  362  :  Zoroastre. 

29,  Oromazis.  —  Principe  du  bien,  comme  Ahriman  était^  celui  du  mal, 
c'est  lui  qui  avait  créé  le  monde,  la  lumière,  la  chaleur,  les  puissances 
bienfaisantes;  il  est  constamment  en  lutte  contre  l'esprit  des  ténèbres. 

29,  Trismegiste.  —  Trismégiste,  législateur  des  Égyptiens,  leur  donna  des 
lois  au  nom  de  Mercure;  cette  double  élision  se  reproduit  dans  les  membres 
de  phrase  qui  suivent. 

30,  Zamolxis.  —  V.  Lexique. 

30,  Cbarondas.  —  Se  perça,  dit-on,  de  son  épée,  parce  qu'il  avait  enfreint 
par  mégarde  une  loi  qu'il  avait  portée  lui-même,  qui  défendait  de  se  pré- 
senter en  armes  dans  l'assemblée  du  peuple;  à  celui  qui  lui  faisant  obser- 
ver qu'il  était  en  défaut  en  enfreignant  sa  loi  :  «  Non,  dit-il  en  se  tuant,  je 
la  confirme.  • 

31,  Minos.  —  Gouverna  avec  tant  de  sagesse,  que  les  poètes  en  ont  fait  un 
des  trois  juges  des  enfers  avec  Rhadamante,  son  frère,  et  Éaque,  roi  d'Égine. 

31,  Lycurgus.  —  V.  N.  II,  220  :  Lycurgus. 

32,  Dracon.  —  Ses  lois  criminelles  étaient  si  rigoureuses  qu'on  alla  jusqu'à 
dire  qu'elles  étaient  écrites  avec  du  sang;  aussi  ne  tardèrent-elles  pas  à 
tomber  en  désuétude. 

32,  SoloB.  —  Un  des  sept  sages  de  la  Grèce;  reçut  mission  vers  l'an  593, 
des  Athéniens,  de  leur  donner  des  lois  au  lieu  et  place  de  celles  qu'ils 
avaient  reçues  de  Dracon;  y  substitua  un  code  sage,  humain;  établit  en 
même  temps  une  constitution  qui  était  un  mélange  habile  de  démocratie 
et  d'aristocratie,  et  calma  ainsi  momentanément  les  troubles  violents  dont 
la  ville  était  l'objet  incessant  et  qui  reprirent  de  plus  belle  moins  de  dix  ans 
après,  pour  aboutir  à  la  tyrannie  de  Pisistrate. 

34,  Moïse.  —  Né  en  Egypte,  où  les  Hébreux  étaient  en  quelque  sorte  captifs. 
Moïse  fut  exposé  dès  sa  naissance  sur  le  Nil,  en  vertu  des  ordres  de  Pharaon, 
roi  d'Egypte,  qui  voulait  faire  périr  tous  les  enfants  màles  de  cette  race; 
il  fut  sauvé  par  la  fille  même  du  roi,  élevé  à  la  cour  et  instruit  dans  les 
sciences  des  Égyptiens.  Informé  de  sa  naissance,  il  s'enfuit  au  désert  et 
reçut,  de  Dieu,  mission  de  délivrer  les  Israélites  de  la  servitude;  il  y  parvint 
(1645),  et  mourut,  les  ayant  amenés  jusque  sur  les  confins  de  la  terre  de 
Judée,  et  leur  ayant  donné,  dans  l'intervalle,  les  tables  de  la  loi  que  lui-même 
avait  reçues  de  Dieu,  sur  le  mont  Sinaï.  Moïse  est  l'auteur  du  Pentateuque, 
c'est-à-dire  des  cinq  premiers  livres  de  l'Ancien  Testament,  qui  renferment 
l'histoire  sacrée  depuis  la  création  du  monde  jusqu'à  l'entrée  des  Hébreux 
dans  la  Terre  promise,  un  code  de  lois  et  un  recueil  de  prescriptions  reli- 
gieuses. —  Il  est  à  observer  que  le  moyen  employé  par  Moïse  pour  faire 
accepter  ses  lois,  est  analogue  à  celui  dont  ont  usé  les  législateurs  dont 
Montaigne  vient  de  parler  :  II  s'entretenait  seul  à  seul  sur  le  Sinaï  avec 
Dieu,  par  des  temps  d'orage  et  de  brouillard,  le  peuple  étant  consigné  à 
distance  {Exode,  XIX). 

35,  Bedoins.  —  L'islamisme. 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  XVf.        VOL.  II,  PAG.  462.  Fb.541 

35,  louinuille.  —  Dans  ses  Mémoires,  58. 
464, 

6,  Escorce.  —  V.  N.  I,  62  :  Tout. 

CHAPITRE  XVII. 

Presumption.  —  Dans  ce  cliapitre,  Montaigne  dit  d'excellentes  choses  et 
donne  des  détails  sur  son  caractère  et  la  nature  de  son  esprit,  sur  sa  per- 
sonne, ses  écrits,  son  style,  son  défaut  de  mémoire,  son  ignorance  des 
choses  les  plus  communes,  sur  son  irrésolution  qu'il  appelle  une  cicatrice 
bien  mal  propre  à  produire  en  public. 
21,  Valeur.  —  De  notre  mérite. 
466, 

27,  Fuit.  —  Pour  avoir  écrit  leurs  mémoires. 

31,  Propensions.  —  Il  n'est  pas  étrange,  il  n'est  pas  extraordinaire  que  nous 
ayons  des  qualités,  des  penchants,  etc. 

36,  Consente.  —  Qui  s'accordait,  qui  était  en  harnionie  avec... 

37,  Gras.  —  Add.  des  éd.  ant.  :  Estant  douez  d'vne  extrême  beauté,  ils  s'y 
aidoient  vn  peu,  sans  y  penser,  par  mignardise. 

37,  Csesar.  —  Plutarque,  César,  I,  à  la  fin.  —  On  a  dit  la  même  chose  de 
Pompée.  Sénèque,  Contr.,  III,  19;  Plutarque,  De  l'Utilité  à  retirer  de  ses 
ennemis,  6. 
39.  Bincer.  —  Froncer,  rider  ;  du  latin  ringi,  grogner  en  montrant  les  dents, 

en  parlant  des  chiens  enragés. 
42,  Salutations.  —  Var.  de  1588  :  Bonnetades. 
468, 

2,  Gloire.  —  Par  orgueil. 

9,  Constantius.  —  L'empereur  Constance  II,  fils  de  Constantin;  Ammien 
Marcellin,  XXI,  14,  se  borne  à  parler  de  sa  prestance  et  de  sa  dignité 
hautaine;  le  surplus  semble  une  amplification  de  Montaigne. 
15,  Moy.  —  Les  gestes  et  le  port  du  corps,  dont  il  a  parlé  plus  haut. 

17,  Vice.  —  A  une  vaine  et  sotte  fierté,  ainsi  qu'il  est  dit  également  au  com- 
mencement de  ce  paragraphe. 

32,  Maistrise.  —  Là  possession. 
470, 

4,  Eftect.  —  Lorsque  je  me  propiîse  de  faire  telle  ou  telle  chose,  je  n'ai 
point  d'avance  la  notion  exacte  des  moyens  dont  je  pourrai  user  pour 
réussir,  et  je  n'en  suis  instruit  que  par  le  résultat. 

7,  Desseigne.  —  Je  les  détermine,  j'en  forme  le  dessein. 

30,  Escriture.  —  L'Ecclésiaste  dit  :  «  Ce  désir  infini  de  savoir  qui  est  né 
avec  nous,  a  été  donné  par  Dieu  à  l'homme,  comme  une  démangeaison  et 
une  lèpre,  pour  le  tourmenter  sans  aucun  fruit.  »  —  Les  légendes  d'Eve 
chez  les  chrétiens,  de  Pandore  chez  les  anciens,  sont  la  personnification 
des  méfaits  de  la  curiosité. 

37,  Prix.  —  Je  me  regarde  comme  étant  de  la  classe  commune  et  ordinaire 
des  hommes,  et  m'en  contente;  les  défauts  les  plus  communs,  les  plus  ré- 
pandus dans  les  basses  classes,  je  les  ai  et  ne  les  désavoue  ni  ne  m'en 
excuse;  la  seule  chose  que  j'apprécie  en  moi,  c'est  que  je  sais  ce-que  je  vaux. 
472, 

5,  Foiblesse.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  le  me  connoy  tant,  que  s'il  estait  party  de 
moy  chose  qui  me  pleut,  ie  le  deuroy  sans  double  à  la  fortune. 

7,  Ouurer.  —  A  l'employer,  à  la  mettre  en  œuvre. 

11,  Poësie.  —  II  est  sur  que  c'est  l'espèce  d'ouvrage  qui  souffre  le  moins  la 
médiocrité,  et  c'est  bien  de  la  poésie  et  des  poètes  qu'on  peut  dire  :  «  Qui 
ne  vole  au  sommet,  tombe  au  plus  bas  degré.  »  NaigeÔn. 

18,  Est.  —  Ce  mot  manque  dans  les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux. 

19,  Peuples.  —  Des  peuples  tels  que  ceux  dont  il  va  être  parlé,  qui,  malgré  sa 
puissance,  marquèrent  si  vivement  le  mépris  qu'ils  éprouvaient  pour  la 
mauvaise  poésie  de  Denys. 


Fb.542  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

•29,  Olympiques.  —  Ces  jeux  se  célébraient  tous  les  quatre  ans  à  Olympie. 
Pendant  leur  durée  les  hostilités  étaient  suspendues;  les  femmes  n'j-  pou- 
vaient assister;  seuls  les  Grecs  (y  compris  ceux  de  leurs  colonies)  pouvaient 
y  prendre  part.  Ils  comprenaient  des  courses  de  chars  et  de  chevaux;  — 
des  courses  à  pied;  —  la  lutte,  où  les  adversaires  étaient  absolument  nus  et 
oints  d'huile;  —  le  pugilat,  où  ils  avaient  la  tête  protégée  par  une  calotte 
d'airain  et  usaient  de  gantelets  en  lanière  de  cuir;  cet  exercice,  toujours 
sanglant,  était  souvent  mortel  et  ceux  qui  s'y  livraient  mouraient  presque 
tous  avant  l'âge;  le  pancrace,  comprenant  la  lutte  et  le  pugilat;  mais  les 
poings  étaient  nus,  il  était  interdit  de  mordre  et  le  combat  se  prolongeait 
jusqu'à  ce  que  l'un  des  adversaires  se  déclarât  vaincu,  aussi  y  avait-il 
souvent  mort  d'homme;  —  le  panthèle,  se  composant,  comme  l'indique 
son  nom,  de  cinq  épreuves  :  la  lutte,  le  saut,  la  course,  le  jet  du  disque  et 
celui  du  javelot;  les  enfants  y  prenaient  part  dans  un  concours  particulier. 
—  Ils  comportaient  aussi  des  concours  de  poésie.  —  Les  vainqueurs  étaient 
particulièrement  honorés;  les  poètes,  les  sculpteurs  ont  maintes  fois  célébré 
leurs  hauts  faits;  Chylon,  un  des  sept  sages,  mourut  de  bonheur  en  em- 
brassant son  (ils  victorieux. 

De  nos  jours  on  a  cherché  à  faire  revivre  en  Grèce,  quelque  peu  modifiés 
en  raison  des  temps,  ces  jeux  auxquels  ce  nom  a  été  maintenu,  bien  qu'ils 
aient  lieu  à  Athènes.  En  1906,  les  résultats  des  principaux  exercices  ont  été 
les  suivants  :  Course,  dite  de  Marathon,  exécutée  sur  le  parcours  suivi  par 
ce  guerrier  qui,  après  la  bataille  de  ce  nom  (490],  vint  en  toute  hâte  à 
Athènes  annoncer  la  victoire  et,  sa  mission  remplie,  tomba  mort  d'épuise- 
ment aux  pieds  des  magistrats  :  la  distance  à  franchir,  l'ikil.,  l'a  été  en 
2"  51  min.  :  il  est  à  observer  que  la  route  est  dure  et  en  mauvais  état; 
même  parcours  (aller  et  retour)  sur  vélocipède  en  2"  41;  saut  en  hauteur 
avec  élan,  l'",T7;  sans  élan,  1"',56;  lancement  du  disque,  35'", 17. 

30,  Faillit.  —  Manqua,  ne  put  aborder. 

33,  Poëme.  —  Diodoke  de  Sicile,  XIV,  104. 

43,  Leneïens.  —  Diodore  de  Sicile,  XV,  74.  —  La  tragédie  dont  il  est  ici  ques- 
tion, présentée  par  Denys  aux  fêtes  Lenéennes  (fêtes  qui  avaient  lieu  à 
Athènes  en  l'honneur  de  Bacchus,  et  se  célébraient  par  des  concours  dra- 
matiques), a  nom  ■<  la  Rançon  d'Hector  ». 
474, 

1,  Conceut.  -    V.  N.  I,  28  :  Tyran. 

19,  Estage.  —  Les  éd.  ant.  portent  :  Et  en  mon  imagination  mesmes,  ie  ne 
conçoy  pas  les  choses  en  leur  plus  grande  perfection,  au  lieu  de  :  «  Et  cette... 
estage  ». 

25,  D'y  aspirer.  -^  Var.  des  éd.  ant.  :  de  me  le  représenter. 

27,  Quelqu'vn.  —  Ce  quelqu'un,  c'est  Xénocrate.   Plutarque,  Préceptes  du 

mariage,  26. 
30,  Gratiis.  —  «  L'amitié  même  a  besoin  d'elles  »,  a  dit  Moncrif.  Dans  une 

épître  à  Fontenelle,  le  cardinal  de  Bernis  écrit  : 

•  Les  Grâces  seules  embellissent    j    Et  nos  talenls  son  des  ressorts 
Nos  esprits,  ainsi  que  nos  corps;    I    Que  leurs  mains  légères  polissent.  » 

36,  Moy.  —  C'est  pour  me  conformer  à  moi-même,  être  fidèle  à  mon  caractère. 
476, 

1,  Rabirius.  — •  Orateurs  qui^  au  dire  de  Cicéron,  Acad.,  I,  2,  dissertaient 

sur  toutes  choses,  sans  art,  en  style  vulgaire  et  sans  jamais  conclure;  ils 

appartenaient  à  la  secte  des  Épicuriens,  lesquels  méprisaient  la  rhétorique 

et  la  dialectique. 

II,  Les  raisons.  —  Les  éd.  ant.  font  précéder  ces  mots  de  ceux-ci  :  Ce  que 

i'ay  à  dire,  ie  le  dis  tousiours  de  toute  ma  force. 
13,  Commune.  —  De  sujets  communs,  de  choses  vulgaires. 
15,  Exorde.  —  Cicéron,  De  Universo,  2.  —  L'exorde  est  la  première  partie 
•        d'un  ouvrage.  * 

20,  Profonder.  —  Approfondir. 


NOTES.         LIV.  II,  Cil.  XVII.        VOL.  II,  PAG.  476.  YbM.i 

26,  lamais.  —  Cela  est  particulièrement  vrai  pour  Platon,  qui  est  souvent 
bien  vide  de  choses  et  dont  le  pins  grand  mérite  consiste  dans  le  style  et 
l'élocution.  Naigeon. 

30,  Affection.  —  Var.  des  éd.  ant.  et  de  l'ex.  de  Bordeaux  :  Uaffeclation; 
version  qui  a  été  introduite  dans  la  traduction. 

34,  Platon.  —  République,  X. 

40,  Seneque.  —  Montaigne  n'a  ni  les  saillies  de  Sénèque,  ni  en  général  son  stylo 
et  sa  manière;  il  est  plus  dense,  plus  serré, plus  nerveux;  il  ne  revient  pas 
aussi  souvent  que  Sénèque  sur  les  mêmes  pensées  et  ne  cherche  pas  autant 
que  lui  à  faire  de  l'esprit;  comme  lui,  son  style  est  heurté,  inégal,  mais  la 
manière  et  la  tournure  d'esprit  diffèrent  notablement.  Naic.eox. 

41,  Taire.  —  L'ex.  de  Bord,  porte  :  faille;  variante  adoptée  dans  la  traduction. 
478, 

6,  Tacitus.  —  De  Oratoribus,  à  la  fin. 

10,  Greu.  —  -  Ce  n'est  pas  le  langage  de  Montaigne,  c'est  son  imagination 
qu'il  faut  i-egretter.  •  Voi.tauie.  —  Nonobstant,  ce  langage  a  bien  son.  mérite, 
eu  égard  à  Tétat  de  la  langue  française  à  l'époque  où  il  écrivait. 

16,  Anffoulemoisin.  —  Ou  mieux,  comme  porte  l'ex.  de  Bordeaux  :  Angou- 
moisin,  patois  de  l'Angoumois  et  non  d'Angoulème. 

18,  Gascon.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  pur  et  désirerais  le  sauoir. 

25,  Maistre  lean.  —  Est  ici  synonyme  de  savant.  Cette  qualification  de 
«  maistre  »,  en  dehors  de  son  sens  ironique  (V.  N.  I,  112  :  Maistre  lehan), 
était  aussi  donnée  aux  lettrés  et  à  ceux  qui  excellaient  dans  un  art  quel- 
conque ;  elle  est  devenue  courante  à  notre  époque,  particulièrement  à  l'égard 
des  gens  du  barreau  et  de  bien  d'autres  encore;  quoique  fréquemment 
employée  abusivement,  elle  est  de  celles  qui  flattent  le  plus  ceux  auxquels 
elle  s'adresse,  et  bien  rares  sont  ceux  qui  s'en  offusquent. 
480, 

16,  Beauté.  —  C'est  bien  plutôt  la  force,  la  finesse,  la  ruse,  en  un  mot  ce  droit 

«  ...  qu'un  esi)rit,  vaste  et  ferme  en  ses  desseins, 
A  sur  l'esprit  grossier  des  vulgaires  humains  », 

qui  ont  donné  aux  uns  le  pouv(Tir  sur  les  autres.  Les  avantages  corporels 
ont  contribué  sans  doute  à  établir,  ou  du  moins  à  préparer  cette  supériorité  ; 
mais  la  vraie  source  de  ce  pouvoir,  et  ce  qui  a  servi  à  le  conserver  chez 
ceux  qui  en  jouissaient,  n'est  autre  que  l'inégalité  des  facultés  intellectuelles. 
La  force  physique  asservit  un  individu  à  un  autre  individu,  mais  elle  ne 
lui  soumet  pas  une  multitude;  s'il  est  plus  fort  que  tel  ou  tel  homme,  il  est 
plus  faible  que  trois,  que  quatre,  que  dix;  mais  un  degré  supérieur  d'intel- 
ligence suffit  pour  fonder  cette  prééminence  d'un  individu  sur  tout  un 
peuple.  Lucrèce  n'a  pas  manqué  de  joindre  sur  ce  point  à  la  force  physique 
la  supériorité  de  l'esprit,  et  s'il  assigne  également  une  grande  influence  à 
la  beauté,  c'est  lorsqu'elle  se  trouve  réunie  à  la  force  corporelle  et  au  génie. 
Naigeon. 

23,  Présence.  —  Prestance. 

25,  Haulteur.  —  Végèce,  I,  5. 

28,  Doigt.  —  L'Église  fait  de  même  pour  ses  prêtres,  et,  indépendamment 
des  autres  conditions  à  remplir,  n'accepte  pas,  pour  ces  fonctions,  ceux  de 
taille  trop  au-dessous  de  la  moyenne,  ou  affectés  de  défauts  physiques  qui 
prêteraient  à  la  raillerie. 

30,  Militaire.  —  S'il  n'a  pas  cette  taille  commune,  déjà  assez  faible,  que  le 
Courtisan  exige  pour  son  gentilhomme,  et  s'il  était  au-dessous,  je  n'en 
voudrais  pas  comme  soldat. 

31,  Aristote.  —  Morale  à  Nicomaque,  IV,  7. 

34,  Procerité.  —  Haute  taille  ;  mot  forgé,  par  Montaigne,  du  latin  pruceritas, 
grandeur. 

34,  Personnes.  —  Aristote,  Politique,  IV,  4,  le  dit  des  Éthiopiens;  en  ce 
qui  concerne  les  Indiens,  c'est  Strabon  qui  rapporte  que  certains  d'entre 
eux  choisissaient  pour  roi  lo  plus  beau  d'entre  les  concurients. 


Fb.o44  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

482, 

2,  Hominum.  —  La  question  de  la  beauté  de  Jésus-Christ  a  été  souvent 
débattue.  Montaigne  donne  ici  la  prophétie  de  David  dix  siècles  avant  sa 
venue  :  «  Il  est  le  plus  beau  des  hommes  »  ;  d'autre  part,  deux  siècles 
après,  le  prophète  Isaïe  disait  :  «  Nous  l'avons  vu,  il  n'avait  ni  éclat,  ni 
beauté  »  ;  on  concilie  ces  deux  témoignages  opposés  en  objectant  qu'Isaïe 
le  représente  au  moment  de  la  Passion,  quand  il  est  abreuvé  d'outrages 
et  en  proie  à  la  souffrance.  Ce  qui  est,  c'est  qu'aucune  constatation  pou- 
vant être  tenue  pour  authentique,  n'existe.  Ceux  qui  en  tiennent  pour 
l'opinion  de  David  font  surtout  valoir  que  du  fait  même  de  sa  divinité, 
il  ne  pouvait  en  être  autrement;  les  autres,  que  s'il  en  eût  été  ainsi,  cela 
eût  été  immanquablement  consigné  dans  les  documents  de  l'époque  ayant 
trait  à  lui  et  notamment  dans  les  évangiles:  ce  qui  porte  à  adopter  une 
opinion  moyenne  et  à  dire  qu'il  est  probable  qu'au  point  de  vue  physique, 
rien  en  lui  n'attirait  particulièrement  les  i-egards,  mais  que  la  sublimité 
de  sa  vie  a  fait  croire  à  la  beauté  de  ses  traits. 

2,  Platon.  —  République,  VU. 

7,  Pbilopœmen.  —  L'éd.  de  80  porte  :  Phocion  (ie  puis  aisément  me  mes- 
conter  aux  noms,  mais  non  pas  à  la  substance).  —  Le  fait  est  tiré  de  Plu- 
TARQCE,  Philopœmen,  1.  Philopœmen  était  le  généralissime  de  la  Ligue 
achéenne  (ligue  qui  subsista  de  281  à  146),  constituée  par  les  principales 
villes  du  Péloponnèse  (Grèce),  pour  sauvegarder  leur  indépendance  et  dont 
pendant  longte-mps  il  fit  triompher  les  efforts;  il  mourut  les  armes  à  la 
main;  on  l'a  surnommé  le  dernier  des  Grecs.  A  des  talents  militaires 
sérieux,  il  joignait  toutes  les  vertus  civiques. 

11,  Pbilopœmen.  —  Var.  de  l'éd.  de  80  :  Phocion. 

28,  Maladies.  —  Les  éd.  ant.  à  88  portent  :  quoyque  ie  m'en  sois  serui  assez 
licentieusemenl,  au  lieu  de  :  «  rarement...  maladies  ». 

31,  Vns.  —  Ce  qui  donne  à  penser  que  ceci  a  été  écrit  un  peu  après  1573, 
«  pieça  »  n'existant  pas  dans  les  premières  éditions. 

37,  Euntes.  —  C'est  ce  qui  fait  que  les  contemporains  s'étonnent  souvent 
de  ne  ])as  reconnaître  certains  personnages  dans  les  statues  qu'on  leur 
élève  après  leur  mort;  c'est  qu'avec  juste  raison  le  sculpteur  fait  choix 
le  plus  souvent,  pour  les  représenter,  de  l'époque  où,  dans  la  plénitude  de 
leurs  moyens,  ils  ont  accompli  ce  à  quoi  ils  doivent  de  se  survivre.  Si 
notre  image  doit  passer  à  la  postérité,  n'est-il  pas  juste  que  ce  soit  tel  que 
nous  étions  «  avant  d'avoir  subi  du  temps  l'irréparable  outrage  »  ?  C'est  ce 
qui  conduisit  la  reine  Victoria  d'Angleterre,  alors  octogénaire,  à  faire  faire, 
dit- on,  sa  statue  la  représentant  à  vingt  ans,  dans  tout  l'éclat  de  sa  jeunesse 
et  de  sa  beauté,  qui  aurait  été  déposée,  à  l'insu  de  tous,  dans  une  chapelle 
close  et  à  demi  enfouie  sous  les  ronces  d'une  de  ses  demeures  seigneu- 
riales, et  découverte  par  hasard  quelques  années  après  sa  mort,  avec  cette 
mention  «  qu'elle  l'avait  fait  faire  afin  que  l'on  sut  qu'elle  avait  été  jolie 
femme  et  épouse  aimée  ». 
484, 

6,  Gourdes.  —  Pesantes,  maladroites;  du  latin  gurdus  qui,  eu  langage 
trivial,  signifiait  sot,  stupide;  de  gourd,  vient  engourdir. 

8,  Clerc.  —  A  part  cela,  en  dépit  de  ces  défectuosités  qui  n'entachent  pas 
le  fond,  j'en  sais  autant  qu'un  autre.  —  Clerc  est  à  prendre  ici  dans  le 
sens  de  savant,  capable,  comme  dans  la  fable  de  La  Fontaine  «  les  Ani- 
maux malades  de  la  peste  »  : 

«  Un  loup,  quelque  peu  clerc,  prouva  par  sa  harangue 
Qu'il  fallait  dévouer  ce  maudit  animal.  ■ 

10,  Plunae.  —  Avant  que  l'usage  des  enveloppes  de  lettres  se  fût  généra- 
lisé, on  pliait  celles-ci  pour  les  fermer;  et  avant  l'invention  des  plumes 
métalliques  qui  ne  remonte  guère  qu'à  quatre-vingts  ans,  on  écrivait  avec 
des  plumes  d'oie,  que  chacun  taillait  pour  s'en  servir. 


NOTES.        LIV.  II,  CH.  XVIF.         VOL.  II,  PAG.  484.  Fb.545 

12,  Oyseau.  —  Dans  la  chasse  au  faucon,  et  aussi  avec  d'autres  oiseaux  y 
employés,  chasse  qui  ne  se  pratique  plus  guère  aujourd'hui,  l'oiseau  prêt 
à  être  lancé,  était  encapuchonné  et  porté  sur  le  poing,  jusqu'au  moment 
où  on  le  lâchait  sur  le  gibier. 

24,  Aurum.  —  Les  Ilots  du  Tage  roulent  de  l'or  en  petite  quantité. 

26,  Soing.  —  Montaigne  avait  d'abord  écrit  :  le  ne  treuue  rien  si  chèrement 
acheté  que  ce  qui  me  coiiste  du  souing;  addition  portée  sur  l'ex,  de  Bord, 
et  qui  finalement  a  été  rayée. 

36,  Inquiétude.  —  La  parenthèse  et  ce  qu'elle  renferme  ne  figurent  pas  sur 
le  manuscrit  de  Bordeaux  qui  porte  :  et  en  im  tel  degré  de  sens  que  i'ay  senti 
en  auoir  occasion;  addition  dont  il  a  été  tenu  compte  dans  la  traduction. 

38,  Austris.  —  Les  vents  étaient  fils  du  Ciel  et  de  la  Terre.  Ils  avaient  pour 
roi  Eole,  qui  les  tenait  enfermés  dans  les  cavernes  des  îles  Eoliennes  (auj. 
Lipari,  au  x\.  de  la  Sicile),  d'où  il  les  déchaînait  sur  la  terre  et  les  mers; 
les  principaux  étaient  :  Eurus,  le  vent  d'orient;  Notus  et  Auster,  les  vents 
du  midi;  Borée  et  Aquilon,  les  vents  du  nord;  Zéphyr,  celui  d'occident. 
Myth. 

41,  Contenter.  —  Je  n'ai  eu  besoin  que  de  la  suffisance  de  me  contenter 
de  ce  que  j'avais.  —  Les  éd.  ant.  commençaient  cette  phrase  ainsi  :  Estant 
né  tel,  qu'il  ne  m'a  fallu  mettre  en  queste  d'autres  commodités.. . 
486, 

18,  Mises.  —  De  mes  dépenses. 

21,  Furibus.  —  Montaigne  détourne  ici  les  paroles  d'Horace  de  leur  vrai 
sens,  pour  les  adapter  à  sa  pensée. 
488, 

10,  Habillage.  —  Par  l'incertitude  de  les  prévenir  ou  de  les  atténuer. 

23,  Gaudisseur.  —  Railleur.  Gaudir,  c'est  se  moquer  par  jeu  et  en  riant.  Nicox. 
490, 

16,  Passé.  —  Les  auteurs  anciens  qu'il  affectionnait. 

24,  Sont.  —  Dans  une  édition  des  Essais  (Lefebvre,  Lyon,  1595),  on  a  sup- 
primé, comme  injurieux  pour  la  nation,  ce  passage  qui  relate  un  propos 
que  certains  ont  attribué  au  chancelier  Michel  de  l'Hôpital.  Tite-Live  ne 
nous  avait  pas  beaucoup  plus  ménagés,  dans  ce  passage  que  Rabelais, 
dans  Gargantua,  traduit  de  la  sorte  :  «  Telle  est  la  nature  et  la  complexion 
des  Français,  qu'ils  ne  valent  qu'à  la  première  pointe  :  lors,  ils  sont  pires 
que  des  diables;  mais  s'ils  séjournent,  ils  sont  moins  que  femmes.  » 

492, 

8,  Vtiles.  —  C.-à-d.  un  prince  ne  peut  faire  ses  affaires  (réussir)   qu'en 

se  conciliant  la  bonne  volonté  (l'affection  de  son  peuple);  et  nulles  autres 

qualités  (plus   que  celles  qui   viennent  d'être   indiquées)  ne  peuvent  lui 

gagner  cette  affection,  lui  être  plus  utiles. 
16,  Plier.  —  L'ex.  de  Bord,  porte  tordre,  qui  est  bien  plus  expressif. 
26,  Humain.  —  Les  éd.  ant.  portent  :  tel  qu'il  est,  car  il  n'y  a  rien  qui  ne 

soit  digne  d'estre  veu,  au  lieu  de  :  «  Tout  y  ...  humain  ». 
26,  Aristote.  —  Morale  à  Nicomaque,  IV,  8. 
29,  Apollonius.  —  Sentence  rapportée  par  Philostrate. 

32,  Sert.  —  Parce  que  cela  lui  sert,  lui  est  utile. 

38,  Sottise.  —  «  11  y  a  des  vérités  qu'il  faut  laisser  au  fond  de  leur  puits.  » 
—  «  Les  injures  sont  souvent  des  vérités  sans  voile.  »  —  «  La  vérité  est 
utile  à  qui  l'entend,  nuisible  à  qui  la  dit.  »  Térence,  Andrienne. 
494, 

6,  Princes.  —  Louis  XI,  Charles  VIII. 

8,  Macedonicus.  —  Aurelius  Victor,  De  Viris  ill.,66.  —  Nombre  d'éditions 
postérieures  à  1595  ajoutent  ici  :  et  publier.  Cette  variante,  étant  dans  le 
sens  de  la  phrase,  a  été  adoptée  dans  la  traduction,  bien  que  ne  se  trou- 
vant ni  dans  les  éd.  antérieures,  ni  dans  l'ex.  de  Bordeaux. 

9,  Régner.  —  Maxime  favorite  de  Louis  XL 

20,  Chose.  —  Donneraient  un  conseil  de  quelque  utilité. 

33,  Enfance.  —  En  1537;  Montaigne  avait  quatre  ans. 

ESS.tlS  DE  MONTAIGNE.  —  T.   IV.  35 


Fb.546  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

496, 

•2,  Dissimulé.  —  Cette  phrase  est  à  lier  avec  le  membre  de  phrase  qui  ter- 
mine l'avant-dernier  alinéa  :  «  Qui  est  desloj^al  enuers  la  vérité,  l'est  aussi 
enuors  le  mensonge   »  ;  il  en  était  ainsi  dans  les  éd.  ant.   où  l'alinéa 
intoniRuliaire  n'existe  pas. 
17,  Aristippus.  —  Dior.f;NE  Laerçe,  II,  68. 
21,  Tout.  —  Jlontaigne  s'est  déjà  plaint  de  la  faiblesse  de  sa  mémoire,  liv.  I, 

ch.  IX  (I,  58). 
24,  Tablettes.  —  Je  ne  saurais  me  charger  de  quelque  commission,  sans  en 
prendre  note. 
498, 

32,  Maison.  —  V.  III,  156  et  Notice  sur  les  Illustrations,  pi.  III,  vol.  IV, 
fasc.  A. 
500, 

7,  Mémoire.  —  Pli.ne,  A^at.  IlisL,  VII,  24,  dit  que  Messala  Corvinus  oublia 
jusqu'à  son  nom. 

8,  Trapezonce.  —  Mourut  dans  une  extrême  vieillesse,  ayant  oublié  tout 
ce  qu'il  savait. 

13,  Perfluo.  —  Les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bord,  portent  effîuo. 

16,  Ciceron.  —  «  Je  n'ai  jamais  ouï  dire,  écrit  Cicéron,  dans  son  Traité  sur 
la  vieillesse,  7,  qu'un  vieillard  ait  oublié  l'endroit  où  il  avait  caché  son 
trésor;  il  se  souvient  à  merveille  de  tout  ce  qui  l'intéresse,  et  sait  fort 
bien  ce  qu'il  a  affermé  ses  terres,  quels  sont  .ses  créanciers  et  surtout  ses 
débiteurs.  » 

26,  Dire.  —  M""  de  Gournay  s'est  livrée  à  ce  travail  qui  porte  sur  près  de 
douze  cents  citations,  et,  sauf  une  cinquantaine,  les  a,  à  peu  près,  toutes 
retrouvées,  tâche  difficile,  l'auteur  en  ayant  mêlé  parfois  deux  ou  trois 
ensemble  et  parfois  aussi  les  ayant  altérées  soit  dans  la  forme,  soit  dans 
le  sens. 
502, 

10,  Occupation.  —  Allusion  à  une  anecdote  que  rapporte  Pline  le  Jeune, 
V,  3,  pour  montrer  combien  son  oncle,  Pline  l'Ancien,  était  ménager  de 
son  temps,  ayant  été  jusqu'à  s'impatienter  do  ce  qu'un  de  ses  amis  assis- 
tant avec  lui  à  une  lecture,  avait  interrompu  pour  faire  répéter  une 
phrase  mal  lue,  mais  cependant  encore  intelligible. 

28,  Get.  —  Ou  mieux  ject,  du  latin  jactus.  Ni  avec  des  jetons,  ni  avec  la 
plume.  V.  N.  I,  210  :  letter. 

42,  Brossailles.  —  Ceci  s'applique  à  Démocrite,  jugeant  à  Abdère,  et  non 
à  Athènes,  des  dispositions  de  Protagoras  pour  les  sciences,  en  le  voyant 
arranger  artistement  des  fagots.  Diogène  Laerce,  IXj  53  et  Aulu  Gelle, 
V,  3. 

44,  Faim.  —  L'éd.    de  80  ajoute  :  et  fay  grand  double.,  quand  lauroy  vn 
cheual  et  son  équipage,  que  l'eusse  l'entendement  de  l'accommoder  pour  m'en 
seruir. 
504, 

4,  Suiet.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  :  qui  est  moy. 

23,  Barleduc.  —  Lors  du  voyage  que  la  cour  de  France  y  lit  en  1559,  le 
roi  conduisant  on  Lorraine  Claude  de  France,  sa  sœur,  mariée  au  duc 
Charles  III. 

24,  René.  —  Le  père  du  duc  René,  le  vainqueur  de  Charles  le  Téméraire, 
duc  de  Bourgogne.  C'est  ce  roi  René  qui  se  retira  en  Provence,  ce  qui 
donna  lieu  au  dicton.:  «  Se  chaufler  à  la  cheminée  du  roi  René  »,  pour 
dire  :  se  chauffer  au  soleil.  —  On  a  pensti  que  l'exhibition  de  ce  portrait 
avait  eu  pour  objet  de  donner  occasion  aux  Guise  d'entamer  un  plaidoyer 
en  faveur  do  leur  maison,  afin  d'obtenir  pour  l'un  des  leurs  l'investiture 
qui  leur  fut  octroyée  du  duché  de  Bar,  lequel  duché  était  distinct  de  la 
principauté  du  même  nom  qu'ils  détenaient  déjà  et  qui  à  la  mort  du  dit 
roi  René  avait  fait  retour  à  la  couronne  de  France  ;  du  reste  François  II 
était  inféodé  aux  Guise  dont  il  avait  épousé  la  nièce,  Marie  Stuart. 


NOTES.         I.IV.  Il,  Cil.  XVII.         VOL.  II,  PAG.  "iOi.         Fb.547 

27,  Creon.  —  Crayon  ;  beaucoup  de  personnes  encore  prononcent  créon, 
d'après  l'orthographe  ancienne. 

35,  Cbrysippus.  —  Diogène  Laerce,  VII. 

42,  Vent.  —  Expression  proverbiale  fondée  sur  ce  que  font  parfois  ceux  qui, 
ne  sachant  où  porter  leurs  pas,  jettent  une  plume  en  l'air  et  vont  du  côte 
vers  lequel  l'emporte  le  vent;  ici,  elle  veut  dire,  comme  Montaigne  l'ex- 
plique lui-même,  s'abandonner  à  la  merci  de  la  fortune. 
506, 

5,  Dets.  —  Rabelais  a  aussi  imaginé  un  procès  ainsi  jugé  avec  des  dés. 
9,  Mattbiam.  —  Lors  de  l'élection  par  les  Apôtres,  pour  se  compléter  à 
douze,  d'un  des  disciples  du  Christ,  en  remplacement  de  Judas  qui  s'était 
donné  la  mort  après  l'avoir  trahi  et  livré.  —  Le  nom  de  Mathias  ne  figure 
pas  néanmoins  parmi  ceux  des  autres  apôtres  dont,  à  certain  moment  de 
la  messe,  il  est  fait  mention;  tandis  que  celui  de  S.  Paul,  quoiqu'il  n'ait 
pas  compté  au  nombre  des  apôtres  proprement  dits,  s'j'  trouve  accolé  à 
celui  de  S.  Pierre.  Cette  anomalie  tient  précisément  à  ce  que  Blathias  n'a 
pas  été  choisi  comme  apôtre  par  Jésus-Christ  en  personne  et  que  S.  Paul  a 
été  appelé  à  lui,  sur  le  chemin  de  Damas,  par  Notre-Seigneur  lui-même;  et 
il  a  été  qualifié  l'apôtre  des  Gentils,  parce  que  ses  prédications  ont  eu 
principalement  pour  objet  la  conversion  des  Gentils  ou  païens,  plus  que 
colle  des  Hébreux. 

11,  Baston.  —  Voyez  combien  de  bouts  a  ce  bâton  ;  c'est-à-dire  de  combien 
(le  façons  cliaque  chose  peut  être  présentée. 

20,  Machiauel.  —  Son  principal  écrit  est  «  le  Prince  »,  ouvrage  où  il  enseigne 
aux  tyrans  le  moyen  de  réussir,  jnême  au  mépris  de  la  justice  et  de  l'hu- 
manité, et  où  il  expose  cette  détestable  politique  qui  a  reçu,  de  son  nom, 
la  qualification  de  machiavélique.  On  a  aussi  de  lui  le  «  Discours  sur  Tite- 
Live  »,  où  il  se  montre  grand  penseur  et  où  l'on  retrouve  des  doctrines  non 
moins  perverses;  enfin,  des  comédies  licencieuses.  Quelque  opinion  que  l'on 
ait  de  sa  moralité,  on  ne  peut  contester  qu'il  ne  soit  un  grand  écrivain. 
508, 

5,  Remuement.  —  Cette  assertion  étrange,  qui  étonne  de  la  part  de  Mon- 
taigne, quelque  satisfait  qu'il  put  être  de  sou  propre  sort  et  si  assoilTé  qu'il 
fût  de  tranquillité,  ne  s'explique  que  par  la  lassitude  résultant  de  l'état  de 
troubles  et  de  guerres  civiles  continues,  durant  lequel  tout  allait  de  mal 
en  pis,  qui  en  son  siècle  a  désolé  la  France. 

23,  Monde. 

«  Sans  songer  comment  va  la  flotte   j   Je  laisse  la  crainte  au  pilote, 

Qui  vogue  avec  moi  sur  les  eaux,      I   Et  la  manœuvre  aux  matelots.  »  Gresset 

26,  Céleste.  —  Ne  dirait-on  pas  ceci  écrit  de  nos  jours  quand  on  voit  com- 
bien le  peuple,  sans  distinction  aucune,  pas  plus  sous  le  rapport  de  l'in- 
telligence que  sous  celui  des  moyens  d'existence,  et  les  pitis  fortunés,  à  cet 
égard,  plus  encore  peut-être  que  ceux  qui  le  sont  moins,  se  désintéressent 
absolument  des  actes  de  leurs  mandataires.  —  C'est  ainsi  qu'on  en  est 
arrivé  à  voir  ces  atteintes  légales  ou  illégales  journellement  portées  à  la 
liberté  religieuse,  à  la  liberté  politique,  à  la  liberté  du  travail,  à  la  liberté 
individuelle,  à  toutes  les  libertés,  et  souffrir  toutes  licences  de  quiconque  a 
une  attache  gouvernementale  officielle  ou  officieuse  ;  à  être  témoin  d'un  gas- 
pillage des  deniers  publics  tel  que  ni  l'accroissement  effrayant  de  notre 
dette,  ni  l'augmentation  continue  des  impôts  n'y  peuvent  suffire;  à  assister 
à  la  délation  érigée  en  système  de  gouvernement,  à  l'antimilitarisme  pro- 
gressant sans  cesse  dans  notre  armée  de  terre  et  de  mer  dont  les  chefs 
sont  constamment  tenus  en  suspicion  et  jamais  soutenus;  à  l'impossibilité 
d'obtenir  justice  pour  qui  n'adhère  pas  hautement  et  ne  donne  de  gages 
aux  idées  sectaires  qui  nous  dominent;  c'est  à  cela  encore  que  nous  devons 
notre  politique  étrangère  si  hésitante  et  si  timorée,  ces  tendances  à  ac- 
croître les  monopoles  de  l'État  si  contraires  à  toutes  les  lois  économiques 


Fb.548  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

et  que  nous  devrons  l'impôt  sur  le  revenu  qui  nous  assujettira  tous  au  bon 
plaisir  des  répartiteurs.  —  11  faudrait  cependant  réagir,  et  pour  cela 
d'abord  ne  pas  s'abandonner  comme  nous  le  faisons  tous,  les  partis 
extrêmes  exceptés.  Lors  des  élections,  des  comités  se  forment  qui  provo- 
quent des  réunions  électorales,  donnant  à  ce  moment  un  coup  de  collier; 
mais  une  fois  les  élections  terminées,  plus  rien,  c'est  fini,  les  comités  se 
dissolvent  ou  sommeillent,  on  laisse  aller  les  choses  à  vau-l'eau;  sauf, 
comme  nous  venons  de  le  dire,  chez  les  partis  avancés,  qui,  eux,  ne  perdent 
pas  de  vue  leur  élu,  lui  envoient  des  injonctions,  l'obligent  de  temps  à 
autre  à  venir  s'expliquer,  rendre  compte  de  son  vote.  C'est  là  ce  que  tous 
doivent  faire;  les  comités  demeurer  constitués  en  permanence,  pour  secouer 
l'apathie  des  électeurs,  les  convoquer  chaque  fois  que  des  questions  impor- 
tantes sont  à  l'ordre  du  jour,  recueillir  leur  manière  de  voir,  la  porter  à 
la  connaissance  de  leur  mandataire,  de  telle  sorte  qu'il  n'en  ignore  et  y 
puise  une  force  qui  lui  permette  de  réagir  contre  les  influences  étrangères 
qui  trop  souvent  déterminent  son  vote;  et,  lors  des  réélections,  rejeter  im- 
pitoyablement tous  ceux  qui  auraient  forfait  par  faiblesse  ou  autrement 
aux  idées  sous  l'empire  desquelles  ils  avaient  été  élus. 

Mais  surtout  il  ne  faudrait  pas  aux  élections,  entre  les  divers  groupes  de 
conservateurs  (monarchistes  et  républicains),  de  ces  divisions  inti-ansi- 
geantes  qui  sont  la  chance  la  plus  sûre  de  leui's  adversaires  communs,  lors 
même  que  ceux-ci,  ce  qui  est  le  cas  le  plus  fréquent,  ont  l'infériorité  numé- 
rique. 11  devrait  être  de  règle  absolue  qu'au  premier  tour  de  scrutin,  si 
l'accord  n'a  pu  se  faire,  que  chacun  vote  suivant  ses  préférences;  mais 
qu'au  second  tour,  n'en  tenant  plus  aucun  cdmpte,  tous,  sans  exception 
aucune,  votent  pour  le  candidat  conservateur  qui  aurait  obtenu  le  plus  de 
voix  au  premier  tour,  tous  les  autres  se  désistant  en  sa  faveur  ;  hors  de  là, 
pas  de  salut! 

Voilà  pour  l'avenir;  en  ce  qui  touche  le  présent,  alors  qu'on  voit  ceux 
qui  détiennent  le  pouvoir,  manquer  au  premier  de  leurs  devoirs  qui  est  de 
s'appliquer  à  faire  régner  l'ordre  et  la  paix  dans  le  pays,  y  semer  l'inquié- 
tude, fomenter  l'agitation  et,  se  faisant  les  complices  des  fauteurs  de  troubles, 
le  mener  à  sa  ruine,  comment  s'étonner  de  voir  certains  caractères  éner- 
giques qui,  estimant  que  les  grands  maux  appellent  les  grands  remèdes, 
cherchent  à  stimuler  le  clan  si  craintif  et  si  veule  des  conservateurs  de 
toutes  nuances  et  préconisent  le  recours  à  la  violence,  comme  en  Russie, 
mais  dans  un  but  diamétralement  opposé,  contre  les  criminels  qui  entre- 
tiennent pareil  état  de  choses,  provoquant  contre  eux  des  actes  individuels 
dont  il  est  malaisé  de  se  défendre  parce  qu'ils  ne  peuvent  se  prévoir  et  que 
celui  qui  a  fait  le  sacrifice  de  sa  vie  est  maître  de  celle  d'autrui,  à  l'exclu- 
sion de  tout  acte  collectif  qui,  dirigé  contre  quiconque  dispose  de  la  force 
et  de  la  légalité,  serait  en  ce  temps  de  télégraphe,  de  téléphone,  d'armes  à 
tir  rapide,  inévitablement  écrasé  dès  qu'il  serait  démasqué. 
32,  Contradiction.  —  C.-à-d.,  si  on  s'aperçoit  qu'on  manque  de  jugement, 

cela  seul  est  au  contraire  une  preuve  qu'on  en  a. 
40,  Disposition.  —  De  bonne  santé,  c'est  le  sens  qu'a  encore  aujourd'hui 

l'adjectif  dispos. 
40,  Beauté.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  :  et  de  la  noblesse;  additio^i  qui  avec 
juste  raison  a  disparu,  car  la  différence  est  grande  entre  le  titre  et  la  chose, 
elle  existe  chez  beaucoup  qui  ne  sont  point  qualifiés  pour  la  posséder  et 
inversement,  et  dans  bien  des  cas  le  monde  est  loin  de  ratifier  le  jugement 
qu'à  cet  égard  chacun  porte  sur  soi. 
510, 

2,  Touchons.  —  Nous  sentons,  nous  apercevons  bien  facilement  si  elles 

surpassent  les  nôtres. 
6,  Peine.  —  Et  encore  avec  beaucoup  de  peine. 
10,  Nom.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  :  Le  plus  sot  homme  du  monde  pense  auoir 

autant  d'entendement  que  le  plus  habile. 
13,  Art.  —  C.-à-d.  on  doit  s'attendre  à  fort  peu  d'encouragements  et  d'éloges 


NOTES.        LIV.  II,  Cil.  XVII.        VOL.  Il,  PAG.  510.  Fb.S49 

à  propos  des  ouvrages  philosophiques  et  des  simples  productions  de  l'en- 
tendement que  nous  pouvons  écrire  parce  que  les  savants  qui  les  ont  dans 
leur  domaine,  ne  font  cas  que  de  l'érudition  et  de  Tart  et  n'attachent  de 
prix  qu'à  la  science. 

22,  Sens.  —  Du  jugement. 

26,  Siennes.  —  «  D'où  vient  qu'un  boiteux  ne  nous  irrite  pas  et  qu'un  esprit 
boiteux  nous   irrite?  C'est  qu'un  boiteux  reconnaît  que  nous  marchons 
droit  et  qu'un  esprit  boiteux  dit  que  c'est  nous  qui  boitons.  »'  Pascal. 
514, 

24,  Nul.  —  J'ai  soixante-dix  ans,  j'ai  vu  et  approché  beaucoup  de  monde  et 
je  puis  en  dire  autant.  Bien  rares  sont  les  hommes  qui,  vus  de  près,  s'élè- 
vent notablement  au-dessus  de  la  moyenne  des  gens  que  nous  tenons 
comme  bien  doués;  plus  rares  encore  sont  ceux  qui  présentent  un  en- 
semble de  qualités  essentielles  dont  rien  ne  trouble  l'harmonie.  Parmi  ces 
exceptions  je  n'en  ai  guère  connu  que  trois  :  le  général  Desvaux,  le  com- 
mandant du  Vallon,  le  général  Niox. 

Le  général  Desvaux  (1810  à  1885),  dont  j'ai  été  l'officier  d'ordonnance, 
devenu  sous-gouverneur  de  l'Algérie  et  commandant  de  la  cavalerie  de  la 
Garde  impériale  en  1870,  à  Metz,  où  il  fut  l'un  des  rares  membres,  le  seul, 
dit-on,  du  Conseil  de  guerre,  convoqué  à  la  dernière  heure,  qui  se  soit 
prononcé  contre  la  capitulation,  était  un  homme  chez  lequel  le  jugement, 
l'instruction,  la  capacité,  le  caractère  et  les  qualités  du  cœur  allaient  de 
pair;  c'était  un  excellent  administrateur  et  un  chef  militaire  de  premier 
ordre.  A  diverses  reprises,  après  nos  désastres,  le  Ministère  de  la  guerre 
lui  fut  offert;  il  s'y  refusa,  les  nécessités  de  la  politique  intérieure  du  mo- 
ment rendant  impossible  l'obtention  des  mesures  que  son  intégrité  et  son 
esprit  de  discipline  lui  faisaient  considérer  comme  indispensables  et  sur 
lesquelles  sa  conscience  ne  lui  permettait  pas  de  transiger. 

Le  commandant  du  Vallon  (1837  à  1866),  tué  au  Mexique,  étant  à  29  ans 
déjà  chef  d'escadron  et  officier  de  la  Légion  d'honneur,  et  qui  par  sa 
grande  intelligence,  son  esprit  résolu,  son  ampleur  de  vue,  sa  facilité  d'élo- 
cution,  sa  carrière  si  brillamment  commencée,  était  appelé,  si  la  mort  ne 
l'eût  arrêté,  à  de  hautes  destinées,  étant  donnés  les  événements  qui  ont 
suivi  et  dont  seul  Gambetta  a  émergé,  tant  étaient  grandes  les  médiocrités, 
pourtant  si  nombreuses,  en  situation  de  devenir  quelqu'un,  qui  s'y  sont 
trouvées  mêlées. 

Le  général  Niox  (né  en  1840),  l'ami  de  toute  ma  vie,  devenu  commandant 
de  la  place  de  Paris,  puis  des  Invalides  et  Directeur  du  Musée  de  l'armée, 
qui  lui  doit  son  organisation.  Remarquable  entre  tous  par  son  intelligence 
supérieure,  un  jugement  jamais  en  défaut,  une  honnêteté  de  sentiments  à 
toute  épreuve  et  une  grande  indulgence  naturelle  affermie  par  ses  idées 
philosophiques,  il  est  bien  regrettable,  au  point  de  vue  de  l'intérêt  com- 
mun, qu'une  faiblesse  de  l'ouïe  l'ait  empêché,  comme  toutes  ses  qualités 
et  connaissances  l'y  appelaient,  d'arriver  à  la  direction  de  notre  état  mili- 
taire qui  n'eût  jamais  été  en  meilleures  mains. 

34,  Liures.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  de  la  science.  —  Cette  classe  de  gens  qui, 
de  nos  jours,  a  nom  «  intellectuels  »,  n'a  pas  varié  dans  leurs  vaniteuses 
prétentions  qui  les  poussent  parfois  hors  des  bornes  de  la  raison;  ils  ont 
de  la  science,  de  l'esprit  à  foison,  mais  pas  toujours  du  bon  sens,  appelé 
si  à  tort  du  sens  commun. 
516, 

12,  Hierosme.  —  S.  Jérôme;  a  laissé  un  grand  nombre  d'écrits,  les  uns  his- 
toriques, les  autres  polémiques,  dans  lesquels  il  combat  les  hérésies  de  son 
temps;  son  style  est  pur  et  éloquent,  mais  il  se  laisse  entraîner  à  de  vifs 
emportements;  son  plus  beau  titre  est  sa  traduction  latine  de  la  Bible, 
faite  sur  l'hébreu,  connue  sous  le  nom  de  Vulgate  et  adoptée  comme 
canonique  par  le  concile  de  Trente. 

14,  Institution.  —  Système  d'instruction  ou  mieux  d'éducation.  —  Se  reporter 
particulièrement  à  ce  sujet  au  ch.  XXIV  du  liv.  I. 


Fb.SoO  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

22,  Elle.  —  Notre  éducation  nous  a  appris. 
34,  Lecteur.  —  Lecteur  public,  professeur. 

37,  Vie.  —  Polémon,  dans  sa  jeunesse,  s'était  livré  à  la  dissipation;  la  leçon 
qu'il  entendit  de  Xénocrate  parlant  sur  la  tempérance,  lui  fit  concevoir 
une  telle  honte  de  ses  excès,  qu'il  se  convertit  aussitôt  à  la  philosophie;  il 
devint  le  disciple  le  plus  zélé  de  Xénocrate  et  mérita  de  lui  succéder  dans 
la  chaire  de  l'Académie.  Diocèse  Laerce,  Polémon,  IV,  16;  Valèke  Maxime, 
YI,  9,  etc. 

518, 

22,  Excellent.  —  Daurat,  de  Bèze,  etc.,  sont  ici  cités  pour  leurs  poésies  en 

latin;  Ronsard,  du  Bellaj*  comme  poètes  français. 
30,  Vieillesse.  —  A  la  bataille  de  S.-Denis  (1567)  où,  lors  de  la  deuxième 

guerre  de  religion,  les  catholiques  furent  vainqueurs,  mais  perdirent  leur 

chef  le  connétable  de  Montmorency,  homme  d'une  austérité  qui  atteignait 

à  la  rudesse. 

33,  De  la  Noue.  —  Après  avoir  changé  plusieurs  fois  de  parti,  fut  blessé 
mortellement,  pour  le  service  de  Henri  IV,  au  siège  de  Lamballe  (Bre- 
tagne); on  a  de  lui  des  «  Discours  politiques  et  militaires  »,  mémoires  qui 
renferment  des  faits  intéressants. 

34,  Parts.  —  Partis,  factions. 

36,  l'ay  pris.  —  Cet  alinéa,  consacré  à  M"'  de  Gournay,  n'existe  pas  dans  les 
éditions  antérieures;  c'est  en  elïet  seulement  lorsque  Jlontaigne  vint  à 
Paris  pour  surveiller  l'impression  de  l'édition  de  1588,  qu'il  fit  sa  connais- 
sance. —  Dans  l'édition  de  1635,  qu'elle-même  a  publiée,  ce  passage  est 
modifié  ainsi  qu'il  suit  :  les  mots  «  beaucoup  plus  que  »  et  les  deux  membres 
de  phrase  ci-après  :  «  Et  enveloppée  ...  au  monde  «,  «  El  enlr'autres  ...  cruel- 
lemeiit  »,  sont  supprimés.  Il  est  à  croire  qu'ils  avaient,  prêté  à  de  malignes 
interprétations  et  que  leur  suppression  dont  elle  s'excuse  en  disant  :  «  En 
ce  seul  poinct  ai-je  esté  hardie,  de  retrancher  quelque  chose  d'vn  passage 
qui  me  regarde  »,  a  été  une  concession  qu'elle  a  faite  aux  mauvaises 
langues  de  son  temps,  de  même  que  quelques  autres  coupures  dans  cette 
même  édition  ont  été  une  satisfaction  donnée  aux  scrupules  de  ceux  que 
choque  une  certaine  liberté  d'expressions.  —  Cicéron  avait  eu  aussi  sa 
Marie  de  Gournay  :  une  dame  romaine  nommée  CaroUi  se  lia  d'intimité 
avec  lui,  en  tout  bien,  tout  honneur,  par  amour  pour  la  philosophie;  elle 
avait  70  ans.  Marie  de  Gournay  n'en  avait  que  22. 

38,  D'alliance.  —  Marie  le  Jai-s,  demoiselle  de  Gournay  du  nom  du  lieu  où 
elle  habitait  (1565  à  1645),  née  à  Paris.  —  Elle  avait  dix-huit  ans,  quand 
ayant  lu  les  deux  premiers  livres  des  Essais,  elle  se  prit  pour  leur  auteur 
d'une  véritable  admiration.  En  1588,  ayant  appris  la  présence  de  Montaigne 

,  à  Paris,  elle  vint  l'y  voir  et  le  charma  si  bien  par  son  esprit  et  son  érudi- 
tion, qu'elle  réussit  à  l'attirer  à  Gournay,  en  Picardie,  chez  sa  mère,  où  il 
fit  plusieurs  séjours  prolongés.  De  retour  chez  lui,  il  s'empressa  d'insérer 
dans  la  nouvelle  édition  en  préparation  de  sçn  ouvrage,  celle  à  laquelle  la 
mort  l'empêcha  de  mettre  la  dernière  main,  l'éloge  de  sa  jeune  admira- 
trice, qu'il  qualifie  sa  fille  d'alliance.  —  Mademoiselle  de  Gournay  pleura 
Montaigne  comme  un  père  lorsqu'il  mourut  cinq  ans  plus  tard;  elle  et  un 
ami,  le  poète  Pierre  de  Brach,  l'avaient  aidé  lors  de  l'impression  de  sa  dernière 
édition,  aussi  les  désigna-t-il  comme  exécuteurs  d'une  réédition  à  laquelle 
il  travaillait  lorsque  la  mort  vint  l'atteindre.  En  vue  de  cette  réédition  il 
avait  annoté  et  retouché  un  exemplaire  de  son  édition  de  1588;  fidèle 
observatrice  de  ses  intentions,  sa  veuve,  pour  ne  pas  se  défaire  de  l'ori- 
ginal, chargea  Pierre  de  Brach  de  la  mise  au  net  de  ces  notes  manuscrites, 
qu'il  transcrivit  en  leur  lieu  et  place  sur  un  autre  exemplaire  de  cette 
même  édition,  se  bornant  à  rectifier  quelques  incorrections,  et  cette  copie, 
envoyée  en  1594  à  Mademoiselle  de  Gournay  qui  la  fit  imprimer  accom- 
pagnée d'une  trop  longue  préface  qu'elle-même  avait  composée,  constitua 
l'édition  de  1595.  Cette  copie  est  perdue;  quant  à  l'original,  longtemps 
ignoré,  il  a  été  retrouvé  deux  siècles  après  chez  les  Feuillants  de  Bordeaux 


NOTES.         LIV.  If,  CH.  XVJI.         VOL.  II,  PAG.  518.  Fb.55I 

et  se  trouve  actuellement  à  la  bibliothèque  de  cette  ville.  —  Ce  pieux  devoir 
accompli,  Mademoiselle  de  Gournay,  en  159G,  se  rendit  en  Guyenne  pour 
faire  visite  à  la  veuve  et  à  la  lille  de  son  père  par  alliance,  et  s'inspirer  de 
la  vue  des  lieux  où  il  avait  vécu  et  où  il  avait  écrit  ce  livre  qu'elle  mettait 
au-dessus  de  tout;  elle  n'avait  alors  que  29  ans;  elle  en  vécut  encore  cin- 
quante, toujours  fidèle  au  culte  de  Montaigne,  ne  publiant  pas  moins  de 
onze  éditions  de  ses  Essais,  dont  la  dernière  en  1035,  magnifique  in-folio 
qu'elle  eut  la  bonne  fortune  de  pouvoir  dédier  au  cardinal  de  Richelieu. 
Elle-même  était  écrivain,  et  prit  une  large  part  au  mouvement  littéraire 
de  l'époque;  on  a  d'elle  des  poésies,  quelques  écrits  dont  le  plus  remar- 
quable est  «  L'Égalité  des  hommes  et  des  femmes  »,  et  des  traductions  de 
morceaux  de  Virgile,  de  Tacite  et  de  Salluste. 
520, 

7,  Bastantes.  —  Suffisantes;  de  l'italien  baslare,  suffire,  d'où  vient  égale- 
ment «  baste  •'  encore  en  usage  dans  le  style  familier. 
12,  Quartier.  —  Pays. 

15,  Considération.  —  Il  est  à  remarquer  que  IMontaigne  parle  toujours  avec 
plus  (U^  chaleur  et  d'enthousiasme  de  ces  liaisons  où  le  sang  n'est  pour 
rien,  de  son  amitié  avec  La  Boétio,  de  son  alliance  avec  M'^°  de  Gournay, 
que  de  ses  affections  de  famille. 

16,  Aage.  —  Dans  ce  siècle,  en  ce  temps. 


CHAPITRE  XVIII. 

28,  Ouuroirs.  —  Ateliers.  Ce  mot  «  ouvroir  »,  qui  s'appliquait  jadis  aux  locaux 
où  '■  ouvraient  >•  (travaillaient)  les  gens  de  métier,  ne  se  dit  plus  aujour- 
d'hui que  do  locaux  où  on  forme  les  jeunes  filles  à  la  couture  et  d'autres 
travaux  analogues,  et  où  des  associations  charitables  exécutent,  préparent 
des  travaux  de  même  genre  pour  les  jeunes  filles  et  femmes  pauvres. 

522, 

2,  Fermir.  —  Appuyer,  fortifier;  du  latin  firmare.  —  Affermir,  qui  est 
d'usage,  a  même  racine  et  à  peu  près  même  signification;  ferme,  fermeté 
en  dérivent  plus  directement  encore. 

3,  Solide.  —  Allusion  aux  Commentaires  de  César  et  à  l'Anabase  de  Xéno- 
phon,  où  tous  deux  font  le  récit  de  faits  auxquels  ils  ont  pris  part;  c'est 
également  ce  qui  donne  tant  d'intérêt  aux  Commentaires  de  Napoléon. 

8,  Rogatus.  —  Le  texte  d'Horace  porte  coucous,  qui  signifie  :  je  ne  fais 
cette  lecture  qu'à  mon  corps  défendant,  lorsque  j'y  suis  obligé;  le  chan- 
gement apporté  par  Montaigne  exprime  plus  exactement  sa  pensée. 

14,  Turgescat.  —  L'éd.  de  88  donne  le  vers  de  Perse  en  entier,  ajoutant  : 
dare  pondus  idonea  fumo  {de  donner  du  poids  à  la  fumée). 

18,  Image.  —  A  entrer  en  communication  avec  moi  et  me  rappeler  à  son 
souvenir,  grâce  à  ce  tableau  que  je  trace  de  moi-môme. 

29,  Seing.  —  Add.  de  l'ex,  de  Bord,  que  l'on  a  cru  devoir  insérer  dans  la 
traduction  :  des  heures  (livre  de  prières,  dénomination  qui  subsiste  encore). 

30,  Peculiere.  —  Particulière,  personnelle;  du  latin  peculiaris,  qui  a  même 
signification.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  :  vn  harnois,  vne  espée  qui  leur  a 
serui,  te  les  conserue  pour  l'amour  d'eux,  autant  que  ie  puis,  de  l'iniure  du 
temps. 

30,  Gaules.  —  On  vaquait  beaucoup  à  ses  affaires,  à  cheval,  en  ce  temps;  et 
on  a  supposé  que  ces  longues  gaules  pouvaient  être  des  sortes  de  cravaches 
confectionnées  en  bois  de  houx  ou  tout  autre  également  flexible,  comme 
il  s'en  fait  aujourd'hui  dans  le  Roussillon  en  bois  de  micocoulier;  peut- 
être  n'était-ce  que  de  simples  baguettes  comme  on  en  tient  souvent  à  la 
main;  mais  en  raison  du  qualificatif  qui  les  accompagne,  il  y  a  plutôt 
probabilité  que  ce  devait  être  de  longs  bâtons,  constituant  de  hautes 
cannes,  comme  celles  qui  furent  si  fort  à  la  mode  sous  Louis  XIV. 


Fb.552  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

36,  Escriture.  —  L'imprimerie. 

37,  Aisée.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  :  pour  m'exempter  de  la  peine  d'en  faire 
plusieurs  extraits  à  la  main. 

524, 

4,  Testonner.  —  Ajuster,  parer.  La  Fontaine  a  employé  ce  mot,  en  l'expli- 
quant, dans  sa  fable  «  L'homme  entre  deux  âges  »  : 

«  Ces  deux  veuves,  en  badinant, 
L'allaient  quelquefois  testonnant, 
C'est-à-dire  ajustant  sa  tête.  » 

7,  Premières.  —  Me  peignant  pour  autrui,  je  me  suis  réellement  rendu 
meilleur  que  je  n'étais  auparavant;  le  portrait  a  formé  l'original. 

8,  Autbeur.  —  Mon  livre  et  moi  sommes  un;  je  ne  suis  pas  autre  qu'il  me 
représente,  et  il  n'est  pas  différent  de  ce  que  jo  suis.  C'est  cette  même  idée 
dont  Montaigne  tirait  parti,  quand  il  écrivait  à  Henri  III,  auquel  il  avait 
fait  hommage  de  la  première  édition  des  Essais  et  qui  l'en  avait  fait  com- 
plimenter, disant  que  l'ouvrage  lui  plaisait  extrêmement  :  «  Il  faut  donc 
que  je  plaise  à  Votre  Majesté,  car  il  ne  contient  qu'un  discours  (une  re- 
production) de  ma  vie  et  de  mes  actes.  »  Boxnefon. 

13,  Heure.  —  Dans  un  soliloque  de  quelques  instants. 

13,  Primement.  —  Exactement. 

32,  Sagoin.  —  Sagouin,  sorte  de  petit  singe.  —  Allusion  ironique  appliquée 
à  un  Sagon,  par  Marot  contre  lequel  était  dirigée  son  épître  intitulée  : 
«  Fripelippes,  valet  de  Marot,  à  Sagon  ». 
526, 

6,  Pindare.  —  Clément  d'Alexandrie,  Strom.,  VI,  iO;  Stobée,  Serm.,  XI. 

13,  François.  —  Vers  450,  époque  où  écrivait  Salvl\m;s,  Z)e  Gubernatione  Deî, 
I,  14;  il  s'agissait  des  Francs,  tribu  de  la  Germanie,  qui  habitaient  entre  le 
Mein,  la  mer  du  Nord,  l'Elster  et  l'Elbe,  et  qui  venaient  d'envahir  la  Gaule 
septentrionale. 

31,  Ancien.  —  Plutarque,  Ly sandre,  4. 

34,  Vilité.  —  Bassesse;  du  latin  vilitas,  comme  l'adjectif  vil  qui  est  demeuré 
dans  notre  langue. 
528, 

11,  Prononcée.  —  Rien  chez  les  Perses,  lit-on  dans  Hérodote,  n'est  si  honteux 
que  mentir;  et,  après  le  mensonge,  que  contracter  des  dettes,  surtout, 
disent-ils,  parce  que  celui  qui  a  des  dettes,  ment  nécessairement. 

11,  Grèce.  —  Lj^sandre;  voir  sa  vie  dans  Plutarque. 

19,  Grecs.  —  A  l'appui  Se  cette  assertion  on  peut,  entre  autres,  indiquer  les 
deux  faits  historiques  ci-après  :  —  Marius,  défié  par  un  des  chefs  ennemis, 
lors  de  la  guerre  sociale  (90),  qui  lui  criait  :  «  Si  tu  es  si  grand  capitaine, 
viens  te  battre  avec  moi!  »  lui  répondit  :  «  Si  tu  es  toi-même  si  grand 
guerrier,  force-moi  à  combattre.  »  —  Après  la  bataille  d'Actium  (31),  Antoine 
ayant  envoyé  défier  Octave,  celui-ci  répondit  qu'Antoine  avait  assez 
d'autres  chemins  pour  aller  à  la  mort,  sans  s'exposer  à  périr  honteusement 
comme  un  gladiateur. 

26,  Barbe.  —  Plutarque,  Pompée,  16;  Caton  d'Utique,  7.  —  Il  n'est  pas  exact 
que  César  fût  appelé  voleur  à  sa  barbe.  Il  était  en  Gaule  et  Curion  deman- 
dant au  Sénat,  ou  que  Pompée  congédiât  son  armée,  ou  que  César  fût  au- 
torisé à  retenir  la  sienne  sous  les  drapeaux,  le  consul  Marcellus,  traitant 
ce  dernier  de  brigand,  opina  pour  qu'il  fût  déclaré  ennemi  de  la  Patrie, 
s'il  ne  posait  immédiatement  les  armes.  —  Quant  à  la  circonstance  où 
Caton  le  qualifia  d'ivrogne  devant  ce  même  corps  constitué,  elle  est  relatée 
au  ch.  XXXIII  de  ce  même  livre  des  Essais  (II,  638). 


NOTES.        LIV.  II,  CH.  XIX.        VOL.  II,  PAG.  528.  Fb.553 


CHAPITRE  XIX. 

Ce  chapitre,  traduit  presque  textuellement  d'Ammien  Marcellin,  contient 
un  bel  éloge  de  l'empereur  Julien;  et,  à  son  tour,  a  fourni  à  Voltaire  la 
plupart  do  ce  qu'il  a  dit  sur  ce  prince.  —  Ce  même  chapitre,  en  raison  des 
termes  en  lesquels  il  y  est  parlé  de  Julien,  et  avec  lui  les  passages  où,  dans 
les  Essais,  sont  taxés  de  cruauté  les  supplices  au  delà  de  la  mort  simple,  et 
surtout  l'usage  répété  qui  s'y  rencontre  du  mot  «  fortune  »,  employé  dans 
le  sens  de  hasard,  de  fatalité,  en  place  de  celui  plus  orthodoxe  de  Provi- 
dence, donnèrent  lieu,  à  Rome,  on  1580,  de  la  part  de  la  censure,  à  des 
observations  dont  l'auteur,  du  reste,  ne  tint  aucun  compte.  V.  N.  I,  588  : 
Indiscipliaatis,  et  V.  N.  III,  171  :  Reuere. 
530, 

16,  Monde.  —  Vopiscus,  in  TacHo  imp.,  10. 

18,  Créance.  —  Une  grande  partie  des  ouvrages  de  cet  historien  a  été  perdue, 
Montaigne  en  donne  l'explication.  Nous  n'avons  que  des  fragments  de  ses 
Annales  qui  allaient  de  la  mort  d'Auguste  à  celle  de  Néron;  et  de  ses  His- 
toires qui  vont  de  l'avènement  de  Galba  jusqu'à  Nerva.  Tacite  est  univer- 
sellement regardé  comme  le  plus  grand  historien  des  temps  anciens  ;  il  est 
grave,  profond,  énergique,  concis  sans  manquer  d'abondance;  il  peint  ses 
portraits  des  plus  vives  couleurs;  ses  jugements  flétrissent  le  crime  et  la 
tyrannie;  il  est  d'ailleurs  exact,  n'écrivant  que  ce  qu'il  a  vu  ou  que  dos 
contemporains  lui  ont  raconté. 

22,  Julian.  —  Était  neveu  de  Constantin  le  Grand.  Envoyé  en  Gaule  avec  le 
titre  de  César,  il  fixa  son  séjour  à  Lutèce  (Paris)  et  se  signala  contre  les 
Germains.  Élu  empereur  en  361,  il  renonça  ouvertement  au  christianisme 
dans  lequel  on  l'avait  élevé,  ce  qui  le  fit  surnommer  l'Apostat  (du  grec 
&(f\,(jxa.y.on,  se  retirer),  et  fit  de  vains  efforts  pour  relever  le  paganisme.  11  ne 
régna  que  deux  ans;  durant  ce  temps,  il  fit  de  sages  lois,  réforma  les  abus 
les  plus  criants,  fit  la  guerre  aux  Perses,  débuta  par  des  succès,  mais  dut 
battre  en  retraite,  la  région  où  il  avait  pénétré  ayant  été  dévastée  par 
l'ennemi  et  n'offrant  plus  aucunes  ressources;  blessé  mortellement  au  cours 
de  cette  retraite,  il  mourut  peu  après  (363).  —  Dédaigné  à  la  cour  dans  sa 
jeunesse,  il  s'était  adonné  à  l'étude  et  possédait  à  fond  l'éloquence  et  la 
philosophie;  il  appartenait  à  l'école  des  Stoïciens  dont  il  portait  le  manteau, 
la  longue  barbe,  en  même  temps  qu'il  pratiquait  l'austérité  de  leurs  mœurs; 
jamais  sa  haine  contre  le  christianisme  ne  le  porta  à  aucune  violence 
contre  les  Chrétiens. 

23,  L'apostat.  —  «  Ce  sont  deux  grands  écueils  de  tout  croire  et  de  ne  rien 
croire.  Si  vous  voulez  savoir  quels  étaient  Constantin  et  Julien,  ne  croyez 
ni  tout  le  mal  qu'on  a  dit  de  Julien,  ni  tout  le  bien  qu'on  a  dit  de  Cons- 
tantin. »  Catherinot. 

23,  Rare.  —  Par  ses  vertus  et  ses  actes,  l'empereur  Julien  a  été  au-dessus  de 
son  époque,  et  Montaigne,  avec  juste  raison,  le  représente  comme  tel.  —  11 
est  à  observer  toutefois,  d'une  façon  générale,  que  notre  auteur  ne  se 
piquait  nullement  d'exactitude,  acceptait  sans  les  contrôler  (il  en  a  fait 
l'aveu  I,  150)  tous  faits  et  dires  qu'il  jugeait  à  propos,  pour  les  traiter  à  sa 
mode;  si  ses  déductions  sont  presque  toujours  frappées  au  coin  de  la  logique 
et  du  bon  sens,  on  ne  saurait  cependant  sans  discussion  s'appuyer  sur  son 
autorité  on  matière  d'histoire  ou  de  science. 

30,  Vne.  —  Ammien  Marcellin,  XXIV,  8. 
532, 

2,  Prédécesseurs.  —  Ammien  Marcellin,  XXII,  10;  XXV,  5  et  6.  —  «  Julien,  a 
dit  Voltaire,  qui  eut  le  malheur  d'abandonner  la  religion  chrétienne,  mais 
qui  fit  tant  d'honneur  à  la  religion  naturelle;  Julien,  le  scandale  de  notre 
église  et  la  gloire  de  l'empire  romain.  »  —  Plus  philosophe  qu'empereur, 
il  était  de  ceux  qui,  si  déjà  l'empereur  Antonin  ne  l'avait  exprimé,  auraient 


Fb.t)54  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

pu  inspirer  à  Etienne  Tabourot,  auteur  comique  du  xvi°  siècle,  ces  mauvais 
vers  qui  traduisent  une  pensée  assurément  juste  : 

«  Heureuses  seront  les  provinces,    i   Des  princes  qui  philosopheront, 
Dedans  lesquelles  régneront  I    Ou  quand  les  sages  seront  princes.  » 

4,  Marcellinus.  —  Ammien  IMarcellin.  —  V.  II,  58  et  N.  Marcellinus.  A 
écrit  une  histoire  des  empereurs  romains  depuis  Nerva  jusqu'à  Valentinien  ; 
le  premier  livre  en  est  perdu.  Cet  ouvrage  jouit  d'une  grande  autorité, 
surtout  dans  sa  dernière  partie,  où  l'auteur  rapporte  ce  qu'il  a  vu;  la 
modération,  bien  rare  pour  l'époque,  qu'il  apporte  quand  il  parle  du  chris- 
tianisme et  du  paganisme,  fait  qu'on  ne  peut  deviner  par  ses  écrits  et  qu'on 
ne  sait,  quoique  Montaigne  donne  à  supposer  ici  qu'il  était  chrétien,  à 
quelle  religion  il  appartenait. 

4,  Histoire.  —  Amm.  Marcellin,  XXII,  10,  etc. 
9,  Nous.  —  Chrétiens. 

11,  Recitent.  —  Sozoméne,  Bisl.  ecclés.,  V,  4. 

16,  Affectant.  —  Julien  affecta,  témoigna  en  cette  circonstance. 

21,  Sang.  —  Eutrope,  X,  8.—  Sans  persécution;  par  opposition  à  celles  qu'à 
diverses  reprises  avait  eu  à  endurer  le  christianisme  naissant.  —  L'édition 
de  1580  porte  ici  le  passage  afférent  à  l'exclamation  prêtée  à  l'empereur 
Julien,  lorsqu'il  se  sentit  frappé  à  mort,  que  l'édition  de  1595  reproduit 
légèrement  modifiée,  un  peu  plus  loin  (II,  534  :  Ce  langage,  etc.). 

24,  Constantius.  —  Amm.  Marcellin,  XXII,  2.  —  A  la  mort  de  Constantin  le 
Grand  (337),  l'empire  fut  partagé  entre  ses  trois  fils  :  Constantin,  Constance 
et  Constant.  Le  second  ne  tarda  pas  à  demeurer  seul  par  suite  de  la  mort 
de  ses  frères  (350);  mais  il  se  rendit  tellement  odieux,  que  les  armées  de 
Gaule  proclamèrent  Julien  empereur;  il  marchait  contre  lui,  quand  la  mort 
le  surprit  en  route  (361). 

•26,  Accoustumoit.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  :  lousiours.. 

27,  Guerre.  —  Amm.  Marcellin,  XVI,  2. 

31,  Estudier.  —  Id.,  XVI,  17;  XXVI,  5. 

40,  Artifice.  —  Id.,  XVI,  2. 
534, 

8,  Armées.  —  Amm.  Marcellin.  XXV.  3. 

13,  Sacrifices.  —  Jd.,  XXV,  6. 

27,  Gloire.  —  Id.,  XXV,  4. 

28,  Brutus.  —  Dans  la  nuit  qui  précéda  la  première  bataille  de  Philippes 
(42),  où  Cassius,  battu,  se  tua,  Brutus,  qui  commandait  avec  lui,  avait 
vu  apparaître  un  fantôme  qui,  interpellé,  lui  dit  :  «  Je  suis  ton  mauvais 
génie,  tu  me  verras  dans  les  plaines  de  Philippes.  »  Un  mois  après,  la 
veille  de  la  deuxième  bataille  de  ce  nom,  où,  à  son  tour,  Brutus  éprouva 
le  même  sort  que  Cassius,  et  comme  lui  se  tua,  cette  vision  se  serait 
renouvelée.  V.  N.  II,  646  :  Brutus. 

29,  Mort.  —  Amm.  Marcellin,  XX,  5;  XXV,  2. 

30,  Nazaréen.  —  Théodoret,  Ilist.  ecclés.,  III,  20. 

35,  Attache.  —  Ce  passage  :  «  Ce  langage...  attache  »  (lig.  29  à  35),  existe 
un  peu  modifié  dans  l'édition  de  1580  (V.  N.  II,  532  :  Sang);  supprimé  dans 
les  éditions  suivantes,  il  a  été  rétabli  dans  celle-ci  où  nous  le  retrouvons. 

30,  Marcellinus.  —  Amm.  Marcellin,  XXI,  2. 
536. 

5,  Constantinople.  —  Parait  avoir  été  fondée  par  les  Grecs,  sous  le  nom 
de  Byzance,  à  une  époque  très  reculée  et  avoir  joué  dès  les  temps  les 
plus  anciens  un  rôle  important;  à  diverses  reprises  ravagée  ou  détruite, 
elle  devint  sous  Constantin  le  Grand,  qui  lui  donna  son  nom,  la  capi- 
tale de  l'empire  (330),  et  bientôt  surpassa  Rome  même,  par  la  magnifi- 
cence de  ses  monuments,  sa  population,  ses  richesses  et  son  commerce. 
Les  Turcs  s'en  sont  emparés  et  en  ont  fait  leur  capitale  en  1453. 

8,  Religion.  —  Amm.  Marcellin,  XXII,  3. 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  XIX.         VOL.  Il,  PAG.  530.  Fb.555 

12,  Intelligence.  —  Cette  même  politique  avait  été  observée,  au  dire  de 
DiODORE  iiE  Sicile,  par  les  Égyptiens  qui  laissaient  se  multiplier  chez  eux 
divers  cultes,  dans  l'idée  que  les  dissensions  qui  se  produiraient  entre 
eux,  détourneraient  de  créer  des  difficultés  au  gouvernement;  c'est  un 
peu  ce  que  chercha  à  faire  Catherine  de  Médicis  pour  contenir  les  catho- 
liques par  les  protestants  et  réciproquement;  c'est  également  le  système 
actuel  de  gouvernement  des  sultans  de  Constantinople,  ce  n'est  en  somme 
qu'une  application  ])articulière  du  principe  d'application  si  générale  : 
«  Diviser,  pour  régner.  » 

CHAPITRE  XX. 

31,  Elemens.  —  L'air,  le  feu,  la  terre  et  l'eau,  tenus  encore,  du  temps  de 
Montaigne,  comme  les  éléments  essentiels  de  tout  ce  qui  a  vie. 

32,  Matière.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  :  plus  vile. 
538, 

1,  Seruice.  —  L'or  et  l'argent,  en  raison  de  leur  peu  de  dureté  relative, 
ne  sont,  en  effet,  employés  à  l'état  pur,  ni  dans  les  monnaies,  ni  dans 
l'orfèvrerie,  mais  alliés  au  cuivre  à  raison  de  9/10  de  métal  fin  (or  ou 
argent)  et  1/10  de  cuivre  pour  les  monnaies;  pour  les  pièces  d'orfèvrerie 
la  proportion  de  l'alliage  (du  cuivre)  est  un  peu  plus  forte. 
4,  Aristippique.  —  Telle  que  la  conçoit  l'école  cyrénaïque  fondée  par  Aris- 
tippe.  V.  X.  II,  240  :  Cyrenaiques. 

12,  Morbidezza.  —  Terme  de  peinture  et  de  sculpture;  mollesse  et  délica- 
tesse des  chairs,  en  particulier  chez  la  femme  et  chez  l'enfant. 

17,  Donnent.  —  C'est  là  une  pensée  d'ÉpiCHAiniE,  conservée  par  Xénophon, 
dans  ses  Mémoires  sur  Sacrale,  II,  I,  20.  Elle  a  été  reproduite  par  Voiture  : 
«  Pour  l'ordinaire,  la  fortune  nous  vend  bien  chèrement  ce  qu'on  croit 
qu'elle  nous  donne.  »  Elle  se  retrouve  chez  La  Fontaine,  qui  dans  son 
poème  de  «  Philémon  et  Baucis  »  semble  l'avoir  imitée  de  V^oiture  : 

•  Il  lit  au  front  de  ceux  qu'un  vain  luxe  environne, 
Que  la  Fortune  vend  ce  qu'on  croit  qu'elle  donne.  • 

De  son  côté,  Voltaire  dit  : 

«  Le  bonheur  est  un  bien  que  nous  vend  la  Nature.  • 

21,  Socrates.  —  Dans  le  Phédon  de  Platon. 

23,  Metrodorus.  —  Sénèque,  Episl.  99. 

29,  Melancholie.  —  La  Fontaine,  dans  Psyché,  II,  exprime  la  même  pensée  : 

•  ...  Il  n'est  rien 
Qui  ne  me  soit  souverain  bien. 
Jusqu'au  sombre  plaisir  d'un  cœur  mélancolique.  » 

32,  Seneque.  —  Episi:  63. 

3^^!,  Veteris.  —  L'ex.  de  Bordeaux  porte  veluli,  et  aussi  le  texte  de  Catulle. 
540, 

3,  Fondre.  —  S'enfoncer,  s'effondrer,  succomber. 
7,  Enfondrer.  —  Où  il  ne  peut  se  fixer  et  où  il  craint  de  s'embourber. 
10,  Platon.  —  Telle  n'est  pas  la  pensée  beaucoup  plus  restrictive  émise  par 
Platon,  République,  IV,  5,  qui  dit   que   si  au   préalable   on   ne  fait  pas 
l'éducation  de  la  jeunesse  et  qu'on  ne  la  dresse  pas  à  respecter  les  lois, 
elles  deviennent  inutiles,  parce  qu'il  n'y  en  a  pas  de  parfaites,  et  quelque 
amendement    qu'on   y  apporte,    on  ne   pare   à   un    inconvénient    qu'en 
en  substituant  d'autres,  si  bien  que  quelles  qu'elles  soient,  elles  sont  tou- 
jours en  défaut  dans  un  cas  donné.  Xaigeon. 
17,  Hydra.  —  L'hydre  de  Lerne,  serpent  monstrueux  qui,  d'après  la  Fable, 
séjournait  dans  le  lac  de  Lerne  en  Argolide  (Grèce  ancienne);  il  avait 


Fb.5S6  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

sept  têtes,  et  chacune  repoussait  à  mesure  qu'on  la  coupait;  Hercule  en 
délivra  la  terre.  Le  monstre,  transporté  au  ciel,  forme  la  constellation 
australe  de  l'Hydre.  Myth. 

2G,  Pourtant.  —  C'est  pour  cela  que... 
542, 

6,  Vérité.  —  Cicéron,  De  Nat.  deor.,  I,  22;  Bayle,  Simonide.  —  Le  roi  Hiéron 
avait  prié  Simonide  de  lui  dire  ce  que  c'est  que  Dieu  ;  celui-ci  lui  répondit 
qu'il  avait  besoin  d'un  jour  pour  examiner  la  question.  Le  lendemain,  le 
roi  ayant  renouvelé  sa  question,  le  poète  demanda  encore  deux  jours  pour 
faire  réponse;  et,  chaque  fois,  il  alla  doublant  le  nombre  de  jours  deman- 
dés. Cicéron,  rapportant  le  fait,  dit  :  «  Je  crois  que  Simonide,  après  avoir 
promené  son  esprit  d'opinions  en  opinions,  toutes  plus  subtiles  les  unes 
que  les  autres,  et  cherché  vainement  la  plus  probable,  désespéra  finale- 
ment de  trouver  la  vérité.  » 

6,  Qui.  —  Cet  alinéa  fait  suite  à  l'avant-dernier  de  ceux  qui  précèdent; 
entre  les  deux  a  été  intercalé  l'incident  de  Simonide,  qui  n'existe  pas  dans 
les  éditions  précédentes,  d'où  un  peu  d'obscurité  dans  le  texte. 
8,  Engin.  —  Un  esprit  ordinaire,  de  moyenne  capacité;  vient  du  mot  latin 
ingenium,  esprit. 

12,  Mesnage.  —  D'économies,  de  savoir-faire. 

18,  Conte.  —  Probablement  Henri  III;  ce  fut  aussi  le  caractère, de  Louis  XV. 


CHAPITRE  XXI. 

23,  Debout.  —  Suétone,  Vespasien,  24. 

25,  Propos.  —  Spartien,  Verus,  6.  «  Un  empereur  doit  mourir  dans  la  plé- 
nitude de  ses  facultés  physiques  et  morales  et  non  affaibli  par  l'âge  ou 
les  maladies.  »  On  peut  du  reste  en  dire  autant  de  tous  ceux  qui  ont  à 
commander  ou  à  administrer,  toutefois  l'application  de  ce  principe  aug- 
mente d'autant  plus  d'importance  que  la  fonction  occupée  en  a  elle-même 
davantage. 

30,  Appoltronny.  —  Proprement  accoutumé  au  lit;  viendrait  de  poltroniser, 
dérivé  lui-même  de  poltro  qui,  en  italien,  signifie  lit,  couche,  oreiller, 
coussin;  d'où,  par  extension,  s'accoutumer  à  la  paresse,  rendu  lâche,  énervé; 
c'est  là  une  étymologie  de  notre  mot  poltron,  quelque  peu  différente  de 
celle  qu'on  lui  attribue  généralement  (V.  N.  II,  568  :  Voyage). 

32,  Nonchalant.  —  Si  peu  soucieux. 
544, 

13,  Absence.  —  Henri  de  Navarre,  devenu  Henri  IV. 

13,  Selym  I.  —  Plein  de  courage  et  de  fermeté,  mais  ambitieux,  perfide  et 
cruel,  Sélim  l"  détrôna  et  fit  périr  son  père,  ordonna"  la  mort  de  plusieurs 
de  ses  frères,  soumit  la  Syrie  et  prit  le  titre  de  calife  (vicaire  de  Mahomet), 
dont  il  déposséda  le  dernier  calife  Abbasside  de  Bagdad  et  que  ses  suc- 
cesseurs à  Constantinople  ont  conservé  depuis;  conquit  l'Egypte  sur 
les  Mamelouks,  la  Mecque  et  Alger. 

15,  Complètes.  —  Cela  est  exact;  mais,  par  contre,  tout  aussi  vrai  quand 
au  lieu  de  victoires  que  l'on  remporte,  ce  sont  des  défaites  que  l'on  éprouve  : 
François  ler,  à  Pavie;  Philippe  de  Valois,  à  Crécy;  Jean  le  Bon,  à  Poitiers; 
Charles  XII,  à  Pultawa;  Napoléon,  à  Waterloo,  etc.  —  C'est  là  du  reste 
une  question  qui  n'est  pas  d'actualité  en  France  où  de  parti  pris  le  chef 
de  l'État  n'a  guère  chance  d'être  un  soldat;  il  semble  d'ailleurs  devoir  en 
être  de  même  dans  un  avenir  prochain  du  Ministre  de  la  guerre.  Les  gens 
politiques  n'ont-ils  pas  toute  science  infuse,  et  qu'y  aura-t-il  de  changé 
sauf  que  les  bureaux  dirigeront  au  lieu  d'être  dirigés,  et  que  le  personnel 
sera  bouleversé  au  gré  des  inlluences  et  passions  politiques  du  moment? 
Aussi,  ce  qu'en  semblable  situation  on  peut  espérer  de  mieux  pour  notre 
état  militaire  c'est  l'existence  d'un  Conseil  supérieur  de  la  guerre,  com- 
prenant tous  ceux  désignés  pour,  en  cas  de  guerre,  exercer  le  commande- 


NOTES.        LIV.  II,  CH.  XXI.        VOL.  II,  PAG.  544.  Fb.557 

ment  de  nos  armées,  dont  les  avis  en  toute  question  militaire  de  quelque 
importance  soient  d'obligation  et  toujours  communiqués  in  extenso  à 
qui  il  appartient  de  décider;  l'établissement  des  tableaux  d'avancement  et 
l'initiative  des  nominations  à  tous  les  hauts  grades  et  emplois  de  l'armée 
devraient  également  lui  être  attribués.  La  guerre  éclatant,  le  Ministre, 
qu'il  soit  civil  ou  militaire,  demeurerait,  continuant  à  pourvoir  aux  be- 
soins de  tous,  avec  l'assistance  de  l'un  des  sous-chefs  de  l'État-Major  gé- 
néral du  temps  de  paix,  toujours  prêt  à  remplacer  son  chef,  devenant, 
ipso  facto,  le  Major  général  des  armées  opérant  sur  le  principal  théâtre 
d'opérations.  Une  fois  les  hostilités  commencées,  ce  sont  les  événements 
qui  décident  de  ce  qui  suit,  toute  prévision  à  cet  égard  est  sans  objet, 
toute  idée  préconçue  peut  être  une  entrave;  il  faut  et  il  suffit  que  les 
hommes  appelés  à  y  pourvoir  aient  été  choisis  à  hauteur  de  la  tâche  qui 
peut  leur  incomber,  qu'ils  soient  au  fait  de  la  situation  et  aient  du  ca- 
ractère. 
17,  Pensée.  —  Cela  n'a  jamais  été  d'une  absolue  vérité,  l'action  dirigeante 
du  chef  en  dehors  du  combat  ayant  toujours  eu  quelque  influence  sur  le 
résultat,  bien  qu'incomparablement  moindre  qu'aujourd'hui,  comparée 
à  sa  conduite  pendant  le  combat  proprement  dit.  D'abord  on  ne  manœu- 
vrait guère  autrefois,  on  se  bornait  généralement  à  se  porter  à  la  ren- 
contre les  uns  des  autres;  et,  d'autre  part,  le  combat  se  livrait  sur  une 
étendue  peu  considérable,  si  élevés  que  fussent  les  effectifs  en  présence; 
tout  ce  qui  s'y  passait,  était  vu  d'un  grand  nombre  et,  transmis  à  la  voix, 
était  à  l'instant  su  de  tous;  l'effet  en  était  immédiat,  et  dans  ces  condi- 
tions l'attitude  du  chef  était  d'importance  capitale.  —  De  nos  jours,  c'est 
tout  autre  :  Dès  le  principe  et  longtemps  avant  qu'on  n'en  vienne  aux 
mains,  le  chef  manœuvre  en  vue  d'acquérir  la  supériorité  morale,  d'avoir 
toute  liberté  de  mouvements  et  d'entraver  celle  de  l'adversaire,  et  de 
faire  que,  tout  en  ne  se  compromettant  pas  trop  lui-même,  un  succès  de 
sa  part,  quand  le  heurt  se  produira,  soit  aussi  désastreux  que  possible  pour 
son  ennemi.  Quand  approche  le  moment  de  l'action,  il  prend,  dans  la 
mesure  du  possible,  les  dispositions  que  commande  la  situation.  Quand 
elle  s'engage,  il  observe,  mais  de  loin  pour  mieux  juger  de  l'ensemble 
sans  être  distrait  par  les  détails,  et  n'intervient  que  par  l'envoi  en  ligne 
de  ses  réserves  quand  il  le  juge  utile.  Lorsqu'elle  prend  fin,  c'est  lui  qui, 
s'il  a  le  dessus,  s'applique  à  faire  que  la  poursuite  transforme  la  défaite 
de  l'adversaire  en  déroute,  ou  à  le  contenir  s'il  a  le  dessous.  Du  commen- 
cement à  la  fin,  sa  pensée  est  toujours  en  action,  et  moins  il  engage  sa  per- 
sonne, mieux  il  fait;  sur  une  zone  aussi  étendue  que  celle  sur  laquelle  se 
livrent  les  combats  actuels,  à  moins  qu'il  ne  s'agisse  d'un  engagement 
insignifiant  par  le  nombre  des  combattants,  l'intervention  personnelle 
d'un  chef,  dans  la  mêlée,  ne  saurait  guère  excéder  en  résultat  physique 
celle  du  moindre  de  ses  soldats,  elle  a  toute  chance  d'être  sans  effet  réel- 
lement utile,  et  risque  fort  de  compromettre  la  direction.  —  Cette  der- 
nière partie  de  l'assertion  de  Montaigne  qui,  de  fait,  est  on  ne  peut  plus 
vraie,  doit  donc  s'entendre  du  chef  qui,  présent  sur  le  théâtre  de  l'action, 
exerce  le  commandement  effectif  des  troupes  engagées,  à  l'encontre  de 
celui  qui,  à  distance,  prétend  gouverner  les  événements  et  dicter  des 
ordi-es  à  ceux  qui,  sur  place,  sont  aux  prises  avec  les  difficultés  dont  il 
ne  peut  juger. 

20,  Ferme.  —  «  Ayant  les  pieds  sur  la  terre  ferme  »,  comme  un  planteur 
de  choux.  Coste. 

21,  Hottomane.  —  Branche  de  la  race  turcomane  (race  dominante  dans  le 
Turkestan,  en  Perse  et  en  Asie  Mineure),  du  nom  d'Othman  1,  fondateur 
de  l'empire  turc  (xui"  siècle). 

25,  Ammurath.  —  Vainquit  les  Perses  et  les  Hongrois,  enlevant  aux  pre- 
miers trois  provinces,  aux  seconds,  l'importante  place  de  Raab;  avait 
débuté  en  faisant  étrangler  ses  cinq  frères,  tous  en  bas  âge. 

27,  Edouard.  —  Prétendant  à  la  couronne  de  France,  du  chef  de  sa  mère, 


Fb.S58  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

sœur  de  Charles  le  Bel,  gagnait  contre  Philippe  de  Valois  la  bataille  de 
Crécy  (1346),  prit  Calais  (1347)  et  plusieurs  autres  villes;  son  fils  le  prince 
de  Galles  gagnait  sur  le  roi  Jean,  successeur  de  Philippe,  la  bataille  de 
Poitiers  (I35G);  mais  moins  heureux  contre  Charles  V,  il  perdait  peu  à  peu 
toutes  ses  conquêtes  et  ne  possédait  plus  que  quelques  places  maritimes  en 
France,  quand  il  mourut. 
ti8,  Charles:  —  Fit  avec  succès  la  guerre  à  Edouard  III  d'Angleterre  qui  avait 
envahi  la  France,  au  roi  de  Castille,  et  réunit  à  la  couronne  le  Poitou,  la 
Saintonge,  le  Rouorgue,  une  partie  du  Limousin,  le  comté  de  Ponthieu  et 
la  Guyenne.  Il  eut  pour  généraux  Olivier  de  Clisson,  Bertrand  du  Guesclin, 
Boucicaut;  témoin  des  malheurs  causés  par  la  captivité  de  son  père  Jean 
le  Bon,  fait  prisonnier  à  la  bataille  de  Poitiers,  il  s'était  fait  une  loi  de  ne 
point  commander  ses  troupes  en  personne  et  dirigeait  tout  du  fond  de 
son  cabinet. 

33,  Castille.  —  Montaigne  fait  ici  allusion  à  la  découverte  et  à  la  conquête 
du  Mexique,  du  Pérou,  de  la  Nouvelle-Grenade,  du  Chili  et  de  Buenos- 
Ayres,  réalisées  à  cette  époque,  au  nom  des  rois  de  Castille,  par  les  Chris- 
tophe Colomb,  les  Fernand  Cortez,  les  Pizarre,  etc. 

33,  Portugal.  —  Par  les  expéditions  de  Diaz,  de  Vasco  de  Gama,  de  Cabrai, 
les  conquêtes  d'Albuquerque,  le  Portugal,  au  xvi'  siècle,  était  maître,  en 
Asie,  des  Indes,  des  Moluques,  et  en  Amérique,  du  Brésil. 

35,  Facteurs.  —  Agents  des  grandes  compagnies  par  lesquelles,  jadis,  les 
états  européens  exploitaient  leurs  colonies. 

39,  Respirer.  —  Zonaras,  d'où  ceci  est  tiré,  dit  :  «  Julien  se.  démontra  si 
sobre,  que  presque  il  ne  rotait  ni  ne  crachait  et  allait  jusqu'à  dire  que, 
s'il  était  possible,  un  philosophe  devrait  môme  se  garder  de  respirer.  » 
546, 

3,  Persienne.  —  Xésophon,  Cyropédie,  I,  2,   IG,  ne  parle  pas  plus  de  la 
sueur  à  propos  des  Perses,  que  Zonaras  à  propos  de  Julien  ;  il  dit  seule- 
ment qu'il  était  déshonnête  parmi  eux  de  cracher,  de  se  moucher  et  de 
paraître  plein  de  vents. 
5,  Seneque.  —  Epist.  88. 

10,  Fortune.  —  «  Venez  voir  mourir  un  maréchal  de  France,  »  disait  Ney 
faisant  à  Waterloo  (1815)  un  dernier  effort,  avec  la  brigade  Brue,  contre 
les  lignes  anglaises  prenant  l'offensive  pour  seconder  l'action  de  Bliicher. 
«  Je  ne  rentrerai  à  Paris  que  mort  ou  victorieux,  »  disait  de  son  côté 
le  général  Ducrot,  en  sortant  pour  livrer  la  bataille  de  Champigny  (1871). 
Et  tous  deux,  bien  que  demeurés  constamment  exposés  aux  coups  des  en- 
nemis, se  retrouvaient  vivants  en  fin  d'action,  malgré  ce  qu'ils  avaient  dit 
et  espéré. 

17,  Gradiuum.  —  Porteur  de  glaive,  surnom  du  dieu  Mars. 

18,  Deos.  —  En  479.  Les  Romains,  en  guerre  avec  les  Èques,  avaient  vu 
échouer  leurs  efforts  par  l'insubordination  de  leurs  soldats,  motivée  par 
une  loi  agraire  en  discussion  à  Rome.  Redoutant  la  même  mauvaise  volonté 
l'année  suivante,  alors  qu'on  était  en  présence  des  Étrusques,  qui  venaient 
les  insulter  jusque  dans  leur  camp,  les  consuls  refusèrent  quand  même 
d'en  venir  aux  mains,  jusqu'à  ce  que  leurs  soldats  eussent  juré  de  vaincre 
ou  de  mourir,  ce  qu'ils  firent,  et  tinrent  parole,  à  rencontre  de  ce  qu'en 
dit  Montaigne.  —  Celui-ci  semble  confondre  cet  épisode  avec  celui  des 
Fabiens,  guerriei's  à  l'effectif  de  306,  tous  de  la  famille  Fabia,  qui,  deux 
ans  après  (477),  ayant  à  leur  tète  le  consul  Fabius  Vibulanus,  se  char- 
gèrent à  eux  seuls  de  combattre  les  Véiens,  qu'ils  battirent  en  diverses 
rencontres;  mais  étant  tombés  dans  une  embuscade,  ils  périrent  tous, 
accablés  par  le  nombre. 

31,  Philistus.  —  Plutarque,  Dion,  8.  Philistus  défait  fut,  suivant  les  uns, 
pris  et  tué  par  les  ennemis;  selon  d'autres,  il  se  tua  pour  ne  pas  tomber 
entre  leurs  mains. 

38,  Frustratoirement.  —  Inutilement,  en  vain.  Frustratoire  est  encore  en 
usage  au  palais  ;  frustratoirement  n'est  plus  français. 


NOTES.  IJV.  II,  CH.  XXI.         VOL.  II,  PAG.  548.  Fb.5S9 

548, 

4,  Castille.  —  De  Thou,  LXV.  —  Bataille  d'El-Ksar  cl-Kebir,  au  Maroc,  en 
1578.  Y  périrent  :  Sébastien,  roi  de  Portugal,  qui  disparut  dans  le  com- 
bat; le  vainqueur  Muley  Abd  el-Melek,  roi  do  Fez  et  de  Maroc,  terrassé 
par  la  maladie  dans  le  cours  même  de  la  bataille;  Muley  Mohammed,  son 
neveu,  qu'il  avait  détrôné  et  à  l'instigation  duquel  était  venu  Sébastien, 
auquel  il  s'était  joint,  se  noya  dans  sa  fuite;  de  la  sorte  périrent  par  la 
maladie,  le  fer  et  l'eau,  trois  rois  dans  cette  même  journée.  —  Sébastien 
ne  laissant  pas  d'enfants,  le  cardinal  Henri,  son  oncle,  lui  succéda;  et, 
à  la  mort  de  celui-ci  (1580),  Philippe  II,  roi  d'Espagne,  s'empara  de  la 
couronne  du  Portugal. 
34,  Tracasser.  —  Mener  cà  et  là,  malgré  les  souffrances  qu'il  éprouvait. 
550, 

2,  Nouuelle.  —  De  Thou,  LXV,  raconte  qu'on  prêtait  le  môme  fait  à  Charles 
de  Bourbon,  l'ancien  connétable,  tombant  expirant  au  pied  des  murailles 
de  Rome,  à  laquelle  il  donnait  l'assaut  avec  les  bandes  à  la  tète  desquelles 
il  s'était  mis  (1527).  —  Nelson,  en  1805,  à  Trafalgar,  on  agit  de  môme  : 
blessé  à  mort  sur  le  pont  de  son  vaisseau  amiral,  et  ti-ansporté  dans  sa 
chambre,  il  se  fit  couvrir  la  figure  et  ses  décorations  de  son  mouchoir, 
afin  de  n'être  pas  remarqué  de  l'équipage  et  de  ne  pas  l'impressionner 
défavorablement. 

10,  Main.  —  N'.N.  II,  430  :  Premier.  —  Une  fois  sa  résolution  arrêtée,  dit 
Plut.\rque  qui  raconte  cette  mort  avec  grands  détails,  aj'ant  près  de  lui 
l'épée  avec  laquelle  il  était  décidé  à  se  tuer,  il  s'endormit  lisant  le  Phédon 
et  alternativement  prenant  un  peu  de  repos. 

CHAPITRE  XXII. 

13,  Essaye.  —  Éprouve,  fatigue. 

13,  Lisais.  —  Dans  la  Cyropédie  de  Xénophon,  VIII,  6,  9. 

20,  Grues.  —  Les  empereurs  du  Mexique  avaient  des  courriers  à  pied,  qui 
atteignaient  à  peu  près  à  la  même  vitesse;  ils  étaient  dressés  à  la  course 
et  leurs  exercices,  à  Mexico,  avaient  comme  but  final  les  pieds  d'une  idole 
auxquels  on  arrivait  en  montant  120  marches. 

20,  Cœsar.  —  De  Bello  civiii,  III,  11. 

24,  Mille.  —  Suétone,  César,  57.  Le  mille  romain  valait  environ  1500'"  (exac- 
tement 1481);  cent  milles  font  donc  à  peu  près  cent  cinquante  kilomètres. 

27,  Tiberius  Nero.  —  Pline,  Nat.  Hisl.,  VII,  20.  Tibère,  le  même  qui  devint 
plus  tard  empereur.  Le  fait  se  passait  en  l'an  9;  son  frère  Drusus,  après 
de  nombreux  succès  en  Gaule,  opérait  en  Germanie,  quand  il  tomba  ma- 
lade et  mourut.  Tibère  prit  la  conduite  des  opérations  et  acheva  la  dé- 
route des  Germains,  8. 
552, 

3,  Peruenit.  —  The-Live,  XXXVII,  7.  —  En  190;  l'armée  romaine,  en 
marche  contre  Antiochus,  devait  traverser  la  Thrace;  Sempronius  Gracchus 
fut  député  à  Philippe  de  Macédoine  dont  elle  dépendait,  pour  pénétrer 
ses  sentiments  et  savoir  si  on  l'aurait  pour  ou  contre  soi.  —  La  distance 
d'Amphisc  à  Polla  est  d'environ  trois  cents  kilomètres. 

3,  Postes  assises.  —  Relais  permanents,  d'usage  habituel.  —  Louis  XI,  en 
France,  fut  le  premier  qui  établit  un  service  de  poste  régulier;  les  relais 
étaient  placés  de  deux  en  deux  lieues  (8  kilomètres).  —  Qu'est-ce  que  la 
vitesse  de  ces  moyens  do  transport  auprès  de  celles  réalisées  de  nos  jours 
par  les  moyens  de  locomotion  qui  sont  venus  s'ajouter  aux  anciens;  alors 
que  sur  hippodrome,  la  plus  grande  vitesse  obtenue  à  pied  a  été  de 
cinq  kilomètres  en  seize  minutes  et  celle  à  cheval  de  3.000'"  en  3'"  15  (réa- 
lisée en  UX)3,  par  Quo  Vadis,  au  Grand  Prix  de  Paris),  déjà  avec  le  vélo- 
cipède, dont  aujourd'hui  tout  le  monde  use,  on  fait  aisément  d'une  façon 
suivie  sur  une  bonne  route  25  à  30  kil.  à  l'heure;  tandis  qu'en  mer  on 


Fb.560  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

arrive  à  des  vitesses  de  33  nœuds  (60  kil.  à  l'iieure)  par  des  torpilleurs; 
l'Angleterre  a  même  actuellement  sur  chantier  un  croiseur  qui  doit  mar- 
cher à  36  nœuds  (65  kil.  400);  des  trains  de  chemin  de  fer  vont  couram- 
ment à  la  vitesse  de  100  kil.  à  l'heure,  le  do^passant  même;  des  automobiles 
ont  atteint  jusqu'à  120. 

5,  Cecinna.  —  Il  avait,  dit  Pline,  Nat.  Hist.,  X,  24,  des  quadriges  (chars 
attelés  à  quatre  chevaux  de  front)  qu'il  faisait  courir;  et,  pour  annoncer 
à  ses  amis  le  résultat,  il  lâchait  celles  de  ses  hirondelles  qu'il  emportait 
avec  lui  à  Rome,  teintes  de  la  couleur  du  parti  qui  avait  remporté  la 
victoire.  —  La  vitesse  des  hirondelles  semble  notablement  supérieure  à 
celle  des  pigeons  :  récemment,  une  hirondelle  avait  été  amenée  d'Anvers 
à  Compiègne  et,  en  même  temps,  250  pigeons  de  même  provenance. 
Lâchés  ensemble,  l'hirondelle  aurait  regagné  son  nid  en  une  heure  sept 
minutes,  ce  qui  donne  207  kilomètres  à  l'heure,  tandis  que  les  premiers 
pigeons  arrivés  auraient  mis  quatre  heures  et  deux  minutes  pour  franchir 
cette  même  distance  de  235  kilomètres. 

10,  Rome.  —  Les  théâtres,  dans  l'antiquité,  étaient  à  ciel  ouvert.  Indépen- 
damment des  représentations  théâtrales,  ils  servaient,  à  Rome,  aux  com- 
bats de  gladiateurs,  aux  courees,  etc.,  lesquels  étaient  l'objet  de  paris 
dont  il  importait  de  connaître  les  résultats  qui  se  transmettaient  ainsi. 

13,  D.  Brutus.  —  Pline,  Nat.  Ilisl.,  X,  77.  —  Assiégé  dans  Mutine  (Modène), 
D.  Brutus  fit  parvenir  au  camp  des  consuls  des  lettres  attachées  aux 
pattes  de  pigeons,  et  déjoua  ainsi  la  vigilance  d'Antoine,  malgré  les  filets 
tendus  par  celui-ci  en  travers  du  fleuve  pour  intercepter  toute  commu- 
nication (43). 

14,  Ailleurs.  —  Cet  emploi  des  pigeons  pour  les  communications  rapides  est 
très  ancien.  Les  Grecs  en  usaient  aux  jeux  olympiques  pour  signaler  les 
vainqueurs,  les  Romains  aux  jeux  du  cirque;  les  Chinois  s'en  servaient; 
en  Egypte,  on  annonçait  de  la  sorte  à  l'intérieur  l'arrivée  des  bateaux 
à  Alexandrie.  Leur  usage  â  la  guerre  est  plus  récent,  Montaigne  en  cite 
le  premier  exemple  connu;  pendant  les  croisades,  les  Sarrasins  en  firent 
grand  usage  et  les  Croisés  les  imitèrent  dans  des  proportions  plus  res- 
treintes. En  Europe,  il  ne  remonte  guère  qu'au  milieu  du  siècle  dernier, 
mais  il  s'est  depuis  considérablement  étendu,  nonobstant  le  télégraphe 
et  l'invention  de  la  télégraphie  sans  fil.  La  vitesse  des  pigeons  bien  en- 
traînés est  estimée  de  60  à  80  kil.  à  l'heure,  et  les  traites  fournies  atteindre 
4  à  500  kil.,  cela  toutefois  semblant  des  maxima.  —  Les  anciens,  comme 
tous  les  peuples  primitifs,  ont  souvent  usé,  pour  communiquer  à  distance, 
de  feux  allumés  sur  des  points  élevés  dont,  de  jour  la  fumée,  de  nuit 
la  lueur,  marquaient  qu'un  événement  attendu  venait  de  se  produire. 
C'est  à  cela  que  servaient,  au  moyen  âge,  les  nombreuses  tours  dont  les 
ruines  s'aperçoivent  encore  sur  notre  rivage  méditerranéen;  elles  signa- 
laient par  leure  feux  l'apparition  au  large  des  navires  suspects  et  invi- 
taient les  populations  éparses  dans  les  campagnes  à  se  mettre  en  sûreté 
dans  les  bourgs.  —  Citons  encore  comme  moyen  de  communication  rapide 
en  usage  au  temps  jadis  les  cris  répétés  de  distance  en  distance;  c'est 
ainsi,  dit  César,  dans  ses  Commentaires,  que  le  massacre  des  Romains  qui 
avait  été  fait  à  Orléans  au  lever  du  soleil,  fut  connu  à  neuf  heures  du  soir 
en  Auvergne  à  cinquante  lieues  de  distance.  —  Le  télégraphe  aérien, 
inventé  sous  la  Révolution,  outre  sa  permanence,  réalisait  le  grand  avan- 
tage, par  son  code  de  signaux,  de  pouvoir  transmettre  à  peu  près  tout; 
mais  son  fonctionnement  était  interrompu  par  la  nuit  et  le  brouillard. 
La  télégraphie  électrique  qui  s'est  substituée  à  lui,  presque  instantanée, 
puis  le  téléphone  semblaient  le  nec  plus  ultra,  et  voici  que  la  télégraphie 
sans  fil  va  encore  au  delà  de  ce  que  l'on  pouvait  concevoir;  née  d'hier, 
elle  a  déjà  donné  possibilité  de  communiquer  à  des  distances  de  deux 
cents  kilomètres. 

20,  Chemin.  —  11  en  était  de  même  chez  les  Romains,  où,  comme  on  l'a  vu 
plus  haut,  ce  service  comportait  aussi  des  coches.  Le  cas  échéant,  chevaux 


NOTES.         LIV.  II,  Cil.  XXII.         VOL.  II,  PAG.  552.  Fb.561 

de  selle,  bètes  de  trait  et  véhicules  pouvaient  être  réquisitionnés  par  les 
courriers  dans  l'embarras;  cette  servitude  fut  abolie  par  l'empereur 
Adrien. 

22,  Seiour.  —  Soulagement. 

23,  Vsage.  —  C'est  cependant  d'un  efïet  salutaire  pour  les  longues  courses, 
se  répétant  plusieurs  jours  de  suite,  qu'on  les  fasse  à  pied  ou  à  cheval, 
mais  il  faut  y  être  habitué.  —  Les  sultans  entretenaient  également  des 
courriers  à  piei,  auxquels,  dit-on,  par  une  opération  chirurgicale,  on 
enlevait  la  rate  pour  les  rendre  plus  dispos  et  plus  agiles.  Payex. 

CHAPITRE  XXIIl. 

S54, 

11,  Atletes.  —  En  dehors  de  l'entraînement  continu  auquel  de  nos  jours 
sont  soumis  les  jockeys  qui  prennent  part  aux  courses,  on  leur  fait  suivre 
un  régime  spécial  et,  entre  autres  choses,  on  provoque  pareillement,  chez 
eux,  d'abondantes  transpirations  pour  les  rendre  plus  légers,  avant  qu'ils 
ne  montent  à  cheval  pour  courir. 

20,  Marée.  —  Foule;  comme  on  dit  «  les  flots  de  la  multitude  ». 

22,  Grèce.  —  Les  Turcs;  mais  cette  situation  a  pris  fin  en  1830,  époque  à 
laquelle  une  insurrection  datant  de  1821  et  la  bataille  navale  de  Navarin, 
gagnée  en  1827  par  les  flottes  combinées  de  France,  d'Angleterre  et  de 
Russie,  rendirent  à  la  Grèce  son  indépendance. 

32,  Inconuenient.  —  C'est  actuellement  encore,  en  Europe,  une  des  causes 
de  guerre  des  plus  à  redouter  que  de  servir  de  palliatif  à  des  difficultés 
économiques,  ou  de  dérivatif  à  des  difficultés  de  politique  intérieure,  qui 
vont  croissant  sans  cesse  par  suite  de  l'aveuglement,  de  l'inertie  et  de  la 
division  des  conservateurs  et,  d'autre  part,  de  l'esprit  de  plus  en  plus  entre- 
prenant et  des  exigences  de  plus  en  plus  grandes  des  socialistes. 

39,  Carthaginois.  —  Carthage,  située  non  loin  de  l'emplacement  où  se  trouve 
actuellement  Tunis,  devenue  la  capitale  d'une  république  maritime  très 
puissante,  et  la  rivale  de  Rome,  eut  à  soutenir  contre  celle-ci  de  longues 
luttes  connues  sous  le  nom  de  «  guerres  puniques  »,  qui  se  terminèrent 
par  la  prise  et  la  destruction  de  la  cité  africaine  (146). 

39,  Bretigny.  —  Froissart,  I,  213.  —  Le  traité  de  Brétigny  (1359),  par  lequel 
le  roi  Jean  le  Bon,  fait  prisonnier  à  la  bataille  de  Poitiers,  abandonnait  à 
l'Angleterre,  pour  racheter  sa  liberté,  toutes  les  conquêtes  faites  par  ses 
prédécesseurs,  ne  fut  pas  reconnu  par  les  États  généraux  convoqués  à  cet 
effet  par  le  Dauphin.  La  guerre  reprit  alors  de  plus  belle,  pour  ne  se 
terminer  qu'en  1453,  par  la  bataille  de  Castillon;  elle  avait  duré  cent 
quinze  ans. 
556, 

2,  Outre-mer.  —  Allusion  à  une  expédition  en  Angleterre,  méditée  vers  1338 
par  Philippe  IV  de  Valois,  pour  laquelle  il  avait  réuni  vingt  à  trente  mille 
liommes,  et  que  devait  commander  son  fils  Jean,  duc  de  Normandie,  de- 
puis Jean  le  Bon,  alors  âgé  de  20  ans;  cette  expédition  n'eut  pas  lieu,  le  roi 
d'Angleterre  ayant  pris  lui-même  l'offensive  et  envahi  la  France. 

10,  Ruine.  —  C'était  l'avis  de  l'amiral  de  Coligny  ;  et,  s'il  se  trouvait  à  Paris 

lors  de  la  S. -Barthélémy,  c'est  qu'il  était  question,  à  ce  moment,  entre  le 

roi  et  lui,  d'une  guerre  dans  les  Pays-Bas  devant  servir  de  dérivatif  à  nos 

troubles  intérieurs   d'alors,  guerre  dans  laquelle  il  eût  exercé   un   com- 

'     mandement. 

13,  Commodité.  —  «  La  guerre  n'est  qu'un  instrument  de  la  politique.  » 
Clausewitz. 

14,  Virgo.  —  Némésis,  déesse  de  la  vengeance,  chargée  de  punir  le  crime  et 
de  renverser  une  insolente  prospérité;  surnommée Rhamnusia,  de  ce  qu'elle 
avait  un  temple  à  Rhamnus,  bourg  de  l'Attique, 

20,  Elotes.  —  Plutarque,  Lycurgue,  21.  —  Elotes  ou  Ilotes;  à  l'origine  ce 
nom  désignait  les  habitants  d'Hélos,  ville  de  Laconie  (Gi'èce  anc),  prise  et 

ESSAIS   DE   MONTAIGNE.   —  T.  IV.  3G 


Fb.562  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

détruite  en  1059  par  les  Lacédéinoniens  qui  les  réduisirent  en  esclavage. 
Il  fut  ensuite  étendu  à  tous  leurs  esclaves  indistinctement,  qu'ils  traitaient 
avec  une  extrême  dureté,  les  entretenant  soigneusement  dans  l'état  le  plus 
abject. 

27,  Art.  —  Celse  dit  à  cet  égard  :  <-  Ceux  qui  pratiquent  la  médecine  ration- 
nelle, estiment  qu'Hérophile  et  Erasistrate  agissaient  bien,  en  obtenant  des 
rois  que  les  criminels  leur  fussent  livrés  pour  être  disséqués  vivants,  et 
qu'on  pût  observer,  alors  qu'ils  étaient  encore  pleins  de  vie  et  avant  qu'ils 
eussent  rendu  l'àme,  la  disposition,  la  couleur,  la  forme,  les  dimensions 
des  organes  »  ;  mais  il  ajoute  :  «  disséquer  ainsi  des  hommes  vivants,  est 
aussi  cruel  qu'inutile  ». 

35,  L'empereur.  —  Ce  ne   fut  qu'en  403  que  les  combats  de  gladiateurs 
furent  abolis  par  l'empereur  Honorius,  après  que  les  spectateurs  eurent  tué 
à  coups  de  pierre  un  anachorète,  nommé  Télémaque,  qui,  venu  exprès  de 
l'Orient  à  Rome,  s'était  jeté  entre  les  combattants  pour  les  séparer. 
558, 

17,  Rumpi.  —  Dans  les  combats  de  gladiateurs,  le  vaincu  devait  mettre  bas 
les  armes  et  était  égorgé,  à  moins  que  les  spectateurs  ne  voulussent  lui 
sauver  la  vie;  le  vainqueur  les  consultait  du  regard  :  le  bras  étendu,  le 
poing  fermé,  le  pouce  détaché  et  en  dessus,  marquait  qu'il  eût  à  achever 
son  adversaire;  le  poing  renversé,  le  pouce  en  dessous,  qu'on  faisait  grâce. 

30,  Interest.  —  Le  fait  était  assez  fréquent  jadis  :  le  landgrave  de  Hesse,  le 
duc  de  Brunswick  en  Allemagne  vendaient  leurs  sujets  aux  recruteurs 
anglais;  le  prince  de  Waldeck,  aux  Hollandais;  les  Suisses  se  vendaient 
eux-mêmes.  A  la  bataille  de  S. -Quentin,  il  y  avait  des  Allemands  des  deux 
côtés;  de  même  des  Suisses,  à  la  bataille  de  Fontenoy,  etc. 


CHAPITRE  XXIV. 

31,  Romaine.  —  Ce  qui  a  le  plus  contribué  à  rendre  les  Romains  les  maîtres 
du  monde,  c'est  qu'ayant  combattu  successivement  tous  les  peuples,  ils  ont 
toujours  renoncé  à  leurs  usages,  sitôt  qu'ils  en  ont  trouvé  de  meilleurs. 
Montesquieu. 
560, 

4,  Suétone.  —  César,  56. 

10,  Moy.  —  CicÉROx,  Episl.  fam.,  VII,  5.  —  La  lettre  en  question  porte 
M.  Orfius.  —  Quelques-uns  ont  regardé  l'offre  de  César  comme  un  badinage, 
Montaigne  la  prend  au  sérieux  et  il  a  probablement  raison  ;  ces  chefs  de 
peuplade  étaient  de  fait  des  lieutenants  de  la  république  romaine  et  il  n'y 
a  pas  à  s'étonner  qu'elle  pourvût  à  leur  nomination. 

12,  beiotarus.  —  Cicérox,  De  Divin.,  II,  37-  —  Déjotarus  était  allié  de  Rome  ; 
malgré  ses  traités  avec  elle.  César  lui  enleva  son  i-oyaume  parce  qu'il  avait 
suivi  le  parti  de  Pompée  auquel  il  s'était  lié  d'amitié;  plus  tard,  il  le  reçut 
en  grâce. 

13,  Gentil-homme.  —  Les  éd.  ant.  à  88  ajoutent  :  sien  amy. 

16,  Escus.  —  Suétone,  César,  54,  indique  comme  se  montant  à  six  mille  talents 

(27.900.000  fr.)  la  contribution  que  versa  Pompée. 
19,  Marcus  Antonius.  —  Plutarque,  Antoine,  8. 
34,  Immoi^tels.  -  En  170.  Tite-Live,  XLV,  12  et  13. 
562, 

5,  JReges.  —  Citation  que  Montaigne  a  traduite,  avant  de  la  donner.  — 
C'est  le  régime  qui,  de  nos  jours,  subsiste  dans  la  partie  de  l'Hindoustan 
soumise  à  la  domination  de  l'Angleterre,  qui  en  a  absorbé  une  portion,  en 
administre  une  autre  directement  et  a  laissé  le  reste  à  ses  princes  indigènes 
respectifs  à  titre  de  tributaires,  vassaux  ou  alliés.  C'est  ce  qu'elle  est  en 
train  d'appliquer  à  l'Egj'pte;  et  ce  que  nous-mêmes  pratiquons  en  Tunisie, 
sous  le  nom  de  protectorat.  . 

10,  Acquis.  —  En  1526,  Jean  Zapoly  disputait  à  Ferdinand  d'Autriche  (le  frère 


NOTES.        LIV.  II,  Cil.  XXIV.        VOL.  II,  PAG.  562.  Fb.o63 

de  Charles-Quint)  le  trône  de  Hongrie  :  battu  par  son  compétiteur,  il 
s'adressa  à  Soliman  dont  il  se  reconnut  le  vassal,  et  en  obtint,  en  retour, 
l'investiture  d'une  partie  de  ce  royaume  et  des  secours. 

CHAPITRE  XXV. 

21,  Appian.  —  Guerres  civiles,  IV. 
29,  Hébétée.  —  Affaiblie. 

34.  Liaisons.  —  Bandages. 
564. 

1,  Froissard.  —  Mémoires,  I,  29. 
8,  Bides.  —  Ceux  qui  louchent. 

11,  Mot.  —  C'est  ce  qui  arrive  fréquemment  quand,,  pour  se  moquer,  les 
enfants  contrefont  un  tic,  un  défaut  de  prononciation  :  c'est  ce  qui  leur 
fait  contracter  si  facilement  et  d'une  façon  inconsciente  l'accent  des  pays 
où  ils  séjournent;  c'est  également  un  effet  analogue  qui  fait  qu'entendre 
tousser,  voir  bâiller  nous  provoque  à  le  faire  nous-mêmes.  Cela  avait  donné 
lieu  chez  les  Grecs  à  un  proverbe  que  rapporte  Plutarque  :  «  Si  tu  fré- 
quentes un  boiteux,  tu  apprendras  à  clocher  »  ;  et  à  ce  propos,  Montaigne  dit 
encore  au  chap  XX  du  livre  I  des  Essais  (I,  132)  :  -<  Vn  tousseur  continuel 
irrite  mon  poulmon.  • 
15,  Seiourner.  —  Et  de  me  reposer  dessus. 

19,  Pline.  —  Nat.  Hist.,  VII,  50. 

22,  Ailleurs.  —  «  Fortis  imaginalio  générât  casum,  disent  les  clercs  »  ;  entrée 
en  matière  du  ch.  XX  du  liv.  I  (I,  132). 

28,  Lucilius.  —  Sénkque,  Epist.  50. 

CHAPITRE  XXVI. 

566, 

20,  Barbares.  —  Tacite,  Arin.,  XII,  47.  —  Cette  coutume  était  en  usage  chez 
les  peuples  de  l'Asie  septentrionale  :  les  Ibériens,  les  Arméniens,  les  Parthes. 

2(3,  PoUere.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  qui  signifie  exceller  sur  les  autres. 
568, 

{'),  Populariter.  —  V.  N.  II,  558  :  Rumpi. 

11,  Armées.  —  Suétone,  Auguste,  24. 

12,  Italique.  —  Ou  sociale;  guerre  entre  les  Romains  et  leurs  alliés  les  peuples 
d'Italie,  qui  réclamaient,  pour  prix  de  leurs  services,  le  droit  de  bourgeoisie 
et  les  privilèges  attachés  au  titre  de  citoyen  romain  (91  à  87). 

15,  Voyage.  —  Les  éd.  ant.  portent  :  celle  guerre,  au  lieu  de  :  «  ce  voyage  ».  — 
Valère  Maxime,  V,  3,  3.  —  On  croit  que  c'est  de  là  (a  pollice  trunco,  de  ce 
qu'on  se  mutilait  le  pouce  pour  se  dispenser  du  service  militaire)  que  vient 
le  mot  poltron  (V.  N.  II,  542  :  Appoltronny).  —  En  367,  l'empereur  Valen- 
linien  condamna  à  être  brûlés  vifs  ceux  qui  se  coupaient  les  doigts  pour 
se  soustraire  à  la  milice.  De  nos  jours,  en  France,  ceux  qui  se  rendent  cou- 
pables de  faits  semblables  ou  analogues,  ce  qui  afrive  de  temps  à  autre,  sont 
punis  judiciairement  et,  à  l'expiration  de  leur  peine,  envoyés  dans  des  corps 
de  discipline  où  ils  accomplissent  leur  temps  de  service. 

15,  Quelqu'vn.  —  Ce  quelqu'un  c'est  Philoclès,  un  des  généraux  d'Athènes. 

,  dans  la  guerre  du  Péloponnèse,  qui,  lui-même  fait  prisonnier  un  peu  plus 
tard  à  la  bataille  d'iEgos  Potamos  (404),  fut  mis  à  mort  avec  3.000  autres 
prisonniers.  Plutarque,  Z,ysa«dre,  5;  Xénophon,  Hist.  Gr.,  II;  etc. 

18,  jEginetes.  —  En  458.  Cicéhon,  De  Off'.,  III,  11  ;  Valère  Maxime,  IX,  2;  mais 
Elien,  Plutarque  et  Xénophon,  qui  relatent  également  le  fait,  disent  que  ce 
fut  pour  les  mettre  hors  d'état  de  manier  la  lance,  sans  les  rendre  inca- 
pables de  ramer.  Peut-être  est-ce  en  retour  que  fut  rendue  à  Egine  cette 
loi  qui  ordonnait  de  mettre  à  mort  tout  Athénien  qui  aborderait  dans 
l'île,  loi  dont  faillit  être  victime  Platon  quand  il  y  fut  déporté  par  ordre  de 


Fb.SGt  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Denys  le  Tyran;  il  n'aurait  dû  son  salut  qu'à  ce  que  quelqu'un  aurait  dit 
par  dérision  que  ce  n'était  qu'un  philosophe,  sur  quoi  on  se  borna  à  l'agréer 
comme  esclave.  —  A  certains  moments  de  l'empire  romain,  on  coupa  aussi 
les  jarrets  aux  prisonniers  de  guerre  pour  les  empêcher  de  servir  plus  tard. 

19,  Lacedemone.  —  Plutabque,  Lycurgue,  14. 

CHAPITRE  XXVII. 

21,  Couardise.  —  Lâcheté,  poltronnerie. 

25,  Friuoles.  —  Robespierre,  au  plus  fort  de  la  Terreur,  voyant  pêcher, 
après  un  repas  qu'il  avait  fait  à  la  campagne,  s'apitoyait,  dit-on,  sur  les 
souffrances  des  poissons  qui,  une  fois  pris,  mouraient  hors  de  l'eau. 
M°"  Campan. 

28,  Andromacbe.  —  Hécube,  pendant  la  guerre  de  Troie,  perdit  presque 
tous  ses  enfants  au  nombre  de  dix-neuf,  vit  massacrer  sous  ses  yeux  son 
mari,  sa  fille  Polyxène,  son  petit-fils  Astyanax,  fils  d'Hector,  et  devint  l'es- 
clave d'Ulysse,  tandis  que  sa  fille  Andromaque  devenait  celle  de  Pyrrhus, 
fils  d'Achille,  qui  l'épousa.  Les  malheurs  de  l'une  et  de  l'autre  ont  fait  le 
sujet  de  tragédies  grecques  et  aussi  de  tragédies  françaises. 

29,  Jours.  —  Plutarqle,  Pélupidas,  15.  —  Alexandre  de  Phères,  assistant  à 
une  représentation  des  Troades  d'Euripide,  sortit  brusquement  du  théâtre 
et  fit  dire  à  l'acteur  de  ne  pas  s'inquiéter  et  de  continuer  à  bien  jouer 
son  rôle;  que  s'il  était  sorti,  ce  n'était  pas  qu'il  fût  mécontent  de  son  jeu, 
mais  qu'il  avait  honte  que  lui,  qui  sans  pitié  envoj-ait  tant  de  gens  à  la 
mort,  on  le  vît  s'attendrir  sur  les  malheurs  d'Hécube  el  d'Andromaque. 

570, 

2,  Voir.  —  S'arrête,  dès  qu'elle  voit. 

8,  Gendarme.  —  S'accoutume  au  meurtre  et  devient  cruel  par  l'habitude 
de  plonger,  jusqu'aux  coudes,  ses  mains  et  ses  bras  dans  le  sang.  —  «  Se 
gendarmer  »,  c'est  se  mettre  en  humeur,  en  posture  d'homme  qui  veut 
combattre. 

20,  Bouquer.  —  «  Faire  bouquer  quelqu'un  »,  c'est  lui  causer  du  dépit,  le 
mortifier,  le  faire  enrager,  l'obliger  à  céder.  Au  propre,  c'est,  en  se  jouant, 
donner  sur  les  joues  du  patient,  qui  les  tient  gonflées,  deux  petites  tapes, 
du  plat  et  du  revers  de  la  main,  qui  l'obligent  à  desserrer  et  à  laisser 
échapper  l'air  qui  sort  avec  un  bruit  semblable  à  celui  d'un  petit  coup 
de  baguette  sur  un  tambour. 

29,  Commise.  —  Plutarque,  Des  délais  de  la  Justice  divine,  2.  —  Montaigne 
se  trompe  en  disant  que  Bias  plaignait  les  Orchoméniens;  c'est  Patrocle, 
un  des  interlocuteurs  de  ce  dialogue  de  Plutarque,  qui  cite  cet  exemple 
de  la  vengeance  trop  tardive  des  dieux,  sans  indiquer  en  quoi  a  consisté 
cet  acte  de  trahison,  ni  à  quelle  époque  il  a  été  commis,  mais  seulement 
que  de  ce  fait  les  Orchoméniens  auraient  perdu  enfants,  parents  et  amis, 
et  que  ce  ne  serait  que  longtemps  après  que  Lyciscus  aurait  été  atteint 
d'une  maladie  par  suite  de  laquelle  son  corps  tombait  en  décomposition 
et  que  lui-même  considérait  comme  une  punition  du  ciel. 

37,  Pistolade.  —  Coup  de  pistolet. 
572, 

16,  Vertu.  —  Courage.   / 

•19,  Vaincre.  —  Les  éd.  ant.  portent  :  mais  lâc/iement,  sans  combat  et  sans 
hazard;  au  lieu  de  :  «  plus  seurement  qu'honorablement  ». 

24,  Aueugle.  —  «  Faire  la  figue  à  quelqu'un  »,  c'est  lui  faire  la  nique,  lui 
tirer  la  langue,  lui  rire  au  nez,  en  un  mot  se  moquer  de  lui  en  lui  faisant 
quelque  grimace  (V.  N.  I,  124  :  Figue). 
■     24,  Sourd.  —  «  Dire  des  pouilles  à  quelqu'un  »,  c'est  lui  dire  des  injures, 
des  paroles  méprisantes. 

27,  Morts.  —  Pline,  dans  sa.  Préface  à  Vespasien.  C'est  Plancus  lui-même 
qui  fit  la  réponse  donnée  par  Montaigne  comme  exprimée  en  son  nom. 


NOTES.        UV.  II,  CIL  XXVII.         VOL.  II,  PAG.  572.  Fb.56o 

29,  Noisif.  —  Querelleur;  dérive  de  noise  que  l'on  retrouve  encore  dafis 

cette  expression  souvent  employée  :  «  chercher  noise  ».  . 
29,  Aristote.  —  Diogène  Laerçe,  IX,  18. 

32,  Coup.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  :  de  bâton. 
574, 

8,  Combat.  —  C'est  ce  à  quoi  on  est  revenu  de  nos  jours. 

33,  Heary.  —  Chroniques  de  Monstreleï,  1,  9.  —  En  1371  ;  le  duc  d'Orléans, 
frère  de  Charles  VII  et  père  de  Dunois,  accusé  d'avoir  contribué  à  la 
maladie  du  roi  devenu  fou,  et  de  le  tenir  en  chartre  privée,  avait  pro- 
voqué Henry  IV  roi  d'Angleterre,  qui  avait  tenu  ce  propos;  chacun;  de- 
vait être  accompagné  de  cent  chevaliers.  Henry  n'accepta  pas  le  d^i , 
disant  qu'il  n'était  pas  dans  les  usages  de  ses  prédécesseurs  que  le  roi'fee 
mesurât  avec  quelqu'un  qui  n'était  pas  de  son  sang  (de  moindre  état  qu'il 
n'était  lui-même). 

34,  Lacedemoniens.  —  Hérodote,  I,  82;  Pausanias,  X,  9;  Athénée,  XV,  6;  etc. 
—  Les  Argiens  et  les  Lacedemoniens,  en  querelle  au  sujet  du  territoire 
de  Thyrée,  convinrent  de  remettre  leurs  intérêts  à  trois  cents  de  chaque 
parti.  Le  combat  eut  lieu;  il  ne  demeura  que  deux  Argiens  et  un  Lacé- 
démonien  du  nom  d'Othryadès;  la  nuit  les  sépara;  les  deux  Argiens  se 
retirèrent;  Othryadès,  resté  seul,  érigea  un  trophée  avec  les  armes  des 
ennemis,  y  traça  de  son  propre  sang  une  inscription  qui  attribuait  la 
victoire  à  son  pays  et  se  donna  la  mort  pour  ne  pas  survivre  à  ses  com- 
pagnons. Mais  cela  ne  servit  de  rien;  on  ne  s'entendit  pas  sur  le  vain- 
queur; les  deux  armées  en  vinrent  aux  mains  et  la  victoire  demeura  à 
Sparte  (VI"  siècle). 

35,  Curiatiens.  —  Le  combat  eut  lieu  à  la  vue  des  deux  armées,  pour  dé- 
cider à  laquelle,  de  Rome  ou  d'Albe,  appartiendrait  la  suprématie.  Trois 
frères  de  part  et  d'autre,  les  Horaces  pour  Rome,  les  Curiaces  pour  sa 
rivale,  étaient  en  présence  :  au  premier  choc  deux  Horaces  tombèrent, 
les  trois  Curiaces  étaient  blessés.  Le  survivant  des  Horaces,  craignant 
de  succomber  contre  ses  trois  adversaires  réunis,  feignit  de  prendre  la 
fuite  afin  de  les  diviser,  persuadé  qu'ils  le  suivraient  plus  ou  moins  vite 
suivant  la  gravité  de  leurs  blessures.  Sa  prévision  se  réalisa;  revenant 
alors  impétueusement  sur  ses  pas,  il  immola  successivement  ses  trois  ad- 
versaires et  assura  ainsi  le  triomphe  de  sa  patrie  (667).  —  En  citant  ce 
fait,  Plutarque  en  conte  un  autre,  à  peu  près  identique  dans  ses  détails, 
survenu  lors  d'une  guerre  entre  les  habitants  de  Tégée  et  de  Phenée 
(Grèce)  ;  des  deux  côtés,  les  champions  étaient  trois  frères  jumeaux. 

39.  Meslé.  —  A  ajouter  à  cette  nomenclature  le  combat  des  Trente,  célèbre 
défi  porté  en  1351  par  Jean,  sire  de  Beaumanoir,  au  châtelain  anglais  de  Ploër- 
mel.  Trente  chevaliers  bretons  et  autant  d'anglais  en  vinrent  aux  mains 
au  pied  du  chêne  Mi-voie  (Bretagne);  huit  anglais  furent  tués,  les  autres 
se  rendirent.  Dans  l'ardeur  de  l'action  Beaumanoir  blessé,  épuisé  de 
fatigue  et  de  la  perte  de  son  sang,  faiblissait  :  «  Bois  ton  sang,  Beauma- 
noir! »  lui  cria  son  frère  qui  était  au  nombre  des  combattants.  Bouillet. 

39,  Domestique.  —  De  famille.  —  Ce  duel,  dont  il  va  être  parlé,  Montaigne 
n'en  fait  pas  mention  dans  son  journal  de  voyage,  ce  qui  donne  à  penser 
qu'il  a  dû  avoir  lieu  après  son  départ  d'Italie,  où  son  frère  l'avait  accom- 
pagné et  où  il  demeura  après  lui;  on  peut  voir  tout  le  détail  de  cette 
affaire  dans  les  Mémoires  de  Brantôme,  touchant  les  duels. 
576, 

29,  Théorique.  —  Nous  disons  aujourd'hui  théorie,  quoique  nous  ayons 
conservé  pratique;  c'est  une  bizarrerie  de  l'usage.  —  Rabelais,  I,  5,  dit 
comme  3Iontaigne  :  «  le  n'entends  point  la  théorique;  la  practique,  io 
m'en  aide  quelque  peu.  »  —  Brantôme,  parlant  des  duels,  dit  pareillement  : 
«  Les  Italiens  en  ont  très  bien  sceu  les  théoriques  et  practiques.  » 

34,  Germains.  —  Tite-Live,  XXVIII,  21.  —  Tous  deux  se  disputaient  la 
succession  à  uiïe  principauté;  ils  résolurent  de  s'en  remettre  au  sort  des 
armes.  Ils  se  battirent  en  présence  de  l'armée  romaine,  dans  l'arène  des 


Fb.566  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

gladiateurs  à  Carthage  (et  non  en  Espagne),  alors  qu'on  y  célébrait  des 
jeux  funèbres  à  l'occasion  de  la  mort  des  deux  Scipion  (206). 
578, 

15,  Butes.  —  C'étaient  des  tirs  organisés  pour  l'arc  et  l'arbalète,  avec  ou 
sans  banquette  pour  le  tireur  d'une  part;  et  de  l'autre,  à  distance  conve- 
nable, une  levée  de  terre  contre  laquelle  se  plaçait  le  but  à  atteindre 
comme  il  en  existe  encore  beaucoup  dans  le  Nord  de  la  France.  Le  mot 
«  butes  •  signifie  ici  ce  genre  de  tir,  plutôt  que  son  aménagement. 

Tous  les  exercices  concourant  au  développement  de  la  force  et  de  l'adresse, 
sont  à  pratiquer,  et  notamment  ceux  qui  sont  d'utilité  immédiate  à  la 
guerre.  A  ce  titre  le  tir  à  l'arme  de  guerre  est  particulièrement  à  encou- 
rager, car  la  défense  nationale  y  est  intéressée  :  les  efforts  individuels 
de  quelques-uns  à  cet  égard  sont  insuffisants,  il  faut  que  cela  devienne  une 
institution  d'Etat.  Pour  ce  faire,  et  c'est  possible,  facile  même,  il  faudrait 
que  ces  tirs  à  la  cible  pussent  s'effectuer  au  centre  même  des  populations, 
et  nonobstant  n'offrir  aucun  danger;  être  gratuits  dans  une  certaine  me- 
sure, pour  tout  individu  de  nationalité  française,  de  l'âge  des  enrôlements 
volontaires  à  celui  du  passage  dans  l'armée  territoriale.  On  peut  satisfaire 
aux  deux  premières  conditions,  en  établissant  ces  tirs  souterrainement , 
dans  les  villes,  sous  les  promenades  publiques  ou  les  principales  artères 
(à  Paris  par  exemple  sous  l'esplanade  des  Invalides,  aux  Tuileries  sous  la 
terrasse  du  bord  de  l'eau,  etc.),  et  dans  les  localités  moindres,  dans  le 
voisinage  immédiat,  à  l'instar  des  tirs  forains.  On  emploierait  à  cet  effet 
des  tuyaux  métalliques  de  2  à  ô""  de  longueur,  s'ajoutant  les  uns  aux  au- 
tres, de  forme  appropriée,  de  1"  de  hauteur  sur  0.60  de  largeur,  d'épais- 
seur variable  suivant  qu'ils  seraient  en  acier  ou  en  fonte,  suffisante  pour 
n'être  pas  perforés  par  la  balle  ;  leur  longueur  totale  permettant  le  tir  à 
200" .  A  l'origine  du  tir  serait,  pour  le  personnel  et  les  tireurs,  une  cons- 
truction également  souterraine  analogue  à  celle  qui  vient  d'être  édifiée 
pour  un  tout  autre  usage,  à  Paris,  près  de  l'église  de  la  Madeleine;  l'autre 
extrémité  serait  aménagée  pour  les  marqueurs;  un  fil  électrique  les  relie- 
rait. Des  organisations  analogues  ont  déjà  fonctionné  à  Lisieux,  à  Bergerac, 
et  donnent  les  meilleurs  résultats.  —  Le  tir  aurait  lieu  les  dimanches  et 
jours  de  fête.  Le  nombre  des  cartouches  allouées  annuellement  à  titre 
gratuit  aux  seuls  individus  dont  il  a  été  question  ci-dessus,  pourrait  être 
de  36  à  chaque  ayant-droit,  qui  aurait  la  faculté  de  les  tirer  quand  bon 
lui  semblerait  par  série  de  six,  en  trois  séances  au  moins  :  l'Etat  trouverait 
là  un  heureux  moyen  de  renouveler  ses  approvisionnements  de  mobili- 
sation; on  intéresserait  les  tireui-s,  en  leur  tenant  compte  des  résultats 
lors  de  l'appel  sous  les  drapeaux  ou  des  périodes  d'instruction.  L'installa- 
tion de  ces  tirs,  et  il  devrait  en  être  créé  un  au  moins  par  canton,  serait 
peu  considérable  :  3.000  fr.  environ;  elle  serait  à  la  charge  des  communes 
du  canton.  L'État  pourrait  leur  venir  en  aide  par  des  subventions,  cela 
constituant  au  premier  chef  une  dépense  d'utilité  publique  indispensable 
pour  que  le  tir,  qui  importe  à  un  si  haut  degré  à  notre  sécurité  et  à  notre 
indépendance,  pénètre  dans  les  mœurs. 

15,  Tournois.  —  Sorte  de  fête  publique,  très  en  faveur  au  moyen  âge,  où 
les  chevaliers  se  mesuraient  entre  eux  à  cheval,  armés  de  pied  en  cap, 
mais  à  armes  courtoises.  Ces  jeux,  qui  souvent  entraînaient  mort  d'homme, 
prirent  fin  en  France  en  1559,  à  la  suite  d'un  accident  survenu  au  cours 
de  l'un  d'eux  et  qui  causa  la  mort  du  roi  Henri  II. 

15,  Barrières.  —  C'était  une  variante  de  ce  qui  se  pratiquait  dans  les  tour- 
nois :  au  lieu  d'avoir  liberté  entière  de  mouvements,  les  deux  adversaires 
étaient  séparés  par  des  barrières  qui  empêchaient  le  combat  corps  à 
corps. 

19,  Dommageables.  —  Par  ce  qu'il  a  dit  du  duel  et  ce  qu'il  dit  ici  de 
l'escrime  —  qui  en  est  l'exercice  préparatoire  —  on  voit  que  Montaigne 
réprouve  à  la  fois  l'un  et  l'autre.  En  ce  qui  touche  le  duel  proprement  dit, 
cette  réprobation  est  parfaitement  justifiée,  c'est   un  reste  d'institutions 


NOTES.        LIV.  II,  Cil.  XXVII.        VOL.  II,  PAG.  578.         Fb.567 

barbares  où  le  bon  droit  n'entre  pour  rien  et  a  trop  souvent  le  dessous, 
mais  il  est  dans  les  mœurs  et  par  cela  même  difficile  à  déraciner,  au 
point  que  la  peine  de  mort  édictée  contre  les  duellistes,  et  appliquée  à 
certains  moments,  n'a  pu  en  avoir  raison.  De  nos  jours,  où  les  lois,  à  cet 
égard,  sont  absolument  lettre  morte,  il  est  surtout  cultivé  par  de  faux 
braves  auxquels  il  sert  à  faire  de  la  réclame.  Il  n'en  serait  pas  ainsi  si  on 
ridiculisait  comme  elles  le  méritent  ces  rencontres  sans  motifs  séiùeux, 
aboutissant  à  des  résultats  qui  ne  le  sont  pas  davantage.  Si,  chaque  fois, 
elles  devaient  se  poursuivre  jusqu'à  la  mise  hors  de  combat  de  l'un  des 
deux  adversaires  et  n'étaient  pas  arrêtées  à  la  moindre  égratignure,  ou  à 
la  première  balle  tirée  même  perdue,  leur  nombre  s'en  réduirait  déjà 
considérablement;  et  bien  plus  encore  si  chaque  fois  aussi  la  justice, 
comme  c'est  son  devoir,  citait  devant  elle  sans  exception  et  non  à  sa  fan- 
taisie tous  ceux  ayant  soit  comme  adversaires,  soit  comme  témoins  par- 
ticipé à  un  duel,  quel  qu'en  ait  été  le  résultat,  et  frappait  impitoyablement 
pour  fait  ou  tentative  d'homicide  ou  de  coups  et  blessures  celui  qui  serait 
reconnu  avoir  à  sa  charge  les  torts  ayant  rendu  le  duel  indispensable  ou 
l'ayant  amené  abusivement.  Dans  ces  conditions,  on  se  respecterait  davan- 
tage les  uns  les  autres,  tout  en  n'allant  sur  le  terrain  que  pour  des  raisons 
en  valant  la  peine,  si  toutefois  il  en  existe  qui  justifient  que,  quelle  que 
soit  l'inégalité  que  crée  entre  les  adversaires  la  pratique  des  armes,  se 
faire  tuer  ou  blesser  répare  une  injure  dont  on  a  été  victime.  Cela  est 
tellement  absurde  qu'il  serait  tout  aussi  efficace  et  bien  plus  logique  de  la 
part  de  ceux  qui  sont  d'accord  pour  régler  leurs  querelles  de  la  sorte,  de 
fixer  d'abord  à  l'amiable,  par  l'intermédiaire  de  leurs  témoins,  la  répara- 
lion  jugée  nécessaire  :  la  mort,  une  balle  ou  un  coup  de  poignard  dans  la 
poitrine,  dans  un  membre,  ou  encore  payer  une  amende,  accomphr  tel  ou 
tel  acte,  satisfaire  à  telle  convention,  suivant  ce  qui  aurait  été  ainsi  dé- 
cidé, et  tirer  au  sort  auquel  des  deux  il  échéerait  de  s'exécuter.  De  cette 
façon,  les  chances  seraient  égales,  le  but  ne  serait  pas  dépassé,  et  la  justice 
n'aurait  pas  à  intervenir;  sans  compter  que  si  hétérochte  que  cela  pa- 
raisse, ce  mode  de  règlement  a  parfois  été  déjà  employé. 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  duel  est  et  restera  toujours  une  institution 
qui  n'a  pas  le  sens  commun  :  —  Tandis  qu'il  est  permis  aux  personnes 
soi-disant  distinguées  de  se  faire  justice  à  coups  d'épée  ou  de  pistolet, 
il  est  défendu  à  l'homme  du  peuple  de  se  la  faire  à  coups  de  bâton 
(Colonel  Perron).  —  On  rougit  dans  le  monde  honorable  de  ruiner  un 
joueur  qui  ne  sait  pas  jouer,  on  ne  rougit  pas  d'ôter  la  vie  à  qui  ne  sait 
pas  se  défendre.  —  Ces  rencontres  sont  tout  à  l'avantage  de  l'homme  im- 
moral qui,  parce  qu'il  sait  manier  une  arme,  se  croit  tout  permis  ;  elles  ne 
prouvent  même  pas  la  véritable  bravoure,  s'allient  souvent  aux  vices  les 
plus  dégoûtants  et  même  avec  la  lâcheté  militaire;  les  plus  hardis  bret- 
teurs  ne  sont  parfois  que  de  mauvais  soldats  (le  journal  l'Eclair). 

2-2,  Confus.  —  Erreur  évidente;  il  faut  lire  «  consul  »,  comme  le  porte  du 
reste  l'ex.  de  Bordeaux.  —  Le  fait  est  rapporté  par  Valère  Maxime,  II,  3,  2. 

28,  Pbarsale.  —  Plutarque,  César,  12.  —  La  recommandation  faite  par 
César  à  ses  troupes,  de  frapper  leurs  adversaires  plutôt  au  visage,  tenait  à 
ce  que  la  cavalerie  de  Pompée  était  recrutée  en  majeure  partie  parmi  les 
jeunes  patriciens,  qui  appréhendaient  surtout  de  se  voir  défigurés.  Ce 
.  qu'avait  prévu  César,  arriva  :  détournant  la  vue,  se  couvrant  la  tête  pour 
se  préserver  la  face,  ils  ne  tardèrent  pas  à  prendre  honteusement  la  fuite, 
ce  qui  causa  la  perte  du  reste  de  leur  armée. 

31,  Pbilopœmen.  —  Plutarque,  Philopœmen,  12. 
580, 

1,  Cape.  —  En  habit  de  guerre. 

2,  Sachez.  —  Platon,  dans  le  dialogue  de  ce  nom. 

8,  Platon.  —  Traité  des  Z-ois,  VII. 

9,  Cecyo.  —  L'ex.  de  Bord,  porte  Epicius,  au  lieu  d'«  Epeius  »,  et  Cercyo 
au  lieu  de  «  Cecyo  ». 


Fb.568  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

11,  Confèrent.  —  Contribuent.  «  Conférer  »,  dans  ce  sens,  est  purement 
latin. 

12,  Maurice.  —  Philippe  est  désigné  sous  le  nom  de  Philippicus  et  indiqué 
conmie  beau-frère  et  non  comme  gendre  de  l'empereur  Maurice,  par  Zona- 
ras  et  Cedrenus.  —  Phocas,  avant  de  tuer  l'empereur  qu'il  avait  fait  pri- 
sonnier, fit  égorger,  en  présence  de  sa  victime,  ses  cinq  enfants.  La  nour- 
rice du  plus  jeune,  pour  le  sauver,  lui  avait  substitué  le  sien;  Phocas 
l'apprit  et  le  fit  livrer  au  bourreau. 

26,  Macédoine.  —  Tite-Live,  XL,  3  et  4.  —  Ce  Philippe  est  celui  qui,  à  deux 
reprises,  fit  la  guerre  aux  Romains,  et,  en  dernier  lieu,  subit  à  Cynos- 
céphales,  on  Thessalie  (Grèce),  une  défaite  qui  fut  suivie  d'un  traité  hon- 
teux; il  allait  reprendre  les  hostilités,  quand  il  mourut.  De  naturel  très 
soupçonneux,  il  alla,  sur  de  faux  rapports,  jusqu'à  faire  mettre  à  mort  son 
propre  fils. 

28,  Résoudre.  —  Se  rassurer. 

37,  Propos.  —  Ce  passage  «  Les  belles  matières...  à  mon  propos  »,  ne  figure 
pas  dans  l'ex.  de  Bord.  Son  intercalation  coupe  assez  inopportunément  le 
récit,  qui  est  tiré  de  Tite-Live,  XL,  4,  que  toutefois  Montaigne  ne  s'est  pas 
astreint  à  traduire  bien  fidèlement. 

582, 

8,  Roy.  —  Qui  ordonnait  de  saisir  les  enfants  de  tous  ceux  qu'il  avait  fait 

tuer. 
19,  loindre.  —  Comme  ces  gardes  étaient  sur  le  point  de  les  atteindre. 
24,  Traictes.  —  Tirées  du  fourreau,  mises  à  nu;  du  latin  tractus. 
26,  Forte.  —  Plus  noble,  plus  courageuse. 
34,  Maistres.  —  Le  fait  se  passait  on  185. 

38,  Vengeance.  —  Allusion  au  mot  de  Caligula  :  «  Je  veux  qu'il  se  sente 
mourir.  »  Suétone,  Caligula,  30. 

584, 

1,  Engins.  —  Ç.-à-d.  les  voilà  forcés  de  trouver  des  moyens  par  lesquels 
ils  puissent  savourer,  à  la  fois,  complètement  et  lentement  le  plaisir  de  la 
vengeance. 

4,  Cruauté.  —  Cette  même  pensée  se  trouve  déjà  exprimée  dans  les  mêmes 
termes,  liv.  II,  ch.  II  (II,  102),  et  ce  fut  un  des  passages  des  Essais  dont 
la  censure,  à  Rome,  fit  reproche  à  son  auteur.  —  Là  se  borne  l'apprécia- 
tion de  Montaigne  sur  la  peine  de  mort,  et  les  philanthropes  de  nos  jours 
qui  en  poursuivent  l'abolition  ne  sauraient  s'appuyer  sur  lui.  Cette  peine 
n'est  pas  à  supprimer,  même  à  l'égard  des  criminels  ne  jouissant  pas  de 
la  plénitude  de  leurs  facultés;  ils  ont  montré  qu'ils  sont  un  danger  public, 
comme  l'est  un  chien  enragé,  la  société  a  le  devoir  de  se  débarrasser  d'eux 
comme  de  lui.  Quant  à  son  efficacité  préventive,  elle  n'est  pas  niable,  pas 
plus  que  celle  des  châtiments  corporels  si  malencontreusement  supprimés 
en  France.  Ce  qui  restreint  l'effroi  salutaire  qu'elle  inspire  c'est  surtout 
l'espoir  d'y  échapper,  depuis  que  les  jurys  et  le  chef,  de  l'Etat  ont  exigé 
en  principe,  les  uns  les  circonstances  atténuantes  lors  même  qu'il  n'y  en  a 
pas,  l'autre  la  grâce  octroyée  lors  même  qu'elle  est  le  moins  justifiée.  Par 
trop  de  sensiblerie  pour  les  mauvais,  on  en  est  arrivé  à  compromettre  la 
sécurité  des  bons  :  l'assassinat,  les  attaques  nocturnes  sont  devenus  en 
France  de  pratique  courante;  à  Londres,  qui  a  six  millions  d'habitants, 
on  ne  compte  en  moyenne  par  an  que  seize  à  vingt  assassinats,  tandis 
qu'à  Paris,  où  la  population  est  moitié  moindre,  il  y  en  a  dix  fois  plus. 
C'est  qu'aussi  chez  nos  voisins  d'outre-Manche  tout  assassin  est  pendu  :  il 
n'y  a  ni  circonstances  atténuantes,  ni  distinction  de  sexe;  toute  attaque 
nocturne  est  punie  du  «  Chat  à  neuf  queues  »,  sorte  de  knout,  sans 
préjudice  du  «  hard  labour  »  (travaux  forcés),  et  celui  qui  en  a  goûté 
une  fois,  ne  s'expose  guère  à  le  recevoir  une  seconde.  —  Quant  à 
la  publicité  des  exécutions,  elle  est  sans  utilité  et  a  même  des  inconvé- 
nients, dont  le  plus  grave  est  de  diminuer  la  crainte  qu'elle  inspire,  en 


586, 


NOTES.         LIV.  II,  CIL  XXVII.         VOL.  II,  PAG.  584.         Fb.569 

montrant  combien  c'est  peu  de  chose;  l'abus  qu'on  en  fit  sous  la  Terreur 
n'avait-il  pas  enlevé  à  la  plupart  des  prisonniers  déférés  au  Tribunal  ré- 
volutionnaire, certains  dès  le  premier  moment  du  sort  qui  les  attendait, 
et  familiarisés  avec  celte  idée,  les  préoccupations  inhérentes  d'ordinaire  à 
ceux  qui  sont  sous  le  coup  d'accusations  capitales! 

10,  losepbe.  —  Dans  VHùtoire  de  sa  vie,  vers  la  fin. 

16,  Mecbmed.  —  Chalcondyle,  Bist.  des  Turcs,  liv.  X.  —  Mahomet  II;  s'em- 
para de  Constantinople  dont  il  fit  sa  capitale  et  subjugua  la  presque  tota- 
talité  des  provinces  qui  font  partie  ou  relèvent  encore  actuellement  de  la 
Turquie  d'Europe;  à  la  gloire  des  armes,  joignit  celle  des  lettres;  l'histoire 
lui  reproche  cependant  des  actes  d'une  cruauté  révoltante. 

19,  Simeterre.  —  Ou  mieux  cimeterre;  sabre  à  lame  fort  large  et  recourbée 
dont  faisaient  particulièrement  usage  les  Turcs. 

27,  Crœsus.  —  Hérodote,  I,  92;  Plutarque,  De  la  malignité  d'Hérodote. 

29,  FouUon.  —  Artisan  qui  fabriquait  le  drap. 

30,  Cardes.  —Sorte  de  peignes  formés  de  pointes  de  fer  très  fines,  disposées 
sur  un  grand  nombre  de  rangées,  servant  à  démêler  la  laine,  la  bourre 
ou  la  soie  dont  on  fait  les  étoffes. 

33,  Vayuode.  —  Titre  porté  autrefois  par  les  princes  des  principautés  danu- 
biennes. 

38,  L'enuie.  —  Toute  la  haine  qu'inspiraient  les  méfaits  de  l'un  et  de  l'autre. 
Du  latin  invidia  qui  a  cette  signification;  exemple,  parmi  tant  d'autres,  de 
la  propension  de  Montaigne  à  écrire  le  français  en  latin,  y  transposant  et 
adaptant  tous  mots,  expressions  et  tournures  de  phrase  lui  semblant 
propres  à  mieux  rendre  sa  pensée. 

3,  Suitte.  —  Chronique  de  Carion  et  Annales  de  Silésie.  —  En  1514.  A 
l'occasion  d'une  croisade  projetée  en  Hongrie  contre  les  Turcs,  un  soulè- 
vement de  gens  sans  aveu  éclata.  Ils  prirent  pour  chef  Georges  Sechel, 
qui  commit  à  l'égard  de  la  noblesse  les  actes  les  plus  horribles.  Vaincu 
en  divei*ses  rencontres  et  en  dernier  lieu  à  Temesvar,  Sechel  expia  ses 
forfaits  par  le  supplice  qu'indique  Montaigne  :  nu  et  enchaîné  sur  un 
chevalet,  on  lui  mit  sur  la  tète  une  couronne  de  fer  ardent;  on  le  saigna 
et  on  fit  boire  son  sang  à  son  frère;  puis  après  lui  avoir  refermé  les 
veines,  on  fit  dévorer  à  belles  dents  son  corps  par  vingt  de  ses  complices 
et  ce  qui  demeura  de  son  corps  fut  haché,  bouilli  et  rôti,  et  on  le  leur  fit 
manger;  eux-mêmes,  on  les  fit  périr  ensuite  dans  d'affreux  supplices. 


CHAPITRE  XXVIH. 

4,  Caton  le  Censeur.  —  Fut  préteur;  consul,  obtint  par  ses  succès  en 
Grèce  les  honneui-s  du  triomphe;  enfin  censeur,  fonctions  qu'il  exerça  avec 
une  grande  sévérité.  Dans  ses  dernières  années,  redoutant  la  rivalité  de 
Carthage,  il  terminait  tous  ses  discours  au  Sénat,,  quel  qu'en  fût  l'objet, 
en  disant  qu'il  fallait  la  détruire.  On  lui  a  reproché  son  avarice  (V.  N.  I, 
564  ;  Dehors;  N.  II,  112  :  Seruy)  et  trop  de  penchant  pour  le  vin  (V.  N.  I, 
616  :   l-irlus). 

4,  leune  Caton.  —  Montra  de  bonne  heure  une  âme  ferme  et  courageuse 
qui  ne  se  démentit  jamais.  Lors  de  la  rivalité  de  César  et  de  Pompée,  il  se 
déclara  pour  ce  dernier;  du  reste  bien  avant  déjà  il  s'était  prononcé 
contre  César  dont  il  redoutait  l'ambition  et  qui  avait  été  l'amant  de  sa 
sœur.  Après  la  défaite  de  Pompée,  il  rallia  son  armée  et  passa  en  Afrique 
pour  continuer  la  résistance;  la  bataille  de  Thapsus  anéantit  ses  espé- 
rances; enfermé  dans  Utique,  il  s'y  donna  la  mort,  et  de  ce  fait  a  été  appelé 
Caton  d'Utique  pour  le  distinguer  de  son  grand-oncle  Caton  le  Censeur 
(V.  I,  502  et  N.  Escarmouche;  N.  II,  430  :  Premier;  N.  II,  434  :  Autre; 
N.  I,  404  :  Catoni). 

5,  Apparient.  —  Les  éd.  ant.  portent  :  font  à  mon  opinion  grand  honneur 


Fb.570  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

au  premier  :  car  ie  les  Irouue  eslongnex  d'vne  extrême  distance  ;  au  lieu  de  : 
«  apparient...  siècle  ». 

6,  Visages.  —  C.-à-d.  le  premier  montra  son  beau  naturel  sous  plus  d'as- 
pects différents. 

6,  Precelle.  —  L'emporte;  du  latin  prsecellere,  surpasser,  vaincre. 

11,  Scipion.  —  L'animosité  de  Caton  le  Censeur  contre  Scipion  l'Africain  ne 
prit  jamais  fin.  Non  content  de  l'attaquer  lui-même,  il  lui  suscita  des 
accusateurs  (V.  I,  660);  et,  ne  parvenant  pas  à  l'atteindre  à  cause  de  son 
illustration,  il  poursuivit  son  frère  I.ucius  qu'il  fit  condamner  à  une 
amende  excédant  ses  ressources  et  plus  tard,  lorsque  lui-même  fut  cen- 
seur, il  alla  jusqu'à  le  priver  de  son  cheval,  pour  insulter  à  la  mémoire 
de  son  frère. 

13,  Dit.  —  Plutarque,  Caton  le  Censeur,  1. 

14,  Grecque.  —  Caton  avait  quatre-vingts  ans  quand  il  commença  à  se 
livrer  à  l'étude  de  cette  langue. 

17,  Enfantillage.  —  En  enfance.  Cette  expression  de  Montaigne  est  de  celles 
'  que  Pasqlier  lui  reproche  d'avoir  employées  dans  un  sens  inaccoutumé. 

17,  Et  tout.  —  Aussi.  On  dit  encore  dans  certaines  parties  de  la  France, 
notamment  en  Sologne,  «  itout  »,  pour  aussi. 

18,  Patenostre.  —  L'oraison  dominicale,  le  Pater  noster,  comme  l'on  dit 
quelquefois,  ou  simplement  le  Pater,  expression  d'usage  courant.  Patenostre, 
au  dire  de  Pasqcier,  était  à  l'époque  une  expression  purement  gasconne  : 
«  Dieu  nous  garde  des  patenostres  de  M.  le  Connétable  »,  disait-on  alors, 
en  parlant  du  connétable  de  Montmorency  qui,  dévot  autant  que  sévère, 
marmottait  toujours  Pater,  Credo  et  Ave  Maria,  ne  s'interrompait  que 
pour  ordonner  des  mesures  de  rigueur  et  reprendre  aussitôt  ses  oraisons. 

21,  Gaigna.  —  Plutarque,  Parallèle  de  Flaminius  avec  Philopœmen.  —  En 
197;  à  la  bataille  de  Cynoscéphales,  où  il  défit  Philippe  V,  roi  de  Macé- 
doine. 

22,  Honestis.  —  Dans  Juvénal,  d'où  elle  est  tirée,  cette  phrase  a  un  sens  tout 
autre  que  celui  dans  lequel  elle  est  employée  ici. 

24,  Encore?  —  Plutarque,  Apophlh.  des  Lacédémoniens.  Xénocrate,  dit-il, 
venait  à  l'école  d'Eudeminondas  pour  y  apprendre  la  vertu  :  «  Quand  en 
usera-t-il,  s'il  en  est  encore  à  la  chercher?  »  aurait  observé  celui-ci.  Le  fait 
ainsi  présenté  semble  douteux.  Xénocrate  ayant  été  des  disciples  de  Platon, 
au  nombre  desquels  comptait  également  Eudeminondas,  et  ayant  dirigé 
l'Académie,  après  Speusippe,  pendant  vingt-cinq  ans;  mais  il  se  peut  que 
Xénocrate  qui,  lui  aussi,  l'avait  eu  pour  auditeur,  allât  parfois  l'entendre 
quand  il  en  vint  lui-même  à  professer. 

25,  Philopœmen.  —  Plutarque,  Philopœmen,  12. 
588, 

1,  Sages.  —  Cette  maxime  est  tirée  de  Sénèque,  Epist.  36. 
20,  Cettuy-cy.  —  Caton  le  Censeur. 

23,  Abécédaire.  —  Sénèque,  Epist.  36. 

40,  Nuict.  —  Sénèque,  Epist.  71  et  104.  Le  jour  où  Caton  échoua  dans  l'obten- 
tion de  la  préture,  dit  l'auteur  latin,  il  alla  jouer  à  la  paume;  Montaigne 
parle  à  cette  occasion  de  la  nuit  au  lieu  du  jour,  probablement  par  licence 
littéraire,  pour  mieux  établir  le  parallèle  entre  ce  fait  et  celui  de  sa  mort. 

CHAPITRE  XXIX. 

590, 

6,  Quelqu'vn.  —  Sénèque,  Epist.  73,  et  De  Providentia,  5.  —  Cela  rappelle 
ces  vers  de  Sylvain  Maréchal,  un  des  chantres  de  la  Liberté  et  de  la  déesse 
Raison  (1750  à  1803)  : 

.  Le  Sage  est  plus  que  Dieu,  sur  ce  globe  bizarre  : 
Les  maux  que  Dieu  permet,  le  Sage  les  répare  ; 
D'un  souffle,  en  se  jouant,  Dieu  créant  l'univers. 
Est  moins  que  Régulus  redemandant  des  fers.  » 


NOTES.        LIV.  II,  Cil.  XXIX.         VOL.  II,  PAG.  690.  Fb.b71 

8,  Imbécillité.  —  La  faiblesse  ;  du  latin  imbecillUas,  qui  a  même  signification. 

9,  Dieu.  —  Cette  même  pensée  a  été  bien  souvent  exprimée.  —  Cicéron  : 
«  Il  n'est  point  de  puissance  que  la  force  ou  le  fer  ne  viennent  à  bout  de 
briser  ou  de  détruire;  mais  se  vaincre  soi-même,  étoutïer  son  ressentiment, 
modérer  sa  victoire...,  jc'est  là  un  héroïsme  qui  vous  élève  au-dessus  des 
plus  grands  hommes  ou  plutôt  vous  assimile  aux  dieux  eux-mêmes.  •  — 
P.  Syrus  :  «  On  vainc  deux  fois  quand,  victorieux,  on  se  vainc  soi-même.  - 
—  S.\L0M0N  :  «  Qui  se  domine  est  plus  grand  qu'un  conquérant.  »  —  St- 
NÈQUE  :  «  11  n'y  a  pas  plus  puissant,  que  celui  qui  se  possède.  •  —  Th.  Cor- 
neille : 

«  Un  roi,  né  pour  l'éclat  des  grandes  actions, 

Dompte  jusqu'à  ses  passions  ; 
11  ne  se  croit  point  roi,  s'il  ne  fait  sur  lui-même 
Le  plus  illustre  essai  de  son  pouvoir  suprême.  • 

La  Fontaine*^  «  La  plus  belle  victoire  est  de  vaincre  son  cœur.  » 
2(3,  Manque.  —  Défectueux,  imparfait,  faible. 

28,  lours.  —  Les  actes  de  la  vie  ordinaire  et  sa  manière  d'être  habituelle. 
592, 

6,  Conte.  —  Diogène  Laebce,  62  et  63. 

11,  Amis.  —  Montaigne  a  dit  précédemment  (liv.  II,  ch.  XII,  vol.  II,  p.  236) 
que  ceux  qui  dépeignent  ainsi  Pyrrhon,  enchérissent  sur  sa  doctrine. 

27,  Discours.  —  Diogène  Laerce,  66. 

28,  D'icy.  —  Du  manoir  de  Montaigne. 

31,  Bien-veignant.  —  L'accueillant,  en  manière  de  bienvenue. 

35,  Nostres.  —  Un  fait  semblable,  chez  un  jeune  gentilhomme  de  la  Sologne, 
est  relaté  par  Henry  Estienxe,  dans  son  Apologie  pour  Hérodote,  I,  et  se 
serait  passé  au  milieu  du  xvi"  siècle;  peut-être  est-ce  le  même  auquel 
Montaigne  fait  allusion. 

40,  Extulerat.  —  Le  texte  de  Ti  bulle  porte  extulil. 
594, 

3,  Cibele.  —  Les  Galles,  prêtres  de  Cybèle,  se  mutilaient  eux-mêmes,  en 
se  faisant  initier,  coutume  que  l'on  fait  remonter  à  Atys  leur  fondateur 
qui,  aimé  de  Cybèle  et  commis  par  elle  à  son  culte,  après  lui  avoir  juré 
de  garder  la  chasteté,  ayant  manqué  à  son  serment,  fut  inspiré  par  la 
déesse  d'une  telle  fureur  qu'il  se  mutila  lui-même. 

28,  lours.  —  Peut-être  Marco  Polo,  vénitien,  dont  les   voyages  en  Asie, 
notamment  en  Tartarie,  où  cette  coutume  semble  avoir  existé,  bien  qu'ef- 
fectués à  la  fin  du  xui"  siècle,  n'ont  été   publiés  qu'au   commencement 
du  xvr. 
596, 

1,  Baller.  —  Danser,  de  l'italien  ballare  qui  a  même  signification. 

17,  Tristesse.  —  L'usage  de  se  jeter  dans  les  flammes  à  la  mort  du  mari 
existe  encore  dans  l'Inde;  dans  la  partie  soumise  aux  Anglais,  il  faut  en 
obtenir  la  permission,  et  le  nombre  de  ces  sacrifices  qu'ils  ont  tolérés 
s'est,  de  I8Î7  à  I82I,  en  cinq  ans,  élevé  à  3.402  (trois  mille  quatre  cent 
deux) ! 

26,  Gymnosopbistes.  —  Quinte-Curce,  VIII,  9;  Strabon,  XV.  —  Ils  allaient 
toujours  nu-tête  et  nu-pieds,  d'où  leur  nom  ;  faisaient  profession  de  vivre 
dans  la  retraite,  de  fuir  le  mariage  et  de  mépriser  la  douleur.  Montaigne 
mentionne  ici  d'après  Plutarque,  Alexandre,  21,  la  mort  de  l'un  d'eux; 
trois  siècles  plus  tard,  un  autre  nommé  Zarmenochegas  en  agissait  de 
même,  dans  Athènes,  devant  Auguste. 

28,  Façon.  —  Usage,  coutume. 

39,  Fatum.  —  Le  destin,  la  fatalité.  Allusion  aux  querelles  suscitées  à 
maintes  reprises,  dans  l'Église  même,  par  le  don  de  prescience  attribué 
à  Dieu,  qui  enlèverait  à  l'homme  son  libre  arbitre,  son  arbitrage,  comme 
dit  Montaigne  quelques  lignes  plus  loin. 


Fb.572  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

598, 

26,  Sarrazins.  —  Cette  appellation  donnée  au  moj'en  âge  aux  armées  mu- 
sulmanes, viendrait  de  ce  qu'au  début  certaines  tribus  pillardes  de  l'A- 
rabie (Serrak,  en  arabe,  signifie  voleur)  constituaient  leur  force  princi- 
pale. 

27,  S.  Lonys.  —  Atteint  d'une  maladie  dangereuse,  fit  vœu  d'aller  combattre 
les  infidèles.  Il  débarqua  en  Egypte  où,  après  quelques  succès,  il  fut  battu 
et  fait  prisonnier  à  la  bataille  de  Mansourah  ;  ayant  racheté  sa  liberté,  il 
passa  en  Palestine,  où  il  demeura  quatre  ans  sans  grands  résultats.  En 
1270,  il  s'embarqua  pour  une  seconde  guerre  sainte,  et  aborda  près  de 
Tunis;  mais  la  peste  se  mit  peu  après  dans  son  armée,  lui-même  en  fut 
atteint  et  mourut. 

34,  Mort.  —  Mémoires  de  Joinville. 

42,  Improuueu.  —  En  1498.  Savonarole,  moine  jacobin  et  partisan  de  la 
France  à  Florence,  était  accusé  d'hérésie,  de  paillardise  et  de  tromper  le 
peuple  dans  ses  prédications.  Un  cordelier,  adversaire  politique  et  reli- 
gieux des  Jacobins,  offrit  de  démentir  ses  impostures  et  ses  fausses  doc- 
trines par  l'épreuve  du  feu  :  tous  deux  devaient  ensemble  monter  sur  un 
même  bûcher;  il  ne  doutait  pas  d'y  rester,  mais  avec  lui  son  adversaire 
qui  se  disait  certaih  dy  échapper.  Savonarole  se  présenta  ayant  en  main 
le  Corpus  Domini  (une  hostie  consacrée),  prétendant  que  c'était  là  sa  sau- 
vegarde; le  cordelier  protesta,  mais  en  vain,  disant  qu'il  était  impie  d'ex- 
poser l'hostie  à  être  brûlée,  et,  de  ce  fait,  l'épreuve  n'eut  pas  lieu.  Quelques 
jours  après,  condamné  par  le  représentant  du  pape,  Savonarole  périt 
dans  les  flammes.  —  Mémoires  de  Ph.  de  Comixes,  VIII,  19;  Sismondi,  Répu- 
bliques italiennes  du.  Moyen  Age,  Xll,  98. 
600, 

2,  L'Huniade.  —  En  1448,  lors  de  la  bataille  de  Crassovie,  où,  pendant 
trois  jours,  les  Hongrois  résistèrent  à  l'armée  ottomane  quatre  fois  plus 
nombreuse  qu'eux. 

2,  Donner.  —  «  A  se  livrer  »  ou  «  à  se  choquer  »,  batailles  ayant  ici 
le  sens  d'  «  armées  ». 

7,  Forme.  —  «  Au  gîte  »,  terme  de  chasse. 

29,  Espaule.  —  Henri  de  Navarre,  depuis  Henri  IV,  qui  par  son  activité, 
et  quelquefois  par  sa  témérité,  suppléait  aux  ressources  qui  lui  man- 
quaient. 
31,  D'Orange.  —  Guillaume  de  Nassau,  chef  des  Pays-Bas  révoltés  contre 
la  domination  des  Espagnols  qui  avaient  mis  sa  tête  à  prix.  Assassiné  en 
1584  par  un  fanatique  qui  le  tua  d'un  coup  de  pistolet,  il  avait  déjà  été, 
deux  ans  auparavant,  l'objet  d'une  semblable  tentative  de  meurtre. 
602, 

3,  Troublé.  —  Actuellement  le  poignard  est  bien  délaissé  dans  le  cas  où 
ces  attentats  sont  inspirés  par  la  politique  ou  la  question  sociale  qui  sont 
devenues  tout  un;  au  pistolet  s'est  substitué  le  revolver;  mais  c'est  aux 
explosifs  que  l'on  a  recours  de  préférence.  Les  facilités  d'exécution  et  les 
chances  d'échapper  soi-même  sont  beaucoup  plus  grandes;  le  nombre  des 
victimes  étrangères  à  la  cause  est  à  la  vérité  plus  considérable,  mais  de 
cela  n'ont  cure  ceux  qui,  à  l'abri  de  tout  danger,  ont  préparé  le  forfait. 

11,  Pareil.  —  En  1563,  par  Poltrot  de  Méré,  lequel  assassina  le  duc  de 
Guise  qui,  venant  de  mettre  le  siège  devant  Orléans,  revenait  à  cheval  à 
son  logis.  Contrairement  à  ce  que  dit  Montaigne,  l'assassin  était  à  pied, 
embusqué  derrière  un  buisson,  et  tira  à  six  pas  de  distance;  son  arresta- 
tion n'eut  lieu  que  le  lendemain;  après  jugement,  il  fut  écartelé.  Mémoires 
de  Brantôme,  à  l'art.  M.  de  Guise,  tome  111. 

23,  L'aultre.  —  Balthazar  Gérard,  l'assassin  du  prince  d'Orange;  il  fut 
pareillement  écartelé. 

25,  Assassins.  —  Assassiniens.  Peuplade  de  Phénicie;  leur  Chef  n'était 
connu  des  croisés  que  sous  le  nom  de  «  Vieux  de  la  Montagne  •  ;  l'obéis- 
sance absolue   des  initiés  à  ses  ordres  le   faisait  redouter  de  tous;  nul 


NOTES.        LIV.  II,  CH.  XXIX.         VOL.  II,  PAG.  602.  Fb.o73 

n'était  à  l'abri  des  arrêts  de  mort  qu'il  prononçait.  —  On  a  beaucoup  dis- 
cuté sur  leur  nom,  d'où  nous  avons  fait  assassins  et  qui  est  passé  dans 
notre  langue  :  les  uns  le  font  dériver  du  pays  qu'ils  occupaient  et  qui  se 
serait  appelé  Haschischa;  d'autres  de  ce  que  c'étaient  des  fumeurs  de 
«  haschisch  •  (sorte  de  préparation  enivrante  du  chanvre);  d'autres,  de  ce 
que  leur  arme  de  prédilectiofi  était  un  poignard  appelé  Sahs,  etc.;  pour 
nous,  nous  estimons  qu'il  vient  du  met  arabe  asses  (gardes),  encore  actuel- 
lement usité,  parce  qu'ils  étaient  les  gardes  de  leur  chef  et  que  leur  rôle 
actif  en  avait  fait  la  terreur  des  contrées  environnantes.  —  Consulter  à  ce 
sujet  Sylvestre  de  Sacy. 

'M,  Saincte.  —  En  1151;  ce  crime  fut  le  fait  d'un  fanatique  religieux. 

Ul,  Montferrat.  —  En  1192,  à  Tyr;  Conrad  qui  en  était  seigneur  y  fut  as- 
sassiné pour  n'avoir  pas  fait  droit  à  une  réclamation  du  Vieux  de  la  Mon- 
tagne qui  revendiquait,  comme  lui  appartenant,  un  vaisseau  dont  le 
Tyriens  s'étaient  emparé. 

CHAPITRE  XXX. 

604, 

■29,  Teste.  —  Montaigne  parle  ici  d'un  être  né  viable  à  deux  corps  et  une 
seule  tête.  Ce  cas  est  moins  fréquent  que  celui  de  jumeaux  unis  tangen- 
tiellement  par  une  membrane  qu'aujourd'hui  on  tente  parfois  de  disjoindre 
par  une  opération  chirurgicale  :  tels  les  frères  Siamois,  dans  la  première 
moitié  du  siècle  dernier,  qui  arrivèrent  à  âge  d'homme  et  demeurèrent 
ainsi  unis  jusqu'à  leur  mort;  celle  de  l'un  entraîna  celle  de  l'autre.  — 
En  Suisse,  les  soeurs  Marie- Adèle,  opérées  en  1882  et  qui  succombèrent 
toutes  deux.  —  En  188G,  les  filles  du  docteur  allemand  Bœhm,  opérées  par 
leur  père  quelques  jours  après  leur  naissance;  l'une  d'elles  mourut.  —  Les 
sœurs  brésiliennes  Rosalina-Maria,  opérées  en  1900  et  dont  l'une  mourut 
six  jours  après.  —  Les  sœurs  hindoues  Radica-Doodica,  fillettes  de  8  à  9  ans, 
toutes  deux  tuberculeuses,  opérées  en  1902,  qui  moururent  l'une  six  jours, 
l'autre  douze  à  quinze  mois  après.  —  Les  sœurs  Rosa-Josepha,  nées  en 
1877,  dans  les  environs  de  Prague,  opérées  en  Amérique,  en  1906,  avec 
succès,  semble-t-il.  —  Deux  jeunes  Chinois,  encore  indemnes,  que  l'on 
exhibe  à  travers  lo  monde  dans  les  fêtes  foraines. 

30,  JRoy.  —  llenrilll,  sous  lequel  s'agitaient  trois  partis  puissants  :  les 
Catholiques,  la  Ligue  et  les  Protestants. 

35,  Reculons.  —  La  remarque  est  d'ARisTOTE  qui,  dans  sa  Rhétorique,  111, 
12,  dit  qu'Épiménide  n'exerçait  point  sa  faculté  divinatrice  sur  les  choses 
à  venir,  mais  sur  celles  qui  étaient  passées  et  encore  inconnues. 
606, 

7,  Homme.  —  «  Cette  opinion  de  Montaigne  :  «  Ce  que  nous  appelons 
monstres,  etc..  »,  résume  admirablement  l'opinion  qui  prévaut  de  nos 
jours,  et  la  science  d'aujourd'hui  ne  saurait  rendre  d'une  manière  plus 
concise  et  plus  énergique  l'opinion  à  laquelle  elle  s'est  arrêtée  et  qui  est 
bien  plus  sage  que  celle  qui  consiste  à  dire  que  la  monstruosité  est  l'ab- 
sence de  quelque  cause  finale.  »  Chateaubriand,  —  Le  même  dit  encore  : 
«  Les  monstruosités  nous  sont  envoyées  pour  nous  montrer  ce  que  serait 
la  création,  si  Dieu  retirait  sa  main.  >•  —  «  L'univers,  pour  qui  saurait 
l'embrasser  d'un  seul  coup  d'œil,  serait  un  fait  unique,  une  grande  vérité.  » 
D'Alembert.  —  «  Ce  qui  est  hasard  à  l'égard  de  nos  conseils  incertains  est 
un  dessein  concerté  dans  un  conseil  plus  haut.  •  Bossuet. 

12,  Soit.  —  «  Cela  est  absolument  vrai  au  physique  comme  au  moral;  tout 
est  dans  la  nature,  le  vice  comme  la  vertu;  et  il  est  impropre  de  dire, 
par  exemple,  que  tel  crime  est  contre  nature,  il  n'y  en  a  point  de  tel.  » 
Naigeon. 


Fb.574  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


CHAPITRE  XXXI. 


20,  Aristote.  —  Morale  à  Nicomaque,  X,  9,  où  se  trouve  cité  le  passage 
d'HoMÉRE  sur  les  Cyclopes,  Odyssée,  IX,  114. 

21,  Cyclopes.  —  Suivant  la  fable,  étaient  des  géants  monstrueux  n'ayant 
qu'un  œil  au  milieu  du  front  et  forgeant  dans  l'Etna,  sous  les  ordres  de 
Vulcain,  les  foudres  de  Jupiter;  suivant  l'Histoire,  ce  furent  les  premiers 
habitants  de  la  Sicile,  hardis  pirates,  toujours  sur  la  côte  à  épier  s'il  ne 
passait  pas  quelque  navire  pour  le  piller. 

608, 

7,  A  tout.  —  «  Avec  »,  comme  on  l'a  déjà  vu  plusieurs  fois. 
7,  Esclatante.  —  Avec  une  voix  aiguë,  des  éclats  de  voix. 

10,  Eslocbements.  —  Synonyme  d'esboittements  et  qui,  tous  deux,  signi- 
fient dislocations. 

15,  Sincérité.  —  Pureté,  netteté  de  jugement;  c'est  le  sens  propre  du  mot 
latin  sinceritas. 

18,  Pédantes.  —  Aux  maîtres  d'école. 

29,  R'accoisez.  —  Apaisés,  tranquillisés,  revenus  de  notre  emportement. 
Vient  de  l'ancien  mot  «  coi  »,  qui  ne  se  retrouve  plus  que  dans  les  ex- 
pressions «  se  tenir  coi  »,  «  demeurer  coi  »,  et"  qui  dérive  lui-même  du 
latin  quietus,  qui  a  même  signification. 

29,  Brouillas.  —  Brouillards.  —  Ce  passage  est  emprunté  de  Plutauque, 
Comment  il  faut  refréner  la  colère,  et  dans  les  mêmes  termes  que  ceux 
employés  par  Amyot  son  traducteur. 

39,  Gorgoneo.  —  Gorgones.  — -  C'étaient  trois  sœurs  hideuses  à  voir,  qui 
n'avaient  qu'un  œil  en  commun  et  changeaient  en  pierre  tous  ceux  qui  les 
regardaient;  Persée  en  délivra  la  terre  et  parvint,  avec  le  secours  de 
Minerve,  à  trancher  la  tête  de  Méduse,  l'une  d'elles,  que  la  déesse  fixa  sur 
son  égide  ou  bouclier.  Myth. 

40,  Rabirius.  —  Les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bord,  portent  :  Lucius  Saturninus, 
ce  en  quoi  il  y  a  confusion.  —  Rabirius  avait  été  un  des  sénateurs  les 
plus  opposés  à  Saturninus  lorsque,  37  ans  auparavant,  ce  tribun  du  peuple, 
chaud  partisan  de  Marins,  dont  César  était  le  neveu,  avait  été  assassiné; 
et  c'est  de  cet  assassinat  commis  non  par  lui,  mais  par  un  esclave,  qu'en 
la  circonstance,  il  était  accusé. 

610, 

1,  Faire.  —  ■<  Bien  dire  fait  rire,  bien  faire  fait  taire.  » 

2,  Ceux-là.  —  Les  Protestants. 

7,  Croit  pas.  —  Il  n'est  en  effet  que  trop  vrai  que  les  mœurs  ne  sont  pas 
toujours  en  concordance  avec  les  principes  religieux;  on  ne  saurait  nier 
•    cependant,  en  ce  qui  touche  le  Christianisme,  que  leur  action  ne  peut  être 
que  favorable. 

11,  Eudamidas.  —  Plutarque,  Apophth.  des  Lacédémoniens,  porte  Eudemo- 
nidas. 

14,  Cleomenes.  —  Plutarque,  ibid. 

19,  Viuement.  —  C.-à-d.  le  fait  entre  plus  avant  dans  l'àme,  frappe  plus  for- 
tement l'esprit  de  ceux  qui  le  lisent  ou  l'écoutent.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  : 
et  presse  bien  autrement. 

30,  Bien.  —  L'éd.  de  88  porte  :  d'honneur,  au  lieu  de  :  «  de  bien  ». 

31,  Proposer.  —  Aulu-Gelle,  XVIII,  3. 

35,  Aul.  Gellius.  —  Aulu-Gelle,  I,  26;  on  a  de  lui  un  ouvrage  qui  ne  nous 
est  pas  parvenu  en  entier,  intitulé  «  Nuits  attiques  »,  où  l'on  trouve  de 
précieux  renseignements  sur  l'antiquité  et  beaucoup  de  fragments  d'au- 
teurs anciens  perdus. 

612, 

3,  Vantait.  —  Cet  esclave  de  Plutarque  lui  reprochait  non  de  n'être  pas 
philosophe,  mais  de  ne  pas  agir  en  philosophe. 


NOTES.        LIV.  II,  GH.  XXXI.        VOL.  II,  PAG.  612.         Fb.SIS 

16,  Disputons.  —  «  La  valeur  ne  se  connaît  que  dans  la  guerre,  Tarnitié 
dans  le  besoin,  la  sagesse  dans  la  colère.  »  Prov.  oriental. 

16,  Archytas.  — Cicéron,  Tusc,  IV,  36;  De  Republica,  1,  38;  Valère  Maxime, 
IV,  1;  Lactance,  De  ira  Dei,  18;  etc. 

20,  Bien.  —  Les  éd.  ant.  portent  :  comme  lu  mérites,  au  lieu  de  :  <•  bien  ». 

21,  Platon.  —  SÉNÈQUE,  De  Ira,  111,  12. 

23,  Cbarillus.  —  Plutarque,  Apophlh.  des  Lacédémoniens. 
32,  Vertu.  —  Séxkqle,  De  Ira,  1,  16,  d'où  le  fait  est  tiré,  est  moins  favorable 
à  Pison  :  «  C'était,  dit-il,  un  homme  exempt  de  plusieurs  vices,  mais 
mauvais  et  dans  l'esprit  duquel  la  sévérité  était  la  fermeté  d'àme.  »  11 
passait  pour  avoir,  à  l'instigation  de  Tibère,  empoisonné  Germanicus; 
accusé  de  ce  crime  par  Agrippine  et  craignant  de  n'être  pas  soutenu  par 
l'empereur,  il  se  donna  la  mort. 
614, 

5,  Negotier.  —  Qui  ont  affaire  à  des  femmes  têtues. 
8,  Celius.  —  SÉNÈQUE,  De  Ira,  111,  8. 

15,  Pbocion.  —  Plutarque,  Inslructions  pour  ceux  qui  manient  affaires  d'Etat. 
—  Phocion,  aussi  redoutable  à  la  tribune  que  sur  le  champ  de  bataille, 
fut  le  rival  de  Démosthène  qui  l'appelait  la  «  hache  de  ses  discours  »;  il 
était  célèbre  par  son  désintéressement  et  sa  rigidité  de  principes;  injus- 
tement accusé  de  trahison,  fut  condamné  par  ses  concitojens  à  boire  la 
ciguë. 
616, 

3,  Dehors.  —  Peut-être  le  duc  d'Anjou,  devenu  Henri  111. 

4,  Diogenes.  —  Diogène  Laerce,  IV,  34.  —  Diogène,  venu  de  bonne  heure  à 
Athènes,  y  étudia  la  philosophie,  et,  adhérant  aux  principes  de  l'école 
des  Cyniques,  outra  leur  austérité,  vivant  dans  la  plus  grande  misère, 
habitant,  dit-on,  dans  un  tonneau  et  ne  subsistant  que  d'aumônes;  faisait 
surtout  consister  la  sagesse  dans  les  privations  volontaires.  On  cite  de  lui 
nombre  d'anecdotes  dont  l'authenticité  est  douteuse. 

7,  Butfe.  —  Soufflet.  —  L'éd.  de  88  porte  :  nazarde  à  son  valet  à  peu,  au 
lieu  de  :  <■  buffe...  peu  ». 

14,  Famille.  —  Cet  alinéa  semble  avoir  été  écrit  par  Montaigne  à  l'adresse 
de  sa  femme,  qu'il  ne  met  du  reste  presque  jamais  ostensiblement  en 
cause. 

29,  Partie.  —  Sans  partie  adverse,  sans  antagoniste. 

30,  Portent.  —  C.-à-d.  pour  en  user  là  seulement,  où  elles  peuvent  produire 
quelque  effet. 

618, 

0,  Mesme.  —  La  chute  des  corps  graves  abandonnés  à  eux-mêmes  est,  en 
effet,  accélérée  au  fur  et  à  mesure  qu'ils  descendent;  cela  est  vrai  au 
moral  comme  au  physique. 

7,  Paye.   —  Ce  qui  me  satisfait,   mè  dédommage,  c'est  que  lorsque   les 
occasions  sont  d'importance. 
10,  C^eruelle.  —  En  inquiétude. 

28,  Aristote.  —  Morale  à  Nicomaque,  111,  8. 

29,  Contredisent.  —  Sénèque,  De  Ira,  1,  16. 

CHAPITRE  XXXll. 

620, 

9,  Neutuiesme.  —  Le  règne  de  Charles  IX  fut  déchiré  par  les  guerres  des 
Catholiques  et  des  Protestants  ;  et  la  paix  étant  conclue,  déshonoré  par  le 
massacre  de  ces  derniers,  ordonné  à  l'instigation  de  la  reine  mère  Cathe- 
rine de  Médicis  et  pratiqué  à  la  fois  sur  tous  les  points  de  la  France, 
dans  la  nuit  de  la  S.-Barthélemy  (24  août  1572). 

15,  Esprit.  —  Les  éd.  ant.  portent  :  sa  viuacité,  au  lieu  de  :  ■<  son  esprit  ». 
22,  Seneque.  —  Sénèque  a  compté,  de  tous  temps,  des  partisans  très  décidés 

et  de  très  violents  adversaires  :  Montaigne,  Balzac,  le  comte  de  Maistre 


Pb.576  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

sont  au  nombre  des  premiers;  Diderot  en  fait  un  éloge  outré;  Dryden  et 
La  Harpe  le  déprécient  outre  mesure. 

24,  Dion.  —  A  écrit  une  histoire  romaine  depuis  Énée  jusqu'aux  temps  où 
lui-même  vivait.  Il  est  en  général  exact;  on  lui  reproche  cependant  de  la 
partialité  envers  certains,  entre  autres  contre  Sénèque. 
622, 

5,  Mort.  —  Tacite,  Annales,  XIII,  11;  XIV,  53,  54,  55;  XV,  60,  64.  Il  faut 
reconnaître  cependant  qu'il  y  a  dans  Tacite  même  de  terribles  imputations 
contre  lui,  notamment  quand  il  e  représente  (XIV,  7)  demandant  à  Bur- 
rhus  s'il  faut  ordonner  aux  soldats  le  meurtre  d'Agrippine,  et  se  chargeant 
ensuite  (XIV,  II)  de  l'apologie  de  ce  parricide. 

23,  Hannibfil.  —  Cette  appréciation  d'Annibal  aurait,  été  émise  par  lui 
dans  une  rencontre  qu'il  aurait  eue  à  Ephèse  avec  Scipion,  lorsque  le 
premier  était  réfugié  auprès  d'Antiochus  et  que  le  second  était  en  ambas- 
sade auprès  de  ce  prince  (190).  Elle  est  relatée  par  Plutarque  dans  les 
vies  de  Pyrrhus  et  de  Flaminius.  Dans  la  première  Annibal  aurait  assigné 
à  Pjrrhus  le  premier  rang,  à  Scipion  le  second  et  s'attribuait  à  lui-même 
le  troisième.  Dans  la  seconde,  il  donnait  la  prééminence  à  Alexandre,  le 
second  rang  à  Pyrrhus,  le  troisième  à  lui-même.  A  quoi  Scipion  lui 
ayant  dit  :  •  Et  comment  jugeriez-vous,  si  vous  m'aviez  vaincu?  »  Annibal 
aurait  répondu  :  ■<  Je  me  placerais  au-dessus  de  tous  les  autres  capitaines 
du  monde.  »  —  Tite-Live  relate  également  cette  conversation,  comme  le 
fait  Plutarque  dans  la  vie  de  Flaminius;  néanmoins,  elle  est  généralement 
considérée  comme  apocryphe,  on  ne  croit  même  pas  qu'Annibal  et  Scipion 
se  soient  rencontrés  nulle  part  après  Zama. 

23,  Autrement.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  :  recité. 

30,  Larecin.  —  Plutarque,  Lycurgue,  14.   —  Montaigne  a  déjà  mentionné 
ce  fait,  I,  458.  . 

33,  Loy.  —  Plus  de  moyen,  de  faculté,  de  liberté. 

36,  Pyrrhus.  —  Plutarque,  Pyrrhus,  12. 
624, 

9,  Ailleurs.  —  Immédiatement  après  l'exemple  de  cet  enfant  dont  il  est 
question  plus  haut,  qui  se  laissa  dévorer  le  ventre  par  un  jeune  renard 
qu'il  avait  dérobé. 

12,  Cicero.  —  Tusc,  II,  14;  V,  27. 

18,  Tesmoins.  —  Valère  Maxime,  III,  3,  cite  aussi  le  fait,  mais  en  attribuant 
ce  trait  de  courage  à  un  enfant  macédonien  qui  assistait  à  un  sacrifice 
offert  par  Alexandre. 

29,  Recite.  —  Liv.  XXII,  vers  la  fin  du  ch.  16. 

40,  Tua.  —  Tacite,  A^inales,  IV,  45.  —  L'an  25,  sous  le  règne  de  Tibère. 
L.  Pison  était  gouverneur  de  l'Espagne  citérieure;  ce  meurtre  fut  attribué 
à  la  sévérité  avec  laquelle  il  poursuivait  les  rentrées  au  trésor  public. 

40,  Epicbaris.  —  Tacite,  Annales,  XV.  57. 
626, 

10,  Argoulets.  —  Auprès  de  nos  soldats,  de  nos  gens  d'armes. 

17,  Pistole.  —  Avec  le  chien  d'un  pistolet.  Les  chiens  des  armes  à  feu  de 
l'époque  se  composaient  de  deux  plaquettes  en  fer  ou  mâchoires  reliées 
par  une  vis  et  formant  étau,  pour  tenir  soit  la  iTièche,  soit  la  pierre  servant 
à  mettre  ou  à  produire  le  feu. 

20,  Rançon.  —  Prix  payé  pour  se  racheter  de  captivité  ou  de  mauvais 
traitements  auxquels  on  se  trouvait  exposé. 

23,  Dague.  —  Sorte  de  poignard. 
628, 

4,  Ailleurs.  —  Ch.  XXVI  du  premier  livre  (I,  288  et  suivantes;. 
14,  Insupportable.  —  L'ex.  de  Bord,  porte  :  Quelle  bestiale  stupidité!  au  lieu 

de  "0...  insupportable?  » 
14,  Considère.  —  Les  éd.  ant.  portent  :  aucunes  de  ces  armes  anciennes  esle^ 
uées  iusqu'au  ciel  au  pris  de  la  mienne,  au  lieu  de  :  «  aucuns...  anciens  ». 

21,  Celles-là.  —  En  introduisant  la  variante  qui  précède,  Montaigne,  ayant 


NOTKS.         LIV.  II,  CH.  XXX[1.         VOL.  Il,  l*AG.  028.         Fb.577 

substitué   «   honunes  >•  à   «   àmcs   ■>,  aurait   dû    pareillement  remplacer 
«  celles-là  »  par  «  ceux-là  ». 

26,  Mulcté.  —  Mis  à  l'amende;  du  latin  mulctalus  qui  a  ce  même  sens.  Le 
fait  est  tiré  de  Plutarque,  Agésilas,    1. 

32,  Petalisme.  r-  L'ostracisme  était,  à  Athènes,  une  sentence  de  bannisse- 
ment politique  pour  dix  ans  qui,  lors  du  vote,  s'inscrivait  sur  une  co- 
quille, d'où  son  nom.  —  Le  petalisme  était  à  Syracuse  et  à  Corinthe  ce 
que  l'ostracisme  était  à  Athènes;  mais  sa  durée  n'était  que  de  cinq  ans  et 
le  vote  s'exprimait  sur  une  feuille  d'olivier,  d'où  aussi  le  nom  qu'il 
portait. 

36,  Cicero.  —  Fut  successivement  préteur,  édile  et  consul.  Mérita  le  nom 
do  «  Père  de  la  patrie  »,  en  déjouant  la  conjuration  de  Catilina;  embrassa 
le  parti  de  Pompée,  après  Pharsale  se  rallia  à  César.  Ce  dernier  mort,  il 
opposa  Octave,  neveu  de  César,  à  Antoine  qu'il  attaqua  vivement  et  dont 
l'influence  le  fit  proscrire;  il  périt  égorgé  comme  il  cherchait  à  fuir.  V. 
N.  II,  72. 

36,  Aristides.  —  Célèbre  par  ses  vertus  civiles  et  militaires;  son  intégrité 
le  fit  surnommer  ■•  le  Juste  »  ;  il  était  de  ceux  qui  commandaient  à  la 
bataille  de  Marathon,  contribua  au  succès  de  celles  de  Salamiue  et  de 
Platée,  fut  frappé  d'ostracisme  par  crainte  de  son  crédit,  chargé  d'admi- 
nistrer le  trésor  commun  des  Grecs  destiné  à  pourvoir  aux  guerres  futures 
contre  les  Perses,  et  mourut  si  pauvre  que  l'Etat  fut  obligé  de  pourvoir  à 
ses  funérailles  et  de  doter  ses  filles. 

36.  Sylla.  —  Lieutenant,  puis  collègue  et  enfin  rival  de  Marius  contre  lequel 
il  représentait  l'oligarchie;  vainqueur  de  Mithridate  l'oi  du  Pont,  il  parvint 
après  quelques  alternatives  à  triompher  des  partisans  de  Jlarius  qui  était 
mort  dans  l'intervalle,  et,  maître  absolu  de  Rome,  élu  dictateur  perpétuel, 
ensanglanta  ses  succès  par  d'horribles  cruautés  et  de  nombreuses  pros- 
criptions. Deux  ans  après,  sans  crainte  des  haines  qu'il  avait  suscitées, 
il  abdiquait  et  rentrait  dans  la  vie  privée;  il  mourut  l'année  suivante. 
V.  Il,  156  et  N.  Sylla. 

36,  Lysander.  —  Remporta  sur  les  Atiiéniens  la  victoire  navale  d'^Egos- 
Potaraos  qui  mit  fin  à  la  guerre  du  Péloponnèse  (405),  fut  tué  dix  ans  après 
dans  un  combat  livré  contre  les  Thébains. 

36,  Marcellus.  —  Fut  cinq  fois  consul;  battit  les  Gaulois  (222);  envoyé 
contre  Annibal  après  la  bataille  de  Cannes,  il  releva  les  affaires  des  Ro- 
mains à  Noie,  puis  à  Syracuse  dont  il  s'empara  après  un  siège  de  trois 
ans;  Archimède  périt  dans  le  sac  de  cette  ville,  malgré  l'ordre  qu'il  avait 
donné  de  l'épargner  (112);  vainqueur  d' Annibal  à  Canusium  (210),  il 
périt  deux  ans  après  dans  une  embuscade.  On  l'avait  surnommé  ■•  l'épée  de 
Rome  ■',  comme  Fabius  Cunctator  en  était  «  le  bouclier  ». 

37,  Pelopidas.  —  Ami  d'Epaminondas;  contribua  puissamment  à  l'expulsion 
des  Spartiates  de  Thèbes  (379);  fut  tu(''  eu  364  à  Cynoscéphales  (Thessa- 
lie),  dans  un  combat  contre  Alexandre  de  Phères. 

37,  Pompeius.  —  Général  romain,  surnommé  le  Grand.  Embrassa  le  parti 
de  Sylla;  reprit  la  Sicile  et  l'Afrique  aux  partisans  de  Jlarius.  Sylla 
mort,  il  reprend  la  Narbonnaise  et  l'Espagne  à  ses  adversaires  politiques 
à  la  suite  de  la  défaite  et  la  mort  de  Sertorius  (78).  Il  triomphe  en  Italie 
d'une  révolte  des  esclaves;  extermine  les  pirates  de  la  Méditerranée,  achève 
la  guerre  de  Mithridate,  conquiert  une  partie  de  l'Asie  et  forme  le  pre- 

.  mier  triumvirat  (60),  avec  Crassus  et  César  dont  il  a  épousé  la  fille.  A  la 
mort  de  cette  dernière  et  Crassus  ayant  été  tué  chez  les  Parthes,  il  rompt 
avec  César;  dans  la  lutte  qui  s'ensuit,  soutenu  par  le  Sénat,  il  n'en  est 
pas  moins  chassé  d'Italie,  passe  en  (jrèce,  tient  un  instant  son  ennemi 
en  échec  à  Dyrrachium,  mais  battu  à  Pharsale,  il  va  demander  asile  en 
Egypte,  où  à  son  débarquement  il  est  assassiné  par  ordre  du  roi.  Pompée 
parvint  au  faîte  des  grandeurs,  il  le  dut  surtout  à  sa  bonne  fortune;  il 
avait  de  l'ambition,  de  la  morgue,  des  talents,  mais  le  génie  lui  faisait 
défaut. 

ESSAIS   DE  MONTAIGNE.  —  T.    IV,  37 


Fb.578  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

37,  Agesilaus.  —  Roi  de  Sparte;  vainquit  les  Perses  en  Asie  et  conquit  l'Asie 
Mineure;  gagna  la  bataille  de  Coronée  sur  les  Grecs  coalisés,  et  fut  lui- 
même  vaincu  à  Mantinée  par  Epaminondas;  il  se  distinguait  par  son 
courage  et  sa  grandeur  d'àme;  à  l'âge  de  quatre-vingts  ans  il  guerroyait 
encore. — Au  nombre  des  recommandations  expresses  faites  par  Lycurgue, 
était  celle  de  ne  pas  combattre  trop  fréquemment  contre  les  mêmes  enne- 
mis, afin  qu'ils  n'arrivassent  point  à  acquérir  l'expérience  de  la  guerre; 
c'est  le  reproche  qu'on  a  fait  à  Agésilas,  d'avoir,  par  ses  expéditions  répétées 
en  Béotie,  rendu  les  Thébains  aussi  experts  en  cet  art  que  les  Lacédémo- 
niens  et  avoir  fini  par  être  battu  par  eux.  C'est  aussi  ce  qui  est  arrivé  à 
Napoléon  qui,  après  avoir  vaincu  l'Europe  si  souvent,  a  été  vaincu  par 
elle,  autant  parce  qu'au  jeu  de  la  guerre,  comme  en  tout  autre,  on  ne 
gagne  pas  toujours,  que  parce  qu'en  battant  sans  cesse  ses  adversaires,  il 
avait  laissé  pénétrer  par  quelques-uns,  partie  des  secrets  de  son  génie. 
630, 

4,  Œuures.  —  V.  II,  70  et  N.  Profitable. 

6,  Vertu.  —  Ce  même  esprit  d'équité  que  Montaigne  relève  dans  les  «  Vies 
illustres  »  de  Plutarque  et  notamment  dans  les  Parallèles  qui  s'y  trouvent 
insérés,  se  retrouve  dans  la  <>  Collation  d'aucunes  histoires  romaines  avec 
les  autres  semblables  grecques  »,  de  ce  même  auteur  ou  parues  sous  son 
nom.  On  y  voit  d'un  côté  Posthumius  livrant  au  supplice  son  fils,  bien 
que  vainqueur,  pour  avoir  combattu  contre  son  ordre;  et,  de  l'autre, 
Epaminondas  en  agir  de  même.  Là  c'est  Agamemnon  sacrifiant  sa  fille 
pour  obtenir  des  yents  favorables;  ici  c'est  la  fille  de  Métellus  qu'atteint  la 
même  infortune.  De  même  à  propos  du  dévouement  de  Décius,  de  l'hé- 
roïsme de  Mucius  Scevola,  de  la  trahison  du  roi  Pausanias  de  Sparte  et  de 
la  manière  dont  elle  fut  punie,  etc..  il  cite  des  faits  analogues  chez  la 
partie  adverse,  s'appliquant  d'une  façon  indéniable  à  tenir  la  balance 
égale  entre  les  Grecs  et  les  Romains. 

25,  Labienus.  —  L'un  des  plus  habiles  lieutenants  de  César  en  Gaule;  se 
sépara  de  lui  quand  celui-ci,  franchissant  le  Rubicon,  marcha  sur  Rome; 
embrassa  alors  le  parti  de  Pompée  et  prit  part  à  la  bataille  de  Munda 
(Espagne)  qui  mit  fin  à  la  guerre  civile. 

25,  Ventidius.  —  César  lui  confia  quelques  affaires  importantes  en  Gaule; 
après  la  mort  du  dictateur,  il  seconda  Antoine  contre  ses  meurtriers;  pos- 
térieurement opposé  aux  Parthes,  il  les  chassa  de  l'Asie  Mineure  (35). 

28,  Agis.  —  Agis  III  tenta  de  remettre  en  vigueur  les  lois  de  Lycurgue, 
d'abolir  les  dettes,  de  faire  un  nouveau  partage  des  terres,  mais  il  échoua 
et  fut  mis  à  mort  par  l'influence  de  ceux  dont  il  menaçait  les  intérêts 
(244  à  239). 

28,  Cleomenes.  —  Cleomène  111,  poureuivant  l'œuvre  d'Agis  III  son  prédé- 
cesseur, opéra  une  révolution  à  Sparte,  égorgea  les  éphores  qui  s'y  oppo- 
saient, détruisit  le  Sénat,  abolit  les  dettes,  effectua  un  nouveau  partage 
des  terres  et  bannit  le  luxe.  Ayant  à  combattre  les  Achéens,  d'abord  vain- 
queur, il  finit  par  être  vaincu  ;  il  passa  alors  en  Egypte  pour  y  chercher 
des  secours,  mais  déçu  dans  ses  espérances,  et  peu  après  menacé  dans  sa 
liberté,  il  fut  réduit  à  se  donner  la  mort. 

29,  Lycurgus.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  :  et  Scipion  encore  à  Epaminondas 
qui  estoyent  aussi  de  son  rolle. 

32,  Parangonner.  —  Comparer;  mot  d'étymologie  grecque,  *que  les  Italiens 
ont  conservé  avec  le  sens  qu'il  a  ici  ;  en  français,  n'est  plus  employé  que 
comme  terme  d'imprimerie. 

35,  Dit-il.  —  Dans  son  Parallèle  de  Pompée  avec  Agésilas. 

37,  Conférer.  —  Comparer,  du  latin  conferre;  Montaigne  en  fait  un  fré- 
quent usage  dans  cette  acception. 

38,  Dit-il.  —  Dans  son  Parallèle  entre  ces  deux  personnages. 
632, 

4,  Séparément.  —  Ainsi  que  l'auteur  l'observe,  Plutarque,  dans  ses  Paral- 
lèles, ne  porte  pas  d'appréciation  d'ensemble  sur  les  deux  hommes  qu'il 


NOTES.         LIV.  II,  Cil.  XXXII.         VOL.  11,  PAG.  632.         Fb.579 

met  en  comparaison;  il  fait  ressortir  pour  chacun,  sur  quelques  points 
caractéristiques,  ce  qu'il  y  a  de  plus  particulier  à  retenir,  et  il  est  assez 
difficile  de  conclure  pour  lui  : 

Entre  Démosthène  et  Cicéron,  il  donne  le  prix  de  l'éloquence  au  pre- 
mier et  insiste  sur  la  supériorité  des  mœurs  du  second.  11  apprécie  le 
désintéressement  et  la  réserve  d'Aristide,  et  constate  que  Caton  l'Ancien, 
dont  il  ne  méconnaît  pas  le  caractère,  occupe  une  beaucoup  plus  grande 
place.  Sylla,  dit- il,  a  fait  de  plus  grandes  actions,  Lysandre  de  moins 
grandes  fautes;  celui-ci  a  été  plus  tempérant  et  plus  sage,  l'autre  a  témoi- 
gné de  plus  de  capacité  et  de  valeur  militaires.  Entre  Marcellus  et  Pélo- 
pidas,  la  balance  est  à  peu  près  égale  :  leur  vie  comme  leur  mort  a  bien 
de  l'analogie;  le  premier  a  plus  fait,  toutefois  la  délivrance  de  Thèbes  par 
le  second  a  été  admirablement  conçue  et  exécutée.  Pompée  se  distingue 
par  l'éclat  de  ses  succès  et  sa  probité  politique;  Agésilas  a  plus  de  valeur 
militaire  réelle.  Les  exploits  de  Camille,  sa  droiture,  le  différencient  de  Thé- 
mistocle  qui  avait  incontestablement  plus  d'adresse.  Entre  les  Gracques  et 
Agis  et  Cléomène,  Tibérius  Gracchus  lui  semble  l'emporter  par  sa  vertu. 
La  législation  de  Numa  est  plus  douce  que  celle  de  Lycurgue;  il  l'a  imposée 
par  la  persuasion,  Lycurgue  par  la  force;  les  Romains  ont  obtenu  d'autant 
plus  de  succès  qu'ils  se  sont  éloignés  des  institutions  du  premier,  les  Spar- 
tiates ont  perdu  leur  supériorité  pour  avoir  abandonné  les  lois  du  second. 

CHAPITRE  XXXIII. 

8,  Spurina.  —  Ce  n'est  que  dans  le  deuxième  avant-dernier  alinéa  de  ce 
chapitre  qui  porte  sur  le  rôle  essentiel  de  l'àme  et  des  particularités 
afférentes  à  César,  avec  lesquels  l'histoire  dé  Spurina  n'a  aucun  rapport, 
qu'il  est  question  de  lui  qui,  à  en  juger  par  le  titre,  devrait  en  être  le 
sujet  principal. 

634, 

9,  Portent.  —  Montaigne  joue  ici  sur  les  mots  :  haire,  cilice,  chemise  de 
crin,  et  hère,  homme  de  peu,  sans  vigueur,  sans  bien,  sans  mérite  ou  sans 
crédit. 

9,  Xenocrates.  —  Diogène  Laerce,  IV,  7.  —  Lais  reçui  les  hommages  de 
tout  ce  que  la  Grèce  renfermait  d'illustre  et  fut  la  maîtresse  d'Alcibiade; 
on  dit  qu'ayant  suivi  en  Thessalie  un  jeune  homme  dont  elle  était  éprise, 
les  femmes  de  cette  contrée,  jalouses  de  sa  beauté,  l'assassinèrent. 

12,  Beauté.  —  Les  éd.  ant.  ajoutent  :  de  ses  mignardises. 

19,  Satiété.  —  Montaigne  avait  oublié  cette  phrase,  lorsqu'il  écrivait  vers  la 
fin  du  ch.  suivant,  pag.  658  :  «  Il  y  peut  auoir  quelque  iuste  modération  en 
ce  désir  de  gloire,  et  quelque  sacieté  en  cet  appétit  comme  aux  autres  ». 

25,  Pinceter.  —  Epiler.  —  Suétone,  César,  45. 

30,  Fois.  —  César  eut  quatre  femines  légitimes  :  Cossutia,  issue  d'une  famille 
équestre,  possédant  une  grande  fortune,  qu'il  répudia  pour  épouser  Cor- 
nelia,  fille  de  Cinna  lieutenant  de  Mari  us.  Celle-ci  étant  morte,  il  épousa 
Pompeia  nièce  de  Sylla,  avec  laquelle  il  divorça  parce  qu'elle  était  soup- 
çonnée d'adultère.  Enfin,  Calpurnie,  nièce  de  Pison.  —  Lors  de  sa  mort, 
une  loi  avait  été  préparée,  et  devait  être  présentée  en  son  absence,  qui, 
pour  lui  permettre  d'avoir  des  enfants,  l'autoriserait  à  épouser  autant  de 
femmes  qu'il  voudrait. 

'31,  Nicomedes.  —  Quand,  à  Rome,  leurs  généraux  recevaient  les  honneurs 
du  triomphe,  les  soldats  avaient  coutume  d'égayer  par  des  chants  la 
marche  du  triomphateur;  lorsque  César  célébra  son  triomphe  sur  les 
Gaules,  parmi  les  couplets  qui  se  répétèrent  en  choeur  ce  jour-là,  figurait 
celui-ci  : 

«  César  a  mis  dix  ans  à  subjuguer  les  Uaules, 
Et  Nicoméde,  une  heure  à  soumettre  César  », 

allusion  au  commerce  intime  auquel  il  s'était  prêté  dans  son  enfance  avec 


Fb.580  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

ce  roi  de  Bythinie  et  dont  il  rejaillit  sur  lui  un  opprobre  qui  de  son  vi- 
vant a  servi  de  texte  à  une  foule  de  railleries.  V.  N.  I,  550  :  Nicomeclis. 

;i2,  Cleopatra.  —  Non  moins  remarquable  pai'  son  esprit  que  par  sa  beauté 
fut  la  maîtresse  de  César,  puis  celle  d'Antoine  qui,  pour  l'épouser,  répudia 
Octavie  sœur  d'Octave.  Après  la  défaite  et  la  mort  d'Antoine  et  après  avoir 
en  vain  cherché  à  séduire  le  vainqueur,  afin  de  ne  pas  tomber  vivante  en 
son  pouvoir,  elle  se  donna  la  mort,  en  se  faisant  piquer  au  bras  par  un  aspic. 

2'S,  CsesariOD.  —  Plut,\kque,  César,  13.  —  Cet  enfant  fut  déclaré  roi  d'Egypte 
en  42  par  les  triumvirs  Antoine,  Octave  et  Lépide,  sous  le  nom  de  Pto- 
lémée  XIV  et  la  tutelle  de  sa  mère.  En  32,  il  recevait  le  vain  titre  de  Roi 
des  rois  et  l'an  30,  peu  après  la  mort  de  sa  mère,  il  périssait  par  ordre 
d'Auguste. 

34,  L'amour.  —  Sléto.ne,  César,  50,  52  etc. 

39,  Caesar.  —  Julie,  qui  par  sa  douceur  empêcha  longtemps  la  discorde 
entre  le  beau-père  et  le  gendre;  sa  mort,  survenue  en  55,  fit  disparaiti-e 
la  principale  cause  à  laquelle  on  devait  que  la  guerre  civile  n'eût  i)oint 
enco)-e  éclaté  entre  eux. 
636, 

2,  ^gisthus.  —  Egisthe,  fils  incestueux  de  Thyeste  et  de  sa  fille  Pélopée. 
était  à  la  fois  le  frère  et  le  fils  de  sa  nière  ;  Pompée,  en  épousant  la  fille 
de  César  qui  avait  été  l'amant  de  sa  femme,  se  trouvait  être  à  la  fois 
pseudo-beau-frère  et  gendre  de  son  beau-père. 

8,  Amoureuse.  —  Lorsqu'il  rentra  dans  Rome,  sur  son  char  de  triomphe, 
après  la  conquête  des  Gaules,  les  soldats,  auxquels  en  pareille  circonstance 
était  laissée  une  grande  licence,  chantaient  :  «  Bourgeois,  cachez  vos 
femmes,  nous  amenons  le  galant  au  crâne  dénudé.  »  Suétone,  César,  ol. 

10,  Place.  -~  Salluste  dit  de  même  de  Sylla  :  «  D'une  grande  intelligence, 
a-ssoiffé  de  volupté,  il  l'était  plus  encore  de  gloire,  car,  si  plongé  qu'il  fut 
dans  la  luxure,  jamais  elle  ne  lui  fit  perdre  de  vue  les  affaires.  » 

14,  Soldat.  —  Aussi  vigoureux  et  infatigable  athlète  en  amour  qu'à  la  guerre. 

20,  Ladislaus.  —  Sismondi,  Histoire  des  républiques  italiennes,  tome  VIII,  ra- 
conte la  mort  de  Ladislas  d'une  manière  un  peu  différente  :  il  aurait  été 
atteint  à  Pérouse  d'une  maladie  que  ses  débauches  excessives  auraient 
occasionnée;  et  une  de  ses  maîtresses,  qu'on  accusait  de  l'avoir  empoi- 
sonné et  qui  était  fille  d'un  médecin  de  cette  ville,  serait  morte  peu  de 
jours  après,  emportée  par  la  même  maladie. 

24,  Destroict.  —  Ayant  réduit,  par  un  siège  rigoureux,  la  ville  de  Floi'ence 
en  telle  détresse. 

31,  Attournoit.  —  Orner,  parer;  est  d'étymologie  grecque.  D'attourner  vient 
atours,  qui  est  fort  en  usage. 
638, 

10,  Escrit.  —  En  dehors  de  ses  Commentaires  sur  la  guerre  des  Gaules  et 
la  guerre  civile  qui  seuls  nous  restent,  de  ses  lettres  au  Sénat,  à  Cicéron, 
à  ses  amis,  César  aurait  écrit  sur  la  grammaire,  l'éloquence,  l'histoire,  et 
encore  des  poèmes,  une  tragédie  d'Œdipe  et  des  recueils  de  faits  mémo- 
rables qu'Auguste  défendit  de  publiei-;  on  lui  attribuait  aussi  des  livres 
sur  les  Augures  et  une  Cosmographie  qui  ne  furent  probablement  com- 
posés que  sur  ses  ordres. 

15,  Actiue.  —  Suétone  dit  qu'il  faisait  au  besoin  cent  milles  par  jour  (150  kil.). 
passait  les  rivières  à  la  nage  ou  sur  des  outres,  arrivait  souvent  avant 
qu'on  ne  fût  instruit  de  son  départ.  Fi-oias  le  compare  à  la  foudre  ;  et  Ci- 
cÉRON,  dans  le  temps  même  où  il  parlait  de  lui  en  ennemi,  le  regardait 
comme  un  prodige  de  promptitude  et  de  vigilance. 

16,  Labeur.  —  Dur  au  travail;  c'est  une  expression  toute  latine. 

19,  Oppius.  —  Suétone,  César,  53.  —  Oppius,  lieutenant  et  ami  de  César,  est 
regardé  comme  le  véritable  auteur  des  guerres  d'Alexandrie,  d'Afrique  et 
d'Espagne,  attribuées  à  César.  Plutarque  estime  qu'il  ne  saurait  être  cru 
qu'avec  réserve  dans  tout  ce  qu'il  rapporte  des  amis  et  des  ennemis  de 
celui-ci,  dont  lui-même  était  le  familiei-. 


NOTES.         MV.  If,  cri.  XXXIIl.         VOL.  If,  PAG.  638.         Fb.581 

22.  Boulanger.  —  Chez  les  Romains,  tous  les  artisans  étaient  des  esclaves. 
io,   Pays.  —  Suétone,  César,  53. 

28,  Catilina.  —  Perdu  de  dettes,  Catjlina  entreprit  de  rétablir  sa  fortune 
par  le  sac  de  Rome.  Sa  conjuration,  ourdie  parmi  ses  compagnons  de  dé- 
bauche et  tous  les  libertins  do  la  ville,  fut  déjouée  par  Cicéron;  lui-même 
mourut  les  armes  à  la  main,  en  combattant  les  troupes  envoyées  contre  lui. 

29,  Cachetés.  —  Une  lettre,  un  billet  doux  qui  se  remettent  en  cachette, 
à  la  dérobée. 

34,  Yurongne.  —  Plutarquk,  Calon  d'UHque,  7. 
640, 

10,  Douceur.  —  Montaigne,  liv.  Il,  ch.  11  (II,  100),  se  montre  moins  indul- 
gent qu'ici  vis-à-vis  de  César.  Parmi  les  actes  qui  lui  sont  reprochés  est 
l'exil  à  perpétuité,  en  un  lieu  déterminé  avec  privation  de  tous  leurs 
droits  de  citoyens,  de  nombre  de  ses  adversaires  politiques,  les  Plancius, 
les  Nigidius,  les  Cecina,  etc.,  qui  n'avaient  d'autres  torts  que  d'avoir  dé- 
fendu contre  lui  le  Sénat  et  les  lois. 

17.  Liberté.  —  Cn.  Magius,  L.  VibuUius  Rufus,  etc.  Ciîsar,  De  Bello  civili, 
I,  24;  111,  10,  etc. 

20.  Luy.  —  Suétone,  César,  75. 

27,  Romains.  —  Id.,  i/iid.,  75. 

32,  Conduire.  —  Ce  ne  fut  que  durant  la  guerre  civile  et  seulement  envers 
ceux  qui  avaient  qualité  de  citoyens  romains  que  César  en  agit  ainsi; 
ailleurs  et  contre  tous  autres  il  agit  bien  différemment,  souvent  avec 
la  plus  grande  inhumanité  :  il  ne  faisait  d'ordinaire  aucun  quartier  à 
l'ennemi;  ordonnait  fréquemment,  après  une  victoire,  qu'on  tuât  «  toute 
la  durée  d'un  jour  ».  A  Uxellodunum  (que  l'on  croit  être  Cahors),  il  lit 
couper  les  mains  à  tous  ceux  qui  avaient  porté  les  armes.  11  lui  est  arrivé 
de  faire  fermer  les  ouvertures  de  cavernes  où  s'étaient  réfugiées  des  popu- 
lations inoffensives  et  de  les  faire  de  la  sorte  mourir  de  faim  et  d'incen- 
dier des  forêts  pour  faire  périr  les  restes  d'armées  en  déroute.  Quant  à  sa 
conduite  à  l'égard  de  Vercingétorix  vaincu  (II,  656),  pour  être  de  pratique 
fréquente  chez  les  Romains,  on  ne  saurait  certes  pas  la  qualifier  de  ma- 
gnanime. 

37,  Feindre.  —  «  La  modération,  a  dit  Montesquieu,  en  parlant  de  César, 
que  l'on  montre  après  qu'on  a  tout  usurpé,  ne  mérite  pas  de  grandes 
louanges.  » 

40,  Consul.  —  Suétone,  César,  73. 
642, 

1,  Testonner.  —  Piquer,  satiriser  (V.  N.  II,  .'')21);  ce  mot  peut  être  traduit 
ici  presque  littéralement,  en  y  employant  le  langage  familier  où  l'on  dit 
de  quelqu'un  vivement  critiqué,  qu'il  a  été  habillé  de  bonne  façon. 

2,  Mamurra.  —  Chevalier  romain  qui  acquit  de  prodigieuses  richesses 
dans  les  Gaules  où,  en  qualité  d'Intendant  de  l'ai-mée,  il  avait  accompagné 
C(''sar  dont  il  était  un  des  compagnons  de  débauche.  Catulle,  carmen  29. 

3,  Table.  —  Suétone,  César,  73. 
5,  Aduerty.  —  Id.,  ibid.,  75. 

9,  Autheurs.  —  Id.,  ibid.,  75. 

12,  Descouuert.  —  Id.,  ibid.,  72. 

15,  Plaignist.  —  Id.,  ibid.  48. 

22,  Largesse.  —  Dion  Cassius  l'elati;  que  le  soin  extrême  qu'avait  César  d'ac- 
'  cumuler  des  richesses  et  de  se  faire  donner  de  l'argent  sous  quelque  pré- 
texte que  ce  fût,  provenait  des  dépenses  excessives  qu'il  avait  à  faire  pour 
arriver  à  la  domination,  s'y  maintenir  et  l'agrandii-,  disant  lui-même  que 
pour  parvenir  à  ce  but,  on  avait  besoin  de  deux  choses  qui  se  soutenaient 
l'une  par  l'autre  :  de  l'argent  et  des  troupes. 

26,  Bien.  —  Suétone,  César,  72. 

26,  L'enyura.  —  Cette  furieuse  passion  l'enivra. 

28,  Nom.  —  L'éd.  de  80  aj.  :  vain. 

29,  Loix.  —  Suétone,  César,  77. 


Fb.b82  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

30,  Lny.  —  Ce  corps  politique  lui  apportait  un  décret  qu'il  venait  de  rendre 
pour  augmenter  les  honneurs  qui  lui  étaient  décernés;  César  était  alors 
assis  dans  le  vestibule  du  temple  de  Vénus,  où  il  était  demeuré  afin  qu'on 
ne  pût  dire  qu'il  avait,  par  sa  présence,  ôté  aux  Sénateurs  la  liberté  d'o- 
piner comme  bon  leur  semblait;  il  ne  se  leva  pas  en  voyant  venir  le  Sénat 
et  écouta  assis  ce  qu'on  avait  à  lui  dire,  ce  qui  irrita  tellement  les  séna- 
teurs et  les  autres  Romains,  que  ce  fut  l'un  des  principaux  prétextes  de 
ceux  qui  conspirèrent  contre  sa  vie.  Dion  Cassius. 

39,  Autres.  —  Notamment  Henri  IV  qui  laissa  perdre  tous  les  avantages  de 
sa  victoire  de  Coutras  (1587)  afin  de  courii"  après  sa  maîtresse,  la  belle 
Corisande  d'Andouins,  si  chère  à  Montaigne.  Mkzerai. 
644, 

16,  Continents.  —  L'éd.  de  80  porte  :  des  dames  les  plus  continentes,  au  lieu 
de  :  «  plus  continents  ». 

23,  Visage.  —  Ce  fait,  rapporté  par  Valère  Maxime,  IV,  5,  remonte  à  une 
époque  où  l'Étrurie  (nom  ancien  de  la  Toscane)  ne  jouissait  pas  encore  du 
droit  de  bourgeoisie  romaine  et  par  conséquent  est  antérieur  au  i®""  siècle 
av.  J.-C. 
646, 

10,  Scipion.  —Allusion  à  l'acte  de  Scipion,  premier  Africain,  auquel,  après 
la  prise  de  Carthagène  (Espagne),  une  femme  d'une  grande  beauté,  faite 
prisonnière,  fut  amenée.  Respectant  son  honneur,  Scipion  fit  rechercher 
un  jeune  prince  celtibérien  dont  elle  était  la  fiancée  et  la  lui  remit;  lui- 
même  n'avait  alors  que  vingt-cinq  ans. 

CHAPITRE  XXXIV. 

15,  Recommandation.  —  On  ne  saurait  dire  que  les  Essais  aient  été  la 
lecture  favorite  de  Napoléon:  toutefois  dans  le  volume  23  de  sa  corres- 
pondance, pag.  399,  on  le  voit  faire  écrire  à  son  secrétaire,  le  7  mai  I8I2, 
au  moment  de  partir  pour  la  campagne  de  Russie  :  «  Un  Montaigne,  petit 
format,  serait  peut-être  bon  à  mettre  dans  la  petite  bibliothèque.  » 

16,  Apbricain.  —  Scipion  sauva  la  vie  à  son  père  blessé  à  la  bataille  du 
Tessin,  il  n'avait  encore  que  17  ans;  préteur  en  Espagne  en  211,  il 
s'empara  de  Carthagène  tombée  au  pouvoir  des  Carthaginois,  battit  As- 
drubal  et  reconquit  en  quatre  ans  cette  province.  De  retour  en  Italie, 
envoyé  contre  Annibal,  il  fit  triompher  l'idée  de  transporter  la  guerre  aux 
portes  de  Carthage,  et  chargé  de  son  exécution,  gagna  sur  Annibal,  rap- 
pelé par  ses  concitoyens  alarmés,  la  bataille  de  Zama,  qui  mit  fin  à  la 
deuxième  guerre  punique  (202).  En  190,  comme  lieutenant  de  son  frère, 
il  accompagna  celui-ci  en  Asie,  et  l'aida  à  triompher  d'Antiochus  le  Grand, 
roi  de  Syrie,  qu'ils  contraignirent  à  la  paix.  A  leur  rentrée  à  Rome,  injus- 
tement accusés  par  le  parti  populaire  auquel  sa  hauteur  et  sa  partialité 
pour  les  patriciens  le  rendaient  odieux,  il  fut  condamné  à  l'exil  où  il 
mourut,  tandis  que  son  frère,  frappé  d'une  amende  considérable  qu'il  ne 
put  payer,  était  jeté  en  prison.  Scipion  réunissait  au  génie  militaire,  tous 
les  genres  de  vertu  :  l'humanité,  la  tempérance,  le  désintéressement,  etc. 

16,  Brutus.  —  Lors  de  la  guerre  civile  entre  César  et  Pompée,  embrassa  le 
parti  de  ce  dernier  et  combattit  à  Pharsale;  néanmoins  César  qui  l'aimait 
et  qui,  pensait-on,  était  son  père,  l'attira  à  lui  et  le  combla  de  caresses  ; 
mais  l'éducation  stoïcienne  qu'il  avait  reçue  de  son  oncle  et  son  nom  même 
l'armèrent  contre  lui,  quand  le  dictateur  aspira  au  pouvoir  suprême,  et  il 
participa  à  sa  mort  (44).  Après  ce  meurtre,  poursuivi  par  Antoine,  et 
vaincu  dans  les  plaines  de  Philippes,  désespérant  alors  du  salut  de  la 
république,  il  se  tua.  V.  N.  I,  638  :  L'occasion. 

16,  Polybins.  —  Combattit  avec  Philopœmen  et,  envoyé  en  otage  à  Rome 
où  il  demeura  17  ans,  se  lia  avec  Scipion  Émilien  qu'il  accompagna  au 
siège  de  Carthage;  voyagea  en  Afrique,  en  Espagne,  en  Gaule,  et  écrivit 
divers  ouvrages  qui  sont  perdus  et  dont  le  plus  considérable  était  une 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  XXXIV.         VOL.  II,  PAG.  646.         Fb.583 

histoire  en  40  livres  de  Rome  et  des  autres  états  contemporains,  ouvrage 
dont  il  ne  reste  que  cinq  livres  entiers.  L'exactitude,  le  jugement,  l'impar- 
tialité, sont  ses  qualités  maîtresses;  il  scrute  les  événements,  les  analj'se, 
ce  qui  en  fait  l'historien  des  hommes  d'état,  des  hommes  de  guerre  et 
des  penseurs. 

17,  Cinquiesme.  —  Charles-Quint,  déjà  roi  d'Espagne  en  1516,  fut  élu  em- 
pereur d'Allemagne  trois  ans  après,  succédant  à  Maximilien  son  aïeul. 
11  avait  comme  compétiteur  à  l'empire  François  I",  roi  de  France,  avec 
lequel  il  fut  en  guerre  pendant  la  majeure  partie  de  son  règne;  il  rem- 
porta sur  lui  la  victoire  de  Pavie  (1525);  échoua  dans  une  expédition  contre 
Marseille  (1536),  fut  défait  à  Cérisoles  (1544)  et  assiégea  inutilement  Metz 
(1552).  Il  fit  avec  des  alternatives  de  succès  et  de  revers  plusieurs  expédi- 
tions contre  l'Afrique.  Il  fut  l'adversaire  de  la  Réforme,  mais  n'en  fut  pas 
moins  obligé  d'accorder  la  liberté  du  culte  aux  Protestants  (1552).  En  1556, 
affaibli  par  les  maladies,  aigri  par  les  revers,  il  abdiqua  et  céda  l'empire 
à  son  frère;  déjà  l'année  précédente,  il  avait  remis  l'Espagne  à  son  fils, 
et  il  se  l'ctira  au  monastère  de  S.-Just  en  Estramadure  où  il  mourut; 
on  dit  qu'il  regretta  vivement  le  pouvoir  dont  il  s'était  démis;  il  était  d'un 
caractère  très  dissimulé. 

18.  Ailleurs.  —  Semble  désigner  la  i"eine  Catherine  de  Médicis  qui  passait 
pour  s'en  inspirer  et  qui,  en  tout  cas,  y  conformait  ses  actes  et  sa  politique. 

22,  Militaire.  —  Montaigne  possédait  un  exemplaire  des  Commentaires  de 
César  (V.  N.  II,  82  :  Lisant),  sur  lequel,  suivant  son  habitude,  il  a  consigné 
l'impression  que  la  lecture  de  cet  ouvrage  lui  laissait;  on  y  lit  :  «  C'est  un 
livre  qu'un  Général  d'armée  devrait  avoir  continuellement  sous  les  yeux, 
comme  patron,  ainsi  que  faisait  le  maréchal  Strozzi  qui  le  savait  quasi 
par  cœur  et  l'a  traduit;  et  non  je  né  sais  quel  Philippe  de  Comines  que 
Charles  Cinq  avait  en  pareille  recommandation  ;  de  même  que  le  grand 
Alexandre  avait  les  œuvres  d'Homère,  etc..  »  Ce  dédain  que  dans  ces 
annotations  marque  Montaigne  pour  Philippe  de  Comines  témoigne  qu'elles 
ont  dû  être  écrites  avant  les  Essais,  où  l'auteur  ne  laisse  pas  de  lui  témoi- 
gner beaucoup  plus  de  considération,  notamment  dans  son  chapitre  «  des 
livres  »  où  il  rapporte  le  jugement  qu'il  a  porté  après  lecture  sur  les  Mé- 
moires de  cet  historien  et  aussi  au  chapitre  VIII  du  livre  III. 
648, 

1,  luba.  —  Juba  I";  embrassa  le  parti  de  Pompée,  accueillit  après  la  ba- 
taille de  Pharsale  les  restes  de  l'armée  vaincue;  joint  à  eux,  il  livra  à 
César  la  bataille  de  Thapsus  (46);  vaincu,  il  se  fit  tuer  par  un  de  ses 
serviteurs. 
9,  Armée.  —  Suétone,  César,  66.  —  Sur  son  exemplaire  annoté  des  Com- 
mentaires de  César,  Montaigne  a  inscrit  :  «  On  craint  souvent  l'ennemi 
plus  par  réputation  que  par  l'effet.  » 

16.  Execution.  —  Suétone,  César,  65.  —  «  Une  armée  ne  se  doit  enquérir 
des  desseins  de  son  général  »  (annotation  de  Montaigne  sur  son  ex.  des 
Commentaires  de  César).  —  A  cela,  on  serait  tenté  d'opposer  ce  mot  de 
Napoléon  :  «  A  la  guerre,  chacun  doit  connaître  sa  manœuvre  »  ;  mais  la 
contradiction  n'est  qu'apparente  :  Napoléon  ne  veut  parler  que  du  mouve- 
ment en  exécution,  dont  la  divulgation  n'offre  plus  d'inconvénient  dès  que 
l'ordre  d'exécution  est  donné,  parce  que  le  temps  faisant  défaut  à  l'ennemi, 
il  ne  peut  prendre  pour  y  parer  de  nouvelles  dispositions  et  en  est  réduit 
à  celles  en  lesquelles  il  se  trouve. 

20,  Souisses.  —  César,  De  Bello  Gallico,  1,  7.  —  En  58;  ils  avaient  quitté 
leur  pays  en  masse,  pour  venir  s'établir  en  Gaule;  les  uns  furent  exter- 
minés, les  autres  refoulés  sur  la  contrée  d'où  ils  étaient  partis. 

31,  D'accord.  —  Souvent,  en  effet,  il  lui  est  arrivé  de  n'accorder  des  trêves 
que  pour  les  violer. 

33,  Desobeyssance.  —  «  César  estimait  plus  encore  l'obéissance  que  la  vail- 
lance ..  (annotation  de  Montaigne  sur  son  ex.  des  Commentaires  de  César). 

38,  Combat.  —  Suétone,  César,  67. 


Fb.o84  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

650. 

1,  Armez.  —  Suétone,  César,  67.  —  V.  I,  520  :  Pareillement,  qui  auroitclc. 
1,  Grauez.  —  L'éd.  do  80  porte  :  labourez. 
4,  Compagnons.  —  Slktone,  César,  67. 

10,  Estoit.  —  Les  (kl.  ant.  aj.  :  Irop  molle  et. 

12,  Soldats.  —  Suétone,  Auguste,  25. 

13,  Seuerité.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  asseurance. 

11,  Plaisance.  —  Suétone,  César,  69.  —  V.  N.  I,  198  :  Metuens. 

17,  Douceur.  —  Suétone,  César,  69.  —  La  10"  légion  se  mutina,  à  Rome,  on 
46,  aloi"s  qu'il  était  sur  le  point  de  passer  on  Afrique;  c'était  sa  légion 
préférée.  Il  la  fit  rentrer  dans  l'ordre  en  se  présentant  aux  mutins  et  les 
appelant  «  Citoyens  »,  au  lieu  do  «  Soldats  »  ;  ils  protestèrent  qu'ils  étaient 
soldats.  Il  leui"  pardonna,  mais  les  plus  compromis  perdirent  lo  tiers  du 

•  butin  et  des  terres  qui  leur  étaic^nt  destinés. 

18,  Rhin.  —  César,  De  Bello  Gallico,  IV,  17.  —  Le  pont  construit  par  César 
sur  lo  Rhin,  le  fut  on  l'an  55,  près  de  Bonn.  liétait  sur  pilotis  et  fut  achevé 
en  dix  jours;  en  cet  endroit  le  fleuve  a  600'"  de  large,  mais  c'était  l'époque 
de  l'année  où  ses  eaux  sont  le  plus  basses  et,  de  ce  fait,  cette  largeur  peut 
être  réduite  de  moitié. 

26,  Combat.  —  Sur  ce  point,  Cyrus,  estimant  les  harangues  inutiles  (V.  III. 
364),  différait  d'avis  avec  César;  peut-être  était-ce  en  raison  de  la  diffi- 
culté d'en  user,  par  suite  des  effectifs  considérables  et  do  la  composition 
des  armées  asiatiques  formées  de  nombreux  contingents  de  peuples  divers, 
assez  peu  disciplinés,  alors  que  les  armées  romaines,  bien  inférieures  en 
nombre,  beaucoup  plus  disciplinées,  homogènes,  constituaient  des  groupes 
compacts  dont  le  chef  pouvait  être  vu  et  entendu.  —  Dans  les  armées 
modernes,  par  suite  des  étendues  considérables  sur  lesquelles  opèrent  les 
armées,  les  harangues  sur  ]e  champ  de  bataille  sont  généralement  rempla- 
cées par  des  ordres  du  jour  lus  avant  le  combat;  toutefois,  il  est  encore 
des  circonstances  où  elles  se  produisent.  —  On  a  conservé  le  souvenir  de 
celle  qu'Henri  IV,  en  1590,  à  la  bataille  d'Ivry,  adressait  à  ses  troupes  : 
«  Gardez  bien  vos  rangs,  et  si  vous  perdez  vos  enseignes,  cornettes  et  gui- 
dons, ralliez-vous  à  mon  panache  blanc,  vous  le  trouverez  toujours  au  chemin 
de  l'honneur  et  de  la  victoire.  »  —  Napoléon  excellait  dans  l'un  et  l'autre 
genre,  comme  en  tout  ce  qui  touche  à  l'art  de  la  guerre  :  Sa  proclamation 
à  l'armée  d'Italie,  en  1796,  au  début  des  hostilités,  après  lui  avoir  énuméré 
ce  qu'il  attendait  d'elle,  se  terminait  a-insi  :  ■<  Soldats  d'Italie,  manqueriez- 
vous  de  courage  et  de  constance?  »  Dans  cette  même  campagne,  au  mo- 
ment d'entrer  en  Vénétie,  ayant  déjà  conquis  le  Piémont  et  la  Lombardie, 
après  leur  avoir  fait  miroiter  le  triomphe  :  «  Vous  rentrerez  dans  vos 
foyers,  leur  disait-il,  et  vos  concitoyens,  en  vous  montrant,  diront  :  Il  était 
de  l'armée  d'Italie!  »  En  1798,  à  la  bataille  des  Pyramides  :  «  Soldats,  du 
haut  de  ces  pyramides,  quarante  siècles  vous  contemplent!  »  A  Marengo, 
en  1800,  lorsque,  à  la  fin  de  la  journée,  il  reprenait  l'offensive  :  «  Souvenez- 
vous  que  mon  habitude  est  de  coucher  sur  le  champ  de  bataille!  »  En  I8I2, 
le  matin  de  la  bataille  de  la  Moskowa,  alors  que  le  soleil,  jusque-là  caché 
par  un  épais  brouillard,  venait  de  se  montrer  :  «  Soldats,  leur  dit  l'em- 
pereur, voilà  le  soleil  d'Austerlitz.  »  En  1815,  trois  jours  avant  Waterloo, 
comme  l'armée  entrait  en  Belgique,  il  lançait  une  proclamation,  la  der- 
nière, se  terminant  par  ces  mots  :  •■  Pour  tout  Français  qui  a  du  cœur,  le 
moment  est  venu  de  vaincre  ou  de  mourir  !  »  —  Citons  encore  ce  fait  de 
Nelson,  à  la  bataille  de  Trafalgâr  (1805),  au  moment  où  le  combat  allait 
s'engager,  communiquant  par  signaux  à  tous  les  navires  de  sa  flotte  ces 
simples  mots  devenus  depuis  si  célèbres  :  «  L'Angleterre  compte  qu'au- 
jourd'hui, chacun  fera  son  devoir!  » 

29,  Tonrnay.  —  César,  De  Bello  Gallico,  II,  21.  —  Cette  bataille,  qu'il  convien- 
drait mieux  d'appeler  de  la  Sambre,  se  livra  sur  le  territoire  des  Nerviens. 
aux  environs  de  Maubeuge,  contre  la  Gaule  du  Nord  (53).  César  fut  sui- 
pris,  pendant  qu'il  fortifiait  son  camp  :  les  soldats  attaqués  se  rallièrent 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  XXXIV.         VOL.  II,  PAG.  650.         Fb.585 

aux  premières  enseignes  venues,  l'arrivée  de  l'arrière-garde  rétablit  le  com- 
bat; la  race  et  le  nom  desNerviens  y  furent  presque  anéantis;  de  60.000  h. 
en  état  do  porter  les  armes,  il  en  resta  à  peine  5.000. 

M,  D'autres.  —  Jadis  un  chef,  embrassant  du  regard  l'ensemble  de  ses 
troupes  sur  un  champ  de  bataille,  pouvait,  de  sa  personne,  se  porter  uti- 
lement d'un  point  à  un  autre;  il  n'en  est  plus  ainsi,  et,  en  général,  moins 
il  se  déplace  dans  le  courant  de  l'action,  mieux  cela  vaut;  renseigné, 
minute  par  minute,  sur  les  mouvements  de  l'adversaire  et  les  fluctuations 
du  combat  qu'il  suit  sur  la  carte,  échappant  par  son  éloignement  aux  im- 
pressions suggestives  exagérées  que  causent  toujours  les  événements  dont 
on  a  le  spectacle  sous  les  yeux,  il  juge  plus  sainement  et  peut  donner  avec 
plus  d'à-propos  dos  ordres  plus  réfléchis. 
652, 

3,  Sien.  —  Suétone,  César,  55.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  C'estoit  le  plus  laborieux 
chef  de  guerre  et  le  plus  diliyenl  qui  fui  onques. 
5,  Coche.  —  Plutarque.  César,  12.  —  L'éd.  de  88  porte  :  sa  coche. 

11,  Passa.  —  Surpassa,  surmonta. 

11,  Extrêmes.  —  Dans  cette  guerre.  César  fut  souvent  en  danger  par  les 
embûches  qu'on  lui  dressa,  et  son  armée  faillit  périr  par  la  disette 
(48). 

13,  Marseille.  —  La  ville,  qui  avait  pi'omis  sa  neutralité  à  Césai',  avait  ou- 
vert son  port  à  la  flotte  de  Pompée.  Le  siège  fut  long,  et  les  assiégés,  plu- 
sieurs fois  battus,  ne  se  rendirent  qu'à  la  dernière  extrémitc',  manquant  de 
vivres,  leurs  remparts  démantelés  et  plus  aucun  espoir  d'être  secourus 
(48). 

14,  jEgypte.  —  César  y  détrôna  le  jeune  Ptolémée  XII,  tant  pour  le  punir 
d'avoir  donné  son  assentiment  au  meurtre  de  Pompée,  qu'en  raison  des  dis- 
sentiments qui  s'étaient  élevés  entre  ce  prince  et  Cléopàtre,  sa  femme  et  sa 
sœur,  dont   les  charmes   l'avaient  séduit  et  en  faveur  de  laquelle  il  se 

'  déclara  (48).  11  le  remplaça  par  son  frère  Ptolémée  XII 1,  âgé  de  11  ans, 
qu'épousa  Cléopàtre  au  lieu  et  place  de  son  frère  aîné;  elle-même  avait 
21  ans;  ce  second  époux  mourut  quatre  ans  après.  —  Dans  cette  expédition 
d'Egypte  qui  se  réduisit,  comme  action  militaire,  à  la  répression  du  soulè- 
vement d'Alexandrie,  devant  laquelle  César,  poursuivant  Pompée,  s'était 
,  arrêté  en  apprenant  la  mort  de  son  rival,  et  avait  débarqué  précédé  de  ses 

licteurs,  ce  que  les  Egyptiens  avaient  considère''  comme  une  offense  à  la 
majesté  de  leur  roi  et  qui  leur  avait  fait  prendre  les  armes,  les  Romains 
mirent  le  feu  à  plusieurs  édifices,  entre  autres  à  cette  célèbre  bibliothèque 
des  Ptolémée.  400.000  volumes  furent  brûlés.  Reconstituée  par  la  suite,  elle 
fut  à  nouveau  partiellement  incendiée  par  accident  sous  ïhéodose  le  Grand 
et  finalement  anéantie  en  038  de  parti  pris,  par  la  barbarie  des  Musulmans, 
qui  pendant  des  mois  employèrent  les  innombrables  et  précieux  volumes 
dont  elle  se  composait  à  chauffer  les  bains  publics. 

16,  Pharnaces.  —  Fils  de  Mithridate  le  Grand  auquel  il  succéda  à  la  suite 
d'une  sédition  militaire;  avait  espéré,  à  la  faveur  des  guerres  civiles  des 
Romains,  rentrer  dans  les  conquêtes  faites  et  perdues  par  son  père.  César 
en  cinq  jours  et  dans  un  combat  de  quatre  heures  anéantit  ses  espérances 
(47).  C'est  à  cette  occasion  qu'il  écrivit  au  Sénat  ce  compte  rendu  célèbre 
de  ses  opérations  ne  comprenant  que  trois  mots  :  Veni,  vidi,  vici  (je  suis 
venu,  j'ai  vu,  j'ai  vaincu),  qui,  lors  de  son  triomphe,  furent  reproduits  sur 
un  tableau  qui  figurait  au  cortège. 

17,  luba.  —  A  Thapsus,  en  46.  V.  N.  II,  648  :  luba. 

18,  Pompeius.  —  A  Munda,  en  46.  L'aîné  des  fils  de  Pompée  s'y  trouvait 
seul;  il  périt  dans  sa  fuite;  cette  bataille  où  César  avait  contre  lui  Labie- 
nus,  son  ancien  lieutenant  en  Gaule,  et  qu'il  faillit  perdre,  mit  fin  à  la 
guerre  civile  et  assura  d'une  manière  décisive  son  triomphe. 

26,  Auaricum.  —  Césak,  De  Bello  Gallico,  VIII,  24.  —  Aujourd'hui  Bourges; 

en  52,  au  début  du  soulèvement  des  Gaules  provoqué  par  Vercingétorix. 
31,  Angleterre.  —  Suétone,  César,  58,  —  L'expédition  de  César  contre  les 


Fb.D86  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

peuples  de  la  Grande-Bretagne  (55),  où  par  deux  fois  il  franchit  le  détroit 
actuel  du  Pas  de  Calais,  peut  compter  parmi  celles  témoignant  le  plus 
d'audace;  on  dit  qu'il  l'entreprit  uniquement  dans  l'espoir  d'y  trouver  des 
perles  dont  il  était  fort  avide,  comme  aussi  des  pierres  précieuses,  des 
statues  et  des  tableaux  antiques.  Ni  l'une  ni  l'autre  de  ces  descentes  ne 
donnèrent  de  résultats  sérieux;  la  première  eut  pour  prétexte  les  secours 
prêtés  aux  Gaulois,  la  seconde  que  les  conditions  de  paix  n'avaient  pas  été 
remplies.  César  semble  chaque  fois  s'être  embarqué  partie  à  VVissan,  par- 
tie à  Boulogne,  et  avoir  débarqué  à  Kent  près  de  Douvres,  au  N.  de  Dou- 
vres, à  la  pointe  orientale  du  comté  de  Kent  qui  porte  aujourd'hui  le  nom 
de  North  Foreland  près  de  Ramsgate. 

3-2,  Gué.  —  Vraisemblablement  la  profondeur  de  l'eau  jirès  du  rivage,  qu'il 
fallait  gagner  en  marchant  plus  ou  moins  dans  la  mer,  les  navires  ne  pou- 
vant approcher  assez  près  pour  qu'il  fût  possible  d'aborder  autrement;  du 
reste  Suétone,  César,  58,  dit  à  ce  propos  :  •  Il  ne  passa  en  Bretagne  qu'a- 
près avoir  reconnu  par  lui-même  le  point  de  débarquement,  l'itinéraire  à 
suivre  et  les  conditions  d'accès.  - 

35,  Refusa.  —  César,  De  Bello  civili,  1,  72. 

38,  Ost.  —  Armée;  du  latin  hostis  (ennemi).  Ce  mot  était,  dans  l'ancienne 
langue  française,  employé  indifféremment  pour  désigner  l'un  et  l'autre  de 
deux  adversaires  :  «  Si  l'ost  savait  ce  que  fait  l'ost,  disait  un  adage  mili- 
taire de  l'époque,  l'ost  déferait  l'ost  (Si  l'un  connaissait  les  projets  de  l'au- 
tre, le  premier  battrait  le  second).  » 

38,  Nécessité.  —  César  fit,  à  diverses  reprises,  franchir  des  cours  d'eau  à  son 
armée  dans  des  conditions  assez  délicates,  ses  hommes  ayant  de  l'eau  jus- 
qu'aux aisselles,  notamment  la  Loire,  en  51,  lors  de  l'insurrection  générale 
des  Gaules,  et  la  Sègre  en  Espagne,  comme  l'indique  ici  Montaigne,  lors 
de  ses  opérations  contre  Afranius  en  49.  En  ces  circonstances,  sa  cava- 
lerie, répartie  de  l'un  et  l'autre  côté ,  était  employée,  en  amont,  à  rompi-e 
le  courant;  en  aval,  à  recueillir  ceux  qui  auraient  été  entraînés. 
654, 

21,  Bouclier.  —  César,  De  Bello  Gallico,  II,  25.  —  En  l'an  53. 

25,  Présence.  —  Suéto.ne,  César,  58. 

25,  Dirracbium.  —  Suétone,  César,  58;  Pi.utarqu-e,  César,  passim;  Appien, 
Guerre  civile,  II  ;  etc. 

35,  Siennes.  —  César  franchit  le  Rubicon  avec  5.000  fantassins  et  3.000  ca- 
valiers; il  avait  en  Egypte  3.200  fantassins  et  800  cavaliers;  il  n'amena  en 
Afrique  contre  Scipion  et  Juba  que  3.000  fantassins  et  quelques  cavalière. 
—  A  la  bataille  de  Pharsale  il  perdit  200  hommes;  Pompée,  15.000.  A  celle 
de  Thapsus  il  en  perdit  50  ;  à  celle  de  Munda,  1.000,  et  ses  adversaires  leur 
armée  entière. 

35,  Gens-là.  —  Alexandre  et  César. 

37,  Disoit-il.  —  César. 
656, 

3,  Bout.  —  Suétone,  César,  62. 

4,  Alexia.  —  Ce  siège,  qui  se  termina  par  la  prise  de  la  ville  et  la  reddition 
de  Vercingétorix  (52),  mit  fin  au  soulèvement  général  de  la  Gaule  ;  il  ne 
resta  plus  à  faire  rentrer  dans  l'ordre  que  quelques  peuplades;  la  pacifica- 
tion complète  se  termina  l'année  suivante. 

6,  Cbeuaux.  —  Dans  ses  Commentaires,  VII,  64,  César  dit  «  huit  mille  che- 
vaux »  ;  c'est  le  nombre  qu'il  faut  lire;  il  est  probable  que  Montaigne  avait 
écrit  sur  son  manuscrit  «  huit  à  neuf  mille  »,  l'imprimeur  aura  lu  •  cent 
neuf  mille  ». 

7,  Maniacle.  —  Littéralement  -  furieuse  •  ;  ici,  incroyable,  merveilleuse. 
Dans  l'ancien  français,  maniacle  et  maniaque  étaient  synonymes;  ce  der- 
nier seul  est  resté. 

12,  Tigranocerta.  —  Tandis  que  LucuUus,  avec  15  à  20.000  hommes,  assié- 
geait Tigranocerte  sa  capitale,  Tigrane  roi  d'Arménie  vint  la  secourir 
traînant  avec  lui  une  armée  de  250.000.  LucuUus,  malgré  son  infériorité 


NOTES.         LIV.  11,  CH.  XXXI V.         VOL.  11,  PAG.  656.         Pb.587 

numérique,  marcha  contre  eux  ;  les  barbares  s'enfuirent  sans  presque 
soutenir  le  choc  et  perdirent  KXI.OOO  h.;  LucuUus  n'aurait  eu  que  cinq 
morts  et  cent  blessés;  peu  après,  il  était  maître  de  la  ville  (69). 

20,  Est.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  rare  et. 

19,  Confusion.  —  Césak,  De  Hello  Gallico,  VII,  71. 

28,  Secours.  —  Xénopho.n  s'exprime  ainsi  :  «  Ce  n'est  ni  le  nombre,  ni  la 
force  qui  donnent  la  victoire;  elle  est  acquise  à  ceux  qui,  avec  l'aide  des 
dieux,  attaquent  avec  le  plus  de  fermeté  d'clme.  »  —  C'est  là  une  vérité 
relative,  à  l'appui  de  laquelle  on  peut  citer  de  nombreuses  batailles  dans 
l'antiquité,  alore  que  le  combat  corps  à  corps  jouait  un  rôle  presque  exclusif 
et  toujours  prédominant,  où  des  résultats  inouïs  ont  été  obtenus  avec  des 
forces  absolument  disproportionnées.  Mais  l'invention  des  armes  à  feu  et 
leurs  perfectionnements  incessants,  leur  accroissement  en  portée,  en  jus- 
tesse et  en  vitesse,  ont  réduit  à  néant  l'influence  de  la  force  physique  des 
combattants  et  augmenté  colle  du  nombre  dans  une  très  notable  propor- 
tion. Aujourd'hui,  où  la  question  est  souvent  aux  trois  quarts  résolue 
quand  on  est  encore  hors  de  vue  et  bien  avant  que  le  feu  soit  ouvert,  et 
où  la  victoire  est  à  peu  près  décidée  sans  que  parfois  on  se  soit  abordé  sur 
le  point  décisif,  même  avec  des  effectifs  en  présence  atteignant  des  cen- 
taines de  mille  hommes  de  part  et  d'autre,  le  nombre  joue  un  rôle  con- 
sidérable en  facilitant  les  mouvements  enveloppants.  Toutefois  il  n'est  pas 
plus  que  jadis  le  seul  facteur  du  succès;  le  moral  des  troupes,  l'initiative, 
l'habileté  manœuvrière  des  chefs,  surtout  chez  le  général  et  ses  principaux 
lieutenants,  peuvent,  encore  comme  par  le  passé,  donner  la  victoire  à  une 
armée  numériquement  inférieure,  si  elle  ne  se  cantonne  pas  dans  une 
passivité  continue  et,  par  sa  mobilité  et  ses  propres  attaques  exécutées  en 
temps  opportun,  s'applique  à  contenir  et  à  déjouer  les  mouvements  et  les 
attaques  de  l'adversaire. 

30,  Tamburlan.  —  Tamerlan,  appelé  aussi  Timour  et  dont  le  véritable  nom 
est  Timour-Leng;  né  à  Samarcande,  dans  le  Turkestan,  il  conquit  ce  qui 
aujourd'hui  constitue  la  Perse,  l'Afghanistan,  la  partie  N.  de  l'Hindoustan 
et  l'Asie  Mineure;  il  marchait  sur  la  Chine,  quand  il  mourut.  Sanguinaire 
et  fanatique,  il  incendia  Delhi,  Damas,  Bagdad  et  nombre  d'autres  villes; 
devant  Delhi,  il  fit  égorger  100.000  captifs;  à  Bagdad,  il  érigea  un  obélisque 
avec  90.000  têtes  coupées. 

32,  Contusion.  —  A  Ancyre  (Asie  Mineure),  en  1402.  Un  million  de  combat- 
tants se  choquèrent  en  cette  journée;  la  bataille  dura  trois  jours  et  deux 
nuits;  240.000  h.,  dit-on,  furent  tués  sur  le  terrain  même.  Des  deux  adver- 
saires, l'un,  Tamerlan,  était  manchot  et  boiteux  par  suite  de  blessures  re- 
çues à  la  main  et  au  pied,  l'autre  était  borgne. 

34,  Baster.  —  Suffire  à  un  habile  général.  —  C'était  vrai  jadis,  et  Turenne 
dans  son  admirable  campagne  d'Alsace  de  1675,  Bonaparte  dans  celle  non 
moins  remarquable  de  1796  en  Italie,  l'ont  bien  montré;  mais  avec  le 
principe  de  la  nation  armée  et  la  puissance  de  l'armement  actuel,  les 
petites  armées  où  le  chef  exerçait  une  action  prédominante  et  pouvait 
conduire  les  choses  à  son  gré,  ne  sont  plus.  Le  général  placé  aujourd'hui 
à  la  tête  d'une  armée  de  plusieurs  centaines  de  mille  combattants,  se 
mouvant  sur  une  étendue  de  80  à  100  kilomètres  et  même  davantage, 
livrant  bataille  sur  un  front  de  plusieurs  lieues,  n'est  plus,  malgré  le 
télégraphe,  aussi  maître  que  jadis  de  les  faire  se  mouvoir  à  son  gré  et  avec 
une  rapidité  suffisante,  et  une  fois  l'action  générale  engagée,  les  combats 
partiels  dont  elle  se  compose  sont  si  multipliés,  se  livrent  à  de  telles  dis- 
tances et  sont  d'une  importance  telle,  que  son  intervention,  quelque 
grand  que  soit  son  génie,  peut  être  impuissante  ou  tardive.  Aux  temps 
anciens  et  au  moyen  âge,  on  a  bien  vu  des  masses  aussi  considérables  en 
présence,  mais,  outre  que  les  non-combattants  s'y  trouvaient  dans  une 
proportion  énormément  plus  considérable,  le  défaut  d'organisation,  le 
combat  corps  à  corps  qui  était  seul  pratiqué,  la  courte  portée  et  la  puissance 


Fb.o88  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

bien  moindre  des  armes  de  jet,  ne  permettaient  guère  de  manœuvrer  et 
le  nombre  perdait  par  là  beaucoup  de  son  importance. 

37,  Vercingentorix.  —  Arverne  de  naissance  (les  Arvernes  avaient  poui* 
territoire  à  peu  près  l'Auvergne  actuelle),  ^  orcingétorix  souleva  la  Gaule 
centrale  que  C(''sar  venait  de  soumettre  et  se  fit  nommer  généralissime 
(53).  César  accourant  aussitôt,  après  avoir  échoué  devant  Gergovie,  capi- 
tale des  Arvernes  (située  proche  l'emplacement  actuel  de  ClermontFer- 
rand),  le  battit  en  plusieui-s  rencontres,  s'empara  d'Avaricum,  sa  princi- 
pale place  d'armes,  l'enferma  dans  Alésia  et  le  contraignit  à  se  rendre 
(52).  Jeté  dans  un  cachot  à  Rome,  Vercingétorix  y  demeura  six  ans  et, 
après  avoir  orné  le  triomphe  du  vainqueur,  fut  étranglé  (47).  Vercingé- 
torix était  chez  les  Gaulois,  non  un  nom  propie,  mais  un  titre  de  com- 
mandement qui  pourrait  se  traduire  par  généralissime  ;  on  ignore  comment 
s'appelait  le  chef  arvorne  connu  sous  ce  nom  et  vaincu  à  Alé.sia. 

39,  Àlexia.  —  César,  De  Bello  Gallico,  VII,  8. 
658, 

3,  Considéré.   —   Retenu,   réfléchi,   réservé,    prudent:  d'où    inconsidéré, 
étourdi. 
.S,  Appius.  —  Slktone,  César,  60. 

1,  Estimant.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  dict  Suétone. 

12,  Appétit.  —  Montaigne  a  dit  précisément  le  contraire,  liv.  11,  eh.  33,  II, 

634. 
18,  Ariouistus.  —  Venu  en  Gaule  comme  allié   des  Séquanes  (peuple  qui 

iiabitait  le  territoire  de  l'anc.  Franche-Comté),  Arioviste  voulut  s'opposer 

aux  conquêtes  de  César  après  avoir  feint  d'être  l'ami  des  Romains,  mais 

il  fut  complètement  battu,  en  58,  près  de  Vesontio  (auj.  Besançon). 
■2S,  Foy.  —  César,  De  Bello  Gallico,  1,  46. 
27.  Ennemis.  —  Suétone,  César,  68. 
30,  Guerre.  —  Les  histoires  grecques  et  romaines  contiennent  de  nombreux 

récits  des  prouesses  que   les  nageurs  ou  plongeurs  ont  exécutées   dans 

l'antiquité. 
33,  Alexandre.  —  Tout  comme  Alexandre  du  reste,  César  était  aussi  un 

excellent  cavalier.  V.  I,  530. 
660, 

2,  Cotte  d'armes.  —  Signifie  ici  son  manteau  de  général,  riche  casaque 
qui  se  mettait  comme  signe  distinctif,  par-dessus  la  cuirasse;  du  reste  les 
éd.  ant.  à  88  portent  acouslrement,  au  lieu  de  «  cotte  d'armes  »,  qui  se  dit 
plus  généralement  d'une  sorte  de  blouse  '  faite  de  petits  anneaux  de  fer 
entrelacés,  d'où  .son  nom  de  ■<  cotte  de  mailles  ».  —  En  ce  qui  concerne  les 
tablettes.  Voltaire  conteste  le  fait  :  «  Outre  que  César  n'en  parle  pas  dans 
ses  Commentaires,  dit-il,  quand  on  se  jette  à  la  mer  des  papiers  à  la  main, 
on  les  mouille  »;  et,  quanta  la  cotte  d'armes,  Dion  dit  au  contraire  : 
«  César  jeta  son  manteau  de  pourpre  qui  pouvait  l'empêcher  de  nager; 
les  Egj-ptiens  s'en  emparant,  s'en  firent  un  trophée.  » 

3,  L'aage.  —  Suétone,  César,  64.  —  En  48.  V.  N.  II,  652  :  ^Egypte.  Il 
attaquait  un  pont  dans  Alexandrie,  quand  une  brusque  sortie  de  l'ennemi 
le  contraignit  à  se  jeter  dans  une  barque;  il  avait  alors  53  ans. 

4,  Créance.  —  N'inspira  tant  de  confiance. 

o,  Centeniers.  —  Centurions,  chefs  d'une  troupe  de  cent  hommes. 

8,  Nécessiteux.  —  Suétone,  César,  68. 

8,  Cbastillon.  —  Plus  connu  sous  le  nom  d'amiral  de  Coligny;  jouit  dés 
le  début  d'une  grande  faveur  à  la  cour  et  fut  élevé  en  1552  à  la  digniU' 
d'amiral;  mais  las  des  intrigues  qui  se  menaient  autour  de  lui,  il  ne  tarda 
pas  à  résigner  tous  ses  emplois  et  à  se  retirer  dans  ses  terres.  En  1562.  lors 
des  guerres  de  religion,  il  fut  fait  lieutenant-général  par  le  parti  protes- 
tant; comme  tel,  prit  part  à  la  bataille  de  Dreux,  au  combat  indécis  de 
S.-Denis,  aux  batailles  de  Jarnac  et  de  Monteontour  qui  furent  fatales 
à  son  parti.  Après  la  paix  de  S.-Germain  (1570),  il  revint  à  la  coui'  où  il 
fut  des  plus  choyés  et  en  1572  une  des  premières  et  la  plus  illustre  victime 


NOTES.         MV.  II,  CH.  XXXIV.         VOL.  II,  PAG.  660.         Fb.589 

de  la  S. -Barthélémy.  Il  était  cl'iin  caractère  grave,  doux  et  bienveillant, 
général  assez  habile,  mais  nialheureux. 

11,  L'accompagaoient.  —  Les  Français  de  son  armée,  c'étaient  les  protes- 
tants; les  étrangers  étaient  les  contingents  allemands  au  service  'de  ce 
parti. 

18,  Prenaient.  —  En  725;  Carthage  employait  des  mercenaires  dans  ses 
armées  en  présence  desquelles  on  était,  d'où  cette  qualification  appliquée 
en  la  circonstance  dans  l'armée  romaine  à  ceux  qui  ne  firent  pas  ce  sacri- 
fice aux  difficultés  du  moment. 

21,  Tancer.  —  Suétone,  César,  68.  —  Dans  les  nombreuses  actions  de  guerre 
qu'il  engagea,  Césai"  n'éprouva  que  deux  échecs,  du  reste  bien  vite  et  glo- 
rieusement réparés  :  l'un  devant  Gergovie  en  Gaule,  l'autre  à  Dyrrachium. 

21,  Légions.  —  L'effectif  de  la  légion  romaine  a  varié  de  trois  à  six  mille 
fantassins  et  trois  cents  cavaliers;  la  cohorte  en  était  une  fraction  qui 
comprenait  cinq  cents  hommes. 

24,  Flescbes.  —  Suétone,  César,  68;  César,  De  Bello  civili,  III,  53. 

24,  Scœua.  —  César,  De  Bello  civili,  111,  53;  Florus,  IV,  2;  Valère  Maxime, 
111,  3,  23;  Suétone,  César,  68. 

29,  Party.  —  Suétone,  César,  68. 

34,  Propre.  —  En  48.  —  Pi.utarque,  César,  5. 

35,  Salone.  —  César,  De  Bello  civili,  III,  9.  —  En  49,  pendant  les  opérations 
autour  de  Dyrrachium. 

37,  Aduint.  —  Les  éd.  ant.  a'].  :  et  extraordinaire. 
662, 

2,  Engins.  —  Machines  de  guerre. 

1,  Cordes.  —  Les  femmes  de  Carthage  firent  de  même,  lors  du  siège  de 
cette  ville  par  Scipion  Emilien. 

CHAPITRE  XXXV. 

18,  Sçait. 

«  Et  si  je  8ais  compter, 
Il  en  est  jusqu'à  trois  que  je  i)ourrais  citer.  »  Bou.eau. 

664, 

8,  Dolent.  —  Citation  dont  les  termes  sont  légèrement  altérés,  san^  que 
le  sens  soit  modifié. 

8,  Rechigner.  —  Air  renfrogné;  rechigner,  dit  Nicot,  c'est  user  de  paroles 
et  de  regards  mal  gracieux  et  vient  de  ce  que  c'est  faire  en  quelque  sorte 
comme  un  chien  mécontent. 

9,  Dispenserons.  —  Permettrions,  accepterions  ;  dispenser  signifiait  autre- 
fois permettre.  Nicot. 

16,  Voix.  —  "  Femme  rit  quand  elle  peut  et  pleure  quand  elle  veut.   »  Pru- 

verbe. 
21,  Payement.  —  C.-à-d.  :  Cette  cérémonieuse  contenance  est  bien  moins 

pour  le  mort  que  pour  les  vivants;  elle  a  plus  pour  objet  d'acquérir  que 

de  payer. 

30,  Pline  le  ieune.  —  Epis  t.  VI,  24. 
666, 

20,  Faux.  —  Le  milieu. 

26,  Riches.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  de  grand  lieu,  au  lieu  de  :  «  riches  ». 

27,  Arria.  —  Le  récit  qui  suit  est  en  entier  extrait  de  Pline  le  .Ieune,  Episl. 
III,  16. 

28,  Consulaire.  —  Qui  avait  été  consul. 

32,  Plusieurs.  —  Cecina  Pœtus  se  tua  dans  les  circonstances  que  rapporte 
ici  Montaigne  (43);  Thraseas  Pœtus  son  gendre,  illustre  par  sa  vertu  et  son 
courage,  fut  un  des  représentants  de  la  faible  opposition  sénatoriale  qui 
osait  désapprouver  Néron;  il  sortit  du  Sénat,  pour  ne  pas  entendre  l'apo- 
logie du  meurtre  d'Agrippine  faitç  par  Sénèque.  Accusé  sous  de  frivoles 


Pb.'iQO  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

prétextes,,  il  l'ut  condamné  à  mourir  et  s'ouvrit  les  veines;  sa  femme,  imi- 
tant l'exemple  de  sa  mère,  ne  voulait  pas  lui  survivre.  Thraseas  la  pria 
instamment  de  se  laisser  vivre  pour  Fannia  leur  fille  (66). 
668, 

15.  Sçauriez.  —  •■  Ne  save/-vous  pas,  lait  dire  Mai-tial  à  Porcie  fille  de 
Caton  d'Utique,  qu'on  ne  peut  empêcher  pereonne  de  mourir;  je  croyais 
que  mon  père  vous  l'avait  appris?  »  V.  N.  II,  430  :  Premier. 

29,  Instant.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  Cela  dif,  au  lieu  de  :  «  Et  en  mesme 
instant  ». 

39,  Riche.  —  Il  est  incontestable  que  les  trois  mots  mis  par  Pline  dans  la 
bouche  d'Arria,  en  disent  beaucoup  plus,  dans  leur  concise  simplicité,  que 
la  phrase  étudiée  que  lui  prête  Martial. 

44,  Crainte.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  en  quoy  il  estait  de  suyure  son  conseil, 
au  lieu  de  :  «  de  la  suyure  en  mourant  ». 
670, 

2,  Paulina.  —  Tacite,  Ann.,  XV,  61  et  64. 
2,  leune.  —  L'éd.  de  80  porte  :  belle,  ieune. 

4,  Seneque.  —  Fut  d'abord  orateur,  puis  s'adonna  à  la  philosophie;  accusé 
d'intrigues  crimineUes  avec  la  fille  de  Germanicus,  il  fut  exilé  en  Corse 
et  il  y  demeura  huit  ans;  rentré  en  grâce,  il  fut  choisi  comme  précepteur 
de  Néron.  Lorsque,  parvenu  à  l'empire,  celui-ci  donna  carrière  à  sa  mau- 
vaise nature,  Sénèque  essaya  de  s'y  soustraire  en  sollicitant  sa  retraite; 
l'empereur  s'y  opposa  par  hypocrisie,  puis  ne  voyant  en  lui  qu'un  censeur 
incommode,  il  feignit  de  le  trouver  compromis  dans  la  conspiration  de 
Pison  et  lui  envoya  l'ordre  de  se  donner  la  mort,  ce  qu'il  fit  en  se  faisant 
ouvrir  les  veines  et  témoignant  d'un  calme  absolu,  ce  dont  Montaigne 
nous  donne  ici  un  récit  complet  (68).  On  a  reproché  à  Sénèque  les  ri- 
chesses considérables  acquises  pendant  qu'il  était  en  crédit,  l'approbation 
qu'il  a  donnée  à  l'empoisonnement  de  Britannicus  et  l'apologie  qu'il  a  faite 
du  meurtre  d'Agrippine.  On  a  de  lui  des  écrits  philosophiques  et  de  nom- 
breuses lettres  à  Lucilius;  partout  il  y  prêche  la  morale  la  plus  austère 
et  le  mépris  de  la  mort;  Montaigne  leur  a  fait  de  très  fréquents  emprunts; 
son  style  est  brillant,  élégant,  quoique  un  peu  aflfété.  Sénèque  semble  né 
à  Rome  ;  on  le  donne  parfois  comme  étant  de  Cordoue,  d'où  était  son  père 
venu  à  l'âge  de  15  ans  à  Rome,  où  il  a  vécu  et  où  il  est  mort. 

13,  Estriuoit.  —  Refusait  de  se  soumettre. 
672, 

18,  Beauté.  —  Var.  des  éd.  ant.  :  noblesse,  au  lieu  de  :  «  beauté  ». 

20,  Vieillesse.  —  L'éd.  de  80  ajoutait  :  {car  il  auoit  lors  enuiron  cent  qua- 
torze ans);  il  en  avait  en  réalité  soixante-cinq. 

30,  Elle.  —  La  poison;  le  mot,  du  temps  de  Montaigne,  était  féminin:  au- 
jourd'hui encore,  on  le  fait  tel  dans  le  langage  trivial.  ' 

37,  Fascbeuse.  —  Var.  des  éd.  ant.  à  88  :  lourde,  au  lieu  de  :  •  fascheuse  ». 
674, 

0,  Commun.  —  C'est  du  reste  de  la  réahté,  à  laquelle  n'atteint  jamais  la 
fiction,  que  les  auteurs,  se  bornant  à  modifier  certains  détails  et  parant 
le  tout  avec  plus  ou  moins  de  talent,  tirent  généralement  le  fond  des 
ouvrages  qui  leur  font  le  plus  honneur;  l'imagination  serait  impuissante 
à  concevoir  l'infinité  des  situations  que  nécessite  la  production  littéraire 
qui  va  sans  cesse  croissant;  et  c'est  en  serrant  au  plus  près  la  vie  réelle, 
ses  incidents  et  ses  accidents,  qu'ils  captivent  le  plus  notre  intérêt. 
15,  De  ce.  —  Les  éd.  ant.  portent  :  ou  comme  Arioste  a  rangé  en  vne  suite, 

ce;  au  lieu  de  :  <•  de  ce  ». 
22,  Lucilius.  —  Epist.  104. 


NOTES. 


TROISIÈME  VOLUME. 

LIVRE    SECOND 

[Suite). 

CHAPITRE  XXXVI. 

10, 

21,  Aueugle.  —  Ce  qui  ne  veut  pas  dire  qu'il  était  aveugle-né;  croire 
quHomère  est  né  aveuglej,  dit  Velleius  Paterculus,  c'est  être  soi-même 
aveugle  et  privé  de  tout  sens  et  surtout  de  bon  sens. 

21,  Auant  que.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  les  arts  et. 
12, 

17,  Elle  est.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  foible  et. 

23,  Imiter.  —  Ce  jugement  sur  Homère  a  été  forniulé  par  Velleius  Pater- 
culus, I,  5. 

23,  Aristote.   —  Poétique,  24. 

24,  Substantiels.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  massifs. 

20,  Coffret.  —  Pline,  Hist.  nat.,  VII,  9.  —  A  la  bataille  d'Issus,  tout  le  camp 
de  Darius,  qui  traînait  avec  lui  sa  famille,  sa  cour,  des  richesses  considé- 
rables, et  où  régnait  un  luxe  inouï,  était  tombé  aux  mains  du  vainqueur. 

28,  Militaires.  —  Plutarque,  Alexandre,  2. 

29,  Cleomenes.  —  Plutarque,  Apophlh.  des  Lacédémoniens. 
32,  Plutarque.  —  Dans  son  traité  Du  trop  parler,  5. 

37,  Point.  —  Plutarque,  Alcibiade,  3. 

42,  Qu'il  est.  —  Plutarque,  Apophlh.  des  rois,  art.  Hiéron. 

43,  Philosophes.  —  Cicéron,  Tusc,  1,  32. 

46,  Hélène.  —  Fille  de  Jupiter  et  de  Léda  femme  de  Tyndare  roi  de  Sparte, 
était  sœur  de  Castor  et  de  Pollux,  ainsi  que  de  Clytemnestre  femme  d'Aga- 
memnon.  Elle  épousa  Ménélas,  qui  succéda  à  Tyndare  comme  roi  de 
Sparte  et  dont  elle  eut  une  lîllc  Ilermione.  Elle  fut  enlevée  par  Paris,  fils 
de  Priam,  roi  de  Troie,  ce  qui  détermina  la  guerre  de  ce  nom,  entre  les 
Grecs  et  Troie.  Après  la  prise  de  cette  ville  qu'Hélène  livra  perfidement 
aux  Grecs  pour  rentrer  en  grâce  auprès  de  son  époux,  celui-ci  la  ramena 
à  Sparte.  Ménélas  mort,  elle  dut  quitter  Sparte  et  se  retira  à  Rhodes  où 
Polixo,  femme  de  Tlépolèmo  qui  avait  péri  au  siège  de  Troie,  la  fit  pen- 
dre. 

47,  lamais.  —  Montaigne  semble  avoir  des  doutes  que  le  siège  de  Troie  ait 
jamais  eu  lieu. 


14, 


5,  Troyens.  —  Les  Romains  se  réclamaient,  par  la  descendance  d'Énéo, 
d'une  prétendue  origine  troyenne;  cette  origine  a  été  également  revendi- 
quée par  les  Vénètes;  on  a  même  été  jusqu'à  l'établir  pour  les  Francs. 

7,  Moy.  —  Cette  lettre  a  toujours  passé  pour  apocryphe.  —  En  citant  ce 

passage,  Bayle  dit  :   «  Voilà  comment  des  maux  chimériques,  forgés  par 

des  poètes,  ont  servi  d'apologie  à  des  maux  réels  »  ;  forgés  par  des  poètes, 

par  d'autres  ou  par  nous-mêmes;  cette  réflexion  est  bien  juste. 

12,  Atbenae.  —  Vers  grec  cité  par  Aulu-Gelle,  III,  11,  et  reproduit  en  latiu. 


Fc.592  ESSAIS  DK  MONTAIGNE. 

—  La  inèiue  incertitude  régne  sur  le  lieu  de  naissance  de  quelques  illustra- 
tions semblables  :  Christophe  Colomb  est  revendiqué  par  Gênes,  Savone, 
Nervi,  Cogoletto,  Cuecaro  et  Calvi.  Huit  villes  se  sont  disputé  l'honneur 
d'avoir  vu  naître  Cervantes  :  Madrid,  Tolède,  Séville,  Lucana,  Esquivias, 
Alcazar  de  San  Juan,  Consnegi-a  et  Alcala  de  Ilénarès.  —  On  ne  connaît 
pas  avec  certitude  où  est  né  Charlemagne. 
13,  Alexandre  le  Grand.  —  Fils  de  Philippe  et  d'Olympias,  eut  Aristote 
pour  précepteur  et  monta  sur  le  trône  en  336.  Dés  son  début,  il  soumit  la 
Grèce  qui,  se  fiant  sur  sa  jeunesse,  avait  cru  pouvoir  secouer  le  joug  que 
son  père  lui  avait  imposé,  et  détruisit  Thèbes  de  fond  en  comble.  Puis,  se 
taisant  nommer  généralissime  des  Grecs  contre  les  Perses,  il  franchit l'Hel- 
lespont  avec  30.000  hommes  et  5,000  chevaux  ;  défit  sur  les  bords  du  Granique 
(334)  l'armée  de  Darius  roi  des  Perses  et  soumit  l'Asie  Mineure;  l'an- 
née suivante  il  le  vainquit  lui-même  à  Issus  en  Cilicie  (333),  et  y  fit 
prisonnière  sa  famille  qu'il  traita  avec  générosité;  acheva  la  soumission  de 
la  Syrie,  de  l'Egypte  où  il  fit  bâtir  Alexandrie,  et  pénétra  jusqu'en  Libye 
où  il  se  fit  déclarer  fils  de  Jupiter,  par  l'oracle  d'Ammon.  A  son  retour,  il 
remporta  une  nouvelle  victoire  sur  Darius  (331),  qui  fut  bientôt  suivie 
de  la  mort  de  ce  roi  et  le  rendit  maître  de  toute  la  Perse.  Poursuivant 
ses  conquêtes,  il  attaqua  les  Scythes,  les  Indiens,  défit  le  roi  Porus  qu'il 
traita  avec  magnanimité  et  s'avança  jusqu'à  l'Indus.  Ses  soldats  refusant 
de  le  suivre  plus  loin,  il  revint  à  Babylone  où  il  mourut  d'une  fièvre  aiguë 
(323),  usé  qu'il  était  par  les  débauches  et  les  excès  de  toutes  sortes.  — 
A  sa  mort,  son  corps,  après  avoir  été  embaumé  et  exposé  pendant  sept 
jours,  fut  placé  dans  un  cercueil  d'or  et  transporté,  suivant  le  désir  qu'il 
en  avait  manifesté,  à  Alexandrie  (Egypte).  Sur  le  chariot  qui  effectuait  le 
transport  et  qui  était  traîné  par  64  mulets,  attelés  à  quatre  timons,  se 
présentant  8  de  front,  sur  une  égale  profondeur,  s'élevait  une  chambre 
sépulcrale  monumentale  où  abondaient  l'or,  la  pourpre  et  les  pierreries. 
César  et  Auguste  se  firent  ouvrir  son  tombeau,  et  sur  sa  tète  ce  dernier 
plaça  une  couronne  d'or;  l'empereur  Septime  Sévère  en  interdit  l'accès;  et, 
depuis,  on  ignore  ce  qu'il  est  devenu. 

31,  Possession.  —  Alexandre  ne  désigna  personne  pour  lui  succéder,  se  con- 
tentant de  léguer  sa  couronne  au  plus  digne.  Son  empire  fut  partagé  entre 
ses  généraux  et  ce  partage  fut  la  source  de  guerres  longues  et  sanglantes, 
l'erdiccas,  auquel  en  mourant  il  avait  remis  son  anneau  royal,  se  considé- 
rant de  ce  fait  comme  appelé  à  régner  sur  l'ensemble,  effectua  le  partage 
sans  rien  se  réserver  pour  lui-même  en  particulier  :  Séleucus  reçut  la 
Syrie  et  la  haute  Asie;  Ptolémée,  l'Egypte;  Antigone,  l'Asie  Mineure;  Eu- 
mène,  la  Cappadoce  et  la  Paphiagonie  ;  Lysimaque,  la  Thrace  ;  Antipater. 
la  Macédoine  et  la  Grèce.  Quelques-uns,  comme  Séleucus  et  Ptolémée,  firent 
souche  et  leurs  dynasties  régnèrent  jusqu'au  moment  où,  deux  ou  trois 
siècles  après,  leurs  états  devinrent  simples  provinces  romaines. 

32,  Tempérance.  —  Ce  mot  est  à  prendre  ici  dans  le  sens  de  modération, 
bien  qu'Alexandre  n'ait  guère  été  plus  modéré  que  tempérant. 

34,  Reproche.  —  Les  éd.  ant.  à  88  aj.  :  que  la  colère. 

38,  Thebes. — Certaines  éditions  postérieures  ajoutent  :  et  de  Persepolis.  — 
Pour  ce  qui  est  de  la  ruine  de  Thèbes,  V.  N.  I,  22  :  Esclaues.  Celle  de  Per- 
sépolis,  que  Montaigne  eût  également  pu  citer,  eut  lieu  dans  les  conditions 
suivantes  :  Dans  le  cours  d'une  orgie  et  sous  rinfiuence  de  l'ivresse  et  à  l'in- 
citation de  Thaïs,  courtisane  athénienne,  Alexandre,  quittant  la  salle  du 
festin,  portant  lui-même  une  torche  enflammée,  aUa  mettre  le  feu  au  palais 
des  rois  de  Perse;  ce  palais,  dont  les  ruines  subsistent  encore,  construit  en 
bois  de  cèdre,  passait  pour  la  huitième  merveille  du  monde  (331j. 

38,  Menander.  —  Commandant  d'une  forteresse  en  Perse,  ne  voulut  pas  y 
demeui-er  quand  Alexandre  se  proposa  de  passer  dans  les  Indes;  irrité  de 
son  refus,  ce  prince  le  tua  de  sa  propre  main. 

39,  Hephestion.  —  Favori  d'Alexandre,  compagnon  de  ses  travaux  et  de  ses 
plaisirs,  atteint  de  maladie,  mourut  du  fait  de  sa  propre  imprudence: 


16, 


NOTES.        LIV.  II,  en.  XXXVI.         VOL.  III,  PAG.   14.         Fc.593 

Alcxanflre  fut  si  affecté  de  cotte  mort,  qu'il  fit,  dit  Plutarque,  mettre  en 
croix  lo  médecin  qui  le  soignait.  Arrien  conteste  le  fait. 

39,  Persiens.  —  Après  la  bataille  d'Issus,  où  les  pertes  des  Perses  s'élevèrent, 
dit-on,  à  cent  mille  hommes. 

40,  Indiens.  —  Ces  Indiens,  guerriers  de  profession,  se  mettaient  à  la  solde 
des  peuplades  voisines  et  les  servaient  avec  fidélité  et  courage;  ils  avaient 
fait  souvent  du  mal  à  Alexandre  qui,  les  tenant  assiégés  dans  une  ville 
d'abord  difficile,  leur  offrit  une  capitulation  honorable  pour  les  amener  à 
en  sortir;  comme  ils  se  retiraient,  il  les  surprit  dans  leur  marche  et  les 
fit  tous  passer  par  le  fil  de  l'épée  (330). 

1,  Cosseïens.  —  Pour  se  distraire  du  chagrin  que  lui  causait  la  mort  d'Hé- 
phestion,  Alexandre,  dit  Plutarque,  partit  en  guerre,  comme  on  va  à  une 
partie  de  chasse,  contre  les  Cosséiens  qu'il  e.xtermina,  sans  distinction  de 
sexe,  ni  d'âge,  n'épai'gnant  même  pas  les  petits  enfants  :  holocauste,  dit 
son  entourage,  à  la  mémoire  d'Héphestion  (327). 

2,  Clytus.  —  Ql'inte-Curce,  X,  5.  —  Clitus  était  frère  de  la  nourrice 
d'Alexandre,  ra\'ait  suivi  dans  toutes  ses  expéditions  et  lui  avait  sauvé 
la  vie  au  passage  du  Granique.  Dans  un  festin,  le  roi,  échauffé  par  le  vin, 
et  irrité  de  ce  qu'il  mettait  les  exploits  de  son  père  au-dessus  des  siens, 
le  tua  (326).  Revenu  à  lui,  il  le  pleura  l't  lui  fit  faire  des  funérailles 
magnifiques;  mais  ce  qui  contribua  le  plus  à  calmer  sa  douleur  et  se9 
remords;  c'est  que  la  veille  du  meurtre,  l'ayant  vu  en  songe  vêtu  d'une 
robe  noire,  assis  au  milieu-  des  enfants  de  Parménion  qui  tous  étaient 
morts,  le  divin  Aristandre  lui  rappela  ce  songe,  comme  un  indice  certain 
que  c'était  là  un  événement  réglé  par  le  destin;  et  que,  d'autre  part,  le 
philosophe  Anaxagoras  s'évertua  à  lui  prêcher  que  toutes  les  actions  des 
princes  sont  justes  et  légitimes,  et  qu'il  se  devait  à  lui-même  de  ne  pas 
se  laisser  maîtriser  par  une  vaine  opinion. 

5,  Vices.  —  Si  Alexandre  a  pu  mériter  d'être  jugé  ainsi  au  début,  il  n'en 
a  pas  été  de  même  plus  tard,  quand  la  nature  s'éveillant  en  lui  et  la  pros- 
jtérité  l'enivrant,  ses  passions  ont  pris  le  dessus.  Dès  lors,  il  se  plongea 
dans  la  débauche  et  sa  vie  ne  fut  plus'  qu'une  suite  ininterrompue  de  dé- 
sordres de  tous  genres  qui  scandalisèrent  ses  anciens  sujets.  Tite-Live  et 
Athénke  le  jugent  beaucoup  moins  favorablement  que  Montaigne  qui, 
comme  Plutarque  et  Quinte-Curce  ses  historiens,  se  montre  fort  indul- 
gent à  son  égard.  C'est  chez  ce  dernier  qu'on  trouve  le  récit  curieux  de 
son  attitude  vis-à-vis  de  Bagoas,  cet  eunuque  mignon  de  Darius,  qui  servit 
de  même  aux  plaisirs  de  son  vainqueur,  lequel  en  plein  théâtre  lui  prodi- 
guait les  baisers  les  plus  lascifs;  Tite-Live,  qui  ne  s'est  occupé  de  lui 
qu'incidemment,  estime  qu'il  n'eût  pas  triomphé  des  Romains  aussi  facile- 
ment qu'il  a  subjugué  les  nations  orientales. 

9,  Indes.  —  Ses  troupes  refusant  de  le  suivre  au  delà  du  Gange,  Alexandre 
revint  sur  ses  pas.  Mais,  pour  laisser  dans  ces  contrées  une  haute  idée  do 
son  nom,  il  fit,  dit  Plutakque,  forger  des  armes  plus  grandes,  des  man- 
geoires pour  chevaux  plus  hautes,  des  mors  plus  pesants  que  d'ordinaire, 
et  les  abandonna,  les  faisant  semer  çà  et  là. 

10,  Fortune.  —  Voir  sur  les  faits  qui  précèdent  :  Plutarque,  Alexandre, 
18,  19,  22,  etc.;  —  Quinte-Curce,  IX,  3;  X,  4,  5,  etc.;  —  Diodore  de  Sicu.e, 
XVII,  95. 

13,  Hommes.  —  Annibal,  d'après  Tite-Live,  donnait  le  pas  à  Alexandre  sur 
tous  autres,  parce  qu'avec  une  poignée  d'hommes,  il  avait  triomphé  d'in- 
nombrables ennemis,  et  qu'il  avait  atteint  les  régions  extrêmes  qu'il  était 
donné  à  l'homme  de  pouvoir  atteindre.  V.  N.  II,  622  :  Hannibal. 

15,  Miracle.  —  Les  éd.  ant.  à  88  aj.  :  car  on  lient  entre  autres  choses  que  sa 
sueur  produisoit  une  très  douce  et  souafue  odeur,  ce  que  Montaigne  a  déjà 
dit  dans  son  chapitre  des  senteurs,  I,  574. 

23,  Médailles.  —  'Trébelhus  Pollion,  Trig.  lyrann.,  14.  —  On  a  eu  la  même 
opinion,  après  saint  Louis,  sur  les  pièces  de  monnaie  à  son  effigie. 

ESSAIS   de    MONTAIGNE.  —  T.    IV.  38 


Fc.594  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

18, 

I,  Epaminondas  —  S'était  d'abord  adonné  à  l'étude  des  lettres  et  de  la 
philosophie.  Lié  avec  Pélopidas,  il  l'aida  à  délivrer  Thèbes  des  Lacédémo- 
niens  qui  s'en  étaient  emparés  par  trahison.  Nomiiié  généi-al  lors  de  la 
guerre  qui  s'ensuivit,  il  fut  vainqueur  à  Leuctres  (371),  et  releva  Messène 
do  ses  l'uinos  pour  l'opposer  à  Lacédémone.  Postérieurement,  il  obtint  plu- 
sieurs avantages  sur  Alexandre,  tyran  de  Phères;  puis,  la  guerre  ayant 
repris  contre  les  Lacédéraoniens,  il  les  battit  à  nouveau  à  Mantinée,  mais 
y  fut  blessé  mortellement  (363).  Epaminondas  donna  l'exemple  de  toutes 
les  vertus;  il  n'avait  pas  moins  de  frugalité  et  de  désintéressement  que  de 
génie  et  de  courage.  V.  N.  I,  344  :  Reng. 

13,  Eux.  —  DiODORE  DE  Sicii.E,  XV,  88;  Pausamas,  VIII,  13,  etc.  C'est  auss 
le  jugement  de  Cicéron,  De  Orat.,  III,  34;  Tusc,  I,  2;  il  est  vrai  qu'ailleurs, 
Acad.,  11,  1,  il  en  dit  autant  de  Thémistocle. 

16,  Luy.  —  Pi.uTARQUE,  De  l'Esprit  familier  de  Sacrale,  23. 

20,  Partie.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  qui  est  de  la  vertu  et. 

23.  Cestuy-cy.  —  Epaminondas. 

25,  Parangon.  —  En  comparaison.  Ce  mot  s'employait  aussi  dans  le  sens 
de  modèle  :  •  0  dame  illustre,  ô  parangon  d'honneur!  •  Marot. 
20, 

18,  Leuctres.  —  Plutarque,  Coriolan,  2;  et  dans  le  traité  où  il  entreprend 
de  prouver  Qu'on  ne  saurait  vivre  joyeusement  selon  la  doctrine  d'Épicure, 
13. 

19,  Beaucoup.  —  Coucher  de  beaucoup,  c'est  exagérer,  se  vanter.  —  Ce  mot 
■<  coucher  »  était  à  l'époque  fréquemment  employé  et  présentait  des  ac- 
ceptions très  diverses  suivant  la  nature  du  complément  qui  l'accompa- 
gnait :  «■  coucher  de  peu  »,  c'était  faire  bon  marché  de.  faire  le  modeste; 
«  coucher  gros  »,  mettre  gros  jeu  sur  une  carte  par  exemple;  «  coucher 
par  écrit  »  se  dit  encore  dans  le  langage  familier.  Régnier  a  dit  :  «  Ne 
couche  de  rien  moins  que  l'immortaUté  »,  c.-à-d.  ne  vise,  n'aspire  à  rien 
moins  qu'à  l'immortalité. 

20,  Tant.  —  L'éd.  de  88  aj.  :  vtile  et. 

22,  Cause.  —  Plutarque.  De  l'Esprit  familier  de  Sacrale,  4. 
25,  L'espargner.  —  Id.,  ibid.,  17. 


22, 


2,  Luy.  —  DiODORE  de  Sicile,  XX,  88;  Cornélius  Népos,  Epaminondas,  10; 
Justin,  VI,  8;  etc. 


24, 


CHAPITRE  XXXVIl. 

3,  Pièces.  —  C'est  son  livre  même  que  Montaigne  désigne  de  la  sorte. 
9,  Oster.  —  Cependant,  précisément  dans  ce  chapitre  (pag.  26),  a  été  sup- 
primé et  remplacé  par  quelques  mots,  un  assez  long  passage  qui  se  trou- 
vait dans  l'édition  de  1588. 
18,  Conuersation.  —  C.-à-d.  une  vie  qui  se  prolonge  jusque  dans  la  vieil- 
lesse ne  se  passe... 
30,  Membre.  —  Les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bordeaux  aj.  :  mais  c'estoient  vaines 
propositions. 

7,  Msecenas.  —  S'était  lié  avec  Auguste,  alors  que  celui-ci  étudiait  en 
Grèce.  Il  l'accompagna  dans  toutes  ses  guerres  et,  quand  il  devint  empe- 
reur, se  contenta  d'être  son  ami  et  refusa  toutes  charges  et  honneurs. 
Il  ne  se  servit  de  son  crédit  que  pour  le  porter  à  la  clémence  et  surtout 
favoriser  les  gens  de  lettres  :  Virgile,  Horace,  Properce  étaient  ses  amis 
et  ses  protégés;  lui-même  avait  composé  quelques  poésies,  dont  il  ne  reste 
que  quelques  fragments. 
11,  Bene  est.  —  Vers  de  Mécène  conservés  par  Sénèque  et  que  La  Fontaine 
a  traduits  ainsi  dans  sa  fable  La  Mort  et  le  malheureua;  : 


NOTES. 


LIV.  II,  CH.  XXXVII.         VOL.  III,  PAG.  24. 


Fc.595 


26, 


«  ...  Qu'on  me  rende  impotent, 
Cul-de-jatte,  goutteux,  manchot,  pourvu  qu'en  somme 
Je  vive,  c'est  assez:  je  suis  plus  que  content.  » 

17,  Stoïcien.  —  Ou  plutôt  <-  le  cynique  ».  Est  le  fondateur  de  cette  école: 
il  était  disciple  de  Socrate  et  fut  le  maître  de  Diogène.  11  faisait  consister 
le  souverain  bien  dans  la  vertu  qu'il  plaçait  dans  le  mépris  des  richesses, 
des  grandeurs  et  de  la  volupté;  c'est  lui  qui,  le  premier,  prit  la  besace  et 
le  bâton  de  mendiant  comme  symbole  de  la  philosophie.  —  Ce  trait  est 
rapporté  par  Diogène  Laerce,  VI,  18. 

38,  Essayé.  —  Éprouvé. 

6,  Accointer.  ~  Me  familiariser  avec  la  mort. 

13,  Opter.  —  La  pensée  exprimée  par  ce  vers  de  Martial  a  été  souvent  repro- 
duite : 


«  Las  d'espérer  et  de  me  plaindre 
Des  Muses,  des  grands  et  du  sort, 
«  Être  satisfait  de  son  sort, 
Quel  qu'il  soit,  ne  jamais  s'en  plain- 
[dre. 


C'est  ici  que  j'attends  la  mort. 

Sans  la  désirer  ni  la  craindre.  «  Meynard. 

Et  regarder  venir  la  mort 

Sans  la  désirer  ni  la  craindre.  •  Bussy-Rabutix. 


Madame  de  Tracy  l'a  développée  :  «  La  vraie  philosophie  c'est  de  pré- 
férer ce  qu'on  a,  et  de  voir  toutes  choses  du  bon  côté;  de  même  le  vrai 
christianisme  consiste  à  faire  à  tous  les  êtres  animés,  bêtes  et  gens,  le  plus 
de  bien  possible  et  à  attendre  la  mort  sans  crainte,  comme  sans  impa- 
tience. »  —  QuiNAULT  l'a  résumée  ainsi  : 

«  Faites  choix  de  l'indifférence, 
Elle  assure  un  sort  plus  heureux.  » 

20,  Gestes.  —  Au  lieu  de  :  «  Qu'elle  laisse...  gestes  »  (1.  18  à  20),  les  éd.  ant. 
portent  :  comme  si  elle  dressait  les  hommes  aux  actes  d'vne  comédie,  ou 
comme  s'il  esloit  en  sa  iurisdiclion,  d'empescher  les  mouuemenls  et  altéra- 
tions que  nous  sommes  naturellement  contraincts  de  receuoir  :.  qu'elle  em- 
pesche  donq  Sacrales  de  rougir  d'affection,  ou  de  honte,  de  cligner  les  yeux 
à  la  menace  d'vn  coup,  de  trembler  et  de  suer  aux  secousses  de  la  fiebure  :  la 
peinclure  de  la  Poésie,  qui  est  libre  et  volontaire,  n'ose  priuer  des  larmes 
mesmes,  les  personnes  qu'elle  veut  représenter  accomplies  et  parfaietes. 


E  se  n'afflige  tanto, 
Che  si  morde  le  man,  morde  le  labbia, 
Sparge  le  guancie  di  conticuo  pianlo, 

elle  deburoit  laisser  celle  charge  à  ceulx,  qui  font  profession  de  reigler  nostre 
maintien  et  nos  mines.  —  Traduction  de  la  citation  :  «  Son  affliction  est 
telle  qu'il  se  mord  les  mains,  qu'il  se  mord  les  lèvres  et  que  sa  joue  est 
sans  cesse  inondée  de  pleurs  »  (Auteur  inconnu). 

20,  Condonne.  —  Accorde,  permette,  du  latin  condonare  qui  a  même  sens. 

22.  Voyelle.  —  Qui  se  décèle  par  la  voix,  par  des  plaintes,  des  gémisse- 
ments. 

29,  Instruire.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  qu'elle  luy  ordonne  ses  pas  et  le  tienne  en 
bride  et  en  office. 

35,  En  accidens.  —  Précédé  dans  l'éd.  de  88  par  ;  Voyla  sa  charge  :  du 
dehors,  il  importe  peu  et. 

37,  Corps.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  C'est  bien  assez  que  nous  soyons  tels,  que 
auons  nous  accoustumé  en  nos  pensées  et  actions  principales  :  quant  au  corps, 
s'il,  au  lieu  de  :  «  Si  le  corps  ». 

38,  Tonrneboule.  —  Qu'il  se  tourne  et  se  retourne  comme  une  boule. 


Fc.Fi96  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

28, 

5,  Epicurus.  —  Diogène  Laerce,  X,  18.  / 

8,  Caestibus.  —  Gestes;  gantelets  garnis  de  fer  ou  de  plomb,  dont  se  ser- 
vaient les  athlètes  dans  les  combats  du  pugilat. 
12,  Assaux.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  de  la  douleur. 
19,  Desespoir.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  à  la  rage. 
22,  Retert.  —  V^ers  du  Philoctète  d'ATTios,  cités  deux  fois  par  Cicéros,  De 

Finibus.  II,  29 et  Tusc,  II,  14. 
30,  Cicero.  —  De  Divin.,  Il,  69. 

32,  Desgarcent.  —  Mot  forgé  par  Montaigne  pour  exprimer  que  les  dou- 
leurs de  la  pierre  ne  le  portaient  à  rêver  qu'il  avait  commerce  avec  une 
femme,  comme  il  était  arrivé  à  l'individu  dont  parle  Cicéron. 

33,  Vreteres.  —  Canaux  qui  mettent  en  communication  les  reins  et  la  ves- 
sie. 

34,  Ordinaire.  —  Les  éd."  ant.  aj.  -.le  deuise,  ie  ris,  i'estudie,  sans  esmolion  et 
altération. 

36,  Préparer.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  par  estude  et. 
30, 

1,  Essayé.  —  Je  me  suis  cependant  mis  à  l'essai,  à  l'épreuve. 
8,  Santé.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  pure  de  douleurs. 

13,  Présomption.  —  Socrate  disait  d'Antisthène  affectant  de  ne  porter  que 
des  vêtements  dépenaillés,  qu'il  apercevait  sa  vanité  au  travers  des  trous 
de  son  manteau.  —  «  L'excès  de  modestie  est  un  raffinement  d'orgueil.  • 
Pascal.  —  «  La  simplicité  affectée  est  une  imposture  délicate.  •  —  •  L'or- 
gueil est  égal  chez  tous  les  hommes;  il  n'y  a  de  différence  qu'aux  moyens 
et  à  la  manière  de  le  mettre  à  jour.  •  La  Rochefoucauld. 
32,  Cartilage.  —  Pline,  Hist.  nat.,  VII,  12. 

34,  Illégitime.  —  Plutarque,  dans  son  traité  De  ceux  dont  Dieu  diffère  la  pu- 
nition, 19,  ne  dit  pas  qu'on  ait  jamais  tenu  pour  illégitimes  ceux  qui  ne 
portaient  pas  l'empreinte  d'un  fer  de  lance  sur  le  corps;  il  remarque  au 
contraire  qu'après  avoir  disparu,  cette  empreinte  avait  reparu  dans  cette 
même  famille  après  un  assez  long  intervalle  de  temps. 

36,  Ressemblance.  —  C'est  ce  qu'HÉRODOxE,  VI,  180,  raconte  d'un  peuple  de 
Libye. 
32, 

15,  Mère.  —  Le  père  de  Montaigne  parait  avoir  eu  dix  enfants,  dont  les  deux 
aînés  seraient  morts  en  bas  âge,  peut-être  avant  la  naissance  de  Michel, 
de  telle  sorte  que,  né  le  troisième  après  cinq  années  de  mariage,  il  se 
trouva  être  l'aîné  de  quatre  frères  et  trois  sœurs  qui  parvinrent  à  âge 
d'homme.  V.  N.  I,  114  :  Frère. 

38,  Deux.  —  Ramon  Eyquem,  son  bisaïeul,  mort  en  1478. 

41,  Sept.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  six. 
34, 

10,  Empeschement.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  rengregement  de  mal. 

13,  Quatre.  —  Ces  quatre  frères  étaient  :  Pierre,  le  père  de  Montaigne,  qui 
était  l'aîné.  Thomas,  que  l'on  appelait  M.  de  S. -Michel,  parce  qu'il  était 
curé  de  cette  paroisse  où  se  trouvait  sis  le  château  de  Montaigne;  il  mou- 
rut jeune.  Pierre  minor,  dit  Seigneur  de  Gavific  ;  il  succéda  aux  emplois 
ecclésiastiques  de  son  frère  Thomas  et  devint  chanoine  de  S.-André  et  de 
S.-Seurin  de  Bordeaux  et  curé  de  Lahontan,  localité  dont  il  est  question 
plus  loin,  page  60.  Enfin  Raymond,  Seigneur  de  Dussaguet,  avocat  au  par- 
lement de  Bordeaux. 

16,  Mal.  —  Et  cela  lui  réussit  si  mal. 

19,  Dyspathie.  —  Aversion;  le  mot  est  emprunté  du  grec,  nous  disons  au- 
jourd'hui antipathie. 
25,  Considération.  —  Préjugé. 
29,  Epicurus.  —  Cicéron,  Tusc,  V,  33;  Diogène  Laerce,  X,  129. 

35,  Iniurieuse.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  ne  peut  auoir  ny  grâce,  ny  faueur,  au 
lieu  de  :  «  nous  vient...  à  estre  iniurieuse  ». 


NOTES.         LIV.  Il,  CH.  XXXVII.         VOL.  III,  PAG.  34.        Fci.597 

40,  Secours.  —  Les  éd.  ant.  et  l'ex.   do  Bordeaux  port.  :  de  s'ayder  de  ces 
nobles,  au  lieu  de  :  «  d'appeler  à  son  secours  ». 
36, 

2,  Chère.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  esphieuse. 

6,  Certain.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  Mais  ie  dy  que  ce  qui  s'en  void  en  prac- 
tique,  il  y  a  grand  dangier  que  ce  soit  pure  imposture,  i'en  crois  leurs  con- 
fraires  Fiorauanti  et  Paracelse. 

8,  Retforts.  —  Raifort;  sorte  de  rave  sauvage  de  goût  très  prononcé. 

9,  Séné.  —  Arbrisseau  des  pays  chauds,  dont  les  valves  des  fleui-s  sont  pur- 
gatives. 

11,  Solon.  —  C'est  Plutakqoe  qui  le  lui  fait  dire  dans  le  Banquet  des  sept 
Sages,  19. 

14,  Vberté.  —  Fertilité;  du  latin  ubertas  qui  a  même  signification. 

15,  Arondes.  —  Hirondelles;* cet  ancien  nom  de  l'hirondelle  se  retrouve  en- 
core dans  «  queue  d'aronde  »,  à  la  fois  terme  de  charpentier  et  de  fortifica- 
tion. 

19,  Pastissage.  —  Mélange  informe,  espèce  de  salmigondis  ou  de  macédoine. 

25,  Désigne.  —  Prescrit,  ordonne. 

26,  Estime.  —  Montaigne  raconte  dans  son  Voyage  que,  se  trouvant,  pour 
sa  santé,  aux  bains  «  délia  Villa  »  près  de  Lucques,  en  1581,  il  laissa  échap- 
per cette  exclamation  :  «  La  vainc  chose  que  la  médecine  !  »  Ce  qui  suit 
prouve  que  ce  mot  partait  du  fond  de  l'àme  ;  et  pour  le  confirmer  dans 
son  idée,  plusieure  fois,  rapporte-t-il  encore,  il  fut  appelé  à  Rome  à  des 
consultations  de  médecins;  à  l'une,  entre  autres,  le  malade  était  résolu 
de  s'en  tenir  à  sa  décision  ;  et  il  ajoute  :  «  J'en  riois  en  moi-même.  »  Le 
Clerc. 

37,  Ordonnances.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  drogues. 
38, 

1,  Point.  —  Je  ne  me  fais  pas  un  sujet  de  frayeur,  je  ne  souffre  pas  d'être 
sans  médecin  ;  —  c'est  le  sens  propre  de  «  passionner  »  qui  ne  se  dit  plus 
aujourd'hui  qu'au  sens  figuré. 
13,  Censeur.  —  Pline,  d'où  cette  assertion  semble  tirée,  émet  en  effet  que 
les  médecins  ne  furent  reçus  à  Rome  que  six  cents  ans  après  la  fondation 
de  cette  ville;  mais  pour  ce  qui  est  de  leur  expulsion,  il  dit  expressément 
qu'elle  n'eut  lieu  que  longtemps  après  la  mort  de  Caton. 

18,  Plutarque.  —  Vie  de  Caton  le  Censeur,  12. 

19,  Pline.  -  Ilist.  nat.,  XXV,  8. 

20,  Hérodote.  —  Liv.  IV,  ch.  187.  —  Hippocrate  dit  à  peu  près  la  même 
chose  des  Scythes. 


40, 


2,  Platon.  —  Dans  le  Timée. 

3,  Appartiennent.  —  Dont  nous  avons  la  disposition.  —  Ces  trois  modes 
de  perturbations  intestines  sont  les  vomitifs,  les  purgations  et  la  saignée. 

7,  Harpades.  —  Combats;  coups  de  harpon  ou  de  griffes.  —  Se  harper, 
c'est  lutter  à  qui  mieux  mieux,  corps  à  corps,  se  prenant  aux  cheveux,  se 
mordant,  mettant  tout  en  jeu  pour  se  faire  le  plus  de  mal  possible. 
10,  Intiable.  —  Incertain,  sur  lequel  on  ne  peut  compter. 

14,  Dibore.  —  Expression  employée  jadis  dans  le  Languedoc  et  qui  peut  se 
traduire  par  «  Holà!  »  ou  encore  :  «  Alerte,  à  l'aide,  au  secours  »;  —  était 
employée  couramment  dans  celte  région,  alors  dans  son  premier  sens,  par 
les  laboureurs,  les  charretiers  pour  presser  la  marche  de  leurs  bêtes. 

15,  Impiteux.  —  Impitoyable,  sans  pitié. 

21,  Entraine  —  Imitation  de  ce  vers  de  Sénèque,  Epist.  107  :  «  Ducunt  vo- 
lenlem  fala,  nolentem  trahunt  (Le  destin  mène  qui  s'y  prête  et  contraint 
qui  résiste).  »  Ce  que  Fénei.on  a  rendu  sous  cette  autre  forme  :  <•  L'homme 
s'agite,  Dieu  le  mène.  » 

27,  Tué.  —  Pline  l'Ancien,  qui  vivait  avant  Adrien,  cite  une  épitaphe  exac- 
tement conçue  dans  les  mêmes  ternies  :  •  Le  trop  grand  nombre  de 
médecins  qui  l'ont  assisté,  l'a  tué.  •  —  Dans  une  de  ses  comédies,  Casimir 


Fc.b98  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Delavigne  exprime  la  môme  idée,  en  parodiant  le  vers  si  connu  de  Cor- 
neille et  l'appliquant  à  un  malade  auquel  plusieurs  médecins  ont  apporté 
leurs  soins  :  <-  Que  vouliez-vous  qu'il  fît  contre  trois?  —  Qu'il  mourût.  » 

28,  Diogenes.  —  DiOGf:NE  Laeiîce,  VI,  62. 

29,  Autresfois.  —  ■•  Parlons  fi'anchement,  Docteur,  dit  un  jour,  en  plaisan- 
tant, Frédéric  II  de  Prusse  à  son  médecin.  Combien  avez-vous  tué  d'hommes 
pendant  votre  vie?  —  Sire,  répondit  celui-ci,  à  peu  près  trois  cent  mille 
de  moins  que  Votre  Majesté.  »  —  «  Diaulus  était  médecin,  maintenant  il 
est  croque-mort  ;  il  n'a  pas  changé  de  métier.  »  Martial.  —  «  Tu  tuais  les 
hommes  étant  médecin  ;  gladiateur,  tu  les  tues  encore.  »  Martial. 

29,  Nicocles.  —  Le  mot  de  Nicociès  se  trouve  dans  le  ch.  46  de  la  Collection 
des  moines  Antonius  et  Maximus;  cette  épigramme  a  souvent  été  répétée. 

33,  Faute.  —  Les  éd.  ant.  à  88  port.  :  heur,  que  leur  erreur  et  leurs  fautes 
sont  soudain  mises  sous  terre  et  enseuelies,  au  lieu  de  :  «  heur...  faute  ». 

37,  Moy.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  query  à  moy,  au  lieu  de  :  «  query  moy  ». 

39,  Subiects.  —  C.-à-d.  les  médecins  s'en  font  honneur  auprès  de  ceux  qui 
se  sont  mis  entre  leurs  mains. 

42 

15,  Morfondement.  —  Ce  que  nous  appelons  aujourd'hui  un  chaud  et  froid, 

une  affection  causée  par  un  froid  subit,  vous  surprenant  ayant  chaud. 
21,  Propos.  —  De  la  République,  III.   . 
27,  Conte.  —  Dans  sa  fable  Le  malade  et  le  médecin.  —  Les  éd.  ant.  à  88 

port.  :  ce  me  semble. 

40,  Propres.  —  Les  Chinois,  les  Japonais  paient,  dit-on,  leurs  médecins,  tant 
par  journée  de  bonne  santé;  et,  quand  ils  sont  malades,  ils  sont  soignés 
gratis.  La  chose  n'est  pas  aussi  paradoxale  qu'elle  en  a  l'air  au  premier 
abord;  c'est  l'analogue  de  ce  qui  se  pratiquait  il  y  a  un  demi-siècle  en 
France,  et  qui  se  pratique  peut-être  encore  dans  les  campagnes,  où  l'on 
contractait  abonnement  avec  le  médecin;  c'est  également  ce  qui  se  passe 
dans  les  sociétés  de  secours  mutuels.  Ce  mode  a  disparu  dans  les  grandes 
villes  depuis  que  les  médecins  ont  mis  leurs  soins  à  des  prix  tellement 
exorbitants  que,  pour  échapper  à  leurs  exigences  souvent  peu  en  rapport 
avec  leur  science  (les  plus  modestes  ne  sont  pas  les  moins  bons),  beaucoup 
de  personnes  de  condition  aisée  cherchent  à  se  faire  admettre  dans  les 
hôpitaux.  On  se  plaint  qu'en  agissant  ainsi ,  elles  volent  les  pauvres 
pour  lesquels  ces  établissements  ont  été  créés;  c'est  la  nécessité  qui  les  y 
oblige  :  elles  n'ont  d'autre  moyen  de  se  procurer  des  soins  dont  elles 
soient  sûres,  et  d'échapper  ainsi  à  l'ignorance  des  uns  et  aux  prix  exa- 
gérés des  autres.  «  Les  anciens  ne  voulaient  pas  surtout  que  la  vie  des 
hommes  fût  au  prix  d'un  énorme  salaire  »  ;  mais  déjà  du  temps  de  Pline 
qui  écrivait  ainsi,  les  médecins  étaient  parfois  payés  des  prix  excessifs, 
effet  de  la  civilisation  qui,  augmentant  le  bien-être  physique,  fait  que 
chacun  tient  davantage  à  la  vie.  D'après  lui,  Erasistrate  aurait  reçu  cent 
talents  (575.000  fr.)  pour  avoir  guéri  le  roi  Antiochus  et  il  en  cite  plusieurs 
qui  en  ont  laissé  plus  de  mille  à  leurs  héritiers,  après  en  avoir  dépensé 
autant  durant  leur  vie.  Aujourd'hui  on  a  également  tendance  à  l'exagé- 
ration, et  quand  on  leur  parle  de  tarif,  les  princes  de  la  science  répondent 
en  concédant  le  paiement  de  leurs  honoraires  au  prorata  du  revenu 
représenté  par  le  prix  du  loyer.  Si  encore  ils  étaient  tenus  de  garantir  la 
guérison  ou  seulement  du  soulagement! 

44, 

1,  .Xeculapius.  —  Avait  appris  la  médecine  du  centaure  Chiron.  Non  con- 
tent de  guérir  les  malades,  il  ressuscitait  même  les  morts;  c'est  ainsi  qu'il 
rendit  la  vie  à  Hippolyte,  fils  de  Thésée,  qui,  repoussant  les  obsessions  de 
Phèdre  sa  belle-mère,  accusé  par  elle  auprès  de  Thésée  d'avoir  voulu  la 
séduire,  sur  la  demande,  adressée  par  son  père  à  Neptune,  de  le  venger, 
avait  été  déchiré  par  un  monstre  marin.  Jupiter,  irrité  de  l'audace  d'Es- 
culape,  le  foudroya,  à  la  prière  de  Pluton,  dieu  des  enfers,  dont  l'empire, 
s'il  eût  eu  des  imitateurs,  eût  couru  risque  de  devenir  désert. 


iNOTES.        LIV.  II,  CH.  XXXVII.        VOL.  III,  PAG.  44.        Fc.599 

2,  Hypolitus.  —  Les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bord.  port,  à  tort  Ileleine,  au 
lieu  de  «  Hypolitus  »'. 

6,  Stygias.  —  Du  Styx.  Ce  fleuve  faisait  sept  fois  le  tour  des  enfers;  ses 
eaux  étaient  glacées  et  vénéneuses;  c'est  par  lui  que  les  dieux  avaient 
coutume  de  jurer  et  leur  serment  alors  était  irrévocable;  s'ils  y  man- 
quaient, ils  étaient  déchus  pendant  neuf  ans  de  leur  divinité. 

9,  Mon.  —  Vraiment  oui,    puisqu'il  peut    impunément...   —    Expression 
elliptique  d'usage  fréquent  du  temps  de  Montaigne,  mise  pour  ;  «  C'est 
mon  avis  ».  —  Cette  réponse  de  Nicoclès  se  trouve  dans  le  ch.  146  de  la 
Collection  des  moines  Antomus  ^t  Maximus. 
18,  Cassam.  —  En  citant  ce  vers,  Cicéron  l'explique,  ajoutant  :  «  au  lieu  do 
dire  comme  tout  le  monde,  «  un  limaçon  »  ou  plutôt  fort  probablement 
«  un  bouillon  de  limaçons  ». 
20,  Fanatiques.  —  Les  éd.  ant.  et  l'ex.  de  Bord.  port.  :  fantastiques. 
46, 

2,  Contestations.  —  Pline,  Ilist.  nat.,  XXIX,  1. 

22,  Hieropbilus.  —  Celse,  préface  du  P""  livre.  —  Hiérophile  fut  le  créatear 
de  l'anatomie;  on  dit  qu'il  poussa  l'amour  de  la  science  jusqu'à  disséquer 
des  corps  de  criminels  vivants. 

23,  Erasistratus.  —  Erasistrate  s'est  adonné  à  l'anatomie;  a  été  le  chef  de 
l'école  des  Méthodistes  qui,  procédant  d'après  des  méthodes  déterminées, 
était  opposée  à  celle  des  Empiriques,  qui  s'appuyaient  exclusivement  sur 
l'expérience;  son  école  a  jusqu'à  Galien  joui  d'une  grande  célébrité. 

23,  Asclepiades.  —  11  préconisait  les  douches;  le  premier,  il  a  pratiqué  la 
broncliotomie  dans  le  cas  de  l'angine. 

24,  Alcmaeon.  —  A  écrit  sur  la  nature  de  l'âme  et  sur  la  médecine;  admet- 
lait  comme  causes  de  toutes  choses,  certains  principes  fondamentaux,  dont 
chacun  avait  son  contraire. 

27,  Strafo.  —  Straton;  il  passa  une  partie  de  sa  vie  en  Egypte  où  il  fut 
précepteur  de  Ptolémée  Philadelphe.  Il  expliquait  tout  par  la  force  produc- 
trice de  la  nature  et  les  maladies  par  les  entraves  qu'on  lui  opposait. 

28,  Hippocra tes.  —  Le  père  de  la  médecine,  ainsi  qu'on  l'a  surnommé.  — 
Avait  beaucoup  voyagé;  enseigna  et  pratiqua,  surtout  à  Athènes.  Se  basait, 
pour  traiter  les  malades,  sur  l'observation,  plus  que  sur  des  hypothèses, 
comme  on  l'avait  fait  jusqu'à  lui;  usait  de  remèdes  simples;  le  premier, 
divulgua  les  méthodes  curativos  jusqu'alors  tenues  secrètes;  a  beaucoup 
écrit,  en  relatant  ses  observations;  n'a  pas  craint  d'avouer  ses  erreurs.  On  a 
dit  de  lui  qu'il  avait  refusé  des  propositions  d'Artaxerxès,  roi  des  Perses, 
qui,  à  prix  d'or,  voulait  l'enlever  à  la  Grèce  et  se  l'attacher. 

28,  Amis.  —  Pline  l'Ancien,  Hist.  nat.,  XXIX,  1,  au  commencement. 

37,  Peloponnesiaque.  —  Guerre  du  Péloponnèse;  guerre  mémorable  de  la 
Grèce  ancienne,  qui  eut  lieu  de  431  à  401,  entre  Sparte  et  Athènes,  et 
qui,  après  des  alternatives  de  succès  et  de  revers,  se  termina  par  la  défaite 
de  cette  dernière. 

38,  Science.  —  Tous  ces  détails  sur  la  médecine  sont  extraits  de  Pline,  Hist. 
nat.,  XXIX,  1. 

48, 

7,  Tbemison.  —  Restaurateur  de  l'école  méthodiste,  basée  sur  ce  qu'il  n'y 
a  dans  la  nature  que  de  la  matière  animée  et  que  la  diversité  des  corps 
provient  de  la  diversité  des  atomes  ou  éléments  qui  les  composent. 

7,  Musa.  —  Guérit  Auguste  d'une  maladie  dangereuse,  ce  qui  lui  valut 
d'être  comblé  d'honneurs  par  le  prince  et  par  le  Sénat  :  sa  statue  fut 
placée  dans  le  temple  d'EscuIape;  et,  à  sa  considération,  les  médecins 
furent  exempts  de  toutes  sortes  d'impôts.  —  Musa  était  l'ami  d'Horace  ("t 
de  Virgile;  c'est  lui,  a-t-on  dit,  que  ce  dernier  a  célébré  dans  le  livre  XII 
de  YÉnéide,  sous  le  nom  de  lapis. 

9,  Messalina.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  femme  de  Claudius  Csesar. 
23,  Latineurs.  —  Gens  qui  s'expriment  en  latin. 

25,  Cueillons.  —  Les  éd.  ant.   port.  :  nous  ne  sçaurions  donner  pris  aux 


Fc.600  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

drogues  que  nous  cognoissons  :  si  elle  ne  nous  est  inconnue,  si  elle  ne  vient 
d'oulre-mer,  el  ne  nous  est  apportée  de  quelque  lointaine  région,  elle  n'a 
point  de  force;  au  lieu  de  :  «  la  drogue...  cueillons  ». 
26,  Gayac.  —  Arbre  de  la  Jamaïque  à  bois  très  dur  et  résineux  dont  la 
décoction  est  un  sudorifique;  on  le  nomnio  aussi  «  bois  saint  -. 

26,  Salseperille.  —   Salsepareille;   plante  d'Amérique,   dont  la    racine  est 
(lépuralive  et  sudoi'ifique. 

27,  Esquine.  —  Bois  d'esquine;  racine  d'un  certain  jonc  des  Indes,  dont  il 
est  fait  usage  en  médecine. 

'30,  Mespriser.  —  Les  éd.  ant.  aj.  -.et  estimer  vaines. 

3^1,  Paracelse.  —  Prétendait  révolutionner  la  médecine;  et  après  avoir  joui 
d'une  grande  réputation,  tomba  dans  le  discrédit  et  mourut  à  l'hôpital. 

34,  Fiorauanti.  —  Mêlait  à  un  peu  de  science  beaucoup  de  charlatanisme, 
acquit  une  certaine  notoriété. 

35,  Argenterius.  —  Se  distingua  par  ses  vives  attaques  contre  Galien. 
50, 

2,  More.  —  Ésope,  dans  sa  fable  VÉthiopien.  —  Les  Maures  sont  distincts 
des  Berbers,  des  Arabes  et  des  Nègres  dont  l'ensemble  forme  la  majeure 
partie  de  la  population  de  l'Afrique;  ils  semblent  un  croisement  de  ces 
deux  dernières  races,  habitent  de  préférence  les  villes,  sont  vigoureux, 
basanés,  fourbes  et  cruels,  s'adonnent  volontiers  au  brigandage,  à  la  pira- 
terie et  à  la  traite  des  nègres. 

22,  Merueilleusement.  —  Met  à  une  rude  épreuve. 

23,  Repos.  —  Les  éd.  ant.  à  88  aj.  :  el  de  ne  troubler  rien  en  son  estât. 

30,  Affuster.  —  Ajuster,  mener  à  bien;  au  propre,  c'est  appliquer  une  gar- 
niture de  bois  à  quelque  chose. 
40,  Faut.  —  S'il  se  méprend,  s'il  manque. 
52, 

14,  Conseil.  —  L'éd.  de  80  aj.  :  {car  d'en  voir  plusieurs  biend'accord  ilest  mal 
aisé  :  Hz  haïssent  Vvni-son  de  la  musique). 

15,  Suader.  —  Persuader,  comme  portent  les  éd.  ant.  Suader  est  le  mot  latin 
suadere  qui  a  même  signification. 

22,  Foye.  —  De  nos  jours,  cela  n'est  plus  exact  :  l'invention  de  Roengen, 
autrement  dit  les  rayons  X  réalisent  dans  une  certaine  mesure  ce  fait  qui 
dépasse  notre  intelligence,  bien  que  nous  le  reproduisions  à  volonté,  de 
rendre  translucides  des  corps  opaques,  notamment  le  corps  humain,  et  de 
nous  en  révélei-  l'ossature  et  la  présence  de  tout  corps  étranger. 

24,  Et  qui.  —  L'éd.  de  80  porte  :  desquels,  ils  disent,  qu'il  y  en  a  aucuns  qui, 
au  lieu  de  :.  -  et  qui  ». 

35,  Diuerses.  —  Plus  tard,  Voltaire,  exprimant  la  même  idée,  a  dit  de 
même  :  «  Quelle  bonne  farce,  d'introduire  dans  un  corps  que  l'on  connaît 
peu  des  médicaments  que  l'on  ne  connaît  pas.  » 


54, 


4,  Officier.—  Qui  est  pourvu  d'un  office,  d'une  charge.  Ici  d'un  pharmacien 
ou,  comme  on  disait  alors,  de  l'apothicaire. 

6,  Pourpointiers.  —  Tailleurs  qui  ne  faisaient  que  le  pourpoint  (ancien 
vêtement  français  qui  couvrait  le  corps  du  cou  à  la  ceinture);  doit  s'enten- 
dre de  l'ensemble  des  vêtements  du  haut  du  corps. 

6,  Cbaussetiers.  —  Ne  faisaient  que  les  hauts-de-chausses  (culottes)  et  les 
bas. 

13,  .égyptiens.  —  Hérodote,  II,  84. 

14,  Descouper.  —  Diviser  en  parties  complètement  séparées;  on  dit  actuelle- 
ment créer  des  spécialités.  —  A  cet  égard,  le  vœu  de  Montaigne  est  au- 
jourd'hui complètement  réalisé;  les  spécialistes  foisonnent,  il  }'  en  a  do 
toutes  sortes.  L'idée  est  bonne,  sa  réalisation  l'est  moins.  Adressez-vous  à 
l'un  d'eux,  à  peine  s'il  vous  examine,  admet  sans  conteste  que  vous  no 
faites  pas  erreur,  que  votre  cas  relève  bien  de  lui  et,  ne  voyant  que  sa 
partie,  de  la  meilleure  foi  du  monde,  quels  que  soient  votre  tempérament  et 
vos  antécédents  qu'il  ne  recherche  même  pas,  vous  trace  un  traitement 


56, 


NOTES.        LIV.  II,  CH.  XXXVII.         VOL.  III,  PAG.  64.         Fc.601 

d'après  une  des  formules  qu'il  a  adoptées.  Hors  certains  cas  de  chirurgie  où 
incontestablement  les  spécialistes,  en  raison  d'une  pratique  plus  fréquente, 
ont  plus  de  dextérité  et  sont  à  préférer,  il  n'y  en  a  pas  un  seul,  si  grande 
soit  sa  réputation,  qui  vaille  mieux  qu'un  médecin  modeste  et  conscien- 
cieux auquel  vous  vous  confiez  d'habitude,  qui  vous  voit  fréquemment, 
qui  vous  porte  affection,  vous  suit  .et  de  longue  date  connaît  votre  tempé- 
rament. —  En  somme,  il  est  sage  de  n'avoir  recours  à  un  spécialiste  que 
sur  le  conseil  de  son  médecin  ordinaire. 

21,  Amy.  —  La  Boétie,  mort  de  la  dysenterie  en  1563. 

25,  Dissentieuses .  —  Par  ces  drogues  mêlées  confusément  et  qui  ont  des 
qualités  discordantes  et  contraires. 

29,  Graue.  —  Gravelle;  maladie  des  reins  et  de  la  vessie  donnant  lieu  à  la 
production  de  concrétions  calcaires  semblables  à  de  petits  grains  de 
sable. 

29,  Pierre.  —  Maladie  dans  laquelle  les  concrétions  qui  se  produisent  chez 
certaines  personnes  atteintes  de  gravelle,  s'agglomèrent,  ce  qui  rend  leur 
expulsion  beaucoup  plus  difficile  et  douloureuse. 

3,  Expeller.  —  Chasser;  du  latin   expellere,  qui  a  même  signification  et 
dont  le  participe  passé  expulsus  a  fourni  les  dérivés  «  expulsé,  expulsion  ». 

8,  Eau.  —  Uriner;  expression  gasconne  qui  s'est  généralisée  et  s'emploie 
aujourd'hui  assez  couramment  dans  le  langage  familier. 
19,  Il  est  bon.  —  Le  passage  commençant  par  ces  mots  et  se  terminant 
pag.  60,  lig.  14,  par  ceux-ci  :  <■  en  cet  art  »,  était  rédigé  ainsi  qu'il  suit 
dans  l'édition  de  1580  :  Somme,  Hz  n'ont  nul  discours,  qui  ne  soit  capable 
de  telles  oppositions.  Quant  au  iugement  de  l'opération  des  drogues,  il  est 
autant  ou  plus  incertain,  fay  esté  deux  fois  boyre  des  eaux  chaudes  de  noz 
montaignes  :  et  m'y  suis  rangé,  par  ce  que  c'est  vne  potion  naturelle,  simple, 
et  non  mixtionnée,  qui  au  moins  n'est  point  dangereuse,  si  elle  est  vaine  :  et 
qui  de  fortune  s'est  rencontrée  n'estre  aucunement  ennemie  de  mon  gousl  (il 
est  vray  que  ie  la  prens  selon  mes  règles,  non  selon  celles  des  médecins) 
outre  ce  que  le  plaisir  des  visites  de  plusieurs  parens  et  amis,  que  i'ay  en 
chemin,  et  des  compaignies  qui  s'y  rendent,  et  de  la  beauté  de  l'assiete  du 
pais,  m'y  attire.  Ces  eaux  là  ne  font  nul  miracle  sans  doute,  et  tous  les  effeclz- 
estranges  qu'on  en  rapporte  ie  ne  les  croy  pas;  car  pendant  qu.  i'y  ay  esté, 
il  s'est  semé  plusieurs  telz  bruits  que  i'ay  decouuers  faux  m'en  informant  vn 
peu  curieusement.  Mais  le  monde  se  pipe  aiseement  de  ce  qu'il-  désire.  Il  ne 
leur  faut  aster  aussi  qu'elles  n'esueillent  l'qppetit  et  ne  facilitent  la  digestion, 
et  ne  nous  prestent  quelque  nouuelle  alegresse,  si  on  n'y  va  du  tout  abatu 
de  forces.  Mais  moy  ie  n'y  ai  esté  ny  ne  suis  délibéré  d'y  aler  que  sain  et  auec- 
ques  plaisir.  Or  quant  à  ce  que  ie  dis  de  la  difficulté,  qui  se  présente  au 
iugement  de  l'opération,  en  voicy  l'exemple.  Je  fus  premièrement  à  Aigues- 
caudes,  de  celles  là  ie  n'en  sentis  nul  effet,  nulle  purgation  apparente  :  mais 
ie  fuz  vn  an  entier  aprez  en  estre  reuenu  sans  aucun  ressentiment  de  colique, 
pour  laquelle  i'y  estoy  allé.  Depuis  ie  fus  à  Banieres,  celles  cy  me  firent 
vuyder  force  sable,  et  me  tindrent  le  ventre  long  temps  après  fort  lâche. 
Mais  elles  ne  me  garantirent  ma  santé  que  deux  mois  :  car  après  cela  i'ay  esté 
tresmal  traicté  de  mon  mal.  le  demanderais  sur  ce  tesmaignage,  ausquelles 
mon  médfcin  est  d'auis  que  ie  me  fie  le  plus,  ayant  ces  diuers  argumentz  et 
circonstances  pour  les  vnes  et  pour  les  autres.  Qu'on  ne  crie  donc  plus  après 
ceux,  qui  en  ce  te  incertitude  se  laissent  gouuerner  à  leur  appétit  et  au  sim- 
ple conseil  de  nature.  Or  ainsi,  quand  ils  vous  conseillent  vne  chose  plus 
tost  qu'vne  autre,  quand  ils  nous  ordonnent  les  choses  aperitiues,  comme  sont 
les  eauj;  chaudes,  ou  qu'ils  nous  les  deffendent  :  ils  le  font  d'vne  pareille  in- 
certitude, et  remettent  sans  double  à  la  mercy  de  la  fortune  l'euenement  de 
leur  conseil  :  n'estant  eti  leur  puissance  ny  de  leur  art  de  se  respondre  de  la 
mesure  des  corps  sableux,  qui  se  couiient  en  noz  reins  :  là  où  vne  bien  legiere 
di/ferance  de  leur  grandeur  peut  produire  en  l'effet  de  notre  santé  des  conclu- 
sions contradictoires.  Par  cet  exemple  Ion  peut  iuger  de  la  forme  de  leurs  dis- 


Fc.602  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

cours.  Mais  pour  les  presser  plus  viuement,  il  ne  fauldroit  pas  vn  homme  si 

ignorant  comm£  ie  suis  de  leur  art. 
31,  Bastelant.  —  Faisant  les  bateleurs,  se  jouant  et  badinant. 
58. 

33,  Bella  Villa.  —  Bains  près  de  Lucques;  on  les  nomme  actuellement  tout 

simplement  i  Bagni  [les  Bains). 


60, 


62. 


1,  Prise.  —  C.-à-d.  on  retient  les  malades  au  lit  dans  l'établissement  même 
où  ils  ont  bu  l'eau. 

3,  Corneter.  —  Corneter  et  ventouser  sont  synonymes;  le  premier  est  hors 
d'usage;  dans  quelques  dictionnaires  modernes,  on  trouve  encore  «  cornet 
à  ventouses  ». 

4,  Doccie.  —  Douches;  jets  d'eau  chaude  ou  froide  que  l'on  dirige  sur  le 
corps  ou  une  de  ses  parties.  Leur  emploi,  restreint  au  temps  de  Montaigne 
à  l'état  de  traitement  curatif,  s'est  généralisé,  et  est  devenu  en  outre  un 
de  nos  moyens  courants  d'hygiène  et  de  propreté. 

19,  Ettertur.  —  Ausone,  Epig.  74,  de  qui  sont  ces  vers,  joue  ici  sur  le  mot 
e/fertur,  efferre  signifiant  emporter  et  aussi  porter  en  terre.  —  En  fait  de 
médecins  du  nom  d'Alcon,  on  n'en  connaît  qu'un,  dont  Pline  dit  qu'il 
vivait  à  Rome  du  temps  de  Claude,  et  qu'ayant  été  exilé  et  ses  biens 
s'élevant  à  dix  millions  de  sesterces  (2.i000.(X)0)  confisqués ,  il  en  gagna 
autant  en  peu  d'années,  après  avoir  été  rappelé. 

25,  Caupene.  —  Ce  baron  de  Caupène  était  petit-fils  du  maréchal  de  Mont- 
luc. 

27,  Bénéfice.  —  Charge  ecclésiastique  pourvue  d'un  revenu;  les  patrons 
étaient  ceux  qui  avaient  contribué,  eux  ou  leurs  ancêtres,  à  la  fondation 
de  l'église;  ils  présidaient  aux  cérémonies,  présentaient  un  candidat  à  la 
nomination  de  l'évêque  et  percevaient  quelquefois  une  partie  des  revenus 
du  bénéfice.  Celui  dont  il  est  question  ici,  était  la  cure  de  Lahontan,  dont 
avait  été  titulaire  un  des  oncles  de  Montaigne.  V.  N.  III,  34  :  Quatre. 

37,  Bestroit.  —  District,  pays,  se  livrer  à  la  mendicité. 

43,  Maistres.  —  Voir  N.  II,  478  :  Maistre  lean. 

2,  Grand.  —  Ou  monsieur,  comme  portent  les  éd.  ant. 

4,  Compères^  —  L'éd.  de  80  port.  :  cousins.  —  Les  bourgeois  s'appelaient 
entre  eux  compères,  comme  les  gentilshommes  s'appelaient  cousins. 

12,  ApoBtemes.  —  Abcès  non  ouverts;  apostème  et  apostume  se  disent  en- 
core, quoique  rarement;  on  le  trouve  chez  La  Fontaine,  dans  sa  fable 
Le  cheval  et  le  loup  : 

«  J'ai,  dit  la  bête  chevaline, 
Un  apostume  sous  le  pied.  > 

25,  Raccourcies.  —  Ce  membre  de  phrase  :  «  leurs  vies  raccourcies  de  moi- 
tié •  ,  est  de  trop.  On  ne  saurait  nier  que  la  médecine  ne  soit  parvenue 
à  force  d'hygiène  à  prolonger  la  vie  humaine  dont  certaines  statistiques 
fixent,  de  nos  jours,  la  durée  moyenne,  en  France,  à  46  ans,  alors  qu'il  y  a 
un  siècle  à  peine,  on  la  tenait  moindre  de  près  de  10  ans.  De  fait,  les 
maladies  engendrées  ou  aggravées  par  la  misère  et  les  logements  insalu- 
bres, la  malpropreté,  la  négligence  dans  les  soins  donnés  aux  enfants  en 
bas  âge,  ont  bien  diminué;  et  aussi  les  épidémies,  par  suite  des  mesures 
prises  dès  leur  apparition  pour  en  arrêter  le  développement;  enfin  la  vac- 
cination a  de  plus  en  plus  raison  de  nombre  de  maladies,  et  non  des 
moindres,  contre  lesquelles  la  science  était  jadis  impuissante.  Mais  à  quel 
prix  ce  résultat  est  obtenu,  Montaigne  nous  le  dit,  et  cet  affaiblissement 
qu'il  accuse  dans  nos  tempéraments  est  bien  réel  :  notre  vie  est  plus 
longue,  mais  plus  souffreteuse;  l'intensité  de  l'existence  qui  aujourd'hui 
se  passe,  pour  le  plus  grand  nombre,  dans  un  état  de  préoccupations  et 
souvent  de  surexcitations  continues  qui,  jadis,  n'était  l'apanage  que  do 


NOTES.         LIV.  II,  CH.  XXXVII.         VOL.  III,  PAG.  62.         Fc.603 

quelques-uns;  la  sophistication  des  denrées  alimentaires  quelles  qu'elles 
soient,  la  contamination  presque  générale  de  l'eau  que  nous  buvons; 
'  l'alcoolisme  qui  va  gagnant  sans  cesse,  font  que  finalement,  dès  la  jeu- 
nesse, nous  sommes  aux  prises  avec  des  maux  d'estomac,  d'intestins,  avec 
des  douleurs  de  toute  nature' qu'autrefois  on  ne  connaissait  guère  que 
dans  l'âge  avancé,  et  témoignent  d'une  dégénérescence  qui  va  augmentant 
de  génération  en  génération.  —  Parmi  ces  infirmités  devenues  plus  pré- 
coces et  multipliées,  la  tuberculose,  qui  présentement  en  France  emporte 
350.000  personnes  par  an,  tient  le  premier  rang,  tant  par  sa  gravité  que 
par  la  rapidité  de  son  extension.  Son  développement  excessif,  depuis  une 
cinquantaine  d'années,  tient  à  ce  qu'elle  est  héréditaire,  et  que  la  sélection 
qui,  il  n'y  a  pas  encore  cent  ans,  s'opérait  aux  débuts  de  la  vie  et  s'éten- 
dait à  tout  ce  qui  était  venu  au  monde  avec  une  organisation  débile,  se 
trouvant  considérablement  réduite  par  les  progrès  de  l'hygiène,  tous  ceux 
qui  n'ont  échappé  que  grâce  à  ces  conditions  d'hygiène,  vont  procréant 
des  êtres  qui  sont  tout  désignés  pour  être  atteints  à  bref  délai  et  propager 
à  leur  tour  les  germes  morbides  qu'ils  ont  reçus  en  naissant.  On  peut 
essayer  de  guérir  les  tuberculeux,  on  y  parviendra  peut-être  pour  nombre 
d'entre  eux;  mais  tous  les  moyens  curatifs  existants  ou  à  trouver  :  ré- 
gime, sanatoria,  sérums,  ne  seront  que  des  palliatifs  insuffisants  contre  le 
fléau  ;  pour  l'enrayer,  il  n'est  qu'un  remède  d'efficacité  absolue  :  il  faut 
le  prévenir,  en  tarir  la  source  en  interdisant  le  mariage,  c'est-à-dire  la 
propagation  de  leur  mal,  à  ceux  qui  sont  contaminés;  et  pour  cela  il  suffit 
que  la  loi  édicté  qu'un  bulletin  de  visite  médicale,  déUvré  à  bon  escient, 
soit  joint  aux  pièces  à  produire  à  la  mairie,  par  quiconque  est  en  instance 
de  mariage.  Conçu  en  termes  généraux,  ce  bulletin  aurait,  du  même  coup, 
pour  effet  de  protéger  les  familles  contre  l'introduction  subreptice  dans 
leur  foyer  des  syphilitiques  et  autres  avariés  qui,  plus  heureux  que  les 
tuberculeux,  ont  des  chances  de  guérison;  il  ne  serait  qu'un  renseignement 
qui  leur  permettrait  de  savoir  à  quoi  s'en  tenir,  celles  qui  le  jugeraient 
à  propos  ayant,  à  moins  que  l'expérience  ne  montre  la  nécessité  d'un  in- 
terdit formel,  la  faculté  de  passer  outre;  le  remède  n'est  ni  difficile,  ni 
coûteux,  ni  gênant  pour  ceux  qui  sont  indemnes,  il  suffit  de  vouloir. 

40,  Curieux.  —  Les  éd.  ant.  à  88  aj.  :  et  d'autres  auec  moy. 
64, 

5,  Inusité.  —  Il  s'agit  ici  de  pelotes,  de  grosseur  variable,  pouvant  attein- 
dre cinq  à  six  centimètres  de  diamètre,  nommées  par  les  savants  «  ega- 
grophytes  »  et  aussi  «  besourds  d'Allemagne  »,  composées  de  détritus  de 
plantes,  de  poils  de  l'animal  et  de  concrétions  calcaires  qui  se  forment 
assez  fréquemment  dans  le  premier  et  parfois  dans  le  deuxième  estomac 
des  ruminants. 

15,  Pétrifiante.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  Et  si  celte  besle  est  suiette  à  cette  maladie, 
ie  trouue  qu'elle  a  esté  mal  choisie  pour  nous  y  seruir  de  médicaments.  — 
En  supprimant  ce  membre  de  phrase,  Montaigne  s'est  bien  inconsciem- 
ment épargné  les  démentis  que  l'avenir  lui  eût  apportés,  lorsque  150  ans 
j:)lus  tard  la  vaccine  était  découverte  et  que  trois  siècles  après  lui  le  génie 
de  Pasteur,  qui  n'était  pas  médecin,  imaginait  de  communiquer  certaines 
maladies  à  certains  animaux  et  par  des  traitements  appropriés  d'en  tirer 
ces  sérums  qui  immuni^nt  l'homme  et  aussi  d'autres  animaux  contre 
ces  mêmes  maladies  ou  les  en  guérissent,  ouvrant  à  la  science  un  champ 
illimité  d'expériences  et  d'applications. 

21,  Euenemens.  —  Néanmoins,  elles  réussissent  dans  quelques  heureuses 
circonstances. 

22,  Nécessité.  —  «  Honore  les  médecins  à  cause  de  la  nécessité  (sous- 
entendu  :  où  tu  es  d'y  avoir  recours),  »  dit  I'Ecclésiastique,  XXX VIII,  1; 
et  il  ajoute  :  «  parce  qu'il  est  une  création  du  Très-Haut  ». 

23,  Asa.  —  «  Affligé,  dit  I'Écriture  (II  Paralipomènes,  XVI,  12),  d'un  mal  qui 
lui  tomba  sur  les  pieds  et  remonta  plus  haut  (probablement  la  goutte),  il 
n'eut  point  recours  au  Seigneur  et  mit  plutôt  sa  confiance  dans  la  science 


Fc.604  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

des  médecins.  »  On  croit  que  par  médecins,  il  faut  entendre  ici  les  magi- 
ciens, parce  qu'alors  la  plupart  des  médecins  usaient  de  sortilèges  et  de 
superstition,  et  qu'il  est  vraisemblable  que  s'il  en  eût  été  autrement,  ce  ro- 
proche  ne  lui  eût  pas  été  adressé. 

25,  Aymez.  —  «  Le  médecin,  d'après  Alphonse  Daudet,  est  un  homme  qui 
console  toujours,  soulage  souvent,  guérit  parfois.  •  Définition  fort  juste 
en  tant  qu'appliquée  au  médecin  familial,  qui  vous  suit  au  cours  de  la  vie, 
étudie  et  connaît  votre  tempérament,  est  votre  ami  autant  que  voti-c 
conseiller,  ce  qui  est  rare  dans  les  grands  centres  où  abondent  par  trop 
ce  que  l'on  est  convenu  d'appeler  les  princes  de  la  science  et  aussi  les 
spécialistes  et  les  prolétaires.  Aux  premiers  le  temps  fait  défaut,  les  seconds 
ne  voient  que  ce  qui  les  touche,  les  derniers  parfois  n'ont  pas  assez  de 
scrupule;  chez  certains  d'entre  les  uns  et  les  autres  les  honoraires  deman- 
dés sont  souvent  d'une  exagération  excessive,  lors  même  que  leur  science 
s'est  trouvée  en  défaut  ou  que  leurs  soins  n'ont  pas  abouti. 

28,  Vacations.  —  Professions. 

32,  Loy.  —  .Je  leur  permets,  je  leur  donne  licence. 

33,  Sorte.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  me  coucher  sur  le  coslé  droit,  si  i'ayme  au- 
tant y  eslre,  que  sur  le  gauche,  au  lieu  de  :  «  m'abrier...  sorte  >■. 

36,  Clairet.  —  Ancien  nom  du  vin  de  Bordeaux  que,  dit-on,  les  Anglais,  qui 
en  sont  fort  amateurs  et  gros  consommateurs,  lui  ont  conservé  et  qui 
vient  de  ce  que,  relativement  aux  autres  vins  du  Midi,  il  est  peu  chargé  en 
couleur. 


66, 


68, 


10,  Destroussement.  —  Ouvertement. 

14,  Soit.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  faim. 

24,  Place.  —  Places  publiques.  «  C'était  une  loi  sagement  établie  » ,  dit 
Hérodote,  I,  197,  qui  ajoute  :  «  il  n'était  pas  permis  de  passer  près  d'un 
malade  sans  s'enquérir  de  son  mal  ».  —  V.  aussi  Strabox,  XVI. 

29,  Breuets.  —  Barbotages  est  pris  ici  au  figuré  et  signifie  marmottages, 
prières  cabalistiques,  etc.  ;  les  brevets  sont  les  préservatifs  contre  le  poison, 
les  enchantements,  les  maladies,  etc.,  généralement  sous  forme  de  billets 
enfermés  dans  une  sorte  de  gaine  en  étoffe  ou  en  peau  qu'on  suspendait 
aux  bras,  aux  poignets  et  autres  parties  du  corps,  autrement  dit  des 
amulettes;  il  nous  en  reste  bien  quelque  chose. 

32,  Homère.  —  Odyssée,  IV,  231. 

36,  Confrairie.  —  Société  habituelle  ;  lorsqu'il  écrivait  les  Essais  et  en  parti- 
culier ce  chapitre  où  il  se  met  assez  souvent  en  cause,  il  ne  faisait  plus 
partie  du  Parlement. 

2,  Desprendre.  —  Je  ne  puis  quitter  ce  sujet. 

6,  Simples.  —  Nom  vulgaire  des  herbes  et  plantes  médicinales. 

17,  Galen.  —  Galien;  séjourna  plusieurs  années  à  Alexandrie  pour  y  étudier 
l'anatomie;  vint  à  Rome  et  y  devint  le  médecin  des  empereurs  Marc- 
Aurèle,  Vérus  et  Domitien.  C'est,  après  Hippocrate,  dont  il  suivait  la 
doctrine,  le  premier  médecin  de  l'antiquité  ;  il  a  publié  une  foule  dîécrits 
qui  formaient  un  corps  complet  d'études  médicales,  plusieurs  sont  perdus. 
Il  expliquait  tout,  en  médecine  comme  en  physique,  par  le  fait  des  quatre 
éléments  :  l'eau,  l'air,  la  terre,  le  feu,  et  celui  des  quatre  qualités  :  le 
chaud,  le  froid,  l'humide,  le  sec;  et  pour  expliquer  les  phénomènes  de  la 
vie,  il  admettait  un  fluide  vital. 

20,  Vaisseau.  —  Vase.  Un  auteur  du  xvn'  siècle  dit  qu'à  cette  époque  les 
Indiens  considéraient  du  bouillon  de  serpent  comme  un  excellent  préser- 
vatif contre  la  lèpre. 

30,  Aisée.  —  C.-à-d.  à  laquelle  il  faut  prêter  une  croyance  bien  souple  et 
bien  accommodante;  il  se  trouve  à  nouveau  non  moins  embarrassé  pour 
discerner  dans  quel  cas  et  à  quelle  maladie  il  peut  faire  application  de 
ce  remède. 

36,  Maladies.  —  Devant  chacun  de  ces  compléments  :  l'épilepsie,  au  mélan- 


NOTES.  LIV.  II,  CH.  XXXVII.         VOL.  III,  PAG.  68.  Fc.60o 

colique,  on  hiver,  etc.,  les  mots  •<  que  c'est  -,  sont  chaque  fois  sous- 
entendus. 
70, 

16,  Expériences.  —  Hippocrate,  Galion  et  Celse. 

24,  Pas.  —  Sur  ce  passage,  ce  sujet. 
72, 

9,  Tibère.  —  Tacite,  Ann.,  VI,  46.  —  Tibère,  encore  jeune,  se  distingua 
aux  armées  et,  plus  tard,  fit  fleurir  la  paix,  l'ordre,  la  justice  dans  les  pro- 
vinces et  administra  bien  les  finances;  mais,  soupçonneux  et  cruel,  il 
donna,  lorsqu'il  eut  le  pouvoir  suprême,  libre  cours  à  ces  instincts.  Sur 
la  fin  de  sa  vie,  il  s'était  retiré  dans  l'ile  de  Caprée,  non  loin  de  Naples, 
pour  échapper  à  la  haine  qu'il  sentait  s'élever  autour  de  lui  et  se  livrer 
en  toute  liberté  à  ses  vices. 

i6.  Suffisance.  —  L'éd.  de  80  aj.  :  pour  m'agencer  et  meliorer,  non  pour  me 
parer  et  honorer;  —  celle  de  88  aj.  :  et  de  la  valeur. 

:i3,  Creu.  —  Ailleurs  pourtant,  Montaigne  dit  qu'il  faut  coUoquer  les  gens 
non  selon  les  facultés  de  leur  père,  mais  selon  celles  de  leur  àmé.  Si  tous 
ceux,  «  sous  de  meschantes  chausses  »,  n'avaient  pas  fait  de  livres,  que 
de  chefs-d'œuvre  n'existeraient  pas  :  Homère  a  mendié;  Virgile  naquit 
paysan;  Horace  était  (ils  d'esclave;  Corneille,  qui  touchait  six  francs  de 
droits  d'auteur  quand  on  jouait  le  Cid,  demandait  un  crédit  do  trois  sols 
pour  un  ressemelage  de  souliers;  La  Fontaine  avait  souvent  besoin  de 
Fouquet;  Boileau  empruntait  cent  pistoles  à  Racine  pour  aller  aux  eaux, 
et  Racine  les  demandait  à  Louis  XIV  pour  les  prêter  à  Boileau. 

34,  Moy.  —  Ne  me  le  demandez  pas  à  moi,  qui  aimerais  encore  mieux  être 
un  bon  cuisinier,  si. 

37,  Ailleurs.  —  Le  Talmud  dit  dans  le  même  sens  :  «  La  science  sans  rà- 
chesse  est  comme  un  pied  sans  soulier;  la  richesse  sans  la  science  comme 
un  soulier  sans  pied.  » 


74, 


12,  Latins.  —  Bien  d'autres  médecins  latins  ont  écrit,  entre  autres  :  Celius 
Aurelianus,  contemporain  de  Galien;  Serenus  Samonicus,  qui  vivait  sous 
l'empereur  Septime  Sévère;  Marcellus  Empiricus,  sous  Théodose  le  Grand; 
jEmilius  Macer,  contemporain  de  Virgile;  Apulée,  contemporain  de  Celse; 
il  est,  du  reste,  à  observer  que  les  Romains  s'abstenaient  en  général  de 
pratiquer  cet  art,  que  n'exerçaient  guère  que  les  Grecs.  Paven. 

12,  Celsus.  —  A  traité  de  toutes  les  sciences,  et  en  particulier  de  la  méde- 
cine; seul,  demeure  son  ouvrage  sur  ce  dernier  sujet,  remarquable  par  le 
style  autant  que  par  la  valeur  du  fond. 

14,  Pincer.  —  C.-à-d.  je  ne  fais  que  critiquer  légèrement  cet  art  des  méde- 
cins. —  Montaigne  fait  le  mot  <•  art  »  tantôt  féminin,  tantôt  masculin, 
mais  plus  souvent  féminin. 

14,  Pline.  —  Liv.  XXIX,  ch.  1. 

15,  Corde.  —  Ou  de  leur  latin,  comme  port,  les  éd.  ant.  ;  c.-à-d.  de  leurs 
ressources. 

21,  Gramontoises.  —  C.-à-d.  il  ne  parle  pas  des  eaux  thermales  de  ce  côté-ci 
des  Pyrénées  qui  relèvent  de  la  seigneurie  de  Gramont.  —  Cette  seigneurie, 
située  dans  la  Basse-Navarre,  appartenait  à  la  famille  du  même  nom,  dont 
était  madame  de  Duras.  —  L'éd.  de  80  aj.  ici  :  les  montaignes  où  elles  sont 
assises  ne  sonent  et  ne  retentissent  rien  que  de  Gramont. 

21,  Ils.  —  Les  éd.  ant.  port.  :  Nos  médecins  sont  encore  plus  hardis,  car  ils, 
au  lieu  do  :  «  Ils  ». 

29,  Pericles.  —  Chef  du  parti  démocratique  à  Athènes;  il  aimait  les  lettres 
et  les  arts  qui  prirent,  sous  son  initiative,  un  essor  qui  fait  souvent  dési- 
gner son  époque  sous  le  nom  de  «  siècle  de  Périclès.  Il  signala  son  admi- 
nistration à  l'intérieur  par  la  construction  de  beaux  édifices  et  des  fêtes 
somptueuses;  au  dehors,  par  de  grands  succès,  mais  qui  ne  se  maintinrent 
pas.  11  détenait  le  pouvoir  quand  éclata  la  guerre  du  Péloponnèse  (V.  N. 
III,  162  :  Peloponnesiaque)  ;  il  n'en  vit  que  les  débuts  et  mourut  de  la  peste. 


Fc.606  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

30,  Breuets.  —  Amulettes.  V.  N.  III,  66. 
76, 

5,  Dragmes.  —  Poids  et  monnaie  grecs  :  comme  poids,  la  drachme  était 
environ  de  trois  grammes;  comme  monnaie,  de  cinquante  à  quatre-vingts 
centimes  environ,  sa  valeur  ayant  varié  à  diverses  époques. 

5,  Opiate.  —  Préparation  pharmaceutique  de  consistance  un  peu  molle  et 
dont  le  suc  de  pavot  (opium)  était  la  base. 

6,  Violente.  —  Les  éd.  ant.  aj.  :  et  r/ui  aura  troublé  Vassiette  de  mon  enten- 
dement et  de  ma  raison. 

11,  Deriuée.  —  C.-à-d.  qui  m'est  venue  de,  qui  m'a  été  transmise  par  mes 

ancêtres. 
18,  Assené.  —  Bien  singulier,  bien  mal  placé,  peu  justifié. 
37,  Diuersité.  —  «  Diversité  est  ma  devise,  »  a  dit  La  Fontaine.  —  Les  éd. 

ant.  aj.  :  et  la  discordance. 


LIVRE    TROISIEME 


CHAPITRE  PREMIER. 


78, 


Troisième.  —  Ce  troisième  livre  a  paru  pour  la  première  fois  dans  l'éd. 
de  1588. 

Honeste.  —  Ce  chapitre  traite  de  la  conduite  à  tenir  dans  les  guerres 
civiles.  11  mérite  attention  et  est  assez  difficile  à  comprendre;  Montaigne  y 
développe  les  idées  qui  ont  dû  le  guider  et  les  sentiments  qui  ont  dû  l'animer 
pendant  le  temps  durant  lequel  il  a  occupé  des  fonctions  publiques. 
2,  Curieusement.  —  Avec  recherche,  avec  prétention,  de  parti  pris.  — 
Pascal  a  encore  ramassé  ici,  chez  Montaigne,  comme  cela  lui  arrive 
souvent,  une  pierre  pour  le  lapider.  Après  lui  avoir  reproché  de  s'être  fait 
le  sujet  principal  de  son  livre,  il  termine  :  «  Car  de  dire  des  sottises  par 
hasard  et  par  faiblesse,  c'est  un  mal  ordinaire  :  mais  d'en  dire  par  dessein, 
c'est  ce  qui  n'est  pas  supportable...  » 
6,  Eust.  —  Pour  peu  qu'elles  me  coûtent. 

11,  Poison.  —  Tacite,  Ann.,  II,  88. 

38,  Parer.  —  «  L'hypocrisie  est  un  hommage  rendu  parle  vice  à  la  vertu.  « 
La  Rochefoucauld. 
80, 

9,  Sentent.  —  «  Cet  âge  est  sans  pitié,  »  a  dit  La  Fontaine,   parlant  de 
l'enfant. 

28,  Impudence.  —  Cette  même  thèse  est  exposée  par  Boguet,  ce  juge  de 
Saint-Claude  qui,  dans  son  discours  sur  les  sorciers  (1602),  blâme  la  perfidie 
dont  on  usait  envers  eux,  ne  voulant  pas  que  l'avocat  trahisse  son  client, 
que  le  juge  promette  grâce  à  l'accusé  pour  le  faire  mourir;  blâmant  les 
épreuves  auxquelles  on  les  soumettait,  la  torture  qu'on  leur  infligeait,  et 
qui  tout  en  préconisant  ces  principes  humanitaires,  fit  du  pays  un  désert; 
il  n'y  eut  jamais  juge  plus  consciencieusement  exterminateur  (V.  N.  III, 
540  :  Vif). 

32,  Peine.  —  Que  difficilement  je  trahirois  le  prince  pour  un  particulier, 
moi  qui  serais  très  fâché,  etc. 

36,  Princes.  —  Entre  le  roi  de  Navarre,  depuis  Henri  IV,  et  le  duc  de 
Guise;  postérieurement  entre  Henri  III  et  le  roi  de  Navarre.  V.  de  Thou, 
De  Vita  sua,  III,  9. 


82, 


3,  Masque.  —  Engageassent  la  pointe  de  leur  lance  ou  de  leur  épée  dans 
mon  masque. 


NOTES.         LIV.  III,  CM.  I.  '     VOL.  III,  PAG.  82.  Fc.607 

3,  Mestier.  —  Les  diplomatos. 

5,  Peuuent.  —  Contrefont  la  plus  parfaite  neutralité  et  se  montrent  les 
plus  amis  qu'ils  peuvent,  les  plus  dévoués  aux  intérêts  de  ceux  avec  qui 
ils  traitent.  —  «  Un  diplomate,  disent  les  Italiens,  doit  avoir  la  physio- 
nomie ouverte  et  la  pensée  impénétrable.  » 
15,  Hipperides.  —  Plutarque,   De   la  différence  du  flatteur  avec  l'ami,  24. 

—  lljpéride  s'employa  activement  contre  les  Macédoniens  qui,  vainqueurs, 
se  le  firent  livrer,  lui  arrachèrent  la  langue  et  le  soumirent  aux  pires 
tortures. 

24,  Peut.  —  Que  le  coup  porte,  s'il  est  possible. 

27,  Particulière.  —  Tacite  dit  de  même  :  «  Galba,  Othon,  Vitellius  ne  me 
sont  connus  ni  par  les  bienfaits,  ni  par  les  offenses  que  j'en  ai  reçus.  • 

28,  Priué.  —  Ni  excitée,  ni  ralentie  par  un  intérêt  personnel. 

29,  luste.  —  Cette  cause  est  celle  de  la  Ligue,  confédération  du  parti  catho- 
lique sous  Henri  111,  fondée  par  le  duc  de  Guise,  dans  le  but  apparent  de 
défendre  la  religion  contre  les  Calvinistes;  en  réalité,  pour  renverser  le 
roi.  Henri  IV  y  mit  fin  par  ses  victoires  et  son  abjuration  en  1593. 

31,  Potest.  —  Cette  citation  ne  figure  pas  ici  dans  l'ex.  de  Bordeaux;  elle 
est  reproduite  dans  la  présente  édition  une  seconde  fois,  III,  502. 
84, 

4,  Vieille.  —  Allusion  à  un  dicton  de  l'époque.  La  vieille  femme  en  offrant 
un  cierge  à  saint  Michel,  un  autre  au  dragon  avec  lequel,  dans  les  ta- 
bleaux, on  le  représente  en  lutte,  cherche  à  ménager  les  deux  adversaires, 
la  chèvre  et  le  chou,  comme  dit  un  autre  proverbe.  Montaigne,  à  son 
instar,  est  disposé  à  faire  sa  cour  aux  deux  partis  en  présence.  Cet  aveu 
prêterait  fort  à  la  critique  sans  le  commentaire  qui  le  suit  et  dont  il  ne 
saurait  être  séparé.  —  La  Fontaine,  et  lui  sans  commentaires,  a  dit  aussi  : 
«  Le  sage  dit,  selon  les  gens  :  Vive  le  roi.  Vive  la  Ligue  »  ;  mais  ce  n'est 
qu'une  constatation  qu'il  fait  et  non  une  opinion  personnelle  qu'il  émet. 

—  Ce  passage  rappelle  encore  celui  de  Macrobe,  où  il  parle  d'un  homme 
qui  avait  dressé  deux  corbeaux,  l'un  pour  féliciter  Auguste,  l'autre  pour 
applaudir  Marc-Antoine. 

7,  Besoing.  —  Add.  de  88  :  el  s'il  ne  sert. 

9,  Atticus.  —  Cornélius  Népos,  Atticus,  6.  —  Atticus  s'éloigna  de  Rome, 
pendant  les  guerres  civiles,  pour  ne  pas  prendre  part  aux  troubles  publics. 
Il  se  refusa  constamment  à  toute  situation  officielle  et  resta  constam- 
ment lié  avec  les  hommes  les  plus  éminents,  quoiqu'ils  fussent  divisés 
entre  eux,  avec  Sylla  et  Cinna,  Pompée  et  César,  Antoine  et  Cicéron, 
Brutus  et  Octave.  Jouissant  d'une  grande  fortune  et  d'un  grand  crédit,  il 
n'en  usa  que  pour  faire  réparer  les  injustices  et  secourir  les  victimes  des 
divers  partis. 
17,  Honneste.  —  Combien  est  d'à  propos  cette  appréciation  de  Montaigne 
sur  la  conduite  à  tenir  en  cas  de  troubles.  En  ces  temps,  dès  qu'il  s'en 
produit,  on  gémit,  on  ferme  boutique,  on  se  clôt  chez  soi,  on  émigré  ou 
encore  on  va  voir,  semblant  faire  cause  commune  avec  les  fauteurs  de 
désordre  et  de  la  sorte  donnant  plus  d'importance  au  mouvement  et  ajou- 
tant à  la  difficulté  de  la  répression,  s'en  remettant  exclusivement  du  soin 
de  ramener  l'ordre  au  Gouvernement  qui  parfois  trahit,  parfois  lâche  pied, 
et  en  tout  cas,  n'a  pas  toujours  sous  la  main  de  quoi  parer  au  mal,  qui 
va  grandissant  d'instant  en  instant.  11  en  serait  souvent  autrement  si  dès 
le  début  chacun  s'y  employait;  en  Angleterre,  quand  le  fait  se  produit,  cha- 
cun prenant  parti  a  possibilité  de  s'enrôler  momentanément  dans  la  police, 
à  laquelle  ce  concours  immédiat  permet  la  plupart  du  temps  d'étouffer 
le  mal  dès  qu'il  se  manifeste.  Que  ne  tente-t-on  pareille  chose  en  France! 
il  ne  manque  pas  de  gens  d'ordre  et  de  cœur  pour  s'y  prêter;  sa  réalisa- 
tion serait  peut-être  plus  facile  qu'on  ne  se  l'imagine,  et  procurerait  un 
appoint  moral  sérieux  et  effectif  qui  n'est  pas  à  négliger.  —  On  commence 
du  reste,  dans  nos  grandes  villes  où  les  attaques  nocturnes  vont  se  multi- 
pliant dans  une  proportion   inquiétante,  à  se  faire  à  l'idée  que  le  plus 


Fc.008  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

sur  est  pncore  de  se  protéger  soi-inêini',  et  à  préconiser  la  création  de 
gardes  de  nuit,  à  la  charge  des  particuliers  et  à  l'instar  des  sérénos  en 
Espagne  et  de  ce  qui  existe  de  semblable  en  d'autres  pays  sous  d'autres 
noms,  spécialement  chargés  de  veiller  dans  telle  rue,  tel  quartier,  à  la  sû- 
reté de  tous,  prévenii'  les  effractions,  prêter  assistance  aux  passants  attardés, 
poursuivre  et  arrêter  les  malfaiteurs.  —  Cette  attitude  inerte  des  popula- 
tions en  cas  de  troubles,  se  retrouve  également  lorsque  se  produit  un  in- 
cendie; la  plupart  viennent  voir,  puis  se  dérobent  aussitôt,  laissant  aux 
sapeurs-pompiers  et  à  l'armée,  quand  il  s'en  trouve  des  détachements  sur 
les  lieux,  la  tàclie  exclusive  de  le  combattre;  cette  observation  n'a  pas 
trait,  bien  entendu,  à  Paris  et  autres  villes,  où  le  service  de  secoure  contre 
l'incendie  est  organisé  de  toutes  pièces  et  n"a  besoin  d'aucune  aide. 

18,  Applicent.  —  D'un  t'ait  particulier  auquel  a  trait  cette  citation,  Mon- 
taigne fait  une  maxime  générale,  en  changeant  un  peu  les  paroles  de 
l'auteur. 

19,  Gelon.  —  Hérodote,  VIII,  163.  —  En  480;  mais  le  fait  n'est  pas  exact  : 
Gelon  allait  se  joindre  aux  Grecs  contre  Xerxès,  quand  les  Carthaginois,  à 
l'instigation  de  ce  prince,  attaquèrent  la  Sicile,  où  du  reste  ils  furent 
complètement  battus,  et  une  des  conditions  que  leur  imposa  le  vainqueur 
fut  l'abolition  des  sacriOces  de  victimes  humaines. 

22,  En  eschauguette.  —  En  sentinelle  ;  se  dit  et  du  lieu  d'où  l'on  surveille 

et  de  l'action  elle-même. 
•24,  Concilier.  —  Faire  alliance  avec,  se  rendre  favorable. 

30,  Veut.  —  C.-à-d.  auxquelles,  qui  le  voudrait,  ne  peut  se  dispenser  de 
prendre  part.  —  La  traduction  présente  ici  un  contre-sens  que  corrige 
i'errata  placé  à  la  fin  du  volume.  —  La  difficulté  de  compréhension  de  ce 
membre  de  phrase  disparaît  en  le  lisant  :  «  ne  s'empesche  pas  qui  ne  veut 
pas  »,  ce  qui  n'en  change  pas  le  sens. 

31,  Attrempance.  —  Modération,  du  latin  temperantia,  qui  a  cette  signifi- 
cation. 

31,  De  Moruilliers.  —  Personnage  considérable  de  l'époque;  prit  part  au 
traité  de  Cateau-Cambrésis  et  au  concile  de  Trente.  Protégé  par  les  Guise, 
il  se  montra  toujours  contraire  à  la  Réforme,  mais  ne  s'associa  point  aux 
persécutions  dont  elle  fut  l'objet. 

31,  Ouurent.  —  Travaillent. 

37,  Appreste.  —  Ceci  est  fort  sujet  à  discussion.  A  moins  de  s'annihiler 
complètement,  et  encore,  ce  qui  en  tout  cas  n'est  ni  digne,  ni  conforme  au 
devoir,  la  neutralité,  dans  les  divisions  politiques,  est  peu  admise;  il  faut 
être  nettement  d'un  côté  ou  de  l'autre  et  qui  n'est  pas  du  côté  du  manche, 
est  du  côté  du  balai;  vienne  l'occasion,  on  le  lui  fera  bien  voir. 


86, 


88 


3,  Marcher.  —  Par  ce  fait  qu'on  marche. 

14,  Guerre.  —  «  Nos  vertus  ne  sont  souvent  que  des  vices  déguisés.  •  La 
Rochefoucauld.  —  «  Les  vices  entrent  dans  la  composition  des  vertus, 
comme  en  médecine  les  poisons  dans  la  composition  des  remèdes;  la  pru- 
dence les  assemble  et  lès  tempère  et  elle  s'en  sert  utilement  dans  les  di- 
verses circonstances  de  la  vie.  »  La  Rochefoucauld. 

25,  Homme.  —  Quand,  le  15  juin  1815,  de  Bourmont,  chef  d'état-major  d'un 
corps  d'armée  français,  passa  à  l'ennemi,  quelques  heures  après  il  ren- 
contrait Bliicher  qui  commandait  l'armée  prussienne  qui  nous  était  oppo- 
sée. Le  vieux  soldat,  révolté  de  voir  un  homme  portant  l'uniforme  de 
général  de  division  déserter  le  matin  d'une  bataille,  le  laissa  passer  sans 
rien  lui  demander  et  un  de  ses  officiers  s'étonnant  de  sa  brusquerie  à  son 
égard,  alors  qu'il  avait  arboré  la  cocarde  blanche,  dit  tout  haut,  sans  se 
soucier  d'être  entendu  par  le  transfuge  :  «  Qu'importe  la  cocarde,  Jean 
foutre  sera  toujours  Jean  foutre.  • 

7,  Lysimacbus.  —  Plutarque,  De  la  Curiosité,  4.  —  Lysiniaque  apparte- 
nant à  la  garde  royale  d'Alexandre  le  Grand  et  ayant  encouru  sa  disgrâce. 


90, 


92, 


94, 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  I.         VOL.  III,  PAG.  88.  Fc.609 

fut,  par  ordre  de  ce  conquérant,  exposé  sans  armes  à  la  fureur  d'un  lion 
énorme;  comme  l'animal  ouvrait  la  gueule  pour  le  dévorer,  il  lui  saisit  la 
langue  avec  la  main  et  l'étoulïa,  ce  qui  excita  si  fort  l'admiration 
d'Alexandre  qu'il  lui  rendit  son  amitié;  il  se  révéla  par  la  suite  un  de  ses 
meilleurs  généraux,  et  à  sa  mort  devint  roi  de  Thrace;  plus  tard  il  con- 
quit la  Macédoine  et  périt  en  cherchant  à  s'agrandir  davantage  encore; 
d'un  caractère  qui  était  en  rapport  avec  sa  force  brutale,  il  se  rendit 
odieux  par  ses  cruautés  ;  n'épargnant  pas  même  les  siens,  il  mit  à  mort  un 
de  ses  fils  sur  de  légers  soupçons. 
9,  Secrets.  —  «  La  pensée  intime  du  roi  doit  demeurer  secrète.  »  Livre  de 
Tobie. 

1,  Succedoit.  —  C.-à-d.  et  cela  avec  succès. 

2,  Heure.  —  C.-à-d,  cependant  je  m'en  détachai  de  bonne  heure.  —  Allu- 
sion aux  fonctions  de  conseiller  au  parlement  de  Bordeaux  que  Montaigne 
occupa  de  1554  à  1570. 

20,  Engin.  — Esprit;  du  latin  ingenium  qui  a  cette  signification. 
29,  Bastonnades.  —  Cette  fable  d'Esope  a  été  reproduite  par  La  Fontaine  : 
L'âne  et  le  petit  chien,  IV,  5. 

1,  Dandamys.  —  Plutarque,  Alexandre,  20;  Strabon,  XV,  qui  l'appelle 
Mandanis.  —  Le  propos,  tenu  par  Dandamis,  sur  ces  philosophes  grecs 
était  qu'ils  pensaient  sagement,  mais  avaient  tort  de  faire  passer  la  loi  et 
les  coutumes  avant  la  nature,  sans  quoi  ils  ne  rougiraient  pas  d'aller  nus 
et  de  vivre  simplement.  C'est  par  ses  conseils  que  le  roi  Taxile  aurait  fait 
sa  soumission  à  Alexandre.  Invité  à  se  rendre  auprès  de  lui  par  ce  con- 
quérant qui  lui  promettait  récompense  s'il  obéissait  et  le  menaçait  de  châ- 
timent dans  le  cas  contraire,  il  refusa,  faisant  répondre  qu'il  n'avait  nul 
besoin  qui  ne  trouvât  déjà  ample  satisfaction  et  que  la  mort  le  débarras- 
serait d'une  guenille  charnelle  déjà  usée  par  la  vieillesse  et  lui  procurerait 
en  échange  une  vie  meilleure. 

9,  Nécessaires.  —  Telle,  par  exemple,  celle  qui  a  pour  objet  la  propagation 
de  l'espèce. 
23,  Rome.  —  Tacite,  Ann.,  11,  65.  —  En  18,  ces  deux  compétiteurs  étaient 
l'oncle  et  le  neveu,  et  l'empereur  qui  intervint  ce  fut  Tibère;  Pomponius 
Flaccus,  employé  en  cette  circonstance,  était  lié  avec  celui  qu'il  reçut  mis- 
sion d'arrêter  et  c'est  ce  qui  l'avait  fait  désigner  à  cet  effet,  ce  choix  devant 
moins  exciter  sa  défiance. 
26,  Sentir.  —  Montaigne  fait  ici  allusion  à  quelque  trait  de  perfidie  qui  s'est 
produit  à  l'époque  où  il  écrivait;  mais  dans  ces  temps  de  corruption  et  de 
troubles  il  y  eut  tant  de  faits  de  ce  genre,  qu'on  ne  peut  deviner  duquel 
il  veut  parler.  Peut-être  est-ce  de  la  Saint-Barthélémy  succédant  à  la  paix 
qui  venait  d'être  conclue  avec  les  Protestants  et  ayant  lieu  en  même  temps 
que  se  célébrait  le  mariage  de  la  sœur  du  roi  avec  le  roi  de  Navarre  leur 
principal  chef,  ou  encore  on  a  cru  que  ce  pouvait  être  de  la  feinte  récon- 
ciliation de  Catherine  de  Médicis  avec  le  duc  de  Guise  et  qui  aboutit  à  l'as- 
sassinat de  celui-ci,  qu'il  était  question;  c'est  douteux,  parce  que  l'événe- 
ment s'est  produit  l'année  même  ou  s'imprimait  cette  partie  des  Essais 
(1588)  et  qu'à  ce  moment  semblable  dénouement  ne  pouvait  se  prévoir. 
X),  Non  que.  —  Alors  que  cela  n'irait  pas  jusqu'à  assassiner... 
38,  Lacedemoniens.  —  Plutarque,  Différence  entre  le  flatteur  et  Vami,  21. 


5,  luges.  —  Plutarque,  Apophth.  des  rois.  —  Il  y  a  longtemps  de  cela!  Que 
de  fois  depuis,  malgré  ce  qu'a  pu  dire  un  des  siens,  a-t-elle,  dans  les  causes 
politiques,  rendu  des  services  en  rendant  des  arrêts;  cela  est  et  sera  tou- 
jours en  plus  ou  en  moins,  suivant  les  hommes  et  les  temps. 

18,  Fabricius.  -  Combattant  Pyrrhus,  le  médecin  de  ce  prince  lui  proposa 
de  l'empoisonner;  il  en  avertit  le  roi  auquel  il  renvoya  le  traître  chargé  de 
liens;  Pyrrhus,  frappé  de  sa  générosité,  lui  rendit  sans  rançon  tous  les  pri- 

ESSAIS  DE  MONTAIGNE.  —  T.   IV.  39 


Fc.610  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

sonniers  qu'il  lui  avait  faits  et  bientôt  après  évacua  l'Italie  (278).  Quel- 
ques années  auparavant  (282),  vainqueur  des  Samnites,  il  avait  refusé  les 
présents  qu'ils  lui  offraient  pour  leur  avoir  fait  accorder  la  paix.  Deux 
fois  consul,  une  fois  censeur,  il  mourut  si  pauvre  que  l'Etat  fut  obligé  de 
doter  sa  fille  et  de  faire  les  frais  de  ses  funérailles.  —  L'éd.  de  88  port. 
Flaminius,  ce  qui  est  une  erreur. 

23,  Practiqua.  —  Gagna,  soudoya. 

26,  Galant.  —  En  habile  homme. 

31,  Arse.  —  Brûlée,  du  latin  a7-sus,  part,  passé  de  ardere  qui  a  cette  signi- 
fication. 

31,  Totale.  —  Avec  massacre  général;  —  occision,  du  latin  occidere,  tué; 
part,  passé,  occisus. 

36,  Conduitte.  —  En  1138.  —  Boleslas  lui  avait  tendu  une  embuscade  dans 
laquelle  il  était  tombé,  et  était  demeuré  quelque  temps  son  prisonnier. 
Martin  Cromer,  De  rébus  Polon.,  V. 


96, 


98, 


1,  Argyraspides.  —  Corps  des  plus  estimés  de  l'armée  macédonienne,  com- 
posé de  vieux  soldats  et  qui  faisait  partie  de  la  garde  d'Alexandre;  à  sa 
mort,  ils  suivirent  Eumène.  Ils  avaient  de  petits  boucliers  d'argent,  d'où 
leur  nom,  et  étaient  armés  de  la  sarisse,  sorte  de  longue  lance. 

1,  Enmenes  —  Plut.\rque,  Eumène,  9.  —  Eumène  avait  été  secrétaire  de 
Philippe,  père  d'Alexandre.  A  la  mort  de  ce  dernier,  il  se  fit  le  protecteur 
de  sa  veuve  et  de  son  fils,  ce  qui  le  mit  en  lutte  continue  avec  les  autres 
généraux  et,  en  particulier,  contre  Antigone,  auquel  le  livrèrent  ses  sol- 
dats fatigués  de  ces  guerres  sans  fin  et  gagnés  par  les  promesses  qui  leur 
furent  faites.  Antigone  le  laissa  mourir  de  faim  ;  mais  obligé  de  décamper 
et  la  mort  ne  se  produisant  pas  assez  vite,  il  le  fit  égorger  (315). 

2,  Mais.  —  A  peine  l'eut-il  fait  tuer. 

13,  Tarpeien  —  A  Rome;  roche  située  près  du  Capitole  et  d'où  l'on  précipi- 
tait les  criminels  coupables  de  trahison  ;  l'esclave  qui  avait  trahi  Sulpitius 
en  fut  précipité  coiffé  du  bonnet  de  liberté,  fruit  de  sa  scélératesse.  Valère 
Maxime,  VI,  5,  7. 

15,  Canacre  —  Grégoire  de  Tours,  II,  41,  d'où  le  fait  semble  tiré,  dit  Cha- 
raric,  au  lieu  de  Canacrè,  et  ne  le  rapporte  pas  de  la  sorte;  Montaigne  a  dû 
faire  confusion.  11  est  à  croire  qu'il  s'agit  plutôt  de  Cloderic,  dont  il  est 
question  immédiatement  chez  ce  même  historien  :  Cloderic  avait  fait  égor- 
ger Sigebert,  son  père,  roi  de  Cologne,  à  l'instigation  de  Clovis;  celui-ci  le 
fit  tuer  à  son  tour  par  des  émissaires,  qui  le  massacrèrent  comme  il  leur 
montrait  le  trésor  dont  la  mort  de  son  père  l'avait  rendu  maître  (509). 

16,  Pratiquez.  —  Ce  à  quoi  il  les  avait  incités. 

20,  Race.  —  Suivant  ce  qui  est  de  coutume  chez  eux. 

30,  Conscientieuse.  —  C'est  ainsi  que  venait  d'en  agir  (1501)  le  duc  de 
Valentinois,  César  Borgia,  et  le  souvenir  de  ce  fait,  consigné  du  reste  dans 
Machiavel,  Prince,  7,  n'en  était  pas  encore  perdu,  à  l'égard  de  Remiro 
d'Orso,  établi  par  lui  gouverneur  de  laRomagne,  qu'il  lui  avait  asservie  par 
la  terreur,  et  qu'il  fit  ensuite  poursuivre  et  exposer  éventré  sur  la  place 
publique,  en  désaveu  des  cruautés  qu'il  avait  commises  dans  son  intérêt,  pen- 
sant par  là  se  concilier  les  populations  qui  ne  furent  pas  dupes  du  procédé. 

3,  Seianus.  —  Quand  Tibère  se  retira  à  Caprée,  Séjan  exerça  toute  l'au- 
torité à  Rome,  enchérissant  encore  sur  la  tyrannie  de  son  maître;  mais, 
pressé  par  l'ambition,  il  alla  jusqu'à  aspirer  au  pouvoir  suprême  et  pour 
y  arriver  conspira  contre  l'empereur;  découvert,  il  fut  arrêté  et  étranglé. 

5,  Forcée.  —  Violée.  —  Montesquieu  fait  à  ce  sujet  la  réflexion  que  Tibère, 
en  agissant  ainsi,  détruisait  les  mœurs  pour  conserver  la  coutume  :  Vol- 
taire conteste  cette  aggravation  d'un  acte  de  cruauté  déjà  si  odieux  par 
lui-même.  L'enfant  avait  sept  ans,  Tibère  en  avait  soixante-dix  et  était  trop 
adroit  pour  ordonner  une  barbarie  aussi  infâme  qui,  sans  utilité,  lui  au- 
rait valu,  malgré  l'abaissement  des  caractères,  la  réprobation  universelle. 


NOTES.         UV.  ITI,  CH.  I.         V0[..  111,  PAG.  98.  Fc.Oll 

Du  reste  ni  Tacite,  Ann.,  V,  9,  ni  Suétone,  qui  rapportent  le  fait,  ne  disent 
que  cette  action  exécrable  ait  été  commise  avec  son  assentiment  ou  celle 
du  Sénat;  ils  se  bornent  à  la  présenter  comme  un  bruit  rapporté  par  les 
écrivains  du  temps. 
13,  Propre  parricide.  —  En  commettant  un  crime  semblable. 

16,  Vuitolde.  —  Cromer,  De  rébus  PoL,  XVI. 

22,  Foy.  —  Fait  manquer  à  sa  parole  et  violer  sa  foi.  " 
27,  Géhenne.  —  Tourmenté,  pressé,  gêné. 
100, 

2.  Reserue-il.  —  Dans  quelle  nécessité  plus  pressante  et  plus  juste  veut-il 
s'en  remettre  à  la  pure  conduite  du  ciel? 

9,  Naturelles.  —  De  droit  commun,  dictées  par  la  nature. 

27,  Frère.  —  Diodore  de  Sicile,  XVI,  65;  Plutarque,  Timoléon,  3;  Corné- 
lius Népos,  Timoléon,  1.  —  Son  frère  Timophane  voulant  usurper  le 
pouvoir  à  Corinthe,  Timoléon,  n'ayant  pu  le  détourner  de  ses  projets  cri- 
minels, le  tua  (365)  ;  après  ce  cruel  sacrifice,  il  s'exila  et  resta  vingt  ans 
éloigné  des  affaires.  En  343,  chargé  par  Corinthe  d'aller  délivrer  Syracuse 
de  la  tyrannie  de  Denys  le  Jeune,  il  le  chassa,  délivra  de  même  plusieurs 
autres  villes  de  la  Sicile  des  tyrans  qui  les  opprimaient  et  repoussa  les 
Carthaginois;  partout  il  rétablit  la  république,  fit  relleurir  l'ordre  et  la 
prospérité,  puis  abdiqua  le  pouvoir  souverain.  Il  est  regardé  comme  un 
modèle  de  grandeur  d'âme,  de  sagesse  et  de  modération. 

28,  hiuers.  —  Si  étrange,  si  singulier. 

35,  Cettuy-cy.  —  C.--à-d.  le  but  que  se  proposait  Timoléon  en  tuant  son 
propre  frère  qui»oppressait  sa  patrie,  est  excusable,  autant  qu'une  pa- 
reille action  peut  l'être. 
102, 

1,  Orde.  —  Sale;  dérive  du  latin  sordidus,  par  suppression  de  la  lettre 
initiale;  de  ce  mot  dont  on  ne  se  sert  plus  aujourd'hui,  est  venu  «  or- 
dure »,  qui  est  encore  en  usage. 

3,  Garand.  —  Pour  justifier. 

9,  Elles.  —  CicÉRON,  De  Offic,  III,  22. 

13,  Aueugle.  —  Le  maître  punit  son  disciple  de  ce  qu'il  a  été  docile;  et  le 
clairvoyant,  l'aveugle  qu'il  guide,  du  faux  pas  qu'il  lui  fait  faire. 

20,  Rien.  —  Ce  point  de  morale  est  controversé;  V.  la  note  ci-dessous, 
lig.  28  :  adhiberi.  —  A  l'appui  de  l'opinion  de  Montaigne,  on  peut  citer 
le  fait  de  Turenne  qui,  dévalisé  par  des  brigands,  leur  demanda  de  leur 
racheter  un  des  bijoux  qu'ils  lui  avaient  enlevés,  auquel  il  tenait  particu- 
lièrement, et  chez  qui,  peu  après,  confiant  dans  sa  parole,  l'un  de  ses 
voleurs  n'eut  pas  crainte  de  se  présenter  pour  toucher  le  prix  convenu. 

24,  Parole.  —  De  tenir  fermement  ma  parole.  La  «  maille  »  était  une  petite 
monnaie  de  cuivre  (il  en  fallait  vingt-quatre  pour  faire  un  sou)  ;  faire  la 
maille  bonne,  c'est  garantir  que  le  compte  est  exact. 

28,  Adhiberi.  —  Cette  citation  est  de  Cicéron',  De  Offic,  III,  30,  qui  parle  de 
Régulas,  c'est-à-dire  de  la  conduite  à  tenir  à  l'égard  d'un  ennemi  légitime, 
vis-à-vis  duquel  tout  engagement  pris  doit  être  tenu.  Au  contraire  et  à 
rencontre  de  ce  qu'en  pense  Montaigne,  Cicéron  {De  Off.,  III,  29)  estime 
que  vis-à-vis  d'un  ennemi  illégitime,  tel  qu'un  pirate,  c'est  l'exemple  dont 
il  se  sert  :  •<  Il  ne  peut  y  avoir  entre  vous  et  lui  ni  foi  ni  serments  »  ; 
il  avait  déjà  dit  à  ce  même  propos,  dans  le  même  ouvrage  (1, 10)  :  «  Qui  ne 
sent  qu'on  n'est  pas  obligé  de  tenir  les  promesses  arrachées  par  la  crainte, 
ou  surprises  par  fraude?  » 

31,  Excellons.  —  Voir  liv.  II,  ch.  XXXVI,  III,  18. 
104, 

•  4,  Justice.  —  Plutarque,  De  l'Esprit  familier  de  Sacrale,  4  et  24. 

14,  Gauchit.  —  Et  évite,  au  milieu  d'une  telle  mêlée,  la  rencontre...  Plu- 
tarque, De  l'Esprit  familier  de  Socrate,  17. 

17,  Bénignité.  —  C'est-à-dire  celui-là  maîtrisait  bien  la  guerre,  qui  arri- 
vait à  lui  faire  admettre  la  pratique  de  la  bonté. 


Fc.612  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

23,  Armez.  —  Plutarque,  Pompée,  3.  —  Ce  langage  fut  tenu  par  Pompée 
aux  Mamertins  qui,  cités  par  lui  à  son  tribunal,  s'y  refusaient,  invoquant 
des  traités  antérieurs.  Le  différend  se  termina  par  la  prise  de  leur  ville 
(82),  qui  ne  dut  d'échapper  à  une  destruction  totale  qu'au  dévouement 
d"un  de  ses  citojens.  V.  N.  I,  20  :  Peine. 

25,  Deux.  —  Pll'tarque,  César,  11.  —  Réponse  faite  par  César  qui,  au 
début  de  la  guerre  civile,  manquant  d'argent,  mit  la  main  sur  la  réserve 
du  trésor  public  destinée  à  subvenir  aux  guerres  contre  les  Gaulois,  créée 
lors  du  sac  de  Rome  en  390.  Cette  réponse  s'adressait  à  Métellus,  tribun 
du  peuple,  qui  s'opposait  à  cet  enlèvement;  César  alla  même  jusqu'à  le 
menacer  de  le  tuer,  lui  disant  :  «  Et  tu  sais,  jeune  homme,  qu'il  m'est  plus 
facile  de  le  faire  que  de  le  dire  »  ;  déjà  aux  objections  qui  lui  avaient  été 
faites,  touchant  l'affectation  déterminée  de  cette  réserve,  il  avait  répondu 
qu'  «  elle  n'avait  plus  sa  raison  d'être,  puisque,  grâce  à  lui,  la  Gaule  était 
soumise  »  ;  et  les  tribuns  hésitant  encore  à  lui  en  ouvrir  les  portes,  il 
ordonna  de  la  briser. 

26,  Loix.  —  Plutarque,  Marins,  10.  —  Ce  propos  fut  tenu  par  Maiius, 
auquel  on  faisait  reproche  d'avoir  en  90,  au  mépris  de  la  loi,  concédé  le 
droit  de  cité  à  un  millier  d'habitants  de  l'Ombrie,  et  à  d'autres,  pour 
s'en  faire  des  partisans. 

28,  Ennemis.  —  Épaminondas  n'avait-il  pas  emprunté  aux  Lacédémoniens... 
—  Les  Lacédémoniens  sacrifiaient  aux  Muses,  en  usant  à  la  guerre  d'ins- 
truments de  musique  dans  le  but  indiqué  ici  ;  et  aussi  pour  que,  par  leur 
intervention,  leurs  hauts  faits  passassent  à  la  postérité. 

29,  Destremper.  —  Modérer,  tempérer. 

30,  Parentes.  —  Le  premier  de  ces  deux  membres  de  phrase  est  interro- 
gatif  dans  Cicéron,  et  la  réponse  est  loin  d'être  aussi  péremptoire  que  le 
donne  à  supposer  la  citation  telle  qu'elle  est  présentée. 

106, 

5,  Desreglée.  —  César.  —  Lucaix,  VII,  320,  dont  sont  les  vers  qui  suivent, 
semble  s'être  laissé  entraîner  ici  par  sa  verve  poétique.  Ces  exhortations, 
qu'il  prête  à  César,  sont  en  effet  contraires  à  ce  que  l'histoire  rapporte  de 
lui  recommandant  à  ses  soldats,  notamment  le  jour  de  la  bataille  de  Phar- 
sale,  d'épargner  les  citoyens  romains.  Le  jugement  que  Montaigne  porte 
ici  sur  lui,  sur  la  foi  du  poète,  est  en  contradiction  avec  un  passage 
antérieur  des  Essais  (liv.  II,  ch.  XXXIV,  II,  658),  où  lui-même  dit  que 
César  ne  considérait  pas  tous  les  moyens  comme  licites  pour  se  procurer 
la  victoire. 

15,  Regret.  —  Tacite,  Hist.,  III,  51.  —  Le  fait  cité  se  passa  en  88,  dans  un 
combat  livré  au  mont  Janieule,  sous  les  murs  mêmes  de  Rome,  entre 
Cinna,  partisan  de  Marins,  et  Cn.  Pompée,  père  du  grand  Pompée. 

17,  Capitaines.  —  Tacite,  Hist.,  III,  51.  —  Sous  Vitellius.  Les  lois  humaines 
ne  permettant  pas  de  récompenser  ce  monstre,  ni  l'intérêt  de  la  guerre 
de  le  punir,  on  remit  à  un  autre  temps  de  lui  donner  satisfaction,  sous 
prétexte  que  le  service  rendu  méritait  plus  qu'on  ne  pouvait  faire  sur  le 
moment;  on  ne  sait  ce  qui  arriva  ensuite.  —  Cette  réflexion  sur  le  chan- 
gement survenu  avec  le  temps  dans  les  mœurs  romaines,  rappelle  celle 
d'Annibal  mourant  :  «  Jadis,  les  Romains  dénonçaient  à  Pyrrhus  qui, 
à  la  tête  d'une  armée,  avait  envahi  l'Italie,  son  médecin  méditant  de 
l'empoisonner;  aujourd'hui,  ils  envoient  un  personnage  consulaire  au 
prince  dont  je  suis  l'hôte,  pour  qu'il  les  débarrasse  de  moi  par  un  crime.  » 

TlTE-LlVE. 

24,  Honeste.  —  L'éd.  de  88  port.  :  digne. 

CHAPITRE  II. 

Ce  chapitre  est  un  des  plus  beaux  des  Essais  ;  il  est  grave,  profond, 
et  partout  d'un  grand  sens.  Montaigne  ne  s'y  montre  pas  fort  orthodoxe, 
il  traite  son  sujet  en  philosophe  et  ne  le  perd  pas  un  moment  de  vue. 


NOTES.         LIV.  m,  CH.  II.        VOL.  III,  PAG.  106.  Fc.613 

—  La  même  question  a  été  étudiée  par  Charron,  De  la  Sagesse,  II,  3,  9,  qui 
a  puisié  largement  ici  ses  inspirations. 
108, 

1,  Fait.  —  Aujourd'hui,  c'est  fini,  terminé,  achevé. 

3,  Perenne.  —  Perpétuelle,  comme  portent  nombre  d'éd.  post.  ;  —  du 
latin  perennis  qui  a  cette  signification.  Le  style  de  Montaigne  est  plein  de 
mots  latins  qu'il  a  francisés  de  la  sorte,  changeant  simplement  leur  termi- 
naison. 
5,  Pyramides.  —  Monuments  de  l'ancienne  Egypte  qui  servaient  à  la  sépul- 
ture des  rois  ou  des  animaux  sacrés.  Les  plus  célèbres  sont  celles  de  Chéops 
(243'°  de  large  à  la  base,  150""  de  haut),  de  Chéfrem  (102'"  à  la  base,  133  de 
haut),  de  Mycérinus  (93""  à  la  base,  5-1  de  haut);  elles  s'élèvent  dans  le  désert 
au  S.-O.  du  Caire;  leur  construction  remonte  à  une  date  incertaine,  du 
XX"  au  XV"  s.,  croit-on.  —  Certains  pensent,  et  il  y  a  lieu  de  croire  qu'il 
en  a  été  ainsi,  que  ces  grands  travaux  et  autres  de  même  nature,  assez 
nombreux  dans  l'antiquité,  ont  été  accomplis  en  y  employant,  en  dehors 
des  ouvriers  d'art,  les  hommes  valides  désœuvrés  et  que  c'est  une  des 
raisons  qui  ont  fait  que  la  mendicité,  cette  plaie  gangreneuse  des  sociétés 
modernes,  était  alors  à  peu  près  inconnue.  Mais  ces  travaux  n'ont  eu 
qu'un  temps  et  ne  pouvaient  intéresser  que  des  territoires  limités;  et  l'ab- 
sence de  mendicité  dans  ces  temps  tient  surtout  à  la  simplicité  de  vie 
d'autrefois,  les  besoins  étaient  moindres  et  recevaient  plus  aisément  satis- 
faction; il  en  est  encore  ainsi  chez  les  peuples  à  demi  civilisés  de  notre 
époque  où  les  mœurs  se  sont  conservées  telles.  La  mendicité  tant  soit 
peu  développée,  avec  accroissement  des  crimes  et  délits  spéciaux  contre 
les  personnes  et  la  propriété,  est  une  des  conséquences  les  plus  tangibles 
des  progrès  de  la  civilisation,  par  ce  fait  que  les  nécessités  de  l'existence 
et  les  appétits  grandissants  exigent  plus  d'efforts  auxquels  ne  peuvent  ou 
ne  veulent  satisfaire  ceux  qu'accablent  certaines  infortunes  ou  que  tien- 
nent la  paresse  et  l'inconduite. 
18,  Demades.  —  Plutarque,  Démoslhène,  3.  —  Montaigne  paraphrase  à  sa 
manière  ce  que  disait  cet  orateur  :  «  Qu'il  s'estoit  bien  contredit  a  soy 
mesme  assez  de  fois,  selon  les  occurrences  des  affaires;  mais  contre  le 
bien  de  la  chose  publique,  iamais.  »  —  Ce  passage  des  Essais  explique  et 
justifie  en  même  temps  toutes  les  contradictions  qui  peuvent  s'y  trouver. 
Quel  est,  en  effet,  l'homme  toujours  invariable  dans  sa  manière  de  voir 
et  qui  n'en  change  pas  dans  le  cours  de  la  vie,  sur  des  points  indifférents 
par  eux-mêmes  et  sur  lesquels  on  peut,  sans  inconvénient  pour  soi  et  pour 
les  autres,  abandonner  l'opinion  qu'on  en  a?  Naigeon. 

20,  Résoudrais.  —  Je  parlerais  catégoriquement. 

26,  Premier.  —  Moi,  je  suis  le  premier  qui  me  communique... 

30,  Cognoissance.  —  G.-à-d.    :   Mais  est-ce   une  raison  pour   que,  simple 
particulier  comme  je  suis  et  qui  n'ai  rien  de  remarquable,  je  prétende 
m'ériger  en  homme  public  par  la  connaissance  que  je  donne  de  moi? 
110, 

3,  Discipline.  —  Du  moins,  j'ai  ceci  conforme  aux  principes  de  la  science. 
14,  Bauasser.  —  Babiller,  folâtrer. 

21,  Mesme.  —  C.-à-d.  l'homme  vraiment  capable,  l'est  en  tout;  son  ins- 
truction apparaît  dans  sa  conversation  comme  dans  ses  ouvrages  et  jusque 
dans  son  ignorance. 

37,  Raconte.  —  L'éd.  de  88  port.  :  narre. 
112, 

4,  Ignorance.  —  «  Tout  vice  est  issu  d'ànerie.  »  —  Ailleurs  (liv.  II, 
ch.  XII,  II,  110),  Montaigne  dit  de  ce  même  proverbe  :  «  Si  cela  est  vray, 
il  est  subiect  à  vne  longue  interprétation.  » 

6,  Empoisonne.  —  Pensée  tirée  de  Sénèque,  Epist.  81. 

«  La:  crainte  suit  le  crime,  et  c'est  son  châtiment.  »  Voltaire,  Sémiramis. 
•  La  peine  suit  le  crime,  elle  arrive  à  pas  lents.  »  Voltaire,  Oreste. 


Fc.614 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


114, 


9,  Repentance.  —  «Le  repentir  est  une  douleur  volontaire  et  qui  sou- 
lage; le  remords,  une  douleur  qui  s'impose  et  torture  sans  soulager.  » 


3,  Mercarializer.  —  Reprendre,  censurer.  Ce  mot  vient  de  «  mercuriales  ., 
séances  du  parlement  de  Paris  qui  se  tenaient  deux  fois  par  an,  un  mer- 
credi (jour  de  Mercure),  où  le  Président,  usant  parfois  d'un  langage 
sévère,  parlait  contre  les  désordres  et  les  abus  commis  dans  l'adminis- 
tration de  la  justice. 

4,  Semons.  —  Invité,  averti,  sollicité;  même  étymologie  et  même  sens  que 
«  semonce  »,  mot  encore  en  usage. 

13,  Toucher.  —  Par  lequel  nous  puissions  juger,  comme  avec  une  pierre 
de  touche,  du  mérite  de  nos  actions. 

20,  La  vostre.  —  Celle  de  vostre  conscience,  comme  port.  l'éd.  de  88. 

25,  Domicile.  —  Si  fortement  ancré  en  nous,  qu'il  semble  faire  partie  inté- 
grante de  nous-mêmes. 

30,  Sens.  —  Montaigne,  en  résumé,  dit  qu'on  ne  se  repent  pas  de  ses  fautes 
habituelles,  mais  seulement,  par  un  effet  de  la  versatilité  de  notre  carac- 
tère, de  celles  que  nous  commettons  accidentellement,  ce  qui  est  bien  vrai 
si  on  y  réfléchit. 

33,  Genae.  —  Horace  fait  ici  regretter  à  Ligur^nus,  sur  le  retour  d'âge,  de 
n'avoir  pas  abusé  de  sa  beauté,  quand  cela  lui  était  possible. 


116, 


118, 


1,  Escbatfant.  —  En  plein  théâtre,  en  public. 
ô,  Pourtant.  —  Et  c'est  pour  cela,  d'après  ces  principes,  que  Bias...  Pll- 
TARQUE,  Banquet  des  sept  Sages,  14. 

8,  Hommes.  —  Montaigne  aurait  pu  citer  aussi  la  réponse  d'Aristippe  à 
quelqu'un  lui  disant  :  «  En  quoi  êtes-vous  donc  supérieurs  au  reste  des 
hommes,  vous  autres  philosophes?  —  En  ce  que,  répondit-il,  si  les  lois 
étaient  supprimées,  notre  conduite  n'en  serait  pas  moins  régulière.  »  Dio- 
GÈNE  Laerce. 

9,  Drusus.  —  Ou  plutôt  M.  L.  Drusus,  comme  dit  Velleius  Paterculus.  Dis- 
tingué par  sa  naissance,  son  éloquence  et  ses  vertus,  étant  tribun  du  peuple 
et  ses  propositions  sur  les  jugements,  le  partage  des  blés  et  des  terres, 
l'extension  du  droit  de  cité  aux  peuples  d'Italie  inquiétant  le  Sénat,  il  fut 
tué  dans  un  soulèvement  organisé  à  cet  effet  (91).  Lui  mort,  toutes 
les  lois  qu'il  avait  fait  rendre  furent  révoquées,  comme  prises  les  aus- 
pices étant  contraires. 

13,  Agesilaus.  —  Plutarqle,  Agésilas,  5. 

17,  Domestiques.  —  «  Il  faut  être  bien  héros,  disait  le  Maréchal  de  Catinat, 
pour  l'être  aux  yeux  de  son  valet  de  chambre.  •  —  «  La  seule  réputation 
fondée  est  celle  que  nous  font  les  gens  avec  lesquels  nous  vivons.  »  Bacon. 

19,  Histoires.  —  La  plupart  des  héros  sont  comme  certains  tableaux;  pour 
les  estimer,  il  ne  faut  pas  les  regarder  de  trop  près.  »  La  Rochefoucauld. 
—  «  Pour  son  siècle  incrédule,  un  héros  n'est  qu'un  homme.  »  Lamartine. 

24,  M'acbettent.  —  Réédition  du  proverbe  :  «  Nul  n'est  prophète  dans  son 
pays  »,  cité  quelques  lignes  plus  haut,  et  qui  se  retrouve  encore  dans 
celui-ci  :  «  Le  sainct  de  la  ville  n'est  pas  oré  »  (prié,  du  latin  orare). 

26,  Moins.  —  Moins  de  crédit,  de  renommée. 


2,  Aristote.  —  Morale  à  Nicomaque,  X,  7. 
11,  Puis.  —  A  ce  propos,  J.-B.  Rousseau  a  écrit 


«  Vous,  chez  qui  la  guerrière  audace 
Tient  lieu  de  toutes  les  vertus, 
Concevez  Socrate  à  la  place 
Du  fier  meurtrier  de  Clitus. 
Vous  verrez  un  roi  respectable. 


Humain,  généreux,  équitable. 
Un  roi  digne  de  vos  autels. 
Mais  à  la  place  de  Socrate, 
Le  fameux  vainqueur  de  l'Euphrate 
Sera  le  dernier  des  mortels.  • 


25,  Non.  —  Et  qui  de  nous  ne  donne  pas  à  Tamberlan. 

28,  Erasme.  —  L'homme  le  plus  savant  de  son  siècle;  écrivain  latin  des 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  II.        VOL.  III,  PAG.  H8.  Fc.61d 

plus  purs,  élégant,  spirituel,  en  même  temps  qu'un  des  hommes  les  plus 
sages  de  son  temps.  D'accord  avec  Luther  sur  la  nécessité  d'une  réforme, 
il  se  sépara  de  lui  quand  il  le  vit  recourir  à  la  violence,  n'aimant  pas 
la  vérité  séditieuse.  Son  œuvre  est  considérable;  le  nombre  de  ses  adages 
et  apophthegmes  dépasse  4.000. 
120, 

4,  Escbappé.  —  Mille  natures  (caractères)  ont  pris  de  mon  temps  le 
chemin  de  la  vertu  ou  du  vice,  quoiqu'elles  eussent  reçu  une  éducation 
qui  semblait  devoir  les  acheminer  dans  un  sens  tout  opposé. 
11,  Magistro.  —  Lucain,  IV,  237.  —  C'est  ainsi  que  ces  jours-ci  (1905),  nous 
avons  vu  au  jardin  des  Plantes  de  Paris  un  éléphant,  d'ordinaire  fort 
tranquille,  soigné  depuis  15  ans  par  un  gardien  qui  s'y  employait  avec 
grande  sollicitude,  et  entre  lesquels  régnait  une  réelle  affection,  saisir 
ce  gardien  avec  sa  trompe,  lui  briser  les  reins  et  le  piétiner  ensuite  avec 
rage.  Chez  l'homme  le  plus  doux  ne  constate-t-on  pas  aussi,  maintes  fois, 
des  retours  aux  pires  instincts,  où  la  brute  assoupie  qui  est  en  nous 
reparaît,  notamment  quand  il  est  perdu  dans  les  foules.  Il  y  devient  alors 
absolument  inconscient,  capable  de  passer  d'un  instant  à  l'autre,  sans 
motif  (et  encore  notre  éléphant,  lui,  pensait-il  probablement  et  non  sans 
raison  apparente  que  c'était  à  son  gardien,  auquel  il  voyait  continuelle- 
ment ouvrir  et  fermer  sa  cage,  qu'il  devait  sa  longue  et  étroite  captivité, 
ou  qu'il  ne  tenait  qu'à  lui  d'y  mettre  fin;  et  que,  ne  le  faisant  pas,  c'était 
un  ennemi),  par  les  sentiments  les  plus  opposés  et  commettre  des  actes 
d'une  férocité  inouïe,  qu'une  fois  seul,  revenant  à  lui-même,  il  réprouve 
de  toute  son  âme,  ne  comprenant  pas  comment  il  a  pu  en  arriver  là. 
Cela  se  voit  constamment  dans  les  mouvements  d'effervescence  popu- 
laire, où  un  rien  suffit  pour  que  les  foules  deviennent  criminelles  et  leur 
frénésie,  leur  cruauté  sans  limites;  qui  n'en  a  été  témoin,  ne  peut  s'en 
faire  une  idée;  une  fois  le  monstre  surexcité,  personne  ne  sait  jusqU'où 
il  ira,  il  est  tout  spontanéité.  Aussi,  combien  sont  coupables  ceux  qui 
vont  déchaînant  les  passions  des  masses  qu'ils  ne  pourront  pas  contenir, 
sans  compter  que  ces  instigateurs,  une  fois  la  mise  en  branle  effectuée, 
ont,  pour  la  plupart,  grand  soin  de  se  tenir  de  leur  personne  prudemment 
à  l'écart. 
21,  Raduiser.  —  Corriger,  réformer;  on  dit  bien  se  raviser  pour  changer 
d'a.vis,  mais  raviser  les  mœurs,  dans  le  sens  de  les  redresser,  ne  se  dit 
guère. 

24,  Seiourne.  —  On  s'abstient,  on  se  dispense. 

25,  Externes.  —  Add.  de  88  :  et  'mternes;  l'ex.  de  Bordeaux  port,  arbitreres, 
que  dans  la  traduction  on  a  cru  devoir  maintenir. 

35,  Rauiseinens.  —  Retours  sur  soi-même,  à  la  raison,  changements  d'avis; 
vient  de  raviser,  mais  n'est  pas  demeuré  dans  la  langue. 
122, 

1,  Mesme.  —  S.-ent.  du  vice. 

3,  Cbafourée.  —  Confuse,  barbouillée.  Vieux  mot  de  la  langue  française, 
dont  Brantôme  a  pareillement  usé. 

26,  Mercy  —  Grâce  à. 

32,  Science.  —  De  la  connaissance... 
124, 

17,  Puis  pas.  —  L'éd.  de  88  aj.  :  facilement. 

20,  Ainsin.  —  C.-à-d.   sans  que  l'homme  soit  lui-même  déterminé   par  sa 
propre  volonté  à  persister  dans  ses  péchés  provenant  de  son  tempéra- 
ment et  de  sa  profession. 
126. 

8,  Regret.  —  De  ce  passage,  on  peut  inférer  que  Montaigne  croyait  que 
les  actions  humaines  s'imposent  à  l'homme,  par  une  sorte  de  fatalité  ré- 
sultant de  la  connexion  inévitable  des  causes  et  des  effets;  ce  qu'il  confirme 
dans  les  lignes  qui  suivent. 
19,  Moy.  —  Suivant  la  mesure  de  mes  forces. 


Fc.616  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

21,  Macbeure.  —  Tache,  contusion,  meurtrissure. 

26,  Négoces.  —  Affaires. 
128, 

6,  Moy.  —  Add.  de  88  :  de  ne  l'avoir  sceu  preuoir. 
11,  Fit-il.  —  Plutarque,  Apophth.,  art.  Phocion. 

17,  le  n'ay  deu.  —  L'éd.  de  88  port.  :  cependant  ie  n'ay  peu. 

27,  Volonté.  —  V.  ci-dessus,  liv.  II,  ch.  XVII,  II,  488,  ce  que  Montaigne  dit 
de  son  aversion  pour  la  délibération;  cela  explique  ce  qu'il  dit  ici. 

29,  Enquis.  —  Enquis  signifie  ici  «  requis  ». 
130, 

1;  Gariement.  —  C-à-d.  et  d'être  dispensé  d'en  répondre.  —  Gariement 
est  un  vieux  mot  signifiant  garantie,  sauvegarde. 

8,  Celuy.  —  Sophocle.  —  Quelqu'un  lui  ayant  demandé  si,  dans  sa  vieil- 
lesse, il  jouissait  encore  des  plaisirs  de  l'amour,  il  répondit  :  «  Aux  dieux 
ne  plaise!  et  c'est  de  bon  cœur  que  je  m'en  suis  délivré,  comme  d'un  maî- 
tre sauvage  et  furieux.  »  Cicéron,  De  Senect.,  14. 

14,  Conscience.  —  Qui  soit  l'effet  du  repentir  et  d'une  conscience  qui  se  ré- 
forme. 
20,  Ores  que.  —  A  présent  que... 

30,  Coniure.  —  L'éd.  de  88  port.  :  esconiure,  qui  donne  au  texte  cette  signi- 
fication :  ■<  je  les  prie  de  se  retirer  »  ;  conjurer  a  ici  ce  même  effet,  mais, 
pour  cela,  est  détourné  de  son  sens  propre. 

33,  Clarté.  —  Je  ne  vois  pas  que  ma  raison  juge  de  la  volupté  autrement  ni 
plus  sainement  qu'alors. 

34,  Maleficiée.  —  En  mauvaises  conditions.  —  L'éd.  de  88  port.  :  maladiue. 
132, 

3,  Cents.  —  C'est  bon  pour  les  gens... 

4,  Deliure.  —  Libre,  comme  portent  plusieurs  éd.  post. 

7,  Maladie.  —  V.  sur  ce  même  sujet  liv.  III,  ch.  IX,  III,  380. 
14,  Antistbenes.  —  Diogè.ne  Laerce,  VI,  5. 

32,  Douloureuses.  —  C.-à-d.  à  ce  repentir  que  l'âge  apporte  et  qui  n'est 
que  le  résultat  d'un  cas  de  force  majeure  et  de  l'impuissance. 

35,  Appétits.  —  L'éd.  de  88  port.  :  la  défaillance  de  nos  forces,  au  lieu  de  : 
"  l'affoiblissement  de  nos  appétits  ». 

•  Chaque  âge  a  ses  humeurs,  ses  goûts  et  ses  plaisirs.  »  Régnier. 
«  Chaque  âge  a  ses  plaisirs,  son  esprit  et  ses  mœurs.  »  Boileau. 

134, 

7,  Vieillesse.  —  Ce  passage  où  Montaigne  s'exprime  avec  une  grande  net- 
teté est  un  des  mieux  pensés  des  Essais. 

9,  Nez.  —  On  me  reprochait  de  parler  alors  que  je  n'avais  pas  encore  de 
barbe  au  menton. 

16,  Enuie.  —  Je  trouve  surtout  dans  la  vieillesse,  de  l'envie... 

17,  Visage.  —  Idée  que  Corneille  a  reproduite  dans  son  Epître  au  Roi  : 

«  Pour  bien  écrire  encor,  j'ai  trop  longtemps  écrit; 
Et  les  rides  du  front  passent  jusqu'à  l'esprit.  » 

24,  Accoustumée.  —  Xénophox,  Apologie  de  Socrate  devant  ses  juges,  le  dit 
expressément,  considérant  qu'à  son  âge,  il  lui  serait  plus  avantageux  de 
mourir  que  de  vivre. 

26,  Puissante.  —  Var.  de  l'éd.  de  88  :  violente. 

CHAPITRE  III. 

136, 

Un  des  meilleurs  chapitres  de  Montaigne.  Il  y  tourne  en  ridicule  les  femmes 
savantes  et  détermine  le  genre  de  connaissances  qu'il  estime  leur  conve- 
nir. Il  parle  de  ses  amours,  de  la  sincérité  à  apporter  dans  le  commerce  des 
femmes;  du  caractère  des  hommes  dont  on  doit  rechercher  la  liaison;  il 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  III.         VOL.  III,  PAG.  136.  Fc.617 

passe  à  son  troisième  commerce  qui  est  celui  des  livres,  dont  il  fait  l'éloge, 
ainsi  que  l'apologie  des  lettres  et  de  l'étude  et  de  leurs  avantages.  Naigeox. 

13,  Tordre.  —  Quand,  en  effet,  on  embrasse  une  opinion  quelconque,  on  ne 
s'oblige  pas  à  y  persévérer  à  tout  jamais,  pas  plus  qu'on  ne  conserve  sa 
vie  durant  les  goûts  que  l'on  peut  avoir  à  un  moment  donné;  quiconque 
se  ferait  une  loi  de  ne  pas  varier  à  cet  égard,  serait  en  contradiction  avec 
tout  ce  qui  l'entoure  qui  est  en  perpétuelle  vicissitude  et  dont  les  sensa- 
tions que  nous  en  percevons,  sont  éminemment  variables. 

31,  luger.  —  Add.  de  88  :  Au  pris  de  ce  fruit  et  amendement  essentiel  auquel 
il  vise,  il  fait  peu  de  compte  de  Vestude  qu'on  emploie  à  charger  et  meubler  sa 
mémoire  de  la  suffisance  d'autruy.   . 
138, 

•2,  Forger.  —  Façonner. 

8,  Aristote.  —  Morale  à  Nicomaque,  X,  8. 

10,  Discours.  —  Ma  raison. 

12,  Effort.  —  C.-à-d.  aussi  peu  d'entretiens  dont  le  sujet  n'est  pas  sérieux 
et  qui  ne  demandent  aucun  effort  de  tête,  me  plaisent  et  captivent  mon 
attention. 

16,  Lascbes.  —  Add.  de  88  :  sans  pois  et  sans  grâce. 

19,  Resueuse.  —  Add.  de  88  :  par  fois. 

24,  Volet.  —  Entre  plusieurs  choses  de  même  espèce,  choisir  la  meilleure. 
—  Cette  expression  vient,  suivant  les  uns,  de  l'habitude  qu'ont  les  jardi- 
niers de  répandre  leurs  graines  sur  une  planche,  qu'ils  nomment  volet, 
quand  ils  choisissent  les  meilleures  pour  semer;  suivant  d'autres,  de  l'usage 
qu'on  avait,  en  France,  de  mettre  les  étoffes  sur  le  volet  intérieur  des  fenê- 
tres, pour  pouvoir  les  examiner  en  détail  et  au  grand  jour. 

25,  Incommode.  —  Impropre. 

29,  Insipience.  —  Folie,  sottise;  du  latin  insipientia,  dont  Montaigne  s'est 
contenté  de  changer  la  terminaison. 
140, 

5,  Peut.  —  XÉNOPHON,  Mém.  sur  Socrate,  I,  2,  3. 

8,  Disconuenir.  —  C.-à-d.  de  ne  pouvoir  m'accommoder  avec  les  gens,  en 
somme  assez  peu  nombreux,  avec  lesquels  le  hasard  m'oblige  à  avoir  des 
relations  fréquentes. 
18,  Harpe.  —  .Je  me  harponne,  je  m'attache  fortement... 

23,  Froid.  —  Var.  de  88  :  mal. 

24,  Aftriandé  de.  —  Var.  de  88  :  acoquiné  dès. 

25,  Parfaicte.  —  Celle  d'Etienne  de  la  Boétie. 

28,  Ancien.  —  Plutarque,  De  la  Pluralité  d'amis,  2. 
142, 

5,  Platon.  —  Traité  des  Lois,  VI. 

6,  Maistral.  —  Magistral,  d'un  ton  de  maître. 

7,  Raison.  —  La  raison  que  je  viens  d'alléguer. 

14,  .Xacus.  —  Eaque.  Se  signala  tellement  par  sa  justice  et  sa  sagesse,  qu'à 
sa  mort,  Jupiter  en  fit  un  des  trois  juges  des  Enfers;  il  fut  le  grand-père 
d'Achille. 

29,  Forchetta.  —  Parler  sur  la  pointe  d'une  fourchette,  c.-à-d.  pour  une 
bagatelle.  —  Expression  italienne  qui  correspond  à  notre  locution  fran- 
çaise :  «  Disputer  sur  la  pointe  d'une  aiguille  ».  Les  Grecs  disaient  :  «  Dis- 
puter sur  l'ombre  d'un  ànp  »,  tiré  d'une  digression  de  Démosthène,  au 
cours  d'une  de  ses  harangues  aux  Athéniens,  leur  contant,  pour  ranimer 
leur  attention,  une  discussion  entre  un  ànier  et  un  individu  auquel  il  avait 
loué  son  àne  et  qui,  descendu  de  sa  monture,  en  cours  de  route,  voulait 
s'abriter  à  son  ombre  des  rayons  du  soleil,  ce  que,  voulant  faire  de  même, 
l'ànier  lui  contestait,  disant  lui  avoir  loué  l'àne,  mais  non  l'ombre  de 
l'animal. 

34,  Magistère.  —  Science  doctorale  et  magistrale. 
144, 

11,  Totse.  —  Ce  mot  de  Sénèque,  Epist.  115,  qu'il  applique  aux  petits  maîtres 


É-c.eiS  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

de  son  temps,  lesquels,  sous  aucun  rapport,  ne  le  cédaient  à  ceux  de  nos 
jours.  L'un  d'eux,  transporté  par  ses  esclaves,  des  bains  chez  lui,  dans  sa 
chaise  à  porteurs,  ne  demandait-il  pas  «  s'il  était  assis  -,  comme  si  c'était 
chose  au-dessous  de  lui  de  savoir  ce  qu'il  faisait! 

17,  Judiciaire.  —  La  science  judiciaire,  le  droit. 

18,  Besoing.  —  La  Bruyère  compare  une  femme  savante  à  une  belle  arme 
de  luxe. 

19,  Loy.  —  Loisir,  liberté,  occasion,  moyen. 

20,  Baste.  —  11  suffit,  c'est  assez;  de  l'italien  basta. 
29,  Parlier.  —  Parleur,  bavard. 

35,  Seruiteur.  —  Amant. 
146, 

2,  Production.  —  Et  me  porte  à  produire. 

7,  Estrangere.  —  Ecartant  de  moi  le  souci  que  pourraient  me  causer  les 
affaires  des  autres. 
11,  Louure.  —  A  la  cour. 

16,  Vie.  —  Outre  qu'il  fut  en  rapport  constant  avec  Henri  de  Navarre  et 
son  entourage,  Montaigne  vint  à  diverses  reprises  à  la  cour  de  France  ; 
notamment,  pour  la  première  fois,  vers  1555,  accompagnant  son  père  qui 
venait  d'être  nommé  maire  de  Bordeaux,  et  allait  demander  le  rétablisse- 
ment de  privilèges  supprimés;  puis,  en  1559,  lors  des  obsèques  de  Henri  II 
et  du  sacre  de  son  successeur,  à  la  suite  duquel  il  alla  à  Bar-le-Duc;  en 
1562,  sous  Charles  IX,  qu'il  suivit  à  Rouen;  en  1588.  où  son  séjour  fut 
marqué  par  son  incarcération  de  quelques  heures  à  la  Bastille. 
24,  Conuoiemens.  —  Action  de  reconduire  quelqu'un  qui  s'en  va. 
148, 

4,  Substitutions.  —  Disposition    par  laquelle    un   testateur  substitue  un 
héritier  à  un  autre  qui  n'a  que  l'usufruit,  sans  avoir  la  propriété  du  bien 
laissé;  question  de   droit  qui,  aux  temps  jadis  surtout,  était  pleine  de 
complications  et  une  source  de  difficultés. 
6,  Confabulations.  —  Conversations,  entretiens,  discours  familiers. 

10,  Rue.  —  «  .\  la  manière  dont  ils  rapportent  leurs  provisions  du  marché  », 
dit  Plltarque,  Dion,  I  ;  ce  qui  porte  à  croire  que  c'était  là  une  coutume 
assez  générale  en  Grèce,  au  moins  chez  les  gens  du  commun,  d'aller  soi- 
même  au  marché.  —  Un  poète  français  a  rendu,  ainsi  qu'il  suit,  la  même 
idée  : 

•  Même  quand  l'oiseau  marche,  on  sent  qu'il  a  des  ailes.  > 

13,  Sutfragante.  —  Souple,  humble,  modeste,  venant  en  seconde  ligne. 

15,  Démette.  —  Qu'elle  descende,  s'abaisse  jusqu'à  nous,  s'accommode  à 
notre  portée. 

16,  Vtile.  —  Var.  de  88  :  belle. 

22,  Femmes.  —  Add.  de  88  :  ef  bien  nées.  —  «  Une  cour  sans  femmes,  disait 

François  I",  est  un  parterre  sans  roses.  » 
32,  Argolica.  —  D'Argos;  qualification  donnée  ici  à  la  flotte  grecque,  parce 

qu'Agamemnon,  roi  d'Argos,  en  avait  le  commandement  suprême. 
32,  Capbarea.  —  C'est  près  du  cap  de  ce  nom  que  la  tempête  dispersa  la 

flotte  des  Grecs,  au  retour  de  la  guerre  de  Troie. 
150, 

6,  louyr.  —  Il  faut  avoir  réellement  bien  désiré  ce  dont  on  veut  avoir  bien 

réellement  le  plaisir  de  jouir.  —  Dorat,  dans  sa  comédie  de  La  feinte  par 

arnou?',  a  dit  :  «  Qui  plaît  sans  aimer,  jouit  sans  être  heureux.  »  On  en  a 

fait  : 

«  Qui  jouit  sans  aimer,  jouit  sans  être  tieureux.  > 

6,  Masque.  —  Hj^pocrisie. 

11,  Bracbmanes.  —  Dits  aussi  Brahmes,  Bramines;  prêtres  de  la  religion 
de  Bouddha.  Ils  se  distinguent  par  un  costume  spécial,  et,  bien  qu'en 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  III.        VOL.  III,  PAG.  150.  Fc.619 

principe   constituant   une  caste  d'ordre  supérieur,  vivant  des  dons  des 

fidèles,  beaucoup  sont  en  réalité  dans  la  misère. 
24,  Platon.  —  Selon  les  principes  posés  par  Lysias  (au  commencement  du 

Phèdre  de  Platon),  et  que  réfute  ensuite  Socrate. 
28,  Engeance.  —  C.-à-d.  je  ne  connais  pas  plus  la  femme  sans  amour,  que 

je  ne  reconnais  mère  celle  qui  n'a  pas  d'enfant. 
152, 

8,  Preambulaires.  —  Qui  précèdent  un  mal  plus  violent,  plus  dangereux. 
11,  Tibère.  —  Tacite,  Ann.,  VI,  1. 

13,  Flora.  —  Etait  de  bonne  maison  et  de  grande  lignée,  et  fut  particulière- 
ment en  relations  avec  Pompée.  Ce  dont  Montaigne,  d'après  Brantôme,  Vie 
des  Dames  galantes,  I,  se  fait  ici  l'écho,  est  tenu  comme  faux  par  Bayle, 
art.  Flora. 

15,  Déduit.  —  Plaisir;  viendrait,  suivant  certains,  du  latin  deducere,  emme- 
ner, parce  que,  disent  les  étymologistes,  jamais  à  court  de  déductions, 
lorsque  quelqu'un  a  du  chagrin,  on  l'emmène  ailleurs  pour  le  consoler  (?). 

16,  Brocadel.  —  La  brocatelle,  ou  le  brocart. 
24,  La  beauté.  —  Var.  de  88  :  le  corps. 

31,  Commerces.  —  L'un  avec  les  hommes  par  une  conversation  libre  et 
familière,  l'autre  avec  les  femmes  par  l'amour. 
154, 

14,  Bride.  —  Proverbe  signifiant  qu'il  est  facile  de  supporter  quelques 
ennuis,  quand  on  a  le  remède  sous  la  main. 

15,  Sicile.  —  Ce  roi  est  dit  «  nostre  »,  parce  qu'il  était  de  la  famille  régnante 
de  France,  se  trouvant  descendre  comme  elle  de  saint  Louis,  son  aïeul  à  la 
cinquième  génération. 

37,  Librairie.  —  Je  me  retire  un  peu  plus  souvent  dans  nia  bibliothèque.  — 
Voir  sur  cette  bibliothèque  la  notice  afTérente  aux  illustrations,  IV,  fas.  A. 
156, 

2,  Dicte.  —  Montaigne,  comme  tous  les  seigneurs  de  son  temps,  avait  à 
sa  disposition  un  secrétaire,  ou  quelque  serviteur  pouvant  en  tenir  lieu  ; 
la  relation  do  ses  voyages,  dont  on  possède  le  manuscrit,  a  été  écrite 
partie  par  lui,  partie  sous  sa  dictée. 

9,  Poly.  —  Propre,  orné,  de  l'italien  polilo,  qui  signifie  propre,  net. 
11,  Despense.  —  Si  je  craignais  aussi  peu  les  embarras  que  la  dépense. 

19,  Liures.  —  A  la  mort  de  Montaigne,  sa  fille  fit  don  à  un  abbé,  grand 
vicaire  du  diocèse  d'Auch,  de  la  totalité  des  livres  que  son  père  avait 
possédés  et  dont  lui-même  a  évalué  le  nombre  à  un  millier.  La  plupart 
sont  aujourd'hui  perdus,  soixante-seize  seulement  demeurent  :  français, 
grecs,  latins,  espagnols,  italiens,  consistant  en  ouvrages  de  médecine,  de 
droit,  un  ou  deux  romans,  quelques  poètes  et  relativenient  nombre  d'his- 
toriens, entre  autres  les  «  Commentaires  »  de  César  (N.  II,  82  :  Lisant,  et 
646  :  Militaire). 

21,  Prospect.  —  Vue,  perspective;  du  latin  prospectus  francise  pai'  Mon- 
taigne. —  Elle  a  trois  fenêtres  qui,  chacune,  offrent  une  vue  agréable  et 
étendue. 

27,  Presse.  —  C.-à-d.  je  suis  bien  aise  qu'il  soit  un  peu  pénible  d'y  monter 
et  qu'elle  soit  à  l'écart,  parce  que  cela  me  fournit  l'occasion  de  faire 
quelque  exercice  et  aussi  m'éloigne  de  la  foule. 
158, 

7,  ûuesf.  —  Le  gain,  comme  port.  l'éd.  de  88;  du  latin  qusestus  d'où  est 
dérivé  acquêt.  —  l\Iaintenant  pour  m'amuser,  et  jamais  en  aucun  temps 
pour  le  gain. 

CHAPITRE  IV. 

160, 

4,  Faisant.  —  En  vous  opposant  brusquement  à  leur  tristesse. 

7,  Œuure.  —  Mirabeau  prétendait  au   contraire  que  la  laideur  est   une 


Fc.620  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

chance  de  succès  dans  un   certain  nombre  de  professions,  au    nombre 
desquelles  il  plaçait  la  médecine. 

14,  Persuader.  —  Add.  de  88  :  quand  il  y  a  résistance. 

17,  Temps.  —  Var.  de  88  :  bonne  pièce. 

20,  Plaint.  ~  Cicéron,  Tusc,  III,  31. 

25,  Amas.  —  C.-à-d.  et  n'employant  pas,  pour  en  faire  usage  suivant  le 
cas,  ces  divers  genres  de  consolation  banale. 
162, 

2,  Peloponnesiaque.  —  Plutarque,  Périclès,  21.  —  On  a  accusé  Périclès 
d'avoir  fait  naître  cette  guerre  pour  détourner  de  lui  les  accusations  dont 
il  était  l'objet,  par  suite  de  l'envie  qu'il  excitait. 

2,  Reuoquer.  — Eloigner;  en  ce  sens,  c'est  purement  le  mot  latin  revocare. 
5,  Liège.  —  De  Comines,  iMém.,  Il,  3.  —  En  1468.  La  ville  était  en  conflit 
avec  son  évêque  qui  était  son  suzerain  et  que  patronnait  le  duc  de  Bour- 
gogne; elle  était  divisée  et  le  parti  de  la  paix  avait  fait  décider  d'ouvrir 
ses  portes  au  duc,  qui  s'était  fait  précéder  du  Sire  d'Himbercourt.  Cette 
velléité  de  résistance  eut  pour  effet  quelques  exécutions,  le  démantèlement 
de  la  ville  et  une  forte  contribution  de  guerre,  ce  qui  n'empêcha  pas  les 
Liégeois  de  se  soulever  à  nouveau  l'année  suivante,  sédition  qui  aboutit 
aux  rigueurs  les  plus  excessives. 

20,  Grasses.  —  Des  offres  plus  avantageuses. 

25,  Predicament.  —  De  cette  catégorie.  On  appelle  «  prédicaments  »,  en 
logique,  les  dix  catégories  d'Aristote. 

25,  Atalante.  —  Ovide,  Métam.,  X,  571. 
164, 

9,  Fil.  —  On  l'accoutume  difficilement  à  combattre  les  maux  en  face. 

19,  Ptolomée.  —  Ptolémée  Lagus  (du  nom  de  son  père)  passait  pour  fils 
d'une  maîtresse  de  Philippe  de  Macédoine,  laquelle  aurait  ensuite  épousé 
Lagus,  un  des  principaux  officiers  de  ce  prince.  A  la  mort  d'Alexandre,  il 
reçut  en  partage  l'Egypte  où  régnèrent  ses  descendants  jusqu'à  la  mort 
de  Cléopàtre.  Habile  et  actif  à  la  guerre,  il  ne  le  fut  pas  moins  à  l'inté- 
rieur et  protégea  les  lettres  et  les  sciences;  ce  fut  lui  qui  fonda  la  célèbre 
bibliothèque  d'Alexandrie.  Il  mourut  en  283,  il  avait  abdiqué  deux  ans 
auparavant. 

20,  Discours.  —  Cicéron,  Tusc,  I,  34;  Valère  Maxime,  VIII,  9.  —  Hégésias 
prétendait  qu'il  vaut  mieux  mourir  que  vivre,  parce  que  la  somme  des 
maux  l'emporte  sur  celle  des  biens;  ses  paroles  imprimaient,  dit-on,  si 
avant  dans  l'esprit  de  ses  auditeurs  l'image  des  choses  qu'elles  représen- 
taient, que  lorsqu'il  avait  parlé  des  maux  de  la  vie,  la  plupart  de  ceux  qui 
l'écoutaient,  voulaient  se  tuer  de  leurs  propres  mains. 

32,  Raualoit.  —  Se  fixait,  se  reportait  sur... 
166, 

4,  Deffaict.  —  Exécuté.  —  Tacite,  Ann.,  XV,  67;  il  a  déjà  été  question  de 
Subrius  Flavius,  I,  30. 

15,  Estocade.  —  Les  uns  lisent  «  estocade  »,  les  autres  «  estacade  ».  Dans 
le  premier  cas,  cela  signifie  «  à  l'épée  »,  l'estoc  était  une  épée  longue  et 
étroite;  dans  le  second,  cela  veut  dire  ■<  en  champ  clos  »,  l'estacade  était 
une  sorte  de  lice,  environnée  de  barrières,  où  les  champions  se  renfer- 
maient pour  se  battre  à  outrance,  sans  êti'e  gênés  par  le  public  tout  en 
demeurant  sous  ses  yeux  ;  de  fait,  les  deux  interprétations  aboutissent  au 
même  sens. 

17,  Crioit.  —  Add.  de  88  :  qu'il  estait  mort,  et. 

20,  Se  descharger.  —  Se  dégager,  se  débarrasser. 

21,  Syllanus.  —  Tacite,  Ann.,  XVI,  9. 
168, 

3,  Mânes.  —  Les  mânes  étaient,  dans  la  mythologie  des  Romains,  les  âmes 
des  morts  considérées  comme  divinités  infernales;  on  leur  rendait  un 
culte  et  les  distinguait  en  bonnes  et  méchantes. 

3,  Imos.  —  Malédiction  proférée,  au  dire  de  Virgile,  En.,  IV,  382,  387,  par 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  IV.        VOL.  III,  PAG.  168.         Fc.621 

Didon  contre  Enée  qui  l'abandonne.  C'est  par  une  fiction  bien  éloignée  de 
la  vérité  historique  que  le  poète  fait  vivre  cette  princesse  au  temps  du 
héros  troyen,  auquel  elle  est  postérieure  de  plus  de  trois  siècles. 
9,  Teste.  —  Valère  Maxime,  IV,  10;  Diogène  Laerce,  Xénophon:  Ei.ien,  Hist. 
div.,  III,  3.  —  En  363;  Xénophon  avait  deux  fils,  Cyrillus  était  l'aîné. 
Par  son  geste,  il  témoignait  que  la  bravoure  dont  son  fils  avait  fait  preuve, 
lui  causait  plus  de  satisfaction  que  sa  mort  no  lui  faisait  ressentir  d'araer- 
tume  :  «  Je  savais,  dit-il,  que  mon  fils  était  mortel!  »  —  Le  Maréchal 
Lefebvre,  duc  de  Dantzig,  eut  son  fils  tué,  en  Espagne,  dans  une  embus- 
cade, après  une  défense  héroïque  (1811).  Son  corps,  retrouvé  peu  de  temps 
après,  était  couvert  de  blessures;  ce  voyant,  le  vieux  guerrier  eut  un 
moment  d'orgueil  qui  sécha  presque  ses  larmes;  et  racontant  à  un  ami 
cette  mort  de  son  enfant  unique  :  «  Ses  morceaux,  dit-il,  se  défendaient 
encore.  » 

9,  Epicurus.  —  Dans  sa  lettre  à  Hermachus.  V.  liv.  II,  ch.  XVI,  II,  444, 

13,  Soldat.  —  CicÉRON,  Tusc,  II,  26. 

14,  Costé.  —  Cornélius  Népos,  Epam.,  9.  —  Epaminondas  blessé  mortelle- 
ment à  la  bataille  de  Mantinée  (363),  apprenant  que  l'ennemi  est  en 
déroute  :  •<  J'ai  assez  vécu,  dit-il,  puisque  je  meurs  sans  avoir  été  vaincu.  » 
Et,  quelqu'un  exprimant  le  regret  qu'il  n'eût  pas  de  postérité  :  «  Je  laisse 
deux  filles  immortelles,  Leuctres  et  Mantinée  »,  fit-il  en  rappelant  ses  deux 
victoires;  peu  après,  il  expirait.  Il  fut  enterré  sur  le  champ  de  bataille 
même,  et,  du  temps  de  Strabon,  deux  cippes  existaient  sur  son  tombeau, 
l'un  avec  une  inscription  béotienne,  l'autre  érigé  par  l'empereur  Adrien 
qui  en  avait  composé  lui-même  l'inscription.  V.  N.  III,  18  :  Epaminondas. 
—  La  même  chose  arriva  à  Nelson,  à  la  bataille  de  Trafalgar  (1805);  appre- 
nant que  la  victoire  était  complète  :  «  A  présent,  dit-il,  je  meurs  satisfait; 
grâces  soient  rendues  à  Dieu,  j'ai  accomph  mou  devoir.  » 

20,  Autres.  —  L'école  des  Stoïciens. 

22,  Mal.  —  Sénèque,  Epist.  22. 

23,  Yurongne.  —  Sénèque,  Epist.  83. 

24,  Blanc.  —  Est-ce  atteindre  le  but?  —  Cette  expression  vient  de  ce  que 
jadis,  comme  maintenant,  les  tirs  à  l'arc,  à  l'arbalète,  à  l'arquebuse,  etc.. 
s'effectuaient  sur  des  buts  où  la  partie  à  atteindre  était  marquée  en  blanc; 
aujourd'hui  que  l'on  tire  de  plus  loin,  un  point  à  viser  est  apposé  sur 
cette  partie  blanche  qu'autrefois  on  visait  elle-même. 

25,  Consorce.  —  Dégager  de  notre  communauté.  —  Consorce  a  été  forgé 
par  Montaigne  du  latin  consortium,  société,  association. 

33,  Passion.  —  «  Cette  passion  (la  vengeance),  pour  un  moment  plus  douce 
que  le  miel,  dit  Homère,  trouble  ensuite  l'àme  de  sombres  vapeurs  et  lui 
prépare  souvent,  pour  toute  la  vie,  des  maux  irréparables.  » 
170, 

3,  Seiournez-le.  —  Donnez4ui  du  repos,  amortissez-le... 

10,  L'amitié.  —  Est-ce  l'amour  de  sa  future  femme  ou  d'une  autre  (Mon- 
taigne s'est  marié  en  1565),  qui  a  ainsi  fait  diversion  au  chagrin  qu'il 
ressentait  de  la  perte  de  son  ami  La  Boétie  survenue  en  1563? 

21,  Muant.  —  Changeant  de  lieu. 

23,  M'esgare.  —  Et  ne  sais  ce  que  je  deviens,  me  perd  de  vue. 
31,  Leniment.  -^  Adoucissement,  du  latin  lenire. 

35,  Chien.  —  Ce  chien,  dit  Plutarque,  Alcibiade,  4,  remarquable   par   sa 
taille  et  sa  beauté,  et  dont  la  queue  était  le  plus  bel  ornement,  avait  coûté 
70  mines,  environ  50.000  fr. 
172, 

1,  Desuoyer.  —  Mettre  hors  de  la  voie,  du  chemin,  désorienter. 
1,  Parleurs.  —  Les  indiscrets,  les  cancaniers. 
3,  Enuoye.  —  Var.  de  88  :  chasse. 

17,  Enfance.  —  Dans  le  traité  intitulé  :  Consolation  envoyée  à  sa  femme,  sia^ 
la  mort  d'une  sienne  fille,  ch.  1  ;  le  même  que  dans  une  circonstance  ana- 


Fc.622  -  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

loguft  Montaigne  envoyait  à  sa  femme,  le  10  septembre  1570,  également 
en  manière  de  consolation. 

20,  Romme.  —  Le  corps  ayant  été  porté  sur  la  place  publique  où  l'oraison 
funèbre  devait  être  prononcée,  Antoine  en  la  terminant  prit  la  robe  toute 
sanglante  et  montrant  les  coups  qu'il  avait  reçus  (César  avait  été  frappé 
de  'ZS  blessures,  dont  une  seule  mortelle  qui  lui  avait  été  faite  à  la  poi- 
trine), excita  le  peuple  qui,  prenant  tout  ce  qui  était  à  sa  portée,  les  bancs, 
les  tables  des  boutiques  environnantes,  dressa  séance  tenante  un  grand 
bûcher  où  le  corps  fut  placé;  et,  quand  le  feu  eut  fait  son  oeuvre,  chacun 
s'emparant  d'un  tison  enflammé  courut  aux  maisons  des  conjurés  pour 
les  incendier,  mais  déjà  ils  s'étaient  fortifiés  et  avaient  paré  au  danger. 

21,  Tintoûine.  —  Tinte,  retentit;  mot  forgé  par  Montaigne  du  latin  lin- 
Hnnare. 

24,  Grammairienne.  —  L'ex.  de  Bordeaux  aj.  :  et  voyelle,  add.  qui  a  été 
admise  dans  la  traduction.  —  C.-à-d.  une  plainte  uniquement  composée 
de  mots  et  de  sons,  à  l'exclusion  de  tout  sentiment  effectif. 

33,  Désirer.  —  Même  de  désirer  l'éviter. 

34,  Empereur.  —  Tibère,  ce  monstre  de  cruauté,  qualifié  ici  de  <■  bon  » 
par  antiphrase.  Suétone,  Tibère,  62. 

36,  Bourrellerie.  —  Des  bourreaux,  des  tortures. 

37,  Là.  —  Dans  un  état  semblable. 
174, 

11,  Didon.  —  Après  l'abandon  d'Énée;  V.  N.  III,  168  :  Imos. 

11,  Ariadné.  —  Après  l'abandon  de  Thésée. 

16,  ïambe.  —  Diogène  Laerce,  1Y,  17.  —  Polémon  en  était  arrivé  à  se  domi- 
ner au  point  que  jamais  on  ne  vit  la  moindre  altération  sur  son  visage, 
ni  sa  voix  trahir  aucune  émotion,  soit  sous  l'effet  de  la  douleur,  soit  sous 
celui  de  la  crainte  ou  des  plaisirs. 

18,  Accession.  —  Augmentation,  accroissement,  du  latin  accedere,  part, 
passé  accessus,  qui  a  même  sens. 

29,  Empruntée.  —  Qu'ils  s'affligent  d'une  douleur  simulée. 

33,  La  Fere.  —  En  1580;  par  le  Maréchal  de  Jlatignon  qui  s'en  empara  sur 
les  Protestants;  le  duc  de  Grammont  y  fut  tué  par  un  boulet  qui  lui 
emporta  un  bras. 

37,  Quintillian.  —  Inst.  oral.,  IV,  2,  vers  la  fin. 
176, 

7,  Prestre-martin.  —  Expression  proverbiale  fondée  sur  le  conte  d'un 
prêtre  du  nom  de  Martin  qui,  disant  la  messe,  faisait  à  la  fois  fonctions 
de  prêtre  et  de  clerc,  chantant  et  répondant,  ce  qui  s'appelle  aujourd'hui  : 
faire  les  demandes  et  les  réponses. 

11,  Desdaing.  —  Et  faire  diversion  à  la  pitié  par  le  dédain. 

15,  Instructiue.  —  Comme  si  le  regret  était  un  sentiment  instructif,  qui 
nous  révélât  des  qualités  inconnues  dans  celui  qui  en  est  l'objet. 

18,  Digne.  —  Le  texte  porte  digne,  ce  qui  ne  se  comprend  pas.  11  est  pro- 
bable que  le  texte  initial  portait  indigne,  et  que  c'est  une  erreur  d'im- 
pression dans  l'édition  de  1580;  et  que,  passée  alors  inaperçue,  elle  s'est 
reproduite  dans  celles  qui  ont  suivi. 

20,  Exemple.  —  Le  texte  et  le  sens  prêtent  aussi  bien  à  dire  :  que  je  dois, 
ou  qui  m'est  donné;  nous  avons  préféré  cette  dernière  version  parce  que 
l'homme  est  plus  souvent  entraîné  par  l'exemple  comme  les  moutons  de 
Panurge,  que  porté  à  le  donner. 
178, 

7,  Puisse.  —  Est-il  un  seul  être  dans  la  nature,  l'homme  excepté,  qui  se 
sustente  du  néant;  un  seul  être  sur  lequel  le  néant  ait  action? 

10,  Fié.  —  Hérodote,  III,  30.  —  En  525  ;  et  cela  parce  qu'étant  en  Egypte, 
il  avait  vu  en  songe  un  courrier  de  Perse,  où  était  demeuré  Smerdis 
son  frère,  lui  annonçant  que  son  frère  avait  été  aperçu  assis  sur  le  trône. 
A  ce  moment  du  reste,  Cambyse  était  sujet  à  des  accès  de  démence  que 
les  Égyptiens  attribuaient  à  ce  qu'il  avait  fait  tuer  le  bœuf  Apis.  —  Dio- 


NOTES.        UV.  m,  CH.  IV.        VOL.  III,  PAG.  178.  Pc. 623 

DORE  DE  Sicile  raconte  cet  autre  fait  non  moins  atroce  :  Un  certain  Mar- 
syas  avait  rêvé  qu'il  coupait  la  gorge  à  Denys  le  Tyran;  celui-ci,  qui  eut 
connaissance  de  ce  rêve,  le  fit  mourir,  disant  qu'il  n'y  aurait  pas  songé 
la  nuit,  s'il  n'y  avait  pas  pensé  le  jour. 

12,  Chiens.  —  Plutarque,  De  la  Superstition.  9.  —  En  724;  Aristodème 
était  alors  en  guerre  avec  les  Lacédémoniens;  outre  ces  hurlements  dont 
il  augurait  mal,  du  chiendent  avait  poussé  autour  de  sa  demeure! 

12,  Autant.  —  Plutarque,  De  la  Superstition,  9,  —  Midas  s'empoisonna, 
dit-on,  avec  du  sang  de  taureau,  pour  la  raison  qu'indique  Montaigne. 

17,  Prometheo.  —  Selon  les  uns,  il  fit  l'homme  avec  de  l'argile  et  l'anima 
avec  le  feu  du  ciel  qu'il  avait  dérobé.  Selon  d'autres,  Jupiter  n'avait  pas 
donné  aux  hommes  l'usage  du  feu;  Prométhée,  en  dérobant  au  soleil, 
les  en  dota;  Jupiter,  irrité  de  son  audace,  le  fit  enchaîner  sur  le  Caucase, 
où  un  vautour  lui  rongeait  le  foie  qui  sans  cesse  renaissait;  Hercule  le  dé- 
livra. Myt/i. 


CHAPITRE  V. 

Ce  chapitre  est  un  des  plus  curieux,  des  plus  variés  des  Essais;  Mon- 
taigne s'y  montre  tour  à  tour  sérieux  et  badin,  grave  et  plaisant,  sage 
et  fou,  moraliste  austère  et  cynique  effronté;  on  y  trouve  do  tout  :  de  la 
gaîté,  du  goût,  de  la  raison,  de  la  philosophie,  une  grande  connaissance 
du  cœur  humain,  des  vues  et  des  conseils  très  sages  sur  la  manière  de 
tirer  parti  de  la  vieillesse;  des  observations  fines  et  judicieuses  sur  l'amour 
en  général,  sur  le  mariage,  ses  avantages  et  ses  inconvénients;  sur  ses 
accidents,  sur  l'injustice  de  la  jalousie,  sur  la  chasteté,  devoir  difficile  à 
observer,  sur  les  inconvénients  de  notre  curiosité  à  cet  égard;  sur  les 
caractères  de  la  véritable  éloquence;  sur  la  force  que  les  bons  esprits 
donnent  à  leur  langue  et  les  nouvelles  richesses  qu'ils  lui  apportent;  sur 
les  avantages  et  les  défauts  de  la  langue  française;  sur  la  liberté  des 
écrits  et  des  paroles,  sur  les  avantages  qu'on  pourrait  retirer  de  l'amour 
dans  un  âge  avancé,  etc.;  en  un  mot,  Montaigne  y  traite  incidemment 
toutes  sortes  de  matières  liées  à  son  sujet,  mais  dont  le  rapport  réel  n'est 
pas  toujours  facile  à  saisir.  On  croit,  en  lisant  ce  cliapitre,  entendre  causer 
ensemble  cinq  ou  six  hommes  d'esprit  qui  laissent  aller  la  conversation 
comme  elle  vient;  qui  s'arrêtent  plus  ou  moins  longtemps  sur  certains 
textes,  et  disent  toutes  les  folies  qui  leur  passent  par  la  tète;  il  est  peu 
de  chapitres  où  se  montre  plus  de  verve  et  d'originalité.  Naigeon. 

22,  Pensemens.  —  Réflexions. 

23,  Onéreux.  —  A  mesure  que  les  réflexions  sur  des  sujets  d'utilité  sont 
plus  profondes  et  plus  solides,  elles  deviennent  plus  embarrassantes  et 
plus  fatigantes. 

24,  Greuent.  —  Pèsent,  accablent,  font  souffrir,  du  latin  gravure;  est  encore 
en  usage. 

28,  Bandée.  —  Elle  extravague,  pour  être  continuellement  appliquée  à  une 

étude  si  sérieuse. 
31,  Office.  —  Dans  le  devoir. 
180, 

7,  Seiourne.  —  Qui  la  repose. 

17,  Folie.  —  Cette  même  pensée  a  déjà  été  exprimée  (I,  344)  :  «  Soyez  so- 
brement sages.  » 

.  Dans  le  mal  comme  dans  le  bien, 
Tous  les  excès  ne  valent  rien  ..  Pat'is  ridicule,  1666. 

19,  Siet.  —  Le  texte  latin  porte  :  ne  foret. 
23,  leunesses.  —  Var.  de  88  :  folies. 
28,  Peuuent.  —  Add.  de  88  :  encor. 


Fc.624  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

30,  Secousses.  —  De  temps  à  autre. 

34,  Platon.  —  Traité  des  Lois,  II. 

39,  Esbaudi.  —  Signifie  à  peu  près  la  même  chose  que  «  resioui   »,  mais 
l'allégresse  qu'il  marque  est  plus  démonstrative  et  agitée  :  n'est  usité  au- 
jourd'hui que  dans  le  langage  populaire. 
182, 

3,  Tressaillir.  —  J'en  suis  bientôt  au  point  de  me  féliciter... 

4,  Deult.  —  Ne  me  fait  du  mal. 

11,  L'estre.  —  C'est,  mot  pour  mot,  ce  que  dit  Cicéron  dans  son  traité  De  ta 
Vieillesse,  19. 

13,  Voluptez.  —  Cette  phrase  incidente  :  «  telles  que  les  satisfactions 
d'amour-propre  »,  que  porte  la  traduction,  n'est  pas  dans  le  texte;  c'est 
une  phrase  explicative  dérivant  de  ce  qui  suit. 

18,  Prinssé-ie.  —  Que  ne  puis-je  encore  éprouver  du  plaisir... 

20,  Salutem.  —  Vers  d'ENxius,  cité  par  Cicéron,  De  OfJ'.,  I,  '24,  au  sujet  de 
Fabius  Maximus  qui,  dit-il,  travaillait  au  bien  public,  sans  se  mettre  en 
peine  de  tout  ce  qu'on  publiait  à  Rome  pour  décrier  sa  conduite.  Coste. 

32,  Logis.  —  Cicéron,  De  Seneclule,  11.  —  Nous  imposent  le  repos,  en 
nous  libérant  dé  certaines  obligations,  ou  nous  contraignant  à  la  cessation 
de  certaines  fonctions  à  des  âges  déterminés,  ce  qui,  plus  que  jamais,  est 
de  règle  de  nos  jours.  Cette  limite,  dans  l'armée,  varie  avec  le  grade;  dans 
la  magistrature,  elle  vient  à  70  ans;  dans  les  autres  administrations  et 
carrières  civiles,  elle  est  d'ordinaire  de  60  ans  et  30  ans  de  services. 

41.  Mal.  —  Souffrance,  peine,  douleur. 
184, 

11,  Personne.  —  Add.  de  88  :  d'honneur.  —  Ce  souhait  de  Montaigne  a  été 
exaucé  :  Pierre  Charron,  chanoine  théologal  de  Condom  (1551  à  1603), 
avec  lequel  il  était  déjà  en  relations  depuis  quelques  années,  devint,  vers 
1589,  le  confident  de  ses  dernières  années  et  le  continuateur  de  sa  pensée, 
dans  son  traité  De  la  Sagesse. 

12,  Resseante.  —  Fixe,  sédentaire.  —  C.-à-d.  qui  soit  à  demeure  quelque 
part  ou  qui  aime  à  vojager. 

14,  Paume.  —  Elle  n'a  qu'à  faire  un  signe.  —  «  Siffler  en  paume  »,  c'est 
siffler  en  soufflant  d'une  certaine  façon  entre  ses  doigts. 

16,  Vieillesse.  —  D'échapper  à  la  vieillesse. 

19,  Affrété.  —  Attaché,  lié,  accroché.  —  Var.  de  88,  de  l'ex.  de  Bord,  et  de 
l'éd.  de  1635  :  affreré. 

22,  Colligence.  —  Étroite  liaison;  du  latin  co/ft.^are,  joindre,  lier,  nouer  en- 
semble. 

23,  Compagnon.  —  Le  corps. 

33,  Par  venues.  —  Sans  interruption;  littéralement  par  train  continu,  suite 
entretenue. 

34,  Eloises.  —  Éclairs.  V.  N.  II,  274.  —  Est  pris  ici  au  figuré  :  des  idées, 
des  conceptions. 

35,  Esperdus.  —  Pour  ne  pas  dire  les  plus  extravagants. 
39,  Veut.  —  Mon  esprit  veut  encore... 

186, 

1,  Rire.  —  Pline,  Hisl.  nat.,  VIII,  19.  —  Crassus,  pour  ce  motif,  avait  été 
surnommé  «  Agélaste  »,  le  glacé.  —  On  a  dit  aussi  de  Jésus-Christ  qu'on 
ne  l'avait  jamais  vu  rire,  mais  qu'on  l'avait  souvent  vu  pleurer. 

17,  Archeanassa.  —  C.-à-d.  de  critiquer  les  écrits  de  Platon  et  de  glisser 
légèrement  sur  les  relations  qu'on  lui  prête  avec...  —  On  a  cru  trouver  la 
preuve  de  ces  relations  et  autres  de  même  sorte,  prêtées  à  Platon,  dans 
diverees  épigrammes  que   lui   attribue  Diogène  Laerce,  et  qui  portent  : 

«  Alexis  n'est  plus,  prononcez  seulement  son  nom  et  chacun  se  retourne  ; 
Phédon  n'était  pas  moins  beau  et  nous  l'avons  perdu  ».  — Alexis  semble 
avoir  été  un  poète  comique  de  l'époque;  Phédon  était  le  co-disciple  de 
Platon  aux  leçons  de  Socrate,  il  était  retourné  en  Élide,  après  la  mort  de 


NOTES.        LIV.  III,  Cil.  V.         VOL.  III,  PAG.  186,         Fc.625 

Socrate  ;  Platon  a  donné  son  nom  à  un  de  ses  plus  importants  dialogues 
sur  l'immortalité. 

«  Cher  Dion,  de  quel  amour  tu  embrases  mon  cœur!  »  —  Dion  était  le 
gendre  de  Denys  l'Ancien,  Platon  fut  constamment  dans  les  meilleurs  rap- 
ports avec  lui. 

«  Quand  tu  considères  les  astres,  chez  Aster,  je  voudrais  être  le  ciel,  pour 
te  voir  avec  autant  d'yeux  qu'il  y  a  d'étoiles.   »  —  Aster  était  un  jeune 
homme  qui  se  livrait  à  l'astronomie  avec  Platon  ;  Montaigne  l'appelle  Stella, 
probablement  parce  que  les  deux  mots  ont  en  latin  môme  signification. 
"  La  belle  Archeasassa,  de  Colophon,  est  à  moi.  Oh!  de  quelle  ardeur  elle 
a  dû  vous  embraser,  vous  qui  avez  goûté  les  premiers  de  sa  jeunesse.  » 
«  Quand  je  couvrais  Agatuon  de  baisers,  mon  âme  était  tout  entière  sur 
mes  lèvres,  prête  à  s'envoler.  » 
?>i,  Mineuses.  —  Affectées,  minaudières. 
188, 

7,  Biens  taicts.  —  Bonnes  actions;  est  pris  ici  dans  le  sens  opposé  à  mes- 
faicts,  mot  qui  suit  et  dont  l'acception  n'est  pas  douteuse. 
19,  Moins.  —  Montaigne  fait  dire  ici  à  Thaïes  le  contraire  de  ce  qu'il  a  dit  : 
«  Un  homme  qui  avait  commis  un  adultère,  conte  Diogène  L.^erce,  I,  36, 
d'où  le  fait  est  tiré,  ayant  demandé  à  Thaïes  s'il  devait  le  nier  par  ser- 
ment, Thaïes  lui  répondit  :  «  Mais  le  parjure  n'est-il  pas  pire  que  l'adul- 
tère? » 

23,  Vice.  —  Quand  on  lui  donne  à  choisir  entre  quelque  entreprise  périlleuse 
et  une  action  vicieuse. 

24,  Origene.  —  Comme  on  en  usa  avec  Origène,  en  le  réduisant  au  choix  ou 
d'idolâtrer,  ou  de  se  souffrir... 

28,  Celles.  —  Pourtant,  dans  leur  erreur,  elles  ne  seraient  pas  dégoûtées,  les 

femmes  qui... 
31,  Ariston.  —  Plutarque,  traité  Delà  Curiosité,  3. 

33,  Rebrasser.  —  Retrousser,  découvrir  ;  on  trouve  dans  le  dictionnaire  de 
l'Académie  :  «  rebrasser  ses  manches  ». 
190, 

1,  Sot.  —  Cela  arrive  très  souvent,  et  a  fait  dire  à  La  Rochefoucauld  dans 
ses  Pensées  qu'un  sot  n'a  pas  assez  d'étoffe  pour  être  bon. 
3,  Paroy.  —  Le  côté  intérieur  d'une  muraille. 

5,  Huguenots.  —  Mot  qui  dérive  par  corruption  de  eidgenossen,  qui  signi- 
fie confédéré  par  serment. 
10,  Escbange.  —  D'être  pris  pour  autre  que  je  ne  suis. 
17,  Cher.  —  J'aimerais  autant. 

19,  Arcbelaus.  —  Plutarque,  Apophth.  desrois'.  —  Tout  le  monde  connaît  le 
mot  de  Turenne  à  un  de  ses  domestiques  qui,  lui  ayant,  par  méprisé,  ap- 
pliqué un  grand  coup  sur  les  fesses,  lui  en  demandait  pardon  à  genoux, 
disant  qu'il  l'avait  pris  pour  Georges  son  camarade  :  «  Et  quand  c'eût  été 
Georges,  dit  tranquillement  Turenne,  en  se  frottant  le  derrière,  était-ce 
une  raison  pour  frapper  si  fort!  » 
22,  Socrates.  —  Diogène  Laerce,  II,  36. 

35,  Cabinet.  —  C.-à-d.  que  les  femmes,  en  raison  de  la  liberté  avec  laquelle 
il  y  parle  de  l'amour,  n'oseront  lire  ce  chapitre  qu'en  particulier,  dans  leur 
boudoir. 
192, 

L  Réglez.  —  Dans  sa  préface  de  l'édition  de  1595,  Mademoiselle  de  Gournay 
entrant  dans  les  idées  de  Montaigne  à  ce  propos  et  le  défendant,  dit  en 
substance  :  «  Qu'ils  sont  donc  chatouilleux  sur  cette  question,  ceux  qui 
font  croire  à  la  jeunesse  qu'on  ne  peut  entendre  parler  de  l'amour  sans  le 
ressentir;  c'est  comme  si  un  prédicateur  venait  dire  que  c'est  rompre  l'abs- 
tinence en  temps  de  carême,  que  d'entendre  parler  de  manger  et  de  ce 
qui  s'y  rapporte.  »  Mais  il  faut  ajoutei'  qu'en  fait  d'amour,  fort  probable- 
ment Jlademoiselle  de  tJournay  ne  s'y  connaissait  guère  (en  1595  elle  avait 
déjà  30  ans),  et  qu'elle  en  parlait  un  peu  comme  un  aveugle  des  couleurs. 

ESSAIS  DE  MONTAIGNE.  —  T.    IV.  40      . 


Fc.626  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

5,  Trahir.  —  Cicérox,  Epist.  fam.,  IX,  22;  dans  cette  lettre  Cicéron  expose 
sur  la  liberté  de  langage  les  principes  des  Stoïciens. 
8,  Bon.  —  Car  il  est  à  remarquer  que,.. 

11,  Franchise.  —  Dans  l'asile,  sous  la  sauvegarde. 

11,  L'arracher.  —  Ce  que  Montaigne  dit  ici  est  exact;  mais  la  cause  de  cet 
état  de  choses  qu'il  peint  si  bien  n'est  autre  que,  si  cette  loi  du  silence, 
devenue  instinctive  et  contre  laquelle  il  s'élève,  n'existait  pas,  les  dévergon- 
dages occasionnés  par  cette  passion,  déjà  si  grande,  en  az'riveraient  à  un 
degré  tel  qu'ils  ne  pourraient  plus  être  contenus;  elle  est  une  sauvegarde 
de  la  société  sur  un  point  où  celle-ci  est  à  la  vérité  quelque  peu  en  con- 
tradiction avec  la  nature.  Où  irions-nous,  si  on  en  pouvait  parler  en  toute  li- 
berté? La  délimitation  entre  ce  qui  se  peut  et  ce  qui  ne  se  peut  pas  dire 
sans  inconvénient  sur  ce  sujet  est  trop  délicate  à  fixer,  serait  trop  diffi- 
cile à  observer;  il  a  été  plus  pratique  et  plus  sage  de  proscrire  complète- 
ment ce  thème  de  conversation. 

20,  Supprimez.  —  Tacite,  parlant  des  Annales  de  Cremutius  Cordus,  que  le 
Sénat  fit  brûler,  dit  :  <■  L'ouvrage  n'en  est  pas  moins  resté,  on  le  cacha  et 
plus  tard  il  reparut.  » 
—  S'-Am.\nd  apprécie  de  même  cette  mesure  dans  sa  Rome  ridicule  : 

«  C'est  doublement  les  faire  vivre, 
Que  les  faire  mourir  ainsi  >. 

20,  Aristote.  —  Murale  à  Xicomaque,  IV,  9. 

21,  Honteux.  —  La  pudeur  doit  servir... 

24,  Estriuent.  —  Résistent. 

25,  Suiuent.  —  Vers  de  la  traduction,  par  Amvot,  du  traité  de  Plutarque, 
Qu'il  faut  qu'un  philosophe  converse  avec  les  Princes,  5. 

30,  Mal  mesler.  —  Brouiller. 
194, 

4,  Dieu.  —  Il  n'y  a  pas  si  longtemps  que  j'ai  cessé  d'être  enrôlé  sous  les 
drapeaux  de  ce  dieu. 

32,  Maritale.  —  Cette  appréciation  de  Montaigne  est  aussi  celle  de  Bernar- 
din DE  S. -Pierre  qui,  dans  son  Préambule  de  YArcadie,  insère  la  citation  qui 
précède  et  la  fait  suivre  de  ce  commentaire  :  «  Mais,  pour  afTaiblir  ce  que 
ce  tableau  a  de  licencieux  et  de  contraire  aux  mœurs  conjugales,  le  sage 
Virgile  oppose  immédiatement  après,  à  la  déesse  de  la  volupté,  qui  de- 
mande à  son  mari  des  armes  pour  son  fils  naturel,  une  mère  de  famille, 
chaste  et  pauvre,  occupée  des  arts  de  Minerve  pour  élever  ses  petits  en- 
fants; et  il  applique  cette  image  touchante,  aux  mêmes  heures  de  la  nuit, 
pour  présenter  un  nouveau  contraste  des  différents  usages  que  font  du 
même  temps  le  vice  et  la  vertu.  » 

33,  Mousses. 

«  l/arijour  que  l'on  contracte  entre  mains  de  notaire. 
Ne  connaît  point  d'amour  les  plus  secrets  mystères; 
C'est  un  amour  bâtard,  qui  naquit  (ce  dit-on), 
Là-bas,  dans  les  enlers,  de  la  vieille  Alecton. 
Mais  l'autre,  qui  fut  fils  de  la  belle  Cyprine. 
D'une  plus  douce  Bamme  échauffe  la  poitrine. 
Il  nous  apprend  des  tours  qui  sont  bien  plus  plaisants. 
Et  de  cent  mille  jeux  entretient  nos  beaux  ans.  » 

Gilles  Dckakd  de  la  Bergerie,  139i. 

37,  Raison.  —  Doivent  avec  raison  être  pris  en  considération,  entrer  en 
ligne  de  compte. 
196, 

3,  Ailleurs.  —  Liv.  1,  ch.  XXIX;  II,  34G. 

4,  Prudemment.  —  Il  faut  prudement,  c.-à-d.  avec  pruderie,  décence,  ré- 
serve; Aristote  dit  en  effet  :  «■  Que  le  mari  approche  de  sa  femme  avec 
pruderie  et  modestie;  qu'il  soit  vergogneux  (chaste,  réservé)  en  paroles, 


NOTES.         L[V.  m,  Cil.  V.         VOL.  III,  PAG.  194.  Fc.G27 

(Iroiturier  et  honnête  en  actions.  •  —  Le  concile  de  Trente  a  dit  de  mémo  : 
«  Le  mariage  est  une  chose  sainte,  il  faut  le  traiter  saintement.  ■•  —  Dans  le 
langage  du  x\i°  siècle,  pruderie  était  toujours  pris  en  bonne  part  et  signi- 
fiait décence  austère,  exempte  d'hypocrisie,  comme  dans  ces  vers  du  Ilu- 
man  de  la  Rose  : 

«  Prudes  femmes,  par  Saint  Denys. 
Autant  en  est  que  de  Phénix.  « 

IC),  D'aguet.  —  Avec  précaution,  circonspection;  en  demeurant  sur  ses 
gardes. 

21,  Troubler.  —  Var.  de  88  :  mesler. 

■Zb,  Vertu.  —  Sage  et  judicieuse  réflexion  sur  la  noblesse  comparée  à  la 
vertu. 

28,  Nil.  —  Les  sources  de  ce  fleuve,  si  célèbre  de  toute  antiquité,  qui  a  un 
cours  de  G.yOO  kil.,  sont  longtemps  demeurées  inconnues;  leur  recherche 
préoccupait  déjà  les  anciens.  —  Néron  envoya  une  expédition  pour  les  dé- 
couvrir. Au  H"  siècle,  Ip  géogmphe  Ptoi-kmée  faisait  sortir  le  Nil  de  deux 
grands  lacs  situés  au  pied  de  montagnes  couvertes  de  neiges  éternelles 
(montagnes  de  la  Lune)  et  les  cartes  et  les  sphères  du  xvi"  siècle  indiquent 
d'une  manière  relativement  précise  la  situation  de  ces  lacs,  indication 
que  ne  reproduisent  pas  les  cartes  du  xvui" -siècle.  A  partir  du  commen- 
cement du  xvi"  siècle,  les  Européens  entrèrent  en  relations  avec  les  rois 
d'Abyssinie  et  connurent  les  sources  du  Nil  bleu  qui  sort  du  plateau  abys- 
sin, mais  plus  de  trois  siècles  devaient  encore  s'écouler  avant  que  celles  du 
Nil  blanc  (Bahr  el-Abiad)  ne  fussent  découvertes.  En  1850,  un  explorateur 
anglais,  Livixgstone,  le  signala  comme  sortant  d'un  grand  lac  de  l'Afrique 
équatoriale  qu'il  ne  put  atteindre.  En  1858,  Speke,  officier  de  l'armée  des 
Indes,  y  parvint,  lui  donna  le  nom  de  Victoria-Xyanza,  mais  n'arriva  pas  à 
reconnaître  l'endroit  d'où  le  fleuve  en  sort.  Ce  ne  fut  qu'en  1875  que  Stan- 
ley le  constata,  en  même  temps  que  l'existence  d'un  autre  lac  qu'il  appela 
l'Albert-Édouard,  dont  les  eaux  se  déversent  dans  le  cours  d'eau  sorti  du 
Victoria-Nyanza.  Enfln  en  181)2,  un  missionnaire  allemand,  Baumann,  recon- 
nut le  Kagera,  principal  tributaire  du  Victoria-Nyanza,  qui  sort  d'un  lac 
de  beaucoup  moindre  étendue  qu'il  nomma  lac  Alexandra;  de  telle  sorte 
qu'on  tient  aujourd'hui  comme  sources  du  Nil  blanc  le  lac  Albert-Edouard 
(source  occidentale)  et  le  lac  Alexandra  (source  orientale). 

38,  Antigonus.  —  Plltarque,  De  la  mauvaise  honte,  10. 
198, 

10,  Ruffiens.  -—  Amants,  galants;  mot  de  provenance  italienne. 

12,  Leur.  —  Aurien  dit  que  chez  les  Indiens,  le  peuple  était  divisé  en  plu- 
sieurs ordres,  et  qu'une  loi  défendait  les  mariages  entre  individus  d'ordres 
différents  :  un  laboureui"  ne  pouvait  épouser  la  fille  d'un  artisan  et  ^insi 
des  autres. 

13,  Poilus.  —  Souillés;  du  latin  pollulus,  qui  a  même  signilication. 

18,  S' entreheurter.  —  En  dehors  de  ruelles  étroites,  il  n'y  a  à  proprement 
parler  que  fort  peu  de  rues  à  Venise;  des  canaux  de  largeur  variable  et 
en  nombre  infini  en  tiennent  lieu.  On  y  chemine  en  gondoles  (barques 
légères),  qui  dans  leur  marche  silencieuse  courraient  risque  de  se  heurter, 
aux  tournants,  dans  les  croisements  où  la  vue  est  interceptée  par  les 
maisons  en  bordure,  si,  par  un  cri  particulier,  les  gondoliers  ne  se  signa- 
laient entre  eux. 
28,  Est.  —  Ce  membre  de  phrase  et  ce  qu'il  dit  plus  loin  (III,  344)  :  «  11  y  a 
•  toujours  quelque  pièce  qui  va  de  trauers,  etc.  »,  donnent  à  penser  que  dans 
le  ménage  de  Montaigne  tout  n'allait  pas  continuellement  pour  le  mieux  • 
mais,  comme  il  le  dit,  n'est-ce  pas  une  règle  générale  et  peut-il  en  êti-e 
autrement,  étant  donné  la  versatilité  de  notre  nature? 

«  Qui  se  marie  par  amour,  i        Qui  se  marie  par  argent, 

A  i)onnes  nuits  et  mauvais  jours;     1         A  jour  et  nuil  le  cneur  dolenl.  . 


Fc.628  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

200, 

9,  Socrates.  —  Diogène  Laerce,  II,  33. 
•    9,  Commode.  —  Avantageux. 
11,  Repentira. 

.  Aller  à  la  guerre  ou  se  marier 
>'e  doit  se  conseiller.  > 

.  C'est  le  célibataire  qui  n'a  point  de  disputes  »  {Proverbe  cité  par 
S.  Jérôme).  —  «  Es-tu  délivré  de  femme,  n'en  cherche  point.  »  S.  Paul. 
\i.  Lupus.  —  La  première  de  ces  deux  sentences  :  «  L'homme  est  à  l'homme 
un  dieu  »,  est  du  poète  comique  CÉcu.ius,  qui  ajoute  :  •<  s'il  connaît  son 
devoir  •.  La  seconde,  «  un  loup  »,  est  de  Plaute,  qui  la  complète  en  disant  : 
«  lorsqu'il  ne  sait  quel  il  est  ». 

18.  CoUo.  —  Nombre  de  gens  pensent  de  la  sorte;  il  en  a  été  ainsi  de  tous 
temps,  mais  cela  ne  fait  que  croître  avec  les  besoins  de  bien-être  qu'a- 
mènent les  progrès  de  la  civilisation  et  les  difficultés  de  la  vie;  le  mariage 
a  tendance  à  être  délaissé,  malgré  l'atténuation  résultant  du  divorce  rendu 
cliaque  jour  plus  accessible,  et  la  femme,  exposée  de  plus  en  plus  à  rester 
fille,  est  réduite  à  chercher  par  elle-même  les  moyens  d'existence  qu'elle 
devrait  tenir  du  travail  d'un  mari.  —  C'est  qu'aussi  combien  est  plus  facile 
la  vie  pour  le  célibataire  :  les  restaurants  pourvoient  à  sa  nourriture,  les 
cercles  à  son  intérieur,  les  maisons  de  santé  le  recueillent  quand  il  est 
malade;  il  lui  est  aisé  de  satisfaire  ses  appétits  sensuels,  au  mieux  de 
ses  caprices  du  moment;  il  ne  connaît  ni  les  orages,  ni  les  embarras  ni  les 
soucis  d'un  ménage;  les  enfants  ne  lui  sont  point  à  charge;  il  n'a  à 
penser  et  ne  pense  qu'à  lui;  toutes  choses  égales,  il  est  libre  et  riche,  aloi-s 
que  le  père  de  famille  a  des  obligations  et  se  trouve  dans  la  gène.  ]Même 
sous  le  rapport  de  l'affection,  ayant  dans  le  présent  plus  de  ressources, 
pour  l'avenir  l'entière  disposition  de  son  héritage,  l'entourage  ne  lui  fait 
pas  défaut  et  il  trouve  chez  des  parents,  des  étrangers,  les  attentions,  les 
témoignages  de  sentiments  en  apparence  les  plus  désintéressés,  qu'on  ne 
rencontre  pas  toujours  chez  les  enfants,  auxquels  on  en  passe  davantage 
et  qui  ont  des  droits,  qui  font  qu'ils  en  prennent  beaucoup  plus  à  leur 
aise.  —  Le  célibataire  est  un  parasite,  qui  ne  rend  pas  à  la  société  ce 
qu'il  en  retire;  à  Sparte,  il  était  noté  d'infamie,  certaines  exclusions 
étaient  portées  contre  lui  et  parmi  les  liontes  qui  lui  étaient  imposées,  à 
certaine  fête,  les  femmes  lui  faisaient  faire  le  tour  d'un  autel,  en  le  bat- 
tant de  verges.  On  ne  saurait  à  notre  époque  user  de  semblables  procédés 
qui  seraient  par  trop  inefficaces,  et  cependant  il  ne  serait  qu'équitable 
de  compenser,  dans  la  mesure  du  possible,  les  obligations  auxquelles  il 
échappe;  on  pourrait  par  exemple  dans  l'obtention  de  certains  emplois, 
de  certaines  faveurs,  avantager  à  mérite  égal  les  pères  de  famille  tandis 
que  souvent  cette  situation  tourne  contre  eux;  mais  surtout  un  impôt 
spécial,  proportionnel  à  leure  revenus,  devrait  frapper  les  célibataires  et 
le  produit  en  être  affecté  à  l'attribution  de  subsides  aux  familles  chargées 
d'enfants  qui  sont  nécessiteuses,  etc. 

19,  Dessein.  —  A  suivre  mon  inclination  naturelle,  de  mon  propre  mouve- 
ment. 

28,  Rebours.  —  Et  plus  à  contre-cœur. 

30,  Espéré.  —  Montaigne  avait  épousé  en  1565  Françoise  de  la  Chassaigne, 
fille  "d'un  conseiller  au  Parlement  de  Bordeaux,  comme  lui-même  l'était 
à  co  moment.  11  semble  s'être  marié  un  peu  pour  combler  le  vide  laissé 
en  lui  par  la  mort  de  La  Boétie,  survenue  deux  ans  auparavant.  Bien  que, 
dans  les  Essais,  Montaigne  se  soit  en  quelque  sorte  fait  une  loi  de  passer 
sous  silence  sa  vie  conjugale,  qu'il  n'y  fasse  guère  allusion  que  lorequ'il 
se  plaint  des  difficultés  que  présente  par  moments  la  vie  domestique,  ou 
qu'il  exprime  la  confiance  qu'il  a,  lorsqu'il  s'absente,  en  qui  en  son  absence 
a  la  gestion  de  sa  maison,  il  y  a  lieu  de  penser  qu'avec  les  idées  qu'il  avait 
sur  le  mariage  si,  comme  il  est  probable,  l'affection  et  la  confiance  ont 


NOTES.        UV.  TU,  CIL  V.         VOL.  IH,  PAG.  200.  Fc.629 

régné  entre  les  deux  époux,  leurs  épanchements  ont  toujours  été  modérés, 
et  qu'il  n'eût  pu  dire,  à  son  lit  de  mort,  à  sa  femme  comme  son  ami  La 
Boétie,  qui  avait  sur  ce  point  des  idées  d'une  élévation  de  sentiments 
bien  autres,  le  dit  à  la  sienne  ainsi  qu'il  le  rapporte  lui-même  :  «  Ayant 
été  joint  à  vous  par  le  saint  nœud  du  mariage,  qui  est  l'un  des  plus  res- 
pectables et  inviolables  que  Dieu  nous  ait  donnés  ici-bas,  je  vous  ai  aimée, 
chérie  et  estimée  autant  qu'il  m'a  été  possible  et  suis  tout  assuré  que 
vous  m'avez  rendu  réciproque  affection  que  je  ne  saurais  reconnaître.  >• 
—  De  fait,  Françoise  de  la  Chassaigne,  morte  en  1627,  femme  de  sens,  très 
rangée,  très  entendue  dans  les  soins  du  ménage,  paraît  avoir  été  en  même 
temps  une  épouse  discrète,  s'effaçant  volontiers,  telle  que  Montaigne  pou- 
vait la  souhaiter;  lui  mort,  elle  se  dévoua  à  sa  mémoire  et  à  son  œuvre. 
202, 

5,  Traistre.  —  Ces  deux  vers  sont  d'un  auteur  inconnu;  on  peut  leur  ap- 
pareiller ceux-ci  dont  la  source  est  également  ignorée  : 

I  II 

Si  lu  as  maistre,  sers-le  bien:  Ne  souffre  à  la  femme  pour  rien, 

Dis  bien  de  lui,  garde  le  sien;  Mettre  son  pied  dessus  le  lien; 

Son  secret  cèle,  quoi  qu'il  fasse,  Le  lendemain,  la  bonne  béte 

Et  sois  humble  devant  sa  face.  Le  voudra  mettre  sur  ta  leste. 

10,  Galantise.  —  Var.  de  88  :  gentillesse. 

11,  Appétit.  —  Qui  ne  s'accorde  pas  avec  mes  désirs. 

14,  Recognoistre.  —  <■  Et  c'est  là  pour  moi  une  consolation,  a  dit  un  com- 
mentateur; je  sais  que  je  fais  mal,  donc  je  n'ai  pas  encore  perdu  la  con- 
naissance dii  devoir  et  par  suite  l'espérance  de  revenir  au  bien.  » 

20,  Maistre.  —  Vole  son  maître.  «  Ferrer  la  mule  » ,  est  une  expression 
du  temps  de  Montaigne,  signifiant  gagner  sur  un  achat  fait  pour  le  compte 
d'un  autre,  autrement  :  «  Faire  danser  l'anse  du  panier.  •■  —  Cette  ex- 
pression paraît  venir  de  ce  qu'aux  temps  où  les  magistrats  allaient  au 
palais  montés  sur  des  mules,  les  laquais  qui  gardaient  ces  bêtes  pendant 
l'audience,  buvaient  ou  jouaient  pour  se  désennuyer,  puis  cherchaient 
quelquefois  à  s'indemniser  do  leur  dépense  ou  de  leur  perte,  en  comptant 
à  leurs  maîtres  des  frais  supposés  pour  le  ferrage  des  mules. 

32,  Repentis. 

«  Amours  qui  commencent  par  anneaux, 
Finissent  par  couteaux.  - 

33,  lupiter.  —  Homère,  Iliade,  XIV,  295. 

38,  Considérations.  —  Préjugés. 

39,  Empescher.  —  Sans  que  cela  nous  arrête. 
39,  Isocrates.  —  Éliex,  Hist.  div.,  XIL  25. 

204, 

6,  Deuroient.  —  Add.  de  88  :  au  moins. 

7,  Différentes.  —  yElius  Verus  pensait  comme  Montaigne,  quand  il  disait 
à  sa  femme  lui  reprochant  ses  infidélités  :  «  Souffrez  que  je  passe  aies 
caprices  avec  d'autres,  le  titre  d'épouse  est  synonyme  d'honnêteté  et  non 
de  débauclie.  »  V.  I,  348. 

13,  Profuse.  —  Prodigue,  s'étend  trop  loin;  du  latin  profusus,  que  Mon- 
taigne a  francisé,  mais  qui  nous  a  donné  «  profusion  ■■  qui  est  resté. 

15,  Lycurgus.  —  A  Sparte,  tout  jeune  homme  désirant  une  jeune  fille  en 
mariage  l'enlevait  à  sa  famille,  la  conduisait  chez  une  matrone  qui  la 
recueillait  et  la  cachait;  lui-même  ne  venait  la  voir  qu'à  la  dérobée  et 
continuait  à  aller  coucher  la  nuit  dans  les  dortoirs  communs  avec  les 
autres  jeunes  gens;  cela  durait  quelquefois  si  longtemps  que  des  maris 
avaient  des  enfants  qu'ils  ne  s'étaient  pas  encore  montrés  en  public  avec 
leurs  femmes;  par  là  les  époux  s'accoutumaient  à  la  tempérance  et  à  la 


Fc.630  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

sagesse,  qqi  entretenaient  en  eux  la  vigueur  ot  la  lécondité,  leiii-  conser- 
vaient leur  première  ardeur  et  renouvelaient  leur  amour. 
.  19,  Riotte.  —  Petite  querelle,  petite  dispute. 

21,  Tempestueux.  —  Morne  dans  les  rapports  les  plus  intimes  que.  d'un 
connnun  accord,  nous  avons  avec  elle,  il  y  a  encore  désaccord  et  dispute. 

25,  Femme.  —  Ovioe,  Mélam.,  III,  323.  —  Tirésias,  un  des  plus  célèbres 
devins  do  l'antiquité.  La  fable  raconte  que  rencontrant  deux  serpents  qui 
frayaient  ensemble,  il  les  sépara  et  aussitôt  devint  femme;  au  bout  d'un 
certain  temps,  les  rencontrant  à  nouveau  en  môme  situation,  il  reprit  sa 
première  forme  d'homme.  Comme  il  avait  de  la  sorte  connu  les  deux  sexes, 
un  dilléreiid  s'étant  élevé  entre  Jupiter  et  Junon  sur  la  question  de  savoir 
si  les  fournies  ont  plus  do  part  que  les  hommes  au  plaisir  vénérien,  il 
fut  pris  pour  juge  et  prononça  que  de  dix  parts  de  plaisir  dans  cet  acte,  il 
y  en  avait  neuf  pour  la  femelle  et  une  pour  le  màlo:  la  déesse,  irritoo 
de  ce  qu'il  avait  pi-ononcé  contre  elle,  le  rendit  aveugle;  pour  le  dédom- 
mager. Jupitei-  lui  accorda  le  don  de  prophétie. 

28,  Empereur.  —  Flavius  Vopiscus,  Proculus.  —  Proculus.  tribun  niilitairo 
en  Gaule  qui,  sous  le  règne  de  Probus,  fut  fait  imperalor  par  ses  troupes  : 
vaincu,  il  fut  mis  à  mort:  il  avait  quelques  talents  militaires  (280). 

29,  Emperiere.  —  Impératrice.  Cette  impératrice  c'est  Messaline,  épouse 
de  l'empereur  Claude,  qui  se  livra,  s'imposa  môme  parfois  à  tout  homme 
de  tout  rang  et  de  tout  état,  allant  jusqu'à  épou.ser  publiquement,  du 
vivant  de  son  époux,  un  de  ses  amants  qu'elle  aimait  éperdument;  co 
qu'apprenant,  Claude  la  lit  mettre  à  mort. 

35,  Cateloigne.  —  En  Catalogne. 

38,  Foy.  —  Qu'on  ce  qui  touche  la  religion,  que  ceux  qu'elle  impose  à  notre 
foi. 

40,  Hergnes.  —  Humeur  chagrine,  acariâtre;  môme  racine  que  «  hargneux 
(querelleui-)  »,  qui  est  encore  en  usage. 
206, 

4,  Dix.  —  Add.  de  88  :  par  iour. 

14,  Prix.  —  Nicolas  Bohier,  jurisconsulte  de  Bordeaux,  mort  en  1053,  conte 
ainsi  le  fait  :  «  En  son  temps,  un  homme  de  la  Catalogne  avait  de  telles 
facultés  prolifiques,  que  chaque  jour  il  entrait  jusqu'à  dix  fois  en  rapport 
avec  sa  femme;  la  reine  d'Aragon  en  fut  infoi'mée  secrètement;  elle  le  lit 
venir  et  il  avoua  le  fait.  Sur  ce  la  reine  lui  interdit  sous  peine  d'avoir 
la  tète  tranchée  d'entrer  désormais  plus  de  six  fois  par  jour  en  rapport 
avec  sa  femme,  que  davantage  le  mettait  en  péril  de  mort.  Qu'est-ce  qui 
en  cela  est  le  plus  étonnant  :  ou  ce  dont  le  mari  était  capable  ou  la  mau- 
vaise querelle  que  lui  avait  faite  son  épouse?  » 

14,  Solon.  —  Plutarqle,  De  l'Amow. 

17,  Cela.  —  Que  les  femmes  sont  plus  ardentes  que  nous  aux  effets  de 
l'amour,  ce  que  lui-même  a  dit  à  la  page  précédente,  pour  ne  donner  que 
maintenant  sa  conclusion. 

18,  Extrêmes.  —  Peut-être  le  sens  est-il  :  ■•  au  risque  de  leur  faire  endurer 
les  pires  et  plus  extrêmes  souffrances  »  (?) 


208, 


1,  Polemon.  —  Diogène  L.\erce,  III,  17. 

3,  Cassez.  —  Quant  à  ces  autres  femmes  qui  épousent  des  hommes  vieux, 
cassés. 

8,  Approchée.  —  Xiphilix,  Caiigula.  —  Clodia  Latea,  à  la  mort  de  Cali- 
gula,  subit  le  supplice  infligé  aux  Vestales  convaincues  d'avoir  manqué 
à  leur  vœu  de  virginité.  Les  vestales,  prêtresses  de  Vesta,  étaient  à  Rome 
chargées  d'entretenir  le  feu  sacré  sur  l'autel  de  la  déesse;  elles  faisaient 
vœu  de  virginité  durant  le  cours  de  leur  ministère  qui,  commencé  entre 
6  et  10  ans,  durait  trente  années;  elles  étaient  au  nombre  de  6.  Créées 
par  Numa,  elles  furent  abolies  par  Théodose;  elles  n'étaient  point 
cloîtrées;  jouissaient  de  grands  privilèges,  notamment  d'être  émancipées, 
d'aller  en  public  précédées  de  licteurs,  et  de  sauver  la  vie  à  tout  criminel, 


NOTES.         I.IV.  III,  CM  V.         VOL.  III,  PA(;.  208.  Fc.631 

mené  au  supplice,  qu'elles  rencontraient  fortuitement.  Si  elles  laissaient 
éteindre  le  feu  commis  à  leur  garde,  elles  étaient  punies  du  fouet;  celles 
infidèles  à  leur  vœu  de  chasteté,  primitivement  lapidées,  furent  par  la 
suite  ensevelies  vivantes  :  on  les  descendait  dans  un  étroit  caveau  mui'é, 
où  elles  trouvaient  un  petit  lit,  une  lampe  allumée,  un  peu  de  pain,  de 
l'eau  et  de  l'huile;  la  pierre  de  ce  sépulcre  était  refermée  sur  elles  et 
scellée  :  leur  complice  devait  mourir  sous  le  fouet. 

13,  Boleslaus.  —  Surnommé  «  le  Pudique  ».  Cromek,  De  rébus  Pal.,  VIII. 
—  D'après  Yllistolre  ecdvsiaslique,  Marcien,  empereur  d'Orient  (v"-  s.),  et 
S'"  Pulchérie  auraient  agi  de  même;  et  aussi  S.  Henri,  empereur  d'Alle- 
magne, duc  de  Bavière  (x"  s.),  et  S'"  Cunégonde. 

lo,  Roys.  —  Réminiscence  de  l'espagnol,  où  les  Reyes  (les  rois)  se  disait 
alors  souvent  pour  le  roi  et  la  reine;  comme  les  Padres  (les  pères),  pour  le 
père  et  la  mère;  les  Hijos  (les  lils),  pour  les  lils  et  les  filles. 

■20,  Desgouster.  —  L'éducation  des  lilles  est  un  point  que  Montaigne  ne  fait 
(|u'cfl]eurer  pour  condamner  les  réticences  exagérées  dont  on  use  vis-à-vis 
d'elles  et  qui  ne  font  qu'exciter  leur  curiosité.  Si  on  se  reporte  en  outre  à 
la  manière  dont,  un  peu  plus  loin,  il  parle  des  républiques  où,  dans  les 
gymnases,  les  deux  sexes  se  montraient  à  nu  l'un  à  l'auti-e,  il  semble  avoir 
été  assez  porté  vers  les  idées  actuelles  de  coéducation  où,  à  l'instar  de  ce 
qui  a  lieu  dans  certaines  écoles  mixtes  d'Angleterre,  garçons  et  filles  sont 
réunis,  système  préconisé  comme  essentiellement  moralisateur  et  donnant 
à  celles-ci  plus  de  caractère. 

21,  Excusent.  —  Admettent,  tolèrent  le  mariage  pour  celles  chez  lesquelles 
le  besoin  s'en  fait  pi'ématurément  sentir.  —  Ceci  a  dû  être  écrit  vers  1586; 
Léonor,  née  en  1571,  venait  d'avoir  quinze  ans,  limite  inférieure  à  laquelle 
la  femme,  en  France,  pouvait  et  peut  se  marier;  pour  l'homme  il  le  peut 
à  17  ans.  En  Autriche,  ces  limites  sont  de  20  ans  pour  l'homme  et  16  pour 
la  femme;  elles  étaient  de  15  et  13  ans  chez  les  Romains;  Lycurgue  les 
avait  fixées  à  37  et  17,  Platon  à  30  et  20.  Chez  les  Orientaux  elles  sont 
moindres  que  chez  nous,  la  nature  étant  plus  précoce  à  cet  égard  dans  les 
pays  chauds  que  dans  les  pays  tempérés;  dans  certains  états  de  l'Amé- 
rique du  Sud,  un  homme  peut  se  marier  à  quatorze  ans,  une  femme  à 
douze,  le  mariage  pourrait  même  avoir  lieu  plus  tôt  avec  le  consentement 
des  pères  et  mères,  mais  un  garçon  de  quatorze  ans  et  une  fdle  de  douze 
ne  dépendent  plus  sous  ce  rapport  que  de  leur  volonté.  V.  II,  26. 

26,  Fouteau.  —  C'est  le  nom  du  hêtre  en  vieux  français;  mais  en  langage 
trivial  de  l'époque  on  désignait  aussi  de  ce  nom,  dérivation  du  mot  latin 
faluere  (V.  N.  II,  178  :  Futuam),  l'organe  génital  de  la  femme. 

34,  Scelerées.  —  Criminelles,  scélérates. 

35,  Interdiction.  —  «  On  peut  tout  dire  devant  les  jeunes  filles,  disait  un 
contemporain  de  Montaigne  :  quand  elles  comprennent,  on  ne  leur  apprend 
pas  grand'chose;  quand  elles  ne  compi-ennent  pas,  on  ne  leur  apprend 
rien  du  tout.  »  A  quoi  on  peut  répondre  :  on  excite  les  premières,  lesquelles 
sont  plus  nombreuses  que  l'homme  ne  le  croit  et  fort  excitables  à  cet  âge, 
et  on  provoque  la  curiosité  des  autres. 

39,  Vngui.  —  Voltaire,  à  l'âge  de  quinze  ans,  traduisait  ainsi  ces  vers 
d'HoRACE  : 

«  Voyez  cette  beauté;  sous  les  yeux  de  sa  mcrc, 
Elle  apprend  en  naissant  l'art  dangereux  de  plaire 
El  d'exciter  en  nous  de  funestes  pencliants. 
Son  enfance  prévient  le  temps  d'être  coupable; 

Le  vice  trop  aimable 

Instruit  ses  premiers  ans.  » 

210, 

1,  Science.  —  «  Le  renard  sait  beaucoup,  une  femme  amoureuse  en  sait 
bien  davantage.  »  Proverbe  espar/nol. 
1,  Autresiois.  —  «  Quicon(iue,  dit  Platon  dans  le  Timéc,  aura  mené  la  vie 


Fc.632  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

des  justes,  retournera  dans  l'astre  fraternel  jouir  de  la  félicité  suprême; 
les  coupables  deviendront  femmes,  quand  ils  reparaîtront  sur  la  terre.  >■ 
7,  Nostre-Dame.  — Ancienne  exclamation  dite  pour  :  «  Par  Notre-Dame!  » 
Aujourd'hui  par  dérivation  et  en  accentuant  l'ellipse,  nous  disons  «  Dame!  " 
dans  le  même  sens. 

14,  Ame.  —  «  Nature,  jeunesse  et  santé  sont  trois  bons  maîtres.  »  Sed.vine. 

15,  Engendrent.  —  '■  Les  hommes  consacrent  leur  jeunesse  à  se  former  un 
esprit,  que  les  femmes  apportent  en  naissant.  Il  vient  à  une  fille  avant  la 
raison;  à  15  ans,  elle  est  faite,  tandis  qu'à  30,  un  homme  souvent  n'est 
qu'un  sot.  »  J.-J.  Kols^au. 

22,  Diffamez.  —  Var.  de  88  :  affole:. 

29,  Escarquillements.  — Ecartement  des  cuisses.  «  Esquarquiller  »,  est-il  dit 
dans  le  Dictionnaire  de  Moxet,  c'est  ouvrir  en  élargissant. 

31,  Strato.  —  Diogène  Laerce,  V,  59. 

32,  Tbeopbraste.  —  Id.,  ib.,  43. 

35,  Pbalereus.  —  le,  ib.,  81. 

36,  Ponticus.  —  Id.,  ib.,  87. 

37,  Antisthenes.  —  Id.,  VI,  15  et  18. 

38,  Aristo.  —  Id.,  VII,  163. 

39,  Cleanthes.  —  Id.,  ib.,  175. 

40,  Spberus.  —  Id.,  ib.,  178. 

41,  Eshontée.  —  Effrontée  au  delà  de  tout  ce  qui  peut  être  souffert,  admis, 
«  plus  le  fait  d'impudiques  créatures  que  de  dieux  »,  ajoute  Diogène 
Laerce,  VII,  187.  188. 

212, 

3,  Cet  office.  —  Dans  l'éd.  de  88,  cotte  phrase  suit  immédiatement  celle  où 
l'on  trouve  quelques  lignes  plus  haut  que  Zenon,  par  ses  lois,  réglait  «  les 
secousses  du  dépucelage  ».  L'intercalation  que  Montaigne  a  faite  posté- 
l'ieurement,  rompt  la  liaison  des  idées  et  fait  que  l'on  ne  voit  pas  tout 
d'abord  à  quoi  se  rapportent  ces  mots  "  à  cet  office  ». 

4,  Nation.  —  Dans  l'île  de  Chypre  (Hérodote,  I,  199;  Athénée,  XII);  —  à 
Iléliopolis,  en  Phénicie  (Eusèbe,  Vie  de  Constantin,  III,  58);  —  à  Sicca 
Veneria,  auj.  le  Kef,  en  Numidie  (Valère  Maxime,  II,  6,  15).  —  A  Babylone, 
dit  Hérodote,  I,  199,  les  dames,  par  dévotion,  se  prostituent  une  fois  dans 
leur  vie.  Ciiacune,  à  cet  effet,  se  rend  au  temple,  et  n'en  sort  qu'après  avoir 
subi  qui  a  jeté  son  dévolu  sur  elle;  ne  lui  demandant  rien  pour  prix  de 
ses  complaisances  et  tenue  de  recevoir  ce  qu'il  lui  remet.  Celles  qui  ont 
une  taille  élégante  et  de  la  beauté  n'y  font  pas  long  séjour;  les  laides  y 
restent  davantage  parce  qu'elles  ne  peuvent  satisfaire  à  la  loi,  il  y  en  a 
même  qui  y  demeurent  trois  ou  quatre  ans.  Après  ce  sacrifice,  rentrées 
chez  elles,  leur  vertu  y  est  à  r.abri  de  toute  faiblesse. 

5,  Garces.  —  L'éd.  de  88  aj.  :  et  de  garçons. 

6,  L'office.  —  V.  III,  232  et  N.  Vie  et  Polices. 

8.  Extinguitur.  —  Un  proverbe  grec  dit  pareillement  :  «  On  éteint  le  feu  par 
le  feu  »  ;  et  une  galante  marquise  du  xvii°  siècle  le  parodiant,  disait  : 
«  C'est  en  succombant  à  la  tentation  qu'on  y  résiste.  » 

20,  Diuinitez.  —  Athénée  dit,  d'après  Iléraclide  de  Syracuse,  que  dans  cette 
ville,  lors  de  la  fête  des  Thesmophories,  en  l'honneur  de  Cérès  et  de 
Proserpine,  le  principal  objet  du  culte  des  femmes  était  la  partie  qui  les 
distinguait  des  hommes;  il  en  était  fait  une  image  avec  de  la  farine  et  du 
miel,  et  on  la  promenait  en  procession.  Naigeon. 

20,  Bacchanales.  —  Fêtes  en  l'honneur  de  Bacchus  qui  prirent  naissance 
en  Egj'pte,  d'où  elles  s'introduisirent  en  Phénicie,  puis  en  Grèce,  et  de  là 
en  Italie.  Au  début,  les  femmes  y  participaient  seules;  ensuite  les  hommes 
y  furent  admis  et  les  désordres  devinrent  tels  que  le  Sénat  romain  les 
interdit  (184).  Mais  la  loi  demeura  peu  de  temps  en  vigueur;  et  sous 
l'Empire,  les  Bacchanales  furent  célébrées  de  nouveau  avec  plus  de  licence 
que  jamais. 

23,  Corps.  —  Hérodote,  II,  48. 


NOTES.         UV.  JII,  CH.  V.        VOL.  III,  PAG.  212.  Fc.633 

21,  Couurecbef.  —  V^oilette  que  les  dames  nobles  portaient  à  peu  près  dans 
les  mêmes  conditions  que  cette  partie  de  la  toilette  se  porte  aujourd'hui. 

27,  Matrones.  —  Dame  romaine  :  suivant  les  uns,  la  matrone  était  la 
lemmc  mariée  qui  n'avait  pas  d'enfant;  suivant  d'autres,  celle  qui  n'en 
avait  qu'un,  celle  en  ayant  plusieurs  étant  la  mère  de  famille. 

28,  Priapiis.  —  Était  surtout  en  honneur  à  Lampsaque  (Asie  Mineure). 
Ses  fêtes,  là  et  partout  ailleurs  où  son  culte  se  pratiquait,  étaient  accom- 
pagnées d'affreux  désordres. 

30,  Nopces.  —  Lactance,  Divin.  Institut.,  I,  20;  S.  Augustin,  De  Civit.  Dei,  VI, 
9.  —  Afin,  dit  Rozini  dans  son  ouvrage  sur  les  Antiquités  romaines  publié 
en  1700,  «  que  le  Dieu  semble  avoir  les  prémisses  de  leur  virginité  ».  Si 
cet  usage  n'était  pas  très  conforme  aux  lois  de  la  pudeur,  il  était  du 
moins  fort  prudent;  il  ôtait  aux  maris  tout  prétexte  à  des  soupçons  qui, 
fondés  ou  non,  sont  la  source  la  plus  féconde  des  mauvais  ménages  et  de 
tous  les  maux  qu'ils  entraînent  après  eux.  Cette  cérémonie  couvrait  les 
faiblesses  des  jeunes  tilles  d'un  voile  impénétrable,  leur  rendait  leur  in- 
nocenqp  première  et  assurait  à  leurs  maris  une  tranquillité  qu'aucun 
nuage  ne  pouvait  plus  troubler  et  ne  contribuait  pas  peu  à  leur  bonheur 
mutuel.  Naigeon.  V.  N.  III,  234  :  Estrangere. 

32,  Chaussure.  —  Signifie  ici  les  hauts-de-chausses  ou  culotte,  le  reproche 
que  leur  fait  Montaigne  de  dessiner  d'une  façon  trop  apparente  les  parties 
sexuelles  ne  laisse  aucun  doute  à  cet  égard.  V.  N.  I,  176  :  Public,  et  I, 
500  :  Chaussure. 

32.  Suysses.  —  Les  régiments  suisses  qui,  à  la  solde  de  la  France,  entraient 
dans  la  composition  de  nos  armées,  depuis  l'an  1521,  époque  à  laquelle 
leur  pays  avait  conclu  avec  François  P'  une  alliance  perpétuelle. 

34,  Grecgues.  —  Grègues,  espèce  de  hauts-de-chausses  ou  culotte;  ce  mot 
s'emploie  encore  quelquefois  et  toujours  au  pluriel. 
214, 

2,  Vray.  —  Les  nations  les  moins  avancées  en  civilisation,  dont  les  mœurs 
conservent  leur  simplicité  primitive,  portent  encore  des  vêtements  qui 
accusent  dans  toute  leur  réalité  chez  la  femme  les  formes  des  parties 
qu'elles  recouvrent;  mais  on  peut  en  dire  autant  des  costumes  tailleur  et 
des  corsets  dits  de  la  faculté  et  autres  de  nos  jours,  qui  chez  nous  les 
moulent  bien  autrement,  en  en  rectifiant  en  outre  l'esthétique. 

4,  Pied.  —  C.-à-d.  :  Alors,  on  instruisait  le  public  des  avantages  qu'à  cet 
égard  on  avait  reçus  de  la  nature  (aujourd'hui  il  ne  faudrait  pas  s'y  fier), 
comme  à  présent  on  donne  la  mesure  de  son  bras  ou  de  son  pied. 

5,  Veue.  —  Des  darnes  du  pays,  aj.  l'éd.  de  88.  —  Ce  bon  homme  paraît 
être  le  pape  Paul  IV  (Caraffa),  qui  régna  de  1555  à  1559.  Vers  la  même 

•  époque,  un  prince  Pamphyle,  à  Rome,  à  la  sollicitation  des  Jésuites,  mu- 
tila pareillement  la  plupart  de  ses  statues  et  tableaux;  postérieurement, 
dit-on,  il  jura,  mais  un  peu  tard,  qu'on  ne  l'y  prendrait  plus.  On  cite 
encore  le  duc  de  Mazarin,  époux  d'une  des  nièces  du  Cardinal,  et  la  du- 
chesse de  Guise  comme  ayant  commis  le  même  vandalisme.  Bien  avant 
eux,  à  la  fin  du  vr  s.,  S.  Grégoire  avait  fait  mettre  à  couvert  certaines 
statues  antiques  de  Rome  que  les  étrangers  venaient  considérer  plus  par 
amour  de  la  chair  que  par  amour  de  l'art.  Un  autre  pape  avait  fait  en- 
tourer de  voiles  de  plomb  les  parties  trop  nues  de  magnifiques  statues 
placées  aux  angles  d'un  tombeau  monumental.  La  même  idée  fit,  à  Paris, 
sous  Charles  X,  adopter  sous  la  forme  d'une  feuille  de  vigne,  une  mesure 
analogue,  qui  s'applique  parfois  encore. 
8,  Déesse.  —  Cérès. 

13,  Ruunt.  —  Virgile,  Georg.,  111,  244,  que  Delille  traduit  : 

•  Amour,  tout  sent  tes  feux,  tout  se  livre  à  ta  rage. 
Tout,  et  l'homme  qui  pense,  et  la  brute  sauvage. 
Et  le  peuple  des  eaux,  et  l'habitant  des  airs.  <■ 

14,  Platon.  —  Vers  la  fin  du  Timée,  d'où  Montaigne  a  pris  tout  ce  paragraplie.- 


Fc.634  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

IN,  Forcené.  —  Il  extravague,  perd  son  Ijon  sens. 

2."],  Législateur.  —  «  Le  bon  Jionimc  »,  c'est-à-dire,  le  pape  dont  il  a  été 
précédemment  parlé.  Une  intercalation  laite  dans  led.  de  95  entre  le 
passage  où  il  en  a  été  question  et  celui-ci  qui  se  faisaient  suite  dans  l'éd. 
de  88,  en  a  rompu  la  liaison. 

:{-2,  Royales.  —  Allusion  aux  images  obscènes  que,  de  tous  temps,  les  ga- 
mins ont  tracées  et  tracent  encore  grossièrement,  au  charbon  ou  à  la  craie, 
sur  les  murs  des  édifices  publics  et  autres. 

'S'i,  Vient.  —  De  là  vient  que  les  femmes  ont  un  profond  mépris... 
216. 

3,  Cela.  —  A  Sparte,  où  il  en  était  ainsi,  il  n'y  avait  pas  de  loi  contre 
l'adultère. 

li,  Liuia.  —  Dion,  Tibère.  —  Livie  eut  un  grand  ascendant  sur  l'empereur, 
auprès  duquel  elle  poussait  la  complaisance  jusqu'à  le  pourvoi)-  de  jeunes 
filles,  belles  et  vierges;  aussi  parvint-elle  à  lui  faire  adopter  et  désigner 
comme  successeur  Tibère  qu'elle  avait  eu  d'un  premier  mari,  auquel  il 
ra\ait  enlevée,  alors  (ju'elle  était  enceinte  d'un  second  enfant  (Drusus). 
Le  mot  que  Montaigne  rapporte  d'elle  est  du  reste  tout  à  son  éloge  :  elle 
le  dit  pour  sauver  des  individus  qu'on  allait  mettre  à  mort  parce  qu'ils 
s'étaient  rencontrés  devant  elle,  dans  la  plus  complète  nudité,  ce  qui  cons- 
tituait un  crime  de  lèse-majesté. 

16,  Exercices.  —  Non  seulement,  à  Sparte,  les  jeunes  filles  assistaient  aux 
jeux  auxquels  dépouillés  de  tout  vêtement  les  jeunes  gens  se  livraient 
dans  les  gymnases,  mais  elles-mêmes,  dans  le  même  état  de  nudité,  aux 
yeux  de  tous,  les  célibataires  seuls  exclus,  car  c'était  là  l'une  des  flétris- 
sures qui  leur  étaient  infligées,  pratiquaient  ces  mêmes  exercices  :  la 
course,  la  lutte,  le  jet  du  disque  et  du  javelot;  allant  aussi  chantant  et 
parfois  leurs  chants,  appropriés  aux  faits  du  moment,  raillaient  l'un  des 
assistants,  donnait  à  un  autre  des  éloges,  tout  cela  dans  le  but  d'exciter 
chez  tous  une  noble  émulation. 

17,  Platon.  —  Républiqiœ,  V.  —  Platon  ne  parle  pas  des  femmes  lacédé- 
nioniennes,  mais  des  femmes  en  général. 

18,  Vertugade.  —  Ou  vertugadin  ;  gros  bourrelet  que  les  femmes  portaient 
sous  leur  robe  pour  en  faire  gonfler  la  jupe  et  produire  un  effet  analogue 
à  celui  obtenu  au  xvni"  siècle  des  cercles  en  baleine  dont  étaient  formés 
les  paniers,  et  aux  cercles  en  acier  constituant  la  crinoline  au  xix\ 

19,  S.  Augustin.  —  De  Civil.  Del,  XXII,  17. 

23,  Acharne.  —  Excite.  —  Acharner  est  employé  ici  dans  son  sens  direct, 
qu'il  n'a  plus  actuellement  et  que  rend  bien  l'expression  triviale  «  porter 
à  la  peau  ». 

24,  Ventre.  —  Puis  nous  leur  reprochons  les  désirs  que  nous  avons  fait 
naître  en  elles. 

218, 

5,  Garde.  —  «  La  continence  est  une  chose  très  difficile  et  de  très  pénible 
garde;  il  est  mal  aysé  de  résister  du  tout  à  nature;  or  c'est  icy  qu'elle  est 
plus  forte  et  ardente,  etc.  »  Charron,  De  la  Sagesse,  III,  41. 
8,  Hallebrenez.  —  Épuisés,  meurtris,  hors  d'état  de  subvenii-  à  leur  tâche. 
Hallebrené  est  un  terme  de  fauconnerie  qui  sert  à  désigner  l'oiseau  de 
chasse  qui  a  une  ou  plusieurs  plumes  rompues. 
15,  Occupet.  —  Citation  dont  Boileau  a  traduit  ainsi  la  dernière  partie  : 

«  ...  Un  baiser  cueilli  sur  les  lèvres  d'Iris 
Qui  mollement  résiste,  et  par  un  doux  caprice 
Quelquefois  le  refuse,  afln  qu'on  le   ravisse.  • 

24,  Lumbis  est.  —  Citation  dont  Montaigne  a  inscrit  lui-même  la  traduction 

en  marge  de  l'exemplaire  de  Bordeaux. 
30,  Galant.  —  Un  homme  adroit  et  expérimenté. 
33,  Choix.  —  C.-à-d.  et  non  parce  qu'elle  se  réserve  pour  un  galant  favorisé. 


NOTES.         IJV.  m,  cil.  V.         VOL.  Hl,  PAC.  220.  •         Fc.63;j 

220, 

(S,  Orront.  —  Écouteront.  —  Futur  du  verbe  «  ouïr  »  qui  est  encore  en 
usage. 
13,  Chasteté.  —  On  croit  que  cette  reine  est  Marguerite,  rcim*  de  Navarre. 
—  'On  a  rapproché  de  ce  passage  celui  où  Ovide  dit  :  «  Est  chaste,  celle 
que  personne  n'a  jamais  sollicitée.  »  Les  deux  idées  ne  sont  pas  idem- 
tiques  :  d'après  Ovide,  seules  les  femmes  (|ui  n'ont  pas  été  mises  à  l'épreuvti 
seraient  chastes,  ce  qui  revient  à  nier  la  chasteté  chez  la  feminti;  tandis 
que  la  reine  dit  que  celles-là  seules  peuvent  se  vanter  d'èti-e  chastes  qui, 
mises  à  l'épreuve,  n'ont  pas  succombé.  —  Coknku.i.k,  dans  Pulyeucfc,  émet 
la  même  i)ensée  : 

«  Ce  n'esi  qu'en  ces  assauts  qu'éclaie  la  vertu. 
Kt  l'on  doute  d'un  cœur  qui  n'a  pas  combattu.  • 

Réc.niek,  lui,  se  montre  plus  sceptique  et  n'épargne  que  la  vierge 

«  Et  la  veuve,  aussi  bien  comme  la  mariée, 

Celle  est  chaste,  sans  plus,  qui  n'en  est  pas  priée.  » 

16.  Se  torfaire.  --  Il  peut  se  donner  quelque  liberté  sans  se  rendre  cou- 
pable. —  L'éd.  de  88  poi-t.  :  s'a/f'oler.  —  Forfaire,  c'est  mal  l'aire;  il  est 
généralement  suivi  d'un  complément  <"t  signifie  alors  violer,  manquer  a  :  il 
a  forfait  à  l'honneur. 

32.  Iniute.  —  A  été  longtemps  compromise  et  injustement  soupçonnée.  — 
■<  Par  injure  »  est  un  latinisme  :  injuria,  c'est-à-dire  sine  jure,  sans 
justice. 

38,  Langage.  —  Ceci  est  rapporté  dans  les  sentences   recueillies  par  An- 
TONirs  et  M.vxiMUS. 
222. 

11,  Douceurs.  —  Var.  de  88  :  diuiiies  (/races,  au  lieu  tle  :  <>  tendres  et  mi- 
gnardes  douceurs  ». 

19,  Addresse.  —  Est  sans  induence  sur  moi,  ne  m'atteint  pas. 

21,  Gratis.  —  Élien,  Hisl.  des  animau:i\,  XII,  12. 

32,  Angoisse.  —  Le  père  du  triumvir.  Qualifié  le  plus  méchant  des  hommes, 
par  Sylla- auquel  il  espérait  succéder;  il  s'était  composé  à  cet  effet  un<' 
troupe  de  gens  sans  aveu;  chassé  d'Italie,  il  se  retira  en  Sardaigne  où  il 
mourut  de  maladie  qui  lui  vint  non  tant  du  regret  de  la  ruine  de  ses 
affaires,  dit  Pi.i  tarque,  Pompée,  ô,  que  de  la  douleur  qu'il  éprouva  d'une 
lettre  qui  tomba  entre  ses  uutins,  par  laquelle  il  connut  que  sa  femme 
avait  forfait  à  son  honneur. 

35,  Rapbanique.  •  Surmulets,  poissons  de  mer  de  même  espèce  que  le 
rouget.  Allusion  au  supplice  que  les  Athéniens  infligeaient  aux  adultères, 
consistant  à  leur  introduire^  dans  h\  corps,  par  le  fondement,  des  raves  ou 
des  surmulets. 

37,  Honte.  —  Vulcain,  qui,  ayant  surpris  Vénus  son  épouse  avec  Mars,  les 
emprisonna  pendant  leur  sommeil  dans  un  fil<>t  d'acier  aux  mailles  im- 
perceptibles et  appela  ensuite  à  jouir  de  ce  spectacle  les  autres  dieux  qui 
se  moquèrent  de  lui. 

10,  Molles.  —  Var.  de  88  :  douces. 
224, 

1,  Bastaî^d.  —  Énée,  fils  de  Vénus  qui  l'avait  eu  d'Anchise  et  auquel  elle 
fit  faire  de  nouvelles  armes  par  Vulcain,  quand,  fuyant  Troie  qui  venait 
de  succomber,  il  passa  en  Italie  pour  y  fonder  une  nouvelle  patrie. 

22,  Maltalent.  —  Méchanceté,  dépit. 

28,  Don.  —  C'est  ce  qui  ne  fut  que  trop  bien  vérifié  par  un  Octavius.  Ce 
fait  donna  lieu  à  un  acte  de  dévouement  d'un  des  affranchis  du  meurtrier, 
qui,  pour  sauver  son  maître,  se  déclara  l'auteur  du  crime;  mais,  quelque 
temps  après,  la  vérité  fut  connue  et  justice  fut  faite  (58).  Tacite,  Ann., 
XI II,  4L 

34,  Monopoles.  —  Assemblées  factieuses. 


Fc.636  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

226. 

fi,  Chasteté.  —  Var.  de  b8  ;  tempérance. 

1"2,  Couuertement.  —  Hérodote,  IV,  2,  dit  bien  que  les  Scythes  ôtaient  la 
"  vue  à  leurs  esclaves,  mais  il  ne  parle  ni  de  leurs  femmes,  ni  du  motif  que 
Montaigne  leur  prête. 

10,  Opportunité.  —  ■  Une  femme  (fort  sage  d'ailleurs  à  ce  que  dit  l'histoire) 
déclarait  qu'elle  répondait  d'elle  toute  l'année,  hormis  le  mois  de  mai.  »  Payex. 

27,  Discrepance.  —  Que  sommes-nous  du  reste,  sinon  un  amas  de  pensées 
et  de  passions  contraires,  qui  sont  sans  cesse  en  opposition  entre  elles? 
—  Discrepance  :  contrariété,  discordance,  du  latin  discrepanlia;  n'est  plus 
usité. 

31,  Enuis.  —  Mal  volontiers,  à  contre-cœur,  avec  répugnance;  du  latin  in- 
vilus. 

32,  Homère.  —  Odyssée,  XVII,  347. 
228, 

3,  Difficulté.  —  Et  j'ai  autant  de  peine  à  refuser  ceux  qui  sollicitent  mon 
assistance. 

8,  Pulmonique.  —  Poitrinaire,  ou,  comme  on  dit  plus  généralement  au- 
jourd'hui, tuberculeuse.  —  «  En  elles,  dit  un  proverbe  lorrain,  le  haut  dé- 
fend le  bas.  » 

11,  Marché.  —  Elles  n'en  rendent  leur  vertu  que  plus  suspecte,  d'autant 
que  les  excuses... 

20,  Contraire.  —  Ces  deu.\  dernières  phrases,  depuis  le  mot-  Outre  »,  se 
rapportent  à  ce  que  Montaigne  a  dit  plus  haut  des  femmes  «  qui  se  vantent 
d'avoir  leur  volonté  vierge  et  froide  ». 

26,  Contrepoil.  —  Qui  fait  entendre  le  contraire  de  ce  qu'elles  disent. 

34,  Estrangere.  —  Qui  sans  ingérence  étrangère,  uniquement  laissées  à 

•    elles-mêmes. 
230, 

5,  Adiré.  —  Égaré,  perdu.  Vient  de  «  à  dire  »  ;  est  encore  en  usage  dans 
le  langage  judiciaire  :  une  pièce  adirée,,  est  une  pièce  qui  est  à  dire,  qui 
manque.  V.  N.  I,  164  :  A  dire. 

10,  Fatua.  —  Varron,  dans  Lactance,  I,  22. 

13,  Hommes.  —  «  Un  jour,  quelqu'un  reprochant  à  Hiéron  qu'il  avait  l'ha- 
leine puante,  et  lui  tançant  sa  femme  de  ce  qu'elle  ne  lui  en  avait  jamais 
rien  dit,  elle  lui  répondit  :  «  Je  pensais  que  l'haleine  de  tous  les  hommes 
sentait  ainsi.  •  Plutarque,  Apophlh.  des  rois,  et  dans  son  traité  Comment  on 
pourra  recevoir  utilité  de  ses  ennemis,  7. 

21,  Soy.  —  S.  Augustin  conte  un  fait  analogue  :  «  Acindynus,  consul  l'an 
430,  étant  gouverneur  d'Antioche,  avait  menacé  un  débiteur  du  trésftr 
public  qui  était  en  retard  pour  le  paiement  d'une  livre  d'or,  de  le  faire 
pendre,  s'il  ne  s'acquittait  à  bref  délai.  Celui-ci  avait  une  femme  dont  était 
épris  un  homme  fort  riche,  qui  lui  oflVit  de  payer  cette  dette,  si  elle 
voulait  passer  une  nuit  avec  lui.  La  femme,  après  avoir  pris  conseil  de 
son  mari  qui  était  retenu  en  prison,  y  consentit:  mais  après  cet  homme 
éluda  sa  promesse.  La  victime  alla  porter  plainte  au  Gouverneur  qui,  se 
reconnaissant  le  premier  coupable  pour  trop  de  sévérité,  se  condamna  lui- 
même  à  désintéresser  le  trésor  et  punit  le  mystificateur.  •  Bayle. 

27,  Entremise.  —  A  cet  égard,  le  monde  n'a  pas  changé,  et,  aujourd'hui 
comme  aloi-s,  combien  d'hommes  doivent  leur  fortune  à  leurs  femmes! 
L'ignorent-ils?  quelques-uns  assurément;  mais  pour  la  plupart  on  n'en 
saurait  douter,  surtout  quand  on  les  entend  attribuer  impudemment  à 
leur  seul  mérite  les  hautes  positions  auxquelles  ils  sont  parvenus.  Victor 
Thierry. 

27,  Argien.  —  Plutarque,  traité  De  l'amour,  10. 

29,  Mecenas.  -~  Pi.utarque,  De  l'amour,  16.  —  Ce  fait  est  aussi  rapporté 
par  CicÉRo.N  d'après  Lucii.ius  qui  vivait  cent  ans  avant  lui.  Ce  n'est  donc 
pas  de  Mécène,  qui  vivait  au  temps  d'Auguste,  qu'il  est  ici  question; 
on  ignore  également  le  Galba  dont  il  s'agit. 


NOTES.         LIV.  m,  CH.  V.        VOL.  III,  PAG.  230.  Fc.G37 

31,  Coussin.  —  On  mangeait  alors,  chez  les  Romains,  à  demi  couché  sur 

des  lits  analogues  aux  canapés  sans  dossier  et  chaises  longues  de  notre 

époque. 
36,  Desbordées.  —  Dans  1  éd.  de  88,  cette  phrase  suit  immédiatement  ces 

mots  qu'on  a  lus  plus  liaut  :  «  Gardons  les  à  vh  plus  noble  siège  ». 
232. 

G,  Indes.  —  Arrien,  Hist.  bid.,  17. 
13,  Viure.  —  Di0(if;sE  Laerce,  II,  105;  Aui.u-Gelle,  II,  18.  —  Pliédon  n'en  fit 

pas  métier  de  son  plein  gré,   comme  Montaigne   le  donne  à  entendre; 

mais,  étant  esclave,  son  maître  l'y  forçait.  V.  N.  I,  650. 

15,  Vie.  —  «  Voyant,  dit  Hérodote,  la  ville  remplie  de  jeunes  gens  qui,  dans 
l'ardeur  de  leurs  passions  ellfrénées,  ne  cessaient  d'attenter  à  ce  qui  devait 
être  l'objet  de  leurs  respects,  Solon  aclieta  et  plaça  dans  des  lieux  déter- 
minés, des  femmes  toujours  prêtes  et  à  l'usage  de  tous  »  ;  nos  maisons 
publiques  ne  sont  pas  autre  chose. 

16,  Polices.  —  Notamment  chez  les  Lj'diens,  Hérodote,  I,  [M;  les  Baby- 
loniens, HÉRODOTE,  I,  196;  etc. 

17,  Sollicitude.  —  De  la  jalousie. 

19,  Boucler.  —  Pris  ici  au  figuré;  réminiscence  des  ceintures  de  chasteté 
dont  il  était  fait  usage  au  moyen  âge  et  dont  il  existe  des  spécimens  dans 
les  musées,  notamment  dans  celui  de  Cluny,  à  Paris. 
25,  Rengrege.  —  Aggrave  encore  davantage. 
36,  Veoir.  —  Quelle  folie  d'arracher... 
234, 

1,  Rapport.  —  Qui  n'affligent  que  par  la  publicité  qu'on  leur  donne. 

5,  Voyage.  —  Plutarque,  Les  demandes  des  choses  romaines,  9. 

10,  Estrangere.  —  Montaigne  donne  de  ce  singulier  abus  qui  a  existé  aux 
temps  barbares  de  la  féodalité  une  explication  admissible.  La  religion,  du 
fait  de  ses  ministres,  alors  que  la  femme  était  bien  peu  (aujoui-d'hui  elle 
est  beaucoup,  et  va  tendant  à  devenir  trop),  a  pu  dans  le  principe  inter- 
venir pour  la  sauvegarder  quand  son  passé  n'était  pas  irréprochable  et 
assurer  ainsi  la  paix  des  ménages.  V.  N.  III,  212  :  Nopces.  Par  la  suite  le 
seigneur,  un  autre  sentiment  (libidinage,  cupidité)  se  joignant  à  la  cause 
première,  sera  arrivé  à  se  substituer  au  prêtre  et  de  la  sorte  se  sera  établi 
ce  droit  dit  de  jambage,  de  cuissage,  de  préUbation,  dont  l'existence  a  été 
niée,  mais  dont  on  retrouve  de  nombreuses  preuves  irréfutables.  V.  N. 
I,  102  :  Faire.  Ce  droit,  suzerains  clercs  et  laïques  le  possédaient  bel  et  bien 
jadis  et  de  fait  en  usaient  quand  bon  leur  plaisait,  le  remplaçant  quand 
ils  le  jugeaient  à  propos  par  une  redevance  qui,  à  la  longue,  devint  la 
règle  quand  les  mœurs  s'adoucirent  et  surtout  lorsque  serfs  et  bour- 
geois en  arrivèrent  à  imposer  leurs  revendications.  —  Les  chanoines  de 
Lyon,  notamment,  sont  mentionnés  comme  l'ayant  possédé  et  s'étant  long- 
temps refusés  à  y  renoncer,  probablement  dans  sa  forme  pécuniaire. 
Rabelais  y  fait  allusion.  Parmi  ceux  qui  aujourd'hui  le  révoquent  en  doute, 
il  en  est  qui  y  voient  simplement  une  interprétation  maligne,  transmise 
par  la  tradition,  de  la  coutume  qui  aurait  existé  au  commencement,  dans 
la  Chrétienté,  de  consacrer  à  la  prière  les  trois  premiers  jours  du  mariage, 
usage  renouvelé,  parait-il,  des  Athéniens,  où  la  mariée,  durant  ces  trois 
jours,  conservait  sa  couronne  virginale. 

24,  Vicissitude.  —  Attendez-vous  donc  à  la  pareille  et  préparez-vous  à  l'être 
à  votre  tour,  car  tout  est  vicissitude  dans  la  nature  et  tout  y  est  com- 
pensé. 

32,  Sages.  —  «  Les  sages  ne  dévoilent  pas  leurs  dissensions  domestiques.  » 
Euripide. 

31,  Languager.  —  Ou  langagier;  bavard,  verbeux,  loquace,  qui  aime  à 
parler. 

36,  Sent.  —  Camus,  évêque  de  Belley,  répondit  à  un  mari  qui  le  priait  d'en- 
gager sa  femme  à  une  vie  plus  honnête  et  plus  décente  :  <■  Tout  ce  que 
je  pourrais  représenter  à  votre  femme  serait  assez  inutile;  le  silence  de 


Fc.638  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

ma  part,  et  surtout  de  la  vôtre,  mo  paraît  beaucoup  plus  sage.  Croyez- 
moi,  mon  ami,  il  vaut  mieux  s'appeler  «  Cornélius  Tacitus  ■>  que  <•  \'u- 
blius  Cornélius.  »  Naigeon. 
236, 

(i,  Pittacus.  —  Plutarque,  Du  contentement  ou  repos  de  l'esprit,  1 1. 

G,  Défaut.  —  Incommodité,  quelque  chose  qui  trouble  notre  repos  et  nous 
empêche  d'être  heureux. 

11,  Interiner.  —  Déclarer  valable,  accepter.  —  On  dit  aujourd'hui  ■•  enté- 
riner >',  et  le  mot  n'est  plus  employé  qu'en  langage  judiciaire. 

13,  Femme.  —  Ce  cas,  donné  par  Montaigne,  comme  admis  par  le  Séiial 
de  Marseille,  pour  justifier  à  ses  yeux  le  suicide,  est  de  l'invention  de 
l'auteur;  les  raisons  admises  étaient  uniquement  l'adversité  ou  une  trop 
grande  prospérité,  ainsi  qu'il  est  indiqué,  d'après  Valère  Maxime,  liv. 
II,  ch.  III  des  Essais,  I,  650. 

17,  Sourd.  —  C'est-à-dire  qu'une  femme  doit  fermer  les  yeux  sur  bien  des 
peccadilles  et  qu'un  mari  ne  doit  pas  prêter  l'oreille  à  tous  les  commé- 
rages. BoNNEFo.N.  —  Cette  maxime  est  du  roi  Alphonse  V  d'Aragon,  elle  a 
été  ainsi  mise  en  vers  : 

«  Il  laul,  pour  qu'uu  hymen  en  tous  points  soit  heureux. 
Que  le  mar   soit  sourd  et  la  femme  sans  yeux.  » 

23,  Cheuet.  —  Hausser  le  chevet;  expression  usitée  du  temps  de  Montaigne 
pour  dire  «  renchérir  sa  marchandise  ». 

27,  Flaminius.  —  En  192.  Devant  entrer  en  opérations  contre  Antiochus 
roi  de  Syrie,  auquel  on  prêtait  force  alliés,  pour  ramener  à  leur  juste 
valeur  les  forces  de  ce  prince  qu'on  exaltait  devant  lui,  Flaminius  contait 
qu'un  hôte,  chez  lequel  il  avait  été  reçu,  lui  ayant  offert,  au  moi^  de  juin, 
un  festin  où  figuraient  du  gibier  en  quantité  abondante  et  variée,  on 
s'étonnait  qu'il  pût  en  être  ainsi  en  cette  saison.  A  quoi  l'hôte  répondit 
que  cette  diversité  n'était  qu'apparente,  que  cette  venaison  n'était  autre 
que  de  la  chair  de  porc  déguisée  par  les  assaisonnements.  «  Il  en  est  ainsi, 
ajoute  Flaminius,  des  armées  du  roi,  dont  il  vient  d'être  fait  une  des- 
cription si  emphatique.  »  Tite-Live,  XXXV,  49. 

27,  Félon.  —  Var.  de  88  :  ambitieux. 

39,'  Parties.  —  Ses  intrigues. 
238, 

10,  Ville.  -  En  48.  Tacite,  Ann.,  XI,  26,  27. 
13,  Insistant.  —  En  lui  résistant. 

21,  Intelligence.  —  Tacite,  Ann.,  XI,  36.  —  Entre  autres  Mnester  et  Traulus 
Jlontanus.  Le  premier  était  un  danseur  dont  Messaline  était  éperdument 
amoureuse;  ne  pouvant  le  faire  consentir  à  ses  désirs,  elle  pria  l'empereur 
de  lui  commander  d'obéir;  Claude,  sans  plus  s'inquiéter  de  ce  dont  il 
s'agissait,  lui  ordonna  de  faire  tout  ce  qu'il  plairait  à  Messaline,  et  dès  lors, 
il  ne  fit  plus  de  résistance.  —  Traulus  Montanus  était  un  jeune  chevalier 
romain  qui,  dans  la  même  nuit,  avait  été  appelé  et  renvoj'é  par  elle,  qui 
passait  avec  une  égalité  du  désir  au  dégoût  (49).  —  Quelques  années  au- 
paravant (42),  un  Appius  Silanus  avait  été  mis  à  mort  pour  l'avoir  of- 
fensée en  refusant  de  consentir  à  sa  passion. 

24,  Vulcan.  —  Voir  plus  haut  (III,  194)  :  Dixerat... 
240, 

1,  Infusus.  —  Tous  ces  mots  si  naturels  et  si  expressifs  se  trouvent,  les 
uns  dans  le  passage  de  Virgile  cité.  III,  194,  les  autres  dans  celui  de 
Lucrèce  qui  vient  d'être  reproduit. 

3,  Rencontre.  —  Pointe  d'esprit,  jeu  de  mots. 

4,  Constante.  —  Douce,  coulante. 

7,  D'efforcé.  —  De  forcé,  disons-nous  aujourd'hui. 

11.  Penser.  --  A  quelqu'un  lui  demandant  ia  recette  de  son  style,  .l.-J.  Rois- 
seau  répondait  :  «  Pensez  comme  moi,  vous,  écrirez  comme  moi.  » 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  V.  VOL.  111,  PAG.  240.         Fc.630 

23,  Choses.  —  Plltakque,  Démosthène,  1,  s'exprime  ainsi  :  «  Bien  tard 
déjà,  étant  au  déclin  de  ma  vie,  quand  je  vins  à  m'occuper  d'ouvrages 
latins,  il  m'arriva  une  chose  étrange  bien  que  très  vraie  :  c'est  que  je  n'ai 
pas  tant  compris  ce  qu'ils  contenaient  par  la  connaissance  quf  j'avais  de 
la  langue,  que  parce  que  je  savais  ce  dont  il  était  question,  ce  qui  m'a 
conduit  à  saisir  aisément  la  signification  des  mots  employés.  • 

30,  Langue.  —  •<  La  fréquente  lecture  d'Amyot  et  de  IMontaigne  est  une  fort 
bonne  initiation  à  l'art  d'écrire,  parce  que  les  tours  de  phrase  et  certaines 
des  expressions  de  leur  temps  ont  une  naïveté,  une  richesse  ou  une  éner- 
gie auxquelles  notre  langue  actuelle  atteindrait  difficilement.  »  Cii.  Nodikr. 

33,  Appesantissent.  —  Leur  donnent  plus  de  poids,  plus  de  force,  plus 
d'expression,  enrichissent  la  langue  de  tours  nouveaux,  grâce  à  l'appli- 
cation sage  et  ingénieuse  qu'ils  savent  en  faire. 

242, 

1,  Siècle.  —  Montaigne  vise  ici  vraisemblablement  Ronsard  et  son  école, 
les  poètes  de  la  Pléiade. 

5,  Discrétion.  —  Mais  l'appropriation  qui  laisse  à  désirer  et  l'abus  qu'ils 
en  font  les  perdent. 

8,  Nouuelleté.  —  Pourvu  qu'ils  puissent  trouver  dans  la  nouveauté  de 
quelques  mots  de  quoi  s'applaudir,  ils  ne  se  mettent  point  en  peine  de 
peindre  exactement  les  choses.  —  «  Se  gorgiasser  »,  qui  signifie  se  plaire, 
se  flatter,  s'applaudir,  est  présentement  tout  à  fait  hors  d'usage. 

13,  Emprunter.  —  Suivant  l'idée  exprimée  ici,  beaucoup  de  termes  em- 
ployés soit  à  la  chasse,  soit  à  la  guerre,  sont  passés  dans  la  langue,  quel- 
ques-uns avec  une  acception  un  peu  modifiée  et,  comme  le  prévoyait  Mon- 
taigne, sans  rien  perdre  de  leur  grâce.  De  la  chasse,  nous  viennent  : 
prendre  son  essor,  tenir  en  ses  serres,  faire  gorge  chaude,  fureter,  être 
aux  aguets,  à  l'affût,  aux  abois,  sur  la  voie,  sur  la  piste,  sur  les  traces, 
aller  sur  les  brisées,  se  rabattre,  etc.;  de  la  guerre  :  se  ranger  sous  les 
drapeaux,  se  jeter  dans  la  mêlée,  recruter  des  adhérents,  revenir  à  la 
charge,  reparaître  dans  l'arène,  être  désarçonné,  rompre  en  visière,  être 
armé  de  toutes  pièces,  etc.. 

15,  Maniant.  —  Souple,  flexible,  maniable. 

22,  Commun.  —  En  notre  langage  des  basses  classes. 

28,  Mode.  —  Manière;  du  latin  modus,  qui  signifie  manière,  façon. 

34,  Faire.  —  Dieu  veuille  qu'ils  aient  eu  raison  d'agir  ainsi! 
244, 

2,  Equicola.  —  Allusion  aux  ouvrages  intitulés  :  «  Les  Assolains,  de  la 
nature  d'amour  >•  du  cardinal  Bembo,  et  «  Délia  Natura  d'Eamore  »  d'Equi- 
cola. 

9,  Antinonydes.  —  D'après  Yalère  Maxime,  Aulu-Gelle,  Plutarque  et  Sui- 
das, c'est  «  Antigénides  ». 

25,  Inaduertement.  —  Ce  qui  ne  peut  guère  être  autrement,  puisque  j'écris 

à  la  hâte  et  sans  attention. 
30,  Moy.  —  V.  N.  II,  524  :  Autheur. 
246, 

20,  S'encheuestroyent.  —  Se  mettaient  la  chevètre  (le  licou),  comme  on 
fait  à  une  bête  de  somme;  —  signifie  ici  «  s'embarrasser  »,  ce  qui  est  son 
acception  la  plus  ordinaire. 

21,  Eux  mesmes.  —  Eliex,  De  Animal.,  XVII,  25;  Strabon,  XV.  —  Ale.xandre 
était  sur  les  bords  de  l'Hydaspe,  occupé  à  construire  la  flotte  qu'il  envoya 
en  reconnaissance  sur  le  golfe  Persique,  lorsque  sur  le  sommet  d'une  col- 
line lui  apparurent  rangés  en  bataille  un  assez  grand  nombre  de  ces  singes; 
les  prenant  pour  des  ennemis,  il  allait  les  faii-e  charger,  quand  le  roi 
Taxile,  qui  l'accompagnait,  le  détrompa;  ils  étaient  de  taille  extraordi- 
naire, c'étaient  probablement  des  orang-outangs  (nom  qui  en  malais  signi- 
fie homme  de  la  forêt)  qui  existent  encore  dans  ces  contrées;  ils  ont  une 
grande  ressemblance  avec  un  homme  et  par  leur  inteUigence  et  leur  con- 
formation  semblent  des  êtres   intermédiaires  entre  lui  et   la  brute;   se 


Fc.640  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

tiennent  ordinairement  debout  sur  les  pieds  de  derrière,  sont  pleins  de 
force  et  d'agilité  et  de  caractère  relativement  doux.  Pour  s'en  emparer 
vivants,  les  chasseurs,  quand  ils  en  voient  sur  un  arbre,  s'établissent  avec 
un  seau  d'eau  à  portée  de  leur  vue  et  font  raine  de  se  débarbouiller, 
substituent  à  leur  seau  un  pot  rempli  de  glu  et  s'éloignent;  le  singe 
descend  de  son  arbre,  s'englue  la  figure  et,  n'y  voyant  plus,  devient  .de 
proie  facile.  On  procède  encore,  en  ayant  de  grands  sacs  dans  un  desquels 
entre  le  chasseur  qui,  en  se  retirant,  en  laisse  d'autres  garnis  de  poils  et 
enduits  de  glu  à  l'intérieur,  que  naturellement  les  singes  essaient  de  chaus- 
ser, ce  qui  les  met  à  leur  merci;  néanmoins  on  les  connaît  peu,  tous 
ceux  qui  ont  été  amenés  en  Europe,  n'ayant  pu  y  supporter  les  rigueurs 
du  climat.  —  A  la  même  catégorie  appartiennent  le  Gibbon  qu'on  trouve 
également  dans  ces  contrées,  le  Chimpanzé  qui  dans  l'ensemble  se  rap- 
proche encore  plus  de  l'homme  et  appartient  au  continent  africain.  En 
Afrique  se  trouve  aussi  le  Gorille,  de  taille  beaucoup  plus  considérable, 
dépassant  parfois  deux  mètres,  beaucoup  plus  fort  et  de  caractère  offensif, 
n'hésitant  pas  à  attaquer  l'homme,  dont,  au  contraire,  les  autres  évitent 
l'approche. 

2,">,  Serments.  —  Ce  juron  s'emploie  encore  fréquemment;  s'il  est  la  plus 
droite  des  exclamations  de  cette  nature,  la  moins  droite,  autrement  dit  la 
moins  orthodoxe,  était  Jarnidieu  (je  renie  Dieu),  fort  employée  aussi  à  cette 
époque;  d'où  pour  éviter  un  blasphème  est  venu  Jarnicoton  qui  avec 
Ventre-saint-gris  étaient  les  jurons  habituels  d'Henri  IV;  Louis  XI  disait 
Pasquedieu;  Duquesne,  Cent  diables.  —  Par  le  Chien!  est  un  juron  sans 
signification  particulière,  imaginé  pour  éviter  de  jurer  par  les  dieux, 
analogue  à  celui  de  Vertuchou,  par  la  vertu  du  chou,  qui  s'emploie  par- 
fois en  France.  Cappari  viendrait,  dit-on,  du  nom  italien  du  câprier,  auquel 
cas  il  ne  signifierait  également  rien;  ne  serait-ce  pas  plutôt  le  juron  grec 
altéré  catara,  qui  signifie  malédiction  et  qui  est  d'usage  courant  dans 
le  pays  de  Naples? 

27,  Cappari.  —  DiOGf:.\E  Laerce,  VII,  32. 

27,  Uair.  —  Diogène  Laerce,  VIII,  6. 

28,  Superficielles.  —  Ceci  a  rapport  à  ce  que  Montaigne  a  dit  plus  haut, 
qu'  «  on  l'a  veu  plus  souuent  iurer  par  similitude  que  par  complexion  »  ; 
les  deux  phrases  se  suivent  immédiatement  dans  l'éd.  de  88. 

32,  Enuis.  —  Plus  à  cpntre-cœur. 
248, 

II,  Resueries.  —  C'est  de  ce  nom  que  îlontaigne  a  déjà  qualifié  son  livre 
(liv.  I,  ch.  XXV,  I,  226),  et  Boileau  dit  en  en  parlant  : 

•  Tantôt  son  livre  en  main,  errant  dans  les  prairieS: 
J'occupe  ma  raison  d'utiles  rêveries.  » 

14,  l'abane.  —  Plus  je  m'efforce  de  ... 

20,  Soif.  —  Var.  de  88  :  faim. 

22,  Vases.  —  Ses  organes  génitaux.  —  L'auteur  avait  d'abord  écrit  «  ses  ro- 
gnons >-;  contre  son  habitude,  il  y  a  substitué  le  mot  «  vases  »,  comme 
plus  décent,  scrupule  qu'il  n'avait  pas  eu  lorsqu'il  a  traduit  la  citation  de 
S.  Jérôme  (III,  218). 

24,  Socrates.  —  Dans  le  Banquet  de  Platon. 

27,  Cratippus.  —  Il  enseignait  à  Athènes,  eut  pour  disciple  Brutus,  le  meur- 
trier de  César;   Pompée  alla  le  voir  après  la  bataille  de  Pharsale  et  en 
reçut  des  consolations. 
250, 

3,  Platon.  — Lois,  I,  13.  —  Ce  mot  est  cité  par  Polvbe,  XV;  Clément  d'A- 

LEXANDKIK,    VIII;   SyNESIUS,   II;   etC. 

4,  louët.  —  Var.  de  88 -i^u'on  se  iouc  de  nous,  au  lieu  de  «  qu'il  est... 
iouet  ». 

17,  Deuantiere.  —  Si  elle  est  toute  découverte.  «  Devantière  •  était  le  nom 
d'une  sorte  de  grand  tablier  que  les  femmes  portaient  à  cheval. 


NOTES.        LIV.  ni,  CH.  V.        VOL.  III,  PAG.  250.  Fc.641 

26,  Alexandre.  —  Plutarque,  Moyens  de  discerner  le  flatteur  d'avec  l'ami, 
23. 

39,  Estendu.  —  Toutes  les  opinions  s'accordent  sur  ce  point,  sans  compter 
que  l'usage  si  étendu  de  la  circoncision  en  est  un  témoignage. 

39,  CircoDcisioDS.  —  Qui  en  est  vue  punition,  add.  de  l'ex.  de  Bord,  qu'on 
a  cru  devoir  insérer  dans  le  texte. 
252, 

1,  Esseniens.  —  Pline,  Nat.  Hist.,  V,  17.  —  Les  Esséniens  proscrivaient  le 
mariage,  la  servitude  et  la  guerre;  ils  formaient  une  sorte  d'association 
moralç  et  religieuse,  vivant  dans  des  espèces  de  monastères,  mettant  en 
commun  leurs  biens  et  se  livrant  à  l'agriculture;  ils  oflraient  une  grande 
analogie  avec  ce  qu'étaient  les  premiers  chrétiens.  Ils  ont  duré  environ 
deux  siècles. 

9,  Zenon.  —  Diogène  L.ierce,  VII,  1^. 
12,  Fuit.  —  Var.  de  88  :  desdaigne. 

19,  Athéniens.  —  Thucydide,  III,  104. 

20,  Mundifier.  —  Purifier. 

22,  Pœnitet.  —  «  Nous  estimons  à  vice  nostre  estre  »;  Montaigne  a  ainsi 
traduit  cette  citation,  que  l'éd.  de  88  fait  suivre  :  Nous  accusons  en  mille 
choses,  les  conditions  de  nostre  estre. 

,  23,  Mangeant.  —  Jean  Léon,  dans  sa  Description  de  l'Afrique,  dit  :  «  Dans 
les  déserts  de  Libye,  les  gentilshommes  du  pays  portent  en  tête  un  linge 
noir,  dont  ils  se  couvrent  le  visage,  n'en  laissant  apercevoir  que  les  yeux, 
et  vont  toujours  ainsi;  quand  ils  mangent,  ils  lèvent  leur  voile  pour 
introduire  leur  nourriture  dans  la  bouche  et  le  baissent  aussitôt  :  ils  don- 
nent pour  motif  de  cette  singularité  que  de  même  qu'il  est  indécent  de 
rejeter  devant  tout  le  monde  ce  qu'on  a  dans  l'estomac,  de  même  il  est 
inconvenant  de  le  remplir  à  la  vue  de  chacun.  »  —  Ce  port  d'un  voile  d'une 
façon  continue,  est  encore  pratiqué  par  les  peuplades  qui  sillonnent  le 
Sahara,  notamment  par  les  Touareg,  et  est  motivé  par  le  besoin  de  se 
protéger  contre  les  sables  ténus  qui  constituent  le  sol  dans  ces  contrées 
que  le  moindre  vent  déplace,  qui  sont  en  permanence  en  suspension  dans 
l'air  et  pénètrent  partout,  les  vêtements  aussi  bien  que  les  tentes,  sans 
qu'on  puisse  s'en  défendre. 

23,  Grandes.  —  Add.  de  88  :  ^n  toute  sorte  de  grandeur.  s 
254, 

6,  Adorées.  —  En  Afrique  :  les  Atarantes,  dit  Hérodote;  les  Éthiopiens 
(Strabon);  les  Atlantes  (Pline), 

10,  Nécessaires.  —  Var.  de  88  :  naturelles. 

18,  Partisanes.  —  Féminin  de  partisans;  ces  lois  doivent  donc  être  des 
lois  de  parti,  de  faction;  mais  comme  Montaigne  oppose  ici  les  lois  par- 
tisanes de  l'homme  aux  lois  universelles  de  la  nature,  ces  lois  partisanes 
doivent  être  des  lois  partielles,  particulières,  comme  il  les  nomme  à  la 
ligne  suivante;  de  son  invention,  comme  le  porte  une  variante  de  l'éd.  de 
Bordeaux.  V.  ci-dessous  :  Ordonnances. 

18,  Fantastiques.  —  C.-à-d.  aux  tiennes  qui  sont  dictées  par  tes  passions 
personnelles  et  tes  préjugés. 

20,  Ordonnances.  —  Var.  de  l'ex.  de  Bord.  :  règles  posiliues  de  ton  inuentlon 
V occupent  et  attachent  et  les  règles  de  la  paroisse;  celles  de  Dieu  el  du  monde, 
au  lieu  de  :  «  ordonnances...  monde  ». 

23,  Poètes.  —  De  Virgile  sur  Vénus  et  Vulcain,  III,  191;  et  de  Lucrèce 
sur  Vénus  et  Mars,  III,  238. 

26,  Reseui.  —  Ciuimpc,  sorte  de  fichu  en  étofl'e  légère.  —  Reseul,  littérale- 
ment réseau,  du  latin  reticulum.,  filet  à  mailles,  d'où  vient  également 
réticule,  nom  donné  au  petit  sac  qu'actuellement  les  dames  portent  presque 
constamment  au  bras,  les  exigences  de  la  mode  faisant  que  les  robes  n'ont 
plus  de  poche. 

20.  JEgyptien.  —  Plutarque,  De  la  curiosité,  ?,.  ^ 

ESSAIS    DE    MONTAIGNE.  —  T.    IV.  41 


Fc.642  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

256, 

1,  Ceux-ci.  —  Virgile  et  Lucrèce.  • 

•1,  Mineuses.  —  Minaudières,  comme  nous  disons  aujourd'hui. 
G,  Aualloit.  —  On  attribue  ce  souhait  à  Philoxkne,  le  même  que  Denys  le 
Tyran  condamnait   aux  carrières  pour  avoir  trouvé   ses  vers  n.auvais. 
Aristote,  Et  hic,  III,  10;  Athénée,  I,  6. 
25,  Commodité.  —  Cette  mesure  apportée  à  nos  plaisirs,  tournerait  à  notre 
avantage... 
258, 

2,  Paissoit.  —  Diogè.ne  Laerce,  VII,  130,  donne  une  autre  raison  de  la 
continence  de  Thrasonydes  :  c'est  qu'il  n'était  pas  aimé  de  sa  maîtresse  et 
qu'appartenant  à  l'école  stoïcienne,  ses  poursuites  étaient  contraires  aux 
principes  de  cette  école  qui  tenait  l'amour  comme  étant  de  l'amitié  éveillée 
par  la  vue  de  la  beauté.  Si  la  raison  que  lui  prête  Montaigne  eût  été  réelle, 
c'eût  été  bien  de  l'inexpérience  de  sa  part,  une  occasion  perdue  ne  se  re- 
trouvant guère,  comme  l'ont  dit  Horace  :  •<  Carpe  diem  (Saisis  le  jour  où 
elle  se  présente)  »;  .Martial  :  «  Vive  hodie  (Vis  aujourd'hui  même)  »,  et 
tant  d'autres,  y  compris  La  Fontaine  dans  son  conte  de  Nicaise  et  sa  fable 
Le  Loup  et  le  Chasseur  : 

•  .louis!  —  Je  le  ferai.  —  Mais  quaiiU  donc?  —  Dès  demain. 
—  Eli,  mon  ami!  la  mort  peut  te  prendre  en  chemin, 
Jouis  dès  aujourd'hui...  • 

5,  Socrates.  —  Xénophon,  Mémoires  sur  Socrate,  I,  3,  11. 

11,  Culilingis.  —  Montaigne  a  changé  le  dernier  mot  de  cette  citation  pour 
la  rendre  plus  acceptable. 

12,  Party.  —  Partagé. 

12,  Laides.  —  «  On  a  cent  mauvais  jours  pour  une  bonne  nuit.  »  Remarques 
d'un  jsosmopolile,  1791. 

15,  Bon.  —  Martial,  dans  plusieurs  de  ses  épigrammes,  s'élève  contre  cette 
mode  des  baisers.  Les  premiers  chrétiens  se  baisaient  ainsi  sur  la  bouche 
dans  leurs  agapes;  cet  usage,  qui  dura  plus  de  quatre  siècles,  fut  aboli  à 
cause  de  ses  conséquences.  Ce  mode  d'embrasser  les  femmes  de  la  sorte 
existait  jadis  en  France;  on  dit  qu'il  est  encore  fréquent  en  Angleterre. 
—  De  nos  jours,  le  baiser  où  que  ce  soit,  est  l'objet  d'une  campagne 
tendant  à  sa  suppression  par  raison  d'hygiène,  comme  propagateur  de 
certaines  maladies  contagieuses  :  la  tuberculose,  la  syphilis,  la  diphtérie, 
les  maladies  éruptives,  etc.  En  Amérique  s'est  même  formée  une  ligue 
contre  son  usage.  Baiser  les  bibles,  les  évangiles,  les  patènes,  etc.,  offre 
même  danger.  Les  perruches  en  vous  bécotant,  les  chiens  en  vous  lé- 
chant sont  susceptibles  de  communiquer  pareillement  certaines  maladies, 
surtout,  de  la  part  du  chien,  des  maladies  parasitaires  (les  vers),  quand 
ce  sont  des  enfants  qui  les  caressent. 

22,  Practiquer.  —  Gagner  par  des  pratiques  adroites. 

24,  Saillir.  —  L'éd.  de  88  port.  :  sallir. 

25,  Faicte.  —  Valère  Maxime,  VIII,  11,  5.  —  Cette  Vénus,  qui  était  en  marbre 
blanc,  ornait  le  temple  de  Gnide  (Asie  Mineure).  «  Ce  temple,  écrit  Pline, 
est  ouvert  de  toutes  parts,  de  sorte  qu'on  peut  la  contempler  de  tous  les 
côtés,  ce  qu'on  croit  ne  pas  déplaire  à  Vénus;  dans  quelque  sens  qu'on 
l'examine,  on  ne  cesse  de  l'admirer.  »  Un  inconnu,  dit-on,  se  passionna 
pour  elle,  se  cacha  la  nuit  dans  le  temple,  et  laissa  sur  le  marbre  la  tache 
dénonciatrice  de  ses  amours.  »  —  On  cite  dans  ce  même  ordre  d'idées, 
mais  plus  excusables  parce  qu'ils  sont  le  fait  d'erreurs  occasionnées  par 
l'art,  sur  des  êtres  privés  de  raison  :  un  cheval  hennissant  à  la  vue  d'une 
cavale  en  peinture;  des  chiens  aboyant  à  la  vue  d'une  chienne  représentée 
dans  un  tableau;  un  taureau,  à  Syracuse,  s'enflammant  et  devenant  fu- 
rieux, pour  une  génisse  d'airain  de  parfaite  ressemblance.  Valère  Maxime. 

26,  Ensueroit.  —  Envelopper  d'un  suaire,  d'un  linceul;  ce  mot,  fort  usité 
du  temps  de  Montaigiïfe,  ne  l'est  plus  aujourd'hui. 


NOTES.  UV.  III,  OH.  V.        VOL.  Ill,  PAG.  238.  Fc.643 

30,  Enterrement.  —  Hérodote,  II,  89. 

31,  Merueilleusement.  —  Var.  de  88  :  monstrueusement. 

32,  Trespassée.  —  On  ne  sait  d'où  Montaigne  a  tiré  ce  fait.  Diogène  Laerce, 
I,  96,  dit  que  Périandre,  irrité  contre  sa  femme  par  ses  concubines,  la  tua 
dans  un  accès  de  colère,  en  la  précipitant  du  haut  des  degrés  de  son 
palais,  en  lui  donnant  un  coup  de  pied,  pendant  une  grossesse.  Quoi  qu'il 
en  soit,  on  rapporte  aussi  qu'il  sacrifia  à  sa  mémoire  toutes  les  parures 
des  femmes  de  Corinthe.  Leur  ayant  prescrit  de  se  réunir  dans  le  temple 
de  Junon,  elles  s'y  rendirent  comme  à  une  tète  avec  leurs  plus  riches 
parures  et  là,  sans  distinction  de  rang,  ni  de  naissance,  elles  furent  dé- 
pouillées par  des  gardes  apostés  à  cet  effet,  et  tous  leurs  habits  brûlés 
en  holocauste. 

34,  Mignon.  —  D'après  la  Fable,  avait  été  placé  dans  le  ciel  par  Jupiter 
qui,  ensuite,  l'en  chassa  et  le  condamna  à  un  sommeil  perpétuel,  parce 
qu'il  avait  osé  attenter  à  l'honneur  de  Junon.  Diane  s'éprit  d'une  vive 
passion  pour  lui  pendant  qu'il  dormait  et  venait  souvent  le  visiter;  il  est 
à  croire  qu'Endymion  cultivait  l'astronomie  et  passait  les  nuits  à  suivre 
le  cours  de  la  lune  et  que  c'est  là  ce  qui  l'aura  fait  passer  pour  son 
amant. 
260, 

7,  Ailleurs.  —  Certains  ont  vu  là  un  écho  de  la  légende  de  la  Belle  Ferron- 
nière  qui  passa  pour  avoir  causé  la  mort  de  François  I",  dont  elle  était 
la  maîtresse,  parce  que  le  mari  jaloux  aurait  inoculé  à  dessein  à  sa  femme 
le  virus  d'une  maladie  mortelle  à  cette  époque,  pour  que  son  infidèle 
épouse  la  communiquât  à  son  insu  au  roi;  c'est  peu  probable,  parce  que 
le  sens  de  la  phrase  porte  sur  un  tout  autre  ordre  d'idée  et  que  François  I" 
est  mort  d'une  fistule  au  périnée  et  non  des  suites  d'une  maladie  syphili- 
tique. Payen. 

13,  Comme.  —  Comme  leur  plairait  la  compagnie  d'un  gJ-os... 

29,  Brutalité.  —  Stupidité,  bêtise. 

32,  Rien.  —  Var.  de  88  :  guère. 

37,  Serue.  —  Tyrannique,  astreignante. 
262, 

4,  Feu.  —  Montaigne  semble  disposé  à  généraliser  ici,  en  ce  qui  touche  la 
femme  en  Italie,  ce  proverbe  qui  y  a  cours  ;  «  A  Gènes,  les  hommes  sont 
sans  foi,  les  femmes  sans  pudeur,  les  montagnes  sans  bois,  les  mère  sans 
poissons.  >' 
9,  Liberté.  —  L'éd.  de  88  aj.  :  Ayant  tant  de  pièces  à  mettre  en  communica- 
tion, on  les  achemine  à  y  employer  tousiours  la  dernière,  puisque  c'est  tout 
d'vn  pris.  Nous  courons  à  peu  près  mesme  fortune.  Ils  sont  trop  extrêmes  en 
contraincte,  nous  en  licence.  De  ces  trois  phrases,  l'ex.  de  Bordeaux  conserve 
les  deux  dernières,  que  nous  avons  cru  devoir  pareillement  maintenir  dans 
la  traduction. 

19,  Sauues.  —  Sans  encourir  de  dommages.  On  appelait  jadis  bague,  non 
seulement  les  anneaux  qui  se  mettent  aux  doigts,  mais  encore  tous  les 
bijoux  précieux. 

22,  Tousiours.  —  Add.  de  88  :  estoient. 

23,  Sarmates.  —  Hérodote,  VIH,  117. 

29,  Aristippus.  —  Diogène  Laerce,  Aristippe,  II,  09. 
32,  Nom.  —  Sa  réputation,  sa  renommée. 
264, 

3,  Tenants.  A  ceux  qui  ont  à  se  défendre.  —  Tenants  est  l'opposé  d'assail- 
lants. 

3,  Gourmandise.  —  Add.  de  88  :  et  de  faim. 

9,  Scythes.  —  «  L'amour  ne  meurt  jamais  de  besoin,  mais  souvent  d'indi- 
gestion. »  Ninon  de  Lenclos. 
16,  Intestins.  —  Cachés  et  renfermés. 

19,  Amazones.  —  Diodore  de  Sicile,  XVII,  10;  Qui.nte-Curce,  VI,  5.  —  Cette 
peuplade,  sur  laquelle  on  a  peu  de  données  précises,  semble  avoir  pris  à  un 


Fc.644  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

moment  quelque  extension  par  la  force  des  armes.  Les  Amazones  se  per- 
pétuaient, dit-on,  par  un  commerce  passager  avec  les  habitants  des  pays 
voisins  et  exposaient  leurs  enfants  mâles;  on  dit  aussi  qu'elles  se  brûlaient 
la  mamelle  droite  pour  pouvoir  tirer  de  l'arc  avec  plus  de  facilité.  —  Le 
fait  rapporté  ici  est,  d'après  Plltarqle,  de  pure  invention,  et  à  l'appui  de 
son  dire  il  invoque  le  témoignage  de  Lysimachus,  l'un  des  précepteurs 
d'Alexandre  qui  ne  l'avait  jamais  quitté  et  déclarait  n'en  pas  avoir  con- 
naissance. 

33,  Nous  sommes.  —  Dans  l'éd.  de  88,  ce  paragraphe  suit  immédiatement 
la  phrase  du  précédent  où  Montaigne  dit  que  la  nature  a  fourni  les  femmes 
de  pièces  uniquement  propres  à  la  défensive.  Il  a  ajouté  depuis  l'histoire 
de  Thalestris,  d'où  une  certaine  interruption  dans  le  sens. 

36,  Fermir.  —  De  fixer,  d'affermir. 
266, 

4,  Estonnent.  —  S'étonnent  de  l'inconstance  en  amour. 

5,  Incroyable.  —  Var.  de  88  :  monstrueuse. 
7,  L'arrest.  —  La  constance. 

15,  Sac.  —  De  confiance,  sans  voir  ni  connaître  ce  que  l'on  achète.  On  dit 
aujourd'hui  «  chat  en  poche  »  et  tel  est  même  le  texte  de  l'éd.  de  88.  — 
Cette  expression  :  «  acheter  chat  en  sac  »  vient  de  ce  que  jadis  où  le  bra- 
connage était  très  sévèrement  puni,  les  braconniers,  pour  moins  s'exposer, 
vendaient  leur  gibier  enfermé  dans  des  sacs,  que  l'acheteur  n'ouvrait 
même  pas  de  peur  d'être  surpris  ;  aussi  parfois,  au  lieu  du  lièvre  ou  autre 
produit  de  chasse  pour  lequel  il  avait  fait  marché,  ne  trouvait-il  qu'un 
chat,  et,  étant  lui-même  en  faute,  il  n'avait  garde  de  porter  plainte. 

21,  Abusée.  —  Bayle,  art.  Jeanne  I"  de  A'aples.  —  En  1345,  André,  appelé 
par  les  Italiens  Andreosso,  était  de  sa  nature  très  ombrageux;  mécontent 
de  n'avoir  aucune  autorité  parce  qu'il  n'était  que  le  mari  de  la  reine, 
alors  que  de  son  propre  chef  il  avait  des  droits  personnels  à  la  couronne 
primant  ceux  de  sa  femme,  à  juste  titre  jaloux  de  ses  débordements  qui 
étaient  connus  de  tous,  redouté  pour  les  projets  de  vengeance  qu'on  lui 
prêtait  et  son  emportement,  une  conspiration  se  forma,  dont  tous  les  con- 
jurés étaient  de  l'entourage  de  la  reine,  et  ils  l'étranglèrent  avec  un  lacet 
de  soie,  persuadés  qu'un  anneau  que  sa  mère  lui  avait  donné  était  un  ta- 
lisman le  préservant  de  mourir  par  le  fer  ou  le  poison  (1547).  Son  frère 
Louis,  roi  de  Hongrie,  pour  venger  sa  mort,  envahit  le  roj'aume  de  Naples; 
Jeanne  s'enfuit  dans  la  Provence  qui  lui  appartenait  et  ne  put  revenir 
dans  ses  états  d'Italie  que  lorsque  le  Pape,  au  jugement  duquel  on  convint 
de  s'en  remettre,  l'eut  déclarée  innocente  de  cet  assassinat,  après  lequel  elle 
avait  épousé  son  amant  qui  en  avait  été  le  principal  auteur.  Elle-même 
mourut  étouffée  en  1587. 

21,  Que  l'action.  —  C'est  la  suite  de  la  phrase  qui  commence  par  :  «  elles 
peuuent  attaquer  ».  Depuis  l'édition  de  1588.  Montaigne  a  intercalé  l'exemple 
de  .leanne  de  Naples,  ce  qui  i-end  la  liaison  des  idées  moins  saisissable. 

22,  Platon.  —  Traité  Des  Lois,  XL 

27,  Essayant.  —  //  peut  advenir  qu'en  nous  essavanl,  ainsi  que  porte  l'éd. 
de  88. 
268, 

5,  Personne.  -^  Add.  de  78  :  d'honneur. 

8,  Lustrum.  —  Il  y  a  dans  le  texte  d'Horace  «  le  huitième  lustre  (quarante 
ans)  »,  au  lieu  de  «  onzième  (cinquante-cinq  ans)  »  qu'y  a  plus  judicieuse- 
ment substitué  Montaigne. 
25,  Consens.  —  Témoins. 

35,  IlUbenter.  —  De  ces  trois  vers,  le  premier  est  le  commencement  d'une 
épigramme  des  Veteru.\i  poetarum  Catalecta,  intitulée  Priapus:  les  autres 
sont  tirés  d'une  autre  épigramme  du  même  recueil,  ayant  pour  titre  Ad 
malronas. 
A  l,  L'essence.  —  Nous  nous  déferons  aisément  des  vices  qui  ne  sont  tels  qu'en 
apparence,  lorsque  nous  n'en  aurons  plus  de  réellement  enracinés  en  nous. 


NOTES.         LIV.  m,  CH.  V.         VOL.  Ilf,  PAG.  370.  Fc.64o 

270, 

i,  Nouueaux.  —  Que  nous  imaginioas  à  notre  fantaisie  des  devoirs  nou- 
veaux. 

5,  Fautes.  —  Où  les  fautes  sont  des  crimes,  et  où  les  crimes  ne  sont  que 
des  fautes. 

10,  lustes.  —  Cette  maxime  est  d'une  application  bien  générale,  qu'il  s'a- 
gisse de  la  morale  ou  d'actes. 

10,  Superficiels.  —  Dont  la  vertu  est  toute  en  apparence. 

13,  Rechargeons.  —  Au  contraire,  nous  en  augmentons... 

14,  Panneaus.  —  Vieux  haillons  de  drap;  du  latin  panniis,  qui  signifie  drap, 
étoffes  en  loques. 

27,  N'ont.  —  Qu'ils  ne  doivent  pas  s'en  prendre... 

30,  Rythme.  —  Pour  qu'en  raison  de  mon  peu  de  mesure,  de  règle.  —  Cer- 
tains estiment  qu'il  faudrait  traduire  :  -  qui,  parce  que  je  ne  m'exprime 
pas  en  vers  ». 

31,  Deux.  —  Théodore  de  Bèze  (auteur  du  vers  latin  qui  suit),  qui  a  écrit 
dans  sa  jeunesse  qui  fut  assez  dissolue  des  poésies^  latines  élégantes,  mais 
licencieuses;  et  S. -Gelais  ^auteur  du  vers  français  cité  après),  qui,  bien 
que  dans  les  ordres,  ne  s'en  livrait  pas  moins  aux  plaisirs  et  n'y  renonça 
que  lorsqu'il  fut  nommé  évéque  (1474). 

32,  Grestez.  —  Des  plus  huppés,  des  plus  en  relief. 

34,  Traicte.  —  «  Quelqu'un  qui  prononcerait  aujourd'hui  ce  vers  parmi 
nous,  serait  regardé  comme  un  crocheteur  ivre.  Défaisons-nous  donc  de 
nos  préjugés,  quand  nous  lisons  d'anciens  auteurs  ou  que  nous  voyageons 
chez  des  nations  éloignées;  la  nature  est  la  même  partout  et  les  usages 
diffèrent  partout.  »  Voltaire,  Dictionnaire  philosophique. 
272, 

17,  Remises.  —  Défaillances. 

27,  Destuytes.  —  Détours,  dissimulations,  défaites. 
274, 

2,  Capitulations.  —  Add.  de  88  :  cérémonieuses. 

2,  Faussées.  —  Violées. 

3,  Caler.  —  Distendre,  relâcher;  terme  de  marine  :  caler  les  voiles,  les 
vergues  contre  les  mâts,  c'est  les  replier  et  les  fixer;  signifie  ici  céder, 
ployer. 

4,  Fois.  —  Plus  d'une  fois,  dans  l'intérêt  de  leur  honneur,  j'ai  niaitrisé  le 
plaisir  que  j'aurais  pu  éprouver,  dans  la  crainte  d'exposer  leur  réputation 
en  les  rendant  mères. 

5,  Assignations.  —  J'ai,  autant  que  j'ai  pu,  pris  sur  moi  le  danger  de  nos 
rendez-vous. 

16,  Génitales.  —  Dans  l'ex.  de  Bord.,  Montaigne  avait  d'abord  ajouté  :  Le 
dessein  d'engendrer  doit  estre  purement  legilime,  qu'il  a  rayé  ensuite;  cette 
addition  lève  tout  doute  sur  ce  qu'il  a  voulu  dire  dans  la  phrase  précé- 
dente. 
22,  Dec.  —  Montaigne  veut  dire  par  là  qu'après  avoir  été  exposé  par  l'amour 
à  bien  des  traverses,  il  est  enfin  débarrassé  pour  toujours  de  cette  dange- 
reuse passion. 
276, 

2,  Est.  —  SÉxÈQUE,  Epist.  95  ;  le  texte  porte  manet  au  lieu  d'est.  La  Fontaine 
reproduit  cette  idée,  bien  que  sous  une  autre  forme,  dans  sa  fable  des 
Deux  chiens  et  l'âne  mort  : 

•  Les  vertus  devraient  être  sœurs 

Ainsi  que  les  vices  sont  frères. 
Dès  que  l'un  de  ceux-ci  s'empare  de  nos  cœurs, 
Tous  viennent  à  la  (ile,  il  ne  s'en  manque  gucres.  » 

6,  Orbes.  —  Contondants,  produisant  des  meurtrissures,  sans  occasionner 
de  plaies. 

9,  Panetius.  —  Sénèque,  Epist.  117. 


Fc.646  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

16,  Venues.  —  Les  assauts,  les  chocs  continus. 

18,  Ensemble.  —  Marcher  de  pair,  s'accorder.  —  «  Oh!  qu'il  est  malaisé, 
dit  Agésilas  (Plltarque  ,  Agésilas,  4),  d'aimer  et  d'être  sage  tout  à  hi 
fois.  » 

19,  Illégitime.  —  Var.  de  88  :  vitieuse. 

23,  Dilaier.  —  L'éloigner  le  plus  longtemps  des  atteintes  de  la  vieillesse.  — 
Var.  de  88  :  relarder. 

31,  Sage.  —  L'éd.  de  88  port.  :  bon  homme. 

32,  Sacrâtes.  —  Xéxophox,  Banquet,  IV,  27. 

40,  Humaines.  —  Add.  de  88  :  ew  règle  et. 

41,  Dea.  —  Pourquoi  cela  ne  serait-il  pas. 

42,  Estriue.  —  Lutte  contre,  combat,  conteste,  contrarie,  interdit. 
278, 

4,  Ingénieusement...  affame.  —  Var.  de  88  :  ingénieusement,  cTéuiter  toute 
viande  et  boisson,  qui  nous  altère  et  nous  a/f'ame,  c'est-à-dire  qui  nous  fasse 
désirer  nouuelle  faim. 

5,  Saturité.  —  Satiété;  de  saturitas,  d'où  viennent  saturer  et  saturation. 
12,  Rigueur.  —  Add.  de  88  :  c^  d'inhumanité. 

14,  Prosterné.  —  Délabré,  afl'aibli,  aflaissé. 

19,  Desmembrons.  —  Var.  de  l'ex,  de  Bord.  :  dessirons,  qui  n'est  autre  que 

le  mot  «  deschirons  »  qu'il  avait  dabord  mis  et  qu'il  a  effacé  pour  l'écrire 

avec  une  orthographe  conforme  à  la  manière  dont  ce  mot  se  prononce  en 

Gascogne. 
21,  Elle.  —  La  «  douleur  »  dont  il  vient  d'être  parlé,  et  non  la  «  fantaisie  », 

c.-à-d.  l'imagination  dont  il  a  été  parlé  beaucoup  plus  haut. 

24,  ColUgance.  —  Union  intime;  du  latin  colligere,  unir,  joindre  ensemble. 
30,  Refroidir.  —  D'en  inspirer  le  dégoût  à  lame... 

34,  Infondre.  —  Imprégner;  du  latin  infundere,  verser  dedans. 
280, 

4,  Me  tienne  en  haleine.  —  Var.  de  88  :  m'exerce. 

17,  Les  nerfs.  —  Var.  de  88  :  Valeine. 

36,  Ancien.  —  Biou.  —  Diogène  Laerce,  IV,  67. 
282, 

6,  Peut.  —  Vai".  de  88  :  ne  peut. 

7,  Conférence.  —  A  entretenir  commerce  avec  des  personnes  auxquelles 
il  est  â  charge. 

14,  Suiue.  —  Dans  la  Cyropêdie,  Cyrus  haranguant  ses  soldats  qu'il  conduit 
contre  Crésus,  leur  dit  :  «  Poursuivre  l'ennemi,  frapper,  tuer,  s'emparer 
de  tout,  s'entendre  louer,  être  libre,  commander,  voilà  le  partage  des 
vainqueurs;  un  sort  tout  contraire  attend  les  lâches;  que  ceux  qui. 
s'aiment,  combattent  donc  pour  moi!  »  C'est  ce  qui  fait  que  nombre 
d'éditions  des  Essais  portent  :  «  Qui  s'aymera,  si  me  suyue  »,  bien  que 
l'éd.  de  95  et  l'ex.  de  Bord,  où  seul  ce  passage  existe,  porte  :  «  Qui 
m'aymera,  si  me  suiue  »,  ce  qui  est  en  effet  une  erreur  manifeste  de 
l'auteur,  que  confirme  la  citation  italienne  qui  précède.  Il  est  probable  que 
du  temps  même  de  Montaigne  comme  maintenant  le  dicton  «  Qui 
m'aime,  me  suive  »  était  en  usage,  et  aura  causé  une  faute  d'impression 
qui  aura  échappé  à  l'auteur  et  aura  été  se  reproduisant  d'édition  en 
édition,  jusqu'à  ce  qu'un  éditeur  avisé  l'ait  relevée.  Toutefois  le  mot  de 
la  présente  édition  a  bien  été  dit,  notamment  pai-  Scipion  Nasica  ameutant 
ses  partisans  contre  Tibérius  Gracchus  (133),  et  par  bien  d'autres  de- 
puis, parmi  lesquels  Philippe  de  Valois  se  résolvant  à  la  guerre  contre 
les  Flamands  (1328).  —  Dans  la  bouche  de  Cyrus,  ■<  Qui  s'aime,  me  suive  • 
a  la  même  signification  que  cet  appel  que,  chez  les  Romains,  dans  les 
cas  de  danger  subit  et  grave,  le  Consul  ou  le  Général,  prenant  un  éten- 
dard, adressait  à  tous,  en  s'écriant  :  «  Que  ceux  qui  veulent  sauver  la 
République,  me  suivent  »;  ou  que  ce  mot  en  France  :  «  La  Patrie  est  en 
danger  »,  de  la  République  de  1793.  —  Ce  sont  des  gestes  du  même  genre 
que  celui  de  Sylla  à  Orchomène  (87)  voyant  ses  soldats  plier,  saisissant 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  V.         VOL.  III,  PAG.  282.  Fc.647 

une  enseigne  et  les  ramenant  en  leur  disant  :  «  C'est  ici  que  je  veux 
périr;  et,  quand  on  vous  demandera  où  vous  avez  abandonné  votre 
Général,  souvenez-vous  de  répondre  que  c'est  à  Orchomène!  >•  De  Sou- 
varoff,  en  1800,  au  pont  du  Diable  en  Suisse,  se  couchant  pour  obliger  les 
siens  en  retraite  à  s'arrêter,  ce  à  quoi  il  ne  parvint  pas.  De  Bonaparte 
cette  même  année  à  Marengo,  reportant  ses  troupes  en  avant  par  ces 
mots  :  «  C'est  assez  reculer,  soldats!  souvenez-vous  que  j'ai  l'habituâe  de. 
coucher  sur  le  champ  de  bataille.  »  —  Cette  erreur  en  rappelle  une  autre 
de  même  nature,  qui  se  rencontre  dans  Virgile,  du  fait  de  l'interpolation 
d'un  copiste  :  «  Audaces  fortuna  juvat  »,  au  lieu  de  :  «  Audentes  fortuna 
juvat  »,  qui  présentent  deux  assertions  de  sens  essentiellement  différents  : 
la  première,  en  disant  que  le  succès  appartient  aux  audacieux  quels 
qu'ils  soient,  est  assez  aventurée  et  pas  toujours  exacte;  la  seconde,  en  le 
préconisant  pour  ceux  qui  osent  après  avoir  pesé  le  pour  et  le  contre, 
est  fort  judicieuse  et  se  réalise  le  plus  souvent. 

16,  Composition.  —  IMélange. 

19,  Xenophon.  —  Anabase,  II,  6,  15. 

19,  Menon.  —  Le  même  dont  Platon  a  donné  le  nom  à  un  de  ses  dialogues, 
fut  l'un  des  chefs  des  Grecs  à  la  solde  de  Cyrus  le  Jeune,  lorsque  celui-ci 
se  révolta  contre  son  frère  (400);  bien  que  soupçonné  d'avoir  trahi, 
lorsque  les  Perses  attirèrent  ces  chefs  et  les  mirent  à  mort,  il  fut  arrêté 
avec  eux  et  subit  le  même  sort. 

24,  Galba.  —  Suétone,  Galba,  21. 

25,  Misérable.  —  Ce  misérable  c'est  Oviue  qui,  relégué  en  Sarmatie,  écrit  à 
sa  femme,  demeurée  à  Rome  sur  ses  instances,  pour  intercéder  en  sa 
faveur  et  qui  s'y  emploie  vainement,  qu'apparemment  le  souci  des  maux 
qu'il  endure  a  dû  le  vieillir,  et  termine  par  les  vers  qui  suivent.  —  Frappé 
par  Auguste,  en  l'an  9  de  J.-C,  pour  un  motif  qui  est  demeuré  une 
énigme,  mais  que  l'on  suppose  être  une  intrigue  de  cour  qu'il  aurait 
connue  et  divulguée,  Ovide  ne  rentra  jamais  en  grâce,  quelques  sollicita- 
tions dont  il  fût  l'objet;  ses  espérances  de  rappel  semblent  même  s'être 
évanouies  lors  de  l'avènement  de  Tibère.  Il  mourut  dans  son  exil  en 
l'an  18. 

30,  Emonez.  —  Diogène  Laerce,  IV,  31. 
284, 

3,  Sophiste.  —  Signilie  «  ami  de  la  sagesse  »;  s'employa  d'abord  en  bonne 
part  et  c'est  ici  le  cas;  mai.s  tomba  dans  le  discrédit,  quand  ceux  qui  se 
di.saient  tels,  se  mirent  à  enseigner  à  prix  d'argent  l'art  de  parler  et  de 
disputer  .sur  tout,  fai.sant  eux-mêmes  profession  de  soutenir  indifférem- 
ment en  toutes  questions  le  pour  et  le  contre  et  à  attaquer  les  principes 
les  plus  évidents  et  les  plus  respectés.  Ils  fleurirent  en  Grèce,  surtout  au 
V  siècle;  Socrate  les  combattit  ardemment  en  détournant  ses  concitoyens 
de  ces  disputes  frivoles  pour  les  ramener  à  la  recherche  sincère  de  la 
vérité. 

4,  Harmodiens.  ~  Aristogiton  et  llaruiodius  étaient  deux  jeunes  Athé- 
niens, liés  d'une  étroite  amitié.  La  sœur  du  second  ayant  été  outragée 
par  Hipparque  qui,  avec  llippias  son  frère,  exerçait  la  tyrannie  à  Athènes, 
ils  conçurent  le  projet  d'en  délivrer  la  ville.  Harmodius  fut  tué,  après 
s'être  défait  d'Hipparque;  et  Aristogiton,  mis  à  la  torture  pour  dénoncer 
ses  complices,  nomma  tous  les  amis  d'Ilippias  qui  furent  aussitôt  mis  à 
mort.  Interrogé  s'il  n'en  restait  pas  d'autres,  il  répondit  qu'il  n'y  avait 
plus  que  lui  Hippias  qui  méritât  la  mort;  celui-ci  le  fit  aussitôt  conduire 
au  supplice  (514).  Leur  initiative  amena  l'expulsion  d'Ilippias;  les  Athé- 
niens leur  érigèrent  alors  une  statue  et  consacrèrent  leur  mémoire  par  des 
fêtes.  —  Bion  donnait  les  noms  d'Aristogitons  et  Harmodiens  aux  premiers 
poils  follets  qui  venaient  estomper  le  visage  des  jeunes  gens,  laissant 
entendre  par  là  qu'ils  les  débarrassaient  des  importunités  dont  ils  étaient 
l'objet,  comme  Aristogiton  et  Harmodius  avaient  mis  fin  à  l'oppression 
d'un  tyran.  Plutarqle,  De  l'amour,.  34. 


Fc.648  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

5,  Non  qu'en.  —  Mais  pas  autant  que  dans. 

13,  Port.  —  Le  port,  la  figure  de  l'amour. 

16,  Nescit.  —  Longtemps  avant  saint  .lérônie,  Anacréon  avait  dit  :  «  Bacchus, 
aidé  de  l'amour,  folâtre  sans  règle.  » 

16,  Galbe.  —  Bonne  grâce,  agréments.  Ancien  mot  gaulois  qui  signifiait 
gros  et  gras,  et  qui,  pour  ce  motif,  donné  comme  surnom  à  un  ancêtre 
de  l'empereur  Galba,  est  demeuré  à  la  famille. 

20,  Folastrant.  —  Var.  de  88  :  aueugle. 

20,  Ceps.  —  Aux  fers,  dans  les  chaînes;  du  latin  cippus,  entrave. 

30,  De  faire...  Socratique.  —  Var.  de  88  :  d'entrer  en  cette  noble  troque.  — 
Harde  signifie  troc,  changement,  et  ici  :  sacrifice,  concession. 

33,  Platon.  —  République,  V. 
286, 

1,  Préoccuper.  —  De  s'emparer,  avant  ses  compagnes,  de  la  gloire... 

20,  Nostre.  —  «  La  vertu  de  l'homme  et  celle  de  la  femme  sont  les  mèmeS;  » 
disait  Antistliône.  DioaÈNE  L.\erce,  VI,  12. 

22,  Paele.  —  Le  fourgon,  long  crochet  en  fer  dont  se  sert  le  boulanger  pour 
remuer  la  braise  du  four;  paele,  pelle  dont  il  se  sert  pour  enfourner  et 
retirer  les  pains.  L'un  et  l'autre  faisant  même  service  et  également  noircis 
par  les  cendres,  «  le  fourgon  se  moque  de  la  pelle  »  (dicton  populaire  qui 
se  dit  aussi  :  «  le  chaudron  se  moque  de  la  poêle  »)  peut  se  traduire  :  «  l'un 
vaut  l'autre  »,  ou  encore  ■•  qui  critique  les  autres,  n'est  pas  sans  y  prêter 
lui-même  ». 


CHAPITRE  VI. 

23,  Cocbes.  —  Au  xvi"^  siècle,  on  appelait  «  coches  »  des  voitures  et  aussi 
des  bateaux  affectés  aux  transports  publics,  tant  par  terre  que  par  eau.  — 
En  tant  que  voiture  le  coche  était  à  peu  près  le  carrosse  de  nos  jours,  un 
landau  ne  se  découvrant  pas. 
288, 

6,  Recueil.  —  Chez  les  Orientaux,  l'usage  est  autre;  c'est  à  celui  de  ces 
effets  qui  se  produit  par  la  bouclie,   provenant  de  vapeurs  émises  par 

*  l'estomac  et  témoignant  d'une  certaine  satisfaction  de  cet  organe  quand 
il  est  repu,  qu'ils  font  bon  accueil.  Ils  ne  se  gênent  aucunement  pour  le 
produire;  sa  manifestation  cliez  eux  ne  blesse  en  rien  la  bienséance,  et 
les  assistants  y  répondent  par  la  formule  sacramentelle,  J"^!  J,*srî 
(louange  à  Dieu),  qui  correspond  à  celle  de  ■<  Dieu  vous  bénisse  »,  que 
nous  répondons  à  ceux  qui  éternuent. 

7,  Aristote.  —  Problem..  33,  9. 

7,  Plutarque.  —  Dans  le  traité  intitulé  Les  Causes  naturelles,  11. 
32,  D'armes.  —  La  citation  qui  suit,  se  trouve  dans  le  Banquet,  dialogue 
que  Platox  consacre  à  l'amour  et  qu'il  termine  par  cet  éloge  de  Socratc 
qu'il  place  dans  la  bouche  d'Alcibiade. 
32,  Route.  —  Déroute.  V.  N.  I,  366. 
290, 

23,  Leuée.  —  Rompre  la  digue,  la  chaussée  qui  m'empêche  d'être  submergé. 

21,  Epicurus.  —  Diogène  Laerce,  X,  117. 

27,  Robe.  —  A  moi,  comme  à  chacun.  Dieu  donne  le  froid,  selon  qu'il  est 

vêtu  :  ■<  A  brebis  tondue,  Dieu  mesure  le  vent.  » 
29,  Desarmé.  —  M'aj^ant  peu  garni  de  force... 

32,  Littiere.  —  C'était  un  lit  reposant  sur  des  brancards,  qui  étaient  portés 
d'ordinaire  par  des  chevaux,  surtout  quand  c'était  une  litière  de  voyage. 
292, 

2,  Esgallement.  —  Les  navires,  à  cette  époque,  marchaient  soit  à  la  voile 
(vaisseaux),  soit  à  la  rame  (galères). 
2,  Toue.  —  Remorque;  d'où  touage,  ce  procédé  de  remorquage  établi  sur  la 


NOTES.         LIV.  III,  CH.  VI.         VOL.  III,  PAG.  292.  Fc.649 

Seine,  dans  la  traversée  de  Paris,  au  moyen  d'une  chaîne  reposant  sur  le 
lit  du  fleuve  et  sur  laquelle  se  hèlent  les  bateaux  remorqueurs. 

15,  Pères.  —  Tout  le  xv°  siècle  est  rempli  des  guerres  de  la  Hongrie  contre 
la  Turquie. 

16,  Rondelier.  —  Soldat  armé  d'une  rondelle  ou  rondache,  sorte  de  bouclier, 
ainsi  nommé  parce  qu'il  était  rond,  au  lieu  d'être  oblong. 

18,  Pauesade.  —  Ou  pavoisade,  garniture  de  pavois  ou  boucliers  juxta- 
posés en  grand  nombre  que  l'on  plaçait  au-dessus  du  pont  des  bateaux 
armés  en  guerre,  pour  mettre  de  tous  côtés  à  l'abri  des  traits  ceux  qui 
servaient  à  bord,  rameurs  et  autres. 

18,  Galliotte.  —  Galiote.  —  Bateau  de  petite  grandeur. 

25,  Logis.  —  Un  poste,  une  position,  un  cantonnement,  un  bivouac. 

26,  Impost.  —  Impotent,  peu  dispos. 

28,  Peinture.  —  Semblable  à  ceux  que  je  viens  de  décrire. 

30,  Neantise.  —  Fainéantise. 

31,  Race.  —  Ces  rois  sont  désignés  dans  l'histoire  sous  le  nom  de  «  rois 
fainéants  »,  parce  qu'ils  étaient  dépourvus  de  toute  autorité  et  que  l'exer- 
cice du  pouvoir  était  entièrement  aux  mains  des  maires  du  palais.  Ils 
commencent  à  Thierry  III  (673)  qui  se  laissa  gouverner  par  Ebroïn,  puis 
par  Pépin  d'Héristal,  et  prennent  fin  à  Childéric  III  (752),  qui  fut  détrôné 
par  Pépin  le  Bref,  son  maire  du  palais. 

32,  Bœufs. 

«  Quatre  bœufs  attelés,  d'un  pas  tranquille  et  lent. 
Promenaient  dans  Paris  le  monarque  indolent.  »  Boileao. 

34,  Luy.  —  Et,  avec  lui,  une  jeune  musicienne  (la  comédienne  Cytheris). 
Plutarque,  Antoine,  3;  Cicéron,  Philippic.,  II,  24;  Pline,  Hist.  nat.,  VIII, 
16. 

34,  Heliogabalus.  —  JE\..  Lampridius,  Hellog.,  28,  29. 
294, 

I,  Nud.  —  En  des  temps  plus  rapprochés,  semblables  exhibitions  se  sont 
produites.  A  l'entrée  solennelle  à  Paris  de  Charles  VI  et  d'Isabeau  de 
Bavière,  dans  le  bassin  d'une  des  places  publiques,  s'ébattaient  deux  belles 
filles  entièrement  nues.  —  Lors  de  son  entrée  à  Anvers,  Charles-Quint  fut 
escorté  d'un  essaim  de  belles  jeunes  filles  de  la  société,  plus  ou  moins 
nues.  —  Vers  1880,  à  l'inaugui-ation  à  Vienne  (Autriche)  du  nouvel  Opéra, 
le  directeur,  a-t-il  été  dit,  fit  défiler  devant  lui,  dans  une  fête  intime,  le 
corps  de  ballet  au  grand  complet,  chaque  danseuse,  sans  aucun  voile, 
portant  sur  l'épaule  une  lampe  allumée,  soutenue  à  la  manière  antique. 
3,  Rouler.  —  L'historien  Flavius  Vopiscus,  Firmus,  6,  ne  dit  pas  que  Fir- 
mus  attelait  des  autruches  à  son  char,  mais  qu'assis  sur  elles,  il  semblait 
voler  avec  elles;  il  dit  aussi  qu'il  montait  des  hippopotames  et  accomplis- 
sait d'autres  prouesses  du  même  genre. 

13,  Roy.  —  Discours  à  Nicoclès. 

17,  Parure.  —  N'ayant  pas  d'autre  moyen  de  me  faire  distinguer,  et  cela 
m'allait  bien. 

18,  Pleurent. —  Il  est  des  hommes  auxquels  de  beaux  habits  ne  conviennent 
pas. 

21,  Demosthenes.  —  III"  Olynthienne. 

25,  Tbeopbrastus.  —  C'est  Cicéron,  De  Off'.,  II,  16,  qui  est  Fauteur  de  cette 
critique. 

27,  Aristote.  —  Cicéron,  De  Off.,  II,  16. 

28,  Commune.  —  La  populace. 

30,  L'emploitte.  —  La  dépense.  Montaigne  continue  à  reproduire  les  pensées 

'de  Cicéron,  De  0/f.,  17. 
34,  Grégoire  treizième.  —  S'est  surtout  rendu  célèbre  par  la  réforme  du 

calendrier  Julien;  était  très  versé  dans  la  jurisprudence;  aimait  les  lettres 

et  les  arts  et  embellit  Rome  de  plusieurs  édifices;  fit  célébrer  par  d'odieuses 

réjouissances  la  S. -Barthélémy. 


Fc.650  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

35,  Catherine.  —  Catherine  de  Médicis,  qui  fit  commencer  les  Tuileries  et 
encouragea  les  travaux  de  Bernard  Palissy,  quand  il  eut  découvert  l'é- 
mail. Quant  au  Pont-Neuf,  jeté  sur  la  Seine  à  Paris  où  il  existe  encore 
sous  ce  nom,  commencé  en  1578  sous  Henri  III,  ses  travaux  furent  inter- 
rompus de  1580  à  1601,  et  il  ne  fut  achevé  qu'en  1604,  sous  Henri  IV. 
296, 

9,  Pourtant  —  C'est  pour  cela  que... 

10,  Porter.  —  Var.  de  88  :  aporter. 

11,  Boëte.  —  Sa  cassette  particulière  (distincte  du  trésor  public). 

12,  Mien .  —  Plutarque,  Galba,  5.  —  Autres  temps,  autres  mœurs  :  N'avons- 
nous  pas  vu  en  ces  temps-ci  un  Président  de  la  République,  élu  pour 
entrer  en  charge  un  mois  après,  s'abstenir  dans  l'intervalle  de  remplir  ses 
fonctions  de  Président  du  Sénat,  en  percevoir  nonobstant  les  émoluments 
et  croire  faire  largesse  en  faisant  abandon  de  ces  6.000  francs  au  person- 
nel inférieur  sous  ses  ordres,  à  la  grande  admiration  de  tous.  En  équité, 
sinon  en  conscience,  les  avait-il  gagnés  et  pouvait-il  vraiment  dire  comme 
Galba  :  «  Ce  n'est  pas  du  public,  c'est  du  mien.  >■ 

17,  Sien.  —  Aujourd'hui,  et  nous  ne  saurions  le  regretter,  les  recettes  bud- 
gétaires des  états  sont  moins  que  par  le  passé  à  la  dévotion  des  souverains, 
qui  en  usaient  comme  ils  l'entendaient;  chefs  d'état,  rois  ou  autres,  ont 
actuellement  leurs  revenus  et  leur  liste  civile,  absolument  distincts  du  tré- 
sor public,  mais  tout  abus  n'a  pas  de  ce  fait  disparu.  11  y  en  a  qui  thésauri- 
sent comme  de  bons  bourgeois,  qui  se  livrent  à  l'agiotage,  jouant  sur  les 
fonds  publics  en  connaissance  de  cause  comme  du  reste  la  plupart  des 
membres  du  Gouvernement,  grâce  aux  renseignements  qu'ils  ont  avant 
tous  autres  et  avec  plus  de  certitude  des  événements  qui  peuvent  influer 
sur  les  cours,  il  leur  arrive  même  de  les  faire  naître  pour  servir  leurs  intérêts. 
Nombreux  sont  ceux  qui  placent  leurs  fonds  à  l'éti-anger  pour  se  ménager 
des  ressources  contre  les  fluctuations  de  la  politique;  ils  n'entament 
même  que  bien  peu  leur  liste  civile  dans  leur  représentation  :  quand  ils  ont 
des  cadeaux  à  faire,  des  prix  à  allouer,  ils  puisent  généreusement  dans  les 
manufactures  de  l'État,  Sèvres,  les  Gobelins,  dont  c'est  présentement  à  peu 
près  l'unique  raison  d'être,  dans  les  haras  nationaux;  et,  à  tout  propos  : 
voyages,  réceptions  de  souverains  ou  visites  rendues,  expositions,  etc.,  se 
font  allouer  des  crédits  supplémentaires;  toutes  choses  qu'il  est  bon  de 
connaître  pour  ne  pas  admirer  outre  mesure  un  faste  qui,  en  réalité,  est 
un  surcroît  de  charges  pour  le  contribuable,  lequel,  malgré  l'apparence,  en 
fait  tous  les  frais. 

21,  Soy.  —  Ce  principe  a-t-il  jamais  existé  autrement  qu'en  théorie?  on  en 
douterait  à  voir  ce  qui  en  est  aujourd'hui,  où  chaque  jour,  au  grand  pré- 
judice de  nos  crédits  budgétaires,  on  crée  et  maintient  nombre  d'emplois 
dont  le  besoin  ne  se  fait  nullement  sentir.  Est-il  rien  de  plus  typique  à  cet 
égard  que  le  cas  des  sous-préfets,  devenus  une  superfétation  depuis  que 
les  moyens  de  communication  ont  pris  le  développement  que  l'on  sait 
(chemins  de  fer,  automobiles,  télégraphe,  téléphone,  machines  à  écrire)? 
leur  inutilité  est  reconnue  de  tous,  leur  suppression  est  périodiquement 
votée  ;  on  les  conserve  quand  même  parce  que  ce  sont  de  précieux  agents 
électoraux,  et  que  leurs  emplois  sont  des  ressources  tout  particulièrement 
décentes  et  avantageuses  pour  récompenser  ce  genre  de  services,  ou  encore 
pourvoir  les  créatures  gouvernementales,  en  même  temps  que  se  ménager 
l'affection  des  villes  qui  en  sont  dotées,  et  à  l'importance  desquelles  elles 
ajoutent;  ici,  comme  partout,  la  politique  intérieure  intervenant,  l'intérêt 
général  est  sacrifié  à  l'intérêt  particulier. 

22,  D'elle.  —  C'est  pourquoi  en  architecture,  par  exemple,  il  n'y  a  pas  de 
véritable  beauté  sans  l'utilité,  et  que  dire  :  «  Voilà  un  bel  édifice  »,  n'a  pas 
de  sens;  on  devrait  dire  :  «  Voilà  une  belle  église,  un  beau  palais.  »  Dans 
l'appréciation,  le  but  poursuivi,  qui  est  ici  la  destination,  est  la  première 
condition  dont  il  y  a  à  tenir  compte.  —  C'est  ce  qui  fait  qu'une  armée  dont 
la  valeur  militaire  est  en  décroissance,  une  magistrature  dont  les  arrêts 


NOTES.         LIV.  III,  CH.  VI.         VOL.  III,  PAG.  296.  Pc.6i)l 

prêtent  à  suspicion,  un  gouvernement  qui  n'a  pas  pour  unique  objectif 
l'intérêt  public  et  la  défense  de  la  société,  quoi  qu'ils  fassent  d'autre  part, 
sont  jugés  exclusivement  sur  ces  points  essentiels  qui  sont  leur  seule  raison 
d'être. 

34,  Dionysius.  —  Apophth.  de  Plutarque. 

35,  Apprendroy.  —  J'apprendrais  plutôt  à  un  roi  ce  proverbe,  etc.  Cette 
sentence  que  Montaigne  traduit  après  l'avoir  citée  est  tirée  de  Plutarque, 
Si  les  Athéniens  ont  été  plus  excellents  en  armes  qu'en  lettres,  4,  où  Corinne 
s'en  sert  pour  faire  sentir  à  Pindare  qu'il  avait  entassé  trop  de  fables  dans 
une  de  ses  poésies. 

298, 

10,  Practique.  —  Gagne. 

16,  Telle  manière.  —  Var.  de  88  :  bouffons,  maquereaux,  menestriers  et 
telle  racaille... 

35,  Assenait.  —  Plaçait. 
300, 

17,  Princes.  —  Xéxophox,  Ci/rop.,  VIII,  9  et  suivants. 

21,  Excez.  —  Chez  les  Romains,  les  jeux  publics  faisaient  partie  du  culte.  Il 
y  en  avait  de  diverses  sortes;  les  principaux  étaient  les  «  .Jeux  Romains  » 
ou  «  Grands  Jeux  »,  institués  par  Tarquin  l'Ancien  (603);  ils  se  célébraient 
du  4  an  P2  septembre,  tous  les  travaux  et  affaires  publics  étaient  interrom- 
pus pendant  leur  célébration. 

31,  Coffre.  —  Cicérox,  De  Off.,  II,  15.  —  Ces  reproches  ne  lui  profitèrent 
guère  :  Alexandre  se  montra  toute  sa  vie  d'une  prodigalité  extrême.  En 
témoignage  d'admiration,  il  envoie  50  talents  (250.000  fr.)  au  philosophe 
Xénocrate,  qui  les  refuse  d'abord,  lui  faisant  répondre  «  qu'il  a  lui-même 
à  satisfaii'e  à  plus  de  besoins  que  lui  »  ;  et  finit  par  accepter  30  mines 
(2.700  fr.)  pour  ne  pas  désobliger  ses  envoyés  désolés  de  son  refus.  —  A  un 
acteur  qui  a,  dans  son  rôle,  inséré  un  vers  à  sa  louange,  10  talents 
(50.000  fr.).  —  Un  de  ses  soldats  conduisant  un  mulet  de  son  trésor,  l'animal 
étant  fatigué  et  son  conducteur  pour  le  soulager  ayant  pris  la  charge  sur 
son  dos,  Alexandre  l'en  gratifie.  —  A  un  courtisan  tombé  en  défaveur,  au- 
quel il  rendait  ses  bonnes  grâces  et  qui  lui  dit  :  «  Daignez  m'en  accorder 
un  gage  »,  5  talents  (25.000  fr.).  —  A  l'occasion  de  son  mariage  avec  Sta- 
tira,  fille  de  Darius,  il  acquitte  toutes  les  dettes  des  Macédoniens  de  son 
armée,  9.870  talents  (environ  50.000.000  fr.).  Pour  les  obsèques  et  le  tom- 
beau d'Héphestion,  il  dépense  plus  de  12.000  talents  (environ  60.000.000  fr.). 
—  Sur  la  fin,  il  avait  fixé  la  dépense  de  sa  table;  en  dehors  de  tous  autres 
repas,  100  mines  (9.000  fr.)  étaient  quotidiennement  allouées  pour  le  sou- 
per, auquel  à  la  vérité  étaient  chaque  jour  conviés  soixante  à  soixante-dix 
de  ses  amis,  ce  qui  constituait  encore  une  dépense  de  150  à  160  fr.  par 
tête. 
302, 

7,  Probus.  —  Vopiscus,  Probus,  19.  Cet  auteur  donne  une  description  dé- 
taillée de  ces  jeux. 

15,  Sufficit.  —  Le  cens  fixé  par  la  loi  pour  appartenir  à  l'ordre  équestre  a 
varié  suivant  les  époques;  au  temps  de  César,  il  était  de  400.000  sesterces 
(77.500  fr.). 

24,  Vermillon.  —  Composition  de  soufre  et  de  mercure  d'un  beau  rouge 
vif. 

25,  Storax.  —  Sorte  de  résine  jaune,  brune  ou  rougeàtre,  d'odeur  agréable. 
41,  Surgeons.  —  Sources;  du  latin  surgere,  sourdre. 

45,  Labourez.  —  Travaillés;  du  latin  laborare  qui  a  cette  signification  et 
qui  vient  lui-même  de  labor,  travail,  d'où  labourage,  le  travail  par  excel- 
lence. 
304, 

6,  Retia.  —  Citation  que  Montaigne  a  traduite  avant  de  la  reproduire. 
10,  Esprits.  —  Bien  autrement  inventifs  que  ne  sont... 
14,  Pas.  —  La  puissance  de  la  nature  est  infinie  et  l'esprit  humain  ne  saurait 


Fc.652  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

préjuger  ce  que  progressivement  il  lui  sera  donné  d'en  découvrir  et  d'en 
faire  application,  jusqu'à  ce  qu'une  de  ces  évolutions  prévues  ou  impré- 
vues fasse  prochainement  ou  dans  des  milliards  de  siècles,  c'est  tout  un 
pour  l'éternité,  disparaître  l'homme  à  son  tour.  Quant  à  ces  allées  et 
venues  de  la  science  qui  font  dire  à  Montaigne  que  nous  tournons  toujours 
dans  le  même  cercle,  ce  qui  est  vrai  encore  et  sera  éternellement  en  ce  qui 
touche  les  idées  et  les  institutions  humaines,  elles  provenaient  de  ce  que 
jadis  l'imprimerie  ne  fixait  pas  et  ne  propageait  pas  comme  aujourd'hui 
chaque  progrès  réalisé  ;  toute  invention,  tout  perfectionnement  était  local 
et  momentané,  au  lieu  d'entrer  comme  maintenant  immédiatement  et  à 
toujours  dans  le  domaine  public  ;  aussi  l'invention  de  l'imprimerie  est-elle, 
sans  conteste,  la  plus  considérable  qui  se  soit  produite;  par  elle,  rien  ne  se 
perd,  tout  progresse  en  bien  comme  en  mal,  seul  l'homme  ne  change  pas- 

"23,  Poetae.  —  Les  deux  derniers  vers  de  cette  citation  sont  employés  ici 
dans  un  sens  tout  différent  de  celui  qu'ils  ont  dans  Lucrèce. 

24,  Solon.  —  Dans  le  Timée.  — L'Egypte  fut  un  des  premiers  états  du  monde 
•connu  des  anciens  à  se  civiliser,  son  origine  se  perd  dans  la  nuit  des 
temps;  les  calculs  les  plus  modérés  font  régner  vers  l'an  2500  Menés, 
le  premier  de  leurs  rois  dont  nos  histoires  font  mention. 

31,  Formarum.  —  Montaigne  a  modifié  les  deux  derniers  mots  de  cette  ci- 
tation pour  l'approprier  à  son  sujet,  qui  est  tout  autre  que  dans  Cicéron. 

42,  Auparauant.  —  Les  Chinois  font  remonter  leur  histoire  à  une  très  haute 
antiquité;  il  semble  vraisemblable  d'admettre  que  leur  premier  législateur 
vivait  vers  le  XXX°  siècle,  et  eux-mêmes  font  partir  de  l'an  2637  leur 
ère  historique.  Longtemps  avant  les  Européens,  ils  ont  connu  la  boussole, 
l'imprimerie,  la  poudre  à  canon,  mais  ces  inventions  sont  demeurées  chez 
eujç  à  l'état  rudimentaire. 
306, 

7,  Cettuy-là.  —  Le  poète  Lucrèce,  auteur  du  vers  qui  précède  et  de  ceux 
qui  suivent. 

14,  Autre.  —  L'Amérique,  que  Christophe  Colomb  venait  de  découvrir  en 
1492. 

16,  Heure.  —  Il  est  hors  de  doute  qu'à  l'heure  actuelle,  toute  la  surface  ha- 
bitable de  la  terre  nous  est  connue;  c'est  ce  qui  fait  que  les  excursions 
dans  les  régions  polaires  arctique  et  antarctique  sont  de  si  peu  d'intérêt,  en 
dehors  de  la  notoriété  qu'y  recherchent  ceux  qui  s'y  livrent;  mais  il  est  non 
moins  indubitable  que  des  modifications  considérables  peuvent  se  produire 
sur  la  surface  terreètre;  que  de  nouveaux  continents  peuvent  surgir, 
d'anciens  disparaître,  sous  l'action  des  forces  constamment  en  travail  dans 
l'intérieur  de  notre  planète;  comme  aussi  de  notables  changements  cli- 
matériques  se  produire,  le  Gulf  Stream  par  exemple  se  modifiant,  ou 
d'autres  courants  s'établissant,  et  les  conditions  dans  lesquelles  elle  est 
habitée  s'en  trouver  pareillement  modifiées. 

22,  Siècle  —  C.-à-d.  si  de  ce  que  dit  ce  poète  pour  prouver  la  jeunesse  de 
son  siècle,  nous  concluons  que  notre  monde  avance  vers  sa  fin... 

26,  Contagion.  —  Par  notre  communication  avec  lui. 

30,  Practiqué.  —  Gagné. 

32,  Eulx.  —  Les  Américains. 

34,  Cusco.  —   Les  Péruviens  regardaient  cette  ville  comme  sacrée;  on  y 
admirait  le  temple  du  soleil,  l'un  des  plus  vastes  et  des  plus  riches  qui 
aient  jamais  existé,  et  le  palais  des  Incas  (dynastie  régnante  lors  de  la 
conquête  du  Pérou  par  les  Espagnols). 
308, 

19,  Dure.  —  Allusion  aux  casques,  cuirasses,  hauberts,  brassards,  cuis- 
sai'ds,  etc..  en  métal  que  portaient  Fernand  Cortez,  Pizarre  et  leurs  com- 
pagnons. 

26,  Inexpérimenté.  —  Si  n'ayant  aucune  idée  des  effets  de  ces  armes,  il  eût 
été  soudainement  attaqué. 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  VI.        VOL.  III,  PAG.  310.        Fc.6S3 

310, 

28,  Mercadence.  —  Les  avantages  du  commerce,  du  latin  merces,  marchandise. 

34,  Misérables.  —  Dans  les  Essais  apparaît  partout  ce  noble  sentiment 
d'humanité,  premier  bienfait  de  la  philosophie:  mais  il  ne  se  montre  nulle 
part  plus  énergique  et  plus  éloquent  que  lorsque  Montaigne  portant  ses 
regards  sur  le  Nouveau  Monde,  n'y  aperçoit  de  tous  côtés  que  des  bour- 
reaux et  des  victimes.  Abbé  .Iay. 

34,  Mines.  —  Il  s'agit  ici  de  l'expédition  (1513  à  1517)  de  Balboa,  officier 
espagnol  qui,  à  la  recherche  des  régions  où  gisait  l'or  trouvé  au  Mexique, 
au  moment  de  sa  conquête,  parvint,  par  l'isthme  de  Panama,  jusqu'à  l'A- 
mérique du  Sud,  mais  dut  rétrograder,  n'avant  pas  de  troupes  suffisantes. 

312, 

33,  Enfance.  —  Voilà  comme  balbutiaient  ces  prétendus  enfants. 

36,  Cannibales.  —  Ceci  donne  une  idée  de  ce  qu'étaient  mes  Cannibales, 
c.-à-d.  ces  hommes  du  Nouveau  Monde  que  nous  traitons  de  sauvages. 

39,  Peru.  —  Atahualpa,  dernier  roi  du  Pérou,  de  la  famille  des  Incas.  Fait 
prisonnier  par  Pizarre,  il  fut,  quelques  mois  après  (1533),  étranglé  par  son 
ordre.  Zakate,  II,  7;  de  la  Veca,  1,  36;  Gomera,  117;  Herrera,  V,  111,  4  et 
autres  historiens  de  la  conquête  de  l'Amérique. 
314. 

9,  Preuue.  —  On  forma  contre   lui  une  accusation  aussi  fausse  que  les 
preuves  qu'on  en  donnait,  savoir  qu'il... 

19,  Mexico.  —  Guatimozin,  dernier  empereur  indien  de  Mexico.  Fait  pri- 
sonnier par  Fernand  Cortez  en  1521,  après  avoir  vainement  tenté  de 
défendre  sa  capitale  contre  ce  chef  espagnol,  il  fut  d'abord  traité  avec 
générosité,  mais  plus  tard  eut  à  endurer  les  plus  cruels  tourments  dans  le 
but  de  lui  faire  dénoncer  où  se  trouvaient  ses  trésors  et  finalement  fut 
pendu  en  1522.  Bernal  Diaz  del  Castillo,  157;  Gomera,  146;  Herrera,  III, 
11-8;  Torque.mada,  I,  et  autres  historiens  de  l'Amérique. 

.32,  Cour.  —  Le  cacique  de  Tacuba. 

35,  Mercy...  plus.  —  Var.  de  88  :  confié  de  dire  ce  qu'il  en  sçauoil,  pour  se 
redimer  de  celle  peine  Insupporlable. 

316, 

3,  Roy.  —  Disons  plus,  un  roi  si  grand... 

4,  Honteuse.  —  Var.  de  88  :  vaine. 
12,  Ventent.  —  Var.  de  88  :  publient. 

24,  De  Castille.  —  Var.  de  88  :  d'Espagne. 

25,  Mal  voulus.  —  Haïs,  à  qui  on  veut  du  mal.  Diego  d'Almagro  qui  le 
premier  pénétra  dans  le  Chili,  et  qui  dans  le  principe  avait  marché  d'ac- 
cord avec  Pizarre  le  conquérant  du  Pérou,  battu  par  lui  à  Cusco,  y  fut 
décapité  par  son  ordre  (1538).  Son  fils,  ralliant  ses  partisans,  vengea  son 
père,  par  le  meurtre  de  Pizarre  (1541);  et  peu  après  éprouva  le  même  sort 
que  lui,  dans  le  même  lieu  (1542).  Gonzalès  Pizarre,  frère  du  précédent,  se 
substitua  a  lui  au  Pérou,  où  pendant  trois  ans  il  régna  en  maître,  Jusqu'à 
ce  que  par  ordre  de  Charles-Quint  il  fut  arrêté  et  mis  à  mort  comme 
rebelle  (1544). 

31,  Prudent.  —  Philippe  II,  roi  d'Espagne.  Sous  son  règne  (1556  à  1598),  les 
colonies  espagnoles  de  l'Amérique  et  des  Indes  rapportèrent  immensément 
d'or  et  d'argent;  mais  ce  prince  consomma  follement  toutes  ces  ricliesses 
dans  ses  vains  projets  de  monarchie  universelle,  et  à  sa  mort,  le  trésor 
était  vide  et  obéré. 
318, 

2,  Commerce.  —  Employé  au  commerce,  en  achat  de  marchandises;  em- 
ploite  signifie  ici  achat  ou  emplette,  comme  on  écrirait  et  prononcerait 
aujourd'hui. 
17,  Paumes.  —  Environ  cinq  mètres. 
320, 

6,  Perennes.  —  D'eaux  vives  coulant  continuellement,  ne  tarissant  pas,  du 
latin  perennis,  continu,  permanent. 


Fc.654  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

9,  Chef.  —  Au  bout,  à  la  fin  de  la  journée  de  marche,  de  chaque  étape. 

17,  Apres.  —  Voir  à  ce  sujet  et  sur  tout  ce  qui  précède.  Robertson,  Histoire 
de  l'Amérique,  liv.  VIII.  L'auteur,  dans  cet  ouvrage,  s'applique  à  réduire 
dans  une  juste  mesure  l'exagération  des  premiers  historiens  de  la  conquête 
du  Nouveau  Monde.  —  A  ce  travail  gigantesque  qu'était  cette  route  de 
Quito  à  Cusco,  on  peut  assimiler  le  Grand  Canal  impérial  de  la  Chine  qui 
met  en  relations  Pékin,  la  capitale  du  Nord,  avec  Nankin,  la  capitale  du 
Sud,  et  avec  Canton;  ce  canal  a  été  commencé  au  IX»  siècle  av.  J.-C.  et  les 
travaux  en  sont  continués  jusqu'à  nos  jours;  il  offre  une  superbe  voie 
navigable  de  2.700  kil.  sans  compter  de  nombreux  embranchements.  Ce 
canal  peut  faire  le  pendant  de  la  grande  muraille  élevée  également  en 
Chine  sur  la  frontièi'e  N.  et  N.-E.  pour  protéger  l'empire  contre  les  incur- 
sions des  nomades  :  Mongols,  Mandchous,  Tartares,  et  qui,  formée  d'un 
parapet  de  terre,  revêtu  de  briques  dans  certaines  de  ses  parties,  s'étend 
sur  une  longueur  de  1.700  kilomètres,  a  6  ou  8""  d'élévation  et  forme  une 
sorte  de  chaussée  pavée,  assez  large  pour  donner  passage  à  5  ou  6  cava- 
liers de  front;  il  est  aujourd'hui  ruiné  en  bien  des  endroits.  G''  Niox. 

26,  Terre.  —  A  la  batailie  de  Caxamalca  (1532).  De  la  Vega,  II,  1,  2b.  Ce  fut 
Pizarre  lui-même  qui  le  précipita  ainsi  de  sa  chaise  à  porteurs.  —  Avaller, 
c'est  mettre  à  val.  jeter  bas. 


CHAPITRE  VII. 

322, 

2,  Tomber.  —  Par  exemple,  par  abdication  comme  firent  Dioclétien, 
Charles-Quint,  Marie-Christine;  ou  encore,  comme  les  chefs  d'état  élus 
pour  un  temps  déterminé  et  qui  quittent  le  pouvoir  à  l'expii'ation  de  leur 
mandat,  ou  spontanément  parce  qu'ils  ne  veulent  pas  se  prêter  à  des 
exigences  que  réprouve  leur  conscience. 

9,  D'affaire.  —  De  difficulté. 
15,  Esgarée.  —  Détournée. 

25.  L'autre.  —  César.  —  En  traversant  les  Alpes,  dit  Plutarque,  César,  3, 
il  passa  par  une  bourgade  de  Barbares,  habitée  par  quelques  malheureux 
ayant  grand'peine  à  vivre;  dans  son  entourage,  on  se  demandait  en  plai- 
santant si  là  aussi  on  intriguait  pour  obtenir  les  charges  publiques  et  s'il 
y  avait  des  compétiteurs.  César,  prenant  la  parole,  dit  :  «  Je  ne  sais,  mais 
quant  à  moi.  je  préférerais  être  le  premier  ici,  que  le  second  à  Rome.  » 

28,  Incognu.  —  Ni  avoir  à  me  débattre  aux  portes  avec  un  huissier,  comme 
un  misérable  inconnu... 

30,  Moyen.  —  L'aurea  mediocritas  d'HoRACE. 

•  La  médiocrité  est  le  trésor  des  sages.  »  Voltaire. 

«  0  médiocrité, 
Mère  des  bons  esprits,  compagne  du  repos.  »  La  Fontaine,  Les  sovhails. 

•  Si  le  bonheur  nous  est  permis, 
Il  n'est  point  sous  le  chaume,  il  n'est  point  sur  le  trône  : 
Voulons-nous  l'obtenir,  amis? 
La  médiocrité  le  donne.  » 

32,  Autrement.  —  Que  désiré. 
324, 

2,  A  l'equipoUent.  -~  Par  contre,  en  revanche,  en  compensation,  en  récom- 
pense. 
7,  Encombriers.  —  Accidents,  empêchements,  encombrements. 

10,  Regulus.  —  Vainqueur  des  Carthaginois  en  Sicile  et  en  Afrique,  il  fut 
à  son  tour  défait  par  eux  et  fait  prisonnier  (256).  Quelques  années  après, 
en  250.  les  Carthaginois  lui  donnèrent  la  liberté  sur  parole,  afin  qu'il 


NOTES.        LIV,  III,  CH.  VII.        VOL.  III,  PAG.  324.  Fc.655 

accompagnât  la  délégation  envoyée  par  eux  à  Rome  pour  traiter  de 
l'échange  des  prisonniers  ;  mais  au  lieu  d'appuyer  cette  mesure,  il  ne  prit 
la  parole  au  Sénat  que  pour  en  dissuader  ses  concitoyens,  et,  après  avoir 
parlé  ainsi  contre  lui-même,  ne  craignit  pas  de  revenir  prendre  ses  fers  à 
Carthage;  on  l'y  fit  périr  au  milieu  d'atroces  supplices. 

12,  Luy.  —  CicÉRON,  De  Fin.  bon.  et  mal.,  II,  20,  auquel  Montaigne  a  em- 
prunté ce  parallèle  entre  Th.  Balbus  et  Régulus,  donne  sans  conteste  la 
préférence  à  ce  dernier  :  «  La  vertu,  dit-il,  ne  laisse  pas  de  proclamer 
plus  heureux  que  Thorius  vidant  sa  coupe  sur  un  lit  de  roses,  Régulus 
qui,  retourné  de  Rome  à  Carthage  sans  y  être  contraint  autrement  que 
par  la  parole  qu'il  en  avait  donnée  à  ses  ennemis,  périt  au  milieu  des  plus 
cruels  tourments,  déchiré  par  la  faim  et  les  veilles.  » 

13,  Mienne.  —  Les  comparer  à  la  mienne... 

16,  Aduenir.  —  Ce  mot  a  ici  le  sens  d'atteindre,  comme  le  mot  «  aveindre  » 
qui  est  au  commencement  de  ce  chapitre;  tous  deux  dérivent  du  latin 
advenive. 

17,  Vsage.  —  Cette  manière  de  voir,  Montaigne  a  eu  occasion  de  la  traduire 
en  fait,  lorsque  prirent  fin  ses  fonctions  de  Maire.  Il  était  absent,  sa  cliarge 
allait  expirer,  il  n'avait  plus  qu'à  présider  à  l'élection  de  son  successeur; 
à  ce  moment  la  peste  sévissait  avec  intensité  à  Bordeaux;  il  ne  crut  pas, 
dans  cette  situation,  devoir  s'y  rendre.  Cette  attitude,  contraire  aux  idées 
de  nos  jours,  si  différente  de  celle  tenue  par  Rotrou  dans  le  siècle  suivant, 
dans  des  circonstances  presque  identiques,  lui  a  été  vivement  reprochée  en 
ces  derniers  temps;  jusque-là  on  n'y  avait  pas  prêté  attention,  parce  qu'il 
était  au  terme  de  son  mandat  et  que  ce  n'était  pas  en  opposition  aux 
idées  de  l'époque,  bien  que  se  soient  produites  à  ce  moment  de  très 
honorables  exceptions.  En  cette  occasion,  Montaigne  a  été  conséquent 
avec  lui-même;  homme  de  devoir,  il  ne  lui  convenait  pas  d'être  sans 
nécessité  un  héros.  «  Rien  de  trop  »  était  aussi  du  nombre  de  ses  devises. 

20,  Perse.  —  Hérodote,  III,  83.  —  A  la  mort  de  Cambyse,  roi  de  Perse 
(522j,  un  mage  se  fit  passer  pour  son  frère  Smerdis,  que  lui-même  avait 
fait  mettre  à  mort  (V.  III,  178  et  N.  Fié),  et  lui  succéda.  La  supercherie 
ayant  été  reconnue,  il  se  forma  un  complot  de  sept  grands  de  l'empire 
(Otanez  était  du  nombre)  qui  tuèrent  l'usurpateur  (V.  II,  332  et  N.  Deux). 
Pour  le  remplacer  sur  le  trône,  il  fut  convenu  entre  les  conjurés  que  le 
premier  d'entre  eux  dont  le  cheval  hennirait  au  lever  de  l'aurore  aurait  la 
couronne.  Ce  fut  Darius  qui  l'obtint  par  l'artifice  de  son  écuyer  qui  avait 
envoyé  d'avance  une  cavale  au  lieu  du  rendez-vous.  C'est  à  cette  épreuve 
que  renonça  Otanez,  aux  conditions  qu'indique  Montaigne. 

25,  Commande.  —  Ayant  autant  d'avereion  à  commander  qu'à  être  cpm- 
mandé. 

29,  Desmesurée.  —  Cette  situation  s'est  bien  modifiée  ;  dans  les  monarchies 
constitutionnelles,  comme  dans  certaines  républiques,  qui  ne  diffèrent 
qu'en  ce  que,  là,  la  royauté  est  à  vie  et  héréditaire,  au  lieu  qu'ici,  le  pré- 
sident est  nommé  à  l'élection  et  pour  un  temps  déterminé,  le  chef  de 
l'état  a  plus  le  pouvoir  d'empêcher  que  celui  d'agir.  Nonobstant,  si  res- 
treint qu'il  soit  devenu,  ce  pouvoir  est  encore  considérable  et  suffisant 
pour  prévenir  le  mal,  sous  condition  qu'il  soit  dévolu  à  un  homme  de  ca- 
ractère, qui  ne  soit  inféodé  à  aucun  parti,  et  qui,  au  lieu  de  toujours  céder, 
use  des  moyens  que  la  Constitution  met  à  sa  disposition,  pour  arrêter  ce 
qu'il  condamne  dans  son  for  intérieur  ou  même  dans  des  manifestations 
platoniques;  mais  combien  en  agissent  différemment,  trahissant  par  leur 
faiblesse  les  intérêts  qui  leur  sont  confiés.  A  Siéyès  revient  dans  les 
temps  modernes  l'honneur  de  cette  conception,  et  il  espérait  au  début 
faire  accepter  ces  fonctions  au  général  Bonaparte.  On  sait  quel  accueil  fut' 
fait  à  sa  proposition.  Ce  rôle  de  fétiche,  assez  semblable  à  celui  des  der- 
niers rois  de  la  race  mérovingienne,  qui  toutefois  n'est  telle  que  lorsque  la 
personnalité  n'en  impose  pas,  car  ici,  comme  en  tout,  tant  vaut  l'homme, 
tant  vaut  la  chose,  a  été  assez  exactement  défini  par  cette  boutade  humo- 


Fc.656  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

ristique  attribuée  au  roi  des  Belges  Léopold  I,  un  jour  que  le  Président  de 
son  conseil  des  ministres  cherchait  à  l'intéresser  aux  difficultés  avec 
lesquelles  il  était  aux  prises  :  «  Avez-vous  la  majorité?  Si  oui,  permettez 
que  j'aille  me  promener;  si  non,  allez-y  vous-même!  • 

326, 

4,  Finer.  —  Trouver,  disposer.  Signifie  proprement  :  mettre  à  fin,  venir  à 
bout  de  trouver. 

5,  Escossois.  —  Deux  ouvrages  d'auteurs  écossais. 

6,  Populaire.  —  L'auteur  qui  se  fait  l'avocat  du  gouvernement  par  le 
peuple. 

20,  Eux.  —  J.-J.  Rousseau  disait  :  «  Je  respecte  trop  M.  le  prince  de  Conti, 
pour  ne  pas  toujours  le  gagner  aux  échecs.  » 

27,  Faëes.  —  Enchantées. 

27,  Brîsson.  —  Plutarque,  Dv  contentement  ou  repos  de  Vesprit,  12,  dont  le 
fait  est  tiré,  appelle  ce  même  athlète  Crisson  dans  un  autre  de  ses  ou- 
vrages. Comment  discerner  le  flatteur  de  l'ami,  15. 

32,  Gaigné.  —  Saixt-Simon  rapporte  une  sincère  admonestation  du  duc  de 
Montausier,  gouverneur  du  Dauphin,  fils  de  Louis  XIV,  à  un  jeune  cour- 
tisan qui  se  laissait  toujours  vaincre  par  ce  prince  au  jeu  du  palet. 

34,  Crocheteur.  —  V.  N.  I,  542. 

35,  Troye.  —  Vénus,  dans  l'Iliade,  voulant  sauver  Enée  son  fils,  blessé  et 
sur  le  point  de  succomber  sous  les  coups  de  Diomède,  est  elle-même 
légèrement  blessée  au  bras. 

35,  Saincte.  —  Déesse. 
328, 

11,  Qualitez.  —  Les  bonnes  qualités  des  princes... 
18,  Qualité.  —  D'être  prince. 

25,  Tybere.  —  Il  ne  semble  pas  que  le  Sénat  l'omain  décernât  des  prix 
d'éloquence;  Suétone  ne  mentionne  que  le  refus  par  Tibère  du  surnom  de 
.<  Père  de  la  patrie  »  qui  lui  était  offert. 

27,  Ressentir.  —  Prévaloir. 

30,  Costé.  —  Penchant  un  peu  sur  le  côté.  Plutarque,  De  la  différence  entre 
le  flatteur  et  l'ami,  8. 

31,  Dionisius.  —  Plutarque,  De  la  différence  entre  le  flatteur  et  l'ami,  8. 

34,  Luy.  —  Philippe  de  Macédoine  ayant  eu  un  œil  crevé  au  siège  de  Mé- 
thone,  Clisophus,  un  de  ses  courtisans,  ne  parut  plus  devant  lui  qu'avec 
un  bandeau  sur  Toeil. 

34,  Greueures.  —  Hergnes  ou  hernies. 

35,  Plutarque.  —  De  la  différence  entré  le  flatteur  et  l'ami,  8:  mais  Montaigne 
a  légèrement  altéré  la  narration  du  fait  en  question. 

330, 

2,  Mitridates.  —  Plutarque,  De  la  différence  entre  le  flatteur  et  l'ami,  8. 

7,  Fauorinus.  —  Spartien,  Adrien,  15.  Favorinus  jouit  quelque  temps  de 
la  faveur  de  l'empereur  Adrien,  mais  finit  par  se  l'aliéner  par  ses  sar- 
casmes. 

10,  Asinius  PoUio.  —  Macrobe,  Saturn.,  II,  14. 

12,  Proscrire.  —  «  A  qui  peut  tout  prendre,  donne  ce  qu'il  demande.  » 

14,  Carrières.  —  Plutarque,  Du  contentement  de  l'espiHt,  10;  Diodore  de 
Sicile,  XV,  6,  7;  Diogène  Laerce,  III,  18  et  19.  —  Philo.xène  ayant  exprimé 
trop  franchement  à  Denj's  l'Ancien,  à  la  cour  duquel  il  vivait,  sa  pensée 
sur  des  vers  de  celui-ci,  le  tyran  l'envoya  aux  carrières  (lieux  d'où  on  extrait 
des  pierres);  quelque  temps  après,  en  étant  sorti  et  consulté  à  nouveau 

,  par  Denys  sur  le  mérite  d'une  pièce  nouvelle  qu'il  venait  de  composer,  au 
lieu  de  répondre,  il  se  contenta  de  dire  :  «  Qu'on  me  ramène  aux  carrières  »  : 
cette  fois,  le  maitre  se  mit  à  rire  et  pardonna.  —  Le  mot  est  devenu 
proverbial,  c'est  être  prêt  à  recommencer  ce  qui  vous  a  déjà  attiré  une 
injuste  persécution. 

14,  Esclaue.  —  Platon,  se  trouvant  à  Syracuse,  s'attira  par  sa  fi*ànchise  la 


NOTES.        LIV.  III,  GH.  VII.         VOL.  III,  PAG.  330.         Fc.Go7 

colère  de  Denys  l'Ancien,  qui  le  fit  vendre  comme  esclave  (398)  pour  le 
prix  de  vingt  mines  (1.822  fr.);  les  autres  philosophes  se  réunirent  pour  le 
racheter  et  le  renvoyèrent  en  Grèce,  en  lui  rappelant  comme  un  avis 
salutaire  qu'un  philosophe  doit  parler  à  un  tyran  le  plus  doucement  pos- 
sible. Plutarque,  Du  conlentement  de  l'esprit,  10;  Diodoke  de  Sicile,  XV,  0, 
7;  DioGÈNE  Laerce,  III,  18  et  19. 
15,  JEgine.  —  Le  cardinal  de  Richelieu  eut  un  pareil-  accès  do  jalousie 
littéraire  contre  Corneille;  et,  à  l'apparition  du  Cid,  il  fit  critiquer  la  pièce 
par  l'Académie  (1636);  par  la  suite,  il  revint  sur  cet  acte  de  faiblesse, 
accorda  une  pension  au  poète,  auquel  l'Académie  ouvrit  ses  portes  (1647). 


CHAPITRE  VIII. 

Chapitre  des  plus  intéressants,  dont  le  sujet  est  traité  à  fond  et  sans 
digressions  étrangères.  On  y  trouve  des  réflexions  sur  l'utilité  de  la 
conversation  que  Montaigne  considère  comme  plus  instructive  que  l'étude 
des  livres  qui  est  languissante  et  n'échauffe  pas;  une  peinture  très  vive  et 
très  spirituelle  des  vices  qui  accompagnent  d'ordinaire  les  disputes,  et,  à 
ce  sujet,  un  mot  en  passant  sur  l'abus  que  les  savants  font  de  la  science. 
Montaigne  constate  encore  que  ce  qui  frappe  nos  sens,  est  la  cause  déter- 
minante de  nos  jugements;  il  donne  une  règle  pour  juger  de  la  capacité 
d'un  homme  dans  la  conversation  et  termine  par  une  appréciation  sur  le 
génie  et  le  caractère  de  Tacite.  Naiueon. 

17,  Uaduertissement.  —  Var.  de  88  :  le  seul  exemple. 

18,  Platon.  —  Lois,  XI. 
24,  Euiter. 

•  Heureux  celuy  qui,  pour  devenir  sage, 
Du  mal  d'autruy  fait  son  apprentissage  !  » 

332, 

5,  Similitude.  —  Var.  de  88  :  exemple. 

6,  Caton.  —  Plutarque,  Caton,  4. 

8,  Lyre.  —  C'était  un  thébain,  du  nom  de  Gémonide;  il  faisait  jouer 

devant  ses  disciples  de  bons  et  de  mauvais  joueurs  de  flûte  et  disait  :  «  En 

ce  mode,  il  faut  jouer;  en  cet  autre,  non.  » 
20,  Mauuais.  —  «  Un  fol  avise  un  sage.  »  Proverbe. 
20,  Ordinaire.  —  Au  lieu  du  développement  qui   suit,  l'éd.   de  88  porte 

seulement  :  la  veuë  ordinaire  de  la  volerie,  de  la  perfidie  a  reiglé  mes  meurs 

et  contenu. 

24,  Inuincibles.  —  Au-dessus  de  ma  portée. 

25,  Conférence.  —  Conversation,  discussion. 

29,  Parler.  —  C'est  généralement  ce  dont  conviennent  les  personnes  qui, 
ayant  joui  de  tous  leurs  sens,  ont  plus  tard  perdu  soit  l'ouïe,  soit  la  vue. 
Ceux  que  ce  malheur  n'a  pas  atteints,  peuvent  néanmoins  se  faire  une 
opinion  à  cet  égard,  s'ils  ont  eu  occasion  de  remarquer  combien  en 
général  les  aveugles  conservent  leur  bonne  humeur  et  recherchent  la  so- 
ciété, tandis  que  les  sourds  demeurent  taciturnes  et  la  fuient,  parce 
qu'ils  s'y  trouvent  isolés. 
334, 

20,  Autres.  —  S.-ent.  Pyrrhoniens. 

24,  Balance.  —  Emblème  de  Montaigne. 

34,  Nature.  —  Encore  faut-il  reconnaître  que  les  opinions  accidentelles  du 

vulgaire  peuvent  être  de  quelque  poids,  qu'elles  ne  sont  pas  absolument 

vaines  et  fantastiques,  de  pures  rêvasseries... 
336, 

17,  Instruit.  —  Var.  de  88  :  adueriit. 

21,  La  "décision.  —  Var.  de  88  :  le  iugemenl.    • 

ESSAIS  DE  MONTAIGNE.   —  T.   IV.  42 


Fc.638  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

27,  Troigne.  —  Trogne,  air,  mine;  ce  mot,  devenu   trivial,  ne  s'emploie 

plus  qu'en  mauvaise  part- 
ie?, Magistrale.  —  D'un  visage,  d'une  mine  arrogante  et  trop  impérieuse. 
31,  Céder.  —  Add.  de  l'ex.  de  Bord.  :  Ouy,  à  mes  despens,  que  l'on  a  cru 

devoir  insérer  dans  la  traduction.  —  Montaigne  veut  dire  que  dans  les 

discussions,  il  cède  souvent  plus  par  civilité  que  par  conviction,  et  il  en 

donne  la  raison. 

36,  Soys.  —  Quelle  que  soit  la  forme  sous  laquelle  on  me  connaîtra,  soit 
qu'on  me  condamne,  soit  qu'on  m'approuve. 

338, 

2,  Paille.  —  .Je  me  brouille.  —  «  Rompre  paille  »  avec  quelqu'un,  c'était 
déclarer  ouvertement  qu'on  cessait  toute  relation  avec  lui.  Quand,  aux 
temps  féodaux,  un  vassal  voulait  rompre  les  liens  qui  l'unissaient  à  son 
seigneur,  il  lui  envoj^ait  une  paille  rompue,  ou  en  rompait  une  devant 
lui;  ainsi  agirent,  à  Soissons,  Robert  comte  de  Paris  et  ses  adhérents  à 
l'égard  de  Charles  le  Simple  ne  voulant  pas  leur  accorder  le  renvoi  de  son 
ministre  Hagenon  (922). 

5,  Suiure.  —  Si  on  fait  difficulté  de  le  suivre. 

5,  Recueilloit.  —  Accueillait,  recevait. 
15,  Antisthenes.  —  Plutarque,  De  la  mauvaise  honte,  12. 

31,  Thème.  —  Du  sujet  de  leur  dispute. 
340, 

9,  Republique.  —  Liv.  VII,  vers  la  fin. 
14,  Artiste.  —  Artificiel,  savant. 

18,  Similitude.  —  Var.  de  88  :  comparaison. 

19,  Plus.  —  L'un  s'attache  à  un  mot,  à  une  comparaison;  un  autre  ne  sent 
plus... 

20,  Vous.  —  Add.  de  88  :  respondre. 

22,  L'effort.  —  Le  fort;  altération  du  fait  de  la  prononciation  gasconne. 
30,  Alemaigne.  —  Querelle  d'Allemand;  querelle  sans  raison  sérieuse. 
342, 

5,  Differendum.  —  Lire  disserendum.  —  C'est  ce  qu'Épicure  pensait  de  la 

dialectique  des  Stoïciens,  au  dire  de  Cicéron. 
9,  Arts.  —  Professeur  d'humanités  et  de  philosophie. 

27,  Latentes.  —  En  marge  de  l'ex.  de  Bord.  Montaigne  a  inscrit  la  traduction 
de  cette  citation,  et  aussi  le  membre  de  phrase  auquel,  dans  Sénèque,  elle 
fait  suite  :  Numquam  auclores,  semper  interprètes  (jamais  auteurs,  toujours 
traducteurs);  mais  l'une  et  l'autre  de  ces  deux  additions  ont  été  ensuite 
rayées. 
30,  Nullement.  —  Var.  de  88  :  rarement. 

32,  Exinanition.  —  Epuisement,  anéantissement;  du  latin  exinanitio,  qui 
a  même  sens;  on  dit  plus  simplement  aujourd'hui  «  inanition  ». 

37,  Marotte^  —  Sorte  de  sceptre  surmonté  d'une  tète  coiffée  d'un  capuchon 
bizarre  de  différentes  couleurs  et  garni  de  grelots;  c'est  l'attribut  de  la 
fohe,  c'était  celui  des  fous  des  rois.  —  A  l'imitation  de  Montaigne,  on  a 
dit  : 

«  Egarant  parfois  les  humains, 

La  science  est  sublime  ou  sotte; 

C'est  un  sceptre  en  certaines  mains. 

En  d'autres  c'est  une  marotte.  •  Kerivalant. 

344, 

G,  Protagoras.  —  Euthydème  et  Protagoras  sont  les  deux  contradicteurs 
de  Socrate  dans  les  deux  dialogues  de  Platon  qui  portent  leurs  noms, 
dirigés  tous  deux  contre  les  sophistes,  dont  le  second  surtout  était  un  des 
échantillons  le  plus  complets.  Il  avait  été  portefaix  dans  sa  jeunesse,  était 
devenu  disciple  de  Démocrite,  puis  avait  tenu  école  de  rhétorique  et  de 
grammaire  :  il  fut  un  des  premiers  qui  fit  payer  ses  leçons.  Il  enseignait 
que  sur  toute  question  on  peut  également  plaider  le  vrai  et  le  faux;  que 


NOTES.        LIV.  m,  CH.  VIIT.         VOL.  III,  PAG.  344,  Fc.659 

tout  est  arbitraire,  lois,  vertu,  vérité;  qu'on  ne  peut  savoir  s'il  y  a  des 
dieux  ou  non.  Protagoras  avait  écrit  sur  la  rhétorique,  la  physique,  la 
politique,  mais  tous  ses  écrits  furent  brûlés  par  ordre  des  magistrats 
d'Athènes.  V.  N.  I,  212  :  Peine. 

16,  Diuine.  —  Montaigne  traduit  ici  Lactance,  Div.  Inst.,  III,  28. 

22,  Fist.  —  C'est  malheureux  parce  qu'en  regardant  autant  l'avocat  que  la 
cause,  ou  en  arrive  à  ce  que  de  bonnes  causes  sont  si  souvent  gâtées  par 
la  manière  dont  elles  sont  défendues,  et  que  de  mauvaises  triomphent 
uniquement  par  le  talent  de  leur  avocat. 
346, 

3,  Pourtant.  —  C'est  pourquoi. 

10,  Passé.  —  Heraclite.  —  Juvénai.,  X,  32. 

12,  Mison.  —  DiOGÈNE  Laekce,  I,  108. 

2(i,  Moy.  —  Quand  on  voit  quelqu'un  commettre  une  faute,  il  faut  se  demander, 
comme  faisait  Platon  :  «  Est-ce  que  je  ne  lui  ressemble  pas?  »  Plutarqle. 

33,  Olet.  —  Proverbe  latin  rapporté  par  Erasme  et  dont  Montaigne  a  changé 
le  premier  mot,  substituant  stercus  (fumier)  à  crepitus  (vent  sonore).  — 
Add.  de  88  :  Somme,  il  faut  viure  entre  les  viuants  et  laisser  chacun  courre 
sa  mode,  sans  notre  soing  et  altération. 

36,  Clairement.  —  «  Comment  peux-tu  dire  à  ton  frère  :  Laisse-moi  ôter  la 
paille  qui  est  dans  ton  œil,  toi  qui  ne  vois  pas  la  poutre  qui  est  dans  le 
tien  ?  »  Evangiles  selon  Saint  Matthieu  et  selon  Saint  Luc. 

37,  Inaduertence.  —  «  Les  mêmes  défauts  qui,  dans  les  autres,  sont  lourds 
et  insupportables,  sont  chez  nous  comme  dans  leur  centre;  ils  ne  pèsent 
plus,  ils  ne  sont  plus.  Tel  parle  d'un  autre  et  en  fait  un  portrait  affreux, 
qui  ne  voit  pas  qu'il  se  peint  lui-même.  »  La  Bruyère.  —  La  Fontaine  a 
traité  de  même  façon  ce  même  sujet  dans  sa  fable  de  La  Besace  : 

«  Lynx  envers  nos  pareils  et  taupes  envers  nous, 
Nous  nous  pardonnons  tout  et  rien  aux  autres  hommes. 
On  se  voit  d'un  autre  œil  qu'on  ne  voit  son  prochain. 

Le  fabricateur  souverain 
Nous  créa  besaciers,  tous  de  même  manière, 
Tant  ceux  du  temps  passé  que  du  temps  d'aujourd'hui. 
Il  fit  pour  nos  défauts  la  poche  de  derrière. 
Et  celle  de  devant  pour  les  défauts  d'autrui.  » 

39,  Entendement.  —  Et  gentil  personnage,  add.  de  l'ex.  de  Bord,  que  l'on  a 
cru  devoir  insérer  dans  la  traduction. 
348, 

9,  Agel  si.  —  Certaines  éd.  post.    portent  Agesis;  la  signification  est  la 
même,  toutefois  les  deux  mots  séparés   accentuent  davantage  la  forme 
conditionnelle  et  par  suite  ironique. 
II,  Tache.  —  C.-à-d.  je  n'entends   même  pas  que,  pour  accuser,  il  faille 

être  exempt  des  mêmes  vices  qu'on  reproche  à  un  autre. 
20,  Socrates.  —  C'est  Platon  qui  le  lui  fait  dire  dans  le  Gorgias. 
22,  Cela.  —  C.-à-d.  qu'en  général  pour  contenir  et  persuader  les  hommes,  il 

faut  parler  à  leurs  sens. 
34,  Passées.  —  Luther,  Calvin  et  autres,  promoteurs  de  la  religion  réformée. 
350, 

3,  Conférence.  —  Il  en  est  de  même  de  la  conversation. 
8,  Morguant.  —  Et  qui  a  tant  de  morgue. 

13,  Commune.  —  A  la  conversation  ordinaire,  à  parler  de  choses  communes. 
33,  Etfectuelle.  —  Effective.  Autant  celle  qui  est  en  paroles,  que  celle  qui  se 
traduit  par  des  actes. 
352, 

8,  Ineptes.  —  Inaptes,  inhabiles. 
13,  Engin.  —  Esprit. 

16,  Socrates.  —  Dans  la  République  de  Platon,  VI. 

17,  Estuyée.  —  En  mauvais  étui.  —  Placée  en  un  lieu  qui  ne  lui  convient 


Fc.eeO  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

pas,  comme  une  liqueur  fine  qui  se  gâte,  si  elle  est  renfermée  dans  un 
vase  qui  n'est  pas  net. 
18,  AtfoUent.  —  Se  nuisent  à  eux-mêmes. 

27,  Pourtant.  —  C'est  ce  qui  fait  que  pour  eux  le  silence  est  non  seulement... 
3(1.  Apelles.  —  Pllt.4rqijE,  Des  moyens  de  discerne^'  le  flatteur  d'avec  l'ami, 

14,  et  Elien,  Hist.  div.,  II,  2,  racontent  ce  trait  comme  étant  de  Zeuxis. 

—  Alexandre,  grand  admirateur  de  son  talent,  ne  permit  qu'à  Apelles  de 
faire  son  portrait.  C'est  aussi  de  lui  qu'on  cite  le  trait  suivant  :  il  exposait 
ses  ouvrages  à  la  vue  du  public  pour  recueillir  les  jugements  des  passants; 
dans  le  nombre,  un  savetier  qui  venait  de  critiquer  une  sandale,  se  mit 
à  vouloir  juger  aussi  du  reste  du  tableau;  mais  le  peintre  l'arrêta,  lui 
disant  ce  mot  passé  en  proverbe  :  «  Ne  sutor  ultra  crepidam  (que  le  savetier 
ne  juge  pas  au  delà  de  la  chaussure)  »,  ce  que  Voltaire  a  réédité  avec  une 
variante  :  «  Faites  des  perruques.  Monsieur  André,  »  dit-il  à  un  André 
perruquier  qui  avait  composé  et  fait  imprimer  une  tragédie  des  plus  mé- 
diocres qu'il  lui  avait  dédiée.  —  «  Fou  qui  se  tait,  passe  pour  sage,  »  dit  un 
proverbe. 

30,  Ouurouer.  —  Ouvroir,  boutique,  atelier. 
37,  Impertinemment.  —  Non  pertinemment,  sans  être  à  même. 
354, 

1,  Mérite. 

'  Ce  monde  n'est  rien  qu'une  loterie 

De  biens,  de  rangs,  de  dignités,  de  droits. 

Brigués  sans  titre  et" répandus  sans  choix.  »  Voltaire. 

4,  Suos.  —  Cette  citation,  tirée  d'une  épigramme  de  Martial,  a  été  traduite 
en  vers  par  Const.\nt  Dubois,  qui  la  termine  ainsi  : 

•  La  vertu  des  sujets  est  de  chérir  leur  maître, 
Celle  des  souverains  est  de  les  bien  connaître.  » 

17,  Yssue.  —  TiTE-LivE,  Diodore  de  Sicile  estiment  qu'il  faut  juger  du  mérite 
des  personnes,  non  par  le  succès  de  leurs  entreprises  qui  est  tout  entier 
du  domaine  de  fortune,  mais  d'après  les  moyens  qu'ils  ont  mis  en  œuvre. 

—  «  A  Carthage,  dit  Tite-Live  (XXXVIII,  48),  on  condamne  à  être  crucifiés 
les  généraux  d'armée  qui,  dans  une  expédition  militaire,  n'ont  pas  bien 
pris  leurs  mesures,  lors  même  que  le  succès  a  favorisé  leurs  entreprises.  » 

28,  Succedoient.  —  Réussissaient. 

30,  Fortune.  —  Plutarque,  Apophth.  des  anciens  rois,  princes  et  capitaines. 
Prologue.  —  ■■  Et  son  roi  »,  aj.  l'historien  grec  qui  en  outre  porte  «  Si- 
ramnez  ». 

32,  Elles  mesmes.  —  -  Le  monde  se  gouverne  par  lui-même  »,  disait  le 
pape  Urbain  VIll.  —  Les  opinions  les  plus  diverses  se  sont  produites  au 
sujet  de  la  part  que  la  fortune,  le  hasard,  la  chance  jouent  dans  la  vie 
humaine.  Notre  bonne  et  notre  mauvaise  fortune,  disent  les  uns,  dépen- 
dent de  notre  conduite;  la  fortune  est  un  fantôme  que  la  religion  a  aboli; 
la  fortune  favorise  ceux  qui  osent.  D'autres  pensent  comme  Denys  le 
Jeune,  auquel  Philippe  de  Macédoine  demandait  comment  il  ne  s'était  pas 
maintenu  dans  le  royaume  que  son  père  lui  avait  laissé  :  «  Mon  père  m'a 
laissé  ses  biens,  mais  non  sa  fortune.  »  Juvé.nal  a  émis  les  deux  opinions; 
dans  une  de  ses  satires  il  parle  de  «  la  toute-puissance  de  notre  étoile  », 
dans  une  autre  il  dit  que  «  tout  dépend  de  notre  prudence  ».  Régnier  a 
dit  de  même  : 

«  La  fortune  est  un  mot  et  n'est  mauvaise  ou  bonne. 
Que  selon  qu'on  la  forme  ou  bien  qu'on  se  la  donne... 

Elle  avance  un  chacun,  sans  raison  et  sans  choix. 
Les  fous  sont,  aux  échecs,  les  plus  proches  des  rois.  • 

37,  L'atfaire.  —  Probablement  la  S'-Barthélemy,  qui  fut  le  plus  gi-and  fait 
de  lepoque. 


NOTES.         LIV.  Ilf,  CH.  VIII.         VOL.  III,  PAG.  3.Ï6.         Fc.661 

356, 

2,  Lascbes.  —  Var.  de  88  :  molles,  au  lieu  de  «  basses  et  lasches  ». 
15,  Fortune. 

«  Tous  faits  humains  dépendent  de  fortune, 
Non  de  conseil,  ni  de  prudence  aucune.  • 
Amyot,  traduit  de  Plularque. 

33,  Thucydides.  —  Liv.  III,  37,  Harangue  de  Cléon. 
358, 

A,  Suffisance.  —  De  grande  capacité,  de  grande  habileté. 

15,  Melantbius.  —  Plutarque,  Comment  il  faut  ouïr,  7. 

18,  Offusquée.  —  Masquée,  obscurcie  par  l'emphase  du  langage. 

21,  Antistbenes.  —  Diogène  Laerge,  VI,  8. 

38,  Peuple.  —  Lopez  de  Gomara,  Bist.  gén.  des  Indes,  II,  77.  —  «  Les  Bour- 
guignons déposaient  leur  roi  lorsqu'il  avait  des  insuccès  à  la  guerre  ou 
que  l'année  avait  été  stérile,  le  considérant  comme  le  maître  des  événe- 
ments et  des  saisons.  »  Lebeau. 
360, 

3,  C'est.  —  Combien  il  est  avantageux. 

16,  Estrangere. 

«  Rien  n'appartient  à  rien,  tout  appartient  à  tous; 

U  faut  être  ignorant  comme  un  maître  d'école 

Pour  se  flatter  de  dire  une  seule  parole 

Que  personne  ici-bas  n'ait  pu  dire  avant  vous.  »  Victor  Hugo. 

•  C'est  imiter  quelqu'un  que  de  planter  des  choux.  •  A.  de  Musset. 

«  Imaginer  n'est  autre  que  se  souvenir.  »  La  Harpe.  —  «  Rien  de  nou- 
veau sous  le  soleil.  >>  L'Ecclésiaste. 

20,  Céder.  —  La  phrase  précédente,  introduite  dans  la  présente  éd.  (95),  in- 
•  terrompt  quelque  peu  le  sens. 

21,  A  escient.  —  Sérieusement,  de  front. 

26,  Dessein.  —  Des  répliques,  des  ripostes  qui  ont  porté  au  delà  de  mon  in- 
tention. —  Revirade  est  plutôt  gascon  que  français;  toutefois  c'est  un  terme 
en  usage  au  jeu  de  trictrac,  et  aussi  au  jeu  de  paume  où  il  signifie  «  coup 
de  revers  ». 

362, 

15,  Espaulettes.  —  Par  parcelles,  en  détail;  par  intervalles  et  discontinua- 
tion. Ainsi,  en  fait  de  maçonnerie,  dit  Nicot,  reprendre  ou  refaire  un  mur 
par  espauletées,  c'est  le  refaire  et  reprendre  par  parcelles  sans  l'abattre, 
le  réparer. 

27,  Aller.  —  «  Quand  j'aurais  la  main  pleine  de  vérités,  je  ne  daignerais  pas 
l'ouvrir  pour  le  genre  humain.  »  Fontenelle. 

29,  L'enfoncer.  —  L'approfondir. 
29,  Crouliez  la.  —  Si  vous  la  remuez,  l'ébranlez. 
364, 

3,  Hegesias.  —  Diogène  Laerge,  II,  95. 

6,  Moins.  —  «  Les  vérités  qu'on  aime  le  moins  à  entendre,  sont  souvent 
celles  qu'il  importe  le  plus  de  savoir.  «  Boiste. 
11,  Cyrus.  —  Xé.nophon,  Cyropédie,  III,  3,  23. 
11,  Ost.  —  D'exhorter,  haranguer,  encourager  son  armée. 
23,  Principians.  —  Les  commençants. 
366, 

I,  L'asne.  —  -■  Les  autres  enseignent  la  sapicnce,  Montaigne  désenseigne 
la  sottise.  »  M"°  de  Gournay. 

4,  Gaudissans.  —  Gouaillant,  plaisantant.  Gausser  (gouailler)  et  gaudir 
(plaisanter)  sont  à  peu  près  synonymes.  —  Montaigne  fait  ici  l'aveu  qu'il 
était  tant  soit  peu  goguenard,  se  plaisant  à  la  raillerie,  mais  aussi  la  sup- 
portant... 

8,  Lycurgus.  —  PLvr.kRCiVE,^Li/curgue,  U. 


Fc.662  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

10,  Souffrance.  —  patience,  tolérance. 

25,  Royal.  —  François  de  Bourbbn,  tluc  d'Enghien,  le  même  qtii  gagna  la 
bataille  de  Cerisoles,  tué  en  1545,  à  l'âge  de  27  ans,  par  la  chute  d'un 
coffre  que  quelques  seigneurs  avec  lesquels  il  jouait  firent  tomber  sur 
sa  tête  d'une  chambre  haute  du  château;  et  le  marquis  de  Beaupréau,  de 
la  maison  de  Bourbon-Montpensier,  tué  en  1560,  à  l'âge  de  15  ans,  en  cou- 
rant un  lièvre. 
368, 

23,  Fortune.  —  Allusion  à  l'Histoire  universelle  de  Trogue-Pompée,  écrivain 
du  I"  siècle,  dont  l'ouvrage,  qui  est  perdu,  ne  nous  est  connu  que  par 
l'abrégé  qu'en  a  fait  Justin,  travail  écrit  avec  simplicité  et  élégance  et  qui 
est  loin  d'être  sot,  malgré  l'appréciation  générale  qu'en  porte  Montaigne. 

28,  Recompence.  —  Comines,  III,  12,  ne  s'attribue  pas  ce  mot;  il  dit  au  con- 
traire le  tenir  de  Louis  XI  qui  lui-même  ne  s'en  donnait  pas  comme  l'au- 
teur, mais  le  lui  citait.  —  «  Les  services  que  les  rois  ne  peuvent  reconnaî- 
tre, les  rendent  d'ordinaire  ingrats.  »  D'Orléans.  —  «  Les  dettes  de  cette 
nature  ne  se  pouvant  payer  produisent  ordinairement  de  la  haine  dans 
l'esprit  du  souverain.  »  La  Rochefoucauld.  —  Cette  pensée  a  du  reste  été 
généralisée  :  «  Dès  que  nous  avons  des  obligations  extraordinaires  envers 
quelqu'un,  il  semble  que  nous  redoutions  sa  présence,  comme  s'il  nous 
incitait  sans  cesse  à  la  reconnaissance  et  qu'elle  soit  un  blâme  constant 
du  retard  que  nous  mettons  à  lui  témoigner  notre  gratitude.  •  La 
Châtre. 

34,  Memorieux.  —  Doué  d'une  bonne  mémoire.  —  Ce  mot,  qu'il  ait  été  forgé 
par  Montaigne,  ou  usité  de  son  temps,  ne  l'est  plus  aujourd'hui  et  n'a  pas 
son  équivalent. 

370, 

13,  Gentil-homme.  —  On  présume  que  ce  gentilhomme  était  M.  de  Foix, 
un  des  beaux-frères  de  Diane  de  Foix,  à  laquelle  Montaigne  a  dédié  le 
ch.  XXV'  du  liv.  I  des  Essais. 

18,  Particulières.  —  Add.  de  88  :  Il  n'est  pas  en  cela  moins  curieux  et  dili- 
gent que  Plularque,  qui  en  faicl  expresse  profession. 

18,  Luy.  —  Annales,  XVI,  16. 

25,  Longueur.  —  «  Il  abrégeait  tout,  parce  qu'il  voyait  tout,  »  dit  Mon- 
tesquieu, en  parlant  de  Tacite. 

28,  Nostre.  —  Add.  de  88  :  et  si  n'en  a  point  oublié  ce  qu'il  deuoit  à  Vautre 
partie. 

32,  Ethiques.  —  Moraux;  dérivé  du  grec  tjôixoç,  moral. 

35,  Us.  —  Ses  contemporains. 
372, 

3,  Foy.  —  Sincérité,  véracité. 

8,  Couuert.  —  Renfermé,  dissimulé.  —  Tacite,  Hist.,  II,  38. 

14,  Euidence.  —  Encore  ne  faut-il  pas  égaler  le  soupçon  à  l'évidence,  donner 
autant  de  poids  à  l'un  qu'à  l'autre. 

29,  Tibère.  —  Tacite,  Ann.,  VI,  6;  Suétone,  Tibère,  67.  —  Au  sujet  du 
mobile  de  cette  lettre,  Suétone  est  du  même  avis  que  Tacite. 

33,  Dict.  —  Annales,  XI,  11. 
35,  Hautain.  —  Droit  et  élevé. 

374, 

1,  luge.  —  Add.  de  88  :  de  soy. 

19,  Bras.  —  Tacite,  Ann.,  XIII,  35.  —  Pendant  l'hiver  de  57  à  58,  lors  de 
l'expédition  de  Corbulon  en  Arménie. 

23,  Historiens.  —  Vespasien,  raconte  Tacite,  Hisl.,  IV,  81,  rendit  la  vue  à 
un  homme  atteint  de  cécité  qui  le  pressait  d'humecter  de  sa  salive  ses 
joues  et  les  orbites  de  ses  yeux,  et  l'usage  de  la  main  à  un  autre  qui  l'avait 
paralysée.  Avant  de  céder  à  leurs  sollicitations,  il  les  avait  fait  examiner 
par  les  médecins  qui  auraient  déclaré  que  chez  le  premier  la  fonction 
visuelle  n'était  pas  détruite,  que  chez  le  second  la  main  était  seulement 
déboîtée,  et  que  chez  l'un  comme  chez  l'autre  la  guérison  était  possible; 


NOTES.         LIV.  III,  CH.  VIII.         VOL.  III,  PAG.  374.         Fc.663 

elle  fut  très  probablement  déterminée  par  l'intensité  de  conviction  des 
deux  infirmes.  —  Chez  les  anciens,  l'orteil  du  roi  des  Perses  passait  pour 
guérir  certaines  maladies;  dans  des  temps  beaucoup  plus  rapprochés,  les 
attouchements  du  roi  de  France,  du  souverain  d'Angleterre  avaient,  di- 
sait-on, le  pouvoir  de  guérir  les  écrouelles,  etc. 

29,  Luy.  —  Qt'iNTE-CuRCE,  IX,  1. 

30,  L'autre.  —  Tite-Live,  I,  Prœf.,  et  VIII,  6, 
376, 

5,  le  voys...  plis.  —  Var.  de  48  :  voir  si  quelque  autre  s'en  contentera. 
8,  Esprits.  —  Var.  de  88  :  iugements. 
10,  Ce  que.  —  S.-ent.  :  au  sujet  de  Tacite. 

CHAPITRE  IX. 

La  vanité.  —  La  vanité  est  ce  dont  il  est  le  moins  parlé  dans  ce  cha- 
pitre; il  n'en  est  question  qu'au  commencement  et  à  la  fin;  il  n'en  est  pas 
moins  des  plus  beaux,  plein  d'idées  profondes,  fines,  ingénieuses,  sérieuses 
et  folles,  tristes  ou  gaies,  quelquefois  fausses,  traitées  avec  verve,  et  où 
l'auteur  se  révèle  un  parfait  égoïste.  11  amuse,  intéresse  et  captive,  et  non 
seulement  se  fait  lire,  mais  conduit  à  penser,  ce  qui  du  reste  est,  en  gé- 
néral, le  principal  mérite  des  Essais.  Naigeon. 

12,  Expresse.  —  11  n'y  a  peut-être  pas  de  vanité  plus  réelle. 

13,  Exprimé.  —  «  Vanité  des  vanités,  tout  n'est  que  vanité,  »  dit  l'Ecclé- 
siaste. 

21,  Bassins.  —  Vases  de  nuit. 

26,  Diomedes.  —  Montaigne  semble  avoir  indiqué  ici  Diomède  pour  Di- 
dyme.  Ce  dernier,  contemporain  d'Auguste,  était  un  grammairien  grec 
d'Alexandrie,  qui  composa  plus  de  4.000  traités,  tous  perdus  aujourd'hui  ; 
quant  à  Diomède,  c'est  un  grammairien  latin  du  v"  siècle,  qui  ne  paraît 
pas  avoir  été  aussi  fécond  et  dont  il  reste  des  recherches  sur  la  langue 
et  la  versification  latines  en  trois  livres. 

30,  Tempeste.  —  Allusion  au  silence  qu'imposait  Pythagore  à  ses  disciples, 
qu'ils  devaient  garder  pendant  deux  ans  au  moins  et  qui  se  prolongeait 
jusqu'à  cinq  pour  ceux  qu'il  reconnaissait  enclins  à  trop  parler. 
378, 

1,  Seiour.  —  De  son  oisiveté,  de  son  repos.  —  Ce  mot,  attribué  à  un  Galba 
quelconque,  est  de  l'empereur  Galba.  Suétone,  Galba,  9. 
3.  Coërction.  —  Répression,  châtiment,  peine,   du   latin  coerctio  qui  a 
même  sens. 

5,  Autres.  —  Le  13  janvier  1535,  François  l"  rendit  une  ordonnance  sup- 
primant toutes  les  imprimeries  de  France  et  défendant  sous  peine  de  mort 
de  publier  aucun  livre  nouveau. 

6.  Escriuaillerie.  —  Démangeaison,  fureur  d'écrire. 

10,  Police.  —  Ajoutez  que,  dans  un  état,  en  devenant  plus  fins,  plus  subtils, 

les  esprits  n'en  deviennent  pas  plus  sages. 
13,  Confèrent.  —  Y  contribuent,  y  arrivent. 

17,  Pressent.  —  Quand  la  corruption  nous  environne  de  toutes  parts. 
21,  Loy.  —  Loisir,  faculté. 
24,  Philotimus.  —  Plutarque,  Comment  on  distingue  le  flatteur  d'avec  l'ami, 

31. 

32,  Chicane.  —  Le  chancelier  de  l'Hospital. 

33,  Oubly.  —  Avec  le  parlementarisme,  ces  amusoires  ont  changé  de  ca- 
ractère. C'est  par  les  promesses,  que  souvent  on  ne  leur  demande  pas, 
que  les  politiciens  cherchent  à  capter  les  populations,  promesses  qu'ils 
n'ont  nullement  l'intention  de  tenir,  contre  l'accomplissement  desquelles 
les  défend  leur  exagération  même,  et  qu'en  tout  cas,  une  fois  arrivés,  ils 
cherchent  à  éluder,  ne  regardant  pas  cependant  aux  conséquences  funestes 
qu'elles  peuvent  avoir,  s'ils  sont  contraints  de  s'exécuter  :  telles  les  lois 


Fc.664  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

sur  l'assistance  à  la  vieillesse,  sur  les  retraites  ouvrières,  sur  le  revenu. 
Combien  est  de  plus  en  plus  vraie,  sur  ce  point,  cette  apostrophe  de  Marat, 
dans  l'Ami  du  peuple  :  «  Tu  te  laisseras  donc  toujours  duper,  peuple 
babillard  et  stupide?  Tu  ne  comprendras  donc  jamais  qu'il  faut  te  défier 
de  ceux  qui  te  flattent!  »  A  la  vérité,  ce  Suisse  (Marat  était  né  à  Genève), 
ce  sinistre  socialiste  d'alors,  auquel  incombe  une  si  large  part  des  pires 
excès  de  notre  révolution  de  93,  combattait  en  écrivant  de  la  sorte  ceux 
qui  prêchaient  la  modération;  ses  paroles  n'en  démontrent  que  mieux 
le  peu  que  valent  les  mots. 
38,  Testonner.  —  Parer  sa  tête,  se  friser  avec  soin. 

«  Ces  deux  veuves  en  badinant, 

En  riant,  lui  faisaient  fête, 
L'allaient  quelquefois  testonnant, 
C'est-à-dire  ajustant  sa  tête  »  ; 

ainsi  s'exprime  La  Fontaine  dans  la  fable  L'homme   entre  detuc  âges  et 
ses  deux  maîtresses;  l'explication  que  dans  son  dernier  vers  il  donne  du 
mot  «  testonner  »  est  motivée  par  ce  fait  qu'il  signifie  également  donner 
des  coups,  principalement  sur  la  tête. 
380, 

12,  Mal-heur.  —  Quand  je  suis  dans  le  malheur. 

15,  Xenopbon.  —  Ce  précepte,  que  Xénophon  (Cyropédie,  1,  6,  3)  met  dans  la 
bouche  de  Cjtus,  qui  dit  le  tenir  de  Cambyse  son  père,  est  que  «  le 
moyen  de  gagner  le  plus  sûrement  la  faveur  des  dieux,  n'est  pas  de  les 
flatter  lorsqu'on  se  trouve  dans  l'adversité,  mais  de  se  souvenir  d'eux 
dans  la  prospérité;  afin  que  lorsqu'on  sera  en  nécessité  on  se  puisse  ré- 
clamer d'eux  avec  plus  d'assurance,  comme  vous  étant  de  longue  main 
propices  et  amis  et  qu'il  faut  en  user  de  même  avec  les  hommes  ». 

15,  Raison.  —  Jlais  non  par  le  motif  qu'il  en  donne,  c'est-à-dire  sans  que 
ce  soit  intentionnel  et  dans  le  but  de  gagner  plus  sûrement  la  faveur 
des  dieux. 

29,  Part.  —  De  cette  disposition  d'esprit. 

35,  Voyager.  —  V.  N.  I,  92  :  Vovages;  III,  394,  430. 
382, 

4,  Peuple.  —  Des  gens  qui  sont  à  votre  service,  qui  relèvent  de  vous. 

16,  loinct.  —  Ajoutez  à  cela... 

17,  Pied.  —  Allusion  à  une  anecdote  contée  par  Plutarque,  Paul  Emile,  3  : 
«  Un  Romain  avait  répudié  sa  femme;  ses  amis  le  lui  reprochaient  et 
énuméraient  les  qualités  de  l'épouse  :  «  Voj'ez  ce  soulier,  leur  répondit-il; 
il  est  bien  fait,  mais  je  suis  le  seul  à  savoir  où  il  blesse.  » 

19,  Prestez.  —  Combien  vous  faites  de  sacrifices  pour... 

21,  Cher.  —  Ce  passage  donne  à  penser  que  dans  le  ménage  de  Montaigne, 

non  plus  que  dans  tout  autre,  tout  n'allait  pas  toujours  à  son  gré.   — 

V.  III,  384. 
28,  Autre.  —  Ceci  contredit  le  proverbe  :  «  Service  de  grand  n'est  pas 

héritage.  » 
33,  M'attends.  —  C'est  ce  à  quoi  je  suis  attentif,  j'applique  mon  esprit. 

36,  Contentement.  —  «  S'il  est  riche,  qu'il  dîne  deux  fois  »,  disait-on  jadis, 
dans  le  peuple,  plaisamment  d'un  homme  sottement  fier  de  ses  richesses. 

384, 

14,  Dam.  —  Tant  pis  pour  lui.  Dam,  dommage,  vient  du  latin  damnum. 
dont  c'est  une  contraction.  —  Montaigne  n'avait  qu'un  héritier,  sa  fille. 

17,  Dissemblables.  —  Allusion  à  la  réponse  que  Phocion  fit  aux  euA'oyés 
de  Philippe  roi  de  Macédoine,  qui,  pour  l'engager  à  accepter  les  présents 
de  ce  prince,  lui  représentaient  que  ses  enfants  étaient  pauvres  et  ne 
pourraient  soutenir  la  gloire  de  leur  père  :  «  S'ils  me  ressemblent,  dit-il, 
le  petit  bien  que  je  possède  à  la  campagne  suffira  pour  les  faire  vivre, 
comme  il  m'a  suffi  à  moi-même  ;  s'ils  ne  me  ressemblent  pas,  je  ne  veux 


NOTES.  LIV.  Ifl,  CH.  IX.         VOL.  III,  PAG.  384.  Fc.665 

pas  entretenir  et  développer  leurs  mauvaises  dispositions  aux  dépens  des 
intérêts*  publics.  »  Cornélius  Népos,  Phoc,  I. 

18,  Crates.  —  Diogène  Laerce,  VI,  88. 

27,  Négoces.  —  Affaires,  du  latin  negolium. 
35,  Fois.  —  Add.  de  88  :  et  honteuses. 

35,  Pointures.  —  Légers  désagréments,  petits  malheurs,  soit  :  petits  par- 
fois, mais  quand  même  toujours  désagréables. 
386, 

6,  le  ne  suis  ...  poisent.  —  Var.  de  88  :  Or  nous  monstre  assez  Homère, 
combien  la  surprise  donne  d'auanlage,  qui  faict  Vlisse  pleurant  la  mort  de 
son  chien,  et  ne  pleurant  point  des  pleurs  de  sa  mère;  le  premier  accident, 
tout  legier  qu'il  estait,  l'emporta,  d'autant  qu'il  en  fut  inopinément  assailly  ; 
il  soustint  le  second  plus  impétueux,  parce  qu'il  y  estoit  préparé.  Ce  sont 
légères  occasions,  qui  pourtant  troublent  la  vie. 

16,  Cauat.  —  Quinault,  dans  son  opéra  d'Atys,  a  rendu  ainsi  ce  demi-vers 
latin  : 

«  L'eau  qui  tombe  goutte  à  goutte 
Perce  le  plus  dur  rocher.  » 

20,  Inséparables.  —  V.  N.  III,  382  :  Cher. 

24,  Raisons.  —  Mes  pièces  de  recettes  et  de  dépenses  à  l'appui  de  mes 

comptes. 
33,  L'estranger.  —  Celui  que  je  bois  chez  les  autres.  Diogène  Laerce,  VI, 

54.  —  "  Pain  d'autrui  a  bon  goût.  »  Proverbe  russe. 
388, 

7,  Dolé.  —  Construit,  poli,  aménagé,  distribué;  du  latin  dolare,  équarrir, 
raboter,  d'où  vient  également  doloire,  sorte  de  hache  ou  cognée  dont 
se  servent  les  cliarpentiers. 

8,  Faineance.  —  Paresse,  fainéantise,  indolence. 

32,  Michel.  —  C'est  le  prénom  de  Montaigne;  par  suite  cette  phrase  doit 
s'entendre  :  Nous  nous  laissons  nous-mêmes  de  côté,  nous  dont  l'individu 
nous  touche  de  plus  près  encore  que  l'homme  pris  dans  un  sens  général. 

390, 

3,  Vacation.  —  Add.  de  88  :  et  la  plus  iuste. 

15,  Appaster.  —  Proprement  donner  la  becquée,  la  pâtée;  ici  :  faire  qu'en 
ma  vieillesse,  je  n'aie  nuls  soucis,  que  je  ne  manque  de  rien. 

19,  Amy.  —  Ce  souhait  ne  fut  pas  exaucé.  Montaigne,  de  son  vivant,  eut 
bien  un  gendre,  sa  fille  s'étant  mariée  deux  ans  avant  sa  mort;  mais, 
moins  d'un  mois  après  le  mariage,  le  nouveau  ménage  alla  habiter  les 
terres  du  mari. 

26,  Mescognoissance.  —  C'est  le  peu  de  soin  que  je  mets  à  les  observer, 
à  me  rendre  compte  de  leurs  faits  et  gestes. 

33,  Argent.  —  Quelquefois,  à  dessein,  je  ne  prends  qu'une  connaissance 
vague,  approximative  de  ce  que  j'ai  exactement  en  fait  d'argent. 

392, 

4,  Iniure.  —  Tort,  comme  en  latin  le  mot  injuria.  —  Comme  je  me  soucie 
peu  du  tort  qu'ils  peuvent  me  faire. 

12,  Paresse  et  négligence.  —  Var.  de  88  :  Faitardise  et  mollesse. 
14,  Négoces.  —  Esclave  de  mes  affaires. 

16,  Auachir.  —  Me  rendre  lâche,  débiliter  mon  courage. 

24,  Crates.  —  Vendit  ses  biens  et  en  retira  300  talents  (environ  un  million 
à  un  million  1/2),  qu'il  distribua  à  ses  concitoyens;  il  avait  de  l'argent 
placé  chez  un  banquier  qui  avait  ordre  de  le  rendre  à  ses  enfants  s'ils  n'é- 
taient pas  philosophes  et  de  le  donner  au  peuple  dans  le  cas  contraire, 
parce  que  s'ils  étaient  philosophes,  ils  n'auraient  besoin  de  rien.  — Crates 
était  contrefait  et  d'une  malpropreté  et  d'un  cynisme  révoltants;  il  inspira 
cependant  une  telle  estime  à  Hipparchia,  riche  et  belle  Athénienne,  qu'elle 
l'épousa  malgré  ses  propres  représentations. 


Fc.666  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

25,  Cures.  —  Soins;  du  latin  cura,  qui  a  même  signification. 

25,  Maison.  —  «  Allez  au  fond  de  la  mer,  objet  de  mauvaises  pensées,  lui 
fait  dire  S.  Jérôme;  je  vous  y  précipite,  afin  que  vous  ne  m'j'  précipitiez 
pas  vous-même.  » 

26,  A  pair.  —  A  l'égal,  autant  que. 

26,  Bien,  —  Mais  je  consentirais  bien  à  échanger... 

27,  Braue.  —  Noble. 

32,  Estriuiere.  —  Courroie  qui  soutient  l'étrier  de  l'homme  à  cheval. 
394, 

6,  Suruenants.  —  Cela  fait  que  je  reçois  avec  moins  de  plaisir  et  traite 
moins  bien  les  survenants. 

II,  Police.  —  Tout  occupé  de  l'ordre. 

25,  Platon.  —  Lettre  9,  àArchytas. 
30,  Desprendre.  —  A  dépenser. 

32,  Attens.  —  Je  m'y  applique. 

38,  Defraudons.  —  Nous  nous  frustrons  de... 
396, 

8,  Emploite.  —  La  dépense. 

11,  Aduertance.  —  Surveillance,  attention;  du  latin  advertere,  être  attentif, 
prendre  garde.  —  Le  mot  n'est  pas  français,  bien  que  son  contraire  «  inad- 
vertance »,  de  même  origine,  le  soit. 

14,  Volonté.  —  La  nonchalance  de  Montaigne  dans  les  questions  d'argent, 
dont  il  a  déjà  été  parlé,  liv.  II,  ch.  XVII,  est  nettement  accusée  par  cette 
mention  qui  a  été  relevée  sur  un  de  ses  livres  de  dépenses  :  «  Item,  pour 
mon  humeur  paresseuse,  mille  liures.  » 

21,  Pressé.  —  J'en  souffre  trop  en  mon  particulier. 

26,  Nom.  —  Ponéropolis,  ou  ville  des  méchants,  qui,  plus  tard,  s'est  appelée 
Philippopolis.  Pline,  Hist.  nat.,  IV,  II;  Plutarque,  De  la  Curiosité,  10. 

38,  Société.  —  «  Si  j'avais,  dit  Voltaire  dans  une  lettre  à  d'Alembert,  des 
citoyens  à   persuader  de  la  nécessité  des  lois,  je  ferais  voir  qu'il  y  en  a 
partout,  même  au  jeu  qui  est  un  commerce   de  fripons,  même  chez  les 
voleurs.  » 
398, 

18,  Pyrrba.  —  Femme  de  Deucalion,  sauvés  tous  deux,  à  cause  de  leur 
justice,  d'un  déluge  universel;  ils  repeuplèrent  le  monde  en  jetant  derrière 
eux  des  pierres  qui  se  transformèrent,  celles  de  Deucalion  en  hommes  et 
celles  de  Pyrrha  en  femmes.  Myth. 

18,  Cadmus.  —  Fils  d'Agénor,  roi  de  Phénicie;  envoyé  par  son  père  à  la 
recherche  d'Europe  sa  sœur,  enlevée  par  Jupiter,  avec  défense  de  revenir 
tant  qu'il  ne  l'aurait  pas  retrouvée,  arriva  en  Grèce,  où  il  songeait  à  s'éta- 
blir, lorsqu'un  dragon  dévora  ses  compagnons.  Il  tua  le  dragon  et  en 
sema  les  dents,  sur  le  conseil  de  Minerve  ;  il  en  vit  naître  aussitôt  autant 
d'hommes  armés  qui  s'entre-tuèrent,  sauf  cinq  qui  l'aidèrent  à  bâtir  la  ville 
qu'il  projetait  et  qu'il  éleva  sur  le  modèle  de  celle  de  Thèbes  en  Egypte, 
d'où  elle  prit  le  nom.  Myth. 

19,  Loy.  —  Loisir,  liberté,  faculté. 
21,  Solon.  —  Plutarque,  Solon,  9.  . 

23,  Varro.  —  S.  Augustin,  De  civ.  Dei,  V,  4. 

37,  De  Pibrac.  —  On  lui  a  reproché  d'avoir  écrit  une  apologie  de  la  S*-Bar- 

thélemy  :  c'est  là  une  accusation  erronée  ;  il  en  fut  au  contraii-e  un  des 

critiques  les  plus  francs. 
40,  De  Foix.  —  Paul;  le   même  dont  il  est  question  au  ch.  précédent.  V. 

III,  370  et  N.  Gentil-homme. 
400, 

7,  Innouation.  —  Rien  n'est  plus  dangereux  pour  un  état,  qu'un  grand 
changement,  une  révolution. 

23,  Partie.  —  La  santé  et  la  force. 

24,  Mascbe.  —  Ce  qui  le  ronge,  le  fait  souffrir. 
29,  Contemporanées.  —  Contemporains. 


NOTES.         LIV.  IH,  CH.  IX.         VOI..  III,  PAG.  400.  Fc.667 

35,  Capouë.  —  Tite-Live,  XXIII,  3,  etc.  —  Ce  sujet  a  fait  l'objet  d'un  conte 
en  vers  d'Andrieux. 
402, 

30,  Resoluant.  —  Je  ne  vais  pas  soudain  dire  d'un  ton  résolu  et  décisif. 

38,  Peuples.  —  Platon,  République,  VIII,  2.  —  L'histoire  moderne  nous  four- 
nit de  nombreux  exemples  de  cette  assertion  :  les  Turcs,  chez  lesquels, 
depuis  des  siècles,  la  guerre  est  à  l'état  endémique  entre  les  diverses  na- 
tionalités dont  se  compose  leur  empire  en  Europe  ;  la  France,  lors  de  la 
Révolution  de  1793,  d'où  elle  est  sortie  plus  unifiée  qu'avant;  la  Russie,  qui 
vient  d'avoir  à  supporter  une  guerre  des  plus  malheureuses  et  est  livrée  à 
des  désordres  intérieurs,  dont,  il  est  vrai,  on  ne  saurait  encore  prévoir  la 
fin.  Seule,  au  xvni«  siècle,  la  Pologne  a  disparu  par  suite  de  ses  dissensions 
intérieures,  qui  en  ont  fait  la  proie  de  ses  voisins. 

42,  Misérable.  —  Var.  de  88  :  malotru. 
404, 

2,  SoloD.  —  Valèke  Maxime,  XII,  2. 

7,  Pelote.  —  Se  jouent  de  nous. 

8,  Habent.  —  Citation  dont  Montaigne  donne  le  sens,  avant  de  la  trans- 
crire. 

18,  Escbeuës.  —  Isocrate  à  Nicoclès. 

35,  Suo  est.  —  Dans  l'auteur  latin,  c'est  d'un  arbre  qu'il  s'agit. 
406, 

2,  Fondent.  —  Vont  au  fond,  coulent. 

8,  Tempestas.  —  Citation  longtemps  attribuée  à  Virgile,  que  l'on  croit  au- 
jourd'hui tirée  d'un  auteur  moderne. 
32,  Diuulsion.  —  Séparation;  du  latin  divulsio  que  Montaigne  a  francisé. 
35,  Qu'enuis.  —  Qu'à  regret,  à  contre-cœur. 

40,  Inculcation.  —  Action  d'inculquer,  répéter.  —  Je  n'aime  pas  qu'on  re- 
'  vienne  souvent  sur  les  mêmes  choses,  même  s'il  s'agit  de  choses  utiles. 
408, 

14,  Lyncestez.  —  Quinte-Curce,  VII,  I.  —  Lynceste  avait  conspiré  contre  la 
vie  d'Alexandre  le  Grand,  à  la  suite  de  la  mort  de  deux  de  ses  frères  im- 
pliqués dans  l'assassinat  du  roi  Philippe.  Retenu  depuis  trois  ans  dans  les 
fers,  on  avait  différé  de  statuer  sur  son  sort,  en  raison  de  la  situation  de 
son  beau-père  Antipater,  chargé  du  gouvernement  de  la  Macédoine  et  de 
la  Grèce,  pendant  qu'Alexandre  conquérait  l'Asie;  lors  de  l'affaire  de  Phi- 
lotas,  on  décida  d'en  finir  avec  lui  et  c'est  alors  que  se  produisit  la  scène 
dont  parle  Montaigne  (329). 

28,  Desprendre.  —  A  me  le  faire  oublier,  me  le  faire  perdre  de  vue. 

29,  Assigné.  —  Confié  et  livré  à... 

32,  Contenance.  —  Jusqu'à  ne  pas  savoir  quelle  contenance  tenir. 

38,  Profession.  —  De  la  profession  militaire,  ainsi  qu'il  résulte  de  la  cita- 
tion de  Quintilien  (indiquée  par  erreur  comme  étant  d'Ovide),  donnée 
quelques  lignes  plus  bas,  de  différents  autres  passages  des  Essais  (III,  154, 
26;  628,  21  et  suivantes;  640,  9;  661,  26  et  suivantes;  680,  23),  et  enfin  du 
tombeau  que  lui  a  fait  ériger  sa  femme  où  il  est  représenté  en  chevalier 
armé  de  pied  en  cap. 
410, 

2,  Saye.  —  Pourrait  se  traduire  de  nos  jours  :  <>  On  se  met  souvent  en 
habit,  pour  ne  pas  mieux  danser  que  si  on  était  en  veston  •  ;  toutefois  saye, 
qui  vient  du  latin  sagum,  espèce  de  casaque  que  les  Romains  portaient 
aux  années,  signifie  plutôt  blouse,  bourgeron. 
4,  Curio.  —  Orateur  médiocre  qui  parlait  avec  élégance,  mais  sans  ordre 
ni  imagination,  et  qui,  un  jour,  au  forum,  fut  abandonné  de  tout  son  au- 
ditoire. CicÉRO.N,  Brulus,  60. 

10,  Artiste.  —  Tient  trop  de  la  forme  artificielle,  scolastique. 

11,  Baste.  —  Il  suffit,  c'est  assez  que  je  me  sois  promis.  V.  N.  II,  520*: 
Bastantes. 

15,  Présente.  —  Et  quant  à  parler  d'abondance,  à  improviser. 


Fc.668  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

18,  Alongeail.  —  Troisième  addition  ;  c.-à-d.  son  troisième  livre  et  les 
additions  que  pour  la  troisième  fois  il  faisait  aux  deux  premiers- 

19,  Pas.  —  Les  variantes  ne  manquent  pourtant  pas;  du  reste  au  ch.  XII 
du  liv.  Il,  Montaigne  se  contredit  lui-même  :  «  le  m'eschaulde  souuent  à 
corriger  et  à  mettre  vn  sens  nouueau.  » 

28,  Supernumeraire.  —  Quelque  pièce  rapportée,  quelque  ornement  ajoute 
à  cet  ouvrage.  —  Emblème  est  employé  ici  dans  un  sens  tout  différent  de 
celui  que  nous  lui  donnons  d'ordinaire;  il  a  celui  du  latin  emblema,  pièce 
insérée,  mise  entre  deux  autres. 
412, 

2,  Nombre.  —  Var.  de  88  :  huit. 

8,  Soy.  —  Ou  des  joncs,  des  roseaux  que  l'air  agite  par  hasard  et  à  son 
gré. 

11,  Antiocbus.  —  Chercha  à  concilier  les  doctrines  des  Académiciens,  des 
Péripatéticiens  et  des  Stoïciens,  n'admettant  de  dissidences  que  sur  les 
mots,  et  fut  considéré  comme  le  chef  d'une  nouvelle  Académie. 

16,  Qu'autre.  —  Non  pas  meilleure  que  différente;  ou  non  pas  meilleure, 
mais  différente. 

18,  Lasser.  —  J'aimerais  mieux  en  être  encore  aux  premières  publications 
de  mes  travaux,  que  de  lasser  en  les  publiant. 

22,  Voit.  —  Add.  de  88  :  ie  plus  souuent. 

31,  Orthographe.  —  A  cette  époque,  des  efforts  étaient  faits  par  plusieurs 
(Pelletier,  Ramus,  etc.),  pour  introduire  dans  l'orthographe  des  réformes 
qu'ils  finirent  par  faire  accepter.  —  Cette  même  question  se  produit  de 
nos  jours,  portant  principalement  sur  l'emploi  d'une  seule  et  même  lettre 
pour  un  même  son  et  la  suppression  des  lettres  inutilement  doublées, 
réforme  qui,  dans  ces  limites,  semble  devoir  prochainement  aboutir. 

32,  Punctuation.  —  Cette  incurie  de  sa  part,  à  cet  égard,  n'a  pas  peu  con- 
tribué à  jeter  de  l'obscurité  sur  plusieurs  passages  des  Essais.  La  ponc- 
tuation, en  particulier,  n'est  pas  chose  indifférente  ;  un  même  texte  ponctué 
de  façons  différentes  peut  présenter  parfois  des  sens  absolument  opposés 
(V.  N.  III,  512  :  Ridicules).  —  En  voici  un  autre  exemple  :  Le  général  Fairfax, 
un  des  généraux  les  plus  célèbres  dans  les  guerres  civiles  de  l'Angleterre, 
sous  Charles  1"  (xvn*  siècle),  écrivit,  dit  on,  sous  la  sentence  de  mort  du 
roi,  après  sa  signature,  ces  mots  que  n'accompagnait  aucun  signe  de 
ponctuation  :  «  Si  omnes  consentiunt  ego  non  dissentio.  »  Avec  une  virgule 
après  consentiunt,  ils  signifient  :  «  Puisque  tous  sont  de  cet  avis,  je  n'y 
contredis  pas  »  ;  et  dont  la  traduction,  en  plaçant  outre  cette  virgule, 
deux  points  après  non,  est  :  «  Quoique  tous  soient  de  cet  avis,  ce  n'est 
pas  le  mien;  je  suis  de  l'avis  contraire.  »  Fairfax  se  réservait,  de  la  sorte, 
la  possibilité  de  faire  valoir  l'un  ou  l'autre  sens,  suivant  la  suite  que 
pourraient  avoir  les  événements. 

414, 

5,  Métal.  —  Que  me  trouvant  vivre  en  des  temps  où  cet  âge  nouveau,  pire 
que  l'âge  d'airain  et  de  fer,  est  en  plein  développement,  au  milieu  de  ce 
que  ce  siècle  a  de  plus  corrompu.  —  Les  anciens  distinguaient  quatre 
âges  dans  l'histoire  du  monde  :  l'âge  d'or,  l'âge  d'argent,  l'âge  d'airain  et 
l'âge  de  fer,  correspondant  chacun  à  une  diminution  de  plus  en  plus 
grande  de  la  vertu  chez  les  hommes. 
7,  Nœud.  —  Celui  de  la  religion. 
14,  Emergeant.  —  Sans  profit,  et  avec  perte. 

16,  Balance.  —  Proportion  gardée. 

17,  Abbord.  —  Var.  de  88  :  porte  ouuerte,  au  lieu  de  :  «  de  grand  abbord  ». 
21,  Fumier.  —  De  me  violenter  chez  moi.  —  Être  sur  son  fumier  signifie  en 

sa  maison,  sur  ses  biens;  un  proverbe  populaire  du  temps  :  «  Un  chien 
sur  son  fumier  est  bien  fort  »,  voulait  dire  :  un  chacun  est  bien  hardi, 
bien  puissant  chez  lui. 

23,  Sac.  —  Ceci  était  écrit  avant  1586,  année  où  Montaigne  vit  sa  maison 
envahie. 


x\OTES.         LIV.  III,  GH.  IX.         VOL.  III,  PAG.  410.  Fc.669 

416, 

2,  Desportemens.  —  Moeurs,  actions. 
7,  Désertées.  —  Détruites. 

9,  Athénien.  — Ce  Lycurgue,  intendant  du  trésor  public,  se  fit  remarquer 
autant  par  son  éloquence  que  par  la  probité  avec  laquelle  il  s'acquitta  de 
sa  cliarge.  Pi.uiAriQUE,  Vies  des  dix  orateurs.  Lycurgue,  1. 

27,  Parole.  —  Principe  parfait  en  lui-même  et  qui  semble  ne  pas  prêter  à 
la  critique;  mais  rien  n'est  absolu,  et  malgré  son  excellence  il  a  conduit 
à  cet  autre,  inepte  dans  ses  conséquences,  que  les  dettes  de  jeu  sont  sacrées, 
comme  si  toutes  ne  l'étaient  pas  et  comme  si,  en  raison  de  leur  origine, 
celles-ci  ne  devraient  pas  passer  après  toutes  auti'os,  ce  qui  est  précisément 
le  contraire  de  ce  qui  se  fait. 

32,  Poinct.  —  L'objet,  le  but. 
418, 

4,  Conscience.  —  L'obligation  que  ma  conscience  m'impose  est... 

14,  Esctiarsement.  —  Chichement;  de  l'italien  scarsaménle,  pauvrement, 
mesquinement. 

15,  Contre.  —  Je  ne  vais  pas  jusque-là,  mais  peu  s'en  faut. 
15,  Desobliger.  —  Être  libre  de  toute  obligation. 

17,  Indignitez.  —  Var.  de  88  :  desplaisirs. 

21,  Publique.  —  ...  à  m'acquitter  vis-à-vis  d'eux  des  devoirs  que  la  société 

impose... 
23,  Dedans.  —  Add.  de  88  :  e<  de  l'obligation  interne  de  mon  affection. 

28,  Desplaisant.  —  Bien  fâché,  peiné. 

30,  Entant.  —  Add.  de  88  :    et  son  cousin. 
420, 

6,  Ailleurs.  —  Var.  de  88  :  obligations  et  bienfaicts  estrangers. 
9,  Prou.  —  Beaucoup. 
17,  Mihi.  —  Le  texte  original  est  notablement  modifié  dans  la  citation. 

21,  Asseurez.  —  Nous  ne  sommes  pas  assez  assurés  de  pouvoir  nous  tirer 
par  nous-mêmes  de  tout  mauvais  pas,  pour  fuir  toute  dépendance,  ne 
nous  confier  et  ne  nous  adresser  qu'à  nous  dans  le  besoin  et.  le  malheur, 
ce  qui  serait  pourtant  le  plus  juste  et  plus  sûr. 

22,  Manque.  —  Défectueuse. 

25,  Hippias.  —  Cicéron,  De  Oratore,  III,  32.  —  Hippias  se  vantait  de  tout 
savoir  :  Platon,  dans  ses  dialogues,  l'a  livré  au  ridicule. 

31,  Poil.  —  Soigner  soi-même  sa  barbe  et  sa  chevelure. 

31,  Braques.  —  Ou  brayes  (l'ex.  de  Bord.  port,  bagues),  caleçon.  Etait  porté, 
dit  NicoT,  par  mesure  de  propreté  par-dessous  les  hauts-de-chausses.  Ce 
mot,  tiré  du  grec,  signifie  court,  petit;  les  braguesen  effet  ne  descendaient 
que  jusqu'au  genou. 

32,  Soy.  —  Pour  ne  faire  fond  que  sur  lui-même  et  n'avoir  besoin  de  per- 
sonne autre. 

34,  Empruntez.  —  Var.  de  88  :  estrangers. 

30,  Passer.  —  Add.  de  88  :  l'ai  très  volontiers  cerchc  l'occasion  de  bien  faire 
et  d'attacher  les  autres  à  moi,  et  me  semble  qu'il  n'est  point  de  plus   doux 
vsage  de  nos  moyens.  Il  est  regrettable  qu'en  remaniant  son  texte,  Jlon- 
taigne  ait  supprimé  cette  phrase. 
422, 

3,  Summission.  —  C'est  de  ce  principe  que  découle  cet  autre  :  «  L'aide 
apportée  au  pauvre  par  la  charité,  ne  doit  être  que  le  moins  possible  gra- 
tuit; si  minime  que  soit  un  service  rendu  qu'on  lui  paye,  sa  dignité  est 
sauve,  l'effort  qu'il  a  dû  faire  le  réhabilite  à  ses  propres  yeux  et  lui  est 
salutaire.  » 

5,  Enuoyoit.  —  Ces  présents  consistaient  en  chevaux  et  oiseaux  de  chasse, 
chacun  au  nombre  de  dix;  nombre  qui,  au  dire  de  Tamerlan,  aggravait 
l'insulte  qui  lui  était  faite,  Bajazet  ne  devant  pas  ignorer  que  le  nombre 
neuf  était  le  nombre  sacré  des  Tartares,  celui  auquel  il  eût  dû  se  fixer. 

9,  Donner.  —  Les  errements  sont  autres  aujourd'hui  et  les  souverains  re- 


Fc.670  ESSAIS;  DE  MONTAIGNE. 

çoivent  aussi  bien  qu'ils  donnent;  seulement  en  France,  c'est  toujours  le 
budget  ou  les  établissements  producteurs  de  l'Etat,  Sèvres,  les  Gobelins  etc., 
ce  qui  est  tout  un,  qui  font  les  frais  quand  ce  sont  nos  représentants  qui 
donnent,  et  quant  à  ce  qu'ils  reçoivent,  ils  ne  manquent  pas  de  toujours 
le  considérer  comme  leur  étant  personnel. 

11,  lupiter.  —  Aristote,  Morale  à  Xicomaque,  IV,  3.  —  Tliétis  implorait 
Jupiter  pour  qu'il  vengeât  Achille,  son  fils,  de  l'affront  que  les  Grecs  ve- 
naient de  lui  faire  en  lui  enlevant  Briséis,  sa  captive.  Le  dieu  acquiesça 
à  sa  demande  et  ratifia  sa  demande  par  un  simple  signe  de  tête  qui 
ébranla  l'Olympe,  ce  dont  Phidias  s'est  emparé  pour  son  Jupiter  Olympien, 
l'un  de  ses  chefs-d'œuvre.  Le  discours  de  Thétis  à  Jupiter  se  trouve  au 
premier  chant  de  VIliade,  v.  503. 

22,  Autruy. 

•  Aclieter  est  meilleur  marclu;  que  demander.  »  Proverbe. 
•  Rien  n'est  plus  cher  que  le  prié.  »  Proverbe. 

2.5,  Contraction.  —  L^exiguïté,  le  peu  d'étendue  de  mes  désirs  et  de  mes 
projets.  —  Ce  mot  est  purement  latin. 
424, 

2,  Aristote.  —  Mçrale  à  Nicômaque,  IX,  7. 

8,  Encores.  —  Xénophon,  son  historien,  dans  la  Cyrovédie,  VllI,  4,  4. 
14,  Amys.  —  Sylla  ne  pensait  pas  ainsi,  disant  de  lui-même,  ainsi  que  le 
porte  son  épitaphe  composée  par  lui  :  «  Nul  ne  fit  plus  de  bien  à  ses  amis, 
et  plus  de  mal  à  ses  ennemis.  » 

24,  Nom.  —  C'est  là  une  erreur  causée  par  la  vanité;  seuls,  lui  et  son  père 
sont  nés  à  Montaigne,  et  lui  seul,  abandonnant  son  nom  de  famille,  y  a 
substitué  celui-ci  qui  sonnait  mieux  et  qui,  du  reste,  s'est  éteint  avec  lui. 

25,  Accoustamons.  —  A  tout  ce  que  nous  tournons  en  coutume. 

28,  Maux 

0  Coutume,  opinion,  reines  de  notre  sort, 

vous  réglez  des  mortels  et  la  vie  et  la  mort.  »  Voltaire. 

29,  Ecbauguette.  —  Var.  de  88  :  garnison.  —  Sentinelle.  —  L'échauguette 
est  une  tourelle  où  est  établie  la  guette,  celui  qui  fait  le  guet,  qui  guette, 
qui  surveille. 

426, 

7,  Indolence.  —  Cette  phrase  de  Montaigne  a  été  l'objet  de  violentes  cri- 
tiques de  la  part  des  solitaires  de  Port-Royal,  injustes  en  cette  occasion, 
contre  leurs  habitudes;  ils  l'ont  considérée  abstraction  faite  de  la  phrase 
précédente  à  laquelle  elle  est  liée  et  en  ont  ainsi  altéré  le  sens.  Mon- 
taigne exprime  simplement  une  rêverie  dans  laquelle  il  se  plonge,  quand 
il  songe  aux  dangers  qui  peuvent  fondre  sur  lui,  et  non  une  règle  de 
conduite.  La  manière  dont  il  parle  de  la  mort  partout  ailleurs  dans  les 
Essais,  la  façon  dont  lui-même  a  fini,  témoignent  hautement  qu'il  ne  la 
redoutait  et  ne  s'en  effrayait  pas. 
25,  Eux.  —  Je  ne  leur  en  veux  pas  non  plus,  il  faudrait  en  vouloir  à  trop 
de  gens. 

30,  Juridique.  —  Ceci  s'applique  ici  plus  spécialement  aux  gens  de  justice 
et  aux  magistrats  que  Montaigne  sembla  redouter  autant  que  les  gens  do 
guerre,  bien  qu'au  chapitre  suivant  il  dise  n'avoir  jamais  eu  de  démêlés 
avec  la  justice;  mais  cela  peut  s'entendre  aussi  de  tous  ceux  qui  détiennent 
la  moindre  parcelle  de  l'autorité  publique,  soi-disant  responsables  vis-à-vis 
de  leurs  supérieurs  qui  n'ont  d'autres  soucis  que  de  les  couvrir,  parce 
qu'en  effet  c'est  généralement  à  leur  instigation  ou  en  conformité  de 
leurs  propres  idées  qu'il  en  est  ainsi.  —  Semblables  abus  sont  de  tous  les 
temps;  mais,  plus  lieureux  que  nous,  chez  les  Athéniens  tout  individu 
investi  d'un  mandat   pouvait   être   tenu   de  justifier  ses   faits   et  gestes 


NOTES.         LIV.  III,  CM.  IX.         VOL.  III,  PAG.  420.  Fc.671 

dans  l'exercice  de  ses  fonctions  :  des  accusateurs  publics  étaient  constitués 
à  cet  effet;  et,  dit  Montesquieu,  les  Romains  étaient  admirables,  en  ce 
que  chez  eux  on  pouvait  faire  rendre  raison  de  leur  conduite  à  tous  les 
magistrats,  les  censeurs  exceptés.  —  En  France,  la  responsabilité  des  fonc- 
tionnaires n'existe  pas;  ils  peuvent  commettre  les  plus  flagrantes  injus- 
tices, les  plus  lourdes  erreurs,  sans  en  subir  de  conséquence  aussi  bien 
dans  le  domaine  administratif  que  dans  celui  de  la  justice  et  a  fortiori 
dans  ce  qui  se  rattache  à  la  politique.  Les  abus  de  ce  fait  sont  de  toutes 
les  époques;  le  général  André  dans  ses  Mémoires  en  révèle  un,  des  plus 
caractéristiques,  commis  vers  1883  par  le  Ministère  solidarisé  à  cet  effet, 
dont  fut  victime,  à  la  requête  de  l'étranger,  un  sieur  Bonnal.  —  La  Ligue  des 
Droits  de  l'homme,  qui  s'est  récemment  constituée  dans  le  but  de  faire 
respecter  ces  droits,  a  plus  de  bonne  volonté  que  d'efficacité;  et  il  en  sera 
ainsi  tant  que  tout  fonctionnaire  quel  qu'il  soit  ne  pourra  être  déféré 
directement  par  qui  se  croira  lésé  aux  cours  d'assises,  seuls  tribunaux  à 
peu  près  indépendants,  qui  auraient  qualité  pour  prononcer  l'amende,  la 
prison,  la  suspension  et  la  révocation  ;  une  semblable  institution  serait 
.  une  loi  de  salut  public,  contre  les  excès  de  pouvoirs  des  juges  d'instruc- 
tion, des  fonctionnaires  administratifs  de  tous  ordres,  trop  souvent  sanc- 
tionnés par  les  tribunaux  civils  et  les  conseils  de  préfecture,  qui  ne  jouis- 
sent pas  ou  qu'on  ne  croit  pas  jouir,  ce  qui  revient  au  même,  d'une 
complète  indépendance. 
428, 

7,  Taches.  —  Cet  enthousiasme  évoque  le  souvenir  des  imprécations  de 
J.-J.  Rousseau  contre  Paris,  auxquelles  Bossuet  ne  se  montre  pas  plus 
favorable  :  «  Adieu,  Paris!  ville  de  bruit,  de  fumée  et  de  boue,  où  les  hommes 
ne  croient  plus  à  l'honneur,  et  les  femmes  à  la  vertu;  adieu,  Paris!  cher- 
chant la  tranquillité  et  le  bonheur,  nous  ne  serons  jamais  assez  loin  de 
toi.  »  J.-J.  Rousseau.  —  «  Paris,  Paris,  dont  on  ne  peut  apprécier  l'orgueil, 
dont  la  vanité  se  soutient  toujours,  malgré  tant  de  choses  qui  la  devraient 
déprimer;  quand  te  verrai-je  renversé.  »  Bossuet. 

7,  François.  —  L'unité  de  la  France  n'était  encore  que  virtuellement  réa- 
lisée; on  était  Breton,  Flamand,  Bourguignon,  Gascon,  Provençal,  etc.. 
autant  que  Français;  la  fusion  n'a  réellement  été  opérée  que  par  la  Révo- 
lution; ultérieurement  par  notre  organisation  militaire  d'avant  1870;  plus 
tard,  les  chemins  de  fer  ont  contribué  à  parfaire  cette  œuvre. 

15,  Estât.  —  La  prédiction  de  Montaigne  s'est  réalisée  en  1871,  lors  de  la 
Commune.  Ce  que  n'avaient  pu  faire  les  Allemands,  l'insurrection  l'a  tenté 
et  ce  n'est  pas  sa  faute,  mais  le  manque  de  temps,  si  Paris,  à  ce  moment, 
n'est  devenu  un  monceau  de  cendres;  si  seuls  les  Tuileries,  l'Hôtel  de  Ville, 
le  Ministère  des  Finances,  la  Cour  des  comptes,  le  Conseil  d'État,  la  Grande 
Chancellerie  de  la  Légion  d'honneur  ont  été  la  proie  des  flammes.  Dans 
l'avenir,  en  pareille  occurrence,  les  explosifs  viendront  en  aide  au  pétrole. 

16,  Abbois.  —  Me  retirer,  mourir.  —  Terme  de  chasse  pris  ici  au  figuré; 
un  cerf  est  aux  abois,  quand,  poursuivi  par  les  aboiements  des  chiens,  il 
est  serré  de  près. 

19,  Excès.  —  Var.  de  88  :  totH.  , 

20,  Postposant.  —  Subordonnant,  estimant  inférieure. 

20,  Commune.  —  C'est  la  théorie  que  professent  de  nos  jours  les  adeptes 
de  l'internationalisme.  Ils  préconisent  le  désarmement  universel,  ne  tenant 
aucun  compte  de  la  nature  humaine  chez  laquelle,  que  ce  soient  des  indi- 
vidualités ou  des  collectivités,  la  force  prime  le  droit,  toujours  prête  à 
fouler  aux  pieds  celui  d'autrui,  à  s'emparer  de  ses  biens,  ne  les  respectant 
que  chez  ceux  qui  sont  en  état  de  les  défendre.  Cette  utopie  serait  quand 
même  respectable  chez  ceux  qui  l'émettraient  de  bonne  foi,  mais  formulée 
par  des  ambitieux  et  des  énergumènes  qui  n'ont  en  vue  que  de  se  créer 
une  popularité  malsaine  en  faisant  miroiter  aux  yeux  des  masses  des 
aspirations  qui  les  allégeraient  de  toute  obligation  militaire,  de  se  dé- 
barrasser eux-mêmes  de  l'entrave  qu'apporte  l'armée  à  la  réalisation  de 


Pc. 672  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

leurs  idées  subversives  eu  vue  de  s'emparer  du  pouvoir,  c'est  avec  raison 
qu'on  les  flétrit  du  nom  de  sans-patrie. 

20,  Féru.  —  Frappé,  entiché,  captivé  par. 

29,  Cboaspez.  —  Plutarque,  De  l'Exil,  5;  Élien,  Hist.  div.,  XII,  40.  — 
«  Ses  eaux,  dit  Pline,  XXXI,  3,  sont  considérées  comme  admirables;  les 
rois  des  Parthes  en  font  porter  avec  eux,  même  dans  leurs  plus  longs 
voyages  »  ;  on  la  faisait  bouillii*. 

34,  Feisse.  —  Sur  ce  point,  Montaigne,  conséquent  du  reste  avec  lui-même, 
se  montre  de  tout  autre  sentiment  que  bien  d'autres.  «  Oh  !  n'exilons  per- 
sonne, l'exil  est  impie  »,  a  dit  Victor  Hugo.  «  L'exilé  partout  est  seul  », 
répète  Lamennais,  dans  une  de  ses  plus  belles  pages  où  il  peint  les  douleurs 
de  l'exil. 
430, 

4,  Quoy?  —  C'est  la  tournure  latine,  quid/'  quod...?  Elle  peut  se  traduire 
ainsi  :  Que  dirai-je  encore?  N'alla-t-il  pas  jusqu'à  repousser  l'argent  que 
ses  amis  étaient  disposés  à  sacrifier  pour  le  délivrer? 

8,  Seconde.  —  C.-à-d.  les  exemples  de  la  première  espèce  sont  ceux  qu'il 
embrasse  plus  par  estime  que  par  affection  ;  ceux  de  la  seconde  sont  ceux 
si  élevés,  si  extraordinaires,  qu'il  en  est  qu'il  n'arrive  même  pas  à  com- 
prendre. 

23,  Romains.  —  Martial,  XIV,  28;  Juvénal,  IX,  50. 

24,  Teste.  —  Le  parasol  en  Italie  et  aussi  en  Espagne,  transformé  plus  tard 
en  Angleterre  où  la  pluie  est  plus  fréquente  que  le  soleil,  y  fut  en  usage 
bien  avant  que  la  France,  grâce  à  son  climat,  songeât  à  l'adopter.  Il  ne 
s'est  généralisé  chez  nous  que  vers  la  fin  du  xvii"  siècle:  le  poids  de  ce 
meuble  donna  longtemps  à  réfléchir  :  en  l'an  de  grâce  1500,  il  mesurait 
en  effet  l'",20  de  diamètre  et,  confectionné  en  cuir,  toile  cirée,  étoffe  de 
soie  huilée  en  papier  verni,  ne  pesait  pas  moins  de  2  kilos. 

27,  Poste.  —  A  leur  gré.  —  Ce  devait  être  tout  simplement,  à  l'intérieur 
des  habitations,  par  le  moyen  de  pankas,  sorte  de  grands  panneaux  mo- 
biles, suspendus  au  plafond,  de  contexture  légère,  recevant  de  main 
d'homme  un  mouvement  d'oscillation  et  dont  il  est  fait  un  usage  constant 
dans  les  pays  orientaux;  à  l'extérieur,  à  l'aide  de  vastes  parasols  et  de 
gigantesques  éventails  portés  ou  agités  par  des  esclaves  ou  des  eunuques, 
comme  cela  se  pratique  encore  en  Chine  et  dans  les  Indes.  Ce  que  Xéno- 
phon  dit  des  Perses  à  ce  propos,  Hérodote  le  dit  égalemement  des  Lydiens 
et  Strabon  des  Bactriens. 

32,  Auoyé.  —  Une  fois  en  route.  —  Être  avoyé,  c'est  le  latin  in  via  esse. 

33,  Grandes.  —  Je  suis  aussi  disposé,  à  me  détourner  des  petites  entreprises 
que  des  grandes;  il  me  doute  autant  de  me  mettre  en  train  pour  les  unes 
que  pour  les  autres. 

432, 

8,  Partir.  —  Au  moyen  âge,  en  France,  on  ne  faisait  que  deux  repas  par 
jour  :  le  dîner  à  9  heures  du  matin  et  le  souper  à  5  heures  du  soir,  ce 
dernier  de  beaucoup  le  plus  copieux.  A  la  fin  du  xv*  siècle,  le  dîner  recula 
à  10  heures;  d'où  ce  dicton  de  l'époque  : 

«  Lever  à^six,  dîner  à  dix, 
Souper  à  six,  coucher  à  dix, 
Font  vivre  l'homnae  dix  fois  dix.  » 

Au  XVI»  s.,  du  temps  de  Montaigne,  à  11  heures;  au  xvii%  à  midi  :  «  J'y 
cours  à  midi  sonnant  »,  dit  Boileau  dans  sa  satire  du  Repas  ridicule; 
aujourd'hui,  certains  ne  dînent  à  Paris  qu'à  1  heure  et  demie.  Ce  recul 
progressif  amena  l'usage  du  déjeuner  (mot  dont  le  sens  est  «  rompre  le 
jeûne  »).  Quant  au  souper,  il  a  été  également  reculé  à  6  et  7  heures  en 
province,  7  heures  et  demie,  8  heures  à  Paris,  il  en  est  même  qui  soupent 
à  10  heures,  10  h.  1/2,  recul  qui  a  introduit,  pour  les  désœuvrés,  l'habitude 
du  thé  de  5  heures. 


NOTES.        LIV.  HT,  CH.  IX.        VOL.  III,  PAG.  432.  Fc.G73 

24,  (Economique.  —  Par  vertu  économique,  Montaigne  comprend  ici  tout 
ce  qui  est  relatif  à  la  bonne  tenue  d'une  maison;  non  seulement  l'écono- 
mie proprement  dite,  mais  aussi  l'ordre,  l'activité,  le  sens  des  affaires, 
qualités  qui  sont  intimement  liées  les  unes  aux  autres  et  n'ont  réellement  • 
d'effet  utile  qu'autant  que  nulle  d'elles  ne  fait  défaut. 

24,  Propre.  —  Je  mets  la  mienne  (ma  femme)  à  même;  je  lui  donne  occa- 
sion d'exercer  cette  vertu. 

30,  Puisse.  —  Pourvu  que  je  le  puisse. 

32,  Quiète.  —  Paisible,  tranquille,  du  latin  quielus,  quia  même  signification. 
434, 

3,  Desprendre.  —  Var.  de  88  :  perdre. 

9,  L'autre.  —  «  L'absence  n'affaiblit  pas  l'amitié,  elle  n'agit  que  éur  les 
passions  brûlantes  comme  l'amour  et  la  haine.  » 

•  L'absence  est  à  l'amour  ce  qu'est  au  feu  le  vent  ; 
Elle  éteint  le  petit  et  rallume  le  grand.  »  B.-Rabutin. 

«  La  beauté,  même  à  l'œil,  sait-elle  toujours  plaire? 
Vous  croyez  que  le  temps  la  détruit  ou  l'altère; 
L'habitude,  voilà  son  plus  triste  ennemi. 
A  qui  nous  voit  toujours  on  ne  plaît  qu'à  demi.  •  Barthe. 

La  conclusion  de  ce  quatrain  est  celle  de  Montaigne  :  «  Un  peu  d'absence 
fait  grand  bien  •  ;  mais  il  se  dit  aussi  avec  non  moins  de  vérité  : 

«  Loin  des  yeux,  loin  du  cœur!  » 

12,  CoUigance.  —  Union,  liaison  intime,  connexion;  du  latin  colligatio. 
15,  Ayde.  —  L'exemple  du   doigt  étendu  se  trouve   dans  Plutarque,  Des 

communes  conceptions  contre  les  Stoïques,  18;  quant  au  dîner,  cela  semble 

appartenir  en  propre  à  Montaigne. 

26,  Locorum.  —  Le  texte  original  est  ici  tant  soit  peu  altéré,  pour  mieux 
s'adapter  à  l'idée. 

436, 

4,  Non  que.  —  Non  moins  que. 

G,  Accouez.  —  Attachés,  accrochés.  Ce  terme  est  encore  employé  par  les 
marchands  de  chevaux  :  Accouer  quatre  ou  cinq  chevaux,  c'est  les  atta- 
cher à  la  file  les  uns  des  autres,  le  licol  de  l'un  à  la  queue  de  celui  qui  le 
précède. 

8,  Chiennine.  —  Saxon  le  Grammairien,  dans  son  Histoire  du  Danemark, 
VllI,  parlant  de  la  conversion  des  peuples  de  Rugen,  dit  que  les  habitants . 
de  Karenty,  une  de  leurs  villes,  après  avoir  renoncé  au  culte  de  leurs 
idoles,  ne  laissaient  pas  de  les  redouter  encore,  se  souvenant  de  la  manière 
dont  elles  avaient  souvent  puni  leurs  impudicités,  les  coupables,  en  action, 
demeurant  liés  l'un  à  l'autre  comme  des  chiens  sans  pouvoir  se  dégager, 
au  point  que  parfois  surpris  ainsi,  ils  avaient  été,  en  cet  état,  placés  l'un 
d'un  côté,  l'autre  de  l'autre,  sur  une  perche  qui  les  soutenait  en  l'air  et, 
de  la  sorte,  hvrés  à  la  risée  publique. 

27,  Viuoit.  —  La  Boétie. 

31,  Seuls.  —  En  ne  travaillant  que  pour  nous  seuls. 
438, 

1,  Tristes.  —  J'éclaircià,  j'égaie  les  tristes  pensées  par  des  parties  de  plaisir, 
telles  que  les  voyages. 

2,  Platoniques.  —  Platon,  Lois,  XII. 

4,  Volontiers.  —  Certains  pensent  qu'il  y  a  erreur  et  que  Montaigne  avait 
voulu  mettre  «  plus  mal  volontiers  »  et  appuient  leur  dire  de  ce  qu'il 
ajoute  peu  après  :  «  Mais  en  tel  aage,  vous  ne  reuiendrez  iamais...  »  L'er- 
reur est  loin  d'être  manifeste,  au  contraire;  et  quant  aux  mots  cités  à 
l'appui,  ils  n'affirment  cette  supposition  que  par  suite  de  l'intercalation 
de  la  phrase  précédente,  qui  n'existe  pas  dans  l'éd.  de  88. 

ESSAIS   DE  MONTAIGNE.  —  T.  IV.  13 


Fc.674  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

18,  Air.  —  Chrysippe  était  de  Soles  en  Cilicie,  Asie  Mineure;  Cléanthe, 
d'Assos  en  Éolie,  Asie  Mineure;  Diogène,  de  Babylone  en  Chaldée,  Asie 
Centrale;  Zenon,  de  Citium,  île  de  Chypre;  Antipater,  de  Tarse  en  Cilicie. 
Tous  ces  philosophes,  de  l'école  stoïcienne,  passèrent  leur  vie  à  Athènes. 
Plltarque,  De  l'Exil,  12. 

26,  Gorge.  —  Montaigne  dit  ailleurs  encore  être  sujet  à  des  maux  de  gorge  ; 
il  est  mort  d'une  esquinancie. 

29,  Miens.  —  Satisfaction  ne  lui  a  pas  été  donnée  sur  ce  point  :  il  est  mort 
chez  lui,  au  milieu  des  siens;  son  corps,  transporté  à  Bordeaux,  a  été  placé 
dans  l'église  des  Feuillants  et  son  cœur  déposé  dans  l'église  de  S.-Michel 
de  Montaigne.  V.  Notice  sur  sa  vie,  IV,  fasc.  A. 

31,  Entregent.  —  Civilité,  politesse. 
440, 

6,  Sortir.  —  Ménage,  à  son  lit  de  mort,  disait  de  même  au  confesseur  qui 
l'assistait  :  «  On  a  besoin  d'une  sage-femme  pour  entrer  en  ce  monde, 
combien  un  homme  sage  est  précieux  pour  en  sortir!  - 

10,  Coniller.  —  A  me  sauver,  me  cacher  comme  un  lapin  dans  son  trou. 
V.  N.  I,  200. 

14,  Quiète.  —  Paisible,  tranquille.  V.  N.  III,  432. 

17,  Parler.  —  Les  anciens  Grecs  et  Romains  attachaient  du  prix  aux  adieux 
suprêmes;  il  leur  semblait  que  l'àme,  au  moment  où  elle  se  détachait  du 
corps,  anticipait  sur  les  secrets  de  la  toinbe  et  ils  recueillaient  comme 
sacrées  les  dernières  paroles  des  mourants;  Andromaque,  dans  Homère, 
regrette  qu'Hector  mourant  n'ait  pu  lui  adresser  «  quelques  sages  paroles 
dont  l'éternel  souvenir  vînt  se  mêler  à  ses  larmes  ».  —  Che?  les  Romains, 
mourir  sans  parler,  se  disait  encore  de  ceux  qui  mouraient  intestats. 

18,  Yeux.  —  L'usage  de  clore  les  yeux  et  la  bouche  à  l'instant  de  la  mort, 
était  en  quelque  sorte  un  rite  sacré  dans  l'antiquité  :  dans  l'Odyssée, 
Agamemnon  aux  Enfers,  ou  plutôt  son  ombre,  se  plaint  de  ce  que  Clytem- 
nestre,  au  moment  où  elle  venait  de  l'assassiner,  s'est  retirée  sans  accom- 
plir ce  pieux  devoir. 

23,  Rechigner.  —  Faisant  mauvaise  figure,  geignant,  ayant  l'air  maussade. 
La  Fontaine  s'est  servi  de  ce  mot  dans  sa  fable  L'aigle  et  hibou;  dépei- 
gnant les  petits  de  celui-ci,  il  dit  :  «  de  petits  monstres  fort  hideux,  rechi- 
gnes, la  voix  de  mégère  ». 

24,  Pieds.  —  Chateaubriand  pensait  de  même  :  «  Cette  impossibilité  de  durée 
et  de  longueur  dans  les  liaisons  humaines,  cet  oubli  profond  qui  nous 
suit,  cet  invincible  silence  qui  s'empare  de  notre  tombe  et  s'étend  de  là 
sur  notre  maison,  me  ramènent  sans  cesse  à  la  nécessité  de  l'isolement. 
Toute  main  est  bonne,  pour  nous  donner  le  verre  d'eau  dont  nous  avons 
besoin  dans  la  fièvre  de  la  mort.  Ah!  qu'elle  ne  nous  soit  pas  trop  chère, 
car  comment  abandonner,  sans  désespoir,  la  main  que  l'on  a  couverte  de 
baisers  et  .que  l'on  voudrait  tenir  éternellement  sur  son  cœur!  » 

27,  Discours.  —  Par  raison. 
442, 

2,  Cheure.  —  Se  fâcher,  se  mettre  en  colère;  c.-à-d.  imiter  la  chèvre  dans 
ses  bonds,  dans  ses  emportements. 

12,  Contrebas.  —  De  haut  en  bas,  tout  à  fait. 
16,  Main.  —  De  longue  main,  d'avance. 

31,  "Vent.  —  Sans  frapper  de  grands  coups  en  i'air,  sans  perdre  son  temps. 
31,  Préoccuper.  —  Prévenir. 
444, 

3,  Dion.  —  Lire  Bion,  ainsi  que  le  portent  l'ex.  de  Bord,  et  la  traduction. 
DiOGÈNE  Laerce,  IV,  45. 

4,  Broche.  —  Il  lui  ferma  la  bouche.  Cette  expression  couper  broche,  tirée 
de  ce  que  l'on  arrête  l'écoulement  du  vin  d'un  tonneau,  en  introduisant 
dans  l'orifice  une  tige  de  bois  ou  broche  que  l'on  coupe  au  ras  de  la  douve, 
correspond  exactement  à  celles  de  couper  court,  couper  net,  que  nous 
employons  aujourd'hui  et  dont  l'origine  est  la  même. 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  IX.        VOL.  III,  PAG.  444.  FcôT-i 

12,  L'iniure.  —  On  prête  à  un.  prédicateur  des  plus  en  renom  de  notre 
temps  un  fait  analogue  :  Piquée  au  vif  par  quelque  trait  de  l'orateur,  une 
personne  crut  s'en  venger  en  disant  à  tout  venant,  qu'après  tout  lui- 
même  n'était  fils  que  d'un  cordonnier.  11  est  de  par  le  monde  une  gent 
exécrable,  celle  qui  a  la  manie  de  rapporter  perfidement  à  autrui  ce  qu'on 
dit  de  lui,  sous  couleur  de  lui  témoigner  de  l'intérêt,  le  frappant  d'un 
trait  qui  ne  l'avait  pas  touché,  au  risque  de  créer  les  pires  inimitiés;  quelle 
atteinte  à  la  charité  et  que  de  mallieurs  en  résultent  chaque  jour!  Le  pro- 
pos fut  répété  à  l'intéressé,  et,  dans  le  premier  sermon  qui  suivit  :  «  On 
me  reproche,  dit  notre  prédicateur,  d'être  fils  d'un  cordonnier;  hélas!  pas 
même  d'un  cordonnier,  je  ne  suis  fils  que  d'un  savetier  qui  ne  faisait  que 
les  raccommodages  et  les  ressemelages,  c^  qui  du  reste  ne  diminue  en  rien 
l'honorabilité  de  mes  parents.  » 

25,  loindre.  —  Cet  honnête  homme,  Montaigne  le  trouva,  vers  l'an  1586, 
dans  Pierre  Charron,  qui,  après  la  mort  de  l'auteur  des  Essais,  écrivit  un 
livre  intitulé  :  ■<  De  la  Sagesse  »,  où  il  a  recueilli  une  infinité  de  pensées  de 
Montaigne  avec  lequel  il  était  lié  d'une  étroite  amitié  vers  la  fin  de  sa  vie. 

32;  Féaux.  —  Les  plus  fidèles,  les  plus  intimes. 

37,  Amy.  —  L'éd.  de  88  et  l'ex.  de  Bord.,  au  Heu  de  :  «  Eh  qu'est-ce  qu'vn 
amy!  •  portent  :  Oh!  vn  amy!  variante  beaucoup  plus  heureuse  sous  rap- 
port de  la  forme  et  de  l'ejfpression  et  qui,  pour  cette  raison,  a  été  suivie 
dans  la  traduction. 

39,  Feu.  —  CicÉRON,  De  Amicit.,  0. 
446, 

6,'Empescber.  —  Embarrasser. 

Q,  Indois.  —  C'est  pourquoi  les  Indiens...  —  Montaigne  dit  volontiers  In- 
dois pour  Orientaux,  dans  le  même  sens  que  les  Romains  et  les  Grecs  di- 
saient les  Barbares,  et  les  Hébreux,  les  Gentils.  —  Ce  qu'il  remarque  ici 
des  Indiens,  Sextus  Empiricus  le  dit  des  Scythes,  Strabon  des  Bactriens  et 
des  Massagètes.  Le  passage  semble  tiré  cI'Hérodote,  où  on  lit  :  «  On  dit 
qu'ils  observent  cette  coutume,  qu'aussitôt  que  quelqu'un  d'entre  eux, 
homme  ou  femme,  tombe  malade,  ses  meilleurs  amis  le  tuent,  parce  que, 
disent-ils,  il  devient  maigre  et  que  la  maladie  corrompt  sa  chair;  et  celui- 
là  même  qu'ils  croient  malade  et  qui  ne  l'est  pas,  ils  ne  laissent  pas  de  le 
tuer  impitoyablement;  ils  font  mourir  de  même  ceux  qui  sont  parvenus  à 
une  extrênijC  vieillesse,  mais  à  ce  régime-là,  il  y  en  a  peu  qui  arrivent  à 
un  âge  avancé.  Il  y  a  d'autres  peuples  dans  les  Indes  qui  observent  une 
coutume  un  peu  différente  :  aussitôt  que  quelqu'un  d'entre  eux  est  malade, 
il  se  retire  à  l'écart  dans  un  lieu  désert,  où  il  demeure  tout  seul,  sans  que 
personne  prenne  soin  de  lui,  soit  qu'il  guérisse,  soit  qu'il  meure.  »  —  En 
ce  qui  concerne  plus  particulièrement  les  Massagètes  (peuple  scythe  au  N. 
de  la  mer  Caspienne),  ils  considéraient,  dit  Strabo.v,  que  la  mort  la  plus 
honorable,  quand  l'âge  les  a  rendus  inutiles,  c'est  d'être  tués  et  mangés 
avec  de  la  viande  de  mouton.  Quant  à  ceux  usés  par  la  maladie,  ils  les  dé- 
truisaient comme  impies  et  ne  les  considéraient  que  comme  susceptibles 
d'être  dévorés  par  les  bêtes  fauves.  Un  autre  auteur  ajoute  qu'ils  n'esti- 
maient rien  de  si  malheureux,  que  de  périr  autrement  que  par  le  fer;  et 
c'est  pourquoi  ils  se  faisaient  une  loi  de  tuer  ainsi  les  vieillards  et  de  les 
manger. 

10,  Insupportables.  —  Ceux  qui  traînent  languissants  un  si  long  espace  de 

vie. 
19,  Loy.  —  La  liberté,  le  droit. 

22,  Maladie.  —  Robert  Gagui.n,  historien  du  xv«  siècle,  dit  en  parlant  de 
Louis  XI  :  •  Dans  son  désir  de  recouvrer  la  santé,  il  alla  jusqu'à  absorber 
du  sang  humain  tiré  à  des  enfants  >-;  on  en  a  dit  autant  du  pape  Inno- 
cent VIII.  —  Celse  dit  :  «  Il  y  en  a  qui  se  sont  guéris  de  l'épilepsie  en  bu- 
vant du  sang  chaud  d'un  gladiateur  qui  venait  d'être  égorgé  »  ;  l'empe- 
reur Constantin,,  malade,  donna  un  témoignage  de  sa  déférence  au  pape 
Sylvestre,  en  renonçant  à  prendre  des  bains  de  sang. 


FC.C76  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

24,  Poisante.  —  Peut-être  David  qui,  d'après  le  Livre  des  Rois,  «  âgé  de 
soixante-dix  ans,  ne  pouvant,  par  suite  de  son  âge,  se  réchauffer,  bien 
qu'ayant  déjà  des  épouses  et  des  concubines,  fit  venir  du  fond  de  ses  états 
une  vierge  pour  coucher  avec  lui  et  le  réchauffer  de  son  contact  »  ;  et, 
ajoute  le  livre  saint,  il  n'eut  pas  d'autres  rapports  avec  elle.  —  On  a  pensé 
aussi  que  ce  pouvait  être  le  duc  d'Albe,  mais  si  on  a  dit  de  lui  qu'il  se  fai- 
sait allaiter  par  deux  nourrices,  on  ne  trouve  rien  autre  du  procédé  prêté 
à  David.  —  L'éd.  de  88  aj.  ici  :  le  conseillerois  volontiers  Venise  pour  la 
retraicle  d'vne  telle  condition  et  foiblesse  de  vie. 

30,  Pendant.  —  Escarpé,  glissant. 

;U,  Gaignart.  —  Coin.  En  Gascogne,  on  désigne  de  ce  nom,  qui  semble  venir 
du  latin  canis,  chien,  les  (joins  exposés  au  soleil  où,  en  hiver,  les  chiens,  et 
aussi  les  gueux,  se  rassemblent,  cherchant  à  combattre  le  froid. 
448, 

8,  lour.  —  «  Ne  remets  pas  à  demain  ce  que  tu  peux  faire  aujourd'hui.  » 
Proverbe.  —  Conséquent  avec  lui-même,  Montaigne,  sentant  approcher 
sa  fm,  se  leva  de  son  lit  en  chemise,  prit  sa  robe  de  chambre,  passa  dans 
son  cabinet  et,  faisant  appeler  tous  ses  serviteurs  et  autres  personnes  aux- 
quelles il  voulait  laisser  des  souvenirs,  il  leur  remit  ce  qu'il  avait  consigné 
à  leur  intention  dans  son  testament,  par  crainte  des  difficultés  qu'auraient 
pu  faire  ses  héritiers  pour  acquitter  les  legs  qu'il  avait  faits.  Anthone,  Com- 
mentaire sur  la  coutume  de  Bordeaux. 
Il,  A  peu.  —  Pour  peu. 

22,  Vsage.  —  Qui  sont  uniquement  à  l'usage... 
450, 

3,  Perdu.  —  Etienne  de  La  Boétie.  V.  liv.  I,  ch.  XXVII,  I,  296  et  suiv. 

4,  Visages.  —  Add.  de  88  :  le  scay  bien  que  ie  ne  lairray  après  moy  aucun 
respondant  si  affectionné  de  bien  loing  et  entendu  en  mon  faict,  comme  i'ay 
esté  au  sien,  ny  personne  à  qui  ie  vousisse  pleinement  compromettre  de  ma 
peinture  :  luy  seul  iouyssoit  de  ma  vraye  image,  et  l'emporta.  C'est  pourquoy 
ie  me  deschiffre  moy  mesmes  si  curieusement. 

11,  M'attendre.  —  Qu'à  m'occuper  d'elle... 

21,  Gaton.  —  Caton  d'Utique.  V.  N.  II,  430  :  Premier. 

31,  Gommourans.  —  Nom  d'une  comédie  de  Plaute.  C'est-à-dire  la  bande 
de  ceux  qui  voulaient  mourir  ensemble,  formée  par  Antoine  et  Cléopâtre; 
gens  qui,  après  la  bataille  d'Actium  "(31),  avaient  formé  ce  projet  au- 
quel, le  moment  venu,  nombre  n'hésitèrent  pas  à  se  soustraire  et  qui  en 
l'attendant  passaient  leur  temps  dans  les  festins  et  la  débauche.  Plutarque, 
Antoine,  15. 

34,  Petronius.  —  Tacite,  Ann.,  XVI,  19.  —  Pétrone  fut  un  des  favoris  de 
Néron  qui  lui  donna  le  titre  d'Arbitre  des  élégances  (intendant  des  plai- 
sire);  soupçonné  d'avoir  pris  part  au  complot  de  Pison,  il  reçut  l'ordre  de 
se  donner  la  mort,  s'ouvrit  les  veines  et  montra  dans  ses  derniers  moments 
la  plus  grande  sérénité.  On  a  de  lui  un  pamphlet  satirique,  où  se  trouve 
entre  autres  un  morceau,  •«  Le  festin  de  Trimalcion  »,  contenant  de  nom- 
breuses allusions  à  Néron,  à  ses  débauches  et  à  son  manque  de  goût; 
pamphlet  qu'en  mourant,  il  lui  aurait  adressé  à  lui-même. 

31,  Tigellinus.  —  Tacite,  Hist.,  I,  72.  —  Tigellinus,  de  basse  naissance,  favori 
de  Néron,  le  déprava,  le  façonna  à  tous  les  forfaits,  osa  même  en  com- 
mettre à  son  insu  et  finit  par  l'abandonner  et  le  trahir;  "c'est  dans  ses  jar- 
dins que  commença  l'incendie  de  Rome.  Exécré  de  tous,  il  reçut  d'Othon 
l'ordre  de  mourir;  au  milieu  des  étreintes  et  des  baisers  de  ses  maîtresses, 
après  des  retards  honteux,  il  se  coupa  la  gorge  et  couronna  l'opprobre  de 
sa  vie  par  la  lenteur  et  la  honte  de  sa  mort. 

35,  Mort.  —  Add.  de  88  :  Selon  les  règles  de  ce  temps  là.  ^ 
452, 

15,  Vie.  —  A  la  facilité  avec  laquelle  je  quitterai  la  vie. 

25,  Fois.  —  Et  plus  encore  quelquefois. 

27,  Propriété.  —  Du  latin  propriare,  approprier;  par  ext.,  convenable,  con- 


NOTES.         UV.  III,  CH.  IX.        VOL.  III,  PAG.  452.  Fc.677 

fortable.  Certains  éditeui*s,  de   leur  propre  mouvement,  y  ont  substitué 
«  propreté  ». 

30,  Conuiuium.  —  Cette  première  partie,  Montaigne  l'a  adaptée  à  son  sujet 
en  lui  prêtant  un  sens  tout  contraire  à  celui  qu'elle  a  dans  l'original. 

37,  Superflue.  —  Voltaire  était  d'un  avis  contraire  :  «  Le  superflu,  chose  si 
nécessaire  »,  a-t-il  dit  quelque  part. 
454, 

8,  Raison.  —  Dans  le  Journal  de  son  voyage  en  Allemagne  et  en  Italie, 
Montaigne  dit  de  lui-même  qu'  «  il  se  conforme  et  renge,  en  tant  qu'en  luy 
est,  aux  modes  du  lieu  où  il  se  treuue  :  et  qu'il  portoit  à  Auguste  (Augs- 
bourg)  un  bonnet  fourré  parla  ville  ». 

10,  Vn.  —  Et  tellement  un  (égal,  indifférent)  que  je  me  plains,  en  vieillissant, 
de  cette  manière  d'être  qui  fait  que  je  suis  content  de  tout. 

16,  Estrangers.  —  «  Evitez  chez  l'étranger  de  vous  lier  avec  les  gens  de 
votre  nation,  vous  ne  verriez  ensemble  que  votre  pays.  »  Bacon. 

20,  Estrangeres.  —  Les  guides  qui  abondent  actuellement,  en  même  temps 
que  s'est  développé  en  France  le  goût  des  voyages,  donnent,  avec  juste 
raison,  comme  principe  essentiel,  surtout  à  l'étranger,  de  savoir  se  con- 
former aux  goûts  et  aux  habitudes  des  pays  où  l'on  se  trouve. 

25,  Venir.  —  Le  retour. 

34,  Homme.  —  Honnête  homme,  au  sens  où  le  xvn'  siècle  emploiera  si  sou- 
vent cette  expression,  c'est  non  tant  l'homme  d'honneur  que  l'homme 
galant,  l'homme  comme  il  faut. 

35,  Façons.  —  A  rencontre  de  ces  hommes  qui  s'effarouchent  des  façons 
contraires  aux  leurs,  je  voyage  parce  que  je  suis  las  de  nos  manières. 

36,  Logis.  —  Aussi  «  se  faschoit-il,  comme  il  le  dit  dans  son  Journal  de 
voyages,  de  rencontrer  à  Rome  si  grand  nombre  de  François,  qu'il  ne 
trouuoit  en  la  rue  quasi  personne  qui  ne  le  saluast  en  sa  langue  ».  —  Nous 
pouvons  en  dire  autant  aujourd'hui  des  étrangers  à  Paris.  Anglais  et  Alle- 
mands en  particulier  pullulent,  non  seulement  en  qualité  de  touristes  qui 
sont  légions,  mais  y  demeurant  soit  pour  leur  agrément,  soit  pour  faire  le 
commerce  ou  se  livrer  à  l'industrie  :  c'est  une  véritable  invasion;  et,  où 
qu'on  soit^  où  qu'on  aille,  on  y  entend  parler  les  langues  étrangères  au 
moins  autant  que  le  français. 

456, 

4,  Peu.  —  Y  a  pu;  forme  elliptique  pour  :  «  y  a  pu  tenir,  y  a  pu  loger  ». 
13,  Suiure.  —  Add.  de  88  :  et  qui  prenne  plaisir  à  vous  assister. 
30,  Arcbytas.  —  Cicéron,  De  Amicitia,  23.  —  Archytas  fut  à  la  fois  ma- 
thématicien, astronome,  homme  d'état,  général;  six  fois   il  fut  élu  chef 
du  gouvernement  et  à  diverses  reprises  battit  les  ennemis  de  sa  patrie.  11 
avait  écrit  sur  presque  tous  les  sujets,  il  ne  reste  de  lui  que  de  très  courts 
fragments.  On  lui  attribue  l'invention  de  la  vis,  de  la  poulie;  il  avait, 
dit-on,  construit  une  colombe  volante. 
30,  Passer.  —  La  vie. 

34,  Auez-vous.  —  S.-ent.  :  mais  on  me  dira;  —  ou  plutôt  Montaigne  adopte 
ici  la  forme  d'un  dialogue  entre  lui  et  un  interlocuteur  supposé  qui  l'engage 
à  ne  pas  voyager. 
458, 

1,  Pompe.  —  Henri  de  Navarre  y  vint  avec  toute  sa  maison  militaire  et  ses 
équipages  de  chasse  le  19  décembre  1584  et  y  séjourna  deux  jours;  il  y 
vint  loger  une  seconde  fois  le  23  octobre  1587,  après  la  bataille  de  Coutras. 
7,  Destourbier.  —  Embarras.  V.  N.  II,  454. 

26,  Moditication.  —  Var.  de  88  :  mesure. 
460, 

6,  Non .  —  Où  n'y  en  a-t-il  pas  / 

22,  Poulet.  —  Un  billet  doux. 

23,  Frotter.  —  C'est  ce  que  Rabelais  appelle  faire  la  bête  à  deux  dos. 

26,  Porcie.  —  Fille  de  Caton  d'Utique,  s'arracha  la  vie,  quand  elle  apprit  la 
défaite  et  la  mort  de  Brutus  son  mari,  après  la  bataille  de  Phihppes;  ne 


Fc.078  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

pouvant  trouver  un  fer  pour  se  détruire,  elle  avala  des  charbons  ardents. 

27,  Homme.  —  Probablement  Théodore  de  Bèze,  qui  publia  presque  en  même 
temps  des  poésies  amoureuses  et  de  nombreux  ouvrages  très  appréciés  on 
faveur  de  la  Réforme,  parmi  lesquels  malheureusement  une  apologie 
intolérante  du  jugement  et  du  supplice  de  Servet,  brûlé  vif,  du  fait  de 
Calvin,  à  Genève,  en  1553,  pour  cause  d'hérésie.  D'autres  pensent  qu'il 
s'agit  de  Muret  qui,  en  1552,  fit  imprimer  et  un  Discours  sur  l'excellence 
de  la  philosophie  et  des  pièces  fort  légères  en  môme  temps  qu'un  com- 
mentaire assez  indiscret  des  «  Amours  »  de  Ronsard.  Bonnefon. 

31,  Desieuné.  —  Se  soit  régalé  (en  rompant  son  jeûne). 
34,  Sentez.  —  Ecoutez  lire...;  foi-me  latine  sentite,  écoutez. 
38,  Ariston.  —  Plutarqoe,  Comment  il  faut  ouïr,  8. 
462, 

5,  Ouurier.  —  Aristippe. 

8,  Aristippique.  —  Contre  la  vertu  telle  que  la  définissait  Aristippe.  Dio- 

GKNE  LaEIîCE,  II. 

Il,  Presse.  —  La  foule,  la  multitude. 

14,  Antisthenes.  —  Diogène  Laerce,  VI,  11. 

17,  Diogenes.  —  Diogène  Laerce,  VI,  38. 

18,  Confidence.  —  La  fermeté,  la  résolution;  c'est  le  sens  de  ce  mot  en 
latin,  mais  qui  n'est  plus  celui  qu'il  a  de  nos  jours. 

23,  Lays.  —  De  Guevara,  Epit.  dorées;  venant  de  cette  source,  on  a  tout 

lieu  de  tenir  ce  propos  comme  apocryphe. 
38,  Sua.  —  La  relation  de  cette  citation  avec  le  texte,  ne  se  saisit  pas  bien; 

cela  arrive  quelquefois  chez  Montaigne. 
41,  Inégale.  —  «  Il  n'y  a  pas  trois  ou  quatre  peuples  sur  la  terre  où  les  lois 

criminelles  soient  assez  bonnes,  pour  qu'on  ne  préfère  pas  à  leur  tribunal 

celui  d'un  seul  homme  de  probité  et  de  bon  sens.  Servan. 

11    Endroicts.  —  De  se  montrer  à  la  fois  sous  deux  jours  opposés. 
13,  Choses.  —  Les  prédicateurs,  les  moralistes. 

15,  Conférence.  —  Du  rapport,  de  la  relation  avec  les  autres  vies. 

19,  Saison.  —  Cicéron,  dans  sa  Lettre  à  Alticus,  II,  I,  reproche  encore  à 
Caton  de  parler  quelquefois,  comme  s'il  opinait  dans  la  république  de 
Platon,  et  non  dans  la  lie  de  Romulus. 

28,  Innocente.  —  Louis  XVI  est,  chez  nous,  un  exemple  des  plus  probants 
de  cette  vérité,  que  démontrent  non  moins  péremptoirement  ceux  entre 
autres  de  Louis  XI  et  de  Richelieu.  L'expérience  ne  le  prouve  que  trop, 
pour  gouverner  les  hommes  et  triompher,  dans  leur  intérêt  même,  des 
obstacles  sans  cesse  renaissants  que  ceux  qui  en  ont  la  gestion  rencontrent 
à  l'accomplissement  de  leur  mission,  il  ne  faut  voir  que  l'utile,  sans  se 
préoccuper  outre  mesure  du  bien  ou  du  mal,  du  juste  ou  de  l'injuste, 
quand  la  nécessité  commande  ;  celui  qu'arrêtent  les  scrupules  le  cas  échéant, 
ne  fait  rien  qui  vaille. 

31,  Confesseur.  —  Peut-être  est-il  question  ici  de  saint  Louis  qui,  de  l'aveu 
même  de  Joinville  son  historien  et  son  panégyriste,  fut  très  intolérant  et 
entreprit  des  croisades  qiïî  coûtèrent  tant  à  la  France,  tournèrent  si  mal 
et  lui  firent  négliger  l'administration  du  royaume.  Naigeon.  —  Cela  peut 
s'appliquer  également  à  Charles  VIII  qui,  en  1484,  restitua  le  Roussillon  à 
Ferdinand  roi  de  Castille,  à  l'instigation  de  son  confesseur;  à  Henri  II, 
qui  persécuta  les  réformés  à  l'instigation  du  cardinal  de  Lorraine  «  qui 
avait  la  conscience  du  roi,  comme  en  sa  manche  »  ;  à  Louis  XIV,  que 
l'influence  de  ses  confesseurs  amena  à  révoquer  l'édit  de  Nantes,  fait  qu'on 
ne  saurait  toutefois  imputer,  comme  nombre  d'historiens  l'ont  fait,  au 
Père  Lachaise  qui,  ainsi  qu'en  témoignent  les  Mémoires  de  Saint-Simon,  y 
était  au  contraire  absolument  opposé  et  parvint  à  l'empêcher  tant  qu'il  vécut. 

33,  Pius.  —  CoME  DE  MÉDTCis  disait  :  «  On  ne  gouverne  pas  avec  des  pate- 
nostres.  »  Et  Bernadotte  :  «  Qu'il  fallait,  pour  conduire  la  France,  une 
main  de  fer  gantée  de  velours. 


NOTES.         LIV.  III,  CIL  IX.         VOL.  III,  PAG.  466.  Fc.679 

466, 

9,  Affaires.  —  Cela  est  très  vrai  et  explique  pourquoi  en  politique  les 
hommes  sont  souvent  inconsciemment  différents  de  ce  qu'ils  sont  dans  la 
vie  privée.  Mais,  si  dans  les  circonstances  anormales  tout  acte,  quel  (lu'il 
soit,  peut  avoir  sa  raison  d'être  et  son  excuse,  en  temps  normal  le  respect 
des  principes  constitutionnels,  des  libertés  publiques  et  des  droits  de 
chacun  est  de  règle  absolue.  Ce  qui  n'empêche  que  nous  voyons  constam- 
ment nos  gouvernants  y  faillir,  parce  que  nous  manquons  du  caractère 
nécessaire  pour  le  leur  imposer  et  que  leur  responsabilité  morale  et 
légale  à  cet  égard  est  illusoire.  Mais  les  pouvoirs  publics  ne  sont  pas 
immuables  et  il  ne  faut  pas  désespérer  qu'il  en  survienne  d'autres  qui 
demanderont  compte  à  ceux  qui  les  ont  précédés  plus  ou  moins  immé- 
diatement, législateurs,  ministres,  chefs  de  l'état,  de  leur  coopération  à  la 
confection  et  à  l'exécution  de  lois  injustes,  ou  d'actes  de  forfaiture;  et 
aussi  à  tous  autres,  investis  de  fonctions  publiques  auxquelles  rien  ne  les 
avait  préparés,  des  mesures  désastreuses  résultant  de  leur  incapacité.  La 
prescription  en  pareille  matière  n'existe  pas,  et,  bien  que  tardivement,  ils 
pourront  avoir  à  supporter  dans  leurs  personnes  et  dans  leurs  biens  les 
conséquences  des  responsabilités  encourues.  Cela  s'est  déjà  vu,  quoique 
assez  rarement;  nous  souhaitons  dans  l'intérêt  public  que  ce  qui  sous  ce 
rapport  a  été  l'exception  devienne  la  règle,  sans  que  pour  cela  se  modifie 
la  forme  actuelle  du  Gouvernement,  qui  est  celle  ayant  toutes  nos  préfé- 
rences; mais  d'elle,  comme  de  toute  institution  humaine,  tant  vaut 
l'homme,  tant  vaut  la  chose. 

9,  Platon.  —  République,  IV,  quelques  pages  après  le  commencement. 
10,  Nettes.  —  Les  culottes  intactes;  c.-à-d.  immaculé,  sans  reproche.  V.  N. 
III,  420  :  Bragues. 

15,  Solage.  —  En  sol,  en  terrain  fort  différent  de  celui  qui  lui  conviendrait. 
40,  Conseil.  —  Le  fait  est  rapporté  dans  son  Gorgias,  où  il  est  traité  de 

l'homme  apte  à  gouverner  les  affaires  publiques,  et  mis  par  Platon  dans  la 
•  bouche  même  de  Socrate  qui  dit  qu'  «  étant  sénateur  et  sa  tribu  se  pré- 
sentant aux  assemblées  du  peuple,  il  ne  savait  comment  s'y  prendre  pour 
recueillir  les  suffrages,  n'étant  pas  un  homme  politique  et  passant  son 
temps  à  s'étudier  lui-même,  sans  s'occuper  des  foules,  ni  de  ce  qu'elles 
pensent  ».  V.  N.  III,  576  :  Socrates. 
468, 

1,  Nombre.  —  La  mienne  est  très  bornée,  quoique  ne  s'étendant  qu'à  un 
petit  nombre  d'objets. 

1,  Saturninus.  —  Trebeli.ius  Poi.i.ion,  Trig.  Tyr.,  23.  —  Saturninus,  Gau- 
lois d'origine,  prit  du  service,  se  signala  par  ses  exploits  en  Gaule,  en  Es- 
pagne, en  Afrique,  parvint  aux  premiers  grades,  fut  salué  empereur  dans 
Alexandrie  et  ne  prit  la  pourpre  qu'à  contre-cœur;  au  bout  de  quelques 
mois,  abandonné  de  ses  troupes,  il  fut  mis  à  mort  (ur  s.). 

5,  Sincère.  —  Var.  de  88  :  Exquise. 

Ib,  Appuyer.  —  Signifie  ici  :  aider  à  la  résistance  contre  la  disposition  au 
mal. 

16,  Enuis.  —  Suivre  envis   une  pente,  un  parti,  une  faction,  c'est  y  être 
entraîné  à  regret,  à  contre-cœur,  avec  répugnance,  malgré  soi. 

26,  Xenopbon.  —  Cet  éloge  s'y  trouve  :  Hist.  grecq.,  IV,  1  et  Eloge  d'Agé- 
silas,  III,  4;  seulement  il  n'y  est  point  question  de  passage  à  travers  le 
Péloponnèse,  mais  d'une  entrevue  dans  son  camp  à  laquelle  Cotys  roi  de 
Paphlagonie,  qui  n'avait  pas  voulu  se  fier  au  roi  de  Perse,  se  rendit  sans 
autre  garantie  que  la  parole  d'Agésilas. 
34,  Capettes.  —  Ces  bambins  d'écoliers.  —  Babouin  signifie  un  enfant 
.  espiègle;  capette  était  le  surnom  donné  à  certains  écoliers  d'un  collège 
de  Paris  (collège  Montaigu),  du  petit  manteau  qu'ils  portaient;  traités  fort 
durement  sous  le  rapport  de  la  table  et  de  la  discipline,  ils  ne  brillaient 
guère  en  général  par  l'intelligence  et  l'instruction,  ce  qui  fit  prendre  ce 
surnom  en  mauvaise  part. 


Fc.680  ESSAIS  Ï)E  MONTAIGNE. 

35,  Françoise.  —  Tant  on  entend  autrement  l'innocence,  la  vertu  en  France, 
qu'on  ne  l'entendait  à  Sparte.  —  C'est  ce  qui  était  arrivé  en  1540,  lorsque 
Charles-Quint,  se  rendant  dans  les  Pays-Bas,  traversa  la  France.  Il  fut 
blâmé  par  nombre  de  gens  de  l'espèce  de  ceux  que  Montaigne  traite  pré- 
cisément ici  de  «  babouins  capettes  »,  pour  son  imprudence  à  se  confier 
ainsi  à  la  bonne  foi  de  François  I",  et  celui-ci  le  fut  pareillement  de  sa 
simplicité  à  ne  pas  user  d'une  si  belle  occasion  de  se  rendre  maître  de  son 
plus  redoutable  ennemi. 
470, 

16,  Guerre.  —  C'est-à-dire  que,  dans  l'intervalle,  pouvant  mourir  de  mort 
naturelle  ou  être  massacré  par  l'un  des  partis,  il  échapperait  de  la  sorte  à 
cette  tempête. 

18,  Voleurs.  —  Marc-Antoine,  Octave  et  Lépide  qui,  de  concert,  s'emparè- 
rent du  pouvoir  après  la  mort  de  César  et  formèrent  le  second  triumvirat 
(42). 

24,  Platon.  —  Le  Phèdre,  œuvre  assez  brillante  de  sa  jeunesse. 

26,  Muances.  —  Changements.  Ils  ne  font  pas  difficulté  de  passer  d'un  sujet 
à  un  autre  tout  différent. 

30,  L'Eunucbe.  —  L'Andrienne,  l'Eunuque,  deux  comédies  de  Térence. 

31,  Torquatus.  —  Sylla,  Cicéron,  Torquatus,  titres  de  chapitres  des  Vies 
parallèles  de  Plutarque. 

32,  Demoniacle.  —  Démoniaque,  ou  plutôt  divine.au  sens  qu'a  ce  mot  8at- 
{10V15C1Ô  dans  la  langue  grecque.  * 

35,  Socrates.  —  Démon  de  Socrate,  un  des  traités   des   Œuvres  morales  de 
Plutarque,  qui  porte  ce  nom. 
472, 

1,  Plus.  —  Surtout  quand  elles  semblent  être  le  fait  de  l'inattention  et  du 
hasard. 
4,  Change.  —  Je  change  de  sujet. 

7,  Maistres.  —  «  Qui  ne  sait  être  fou,  n'est  pas  sage.  »  Proverbe. 

12,  Platon.  —  Lois,  VI. 

16,  Ronapu.  —  Luy  mesme  est  tout  poétique,  add,  de  l'ex.  de  Bord,  qui  a  été 
insérée  dans  la  traduction. 

28,  Maie.  —  Ce  n'est  déjà  pas  si  mal,  s'il  advient... 

30,  C'est  mon.  —  C'est  mon  avis;  se  disait  encore  en  Normandie,  il  y  a  deux 

siècles,  pour  «  ouï  da  »,  sans  doute. 
35,  Aristote.  —  Voir  Aulu-Gelle,  XX,  5,  et  Plutarque,  Alexandre,  2. 
474, 

8,  Trouue.  —  La  raison. 

8,  Incommode.  —  Ailleurs,  notamment  III,  336,  Montaigne  dit  qu'il 
cherche  la  vérité  ;  ici,  il  avoue  qu'il  s'en  soucie  peu,  si  elle  peut  troubler 
sa  tranquillité;  c'est  là  un  des  nombreux  exemples  de  ses  contradictions 
et  des  changements  que  l'âge  ou  la  maladie  apportaient  dans  ses  opi- 
nions. 

9,  L'asnerie.  —  Var.  de  88  :  /a  grosserie. 

13,  Ville.  —  De  Rome. 

14,  Beuere.  —  En  1581,  Montaigne  séjourna  à  Rome  quatre  mois  et  demi.  — 
A  son  arrivée,  on  visita  ses  bagages  et  on  saisit,  comme  il  était  de  règle, 
pour  les  examiner  les  livres  qu'il  apportait  et  parmi  eux  les  Essais,  dont  la 
première  édition  avait  paru  et  avait  été  signalée  comme  renfermant  des 
passages  peu  orthodoxes  ;  ils  lui  furent  néanmoins  rendus  avec  simple- 
ment invitation  d'y  faire  quelques  cJiangements  ;  plus  tard  la  cour  de  Rome 
se  montra  moins  tolérante  et  par  décret  du  12  juin  1676  ils  ont  été  officiel- 
lement condamnés;  ils  figurent  comme  tels  dans  le  Catalogue  des  ouvrages 
mis  à  l'Index  et  interdits  •  où  et  en  quelque  temps  qu'ils  soient  imprimés  », 
et  n'ont  point  été  relevés  de  cet  arrêt.  V.  N  I,  588  :  Indisciplinatis.  —  II, 
528,  liv.  II,  ch.  IX,  appréciation  générale. 

17,  CapHole.  —  Elevé  en  507,  sur  le  mont  Capitolin,  une  des  sept  collines 
de  Rome;  brûlé  trois  fois  :  pendant  les  troubles  de  Marius,  sous  Vitellius 


NOTES.        LIV.  m,  Cil.  IX.        VOL.  III,  PAG.  474.  Fc.68i 

et  sous  Vespasien,  il  fut  en  dernier  lieu   reconstruit  à  grands  frais  par 
Domitien.  Le  Capitole  actuel,  édifié  sur  les  plans  de  Michel-Ange,  sur  l'em- 
placement de  l'ancien,  est  afifecté  à  la  municipalité  de  la  ville. 
22,  Ans.  —  Le  père  de  Montaigne  était  mort  en  1569;  ceci  a  donc  été  écrit 
en  1586. 

28,  Assigné.  —  Le  bienfait  est  moins  désintéressé,  lorsqu'on  peut  espérer 
du  retour. 

29,  Arcesilaus.  —  Diogène  Laerce,  IV,  .  17.  —  Après  de  longs  voyages  en 
Grèce  et  en  Perse,  Arcésilas  vint  se  fixer  à  Athènes  où  il  fonda  la  2"  acadé- 
mie, école  qui  combattait  les  Stoïciens  et  niait  que  l'on  puisse  rien  perce- 
voir de  certain  par  les  sens. 

29,  Ctesibius.  —  Var.  et  erreur  de  88  :  Apelles. 
476, 

3,  Embabouyné.  —  Enchanté,  enthousiaste,  épris. 

7,  Est-ce.  —  Passage  intégralement  traduit  de  Cicéron,  De  fin.  bon.  et  mal., 
ch.  V,  au  commencement. 
20,  Reliques.  —  N'est  pas  employé  ici  dans  le  sens  d'objets  religieux,  mais 
est  appliqué  à  tout  ce  qui  demeure  des  hommes  estimables  qu'en  imagina- 
tion Montaigne  a  vus  vivre  et  mourir,  tellement  il  a  été  imprégné,  depuis 
son  enfance,  de  leurs  faits  et  gestes  par  l'étude  de  l'histoire  et  de  la  litté- 
rature romaines. 

25,  Souuerain.  —  Le  Pape. 

26,  Ailleurs.  —  Rome  était  la  capitale  des  Etats  de  l'Eglise,  gouvernés  alors 
par  Grégoire  XIII. 

28,  Princes.  —  Les  cardinaux. 

33,  Empire.  —  «  Veuve  d'un  peuple-roi,  mais  reine  encor  du  monde.  » 
478, 

12,  Plus.  —  «  Après  moi,  le  déluge.  » 

16,  Nom.  —  N'ayant  pas  d'enfant  raàle,  le  nom  de  Montaigne  devait  s'étein- 
dre et  s'éteignit  avec  lui  ;  ses  frères  portaient  des  noms  tirés  d'autres  pro- 
priétés de  la  famille. 

22,  Commodités.  —  Cette  opinion  de  Montaigne  est  celle  de  beaucoup;  et  il 
faut  convenir  qu'elle  va  se  répandant  de  plus  en  plus  avec  les  progrès  de 
la  civilisation,  ce  qui  fait  pousser  les  hauts  cris  à  certains  qui  considèrent 
comme  une  déchéance  que  l'accroissement  de  population  soit  moindre 
chez  nous  que  chez  d'autres. 
Les  conséquences  de  cet  accroissement  varient  suivant  les  pays  :  avan- 
V  tageux  pour  ceux  qui  ont  des  colonies  où  déverser  leur  excédent,  ou 
chez  lesquels  existe  le  goût  de  l'émigration,  il  est  une  cause  de  misères 
physiques  et  morales  quand  les  débouchés  font  défaut.  Pareillement  avan- 
tageux dans  les  familles  adonnées  à  l'agriculture  où  l'on  tire  très  aisé- 
ment parti  de  chacun,  il  ne  l'est  plus  chez  les  autres.  G.  Lebon. 

En  France,  la  population,  de  39.047.000  habitants  qu'elle  était  en  1901, 
a  été  de  39.337.000  en  1906,  soit  une  augmentation  annuelle  d'en- 
viron seulement  12  pour  mille,  inférieure  à  ce  qu'elle  est  chez  ses  voisins, 
en  Allemagne  notamment,  où  elle  atteint  14  à  15.  Sa  densité  est  également 
moindre;  elle  n'est  que  de  73  habitants  par  kilomètre  carré,  et  en  Alle- 
magne de  112. 

Cette  situation  tient  aux  conditions  de  bien-être  que  l'on  a  en  France,  et 
que  l'on  redoute  d'amoindrir  en  augmentant  ses  charges  et  en  s'expatriant. 
Qu'on  en  conclue  ce  que  l'on  voudra  au  point  de  vue  des  conséquences 
économiques,  tant  que  n'interviendra  pas  un  autre  système  d'éducation 
changeant  notre  tempérament  et  par  là  amenant  les  gens  à  refluer  des 
villes  dans  les  campagnes,  et  à  aller  chercher  fortune  aux  colonies,  ce  qui 
procède  du  même  état  psychologique,  rien  ne  saurait  modilier  cet  état  de 
choses. 

Aussi  est-ce  à  un  tout  autre  point  de  vue  que  nous  sommes  partisan  de 
l'impôt  sur  les  célibataires,  les  divorcés,  les  veufs  et  les  ménages  sans  en- 
fants (on  évalue  à  1.3(X).00<3,  en  Fi-ance,  le  nombre  des  célibataires  mascu- 


Fc.682  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

lins  âgés  de  plus  de  trente  ans,  et  à  1.800.000  celui  des  ménages  sans  en- 
fants). A  cette  mesure,  on  objecte  que  l'impôt  ne  saurait  être  un  moyen  de 
réformer  la  société  ;  mais  tel  n'est  pas  le  but  que  nous  envisageons  :  nous 
ne  voyons  là  qu'une  compensation  équitable  des  charges  qu'entraîne  la 
famille  et  dont  ils  sont  exempts;  alors  qu'on  cherche  par  l'impôt  sur  le 
revenu  à  obtenir  une  plus  juste  répartition  de  nos  contributions,  quoi  de 
plus  naturel  et  de  plus  Juste  que  d'atteindre  ceux  dont  les  revenus  sont  si 
fort  accrus  de  ce  chef! 

25.  Désirées.  —  «  Qui  a  enfant,  a  tourment.  »  Proverbe.  —  Evexus,  de 
l'île  de  Paros  (anc.  Grèce),  poète  dont  Platon  loue  les  talents  et  la  sa- 
gesse, disait  :  «  De  la  crainte  ou  du  chagrin,  c'est  ce  qu'un  père  éprouve 
en  tous  temps  par  son  fils.  » 

31,  Mieux.  —  Il  l'agrandit  tout  au  moins,  car,  en  1576,  il  fit  acquisition  pour 
1.500  livres  (environ  8.000  fr.  de  notre  monnaie)  d'une  forêt  près  et 
au  N.  de  son  château.  —  A  son  décès,  sa  succession  a  été  estimée  à 
90.000  livres,  dont  60.000  pour  la  terre,  laquelle,  lorsqu'elle  sortit  de  la 
famille,  au  commencement  du  siècle  dernier,  fut  vendue  liiiO.OOO,  et  esti- 
mée à  224.000  trente  ans  plus  tard  ;  aujourd'hui,  manoir  (en  dehors  de  sa 
réfection  dernière),  terres  et  bois,  représentant  une  superficie  d'environ 
350  hectares,  valent  plus  du  double.  —  Sa  fille,  en  se  mariant,  reçut  en 
dot  20.000  livres  tournois. 

33,  Pas.  —  Aussi  ne  m'a-t-elle  pas  accordé  de  grâce. 

34,  Ans.  —  Montaigne  écrivait  ces  lignes  vers  1586;  et  Ramon  Eyquem  son 
bisaïeul,  auquel  la  famille  était  redevable  de  sa  situation  de  fortune  et  de 
l'acquisition  du  domaine  de  Montaigne,  et  par  lui  de  son  anoblissement, 
était  mort  en  1478. 

480, 

2,  Bulle.  —  Titre  émanant  de  la  chancellerie  romaine.  —  Montaigne  laisse 
entendre  ici  que  ce  titre  de  bourgeoisie  romaine  lui  a  été  conféré  sans 
qu'il  le  demande;  dans  son  Journal  de  voyage  en  Italie,  il  dit  à  cet  égard  : 
«  Je  le  recherchai,  et  pour  l'obtenir  y  employai  mes  cinq  sens;  j'y  trouvai 
de  la  difficulté  que  je  parvins  toutefois  à  surmonter.  • 
4,  Estais.  —  En  1581.  A  cette  époque,  depuis  longtemps  déjà,  ce  n'était  là 
qu'un  titre  honorifique;  dans  les  temps  anciens,  le  droit  de  cité,  à  Rome, 
comportait  nombre  de  prérogatives,  parmi  lesquelles  :  la  liberté  indivi- 
duelle, le  citoyen  romain  ne  pouvait  être  battu  de  verges,  réduit  en  escla- 
vage, ni  même  mis  à  mort,  car  il  pouvait  éviter  la  peine  capitale  en 
s'exilant;  il  pouvait  aspirer  à  toutes  les  magistratures;  servir  dans  les 
légions  et,  par  suite,  participer  aux  commandements  et  au  butin;  être 
exempt  de  certains  impôts,  etc.  Généralement  la  concession  du  droit  de 
cité  n'était  faite  qu'avec  concession  restreinte  des  privilèges  qui  y  étaient 
attachés. 
34,  Condita.  —  Une  grande  incertitude  règne  sur  la  date  exacte  de  la  fon- 
dation de  Rome  que  l'on  admet  avoir  eu  lieu  de  l'an  754  à  l'an  752  av.  J.-C.  ; 
en  conséquence  pour  la  supputation  des  dates  ayant  trait  à  son  histoire  on 
prend  généralement  l'an  753  (date  moyenne)  comme  point  de  départ; 
à  en  juger  par  ce  document,  cette  date  devrait,  d'après  les  archives  de 
Rome,  être  l'an  750. 

482, 

.18,  Delphes.  —  Sur  le  fronton  du  temple  de  Delphes  était  inscrite  cette 
inscription  :  rvwôt  «autdv  (Gnothi  seauton),  Connais-toi  toi-même.  V.  N.  I. 
28  :  Cognoy;  III,  620  :  temple, 

CHAPITRE  X. 

484, 

9,  Moy.  —  Primo  mihi,  moi  d'abord. 

10,  Affection.  —  Et  contiendrais  volontiers  le  sentiment  d'affection  qui  est 
en  moi,  de  peur... 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  X.        VOL.  III,  PAG.  484.  Fc.683 

15,  Importables.  —  Insupportables. 
17,  Platon.  —  Lois,  VII. 

20,  Soy-mesme.  —  Pensée  imitée  de  Sénèque,  Episl.  62. 
486, 

5,  Entrailles.  —  Les  embarras  domestiques  que  j'ai  dans  mon  intérieur. 

8,  Forains.  —  D'autres  affaires  extérieures,  étrangères,  du  dehors. 
14,  Eux.  —  S.-ent.  :  qui  y  sont. 

22,  Causa.  —  Le  membre  de  phrase  qui  suit  est  la  traduction  de  cette  citation. 
29,  Personne.  —  Toute  cette  période  est  empruntée  de  Sénèque,  De  brev. 
vitse,  3. 
488, 

9,  Aussi.  —  Montaigne  était  aux  bains  de  Lucques,  en  septembre  1581, 
quand  il  reçut  la  nouvelle  de  son  élection;  il  répondit  en  déclinant  l'hon- 
neur qui  lui  était  fait;  mais  les  Bordelais  s'entêtèrent  et  s'adressèrent  au 
roi  qui  intervint,  en  lui  écrivant  qu'en  acceptant  «  il  ferait  une  chose  très 
agréable  et  que  le  contraire  lui  déplairait  grandement  »,  ordre  devant 
lequel  Montaigne  céda.  —  Voici  du  reste  in-extenso  la  lettre  de  Henri  III 
qui  est  datée  du  15  décembre  :  «  Pour  ce  que  j'ai  en  estime  grande  votre . 
fidélité  et  zélée  dévotion  à  mon  service,  ce  m'a  été  plaisir  d'apprendre 
que  vous  avez  été  élu  major  de  ma  ville  de  Bordeaux;  et  ai  confirmé  la 
dite  élection  d'autant  plus  volontiers  qu'elle  a  été  faite  sans  brigue  et  en 
votre  lointaine  absence.  A  l'occasion  de  quoi  mon  intention  est,  et  vous 
ordonne  et  enjoint  bien  expressément,  que  sans  délai  ni  excuse,  reveniez 
au  plus  tôt  que  la  présente  vous  sera  rendue,  faire  le  dû  et  service  de  la 

.  charge  où  vous  avez  été  si  légitimement  appelé,  et  vous  ferez  chose  qui 
me  sera  très  agréable  et  le  contraire  me  déplairait  grandement.  » 

12,  Eslection.  —  Cette  durée  de  deux  ans  et  cette  absence  de  loyer  et  de 
gain  dans  les  fonctions  de  maire  de  Bordeaux  n'existaient  que  depuis  1550; 
auparavant  cette  charge  était  perpétuelle  et  une  rétribution  de  1.400  livres 
tournois  environ  y  était  afi"ectée  qui  se  trouvait  alors  limitée  à  deux  robes 
par  an  aux  armes  de  la  ville. 

13,  Moy.  —  Il  semble  qu'on  peut  conclure  de  là  qu'on  fut  satisfait  de  son 
administration;  Balzac  a  insinué  le  contraire,  sans  en  donner  de  preuve. 

17,  De  Matignon.  —  Le  maréchal  de  Matignon  avait  été  gouverneur  à 
Alençon  et  à  Saint-Lô,  lors  de  la  Saint-Barthélémy,  et  s'était  refusé  à  exé- 
cuter les  massacres  ordonnés  par  le  roi. 

18,  Minister.  —  Dans  l'éd.  de  88,  ce  vers  est  complètement  entremêlé. 

20,  Alexandre.  —  Sénèque,  De  Benef.,  I,  13;  Plutarque,  au  commencement 
de  son  traité  Des  trois  formes  du  gouvernement.  Ni  l'un  ni  l'autre  ne 
parlent  de  Bacchus,  et  Plutarque  nomme  les  Mégariens,  au  lieu  des  Co- 
rinthiens. 

21,  Desdaigna.  —  Var.  de  88  :  hocha  du  nez. 
24,  Descbiffray.  —  Je  me  fis  connaître. 

34,  Appelle.  —  Le   père   de  Montaigne   qui,  antérieurement,  avait  été,  à 
diverses  reprises  et  à  divers  titres,  membre  de  la  municipalité  de  Bor- 
deaux, en  avait  été  nommé  maire  en  1554  et  s'y  était  signalé  par  de  nom- 
breuses mesures  administratives. 
490, 

13,  Siller.  —  Fermer  nos  yeux.  Siller  les  yeux,  se  disait  des  oiseaux  de 
chasse,  auxquels  quand  on  n'avait  pas  de  chaperon  pour  leur  couvrir  la 
tète,  lorsqu'on  les  portait,  on  cousait  les  deux  paupières  avec  une  pointe 
d'aiguille  pour  qu'ils  n'y  voient  pas;  dessiller,  qui  signifie  le  contraire, 
ouvrir  les  yeux,  est  demeuré  dans  la  langue. 

38,  Principale.  —  Add.  de  88  :  e<  plus  légitime. 
492, 

4,  Propre.  —  Pour  lui-même. 

28,  Entreprend.  —  Sénèque,  De  ira,  I,  12. 

36,  Faut.  —  Il  manque  son  coup. 


Fc.684  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

494, 

8,  ïambe.  —  Se  donne  elle-même  un  croc-en-janibe,  s'enchevêtre. 

9,  Implicat.  —  Séxèqle,  Epist.  44.  Ces  mots  terminent  l'épître.  Montaigne, 
qui  les  donne  un  peu  autrement  qu'ils  ne  sont  dans  Sénèque,  les  traduit 
exactement  avant  de  les  citer.  Ils  sont  le  développement  de  cette  autre 
sentence  :  Festina  lente  (hàtez-vous  lentement),  qui,  dit-on,  se  reproduisait 
souvent  dans  la  conversation  et  la  correspondance  de  l'empereur  Auguste. 

16,  Maistre.  —  Probablement  le  roi  de  Navarre,  depuis  Henri  IV. 

17,  Accidens.  —  Var.  de  88  :  négoces. 

35,  Saisir.  —  «  Qui  trop  embrasse,  mal  étreint.  » 
496, 

4,  Opinion.  —  «  Si  tu  vis  conformément  aux  lois  de  la  nature,  tu  ne  seras 
jamais  pauvre;  si  tu  te  règles  sur  celle  de  l'opinion,  tu  ne  sera  jamais 
riche;  la  nature  se  satisfait  de  peu,  à  l'opinion  il  faut  l'immensité,  etc.  » 
SÉNÈQUE,  Epist.  16. 
12,  Socrates.  —  Cicéron,  Tusc,  V,  32. 

14,  Onces.  —  Environ  300  gr.,  la  livre  n'étant  alors  que  de  400. 

15,  Epicurus.  —  Sénèque,  Epist.  18. 

15,  Metrocles.  —  Plutarque,  Que  le  vice  rend  Vhomme  malheureux,  4. 

17,  Cleanthes.  —  C'est  Zenon  qui  disait  cela  de  Cléanthe,  son  disciple.  Dio- 
GÈNE  Laerce,  Vil,  169. 

24,  Outre.  —  Accordons-nous  quelque  chose  de  plus. 

28,  Nature.  —  «  L'accoutumance  est  une  seconde  nature.  »  Pi^overbe  latin 
qu'on  trouve  dans  Macrobe.  —  Fontenelle  disait  au  sujet  de  cette  pensée 
que  reproduit  également  Pascal,  qu'il  voudrait  bien  savoir  quelle  était  la 
première,  puisque  l'habitude  est  la  seconde.  Ce  n'était  là  que  boutade  de 
sa  part;  au  surplus  Montaigne,  en  poursuivant,  s'explique  à  cet  égard  de 
la  façon  la  plus  compréhensible  :  la  première  est  celle  en  laquelle  nous 
sommes,  avant  les  transformations  que  nous  subissons  par  le  seul  effet  des 
habitudes  que  nous  prenons  par  des  causes  diverses  et  qui,  en  s'infusant 
en  nous,  nous  modifient  dans  de  telles  proportions  que  l'on  peut  dire  sans 
exagération  que  notre  nature  est  autre.  Que  de  fois  l'enfant  ne  se  retrouve 
pas  dans  l'adulte,  ni  l'adulte  dans  l'homme  fait! 

30,  Et.  —  Add.  de  88  :  pour  mon  humeur. 

31,  Essimoit.  —  Amaigrissait.  Terme  de  fauconnerie;  essimer  un  faucon 
c'est  lui  faire  perdre  un  excédent  de  graisse,  en  le  soumettant  à  un  certain 
régime.  —  L'éd.  de  88  port.  :  estansoit. 

39,  le  me  plaindrais  ...  d'Arabie.  —  Var.  de  88  :  /e  ne  me  reforme 
pareillement  gueres  en  sagesse  pour  Vvsage  et  commerce  du  monde,  sans 
regret  que  cet  amendement  me  soit  arrivé  si  tard  que  ie  n'aye  plus  loisir 
d'en  vser  :  ie  n'ay  d'oresenauant  besoing  d'aultre  suffisance  que  de  patience 
contre  la  mort  et  la  vieillesse.  A  quoy  faire  vne  nouuelle  science  de  vie  à 
telle  déclinaison,  et  vne.nouuelle  industrie  à  me  conduire  en  cette  voye  où  ie 
n'ay  plus  que  trois  pas  à  marcher?  Apprenez  veoir  la  rhétorique  à  vn  homme 
relégué  aux  desers  d'Arabie. 

40,  Homme.  —  Ce  n'est  pas  ce  que  dit  le  proverbe  :  «  Mieux  vaut  tard  que 
jamais.  » 

498, 

12,  Pape.  —  Grégoire  XIll  qui,  en  1582,  avait  réformé  le  calendrier  dont  il 
avait  retranché  dix  jours  pour  mettre  l'année  civile  en  concordance  avec 
l'année  solaire.  En  France,  on  était  passé  subitement  du  9  au  20  X*  1582 
(V.  III,  526  et  N.  France).  —  Un  dicton  populaire,  antérieur  à  cette  époque  : 
«  A  la  Sainte-Luce,  les  jours  croissent  du  saut  d'une  puce  »,  se  répète 
encore,  bien  qu'aujourd'hui  il  ne  soit  plus  vrai,  la  Sainte-Luce  tombant  le 
13  X*  et  les  jours  décroissant  jusqu'au  22;  avant  la  réforme  grégorienne, 
cette  fête  tombait  le  23,  et  du  22  au  23  l'accroissement  du  jour  est  en  effet 
insensible,  seulement  de  quelques  secondes. 

15,  Vendique.  —  Réclame,  revendique.  Terme  du  palais  qui  vient  du  latin 
vindicare  et  qui  n'est  plus  en  usage;  revendiquer  a  prévalu.  " 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  X.        VOL.  III,  PAG.  498.  Fc.CSj 

18,  Grommelle.  —  Murmure  entre  ses  dents. 

26,  Issue.  —  Montaigne  fait  peut-être,  entre  autres,  allusion  ici  à  l'élection 
des  papes,  dans  laquelle  on  tenait  et  on  tient  encore  grand  compte  de 
l'âge,  afin  que  le  nouvel  élu  ne  se  perpétue  pas  dans  sa  fonction. 

30,  Mesure.  —  Dans  la  mesure  de  notre  état  habituel. 

34,  Aduersitez.  —  «  L'homme  tient  par  ses  vœux  à  mille  choses  :  plus  il 
augmente  ses  attachements,  plus  il  multiple  ses  peines.  »  J.-J.  Rousseau, 
Emile,  V.  Sénèque  a  souvent,  lui  aussi,  exprimé  la  môme  pensée. 
500, 

3,  Pointe.  —  S'abandonnent  à  l'impétuosité  de  leurs  désirs.  Courir  de 
pointe,  c'est  courir  avec  impétuosité,  c'est  ce  que  les  Italiens  appellent  la 
furia  francese' 

5,  Histrioniam.  —  Fragment  de  Pétrone,  conservé  par  Jean  de  Salisbury, 
Polycratic,  111,  8.  —  S.  Jean  Chrysostome  et  d'autres  ont  employé  cette  com- 
paraison :  «  Le  monde  est  une  comédie  qui  se  joue  en  différentes  scènes; 
les  spectateurs  se  connaissent  mieux  que  les  acteurs.  »  Bossuet. 

t  Ce  monde  n'est  qu'une  œuvre  de  comiques, 
Où  chacun  fait  ses  rôles  différents, 
I.à,  sur  la  scène,  en  habits  dramatiques, 
Brillants  prélats,  ministres,  conquérants, 
Pour  nous,  vil  peuple,  assis  aux  derniers  rangs, 
Troupe  futile  et  des  grands  rebutée. 
'     Par  nous,  d'en  bas,  la  pièce  est  écoutée. 
Mais  nous  payons,  utiles  spectateurs; 
Et  quand  la  farce  est  mal  représentée. 
Pour  notre  argent  nous  sifflons  les  acteurs.  •  J.-B.  Rolsseau. 

•  La  vie  que  tu  vois  n'est  qu'une  comédie, 

Où  l'un  fait  le  César,  et  l'autre  l'arlequin  ; 

Mais  la  mort  la  finit  toujours  en  tragédie, 

Et  ne  distingue  point  l'empereur  du  faquin.  »  Auteur  inconnu. 

»  ...  Le  monde  est  une  comédie,  où  le  personnage  que  vous  jouez  n'est  pas 
des  plus  relevés;  mais  il  n'y  en  a  pas  où  l'on  ne  puisse  acquérir  de  l'hon- 
neur. Nous  sommes  ici-bas  comme  dans  l'arche  de  Noé:  peu  d'hommes 
et  beaucoup  de  bêtes.  »  Lamothe  le  Vayek,  1684. 

«  Oui,  ce  bas  monde  est  une  comédie 

Ou,  gouvernés  par  une  austère  loi. 

Pauvres  acteurs  des  drames  de  la  vie, 

Nous  remplissons  bien  ou  mal  notre  emploi.  •  Scribe. 

Balzac,  Shakespeare  ont  aussi  exprimé  cette  même  idée.  «  La  vie  est  une 
comédie  pour  ceux  qui  pensent,  et  une  tragédie  pour  ceux  qui  sentent,  » 
a  dit  Walpole. 
12,  Frelatent.  —  Se  glorifient;  se  prélater,  c'est  témoigner  par  ses  manières 
qu'on  se  croit  fort  au-dessus  des  autres,  se  donner  des  Airs  de  prélat. 

19,  Claire.  —  Montaigne  maire  et  Montaigne  simple  particulier  ont  toujours 
été  deux  êtres  absolument  distincts. 

23,  Exercice.  —  C'est  ce  qui  arrive  tous  les  jours.  Nous  voyons  en  effet 
constamment  les  hommes  politiques  commettre  des  actes  ou  s'associer  à 
des  mesures  contre  lesquelles  leur  conscience  se  révolterait  en  tant  qu'hommes 
privés,  si  leur  mentalité  n'était  absolument  oblitérée,  dans  l'exercice  de  leur 
mandat  ;  c'est  triste,  mais  c'est  la  loi  des  sociétés,  si  différente  et  parfois  si 
opposée  à  la  loi  de  nature,  et  c'est  ce  qui  jusqu'à  un  certain  point  peut 
leur  tenir  lieu  d'excuse.  Il  en  est  souvent  de  même  des  avocats,  qui  eux 
peuvent  invoquer  les  exigences  de  la  cause  bonne  ou  mauvaise  qu'ils  ont 
entrepris  de  défendre;  cela  se  rencontre  aussi  couramment  chez  les  jour- 
nalistes, mais  ceux-là  ne  sont  point  excusables,  car  ils  n'obéissent  guère 
qu'à  leur  propre  intérêt  et  au  désir  d'accroître  le  tirage  de  leurs  journaux. 

24,  Preualoir.  —  11  faut  prendre  le  monde  comme  il  est  et,  autant  qu'on  le 
peut,  en  tirer  avantage. 


Pc.686  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

27,  Pierre.  —  C.-à-d.  familièrement,  comme  feraient  d'obscurs  personnages. 

31,  Presens  brouillis.  —  Var.  de  88  :  dissenlions  présentes. 
502, 

7,  Contraire.  —  Add.  de  l'ex.  de  Bord,  que  l'on  a  cru  devoir  introduire 
dans  la  traduction  :  Vtalur  motu  animi,  qui  vit  ratione  non  potesl.  Tra- 
duction :  "  Que  celui-là  s'abandonne  à  la  passion,  qui  ne  peut  suivre  la 
raison.  »  Cicéron,  Tiisc,  IV,  25.  —  Cette  citation  se  trouve  déjà  liv.  III, 
ch.  I,  III,  82. 

12,  Cause.  —  Cest  qu'ils  n'en  veulent  pas  à  la  cause.  Cette  locution  subsiste 
encore  dans  le  langage  familier  :  A  qui  en  avez-vous?  à  qui  en  a-t-il  pour 
être  de  si  mauvaise  humeur? 

14,  Marche.  —  Les  blesse,  les  incommode.  On  trouve  'dans  Nicot  :  11  a  le 
visage  masché,  c.-à-d.  meurtri. 

18,  Forcené.  —  Je  ne  m'emporte  point,  je  ne  suis  point  hors  de  moi. 

26,  Hérétique.  —  Peut-être  Clément  Marot,  peut-être  Théodore  de  Bèze, 
tous  deux  poètes  et  très  zélés  calvinistes,  dont  il  est  parlé  avec  éloge,  de 
l'un  comme  de  l'autre,  dans  les  Essais.  V.  I,  642  et  II,  518. 

27,  Greue.  —  Belle  jambe. 
504, 

10,  Apollonius.  —  Après  avoir  embrassé  de  bonne  heure  la  doctrine  de 
Pjlhagore,  se  soumit  à  toutes  les  austérités  de  cette  secte;  visita  l'Asie 
Mineure,  la  Chaldée,  pénétra  jusque  dans  les  Indes,  puis  se  rendit  en  Grèce, 
en  Italie,  excitant  partout  l'admiration  et  faisant  des  guérisons  miracu- 
leuses. Ses  contemporains  le  regardaient  comme  un  homme  extraordinaire 
et  lui  reconnaissaient  le  don  de  prévoir  l'avenir  et  de  faire  des  miracles. 
Les  païens,  dans  les  temps  qui  suivirent,  allèrent  jusqu'à  le  mettre  en 
parallèle  avec  le  Christ.  , 

10,  Embuttlerent.  —  Séduisirent,  trompèrent.  Embuffler  quelqu'un,  c'est  le 
mener  par  le  nez,  comme  un  buffle. 

11,  Discrétion.  —  Jugement,  discernement;  du  latin  discretio,  qui  a  cette 
signification;  ne  s'emploie  plus  dans  ce  sens. 

14,  Depuis.  —  Le  premier^  c'est  le  parti  protestant;  l'autre,  né  depuis,  c'est 

la  Ligue. 
18,  Vague.  —  Si  on  ne  suit. 

28,  Detraction.  —  Déchirement,  médisance. 

33,  Garde.  —  C'est  qu'en  effet  la  cause  de  la  guerre  de  Marins  et  de  Sylla 
était  tout  autre  :  cette  guerre  fut  en  réalité  une  de  ces  crises  violentes  de 
la  lutte  éternelle  de  ceux  qui  n'ont  pas  contre  ceux  qui  ont,  qui  aujour- 
d'hui se  traduisent  par  les  grèves;  mais,  pour  s'être  transformé,  le  conflit 
n'en  est  pas  moins  âpre. 

Certes  le  droit  de  grève  est  indéniable,  il  est  un  des  apanages  de  la  liberté, 
et  présentement  le  seul  moyen  de  défense,  quelque  peu  efficace,  de  l'ouvrier 
contre  le  patron  ;  mais  de  même  que  l'accaparement  des  choses  de  première 
nécessité  est  interdit,  tout  arrêt  d'une  certaine  importance  dans  les  diverses 
branches  du  commerce,  de  l'industrie  ou  de  l'agriculture,  ne  saurait  être 
admis;  le  droit  de  grève,  comme  tout  autre  droit  individuel,  ne  saurait 
s'exercer  de  manière  à  préjudicier  à  la  société. 

En  la  circonstance,  ces  deux  principes  ne  sont  point  inconciliables  :  il 
suffit  d'empêcher  ces  conflits  de  se  généraliser;  de  faire  que  chaque  fois 
ils  se  limitent  au  cas  particulier  qui  l'a  amené  et  à  cet  efiet  poureuivre 
impitoyablement,  pour  fait  d'excitation  à  la  haine  des  citoyens  les  uns 
contre  les  autres,  tous  ceux  qui  par  leurs  menées  ou  leurs  écrits  les  fomentent 
ou  s'en  mêlent  alors  qu'ils  n'y  sont  pas  directement  intéressés.  En  outre, 
toute  atteinte  à  la  liberté  de  travail  de  ceux  qui  se  refusent  à  l'abandonner, 
tout  méfait  tant  contre  les  personnes  que  contre  les  propriétés  seraient  à 
prévenir  d'une  façon  efficace,  les  principaux  meneurs,  les  membres  du 
sj'ndicat  quand  il  existe,  en  étant  personnellement  et  pécuniairement 
responsables. 

Et  si,  pour  en  arriver  là,  il  est  nécessaire  d'avoir  recours  à  l'armée,  il 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  X.        VOL.  III,  PAG.  504.  Fc.G87 

faut,  tout  en  recommandant  la  prudence  et  la  modération,  ne  pas  la  ré- 
duire de  parti  pris  à  l'impuissance  en  substituant  à  la  loi  qui  lui  trace  ses 
devoirs  des  instructions  arbitraires,  qui  font  qu'elle  doit  se  laisser  bafouer, 
insulter,  frapper,  et  que  seul  son  sang  coulera  au  lieu  et  place  de  celui  des 
fauteurs  de  désordres  en  présence  desquels  on  l'a  mise. 

Que  l'on  cherche  à  atténuer  les  malheurs  qui  peuvent  se  produire  en 
pareil  cas,  rien  de  mieux.  Que  ne  fait-on  pour  cela  prendre  à  l'infanterie 
des  cartouches  de  tir  réduit  qui  blessent,  mais  ne  tuent  guère,  disposition 
qui,  dit-on,  vient  d'être  rendue  réglementaire  en  Espagne,  à  la  cavalerie  les 
lances  qu'on  lui  fait  si  malencontreusement  déposer,  qui,  en  ne  faisant  pas 
usage  du  fer,  n'ont  jamais  tué  personne  :  elles  ne  seront  pas  désarmées  et 
auront  le  moyen  de  se  faire  craindre.  Au  lieu  de  cela  on  leur  impose  une 
action  absolument  passive,  qui  oblige  à  mettre  en  ligne  des  forces  numé- 
riquement considérables,  qu'on  livre  au  ridicule,  sans  préjudice  des  ou- 

'  trages,  des  coups  et  blessures  auxquels  elles  sont  en  butte,  et  les  grèves  se 

prolongent  indéfiniment,  ne  cessant  que  pour  recommencer  à  courte 
échéance;  c'est  la  misère  pour  les  uns,  la  ruine  pour  les  autres,  et  pour  la 
France  de  sérieuses  atteintes  à  la  paix  et  à  la  prospérité  publiques. 

Le  mieux  évidemment  est  de  chercher  à  prévenir  les  grèves.  L'un  des 
palliatifs  de  quelque  efficacité  à  cette  guerre  entre  le  travail  et  le  capital 
semble  être  la  participation  de  l'ouvrier  aux  bénéfices,  soit  par  le  fait 
d'entreprises  ouvrières  effectuées  en  commun  et  dont  l'intégralité  des  pro- 
duits serait  répartie  entre  les  coopérateurs,  soit  que  dans  les  entreprises 
patronales  où  une  part  des  bénéfices  reviendrait  à  l'ouvrier.  Plût  à  Dieu  que 
ce  système  si  équitable,  déjà  appliqué  par  quelques-uns,  se  généralise  et  que 
par  lui  s'améliore  le  sort  de  ces  malheureuses  femmes  employées  dans  les 
grandes  villes  à  des  travaux  de  couture  par  les  grands  magasins  qui  les 
exploitent  indignement,  leur  faisant  à  grand'peine  l'aumône  d'un  salaire 
dérisoire  d'un  franc  cinquante  à  deux  francs  pour  une  journée  de  dix  à 
douze  heures  de  travail,  se  retranchant,  pour  abuser  ainsi,  derrière  cette  loi 
draconienne  de  l'offre  et  de  la  demande. 

506, 

4,  Voy.  —  A  mesure  que  je  la  vois. 

ILDiogenes.  — DioGÈNE  Laerce,  Vl,23;  Vi.wx.\Kq,\}^,Apophth.des  Lacédémoniens. 
22,  Cotys.  —  Plutarque,  Apophlh.  des  rois. 

39,  Desinent.  —  Quelques  pages  plus  bas  (III,  512),  Montaigne  traduit  lui- 
même  bien  plus  vivement  cette  même  pensée  :  «  De  combien  il  est  plus 
aysé  de  n'y  entrer  pas,  que  d'en  sortir!  • 
508, 

2,  Harper.  —  Se  prendre  à  quelque  chose. 

5,  Ennemis.  —  Accidents  fâcheux.  Succès  est  employé  ici  dans  le  sens  du  latin 
successus,  qui  signifie  toute  espèce  d'événements  heureux  ou  malheureux. 

10,  Exemples.  —  N'entreprenons  pas  d'imiter  ces  exemples.  • 

17,  Escbeuer.  —  Esquiver,  éviter,  de  l'italien  schifase,  d'où  vient  le  mot  esquif. 

18,  Parer.  ■—  C'est  la  philosophie  d'Horace. 
18,  Zenon.  —  Diogène  Laerce,  VII,  17. 

22,  Socrates.  —  Xénophon,  Mémoires  sur  Socrate,  I,  3,  13. 

23,  Contraire.  —  Add.  de  88  :  li  n'espère  pas  que  la  ieunesse  en  puisse  venir 
à  bout. 

2(5,  Disciple.  —  Xénophon,  dans  sa  Cyropédie,  I,  3,  13,  etc. 

29,  Panthée.  —  Abradate  roi  de  la  Susiane,  reconnaissant  à  Cyrus  de  la 

manière  dont  il  avait  traité  son  épouse  captive,  devint  son  ami  et  allié,  et 

périt  peu  après,   en  soutenant  sa  cause,   dans  une   rencontre  avec  les 

Egyptiens.  Pantliée  se  tua  sur  son  corps. 
31,  Tentationem.  —  Montaigne  paraphrase  ce  passage  après  l'avoir  cité. 
33,  Essayée.  —  Tentée. 
510, 

4,  Mesmes.  —  Lorsque  les  causes  de  leur  erreur  sont  affaiblies  par  le  temps 

et  bien  loin  d'eux. 


Fc.688  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

6,  Vert.  —  Au  dépourvu.  —  Expression  provenant  d'un  jeu  qui  se  joua, 
particulièrement  en  mai,  où  l'on  est  obligé,  sous  de  certaines  peines,  à  avoir 
toujours  sur  soi  quelques  feuilles  de  verdure  cueillies  le  jour  même  et  où 
chacun  cherche  à  surprendre  son  compagnon  à  un  moment  où  il  n'en  a  pas. 
H,  Trabunt.  —  Phrase  d'origine  inconnue  que  Montaigne  a  traduite  avant 
de  la  reproduire. 

15,  Bee.  —  Coure,  soupire.  Béer,  c'est  appeler,  souhaiter,  à  gueule  béante, 
comme  fait  le  mouton  bêlant. 

17,  Recueil.  —  Accueil,  comme  on  dit  aujourd'hui. 

19,  Esclaue.  —  Yar.  de  88  :  tyrannique. 

35,  Bruire.  —  Murmurer,  résonner,  se  faire  entendre.  Bruire  n'est  plus  guère 

usité;  ses  dérivés,  bruit,  bruissement,  sont  demeurés. 
42,  Ordes.  —  Sales.  V.  N.  III,  102. 
512, 

11,  lournées.  —  Enfin,  à  force  de  soins,  j'en  suis  arrivé  à  ce  que... 

12,  Procès.  —  Ses  héritiers,  du  fait  de  ses  dispositions  testamentaires,  n'ont 
pu  en  dire  autant.  V.  N.  II,  44  :  Masculines. 

16,  Nom.  —  C.-à-d.  j'ai  bientôt  écoulé  une  longue  vie,  sans  avoir  reçu  ni 
avoir  fait  à  personne  aucune  offense  grave  et  sans  qu'on  m'ait  dit  plus  que 
mon  nom,  qu'on  y  ait  accolé  d'épithète  désagréable. 

17,  Ridicules.  —  «  Grands  effets  et  petites  causes;  mais  combien  souvent 
au-dessous  y  a-t-il  d'autres  causes!  »  (S'*-Beuve),  la  cause  apparente  n'étant 
que  la  dernière  goutte  faisant  déborder  le  vase.  —  Le  proverbe  :  ■•  Faute 
d'un  point,  Martin  perdit  son  âne  »,  appliqué  aux  faits  de  la  vie  courante 
semblant  sans  importance  et  qui  par  suite  de  particularités  imprévues  sont 
gros  de  conséquences,  rend  la  même  idée  que  celle  exprimée  ici  par  Mon- 
taigne concernant  les  événements  qui  bouleversent  le  monde  :  Un  sieur 
Martin,  dit  la  tradition,  prieur  de  l'abbaye  d'Asello  (d'Italie),  avait  fait  graver 
sur  la  porte  du  couvent  cette  inscription  :  «  Porta,  païens  esto,  nulli  clau- 
daris  honesLo  (Porte,  sois  ouverte  à  tous,  ne  sois  fermée  pour  aucun 
honnête  homme)  »  ;  mais,  par  inattention,  l'ouvrier  avait  déplacé  une 
virgule,  ce  qui  permettait  de  lire  :  «  Porta,  païens  esto  nulli,  claudaris 
honesto  (Porte,  ne  sois  ouverte  à  personne,  reste  fermée  à  l'honnête 
homme)  »,  ce  qui,  provoquant  l'indignation  publique,  avait  amené  la  desti- 
tution du  prieur.  Son  successeur  s'empressa  de  rectifier  l'erreur  et  l'on  dit 
depuis  :  «  Uno  pro  punclo,  caruil  Marlinus  Aselio  (Pour  un  seul  point, 
Martin  perdit  Aselio)  »,  c.-à-d.  son  couvent,  qu'un  malin  et  après  lui  tout  le 
monde  a  traduit  «  son  âne  ». 

19,  Mouton.  —  Allusion  à  l'origine  des  démêlés  de  Charles  le  Téméraire,  duc 
de  Bourgogne,  d'abord  avec  les  Suisses  qui  le  battirent  à  Granson  et  à 
Morat  (1476),  puis  avec  René  de  Lorraine  leur  allié,  contre  lequel  11  perdit 
la  bataille  de  Nancy,  où  il  périt  (1477).  Le  fait  initial  de  ces  hostilités  fut 
la  saisie  par  le  comte  de  Romont,  vassal  du  duc  de  Bourgogne,  à  un  Suisse 
qui  traversait  ses  terres,  d'un  chariot  chargé  de  peaux  de  mouton;  pour  se 
venger,  les  Suisses  enlevèrent  au  comte  de  Romont  une  partie  de  ses  terres, 
ce  qui  amena  celui-ci  à  demander  aide  et  protection  à  son  suzerain.  Phi- 
lippe DE  COMINES. 

19,  Engraueure.  —  La  gravure. 

25,  Souffert.  —  Plutarque,  Marins,  3.  —  La  machine  en  question  n'est  autre 
que  la  République  romaine  ébranlée  par  la  rivalité  et  les  guerres  civiles 
de  Marins  et  de  Sylla,  dont  le  point  de  départ  fut  que,  Marius  étant  consul 
et  Sylla  son  préteur,  chacun  revendiquait  le  mérite  de  la  prise  de  Jugurtha, 
roi  de  Numidie  (106)  :  Marius,  parce  qu'il  commandait  et  que  c'était  lui  qui 
avait  obtenu  de  Bocchus,  roi  de  Mauritanie,  beau-père  de  Jugurtha,  de  le 
lui  livrer;  Sj'Ua,  parce  que  c'était  entre  ses  mains  que  cette  livraison 
avait  été  effectuée.  Sur  ces  entrefaites,  Sylla  se  fit  faire,  reproduisant  cet 
épisode,  un  cachet  dont  il  se  servit  exclusivement,  ce  dont  l'irritation  de 
Marius  fut  vivement  accrue.  On  cite  souvent,  après  Montaigne,  le  cachet 
de  Sylla  à  l'appui  de  cet  adage  que  «  de  très  petites  causes  sont  le  plus 


NOTES.        LIV.  m,  CH.  X.        VOL.  III,  PAG.  ;il2.  Fc.689 

souvent  la  cause  des  plus  grands  événements  ».  La  prise  d'Alger  en  1830, 
suivie  de  la  conquête  de  l'Algérie,  n'a-t-elle  pas  eu  pour  cause  première  un 
coup  d'éventail  donné,  dans  le  fort  d'une  discussion,  par  le  Bey  d'Alger  à 
notre  consul? 

22,  Autres.  —  Marius  et  Sylla. 

24,  Despense.  —  Les  Etats  généraux. 

26,  Pomme.  —  La  pomme,  prix  do  beauté,  que  se  disputaient  Junon,  Pallas 
et  Vénus,  cause  indirecte  de  la  guerre  de  Troie,  suscitée  par  les  deux 
premières  de  ces  déesses  à  la  suite  de  l'enlèvement  d'Hélène  (V.  N.  II,  178  : 
Duello)  pour  se  venger  à  la  fois  de  Paris  qui,  clioisi  pour  arbitre,  leur  avait 
préféré  leur  rivale,  et  de  celle-ci,  armant  la  Grèce  contre  cette  ville  tout 
spécialement  protégée  de  Vénus  et  où  r(»gnait  la  famille  de  Paris. 

30,  A  tout.  —  Avec. 

30.  Poignart.  —  On  se  battait  alors  en  duel,  l'épée  d'une  main  et  la  dague, 
ou  poignard,  de  l'autre. 

32,  A  l'enfourner.  —  Au  commencement,  au  début,  pour  savoir  si  vous 
vous  engagerez  dans  une  affaire  ou  une  querelle. 

514,  / 

10,  Conseil.  —  De  céder,  d'entrer  en  accommodements,  de  faire  des  ex- 
cuses, au  lieu  de  lutter  et  courir  les  risques  qui  peuvent  s'ensuivre, 
m'ait... 

11,  Gourmer.  —  Réprimer.  GournuM'  un  cheval  c'est  lui  resserrer  le  mors 
avec  la  gourmette  ou  chaînette  qui  l'assujettit  en  passant  sous  le  menton 
du  cheval. 

23,  Plutarque.  —  Dans  son  traité  De  la  mauvaise  honte,  8. 

30,  Bias.  —  DioGÈNE  Laerce,  I,  87.  —  Les  anciens  disaient  proverbialement 
qu'il  fallait  commencer  par  Argus  et  finir  par  Briarée  (tous  deux  per- 
sonnages mythologiques  qui  avaient,  le  premier  cent  yeux,  le  second 
cent  bras).  —  11  faut  délibérer  avec  lenteur,  mais  exécuter  avec  vigueur 
et  célérité  ce  qui  a  été  résolu.  Dé.\iosthène. 

33,  Accords.  —  Des  réconciliations  qui  suivent  nos  querelles  d'aujourd'hui. 
516, 

3,  Conillieres.  —  Subterfuges,  échappatoires.  V.  N.  I,  200. 

22,  Temperantur.  —  La  traduction  qui  est  donnée  de  cette  citation  est  de 
Montaigne  qui  l'a  inscrite  sur  l'ex.  de  Bord.,  puis  effacée. 

30,  Acberon.  —  Un  des  bras  du  Nil  au  S.  de  Jlemphis  (Egypte  anc);  for- 
mait une  île  où  se  trouvait  une  nécropole,  d'où  les  Grecs  en  ont  fait  un 
fleuve  des  Enfers. 

32,  Sorores.  —  Virgile,  Georij.,  11,  490.  Dei.ii.le  a  traduit  ainsi  cette  cita- 
tion : 

«  Heureux  le  sage  instruit  des  lois  do  la  nature, 

Qui  du  vaste  univers  embrasse  la  structure, 

Qui  dompte  et  foule  aux  pieds  d'importunes  erreurs, 

Le  sort  inexorable  et  les  fausses  terreurs; 

Qui  regarde  en  pitié  les  fables  du  Ténare, 

Et  s'endort  au  vain  bruit  de  l'Aciiéron  avare! 

Mais  trop  heureux  aussi  qui  suit  les  douces  lois 

Et  du  dieu  des  troupeaux  et  des  nymphes  des  bois!  » 

518, 

3,  Ville.  —  De  ma  conduite  comme  maire  de  Bordeaux,  dont  il  a  déjà  été 
question  au  commencement  de  ce  chapitre,  III,  488. 
12,  Moins.  —  Et  moins  encore  une  preuve  de... 
16,  Charge.  —  Montaigne  fut  réélu  maire  en  1583. 

23,  Cessation.  —  On  m'a  accusé  de  n'avoir  rien  fait. 

25,  Charrie.  —  C.-à-d.  :  Partout  où   ma  volonté  m'entraîne,  je  suis  vif, 
ardent,  empressé.  —  L'éd.  de  88  port,  esmeu,  au  lieu  de  «  trespignant  ». 
520, 

7,  Luy.  —  Richelieu  pensait  autrement  et  se  félicitait  de  voir  tant  d'hon- 

ESSAIS  de  MONTAIGNE.  —  T.  IV.  44 


Fc.690  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

nêtes  gens  dormir  sans  crainte  à  l'ombre  de  ses  veilles;  c'est  lui  qui  veil- 
lait pour  assurer  aux  autres  le  sommeil  du  lendemain,  tandis  que  Mon- 
taigne se  bornait  à  jouir  du  présent,  imprévoyant  des  besoins  du  lendemain 
de  ses  administrés.  Gouverner,  commander,  administrer,  c'est  prévoir. 

8,  Glissante.  —  Facile,  qui  passe  inaperçue,  sans  incidents  marquants. 

9,  Efterentem.  —  Cicéron,  De  0/f.,  1,  34. 

12,  Hommes.  —  Les  hommes  de  notre  temps. 

14,  Quiètes.  —  V.  N.  III,  432.  —  L'éd.  de  88  port,  mornes. 

24,  Chalandise.  —  Acquisition  de  chalands,  clients,  clientèle;  chalandise 
a  disparu  de  la  langue,  où  demeurent  chaland  et  achalander. 

27,  Alexandre.  —  Allusion  à  ce  passage  de  Plutarque,  Alexandre,  2,  dans  la 
trad.  d'Arayol  :  «Toutes  les  fois  qu'il  venoit  nouuelles  que  Philippe  auoit  pris 
aulcune  ville  de  renom,  ou  gaigné  quelque  grosse  bataille,  Alexandre  n'estoit 
point  fort  ioyeux  de  l'entendre,  ains  disoit  à  ses  egaulx  en  aage  :  Mon 
père  prendra  tout,  enfants,  et  ne  me  laissera  rien  de  beau  ni  de  magnifique 
à  faire  et  à  conquérir  auecques  vous.  » 

33,  Condition.  —  C'est  ce  que  Socrate  lui  reproche  dans  le  /"  Alcibiade, 
une  ou  deux  pages  après  le  commencement. 

34,  Amette.  —  Petite  âme. 

35,  Embabouynant.  —  Se  faisant  illusion;  une  des  acceptions  assez  mal 
définies  de  ce  mot. 

522, 

5,  Consent.  —  Et  qui  convînt,  qui  fût  témoin... 
8,  Batelée.  —  Cargaison,  chargement  de  navire. 

14,  Bourse.  —  Qui  ne  peut  se  faire  louer  par  les  autres,  qu'il  se  loue  lui- 
même. 

26,  Siècle.  —  Cicéron,  De  Off.,  II,  22. 

31,  Belistresse.  —  Gueuse,  mendiante.  On  disait  autrefois  «  belistrer  » 
pour  «  mendier  »  ;  et  l'on  appelait  les  quatre  ordres  de  bélîtres,  les  quatre 
ordres  religieux  mendiants  :  les  Jacobins,  les  Cordeliers,  les  Augustins  et 
les  Carmes. 

31,  Coquiner.  —  Mendier. 

38,  Rabats.  —  Ce  qui  m'oblige  à  rabattre  quelque  chose  de  sa  bonté,  à 
moins  m'enthousiasmer,  c'est  le  soupçon... 
524, 

6,  Fiunt.  —  Cicéron,  Tusc,  II,  26. 

7,  Glorieux.  —  Vaniteux,  orgueilleux.  Prise  dans  un  sens  favorable,  Mon- 
taigne n'eût  pas  donné  cette  qualification  à  Cicéron. 

7,  Durer.  —  Le  devoir  de  ma  charge  consistait  uniquement  à  conserver 
et  à  vivre  en  paix. 
11,  lour.  —  Moins  brillante,  moins  en  lumière. 
29,  Desseigné.  —  Que  j'ai  eu  dessein  de  suivre,  que  je  me  suis  tracé. 

36,  Affecté.  —  Var.  de  88  :  souhaité. 

CHAPITRE  XL 

526, 

Boyteux.  —  Montaigne  ne  traite  son  sujet  que  vers  la  fin  du  chapitre, 
qui  n'en  est  pas  pour  cela  ni  moins  curieux,  ni  moins  philosophique; 
on  y  trouve  d'excellentes  réfiexions  sur  les  miracles  et  les  choses  extraor- 
dinaires. «  Qui  veut  apprendre  à  doutei^,  n'a  qu'à  lire  ce  chapitre  en 
entier,  »  en  a  dit  Voltaire. 
2,  France.  —  11  a  déjà  été  question,  au  chapitre  précédent  (V.  N.  111,498  : 
Pape),  de  celte  réforme  du  calendrier  qui  substitua  l'année  Grégorienne 
(du  nom  du  pape  qui  l'introduisit)  à  l'année  Julienne,  qui  datait  d'une 
réforme  de  Jules  César  dont  elle  porte  le  nom.  Le  calendrier,  lors  de  la 
réforme  de  César,  avançait  de  80  jours;  remis  au  point  à  ce  moment, 
il  se  trouvait  être,  1600  ans  après,  lors  de  la  réforme  grégorienne,  en  retard 
de  dix  jours.  Le  calendrier  Julien,  ou  vieux  style,  est  encore  suivi  par  les 


xNOïES.         LIV.  m,  CH.  XI.         VOL.  III,  PAG.  526.         Fc.691 

Russes  et  par  quelques  autres  peuples  du  rite  grec;  en  ce  moment,  il  est 
en  retard  de  13  jours  sur  l'autre. 

8,  Sent.  —  Cette  appréciation  n'est  pas  juste.  La  réforme  du  calendrier 
était  nécessaire  pour  mettre  de  l'exactitude  dans  les  observations  et  cal- 
culs astronomiques,   fixer  avec  précision  certaines  époques  de  l'histoire, 
rétablir  la  concordance  entre  ses  indications  et  la  réalité;  l'erreur,  sous 
ce  dernier  rapport,  était  déjà  assez  sensible  pour  qu'on  désirât  en  voir 
arrêter  les  progrès  qui,  à  la  longue,  aurait  amené  une  transposition  com- 
plète de  saisons  :  déjà  on  était  en  été,  que  d'après  lui  le  printemps  n'avait 
pas  encore  pris  fin. 
16,  lours.  —  L'erreur  qui  demeure  n'est  pas  telle  que  le  dit  Montaigne,  et 
on  y  pare  par  le  moyen  qu'il  indique,  mais  qui  avait  été  décidé  dès  le 
'  principe,  en  ne  faisant  pas  bissextile  l'année  qui  termine  chaque  siècle 
qui,   sans  cette  convention,  devrait  l'ôtre,  son  millésime  étant  divisible 
par  4. 
26,  Plutarque.  —  Questions  romaines,  24. 
26,  Borner.  —  Délimiter,  donner  une  mesure  exacte. 
528, 

2,  Causes.  —  Add.  de  88  :  Ils  passent  par  dessus  les  presupposiiions,  mais 
ils  examinent  curieusement  les  conséquences.  —  Un  charlatan,  au  xvn*  siècle, 
montrait  un  jeune  homme  qui  avait,  disait-il,  une  dent  d'or.  Les  philoso- 
phes de  l'époque  firent  à  ce  sujet  force  dissertations  pour  démontrer  qu'il 
s'était  produit  là  un  travail  de  la  nature,  analogue  à  celui  par  lequel 
ce  métal  existe  dans  les  minerais  d'or;  jusqu'à  ce  qu'un  incrédule,  exa- 
minant la  chose  de  plus  près,  découvrit  que  la  prétendue  dent  n'était 
autre  qu'une  dent  enveloppée  dans  une  feuille  d'or  et  adroitement  en- 
trée dans  la  gencive  (J.-J.  Rousseau  commence  par  cette  histoire  son 
traité  sur  la  musique).  —  Aux  débuts  de  la  conquête  de  l'Algérie,  une 
communication  des  plus  intéressantes,  tant  par  elle-même  que  par  l'érudi- 
tion dont  faisait  preuve  l'éminent  correspondant  qui  l'adressait  à  une 
de  nos  sociétés  savantes  des  mieux  qualifiées,  signalait  la  découverte,  dans 
la  nouvelle  colonie,  d'un  rat  à  trompe,  dont  plusieurs  spécimens  furent 
présentés  à  la  docte  assemblée  et  donnèrent  lie(u  à  d'importantes  discus» 
sions,  qui  ne  prirent  fin  que  lorsque  l'avenir  vint  à  révéler  que  ces 
phénomènes  n'étaient  autres  que  des  rats  de  l'espèce  la  plus  commune, 
auxquels  un  adroit  loustic  des  Bataillons  d'Afrique  incisait  habilement 
le  museau  et  y  greffait  l'extrémité  de  la  queue  d'un  de  leurs  congénères, 
et  qu'il  cédait  à  beaux  deniers  comptants  aux  touristes  émerveillés  des 
surprises  que  la  nature  tient  continuellement  en  réserve  pour  ceux  qui 
cherchent  à  pénétrer  ses  secrets. 
15,  Discours.  —  Raisonnement. 

18,  Matière.  —  Et  avec  rien,  comme  avec  quelque  chose. 
23,  Basteler.  —  Faire  le  bateleur  en  compagnie,  péroi'er  à  perte  de  vue 

sans  but  sérieux. 
30,  Moyens.  —  Var.  de  88  :  causes. 
530, 

10,  Accession.  —  Accessoire,  addition. 

12,  Particulière.  —  Sénèque,  Episl.  81.  —  C'est  ce  que  rend  bien  ce  conte 
humoristique  qui  avait  cours  dans  mon  enfance.  Un  Marseillais  (on  ne 
prête  qu'aux  riches)  se  dit  un  jour  :  «  Quelle  bonne  farce  je  vais  leur 
faire!  »  et  à  la  première  de  ses  connaissances  qu'il  rencontre  :  «  Tu  sais? 
lui  dit-il...  Comment,  tu  ne  sais  pas;  la  baleine  échouée,  elle  bouche 
l'entrée  du  port,  on  ne  peut  plus  ni  entrer,  ni  sortir.  —  Ah,  bah!  »  dit 
l'autre,  et  de  courir  aussitôt  pour  voir  ce  spectacle,  interpellant  de  même 
façon  ceux  qu'il  rencontre,  qui  à  leur  tour  propagent  la  nouvelle  à  tous 
venants,  si  bien  que  notre  farceur,  auquel  quelqu'un  la  rapporte  et  voyant 
chacun  s'empresser,  se  prend  à  y  croire  lui-même  :  «  Peut-être  bien,  se 
dit-il,  qu'en  riant  j'ai  dit  la  vérité;  il  faut  que  j'aille  voir.  »  Et  le  voilà  lui 
aussi  parti  comme  les  autres. 


Fc.692  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

20,  D'autruy.  —  «  Les  miracles  ont  toujours  besoin  qu'on  les  aide  à  se 
faire.  »  Renax. 

32,  Hyperbole.  —  Figure  de  rhétorique  qui  consiste  à  exagérer  les  choses, 
soit  en  les  augmentant,  soit  en  les  diminuant,  pour  leur  donner  plus  de 
force. 

37,  Nombre.  —  Diderot  cite  textuellement  ce  passage  depuis  :  «  l'ai  vou 
la  naissance  de  plusieurs  miracles...  »  (p.  528,  1.  38),  et  ajoute  :  «  Je  don- 
nerais la  meilleure  de  mes  pages  pour  celle-là.  » 

37,  Resouldre.  —  De  se  prononcer  d'une  manière  ferme  et  résolue  contre... 
532. 

9,  Appréhension.  —  De  son  imagination. 

16,  Giste.  —  Il  en  a  été,  il  en  est  et  il  en  sera  toujours  ainsi  ;  et  il  n'est  pas 
un  de  ces  prétendus  miracles  avérés,  qui  ne  puisse  s'expliquer  par 
l'autosuggestion  et  qui  ne  soit  contestable.  Il  serait  cependant  si  simple, 
s'ils  avaient  une  source  surnaturelle  qui  voulût  se  manifester  de  la  sorte, 
de  se  révéler  dans  des  conditions  telles  que  personne'  ne  pourrait  la  con- 
tester, par  exemple  un  œil  arraché,  un  membre  amputé,  au  su  et  au  vu 
de  tout  le  monde,  dont  les  blessures  seraient  complètement  cicatrisées  et 
instantanément  renaîtraient  comme  si  l'accident  ne  s'était  pas  produit! 
—  Tous  les  miracles  qu'on  relève,  sans  exception  aucune,  même  les  résur- 
rections qui  peuvent  s'expliquer  par  des  cas  de  mort  apparente,  rentrent 
dans  la  première  catégorie;  pas  un  dans  la  seconde. 
534, 

5,  Du  tout.  —  Tout  à  fait. 

21,  Soustenions.  —  Nous  suspendions. 

26,  Stile.  —  L'usage. 

29,  Semble.  — "Cicéron,  Academ.,  II,  47. 

39,  Thaumantis.  —  Cicéron,  De  .Yat.  Deor.,  III,  20.  —  La  mythologie  fait 
Iris  la  messagère  des  dieux,  et  en  particulier  de  Junon  qui,  en  récom- 
pense de  ses  services,  la  métamorphosa  en  arc-en-ciel.  Elle  était  fille  du 
centaure  Thaumas,  d'où  le  surnom  de  Thaumantias  qui  lui  est  quelquefois 
donné.  Thaumas  signifiant  en  grec  «  admiration  »,  Cicéron  dit  que  c'est 
en  raison  de  sa  beauté,  parce  qu'elle  est  admirable,  qu'on  l'a  faite  née 
de  Thaumas,  c'est-à-dire  de  l'admiration  qu'elle  inspire;  version  dont 
use  ici  Montaigne.  —  On  dit  couramment  :  «  L'admiration  est  la  fille  de 
l'ignorance  et  la  mère  des  merveilles  »  ;  c'est  l'idée  qu'il  a  voulu  exprimer, 
elle  est  plus  compréhensible  ainsi  que  de  la  façon  dont  il  l'a  rendue  : 
«  Iris  est  fille  de  Thaumantis  »,  même  avec  ce  qui  v  fait  suite. 
536, 

I,  Coras.  —  Détenu  à  la  conciergerie  de  Toulouse,  comme  calviniste,  j'  fut 
assassiné  avec  trois  cents  de  ses  coreligionnaires  quelque  temps  après  la 
S. -Barthélémy. 

7,  Pendu.  —  Discours  préliminaire  de  l'Apologie  pour  Hérodote,  par  H.  Es- 
TiENNE,  tom.  I.  —  Un  N^  Armand  du  Thil  avait  trouvé  moj'en,  grâce  à  sa 
ressemblance  avec  un  N''  Martin  Guerre,  de  se  faire  recevoir  comme  son 
inari,  par  la  femme  de  ce  dernier  qui  était  absent.  Il  tint  sa  place  pen- 
dant trois  ans,  et  en  eut  deux  enfants,  sans  que  ni  elle,  ni  ses  parents,  ni 
ses  amis  découvrissent  l'imposture;  au  bout  de  ce  temps,  le  vrai  mari 
survenant,  le  procès  en  question  s'engagea  devant  le  parlement  de  Tou- 
louse (1560);  du  Thil  fut  condamné  à  être  pendu,  puis  brûlé  après  sa 
mort.  —  Montaigne  dit  que  cette  affaire  était  si  peu  claire,  qu'à  son  avis 
un  acquittement  s'imposait;  telle  a  été  à  notre  époque  l'affaire  Dreyfus, 
où  la  culpabilité  possible  n'a  cependant  jamais  été  péremptoirement  éta- 
blie, dont  la  condamnation  a  divisé  profondément  la  nation  et  dont  un 
parti  s'est  fait  si  longtemps  une  arme  contre  l'armée  bien  innocente  de  la 
légèreté  criminelle  de  quelques-uns;  les  erreurs  judiciaires,  comme  les  in- 
humations prématurées,  sont  journalières  :  on  les  éviterait  en  s'abstenant 
aussi  longtemps  que  la  certitude  n"est  pas  faite. 

Il,  Ans.  —  \alère  Maxime,  VIII,  1;  et  Aulu-Gelle,  XII,  7.  —  II  s'agissait 


NOTES.         LIV.  m,  CH.  X[.         VOL.  III,  PAG.  336.  Fc.693 

d'une  femme  de  Smyrne  qui  avait  tué  son  mari  et  son  fils,  lesquels  avaient 
assassiné  un  autre  fils  qu'elle  avait  eu  d'un  premier  mariage;  mù  par 
cette  considération  qu'il  ne  pouvait  ni  acquitter  une  femme  coupable  d'un 
double  assassinat,  ni  punir  une  mère  infortunée  qu'une  juste  douleur 
avait  poussée  à  cette  vengeance,  l'Aréopage  ajourna  à  cent  ans  le  prononcé 
du  jugement  (68). 

13,  Songes.  —  Voir  ci-dessous  N.  III,  540  :  Vif. 

14,  Choses.  —  Il  s'agit  probablement  de  la  pythonisse  d'Endor  que  Saiil 
alla  consulter.  Étant  en  présence  des  Philistins,  se  sentant  pris  d'inquié- 
tude, il  consulta  le  Seigneur,  par  l'organe  de  ses  intermédiaires  ordi- 
naires. Celui-ci  ne  lui  ayant  pas  répondu,  Saûl  fit  rechercher  une  de  ces 
créatures  qu'il  avait  proscrites,  habiles  dans  l'art  de  lire  l'avenir  et  d'évo- 
quer les  morts  du  tombeau.  On  lui  en  indiqua  une  à  Endor.  Il  s'y  rendit 
déguisé,  et  lui  demanda  d'évoquer  Samuel,  ce  qu'elle  fit  avec  la  permission 
de  Dieu,  disent  certains  pères  de  l'Église  avec  lesquels  se  range  ici  Mon- 
taigne, et  elle  lui  prédit  qu'il  serait  battu  et  que  son  royaume  passerait 
aux  mains  de  David,  ce  que  vérifièrent  les  événements  (1051). 

17,  Engin.  —  Une  autre  intelligence  que  la  nôtre. 

25,  Intelligunt.  —  Citation  d'auteur  inconnu. 

26,  Creduntur.  —  S*  Augustin  a  dit  :  «  Le  plus  souvent  il  advient  que  ceux 
qui  entendent  méprisent,  et  que  ceux  qui  n'entendent  point  sont  touchés 
de  plus  de  zèle  et  de  dévouement.  ■> 

32,  Brauerie.  —  En  se  servant  de  termes  insultants  et  méprisants  pour 
ceux  à  qui  il  parle. 
538, 

1,  Aient.  —  Sous-ent.  :  Je  l'admets  pourvu  qu'ils  aient...  —  Il  semble  que 
Montaigne  fasse  ici  allusion  aux  discussions  soulevées  par  la  Réforme, 
la  grosse  question  de  l'époque. 

15,  Autborisé.  —  D'accord;  mais  comment  reconnaître  que  cette  approbation 
surnaturelle  a  bien  été  donnée  à  tel  ou  tel?  Quelle  preuve  en  peut-il  donner 
à  ceux  qui  taxent  de  fourberie  et  d'imposture  cette  prétention  de  sa  part? 

23,  Vente.  —  Avec  la  même  rapidité  que  le  vent. 

31,  Elider.  — Briser,  rompre,  anéantir;  du  latin  elidere,  d'où  vient  élision. 
540, 

3,  Marque.  —  On  prétendait  que  le  diable  imprimait  sa  griffe  sur  le  corps 
des  sorciers. 

7,  Ellébore.  —  Plante  employée  en  médecine  comme  purgatif  et  qu'autre- 
fois on  croyait  propre  à  guérir  la  folie. 

8,  Ciguë.  —  Plante  ombellifcre,  dont  une  espèce,  la  grande  cigué,  est  très 
vénéneuse;  le  poison  extrait  de  cette  plante  était,  notamment  à  Athènes, 
l'un  des  moyens  d'exécution  employés  pour  la  mise  à  mort  des  condamnés 
à  la  peine  capitale. 

16,  Nœud.  —  Gordius,  Phrygien  (Asie  Mineure),  de  simple  laboureur  étant 
devenu  roi,  avait  consacré  dans  le  temple  de  Jupiter  à  Gordium  le  char 
qui  le  portait  quand  on  vint  lui  annoncer  la  royauté;  le  joug  était  lié  au 
timon  par  un  nœud  si  artistement  fait,  qu'on  ne  pouvait  en  apercevoir 
les  bouts;  on  le  nommait  le  «  nœud  gordien  »  et  un  oracle  avait  promis 
l'empire  de  l'Asie  à  qui  le  dénouerait.  Alexandre  le  Grand,  lors  de  son 
expédition,  s'y  essaya;  après  plusieurs  tentatives  infructueuses,  il  le  trancha 
avec  son  épée  et  parvint  ainsi  à  éludei-,  sinon  à  accomplir  la  prédiction. 

18,  Vit.  —  A  cette  époque,  on  brûlait  encore  les  gens  se  disant  sorciers, 
ou  passant  pour  tels.  —  Nicolas  Rcniy,  conseiller  du  duc  de  Lorraine 
et  enquêteur  sur  le  fait  de  sorcellerie,  fit,  dans  l'espace  de  quinze  ans, 
brûler  plus  de  900  prétendus  sorciers,  dont  800  sorcières,  ainsi  qu'il 
l'avoue  lui-même  dans  un  livre  en  1596,  dédié  au  cardinal  de  Lorraine  : 
"  Ma  justice  est  si  bonne,  y  dit-il,  que  l'an  dernier,  il  y  en  a  eu  16  qui  se 
sont  tués,  pour  ne  pas  passer  par  mes  mains.  »  —  En  1602,  dans  le  Jura, 
un  autre  juge,  Boguet,  se  targuait  de  pareille  extermination,  pratiquée 
pendant  seize  ans;  il  avait  l'humanité  de  faire  étrangler  ses  victimes  avant 


Fc.694  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

qu'on  ne  les  jetât  au  feu,  sauf  toutefois  les  loups  garous  «  qu'il  faut  avoir 
bien  soin  de  brûler  vifs  »  ;  après  avoir  d'abord  épargné  les  enfants  au-des- 
sous de  quatorze  ans,  il  en  était  venu  à  croire  que  pour  avoir  raison  de 
cette  lèpre,  il  fallait  brûler  tout  jusqu'aux  berceaux. 

20,  Sommier.  —  De  cheval  de  somme. 

21,  L'estoit.  —  Ces  sortes  de  métamorphoses  temporaires  étaient  provoquées, 
disait-on,  au  moyen  d'un  fromage  dont  certains  hôteliers  initiés  avaient 
le  secret,  qui  changeait  ceux  qui  en  mangeaient  en  bêtes  de  somme,  dont 
les  dits  hôteliers  se  servaient  pour  leurs  propres  services,  leur  rendant 
ensuite  leur  forme  primitive.  S.  Augustin,  qui  relate  le  fait  (De  Civil.  Dei, 
XVIII,  18),  déclare  ne  pas  y  croire  et  que  ce  sont  là  des  effets  de  songes; 
il  admet  toutefois  que  dans  des  cas  très  rares,  ces  suggestions  peuvent 
être  inspirées  par  des  démons  et  qu'alors  les  fardeaux  qu'il  vous  semble 
que  vous  portez,  ce  sont  les  démons  eux-mêmes  qui  les  portent  pour 
compléter  l'illusion.  Mieux  vaudrait  se  borner  à  expliquer  simplement 
de  semblables  faits  par  les  hallucinations  dont  on  peut  être  jouet  en  dor- 
mant, que  de  faire  intervenir  le  diable. 

30,  Pleuuis.  —  Garantis.  Pleuvir  est  un  vieux  mot  inusité,  signifiant  cau- 
tionner, promettre. 

39,  Obliger.  —  Var.  de  88  :  l'attirer. 

39,  Choix.  —  Vous  fournira  les  moyens  de  choisir. 
542, 

11,  Oîçeï.  —  Proverbe  grec  qui  a  son  semblable  en  latin  :  Claudus  optime 
virum  agit  et  que  Montaigne  traduit  après  l'avoir  cité.  C'est  sans  doute 
dans  cette  opinion  que  les  anciens  ont  fait  de  Vulcain,  qui  était  boiteux, 
l'époux  de  Vénus. 

18,  Décidé.  —  Aristote,  Probl,  10,  26. 

31,  Coches.  —  L'ébranlement  et  l'agitation  de  leurs  carrosses.  —  A  un  mo- 
ment, on  en  a  dit  autant  des  machines  à  coudre;  à  ce  compte  où  nous 
conduiront  l'usage  des  chemins  de  fer  et  des  automobiles  et  plus  encore 
celui  des  bicyclettes!  Ce  que  je  puis  cependant  affirmer,  c'est  que  des  efi"ets 
de  ce  genre  se  produisent  parfois  chez  l'homme  qui  demeure  de  longues 
heures  consécutives,  douze  à  quinze,  à  cheval. 

32,  Commencement.  —  Au  commeocement  de  ce  chapitre,  III,  526,  à  la  fin 
de  la  page. 

39,  Mot.  —  De  l'adage  cité  plus  haut  sur  les  boiteux. 
544, 

4,  Italie.  —  Torquato  Tasso,  Paragone  delV  Ilalia  alla  Francia. 
7,  Suétone.  —  Vie  de  Caligula,  3. 

10,  Erratique.  —  Vagabond,  instable,  incertain.  Du  latin  erraticus  qui  si- 
gnifie errant  çà  et  là;  on  désigne  aujourd'hui  sous  ce  nom  :  roche, 
bloc  erratique,  des  roches  qui,  par  une  cause  quelconque,  se  trouvent 
transportées  à  gi-ande  "distance  de  leur  gisement  naturel. 

11,  Tberamenez.  —  Cothurne  (soulier)  de  Tliéramène;  sobriquet  donné  par 
les  Romains  aux  gens  ménageant  deux  partis  contraires  comme  avait  fait 
Théramène,  l'un  des  trente  tyrans  d'Athènes,  imposés  par  les  Spartiates 
à  cette  ville  après  leur  victoire  d'JEgos  Potamos  (404),  qui  adhérait  aux 
mesures  d'oppression  prises  par  ses  collègues  contre  le  peuple  et  qui, 
auprès  de  celui-ci,  les  désapprouvait,  ressemblant,  en  agissant  ainsi,  aux 
chaussures  de  théâtre  que  chaussaient  indifféremment,  suivant  le  besoin  de 
son  rôle,  tout  acteur  homme  ou  femme,  et  qui,  confectionnées  sur  une 
même  forme,  se  mettaient  indifféremment  à  l'un  ou  l'autre  pied.  Cette 
attitude  de  Théramène  tourna  contre  lui,  ses  collègues  le  condamnèrent 
à  boire  la  ciguë  (403).  V.  Érasme,  Theramenis  Colhumus. 

12,  Dragme.  —  La  drachme  (monnaie)  valait  un  peu  moins  d'un  sou. 

14,  Talent.  —  Monnaie  de  convention  valant  près  de  5.000  francs  (4.840  fr.). 

15,  Cynique.  —  Sénèque,  De  Benef.,  Il,  17. 

21,  Riuerso.  —  Proverbe  italien  qui  existe  pareillement  et  textuellement  en 
français. 


NOTES.  LIV.  III,  CH.  XI.  '       VOL.  III,  PAG.  544.  Fc.69o 

23,  Hercules.  —  Obligé  par  les  destins  d'obéir  à  Eurysthée,  roi  d'Argos, 
entreprit,  par  les  ordres  de  ce  prince,  une  foule  de  travaux  périlleux, 
dont  les  principaux,  énumérés  ci-après,  sont  connus  sous  le  nom  des 
"  Douze  travaux  d'Hercule  »  :  Il  étouffa  le  lion  de  Némée;  tua  l'hydre  de 
Lerne;  prit  vivant  le  sanglier  d'Érymanthe  ;  atteignit  à  la  course  la  biche 
aux  pieds  d'airain;  tua  à  coups  de  (lèche  les  oiseaux  du  lac  Stymphale; 
dompta  le  taureau  de  l'île  do  Crète  envoyé  par  Neptune  contre  Minos; 
tua  Diomède,  roi  de  Thrace,  qui  nourrissait  ses  chevaux  de  chair  hu- 
maine; vainquit  les  Amazones;  nettoya  les  écuries  du  roi  Augias,  en  y 
faisant  passer  le  fleuve  Alphée;  combattit  et  tua  le  géant  Géryon,  auquel 
il  enleva  ses  troupeaux;  enleva  les  pommes  d'or  du  jardin  des  Ilespérides; 
enfin,  délivra  Thésée  des  enfers.  Parmi  ses  autres  travaux;  il  délivra  Ilé- 
sione  d'un  monstre  marin;  vainquit  et  étouffa  le  géant  Antée;  sépara  les 
montagnes  de  Calpé  et  d'Abyla  qui  auparavant  étaient  une  seule  montagne 
et  qui  formèrent  ce  qu'on  a  nommé  depuis  les  Colonnes  d'Hercule  (détroit 
de  Gibraltar);  tua  le  centaure  Nessus;  délivra  Promcthée  enchaîné  sur 
le  Caucase,  etc.. 

24,  luger.  —  Cicéron,  Acad.,  II,  34. 
33,  Tout.  —  Planude,  Vie  d'Esope. 


CHAPITRE  XII. 


546, 


Physionomie.  —  Montaigne  ne  traite  le  sujet  qui  sert  de  titre  à  ce 
chapitre  que  dans  ses  cinq  ou  six  dernières  pages. 

14,  Reproche.  —  Add.  de  88  :  et  d'iniure. 

17,  Maisons.  —  L'ex.  de  Bord,  porte  massons;  c'est  la  version  qui  a  été 
adoptée  dans  la  traduction  ;  «  maisons  »  est  évidemment  une  erreur  d'im- 
pression qui  s'est  glissée  dans  les  éditions  antérieures  et  répercutée 
d'édition  en  édition. 

23,  Vent.  —  «  Le  vent  enfle  les  outres,  l'opinion  enfle  les  hommes.  »  Cette 
sentence;  de  Stobée,  se  trouvait  du  nombre  des  inscriptions  que  portaient 
les  solives  de  la  bibliothèque  de  Montaigne. 

24,  Balons.  —  A  cette' époque  l'aérostat,  la  simple  montgolfière  elle-même, 
n'étaient  point  inventés;  il  ne  s'agit  donc  ici  que  de  simples  balles  de 
cuir,  remplies  d'air,  plus  ou  moins  grosses,  comme  encore  actuellement  il 
en  est  employé,  sous  ce  nom,  s(îit  comme  jouet  d'enfants,  soit  à  certains 
jeux,  tels  que  le  foot-ball,  si  fort  à  la  mode  aujourd'hui. 

26,  loinctement.  —  Plus  directement,  plus  spécialement. 

28,  Sequi.  —  «  Régler  ses  actions,  observer  la  loi  du  devoir,  suivre  la  na- 
ture. »  La  morale  de  Montaigne  peut  se  résumer  dans  cette  citation  de 
LucAiN,  parlant  de  Caton,  dont  l'auteur  des  Essais  fait  ici  application  à 
Socrate,  le  plus  parfait  de  ses  modèles,  qu'il  admire,  mais  n'imite  que 
dans  ce  qui  n'est  pas  contraire  à  la  tranquillité  de  son  existence  et  ne 
saurait  v  apporter  de  trouble  dans  l'avenir. 

29,  Pareil  —  Cicéron,  De  OU'.,  1,  26. 
548, 

4,  Braues.  —  Var.  de  88  :  noblea. 

6,  Ralle.  —  Rase  la  terre.  Selon  Cotgkave  «  raller  à  terre  »,  c'est  courir 
vite  et  raser  la  terre,  comme  font  certains  oiseaux. 

14,  Suffisance.  —  ^dd.  de  88  :  soit  pour  iuger,  soit  pour  rapporter. 
24,  Besoigne.  —  Cicéron,  Acad.,  I,  4,  où  Varron  développe  ce  caractère 
moral  de  la  philosophie  de  Socrate. 
550, 

7,  Agricole.  —  Tacite,  Agricola,  4.  —  Sa  mère  avait  nom  Julia  Procella; 
lui-même  fut  le  beau-père  de  l'iiistorien  Tacite  qui  a  écrit  sa  vie.  Général 
habile,  il  soumit  la  Grande-Bretagne  qu'il  réduisit  en  province  romaine, 
et,  le  premier,  reconnut  que  c'était  une  ile. 


Fc.696  ESSAIS  DE  MONTAIGNE, 

12,  Viande.  —  Nourriture.  V.  N.  I,  540.  Se  disait  autrefois  pour  désigner 
toute  chose  entrant  dans  l'alimentation.  —  «  La  sienna  vianda  era,  pans  et 
aygua  lot  dia  (Sa  nourriture  de  tous  les  jours  était  uniquement  du  pain  et 
de  l'eau),  •  est-il  dit  dans  la  Vie  de  S'  Honorât.  —  «  En  cette  isle  seule, 
naissent  ces  belles  poires...,  viande  très  salubre  es  malades,  comme  es 
sains.  »  Rabelais,  IV,  54.  —  Ne  se  dit  plus  aujourd'hui  que  de  la  chair  des 
animaux. 

22,  Pœnitence.  —  Ceux  appartenant  aux  ordres  monastiques  et  plus  parti- 
culièrement aux  ordres  mendiants. 

552, 

1,  Propre.  — Au  fait,  à  l'épreuve. 

2,  Targue.  —  Et  est  armé  pour  la  lutte,  ni  plus  ni  moins  qu'avant  et  ab- 
solument comme  tout  le  monde  l'est;  —  se  targuer  signifie  proprement  se 
couvrir  d'une  targe  ou  targue,  espèce  de  bouclier. 

7,  N'a.  —  Sous-entendu  :  imprimé. 
11,  Incorporels.  —  Sans  corps,  vides  de  sens,  frivoles. 
14,  Céans.  —  Ici  dans  mon  livre. 

20,  D'aban.  —  D'effort,  de  fatigue,  de  tourment. 

21,  Perche.  —  Se  démener,  ainsi  que  fait  l'oiseau  de  proie  qui,  attaché  à 
une  perche,  s'y  débat  continuellement. 

32,  Informe.  —  Nous  forme,  façonne  notre  àme. 

35,  Reuerez.  —  Les  pères  de  l'Eglise,  et  plus  particulièrement  S'  Augustin, 
dans  ses  Confessions. 

37,  Voirie.  —  De  la  lie  du  peuple;  voirie,  c'est  l'endroit  d'une  ville  où  on 
jette  les  immondices. 
554, 

2,  Science.  —  Pourquoi  allons-nous  chercher  dans  l'étude  des  sciences,  des 
armes  contre  les  maux  et  les  accidents  de  la  vie? 

20,  Picoreurs.  —  Les  partisans,  les  maraudeurs. 

21,  Essayois.  —  J'essuyais,  j'éprouvais. 

34,  Nous.  —  "  0  tempora,  o  mores  (Dans  quels  temps  vivons-nous)  !  »  s'écriait 
de  même  Cicéron,  en  de  semblables  circonstances,  s'élevant  contre  la  per- 
versité des  hommes  de  son  époque. 

36,  Donne.  —  Ces  deux  vers  français  semblent  être  de  Montaigne;  la  traduc- 
tion du  vers  de  Virgile  qui  suit  est  de  lui. 

556, 

G,  Estranger.  —  Les  mercenaires  étrangers.  Allemands,  Suisses,  Italiens, 
Espagnols,  qu'appelaient  indifféremment  à  leur  aide  les  Catholiques  et  les 
Protestants.  C'est  ici  la  seule  allusion  que  Montaigne  fasse  à  l'intrusion  de 
l'étranger  dans  nos  affaires  politiques;  quelque  las  qu'il  soit  des  guerres 
civiles,  il  ne  parle  jamais,  soit  dit  à  sa  louange,  de  recourir  pour  y  mettre 
fin  à  l'appui  que  l'on  pourrait  recevoir  du  dehors. 

9,  Chef.  —  Non  à  la  discrétion  du  chef,  mais  chacun... 

23,  Probibete.  —  Virgile  dit  cela  d'Octave,  qui  plus  tard  devint  Auguste. 
Montaigne  en  fait  vraisemblablement  application  ici  à  Henri  de  Navarre 
qui  avait  sauvé  l'Etat  par  l'assistance  qu'il  avait  prêtée  à  Henri  111,  dont, 
au  moment  où  Montaigne  écrivait,  il  était  devenu  le  successeur  naturel 
par  la  mort  du  duc  d'Alençon,  frère  de  ce  dernier. 

24,  Précepte.  —  Il  est  de  Cléarque,  général  lacédémonien,  et  rapporté  par 
Vai-i-re  Maxime,  II,  7,  ext.  2. 

26,  Pourpris.  —  Enceinte,  clos. 

29,  Délicieuses.  —  Fait  rapporté  par  Froxtin,  Stratagèmes,  IV,  3,  13,  au  sujet 
de  l'armc'o  de  M.  Scaurus  en  IlljTie,  vers  l'an  122  —  Ce  Scaurus,  qui 
s'illustra  par  ses  services  militaires  et  qui  obtint  les  honneurs  du  triomphe, 
devint  prince  du  Sénat  et,  comme  tel,  eut,  pendant  un  certain  temps,  la 
direction  de  toutes  les  affaires  de  Rome  ;  mort  en  97. 

30,  Pérégrinations.  —  Voyages;  du  \a.tin  peregrinatio. 

^,  Rbodes.  —  Les  chevaliers  de  Rhodes  qui,  dans  leur  hiérarchie,  com- 
prenaient le  titre  de  commandeur,  avaient  été  particulièrement  sur  mer. 


NOTES.         LIV.  III,  CH.  XII.         VOL.  III,  PAG.  556.  Fc.697 

pendant  plusieurs  siècles,  la  terreur  des  pirates  musulmans.  Du  temps  de 
Montaigne,  on  les  appelait  encore  de  ce  nom,  bien  qu'après  la  prise  de 
Rhodes  par  les  Turcs  (1522),  ils  fussent  devenus  chevaliers  de  Malte,  cette 
ile  leur  ayant  été  donnée  comme  refuge  par  Charles-Quint. 

38,  Pretix.  —  Déterminé,  arrêté,  fixe. 

40,  Empale.  —  Supplice  en  usage  chez  les  Turcs,  consistant  à  enfoncer  dans 
le  fondement  du  condamné  un  pieu  ou  pal,  fixé  verticalement,  qui  lui  traverse 
les  entrailles  et  le  laisser  ainsi  jusqu'à  ce  que  la»  mort  s'ensuive,  ce  qui 
peut  se  faire  attendre  huit  à  dix  heures;  ce  fut  le  supplice  infligé  en  1800 
à  l'assassin  de  Kléber.  , 

40,  Déport.  —  Sans  délai,  sur-le-champ. 
558, 

1,  Damas.  —  Le  fait  se  passait  en  1516;  Selim  I,  sultan  ottoman,  était  d'une 
cruauté  égale  à  son  courage  et  à  sa  fermeté;  il  avait  détrôné  et  fait  périr 
son  père  et  ordonné  la  mort  de  plusieurs  de  ses  frères;  c'est  lui  qui  obtint 
du  dernier  calife  abbasside,  dont  déjà  les  sultans  ottomans  avaient  absorbé 
toute  l'autorité,  de  lui  résigner  cette  qualité  de  calife,  qui  lui  donnait  l'in- 
vestiture religieuse  et  le  mettait  au-dessus  de  tous  les  princes  musulmans. 
5,  Mortelle.  —  La  guerre  civile.  —  S.  Thomas  blâme  la  sédition;  mais  il 
approuve  l'insurrection  consistant  à  renvei-ser  un  pouvoir  injuste  et  tyran- 
nique;  alors,  selon  lui,  elle  est  plus  qu'un  droit,  elle  est  un  devoir.  11  se 
rencontre  sur  ce  point  avec  un  tout  autre  individu  que  lui,  Robespierre, 
qui,  lui  aussi,  a  dit  que  lorsque  la  loi  devient  oppressive,  l'insurrection 
devenait  le  plus  sacré  des  devoirs. 
5,  Fauonius.  —  Plltarque,  M.  Brutus,  3. 

7,  Mesme.  —  Epist.  7,  à  Perdiccas. 

9,  Citoyens.  —  «  Dans  les  séditions,  les  méchants  seuls  gouvernent.  »  Homère. 
15,  Consorce.  —  De  notre  société,  c.-à-d.  de  la  société  chrétienne.  —  Con- 

sorce  est  le  mot  latin  consortium  qui  a  cette  signification  et  auquel  Montaigne 
a  donné  une  désinence  française. 

27,  Colloque.  —  Add.  de  l'ex.  de  Bord,  que  l'on  a  cru  devoir  conserver  dans 
la  traduction  :  Desmembrant  sa  mère  et  donnant  à  ronger  les  pièces  à  ses 
antiens  ennemis. 

37,  Platon.  —  République,  11,  4;  Pensées  de  Platon. 
560, 

14,  Pelaudé.  —  Maltraité,  écorché,  dépouillé. 

14,  Gibelin.  —  Guelphe  et  Gibelin,  noms  de  deux  partis  pohtiques  qui, 
pendant  près  de  quatre  siècles,  divisèrent  l'Allemagne,  puis  l'Italie.  Ces 
dissensions  eurent  pour  point  de  départ  les  prétentions,  en  1158,  à  la 
couronne  impériale  de  Conrad,  seigneur  de  Wiblingen  (d'où  par  corruption 
Gibelin),  et  de  Welf  (dont  on  a  fait  Guelfe),  duc  de  Bavière;  mais  elles  ne 
tardèrent  pas  à  se  modifier  dans  leur  esprit,  et,  d'une  façon  générale,  les 

.  Gi'oelins  en  tenaient  pour  la  domination  impériale  et  la  hiérarchie  féodale, 
les  Guelfes  pour  la  domination  de  l'Eglise  et  l'indépendance  nationale.  Ces 
querelles  cessèrent  par  lassitude  de  part  et  d'autre  et  surtout  par  la  diversion 
qu'occasionna  l'invasion  des  Français  en  Italie,  en  1495. 

17,  Voisinage.  —  3Iontaigne,  qui  lui-même  était  catholique,  habitait  en  plein 
pays  protestant;  en  outre,  sa  mère  Antoinette  de  Louppes  était  protestante 
et  deux  de  ses  enfants,  le  sieur  de  Beauregard  et  .Jeanne  de  Lestonna,  avaient 
adopté  la  môme  religion. 

19,  Desempare.  —  Abandonne,  quitte,  transgresse. 

20,  Recherché.  —  Je  ne  m'écarte  jamais  des  lois  et  qui  eût  fait  l'examen  de 
ma  conduite... 

20,  Muettes.  —  Add.  de  88  :  e<  desrobécs. 
36,  Démise.  —  Soumise;  du  latin  demissa. 
562, 

8,  Commettre.  —  Confier  le  soin  d'une  vieillesse... 

10,  Pourpoint.  —  Presque  nu,  avec  mon  seul  pourpoint;  ou  encore,  réduit 
à  la  dernière  extrémité,  ne  sachant  quel  parti  prendre.  —  «  Mettre  un 


Fo.698  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

homme  en  pourpoint  »,  c'est  à  proprement  parler  le  dépouiller  complète- 
ment, le  réduire  à  la  besace,  dit  Nicot,  ce  qui  ressort  nettement  de  ce 
quatrain  attribué  à  Charles  IX,  où  il  est  question  de  François  I""  : 

«  Le  roy  François  ne  faillit  point, 
Lorsqu'il  prédit  que  ceulx  de  Guise 
Mettroient  ses  enfants  en  pourpoinct, 
*  Et  tous  ses  subiects  en  chemise.  » 

32,  Mail.  —  MaiUet. 
564, 

8,  Temps.  —  Var.  de  88  :  estât. 

30,  Vie.  —  Combien  peu  il  en  a  coûté  au  repos  et  à  la  tranquillité  de  nia 
vie,  quoique  j'en  aie  vu  s'écouler  plus  de  la  moitié,  pendant  que  s'opérait  la 
ruine  de  mon  pays. 

35,  Escbeuer.  —  Eviter,  esquiver.  V.  N.  III,  508. 

36,  Guignent.  —  Qui  nous  visent,  nous  guettent,  s'adressent  à  nous. 
566, 

3,  Qu'à.  —  Mais  seulement  par  comparaison. 

5,  Office.  —  La  corruption  des  grands  et  des  hommes  dans  les  plus  hautes 
situations. 

22,  Mains.  —  «  Cedo  et  manum  tollo,  je  cède  et  tends  la  main.  »  Cicéron, 

fragm.  Consolât,  ap.  Lactant.,  III,  28. 
24,  Tastonner.  —  Flatter,  amadouer.  On  disait  :  tastonner  doucement  les 

chevaux  de  la  main  pour  les  adoucir,  les  calmer. 

31,  Peste.  —  La  peste,  au  xvi'  s.,  ravagea  presque  toute  l'Eiîrope.  A  l'époque 
où  Montaigne  écrivait,  en  1585,  elle  venait  de  sévira  Bordeaux  et  dans  les 
régions  environnantes,  s'étendant  jusque  chez  lui;  dans  la  ville  seule  où 
elle  régna  six  mois,  de  juin  à  décembre  1585,  elle  lit  '16.000  victimes  sur 
42.000  habitants. 

36,  Estranges.  —  Add.  de  88  :  e^  inouys. 
568, 

I,  Plaisante.  —  Singulière,  étrange,  surprenante.  «  Plaisante  »  est  mis  ici 
par  antiphrase. 

32,  Compromis.  —  Eussent  admis  d'une  commune  entente  cette  nécessité. 
36,  Diuerse.  —  Ou  le  goust  tout  diuers,  comme  porte  l'éd.  de  88. 

570, 

6,  Descouppent.  —  Se  répartissent,  se  partagent  en  différentes  formes. 
6,  Neorites.  —  Diodore  de  Sicile,  XVII,  105. 

9,  Fosse.  —  A  cette  époque,  le  service  des  inhumations  n'était  pas  partout, 
surtout  dans  les  campagnes,  un  service  public;  on  enterrait  fréquemment 
de  ci,  de  là,  dans  les  propriétés  particulières,  ce  qui  se  pratiqua  jusqu'au 
moment  de  la  Révolution,  à  l'égard  des  Protestants  qui  n'étaient  pas  admis 
dans  Ifes  cimetières  catholiques  là  où  il  en  existait  et  qui  encore  à  l'heure 
actuelle  y  sont  enterrés  à  part.  C'est  à  cela  qu'est  dû  ce  grand  nombre  do 
terrains,  de  quelques  mètres  carrés  de  superficie,  abandonnés  aujourd'hui, 
qui  existent  dans  certaines  régions,  notamment  dans  le  Périgord,  où  il  en 
subsiste  encore  entourés  de  leurs  murs  de  clôture  et  que  signalent  des 
arbres  funéraires. 

12,  Aucunement.  —  Presque. 

15,  Suffoquant.  —  Des  soldats  romains,  dit  Tite-Live,  XXII,  51,  furent,  le 
lendemain  de  la  bataille  de  Cannes,  trouvés  morts  en  cette  situation;  il  est 
à  croire  que  blessés  grièvement  et  hors  d'état  de  mettre  fin  autrement  à 
leurs  souffrances,  ils  en  avaient  agi  ainsi  de  désespoir. 
572, 

10,  Filière.  —  En  terme  de  fauconnerie,  on  appelle  filière  une  cordelette 
d'une  vingtaine  de  mètres  de  long,  que  l'on  tenait  attachée  à  l'un  des  pieds 
de  l'oiseau  pendant  ses  exercices  de  dressage. 


NOTES.        LIV.  m,  CH.  XII.         VOL.  III,  PAG.  572.  Fc.699 

16,  Frappe.  —  «  Le  coup  ne  nous  surexcite  pas  tant  que  le  bruit.  »  Sénèque, 

Episl.  74. 
20,  Noël.  —  Dès  l'été,  sous  prétexte  que  vous  en  aurez  besoin  en  hiver,  la 

S'-Jean  étant  en  juin  et  Noël  en  décembre. 

25,  Main.  —  Par  avancé. 

28,  Dure.  —  Sénèque,  qui  appartenait  à  la  secte  des  Stoïciens,  dans  ses  Épitres 

13  et  98. 
34,  Volontiers.  —  Vraiment;  ceci  dit  sans  nul  doute  par  ironie. 
574, 

10,  Cbaille.  —  Ne  vous  en  mettez  pas  en  peine. 

14,  Incertam.  —  Le  texte  de  Properce  porte  :  At  vos  incertain. 
30,  Total.  —  C'est  à  tort  qu'on  veut  nous  apprendre  à  mourir,  et  à  changer 
la  forme  de  notre  vie^  alors  que  nous  touchons  à  sa  fin. 

34,  But.  —  «  Le  but  de  nostre  carrière  c'est  la  mort  »,  dit  ailleurs  (I,  112) 
Montaigne,  en  contradiction  ici  avec  lui-même. 

35,  Visée.  —  Le  but  où  elle  vise. 
576, 

11,  Descbargée.  --  Et  la  plus  légère.  —  Suétone,  César,  87. 

19,  Presens.  —  Var.  de  88  :  plus  gravide  que  nous  n'auons. 

20,  Futurs.  —  Add.  de  88  :  e<  de  la  mort  à  venir. 

26,  Socrates.  —  Socrate  était  fils  d'un  sculpteur,  profession  qu'il  exerça 
d'abord,  puis  abandonna  vers  30  ans  pour  s'adonner  aux  sciences,  Criton, 
un  riche  Athénien,  lui  ayant  assuré  à  cet  effet  des  moyens  d'existence.  — 
Dès  lors,  Socrate  se  donna  la  mission  de  réformer  ses  concitoyens  et  sa  vie 
fut  un  véritable  apostolat  qu'il  exerça  uniquement  par  la  parole,  conversant 
avec  les  uns  et  les  autres,  procédant  généralement  par  des  interrogations 
qui,  de  réponses  en  réponses,  amenaient  ses  adversaires  à  de  ridicules 
absurdités,  et  ses  disciples  à  découvrir  par  eux-mêmes  les  vérités  qu'il  voulait 

,  leur  inculquer.  Il  ne  tenait  pas  d'école  proprement  dite;  on  le  rencontrait 
partout  où  se  portait  la  foule,  dans  les  assemblées  du  peuple,  les  fêtes,  les 
gymnases,  et  tout  servait  de  prétexte  à  son  enseignement  dans  lequel  il 
s'appliquait  à  faire  ressortir  les  vertus  (la  prudence,  la  tempérance,  la  force, 
la  justice),  l'existence  d'un  Dieu,  d'une  Providence,  l'immortalité  de  l'àme; 
à  combattre  les  sophistes  qui  prétendaient  tout  savoir,  leur  opposant  que 
quant  à  lui  tout  ce  qu'il  savait,  c'est  qu'il  ne  savait  rien;  à  recommander 
la  pratique  du  bien  comme  le  plus  sûr  moyen  d'arriver  au  bonheur,  le 
respect  des  lois  et  leur  observation  comme  un  impérieux  devoir.  —  Sa  vie 
fut  conforme  à  sa  doctrine;  il  ne  cessa  de  donner  l'exemple  de  toutes  les 
vertus  publiques  et  privées,  se  signala  par  son  désintéressement,  sa  géné- 
rosité, son  égalité  d'humeur.  Ses  mœurs  furent  toujours  irréprochables,  et- 
rien  dans  les  accusations  que  ses  ennemis  portèrent  conti'e  lui  n'en  laisse 
soupçonner  la  pureté.  Jamais  il  ne  se  départit  d'une  simplicité  vraiment 
stoïque;  il  menait  une  vie  frugale,  allait  toujours  nu-pieds  et  ne  se  couvrait 
pas  plus  en  hiver  qu'en  été.  —  Exact  à  remplir  tous  ses  devoirs  de  citoyen 
aussi  bien  en  guerre  qu'en  paix,  Socrate  se  distingua  par  son  courage 
en  diverses  occasions.  11  avait  36  ans,  quand  Potidée  se  révolta  et,  réduite 
par  la  famine,  fut  prise  après  un  siège  de  deux  ans  (434);  il  s'y  fit 
remarquer  par  ses  actions  d'éclat,  et  céda  à  Alcibiade,  qu'il  avait  arraché 
des  mains  de  l'ennemi,  le  prix  de  la  vaillance  que  lui-même  avait  mérité. 
Pendant  ce  siège,  il  demeura  un  jour  et  une  nuit  dans  la  même  attitude, 
comme  en  extase,  ce  qui  lui  arrivait  quelquefois.  A  la  bataille  de  Délium, 
que  les  Athéniens  perdirent  contre  les  Thébains  (424),  il  soutint  pied  à 
pied  la  retraite  avec  Lâchez,  jusqu'à  ce  que  Xénophon,  harassé  de  fatigue, 
étant  tombé  de  cheval,  il  le  prit  sur  ses  épaules  et  le  porta  en  lieu  sûr.  11 
prit  également  part,  en  422,  à  une  expédition  ayant  pour  objet  de  secourir 
Amphipolis,  qui  appartenait  à  Athènes  et  qu'assiégeait  Brasidas,  général 
de  Lacédémone,  qui  y  fut  tué.  De  même  en  paix,  notamment  à  l'occasion 
des  affaires  de  Diomédon  (V.  N.  I,  38  :  Supplices),  et  de  Thcramène  (V.  N, 
III,  544).  Par  sa  vie  tout  entière,  Socrate  mérita  d'être  proclamé  le  plus  sage 


Pc.700  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

des  hommes.  Il  se  disait  inspiré  par  un  génie  familier,  qu'on  a  appelé  «  le 
Démon  de  Socrate  ■,  qui  dirigeait  sa  conduite.  II  ne  semble  pas  que  ce  fût  là 
une  assertion  ajant  pour  objet  de  donner  plus  de  poids  à  ses  conseils  ;  ce  devait 
être  cette  sensation  intérieure  qui  chez  l'homme  à  l'esprit  juste  et  pénétrant, 
lui  communique  comme  un  pressentiment  de  ce  qui  doit  arriver,  avant 
même  que  son  esprit  ait  pu  saisir  la  justesse  de  cette  inspiration.  —  La 
hardiesse  et  la  continuité  de  ses  censures  indisposèrent  à  la  longue  ses 
concitoyens:  dès  l'an  424,  Aristophane,  dans  sa  comédie  des  «  Nuées  », 
l'avait  vivement  attaqué.  Il  finit  par  être  accusé  de  corrompre  la  jeunesse, 
de  ne  pas  admettre  les  divinités  et  de  chercher  à  introduire  des  divinités 
nouvelles;  en  réalité  il  était  poursuivi  surtout  parce  qu'il  était  opposé  au 
pouvoir  démocratique.  Devant  ses  juges,  il  garda  l'attitude  la  plus  fière  et 
fut  condamné  à  boire  la  ciguë;  et  vit  l'exécufîon  de  la  sentence  différée 
durant  trente  jours,  par  suite  du  départ  pour  Délos  de  la  galère  y  transportant 
la  députation  sacrée  que  les  Athéniens  envoyaient  chaque  année  et  jusqu'au 
retour  de  laquelle  aucune  exécution  capitale  ne  devait  avoir  lieu.  Pendant 
cette  longue  agonie  il  conserva  un  calme,  une  lucidité  d'esprit,  une  égalité 
d'humeur  inaltérables,  et,  le  moment  venu,  subit  son  sort  avec  un  courage 
et  une  sérénité  admirables.  Peu  après,  un  revirement  dans  l'opinion  se 
produisit  :  son  principal  accusateur  fut  condamné  à  mort  et  lapidé;  les 
autres,  condamnés  à  un  bannissement  perpétuel,  se  pendirent;  un  deuil 
universel  fut  ordonné  et  une  statue  lui  fut  érigée.  —  Socrate  s'était  marié  à 
l'âge  de  cinquante  ans  ;  Xantippe,  sa  femme,  passe  pour  avoir  mis  plus  d'une 
fois,  par  son  humeur  acariâtre,  sa  patience  à  rude  épreuve;  on  lui  prête 
une  seconde  femme  Mirto,  mais  l'accord  n'existe  pas  sur  ce  point.  Il  semble 
avoir  eu  trois  enfants,  dont  l'un,  Lamproclès,  pouvait  avoir  17  à  18  ans 
quand  il  mourut,  tandis  que  les  deux  autres,  Sophroniscus  et  Menexanus, 
étaient  encore  en  bas  âge.  —  Parmi  ses  disciples  et  avec  une  foule  d'autres, 
Socrate  compte  :  Xénophon,  Platon,  Antisthène,  Aristippe,  Phédon,  EucUde, 
Criton,  pour  ne  nommer  que  ceux  qui*ont  acquis  le  plus  de  notoriété.  — 
Voir  en  outre  le  concernant  :  III,  690;  I,  78;  I,  124  et  N.  Mort;  N.  I,  254  : 
Vtilité;  N.  II,  118  :  Chrestiens;  II,  222  et  N.  Sages;  II,  242  etN.  D'autrui; 
II,  244  et  N.  Fantasies;  II,  426;  III,  1.34  et  N.  Accoustumé. 

27,  Vie.  —  Tout  le  passage  commençant  par  ces  mots  :  «  l'ay  peur.  Mes- 
sieurs »,  et  se  terminant  par  ceux-ci  :  «  craindre  des  Dieux  »,  qui,  dans  la 
traduction,  est  mis  entre  guillemets,  est  extrait  de  l'Apologie  de  Socrate. 
dans  Platox,  ch.  17,  26,  32,  etc.,  traduite  par  fragments  par  Cicéron  dans 
les  Tusc,  I,  41. 

30,  Cachée.  —  Var.  de  88  :  interne. 
578, 

19,^  Prytanée.  —  Édifice  où,  à  Athènes,  les  Prytanes  (magistrats  charges  des 
affaires  politiques  et  judiciaires)  tenaient  leurs  .séances;  on  y  emmagasi- 
nait, en  outre,  des  approvisionnements  de  blé  et  autres  grains,  et  là 
également  prenaient  leurs  repas  certains  citoyens  nourris  aux  frais  du 
trésor  public. 

23,  Homère.  —  Odyssée,  XIX,  163. 

28,  Desmettre.  —  Soumettre,  abaisser. 
580, 

3,  Dieux.  —  L'éd.  de  88  aj.  :  Vous  en  ordomwre:^  doncq  comme  il  vous 
plaira,  membre  de  phrase  qui  dans  l'éd.  de  95  se  lit  à  la  page  précédente, 
lig.  10. 

3,  Puérile.  —  Témoignant  de  sentiments  d'une  naïveté  enfantine. 

6,  Luy.  —  CicÉROx,  De  Oratione,  I,  54. 

7,  Calé.  —  Se  fût-elle  abaissée... 

13,  Incorruptible.  —  Sénèque,  Epist.  31. 

27,  Eux-ttiesmes.  —  Ces  dernières  phrases  sont  copiées  du  traité  de  Pi.l- 
TARQUE,  intitule  De  l'envie  et  de  la  haine,  3. 
582, 

1,  Ignorance.  —  Var.  de  88  :  fantasie,  au  lieu  de  «  impression  et  ignorance  ». 


NOTES.        LIV.  m,  Cil.  XII.        VOL.  III,  PAG.  582.  Fc.701 

8,  D'augmentation.  —  Elle  fait  naître  plus  d'animaux  de  toutes  espèces 
qu'elle  n'en  enlève. 

10,  Dédit.  —  La  traduction  de  ce  vers  d'Ovide  est  donnée  dans  la  ligne  qui 
suit.  ' 

19,  Chantent.  —  Il  y  a  longtemps  que  le  chant  du  cygne  à  l'approche  de  la 
mort,  est  regardé  comme  une  fable. 

36,  lours.  —  J'augmente  tous  les  jours  le  nombre  de  mes  citations,  contre 
ce  que,  tout  d'abord,  je- m'étais  proposé  de  faire  et  le  plan  que  je  m'étais 
tracé  en  commençant  mon  livre.  —  On  peut  dire  que  les  Essais  ont  paru 
en  trois  fois  :  dans  la  première  édition  (1580),  les  citations  sont  assez  rares; 
elles  sont  plus  nombreuses  dans  la  seconde  (1588)  ;  elles  foisonnent  dans  la 
troisième  (1595);  Montaigne  en  a  fait,  ainsi  qu'il  le  dit,  l'amusement  de  son 
oisiveté  pendant  les  quatre  dernières  années  de  sa  vie.  —  «  11  y  a  quelque 
modestie,  qui  sied  bien,  d'appuyer  sa  pensée  de  quelque  autorité  étran- 
gère, ou  de  recourir  à  l'expression  d'un  autre  en  défiance  de  la  sienne 
propre;  mais  c'est  un  usage  qui  peut  dégénérer  en  abus,  et  c'est  ce  qui 
en  est  de  cette  farcissure  d'exemples,  comme  l'appelle  leur  auteur,  que 
l'on  trouve  dans  les  Essais.  Ch.  Nodier. 

584, 

7,  Liminaire.  —  Qui  se  met  en  tète  d'un  livre;  on  a  dit  depuis  épître 
préliminaire,  et  aujourd'hui  préface. 

12,  Exagite.  -  Critique;  une  des  acceptions  du  verbe  latin  exagitare.  CicÉ- 
RON,  Oral.,  13,  dit  aussi  en  parlant  des  dialogues  de  Platon  où  Socrate 
prend  à  partie  les  Sophistes  :  «  Plàto  exagitator  omnium  rhetorum  (Platon, 
ce  critique  de  tous  les  rhéteurs).  >• 

26,  Seruice.  —  Et  le  détournent  de  son  vrai  sens,  pour  en  faire  une  appli- 
cation nouvelle. 

30,  Conte.  —  Et  les  racontent,  les  avouent. 

31,  Moy.  —  Leur  pardonne-t-on  plus  qu'à  moi?  —  Add.  de  88  :  Comme  ceux 
qui  desrobent  les  chenaux,  ie  leur  peins  le  crin  et  la  queue  et  par  fois  ie 
les  eborgne  :  si  le  premier  maistre  s'en  seruoil  à  bestes  d'amble,  ie  les  mets 
au  trot,  et  au  bats  s'ils  seruoyent  à  la  selle. 

31,  Naturalistes.  —  Qui  aimons,  qui  suivons  la  nature,  qui  sommes  parti- 
sans des  choses  naturelles  et  vraies. 
586, 

5,  Perdre.  —  L'auteur  fait  probablement  allusion  ici  aux  sentiments  que 
la  lecture  de  son  livre  avait  inspirés  pour  lui  à  Mademoiselle  de  Gournay. 

8,  Soixante.  —  Var.  de  88  :  septante. 

11,  Espreindre.  —  En  exprimer. 

22,  Deslogeant.  —  Projet  qui  n'a  pas  été  réalisé. 

22,  Parfaict.  —  Var.  de  88  :  patron  admirable,  au  lieu   de   «   exemplaire 

parfaict  ». 
35,  Predicament.  —  Était  de  cette  catégorie. 

37,  Hommes.  —  C.-à-d.  et  est  une  preuve  très  incertaine  de  la  laideur  de 
i'àme. 

588, 

2,  Pied.  —  Add.  de  88  ;  Il  n'est  pas  à  croire  que  cette  dissonance  aduienne 
sans  quelque  accident  qui  a  interrompu  le  cours  ordinaire. 

2,  Sienne.  —  De  sa  laideur. 

4,  Institution.  —  Cicéron,  Tusc,  IV,  37;  De  Fato,  5. 

11,  Phryné.  —  Une  des  courtisanes  les  plus  célèbres  de  la  Grèce  ancienne; 
elle  eut  pour  amant  le  sculpteur  Praxitèle  et  lui  servit  de  modèle  pour  ses 
statues  de  Vénus.  Elle  était  si  riche  qu'elle  offrit,  dit-on,  de  rebâtir  Thèbes 
à  ses  frais,  mais  à  condition  qu'on  placerait  sur  les  murs  cette  inscription  : 
«  Alexandre  a  détruit  Thèbes,  Phryné  l'a  rebâtie  »;  son  offre  fut  refusée. 
—  Accusée  d'impiété  et  défendue  par  Hypéride,  elle  allait  être  condamnée 
quand,  dit  Sextus  Empiricus,  Adv.  Math.,  II,  65,  arrachant  son  vêtement,  la 
poitrine  nue,  elle  se  précipita  aux  pieds  des  juges;  elle  avait  trouvé  pour 
les  gagner  à  sa  cause  un  argument  plus  puissant  que  ceux  de  son  avocat. 


Fc.702  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Athénée,  XIII,  fait,  au  contraire,  honneur  de  cette  idée  à  Hypéride.  Quin- 
TiLiEN,  II,  15,  la  reporte  à  elle-même  et  commente  en  outre  le  fait  de  la 
façon  suivante  :  <■  Ce  n'est  pas  à  la  plaidoirie  d'Hypéride,  tout  admirable 
qu'elle  était,  que  Phryné  dut  son  salut;  mais  à  sa  beauté  dont  elle  acheva 
le  triomphe  en  découvrant  son  sein,  »  voulant  montrer  que  non  seulement 
le  talent  oratoire  et  le  bon  droit  peuvent  faire  avoir  gain  de  cause,  mais 
que  tout  a  le  don  de  persuader  :  l'argent,  la  faveur,  l'autorité  de  celui  qui 
parle,  jusqu'à  la  présence  muette  de  la  vertu,  de  l'infortune  ou  de  la 
beauté.  —  Après  cet  acquittement,  l'Aréopage  rendit  un  décret  qui  défen- 
dait d'exciter  le  moindre  sentiment  de  pitié  chez  les  juges  et  de  juger  un 
accusé,  soit  homme,  soit  femme,  en  sa  présence. 

16,  Pas.  —  Pas  plus  que  le  premier  Scipion  ne  l'a  lui-même  oublié. 

17,  Bon.  —  Dans  le  Jardin  des  racines  grecques  de  Lancelot  si  en  faveur 
dans  les  études  il  y  a  trois  quarts  de  siècle,  on  trouve  :  «  àyoïôo;,  bon, 
brave  à  la  guerre  »  ;  et  cette  indication  est  ainsi  complétée  :  «  prudent, 
excellent,  expertj  propre  à,  utile  »,  mais  il  n'y  est  pas  question  de  beauté. 
Cependant  on  rencontre  quelquefois  dans  les  textes  le  mot  xaXoxaYaôoç, 
«  bel  et  bon  »,  mis  pour  xa).bç  xal  àyaO^;,  d'où  nous  est  venue  cette  même 
expression,  en  usage  en  français,  aujourd'hui  encore,  dans  le  style 
familier. 

19,  Platon.  —  Dans  le  Gorgias. 

20,  Aristote.  —  Politique,  I,  3. 

25,  Fait-il.  —  Diogène  Laerce,  V,  20. 
590, 

8,  Foyter.  —  Fouetter.  —  Et  si  j'étais  chargé  de   punir  les  hommes  je 
châtierais  plus  rudement  les  méchants... 
592, 

6,  Fauorable.  — J'ai  un  visage  avantageux. 

10,  Socrates.  —  S.-ent.  :  qui  était  de  mine  très  ingrate.  V.  III,  586. 

11,  Présence.  —  Prestance.  —  Var.  de  88  :  mon  porl,  au  lieu  de  «  ma 
présence  ».  -  ^ 

25,  Espérons.  —  L'avait  poursuivi  de  très  près. 

28,  Prins.  —  L'éd.  de  88  port.  :  et  desfaicts;  et  aj.  -.ayant  esté  rencontrez  en 
desordre  et  fort  écartez  les  vns  des  autres. 

35,  Enuiée.  —  Add.  de  88  :  e<  nonobstant  ce  vain  interualle  de  guerre  auquel 
lors  nous  estions. 
594, 

31,  Chatouilleux.  —  Ce  guet-apens  se  produisit  en  1588  dans  la  forêt  de 
Villebois,  près  d'Orléans,  alors  que  Montaigne  se  rendait  à  Paris,  proba- 
blement pour  la  réimpression  des  Essais. 

34,  Masquez.  —  L'éd.  de  88  aj.  :  bien  montez  et  bien  armez. 

34,  Argoulets.  —  Arquebusiers,  comme  il  les  nomme  plus  bas.  V.  N.  I,  252. 
596, 

10,  Implorata.  —  On  dit  dans  le  même  sens,  en  français  :  «  M'étant  déjà 
voué  à  tous  les  saints  du  Paradis  ». 

12,  Chef.  —  Add.  de  88  :  non  plus  auec  ses  menasses,  mais. 

19,  Pourpensée.  —  Mûrement  réfléchie;  pourpenser  est  un  augmentatif  de 

penser. 
23,  Non.  —  Add.  de  88  :  (l'essayerois  volontiers  à  mon  tour  quelle  mine  il 

ferait  en  vn  pareil  accident). 

26,  Pareille.  —  Et  me  fit  promettre  de  lui  rendre  la  pareille,  s'il  venait  à  se 
trouver  dans  le  même  cas. 

34,  Droict.  —  A  tort  ou  à  raison;  ou  encore  ici  <■  à  tort  et  à  travers  ». 
598, 

2,  Offenser.  —  Et  je  suis  si  peu  enclin  à  offenser  qui  que  ce  soit... 
4,  Criminelles.  —  Alors  qu'il  était  conseiller  au  parlement. 
6,  Aristote.  —  Diogène  Laerce,  V,  17. 

13,  Trèfles.  —  A  moi  qui  ne  suis  qu'un  valet  de  trèfle  (qu'un  personnage 
de  peu  d'importance),  peut  s'appliquer... 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  XII.        VOL.  III,  PAG.  598.  Fc.703 

15,  Plutarque.  —  Add.  de  88  :  mesme.     ^ 

17,  Mesme.  —  De  ces  deux  mots  cités  par  Plutarque,  l'un  se  trouve  dans  ses 

traités  :  5wr  la  différence  entre  le  flatteur  et  l'ami,  10,  et  De  l'envie  et  de  la 

haine,  3;  l'autre,  dans  la  Vie  de  Lycurgue,  4. 


CHAPITRE  XIII. 

600, 

10,  L'œuf.  —  CicÉRON,  Acad.,  II,  18,  d'où  le  fait  semble  tiré,  le  place  à 
Délos. 

17,  Celuy-là.  —  Justinien  1",  empereur  d'Orient  (527  à  565),  qui  fit  reviser 
toutes  les  constitutions  et  ordonnances  de  ses  prédécesseurs  et  en  forma  le 
code  qui  porte  son  nom,  qui  fut  suivi  des  Pandectes,  des  Institutes  et  des 
Novelles  ;  tous  ces  ouvrages  réunis  constituent  le  Corpus  juris  civilis  (code 
civil). 

602, 

10,  Montaignes.  —  C'était  un  usage  assqz  répandu  au  xiii"  siècle,  dans  les 
républiques  de  Lombardie,  de  confier  à  des  juges  étrangers  l'administra- 
tion de  la  justice;  cet  usage  existait  ailleurs,  notamment  dans  la  petite 
république  de  S'-Marin  en  Italie,  où  il  se  serait  maintenu  jusqu'à  son 
absorption,  en  1870,  par  le  royaume  d'Italie  actuel;  on  le  retrouve  encore 
dans  la  république  d'Andorre  (petit  état  sur  les  confins  de  la  France  et  de 
l'Espagne),  qui  est  administrée  par  deux  viguiers,  nommés  l'un  par  l'évêque 
d'Urgel  (Espagne),  l'autre  par  la  France,  dont  les  jugements,  quand  ils  sont 
frappés  d'appel,  sont  déférés  au  Président  du  tribunal  civil  de  Perpignan. 

11,  Procez.  —  «  Il  est  peu  de  ijations  où  les  lois  criminelles  soient  assez 
bonnes  pour  qu'on  ne  préférât  pas  à  leur  tribunal  celui  d'un  seul  homme 
de  probité  et  de  sens.  ><  Servan. 

18,  Platon.  —  République,  111. 

22,  Testament.  —  Et  en  général,  en  matière  judiciaire  de  quelque  nature 
que  ce  soit.  —  Il  est  actuellement  question  de  la  rendre  plus  compréhensi- 
ble et  aussi  conforme  à  ce  que  l'on  veut  dire,  car  il  faut  réellement  être 
initié  pour  comprendre.  Vous  recevez,  par  exemple,  une  «  assignation  à 
comparaître,  à  trois  jours  francs,  à  dix  heures  du  matin.  Cela  signifie,  ce 
dont  vous  ne  vous  doutiez  probablement  pas,  qu'il  est  inutile  de  vous  déran- 
ger, mais  que  vous  devez  vous  adresser  à  un  avoué  qui  aura  à  se  présenter 
en  votre  lieu  et  place  le  cinquième  jour  à  raidi. 

26,  Artistes.  —  Arrangées  avec  art. 

27,  Primement.  —  Exactement. 

28,  Enfrasquez.  —  Embarrassés,  égarés,  perdus;  de  l'italien  enfrascarsi, 
s'embarrasser  dans  les  branches  des  arbres. 

32,  Vif.  —  De  mercure,  communément  appelé  encore  du  <•  vif-argent  ». 
604, 

8,  Esmiée.  —  Divisée,  émiettée,  du  latin  miltas,  qui  signifie  miettes. 
8,  Doctrina.  —  Ce  sont   bien  les  propres  termes  de  l'auteur  latin,  mais 
pris  dans  un  sens  tout  difl'éront  de  celui  qu'il  leur  a  donné. 
24,  Clïoppent.  —  Bronchent. 

27,  Difficulté.  —  On  dit  en  proverbe  :  «  La  glose  d'Orléans  est  pire  que  le 
texte  ». 

•  Mais  à  quoi  s'attacha  ta  savante  malice? 

Ce  fut  surtout  à  faire  ignorer  la  justice. 

Uans  les  plus  claires  lois,  ton  ambiguïté 

Répandant  son  adroite  et  fine  obscurité, 

Aux  yeux  embarrassés  des  juges  les  plus  sages 

Tout  sens  devint  douteux,  tout  mot  eut  deux  visages. 

Plus  on  crut  pénétrer,  moins  on  fut  éclairci. 

Le  texte  fut  souveut  par  la  glose  obscurci.  •  Boileac. 


Fc.704  ESSAIS  DE  MONTAIGNE, 

606, 

4.  Pice.  —  Proverbe  grec  passé  dans  la  langue  latine.  C'est  aller  s'embar- 
rassant  de  plus  en  plus,  telle  une  souris  dans  de  la  poix  qui  va  s'engluant 
d'autant  plus  qu'elle  fait  plus  d'effort,  se  donne  plus  de  mouvement  pour 

,      se  dépêtrer. 

10,  Estoutferent.  —  Fable  imitée  par  La  Fontaine,  sous  le  titre  de  «  Les  deux 
chiens  et  l'âne  mort  »;  et,  avant  lui,  par  Marie  de  France,  dans  celle  inti- 
tulée '■  Le  loup  qui  prend  la  lune  pour  un  fromage  »,  où  un  loup  voyant  la 
lune  se  refléter  dans  une  mare,  boit  tant  d'eau  de  la  mare  pour  atteindre 
ce  qu'il  croit  être  un  fromage,  qu'il  en  crève  comme  les  chiens  d'Esope. 

11,  Crates.  —  Ou  plutôt  Socrate.  Diogène  Laerce,  II,  22. 
25,  Admiration,  chasse.  —  Var.  de  88  :  double. 

27,  Obliquement.  —  Les  oracles  d'Apollon,  comme  du  reste  tous  les  oracles, 
étaient  toujours  rendus  en  termes  obscurs  et  ambigus,  permettant  diverses 
interprétations  souvent  contradictoires. 
38,  Duierse.  —  Ces  vers  sont  de  La  Boétie,  et  se  trouvent  dans  une  traduc- 
tion de  Roland  le  furieux  faite  à  la  demande  de  Marguerite  de  Caries  qui 
devait  devenir  et  devint  sa  femme. 
608, 

5,  Grain.  —  Que  de  bien  peu.  Métaphore  tirée  du  sorite  du  tas  de  blé.  Le 
sorite  est  un  raisonnement  tendant  à  démontrer  qu'une  quantité  est  par 
elle-même  chose  indéterminée,  c'est-à-dire  qu'elle  est  à  la  fois  petite  et 
grande  :  Qu'on  se  figure  un  tas  de  blé,  qu'on  en  enlève  un  seul  grain,  puis 
un  autre  ensuite,  et  qu'on  continue  de  la  sorte  ;  en  n'enlevant  chaque  fois 
qu'un  grain,  on  ne  détruit  pas  le  tas  et  cependant  il  arrive  finalement  à 
être  réduit  à  un  seul  grain. 

13,  Aristote.  —  Morale  à  Nicomaque,  IV,  13. 

17,  Soy.  —  Mon  sujet  veut  que  je  revienne  souvent  à  parler  de  moi. 
21,  Verhale.  —  Nos  discussions  ne  portent  que  sur  des  mots. 

24,  Substance.  —  Locke  a  démontré  que  nous  n'avons  aucune  idée  claire  et 
précise  de  ce  que  nous  appelons  substance.  V.  son  Essai  philosophique  con- 
cernant l'entendement  humain,  liv.  1,  ch.  4,  §  18;  liv.  Il,  ch.  23,  §  2,  etc. 

29,  Hydra.  —  De  l'hydre  de  Lerne.  Cette  hydre  était,  selon  la  fable,  un  serpent 
monstrueux  à  sept  têtes,  qui  repoussaient  à  mesure  qu'on  les  coupait,  si 
on  ne  les  abattait  toutes  d'un  seul  coup.  La  destruction  de  ce  monstre  fut 
un  des  douze  travaux  d'Hercule  (V.  N.  III,  544  :  Hercules).  La  plupart  des  fic- 
tions mythologiques  recouvrant  une  vérité,  on  pense  que  l'hydre  de  Lerne 
n'était  autre  qu'un  marais  d'où  s'échappaient  des  miasmes  pestilentiels  et 
que  les  habitants  parvinrent  à  dessécher.  Au  figuré,  on  désigne  de  ce  nom 
toute  difficulté  sans  cesse  renaissante  et  Montaigne  en  fait  ici  apphcation 
aux  discussions  auxquelles  prêtent  les  mots. 

29,  Memnon.  —  Ici  et  à  la  ligne  suivante,  il  faut  lire  Menon,  suivant  le  dia- 
logue de  ce  nom  de  Platon.  Cette  erreur  subsiste  également  dans  toutes 
les  éd.  ant.,  comme  aussi  dans  l'ex.  de  Bord. 

34,  Ruchée.  —  «  Qui  ajoute  à  sa  science,  accroît  aussi  son  travail.  »  Ecclé- 
siaste. 
610, 

9,  Ethiques.  —  Morales. 

18,  Justice.  —  «  Montaigne  mérite  vraiment  d'être  compté  parmi  ceux  qui 
ont  contribué  à  l'élaboration  de  nos  lois,  pour  avoir  concouru  au  triomphe 
de.  deux  idées  qui  font  leur  sagesse  et  leur  force  :  la  modération  dans  le 
droit  pénal  et  l'équité  dans  le  droit  privé.  »  Galles,  avocat  général  à  la  cour 
d'Orléans,  18(55. 

29,  luges.  —  Au  nombre  des  progrès  réalisés  par  la  Révolution,  la  publicité 
des  débats  judiciaires  est  sans  contredit  l'un  des  plus  importants.  Elle 
protège  quelque  peu  contre  l'arbitraire  des  juges,  le  sans-gêne,  la  partia- 
lité du  président  à  l'audience,  l'inattention  de  ses  assesseurs,  et  les  dénis 
de  justice  par  trop  flagrants  dans  les  jugements  rendus.  Et  voilà  qu'à  pro- 
pos du  divorce,  on  s'avise  aujourd'hui  de  vouloir  que  le  huis  clos  soit  de 


NOTES.         UV.  III,  CH.  XIII.         VOL.  III,  PAG.   GiO.  Fc.TOo 

règle,  comme  si  toute  afl'aire  de  quelque  nature  qu'elle  soit  ne  pouvait  don- 
ner matière  devant  les  tribunaux  aux  révélations  intimes  les  plus  cruelles, 
aux  scandales  les  plus  éhontés  et  les  moins  attendus  que  l'on  cherche 
de  la  sorte  à  éviter.  C'est  un  inconvénient  regrettable  qui  frappe  à  pre- 
mière vue,  mais  en  y  réfléchissant,  il  n'est  pas  à  mettre  en  parallèle  avec 
ceux,  bien  autrement  préjudiciables,  que  présente  le  huis  clos;  l'ac- 
cepter dans  ce  cas,  c'est  donner  de  l'extension  à  l'abus;  Dreyfus,  lors 
de  son  premier  jugement,  eût-il  été  condamné,  s'il  n'eût  été  jugé  à  huis 
clos  ! 
38,  Accrocher.  —  Retarder,  annuler. 
612, 

1,  Repentance.  —  Non  responsables. 

2,  Consacrez.  —  Sont  sacrifiés,  immolés  aux  formes... 

2,  Autre.  —  C'est  bien  à  Philippe  de  Macédoine,  père  d'Alexandre  le  Grand, 
que  le  fait  se  rapporte.  Plutarque,  en  le  citant,  dit  que  l'individu  que  ce 
roi  venait  de  condamner,  s'étant  aperçu  que  pendant  qu'il  plaidait  sa 
cause,  le  prince  sommeillait,  en  appela  aussitôt  :  «  Et  à  qui?  »  dit  Phi- 
lippe hors  de  lui.  «  A  Philippe  éveillé!  »  Ce  reproche  le  fit  réfléchir  sur  sa 
sentence,  dont  il  reconnut  l'injustice  et  qu'il  répara  de  son  propre  argent. 
Plutarque,  Apophlh.  des  rois. 

9,  Condamné.  —  Le  préjudice  qu'il  avait  causé  au  condamné. 
12,  Crime.  —  Elles  sont  nombreuses  et  de  toutes  les  époques,  par  exemple 
celle  du  chevalier  de  la  Barre  en  1765,  supplicié  à  l'âge  de  19  ans  pour  ne 
pas  s'être  découvert  au  passage  d'une  procession  et  avoir  tenu  des  propos 
anti-religieux. 

12,  Opinions.  —  Plutarque,  Instr.  pour  cettx  qui  manient  affaires  d'État,  21. 

13,  Gros. 

«  Tout  désordre  apparent  est  un  ordre  rée), 
Tout  mal  particulier  un  bien  universel.  »  Pope. 

19,  Cyrenaiques.  —  Diogène  Laerce,  II,  92. 

20,  Tbeodoriens.  —  Diogène  Laerce,  I,  99.  —  Théodore,  surnommé  d'abord 
l'Athée,  ensuite  Théos  (Dieu),  semble  avoir  vécu  en  Egypte  et  à  Cyrène,  du 
temps  des  premiers  successeurs  d'Alexandre  le  Grand.  Il  posait  en  principe 
que  le  sage  se  suffit  à  lui-môme,  que  le  monde  est  sa  patrie,  que  rien  n'est 
honteux  en  soi,  mais  seulement  quant  à  l'opinion  qui  en  a  été  établie  pour 
mettre  un  frein  à  la  multitude;  en  outre,  il  niait  l'existence  des  dieux. 
En  conséquence,  il  considérait  comme  indigne  du  sage  l'amitié,  l'amour 
de  la  patrie  ;  et,  comme  lui  étant  permis  :  le  vol,  l'adultère,  le  sacrilège, 
pourvu  qu'il  choisisse  bien  son  temps. 

26,  Innocence.  —  Plutarque,  Alcibiade,  23.  —  Alcibiade  disait  qu'en  pareil 
cas,  il  ne  s'en  fierait  à  personne,  pas  même  à  sa  mère.  C'est  cette  même 
idée  qu'exprimait  encore,  en  d'autres  termes,  je  ne  sais  quel  Président  de 
cour,  disant  que  si  on  l'accusait  d'avoir  volé  les  tours  de  Notre-Dame  de 
Paris,  il  commencerait  par  prendre  la  fuite  et  gagner  la  frontière. 

27,  Faict.  —  A  même  de  me  récompenser  d'une  bonne  action,  comme  il  a 
pouvoir  de  me  punir  dune  mauvaise. 

29,  Point.  —  Var.  de  88  :  les  autres,  au  lieu  de  :  «  de  ne  faillir  point  ». 
31,  Perte.  —  C'est  la  morale  de  la  fable  de   La  Fontalne,  «  L'huître  et  les 
plaideurs  ». 
614, 

9,  Receu.  —  Ceci  figure  dans  l'éd.  de  88;  c'était  donc  écrit  lorsque,  au  mois 
de  juillet  de  cette  année,  il  fut,  ainsi  qu'il  est  consigné  dans  ses  éphémé- 
'  rides,  par  l'autorité  des  chefs  de  la  Ligue  et  à  la  sollicitation  du  duc  d'El- 
beuf,  en  représailles  de  ce  qu'un  parent  de  ce  duc  était  retenu  pi-isonnier 
par  le  roi  à  Rouen,  enfermé  à  la  Bastille,  où  il  ne  resta  que  quelques  heures, 
ayant  été  presque  aussitôt  remis  en  liberté,  sur  l'intervention,  dit-il,  de  la 
reine-mère. 

essais   de  MONTAIGNE.  —   T.   IV.  45 


Fc.706  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

11,  Atfady.  —  Je  me  languis  tellement  de  la  liberté,  comme  on  dit  dans 
certaines  parties  de  la  France;  j'en  suis  tellement  avide,  tellement  fou. 

12,  Aucunement.  —  En  quelque  sorte,  quelque  peu. 

18,  Loix.  —  Montaigne  parle  ici  de  la  résidence  forcée  et  de  l'interdiction  do 
séjour  des  repris  de  justice,  un  des  abus  de  notre  législation,  qui  de  la 
sorte  ajoute,  pour  les  malheureux  qui  en  sont  frappés,  aux  difficultés  de 
l'existence  et  les  incite  à  poursuivre  dans  la  voie  du  mal.  Elle  ne  fait  que 
changer  le  péril  qu'elle  veut  prévenir  en  les  rejetant  sur  certains  points, 
sur  certaines  professions  où  ils  se  retrouvent  et  s'excitent  réciproquement 
contre  la  société,  et  en  crée  d'autres  non  moins  dangereux  :  beaucoup,  par 
exemple,  se  rejettent  sur  les  travaux  des  ports  et  c'est  en  partie  à  leur  in- 
fluence que  sont  dues  ces  grèves  répétées  qui  en  ce  moment  compromettent 
si  gravement  notre  commerce  mai'itime. 

23,  lustes.  —  ■<  11  est  difficile  de  dire"  au  peuple  que  les  lois  ne  sont  pas 
justes,  car  il  n'obéit  que  parce  qu'il  les  croit  telles  :  il  serait  bon  qu'il  com- 
prît qu'on  ne  leur  obéit  que  parce  qu'elles  sont  lois  et  que  c'est  là  ce  qui 
les  rend  justes.  »  Pascal. 

25,  Sert.  —  Et  cela  leur  suffit.  —  Jubeat  lex,  non  suadeat.  «  La  loi  ordonne, 
elle  ne  persuade  pas,  »  a  dit  le  chancelier  de  l'Hospital. 

26,  Equité.  —  11  est  curieux  de  rapprocher  cette  appréciation  de  ce  que 
pensaient  à  cet  égard  les  révolutionnaires  de  1793.  Déjà  la  Déclaration  des 
droits  de  l'homme  inscrite  en  tête  de  la  Constitution  du  3  septembre  1791 
avait  posé  que  le  but  de  toute  association  poHtique  est  la  conservation  de 
ces  droits,  dont  laliberté,  la  propriété,  la  sûreté,  la  résistance  à  l'oppression, 
qui  sont  naturels  et  imprescriptibles.  —  Le  24  avril  1793,  la  Convention 
discutant  un  projet  nouveau  de  Constitution,  Robespierre  proposait  d'y 
introduire  les  articles  ci-après  :  —  Toute  loi  qui  viole  les  droits  impres- 
criptibles de  l'homme,  est  essentiellement  injuste  et  tyrannique  et  n'est 
point  loi.  —  Tout  acte  contre  la  sûreté  ou  contre  la  propriété  d'un  homme, 
exercé  par  qui  que  ce  soit  même  au  nom  de  la  loi,  hors  des  cas  détermi- 
nés par  elle  et  des  formes  qu'elle  prescrit,  est  arbitraire  et  nul;  le  respect 
même  de  la  loi  défend  de  s'y  soumettre  et,  si  l'on  veut  l'exécuter  par  la 
violence,  il  est  permis  de  le  repousser  par  la  force.  —  La  résistance  à  l'op- 
pression est  la  conséquence  des  autres  droits  de  l'homme  et  du  citoyen. 
—  Lorsque  le  gouvernement  viole  les  droits  du  peuple,  l'insurrection  est 
pour  le  peuple,  et  pour  chaque  portion  du  peuple,  le  plus  sacré  des  droits 
et  le  plus  indispensable  des  devoirs.  —  Quand  la  garantie  sociale  manque 
à  un  citoyen,  il  rentre  dans  le  droit  naturel  de  défendre  lui-même  tous 
ses  droits.  —  Et  le  4  novembre  1848,  la  seconde  République  proclamait  à 
son  tour  qu'il  y  a  des  droits  antérieurs  et  supérieurs  aux  lois  positives.  — 
Cette  légitimité  de  la  résistance  à  des  lois  injustes  a  été  fréquemment  af- 
firmée, notamment  par  Sophocle,  Cicéron,  Victor  Hugo,  Eugène  Pelletan, 
Léon  XIll,  Pie  X. 

28,  Ordinairement.  —  V.  N.  III,  602  :  Procez. 

30,  Doit.  —  ■-  Rien  de  si  fautif  que  ces  lois  qui  redressent  les  fautes;  qui  leur 
obéit  parce  qu'elles  sont  justes,  obéit  à  la  justice  qu'il  imagine,  mais  non 
à  l'essence  de  la  loi.  »  Pascal.  —  Cicéron  n^estimait  pas  davantage  que 
tout  ce  qui  est  légal,  soit  juste;  et  lui  qui  reconnaissait  en  droit  la  souve- 
raineté du  peuple,  n'admettait  pas  que  sa  volonté  fût  légitime  en  tout  ce 
qu'il  prescrit. 

35,  Obseruation.  —  Ne  dirait-on  pas  ceci  écrit  de  nos  jours,  où  la  plupart 
de  nos  lois  actuellement  édictées,  le  sont  par  un  gouvernement  et  des 
chambres  où  le  socialisme  est  en  progrès  constant  et  devant  lequel  s'incli- 
nent autant  par  veulerie  que  par  intérêt  personnel  nombre  de  législateurs, 
rééditant  «  les  crapauds  du  marais  »  de  la  Convention,  qui  ne  sont  inféo- 
dés à  ces  idées  ni  par  leur  origine,  ni  par  leurs  convictions.  Pour  une 
utile,  on  en  compte  dix  qui  ne  le  sont  pas  et  ne  tendent  qu'à  restreindre, 
en  haine  de  la  religion,  de  la  bourgeoisie  et  du  capital,  le  peu  de  liberté 
dont  nous  jouissons.  Telles,  pour  ne  parler  que  des  plus  récentes  :  la  loi  sur 


NOTES.        UV.  m,  CH.  XIII.         VOL.  III,  PAG.  614.  Fc.707 

les  congrégations,  qui  les  a  si  arbitrairement  expulsées;  la  loi  sur  l'en- 
seignement, qui  tend  chaque  jour  de  plus  en  plus  à  la  suppression  des 
écoles  libres;  celles  sur  les  syndicats  et  le  droit  de  grève,  qui,  par  leurs 
exagérations,  ont  allumé  la  guerre  entre  les  patrons  et  ceux  qu'ils  em- 
ploient, et  qui  ont  déjà  produit  tant  de  ruines;  celle  sur  le  repos  heb- 
domadaire, que  l'on  n'arrive  pas  à  appliquer  et  qui,  comme  les  précé- 
dentes, condamne  au  chômage  bien  des  gens  qui  ont  besoin  de  travailler 
et  le  voudraient;  celle  de  la  séparation  de  l'Eglise  et  de  l'Etat,  excellente 
en  principe,  autant  qu'impolitique,  mais  surtout  spoliatrice  au  suprême 
degré,  comme  l'est  celle  contre  les  congrégations;  enfin  la  loi  en  prépa- 
ration sur  le  revenu,  parfaitement  rationnelle  aussi  en  principe,  mais 
inquisitoriale  au  premier  chef  et  qui,  dans  la  réalité,  ne  sera  qu'un  ins- 
trument de  persécution  et  d'iniquité  en  donnant  toute  facilité  de  taxer 
ciiacun  selon  ses  opinions  et  les  sympathies  dont  il  sera  l'objet. 
616, 

5,  Physique.  —  C.-à-d.  c'est  l'unique  science  à  laquelle  je  m'adonne,  à 
l'exclusion  de  toute  autre,  qu'elle  porte  sur  l'étude  des  idées  ou  sur  celle 
des  choses. 

22,  Vie.  —  «  Savoir  ce  qu'il  faut  fuir  et  ce  qu'il  faut  suivre,  voilà  ce  qui 
constitue  le  vrai  sage...  De  même  que  la  nature  nous  a  fournis  de  pieds 
pour  marcher,  de  même  elle  nous  a  munis  de  prudence  pour  nous  con- 
duire. »  Charron. 

34,  Faicte.  —  Diderot,  dans  l'entretien  d'un  père  avec  ses  enfants,  lui  fait 
dire  :  «  Mon  fils,  c'est  un  bon  oreiller  que  celui  delà  raison,  mais  je  trouve 
que  ma  tête  repose  plus  doucement  encore  sur  celui  de  la  religion  et  des 
lois.  » 

34,  Ciceron.  —  L'éd.  de  88  port.  Platon. 
618, 

6,  Populaire.  —  Et  la  vie  d'un  empereur,  aussi  bien  que  celle  d'un  homme 
du  peuple,  est  toujours... 

27,  N'estoit.  —  Add.  de  88  :  que  ie  ne  voy  que  meniir  et. 

34,  Prinsault.  —  D'un  premier  saut. 
620, 

3,  Temple.  —  Apollon,  au  temple  de  Delphes.  V.  N.  III,  482  :  Delphes. 

10,  Subtilité.  —  Platon,  Menon. 

16,  Socrates.  —  Xénophon,  Mémoires  sur  Socrate,  IV,  2,  24. 

26,  Loix.  —  lis  débitent  des  inepties,  du  même  ton,  avec  le  même  sérieux, 
que  s'ils  devisaient  des  lois  ou  des  dogmes  sacrés;  avec  le  style,  le  langage 
d'un  prophète  ou  d'un  législateur. 

27,  Aristarchus.  —  Plutarque,  De  l'Amour  fraternel,  1. 
31,  Exprez.  —  Var.  de  88  :  ordinaires. 

35,  Terre.  —  Antée,  fils  de  Neptune  et  de  la  Terre.  Il  habitait  les  sables  de  la 
Libye;  arrêtait  et  massacrait  tous  les  passants,  parce  qu'il  avait  fait  vœu 
d'élever  un  temple  à  Neptune  avec  des  crânes  humains.  Hercule  le  terrassa 
trois  fois,  mais  en  vain  :  la  Terre,  sa  mère,  ranimait  ses  forces,  chaque  fois 
qu'il  la  touchait;  s'en  étant  aperçu,  le  héros  le  souleva  en  l'air  etl'étouffa. 
Myth. 

45,  Ignorance.  —  Var.  de  88  :  beslise. 
622, 

2,  Maistres  —  Var.  de  88  :  /e  plus  sage  qui  fat  oncques,  au  iesmoignage  des 
dieux  et  des  hommes,  au  lieu  de  :  "  le  maistre  des  maistres  ». 

3,  Antisthenes.  —  Diogène  Laerce,  IV,  2. 

11,  Conditions.  —  Les  qualités  bonnes  et  mauvaises. 

03,  Numerus.  —  Virgile  parle  ici  des  raisins,  dont  les  espèces  sont  si  nom- 
breuses, dit-il,  qu'on  ne  saurait  ni  les  nommer,  ni  même  les  compter. 
30,  Basses.  —  Var.  de  88  :  viles. 
624, 

3,  Perseus.  —  Tite-Live,  XLI,  20. 

4,  Essorées.  —  .Si  libres  en  leur  essor.  —  Essorer  est  un  terme  de  faucon- 


Pc.708  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

nerie  qui  se  dit   du  faucon  lorsque,  prenant  son  vol,  grisé  par  la  liberté 
qu'on  lui  rend,  il  y  met  tant   d'impétuosité,  qu'il  se  laisse  entraîner  au 
point  qu'il  a  peine  à  revenir. 
7,  Autre.  —  Cet  autre,  c'est  probablement  l'auteur  lui-même. 

11,  Simple.  —  Nulle  faculté  exclusivement  bonne  ou  exclusivement  mau- 
vaise, de  sorte  que... 

16,  Morsure.  —  Add.  de  88  :  et  sans  amerlurrie. 

20,  Platon.  —  Dans  le  Gorgias. 

33,  Flatteurs. 

•  Délestables  flatteurs,  présent  le  plus  luneste 
Que  puisse  faire  aux  rois  la  colère  céleste. 

^Racise,  Phèdre.) 

«  Les  flatteurs  du  peuple  sont  aussi  lunestes  à  la  société,  que  le  sont  les 
flatteurs  des  rois.  »  De  Frauexdorf. 

35,  Corrompu.  —  Var.  de  88  :  trahy  et  pipé. 

35,  Canaille.  —  Var.  de  88  :  race. 

35,  Comment.  —  Comment  pourrions-nous  échapper  à  semblable  danger, 
puisque  Alexandre... 
626, 

1,  Nom.  —  Ce  contrôle  de  ses  actions  serait  une  charge  de  la  maison  du 
prince  ou  du  maître,  à  laquelle  ne  serait  attachée  aucune  qualification 
officielle.  , 

10,  Forme.  —  Montaigne  blâme  ici  les  remontrances  adressées  aux  rois  du 
haut  de  la  chaire,  par  les  prédicateurs,  assez  fréquentes  à  cette  époque  où 
la  Sainte  Ligue  était  en  lutte  ouverte  contre  la  royauté;  le  fait  suivant 
donne  une  idée  des  écarts  de  parole  auxquels  ils  s'abandonnaient  parfois  : 
A  l'occasion  d'une  de  ces  orgies  scandaleuses  par  lesquelles  se  terminaient 
le  plus  souvent  les  exercices  religieux  de  la  confrérie  des  pénitents  qu'avait 
organisée  Henri  111,  à  la  cour  même,  et  auxquels  lui-même  participait,  un 
prédicateur  fameux,  du  nom  de  Poncet,  dit  un  jour  en  chaire  :  «  J'ai 
été  averti  de  bon  lieu,  qu'hier  au  soir,  qui  était  le  vendredi  de  leurs  pro- 
cessions, la  broche  tournait  pour  ces  gros  pénitents;  et  qu'après  avoir 
mangé  le  gras  chapon,  ils  eurent  pour  collation  de  nuit  le  petit  tendron 
qu'on  leur  tenait  tout  prêt.  Ah!  malheureux  hypocrites,  vous  vous  mo- 
quez donc  de  Dieu,  sous  le  masque,  et  portez  par  contenance  un  fouet  à 
votre  ceinture?  Ce  n'est  pas  là,  de  par  Dieu,  où  il  faudrait  le  porter;  c'est 
sur  votre  dos  et  sur  vos  épaules  et  vous  en  étriller  très  fort,  il  n'y  a  pas  un 
de  vous  qui  ne  l'ait  bien  gagné.  » 

29,  Route.  —  Tout  ce  qui  pourrait  les  faire  changer  de  conduite  et  de  réso- 
lution. 

31,  Interest.  —  Sans  détriment  pour... 

32,  Qui.  —  Si  on  les  en  eût.  —  Ce  sont  les  journaux  qui,  dans  nos  sociétés 
modernes,  jouent  ce  rôle  de  conseiller  avertisseur,  mais  il  faut,  pour  que  le 
remède  ne  soit  pas  pire  que  le  mal,  qu'ils  soient  libres  et  sincères,  ce  qui 
est  rare  et  difficile  à  discerner,  et  que  les  gouvernants  sachent  et  aient 
possibilité  de  profiter  de  ces  avertissements. 

33,  Bon.  —  Et  cela  leur  réussit. 
35,  Essay,  —  Tacite,  Hisl.,  1,  15. 

38,  Vie.  —  Des  expériences  morales  et  phjsiques  auxquelles  je  me  suis  livré. 
—  Explication  probable  du  titre  donné  par  Montaigne  à  son  ouvrage.  V.  N. 
I,  titre  :  Essais. 
628, 

2,  Contrepoil.  —  C.-à-d.  ce  registre  de  ma  vie  peut  être  un  assez  bon 
guide  pour  régler  la  santé  de  l'âme,  pourvu  qu'on  prenne  la  peinture  que 
je  fais  ici  de  mes  mœurs,  non  comme  un  modèle  à  imiter,  mais  au  con- 
traire comme  exemple  à  éviter. 


NOTES.         LIV.  m,  CH.  XIII.        VOL.  III,  PAG.  628.         Fc.709 

«  Des  défauts  du  prochain  sachons  donc  profiter. 
Il  n'est  guère  moins  nécessaire 
De  voir  ce  qu'il  faut  éviter 
Que  de  savoir  ce  qu'il  faut  faire.  » 

(M"'"  Deshodlières.) 

8,  Médecine.  —  Tacite,  Ann.,  VI,  46,  dit  que  Tibère  croyait  peu  à  l'art  des 
médecins  et  plaisantait  souvent  ceux  qui,  passé  trente  ans,  avaient  besoin 
que  d'autres  leur  apprissent  ce  qui  était  nuisible  ou  contraire  à  leur  tem- 
pérament; Suétone  ajoute  que  lui-même,  dès  cet  âge,  cessa  de  les  consulter; 
et  Plutarqle,  qu'il  avait  coutume  de  dire  qu'un  homme  do  soixante  ans 
mérite  qu'on  se  moque  de  lui,  quand  il  tend  la  main  à  un  médecin  pour 
se  faire  tâter  le  pouls. 
■  13,  Mauuais.  —  Xénophon,  Mémoires  sur  Socrate,  IV,  7,  9. 
15,  Platon.  —  République,  III. 

36,  Dire.  —  Add.  de  88  :  à  les  voir  et  ceux  qui  se  gouuernent  par  eux. 
38,  Eschançon.  —  C.-à-d.  comme  si   j'avais  été  son  échanson,  comme   si 
j'avais  été  attaché  au  service  personnel  de  cet  art  de  la  médecine;  ou  en- 
core :  à  qui  en  voudra  goûter,  en  ayant  fait  l'essai,  je  m'y  connais  et  suis 
à  même  de  lui  servir  d'échanson. 
630, 

5,  Destourbier.  —  Sans  trouble. 
19,  Auguste.  —  Augsbourg,  ville  de  Bavière;  Montaigne   y  passa  en    1580 

lorsqu'il  fit  son  voyage  en  Italie. 
33,  Seneque.  —  Epist.  90. 

33,  Cettuy-ci.  —  L'Allemand  dont  il  a  été  question  plus  haut. 
40,  Euenus.  —  Plutarque,  Questions  platoniques,  8. 
632, 

2,  Bas.  —  On  dit  que  le  vin  est  «  au  bas  »,  quand,  touchant  à  sa  fm,  le 
tonneau  est  presque  vide;  le  vin  qu'on  en  soutire,  acquiert  alors  un  goût 
plus  prononcé  en  raison  de  son  contact  plus  immédiat  avec  la  lie. 

22,  Plus.  —  Comme  s'il  était  préférable,  plus  probant.  L'éd.  de  88  porte  : 
comme  s'il  estait  plus  noble. 

M,  Lybie.  —  Diogène  Laerce,  Pyrrhus,  IV,  81.  —  Athénée  parle  également 
d'un  certain  Magon,  de  Carthage,  qui  trois  fois  avait  traversé  ce  désert, 
vivant  uniquement  de  farine  et  sans  boire. 
634, 

1,  Lisbonne.  —  La  distance  entre  ces  deux  villes  est  d'environ  650  kil.  — 
Le  gentilhomme  en  question  était  le  marquis  de  Pisani,  ambassadeur  de 
France  en  Espagne,  puis  à  Rome. 

10,  Tabut.  —  Vacarme. 

11,  Seneque.  —  Dans  sa  Lettre  56*. 

18,  Socrates.  —  Diogène  Laerce,  II,  36. 

21,  L'eau.  —  Des  norias.  Ces  appareils  composés  jadis  de  pots  en  terre, 
aujourd'hui  de  godets  articulés,  formant  dans  l'un  et  l'autre  cas  une 
chaîne  sans  fin,  montée  sur  une  roue  que  meut  un  manège  actionné 
le  plus  souvent  par  un  cheval,  sont  employés  en  grand  nombre,  de  tout 
temps  et  avec  plus  ou  moins  de  perfectionnements,  dans  le  midi  de 
l'Europe. 

23,  Seneque.  —  Epist.  108. 

24,  Sextius.  —  11  estimait  qu'il  existe  assez  d'aliments  pour  l'homme,  sans 
qu'il  se  nourrisse  d'êtres  vivants  qu'il  tue  à  cet  effet,  ce  qui  développe  en 
lui  son  penchant  à  la  cruauté;  en  outre,  selon  lui,  la  variété  des  mets 
serait  contraire  à  la  santé.  —  Ce  même  Sextius  avait  refusé  la  dignité  de 
sénateur  que  César  lui  offrait,  disant  que  ce  qui  se  donnait  ainsi,  pouvait 
de  même  se  retirer. 

29,  Loudiers,  —  Couvertures  ou  matelas  suivant  leur  épaisseur,  constitués 
par  une  enveloppe  remplie  de  laine,  de  bourre,  de  crin,  parfois  de  duvet 
et  piquée,  servant  à  garnir  les  lits. 

29,  Enîondrent.  —  Qui  enfoncent  sous  le  poids  du  corps. 


Fc.710  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

636, 


2,  Voluptez. 


«  Les  gueux,  les  gueux 
Sont  les  gens  heureux.  »  Béranger. 


«  Car  en  quelque  façon  les  malheurs  sont  propices, 

Et  les  gueux,  en  gueusant,  trouvent  mille  délices.  •  Béranger. 

3,  Politiques.  —  Les  gueux,  nom  générique  donné  à  l'ensemble  des  misé- 
rables, infirmes,  mendiants,  voleurs  et  tous  autres  composant  les  bas- 
fonds  de  la  Société  ou  en  rupture  de  ban  avec  elle,  formaient  jadis  à 
Paris  une  véritable  corporation,  qui  avait  une  hiérarchie  véritable.  Au 
xvu*  siècle,  leur  repaire  principal,  appelé  la  cour  des  Miracles,  était 
établi  près  de  l'église  S.-Eustache;  les  rues  de  la  Grande-Truanderie ,  de 
Vide-Gousset  lui  doivent  leurs  noms;  c'était  un  quartier  formé  d'un 
dédale  de  ruelles  infectes  et  tortueuses  où  gi-ouillait  pêle-mêle  une  popu- 
lation hétéroclite  et  où  de  fait  régnait  le  droit  d'asile,  un  peu  par  tolé- 
rance, un  peu  par  impuissance;  le  guet  n'y  apparaissait  jamais  qu'à  con- 
trecœur et  presque  toujours  ses  recherches  étaient  vaines;  un  roi  électif 
y  gouvernait;  cela  dura  des  siècles.  En  1656  le  nombre  de  ces  individus 
s'élevait  à  40.000  ;  quand  on  se  décida  à  mettre  fin  à  cet  état  de  choses, 
les  infirmes  furent  recueillis  à  l'hôpital  général  qui  venait  d'être  achevé, 
et  les  autres,  de  gré  ou  de  force,  durent  se  disperser.  —  En  l'an  de  grâce 
1907  nous  en  sommes  à  peu  près  revenus,  à  Paris,  à  ce  qui  s'y  passait  il  y 
a  trois  siècles  :  les  Gueux  sont  devenus  les  Apaches,  comme  ils  se  sont 
baptisés  eux-mêmes;  comme  eux  ils  ont  une  organisation,  forment  des 
bandes  qui  ont  des  chefs  auxquels  ils  obéissent  aveuglément;  pour  eux  la 
vie  du  prochain  ne  compte  pas  ;  la  nuit,  ils  sont  les  maîtres  de  Paris  et  de 
sa  banlieue,  sans  pour  cela  être  toujours  inactifs  de  jour.  La  police  re- 
doute de  se  commettre  avec  eux  et  les  évite  autant  qu'elle  peut  le  faire 
décemment;  le  parquet  les  relâche  le  plus  souvent,  quand  on  n'a  pu  faire 
autrement  que  de  les  arrêter,  et  les  tribunaux,  quand  par  extraordinaire 
ils  ont  à  les  juger,  se  montrent  à  leur  égard  d'une  faiblesse  qui  tient  en 
partie  à  des  raisons  budgétaires  et  n'a  d'égale  que  le  peu  de  rigueur  des 
moyens  de  répression  que  nos  lois  édictent  contre  les  malfaiteurs  et  qu'on 
a  chaque  jour  tendance  à  rendre  plus  anodins,  alors  que  déjà  ils  sont  sans 
efficacité  sur  eux. 

5,  Sages.  —  Pythagore,  dans  Stobée,  Serm.  29.  Cette  maxime  est  ainsi 
formulée  dans  Plutarque  ,  De  l'Exil,  7  :  «  Choisis  la  voie  qui  est  la 
meilleure,  l'accoutumance  te  la  rendra  facile  et  plaisante.  » 

26,  Pbilopœmen.  —  Ou  plutôt,  «  comme  on  disait  à  Philopœmen  ».  Plu- 
tarque, Phil.,  I. 

34,  lour.  —  C-à-d.  à  la  belle  étoile,  à  l'air  du  temps,  comme  il  se  dit  en 
style  familier. 
638, 

11,  Marius.  —  Plutarque,  Comment  il  faut  refréner  la  colère,  13. 

15,  Transparante.  —  On  voit  communément  des  gens  auxquels  il  répugne 
de  boire  du  lait  dans  des  récipients  à  parois  transparentes,  des  verres  par 
exemple;  pour  qu'ils  soient  à  l'aise,  il  faut  qu'ils  le  boivent  dans  des  tasses 
ou  des  bols.  Nombre  d'autres  ne  peuvent  souffrir  la  vaisselle  en  métal, 
aussi  bien  la  vaisselle  plate  que  celle  en  étain,  et  toutes  deux  ont  à  peu 
près  disparu,  celle-ci  devant  la  faïence,  celle-là  devant  la  porcelaine  :  affaire 
de  goût  autant  que  de  prix. 

21,  Serein.  —  Vapeur  humide  et  froide  qui  se  dépose,  en  été,  après  le 
coucher  du  soleil. 

33,  Sentiment.  —  Non  pas  tant  son  opinion  que  sa  sensation. 

34,  Imagination.  —  C.-à-d.  :  Quoi!  serait-il  donc  vrai  que  le  doute  même 
et  le  soin  que  nous  mettons  à  nous  enquérir  de  ce  qui  est  vrai  ou  ne  l'est 
pas,  frappe  notre  imagination,  et...  —  L'éd.  de  88  port.  :  inquisition  de 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  XIII.         VOL.  III,  PAG.  638.  Fc.71l 

l'imagination  nous  frappe,  au  lieu  de  :  «  l'inquisition  (la  recherche)  frappe 
nostre  imagination  ». 
37,  Chartre.  —  Se  sont  mis  à  des  régimes  particuliers.  —  D'autres  tradui- 
sent :  sont  tombés  dans  le  marasme;  chartre  désignant  jadis,  paraît-il, 
une  maladie  de  langueur  amenant  le  dépérissement. 
640, 

3,  Haut  mal.  —  César,  au  dire  de  Plutarque,  César,  5,  était  sujet  à  des 
attaques  d'épilepsie,  dont  il  avait  ressenti  les  premiers  accès  en  Espagne, 
alors  qu'il  y  était  comme  préteur. 

7,  Aussi.  —  Add.  de  88  :  les  autres  ont  pour  leur  part  la  discrétion  et  la 
suffisance,  moy  Vingenuité  et  la  liberté. 

8,  Obscure.  —  Var.  de  88  :  cachée. 

34,  Est.  —  Les  premiers  mots  :  An  viuere  tanti  est,  ne  se  trouvent  pas  dans 
le  texte  de  Pseudo-Gallus. 
642, 

10,  Plaisir.  —  Voltaire  a  dit  dans  le  même  sens  : 

«  Et  puisqu'il  faut  que  nous  soyons  damnés, 
Damnons-nous  donc  pour  des  fautes  aimables.  • 

28,  Vices.  —  Ovide  se  vante  même  de  quelque  chose  de  plus. 

30,  Ans.  —  En  quel  âge  tendre;  combien  j'étais  jeune  encore,  quand... 

31,  Rencontre.  —  Ce  fut  bien  un  hasard. 
33,  Qaiartilla.  —  Pétrone,  25. 

644, 

5,  Résolue.  —  Si  nettement  fondé  sur  des  principes  précis  et  déterminés. 

7,  Fernel.  —  Commença  par  s'adonner  aux  mathématiques  et  à  l'astro- 
nomie; se  livra  ensuite  à  la  médecine  et  acquit  une  telle  célébrité  que 
Henri  II  lui  donna  le  titre  de  son  premier  médecin;  a  écrit  de  nombreux 
ouvrages  qui  réunissent  l'élégance  du  style  et  la  solidité  de  la  doctrine. 

8,  L'Escale.  —  Prétendait  descendre  de  la  famille  délia  Scala,  d'où  le  nom 
qu'il  prit.  La  mode  étant  alors  que  tout  savant  se  respectant,  donnât  à  son 
nom  un  air  latin  ou  grec.  Après  avoir  beaucoup  voyagé,  il  se  fixa  en 
France;  fut,  comme  médecin,  d'une  science  très  réelle;  visait  au  i-enom 
d'homme  universel  et  elTectivement  savait  de  tout  et  a  beaucoup  écrit  en 
tous  genres,  mais  c'est  principalement  comme  grammairien  qu'il  mérite 
sa  célébrité. 

23,  Diuertir.  —  Que  je  m'écarte  un  moment  de  mon  sujet. 

33,  Quelqu'vn.  —  Carnéade.  Diogène  Laerce,  Vie  de  ce  philosophe.  IV,  63. 
646, 

7,  Desmarcbe.  —  Se  recule,  se  retire;  en  latin  pedem  referre,  porter  le  pied 

en  arrière. 
13,  Jours.  —  Et  leur  durée  déterminée. 
21,  Tenaces.  —  L'éd.  de  88  port.  :  tenants. 
25,  Cul.  —  L'éd.  de  88  dit  plus  décemment  coslé. 
25,  Vague.  —  Var.  de  88  :  patron  libre,  au  lieu  de  «  mirouer  vague  ». 
648, 

11,  Platon.  —  République,  III. 

13,  Imbecille.  —  Affaibli  par  l'âge. 
17,  Sçauroit.  --  Add.  de  88  :  plus. 

32,  Ctesiphon.  —  Plutarque,  Comment  il  faut  refréner  la  colère,  8. 
32,  Faire.  —  Lutter,  se  battre. 

34,  Auantageux.  —  Ces  gens -là,  les  médecins,  sont  hautains,  impérieux, 
altiers. 

37,  Troigne.  —  Var.  de  88  :  contenance;  le  changement  n'est  pas  flatteur. 
6S0, 

3,  Pipper.  —  Et  tromper,  pour  qui  le  peut. 

20,  Eringium.  —  Appelé  aussi  «  panicaut  »  ou  «  chardon  roland  •;  plante 
dont  la  racine  est  apéritive. 


Fc.712  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

20,  Herbe  du  Turc.  —  Ou   -  turquette  »,  nom   vulgaire  de  la  herniaire, 
plante  astringente  à  laquelle  on  attribuait  la  propriété  de  guérir  la  hernie. 
25,  Profluuion.  —  Écoulement  ;  du  latin  profluvium,  qui  a  même  significa- 
tion. 
29,  Dit-il.  —  Dit  mon  esprit. 
36,  Ainsin.  —  Qui,  d'une  manière  ou  d'une  autre. 
652, 

2,  Discours.  —  Ta  raison. 

11,  Pauses.  —  Plaisantant,  riant  de  temps  en  temps. 

11,  Gens.  —  Var.   de  88  :  raillant  à  pauses  auec  les  dames,  au  lieu   de   : 
«  bouffonant...  tes  gens  ». 
654, 

5,  Paume.  —  Tu  lui  donnes  la  main... 

9,  Inopinément.  —  C.-à-d.  on  t'aura,  avec  ta  sécurité  et  ta  confiance,  fait 
passer  un  matin  de  vie  à  trépas.  —  Passer  l'eau,  c'est  passer  dans  l'autre 
monde,  par  allusion  aux  idées  anciennement  en  cours  chez  les  Grecs  que 
les  âmes  des  morts,  pour  se  rendre  au.x  Enfers,  passaient  l'Achéron,  trans- 
portées dans  la  barque  à  Caron.  V.  N.  III,  516  :  Acheron. 

18,  Sybillines.  —  Une  vieille  femme  proposa  un  jour  à  Tarquin  le  Superbe 
(vers  l'an  510)  d'acheter  neuf  livres  qu'elle  lui  présentait  ;  rebuté  par  le 
prix  qu'elle  en  voulait,  il  refusa.  Elle  en  jeta  trois  au  feu,  et  renouvela 
son  offre  de  vente,  demandant  le  même  prix  des  six  autres;  nouveau  re- 
fus, à  la  suite  duquel  elle  en  jeta  à  nouveau  trois  au  feu.  Tarquin  lui 
demanda  alors  ce  qu'elle  voulait  de  ceux  qui  lui  restaient  :  «  Autant  que 
des  neuf,  »  répondit-elle.  Sa  fermeté  fit  juger  à  Tarquin  que  ces  livres 
devaient  être  d'une  e.xtréme  importance  et  il  en  donna  le  prix  exigé. 
C'étaient  les  livres  sibyllins  contenant  l'avenir  de  Rome  qu'était  venue  lui 
offrir  la  sibylle  de  Cumes.  Ces  livres  furent  déposés  au  Capitole  qui  venait 
d'être  achevé  ;  ils  étaient  consultés  dans  les  grandes  circonstances  et  brû- 
lèrent en  62,  lors  de  l'incendie  de  cet  édifice:  on  chercha  aussitôt  à  les 
reconstituer,  mais  le  peu  d'authenticité  d'un  grand  nombre  des  prédic- 
tions ainsi  recueillies  firent  qu'ils  tombèrent  dans  le  discrédit. 

20,  Expérience.  —  C'est  le  recueil  des  feuillets  composant  son  journal  de 
voyage  en  1580-81  ;  on  s'aperçoit  aisément  en  les  parcourant  qu'il  ne  les 
avait  dictés  ou  écrits  que  pour  lui-même. 

28,  Vn  aage.  —  Var.  de  88  :  quarante  ans. 

29,  Vn  autre.  —  Var.  de  88  :  quatorze. 
656, 

8,  Contrecarre.  —  Opposition. 

9,  Vertu.  —  Ce  sentiment  est  expressément  combattu  par  Plutarque,  dans 
le  traité  Des  communes  conceptions  contre  les  Stoïques,  10  et  suivants. 

16,  Tours.  —  Si  bien  que  tour  à  tour... 

18,  Fable.  —  Platon,  Phédon. 
658, 

24,  Coulpe.  —  C'est  sa  faute. 

35,  Cicero.  —  Comme  Cicéron  tâche  d'adoucir  et  d'amuser  le  mal  de  sa 
vieillesse  (dans  son  hvre  De  Senectute),  j'essaie  d'endormir... 
660, 

1,  Espreignent.  —  Expriment,  tirent,  font  sortir. 
20,  Corps.  —  Sans  que  le  corps  souffre  réellement. 

40,  Heures.  —  A  cette  époque,  on  dînait  ordinairement  à  onze  heures  du 
matin  et  soupait  à  six  heures  du  soir.  V.  N.  III,  432  :  Partir. 
662, 

2,  Platon.  —  DiOGÈNE  Laerce,  Platon,  III,  39;  Platon,  Lois,  VII,  13. 

6,  Scipion.  —  Plutarque,  S'il  est  requis  qu'un  prince  soit  savant,  6. 

30,  Pays.  —  La  profession  militaire  est  aujourd'hui  ce  qu'elle  était  du  tenips 
de  Montaigne,  ce  qu'elle  a  été  et  ce  qu'elle  sera  de  tous  temps,  la  plus  belle 
et  la  plus  noble  de  toutes,  parce  que  son  idéal  est  la  gloire  et  l'intérêt  de 
la  patrie,  sa  vertu  essentielle  l'abnégation  et  qu'elle  a  pour  base  la  discipline  • 


NOTES.        LIV.  m,  CH.  XIII.        VOL.  III,  PAG.  662.         Fc.7i3 

Quoique  exclue  avec  juste  raison  de  la  politique  et,  quoi  qu'en  disent  ses 
ennemis,  n'en  taisant  pas,  quand  le  Gouvernement  lui-même  ne  l'y  incite 
pas,  celle-ci  n'en  réagit  pas  moins  sur  elle,  parce  qu'elle  émane  de  la  Nation, 
qu'elle  participe  de  sa  vie  et  ressent  le  contre-coup  des  passions  qui  l'agitent. 
En  ce  moment  où  les  théories  les  plus  subversives  ont  accès  dans  les  sphères 
gouvernementales  et  vont  gagnant  de  jour  en  jour,  l'armée,  il  faut  en  con- 
venir, traverse  une  phase  difficile;  ses  ennemis,  et  elle  n'en  manque  pas  : 
les  intellectuels  qui  la  jalousent,  les  gens  de  désordre  auxquels  elle  fait 
obstacle,  jusqu'aux  pouvoirs  publics  qui  tout  en  la  cajolant,  l'exaltant, 
l'ont  en  suspicion,  s'efforcent  à  qui  mieux  mieux  de  l'affaiblir;  seul  le  pays, 
sans  arrière-pensée,  lui  demeure  sincèrement  attaché.  Mais  le  mal  fait  son 
œuvre,  l'antimilitarisme  étale  ses  idées  au  grand  jour  et  fait  de  la  propa- 
gande, on  y  fomente  les  rivalités,  favorise  l'intrigue,  ses  institutions  les  plus 
tutélaires  sont  battues  en  brèche,  ses  garanties  foulées  aux  pieds,  on  la 
dégrade  en  en  usant  pour  des  œuvres  de  police,  on  en  abuse  en  la  contrai- 
gnant à  subir  sans  riposter  les  injures  et  les  coups  de  ceux  contre  lesquels 
on  l'emploie,  on  laisse  dire  à  un  ancien  ministre  sorti  de  ses  rangs,  qui 
cinq  ans  durant  a  travaillé  à  sa  désorganisation,  qu'elle  est  en  révolte  perma- 
nente contre  les  idées  du  jour,  si  bien  qu'on  en  est  arrivé  à  ce  que  les 
caractères  y  sont  diminués  au  point  que  ce  système  d'illégalité  et  d'arbi- 
traire dicté  par  la  haine  des  uns,  la  crainte  et  la  faiblesse  des  autres,  ne 
soulève  que  de  bien  faibles  protestations  émanant  de  ceux  qui  en  sont 
directement  atteints  ;  quant  à  ses  grands  chefs,  qui  pourraient  être  frappés 
mais  dont  la  voix  serait  entendue  et  dont  le  devoir  serait  de  parler,  à  peu 
d'exceptions  près,  par  peur  de  se  compromettre,  ils  se  taisent  et  se  bornent 
à  gémir. 

36,  Honneur.  —  Adcf.  de  88  :  et  noblesse. 
664, 

9,  Asseure.  —  Donne  de  l'assurance,  enhardit. 

13,  Galleux.  —  La  gale  était  alors  une  affection  très  répandue,  dont  la  cause 
était  inconnue  et  dont  on  ne  guérissait  pas  aisément.  Aujourd'hui  elle  se 
contracte  beaucoup  moins;  on  sait  qu'elle  est,  due  à  un  animalcule  qui 
s'introduit  sous  l'épiderme,  y  chemine  et  y  pullule,  et  en  vingt-quatre  heures 
on  s'en  débarrasse. 

21,  Pruantes.  —  Sujettes  à  des  démangeaisons;  expression  gasconne. 

21,  Sens.  —  Add.  de  88  :  corporels. 

24,  L'aage.  —  Var.  de  l'ex.  de  Bord.  :  tantost  de  six  ans,  le  cinquantième. 

28,  leunesse.  —  Il  y  a  peu  à  dire  de  ma  santé  au  temps  de  ma  jeunesse  qui 
n'a  guère  connu  la  douleur.  —  Indolence  est  employé  ici  conformément  à 
son  étymologie  (m  privatif,  et  dolor,  douleur);  son  sens  aujourd'hui  est 
tout,  autre. 
666, 

12,  Température.  —  Modération  (de  son  âme). 

16,  Non.  —  .Von  seulement,  comme  le  porte  l'éd.  de  88. 

21,  Tient.  —  Add.  de  88  :  aux  talons. 

22,  Guttur.  —  Le  goitre  est  une  tumeur  spongieuse,  susceptible  de  devenir 
très  volumineuse,  qui  vient  à  la  gorge;  elle  est  très  fréquente  dans  certaines 
vallées  des  Alpes. 

35,  Platon.  —  Dans  le  Timée. 

30,  Histoires.  —  Hérodote,  IV,  181;  Pomponius  Mei.a,  I,  8. 
668, 

3,  Propos.  —  CicÉRON,  De  Divin.,  11,  58. 

6,  Songeant.  —  Galien  dit  qu'ayant  ouï  dire  qu'il  arrivait  à  certaines  gens 
de  marcher  tout  endormis,  il  n'en  avait  rien  cru,  jusqu'à  ce  qu'ayant  eu  à 
voyager  à  pied  toute  une  nuit,  il  fut  forcé  de  le  croire,  par  l'expérience 
qu'il  en  fit  lui-même.  —  Le  fait  est  fréquent  chez  le  soldat,  dans  les 
marches  de  nuit. 

7,  Maison.  —  Diouène  Laerce,  Pyrrhon,  IX,  82. 


Fc.7i4  ESSAIS  DE  MOiNTAlGiNE. 

11,  Fauorinus.  —  Ou  plutôt  ce  qu'il  condamne,  ainsi  qu'il  résulte  d'un 
passage  d'AuLU-GELLE,  Nuits  ait.,  XV,  8. 

30.  Faict.  —  C.-à-d.  ne  pas  faire  bonne  chère  avec  des  mets  dont  les  autres 
se  délectent... 
670, 

1,  Galères.  —  Ce  parent  devait  être  vraisemblablement  officier  du  corps  des 
galères  du  roi,  lequel,  en  1748,  a  été  réuni  à  celui  de  la  marine. 
5,  Village.  —  Au  village  de  Papessus,  agglomération  de  quelques  maisons 
à  environ  3  kil.  N.  du  manoir  paternel,  suivant  une  tradition  locale. 

19,  Attacher.  —  C'est  probablement  en  mémoire  de  ce  parrain  inconnu  qu'il 
reçut  le  prénom  de  Michel;  c'était  parfois  l'usage  de  donner  des  gens  de 
peu  pour  parrains  à  de  jeunes  nobles,  afin  de  leur  enseigner  à  ne  pas 
rougir  plus  tard  de  leurs  inférieurs.  Un  arrière-petit-fils  de  Montaigne, 
Charles-François  de  Lur-Saluces,  fut,  comme  son  bisaïeul,  tenu  sur  les  fonts 
baptismaux  par  des  pauvi-es;  il  en  a  été  de  même  un  siècle  plus  tard  de 
Montaigne  en  Guyenne,  comme  de  Buffon  en  Bourgogne,  qui  eurent  pour 
parrains  des  mendiants  de  la  paroisse,  dont  les  prénoms  leur  furent  donnés, 

.    «  afin  que  toute  leur  vie  ils  se  rappelassent  que  les  pauvres  sont  frères  ». 

BONNEFON. 

25,  Cbelonis.  —  Léonidas  II,  son  père,  roi  de  Sparte  concurremment  avec 
Agis  III,  était  poursuivi  et  contraint  de  quitter  Sparte  et  remplacé  sur  le 
trône  par  son  gendre  Cléombrote  parce  qu'il  s'opposait  aux  réformes  entre- 
prises par  Agis  pour  mettre  fin  aux  abus  qui  s'y  étaient  introduits  et  la 
ramener  à  l'austérité  de  Lycurgue  (243);  au  bout  d'un  certain  temps, 
les  partisans  de  Léonidas  reprirent  le  dessus  (239),  Agis  fut  mis  à  mort 
et  Cléombrote  mari  de  Chélonis  détrôné  dut  à  son  tour  prendre  le  chemin 
de  l'exil.  —  Le  récit  des  faits  de  cette  généreuse  princesse  est  à  lire  dans 
Plutarque,  Agis  et  Cléomènes,  5. 
34,  Flaminius.  —  Dans  sa  Vie  par  Plutarque,  c.  1. 
36,  Pyrrhus.  —  Dans  sa  Vie  par  Plutarque,  c.  2. 
672, 

5,  Auguste.  —  Dans  sa  Vie  par  Suétone,  c.  74. 
674, 

12,  Naturelles.  —  C.-à-d.  à  l'âge  auquel  je  suis  arrivé,  ma  mort  est  juste  et 
naturelle;  et  je  ne  puis  désormais  ni  demander  ni  espérer  de  la  destinée 
une  prolongation  de  vie,  qui  serait  une  faveur  contraire  aux  règles  et  au 
cours  ordinaire  de  la  nature. 

15,  SolOD.  —  Hérodote,  I,  32. 

18,  Passé.  —  C'est  Vaurea  mediocritas  (l'excellente  médiocrité)  d'HoRACE,  tant 
prônée  avant  lui,  dans  l'antiquité  par  Cléobule,  un  des  sept  sages  de  la 
Grèce,  comme  une  des  plus  sûres  conditions  d'une  vie  heureuse.  Diogène 
Laerce,  I,  93. 

•  si  le  bonheur  nous  est  permis. 
Il  n'est  point  sous  le  chaume,  il  n'est  point  sur  le  trône; 
Voulons-nous  l'obtenir,  amis? 
La  «  médiocrité  •  le  donne.  » 

C'est  également  Cléobule  qui  recommandait  de  la  mesure  en  tout  :  «  Faites, 

disait-ii  encore,  du  bien  à  vos  amis  pour  vous  les  attacher  davantage,  et  à 

vos  ennemis  pour  vous  en  faire  des  amis.  » 
23,  Platon.  —  Dans  le  Timée. 
28,  Heure.  —  C.-à-d.  le  déclin  de  nos  facultés  anticipe  sur  le  moment  où 

la  mort  doit  arriver,  et  augmente  à  mesure  que  nous  avançons  vers  l'heure 

fatale. 
33,  Tracasser.  —  Var.  de  88  :  traîner. 
676, 

6,  Refors.  —  Raifort.  V.  N.  III,  36. 
10,  Blanc.  —  V.  N.  III,  64  :  Clairet.  —  Sur  ce  point,  Montaigne  s'en  remettait 


NOTES.         MV.  III,  CH.  XIII.         VOL.  III,  PAG.  676.  Fc.Tio 

du  reste,  le  cas  échéant,   aux  médecins   :  •  Ils   pensent,   dit-il  (liv.  II, 
ch.  XXXVII,  III,  64),  m'ordonner  le  blanc  ou  le  clairet.  ■• 
20,  Abondance.  —  Sénèque,  Epist.  18. 

25,  Liqueur.  —  Vénus  et  Bacchus. 

26,  Propre.  —  C.-à-d.  ou  parce  que  je  n'avais  pour'  manger  avec  moi,  au- 
cune personne  dont  la  société  me  convînt. 

28,  Mange.  —  Sénkque,  Epist.  91. 

28,  Cbilon.  —  Plutarque,  Banquet  des  Sept  Sages,  3. 

678, 

7,  leusne.  —  Par  loix  de  jeusne,  il  faut,  ce  nous  semble,  entendre  ici  les 
régimes  de  toutes  sortes  que  les  médecins  nous  conseillent  dans  le  cas  de 
telles  ou  telles  affections  et  qui  tous  aboutissent  à  des  interdictions  qu'ils 
nous  imposent.  D'autres  ont  pensé  qu'il  s'agissait  simplement  du  jeune  que 
l'Église  prescrit  à  ses  fidèles  et  en  concluent  que  son  observation,  d'après 
ce  qui  suit,  aurait  été  chez  Jlontaigne  beaucoup  plus  une  question  hygiénique 
qu'une  mortification;  c'est  bien,  en  effet,  l'idée  qui,  à  l'origine,  le  fit  pres- 
crire par  la  religion;  et  il  faut  reconnaître  qu'aujourd'hui  avec  tous  les 
tempéraments  qu'elle  y  a  apportés  pour  suivre  nos  estomacs  devenus  plus 
exigeants  en  raison  de  la  vie  plus  intensive  que  nous  menons,  d'une  débilité 
qui  va  croissant  parsuite  de  la  sophistication  de  toutes  denrées  alimen- 
taires et  de  la  place  déplus  en  plus  grande  qu'un  accroissement  dans  le  bien- 
être  général  a  fait  occuper  à  la  viande  dans  notre  alimentation,  le  jeûne 
n'est  plus  guère,  dans  l'Eglise  catholique,  qu'une  marque  d'obéissance  qu'elle 
demande  à  ses  adhérents. 
18,  Galbe.  —  De  parure,  d'apparat. 

680, 

4,  Auguste.  —  Dans  sa  Vie  par  Suétone,  c.  77. 

5,  Democritus.  —  Pline,  Hisl.  nat.,  XXVllI,  6.  —  Le  texte  latin  porte  Démé- 
trius;  Montaigne  a  mis  Democritus,  probablement  parce  qu'il  a  relevé  le 
fait  dans  Erasme  qui  a  commis  la  même  erreur. 

7,  Demysetiers.  —  Le  demi-setier,  mesure  de  capacité  ancienne,  représen- 
tait environ  un  quart  de  litre.  Ce  n'était  pas,  comme  son  nom  semble  l'in- 
diquer, la  moitié  du  seller;  celui-ci  valait  près  de  huit  litres.  Trois  demi- 
setiers  faisaient  donc  trois  quarts  de  litre,  c'est  à  peu  près  la  contenance 
de  la  bouteille  de  Bordeaux. 
13,  Sommelerie.  —  Pièce  où  dans  une  maison  sont  en  dépôt  les  provisions 
de  consommation  immédiate,  et  où  se  font  les  opérations  qu'elles  comportent. 

15,  Vin.  —  D'eau,  aj.  l'éd.  de  88.  —  D'autres  attribuent  cet  usage  à  Amphic- 
tyon,  successeur  de  Cranaiis.  Athénée,  II,  2. 

24,  Ditficultez.  —  Var.  de  88  :  aspretez. 

35,  Soulagé.  —  C'est  la  raison  qui  fait  que,  de  nos  jours,  soit  pour  écrire, 

soit  pour  l'impression,  on  emploie  fréquemment  des  papiers  très  légèrement 

teintés,  de  couleur  crème  plutôt  que  blancs. 

35,  Présent.  —  Montaigne  avait  alors  cinquante-quatre  ans,  ainsi  qu'il  l'in- 
dique ici  même,  dans  l'éd.  de  88. 

682, 

5,  Coïement.  —  Tranquillement.  L'adjectif  coi,  au  masculin,  est  encore  en 
usage  dans  le  style  familier  :  «  Il  est  resté  coi.  » 

16,  Certains.  —  Immobiles. 

18,  Rassis.  —  Add.  de  88  :  e/  pour  la  gesticulation,  ne  me  trouue  guiere  sans 

baguette  à  la  main,  soit  à  chenal  ou  à  pied. 
18,  Chrysippus.  —  Diogèxe  Laerce,  VII,  183. 

27,  Diogenes.  —  Plutarque,  Que  la  vertu  se  peut  enseigner,  2. 

36,  Platon.  —  Dans  le  dialogue  intitulé  Protagoras. 
684, 

1,  Conuiue.  —  S.-ent.  :  pour  qu'un  repas  ait  lieu  dans  les  meilleures  condi- 
tions. Aulu-Gelle,  XIII,  II. 

10,  Forclost.  —  M'en  exclut. 

13,  Manie.  —  Qui  vais  toujours  terre  à  terre.  _ 


Fc.716  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

14,  Culture.  —  Add.  de  88  :  et  plaisir. 
16,  Xerxes.  —  Cicéron,  Tusc,  V,  7. 

35,  Critolaûs.  —  Ce  philosophe  estimait  que  si  dans  l'un  des  plateaux  d'une 
balance  on  mettait  les  biens  de  l'âme,  dans  l'autre  les  biens  du  corps  et, 
en  général,  tous  les  biens  matériels,  les  premiers  l'emporteraient,  même  si 
on  ajoutait  aux  autres  la  terre  et  les  mers.  Cicéron,  Tusc,  V,  17.  —  Mon- 
taigne en  fait  ici  application  à  un  usage  fort  différent. 
686, 

4,  Cyrenaïques.  —  Diocène  Laerce,  II,  90. 
6,  Aristote.  —  Morale  à  Nicomaque,  II,  7. 

12,  Bacchus.  —  Add.  de  88  :  Ces  humeurs  vanleuses  se  peuuent  forger  quelque 
contenlement,  car  que  ne  peut  sur  nous  la  fanlasie?  mais  sagesse,  elles  n'en 
tiennent  tache.  le  hay... 

13,  Cercle.  —  La  quadrature  du  cercle,  ou  transformation  d'un  cercle  eu 
un  carré  de  surface  équi:valente,  est  un  problème  insoluble. 

688, 

2,  Vescu.  —  C'est  le  mot  de  La  Fayette  à  quelqu'un  lui  demandant  ce  qu'il 
avait  fait  pendant  la  Terreur,  durant  laquelle,  membre  de  la  Convention, 
il  s'était  effacé  de  son  mieux  et  avait  réussi  à  passer  inaperçu  :  «  .J'ai 
vécu,  »  répondit-il. 

4,  Si. —  S.-ent.  :  Mais,  me  direz-vous  encore,  si... 

14,  Adminicules.  —  C.-à-d.  n'en  sont  que  d'infimes  accessoires  et  super- 
fétations.  Appendicules  et  adminicules  sont  deux  mots  latins  que  l'on 
rencontre,  avec  le  sens  ici  indiqué,  dans  Cicéron  et  autres,  et  que  I\Ion- 
taigne  a  francisés. 

16,  Deliure.  —  Libre,  dégagé  de  tout  autre  soin. 

17,  Brutus.  —  Plutarque,  M.  Brutus,  1. 

19,  Breueter.  —  Annoter,  prendre  des  notes. 

26,  Certes.  —  Que  ce  soit  en  plaisantant  ou  sérieusement  qu'on  dise... 

26,  Théologal.  —  Jadis,  ecclésiastiques  et  moines  passaient  pour  faire  bonne 
chère,  et,  la  malice  populaire  tenant  comme  vin  de  choix  celui  qu'ils  bu- 
vaient, qualifiait  de  vin  théologal  celui  qui  sortait  de  l'ordinaire.  L'épithète 
de  sorbonique  ne  fait  que  renforcer  cette  même  idée.  La  Sorbonne,  simple 
établissement  d'éducation  ecclésiastique  dans  le  principe ,  était  à  cette 
époque,  et  depuis  près  de  trois  siècles,  devenue  une  faculté  de  théologie, 
dont  les  doctrines  faisaient  loi  en  matière  de  foi. 

27,  Sorbonique.  —  Var.  de  88  :  doctoral. 

31,  Condiment.  —  Assaisonnement.  Le  mot  est  encore  dans  la  langue  et 
vient  du  latin  condimentum,  qui  a  le  même  sens;  on  le  trouve  ainsi  employé 
dans  Cicéron  :  «  Socrate  disait  que  la  faim  est  l'assaisonnement  (condi- 
mentum) de  tous  mets,  et  la  soif  celui  de  toute  boisson,  quels  qu'ils  soient.  » 
35,  Baccbus.  —  Add.  de  l'ex.  de  Bord.  :  Illis  est  indulgendum,  non  seruien- 
.  dum  (il  faut  le  leur  pardonner,  et  ne  pas  leur  en  faire  un  grief). 
37,  Vie.  —  V.  N.  I,  616  :  Virtus. 
690, 

5,  Luy.  —  Épaminondas  pouvait  d'autant  mieux  être  porté  à  en  agir  ainsi 
que  Cornélius  Népos,  Épaminondas,  2,  le  représente  comme  ayant  si  bien 
appris  à  chanter,  à  danser  et  à  sonner  (du  latin  sonare,  jouer  des  instru- 
ments; on  dit  encore  «  sonner  du  cor  •),  qu'aucun  Thébain  ne  lui  était 
supérieur  dans  ces  différents  exercices.  V.  N.  II,  18  :  Epaminondas. 

5,  L'ayeul.  —  II  y  a  là  confusion  entre  Scipion,  le  premier  Africain,  le 
vainqueur  de  Zama,  et  son  petit-fils  adoptif  Scipion  Émilien,  le  second 
Africain,  qui  prit  Carthage;  sur  ce  point,  l'éd.  de  88  présente  la  var.  sui- 
vante :  dit  ieune  Scipion  {tout  compté,  le  premier  homme  des  Romains),  au 
lieu  de  :  «  de  Scipion...  céleste  ».  Le  premier  a  vaincu  Annibal  et  ce  qui  a 
trait  à  la  Sicile  se  rapporte  à  lui  ;  mais  la  liaison  avec  Laîlius  et  la  colla- 
boration à  des  comédies  s'appliquent  nettement  au  second.  Toutefois,  il 
est  à  observer  que  tous  deux  se  sont  illustrés  au  même  degré,  ont  été 
victimes  de  l'envie,  ont  fini  dans  un  exil  plus  ou  moins  volontaire;  qu'il 


NOTES.         LIV.  111,  CH.  XIII.         VOL.  111,  PAG.  090.  Fc.TlT 

y  a  eu  deux  Lielius,  comme  il  y  a  eu  deux  Scipion,  qui  respectivement 
les  ont  suivis  chacun  sur  le  théâtre  de  leur  gloire  et  leur  sont  restés  fidèles 
dans  l'adversité;  qu'enfin  si  Térence  fut  le  familier  de  Scipion  ÉmiHen, 
Ennius  avait  été  celui  de  son  aïeul. 

7,  Céleste.  —  Aulu-Gelle,  Vil,  1. 

8,  Baguenaudant.  —  Musant,  jouant.  —  Baguenauder  semble  venir  de 
baguenaudier,  nom  d'un  arbuste  de  nos  contrées  dont  le  fruit  est  enve- 
loppé d'une  membrane  enflée  comme  une  vessie  que  les  enfants  s'amusent 
à  faire  claquer.  Ce  nom,  mais  dérivant  du  verbe,  est  aussi  celui  d'un  jeu 
de  bagues,  sorte  de  jeu  de  patience  assez  répandu. 

9,  Coquilles.  —  Cicéron,  De  Oral.,  II,  6,  qui  le  dit  du  premier  Scipion,  mais 
.   non  du  second. 

10,  Cornichon  va  deuant.  —  On  a  beaucoup  ergoté  sur  ce  que  ce  jeu  pouvait 
être.  Les  uns  estimèrent  que  c'était  faire  des  ricocliets  sur  la  mer  avec 
les  galets  de  la  plage;  d'autres,  aller  à  qui  ira  le  plus  vite,  tout  en  ramas- 
sant, chemin  faisant,  quelque  chose  à  terre;  ce  serait  encore  le  jeu  de 
boules  où  on  en  lance  tout  d'abord  une  plus  petite  pour  servir  de  but;  ou 
enfin  le  jeu  d'enfants  que  nous  connaissons  sous  le  nom  de  sabot  et  que 
l'on  appelle  aussi  corniche. 

10,  Laelius.  —  «  Quand  ils  pouvaient  s'échapper  de  Rome,  Lœlius  avait 
coutume  d'accompagner  Scipion  à  la  campagne  et  là,  comme  des  captifs 
ayant  rompu  leurs  chaînes,  tous  deux  redevenaient  enfants...;  souvent 
ils  ramassaient  des  coquillages  et  des  galets  sur  les  rivages  de  Gaète  et  de 
Laurente,  et,  libres  de  toute  préoccupation,  s'amusaient  aux  jeux  les  plus 
puérils.  »  CicÉHON.  —  «  Quand,  loin  du  monde  et  des  bruyantes  scènes, 
la  vertu  de  Scipion  et  la  douce  sagesse  de  Laslius  s'étaient  réfugiées  à  la 
campagne,  tous  deux,  dénouant  leur  ceinture,  jouaient  avec  Lucile  et 
s'amusaient  avec  lui  comme  des  enfants,  en  attendant  que  les  légumes 
du  souper  fussent  cuits.  »  Horace.  —  «  Scipion,  dit  Sénèque,  pratiquait 
aussi  la  danse  à  la  mode  des  héros  anciens,  qui  s'y  adonnaient  de  telle 
sorte  qu'ils  pouvaient  être  vus  sans  que  cela  portât  atteinte  à  leur  consi- 
dération. » 

12,  Comédies.  —  Ces  comédies  sont  celles  de  Térence  auxquelles  Scipion 
Émilien  et  Lœlius  eurent  beaucoup  de  part,  au  dire  de  Suétone  dans  la 
Vie  de  ce  poète,  de  quoi  Montaigne  était  si  fort  persuadé  qu'il  dit  (liv.  1, 
39, 1,  432)  :  «  et  me  feroit  on  desplaisir  de  me  desloger  de  cette  créance  ». 

13,  Hommes.  —  Add.  de  88  :  le  suis  extrêmement  despit  dequoy  le  plus  beau 
couple  de  vies  qui  fut  dans  Plularque,  de  ces  deux  grands  hommes  (Épami- 
nondas  et  Scipion  premier  Africain),  se  rencontre  des  premiers  à  estre 
perdu. 

16,  Rome.  —  Allusion  à  l'hostilité  intransigeante  que  durant  sa  vie  entière 
Caton  l'Ancien  et  autres  (V.  les  discours  de  Q.  Fabius,  Tite-Live,  XXIX,  19) 
témoignèrent  au  premier  Scipion.  Montaigne  commet  encore  ici  une  mé- 
prise; ce  même  historien  ne  dit  pas  que  Scipion,  en  Sicile,  visitait  des 
écoles  et  écoutait  des  philosophes,  mais  qu'il  allait  se  promener  au  Gym- 
nasium,  lieu  destiné  aux  exercices  physiques,  auxquels  parfois  il  prenait 
part. 

18,  Baller.  —  Danser. 

27,  Recourir.  —  Secourir. 

30,  Tout.  —  V.  N.  III,  544  :  Theramener. 

32,  Abstinence.  —  Cette  beauté,  c'est  Alcibiade  au  début  de  leur  connais- 
sance, d'après  le  propre  dire  de  celui-ci;  il  y  avait  entre  eux  une  diffé- 
rence d'âge  d'une  vingtaine  d'années. 

39,  Boire  à  lut.  —  Bien  boire.  Expression  venue  de  l'Allemagne  :  boire 
all-aufs  [ail  signifiant  tout,  complètement,  et  aufs,  au  mieux);  d'où  on  a 
fait  allus,  puis  à  lut,  voulant  dire  :  «  Continuer  à  boire  durant  tout  le 
repas,  sans  cesser  de  faire  raison  à  tous  ceux  qui  vous  provoquent  »  ; 
c.-à-d.  vider  chaque  fois  son  verre  jusqu'à  la  dernière  goutte,  aussi  sou- 
vent qu'on  vous  le  remplit. 


Fc.718  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

692. 

1.  Grâce.  —  Socrate  ne  rougissait  pas  de  jouer  avec  les  enfants,  Sénèque. 
•     V.  N.  III,  26  :  Socrates. 

4,  Perfection.  —  Tout  ce  que  dit  ici  Montaigne,  concernant  Socrate,  est 
tiré  presque  mot  pour  mot  du  Banquet  de  Platon,  II,  16,  dialogue  dans 
lequel  ce  philosophe  introduit  Alcibiade  qui  fait  de  son  maître  l'éloge 
le  plus  beau  et  le  plus  délicat;  c'est  le  chef-d'œuvre  de  Platon,  et  dans 
ce  discours  d'Alcibiade,  il  y  a  un  art  et  un  goût  infinis.  Naigeos. 

7,  Ply.  —  C.-à-d.  des  exemples  faibles  et  défectueux,  à  peine  bons  à  suivre 
sous  un  rapport. 

18,  Mespriser.  —  Var.  de  88  :  hayr  et  desdaigner. 

25,  Volupté.    —   ••    Les  plaisirs    sont   amers,   d'abord    qu'on   en  abuse.   » 

M""  Deshol'lières. 
29,  Exemplaire.  —  Diogène  Laerce,  VIll,  88.  —  Dans  sa  Morale  à  Nico- 
maque,  X,  2,  Aristote  réfute  cette  théorie  d'Eudoxe  sur  le  plaisir  en  quoi 
il  faisait  consister  le  souverain  bien,  et  dit  positivement  que  lui-même  se 
distinguait  par  une  tempérance  extraordinaire.  —  Eudoxe,  qui  fut  l'ami 
de  Platon,  était  du  reste  un  philosophe  d'éminente  sagesse;  astronome 
renommé  de  son  temps,  il  avait  apprécié  l'année  solaire  à  365  jours  un 
quart,  ce  qui  fut  adopté  plus  tard,  sous  César,  par  Sosigène  pour  l'établis- 
sement du  calendrier  Julien  ;  géomètre,  on  lui  doit  une  théorie  des  lignes 
courbes;  il  était  aussi  médecin. 
694, 

I,  Platon.  —  Lois,  1. 

4,  Volupté.  —  Des  attraits  excessifs  et  enchanteurs  de  la  volupté.  —  Blan- 
dices  vient  du  mot  latin  blanditiœ  (caresses,  flatteries,  attraits)  que  Mon- 
taigne a  francisé  en  en  changeant  la  terminaison. 
7,  Escbarsement.  —  Modérément.  V.  N.  I,  446. 
10,  Elle.  —  Elles  se  subordonnent  à  elle,  c'est  là  la  vertu. 

19,  Decours.  —  Var.  de  88  :  sa  décadence,  au  lieu  de  :  «  son...  decours  ». 
23,  Compose.  —  Je  me  prépare... 

25,  Moleste.  —  Fâcheuse,  du  latin  molestus,  qui  a  même  sens.  Comme 
adjectif,  ce  mot  n'est  pas  d'usage;  au  contraire  le  verbe  molester,  qui  a 
même  étymologie,  est  d'emploi  courant. 

34,  Pleine.  —  Moncrif  a  rendu  ainsi,  en  vers,  cette  même  idée  : 

•  Plus  inconstant  que  l'onde  et  le  nuage, 
Le  temps  s'enfuit;  pourquoi  le  regretter? 
Malgré  la  pente  volage 
Qui  l'oblige  à  nous  quitter. 
C'est  l'arrêter,  d'en  faire  usage. 

Goûtons  mille  douceurs; 
Et  si  la  vie  est  un  passage. 
Sur  ce  passage  au  moins  semons  les  fleurs.  » 

696. 

1,  Condignes.  —  Absolument  mérités.  Du  latin  condignus,  môme  sens  que 
dignus  mais  plus  affirmatif  encore. 

6,  Moy.  —  Je  délibère  avec  moi-même,  je  raisonne  de  mon  plaisir;  je  ne 
glisse  pas  dessus,  j'approfondis. 
9,  Sens.  —  Je  ne  permets  pas  à  mes  sens  de  s'en  emparer  exclusivement. 
10,  Engager.  —  Var.  de  88  :  enyurer. 
23,  Propose.  —  Je  me  représente... 
42,  A  mesme.  —  A  mesure... 
44,  Trauailler.  —  Arrien,  De  exped.  Alex.,  V,  26. 
47,  Dire.  —  Qu'elle  puisse  ne  pas  éprouver... 
698, 

4,  Maintenoit.  —  Diogène  Laerce,  I,  114.  —  Epiménide,  d'après  la  légende, 
recevait  des  Nymphes  une  nourriture  particulière  qu'il  conservait  dans 
un  pied  de  bœuf;  il  ne  la  prenait  que  par  parcelles  et  on  ne  le  vit  jamais 


NOTES.        LIV.  III,  CH.  XIII.        VOL.  III,  PAG.  698.  Pc.719 

manger.  On  a  dit  aussi  qu'il  avait  dormi  cinquante  ans  dans  une  caverne  ; 
ce  prétendu  sommeil  aurait  été  une  absence  de  quelque  durée  durant 
laquelle,  errant  de  côté  et  d'autre,  il  était  occupé  à  recueillir  des  simples. 

24,  Suyuans.  —  Je  voudrais  que  les  sectateurs  d'une  telle  philosophie 
n'eussent  non  plus  de  droit... 

30,  Fantastique.  —  Il  n'est  pas  visionnaire  à  ce  point. 
700, 

6,  Tousiours.  —  Cet  ancien  paraît  être  Simonide  qui  dit  que  <■  les  dieux 
composent  toujours  avec  la  nécessité  ».  De  son  côté,  Pittacùs  a  dit  aussi  : 
«  Les  dieux  eux-mêmes  ne  vont  pas  à  rencontre  de  la  nécessité.  »  Et  Euri- 
pide :  «  Le  mortel  qui  cède  à  la  nécessité  est  sage  et  connaît  bien  les 
dieux.  » 

14,  Diuina.  —  Cette  proposition  de  S.  Augustin,  De  Civ.  Dei,  XIV,  5,  vise, 
pour  les  condamner,  les  hérésies  des  Manichéens  (III'  s.),  qui  attribuaient 
la  création  à  deux  principes,  l'un  essentiellement  bon,  l'autre  essentielle- 
ment mauvais,  et  tenaient  le  corps  et  la  chair  comme  procédant  de  ce 

.  dernier.       , 

15,  Par  acquit.  —  Var.  de  88  :  farcesque. 

16,  Condition.  —  Add.  de  88  :  naturelle. 

19,  Peregrin.  —  Et  comme  elle  a  plus  de  poids  en  une  langue  étrangère, 
nous  insisterons  sur  ce  point,  en  usant  du  latin. 

29,  Capirotade.  —  On  dit  aujourd'hui  capilotade;  au  propre,  ragoût  composé 
de  viande  rôtie  coupée  en  morceaux  et  assaisonnée  d'ingrédients  divers. 

30,  Arcbimedes.  —  Archimède  était  au  bain  quand  il  découvrit  ce  principe 
de  physique  qui  porte  son  nom  :  «  Tout  corps  plongé  dans  un  fluide, 
perd  une  partie  de  son  poids  égale  au  volume  de  ce  fluide  qu'il  déplace  »; 
dans  sa  joie,  il  en  sortit  précipitamment  et  se  mit  à  courir  tout  nu  dans 
les  rues  de  Syracuse,  criant  :  Eupexa,  eûpexa!  j'ai  trouvé,  j'ai  trouvé!  ob- 
servation qui  le  mit  à  même  de  déterminer  la  quantité  d'alliage  intro- 
duite en  fraude  dans  une  couronne  qu'Hiéron  avait  commandée  en  or 
pur.  Ses  distractions,  en  une  autre  circonstance,  lui  furent  plus  fatales  : 
les  Romains  qui  assiégeaient  Syracuse  dont  son  génie  inventif  contribuait 
à  prolonger  la  résistance  qui  durait  déjà  depuis  trois  ans,  ayant  enfin 
pénétré  par  surprise  dans  la  ville,  Archimède,  tout  occupé  de  la  solution 
d'un  problème,  ne  s'en  aperçut  pas,  et  tardant  à  répondre  à  un  soldat  qui 
lui  enjoignait  de  le  suivre,  celui-ci  le  tua,  bien  que  l'ordre  eût  été  donné 
de  l'épargner  (212). 

31,  Marmaille.  —  Var.  de  88  :  voirie. 

32,  Diuertissent.  —  Et  de  pensées  qui  nous  détournent  de  notre  salut. 
702, 

2,  S'attendre.  —  Dédaignent  de  prêter  leur  attention...  (du  latin  atlendere); 
ou  de  .s'appliquer,  comme  porte  l'éd.  de  1635  de  M"°  de  Gournay. 
1,  Priuilege.  —  Add.  de  l'éd.  de  88  :  Nos  esludes  sont  tous  mondains;  et 
entre  les  mondains,  les  plus  naturels  sont  les  plus  iustes. 
6,  Sousterraines.  —  Corrompues,  infernales. 
(],  Esope.  —  Planude,  Vie  d'Esope. 
18,  De  nos.  —  Var.  de  88  :  des  humaines. 

21,  Immortalisation.  —  Ou  plutôt  sa  déi/icalion,  comme  porte  l'éd.  de  88. 
23,  Hammon.  —  Quinte -Curce,  VI,  9.  —  Jupiter  Ammon  avait  au  milieu 
des  sables  de  la  Libye,  près  de  l'oasis  de  Syouah,  à  500  kil.  du  Caire,  un 
temple  dont  les  oracles  étaient  réputés.  Alexandre  le  Grand  le  visita  en 
332,  après  la  conquête  de  l'Egypte;  pour  l'atteindre  il  marcha  quatre  jours 
en  plein  désert;  à  son  arrivée,  les  prêtres  le  saluèrent  fils  de  Jupiter  et  lui 
assurèrent  qu'il  serait  invincible  jusqu'au  moment  où  il  viendrait  prendre 
•  sa  place  parmi  les  dieux;  et,  à  une  question  de  ceux  qui  l'accompagnaient, 
l'oracle  répondit  qu'il  serait  agréable  à  Jupiter  qu'ils  rendissent  les  hon- 
neurs divins  à  leur  roi.  Peut-être  est-ce  à  cela,  et  aussi  à  ce  qu'il  avait  pu 
remarquer  du  culte  grandiose  dont  les  Egyptiens,  plus  que  pas  un  autre 
peuple,  entouraient  les  restes  de  leurs  rois,  qu'Alexandre  voulut  reposer 


Fc.720  ESSAIS  DE  MONTAICxNE. 

clans  le  temple  d'Ammon.  Ptolémée  Pliiladelphe,  en  conséquence  de  ses 
dernières  volontés,  fit  -transporter  son  corps  à  Memphis,  d'où  Ptolémée 
Soter  le  transféra  à  Alexandrie  où  il  fut  placé  dans  un  cercueil  d'or.  Ce 
cercueil  ayant  été  volé,  fut  remplacé  par  un  cercueil  de  verre;  c'est  là  que 
le  virent  Jules  César,  puis  Auguste  qui  lui  mit  une  couronne  d'or  sur  la 
tête  et  le  couvrit  de  fleurs.  L'empereur  Septime  Sévère  défendit  qu'on  le 
montrât,  et  depuis  on  ne  sait  ce  qu'il  est  devenu  ;  S.  .Jean  Chrysostome,  à 
la  fin  du  iv°  siècle,  en  parle  comme  ignoré  de  tout  le  monde,  autrement 
dit  comme  n'existant  plus. 
28,  Ville.  —  Plutarque,  Pompée,  7.  —  En  66,  aloi's  qu'il  se  rendait  en 
Asie,  pour  y  continuer  la  guerre  contre  Mithridate.  Pompée,  qui  n'avait 
alors  que  vingt-neuf  ans,  avait  déjà  reçu  le  surnom  de  Grand  que  lui 
avait  décerné  Sylla;  il  avait  guerroyé  en  Italie,  dans  les  Gaules,  en  Sicile, 
en  Espagne  contre  Sertorius,  contre  les  pirates,  toujours  avec  un  égal 
succès,  et  entre  temps  avait  obtenu  le  consulat. 
704, 

6,  Extrauagance.  —  Cette  phrase  clôt  et  résume  la  morale  de  Montaigne  ; 
morale  qui  n'est  pas  sans  doute  assez  parfaite  pour  des  chrétiens,  mais 
qu'il  serait  à  souhaiter  voir  servir  de  guide  à  tous  ceux  qui  n'ont  pas  le 
bonheur  de  l'être.  Elle  formera  toujours  un  bon  citoyen  et  un  honnête 
homme.  Elle  n'est  pas  fondée  sur  l'abnégation,  mais  elle  a  pour  premier 
principe  la  bienveillance  envers  les  autres,  sans  distinction  de  pays,  de 
mœurs,  de  croyances  religieuses.  Elle  nous  instruit  à  aimer  le  gouverne- 
ment sous  lequel  nous  vivons,  à  respecter  les  lois  auxquelles  nous  sommes 
soumis,  sans  mépriser  le  gouvernement  et  les  lois  des  autres  nations, 
nous  avertissant  de  ne  pas  croire  que  nous  ayons  seuls  le  dépôt  de  la 
justice  et  de  la  vérité.  Elle  n'est  pas  héroïque,  mais  elle  n'a  rien  de  faible; 
souvent  même  elle  agrandit,  elle  transporte  notre  àme  par  la  peinture 
des  fortes  vertus  de  l'antiquité,  par  le  mépris  des  choses  mortelles  et  l'en- 
thousiasme des  grandes  vérités;  mais  bientôt,  elle  nous  ramène  à  la  sim- 
plicité de  la  vie  commune,  nous  y  fixe  par  un  nouvel  attrait  et  semble  ne 
nous  avoir  élevés  si  haut  dans  ses  théories  sublimes,  que  pour  nous 
réduire  avec  plus  d'avantage  à  la  facile  pratique  des  devoirs  habituels  et 

^des  vertus  ordinaires.  Villemain. 

7,  Tendrement.  —  Plus  doucement,  plus  délicatement,  comme  porte  l'édition 
de  1588. 

10,  Latoe.  —  Apollon,  fils  de  Latone. 

11,  Mente.  —  Juvénai.  résume  de  même  ce  que  l'homme  vraiment  sage  de- 
mande au  ciel  :  La  santé  de  l'âme  unie  à  celle  du  corps.  Orandum  est  ut  sit 
mens  sana  in  corpore  sano. 

12,  Carentem.  —  Horace,  Od.,  I,  31,  17.  —  11  est  impossible  de  n'être  pas 
frappé  de  l'espèce  de  contradiction  que  présentent  la  fin  tant  soit  peu 
épicurienne  (dans  le  bon  sens  du  mot)  des  Essais  et  la  mort  si  dévotieuse 
de  leur  auteur  (V.  supra,  fasc.  A,  p.  xi).  —  On  peut  dire  que  le  souhait 
emprunté  à  Horace  par  lequel  Montaigne  termine  son  livre,  est  le  dernier 
soupir  du  lettré;  c'est  le  reflet  mourant  de  l'enthousiasme  de  l'antiquité, 
c'est  la  fin  de  la  vie  écrite.  Dans  la  vie  vécue,  au  contraire,  le  Montaigne 
de  l'apologie  de  Sebond  reparaît,  et,  au  point  de  vue  religieux,  il  est  peu 
de  morts  plus  démonstratives  que  celle-là.  D""  Payen.  —  Fidèle  à  ses  prin- 
cipes, il  finit  comme  Socrate  «  en  se  conformant  aux  façons  et  formes  re- 
çues autour  de  lui  »  ;  sa  dernière  pensée  fut  un  dernier  hommage  à  la 
religion  de  ses  pères.  Abbé  Jay.  —  Et  de  fait,  à  tous  points  de  vue,  on 
peut  dans  l'ensemble  lui  faire  application  de  ce  vers  de  La  Fontaine  : 

«  Rien  ne  trouble  sa  fin,  c'est  le  soir  d'un  beau  jour.  » 


FASCICULE  G 


GLOSSAIRE 


ET 


NOTE  SUR  LA  LANGUE  DE  MONTAIGNE 


ESSAIS   DE   MONTAIGNE.   —  T.    IV.  46 


NOTE  SUR  LA  LANGUE  DE  MONTAIGNE 


Le  XVI*  siècle  fut  pour  la  langue  française,  comme  pour  toutes  choses,  une 
époque  de  transition,  chacun  écrivait  un  peu  à  sa  fantaisie;  Montaigne  a  fait  de 
même. 

Style.  —  Son  style  est  bret,  concis  et  mouvementé.  Il  écrit  comme  il  parle,  en 
quoi  il  fut  un  précurseur.  Ce  qui  aussi  lui  est  propre,  c'est  le  choix  des  expres- 
sions, si  souvent  imaginées;  ce  sont  les  locutions  et  mots  qu'il  emploie,  tirés  de 
l'ancienne  langue  romane,  des  patois  de  l'époque  ou  forgés  par  lui,  toujours  si 
parfaitement  adaptés  à  l'idée  qu'il  veut  rendre;  et  aussi  ses  tournures  de  phrase, 
qui  tiennent  beaucoup  du  latin,  langue  dans  laquelle  11  avait  été  élevé.  Mais  si,  à 
l'instar  des  meilleurs  écrivains  de  l'antiquité,  l'idée  principale  est  toujours  chez 
lui  exactement  suivie  et  nettement  exprimée,  quand  des  additions  ultérieures  ne 
sont  pas  encore  intervenues,  il  ne  pratique  pas  les  longues  périodes  comme  les 
maîtres  de  cette  époque  et  leurs  imitateurs;  ses  arguments  sont  présentés  avec 
simplicité,  ses  déductions  sont  aisées,  la  phrase  est  courte  et  n'est  pas  surchargée 
de  propositions  incidentes. 

Montaigne  observe  généralement,  dans  le  détail,  les  règles  grammaticales  assez 
flottantes  de  son  temps,  tout  en  s'en  écartant  fréquemment  au  caprice  de  sa  plume. 
Les  principales  particularités  qui  à  cet  égard,  et  sans  rien  avoir  d'absolu,  se  présen- 
tent tant  du  fait  de  leur  auteur  que  des  errements  qui  alors  avaient  cours,  et 
indépendamment  des  fautes  d'impression,  sont  les  suivantes  : 

Syntaxe.  —  Les  inversions  sont  fréquentes  :  Ainsi  faisaient  aucuns  chirur- 
giens... les  opérations  de  leur  art;  —  Bon  est-il  tousiours  de  les  ouïr;  —  Mais  ceci 
sçais-ie  par  expérience. 

Les  pléonasmes  également;  surtout  par  le  fait  d'idées,  de  membres  de  phrase 
jointifs,  ayant  une  signification  identique,  mais  parfois  aussi  par  la  répétition  de 
mots  (noms  ou  adjectifs]  ayant  même  sens;  ces  derniers  sont  notablement  en 
moins  grand  nombre  dans  l'éd.  de  95  que  dans  celles  qui  l'ont  précédée  :  le  cher- 
che à  conniller  et  à  me  desrober  de  ce  passage;  —  S'il  arriuoit  que  mes  humeurs 
pleussenl  et  accordassent  à  quelque  honnesle  homme;  —  Estr anges  et  inouys;  —  for- 
cée et  tendue;  —  esbaudi  et  resioui. 

Des  noms,  aujourd'hui  masculins,  sont  féminins,  et  réciproquement  :  Vn  dot, 
vne  poison.  —  D'autres  sont  des  deux  genres  :  vn  art  ou  vue  art. 

Des  infinitifs  sont  employés  comme  substantifs  :  le  bien  dire. 

Des  verbes  sont  mis  au  singulier,  alors  qu'ils  ont  plusieurs  sujets,  quand  ces 
sujets  sont  au  singulier  :  La  touche  d'vn  bon  mariage  et  sa  vraiepreuue  regarde  le 
temps. 

Certains  verbes  intransitifs  aujourd'hui  sont  employés  transitivement  et  inver- 
sement :  Ressembler  son  père  ;  —  L'vn  plainct  la  compagnie  de  sa  femme. 

D'autres,  alors  réfléchis,  n'ont  plus  cette  forme  et  réciproquement  :  Se  trauail- 
ler;  —  Nous  repentons. 

Les  compléments  indirects  sont  souvent  unis  au  verbe  par  des  prépositions  au- 
tres que  celles  que  nous  emploierions  :  Se  fier  de  quelque  chose;  —  Ne  craindre 
point  à  mouHr;  —  Si  en  l'aage  que  ie  l'ai  connu. 

Association  de  compléments  construits  dilïéremment  :  plongé  en  l'oisiueté  et 
aux  délices;  —  Labienus  ne  peut  souffrir  cette  perte  ny  de  suruiure  à. 


G.724  ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 

Adjectifs  employés  adverbialement  :  mieux  sçauanl. 

L'article  souvent  supprimé  :  Autant  que  fortune  leur  dure;  —  Comme  testes  fu- 
rieuses. 

De  même  la  préposition  de  :  Rien  trop. 

Faire  employé  pour  éviter  la  répétition  d'un  verbe,  précédent  :  le  n'en  cognois- 
sois  pas  seulement  le  nom,  ny  ne  fais  encore  le  corps. 

Aller  employé  comme  auxiliaire,  auquel  cas  le  verbe  qui  suit  est  au  participe 
présent  :  Ceux  qui  nous  vont  instruisant. 

Ils,  vous,  remplaçant  le  pronom  indéfini  on  :  Ils  disent  à  ceux  auec  qui  vous  estes. 

On  s'écrivant  fréquemment  l'on,  Ion  :  l'on  m'aprint;  —  à  l'aduenture  les  estime  Ion. 

Aucun,  nul,  ayant  le  sens  affirmatif  chaque  fois  qu'une  négation  ne  les  accom- 
pagne pas  :  Aucuns  me  conuient  d'escrire;  —  Exemple  aussi  remarquable  que  nul 
des  précédents. 

Dans  l'emploi  de  ne...  pas,  l'un  de  ces  deux  mots  est  souvent  omis  :  Affin  que 
ie  ne  parle  de  luy;  —  Est-ce  pas  faire  vne  muraille  sans  pierre. 

Ainsin  mis  pour  ainsi  devant  un  mot  commençant  par  une  voyelle  :  ainsin  il 
aduint;  —  en  pareil  cas  on  trouve  également  ains  :  ains  instimire. 

L'affixe  privatif  in  ou  im  est  emploj-^é  avec  nombre  de  mots  qui  ne  le  compor- 
tent plus  aujourd'hui  :  ineloquent;  impremeditement  (sans  préméditation). 

Orthographe.  — La  différence  d'orthographe  entre  l'édition  de  1588  et  celle  de 
l'ex.  de  Bordeaux  d'une  part,  et  l'orthographe  de  l'édition  de  1595  de  l'autre, 
est  très  sensible,  surtout  dans  les  additions  de  cette  dernière  qui  se  rapproche 
beaucoup  plus  de  l'orthographe  actuelle;  elle  se  ressent  très  manifestement  de 
la  surveillance  exercée  par  M'"  de  Gournay  sur  l'impression  de  cette  édition. 
Néanmoins,  dans  celle-ci,  comme  dans  les  précédentes,  les  fautes  indéniables 
d'impression  sont  fort  nombreuses;  dans  cette  catégorie,  nous  rangeons  entre 
autres  les  mots  qui  dans  une  même  page  se  rencontrent  avec  des  orthographes 
différentes,  tels  que  enfants  et  enfans  (III,  664,  1  et  9j,  plustot  et  plustost  (III, 
670,  12  et  15),  et  ils  sont  légion. 

Certains  mots  que  nous  écrivons  en  deux  ou  plusieurs  mots,  avec  ou  sans  trait 
d'union,  s'écrivent  en  un  seul  et  réciproquement  :  Dequoy,  trestout,  par  ce  que, 
bon-heur,  bon  heur.  —  Ti^ès  marque  du  superlatif  faisant  indifféremment  corps 
ou  ndn,  et  dans  ce  dernier  cas  presque  toujours  uni  à  lui  par  un  trait  d'union, 
avec  l'adjectif  ou  adverbe  auquel  il  se  rapporte  ;  Tres-desagreable,  tresdesagreable 
ou  1res  désagréable;  tres-aduantageusement,  tresaduantageusement  ou  très  aduan- 
tageusement. 

Le  même  mot,  souvent  à  peu  d'intervalle,  s'écrit  de  diverses  façons  ;  Dit,  dy, 
dict,  deit,  dist;  —  conte,  comte,  compte;  —  i^ang,  reng,  ranc. 

Lettres  w  et  u  employées  l'une  pour  l'autre  :  u  si  la  lettre  est  majuscule  ou  ini- 
tiale d'un  mot,  u  si  elle  ^t  à  l'intérieur  :  ay  lecteyr;  —  t-n  Heure. 

Substitution  de  lettres  et  de  diphtongues  les  unes  aux  autres  :  a  pour  e,  et  ré- 
ciproquement :  accidant,  harengue ;  —  cpour  ch,  pour  q,  pour  s,  cercher,  donq,  de- 
fence;  —  e  pour  ai  :  fresche;  —  f  pour pA,  orthografe ;  — g  pourj,  magesté;  —  i  pour 
j,  et  réciproquement;  lorsque  deux  i  se  suivent,  le  dernier  se  transforme  alors  en 
j  :  ie,  Dij;  —  i  pour  é  :  cerimonie;  —  o  pour  ou  :  formi;  —  t  pour  c  :  antien; 
—  s  pour  X  :  pris;  —  u  pour  o,  pour  eu  et  ou,  et  réciproquement  :  vmbre,  rigur, 
concurre,  receu;  —  y  pour  i,  surtout  à  la  fin  des  mots  :  yure,  m.oy,  luy;  —  ai  mis 
pour  a  :  Montaigne,  compaignîe ;  —  eu  pour  u  :  seureté;  —  ie  pour  e  :  legier;  — 
ai  et  oy  pour  ai  :  François,  i'estois,  i'estoys;  —  ou  pour  eu  :  treuue;  —  ui  pour 
i  :  vuide,  etc. 

S,  X,  2  employés  indifféremment  comme  marque  du  pluriel  :  nos,  noz;  lois,  loix. 

Addition  de  lettres  parasites  provenant  d'étymologie  vraie  ou  fausse  :  b  :  fieb- 
ure;  —  c  :  plainct;  —  d  :  aduenture;  —  f:  vifue;  —  g  :  cognoistre;  —  h  :  au- 
theur;  —  l  :  tiltre;  —  n  :  besongne;  —  p  :  nopces;  —  s  :  mesme;  —  u  :  guain,  etc. 

Suppression  du  T  final  au  pluriel  de  certains  noms  :  enfans,  mas,  precedens. 

Suppression  du  t  euphonique  :  sera-il,  y  a  il,  pour  •  sera-t-il  »,  «  y  a-t-il  »  ;  son 
remplacement  parfois  par  V  ou  l  :  fera-Von  ou  fera  Ion,  pour  «  fera-t-on.  » 


NOTE  SUR  LA  LANGUE  DE  MONTAIGNE.  -  G.72b 

Suppression  fréquente  de  lettres  doubles  :  home,  feme,  haie,  frape,  balre,  etc. 
Etc.,  etc. 

Il  est  à  observer  que  ces  modifications  n'ont  aucune  influence  sur  la  prononcia- 
tion qui,  pour  la  plupart  des  mots,  est  celle  de  nos  jours. 

Accents.  —  L'accent  circonflexe  n'existe  pas  :  ame,  pastre. 

L'accent  grave  ne  se  trouve  que  sur  l'a  préposition,  ou  sur  où  adverbe  :  à  moy, 
où  est-il. 

L'accent  aigu  ne  se  met  que  sur  \'é  des  syllabes  finales  où  il  n'est  pas  muet  : 
aimé,  aimée,  capacité,  dés  (dès  que),  es;  même  dans  ce  cas  (aux,  dans  les)  on  l'omet 
d'ordinaire  lorsque  la  syllabe  se  termine  par  s,x  on  z  :  authorité,  authoritez. 

II  est  fait  assez  fréquemment  usage  du  tréma  sur  l'é  et  sur  l'u  :  poëte,  deuc, 
loilange,  rouage. 

Ponctuation.  —  Les  phrases  sont  courtes,  trop  parfois  au  préjudice  du  sens 
qui  gagnerait  à  plus  de  liaison  ;  le  point  et  virgule  est  fréquent,  mais  presque 
toujours  remplacé  par  deux  points;  les  virgules  sont  prodiguées  outre  mesure,  sur- 
tout dans  l'édition  de  1595;  et  ce  sur  la  recommandation  expresse  de  l'auteur  qui, 
pour  son  propre  compte,  s'en  abstient  d'ordinaire  quand  c'est  lui-même  qui  écrit. 

Dans  le  principe,  Montaigne  s'en  était  remis  complètement  à  ses  imprimeui-s  de 
ces  détails  d'orthographe  et  de  ponctuation,  en  lesquels  lui-même  se  reconnaît  «  peu 
expert  en  l'vn  et  en  l'autre  »  (III,  412).  Vers  la  fin,  uniquement  occupé  à  par- 
faire son  livre,  il  y  prête  davantage  attention,  d'où  cette  note  écrite  de  sa  main 
au  verso  du  titre  de  l'exemplaire  de  Bordeaux  en  vue  de  la  réimpression  de 
l'ouvrage,  note  qui  résume  sa  manière  de  voir  en  la  matière,  et  donne  un  spéci- 
men intéressant  de  sa  propre  orthographe  : 

Montre  montrer  remontrer  etc.  escriues  les  sans  (s)  a  la  differance  de  monstrç 
monstrueus 

cest  home  ceste  famé  escriues  le  sans  (s)  a  la  differance  de  c'est  c'estoit 

ainsi  mettes  le  sans  (n)  quand  une  voyelle  suit  et  aueq  (n)  si  c'est  vne  consonante 
ainsi  marcha  ainsin  alla  (Montaigne  dit  le  contraire  de  ce  qu'il  veut  dire,  mais 
les  deux  exemples  qu'il  donne  l'indiquent  sans  erreur  possible). 

campaigne  espaigne  gascouigne  etc.  mettes  vn  (t)  dauant  le  (g)  corne  a  montaigne 
non  pas  sans  (i)  campagne  espagne 

ne  mettez  en  grande  lettre  que  les  noms  propices  ou  au  moins  ne  diversifies  pas  corne 
en  cet  examplere  que  vn  mesme  mot  soit  tantost  en  grande  lettre  tantost  en  petite 

la  prose  latine  grecque  ou  autre  estrangiere  il  la  faut  mettre  parmi  la  prose  fran- 
çoise  en  caractère  différant  les  vers  a  part  et  les  placer  selon  leur  nature  pentamet- 
tres  saphiques  les  demi  vers  les  comancemans  au  bout  de  la  ligne  la  fin  sur  la  fin  en 
cet  examplere  il  y  a  mille  fautes  en  tout  cela 

Mettes  règles  régler  non  pas  reigles  reigler. 

Suiues  lorthografe  antiene 

outre  les  corrections  qui  sont  en  cet  examplaire  il  y  a  infinies  autres  a  faire  de 
quoi  limprimeur  se  pourra  auiser,  mais  regarder  de  près  aus  poincts  qui  sont  en  ce 
slile  de  grande  importance 

sil  treuue  vne  mesme  chose  en  mesme  sens  deus  fois  qu'il  en  oste  l'vne  ou  il  verra 
qu'elle  sert  le  moins 

c'est  vn  langage  coupé  qu'il  n'y  espargne  les  poincts  et  lettres  maiuscules.  Moi 
mesme  ai  failli  souuant  a  les  oster  et  a  mettre  des  comma  (deux  points)  ou  il  faloit 
vn  poinct. 

qu'il  voie  en  plusieurs  lieus  ou  il  y  a  des  paraniheses  s'il  ne  suffira  de  distinguer 
le  sens  aueq  des  poincts. 

quil  mette  tout  au  long  les  dates  et  sans  chiffre. 


Nota.  —  Les  mots  du  Glossaire  en  italique  égyptienne  sont  ceux  des  Essais; 
ils  sont  écrits  tels  qu'on  les  y  trouve,  par  suite  :  1'/  est  toujours  substitué  au  J 
et  ru  et  le  V  le  sont  l'un  à  l'autre,  U  s' employant  dans  le  corps  des  mots,  et  V  au 
commencement.  En  outre  les  accents  sur  les  e  font  défaut,  sauf  dans  les  syllabes 
finales  dont  l'e  n'est  pas  muet. 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE 


GLOSSAIRE 
des  mots  et  locutions  qui  se  trouvent  dans  les  Essais 

et  sont  aujourd'hui  tombés  en  désuétude  ou  peu  usités,  dont  le  sens  s'est  mo- 
difié, que  l'auteur  emploie  dans  une  acception  qui  lui  est  propre,  ou  dont  l'ortho- 
graphe actuelle  est  quelque  peu  différente  (un  grand  nombre  par  suite  de  l'u- 
sage, quelques-uns  par  faute  évidente  d'orthographe  de  l'auteur  ou  d'impression). 


A  ce  que.  Pour  que. 

A  certes.  Tout  de  bon,  sincèrement. 

A  coup.  Tout  à  coup. 

A  donc,  adonques.  Alors. 

A  escient.  En  connaissance  de  cause. 

A  Venuy  de.  Malgré,  à  rencontre  de. 

A  mesme  que.  A  mesure  que. 

A  mont.  En  haut,  en  remontant. 

A  quoi.  Pourquoi,  à  quoi  faire. 

A  sa  poste.  A  son  gré,  à  sa  conve- 
nance. 

A  tous  les  iours.  En  l'état  ordinaire. 

A  tout,  atout.  Avec. 

A  val.  En  bas,  vers  la  vallée,  en  des- 
cendant. 

Aage.  Temps  actuels,  époque,  âge. 

Abbois  (estre  aux),  (rendre  ses).  — 
Renoncer;  mourir,  n'en  pouvoir  plus. 

Ablactit.  Ablatif. 

Abrier.  Abriter,  couvrir. 

Abstersiue.  Qui  dissipe,  fait  disparaî- 
tre, nettoie. 

Abstruse.  Abstraite,  difficile  à  enten- 
dre, à  concevoir. 

Abutter  (s').  Viser,  tendre  à  un  but. 

Accession.  Addition,  augmentation. 

Accessoire.  Conjoncture,  accident, 
danger,  difficulté. 

Accointances  domestiques.  Servi- 
teurs. 

Accointer.  Joindre.  —  S'accointer.  Se 
familiariser,  se  lier  intimement. 

Acconsuiuy.  Atteint. 

Accoucher  (s').  Accoucher. 

Accouer.  Lier,  attacher  à  la  queue  l'un 
de  l'autre  comme  des  chevaux  que  l'on 


mène  à  la  file.  —  Accoué,  conjoint. 

Accouplage.  Action  d'accoupler. 

Accoustrer.  Accommoder. 

Accoustumance,  accostumance.  Ac- 
tion de  s'accoutumer. 

Accoustumer  vne  chose.  S'y  accou- 
tumer. 

Accroissance ,  accroist.  Accroisse- 
ment. 

Acharné.  Attaché  à  la  chair. 

Acquest.  Acquisition,  profit,  gain. 

Addonner  (s').  S'attachera  quelqu'un. 

Adestrer.  Accompagner. 

Adirer.  Égarer,  perdre. 

Adminicule.  Superfétation  sans  impor- 
tance. 

Adombrer.  Représenter. 

Adresser.  Redresser,  diriger. 

Aduantageux.  Hautain,  impérieux. 

Aduenement.  Ce  qui  advient,  événe- 
ment. 

Aduenir.  Parvenir.  —  Aduenir  (s'), 
s'auenir.  S'accorder. 

Aduenture  (à  V).  Peut-être,  quoi  qu'il 
en  soit. 

Aduersaire.  Contraire. 

Aduertance.  Surveillance,  attention. 

^quable.  Égal. 

Aéré.  Qui  est  d'air,  qui  vit  dans  l'air. 

Attady  après.  Languissant  de. 

Atfaireux.  Affairé. 

Affecter.  Souhaiter,  rechercher. 

Afferir.  Convenir,  appartenir,  con. 
cerner. 

Affermer.  Affirmer. 

Affiner.  Tromper,  décevoir. 

Affoler.  Déprécier,  nuire,  endommager, 
profaner;  rendre  fou. 


G.  728 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


Attolir.  Affoler. 

Affreré.  Uni  comme  à  un  frère. 

Affréter.  Lier,  attacher,  accrocher. 

Atfriandi.  Affriandé. 

Affronteur.  Effronté,  hypocrite. 

Affuster.  Aiguiser,  ajuster,  disposer. 

Agréer  (s').  Avoir  pour  agréable. 

Aguet  (à').  De  parti  pris.  —  Marcher 
d'aguet.  Marcher  avec  précaution, 
en  se  tenant  sur  ses  gardes. 

Aban.  Effort  pénible. 

Ahanner.  Faire  un  effort  pénible,  souf- 
frir, fatiguer. 

Abeurter.  Heurter. 

Ainçoys.  Mais  plutôt. 

Ains.  Mais. 

Ainsi  comme  ainsin.  Dans  tous  les  cas, 
d'une  manière  comme  d'une  autre. 

Ainsin.  Aussi.  —  Par  ainsin.  Par  là, 
en  conséquence. 

Airte  (à  V).  Au  guet,  sur  ses  gardes, 
en  plein  air. 

Aiser  (s').  Diminuer,  devenir  aisé. 

Aisnage.  Aînesse. 

Aixieu.  Essieu. 

Alaigresse.  Agilité. 

Allégation.  Citation. 

Alongeail.  Addition. 

Alternations.  Alternatives. 

Amazonien.  Qui  était  le  propre  des 
Amazones. 

Ambasse.  Ambassade. 

Amenrons  (nous).  Nous  amènerons. 

Amette.  Petite  àme. 

Amiable.  Aimable. 

Amorcber.  Amorcer. 

Amusoire.  Amusement. 

Anatomie  secbe.  Squelette. 

Androgyne.  Qui  réunit  les  deu.\  sexes. 

Animal,  animant.  Animé,  qui  a  une 
àme. 

Anonchalir.  Amollir. 

Aperceuance.  Perception. 

Aperceuoir.  Percevoir. 

Apoltrony.  Accoutumé  à  la  paresse, 
énervé. 

Aposime,  aposeme.  Décoction. 

Apostée.  Simulée. 

Apostume,  aposteme.  Abcès. 

Appaouurir,  apouurir  (s').  S'appau- 
vrir. 

Apparier.  Égaler,  comparer. 

Apparoir.  Apparaître. 

Appaster.  Entretenir. 

Appendicuîe.  Accessoire  sans  valeur. 

Apperceuance.  Intelligence,  perspica- 
cité. 

Appeter.  Désirer  fortement  par  ins- 
tinct; soutirer. 


Appetisser.  Diminuer,  rapetisser. 

Appiler.  Empiler.  —  S'appiler  (s').  Se 
ramasser,  se  rassembler  sur  soi-même, 
s'entasser. 

Apprantisse.  Qui  convient  à  un  ap- 
prenti. 

Apprebender.  Comprendre,  conce- 
voir. 

Apprebension.  Imagination,  concep- 
tion, compréhension. 

Apprentit,  apprentis.  Apprenti. 

Approuuer.  Faire  approuver,  prouver. 

Appuyer.  Résister. 

Apres  à.  A. 

Araigne.  Araignée. 

Ardu.  Difficile,  délicat. 

Argolet.  Arquebusier  à  cheval. 

Aristippique.  Qui  est  propre  à  Aris- 
tippe. 

Aronde,  arondelle.  Hirondelle. 

Arquebouse.  Arquebuse. 

Arrest.  Constance. 

Arrbe.  Marque,  témoignage. 

Arriuée  (d').  Tout  d'abord. 

Arrouté  (estre).  Être  en  route,  en 
chemin,  en  train. 

Ars,  arse.  Brûlé,  être  en  feu. 

Aftialiser.  Régler  par  l'art. 

Artiste.  Qui  crée,  qui  agit,  qui  est  fait 
par  ou  avec  art,  artificiel. 

Asnier.  Anier. 

Aspergez.  Goupillons. 

Assagir.  Rendre,  faire  devenir  sage. 

Assault.  Assaille,  livre  assaut. 

Assener.  Frapper  d'aplomb,  placer. 

Asseons-nous.  Asseyons-nous,  attri- 
buons-nous. 

Assenerant.  Affirmatif,  donnant  assu- 
rance. 

Assiduel.  Assidu. 

Assignations.  Rendez-vous. 

Assigné  à.  Livré  à,  rangé. 

Assuef action.  Habitude. 

Asteure,  asture.  A  cette  heure. 

Astrologien.  Astronome. 

Ataraxie.  Tranquillité  parfaite,  séré- 
nité, impassibilité. 

Attendre  (s').  Tendre  à,  s'appliquer, 
s'intéresser,  espérer,  pratiquer. 

Attifet.  Coiffure  de  grande  dame  au 
XVI*  siècle. 

Attouchement  (F).  Le  sens  du  toucher. 

Attourner.  Orner,  parer. 

Attrepipance.  Modération,  réserve. 

Attrempé.  Tempéré. 

Aucun,  aucunement  {sans  négation). 
Quelqu'un,  quelque,  en  quelque  sorte. 

Aulmones,  aumosnes.  Établissements 
d'assistance. 


GLOSSAIRE.      AUT. 


G.729 


Autant.  Aussi.  — Boire  d'autant.  Boire 
beaucoup. 

Autour.  Sur,  à  propos. 

Auachir.  Rendre  lâche,  débiliter. 

Aualée  (bride).  A  bride  abattue. 

Aualer,  aualler.  Renverser,  jeter  à 
terre;  subir;  comprendre,  admettre. 

Auant-ieu.  Prélude. 

Auau.  Dans  la  direction  de. 

Aueindre.  Atteindre. 

Auemr(s').  Se  joindre,  s'allier,  se  con- 
venir. 

Auisement.  Délibération. 

Auoyer.  Diriger,  être  en  route  {opposé 
de  dévoyer). 


Babouin.  Singe,  enfant,  écolier. 

Badin.  Ecervelé,  jocrisse. 

Baguenaudant.  S'amusant. 

Bagues  sauues.  Sans  dommages. 

Bailler.  Donner,  attribuer. 

Baisse.  Terrain  affaissé,  vallée. 

Balbucie.  Balbutiement. 

Balieure.  Lèvre  inférieure. 

Baliuernant.  S'amusant. 

Baller.  Danser. 

Balote.  Petite  balle  servant  à  exprimer 
les  suffrages. 

Bande  (sergent  de).  Officier  qui  ran- 
geait les  troupes  en  bataille. 

Bandé.  Tendu,    serré,  subtil,  recher- 
ché. 

Barbaresque.  Barbare. 

Barbe  de   paille.  De  la  '  paille   sans 
grains. 

Barbier.  Barbeau,  poisson. 

Barbotant.  Murmurant. 

Barbottage.  Marmottage. 

Bardelle.  Sorte  de  bât  fait  de  toile  et 
de  bourre  pour  monter  à  âne. 

Bardes.  Caparaçons,  armure  des  che- 
vaux de  gens  de  guerre. 

Barguinage.  Action  de  marchander, 
d'où  hésitation  à  prendre  un  parti. 

Barragouin.    Langage    inintelligible, 
barbare. 

Bas  (vin  au).  Le  vin  dans  un  tonneau 

touchant  à  sa  fin. 
Basseté.  Bassesse. 
Bastant.  Suffisant. 
Bastelage.  Comédie,  bouffonnerie. 
Basteler.  Faire  le  bateleur,  le  bouffon, 
pérorer   à    perte    de   vue    et  sans 
motif. 
Basteleresque.  De  bateleur. 


Baster.  Suffire.  —  Baste.  Il  suffit,  c'est 
assez. 

Bastiment.  Action  de  bâtir,  construc- 
tion. 

Bastine.  Bât  rembourré. 

Bataille.  Armée,  troupe. 

Batre.  Battre  en  brèche. 

Battelée.  Charge  d'un  bateau. 

Battures.  Coups  violents. 

Bauasser.  Bavarder,  babiller,  folâtrer. 

Baye.  Baliverne,  moquerie,  frivolité. 

Bazocbe.    Juridiction   des  clercs  du 
palais. 

Beau-fait.  Haut  fait. 

Bêchée.  Becquée. 

Béer.  Ouvrir  la  bouche,  s'étonner  ;  par 
ext.  soupirer,  désirer. 

Belistresse.  Féminin  de  bélitre,  men- 
diant, misérable,  honteux. 

Bellique.  De  guerre,  belliqueux. 

Beluter.  Bluter,  passer  au  tamis. 

Bénéfice.  Charge  ecclésiastique  pour- 
vue d'un  revenu. 

Beneficence.  Action  de  bien  faire,  bien- 
faisance. 

Beniuolence,   beneuolence.   Bienveil- 
lance. 

Bergaaiasque.    Langage    grossier   de 
Bergame. 

Besoigne,  besouigne.  Besogne. 

Besongnes  de  nuit.  Attirail  de  nuit. 

Bide.  Bigle,  louche. 

Bien-facteur.  Bienfaiteur. 

Bienueigner.    Saluer,  accueillir  avec 
bienveillance,  souhaiter  la  bienvenue. 

Biffe.   Moquerie. 

Bigue.  Troc,  échange. 

Biborre.  Aïe!    Hue!     Holà!    Au    se- 
cours! 

Blanc  (deuoyer  du).  Manquer  le  but. 

Blandices.  Attraits,  càlineries. 

Boccon.  Morceau. 

Boete.  Cassette  particulière. 

Boire  d'autant,  à  lut.  —  Boire  beau- 
coup, faire  raison  en  buvant. 

Bois  (rompre  vn).  Rompre  une  lance, 
combattre. 

Bolus.   Composé  pharmaceutique,  pi- 
lule. 
Bon  de  (estre).  Être  le  propre,  le  fait 
de. 

Bonasse.  Bénin;  se  dit  également  de 
la  mer  quand  elle  est  calme. 

Bonnetade.    Salutation    à    coups    de 

bonnet. 
Bordeau,  bordel.  Maison   de    débau- 
che. 
Bossé.  Bossu. 
Boucler.  Bouclier. 


G.730 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


Boule  veue  (à).  A  première  vue. 

Bouquer  (faire).  Faire  embrasser  de 
force.  Au  figuré  faire  enrager  quel- 
qu'un, l'obliger  à  céder. 

Bourrellement.  Torture. 

Bourrellerie.  Art  du  bourreau. 

Boursier.  Celui  qui  tient  la  bourse, 
qui  paie. 

Boutée.  Poussée,  impulsion,  saillie, 
élan;  boutades,  intervalles. 

Boute-feu.  Incendiaire. 

Boute-bors.  Action  de  mettre  ou  d'être 
mis  dehors  ;  de  débouter  ou  d'être  dé- 
bouté; présence  d'esprit;  et  par  ex- 
tension réplique,  repartie. 

Bouteilles  (reuenir  à  ses).  Revenir  à 
son  sujet. 

Brague.  Caleçon.  —  Bragues  nettes. 
Sans  se  salir. 

Bragueries.  Jeux,  divertissements. 

Bran.  Fi! 

Branle.  Mouvement. 

Braue.  Beau,  brillant. 

Brauerie.  Bravoure,  courage  ;  bravade  ; 
arrogance,  fierté. 

Brefuement.  Brièvement. 

Brebaigne.  Femme  ou  femelle  stérile. 

Breuet.  Billet,  note,  amulette. — Breuet 
à  cacbettes.  Billet  doux. 

Breueter.  Abréger,  annoter,  commen- 
ter. 

Bribes.  Restes,  détritus. 

Bride.  Retenue,  modération. 

Brocardai.  Brocart,  brocatelle. 

Brocbe  (couper).  Interrompre,  couper 
la  parole,  fermer  la  bouche. 

Brocber.  Piquer. 

Brode.  Lâche,  efféminé,  languissant, 
mou. 

Brouée.  Brouillard  épais,  brume. 

Brouillars.  Brouillon,  écrit  à  mettre 
au  net. 

Brouillas.  Brouillard. 

Brouillis.  Dissensions,  troubles  inté- 
rieurs. 

Brutalité.  Stupidité,  bêtise. 

Buffle.  Soufnet. 

Bute.  Butte,  but,  cible. 


C. 


Ça  bas.  Ici-bas. 

Cabdet.  Cadet. 

Cagnard,  caignard.  Coin  où  les  chiens 

se  rassemblent,  chenil. 
Caler.  Rabattre  de  ses  prétentions,  s'a- 
baisser, céder. 


Cane  (faire  la).  Faire  un  plongeon,  se 
jeter  à  plat  ventre,  se  dérober. 

Cannes.  Canaux,  tuyaux. 

Cap  à  pied  (de).  De  pied  en  cap. 

Cape.  Manteau  court  avec  capuchon 
tenue  de  guerre. 

Capette.  Diminutif  de  cape. 

Capirotade,    capilotade.    Jlets    com- 
posé de  viandes  rôties  de  diverses 
sortes. 

Capitalement.  D'une  façon  capitale. 

Cappari.  Par  la  chèvre  (juron  italien). 

Capriole.  Cabriole. 

Carole.  Danse,  promenade  en  rond. 

Carrière  (prendre).  Faire  galoper  un 
cheval  à  toute  vitesse. 

Cassez.  Vieux,  ne  se  soutenant  plus. 

Casuel.  Qui  arrive  par  accident,  par 
occasion. 

Casuellement.  Accidentellement,  occa- 
sionnellement. 

Caterre.  Catarrhe.  —  Ca terreuse.  Qui 
tient  du  catarrhe. 

Catbedrant.  Celui  qui  enseigne. 

Catze.  Pennis. 

Causer.  Demander  la  cause.  —  Causeur. 
Chercheur  de  causes. 

Cauterizé.  Torturé,  ulcéré. 

Caution.  Précaution. 

Céans.   Ici. 

Cependant  que.  Pendant  que. 

Ceps.  Liens,  chaînes,  entraves. 

Cercber.  Chercher. 

Certain.  Immobile,  fixe. 

Ceruelle.  Idée,  émotion,  inquiétude. 

Cestuy,  cettuy.  Celui. 

Ceux-icy.  Ceux-ci. 

Cbafouré.  Défiguré, barbouillé;  confus, 
perverti. 

Cbagreigne,  cbagrigne.  Chagrine. 

Chaille  (ne  vous).  N'ajez  souci,  que 
vous  importe. 

Cbaire.  Chaise. 

Cbalandise.  Affiuencede  chalands,  vo- 
gue. 

Cbalemie.  Chanson  rustique. 

Cbaloir.  Importer,  soucier. 

Cbamailler.  Se  ruer  sur  quelqu'un,  le 
frapper. 

Cbampisse,  féminin  de  cbampi.  Malin, 
goguenard. 

Cbanger  (aller  au).  Quitter  une  proie, 
une  piste  pour  en  suivre  une  autre. 

Cbansons  de  Dauid.  Psaumes. 

Cbarriotte.  Chariot. 

Chartes.  Cartes  à  jouer  et  autres. 

Chartre.  Régime  particulier. 

Cbartre.  Maladie  de  langueur. 

Cbascuniere.  Chez  soi. 


GLOSSAIRK.        CHA. 


G.73t 


Chat  en  sac  (acheter).  Acheter  sans 
voir,  de  conliance. 

Chaulde  (sur  la).  Au  moment  même, 
sur-lc-chanip. 

Cbaulde-coUe.  Le  premier  feu  de  la 
colère. 

Ghault.  Chaud. 

Chault  (il),  chaut  (il).  Il  soucie,  il  im- 
porte. 

Chausses.  Culotte. 

Chaussetier.  Confectionneur  de  cu- 
lottes et  de  bas. 

Chaussure.  Vêtements  de  la  partie  in- 
férieure du  corps. 

Chef.  Promontoire.  —  A  chef.  A  bout. 

-  Au  chef.  A  la  fin. 
Cheneuiere  (épou vantail  de).  Manne- 
quin pour  éloigner  les  oiseaux. 

Cheute.  Chute.  —  Féminin  de  chu. 
Tombée. 

Cheualerie.  Cavalerie. 

Cheuance.  Le  bien  que  l'on  possède. 

Cheuet  (hausser  le).  Renchérir  la  mar- 
chandise. 

Cheuir.  Venir  à  bout,  terminer,  éviter, 
jouir,  disposer. 

Cheure  (prendre  la).  Prendre  de  l'hu- 
meur, se  fâcher,  se  mettre  en  colère. 

—  Emporter  à  la  cheure   morte. 
Emporter  sur  le  dos. 

Chîennine.  Comme  font  les  chiens. 

Chopant.  Heurtant,  bronchant,  trébu- 
chant. 

Choqué.  Réfuté. 

Choué.  Frustré,  déçu  de  son  espoir, 
trompé. 

Gicûe.  Ciguë. 

Cigongne.  Cigogne. 

Cil.  Celui. 

Circensez  (ieux).  Jeux  de  cirque. 

Circonscription.  Limitation,  action  de 
refréner. 

Circonstances  de  Dieu.  Particularités 
relatives  à  Dieu. 

Citoyen.  Concitoj'en. 

Clairet.  Nom  du  vin  de  Bordeaux. 

Clause.   Phrase,  proposition,  passage. 

Clerc.  Lettré,  savant,  habile. 

Ciergesses.  Femmes  de  clercs,  savantes. 

Climacide.  Femme  servant  de  marche- 
pied. 

Clin.  Mouvement. 

Coches.  Eclisses  servant  à  comprimer 
la  taille. 

Coerction.  Répression,  châtiment. 

Cogitation.  Pensée,  réflexion. 

Cognoissans.  Personnes,  gens  de  con- 
naissance. 

Coiement.  Voir  Coyement.  ^ 


Coint.  Joli,  beau,  galant,  ajusté. 

Colle.  Colère,  désir. 

Collège.  Congrégation,  couvent. 

Collier.  Collet  à  prendre  les  lièvres. 

Colligence,  colligance.  Liaison,  union 
intime,  connexion. 

Colourine.  Coulevrine. 

Combien  que.  Bien  que. 

Comme.  Comment,  combien. 

Comment  que.  De  quelque  manière 
que. 

Commer.  Dire,  raconter. 

Commettre.  Confier,  préposer  à. 

Commis.  Abandonné,  confié. 

Commourant.  D'accord  pour  mourir. 

Commune  (la).  Le  commun,  le  plus 
grand  nombre;  la  généralité;  le  peu- 
ple, les  plébéiens;  la  populace. 

Compaîgnon.  Compagnon,  égal. 

Compères.  Nom  que  se  donnaient  en- 
tre eux  les  bourgeois. 

Competemment.  Sciemment,  en  con- 
naissance de  cause. 

Complexion.  Disposition  d'esprit. 

Composer  (se).  Se  préparer. 

Conciergerie.  Prison. 

Concilier.  Faire  alliance  avec. 

Condigne.  Très  digne,  méritant. 

Condiment.  Assaisonnement. 

Conditions.  Qualités  bonnes  ou  mau- 
vaises, mœurs,  genre  de  vie. 

Condolu.  Qui  participe  à  la  douleur  de 
quelqu'un,  qui  se  lamente  de  compa- 
gnie. 

Condonner.  Concéder,  permettre,  ex- 
cuser. 

Con fabulation.  Entretien  famiher. 

Conferance,  conférence.  Relation, 
rapport;  conversation;  discussion. 

Conférer.  Contribuer,  apporter;  corn 
parer;  obtenir  un  résultat. 

Confidence.  Courage,  résolution,  con- 
fiance. 

Conforter.  Affermir,  réconforter. 

Confrairie.  Société  organisée. 

Congé.  Autorisation,  permission. 

Conioui.  Se  réjouir  avec  quelqu'un, 
auprès  de  quelqu'un. 

Conniller.  Se  dérober  comme  un  lapin 
dans  son  terrier;  au  figuré  chercher 
des  échappatoires,  prendre  des  dé- 
tours. 

Connillieres.  Terriers,  garenne  ;  au  fi- 
gurée subterfuges. 

Consacrer.  Sacrifier,  immoler. 

Consent.  Témoin;  complicf^;  qui  con- 
vient; consentant. 

Conserue.  Esprit  de  conservation,  d'é- 
conomie. 


G.732 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


Conseruer.  Préserver. 

Considérable.  A  considérer. 

Considération.  Préjugé. 

Considéré.  Retenu,  réfléchi,  prudent; 
d'où  inconsidéré  (étourdi). 

Consorce.  Société,  communauté. 

Conspiré.  Conjuré. 

Constamment.  Avec  constance. 

Consubstantiel  à.  Partie  intégrante  de. 

Consus.  Consul   (faute   d'impression). 

Contadin.  Paysan. 

Contemporanée.  Contemporaine. 

Continemment.  Avec  continence. 

Continent  auec.  Tenant  à. 

Contraction.  Exiguïté,  étendue  res- 
treinte. 

Contraster.  Blâmer,  contredire,  se 
mettre  en  opposition. 

Contrebas  (tondre).  Aller  tout  à  fait 
mal. 

Contrecarre.  Opposition,  résistance 
ouverte. 

Contremont.  De  bas  en  haut. 

Contrepoil  (à).  Au  rebours*,  en  sens 
contraire. 

Contreual.  De  haut  en  bas. 

Controuers.  Controversé. 

Contumelieux,  euse.  Outrageux,  inju- 
rieux. 

Conuenance.  Convention. 

Conuenir.  S'accorder. 

Conuersation.  Relation,  commerce. 

Conniue.  Repas,  festin. 

Conuoiement.  Action  de  reconduire, 
d'accompagner. 

Coquiner.  Mener  la  vie  d'un  coquin; 
mendier. 

Cordée.  Série. 

Cornardise.  Cocuage. 

Cornes  (baisser  les).  S'humilier. 

Corneter.  Appliquer  des  ventouses. 

Corselet.  Cuirasse  légère;  soldat  qui 
en  était  armé. 

Costié,  costier.  Qui  est  à  côté. 

Couardise.  Lâcheté,  poltronnerie. 

Coucber.  Risquer.  —  Coucher  de  peu. 
Risquer  peu  de  chose.  — Coucher  de 
beaucoup.  Exagérer,  se  vanter.  — 
Coucber  de  rien  moins.  Viser,  as- 
pirer à  rien  moins. 

Coulpe.  Faute. 

Coultre.  Contre  (fer  de  charrue). 

Courant  (neud).  Nœud  coulant. 

Courir  de  poincte.  Courir  avec  impé- 
tuosité. 

Courre.  Courir,  parcourir. 

Court.  Cour  (entourage  d'un  souve- 
rain, partie  d'une  habitation).  — 
Courts.  Résidences  royales. 


Courtisane  (à  la).  A  la  mode  de  la 
cour. 

Coutille.  Épée  courte  ou  long  poignard. 
—  Coutillier.  Valet  d'armes  qui  en 
était  porteur. 

Couuert.  Renfermé,  dissimulé. 

Couuertement.  En  dessous;  à  l'abri 
des  indiscrétions. 

Couuertures.  Prétextes,  moyens  dé- 
tournés. 

Couure-chef.  Voilette  que  portaient  les 
dames. 

Couyte.  Matelas. 

Coy  (pied).  De  pied  ferme. 

Coyement.  Tranquillement,  insensi- 
blement. 

Creon.  Crayon. 

Creté.  Huppé,  en  position  élevée,  qui 
est  en  relief. 

Croist.  Croissance. , 

Crotesque.  Grotesque. 

Crouler.  Ébranler.  —  Croulement. 
ébranlement. 

Croupi.  Accroupi. 

Crouster.  Encroûter. 

Crud  (à).  A  nu. 

Crudité.  Indigestion. 

Cueus,  cueux,  queux.  Lingots. 

Cuider  (substantif).  Présomption. 

Cuider  (verbe).  Croire,  penser;  faillir; 
avoir  de  la  présomption. 

Cui  sur  pointe.  Sens  dessus  dessous. 

Cullier.  Cuillère. 

Cupiditez.  Passions. 

Cures.  Soins. 

Curieusement.  Avec  soin;  avec  pré- 
tention; de  parti  pris. 


D. 


Baguer.  Frapper  à  coups  de  dague 
(sorte  de  poignard). 

Dam  (à  son).  Tant  pis  pour  lui,  à  son 
dommage. 

Damasquinée.  Damassée. 

Dameret.  Brillant,  galant. 

Dauantiere.  Tablier  dont  les  femmes 
faisaient  usage  à  cheval.  —  Sans  da- 
uantiere. A  découvert. 

De.  Avec.  —  De  quoi,  de  mode  que. 
De  ce  que. 

Dea.  Da  (particule  servant  à  renforcer 
et  parfois  aussi  interrogative,  se  re- 
trouve dans  Oui-da). 

Deceu.  Déçu. 

Déchiffrer,  descbiffrer.  Décrire,  se 
faire  connaître. 

Déclinaison.  Déclin. 


GLOSSAIRE.      DEC. 


G.733 


Decours.  Décadence,  descente. 

Decroist.  Décroissance. 

Déduction.  Récit,  divertissement. 

Déduit,  desduit.  Divertissement,  passe- 
temps,  occupation  ;  plaisirs  de  l'a- 
mour. 

Detaux,  dettaults.  Défauts. 

Dettubler.  Découvrir,  dégager,  circon- 
cire. 

Detluxion.  Écoulement,  dépôt. 

Deformité.  Difformité. 

Defortune.  Infortune. 

Detraudev,  desfrauder.  Frustrer. 

Degré.  Rang  qu'on  occupe. 

De  la  en  hors.  Depuis  lors. 

Deliure.  Libre,  dégagé  de  soins.  —  A 
deliure.  A  l'aise. 

Démoniaque,  desmoniaque.  Possédé 
du  démon;  et  aussi  divin  dans  le  sens 
étymologique  grec. 

Deneantise.  Néant,  nullité;  état  misé- 
rable. 

Déport.  Délai. 

Deportements .  Mœurs,  actions. 

Desporter  (s'en).  S'en  défaire. 

Dequoy.  Dont,  de  ce  que. 

Deriué  de.  Provenant,  transmis. 

Desaccoustumance.  Action  de  se  dé- 
saccoutumer. 

Desbastiment.  Démolition. 

Descharger.  Dispenser.  —  Se  deschar- 
ger. Se  dégager,  se  débarrasser. 

Descbet.  Manque,  défaut,  diminution. 

Desconsoler.  Émotionner. 

Desconuenir.  Différer. 

Descouper.  Diviser  en  parties  dis- 
tinctes, répartir  en  spécialités. 

Desdite.  Dédit. 

Desemparer.  Oublier,  transgresser, 
enfreindre. 

Desfaire.  Exécuter,  mettre  à  mort. 

Desfortifier.  Détruire  les  fortifications. 

Desfortune.  Infortune. 

Desfuyte.  Défaite,  faux-fujant,  réponse 
évasive. 

Desgarcer.  Ne  pas  être  excité  par  le 
contact  de  la  femme. 

Desgater.  Faire  du  dégât. 

Desgosiller.  Égorger. 

Desgoutement.  Dégoût. 

Desieuner  (se).  Manger,  se  nourrir,  se 
régaler. 

Designer,  desseigner.  Prescrire,  or- 
donner, avoir  dessein,  entreprendre. 
—  Desseigné.  Fait  à  dessein,  préparé. 

Deslaier,  dislaier,  dilayer.  Retarder, 
remettre,  différer. 

Dés  lors  en  auant,  d'ores  en  auant. 
Dorénavant. 


Desloueure.  Dislocation. 

Desmarcher.  Reculer.  — Se  desmar- 
cher,  se  mouvoir. 

Desmettre.  Soumettre,  abattre,  abais- 
ser, descendre. 

Desmeu.  Détourné,  déplacé,  dérangé. 

Desmis.  Soumis. 

Desmonter.  Descendre,  être  renversé 
de  cheval. 

Desmordre.  Lâcher. 

Desmouuoir.  Déplacer,  faire  renoncer, 
disjoindre,  détourner. 

Desobliger  (se).  Se  débarrasser,  être 
libre  d'une  obligation. 

Despartir.  Partager,  disperser,  distri- 
buer. —  Se  despartir.  Quitter,  aban- 
donner. 
'  Despecées.  Rompues,  brisées. 

Despendre.  Dépenser,  payer. 

Despit.  Dépit,  mauvaise  humeur. 

Despiter.  Maudire. 

Desplaisant.  Fâcheux. 

Despreins  (ie).  Je  tirai  de. 

Desprendre.  Détacher,  séparer,  quitter, 
renoncer  ;  faire  oublier,  perdre  de  vue. 

Desprier  ses  prières.  Prier  pour 
qu'elles  ne  soient  pas  exaucées. 

Desrompre.  Rouer. 

Desserre.  Hardes,  défroque,  dépouille. 

Dessirer.  Déchirer. 

Dessoude  (en),  dessoute  (en).  Soudai- 
nement, tout  à  coup,  à  i'improviste; 
en  désordre. 

Destiné.  Déterminé. 

Destourbier.  Obstacle,  empêchement, 
embarras,  trouble. 

Destrancher.  Couper  par  morceaux. 

Destremper.  Modérer,  tempérer. 

Destroict.  Ressort,  étendue  d'une  juri- 
diction; territoire,  pays;  localité, 
endroit. 

Destroict  (à).  En  détresse,  en  telle  ex- 
trémité. 

Destroussement.  Ouvertement,  3irec- 
tement,  brutalement,  simplement. 

Desuoyer.  Désorienter,  égarer. 

Det.  Dé  à  jouer. 

Détailler.  Taillader,  ébrécher,  tailler 
en  pièces. 

Detraction.  Médisance,  diffamation; 
vol,  larcin. 

Deu,  deuë.  Dû,  due. 

Deult  (il).  11  est  douloureux,  pénible. 

Deuant.  Avant.  —  Deuant  que.  Avant 
que. 

Deuination.  Ce  qu'on  devine,  conjec- 
ture. 

Deuis.  Conversation,  entretien,  action 
de  deviser. 


G.734 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


Deuiser.  Discourir,  raconter. 

Dextre.  Droite,  main  droite. 

Dextrement.  Avec  dextérité. 

Dez.  Dés. 

Dialectique.  Action  de  raisonner  avec 
méthode  et  justesse. 

Dialogisme.  Sous  forme  de  dialogue. 

Dict  (il).  Il  dit. 

Die  (que  ie).  Que  je  dise. 

Differenter.  Mettre  en  opposition. 

Dif formation.  Déformation.  —  Ditfor- 
mer.  Déformer,  pervertir. 

Dilection.  Amour,  tendresse,  affection. 

Dire  (à).  De  moins.  —  Dire  (estre  à). 
Donner  à  redire.  —  Dire  (auoir  à). 
Manquer  de  quelque  cliose,  regret- 
ter. 

Disceptation.  Examen,  discussion. 

Disconuenable.  Qui  ne  convient  pas. 

Disconuenance.  Désaccord. 

Discours.  Outre  so7i  sens  ordinaire 
d'expression  de  la  pensée  :  entretien, 
conversation;  raison,  intelligence, 
entendement;  raisonnement,  juge- 
ment; opinion;  sagesse  ;  volonté  ;  su- 
périorité ;  dessein  ;  art,  artilîce,  in- 
géniosité, parti  pris. 

Discrepance.    Désaccord,  contrariété. 

Discrétion.  Discernement,  jugement, 
action  de  distinguer. 

Disertement.  Nettement,  catégorique- 
ment. 

Dispatbie,  dyspatbie.  Haine,  aversion, 
antipathie. 

Dispensation.  Manière  de  faire. 

Dispenser.  Permettre,  disposer,  ac- 
cepter; employer.  —  Dispenser  à 
(se).  Se  laisser  aller  à. 

Disposition.  Bonne  santé. 

Disposition.  État  et  aspect  des  astres 
(terme  d'astronomie). 

Dissentieuses.  Discordantes,  se  con- 
trariant. 

Dissiper.  Morceler. 

Dinars.  Étrange,  singulier. 

Diuertir.  Faire  diversion,  détourner. 

Diuertissement.  Diversion. 

Diuulsion.  Séparation. 

Doccie.  Douches. 

Doctrine.  Science  en  général,  prin- 
cipes. 

Doint  (il).  Qu'il  donne. 

Dolé.  Poli,  équarri,  construit,  aménagé, 
distribué. 

Domestique.  Familier,  qui  est  de  la 
maison. 

Donray,  donrez,  donrois,  donrons. 
Donnerai,  donnerez,  donnerais,  don- 
nerons. 


Dormart.  Dormeur. 

Doulereux.  Douloureux. 

Douloir.  Causer  de  la  douleur.  —  Se 

douloir.  Se  plaindre. 
Doux  fleurant.  Parfumé. 
Droict  (à  tort  et  à).  A  tort  ou  à  raison. 
Droicteur.  Dioiture. 
Du  tout.  Tout  à  fait. 
Duire.  Instruire  à,  conduire,  amener. 
Duit.  Dressé,  façonné,  accoutumé. 
Dy  (ie).  Je  dis. 


E. 

Eage.  Age. 

Eff actuel.  Effectif. 

Bf/ray.  Effroi. 

Ehonté.  Effronté. 

Elabouré.  Travaillé. 

Elider.  Détruire,  anéantir. 

Eloigner.  S'éloigner 

Eloise.  Éclair.  —  Au  figuré  idée,  con- 
ception. 

Embabouiner  (s').  Se  tromper  soi- 
même,  se  faire  illusion  ;  s'embarras- 
ser ;  enchanté,  épris. 

Embatre  (s').  Arriver  en  quelque  lieu; 
se  réfugier. 

Embesognement.  Sollicitude,  souci, 
occupation. 

Emblesme.  Pièce  rapportée. 

Emboire,  imboire.  Se  pénétrer,  absor- 
ber. 

Embraiser  (s').  S'embraser,  brûler. 

Embrouilleures.  Embrouillements. 

Embuffler.  Séduire,  tromper,  mener 
par  le  nez. 

Emmoncaler.  Amonceler. 

Emmy.  Parmi,  au  milieu  de. 

Emoulu.  Rude,  dangereux. 

Empenné,  empanné.  Garni  de  plumes. 

—  Tout  empanné.  Tout  d'une  pièce, 
d'un  bloc. 

Empereur  d'armée.  Général  en  chef. 
Emperiere.  Impératrice,  souveraine. 
Empescber.  Embarrasser.   —   S'em- 

pescber.  Se  lier. 
Emplacer.  Mettre  en  place,  caser. 
Emploicte.  Emploi,  dépense,  emplette. 

—  Emploiter.  Employer. 

Empoixé.  Empoissé. 

Enaser.  Écraser  le  nez. 

Encheinure.  Enchaînement. 

Encberiment.  Tendresse,  caresse  ex- 
cessive. 

Encombrier.  Encombrement,  misère, 
embarras,  accident,  empêchement. 


GLOSSAIRE.       EXC. 


G.735 


Encouardi.  Rendu  couard. 

Enci^ousté.  Revêtu,  incrusté,  alourdi. 

Endebté.  Endetté,  lié. 

Endemain.  Lendemain. 

Enfantillage.  Enfance. 

Entieler.  Mêler  de  fiel 

Enfoncer.  Approfondir. 

Enfondrant.  Où  on  enfonce,  cédant 
sous  le  poids. 

Enfondrer.  S'embourber,  se  perdre. 

Enforger.  Charger  de  fers. 

Enfourcbure.  Le  milieu  du  corps, 
l'enfourcluire. 

Enfourner.  Livrer  à.  —  A  l'enfourner. 
Au  début,  tout  d'abord. 

Enfrasquer,  infrasquer.  Embarrasser, 
empêtrer. 

Engageure.  Engagement. 

Engeance.  Progéniture,  enfants. 

Engin.  Espiit.  —  Engins,  facultés  in- 
tellectuelles; machines. 

Enginieur.  Ingénieur. 

Enhortation,  enhortement.  Exhorta- 
tion, conseil,  remontrance. 

Enborter.  Exhorter,  encourager,  con- 
seiller. 

Enquis.  Requis. 

Ensacher.  Mettre  dans  un  sac  ;  par  ext. 
entasser. 

Enseigneur.  Le  doigt  indicateur 
{terme  de  chiromancie). 

Ensemble.  Avec. 

Ensuerer.  Envelopper  d'un  suaire. 

Ensuyure.  Suivre,  poursuivre,  décou- 
ler, imiter. 

Entelecbie.  Perfection. 

Entendre  de  main  à  main.  Se  répé- 
ter, passer  de  bouche  en  bouche. 

Entourner.  Entourer. 

Entregent,  entrejent.  Civilité,  poli- 
tesse, savoir-vivre,  usage  du  monde. 

Entreget,  entreiet.  Proposition,  ou- 
verture; entrcjects  d'accord;  propo- 
sitions de  paix. 

Entregloser  (s').  Se  censurer,  se  criti- 
quer réciproquement. 

Entremise.  Occupation. 

Entretter.  Mêler,  parsemer. 

Enuis,  enuy.  Involontairement,  à 
contre-cœur.  —  A  l'enuy.  Jlalgré  la 
volonté  de,  avec  répugnance;  à  qui 
mieux  mieux. 

Epecbiste.  Qui  hésite,  sceptique. 

Equabilité.  Equité,  justice. 

Equanimité.  Egalité  d'âme. 

EquipoUer.  Equivaloir.  —  A  l'équi- 
polent.  Comme  équivalent,  en  re- 
vanche. 

Eremite.  Ermite. 


Ergotisme.  Raisonnement  captieux. 

Erratique.  Incertain,  instable,  peu  so- 
lide. 

Erre.  Train,  allure.  —  Belle  erre.  En 
grande  hâte. 

Es,  ez.  Aux,  en  les,  dans  les. 

Esbaudi.  Folâtre. 

Esboitement.  Boiterie,  claudication. 

Esbraillé.  Débraillé. 

Escarbillat.  Éveillé,  gai,  de  bonne  hu- 
meur. 

Escarcber.  Écraser. 

Escarquillement,  esquarquillement. 
Ecartement  des  cuisses. 

Eschaffaut  (en  F).  Sur  une  estrade, 
en  public. 

Escbarsement.  Chichement,  petite- 
ment, modérément. 

Escbaugette  (en).  En  sentinelle,  en 
observation;  —  lieu  d'où  l'on  sur- 
veille. 

Escheler.  Appliquer  une  échelle, 
escalader;  échelonner.  • 

Escheuer.  Echapper  à,  éviter;  termi- 
ner. 

Escient.  Exprès,  à  dessein.  —  A  es- 
cient. En  connaissance  de  cause. 

Esclarcir.  Éclairer. 

Esclatter.  Faire  éclater. 

Esclauer.  Asservir. 

Esconiurer.  Conjurer,  détourner,  éloi- 
gner. 

Escorgée.  Escourgée.  Fouet  à  lanières 
de  cuir. 

Escourter.  Tailler. 

Escot.  Éclat  de  bois,  écharde;  troupe, 
parti. 

Escrier  Crier. 

Esci^iuaillerie.  Démangeaison  d'écrire. 

Escruelles.  Écrouelles. 

Escu.  Bouclier. 

Escuyer  de  trèfle.  Valet  de  bas  étage. 

Esdirer.  Adirer,  perdre. 

Esflochement.  Dislocation. 

Esfoiré.  Relâché,  flasque. 

Esgosiller.  Égorger. 

Esgrafignure.  Égratignure. 

Esiouissance.  Jouissance. 

Eslire.  Élire,  choisir. 

Eslourdir.  Alourdir,  abêtir,  assom- 
mer. 

Esmiée.  Émiettée,  divisée. 

Esmoie  (s).  S'émeut,  s'inquiète. 

Espagnole.  Svelte,  élégant,  à  l'espa- 
gnole. 

Espandable.  Qu'on  peut  épandre. 

Esparuier.  Épervier. 

Espaule  (faire).  Prêter  son  concours, 
mettre  en  relief. 


G.736 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


Espaulettes  (par).  Par  parcelles,  en 
détail,  pas  à  pas. 

Espengle,  espleingue.  Épingle. 

Espérons  (chausser  les).  Poursuivre 
de  près. 

Espessissure.  Épaisseur. 

Espic.  Épi. 

Espices.  Cadeau,  présent. 

Espoinçonner.  Piquer,  aiguillonner, 
stimuler,  percer. 

Esprsindre.  Exprimer,  tirer,  faire  sor- 
tir. 

Esquarre.  Équerre. 

Esquart.  Écart. 

Esrené.  Éreinté,  énervé. 

Essayer.  Tenter,  éprouver,  suljir;  goû- 
ter, savourer. 

Essimer.  Affaiblir,  diminuer,  amai- 
grir. 

Essoré.  Évaporé,  libre  dans  son  essor. 

Essourdie.  Étourdie. 

Establer.  Mettre  à  l'écurie,  à  l'étable. 

Estacade,  estocade  (se  battre  en).  Se 
battre  en  duel  en  champ  clos. 

Estançon.  Etançon,  étai. 

Estançonner.  Etayer,  soutenir. 

Estât  de  (faire).  Estinier. 

Estausser.  Écourter. 

Estent.  Balle  pour  le  jeu  de  paume  :  ce 
jeu. 

Estimation.  Estime;  appréciation, 
prix,  valeur. 

Estoc.  Lignée,  filiation.  —  Par  dou- 
ble estoc.  Des  deux  côtés. 

Estomach.  Cœur. 

Estouper.  Boucher,  clore,  arrêter. 

Estour.  Conflit,  choc,  combat,  mêlée. 

Estoy  (i').  J'étais. 

Estrange.  Étranger. 

Estranger  (s').  S'éloigner,  s'écarter. 

Estrenner.  Étrenner,  gratifier. 

Estrenuer,  esternner.  Éternuer. 

Estrieu.  Étrier. 

Estrit.  Débat,  peine. 

Estrillee.  Mince,  svelte. 

Estriuer.  Quereller,  disputer,  combat- 
tre, résister  à,  témoigner  de  la  répu- 
gnance, hésiter. - 

Estroicy,  estreci.  Rétréci,  étréci. 

Estude.  Cabinet  d'affaires,  salle  de 
travail. 

Estnyé.  Servant  d'étui,  conservé. 

Ethique.  Moral,  ayant  trait  aux 
mœurs. 

Eulx.  Eux. 

Eunuche.  Eunuque. 

Exagiter.  Critiquer,  discuter. 

Exaim.  Essaim. 

Exceller.  Surpasser. 


Exercitation.  Exercice,  préparation, 
entraînement;  —  discussion  philo- 
sophique. 

Exercite.  Armée. 

Excuser.  Tolérer,  admettre. 

Exile.  Maigre,  menu,  sans  force,  ché- 
tif. 

Exinanition.  Inanition,  épuisement. 

Expeller.  Pousser  hors,  rejeter,  ex- 
pulser. 

Expertise.  Connaissance  spéciale. 

Exploit.  Action,  puissance. 

Exsuperance.  Excès,  exubérance. 

Ez.  Voir  Es. 


F. 


Façon.  Usage,  coutume. 

Faé,  taée.  Fée;  enchanté,  doué  de  pro- 
priétés magiques. 

Faict.  Fait.  —  A  taict.  Complètement, 
entièrement.  —  Au  bon  du  faict.  A 
l'heure  du  besoin. 

Faille  (qu'il).  Qu'il  manque. 

Faillir.  Faire  défaut. 

Failloit  (il).  Il  faillait,  il  manquait. 

Faineance.  Fainéantise,  paresse,  indo- 
lence. 

Faintise,  feintise.  Dissimulation,  trom- 
perie. 

Fais.  Faix.  —  Fais  de  bois.  Fagot. 

Faitardise.  Paresse,  fainéantise. 

Fanir.  Se  faner. 

Fantasie.  Fantaisie.  —  Fantasier.  Se 
laisser  aller  à  son  imagination. 

Fantastique.  Visionnaire. 

Farcesque.  Qui  tient  de  la  comédie,  de 
la  farce. 

Farseur.  Auteur  comique. 

Fascheux.  Blâmable,  manquant  d'à 
propos. 

Faucée,  faulcée.  Choc,  charge;  incur- 
sion, irruption;  rupture. 

Faucement.  Faussement. 

Faucer,  faulser.  Entacher  de  faux; 
fendre,  percer  de  part  en  part,  dé- 
foncer. 

Faudra.  Faillira,  manquera. 

Faulsit,  fausit  (il).  Il  fallut,  il  faillit. 

Fault  (il).  Il  faut,  il  manque. 

Faulx,  fauce.  Faux,  fausse,  violé. 

Faustier.  Fautif,  qui  est  en  faute. 

Faux  du  corps.  Le  milieu,  le  travers 
du  corps. 

Fauorie.  Favorite. 

Fauorir.  Favoriser. 

Fay  (ie).  Je  fais. 

Féaux.  Fidèles,  intimes. 


GLOSSAIRE.      FEI. 


G.737 


Feit  (il).  Il  fit. 

Fenoil.  Fenouil. 

Fermir.  Affermir,  fixer,  fortifier. 

Féru.  Blessé,  frappé;  entiché,  captivé. 

Feu  (à).  Par  le  feu. 

Feue  (nouuelle).  Nouvelle  folie. 

Feus  (ie).  Je  fus. 

Fiance.  Confiance. 

Fient.  Fiente,  ordure,  excrément. 

Fier  de  (se).  Se  tenir  assuré  de. 

Fiert  (il).  11  frappe. 

Figue  (taire  la).  Mépriser,  braver,  se 
moquer  en  faisant  un  geste  indécent. 

Filière.  Ficelle  {terme  de  fauconnerie). 

Finablement.  Finalement. 

Finer.  Venir  à  fin,  à  bout,  conclure; 
par  extension  trouver,  disposer. 

Fioyent  (ils).  Ils  se  fiaient. 

Flaque.  Flasque. 

Flegme.  Une  des  humeurs  du  corps 
humain. 

Fleute.  Flûte. 

Floret.  Fleuret. 

Flourissant.  Florissant. 

Fluant.  Qui  coule,  liquide. 

Flueurs.  Menstrues. 

Fluxions.  Mouvements;  vicissitudes. 

Foarre.  Paille.  —  Faire  barbe  de 
toarre.  Tromper,  se  moquer. 

Foiblet,  ette.  Un  peu  faible. 

Fonde.  Fronde. 

Fondre  (se).  S'enfoncer,  s'efifrondrer, 
succomber. 

Fons.  Fond,  fonds. 

Forains.  Du  dehors,  étrangers. 

Force  (non).  Qu'importe. 

Forcée.  Violée. 

Forcener.  Perdre  la  raison,  être  hors 
de  soi,  s'emporter,  exercer  sa  fu- 
reur. 

Forcenerie.  Folie  erotique,  sadisme. 

Forclore.  Empêcher,  exclure. 

Formage.  Fromage. 

Formaliser.  Prendre  forme,  s'assimi- 
ler. 

Forme  (heure  en).  Lièvre  au  gîte 
[terme  de  chasse). 

Formi,  fromi.  Fourmi. 
Formuler.  Fourmiller. 

Fort.  Noble,  courageux. 

Fortitude.  Force  d'âme,  courage,  va- 
leur. 

Fortune  (de).  Par  hasard. 

Fourché  (taire  l'arbre).  Se  tenir  sur 
les  mains,  la  tête  en  bas,  les  pieds 
en  l'air  et  écartés. 
Fouteau.   Nom   du    hêtre,    en   vieux 

français. 
Foy.  Sincérité,  véracité. 

ESSAIS    DE  MONTAIGNE.   —  T.   IV. 


Foyt.  Fouet. 

Fraile.  Frêle. 

Frase.  Phrase. 

Fratesque.  Monacal. 

Froit.  Froid. 

Front.  Fronton, 

Fruition.  Jouissance. 

Frustatoirement.  Inutilement,en  vain. 

Fu  (ie).  Je  fus. 

Fumier  (estre  sur  son).  Être  dans  son 
élément,  dans  les  meilleures  condi- 
tions. 

Fusées.  Difficultés. 


«. 

Galant  homme.  Homme  habile,  adroit. 

Galer.  Battre;  par  extension  égrati- 
gner. 

Galimatrée.  Assemblage,  mélange. 

Gallée.  Galère;  joie. 

Galler.  Caresser;  se  réjouir,  s'amusei. 

Garbe,  galbe.  Bonne  grâce;  contour 
d'une  figure. 

Garber.  Orner,  ornementer,  façonner; 
donner  un  air  de. 

Garçonner.  Dissiper,  prodiguer.  — 
Garçonner  la  temme  d'autrui.  L'at- 
tirer, avoir  des  relations  avec  elle. 

Gardoire.  Endroit  ou  l'on  tient  en 
garde,  où  on  conserve. 

Gariement.  Sauvegarde,  garantie,  res- 
ponsabilité. 

Garse,  garce.  Jeune  fille. 

Gast.  Dégât,  destruction. 

Gauchir.  Dévier,  faire  dévier;  es- 
quiver, échapper  à. 

Gaudisserie.  Caractère,  ton  railleurs 
et  plaisants. 

Gaudisseur.  Railleur,  qui  se  moque 
par  jeu  et  en  riant. 

Gauler  le  poiure.  Être  inquiet,  tour- 
menté. 

Gaye.  Gaie. 

Gayon,  goyon,  gouyon.  Goujon,  pois- 
son. 

Geaule.  Prison,  geôle. 

Gehener.  Tourmenter,  faire  souffrir; 
serrer,  presser. 

Géhenne.  Peine,  souci,  chagrin,  souf- 
france; torture,  question. 

Gendarme.  Homme  d'armes. 

Gendarmer  (se).  S'aguerrir. 

General  (le).  L'intérêt  général. 

Gengiue.  Gencive. 

Genitoires.  Organes  génitaux. 

Genitvwe.  Semence. 

47 


G.738 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


Genouil.  Genou. 

Genoult.  Faire  la  révérence,  donner 

un  salut. 
Gentil  femme.  Femme  de  gentilhomme. 
Geometrien.  Géomètre. 
Gestes.  Hauts  faits,  actions. 
Get.  Jeton. 

Getter.  Gîter,  coucher. 
Giet.  Revers  de  la  robe  ou  de  l'habit. 
Gloire.  Vanité,   orgueil.  —  Glorieux. 

Vaniteux,  orgueilleux. 
Glosse.  Explication  d'un  texte  obscur. 
Gobeau.  Gobelet,  coupe. 
Goderonné.  Paré,  ajusté. 
Gorgias.    Mignon,    propre.   —    Gor- 

giasse.  Agréable,  belle,  élégante. 
Gorgiasser  (se).  Se  pavaner,  se  flat- 
ter, s'enorgueillir. 
Gosseur,  gaussenr.  Synonyme  de  gau- 

disseur. 
Gourd.  Perclus  par  le  froid,  engourdi  ; 

au  figuré  lourd,  maladroit. 
Gourmander.   Dévorer    avec  avidité; 
maltraiter  en  paroles,  gourmander, 
réprimander;  stimuler. 
Gourmer.  Malmener,  battre  à  coups 

de  poing. 
Gouspiller.  Houspiller. 
Grâce.  Reconnaissance. 
Grammairien.  Grammatical. 
Grammercy.  Grand  merci. 
Grangée.     Gens     réunis     dans    une 

grange. 
Grans.  Grands. 
Gras.  Avantageux. 
Gratification.  Confiance,  satisfaction, 

faveur,  reconnaissance. 
Gratifier.  Réjouir,  remercier,  féliciter. 
—  Gratifier  à.  Rendre  grâce,  être 
agréable  à. 
Graue.  Gravier,  gravelle. 
Graueleux.  Atteint  de  gravelle. 
Gregues,     greguesques.     Haut-de- 

chausses,  culotte. 
Greue.  Jambe;  la  partie  de  l'armure 
qui   couvrait  la  jambe,   jambière; 
par  extension  bottine. 
Greuer.  Peser,  accabler. 
Greueure.  Hernie. 
Griefue.  Grave,  pénible,  dangereux. 
Groin  (ieter).  Faire  mauvaise  mine, 

rechigner,  gronder. 
Groisse.  Grossesse. 
Grommeler.  Murmurer. 
Guain.  Grain. 
Guerdon.  Récompense. 
Guère.  Beaucoup. 
Guide.  Petit  poisson. 
Guigner.  Viser,  guetter.  —  Se  gui- 


gner. Se  faire  signe  du  coin  de  l'œil. 
—  Guigner  du  doigt.  Tàter. 


H. 

Habituer  (s').  Fixer  sa  résidence. 

Haie.  Halle. 

Hallebrené.  Épuisé,  harassé,  meurtri, 
dépenaillé. 

Hante.  Hampe. 

Harde.  Troc,  changement. 

Harpade.  Coup  de  harpon  ou  de  grif- 
fes; violent  combat. 

Harper   (se).    Se    saisir  violemment 
l'un  l'autre. 

Hastiueté.  Par  hâte,  précipitation. 

Hault.  Haut. 

Haut  de  chausses.  Culotte. 

Hautain.  Élevé. 

Hautaineté.  Hauteur  orgueilleuse. 

Hautesse.  Hauteur,  élévation. 

Hay  (ie).  Je  hais. 

Haye.  Haie. 

Hazart.  Hasard. 

Hebeté.  Obtus,  languissant,  affaibli. 

Heretier.  Héritier. 

Hergne,  hargne.  Humeur  hargneuse, 
chagrine,  acariâtre,  tracassière. 

Heur.  Bonheur. 

Heures.  Livre  de  prières. 

Heurte  (à  toute).  A  tout  coup. 

Historial.  Relatif  à  l'histoire. 

Hommenet,  hommelet.  Petit  homme, 
être  sans  consistance. 

Hormais.  Désormais,  à  l'avenir. 

Hors.  Désormais.  —  En  hors.  Au  de- 
hors. 

Huict.  Huit. 

Huis.  Porte. 

Hurler  quelqu'vn.  Le  huer. 

Huy.  Aujourd'hui. 

Hydroforbie.  Hydrophobie. 

Hyperbole.  Exagération. 

Hypospbagma.  Maladie  de  l'œil. 
Hypothéqué.  Exposé,  soumis. 


la.  Certes;  désormais. 

lambayer.  Promener,  aller  et  venir. 

lardrin.  Jardin. 

Iceluy,  icelle.  Celui,  celle;  celui-ci, 
celle-ci. 

Idoyne.  Propre  à. 

lect,  iet.  Jeton  ;  calcul  à  l'aide  de  je- 
tons. 


GLOSSAIRE.      lEH. 


G.739 


leban  (maistre).  Appellation  appliquée 
aux  pédants. 

Ignoble.  Qui  n'est  pas  noble. 

Imbécillité.  Faiblesse,  imperfection. 

Imboire.  Absorber,  se  pénétrer. 

Imperiere.  Impératrice. 

Impertinemment.  Non  pertinemment, 
sans  connaissance  suffisante. 

Impetrer.  Prier,  demander. 

Impiteux.  Impitoyable,  sans  pitié. 

Implication.  Action  d'impliquer. 

ImpoUu.  Sans  souillures. 

Importable.  Insupportable;  difficile  à 
endurer,  à  supporter. 

Impost.  Peu  dispos,  peu  valide,  im- 
potent. 

Impremeditement.  A  l'improviste, 
sans  préméditation. 

Improuidence.  Imprévoyance. 

Improuueu.  Imprévu.  —  A  l'impron- 
ueu.  A  l'improviste. 

Inaduertement.  Sans  attention. 

Incole.  Habitant. 

Incommode.  Impropre. 

Incorporel.  Sans  corps,  vide  de  sens, 
frivole. 

Inculcation.  Action  d'inculquer,  de 
faire  entrer  dans  l'esprit  en  répétant 
souvent  la  même  chose. 

Incurieusement.  D'une  manière  in- 
souciante. 

Indefatigable.  Infatigable. 

Indefensible.  Indéfendable. 

Indiuinable.  Qui  ne  peut  être  deviné. 

Ineloquent.  Non  éloquent. 

Inepte.  Qui  n'a  pas  d'aptitude  à,  inapte, 
inhabile. 

Inequalité.  Inégalité. 

Infiable.  Peu  digne  de  foi,  infidèle; 
incertain,  suspect. 

Intondre.  Faire  pénétrer,  insinuer,  im- 
prégner. 

Informer.  Former,  façonner,  rensei- 
gner. 

Infrasquer  (s').  S'embarrasser,  s'em- 
brouiller. 

Iniure.  Tort.  —  Par  iniure.  Sans 
justice,  à  tort. 

Iniurer  (s').  S'injurier. 

Iniurieusement.  Injustement. 

Innumerable.  Qui  ne  peut  se  comp- 
ter, innombrable. 

Inobedient.  Désobéissant. 

Inquisition.  Recherche. 

Inscience.  Ignorance,  manque  de 
science. 

Insculper.  Graver  sur. 

Insipience.  Manque  de  sagesse,  folie, 
sottise. 


Insister.  Résister. 

Institution.  Éducation. 

Insubstantiel.  Chimérique. 

Interest.  Préjudice  causé. 

Interiner.  Entériner,  déclarer  valable, 
accepter. 

Intestin.  Intérieur,  caché,  renfermé. 

loignant.  Près. 

loinct.  Joint. 

loinctement.  Directement. 

lonchez.  Joncs. 

lourd'buy.  Aujourd'hui. 

lours  (à  tous  les).  Manière  habi- 
tuelle. 

louste.  Joute. 

Ire.  Courroux,  colère. 

Ireux.  Colérique,  courroucé,  furieux. 

ludicatoire.  Juridiction,  qui  appar- 
tient à  la  justice,  au  juge. 

ludiciaire.  Astrologue. 

luire.  Ivoire. 

lun  (à).  A  jeun. 

luridiciant,  iuridicié.  Qui  juge,  qui 
est  jugé. 

Juste.  Complet,  entier. 

a. 
Chercher  en  I  les  mots  par  J. 

li. 

Labile.  Sujet  à  changer;  coulant,  fu- 
gitif, fragile,  glissant. 

Labouré.  Travaillé,  orné. 

Lacs.  Lacets,  filets. 

Ladre.  Lépreux. 

Lairray,  lairrions,  etc.  Laisserais, 
laisserions,  etc. 

Landit,  landy.  Foire  de  S.-Denis;  sa- 
laire qui  se  payait  ce  jour-là  par  les 
écoliers  à  leurs  maîtres. 

Languager,  languagier.  Qui  aime  à 
parler,  bavard. 

Larrecin.  Larcin,  vol. 

Lasseté.  Lassitude. 

Latineurs.  Gens  qui  écrivent  en  latin. 

Latinizer  (se).  S'imprégner  du  latin. 

Leçon.  Lecture. 

Lecteur.  Professeur,  lecteur  public. 

Léger  (de).  Légèrement,  aisément. 

Légiste.  Juridique. 

Leniment.  Adoucissement. 

Lenite.  Doux. 

Lettiere.  Litière. 

Lettre  ferit,  lettre  féru.  Demi-savant, 
savant  de  pacotille. 

Leu.  Lu. 

Leut.  Luth. 


G.740 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


Liaison  des  mariages.  Noueraent  d'é- 
guillettes. 

Liaisons.  Bandages. 

Libertin.  Affranchi. 

Librairie.  Bibliothèque. 

Licentier.  Autoriser. 

Lict  (il).  Il  lit. 

Lict.  Lit,  où  l'on  se  couche. 

Limininaire.  Préliminaire,  préface. 

Liture.  Rature,  surcharge. 

Liuresque.  Tiré  des  livres. 

Logis.  Poste,  position,  cantonnement, 
bivouac. 

Lon.  L'on,  on. 

Longuerie.  Longueur. 

Longuet.  Un  peu  long. 

Loudier,  lodier.  Couverture  de  lit, 
matelas,  matelas  de  plumes. 

Lourché.  Regardé  de  mauvais  œil. 

Loy.  Loi;  liberté,  moyen,  faculté;  loi- 
sir, droit. 

Loyer.  Récompense. 

Loyse.  Permet. 

Loz.  Gloire,  éloge. 

Luite,  luicte.  Lutte. 

Lustre.  Aspect. 

Lut.  Boue,  lie.  —  Boire  à  lut.  Bien 
boire,  boire  jusqu'à  la  lie. 

Ly  (ie).  Je  lis. 

Machure.    Tache,  contusion,   meur- 
trissure. 
Maestral,   maistral.    Magistral,    de 

maître. 
Magistère.  Magistrale,  doctorale. 
Magistrat.  Magistrature. 
Mail.  Maillet. 

Maille  bonne  (taire  la).  Compter  lar- 
gement. —  Faire  la  maille  bonne 
de  sa  parole.  La  tenir  fermement. 
Main  (auant),  (auant  la).  D'avance. 
Mais.  De  plus,  et  même. 
Maison  (homme  de).  De  bonne  fa- 
mille. 
Maistrise.  Possession. 
Mal.  Mauvais. 
Malaysance.    Difficulté     d'avoir     les 

choses. 
Maléfices.  Fautes. 
Maleficiée.   Maladive,  en    mauvaises 

conditions. 
Malhabile.  Qui  manque  d'habileté. 
Malmesler.  Brouiller. 
Maltalent.    Dépit,    animosité;    mali- 
gnité, malveillance. 
Maluoulu.  Haï,  détesté,  à  qui  on  veut 
du  mal. 


Maniacle,  maniaque.    Fou,  furieux- 
incroyable,  merveilleux. 
Maniant.  Maniable,  souple,  flexible. 
Manicle.  Cabale. 
Manque.   Manqué,   défectueux,   tron 

que,  faible. 
Manufacture.    Ouvrage    mécanique, 

travail  manuel. 
Manutention.  Maintien. 
Marc  et  tout.  Le  suc  et  le  résidu;  le 
fond   et  la  surface,  le  principal  et 
l'accessoire. 
Marchande  (mettre,  tirer  en  place). 
Mettre  en  évidence,  faire  valoir;  dé- 
velopper. 
Marchander.  Passer  un  marché. 
Marché.  Les  affaires. 
Marche  (basse).  Bas  degré. 
Marée.  Foule. 
Marine.  Rivage  de  la  mer. 
Marmiteux,  euse.  Misérable,  mal  en 
point,  piteux,  portant  mine  désolée. 
Marque.  Marche. 

Marry.  Repentant,  fâché,  chagrin. 
Marte.  Martre,  animal. 
Martin  (faire  le  prestre).  Jouer  plu- 
sieurs rôles  à  la  fois. 
Mascher.  Ronger,  incommoder;  bles- 
ser, faire  souffrir. 
Mastiner.  Mutiler,  maltraiter,  répri- 
mander. 
Mauuaiseté.  Méchanceté. 
Mechanique.  Mesquin,  pauvre. 
Mecreable.  Incroyable. 
Medeciner.  Médicamenter. 
Meliorer.  Améliorer,  amender. 
Memorieux.  Qui  a  de  la  mémoire. 
Menaceux.  Qui  fait  des  menaces. 
Mensale.  Ligne  qui  traverse  le  milieu 

de  la  main  {terme  de  chiromancie). 
Menus  (par  les).  Peu  à  peu,  en  détail. 
Mercadence.    Commerce,    marchan- 
dise. 
Mercier.  Remercier. 
Mercurializer.  Reprendre,   censurer, 

réprimander. 
Mercy  à.  Grâce  à.  —  Sa  mercy.  Grâce 

à  lui. 
Merlin.  Enfanté  sans  la  coopération  de 

l'homme. 
Merque.  Marque. 
Mesaduenir.  Tourner  à  mal. 
Mesaduenu  (il  est).  Il  est  arrivé  mal- 
heur. 
Mesaise.  Gêne,  situation  pénible,  ma- 
laise. 
Mesauenance.  Mésaventure. 
Mescognoissance.  Action  de  mécon- 
naître. 


GLOSSAIRE.      MES. 


G.741 


Mesconter  (se).  Se  tromper  dans  son 

compte. 
Mescreance.  Incrédulité. 
Mescroire.  Se  refuser  à  croire. 
Meshuy.  Aujourd'hui,  désormais. 
Meslé  (homme).  Homme   ni   bon  ni 

mauvais. 
Meslouable.  Qu'on  ne  peut  louer. 
Meslouer.  Blâmer. 
Mesme  (à).  A  mesure. 
Mesmement.  Surtout.  —  Mesmement 

que.  Bien  que. 
Mesnage,     mesnagerie.     Économie; 
soins  du  ménage;  conduite,  savoir- 
faire. 
Mesprinsent  (qu'ils  se).  Qu'ils  se  mé- 
prennent. 
Mesprit  (il  eB).  Mal  lui  en  prit. 
Messeant.  Qui  n'est  pas  convenable. 
Meur,  meury.  Mûr,  mûri. 
Meurs.  3Iœurs. 
Meurte.  Myrte,  plante. 
Mie.  Pas,  nullement. 
Mieinement.  Miaulement. 
Mignarder.     Courtiser,    chercher    à 

plaire  à. 
Mignon.  Favori. 
Migregeois.  A  moitié  grec. 
MiUiasse.  Mille  milliards  ou  trillion. 
Mineux,  euse.  Pauvre,  misérable  ;  dis- 
cret, retenu;  affecté,  minaudier. 
Minière.  Mine. 
Mirouer.  Miroir. 

Mise  (recepte  et).  Recette  et  dépense. 
Moiau.  Milieu,  centre. 
Moins  de.  A  l'exception  de. 
Mole.  Moule. 

Moleste.     Fâcheux,     importun,     en- 
nuyeux, désagréable. 
Mon.   Certainement,  évidemment.  — 
C'est  mon.  Sans  doute,  c'est  mon 
avis. 
Monarcbe.  Monarque. 
Monnoye.  Monnaie. 
Monopole.  Assemblée  factieuse;  intri- 
gue, conspiration. 
Monstre.  Chose  extraordinaire. 
Monstre,  montre.  Montre,  revue,  pa- 
rade, cérémonie;  échantillon. 
Mont  (à).  De  bas  en  haut. 
Montioie.  Croupe  de  terrain. 
Montoie.  Monceau,  tas,  dune. 
Morbidezza.   Mollesse,  délicatesse  de 

chair  {terme  de  peinture). 
Mordre.  Tàter. 
Mortondement.    Refroidissement, 

rhume. 
Morguant.  Ayant  de  la  morgue;  hau- 
tain, menaçant,  méprisant. 


Morné.  Émoussé,  sans  pointe. 

Morrion.  Casque  à  l'usage  de  l'infan- 
terie. 

Mortuaire.  Funérailles. 

Mouelle.  Moelle. 

Moulture.  Mouture. 

Mousquetaire.  Soldat  armé  du  mous- 
quet. 

Mousse.  Émoussé  ;  tendre,  mou  ;  inerte. 

Moyenne.  Ligne  médiane  de  l'inté- 
rieur de  la  main  {terme  de  chiroman- 
cie). 

Moyenner.  Procurer. 

Muance.  Changement,  transforma- 
tion. 

Muer.  Changer. 

Mulcter.  Condamner  à  l'amende. 

Mule  (terrer  la).  Profiter  sur  l'achat 
que  l'on  fait  pour  un  autre. 

Multiforme.  De  formes  diverses;  va- 
riable, changeant. 

Mundifier.  Purifier. 

Musser.  Cacher,  se  blottir,  amuser 
par  de  belles  paroles. 

Mutination.  Action  de  celui  qui  s'obs- 
tine, se  mutine. 

Mytbologiser.  Donner  un  sens  figuré. 

IV. 

Nait,  naifue.  Natif,  naturel. 

Naturaliser.  Rendre  naturel. 

Naturalistes.  Qui  aiment,  qui  prônent 
ce  qui  est  naturel. 

Nauiger.  Naviguer. 

Nazarde.  Chiquenaude  sur  le  nez. 

Ne.  Ni.  —  Ne  plus  ne  moins.  Ni  plus 
ni  moins. 

Neantise.  Nullité,  incapacité,  paresse, 
fainéantise. 

Négoces.  Affaires. 

Negotieux.  Qui  tient  un  commerce; 
qui  demande  du  soin. 

Nez  (s'en  prendre  au).  S'en  prendre 
à  soi.  —  Hocher  du  nez.  Dédaigner, 
repousser.  —  Rincer  le  nez.  Se  grat- 
ter le  nez. 

Niais.  Inné,  natif. 

Nibilité.  Nullité,  néant. 

Noicit.  Qui  cherche  noise,  querelleur. 

Noleage.  Prix  de  passage  en  bateau. 

Nom.  Renom. 

Nommé  (mal).  Mal  famé. 

Non  pas.  Pas  même. 

Non  que.  Sans  parler  de,  comme  aussi, 

à  plus  forte  raison. 
Noncbaloir.  Nonchalance,  paresse. 
Nourrir.  Élever,  éduquer,  entretenir. 


G.742 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


—  Nourry  aux  lettres.  Versé  dans 
les  lettres. 

Nourrisse.  Nourrice. 

Nourriture.  Éducation,  entretien. 

Nouuelleté.  Nouveauté. 

Nubileux.  Nébuleux. 

Nud.  Nu. 

Nue  (en).  En  l'air. 

Nuement.  Simplement. 

Nuysance.  Tort,  dommage,  incommo- 
dité. 

O. 

Obscène.  Sale,  malpropre,  repoussant. 

Occis.  Tués. 

Occision.  Meurtre,  massacre. 

Œconomie.  Administration  d'une  mai- 
son, soins  de  ménage. 

Officier.  Pourvu  d'un  office,  d'une 
fonction  publics. 

Officieux.  Qui  accomplit  son  devoir. 

Offusquée.  Masquée,  obscurcie. 

Oignement.  Onguent,  action  de  oindre. 

Ombrage,  vmbrage.  Ombre,  symp- 
tôme, image. 

Ombrageux.  Ombreux. 

One,  onques,  oncques.  Quelquefois, 
jamais. 

Opiate.  Composé  pharmaceutique. 

Opiniation.  Opinion,  présomption. 

Opiniatrise.  Opiniâtreté,  entêtement, 
obstination. 

Opposite.  Opposé,  contraire. 

Orbe  (coup).  Coup  contondant  qui  ne 
fait  pas  jaillir  le  sang. 

Orbiere.  Œillère,  garde-vue. 

Ord.  Sale,  dégoûtant. 

Ore,  ores,  or.  Alors,  maintenant.  — 
Répété,  signifie  tantôt.  —  Ores  que. 
A  présent,  quoique.  —  Ores  en 
auant.  Dorénavant. 

Orée.  Bord,  limite. 

Orer.  Pérorer,  haranguer,  prier. 

Orra  (il).  Il  entendra,  il  ouïra.  —  Or- 
rois,  orront.  Entendrais,  enten- 
dront. 

Orthographie.  Orthographe. 

Ost.  Armée,  réunion  de  soldats. 

Ottroyer.  Octroyer,  accorder. 

Oubliance.  Oubli. 

Ouir.  Entendre. 

Oultre.  Outre. 

Oultrecuidé.  Outrecuidant. 

Ouuragier.  Qui  nécessite  du  travail, 
de  la  fatigue. 

Ouurer.  Travailler,  mettre  en  œuvre. 

Ouuroûer.  Ouvroir,  atelier,  lieu  où 
l'on  travaille. 


Ouy.  Et  aussi,  et  même,  bien  plus. 

Oy  (V),  il  oyt,  nous  oyons,  vous  oyez, 
ils  oyent,  oyant.  J'entends,  il  en- 
tend, nous  entendons,  vous  enten- 
dez, ils  entendent,  entendant. 


P. 

Pache.  Pacte,  traité,  accord,  conven- 
tion. 

Paele.  Pelle. 

Paidagogisme.  Instruction  de  l'en- 
fance . 

Paille  (rompre).  Se  brouiller,  cesser 
toute  relation. 

Pair  à  pair.  De  pair. 

Pais.  Pays.  —  Païsant.  Paysan. 

Paistre.  Se  nourrir. 

Palestrine.  Lutte  ou  palestre. 

Palissement.  Le  fait  de  pâlir. 

Palme.  Paume. 

Pâlot  (tenir).  Aller  de  pair,  égaler. 

Pancher.  Pencher. 

Panneaux.  Haillons,  loques. 

Pante.  Pente. 

Par  sur  tout.  Par-dessus  tout. 

Parangon  de  (au).  En  comparaison 
de. 

Parangonner.  Comparer. 

Parentelle.  L'ensemble  des  parents, 
la  famille  entière. 

Parfournir.  Fournir  entièrement;  af- 
fermir; accomplir,  achever. 

Parfumier.  Parfumeur. 

Parlement.  Action  de  parlementer, 
pourparlers; cour  supérieure  de  jus- 
tice. 

Parlementer.  Conférer,  entamer  des 
pourparlers. 

Parlerie.  Exubérance  de  paroles,  ver- 
biage. 

Parlier.  Qui  parle  trop,  parleur,  ba- 
billard. 

Parquoy.  C'est  pourquoi. 

Pars,  parts.  Partis,  factions. 

Partement.  Départ. 

Partie.  Adversaire. 

Parties.  Qualités,  talents;  livres  de 
compte,  mémoires  de  dépenses; 
intrigues.   . 

Partir.  Diviser,  partager,  répartir  ;  pro- 
venir de. 

Partisanes.  Émanant  d'un  parti,  parti- 
culières. 

Passades.  Carrousels;  jeux,  exercices 
équestres. 

Passer.  Surpasser,  surmonter. 


GLOSSAIRE.      PAS. 


G.743 


Passion.  Sentiment,  perception,  sen- 
sation; souffrance. 

Passionner.  Souffrir. 

Pastissage.  Assemblage  informe,  mé- 
lange. 

Pastissant.  Construisant,  édifiant. 

Patron.  Modèle. 

Paulme.  Paume,  balle  ;  mesure  de  lon- 
gueur [environ  25  centimètres). 

Paulme  (toucher  en).  Se  toucher  les 
paumes  des  mains,  se  donner  la  main. 
—  Siffler  en  paulme.  Siffler  entre 
ses  doigts. 

Pauses  (à).  De  temps  en  temps,  par 
intervalles. 

Paux,  pluriel  de  pal.  Pieu,  palissade. 

Pauesade.  Pavois  ou  boucliers  en  grand 
nombre. 

Paye.  Paie. 

Peculier.  Particulier,  spécial.  —  Pecu- 
lierement.  Particulièrement,  spécia- 
lement. 

Pédante.  Celui  qui  enseigne  aux  en- 
fants, pédant. 

Pedantesque.  Qui  sent  le  pédant. 

Peinds  (ie),il  peinct.  Je  peins,  il  peint. 

Pelaudé.  Vexé,  molesté,  mis  à  contri- 
bution, dépouillé. 

Pellegrin, peregrin.  Voyageur, ^étran- 
ger ;  par  extension  insolite. 

Peloponnesiaque.  Du  Péloponnèse. 

Pendant.  Suspendu,  escarpé;  qui  va  en 
pente. 

Peneux.  Pénible. 

Pennade.  Coup  de  pied  porté  en  avant 
quand  le  cheval  se  dresse. 

Pennes,  plumes.  —  Pennes  sans  fin. 
Bagues  sorcières. 

Pensement.  Action  de  penser,  ré- 
flexion. 

PenuJtiœe.  Pénultième,  avant- der- 
nière. 

Perdurable.  Durable  au  delà  de  l'or- 
dinaire. 

Peregrin.  Voir  Pellegrin. 

Peregriner.  Aller  en  pays  étranger, 
voyager. 

Perenne.  Perpétuel,  continu. 

Perflable.  Que  l'air  peut  traverser. 

Peroration.  Péroraison. 

Perscruter.  Rechercher,  scruter. 

Persien.  Persan. 

Perspicuité.  Perspicacité. 

Pertinence.  Qualité  de  ce  qui  est  per- 
tinent, aptitude. 

Pertinent.  Ayant  de  l'autorité,  du  tact, 
qui  convient,  habile,  apte. 

Pestilent.  Pestilentiel. 

Petalisme.  Bannissement. 


Petit  (vn).  Un  peu. 

Petrarcbistes .  A  l'imitation  de  Pé- 
trarque. 

Peu  (il  a).  Il  a  pu. 

Peu  que  (à).  Peu  s'en  faut  que. 

Peupler.  Se  multiplier. 

Peusse  (que  ie),  qu'il  peust.  Que  je 
pusse,  qu'il  pût. 

Peuz  (ie),  il  peut.  Je  pus,  il  put. 

Pbantasie.  Fantaisie. 

Pbilistas.  Larrons. 

Pbilodoxe.  Attaché  à  ses  opinions. 

Physicien.  Qui  étudie  la  nature;  mé- 
decin. 

Picoreur.  Soldat  maraudeur,  pillard. 

Picquer.   Piquer. 

Pié.  Pied. 

Pieça.  Depuis  longtemps,  déjà. 

Pièce.  Morceau,  partie;  en  pièce,  ja- 
mais. 

Pied  (mettre  au).  Rabaisser,  mettre 
à  bas. 

Pigne.  Peigne. 

Pile.  Javelot,  trait, 

Pillotter.  Diminutif  de  piller  ;  butiner. 

Pincer.  Affecter,  oppresser. 

Pinceter.  Épiler. 

Piper.  Tromper.  —  Piperie.  Trompe- 
rie—  Pipeur,  piperesse.  Trompeur, 
trompeuse. 

Piqueure.  Piqûre. 

Pistole.  Pistolet.  —  Pistolade.  Coup  de 
pistolet. 

Plaideresque.  Qui  aime  à  plaider,  de 
plaideur. 

Plancher.  Planchéier;  lambrisser,  re- 
vêtir. 

Planiere.  De  plaine. 

Planir  (se).  S'aplanir,  diminuer. 

Planté.  Abondance,  plénitude.  —  A 
planté.  En  abondance. 

Plat.  Plateau. 

Pleinsit.  Plaignit. 

PJeu.  Plu. 

Pleust  (qu'il).  Qu'il  plût. 

Pleuuir.  Garantir,  promettre,  affirmer. 
—  le  pleuuy.  Je  garantis. 

Plombé.  Vicié;  peu  dégourdi. 

Ployable.  Qui  peut  être  ployé,  flexi- 
ble. 

Pius  gue.  Depuis  que,  après  que. 

Podagrique.  Podagre. 

Poil.  Barbe,  chevelure. 

Poinct.  Poing;  point. 

Poindre.  Frapper  du  poing,  battre,  pi- 
quer. —  Us  poingnent.  Ils  pi(iuent. 

Poingnard.  Poignard. 

Pointures.  Traits  piquants,  piqûres, 
légers  désagréments. 


G.744 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


Poisamment.  Pesamment. 
Poisant.  Pesant,  lourd. 
Poix.  Poids. 
Police.  Gouvernement. 
Polissure.  Propreté,  éclat. 
Poilu.  Souillé. 

Poltronesque.  Qui  rend  poltron,  amol- 
lit. 
Poly.  Propre,  orné,  élégant,  confor- 
table. 
Ponant,  ponent.  Occident. 
Ponctille,  pontille.  Menu  détail;  con- 
testation, dispute  sur  un  sujet  léger. 
Portoire.  Ce  qui  sert  à  porter. 
Porture.  Allure. 

Poste  (à  sa).  A  son  gré,  à  sa  disposi- 
tion, à  sa  convenance. 
Postes  assises.  Relais  permanents. 
Posthume.  Descendant,  héritier. 
Postposer.  Subordonner. 
Postreme.  Dernier. 
Potager,  potagier.  Qui  a  charge  du 

potager. 
Pouil.  Pou. 

Pouiller.  Dire  des  injures. 
Poullier,  poulailler.    Bicoque,    place 

forte  sans  importance. 
Poultre.  Poutre. 

Pour.  Par.  —  Pour  ce  que,  pour  au- 
tant que.  Parce  que.—  Pour...  que. 
Quelque.  —  Pour  quoy.  C'est  pour- 
quoi. 
Pourmener.  Promener. 
Pourpenser.   Méditer,   réfléchir,  pré- 
voir, préméditer. 
Pourpoint  (estre  mis  en).  Être  dé- 
pouillé, réduit  à  ce  que  l'on  a  sur  le 
corps;  être  dans  l'embarras. 
Pourpointier.  Tailleur  qui  ne  faisait 
que  des  vêtements  pour  la  partie  su- 
périeure du  corps  (pourpoints). 
Pourpris.  Enclos,  surface. 
Pourtant.  Cependant,  c'est  pourquoi. 
Pourtraict.  Portrait. 
Pourtraire.  Faire  le  portrait. 
Pourueu.  Pourvu. 
Pouruoyance.  Prévoyance. 
Pouruoyer.  Pourvoir,  prévoir. 
Poux.  Pouls,  battement  des  artères  au 

poignet. 
Practique.  Pratique. 
Practiquer.  Gagner,  soudoyer. 
Praeexcellence.    Prééminence,    excel- 
lence supérieure. 
Preambulaire.  Qui  précède,  de  début. 
Prébende.  Revenu  d'un  bénéfice  ecclé- 
siastique. 
Precedence.  Préséance;  supériorité. 
Preceller.  Tenir  le  premier  rang. 


Precipiteusement.  Précipitamment. 
Precipiteux.  Précipité;  dangereux. 
Predicament.  Catégorie. 
Préférence.  Supériorité. 
Pretix.  Fixé,  déterminé,  arrêté. 
Prelater  (se).  Affecter  un  air  de  di- 
gnité, se  prélasser. 
Prens.  Prends. 
Préoccuper.  Occuper,  saisir  d'avance, 

prévenir,  anticiper. 
Preordonner.  Ordonner  d'avance. 
Preposteres.  A  rebours,  à  contre-sens. 
Presbtre.  Prêtre. 
Prescry  (ie).  Je  prescris. 
Présence.  Prestance 
Présentation.  Formule  de  politesse. 
Presse.  Monde,  foule;  vie  publique. 
Preud'hommie,  prud'homie.  Probité, 

honnêteté. 
Prime.  Premier. 
Primement.    Premièrement,  d'abord, 

exactement.    . 
Primesaultier.  Primesautier;qui  don- 
ne son  plus  grand  effort  dès  le  pre- 
mier moment,  qui  agit  dès  que  l'idée 
lui  en  vient. 
Principesque.  Qui  est  le  propre  des  ' 

princes. 
Principiant.  Commençant. 
Prindrent  (ils).  Ils  prirent. 
Prins,  prinse,  print  (il).  Pris,  prise, 

il  prit. 
Prinsaut  (d'vn).  D'un  premier  saut, 

subitement. 
Prinse  (en).  En  butte,  aux  prises. 
Prisable.  Digne  d'être  pris,  estimé. 
Priuation.  —  Manque,  abstention. 
Priué.    Intime,  familier;    particulier, 

personnel. 
Priuement.  En  particulier,  familière-, 

ment. 
Priuilegier  (se).  S'accorder  un  privi- 
lège. 
Prix  tait  (retourner  à  son).  Retour- 
ner à  sa  besogne. 
Procerité.  Haute  taille,  belle  stature. 
Proche  (le).  Le  prochain. 
Procliue.  Enclin  à. 

Professoirement.  D'une  façon  profes- 
sionnelle, pratiquement. 
Protluuion.  Écoulement,  flux. 
Protonder.  Approfondir. 
Protus.  Répandu  abondamment. 
Progeniteur.  Ascendant. 
Promeine  (il).  Il  promène. 
Prominant.  Proéminent,  dominant. 
Promiscue.  Mêlé,  confus;  commun  à 

tous;  indifférent. 
Proportion.  Comparaison. 


GLOSSAIRE.      PRO. 


G.  745 


Propre  (mettre  an).  Fournir  l'occa- 
sion à  quelqu'un  de  faire  une  chose. 

Propriété.  Propreté. 

Prospect.  Dont  la  vue  s'étend  au  loin, 
perspective. 

Prosterné .  Délabré,  affaibli,  affaissé. 

Protocole.  Qui  suggère,  fait  souvenir, 
souffleur. 

Prou.  Assez,  beaucoup. 

Proufit.  Profit. 

Proumenoir.  Promenoir. 

Prouuoir.  Pourvoir,  munir,  garantir. 

Pronuoyance.  Prévoyance. 

Prouidence.  Prudence. 

Prouision.  Précaution. 

Pruant.  Sujet  à  des  démangeaisons, 
qui  démange. 

Publiq.  Public. 

Prudement.  Avec  pruderie,  avec  ré- 
serve. 

Puérilité.  Enfance. 

Puïr.  Puer. 

Puis.  Depuis. 

Pulmonique.  Poitrinaire. 

Pulpitre.  Pupitre. 

Pytbagorien.  Pythagoricien. 


Quand  et  quand.  En  même  temps; 
tout  de  suite.  —  Quant  et,  quand  et. 
Avec,  comme. 

Quantes  fois.  Combien  de  fois. 

Quart.  Qui  est  en  quatrième,  qui  com- 
plète à  quatre. 

Quartelet.  Diminutif  de  quart. 

Quartier.  Pays. 

Quartier  (à).  De  côté,  à  part. 

Quelquefois.  Une  fois. 

Quelques  fois.  Plusieurs  fois. 

Quest,  queste.  Gain,  profit;  quête,  re- 
cherche. 

Quester.  Chercher,  rechercher  avec 
soin. 

Questure,  questuaire.  Mercenaire,  qui 
est  obligé  de  travailler  pour  vivre. 

Queue  (brider  Vasne  par  la).  Prendre 
mal  ses  dispositions. 

Quiète.  Tranquille,  paisible,  sûr.  — 
Quietement.  Tranquillement. 

Quitte.  Délivré  de  toute  charge. 

Quitter.  Concéder,  libérer,  tenir  quitte. 

Quoy.  Que  ne  faisons-nous?  —  Quoy 
non.  Que  ne  faisons-nous  pas  encore? 
—  Quoy  que.  Dirai-je  que. 


Rabillage.  Action  de  raccommoder. 

Racointer.  Se  réconcilier,  revenir  de 
son  emportement. 

Racourciment.  Abréviation,  raccour- 
cissement. 

Racoyser.  Calmer,  apaiser. 

Radoté.  Radoteur,  cassé. 

R'aduisement,  rauissement.  Retour 
sur  soi-même. 

R'aduiser,  r'auiser.  Corriger,  amen- 
der. 

Raller  à  terre.  Raser  la  terre;  vivre 
modestement. 

Ramentauoir.  Remettre  en  l'esprit, 
rappeler,  remémorer. 

Rapetasser.  Raccommoder. 

Rapporter.  Rendre,  exprimer,  dépein- 
dre. 

Rarité.  Rareté. 

Ratiocination.  Raisonnement. 

Raualer.  Jeter  bas,  faire  descendre. 
—  Se  raualer.  Se  reporter. 

Rauasser.  Rêvasser. 

Ray.  Rais,  rayon. 

Reboucher.  Emousser,  calmer. 

BeJbours.  Revêche,  intraitable,  rétif; 
qui  agit  à  contre-cœur. 

Rebrasser.  Retrousser,  relever,  écar- 
ter, découvrir. 

Recelation.  Secret,  discrétion. 

JJecepte.  Recette. 

iîeceu.  Reçu. 

Recharger.  Répliquer  vivement,  à 
nouveau. 

Rechigner.  Geindre,  faire  mauvaise 
fi^-^ure. 

Récitateur.  Narrateur,  faiseur  de  ré- 
cits. 

Reconuoyer.  Accompagner,  recon- 
duire. 

Recordation.  Souvenir,  mémoire. 

Recors.  Témoin. 

Recourir.  Secourir,  délivrer. 

Recousse,  rescousse.  Reprise  de  ce 
qui  a  été  enlevé  de  force;  retour  of- 
fensif. 

Recouurer.  Découvrir,  rencontrer. 

Recouureur.  Couvreur. 

Recreu.  Être  rendu,  excédé  de  fatigue, 
hara.ssé. 

Recueil.  Accueil. 

Jîecueiiieur.  Compilateur. 

Recueillir.  Accueillir. 

Reculement.  Disgrâce. 


G.n6 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


Redouter.  Douter  à  nouveau. 

Réduire.  Concentrer. 

Retors,  retfors.  Raifort,  plante. 

Regard  de  (par,  pour  le).  Quant  à, 
par  rapport  à,  en  ce  qui  concerne. 
—  A  mon  regard.  A  mes  yeux. 

Régent.  Professeur. 

Régenter.  Professer,  gouverner.     . 

Régiment.  Genre. 

Regorger.  Dégorger,  vomir. 

Reimperieux.  Impérieux,  fiers,  hau- 
tains. 

Reistre.  Long  manteau  à  la  mode  al- 
lemande. 

Relaxation.  Relâchement  d'entrailles. 

Reliques.  Restes. 

Remascher.  Aie  figuré  repasser  plu- 
sieurs fois  dans  son  esprit. 

Rembarrer.  Garnir. 

Remerquer,  remercable.  Remarquer, 
remarquable. 

Remis  en  autruy.  Qui  se  fie  à  autrui. 

Remise.  Apaisement,  arrêt.  —  Re- 
mises. Défaillances. 

jReœuement.  Mouvement. 

Renardeau.  Jeune  renard. 

JRenchoir.  Choir  à  nouveau,  retomber. 

Rencontres.  Bons  mots,  répliques,  re- 
parties. 

Rendre.  Accomplir. 

Renger.  Ranger. 

Rengreger.  Augmenter,  accroître,  ag- 
graver. 

Repentable.  Disposé  au  repentir. 

Repentance.  Repentir. 

Repratiquer.  Revoir,  fréquenter  à 
nouveau. 

Reprehension.  Blâme,  reproche. 

Reseruation.  Réserve. 

Reseul.  Filet,  fichu,  guimpe. 

Resigner.  Indiquer,  désigner. 

Résolu.  Persuadé,  convaincu;  défini- 
tif. 

Résoudre  (se).  Se  rassurer,  recouvrer 
la  tranquillité. 

Response.  Réponse. 

Resseant.  Domicilié,  résidant,  séjour- 
nant; sédentaire. 

Ressentiment.  Action  de  sentir,  d'é- 
prouver. 

Ressentiment  (causer  du).  Inspirer 
de  la  rancune. 

Ressentir.  Prévaloir. 

Ressiner,  reciner.  Collation  qu'on  fai- 
sait après  le  dîner;  souper. 

Restrinction.  Restriction. 

Retenter.  Éprouver,  essayer,  sonder. 

Rétention.  Retenue,  garde,  conserva- 
tion. 


Retenument.  D'une  manière  retenue. 

Retirée.  Séparée. 

Retirer  à.  Ressembler. 

Retraict.  Latrines. 

Retraicte.  Retraite. 

Retrain, restrain.  Restreint,  resserré; 
par  extension  économe. 

Retranchement.  Suppression. 

Rets.  Filets. 

Réussir.  Devenir. 

Reuanger.  Poursuivre  une  affaire  au 
lieu  et  place  de  quelqu'un. 

Reueillon.  Repas  pris  au  milieu  de  la 
nuit. 

Reuenir  (se).  Revenir  à  soi,  se  rani- 
mer. 

Reuerentiel.  Respectueux. 

Reuers.  Étrange,  bizarre. 

Reuirade.  Réplique,  riposte. 

Reuoquer.  Éloigner. 

Rheume,  reume.  Rhume,  catarrhe,  etc. 

Riard.  Rieur. 

Rincer.  Froncer,  rider. 

Riotte.  Plaisanterie  aigre-douce,  ta- 
quinerie, petite  dispute. 

Roidir.  Roidir. 

RoUe  (mettre  en).  Mettre  par  écrit. 

Rommeler.  Grommeler,  murmurer. 

Rondelier.  Soldat  armé  de  la  ronda- 
che  (bouclier  de  forme  ronde). 

Rouer.  Tourner. 

Rouet  (mettre  au).  Déconcerter.  — 
Estre  au  rouet.  Être  à  bout  de  res- 
sources d'esprit. 

Route,  roupte.  Défaite,  déroute. 

Rude.  Grossier,  qui  n'est  pas  cultivé. 

Ruffian.  Galant;  proxénète. 

Rythme.  Règle,  mesure.  —  Rythmé. 
Rimé. 


m. 


Sablons.  Régions  sablonneuses. 

Sabouler.  Malmener,  houspiller,  fou- 
ler aux  pieds;  réprimander. 

Sac  en  poche  (acheter).  Acheter  sans 
voir,  de  confiance. 

Sacraire.  Sanctuaire. 

Sagette.  Flèche. 

Saison  (en).  Au  moment,  à  l'époque. 

Salade.  Casque  léger  sans  cimier. 

Sale.  Salle. 

Salseperille.  Salsepareille,  plante. 

Sanctimonie.  Sainteté,  pureté. 

Saoul.  Soûl.  —  Saouler.  Soûler, 

Sapience.  Sagesse. 

Sarbatane.  Sarbacane;  au  figuré,  per- 
sonne interposée. 


GLOSSAIRE.      SAT. 


G.747 


Saturité.  Satiété,  saturation. 

Saulter.  Sauter. 

Sauteler.  Sautiller. 

Sauterie.  L'exercice  du  saut. 

Sauatier.  Savetier. 

Sauue.  Sauf. 

Sauueté.  Sûreté,  hors  de  péril. 

Saye.  Saie,  sayon,  blouse. 

Scarrebillat.  Voir  Escarbillat. 

Sçauant.  Savant.  —  Sçauanteau. 
Petit  savant,  ayant  plus  de  préten- 
tion que  de  science. 

Sçauoir,  sceu,  ie  sçais,  il  sçait,  ie 
sçauoye,  ie  sceuz,  qu'il  sceust.  Sa- 
voir, su,  je  sais,  il  sait,  je  savais,  je 
sus,  qu'il  sût. 

Sçauoir  mon.  Reste  à  savoir. 

Sceleré.  Scélérat,  criminel. 

Science.  Les  lettres,  le  savoir. 

iSeau.  Sceau. 

Secousses.  Trémoussements. 

Secousses  (à).  De  temps  à  autre. 

Secrestin.  Sacristain. 

Sedon.  Selon. 

Seeller.  Sceller. 

Seigner.  Signer;  faire  le  signe  de  la 
croix. 

Sein.  Sain. 

Seing.  Signe. 

Seiour.  Repos,  soulagement;  oisiveté. 

Seiourner.  Donner  du  repos,  amortir. 
—  Se  seiourner.  S'abstenir,  se  dis- 
penser. 

Sembler.  Ressembler,  être  semblable  à. 

Semons,  semond.  Averti,  invité,  solli- 
cité. 

Sens  (ie  me).  Je  sens. 

Sentencier.  Prononcer  des  sentences, 
des  jugements. 

Sentiment.  Odorat. 

Sentir.  Écouter. 

Seoir.  Être  assis,  être  convenablement. 

Serein.  Humidité  du  soir. 

Sereine.  Sirène. 

Sereiner.  Rasséréner,  calmer,  apaiser. 

Serue.  Impérieuse,  astreignante. 

Seur.  Sûr.  —  Seurement.  Sûrement. 

Seureté.  Sûreté. 

Si.  Ainsi,  autant.  —Si,  et  si.  Pourtant, 
toutefois,  néanmoins.  —  Si  que.  Si 
bien  que,  de  telle  sorte  que.  —  Si 
est-ce  que.  Toujours  est-il,  quoi  qu'il 
en  soit. 

Sier.  Convenir. 

Sier.  Tourner,  virer;  se  reporter. 

Signamment.  Notamment,  spéciale- 
ment. 

Signifiant.  Significatif. 

Siller  les  yeux.  Ouvrir  et  fermer  ra- 


pidement les  paupières;  obstruer, 
voiler. 

Simples.  Nom  vulgaire  des  herbes  et 
plantes  médicinales. 

Simplesse.  Naturel  sans  déguisement, 
simplicité  naturelle. 

Sincérité.  Pureté,  netteté  de  juge- 
ment. 

Skeletos.  Squelette,  écorché  pour  étu- 
des anatomiques. 

Solage.  Sol,  terroir. 

Solemne.  Solennel. 

Somme.  En  somme,  en  résumé,  enfin. 

Sommelerie.  Pièce  aux  provisions, 
crédence. 

Sommier.  Bête  de  somme. 

Somne.  Sommeil,  somme. 

Songneux.  Soigneux. 

Sonner.  Signifier,  exprimer  ;  jouer  d'un 
instrument. 

Sorbonnique.  A  l'usage  des  étudiants 
de  la  Sorbonne. 

Sorcerie.  Sorcellerie,  sortilège. 

Soubstenir,  soustenir.  Soutenir,  sus- 
pendre. 

Soubterraines,  sousterraines.  Cor- 
rompues, infernales. 

Soudain  que.  Aussitôt  que. 

Souet,  soueue.  Suave. 

Souffrance.  Patience,  tolérance. 

Souloit.  Avait  coutume. 

Sourdaux.  Qui  font  les  sourds. 

Sourdre.  Surgir,  jaillir. 

Souuenance.  Souvenir. 

Soye.  Soie,  produit  des  vers  à  soie. 

Soye  (qu'il),  qu'ils  soyent.  Qu'il  soit, 
qu'ils  soient. 

Splanade.  Esplanade. 

Spondaique.  Monotone. 

Stile.  Usage,  coutume. 

Strette.  Étreinte,  attaque,  élancement. 

Stropiat.  Estropié. 

Suader.  Persuader. 

Suasion.  Persuasion,  conseil,  sollicita- 
tion. 

Subiect,  subiection.  Sujet,  sujétion. 

Succéder.  Réussir,  avoir  du  succès. 

Suffisance.  Capacité,  habileté. 

Suffisant.  Capable. 

Suffragant.  Dépendant,  subalterne; 
humble,  modeste;  accessoire. 

Suitte.  Suite. 

Superabondance.  Surabondance. 

Supererogation.  Action  de  donner 
par  surcroît. 

Superflument.  Avec  supei'fluité. 

Supernaturel.  Surnaturel. 

Supernumeraire.  Qui  dépasse  la  me- 
sure ordinaire;  surnuméraire. 


G.748 


ESSAIS  DE  MONTAIGNE. 


Suppediter.  Subjuguer,  fouler  aux 
pieds,  l'emporter  sur. 

Supplir,  supplissent  (qu'ils).  Sup- 
pléer, qu'ils  suppléassent. 

Surgeon.  Source. 

Surmonter.  Vaincre. 

Surpayé.  Exalté,,  porté  au  delà  de  sa 
valeur. 

Surpoids.  Excédant  de  poids. 

Surprint  (il),  ils  surpreignent.  Il 
surprit,  ils  surprennent. 

Suruenance.  Ce  qui  survient,  événe- 
ment. 

Sus.  Dessus,  sur.  —  Sus  bout.  Tout 
court. 

Suspens.  Suspendu,  indécis. 

Suyure.  Poursuivre,  continuer. 


T. 


Tablier.  Table  sur  laquelle  on  jouait 
aux  dames,  aux  échecs,  au  trictrac. 

Tabourin.  Tambour. 

Tabut.  Querelle,  vacarme.  —  Tabuter. 
Inquiéter,  molester. 

Taint.  Teint. 

Talent.  Monnaie  de  compte  chez  les 
Grecs. 

Tant.  Si.  —  A  tant.  Alors.  —  Tant 
plus  [répété).  D'autant  plus.  —  De 
tant  que.  D'autant  que.  —  Tant  il  y 
a.  Quoi  qu'il  en  soit. 

Tantost.  Bientôt. 

Targue  (se  mettre  sur  sa).  Se  mettre 
sur  ses  gardes. 

Targuer  (se).  S'armer. 

Tastonner.  Flatter,  amadouer. 

Tect.  Toit. 

Tempérance.  Modération. 

Température.  Modération. 

Tempestatit.  Impétueux,  violent,  em- 
porté. 

Tempesteur,  tempestueux.  Qui  fait 
du  bruit,  qui  est  à  la  tempête. 

Tenants.  Ceux  qui  sont  attaqués  {par 
opposition  avec  assaillants). 

Tendreur.  Tendreté,  qui  est  tendre. 

Tenser.  Tancer. 
Terrein.  Terfain. 

Tesmoing.  Témoin. 
Test.  Suture  du  crâne. 
Testonner.  Piquer,  blesser  quelqu'un. 
—  Se  testonner.  Se  parer  la  tcte,  se 
pomponner. 
Teust  (qu'il  se).  Qu'il  se  tût. 
Théologal.  A  l'usage  des  gens  d'église. 
Théorique.  Théorie. 


Throne.  Trône. 

Tiers,  tierce.  Troisième,  qui  complète 

à  trois. 
Tiltre.  Titre. 
Tinst  (qu'il),  ils  tindrent.  Qu'il  tînt 

ils  tinrent. 
Tintouiner.  Tinter,  retentir. 
Tirasser.  Tirailler. 
Tistre.  Tisser. 

Titanien.  Titanique,  gigantesque. 
Tordre.  Plier. 
Tort.  Tordu,  contourné. 
Touche.  Épreuve,  atteinte. 
Toucher.  Eprouver    comme    avec    la 

pierre  de  touche.  —  Toucher   à  la 

main.  Maintenir,  prétendre. 
Touer.  Remorquer.    • 
Tournebouler.    Tourner    et    rouler; 

bouleverser. 
Tourneuirer.   Tourner   et    virer    en 

tous  sens. 
Tours  (à).  Tour  à  tour. 
Tout  (à),  à  tout  de.  Avec. —Et  tout. 

Aussi.  —  De  tout,  tout  du.  Tout  à 

fait,  entièrement. 
Tracasser.  Mener  çà  et  là,  traîner.  — 

Suiet  tracassé.  Sujet  rebattu. 
Trafique.  Trafic. 
Trahistre.  Traître. 
Traict.  Trait.  —  Traict,  traicté.  Tiré 

du  fourreau,  nu,  dégainé. 
Traiect,  traiet.  Traverser.  —  Traiec- 

ter,  traietter.  Transporter,   passer 

par  eau. 
Trampe.  Trempe. 
Tranchant.  Franchissant. 
Trante.  Trente. 

Trapelle.  Petite  trappe,  souricière. 
Trasseure.  Trait   de  plume,   rature, 

surcharge. 
Trépignant.  Prompt  et  énergique. 
Trepillement.  Trépignement. 
Tressuer.  Suer  abondamment. 
Trestout,    tretout.    Augmentatif    de 

tout. 
Treuue  (ie).  Je  trouve. 
Trichoterie,    tricotterie.     Tricherie, 

chicane. 
Troigne,    trougne.   Attitude,   conte- 
nance. 
Trop.  Beaucoup. 
Tubercle.  Mont,  proéininence  {term,e 

de  chiromancie). 
Tuition.  Défense. 

Tumultuaire.     Tumultueux,     désor- 
donné. 
Turkesque.  A  la  turque. 


GLOSSAIRE.      U. 


G.749 


U. 


Chercher  en  V  les  mots  en  U. 


V. 

Vacation.  Profession ,  état,  occupation.  • 

Vaguer.  Mener,  suivre. 

Vain.  Oisif. 

Val  (à).  En  descendant.  —  A  val  de 

route.  En  déroute. 
Valeur.  Mérite. 

Vanter.  Être  le  jouet  des  vents. 
Vastité.  Qualité  de  ce  qui  est  vaste, 

immensité. 
Vau  le  vent  (à),  auau  le  vent.  Sui- 
vant la  direction  du  vent. 
Vauls  (ie).  Je  veux. 
Vausirent  (ils).  Ils  valurent. 
Vays  (ie).  Je  vais. 
Vberté.  Fertilité,  fécondité. 
Veau.  Niais,  simple  d'esprit.  —  Brides 
à     veaux.     Balivernes,     niaiseries, 
contes  ridicules. 
Vetuage.  Veuvage. 
Veid  (il),  il  veit.  Il  voit. 
Veind  (il).  11  vint. 
Vendiquer.  Revendiquer. 
Vénérien.  Qui  tient  de  Vénus  (terme 

d'astrologie). 
Veniance.  Vengeance. 
Ventance,  venter.  Vanterie,  vanter. 
Venteuses.  Légères,  vaines. 
Venue.  Train  continu  ;  accès,  attaque. 

—  Par  venues.  Sans  interruption. 
Veoj'd  (il),  il  void.  Il  voit. 
Veoir.  Voir. 

Verbale.  Qui  porte  sur  des  mots. 
Vergoigne.  Vergogne,  honte.  —  Ver- 
goigner.   Avoir    honte.  —    Vergo- 
gneux.  Pudique. 
Véritable.  Véridique,  disant  habituel- 
lement la  vérité. 
Verser.  Renverser,  se  comporter. 
Ver  similitude.    Ressemblance,    vrai- 
semblance. 
Vert  (prendre  sans).  Prendre  au  dé- 
pourvu. 
Vertu.  Courage,  vertu  militaire. 
Vertugade.  Jupe   gonflée  au   moyen 

d'un  bourrelet  porté  en  dessous. 
Verues.  Caprices,  fantaisies,  imagina- 
tions. 
Vespre.  Soir. 

Vesquirent,  vesquimes,  vesquit,  ves- 
cut.  Vécurent,  vécûmes,  vécut. 


Vesture.  Vêtement,  habillement. 
Veuil  (ie).  Je  veux. 
Viande.  Vivres,  ce  qui  sert  à  la  nour- 
riture. 
Vilain.  Roturier,  serf. 
Vilanie.  Vilenie. 
Vilité.  Bassesse. 

Villanelles.  Sorte  de  poésies  pastorales. 
Vin  au  bas.  Vin  du  fond  du  tonneau, 

vin  arrivé  à  la  lie. 
Virer.  Tourner. 
Visage.  Aspect,  apparence. 
Visitation.  Action  de  visiter,  visite. 
Visiue.  Visuelle. 
Vitale  (la).  La  ligne  de  vie  (terme  de 

chiromancie). 
Vittoailles.  Victuailles. 
Vmbrages.  Voir  Ombrages. 
Voglie.  Volonté. 

Voire.  Vraiment,  en  vérité,  oui,  certes, 
même.  —  Disant  que  voire.  Disant 
que  c'est  vrai.  —  Voire  mais.  Vrai- 
ment môme. 
Voirement.  Effectivement. 
Voirie.  Lie,  immondices,  le  plus  bas 

degré. 
Vois  (ie).  Je  vais. 
Voix.  Parole,  mot. 

Volante.  Bonne  volonté. 

Volantiers.  Volontairement,  volon- 
tiei's,  vraiment. 

Volet  (trier  sur  le).  Entre  plusieurs 
choses  de  même  espèce,  choisir  la 
meilleure. 

Volupté.  Plaisir,  satisfaction. 

Vouldra  (il).  11  voudra. 

Voulsist,  vousist,  vousisse.  Voulût, 
voulusse. 

Voy  (ie),  ie  voye.  Je  vois. 

Voyager,  ère.  Qui  aime  à  voyager. 

Voye.  Voie,  chemin. 

Voyelle.  Qui  est  formé  de  sons,  vocal, 
verbal. 

Vray,  vraye,  vrayement.  Vrai,  vraie, 
vraiment. 

Vreteres.  Canaux  de  la  vessie. 

Vsance.  Usage  reçu. 

Vtansiles.  Ustensiles. 

Vtil.  Outil,  instrument. 

Vuidange.  Évacuation. 

Vuide.  Vide. 

Vulgaire  (en).  En  langage  national. 

Vy  (ie).  Je  vis. 

Y. 

Yambe.  Jambe. 
Yurogne.  Ivrogne. 


TABLE  DES  MATIÈRES 


A.  —  Notice I 

B.  —  Sommaire  des  Essais. 1 

C.  —  Table  des  citations 63 

D.  —  Variantes 95 

E.  —  L'esprit  des  Essais 149 

F.  —  Notes 265 

G.  —  Glossaire 721 


Typographie  Firmin-Didot  et  C'«.  —  Mesnil  (Eure). 


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