UNIVERSITY OF
laiNOIS LIBRARY
âT URBANA-CHAMPAIQN
BOOKSTACKS
CENTRAL CIRCULATION AND BCX>KSTACKS
The person borrowing this material is re-
sponsible for its renewal or return before
the Latest Date stamped below Youmay
be charged a minimum fee of Ç75.00 for
each non-returned or lost item.
Th.»t, mutilation, or d.fae.m.nt of librory material. «an b.
couse, for .tud.nt di.clplinary «dion. Ail •"«♦"««''• •T"'!'*,!
th. Univ.r.ity of IlIlnoU Ubrary aro th. prop.rty of *^ » taf.
* IHinoi. ond ar. protoctod by ArticU 16B of ./«no,. Cr/m,nal
Law ond Procédure.
TO RENEW, CALL (217) 333-8400.
University of Illinois Library at Urbona-Champolgn
MAY 2 5 2000
When rcMwing by phone. write MW 'î«^»"
below previous due date.
>V y^-
CENTRAI C«CUUT.ONeOOK^f;^S
,^ au.«p»«-*y -*^ «a .400
a»N, U-»«
r92
i^
WhenrencwmgWpn
ptevious due date. _^^^
ESSAIS
DE
MONTAIGNE
(Self-Edition)
TEX.TE ORIGINAL, ACCOMPAGNÉ DE LA TRADUCTION
EN LANGAGE DE NOS JOURS,
'AH
le Général MICHAUD
QUATRIEME VOLUME
Notice, Sommaire des Essais, Table des citations, Varianles,
l'Esprit des Essais, Xotes, Glossaire.
PAlllS
LIHRAIRIE DE PARIS
I'irmii:i-Diclot et C", liîditeurs
5G, RUE Jacob, 5t)
IDOU
Exemplaire
N" 127
ESSAIS DE MONTAIGNE
Of THE
UNIVERSITE ûF ILLINO/S
4*P
>t^
i<
o 'P:.
mm
iiT
iï"
n
O S O
3 u w
m
S « u ■ zs It^ I
iRm%i
•T3
3 u
r ^
3 Ci
' S
^^
3 C
J^ ?.^
:^
w
•^,3C
oô bJO
Së4
Jim
,^
Hl
oS: 5^i &
° 1: 5 r^
M (h?
U
"3 ««>
3 «y
w o ^
S .S o
«-*
w.
3
lU
3-..x\^ î:
y ta
Vi^^^
i>i^'
o^^
ESSAIS DE MONTAIGNE
(Self-Edition*)
TEXTE ORIGINAL ACCOMPAGNÉ DE LA TRADUCTION
EN LANGAGE DE NOS JOURS,
PAR
le G"' MICHAUD
QUATRIEME VOLUME
Notice, Sommaire des Essais, Table des citations, Variantes,
l'Esprit des Essais, Notes, Glossaire.
-fj>
PARIS
LIBRAIRIE FIRMIN-DIDOT ET G»', ÉDITEURS
06, RUE Jacob, 56
1909
* Edition se suffisant à elle-même.
v4
NOTE DE L'EDITEUR
Le Général Michaud étant décédé au cours
de V%inpression du présent ouvrage, ce IV vo-
lume Oj été rédigé d'après le texte et les notes
laissées par fauteur.
765750
FASCICULE A
NOTICE
SUH MONTAIGNE, LES ESSA.IS
ET LES ILLUSTRATIONS DU PRESENT OUVRAGE.
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV.
RÉSUMÉ CHRONOLOGIQUE
DES FAITS PRINCIPAUX DE LA VIE DE MONTAIGNE.
François /«■' régnant.
1533. — Naissance de Michel Eyquem, Seigneur de Montaigne (28 lév.).
IMfit ■"■ ^^ ^^^ élevé au collège de Guyenne.
? — Il achève ses classes à la faculté de Bordeaux.
15^7. — Mort de François Z", avènement de Henri II.
1548. — Il est témoin à Bordeaux d'un soulèvement populaire ' dans lequel le
Gouverneur de la ville est massacré.
? — 11 fait ses études de droit à l'Université de Toulouse,
1555. — Premier vojage de Montaigne à Paris, où il accompagne son père.
1556. — Celui-ci lui cède sa charge de conseiller à la cour des aides de Périgueux.
1557. — 11 devient conseiller au parlement de Bordeaux par suite de la fusion
de ces deux cours judiciaires
1558. — Il fait connaissance et se lie d'amitié avec La Boétie, comme lui conseiller
au parlement de Bordeaux.
1Ô5V. — Mort de Henri II, avènement de François II.
1559. — Autre voyage de Jlontaigne à Paris, à l'occasion du sacre de François II ;
et, de là, à Bar-le-Duc, où le roi se rend peu après.
I.IGO. — Mort (le François II, avènement de Charles IX.
1562. — Bataille de Dreux.
iîJô'l. — Autre voyage à Paris, et de là à Rouen où il accompagne la cour.
1563. — Mort de La Boétie.
1564)
1 vSv — Montaigne traduit la <■ Théologie naturelle >• de Sebond.
1565. — Il épouse Françoise de la Chassaigne (25 sept.).
1566. — Voyage de Charles IX à Bordeaux.
1568. — Mort de Pierre Eyquem, père de Montaigne.
lôDV. — Bataille de Jarnac, combat de la Roche-Abeille, bataille de MontcoaUmr.
1570. — Montaigne résilie sa charge de conseiller.
1571. — U a achevé l'installation de sa bibliothèque et commence à écrire les
Essais.
id. — Naissance de sa fdle Léonor.
id. — Il est fait chevalier de l'ordre de S'-Michel.
? — Le roi le nomme gentilhomme de sa chambre.
A. IV NOTICE SIJU MONTAIGNE.
i'û2. — Massacre de la Saint- Bar Ihélemy .
i57i. — Moi't de Charles IX, avètiement de Henri III.
1577. — Le roi de Navarre lui confère le même titre.
1580. — Publication à Bordeaux de la première édition des Essais.
. /Voyage de dix-liuit mois à Paris, la Fère, Soissons, Plombières, la Suisse,
^^' — < l'Allemagne du Sud, l'Italie, employé en partie à faire, en divers
^ ' ' endroits, usage des eaux thermales.
1581. — Non encore de retour en France, il est élu maire de Bordeaux pour
une période de dou-x ans.
1582. — Autre voyage à Paris.
id. — Publication à Bordeaux de la seconde édition des Essais.
1583. — Montaigne est réélu maire de Bordeaux pour une nouvelle période de
deux ans.
id. — Incident du château Trompette que son gouverneur projetait de livrer
à la Ligue.
1584. — Henri de Navarre vient passer deux jours, en partie de chasse, au
manoir de Montaigne.
1585. — Epidémie de peste à Bordeaux qui, s'étendant, oblige Montaigne et sa
famille à errer pendant six mois liors de chez eux.
1586. — Son manoir est envahi et pillé dans les désordres de la guerre civile.
1587. — Bataille de Contras.
1587. — Le roi de Navarre y couche à nouveau le lendemain de la bataille,
id. — Publication, à Paris, de la troisième édition des Essais.
I'>88. — Journée des Barricades, assassinat du duc de Guise.
1588. — Dernier voyage de Montaigne à Paris; de là à Rouen où le roi s'est
transporté; à Compiègne, chez la mère de M"' de Gournay dont il vient de faire la
connaissance; a Blois où le roi s'est retiré; entre temps (10 juillet) Montaigne est
arrêté par les Ligueurs et conduit à la Bastille où il reste détenu quelques heures.
id. — Publication, à Paris, de la quatrième édition des Essais.
I58U. — Assassi7iat de Henri III, avènement de Henri /!'.
1590. — Mariage de sa fdle Léonor.
1591. — Il devient grand-père d'une petite -fdle.
1592. — Mort de Montaigne (13 sept.). — 11 est inhumé au couvent des Feuillants
à Bordeaux.
1595. — Publication posthume, à Paris, de la dernière des éditions originales
des Essais.
I60I (?). — Mort d'Antoinette de Louppes, mère de Montaigne.
1610. — Assassinat de Henri 1]'.
I61G. — Mort de Léonor, fille de Montaigne,
1627. — Mort de Françoise de la Chassaigne, sa femme.
1871. — Transfert du corps et du monument funéraire de Montaigne à la
chapelle du lycée de Bordeaux à la suite d'un incendie du couvent des Feuillants.
1886. — Réédification, sur son emplacement primitif, du monument et nouvelle
translation du corps, le bâtiment ayant été reconstruit et devenu le palais des
Facultés.
NOTICE SUR MONTAIGNE.
S.\ VIE.
Michel Eyquem. Seigneur de MONTAIGNE, auteur des Essais, naquit le der-
nier jour de février de l'an 1533, au manoir de Montaigne (1), entre Castillon et
Bergerac, sur les confins de la Guyenne et du Périgord.
Les renseignements les plus anciens que l'on possède sur sa filiation, remon-
tent à un nommé Ramon de Gaujac, du nom du village dont il était originaire.
Ce Ramon exei'çait à Bordeaux, rue Rousselle, un commerce de vins qu'il ex-
portait à l'étranger, et auquel il avait joint celui de pastel et de poissons salés.
Sa sœur avait épousé un Martin Eyquem, du village de Blanquefort (2) dans
le Médoc; elle en eut un fils, Ramon Eyquem, que son oncle associa à son com-
merce, et auquel, à sa mort, vers I4C2, il laissa une foi'tune déjà assez consi-
dérable.
Ramon Eyquem, né en 1402, est le bisaïeul de Montaigne. En 1477, il achetait
le fief de Montaigne relevant de l'archevêque de Bordeaux, et mourait l'année
suivante, laissant deux fils et deux filles.
Les deux fils demeurèrent associés; le cadet mourut jeune, sans avoir été
marié; l'aîné, Grimon Eyquem, grand-père de Montaigne, paraît avoir été, en
affaires, d'une remarquable activité et avec lui la situation de fortune de la
famille s'accrut encore notablement. De 14813 à 1507, il fut jurât (3) de Bordeaux.
Il mourut en 1519, presque septuagénaire, laissant quatre fils et deux filles.
L'aîni', Pierre Eyquem, escuyer, seigneur de Montaigne, comme il s'appelait
lui-même, le père de l'auteur des Essais, hérita du manoir dont son aïeul avait
fait acquisition et où lui-môme était né, et des terres constituant la seigneurie
du même nom. Il avait embrassé la carrière militaire et guerroya en Italie;
mais il l'abandonna, lorsqu'eni 1523 il épousa Antoinette de Louppes, dont la
famille, du nom primordial de Lopez, juive et originaire des environs de Tolède,
était venue s'établir, depuis une ou deux générations, à Toulouse et en Guyenne,
pour chercher fortune, y avait réussi et embrassé le protestantisme.
Le père de Montaigne apparaît dès lors, moitié bourgeois, moitié gentilhomme
de province, occupé, tantôt à Bordeaux à vendre ses vins, tantôt à agrandir
son domaine, rebâtir et fortifier son manoir. La considération dont il jouissait
l'avait fait appeler par ses concitoyens bordelais à faire partie de la munici-
palité, et pendant 25 ans il en avait exercé les diverses charges, lorsqu'en 1554
il fut <''lu maire pour deux ans, ce qui était la durée légale de ces fonctions.
Cette même année, était créée à Périgueux une Cour des aides (4); il y sol-
(1) Paroisse de S.-Michel (aujourd'hui commune de Saint-Michel de Montaigne), alors
juridiction de Montravel; aujourd'hui canton de Vélines (Dordogne).
(2) Blanquefort, chef-lieu de canton à deux lieues environ N.-O. de Bordeaux; —
Gaujac ou Gajac, hameau à peu de distance de Blanquefort.
(;*) On appelait ainsi, à Bordeaux, les consuls et les échevins, autrement dit les mem-
hres de la municipalité.
('*) La Cour des aides était une chambre jugeant en dernier ressort les questions affé-
lentes aux aides, subsides établis jadis sur les boissons pour subvenir aux dépenses de
l'Etat; et ultérieurement et par extension tous autres impôts.
A.vi NOTICE SUR MONTAIGNE.
licita et obtint uno place de conseiller, se proposant de la résigner dès que
cela lui serait possible au profit de son fils aine, en faveur duquel il se démit
en effet un ou deux ans après, quand celui-ci atteignit sa vingt-troisième année.
Esprit naturellement ingénieux et pratique, Pierre Eyquem avait senti dans
ses guerres d'Italie se développer en lui le goût des arts et des sciences; et,
regrettant sa jeunesse demeurée étrangère aux lettres, il recherchait volontiers
la société de ceux qui s'y étaient livrés, et s'efforça de doter ses fils de ce qui,
sous ce rapport, avait pu lui faire défaut.
En 11368, il mourait, laissant cinq enfants mâles et trois filles ; de par son tes-
tament, Michel, l'aîné de tous par la mort de deux auti-es décédés en bas âge
héritait de la maison noble de Montaigne et du droit d'en porter le nom; ce
qu'il fit, abandonnant complètement, dès le premier moment, son nom patro-
nymique, le rayant même sur le livre de famille qu'il tenait, pour ne conserver
que celui-là, le seul sous lequel il soit connu, qu'il a du reste illustré à un si
haut degré et qui s'est éteint avec lui.
Montaigne a raconté lui-même, dans les Essais, l'histoire de sa vie avec celle
lie ses pensées; son enfance rustique, sa première éducation; le latin appris
familièrement par lui dans les bras d'un précepteur étranger et au milieu d'un
entoui-age qui ne lui parlait jamais qu'en cette langue: la sollicitude dont il était
l'objet; enfin les .sept années de sa vie scolaire passées au collège de Guyenne,
qu'il quitta en 1546 parce que, semble-t-il, la peste régnait à Bordeaux ; il avait
alore treize ans et venait d'achever son cours, nom sous lequel on comprenait
alors ce qui correspond à notre classe de'rhétorique d'aujourd'hui.
On est moins renseigné sur son adolescence. On pense qu'il fit sa philosophie,
soit à la faculté des arts de Bordeaux, soit avec des profes.seurs particuliers,
et son droit à Toulouse, où il avait des parents du côté de sa mère. Sa liaison
avec Henri de Mesmes, Paul de Foix, (Juy de Pibrac et autres, alors étudiants
en droit à l'université de cette ville, porte à croire qu'il en a, lui aussi, suivi
les cours et que c'est là qu'il a fait leur connaissance.
C'est à cette époque (1548) qu'eut lieu à Bordeaux, à propos de l'impôt de la
gabelle auquel on voulait la soumettre, le mouvement populaire dans lequel
perdit la vie Tristan de Moneins, gouverneur de la ville ; spectacle dont Mon-
taigne paraît avoir été témoin et qui le frappa au point qu'après l'avoir con-
signé une première fois au ch. 23 du liv. I" des Essais, I, 198, il y revient plus
tard, dans les additions qu'il y fait après 1.588, en vue d'une édition nouvelle.
En 1556, Montaigne, ainsi qu'il est dit plus haut, était nommé à la Cour dos
aides de Périgueux, par suite de la résignation faite par son père, en sa faveur,
de sa charge de conseiller. L'année suivante, cette cour était fusionnée avec
le Parlement de Bordeaux.
C'est peu après que Montaigne fit la rencontre de La Boétie, l'auteur du ■• Dis-
cours sur la servitude volontaire », comme lui conseiller à ce même parlement,
avec lequel, dès le premier moment, il se lia de la plus vive et de la plus étroite
amitié et dont, par ses écrits, il a fait la réputation et conservé le souvenir
à la postérité. — Dans leurs rapports, nous attribuons volontiers le premier
rang à Montaigne, laissant La Boétie dans la pénombre ; c'est l'inverse de ce qui
était. La Boétie, de trois ans plus âgé que Montaigne, supérieur à lui par le
savoir, l'éducation et le caractère, aux jeux des contemporains et des deux amis
eux-mêmes, tenait le rang de fi'ère aîné. Par son exemple et ses observations
discn'tes, il modérait chez son ami, dont la nature droite mais indécise se
prêtait à cette direction, les entraînements d'une ardeur juvénile assez pro-
noncée, et contribuait à former l'àme réfléchie, l'esprit observateur et méditatif
de l'auteur des Essais. Montaigne s'en rendait compte et nous le laisse entendi-e ;
lui mort, mort bien plus jeune que Montaigne, il n'en parle jamais qu'avec un
sentiment de respect et lui rapporte tout ce qu'il a fait de meilleur. Il est à
croire que si La Boétie eût vécu davantage, il eût souvent préservé son ami de
l'excès de scepticisme qui a été en lui le cai-actère dominant. Son éducation
première et son amitié pour La Boétie sont dans la vie de Montaigne les sujets
favoris de ses souvenirs et de ses réflexions.
En 1555, semble avoir eu lieu le premier voyage de Montaigne à Paris pour
SA VIE. . A.VH
laquelle il montre tant cralïection; il accompagnait son pore, qui venait solliciter
du roi le rétablissement des privilèges de la ville de Bordeaux dont elle s'était
vue privée, à la suite de la sédition de 1548.
Les obsèques de Henri II en 1559 l'y ramènent et il y demeure jusqu'au sacre
de son successeur, cérémonie à laquelle il a dû assister, ayant avec la cour
accompli le voyage le Bar-le-Duc qui suivit.
En 1562 nous l'y retrouvons et l'y voyons prêter, sans y être convié, devant
lo Parlement de cette ville, le serment de profession de religion catholique,
qu'en opposition à l'édit de janvier de cette même année, qui avait reconnu aux
Protestants la liberté de leur culte, cette cour de justice avait imposé à tous ses
membres, ce qu'imitèrent bientôt tous les autres Parlements du royaume. — De
Paris, Montaigne suit la cour à Rouen, dont venait de s'emparer sur les Réformés
le duc do Guise, après un siège où se place le projet d'assassinat ourdi contre
ce prince, dont il est question au ch, 23 du liv. I". C'est durant cette excursion à
Rouen que Montaigne eut occasion de voir les sauvages brésiliens venus en
France dont il nous entretient ch. 31 de ce même livre, et de converser avec
eux.
Rentré à Bordeaux, il assista peu après (1563) à la mort de La Hoétie, dont il
fait, dans une lettre à son père parvenue jusqu'à nous, un récit qu'on ne peut
lire sans émotion; en le ])erdant, il crut perdre plus qu'un frère et no s'en
consola jamais entièrement.
Pour faire diversion à sa douleur, son père lui demanda de lui traduire l'ou-
vrage de Raymond Sebond, « le Livre des créatures, ou Théologie naturelle »,
écrit en latin mélangé d'espagnol; et aussi, le maria.
Le 25 septembre 1565, il épousait Françoise de la Chassaigne, lille d'un conseiller
à la cour de Bordeaux, qui semble avoir été femme de grand sens, compagne
discrète et dévouée, telle qu'il la fallait à Montaigne, possédant en ménage les
qualités d'ordre et de direction qui manquaient à son mari dont elle appréciait
la valeur, et vis-à-vis duquel elle eut le tact de s'effacer, lui laissant tout loisir
de penser; si bien que malgré les nuages momentanés et inévitables dont on
retrouve trace, cette union a été heureuse; et Montaigne, laissant à sa femme le
soin exclusif de l'éducation de leur fille, a, de fait, rendu à ses qualités l'hom-
mage le plus probant: toujours est-il qu'il lui doit deux immenses services : elle
l'a déchargé des soucis du ménage et a pris soin de ses manuscrits.
Quelques mois après, en 1566, Charles IX venait à Bordeaux, où son passage
fut marqué par une assez verte remontrance infligée en sa présence et en sou
nom au Parlement, par le chancelier de l'Hospital.
En 1568, Montaigne perdait son père. A ce moment, il terminait la traduction
de Sebond et la livrait à l'impression; et, en 1570, se trouvant dans une situation
de fortune qui le laissait maître d'en agir à sa guise, et un laps de temps suffisant
s'étant écoulé depuis la mort de son père pour qu'il pût le faire décemment,
résiliant en faveur de Florimond de Raymond son office de conseiller pour lequel
il ne s'était jamais senti grand goût et qu'il s'était laissé octroyer par déférence
pour la volonté paternelle, il quitta la robe pour l'épée. On ne saurait dire s'il
porta celle-ci seulement en qualité de gentilhomme; il est cependant probable
qu'il prit part à quelques expéditions militaires, ainsi que plusieurs passages
(ies Essais le donnent à penser (V. N. III, 408 : Profession), et surtout celui où il
fait ce magnifique éloge de la vie des camps (ch. 13 du liv. III, III, 662), tout
rempli d'un accent guerrier qui serait ridicule sous la plume d'un homme qui
ne l'aurait jamais pratiquée, ce qu'auraient inévitablement fait ressortir ceux
de ses contemporains tels que Brantôme, Scaligcr qui étaient peu disposés pour
lui.
Plus libre de son temps, et tout en ne négligeant pas aussi complètement
iju'il l'insinue la gestion de son domaine, il se donne alors tout entier à la publi-
cation des œuvres de La Boétie, à laquelle il se croyait tenu, ayant hériti'- de
ses livres et de sa bibliothèque. Ce travail fut pour lui l'occasion d'un nouveau
voyage à Paris ; c'est là qu'il reçut la nouvelle de la naissance et de la mort de
sa première fille.
A son retour en Guyenne, envahi par un immense besoin de solitude, il
A.viii NOTICE SUR MONTAIGNE.
s'occupe de s'aménager, cliez lui, une sorte de réduit où échappant aux autres,
libre de lui-même, il pût méditer à l'aise; il organise en conséquence la prin-
cipale tour de son manoir, qui depuis est dite « Tour de Montaigne ». L'ins-
cription latine, dont la traduction suit, qu'avec nombre d'autres il fait tracer
dans sa librairie ou bibliothèque qui devait constituer son cabinet de travail et
dont il donne si complaisamment la description au ch. 3 du liv. 111 des Essais,
j)eint bien quel pouvait être son état d'âme, à ce moment de son existence :
« L'an du Christ 1571, y est-il dit, à l'âge de trente-liuit ans, la veille des ca-
lendes (1) de mars, Jlichel de Montaigne, depuis longtemps déjà ennuyé de
l'esclavage de la cour et des charges publiques, se sentant encore dispos, est
venu dans cette retraite se reposer sur le sein des doctes vierges, espérant y
passer enfin dans le calme et la sécurité les joui*s qui lui restent à vivre.
Puissent les destins lui permettre de parfaire cette habitation, où déjà ses pères
venaient agréablement se reposer et qu'il consacre à sa liberté, à sa tranquillité
et à ses loisirs. »
En même temps, il commençait à écrire les Essais, cette œuvre capitale de sa
vie. Il ne semble pas toutefois que ce fût avec l'idée d'en composer un ouvrage ;
ce n'était tout d'abord que de simples notes, sur lesquelles il transcrivait ce qui
l'avait frappé dans sa lecture du jour, accompagné de quelques brèves réflexions
d'un caractère général, ainsi qu'il ressort de la division du livre I" en
chapitres courts, dont plusieurs parfois sur le même sujet. Quant à ce qui est
devenu plus tard et de plus en plus le dessein avoué et affiché de son livre :
l'étude minutieuse de soi-même, avec parti pris de se peindre tout entier et à
nu, cela parait si peu avoir été sa première intention que, dans ces mêmes
chapitres, il prend des détours pour parler de lui et ne se met en scène que
sous le voile de l'anonyme, comme par exemple dans celui intitulé : « Du parler
prompt, ou tardif ». Ce n'est qu'à la longue qu'il s'est décidé à livrer au public
ces extraits de ses lectures, les souvenire de ses observations et de ses causeries,
tout ce qu'enfin il a cueilli en faisant l'école buissonnière.
En cette même année 1571, lui naissait une seconde fille, Léonor, la seule, sur
les six qu'il a eues, qui ne soit pas morte en bas âge; et, comme si le sort se
prenait à railler ses projets de retraite, il était fait chevalier de l'ordre de
S.-Michel, « pour ses vertus et ses mérites », dit la lettre-patente lui conférant
cette distinction.
Les événements furent du reste plus forts que sa résolution; et ici s'intercalent,
pour se continuer par intervalles jusqu'à la fin de sa vie, les incidents, à la
vérité accidentels et passagers et sur lesquels on n'a que de très vagues données,
qui font que, dans les Essais, Montaigne laisse entendre qu'il a exercé la profes-
sion militaire, ce qui du reste était alors, par circonstance, le cas d'à peu près
tout gentilhomme, et ceux qui lui font attribuer à diverses époques des missions
sur l'objet précis desquelles on n'est pas davantage fixé, mais qui, étant donné
son caractère, son entregent, la situation à laquelle il parvint, paraissent avoir
dû consister surtout en négociations auprès de certains princes et chefs princi-
paux des divers partis. Il demeure toutefois trace de l'une d'elles, à lui confiée
en 1574, par le duc de Montpensier, commandant l'armée royale en Poitou,
auprès du Parlement et du Corps de ville de Bordeaux, pour qu'ils aient à
prendre des dispositions de défense.
En 1577, le roi de Navarre le nomme gentilhomme de sa chambre, titre abso-
lument honorifique pour certains, comme ce fut le cas pour lui, ne comportant
aucun service auprès du prince. Ce même titre lui avait été ou lui fut dévolu
aussi, la date en étant incertaine, par Charles IX ou son successeur, ainsi qu'en
font foi les titres des deux premières éditions des Essais et son diplôme de
citoyen romain.
(l)On donnait ce nom, dans la chronologie romaine, aux premiers jours de cliaque
mois. Les Romains comptaient par calendes, lesquelles n'existaient pas chez les Grecs,
d'où le proverbe • renvoyer une chose aux calendes grecques ., pour dire qu'on ne la
fera jamais; à remarquer ici que la veille des calendes de mars, ou dernier jour de
février, était la date anniversaire de la naissance de Montaigne.
SA VIE. A. IX
En 1580, parut la première édition de son ouvrage, qui n'en comprenait que
les deux premiers livres.
Montaigne qui, depuis des années déjà, avait commencé à ressentir des atteintes
de gravelle et vainement avait eu recours pour les combattre aux eaux ther-
males de son voisinage, Aigues-Chaudes, Bagnères, se résolut à cette époque à
voyager au loin, autant par goût que pour essayer si d'autres eaux ne lui
seraient pas plus favorables; et aussi, pense-t-on, pour échapper aux difficultés
sans cesse croissantes do la situation intérieure et à celles non moins pénibl'^s
pour lui résultant du train de vie que, chacun de son côté, menaient le roi et
la reine de Navarre et de leurs rapports, qu'il déplorait d'autant plus qu'il était
particulièrement attaché à tous deux.
Il se rendit d'abord à Paris où il fit hommage de son livre au Roi; puis à La
Fère pour rendre les derniers devoirs au comte de Grainmont, le mari de la
belle Corisande d'Andouins, qui venait d'être tué au siège de cette place et dont
il accompagna le corps à Soissons; et, de là, aux bains de Plombières et de
Bade.
De ce voyage qui devait le tenir dix-huit mois hors de chez lui, du 22 juin 1580
au 30 septembre 1581, effectué en courant çà et là à travers la Suisse, l'Allemagne
du Sud et l'Italie. Montaigne a tenu un journal qui n'a rien de remarquable au
point de vue littéraire, mais est intéressant par la connaissance qu'il nous donne
de son auteur; un de ses frères et un jeune seigneur d'Estissac, probablement
le fils de la dame de ce nom à laquelle est dédié le ch. 7 du liv. II des Essais,
l'accompagnaient.
Entré en Allemagne par Bàle, il pousse jusqu'à Augsbourg, où il cache ses nom
et qualités pour qu'on le croie plus grand seigneur qu'il n'est, et d'où il revient
en Italie par Venise, pour arriver à Rome où il fait un séjour de cinq mois,
entrecoupé d'excursions à Notre-Dame de Lorette, où il laisse dans la Casa Santa
son portrait et ceux de sa femme et de sa fille; c'était alors un grand honneur
d'y figurer : « à peine est reçu à donner qui veut, dit-il, au moins c'est faveur
d'être accepté •>; puis il passe à Florence, et va faire une cure d'eau aux bains
délia Villa près de Lucques.
A son arrivée à Rome, ses livres avaient été saisis et parmi eux un e.xemplaire
des Essais, dont l'examen assez superficiel donna lieu de la part de la censure
à quelques critiques assez anodines, dont l'auteur ne tint du reste aucun compte
et qui n'eurent cette fois aucune suite fâcheuse, à rencontre de ce qui en résulta
un siècle après où l'ouvrage fut frappé d'interdit.
Avant de quitter Rome, il sollicita et obtint le diplôme de citoyen romain. Bien
que dans les Essais il le qualifie de <• faveur vaine, qui lui fut octroyée avec
toute gratieuçe libéralité », il convient dans son journal avoir employé pour
l'obtenir « ses cinq sens de nature » ; de fait, cette concession n'était pas prodi-
guée.
Montaigne était aux bains délia Villa, quand dos lettres lui parvinrent, l'infor-
mant qu'un mois et demi auparavant, le I" juillet 1581, il avait été, à l'unani-
mité, élu maire de Bordeaux. Il revint à Rome où il trouva la missive des jurats
lui notifiant officiellement son élection ; il s'achemina alors vers la France par le
mont Cenis, laissant à Rome son frère et M'' d'Estissac.
Il avait été nommé maire sans l'avoir brigué : le souvenir des services rendus
par son père dans cette charge, les quatorze années durant lesquelles lui-même
avait siégé au Parlement, les deux premiers livres des Essais parus l'année pré-
cédente qui obtenaient un vif succès, ses relations l'avaient désigné au choix
de ses concit03fens, on même temps que le désir d'évincer le maréchal de Biron
qui quittait ces fonctions, dont il sollicitait le renouvellement pour lui ou l'attri-
bution à quelqu'un des siens, mais qui, pendant (ju'il les avait occupées, avait
indisposé nombre de pei-sonnes et entre autres, à la fois, le roi de Navarre et sa
femme la reine Jlarguerite sœur du roi de France.
Mais le caractère de Montaigne, autant que ses goûts et même sa santé, l'éloi-
gnaient des charges publiques, et il avait décliné l'honneur qui lui était fait.
Les Bordelais, s'entêtant, s'étaient adressés au roi ; et à son arrivée chez lui, il
trouva une lettre de Henri III l'invitant à accepter : il dut céder; peut-être au
A.xii NOTICE SUR MONTAIGxNE.
Il fut inhumé dans l'église du couvent des Feuillants à Bordeaux.
Quand son mari vint à. lui manquer, après une union qui avait duré plus de
vingt-sept ans, M"" de Montaigne se donna la double tâche de lui ériger un
tombeau et de faire rééditer les Essais conformément aux dernières volontés de
leur auteur.
Ce ne fut qu'en 1614 que le monument funéraire qu'elle voulait lui consacrer
fut achevé : il y est représenté en grandeur naturelle, étendu sur un sarcophage,
revêtu d'une armure, ayant son casque et ses gantelets à côté de lui, et un lion
couché à ses pieds, si bien que malgré ses armes, ■■ on hésiterait à reconnaître le
paisible Montaigne sous cet appareil guerrier », si deux épitaphes, l'une en latin,
l'autre en grec, gravées l'une d'un côté, l'autre de l'autre, résumant sa vie et sa
doctrine, ne renseignaient absolument à ce sujet (P. Bonnefox). — Toutes deux
ont été composées par Jean de S'-Martin avocat au parlement de Bordeaux. La
première, pompeuse et banale, est sans valeur. La seconde résume assez bien sa
vie et ses idées; elle est ainsi conçue :
« A Michel Montaigne, Périgourdin, fils de Pierre, petit-fils de Grimon, arrière-
« petit-fils de Ramon, Chevalier de S.-Michel, citoyen romain, natif de Boideaux.
« ancien maire de la cité des Bituriges, homme né pour la gloire de la nature :
« dont la douceur de mœurs, la finesse d'esprit, la facilité d'élocution et la justesse
« de jugement ont été estimées au-dessus de la condition humaine ; qui a eu pour
« amis les rois les plus illustres, les plus grands seigneurs de France et même les
■■ chefs du parti égaré, quoique lui-même fût d'une moindre condition et fidèle
« observateur des lois et de la religion de ses pères. N'ayant jamais blessé per-
« sonne, aussi incapable de flatter que d'injurier, il reste cher à tous indistincte-
« ment. Ayant toujoure fait profession, dans ses discours et dans ses écrits, d'une
« sagesse à toute épreuve contre toutes les attaques de la douleur, après avoir
« lutté longtemps avec courage contre les assauts répétés d'une maladie impla-
« cable, égalant ses écrits par ses belles actions, il a fait, avec la volonté de Dieu,
« une belle fin à une belle vie.
« Il vécut cinquante-neuf ans, sept mois et onze jours, et mourut le 13 septembre
« de l'an du salut 1592.
« Françoise de Lachassaigne, pleurant la perte de cet époux fidèle et constam-
• ment chéri, lui a érigé ce monument, gage de ses regrets. »
En 1800, la dépouille de Montaigne fut transférée en grande pompe au musée
de la ville; mais il se trouva que par le fait d'une erreur ce n'était pas son corps,
mais celui d'une de ses nièces inhumée au-dessus de lui, qu'on avait déplacé. Il
continuait donc à demeurer à la place qu'il occupait depuis deux cents ans, quand,
en 1871, l'incendie de l'église où il reposait, qui respecta son mausolée, amena son
transfert à titre provisoire dans la chapelle du lycée et plus tard, en 1886, dans
le vestibule des Facultés de Bordeaux construitei^ sur l'emplacement du couvent
des Feuillants; c'est là qu'on le voit actuellement, tandis qu'on n'a pu retrouver
le petit vaisseau contenant le cœur de l'illustre philosophe, déposé à son décès
dans l'église de S.-Michel de Montaigne. Rien n'indiquant qu'il en ait été enlevé,
il doit s'y trouver encore, seulement on ignore où il avait été placé.
En 1616, dans ce même tombeau qui réunit ainsi le père et la fille, avait été
inhumée Léonor. Quant à Françoise de la Cliassaigne. qui mourut en 1627, à l'âge
de 83 ans, ayant survécu trente-cinq ans à son mari, elle alla reposer dans l'église
de S.-Michel.
Léonor s'était mariée deux fois : veuve de François de la Tour, elle avait
épousé en secondes noces le vicomte de Gamaches ; elle en eut une seconde fille,
Marie : c'est par Marie de Gamaches, mariée à un de Lur Saluce, que s'est formée
la descendance directe de Montaigne représentée aujourd'hui par les familles
0' Kelly-Farrell, de Ségur, de Puységur et de Pontac. (Voir le tableau généalogique
ci-contre).
En outre de la traduction de la « Théologie naturelle » de Sebond et des Essais,
on a encore de Montaigne : quelques traductions d'ouvrages grecs et latins accom-
pagnées de dédicaces, quelques poésies en latin et en français, le journal de
ses voyages, trouvé dans un grenier de son manoir, publié pour la première fois
en 1774 et dont le manuscrit a disparu, une éphémeride assez succincte, enfin
GENEALOGIE ET DES
Ramon Eyqukm (1402 à 1476
Acquéreur en
— GrimON EyqUEM, né vers 1450, m. en 1519, marié à Jehanne du Four.
Pierre Eyqukm, escuyer, seigneur de Montaigne (1495 à 1668), marié en
1528 à Antoinette de Louppes, née de 1506 à 1510, morte, croit-on, vers 1601.
"^
MICHEL, seigneur de MONTAIGNE (1533 à 1592), auteur des ESSAIS. ^
Ép. en 1565 FRANÇOISE DE LA ChASSAIGNE (1544 à 1627) ;
en a six filles, dont cinq meurent avitnt l'âge d'un an.
LÉONOR DE M(
En 1590, François de Latour (m. en 1694).
1. — Françoise de Latour (1591 à 1613).
Épouse en 1600 Honoré de Lur (1594 à 1660) (elle avait
9 ans et son mari en avait 6).
(Honoré de Lur et Louis de Lur, qi
Charles de Lur (vicomte d'Oreillan) (1612 à 1639).
Tué au siège de Salces (Roussillon).
Mort sans postérité.
(a) — De Jeanne de Gamaches, deacem
(i) _ De Claude-Madeleine descendent
* A partir de 1622 où, remarié, il quitte Montaigne et se retire dans ses terres, sa trace se p
4NCE DE MONTAIGNE.
1449 Isabeau de Ferraignes.
f de Montaigne.
Pierre (1452-1480), n'a pas été marié,
'erogrina, épouse de Lansac.
Ludita, épouse Verteuil.
rhomas, dit M. de St-Michel, de ce qu'il était curé de cette paroisse, mort peu âgé.
Pierre (minor), dit Seigneurde Gaujac, chanoine de Bordeaux, curé de Lahontan, m. à 67 ans.
Raymond, seigneur de Bussaguet, conseiller au parlement de Bordeaux, m. vers 1567.
[31anquine, épouse de Belcier.
Jehanne, épouse Dugrain.
Arnaud / ^ , , ... , , , .
>■ i aines de Alicnel, morts en bas âge avant sa naissance.
Iliomas, né en 1534, .seigneur de Beauregard, protestant, épouse en secondes noces Jacquette
d'Arsac, belle-fille de La Boétie.
•*ierre, seigneur de la Brousse (1536 à 1597), ne semble pas avoir été marié.
Jeanne, née en 1536, protestante, épouse Richard de Lestonna, conseiller au parlement de
Bordeaux.
Arnaud, dit capitaine St-Martin (1541 à 1564).
jéonor, née en 1552, mariée à Thibaud de Caraain, conseiller au parlement de Bordeaux.
klarie, née en 1554, femme de Bernard de Cazalis.
iertrand, né en 1560, seigneur de Mattecoulom, mort sans postérité, ne semble pas avoir été
marié.
[1571 à 1616).
En 1608, le vicomte de Gamaches*.
2. — Marie de Gamaches (leio à 1683).
Ép. en 1627 Louis de Lur, B"" de Fargues (m. en 1696).*
res, ont épousé les deux sœurs utérines). |
1 Charles-François (1638 à 1669), mort sans postérité.
2 PhilbeRT, né en 1640, sans autre renseignement.
3 Marguerite, épouse L. de Laneau, m. sans enfants.
4 Jeanne, épouse L. de Saint-Jean (a).
5 Claude-Madeleine, épouse L. de Ségur (ô).
5[elly-Farrell, les Farrell et les de Puységiir.
Montaigne et les Pontac.
SA VIE. A.xm
quelques lettres : une d'elles à son père, sur la mort de La Boétie, est assez étendue
et mérite attention: les autres sont sans importance.
On lui a attribué la rédaction d'instructions, rédigées en 1503, par Catherine
de Médicis, à l'adresse de Charles IX qui venait d'atteindre sa majorité; il y a
tout lieu de croire qu'il y est complètement étranger, et qu'elles ont été dictées
par la reine à un homonyme de Jlontaigne remplissant auprès d'elle les fonctions
de secrétaire, le même probablement au profit duquel elle faisait délivrer en 1586
une ordonnance de paiement de 150 écus, que l'on a retrouvée, ■< pour renouveler
un des chevaux de sa charriote et acheter quelques hardes qui lui sont nécessaires ».
!Mais tout ce qui a trait à l'auteur des Essais s'efface devant l'éclat de cette
œuvre capitale; par elle, la mémoire de Montaigne rayonne d'une gloire qui se
maintient en ces temps où tout va passant si rapidement : sa statue orne li'
principal site de Périgueux; il existe de lui de nombreux b^tes et portraits; en
bien des villes, des lycées, des promenades, des avenues, des rues portent son
nom; pendant la Révolution française il a été le sujet d'une comédie; son éloge
a été mis au concours, et innombrables sont les ouvrages et articles de littérature,
critiques et autres, dont il a été l'objet. Par-dessus tout, son livre traduit à
l'étranger en plusieurs langues, sans cesse réédité en France à toutes époques,
introduit par extraits dans l'enseignement, lui a donné l'immortalité en ce monde.
Bien que passant trop légèrement sur le scepticisme confinant à l'égoïsme qui
est le fond de cette existence et la flattant un peu, Villemain dans son panégy-
rique de Montaigne l'a très heureusement résumée et appréciée : » Sa vie, dit-il,
" offre peu d'événements : elle ne fut point agitée; c'est le développement paisible
■< d'un caractère aussi noble que droit. La tendresse filiale, l'amitié occupèrent
« ses plus belles années. Il voyagea, n'étant plus jeune, et n'ayant plus besoin
•■ d'expérience; mais son àme, nourrie si longtemps du génie antique, retrouva
■< de l'enthousiasme à la vue des ruines de Rome. — Malgré son éloignement pour
•< les honneurs et les emplois, élu par le suffrage volontaire de ses concitoyens,
« il remplit deux fois les fonctions de premier magistrat dans la ville de Bordeaux.
•< Il était plus fait pour étudier les hommes que pour les gouverner : c'était
« l'objet où se portait naturellement son esprit: il s'en occupait toujours jusque
'< dans le calme de la solitude et dans les loisirs de la vie privée. — Les fureurs
•< de la guerre civile troublèrent quelquefois son repos; et sa modération, comme
" il arrive toujours, ne put lui servir de sauvegarde. Cependant ces orages même
« ne détruisirent pas son bonheur. C'est ainsi qu'il coula ses jours dans le sein
« des occupations qu'il aimait, libre et tranquille, élevé par sa raison au-dessus
« de tous les chagrins qui ne venaient point du cœur, attendant la mort sans la
« craindre, et voulant qu'elle le trouvât « occupé à bêcher son jardin et non-
« chalant d'elle ». — Les « Essais » ne furent pour lui qu'un amusement facile,
« un jeu de son esprit et de sa plume. Heureux l'écrivain qui, rassemblant ses
« idées comme au hasard, et s'entretenant avec lui-même, sans songer à la pos-
« térité, se fait cependant écouter d'elle. On lira toujours avec plaisir ce qu'il a
« produit sans effort. Toutes les impressions de sa pensée, fixées à jamais par le
•< style, passeront aux siècles à venir. Quel fut son secret? Il s'est mis tout entier
" dans son ouvrage; aussi en lui l'homme ne sera jamais séparé de l'écrivain,
« non plus que son caractère ne le sera de son talent. »
LES ESSAIS.
« Livre consubstantiel à son auteur », écrit Montaigne (liv. II, ch. 18, II, 524
et N. Autheur); autrement dit : mon livre et moi ne faisons qu'un (III, 244).
Les ESSAIS et leur auteur sont en effet inséparables : qui analyse l'un, analyse
l'autre, ils ne sauraient être analysés l'un en dehors de l'autre; et d'autre part,
le proverbe qui dit que nous pouvons nous flatter de connaître l'homme avec qui
nous avons mangé un boisseau de sel est ici en défaut : qui peut dire en effet
combien d'exemplaires des Essais il faut avoir usés avant de croire qu'on connaît
Montaigne J
A.xiY NOTICE SUR iMOiNTAIGNE.
Ondoyant et divere, est sa caractéristique essentielle on uiôme temps quil nous
apparaît être tel ou tel suivant nos propres sentiments, suivant même nos disposi-
tions du moment; on ne le tient jamais; aucune doctrine n'est tellement sienne
qu'il ne puisse avoir soutenu, dans quelque coin des Essais, la doctrine contraire.
Aux yeux des uns, il est le plus naturel, le plus pratique, le plus simple des
sages, et voilà de quoi plaire au plus grand nombre; aux yeux des autres, il est
le plus avisé, le plus fin, le plus raffiné des libres penseurs, et voilà de quoi
plaii'e aux plus délicats; généralement on aime sa hardiesse, quelques-uns le
trouvent osé; d'autres le louent de maintenir à l'état de questions ouvertes
une foule de problèmes que ceux-là estiment préférable d'écarter en les passant
sous silence.
A première vue moraliste de premier ordre, le jugement et la connaissance
du cœur humain priment en lui l'érudition et sa morale n'effarouche pas comme
celle de tant d'autres qui l'ont devancé ou suivi. Sous une forme simple et
attrayante, il nous montre combien du fait même de la natuie, dont notre
liaison est l'interprète, sont faciles et agréables la recherche de la vérité et la
pratique de la vertu, quel contentement elles sont susceptibles de nous pi'o-
curer, et que sous leur action réconfortante peu à peu Tapaisement se fait en
nous. Loin de nous détourner des jouissances qu'il nous est donné de ressentir
ici-bas, il nous incite à ne pas les dédaigner, nous mettant seulement en garde
contre l'abus; comme aussi à patienter avec les misères de l'existence, en les
comparant à ce qu'elles pourraient être, et considérant qu'il est toujoui*s loisible
de s'y soustraire à qui elles sont devenues intolérables. — Élevé dans la pratique
de la foi catholique la plus orthodoxe, il la confesse à maintes reprises, tout en
évitant avec grand soin d'en discuter les dogmes. — Partisan de la royauté
qui, pour lui, représente l'ordre, base essentielle des sociétés, la domination
jwpulaire ne lui semble pas moins être la plus naturelle et la plus équitable:
mais par-dessus tout, il est ennemi de la violence et des abus d'où qu'ils
viennent; rebelle à toute contrainte, il veut pour chacun la liberté la plus
absolue uniquement limitée par l'obligation de ne pas porter atteinte à celle
d'autrui et d'observer les lois.
Et nonobstant, en le scrutant davantage, peut-on nier que sous le rapport
philosophique, nul plus que lui ne se soit évertué à démontrer l'inanité de tout
système et l'impuissance de l'esprit humain? Rien n'est absolu, tout est relatif,
est sa conclusion en toutes choses. — Personne a-t-il mieux montré à quel
point un homme peut être irréligieux, avec la volonté de n'être pas antire-
ligieux! jamais personne n'a fait plus complètement abstraction de la vie éter-
nelle; sa religion est toute de surface et d'étiquette. Lui si prolixe en citations,
use relativement assez peu de l'Ecriture Sainte et de la Bible, tout juste assez
pour ne pas paraître les ignorer, et sa solution de la question religieuse n'est
autre en définitive que de « demander à son curé ce qu'il faut croire et n'y plus
penser •. — Ces mêmes lois, pour lesquelles, comme citoyen, il professe le plus
grand respect, comme penseur il a pour elles, et pour toutes en général, un
mépris absolu, convaincu qu'il est que pas une n'est fondée sur la raison et que
leur existence seule fait leur autorité (Stapfer). — Il est humain, réprouve toute
rigueur inutile et s'apitoye volontiers sur le sort des malheureux; il est de
commerce facile, c'est incontestable; mais de la question sociale il ne dit mot,
et d'autre part que d'égoïsme en lui ! C'est à un degré tel qu'imbu de ses idées,
un homme peut vivre heureux, mais qu'une nation chez laquelle chacun s'ins-
pirerait de pareils sentiments, résigné à tout plutôt que d'accepter d'être troublé
dans sa quiétude, laissant aux autres le soin de lutter pour ce que soi-même on
approuve, souhaite ou désire, serait immanquablement perdue. Et c'est bien là
ce qui nous menace : notre bourgeoisie qui forme le fond sérieux de notre
population, absolument formée sur ce modèle, à peu près satisfaite de son sort,
ne voit, elle aussi, rien au delà (le bien-être est mère de la veulerie); n'ajant
au cœur qu'une passion, l'égoïsme, elle se désintéresse du. flot montant des
revendications des classes ouvrières auxquelles elle , ne veut pas prêter l'atten-
tion, attacher l'importance qu'elles méritent, soit pour y donner satisfaction, soit
pour y résister, ne semblant pas se douter qu'en politique comme à la guerre.
LES ESSAIS. A.xv
pour avoir la paix il faut être tort et redouté, et prévoyant; regarder en face
les difficultés, et les combattro en prenant les devants et non s'incliner. Que
peut-on voir en effet de plus probant sur cette disposition d'esprit chez Mon-
taigne que ces passages mêmes de son livre : « le me contente de iouïr du
monde sans m'en empresser, de viure vne vie seulement excusable et qui seule-
ment ne poise nj' à moi ny à autrui. » — «Si ne sçais à l'examiner de près, si
selon mon humeur et mon sort, ce que i'ay à souffrir des affaires et des domes-
tiques, n'a point plus d'abiection, d'importunité et d'aigreur, que n'auroit la
suitte d'vn homme, nay plus grand que moy, qui me guida.st vn peu à mon
aise. • — « le hay la pauureté à pair de la douleur; mais ouy bien, changer
cette sorte de vie à vne autre moins braue et moins aflaireuse. » — « le me
consolerois aysement de cette corruption des mœurs présentes de nostre estât,
pour le regard de l'interest public: mais pour le mien, non. l'en suis en par-
ticulier trop pressé. >• — « La plus honorable vacation est de seruir au publiq
et estre Uile à beaucoup. Pour mou regard, ie m'en despars, partie par cons-
cience, partie par poltronorie » (ch. IX du liv. III, III, 390, 392, 396). Ce
scepticisme outré, dont on lui fait reproche, s'explique bien, du reste, i)ar
les circonstances dans lesquelles il se trouvait. En politique, les partis chan-
geaient de thèse au fur et à mesure que les événements se produisaient, et
chacun changeait de parti suivant ce qu'il croyait plus avantageux, les con-
victions n'y étaient généralement pour rien. En matière religieuse, son père
était catholique, sa mère protestante, ses frères et sœurs tenaient les uns pour
la première de ces religions, les autres pour la seconde; les discussions eu
famille sur les mérites de l'une et de l'autre devaient être fréquentes en ce
temps où elles étaient l'une des causes essentielles des ti'oubles qui agitaient
si profondément la France. Ce devait être pour lui, qui aimait à penser, un
sujet de méditations constantes, et la méditation en pareille matière, quand
la raison seule s'en mêle à l'exclusion de la foi (et. chez lui, chacune avait son
heure), conduit, ainsi qu'il le dit, « ayant toilt essayé, tout sondé, à ne trouuer
en cet amas de choses diuerses, rien de ferme, rien que vanité » (II, 220);
« toutes choses nous sont occultes, il n'en est aucune de laquelle nous puissions
établir quelle elle est . (II, 244).
S''-Belve rappelle « le plus sage des Français >>; c'est beaucoup dire, mais à
coup sur. Montaigne fut un sage; il est un maître sous le rapport du bon sens,
pour cette moyenne de l'humanité qui forme un groupe si considérable et si
honorable, qui n'est bien capable au cours ordinaire de la vie que d'une sagesse
courageuse encore, mais tempérée et modeste; il nous gouverne, nous dirige,
nous inspire, il est le héros et le hérault du bon sens; et, quand il a affaire
à des âmes plus hautes, plus sévères à la fois et plus ardentes, il ne les conquiert
pas, mais néanmoins il les séduit, les charme jusqu'à les inquiéter; il s'en fait
non des amies, mais, ce qui est plus flatteur, des ennemies qui ne peuvent dé-
tacher de lui ni leurs pensées, ni leurs regards (Faguet). — Et cependant, si
l'on vous disait d'un homme, sans le nommer : II' a traversé l'étude, la magis-
trature, la coui-, la guerre, l'administration, et nulle part il ne s'est arrêté, ni
engagé à fond. Rentré dans la vie privée, il n'y a point pris racine; il a jugé
que les devoirs et les intérêts domestiques étaient encore un cercle trop large,
pour ce que j'appelle sa paresse, une charge trop lourde, pour ce qu'il appelle
son indépendance: il s'est isolé de sa famille après s'être isolé du monde :
comme mari, comme père, il a cru faire assez en laissant sa femme gronder
à l'aise et .sa fille s'élever au hasard, pendant qu'il s'enfermait et rêvait dans
une tourelle réservée de son petit château, sans jamais faire aucun effort pour
autrui. Un tel homme peut-il réellement être considéré comme le type de l'homme
vraiment sage? Que pouvait-il y faire autre que d'observer cet être unique, ce
moi auquel il avait réduit son univers, que par moment il maltraite en paroles,
mais dont il est évidemment trop jaloux, pour qu'on admette qu'il n'en (Hait pas
amoureux; et, frappé des contrariétés et des complexités de sa nature, concluant
de lui-même a nous tous, pouvait-il se représenter l'homme autrement qu'une
énigme indéchiffrable? (G. Guizot). — « Mérite-t-il d'être pris pour modèle, celui
qui se félicite d'être ai'rivé à ce point de philosophie qu'il puisse mourir sans
A.xvi -NOTICE SUIl MONTAIGNE.
regret de chose quelconque, non pas mémo de sa femme et de ses enfants; qui,
poui" n'être point importuné à ce moment par la présence de ses amis et de ses
proches dont il soupçonne les larmes, pour n'être point obligé de consoler leur
douleur ou soutenir leur faiblesse, souhaite d'aller souffrir et mourir parmi
des mercenaires et des inconnus; qui, apprenant la mort de sa fille unique,
envoie à sa femme une lettre badine, avec un traité de Plutarque pour la
consoler? » (Biot).
Pour nous, qui avons vécu des années avec lui, Montaigne nous apparaît vif,
exubérant, et avec cela nonchalant, répugnant à prendre une décision; très
malin, très piquant sous une certaine rondeur d'allures, sociable néanmoins,
d'humeur facile, indulgent pour autrui et en somme agréable compagnon, ne se
sachant pas du reste mauvais gré d'être le bonhonmie qu'il parait et qu'il fait
plus encore peut-être qu'il ne l'est; ayant le jugement sain, l'àme sincère, mais
la conscience peu sévère; c'est un penseur capricieux mais profond, qui a de
l'originalité, le culte de l'antiquité, du pittoresque dans son style, nerveux,
écrivant au jour le jour, par passe-temps, mais s'intéressant peu à ce qui n'est
pas lui, dont il parle avec franchise, tout en ne confessant guère que les défauts
dont on se fait généralement gloire dans le monde; d'un égoïsme profond, répu-
gnant à l'action et aimant par-dessus tout le calme et le repos; d'un scepticisme
achevé, qui le porte à accepter par trop toutes les faiblesses liumaines, sans
jamais provoquer un effort quel qu'il soit pour les prévenir ou les refréner; et
cependant sensible à la vertu et réprouvant le vice; admirateur du beau et du
bien, tout en se reconnaissant incapable d'}^ atteindre; prenant ses maux en
patience, compatissant à ceux dautrui, résigné à ce qu'il ne peut empêcher,
se contentant de son sort; pondéré, n'exagérant rien, ne se passionnant pas;
ne se croyant pas infaillible; tolérant, n'imposant pas ses idées, respectant les
opinions des autres et même leurs erreurs; considérant la versatilité comme
inhérente à la nature humaine et ne s'en étonnant pas; fuyant les discussions;
a tout procès, préférant un accommodement; assoiffé de liberté pour lui et pour
autrui; respectueux des pouvoirs établis, non qu'il les tînt comme parfaits, mais
parce qu'il estimait qu'il n'y a rien qui ne prête à la critique et qu'il ne donnait
point dans les utopies; tout en étant d'un parti, se conciliant les autres, sans
manquer ni à ses obligations, ni à ses propres sympathies; ne se mêlant aux
affaires publiques qu'à son corps défendant, et faisant alors, sans jamais outre-
passer, ce qu'il croyait être son devoir; cherchant à esquiver toute ingérence
dans les intérêts et les affaires des autres, ne s'occupant même que modérément
des siennes, préféi^ant l'inconvénient d'être volé à l'obligation de surveiller ses
domestiques; ne s'obstinant pas à vouloir pénétrer quand même la raison de ce
qui est; se laissant vivre, ne faisant fi d'aucune des jouissances et agréments
que l'existence comporte; envisageant la mort sans appréhension, constamment
préparé à sa venue; fidèle à la religion de ses pères, moins par conviction, que
pour n'être pas troublé par l'ignorance où nous sommes de ce qui se passe après
nous, et, parce qu'il trouvait difficilement à accommoder sa foi avec sa raison,
évitant avec le plus grand soin de les mettre en présence. Avec cet ensemble de
défauts et de qualités, honnête sans être parfait, satisfaisant, en ces temps ex-
traordinairement agités, aux conditions essentielles de ce qui procure à l'homme
cette tranquillité relative du corps et de l'àme, qui en somme est le bonheur tel
qu'il peut être ici-bas, réalisant Vaurea mediocrttas d'Horace, Montaigne est un
consolateur précieux et, à ce titre, vaut d'être lu et médité de tous.
L'ouvrage de Montaigne est un vrai répertoire de souvenirs et de réflexions
nées de ces souvenirs. Sur chaque sujet, il commence par dire tout ce qu'il sait
et il finit par dire ce qu'il croit et naïvement, en toutes choses, le pour et le
contre; c'est un penseur profond, mais capricieux; et le cours de ses idées
l'entraîne sans cesse à tous les points imaginables de l'horizon. On lui a re-
proché de conter trop d'histoires, mais c'est précisément par là qu'il arrive
à son but : nous montrer l'homme dans toutes les attitudes.
Le succès des Essais s'affirma assez rapidement, bien qu'il semble que ses
contemporains aient été plus vivement ciioqués que nous ne le sommes
aujourd'hui) des incorrections et des singularités de son style; Pasquiek lui
LES ESSAIS. A.xvii
reprochait qu'en plusieurs endroits de son livre, on reconnaissait « je ne sais -
quoi du ramage gascon », et l'inVitait à les corriger, ce dont, du reste, il se
garda bien.
Déjà à la lin de son siècle, .Iuste Lipse avait surnommé l'auteur des Essais
« le Thaïes français » et de Thou, qui le qualifie d' « Homme franc, ennemi de
toute contrainte », lui promet l'immortalité; par contre Scaliger l'appelle « un
ignorant hardi », et les gens d'Église le traitent de « sophiste ».
Dès le milieu du xvn- siècle, les Essais étaient presque universellement ré-
pandus, beaucoup déjà s'en inspirent et bien diverses sont, à cette époque, les
appréciations émises à leur sujet :
Le cardinal Duperkon les dénomme « le bréviaire des honnêtes gens ».
Bacon écrit ses Essais ayant sous les yeux ceux de Montaigne, qu'il comparait
au travail des abeilles.
GuEz DE Balzac dit en en parlant : « Ce n'est pas un corps entier, c'est un
corps en pièces, tant l'auteur est ennemi de toute liaison soit de la nature, soit
de l'art. Il sait bien ce qu'il dit, mais ne sait pas toujours ce qu'il va dire; s'il
a dessein d'aller dans un lieu, le moindre objet qui lui passe devant les yeux,
le fait sortir de son sujet pour courir après ce nouvel objet; mais il s'égare plus
heureusement que s'il allait tout droit et ses digressions sont agréables et ins-
tructives », et il le tient comme ayant porté la raison humaine aussi haut qu'elle
peut s'élever, sOit en politique, soit en morale.
Mézerav l'appelle « un Sénèque chrétien ».
S.-EvREMOND dit qu'il « s'y plaira toute sa vie ».
Pascal, qui avait commencé par le lire avec passion et le goûter très vive-
ment, s'élève contre les tendances païennes de sa morale, lui reproche de mettre
toutes choses dans un doute universel, ce qui est en effet la caractéristique
de sa philosophie, et trouve bien sot le projet qu'il a eu de se peindre. Sur ce
dernier point, M. Faguet a depuis observé judicieusement : « qu'en tous cas,
le sot projet ne fut pas de s'étudier et de se connaître; que c'est peut-être notre
premier devoir que de savoir ce que nous sommes; à qui, en nous, nous avons
affaire; que rien n'est plus digne d'un esprit sérieux, ne lui est plus nécessaire,
ne s'impose plus à lui ». Et cependant, malgré les violentes attaques dont il le
poursuit, allant jusqu'à l'accuser de ne penser qu'à mourir lâchement et molle-
ment, nul plus que Pascal n'a emprunté à Montaigne, à la vérité sans le nom-
mer, si bien qu'on a pu dire que, malgré les différences profondes qui les
séparent, la Bible est le seul livre qui ait agi sur Pascal plus que les Essais; et
que, par une dévotion outrée et mal dirigée, il en est arrivé au même point
que Montaigne par son scepticisme exagéré.
Après Pascal, c'est l'école de Port-Royal qui, tout en convenant que Jlontaigne
a beaucoup d'esprit, lui reproche qu'après avoir bien aperçu le néant des choses
humaines, il croit peu à celles du ciel et réduit la philosophie à l'art de vivre à
son aise ici-bas; qu'en tant que philosophe, c'est un •< menteur » qui se moque du
lecteur.
M""' DE Lafayette écrit qu'« il y a plaisir à avoir un voisin tel que lui ».
Molière rivalise de sagacité et de profondeur avec lui, quand il peint la
morgue et la vanité des érudits, l'ignorance et le pédantisme des médecins, les
sottes prétentions des femmes savantes et plusieurs autres ridicules.
La Fontaine, qui a à peu près sa méthode et sa morale, imite dans ses fables
sa philosophie naïve.
" Quel aimable homme, qu'il est de bonne compagnie, que son livre est plein
de bon sens! » écrit M'"" de Sévigné.
Malebranche le juge avec sévérité : il le tient pour pédant* parce qu'il cite
beaucoup sans être érudit; comme fort en citations, mais malheureux et faible
en ses raisons et déductions, lui reprochant de persuader non par des argu-
ments, mais par son imagination; « un trait d'histoire ne prouve pas, un petit
conte ne démontre pas; deux vers d'Horace, un apophthegme de Cléomènes, un de
César ne doivent pas persuader des gens raisonnables » ; et cependant les Essais
ne sont qu'un tissu de traits d'histoire, de petits contes, de bons mots, de dis-
tiques et d'apophthegmes.
ESSAIS DE MONTAIONE. — T. IV. b
A.xvm NOTICE SUR MONTAIGNE.
HuET, qui ne se piquait cependant pas d'une grande austérité, appelait les Essais
« le bréviaire des honnêtes paresseux et des ignorants studieux qui veulent s'en-
fariner de quelque connaissance du niondr- ot de quelque teinture «les lettres ».
« A peine trouverez-vous, disait-il, un gentilhomme de campagne qui veuille se
distinguer des preneurs de lièvres, sans un Montaigne sur sa cheminée. »
Bayle, cet esprit si judicieux, le continue et le commente.
La Bruyère, qui l'a beaucoup étudié, s'empare de son style; il en a le pitto-
resque, mais avec beaucoup plus de hardiesse; et en peu de lignes, il le venge
des attaques de Balzac et de Mai.ebkanche : « L'un ne pensait pas assez pour
goûter un auteur qui pense beaucoup; l'autre pense trop subtilement pour s'ac-
commoder de pensées qui sont naturelles. »
Le xviu" siècle a pour lui une admiration profonde, dans laquelle il entre peut-
être quelque parti pris : ses idées triomphent; les philosophes de cette époque
le réclament comme un des leurs, un peu à tort du reste, car à lopposé des
encyclopédistes qui estiment que l'homme est né bon et que c'est la société
qui, mal organisée, le déprave, Montaigne a plutôt tendance à croire que c'est
l'homme, plus que la société, dont l'amélioration est à poursuivre.
Montesquieu en particulier se fait son défenseur (1).
M""^ DU Deffand l'excepte lui seul de son dédain pour les philosophes qui tous,
dit-elle, sauf lui, sont des fous.
Voltaire plus que tout autre lui prodigue l'éloge, estime surtout en lui son
imagination (?), trouve charmant le projet qu'il a eu de se peindre naïvement
comme il l'a fait, et ajoute : « Quelle pauvre idée ont eue Nicole, Malebranche et
Pascal de le décrier (3). »
Vauvexargues et Duclos marchent sur ses pas, montrant à l'homme ses travere
et ses défauts.
J.-J. Rousseau s'en inspire, le copie souvent, et, comme lui, ne craint pas de
se montrer tout entier et sans voile aux regards de ses contemporains.
BuFFOx développe ses pensées sur la nature.
Sedaine l'unit à Shakspeare et à Molière, admirant " ce fonds immense de na-
turel, de raison, de grâce, de variété, de profondeur et de naïveté qui caracté-
rise ces grands hommes >•.
« Il est aussi vraisemblable, dit Marmontel, que sans Montaigne on n'eût pas
eu Pascal, qu'il l'est que sans Corneille on n'eût pas eu Racine. »
Ducis, lui aussi, admire sa raison et sa grâce. '
Delille lui dresse un piédestal, ainsi qu'on en peut juger par les vers qui ter-
minent cette notice.
La Harpe s'exprime ainsi à son sujet : « Écrivain, il a imprimé à la langue
française une sorte d'énergie familière, qu'elle n'avait point avant lui et qui ne
s'est pas usée. Philosophe, il a peint l'homme tel qu'il est sans l'embellir avec
complaisance, sans le défigurer avec misanthropie. Il n'est jamais vain, ennuyeux,
hypocrite, ainsi qu'il arrive souvent, quand on se met soi-même en scène. Quels
trésors de bon sens! Ses Essais sont le livre de tous ceux qui lisent et même de
ceux qui ne lisent pas. •
Le siècle suivant, s'en rapportant généralement au précédent, ne lui a pas été
moins favorable, bien que ses critiques n'y soient pas en moins grand nombre
que ses admirateurs; mais c'est surtout son style, plus que ses idées, qui alors est
en honneur. En 1812, son éloge était mis au concours, et dans Yillemain, déjà
cité, auquel en fut attribué le premier prix, on relève : • La morale de Mon-
taigne n'est pas sans doute assez parfaite pour des Chrétiens; il serait cependant
à souhaiter qu'elle servit de guide à tous ceux qui n'ont pas le bonheur de l'ê-
tre. Elle formera toujours un bon citoyen et un honnête homme. Elle n'est pas
fondée sur l'abnégation, mais elle a pour premier principe la bienveillance envers
les autres, sans distinction de pays, de mœurs, de croyance religieuse. Elle nous
instruit à aimer le gouvernement sous lequel nous vivons, à respecter les lois
auxquelles nous sommes soumis, sans mépriser le gouvernement et les lois des
autres nations; nous avertissant «de ne pas croire que nous ayons seuls le dépôt
(1) V. N. I, 55-2 : Inusité. — (2) V, N. II, 47^ : Creu. — (3) V. >. II, 18 : Extrauagaat.
LES ESSAIS. A.xix
delà justice ot de la vérité. Elle n'est pas héroïque, uiais elle n'a lion de faible;
souvent même elle agrandit, elle transpoi-te notre àme par la peinture des fortes
vertus de l'antiquité, par le mépris des choses mortelles et î'entiiousiasme des
grandes vérités; mais bientôt elle nous ramène à la siniplicit(; de la vie com-
mune, nous y fixe par un nouvel attrait et semble ne nous avoir élevé si haut
dans ses théories sublimes, que pour nous réduire avec plus d'avantage à la
facile pratique des devoirs habituels et des vertus ordinaires. »
MiciiEi.ET le traite assez durement : « Les Essais disent le découragement, l'en-
nui, le dégoût qui remplissent les âmes; j'j- trouve à chaque instant certain
goût nauséabond, comme dans une chambre de malade. » Ailleurs il l'appelle « ce
malade égoïste, clos dans son château de Montaigne ».
<;. GuizoT, dont nous avons plus haut donné des extraits, déclare nettement,
après l'avoir étudié de ti'ès près, qu'il l'admire mais ne l'aime pas : « Montaigne,
dit-il, est venu jusqu'à nous, porté par les (lots changeants de l'opinion, dont il
est l'enfant gâté; en dépit des vicissitudes dont elle est coutumière, il est des
écrivains de son temps le seul de qui l'importance et l'influence aient grandi
avec les ans. Esprit singulièrement libre, ouvert, équitable et prudent, de tous nos
grands hommes d'autrefois, il est peut-être celui que nous aurions le plus de pro-
fit à évoquer et à consulter. 11 a le génie de la modération et du langage le plus
propre à exprimer. A travers trois siècles qui nous séparent, nous n'avons pas à
faire effort pour remonter jusqu'à lui, tellement il est près de nous, plus près que
beaucoup d'une date plus récente et d'une langue plus semblable à la nôtre. Il est
nommé et cité partout; il est si répandu, ses anecdotes et ses traits de style ont
tant circulé, que, même anonyme, on le retrouve sans cesse; de plus, on lui prête
autant qu'on lui emprunte et ce n'est pas peu dire. Mais au fond, tout essayer,
tout esquiver; ne jamais exposer une pensée sans en laisser entrevoir la contre-
partie, et ne jamais conclure; peu de caractère, pas d'idéal, s'accommodant de
tout; vieux de bonne heure, jeune jusqu'à la fin : voilà Jlontaigne; c'est un
homme de génie, mais en tout un amateur : en morale, en religion, en politique et
même en affections de famille. Les Essais ont réussi, incontestablement, et avant
tout, par le talent, l'esprit, l'entrain, l'imagination de leur auteur; mais en même
temps, parce qu'il s'y applique à nous apprendre à arranger, à son exempre,
commodément notre vie et à reposer notre tète sur un oreiller doux et sain. »
Plus près de nous, Margerie le résume de la sorte : « Il connaît à merveille
les misères humaines, et les expose sans chercher à les corriger; sa sagesse est
de vivre et de se réjouir, et le meilleur moyen d'y atteindre est poui- lui de ne se
troubler de rien et de ne rien prendre au sérieux. D'une façon générale, il dé-
courage les élans généreux qui sont la source des grandes choses; et, pour ce
motif, il n'est pas à mettre, en entier, entre les mains de la jeunesse, à laquelle
il enlèverait trop tôt ses illusions. Par contre, de quel charme n'est-il pas pour
celui qui va atteindre l'âge de la retraite; quand l'expérience lui a appris com-
bien décevantes sont les gloires de ce monde, et qu'il cherche à orienter sa vie on
vue de se reposer des luttes auxquelles il a pris part, il lui fait voir toutes choses
sous leur véritable jour. » Et il termine : •< Bon homme et aimable compagnon,
oui; mais cœur chaud et grand cœur, non; son attitude pendant la peste de
Bordeaux, alors qu'il était maire de cette ville, en témoigne; il lui manquait en
outre une conscience sévère et un vaillant désir de progrès moral. »
Dans son Hhioire de France (tome IX), Henri Martin estime que la plupart des
écrivains, Rabelais même, peuvent s'analj'.ser ; seul Montaigne échappe : « On
peut, dit-il, esquisser le profil des Alpes et des Pyrénées mais comment fixer
l'a-spect de l'Océan aux flots mobiles? Chez lui c'est en tout le respect des cou-
tumes établies, non parce qu'elles sont bonnes, mais parce qu'elles sont, et coû-
tent trop à changer en admettant même que nous gagnions au change; mais tout
en nous accommodant de toutes choses extérieures, tout en subissant patiem-
ment tous les jougs, il veut que nous ne nous y engagions que le moins possible,
que nous conservions. la pleine liberté de penser; et cette réserve est en lui le
point de départ d'une guerre à tout ce dont tout à l'heure il nous commandait
le respect, à toute coutume, à toute convention, à tout préjugé, toute supersti-
tion, qui tous sont de sa part l'objet d'un doute universel. •
A.xx NOTICE SUR MONTAIGNE.
Enfin, tout récemment, M. Albalat émet sur lui l'appréciation suivante : « C'est
l'homme de Sénèque et de Plutarque; l'antiquité fut son modèle, d'elle il accepte
tout, ne conteste rien. Il en est plein au point que si l'on retranchait tout ce
qu'elle lui a fourni, les Essais se trouveraient fort abrégés, de nombreux chapi-
tres n'auraient qu'un petit nombre de lignes et quelques-uns disparaîtraient
complètement. C'est un penseur que n'ont jamais troublé ni les difficultés de la
vie présente, ni les angoisses de la vie future. Né dans la religion catholique,
il est au plus haut degré respectueux de ses dogmes et observateur de ses pra-
tiques; mais, la plume à la main, après avoir placé la vérité religieuse au-dessus
de tout débat, il fait montre d'un état d'âme et d'une tournure d'esprit tout
autres : Son chapitre sur les croyances et les légendes est, de fait, la négation de
toutes révélations divines et de toute espèce de miracles; il réfute la théorie du
repentir et de la pénitence: il parle de la mort en homme qui n'est pas précisé-
ment convaincu de l'immortalité de l'âme, et ne demande jamais du courage et
de la résignation à l'idée religieuse: sa morale n'a rien de commun avec celle du
christianisme »; et, bien que ces sujets tiennent une grande place dans son livre,
lui, si prolixe en citations, n'use en cela de l'Écriture sainte et de la Bible que
tout juste assez pour ne pas paraître les ignorer.
Toutefois ce scepticisme outré qui, chez lui, est un point dominant, qui se ré-
vèle partout dans les Essais et qui l'a amené à une sorte d'adaptation, dit Bru.ne-
TiÈRE, ou accommodation aux circonstances, qui ne sont jamais, ou bien rare-
ment, les mêmes, ni pour deux d'entre nous, ni pour chacun de nous, à deux
moments différents de son existence, il faut, pour en juger équitablement, con-
sidérer les temps où vivait Jlontaigne; tant d'événements extraordinaires
venaient de s'accomplir ou étaient encore en évolution, qui étaient bien faits
pour faire douter quiconque de bonne foi cherchait à se rendre compte. C'étaient
l'invention de l'imprimerie (1440), la chute de l'Empire d'Orient (1453), la décou-
verte du Nouveau Monde (1492), la Renaissance (xv'' et xvi« siècles), enfin la
Réforme de Luther (1517) avec les troubles de conscience qui en résultèrent et
les guerres civiles de si longue durée, où se donnèrent si longtemps et si pleine-
ment carrière toutes les passions déchaînées, qui éclatèrent à cette occasion et
dont la France, qu'elles mirent dans le plus complet désarroi, fut particulière-
ment le théâtre.
Étudiant de plus près l'influence qu'ont pu avoir sur l'œuvre de Montaigne et
les opinions qu'il }• manifeste, l'origine de sa famille, la situation à laquelle il
était arrivé, ses alliances et les événements au milieu desquels sa vie s'est dé-
roulée, Malvezix, en 1875, s'exprimait ainsi :
« Michel Eyquem descendait de ces anciens bourgeois de Bordeaux (son père
prenait encore ce titre), continuateurs du municipe romain, qui vivaient dans
une véritable république, ne reconnaissant au-dessus d'eux aucun seigneur, si
ce n'est le duc de Guyenne et plus tard le roi de France, avec lesquels ils étaient
souvent en lutte quand ceux-ci, toujours à court d'argent, cherchaient à faire
peser plus lourdement sur eux, sur leur commerce ou sur leurs terres leur joug
fiscal, alors que ceux-là considéraient ne leur devoir que l'hommage de souve-
raineté et l'octroi volontairement consenti de subsides et d'impôts.
« Ces fiers marchands, qui dans leurs actes prenaient le titre de « Sire », n'a-
vaient pas encore perdu l'habitude de se gouverner eux-mêmes, de voter eux-
mêmes leurs taxes, de lever des troupes et de les commander; ils possédaient
des maisons nobles, des juridictions, des seigneuries, des baronnies au même
titre que les gentilshommes et s'anoblissaient eux-mêmes comme citoyens de
Bordeaux, sans souci du pouvoir royal, lui rendant seulement le service militaire
du ban et de l'arrière-ban pour leurs terres nobles.
« Quant aux gentilshommes du pays, ils avaient encore, eux aussi, l'habitude
de penser et de s'exprimer librement; la royauté n'avait encore que peu de
puissance sur eux et les souvenirs de la nationalité perdue n'étaient pas éteints.
« A l'indépendance de ces bourgeois dont il était issu, de ces gentilshommes
parmi lesquels il comptait, Montaigne joignait celle de l'érudit qui s'était fait un
idéal du citoyen des cités grecques et romaines; c'est en obéissant à ce courant
d'idées qu'il a porté la lumière sur les abus les plus criants de son époque et
LES ESSAIS. A.xxi
attaqué les superstitions et erreurs de son temps. Les questions politiques, sociales
et j'eligieuses ne faisaient pas plus défaut à ce moment que maintenant, et c'est
ainsi que nous le voyons signaler les inconvénients de la vente des offices de
judicature, du mode d'éducation; l'abolition de la torture qui était avec l'ins-
truction secrète des procès un des modes d'exercer la justice, celle des peines
édictées contre les sorciers.
« Mais s'il voulait remédier aux abus, il ne reconnaissait pas moins combien
il est dangereux de vouloir renverser tout ce qui existe, au lieu de procéder avec
mesure et avec l'aide du temps. Il vivait alors que catholiques et huguenots riva-
lisaient de haines sauvages et de fureurs sanglantes; dans la Guyenne même les
cruautés du catholique de Montluc étaient égalées par celles du protestant baron
des Adrets ; dans toute la France se répétaient officiellement les massacres de la
Saint-Barthélémy, les Guises assassinaient Coligny, le roi assassinait les Guises,
Jacques Clément assassinait le roi; dans les campagnes, chaque gentilhomme
faisait la guerre de partisan pour le Roi ou pour la Ligue, pour les catholiques
ou pour les huguenots; dans les villes, les émeutes et les massacres populaires
étaient suivis des' pendaisons et des massacres royaux; et, dans ces conditions,
Montaigne ■< assis au moyeu de tout le trouble » des guerres civiles de France,
était fondé à redouter les « nouvelletez », à prêcher l'obéissance à la loi et faire
appel, sans distinction de parti, à la tolérance et à la modération. Véritable pré-
curseur des temps modernes, il nous montre l'idéal que nous n'avons pas encore
atteint : la liberté sans la licence, l'ordre sans le despotisme. »
S'il parle de lui, dit-on souvent, il ne se livre pas : « Sauf de son père, ce qu'il
dit des siens est fort vague ; de ses amis, à part La Boétie et M"° de Gournay,
il ne dit mot; il fait parfois allusion à des événements auxquels il a été mêlé,
mais fort rarement et sans jamais préciser; au point que la profession militaire
à laquelle en certains passages il fait allusion et que semble lui confirmer le
monument funéraire élevé sur sa tombe, a été mise en doute; de même qu'on
n'a par lui aucune donnée sur les missions et négociations dont il a été chargé
et que d'autres documents établissent. » A cela lui-même a répondu par avance :
« Ce ne sont mes gestes que i'escris : c'est moy, c'est mon essence » (vol. I,
pag. 680). — Peut-être est-on plus fondé quand on lui reproche de n'avouer guère,
en les présentant comme tels, que des défauts discutables, tenus souvent pour
des qualités; mais avec quel art il les discute et nous amène à leur sujet à faire
un retour sur nous-mêmes!
Il est à remarquer que bien que Montaigne ait étudié l'homme à fond, et
qu'au ch. 13 du liv. III (III, 670) il dise qu'il s'adonne volontiers aux petits,
il ne parle guère des prolétaires qu'en deux occasions, pour les plaindre d'être
foulés par tous les partis et lui aussi par conlre-coup, et pour faire ressortir avec
quelle résignation ils supportent le mauvais sort ; il est vrai qu'en ces temps, ils
tenaient bien peu de place et que son égoïsme le portait à s'en désintéresser.
C'est cette communauté de sentiments entre leur auteur et la bourgeoisie qui
fait que les Essais sont un des livres de prédilection de celle-ci ; elle s'y retrouve
avec ses qualités et ses défauts : son bon sens, son honnêteté native, son amour
de la paix à tout prix, sa versatilité, sa vanité et ses idées tant soit peu fron-
deuses.
Cette vogue, un dessin humoristique de Gavabni, daté de 1840, la fait bien
ressortir : un détenu à la prison de Clichy pour dettes (à cette époque tout
créancier pouvait faire incarcérer un débiteur laissant en souffrance ses enga-
gements), reçoit la visite de sa femme et de leur enfant; celle-ci l'aborde en lui
disant : « Petit homme, nous t'apportons ta casquette, ta pipe d'écume et ton
Montaigne. » — Non moins probante est cette inscription funéraire que porte au
Père-Lachaise, principal cimetière de Paris, la tombe d'Auguste Collignon, secré-
taire général du ^Ministère de la guerre, en 1800, sous Carnot : « 11 vécut en
homme de bien et puisa la vérité dans les Essais de Montaigne. »
Les Essais sont moins un livre, qu'un journal divisé en chapitres, qui se sui-
vent sans se lier et qui portent chacun un titre sans se soucier beaucoup d'en
tenir les promesses (Ciikistian) : ces en-tète dépistent le lecteur plus qu'ils ne le
guident, ce sont de vrais trompe-l'œil. II est question de tout dans cet ouvrage :
A.xxii NOTICE SUR MONTAIGNE.
poésie, médecine, histoire naturelle, art militaire, politique, religion, éducation,
morale, et de bien d'autres choses, et tout y est confondu ; ce qui y est dit sur
un même sujet est épars un peu partout, pêle-mêle, que viennent encore accroître
des digressions fréquentes, des citations nombreuses n'ayant parfois qu'un rap-
port éloigné avec le texte où elles sont enchâssées, souvent avec une signification
tout autre que celle qu'elles ont dans l'ouvrage d'où elles sont tirées; des répé-
titions et aussi des intercalations faites après coup qui rompent le sens, que
l'auteur ne se donne pas la peine de rétablir, ce qui le rend par place de com-
préhension difficile; véritable maquis littéraire où, à tout instant, malgré les
Ilots de lumière que le style y répand, on a besoin d'être éclairé, d'où une curio-
sité sans cesse éveillée qui n'est pas un des moindres attraits des Essais.
Aucun plan préconçu n'a évidemment présidé à leur rédaction et même, au
début, ils n'étaient pas destinés à l'impression; c'est ce qui explique qu'ayant
commencé à les écrire en 1571, Montaigne n'en a publié qu'environ neuf ans
après les deu.x premiers livres, rédigés cependant au courant de la plume, ce
qui était vrai alors, et sans les retouches et augmentations notables qu'il y a
apportées depuis.
C'est vraisemblablement après cette première publication, et à ce moment seu-
lement, que Montaigne a pris à cœur ce travail, s'est décidé à en accroître l'im-
portance, l'a retouché, y a ajouté et écrit le troisième livre où, de parti pris,
se mettant résolument en cause, il peut dire en toute vérité qu'il en est le
sujet principal et constant.
Mais cette absence de plan ne nuit en rien à l'unité de doctrine qui n'est
•autre, et sur ce point l'auteur ne se dément pas une seule fois, que l'inanité et
l'inutilité de tout système philosophique; chacun, s'étudiant, doit se suffire à
lui-même.
Certes il y a des secrets de l'art d'écrire que Montaigne ne possède pas, mais
par son charme, il en fait oublier l'absence; les mérites qui tiennent de la
méthode lui sont inconnus; mais il écrit comme il parle, en cela il a été l'un des
précurseurs de ce genre, et les qualités qui tendent à l'expression proprement
dite lui sont innées et il atteint à l'éloquence quand il exprime les beaux senti-
ments et loue les belles actions. La plupart des grands écrivains du xvn' siècle
l'ont beaueoup étudié, et l'originalité de son style leur a fourni nombre d'ex-
pressions et d'images que l'on retrouve en lui. — En vrai gascon, du reste, il
va au-devant de toutes les critiques : 11 n'a souci, dit-il, ni de l'orthographe,
ni de la ponctuation; si les mots lui font défaut, il en forge; peu lui importe
que les faits qu'il cite soient vrais ou non; c'est intentionnellement qu'il saute
d'un sujet à un autre, qu'il n'énonce pas les sources où il puise; si ce qu'il dit
ici est en contradiction avec ce qu'il a dit là, c'est qu'alors il pensait difi'érem-
ment que maintenant; les erreurs légères de rédaction qu'on pourra relever, il
n'y a pas à lui en tenir compte; celles de quelque importance sont à attribuer à
ses imprimeurs.
La langue française ne faisait guère que commencer à se former, il est même
de ceux qui ont le plus contribué à la fixer; le jargon que parlaient nos aïeux
dans les siècles précédents commençait à peine à s'affiner; les meilleurs ouvrages
s'écrivaient en latin, et les Essais eux-mêmes, bien qu'écrits en français, l'ont
été comme l'on écrit en latin. C'est à cela qu'on doit d'y rencontrer de si nom-
breux mots latins francisés, de si fréquentes tournures et constructions de
phrase latines, et notamment des ellipses répétées; si bien qu'on peut dire que
Montaigne a créé la langue dont il a fait emploi, en usant avec toute la liberté
d'un inventeur; les formules reçues sont pour lui sans autorité; il pense et les
mots ne servent qu'.à peindre sa pensée; rarement se rencontrent en lui des
circonlocutions; toujours vif et précis, il est économe de mots et prodigue
d'idées (La Dixmerie); et ce que, dans sa préface de Milliridate, Racine dit en
parlant d'Amyot, lui est de tous points applicable : « Je rapporte les paroles de
Plutarque, telles qu'Amyot les a traduites, parce qu'elles ont une grâce, dans le
vieux style de ce traducteur, que je ne crois pas pouvoir égaler dans notre
langue moderne. »
A l'éloge de Sénèque et de Plutarque, Montaigne .a consacré un de ses cha-
LES ESSAIS. A.xxii
pitres; c'est à bon droit, car les emprunts qu'il leur a faits et aussi les idées, les
inspirations qu'il leur a prises sont considérables; Ciccron également a été mis
largement à contribution, quoique cependant à un degré moindre, et il a été
aussi ingrat qu'injuste envers lui en le traitant aussi mal qu'il l'a fait à diverses
reprises.
Quant à écrire à bride abattue, à ne pas se relire comme il le dit, il n'en est
rien, du moins à partir du moment où il cesse d'écrire pour lui seul. L'examen
des diverses éditions des Essais fixe complètement à cet égard. C'est alors un
écrivain raffiné et habile qui sait cacher, sous des dehors innocents, la hardiesse
de la pensée; son style n'a ni masque, ni fard, mais il a de la toilette; non
seulement il corrigeait, mais il ajoutait; et quand il ajoutait ce n'était pas en
une fois et d'un jet. En regardant les notes manuscrites de l'exemplaire de
Bordeaux, dont il est question plus loin, on voit qu'en deux tiers de page, la
plume et l'encre changent jusqu'à dix fois, et, au lieu que ce soit le flot courant
d'une conversation abondante, cela apparaît comme un chef-d'œuvre de mar-
queterie (G. GmzoT) ; si bien que ses trois éditions principales de 1580, 88, 95,
apparaissent en quelque sorte comme trois livres distincts écrits sous des
impressions dilTérentes, ce sont trois images d'un même homme le plus mobile
le -plus ondoyant qui fut jamais, le plus habile à se dérober tout en ayant l'air
de se livrer jusqu'à l'abandon, et qu'on ne peut un peu connaître qu'en super-
posant la seconde de ces images à la première et la troisième aux deux autres
(Brunetière) : idée fort judicieuse que réalise le procédé indiqué dans l'avant-
propos par lequel, dans la présente édition, débute le fascicule afférent aux
variantes. V. infra, p. 97.
Mais ces constatations une fois faites, de quelle valeur sont-elles devant le
satirique et immuable bon sens de Montaigne, sa verve constante, son style
pittoresque, ses expressions au ton nerveux, original, auquel on ne peut toucher
sans les affaiblir considérablement, sans courir risque souvent d'altérer le fond
de la pensée et de lui enlever partie de sa force et de son agrément? Tout cela,
jusqu'à l'allure de hasard qu'affecte son livre, en rend la lecture facile et at-
trayante. Ces qualités, jointes à ce qu'il est éternellement vrai, font qu'il se
lit et se lira toujours, alors que déjà bien rares sont les ouvrages sérieux qui se
lisent aujourd'hui; on en écrit encore, on les parcourt quelquefois, on ne les lit
plus, on n'en a plus le temps; en dehors de ce qui a trait à la profession de
chacun, le journal du matin, le roman et la pièce de théâtre du jour suffisent à
notre époque, et cela semble devoir aller sans cesse en s'accentuant, par suite
du surmenage intellectuel qu'impose la satisfaction des besoins de la vie ma-
térielle de plus en plus exigeante et difficile à assurer.
Les Essais, pour qui les connaît, et .dans un certain milieu nul ne les ignore,
échappent à cette loi, parce que leur lecture, ne demandant aucun effort, repose
de l'état de surexcitation dans lequel nous vivons. Ils se lisent sans suite, à
bâtons rompus, comme ils ont été écrits, et c'est là un de leurs plus grands
charmes : pas n'est besoin de marquer où vous en êtes resté; ouvrez-les à n'im-
porte quelle page, et le passage sur lequel vous êtes tombé vous intéressei-a sans
qu'il soit nécessaire de vous reporter à ce qui précède, non plus qu'à ce qui
suit; et plus tard, vous le relirez encore, lorsqu'il se représentera à vous, sans
que l'idée vous vienne de tourner le feuillet.
Il s'y rencontre bien, de ci, de là, quelques expressions de nature à choquer
la pruderie de nos jours, où l'on tient plus de compte de la forme que du fond;
elles s'expliquent par ce fait qu'autrefois on n'attachait pas à la pureté des
termes employés celle des sentiments et des idées; lascif dans ses expressions,
Montaigne était pudibond en pensée : versu lascivus, menl^ pudicus eral; et s'en
souvenant, on passe outre sans en être autrement offusqué.
En somme la grande singularité et le plus grand mérite des Essais, c'est que,
mettant en pratique la philosophie, toute opinion extrême y est combattue;
qu'ils enseignent la paix, la douceur, la bienveillance entre les hommes, et que,
quoi que l'on pense de leur auteur à un titre quelconque, le langage dans lequel
il s'exprime ne laisse pas de captiver.
A.xxiv xNOT[CE SUR MONTAIGNE.
PASSAGES DES ESSAIS
S 1. — Où il est plus particulièrement question de cet ouvrage (1).
Quelle fin Montaigne s'est proposée en écrivant les Essais, I, 58. — Il les con-
sidère comme l'essai de ses facultés naturelles et non de ses facultés acquises,
II, 60.
Sa manière de les composer, I, 210, 552.
Comparaison relative aux Essais, I, 296.
Pourquoi il s'est pris lui-même pour sujet d'étude, I, 676.
Diversité du sujet qu'il traite, III, 108.
Connaissance approfondie qu'il en a, III, 110.
Faute, dans sa vie, d'actions de quelque intérêt, il enregistre ses fantaisies.
III, 376.
II exprime ses idées du moment, demain elles seront peut-être autres, I, ■2'3-2.
Pourquoi il parle si souvent de lui-même dans son livre, II, 524.
Ce qu'il gagne à publier ses mœurs, III, 440.
Peut-être se faisant connaître, se fera-t-il un ami, III, 444.
Il esquisse plutôt qu'il ne traite les sujets dont il s'occupe, I, 434.
Malgré les apparences, les sujets traités se tiennent toujours plus ou moins
les uns les autres, III, 470.
Il s'est imposé d'oser dire tout ce qu'il ose faire, III, 186.
Aveu de l'obligation où il est cependant de voiler parfois sa pensée, III, 474.
Ce qu'il pense de ceux qui condamnent la licence de ses écrits, III, 186.
Comment il excuse cette licence, III, 270.
Dans quel but Montaigne a inséré dans son livre des citations et des passages
empruntés à d'autres auteurs, III, 582.
Ses principes à l'égard de ces citations et de ces imitations, I, 232. — II ne
compte pas ces emprunts, il les pèse, II, 60.
Motifs pour ne pas citer les auteurs où il puise et ne pas mettre d'ordre dans
ses récits, II, 62.
Raison de l'absence de toute méthode dans son ouvrage, I, 552.
Pourquoi il aime les digressions, III, 470.
Caractère de son style, II, 476.
Son français corrompu par le langage du pays où il vit, ÏI, 478. '
Langage qu'il s'est appliqué à employer, I, 278.
Comment il travaillait aux Essais, III, 22.
Plusieurs feuillets lui en ont été soustraits, III, 22.
II fait volontiers des additions à son livre, mais ne le corrige pas, III, 410.
Il craint, par faute de mémoire, de se répéter, III, 406.
Il ne se mêle ni de l'orthographe, ni de la ponctuation, et ne revise pas le
travail de l'imprimeur, III, 412.
Affection qu'il a pour son livre, II, 52,
Ses différentes appréciations sur sa valeur, III, 366.
Sa soumission à la critique que l'Eglise peut en faire, I, 578.
11 est loin d'en être complètement satisfait, II, 474.
Succès uuquel il lui semble pouvoir prétendre, I, 572.
Comment il peut être utile à la santé de l'âme et à celle du corps, III, 628.
Destinée qui lui paraît réservée, III, 448.
? 2. — Notes ayant trait à la contexture des Essais.
Origine de ce titre « les Essais », N. I, Titre, Essais.
Montaigne esquisse plutôt qu'il ne traite les sujets dont il s'occupe, N. I, 436,
Air.
(1) Voir Nota, fasc. B, p. 3.
LES ESSAIS. A.xxv
Toute assertion^ exacte ou non, lui est bonne, comme point de départ d'une
idée qu'il se propose d'exposer, N. I, 40, Dit.
Précautions oratoires prises avant l'émission d'idées peu orthodoxes, N. I, 578,
Icy.
Tendance de Montaigne à écrire le français en latin, N. II, 584, L'enuie.
Il altère souvent les citations qu'il donne, N. II, 242, Profuerunt.
Montaigne, les Essais et Henri III, N. II, 524, Autheur.
La première édition des Essais parut en 1580.
Cette édition, imprimée à Bordeaux, ne comprenait que les deux premiers
livres, chacun formant un volume in-S" dont l'impression n'est pas faite avec
les mêmes caractères pour tous deux; les citations y sont peu nombreuses; les
sonnets de La Boétie, objet du ch. 28 du livre 1"% y figurent.-
En 1582, Montaigne en publiait une seconde édition, revue et augmentée, mais
toujours réduite à ses deux premiers livres, renfermés cette fois en un seul
volume in-8°.
En 1587, troisième édition, celle-ci du format in-12; la ponctuation y est
améliorée, d'assez nombreuses corrections de style et quelques phrases remaniées.
Ces trois premières éditions sont devenues fort rares; dans diverses ventes
publiques du siècle dernier, des exemplaires de la première ont été vendus :
527, 515, 645, 1.050 et jusqu'à 2.060 francs; un de la seconde a dépassé 200 francs,
un de la troisième a atteint près de 500 francs.
Enfin en 1588, autre édition, in-4'' cette fois, qui, d'après son titre, serait la
cinquième. La quatrième n'existe pas; on pense qu'elle avait pu être publiée
dans l'intervalle en Angleterre, ou encore en France, le privilège de l'imprimeur
de l'édition précédente étant expiré; mais on manque de données précises à cet
égard. Imprimée à Paris, l'édition de 1588 se trouve, toujours d'après le titre
même de l'ouvrage, augmentée d'un troisième livre et de six cents additions aux
deux premiers; la pagination du dernier livre y est distincte de celle des deux
autres; les additions introduites interrompent déjà assez fréquemment le texte
primitif et l'alourdissent parfois.
Cette édition est la dernière publiée du vivant de Montaigne, qui mourut
encore occupé à en préparer une nouvelle. Les rapports qui s'étaient établis
entre lui et le poète Pierre de Bracii d'une part et M"" de Gournay de l'autre,
lors de l'impression de l'édition de 1588 à laquelle ils semblent s'être intéressés,
firent que naturellement, et peut-être aussi sui" sa recommandation, Françoise
de la Chassaigne sa veuve, résolue à donner suite aux intentions de son mari,
s'adressa à eux pour l'y aider.
Montaigne consignait toutes les modifications et additions qu'il projetait sur
un exemplaire de l'édition de 1588, y joignant des notes détachées. Pierre de
Brach reçut mission de les transcrire, en les mettant au net sur un autre
exemplaire, qu'il adressa à M"° de (îournay chargée d'en surveiller l'impression.
Tous deux s'acquittèrent avec conscience et promjjtitude de leurs tâches respec-
tives; moins de trois ans après la mort de l'auteur, l'édition nouvelle, portant la
date de 1595, était livrée au public.
Cette «klition, in-folio, est d'un tiers plus considérable que la précédente. Comparée
à l'exemplaire annoté de la main de Montaigne qui, conservé par la famille, a
ensuite appartenu aux Feuillants et se trouve actuellement à la Bibliothèque
publique de Bordeaux, l'orthographe en est plus simple, la ponctuation établie
de manière à n'avoir que de très,courtes phrases, et dans les cas très rares où les
deux textes diffèi-ent, les divergences, toutes de forme, ne consistent guère qu'en
quelques termes adoucis, quelques expressions moins primesautières, des mots
ajoutés, retranchés ou modifiés pour rectifier des incorrections de style, ce qu'im-
manquablement l'auteur eût opéré lui-même, avant de livrer son travail au public,
témoignant de la part de ses exécuteurs testamentaires de la fidélité la plus
absolue. — Qu'eût été cette édition si elle avait été publiée du vivant de l'auteur?
Nul ne le saurait dire; immanquablement, jusqu'au dernier moment, il eût fait
encore des modifications aux notes d'après lesquelles celle-ci a été établie (sur
l'exemplaire de Bordeaux, Montaigne écrit et raye trois fois avant de l'admettre
A.xxvi NOTICE SUR MONTAIGNE.
la citation : HIe bealus.... [Vol. I, pag. 484, lig. 25]; rien ne prouve que finalement
il l'eût maintenue), de telle sorte que le texte définitif des Essais n'aj'ant pas existé,
ne sera jamais connu.
Il est à observer que par le fait d'une omission qui n'a pas été constatée à temps,
cette édition ne porte pas VAvis au lecteur qui devrait figurer en tête; par contre,
elle est précédée d'une préface assez étendue et par trop apologétique de M"' de
Gournay qui l'a dotée en outre d'une table analytique assez détaillée; enfin par
suite d'une mention bien ou mal interprétée, inscrite sur le manuscrit de Bor-
deaux, les sonnets de La Boétie n'y sont pas reproduits. — Quant à l'exemplaire
qui a servi de copie, il n'existe plus; il semble avoir été détruit, aussitôt l'im-
pression achevée. i
" M"' de Gournay, sa fille d'alliance comme il l'appelait et titre dont elle aimait
à se parer, s'était donnée de toute son âme à Montaigne et à son œuvre ; pos-
térieurement à l'édition de 1595, elle en a publié nombre d'autres (une dizaine en-
viron), dérivant toutes de celle-ci; entre autres :
Une en 1608, portant en marge des sommaires, forcément réduits à quelques
mots; ce qui avait déjà été réalisé, dès 1595, à Lyon, dans une réédition de celle
de 1588.
Une en 1611, où elle donne l'indication de la plupart des sources où Montaigne
a pris ses citations.
Une en 1617, qui présente la traduction de toutes ces mômes citations.
Enfin la magnifique édition in-folio de 1635, dédiée au cardinal de Richelieu,
dont la libéralité avait aidé à la publication. Pour la première fois^ figure au fron-
tispice de l'ouvrage la devise de Montaigne : " Que sçais-je », avec la balance. La
préface est celle de l'édition-mère, notablement augmentée et corrigée. Le texte
présente parfois avec celui de l'édition de 1595 de légères différences; certains
changements y ont été malencontreusement apportés, sur la demande expresse
des imprimeurs, pour rajeunir le style et rendre l'ouvrage plus facile à lire.
Depuis, les éditions des Essais n'ont cessé de se succéder. Le docteur Payen,
mort en 1870, qui s'était adonné avec passion à Montaigne et à tout ce qui s'y
rattache, en possédait cent trente-six, dont une vingtaine en langue allemande,
anglaise, hollandaise et italienne, et sa collection, aujourd'hui propriété de la
Bibliothèque nationale, n'était pas complète; leur nombre s'accroît chaque jour.
Parmi elles, nous citerons :
Deux éditions données de 1724 à 1725 et enrichies de notes nombreuses par
Pierre Coste qui, lui aussi, a pris pour base l'édition de 1595, mais en en ra-
jeunissant l'orthographe.
Une édition de Naigeon, également annotée par lui, stéréotypée par Firmin-
Didot, portant la date de 1802 et imparfaitement établie d'après le manuscrit de
Bordeaux, et en outre en en altérant l'orthographe.
Une édition de 1820, d'Amaury Duval; en tète de chaque chapitre se trouvent
des sommaires détaillés, permettant d'en embrasser l'ensemble et de se retrouver
dans ce dédale d'idées qu'est l'ouvrage; le texte est celui de 1595, mais l'ortho-
graphe est de convention.
Une de 1826, de J.-V. Leclerc, dans les mêmes conditions que la précédente.
Une de MM. Barckhausen et Dezeimeris (1873), donnant le texte original de
l'édition première de 1580, avec les variantes de celles de 1582 et 1587.
Une de MM. Courbet et Royer (1872 à 1900), réédition de celle de 1595, remar-
quable par son exactitude et .son exécution typographique, suivie d'une notice
des plus complètes sur Montaigne, et d'un relevé des variantes des éditions de
1580, 1582, 1587, 1588 et du manuscrit de Bordeaux.
Une de MM. Motheau et .Jouaust (1873-80), très soignée, éditée d'après l'édition
de 1588 et donnant en notes toutes les variantes de celle de 1595 en respectant
scrupuleusement l'orthographe de l'une et de l'autre.
Une dite « Edition municipale de Bordeaux », en cours de publication aux
frais de cette ville rpii en a confié l'exécution à M. Strozzi. Elle a pour base le
texte de 1588, que suit celui de 1580, et en second lieu les additions et même les
ratures manuscrites de l'exemplaire de Bordeaux, le tout imprim(' avec des
diflférences typographiques qui ne permettent aucune confusion.
LES ESSAIS. A.xxvn
A l'étranger, une de 1897, à laquelle un grand soin a été apporté; publiée à
Londres, elle est une réédition d'une autre de 1603, la première en langue étrangère.
Celle-ci enfin, qui porte, en regard du tes.te de 1595, sa traduction en langage
de nos jours, et dans un volume à part tous les renseignements propres à lui
permettre, ainsi que son titre l'indique, de se suffire à elle-même. — Puisse le
lecteur la lire avec le même intérêt que nous avons éprouvé à la composer et
chacun réaliser le souhait qu'au début de ce siècle, Delille formait en parlant de
Jlontaigne, dont en ces quelques vers il appréciait fort judicieusement l'œuvre :
Uiclie du fonds d'autrui, riche aussi par son fonds,
Fidèle à son caprice, infidèle à ses litres,
Il sait parler au sage et causer en ami.
Heureux ou malheureux, en ville, à la campagne,
Que son livre charmant partout vous accompagne.
PASSAGES DES ESSAIS
ou IL EST PLUS PARTICULIÈREMENT QUESTION DE MONTAIGNE
ET DES SIENS (1).
Dans chaque groupe de deux nombres, le premier indigue le volume,
le second te page.
«
Les aïeux de Montaigne. — Noms patronymiques de Montaigne, II,
4.Ï6. — Éloge de ses aïeux, II, 96. — Son affection pour eux, II, 522. — Leur
longévité, III, 34.
Le père de Montaigne. — Portrait de Pierre Eyquem, père de Montaigne,
quelques particularités de sa vie, I, 620. — Ses soins pour les affaires de la ville
de Bordeaux pendant qu'il en fut maire, III, 488. — 11 aimait à bâtir, III, 380.
— Un de ses projets, I, 388. — Il tenait un journal des faits intéressant sa famille,
I, 390 — Soins qu'il prit pour l'éducation de son fils, I, 282; III, 670. — Ses dis-
positions à l'égard des savants, II, 110. — Il demande à son fils de faire pour
lui la traduction de la « Théologie naturelle » de Raymond Sebonde, II, 112.
MONTAIGNE.
Jeunesse de Montaigne. -- Ob.servation sur la durée de la grossesse de sa
mère, II. 330. — Temps précis de sa naissance, I, 110. — Tenu sur les fonts bap-
tismaux par des personnes de la plus basse extraction, III, 670. — Montaigne
en nourrice, III, 670. — Dressé dès le plus bas âge à la plus commune façon de
vivre, III, 670. — Précaution avec laquelle on l'éveillait dans son enfance, I, 282.
— Douceur avec laquelle il a été élevé, II, 26. — Comment il apprit le latin,
I, 280; — le grec, I, 282. — Collège où il fit ses études et fruit qu'il en retira,
I, 284. — Sa paresse était telle, qu'elle résistait même à l'attrait du jeu, I, 282.
— Comment il prit goût à la lecture dès l'âge de huit ans, I, 28-4. — Ne lut
jamais de romans, I, 284. — Vers douze ans, jouait au collège les premiers rôles
(Il Dans cette table comme dans toute autre des Essais, ce Prolée Insaisissable, lout
point qui s'y trouve mentionné, bien que quelque peu précisé dans la page dont le
numéro suit, se rattache plus ou moins directement aux pages qui précèdent et qui
suivent dans lesquelles il est conuiie enchâssé, formant en quelque sorte un tou\ indi-
visible^ considération dont le lecteur a à tenir compte.
A.xxviii NOTICE SUR MONTAIGNE.
dans des tragédies latines, I, 286. — Souvenir d'un soulèvement populaire à
Bordeaux, I, 198. — Bien qu'il eût un jugement sain et des idées au-dessus
do son âge, ses facultés intellectuelles ne se sont développées que lentement,
I, 282.
Montaigne à âge d'homme. — Son portrait au physique et au moral, II,
482. — Effet de l'àgt sur lui après trente ans, I, 598. — Ses armoiries, I, 514. —
Sa devise, II, 276. — Montaigne combattant un effet d'imagination, 1, 138. — Son
mépris pour le jeu d'écliecs, I, 552. — Son jurement ordinaire, III, 246. — Mon-
taigne chevalier de l'ordre de S. -Michel, II, 370. — Mort de son frère le capitaine
S.-Martin, I, 114. — Histoire d'un accident qui lui causa un long évanouissement,
I, 668. — Duel de son frère le S"" de Mattecoulom, II, 574. — 11 obtient le titre de
bourgeois de la ville de Rome, III, 280. — Il est élu maire de Bordeaux, III, 488,
518. — A quelles extrémités il fut réduit par la peste qui le chassa de chez lui,
III, 566. — Personnages de son temps qu'il tient le plus en estime, II, 518. —
Éloge de M'"" de Goui-na}-, II, 518. — Son souhait pour ses vieux jours, III, 390.
— Ses dispositions morales dans sa vieillesse, II, 180. — Usages auxquels il se
trouvait asservi à cette époque de sa vie, III, 636. — Dans sa demeure, il a donné
l'hospitalité à des rois, III, 458. — Particularité de l'une des tours de son ma-
noir, I, 156.
Ses qualités physiques. — 11 était de forte constitution, mais nonchalant
et peu dégourdi, II, 482; III, 662. — 11 a ressenti jusque dans la vieillesse les
effets de cette bonne constitution, III, 664. — Excellence de sa vue; comment il la
ménageait quand elle a commencé à être fatiguée, III, 680. — Geste qui lui était
propre et qui pouvait, passer pour la marque d'une sotte fierté, II, 466. — Sa
disposition particulière à sentir les odeurs et à s'en imprégner, I, 574. — Son
goût pour l'équitation et son endurance à cheval, I, 532; II, 550; 111,430. —
Ses sentiments se reflètent sur son visage, III, 664. — Son air naïf a été d'un
grand secours dans deux circonstances très importantes, 111,592. — La sincérité
de ses intentions qui paraît dans ses yeux et dans sa voix empêche qu'on ne
prenne en mauvaise part la liberté de ses discours, III, 596. — Effet sur lui
du bruit imprévu d'une arquebusade, I, 82.
Ses qualités morales et intellectuelles. — Sa disposition naturelle à la
pudeur, I, 34. — Son peu de mémoire, I, 58; II, 496, 498, 500; III, 406,408. —
11 s'en défiait, lors même qu'il avait appris un discours par cœur, III, 410. —
Son horreur naturelle pour les vices, II, 96. — Son aversion pour le mensonge,
I, 64; — pour toute espèce de tromperie, -même au jeu, I, 158. — Son sentiment
sur l'ivrognerie. 1, 618. — Son éloignement pour la curiosité, 1, 656. — Son aversion
pour le larcin, II, 24. — Son aversion particulière pour la cruauté, 11,98. — Son
humanité à l'égard des bêtes, II, 104. — Il haïssait la dissimulation. II, 492. —
En quoi consistait la vertu de Montaigne, II, 94. — En quoi consistait ce qu'il
avait de bon, II, 98. — Inconstance et diversité de ses dispositions morales et
intellectuelles, I, 348. — Il a l'esprit primesautier; ce qu'il ne comprend pas
d'abord, il le comprend encore moins en s'y obstinant, II, 64. — Il était naturelle-
ment irrésolu, II, 348, 504, 506. — Délibérer l'importune, II, 488. — Ses dispositions
à la paresse, II, 484. — Son incapacité à soutenir un travail pénible, à parler ou
composera volonté, I, 70. — Il était peu fait aux mœurs de son siècle, II, 490.
Était dégoûté de l'ambition par l'incertitude qui l'accompagne, II, 488. — Son
stoïcisme dans la plupart des circonstances qui causent ordinairement une
grande affliction, I, 462. — Il aimait à louer le mérite dans ses amis et 'même
dans ses ennemis, II, 514.
Son caractère. — Son caractère dans ses premières années, I, 282. — Con-
formité de son caractère, dans l'âge mûr, avec celui qu'il annonçait dans ses
premiers ans, II, 486. — Application du caractère de Persée, roi de Macédoine,
à l'homme en général et à lui-même en particulier, III, 624. — Il est naturellement
porté à la commisération, I, 18. — Son éloignement pour la tristesse, I, 22. — Son
penchant pour la nonchalai}Co, II, 486. — Son peu de goût pour la vie de gen-
tilhomme campagnard, II, 502; III, 388. — Il aime à vivre dans la médiocrité,
III, 322. — Aurait préféré une vie tranquille à celle si belle d'un Régulus, III, 324.
— Il aime à se recueillir, II, 512. — Il produisait ordinairement ses plus profondes
LES ESSAIS. A.xxix
pensées à l'improviste, III, 248. — Se délivrait d'une passion par une autre pas-
sion, III, 170. — Pou accessible toutefois aux passions violentes, II, 351. — Sa
S3'mpatliio va surtout aux faibles, III, 670. — Sa loyauté dans les petites choses,
I, 158. — Il ne peut même pas souffrir qu'on se trompe sur son compte, III,
82. — Se tenait comme absolument oblige par les engagements de probité et les
promesses, III, 410. — Caractère de son courroux dans les grandes et les
petites affaires, II, 618. — Il a toujours été chatouilleux et sensible aux offenses,
mais il le devient encore davantage en vieillissant, III, 184. — Ses conseils à
sa famille pour le cas où il se met en colère, II, 616. — 11 ne présume les
vices qu'après les avoir vus, III, 390. — Son peu de goût pour les grandeurs,
III, 324. — Sa franchise, II, 492. — Était naturellement ouvert et libre avec les
grands, II, 496. — Dans les affaires, il s'offre toujours par ses opinions les plus
vives et par la forme la plus sienne, II, 82. — 11 aimait par-dessus tout l'indé-
pendance, III, 418. — N'aimait ni à maîtriser, ni à être maîtrisé, III, 324. —
Sa passion pour la liberté, III, 614'. — Pourquoi il s'opposait aux affections qui
l'attachaient à autre chose qu'à lui-même, III, 484. — Avait soin de ne pas
devenir esclave de ses affections, III, 501. — Etait ennemi de toute obligation
et contrainte, II, 498. — L'était au point qu'il comptait comme un gain d'être
dégagé de son attachement à certaines personnes par leur ingratitude, III,
418. — Limites dans lesquelles il est prêt à se sacrifier, III, 84. — N'aime à
solliciter, ni à contracter d'engagement ni pour lui-mémo, ni pour autrui, III,
422. — 11 hait la pauvreté à l'égal de la douleur, III, 392. — Préfère donner
que recevoir, III, 422. — Il osait dire ce qu'il osait faire, III, 186. — 11 était
fort porté à imiter, III, 246. — Influence sur lui de l'imagination, I, 132; III,
08-1. — Son éloignement pour toute espèce de nouveauté surtout en politique,
I, 178. — 11 jugeait mieux de lui-même par ses propres réflexions sur sa con-
duite, que parles reproches ou les louanges de ses amis, III, 114. — Prenait
son jugement pour direction ordinaire de ses actions, III, 124. — Il ne partage
pas cette erreur commune de juger d'un autre d'après soi, I, 398. — Se ser-
vait rarement des avis d'autrui et en donnait rarement aux autres, III, 128.
— Ne se repentait jamais de la manière dont il avait conduit ses affaires,
III, 124. — Pourquoi il ne s'affligeait pas lorsque les événements ne répon-
daient pas à ses désirs, III, 130. — 11 était plus sage et plus modéré dans la
prospérité que dans l'adversité, III, 380. — Beaucoup de choses sont des sujets
d'affliction pour les autres hommes, qui n'en sont pas pour lui, I, 462. — Pour-
quoi il étendait ses besoins au delà de ce que la nature exige nécessairement,
III, 496. — 11 était porté à ravaler le prix des choses qu'il possédait et à ne pas
faire grand cas de lui-même, II, 468.
Ses/lnœurs. — Il s'étudiait lui-même plus qu'aucun autre sujet; ce qu'il
apprenait par là, III, 618. — Cette étude le mettait, en outre, à même de juger
passablement des autres, III, 622. — Ses discours s'accordaient avec ses mœurs,
III, 698. — 11 était moins réglé dans ses opinions que dans ses mœurs, II, 96.
— Son antipathie pour la cérémonie, I, 84. — Comment dans la conduite de ses
affaires et de ses propres actions, il évitait les inconvénients en les prévenant,
III, 506. — A quel prix il s'est appliqué à éviter les procès, III, 510. — 11 était
ennemi des décisions trop hardies, III, 534. — 11 s'opposait tout d'abord au
progrès de ses passions, III, 504. — II aimait une f:agesse douce et gaie et fuyait
l'àpreté des mœurs, III, 186. — Il appréciait à leur valeur les voluptés natu-
relles, III, 684. — 11 ne devait guère qu'au hasard de sa complexion ce qu'il a pu
montrer de sagesse; il ne se sent pas grand empire sur lui-même, II, 96. — C'est
par cela qu'il a pu résister aux plus fortes impressions de la volupté, lî, 98. — Il
hait à peu près également une lourde oisiveté et un travail pénible, III, 276. —
Dans quel rang il mettait les plaisirs purs de l'imagination et les plaisii"s
corporels, III, 686. — Son intention est de passer doucement et non laborieu-
sement ce qui lui reste de vie, II, 62. — En somme, il l'aime et cherche à en
tirer le meilleur parti, III, 696.
Son mariage. — Sa répugnance pour le mariage et sa conduite par rapport
aux devoirs de cette union, III, 200. — Date de son mariage, II, 26. — Sa con-
fiance en sa femme pour la conduite de sa maison. III, 432. — Il lui avait
A.xxx iNOTICK SUll MOiNTAIGNE.
abandonna tout ce qui concernait l'éducation de leur lillc, III, 208. — Exemple
de sa circonspection à l'égard de cette éducation, III, 208. — Réforme qu'il a
introduite dans sa famille, II, o2. — Il ne souffrait pas volontiers près de lui les
enfants nouveau-nés, II, 22. — Comment il a supporté la perte de ses enfants
en bas âge, I, 402. — Ne comptait pas pour un malheur de n'avoir point d'en-
fants qui pussent ])orter son nom, III, 478.
Montaigne et La Boétie. — Sa liaison avec La Boétie, I, 296. — Comment, dès
leur première rencontre, ils s'aimèrent de la plus parfaite amitié, I, 298, 300,
306, 310. — Regrets de Montaigne sur sa perte, 1, 316. — Eloge qu'il en fait, 1,318.
Economie domestique. — Répugnance qu'éprouvait Montaigne à s'occuper
de soins domestiques, I, 422; III, 382 et suiv. — Ne jouissant encore d'aucuns
revenus, il dépensait sans compter, I, 466. — Il thésaurisait au début, quand il
a commencé à être le maître de sa fortune, I, 468. — Ce n'est que plus tard qu'il
s'est mis à dépenser en'proportion de ce qu'il possédait, I, 472. — Ses dispositions
et ses idées à l'égard de l'administration de sa maison, III, 392 et suiv. — 11 était
peu fait pour amasser, III, 394. — Trouvait commode, pour ses dépenses, de se
fier à ses domestiques, quoi qu'il pût lui en coûter, III, 390.
Vie sociale. — Etait trop délicat dans le commerce qu'on est obligé d'entre-
tenir avec le commun des hommes, III, 138. — Passionné pour des amitiés
exquises, il est peu propre aux amitiés communes, III, 140. — Il aime la société
des honnêtes gens, III, 146. — Son sentiment sur les rangs et préséances, 111,444.
— Sa manière d'être dans la conversation, III, 138. — Son goût pour la discussion.
III, 334. — Souffrait sans peine la contradiction, III, 336. — N'aimait pas à être
interrompu quand il parlait, III, 248. — Aimait à railler et à être raillé, mais
il déteste les jeux de main, III, 366. — Hait la sottise chez ceux avec lesquels il
cause; ne perd pas son temps à relever celles qu'on dit devant lui, III, 362. —
Son peu de disposition pour la llatterie, II, 476, 496. — Mention de ses rela-
tions avec la cour, III, 82. — Quelle était la solitude qu'il désirait, III, 146.
Vie publique. — Montaigne se félicitait de ne rien devoir aux princes et de
vivre dans l'indépendance, 111,420. — Les compositions que nécessite la vie publique
l'en ont dégoûté, III, 466. — Il n'a jamais souhaité de postes fort élevés, III,
322. — Il fuyait les emplois publics, III, 464. — Son éloignement pour la magis-
trature, III, 90. — Sa règle de conduite dans les charges publiques, III, '492,
500, 524. — Elu maire de Bordeaux, il est obligé d'accepter cette charge;
comment il s'en est acquitté; elle lui est continuée par seconde élection, 111,488.
— Portrait qu'il fit de lui-même à Messieurs de Bordeaux, III, 488. — Attitude
qu'il conseille à l'égard de troupes convoquées pour une revue dont on était en
défiance, I, 200. — Jugement qu'on fit de la manière dont il s'était acquitté de sa
mairie, III, 518. — Montaigne et le métier des armes, II, 450, 500; III, 038,
662. — Comment il entendait le rôle de négociateur, III, 82, 86.
Montaigne et les guerres civiles. — Ses sentiments à l'égard de son temps,
I, 398. — Tranquillité de sa conscience durant les guerres civiles, II, 356. — II
n'embrassait aucun parti avec trop d'ardeur, III, 84. — Sa conduite vis-à-vis de
personnes de différents partis, III, 86. — En épousant un parti, il n'épousait
point les injustices et les entêtements ridicules de ce parti, III, 500. — Comment
pendant longtemps, au début, il se trouva préservé, dans une maison sans défense,
II, 438. — Les troubles s'aggravant, il a la douleur de n'être plus à l'abri du
pillage que grâce à la protection d'autrui, III, 414. — En butte aux excès des
deux partis, il finit par en pàtir considérablement, III, 554, 560. — En quoi, en
cette occurrence, il faisait consister tout son bonheur, III, 132. — Mention de la
mort de son page, I, 658. — Détails sur deux circonstances critiques dans lesquelles
il s'est trouvé, III, 592. — Son opinion sur la meilleure forme de gouvernement et
sur les révolutions, III, 398 et suiv.
Quelques-unes de ses idées sur certains points. — Son opinion sur la
nature de Dieu, II, 250. — Sur la Patenôtre, II, 578. — Ses idées philosophiques,
III, 698. — Seuls biens qu'il mette en ligne de compte, III, 72. — Il préfère l'es-
time présente à celle qui pourrait le suivre après sa mort, III, 72. — Il n'a pas
l'ambition d'être jugé plus favorablement après sa mort, qu'il ne l'aura été de
son vivant, III, 72. — Il regarde tous les hommes comme ses compatriotes,
LES ESSAIS. A.xxxi
III, 428. — Son sentiment sur l'exil, III, 428. — Son opinion sur la science et
ses dispositions à l'égard des savants, II, 110. — Ce qu'il jugeait de la langue
française, III, 212. — Sur les miracles el les prodiges, III, 528. — Aveu de
quelques idées superstitieuses de sa part, III, oo4. — Son procédé pour con-
soler une personne affligée, III, 158. — Son remède contre le cliagrin, III, 170.
— Sa tendresse pour Paris, III, 428. — Son admiration pour la ville de Rome,
111, 474. —Pourquoi il se défiait de l'habileté d'un homme qu'il voyait en situa-
tion élevée. III, 360. — Ses observations sur le mal de mer fondées sur sa propre
expérience, III, 288.
Montaigne et les femmes. — De la douceur qu'il trouvait dans le com-
merce des femmes, III, 148. — Il voulait que ce commerce fût accompagné de
sincérité, III, 150. — Son goût sur \e chapitre de l'amour, III, 264. — Cette
passion l'a beaucoup fait souffrir dans sa jeunesse, III, 148. — Il n'a jamais
beaucoup fréquenté les femmes publiques, III, 152. — En amour, il préférait les
grâces du corps à celles de l'esprit, III, 152. — Disci'étion et bonne foi qu'il
apportait dans ses amours, III, 272. — Croyait salutaire l'amour pris avec
modération, III, 276. — Son opinion sur l'âge où l'amour est convenable, III,
282.
Montaigne, les livres et les lettres. — Ouvrage qui lui inspira le goût
de la lecture et moyen par lequel on entretint ce goût en lui, I, 284. — Il se
complaisait dans le commerce des livres, III, 154. — Ce qu'il dit de sa biblio-
thèque et de sa situation, III, 156. — Ce qu'il recherchait dans les livres, II,
62. — Effet de la lecture sur son esprit, III, 138: — Indication de ses auteurs de
prédilection, I, 284; II, 64. — Pourquoi il préférait les anciens aux modernes,
II, ,61. — Son goût particulier pour l'histoire et la poésie, I, 228, 404; II, 76.
— Sa méthode pour la lecture des historiens, I, 94. — Poètes latins qu'il
mettait au premiei- rang, II, 66. — Modifications successives de son goût
pour la poésie, I, 404. — Ce qu'il pensait d'Ovide à la fin de ses jours, H, 64.
— Quel usage il faisait de Sénèque et de Plutarque, II, 70. — Comment il s'y
prenait pour juger d'un ouvrage d'esprit que l'auteur soumettait à son appré-
ciation, III, 666. — Aveu du peu de profondeur de ses connaissances en fait
de sciences, II, 226. — Son ignorance des clioses les plus vulgaires, II, 502.
Son langage, son style, etc. — Son langage, II, 476; I, 480. — Fort libre
dans ses paroles, comment il excuse cette licence, II, 186. — Détails sur sa
manière d'écrire et de parler, II, 474; III, 244. — Sur son style, I, 152, 278, —
Son mode de travail, III, 22. — Son peu de succès dans la poésie, II, 472. —
Son motif pour traduire la « Théologie naturelle » de Raymond Sebonde, II,
112. — Pourquoi, excepté Plutarque, il aime à se passer de livres en écrivant,
III, 244. — Quand il composait, ne se faisait aider par personne, III, 244. —
En Guj'enne il acheta les imprimeurs, ailleurs ils l'achètent, III, 116. — Son
genre pour le style épistolaire, III, 436. — Etait ennemi des compliments outrés
qu'on emploie dans les lettres, II, 438. — Peu propre à écrire des lettres de
i-ecommandation, II, 438. — II écrivait ses lettres avec beaucoup de rapidité et
de négligence, II, 438. — (^ Celles qui lui coûtent le plus sont celles qui valent le
moins, II, 440. — Il n'aime pas à se relire et ce n'est qu'à contre-cœur qu'il se
corrige. III, 400.
Voyages. — Pourquoi il se plaisait à voyager, III, 380. — En voyage, il ne
pense qu'à lui, III, 394. — Autres avantages qu'il y trouve, III, 430. — Raisons
qui auraient pu l'en détourner, réponse qu'il y fait, III, 456. — Sa manière de
voyager, III, 450 et suiv. -— Sa manière de voyager à cheval, III, 430. — Il se
prêtait sans peine aux différents usages et modes de chaque pays, III, 454. —
Pratique à laquelle il s'était habitué en voyage, I, 92. — Aurait aimé un com-
pagnon de voyage avec lequel il eût pu s'entretenir, III, 456. — Mésaventure
qui lui est survenue dans un voyage à Paris, 111,596. — Autre aventure qui s'est
produite dans un voyage qu'il faisait avec son frère le sieur de la Brousse, I,
658. — Mention d'un voyage à Orléans, I, 272. — A Rouen, I, 374. — A Vitrv-
le-François, I, 136. — A^Bar-le-Duc, II, 501. —A la Fère, III, 174. — ASoissons,
III, 174. — Aux stations thermales, III, 56. — En Allemagne, III, 630. — En
Italie, I, 238; III, 474. — Impression que fit sur lui le Tasse devenu fou, II,
212.
A.xxxii NOTICE SUR MONTAIGNE.
Ses goûts, ses habitudes, ses dispositions naturelles. — Détails sur
SOS goûts, habitudes, etc., relatifs aux actions les plus communes de la vie, III,
484, 630, 660. — Ses songes étaient plus ridicules que tristes, III, 666. — Quand
il était jeune, il aimait à se parer, III, 294. — Règles qu'il observait à l'égard
de ses vêtements, I, 394; III, 678. — Sa démarche; il se tenait fort peu dans
une même situation, III, (38-2. — Son habitude de porter une canne. II, 564. —
Ses habitudes de table, I, 268, 548: III, 638, 642, 6fJ8, 672 et suiv. - Peu sensible
au plaisir de boire, I, 622. — Jeûnait quelquefois et pourquoi, III, 676. — Sain
ou malade, il suivait volontiers ses appétits naturels, III, 642. — Il était peu
délicat à table, III, 668. — Ce qu'il jugeait des plaisirs de la table, III, (J82. —
Son goût a eu ses changements et ses révolutions, III, 676. — Il avait soin de
se tenir le ventre libre, III, 640. — N'airpait pas à demeurer dans un air con-.
fine, III, 680. — La chaleur l'incommodait plus que le froid, III, 680. — Ne
pouvait souffrir ni coche, ni litière, ni bateau, III, 290. — Ses raisons pour
renoncer aux jeux de hasard, III, 506. — Les odeurs les plus simples et les plus
naturelles sont celles qui lui plaisent davantage, I, 574.
Montaigne et la maladie. — Sa. bonne constitution, II, 482; III, 6&1. —
Son peu de confiance dans la médecine, I, 192; II, 34; III, 648. — En quel état
il serait, s'il venait à se livrer aux mains des médecins, II, 76. — Malade, il
conservait la même manière de vivre que lorsqu'il se portait bien, III, 630. —
Son esprit peu troublé par les maladies du corps, III, 666. — Pourquoi parler
lui nuisait dans ses maladies, III, 644. — Sa santé sur ses vieux jours, III, 651.
— Devenu sujet à la colique (gravelle), avec le temps il s'accommode avec ce
mal, III, 24. — Quels avantages il retire de cette douloureuse maladie, II, 26;
III, 650 et suiv. — Il pense la tenir de son père, II, 32. — Il arrive à se pos-
séder assez bien dans ses accès, II, 30. — Tout bien considéré, il se console de
ses infirmités, III, 660. — Eaux thermales dont il a fait usage, II, 58.
Montaigne et la mort. — Quels étaient ses préparatifs par rapport à la
mort, III, 446. — L'idée de la mort est plus pénible en santé qu'en maladie,
I, 122. De quel genre de mort il s'accommoderait le mieux, III, 450. — Il lui
est indifférent de mourir loin des siens, III, 438. — Voudrait être assisté d'un
sage ami en sortant de ce monde, III, 440. — Son projet pour ses dernière
moments, I, 56. — Son opinion sur les cérémonies des funérailles, I, 38.
Jugements de Montaigne sur lui-même. — Estime qu'il avait de lui-
même, II, 470, 508. — Idée qu'il avait de la justesse de ses opinions, II, 510. —
Par le fait même qu'il écrit sur lui-même, il est tenu de s'observer dans ses
mœurs, III, 442. — Lui-même était le miracle le plus réel à ses yeux, III, 532.
— En quelles sortes d'affaires il aurait pu être employé utilement, III, 518. — Il
se serait cru propre à parler librement à son maître et à lui apprendre à se con-
naître lui-même, III, 624.
NOTES ayant trait à Montaigne et aux siens.
Nota. — L'indication N. I, 620, Italie, signifie qu'il y a lieu de se reporter
aux notes (N) afférentes au premier volume (I), page 620; et, parmi elles, à celle
ayant pour indice le mot Italie.
Le père de Montaigne. — Détails sur Pierre Eyquem, N. I, 620, Italie. —
Oncles de Montaigne, N. III, 34, Quatre. — Frères et sœurs de Montaigne, N.
III, 32, Mère. — Naissance de son dernier frère, N. I, 620, Miracles- — Parenté
protestante de Montaigne, N. III, 560, Vojsinage. — Pierre Eyquem maire de
Bordeaux, N. III, 488, Appelé. — Mise de sa maison en état de défense. N. II,
438, Faicte.
Montaigne, sa jeunesse. — Prononciation de son nom, N. I, Titre,
Montaigne. — Observation sur la durée de la grossesse de sa mère, N. II, 330,
Mois. — Son prénom, N. III, 670, Attacher. — Lacune de son éducation, N. I,
280, Moy. — Son précepteur allemand, N. I, 280, Latine. — Ses frères et sœurs,
N. I, 114, Frère.
Montaigne à âge d'homme. — Montaigne et son nom patronymique, N.
LES ESSAIS. A.xxxiii
III, A2[, Noiir. — Ses armoiries, N. I, 514, Fasce. — Sa devise, N. II, 276, « Que
sçay-ie ». — Montaigne élu maire, N. III, 488, Aussi. — Montaigne réélu, N.
111,518, Charge. — Montaigne maire et Montaigne simple particulier, N. III,
500, Claire. — Henri de Navarre chez Montaigne, N. III, 456, Pompe. — M"' de
Gournay, N. II, 518, D'alliance.
Ses qualités morales et intellectuelles. — Son peu de mémoire, N. I,
58, iMienne. — Montaigne et le bon sens, N. II, 310, Inconstante: N. III, 366,
L'asne. — Son humeur paresseuse, N. III, 396, Volonté.
Mœurs. — Procès relatif à sa succession, N. II, 44, Masculines.
Son mariage. — Date de son mariage, N. II, 26, Ans. — Sa retenue dans le
mariage, N. I, 346, Simple. — Ses filles, N. I, 462, Fascherie. — Paix du ménage,
X. III, 382, Clier. — Son nom s'est éteint avec lui, N. III, 478, Nom.
Montaigne, les livres et les lettres. — Ses livres, N. III, 156, Liures. —
Montaigne comparé à Sénèque, N. II, 476, Seneque. — Montaigne qualifié de
• sage ignorant >■, N. I, 232, Autruy.
Son langage, son style, etc. — Traduction delà ■> Théologie naturelle ■• de
Sebond, N. II, 112, Mort. —Lettres de Montaigne, N. I, 436, Chose. — Son
écriture, N. I, 438, Mal. — 11 usait aussi de secrétaires, N. III, 156, Dicte. —
Montaigne et son imagination, N. II, 478, Creu.
Économie domestique. — Son souhait de vivre en s'en remettant à un
gendre de tout souci matériel, N. III, -M), Amy. — Ce qu'est devenu son patri-
moine entre ses mains, N. I, 472, Folies; N. I, 472, Terres.
Vie sociale. — Montaigne et Charron, N. III, 444, loindre. — Séjours de
Montaigne à la cour, N. II, 146, Vie.
Vie publique. — Montaigne et les différents chefs de parti, N. I, 152, Partis.
— Il no voulait s'inféoder à aucun d'eux, N. I, 246, Particulières. — De parti
pris, il repousse toute avance tendant à le faire rentrer dans la vie publique, N.
II, 210, Viurc. — Auprès de qui il a joué le rôle de négociateur, N. III, 80,
Princes. — Quelle était sa profession, N. III, 408, Profession.
Montaigne et les guerres civiles. — Sur ce qu'il pensait de la moralité
publique en son époque, N. I, 550, Nous. — Guerres de religion du temps de
Montaigne, N. I, 668, Deuxièmes. — Pillage de sa mai.son, N. III, 414, Sac. —
Montaigne à la Bastille, N. III, 614, Receu.
Quelques-unes de ses idées sur certains points. — Montaigne chré-
tien et moraliste, N. I, 590, Instruisants. — Le doute est de règle dans les con-
troverses religieuses, N. II, 332, Reseruément. — Résumé de la morale de Mon
taigno, N. 111,546, Sequi; N. III, 704, Extrauagance. — Montaigne et le suicide.
N. 1,628, Contestations. — Montaigne et "la fatalité, N. III, 126, Regret. — Son
influence sur nos lois, N. III, 610, lustice.
Voyages. — Journal de voyage de Montaigne, N. I, 92, Voyages; N. III, 654,
Passée. — Sur son titre de bourgeoisie romaine, N. III, 480, Bulle.
Montaigne et la maladie. — Maladie dont il est mort, N. III, 438, Gorge.
Montaigne et la mort. — Lui-même distribue à ses serviteurs les legs qu'il
leur destine, N. III, 148, leur. — Sa mort, N. I, 122, Mort. — Son tombeau, N.
III, 438, Miens.
ESSAIS DE MONTAIGNE.
LES ILLUSTRATIONS DU PRESENT OUVRAGE.
Planche I (P' volume).
Portrait de Montaigne. — Il existe soit en original, soit reproduits par
la gravure, d'assez nombreux portraits de Montaigne plus ou moins authentiques,
laits de son vivant, à différents âges.
Celui qui présente le plus d'authenticité et en même temps semble le mieux
rendre sa physionomie telle qu'elle pouvait être et que nous nous la représentons
à l'époque où il écrivait les Essais, aurait été peint en 1581, à Rome, pendant le
voyage qu'il y fil (il avait donc alors 48 ans), par Palma Vecchio (le vieux), peintre
italien (né en 1548 et mort en 1588). Ce portrait, alors que Montaigne était maire
de Bordeaux, aurait été donné par lui en 1583 au musée de cette ville, où en 1640
il a été copié par Ribeira, dit l'Espagnolet, pour la famille qui le détient encore.
L'original a disparu, sans qu'on sache ce qu'il est devenu, bien que certains pré-
tendent qu'il n'est autre qu'un portrait qui se trouverait actuellement au château
de Montaigne.
De ce tableau et de sa copie, il existe plusieurs gravures dont les plus an-
ciennes remontent à 1772; la vignette en tête de notre premier volume est la
reproduction de l'une d'elles exécutée en 1826 par Ilenriquet Dupont. Le ruban
et la médaille qu'y porte Montaigne sont ceux de l'ordre de S.-Michel, dont les
règlements imposaient à ses titulaires de ne jamais les quitter, fût-ce au péril de
la vie; quand il se faisait peindre à Rome, Montaigne en était chevalier depuis
une dizaine d'années.
Des diverses gravures le représentant, il en est une reproduisant son portrait
par Thomas de Leu ; nous la signalons parce qu'au-dessous se lit ce quatrain
attribué à Malherbe :
« Voicy du grand Montaigne vne entière figure,
Le peindre a peinct le corps et luymesme l'esprit;
Le premier par son art égale la Nature,
Le second la surpasse en tout ce qu'il escrit. •
Une autre de ces gravures porte ces vers de l'abbé Gacon :
« Ennemi de tout fanatisme,
Après avoir réglé son esprit et ses mœurs,
Par un aimable pjrrhonisme
Il rendit ses écrits le charme des lecteurs. »
Les vere suivants en accompagnent une autre de 1837 :
« Philosophe sublime en sa naïveté,
Lorsque le fanatisme appelait l'ignorance,
En enseignant le doute il illustra la France
Et sut, dans son portrait, peindre l'humanité. >
Une édition des Essais de 1611, est la première qui soit ornée d'un portrait.
Armoiries. — « le porte d'azur semé de trèfles d'or, à une pâte de lyon de
mesme, armée de gueules, mise on face ■> (liv. 1, ch. 46, I, 514); ce qui, pour les
profanes, se traduit de la sorte : Mon écusson est sur fond d'azur (bleu), semé de
trèfles d'or (jaune) ; y figure une patte de lion de même couleur, armée de gueules
ILLUSTRATIONS DU PRÉSENT OUVRAGE. A.xxxv
(ayant les griffes rouges), mise en fac«^ (posée de face) et brochant sur le tout
(allant d'un bord à l'autre de l'écusson); cette dernière indication n'est pas dans
le texte, mais la disposition qu'elle marque existe. — Montaigne, à sa mort, n'ayant
point d'héritier mâle, légua ses armes à Charron, l'auteur de la Sagesse, qui, en
ses derniers ans, était devenu son ami et son disciple.
Signature. — Cette signature est le fac-similé de celle apposée sur une lettre
adressée, le 21 mai 1582, par Montaigne aux jurats (sorte de conseillers muni-
cipaux) de Bordeaux, alors qu'il en était maire.
11 est à observer que l'n de son nom est supprimée, ce qui était assez fréquent
dans la façon d'écrire de l'époque, quand dans la syllabe cette lettre était suivie
d'une voyelle, ainsi qu'on peut voir sur la planche IV; elle se remplaçait alors
par un trait sur la lettre précédente, trait qui dans sa signature se confondait
avec la barre du t.
A la mort de son père, Montaigne devenu chef de famille a cessé, dans sa signa-
ture, de faire précéder son nom de son prénom, que ses frères, au contraire,
continuèrent à apposer concurremment.
Prononciation du nom de Montaigne. — Se reporter à ce sujet à la note
y afférente, I, 13, Montaigne.
Planche II (II" volume).
Plan et perspective du manoir de Montaigne au XVIII" siècle et
croquis topographique des environs. — Le manoir ou maison noble de Mon-
taigne, sa » maison » comme il l'appelle, ne mérite lo nom de château qu'on lui
donne la plupart du temps, que depuis sa réfection à peu près complète vers 1860,
et sa reconstruction totale, la tour exceptée, 1887.
Il est situé à environ 4 kil. N. de la route de Bergerac à Libourne par Castillon
et de la Dordogne que longe cotte route, et est distant de 20 kil. E. de Bergerac à
rO. et de 8 kil. de Castillon à l'E. Cet immeuble fait partie du territoire de la
commune de S.-Michel-Montagne, appelée aussi Saint-Michel-Bonnefare (agglomé-
ration d'environ 400 habitants dont il est éloigné de 5 à 600°") ; cette commune qui
relève du canton de Vélines, arr. de Bergerac, dép, de la Dordogne, est limitrophe
(lu département de la Gironde.
Le manoir est construit sur un mouvement de terrain d'à peu près 70'" d'éléva-
tion, à pentes moyennes, au pied duquel coule la Lidoire, petit affluent de la
Dordogne ; en ce point, la vallée est assez large et, de l'habitation dans la direction
de N.-O., la vue s'étend assez loin sur les" plaines du Périgord et du Bordelais.
Suivant une description de 1778, quoique habité, il était, à cette époque, dans un
état de délabrement complet; du reste, il n'avait jamais dû présenter rien de
grandiose, ne devait d'avoir résisté à l'action du temps que grâce à la solidité
de ses murs et n'était intéressant que par le souvenir de Montaigne.
Il se composait d'une enceinte rectangulaire complètement fermée.
La face S.-O. N.-E. était flanquée de deux tours. Joignant celle du S. mais sur
l'autre face y attenant, était la porte d'entrée, des plus simples, quoique garnie
de mâchicoulis. Elle donnait accès dans une sorte de préau étroit servant de
passage, qui contournait en partie la tour et d'où par une seconde porte on
débouchait dans la cour qui était de forme à peu près carrée et avait cinquante
pas environ de longueur sur à peu près autant de largeur; elle était plantée
d'arbres sur son pourtour.
La maison d'habitation en occupait le côté faisant face aux deux tours; les trois
autres l'étaient par les communs. La maison comprenait un rez-de-chaussée et
deux étages; la distribution en était assez confuse et mal entendue. Derrière
était une longue et large terrasse, présentant des ombrages et des parterres, d'où
l'on avait une vue belle et étendue; une balustrade, rendue nécessaire par des
soutènements assez abrupts, la clôturait du côté de la vallée.
La tour S. encore existante et sur laquelle nous reviendrons à propos des
illustrations de la planche III, assez massive et un peu écrasée, comprend également
un rez-de-chaussée et deux étages; elle est connue sous le nom de Tour de Mon-
A.xxxvi NOTICE SUR MONTAIGNE.
taigne. L'auteur des Essais }• avait une chambre où il couchait parfois et sa
bibliothèque. Un beffroi surmontait cette tour et abritait une cloche dont il est fait
mention au ch. 22 du liv. 1 des Essais, page 156, elle sonnait l'Angelus et servait
à appeler les tenanciers du fief les jours de fête et aussi en cas d'alarme. L'autre
tour, moins grosse et un peu plus élevée, était dite tour de Trachère et il semble
que c'est uniquement par opposition avec le nom de la première, et à tort, qu'on
rappelle parfois Tour de Madame; ni la femme, ni la mère de Montaigne ne l'ont
occupée. De construction beaucoup plus récente que l'autre, vraisemblablement
bâtie pour accroître la force défensive de la demeure, elle était déjà en ruines
au commencement du siècle dernier, et, ne faisant plus que masquer le coup
d'oeil, elle a depuis complètement disparu.
Vendu à diverses reprises, ce manoir en était venu, faute d'entretien, à un
tel état de délabrement, qu'il n'était plus guère habitable, quand en 1857 il fut
entièrement restauré, mais en tenant compte du progrès en matière de confort ;
seule, la tour de Montaigne le fut en conservant sa distribution intérieure, toutefois
le beffroi fut supprimé. En 1885, ruiné de fond en comble par un incendie, il fut
l'éédifié peu après, mais cette fois sans s'astreindre à respecter aussi passivement
le plan primitif, dont on s'écarta aussi bien pour les détails extérieurs que dans
l'aménagement; c'est devenu une très belle habitation, luxueuse à l'intérieur,
justifiant aujourd'hui le nom de château qu'on lui avait donné prématurément.
Par contre, de la maison de Montaigne il ne reste plus que l'emplacement et la
tour, que le feu avait encore épargnée grâce à sa situation à l'écart et à l'épaisseur
de ses murs; sauf le beffroi, elle garde sa physionomie d'antan.
On peut remarquer que le croquis topographique (copie de la Carte de l'Etat-
Major) porte S.-Michel-Montagne, conformément à la prononciation locale que
pour un centre d'habitations il y aurait en effet inconvénient à altérer sur une
carte; tandis qu'il y est écrit Château de Montaigne d'après les errements anciens
existant encore; la prononciation n'en est pas moins la même, dans le pays, pour
l'un comme pour l'autre.
Pi.ANCHF. III (III' volume).
Tour de Montaigne. — Cette tour, dont il a été indiqué, à propos do la
planche II, la situation par l'apport au reste du manoir, semble, par ses assises,
datei" du xni" siècle; elle a 10'" de diamètre. 13™ de haut; au ras du sol ses murs
sont épais de près d'un mètre cinquante.
Elle comprend, a-t-il été dit, un rez-de-chaussée et deux étages, auxquels ou
accède par un escalier en colimaçon aménagé dans une tourelle latérale. En outre,
un appentis, surmontant la porte d'entrée et son porche intérieur, la joint et
faisant corps avec elle communique à chaque étage qui se trouve ainsi accru
chacun d'une pièce de dégagement mesurant 3"'50 sur 3'".
Le rez-de-chaussée est aménagé en chapelle. A l'extérieur, au-dessus de la
porte y donnant accès, sont sculptées les armes de IMontaigne, qui se retrouvent
là un peu partout; l'intérieur est de forme carrée, aux angles arrondis; le plafond.
de 3"" d'élévation, est voûté; la pièce, assez obscure, ne rec^oit de jour que par la
porte et deux soupiraux; l'autel est .placé dans une niche éclairée par la partie
supérieure.
Au premier étage, se trouve une chambre à coucher carrée de sept mètres de
côté. Il y a une cheminée et deux fenêtres assez étroites auxquelles on parvient
par quatre marches pratiquées dans l'épaisseur des murs. Une ouverture, ménagée
dans le carrelage du sol, permet d'avoir vue sur l'autel de la chapelle et de suivre
<;e qui s'y passe. La pièce de l'appentis attenante à la chambre forme débarras.
Quarante-six marches conduisent du pied de la tour au tleuxième étage où
était la bibliothèque de Montaigne, dont il donne si complaisamment la descrip-
tion au ch. 14 du liv. III des Essais (IIP vol., page 1.56). Cette bibliothèque est de
forme circulaire, de 8™ .50 de diamètre; il y a trois fenêtres et pas de cheminée; le
plafond a 3"" d'élévation ; ses poutres et solives font saillies et sont couvertes
d'inscriptions latines et grec(|ues tracées au pinceau, nous en donnons ci-après
ILLUSTRATIONS DU PRÉSENT OUVRAGE. A.xxxvii
la traduction. La pièce contiguë de l'appentis possède une cheminée, sa fenêtre
permet de voir tout ce qui se passe à l'intérieur du manoir. C'était le cabinet de
travail elle lieu de repos de Montaigne; il s'était plu à l'ornementer. On y re-
trouve des vestiges de peintures murales parmi lesquelles on distingue encore :
Les amours de Mars et de Vénus, Cimon allaité par sa fille, etc. ; c'est là enfin
qu'était l'inscription latine dont la traduction suit, consacrant ce local aux Muses,
annonçant la détermination du maître du logis de renoncer aux tracas de la
vie publique et fixant la date à laquelle il a commencé à écrire : « L'an du Christ
1571, à l'âge de 'i8 ans, la veille des calendes de Mars, anniversaire de sa naissance,
Michel de Montaigne, ennuyé déjà depuis longtemps de l'esclavage de la cour
et des charges publiques, alors qu'il se sentait encore dispos, est venu ici pour
s'isoler et s'y reposer sur le sein des doctes vierges, dans le calme et la sécurité;
il y passera les jours qui lui restent à vivre. Espérant que le destin lui permettra
de parfaire cet asile, cette douce retraite qu'il doit à ses ancêtres, il la consacre
à sa liberté, à sa tranquillité et à ses loisirs. «
Voir sur le contenu de cette bibliothèque les notes : III, 156, Liures; II, 8'2,
Lisant.
Inscriptions de la bibliothèque de Montaigne. — C'est aussi Mon-
taigne qui a fait peindre les sentences qui se lisent sur les poutres et solives
du plafond de la bibliothèque; on peut donc les considérer comme reflétant,
mieux ((ue tout, ses dispositions d'esprit; au moins à cette époque, où il fit
aménager ce local ; c'est à ce titre que nous en donnons le relevé fait en 1861
par MM. Galy et Lapierre, traduites par eux et consignées dans l'opuscule in-
titulé « Montaigne chez lui ».
Ces sentences étaient au nombre de 56; quatre n'ont pu être déchiffrées. Le
plus grand nombre est tiré de l'Ecclésiaste, des Epîtres de S. Paul, de Stobée et
de Sextus Empiricus; elles dénotent bien dans leur ensemble le scepticisme dont
Montaigne était imbu. La plupart sont insérées, soit textuellement, soit en subs-
tance, dans les Essais, notamment dans l'Apologie de Sebond : celles pour les-
quelles il en est ainsi, sont signalées ci-dessous par une astérisque; celles en
grec sont marquées de l'indication 1. G., les autres sont en latin.
— * Pour l'homme l'extrême science, c'est d'approuver les choses telles qu'elles
sont; et, quant au reste, de l'envisager avec confiance (d'après l'Ecclésiaste).
— * La curiosité de connaître les choses a été donnée aux hommes pour
Iléau, dit la Sainte Écriture (d'après l'Ecclésiaste).
— Le souffle enfle les outres vides, l'opinion enfle les cerveaux creux des
hommes (I. G., Stobée, attribué à Socrate).
— * Tout ce qui est sous le ciel, court- loi et fortune pareilles.
— * Pas plus ceci que cela; pourquoi ceci plutôt que cela? (Sextus Empiricus).
- Dieu a mis en nous l'idée des œuvres grandes ou petites qu'il a multipliées
sur la terre.
- * Je vois en efïet que tous, en cette vie, ne sommes que des simulacres
ou des ombres légères [l. G., Stobée).
— 0 faible esprit humain! ô cœurs aveugles! dans quelles ténèbres, parmi
quels dangers vous usez, en tous temps, votre existence! (Lucrèce).
— Celui qui compte sur son élévation, sera renversé par le premier accident
venu (I. N., Stobée).
— * Tout, et le ciel et la terre et les eaux, ne sont rien, auprès de l'immensité
do l'univers (Lucrèce).
— * Avez-vous vu un homme qui se croit sage? Espérez mieux de celui auquel
la raison fait défaut (Proverbes de Salomon).
- Par ce fait que tu ignores comment l'àme est unie au corps, tu ne connais
pas l'œuvre de Dieu (d'après l'Ecclésiaste).
— Cela se peut et aussi ne se peut pas (L G., Sextus Empiricus).
— * Le beau, digne d'admiration (1. G., d'après Platon).
- * Homme, vase fragile (l. G.).
- Ne soyez point sages à vos |)ropres yeux (S' Paul aux Romains).
— * La superstition suit l'orgueil et lui obéit comme à son père (1. G., Stobée,
attribué à Socrate).
A.xxxvui NOTICE SUR MONTAIGNE.
— * C'est à elle seule (la Majesté divine) qu'appartient la science et la sagesse
(1. G., Hérodote).
— Ni désirer, ni craindre son dernier jour (Martial).
— Homme, tu ne sais pas si ceci te convient plutôt que cela, ou si les deux
ne te sont pas nécessaires (d'après l'Ecclésiaste).
— * Je suis homme et crois être soumis à toutes les conditions de ma nature
humaine (Térence).
— *Ne soyez pas plus sage qu'il n'est nécessaire, de peur que vous n'en de-
veniez stupide (Ecclésiaste).
— * L'homme qui croit savoir, ne sait ce que c'est que savoir (S' Paul aux
Coi'inthiens).
— * Celui qui pense être quelque chose n'est rien, et se leurre lui-même
(S' Paul aux Galates).
— * Ne soyez pas plus sage qu'il ne faut, soyez modéré dans votre sagesse
(S' Paul aux Romains).
— Nul homme n'a su, nul homme ne saura rien de certain (I. G., Xénophon).
— * La vie que nous vivons est-elle la vie, ou est-ce ce que nous appelons
mort qui est la vie? (I. G., Stobée).
— Tout ce que l'homme voit est de trop grande difficulté pour qu'il puisse
l'interpréter (I. G., d'après l'Ecclésiaste).
— * Il est très aisé de parler à tort et à travers, pour et contre (1. G., Iliade).
— Le genre humain est trop avide de fables (Lucrèce).
— Quelle inanité en toutes choses! (Perse).
— Partout vanité! (Ecclésiaste).
— * Garder mesure, ne pas dévier de sa voie, suivre nature (Lucain).
— * Bourbe et cendre, qu'as-tu à te glorifier? (Ecclésiaste).
— * Malheur à vous qui êtes sages à vos propres yeux! (Isaïe).
— * Jouis agréablement de ce que tu as, que t'importe le reste? (d'après l'Ec-
clésiaste).
— * Il n'y a pas de raison qui n'ait sa contraire (L G-, Sextus Empiricus).
— Notre esprit erre dans les ténèbres; privé de lumière, il ne peut apercevoir
la vérité (Michel de l'Hospital).
- * Dieu a fait l'homme semblable à l'ombre; qui peut en juger quand le
soleil n'est plus? (d'après l'Ecclésiaste. — Pline).
^ * Il n'y a de certain que l'incertitude, et rien de plus misérable et de plus
orgueilleux que l'homme (Pline).
— De toutes les œuvres de Dieu, rien n'est plus inconnu à l'homme que la
trace du vent (d'après l'Ecclésiaste).
— Chacun s'occupe à sa manière des dieux et des hommes (I. G., Euripide).
— L'opinion que tu as de ton importance te perdra, parce que tu te crois
quelque chose (I. G., Stobée).
— * Les hommes sont tourmentés par les opinions qu'ils ont des choses, non
par les choses mêmes (I. G., Stobée).
— * L'homme élève sa pensée, mais il reste mortel (I. G., Stobée).
— A quoi bon charger son àme d'une ambition qu'elle ne saurait porter?
(Horace).
— Les jugements de Dieu sont des abimes profonds (Psalmiste);
— * Je n'établis rien (I. G., Sextus Empiricus).
— * Je ne comprends pas, je m'arrête, j'examine (1. G., Sextus Empiricus).
— * Je prends pour guide la coutume et les sens.
— Par le raisonnement alternatif.
— .le ne puis comprendre (I. G.).
Planche IV (IV' volume).
Fac-similé de la page 151 de l'exemplaire de Bordeaux, donnant
la fin du ch. 5 du liv. II, pages 660, 1. 37 à 664, I. 5 du 1" volume de la présente
édition. Cette page se compose de deux éléments : l'un, typographique, est le
ILLUSTRATIONS DU PRÉSENT OUVRAGE. A.xxxix
texte de l'édition de 1588, dont le livre est un exemplaire; l'autre, manuscrit,
est de la main même de Montaigne.
Ci la transcription de ces inscriptions manuscrites avec leur orthographe
et leur ponctuation :
Premier renvoi figurant dans la marge de droite et prenant place après le
mot asseurance : Maior animus ot natura ei^at ao maiori fovtunœ asauctus quam
vt rem osse sohyil et summilieii^e se in- humilUatemr'eausam dicenlium (citation de
Tite-Live écrite puis rayée par l'auteur, elle n'a été reproduite dans aucune édi-
tion) : il auoil le ceur trop gros de nature et acoslume a trop haute fortune dit
Tite Liue pour qu'il sceu estre criminel et se desmellre a la bassesse de deffan-
dre son emme innocence (cette addition est la traduction de la citation raturée
qui précède; elle figure dans l'édition de 1595).
Renvoi figurant dans la marge de gauche et prenant place après le mot
vérité : El celuy qui les peut souffrir cache la vérité et celuy qui ne les peut
souffrir (addition introduite dans l'édition de 1595).
Première rature dans le texte : est appuie sur, substitué à vient ao (variante
qui n'a pas été insérée dans l'édition de 1595).
Deuxième renvoi figurant dans la marge de droite et prenant place après
le mot douleurs : Etiam innocenter cogit mentiri dolor. Dou il auient que celluy
que le iuge a faict geiner pour ne le faire mourir innocent il le face mourir et
innocent et geiné (addition qui figure dans l'édition de 1595).
Deuxième rature dans le texte : confessions, substitué à accusations (variante
qui figure dans l'édition de 1595).
Troisième rature dans le texte : loge, substitué à compte (variante qui figure
dans l'édition de 1595).
Intercalation dans le texte, après le mot c'est, dict on (addition introduite
dans l'édition de 1595).
Addition inscrite dans le bas de la page et faisant suite au mot inuenter.
Bien inhumainement pourtant et bien inutilement a mon auis. Plusieurs nations
moins barbares en cela que la grecque et la romaine qui les en apellent estiment
horrible et cruel de tourmanter et desrompre un home de la faute du quel uous
estes encores en double. Et que pour ne le tuer sans raison vous luy faciès pis
que le liwr. Information plus pénible que le supplice. Que peut-il mais de uostre
ignorance pour estre ainsi traicto. Estes vous pas tustes-iniustes qui pour ne le
tuer sans ï^mson occasion luy f aides pis que le tuer. Qu'il soit ainsin; voies com-
bien de fois il aime mieux mourir sans raison que de passer par cette informa-
lion plus pénible que le supplice : et qui souuent par son aspreté deuance le
supplice et la oomdomnaiion l'exécute. le ne scai dou ie tiens ce conte mais il
raporte exactement la conscience de nostre iustice. Vne feme de village accusoit
deuant un gênerai d'armée grand iusticier un soldat pour auoir arrache a ses
petits enfans ce peu de la bouillie qui luy resloit a les sustanter cette armée
aiant rauage tous les villages a l'enuiron. De preuue il n'y en auoit point le iugo
gênerai après auoir somme la feme de regarder bien a ce quelle disait d'au-
tant qu'elle serait coupable de l'accusation si elle mantoit et elle persistant
il fit ouurir le vantre au soldat pour s'esclaircir de la vérité du faict. Et la feme
se trouua auoir raison Condemnation instructiue (addition introduite dans l'édi-
tion de 1595).
Remarquer la mutilation que, du fait du relieur, ont subie la plupart des mots
terminant les lignes manuscrites de la marge de droite.
Fleurons divers.
QUE SÇAY IE? (I, verso du faux-titre).
C'est la devise de Montaigne (II, 276) ; elle répond bien au doute universel
qui est le fond de sa philosophie et aux réflexions que lui suggéraient ses
lectures habituelles. C'est la même pensée qui lui inspirait cette médaille qu'il
faisait frapper à son nom, portant en exergue iniyoi « (je doute) » (N. II, 276,
Que sçay-ie), qui, sous une autre forme, exprime la même idée laquelle, de fait,
A.XL NOTICE SUR MONTAIGNE.
est celle de tout homme qui sans le secours de la foi, s'adressant uniquement
à la raison, médite sur ces questions insolubles relatives à la divinité, à l'im-
mortalité de l'àme, la vie future, etc.
FAY TON FAICT ET TE COGNOY (II, verso de la planche II).
C'est la règle de conduite des sages de l'antiquité et de toutes les époques :
elle rentrait d'une façon absolue dans les idées de notre philosophe dont l'àme
était foncièrement iionnête et qui de plus s'étudiait constamment.
CACHE TA VIE (III, verso, du faux-titre).
Il semble que cette sentence d'Épicure ou de quelqu'un des siens soit mal
venue à être appliquée à l'auteur des Essais qui dit son « livre consubstantiel
à son autheur • (II, 524), ajoutant que « sa fin principale et perfection c'est d'oslre
exactement mien • (III, 241); et cependant nul moins que lui n'a tenu ce qu'il
promet. Il donne bien sur lui-même quelques détails physiques, cite quelques-
uns de ses penchants, mais, sauf quelques mots sur son enfance et la mention
de son élection à la mairie de Bordeaux, de son obtention de l'ordre de S'-Michel
et de la qualité de citoyen romain, il est absolument muet sur ses faits et
gestes. En dehors de quelques allusions sur .sa vie de famille, nous n'en connais-
sons rien, rien de ce qu'il a pu faire pendant qu'il était conseiller au parlement:
il semble avoir été aux armées, rien ne nous révèle à quels moments et dans
quelles conditions; les relations de ses contemporains le présentent comme
ayant été employé à diverses reprises à des missions politiques, il n'en dit mot
et là encore le doute subsiste. Pour savoir par quoi ont été marquées ses quatre
années de mairie, sauf une circonstance, il faut avoir recours aux archives de
l'époque; les seuls l'enseignements que l'on ait sur sa vie publique, sa vie intime
et les siens, à part de rares détails bien insignifiants, c'est ailleurs que dans
son livre qu'il faut les rechercher; et, pour quelqu'un qui répète en plusieurs
endroits qu'il y est tout entier, il est difficile de dire moins de soi-mênje qu'il
ne fait.
RIEN TROP (III, verso de la dernière page).
Cette maxime (citée I, 292) résume le livre et aussi la vie de Montaigne, telle
qu'elle ressort de son aveu et de ce que nous en savons; il semble, de parti
pris, ne s'être passionné pour rien, afin de s'assurer une existence tranquille
autant que le permettaient, dans les temps troublés où il vivait, la lutte des
partis et ses propres sympathies qui, avant tout, allaient à lui-même; aussi
cette devise est-elle tout indiquée comme conclusion des Es.sais.
VIRES ACQUIRIT EUNDO (IV, verso de la planche IV).
« Plus il va, plus ses forces acquièrent de développement. • Est-il une épi-
graphe qui soit d'application plus exacte que celle-ci, inscrite par Montaigne
en tète de l'exemplaire de Bordeaux et marquant les accroissements successifs
de chaque édition des Essais, pour qualifier également le développement cons-
tant qu'à la suite de l'ouvrage lui-même, ont pris les dissertations, interpréta-
tions et notes de toute nature auxquelles il a donné lieu?
FASCICULE B
SOMMAIRE DES ESSAIS
(relevé des sommaires intercalés dans la traduction)
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV.
Dès i59o, dans une édition publiée à Lyon, et jusqu'au commen-
cement du siècle dernier, la plupart des éditions des Essais ont été
pourvues de « sommaires » accompagnant le texte et insérés en
marge. En l'état, outre qu'ils modifiaient légèrement la contexture
apparente de l'ouvrage, ils se trouvaient forcément réduits à quel-
ques mots et par suite manquaient parfois de clarté; c'est pour-
quoi, depuis, ils ont été généralement supprimés malgré leur in-
contestable utilité, car ils aident fort à s'y reconnaître.
Pour bénéficier des avantages qu'ils présentent et parer aux in-
convénients, Amaury Duval, dans son édition de 1820-22, a établi ses
sommaires par chapitre et les a placés en tête de chacun d'eux ; il
a pu, notamment, leur donner de la sorte plus de précision et une
liaison qui leur avait manqué jusqu'alors. Mais la lecture de Mon-
taigne ne se fait guère par chapitre ; on l'ouvre au hasard et là
où le livre s'est ouvçrt, on lit.
Ces considérations nous ont amené à intercaler ces sommaires
dans la traduction, ce qui a permis de les libeller d'une façon plus
intelligible, tout en respectant la physionomie du texte oi'iginal ; et
simultanément, à les réunir à part pour l'ouvrage entier, dont ils
donnent ainsi une idée d'ensemble que l'on ne peut se former en le
lisant, en raison des nombreuses digressions et intercalations qui
s'y trouvent.
Les sommaires de la présente édition sont, pour la plupart, re-
produits, le plus souvent textuellement, d'Amaury Duval ; il eût été,
en effet, difficile de faire mieux.
Nota. — Les nombres en chiffres romains, sans autre indication,
marquent le volume; ceux en chiffres arabes indiquent la page.
ESSAIS DK MONTAIGNE.
SOMMAIRE DES ESSAIS.
(relevé des sommaires intercalés dans la traduction).
LIVRE PREMIER.
CHAPITRE I.
Divers moyens mènent à même fin, I, 17. — Par une extrême soumis-
sion on peut désarmer la colère; parfois on parvient au même but en inspirant
l'estime et l'admiration (le prince Edouard, ScANOERnERO, Conrad- III, Pélopidas,
Épaminondas et les Thébains, Pompée), 17. — Mais quelquefois aussi un courage
obstiné irrite le vainqueur et le rend implacable (Denys l'Ancien et Phyton, Sylla,
Alexandre le Grand à l'égard de Bétis et des Thébains), 19.
CHAPITRE IL
De la tristesse, I, 23. — La tristesse est une disposition d'esprit des plus
déplaisantes, 23. — Effet des grandes douleurs en diverses circonstances; tout sen-
timent excessif ne se peut exprimer (Psamménit et Cambyse, le cardinal Charles de
Lorraine, le sacrifice d'IPHioÉNiE, Niobé, le seigneur de Raïsciac), 23. — Saisissement
causé par la joie, la honte, etc. (Sophocle, Denys l'Ancien, Thalna, Léon X, Dio-
DORE le dialecticien), 25.
CHAPITRE III.
Nous prolongeons nos affections et nos haines au delà de notre
propre durée, I, 29. — L'homme se préoccupe trop de l'avenir, 29. — La sa-
gesse voudrait qu'on, s'occupât davantage du temps présent et qu'on s'appliquât
à se bien connaître (Platon, Épicure), 29. — C'(5tait une loi très sage que celle qui
ordonnait d'e.xaminer la conduite des rois après leur mort, 29. — Nous leur de-
vons obéissance, mais l'estime et l'affection ne sont dus qu'à leurs vertus (Néron,
Lacédémone), 31. — Réflexions sur ce mot de Solon que nul, avant sa mort, ne
peut être dit heureux (Aristote), 33. — Honneurs rendus et influence prêtée à
certains après leur mort (Duguesclin, Barthélémy d'Alviane, Nicias, Agésilas,
Edouard I, roi d'Angleterre, Jean Ghiska, Tribus indiennes), 33. — Fermeté de
Bayard sur le point d'expirer, 35. — Particularités afférentes à l'empereur Maxi-
MiLiEN età Cyrus, 35. — Nos funérailles doivent être en rapport avec notre situation,
aussi éloignées d'une pompe exagérée que de la mesquinerie (Marcus Lepidus,
Lycon, Saint Augustin, Socrate), 37. — Cruelle et dangereuse superstition des
Athéniens sur la sépulture à donner aux morts (combat près des Iles Argineu-
SEs et DioMÉDON, combat près de l'ile de Naxos et Ch.\brias), 39.
B.6 ESSAIS DE MONTAIGNE.
CHAPITRE IV,
L'âme exerce ses passions sur des objets auxquels elle s'attaque
sans raison quand ceux, cause de son délire, échappent à son
action, I, 41. — Il faut à l'àme, en proie à une passion, des objets sur lesquels
elle l'exerce à tort ou à raison, 41. — Souvent même, en pareil cas, nous nous en
prenons à des objets inanimés (Xerxès et le mont Athos, Cyuls et le Gyndde,
Caligula; folie d'un Roi voulant se venger de Dieu lui-même, d'AuGUSTE contre
Neptune et lors du désastre de Varus, des Thraces contre le ciel en temps
d'orage), 43.
CHAPITRE V.
Le commandant d'une place assiégée doit-il sortir de sa place pour
parlementer, I, 45. — Jadis on réprouvait l'emploi de la ruse contre un en-
nemi (Lucius Marcius et Persée; les Romains envers Pyrrhus et les Phalisques, les
Achkexs, les peuples de Ternate, Florence), 45. — Aujourd'hui, nous tenons
comme licite tout ce qui peut conduire au succès; aussi est-il de principe que le
gouverneur d'une place n'en doit pas sortir pour parlementer (les seigneurs de
MoNTMORD et de I'Assigny et le comte de Nassau, Guy de Raigon et le seigneur
de l'EcuT, EuMÈNE et Antigone), 47. — Exemple d'un cas où cependant le gou-
verneur d'une place s'est bien trouvé de se fier à son adversaire (Henry de Vaux et
Barthélémy de Bonnes), 49.
CHAPITRE VI.
Le temps durant lequel on parlemente est un moment dangereux,
I,' 51. — La parole des gens de guerre, même sans que cela dépende d'eux, est
toujours sujette à caution (jEmilius Reggius et la ville de Phocée, Cléomène et les
Argiens), 51. — C'est souvent pendant les conférences en vue de la capitulation
d'une place, que l'ennemi s'en rend maître (Casilinum, Capoue, Yvoy, Gènes, Ligny
en Barrois), 53. — La victoire devrait toujours être loyalement disputée (Principe
italien, Chrysippe, Alexandre le Grand et Darius), 53.
CHAPITRE VII.
Nos actions . sont à apprécier d'après nos intentions, I, 55. — Il
n'est pas toujours vrai que la mort nous libère de toutes nos obligations
(Henry VII d'Angleterre et le duc de Suffoi.k, les comtes d'Egmont et de Horn,
l'architecte de Rhampsinet, roi d'Egypte), 55. — Il est trop tard de ne réparer ses
torts qu'après sa mort, et odieux de remettre à ce moment de se venger, 57.
CHAPITRE VIII.
De l'oisiveté, I, 27. — L'esprit est comme une terre qu'il faut sans cesse
cultiver et ensemencer; l'oisiveté le rend ou stérile ou fantasque, 57.
CHAPITRE IX.
Des menteurs, I, 59. — Montaigne déclare qu'il manque de mémoire, ce qui
n'est pas un aussi grand désavantage qu'on le croit communément. Cela a l'in-
convénient de le faire parfois taxer de manque de bonne volonté, mais lui pro-
cure l'avantage de lui interdire l'ambition, de lui faire juger des choses par lui-
même, de le porter à parler peu et le dispose à l'oubli des offenses (Darius), 59.
— Un menteur doit avoir bonne mémoire, 63. — Le mensonge est odieux et
expose à bien des dangers; il est, avec rentêtement, à combattre dès le début
chez l'enfant, 65. — Mésaventures de deux ambassadeurs (François I" et Francis-
que DE Taverna, un ambassadeur du pape Jules II), 67.
SOXfMAIRE DES ESSAIS. MV. I, Cil. X. — VOL. I. B.7
CHAPITRE X.
De ceux prompts à parler et de ceux auxquels un certain temps
est nécessaire pour s'y préparer, I, 69. — Certaines gens ayant à parlei-
en public, ont besoin de préparer ce qu'ils ont à dire; d'autres n'ont pas besoin
de préparation. La première de ces qualités est le propre des prédicateurs, la se-
conde convient au.x avocats (le chancelier Poyet et le cardinal dl Bellay), 69. —
Il en est chez lesquels la contradiction stimule le talent oratoire (Severus Cas-
sius), 71. — Il y a des personnes qui, sans préparation, parlent mieux qu'elles
n'écrivent, quelque peine et travail qu'elles apportent à rédiger, 71.
CHAPITRE XL
Des pronostics, I, 73. — Les anciens oracles avaient déjà perdu tout crédit
avant l'établissement de la religion chrétienne, 73. — On croit encore cependant
à certains pronostics. Origine de l'art de la divination chez les Toscans, art vain
et dangereux qui ne rencontre la vérité que par l'effet du hasard (le marquis de
Saluces, citation d'IIoRACE, Dl\ooras surnommé l'athée, Joachlm abbé de la Calabre,
l'empereur Léon), 73. — Ce que parait avoir été le démon familier de Socrate, 79.
CHAPITRE XII.
De la constance, I, 79. — En quoi consistent la résolution et la constance,
79. — 11 est parfois licite de céder devant l'ennemi, quand c'est pour le mieux
combattre (les Turcs, Socrate et Lâchés, les Lacédémoniess à Platée, les Scythes et
Darius), 81. — Chercher à se soustraire à l'effet du canon, quand on est à décou-
vert, est bien inutile par suite de la soudaineté du coup (le marquis du Guast,
Laurent.de Médicis), 81. — Les stoïciens ne dénient pas au sage d'être, sur le pre-
mier moment, troublé par un choc inattendu; mais sa conduite ne doit pas en être
influencée, 83.
CHAPITRE XIII.
Cérémonial des entrevues des rois, I, 85. — Attendre chez soi un grand
personnage dont la visite est annoncée, est plus régulier que d'aller au devant de
lui, ce qui expose à le manquer (Marguerite de Navarre), 85. — Dans les entrevues
de souverains, on fait en sorte que celui qui a la prééminence, se trouve le premier
au rendez-vous (Clément VII et François I"; Clément VII et Charles-Quint), 85. — Il
est toujours utile de connaître les formes de la civilité, mais il faut se garder de
s'en rendre esclave et de les exagérer, 87.
CIUPITRE XIV.
On est punissable quand on s'opiniâtre à défendre une place au
delà de ce qui est raisonnable, I, 87. — La vaillance a ses limites; et qui
s'obstine à défendre une place trop faible, est punissable (le connétable de Mont-
morency à Pavie et au château de Villane, le capitaine Martin du Bellay à Turin),
87. — L'appréciation du degré de résistance et de faiblesse d'une place est diffi-
cile, et l'assiégeant qui s'en rend maître est souvent disposé à trouver que la
défense a été trop prolongée, 89.
CHAPITRE XV.
Punition à infliger aux lâches, 1, 89. — La lâcheté ne devrait pas être punie
de mort chez un soldat, à moins qu'elle ne soit l'effet de mauvais desseins (\c
seigneur deVervins, 89). — Les peuples anciens et modernes ont souvent varié dans
la manière de sévir contre la poltronnerie (Charondas, l'empereur Julien, les Ro-
mains après la défaite de Cannes, le seigneur de Franget, etc.), 91.
B.8 ESSAIS DE MONTAIGNE.
CHAPITRE XVI.
Façon de faire de quelques ambassadeurs, 1,93. — Los hommes aiment
à faire parade de toute science autre que celle objet de leur spécialité (Périandre,
CÉSAR, Denys l'Ancien), 93. — Pour juger de la valeur d'un chroniqueur, il im-
porte de connaître sa profession, 95. — Les ambassadeurs d'un prince ne doivent
lui cacher quoi que ce soit (Ambassadeurs de François I" auprès de Charles-Quint),
95. — Rien de la part des subordonnés n'est apprécié par un supérieur comme
leur obéissance pure et simple (Publius Crassus), 97. — Une certaine latitude est
cependant à laisser aux ambassadeurs (fâcheux errements des Perses), 97.
CHAPITRE XVII.
De la peur, I, 99. — La peur est la plus étrange de toutes les passions; ses
effets sur le vulgaire, 99. — Les soldats eux-mêmes en sont atteints (un enseigne à
l'attaque de S.-Paul, lors du siège de Rome par M. de Bourbon, épisode de la guerre
de Germanicus contre les Allemands), 99. — Elle a souvent des effets contraires, elle
nous immobilise ou nous donne des ailes (l'empereur Théophile), 101. — Quelque-
fois elle détermine des actions d'éclat (les Romains à la bataille de laTRÉBiE), 101.
— Elle domine toutes les autres passions et, plus qu'aucune autre, nous démora-
lise (les compagnons de Pompée), 101. — Terreurs paniques (Carthage), 103.
CHAPITRE XVIII.
Ce n'est qu'après la mort, qu'on peut apprécier si, durant la vie,
on a été heureux ou malheureux, I, 103. — Par suite des vicissitudes con-
tinuelles de la fortune, ce n'est qu'après notre mort qu'on peut dire si nous avons
été heureux ou non; incertitude et instabilité des choses humaines (Crésus et
Cyrus, Agésilas, un successeur d'ALEXANDRE le Grand, Denys le Jeune à Corinthe,
Pompée en Egypte, Ludovic Sforza, Marie Stuart), 103. — Une belle mort absout
parfois une vie coupable ; elle finit dignement une vie innocente et pure (Scipion,
Épaminondas), 105.
CHAPITRE XIX.
Philosopher, c'est apprendre à mourir, 1, 107. — Ce que c'est que philo-
sopher, 107. — Le plaisir est le seul but delà vie, mais on ne se le procure surtout
que par la vertu; la difficulté ajoute aux satisfactions qu'elle nous cause, 109. —
Le mépris de la mort est l'un des plus grands bienfaits que nous lui devons, 111.
— La mort est le but essentiel de la vie; le mot en était désagréable aux Romains,
1 13. — La mort nous surprend inopinément de bien des façons (un duc de Bre-
tagne, Henry II roi de France, Philippe fils de Louis le Gros, ^Emilius Lepidus, Aufi-
dius, Cornélius Gallus, Tigellinus, Ludovic de Gonzague, Speusippe, Babius, Caius
JuLius, le capitaine S. -Martin frère de Montaigne), 115. — Il faut toujours être
préparé à la mort, et l'idée en être toujours présente à notre esprit (coutume des
Egyptiens, Paul Emile et Persée, raison d'être des cimetières autour des temples
au milieu des villes, combats de gladiateurs chez les Romains pendant les festins),
1 15. — Intérêt que nous avons à y penser fréquemment.- Le mépris de la vie est
le fondement le plus assuré de la religion, 117. — La mort fait partie de l'ordre
universel des choses ; la vie n'est par elle-même ni un bien ni un mal (Socrate,
les éphémères), 127. — L'immortalité n'est pas désirable. Pourquoi la mort est mê-
lée d'amertume (Chikon, Thalès), 131. — Pourquoi elle nous paraît autre à la guerre
que dans nos foyers ; pourquoi elle est accueiUie avec plus de calme par les gens
du commun que par les personnes des classes plus élevées, 133.
CHAPITRE XX.
De la force de l'imagination, I, 133. — Effets de l'imagination (Gallus
Vinius), 133. — Des émotions violentes peuvent occasionner des modifications
SOMMAIRE DES ESSAIS. IJV. I, CH. XX. — VOL. I. B.9
radicales dans notre organisme (Cippus, le ku-s de Crésus, Antiochus, Lucics Cos-
siTius, Ii'His, Marie Germain), 135. -r L'imagination peut produire des extases, des
visions, des dél'aillances considérées jadis comme le fait d'enchantements (le roi
Dac.obert, s. François, exemples rapportés par Celse, par S. Augustin, plaisante
ANECDOTE dont Montaigne a été l'auteur, Amasis roi d'Egypte et Laodice, la bru de
Pythagore), 137 — Comment les mariés doivent se comporter dans la couche
nuptiale, 143. — Nos organes sont sujets à aller à rencontre de notre volonté
qui, elle-même, échappe parfois à toute direction, 143. — Du seul fait de l'imagi-
nation, les maladies peuvent se guérir ou s'aggraver; exemples à l'appui, 147. —
Les bêtes, elles aussi, en ressentent les effets, 149. — Notre imagination est sus-
ceptible d'agir même sur d'autres que sur nous (Femmes de Scythie, impressions
ressenties par les enfants dans le sein de leur mère, fascination exercée sur des
animaux), 149. — Jlontaigne cite les faits qui arrivent à sa connaissance, sans
se préoccuper de leur exactitude; il se borne à en prendre texte pour ses ré-
flexions. L'impossibilité de contrôler ceux qu'ils consignent fait que le rôle de
chroniqueur ne convient guère ni à un philosophe, ni à un théologien; motifs
pour lesquels l'auteur s'est refusé à écrire la chronique de son temps, 151.
CHAPITRE XXI.
Ce qui est profit pour l'un, est dommage pour l'autre, I, 155. — Dans
toute profession, on ne fait bien ses affaires qu'aux dépens d'autrui (Demade l'A-
thénien), 155.
CHAPITRE XXII.
Des coutumes et de la circonspection à apporter dans les modifi-
cations à faire subir aux lois en vigueur, I, 155. — Force de l'habitude;
elle s'exerce même malgré des intermittences de certaine durée (Mithrydate,
alimentation de certains peuples, endurcissement de I'athlète, habitants des cata-
ractes, MUSIQUE céleste, VÊTEMENTS parfumés, bruit de cloches), 155. — Les vices
prennent pied chez l'enfant dès le bas âge et devraient être combattus dès ce mo-
ment, 159. — Habileté à laquelle on peut atteindre par l'habitude, 161. — Puis-
sance de la coutume sur les opinions; elle est cause de la diversité des institutions
humaines, 16L — Coutumes bizarres de certains peuples, 161. — Les lois de la
conscience dérivent plus des coutumes que de la nature; notre attachement au
gouvernement, au pays, est notamment un fait d'habitude, 169. — L'habitude est
aussi la source de grands abus, entre autres la vénalité des charges de la justice,
son mode d'administration; et, en fait de choses de moindre importance, le gro-
tesque de certains vêtements de notre époque; difficulté d'aller à fencontre, 173.
— Il n'en faut pas moins se conformer aux usages et, sauf le cas d'absolue néces-
sité, se garder de toute innovation dans les institutions publiques. Ébranlement
causé en France par l'introduction de la Réforme (Charondas, Lycurgue, I'éphore
et la CYTHARE, la Réforme et la Ligue, le Sénat romain, I'oracle de Delphes), 177. —
L'obéissance aux lois est un principe de la religion chrétienne; quanta ses pro-
pres dogmes, ils sont hors de toute discussion, 181. — Cas où l'absolue nécessité
impose des modifications à l'état, de choses existant (Octavius, Caton, Agésilas,
Alexandre le Grand, les Lacédémoniens avec Lysandre et Périclès, Philopoemen),
185.
CHAPITRE XXXIII.
Une même ligne de conduite peut aboutir à des résultats dissem-
blables, I, 187. — La clémence désarme souvent des conjurés (le duc de Guise
à Rouen, Auguste envers Cinna), 187. — La médecine n'est pas le seul art où la
fortune ait une large part dans le succès ; les beaux-arts, les lettres, les entreprises
militaires sont dans le même cas, 193. — Parti à prendre lorsque ce qui peut
s'ensuivre présente de l'incertitude, 195. — Il n'est pas avantageux de s'attacher à
prévenir les conjurations par la rigueur (Dion et Calypsus, Alexandre le Grand et
Philippe son médecin), 195. — Triste état d'un prince enclin à la défiance, 197. —
BAO ESSAIS DE MONTAIGNE.
La hardiesse permet seule de n^aliser de grandes choses (Scipion et Syimiax,
Louis XI, Césak), 197. — Conduite à tenir en présence d'émeutes; la conliance qu'on
montre doit, pour porter l'ruit, être ou paraître exempte de crainte, iOU. — Con-
fiance de César en sa fortune, 201. — Conseil donné à un tyran pour se mettre à
couvert des complots qu'on pouvait former contre lui (Denys de Syracuse, le duc
d'ATHÈNEs à Florence), 201. — Mourir vaut mieux parfois que d'être sous la menace
continue d'une fin tragique, 203.
CHAPITRE XXIV.
Du pédantisme, I, 203. — Les pédants sont et ont été de tous temps mépri-
sés et ridiculisés malgré leur savoir (du Bellay, Plutarque, Rabelais, Marguerite
DE Valois), 203. — Les philosophes de l'antiquité étaient au contraire générale-
ment estimés, parce que sous leur originalité et leur dédain pour les fonctions pu-
bliques, existait une science profonde; différence essentielle entre eux et les pé-
dants de nos jours (Arciiimède, CRATf:s, Heraclite ;Empédoci.e, Tiialès, Anaxagore),
205. — Les pédants ne s'occupent que de meubler leur mémoire et à en faire pa-
rade, sans que bénéficient de ce qu'ils apprennent ni leur jugement, ni leur cons-
cience, 209. — Exemple de ce Romain qui se croj^ait savant, parce qu'il avait des
savants à ses gages, 211. — La science n'est utile qu'autant qu'elle nous devient
propre. Caractères distinctifs des vrais et des faux savants (Lucullus, Protagoras,
Adrien Turnebus), 213. — La science sans le jugement ne saurait porter fruit, peut-
être est-ce là le motif pour lequel nous la tenons comme une superfétation chez la
femme (François duc de Bretagne), 217. — Nos pères n'en faisaient pas grand cas;
et, chez ceux auxquels les dispositions naturelles pour en bénéficier font défaut,
elle est plus dangereuse qu'utile; la plupart des pédants de notre époque est dans
ce cas, parce qu'ils ne s'y sont adonnés que pour en tirer profit (Ariston de Chio),
217. — Les Perses s'appliquaient à apprendre la vertu à leurs enfants (Astyage et
Cyrus) ; les Lacédémoniens à les mettre en présence de la réalité, les instruisant
par l'exemple de ce qu'ils auraient à faire quand ils seraient devenus des hommes
(Agésilas), 221. — Différence entre l'éducation que recevaient les Spartiates et
celle que recevaient les Athéniens (les Lacédémoniens et Antipater, Agésilas et
Xénophon), 223. — Comment Socrate se joue d'un sophiste se plaignant de n'avoir
rien gagné à Sparte, 223. — Les sciences amollissent et efféminent les courages
(les Turcs, les Scythes, les Parthes, Tamerlan, les Goths en Grèce, Charles YIII
en Italie), 225.
CHAPITRE XXV.
De réducation des enfants, I, 227. — Montaigne déclare n'avoir que des
données assez vagues sur les sciences; en dehors de Plutarque et de Sénèque, .il
n'a guère d'auteurs qui lui soient familiers. Tout en traitant des sujets sur les-
quels il n'a que des connaissances superficielles, il se garde d'imiter ces trop nom-
breux écrivains qui, donnant dans une erreur trop commune, empruntent dans
une large mesure aux auteurs anciens, croyant ainsi en imposer à leurs lecteurs
(Chrysippe, Épicure, centons de Capilupus et de Juste Lipse), 227. — L'éducation
de l'enfant doit commencer dès le bas âge; il est difficile de préjuger par ses
premières inclinations de ce qu'il sera un jour, aussi ne faut-il pas y attacher
trop d'importance (Cimon, Thémistocle, Platon), 233. — La science convient sur-
tout aux personnes de haut rang; non celle qui apprend à argumenter, mais celle
qui rend habile au commandement des armées, au gouvernement des peuples, etc.,
235. — Le succès d'une éducation dépend essentiellement du gouverneur qui y
préside, lequel doit avoir du jugement, des mœurs plutôt que de la science, s'ap-
pliquer à aider son élève à trouver lui-même sa voie et l'amener à exposer ses
idées au lieu de commencer par lui suggérer les siennes (Socrate, Arcésilas),
236. — Chaque enfant est à instruire suivant le tempérament qui lui est propre;
appliquer à tous une mÇ'me méthode, ne peut donner pour le plus grand nombre
que de mauvais résultats, 237. — L'élève ne doit pas adopter servilement les opi-
nions des autres et n'en charger que sa mémoire; il faut qu'il se les approprie et
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. I, CH. XXV. — VOL. I. B.M
les rende siennes, 239. — Le profit de l'élude est de rendre meilleur. Ce qu'il faut
développer, c'est l'intelligence; savoir pai' cœur, n'est pas savoir. Tout ce qui se
présente aux yeux doit être sujet d'observation, 241. — Les voyages bien dirigés
sont particulièrement utiles; il faut les commencer de bonne heure, 243. — L'en-
fant gagne à être élevé loin des siens; il faut l'habituer aux fatigues, endurcir
son corps en même temps que fortifier son âme, 243. — En société, l'adolescent
s'appliquera plus à connaître les autres qu'à vouloir paraître; et, dans ses pro-
pos, il se montrera réservé et modeste, 245. — Il sera affectionné à son prince,
prêt à le servir avec le plus grand dévouement pour le bien public, mais mieux
vaut qu'il ne recherche pas d'emploi à la cour, 247. — On lui inspirera la sincé-
rité dans la discussion; il prêtera attention à tout, s'enquerra de tout, 247. — L'é-
tude de l'histoire est de première importance; supériorité de Plutarque comme
historien (JIaucellus, Alexandridas), 249. — La fréquentation du monde contri-
bue beaucoup à nous former le jugement (Socrate), 251. — Le monde doit être
notre livre d'étude de prédilection (Pythagore et les jeux olympiques), 253. — La
philosophie servant à diriger notre vie, est ce qui doit tout d'abord être enseigné
à l'homme quand il est jeune, 253. — Avant d'observer le cours des a.stres, il doit
observer ses propres penchants et s'attacher à les régler, 255. — Il pourra ensuite
se livrer aux autres sciences, les scrutant à fond au lieu de se borner à n'en ap-
prendre que quelques définitions vides de sens, 257. — La philosophie, dégagée de
l'esprit de discu.ssion et des minuties qui la discréditent trop souvent, loin d'être
sévère et triste, est d'une étude agréable (Démétrius le grammairien et Héracléox
DE Mkoare, Bradamante et Angélique), 257. — La vertu est la source de tous les
plaisirs de l'homme par cela même qu'elle les légitime et les modère, 261. — L'é-
ducation adonnera l'enfant ne doit pas se régler d'après le rang des parents dans
la société, mais d'après ses propres facultés, 261. — La philosophie est de tous
les âges: trop de science abêtit (Aristote et Alexandre le Grand, Épicure et Meni-
CEus, Carnéade), 263. — Toutes les circonstances, même le jeu, pz'êtent à l'étude
de la philosophie (Socrate), 265. — Le dressage du corps chez l'enfant, doit être
mené de front avec celui de l'âme, 265. — L'étude doit lui être rendue attrayante,
et tout procédé violent pour l'y astreindre être banni, 267. — L'homme ne doit se
singulariser en rien ; être capable de se conformer aux usages de son milieu quel
qu'il soit, mais n'aimer à faire que ce qui est bien (Germanicus, Callisthène et
Alexandre le Grand, Alcibiade chez les Perses et les Lacédémoniens, Aristippe),
269. — C'est par ses actes qu'on jugera du profit qu'un jeune homme a retiré de
l'éducation qu'il a reçue (Platon, IIéraclide du Pont, Diogène et Hégésias, Zeuxi-
DAMUs), 271. — Ce qu'il saura bien, il arrivera toujours à l'exprimer suffisamment;
la connaissance des choses importe plus que les mots pour les rendre (Cléomène
et les AMBASSADEURS de Samos, deux architectes d'Athènes, Cicéron et Caton), 273.
— Dans un poème, l'idée et le vers sont deux choses essentiellement distinctes
(Ménandre, Ronsard, du Bellay), 275. — Les subtilités sophistiques qui s'ensei-
gnent dans les écoles sont à mépriser; un langage simple est à rechercher (Aris-
tippe, Chrysippe, Aristophane le grammairien et Épicure, caractéristiques du
langage chez les Athéniens, les Lacédémoniens et les Cretois, Philologues et
LoGOPHiLEs), 277. — Comment Montaigne apprit le latin et le grec; causes qui
empêchèrent ce mode d'instruction de porter tous ses fruits, 281. — Comment
naquit chez lui le goût de la lecture, 285. — Les jeux et les exercices publics sont
utiles à la société, 287.
CHAPITRE XXVI.
C'est folie de juger du vrai et du faux avec notre seule raison, I,
289. — L'ignorance et la simplicité se laissent facilement persuader; mais si l'on
est plus instruit, on ne veut croire à rien de ce qui paraît sortir de l'ordre natu-
rel des choses, 289. — Et cependant, autour de nous, tout est prodige, et l'habi-
tude seule nous empêche de tout admirer (Chilon), 291. — S'il est des choses que
l'on peut rejeter, parce qu'elles ne sont pas avancées par des hommes qui peuvent
faire autorité, il en est de très étonnantes qu'il faut au moins respecter, lorsqu'el-
les ont pour témoins des personnes dignes de notre confiance (Froissart, Plu-
B.12 ESSAIS DE MONTAIGNE.
TARQUE, CÉSAR, Plixe, Bolchet, S. AiGLSTix), 293. — En matière de religion, ce
n'est pas à nous à décider ce que l'on peut ou non concéder aux ennemis de la
foi, 295.
CHAPITRE XXVII.
De ramitié, 1,297. —Le discours de la Boétie sur la servitude volontaire, a été
le point de départ de l'amitié qui l'unit si étroitement à Montaigne, 297. — L'amitié
vraie est le sentiment le plus élevé de la société; il est es.sentiellement différent
des autres affections qui s'y rencontrent communément et en ont l'apparence, 299.
— Toute contrainte exclut l'amitié; c'est ce qui fait que les rapports entre les
pères et les fils revêtent un autre caractère : de même entre les frères que divisent
souvent des questions d'intérêt (Aristippe), 299. — Entre hommes et femmes, dans
le mariage comme en dehors, un autre sentiment prédomine et l'amitié ne saurait
y trouver place, 301. — Les unions contre nature admises chez les Grecs y tendaient
parfois (Plaidoyer à ce sujet des philosophes de l'Académie; Achille et Patrocle,
Harmodius et Aristogiton), 303. — Caractère essentiel de l'amitié parfaite; elle ne se
raisonne pas et deux âmes, unies par ce sentiment, n'en font qu'une (La Boétie et
Montaigne, Tiberius Gracchus et Blosius), 307. — Dans les amitiés communes, il
faut user de prudence et de circonspection (Chilox, Aristote),311. — Entre amis vé-
ritables, tout est commun; et, si l'un est assez heureux pour pouvoir donner à son
ami, c'est celui qui donne, qui est l'obligé (Diogène le philosophe, testament d'Eu-
DAMiDAS et Aréthée le Corinthien), 311. — Aussi, dans l'amitié véritable, les deux
amis ne s'appartenant plus, ce sentiment est exclusif chez eux et ils ne sauraient
l'étendre à une personne tierce, 313. — Dans les autres relations que l'on peut
avoir, peu importent d'ordinaire le caractère, la religion, les mœure des personnes
avec lesquelles on est en rapport; il n'en est pas de même en amitié, 315. — Re-
grets profonds qu'a laissés à Montaigne, jusqu'à la fin de ses joui-s, la perte de
son ami, 317. — Pourquoi Montaigne substitue au Discours sur la servitude volon-
taire de La Boétie, qu'il avait dessein de transcrire ici, la pièce de vers du même
auteur qu'il donne dans le chapitre suivant, 319.
CHAPITRE XXVin.
Vingt-netifs sonnets d'Etienne de la Boétie, I, 319.
CHAPITRE XXIX.
De la modération, I, 345. — D faut de la modération, même dans l'exercice
de la vertu (Horace, S. Paul, Henri III, la mère de Pausaxias, le dictateur Postl'l-
Mius), 345. — La philosophie elle-même poussée à l'extrême, comme toutes autres
choses, est préjudiciable (Calliclès), :^5. — Dans tous les plaisirs permis, entre
autres dans ceux du mariage, la modération est nécessaire (S Thomas, les Musul-
mans, ZÉNOBiE, Jupiter, les rois de Perse, Épaminondas et Pélopidas, Sophocle et PÉ-
RiCLÈs, l'empereur tElius Vérus), 347. — L'homme s'applique à aggraver les mi-
sères de sa condition : c'est avec des privations et des souffrances qu'on croit
guérir ou calmer les passions, c'est donner d'un excès dans un autre, 351. — C'est
à ce sentiment qu'il faut rattacher les sacrifices humains généralement pratiqués
dans les temps passés et qui subsistaient également en Amérique, lors de sa décou-
verte (Amurat, les peuples d'AMÉRiQUE, Fernand Cortez), 351.
CHAPITRE XXX.
Des Cannibales, I, 353. — Fausse opinion que l'on a quelquefois des peuples
que l'on dit « barbares . (Pyrrhus et les Romains, Flaminius, Publius Galba et les
Grecs), 353. — De la découverte de l'Amérique; il n'est pas probable que ce soit
l'Atlantide de Platon, ni cette terre inconnue où voulurent s'établir les Carthagi-
nois (V^iLLEGAiGNOs, SoLON, Aristote), 355. — Qualités à rechercher chez ceux qui
écrivent des relations de voyage ; chacun devrait exposer ce qu'il a vu et ne parler
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. I, Cil. XXX. — VOL. I. B.13
que de ce qu'il sait pertinemment, 357. — Pourquoi et combien à tort nous quali-
fions de « sauvages » les peuples d'Amérique, 359. — Description d'une contrée du
nouveau continent; manière do vivre de ses habitants, leurs demeures, leur
nourriture, leurs danses, leurs prêtres, leur morale (les Scythes), 363. — Comment
ils font la guerre ; pourquoi ils tuent et mangent leurs prisonniers ; en quoi ils
sont, en cela même, moins barbares que nous dans certains de nos actes (les Scy-
thes, les Portugais, les Stoïciens, les Gaulois à Alésia, les Gascons), 365. — Ils ne
se proposent, dans leurs guerres, que d'acquérir de la gloire sans rechercher d'a-
grandis-sement de territoire; tous leurs efforts auprès de leurs prisonniers ten-
dent à leur faire demander merci (les Hongrois), 369. — La vaillance consiste
essentiellement dans notre force d'àme et non dans notre supériorité physique;
aussi y a-t-il des défaites plus glorieuses que des victoires (Léonidas aux Thermo-
pyles, Iscnoi-AS contre les Arcadiens), 371. — Constance des prisonniers chez ces
peuplades sauvages, en présence des tourments qui les attendent, 373. — Les
femmes, dans cette contrée, mettent un point d'amour-propre à procurer d'autres
compagnes à leurs maris (les femmes d'Abraham et de Jacob, Livia femme d'Au-
guste, Stratonice), 373. — Opinions émises sur nos mœurs par trois de ces sauva-
ges venus visiter la France, 375. — Privilèges que confère chez eux la supréma-
tie, 377.
CHAPITRE XXXI.
Il faut apporter beaucoup de circonspection quand on se mêle
d'émettre un jugement sur les décrets de la Providence, I, 377. — On
ne croit à rien si fermement qu'aux choses qui ne peuvent être soumises au rai-
sonnement, 377. — Pour appuyer la vérité de la religion chrétienne, il ne faudrait
jamais apporter en preuve le èuccès de telle ou telle entreprise; c'est donner ma-
tière à toutes sortes de contestations (combats de la Roche-Abeille, de Montcontour
et de Jarnac; bataille de Lépante, Arrius et le pape Léon, Héliogabale, S. Irénée),
379. — Les événements sont dus à des causes que Dieu seul connaît et qu'il n'est
pas donné à l'homme de pénétrer, 381.
CHAPITRE XXXII.
Les voluptés sont à fuir, même au prix de la vie, I, 381. — Abandon-
ner la vie, quand elle est misérable et tourmentée, n'a rien que d'ordinaire et na-
turel ; mais se donner la mort a;U milieu de toutes les prospérités et pour se sous-
traire aux joies de ce monde et de la volupté est plus singulier (Sénèque et Lucilius,
Épicure et Idoménée; S. Hilaire,, sa fille Habra et sa femme), 381.
CHAPITRE XXXIII.
La fortune marche souvent de pair avec la raison, I, 385. — La
fortune agit dans les conditions les plus diverses : parfois elle se substitue à la
justice (le duc de Valentinois et le pape Alexandre VI), 385. — Elle détermine
les événements les plus bizarres qui vont jusqu'à tenir du miracle (le Sieur de
LiQUES, les deux Contantin, Clovis à Angoulême, le roi Robert près d'Orléans, le
capitaine Rense à Erone), 385; — opère des cures inespérées (Jason de Phèrcs),
387; — produit dans les arts, dans nos affaires les effets les plus inattendus (le
peintre Protogène, Isabelle reine d'Angleterre, Timoléon, les deux Ignatius), 387.
CHAPITRE XXXIV.
Une lacune de notre administration, I, 389. — Utilité dont serait dans
chaque ville un registre public où chaque habitant pourrait insérer des annon-
ces et des avis, proposer ce qu'il veut vendre ou acheter, etc. (Lilius Gregorius
GiRALDi et Sébastien Chasteillon), 389. — Intérêt que présenterait également la
tenue dans chaque famille d'un livre où seraient consignés, jour par jour, les pe-
tits événements qui l'intéressent : mariages, naissances, décès, voyages, nouvelles
bonnes et mauvaises, etc., 391.
B.14 ESSAIS DE MONTAIGNE.
CHAPITRE XXXV.
De l'habitude de se vêtir, I, 393. — La nature nous a-t-elle formés pour
être vêtus? Dans des contrées où cependant le froid est rigoureux, il y a des na-
tions, comme des individus, qui se sont accoutumés à vivre nus ou presque nus
(les PEUPLADES d'Amérique, nos paysans, le fou du duc de Florence, le roi Massi-
NissA, l'empereur Sévère, les Égyptiens et les Perses, Ao.ésu.as, César, Anmbai., les
HABITANTS DU PÉGU, le Roi de Pologne), 393. — Du froid en certaines circonstances
(dans le Luxembourg, au Palus Méotides, les Romains et les Cap.thaginois à la ba-
taille près de Plaisance, en Arménie lors de la rcti*aite des Dix mille : arbres frui-
tiers enterrés pour les protéger du froid), 395. — Usages à la cour de l'empereur
du Mexique, 397.
CHAPITRE XXXVI.
Sur Gaton le Jeune, I, 399. — Il ne faut pas juger des autres d'après soi,
399. — Aujourd'hui la vei'tu n'est qu'un vain mot; on n'est vertueux que par
habitude, par intérêt ou par ambition (les Spartiates et Aristodème), 399. — 11
est des hommes qui cherchent à rabaisser les personnages éminents par leurs
vertus; il faudrait au contraire les offrir sans cesse comme des modèles à l'admi-
ration du monde (Caton d'Utique), 401. — Comment cinq poètes anciens ont
parlé de Caton; la vraie poésie nous transporte, mais ne peut s'analyser (Mar-
tial, Manilius, Lucain, Horace et Virgile), 403.
CHAPITRE XXXVII.
Une même chose nous fait rire et pleurer, I, 405. — Un vainqueur
pleure souvent la mort d'un vaincu, et ce ne sont pas toujours des larmes faus-
ses (Antigone vis-à-vis de Pyrrhus, René de Lorraine vis-à-vis de Charles de Bour-
gogne, le comte de Montfort vis-à-vis de Charles de Blois, César vis-à-vis de
Pompée), 405. — Des passions multiples et souvent contraires subsistent en effet
simultanément dans le cœur de l'homme (Néron ; Xerxès), 407. — D'ailleurs nous
n'envisageons pas sans cesse une même chose sous un même aspect (Timo-
léon), 409.
CHAPITRE XXXVIII.
De la solitude, I, 411. — Les méchants sont nombreux; nul doute que leur
société ne soit funeste, c'est un motif de rechercher la solitude (Bias, I'Ecclésias-
tique, Albuquerque, Charondas, Antisthène), 411. — Ce que la plupart des hommes
y recherchent, c'est d'y vivre loin des affaires et dans le repos; mais elle ne nous
dégage ni de tous soins domestiques, ni surtout de nos vices (Socrate), 413. —
Affranchir notre âme des passions qui la dominent, la détacher de tout ce qui est
en dehors de nous, c'est là la vraie solitude ; on peut en jouir au milieu des villes
et des cours (Stilpon, Antisthène, l'évêque Paulin), 415. — Les hommes se passion-
nent pour mille choses qui ne les concernent pas, 417. — La retraite convient
surtout à ceux qui ont consacré la majeure partie de leur vie au service de l'hu-
manité (Thalès), 419. — Il faut être capable de faire abstraction de toutes nos
obligations, et, faisant un retour sur nous-mêmes, être exclusivement à nous;
tempéraments qui s'y prêtent le mieux ; comment y arriver, 419. — Il faut user
de ce que nous avons, mais sans nous en faire une nécessité, et être prêts à
nous en passer, si la fortune vient à nous en priver, 421. — Occupations qui con-
viennent davantage dans la vie solitaire (Cyrus, Démocrite), 423. — Pline et Cicé-
ron conseillent de mettre à profit la retraite pour se faire un nom par quelque
œuvre littéraire, 423. — Cas particulier de ceux qui, par dévotion, recherchent la
vie solitaire, 425. — Combien peu est raisonnable le conseil de Pline et de Cicé-
ron, 425. — Études et soins auxquels on peut se livrer dans la solitude; sciences
dont, à ce moment, il ne faut pas s'embarrasser l'esprit, 427. — La gloire et le re-
pos sont choses incompatibles (Épicure et Sénèque), 427.
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. I, CH. XXXIX. — VOL. I. B.15
CHAPITRE XXXIX.
Considérations sur Cicéron, I, 431. — Cicéron et Pline le Jeune étaient des
ambitieux pleins de vanité; ils ont été jusqu'à solliciter les historiens de faire
l'éloge de leurs faits et gestes, 431. — Même dans leure lettres intimes, ils ont re-
cherché l'élégance du style; elles semblent n'avoir été écrites que pour être pu-
bliées (XÉNOPHON et César; Scipion, L-«lius et Térence), 431. — Les rois et les
grands ne doivent pas tirer vanité d'exceller dans les arts et les sciences; seuls
les talents et qualités qui importent à leur situation sont susceptibles de leur
faire honneur (Cyrus, Charlemagne, Philippe et Démosthène, Philippe et Alexan-
dre, Iphicrate, Antisthène), 433. — Dans ses Essais, Montaigne dit avoir inten-
tionnellement évité de développer les sujets qu'il traite ; il se borne à les esquis-
ser, sans même se préoccuper de la forme sous laquelle il les présente, 435. —
Combien sont différents de Pline et de Cicéron, Épicure et Sénèque qui criti-
quent cette soif de célébrité dans un style moins brillant, mais plus sensé, 437.
— Raisons qui font que Montaigne préfère la forme qu'il donne à ses Essais au
genre épistolaire pour lequel il avait cependant des dispositions particulières, 437.
— Rien de ridicule comme les formules oiseuses de respect et d'adulation qu'on
prodigue de nos jours dans la correspondance privée; comment lui-même procé-
dait (Annibal Caro, Montaigne), 439.
CHAPITRE XL.
Le bien et le mal qui nous arrivent ne sont souvent tels que par
l'idée que nous nous en faisons, I, 441. — La diversité des opinions sur les
biens et les maux est grande; la mort elle-même n'apparaît pas à tous comme un
mal, 441. — Des gens plaisantent sur son seuil même, en allant au supplice, etc.
(Théodore et Lysimaque, les habitants d'ARRAs; plaisanteries de condamnés con-
duits au supplice, de bouffons à leurs derniers moments), 443. — Dans les Indes,
les femmes s'ensevelissent ou se brûlent vivantes sur le corps de leurs maris;
fréquemment les vicissitudes de la guerre amènent des populations entières à se
donner volontairement la mort (au royaume de Narsingue, le peuple de Milan,
les Xanthiens, les Grecs lors des guerres médiques), ^147. — Souvent l'homme sa-
crifie sa vie à la consenation de ses opinions religieuses (les Turcs, les Juifs
sous Jean et Emmanuel de Portugal, les Albigeois), 447. — Parfois la mort est re-
cherchée comme constituant un état préférable à la vie ; elle ne saurait donc
être un sujet de crainte (Pyrrhon), 449. — La douleur est tenue par certains
comme le plus grand des maux ; il en est qui nient sa réalité, tandis que d'au-
tres au contraire, mentant à eux-mêmes, prétendent faussement ne redouter
dans la mort que la douleur qui d'ordinaire l'accompagne (Aristippe, Hiéronyme,
PosiDONius et Pompée, Saint Augustin), 451. — La réalité de la douleur n'est pas
douteuse, c'est même le propre de la vertu de la braver, 453. — Plus elle est vio-
lente plus elle est coui-te, et plus il est possible à l'homme d'en diminuer l'acuité
en réagissant contre elle, ce que nous permettent de faire les forces de l'âme,
et ce à quoi nous parvenons tous sous l'empire de sentiments divers (les femmes
en couches, en particulier celles des Suisses et les Bohémiennes ; la femme de Sabinus,
des enfants de Lacédémone, Mutius Scevola, les gladiateurs, les femmes par coquet-
terie, une FILLE de Picardie, les Turcs, S. Louis, Guillaume dernier duc de Guyenne,
Foulques comte d'Anjou, Q. Maximus, M. Caton, L. Paulus, Térez roi de Thrace,
les Espagnols, austérité du cardinal Borromée, accident funeste que certains sup-
portent sans peine), 455. — Est-ce un bien ou non d'avoir beaucoup d'enfants (Mon-
taigne, Thalès)? 465. — L'opinion que nous en avons fait seule le prix des cho-
ses, 465. — Comment Montaigne réglait ses dépenses alors qu'il n'était pas encore
maître de ses biens, 467. — L'indigence peut subsister chez le riche comme elle
existe chez le pauvre, 469. — Être riche est un surcroît d'embarras; on est bientôt
en proie à l'avarice et à ses tourments (Montaigne, César, Denys et un Syracu-
sain), 469. — Vivre au jour le jour suivant ses revenus, sans trop se préoccuper
de l'imprévu, est le parti le plus sage (Féraulez seigneur Persan, un vieux pré-
B.16 ESSAIS DE MONTAIGNE.
lat), 471. — Les bicMis ne sont donc pas plus réels que les maux; les uns comme
les autres ne sont tels que par l'appréciation que nous en portons, 475. — En
somme, il faut savoir se commander et, finalement, il nous est toujours loisible
de mettre un terme à ce que nous envisageons comme des maux, quand ils nous
deviennent intolérables, 475.
CHAPITRE XLI.
L'homme n'est pas porté à abandonner à d'autres la gloire qu'il
a acquise, I, 477. — Le vain désir d'acquérir de la réputation nous fait renon-
cer à des biens plus réels, tels que le repos, la santé, etc. ; et nous porte même à
sacrifier notre vie. La gloire n'est qu'une illusion, une ombre, et cependant on
voit jusqu'à des philosophes qui, tout en la décriant, la recherchent, 477. — On
trouve rarement des hommes qui abandonnent aux autres leur part de gloire;
exemples de cette abnégation de soi-même (Catulus Luctatius, Antoine de Lève
et Charles-Quint, Archélonide mère de Brasidas, Edouard III d'Angleterre, L^ïlius
et SciPioN, 'Théopompe roi de Sparte, l'évèque de Beauvais à la bataille de Bouvi-
nes), 479.
CHAPITRE XLII.
De l'inégalité qui règne parmi les hommes, I, 481 . — Extrême diffé-
rence que l'on remarque entre les hommes; on ne devrait les estimer qu'en rai-
son de ce qu'ils valent par eux-mêmes et après les avoir dépouillés de tout ce
qui n'est pas eux; c'est par leur àme qu'il faut les juger, 481. — De vaines appa-
rences extérieures distinguent seules le roi du paysan, le noble du roturier, etc.
Que sont les l'ois? des acteurs en scène, des hommes plus méprisables quelquefois
que le dernier de leurs sujets, soumis aux mêmes passions, aux mêmes vices (les
ROIS de Thrace, Alexandre le Grand et ses flatteurs, Antigone et le poète Hermo-
dore), 485. — Le bonheur est dans la jouissance et non dans la possession; or
peuMl jouir des avantages de la royauté celui qui ne sait apprécier son bonheur,
celui dont l'esprit est borné, l'âme grossière, ou qui est tourmenté par des dou-
leurs physiques? 487. — Combien le sort des rois est à plaindre; leurs devoirs
constituent une lourde charge (Séleucus, Cyrus), 489. — La satiété leur rend tous
les plaisii-s insipides (le roi Hiéron, le Grand Seigneur), 489. — Ils sont constam-
ment sous les yeux de leurs sujets qui les jugent avec sévérité (le roi Hiéron; le
roi Alphonse), 491. — La vie d'un seigneur retiré dans ses terres, loin de la cour,
est bien préférable, 493. — Les rois ne connaissent pas l'amitié, la confiance ; ils
n'ont autour d'eux que des flatteurs et des hypocrites (Hiéron, l'empereur Julien),
493. — Les commodités effectives dont ils jouissent leur sont communes avec les
autres hommes (l'empereur Dioclétien), 495. — Gouvernement idéal (Anacharsis),
495. — Une folle ambition les porte souvent à ravager le monde lorsqu'ils pour-
raient, sans effort, se procurer le repos et les vrais plaisirs (Cinéas et Pyr-
rhus), 495.
CHAPITRE XLIII.
Des lois somptuaires, I, 497. — Interdire l'usage de l'or et de la soie à
certaines classes de la société dans le but d'enrayer le luxe, c'est aller à rencon-
tre de ce que l'on se propose, 497. — L'exemple des grands fait loi, c'est pour-
quoi ils devraient se distinguer par leur simplicité (Zeleucus), 497. — Bizarrerie
et incommodité de certaines modes, 499. — Même dans les modes, les change-
ments sont dangereux pour la jeunesse (Platon), 501.
CHAPITRE XLIV.
Du sommeil, I, 501. — Sans doute le sage peut commander à ses passions;
mais il n'est pas impassible et il ne peut les empêcher d'émouvoir son àme ;
aussi, faut-il regarder comme très extraordinaires ces hommes qui, dans les plus
importantes circonstances de leur vie et lorsqu'ils devraient éprouver les plus
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. I, Cil. XLIV. — VOL. I. B.17
vives agitations, ont pu se livrer au sommeil (Alexandre le Grand, l'empereur
Othon, Caton d'Utiqle, le jeune Marius), 501. — Le sommeil est-il nécessaire à la
vie (Persée, Pline, Hérodote, Éplménide), 505?
CHAPITRE XLV.
Sur la bataille de Dreux, I, 505. — H importe peu que, dans une action
de guerre, un chef ne fasse pas tout ce que commande le devoir ou la bravoure,
pourvu qu'il obtienne la victoire; le succès est le seul objectif à poursuivre (le
duc de Guise, Puilopoemen, Agésu.as), 505.
CHAPITRE XLVI.
Des noms, I, 50y. — 11 est des noms qui sont pris en mauvaise part; cer-
tains sont, par tradition, plus particulièrement usités dans telle ou telle famille de
souverains, d'autres plus ou moins répandus chez tel ou tel peuple (noblesse ré-
partie en un festin suivant la ressemblance des noms; mets servis dans l'ordre
alphabétique), 509. — 11 est avantageux de porter un nom aisé à prononcer et
qui se retient facilement, 509. — Influence des noms (un jeune homme de Poitiers;
Pvthagore, les Calvinistes), 511. — Il serait bon de ne jamais traduire les noms
propres et de les laisser tels qu'ils sont écrits et se prononcent dans leur langue
d'origine (Jacques Amyot), 511. — Inconvénient qu'il y a à prendre, comme cela
se fait en France, des noms de terre; la tendance à falsifier les généalogies s'en
trouve favorisée, 513. — Les armoiries passent également des uns aux autres (Ar-
moiries de Montaigne), 515. — On se donne bien de la peine pour illustrer un
nom qui souvent sera altéré par la postérité; un nom, après nous, n'est en (in de
compte qu'un mot et un assemblage de traits sans objet (Duguesclin), 515. —
Parfois, de notre vivant même, ce n'est qu'un pseudonyme (Nicolas Denoist, Sué-
tone, Bayard, Escalin), 515. — A qui le souvenir que les noms consacrent, s'ap-
plique-t-il parmi le grand nombre d'êtres connus et inconnus de l'histoire, qui
na sont plus et qui ont porté le môme nom ? 517. — Qu'importe après eux aux
grands hommes la gloire de leur nom (Épaminondas, Scipion l'Africain)? 5-17.
CHAPITRE XLVII.
Incertitude de notre jugement, I, 519. — En, maintes occasions on peut
être incertain sur le parti à prendre, par exemple : Faut-il poursuivre à outrance
unennemi vaincu? L'adversaire peut regarder comme un témoignage de faiblesse
que vous ne poursuiviez pas le cours d'un succès; et, d'autre part, c'est quelquefois
une imprudence qui peut devenir fatale, le désespoir pouvant donner de nou-
velles forces au vaincu (le duc d'ANJOu à Montcontour, les Espagnols à S.-Quen-
tin. Pompée à Oricum, Sylla et Marius pendant la guerre sociale, M. de Foix à
Ravenne, les Lacédémoniens, Clodomir, roi d'Aquitaine), 519. — Faut-il permettre
que les soldats soient richement armés? Leur courage en est quelquefois exalté;
ils sont plus fiers et ont davantage le désir de conserver des armes précieuses,
mais on présente à l'ennemi un appât de plus (les peuples d'Asie, les Romains et
les Sammtes, réponse d'AsNiBAL à .\ntiochus, Lycurgue), bil. — Faut-il permettre
aux soldats de braver l'ennemi par leurs propos au moment d'en venir aux
mains? S'il est bon do maintenir en eux l'idi-e de leur supériorité sur leurs ad-
versaires, il peut arriver aussi que les injures rendent le courage à ceux qui l'a-
vaient perdu (V'^iTELi.ius et Othon), 523. — Un général doit-il, pour le combat, se
déguiser pour n'être pas reconnu des ennemis? Cette ruse a quelquefois du suc-
cès, mais elle expose le chef à être méconnu de ses troupes (le roi Pyrrhus,
Alexandre, César, Lucullus, Agis, Agésilas, Gylippe), 523. — Est-il préférable au
combat de demeurer sur la défensive ou de prendre l'offensive? D'une part celui
qui attend en position sent faiblir son courage; mais, de l'autre, en se portant à
l'attaque, on risque de se désagréger et d'épuiser ses forces dans la course finale
(bataille de Pharsai.e, Cléarque à Cunaxa), 525. — Vaut-il mieux attendre l'ennemi
essais de MONTAIGNE. — T. IV. 2
B.18 ESSAIS DE MONTAIGNE.
chez soi ou aller le combattre chez lui? Chez soi, le pays est foulé par les deux
partis, ses ressources sont annihilées, les habitants molestés, un échec peut les
conduire à prendre de fâcheuses résolutions ; par contre, on y dispose de tout, il
vous est favorable et connu dans tous ses détails, les communications de l'ennemi
y sont difficiles, il est obligé de se garder de toutes parts, en cas de revers la
retraite peut lui être coupée (invasion de la Provence par les Espagnols sous
François I", Scipion et A nnibal, les Athéniens en Sicile, Agathocle en Afrique),
525. — Cette même indécision, que nous relevons dans des circonstances ayant
trait à la guerre, existe dans toutes les déterminations, de quelque nature qu'elles
soient, que nous pouvons avoir à prendre, 529.
CHAPITRE XLVIII.
Des chevaux d'armes, I, 529. — Chez les Romains, les chevaux avaient
différents noms suivant l'emploi auquel ils étaient destinés ; usage simultané à la
guerre de deux chevaux chez eux et chez les Numides, 529. — Il y a des che-
vaux dressés à défendre leurs maîtres, à se précipiter sur ceux qui les attaquent
(Artibius général Persan, Charles VIII à Fornoue, chevaux des Mameluks), 531.
— Particularités relatives aux chevaux d'Alexandre et de César, 531. — L'exercice
du cheval est salutaire, 533. — Pour combattre, les Romains faisaient parfois
mettre pied à terre à leurs gens à cheval; aux peuples nouvellement conquis
ils étaient leurs armes et leurs chevaux, 533. — Nos ancêtres combattaient généra-
lement à pied afin de moins compromettre leurs chances de succès, 533. — Les
armes les plus courtes sont les meilleures, une épée vaut mieux qu'une arque-
buse, 535. — Aussi faut-il espérer qu'on abandonnera cet usage des armes à feu,
pour reprendre les armes anciennes ; ce qu'était la phalarique, 535. — Autres
armes des anciens qui suppléaient à nos armes à feu, 537. — Plusieurs peuples
ont excellé dans l'art de manier les chevaux, 537. — Dans certains pays les mules
et mulets sont considérés comme des montures déshonorantes, dans d'autres
comme fort honorables (les chevaliers de I'Echarpe, les Abyssins), 539. — Com-
ment en usaient les Assyriens avec leurs chevaux, 539. — Dans des cas de néces-
sité, les chevaux ont servi à nourrir les hommes (les Sarmates, les Cretois, les
Turcs, les Tartares, les Moskovites), 539. — Effet produit par l'apparition des
chevaux, lors de la découverte de l'Amérique, sur les peuplades qui n'en avaient
jamais vu, 541. — Montures diverses en usage dans les Indes, 541. — Comment,
au combat, accroître l'impétuosité des chevaux (Rutilianus contre les Sarmates,
Flacgus contrôles Celtibériens), 541. — Autres particularités relatives au cheval
(Acte de vassalité du duc de Moskovie vis-à-vis des Tartares, chevaux éventrés
pour se garantir du froid, Bajazet fait prisonnier, chevaux déconsidérés par la
perte de leur crinière et la mutilation des oreilles, manière de combattre des
Dahes), 541. —Aucun peuple ne surpasse les Français pour leur adresse et leur
grâce à cheval; exemples d'habileté hippique (M. de Carnavalet, tours de force
équestres, le prince de Sulmone), 543.
CHAPITRE XLIX.
Des coutumes des anciens, I, 545. — Il est naturel de tenir aux usages de
son pays ; cela rend plus surprenant encore l'instabilité des modes en France,
545. _ Coutumes diverses des anciens, en particulier des Romains; ils combat- -
talent l'épée d'une main, l'autre enveloppée dans un pan de leur manteau ; ils se
baignaient avant leurs repas, mangeaient couchés, s'épilaient (Caton après la ba-
taille de Pharsale), 547. — Comment ils se saluaient (Pasiclès le philosophe), 547.
— Usage auquel ils employaient les éponges; récipients disposés dans les rues
pour les besoins des passants, 549. — Ils faisaient rafraîchir le vin avec de la neige,
se servaient de réchauds et avaient pour les voyages des cuisines portatives, 549.
— Nous n'arrivons pas plus à les égaler dans leurs débauches que dans leurs
vertus, 549. — Être nommé avant ou après un autre n'était d'aucune importance
chez les Romains au point de vue de la prééminence, 551. — Les dames Romaines
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. I, CIL XLIX. — VOL. I. B.19
aux bains, 55L — Les passages en bateau se payaient au départ, 55L — Les
femmes couciiaient du côté de la ruelle du lit; elles portaient le deuil en blanc
(César et Nicomède, les dames à Argos et à Rome), 551.
CHAPITRE L.
Sur Démocrite et Heraclite, I, 553. — En toutes choses le jugement est
nécessaire; Montaigne, dans les Essais, en fait une application constante. Dans
la composition de cet ouvrage, il ne s'astreint à aucune règle, tout sujet lui est
bon, et il l'effleure ou l'approfondit plus ou moins, suivant l'idée qui lui vient, 553.
— Dans n'importe quel acte de la vie le caractère de l'homme se révèle, et à
toutes choses notre àme imprime un cachet personnel; aussi peut-on juger les
hommes dans leurs petites comme dans leurs plus grandes actions, à table, au
jeu, comme à la tête des armées: au jeu d'échecs par exemple, si ridicule par la
contention d'esprit qu'il nécessite pour un passe-temps, ont part toutes les facul-
tés de notre àme (Cicéron, Caton, Socrate, Alexandre), 555. — Démocrite riait,
Heraclite pleurait de nos sottises; le premier était dans le vrai, il faut rire de ce
que l'on méprise et non s'en affliger (Diogène, Timon le Misanthrope, Statilils et
Brutus, Hégéslas, Théodore), 559.
CHAPITRE LI.
Combien vaines sont les paroles, I, 559. — La rhétorique est l'art de
tromper (Thucydide et Périclès), 559. — Les républiques bien ordonnées ont tou-
jours fait peu de cas des orateurs; c'est surtout dans celles en décadence qu'a
fleuri l'éloquence (la Crète, Lacédémone, Athènes, Rhodes, Rome; Ariston, Socrate,
Platon; les Mahométans, les Athéniens; Pompée, César, Crassus, Llcullus, Lentu-
i.ts, Metelll's ; Volumnius), 559. — Ayant surtout action sur les masses, l'art de la
parole est moins en honneur dans les monarchies (Macédoine, Perse), 56L — Abus
qu'on en fait dans toutes les professions (le maître d'hôtel du cardinal Carafl'a,
les architectes, les grammairiens), 561. — Abus qui se produisent également dans
les titres pompeux que nous donnons à certaines charges et les surnoms glorieux
que nous attribuons à de médiocres personnages (Platon et I'Arétin), 563.
CHAPITRE LU. ^
Parcimonie des anciens, I, 565. — Exemples de la parcimonie avec laquelle
ont vécu certains personnages illustres de l'antiquité et de Rome en particulier
(Attilius Regulus, Caton l'ancien, Scipion Émilien, Homère, Platon, Zenon, Tibe-
Kius Gracchus), 565.
CHAPITRE LUI.
A propos d'une phrase de César, I, 565. — L'imperfection de l'homme est
démontrée par l'inconstance de ses désirs; à peine possède-t-il un bien, qu'il sou-
pire après un autre; il ne sait jamais jouir du bonheur présent (Lucien, Épicure,
César), 565.
CHAPITRE LIV.
Inanité de certaines subtilités, I, 567. — Certaines subtilités et les ta-
lents frivoles ne méritent pas d'être encouragés; il est plus facile qu'on ne pense
d'exceller en ce genre (certains poètes, I'homme au grain de millet), 567. — En
bien des choses les extrêmes se touchent; la peur et un courage excessif produi-
sent parfois en nous les mêmes effets ph3^siques (dénominations de Sire, de Dame;
Don Sanche), 56!». — Aux prises avec la souffrance, la bêtise et la sagesse on arri-
vent aux mêmes fins, 571. — Les esprits simples sont propres à faire de bons chré-
tiens ot les esprits élevés des chrétiens accomplis; les esprits médiocres sont su-
jets à s'égarer (paysans, philosophes et demi-savants), 571. — La poésie populaire
est souvent comparable à la plus parfaite (villanelles), 573. — Ayant fait de vains
B.20 ESSAIS DE MONTAIGNE.
ciïorts pour soitir de la médiocrité, Montaigne pense que si ses Essais ne plaisent
ni aux esprits vulgaires ni aux intelligences supérieures, peut-être pourront-ils
se soutenir dans la région moyenne, 573.
CHAPITRE LV.
Des odeurs, I, 575. — On a dit de certaines personnes que les émanations
de leur corps avaient une odeur suave; mieux vaut encore ne rien sentir que
sentir bon (Alexandre le Grand, les femmes scythes), 575. — 11 est des personnes
extrêmement sensibles aux odeurs qui, pourtant, ne sont pas plus sujettes que les
autres aux maladies épidémiques qui se propagent par l'air (Montaigne, Socrate),
575. — Il semble que les médecins pourraient tirer plus de parti des odeurs, car
elles ont sur nous une action très sensible (emploi de I'encens dans les églises),
577. — En Orient on fait emploi des parfums dans l'apprêt des viandes (le roi de
Tunis), 577. — La puanteur est une des incommodités des grandes villes (Venise,
Paris), 577.
CHAPITRE LVI.
Des prières, 1,579. — Profession de foi de Montaigne: elle prime tout ce qu'il
peut dire ou écrire sur la religion, 579. — De toutes les piùères, l'oraison domi-
nicale est celle dont on devrait faire le plus fréquemment usage, 579. — Dieu ne
devrait pas être indifféremment invoqué à propos de tout; on devrait avoir l'àme
pure, quand on le prie, 579. — Mais le plus souvent on prie par habitude; on
donne une heure à Dieu, le reste au vice, 581. — Que peuvent valoir les prières
de ceux qui vivent dans une inconduite persistante; on en voit qui vont jusqu'à
sacrifier leurs convictions religieuses à leurs intérêts temporels, 583. — Quelle
prétention que de penser que toute croyance autre que la nôtre est entachée d'er-
reur, 583. — Les psaumes de David ne devraient pas être chantés indifféremment
par tout le monde, c'est les profaner; la Bible ne devrait pas dava-ntage se trou-
ver dans toutes les mains, elle ne doit être lue qu'avec respect et lorsqu'on y est
préparé, son étude n'amende point les méchants, 585. — Il n'y a pas d'entreprise
plus dangereuse qu'une traduction de la Bible en langage vulgaire, peu de per-
sonnes étant aptes à prononcer sur les difficultés d'interprétation (les Juifs, les
Musulmans), 587. — Une grande prudence est à apporter dans l'étude des questions
dogmatiques sur lesquelles, aujourd'hui, les femmes et même les enfants se mê-
lent de discuter (les mystères du temple de Delphes, les empereurs Théodose et
Andronic Comnène, les habitants de l'île Dioscohide, les Païens), 587. — On ne de-
vrait jamais mêler la théologie aux discussions philosophiques; c'est une science
à part, qui a son objet propre et sur laquelle les initiés seuls devraient être ap-
pelés à écrire (S. Jean Chrysostome), 589. — Le nom de Dieu ne devrait être in-
voqué que dans un sentiment de piété, 591. — Abus qu'on fait de la prière (anec-
dote contée par Marguerite de Navarre), 591. — Que de choses on demande à
Dieu, qu'on n'oserait lui demander en public et à haute voix (les Pythagoriciens,
Œdipe), 593. — On dirait que pour beaucoup, la prière n'est qu'une sorte de for-
mule cabaUstique pouvant faciliter l'accomplissement de nos désirs, 593.
CHAPITRE LVII.
De l'âge, I, 595. — Qu'entend-on par la durée naturelle de la vie de l'homme,
alors que tant d'accidents surviennent qui en interrompent le cours (Caton
d'Utique)? 595. — Mourir de vieillesse n'est pas un genre de mort plus naturel
qu'un autre et c'est la mort la plus rare de toutes, 597. — C'est un vice des lois
d'avoir retardé jusqu'à 25 ans l'âge auquel il est permis de gérer soi-même ses
affaires; dès l'âge de vingt ans, on peut le plus souvent augurer ce que nous se-
rons (Servius Tullius, l'empereur Auguste), 597. — On cite un bien plus grand nom-
bre d'hommes qui se sont distingués par de belles actions avant leur trentième
année, qu'on n'en cite qui se sont rendus célèbres après (Annibal, Scipion), 599. —
La vieillesse arrive promptenient ; aussi ne faudrait-il donner à l'apprentissage
de la vie, c'est-à-dire à l'éducation, que le temps strictement nécessaire, 599.
SOMMAIHE DES ESSAIS. LIV. II, r.Il. I. — VOL. I. B.21
LIVRE SECOND.
CHAPITRE I.
De l'inconstance de nos actions, I, 601. — On trouve dans l'homme tant
de contradictions, qu'on chercherait en vain à les expliquer (Marius le jeune,
BoNiFACE YIII, Néron), 601. — Tout homme a un caractère indéterminé (l'empe-
reur Auguste], 601. — Rien de plus ordinaire en nous que l'inconstance; à peine
l'antiquité nous offre-t-elle quelques hommes toujoui-s fermes dans leurs desseins,
cependant le caractère de la sagesse est la constance dans tout ce qui est juste et
bon (Sénèque, Démosthène), 601. — C'est toujours l'occasion qui fait les hommes
tels qu'ils nous apparaissent (fille de vertu équivoque qui tente de se tuer parce
qu'elle craint d'être violentée; soldat d'Antigone qui, venant à guérir d'une ma-
ladie, perd sa valeur; autre soldat devenu courageux pour avoir été dévalisé),
603. — Essentiellement variable, l'homme est tantôt humble, tantôt orgueilleux ;
un jour chaste, un autre jour débauché; avare et prodigue, etc. (le chef des
Janissaires de Mahomet II), 607. — Pour être véritablement vertueux, il faudrait
l'être dans toutes les circonstances de la vie ; autrement c'est à l'action et non à
l'homme que l'on doit des éloges (les Grecs, les Cimbres, les Celtibériens), 609. —
Peu d'hommes ont de belles qualités qui ne présentent des taches. La vaillance
même d'Alexandre le Grand n'en est pase.xempte; quoique extrême en son genre,
elle n'a pas toujours été parfaite et ne s'est pas étendue à tous ses actes, 609. —
Notre inconstance dans les diverses circonstances de la vie n'a rien qui puisse
surprendre, attendu que nul d'entre nous n'a de règle de conduite bien définie
(Sophocle, les Pariens et les Milésiéns), 611. — On ne saurait porter un jugement
sur les hommes d'après les actes isolés dont l'ambition, l'amour ou toute autre
passion ont pu les i-endre capables; pour les bien connaître, il faudrait pénétrer
profondément dans leur àme et les examiner longuement; devant une tâche aussi
difficile beaucoup, qui se mêlent de juger, devraient s'abstenir, 611.
CHAPITRE IL
De l'ivrognerie, I, 613. — Tous les vices ne sont pas de même gravité; il y
a entre eux des degrés, 613. — L'ivrognerie est un vice grossier qui n'exige pas,
comme d'autres, de l'adresse, du talent, du courage, 615. — Dans l'ivresse on
n'est plus maître de ses secrets. On a vu cependant quelques hommes conserver, en
cet état, le sentiment de leurs devoirs; mais d'autres, en pareille situation, ont pu
éprouver les plus grands outrages sans même en rien sentir (l'historien Josf:phe
et un ambassadeur, Auguste et Lucius Pison, Tibère et Cossus, Cimber, Cassius, les
Allemands, Attale et Pausanias, une villageoise des environs de Bordeaux), 015.
— Les anciens ont peu décrié le vice de l'ivrognerie; c'est en effet celui qui porte
le moins de dommage à la société, il est des plus faciles à satisfaire et dans les
mœurs de certains peuples (Socrate, Caton le Censeur, Cyrus), 617. — Les anciens
passaient les nuits à table et quelquefois les jours; nous avons tendance en France
à nous modérer sous ce rapport, mais nous nous dédommageons en nous adon-
nant davantage au libertinage, 619. — Portrait et caractère du père de Montaigne;
ce qu'il pensait de la chasteté des femmes, 619. — Boire est à peu près le dernier
plaisir qui demeure à la vieillesse. D'où vient l'usage de boire de grands verres
à la fin des repas (Anacharsis), 621. — Platon interdit le vin aux adolescents tout
en le permettant aux hommes faits; encore devraient-ils s'en abstenir lorsqu'ils
sont à la guerre ou dans l'exercice de fonctions publiques; son abus est nuisible
aux vieillards (les Carthaginois, Stili'on, Arcésilas), 623. — Le vin peut-il triom-
pher de la sagesse? Pour répondre, il ne faut que réfléchir combien est grande la
faiblesse humaine (Lucrèce, Virgile, Plutarque), 625. — Les faits d'impassibilité
au milieu des tourments que nous fournissent les philosophes et aussi les raart3Ts
chrétiens, sont des effets de surexcitation due à un enthousiasme frénétique (Mé-
trodore, Anaxarque, les martyrs), 627. — Cette surexcitation apparaît également
B.22 ESSAIS DE MONTAIGNE.
dans les propos tenus sous l'effet d'idées fixes; nous la constatons aussi chez les
guerriers, les poètes chez lesquels l'àme peut, sous cette influence, s'élever au-
dessus d'elle-môme (Antisthène, Sextius, Épicuke, Akistote, Platon), 627.
CHAPITRE III.
A propos d'une coutume de l'île de Céa, I, 629. — Il y a des accidents
pires que la mort; celui qui ne la craint pas, brave toutes les tyrannies et toutes
les injustices (Damindas, Agis, un enfant de Lacédémone, les Lacédémoniens et An-
tipater, les Lacédémoniens et Philippe), 629. — C'est un bienfait de la nature que
d'avoir mis constamment, comme elle l'a fait, la mort à notre portée, et, par elle,
de nous avoir faits libres d'accepter ou de refuser l'existence qui nous est faite.
Arguments en faveur du suicide (Boiocalus, le grammairien Servius, les Stoïciens,
Hégésias, Diogène et Speusippe), 631. — Objections contre le suicide; c'est une lâ-
cheté de fuir l'adversité; c'est aller contre les lois de la nature que de ne pas sup-
porter l'existence telle qu'elle nous l'a faite (Regulus et Caton, Martial, Lucain,
Platon), 633. — Pour ceux qui admettent comme licite de se donner la mort,
dans quel cas est-on fondé à user de cette faculté? Tant que demeure un reste
d'espérance on ne doit pas disposer de sa vie, et les revirements de la fortune
sont tels qu'il n'y a jamais lieu de désespérer (les vierges de Milet, Therycion et
Cléomène, Josèphe, Cassius et Brutus, le duc. d'Enghien à Cérisoles), 637. — Cepen-
dant des maladies incurables, d'irrémédiables infortunes peuvent autoriser une
mort volontaire (Démocrite chef des Étohehs, Antinous et Theodotus, un Sicilien
à Goze, les femmes juives lors de la persécution d'Antiochus, subterfuge employé
par sa famille vis-à-vis d'un criminel, Scribonia et son neveu Libo, mort coura-
geuse de Razias lors de la persécution de Nicanor), 639. — Elle est glorieuse chez
les femmes qui n'ont d'autre moyen de conserver leur honneur, ou auxquelles il
a été ravi par la violence, ce dont beaucoup pourtant finissent par prendre leur
parti (Pelagia et Sopiironia, une femme de Toulouse, Clément Marot), 641. — Les
raisons les plus diverses ont été cause de semblables résolutions (L. Aruntius,
Gr. Silvanus et Statius Proximus, Spargapizez, Bogès, Ninachetuen seigneur indien,
CoccEius Nerva), 643. — Femmes se donnant la mort pour encourager leurs maris
à faire de même (Sextilia femme de Scaurus, Paxea femme de Labeo, la femme de
Fulvius), 645. — Mort de Vibius Virius et de vingt-sept autres sénateurs de Ca-
poue, 645. — Inhumanité de Fulvius consul romain (Taurea Jubellius), 647. —
Indiens qui se brûlent tous dans une ville assiégée par Alexandre le Grand, 647.
— Fin tragique des habitants d'Astapa, ville d'Espagne assiégée par les Romains,
649. — Fin analogue des habitants d'Abydos; de semblables résolutions sont plus
facilement décidées par les foules que par les individus, 649. — Privilège accordé
du temps de Tibère aux condamnés à mort qui se la donnaient eux-mêmes,
649. — Parfois on se donne la mort dans l'espoir des félicités d'une vie future
(S. Paul, Cléombrote, Jacques du Chatel évêque de Soissons, les Indiens), 651. —
Plusieurs coutumes et institutions politiques autorisaient le suicide et s'y prê-
taient (à Marseille, dans l'île de Céa; mort courageuse, dans ces conditions, d'une
femme de haut rang de cette île qui s'empoisonne en public; chez une nation
hyperboréenne), 651. — Conclusion : de grandes douleurs et une mort misérable en
perspective sont les motifs les plus excusables qui peuvent nous porter à nous
ôter la vie, 653.
CHAPITRE IV.
A demain, les affaires, I, 655. — Amyot nous, a rendu un réel service on
traduisant Plutarque, ouvrage si plein d'enseignements; il ferait également œuvre
utile en traduisant Xénophon, 655. — Plutarque nous cite, entre autres, un
exemple de discrétion donné par Rusticus différant d'ouvrir un message de l'em-
pereur, pour ne pas troubler une conférence. 655. — Si trop de curiosité est ré-
préhensible, trop de nonchalance ne l'est pas moins et, de la part de quelqu'un
chargé des affaires publiques, ce peut avoir les plus graves inconvénients (M. de
Routières, Jules César, Arciivas tyran de Thèbes), 657. — Ligne de conduite qu'il
semble possible de tracer à ce sujet (Place consulaire), 657.
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. II, CU. V. — VOL. I. B.2a
CHAPITRE V.
De la conscience, I, 659. — On dissimule en vain; l'àmc se révèle toujours
par quelque côté (un gentilhomme du parti contraire à celui de Montaigne, Bessls),
059. — Qui va contre sa conscience, l'a contre lui ; le châtiment d'une faute com-
mence au moment même où elle se commet (Platon, Hésiode, Apollodoke, tyran
de Potidée, Épicure, Juvenal), 659. — Par contre, une bonne conscience nous
donne confiance (Scipion), 661. — Injustice et danger de la torture pour obtenir
des aveux des accusés (Publils Syrus, Philotas), 663. — Ce procédé d'information
est réprouvé par certaines nations que nous qualifions de barbares et qui, en cela,
le sont moins que nous (Bajazet 1"), 663.
CHAPITRE VI.
De l'exercice, I, 665. — Le raisonnement et la science ne suffisent pas pour
lutter contre les difficultés de la vie; il faut nous y exercer pour pouvoir en
triompher le cas échéant, 665. — Mais si l'on peut par l'expérience fortifier son
âme contre la douleur, l'indigence, etc., contre la mort, nous n'avons pas cette
ressource parce qti'on ne la souffre qu'une fois, 665. — Exemple mémorable de
.1. Canius qui, au moment de mourir, ne songeait qu'à observer l'impression qu'i
en pouvait ressentir, 667. — Il y a pourtant possibilité de se familiariser avec lai
mort et presque de l'essaj'er; le sommeil en est une image, les évanouissements
lui ressemblent plus encore, 667. — Comme tant d'autres choses, la mort produit
plus d'effet de loin que de près, 669. — Accident survenu à Montaigne qui lui
causa un long évanouissement, 669. — Ce qu'il éprouva pendant cette défaillance
et en reprenant ses sens, 671. — Ce fut pour lui une preuve de l'idée, qu'il s'était
faite depuis longtemps, que les affres de la mort sont les effets d'une désorgani-
sation à laquelle l'âme ne participe pas, 671. — L'agonie est un état analogue à
celui d'un homme qui ne serait ni tout à fait éveillé, ni complètement endormi,
673. — Au début de son accident Montaigne demeure anéanti, ses mouvements
comme ses réponses sont inconscients, seul règne en lui un sentiment de bien-
être qui le tient tout entier; à ce moment où la mort était si proche, sa béatitude
était complète, 675. — Peu à peu renaissant à l'existence, la mémoire lui revient,
et en même temps les souffrances l'envahissent et prennent une place prépondé-
rante, 677. — Si Montaigne s'est si longuement arrêté sur cet accident, c'est que
son but est de s'étudier dans toutes les circonstances de la vie, afin d'offrir aux
autres d'utiles documents (Pline l'Ancien), 677. — C'est à tort que l'on accuse de
vanité ceux qui se confessent publiquement et qui, en toute sincérité, montrent
à découvert leurs actes et leurs passions; nous sommes à nous-mêmes, pour qui
sait s'observer, une précieuse source d'enseignements (Socrate), 679. — Il faut
reconnaître toutefois que cette étude de soi-même est des plus délicates, 681. —
S'occuper de soi n'est pas se complaire en soi, c'est le moyen de se connaître ; par
suite d'arriver à m,ieux, ce qui est le but de la sagesse, 683.
DEUXIÈME VOLUME
CHAPITRE VII.
Des récompenses honorifiques, II, IL — Les distinctions honorifiques sont
éminemment propres à récompenser la valeur (l'empereur Auguste), 11. — A cet
égard, l'institution des ordres de chevalerie est une conception des plus heureu-
ses (ordre de S.-Michel), II. — Les récompenses pécuniaires s'appliquent à des
services rendus de tout autre caractère, 13. — La vaillance est une vertu assez
commune qui prime chez nous la vertu proprement dite, laquelle est bien autre-
ment rare, 13. — Conditions dans lesquelles se décernait l'ordre de Saint-Michel ;
B.24 ESSAIS DE MONTAIGNE.
abus qui en a été fait, discrédit en lequel il est tombé ; mieux vaudrait ne pas le
donner à des gens le méritant, que l'avilir en le prodiguant, 13. — Ce discrédit
rend difficile de mettre en honneur un nouvel ordre de chevalerie (ordre du
S. -Esprit), 15. — En France, la vaillance tient chez l'homme le premier rang
comme la chasteté chez la femme, 17.
CHAPITRE Vm.
De l'affection des pères pour leurs enfants, II, 19. — Comment Mon-
taigne a été amené à écrire et à faire de lui-même le sujet de ses Essais, et pour-
quoi il consacre ce chapitre à Madame d'Estissac, 19. — L'affection des pères
pour les enfants est plus grande que celle des enfants pour leurs pères, ce qui
tient à ce que tout auteur s'attache à son œuvre et que, toujours, celui qui
donne aime plus que celui qui reçoit, 21. — Il ne faut pas trop se laisser in-
fluencer par les penchants que l'on nomme naturels; on ne doit d'amitié aux en-
fants que s'ils s'en rendent dignes; et c'est une faute qui se produit fréquem-
ment, d'être plus généreux envers les enfants lorsqu'ils sont très jeunes, que
lorsque à un âge plus avancé leurs besoins se sont accrus; il semble qu'alors
on les jalouse, 21. — 11 faudrait, au contraire, partager de bonne heure ses biens
avec eux; cela leur permettrait de s'établir plus tôt et dans de meilleures condi-
tions, et ne les inciterait pas, comme il arrive parfois, à commettre par besoin
des actions viles, des vols par exemple, auxquelles ils s'habituent (un gentilhomme
adonné au vol), 23. — Mauvaise excuse des pères qui thésaurisent pour conser-
ver le respect de leurs enfants; c'est par leur vertu et leur capacité seules qu'ils
peuvent se rendre respectables, 25. — Trop de rigueur dans l'éducation forme des
âmes serviles (Montaigne, Léonore sa fille), 27. — Il ne faut pas se marier trop
jeune ; l'âge le plus favorable au mariage semble être de trente à trente-cinq ans,
cette règle ne s'appliquant pas toutefois aux classes inférieures de la société où
tout homme vivant du travail de ses mains a intérêt à avoir beaucoup d'enfants
(Aristote, Platon, Thalès, les Gallois, un roi de Tunis, les athlètes en Grèce,
coutume dans les Indes), 27. — Un père ne doit pas se dépouiller trop jeune en
faveur de ses enfants, 29. — Celui qu'accablent les ans et les infirmités ne devrait
garder pour lui que le nécessaire (l'empereur Charles -Quint), 29. — Mais peu de
gens savent se retirer à temps quand l'âge les gagne, 31. — En faisant l'abandon
de l'usufruit de son superflu à ses enfants un père doit se réserver la faculté de
les surveiller, de vivre avec eux et même de reprendre ses biens s'il a des motifs
de plainte (singularité d'un doyen de S.-Hilaire de Poitiers), 31. — ■ Appeler les
parents des noms de père et de mère, ne devrait pas être interdit aux enfants;
on se trompe quand on croit se rendre plus respecta,ble à eux par la morgue et
la hauteur; il vaut mieux s'en faire aimer que s'en faire craindre, 33. — Exemple
d'un vieillard qui, voulant se faire craindre, était joué par tout son entourage,
35. — Quand les vieillards sont chagrins, grondeurs, avares, toute leur maison :
femme, enfants, domestiques, se ligue contre eux pour les tromper (Caton), 37.
— Profitons pour nous diriger à ce moment de la vie, des exemples que nous
voyons autour de nous, 39. — Un père regrette parfois de s'être montré trop grave,
trop peu bienveillant pour ses enfants (le maréchal de Montluc), 39. — Dans
la vieillesse c'est surtout un ami qu'il faudmit; l'amitié est préférable à toutes
les liaisons de famille, 41. — C'est un tort de laisser à sa veuve les biens dont
les enfants devraient jouir. Ce n'est pas non plus toujours une bonne affaire que
d'épouser une femme ayant une belle dot, quoique une femme pauvre ne soit
pas par cela même plus maniable, aucune considération ne modifiant sur ce
point le caractère de la femme, 41 — Un mari ne doit attribuer à sa veuve que
ce qu'il lui faut pour se maintenir dans le rang qu'elle a dans la société; on ne
doit la laisser maîtresse de disposer de la fortune de ses enfants que durant le
temps de leur minorité, 43. — Pour la répartition des biens qu'on laisse en mou-
rant, le mieux est de s'en rapporter aux lois admises dans le pays; les testa-
ments sont presque toujours injustes, 43. — Les substitutions en vue d'éterniser
notre nom sont ridicules. On fait fréquemment erreur en déshéritant des enfants
dont l'extérieur ne pronostique pas un avenir avantageu.x; dans son enfance,
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. II, Cil. VIII. - VOL. II. B.25
Montaigne était lourdaud et peu dégourdi, 45. — Raisons données par Platon
pour que les questions d'héritage soient réglées par les lois, 15; — Revenons aux
femmes : Il ne faut pas leur laisser le droit de partager les biens que les enfants
tiennent de leur père, la mobilité et la faiblesse de leur jugement ne leur permet-
tant pas de faire de bons choix; le plus souvent ce sont ceux qui le méritent le
moins, qu'elles affectionnent le plus, 47. — On compte en vain sur ce qu'on ap-
pelle la tendresse maternelle; en ont-elles celles qui confient à des étrangères, et
souvent aux mamelles des animaux, les enfants qu'elles devraient allaiter? 47. —
Les hommes chérissent les productions de leur esprit bien plus que leurs propres
enfants, et en effet c'est bien plus exclusivement leur ouvrage (Labienus, Cassius
Severl's, Cremltius Cordus, Lucain, Épicure, s. Augustin, Montaigne, Épaminondas,
Alexandre et César, Phydias, Pygmalion), 49.
CHAPITRE IX.
Des armes des Parthes, II, 55. — Mauvaise habitude, aux armées, de la
noblesse de nos jours de ne s'armer qu'au dernier moment, 55. — Nos armes
actuelles sont plus incommodes par leur poids qu'elles ne sont propres à la dé-
fense (Alexandre le Grand, les anciens Gaulois, Lucullus et les Mèdes), 55. — On
est plus vigilant, quand on se sent moins protégé (Scipion Émilien), 57. — C'est le
défaut d'habitude qui nous fait paraître nos armes si pesantes; poids énorme porté
par les soldats romains (Caracalla, les soldats de Marius, Scipion Émilien en Es-
pagne), 57. — Ressemblance des armes des Parthes avec celles dont nous faisons
usage nous-mêmes aujourd'hui (Démétrius etALCiNus), 57.
CHAPITRE X.
Des livres, II, Cl. — En écrivant ses Essais, Montaigne n'a pas de plan
arrêté, il donne libre cours à sa fantaisie; il sait combien il est ignorant, aussi,
tout en disant sur chaque chose ce qu'il juge à propos, peu lui importe les er-
reurs que l'on pourra relever, 61. — Double motif qu'il a pour ne pas nommer
les auteurs auxquels il emprunte des idées, voire même des passages entiers et
dont il donne des citations; il veut orner son ouvrage et rire de la critique que
l'on fera peut-être en lui, et sans s'en douter, des auteurs de l'antiquité auxquels
il fait des emprunts, 61. — Il renouvelle l'aveu de son ignorance, mais la science
coûte trop à acquérir et il préfère passer doucement la vie; aussi, ne lit-il que
les autours qui l'amusent et ceux qui lui apprennent à bien vivre et à bien mou-
rir, 63. — Parmi les auteurs des temps modernes simplement amusants, Montai-
gne n'apprécie guère que Boccace, Rabelais et Jean Second; il a toujours trouvé
insipides les romans des Amadis et, l'âge ayant modifié ses goûts, AaiosTEet même
Ovide qui dans son enfance lui plaisait tant, n'ont plus d'attrait pour lui, 65. —
11 regrette d'avoir à confesser qu'il n'apprécie pas I'Axioche de Platon, c'est
probablement un effet de son ignorance, 65. — Les fables d'ÉsopE renferment
généralement un sens plus profond que celui qui ressort à première vue, 67. —
Parmi les poètes latins, les premiers pour lui, sont : Virgile, surtout par ses
Géorgiques et le cinquième livre de I'Énéide; Lucrèce, Catulle et Horace; il
prise aussi Lucain, mais plus pour ses pensées que pour son style, 67. — Com-
bien Térence est au-dessus de Plaute; quelle élégance, quelle grâce inimitable, un
rien lui suffit pour provoquer l'intérêt; quelle différence sous ce rapport entre
eux et les poètes comiques de nos jours! 67. — Les bons poètes ont toujours évité
l'affectation et la recherche: c'est ce qui fait que les épigrammes de Catulle sont
si supérieures dans leur simplicité, aux satires de Martial dont les pointes sont
aiguisées avec tant de soin, 69. — Comme les bons plaisants, les bons poètes
n'ont pas non plus besoin de déguisements, d'ornements superflus pour exciter
l'intérêt; Que l'on compare Virgile et Arioste : le premier fend l'air d'un vol
hardi, le second ne fait que voleter de branche en branche, 71. — D'entre les
ouvrages sérieux, Plutarque et Sénèque sont ceux que préfère Montaigne; compa-
raison entre ces deux auteurs, 71. — Quant à Cicéron, ce que Montaigne ap-
B.26 ESSAIS DE MONTAIGNE.
précie le plus en lui, ce sont ses ouvrages philosophiques; mais il Tennuie par
ses longs préambules et ses éternelles définitions, il arrive trop tard au sujet.
On peut en dire autant de Platon dont la forme dialoguée alourdit le style, ce
n'est point ainsi qu'écrivent Pline et quelques autres, 73. — Les lettres de
CicÉRON à Atticus sont d'un grand intérêt par les particularités qu'elles con-
tiennent sur les mœui"s et le caractère de l'auteur qui, bon citoyen, avait peu
d'énergie, était dévoré d'ambition et de vanité et avait la faiblesse de se croire
un grand poète (Brutus),' 75. — Son éloquence hors de pair, a trouvé cependant
des censeure: on lui a reproché ses trop longues périodes et les mots à effet par
lesquels il les termine si souvent (Cicéron le jeune et Cestius), 75. — De tous les
auteurs de divers genres, les historiens sont ceux que Montaigne affectionne
le plus, parce qu'ils font connaître l'homme en général; et, parmi les histo-
riens ceux qui, tels que Plutarque et Diogène Laerce, ont écrit la vie de grands
personnages, 77. — Éloge des Commentaires de César, 77. — Les meilleurs histo-
riens, sont ceux, assez rares du reste, qui, ayant le génie de l'histoire, s'imposent
par leur valeur, et ceux qui l'écrivent avec simplicité et bonne foi; les autres
nous induisent en erreur par leurs relations tronquées ou altérées et leurs juge-
ments erronés (Froissard), 79. — Les bonnes histoires sont surtout celles faites
par des hommes ayant pris part aux événements qu'ils racontent; difficulté de
fixer, même dans ce cas, les détails de certains faits (Asinils Pollio et les Com-
mentaires DE CÉSAR, Bodin), 81. — Jugcmeuts de Montaigne sur Guichardin, Phi-
lippe de Comines, Guillaume et Martin du Bellay; ces deux derniers paraissent
avoir eu pour but de faire le panégyrique de François I", plutôt que d'écrire des
mémoires (Sire de Joinville, Éginhard), 81.
CHAPITRE XI.
De la cruauté, II, 85. — La bonté a l'apparence de la vertu; mais celle-ci
lui est supérieure en ce qu'elle suppose une lutte perpétuelle contre les passions
(les Stoïciens, Épicuriens et Arcésilas), 85. — C'est par les combats qu'elle livre,
que la vertu se perfectionne (Épaminondas, Socrate, Metellus), 87. — Dans les
âmes touchant à la perfection, la vertu est facile à pratiquer parce qu'elle y est à
l'état d'habitude (Socrate), 89. — Combien est belle la mort de C.aton d'Utique,
étant donnés ses circonstances et son mobile, 91. — L'espèce de gaîté qui ac-
compagne la mort de Socrate met encore celle-ci au-dessus de celle de Caton
(Aristippe), 93. — La vertu comporte divers degrés : résister au vice d'une façon
continue et en triompher, est plus beau que de réagir après y avoir cédé de
prime abord; et cette réaction elle-même est plus méritoire que de ne pas s'a-
bandonner à mal faire par nonchalance de tempérament, 93. — Certaines vertus
nous sont attribuées qui ne proviennent que de la faiblesse de nos facultés, ce
dont il y a lieu de tenir compte avant de porter un jugement sur nos actes
(appréciation sur la bravoure chez les Italiens, les Espagnols, les Français, les
Allemands et les Suisses), 93. — Jlontaigne déclare qu'il a dû à son tempérament,
•plus qu'aux efforts qu'il a faits pour leur résister, de ne pas céder à ses pas-
sions, et qu'il était plus réglé dans ses mœui's que dans ses pensées et ses pro-
pos, ainsi que cela arrive chez bien d'autres (Aristippe, Épicure), 95. — Il estime,
contrairement à ce qu'en pensent les Stoïciens, que, pour être adonné à un vice,
on n'est pas nécessairement sujet à tous les autres (Socrate, Stilpon), 99. — Il est
possible à l'homme, quoique le contraire ait été soutenu, de demeurer maître de
ses pensées et de sa volonté sous les caresses les plus ardentes de la femme la
plus désirée, plus encore que sous l'excitation de la chasse pour qui a cette pas-
sion, 101. — Sensibilité de Montaigne; son horreur pour tout ce qui est cruauté
(Jules César), 101. — Même à l'égard des criminels, la peine de mort devrait être
appliquée sans aggravation de tourments barbares qui n'ajoutent rien à son effet
(un soldat prisonnier), 103. — Ces barbaries devraient, tout au plus, s'exercer
sur les corps inanimés des suppliciés; d'autant qu'il est à remarquer que mutiler
les cadavres, produit une grande impression sur le peuple. Aujourd'hui, au con-
traire, on en est arrivé à tuer et à torturer les gens uniquement pour le plaisir
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. II, Cil. XI. - VOL. 11. B.27
de leurs souffrances (le voleur Catena, Artaxerxès, les Égyptiens), lOli. — Huma-
nité de MOiNTAioNE vis-à-vis des bêtes, 105. — Le dogme de l'immortalité de l'àme
a conduit au système de la métempsjcose auquel, pour sa part, Montaigne ne
croit guère (Pythagore, les Égyptiens, les anciens Gaulois), 107. — Chez certains
peuples, certains animaux étaient divinisés; c'était un hommage rendu, soit aux
services que nous en retirons, soit aux qualités essentielles qui les caractérisent,
107. — Nous devons nous montrer justes envers nos semblables et avoir des
égards pour toutes les autres créatures susceptibles d'en sentir les effets; des
peuples entiers, des hommes célèbres ont témoigné par des monuments et autre-
ment leur reconnaissance à des animaux (les Turcs, les oies du Capitole, les bêtes
de somme employées à Athènes à l'érection d'un temple, les Agrigentins, les Égyp-
tiens, CiMON, Xantippe, Plutarque), 109.
CHAPITRE XII.
Apologie de Raixaond Sebond, II, 111. — Est-il vrai que la science soit
mère de toutes les vertus, comme l'ignorance de tous les vices? 111. — Son père
avait les savants en haute estime et les accueillait avec distinction; pour lui, Mon-
taigne, il se contente de les aimer, 111. — Un de ces savants. Pierre Bunel, qui avait
prévu les immenses conséquences de la Réforme, laquelle commençait à poindre
en France, ayant donné le traité de Raimond de Sebond sur « la Théologie natu-
relle » au père de Montaigne, celui-ci le fit traduire d'espagnol en français par son
fils, traduction qui depuis a été publiée, 111. — Éloge de ce livre (Adrien Turne-
Bus), 113. — Cet ouvrage a soulevé des objections; la première c'est qu' « il ne
faut pas appuyer de raisons humaines ce qui est article de foi », 115. — Il est
vrai que la raison est insuffisante pour démontrer par elle-même des faits au-des-
sus de notre intelligence; il faut que d'abord nous soyons éclairés parla foi qui
est une grâce de Dieu ; la raison a alors son utilité en venant corroborer ce que
la foi enseigne, 115. — Chez le Chrétien, la foi fait généralement défaut; aussi sa
vie qui, dirigée par la Divinité elle-même, devrait être si édifiante, prête-t-elle
si fort au reproche ; les uns font semblant de croire, les autres se persuadent
qu'ils croient et ne savent ce que c'est que croire (les Mahométans, Ics^Païens,
S. Louis et un hoi tartare converti, un Juif voyageant à Rome), 117. — Dans les
guerres de religion, ce sont les intérêts des jiartis qui les guident, si bien que
parfois les maximes de l'un sont abandonnées par lui et reprises par l'autre qui
les combattait, 119. — Chacun fait servir la religion à ses passions; le zèle du
chrétien éclate surtout pour produire le mal; si notre foi était sincère, outrage-
rions-nous sans cesse Dieu comme nous le faisons et craindrions-nous la mort
qui doit nous réunira lui (ANTiSTiif:NE, DioGi':NE)? 121. — C'est ne pas croire, que
croire par faiblesse ou par crainte, 123. — Les athées ne le sont guère que par
vanité; ils veulent se montrer au-dessus des croyances populaires; en présence
de la mort, ils reviennent aux idées religieuses (Bion), 125. — L'opinion de Pla-
ton, que les enfants et les vieillards sont plus portés à la^ religion que les hommes
dans la force de l'âge, n'est pas exacte; ce n'est pas par faiblesse d'esprit que nous
y sommes amenés, mais parce que Dieu se manifeste à nous par ses œuvres; ce
que nous en saisissons explique ce qui nous en échappe; c'est ce que Sebond
s'applique à démontrer, 127. — Ses arguments, par leur conformité avec ce que
nous enseigne la foi, ont une valeur indéniable (Socrate, Caton, Sebond), 129.
La seconde objection faite à Sebond, c'est que « ses arguments sont faibles »;
mais est-il possible d'en produire d'autres, étant donné le peu que nous pouvons
par nous-mêmes? 129. — 11 faut tout d'abord reconnaître qu'il est bien des choses
qui ne peuvent s'expliquer par la raison seule (S. Augustin), 131. — L'homme se
croit une grande supériorité sur toutes les autres créatures; examinons ce qui en
est, 133. — Est-il fondé à prétendre que le ciel, la mer et toutes les merveilles de la
nature n'ont été créés que pour lui? 135. — S'il est vrai que les astres ont de l'in-
lluence sur nos destinés, pouvons-nous dire que nous commandons, quand nous
ne faisons qu'obéir? 135. — Que savons-nous de ces astres, sur quoi pouvons-
nous appuyer les suppositions que nous émettons à leur sujet? mais notre pré-
B.28 ESSAIS DE MONTAIGNE.
somption.est sans limites (Anaxagore), 135. — Vis-à-vis des animaux, en quoi
consiste notre supériorité? nous pensons, nous parlons, mais est-il sûr que les
botes n'aient pas, elles aussi, des idées ot un langage (I'Age d'or d'après Platon)?
J37. — Les bétes se comprennent entre elles ; si nous ne les comprenons pas, est-
ce à elles ou à nous que cela est imputable? 139. — Celles qui n'ont pas de voix
se font comprendre par les mouvements du corps; que de choses n'exprimons-
nous pas nous-mêmes, par gestes (un ambassadeur d'Abdèreet Agis roi de Sparte)?
139. — Leur habileté surpasse celle de l'homme, si bien qu'il semblerait que la
nature les a traitées plus favorablement que nous (les abeilles, les hirondelles,
I'araignée), 141. — 11 n'en est rien; en dépit des apparences, elle a donné à
l'homme tout ce qui est nécessaire à sa conservation, 145. — Il ne tiendrait qu'à
nous de nous passer de vêtements, même dans les climats froids ; et, sans culti-
ver le sol, ni nous livrer à aucune préparation d'aliments, nous pourrions trouver
partout notre nourriture (certaines peuplades sauvages, les Gaulois, les Irlandais),
145. — L'homme est naturellement mieux armé que beaucoup d'autres animaux;
et s'il a recours, pour accroître sa force, à des moyens de défense artificiels, d'au-
tres animaux, qui ont des armes naturelles, agissent de même (I'éléphant, le
taureau, le sanglier, I'iciineumon), 147. — Le langage n'est pas chez l'homme une
chose naturelle; mais, de même que les animaux manifestent leurs sentiments et
se font comprendre en donnant de la voix, il y a lieu de penser que nous-mêmes
avons un parler inné, car nous nous faisons comprendre d'eux; et, de ce langage,
semble qu'il y ait trace chez l'enfant, 149. — Tout cela dénote que nous ne
sommes ni au-dessus ni au-dessous du reste des animaux, 151. — Les bêtes, comme
les hommes, suivent librement leurs inclinations; comme eux, elles sont suscep-
tibles de réflexion dans ce qu'elles font (renards employés par les Thraces pour
vérifier l'adhérence de la glace), 151. — Si nous les asservissons, n'en est-il pas de
même des hommes vis-à-vis les uns des autres? Souvent même, nous nous astrei-
gnons à l'égard des bêtes, à ce que ne feraient pas pour nous nos propres servi-
teurs (les Climacides, les femmes de Thrace, les gladiateurs, les Scythes, Diogènè),
151. — Les animaux (les tigres, les lions, le chien, le brochet, I'hirondelle, I'éper-
vier, la cigogne, I'aigle, les faucons en Thrace, les loups dans les Palus-lMéotide,
la seiche) pratiquent la chasse comme font les hommes, parfois de commun ac-
cord, 155. — La force de l'homme est inférieure à celle de bien des animaux, et de
bien plus petits que lui en triomphent aisément (Sylla), 157. — Les bêtes savent
discerner ce qui peut leur être utile 'soit pour leur subsistance, soit en cas de
maladie (les chèvres de Candie, la tortue, le dragon, les cigognes, les éléphants),
157. — Exemple caractéristique de raisonnement chez le chien, 157. — Les bêtes
sont capables d'être instruites (chiens savants, chiens d'aveugle, chien du théâtre
de Marcellus, les boeufs des jardins de Suze), 159. — On constate que quelques-
unes se livrent à l'instruction des autres, et il y en a qui s'instruisent elles-mêmes
(le ROSSIGNOL, des éléphants de cirque, une pie, un chien qui veut se'désaltérer),
161. — Subtilité et pénétration des éléphants, 163. — D'hommes à hommes, nous
traitons de sauvages ceux qui n'ont pas les mêmes usages que nous ; de même
nous nous étonnons de tout ce que, chez les animaux, nous ne comprenons pas,
167. — II semble que chez I'éléphant, il y ait trace de sentiment religieux; l'é-
change d'idées entre animaux auxquels la voix fait défaut, n'est pas niable (les
FOURMIS de Cléanthe), 167. — Propriétés que nous ne possédons pas et dont jouis-
sent certains animaux (le rémora, le hérisson, le caméléon, le poulpe, la torpille),
169. — Les prédictions fondées jadis sur le vol des oiseaux, pouvaient avoir leui-
raison d'être (les oiseaux de passage), 171. — N'attribue-t-on pas aux chiennes de
savoir discerner, dans une portée, le meilleur de leurs petits? 171. — Sous bien
des rapports, nous devrions prendre modèle sur les animaux, 171. — Ils ont le
sentiment de la justice, leur amitié est plus constante que celle de l'homme (le
CHIEN du roi Lysimaque, celui de Pyrrhus), 173. — Dans leurs goûts, leurs affections,
en amour, ils sont délicats, bizarres, extravagants comme nous-mêmes (propension
des CHEVAUX pour ceux de même robe, I'éléphant et la bouquetière d'Alexandrie,
le bélier de Glaucia), 173. — Subtilité malicieuse d'un mulet, 177. — Certaines
bêtes paraissent sujettes à l'avarice, d'autres sont fort ménagères (La fourmi et le
GRAIN de blé), 177. — Quelques-unes, ce sont des exceptions, se font la guerre à
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. II, Cil. XII. - VOL. II. B.29
l'instar des hommes chez lesquels elle dénote une si grande imbécillité, les princes,
qui sont soumis aux mêmes passions que nous, la faisant pour des motifs aussi
futiles que ceux qui occasionnent les querelles des particuliers et son issue étant
souvent amenée par des incidents des moins importants de la vie ordinaire
(causes de la guerre de Troie, de la guerre civile entre Antoine et Auguste ; inter-
vention de la poussière dans les batailles livrées par Sertorius à Pompée, par
EuMÈNE à Antigone, par Suréna contre Crassus; des abeilles au siège de Tam|y),
177. — Fidélité et gratitude des animaux (le chien d'Hésiode et autres, le lion
d'Androclès), 161. — Comme nous, ils se constituent en sociétés pour se défen-
dre mutuellement; des individus d'espèces différentes s'associent pour pourvoir
a leur sûreté et à leur subsistance (les boeufs, les pourceaux, etc.; I'escake, le
barbier; la baleine et son guide, le crocodile et le roitelet, la nacre et le pino-
thère; les thons), 187. — Nous trouvons en eux des exemples de magnanimité,
de repentir, de clémence (fierté d'un chien, repentir d'un éléphant, clémence
d'un tigre), 189. — L'ingéniosité de 1' alcyon dans la construction de son nid dé-
fie notre intelligence, 189. — Les animaux nous ressemblent et nous égalent aussi
par l'imagination puisque, comme nous, ils ont des songes et des souvenirs (le
cheval, les chiens), 191. — Quant à la beauté, pour savoir si nous avons sur eux
quelque avantage de ce fait, il faudrait tout d'abord être fixé sur ce en quoi elle
consiste; or, que d'opinions diverses sur ce point : telles formes, telles couleurs
appréciées dans un pays, sont rebutantes dans un autre (les Orientaux, les femmes
Basques, les Mexicaines, les Italiens, les Espagnols), 193. — A cet égard, nous ne
sommes nullement fondés à nous croire privilégiés par rapport aux bêtes, celles
qui ont le plus de ressemblance avec nous sont les plus laides, 195. — L'homme
a plus de raisons que tout autre animal de couvrir sa nudité, tant il y a d'im-
perfections en son corps, 197. — Du reste tous les biens qu'il s'attribue sont ima-
ginaires, et les biens réels il les départ aux animaux (Héraclide et Phérécide,
Ulysse et Circé), 199. — Malgré cela, estimant notre forme extérieure au-dessus
de tout, nous n'admettons de supériorité sous aucun rapport de qui n'est pas
formé à notre image, 199.
Examinons maintenant si l'homme a lieu de s'enorgueillir de ses connaissances.
Avec tant de vices et d'appétits déréglés, est-il en droit de se glorifier de sa rai-
son? 201. — La science ne nous garantît ni des maladies, ni des incommodités de
la vie (Varron, Aristote), 201. — Les ignorants sont plus sages et savent plus que
bien des savants, 203. — Dès le principe, Dieu nous a interdit la science; la re-
ligion veut que nous demeurions ignorants et obéissants (la Genèse, les Sirènes et
Ulysse, S. Paul), 203. — Mais la présomption est le partage de l'homme (CicÉ-
RON, Lucrèce. Démocrite, Aristote, Chrysippe, Sénèque), 205. — Et pourtant, com-
bien la force d'àme de nos philosophes est impuissante contre les douleurs physi-
ques devant lesquelles l'ignorant souvent demeure impassible (Posidonius, Arcé-
siLAS, Denys d'Héraclée), 207. — Les effets de l'ignorance sont préférables à ceux
de la science; selon quelques philosophes, reconnaître la faiblesse de son juge-
ment est le souverain bien (Pyrrhon, au Brésil), 209. — Les maladies du corps et
de l'esprit sont souvent causées par l'agitation de notre âme, le génie est proche
de la folie (Le Tasse), 211. — L'indolence de l'esprit, non toutefois une indolence
complète laquelle n'est du reste ni possible ni durable, produit la vigueur cor-
porelle et la santé (Crantor et Épicure), 213. — La science nous renvoie souvent
à l'ignorance pour nous adoucir les maux présents, 215. — La philosophie agit de
même, lorsqu'elle nous incite à oublier les maux passés (Lycas, Thrasylaus), 215.
— En nous concédant de mettre fin à notre vie quand elle nous est devenue in-
supportable, elle témoigne encore plus nettement de son impuissance (Cicéron,
Horace, Démocrite, Antisthène, Chrysippe, Cratès, Sextius), 219. — La simplicité
et l'ignorance sont des conditions de tranquillité (V^alens, Licinius, Mahomet,
Lycurgue), 221. — Il est dans le Nouveau Monde des nations qui, sans magistrats
et sans lois, vivent plus régulièrement que nous ne faisons, 221. — Funestes effets
de la curiosité et de l'orgueil, 223. — A quoi Socrate a dû le nom de Sage, 223.
— Les recherches sur la nature divine sont condamnables; nos notions sur l'Être
suprême sont imparfaites, lui seul peut se connaître et s'interpréter (S. Augustin,
Tacite, Platon, Cicéron), 223. — Ce que nous possédons de la vérité, ce n'est point
B.30 ESSAIS DE MONTAIGNE.
avec nos propres forces que nous y sommes arrivés, nous en sommes incapables
(S. Paul), 225. — A la fin de leur vie, les plus savants philosophes se sont aperçus
qu'ils n'avaient rien appris (Velleius, Phérécide, Socrate, Platom, Cicéron), 227. —
Examinons jusqu'à quel degré de connaissances ont pu parvenir les plus grands gé-
nies, 229. — Il y a trois manières de philosopher: l'une dogmatique, qui est celle de
ceux qui assurent avoir trouvé la vérité; l'autre, académique, est appliquée par
ceux qui déclarent qu'elle est au-dessus de notre compréhension; la troisième,
sceptique, est le propre de ceux qui la cherchent encore, 229. — État d'esprit et
doctrine des Pvrrhoniens qui personnifient ce dernier mode, 231. — Avantage de
leur doctrine ; toutes les opinions étant contestables, il n'y a pas de raison pour
se décider et adopter plutôt l'une que l'autre, 233. — Dans la vie ordinaire, ils agis-
sent comme tout le monde, se soumettant aux lois, aux usages, parce qu'ils dou-
tent qu'on puisse leur en substituer de meilleurs (Pyrrhon), 235. — Combien sont
plus faciles à gouverner les esprits simples et peu curieux; plus que tous autres,
ils sont préparés à recevoir la parole de Dieu, 237. — Quant aux Dogmatistes qui
prétendent avoir trouvé la vérité, leur assurance ne fait guère que masquer leur
doute et leur ignorance (Socrate, Cicéron, Aristote, Épicure), 239. — Souvent les
philosophes affectent d'être obscurs, pour ne pas révéler le vide de leur science
(Aristote, Carnéade, Épicure, Heraclite), 241. — Certains ont dédaigné les arts
libéraux et même les sciences, prétendant que ces études détournent des devoirs
de la vie (Cicéron, Zénon, Chrysippe, Plutarque, Épicure, Socrate), 241. — On ne
sait si Platon était dogmatiste ou sceptique; ses opinions ont dontié naissance
à dix sectes différentes, 243. — On peut en dire autant de la plupart des philo-
sophes anciens de quelque renom ; combien se contredisent eux-mêmes (Anaxa-
gore, Parménide, Xénophane, Sénèque, Plutarque, Euripide, Démocrite, Empédocle)!
243. — 11 ne faut pas s'étontier de voir tant de gens s'efforcer ainsi de découvrir
la vérité, il y a quelque charme à cette recherche (les Stoïciens, Démocrite), 245.
— L'étude de la nature est également une occupation où se complaît notre es-
prit (Eudoxe), 247. — Mais il est peu probable qu'ÉPicuRE, Platon et Pythagore
nous aient donné comme réels, l'un ses atomes, l'autre son spiritualisme, le der-
nier ses nombres; en émettant ces théories, ils n'ont sans doute que voulu faire
échec à d'autres systèmes préconisés, ne reposant pas sur des bases plus solides,
247. — La vraie philosophie consiste à ne rien donner comme certain et à res-
pecter ostensiblement la religion et les lois de son pays, tout en réservant son
jugement, 249. — Malgré notre impuissance à déterminer ce que c'est que Dieu,
la question a été fort agitée par les anciens; l'opinion la plus fondée est celle
qui le représente comme une puissance incompréhensible qui a produit et con-
serve tout (Valerius Seranus, s. Paul, Pythagore, Numa), 251. — Mais il faut au
peuple une religion palpable qui émeuve l'homme dans ses croyances et quand
il prie; et, de tous les cultes, le plus excusable est celui du Soleil, 258. — Opinions
diverses des philosophes sur la nature de Dieu; elles sont sans nombre (Thalès,
Anaximandre, Anaximène, Anaxagore, Alcméon, Pythagore, Parménide, Empédocle,
Protagoras, Démocrite, Platon, Socrate, Speusippe, Aristote, Héraclide du Pont,
Théophraste, Straton, Zénon, Diogène d'Apollonie, Xénophane, Ariston, Cléanthe.
Persée, Chrysippe, Diagoras, Théodore, Épicure, Ennius), 255. — Cette diversité
montre la faiblesse de notre raison; mais ce qui est le comble de l'extravagance,
c'est de faire des dieux des hommes que nous connaissons tant, on comprend
mieux que des bêtes on ait fait des dieux parce qu'elles nous sont moins connues.
Une autre folie, est de déifier certaines abstractions, comme la concorde, la liberté,
ou certains de nos maux comme la peur, la fièvre, etc., 257. — Impudente pru-
dence des Égyptiens au sujet de leurs dieux, 259. — Est-ce sérieusement que les
philosophes ont traité de la hiérarchie de leurs divinités, comme aussi de la con -
dition des hommes dans une autre vie (Platon, Mahomet)? 259. — Il n'est pas con-
cevable que notre àme dégagée des sens ses organes, puisse conserver ses goûts,
ses affections; et si, dans une autre vie, nous n'existons plus tels que nous
sommes sur la terre, ce n'est pas nous qui sentirons, qui jouirons; ce qui a cessé
d'être, n'est plus (Pythagore, le Phénix, le ver a soie), 261. — Et puis, pourquoi
les dieux récompenseraient-ils ou puniraientrils l'homme, après sa mort? n'est-co
pas par leur volonté qu'il a été tel? 263. — Il est ridicule de prétendre arriver à
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. II, Cil. XII. — VOL. II. B.31
connaître Dieu, sa nature, etc., en prenant l'homme pour terme de comparai-
son, ainsi que cela s'est toujours fait, 265. — C'est en partant de là qu'on a cru
l'apaiser par des prières, des fêtes, des présents, et même en immolant des êtres
humains sur ses autels (Tiberius Semphonius, Paul Emile, Alexandre le Grand,
Énée, les Gètes, Amestris, les idoles de Themixtatan, les Carthaginois, les Lacédé-
MOMENS, Iphigénie, Ics deux Decius), 265. — Prétendre satisfaire à la justice divine
en choisissant soi-même son expiation, est un contre-sens; est-ce au criminel à
fi.xer lo châtiment qu'il a encouru (Poi.ycrate, les Corybantes, les Ménades, cor-
tains Maiiométans)? 267. — Il n'est pas moins ridicule de juger d'après nou.s-
mémes du pouvoir et des perfections de Dieu ; de croire qu'il peut se réjouir, se
fâcher, etc., que ses règlements, sa juridiction ressemblent aux nôtres, et que
c'est à notre intention qu'il a fait les lois qui régissent le monde (Stili'on), 269. —
Non seulement ces lois s'appliquent à notre monde mais aux autres encore si,
comme il est vraisemblable, il en existe en nombre infini, probablement bien
différents de celui-ci où l'éloignement des lieux suffit pour que de grandes dif-
férences subsisteut entre les êtres qui s'y trouvent (Platon, Démocrite, ÉpicuitE,
Pline, Hérodote, Plutarque), 271. — Les règles que nous avons cru déduire de la
nature sont sans cesse démenties par les faits; tout est obscurité et doute; nous
ne savons même pas si nous vivons. Diversité des opinions sur le monde et la
nature (Métrodore de Chio, Euripide, Melissus, Protagoras, Nausiphane, Parménide,
Zenon), 275. — C'est que la puissance divine ne peut être définie par aucun lan-
gage humain, dont l'imperfection est cause de toutes les erreurs et contestations
qui se produisent, 277. — C'est par suite de cette même imperfection que nous
disons qu'il y a des choses impossibles à Dieu, comme de ne pas être, de faire
que le passé ne soit pas, etc. ; du reste notre outrecuidance à vouloir tout sou-
mettre à notre examen, à faire Dieu à notre image, fait que nous lui prêtons des
attributs qui, pour lui, sont dépourvus de sens, alors qu'il ne nous est pas donné
d'avoir de lui la moindre conception (Pline, Épicure, Thalès, Platon, Pythagore,
Tertullien, Straton, Cicéron, s. Augustin, S. Paul), 279. — Nous l'avons tellement
rabaissé que nous, incapables de créer quoi que ce soit, sommes arrivés à faire des
dieux à la douzaine (Faustine, Auguste, les Thasiens et Agésilas, Trismégiste), 281.
— Énoncé de quelques-uns des arguments que les philosophes ont mis en avant
pour déterminer la nature de Dieu, 283. — On allait jusqu'à admettre couram-
ment que les dieux pouvaient entrer en rapport avec la femme (Pauline; un
gardien du temple d'Ilercule, Laurentina et Teruncius, Apollon, Ariston et Péric-
TiONE, les Merlins), 285. — Chaque être s'estimant la perfection, si les bêtes s'avi-
saient de faire des divinités, chacune les ferait, elle aussi, à son image (Xéno-
phane), 287. — L'homme s'est imaginé que tout, dans le monde, n'existe que pour
lui; que pour lui seul il fait jour, il pleut, il tonne; que les dieux ne parlent et
n'agissent que pour lui, qu'ils épousent ses querelles, partagent ses plaisirs (Nep-
tune et JuNON, les Cauniens), 289. — Il donnait à chacun d'eux telle ou telle attri-
bution : l'un guérissait de la toux, l'autre de la fièvre, etc.; il y en avait dont la
puissance était si bornée, qu'il en fallait bien cinq ou six pour produire un épi
de blé, 289. — Outre qu'il était de principe que, dans son propre intérêt, on doit
laisser ignorer au peuple beaucoup de choses vraie^ et lui en donner à croire de
fausses, dès que l'esprit humain veut pénétrer certains mystères, il s'y perd.
Combien d'idées n'ont-elles pas été émises sur la matière dont est formé le soleil?
en vérité, mieux eût valu s'abstenir (Scévola, Varron, S. Augustin, Anaxagore,
Zénon, Archimède, Socrate, Polyenus), 291. — N'a-t-on pas imaginé que le mouve-
ment des corps célestes fonctionne d'après les mêmes moyens que les machines
de notre invention! 293. — En somme, la philosophie nous présente toutes choses
comme font les poètes, èous forme d'énigmes (Timon et Platon), 293. — Du reste
l'homme n'a pas d'idées plus nettes sur lui-même que sur tout ce qui l'entoure :
en combien de parties différentes du corps û'a-t-on pas logé l'àme? quelle expli-
cation a pu être donnée de ce que celle-ci s'unit à une substance matérielle (une
SERVANTE de Milot, Cicéron et Démocrite, Socrate)? 295. - Ce qui fait qu'on ne ré-
voque pas en doute ces théories, c'est qu'on ne les discute jamais; on les accepte
sous l'autorité du nom de qui les a émises et, si on vient à tenter de les soumet-
tre à l'examen, on s'égare soi-même (Aristote, Pythagore), 299. — Voulons-nous,
B.32 ESSAIS DE MONTAIGNE.
pour nous décider, recourir <à l'expérience? les sens nous trompent; à la raison?
sujette elle aussi à l'erreur, elle ne peut pas mieux nous guider que les sens, 303.
— Que nous apprend celle-ci sur la nature de l'àme par exemple? A chaque phi-
losophe elle enseigne que l'âme est une substance différente suivant l'idée que
chacun s'en fait (Cratès, Dicéarque, Platon, Thalès, Asclépiade, Hésiode, Anaxi-
MANDRE, Parmémde, Empédocle, Possidonius, Ci.éanthe, Galien, IIippocrate, Varron,
ZÉNON, HÉRACI.IDE DU PONT, XÉNOCRATE, ICS ÉGYPTIENS, ICS ChALDÉENS, ArISTOTE, LaC-
TANCE, SÉNÈQUE, leS DOGMATISTES, CiCÉRON, S. BERNARD, HERACLITE), 305. — OÙ lOgC-
t-elle? la môme divergence règne sur ce point (nombre d'entre les philosophes
déjà cités; IIiérophile, Démocrite, Épicure, Moïse, Straton, Chrysippe, les Stoï-
ciens, etc.), 305. — Ces opinions diverses ne prouvent-elles pas la vanité des re-
cherches philosophiques, joint à cela les définitions incohérentes émises sur le
monde et sur l'homme? Faiblesse du système des atomes et de quelques autres
(Platon, les Épicuriens, Cotta, Zénon, Socrate), 309. — Si bien qu'on est tenté de
croire que ce n'est pas sérieusement que ces philosophes ont débité leurs rêve-
ries; de fait, il n'y a rien d'absurde qui n'ait été dit sur ces sujets, par l'un
ou par l'autre, 311. — Pour en revenir à l'âme, l'opinion la plus vraisemblable
est qu'elle loge au cerveau et que de là, au moyen des différents organes, elle
gouverne le corps, 313. — Quant à son origine, nouvel embarras ; diversité des
opinions à ce sujet; est-ce une émanation de l'àme univereelle? préexiste-t-elle au
corps? est-elle immortelle ou non? 313. — Ce qu'il y a de certain, c'est qu'elle
nait avec le corps, croît, se fortifie et s'affaiblit avec lui; qu'il ne faut pour la
troubler, pour faire d'un sage un furieux, qu'un accident souvent léger, une
maladie, la bave d'un chien (Socrate, Caton), 317. — Les plus hardis Dogmatistes
eux-mêmes rie soutiennent que faiblement le dogme de l'immortalité de l'âme (Phé-
récyde de Syros, Thalès), 321. — Bien que ceilaines considérations portent à con-
cevoir ce dogme, aucun de ceux qui l'ont admis n'ont insisté et n'ont produit à
l'appui de raisons de quelque valeur; ils n'ont rencontré juste que par hasard, et
il nous faut sur ce sujet nous en rapporter uniquement à ce que nous enseigne
la révélation, 323. — Arguments qui, selon différents philosophes, militent pour
ce principe ; tous sont défectueux et, avec eux, le système de la métempsycose et
autres auxquels il a donné lieu (Pythagore, Origène, Varron, Chrysippe, Platon,
PiNDARE, Plutarque), 325. — La manière dont se forme le corps humain est aussi
inconnue que la nature de l'âme, tout est mystère dans la génération (Archélaus,
Pythagore, Platon, Alcméon, Démocrite, Épicure, Aristote, Galien), 329. — ^ D'où
cette conclusion : ne se connaissant pas lui-même, l'homme ne peut arriver avec
ses propres moyens à la connaissance de quoi que ce soit (Protagoras, Thalès),
331.
En raison de notre impuissance à faire la lumière par nous-mêmes, les argu-
ments qui précèdent ne sont pas sans danger; ils peuvent se retourner contre
nous, 3.33. — L'esprit humain malgré les mesures prises pour le contenir et le
guider, ayant toujours tendance à échapper et à divaguer, mieux vaut s'en tenir
sur ces questions aux enseignements de la foi et éviter toute controverse; toute-
fois si, avec certaines gens, on est obligé de les discuter, ces arguments pour-
ront être utilement employés, 335. — Actuellement, les sciences sont l'objet d'un
enseignement officiel, en dehors duquel toute innovation est abusivement pro-
hibée, 337. — Il n'en est pas moins vrai que l'esprit humain ne peut outrepasser
certaines limites dans la connaissance des choses, parce qu'il ignore les causes
premières et que, l'àme étant incapable de distinguer entre la vérité et le men-
songe, force nous est de nous arrêter dès les premiers pas, 339. — Aussi est-il
plus facile et moins hasardeux d'être Pyrrhonien et de refuser à l'homme la
possibilité d'une certitude sur quoi que ce soit, que d'être Dogmatiste et d'ad-
mettre dans une certaine mesure cette possibilité, 339. — En dehors de l'infinie
diversité d'opinions qui nous divisent, nous varions nous-mêmes constamment
dans les jugements que nous portons sur un même sujet, 343. — Ces jugements
sont essentiellement variables avec nos dispositions physiques, et cette influence
est bien difficile à constater; ceux qui parlent on public, par exemple, n'arri-
vent-ils pas à subir eux-mêmes l'effet de leur propre parole (Cléomène, I'Aréopage,
Montaigne)? 345. — Les passions auxquelles l'àme est en proie, n'ont pas une ac-
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. II, Cil. XII. — VOL. II. B.33
tion moindre; les plus grands hommes sont ceux qui éprouvent les passions les
plus fortes; quelle confiance par suite avoir en notre jugement soumis à de pa-
reils mobiles, d'autant qu'il semble que plus il est exalté plus il a part aux se-
crets des dieux (Thémistocle, Démosthkne) ? 353. — Peut-on disconvenir que sous
l'influence de l'amour nous voyons, nous pensons, nous agissons tout autrement
que lorsijue nous sommes au calme? Sommes-nous plus dans la vérité dans un
cas que dans l'autre? C'est un point qu'il n'est pas facile de décider (Montaigne,
Pykiihox), 355. — De tout cela il résulte qu'il ne faut pas se laisser aller aisément
aux opinions nouvelles, on risque de perdre au change; et puis, quel privilège
ont donc les nouveautés pour nous séduire et nous enti-aîner (Cléanthe de Sa-
Mos, NicÉTAs de Syracuse, Copernic)? 355. — Quelles garanties particulières de sta-
bilité présentent-elles pour l'avenir (Aristote, Paracelse, Théoi'iiraste, Jacques
Peletier, Ptolémée)? 357. — Tout en ce monde et ce monde lui-même ne se mo-
difient-ils pas continuellement? Combien sont incertaines les données que nous
avons sur son origine (Platon, les prêtres d'Egypte et Hérodote, Aristote et
CicÉRON, Salomon et Isaie, Heraclite, Apulée, Alexandre, les Chaldéens, Zoroas-
TRE, Sais, Athènes, Épicure), 361. — Dans le Nouveau Monde, n'a-t-on pas re-
trouvé des pratiques et des traditions ayant cours, qui existent ou ont existé
dans le monde ancien? 363. — Malgré ces ressemblances qu'on relève en des
lieux différents bien éloignés les uns des autres, il est certain que l'esprit de
l'homme change suivant les climats et les siècles, et son inconstance dans ses
désirs est une preuve indéniable de sa faiblesse (Véuèce, les prêtres d'Egypte,
SoLON, Athènes, Thèbes, Cyrus), 367. — Incapables de discerner ce qui leur con-
viendrait, souvent les hommes demandent au ciel des biens qui sont pour eux
une source de malheurs (Socrate, les Lacédémoniens, Midas, Cléobis et Biton,
ÏROPHONius et Agamède), 369. — Dans l'impossibilité où ils sont de discerner en
quoi consiste le souverain bien, il semble que ce qui en est le plus approchant
soit ce que les Pyrrhoniens considèrent comme tel : l'ataraxie, c'est-à-dire le
calme absolu de l'esprit ne décidant jamais sur rien (Pythagore, Aristote, Ar-
CHÉsiLAs), 371. — En prenant la raison pour guide, la confusion, nos embarras
sont les mêmes, car tout change autour de nous, et les lois plus encore que
toute autre chose ; souvent ce qui est légitime ici est criminel ailleurs, 373. —
On n'est même pas d'accord sur ce qu'on appelle les lois naturelles; elles sont
aussi inconstantes que les autres; pas une n'est observée par toutes les nations
(Protagoras, Ariston, Thrasymaque), 375. — Que de choses, sur lesquelles l'accord
devrait exister, voyons-nous acceptées par les uns, proscrites par les autres, en
raison du point de vue différent auquel chacun se place (Peuplades chez les-
quelles les enfants mangent leurs pères et mères défunts, Lycurgue, Platon, Aris-
TippE et Denys le tyran, Aristippe et Diogène, Solon pleurant son fils, Socrate
pleuré par sa femme), 377. — Les plaidoyers des avocats et en maintes occasions
les embarras des juges, prouvent combien les lois prêtent à interprétation; les
idées sur la morale n'ont pas plus de fixité (Arcésilas, Dicéarque), 379. — Les
lois et les mœurs tiennent surtout leur autorité de ce qu'elles existent. Si on
remontait à leur origine, on constaterait parfois combien sont discutables les
principes qu'elles consacrent; aussi les philosophes qui se piquaient le plus de
ne rien accepter sans examen, ne se faisaient-ils nullement scrupule de ne pas
les observer et de ne tenir aucun compte des bienséances (Chrysippe, Métroclès
et Cratès, Diogène, IIipparchia),.381. — Des philosophes ont avancé que, dans un
même sujet, subsistent les apparences les plus contraires; ce qu'il y a de cer-
tain, c'est que les termes les plus clairs peuvent toujours être interprétés diffé-
remment et que bien des écrits obscurs ont, grâce à cela, trouvé des interpréta-
tions qui les ont mis en honneur (Heraclite, Protagoràs), 383. — Homère n'a-t-il
l>as été présenté comme ayant traité en maître les questions de tous genres?
Et Platon n'ost-il pas constamment invoqué comme s'étant prononcé en toutes
choses, dans le sens de celui qui le cite, etc.? 387. — Quoique les notions qui
nous viennent des sens puissent, comme on l'a dit, être erronées, les sens sont
pourtant la source de toutes nos connaissances (Chrysippe, Carnéade), 389. — Si
nous ne pouvons tout expliquer, peut-être est-ce parce que certains sens exis-
tent dans la nature et que l'homme s'en trouve dépourvu, ce qu'il lui est impos-
ESSAIS de MONTAIGNE. — T. IV. 3
B.34 ESSAIS DE MONTAIGNE.
sible de constater, 391. — C'est par les sens que, malgré les erreurs en les-
quelles ils nous induisent, toute science s'acquiert; chacun d'eux y contribue et
aucun ne peut suppléer à un autre (Épicuiie, Timagoras), 395. — L'expérience ré-
vèle les erreurs et les incertitudes dont est entaché le témoignage des sens qui,
bien souvent, en imposent à la raison (Philoxène, Narcisse, Pygmalios, Démocrite,
Théophraste, le joueur de flûte de Gracchus), 399. — Par contre, les passions de
l'âme ont également action sur les opérations des sens et concourent à les alté-
rer, 403. — C'est avec raison que la vie de l'homme a été comparée à un songe;
que nous dormions ou que nous soyons éveillés, notre état d'âme varie peu,
405. — En général, les sens des animaux sont plus parfaits que ceux de l'homme;
des dififéreiices sensibles se peuvent aisément constater entre eux, 405. — Même
chez l'homme, nombreuses sont les circonstances qui modifient les témoignages
des sens, et leur enlèvent tout degré de certitude, d'autant que souvent les indi-
cations données par l'un sont contradictoires avec celles fournies par un autre,
409. — En somme, on ne peut rien juger définitivement des choses d'après les
apparences que nous en donnent les sens, 413. — En outre, rien chez l'homme
n'esta l'état stable; constamment en transformation, il est insaisissable (Pla-
ton, Parmémde, Pytil\gore, Heraclite, Épicharme, Plutarque), 415. — D'où nous
arrivons à conclure qu'il n'y a rien de réel, rien de certain, rien qui n'existe
que Dieu; que l'homme n'est rien, ne peut rien par lui-même; et que, seule, la
foi chrétienne lui permet de s'élever au-dessus de sa misérable condition (Plu-
tarque, Sénèque), 417.
CHAPITRE XHI.
Du jugement à porter sur la mort d'autrui, II, 421. — Peu d'hommes
témoignent à leur mort d'une réelle fermeté d'âme; il en est peu qui croient à
ce moment que leur dernière heure est venue, 421. — Quand nous en sommes
là, nous sommes portés d'ordinaire à croire la nature entière intéressée à notre
conservation et que nous ne pouvons périr sans que le monde en soit boule-
versé (César), 421. — Pour juger du courage de qui s'est donné la mort, il faut
examiner dans quelles circonstances il se trouvait; la fermeté que nous ad-
mirons ne vient souvent que de la crainte de souffrir une mort lente ou hon-
teuse (Caligula, Tibère, Héliogabale), 423. — Exemples de faiblt^sse chez des gens
qui avaient décidé de se tuer (L. Domitius, Plautius Sylvanus, Albucilla, Dé-
mosthène, g. Cimbria, Ostorius), 425. — Une mort prompte et inattendue est la
plus désirable (l'empereur Adrien, César), 425. — Noble constance de Socrate
dans l'attente de la mort, 427. — Exemples (Pomponius Atticus, le philosophe
Cléanthe, Tullius Marcellinus), 427. — Courage de Caton aidant, en pareille
circonstance, la mort à accomplir son œuvre, 429.
CHAPITRE XIV.
Comment notre esprit se crée à lui-même des difficultés, II, 431.
— Le choix de l'homme entre deux choses de même valeur se détermine par
si peu, qu'on est amené à en conclure que tout ici-bas est doute et incertitude
(Pline), 431.
CHAPITRE XV.
Notre désir s'accroît par la difficulté qu'il rencontre à se satis-
faire, II, 4;]3. — La difficulté de les obtenir et la crainte de les perdre sont
ce qui donne le plus de prix à nos jouissances; les obstacles rendent notam-
ment les plaisirs de l'amour plus piquants; tout ce qui est étranger a pour
nous plus d'attr*it (Jupiter et Danaé, Lycurgue et les lois de Lacédémone, la cour-
tisane Flora), 433. — Les femmes ne se voilent et n'affectent de la pudeur, que
pour exciter davantage nos désii-s (l'impératrice Poppée), 435. — C'est pour ré-
veiller notre zèle religieux, que Dieu permet les troubles qui agitent l'Église,
437. — En interdisant le divorce, ou a affaibli les nteuds du mariage, 437, — La
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. II, Cil. XV. — VOL. II. B.3o
sévérité des supplices, loin d'empêcher les crimes, en augmente le nombre; il y
a des peuples qui ont existé sans lois répressives (les Argyppiîes), 437. — Mon-
taigne, au milieu des guerres civiles, a garanti sa maison de toute invaison, en
la laissant ouverte et sans défense, 439.
CHAPITRE XVI.
De la gloire, II, 441. — En tout, il y a lieu de distinguer le nom et la chose,
442. — A Dieu seul appartient gloire et honneur; l'homme manque de tant d'au-
tres choses qui lui sont autrement nécessaires, qu'il est bien puéril à lui de re-
chercher celles-là, 441. — Plusieurs philosophes ont pi'èché le mépris de la gloire
laquelle, chez l'homme, est cause de si grands dommages; elle n'est à rechercher
que lorsque d'autres avantages plus réels l'accompagnent (CnuYsn'PE, Diogène,
les SniJ;NES et Ulysse), 443. — Et cependant l'homme est tellement complexe
que bif'n que ce mépris fût un des dogmes fondamentaux de sa doctrine. Épi-
cure lui-même, à son heure dernière, n'a pas été sans se préoccuper du soin de sa
réputation, 445. — Selon d'autres pliilosophes la gloire est désirable pour elle-
même; le plus généralement on admet qu'il ne faut ni la rechercher, ni la fuir
(Carnéade, Ari.stote), 447. — Erreur de ceux qui ont cru que la vertu n'est dési-
rable que pour la gloire qui l'accompagne (Cicéron), 447. — S'il en était ainsi, il ne
faudrait jamais faire de belles actions que lorsqu'on est remarqué (Sextus Pedu-
CEUS, Sextilius Rufus, m. Crassus et Q. IIortensius), 447. — La vertu serait chose
bien frivole, si elle tirait sa recommandation de la gloire, 449. — Quant à Mon-
taigne, toute la gloire qu'il désire, c'est de passer une vie tranquille, telle qu'il la
conçoit, 449. — C'est le hasard qui donne la gloire: que de belles actions demeu-
rent inconnues (César, Alexandre), 449. — La vertu est à rechercher pour elle-
même, indépendamment de l'approbation des hommes, 451. — Le jugement des
foules est méprisable ; le sage ne doit pas attacher de prix à l'opinion des fous
(Uémétrius, Cicéron), 453. — Quand on ne suivrait pas le droit chemin uniquement
parce qu'il est droit, il faudrait encore le suivre pour son propre avantage, les
choses honnêtes étant ordinairement celles qui profitent le plus (Paul Emile, Fa-
bius), 153. — On fait trop cas de la louange et de la réputation, d'ailleurs on
n'est jamais jugé que sur des apparences; aussi notre juge le plus sûr, c'est nous-
mêmes, 455. — Certains vont jusqu'à vouloir que leurs noms soient connus à tout
prix, même par des crimes (Érostkate, Manlius Capitolinus), 457. — Qu'est-ce
pourtant que la gloire attachée à un nom? n'est-il pas des noms communs à plu-
sieurs familles, témoin celui de Montaigne? 457. — Peu d'hommes, sur un très
grand nombre, jouissent de la gloire à laquelle ils pourraient prétendre (les
Grecs, les Romains, les Lacédémoniens), 459. — Les écrits qui relatent leurs actions,
le souvenir qui s'en conserve sont eux-mêmes de bien courte durée, 459. — A
quel degré ne faut-il pas atteindre pour que notre mémoire se perpétue! dans de
telles conditions, et la vertu portant elle-même sa récompense, est-ce la peine de
sacrifier à la gloire? 4(51. — On peut cependant arguer en sa faveur qu'elle est un
stimulant pour les hommes; qu'elle les porte quelquefois à la vertu, parce que re-
doutant le blâme de la postérité, ils recherchent son estime (Trajan, Néron, Pla-
ton), 461. — Un semblable mobile équivaut à avoir recoui's à la fausse monnaie
(luand la bonne ne suffit pas; cela a été le cas de tous les législateurs (Numa, Ser-
TORius, Zoroastre, Trismégiste, Zamolxis, Charondas, Minos, Lycurgue, Dragon et
Soi.oN, Moïse, la religion des Bédouins), 463. — Quant aux femmes, elles ont tort
d'appeler honneur ce qui est leur devoir; celles qui ne sont retenues que par la
crainte de perdre leur honneur, sont bien près de céder, 463.
CHAPITRE XVII.
De la présomption, II, 465. — La présomption nous fait concevoir une trop
haute idée de notre uiéfite, elle nous représente à nous-mêmes autres que nous ne
sommes; mais, pour fuir ce défaut, il ne faut pas tomber dans l'excès contraire
et, par une excessive modestie, s'apprécier moins qu'on ne vaut; en toutes choses,
B.36 ESSAIS DE MONTAIGNE.
il faut être vrai et sincère, 465. — Se peindre soi-môme est le moyen de se faire
connaître pour qui mène une vie obscure; c'est ce qui, contrairement aux con-
ventions mondaines, a déterminé Montaigne à parler de lui-même et l'incite à
continuer (Llcilius), 462. — Remontant à son enfance, il remarque, qu'ainsi qu'il
arrive souvent, il avait des gestes habituels qui, chez lui, pouvaient indiquer de
la fierté; on ne saurait en inférer qu'il .soit réellement atteint de ce défaut (Alexan-
dre, Alciiîiade, Jules César, Cicéron, Constantin), 467. — Il ne trouve bien rion
de ce qu'il fait, et estime toujours moins les choses qu'il possède que celles qui
appartiennent aux autres, 469. — La trop bonne opinion que l'homme a de lui-
même, semble à Montaigne être la cause des plus grandes erreurs, 471. — Il sait
le peu qu'il vaut, il a toujours été peu .satisfait de ce que son esprit a produit,
surtout lorsqu'il s'est essayé dans la poésie que cependant il aime, 471. — Accueil
fait aux jeux olympiques à celle de Denys l'Ancien, 473. — Opinion que Montaigne
a de ses propres ouvrages; il a grand'peine à rendre ses idées et ne s'entend nul-
lement à, faire valoir les sujets qu'il traite (Cicéron, Xénophon, Platon), 475. —
Son style est embarrassé, sa nature primesautière s'accommode mieux de parler
que d'écrire; sa prononciation est altérée par le patois de son pays; avec l'âge, il
a perdu l'habitude qu'il avait, étant enfant, de s'exprimer et d'écrire en latin
(Salluste, César, Sénèque, Plutakqle, Messala), 477. — De quel prix est la beauté
corporelle? c'est elle qui, la première, a mis de la différence entre les hommes,.
479. — Montaigne était d'une taille au-dessous de la moyenne. A rencontre de ce
qui est pour la femme, chez l'homme une taille élevée est la condition essentielle
et presque unique de la beauté (C. Marius. les Éthiopiens, les Indiens, Jésus-Christ,
Platon, Philopcsmen), 481. — Généralement maladroit aux exercices du corps, il
était cependant vigoureux et résistant, quand les fatigues auxquelles il se livrait
provenaient de sa propre volonté, 483. — Son état de fortune à sa naissance lui
assurait l'indépendance, il s'en est tenu là, 485. — Sa nonchalance est telle, qu'il
préfère ignorer les préjudices qu'il peut en éprouver que d'avoir à s'en préoccu-
per, 487. — Toute réflexion, toute délibération lui sont pénibles, bien qu'une fois
sa détermination prise, la résolution ne lui fasse pas défaut, 487. — L'incertitude
du succès l'a dégoûté de l'ambition, qu'il n'admet que chez ceux qui sont dans l'o-
bligation de chercher fortune pour se maintenir dans la condition où ils sont nés
(le chancelier Olivier), 489. — Son siècle, par sa dépravation, ne convient nulle-
ment à son humeur, 491. — On n'y connaît pas la franchise, la loyauté et, lui,
abhorre la dissimulation (Aristote, Appollonius), 493. — La fourberie finit presque
toujours par avoir de mauvais résultats; il est plus nuisible qu'utile pour les
princes d'y avoir recours (Metellus Macedonicus, Louis XI, Tibère, Soliman), 495.
— Montaigne, ennemi de toute contrainte et de toute obligation, apportait dans
ses relations avec les grands une entière liberté de langage (Aristippe), 493. —
L'infidélité de sa mémoire lui rendait impossible de prononcer des discours de
longue haleine, 497. — II était tellement rebelle à toute pression, que sa volonté
elle-même était parfois impuissante à obtenir obéissance de lui-même (un archer),
497. — Son peu de mémoire qui se révélait en maintes occasions, le mettait no-
tamment hors d'état de démêler dans ce qui lui venait à l'esprit, ce qui lui était
propre de ce qui était une réminiscence de ses lectures (Messala Corvinus,
Georges Trapezunce), 499. — Il avait l'esprit lent et obtus, mais ce qu'il avait une
fois compris il le retenait bien (Pline le Jeune), 501. — Son ignorance à propos
des choses les plus communes, 503. — Il était foncièrement irrésolu, trouvant
tour à tour également bonnes les raisons alléguées pour ou contre, ce qui le por-
tait dans les cas douteux à suivre les autres ou à s'en rapporter au hasard, plus
qu'à se décider par lui-même (René de Lorraine, Chrysippe, Mathias, Socrate),
505. — Par la même raison, il est peu favorable aux changements politiques, parce
qu'on n'est jamais sûr des institutions nouvelles qu'on veut substituer à celles
existant depuis longtemps déjà (Machiavel), 507. — Sur quoi est fondée l'estime
que Montaigne a de lui-même; il croit à son bon sens, du reste personne au
monde ne s'imagine en manquer, 509. — C'est ce qui fait que les ouvrages uni-
quement inspirés par le bon sens, attirent si peu de réputation à leurs auteurs;
chacun se croit capable d'en faire autant, 511. — Montaigne estime que ses opi-
nions sont saines; il en voit une preuve dans le peu de cas qu'il n'a jamais cessé
SOMMAIRE DES ESSAIS. IJV. Il, Cil. XVII. — VOL. II. B.37
de faire de lui-même malgré la profomle aU'ection qu'il se porte, 511. — Los au-
tres regardent en avant d'eux; lui ne regarde que lui-même, s'examine, se con-
trôle et exerce ainsi constamment son jugement, 513. — 11 estime peu son épo-
que ; peut-être ce sentiment provient-il en partie de son commerce continu avec
l'antiquité autrement riche à tous égards. 513. — C'est toujours avec plaisir qu'il
loue le mérite partout où il le constate, chez ses amis et même chez ses enaemis
(les Perses), 515. — Les honunes complets sont rares; éloge de son ami Etienne
de la Boétie, 515. — Les gens de lettres sont vains et faibles d'entendement;
peut-être exige-t-on trop d'eux et est-on, envers eux, moins porté à l'indulgence,
515. — Mauvaise direction imprimée à l'éducation qui se borne, en fait de morale, à
des définitions, au lieu de nous en inculquer les principes, 517. — EfTets d'une bonne
éducation; elle modifie le jugement et les mœurs. Les mœurs du peuple, en leur
simplicité, sont plus réglées que celles des philosophes de ce temps, 517. —
Honunes de guerre, hommes politiques, poètes et autres qui, seuls, parmi ceux de
son siècle, semblent à Montaigne mériter une mention spéciale (le duc de Guise,
le maréchal Stkozzi, les chanceliers Olivier et l'IIospital, Daurat, Théodore de
Bèze, Buchaxax, Mont-Doré, Turnebus, Ronsard, du Bellay, le duc cI'Albe, le con-
nétable DE Montmorency, M. de la Noue), 519. — Éloge de Marie de Gournay, sa
flUe d'alliance, 519. — En ces temps de guerre civile continue, la vaillance, en
France, a atteint presque à la perfection et y est devenue une vertu commune,
521.
CHAPITRE XVIII.
Du fait de donner ou recevoir des démentis, II, 521. — Si, dans son
livre, Montaigne parle aussi souvent de lui-même, dont la vie n'offre rien de re-
marquable, c'est pour laisser un souvenir de lui à ses amis (César, Xénopiion,
Alexandre, Auguste, Caton, Sylla, Bkutus), 521. — Mais alors même que personne
ne le lirait, il n'en aurait pas moins employé, d'une manière agréable, à s'étudier
et à se peindre, une grande partie de sa vie; que lui importe le reste, 525. — Son
siècle est si corrompu que l'on ne se fait plus scrupule de parler contre la vérité,
défaut imputé à bien des époques aux Français (Pindare, Platon, Salvinus Mas-
siLiENsis), 527. — Et cependant rien ne les offense plus que de leur en faire re-
proche, probablement parce que les reproches mérités blessent plus que les ac-
cusations non fondées; et aussi, parce que mentir est une lâcheté (Lysandre), 527.
— Le mensonge est un dissolvant de la société; il est en abomination chez cer-
tains peuples de l'Amérique récemment découverte, 529. — Les Grecs et les Ro-
mains, moins délicats que nous sur ce point, ne s'offensaient pas de recevoir des
démentis (César), 529.
CHAPITRE XIX.
De la liberté de conscience, II, 529. — Le zèle religieux est souvent ex-
cessif et conséquemment injuste, 529. — C'est à ce zèle outré des premiers chré-
tiens qu'il faut attribuer la perte d'un grand nombre d'ouvrages de l'antiquité
(l'empereur Tacite et Cornélius Tacite), 531. — Leur intérêt les a aussi portés à
louer de très mauvais empereurs favorables au christianisme, et à en calomnier
de bons qui lui étaient contraires; du nombre de ces derniers est Julien, sur-
nommé l'Apostat, qui était un homme de premier ordre; sa continence, sa justice
Alexandre, S'ch'ion), 531. — Appréciation portée sur lui par deux historiens chré-
tiens ses contemporains, Ammien Marcellin et Eutkope, 533. — Sa sobriété, son
application au travail, son habileté dans l'art militaire (Alexandre le Grand), 533.
— Sa mort a quelque similitude avec celle d'Épaminondas, 535. — On l'a sur-
nommé l'Apostat; c'est un surnom qu'il ne mérite pas, n'ayant vraisemblable-
ment jamais été chrétien par le cœur. 11 était excessivement superstitieux; l'ex-
clamation qu'on lui prête, lorsqu'il se sentit fra[)pé à mort, ne semble pas avoir
été dite (Marcus Brutus), 535. — 11 voulait rétablir le paganisme et détruire les
chrétiens en entretenant leurs divisions par une tolérance générale, 525. — Nos
rois, probablement par impuissance, suivent le même système à l'égard des ca-
tholiques et des protestants, 537.
B.38 ESSAIS DE MONTAIGNE.
CHAPITIIE XX.
Nous ne goûtons rien qui ne soit sans mélange, II, 537..— Los
hommes ne sauraient goûter de plaisirs sans n^Mange; toujours quelque amer-
tume se joint à la volupté; il semble que, sans cet ingrédient, on ne saurait la
supporter (Akiston, Pykrhon, Épicharme, Socrate, Métuodore, Attale), 537. — Au
moral, il en est de même; point de bonheur sans quelque teinte de vice, point de
justice sans quelque mélange d'injustice (Platon), 541. — Dans la société même,
les esprits las plus parfaits ne sont pas les plus propres aux affaires ; tel homme
du plus grand sens ne sait pas conduire sa maison, tel qui connaît l'économie
publique laisse glisser en ses mains toute une fortune (Simomde et le i"oi Hié-
ron), 541.
CHAPITRE XXI.
Contre la fainéantise, II, 543. — C'est un devoir pour un prince de mourir
debout, c'est-à-dire sans cesse occupé des affaires de l'État; pourquoi des sujets
se sacrifieraient-ils au service et aux intérêts d'un souverain dont l'âme est avilie
par l'oisiveté (les empereurs Vespasien et Adrien)? 543. — Il est naturel qu'un prince
commande ses armées; les succès qu'il remporte sont plus complets et sa gloire
plus justifiée (Sélim I, Bajazet II, Amurat III et Charles V; les rois de Castille et
de Portugal), 545. — A l'activité les princes doivent joindre la sobriété (l'empe-
reur Julien, la jeunesse lacédémonienne et la jeunesse persane, les anciens Ro-
mains), 545. — Le désir de mourir bravement et utilement est très louable, mais
cela n'est pas toujours en notre pouvoir (les légions romaines de M. Fabius, quel-
ques soldats indiens, Philistus), 547. — Bel exemple de vertus guerrières donné
par IMouLEY-MoLuCH, roi de Fez, dans un combat où il expire vainqueur des Por-
tugais, 547. — Tranquillité d'âme de C.aton, résolu à la mort et sur le point de se
la donner, 551.
CHAPITRE XXII.
Des postes, II, 551. Montaigne, petit et trapu, courait volontiers la poste
dans sa jeunesse, 551. — L'usage de disposer à demeure des chevaux de relais,
de distance en distance, a été établi par Cyrus, roi de Perse ; les Romains ont agi
de même (Vibullius Rufus, César, Tiberius Néron, Sempronius Gracchus), 553.
— Emploi d'hirondelles, de pigeons pour faire parvenir rapidement des nouvelles
(Cecina, D. Brutus), 553. — Au Pérou, c'était avec des porteurs que se courait la
poste ; mesure prise en Turquie pour assurer le service des courriers, 553.
CHAPITRE XXIII.
Des mauvais moyens employés à bonne fin, II, 553. — Les états po-
litiques sont sujets aux mêmes vicissitudes et accidents que le corps humain;
lorsque leur population s'accroît outre mesure, on recourt aux émigrations, à la
guerre, etc. (les anciens Francs, les Gaulois et Brennus, les Goths, les Vandales,
les Turcs, les Romains, Edouard III roi d Angleterre, Philippe de Valois), 553. — La
faiblesse de notre condition nous réduit à recourir parfois, dans un bon but, à de
mauvais moyens (Lycurgue, condamnés a mort livres vivants au scalpel des méde-
cins), 557. — Les spectacles de gladiateurs avaient été inventés pour inspirer au
peuple romain le mépris de lamort (l'empereur Théodose), 557.
CHAPITRE XXIV.
De la grandeur romaine, II, 559. — Montaigne ne veut dire qu'un mot do
la grandeur des Romains, à laquelle il ne trouve rien de comparable. N'étant
encore que simple citoyen romain, César donne, vend, propose des trônes (César
et CicÉRON, M. FuRius, le roi Déjotarus et un gentilhomme de Pergame, le roi Pto-
lémée), 559. — Une lettre du sénat romain suffit pour faire abandonner ses con-
SOMMAIRE DES ESSAIS. LI\ . If, GII. \.\IV. — VOL. II. B.;50
quèU's à un roi puissant (I'oimi.ils et le roi Antiochus), 5G1. — Los Romains ren-
daient leurs royaumes aux rois qu'ils avaient vaincus, pour faire de ceux-ci des
instruments de servitude (Alulste, le roi breton Cogidlnls, Soi-iman), ûG.
CHAPITRE XXV.
Se garder de contrefaire le malade, II, 563. — Exemples de personnes
devenues soit goutteuses, soit borgnes après avoir feint de l'être pendant quelque
temps (Celils, un homme cité par Appien), 503. — Réflexion de Montaigne sur un
vœu formé par quelques gentilshommes anglais, 565. — Il faut empêcher les en-
fants de contrefaire les défauts physiques qu'ils aperçoivent chez les autres, de
peur qu'ils ne les contractent eux-mêmes, 565. — Exemple d'un homme devenu
aveugle en dormant, 565. — Une folle habitant la maison de S(''nèque, devenue
aveugle, croyait que c'était la maison qui était devenue obscure; réflexion de ce
philosophe sur ce que les hommes ressemblent à cette folle, attribuant toujours
leurs vices à d'autres causes qu'à eux-mêmes, 565.
CHAPITRE XXVI.
Du pouce, II, 567. — Usage chez cei'tains i*ois barbares de cimenter leurs
alliances en entrelaçant leurs pouces, les piquant, et suçant le sang l'un de l'autre,
567. — Etymologie du mot pouce, 567. — Coutume des Romains d'abaisser ou
d'élever le pouce pour applaudir ou pour ordonner la mort des gladiateurs, 567. —
La mutilation du pouce chez les anciens dispensait du service militaire (les Ro-
mains, Alglste, C. Vatienus, Phu.oclès, les Athéniens et les Écinètes, les Lacédémo-
NIENS), 569.
CHAPITRE XXVII.
La poltronnerie est mère de la cruauté, II, 569. — Vérité de l'adage qui
fait le titre de ce chapitre; lo vrai brave pardonne à l'ennemi qu'il a vaincu, le
lâche l'injurie et le frappe même lorsqu'il est réduit à l'impuissance (Alexandre
tyi-an de Phères), 569. — Tuer son ennemi quand il est abattu, c'est se priver de
la vengeance; mieux vaudrait le conserver à la vie, pour jouir de sa honte. Celui
qui succombe n'est pas du reste le plus à plaindre; le i-epos lui est acquis, tandis
que le survivant est obligé de fuir, de se cacher (Bias, Lysiscus, coutume du
l'oyaume de Narsingue), 571. — Une chose inexcusable c'est d'attendre la mort d'un
ennemi pour publier des invectives contre lui (Asinils Pollion et Plancus, Aris-
tote),573. — Les duels dérivent d'un sentiment de lâcheté, de la crainte que notre
adversaire ne renouvelle ses offenses ; l'usage de s'y faire accompagner de tenants
dans les querelles particulières part de ce même sentiment, la peur de se voir
abandonné à soi-même devant le danger; devoirs des tenants en pareille occur-
rence (le duc d'Orléans et le roi Henry d'AxoLETERRE, les Argiens et les Lacédé-
moniens, les Horaces et les Curiaces, un frère de Montaigne), 573. — S'il est vrai
que, seul, le courage doive être honoré, l'art de l'escrime est à flétrir, puisqu'il ne
procure la victoire qu'à force de feintes et de ruses; de plus, il porte à violer les
lois (le consul P. Rutilils, César à Pharsale), 577. — D'ailleure, à la guerre, cet
art est inutile et parfois dangereux (Piiilopoemen, Pl.vton), 579. — Les gens sangui-
naires et cruels sont généralement lâches, et un premier acte de cruauté en
amène nécessairement d'autres (l'empereur Maurice et Phocas; Philippe roi de
Macédoine, Thkoxkne et Poris), 581. — Les tyrans s'ingénient à prolonger les
tourments de leurs victimes; mais leur intention est souvent trompée, les, tortures
violentes tuant, et celles qui sont toiérables ne suffisant pas à leur rage, 583. —
Dans les exécutions ordinaires de la justice tout ce qui outrepasse la mort simple,
est cruauté (.Jliks crucifiés), 583. — Détails de quelques supplices atroces; Mon-
taigne pense que les plus hideux à voir, ne sont pas toujours ceux qui causent
le plus de douleur aux malheureux qui ont à les subir (l'empereur Meciimet en
Épire, Crésls; Georges Séchel, chef des paysans polonais révoltés), 585.
B.40 ESSAIS DE MONTAIGNE.
CHAPITRE XXVIU.
Chaque chose en son temps, II, 587. — Ce furent deux grands hommes
que Caton le Censeur et Caton d'Utique; mais celui-ci l'emporte de beaucoup sur
le premier, 587. — Dans sa vieillesse, Caton le Censeur s'avisa d'apprendre le grec ;
c'est un ridicule, toutes choses doivent être faites en leur temps (Q. Flaminius,
EuDAMiNONDAS et XÉNOCRATE, Philopoemen et le roi Ptolémée), 587. — Nos désirs de-
vraient être amortis par l'âge, mais nos goûts et nos pa.ssions survivent à la perte
de nos facultés; quant à lui, Montaigne, il ne pense qu'à sa fin et ne forme pas
de projets dont l'exécution nécessiterait plus d'une année, 589. — Sans doute un
vieillard peut encore étudier, mais ses études doivent être conformes à son âge,
elles doivent lui servir à quitter le monde avec moins de regrets (Caton d'Utique),
589.
CHAPITRE XXIX.
De la vertu, II, 591. — Par le mot vertu, il faut entendre ici la force d'âme.
Ce n'est pas en des élans impétueux mais passagers que consiste ce genre de
vertu ; elle demande de la persévérance, un caractère solide et constant, et se ren-
contre rarement, 591. — Bien qu'il la possédât à un haut degré, Pyrrhon essaya
vainement de toujours mettre sa vie en conformité avec sa doctrine ; c'est que
ce n'est pas tout de témoigner de la fermeté d'âme dans une circonstance donnée,
le difficile est de se montrer tel dans toutes ses actions, 591. — Traits de courage
amenés par une soudaine résolution (un paysan et un gentilhomme du pays de
Montaigne, une femme de Bergerac), 593. — Autres exemples, ceux-là suite de dé-
terminations, de projets arrêtés longtemps à l'avance; ces actions fortes et cou-
rageuses longuement préméditées sont, en général, le fruit de préjugés absurdes
ou de fausses doctrines (les femmes hindoues, les gymnosophistes, Calanus), 595. —
Le dogme de la fatalité, souvent mis en avant mais facile à réfuter, est fréquem-
ment exploité pour surexciter les esprits; c'est lui qui inspire tant d'audace aux
Turcs (les Bédouins, deux moines de Florence, un jeune Turc, Henry de Navarre),
597. — Quant aux assassins, la plupart du temps ce sont les passions religieuses
ou politiques qui arment leur bras (les assassins du prince d'Orange et du duc de
Guise, la secte des Assassins), 601.
CHAPITRE XXX.
A propos d'un enfant monstrueux, II, 605. — Description d'un enfant et
d'un pâtre monstrueux; ce qui nous paraît telj ne l'est pas pour la nature, 005.
CHAPITRE XXXI.
De la colère, II, 607. — Il vaut mieux confier les enfants au gouvernement
qu'à leurs propres parents (les institutions de Lacédémone et de Crète), 607. —
Ceux-ci les châtient quelquefois dans des transports de colère, ils les accablent de
coups, les estropient; ce n'est pas correction, c'est vengeance, 607. — La colère
nous fait le plus souvent envisager les choses sous un aspect trompeur; les fautes
qui nous irritent ne sont pas telles qu'elles nous paraissent. Combien hideux
sont les signes extérieurs de la colère (César et Rabirius), 609. — Il ne faut pas
juger de la vérité ou de la fausseté des croyances et des opinions des hommes par
leur conduite habituelle (Eudaminondas, Cléomène, Cicéron et Brutus, Cicéron et
Sénèque, les ÉPHORES de Sparte), 611. — Modération de quelques grands hommes
sous l'empire de la colère (Plutarque et un de ses esclaves, Archytas de Tarente,
Platon, le lacédémonien Charylle et un ilote), 611. — Nous cherchons toujours à
trouver et à faire trouver notre colère juste et raisonnable (Cneius Pison), 613. —
Les femmes naturellement emportées, deviennent furieuses par la contradiction ;
le silence et la froideur les calment (l'orateur Celius, Phocion), 615. — Pour ca-
cher sa colère, il faut des efforts inouïs ; elle est moins terrible quand elle éclate
librement (les hommes de guerre, Diogène et Démosthèse), 615. — Attentions à avoir
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. II, Cil. XXXI. — VOL. H. B.41
quand, dans son intérieur, on a sujet de se mettre en colère, 617. — Caractère du
courroux de Montaigne; il l'oint parfois d'être plus en colère qu'il ne l'est réelle-
ment, 617. — Il ne croit pas que la colère puisse jamais avoir de bons effets,
même quand il s'agit de forcer les autres à pratiquer la vertu; c'est une arme dan-
gereuse; elle nous tient, nous ne la tenons pas (Akistote),619.
CHAPITRE XXXII.
Défense de Sénèque et de Plutarque, II, 621. — Combien est fausse la
comparaison" que l'on a voulu établir entre SKNi^;QUE et le cardinal de Lorraine, en
s'appuyant sur le portrait injurieux que l'historien Dion trace du premier; il est
plus rationnel de croire ce qu'en disent Tacite et quelques autres qui en parlent
d'une manière très honorable, 621. — Quant à Pi.ur arque, il a été accusé par Bo-
din, d'ignorance, d'excessive crédulité et de partialité ; réfutation de ces accusa-
tions. Sur le reproche d'ignorance, Montaigne n'a pas le savoir nécessaire pour en
juger, 623. — Nombreux exemples témoignant que les faits avancés par Plutarque
et qualifiés d'incroyables par son critique, n'ont rien d'impossible (un enfant de
Lacédémone, Pyrrhus, les jeunes Spartiates, Ammien Marcelun et les Égyptiens, un
PAYSAN espagnol et L. PisoN, Ei'iCHARis, do simples villageois du temps de Mon-
taigne), 623. — C'est un tort de vouloir juger du possible et de l'impossible par
ce dont nous sommes nous-mêmes capables (Agésilas), 629. — La partialité de
Plutarque en faveur des Grecs et au détriment des Romains n'est pas mieux fon-
dée, d'autant qu'il ne prétend pas que les grands hommes de ces deux peuples
qu'il met en parallèle, ont même valeur; il ne porto pas sur eux d'appréciation
d'ensemble,- il ne compare que des points de détail en des situations déterminées,
629.
CHAPITRE XXXIII.
Histoire de Spurina, II, 633. — Nous apprendre à commander à nos pas-
sions, tel est le but de la philosophie. Mais il en est d'une violence extrême; et,
des appétits qu'elles font naître en nous, ceux que l'amour occasionne semblent
les plus excessifs; peut-être est-ce parce qu'ils intéressent à la fois le corps et
l'âme, 633. — De combien de moyens ne s'est-on pas servi pour les amortir ; les
mutilations, les cilicos, les réfrigérants de toutes espèces (un prince français, XÉ-
nocrate), 633. — Chez quelques-uns, l'ambition est plus indomptable que l'amour;
Jules César, qui était d'une incontinence excessive, a toujours su réprimer la
fougue de cette passion quand il s'agissait de grands intérêts (César, Mahomet II),
635. — D'autres, au contraire, ont fait céder l'ambition à l'amour (Ladislas roi
de Naples), 637. — César ne sacrifiait jamais à ses plaisirs une heure de son
temps quand les affaires l'exigeaient tout entier; il était à la fois le plus actif et
le plus éloquent de son époque; il était aussi très sobre (César et Caton), 639. —
Sa douceur et sa clémence ont paru douteuses; mille exemples prouvent qu'il avait
ces qualités (les capitaines de Pompée, César à Pharsale, C. Memmius, C. Calvius,
Catulle, C. Oppius), 641. — Mais son ambition effrénée l'a amené à renverser la
république la plus florissante qui ait jamais existé, ce dont rien, d'après Mon-
taigne, ne saurait l'absoudre (j\Iarc Antoine), 6^13. — ExeKiple extraordinaire d'un
jeune Toscan, Spurina, qui, extrêmement beau, se cicatrisa tout le visage pour se
soustraire aux passions qu'il inspirait, 645. — Une telle action ne se peut approu-
ver; il est plus noble de lutter que de se dérober aux devoirs que la société nous
impose, autrement c'est mourir pour s'épargner la peine de bien vivre (Scipion et
Diogène), 645.
CHAPITRE XXXIV.
Observations sur les moyens que Jules César employait à la
guerre, II, 6^17. — Dans le chapitre précédent, Montaigne a examiné les vices et
les qualités de César, il s'occupe ici de ses hauts faits et de ses talents militai-
res; selon lui, ses commentaires devraient être le bréviaire de tout homme de
guerre, 6'17. — Pour rassurer ses troupes alarmées de la supériorité numérique de
B.42 ESSAIS DE MONTAIGNE,
ronuenii, il leur exagérait lui-même cette supériorité; il accoutumait ses soklats à
lui obéir sans les laisser commenter ses desseins; très ménager du temps, il sa-
vait amuser l'ennemi pour le surprendre avec plus d'avantage (le roi Jlba, Cy-
Kus, les Suisses), 647. — II n'exigeait guère tle ses soldats que la vaillance et la
discipline, parfois il leur donnait toute licence; il aimait qu'ils fussent richement
armés, les honorait du nom de « Compagnons », ce qui n'empêchait pas qu'il ne
les traitât, le cas échéant, avec beaucoup de sévérité, 649. — Il se complaisait aux
travaux de campagne, 651. — Il aimait à haranguer ses troupes avant le combat,
et ses harangues sont des modèles d'éloquence militaire, 651. — Rapidité de Cé-
sar dans ses mouvements; aperçu de ses guerres nombreuses en divers pays, 653.
— Il voulait tout voir par lui-même; préférait obtenir le succès en négociant,
plutôt que par la force des armes; il était plus circonspect qu'Alexandre dans ses
entreprises, et donnait hardiment de sa personne chaque fois que la nécessité le
comportait (bataille de Tournai, siège d'Av.\RicuM, guerre contre Afraxius et Pe-
TREius, César à Dyurachium, César franchissant I'Hellespoxt), 633. — Sa confiance
et sa ténacité au siège d'ALÉsiA; deux particularités dignes de remarque à pro-
pos de ce siège (Luculi.us, Vercingétorix), 657. — Avec le temps. César devint plus
retenu dans ses entreprises. Quoique peu scrupuleux, il n'approuvait cependant
pas qu'on se servît de toutes sortes de moyens à la guerre pour obtenir le suc-
cès (Arioviste), 659. — Il savait très bien nager et aimait à aller à pied, 659. —
Ses soldats et ses partisans avaient pour lui une extrême affection et lui étaient
tout dévoués (l'amiral de Chatillo.n, Sceva soldat de César, Graxius Petromus, le
siège de Salone), 661.
CHAPITRE XXXV.
Trois bonnes femmes, II, 663. — Quelques épigrammes de IMontaigne con-
tre les femmes qui font parade de leur affection pour leurs maris seulement
quand ils sont morts (la veuve d'un prince français), 663. — Cependant, dans
l'antiquité, il en relève trois qui voulurent partager le sort de leurs époux se
donnant la mort. La première, une italienne, citée par Pline le Jeune, était de
naissance commune; son dévouement, 665. — Les deux autres sont nobles; l'une
est Arria, femme de Cecina P^tus ; son énergie, 667. — L'autre est Paulixa Pom-
PEiA, femme de Sénèque; son histoire, 671. — Singulière preuve d'amour que, de
son côté, Sénèque, renonçant pour elle à mourir, avait donnée à sa femme, 675.
TROISIEME VOLUME.
CHAPITRE XXXVI.
Quels hommes occupent le premier rang entre tous, III, II. —
Trois hommes des temps passés occupent, selon Montaigne, le premier rang en-
tre tous. Le premier, c'est Homère, le prince, le modèle de tous les poètes; estime
que l'on en a fait dans tous les temps (Aristote, Varrox, Virgile, Alexandre le
Grand, Cléomène, Plutarque, Alcibiade, Hiéron, Platon et Panetius, Mahomet II et
le pape Pie II), II. — Le second est Alexandre le Grand : ses belles actions pendant
sa vie si courte; il est préférable à César qui pourtant lui est supérieur sous
certains rapports (Annibal, les Mahométans), 15. — Le troisième et le meilleur de
tous, c'est Epaminondas; il l'emporte sur Alexandre et César, mais son théâtre
d'action a été beaucoup plus restreint. Les Grecs l'ont nommé le premier d'entre
eux; il réunissait toutes les qualités que l'on trouve éparses chez les autres, et chez
lui elles atteignaient la perfection, 19. — Scipion Emilien pourrait lui être com-
paré, s'il eût eu une fin aussi glorieuse. Ce qu'on peut dire d'ALCiBiADE, 21. —
Bonté, douceur, équité et humanité d'Épaminondas (Pélopidas, les Béotiens), 21.
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. II, Cil. XXXVIl. — VOL. III. B.43
CHAPITRE XXXVIl.
De la ressemblance des enfants avec leurs pères, III, 23. — Com7
ment Montaigne a fait son livre: il n'y travaillait que lorsqu'il avait des loisirs;
un valet lui a emporté une partie de son manuscrit, il le regrette peu, 23. — Il y
a sept ou huit ans qu'il a commencé à l'écrire, et depuis dix-huit mois il souffre
d'un mal qu'il avait toujours redouté, de coliques néphrétiques, 23. — Combien
les hommes sont attachés à la vie! Pour lui, il est bien plus sensible aux maux
physiques qu'aux douleurs morales, et cependant il commence à s'habituer à sa
cruelle maladie qui lui offre cet avantage de le mieux famiUariser avec la mort
(Mécène, Tamerlan et les lépreux, Antisthène et Diogène), 23. — 11 n'est point de
ceux qui réprouvent que l'on témoigne par des plaintes et des cris les souffrances
que l'on ressent, quoiqu'il arrive à assez bien se contenir, et que, même dans les
plus grandes douleurs, il conserve sa lucidité d'esprit, s'observe et se juge, 27. —
Ce qui l'étonné et qu'il ne peut s'expliquer, ce sont ces transmissions physiques
et morales, directes et indirectes, des pères, des aïeux, des bisaïeuls aux enfants
(la famille des Lépides à Rome, une famille de Thèbes), 31. — 11 pense tenir de son
père ce mal de la pierre dont il est affecté, comme aussi il a hérité de lui de son
antipathie pour la médecine, 31. — Motif du peu d'estime en laquelle il tient cette
science, elle fait plus de malades qu'elle n'en guérit, 35. — La plupart des peu-
ples, les Romains entre autres, ont longtemps existé sans connaître la médecine
(les Romains, Caton i.e Censeur, les Arcadiens, les Libyens, nos villageois), 39. —
L'utilité des purgations imaginées par la médecine n'est rien moins que prou-
vée ; sait-on du reste jamais si un remède agit en bien ou en mal et s'il n'eût pas
mieux valu laisser faire la nature (un Lacédémonien, l'empereur Adrien, un
LUTTEUR et Diogène, Nicoclès), 39. — Les médecins se targuent de toutes les amé-
liorations qu'éprouve le malade et trouvent toujours à excuser le mauvais succès
de leurs ordonnances (Platon, Ésope), 41. — Loi des Égyptiens obligeant les mé-
decins à répondre de l'efficacité du traitement de leurs malades (Esculape), 43. —
Le mystère sied à la médecine; le charlatanisme qu'apportent les médecins dans
la désignation et le mode d'emploi de leurs drogues, leur attitude compassée près
de leurs malades en imposent; ils devraient toujours discuter à huis clos et se
garder de traiter à plusieurs un même malade, ils éviteraient ainsi de déceler les
contradictions qui régnent entre eux, 45. — Sur la cause même des maladies, que
d'opinions diverses! 47. — Quand la médecine a commencé à être en crédit;
fluctuations que, depuis cette époque, ont subies les principes sur lesquels elle re-
pose (lIipPOCRATE, Chrysippe, Érasistrate, Hiérophile, Asclépiade, Thémisson, Musa,
Vectius Valens, Thessalus, Crinas de Marseille, Charinus, Pline l'Ancien, Paracelse,
P'ioraventi, Argentarius), 47. — Rien de moins certain que les médicaments qui
ne font pas de bien ne font pas de mal ; en outre, les méprises sont fréquentes ;
la chirurgie offre une bien jjIus grande certitude, 49. — Comment ajouter foi à
des médicaments complexes, composés en vue d'effets différents, souvent con-
traires, devant se produire simultanément sur divers de nos organes? 53. — Cha-
que maladie devrait être traitée par un médecin distinct qui s'en serait spécia-
lement occupé (les Égyptiens), 55. — Faiblesse et incertitude des raisonnements
sur lesquels est fondé l'art de la médecine : l'un condamne ce que l'autre ap-
prouve, 55. — Quoique Montaigne n'ait confiance en aucun remède, il reconnaît
que les bains sont utiles, peut-être aussi les eaux thermales; diversité dans les
modes d'emploi de ces eaux (sources minérales en France, en Allemagne, en Ita-
lie), 57. — Conte assez plaisant contre les gens de loi et les médecins (les habi-
tants du pays de Lahontan), Gl. — Autre conte sur la médecine (un bouc nourri
d'herbes apéritives et de vin blanc), 63. — Ce n'est que leur science que Slontai-
gne attaque chez les médecins et non eux, pour lesquels il a la même estime que
pour les gens de n'importe quelle autre profession; limite dans laquelle il se con-
fie à eux ; combien au surplus ne font pas, pour eux-mêmes, usage des drogues
qu'ils prescrivent à autrui (Lycurgue, un gentilhomme gascon), 65. — C'est la
crainte de la douleur, de la mort, qui fait qu'on se livre communément aux mé-
decins (les Babyloniens, les Égyptiens), 07. — Sur quoi, du reste, la connaissance
B.44 ESSAIS DE MONTAIGNE.
que les médecins prétendent avoii- do lefficacité de leurs remèdes est-elle fondée
(Galien)? 69. — Insertion d'une lettre do Montaigne à IMadame de Duras. Elle lui
a entendu exposer ses idées sur la médecine, elle les retrouvei'a dans son ouvrage
où il se peint tel qu'il est, ne voulant pas paraître après lui autre qu'il n'était de
son vivant, se souciant peu de ce que, lui mort, on en pourra penser (Tibère),
71. — S'il a parlé si mal de la médecine, ce n'a 'été qu'à l'exemple de Pline et
de Celse, les seuls médecins de Rome ancienne qui aient écrit sur leur art, 75.
— 11 se peut que lui-môme en arrive à se remettre entre les mains des médecins;
c'est qu'alors, comme tant d'autres, il sera gravement atteint et ne sera plus en
possession de la plénitude de ses facultés; au surplus, sur ce sujet comme sur
toutes autres choses, Montaigne admet fort bien que tout le monde ne soit pas
de son avis (Périclès), 7ô.
LIVRE TROISIEME.
CHAPITRE I.
De ce qui est utile et de ce qui est honnête, III, 79. — La perfidie est
si odieuse que les hommes les plus méchants ont parfois refusé de l'employer,
même quand ils y avaient intérêt (Tibèke et Arminius), 79. — L'imperfection de
la nature humaine est si grande que des vices et des passions très blâmables,
sont souvent nécessaires à l'existence de la société; c'est ainsi que la justice re-
court quelquefois et bien à tort à de fausses promesses, pour obtenir des ayeux,
79. — Dans le peu d'affaires politiques auxquelles IMontaigne a été mêlé, il a
toujours cru devoir se montrer fi'anc et consciencieux (Hypéride et les Athéniens,
Attigus), 81. — Quelque danger qu'il y ait à prendre parti dans les troubles inté-
rieurs, il n'est ni beau, ni honnête de rester neutre (Gélon tyran de Syracuse,
MoRviLLERs évêque d'Orléans), 85. — Quel que soit le parti que l'on embrasse, la
modération est à observer à l'égard des uns comme vis-à-vis des autres, 87. — Il
est des gens qui servent les deux partis à la fois; ils sont à utiliser, tout en se
gardant du mal qu'ils peuvent vous faire, 87. — Quant à Montaigne, il disait à tous
les choses telles qu'il les pensait, et se contentait de ce qu'on lui communiquait
sans chercher à pénétrer les secrets de personne, ne voulant du reste être l'homme
lige de qui que ce fût (Philippide et Lysimaque), 87. — Cette manière de faire n'est
pas celle que l'on pratique d'ordinaire, mais il était peu apte aux affaires publi-
ques qui exigent souvent une dissimulation qui n'est pas dans son caractère, 89.
— 11 y a une justice naturelle, bien plus parfaite que les justices spéciales à cha-
que nation', que chacune a créées à son usage et qui autorisent parfois des actes
condamnables lorsque le résultat doit en être utile (l'indien Dendamis), 91. — La
trahison, par exemple, est utile dans quelques cas, elle n'en est pas plus honnête;
ceux qui s'y prêtent en sont flétris et on ne saurait vous imposer d'en commettre
(deux COMPÉTITEURS au royaume de Thrace, l'empereur Tibère et Pomponils Flac-
cus, les Lacédémomens et Antipater, les rois d'Egypte et leurs juges), 93. — Si elle
est excusable, ce n'est qu'opposée à une autre trahison sans que pour cela le
traître cesse d'être méprisé; parfois il est puni par ceux-là mêmes qu'il a servis
(F.ABRicius et le médecin de Pyrrhus, Jaroi.epc duc de Russie, Antigone et les sol-
dats d'EuMÈNE, I'esclave de Sulpitius, Clovis, Mahomet II, la fille de Séjan), 95.
— Ceux qui consentent à être les bourreaux de leurs parents et de leurs compa-
gnons encourent la réprobation publique (Witolde, prince de Lithuanie), 99. —
Les princes sont quelquefois dans la nécessité de manquer à leur parole; ils
ne sont excusables que s'ils se sont trouvés dans l'impossibilité absolue d'assurer
autrement les intérêts publics dont ils ont charge, 99. — Comment le Sénat de
Corinthe s'en remit à la Fortune, du jugement qu'il avait à porter sur Timoléox
qui venait de tuer son propre frère, 101. — Acte inexcusable du Sénat romain
revenant sur un traité qu'il avait ratifié, revirement fréquent dans les guerres
civiles, 101. — L'intérêt privé ne doit jamais prévaloir sur la foi donnée; ce n'est
SOMMAIRE DES ESSAIS. UV. HI, CH. I. — VOL. III. B.45
que si on s'est engagé à quelque choso d'inique ou de criminel, que l'on peut
manquer à sa parole, 103. — Chez Épaminondas, l'esprit de justice et la délica-
tesse de sentiments ont toujours été prédominants; son exemple montre qu'ils
sont compatibles avec les rigueurs de la guerre et qu'il est des actes qu'un
homme ne peut se permettre même pour le service de son roi, non plus que
pour le bien de son pays (Pompée, Césau, Maiuls, un soldat de Pompée, un autre
à une époque un peu postérieure), 103. — En résumé, l'utilité d'une action ne la
rend pas honorable, 107.
CHAPITRE II.
Du repentir, III, 107. — Avant d'entrer en matière, Montaigne jette un re-
gard sur lui-même et expose que, si la peinture qu'il (ait de lui dans son ouvrage
ne le représente pas constamment avec les mêmes idées, c'est qu'il se peint au
jour le jour et que rien n'est stable en ce monde; il change, parce que tout
change (Demade), 107. — Quoique sa vie n'offre rien de particulier, l'étude (|u'il
en fait, n'en a pas moins son utilité, étant donné que c'est un homme qu'il dé-
peint, et non un grammairien, un poète ou un jurisconsulte; que jamais auteur
n'a traité un sujet qu'il possédait mieux, et qu'il ne veut que raconter et non en-
seigner, 109. — Tout vice laisse dans l'àme une plaie qui tourmente sans cesse;
une bonne conscience procure, au contraire, une satisfaction durable; c'est ce
qui fait que Montaigne se félicite de n'avoir, malgré la contagion de son siècle,
causé ni la ruine ni l'affliction dé personne, de n'avoir pas attenté publique-
ment aux lois, ni manqué à sa parole, 111. — Chacun devrait être son propre
juge, les autres n'ont qu'une fausse mesure de nous-mêmes; ce n'est pas nous
qu'ils voient, mais ce qu'ils croient deviner de nous sous le masque dont nous
nous couvrons, 113. — Le repentir est, dit-on, la suite inévitable d'une faute;
cela n'est pas exact pour les vices enracinés en nous, 115. — La vie extérieure
d'un homme n'est pas sa vie réelle, il n'est lui-même que dans sa vie privée;
aussi combien peu font l'admiration de ceux qui vivent constamment dans leur
intérieur et même dans leur voisinage immédiat. C'est surtout chez les hommes
de condition sociale peu élevée, que la grandeur d'âme se manifeste (Bias, Livius
Drusus, Agésilas, Montaigne, Aristote, Alexandre et Socrate, Tamerlan, Érasme),
115. — Les inclinations naturelles, les longues habiXudes se développent, mais ne
se modifient ni ne se surmontent par l'éducation ; aussi ceux qui entreprennent
de réformer les mœurs, se trompent-ils en croyant y arriver : ils n'en changent
que l'apparence, 121. — Les hommes en général, même dans leur repentir, ne
s'amendent pas réellement ; s'ils cherchent à être autres, c'est parce qu'ils espè-
rent s'en trouver mieux; pour lui, son jugement a toujours dirigé sa conscience
(un PAYSAN de l'Armagnac), 121. — Aussi ne se repent-il aucunement de sa vie
passée; dans la gestion de ses propres affaires, il a pu commettre des erreurs
importantes : c'est à la fortune, et non à son jugement, qu'il en impute la faute,
125. — Les conseils sont indépendants des événements; lui-même en demandait
peu et n'en tenait guère compte; d'autre part, il en donnait rarement. Une fois
une affaire finie, il se tourmentait peu de la tournure qu'elle avait prise, lors
même qu'elle était contraire à ses désirs ou à ses prévisions (Phocion), 129. —
On ne saurait appeler repentir les changements que l'âge apporte dans notre
manière de voir et par suite dans notre conduite; la sagesse des vieillards n'est
que de l'impuissance; ils raisonnent autrement, et peut-être moins sensément
que dans la vigueur de l'âge (Antisthène), 131. — Il faut donc s'observer dans la
vieillesse pour éviter, autant que possible, les imperfections qu'elle apporte avec
elle (Sochate), 133.
CHAPITRE in.
De la société des hommes, des femmes et de celle des livres, II E,
137. — La diversité des occupations est un des caractères principaux do l'âme
humaine; le commerce des livres est de ceux qui la distraient (Caton l'Ancien),
B.46 ESSAIS DE MONTAIGNE.
137. — Pour Montaigne, son occupation favorite était de méditer sur lui-même ;
par la lecture, il ajoutait à ses sujets de méditation; il se plaisait aussi aux con-
versations sérieuses, sans bannir toutefois les sujets ayant de la grâce et de la
beauté; les entretiens frivoles n'étaient pour lui d'aucun intérêt (Aristote), 137.
— Peu porté à se lier, il apportait beaucoup de circonspection dans ces amitiés
de rencontre qu'engendre la vie journalière; celte réserve, commandée aussi par
le mauvais esprit du temps, n'a pas été sans indisposer beaucoup de personnes
contre lui ; par contre, assoiffé d amitié vraie, il se livrait sans restriction s'il
venait à se rencontrer avec quelqu'un répondant à son idéal (Socrate, Plltar-
que), 139. — Il est utile de savoir s'entretenir familièrement avec toutes sortes de
gens et il faut se mettre au niveau de ceux avec lesquels on converse; aussi
n'aime-t-il pas les personnes au langage prétentieux (Platon, les Lacédémomens),
141. — Cette sorte de langage est un défaut fréquent chez les savants et qui lui
fait fuir les femmes savantes; que la femme ne se contente-t-elle de ses dons na-
turels ; si, cependant, elle veut étudier, qu'elle cultive la poésie, l'histoire et ce
qui, en fait de philosophie, peut l'aider à supporter les peines de la vie, 143. —
Montaigne, de caractère ouvert et exubérant, s'isolait volontiers autant par la
pensée au milieu des foules, à la cour par exemple, que d'une manière effective,
chez lui, oîi on était affranchi de toutes les contraintes superflues qu'impose la
civilité, 145. — Dans le monde, il recherchait la société des gens à l'esprit juste et
sage, lesquels sont bien plus rares qu'on ne croit; nature des conversations qu'il
avait avec eux. C'est là ce que finalement il appelle son premier commerce (Ilip-
poMACHus;, 147. — Le commerce avec les femmes vient en second lieu; il a sa dou-
ceur, mais aussi ses dangers; les sens y jouent un grand rôle; Montaigne vou-
drait que de part et d'autre on y apportât de la sincérité, à cet égard l'homme
est au-dessous de la brute (les fh-les des Brahmanes), 149. — Idée qu'il donne
de ses amours; les grâces du corps, en pareil cas, l'emportent sur celles de l'es-
prit bien que celles-ci y aient aussi leur prix (l'empereur Tibère, la courtisane
Flora), 153. — Un troisième commerce dont l'homme a la disposition, est celui
des livres; c'est le plus sur, le seul qui ne dépende pas d'autrui ; les livres con-
solent Montaigne dans sa vieillesse et dans la solitude (Jacques roi de Naples et
de Sicile), 153. — Sa bibhothèque est son lieu de retraite de prédilection ; description
qu'il en donne, 155. — Les Muses sont le délassement de l'esprit. Dans sa jeunesse,
Montaigne étudiait pour briller; dans l'âge mùr, pour devenir plus sage; devenu
vieux, il étudie pour se distraire, 159. — Mais le commerce des livres a, lui au.ssi,
des inconvénients ; il n'exerce pas le corps : de ce fait, dans la vieillesse, il est
préjudiciable à la santé, 159.
CHAPITRE IV.
De la diversion, III, 159. — C'est par la diversion qu'on parvient à calmer
les douleurs vives. On console mal par le raisonnement ; il faut distraire l'esprit,
appeler son attention sur d'autres objets, mais l'effet en est de courte durée
(Cléanthe, les PÉRiPATÉTiciENS, Chrysippe, Épicure, Cicéron), 159. — A la guerre, la
diversion se pratique utilement pour éloigner d'un pays un ennemi qui l'a en-
vahi, pour gagner du temps (Périclfis, le sielr d'Himbercourt, Atalante et IIippo-
mène), 161. — C'est aussi un excellent remède dans les maladies de l'àme, par elle
on rend moins amers nos derniers moments; Socrate est le seul qui, dans l'at-
tente de la mort, sans cesser de s'en entretenir, ait constamment, durant un long
espace de temps, gardé la plus parfaite sérénité (les disciples d'HÉoÉsus et le roi
Ptolémée), lti5. — Chez les condamnés à mort, la dévotion devient une diversion
à leur terreur, 165. — Fermeté, loi'S de son exécution, de Subrius Flavius con-
damné à mort, 167. — Sur un champ de bataille, dans un duel, l'idée de la mort
est absente de la pensée des combattants (L. Silancs), 167. — Dans les plus cruelles
calamités, nombre de considérations rendent notre situation moins pénible; som-
mes-nous menacés d'une mort prochaine, l'espérance d'une vie meilleure, le suc-
cès de nos enfants, la gloire future de notre nom, l'espoir que nous serons ven-
gés, etc., tout se présente à notre esprit, l'occupe et le distrait (Didon, Arune,
XÉNOPHOx, Épicure, Épaminondas, Zéxon), 167. — Moyen de dissiper un ardent dé-
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. III, CH. IV. — VOL. III. B.47
sir de vengeance, 169. — C'est encore par la diversion qu'on se guérit de l'amour,
comme de toute autre passion malheureuse; par elle, le temps, qui calme tout,
exerce son action, 169. — De même en détournant l'attention, on fait tomber un
l)iiiit public qui vous offense (Ai.cibiade), 171. — Un rien suffit pour attirer et dé-
tourner notre esprit; en présence même de la mort, les objets les plus frivoles
entretiennent en nous le regret de la vie (Plutarque, la robe de César, Tibère),
173. — L'orateur et le comédien en arrivent souvent à ressentir en réalité les sen-
timents qu'ils expriment dans le plaidoyer qu'ils débitent ou le rôle qu'ils jouent
(les PLEUREUSES, Ic convoi de M. de Grammont, Quintilien), 175. — Singulier moyen
que nous mettons en œuvre pour faire diversion à la douleur que nos deuils
peuvent nous causer, 177. — Nous nous laissons souvent influencer par de purs
effets d'imagination; parfois, il n'en faut pas davantage pour nous porter aux pi-
res résolutions (Cambyse, Arisïodème, Midas, Prométhée), 177.
CHAPITRE V.
A propos de quelques vers de Virgile, III, 179. — La vieillesse est si
naturellement portée vers les idées tristes et sérieuses que, pour se distraire, elle
a besoin de se livrer quelquefois à des actes de gaité; à l'âge où il est parvenu,
Montaigne se défend de la tempérance comme il se défendait autrefois de la vo-
lupté, 179. — Aussi saisit-il avidement toutes les occasions de goûter quelque
plaisir et pense qu'il vaut mieux être moins longtemps vieux, que vieux avant de
l'être (Platon), 181. — Ce qu'il y a de pire, dans la vieillesse, c'est que l'esprit se
ressent des souffrances et de l'affaiblissement du corps, 185. — Lasanté, la vigueur
physique font éclore les grandes conceptions de l'esprit; la sagesse n'a que faire
d'une trop grande austérité de mœurs, elle est par essence gaie et sociable (Platon,
SocRATE, Crassus), 185. — Ceux qui se blessent de la licence des écrits de Montaigne
devraient bien plutôt blâmer celle de leurs pensées. Pour lui, il ose dire tout ce qu'il
ose faire et regrette que tout ce qu'il pense ne puisse de même être publié; il est
du reste à présumer que la confession qu'il fait de ses fautes, aura peu d'imitateurs
(Thalès, Origène, Ariston), 187. — Ce que les hommes craignent le plus, c'est
qu'une occasion quelconque mette leurs mœurs à découvert; et pourtant, com-
ment un homme peut-il être satisfait d'être estimé, honoré, lorsqu'il sait qu'il ne
mérite ni l'estime, ni la vénération? Montaigne, qui va maintenant entrer dans
le vif de son sujet, appréhende que ce chapitre des Essais ne fasse passer son
livre du salon de ces dames dans leur boudoir (ArchélaOs, Socrate), 191. — Com-
ment se fait-il que l'acte par lequel se perpétue le genre humain, paraisse si hon-
teux qu'on n'ose le nommer? Il est vrai que si on tait son nom, il n'en est pas
moins connu de tout sexe (Aristote, Plutarque, Lucrèce), 193. — Pourquoi avoir
voulu brouiller les Muses avec Vénus? Rien n'inspire plus les poètes que l'amour,
et rien ne peint mieux ses transports que la poésie; pour s'en convaincre, il ne
faut que lire les vers oîi Virgile décrit avec tant de chaleur une entrevue amou-
reuse de Vénus avec Vulcain, 193. — Le mariage diffère de l'amour; c'est un
marché grave, dicté par la raison, que l'on contracte en vue de la postérité ; les
extravagances amoureuses doivent en être bannies; au surplus, les mariages aux-
quels l'amour a seul présidé, ont, plus que tous autres, tendance à mal tourner
(Aristote), 195. — L'amour ne fait pas partie intégrante du mariage, pas plus
que la vertu n'est d'une façon absolue liée à la noblesse. Digression sur le rang
en lequel sont tenus les nobles dans le royaume de Calicut (Antigone), 195. — Un
bon mariage, s'il en existe, est une union faite d'amitié et de confiance, qui im-
pose des devoirs et des obligations mutuelles; il n'est pas d'état plus heureux
dans la société humaine (Socrate), 199. — Montaigne répugnait beaucoup à se
marier, cependant il s'est laissé assujettir par l'exemple et les usages à ce com-
mun devoir; et, tout licencieux qu'on le croit, il a mieux observé les lois du ma-
riage qu'il ne l'avait promis et espéré. Ceux-là ont grand tort qui s'y engagent
sans être résolus à s'y comporter de même, 201. — Différence entre le mariage
et l'amour; une femme peut céder à un homme, dont elle no voudrait pas pour
mari (Virgu.e, Isocrate, Lycurgue, Platon), 203. — Nos lois sont trop sévères
B.48 ESSAIS DE MONTAIGNE.
envers les femmes, on voit qu'elles ont été faites par les hommes. Nous voulons
qu'elles maîtrisent leurs désirs plus ardents encore que les nôtres, que nous n'es-
sayons même pas de modérer (Isocrate, Tirksias, Proculus et Messalixe, une
FEMME DE Catai.oose ct la REINE d'Akagox, Solox), 205. — Il n'y a pas de passion
plus impérieuse, et nous nous opposons à ce qu'elles en tempèrent les effets ou
reçoivent entière satisfaction; épousent-elles un jeune homme, cela ne l'empêche
pas d'avoir des maîtresses; un vieillard, c'est comme si elles restaient vierges (le
philosophe Polémox, la vestale Clodia L.«ta, Bolesi.as roi de Pologne et Kixge
sa femme), 200. — L'éducation qu'on donne aux jeunes filles, tout opposée à ce
qu'on exige d'elles, éveille constamment en elles ce sentiment: elles n'entendent
parler que d'amour; ce qu'on leur en cache, souvent maladroitement, elles le
devinent; aussi, leur imagination aidant, en savent-elles plus que nous qui pré-
tendons les instruire, et Boccace et l'Arétin n'ont rien à leur apprendre (la fii,le
DE Montaigne), 200. — Du reste c'est l'amour, c'est l'union des sexes qui sont la
grande affaire de ce monde; aussi ne faut-il pas s'étonner si les plus grands phi-
losophes ont écrit sur ce sujet (Socrate, Zéxon, Straton, Théophraste, Aristippe,
Platon, Démétrius de Phalère, Héraclide du Pont, Antisthène, Ariston, Cléanthe,
Sphereus, Chrysippe, l'école d'ÉPiciRE), 211. — Dans l'antiquité, les organes de la
génération étaient déifiés; aujourd'hui, comme alors, tout du fait de l'homme
comme de celui de la nature, rappelle constamment l'amour aux yeux de tous
(à Babylone, dans l'île de Chypre, à Héliopolis, les Égyptiennes, les matrones de
Rome, la chaussure des Suisses, les costumes des hommes et des femmes chez nous
et ailleurs, un pape), 213. — Mieux vaudrait renseigner de bonne heure la femme
sur les choses de l'amour, que de lui en faire mystère et de laisser son imagina-
tion travailler, ce qui la porte notamment à des exagérations qui aboutissent à
des déconvenues lorsqu'elle est en présence de la réalité; en somme, dans toutes
les règles qu'il a édictées, l'homme n'a eu que lui-même en vue (Platox, les
FEMMES de I'Ixde, Livie, les Lacédémoniexnes, S. Augustin), 215. — 11 est bien diffi-
cile, dans l'état actuel de nos mœurs, qu'une femme demeure toujours chaste et
fidèle (S. Jérôme), 217. — Elles n'en ont que plus de mérite, lorsqu'elles parvien-
nent à se maintenir sages; mais ce n'est pas en se montrant prudes et revêches
qu'elles feront croire à leur vertu. Ce à quoi elles doivent s'appliquer, c'est à con-
server leur réputation, ou, si elles l'ont perdue, à la rétablir. L'indiscrétion des
hommes est un grand tourment pour elles, 219. — La jalousie est une passion
inique dont elles ont également à souffrir, etc.; le préjugé qui nous fait considé-
rer comme une honte l'infidéhté de la femme n'est pas plus raisonnable. Que de
grands hommes se sont consolés de cet accident ; les dieux du paganisme, Vul-
CAix entre autres, ne s'en alarmaient pas. Chez la femme, la jalousie est encore
plus terrible que chez l'homme; elle pervertit en elle tout ce qu'il y a de bon et
de beau et la rend susceptible des pires méfaits (le berger Chratis, Lucullus,
CÉSAR, Pompée. Antoine, Catox, Lépide, Vulcain et Vénus, Octave et Paulia Posthu-
mia), 223. — La chasteté est-elle chez la femme une question de volonté? Pour
réussir auprès d'elle, t<)ut dépend des occasions et il faut savoir oser (Montaigne
était de ceux qui n'osent guère) ; celles qui se prétendent sûres d'elles-mêmes, ou
n'ont pas été exposées à la tentation, ou se vantent ; du reste ce que nous enten-
dons leur interdire à cet égard, est mal défini et peut se produire parfois incons-
ciemment (les FEMMES Scythes, Fatua femme de Faustus, la femme de Hiérox), 227.
— C'est d'après l'intention qu'il faut juger si la femme manque, ou non, à son de-
voir; qu'a-t-on à blâmer chez celle qui se prostitue pour sauver son mari? à celle
qui a été livrée au libertinage avant l'âge d'avoir pleine connaissance? et puis,
quel profit retirons-nous de prendre trop de souci de la sagesse de nos femmes
(Phaulius d'Argos et le roi Philippe, Galba et Mécène, les ffmmes de l'Ixde, le phi-
losophe Phédon, Solon) ? 231. — Il vaut mieux ignorer que connaître leur mauvaise
conduite; un honnête homme n'en est pas moins estimé parce que sa femme le
trompe. C'est là un mal qu'il faut garder secret, mais c'est là un conseil qu'une
femme jalouse ne saurait admettre, tant cette passion, qui l'amène à rendre la
vie intolérable à son mari, la domine une fois qu'elle s'est emparée d'elle (Pitta-
cus, le sénat de Marseille), 233. — Un mari ne gagne rien à user de trop de con-
trainte envers sa femme ; toute gêne aiguise les désirs de la femme et ceux de
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. III, CH. V. — VOL HI. B.49
ses poursuivants (un hôte de Flamimis, Messaline et Claude), 237. — Lucrèce a
peint les amours de Vénus et de Mars avec des couleurs plus naturelles que Virgile
décrivant les rapports matrimoniaux de Vénus et de Vulcain; quelle vigueur
dans ces deux tableaux si expressifs! Caractère de la véritable éloquence; enrichir
et perfectionner leur langue est le propre des bons écrivains; quelle différence
entre ceux des temps anciens et ceux du siècle de Montaigne (Viroile, Llcrèce,
Gallls, Hokace, Plutarque, Ronsard et la Pléiade), 239. — La langue fran-
çaise, en l'état, se prête mal, parce qu'on no sait pas en user, à rendre les idées
dont l'expression comporte de l'originalité et de la vigueur; ce qui fait qu'on a sou-
vent recours à l'aide du latin et du grec, alors qu'on en pourrait tirer davantage.
On apporte également trop d'art dans le langage employé dans les questions de
science (Léon l'Hébreu, Ficin, Aristoïe, Bambo, Équicola), 243. — Montaigne ai-
mait, quand il écrivait, à s'isoler et à se passer de livres pour ne pas se laisser
intUiencer par les conseils et par ses lectures; il ne faisait exception que pour
Plutarque (un peintre, le musicien Antigemde), 245. — Il a grande tendance à
imiter les écrivains dont il lit les ouvrages, aussi traite-t-il de préférence des sujets
qui ne l'ont pas encore été; n'importe lequel, un rien lui suffit (des sinc.es et
Alexandre, Socrate, Zenon et Pythagore), 247. — Les idées les plus profondes,
comme les plus folles, lui viennent à l'improviste, surtout lorsqu'il est à cheval;
le souvenir qu'il en conserve est des plus fugitifs, 249. — Revenant à son sujet
principal, Montaigne estime que l'amour n'est autre que le désir d'une jouissance
physique; et, considérant ce que l'acte lui-même a de ridicule, il est tenté de
croire que les dieux ont voulu par là apparier les sages et les fous, les hommes
et les bêtes (Socrate, Platon, Alexandre), 249. — D'autre part, pourquoi regarder
comme honteuse une action si utile, commandée par la nature? On se cache et
on se confine pour construire un homme; pour le détruire, on recherche le grand
jour et de vastes espaces (les Esséniens, les Athéniens), 251. — N'y a-t-il pas des
hommes, et même des peuples, qui se cachent pour manger? chez les Turcs, des
fanatiques qui se défigurent? un peu partout des hommes quj s'isolent de l'hu-
manité? On abandonne les lois de la nature, pour suivre celles plus ou moins
fantasques des préjugés, 253. — Parler discrètement de l'amour, comme l'ont fait
Virgile et Lucrèce, c'est lui donner plus de piquant; ainsi font les femmes qui
cachent leurs appâts pour les rendre plus attrayants; et les prêtres, leurs dieux
pour leur donner plus de lustre (Virgile, Lucrèce, Ovide, Martial), 255. — ^ L'amour,
tel que le pratiquent les Espagnols et les Italiens, plus respectueux et i)lus timide
que chez les Français, piait à Montaigne; il en aime les préambules; celui qui ne
trouve de jouissance que dans la jouissance n'est pas de son école. Le pouvoir de
la femme prend fin, dès l'instant qu'elle est à nous (Thrasomde), 257. — La cou-
tume d'embrasser les femmes lorsqu'on les salue, lui déplaît, c'est profaner le
baiser; les hommes eux-mêmes n'y gagnent pas : pour trois belles qu'ils embras-
sent il leur en faut embrasser cinquante laides (Socrate), 259. — 11 approuve que,
même avec des courtisanes, on cherche à gagner leur affection afin de ne pas
avoir que leur corps seulement (les Italiens, la Vénus de Praxitèle, un Égyptien,
Pkriandre, la Lune et Endymion), 259. — Les femmes sont plus belles, les hommes
ont plus d'esprit en Italie qu'en France; mais nous avons autant de femmes
dexquise beauté et d'hommes supérieurs que les Italiens. La femme mariée est
chez eux, ti'op étroitement tenue, ce qui est d'aussi fâcheuse conséquence que de
leur laisser trop de licence, 261. — Il est de l'intérêt de la femme d'être modeste
et d'avoir de la retenue; même n'étant pas sages, elles sauvegardent de la sorte
leur réputation; la nature d'ailleurs les a faites pour se refuser, du moins en ap-
parence, car elles sont toujours prêtes; par ces refus, elles excitent beaucoup plus
l'homme (les Sarmates, Aristippe, Tiialestris et Alexandre), 2G5. — Il y a de l'in-
justice à blâmer l'inconstance de la femme; rien de violent ne peut durer et, par
essence, l'amour est violent; d'autre part, c'est une passion qui n'est jamais as-
souvie, il ne faut donc pas leur savoir mauvais gré si, après nous avoir acceptés,
s'aporcevant que nos facultés, notre mérite ne sont pas ce qu'elles attendaient
de nous, elles se pourvoient ailleurs (la reine Jeanne de Naples, Platon) 265.
Quand l'âge nous atteint, ne nous abusons pas sur ce dont nous sommes encore
capables, et ne nous exposons pas à être dédaignés, 267. — Montaigne reconnaît
ESSAIS de MONTAIGNE. — T. IV. 4
B.50 ESSAIS DE MONTAIGNE.
la licence de son style, mais il tient à ce que son livre soit une peinture exacte
de lui-même; et, bien qu'aimant la modestie, il est obligé par les mœurs de son
temps à une grande liberté de langage qu'il est le premier à i-egretter (Théodohe
DE Bkze, Saint-Gelais), 269. — Il est injuste d'abuser du pouvoir que les femmes
nous donnent sur elles en nous cédant; à cet égard, il n'a rien à se reprocher : il
tenait religieusement les engagements pris avec elles, en observait toutes les con-
ditions, souvent au delà et plus môme qu'elles n'eussent voulu, 273. — Même dans
ses plus vifs transi)orts, il conservait sa raison. Il estime qu'en pareille matière,
la modération doit être de règle; tant (ju'on reste maître de soi et que ses forces
ne sont point altérées, on peut s'abandonner à l'amour; quand viennent les ans,
l'imagination, substituée à la réalité, nous i-anime encore (le philosophe Panetiis,
Agésilas, Anackéon, Socrate), 275. — Dans l'usage des plaisirs, l'esprit et le corj)s
doivent s'entendre et s'entr'aider pour que chacun y participe dans la mesure où
cela lui est possible, comme il arrive de la douleur, 279. — L'amour chez le vieil-
lard que n'a pas encore atteint la décrépitude, ranimerait le corps, obligerait à
en prendre plus de soin, ragaillardirait l'esprit, ferait diversion aux tristesses et
aux chagrins de toutes sortes qui l'assaillent; mais il ne saurait exiger un amour
i"écipi'oque; surtout qu'il ne s'adresse pas à des femmes hors d'âge. A dire vrai,
l'amour sans limites ne convient qu'à la première jeunesse (Biox, Cvkus, Ménon,
l'empereur Gai.ba, Ovide, Emoxès de Chio et le philosophe Arcésii.as. Hofiace, Ho-
mère, Platon, la reine Marguerite de Navarre, Saint Jérôme), 281. — On voit sou-
vent les femmes sembler faire de l'amour une question de sentiment et dédaigner
la satisfaction que les sens peuvent y trouver, 285. — En somme, hommes et
femmes ont été pétris dans le même moule, et un sexe n'est guère en droit de cri-
tiquer l'autre (Platon, Antisthène), 287.
CHAPITRE VI.
Des coches, III, 287. — Différence des opinions des philosophes sur les
causes et les origines de divers usages et accidents, par, exemple sur l'habitude
de dire : « Dieu vous bénisse! » à qui éternue, sur le mal de mer; digression sur
la peur (Plltarqle, Montaigne, Socrate, Épicure), 287. — Variété d'emploi dos
chars à la guerre; usage qui en a été fait pendant la paix, par nos premiers rois,
par divers empereurs romains (les Hongrois et les Turcs, les rois fainéants, Marc-
Antoine, IIÉLiOGABALE, l'empercur Firmus), 293. — En général, les souverains ont
grand tort de se livrer à des dépenses de luxe pour se montrer avec plus d'ap-
parat, donner des fêtes au lieu d'employer leurs trésors à élever des monuments
et des établissements utiles; ces prodigalités sont mal vues des peuples qui esti-
ment, avec raison, qu'elles sont faites à leurs dépens (Isocrate, Démosthène, Théo-
PHRASTE, Aiustote, le pape Grégoire XIII, la i-eine Catherine, l'empereur Galba),
295. — Un roi, en effet, ne possède rien, ou ne doit rien posséder en propre et il
se doit tout entier à son peuple; une sage économie et la justice doivent présider
à ses libéralités d'autant que, quoi qu'il fasse, il lui sera toujours impossible de
satisfaire l'avidité de ses sujets (Denys le Tyran, Cyrus et Crésus), 297. — On pou-
vait à Rome excuser la pompe des spectacles, tant que ce furent des particuliers
qui en faisaient les frais, mais non quand ce furent les empereurs, parce que c'é-
tait aloi-s les deniers publics qui en supportaient la dépense (Philippe père d'A-
lexandre), 301. — Description de ces magnifiques et étranges spectacles; ce que
l'on en doit le plus admirer, c'est moins leur magnificence que l'invention et les
moyens d'exécution; nous y voyons combien les arts, que nous croyons arrivés
chez nous à la perfection, sont moins avancés que chez les anciens; l'artillerie et
l'imprimerie qui viennent d'apparaître chez nous, étaient connues depuis mille ans
en Chine (l'empereur Probus, Solon et les prêtres égyptiens), 301. — Un nouveau
monde vient d'être découvert; ses habitants sont gens simples, moins corrompus
que nous, ayant du bon sens; des arts leur sont absolument inconnus, d'autres,
à en juger par certaines de leurs œuvres, ne le cèdent en rien à ce que nous-
mêmes pouvons produire, 307. — Pour ce qui est de leur courage, il n'est pas dou-
teux que, s'ils ont succombé, c'est beaucoup plus par ruse et par surj)rise que du
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. Ili, CH. VI. - VOL. III. B.ol
l'ait de la valeur de leurs ennemis, 309. — Tout autre eût été le sort de ces peu-
ples s'ils étaient tombés entre les mains de conquéi-ants plus humains «H policés
comme étaient les anciens Grecs et Romains; les réponses que firent certains
d'enti-e eux à leurs envahisseurs se présentant pour pénétrer chez eux, témoi-
gnent (le leur mansuétude et de leur bon sens, 311. — Mauvaise foi et barbarie
des Espagnols à l'égard des derniers rois du Pérou et de Mexico; horrible auto-
dafé qu'ils firent un jour de leurs prisonniers de guerre, conduite odieuse que la
Providence n'a pas laissée impunie, 313. — L'or, par lui-même, n'est pas une ri-
chesse, il ne le devient que s'il est mis en circulation, 317. — Les Mexicains
croyaient à cinq âges du inonde, et pensaient se trouver dans le dernier quand les
Espagnols vinrent les exterminer, 319. — La route de Quito à Cusco, au Pérou,
surpasse sous tous rapports n'importe quel ouvrage qui ait été exécuté en Grèce,
à Rome et en Egypte, 319. — Pour en revenir aux coches, ils étaient inconnus
dans le Nouveau Monde; le dernier roi du Pérou était, au milieu de la mêlée,
porté sur une chaise d'or élevée sur des brancards d'or, lorsqu'il fut fait prison-
nier par les Espagnols, 321.
r.IIAPITRE VII.
Des inconvénients des grandeurs, III, 321. — Qui connaît les grandeurs
et leurs incommodités, peut les fuir sans beaucoup d'efforts ni grand mérite, 321.
— Montaigne n'a jamais souhaité des postes très élevés; bien difl'érent de César,
il préférait être le deuxième ou le troisième dans sa ville, que le premier à Paris;
une vie douce et tranquille lui convient bien mieux qu'une vie agitée et glo-
rieuse; il ne voudrait ni commander ni obéir, si ce n'est aux lois (Thokius Bai.-
Dus et Regli.ls, Otanez), 323. — Il est très porté à excuser les fautes des rois,
parce que leur métier est des plus difficiles; leur toute-puissance est une préroga-
tive dangereuse; on leur cède en tout, ils n'ont jamais la satisfaction de la diffi-
culté vaincue (deux auteurs écossais, Brisson et Alexandre, Carnéade, IIomi^ire
et Vénus), 325. — Leurs talents et leurs vertus ne peuvent se manifester, parce
que ceux qui les entourent se sont fait une règle de louer in<lifféremment toutes
leurs actions et qu'ils leur cachent leurs défauts do crainte de les offenser. Com-
ment dans ces conditions s'étonner qu'ils commettent tant de fautes; ce sont leurs
flatteurs, cause de ce mal, qui seraient à punir (Tibère et le Sénat Romain ; les
COURTISANS d'ALEXANDRE, de Denys, de Mithridate, le philosophe Favorinus et
l'empereur Adrien, Polliox et Auguste; Philoxène, Platon et Denys), 329.
CHAPITRE VIII.
Sur l'art de la conversation, III, 331. ' — En punissant les coupables, la
justice ne saurait avoir qu'un but : empêcher les autres hommes de commettre
les mêmes fautes; c'est ainsi que l'aveu que Montaigne fait de ses erreurs, doit
servir à corriger les autres (Platon, Caton, un .ioueur de lyre), 331. — Mais où
l'esprit se forme le plus c'est, selon notre moraliste, dans la conversation; cet
exercice lui parait plus instructif encore que l'étude dans les livres, 333. — On y
apprend à supporter la sottise, la contradiction et la critique. Sur le premier
point, Montaigne connaissant la faiblesse de l'esprit humain, écoutait patiemment
les propositions les plus absurdes, les opinions les plus folles, 335. — La contradic-
tion éveille l'esprit et aide parfois à la découverte de la vérité, mais il faut qu'elle
ait lieu en termes courtois. La critique est susceptible de nous corriger, mais il
faut être de bonne foi et savoir l'accepter, ce qui n'est pas donné à tout le monde
(Socrate, Antisthène), 335. — Dans les conversations, la subtilité et la force des
arguments importent moins que l'ordre ; le vulgaire en met souvent dans ses dis-
cussions plus que les philosophes et les savants; les conversations sans méthode,
sans ordre, dégénèrent vite en dispute; et, pour ce qui est de discuter avec un
sot, il ne faut absolument pas s'y prêter, 339. — Les disputes devraient être in-
terdites; quand on en arrive là, chacun, sous l'empire de l'irritation, y perd la
notion de ce qui est raisonnable; on se quitte ennemis, sans avoir fait faire un
B.52 ESSAIS DE MONTAIGNE.
pas à la question (Platon), 341. — L'attitude des gens de science, l'usage qu'ils en
font, laissent souvent à désirer; suivant qui la possède, c'est un sceptre ou la ma-
rotte d'un fou, 311. — C'est l'ordre et la môthode qui donnent du prix aux con-
versations; la forme y importe autant que le fond; il en est de même dans notre
vie familiale, où nous supportons plus aisément les fautes de nos domestiques que
les mauvaises excuses que, par bêtise, ils s'entêtent à nous présenter pour les pal-
lier (DÉMOCRiTE, Ai.cibiade), 343. — C'est un grand défaut de ne pouvoir souffrir
les sottises des autres; ne se trompe-t-on pas soi-même en les croyant des sottises;
sommes-nous donc si sûrs de notre propre jugement? que de fois ce que nous
i-eprochons aux autres, existe chez nous-mêmes (Heraclite, Myson', Platon, So-
crate) ! 347. — Ce qui frappe nos sens a une grande influence sur nos jugements : la
gravité d'un personnage, son costume, sa situation, etc., tout cela donne du poids
aux sottises qu'il débite, 349. — Parfois aussi les grands paraissent plus sots qu'ils
ne sont, parce qu'en raison de leur position on attend plus d'eux que du com-
mun des mortels; le plus souvent leur intérêt est de garder le silence, de la sorte
leur ignorance ressort moins (MÉOABYSEet Apelle), 351. — Et pourquoi les grands
seraient-ils plus éclairés que les autres? c'est le hasard qui, la plujiart du temps,
distribue les rangs, donne les places et il ne saurait guère en être autrement, 353.
— Le succès obtenu dans les grandes affaires n'est i)as une preuve d'habileté;
souvent il est dû au liasard qui intervient dans toutes les actions humaines (les
Carthaginois, les Romains, le persan Syramnez, Thucydide), 355. — Pour juger des
grands, voyez ceux que la fortune fait tomber de leur rang élevé; comme ils parais-
sent au-dessous du médiocre, lorsqu'ils ne sont plus entourés d'un éclat imposant
(^MÉLANTHE et Denys, Antisthène, les Mexicains), 357. — Montaigne est porté à se dé-
fier de l'habileté d'un homme, dès lors que cet homme a une haute situation ou
jouit de la faveur populaire, 359. — Il n'accepte qu'avec réserve les mots heureux
de ses interlocuteui's, qui peuvent les avoir empruntés et ne pas se rendre compte
eux-mêmes de leur valeur, 301. — II se méfie également de ceux qui, dans leurs
reparties, se renfei-ment dans des généralités; il faut les amener à préciser pour
savoir au juste ce qu'ils valent, 361. — Souvent les sots émettent des idées justes,
mais elles ne sont pas d'eux; hors d'état d'en faire une judicieuse application, il
n'y a qu'à les laisser aller, ils ne tardent pas à s'embourber (Hégésias, Cyrus),
3G3. — Reprendre un sot, avec l'espérance de rectifier son jugement, c'est peine
perdue, 365. — Ce qu'il y a de plus déplaisant chez un sot, c'est qu'il admire
toujours tout ce qu'il dit, 365. — Les causeries familières, à bâtons rompus, où
on fait assaut d'esprit, ont aussi leurs charmes; les propos vifs et hardis qui s'y
échangent, forment le caractère et peuvent parfois nous éclairer sur nos défauts,
367. — Les jeux de main sont à proscrire; ils dégénèrent trop souvent en voies
de fait (deux princes de la famille royale), 367. — Comment Montaigne s'y prenait
pour juger d'une œuvre littéraire sur laquelle l'auteur le consultait ; sur les siennes,
sur ses Essais, il était toujours hésitant, bien plus que lorsqu'il s'agissait de colles
des autres, 367. — Un point sur lequel il faut se montrer très réservé, c'est lors-
qu'on rencontre des idées qui peuvent ne pas appartenir en propre à fauteur,
sans qu'on ait de certitude à cet égard (Philippe de Commines, Tacite, SÉNh:yiE, Ci-
céron), 369. — Digression sur Tacite. Cet historien a relégué au second plan les
faits de guerre et s'est plutôt attaché aux événements intérieurs, qu'il juge plus
qu'il ne les raconte, 371. — Sa sincérité ne fait pas doute, il est du parti de l'or-
dre; néanmoins, il semble avoir jugé Pompée avec trop de sévérité; à propos de
Tibère, Montaigne a quelque doute sur l'impeccabilité de son jugement. 371. —
C'est à tort qu'il s'excuse d'avoir parlé de lui-même dans son histoire; Montaigne,
lui, non seulement ne craint pas de parler de lui-même dans ses Essais, mais il
ne parle que de lui et en observateur désintéressé, 373. — Caractère de Tacite à
en juger par ses écrits; on ne saurait que le louer, lui et tous les historiens qui
ont agi de même, d'avoir recueilli et consigné tous les faits extraordinaires et les
bruits populaires (Vespasien), 375.
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. III, CH. IX. — VOL. III. B.53
CHAPITRE IX.
De la vanité, III, 377. — Montaigne plaisante sur la manie qu'il a d'enre-
gistrer toutes les idées qui lui i)assent par la tête; c'est Uà une occupation qu'il
pourrait prolonger, tant (|u'il y aui-a au monde de l'encre et du papier (un gen-
tilhomme, DioMÈDE, Galba), :>77. — On devi-ait faire des lois contre les écrivains
ineptes et inutiles; il \' <mi a tant que pendant qu'on sévirait contre les plus dan-
gereux, il aurait, lui, le temps de s'amender (le médecin I'hu.otinls), 379. —
Comment k% politiques amusent le peuple, alors qu'ils le maltraitent le plus (les
Spartiates), 379. — Tout différent des autres, Montaigne se sent plus porté à de-
venir meilleur dans la bonne que dans la mauvaise fortune (Xénophon), IWl. — Il
aimait le changement et, comme conséquence, les voyages, qu'il affectionnait
aussi parce qu'ils le sortaient de chez lui et que, s'il est agréable de commander
chez soi, si modeste que soit son domaine, la situation a ses ennuis, 381. — l'eu
fait à la gestion de ses biens, ce qu'il considère du reste comme chose aisc'e, elle
lui était d'autant plus à charge, que ce qu'il possédait lui suffisait et qu'il n'avait
nulle envie d'accroître son patrimoine, 383. — Les voyages ont l'inconvénient de
coûter cher, mais cela ne l'arrêtait pas; il s'arrangeait seulement à y subvenir
sans entamer son capital qu'il estimait devoir suffire à son unique héritier, puis-
qu'il lui avait suffi à lui-même (Phociox, Cratès), 385. — Si peu qu'il s'occupât
de son intérieur, ce pourquoi il avait peu d'aptitude, il y trouvait mille sujets
de contrariété qui, si légers qu'ils fussent, constamment répétés, ne laissaient
pas de le blesser souvent davantage que de bien plus grands maux ; aussi pré-
férait-il la vie hors de chez lui (Diogène), 'S8Î). — Nullement sensible au plaisir
de bâtir, s'il a fait quelques changements dans sa maison, cela a été pour se
conformer, à l'intention qu'en avait eue son père. Il n'aime non plus ni la chasse,
ni le jardinage, et, si profitable que ce soit, il n'est pas porté à s'occuper des af-
faires publiques; jouir de l'existence, lui suffit (Platon), 387. — Il souhaiterait
pouvoir abandonner la gestion de ses biens à quelque ami honnête, à un gendre
par exemple, auquel il en céderait les revenus et qui lui assurerait le bien-être
jusqu'à la fin de ses jours, 391. — Il se fiait à ses domestiques, évitant de se
renseigner sur eux pour ne pas être obligé de les avoir en d(>fiance, 391. — Sa
répugnance à s'instruire de ses proprcîs affaires était telle, qu'il n'a jamais pu
prendre sur lui de lire un titre, un contrat (Cratès), 393. — Chez lui, la moindre
chose qu'il voit le préoccupe; que n'a-t-il au moins pour l'assister dans la direc-
tion de son intérieur un second, sur lequel il puisse se reposer; obligé de veiller
à tout, sa manière de recevoir les éti-angers s'en ressent, chose contraire à
son tempérament beaucoup plus porté à dépenser qu'à thésauriser (Platon), 395.
— Une autre raison qui le portait à voyager, c'est la situation morale et poli-
tique de son pays, dont il souffre, moins par intérêt pour la chose publique,
tout finissant par s'arranger, que pour lui-même qui n'a pas le courage de voir
tant de corruption et de déloyauté (le roi Philippe), 397. — Toutes les discus-
sions, les disputes sur la meilleure forme de gouvernement, sont parfaitement
inutiles; le monde existe : si on peut le redresser, on ne saurait lui faire perdre
un pli qui est déjà pris. Pour chaque nation, le meilleur gouvernement est celui
auquel elle est accoutumée (Solon, Varron, de Pibrac et Monsieur de Foix), 399.
— Rien n'est plus dangereux pour un état qu'un changement radical; il faut
s'appliquer à améliorer, mais non à renverser (les meurtriers de César), 401. —
Les réformes elles-mêmes sont souvent difficiles; un gouvernement même vi-
cieux peut se maintenir malgré ses abus, sans compter que, parfois, si on re-
gardait chez ses voisins, on y trouverait pire (Pacuvius Caluvius, Solon), 401. —
L'empire romain est un exemple qu'une domination étendue ne témoigne pas
qu'à l'intérieur tout soit pour le mieux, et montre que, si miné que soit un état, il
peut se soutenir longtemps par la force même des choses (Isocrate), 405. — De
la corruption générale des états de l'Europe, Montaigne conclut que la France
peut se relever de son état actuel ; toutefois, il redoute qu'elle ne se désagrège,
405. — M'ontaigne craint de parfois se répéter dans ses Essais; il le regretterait,
mais sa mémoire va lui faisant de plus en plus défaut (Lynceste), 407. — S'il a à
B.o4 ESSAIS DE MONTAIGNE.
prononcer iin discours qu'il ait préparé, la crainte de perdre le fil de ses idées
le paralyse: aussi, comme le lire c'est se lier les mains et qu'il n'est pas capable
d'improviser, il a pris la résolution de s'en abstenir désormais (l'orateur Ciuiox),
409. — Il fait volontiers des additions à son livre, mais ne cori-igo pas; ce se-
rait faire tort aux acheteurs des éditions précédentes; et puis, il a vieilli sans
s'assagir et les changements qu'il pourrait y introduire ne vaudraient peut-être
pas ce qui y est (Antiochls), 411. — Il s'en rapporte uniquement à ses éditeurs
pour l'orthographe et la ponctuation; des fautes d'autre natui-e peuvent être
relevées dans le texte, il ne s'en préoccupe pas; qu'elles proviennent^ de la copie
ou de l'impression, le lecteur, qui connaît ses idées, saura les rectifier, 413. —
Vivant au foyer des guerres civiles, il est exposé aux insultes de tous les partis;
il souffre beaucoup dans ses intérêts de cet état de choses, bien que, jusqu'ici,
il ait échappé au pillage, ce qu'il attribue à ce qu'il n'a pas mis sa maison en
t'tat de défense, à l'eAime dont il jouit dans le pays, aux sei'vices qu'il rend à
ses voisins et à sa bonne fortune; il regrette que les lois soient impuissantes à
le protéger et d'en avoir obligation à d'autres (Lvclrgle d'Athènes), 415. — Il se
considère comme absolument obligé par ses engagements et ses promesses; mais
il est tellement ennemi de toute contrainte, qu'il lui répugne même d'être lié
par les devoirs de la reconnaissance et tient pour avantageux de se trouver dé-
livré, par leurs mauvais procédés à son égard, de son attachement à certaines
personnes, 417. — Il ne doit rien aux grands et ne leur demande que de ne pas
s'occuper de lui; il s'applique à tout supporter et à se passer de tout; il aime à
obliger ses amis, mais ils l'importunent s'ils lui demandent d'intervenir en leur
faveur auprès de tiers; en tout cas, s'il lui faut contracter des obligations envers
autrui, il souhaite que ce soit pour tout autre chose qu'obtenir protection contre
les fureurs de la guerre civile (Hippias d'Élis, Baj.azet et Tameki.an. l'empereur
Soi.iMAX et l'empereur de Caliclt, Cvkis, i.e phemieu des Scipions), 419. — Il vit
dans des transes continues; ces désordres étaient, du reste, un mal depuis long-
temps à l'état latent, et peut-être est-il préférable de le voir passé à l'état aigu;
c'est encore là une des causes qui font qu'il voyage tant, bien qu'il ne soit pas
assuré de trouver mieux, 425. ^ Quoique les troubles qui la- déchirent, le dégoû-
tent de la France, il aime Paris; il n'est français que par cette capitale; puisse-
t-elle demeurer à l'abri de dissensions intestines, ce serait sa ruine, 429. — Au
surplus, il regarde tous les hommes, à quelque nation qu'ils appartiennent,
comme ses compatriotes; le monde entier est pour lui une patrie, aussi ne re-
douterait-il pas la peine de l'exil (les rois de Peiise, Socrate), 429. — Avantages
que Montaigne trouve à vojager; il demeure sans peine huit à dix heures consé-
cutives à cheval et, sauf les chaleui-s excessives (il voyage alors de nuit), ne re-
doute aucunes intempéries (les anciens Romains, les Perses dans l'antiquité, les
EsPAONOLs), 431. — On le blâme de ce que, vieux et marié, il quitte sa maison
pour voyager; mais il y laisse une gardienne fidèle qui y maintient l'ordre. La
science du ménage est la plus utile, la plus honorable chez une mère de famille;
il est vrai que bien des femmes ne pensent qu'à leur toilette et vivent dans l'oi-
siveté, la sienne n'est pas telle, 433. — On objecte que c'est témoigner peu d'af-
fection à sa femme que de s'en éloigner; mais l'absence momentanée aiguise, au
contraire, le désir de se revoir; il se connaît en amitié, et affirme qu'on n'aime
pas moins son ami absent que présent (les ensorcelés de Kareinty), 433. —
Pourquoi craindre de voyager quand on est vieux 1 C'est alors que les voyages
sont le plus utiles; il peut mourir en route, dira-t-on, qu'importe; c'est une éven-
tualité dont il ne se préoccupe pas quand il se met en route (les Stoïciens), 437.
— Quoiqu'il lui soit indifférent de mourir là ou ailleurs, il préférerait que la
mort le surprît à cheval et hors de chez lui ; il serait plus en paix et sentirait
moins de peine et de regrets autour de lui, 439. — Quelle fâcheuse habitude que
notre entourage s'apitoie sur nos maux, cela nous énerve; voir auprès de nous
moins de mines impressionnées nous disposerait plus favorablement, 441. — A
publier cette étude sur lui-même, Montaigne trouve qu'elle a ce grand avantage
de lui servir de règle de conduite et que les critiques seront moins itoités à dé-
naturer ses qualités, .sa confession devant les désarmer en partie; il reconnaît,
du reste, avoir toujours été traité au-dessus de ses mérites (Antio.one et le philo-
SOM.MAIIŒ DES ESSAIS. LIV. III, CH. IX. — VOL. III. B.55
sophe Bios), 113. — Peut-être aussi sa lecture fera-t-ellc ((ue quelqu'un lui conve-
nant, sera di'sireu.x d'entrer en rapport d'amitié avec lui : Oh! un ami! que ne
donnerait-il pas pour en avoir un, 445. — C'est finir par devenir à charge! aux
nôtres que de les occuper constamment de nos maux. Viendrait-il à tomber ma-
lade dans un coin jierdu, il a de quoi se suffire avec ce qu'il porte avec lui; et
puis, dès qu'il se sent malade, il a toujours soin de mettre en ordre ses affaires
de conscience et autres, ce qui fait qu'il est toujours prêt (les Indiens), 447. —
Son livre ne lui survivra que peu d'années, d'autant que notre langue se trans-
forme continuellement; il n'en constitue pas moins une précaution pour qu'a-
près lui, on ne le juge pas autre qu'il n'est, 449. — Genre de mort dont Mon-
taigne s'accommoderait le mieux; toujours est-il qu'il a cette satisfaction que la
sienne ne sera pour les siens, dont les intérêts sont assurés, un sujet ni de plai-
sir, ni de déplaisir (les commolkants d'Antoine et de Cléopàtre, PÉrifONE, TuiELi.i-
Nus, le philosophe Théophhaste), 451. — Il ne recherche pas ses aises en voyage;
il va au jour le jour, sans iitnéraire fixe; aussi est-il toujours satisfait, même
s'il ne trouve pas dans un pays ce qu'il venait y voir, il apprend du inoins que
la curiosité signalée n'existe pas, ^153. — Il sait s'accommoder de tout et se jjlie à
tous les usages du pays où il se trouve, rien ne lui parait litrange; aussi blàmc-
t-il fort la sotte tendance qu'ont les Français à l'étranger de tout y dc-nigrer, et
ne ac joignait-il pas à leurs sociétés quand il en rencontrait, 455. — Tout ce
(ju'il demanderait, ce serait d'avoir un compagnon de voyage de même humeur
que lui, car il aime à communiquer ses idées (Sénèque, Cicékon, Ahchvtas, Aius-
tipi'e), 457. — La situation qu'il a, le bien-être dont il jouit, devraient, ce sem-
ble, le détourner de sa passion des voyages ; mais il y trouve l'indépendance, et
elle lui est si chère qu'il rejette les commodités de la vie par crainte d'en être
asservi, 457. — C'est là, dira-t-on, de la vanité, mais où n'y en a-t-il pas? Les
plus belles maximes philosophiques, les plus beaux règlements de vie sont vains;
et ceux-là mêmes qui les émettent ne les suivent pas. Ne voit-on pas journelle-
ment un juge prononcer une condamnation pour un fait que lui-même a commis
ou va commettre? La faute en est aux lois, qui exigent de nous plus que nous
ne pouvons (Akiston, Xénophon, Soi.on, Antisthî:ne, DioGf;NE, la courtisane Laïs),
401. — On peut encore, à la rigueur, admettre que dire et faire soient dissem-
blables chez les gens qui professent la morale; mais lui, parlant de lui-même,
est tenu à être plus conséquent. L'homme public doit compter avec les vices de
son temps; Montaigne a reconnu par lui-même que les affaires publiques ne se
traitent pas d'après les mêmes principes que les affaires privées, son caractère
ne se prête pas à semblal)le compromission; au surplus, il est fréquent de ne pas
trouver réunies chez un même homme les qualités nécessaires à ces deux genres
d'affaires (Caton, un uoi de France, Platon, Sochate, Saturninus), 465. — Une
vertu naïve et sincère ne peut être emplojée à la conduite d'un état corrompu;
du reste, sa notion s'altère dans un milieu dépravé; quoi qu'il en soit, on doit
toujours obéissance à ceux qui ont charge d'a[)pliquer les lois, si indignes qu'ils
soient (SKNf:yUE, Acésilas), 4G9. — Si Montaigne sort aussi fréquemment de son
sujet, c'est qu'il s'abandonne au flux de ses idées qui, en y regardant de près, ne
sont cependant pas aussi décousues qu'elles en ont l'air; et puis, il oblige ainsi
le lecteur à plus d'attention, ce qui déjà l'a porté à donner à ses chapitres plus
d'extension qu'au début (Platon, ïéhence, Plutakque), 471. — Affection particu-
lière de Montaigne pour la ville de Rome, due au souvenir des grands hommes
qu'elle a produits; lui, qui a le culte du passé, ne voit ses ruines qu'avec émotion
et respect; aujourd'hui encore, n'cst-elle pas la métropole de la chrétienté, la ville
universelle, la seule au monde qui ait ce caractère (Akcésilas et CTESinius)? 475.
— 11 doit Vjeaucoup à la fortune pour l'avoir ménagé jusqu'ici. Il est vrai que
l'avenir est inquiétant, mais que lui importe ce qui adviendra quand il ne sera
plus? il n'a pas d'enfant mâle qui continuera son nom; et puis, même ne pas
avoir d'enfants du tout ne lui semble pas chose bien regrettable, 477. — 11 lais-
sera après lui son patrimoine tel qu'il l'a reçu, la fortune ne lui ayant jamais
octroyé que de légères fav(Hirs sans consistance, 479. — De ces faveurs, il n'y en
a pas à laquelle il ait été plus sensible qu'au titre de citoyen romain qui lui a
été accordé quand il était à Rome, titre dont il reproduit textuellement la teneur,
B.o6 ESSAIS DE MONTAIGNE.
pour ceux que cela intéresse et aussi un peu par vanité, 479. — C'est qu'en effet
l'homme est tout vanité; et c'est parce que nous sonmies déçus par ce que nous
voyons quand nous venons à nous observer, que nous reportons constamment
nos regards partout ailleurs que sur nous-mêmes, 483.
CHAPITRE X.
Il faut contenir sa volonté, III, 185. — Montaigne ne se passionnait pour
rien; il se gardait de prendre des engagements, résistant même à ce à quoi le
poussaient .ses propres affections, parce qu'une l'ois entraîné, on ne sait plus où
l'on va; si, nonobstant, on parvenait à l'intéi'esseï' à des affaires autres que les
siennes, i I promettait de s'en charger, mais modérément, ayant bien assez de
celles-ci pour l'occuper, 485. — Beaucoup se font les esclaves des autres, se prodi-
guant pour s'employer à ce qui ne les regarde pas; cela devient une nécessité chez
eux; il ne manque cependant pas sur notre propre i-oute de mauvais pas dont
nous avons assez à faire de nous garder, 487. — Élu maire de Bordeaux, Montai-
gne n'accepta qu'à son corps défendant cette charge à laquelle il fut réélu à l'ex-
piration de son mandat. Portrait qu'il fit de lui à Messieurs de Bordeaux, leur fai-
sant connaître qu'ils ne devaient pas compter qu'il s'emploierait tout entier à leurs
affaires, comme avait fait son père qui avait également occupé ces fonctions, 489.
— Son père était imbu de ce principe si généralement enseigné et que des sages
ont eux-mêmes prêché il y a longtemps, que nous devons nous oublier pour ne
travailler que pour le bien public; est-ce raisonnable? Le vrai sage qui sait bien
ce qu'il se doit, trouve par là même ce qu'il doit aux autres, 491. — Il faut se
dévouer aux fonctions que l'on occupe, mais ce ne doit être qu'un prêt temporaire
et accidentel de sa personne; il ne faut pas qu'elles nous absorbent entièrement
ni qu'elles nous passionnent, ce qui nous entraînerait à manquer de prudence et
d'équité, 493. — Excellent caractère d'un prince du temps de Montaigne, qui était
supérieur aux accidents de la fortune. Même au jeu, il faut être modéré; nous le
serions plus, si nous savions exactement combien peu nous est nécessaire (Sockate,
Metrodore, Épiclre, Cléasthe), 495. — Bien que les besoins que nous tenons de la
nature soient faciles à satisfaire, nos habitudes, notre position dans le monde,
notre âge nous portent à en étendre le cercle: c'est dans ces limites que nous
devons les contenir; les multiplier, c'est offrir à l'adversité plus de chance encore
de nous atteindre (calendrier Grégorien), 497. — C'est folie de s'enorgueillir de l'em-
ploi que l'on occupe et de ne pas s'apercevoir que la plupart du temps, c'est la
robe du magistrat que l'on salue et non sa personne; notre personnnalité doit
toujours demeurer indépendante de la fonction que nous remplissons (JIontaione),
501. — Si l'on se jette dans un parti, ce n'e.st pas une raison pour qu'on en excuse
toutes les injustices, toutes les fureurs, tous les entêtements ridicules; la raison
veut qu'on reconnaisse ce qui est mal dans le parti qu'on a embrassé et ce qui est
bien dans le parti contraire (Marcus Manlils), 501. — Facilité extraordinaire des
peuples à se laisser mener par les chefs de parti (Apollonius, Mahomet), 505. — Dif-
férence entre la guerre que se faisaient César et Pompée et celle qui eut lieu entre
Marils et Sylla; avertissement à en tirer, 505. — Du danger qu'il y a à être l'es-
clave de ses affections (Diogène), 505. — Il faut s'efforcer de prévenir ce qui, dans
l'avenir, peut nous attirer peines et difficultés; c'est ainsi que Montaigne évitait
d'avoir des intérêts communs, surtout avec des parents; il fuyait les discussions
et les gens de caractère difficile (le roi Cotvs), 507. — Quelques âmes fortement
trempées affrontent les tentations; il est plus prudent à celles qui s'élèvent peu
au-dessus du commun, de ne point s'y exposer et de s'efforcer de maîtriser ses
passions dès le début; ce qui se passe dans le cas de la volupté et du plaisir de
se venger en témoigne; il est trop tard de leur fermer la porte, lorsque déjà elles
ont pénétré (Caton, Zénon et Chrémonyde, Socrate, Cyrls et Panthée, le S. -Esprit),
509. — Montaigne fuyait les procès, alors même que ses intérêts devaient en
souffrir; il n'en a jamais eu, non plus que de duels; et, jamais une épithète mal-
sonnante n'a été associée à son nom, 511. — Les plus grands troubles ont le plus
souvent des causes futiles; dans toutes les affaires, et particulièrement dans nos
querelles, il faut réfléchir avant d'agir; mais une fois lancé, il faut aller, dût-on
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. III, CH. X. — VOL. III, B.57
périr à la poine; le manque de prudence conduit au manque de cœur (le dernier
DUC DE BoLiiGoiiNE, la cliutc dc Rome républicaine, la guerre de Troie, Pi.utarque,
BiAs), 513. — La pluj)art des réconciliations qui suivent nos querelles sont hon-
teuses; quand on ne le fait pas de son plein gré, démentir ce qu'on a fait ou dit
est une lâcheté, 515. — Jugement que l'on a porté sur la manière dont Montai-
gne s'est acquitté de sa mairie de Bordeaux et appréciation qu'il en porte lui-
même. Divci-sité des jugements des hommes sur ceux qui les administrent. 11
avoue (jue ceux qui lui reprochent de n'avoir pas apporté dans ces fonctions une
ardeur excessive, sont dans le vrai; mais, de fait, la population n'a pas dû être
trop mécontente de son administration puisqu'elle l'a réélu. Il faisait ce qu'il fal-
lait; n'aimait ni le bruit, ni l'ostentation; et, en tin de compte, il a maintenu
l'ordre et la paix, 517. — Il n'est pas de ceux qui ont de l'ambition, laquelle n'est
pas de mise quand les questions que l'on a à traiter sont affaires courantes dont
il ne faut pas exagérer l'importance, 521. — La renommée ne s'attache pas qu'à
des actes qui sortent de l'ordinaire; elle vient d'elle-même, nos sollicitations n'y
font rien, 523. — En somme, il n'avait qu'à maintenir l'état de choses existant;
il l'a fait, y donnant di" lui-même plus qu'il ne s'y était engagé ; il n'a offensé
personne, ne s'est attiré aucune haine; et, quant à être regretté, il ne l'a jamais
souhaité, 525.
CHAPITRE .XI.
Des boiteux, III, 527. — Critique des changements opérés dans le calendrier
par la réforme grégorienne ; depuis tant de siècles que le monde existe, nous ne
sommes pas encore arrivés à nous entendre sur la forme adonner à l'année, 527.
— Vanité des recherches de l'esprit humain; on veut découvrir les causes d'un
fait, avant d'être assuré que ce fait est certain, 527. — Comment de prétendus
miracles s'accréditent par notre propension à vouloir persuader les autres de ce
que nous croyons nous-mêmes, et par l'autorité que prend sur nous toute croyance
qui a de nombreux adeptes et est éclose depuis un certain temps déjà; que ne va-
t-on au fond des cho.ses (un prince goutteux et un prêtre)? 529. — La plupart d'en-
tre eux rej)osent sur des riens, et on se perd à leur chercher des causes sérieuses;
le seul miracle <|ue Montaigne ait constaté, c'est lui-même : il a beau s'étudier, il
ne parvient pas à s'explic^uor, 533. — Histoire d'un miracle bien près d'être accré-
dité, qui ne rei)0Sait que sur de simples plaisanteries, 533. — 'Lous les préjugés
de ce monde viennent de notre présomption et de notre ignorance, nous ne vou-
lons pas douter; pourtant il est une ignorance qu'il ne faudrait jamais craindre
d'avouer (Lus [l'arc en ciel] et Thaumantis, Corras, I'Aréopage), 535. — De ce que
les livres sacrés relatent des miracles, il ne faut pas en conclure qu'il doive s'en
opérer de nouveaux de notre temps, 537. — Montaigne n'admet pas qu'on maltraite
ceux d'opinions contraires aux nôtres, 537. — Oter la vie aux sorciers pour se dé-
fendre contre leurs prétendus actes surnaturels, c'est faire peu de cas de l'existence
humaine; la plupart du temps les accusations portées contre eux sont sans fon-
dement; et puis, on n'est pas obligé de croire à un miracle qui se peut démas-
quer ou expliquer, 539. — Montaigne est très porté à croire que ces gens, et il en
a observé plusieurs, ont l'imagination malade et sont fous plutôt que criminels;
il ne prétend pas d'ailleurs qu'on se range de son avis (Prestantius), 539. — Ré-
flexions sur un proverbe italien qui attribue aux boiteux des deux sexes plus d'ar-
deur aux plaisirs de l'amour, et explications qu'on en donne (la reine des Ama-
zones, les BOITEUX, les tisserandes), 543. — L'esprit humain admet comme i-aisons
les choses les plus chimériques, et souvent on explique un même effet par des
causes opposées (i,e Tasse, les Français et les Italiens, Antigone et un philosophe
cynique), 543. — C'est ce qui a amené les Académiciens à poser en principe de
douter de tout, ne tenant rien pour absolument vrai, non plus que pour absolu-
ment faux (Clitomaque, Carnéade, Ésope), 545.
CHAPITRE XII.
De la physionomie, III, 547. — Presque toutes nos opinions ne se forment
que par l'autoi'ité d'autrui. Nous admirons Socrate sans le connaître, parce qu'il
B.o8 ESSAIS DE MOM'ÂlGNE.
est robjot do l'ai)pi'obation universelle. Il est vrai qu'il n'en impose pas comme
Caton, et s'il vivait à notre époque, peu d'Iiommes feraient cas d'un enseignement
donné sous la forme simple et naïve qu'il emploie, 547. — Notre bonne fortune a
voulu que sa vie et ses enseignements nous aient été transmis {)ar des témoins
très fidèles et compétents. Quel inmiense service n'a-t-il pas rendu à l'homme en
lui montrant, dans un langage à la portée do tous, ce qu'il peut par lui-même,
549. — L'homme est incapable de modération, même dans sa passion d'apprendre:
la science d'une utilité discutable, qui ne nous conduit seulement pas à affron-
ter la mort avec plus de fermeté qu'un paysan, n'est même pas sans danger. Ce
qui nous est vraiment utile est naturellement en nous, mais il faut le découvrir
et c'est ce que Socrate enseignait (la mkhf. D'AditicoLA, les Tlscli.anes), 549. —
SÉNKQLE et Pi.LTARQLE ont traité de la préparation à la mort; le premier s'en
montre très préoccupé, le second beaucoup moins. L'indifférence et la résignation
avec lesquelles les pauvres gens la supportent, elle et les autres accidents de la
vie, sont plus instructives que les enseignements de la science à ce même pro-
l)0s, 553. — C'est au milieu des désordres de la guerre civile que iMontaigne écrit
ce passage de son livre: excès qui se commettent, indiscipline des troupes; les
meilleui's, en ces circonstances, finissent par se gâter (les ahmées komaines et les ar-
mées TLHQUEs), 555. — Quels que soient les abus d'un gouvernement, s'armer con-
tre lui sous préte.xte d'y porter remède, n'est pas excusable : il faut laisser faire la
Providence (Favomls, Platon), 559. — Le peuple se trouve l'uiné pour de longues
années par les déprédations qui se commirent alors; lui-même eut de plus à souf-
frir des suspicions de tous les partis, aggravées par le peu de souplesse de son
caractère, 561. — Dans son infortune, Montaigne, ne voyant pas d'amis à qui
s'adresser, pi'end le parti de ne compter que sur lui-même et de lutter sans se
préoccuper de ce qu'il avait perdu, pour ne songer qu'à conserver ce qui lui
reste; et, dès lors, il agit comme s'il devait en être réduit aux pires extrémités.
D'autre part, se désintéressant complètement de ce qui ne le touche pas directe-
ment, il se prend à considérer uniquement comme un sujet d'étude l'effondre-
ment auquel il assiste et en suit les progrès presque avec intérêt; il avoue, à sa
honte, en être arrivé de la sorte à n'être pas troublé dans son repos et sa tran-
quillité d'esprit, 563. — Pour comble de malheur, la peste survint; il dut, avec sa
famille, pour laquelle il redoutait la contagion, errer à l'aventure pendant six mois:
le fléau avait fait de grands ravages et pendant longtemps la main-d'œuvre fit
défaut pour la culture, 567. — Résignation des gens du peuple dans ce désastre géné-
ral (les NÉoitiTEs, nos paysans, les soldats romains après la défaite de Cannes), 569.
— De combien peu de secours nous sont les enseignements de la science dans les
grands événements de la vie ! ils ne font que porter atteinte à la force de résistance
que la nature a placée en nous; à quoi bon appeler notre attention sur les maux
auxquels nous .sommes exposés, ne vaut-il pas mieux les ignorer jusqu'au moment
où ils nous frappent (Sénèque)? 571. — L'expérience qu'elle prétend nous donner
est déjà un tourment; apprendre à souffrir et à mourir, c'est souffrir et mourir
avant le temps; la science ne nous prépare pas à la mort, mais aux approches de
la mort; laissons faire la nature, elle se chai-ge au moment voulu de suppléer à
tout ce que nous ne savons pas et, par elle, nous serons en meilleures disposi-
tions que n'était Aristote (César), 573. — Socrate, par ses discours et ses exemples,
nous enseigne à suivre purement la nature. Sa défense devant ses juges : « Il ne
sait ce que c'est que la mort; si c'est une transmigration des âmes, n'ayant rien
à se reprocher, il ne s'effraie pas d'aller réjoindre tant de grands personnages qui
ne sont plus. Que ses juges décident suivant leur conscience; s'il a un conseil à
leur donner, c'est de récompenser sa vie passée à prêcher le bien, en le nourris-
sant le restant de ses jours, en raison de sa pauvi'eté, aux frais du trésor public.
Il ne les implore pas, non par di'dain, mais parce que ce serait se démentir.
leur faire injure et douter des dieux». 577. — Quelle naïveté et, à la fois, quelle
hauteur de sentiments dans ce plaidoyer si digne de lui ; aussi en quel honneur
le tient, à si juste raison, la postérité, tandis que ses accusateurs, accablés par le
mépris public, de désespoir en sont venus à se i)endre (Socrate et l'orateur Lvsl\s).
581. — Socrate y parle de la mort comme d'un incident naturel de la vie, et il
est dans le vi-ai; ce n'est pas la mort que les âmes simples redoutent, mais la
SOMMAIRE DES ESSAIS. MV. III, CH. XI. — VOL. III. B.59
douleur qui l'accompafrno ; la nature ne saurait en effet nous faire prendre en
horreur ce passage de vie à trépas indispensable à l'accomplissement de son
œuvre; par la simplicité de sa vie et celle avec laquelle il rend ses idées, Socrate
est admirable (les chevalx, les cygxks, les kléphants), 581. — Bien qu'il vienne de
dire que nous ne vivons pas assez sur notre propre fond, Montaigne a, lui aussi,
introduit quantité de citations dans son ouvrnge ; ce n'était pas dans son idée
première, mais il s'est laissé entraîner par le goût de son époque et le besoin
d'occuper ses loisirs; il n'indique pas d'où il les tire, parfois il les transforme ou
les détourne de leur vrai sens, et cela pour ne pas faire étalage d'une science qui
n'est pas en lui (Sockate et Euthydkme, un phésidknt), 583. — Il est dangereux de
se mettre à écrire sur le tard, l'esprit a perdu sa verdeur; lui-même eût dû s'y
prendre plus tôt, mais il ne se propose pas tant de montrer ce qu'il sait que ce
((uil ne sait pas; et, voulant peindre sa vie, il a dû attendre le moment où elle se
(léroulait tout entière à ses yeux, 585. — A propos de physionomie, Montaigne
revient à Socrate : il est fâché qu'une si belle âme se soit trouvée dans un cori)s
si disgracié, il pense qu'il y a une certaine relation et conformité entre le corps
et l'esprit (La Boétie), 587. — Comme Platon et la plupart des anciens philosophes,
il estime singulièrement la beauté; toutefois, une piiysionomie avantageuse n'est
pas toujours fondée sur la n'-gularité des traits du visage, et on ne peut pas tou-
jours faire fond sur la physionomie pour porter un jugement sur un individu
(l'iiKVNÉ, Cvitus, Ai.EXANDUE, CÉsAK, Scu'ion), 589. — Eu principc, il faut suivre les
indications de la nature; les lois et la religion, au lieu de servir de régulateurs à
nos devoirs, nous les dictent; et on en arrive à s'imaginer, bien à tort, que les
observances religieuses, sans de bonnes mœurs, suffisent au salut d'un état, 591.
— Physionomie de Montaigne; son air naïf lui attirait la confiance. Récit de deux
aventures où le bon effet qu'il produisait à première vue et sa franchise lui ont
été très avantageux, 593. — La simplicité de ses intentions, qu'on lisait dans son
regard et dans sa voix, empêchaient qu'on ne prît en mauvaise part la liberté
de ses discours; dans la répression des crimes, il n'était pas pour trop de sévérité
(AiusTOTE, Ciiaimlle), 597.
CHAPITRE Xlil.
De l'expérience, III, 599. — L'expérience n'est pas un moyen sûr de par-
venir à la vérité, parce qu'il n'y a pas d'événements, il n'est point d'objets abso-
lument semblables; on ne peut, par suite, juger sainement par analogie, 599. —
Par cette même raison, la multiplicité des lois est fort inutile; jamais les législa-
teurs ne peuvent embrasser tous les cas; les meilleures lois sont les moins nombreu-
ses, les plus simples, n'embrassant que les cas généi-aux, 601. — Celles de la nature
nous procurent plus de félicité que celles que nous nous donnons, et les juges les
plus équitables seraient peut-être les premiers venus, jugeant uniquement d'après
les inspirations de leur raison (quelques républiques italiennes, Ferdinand i.e Ca-
tholique, Platon), (X)3. — Pour vouloir être trop précis, les textes de lois sont
conçus en termes si obscurs, dont l'obscurité est encore accrue par les gloses et
commentaires qui se sont greffés sur eux (ce qui est du reste le propre de toutes
les interpr(''tations), que, si bien qu'on s'exprime dans la vie ordinaire, on n'arrive
pas dans les contrats et testaments à formuler ses idées d'une façon indiscutable;
à quoi s'ajoute que, sur chaque chose, il y a autant d'opinions que d'hommes,
et que souvent le même homme pense différemment en des temps différents, par-
fois à des heures différentes de la même journée (Ulpian, Bartholdus, Baldus,
Aristote, les chiens d'Ésope, Cratès et Heraclite), 603. — Si les interprétations
se multiplient à ce point, la cause en est à la faiblesse de notre esprit qui, en outre,
ne sait se fixer. En nos siècles, on ne compose plus, on commente; compren-
dre un auteur est devenu notre seule science; nos opinions ne se forment plus-
elles-mêmes, elles se entent les unes sur les autres. Les Essais de Montaigne
reviennent souvent à parler d'eux-mêmes; on y trouvera peut-être à dire, son
excuse c'est que lui-même en est le sujet, 607. — Ce qu'il y a de singulier, c'est
que les discussions, les disputes ne roulent guère que sur des questions de mots.
Si on ne trouve nulle part de similitude absolue, la dissemblance ne l'est pas
BM ESSAIS DE MONTAIGNE.
davantage, et dans les choses dissemblables se trouve toujours quelque joint qui
fait que ciiacun les interprète à sa façon (Luther, Sockatk et Ménon), H09. — Im-
perfection des lois; exemples d'actes d'inhumanité et de foi-faits judiciaires aux-
quels elles conduisent; refus d'assistance à des malheureux en péril; exécution
d'innocents, victimes de ce que leurs condamnations n'étaient entachéas d'aucun
vice de forme. Combien de condamnations sont prononcées, qui sont plus crimi-
nelles que les crimes qui les motivent (des i'aysans du pays de Montaigne, des
jLiiEs de la même contrée, Phu.ippe de Macédoine)! 611. — Montaigne partage l'o-
pinion des anciens, qu'il est prudent, qu'on soit accusé à tort ou non, de ne pas
se mettre entre les mains de la justice. Puisqu'il y a des juges pour punir, il de-
vrait y en avoir pour récompenser (Ai-ciBiADE, les Ciiinoi.sj, 613. — Il n'a jamais eu de
démêlés avec la justice, et il est si épris de liberté, qu'il irait n'importe où, s'il se
sentait menacé dans son indépendance, 615. — Les lois n'ont autorité» que parce
qu'elles sont les lois et non parce qu'elles sont justes. Comment le seraient-elles, étant
le plus souvent l'œuvre de sots, ou de gens qui, en haine de l'égaHté, manquent à
l'équité; pour lui, il a renoncé à leur étude; c'est lui seul qu'il étudie, et, pour le
reste, il s'en remet simplement à la nature, 615. — Que ne prêtons-nous plus d'atten-
tion à cette voix qui est en nous et qui suffit pour nous guider? Quand nous cons-
tatons que nous nous sommes trompés en une circonstance, à moins d'être un sot,
nous devrions être atout jamais en défiance de nous dans toutes les circonstances
analogues; c'est ce qui lui arrive pour sa mémoire; aussi devons-nous nous étudier
constamment pour que nos passions ne viennent pas pervertir notre jugement,
617. — « Se connaître soi-même • est la science capitale; ceux-là seuls qui la prati-
quent savent combien peu nous savons; celui qui sait, hésite et est modeste; l'igno-
rant est affirmalif, querelleur, opiniâtre, ce résultat est le fait de l'école du monde ;
c'était aussi ce qu'en pensait Socrate (Socrate et Elthydème, Ahistarqle, Antée, Ax-
TisTHÈsE et Socrate), 621. — Montaigne étudiait sans cesse les autres, pour se mieux
connaître; il en était arrivé à les juger avec assez de discernement; toutefois, il
était très hésitant pour se prononcer, rien n'étant difficile comme de déterminer
dans quelle catégorie doit prendre place telle ou telle de nos actions. En géné-
ral, l'homme est mal équilibré; quel service on rend à qui sait l'entendre, de
lui dire avec franchise ce qu'on pense de lui (Persée roi de Macédoine, Mon-
TAKiNE) ! 623. — Montaigne estime qu'il n'est propre à rien, sauf à parler librement
à un maître auprès duquel il eut été placé, lui dire ses vérités et faire qu'il se
connaisse lui-même. Pareil censeur bénévole et discret qui, sans paraître censurer
leur conduite, leur en ferait apercevoir les conséquences, les tiendrait au courant
de ce que le peuple pense d'eux, serait chose précieuse pour les rois, sur lesquels
cette engeance maudite des flatteurs a un effet si pernicieux (Montaigne, Alexan-
dre), 625. — Ses Essais sont une sorte de cours expérimental, fait sur lui-même,
d'idées afférentes à la santé de l'àme et du corps. Pour ce qui est de l'àme, on y
apprend moins ce qui est à faire que ce qui n'est pas à faire; quant au corps,
on peut en déduire que chacun qui s'observe, est à lui-même son meilleur méde-
cin. Exposé du régime qu'il a suivi toute sa vie durant (Tibère, Socrate, Platon),
627. — Montaigne conservait le même genre de vie, qu'il fût malade ou bien por-
tant; il fuyait la chaleur émanant directement du foyer (mode de chauffage usité
à Augsbourg, Evenus),63I. — Les coutumes d'un pays sont parfois le contraire de
celles de quelque autre nation; tendance que nous avons à aller chercher ailleurs,
dans l'antiquité notamment, des arguments que notre époque nous fournirait
amplement, 633. — Exemples de singularités résultant de l'habitude : Andron l'argien
traversant sans se désaltérer les déserts de la Libye, gentilhomme passant des mois
et même une année entière sans boire; savant qui aimait à travailler au milieu
du bruit; Socrate dans son intérieur; Sénèque ne mangeant rien de ce qui avait
eu vie (Sextius, Attale), 633. — Nos goûts se transforment par l'effet de l'habitude;
il faut faire en sorte, surtout quand on est jeune, de n'en avoir aucun dont nous
soyons les esclaves et contre lequel nous ne puissions aller à un moment donné
(Pythagore, Philopoemen), 635. — Habitudes qu'avait contractées Montaigne dans sa
vieillesse; passer la nuit au grand air l'incommodait, faiblesse contre laquelle la
jeunesse doit se prémunir; soin qu'il avait de se tenir le ventre libre (Marius,
César), 637. — Ce que les malades ont de mieux à faire, c'est de ne rien changer à
SOMMAIRE DES ESSAIS. LIV. III, CH. XIII. — VOL. III. B.61
leur mode d'existence; lui-même, malade ou bien portant, ne s'est jamais abstenu
de ce qui lui faisait envie; il en a été de même des plaisirs de l'amour qu'il a
commencé si jeune à connaître, que ses souvenirs ne remontent pas jusque-là
(Qlartu.i.a), 641. — L'incertitude de la médecine autorise toutes nos envies, ((45.
— Montaigne avait un timbre de voi.x élevé, ce qui faisait qu'il fatiguait en par-
lant; dans la vie courante, l'intonation de notre voix est à régler suivant l'idée
qu'on veut rendre (Carnéade),(>45. — Les maladies, comme tout ce qui a vie, ont
leurs évolutions dont il faut attendre patiemment la fin; laissons faire la nature,
nous luttons en vain. Dès notre naissance, nous sommes voués à la souffrance et,
arrivés à la vieillesse, l'efTondrement est forcé; les médecins n'y peuvent rien,
sinon nous troubler par leurs pronostics (Crantor, les Mexicains, Ctésiphon), 647.
— Dans ses maux, Slontaigne aimait à flatter son imagination : atteint de gra-
velle, il s'applaudit que ce soit sous cette forme qu'il ait à payer son tribut inévi-
table à l'âge; c'est une maladie bien portée; peut-être comme tant d'autres finira-
t-elle avant lui ; en tout cas, elle ne le prive pas de tenir sa place en société
et, par les souffrances qu'elle lui fait endurer, le prépare insensiblement à la
mort, 649. — Passant habituellement par les mêmes phases, on sait au moins
avec elle à quoi s'en tenir; et si les crises en sont particulièrement pénibles, quelle
ineffable sensation quand, d'un instant à l'autre, le bien-être succède à la douleur
(les Stoïciens, Socrate), 655. — La gravelle a encore l'avantage sur bien d'autres
maladies, de ne pas entraîner d'autres maux à sa suite, de laisser au patient
l'Usage de ses facultés, la possibilité de vaquer à ses occupations et à ses plaisirs;
elle n'altère pas sa tranquillité d'esprit, s'il ne prête pas l'oreille à ce que lui en
diraient les médecins, 657. — Montaigne était grand dormeur, ce qui est préjudi-
ciable à la santé; cependant en cela, comme en toutes choses, il savait s'accom-
moder aux circonstances. Sa petite taille lui faisait préférer aller à cheval qu'à
pied dans les rues et quand il y avait de la boue (Platon, Scipion), 661. — Le mé-
tier des armes est de toutes les occupations la plus noble et la plus agniable, 663.
— Montaigne était d'excellente constitution; touchant à la soixantaine, il est en-
core vigoureux pour cet âge; chez lui, les maux du corps n'avaient que peu de
prise sur l'âme, <56ô. — Ses préoccupations n'ont pas souvent troublé son som-
meil, et ses songes étaient rarement tristes (Platon, Socrate, Xésophon, Aristote,
les Atlantes, Pvtiiacore, le philosopiie Théon, le valet de Périclès), 667. — Il était
peu délicat sous le rapport de la nourriture; la délicatesse est le fait de quiconque
affecte une préférence trop marquée pour quoi que ce soit (Favorixus), 669. — Dès
le berceau, Montaigne avait été habitué à vivre comme les gens de la plus basse
classe et à se mêler à eux; cette fréquentation l'a rendu sympathique au sort des
malheureux (la reine Chéi.onis, Flaminius, Pyrrhus), 671. — Il n'airnait pas rester
longtemps à table; les anciens Grecs et Romains entendaient beaucoup mieux que
nous cette jouissance (Auguste), 673. — Indifférent à ce qu'on lui servait, il se
laissait aller à manger de tout ce qui paraissait sur la table, 673. — C'est un<>
grâce que Dieu nous fait quand la mort nous gagne peu à peu, ce qui est l'effet
de la vieillesse; le moment fatal doit alors nous moins affecter, puisque ce n'est
plus qu'une fraction de nous-mêmes qu'elle atteint; du reste la mort est indisso-
lublement liée à la vie, on en constate en nous la présence et les progrès dans
tout le cours de notre existence (Solon), 67o. — Montaigne n'a jamais acquis la
certitude que certains mets lui fussent nuisibles; il en est dont il s'accommodait
parfaitement, dont ensuite il s'est mal trouvé et que, plus tard, il a très bien suppor-
tés, 677.— Il lui est arrivé parfois de se passer de prendre un repas, quand il vou-
lait se ménager pour mieux manger le lendemain, avoir l'esprit dégagé, ou quand
il n'avait pas une société qui lui convint. 11 est bon de manger doucement, fré-
quemment plutôt que beaucoup à la fois. Tout régime trop longtemps suivi, cesse
d'être efficace (Éimcure, Chilon), 677. — Il ne sert de rien non plus de se trop
couvrir, on s'y habitue et cela n'a plus d'effet, 679. — Nos occupations et nos plai-
sirs nous portent à donner plus d'importance au soufier qu'au dîner; l'estomac,
d'après Montaigne, s'accommode mieux du contraire. H buvait peu, seulement
aux repas et uniquement du vin coupé d'eau (Auguste, Démocrite, Cranaus roi
d'Athènes), 679. — Il n'aimait pas l'air confiné; était plus sensible au froid qu'au
chaud; avait bonne vue, mais elle se fatiguait aisément; sa démarche était vive,
B.62 ESSAIS DE MONTAIGNE.
il ne pouvait tenir en i)lacc ; à table, il mangeait avec trop d'avidité (la servante
de Chrysippe, DioGf;NE), 681. — Des convives agréables, des mets délicats, une ta-
ble bien sei-vie, sont essentiels pour un bon repas; il est des gens qui dédaignent
ce genre de plaisir qui est cependant de ceux que la natui-e nous offre elle-même,
ce dédain est le fait d'un esprit maladif et chagrin (Ai.ciriade, Vakhon, Xeuxès),
083. — Les plaisirs de l'âme sont peut-être supérieurs à ceux du corps; les plus
appréciables sont ceux auxquels l'une et l'autre participent simultanément (les
PHILOSOPHES Cykknaiqles, Aristu'pe, Zénon, Pvthaoohe, Socrate, Platon), 085. —
Tout ce qui est de nécessité la nature l'a rendu agréable, et le sage use des vo-
luptés comme de toutes autres choses; bien vivre et imprimer une bonne direc-
tion à sa vie, est la seule et véritable lin de l'homme (Brutus, les deux Caton),
087. — Les délassements siéent aux âmes fortes et généreuses comme aux autres,
ainsi qu'il ressort des exemples d'ÉPAMiNONOAS, de" Scipion et de Socrate, 689. —
La grandeur d'âme consiste surtout à régler sa conduite et à la circonscrii'e dans
de justes limites; elle ne doit pas fuir les plaisirs que lui offre la nature, mais
leS|goûter avec modération et montrer une égale fermeté dans la volupté comme
dans la douleur (Eudoxls, Platon), 093. — Pour lui, Montaigne, bien (|u'au
déclin de sa vie et prêt à la quitter sans regret parce que c'est dans l'ordre
naturel des choses, il ne se contente pas de passer le temps; et, quand il ne
souffre pas, il le savoure, jouissant du calme qui s'est fait en lui, sans préoccu-
pation de l'avenir, ce poison de l'existence humaine (Alexandre), 095. — La vie
est à accepter telle que Dieu nous l'a faite ; tout ce qui vient de lui est bon ; c'est
se montrer ingrat à son égard que de repousser les satisfactions dont il l'a dotée
(Éplménide), 097. — Vivons suivant la nature, ce guide si doux autant que pru-
dent et judicieux; chez la plupart des gens dont les idées vont s'élevant au-dessus
du ciel, les mœurs sont plus bas que terre (Socrate), 0î)9. — En somme, dans
tous les états de la vie, il faut jouir loyalement de ce que l'on est, et c'est folie de
vouloir s'élever au-dessus de soi-même (Socrate, Platon, Alexandre et Philotas, les
Athéniens et Pompée], 703.
FASCICULE C
TABLE DES CITATIONS
ET INDEX DES AUTEURS d'oU ELLES SONT TIREES.
Cette table des citations, établie par ordre alphabétique", donne, en regai-d de
chacune d'elles, l'indication do l'auteur d'où elle est tirée.
Elle a surtout pour objet d'aider à la collation des diverses éditions, étant le
plus sûr moyen de trouver aisément dans l'une un passage relevé dans une au-
tre, par la détermination et la recherche de la citation qui la précède ou de celle
qui la suit.
Ces citations, réparties entre 9G auteurs, sont au nombre de 1.308, y compris
cinq qui ne figurent que dans l'exemplaire de Bordeaux et trois qui ne se trou-
vent que dans les éditions antérieures à 1595, dans lesquelles on en relève en
outre deux qui y sont reproduites deux fois chacune.
Une annexe donnant la liste alphabétique des auteurs ainsi mis à contribution,
suit avec indication du chiffre de leur apport; parmi eux, Cicéron, Lucrèce, Ho-
race, Virgile et Sénèque y occupent de ce fait, et de beaucoup, le premier rang.
Montaigne n'indique jamais la source de ses citations; bien plus, il en change
très souvent un ou plusieurs mots, soit pour la mieux approprier à sa pensée,
soit encore, mais rarement, par pudeur. Souvent aussi, il y ajoute un membre
de phrase de son crû, ou amalgame deux fi-agments d'un même auteur ou d'au-
teurs différents; aussi les recherches, auxquelles se sont particulièrement livrés
Jlademoiselle de Gournay, Coste, Le Clerc et autres pour adapter à chacune le
nom de qui elles émanent, ont-elles dû présenter une certaine difficulté; dans le
nombre, trente-six demeurent encore d'origine inconnue. — A noter aussi que
Montaigne les détourne très fréquemment du sens qu'elles ont dans le texte d'où
il les tire, ou les applique à des sujets tout différents, ce qui, à la vérité, est un
procédé en usage de temps immémorial.
A ces mêmes auteurs et à quelques autres, Montaigne a fait bien d'autres em-
prunts, dont partie sont signalés dans les notes, mais il n'est question ici que des
citations proprement dites.
Dans la table, les mots en égyptienne italique sont les premiers de chaque ci-
tation; les deux nombres qui suivent indiquent le volume et la page; les asté-
risques, quand il y en a, marquent qu'elles ont donné lieu à une note; le nom qui
vient après, en petites majuscules, est celui de l'auteur; puis, en ilaliques et géné-
ralement en abrégé, celui de l'ouvrage; les nombres qui terminent en indiquent
suivant sa nature : le livre, le volume ou l'acte; le chapitre ou la scène; enfin l'a-
linéa ou le vers selon qu'il y a lieu.
Dans l'annexe, le nombre qui suit le nom de chaque auteur est celui des cita-
tions extraites de lui; les autres indiquent l'époque où il a vécu, les dates de sa
naissance et de sa mort, date suivie de av., si elle est antérieure à l'ère chré-
tienne.
F.X. de Bord, signifie ; Exemplaire de Bordeaux.
Ed. de 80, 88, ant. signifient : Édition de 1580, 1588, antérieures à 1595.
ESSAIS DE MONTAIGNE.
ESSAIS DE MONTAIGNE.
TABLE DES CITATIONS.
(INDICATIONS REPORTANT A L'ÉDITION dite <• SELF-ÉDITION »)•
A demain. — I, (ÎM. — Pi.utahque, de V Esprit familier de Sacrale.
A multis. — II, 194. — SÉXKQUE, Epist. 12 1.
A natui^a. — III, 182. — Sénkqle, Epist. \i9.
A quo ceu. — III, 12. — Ovide, Amor., III, 9,25.
A sole. — I, 510. — CicÉRON, Tusc, V, 17.
Abducendus. — III, 1(j4. — Cicérox, Tusc, IV,. 35.
Ablatum. — III, 300. — Ovide, Trist., L 6, 29.
Ac veluti. — II, 052. — Virgile, Enéide, XU, 684.
Ad deos. — I, 18<J. — Tite-Live, X, G.
Ad hsec. — I, 516. — Juvénai., Sat., X. 137.
Ad ictus. — I, 536. — Tite-Live, XXXVIIL 5.
Ad nos. — II, 458. — Virgile, En., VII, 616.
Ad nuilum. — III, 18-1. — Pseudo-Gallls, I, 125.
Ad primum. — III, 636. — Jlvénal, VI, 576.
Ad quamcumque. — II, 232. — Cicéron, Acad., II, 3.
Ad summum. — II, 204. — Horace, Episl., I, 1, 106.
Ad unum. — III, 268. ^- Horace, Ep., Xll, 15.
Adde heliconiadum. — III, 12. — Lucrèce, 111, 1050
Adeo minimis. — II, 288. — Tite-Live, XXVII, 23.
Adeo nihil. — I, 178. — Tite-Live, XXXIV. 54.
Adeo pavor. — I, 100. — Qlixte-Curce, III, 11.
Adbuc ardens. — III, 204. — Juvénal, Sat., VI, 128.
Aditum. — 1, 184. — Sénèque, Œdipe, 111, 686.
^que pauperibus. — I, 26'4. — Horace, Epist., I, 1. 25.
Age! si haec. — III, 348. — Térence, .Andr., IV, 11.9.
Agnosco veteris. — III, 194. — Virgile, En.. IV, 23.
Agros divisere. — II, 4^1 — Lucrèce. V, liœ.
Ah! tum. — III, 222. - Catulle, Carw'., XV. 17.
Ainsi voit-on. — III, 606. — La Boétie.
Alcon hesterno*. — III, 60. — Avsone. Epigr..7\.
Aliquis. — I, G'^. — Séxèque, Epiât. 13.
AUoquar. — i; 318. — Catulle, LXV, 9.
Aller ab. — I, 286. — Vukui.e, E'/loç/., Vlll, 39.
Aller remus aquas, aller mibi. — III, 160. — Properce, III, 3, 23.
Aller remus aquas, aller tibi. — II, 490. — Properce, III, 2, 23.
Aller ridebal. - I, 7£j{). — .ruvÉNAi,, Sat., X, 28.
Amor ordinem *. — III, 286. — S. .Jérôme, Lettre à Chroinatius.
Amorem conatum. — I. 306. — Cicérox. Tusc, IV, 34.
C.68 ESSAIS DE MONTAIGNE.
An potei'unt. ~ II, 39-2. — Llckkce, IV, 487.
An quidquam. — II, 452. — Cicéron, Tusc, V, 36.
An vivere*. — III. 640. — Psecdo-Gallus, Eleg., I, 155, 247.
Animus multo. — (III, 510). — Serait de Sésèque. (Ne se trouve que dans l'ex.
de Bord.).
Animus quod. — III, 180. — Pétrone, Salyr., c. 128.
Ante oculos *. - III, 434. — Ovide. Ti-isl., III, 4, 57.
Apud alios. — I, 210. — Cicéron, Tusc, V, 36.
'Api-Tia xw>'ô; "• — III. 542. — Théocrite. Idylle, IV, 62.
'ApiffXûv ixExpov *. — III, 674. — DiooÈNE Laerce, I, 93.
Aiistoni tvagico. — 1, 288. — Tite-Live, XXIV. 24.
Arma acri. — III, 224. — Virgile, En., VIII, 441.
Arma enim. — II. 56. — Cicéron, Tu.sc., Il, 16.
Arma proferri. — I, 532. — César, de Bello gall., VII, 11.
Arma rogo. - III. 224. — Virgile, En., VIII, 383.
Armati terram. - III, 396. — Virgile, £'ne/rf., VII, 748.
Arripe dilatam. — II, 5.56. — Prudence, Cont. Symm., II. frJ3.
'ArrwTo-j; ex — I, 218. — Cicéron, de Nul. deor., III, 31.
At tibi nil. — I, 548. — Martial, Epigr., 11, 58, 11.
At tu Catulle. — III, 46(i. — Catulle, Carm., VIII, 19.
Athenis tenue*. — II, 'S&i. — Cicéron, de Fato, 4.
Atque adeo. — II, 128. — Manilius, IV, 907.
Atque aliquis. — III, 222. — Ovide, Métam., IV, 187.
Atque idem — I, 5-1. — Virgile, En., X, 732.
Atque illum. — II, 222. — Cicéron, Irad.'du Timêe, 2.
Atque in se. — I, 128. — Virgile, Georg., II, 402.
Attonitus novitate. — II, 370. — Ovide, Mélam., XI, 128.
Audit iter. — I, 112. — Cj.audien, in Riif., 11, 137.
Auterimur. — II, 100. — Ovide, de Rem. Amor., 1, 343.
Auro quoque*. — III, 304. — Calpurnius, Eclog., Vil, 53.
Aut bibat. — II, 218. — Cicéro>-, Tmc, V, 4.
Aut fuit*. — I, 452. — La Boétie. — Ovide, Ep. d'Ariadnc.
Aut nimiis. — III, 382. — Lucrèce, V, 216.
Aut qui non. — I, 276. — Quintil., VIII, 3.
Aut verberatœ. — III, 383. — Horace, Od., III, 1, 29.
Aves quasdam. — I, 72. — Cicéron, de .\at. deor., II, (M.
Avida est. — I, 454. — Sénèque, de Prov., 4.
Aymé l'estat. — III, 398. — De Pibracq, Quatrains.
Balteus. — III, 302. — Calpurnius, Eclog., VIII, 47.
Basti*. — I, 92. — Properce, II, I, 43, trad. italienne.
Belli. — III. 238. — Lucrèce, 1, .33.
Belluœ. — II, 106. — Cicéron, de \al. deor., I, 36.
Bellum. — II, 378. — Virgile, En., III, 539.
Bénéficia. — III, 368. — Tacite, Ann., IV, 18.
Bina. — II, 40(j. — Lucrèce, IV, 451.
Bona iam. — III, 478. — Source inconnue.
Bouha. — I, 210. — Dicton gascon.
Brevis esse. — II, 476. — Horace, Art poél., 25.
Brevis est *. — II, 118. — Quintilien, XII, 11.
Chercher par Q les citations qui ne se trouveraient pas ict
Csedebant. — I, 534. — Virgile, En., X, 756.
Csedimur. — II, 506. — Horace. Epist., II, 2. 97.
TABLE DES CITATEONS. CAP. C.69
Caetera pars. — II, 312. — Lucrèce, IIL 144.
Calamitosus. -- I, 28. — Sénèque, Epist. 90.
Gapienda. — II, 490. — Sénèque, Agnm., II, 1, \7.
Captisque. — III, 540. — Tite-Live, VIII, 18.
Caspamus. — I, 426. — Perse, Sal., V, loi.
Casta. — II, 668. — Martial, I, 14.
Casus. — II, 458. — Juvénai., Saf., XIII, 0.
Catoni. — II, ÎW. — Cicéron, deOff'., I, 31.
Cavete. ~ II, 204. — S. Paul, ad Coloss., II, 8.
Ceu tlamina. — III, 510. — Virgile, En., X, 97.
Ceux qui. — III, 192. — D'après Pi.utarque, Qu'il faut qu'un philosophe converse
avec les princes, c. 5.
Che non. — I, 238. — Dante, Inf., XI, 93.
Che ricordasi. — II, 214. — Le Tasse, Jér. dél. .
Chi puo. — I, 2(5. — Pétrarque, sonnet 137.
Chi troppo. — II, 332. — Pétrarque, Chants, XI, 48.
Clare. — I, 592. — Horace, Epist., I, 16, 59.
Clarus. — II. 240. — Lucrèce, I, 640.
Coacervanturque. — II, 518. — Tite-Live, II, 47.
Cogitationes. - II. 244. — Liv. de la Sagesse, IX, 14.
Corne quei. — I, 670. — Le Tasse, Ger. lib., VIII, 26.
Corne segue. - I, ;i02. — Ariosto, X, 7.
Commun! *. — I, 566. — César, de Bello civ., II, I.
Concessa. -- III, 236. — Lucain, II, 446.
Conentur. — I, 122. — Horace, Ep., 1, 1, 19.
Conîusum. - III, 602. — Sénèque, Epist. 89.
Coniicito humorem. — III, 170. — Lucrèce, IV, 1062.
Coniugis. — I, 386. — Catulle, LXVIH, 81.
Coniugium *. — II, 368. — Juvénal, X, 352.
Conscia. — I, 660. — Ovjde, Fast., I, 485.
Consiliis*. — I, 516. — Cicéron, Tusc, V, 17.
Consueta. — II, 192. — Lucrèce, IV, 999. " .
Consuetudine. — I, 290. — Cicéron, de Nat. deor., Il, 38.
Consuetudinis. — I, 156. — Cicéron, Tusc, II, 17.
Consurgit *. — II, 558. — Prudence, Cont. Symm., Il, '617.
Contemnite. - II, 434. — Properce, II, 14, 19.
Contextus. — III, 240. — Sénèque, Epist. 33.
Gontorta. — I, 276. — Cic, Acad., II, 24.
Contrahi *. — II, 320. — Cicéron, de Divin., II, 5S.
Convenu. - III, 510. — Cicéron, de 0/f., II, 18.
Gonverso. — II, 568. — Juvénal, III, 36.
Corpoream. — II, 318. — Luckèce, 111, 176.
Gorruptibile. — II, 136. — S. Augustin, de Civ. Dei, XIII, 15.
Cosi per. — II, 148. — Dante, nel l'urg., XXVI, 31.
Gras vel. — II, 278. — Horace, Od., Ili, 29, 13.
Crédit. ~ II, 422. — Lucain, V, 653.
Credo. - II, 4.50. — Ariosto, Orlando, XI, 81.
Crocodilon. — II, 108. — Juvénal, XV, 2-7.
Cui cor. - III, 688. — Cicéron, de Fin. bon et mal., II, 8.
Gui cum. — III. 620. — Lucain, IV, 599.
Gui malus. - II, 12. — Martial, XII, 82.
Cui sit. - II, m. — Horace, Epist., I, 1, 51.
Cui Vivendi. — I. 610. — Cicéron, Parad., V, 1.
Cujus in *. — III. 280. — Horace, Epod., XII, 19.
Cujus livida. — III, 258. — Martial, VII, 94.
Gujusque. — III, 12. — Manilius, II, 18.
Cum de. — II, 324. — Sénèque. Episl. 117.
Cum in summa. — II, 272. — Lucrèce, II, 1077.
Cum jam. — II, 100. — Lucrèce, IV, 1099.
C.70 ESSAIS DE MOISTAIGNE.
Cum moriar. — I, 120. — Ovide, Am., II, 10, 36.
Cum morosa. - III, 170. — Perse, SaL, IV, 73.
Cum relego. — II, 474. — Ovide, de Ponlo, I, 5, 15.
Cum res. — I, 271. — Séxèque, Cunt., 111.
Cum semper. — III, 518. — Q. Cicéron, île Pelil. Consulat., 2.
Cum suspicimus. — II, 134. — Lucrèce, V, 1203.
Cum vint. — I, 01 1. — LtiCiiKCE, III, 475.
Cuncta ferit. — II, 580. — Ci.audien, in Eutr., I, 182.
Cunctaque. — II, 400. — Ovide, Melam., III, 424.
Cupidine. — III, 536. — Tacite, flisL, I, 22.
Cur amplius. — I, 126. — Lucrèce, III, 054.
Ciir isto. — I, 72. — Cicéron, de Divin., II, 57,
Cur hanc. — I, 74. — Lucain, II, 1, 14.
Cur non. — I, 126. — Lucrèce, 111,951.
Curée. — I. 26. — Sénèque, Hipp., II, 3, 607.
Curatio. — I, 38. — S. Augustin, deCiv.Dei, I, 12.
Curentur. — III, 462. — Juvé.">ai,, XIII, 124.
Curis. — III, 572. — Virgile, Georg., I, 123.
D'autant es-tu. — III, 702. — Pi.utarque, Pompée, c. 7 [Amyotj.
Dare pondus. — III, 528. — Perse, V, 20.
De capsula *. -— III, 144. — D'après Sénèque, Episl. 115.
De la vertu. — II,' 218. — Pi.utarque, Cont. des Phil. Sloïq. {Amyot).
Débet enim. — I, 634. — Lucrèce, III, 874.
Debilem *. — III, 24. — Sénèque, Epist. 101 .
Deçà vers. — II, 442. — D'après Homère, Od., XII. 181.
Dédit hoc. — II, 452. — Quintilien, Inst. oral., I, 12.
Detienda. — III, 642. — Dicton espagnol.
Deliberata *. — II, 00. — Horace, Od., I, 37.
Democriti pecus. — I, 422. — Horace, Ep., 1, 12, 12.
Democritum postquam. — II, 218. — Lucrèce, III, 1052.
Denique connubia. — II, 328. — Lucrèce, III, 777.
Denique cur. — II, 314. — Lucrèce, III, 741, 746.
Denique ut. — II, 410. — Lucrèce, IV, 714.
Deprendas. — I, 258. — Juvénai,, IX, 18.
Desinit in. — I, 296. ^- Horace, Art poàt., 4.
Deum namque*. — II, 314. — Virgile, Georg., IV, 221.
Deus hœc. ~ III, 406. — Horace, Epod., XIII, 7.
Deus ille. — II, 206. — Lucrèce, V, 8.
Deus ita. — II, 280. — S. Augustin, de Civ. Dei, XI, 22.
Deus superbis. — II, 130. — S. Pierre, Epist. I, 5, 5.
Di citatorie. — II, 220. — Ariosto, Orland. fur., 14, 84.
Diaboli *. — III, 218. — S. Jérôme, Contre Jovinien.
Dicendum. — II, 228. — Cicéron, de Divin., II, 3.
Ditticultatem*. — III, 604. — Quintilien, Insl.orat., X, 3.
Diriguisse *. — I, 24. — Ovide, Metam., VI, 301.
Diis te. — III, 702. — Horace, Od., III, 6, 5.
Distinguo. — I, 608. — Terme de logique.
Diverses. — II, 588. — Pseudo-Gallus, I, 104.
Divitiarum. — I, 472. — Cicéron, Parad., VI, 2.
Dixerat. — III, 194. — Virgile, En., 387, 392.
Dolus an ". — I, 46. — Virgile, En., H, 390.
Dominus novit. — Psaume XCIII, II. j JJj~4^
Domitosque. — II, 288. — Horace, Od., II, 12, 6.
Dubia. — II, 488. — Sénèque, Agam., III, 1, 29.
TABI.E DES CITATIONS. DUC. C.71
Ducimur. — I, (K)-,'. — Horace, Sal., II, 7, ^i.
Dum abest. — I, 566. — Lucrèce, III, 1095.
Dum œs. — I, 550. — Horace, Sat., I, 5, 13.
Dum tortiina. — I, 518. — Lucain, VII, 73 1.
Dum in. — II, 506. — Térence, Andr., I, 6, 32.
Dum licet. — III, 186. — Horace, Epod., XIII, 7.
Dum melior. — III, 621. — Virgile, En., V, 415.
Dum nova. — III, 276. — Juvénai., Sal., III, 26.
Dum spectant. — I, 148. — Ovide, De rem. amor, 615.
Dum tela *. — III, 106. — Lucain, VII, 320.
Duris ut. — 1, 634. — Horace, Od., IV, 4, 57.
E
E cosi. — I, 406. — Pétrarque
'H Seto-iôani-ovia*. — 11,222. — Stobée, Serm., XXII, 189.
"H !;^v*. — I, 380. — D'après Stoiîi';i:, Serm., 20.
Ea non. - III. 81. — Tite-Live, XXXII, 21.
Eam vir. — I, 46. — Fi.orus, 1. 12.
Ego deum. — II, 256. — Exmi s, (///. Cic, de Div., 11, 50.
Ego hoc. — II, 452. — Cicéron, de Fin., Il, 15.
Ego illos. — III, 476. — Sénèque, Episl. 64,
Ego vero *. — II. 76. — Cicérox, de Senect., 10.
Egregium. — III, 470. — .Iuvénai,, XIll, 64.
Eheu! cicatricum. — III, 402. — Horace, Od., 1, 35,33.
Ejulatu \ — III, 28. — Cicéron, Tusc, II, 14.
E'I silenzio. — II, 140. — Le Tasse, Aminla, II, 34.
Emori''. — II, 426. -- Cicéron, Tusc, I, 8.
Emunctœ. — I, 274. — IIor., SnL, 1, 4, 8.
'Ev Tô). — II, 218. — Sophocle, Ajax, 552.
Enimvero*. — III, 404. — Pi.aute, Prologue des Captifs.
Ense maritali. — III, 222. — Source inconnue.
Eodem enim. — III, 692. — Cicéron, Tusc, IV, 31.
'Euéwv 8è. — I, 518. — Homère, lUadr, XX, 249.
Equi sine. — I, 538. — Tite-Live, XXXV, 11.
Equidem. — III, 374. — Quinte-Curce, IX, 1.
Eritis. - II, 20-1. — Homère, ap. Cic, de Fin., V, 18.
Esse unum. — III, 270. — Q. Cicéron, de Petit, consul., 14.
Esse videatur. — II, 76. — Cicéron, de Orat., 23.
Est prudentis. — III, 418. — Cicéron, de Amie, 17.
Est quaedam ileve. — II, 538. — Ovide, Trist., IV, 3, 27.
Est quaedam vox. — III, 646. — Quintilien, XI, 3.
Est situm. -— II, 21(i. - ('iri;i;i.\, de Fin., l, 17.
Estne. — I, 4m. — (au lu;. i.W I, 15.
Et cantharus. — III, ;394. — Horace, Episl., 1, 5, 23.
Et casta. — II, 266. — Lucrèce, I, 99.
Et cuncta. — I, 404. — Horace, Od., II, 1, 23.
Et errât. — II, 26. — Térence, Adelph., I, 1, 40.
Et tugit. — II, 434. — Virgile, Eglog., III, 65.
Et gens. — I, 538. — Lucain, IV, 682.
Et habet. — III, 186. —Martial, VII, 58, !».
Et a, qui. — II. 86. — Cicéron, Epist. fam., XV, 19.
Et iuvictum. — I, 401. — Manilius, Astr., IV, 87.
Et ipse. — I, 300. — Horace, Od., II, 2, 6.
Et languor. — II, 432. — Horace, Epod., XI, 9.
Et laxas. — II, 522. — Catulle, XCIV, 8.
Et lupus. — II, 570. — Ovide, Trist.. III, 5, 35.
Et maie. — I, 528. — Manilius. IV, '.t.i.
C.72 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Et mentem. — III, 210- — Viitiiii.i:, Cleor;/., III, 267.
Et mihi. — III, 'M). — Pseudo-Gai.i.ls. I,' «il.
Et militavi. — III, 6l± — Horace, Od., III, 20, 2.
Et minimœ. — III, 181. — Ovide, Trisl., 111, 11, t2.
Et mutœ. — II, 138. — Lucrèce, V, 1058.
Et nihil ^ II, 262. — Lucrèce, III, 857.
Et nudam. — III, 254. — Ovide, Amor., I, 5. 24.
Et nuUa. — III, 104. — Ovide, de Porilo, I, 7, o7. '
Et Numidse. ~ I, 538. — Viruii.e, En., IV, 41.
Et obscenas. — II, 380. — Cicéron, Tusc, IV, 33. ■
Et patimur. — II, 55^1. — Juvénal, VI, 291.
Et plaga. — II, 360. — Véuèce, I, 2.
Et post. — I, 112. — Horace, Od., 111, 1, 40,
Et quaerendum. — III, 266. — C.\tuu.e, Carm., LXVII. 27.
Et quo ferre. — I, 534. — Lucain, VIII, 384.
Et quo quemque. — I, 254. — Virgile, En., III, 459.
Et se n'aflige. — (III, 26j. — Auteur inconnu. (Ne se trouve que dans les éd. ant.
à 1595).
Et secum. — II, 616. — Claudien, in Eulrop., 1, 237.
Et solem''. — II, 404. — Vu^-ile, Ejiéide, IV, 470.
Et sua sunt*. — III, 406. — Source inconnue.
Et supera *. — III, 304. -- Lucrèce,' V, 327.
Et taciti. — III, 268. — Ovide, Amor., 1, 7, 21.
Et tellus. — II, 146. — Lucrèce, 11, 1157.
Et velut. — III, 16. — Virgile, Enéid., XU, 521.
Et veniunt. — I, 360. — Properce, 1, 2, 10.
Et via. — I, 26. — Virgile, En., XI, 151.
Et versus. — III, 194. — Juvénal, VI, 196.
Et vulgo. — II, 408. — Lucrèce, IV, 73.
Etenim. — III, 510. — Cicéron, Tusc.,lY, 18.
Etiam. — I, 662. — Sentences de Publius Syrus.
E'j/oyov*. — I, 636. — Diogène Laerce, VllI, 130.
Ex quo Ennius. — I. 212. — Cicéron, de Off., III, 45.
Ex quo intelligitur. — I, 162. — Cicéron, Tusc, III, 28.
Ex senatus-consultis. — III, 92. — Sénèque, Epist. 95.
Excindintur *. — III, 516. ~ Source inconnue.
Excludat. — III. 134. — Horace, Ep., H, 1, 38 et 45.
Excursusque. — II, 70. — Virgile, Geurg., IV, 194.
Excutienda. — III, 444. — Cicéron, de Amie, 6. (Se trouve une seconde fois
dans l'éd. de 88, II, 60).
Exeat aula. ~ III, 464. — Luc.un, Vlll, 493.
Exeat inquit. — III, 302. — .Juvénal, Sal., III, 153.
Experta. — III, 266. — Martial, VII, 58, 3.
Exsilia tormenta. — III, .572. — Sénèque, Epist., 9\, 107.
Exsilioque. — III, 2ïi4. — Virgile, Georg., II, 511.
Exstantesque. — II, 398. — Lucrèce, iv', 398, 390, 421.
Exsuperat. - III, 554. — ^'IRGILE, Enéid., XII, 46.
Extrema. — II, 666. — Virgile, Georg., II, 173.
Faber est. — I. 468. — Sai.luste, de Rep. Ord., I, 1.
Faciasne. — II, 518. — Horace, Sat., II, 3, 253.
Facta etenim. — II, 134. — Manilius, 111, 58.
Falciteros. — I, 674. — Lucrèce, III, 642.
Falsus honor. — II, 454. — Horace, Epist., 1, 16, 39.
Fata viam. — III, 354. — Virgile, En., 111, 395.
Fate bea*. — III, 282. — Proverbe italien.
TXTW.E DES CITATIO>'S. FAT. C.73
Fatum est. — III, -'<•:.'. - ,]i vknai., Sal.. IX, 32.
Fautor. — II, 5tJ8. — IIohaci;, Hpisl., I, 18, Wi.
Favellar. — III, 142. — Expression italienne.
Fay ton faict. — I, 28. — Platon, T'unée.
Félix qui. - III, 516. — Vnuiii.E, Georg., II, 490.
Ferox gens. — I, 462. — Tite-Livk, X\\1\ . 1*.
Festinatio. — III, 494. — Qlime-Ci uri:. IX. '.),12.
Fit etiam. — II, 402. — Cicéiion, de Divin., I, 37.
Flagitii. — III, 211. — Ennius, ap. Cicéhon, Tusc, IV, 33.
Flere omnes. — I, 42. — Tite-Live, XXV, 37.
Flexilis. — II, 58. — Ci.AunnoN, conlix hufin, II, 358.
Fluctus uti. — III, 618. — Vnuiu.E, En., VII, 528.
FoUiculos. — III, 172. — Llcuèce, V, 801.
Formas. — II, 258. — Cicéron, deNal. deor., II, 28.
Fors etiam. — III, 234. — Catulle, Carm., LXVII, 170.
Fortes creantur. — II, 314. — Horace, Od., IV, 4, 29.
Fortis imaginatio. — I, 132. — Sénèque, Epist. 24.
Fortuna vitrea *. — I, 4(j8. — Ex Mim. P. Syri.
Fortunae cetera. - III, 478. — Ovide, Mélam., II, 1 10.
Fortunse miseras. — I, 350. — Properce, III, 7, 44.
Fractam et. — II, 76. — Cicéron, de Orat., 18.
Fructus enim. — III, 390. — Cicéron, de AmicU., 19.
Frui paratis. —III, 701. lim; \(i,. Od., I, 31,17.
Fu il vincer. — I, 52. — AinuMu, W. 1.
Fulgur ibi. — II, 178. — Lucrèce, II, 325.
Fugax rerum. — III, 48 1. — Ovide, rrisl., III, 2, 9.
Fuge suspicari *. — III, 268. — Horace, Od., 11,4,12.
Furem signata. — II, 438. — Sénèque, Epist., 68.
Furit alter.— II, 134. — Manilius, IV, 79,118.
Galla nega. — II, 432. — .Mautiai., IV, 37.
Gaudeat. — II, 346. — IMcton judiciaire.
Gentes esse. — II, 376. — Ovide, Métnm., X, 331.
Gigni pariter. — II, 3IS. — Lucrèce, III, 116.
Goria in. — II, 112. S. Luc, Evawj., II, M.
Gloria nostr a. II, 15(). — S. Paul, Ep.ad Cnrinlh., Il, 1,12.
Gloria, quantalibet. — II, 442. — JuvÉNAL,.bi'rt^., Vil, 81.
Gratatusque. — 1,548. — Ovide, de Ponlo, IV, 9,13.
Gratum est. — II, 608. — Juvénal, XIV, 70.
Gravissimi. — I, 520. — Porcius Latro.
H
Habita fides. — I, ItMi. — Tite-Live, XXII, 22.
Habitum quemdam. — I, 301. — Lucrèce, III, inO.
Hac duce. — I, 612. — Tihulle, II, 1, 75.
Hase demum *. — I, 278. — Faisricius. 11, 10.
Haec loca. — I, 364. — Virgile, En., 111, 11 1.
Hœc nempe *. — II, 48(3. — Horace, Epiai., 1, 6, 45.
Hœc neque. — III, 374. — Tite-Live, I, Frœ/., et VIII, 6.
Haec perinde. — I, 486. — Tére.nce, HeoM., I, 3,21.
Haec si. — III, 274. — Téhence, Eunuch., I, 1, 16.
Hœcsunt.— III, 168. — Cicéron, Tusc, II, 23.
Haeret lateri. — I, 412. — Virgile, En., IV, 73.
Hanc amplissimam. — I, 270. — Cicéron, Tksc, IV, 3.
Harum sententiarum. — II, 306. — Cicéron, Tusc, l, Il
C.74 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Has meus. — II, 61. — Properce, IV, 1, 70.
Has vobis. — I, 'rlH. — Mautiai., Epigr., VII, IN, 4.
Haud cuivis. — I, 592. — Perse, II, (3.
Haud ignai^us. — II, 91. — Virgile, En.,X\, 151.
Hector erat. — II, 2(30. — Ovide, Trist., 111, 11, 27.
Hem! vir. — I, 180. — Tékence, Eiin., II, 3, 1.
Heredis, tletus. — I, 106. — Pubi.ius Syrus.
Hesterno *. — I, 61 1. — Virgile, Egl., V, lo.
Heulpatior. — I, 178. — Ovide, Ep. Phyl. Dam., v. 48.
Heu! reliquias. — II, 104. — Cicéron, Tusc, 1,41.
Heu! senibus. — I, 122. — Pseudo-Gallls, 1, 16.
Heu! tantum. — III, 592. — Source inconnue.
Hi, motus. ~ II, 180. — Virgile, Georg., IV, 86.
Hic illius. — II, 288. — Virgile, En., l, 16.
Hic exultât. — II, 306. — Lucrèce, III, 142.
Hic rogo. — I, 634. — x^Iartial, II, 80, 2.
His dantem. — I, 404. — Virgile, En., VIII, 670.
His quidam. — II, 142. — Virgile, Georg., IV, 219.
His se. — III, 172. — Lucrèce, II, 42.
Hoc âge *. — II, 72. — Sentence tirée du grec.
Hoc est. — III, 180. — Martial, X, 23, 7.
Hocipsum ita. — III, 418. — Cicéron, de Off., I, 9.
Hoc ipsum, quo. — I, 590. — Perse, II, 51.
Hoc liberiores. —II, 232. — Cicérox, Acad., Il, 3.
Hoc quoque. — I, 616. — Pseudo-Gallus, I, 47.
Hoc salsum. — I, 562. — Térence, Adelph., IIL 3, 71.
Hoc sermone. — III, 144. — Jlvénal, VI, 189.
Homo homini *. — III, 200. — Cecilils, d'après Symmaque, Epist., X, 104; et
Plaute. Asinar., 11, 4, 88.
Honesta. — I, 178. — Térence, Aridr., 1, 1, 114.
Hos inter. — II, 5.58. — Stace, Sylv., 1, 6, 51.
Hos natura. — I, 362. — Virgile, Georg. ,U, 20.
Hostis adest. — III, 554. — Ovide, de Ponto., 1. 3,57.
Huic versatile. III, 136. — Tite-Live, XXXIX, 40.
Humani a se *.— I, 624. — Térence, Heaut.,\, 1, 25.
Humani qualis. — III, 352. — Claudien, in Eulrop., 1, 303.
Hune ego. — I, 672. — Virgile, En., IV, 702.
Hune saltem. — III, 556. — Virgile, Georg., l, 500.
Chercher par J les citations gui ne se trouveraient pas ici.
Id cinerem. — I, 516. — Virgile. En., IV, 34.
Id cum. — I, 540. — Tite-Live, XL, 10.
Id genus. — I, 378. — Horace, Sat., I, 2, 2.
Id maxime. — III, 90. — Cicéron, de Off., 1, 34.
Igneus est. — II, 304. — Virgile, En., VI, 730,
Ignoratur. — II, 304. — Lucrèce, I, 113.
Illam mese. — I, 316. — Horace, Od., II, 17, 5.
Ille beatus.^ I, 484. — Sénèque, Ep., 115.
lUe etiam. — II, 422. — Virgile, Georg., I, 466.
lUe licet. — I, 116. — Properce, III, 18, 25.
Ille quod. — II, 196. — Ovide, de Rem. amor., 429.
nie solus. — II, 34. — TÉRENCE, ^rf., IV, 2, 9.
Illevelut. — II, 466. — Horace, Sat., II, I, 30.
mis est. — (III, 688). — Source inconnue. (Ne se trouve que dansl'ex. de Bord.
lUisos *. — II, 116. — Imité de Virgile, En., VII, 587.
Illiterati. —II, 202. — Horace, Epod.,S, 17.
TABLE DES CITATIONS. ILL. CVS
JUiid in his. — I, 1-20. — Llckkce, III, 913.
lUud ssepe. — III, -288. — Maktiai., VII, 62, 6.
Immortalia. — II, -lii. — Llcukce, V, 122.
Immunis. — I, 5!)i. — Horace, Od., III, 23, 17.
Impellens. - III, 1 1. — Lucain, I, 149.
Imperet bellante. — I, 132. — Hokack, Carm. saec, v. 51.
Imperiti enim. — III, 490. — Qlintilien', Inst. oral., II, 17.
Impiger... et. — II. 424. — Lucain, IV, 798.
Impius hœc *. — III, 424. — Virgile, Eglof/., I, 71.
Imponit finem. — II, 586. — Juvénal, VI, 44 1.
Iinportunus. — III, 284. — Horace, Od., IV, 13, 9.
In aequo. — II, 132. — Séxèque, Ephl. 98.
In culpa *. — I, 414. — Horace, Ep., I, 14, 13.
In divitiis. — I, 168. — Sénèque, Epixl. 74.
In ferrum. — II, 462. — Lucain, I, 461.
In tragili. — III, 182. — Cicéron, de Senecl., I, 18.
In génère. — I, 222. — rormule scolastique.
In manicis. — I, 124. — Horace, Episl., I, 16, 76.
In me omnis. — III, 420. — Térence, Adelph., III, 5, 9.
In negotiis *. — III, 486. — Sénèque, Episl. 22.
In rébus. II, 404. — Lucrèce, IV, 812.
In solis. — I, 416. — Tirulle, IV, 13, 12.
In tam *. — III, 510. — Source inconnu»'.
In vera. — I, 128. — Lucrèce, III, 898.
In virtute. — II, 206. — Cicéron, de Xal. deor., III, 36.
In vitium. — I, 678. — Horace, de Ai't. poel., 31.
Incedis per. — III, 488. — Horace, Od., II, 1, 7.
Incertam. — III, 574. — Properce, II, 27, 1.
Indefiiror. ~ II, 378. — Juvénau, XV, 37.
Inde toro. — I, 546. — Virgm.e, En., 11,2.
Inde tragus. - III, &12. — Martial, XI, 22, 7.
Indignare si. — III, ft48. — Sénèque, Epist. 91.
Indum sanguineo. — III, 268. — Virgile, Enéld., XII, 67.
Indupedita. — II, 150. — Lucrèce, V, 874.
Iners malorum. — II, 216. — Sénèque, Œdipe, III, 7.
Infirmum. — II, 268. — S. Paul, Ep. aua; Corinthiens, I, 1,25.
Inguina. — I, 550. — JIartial, Epif/r., VII, 35, 1.
Insani sapiens. — I, 314. — Horace, Ep., l, 6, 15.
Insita. — III. 530. — Tite-Live, XXVIII, 24.
Instillata. — II, 314. — Auteur inconnu.
/i2ter caetera. — II, 136. — Sénèque, de Ira, II, 9.
Inter enim. — II, 262. — Lucrèce, III, 872.
Inter furor. — II, 378. — Juvénal, XV, 37.
Inter se. — I, 126. — Lucrèce, II, 75, 78.
Inter visa. — II, 340. — Cicéron, Acad., II, 28.
Interdum. — II, 4;jii. — Properce, II, 15, 6.
Intolerantissima . — II, 5^1. — Tite-Live, X, 28.
Intrandum. III, 698. — Cicéron, de Fin. bon. et mal., V, 16.
Invenies. — IJ, 3ÎK». — Lucrèce, IV, 479,483.
Invitum qui. — II. 428. — Horace, de Art. poet., 167.
Ipsa consuetudo. — II, 504. — Cicéron, Acad., II, 21.
Ipsa dies. — III, 380. — Pétrone, Fragments.
Ipsa félicitas. — II, 538. — Sénèque, Episl. 74.
Ipsa se velocitas. — III, 494. — Sénèque, Epist. 44.
Ipsa si velit. — III, 402. — Térence, Adelph., IV, 7, 43.
Ipsa veritatis. — II, 324. — S. Augustin, de Civ. Dei, XI, 22.
Ipsee res. — I, 274. — Cicéron, de Fin., IIL 5.
Ipse ego *. ~ II, 106. —Ovide, Métam., XV, 160.
Ipse inter. — II, 480. — Virgile, Enéide, VII, 783.
C.76 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Jpsi animi. — III, 586. — Cicékon, Tu.sc., I, 33.
Irarumque. — III, '238. — Virgile, En., XII, 499.
Ista sic. — I, 71. — CicÉRON, de Divin., I, 6.
Jstud nihil. — II, -21 1. — Cicéron, Tuhc, III, 6.
It nigrum. — II, 180. — Virgile, En., IV, 101.
Ita est. — II, 280. — Cicékon, de Nal. deot\, I, 27.
Ita finitima. — III, 528. — Cicéron, Academ., II, 21.
Jtaliam si *. — II, 122. — Lucain, V, 570.
Chercher par I les citations qui ne se trouveraient pas ici.
Jactantius *. — II, 664. — Tacite, Ann., II, 77.
Jam tuerit. — I, 118. — Lucrèce, III, 928.
Jam nemo. — I, 290. — Lucrèce, II, 1037.
Jam prece *. — III, 596. — Catulle, Carm., LXVl, (55.
Jamque adeo. — III, 306. — Lucrèce, II, 1151.
Jamque caput. — II, 420. — Lucrèce, II, 1165.
Jovis incunabula. — II, 290. — Ovide, Métam., VIII, 99.
Jucundum qumn. — I, 118. —Catulle, LXVIII, 16.
Junctaque. — II. 288. — Ovide, Fast., III, 81.
Jupiter omnipotens. — II, 2bO. — Valerius Soranus d'ap. S. Augustin, de Cic.
Dei, Vil, 9 et 11.
Jure perhorrui. — III, 516. — Horace, Od., III, 16, 18.
Jus hoc. — I, mi. — Lucain, VIII, 633.
Justa pari. — II, 506. — Tibulle, IV, 41.
L'husbergo. — II, 56. — Ariosto, XII, 30.
La fama. — I, 476. — Tasso, Gerus. lib., XIV, 63.
La fortune. — I, 386. — Ménandre, trad. de Montaigne.
La lumière. — II, 252. — Ronsard.
Labor callum. — I, 2M. — Cicéron, Tusc, II, 15.
Laborum nuUa — III, 28. — Virgile, Enéide, VI, 103.
Leetius est. — I, 151. — Lucain, IX, 404,
Lsetus in. — I, 74. — Horace, Odes, H, 16, 25.
Languidior \ — II, 228. — Catulle, Carhi., I.XVll, 21.
Largus enim. — I, 408. — Lucrèce, V, 282.
Latent ista. — II, 294. — Cicéron, Acad., II, 39.
Latius excisas *. — II, 438. — Rutilius, Iliner., 1, 397.
Laudandis. — III, 476. — Sidoine Apollinaire, Carm., XXIII, Xarbo, v. 62.
Laudari haud. — II, 454. — Perse, Sat., I, 47.
Les œuvres. — II, 244. — Plutarque, des Oracles qui ont cessé {trad. d'Amyol).
Levationes. — II, 214.— Cicéron, Tusc, 111, 15.
Licet quoi. — I, 128. — Lucrèce, 111, 1103.
Licet sapere. — I, 244. — Sénèque, Epist. 103.
Liquidus. — II, 68. — Horace, Epist., Il, 2,120.
Lotus nobiscum. — III, 60. — Martial, VI, 53.
Lurida preeterea. — II, 406. — Lucrèce, IV, 333.
Luxuria ipsis. — III, 262. — Tite-Live, XXXIV, 4.
M
Ma or. — II, 28. — Tasso, Ger. lib., X, 39.
Magis magnos. — I, 204. — Rabelais, Garg.,\, 39.
Magna dii. — II, 280. — Cicéron, de Nal. deor.,\\, 66.
Magna pars. — III, 670. — Sénèque, Epist. 123.
TAm.E DES CITATIONS . MAC. C.77
Magna servitus. — III. liki. — Sénèque, Cons. adPolyb., 2G.
Magnaw rem. — I, 010. — Sé.nkque, Epist. 120.
Magno veluti. — II, 611. — Virciile, Enéid. ,\ll, 462.
Magnum stridens. — I. ô36. — Virgile, En., IX, 705.
Magnus animus. — III, 552. — Sénèque, Epist. 115, 114.
Mais ie hay. — I, 204. — .Ioachim dl Bellay.
Maioi^em fidem *. — III, 536. — Source inconnue.
Malam mortem. — I, 452. — S. Alclstix, de Civ. Dei, 1, II.
Maie cuncta. — III. 492. — Stage, Thébaïde, X, 704.
Malo me *. — I. 54. — Qiinte-Clrce, IV, 13.
Malum consilium est consultori. — I, 660. — Allu-Gelle, IV, 5.
Malum consilium est quod. — I, 600. — Alll-Gf.i.i.e, XVII, 14.
Manco maie. III. 472. — Expression italiennt».
MavEÎ-^v jj:à>,).ov *. - I. 626. — Aulu-Geli.e, IX, 5.
Manant (dict-il) ♦. — I. 120. — Virgile, En., IV, 8N.
Manente memoria. — III, 104. — Titk-Live, XXV, \H.
Materiam culpse. — III, 236. — Ovide, Trisi., IV. 1, 31.
Maximum hoc. ~- I. 402. — Sénèque, Thiesl., II. 1. 30.
Me si fata. — III. 45(5. — Virgile, En., IV, 310.
Me tabula *. - III, 274. — Horace, Od., I, 5, 13.
Medio de. ~ II, 538. — Lucrèce, IV. 1130.
Mediocribus. — II, 472. — Horace, de Arle poel., 372.
Médium non. — II. 312. — Claudien, de Sexto cons. Hon., V. 411.
Melius non *. — III, 506. — Sénèque, Epist. Ti.
Melius scitur. — II, 222. — S. Augustin, de Ord., II. 10.
Meminerint Deum. — II, 448. — Cicéron, de O/J'., III, 10.
Memineris maximos. — I, 454. — Cicéron, de Fin., I. l.j.
Memini etiam. — II. 216. — Cicéron, de Fin., II, 32.
Memoria certe. — II, 500. — Cicéron, Acad., II. 7.
Mené huic. — III, 524. — Virgile, Eneid., Y, 849.
Mens immota. — I, 82. — Virgile, En., IV, 449.
Mens intenta *. - III, 180. — Ovide, Trist., IV, I, 4.
Mensque pati. — III, 184. — Ovide, de Ponto, I, 5, 18. ,
Mentem sanari. — II, 318. — Lucrèce, III, 509.
Mihi nempe. — II, 510. — Lucrèce, V, 959.
Mihi quidem. — III, 524. — Cicéron, Tusc, II, 20.
Mihi sic. — I, 314. — Térence, Heaut., I, I, 28.
Mille animas *. — III, 582. — Ovide, Fastes, I, 380.
Minister veteris. — II, 538. — Catulle, XXVII, 1.
Minus afficit. — III, 574. — Quintilien, Inst. Oral., I, 12.
Minus un. — II. 68. — Martial, Préf. du liv. VIII. '
Minutatim. — II, 482. — Lucrèce, II, I13I.
Miramur. — III, 532. — Sénèque, Epist. 118.
Mirum quo. - II, 278. — Pline, Aal. Hist., II, 23.
Misce stultitiam. — III, 182. — Horace, Od., IV, 12, 27.
Miser! ô miser. — I, 120. — Lucrèce, III, 911.
Misero quod *. — I, 26. — Catulle, Carm., LI, 5.
Miaw CTosiCTiriv. — I, 71. — Euripide, np. Cicéron, ap. fain., XIII, 15.
Mista senum. — III. 566. — Horace, Od., I, 28, 19.
Modus quo. ~- II, 2f»8. — S. Augustin, de Civ. Dei, XXI. 10.
Mœchus ex. — II. 382. — Martial, III, 70.
MoUiter. — II, 484. — Horace, Sal., II, 2, 12.
Morbis in. — II, 318. - Lucrèce, III, 461.
More terrarum. — II, 172. — Lucrèce, IV, 1261.
Mores cuique. — 1, 4Î)6. — Cornélius Nei>os, Alt., IL
Mors utinam. — I, 442. — Lucain, IV, 580.
Morte carent. — II, 106. — Ovide, Métatn.f XV, 158.
Morte obita. — III, 6!)6. — Virgile, Enéide, X, 011.
Motus doceri. — III, 208. — IIurace. Od., III. 6. 21.
C.78 ESSAIS DE MONTATGNE.
Mugitus veluti. — II. GIG. — Vir(;ii,f,. Enriil.. XII. I(i:i.
Mulciber in. — II, :îo8. — Ovidk, Tiist., 1. -2. 5.
Mulier tum *. -I. 574. — Plaute, MoftlelL, I, :;, llu.
Multa ceimunt. - I. 72. — Cicéhon, de Nat. Dem-.. II. i>i>.
Multa dies. — I, ()38. — Tihuile, En., XI, l-^.").
Multi fallere. — III. 390. — Sénkque, Episl. :i
Multimodis. — II, 101. — Lucukce, IV, 1152.
Multo... mortem. — I, 128. — Lucrkce. III, 939.
Multos in. — I. 031. — Lucain, VII, 101.
Multum interest. — I, 270. — SÉNÈyii:. A>/.s7. Do.
Multum sibi. — II, 80. — Sénèqle, Episl. 13.
Mundus domus *. — II, 292. — Varhon.
Mundus universus *. — III, .500. — Pétrone.
Mûris nuUa. — III, ôO(». — Ci.aldien, m Eulrop.,ï, 244.
Mus in pisce. — III, (jOO. — Proveibo latin.
Muta îerrarum. — II, 100. — Ci.aldien, /// Ruf., II, 182-491.
Mutât enim. — II, 410. — Lucrèce, V. 826.
N
Nas iste. — III, 78. — Térence, Heaul., 111, 5, 8.
Nam cupide. — II, 112. — Lucrèce, V, 1139.
Nam istis. — I. 74. — P.\cuvius, ap. Cic, de Divin., 1, 57.
Nam mulier. — II, 272. — Lucrèce, IV, 1266.
Nam nos quoque. — III, 148. — Cicéron, Parad., V, 2.
Nam nox nulla. — I, 130. — Lucrèce, V, 579.
Nam Pater. — III, 44. — Virgile, Enéid., Vil, 770.
Nam qui putat. — III, .368. — Sénèque, Epist. 81.
Nam quod adest. — II, 360. — Lucrèce, V, 1411.
Nam quum vidit. — I, 560. — Lucrèce, IV, 9.
Nam si quando. — III, 286. — Virgile, Georg., 111, 98.
Nam si quod. — III, 496. — Lucilius, lib. 5, ap. Nonius, V, 98.
Nam si tantopere. — II, 316. — Lucrèce, III. 071.
Nam tibi. — I, 128. — Lucrèce, III, 957.
Nam verse. — I, 101. — Lucrèce, III, 57.
Namque sagacius. — I, 574. — Horace, Epod., XII, M.
Namque unam. — III, 286. — Lucrèce, VI, 701.
Namquodcumque. — I, 154. — Lucrèce, II, 752.
Narras et. — III. 112. — Horace, Odes, 111, 19, 3.
Narratur et. ~ I. 016. — Horace, Od., 111, 51, 11.
Nascentes morimur. — I, 126. — Manilius, Asiron., IV, 16.
Nasutus sis. — II, 504. — Martiai,. II. 13.
Natura homo. — III, 610. — Si'nèi^i e, Ejiisl. M2.
Ne amores. — II, 380. — Cicéhon, de Fin., 111. 20.
Ne nos inducas. — III. 5(t8. — S. .AIatuiif.l. VI. 13.
Ne si, ne no. — II. .501. — PÉTiiAiifjui;.
Ne toga. — II. .522. — Mautiai,. XIII, 1, 1.
Ne utile. — I, 71. — CiCKi;nN, <h' \at. Deor.,Ul, G.
Ne veraque. — I, 184. — Lucrèce, II, 47.
Nec ad melius *. — III, 342. — Cicéron, de Fin.. I, 19.
Nec calidse. — I, 486. — Lucrèce. 11. 34.
Nec divis. — III, 224. — Catui.i.f. Cfr,,,., I. XVIII. 141.
Nec facilis. — I, 614. — Juvénal, XV. 17.
Nec fas *. — I 316. — Térence, JHeauL. 1. 1. 97.
Nec gentibus. — III, 104. — Lucain, I, 82.
Nec habetur. — II. 170. — Oviue, MiMam.. X. 325.
Nec id. — II. !(]<;. — Tacite. Ayric. 1.
TABLE DES CITATIONS. M-C. C.79
Nec in regnis. — II. 280. — Cickuon. <lr Xal. Ihmr., 111. •"!."».
Nec jam *. — III, 10 J. — Licain, I, l:».
Nec me. — III, 510. — Cickuon, Tusc, 1. -.Ti.
Nec mihi. — III, 191. — Autour incouiui.
Nec minimo. — I, 502. — Juvknai., Sal., V, 12:î.
Nec nisi. — II, 570. — Claudif.n, Ep. ml. Had., oO.
Nec, si. — II, 208. — Lucrkce, III, 859.
Nec sibi. — I, 128. — Lucrèce, III, 932, 935.
Nec sunt. — III, 420..— Virgile, Enéid., Xll. 519.
Nec tam. — III, 130. — Quintilien, Inst. oral.. V. 12.
Nec tamen. — II, 390. — Lucrèce, IV, 380, 390.
Nec tantum. — III, 210. — Catulle, Cariii., LX\1, 125.
Nec ultra. — II, 98. — Juvénal, Sal., VIII, 101.
Nec Vénères.^ II, 190. — Lucrèce, IX. 1182.
Nec vincet— I. (;12. — Iloii\(i. Sdf.. 1. :!. 115.
Nec vitiant. —III, 000. — Ovii.k. /'/vv/., 111. s. 25.
Necnon libelli. — III. 21i). — Horace, Epad., VIIL 15.
Neminem. — I, 52. Ci' i'uun-, de 0/f'., III, 17.
Nemo altero. — I, lis. Sknèque, Episl. 91.
Nemo enim. — III, :!.s(;. — Sknèque, Episl. 13.
Nemo expergitus. — I, 001. — Lucrèce, III, 942.
Neque in. — II, 512. — Perse, IV, 2.3.
Nemo satis. — III, 102. — Juvénal, XIV, 233.
Nempe et. — I, 1 10. — Horace, Od., III, 2, 14.
Neptunus *. — II, 288. — Virgile, En., 11,010.
Neque aftectui. — III, 150. — Tacite, .4nHai., XII, 45.
Neque enim disputari. — III, 330. — Cicéron, de Fin. bon. et mal, 1, 8.
Neque enim eaedem. — II, 14. — Tite-Live, XXV, 19.
Neque enim est. — I, ;300. — Catulle, LXVIII. 17.
Neque extra. — II, 502. — Source inconmic
Neque gratia. — II, 221. — Cicéron, de Nal.deor., I, 17.
Neque illa. — II, 174. — Horace, Sal., I, 2, 09.
Neque sepulcrum. — I, 40. — En.nius, ap. Cic. '/'asc., I, 11.
Neque submissam. — III, 520. — Cicéron, de 0/J'., I, :{1.
Neque ut. — I, 211. — Cicéron, Acad., II, 3.
Nequidquam. — I, 212. — Lwus, ap. Cicéron, de O/J'., III, 15.
Nescio quis. — I, 148. — N'iik.ii.k, /•:///.. III. 103.
Nihil actum. — III, 090. — Aimmia. dr /■;.//'. Ah'.r.. V, 20.
Nihil enim. — I. 008. — Cici'kon, 7'».sr.. 11, -i: .
Nihil est bis. — III, 410. — Cicéron, Acad., II, 1.
Nihil est tam populare. — II, 492. — Cicéron, pru Lig., XII.
Nihil est tam utile. — III, 472. — Sénèqie. E/d^l. 2.
Nihil est turpius. — III, 020. — Cicéron, Aind., 1, 13.
Nihil in. — III, 558. — Tite-Live, XXXIX, 10.
Nihil itaque. — II, 370. — Source inconnue.
Nihil sanantibus. — III. 312. — Sénèque, E/risl. 5'.t.
Nihil suprse. — III, 178. — Horace, Od., Il, 18 et, 11.
Nihil tam absurde. — II, 312. — Cicéron, de Divin.. II. 58.
iViiadeo fieri ♦. —I, 108.— Lucrèce, ni, 183.
Nil adeo magnum. — I, 172. — Lucrèce. IL 1027.
Nihil admirari. — II, 372. — IIoraci., E/iisf.. I. 0. 1
Nil ego. — I, 310. — Horace, Sal., I, 5, 1 1.
Nihil mihi *. ~ II, .550. — C.vrui.i.E, LXVllI, 77.
Nil scii^i. — II, 230. — Lucrèce, IV, 470.
Nil tam inasstimabile. — II, 452. — Tite-Livk, XXXI, 31.
Nimirum hac. — I, 101. — Macrobe, Sal.. H. 7.
Nimirum propter. — 111,212. — Anfciir iiirnnuii.
Nimirum, quia. — I, 190. — Li ( uèi r. \ , I 1:11.
Nimirum sapiunt. — III. 2riX. ^- Vi,ii.i!i\i i'uktmmm iatai.ecta. ad Malionas.
C.80 KSSAIS DE MONTAIGNE.
Nimium boni. — II, ili. — Enxius, ap. Cic, de Fin.. II. 13.
Nisi purgatum. — I, 114. — Luckkce, V, 44.
Nisi tu servare. - II, 434. — Oviue, Amor., II, 19, 47.
NoUo barbam. — III, 'M2. - Makhai.. X, 9(), 9.
Nomen habent. — II, IGG. — Maktial, IV, 29, 0.
i\ô[jLoiç ETTErrOai. I, ITG. — Kx Iruf^ed. (jrœcis Huo. Groitii.
Non sestimatione. — III, '3H2. — Cicéuon, Parad.. VI, o.
Non agimuv. — II, 484. — Horace, Episl., Il, 201.
Non alia longe. — II, 140. — Lucrèce, V, 1029.
Non alio pacto. — II, 320. — Lucrèce, III, 111.
Non alium videre. — I, 128. — Mamlius, I, 529.
JVoiJ ampliter. — III. 4o2. - Poète cité par Nomus, XI, 19.
Non armis. — III, .'k>4. — Source inconnue.
Non emolumento. — II, 452. — Cicéron, de Fin.. 1, id.
Non domus. — I, 4(S(;. — Horace, Episl., 1, 2, 47.
Non enim gazée. — I, 181. — Horace, Od., 11. IG, 9.
Non enim hilaritate. — I, 454. — Cicéron, de Fin., II, KK
Non enim nos. — II, 23G. — Cicéron, de Divin., I, 18.
Non enim parenda. — I, 212. — Cicéron, de PVnibux, I, 1.
Non enim patria *. - III, 104. — Cicéiuin, de ()/]'.. III, 2.').
Non equidem *. — II, .522. — Perse, V, 19.
Non esse. — I, 472. — Cicéron, Farad., VI, 3.
Non est loquendum. — I, 210. — Sénèque, Episl. 108.
Non est ornamentum. — I,.434. — Sénèque, Ep. 115.
Non est ut. — I, <;34. — Sénèque, Theb., 1, 190.
Non hoc amplius. — III, 6G1. — Horace, Od., III, 10, 19.
Non ipse pro. — III, 4!)2. — Horace, Orf.,IV, 9, 51.
Non jam. — II, 122. — Lucrèce, III, G12.
Non levia. — I, 514. — Viroii.e, Eh., XII. 70 1.
Non nobis. — III, 522. — Psaume CXIII, 1.
Non ponebat. — III, 182. — Ennius, ap. Cicéron, deO/f'., I, 21.
Non potest. — II, .338. — Cicéron, Acad., II, 41.
Non pudeat - III, 18G. — Auteur inconnu.
Non pudet. — I, IGO. — Cicéron, île Mal. deor., I, :!ii.
Non quidquid. — II, 45G. — Perse, Sal., I. 5.
Non recito *. — II, .522. — Horace, Sal., I, 4, 7:5.
Non schivar. — II, .578. — Tasso, Ger. lih., XII, 55.
Non secus. — III, G48. — Pseudo-Gali.us, I, 171.
Non si te. — II, 284. — Horace, Sal., II, 3, 19.
Non siculse. — I, 110. — Horace, Od., III, 1, 18.
Non sumus. — I, 238. — Sénèque, Episl. 33.
Non tam commutandarum. — III, 400. — Cicéron, de Off.. H, I.
Non tam id sensisse. — II, 250. — Source inconnue.
Non tam omnia. — III. 502.— Tite-Live, XXXIV, 21.
Non tam patientibus. — I, .536. — Tite-Live, XXXVIH, 3G.
Non tanta cœlo. — II, 422. — Pi.ine, Hisl. nal.. H, 8.
Non viriliter *. — II, 592. — Tibui.le, Priap., 84.
Non vitse. — I, 216. — Sénèque, Ep. 106.
Non vultus. — I, 124. — Horace, Od., HI, 3, 3.
Nonne videmus, nil. — 1,482. — Lucrèce, II, 16.
Nonne videmus, quid. — I, 602. — Lucrèce, III, 1070.
Nonne vides. — 111,330. — Horace, Sat., I, 4, 409.
Nosse oui. — II, 282. — Lucain, I. 452.
Nostre mal. — III, 554. — Source inconnue.
Nostri nosmet. - III, 252. - Térence, Phor., I, 3, 20.
Notumque. III, 224. — Virgile, En., V, 21.
Nudaque. — I, 390. - Ovide, TrisL, III, 10, 23.
Nul avant*. — I. 32. — Hérodote, I, 3^2.
NuUa ars. — III. 29G. — Cicéron, de Fin. bon. elnuil., V, 0.
TABLE DES CITATIONS. NUL. C.81
Niilla placida. — III, 458. — Sénkqlë, Epist. 2G.
NuUae sunt. - III, 224. — Propekce, II, 8, 3.
NuUum initia. — III, 276. — Sénkque, Episl. !)5.
Nullum scelus. — II, 26. — Tite-Live, XXVII, 28.
NuUum sine. — II, 538. — Sénèqle, Epiât. 6'J.
NuUus in urbe. — II, 381. — Mautial, I, 71.
Num tu quse. — JII,2I8. — Horace, Od., II, 12, 21.
Nunc caput. — II, 558. — Mamlius, Astron., IV, 225.
Nunc levior*. — II, 458. — Perse, Sat., 1,37.
Nunc, si. —II, UMJ. — JtvÉNAi-, XIII,60.
Nunquam ad liquidum. — III, 532. — Qoixte-Curce, IX, 2.
Nunquam adeo. — II, 508. — Juvénal, VIII, 183.
Nunquam naturam. — I, 458. — Cicéron, Tusc, V, 27.
Nunquam simpliciter. — III, 458. — Quinte-Curce, IV, 14.
Nunquam tutelse. — I, 238. — Séxèque, Epist., 33.
0
0 ego, di *. — III. 282. — Ovide, ex Ponio, I, 4, 49.
0 fortes. — III, 688. — Horace, Od., I, 7, 30.
0 lane! - 1, 550. — Perse, Sat., I, 58.
0 lupiter. — 1,588. — Plutarque, Traité de l'amour, 12.
0 pater. — II, 326. — Virgile, Enéid., VI, 719.
0 misero frater. — I, 316. — Catli.i.e, LXVIII, 20.
0 misera quorum. — III, 254. — Pseudo-Galixs, I, 180.
0 prima. — III, 178. — Properce, III, 5, 7.
0 sancte. — II, 288. — Cicéron, de Divin., II, 56.
0 seclum. — II, 66. — Catuu.e, XL III, 8.
Obest plerùmque. — I, 236. — Cicéron, de Xat. deor., I, 5.
Obstetrix. — III, 230. — S. Augustin, De Civ. Dei, I, 18.
Obstupui, steteruntque. — I, 98. — Virgile, i?»., II, 774.
Obstupuit virgo. — III, 162. — Ovide, Mélam., X, 666.
Obuersentur. — I, 428. — Cicéron, Tusc, H, 22.
Occultum quatiens. — I, 658. — Juvénal, XIII, 195.
Occupavi te. — I, 626. — Cicéron, Tusc, V, 9. .
Ocyor. — II, 652. — Lucain, V, 405.
Odi homines. — I, 206. — Pacuvius, ap. Gallium, XHI, 8.
Offendor. — III, 230. — Martial, 7, 6.
Otficii. — II, 460. — Source inconnue.
Ogni medaglia. — III, 544. — Proverbe italien.
Ole quid. — III, 462. — iMartial, VH, 9, I.
Ohm jam. — II, 588. — Sénèque, Epist. 77.
Omne adeo. — III, 214. — Virgile, Georg., III, 241.
Omne magnum. — 11,540. — Tacite, Ann., XIV, 44.
Omnem credo. — 1, 116. — Horace, Epist., I, 4, 13.
Omnes clari. — III, 168. — Cicéron, 7'w.sc., II, 24.
Omnes eodem. — I, 110. — Horace, Od., II, 3, 25.
Omnes pêne. — II, 226. — Cicéron, Acad., I, 12.
Omnia cum. — II, 270. — Lucrèce, VI, 679.
Omnia îanda. —III, 554. —>■ Catulle, de Nupl. Pd. et Thet., V, 405.
Omnia incerta. — II. 298. — Pline, Xat. Hist., II, 37.
Omnia non. — III, 106. — Properce, lil, 9, 7.
Omnia quse secundum naturam tiunt. — III, 674. — Cicéron, de Senect., cl 9.
Omnia quee secundum naturam sunt *. — III, 698. — Cicéron, de Ein. bon. et
mal,., 111, 6,
Omnia te. — I, 130. — Lucrèce, III, 981.
Omnia vitia. — II, 616. — Sénèque, Epist. 56.
Omnino amicitiae. — I, 306. — Cicéron, de Amie, 20.
essais de .MONTAIGNE. — T. IV. (»
C.82 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Omnino si. — II, 512. — Cicékon, de Off., I, 31.
Omnis Aristippum. — I, 270. — Horace, Episl., l, 17, 2.').
Omnium rerum. — II, 432. — Sénèque, de Benef., VII, D.
Oncques ne furent. — I, 21. — La Boétie.
Opinio est. — I, 476. — Cicérox, Tusc, II, 22.
Optât ephippia. — I, 92. — Horace, Epist., I, 14, 43.
Optato quam . — III, 198. — Catulle, de Coma Beren., LXIV, 79.
Ora tument. — II, (308. — Ovide, de Arle amandi, 111, 503.
Orabunt causas *. — I, 432. — Virgile, En., VI, 51.
'ii; oùSèv T). — I, 216. — Ap. Stobée, III, 37.
Oscula dat ». — II, 400. — Ovide, Mélam., X, 256.
Oii Yàp èâ. — II, 130. — HÉRODOTE, VII, 10.
Pacisque bonus. —(III, ^148). — Virgile, En., XI, 658. — (Cette citation ne fi-
gure que dans l'éd. de 88, pag. 444, au lieu et place de celle « Uterque bo-
nus », dont elle n'est qu'une inversion).
Pallada *. — II, 288. — Ovide, FasL, 111, 81.
Pannonis haud. — I, 42. — Lucain, VI, 220. ^
Paridis propter. — II, 178. — Horace, Epist., I, 2, 6.
Parem passis. — III, 572. — Séniîque, Episl. 74.
Parum mihi *. — II, 242. — Salluste, Bell. Jug., 85.
Paterna vestis. — II, 522. — S. Augustin, de Civ. Dei, I, 13.
Pati natse. — III, 264. — Sénèque, Epist. 95.
Paucis opus. — III, 550. — Sénèque, Epist. 106.
Paucos servitus. — I, 492. — Sénèque, Episl. 22.
Paulum sepultae. — II, 446. — Horace, Od., IV, 9, 29.
Pectus est. — III, 240. — Quintilien, X, 7.
Pecuniarum. — III, 300. — Cigéron, de Off., l, 14.
Pejoraque. — 111,396. — Juvénal, Sat., XIll, 28.
Pejus vexabar. — III, 288. — Sénèque, — Episl. 53.
Per dispositos. — II, 532. — Tite-Live, XXXVII, 7.
Per quae luxuria. — III, 668. — Sénèque, Epist. 18.
Per varias. — III, 598. — Manilius, 1, 59.
Perché, dubbiosa. — I, 670. — Le Tasse, Ger. lib., XII, 74.
Perdam sapientiam. — II, 324. — S.Paul, Corinth., I, 1, 19.
Permitte divis. — III, 356. — Horace, Od., 1, 9, 9.
Perspicuitas. — III, 560. — Cicéron, de jVa<. Deor., 111, 4.
Petite hinc. — I, 262. — Perse, V, 64.
P inguis amor. — I, 488. — Ovide, Amor., H, 19, 25.
Placet! pare *. — II, 218. — Sénèque, Episl. 70.
Plenus rimarum *. — II, 500. — Térence, Eunuch., 1, 2, 25.
Plerumque gratas. — I, 490. — Horace, Od., 111, 29, 13.
Plus dolet. — III, 576. — Sénèque, Episl. 95.
Plus salis *. — III, 452. — Cornélius Nepos, Allicus, 13.
Plus sapit. — II, 518. — Lactance, Div. Inslit., III, 5.
Plus sonat. — I, 276. — Sénèque, Episl. 40.
Pocula Lethxos. — III, 408. — Horace, Epod., XIV, 3.
Pœna minor. — III, 574. — Source inconnue.
Poste, non dolet. — II, 668. — Pline le Jeune, III, 16.
Point ne se tault. — I, 44. — Plutarque, trad. d'Amyot.
Polf me occidistis. — II, 216. — Horace, Epist., II, 2, 138.
Pone seram. — III, 232. — Juvénal, Sat., VI, 346.
Possint ut. — III, 280. — Horace, Od., IV, 13, 26.
Post, bellator. — II, 184. — Virgile, En^, XI, 89.
Posterior... res. — II, 344. — Lucrèce, V, 1413.
Posthume non. — I, 574. — Martial, II, 12, 14.
TABLE DES CITATIONS. POS. C.83
Postquam cupidae. — III, 256. — Catulle, Carm., LXIV, 1 17.
Postquam docti. — I, 218. — Sénèque, Epist. 95.
Potare et. — II, 21(i. — Horace, Epist., I, 5, 14.
Potentissimus. — III, 504. — Sénèque, Epist. 90.
Prsetulerim... — I, 114. — Horace, Epist., II, 2, 126.
Prima est. — I, 660. — Juvénal, Sut., XIII, 2.
Prima quse. — I, 126. — Sénèque, Het-c. fur., III, 874.
Primitiœ. — II, 576. — Viugile, Enéide, XI, 156.
Primoque. — II, 101. — Ovide, Métam., XV, 106.
Primus clamor. — I, 534. — Tite-Live, XXV, 41.
Principis est. — III, 354. — Martial, VIII, 15.
Profecto fortuna. — II, 418. — Salluste, Bell. Catil., 8.
Protecto non. — II, 284. — S. Augustin, de Civ. Dei, XII, 15.
Proinde quod. — II, 396. — Lucrèce, IV, 500.
Pronaque. — II, 194. — Ovide, Métam., I, 84.
Proptereaque. — I, 392. — Lucrèce, IV, 936.
Provehimur. — II, 420. — Virgile, En., III, 72.
Proxima deinde. — II, 632. — Virgile, En., VI, 43^1.
Prudens tuturi. — I, 74. — Horace, Odes, III, 29 et suivants.
Psilothro nitet. — I. 546. — Martial, Epigr., VI, 93, 9.
Puellae hune. - I, 486. — Perse, Sal., II, 38.
Pugiles etiam. — III, 28. — Cicéron, Tusc, II, 23.
Pulchrumque. — III, 664. — Virgile, Enéid., II, 317.
Pungit dolor. — II, 218. — Cicéron, nwc, II, 14.
Pungit in. — II, 312. — La Boétie.
Pusi saepe. — I, 548. — Lucrèce, IV, 1024.
\Chercher par C les citations qui ne se trouveraient pas ici.
Qua Deus. — III, 616. — Properce, III, 5, 26.
Qua tacie. — II, 306. — Cicéron, Tit.<sc., I, 28.
Quae fuerant. — III, 114. — Sénèque, Epist. 39.
Quse fuit. — II, 266. — Cicéron, de Nat. Deor., III, 6.
Quœ ista. — III, 522. — Cicéron, de Fin. bon. et mal., II, 15.
Quae magis. — III, 552. — Cicéron, Tusc, V, 5.
Quse mare. — II, 296. — Horace, Epist., I, 12, 16.
Qiuae mens *. — III, 114. — Horace, Odes, IV, 10, 7.
Quae molitio. — II, 134. — Cicéron, de Nat. Deor., I, 8.
Quae nequeunt. — III, 560. — Ovide, Trisl., III, 10, 65.
Quae nisi. — I, 590. — Perse, II, 4.
Quae procul. — II, 258. — Lucrèce, V, 123.
Quae quasi. — I, IIO. — Cicéron, de Fin., I, 18.
Quae quia. — II, 46-4. — Ovide, Amor., III, 4, 4.
Quae sunt. — II, 136. — Cicéron, de Nat. Deor., I, 31.
Quae te nunc. — III, 458. — Ennius, ap. Cic, de Senecl., I.
Quae tellus. — I, 218. — Properce, IV, 3, 39.
Quae venit. — III, 650. — Ovide, Heroid., V, 8.
Quae veritati. — I, 278. — Sénèque, Epist. 10.
Quaenam ista. — III, 250. — Claudien, in Ëïilrop., I, 26.
Quaeramus ad. — II, 380. — Sénèque, Epist. 123.
Quaeris quo *. — I. 10. — Sénèque, Troad., \\, 30.
Quaerite quos. — III, 616. — Lucain, I, 417.
Quaestuque. — II, 101. — Virgile, Enéide, VII, 501.
Quai l'alto. — III, 191. — Le Tasse, Gerus. liber., XII, 63.
Qualis gemma. — II, (J44. — Virgile, Enéid., X, 131.
Qualis ubi alterno. — II, 354. — Virgile, Enéide, XI, 024.
Qualis ubi Oceani. — III, 16. — Virgile, Enéid., VIII, 589
C.84 ESSAIS DE MOiNTÂIGNE.
Quam docti. — II, 238. — Source inconnue.
Quam miserum. — III, 424. — Ovide, Trisl., IV, 1, 9.
Quam multi. — II, 180. — Vmigile, Enéid., Vil, 718.
Quam vereri *. — I, 31)8. — Cicéron, Tusc, V, 2.
Quamcumque Deus. — (I, 426). — Source inconnue. — (Ne se trouve que dans les
cdit. ant. à 88).
Quamvis non *. — III, 304. — Martial, XII, 29, 15.
Quando leoni. — II, 178. — .Juvénal, XV, 100.
Quantaque. — II, 134. — Manimus, I, 55; IV, 93.
Quanto quisque. — III, 478. — Horace, Od., III, 16, 21 et 42.
Quantum vis. - I, 606. — Horace, Epist., II, 2, 39.
Quare etiam. — II, 272. — Lucrèce, II, 1072.
Quare vitia. — III, 186. — Sénèque, Epist. 53.
Quasi non sit. — II, 418. — Cicéron, de Off., I, 4.
Quasi quidquam. — I, 280. — Pline, Hist. nat.
Quasi vero forti *. — III, 102. — Cicéron, de 0/f., III, 30.
Quasi vero mensuram. — II, 330. — Pline, Hist. nat., II, 1.
Quasi vero quidquam. — III, 530. — Cicéron, de Divinat., II, 39.
Que sçay-je. — II, 276. — Devise de Montaigne.
Quem circumcursans. — III, 642. — Catulle, Carin., LXVI, 133.
Quem duplici *. — I, 270. — Horace, Epist., I, 17, 25.
Quem semper. — I, 316. — Virgile, En., 49.
Quem si puellarum. — I, 282. — Horace, Od., H, 5, 21.
Queis arte. — I, 216. — Juvénal, XIV, 34.
Qui alicujus. — I, 276. — Sénèque, Epist. 59.
Qui autem *. — I, 370. — Cicéron, de Fin., V, 5.
Qui capite. — I, 112. — Lucrèce, IV, 474.
Qui certis. — II, 236. — Cicéron, Tusc, II, 2.
Qui corpus. — II, 102. — S. Luc, XII, 4.
Qui disciplinam. — I, 270. — Cicéron, Tusc, II, 4.
Qui genus. — II, 216. — Lucrèce, III, 1056.
Qui nisi sunt. — I, 452. — Lucrèce, IV, 486.
Qui quid sit. — III, 12. — Horace, Epist., I, 2, 3.
Qui requirunt. — II, 240. — Cicéron, de Nal. Deor., I, 5.
Qui se unus. — II, 216. — Épicure, . ajo. Cic, de Fin., Il, 3.
Qui se non. — III, 368. — Q. Cicéron, de Pet. cous., 9.
Qui sibi amicus. — I, 490. — Sénèque, Epist. 6.
Qui ut rationem. — I, 294. —Cicéron, Tusc, I, 21.
Qui valut *. — III, 700. — S. Augustin, de Civ. Dei, XIV, 5.
Qui vigilans. — II, 228. — Lucrèce, III, 1061, 1059.
Quia etiam. — I, 476. — S. Augustin, de Civ. Dei, V, 14.
Quia quidquid. — III, 418. — Valère Maxime, II, 2, 6.
Quibus desultorum. — I, 530. — Tite-Live, XXIII, 29.
Quibus vivere. — III, 138. — Cicéron, Tusc, V, 38.
Quicumque Argolica. — III, 148. — Ovide, Trist., I, 1, 83.
Quid brevi. — I, 118. — Horace, Od., II, 16, 17.
Quid causas. — III, 222. — Virgile, En., VIII, 395.
Quid dixi. — III, 592. — Térence, Heaut., I, 1, 42.
Quid enim. — II, 368. — Juvénal, Sat., X, 4.
Quid tas. — I, 252. — Perse, III, 59.
Quid juvat. — II, 258. — Perse, Sat., II, 61 et 62.
Quid moveant *. — I, 254. — Properce, IV, 1, 89.
Quid quisque. — I, 114. — Horace, Od., II, 13, 13.
Quid terras. — I, 414. — Horace, Od., H, 16, 18.
Quid vesani. — II, 556. — Prudence, Cont. Symm., II, 672.
Quidquid id est *. — II, 396. — Lucrèce, V, 577.
Quidquid principes. — I, 498. — Quintilien, Decl., 3.
Quin etiam. — I, 120. — Silius Italicus, XI, 51.
Quin ut aliquid. — III. 388. — Virgile, Eglog., Il, 71.
TABLE DES CITATIONS. QUI. C.8a
Quippe etenim. — II, 3-20. — Lucrèce, IH, 80L
Quippe ubi fas. — III, 396. — Virgile, Georg., I, 50 L
Quippe ubi se. — I, 060. — Lucrèce, V, 1157.
Quippe videbis. — II, 192. — Lucrèce, IV, 988.
Quis accurate. — I, 278. — Sénèque, Epist. 75.
Quis desiderio. — I, 310. — Horace, Od., L 24, 1.
Quis est enim iste. — I, SOL — Cicf.ron, Tusc, IV, 3^1.
Quis est enim quem. — I, 180. — Cicéhox, de Divin., I. 10.
Quis est enim qui. — I, 76. — Cicéron, de Divin., II, 59.
Quis hominum. — I, 380. — Livre de la Sagesse, IX, 13.
Quis mediocris. — I, 458. — Cicéron, Tusc, II, 17.
Quis non malarum *. — II, 100. — Horace, Ëpod., II, 37.
Quis puer. — I, 550. — Horace, Od., II, 11, 18.
Quis sub Arcto. — II, 318. — Horace, Od., I, 26, 3.
Quis tumidum. — III, 606. — Juvénai,, XIII, 102.
Quis vetat *. — III, 222. — Ovide, de Arte amandi, III, 93.
Quisquam vix *. — I, 32. — Lucrèce, III, 890 et 895.
Quisque suos. — III, 460. — Virgile, En., IV, 743.
Quisquis ubique *. — I, 58. — Martial, VII, 73.
Quo diversus. — III, 470. — Virgile, En., V, 166. ,
Quo, haud, — I, 532. — Tite-Live, IX, 22.
Quo in plures. — III, 298. — Cicéron, de O/f'-, H, 15.
Quo me cumque. — III, 576. — Horace, Epist., l, 1, 15.
Quo mihi fortunas. — III, 496. — Horace, Epist., I, 5, 12.
Quo quis. — II, 494. — Cicéron, de Off., II, !».
Quo rapiat. — III, 196. — Virgile, Georg., III, 137.
Quo timoris. — III, 290. — Tite-Live, XXII, 5.
Quod beatum. — II, 280. — Cicéron, deNat. deor., I, 17.
Quod crebo. — II, 606. — Cicéron, de Divin., II, 31.
Quod est ante *. — II, 296. — Cicéron, de Divin, II, 13.
Quod finxere. — II, 280. — Lucain, I, 486.
Quod tutuit*. — II, 198. —Martial, Epigr., XI, 21, 3.
Quod licet. — II, 436. — Ovide, Amor., II, 19, 3.
Quod me jus *. — III, 418. — Térence, Adelph., 111,5, 44.
Quod mutatur. — II, 260. — Lucrèce, III, 756.
Quod pectus. — I, 546. — Martial, Epigr., II, 62, 1.
Quod petiere. — II, 434. — Lucrèce, IV, 1070.
Quod petiit. — I, 602. — Horace, Epist., I, 1, 98.
Quod sit. — III, 626. — Martial, X, 47, 12.
Quorum igitur. — II, 134. — Cicéron, deNat. deor., II, 51.
Quos tama. —II, 460. — Virgile, En.,\, 302.
Quos, quoniam. — II, 290. — Ovide, Métam., I, 19L -^
Quos ultra. — I, 612. — Horace, Sat., I, 1, 107.
Quoties non modo. — I, 448. — Cicéron, Tusc, I, 37.
Quoties nos descendentis. — III, 302. — Calpurnius, Eclog,, VII, 64.
Quoties pacem. — III, 424. — Lucain, I, 255 ot 56, 251.
Quum de religione. — I, 182. — Cicéron, de Xat. deor., III, 2.
Quum in se. — II, 574. — Source inconnue.
Quum veritatem. — II, 290. — S. Augustin, de Civ. Dei, IV, 31.
R
Rabie jecur. — II, 008. — Juvénal, VI, 647.
Rapuitque. — II, 652. — Lucain, IV, 151.
Rari quippe. — I, 410. — Juvénal, 13, 26.
Rai^um est enim. — I, 418. — Quintilien, X, 7.
Rarus enim. — III, 350. — Juvénal, V^III, 73.
Ratio et prudentia. — I, 412. — Horace, Ep., I, 2, 25.
C.86 ESSAIS DE MONTAIGNE.
JRe succumbere. — II, 20G. — Cicéhon, Tusc, II, 13.
Rébus in adversis. — I, 034. — Martial, XI, 56, 15.
Recte facti. — II, 460. — Sénèque, Episl. 81.
Regibus hic. — I, 482. — Horace, Sat., I, 2, 86.
Rem gratissimam. — II, 322. — Sénèque, Episl. 102.
Rerum natura. — III, 436. — Cicéron, Acad., II. 29.
Res quae in *. — III, G66. — Cicéron, de Divin., I, 22.
Res... quœque. — II, 150. — Lucrèce, V, 921.
Respice enim. — I, 128. — Lucrèce, III, 985.
Rheni mihi. — II, 650. — Lucain, V, 289.
Rhedarum transitu. — III. 42. — Juvénai., III, 23G.
Ridentem dicere. — III, 250. — Horace, Sat., I, 1,24.
Rides nos. — 1, 574. — Martial, VI, 55, 4.
Rimula dispeream. — III, 270. — Th. de Bèze, Juvenilia.
Risi successu *. — II, 454. — Ovide, Heroïd., I, 18.
Rupi jam. — I, 414. — Perse, Sat., V, 158.
Saepe duobus. — II, 178. — Virgile, Georg., IV, 67.
Saepe etiam. — III, 224. — Catulle, Carm., LXVIII, 141.
Saspius olim. — II, 268. — Lucrèce, I, 83.
Sanctius est. — II, 222. — Tacite, de Mor. Germ., 34.
Sanguineam. — II, 304. — Virgile, En., IV, 349.
Sanitatis. — 111,530. — S. Augustin, deCiv. Dei, VI, 10.
Sapere aude. — I, 254. — Horace, Epist., II, I, 40.
Sapiens divitiarum. — III, 698. — Sénèque, Epist. 119.
Sapiens, pol! — I, 482. — Plaute, Trin., II, 2, 84.
Sapiens, sibique. — I, 482. — Horace, Sat., Il, 7, 83.
Satius est. — II, 246. — Sénèque, Epist. 88.
Saxis globosis. — I, 536. — Tite-Live, XXXVIIl, 29.
Scilicet, avolsus. — II, 262. — Lucrèce, III, 562.
Scilicet et fluvius. — I, 290. — Lucrèce, VI, 674.
Scilicet et grandes. — I, 484. — Lucrèce, IV, 1123.
Scilicet et morbis. — II, 202. — Juvénal, XIV, 156.
Scilicet ultima *. — I, 102. — Ovide, Met., III, 135.
Secreti celant. — II, 258. — Virgile, En., VI, 443.
Sed nec vocibus. — II, 566. — Martial, XII, 98, 8.
Sed neque quam *. — III, 622. — Virgile. Georg., II, 103.
Sed videat:— III, 98. — Cicéron, de O/f'., III, 29.
Segnius homines. — II, 212. — Tite-Live, XXX, 21.
Semianimesque. — I, 674. — Virgile, En., X, 396.
Semper Ajax. — II, 350. — Cicéron, Tusc, IV, 23.
Semper enim. — 1, 477. — Tite-Live, XXVII, 45.
Sensus! o superi. — III, 392. — Source inconnue.
Sentit enim. — II, 146. — Lucrèce, V, 921.
Seorsum cuique. — II, 392. — Lucrèce, IV, 490.
Serpente ciconia. — II, 154. — Juvénal, XIV, 74, 81.
Sers top mary. — III, 202. — Dicton du xv° siècle.
Servare modum *. — III. 546. — Lucain, II, 381.
Servitus obedientia. — III, 392. — Cicéron, Parad., V, 1.
Seu Libra. — II, 96. — Horace, Od., II, 17, 17.
Seu plures. — III, 544. — Virgile, Georg., I, 89.
Sexme vix. — III. 642. — Ovide, Amor., III, 7. 26.
Si blando. — III. 266. — Virgile, Georg., III, 127.
Si consilium. — II, 370. -- Juvénal, Sat.,X, 346.
Si contigerit. — III, 456. — Cicéron, de O/f., I, 43.
Si cum bac. — III, 456. — Sénèque, Epist. 6.
TABLE DES CITATIONS. SIC. G. 87
Sicupidus. —I, 212. — Juvéxai,, VIII, 14.
Si forte. — II, 238. — Cickron, trad. du Timée, 3.
Sifractus. — I, 634. — Horace, Od.,III,3, 7.
Sifurtiva. — III, 272. — Catulle, Carm., LXVIII, 14.j.
Si gravis. — 1, 454. — Cicéron, de An., II, 29.
Si in corpus. — II, 314. — Lucrèce, III, 671.
Si interminatam *. — III, 304. — Cicéron, de Xal. deor., I, 20.
Si Vespine. — I, 598. — Proverbe, du Dauphino.
Si melius. — II, 128. — Horace, Epist., I, 5, 0.
Si modica. — III, 668. — Horace, Epist., I, 5, 2.
Si munitae *. — I, 624. — Horace, Od., III, 28.
Si nocturnus. — I, 580. — Juvénal, VIII, 144.
Si non longa. — 111,268. — Veterum poetarum catalecta, Priapus.
Si non prima. — III, 170. — Lucrèce, IV, 1067.
Si nunc primum. — I, 290. — Lucrèce, II, 1021.
Sinunquam *. — II, 432. — Ovide, Amor., II, 19,27.
Si qua volet. — II, 434. — Ovide, Amor., II, 19, 33.
Si quid enim. — II, 474. — Auteur inconnu.
Si quid Socrates. — I, 244. — Cicéron, deOff., I, 4L
Si succederit *. — I, 370. — Sénèque, de Prov., 2.
Si ventri. — I. 488. — Horace, Epist., I, 12, 5.
Si vitiis. — II, 96. — Horace, Sat., I, 6, 65.
Sibi arma. — III, 182. — Cicéron, de Senect., c. HJ.
Sic abiit. — II, 90. — Cicéron, Tusc. Qusest.,l, 30.
Sic est. — III, 460. — Cicéron, de Off., I, 31.
Sic fatur. — I, 624. — Virgile, En., VI, 1.
Sic rerum. — III, 582. — Lucrèce, II, 74.
Sic tauriformis. — III, 654. — Horace, Od., IV, 14, 25.
Sic ubi. — III, 120. — LucAiN, IV, 237.
Sic voluenda. — II, 356. — Lucrèce, V, 1275.
Sicut aquœ. — I, 5S. — Virgile, En., VIII, 22.
Sigillatim. — II, 362. — Apulée, de Deo Socratis.
Simia quam. — II, 196. — Ennius, ap. Cic, de Nnt. deor., I, ;i5.
Simplex illa. — III, 554. — Sénèque, Epist. 95.
Simpliciora. — III, 410. — Quintilien, Inst. Orat., XI, 1.
Simul œvo. — II, 320. — Lucrèce, III, 459.
Sincerum est. — III, 684. — Horace, Epist., I, 2, 51.
Singula de. — II, 482. — Horace, Epist., II, 2, 55.
Sinistras sagis. — I, 546. — Cé.sar., de Bello civ., I, 75.
Siquidem Tyrio. — II, 164. — Juvénal, XII, 107.
Sit Cato. — I, 404. — Martial, VI, 32.
Sit mese. — II, 388. — Horace, Od., II, 6, 6.
Sit mihi. — III. 562. — Horace, Epist., I, 18, 107.
Sit tandem. — III, 206. — Martial, XII, 90,10.
Smyrna *. — III, 14. — Aulu-Gelle, III, II.
Sola sapientia. — III, 622. — Cicéron, de Ein. bon. et mal., III, 7.
Solum certum *. — II, 430. — Pline, Nat. HisL, II, 7.
Solve senescentem. — II, 30. — Horace, Epist., I, 1, 8.
Somnia sunt. — II, 322. — Cicéron, Acad., II, 38.
Somnia terrores. — I, 290. — Hor., Ep., II, 2, 208.
Sors cecidit. — II, 506. — Ad. Apost., I, 26.
Speciosus forma. — II, 482. — Psaume XVL, 3.
Speculataque. — II, 134. — Manilius, I, GO.
Spempretio. — II, 488. — Térence, Adelph., II, 3, 11.
Sperat et. — I, 036. — Pentadius, de Spe.
Spero equidem. — III, 1()8. — Virgile, Enéide. IV, 382, 387.
Spondam régis. — I, 550. — Suétone, César., 29.
Spumantemque*. — I, 626. — Virgile, En., IV,. 158.
Stercus cui que. — III, 346. — Proverbe latin.
C.88 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Sterilisque. — I, 351. — IIouace, Art poét., 05.
Stetit agere. — I, 1!»8. — Lucain, V, 316.
Stillicidi casus. — III, 386. — Lucrèce, I, 314.
Stultequid. — III. 648. —Ovide, TrisL, III, 8, 11.
Stulti vita. — III, 694. — Sénèque, Epist. 15.
Stultitise proprium. — III, 700. — Séxèqle, Epist. 74.
Suave mari. — III, 80. — Lucrèce, II, 1.
Suavis laborum. — II, 216. — Euripide, ap. Cic, de Fin., II, Si.
Sub aliéna *. — III, 342. — Séxèque, Episl. 33.
Sudores itaque. — I, 624. — Lucrèce, III, 155.
Sutticit ad id. — III, 496. — Sénèque, Epist. 90.
Suftundere malis * — I, 90. — Tertullikn, Apologétique.
Sulmone Creator. — II, 264. — Virgile, En., X, 517.
Summum nec. — III, 26. — Martial, X, 47.
Sunt qui *. — I, 398. —D'après Cicéron, Tusc, II, I.
Sursum corda. — II, 72. — Tiré de l'ordinaire de la messe.
Tacito mala. — I, 592. — Lucain, V, 104.
Tacitum sylvas. — I, 426. — Horace, Ep., I, 4, 4.
Tala facit. — III, 10. — Properce, II, 34, 79.
Taies sunt *. — I, 604; II, 346. —Traduits de VOdyssée, XVIII, 135.
Tam blanda. — II, 286. — Cicéron, deNat. deor., I, 27.
Tarn multse. — III, 426. — Virgile, Georg., I, 506.
Tandem efticaci. — III, 628. — Horace, Epod., XVII, 1.
Tanquam thura. — III, 260. — Martial, XI, 103, 12, et 59, 8.
Tanta vis. — III, 476. — Cicéron, de Fin., V, I et 2.
Tantaque in. — II, 406. — Lucrèce, IV, 638.
Tanti mihi. — II, 484. — Juvénal, Sat., III, 54.
Tantum cura. — II. 562. — Martial, VII, 39, 8.
Tantum doluerunt *. — I, 456. — S. Augustin, de Civ. Dei, I, 10.
Tantum ex publicis. — III, 564. — Tite-Live, XXX, 44.
Tantum religio. — II, 266. — Lucrèce, I, 102.
Tantum se fortunse. — III, 500. — Quinte-Curce, III, 2, 18.
Tantus est. — II. 268. — S. Augustin, de Civ. Dei, VI, 10.
TauT6(xaTov *. — I, 386. — Ménandre.
T^ yE<.ç.\ Seï *. — III, 296. — Plutarque, Siles Athéniens ont été plus excellents en
armes qu'en lettres.
Te tenet. — III, 260. — Tibulle, I, 6, 35.
Tegmina. — II, 54. — Virgile, E7i., VII, 742.
Temo aureus *. — I, 292. — Ovide, Mètam., II, 107.
Tempora certa. — I, 276. — Hor., Sat., I. 4, 58.
Tenez chaults. — II, 172. — Aphorisme populaire.
Tentatum. — II, 54. — Ovide, Métam., X, 289.
Terramque. — II, 270. — Lucrèce, II, 1085.
Terrigenam'^. — III, 44. — Cicéron, de Divin., II, 64.
Tetrica sunt. — III, 186. — Sidoine Apollinaire, Epist.. I, 9.
T{ n),£tào£(7(7t. — I, 254. — Anacréon, Od., XXVH, 10.
Tibi quod — II, 434. — Térence, Phorm., I, 3, 9.
Tibi si datur. — III, 260. — Catulle, LXVIIl, 147.
Tt; 8'oîÔev*. — II, 274. — Platon, Gorgias.
Tôt circa. — II, 420. — Sénèque, Suasor, I, 4.
Tôt Galatœ. — II, 560. — Claudien, in Eutr., I, 203.
Tôt per impotentia. — I, 466. — Catulle, IV, 18.
Tôt qui. — III, 23-1. — Lucrèce, III, 1039, I04I.
Tota philosophorum. — III, 57*4. — Cicéron, Tusc., I, 30.
Totus et argento. — I, 488. -' Tibulle, I, 2, 70.
TABLE DES CITATIONS. TOT. C.89
Totus bic locus. — I, 38. — Cicéron, Tusc, I, 45. ' «
Transcurramus — I, 108. — Sénèque, Episl. 117.
Transvolat. — II, 434. — Horace, Sat., I, 2, 108.
Très mihi. — II, 370. — Horace, E])ist., H, 2, Gl.
Tristemque. — III, 186. —Auteur inconnu.
Tu dea. — III, 192. — Lucrèce, 1, 22.
Tu sapientium. — I, 614. — Horace, Od., 111, 21, 14.
Tu secanda. — II. 588. - Horace, Od., II, 18, 17.
Tum pavor. — I, 100. — Enmus, ap. Cic, Tusc, IV, 8.
Tum porro. — II, 144. — Lucrèce, V, 223.
Tum quoque. — III. 424. — Ovide, Trist., 111, 10, 67.
Tum vero in. — II, 386. — Virgile, En., V, 720.
Tum vertice. — I, 394. — Silius Italicus, 1, 250.
Tun\ vetule. — I, 428. — Perse, SaL, 1, 22.
Tune animis. — III, 594. — Virgile, En.,\l, 261.
Tuo tiJbi. — III, 114. —Cicéron, Tusc.,l,2oet deNat. deorum,lU, 35.
Turpe est. — II, 1!X). — Properce, III, 9, 5.
Turpis Romano. — II, 192. — Properce, H, 17, 26.
Tuta et parvula. — I, 420. — Horace, Ep., 1, 15, 42.
Tutumque. — I, 406. — Lucain, IX, 1037.
U
Cherdier par V les citations qui ne se trouveraient pas ici.
Uberibus. — III, 158. — Juvésal, Sat., VI, 272.
Ubi ii^atos*. — II, 268. — S. Augustin, de Civ. Dei, VI, 10.
Ubi jam. — I, 598. — Lucrèce, 111, 452.
Ubi non. — III, 552. — Sénèque, Epist. 75.
Ubi velis. ~ III, 236. — Térence, Eun., IV, 8, 43.
Un vit. — III, 270. — Saint-Gelais, Œuv. poét.
Ubi mortifero. — II, 594. — Properce, 111, 13. 17.
Ubique mors. — I, 630. — Sénèque, Théb., I, 1, 151.
Udum et molle. — I, 262. — Perse, III, 23.
Unde rigent. — II, 482. — Martial, II, 36, 5.
Undique totis. — 111,560. — Virgile, Eglog., 1, U.
Unicuique ista. — II, 248. — Sénèque, Suasor,4.
Unusquisque *. — I, 426. — Properce, II, 25, 28.
Ure meum. — II, 154. — Tirulle, I, 9, 21.
Usque adeo mortis. — I, 634. — Lucrèce, 111, 79.
Usque adeo res. — I, 104. — Lucrèce, V, 1231.
Usque adeone. — I, 422. — Perse, Sat., 1, 23.
Usuram nobis. — I, 324. — Cicéron, Tusc, I, 31.
Usus efticacissimus. — I, 156. — Pline, Nat. hist., XXVI, 2.
Ut bona saepe. — II, 306. — Lucrèce, III, 103.
Ut cibus. — II. 410. — Lucrèce, 111, 103.
Ut despici. — II, 402. — Tite-Live, XLIV, 6.
Ut enim. — II, 464. — Cicéron, de Fin., Il, 15.
Ut externus *. — I, 61. — Pline, Nat. Hist., VU, 1.
Ut fuerit. — I, 216. — Cicéron, Tusc, II, 4.
Ut haberent*. — II, 562. — Tacite, Af/ricola, 14.
Ut homo. — II, 101. — Sénèque, Epist. 90.
Ut Hymettia. — II. 338. — Ovide, Métam., X, 284.
Ut magis. — 111, 598. — Tite-Live, XXIX, 21.
Ut maris. — II, 352. — Cicéron, 7\isc.,\, 6.
Ut me conspexit. — I, 26. — Virgile, En., III, 306.
Ut missum. — III, 286. — Catulle, Carm., LXV, 19.
Ut necesse est. — I, 288, — Cic, Acad., II, 12.
C.90 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Ut ohm. — III, 6<)0. — Tacite, Ann., III, 25.
Ut omnium. — III, 550. — Sénkque, Epist. lOG.
Ut palam. — III. 176. — Pi.ine, Xal. Hisl., III, 5.
Ut potero. — II. 238. — Cickron, Tvsc, 1,9.
Ut quasi. — I, 134. — Lucrèce, IV, 1029.
Ut quisque. — III, 356. — Plaute, Pseud., II, 3, 13.
Ut quum facta. — II, 604. — Cicéron, de Divin., II, 31.
Ut quum, in *. — II, 234. — Cicéros, Acad., II, 33.
Ut satius multo. — I, 488. — Lucrèce, V, 1126.
Ut si quis *. — III, 44. — Cicéron, de Divin., II, 64.
Ut stultitia. — (I, 28). — Auteur inconnu. —(Cotte citation qui existe dans l'ox.
de Bord, est remplacée par sa traduction dans l'éd. de 1595).
Ut tandem. — I, 676. — Ovide, TrisL, 3, 14.
Ut tragici. — II, 462. — Cicéron, de Nat. deor., I, 20.
Ut vinum. — II, 200. — Cicéron, de Nat. deor., III, 27.
Utatur motu*. — III, 82; III, 502. —Cicéron, T'use, IV, 25.
Uterque bonus.— 111,448.— Virgile, £"«., XI, 658. (V. la citation Pacisque).
Uxor si. — III, 436. — Térence, I, 1, 7.
Chercher par U les citations qui ne se (trouveraient pas ici.
Vah! quemquamne. — I, 418. — Térence, Ad., I, 1, 13.
Variseque. — II, 148. — Lucrèce, V, 1077, 1090, 1082, 1083.
Variam semper. — I, 58. — Lucain, IV, 704.
Vascones ut. — I, 366. — Juvénal, Sal., XV, 93.
Vellere queis. — I, 460. — Tibulle, I, 8, 45.
Velut asgri. — I, 58. — Horace, Arlpoél., 7.
Valut minuta. — II, 348. — Catulle, Epigr., XXV, 12.
Velut rupes. — III. 508. — Virgile, E71., X, 693.
Venantumque. — II, 192. — Lucrèce, IV, 992.
Venit et epoto. — I, 540. — Martial, Spect. Lib., épig. 3, v. 4.
Ventus ut. — I, 40. — Lucain, III, 362.
Venus huic. — III, 204. — Ovide, Métam., III, 323.
Vera et sapiens. — II, 448. — Cicéron, de OJf., I, 19.
Verbaque previsam *. — I, 274. — IIor., Art poét., 311.
Verbis indisciplinatis *. — I, 588. — S. Augustin, de Civ. Dei, X, 29.
Verbis, quae. — I, 606. — Horace, Epist., Il, 2, 36.
Veri juris. — III, 90. — Cicéron, de Off-, III, 17.
Versamur ibidem. — I, 128. — Lucrèce, III, 1093.
Vertuntur species. — III, 3o6. — Virgile, Georf/., I, 420.
Verum animo. — III, 418. — Lucrèce, 1, 403.
Verum nil. — II, 472. — Martial, XII, 63, 13.
Verum ut. — III, 306. — Lucrèce, V, 331.
Vi morbi. — II, 672. — Lucrèce, III, 485.
Via qua munita. — II, 390. — Lucrèce, V, 103.
Victor, Marce. — II, 546. — Tite-Live, II, 45.
Victoria nulla. — I, 370. — Claudien, de sexto Consul. Hon., 218.
Victrix causa. — I, 404. — Lucain, I, 128.
Videantur sane. — 111,538. — Cicéron, Academ., H, 27.
Videas desertaque. — III, 568. — Virgile, Georg., III, 476.
Videndum est. — III, 302. —Cicéron, de O/f., 1,41.
Vidi ego nuper. — III, 262. — Ovide, Amor., III, 4, 13.
Vidimus et. — II, 422. — Lucain, IV, 178.
Vince, Hannibal. — I, 518. — Pétrarque, Sonnets, III.
Vincitur haud. — 1, 520. — Lucain, IV, 275.
Vires ultra. — III, 430. - Virgile, Enéid., VI, 114.
TABLE DES CITATIONS. VIR. C.91
Virga tua. — II, 370. — Psaume XXII, 4.
Viri a diis. — (I, 362). — Sénè^ue, Ep. 90. (Cette citation ne se trouve que dans
l'ex. de Bord.).
Virtus repulsœ. — II, 450. — Horace, Od., III, 2, 17.
Virtutem verba. — I. 398. — Horace, Episl., I, 6, 31.
Vis... animai. — II, 318. — Lucrèce, III, 498.
Vis morbi. — II, 318. — Lucrèce, III, 491.
Visere gestiens. — III, 456. — Horace, Od., III, 3.
Vitam adolescentibus. — III, 674. — Cicéron, de Scnecl., 19.
Vitam régit. — II, 452. — Cicéron, Tmc, V, 9.
Vitamque sub. — I, 242. — Horace, Odes, III, 2, 5.
Vitasque in. — I, 600. — ViRdii.E, Geurg., IV, 238.
Vitia otij. — III, 136. — Sénèque, Epis t. 36.
Vivere, mi Lucili. — III, 664. — Sénèque, Epist. 9(i.
Vivere si recte. — II, 218. — Horace, Epist., II, 2, 21.3.
Vivit, et est. — I, 672. — Ovide, Trist., I, 3, 12.
Vixere fortes *. — III, 304. — Horace, Carm., IV, 9, 25.
Vixi et quem. — II, 588. — Virgile, En., IV, 653.
Volucrem sic *. — I, 480. — Juvénal, VIII, 57.
Voluptatem contemnunt. — (I, 608). — Semble tirée de Sénèque. (Cette citation
no se trouve que dans l'e.x. de Bord.).
Volutantibus res. — II, 540. — Tite-Live, XXXII, 20.
Vos, o patritius. — I, 214. — Perse, 1, 61.
Vosne velit. — I, 46. — Ennius, ap. Cic, de 0/f'., If 12.
Vota puer. — I, 134. — Ovide, Met., IX, 793.
Z
Zon sus l'œil. — II, 524. — Ci.. Marot, Ep. de Fripelippes à Sagon.
INDEX ALPHABETIQUE
DES AUTEURS D'OU SONT TIRÉES LES CITATIONS INSÉRÉES
DANS LES ESSAIS.
Actes des Apôtres, I. — Livre du Nouveau Testament, rédigé en grec par S. Luc,
vers l'an 63.
Amvot, 6. — Évêque d'Auxerre, traducteur de Plutarque (1513 à 1593).
Anacréon, 1. — Célèbre poète lyrique grec, dont les poésies exaltent surtout le
plaisir (560 à 478 av.).
Apulée, 1. — Écrivain latin du n» s., auteur de VAne d'6r.
Arioste (L'), 5. — Célèbre poète italien, auteur du Roland furicu.ic (1574 à 1533).
Attius, 2. — Ou Accius; poète tragique latin (170 à 94 av.).
Aijlu-Gelle, 3. — Écrivain latin du ii" s., auteur des Nuits attiques.
AusoNE, 1. — Poète latin, né à Bordeaux (3(J9 à 394).
Bellay (Du), 1. — Fut un de ceux qui s'efforcèrent de régénérer la poésie fran-
çaise; auteur également de quelques poésies latines (1524 à 1.560).
Bèze (Théodore de), 1. — Un des principaux chefs de la Réforme en France; au-
teur dans sa jeunesse de poésies élégantes, mais licencieuses (I5I9 à 1605).
Boétie (La), 4. — Écrivain français, ami de Montaigne, auteur du Discours sur la
Servitude volontaire et de quelques poésies latines (1530 à 1563).
C.92 ESSAIS DES MONTAIGNE.
Cai.purmnus, 3. — Poète latin du ni' s., on a de lui quelques églogues.
Catalecta (Veterum poetarum), 2. — Recueil de fragments de poètes latins an-
ciens, édité en Hollande au .wi' siècle.
Catulle, 28. — Poète latin, né vers l'an 86 av., ses poésies sont élégantes et
naïves.
Cecilius Statius, 1. — Poète comique latin, dont il ne reste que des fragments,
m. en 174 av.
César, 3. — Célèbre général romain, l'un des plus grands capitaines de l'anti-
quité; écrivain militaire distingué, auteur des Commentaires (101 à 44 av.).
CicÉRox, 180. — Le plus célèbre des orateurs romains; le premier des prosateurs
latins, auteur de plaidoyers et de traités philosophiques remarquables (100 à
43 av.).
CicÉRON (QuiNTus), 3. — Frère de Cicéron, i" s. av.
Claudien, 12. — Poète latin du iv s.
Cornélius Nepos, 1. — Auteur latin du i" s.; auteur de biographies.
Dante Alighieri, 2. — Célèbre poète italien, auteur de la Divine Comédie; est re-
gardé comme le père de la poésie italienne (1265 à 1321).
Ennils, 9. — Un des plus anciens poètes latins, grec de naissance (239 à 169 av.).
Épicharme, 1. — Poète et philosophe pythagoricien (540 à 450 av.).
Euripide, 2. — Illustre poète tragique grec, élégant et pathétique (480 à 406 av.).
Fabricius, 1. — Bibliographe allemand, auteur d'une Bibliothèque latine et d'une
Bibliothèque grecque qui sont des monuments d'érudition (1668 à 1736).
Florus, 1. — Historien latin (ii' s.), auteur d'un Abrégé d'histoire romaine.
Genèse, 1. — Le premier livre de la Bible, attribué à Moïse, récit de la création
du monde et histoire primitive jusqu'à la mort de Joseph.
Grotius (Hugues), I. — Publiciste hollandais, auteur du célèbre ouvrage, Du
droit de guerre et de paix (1583 à 1645).
Hérodote, 2. — Célèbre historien grec, dont les écrits sont un des monuments
les plus précieux de l'antiquité (484 à 406 av.).
Homère, 3. — Poète grec, regardé comme le plus grand de tous les poètes, auteur
de ['Iliade et de VOdyssée (x° s. av.).
Horace, 150. — Célèbre poète latin (64 av. à 4) ; ses poésies : odes, épUres, satires
sont des modèles de déUcatesse et de bon goût.
IsocRATE, 1. — Célèbre orateur athénien; se recommande par l'élégance et l'har-
monie (436 à 338 av.).
JuvÉNAL, 50. — Célèbre poétique satirique latin; se distingue par son énergie (42
à 120).
Lactance, 1. — Écrivain latin, surnommé le « Cicéron chrétien » en raison de l'é-
légance de son style (250 à 325).
LucAiN, 39. — Poète latin, auteur de la Pharsale (39 à 65).
LuciLius, 1. — Poète satirique latin (180 à 103 av.).
Lucrèce, 148. — Poète latin, auteur du poème De la nature des choses où il fait
preuve d'un souffle puissant et atteint parfois au subhme (95 à 51 av.).
Macrobe, 1. — Écrivain latin du v s., auteur des Saturnales.
Manilius, 12. — Poète latin de la fin du règne d'Auguste; on ne sait rien autre de
lui.
Marot (Clément), 1. — Poète français; son style, empreint d'une grâce naïve, a
fait école (1495 à 1544).
Martial, 42. — Poète latin, auteur d'Épigrammes; est élégant, spirituel, mais li-
cencieux (43 à 104).
Mécène, 1. — Favori d'Auguste, protecteur des lettres, des sciences et des arts; a
composé lui-même quelques poésies dont il ne reste que des fragments (m. vers
l'an 8 av.).
MÉNANDRE, 1. — Poète comique grec (342 à 290).
NoNius, 1. — Grammairien latin (ni' s.); a laissé un ti-aité précieux par quelques
fragments d'auteurs anciens qui s'y trouvent conservés.
Ovide, 71. — Poète latin; auteur des Métamorphoses (43 av. à 17).
Pacuvius, 2. — Un des plus anciens poètes dramatiques de Rome (220 à \20 av.).
Pausanias, 1. — Géographe et historien grec du ii' s.
INDEX DES AUTEURS D'OU SONT TIRÉES LES CITATIONS. C.93
Pentadius, 1. — Épigrammatiste latin du commencement du vi» s.
Pekse, 22. — Poète satirique latin (34 à 62); de principes rigides, style éner-
gique et concis.
PÉTRARQUE, 5. — L'un dcs créateurs de la langue italienne, célèbre par les Sonnets
et les Chants qu'il écrivit pour Laure de Noves (1304 à 1374).
PÉTRONE, 3. — Écrivain latin, auteur du Salyricon; m. en 66.
PiBRACQ (de), 1. — Magistrat français, auteur de Quatrains moraux (1529 à 1584).
Platon, 2. —Célèbre philosophe grec, fondateur de l'Académie; consigna dans de
nombreux écrits, la plupart sous forme de dialogues, sa doctrine et celle de So-
crate son maître (430 à 317 av.).
Pi.aute, 5. — Poète comique latin ; remarquable par sa verve et son originalité
(227 à 184 av.).
Pi.iNE 1,'Ancien, 8. — Célèbre naturaliste romain; auteur d'une Histoire naturelle,
.sorte d'encyclopédie encore estimée de nos jours; m. en 79.
Pi.iNE le Jeune, 1. — Littérateur romain, auteur de Lettres célèbres (62 à 115).
PoRCius Latro, 1. — Rhéteur, ami de Sénèque (i" s.).
Properce, 21. — Poète latin, auteur d'Élégies (51 à 14 av.).
Proverbes et sentences, 13.
Prudence, 4. — Poète latin chrétien du iv s., d'origine espagnole.
Psalmiste, 5. — Le roi David (x' s. av.), auteur du livre des Psaumes, cantiques sa-
crés de l'Ancien Testament, considérés comme le chef-d'œuvre de la poésie lyrique.
Pseudo-Gallus, 7. — Pseudonyme attribué à Maximianus, poète latin du v ou
vi" s.
PuBLius Syrus, 3. — Poète latin, auteur de sentences et de maximes (i" s.).
Quixte-Curce, 7. — Historien latin, auteur d'une Histoire d'Alexandre le Grand
(I" s.).
QuiNTiLiEN, 12. — Célèbre rhéteur latin (42 à 120).
Rabelais, 1. — Écrivain français, auteur de Gargantua, ouvrage satirique (1493
à 1553).
Ronsard, 1. — Célèbre poète français, chef d'une école littéraire qui infusa à la
poésie française plus de verve, d'harmonie et de rythme (1524 à 1585).
Ruth.ius, 1. — Né en Gaule, a écrit en vers elégiaques un voyage dans cette con-
trée (V s;).
Sagesse (Livre de la), 3. — L'un des livres sapientiaux de la Bible, attribué à
Saloinon (x" s. av.).
S. AuciusTiN, 17. — Un des Pères de l'Église latine (354 à 430) ; a laissé de nombreux
ouvrages dont La Cité de Dieu et les Confessions.
S.-Gelais, 1. — Évéque d'Angoulême; auteur, avant son entrée dans les ordres,
de poésies légères (14(56 à 1502).
S. Jérôme, 2. — Docteur de l'Église latine (331 à 420) ; c'est à lui que l'on doit la
traduction de la Bible appelée Vulgate.
S. Luc, 2. — L'un des quatre évangélistes, auteur des Actes des Apôtres; va.
vers 70.
S. Matthieu, 1. — Apôtre et évangéliste.
S. Paul, 4. — Surnommé l'Apôtre des Gentils, auteur A'Épiti^es à certaines Églises
primitives; m. en 66.
S. Pierre, 1. — Prince des Apôtres, auteur de deux Épîtres aux premiers chré-
tiens ; m. en 66.
Salluste, 3. — Auteur latin (80 à 38 av.); a écrit l'histoire de la Conjuration de
Catilina et des Guerres de Jugurtha.
Sénèque le philosophe, 93. —D'origine espagnole; célèbre philosophe latin, auteur
d'un grand nombre de traités de philosophie morale (2 à 65).
;^ÉNÈQUE le rhéteur, 5. — D'origine espagnole; père du précédent; professa la rhé-
torique à Rome (61 av. à 32).
Sidoine Apollinaire, 2. — Évéque de Clermont, poète et écrivain latin (430 à 488).
Sii.ius Italicus, 2. — Poète (i" s.); auteur d'une épopée sur la seconde guerre pu-
nique.
Sophocle, 1. — Célèbre tragique grec, dont il ne nous reste que sept pièces, con-
sidérées toutes comme des chefs-d'œuvre (495 à 405 av.).
C.94 ESSAIS DE MOiNTAIGNE.
Source inconnue, 36.
Stace, 2. — Poète lat'in (61 à 90), autour do la Thèbaïde.
Stobée, 3. — Savant moine et compilateur grec (iv s.).
Suétone, 1. — Historien latin, auteui- des Vies des douze Césars (65 à i;]5).
Tacite, 9. — Historien latin des plus estimés, auteur des Annales, des Histoires
et des Mœurs des Germains (54 à 140).
Tasse (Le), 7. — Torquato Tasso; illustre poète italien (1544 à 1595), auteur de la
Jérusalem délivrée, chef-d'œuvre de poésie épique.
Tékence, 24. — Poète comique latin, dont il ne nous reste que six comédies (194
à 158 av.).
Teiituixien, 2. — Célèbre docteur de l'Église, auteur d'une Apologétique remar-
quable (160 à 245).
TiBui.i.E, 8. — Poète latin, auteur (VÉlégies empreintes d'élégance et d'une exquise
sensibilité (54 av. à 18).
TiTE-LivE, 38. — Historien romain (59 av. à 19); a écrit une Histoire romaine en
140 livres, dont il ne reste que 35.
Vai.ère Maxime, 1. — Historien latin du temps de Tibère (i" s.).
Valerius Soranus, 1. — Médecin, orateur, poète et écrivain distingué, ami de (]i-
céron (i" s. av.).
Varrox, 1. — Poète latin épique et didactique assez estimé, dont il ne reste que
quelques fragments (82 à 37 av.).
Végèce, 1. — Écrivain latin, auteur d'un Traité d'art militaire (iv' s.).
VniGiLE, 118. — Le plus célèbre des poètes latins, esprit délicat faisant appel aux
sentiments les plus intimes, style noble et correct; auteur de V Enéide, des Géor-
giques et des Bucoliques (70 à 1 av.).
FASCICULE D^
VARIANTES
DE l'édition de 1595 PAR RAPPORT AUX ÉDITIONS DE 1580
ET 1588; ET DE CETTE DERNIÈRE A CELLE DE 1580.
Ce relevé a été établi principalement d'après l'édition de 1872-90 de MM. Cour-
bet et Royer et celle de 1889 de MM. Motheau et Jouaust.
Montaigne a, de son vivant, publié les Essais on 1580; les a réédités en 1582,
1587, 1588, et en avait préparé une nouvelle réédition quand il est mort (1592).
Cette autre a été mise au point et publiée par ses exécuteurs testamentaires en
1595. En outre, l'un des exemplaires de l'édition de 1588 annotés par lui, qui ont
servi à cette mise au point, dit « Exemplaire de Bordeaux », retrouvé trois siè-
cles après, et depuis imprimé tel que, porte à six le nombre des éditions ayant
l'attache de l'auteur.
De ces diverses éditions, la moins conaplète est naturellement la première ; elle
n'en a pas moins un intérêt de premier ordre parce que, de toutes, elle est celle
qui, dans chacun de ses chapitres pris isolément, présente le plus d'unité et même
d'originalité d'expressions auxquelles porte atteinte, dans les éditions suivantes,
le grand nombre de corrections, d'additions, intercalations, transpositions succes-
sives, faites continuellement par Montaigne lui-même, sans que souvent ait été suf-
fisamment modifié en conséquence ce qui les précède ou ce qui les suit; d'où des
interruptions fréquentes dans le cours des idées, et le sens rendu parfois obscur
et difficile à saisir.
L'édition de 1580 a été constituée de morceaux détachés sur des sujets n'ayant
aucun rapport entre eux, écrits par Montaigne au coure de son existence, suivant
l'impression du moment, pour sa seule satisfaction, sans l'idée préconçue de les
faire imprimer.
Sa traduction de l'ouvrage de Sebond achevée, il en avait repris le thème et
l'avait à nouveau traité à sa façon, en manière d'essai, c'est le cas de le dire, et
ce commentaire l'avait satisfait. D'autre part, son éducation première, dirigée
d'une façon qui n'était pas celle de tout le monde, les mauvais souvenirs qu'il
avait conservés de certains errements suivis en la matière, avaient été pour lui
l'occasion d'écrire sur ce sujet quelques pages dont il n'était pas mécontent, non
plus que de quelques autres que lui avaient inspirées son amitié pour la Boétie,
mort récemment.
La publication de cette traduction de Sebond et celle des œuvres de la Boétie
auxquelles il venait de s'adonner, la première à l'instigation de son père, la se-
conde comme exécuteur testamentaire de son ami, et le désœuvrement et la va-
nité aidant, il se dit qu'il pourrait bien agir vis-à-vis de lui-même ainsi qu'il
l'avait fait pour d'autres. Réunissant alors ses opuscules, pour en former autant
de chapitres et en constituer un livre, il les donne à imprimer.
Le succès le met en appétit, et ce livre devient la grande distraction de sa vie :
il le corrige, y ajoute, le réédite; comme, après lui, l'annoter, le débrouiller, l'a-
nalyser, le commenter, le traduire et aussi le rééditer sont devenus une des
grandes occupations des générations suivantes, passées, présentes et probable-
ment futures; car, en ces temps de progrès si considérables dans les sciences et
les arts industriels, les originalités littéraires se font de plus en plus rares, les
productions de ce genre étant engendrées par notre seule imagination qui va
sans cesse tournant dans le même cercle. — Toutefois les premières rééditions
des Essais, de 1582 et 1587, ne présentent que des retouches insignifiantes, qui
n'altèrent sensiblement ni la forme, ni le fond de l'œuvre primitive; ce sont de
nouveaux tirages, plutôt que des éditions nouvelles, et c'est pourquoi nous ne
nous en occuperons pas davantage.
Tout autre est l'édition de 1588. — De 1580 à 1588, la guerre civile s'est étendue;
ses excès se sont aggravés, Montaigne a eu personnellement à en pâtir. Simulta-
nément, il a joué un rôle politique, a effectué un long voyage de dix-huit mois dans
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 7
Da.98 ESSAIS DE MONTAIGNE.
l'est de la France, en Allemagne et en Italie, a été maire de Bordeaux; la vivacité
de ses sentiments généreux se ressent de la connaissance plus approfondie qu'il
a acquise de l'homme, et c'est durant cette période qu'il compose le troisième li-
vre des Essais qui jusqu'alors n'en avaient compris que deux. Aussi ce troisième
livre reflète-t-il plus particulièrement cette phase de sa vie et l'impression qu'il
conserve des événements auxquels il s'est trouvé mêlé, à quoi s'ajoutent aussi beau-
coup plus de confidences personnelles que par le passé; et il en de même des
additions, déjà importantes, qu'il fait en même temps à ses deux premiers livres.
De 1588 à 1592, malade, fatigué, désabusé, confiné chez lui, il n'enfante plus,
mais va polissant et repolissant (certaines de ses phrases ont été refaites jusqu'à
cinq fois); il remanie son texte où il intercale citations, anecdotes, dissertations
en nombre et en étendue sensiblement plus considérables que par le passé, pour
aboutir de la sorte à l'édition de 1595, à laquelle la mort l'empêche de mettre la
dernière main. Mais sa famille confie cette tâche à deux érudits, en communion
intime d'idées avec lui : à Pierre de Brack pour la mise au point, à M"' de Gour-
naj' pour l'impression, ce dont tous deux s'acquittent avec le plus grand scrupule
et un soin tout filial.
En somme, ces trois éditions essentielles des Es.sais (1580, 1588 et 1595), compa-
rées les unes aux autres, accusent de nombreuses retouches, suppressions, modi-
fications, additions. Nonobstant, il n'est pas une suppression ou modification qui
présente de l'importance; toutes ne consistent qu'en quelques mots supprimés ou
changés en vue d'éviter des répétitions, donner plus de correction à la phrase et
quelquefois, mais rarement, en préciser ou accentuer davantage le sens; les pas-
sages complètement remaniés sont peu fréquents. Aussi, les reproduire eût cons-
titué un travail d'impression absolument dépourvu d'utilité et d'intérêt, où le
lecteur, à moins d'y apporter une e.xtrême attention, n'eût fait que se perdre; à
très peu près, personne ne l'eût consulté. 11 a paru suffisant de consigner dans
les notes celles qui exceptionnellement valent d'être signalées. — Il n'en est pas
de même des additions : qu'elles comprennent des pages entières ou se réduisent
à un ou plusieurs mots, toutes ajoutent au sens, et par les idées nouvelles
qu'elles introduisent, et par la précision qu'elles apportent, donnant ainsi possi-
bilité de se rendre compte de l'évolution que l'âge et les événements ont
amenée chez l'auteur. Dans l'édition de 1580 on le voit ayant une tendance nette-
ment accusée au stoïcisme, alors qu'il écrit étant dans la force de l'âge et que,
jusque-là, des épreuves personnelles n'ont pas encore tempéré la fougue de la
jeunesse et ébranlé les illusions. Les additions de 1588 nous le montrent envahi
davantage par le scepticisme, né de l'impression ressentie durant cette période si
agitée de 1580 à 1588. Postérieurement, de 1588 à 1592, assoiffé de repos, con-
vaincu par expérience du néant des choses d'ici-bas, son parti pris de s'accom-
moder de tout ce qui peut survenir, pour n'être troublé que le moins possible
dans sa tranquillité, ressort dans les additions de 1595.
C'est ce qui nous porte à ne donner ici, en ce qui touche ces éditions de 80 et
de 88, que les additions qui y ont été apportées; nous bornant pour les autres va-
riantes, de quelque nature qu'elles soient, de ces deux éditions, à renvoyer aux
notes (fascicules Fa, Fb, Fc).
Mais, par lui-même, ce relevé ne dit rien, et à qui voudra se rendre compte
d'une façon effective de ces transformations successives, nous conseillons l'emploi,
avec son aide, du procédé graphique ci-après, d'exécution simple, qui les fera net-
tement ressortir :
Le volume est indique au litre courant; — les nombres en caractères gras mar-
quent la page; — ceux en caractères ordinaires, la ligne.
Les indications affectées de la lettre C s'appliquent aux additions faisant défaut
dans V édition de i580; — celles affectées de la lettre B aux additions faisant dé-
faut à la fois à 1580 à 1588; — enfin, celles réduites à des nombres, renvoient aux
notes où il est question des variantes autres.
Ceci étant, on marquera longitudinalement en marge du texte, d'un trait au
crayon, les variantes affectées d'un C, et on doublera ce trait pour celles affectées
d'un B, en mémo temps que pour les unes et les autres des parenthèses, égale-
VARIANTES. Da.99
ment au crayon, indiqueront où chacune commence et où elle finit. De la sorte,
les parties du texte sans trait signaleront le texte de 1580; celles sans trait ou
affectées d'un trait simple, celui de 1588; et le tout, marqué ou non, celui de
1595; à quoi des astérisques pourront être ajoutés pour les variantes simplement
désignées par des nombres.
La page ci-après des Essais (II, 432) présente un spécimen de ce que l'on ob-
tiendra de la sorte ;
CHAPITRE XY.
Que nostre désir s'accroist par la malaisance,
II. n'y a raison qui n'en aye vne contraire, dit le plus sage party
dos philosophes. le remaschois tantost ce beau mot, * qu'vn an-
cien allègue pour le mespris de la vie : Nul bien nous peut ap-
porter plaisir, si ce n'est celuy, à la perte duquel nous sommes
préparez : | In wquo est dolor amissse rei, et iimor amittendœ | . Vou-
lant gaigner par là, que la fruition de la vie ne nous peut estre
vrayement plaisante, si nous sommes en crainte de la perdre. Il
se pourroit toutesfois dire au rebours, que nous serrons et embras-
sons ce bien, d'autant plus estroit, * et auecques plus d'affection,
que nous le voyons nous estre moins seur, et craignons qu'il nous
soit osté. Car il se sent euidemment, comme le feu se picque à
l'assistance du froid, que nostre volonté s'aiguise aussi parle con-
traste :
I Si numquam Danaen habuisset ahenea turris,
Non esset Danae de loue facta parens : |
et qu'il n'est rien naturellement si contraire à nostre goust que la
satiété, qui vient de l'aisance : ny rien qui l'aiguise tant que la
rareté et difficulté. Omnium rerum voluptas ipso quo débet fugare
periculo crescit.
Galla, nega; salialur amor, nisi gaudia torquent.
Pour tenir l'amour en haleine, Lycurgue ordonna que les mariez
de Lacedemone ne se pourroiont prattiquer qu'à la desrobée, et
que ce seroit pareille honte de les rencontrer couchés ensemble
qu'auecques d'autres. La difficulté des assignations, le danger des
surprises, la honte du lendemain,
Et languor, et silentium,
Et latere petitus imo spiritux,
c'est ce qui donne pointe à la sauce. | Combien de ieux tres-lasciue-
ment plaisants, naissent de l'honneste et vergongneuse manière
de parler des ouurages de l'Amour ? | La volupté mesme cherche à
s'irriter par la douleur | . Elle est bien plus sucrée, quand elle cuit,
et quand elle escorche | . La courtisane Flora disoit n'auoir iamais
couché auec Pompeius, qu'elle ne luy eust faict porter les merques
de ses morsures.
ESSAIS DE MONTAIGNE.
VARIANTES
DE l'édition de 1595 PAR RAPPORT AUX ÉDITIONS DE 1580
ET 1588; ET DE CETTE DERNIÈRE A CELLE DE 1580.
AV LECTEVR.
14. - 10. — 13. — 20.
LIVRE PREMIER.
16. — Ch. I. — 3, B, par submission. — 18, 11 à 16, C, L'vn et l'autre... auec
eux. — 38 à 20, 20, B, Dionysius... la mer.
20, 29 à 22, 11, C, Et directement... moins? — 8. — Il à 29, B, ou qu'il l'esti-
mast... esclaues. — Gh. II. — 30, C, le suis... passion. — 30 à 24, 5, B, et ne l'es-
père... sages. —26, 8, C, El via... dolure est. — 9 à 21, B, En la guerre... par terre.
— 32 à 36, C, Aussi n'est... d'amour. — 38, C, au giron... iouïssance. — 39. — 42
à 47, C, La surprise... falur. — 28, lia 13, C, le suis... discours. — Ch. III. — 14
à 20, C, Ceux qui... ouurage. — 20 à 22, B, nous imprimant... science. — 22 à 26,;
C, Xous ne sommes... serons plus. — 26 à 30, 4, B, Calamitosus... l'aduenir.
30, 5à 11, C, Entre les... Princes. — 11 à 32, 16, B, qui ont à... n'est plus. — 17 à
21, C, Quisquam... Vindical. — 33 à 39, C, Do vray... Bœotiens. — 41. — 34, 11 à
20, C, lean Zischa... d'encouragement. — 36, 9 à 13, B, L'ordonnance... religion.
— 13 à 35, C, Ce conte... coust. — 14. — 35 à 38,2, B, S'il estoit... mechaniques. —
2 à 4, C, religion. — 13 à 35, C, Ce conte... coust. — 14. — 35à 38, 2, B, S'il estoit...
le lairrois... charge. — 5 à 10, B, Tutus... respond-il. — 10 à 15, C, Si i'auois...
mort. — 15 à 40, 18, B, A peu, que... qu'on dit.
40. — Ch. IV. — 30 à 31, G, V^entus... inani. — 42, 8 à 15, C, Ainsin... haslam.
— 21 à 25, B, Liuius... le deuil. — 32 à 44, 6, B, Le peuple... bestise. — 14. — 16
à 18, B, A l'exemple... flèche. — 22, C, Mais nous... esprit. — Ch. V. — 46, 11. —
14 à 29, B, Les Achaïeus... Martinella. — 48, 18 à 35, C, Eumenes... demandoit. —
37 à 50, 2, C, le me fie... loyauté.
, 50. _ Ch. VI.— 11 à 26, B, Et a tousiours... militaire. —31 à 52, 13, B, Pendant
le... par tout. — 37 à 54, 6, C, Et plus... armis. — Ch. VII. — 56, 4 à 20, B, l'ay
veu... aperteiiient. — Gh. VIII. — 58, 1 à 4, C, Sicut... tecli. — 10, C, Quisquis...
habitat. — Ch. IX. — 25. — 30. — 30, B, Platon... déesse : — 32 à 60, 13, C, si en
mon... sur ce.
60, 14 à 23, B, que c'est... mémoire. — 23 à 25, C, Que mon... l'inuention. — 25
à 28, B, Si elle... discours. — 28 à 33, C, C'est pitié... iugement. — 33 à 62, 4, B,
Da.l02 ESSxVIS DE MONTAIGNE.
Et c'est... fois. — 4 à 5, C, secondement... ancien. — 5 à 9, B, il me faudroit...
Athéniens. — 9 à 10, C, et que les... nouuelleté. — 23 à 64, 7, C, Dequoy i'ay... estrc.
— 7 à 32, B, En vérité... silence. — 68. - Ch. X.
70, 5 à 7, C, La part... France. — 24 à 26, C, ainsi qu'il... ouuert. — 33 à 36, B,
le ne me... à part moy. — 38 à 72, 9, B, Cecy m'aduient... hésitation. — Ch. XI. —
13 à 15, B, Et ces mots... contemptius. — 15 à 18, B, ausquels Platon... d'icelles. —
18, B, Aues... pulamus. — 19, C, des fouldres... riuieres. — 20 à 22, B, Mulla... por-
tentis. — 74, 1 à 5, C, Cur hanc... timenli. — 6, B, A"e ville... angi. — 39 à 76, 1, B,
Et ceux... cette art. — 1 à 2, C, Naissance... songes. — 3 à 13, B, Et de vray...
adolescence. — 13 à 15, C, l'en voy... mensonge. — 15, B, Quis est... collineet. —
16 à 18, C, le ne les... tousiours. — 18 à 30, B, loint que... diuination. — 30 à 32,
C, D'autant... vanitez. — 30 à 78, 10, B, le voudrois... plaira. — 10 à 16, C, Le
démon... agitations. — 16 à 18, B, d'vne opinion... prudence. — 18, C, Et en ay
eu. — 18 à 20, B, de pareillement... Socrates. — 20 à 22, C, ausquolles ie... diuine.
— Ch. XII. — 32 à 80, 24, B, Plusieurs nations... saouL
80. — 82, 10 à 14, C, le ne me puis... que moy. — 14 à 30, B, N'y entendent... mo-
dère. — 84. — Ch. XIII. — 10 à 16, C, Pour moy... tanière. — 30 à 86, 14, B, Non
seulement... communicable. — Ch. XIIII(XL dans les éd. ant.). [Le chapitre XIV
des éditions de 1580 à 1588 est le chapitre XL de celle de 1595; et tous les chapi-
tres de XV à XXXIX de ces premières éditions ont leur numéro supérieur d'une
unité à celui qu'ils ont dans cette dernière]. — 88, 16. — 18 à 21, B, Etau quartier...
moi-cy. — 22 à 23, C, Ainsi sur... et armé. — Ch. XV (XVI dans les éd. ant.).
90, 20, B, Suffundere... effundere. — 28 à 32, B, L'aspre... ennemis. — 92. —
Ch. XVI (XVll dans les éd. ant.). — 9 à 11, C, Basti... armenli. — 17 à 30, B,
Voyez... offense. —94, 23. —96, 7 à 37, B, Nous nous... décret. — 98. — Ch. XVII
(XVIII dans les éd. ant.). — 30 à 100, 1, C, Pareille rage... partoit.
100, 7, C, Adeo... formidat. — 11 à 102, 16, B, Lors exprime... Paniques. —
Ch. XVIII (XIX dans les éd. ant.). —104, 8 à 12, B, La plus belle... cruauté. —24.
— 28. — 106, 3 à 14, C, I'ay veu... perfection. — 14 à 21, B, Il est des... course. —
21 à 24, C, Au iugement... sourdement. — Ch. XIX (XX dans les éd. ant.). — 108,
2, B, que le plaisir... but. — 5 à 110, 11, B, Les dissentions.,, barrière.
110, 14. — 26 à 29, C, Omnes... cynibx. — 31 à 34, 11 n'est... impendet. — 38 à 41,
Non Siculœ... reducenl. — 112, 1 à 2, C, Audit... futura. — 16 à 21, C, Par ce que...
Maistre-Iehan. — 114, 1. — 22, C, le capitaine S. Martin. — 116, 6 à 7, C, puis qu'il...
homme. — 11 à 13, C, et que nulle... capul. — 34à 36, B, 11 n'y a... pas mal. — 118,
10, C, lam fmril... licebil. — 20, B, Et me rechante... auiourd'huy. — 26, B,
Nemo... certior. — 28, C, œuurè. — 33 à 37, B, Comme ccluy... la mort. — 40, C,
Quid... Milita.
120, 5 à 11, B, le suis... saines. — 12 à 13, C, Miser... vitae. — 19. —27 à 28, C,
Illud... vna. — 36 à 39, C, Quin... inensis. — 40 à 42, B, Et comme... seras tel. —
122, 2 à 7, Il y paroist... vtile fin. — 30 à 34, C, Voyons à... manet. — 35 à 37, B,
Ccsar... en vie. — 37 à 124, 7, C, Qui y... douloureux. — 14 à 17, C, Non vultus...
manus. — 30 à 126, 12, C, Que chaut-il... ridicule. — 17 à 18, C, Inter se... tradunt.
— 25. — 26 à 32, B, Tout ce que... essentiellement. — 32 à 39, C, Si vous auez...
omne. — 40 à 41, B, La vie... faictes. — 128, 5, B, Non alium... aspicient. — 13 à
14, C, versamur... annus. — 17 à 20, B, L'équalité... comprins. — 25 à 36, C, Et si
vous... videmus. — 37, B, Elle ne vous... estes plus. — 40 à 43, C, et ne vous...
fueril. — 44 à 47, B, L'vtilité... vescu. — 48 à 130, 1, B, encore n'y... issiie.
130, 3, C, Omnia... sequentur. — 7 à 9, C, Nam nox... atri. — 10 à 132, 1, B, A
quoy faire... arriue. — 14, C, et de prescheurs. — 20. — Ch. XX (XXI dans les éd.
ant.). —29 à 134, 12, B, Son impression... empirer aussi. — 136, 1 à 14, C, Pas-
sant à... aux filles. — 19 à 27, B, Sainct Augustin... haleine. — 27. — 35, C, De
qui ie... moy-mesme. — 138, 2, B, à coup. — 3 à 13, B, Et de là... foiblesse. — 16
à 22. — 12 à 140, 32, B, Il vaut mieux... sacrifices.
140, 32 à 34. — 34 à 36, B, La bru... cotte. — 36, C, de l'assaillant. — 142, 4 à
5. — 5 à 146, II, B, Les mariez... mesmes. — 21, C, domestique.
150, 13 à 16, C, Les discours... accidens. — 16 à 152, 29, B, Si ie ne comme...
ainsi. — 154. — Ch. XXI (XXII dans les éd. ant.). — Ch. XXII (XXIII dans les
éd. ant.). — 156, 8, B, Vous... magister. — 9, B, l'antre... république, ot. - 13 à
VAUIANTES (1595-88 et 80. LI V. 1, CH. XXU. VOL. I. Da.l03
•20, C, ot en ce monde... venimeuses. — 20 à 160, 1, B, Consuetudinis... respecte plus,
160, 8. — 23 à 25, B, Et est très... veritatis. — 26 à 33, C, l'estime... ordure. —
33 à 162, 15, B, Desrobons... peuples. — 15 à 164, 29, C, où sauf sa... crud. — 29
H 166, 7, B, Où le grand... noble. —7 à 9, C, Où Ion vit... efïroy. — 9à 11, B, Où
les femmes... pucellage. — 11 à 32, C, Où l'on salue... gentillesse. — 32 à 35, B,
où ils nourrissent... l'oposite. — 35 à 38, C, Où les pères... leurs fils. — 38 à 168, 2,
B, Où au.x assemblées... aux autres. — 12. — 15 à 17. — 21 à 23, C, Fit elle... hon-
neur. — 26 à 170, 4, B, Celuy qu'on... applaudissement.
170, 4 à 6, C, Quand ceux... coustume. — C, 15 à 35, B, Par où... Thessalie. —
172, M à 3-1, B, C'est cette... fussent. — 174, 9 à 14, B, Non selon... marchandise.
— 176, 20 à 22, C, comme ce... inique. — 178, 5 à 14, C, le suis desgouté... sa
ruine. — 8. — 14 à 15, B, Le fruict... pescheurs. — 15 à 18, C, La liaison... iniures.
— 18 à 24, B, La maiesté... effort. — 25 à 34, C, Toutes sortes... dangereux. — 35,
B, Adeo... est.
180, 1 à 6, C, Si me semble... pays propre. — 6 à 18, B, Est-ce pas... estoit pro-
pre. — 18 à 33, C,- La religion... malheur. — 33 à 182, 2, B, Quis est... party. — 2 à
5, G, Car qui... introduit. — 5 à 30, B, Cette si... sequor. — 30 à 184, 4, C, Dieu le...
intestines. — 7 à 13, C, Si est-ce... inequalité. — 13. B, Aditum... fides. — 13 à 17,
C, D'autant que... obéissance, — 17 à 19, B, L'aller... effréné. — 30, C, et cet au-
tre... May. — 186. — Gh. XXIII (XXIV dans les éd. ant.). — 188, 8.
190. — 192, 34. — 104, 6, C, le suis... Sylla. — 23 à 24, C, et puis... droit. — 31.
— 196, 2 à 2.5, C, Et puis ce... y voye. — 14. — 25 à 30, B, l'en sçay... leué. — 30 à 31,
C, La prudence... exécutions. — 31 à 39, B, Scipion... obligat. — 39 à 198, 7, C, A
vue vie... rebelle. —8 à 10, B, Stetit... meluens. — 11 à 200, 16, Mais il est... con-
fidence. — 198, 27. — 28. — 30. — 40 à 200, 2.
200, 18. —24 à 202, 2, C, Vn estranger... vent. — 2 à 8, B, Le Duc... domination.
— 22. — Ch. XXVI (XXV dans les éd. ant.). — 204, 3 à6, C, Mais en... pedantesque.
— 15 à 19, C, A receuoir... aux autres. — 20, B, et les lampes... d'huile. — 21, B,
et de matière. — 31. —31 à206, 11, B, leurs opinions... hommes. — 18, B, Odi...
sententia. — 31à38, B, Maisaucuns... compagnie. —208, 1, B, Et refusa... offrirent.
— 2. — 9 à 15, B, Ce qu'Aristote... prudents. — 16. — 22 à 2.5, B, Criez d'vn...
testes. — 30, B, et la conscience.
210, 1 à 9, B, C'est merueille... future. — 13 à 20, B, Apud... sommes là. — 32 à 37,
B, l'en cognoy... derrière. — 37. — 212, 8. — 9 à 14, C, Nous nous... mendiée. — 17.
— 18àl9, B,Éx quo... quiret. — 20à22, C,Si cupidus... sapientia est. — 22à26, B,
Dionysius... lafaire. — 33à 214, l,B,llen deuoit... e.xperience. — 2, B,ces sçauan-
taux. — 20à22, C, Etqui auoit... sannœ. — 32 à 34, C, Ethay... il est. — 36. —216,
4 à 5, C, Quels... Titan. — 8. — 21, B, Non vitse... discimus. — 26, B, vt fuerit... didi-
scissc. — 218, 7 à 220, 1, B, Postquam... exlre.
220, 4 à 14, B, Platon... craindre. —21, B, Exemple... ses loix. — 222, 33 à 224, 25,
B, 11 est très... guerriers. — 226. — Ch. XXV (XXVI dans les éd. ant.). — il à 12, B,
Et à l'aduenture... nostre vie. — 13. — 15.— 16 à 24, B, Et n'est enfant... rien. —
228, 2:3, i'engendrerois des monstres : comme font. — 23 à 25, B, Il faut... gens-
là. — 30 à 36, B, c'estoient deux... allégation.
230, 11 à 232, 7, B, Reprendre en... Politiques. —25. — 30 à 36, B, Tout ainsi...
nourrir. — 234, 2 à 6, C, Voyez Cimon... facilement. — 10. — 16 à 17, B, Platon en...
d'autorité. — 236, 5. — 21 à 238, 1, B, Socrates, et... discipline. — 7 à 8, B, prenant...
Platon. — 11. — lia 15, C, Nostre ame... esteinte. — 16, B,Numq\Mm... fiunt. — 17à
24, C, le vy... Rome. — 25, B, simple. — 29, C, Che non... m'aggrnda. — 32 à 35, B,
Qui suit.., au moins.
240, 2 à 4, B, Ce n'est... mesme. — 9 à 16, B, Qu'il celé... sage. — 21 à 22, C, de la
Rhétorique et de la Grammaire. — 24 à 31, B, Sçauoir par... fard. — 32, C, de mon
temps. — 35. — 35 à 242, 12, B, ou qu'on... à iuger. — 30 à 31, C, Vitamque... rébus.
— 32 à 244, 12, 3, Ce n'est... corde. — 25 à 37, B, Qu'il se... assequebanlur . — 246, 10
à 25, B, yieque, vl... matière. — 26. — 26, B, et n'ayent... conduite. — 30 à 34, B, Que
l'opiniatrer... philosophiques. — 248, 15 à 16, C, Quœ tellus... ferai. — 22. — 23 à24,
B, et le seul... part — 27 à 28, B, la date de... ny tant. —30 à 37, B, C'est à mon,., pé-
nètrent.
250, 2. — 6 à 9, C, Comme ce... volontaire. — 19 à 20, B, Ceux qui... paroles. — 36
Da.l04 ESSAIS DE MONTAIGNE.
à 252, 1, C, A qui il... orage. — 5à6, C, Nous sommes... preiudice. — 29 à 35, B, Nos-
tre vie... la leur. — 39 à43, C, Quid... gignimus. — 254, 7, C, Et quo... laborem. — 12
à 13, B, Entre les... l'vtililc. — 29 à 31, C, Quid... astres et. — 36 à 41, B, Anaxi-
menes... monde. —256, 2. — 3. — 12. — 19, B, qui se treuue. — 20, B, par opinion et
par effet. — 258, 3 à 5, C, Deprendas... faciès. — 10 à 12, B, La plus expresse... serein.
— 15. — 17 à 262, 3, B, Elle a pour... leur ame.
260. — 262, 7 à 8, C, Vdum...rola. — 11 à 16, B, Cicero... nécessaires. — 35 à 36, C,
Petite... canis.—37 à 40, C, C'est ce que... saison. — 41. — 264, 2 à 9, B, Ny ne... on-
gles. — 266, 5, B, bonne. — 6, B, la musique. — 8, B, et la disposition de la personne.
— 13 à 15, Et à l'ouïr... contraire. — 16. — 17. — 25 à 268, 12, B, Enfant... musique.
— 13 à 15, B, Qui ne... soleil. — 29, B, son exercitation... l'vsage.
270, 1 à 2, B, multum... nesciat. — 19. — 19 à 33, B, Celuy-là... actions. — 38 à 272,
3, B, Quidisciplinam... vies. — 38, B, à la conception. — 39. — 274, 5, B, Et c'est...
rapiunl.—-23 à 28, C, Et quoy... feray. — 32 à 33, B, S'il n'est... en soy. — 38, C,
Emunctœ... versus. — 276,2à5,C, Tempora... poetae. — 11. — 14, B, Plus sonat... va-
let. — 20 à 26, B, Qu'il s'en... d'aage. —22, C, contorta... sophismata. — 31 à 36, B,
aul qui... quérir. — 278, 2 à 4, B, non tant... feriet. — 5. — 8. — 12, B, Et si ne... ap-
pelle. — 9 à 14, C, l'ay volontiers... parler. — 14 à 18, B, Toute affectation... mespri-
sant. — 20 à 26, B, Quaex^erilati... pensent de mesmes. — 40.
280. — 282, 25. — 35. — 284, 25. — 286, 7. — 7 à 25, B, le sens.. . ne fay. — 26 à 27,
B, et des iugements... cognoissoit. — 30 à 288, 2, 0, Mettray-ie... louablement. — 2à
5, B, Il estoit loisible... deformabat. — 5 à 15, C, Car i'ay... paternelle. — 15 à 17, B, et
qu'aux... occultes. — 33, C, Pour reuenir... propo.s. — Ch. XXVI (XXVII dans les éd.
ant.). — 28 à 290, 1 , B, Vt necesse... persuasion.
290, 29 à 30, C, iam nemo... lempla. — 41 à 44, C, scilicet... videtur. — 45 à 292, 1,
B, Consuetudine... causes. — 1. — 2. — 7 à 13, B, si l'on entendoit... Chilon. — 18,
C, à Mante. — 38. — 294, 12, B, Qui vt... frangèrent. — 39. — 296. — Ch. XXVII
(XXVIII dans les éd. ant.).— 25. —298,6, C, peut estre. — 7 à 9, B, (moy qu'il...
papiers). — 13, B, longue espace. — 20 à 28, B, Et dit Aristote... iustice. — 22 à
28, B, en gênerai... coniointement.
300, 7. — 10 à 11, C, que nous... vers. — 34 à 35, C, El ipse... paterni. — 302,
25. — 34 à 35, B, où l'homme... entier. — 37, B, et par les... reietté. — 39 à 306,
15, B, Laquelle pourtant... sunt. — 23, B, qu'en respondant... c' estoit moy. — 26
à 308, 6, B, Nous nous cherchions... qu'à soy. — 9 à 11, B, qui ayant... pareille.
— 24. — 27 à 35, B, Ils estoient... eux mesmes.
310, 10 à 17, C, mais ie ne... ordinaires. — 17 à 19, B, coustumieres... nul
amy. — 30 à 32, B, et leur conuenance... d'Aristote. — 312, 5. — 7 à 8, B, Quand
le... demandoit. — 35 à 314, 8, B, si deux... monde. — 14 à 38, B, et qui me... ail-
leurs. — 316, 20. — 34 à 38, C, Illam... ruinam. — 318, 8. — 21, C, et auec rai-
son. — 30. — Ch. XXVIII (XXIX dans les éd. ant.).
320. 330.
34o! — 344. — Ch. XXIX (XXX dans les éd. ant.). — 20. — 22 à 346, 18, B, I'ay
veu... trace. — 19.— 22 à 24, B, Bien apprentis... deffend. — 25 à 26. — 29 à 35,
B, Ces encheriments... simple. — 38, C, prudente et. — 348, 1, B, C'est vn... Pla-
ton. — 1 à6, C, Certaines nations... mariage. — 7 à 14, B, C'est de... parents. —
20 à 25, G, Tous plaisirs... Capitaines. — 25 à 30, B, Sophocles... chastes. — 34 à
37, B, Et nostre... desbordez.
350, 5, C, Fortunœ... vias. — 6 à 12, B, La sagesse... bornes. — 20 à 25, C, et
qu'il y... ressentiment. — 34 à 37, C, Cette impression... religions. — 37 à 40, B,
Encore du... trespassé. — 40 à 352, 29, C, Et en ces... voicy. — Ch. XXX (XXXI dans
les éd. ant.). —354,2 à 3, B, et Philippus... Galba. — 13.-31 à 33, C, Hœcloca...
foret. — 356, 7 à 23, C, Il semble... fourriers. — 23 à 25, B, Et voyons de... pais.
— 358, 40 à 360, 2, Et si pourtant... culture.
360, 8 à 10, C, Et veniunl... canunt. — 13 à 16, B, Toutes choses... dernière. —
35. — 362, 2, C, Nos natura... dédit. — 20 à 21, C, comme Suidas... manger. —364,
27 à 37, B, C'est don... imposture"? — 366, 7 à 8, B, par le bout... offencé. — 43 à
44, C, Vascones... animas. — 368, 34.
370, 1. — 3 à 9, B, Victoria... contre eux. — 21, B, si succideril... pugnat. —
26, C, les plus vaillants... infortunez. — 26 à 372, 13, B, Aussi, y a-il... battre. —
VARIANTES (1595-88 et 80). LIV. I, CH. XXX. VOL. I. Da.lOo-
374, 4. — 4 à 12, B, Les nostres... père. — 376. — Ch. XXXI (XXXII dans les éd.
ant.). — 26 à 30, B, A cette cause... cachée. — 378, 10 à 14, C, En vne nation...
discours.
380, 7 à 12, B, Dieu nous... raison. — 20, B, Quis hominum... Dominus? —
Ch. XXXII (XXXIII dans les éd. ant.). — 384. - Ch. XXXIII (XXXIV dans les éd.
ant.). --386, 3. — 6 à 8, B, Sembbe-il... finit. — 38. — 42 à 388, 18, B, Icetes auoit...
prudence. — 19 à 31, C, Pour la Un... l'autre.— Ch. XXXIIII (XXXV dansles éd.
ant.). — 34.
390, 15, B, ou secourus... estoient. — 24 à 39, B, En la police... failly. — 392. —
Ch. XXXV (XXXVI dans les éd. ant.). — 25 à 36, B, et soubs... nostre. — 27 à 29,
B, les jeux... ventre. — 33 à 394, 3, B, Pourquoy semble... deuotion? — 14 à 21,
B, ce qu'on dit... descouuertes. — 28 à 33, B, Vn Vénitien... a mise. — 33 à 43, C,
Celuy que... reuerence. — 43 à 396, 1, C, (non pas moy... père). — 5. — 8 à 11, C,
Les gelées... naualo. — lia 30, B, Les Romains... voir. — 31 à 35, A, sur le sub-
ject... deux fois. — 398. — Ch. XXXVI (XXXVll dans les éd. ant.). — 2. — 2 à
14, B, Pour me sentir... exemples. — 16, B, 5'im< qui... confidunt. — 18, B, inimi-
table. — 21, et débauche. — 21. — 27 à28, C, virtutem... ligna. —29 à 31, B, quam
vereri... parement. — 31.
400, 6, B, autre cause mouuante. — 8 à 19, B, En cette... passe. — 19. — 21 à
28, C, Grande subtilité... volonté., — 28 à 402, 2, B, Ils ne font... le font. — 5. —
10. — 10 à 11, B, Sottes gens... gloire. — 16 à 404, 13, B, et pour l'interest... car-
rière. — Ch. XXXVII (XXXVIII dans les éd. ant.). — 408, 2 à 10, B, Quand io...
définition. — 10 à 14, C, Qui pour... pitié. — 17 à 22, C, Largus enim... impercep-
tiblement. — 22 à 30, B, Artabanus... larmes. — 24 à 43, C, Nil adeu... videtur.
410. —Ch. XXXVIII (XXXlXdans les éd. ant.). — 17. — 21 à 22, C, Rari quippe...
\ili. — 26 à 412, 8, C, Et les marchands... à bord. — 13 à 15, C, Charondas.;.
compagnie. — 13 à 20, B, 11 n'est rien... maladies. — 414, 11 à 12, C, comme les...
secouant. — 42 à 45, B, C'est ce que... naufrage. — 416, 20, C, In solis... lucis. —
21 à 22, B, La vertu... effects. — 418, 7 à 9, C, La solitude... Thaïes. — 22 à 35,
B, 11 est temps... office.
420, 31 à 35, B, le n'estime... libéralement. — 422, 38 à 39, C, Vsque... allers —
424, 1 à 20, B, Il semble... de vie. — 22. — 426, 12 à 13, C, et choisir... ire via. —
34. — 428, 3, C, Tun', vetule... escas? — 35, B, obuersenlur... animo.
430. — Ch. XXXIX (XL dans les éd. ant.). — 432, 11 à 12, C, et me feroit... créance.
— 22 à 27, B, l'ay vcu... qualitez. — 27 à 38, C, Les compagnons... sciai.. — 434,
10 à 14, C, Vn Roy... ceux-là. — 16 à 35, B, le sçais... concinnitas. — 436, 26 à 27,
C, Sur ce subiect... chose. — 28 à 438, 1, B, Et eusse... succédé. — 1 à 21, C, l'ay
naturellement... conception. — 15 à 19. — 21 à 26, B, A bienuiennor... lasches.
— 26 à 440, 19, Ce sont grands... imprimer.
440. — Ch. XL (XLI dans les éd. ant.). — 442, 22 à 29, C, Celui-là... darel! —
26 à 29, B, Or, laissons... leur mort. — 30. — 444, 21. — 446, 1 à 9, C, Au royaume...
maistre. — 18 à 448, 36, B, Toute opinion... fync«r7-enm/. — 36 à 40, C, l'ay veu...
ardente.
450, 20, B, si nous en deuenons... laschos. — 28, B, Aristippus, Hieronymus et.
— 29. -- 462, 20. - 22 à :35, B, Toutesfois... la douleur. — 454, 6. — 16 à 17, B, Non
enim... beati. — 2.5, si grauis... leuis. — 27 à 30, B, Si tu ne la... exeamus. — 35.
— 33 à 456, 25, B, de ne nous... desclouë. — 30 à 31, B, Comme le... l'àme. — 33.
— 458, 7 à 11, B, Outre tant... iumeaux. — 12 à 11. — 20 à 25, B, Et Cicero... mol-
lissimus. — 41 à 460, 2, B, Quis... contraxit?
460,4. — 10 à 11, C, Vellerc... nouant. — 16 à 32, B, 11 est ordinaire... cuisses. —
462, 10 à 474, 21, C, Q. Maximus... glace. — 462, 10, Q. Maximus... œgriludinem.
— 32 à 35, B, Caton Consul... armis esse. — 464, 14 à 29, B, La plus commune...
(a médecine. — 11, B, à m'acquiter. — 468, 6 à 8, B, n'y ayant... frangiiur. — M
à 15, B, Elles viennent... forlunœ. — 16 à 21, B, In diuitiis... subiects? — 21. —
32 à 36, B, l'enfaisoy... prudence.
470, 2, B, de monnoye. — 8, B, Tout compté... l'acquérir. — 11, B, Pour auoir...
pas moins. — 16, B, vous n'oseriez l'escorner. — 22, B, (elles sont... bonnes). —
27 à 33, B, Selon cette... prudence. — 33. — 472, 9 à 12, B, Et est follie... faict. —
13, B, de quoy ie n'ay que faire. — 14, B, Non esse... vectigal est. — 16, B, Divilia-
Da.lOO ESSAIS DE MONTAIGNE.
rum...satielus. — 20. — 21 à 474, 0. B, Feraulez... cœur. — 9 à 10, B, Chascun est...
malheureuse. — 30, B, diuersement les hommes. — 476, 1 à 4, B, Opinio est... im-
pares. — 6. B, humaine faiblesse. — 7. — 9 à 11, B, Nul n'est... feroit-on. —
Ch. XLI. — 17 à 21, C, Lafama... sgombra. — 23 à 25, C, c'est la plus... rencon-
tre. — 23. B, Quia... cessât. — 478, 34 à 480, 16, C, Semper enini... aux pieds. —
478, 12 à 480, 16, B, Comme les... aux pieds.
480. — Ch. XLII. — 18. —20. — 22. — 23 à 25, B, Hem!... innumerables. — 20 à
31, C, Volucrem... circo. — 482, 42. — 43. B, Sapiens... sibi. — 484, 3. — 8à 9, B,
vn noble... pauure. — 11 à 16, B, En Thrace... essentielle. — 21 à 23, C, Scilicel...
polal. — 25, B, nie beat us... félicitas est. — 32 à 37, C, et le soing... ab auro. —
486, 18 à 24, C, Puellœ... mala. — 33. — 36 à 39, B, Tout ainsi... rebours. — 488,
2 à 3, C, il a beau... et auro. — 21 à 24, C, Vt satius... commande. — 29 à 20,
C, Pinguis... nocel.
490, 6 à 11, B, Il n'est... fauconniers. — 14 à 27, C, Et ie ne sçay... balafre. —
19 à 20, B, De vray... plaist. — 35, C, parleurs et. — 36 à 39, C, Le Roy... serui-
teur.s. — 492, 3 à 20, C, Les auantages... tenent. — 20, B, Paucos... tenenl. — 29 à 31,
C, Maximum... laudare. — 494, 7. — 14 à 28, C, Toutes les... au vice. — 496. —
Ch. XLIII. — 16, C, qui mangent du turbot. — 18. — 20, C, tels excez... Prince.
— 498, 1. — 7. — 23 à 500, 17, C, C'estoit vne... esté autres. — 498, 21, B, à leur
(leuoir et. — 24, B, Quicquid... videnlur. — 25.
500, 5 à 17, B, Platon en... esté autres. — Ch. XLIIII. — 502, 42. —504, 21 à 24,
B, Chez Hérodote... de suitte. — Ch. XLV. — 506, 17 à 32, C. En cette... sauuetO.
— 508. — Ch. XLVI. — 19 à 23, C, 11 est autant... des autres. — 26.
510, 3à 5, B, Et Socrates... enfants. — 14 à 20, C, Cette correction... l'endormit.
— 512, 12 à 514, 8, C, 11 y a tant... confusion. — 13 à 18, B, 0 la courageuse...
iouët. — 516, 3 à 6, B, Et en diuerses... cognu. — 12. C, fd cinerem... sepultos? —
13 à 24, B, Quel ressentiment... le sçait. — 518. — Ch. XLVII.
520, 10 à 17, C, grauissimi... malheur. — H, B, grauissimi... necessitatis. — 13
à 17, B, Voyla pourquoi... malheur. — 27 à 29, B, Raison... choses. — 34 à 39, C,
Antiochus... soyent. — 524, 1 à 5, B, Alexandre... impérial. — 25 à 31, B, En
cette... a trait. —528, 23. —24 à 26, B, Nous raisonnons... hazard. — Ch. XLVIII.
530, 9 à 34, B, Les Numides... commande. — 35. — 532, 14, B, Platon... santé.
— 17. — 23, B, institution... Cyrus. — 28 à 35, B, et pour l'aduantage... empire. —
534, 2, B, la plus part du temps. — 5, B, quoy qu'en... Xenophon. — 12 à 15, C,
csedebant... decernit. — 14 à 15, B, Leurs battailles... routes. — 23 à 27, C, On as-
sené... gladiis. — 32 à 536, 31, B, Celle dequoy... inuentions. — 32. — 33. — 538, 4.
— 9, C, et bardelies. — 11 a 19, C, Ce que i'ay... currentium. — 17 à 19, B, Et
Numidœ... currentium. — 24 à 544, 9, C, Le Courtisan... son assiette. — 538, 24 à
36, B, Le Courtisan... exercice.
540, 4 à 9, B, Pour vérifier... salent. — 21 à 35, B, Quelcun de... transcurrerunt.
— 542, 7 à 17, B, Bajazet... Hérodote. — 24 à 36. B, le n'estime... viuoit. — 544, h
à 9, B, pour montrer... son assiette. — Ch. XLIX. — 14. — 546, 6 à 8, B, 11 n'y a...
insen.siblement. — 30. — 548, 2, C, comme font les Vénitiens. — 4 à 8, B, Et tou-
choyent... l'autre? — 29, B, comme l'en ay veu.
550, 23. — 28 à 39, C, Ils prenoyent... estois creu. — 552. — Ch. L. — 15. — 15 à
17, B, Car ie ne... faire veoir. — 17 à 554, 1. — 5 à 556, 12, B, Entre les... qu'vn
autre. — 17 à 19, C, Aller... aller. — 558, 2 à 7, B, Conformément... risible. —
Ch. LI. — 9 à 10, C, C'est vn... pied. — 12 à 17, C, et croy... gaigne. — 23 à 31,
B, Ariston... perorations.
560, 9 à 15, B, contre l'opinion... dit-il. — 15, B, à Rome. — 24, B, bonne insti-
tution et. — 562, 1 à 2, C, Nec minimo... secetur. — 20 à 23, C, Ovez dire... cham-
brière. — 27. — 27. — 564. — Ch. LU. — 23 à 25, C, 11 ne fut... Romains. —
Ch. LUI. — 566, 11 à 13, C, Dum abest... tenet. — 20 à 28, C, Nam cum... venirent.
— 35. — Ch. LIIII . — 568, 14, B, merueilleux. — 23 à 25, C, Les daiz... Uuernes.
— 30 à 37, B, Le saubriquet... aplat.
570, 5 à 6, B, Le désir... volupté. —21 à 572, 22, C, Il se peut... prix. — 570, 21
à 24, B, il y a ignorance... première. — 25. — 26, B, simplement. — 572, 8 à 22, B,
Les païsants... prix. — 29. — 29. — 31. — 574. — Ch. LV. — 10. — 19 à 576, 30,
C, l'ayme... sa boue. — 574, 25 à 30, B, les senteurs... parfumées. — 576, 7 à 10,
VARIANTES loOîi-SS cl 80). LIV. I, Cil. LV. VOL. 1. Da.i07
B, On lit do... plus mal. — 16 à 27, B, le voudrois... soudain. — 578. — Ch. LVI.
— là 13, C, le propose... comme icy. — 6 à 10, B, tenant pour... suis nay. — 20.
— 21, B, sinon... tousiours. — 22 à 24, B, C'est l'vnique... cette lu.
580, 5, B, et peut... ayder. — 7 à 9, B, comme il... pouuoir. — 9. — 10 à 15,
B, Platon... constance. — 26 à 32, C, Si noclumus... malice. — 28 à 32, B, Et l'as-
siette... malice. — 34 à 584, 6, C, Et me desplaist... part. — 582, 2. — 7 à 584, G,
B, Quelle prodigieuse... part. — 7. — 15 à 590, 11, C, Ny n'est... taire. — 584, 15.
— 17, B, C'estoyent... esbats. — 23 à 33, B, Ce n'est pas... témérité. — 33. — 586,
10 à 588, 17, B, L'vn de noz... le nom. — 36, B, verbis indisciplinalis. — 38. —
38 à 590, 5, B, le propose... non instruisants.
590, 11. — 22.-25. — 36, B, et le conuions à l'iniustice. — 26, C, Quœ, nisi...
diuis. — 33 à 38, C, Au pied... ipse. — 33 à 35, B, Au pied... auarice. — 592, 11.
— 18 à 19, C, Tacito... concipimus. — 20. — 31 à 35, B, Les Dieu.x... prudence.
36, B, comme d'vn iargon, et. — 39, C, ou de nostre contenance. — 594, 2. — 11
à 16, C, Ny les... mica. — 11 à 12, B, Ny les... meschant. — Ch. LVIL — 24.-598,
3 à 5, C, Si l'espine... Daulphiné. — 9 à 14, B, Ouy, en... d'eux-mesmes. — 21 à 28,
C, Vbi iam... dangereux. — 29.
LIVRE SECOND.
600. — Ch. L — 18. — 19 à 602, 9, C, Il y a... vray. — 8, B, et distinctement... à
pièce. — 37 à 39, C, iVomie... possit. — 604, 5 à 6, B, Nous flottons... constam-
ment. — 9 à 12, B, (Empedocles... mourir). — 30. — 38. — 606, 11 à 18, B, Quand
nous... despit. — 24 à 608, 4, C, Cette variation... Logique. — 606, 24 à 29, B,
Cette variation... simple. — 36, B, chaste, luxurieux. — 38, B, sçauant... prodigue.
— 608, 20 à 36, C, Quand estant... courage. — 20 à 26, B, Quand estant... proficiscn-
liir. — 28 à 29, B, Toute incomparable... taches. — 34 à 36, B, Et l'excès... courage.
610, 4. — 8, B, cui viuendi... prouisa est. — 25 à 32, B, Ny ne trouue... publi-
ques.— 34, C, chaque moment. — 36, B, Magnam... agere. — 612, C, Hac duce...
venit. — Ch. IL — 29 à 614, 3, C, La confusion... incognus. — 612, 45 à 614, 3, B,
Comme Socrates... incognus. — 10 à 16, C, et estonne... de soy. — 15 à 16, B, Le
pire... de soy. — 20 à 22, C, Tu sapientium... Lyseo. — 31 à 34, B, Et commit...
vin! — 36 à 616, 21, C, Nec facilis... ensemble. — 1 à 21, B, le n'eusse pas... en-
semble. — 26 à 27, C, Hoc quoque... ferunl. — 28.— 30 à 31, C,Narratur... virtus.
— 38. — 38 à 39, C, Et escrit-on... affaires. — 618, 10 h 620, 30, B, Vn homme...
bouteilles.
620, 33. — 622, 2 à 3, B, Les autres... prix. — 5 à 624, 5, C, le ne puis... Arcesi-
laiis. — 622, 8 à 624, 5, B, Ma constitution... Arcesilaûs. — 24 à 27, C, Sudores...
videmus. — 29 à 32, B, comme vn... fadeze. — 33 à 34. — 36, B, qui feignent...
poste. — 626, 4 à 11, Laissons... pilez. — 26, B, mot d'Antisthcncz. — 32, C, et
dignes do luy. — 628, 16 à 20, C, et s'en respond... céleste. — 16 à 20, B, Platon...
céleste. - Ch. in. -24. —31.
630, 10 à 11, B, Et à Philippus... mourir? — 12 à 16, C, Nous pouuons... Romains.
— 632, 2 à 5. — 3 à 21, B, C'e.st foiblesse... de vie. — 22. —27 h 29, B, que nous
ne sommes... contre nous. — 36, B, d'espreuue. — 634, 22, B, Hic, rogo... mari?
— 28. — 32 à 37, B, Platon... craintiue. — 46, B, Il n'en vaudroit de rien mieux.
— 49 à 51, C, Débet... accidere. — 636, 32 à 33, C, Speral... minax. — 638, 9. —
13 à 22, C, A la iournée... locauil. — 13 à 19, B, A la iournée... superstes fuit. —
24. — 25. — 25 à 26, B, Seneque... l'ame. — 28 à 42, B, Damocritus... les siens.
640, 28, B, par l'vne... playes. — 30, B, sur eux. — 35 à 642, 1, B, L'histoire...
conscience. — 17 à 650, 2, C, Lucius Aruntius... testament. — 642, 18 à 644, 16, B,
Gr'anius Siluanus... le feu. —35 à 646, 43, B, Vibius Virius... Consul. — 49 à 648,
28, B, Astapa... iugements.
650, 7 à 10, B, Par où... iugement. — 16 à 25, B, En certain... partie. — 25 à 26.
— 652, 30 à 31, C, La douleur... incitations. — 654. — Ch. III. — 1. — 7. — 656,
5 à 6, C, vers laquelle... complexion; et. — 9 à 14, C, le n'en... d'autruy. — 20.
— 36. — 658. — Ch. V. — 1 à 2. — 7. — 11 à 15, C, Comme il... espérance.
660, 2. — 13 à 15, C, l^ippe... dédisse. — 24 à 26, C, Et ie puis... desseins. —
Da.108 ESSAIS DE MONTAIGNE.
662, 1 à 4, il auoit... innocence. — 6 à7, B, Et celuy... souffrir. — 17 à 24, C, Que
ne diroit... géhenne. — 19 à 21, B, Eliam... géhenne. — 22. — 25, B, dit-on. —
26 à 664, 5, B, bien inhumainement... instructiue. — Ch. VI. — 11. — 666,2.
— 16, C, Jus hoc... habebat. — 25 à 33, B, Combien... crainte. — 38. — 38. — 668,
9 à 13, C, Voicy que... ailleurs. — 39.
670, 18 à 19, C, Perché... mente. — 25 à 26, C, Corne... deslo. — 40. — 672, 3 à 7,
C, vi morbi... fatigat. — 14, C, Viuil... suœ. — 20 à 31, C, le n'imagine... misère.
— 674, 10, C, Semianimésque... retractant. — 13 à 22, C, et ont des... dolorem. —
23. — 42, C, et arrosée. — 676, 13. — 15, C, VI tandem... mei. — 20. — 38 à 682, 26,
B, Et ne me doibt... sa bouche.
SECOND VOLUME
10. - Liv. II, Ch. VII. — 12, 10 à 11. - 12. - 16. — 25, B, non plus... mes-
mes. — 28. — 14. 12 à 14, C, Et qui... militaire. — 20, B, Neque enim... sunt. —
16, 11. — 18. — Ch. VIII. - 17. - 21. B, vostre mari.
20, B, vostre fils. — 24 à 36, B, loint cette... prendre. — 22, 7, B, et ne les...
de moy. — 17. — 24, B, Comme... pour sortir. — 27, B, nous mesler d'. — 24, 22
à 23, C, le le hay... personne. — 23. — 27. — 36 à 37, B, (de vray... d'auarice).
— 26, Il à 29, C, l'accuse... opiniastres. — 18, B, Leonor. — 32, B, nuUum...
habet. — 40 à 42, le me maryai... Aristote. — 42 à 28, 7, B, Platon... importune.
— 10 à 19, C, d'autant... dix ans. — 11, B, par l'accouplage des femmes. — 15 à
22, B, Muleasses... Vénérien. — 37.
30, 1, C, à l'imitation... qualibrc. — 28. — 32, 32, B, comme nostre... miliers.
— 34, 5, C, vrais epouuantails de cheneuierc. — 6 à 38, 20, C, Quand ie... auanta-
geusement. — 34, 13, B, le plus... France. — 31 à 36, 14, B. Ce seroit... effect. —
31 à 34, B, Le vieil Caton... à nous. — 38, 2 à 20, B, Au cas que... auantageuse-
ment.
40, 7. — 9 à 17, C, 0 mon amy... que ce soit. — 9 à 13, 0 mon amy... priua-
tion. —34 à 42, 8, C, Pourtant... belles. — 19 à 46, 6, B, En gênerai... laissez. —
26. — 48, 3, B, autour de. — 15 à 20, B, le croy... premiers pas. — 20. — 32 à 34,
B, Platon... Minos. — 35 à 50, 5, B, Heliodorus... façon.
50, 33 à 37, C, Pareil... manger. —52, 22, C, Et'ie ne... que moy. — 22, B,
beaucoup. — 24 à 31, B, A cettuy-ci... que moy. — 33. — 34 à 35, B, Car selon...
ouurage. — 39. — 54. — Ch. IX. — 25 à 26, B, Tite Liue... gerebant. —27 à 31, C,
ou se couuroient... rarement. — 56, 2, B, ou autrement. — 7 à 15, C, et comme...
victoire. — 24 à 28, C, Et craignoit... gauche. — 24 à 25, B,Et craignoit... garder.
— 36, B, L'Empereur... armée. — 40, B, arma... dicunt. — 58, 3 à 5, C, iusques
à... haste. — 7 à 9, B, Le ieune... cuit. — 17. — 32 à 36, C, Flexilis... armos.
60. — Ch. X. — 1.5. — 16. — 17 à 62, 12. — 31. — 64, 2, C, Has meus... equus. —
5 à' 12, C, Si ie m'y... réitérées. — 7 à 8, B, et contention... ferme. — 9, B, Ma
veue... dissipe. — 20. — 34, B, anciens. — 34. — 39, C, et aduoue. — 66, 13, C,
Et le cinquiesme... parfaict. — 19, B, à toute heure... à luy. — 28, C, 0 seclum...
infacetum.i — 30, C, cestuy-ci... Gentil-homme. — 31, B, et préférence. — 32 à 34,
B, fait beaucoup... compagnon. — 68, 10. — 26, C, ils montent... iambes. — 26. —
29. — 31 à 35, C, Et les dames... ordinaire.
70, 1. — 14. — 22, B, et dépendance. — 22. — 31, C, selon moy. — 31, B, en
particulier. — 72, 2, C, il nous... pousse. — 4. — 7. — 15, B, ou éloquent. —28,
B, à qui il... portera. —31, que nous... corda [manque dans 88]. — 36 à 74, 6, B,
La licence... dressent. — 10. — 29, B, ambitieuse. — 35. — 76, 21 à 25. — 28. —
30 à 34, B, ou plus entendu... fantasies. — 78, 8.
80, 7. - 16, B, ou au moins... sorte. — 20. - 22. - 84. — Ch. XI. —86, 12 à 16,
B. quoy que die... iamais des coqs. — 23, B, et en ses mœurs. — 25 à 27, B, et
ijqui... retinent. — 34, B, multum... lacessita. — 88, 19, B, et imperfections.
VARIANTES :io0o-88 et 80). LIV. II, CH. XI. VOL. II. Da.109
90, 8. — 11, B, Sic abijl... gauderel. — 23, C, et d'vne... virile. — 26, C, Dellbc-
rata... ferocior. — 20. — 32 à 43, B, La philosophie... à sa vie. — 92, 10 à 13, B,
A ce tressaillir... adueiiir. — 10 à 17, B, Aristippus... fit-il. — 94, 22 à 23, C,
Haud iynarus... possit. — 27 à 30, C, l'av veu... Au deuieurant. — 96, 12 à 15, C,
Seu Libra... vndœ. — 17 à 19, C, La responco... en horreur. — 25 à 43, C, le di-
ray... exemple. — 20, B, par là en plusieurs choses. — 28 à 43, B, Aristippus...
exemple. —98, 1 à 2. — 9, C, nec vllra... f'oueo. — 19 à 24, B, Ce sont incontinant.
— 27 à 29, B, Et les familiers... l'autio. — 31 à 33, C, L'innocence... d'art.
100, y à 12. — 12. - 18 à 20. — 22 a 2.'). — 25. — 29. — 31 à 33, B, Il n'est... peintes.
— 102. — 7. — 12 à 31, B, Ces iours... changée. — 'M'> à 104, 17, C, comme Dieu...
essentielle. — 30 à 104, 2, B, comme Dieu... diuexarur. — lia 17, Les ^tlgyptiens...
essentielle. — 28, C, en angoisse. — 30, B, VI homo... mc'ulul. — 37 à ;fô, C, quœ-
stxiqite... similis. — 45 à 106, 5, C, Apres qu'on... desmembrer. — 12, C, nations.—
22à 37, C, Muta ferrarum... furrnœ. — 42, B, Belluse... comccrulœ. — 108, 1 à 5,
C, Crocoddon... venerantur. — 10 à 11. — 19. — 20 à 30, C, le ne crain... bestes.
— 35 à 110, 3, B, Les Agrigentins... trespas.
110. — Gh. Xn. — 28, C, non plus... prédécesseurs. — 112, 12. — 14. — 22, C,
Nain cupide... melulum. — 25, B, particulier. — 28, C, comme celuy-là. — 31, B,
nommément... foible. — 32. — 114, 9. — 25. — 116, 39 à 118, 2, C, Voulez vous...
Chrestiens.— 2 à 7, B, Toutes autres... vérité. — 7 a 18, C, Pourtant eut... vicieu-
ses. — 23 à 20, B, Breuis... croire. — 34. — 30 à 120, 21, B, Sentez si... dire.
120, 31, B, et casuelles. — 32 à 122, 2, B, le voy cela... incite. — 9 à 20, B, Le
meilleur... prestre. — 30 à 32, C, Non iam... ceruus. — 124, 0 à 7, C, Nous sommes...
.\lemans. — 9. — 13 à 15, B, Plaisante... descroire. — 17 à 126, 10, B, Ils eslablis-
sent... peuuent. — 10 à 15, C, L'erreur du... imbécillité. — 30 à 128, 2, C, Car ce
monde... intelligibles. — 9.
130, 3 à 7. — 22 à 25, B, Abbattons... aux hommes. — 3 à 132, 2, B, Car Sainct
Augustin... entremise. — 34 à 134, 4, B, Ont elles... accouplage. — 41 à 43, B, qitœ
molilio... fuerunl? — 136, 2 à 9, B, Dirons nous... angusliœ. — 10 à 11, B, y deui-
ner... Anaxagoras? — 14 à 17, B, Inler... cogitanlem. — 19. — 34 à 138, 12, B,
Quand ie... temps. — 18 à 23, C, Toutestois... mouuements. — 25. — 31 à 34, C,
Et mufœ... gliscunl. — 34. — 38, B, leurs mouuemens... traictent.
140, 1 à 2, C, Non alla... lingux. — 10 à 11, C, E'I silentio... parole. — 12 à 37.
C, Quoy des mains... intelligible. — 12 à 32, B, Quoy des mains... d'autre langue.
— 142, 0. — 39. — 144, 19 à 31, C, Tum poivra... rerum. — 33. — 30 à 39, C,
Nos anciens... froid. — 40. — 146, 12, C, Sentit... abuti. — 21. — 148, 18 à 28, C,
Comment ne... rire encore. — 32 à 35, C, Variseque... cantus.
150, 7, C, Indupedita... vincHs. — 10 à 11, C, lies quœque... semant. — 28, B.
et de plus riches effects des facultez plus riches. — 30 à 31, B, ou quelque...
meilleure. — 152, 30 à 33, C, et les Cliraacides... en coche? — 35 à 30, B, Les
femmes... inary. — 39 à 154, 15, C, Des armées... tombe. — 10 à 15, B, Quand
les... tombe. — 18à25, B; A quel... seruis. — 32 à 41, C, Serpente... ses rets. — 43,
B, des colliers. — 156, 34 à 35. — 158, 30.^
160, 28 à 162, 1, C, Nous pouuons... harmonie. — 164, 10. — 18 à 19, C, qui
tient... ordonnée. — 21 à 24, C, Si quideni... turrim. — 34 à 39, C, comme fai-
soient... aspreté. — 166, 1, B, et siècles. — 1 à 3. — 22. — 22 à 24, C, et i'ay...
traictent. — 168, 9.
170, 0, B, desquelles... à nous. — 38. — 172, K». — 15 à 22, C, EtveieUent...ictiim.
— 176, 20. — 178. 7 à 9, C, Quando... apri? — 10, B, pourtant. — 22 à 25, C, Ful-
gitr... ruundi.
180, 2 à 7, Quant... tellus. — 21 à 22, C, qui ont... Crassus. — 25 à 44, C,
Qu'on... éléphant. — 25 à 33, B, Qu'on... à dire. — 45, B, vifue. — 43 à 186, 3, C,
Nous pleurons... les nostres. — 188, 23 à 27, C, Touchant... mourir.
190. — 192, 38 à 40, B, de laquelle... appétit. — 41, C, Turpis... color. — 43 à
194, 19, C, et chargent... l'espaule. — 0 à 9, B, Et vn homme... d'oreille. — 14 à
lit, B, Non seulement... Pline. — 23 à 26, B, Tout ainsi... boule. — 31 à 35, B, ^
multis... aërées. — 196, 4 à 8, B, Quels animaux... bestes? — 12, B, Simia... nobis!
— 13. - 17. — 20. — 25. — 31. - 32. — 33 à 39, C, Ce n'est... amore. — 198, 5.
— 38. — 41 à 200, 4, B, Car en lin... tantost.
Da.no ESSAIS DE MONTAIGNE.
200. — 14 à 24, C, S'il ne nous... dari. — 15. — 18 à 24, B, Vt vinum... darl. —
202, 1 à 20, C, A on trouué... sa vie. — 11. — 13, B, ou pour... richesse. — 15 à
20, B, Il ne nous... à sa vie. — 39 à 204, 2, B, d'autant... péché. — 5 à 7, B, Et les
Sereines... science. — 10 à 11, B, Cauele... mundi. — 11. — 14. — 20. — 22 à 24,
C, Les Dieux... essence. — 206, 1 à 9, C, Deus... sapience. — 14. — 14 à 17, B,
Conformément... surmonte. — 19. — 34. — 28 à 208, 5, B, Se.succumbere... Stoi-
ques. — 17. — 18, et ceux d'vn cheual [manque à 88].
210, 10, C, à présent. — 14. — 14 à 20. B, Ce qu'on... quelconque. — 25 a 212,
19, C, comme elle... guider. — 18 à 19, B, 11 nous faut... guider. — 24. —25, B,
Scgnius... senthmt. — 34. — 36. — 36 à 38, B, comme disoit... mali. — 214, 7 à' 19,
B, Si ne la... suiure. — 26 à 27, B, retirer... et de. — 30 à 31, B, Leuaiiones...
ponit. — 37 à 39, C, Ce seroit... la noia. — 216, 2 à 4, B, et conseil... memoria. —
13 à 16, B, Et cela... volo.— 17, B, ç-wi se... ausus. — 22, B,Iners... est. — 218, 15à
20, B, Placet?... V. le B. — 35 à 220, 7, C, Et Crates... corps. — 218, 35 à 36, B.
Et Crates... hart.
220, 22, B, par les Espagnols. — 222, 14 à 24, B, 0 cuider... sagesse. — 3^4 à
224. 1, C, Si elle... Ciceron. — 222, 36 à 224, 1, B, Melius... Ciceron. — 3 à 7, C.
Nous disons... sienne. — 8 à 22, B, et le fait... omnia. — 226, 11. — 21 à 29, B,
C'est... descouure. — 31 à 37, B^ Nous sçauons... vitœ. — 39 à 228, 3, B, Et pen-
dant... diffidens. — 14, B, de sagesse. — 21. —37 à 40, B, de qui... Xenophanes.
230, 16 à 21, B, Zenon... science. — 232, 10 à 234, 20, C, Pourquoy... croyent. —
232, 20 à 21, B, ad quamcumque... adhxrescunl. — 24 à 26, B, /Tôc... autres. — 30
à 33, B, Qu'iray-ie... ignorons. — 234, 1 à 7, B, S'il est... professeur. - 23 à 24, B,
Rien... faux. — 27, B, et suspension. — 236, B, non enim... voluit. — 7. — 14, B,
en règle et droicture. — 17 à 238, 2, B, Si n'est-il... humaines. — 11 à 14, C, C'est
vne... valons. — 12 à 13, C, Dominus... sunt. —24 à 37, Bjquam docli.. requiralis.
240, 4 à5, B, Et pourtant... escrits. —8. — 10 à 32, C, Oyez la... di.sciplines. —
10 à 18, B, Oyez la... nota. — 19. — 22 à 23, B, Clytomachus... estoit.— 31 à 37, B,
Cicero... disciplines. — 242, 4 à 9, B, De quelque... profuet-unt. — 10. — 9 à 31, B,
Le conducteur... d'autruy. —32 à 36, C, comme... autres. — 38. — 38 à 244, 20, B,
Et les reconciliateurs... matière. — 25 à 30, C, semblable... prouidentiœ. — 26. — 29
à 30, B, reuenant... prouidentiœ. — 35. — 35, B, et trouuent... sçauoir. — 246, 3.
— 7 à 8, B, Et volontiers... supposé. — 15 à 35, C, Satius... après. — 15 à 20, B,
Satius... salutaire. — 31. — 248, 2. — 7 à 9, B, pourueu... vi. — 15. — 19 à 39, B,
Platon... compte.
250, 5 à 7, B, A'^on lam... volidsse. — 22, B, soubs quelque nom. — 24 à 34, B, Ju-
piter... songes. — 36. — 39 à252, 20, B, Pythagoras... effect. — 21. — 42 à 256, 30, B.
Thaïes... inconsidérée. — 32. — 258, B, nos morts et sépultures. — 7 à 12, C, Quœpro-
cul...iracundias. — 9àl2,B, Formse... iracundias. — 13à 15, B, non-seulement... mi-
sère. — 16 à 25, C, Quid... vénération. — 19 à 25, B, Les ^Egyptiens... vénération.
260, 2 à 4, B, Si sont... mondaines. — 17. — 30, B, Tout... mortel. — 27 à 28, B.
et parfaitement... expei'ience. — 35 à 36, C, Hector... equo. — 40 à 41, C, Quod...
migrant. — 262, 4 à 8. — 25 à 26, C, Scilicet... toto. — 31 à 32, C, Inter... omnes. — 45
à264, 1,B, s'il... mortelle. — 13à 20, C, C'est... cognoissance. — 29à34. B, Comme...
d'or. — 33 à 266, 20, C, Sulmone... contente. — 1 à 17, B, Les Getes... malormn. — 25.
— 26 à 37, C, et de vouloir... occidissent. — 33 à 35. ^ 36 à 37, B, Quœ fuit... Occidis-
sent. — 38 à 268, 12, C, qui ne... prophète. — 266, 39 à 268, 3, B, et ne... peine. — 7
àl2,B, Et elle... prophète. — 13àl4,B,en la... l'embonpoinct. — 15à25,B, Tantus...
intulit. — 34 à 270, 2, B, Infirmum... cela.
270, 32. — 38 à 39, C, Terra)nque... innumerali. — 272, 4 à 5, C, €um... crescal. — 10
à 12, C, Quare... sether.— li à 19, B, que Platon... créateur. — 22à23, B, Epicurus...
dissemblables. — 27 à 29, B, Et au... Ceres.— 31 à42, C,Et y a... est ainsi. — 39 à 41,
des nations... noire. — 274, 6 à 8, B, Cela... ignorance. — 14. — 15 à 18, B, la neige...
Ou si. — 23 à 276, 3, C, Et non... vaine. — 274, 26 à 27, B, la mort... moment. —
32 à 276, B, Protagoras... vaine. — 3. — 16 à 22, C, Prenons... embourbez.— 27,
B, assurentque.— 35à36, C, Cette fantasie... balance. — 278, 6. — 32 à 36 B, Mi-
rum... similitude. —40. —41 à 280, 26, C, Et est... corps.
280, 1 à 26, B, Magna... corps. —28 à 292, 14, C, Voyez... familières. —280, 40 à
282.2. B, Quasi... faict. — 8, B, quand... trouue. — 9 à 13, B, L'homme... faire. —
VARIANTES (1595-88 et 80), LIV. [1, CH. XH. VOL. II. Da.lli
iO à 37, B. Nous sommes... bonté. — 39 à 284, 6, Los biens... compagnons. — 14 à
15, B, Profecto... camparant. —27 à 286, 11, B, Varro... langue. — 13 à 14, A, (le
lyon... espèce). — 19 à 25, B, D'où... humana. — 38 à 39, B, Tarn... natura. — 288,
12 à 13, B, pour nous... des leurs. — 18 à 22, B, Les Cauniens... territoire. — 24,
B, qui la peste. — 24 à 25, B, qui vne sorte... Deos. — 27 à 28, B, à chasque... Dieu
— 31 à 36, B, 0 sancte... vcnerandvs . — 37 à 39, B, qui loge... mio. — 42 à 290, 8,
B, Trois à... mauuais.
290, 11 à 18, B, L'homme... fallUur. — 20 à 23, B, Et ne... témérité. — 26 à 27.
B, s'enquiert... règlement.— 32 à 34, B, etvtile... receuoit : et. — 37 à 292, 14, B,
Socrates... familières. — 27 à 294, 10, C, et ranger... poétique. — 292, 27 à 29, B,
et ranger... Platon. — 35, B, et fanatiques folies. — 34 à 294, 10, B, le suis...
poétique. — 16 à 17. C, (et nostre... iustice). — 24 à 29, B, Platon... dire. — 296.
7 à 15, B, Et ce n'est... faillent. — 22 à 24, Car... plagas.— 27 à 32, B, Comme...
hommes. — 298, 5, B, à telle... basse. — 8. — 8 à 1 1. B, Omnia... homo est.
300, 15.-302,7 à 9, B, La persuasion... Platon. — 304, 11 à 21, C, non de... insi-
nuelse. — 11 à 16, B, non de... cognoistre. — 38 à39, C, HabUum...dicunt. — 306,
4 à6, B, Et après... Cicero. — 8 à 11, B, Heraclitus... essence. — 15 à 16, C, Vl
bona... valentis. — 18 à 19, C, Hic... mulcenl. — 24 à 29, B, Qua facie... ignorées. —
39 à 308, 15, B, Que craignons... Dieu.x. — 30 à 310, 2, B, Et lors... sage.
310, 0. — 6 à 9, B, Qui fagoteroit... modérées. — 17. — 28, B, et les falsifient. —
31, B, pour... enfans. — 33 à 312, 17, C, le conseillois... fortuit. — 1, B, et a tant
dict. — 4 à 5, B, Nihil... philosophoriim. — 8 à 17, B, Mes mœurs... fortuit. — 18.
— 33 à 34, B, Médium... lustrât. — 37 à 38, C, Cxlera... monetur.— 314, 33 à 3-5, C,
Siin... tenemus? — 37. — 41. — 316, 12à 14, C, Nam si... errai. — 30à33, B, Platon...
temporelles. — 36. — 318, 3 à 4, C, Gigni... mentem. — 10 à 11, C, Mentem... vide-
mus.— 15 à 16, C, Corpoream... laborat. — 25 à 27, C, Fis... vetieno.— 32, C, ac-
cablé. — 35 à 38, C, Vis morbi-.. vndœ. — 50 à 320, 2, C, Morbis... cadenli.
320, 4 H 11, B, non plus... première. — 12. — 25 à 28, C, Simul... decidere. —
26 à 28,B,Ce que... decidere . — '6^ k 40, iVona/io... lumière? — 41 à44,B, laquelle...
d'autres). — 322, 2, B, principalement. — 4 à 6, B, non plus... probantium.— 11.
— 13, B, comme dit Platon. — 16 à 25, B, Vn soing... volontiers. — 28 à 29, B.
Somnia... ancien. —324, 8 à 9, B, Perdam... reprobabo. — 22 à 33, B, Confessons. .
persuasione. —37 à 39, B, Laissons... linie. — 326, 7. — 7 à 32, B, Et luy... en luy.
— 328, 11, B, desnostres mesmes. — 32, C, iusques au bout. — 40 à 330, 5, B,
Car... terre.
330, 35 à 332, 8, B, Et, qui... impossible. — 17 à 30, C, 11 ne... vaisseau. — 22 à
30, B, l'ay veu... vaisseau. — 32 à 35, C, Tenez... scauezza. — 334, 6. — 9 à 10, B,
Et Platon... bestes. — 18 à 33, C, On le... tracent. — 28. — 30 à 33, B, Et n'y...
tracent. — 35. — 338, 9. — 25 à 26, C, Non polcsl... comprehendendi. — 33.
340, 10. — 27. — 35 à 36, B, Inler... inlerest. — 342, 8. — 344, 12 à 20, C, Quoy...
supernaturelle. — 36 à 40, C, Cleomones... fantasios. — 346, 1.— 7 à 8, C, Ce véné-
rable... iustice. — 348, 16 à 18, C, Vn mesmo... aggrcable. — 20 à 24, C, Il se...
l'allégresse. — 21. — 26. — 28 à 350, 16, C, En mes... doigt. — 348, 42.
350, 23, B, suiuant... Peripateticiens. — 28 à 38, B, Semper... politique. — 38. —
38 à 352, 3, C, et la prudence... présomption? — 9. — 9 à 14, B, ou bien... queat.
— 18. — 18 à 19, B, n'allant... emprunté. — 19. — 20. — 20. — 22 à 354, 5, B, N'y a...
incroyable? — 32 à 38, C, Autant... relinquit. —39. — 356,6 à 9, C, Ainsi... pro-
duites. — 7.- 19. — 20 à 21, B, par le... ai.xieu. — 24 à 25. —34. — 37. -358, 17
à 18, C, II ne... choses. — 39.
360, 5, C, c'estoit.... Antipodes. — 15. — 15 à 368, 19. C, et s'il... mescompte? —
360, 15 à 362. 11, B. et il... Sais. — 16 à 24, B, En vérité... choses. — 37, B, l'absti-
tincnce... viure. — 366, 30 à 35, B, Et plaga... valentes. — 368. 1 à 2, B, icy à la li-
berté, icy à la seruitude. — 8 à 10, B, disant... infertiles. — 18 à 19, B, et qu'en...
mescompte? — 27 à 36, C, Quid... vxor? — '30îi 'M, B, C'est pourquoi d'icelles. —37.
370, 5 à 14, C, Disons... nostres. — lia 14, B, Cleobis.... nostres. — 18, C, Virga...
sutit. — 23 à 29, C, Siconsilium... doubteux. — 32 à 34, B, duquel... disputât. — 372,
1, B, quia... douleur. — 3, C, de l'ancien Pythagoras. — 6, B, Aristote... n'admi-
rer. — 16 à 26, C, Combien... ce seroit. — 30, C, comme est... diuin. — 374, 4 à 19,
B, Et chez... paroUe. — 36. B, et témérité du sort. — 376. 20 à 24, C, Il est... incons-
Da.H2 ESSAIS DE MONTAIGNE.
tance. — 24, B, Nihil... art'is est. — 378, 10 à 17, B, Ses amis... des choulx. — 17
à 23, C, C'est vn... pacis. — 23. — *25 à 30, B, On preschoit... répliqua il. — 30 à
33, C, Indefuror... colit.
380, 17, B, Aux foibles esprits. — 13, C, Arcesilaus... le fust. — 19 à 26, B, Et ubs-
cœnas... excessiues. — 382, 7, B, Et la plus... obligation. — 8. — 10 à 19, B, A peine...
suiuy. — 384. 8 à 20, B, C'est comme... sa règle. — 2ô. — 386, 23 à 32, B, Pourtant...
Landit. —388, 13 à 20, B, Voyez... l'interprète. — 28 à 38, B, Les Cyrenayens...
cogitation.
390, 8, C, Via... menth. — 13, B, Et selon... sentiment. — 392, 2 à 4, C, An pote-
riinl... r^uince?jL —20, B, laquelle... conséquences. — 394, 11 à 21, B, Qui apprend...
tasté. — 396, 10, C, Quicqitid... videlur. — 15, C, Nec tamen... noli. — 21 à 24, B,Ti-
niagoras.... l'instrument. — 38 à 47, B, Ce conseil... l'impudence. — 42 à 398, 4, C,
Au cas... science. — 10 à 16, C, Extanlèsque... raplim. — 31 à 41, C, Quant à...
bouche. — 42 à 400, 9, B, Et Zenon... à moy,
400. — 402, 15, B, Vldespici... possit. — 20 à 22, C, Que Theophrastus... changei-.
— 25 à 27, B, Fit etiam... timoré. —42 à 404, 1, B, Ils mentent... à l'enuy. —5, C,
Multimodis... vigere. — 18 à 31, C, Ceux qui... dormir? — 25 à 31, B, Nous veil-
lons... dormir? —406, 18 à 21, C, Quelque... qualité? —2S,Lurida... Arquuli. —
41 à 408, 1, C, si nous... bina. — 10 à 15, Kl vulgo... colore. — 28.
410, 2 à 9, C, Ces personnes... desdaignables? — 14, C, VI cibus...ex se. — 24. —
28 à 32, B, Pourquoy... friandise. —34. — 414, 10 à 22, B, Estimant... grand cas.
— 20 à39, C, Epicharmus... autres. — 416, 2 à 5, C, Mutât... cogit. — 418, 23. —
25, B, Extraordinairement. — 28, B, C'est à... métamorphose.
420. — Ch. XIII. — 17 à 25, C, Prouehimur... auee nous. — 27, B, Tôt circa...
deos. — 29 à 35, B, Comment... qu'vn. — 422, 11 à 18, C, Et cette... actions. — 18.
— 18, B,.Xo7itanta... fiUgor.— 25, B, D'autant... dessein.— 33 à 35, C, Vidimus...
morti. — 424, 5, C, Impiger... coacta. — 19 à 22, B, Pendant.... gens. — 22 à 25,
C, Albucilla... Sicile. — 26 à 31, B, Et C. Fimbria... transperça. — 37, C, Si Ca?-
sar... — croire. — 426, 8 à 13, B, Il n'y a rien... cogitation. — 33 à 40, B, L'his-
toire... auancé.
430. — Ch. XIV. — 32. — 432. — Ch. XV. — 2. — 5, B, In œquo... amittendx. —
9. — 14, C,Si nunquam... parens. — 28 à 30, B, Combien... l'Amour? — 31, C, EUp
est... escorche. — 434, 6 à 12, C, Ceux de... à un autre. — 12 à 17, B, l'ay chassé...
deuant. — 21, C, Nisi...mea. — 26 à 35, C, La rigueur... heri. — 26, B, Pourquoy
inuenta... amants. — 43. — 37 à 436, 20, C, Pourquoy a... languissante. — 10. —
14. — 2-3 à 31, C, C'est vn... dommage. — 438, 2 à 5, C, Qu'ils... serpunt. — 8 à 14,
B, Les histoires... d'ailleurs. — 14 à 17, C, Il y a... hayes. — 17 à 440, 29, B, Fu-
rem... trente ans.
440. — Ch. XVI. — 442, 32 à 36, C, Le premier... fleurisse. — 40, C, Gloria... est.
— 446, 6 à 8, B, Aristote.. fuyr. — 22 à 448, 5, B, N'y va... suam. — 9, B, Pro-
fecto... obscurdtque. — 12 à 18, B, C'est le... longueur. — 19, B, Quasi... sil. — 28 à
34, B, Vera... particulier.
450, 4 — 17 à 22, Qui tient... nostrae. — 43 à 46, C, Virtus... nurse. — 452, 5, B,
\on... décore. — 9 à 13, C, 11 faut... d'inconstance, — 13 à 16, B, Est-ce... vniuer-
sos. — 16, C, quiconque... prise. — 17 à 22, B, Nil tam... laudetur. — 22 à 33, C,
NuU'art... vtile. — 33, B, Dédit... iuuarent. — 34 à 454, 4, C, Le marinier... dolos.
— 5 à 12, B, Paul ^mile... consentement. — 12 à 17, C, 11 y a... belle. — 27, B, en
particulier. — 31 à 36, C, Et qui... asseurez. — 456, 2 à 10, C, En celles... extra. —
24, B, à la.,, ensoy. — 27 à 29, B, Et quand... par fois. — 458, 1, C, surnom... An-
gleterre. — 6. — 7. — 10, C, Nunc... violse. — 22 à 23, C, Casus... aceruo. — 27 à 31,
B, Les fortunes... d'exemples. — 35, C, Ad nos... aura. — 37 à 460, 1, C, Les Lacé-
demoniens... mémoire.
460, 14, B, Et ce... demeurant. — 17, C, Quos... reco7ulit. — 30, B, rectè... est. — 38 à
462, 3, C, Si le peuple... l'entreprend. — 4 à 14, B, Et Platon... possunt. — 26 à 35,
B, Et l'authorité... d'Egypte. — 40, C, In ferrum... vitse. — 464. 4 à 7, C, vt enim... re-
fus. — 6, B, Ny. — 17 à"^19, B, Toute... conscience. — Ch. XVII. — 466, 16, B, Et de
qui... parlent. — 26, B, xXec id... fuit. — 37. — 42. — 468, 1, B, On peut... gloire.
— 2 à 9, C, le suis... n'oublions pas. —20 à470, 8, B, 11 me semble... Pareillement.
470. 9, B, en gros. — 18, B, qui voient.... ciel. — 34 à 472. 1, B, le me... teint.
VARIANTES (1595-88 et 80). LIV. II, Cil. XVII. VOL. II. Da.ll3
— 5. — IS. 15, est. — 19 à 474. 1, 15, Que nous n'auons... conceut. — (i, C, Puisqu'on...
soy-mesmes. —6 à lii, B, SpôcialemcMit... maintenir. — li"), C, Cùm... Uni. — 18, B,
saisirnj-. — 19. — 22, B, et souhaict. — 25. — 35 à 476, 1, B, Quand... Rabirius. —9
à 11, C, Les Princes... comptes. — 11. — 12 à 10, B, Mauuais... sagement. — 28, B,
sinon... inclination. — 30. — 34, B, Platon... langage. —"SG, C, lequable. — 39 à
41, C, Et si... Plutarque. — 478, 15 à 17, B, C'est... esfoiré. — 18. — 20 à 22, B,
Autant... abondant. — 21, B. Ouï... lean.
480, 7 à IL B, La secte... Nature. — 17 à 19, C, Agros... vigebanl. — 20, C, vn
[teu. — 21 à 33. B< C. Marius... liault. — 38 à 482, 2, C, Ipse... huminum. — 2, B,
Et Platon... république. — G, B, à vostre. — 7. — 11. — 17, C, et rondeur. — 17.
C, cil douceur. — 20, C, ny le poil releué. — 22. — 25, C, entre... moyennement.
— 31. C, pieça. — 32, C, Minuta tint... œtas. — 484, B', et ne ly... clerc. — 10, C, ny
trancher... vaille. — 11 à 13, B, ny equipper... cheuau.x. — 20, B, poùrquoy... on-
gles, et. — 23, C, TanH...aurum. — 25, B, Extrêmement oisiL.. soing. — 33 à .30,
B, (vne occasion... inquiétude). — 41. — 41 à 486, 7, B, Qui est... patience.— 10 à
14, B, ou, si l'en... poussif. — 32 à-35, C, l'ayme... apparences.— 32 à 488, 11, C,
A vn danger... souffrance. — 12, B,Dulna... mala.— 11 à 30, C, Aux euenements...
reproche. — 37 à 490, 10, C, Spem... Queste.
490, 11, B, Capienda... est. — 12 à 14, C, Et i'excuse... peut. — 14, B, point. — II,
C, voir... faute. —24, C, Turpe... f/enu.— 35, C, J\'unc... tousiours tout. —44 à 492,
8, B. Les marchans... bonilas. —9 à 12, B, grand... homme. [Le reste de la phrase
est modifié en conséquence par la substitution de la 1" personne à la 3" : mes ven-
geances, ma parole, ma foy]. — 10, C, que de plier... seruice. — 22, C, Par là...
manquer. — 26. — 20 à 28, B, Aristote... d'autruy. — 28 à 30, C, Apollonius...
vérité. — 30 à 37, B, C'est là... impremeditement. — 494, 3, si ce n'est... vérité.
— 10 à 12, B, Quo... quis probilatis. — 14, C, Comme... Tibère. — 17, C, Qui est...
men.songe. — 18 à 496, 1, B, Ceux qui... preiudice. — 2 à 4, C, l'aduoiie... ouuert.
— 1, B, comme ie suis. — 4 à 17, C, sans considération... l'euenement. — 17 à 19,
B, Aristippus... chacun. — 20, B, et misérable. — 26, B. mot à mot. — 28 à 33,
B, Mais ce... autheur. — 37 à 498, 31, C, Cecy que... dessein. — G, B, par fois.
500, 2 à 5, C, le diray... lettre. — 6 à 12, C, Messala... l'àme. — 7, B, Ce qu'on...
Trapezonce. — 13. — 14 à 17, C, Il m'est... conlinel. — 14, B, trois... parauant. —
15 à 17, B, et d'oublier... conlinel. — 26, C, les mots. — 26 à 34, C, Et suis... raison.
— 34 à 37, B, Ce n'est... reçoy. — 502, 5, C, et profondement. — 7, B,long. — 17,
B, si non... instruisables. — 34 à 37, C, moins... cliicn. —39, B, et que... vin. —
44. — 504, 4. — 5, B, Qu'on... non. — 31, C, Ne si... choisir. — 34 à 37, B, et le
philosophe... mesme. — 506, 9 à 11, B, La raison... baston. — 17 à 20, C,les mien-
nes... foibles.se. — 20, B, Ipsa... lubrica. — 508, 12, C, Nunquam... supersint. —
22 à 27, B, le fay... plaide. — 32 à 35, C'est vne... opaque. — 39, C, du courage.
— 39, C, corporelle. — 40.
510, 5 à 8, B, si ce n'est... le sien. — 9, C, et vne... nom. — 10. — 10 à 21, B, Et
puis... plaire. — 23, B, n'est-ce... veuë. — 512, 7, C, Nemo... descenderc. — 10, C,
quelle qu'elle... moy. — 13, C, elles sont... miennes. — 19 à 23, C, La recom-
mandation... mœurs.— 23 à 26, Omnino... tuam. — 514, 3 à 10, C, Voire... d'hon-
neur. — 10, B, Mon... non. — 11 à 13, C, Et ne... ce soit. — 13 à 23, B, le me...
vertu. — 22, C, ou vne... excellence. — 34. — 516, C, qu'en... piastre. — 518, B,
La moins... sapit. — 24 à 32, C, Les vies... temps. — 32 à 520, 15, B, Comme...
considération.
520. — Ch. XVIII.- 522,4, B, Caton. — 14. — 13 à 15, C, Non equidem... loqui-
mur. — 21, C, le iuge... nihilité. — 22, B, le ne... rougis. — 29. — 30. — 31, B,
Palerna... affeclus. — 37. — 37, B, peut estre... marché. — 40, C, Et taxas...
lunicas. — 524, 1 à 526, 2, B, Et quand... seruir. — 7, B, et le premier... republique.
27, à 30, C, Seroit-ce... science? — 4 à 11, C, Certaines... prononcée. — Ch. XIX.
530. — 532, 26. — 534, 29 à 35, B, Ce langage... attache. [Ce passage légèrement
modifié existe dans l'édition de 1580, après le mot sang, II, 532, 21]. — 536. —
Ch. XX. — 32. — 538, 1 à 4, B, Ny la vertu... Aristippique. — 6 à 13, C, Medio...
consubstantialité. — 13 à 1.5, B, La profonde... masche. — 19 à 23, B, Le travail...
queue. — 23 à 31, C, Metrodorus... voluplas. — 32 à 36, B, Et dit... aigres. — 36 à
41, C, Nature... larmes. — 41 à 540, 7, B, Nullum... d'enfondrer.
ESS.'VIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 8
Da.H4 ESSAIS DE MONTAIGNE.
540, 7 à 15, C, Quand ie... bigarrure. — 12, B, (et il y escoutoit de près). — 20 à
35, C, Il est... diuerses. — 35, B, contraires. — 35 à 542, 6, B, volulantibus... vérité.
— 6 à 18, C, Qui en... conte. — Ch. XXI. — 544, 1 à 37, B, Quand quelqu'vn...
présence. — 546, 8 à 550, 10, B, C'est vne. .. sa main.
550. — Ch. XXII. — 11 à 13, C, le n'ay... long temps. — 18, B, Et disent... grues.
— 26, B, et ne se... gué. — 39 à 552, 4, B, En la... course. — 4 à 17, C, L'inuen-
tion... vn pas. — 17 à 23, B, l'entends... vsage. — Ch. XXIII. — 554, 32, C, Et...
incumbit. — 556, 14, C, Ail... heris. — 33 à 40, C, Quid... armis. —558, 12 à 17,
C. Les filles... rumpi. — 20 à 26, C, iusques... viriles. — Ch. XXIV.
560, 13. — 18à 20, C. T<}1... donnoit. — 21 à 39, B, Si en... immortels. — 39 à 41,
C, Tous les... estrangers. — 562, 6 à 10, B, 11 est... acquis. — Ch. XXV. — 564, 13
à 18, B, De tout... race. — 566. — Ch. XXVI. - 26. — 568. 15. — 18, B, Les Athé-
niens... marine. — 19, C, En Lacedemone... pouce. — Ch. XXVII. — 22 à 30, C, et
si ay... e.xtremitez ?
570. — 11, C, El lupus... fera est. — 20 à 36, C, Et tout... repentance. — 40 à 42,
B, Et luy... insensiblement. — 572, 3 à 5, C, C'est vne... d'entreprinse. — 7 à 16,
B, Ce n'est... les bras. — 19. —20 à 31, B, Et cherchons... soy pas. —32. — 36 à
580, 12, C'est aussi... thème. — 574, 4, B, Quum in... esset. — 7, B, et pour... combat.
— 34, B, trois cents... Curiatiens. — 576, 37, B, et l'exerçons... sçauoir. — 33 à 37,
B, vtile... expérience. — 578, 22, B, Cousus. — 25 à 30, B, Escrime... présent. —
38 à 580, 11, B, Aussi y... confèrent point.
580, 17, B, Doncq. — 22 à 582, 34, B, Les premières... maistres. — 584, 12, B, trois
... auoit. — 14 à 586, 3, B, Chalcondyle... suitte. — Ch. XXVIII. — 5.-18 à 21,
B, Comme on... gaigna. — 24, C, Imponit... honestis. — 25 à 28, C, Et Philopœ-
men... employer. — 588, 7 à 9, C, Tu seconda... domos. — 22, B, On peut... abé-
cédaire. — 24, C, Diuersos... conueniunt. — 40 à 590, 2, B, La nuict... lut vn.
590. — Ch. XXIX. — 24 à 26, B, sauf... gros. — 592, 19, B, qu'on le puisse. —
594. 23 à 27, C, l'bi... viris. — 28 à 596, 24, B, Vn homme... enseuelis. — 34 à 37,
C, Et n'estoit... terrestre. — 598, 42 à 600, 29, B, Vn jeune... espaule.
600, 29 à 602, 25, C, Il n'est... patience. — 25 à 36, B, Les Assassins... d'œuure.
— 604. — Ch. XXX. —33, Vt quum... reuocentur. — 34 à 606, 3, C, le vien... fem-
mes. — 3 à 14, B, Ce que... apporte. — Ch. XXXI. — 19 à 23, B, La plus part....
l'enfance. — 608, 3 à 7, C, liabie... visage. — 12 à 14, C, Gralum... agendis. — 22
à 31, C, au trauers... soif. — 40.
610, 19. — 30. — 28 à 31, C, Car les... proposer. — 612, 20. — Qi\, 5 à 618, 27,
C, Ceux qui... le moins. — 616, 7. — 12, B, Omnia... subsidunt.
620. — Ch. XXXII. — 2, B, et à mon... despouilles. — 15. — 622, 23. — 624, B,
L'histoire... miracle. — 32 à 40, C, Vn paysan... s'y tua. — 40 à 626, 10, B, Epi-
charis... contre luy? — 27, C, (comme... auant. — 31 à 628, 2, C, l'ay cogneu...
fermeté. — 5, B, ce que... Bodin. — 7, B ou ne voudroient. — 7 à 11, B, Il semble
... insupportable! — 14.— 18 à 21, B desquels... se monter.
630. - 29. - 632. — Ch. XXXIII. — 634, 12. — 28, C, s'il en faut... peinture. -
636. 10 à 638, 2, B, Jle ressouuenant... Cœsar.
640, 2. C, A ce que... sobriété. — 642, 28. — 644, 11 à 14, C, Qualis... ebur. —
16. — 23 à 646, 13, B pour en... force. — Ch. XXXIV. — 16, B, Scipion... Xeno-
phon.
650. — 1. — 8, C, Rheni... sequal. — 10. — 13. — 652, 3. — 19 à 25, Ocior... se-
cum. — 37 à 654, 2, C, 11 fit... arlus. — 7 à 10, C, Si... agris. — 36, C, et disoit-il...
entreprises. — 656, 20. — 21 à 35, B, Suiuant... militaire. —658. 4.
660, 14 à 18, B, La passion... prenoient. — 37. —662. — Ch. XXXV. — 22 à 27,
C, La touche... perdus. — 2' à 664, 1, B, cherchent... morts. — 1 à 10, C, La vie...
la vie. — 10 à 12, B, Est-ce... suis plus? — 13 à 30, C, S'il v a... conséquence. —
666, 26. - 668, 29. — 44.
670, 2. — 672, 18. — 20. - 37. - 674, 15. — 20, B, excellens... vsage.
VARIANTES (189b-88 et 80\ I.IV. II, CH. XXXVI. VOL. III. Da.Ii:i
TROISIEME VOLUME.
10. - Liv. II, Ch. XXXVI. - 10. C, Taie-., arliculis. — 21. - 24, B, en quelque...
ce soit. — 12, 17. — 24. — 21, B, Que n'estoit... philosophes. — 14, 20, C, Impet-
lens... ruina. — 23 à 27, C, et en vne... l'homme. — 32, C, iustice... vaincus. —
34. — 34 à 16, 14, C, ouj- bien... des hommes. — o, B, et a esté... vices. — 15. —
15 à 19, C, ce port... resoluU. — 21 à 25, C, et qu'encore... que ce soit. — 25 à 28,
B, et qu'encores... priuilege. — 30, C, Et il ne... d'Alexandre. — 32 à 41, C, Ce
furent... du monde. — 18, 13, B, facilement. — 16 à 18, B, Car il... persuasif.'—
20. — 20à22, B, qui seule... ensemble. — 23 à 20, C, En cestuv-ci... fortuite. — 20
à 20, 15, B, L'ancienneté... Epaminondas.
20. 10 à 20, C, Le plus... action. — 20. — 25 à 22, 2, B, Et son... par luv. —
Ch. XXXVII. — 8, B, ouy a... oster. — 30. — 30 à 24, 1, B, Qu'à celuy... vsures. —
7 à 20, B, Oyi'z... maux. — 34, B, comme... emploj'ons. —26, 20. — 21 à 28, B,
Qu'elle condone... semble. — 29. — 3tî, B, capable... mesure. — 35. — 37. — 28, 4
à 9, B, Ne commandons... vehemenllor. — 12. — 13, B, et me... brailler. — 19. —
19 à 32, B, comme celuy-là... estrangement. — 33, B, lors que... ronger. — 34. — 30.
— 38 à 40, C, Laborum... peregi.
30, 8. — 28 à 30, C, et comme... ressemblance. — 32, 9, C, le troisiesme... nais-
sance. — 14, C, seul iusques... mère. — 41, B, asteure. —41, B, sain. — 34, 10. —
13 à 19, C, Le dernier... Sainct Michel. — 18 à 31, C, Et suyuant... grandes. — 35.
— 40. — 36, 2. — 0. — 6 à 18, C, l'entends... limite. — 18 à 20, B, Comme nous...
l'estime. — 37. —38, 20 à 24, B, Et les Lybiens... rheume. — 30 à 40, 24, C, Et si
ne ... estomach.
40, 1 à 24, B, C'est du... estomach. — 17 à 19, Vn mauuais... autrefois. — 33. — 37.
— 42, 21 à 23, C, Platon... promesses. — 27. — 44, 2. — 3 à 0, C, Nam... vndas. —
8 à 10, C, Vn médecin... de gens. — 15 à 18, B, Quoy qu'en... cassam. — 20. — 24,
B, et incognu. — 48, 9. — 25. — 30.
50, 1 à 7, ^sope... santé. — 23. — 52, 14. — 15. — 24. — 54, 5 à 25, B, Comme
nous... dissentieuses. — 56, 18 à 60, 14, C, 11 est bon... cet art. [Voir aux notes].
60. — 62, 2. — 4. — 40. — 64, 15. — 33. — 37 à 66, G, C, l'entens... goust. — 14. —
10 à 20, B, La plus part... patience. — 23 à 27, B, Les Babyloniens... autrement. —
32 à 35, B, Ce qu'Homère... croire.
70, 14 à 23, C, Quand... procuration. — 23, B, déclarez. — 72, 10 à 18, C, L'hu-
meur... oreilles. — 13 à 23, B, Si i'estoy... oreilles. — 26.-28 à 36, B, Qui a...
seruist. — 74. 21. — 21. — 76,6. — 32, B, et plus... formes. — 37.
LIVRE TROISIÈME.
78. - Ch. I.
80, 24, B, et qu'on massacre. — 82, 21, B. en ce. — 27 à 29, B, le regarde... bon gré.
— 34, B, Vtatur...potest. —84, 7. — 17 à 25, B, Ea non... nécessairement. —88, 4 à
6, B, Vn parler... l'amour. — 21 à 24, B, Et eux... la leur. — 33, B, à cette heure.
90, 29, B, Id maxime... maxime. — 36, B, spéciale, nationale. — 37, B, Veri...
vlimur. — 92, B, Ex... exercenlur. — 94, 14 à 16, B, Si la... trahison. — 18. — 20,
B, par après. — 21, B, vn seruage et. — 96, 10 à 20, B, L'esclaue... chiens. — 30 à
33, B, loint... menées. — 98, 7 à 20, B, Quand le... homicide. — 28, B, sed... per-
iurio. — 30 à 100, 8, B, Quand il... iuste.
100, 13 à 102, 31, B, Timoleon... obligation. — 104, 3, B, ou ses complices. —
16, B, bien. — 18, B, toute. — 22, B, et la... innocence. —31, B, qu'il y... mesmes.
— 33. B. manenle... iuris. — 38, B, de son Roy, ny. — 39, B, .Yon enim... parentes.
— 106, 19. B, et qu'elle... chacun. — 21, Omnia... apta. — 24. — Ch. II. — 108, 24
à 29, B, Les autheurs... à soy.
110, 6 à 8, B, ne pénétra... suittes : et. — 18 à 21, B, Qui a vn... mesme. — 31
à 34, B, et que ma... homme. — 37. — 112, 5, B, La malice... empoisonne. — 25, B,
et apprinst. — 33 à 114, 10, B, signamment... mode. — 20. — 20 à 22, B, Tuo
libi... omnia. —27, B, et ancrez. — 116, 17 à 27, B, Nul a... quitte. — 118, 2 à 4,
Da.116 ESSAIS DE MONTAIGNE.
B, Et les... magistrat. — 5 à 7, B. La plus... gloire. — 15 à 'M, B, La grandeur...
viure.
420. 19, B, Nature... vsage. — 25. —26, B, à bon marché. — 124. 16, B, ou
péchez de profession. — 17. —21 à 27, B, le ne... office. — 32, B, ny d'interrup-
tion. — 126, 33 à 128.5, La force... limites. — 6. — 17. — 18 à 130, 1, B, le n'ay...
gariement.
130, 11. B, N^ec tam... sil. — 21, B, Moy... trouue que. — 24 à 27, B, Et trouue...
spirituelle. — 30. — 34. — 34 à 132, 32, B, Misérable... douloureuses. — 35. — 134,
20 à 24, A voir... accoustumee. — 26. — 136. — Ch. III. — 5 à 7, B, Yoyla... age-
ret. — 16, R, bandée et. — 24, B, Les liures... estude. — 27, B, se range... forti-
fie. — 31. — 31 à 138, 11, B, Le méditer... memoyre. — 16. — 19. — 29, B*-et
toute... commune.
140, 23. — 24. — 142, 4 à 10, B. Et le conseil... équitables. — 144, 11, B, de Cap-
sula tolœ. — 146, 7, B, et non... affaires. — 148, 16. — 22, B, belles et. — 22. —
22 à 23, B, nam... habemus.
150, 8 à 15, B, qui ne... vne qui. —22 à 25, B, Neque... aymons. — 152, 6 à 8, B, de
la santé... preambulaires. — 24. — 24 à 29, B, elle est... deux ans. — 156, 3 à 38,
B, Elle est... estre. — 158, 3, B, le ieu et le passetemps. —7.— 8 à 10, B, non pour...
au delà. — Ch. IV.
160, 14. — 17. — 19 à 26, B, Ny n'allay... Cicero. — 34 à 162, 3. B, A l'aduenture...
histoires. — 164, 6 à 8. B, Abducendus... est. — 19, B, et si dru... discours. — 166,
3 à 12, B, Subrius... subiect. ->- 18. — 21 à 27, B. Beaucoup... destiné. — 168, 5 à
9, B, Xenophon... teste. — 10 à 15, C, Omnes... dolorum. — 17 à 26, B. Voire...
hommes.
170, 30 à 32, B, et suiuant... d'icelles. — 172, 8. — 8, B, Cela c'est... chausse. —
3 à 174, 10, B, L'opiniastreté... m'attendrit. — 12 à 16, B, c'est vne... iambe. — 33
à 176, 5, B, Quintilian... douleur. — 11 à 19, B, De bien... mort. — 178, 1 à 5, B,
Quelles grimaces... persécute? — Ch. V. — 31, B, dit-on.
180, 23. — 27. — 34 à 40, B, Platon... d'entre eu.x. — 182, 14 à 17, B, le ne ... auc-
lori. — 30 à 32, B, Sibi arma... tesseras. — 41, B, in f'ragili... est. — 184, 11. —
19. — 26 à 37. B, Noz maistres... contraire. — 186, 6, Tristèmque... arrogantiam. —
8 à 11, B, le croy... rire. — 12 à 18, B, le sçay... sentire. — 29 à 188, 9, B, Qui
s'oblige roit... confesser. — 18, B, luy. — 37 à 1^, 4, B, ny à la malice... blanchie.
190. 7, B, encore. — 22 à 24, B, Socrates... disent. — 31 à 33, B, On me pour-
roit... sottise. — 192. 8 à 22, B, Car il ... vieillesse.— 23, B, ses vertus... moindres.
196. 21. — 198, 4 à 26, B, De vray... fortune.
200, 9 à 11. B, Socrates... repentira. — 202, 10. — 11, B, c'est trahison... s'es-
pouser. — 20, B, Tel valet... pourtant. — 32 à36, B, Et iusques... teste. — »)4,6. —
10. — 14, B, Pour fuir... Platon. — 206, 4. — 14 à 16, B, considerans... coniugale.
— 16, B, dis-ie. — 208, 3, B, Si c'est... vefues.
210, 3, B, Seroit-cc... autresfois?— 22. — 30 à 212, 2, B, De quel... volupté. —5.
— 7, B, Nimirum... extinguitur. — 35 à 214, 3, B, 11 me... pied. — 5 à 6, B, suy-
uant... corpora. — 14à22, B, Les Dieux... matrice. — 27 à 30, B,Et tel... vsage.—
33 à 216, 3, B, Que .sçait-on... à cela. — 4 à 12, B, Et quoy... yeux. — 14 à 22, B,
Les Lacedemoniennes... estât. — 30 à 218, 3, B, Inique... cause. — 24, B, DiaboH...
lerosme.
220, 5 à 13, B, Car cette... chasteté. — 222. 11. — 40. — 224, 9, B, outre... ré-
publiques. — 19 à 21, B, c'est des... remède. — 226. 6. — 10 à 12, B, Les femmes...
couuertement. — 228, 5, B, si cuysant et. — 24, B, d'vn visage sérieux.
230, 2 à 6, B, II est... l'a tuée. — 24 à 35, B, Mais... Mecenas? — 232, 10 à 16, B,
Phedon... polices. — 234, 23, B, Chacun... vicissitude. — 31 à 36, B, Les aigreurs..^
en sent. — 236, 10 à 15, B, Le Sénat... très-difficiles. — 27. — 238, 6. — 13, B, et
qui... l'incitast?
240, 7, B, Contexlm... occupati. — 14, B, Peclus... facil. — 24, B, Elles... disent.
— 242, 15, maniant et. — 244, 7 à 11, B, Et auroy... chantres. — 16, B, ie ne...
aile. — 31 à 33, B, tu te... feinte. — 246, 4, B, A Paris... Montaigne. — 11 à 27, B,
Imitation... l'air. — 248, 20. — 21 à 25, B, en vn... beauté. — 30, B, qu'on ayt...
ensemble.
250, 4. — 15 à 17, B, Ceux qui... deuantiere. — 31, B, Sommes... faict? — 252,
VARIANTES (1395-88 et 80). LIV. III, CH. V. VOL. III Da.ll7
3 à 11, B, (à cette... sexe. — 1-2. — IZ à 15, R, Pour le... peut. — 18 à 21, B, Les
Athéniens... ensemble. — -22. — 23. — 28 à 34, B, En l'empire... euipirement. —
35, B, à qui... mal-heur?— 254, 5, B, Il en... adorées. — 7, B, dangereux... desre-
glement. — 10. — 13, B, Trouues... fasche. — 19, B, incertaines. — 20, B, Les or-
donnances... point. — 256, 35 à 258, 2, B, Et Thrasonidez... paissoit. — 21. — 31.
— 33 à 260, 1, B. Ne semble... songe?
260, 32. — 262, 3 à 5, B. Et ont... resnes. — 9. — 10, B, pages. — 19, B, de soy.
— 22. — 23 à 25, B, C'est à ... guerre. — 27, B, et à nous aussi — 29 ta 31, B, Car,
comme... entrer. — 264, 1 à 3, B, Platon... tenants. — 3. — 14, B, Patl nalœ. — 17
à 33. B, Il faut... Princesse. — 266, 5. — 15. — 15 à 21, B, leanne... abusée. — 24
à 27, B, Platon... seulement. — 268, 5. — 13 à 16, B, Et admire... ieunesse. — 36 à
272, 4, B, et d'vne... Suiuons.
270. — 272, 10, B, Il n'y... volontaires. — 274, 2. — 7 à 15, B, l'ay... difficulté. —
17, B, à nos gens. — 33, B, L'insuffisance... meslouable. —276, 2, B, Nullum... est.
— 19. — 23. — 31. — 40. — 41, B, Pourquoy... chose. — 278, 4. — 12. — 29 à 280,
3, B, En pareil... corps?
280, 4. — 7, B, la grâce. — 10 à 12, B, me remettroit... à soy. — 14, B, et le;.,
santé. — 17. — 17, B, et la... la vie. — 33 à 39, B, Et ce... frais. — 282, 3 à 5, B,
En vérité... fait. — 6. — 14, B, ou à la... suiue. — 19 à 23, B, Xenophon... informe.
— 29 à 36, B, Et entre... lissée. — 284, 1 à 4, B, Et la... Harmodiens. — 9 à' 12, B,
Et Marguerite... bonnes. — 16, B, Amor... nescit. — 20. — 30. — 31 à 286, 1, B,
achetant... à vno. — 16 à 20, Platon... nostre. — Ch. VI. — 288, 19, B, Comme...
sucrurrerel. — 27, B, sinon... toutesfois.
290, 7, B, Quo... est. — 18, B, ressoudre et. — 24 à 26. B, Epicurus... sage. —
26, B,me..— 292. 9 à 32, Si l'en... bœufs. — 294, 12 à 16, B,Le conseil... mémoire.
— 24 à 296, 3, B, Et a l'on... seruice. — JO. — 17 à 22, B, La iurisdiction... versa-
tur. — 29 à 32, B, Et son... libéraux. — 39. B, il faut... respandre. — 298, 10 à 12,
B, Quo in... possis? — 15. — 29 à 300, 18, B, Comment... Princes.
300, 24, B, principalement. — 25 à 31, B, Pecitniarum... coff're. — 304, 24 à 31,
B, Et la... formarum. — 32, B, par rapport. — 44, B, multiplication et. — 308, .'38,
B, et boucliers de bois.
310.-314, 8. B, etiouyr... reserré. — 35. — 316, 1, B, si barbares. —4. — 12. —24.
320. — Ch. VIL — 322, 30 à 34, B, Et ay... aysee. — 324, 1 à 18, B, Mais si... par-
tis. — 19 à 25, H, Otanez... commande. — 326, 38, B, s'enialouser.
330. — Ch. VIII. — 17. — 17 à 20, B, De les condamner... faute. — 22, B, et incor-
rigibles. — 332, 5. — 20. — 21 à 24, B, le me... inuincibles. — 336, 12 à 15, B, Elle
n'est... polesl. — 17.-21. — 26 à 338, 12, B, Etpourueu... rabillent. — 32, B, par trop.
— 26 à 33, B, Ce n'est... dits. — 37 à 340, 10, B, Il est... nays.
340, 18. — 20. — 22 à 24, B, ou sur... contention. — 29 à 31, B, Cet autre... sien.
— 342, 3, B, Xihil... lilleris. — 5, B, A'ec ad... di/ferendum. — 27, B, sub... latentes.
— 30. — 344, 4 à 10, B, Il m'est... exercer. — 16, B, Le monde... inquisition. —
22 à 26, Et tous... l'imite. — 346, 12 à 14, B, Mison... respondit-il. — 16 à 19, B, Si
ie... altération. — 24, B, Ce que... sain. — 26 à 31, B, Non seulement... exemples.
— 32, B, parceluy qui l'inuenta. — 33. — 34 à 348, 26, B, Nos yeux... conscience.
350, 20 à 23, B, Comme... amas. —352, 15 à 17, B, Et les... estuyee. — 354, 3, B,
Principis... suos. — 15 à 19, B, Les Carthaginois... bon heur. — 356, 4. — 25, B, et
casuelles. — .34, B, Et y... subtils. — 36, B, Vt qulsque... dicimus.
360, 18, B, Qu'on... moy-mesme. — 362, 2 à 20, B, Qu'ils... sots. — 364, 3, B, Le
dogme... ailleurs. — 5, B, Mais icy. — 10 à 16, B, Et pouuons... institution. — 22,
B, Mon^humeur... principians. — 36 à 366, 1, B, L'obstination... l'asne. —8, B, ny
moins... Lycurgus. — 25, B, royal... s'esbatant. —368, 10, B,etle deuancer. — 31, B,
Et Seneque... potest.
370, 18. — 18 à 25, B, Et me... longueur. — 28. — 374, 1. — 5 à 12, B, l'ose...
saoul. — 30 à 35, B, et l'autre... antiquité. — 376, 4, B, et certaine... oreilles. — 8.
— Ch. IX. - 378, 37 à 380, 2, B, C'est à... vie. -
380, 6, B, et iette... coignee. — 20, B, Comme si... mauuaise. — 23, B, la fc^ueur...
roydit. — 382, 28. B, ie ne pretens... et que. — 24, B, au demeurant. — 36, B, Non
.Tstimatione... modus. — 384, 2 à 22, B, Les voyages... richesses. — 32 à 34, B, Et
les... cacher. — 35. — 386, I, B, et graisles. — 3, B, la tourbe... soit. — 6 à 10. —
Dans ESSAIS DE MONTAIGNE.
12, B. nemo... impellL — 17 à 20, B, Les inconuenients... inséparables. — 42. B,
Diogenes... fait-il. — 388, 8 à 11. R, Et accuse... main. — 18, B, Elles sont... ag-
greables. — 24, B, le nom... m'abillo. — 30 à 33, B, Nous... l'homme.
390, B, vne fois. — 2, B, comme luy. — 3. — 3 à 5, C, Fruclus... conferlur. — 9,
B, et Platon... abstenir. — 24, B, MuUi... fecerunl. — 31, B, de cette... larrecin. —
392. 2 à 4. La portion... iniure. — 12. — 12 à IH. B, Que ne... auachir. — 23, B,
Seruitus... suo. — 25, B. et cures... maison. — 31 à 33, B, Vne rené... eschec. —
394, 4 à 7, B, Cela... fascheu.x. — 22 à 27, B, l'en parle... iniustice. — 398, 23 à 26,
B, V'arro... nature.
400, 15, B, non tam... cupidi. — 20 à 402, 22, B, La fin... inexpérimenté. — 35 à
39, B, C'est comme... peuples. — 42. — 43 à 404, 2, B, C'est nostre... dessoubs. —
15 à 18, B, (et me... escheuës). — 406, 28 à 32, B, Il semble... craintes. — 41 à 408,
3, B, Et l'vsage... vniuerselles. — 34, B, d'accent... visage. — 38 à 410, 3, B, et
chose... expectatio.
410, 10, B, Simptîciora... décent. —24 à 33, B, Mon... aage. — 412, 2. — 3, B. qui
furent... vingts. — 4 à 16, B, Moy à... qu'autre. — 22. — 414, 15 à 17, B, Et tels...
balance. — 17. — 416, 5 à 7, B. la libre... condonons. — 11, B, par recompense ny.
— 27 à 418, 2, B, le suis... propositions. — 6, B, Hoc... voluntarium. — 17. — 21,
B, à faire... afl'ection. — 23. — 23, B, Est prudentis... beneuotenlise . — '.¥).
420, 6. — 9, B, me donnent... rien. —13 à 16, B, Combien... acheue. — 17, B, fn
me... mihi. — 23, B, et en courage... fortune. — 25 à 33, B, Eleus... estranger. —
34. — 36. — 36 à 422, 37, B, le me... chacun. — 424, 1, B, aussi... Aristote. — 7 à
14, B, Cyrus... amys. — 29. — 426, 9 à 11, B, Ils disent... longue. — 24 à 32, B,Les
voleurs... de peu. — 428, 19. — 31 à 430, 11, B, Ce que... iugement.
430, 15, B, fantasies et vsances. — 24 à 27, le voudroy... Xenophon. — 432, 21
à 24, B, Qu'on... œconomique. — 30 à 32, B, 11 n'aduiendra... quitte. — 434, 4.-5
à 8, Ces interruptions... party. — 16 à 22, B, Elle embrasse... occasion. — 436, 1,
B, Rerum... finium. — 7 à 10, B, ou comme... besoing est. — 39 à 438, 5. B, leune...
soi.xante. — 8 à 11, B, et me... course.
440, 35 à 442, 6, B, Qui se... femmes. — 444, 2 à 12, B, l'embrasseroy... l'iniure.
— 16 à 22, B, le me... quittée. — 29 à 33, B, Plaisante... prœcordia. — 37. — 446,
1 à 3, B, Si estimons... hideuses. — 6 à 9, B, Pourtant... pourroit. — 24. — 24 à
30, B, La décrépitude... compagnie. — 448, 16 à 21, B, Il escoule... estât.
450, 4. — 24, B, Tant... l'effect. — 35. — 442, 8 à 25, B, Mon... par fois. — 454,
12 à 16, B, Quand... d'estrangers. — 456, 13. — 13, B, extrême. — 18 à 25, B, Si
cum... vita. — 36 à 458, 1, B, La majesté... pompe. — 14, B, Nulla... composuil. —
26. — 38, B, sans... particulière.
460, 7, B, Dominus... sunl. — 14, B, Sic est... sequamur. — 23 à 26, B, Celle à...
Porcie. — 462, 7, B, Et Xenophon... Aristippique. — 14 à 18, B, Antisthenes...
nature. — 19 à 21, B, Les bons... appétit. — 27, B, vniuerselle. — 40, B, et que...
foiter. — 464, 5 à 10, B, L'homme... pouuons pas. — 19 à 25, B, Mes mœurs... de
luy. — 466, 9 à 16, B, Platon... à soy. — 25 à 27, B, La liberté... mestier là. — 32,
B, et faicts...— effects. — 36 à 43, B, letrouue... exemple. — 468, 5. — suyuent...
promesse. *
470, 24 à 28, B, l'ay... sembler. — 30, B, l'Andria... ceux cy. — 31 à 472, 4, B,
C'est vn... serré. — 5. B, mon stjie... mesme. — 7, B, disent... exemples. — 9, B,
■ et ie la... vers. — 12 à 18, R, Le poète... Dieux. — 24 à 27, B, Nifiil... ie dy. —
36 à 474, 5, B, Par ce... discordantes. — 9. — 29. — 476, 7 à 13, B, Est ce... poni-
mus. — 16, B, Ego... assurgo. — 32, B, Laudandis... ruinis. — 33, B, V't palam...
nnlurae. — 478. 26, B, Bona... semina. — 34, B, particulièrement.
480. — 484. — Ch. X. — 15 à 17, B, On se... deux. — 486, 21 à 26, B, In negoliis
... dignité. — 488, 2, B, et le... enfoncer. — 18. — 21.
490, 10 à 15, B, La vérité... errent. — 25 à 28, B. faulce... amitié. — 36, B, Qui
ne... esse. — 38. — 492, 25, B, et me... a moy. — 32, B, .Maie... Impetus. — 494, 5 à
7, B, Non seulement... force. — 17. — 25, B, Ses pertes... triomphe. — 30, B, et
au desordre. — 496, 9 à 14, B, Nam si;., point. — 11 à 13, B. Suf'ficif... Clean-
thes. — 29, B, ce qui... me manque. — 30. — 31. — 498. 8. — 8 à 26, B. La fin. .
l'issue.
500, 9, B, C'est... poictrine. — 31. — 502, 1 à 4. B, Ils adorent... moy. — 5. B.
VARIAiNTES (1595-88 et 80). LIV. III, CH. X. VOL. III. Da.H9
Neque... gero. — 10 à 17, B, C'est qu'ils... cnrpebanl. — 18 à 504, 23, B, le me...
contraires. — 506, 2, B, aiiec... appétit. —25 à 29, B, Pareillement... dissocia-
tion. — 34, B, qui n'est... consolation. — 39, B, Melius... desinent. — 508, 18 à 22,
B, Zenon... tumeurs. — 23. — 25 à 30, B, Et son... que luy, — 37 à 510, 8, B,
Ceux qui... iuste.
510. 19. ^ 28 à 34, B, Qui n'arreste... consislendi. — 43 à 512, 11, C, Coniœnit...
droicts. — 27, B, Les poètes... sang. — 35, B, De combien... sortir. — 514, 9 à 22,
B, Pourtant... raison. — 28, B, d'y tenir ferme. — 30, B, Entreprenez... ardam-
ment. — 516, 22, Excindunlur... temperanlur. — 518, 8, B, Cùm... quielus. — 24.
520, 9. B, Neque... cfferentem. — 14. — 31 à 33, B, Alcibiades... condition. —
522, 23 à 26, B. Ceu.x qui... siècle. — 32, Quœ est... peti. — 524, 5, B, Mihi...
monde. — 10 à 12, B, L'abstinence... espace. — 36. — 526. — Ch. XI. — 10, B,
obscure et obtuse. — 33, B, Ils passent... conséquences. — 528, 2. — 2 à 13, B,
Plaisans... coustume. — 30. — 32, B, lia... committere.
530, 7 à 12, B, et vont... particulière. — 24, B, ou par... narration. — 30 à 32,
B, La parole... l'hyperbole. — 37, Quasi... lurba. — 532, 16, B, Miramur... fallen-
lia. — 534, 22, B, ou pour dire... s'engendrent. — 24, B, et sommes... réfuter. —
35, B, enquestente... resolutiue. — 39 à 41, B, Iris... bout. — 43, B, Ignorance...
science. — 538, 2, B, Videanlur... modo. — 30, B, au moins.
540, 8, B, Captisque... visa. — 14, B, l'expérience et. — 18 à 24, B, On recite...
. iustice. — 29 à 33, B, Car en ce... nesciam. — 38. — 546. — Ch. XII. — 14. — 16,
B, Il n'a... maisons. — 20, B, qui estimons... releue. — 548, 4. — 14. — 21, B,
créances. — 22, B, C'est luy... besoigne.
550, 5 à 20, B, Estendant... empoisonnent. — 25 à 27, B, Et est... l'esprit. — 30,
B, à peu près. — 32, B, Paucis... bonarn. — 37 à 552, 4, B, Pusse-ie... Quoy, si. —
11 à 19, B, Ce no sont... agilur. — 24 à 26, B, chaud... estois. — 33 à 554, 1, B,
Celuy là... résistance.— 16, B, Simples... versa est. — 21, B, non nrmis... cerla-
tur. — 556. 24 à 558, 4, B, Qu'est deuenu... piller. — 6 à 30, B, L'vsurpation...
diuine. — 35 à 37, B, Xihil... iuste.
560, 20. — 23 à 37, B, l'ayde... lors. — 562, 6 à 20, B, En toutes... à soy. — 22,
B, comme par... droicteur. — 564, 7, B, Polenlissimus... poteslale. — 8. — 16 à
566, 9, B, Comme ie... guerison. — 36. — 568, 8, B, alors. — 36.
570, 5 à 8, B, Comment... heureuse. — 11 à 15, B, D'vne... suffoquant. — 572,
10, B, Exilia... lyro. — 14 à 16, B, Parem... frappe. — 18 à 20, B, et prendre...
Noël. — 27 à 32, B, Ils poiseront... mots. — 574, 2 à 10, B, 11 fut... fournir. —
19, B, L'vne nous... effraye. — 21, B, Vn quart... particuliers. — 29 à 39, B, Si
nous... poids. — 576, 3, B, Quo me... hospes. — lia 17, B, Plus solet... souffre.
— 19. — 20. — 20, B, Que leur... agitable. — 30. — 36 à 578, 5, B, Il est à... songes.
— 8à580, 3, B, Si ie... Dieux.
580,3. — 4 à 18, B, Vrayement... façon. — 34, B, en vne... enfantine. — 582, 1.
— 10, B, Mille... dédit. — 11 à 16, B, Nature... mort. — 35 à 38, B, le m'en... au-
tre. — 584, 8 à 20, B, Ces patissages... faire. — 22, B, En le... donnoit. — 27 à 30,
B, Au hazard... estranger. — 31 cà îM, B, Nous autres... allégation. — 33. — 586,
2 à 5, B, d'escrire... perdre. — 8. — 15 à 18, B, Accessoirement... l'inscience.
— 22. — 24, B, et si... iniustice. — 27 à 588, 2, B, Ipsi... pied. — 2. — 4, B, Mais
en... elle-mesme. — 8, B, et Platon... nature. — 11 à 28, B, Phryné... beauté.
590, 26 à 592, 6, B, Dirai-ie... conscience. — 11. — 20, B, comme... chacun. —
28. — 34, B, Ce mystère... soupçon. — 35. — 594, 14 à 19, B, Nous faillons... am-
plifions. — 34. — 43, B, Tune... firmo. — 596, 12. — 16, B, en ce temps là. — 23.
— 598, 1, B, comme. — 5 à 12, B, VI magis... imitation. — 15. — Ch. XIII. — 25,
B, Per... viam. — 27, B, de beaucoup.
.600, 9, B, Et y... l'œuf. — 16, B, Nature... dissemblable. — 28, B, Vt olim... la-
boramus. —602. 40, B, Confusum... sectumest. — 604, 7, B, Comme... doctrina. — 606,
11 à 14, B, A quoy... suffoquast. — 17, B, ouy... mesme. — 19 à24, B, C'est ... demy.
— 25. — 40 à 608, 6, B, Tout... pénultième. — 7 à 18, B, Sottement... prendre.
610, 1 à 4, B, Ingénieux... l'homme. — 612, II, B, Combien... crime. — 18 à 22,
B, Et de ce... profitable. — 29. — 31 à 614, 6, B, En la... estrené. — 24 à 28, B,
Qui bien... ordinairement. — 616, 11, B, Sit... arces. — 13 à 34, B, En cette...
faicte. — 35. — 618, 19 à 21, B, D'apprendre... importante. — 27.
Da.l20 ESSAIS DE MONTAIGNE.
620, 4 à 6, B, Platon... Xenophon. — 10 à 13, B, D'où... s'enquiert. — 16, B,
comme... Euthydemo. — 26, B, Niliil... prœcurrere. — 31. — 11. — 622, 2. —
2 à 7, B, Car h;... adioustoit-il. — 21 à 26, B, Les sçauans... cecy. — 30. — 31, B,
Sola... est. — 624, 2 à 14, B, Ce qu'on... mcscognoissable. — 16. — 20, B, Platon...
hardiesse. — 35. — 35. — 626, 17 à 20, B, le le... silence. — 628, 8 à 13, B, Et le...
mauuais. — 36. — 39 à 41, B, le n'ay... heure.
630. — 632, 8, B, Nous mettons... moule. — 15 à 17, B, Et comme... sage. — 22.
— 33. B, Et ce... Lybie. — 634, 11, B, Et Seneque... soy. — 18 à 21, B, Socrates...
l'eau. — 22 à 31, B. Senequo... mollesse. — 636, 6, B, aussi. — 37, B, comme...
heures. — 638, M à 16, B, Tout métail... capacité. — 31. — 39, B, Fascheuse...
iour.
640, 7. — 8. — 17 à 18, B, A'atKrd... interrompue. — 642, 16, B, Le vin... inuin-
cible. — 646, 3, B, Est... proprietale. — 10 à 18, B, leurs maladies... nostre. — 21.
— 25. — 26. — 27 à 29, B, le ne... profit. — 648, 4, B, Indujnare... est. — 9 à 16,
B, La goutte... l'vtilité. — 17. — 18, B, et allongera... misère. — 37.
650, 26 à 28, B, La décence... sain. — 652, 11. — 21 à 26, B, Mais... salutaires.
— 33 à 35, B, Et qui... t'appelle. — 654, 5 à 9, B, Par où... inopinément. — 13 à
20, B, A faute... passée. — 28. — 29. — 658, 37 à 660, 8, Qu'il... empeschant.
660, 12 à 20,' B, Qui craint... diuination. — 662, 2, B, Platon... boire. — 11, B,
et m'accommode. — 22, B, depuis... aage. — 36. — 37 à 664, 1, B, que Platon...
enfants. — 3, B, soldat volontaire. — 7, B, et tout vn peuple. — 17 à 21, B, Viuere...
secousses. — 21. — 33, B, et mes yeu.x. — 666, 16. — 21. — '32 à 668, 8, B, lies...
maison. — 28, B, Per... luclit.
670, 8, B, Magna... venter. — 672, 1, B, et me nuisent. — 3, B, quoy... courtes.
— 10 à 16, B, Les anciens... aggreables. — 674, 11 à 26, B, A la vérité... maluri-
las. — "33.
680, 13 à 17, B, Ils disent... ans. — 24. — 35. — 682, 3 à 10, B, Voyla... s'escoule.
— 18. — 18 à 25, B, Comme... place. — 29, B, 11 y... grâce. — 36 à 684, 1, B, par
la... s'entrefestoj-er. — 5 à 12, B, Ce n'est... trouue. — 14, B, desdaigneux. — 14.
— 16 à 19, B, Xerxes... trouuées. — 22 à 686, 6, B, Nous n'auons... iustcs. — 12.
— 12, B, Chercheront... femmes. — 16 à 19, B, qu'il s'y... mieux. — 32 à 688, 14,
B, Sages... le plus. — 17, B, au deuis. — 17 à 20, B, Et Brutus... sécurité. — 26.
— 35 à 38, B, suiuant... palalus.
690, 3, B, de chanter, de sonner. — 7. — 13. — 13 à 16, B, Et la... Rome. —
21 à 32, B, Il s'est... abstinence. — 32, B, et fouler la glace. — 35 à 38, B, Il s'est...
venin. — 692, 4 à 8, B, Il est... correcteurs. — 12 à 15, B, La grandeur... cminen-
tes. — 18. — 24 à 29, B, L'intempérance... exemplaii-e. — 30 à 32, B, pareille-
ment... conlractio : et. — 34 à 694, 10, B, Le voir... vertu. — 19. — 22, B, Slulli...
ferlur. — 25, B, Aussi... viure. — 696, 10. — 20, B, passée... future. — 48 à 698,
2, B, Et me... acerrimus. — 6, B, ains... talons. — 12, B, tout bon... sunt. — 16 à
31, B, Elle faict... voluptcz. — 33, B, Intrandum... peruidendum. — 35 à 700, 2, B,
Et ce... nature.
700, 5, B, auec... tousiours. — 10 à 13, B, Qui vclul... diuina. — 15. — 16. — 16,
B, et tres-principale. — 18 à 22, B, L'authorité... motus? — 31. — 34 à 702, 4, B,
lesquelles... temporelles. —4.-4 à6, B, Entre... sousterraines. — 6, B, ce grand
homme. — 44 à 18, B, Ces humeurs... diuin. — 18. — 19, B, et basses. — 21. —
26, B. Diis... imperas. — 704, 1 à 4, B, Si auons... cul. — 5, B, et humain... ordre.
FASCICULE Db
VARIANTES
DE l'édition de 1595 PAR llVPPOttT A l'eXEMPLAIRE
DE BORDEAUX.
Ce relevé a été établi principalement d'après l'édition de 1802 de Pierre et Fir-
rain Didot et celle de 1872-90 de MM. Courbet et Royer.
Toutes les variantes, ou à peu près, que présente l'édition de 1595 par rapport
à l'exemplaire de Bordeaux, figurent ici; il n'a guère été laissé de côté que celles
simplement afférentes à l'orthograplie, et encore pas toujours.
Ce faisant, nous n'avons pas cru le moins du monde faire œuvre de quelque
intérêt, un très petit nombre de ces variantes valant seules d'être signalées^ ce
à quoi les notes suffisaient; nonobstant nous nous sommes imposé cette charge,
uniquement pour que chacun, jugeant par lui-même, puisse, en connaissance de
cause, apprécier de la différence insignifiante des deux textes et de leur valeur
respective.
L'exemplaire de Bordeaux porte beaucoup de ratures; on a été jusqu'à en faire
le relové. Nous ne poussons pas jusque-là, estimant que ce que l'auteur a sup-
primé est comme non avenu, et que ce n'est pas être dans le vrai que d'en tenir
compte quand même.
L'édition de 1595 et l'exemplaire de Bordeaux diffèrent essentiellement par cer-
tains passages souvent étendus, existant dans la première et qui ne se retrouvent
pas dans le second, alors que l'inverse n'a pas lieu ; et aussi, mais cela est de
beaucoup moindre importance, par un assez grand nombre de variantes insi-
gnifiantes, suppressions, modifications, additions limitées à quelques mots. 11 est
à remarquer que les tournures de phrase légèrement différentes qui résultent de
ces modifications sont toutes, à très peu d'exceptions, plus correctes ou plus ex-
pressives dans l'édition de 1595; le peu de fois que nous avons estimé le con-
traire, nous avons adopté, dans la traduction, la variante de l'exemplaire de
Bordeaux et l'avons signalé ici et dans la traduction elle-même par un astérisque.
Le dit exemplaire de Bordeaux présente, on outre, un bien plus grand nombre
de fautes d'impression et d'orthographe dans sa partie typographiée ; et ces der-
nières sont encore infiniment plus nombreuses dans la partie manuscrite où la
ponctuation fait à peu près complètement défaut. Ces particularités justifient
bien les conjectures qui prévalent sur l'origine de ces deux textes.
Il semble de fait que l'auteur des Essais, dans les dernières années de sa vie,
travaillant en vue d'une nouvelle réédition, le faisait au moyen d'annotations
inscrites sur un exemplaire, on feuilles, de l'édition de 1588 qui n'est autre que
l'exemplaire de Bordeaux; cet exemplaire était en feuilles, puisque, relié aujour-
d'hui, nombre des notes manuscrites ont été tronquées par le couteau du relieur.
Lui mort, Pierre de Brack, auquel, à Bordeaux, s'adresse la famille pour la réa-
lisation de ses intentions, chargé de la révision et de la mise au net de ces an-
notations, le fait en se servant d'un second exemplaire de cette même édition,
vraisemblablement aussi en feuilles et aujourd'hui disparu, qui lui est remis
à cet effet. Peut-être Montaigne avait-il déjà commencé lui-même cette mise au
net, ou encore ce second exemplaire lui servait-il, comme l'autre, à consigner
ses, modifications, l'un demeurant à la ville, l'autre à la campagne, leurs anno-
tations respectives devant plus tard être fusionnées et ne former qu'un tout.
Cette existence simultanée ressort de ce que nombre de variantes entre les édi-
tions de 1595 et 1588 ne se retrouvent pas quand on compare cette dernière
édition avec l'exemplaire de Bordeaux.
Quoi qu'il en soit, de Brack a mis, ou achevé de mettre, l'ouvrage au point en
reportant ou continuant à reporter sur l'un les notes et retouches de l'autre; et,
pour plus de célérité, il les détachait de celui-ci pour les rattacher à celui-là,
Db.l24 ESSAIS DE MONTAIGNE.
quand elles étaient écrites sur des papillons y attenant par des pains à cacheter
dont, en de nom breux endroits, on voit trace, constatant leur disparition de l'exem-
plaire de Bordeaux, on mémo temps qu'on les trouve insérées dans l'édition de
n05. Chemin faisant, de Brack rectifiait, au fur et à mesure, les fautes d'im-
pression, de grammaire et d'orthographe, de l'exemplaire sur lequel il travaillait
et des notes manuscrites qu'il y transcrivait, non toutefois sans qu'il lui en
échappât quelques-unes, car il s'en trouve encore pas mal, bien que partie de
celles qu'il a laissé subsister aient dii être corrigées par U"" de Gournay lorsque
ce travail achevé lui a été envoyé à Paris, pour l'impression dont elle avait
charge.
En résumé, l'édition de 1595 est plus complète que l'exemplaire de Bordeaux;
et les très légères différences que présentent leurs parties communes sont géné-
ralement à l'avantage de la première qui, par là, continue à mériter sans con-
teste la qualification de « vieil et bon exemplaire » que lui donne M'" de Gournay,
dans son édition de 1635, et d'être appelée « la Vulgate ». comme la dénomment
MM. Barckhausen et Dezeimeris; — par contre l'exemplaire de Bordeaux, par ses
notes manuscrites, renseigne incontestablement au mieux de ce qui est possible
sur l'orthographe personnelle de Montaigne (voir, en particulier, à cet égard,
conmie échantillons de quelque étendue, les variantes relatives au capitaine Rais-
ciac (I, 26, 10 à 20) et à une tentative de suicide d'un condamné à mort (II, 102,
13 à 31); et aussi le fac-similé de la page 151 dudit exemplaire qui est donné en
tète, dont il est question dans le fascicule A (notice sur les illustrations), qui ren-
seignera également sur son écriture). L'orthographe des éditions de 1580, 1582,
1587, 1588 est, en efïet, beaucoup plus celle de ses imprimeurs que la sienne, car
il leur avait laissé carte blanche : « le ne me mesle, ny d'orthographe et ordonne
seulement qu'ils suiuent l'ancienne, ny de la punctuation, » dit-il au chap. ix du
livre III (vol. III, p. 412). Ceux-ci, au surplus, ne semblent pas sur ce point avoir
agi à sa complète satisfaction, à en juger par les reconmiandations écrites par
lui-même en vue de la réédition projetée que l'on retrouvera en tète du fasci-
cule G (Glossaire) et dont ses exécuteurs testamentaires ont tenu d'autant plus
compte dans l'édition de 1595, qu'ils étaient, plus que lui, respectueux de ces dé-
tails; si bien, qu'à cet égard, cette édition a en plus ce que les autres ont en
moins.
Qui veut, en dehoT-s du procédé graphique que nous avons donné dans le
préambule du fascicule précédent (Da), avoir un ensemble complet auquel rien
ne manque des variantes des Essais avec leurs transformations successives, l'ob-
tiendra, mais sous une forme moins simple et moins saisissante, par la réunion
des quatre éditions ci-après mentionnées dans l'énumération qui clôt la notice
placée en tète de ce volume : — La rééditition de 1580, par MM. Barckhausen et
Dezeimeris. avec les variantes de 1582 et de 1587; — celle de 1588 par MM. Motheau
et Jouaust avec les variantes de 1595; — celle de 1595 par MM. Courbet et Rover;
— enfin l'édition municipale de Bordeaux, qui, à l'instar de celle de MM. Mo-
theau et Jouaust, a pour point de départ le texte de 1588, mais conjointement
avec celui de 1580 et les additions manuscrites de l'exemplaire de Bordeaux.
Dans le présent relevé, le volume est indiqué au titre courant; — les nombres en
caractères gras marquant la page; — ceux en caractères ordinaires, la ligne.
Les indications affectées de la lettre A s'appliquent aux additions que présente
l'édition de 4595, par rapport à l'exemplaire de Bordeaux; — celles affectées de
la lettre D, à ce qui fait défaut dans celle-là et se trouve dans celui-ci; — enfin,
celles affectées de la lettre R marquent que ce qui précède cette lettre et fait partie
du texte du premier de ces deux documents, se trouve remplacé, dans le second,
par ce qui la suit.
ESSAIS DE MONTAIGNE.
VARIANTES
DE l'édition de 1595 PA.R RAPPORT A l'eXEMPLAIRE
DE BORDEAUX.
LIVRE I.
16. = Ch. I. = 4, la constance et la resolution, R, et la constance. = 18, 24,
pleui"s, R, prières.
20, 18, et mesines, R, estant à mesmes. — 37, y, D, auoit. = 22, 4, l'obstination
à se taire, R*, son fier et obstine silence. — G, ce silence, R, ta taciturnite. — 10, force
(le courage, R, hardiesse. — 10, A, naturelle et. — 22, veu. D, si abatu de blessures.
= 24. = Ch. II.— 1, vilain, R, monstrueux. — 28, celuy, D*, d'vn. — 3G, vierge,
R, fille. — 37, rapporter, R, représenter. = 26, 10 à 20, vn gendarme... accablé,
R, Raïsciac, capitaine Alemand volant raportcr le corps d'vn home de cheual à
qui chacun auoit veus excessiuement bien faire en la meslee le pleignoit d'vne
pleinte commune mais curieus aueq les autres de conoistre qu'il estoit après qu'on
l'eut desarme trouua que c'estoit son filx et parmi les larmes publiques luy seul
se tint sans espandre ny vois ny pleurs debout sur ses pieds les yeus immobiles
le regardant fixement iusques à ce que l'effort de la tristesse venant à glacer. =
28. = Ch. III. = 28, ces, R, ses. — 34 à 30, 3, Comme... soy, R, Vt sluUitia etsi
adepta est quod concupuit nunquam se tamen satis consecutam pulat : sic sapientia
semper eo contenta est quod adest, neque eam vnquam sui pœnilet (Cette citation
est remplacée par sa traduction dans l'édition dé 1595).
30, 4, soucy, R, sollicitude. — 29, valeur, R, nature. — 32, de luy, R, par luy.
— 33, deuenu, R, venu. — 35, continuels maléfices, R, continuelles meschancctez.
— 37, A, à luy, et à tous meschans comme luy. = 32, 9, mourir, R, sa mort. —
10, à souhait, R, selon ordre. — 41, soing, D, que nous auons. = 34, 12, Zischa,
R, Vischa. = 36, 37, au degré, R, à la forme.
40, 2, mer, D, des Athéniens. — 14 à 18, A, Tout... dit. = Ch. IV. = 21, fort,
M, plaisamment. —42, 28, mer, D*, de l'Helespont, l'enforgea et luy (it dire mille
vilanies. = 44. = Ch. V. = 29, vieux, R, vieils. = 46, 3, traistre, R, trahistre. —
3, desloyal, R, meschant. — 9, franche, II*, loyale. — 21, l'auoir, D, premièrement.
— 23 à25, Mais aussi... vaincre, R, Mais cela faict aussi si leurs ennemis ne cèdent
et vienent à accort, ils donnent loy au pis faire et ne pensent pouuoir estre re-
proches de trahison de finesse et de tout moien qui sert à veincre. = 48, II, du
Bellay, R, Monsieur du Bellay. — 20, luy parler, alléguant, R, parler à luy et qui
après plusieurs autres entremises alleguoit. — 25, en, D, ostage.
50. = Ch. VI. = 52, 26, à Ligny, R, en Ligny. — 28, parlementer, R, parler. —
29, parlement, R, marché. —39, dit-il, R, fit-il. = 54, ), de chercher, R, d'em-
ployer. = Ch. VII. = 56, 20, A, et apertetnent. = Ch. VIII. = 58, 20, de carrière,
D, d'affaire. = Ch. IX. — 27, merueilleuse, R, znonstrueuse.— 29, gaigner, D, pai'
là.
Db.l26 ESSAIS DE MONTAIGNE.
60. 10, s'empestrc. R, s'empesche. — 21, d'autruy, D*, corne faict le monde. —
3i, A, de tant. — 39, défaillent de, R, défaillent "par, = 64, 1, ce bel, R, cette
belle. = 66, ce fut, R. qui fut. = 68. = Ch. X. = 22, reiettent, D, hore.
70. 20. à j'iiuyle et à la lampe, R. l'hu\ le et la lampe. — 23, entreprise, D*, la
met au rouet. '= 72. = Ch. XI. = 76, 30, essayé. A, de. = 78. 11, sans. D. atan-
dre. = Ch. XII. = 29, de pied ferme, R, patiemment.
80. C. pl.ace, R, face. — 22, d'en manger, R. d'v mordre. — 24. A, tout son saoul.
= 84. =Ch.XIII. = 12, autant... la. R, toute. — 14. à, D. moy. = 86. = Ch. XIIII.
(XIlll, R, XV) [Sous ce numéro Xllll, l'exemplaire de Bordeaux insère le chapi-
tre qui, dans la présente édition, porte le numéro XL; par suite, ce chapitre Xllll
est le chapitre XV du dit exemplaire, dont tous les chapitres de XV^ à XXXIX
ont leur numéro supérieur d'une unité à celui qu'ils ont dans l'édition de 1595].
= 88, 13, semblant. D, point. = Ch. XV (XV, R, XVI).
90, 22, punissoient... de, R, condamnoient... à. — 23, dit, R, i-aconte. — 24, à vno.
R. en vne. — 28, chastiement. R, condamnation. — 32, A, amis. = 92. = Ch. XVI
(XVI, R, XVll). — 12. contraire, R, rebours. — 15, d'vn bon, R. de bon. —24, A.
et si ne scauoit guère. — 25, vacation, R, vocation. — 29, recognoissent, R, rencon-
trent. — 30, offenses, D*, et si n'y rcauoit rien. —33, A, trauailler de. = 94.21,
et soldats, R*, soldats et subiects. = 96, 5, comme en authorité, R*. et non en
authorite seulement, mais. — 8, si volontiei-s, R. volontiers. — 19, A, de art. —
30, A, auiourd'hui. = 98. = Ch. XVII (XVII, R, XVlll). — 24, lulle, R*, luille.—
30, rage poulse, R, peur saisit.
400,21 à 31, A, Quelle affection... expectorât = [Dans l'exemplaire de Bordeaux,
existe ici un renvoi dont l'objet n'est pas indiqué et donne à penser que le papil-
lon sur lequel ce passage était transcrit s'est ou a été détaché]. = 102,8, frappez,
R, sesis. — 14, fureur, R*, tumulte. = Ch. XVIII (XVIII, R, XI \). = 104, 9, par
la main d'vn, R, par main de. — 10, A, indigne et barbare cruauté. = 106. =
Ch. XIX (XIX, R, XX).
110. = 114, 9, l'airte, R, l'airle. — 44, en dessoude et au descouuert, R, en des-
sous de et à descouuert. = 116, 22, nous efforçons, R, efforçons nous. — '29, homme,
R, corps d'homme mort. = 118, 28, A, œuure.
120, 5, A, Dieu merci. — 7, quelconque, D*, si ce n'est de la vie, si sa perte vient
à me poiser. = 10, A, Les plus mortes... saines. — 17, désigner, R, desseigner. —
18, en voir, R, n'en voir. = 122, 7, la pensée, R, l'imagination. — 17, A, ie n'ay.
— 32, la veue, R, le goust. = 124, 30, mais aussi, R, Et. = 126, 41, la leur, R, ie
leur. = 128, 34, A, que rien. — 38, A, D'auantage.
130, 22, le luy, R, ie vous. — 32, l'air. A, et. = 132. = Ch. XX (XX, R, XXI). —
25, par... a, R, de. = 134, 7, A, à Thoulouze. — 13, A, lors. — 36, Par là, R. de
la. = 136, 27, crédit, D, des miracles. — 31, en ce double, R, de cette opinion. =
138, 3, en courut, R, en encourut. — 7, se, R, le. — 9, luy. À, en. — 12, net, D, à
l'endroit de ce subiect. — 16, ou les, R, si les. — 23, comte, R, compte. — 34, A.
viuant chez moi. — 35, comte. R, compte.
140, 4, A, à l'heure susditte. — 4, A, à l'oreille. — 9, paroles, R, oraisons.— 13, A, à
la dernière fois. — 31, d'après, R, d'empres. — 35, quant et quant, R, aussi. - 36,
sa cotte, R, le cotillon. — 38, ne la fait, D*. guiere. = 142, 1, ardantes, R, bouil-
lantes. — 2, A, qu'on donne de soy. — 5, mariez, D, le temps étant tout leur. =
144, 13, la, D, toute. — 15, Viuez, D, son glosatur. — 16, voix, R, vers. — 18, co-
gnois, R, sçais. — 21 à 25, A, Et pleust.. lepouuoir! = 146, 1, charges... son dict.
R, charges telles veu la condition des parties qu'elles ne peuuent aucunement
apartenir ny concerner son dict. — 2 à 4, A. Car l'effect... quietement. — 9.
Ouurage... Amour, R. pourtant est à Socrates action diuine que la génération et
amour. — 12, escrouelles, R, escruelles. — 12, reporte, R, rapporte. — 16, supplée,
R, supplisse. — 38, espingle, R, espingue,
150, 3, Heures, R, les Heures. — 16, A, assez. — 17. comme pour moy, R*, comme :
pour moy, ce n'est pas mal parler que mon commer. — 28, fay, R. feis. — 30, A,
leu. —32, mon inscience, R, ma science. = 152, 24. volontiers. A. de. =154. =
Ch. XXI (XXI, R, XXll). = Ch. XXII (XXII, R, XXIII). = 156, 10, les médecins,
R, croy les médecins. — 27, A, polis. — 31, A. de ça bas. — 31. demeurer. R. du-
rer. —35, les perçoit, R, s'en estonnoient. — 38, l'accoustumance, R, la costumance.
VARIANTES (lo9a-E\. de Bordeaux). ÙW I, CH. XXII. VOL. I. Db.l27
= 158, 1, estonne, R, effraie. — 21, naifiie, R, forte. —22, A, et plus neufue. —3,
espingles, R, esplingues. — 33, tricotterie, R, frichoterie.
160, 8, donné, D*, car il gaigne sa vie à se faire voir. — 28, raison, R, discours.
— 34, François, R, Frances. — 36, bonnes, R, bons. = 162, 1, plus, D, de horrur
et. — 2, faisons... ordures, R, faisons tous autres excremans. — 11, loingtains, R,
nouueaux. = 164,8, que l'on, R, qu'on. — 24, les démons, R, leurs démons. — 25,
qu'il, R, qui. — 32, estrennes, D*, annuelles. — 33, lequel... esteint, R*, l'ambas-
sadeur qui l'apporte aiTiuant, l'antien feu est esteint tout par tout en la maison.
— 36, deuotion, D, com' ils font souuent. — 36, A, ce qui auient souuent. =166.
1, semblent le requérir, R*, le requièrent. — 2, A, luy. — 3, gouuernail, R, gou-
uernement. — 7, insociable, R, inciuile. — 19, à nourrisse, R, en nourrisse. — 32,
poil. D, du corps. = 168, 1, A, sans distinction de parenté. — 37, plus, R, autant.
170, 16, les, R, hors des. — 16, hors les, R, hors des. — 33 à 35, A, C'est par...
Thessalie. = 172, 15, par laquelle, R, de quoy. — 16, A, et preposteres. — 19,
coustume; là, R, coustume; où. — 32, tesmoin, R, corne. = 174, 12, chargées, R,
les chargeant. — 13, prodigieuse, R, monstrueuse. = 176, 4, fantasticques, R,
monstrueux. — 18, vie, D*, propre. = 178, 19, royalle, D*, dict un antien.
180, 17, souciassent. R, souignassent. — 18, prouuoir, R, pouruoir. = 184, 24,
vingt, R, vint et. = 186. = Gh. XXIII (XXIll, R, XXIV). = 188, 8, tuer, R, ho-
micides. — 13, L, R, Lucius. — 19, pourmener, R, promener. — 31, dit, R, fit. —
32, luy, R, ly.
190, 20, n'as-tu. A, pas. = 194, 31, telle humanité, R*, si notable bonté. = 196,
31, des, R, de. = 198, 12, présenter, R, représenter. — 14, représenter, R, pré-
senter.
200, 16, confidence, R, confiance. — 18, clémence, D*, et douceur. = 202, 6, dit,
R, di. — 8, s'ennuïast... domination, R, se peut ennuier de son iuste gouuerne-
ment. = Ch. XXIV (XXIV, R, XXV). — 31, n'auoir, R, n'auoit. — 32, gouuerne-
ment, D, et en garde. = 204, 21, A, faict. —22, occupe, R, saisi. —37, vn Prince,
R, leur Prince. — 39, rudement, D, qu'vn pastre. = 206, 11, hommes, R, gens.
— 36, qu'il, R, à quoi il. = 208, 24, destourner, R, de tourner.
210, 16, naistre. A, souuent. — 17, d'esprit, D, souuent. — 28, suppléassent en,
R, supplissent. = 212, 8, formèrent, R, formairent. — 18, Nequidquam, R, Ne-
quicquam. — 32, sot et présomptueux, R, fier et plus outrecuidé. = 216, 5, V, R,
cinquiesrne. = 218, 13, pris appétit, R, prins le goût. — 34, et. A, coustumiere-
ment. — 35, qu'vn, R, que tout. — 38, aawxoy;, R, asotos.
220, 10, quatre, D, d'eus. = 224, 4, comptes, R, contes. — 6, vie. A, priuee, —
20, huitième, A, quasi. = 226. = Gh. XXV (XXV, R, XXVI). — 13, monarque, R,
monarche. — 20, leçon, D*, au moins selon icelle. — 25*, c'est, D, plus. — 25, A,
en matière de Hures. = 228, 19, que chacun, R, qu'vn chacun.
230, 8, oncques puis, R, onques plus. — 14, sçay, D, bien. — 24, par où, R,
où. — 31, A, purement. — 34, cette, R, vostre. = 232, 14, nouuel, R, nouueau.
— 18, petit, R, peu. — 31, deuant, R, auant. = 234, 3, ours, A, et. — 14, Platon,
D, mesme. — 15, trop, R, beaucoup. = 236, 8, réussir, R, tirer vn. — 9,
qu'homme, R, qu'vn homme. — 24, deuant, R, d'auant. = 238, 7, à son, R, de
son. — 21, A, sienne. — 28, double, D*, 11 n'y a que les fols certeins et résolus.
240. =242, 22, ou la... harquebuse, R, ny la... harquebouse. —23, et. A, faut.
— 34, seule, R, suie. = 244, 5, collum, R, callum. — 7, dislocation, R, disloueure.
— 11, les gens, R*, les plus gens. — 28, A, du monde. — 30 à 32, comme... va-
leur, R, tirer nom par reprehantion et nouueletez. — 36, fecerinl, R, fecerunt. —
38, que. A, là. = 246, 19, Vn, A, pur. — 25, en vn, R, d'vn. — 27, conduite, R+,
guide. = 248, 3, au, L), haut. — 23, estimable, R*, inestimable. — 32. l'ai leu, R,
ie lis. — 36, par laquelle, R, en laquelle. — 36, laquelle, D, philosophie.
2|50, 8, la Botetie, R, la Boitie. — 25, l'imagination, R, son imagination. = 252,
30, s'y exercent, R, s'exercent. —33, aucun, R'^, autre. = 254, 13, voirement en
quelque manière, R, aucunement. — 15, en quelque manière aussi, R, aucune-
ment. — 37, aux secrets, R, au secret. — 38, Car... pays [Cette phrase dans
l'exemplaire de Bordeaux est mise entre parenthèses]. = 256, 1, appris, R, dict.
— 16, mordre, D*, et. — 18, philosophie, D, ce. — 20. pris, D, et. = 258, 22,
routtes, R, routes. — 33, d'affection, A, que.
Db.l28 ESSAIS DE MONTAIGNE.
260, 10, api)otit, 11, p:oust. — 19, on, R, dans. — 20, beauU', D, et. — 30, victo-
rieux, R, gioi'itnix. — 3::^, sinon, 1), qiio de bone heure son gouuerneur l'estrangle
s'il est sans témoins ou. = 262, 30, miserique, R, ntiserisque. — 37, disoit, R, dict.
— 42, l'abandonne à. A, la colère et. — 42, humeur, R, l'humeur. — 264, 17,
iardin, R, iardrin. = 266, 15, contraire, R, rebours. = 268, 1, pourtraire, R, por-
traire. — 3, là fust, R, ce fut. — 9, aux Muses, R, les Muses. — 13% ennemie, D,
de communication et. — 24, corps. A, est.
270, 1, (/uis, R, nliquis. — 33, s'il y a, R, s'il a. — 34, s'il y a, R, s'il a. — 34,
bonté, D, et. = 272, 14, parties, A, et. — 19, voyois, R, descouuris. — 39, lécher,
A, encores. = 274, I, dans, R, en. — 7 harangere, R, liarangiere. — 11, bene-
uolence, R, beniuolence. = 276, 30, qu'ils, R, qui. — 33, gui, R, Sunl qui. — 3^1
belle, R, bone. — 35, destors, R, tors. — 278, 10, au port, R, à la façon. — 2fi*,
scolastique, R, pedantesque.
280, IG, c'en, R, ce en. — 282, 28, faut, D, nullement. — 30, A, en premier. =
284, 13, inaccoustumée, R, nouuelle. = 286, 8, comme cela, R, de mesmes. — 9,
sont telles, R, comme cela. — 9, A, il est. — 10, A, trop desdaigneux. — 11, A,
mesmes. — 12, A, pourquoi. — 17, la gratitude, R, de la gratitude. — 20, A, et
de moy, que ie suis plus mien. = 288, 3, (Iréce, R, en Grèce. — 14*, raisonnable
que, D, le magistrat, et. = Ch. XXVI (XXVl, R, XXVII). — 26, estoit, R, c'estoit.
290. 2î). saturusque, R, saliale. = 294. 2, de. A, la. — 296, 6*, les, D, deux. =
Ch. XXVII (XXVll, R, XXVlll). — 24, le Contre-vn, R, le contre-vn. — 298, 13, es-
pace. R, pièce.
300, 8, Aristippus, R, qui. = 302, 37*, par les, R, par le commun consente-
ment des.
310. = 312, 40*, un autre, R, nul autre. = 314, 20, si ie, R, si t'en. — 23,
reste, D. certes. — 28, ne doiuent, R, me doiuent. — 37, auant. R, aueq. = 318. =
Ch. XXVIII (XXVlll, R, XXIX).
320, 19, sentant, R, sentent. — 51, desreglé, D, Ces vers se voient ailleurs. =
[L'exemplaire de Bordeaux n'étant autre qu'un exemplaire de l'édition de 1588
corrigé et annoté par l'auteur, les sonnets y figurent; mais ils y ont été rayés
en suite de l'annotation indiquant qu'ils se voient ailleurs. — Dans l'édition de
1595, ils ne sont pas reproduits et une mention poi'te : ■■ Ces vingt-neuf sonnetz
d'Estienne de la Boëtie qui estoient mis en ce lieu ont esté despuis imprimez
auec ses œuures. » Nous les avons néanmoins insérés dans la présente édition
pour conserver à l'ouvrage la physionomie qu'il a dans celle de 1588, la dernière
de celles exécutées sous les yeux de IMontaigne, estimant préférable d'en agir
ainsi, plutôt que de les faire figurer aux variantes où sans cela ils devraient
prendre place].
330.
340. = 344. = Ch. XXIX (XXIX, R, XXX). — 31, ny à suiure, R, à suiure. — 346,
G, soy-mesme, R, à soy. — 10, trace, R, a tracé. — 29, A, en ce subiect là. — 34,
nosti-e histoire Ecclésiastique a conserué, R, nos antiens autheurs ecclésiastiques
font. — 3G, et soustenir... desbordez, R, ses trop lasciues et immodérées amours.
350, 11, plus, R, que. — 39, luy. M, seruist. = 352. = Ch. XXX (XXX, R, XXXI).
= 354, 9, de grande, R, estre de. = 356, 24, vne, R, d'vne. — 29, nauigé, R, naui-
gué. — 57, qu'on, R, que l'on. — 358, 19, du, R, de ce. — 29 à 30, vray...
vérité, R, vrfiy, il semble que nous n'auons auti-e touche de la vérité. — 40, les
accommodant, R, et les auons seulement accommodées.
360. = 362, 1, perfection, D, Vin a Diis récentes [Traduction : Ces hommes
semblent être formés récemment de la main des Dieux]. = 366, 23, leur. A,
dont ils. — 26, à point, R, bien. — 39, d'Alexia, R, de Alesia.
370, 33. du combat, R, d'vn combat. = 374, 38, dont, R, d'où. =376, 11, rien
qui vaille, R, guiere de plaisir. — Ch. XXXI (XXXI, R, XXXII^. = 378, 19, par
la, R, par le bonheur et. — 31, moultures, R, mouldures.
380. = Ch. XXXII (XXXII, R, XXXllI). — 25, régies, R, lois. = 384. — Ch. XXXIII
(XXXIll, R, XXXIV). — 29, fallut, R, fausit. = 386, 19, empenné, R. empanné.
— 22, aposteme, R, apostume. — 25, aposteme, R, apostume. = 388. 3, se gui-
gnoyent, R, le guignoint. — 17, de retirer, R. dauoir retiré. — Ch. XXXI II
(XXXIV, R, XXXV).
VARIANTES (lo9o-Ex. de Bordeaux). LTV. I, CH. XXXIV. VOL. I. Db.l29
390, 27, Notaire, R, Notere. - 392. — Ch. XXXV (XXXV, R, XXXVI). - 13, est,
D, àla vérité. —25, A, et soubs... noslre. — 34, du, R, d'vn. = 394, 1, à celle d'vn
homme, R, à vn home. — 4, scarbillat, R, scarrebillat. — 5, amitonné, R, emmi-
tonné. — 16, Perses, R, Persiens. — 34, l'vn, R, vn. = 396,5, Ouide, D, à deux
doigts prez. — 16, oignants, R, ouignant. — 18, couroit, R, tiroit. — 23, en es-
tants. R. estant. — 16, estropies, R, stropiez. — 30, A, et nous... voir. = 398. —
Ch. XXXVI (XXXVI, R, XXXVII). — 11, et les aymc, R, et si les ayme. — 16,
suadent, R, laudent nisi.
400, 11, attribuèrent, R, attribuarent. — 13, A, de leur nation. — 30, dotracter,
R, retracter. — 32, pour, R, a. —35, Et il faut, R, Mais il faut. — 36, inuention,
R, conceiJtion. — 402, 5, ny dressée à, R, pour. — G, naifue, D, ny dressée à
cela. — 20, il estimera, R, estimer. — 28, la suprême, R, l'e.xcessiue. = 404, 23,
cœur, R, chœur. - Ch. XXXVII (XXXVII, R, XXXVIII). - 30, pleingnit, R.
pleinsit. — 3-1, le Duclié, R, la duciié. = 406, 23, nostre ame, R, nos âmes. — 35,
despend, R, desprend. = 408,5, nommer, R, nomer. — 5, honeste homme tantost
après, R, tantost honeste home. — 8, ny heure à peine en laquelle, R, auquel.
410. — Ch. XXXVIII (XXXVIII, R, XXXIX). — 11, au contraire, R, au rebours.
= 412, 4, Emanuel Roy, R, le Roy Emanuel. — 5, péril. A, de fortune. —5, péril,
R, fortune. — 8, bord, R, sauuete. — 18, viuent, R, viuoint. = 416, 9, establis-
sions, R, estabUssons. — .12, A, de chose. — 21, vertu, D, dict Antisthenes. =
418, 8, à l't^xemple, R, suiuant l'exemple. — 27, tant d'amitiez, R, l'amitié. — 32,
hommes, R, homes. — 33, vieux, R, vieils. —.34, certain, R, nul certein.
420, 3. et ne, R, ny. = 422, 2, veux, R, puis. — 9, portent, nonobstant, R, ne
laissent pas de porter. = 424, 6, cerchcnt, R, recherchent. — 8, bonté, R, et en
bonté. — 9, rassasier, R, ressasier. — 20, délicieuse, R, délicate. — 20, sorte, R,
forme.
430, 2, vous remettra, R, les remettra. — Ch. XXXIX (XXXIX, R, XL). = 432,
II, et me feroit on, R, on me feroit. — 25, vulgaire, R, vulguere. — 29, scauan-
tes... par, R, scauantes : se recommandans par. = 434, 16, comme, D, c'est. —
22, A, au moins. — 26, curieusement, R, ingénieusement. — 31, sôuuent, R,
souent. — 32, A, en ce lieu. — 33, Retournant, R, Reuenant. — 436, 33, A, espèce
de. — 34. que. D, ie ne suis.
440. — Ch. XL (XL, R, XIV). = 444, II, présente, R, présenta. —21, errer, R,
fallir. = 446, 1 à 8, Au royaume... leur maistre, R, Au royaume de Narsingue
encores auiourd'huy, les femmes de leurs prestres sont viues enseuelies auec
leurs maris morts. Toutes autres femmes sont brûlées viues non constammant
sulement maisgaïement aus funérailles de leurs maris. Et quand on brûle le corps
de leur Roy trépassé toutes ses femes et concubines ses mignons et toute sorte
d'ofliciers et scruitui's qui font un peuple accourent si allègrement à ce feu pour
s'y ietter quant et leur maistre qu'ils semblent tenir à honeur d'estre compai-
gnons de son trespas. [En outre, au lieu d'occuper la place qu'il a ici, ce passage
est transposé et mis plus haut après « Viue le Roy », page 444, ligne 24]. — 13,
des Xanthiens, R, de la ville des Xanthiens. — 16, fuir la vie, R, finir la vie. —
17, Brutus, D, à tout son armée. — 19, courageux, R, bon. — 29, arriué, R,
venu. — 35, victuailles, % vittoailles. — 35, contreints, R, fussent contreints. —
35 à 36, A, longuement... du tout. =448, 3, A, successeur de lehan. — 5, or-
donna de sortir, R, dona temps de vuider. — 7, non méprisable historien latin,
R, le meilleur historien. — 9, à la volerie des mariniers, R, come leurs compai-
gnons. — 11 à 12, en reduisist... amonceler, R, en rauisast aucuns : ou pour les
amonceler. — 20, Il dit, R, Ils disent. — 21, enfants, R, les enfants. — 23, Il fut,
R, II y fut. — 25, ieunes, R, iunes. — 31, A, à telles mutations. — 32 à 34, A, En
la ville... opinions. — 40, fin, R, faim.
450, 20, A, si nous en deuenons i)lus lasches. — 34, discourir, D, et d'en parler.
= 452, 10, accroire, B, à croire. — 14, loy, R, habitude. — 16, offences, D, qu'on
leur faict. — 20, Aussi, R, Et à la vérité. = 454, 6, crédit, D, parmi nous. — 34,
condition, D, et conduite. = 456, 4, vaille, R, puisse. — 10, comme vue, R, en
vne. — 14, ainsi qu'elles montrent, R, comme nous volons. — 20, A, égal et. —
26, aspre, R, aigre. — 31, ainsin, R, aussi. — 36, doluerunl, R, doluerunt, dict
S. Augu.stin. = 458, 13, craignons... malice, R, craignons sa peine.
ESSAIS DE MO.NTAIGSE. — T. IV. 9
Db.430 ESSAIS DE MONTAIGNE.
460, 15, auec, R, à tout. — 21, A, quand ie veins... de Blois. — 22, A, peu au-
pai'auant. — 22, A, en Picardie. — ;J9, on portoit... de nuict, R, il portoit touiours
dans vue boite. =462, 5, S., R, Sainct. — 18, A, faueur et. — 18, A, singulière du
ciel. — 19, mais... nouri'ice, R, et l'en ai perdu mais en nourri.sse. = 464, 9, mais,
R, et. — 14, leur pris, D, et valeur = 466, 43, eux, R, leur. = 468, 23, A, pas.
470, 2î, et n'en vsoi' point, R, et à n'en vser. — 33, eut, D, sur ce propos. =
472, 5, et quand ma, R, et ma. — 9, suffire, R, baster. — 13, et non, R, non. —
19, folie, R, maladie. — 31, bourse. A, et. = 474, fj, conuenables, R, sortables. —
21, A, en. — 34, vn, R, vne. = 476, G humaine, R, l'humaine. — Ch. XLI. — 20,
délégua, R, dileyua. =478, 5, pour, R,d'. — 9, Quand, D, l'Empereur. — 11, l'Em-
pereur, R, son maistre.
480. — Ch. XLII. — 17, inegualité, R, inequalitc. = 484, 38, migraine, R, mi-
craine. = 486, 21, s'apperçoiuent, R, se pcrcoiuent. — 20, le sentiment propre à,
R, du sentiment pour. — 39, ame, R, esprit. = 488, 25, qu'à la, R, qu'en la.
490, 20, d'y, R, de. = 494, 11, m'enorgueillirois, R, m'en orgueillirois. — 28, me-
sureroit, R, mesuroit. = 496. = Ch. XLIII. = 14, qui, R, et qui. = 498, 15, hors,
R, hors de. — 17, homme, R, l'homme. — 22, A, à leur deuoir et.
500, 6, au, R, du. — 9, vne autre, R, autre. — 11, les anciennes, R, toutes an-
tiennes. = Ch. XLIIII. = 504, 4, fallut, R, fausit. = Ch. XLV. = 506,4, de Ma-
chanidas, R, contre Machanidas. — 14, l'heure, R, heure. — 24, aussi, D, y. =
508. = Ch. XLVI. = 7, des Henrys, R, de Henris. — 26, nom, D^^, beau et. — 2(5,
mettre en mémoire, R, retenir. — 31, pouuoir, D, iamais.
510, 3, diuers, R, reuers. — 15, A, suiuante. — 20, ne dira, R, dira. — 30, temps,
A, là. = 512, 5, cadet, R, cabdet. — 27, ayeulz, R, aïeuls. = 514, 15, immensité,
D*, l'œternité. — 15 à 17, A, et remplissant... qu'elle veut! = 516, (5, pensez, R,
diuinez. — 15, A, tant de siècles. — 16, atlrila, R, altonsa. = 518. = Ch. XLVII.
= 3, prou. A, de. — 5, vince, R, vinse. — 28, on, R, l'on.
520, 38, ouy, R, c'est mon. = 524, 27, se, R, soy. = 526, 10, piller, R, do pillei'.
— 36, d'eslargir, R, eslargir. = 528, 25, témérairement, R, inconsidérément. —
26, à la témérité du, R, au. = Ch. XLVIII.
530, 7, coste à coste, R, costé à costé. — 18, ils. A, se. — 20, Artibius, R, Arti-
l)ie_ _ 26, A, Charles. — 26, pennades, R, de coups de pied. — 20 à 34, faicts...
commande, R, faicts par certoins signes et voix à ramasser aueq les dans les lan-
ces et les darts et à les offrir à leur maistre en pleine meslée et à conoistre et
discerner l'enemi sur qui il fault qu'ils se ruent de pieds et de dents. = 532, 14,
Platon la, R, Platon le. — 34, soy, D, à ceux qui sont. = 534, 1, es, R, en tous les.
— 14, à cette heure, R, asture. — 22, vienne, R, viendra. = 536, 7, dressoit, g,
adressoit. — 17, traistresses, R, trahistresses. — 27, vn bouclier, R, le bouclier. —
28, tirer. A, des. = 538, 3, les veoir, R, le voir. — 4, ses mots, R, ces mots. — 26
à 28, Les Abyssins... mules, R, Les Abyssins à mesure qu'ils sont plus grands et
plus auances i)res le Pretteian leur maùstre affectent au rebours des mules à
monter par honeur. — 31, longueur, R, longur à la guerre. — 32, desordre, R, des-
soude. — 33, en, R, au.
540, 2, Crotte, R, Crète. — 33, fecisse, R, sua. — 542, 8, belle erre, R, bellere. —
9, à. M, son. — 13, l'eut, D, refrechic et. — 29, Monsieur, R, le sieur. — 33, de
bons, R, des bons. = 544, 2, piquoit, R, couroit. — 4, donnoient carrière, R, cou-
roient. = Ch. XLIX. — 546, entre, R, d'entre. — 24, perfumée, R, parfumée. —
24, tenoicnt, R, s'emploioint. — 26, perfumoyent, R, parfumoyent. — 39, vie, D *,
plus. = 548, 4, et saluer, R *, ou saluer. — - 7 à 8, cette... l'autre, R, cecy n'est-if
pas vostre aussi bien que les genous. — 9, de. A, la. — 27, donner, A, du. — 28,
sur les, R, sur des. — 40, magnificence, D, de.
550, 23, naulage, R, nolleage. = 552. = Ch. L. = 6, ouy, R, voire. — 7, dont.
R de quoy. — 15, traicter, R, produire. — 16, qui. A, nous. — 22, A. et me
trompois en mon impuissance. = 554, 9, ses, R, ces. = 556, 1, trouble, R, grossit
et espessit. — 16, triste, R, attristé. — 32, poingnant, R, pouignant. = 558, 6,
propre, D, et peculiere. = Ch. LI. = 25, art, R, est. — 30, fust, R, en fut.
560, 12, grands, R, grans. — 23, raison, R, la raison. =562, 22, reproche... indigne-
ment, R,tesmoignaged'vne singulière vanité de. — 36, fantastiques, R, fantasques.
— 564. — Ch.LII. -Ch. LUI.— 566,31, A, qu'il tient. — Ch. LIV. —568,18, se tin-
VARIANTES (Ib93-Ex. de Bordeaux). LIV. I, OH. LTV. VOL. L Db.lHl
sent, R. se tiennent. — 3-2 à 37, peur... plat, R, peur font tresmousser nos mem-
bres. Et coluy à qui ses ians qui larmoient voiant frissonner la peau, s'essaioint
de le rassurer en apetissant le hasard auquel il s'aloit presanter leur dict Vous
me conessez mal. Si ma cher sçauoit ou mon corage la portera tantost elle s'en
transiroit tout à plat.
570. ;>(), niaiserie... arrestez, K, simplicité et ignorance de nous voir arrester. —
572, 9, selon... natures, R, selon nostre temps des natures. — 14, ceux cy, R,
cens icy. — 574. — Ch. LV. — 6, parfaict, R, excellent. — 10, exquise, R, par-
faicte. — 10, rien, R, à rien, comme on dict que la meilleure odeur de ses ac-
tions, c'est qu'elles soient insensibles et sourdes. — 14, sentir, R, de santir. —
576, 1, accusent, R, occupent. — 10, ce crois-ie, R, croi le. — 17, ouurage, R,
art. — -.^3, se trouuerent... reuenir, R, reuenoient. — 21 à 27, non la... soudain, ,
R, ils remplissoient non sulcment la sale mais toutes les chambres de son palais
et iusques ans maisons du voisinage d'vne très souefue vapur qui ne se perdoit
pas si tost. — 578. — Ch. LVI. — 7 à 9, pour... Catholique, R, pour exécrable s'il
se treuue chose dicte par moy ignoramment ou inaduertement contre les sainctos
pi-escriptions de leglise catholique. — 12, ainsi, R, ainsin.
580, 3, d'escrier, R, descrier. — 582, 1, quand ie baaille, R, au bailler. — 31,
son, R, au. — 584, 14, ses, R, ces. — 586, 13, pouuoit, R, peut. — 14, nous qui, R, qui.
- - in, de personnes, R, des personnes. — 30, des principaux, R *, deux grans. — 588,
1. soit, D, pas. — 14, portoit, R*, commençoit. — 22, prendroient, R, tireroient.
590, 4, façon, R, manière. — 9, peut estre, R, à l'auenture. — 25, inuoquons,
R, appelions. — 29, fortune, R, passion. — 35, luxure. A, et. — 592, 32, ses, R, ces.
— 594. — Ch. LVII. — 596, 34, dixnouf, R, dix et neuf. — 598, l, produisent, R,
iiLseignent. — 9. de mesmcs, R, des mesmes.
LIVRE SECOND.
600. — Ch. I. — 9, cruauté, R, la cruauté. — 602, 2, renuoyent, R, vont ron-
uoyant. — 17, vice, D, ce. — 604, 20, fdle. A, de. — 606, 11, refuse, R, refusa. — 11,
Mahomet, R, Mechmet. — 18, tant, D, sa. — 22, n'est. A, pas. — 608, 20, pauureté,
R, poureté. — 25, tout au, R, tout le. — 30, légers soupçons, R, legieres soub-
çons. — 36, rapportées, D, Voluplalem conlemnnunt, in dotore sunt molliores;
gtoriam negligunt, frangunlur infamia. [Traduction : « Les mêmes hommes qui
méprisent la volupté, se montrent faibles vis-à-vis de la douleur; d'autres qui
n'ont aucun souci de la gloire, sont terrassés par la perte de l'estime publique »].
610, 20, à,. \, la. —27, Visitants l'isle, R, Visitans isle. — 612. — Ch. II. — 614,9,
c'est, R,est. — 15, ou, R, quand. — 23, recite, R, conte. — '30, Hesterno, R, Eslerno.-—
616. 10, fort, R, singulièrement. — 12, des premiers, R, les premiers. —20, foyer, R,
foïer. — 618, 9, ny malaisé, R, et malaysé. — 12, A, et où... naturelles. — 11,
friand. R. agréable. — 15, autre, R, parfois désagréable. — 21, modereement, D,
en creinte de sa santé. — 21, 11, A, y. — 22, des nuits, R, les nuits. — 30, allas-
sions, R, alissions. — 37, ce peut estre, R, c'est.
620, 4, vulgaires, R, vulgueres. — 5, estoit, D, le plus. — G, le port, R, la con-
tenance. — 9, et religion, R *. en religion. — 14, on dit... bras, R, m'a on dict
qu'il exerçoit .ses bras. — 25, c'estoit... en, R, auoit eu fort. — 30, sur le... retour.
R. retournant. — 622, 10, coup, D *, quasi. — Il à 15, A, Et par... goust. — 21,
pardonne, R, ordone. — 22, A, vn peu. — 30, choses vtiles, R. chose vtile. — 624,
9, A, et la plus parfaicte. — 10, garder de, D, ne. — 33, gémit à la, R, .se pleint à
l'estrete d'vne verte. — 626, 14, de tenaille, R, des tenailles. — 628, 15, Sagesse, D,
c'. -t 18, qu'il, D, nous. — Ch. III.
630. — 632, 2, à tuer, R; de tuer. — 2, podagre, R, podagriques. — 3, qu'elles.,
insensibles, R, que ce fut sans sentiment. — 12, que ie, D *, me. — 30, punis, D
et en celui-cy et. — 634, 33, soi-mesmes, A, et. — 35, Fortune, A, ny. — 636, 31,
disoit, R, dit. — 638, 13 à 17, A, A la... victoire.
640, 35 à 642, I. [La phrase commençant par ces mots : « L'histoire ecclésias-
tique... », est intervertie avec la suivante : •< l'eiasgia et Sophronia...]. — 1, A. l'e-
ligion et. — 31, riuiere. A, de. — 644. 3, de <|uantité, U. (I.'vne quantité. — 10,
DbJ32 ESSAIS DE MONTAIGNE.
à la, II, en. — 12, mesme; que, D, la. — 14, de, A, ne. — 29, retourne, R, retourna.
— 40, sentiroit. A, de. — 646, 28, occis... main, R, de ma main occis. — 35, s'em-
braiserent, R, s'embraisarent. — 648, 2, firent, A, vn. — 4, entouré, R, entourné. —
14, en, R, dans. — 22, A, auec plus d'ordre et plus.
650. — 652, 0, vins, A, et. — 30, douleur, D ♦, insupportable. — 654. — Ch. III.
— 7, sens, D, si beau. — 5 à II, car... desdie [est mis entre parenthèses dans
l'exemplaire de Bordeaux]. — 658. — Ch. V. — 9, r'encontrer, R, rencontrer.
660. — 662, 3, sçauoir, R, qu'il sceut. — 13, vient de, R, est appuie sur. — 21, a
géhenne, R, geiné. — 37, le General, R *, vn gênerai. — 58, ce peu de, R, le peu
de la. — 39, tout l'auagé, R, rauagé tous les villages à l'enuii-on. — 664. — Ch. VI.
— 666, 1, noble, B, homme. — 668, 39, au delà,'D, mort.
670. — 672. 2, accident, R, l'accident. — 36, A, quelquefois. — 674, 7, beaux,
R, belles. — 40, de légers, R, des legiers. — 676, 12, molle, R, douce. — IG, ren-
gager, R. i''engager. — 678, 1, A, pourtant. — 1, mauuais, R, mauués. — 1, gré,
D, pourtant. — 16, n'estudie, R, estudie.
680, 5, il. A, plus. — 18, ouurage, R, ouuragos. — 25, entier, D, et. — 32, tont
à fait, R *, ou près de là. — 34, vaut, D, là. — 682, 10, chéris, D, 11 peut estre. —
12, oysiueté. A, de. — 18, de Scipion, d'Epaminondas, R, des deux Scipions. —
22, en luy, R, es luy. — 25, nom. R, surnom.
SECOND VOLUME.
10. — Liv. II, ch. VII. — 18, excellens, D, sans despance. — 12, G, ne charge,
R, ny charge. — 14, 6, de contraires accidens, R, d'accidens eneniis. — 15, la vail-
lance, R, cette considération. — 16, 11, Cecy, R, Mais il. — 18. — Ch. VIII. —
12, espèce, A, et.
20, 6, sa puérilité, R, son enfance. — 36, Et donner... prendre, R, et il est plus
difficile de doner que de prendre. — 22, 4, duquel, R, de quoy. — 8, noui-rir. R.
nourris. — H, quant et. A, quant. — 31, prouuoir, R, pouruoir. — 24, 3, prou-
uoir, R, pouruoir. — 36 à 37 (de vray... d'auarice). [Les parenthèses sont suppri-
mées dans l'exemplaire de Bordeaux]. — 37, d'auarice, R, de l'auarice. — 26, 25.
vers, R, enuers. — 31, peut, R, ne peut. — 28, 15 à 22, Muleasses... d'enfants.
[Cette phrase est intervertie dans l'exemplaire de Bordeaux, avec la suivante .
L'histoire... Vénérien]. — 16, ses Estais, R, son estât. — 16, A, Mahomet. — 17, de
sa, R. pour son. — 17, l'appellant, R, et l'apeloit. — 17, engendreur, R, faisur.
— 18, lecus, R, Iccus. — 21, tels, R, autres.
30. — 32, 19, l'incommodité, R, la subiection. — 20, vingt, D, et. — 25, portoit.
R, apportoit. — 31, enuers... nées, R, en vne nature bien née. — 32, miliers, R,
foison. — 37, A, l'ay... famille. — 34, 4, fieres et, D, reimperieuses. — 20, prou-
uoyance, R, pouruoyance. — 24, Quantes, R, Quant de. — 37, lioubles, R, trou-
blez. — 36, II, sa, R, mesme. — 11, fin, D, ses. — 31, vieil, R, vieus. — 38, 3.
m'eschappe, R, n'eschappe. — 5, à compai-aison, R, et de combien autre chose
que. — 20, A, plus auantageusement.
40, 9 à 13, A, 0 mon amy!... priuation? — 19, A, l'vne. — 37, estrangiere, R,
estrangier. — 42, 10, l'aage, R, cet aage là. — 23, temeraii-ement, R, temerere-
ment. — 44, 15, trompez, R, mescontez. — 20, dialogue, R, discours. — 33, de
peur que, R, si. — 36, maison, R, famille. — 46, 2, ioyeusement... humaine, R.
doucement et de bone voglie où l'humaine nécessité. — 5, soucy, R, souin. —
5 à 7, Reuenant... soit deue, R, Mais au demeurant il me semble, ie ne sçay com-
ment, qu'en toutes façons la maistrise n'est aucunement doue aux femmes. —
10, aucunement, R, point.
50. — 52, 1, s'approcher, R, approcher. — 7, la doctrine, R. sa doctrine. — 39,
d'eschanger, R, à eschanger. — 54, 8, qu'ayant, R, qui aj-ant. — Ch. IX. — 56,
15, mousquetaires, R, mosquetaires. ^ 16, qu'on, R, que l'on. — 24, craignoit, R.
craignant. — 58, 4, A, marchant en bataille. — 40, fust. D, au.
60. — Ch X. — 18, ou secourir... de moy, R, mon propos. — 19, A. non à ma...
VARIANTES (139o-Ex. de Bordeaux). LIV. Il, CH. X. VOL. II. Db.l33
suite. — 21, par, R, tantost. — ii, ou par, R, tantost. — 25, comparaisons, argu-
ments, R, inuantions. — 26, A, quelcun. — 26, à escient... cache, R, i'ay à escient
ommis parfois d'en merquer. — 62, 4, Plutarque, R, Platon. — 5, Senequo, R, Ci-
ceron ou Aristote. — 9, recognoissance, R, cognoissance. — 10, connoistro, R,
sentir. — 25, ainsi, R, ainsin. — 27, souhaiterois, D, bien. — 64, 8, contention,
R, la contantion. — 9, le retire, R, la retire. — 32, outrecuidé, R, sot. — 66, 11,
comparaison, R, la comparaison. — 68, 30, basteleresque, R, bateleresquc.
70, 18. ainsi, R, comme. — 22, A, et dépendance. — 32, garde, R, targue. —
72, 9, ces, R *, ses. — 26, en retrouuer le fil, R, rencontrer le ûl du propos. —
74, 18, bel, R, beau. — 27, son àme, R, luy. — 33, imperfection, R, à luy faute
de iugement. — 76, 22, variété, R, diuersité. — 24, diuersité. R, variété. — 30, ie
suis... fortunes, R, ie ne considère pas moins curieusement la fortune. — 32,
comme de cognoistre, R, que.
80, 12, beaux, R, de beaux. — 3l, par là, R, par cet exemple. — 82, 24, le ca-
quet, R, au caquet. — 84. — Ch. XI. — 86, 14, et iamais, R, mais iamais. — 16,
des chapons il ne s'en, R, de chapon il ne se. — 88, 23, personnage, R, person-
nage là. — 25, ny aucune, R, et aucune.
90,30, clair, R, à clair.— 41, m'en... foible, R, me la recite d'apparence forte
attachée à une foible vie. — 43, de cause, R, d'vne cause. — 92, 13, aduenir, R, à
venir. — 94, 20, hazards, R, dangiers. — P. 96, 2, grand' mercy, R, granmercy.
— 30, Dionysiusle tyran, R, du tiran Dionisius. — 31, afin, R, pour. — 36, versast
et ieta.st, R, iettat et versât. — 39, le prie de luy enuoyer, R, qu'il luy enuoie.
— 40, formage, R, fromage. — 41, A, tout. — 98, 2, ic les, R, il les. — 21, que
sçauroit... vn sainct, R, qu'vn sainct sauroit faire. — 27, l'auoit, R, auoit.
100, 18, D, du plaisir. — 20, préparer, D, et bander. — 24, A, petite. — 40, qui
l'auoient, R, qu'ils auoient. —102, 13 à 31, que le peuple... changée, R, qu'en la
place des charpantiers commançoient a dresser leurs ouurages et le peuple a s'y
assembler tint que c'estoit pour luy et entre en desespoir n'ayant autre chose a
se tuer se saisit d'vn viens clou de charrette rouillé que la fortune luy présenta
et s'en dona deus grands coups autour de la gorge : et volant qu'il n'en auoit
peu esbranler sa vie s'en dona vn autre tantost après dans le ventre de quoi il
tumba en euanouissement. Et en cet estât le trouua le premier de ses gardes qui
entra pour le voir. On le fit reuenir et pour emploier le temps auant qu'il dé-
faillit on luy fit sur l'heure lire sa santance qui estoit d'auoir la teste tranchée;
de laquelle il se trouua infiniement resioui et accepta a prendre du vin qu'il
auoit i-efuse et remerciant les iuges de la douceur inespérée de leur condamna-
tion dict que cette deliberatiori de se tuer lui estoit venue par l'horrur de quelque
plus cruel supplice du quel luy auoint augmenté la crainte des apprêts qu'il
auoit veu faire en la place et qu'il auoit prins parti d'apeler la mort pour en
fuir vne j)lus insupportable. — 104, 16, figure, A, et. — 13, abondons, R, foison-
nons. — 23, farouches, R, monstrueuses. — 108, 13, qu'ils, R, laquelle ils.
110. — Gh. XII. — 9, de Sebonde, R *, Sebond. [Les variantes de ce nom :
Sebon, Sebond, Sebonde, Sabonde, sont très fréquentes, elles ne seront plus repro-
duites]. — 18, dés long, R, de long. — 112, 5, bien, R, vn bien. — 114, 2, En quoy,
R, Enquoy. — 9. Turnebus, R, Tournebu. — 28, priuilegiée, R, priuilegée. — 116,
26, soustiendrions, R, soutienderions. — 118, 6, merque, R, marque.
120, 22, légitime, D, et moïene. — 38, comme, R', corne. — 122, 14, bique, R,
troque. — 18, religion, R, relligion. — 20, quelle enuie, R, quel goût. — 21, l'en-
uie, R, le goût. — 19, A, si tu le crois. — 21, plus loin, R, hors. — 25, A, et qui
ne fais rien qui vaille. — 33, veux, R, veuil. — 124, 6, créance, R, croyance. —
31, raison, R, amour. — 126, 1, conscience. Pourtant ils, R, consciance pourtant.
Ils, — 1, leurs mains, R, les mains. — 3, A, et appesanti. — 4, laissons, A, pas.
— 12, ame, D *, de Platon. — 128, 16, mais, D, c'est. — 23, parfaict, R, perfet.
130, 4, les dicts... d'autruy, R, le sens des escris d'autrui. — 5, A vn... infecte,
R, et vn atheïste se flate à ramener tous les autheurs à l'athéisme infectant. —
24, point... hommes, R, en fort peu d'homes. — 39, A, faict-il. — 136, 10, deuiner,
R*, songer. — 19, et quant, D *, dict Pline. — 34 à 138, 2, A, Nous nous... la
sienne. — 9, impudence, R, imprudence. — 16, les, D, en. — 25, des nostres, R, du
nostre. — 34, abboyer du chien, R, abbayer.
Db.l34 ESSAIS DE MONTAIGNE. <
140. -M. ivniioyons, R, renuoions. — 25, soubmettons, R. summetons. — 31. ot,
A, ne s'. -- 142. 6, priidcnco. R. prouidoncc. — 3!), par art, R, à l'industrio. — 144.
35, plusieurs, R. tant de. ~ o(i, ossaj-»S R, gousté. — 40, .souffrir, D*, le visage,
les pieds, les mains, les iainhcs, les espaules. la teste, selon que l'vsage nous y
conuio. — 40, S'il, R. Car s'il. — 148, 3, lesquelles il, i;. qu'il. — (i, l'ichneunioii.
R. l'ichneaumon. — 13, parlons. R. parlions.
150, 4, à la presse, R, au nombre. — 28, A, et de [)lus riches effects des facul-
tez plus riches. — :>0, œuurer... tiennent 'les, R. ouurer. c'est aussi celle des. —
30, A, ou quelqu'autre meilleure. — 152, 14, glace. A, de. — 156, 20, fenoil, R.
fenouil. — 20. cicogues, R, cigoignes. — 37, vn, R, l'vn. — 158, 36, rationaci-
nation, D. et sans discours.
160. — 162. 11. s'arresterent, ii.'s'aii'rstaieiit. — 1'.'. d exiiriuiei-. 11. '!(■ ixpri-
luer. — 22, d'alléguer, R, à alléguer. — 164, 43, es animaux. R. des animaux. —
166. 13, Il nous... ainsin, R, comme il nous adulent. — 168, 30. la condition... 11
a. R, de la condition de l'hérisson, qu'il a.
170, 34, le giste, R, leui' giste. — 176, 26, vsage. R, d'vsage. — :'!•. a coustunie.
R. a accoustumé.
180, 2, qui semblent, R, qu'il semble. — 27, assiegeans, R, pressans. — 27, Xia-
tine, R, Xiatime. — 28, quantité, R, grande quantité. — 29, auec, R, à tout. —
30, abandonnèrent leur entreprinse, R. les mirent en route. — 31, piqueures,
R, leurs pointures. — 182. 25 ordonnèrent, R. ordonnarent. — 13, ie m'embatis,
R, m'estahs enbatu. — 13, et me, R, ie me. - 28, comme ce lyon estoit, R, ce
Lyon s'enestant. — 186. 19, goujon, R, gayon. — 31. l'ichneumon, R, l'ichneau-
mon. — 32. s'approche, R, aproche.
190, 21, desmeut, R, desment. — 38, A, de laquelle. — 40, appétit, R, poste. —
194. 10. Et cette. R. Cette. — 196, 20, de laine. R, laine. — 20, que nous, R, qu'à
nous. — 198. 21, ils eussent, R, qu'ils eussent. — 41. Car en fin. R, Enfin.
200, 1, n'est, D, pas. — l. Dieu, D*, mesme. — 14, des passions, R, de passions.
— 15, butte, R, prise. — 16, bestes, R*, et autres animaux. — 202, 1, on, R, l'on.
— 12. plus comme. D, la beauté. — 17. formis. R, aux fourmis. — 12, neantmoins.
R, ce neantmoins. — 39, propre. R, principal. — 40, bien-facteur. R, bienfactur.
— 204. 1, De l'obéir, R, D'obéir. — 5, Sereines, R, Sirènes. — 206. 32, mesmes. R,
les mesmes. — 36, qui le... retournoit, R, l'estant venu visiti r it s'en retournant.
— 208, 1, estre, R, en estre. — 14, douleurs, R. douleur. — 24. caterrousi\ R. ca-
tarreuse.
210. 15, on r, R. ot qu'on. — 18, pensée, R, et pensée. — 18. comme gent.s. U.
comme gens. — 21, trouue, R, voit. — 212, 19, la commodit<'. R. le goust. — 23,
n'auons, D. pas. — 214, 8, sentiment, R, goust. — 31, qu'où, R, que où. — 216, 39,
ceruelle, R, fantasie. — 218, 5, ioie, R, plein de lies.se.
220, 10, et. A, se. — 36. à toute, R. toute. — 222, 10, nom, R, surnom. — 21, se
tenoit pas tel, R, s'en tenoit pas. — 28. rien, D, à la vérité. ~- 224, 24, point, R,
pas. — 34, diuin, R. ce diuin. — 226, 7, qu'il, R, qu'il y. — 17, baisser, R, à bais-
ser. — 18, tout, R, et tout. — 19, de ferme, R, ferme. — 25, te porter, R, t'appor-
ter. — 28, n'y d'y, R, et d'y. — 228, 37, de qui, R, desquels. — 38, d'Archilochus,
A, et.
230, 1, ceux-là. R, ceux. — 232, 32. choisissiez, R, choisissez. — 234. du. R. dvn.
— 6. consentement, R, consenlemant. -— 236. 16, d'estalilii-. D*. l.i v^riti'. 32.
qu'il. R, qui. — 238, 8, contre les. A, loix et. — 13, d'y. H. y. - 27, ses. U. ces.
240, 2, approche, R, a approché. — 19, ont. A, ils. — 26, ne descouurir la va-
nité, R, descouurir l'inanité. —36, la republique, R, sa republique. — 242, 3, A,
les autres. — 3, toutes, D*, aussi. — 4, celle, D, seulement. — 11, d'exercer, D, et
esbattre. — 12, A, mesmes. — 25, auoyent, R, ont. — 25, s'estoit, R, s'est. — 20.
se contentant. R, et se contente.— 30, l'emmailloter, R. le mailloter. — 30. circon-
cir. R, circoncire. — 35, dessein, R, vn dessein. - 37, bien, D, et. — 244, 1, de-
uovent, R, deuront. — 35, trouuent, D. qu'il y a. — 248, 28, estant. R. et estant.
— 'lO, il'y, R, à y.
250, 3*3, leur donnoit, R, nous adonné. — 34, leurs songes, K, nos songes. —
2j2, 9, compiler à, R, compiler en. — 254, 13, A. rien. — 256, 7, entourant. R. en-
tournant. — 14. perlTàbles. R. perfilables. ^ 25, m'humilient. R. me humilient.—
VARIANTES (1595-Ev. de Bordeaux). L[V. II, CH. XII. VOL. il. Db.l35
27, prérogatiuo, l), le laisse cà part los troins de vie monstrueux et contie nature.
— 258, 5. nos sépultures, R, et sépultures. — 25, veneratioji, D, que n'en faisoient
les Romains de Testât de Hercules, Pollux Platon, Esculapc et tant d'autres.
260,9, d'applicable, R, applicable. —30, prépare. 11, a préparé. — 262, lautiue,
R, fautiere. —264, 31, Sardeif^ne, R, Sardaigne. — 266, 23, par, D, le. —268, 11,
s'esbalatrrent le visage, R, se balafrent les visages. — 20, grand, R, grande. — 20,
apparier, R, assortir.
270, 32, attaquent, R*, attachent. — 272, 26, ce nouueau... monde, R, ces nou-
uelles terres. — 37, accouchent, R, s'accouchent. — 40, vsage, D, et conoissance.
-- 274, 16. la disoit, R, disoit estre. — 17, l'homme, R, ou l'home le. — 34, Mau-
siphanes, R*, Nausipham^z. — 276, 12, Grammariens, R, Grammairiennes. — 33,
ny moins, R, ne moins. — 278, 33, rabrouent, R, rebrouent. — 41, attribué, R,
doné.
280, 3, à ce Roy là c'estoit, R, ce lui estoit. — 8, apporte, R, aporte. —20, rui-
nent, R, nuisent. — 22, elles chacune, R, eus chacun. — 25, deuinent. H, diuinent.
— 282, 25, sçachiez, R, saches. — 284, 5, accession, R, succession. — 26, trouue,
R*, trouua. — 29, secrestin, R, secretain. — 286, 5, les pères, R, le père. — 9,
trouue... croyance, R, treuue descriez par la créance.
290,6. humaine, R, rhumainc. — 12, fausses, R, fauces. — 21, voulu, R, volu. —
24, matière est, D, le ciel et. — 25, et de pierre... de son, R, ou auec Anaxagoras
de pierre et telle estoffe de nostre. — 30, produite de, I), la beauté et. — 32, d'en
sçauoir, R, en scauoir. — 38, de touts, R, tous. — 294, 7, ces, R, ses. — 8, des-
cousu, D*, Timon l'apelle par iniure grand forgeur de mii'acles. — 10, A, Toutes
les... poétique. — 40, d'estages, R, cstages. — 296, 12, feint, R, feinte. — 12, ou au-
tre, R, vn. — 20, pourueu, R, prouueu. — 29, qu'il ne, R, qui ne.
300. — 302, 7, la persuasion, R, l'impression. — 304, 27, à l'éloquence altérer, R,
altérer à l'éloquence. — 29, roides, R, roiddes. — 308, 18, alloyent le, R, l'aloint. —
24, qu'ils se, R, qu'elles se. — 25, l'vn à, R, l'vne à.
310, 7, sapience, R, prudance. — 8, volontiers, R, volantiers. — 9, vtile... mo-
dérées, R, vtille à considérer que les opinions saines et modérées. — 18, dit, R, il
dit. — 23, à visage, R, en visage. — 316, 26, qui n'ont, R, qui n'a.
320, 12, l'vsage, R, le goust. — 28, decidere, R, considère. — 43, Syrius, R, Syrus.
— 322, 7, des paroles, R, de paroles. — 14, de la veuë et cognoissance, R, à la veuë
obscure et incerteine. — 18, les sépultures, R, des sépultures. — 23, et des, R, ou
des. — 324, 4, prenne, R, preigne. — 7, Nemroth, R, Nembrot. — 326, 1, fantaisie,
R, opinion. — 1, à nous, D*, en diuers lieux. — 10, ces'mesmes, R, les. — 11, et
en, R, et après en. — 18, A, incognu et. — 33, en autre, R, a vn' autre. — 328, 11,
aussi. A, des nostres mesmes. — 13, diables, D, et aucuns des nostres l'ont ainsi
iugé.
330. — 332, 3, iugement, D, en. — 17, A, vouloir. — 22 à 30, l'ay vcu... vaisseau,
R, Il est des armes et conditions de combat si desperées qu'il est hors de créance
que l'vn ny lautre se puisse sauuer ie les ay veu condamner aïant este offertes.
Les Portuguais prindrent 14 Turcs en la mer des Indes les quels impatians de
leur captiuite sa résolurent et leur succéda de mettre et eus et leur malstre et le
vesseau en cendre frottant des clous de nauire l'vn contre l'autre tant qu'une es-
tincelle de feu tumbat sur les barrils de poudre à canon qu'il y auoit. — 334, 9 à
11, Platon... bostes, R, Platon à deus doits près que sans loix nous viucrions comme
besles brutes essaie à le vérifier. — 28 à 29, ôutrageux... à qui, R, outrageusglaiue
que l'esprit, à son possessur mesmes, pour qui.
340, 21, prendre, R, pendre. — 342, 1, gourdz, R, gourdes. — 23, comprendre
aucune chose, R, aucune chose comprendre. — 35, d'asseurance, R. de force. —
344, 9, l'honncui-, R, honneur. — 12, apprenions, R, aprenons. — 22, fautiue, R,
fautiere. — 24, reccuons, R, y receuons. — 346, 16, atterrer, R, altérer, — 22, torte,
R, et torte. — 348, 4, n'a, R, n'ay.
350. 19, prinse, R, en prinsc. — 352, 22, hardiesse, R, la hardiesse. — 26, assou-
pissement, R, assopissement. — 32, deuins, R, diuins. — 354,3, l'esprit qui est en
l'homme, R, l'esprit qui est partie de l'home. — 4, ténébreux, R, tenebreus. —
356, 23, astrologienncs, R, A.stronomiques. — 358, 6, son ame, R, leur ame. — 21'
notoirement, R, euidemment.
Db.i36 ESSAIS DE MOISTAIGNE.
360, 17. dit, R. tient. — 19, à l'Occident, R, en Occident. — 24, l'vne, R, l'vn. —
31. au changement, R.à mutation. — 38, monstrans, R, se monstrans. — 39, ores
auant, R, ores dauant. — 362, 3, monuments, K, mouuoments. — 6, Chaldéens
tenoient, R, Chaldées tenoint. — 6, registre, R, de registre. — 7, autres, R, d'au-
tres. — 19, d'vn. A, si. — 19, populaires sauuages et des mœurs. R. populeres
monstrueuses des mœurs. — 23, noms, R, nous et en accidens. — 25, .\, jamais.
— 36. deuiner, R, diuiner. ^ 364, 27, cérémonies, R, cerimonies. — 368, 10, créance,
R, opinion. — 26, le satisfaire, R*, se satisfaire. — Sî, de la puissance suprême,
R, diuine.
370, 2, insupportable commodité, R, commodité insupportable. — 21, la deuons,
R, le devons. — 27, des dez, R, de dez. — 33, deux cens quatre vingtz, R, 288.
— 34, disputai, R, dissentil. — 374, 12, religion, R, la religion. — 14, trépied. R,
trepié. — 25, A, ne l'estre. — 26, Quelle... mensonge. R, Quelle vérité que ces mon-
tagnes bornent qui est mensonge. — 31, nommer... sinon, R, autrement nommer
cela que. — 378, 28, telle circonstance, R, telles circonstances. — 33, Scj-thes, R,
Schvtes.
380, 24, Diogarchus, R*, Dicearchus. — 28, s'annoblissent, R, s'ennoblissent. —
382, 26, perdre. C'est chose, R, auilir. C'est vn' espèce. — 30, quarrefour, R, car-
refour. — 35, A, vagabonds et oisifs. — 384, 5, demanda, R, demandoit. — 18, de
pouuoir, R, qu'il peut. — 386, 11 y a, R, Car 11 y a. — 28, ne luy, R, il ne luy. —
29, buletants, R, belutant. — 388, 3, diuersement, R, différemment. — 5, entre-
prises, R, entreprinses. — 8, y faict, R, en faict.
390, 14, A, rien. — 36, est, R, c'est. — 39, à nous. R, en nous. — 392, à voir, R,
y voir. — 394, 17, miaulement, R, mieinement. — 20, formage, R, fromage. —
396, 25. l'effect, R, effaict. — 45, faut, R, se faut. — 398, 17, arquebuse, R, arque-
bouse. — 23, functions, R, opérations.
400, 6. fascheux... donner, R, fascheus lequel oiant vn doner. — 7, il se prini,
R, se prit. — 41, couureurs, R, recouureurs. — 45, poultre, R, poutre. — 402, 17,
A, fut pourquoi ce. — 34, flusteur, R, fleuteur. — 404, 1, A, se trompent. — 28,
endort, D, et. — 33, fait celles, R, faict ceux. — 35, penser, D, si. — 408, 6, le son
autre, que, R, le son, autre que. — 18, opération, R, action. — 43, elle n'aille, R,
elles n'aillent.
410, 1, la roule, R, les roule. — 2, elle vous semble equable, R, elles vous sem-
blent equables. — 2, pareille, R, pareilles. — 5, embesongner, R, embesoigner. —
414, 11, Ainsi... subjectes, R, Ainsin estant toutes choses subjectes. — 12, qui y
cherche, R, cherchant. — 17, estimant. A, qu'. — 20. seul, R, sul. —41, décré-
pite, R, décrépite. — 416, 41, partit, R, part.
420. — Ch. XIII. — 29, Comment, R, Cornant. — 34, place, R, places. — 422, 13,
actions, R, distinctions. — 9, c'a, R, çà. — 424, 27, pour ne se pouuoir, R, ne se
pouuant. — 33, circonscriuist, R, circonscript. — 37, l'a osé, R, la osé. — 426,40,
auoit, A, si. — 428, 31, suyuant, après s'estre, R, après, s'estant. — 35, ains, R,
voire. — 41, de le, R, à le.
430. — Ch. XIV. — 14, l'autre. A*, estant tous pareils et. — 20, choix, R, plus.
— 20, A, tente et. —432. — Ch. XV. — 434, 13, vieil, R, vieus. - 23. à vraydire.
R, à dire vérité. — 38, désire montrer, R*. chacune désire montrer. — 436, 8, in-
fantine, R, enfantine. — 9, froide, R, fiere. — 10, triompher, D, de la rigueur. —
gardoient, R, aymoient. — 438, 7, L'ordre et, D, le. — 31, bien à poinct, R. par-
faitement.
440. 10, A, encore. — 11, perdez vous, R, perdes vous? — 15. cy, D, ne. — 23,
scache, R, sache, en France. — 25, vaisselle, R, cueillier. — 25, A, ny tapisserie.
— Ch. XVI. —444, 20, merque, R, marque. — 446, 30, cela que, R, ce que. — 32,
que nous y eussions, R*, qu'il y eut.
450, 1, naissance, A, mesmes. — 10, harquebuziers, R, harquebouziers. — 12.
A, à mon aduis. — 26, personne. R, homme. —452, 8, A, autre chose. — M.
raison, A. de. — 27, volage, R, vagabonde. — 36, si tu veux, tu me perderas. R,
tu me perderas, si tu veux. — 454, 33, doigt, R, doit. — 34, assez, R, asses. — 34,
souuent, R, souuant. — 34, présenter, R, presanter. — 458, 7, ossa, R, ossa? —
13, l'on, R, on. — 15, harquebusier, R, harquebouzier.
460. 2, harquebusade, R, harquebousade. — 462. 6. bonne. D *, réputation et.
VARIANTES (159o-Ex. de Bordeaux). LIV. II, CH. XVI. VOL. II. Db.l37
— 8, souuent, R, souuant. — 11, Et pour... estre, R, Pourtant à l'auanture. —
14. VI... possunt *. [Cette citation est placée, dans l'e.x. de Bordeaux, avant la
phrase précédente au lieu de la suivre]. — 43, soit, R, puisse estre. — 464, 3, A,
ne leur conseille. — Ch. XVII. — 466. De qui, R, que. — 468. L'empereur Cons-
tantius, R. Constantius TEmpereur. — '25 possède, D, de ce que ie les possède.
470, 4, ma force... autre force, R, moy que de toute autre chose. — 7, mon
industrie, R, ma force. — îX), Escriture, R, parole. — 35, seulement, R, sulement.
— 472,3, contentast, R, remplist. — I, iugement, R, goust. — 5, sens, R*, desad-
uoue sans cesse; et me sens par tout. — 18, A, est. — 22, A, des musiciens. —
29, ces pauiilons, R, ses pauillons. — "29, ces chariots, R, ses chariots. — 30, la
nauire, R, le nauire. —474, 7, fort et foible, R, fors foibles. — 11, ahurté, R,
fort. -- 11, auis, D *, et plus roide. — 17, lame, D *, et certeine image trouble.
— 17, présente, D, comme en songe. — 18, saisir ny, R, sesir et. — 19, ostage,
n *, Ce que. — 32, polissure, R, iantillesse. — 31, suiure moy, R *, suiure a
moy. — 41, façon. R, guise. — 476, 13, plus extrêmes, R, dernières. — 16, A, sa-
gement. — 16, sçauoir relascher, R, conduire. — 27, fluide, R, poli. — 27, aspre,
b *, et desdeigneux. — 30, affection, R *, affectation. — 34, ny. A, qui. — 41,
taire, R *, faire. —478, 12, A, qui sont. —16, Angoulemoisin, Il *, Angoumoisin.
— 20, A, qu'autre.
480, 6, démérites, R *, mérites. — 6, sociable, R, civilisée. — 28, doigt, R,
doit. — 482, 21, proportion, R, rondeur. — 22, iuste proportion de, R, propor-
tion légitime des. ^ 39, dispost, R *, très dispost. — 484, 25, A, libre et. — ^ 33,
arrester *, D, et en tel degré de sens que i'ay senti en auoir occasion. — 33 à
36, A, (une occasion... inquiétude). — 486, 1, toutesfois, R, pourtant. — 3, di-
sette, R, nécessité. — 7, besoin, R, disette. — 15, A, lors mesme. — 15, donné,
R, formé.
490, 17, A, point. —22, soyent,R, sont. — 492, 2, A, présentes. — 7, attirer, R,
tant flatter. — 8, les plus vtiles, R, bien plus vtiles que les autres. — 16, plier,
R, tordre. — 17, dissimulation, R, de dissimulation. — 25, tout y est bon, R, où
tout y est bon. — 33, il n'est, R, n'est. — 494, 8, et qui, R *, que qui. — 29,
gain, R, guein. — 36, A, par ses gents. — 38, apparence, R, quelque apparence.
— 496, 4, ouuert, R, descouuert. — 16, dessein, R, discours. — 30, m'y, R, me.
— 30, propre, R, mien. — 32, arrester... autheur, R, conceuoir. — 498, 4, sçais
plus le faire, R, le scais plus.
500, 8, Trapezonce, R, Trapesonce. — 12, l'ame. [L'ex. de Bord, porte ici la
citation : Memoi'ia... conlinet., que l'éd. de 95 donne quelques lignes plus bas]. —
13, perftuo, R, ef'flao. — 14, mot, D *, du guet. — 21, ils traictent, R, elles traic-
tent. — 504, 6, le peu, R, ce peu. — 17, suis, R *, me suis. — 20, guère fortuite-
ment, R, iamais fortuitement. — 37, il en, R, qu'il en. — 506, 19, A, pourtant. —
508, 26, A, iamais.
510,6 à 8, A, Et qui... sien. — 9, on doit, R, ie dois. — 11, appartient, R, tou-
che. — 16, grossières, R *, communes. — 16, la grâce, D, et le pois. — 17, discours,
D *, hautain et. — 22, de grâces, R, ses grâces. — 512, 17, exemples, R, discours.
— 19, claire, R *, entière. — 514, 3, l'enrichis, R *, i'encheris. — 16, parloient,
R, parlent. — 17, faisoyent la, R, ifont. — 18, portoit, R, porte. — 23, le doiue
admirer, R, s'en doiue estonner. — 25, A, au vif. — 35, que Ion, R, que en. —
516, 11, et faisans, R, Ils font. — 12, pour se rendre eux, R, et eux se rendent.
— 518, 18, abondance, R, foison. — 32, douceur, R, et douceur. — 33, de Mon-
sieur, R, du sieur. — 26 à 520, 15, A, I'ay pris... considération. [Ici l'ex. de Bord,
porte une croix qui devait signaler un renvoi sur feuille volante qui a disparu].
520. — Ch. XVIII. — 522, 25, plus comnmnes paroles, R, paroles communes.
— 29, seing, D *, des heures. — 29, peculiere, D *, qui leur a serui, et. — 524,
4, me testonner, R, dresser. — 16, digèrent, R, dirigent. — 28, Quantes, R,
quant de. — 39, pincer, D,ou. — 526, 13, l'empereur Valentinian, R, Valentinian
l'Empereur. — 528. — Ch. XIX.
530. — 534, II, l'Apostatj R, apostat. — 536, 8, la religion, R *, sa religion. —
Ch. XX. — 538, 34, veteris, R, vetiili.
540, 9, à quelque, R, de la. —9, nette, R, verte. — 542, 10, comme, R, com-
ment. — Ch. XX. — 19, dont, R, de quoy. — 544, 8, dégradent, D ♦, iustement.
Db.l38 ESSAIS DE MONTAIGNE.
— 13, raison, R *, grande raison. — 19, le champ et au propre,. R, la place et au
milieu de. — 546. — Ch. XXI. — 11 à 38, A, Fortune... ennemies. [Un renvoi sans
objet que porte ici Ye\. de Bordeaux, semble indiquer que ce passage devait être
sur une feuille volante qui a disparu]. — 548, l, Portugalois, R, Portugaiz. — 7,
brauement, U, plus glorieusement. — 12, glorieusement, R, laborieusement. —
"21, consumer, R, consommer. — 21, son armée, R, l'armée.
550, 1, affin de, R, pour. — 7, soucy, R *, soin. — 8, dedans, R, dans. — 0,
cœur, D *, et en sa teste. — Ch. XXII. — 20, renient, R, vient. — 23, car. D, là.
— 26, destourna iamais pour, R, destournoit du droit pour aller. — 552, 20,
recreu. Pour, R, recreu et que pour. — 22, A, comme vsage. — Ch. XXIII. —
554, 19, d'Alemaigne, R, de l'Aleniaigne. — 37, abondant, R *, foisonnant. — 556,
3, d'emmener, R *, d'en mener. — 558, 1, voire, R, et. — Ch. XXIV.
560, 14, plusieurs, D *, autres. — 29, auec, R, à tout. — 562, 9, domination,
R *, puissance. — 9, A, que sa vertu... acquis. — Ch. XXV. — 14, la mine. I!,
mine. — 564. 12. dessigné de, R, entrepris de s'en. — 15, m'en, R, de m'en. —
19, le premier. R, tout le premier. — 20, se le. R, s'en. — 27, Harpasté. R, Har-
paste. — 31, ris, R, me ris. — 566, 2. l'emmener, R, l'en emmener. — Ch. XXVI.'
— 568, 15, dont, R, de qui. — Ch. XXVII. — 21, la cruauté, R, cruauté. — 22, si
ay, R *, ay.
570, 9, deschiqueter, R, à deschiqueter. — 33, souffrir, R, sentir. — 35, rece-
uoir, R, souffrir. — 572, 19, vaincre, D *, mais. — 12, A, moins excusable, — 33,
aduersaire, R, ennemy. — 38. espace, R, image. — 574, 9, s'engagent, R, s'y s'enga-
gent. — 39, Matecoulon. R, Matecolom. — 576, 34, vieil, R, viens. — 578, 5, mes-
tier, R, un mestier. — 22, confus, Il *, consul. — 36, dresse, R *, exerce. — 42 à
480. 1. A, Ny qu'vn... poignard.
580, 6, tenir, R. dire. — 9. Epeius, R, Epicius. — 9, Cecyo, R. Cercyo. — 11,
bellique. R, des guerres. ,^- 32, siesent bien, R *. tiennent touiours bien leur ranc.
— 33 à 37. A, Quand elles... propos. — 582. 14, en l'honneur, R, à l'honur. — 16.
en vn, R, dans vn. — 25, A, pleines. — 584, 12, recogneut, R, y recogneut. — 22,
souffrance, R, sentiment. — 29, gratter, R, tant gratter. — 30, ce mestier iusqu'à
ce quMl, R, ce cardur qu'il. — 34, A, nud. — 35, apporter, R. inuanter. — 35, fit
ieusner plusieurs, R. ne dona ny à manger ny à boire ans. — 36, et voyant, R,
voyant. — 38, A, seul. — 586, 1, en engloutissants, R, engloutissants. — Ch. XXVIII.
— 9, nulle. R. nul autre. — 588. 2, nous, R, nostre nature. — 22, peut, R, veut.
590. — Ch. XXIX. — 592. 21, lui estant, R, estant. — 22, Quoi, R, Comment. —
594. i, il s'en, R, s'en. — 10, prit, R *, prenant. ^ 13, en la, R, dans la. — 35, va,
R, com'allant. — 596, 1, à chanter, R. chanter. — 6, en l'eau, R, dans l'eau. —
37. consommé, R, consumé.
600, 27 à 29. heureusement... espaule, R, honorablement son profit si fortune
continue à luy faire espaule. — 602, 6, eust sceu, R, le pouuoit. — 12, à la mort,
R *, mortel. — 12. eust, R. en eust. — 13, A, tel. — 13, A, estant. — 17, perdit,
D, et troubla. — 28, court chemin à gaigner, R. certein moïen de mériter. — 28,
de tuer, R, tuer. — 29 à 34, Parquoy... saincte, R, Par quoi, mesprisants tous
les dangiers propres, pour vne si vtile exécution : vn ou deus se sont veus son-
nent, au pris d'vne cerleine mort, se presanter à assassiner {nous auons em-
prunté ce mot de leur nom) leur enemi au milieu de ses forces. Ainsi fut tué
nostre conte Raymond de Tripoli, en sa ville. — 33 à 35, A. Et pai'eillemeut...
d'œuure. — 604."^— Ch. XXX. — 6, enuiron, R *, à peu près. — 606. — Ch. XXXI.
— 21, des Cyclopes, R, de Cyclopes. — 608, 9, estroppiez, R, stropiets. — Caius
Rabirius, R, Lucius Saturninus [ce qui est une erreur].
610, 27, actions, R, offices. — 612, 1, iniurier, R, à iniurier. — 614, 3, esgaré,
R, escarté. — 13, dit, R, fit. — 616, 16, poids, R, poix.
620. — Ch. XXXII. — 25. outre, D, ce. — 624, 32, à dire, R. de dire. — 40, vne
paroy, R. vn fiaroy. — 626, 6. se dérober, R, de se dérober. — 8, A, du jour
précèdent. — 628, 8, A. l'humaine. — 8. selon... autres, R, touche et reporte à
cela là toutes les autres formes. — 9, rapportent, R, règlent. — 10, fauces, R. ar-
tificielles. — 10 à 13, A, Luy... monde. — 14, 0... insupportable! R, Quelle bes-
tiale stupidité. — 15, notamment, R, nomement. — 16, mille ♦, R, mes. — 27, la
volonté, R, volonté...
VARIAMES (l59o-Ex. de Bordeaux . LIV. II, CH. XXXIIl. VOL. U. Db.l39
630. — 632. — Ch. XXXIIl. — 634, 30. quatre, R, à quatre. —636. 2, (Tappeller,
R, appeler. — 5, nay, R, issu. — 17, regaigna, R, regaigne. ~ 638, 28, vint ap-
porter. R. apporta.
640. 15. la guerre, II. guerre. -i~ 16, trois et quatre, R. à trois et à quatre. —
644. 8, condamner, R, de condamner. —646. — Ch. XXXIV. — 16, Aphricain, R,
l'Aphricain. — 648, 10. de tel interest, R, si grande. — 10 à 13, de les trouuer...
par réputation, R, les ayant iugez t'oibles par réputation, les trouuer apr«>s, à la
vérité bien forts. — 30, pas fort, R. guiere.
650, 30, exhorter, R, enhorter. - 652, 5, son coche, R,.sa coche. — 15, de Pont,
R, du Pont. — 654, 25, trauersé, R, traiecté. — 20, reprendre, D, luy mesme. —
36, falloit, R, failloit. — 38, comme il eust, R, ayant. — 38, passast, R, passant.
— 658, 1. prouuoir, R, poui'uoir. — 13, ainsin, R, ainsi.
660, 25, l'vne, R, vne. — 30, après auoir, R, ayant. -662, 3, alTin d'en. H, pour
en. — 8, comme ils eurent, R, ayant. -~ Ch. XXXV. — 22, trop, R, prou. — 664,
5, s'esgratigner, R, esgratigner. — 10, ie ne suis. R, ie commence à n'estrc. —
666, 35, l'ommenoient, R, l'en amenoient. — 668, 2, ie t'escoute, à toy, R, ie t'es-
couUî toy. — 16, elle s'alla. R, s'alla.
670. 1, enuoya, R, ayant enuoyé. — 20, il se tourne, R, se tournant. — 34, des-
tourne, R, destourna. — 672, 30, pai-, R, pour. — 32, en outre, R, outre cela. —
674. 1, vesquit, R, vcscut. —676, 9, la [)lus grande, R, plus grande. — 15, Paulina,
R, Pauline.
TROISIÈME VOLUME
10. — Liv. II, ch. XXXVI. — 7, seulement dire cela, R, par dire seulement
cela. — 12, 30, guerrière, R, militaire. — 14, 20, imaginiez, R, imaginez. — 16,
28, priuilege, R, priuiliege. — 18, 4, ambition, R, l'ambition. — 33, ny forme, R,
nulle règle.
20, 1, A, en la forme qu'elle estoit en luy. — 2, donncroit, R, donrroit. — 3,
magnifique, R, illustre. — 4, se pourroit... balance, R, me pourroit mettre en
doubte du chois. — 10, mais que... homme, R, mais galant home qu'ils noment.
— 31, dependoit de luy, R, de luy dependoit. — 22, 2, A, luy mort. — Ch. XXXVII.
— 30. menbre, D, Mais c'estoient vaines propositions. — 24, 17, s'escriant, R,
l'escriant: — 26, 16, ordonne si. D *, rigoreusement et. — 17, souffrance, R, tolé-
rance.—22, ses, R*, ces. — 26, tordions, R, tordons. — 27, tordions, R, tordons. — 35,
d'entretien... occupation, R, de commerce, capable d'entretien. —28, 7, pardonne,
R, permet. — 13, A, et me... brailler. — 19, au desespoir, R, à me perdre. — 27, A,
leur. — 33, A, lors. — 33, ronger, R, poindre si fort.
30, 1, apprenti, R, apprentis. — 15, y ait, R, y a. — 32, 30, par leur conduite,
R, soubs leurs règles. — 34, iniurieuse, R *, pénible et iniuricuse. — 40, d'appe-
ler à son secours les, R, de s'ayder de ces nobles et. — 36, 20, très inepte souuant,
R, souuant très inepte.
40, 31, auantageus(! à, R, auantageuse de. — 42, 30, vne autre, R, à vne autre.
— 31, si ay, R, ay. — 44,2, llypolitus, R, llelcine [ce qui est une erreur]. — 20, fa-
natiques, R*, fantastiques. —24, et incognu, R.incognu. — 46,4, descouuertes, R,
descouuerts. — 6, y retrancher, R, en retrancher. — 7, adjouster quelque chose, R,
y adjouster. — 15, à tous, R, tous. — 37, n'estoit, R, n'y auoit. — 48, 6, gaignerent,
R*, vindrent aussi en. — 17, l'vsage... accoustumé, R, le publique, et tant de siècles
auparauantaccoustumé, vsage des bains chauds. — 23, des Latiaeurs, R, les Lati-
neurs. — 26, d'esquine, R, desquine.
50. — 54, 6, pourpointiers, R, prepouintiers. — 6, chacun, R, chaqun. — 10,
potagers, R, potagiers. — 15, cette partie, R, elle. — 58, 32, spécialement, R, no-
tamment.
60, 11. alla, R. s'alla.— lI,s*aduiser,R, aduiser. — 62, 12, apostemes, R, apostumes.
Db.l40 ESSAIS DE MONTAIGNE.
— 33, prôuuoir. R, garnir. — 64, 33, autre sorte, R, vn autre sorte. — 66, 17, en-
durent et laissent faire, R, souffrent.
70, 9, estoit. R, fut. — 18, y verrions, R, verrions. — 72, 17, quand ce, R, que ce.
— 29, cognoistre, R, parestre. — 31, à son œconomie, R *, et œconomie de sa
maison. — 74, 20, toutes, R, sont toutes. — 21, A, sorte de. — 30, dit-il, R, fit-il.
— 30, montrant, R, en montrant. — 76, M, Aussi, R, Et aussi. — 14, exhorte-
niens, R, enhortemens. — 16, qu'il, R *, ou qu'il. — 18. Ce seroit, R, qui seroit.
— 33, susceptible de formes, R, plus susceptible de plus de formes.
LIVRE TROISIÈME.
78. — Gh. I. — 6, ny. A, ne.
80, 9,1a sentent, R, le sentent. — 82, 8, Fortune, R, la fortune. — 15, qui peuuent.R,
peuuent. — 21, A, en ce. — 26, d'obligation, R, obligation. —34, A, Vtatur... polesl. —
35, légitimes, D *, et équitables. — 36, tempérées, R *, equables et tempérées. —
84, 20,çuspendoit, R, suspendit. — 22, avec, R, à tout. — 22, de quel, R, du quel.
— 24, aux victorieux, R, victorius. — 26, party, D *, par application de dessein.
— 86, 9, vne intestine aspreté, R, aspreté intestine. — 17, au moins, R, mais au
moins. — 21, aux vus... encore, R, à ceux là et à ceux-ci tient encore. — 88, 6, A,
à mon gré.— 21, n'en puis-ie, R, ne puis-ie. — 27, n'est. A, ce. — 33, A, à cette heure.
— 33, négotier, D, entre nous.
90, 25, leur asne, R, à l'asne. — 36, nationale, D, locale. — 94, 14, trahison doit.
R, perfidie peut. — 16, chastier, R, punir. — 16, perfidies, R, trahisons. — 20, A,
par après. — 30, Visilicie, R, Vislicie. — 96, 3, luy mesme estre, R, estre luy
mesme. — 13 à 16, Et nostre... pratiquez. [Dans l'ex. de Bordeaux, cette phrase
est reportée après « chiens », lig. 26]. — 14, A, au lieu des armes d'or qu'il leur
auoit promis. — 39, employé, tl, y employé. — 98, 9, fils, D *, contre luy. — 17.
de Lithuanie, R, des Lithuaniens. — 17, introduisit... desfaire, R, fit autresfois
cette loy, que les criminels condamnes, eussent à exécuter eus mesmes de leurs
mains la sentance capitale contre eus donée. — 31, guarison, R, guerison.
100, 24, propre salut, D *, oui. — 27, a, R, ha. — 102, 1, le profit, R, l'vtilité. —
23, suis ie, R, y suis ie. — 26. abolir, R, renuerser. — 27, promesses, D *, et ser-
mens. — 104, 28, A, toute. — 106, 4, exhortements, R, enhortemens. — 17, l'hon-
neur, R *, l'honnesteté. — Ch. II. — 108, 2, fouruoyent, R, se fouruoyent. — 12,
l'heure, D, presante. — 25, spéciale, R, particulière. — 32, et crus, R, crus.
110, 2, science, D *, sans art. — 7, distinctement, R, particulièrement. — 8.
plus pleinement, R, pleinement. — 114, 8, à en parler, R, à qui sauoit a répro-
bation plus tost parler. — 19, naturel, R, nature. — 118, 6, pour la, R, par. — 21,
A, du dehors. — 30, qu'il, R, qu'Erasme.
120, 1, en leur, R, de leur. — 15, A, guère. — 25, externes, D *, arbitreres. —
122, 9, Si se, R, Si ce. — 23, emporté, R, rapporté. — 27, de laquelle, R, De quoy.
— 124, 16, complexion, ou, R, complexion voire. — 20, ainsin, R, ainsi. — 23,
approchent des, R, approchent les. — 26, la nostre, R, la leur. — 30, altérer...
ame, R, estre marris et desplaisants. — 31, grande desplaisance, R, grand regret.
— 126, 8, regret, R, regreter. — 12, l'imaginer, R, d'imaginer. — 128, 25, à cette
heure, R, asture. — 29, aussi peu, R, encore moins. — 29, suis, D, fort. — 29, et
encore, R, mais l'en suis encore. — 33, A *, qu'à la mienne. — 33, cil, R, celuy.
130, 14, A, le coup. — 32, à part, R, apar. — 132, 10, l'infortune de ma vieil-
lesse, R, la desfortune de ma décrépitude. — 31, cassée, R, croupie. — 134, 6, à moy
de, R, à moy à. — 18, l'aigre, R, à l'aigre. — 19, le moisi, R, au moisi. — 136. —
Ch. III. —6, vieil, R, vieus. — 24, soy, R, à soy. —30, des subiects propres, R, de
subiects siens. — 138, 5, l'a nature, R, la nature. — 7, addonnions, R, addonnons.
— 29, sapience. A, est.
140, 25, de ieunesse, R *, dés ieunesse. — 142, 6, maistral, R, maestral. — 146.
11, presse, R, foule. — 28, ceux icy, R, ceux-cy. — 148, 39, pouruoir, R, pouruoyer.
150, 9, aage, R, eage. — 9, poil, R, ris. — 23, vtilement, R *, plus vtilement.
— 25, d'autant. A, plus. — 152, 3, auec, R, à tout. — 154, 13, bel, R, beau. — 16,
oriller, R, oreiller. — 28, dis-ie, R, fais-ie. — 33, mon, R, à mon. — 156, 12, i'y
pourroy, R, ie pouuois. — 15, proumenoir, R, promenoir. — 16, pas seul cojiime.
VARIANTES (159d-Ex. de Bordeaux). UV. III, CH. III. VOL. III. Db.l4I
R, si. — IG, l'agitent, R, ne l'agitent. —20, A, sur des pulpitres. —30, cour, R,
court. — 158, 9, pas, R, part. — Ch. IV. —21, La plus, R *, car la plus.
160, 7, lamais, R, Et jamais. —29, douloureuse, R, doulereuse. — 162, 9, com-
mence, R, print. — 164, 4, caterrhe, R, catarre. — 4, desuoyent, R, le desnoj'ent.
— 23, l'eschaffaut, R, vn escliaffaut. — 166, 5, champ, R, camp. — ^ 10, deuina
R, diuina. — l.o, comme il se batoit, R, ou combattant. — 17, crioit, R, criant.
— 17, A, mais il. — 23, il so rua, R, se ruant. — 24, A, comme. —25, delendoit
R, défendant. — 168, 7, sa couronne i\ terre, R, à terre sa corone. — 10, l'vtilité
R, vtilité. — 21, pas donc, R, donc pas. — 36, comme l'on, R, comment on.
170, 22, compagnie, R, compaignie. — 172, G, accueils, R, acceuils. — 24, gram-
mairienne, D *, et voyelle. — 34, m'apporte, R, apporte. — 174,6, ie voy, R io
voioi. — 6. la voy, R, la voyois. — 13, vnc exemple, R, vn exemple. — 19, part
R, leur part. — 176, 5, port, R, teint. — 30, mette, R, iette. —178. — Ch. V.
180, 37, verdissant, R, fleurissant. — 182, 7, faudroit, R *, y laudroit. — 7
lucte, R, luicte. — 28, à se tenir, R, de se tenir. — 184, 19, affrété, R, affreré. — 24
puissances, R, opérations. — 26, le morfondu, R, au morfondu. — 29, à vn rauis-
sement, R, au rauissement. — 33, l'esprit, R, mon esprit. — 34, clairté, R, portée.
— 37, tire, R, faict. — 186, 10, A, fascheusement. — 27, deuroit, R, deuoit. —
188, 9, au faillir, R, aus mesfaicts. — 18, Thaïes, A, luy. — 33, cache, R, couure.
190, 4, d'ostre blanchie, R, ou blanchie. — 10, fuis, R, crains. '—21, Voyi-e R
Oui. — 21, fit-il, R, dict-il. — 23, dit-il, R, lit-il. — 30, qu'il m'appartient, R, qui
m'appartient. — 192, 12, A, Et le sexe... taire ie plus. — 13, C'est vne, R *, 11 est
bon aussi, que c'est vne. — 14, Non pas, D, mesme. — 39, l'interest, R, interest.
— 196, 6, ne la face, R, la face. — 32, emploite, R, en-ploite. — 37, alors, R, en ce
cas. — 198, 2, dit, R, fit. — 6, leurs charges, R, leur charge. — 24, vne de, R, vn
de. — 24, cordonnière, R, courdonniere. — 27, continuation, R, constance.
34, maistresse, D, et d'amye.
200, 7, dehors, R, hors. — 9, prendre, ou, R, du prendre ou. — 202, 14 tra-
hison, D, de. — 204, 6, deuroient, R, deuoyent. — 10, chatouilleux, R, chatouil-
lant. — 15, voyez, R, voies. — 38, ce mesme, R, cela mesme. — 206, 14, Car...
légiste, R, et que Solon, chef de l'eschole iuridique. — 16, D, dis-ie. — 208, 5 son
interdiction, R, interdiction.
210, 35, temps, D *, plus hardies. — 212, 1, le veux... volupté, R, Car il faut
laisser à part ces escris des philosofes qui ont suiui la secte Epicurienne 5
temples, R, églises. —5, garses, D *, et des garsons à. — 214, 1, publicq, D, esga-
lement. — 216, 1, hommes, D, et. — 5, du Pegu, R, de Pegu. — 16, peu exactes...
marchant, R, et montroient en marcliant leurs cuisses à nud. — 19, parle R
tesmouigne. — 30 à 218, 3, Inique... cause. [Ce passage est reporté après la cita-
tion Num tu, pag. 218, lig. 16]. — 1, plus vicieuse, R, vicieuse. —3, Elles, R Et
elles. — 35, renfrongnée, R, renfroignée.
220, 9, deuinant, R, diuinant. — 12, o'est, R, c'estoit. — 29, indiscrétion, R l'in-
discrétion. — 36, dames, D, de bien et. — 222, 11, et mignardes douceurs, R, o^i-a-
ces. — 40, pourtant, D, pas. — 40, molles, R *, douces. — 224, 26, l'aigre et' R à
l'aigre et à. — 228, 23, inepte, D, aux danles. — 23, messeante, A, aux dames.'
230, 5, adiré, R, esdiré. — 13, qualité commune, R, commune qualité. — 25 A
entre nous. — 30, d'œiilades et de, R, par cuillades et. — 32, leurs amours r'
leur intelliiance. — 32, Ce qu'il aduoua, R, Et laduoua. — 34, tout franchement..!
vois tu pas, R, Vois tu pas coquin. — 232, 15, prouuoir, R, pouruoir. — 234 33
trouuent, R, treuuent. — 236, 11, intériner sa, R, d'accorder la. — 26, toute r'
tout. — 33, craignions, R, craignons.
240, 19, dans les choses, R, dans la chose. — 242, 28, artificielle, R, trop arti-
ficielle. — 31, si ny, R, sil n'y. — 31, recognois, D *, pas. — 246, 4, l'estranger,
R, à l'estranger. — 13, il eust esté autrement, R, autrement il eust esté. — 17'
auec, R, à tout. — 19, imprudemment, R, imprudamment. — 21, eux-mesmes'
R *, d'elles mesmes. — 28, que si l'ai, R, qu'ayant. — 248, 15, aussi des, R, aussi
de ces. — 19, et parlant, R, parlant. — 22, A, comme... parties. — 30, qu'on, R,
Et qu'on.
250, 4, ce que, R, car ce que. — 4, a esté... iouet, R, est le iouet des Dieus. —
11, aff routeur, R, vn affronteur. — 17, deuantiere, R, dauantiere. — 18, des cir-
Db.l42 ESSAIS DE MOiNTAIGXE.
concisions, R. du troneonement du prépuce qui en est vne punition. — 252, 3, à
celte heure, R, asteure. — 4, honteuses, D *, et pcneuses. — 7, hazardé, R. ha-
sarde. — 12, court, R, suit. — i4, A, le plus. — 15, cacher, D *, et rougir. —
17, faueur, R, grâce. — 2i, pœnitet, D, Nous estimons à vice nostre estre. — 29,
exceller, D, sur. —30. leur, R, leurs. — 32, Gens fanatiques, R, Sottes gens qui.
-- 254, 13, l'aise, R, ton aise. — 14, A, la moitié de. — M, lasche, R, vient à des-
plaisir. — 16, soit, 1) *, manque et. — 22, ordonnances... monde, R, règles posi-
tiues de ton inuantion t'occupent et atachent et les règles de ta paroisse : celles
de Dieu et du monde. — 256, 2, leur larcin, R, le larcin. — 5, sauourer, R, gon-
fler. — 28, A, rien. — 31, d'vne, R, de sa. — 258, 2, se paissoit, R, paissoit. —
21. saillir, R, salir. —31, merueilleusement, R, monstrueusement.
260, 2, sans ame, D *, ou sans sentiment. — 262, 9, liberté, D *, Nous courons
à peu près mesmc fortune. Ils sont trop extrêmes en contrainte, nous en licence.
— 22, tousiours, D, ostoyent. — 23, alfaires aux Sarmates, R, aux Sauromatcs.
— 27, et à nous aussi, R, corne à nous. — 30, ieunes hommes, R, iunes gens. —
264, 4, tout leur art, R, toute leur art. — 32, peut, R, put. — 33, par tout, R, en
tout. — 266, lô, sac, R *, poche. — 17, auec, R, à tout. — 24, loixr.. iuges, R,
loix que pour décider l'opportunité des mariages les iuges. — 268, 8, vndenum,
R, heu denum [Horace dit oclavum\. — 37, est également mienne, R, me fait éga-
lement moi. — 42, générale, R, vniuerselle.
270, 7, de la raison commune, R, et communes. — 9, légères, R '^, menues. —
10, iustes, R *, pressantes. — 23, d'autres miennes fautes, R, de null' autre partie
de ce traicté. — 23, l'estime, R, le tiens. — 26, difficile, R *, très difficile. — 28,
jirendre, D, proprement. — 31, nostres, D, et des plus cretez. — 31, deux. A, et
des plus cretez. — 272, 3, circonstances... particulières, R, particulières et gene-
i"ales circonstances. — 274, 31, de recommencer, R, à recommencer. — 276, 23,
disiaier, R, retarder. — 278, 5, farcir, R *, que farcir. — 7, breuuage, R, bois-
son. — 18, desmenbrons, R, dessirons. — 35, sa, R, leur.
280, 17, la vie, R, l'ame. — 19, fort, R, bien. — 24, veu, R, sachant. — 282, 5.
qu'on me fait, R *, que ie sens. — 8, ausquels, R, ausqueles. — 13, exhortoit, R,
enhortoit. — 19, contre, R, à rencontre. — 20, embesongna, R, embesougnat. —
33, fust, R *, soit. — 34, La laideur, R, Vne laideur. — 34, d'vne vieillesse, R, et
vne vieillesse.' — 284, 3, laquelle, D *, si plaisamment. — 16, galbe, R, garbe. —
21, sagesse, R, par sagesse. — 28, rassis, R, prudent. — 286, 22, paele, R, poêle. —
Gh. VÎ. — 28, pour voir, R, voir. — 288, 2, ester nuent. R, estrenuent. — 4, ester-
nuement, R, estrenuement. — 16, spécialement, R, et notamment. — 22, m'ait,
D, au moins.
290, 18, ressoudre, R, ressouder. — 26, Dieu, A *, me. — 31, et les... ieunesse. [Ce
membre de phrase est mis entre parenthèses dans l'ex. de Bordeaux]. — 292, 8.
lucter, R, luicter. — 16, mousquetaire, R, mosquetere. — 20, tirer, D *, auant. —
23, prendre, R *, tirer. — 30, D, comme..", enseignes. — 31, par païs en, R, en
païs sur. — 32, mené, R, traine. — 33, traîner, R, mener. — 294, 16, cadet, R.
cabdet. — 16, seoit, R, sioit. — 25, qui establit, R, d'auoir establi. — 26, main-
tient, R, maintenu. — 28, souuenance, R, méraoii'e. — 33, de rues, R, des rues. —
34, lairra, R, a laissé. — 34, à long, R, de mon. — 296, 6, train le seruice, R, train
lusage. — 10, porter, R, apoiter. — 15, main souueraine, R, mains souueraincs.
— 25, donront, R, donneront. — 298, 2, ont, R, l'ont. — 15, qu'ils, R, lesquels. —
17, s'ils montrent, R, en montrant. — 18, duquel, R, de qui. — 18, r'allient, R,
raliant. — 25, la libéralité, R, libéralité. — 29, s'appaouurit, R, s'apouurit. — 30,
les enuios, R, des enuies. — 36, à faire, R, de faire. — 36, A, après. — 28, et
n'en, R, et ne.
300, 7, seulement autant, R, autant seulement. — 8, propre, R, plus propre. —
9, A, ne disoit. — 10, Cyrus, R, luy dict Cyrus. — 19, au moins en apparence.
[Ce membre de phrase est mis entre parenthèses dans l'ex. de Bordeaux]. — 21,
d'excez, R, excez. — 302, 9, rares, R, plusieurs rares. — 16, poussent. R, peut. —
21, charioit,R, charrioit. —304, 13, tourneuirons, R, tournoions. — 306, 16, à cette
heure, R, asture. — 25, très-fort, R, très bien. — 308, 15, sceu, R, imaginé. — 31.
ostez, dis-ie, R, contez, dis-ie. — 32, à cette, R, cette.
310. — 314, 19, l'on des, R, on des. — 26. quand ils eurent. R. aju'cs auoir. —
VARIANTES (lo95-Ex. de Bordeaux). LIV. IIF, CH. VI. VOL. III. Db.I43
:16, ils se mirent, R, so niiront. — il, géhennes, R, geines. — 28, pour n'auoir,
R, n'ayant. - 316, 1, A, si bfii-bares. — 28, mangoz entre eux, R, entremangez.
320,' 29, les épaules, R, leurs épaules. — Ch. VII. — 28, n'est, A, ce. — 324. 3,
donneroit, R, donroit. — 8, en la, R, à la. — 326, 28, feignit, R; feingnit. — 33,
par terre, R, à terre. — :î8, s'(Miialouser. R, s'en ialouser.
330, 2, pretondoit à, R, euuioit. — Ch. VIII. — 22, A, et irrémédiables. — 332,
7). similitude. R, exemple, — 17, est, R, n'est. — 18, à reculons, R, qu'à reculons.
— 18. conuenance, R, accord. — 19, accord, R, sinulitude. — 23. A, aussi bon...
iiie.schants. — 27, à cette lieure, R, asture. — 334, 2, Mais comme, R, Comme. —
336, 1, fuyons. A, à. — 27, impérieusement, R, impérieuse. — 28, le prends...
souuent, R, le preste l'espaule aus reprehantions que l'on faict en mes cscris :
et les ai souuent changez. — 31, céder, D *, oui, à mes despens. — 31, malaisé,
R *, certes malaisé. — 338, G, opposoit, R, faisoit. — 8, victoire, R, gloire. — 9,
Toutesfois, R, Mais. — 33, à ee que ie dits, R, à jiropos. — 37, traitter, R, treter.
340, 27, voylà. A, vn. — 342, 18, du langage, R, de langage. —30, nullement, R,
rarement. - 344, 24, poursuy, R, rechercherois. — 25, affm, R, pour. — 25, affin,
R, pour. — 2G, A, que le... l'imite. — 346, 13, seul, R, tout .seul. — 13, de ce, D,
mesme. — 13, seul, R, tout seul. — 17, la riuiero courre, R, courre la riuiere. —
1!>, De vray, R, Voyre mais. — 30, retorquables à, R, contournables vers. — 31,
bien dit, R, dit. — 32, bien, R, très. — 3'4, le iour, R, du iour. — 38, d'entende-
ment, D. et gentil personnage. — 39, autant, R, aussi. — 348, 1, A, du registre.
— 5, ennuyeux, R, enuieux. — 5, la prerogatiue, R, les prcrogatiues. — 7, s'il...
faudroit, R, S'ils entandoint latin il leur faudroit. — 10, ne dis, R, n'en tans. —
11, tache, R, coulpe. — 13, A, et seuere. — 15, ce neantmoins à l'oster, R, à l'os-
ter ce neantmoins.
350. — 352, 12, riche, R, noble. —354, 5, en discerner, R, la discerner de la. —
7. meilleure, R, meillure. — 26, comme, R, comment. — 356, femmelettes, R,
femmes. — 358. 7, mesle, R, remesle. — 30, d'esgouster, R, desgouter.
360, 10, A, bien. — 362, 16. surmonte, D, par où il se rehausse. — 17, A, et ses
diuerses vertus. — 17, l'vne, R, vne. — 366, 1, sérieux, graue, R, graue, sérieux. —
16, Il n'est, R, N'est. — 368, 1, dis-ie, R, fais-ie. — 10, A, et le deuancer. — 11,
cognoissance, D, et le deuancer. — 12, Essais, R, essais. — 23, ce n'est, R, n'est.
370, 3, qu'il, D, y. — 4, s'il, A, y. —33, A, quelque. — 372, 35, accuse, R, a. —
376, 10, présente, R. représente. — Ch. IX. — 378, 24, à, A, vn. — 27, de qui, R,
duquel. — 36, abandonné à, R, perdu.
380, 1, vont précipiter, R, se voient ieter. — 6, Ion, R, on. — 382, 4, l'oppression,
R, oppression. — 30, A, qui vaille. —384, 4, aussi, R, encore. — 8, de me prome-
ner, R. du promenei'. — 8, de me retirer, R, du repos. — 15, méritera, R, mérite.
— 21, les sots. R, les simples. — 386, 1, lassent, R, lassent et offensent. — 8, plus,
l'y, R, plus. l'en. — 9, perspicacité, R, conoissance. — 9, si i'y ay, R. si i ay. —
l6, me poisent, R, m'offancent. — 17, D, et m'vlcerent. — 19, quand ils, R*, no-
meement quand ils. — 42, libre et pur, R, naif. — 388, 3, la Dieu me permette, R,
la à Dieu ne plaise. — 7, i-egai'dant plus, R, plus regardant. — 18, A, bien. — 19,
m'oyant, R, en m'oyant. — 20, me viennent soufder, R, vont me soufflant. — 24,
prix, R, le prix. — 24, m'habille, R, me habille.
390, 27, que ie les ai veuz, R, les auoir veux. — 392, 5, manier, D*, poiser. —
33, eschec, R, humeur. — 394, 27, paiticuliers, R, propres. — 396, 7, contraire, R,
'rebours. — 9, à rauarice, R, son auarice. — 39, farouches, R, monstrueuses. —
398. 6, saunages, R, farouches. — 17, vn monde... formé, R, les hommes obligez
(lesia et formez. — 18, l'engendrons, R, les engendrons. — 19, le redresser, R, les
redresser. — 20, la tordre de son, R, les tordre de leur. — 20, accoustumé plus,
R, plus accoustumé. — 21, rompions, R, rompons. —25, receiie, D*, et formée.
400, 1, vne autre coupple, pareille, R, vn autre coupple, pareil. — 402,42, misé-
rable, R, malotru. — 404, 1, dessus, R, dauant. — 2, dessoubs, R, après nous. —
3, remporter, R, raporter. — 22, plus espesse, R, espèce. — 406, 3, croulle, R,
crolle. — 408, 31, A, d'accent et de visage.
410, 7, l'ay... euité, R, le me suis tousiours bien gardé. — 13, très inepte, R,
monstrueux. — 17, aux soudaines, R, à soudaines. — 33, A, à cau.se. — 412, 2 à 4,
le suis... pouce. R. Mes premières publications furent l'an 1580. Despuis, d'vn long
Db.Ufe ESSAIS DE MONTAIGNE.
trait de temps ie suis enuieilli, mais assagi ie ne le suis certes pas d'vn pouce. —
4, à cette heure, R, asture. — 6, bel, R, beau. — 5, yuroigne, R, yurouigne. —
8, ionchez, R*, ioncs. — 11, seroit. A, ce. — 414, 6, mœurs, R, humeurs. — 8, com-
mande, R. fuit à. — 10, empirer meshuy, R, meshuy'empirer. — 10, vers, R, enuers.
— 18, laquelle, R, à laquelle. — 19, vois cherclier, R, me mesle. — 19, le plus, R,
la plus. — 51, i'estime, R, estime. — 26,^ telle, R, quelle. — 416, 7, désertées, D*, et
ruinées. — 32, me les, R, me le. — 418, 2, roido, R, plus roide. — 19, pour, R, à. —
24, trop, R, vn peu bien. — 26, estre aucunement, R, aucunement estre. — 34,
iustice exacte, R, exacte iustice.
420, 4, A, simplement. — 31, bragues, R, bagues. — 38, A, enuere moy. — 422,
15, A, s'ils sauouroient... liberté et. — 19, d'affranchir, R, affranchir. — 26, A, sol-
licitant, requérant, suppliant, ny moins. — 29, m'en, R, me. — 30, A, ou besoing.
— 33, m'engager, D*, pour eus. — 37, et prest au besoing, R, au souin. — 424, 12,
sa hardiesse, R, son hardiesse. — 29, eschaugette, R, eschoguette. — 426, 0. ni'es-
touffe, R, m'accable. — 9, crainte, R*, trouble. — 25, Fay-ie, R, Fais-ie. — 26, robes,
R, fortune. — 29, A, et iuridique. — 36, sont, R*, valent. — 36, A, nettes. — 428,
37, les puis, R, puis.
430, 14, façonner, R, former. — 432, 3, nommément, R, notamment. — 3, cours
iours, R, iours cours. — 13, maison, R, famille. — 18, mère de famille, R, femme.
— 21, douaire, R, doire. — 434, 9, spécialement, R, notamment. — 17, A, et plus
continuellement. — 18, touchons, D, plus continuellement. — 30, à dix, R, dix. —
32, sçaura prescripre, R, prescripra. — 438, 5, les soixante, R, soixante. — 29, loing,
R, esloigné.
440, 4, ne le gratte, R, n'y touche. — 13, l'interest, R, interest. — 16, ou on, R,
ou Ion. — 26, gouuerner, R, entretenir. — 442, 7, les exclamations, R, exclama-
tions. — 28, A, vray. — 444, 2, volontiers, R, franchement. —3, Dion, R*, Dion. —
3, Antigonus, R, Antigon. — 7, beau et aduenant, R, agréable. — 18, masles, R*,
homes. — 23, ay espéré, R, espère. — 23, aduenoit, R, aduient. — 24, pleussent et
accordassent, R, plaisent et accordent. — 25, mon trépas, il rechercheroit, R, que
ie meure, il recherchera. — 25, ay donné, R, donne. — 28, l'a veu, R, le voit. —
28, dans, R, en. — 90, l'eusse sceu, R, ie scauois. — 34, m'eust esté, R, me fut. —
35, ie l'eusses esté, R, ie l'irois. — 37, Eh... amy, R*, 0 vn amy. — 446, 8, A, de
leurs. — 24, poisante, D, le conseillerois volontiers Venise, pour la retraicte d'vne
telle condition et foiblesse de vie. — 27, moy, R, à moy. — 29. le leur, R, Ce. —
31, ces voyages, R, vn si long voyage. — 448, 8, dislayer, R, deslaier. — 17, à cette
heure, R, asture. — 19, s'ira difformant, R, se difformera.
450, 13, maussade, R, sale. — 31, commourans, R, commorans. — 452,4, parmj',
R, mais entre. — 19, La fortune ayde, R, Combien ayde la fortune. — 16, aux
miens, R, à nul. — 20, leur apporter, R, faire guiere. — 454, 3, le plus, R, plus. —
456, 15, saueur, R, goust. — 458, 22, commune sorte, R, basse forme. — 32, quelque.
R, aucun.
460, 26, les hommes, R, des hommes. — 462, 7, vertu, R, volupté. — 20, se ser-
uent simplement des, R, suiuent simplement les. — 464, 9, condamnent à, R, accu-
sent elles mesmes de. — 16, raison, R, mesure. — 20, desconuienent, R, disconuie-
nent. — 466, 2, A, si. — 15. Et vne bonne, R, Comme vn'. — 34, ou vn peuple,
R, vn peuple. — 468, 31, A, suyuant... promesse.
470, 26, muances, R, nuances. — 30, aultres, D, tiltres. — ceux-ci, R, ces autres
noms. — 32, vn art, R, vn' art. — 472, H, quelque air, R, l'air. — 12, parlerie, D,*
C'est l'originel langage des Dieux. [Membre de phrase reporté dans le texte de 1595,
même page, lig. 17, après « philosophie »]. — 16, i-ompu, D, Luy mesme est tout
poétique. — 16, théologie, A, est toute. — 474, 7, trop incommode, R, incommode.
— 29, Ctesibius, R, vn Ctesibius. — 36, de moyen, R, moyen. — 476, 20, lesquels, R,
que. — 478, 1 , outrageux, D*, au moins et. — 8, me renuoyera, R, m'en enuoyera,
— 34, il y est, D, plus de cent ans. — 34, A, et au delà de cent ans.
480. —484. — Ch. X. — 21, s'hypothéquer, R, se hypothéquer. — 486, 22, boson-
gne, D*, et de l'obligation. — 488, 2, et le, R, il le faut. — 2, l'enfoncer, R. s'y enfon-
cer. — 9, s'y interposant aussi, R, aussi s'y interposant. — 9, doit, R, en doit. —
16, Glorieux, R, Braue. — 22, comme, R. comment. — 34, lieu mesme, R, mesme
lieu. — 38, mesprisant, R, en mesprisant.
VARIANTES (4o95-Ex.de Bordeaux). LIV. III, CH. X. VOL. TH. Db.I43
490, 12, trompions, R, trompons. — i:], les redresser, R, le dresser. — 21, qu'eu
ceux-cy, R, (^ue en ceux icy. — 492, 27, désirs, R, désir. — 494, 21, ensuiure, R,
suyure. — 2;>, espineux, R, bien espineux. — 496, 30, et i'aymerois presque, R,
i'a3'merois quasi. — 31, l'essimoit, R, l'estimoit. — 33, ny de, R, et de. — 498, 10,
expirée, R, est vuidée. — 11, A, par manière d'exemple. — 27, après d', R, à. —
27, d'en, R, à en.
500, 18, selon la, R, à la. — 502, 2, qui sont du, R, que ie vois au. — 4, moy, R,
ma cause. — 7, contraire, D*, Malur molu animi qui vli ralione non potesl. [Tra-
duction : « Que celuy-Ià s'abandonne à sa passion, qui ne peut suivre la raison »]. —
504, 1, aueugle ou, R, aueugle et. — 35, m'estudiois, R, estudiois. — 506, 29, dis-
sociation, R, dissantion. — 35, excuse, R, sottise. — ;35, consolation, D, de sa perte.
— 35, jirogrez, D, des affaires douteux et. — 508, 10, })ouru6ir, R, pouruoer.
510, 22, prouuoit, R, pouruoit. — 30, temposte, D, Animus nniHo anlequam ojt-
primalur, quatilur. [Traduction : « L'esprit est frappé très longtemps avant d'ê-
tre abattu »]. — 512, 10, de ne, R, à ne. — 14. ni'cust pieu d', R, l'eusse voulu. —
34, grandes, E, de grandes. — 35, est-il, R, il est. — 514, 11, ad'aire, R*, de la peine.
— 28, A, d'y tenir ferme. — 30, froidement, R, lâchement. — 31, ardemment, R,
chaudement. — 516, 5, A, à vn autre. — 9, sont, D*, pas. — 22, Excindunlur, R,
abscindunlur. — 518, 13, d'ingratitude, R, ingratitude. — 27, vigueur, R, la vi-
gueur. - 27, liberté, R, la liberté.
520, 23, eschafTaux, R, esciiauffaux. — 32, A, tout cela. — 33, cette condition, R, sa
fortune. — 522, 17, repetasser, R, repotasser. — 24, attribue, R, done. — 25, sienne,
D, propre. — 20, son, R, tout son. — 34, ainsin, R, ainsi. — 35, sommes, R, ne
sommes. ~ 524. 12, cette espèce, R, ce costé là. — 29, guarir, R, guérir, —si ay,
R, ay. — 526. — Ch. XI. —2, doiuent, R, deuoint. — 29, resuassoit, R, rauassois. —
528, 1 , pi-esuppositions, R, essais. — 1, examinant, R, en examinant. — 2, laissent, D,
là. — 2, courent aux, R, s'amusent à traiter les. — 3, touche, R, appartient. — 3, ce-
luy, R, à celuy. — 5, A, et accomply. — 5, besoing, R, nature. — 9, A, et de soy
mesmes. — 10, A, Les effects... nullemejit. — 10 à 12, Le déterminer... l'accepter, R,
Le déterminer et le scauoir comme le doner apartient à la régence et à la maîtrise :
à l'infériorité, subiection et aprantissage appartient le iouyr, l'accepter. [En outre
l'ordre des phrases où se trouvent les onze variantes qui précèdent est modifié ainsi
qu'il suit : ■■ lis laissent... causeurs (lig. 2 à 3) » est placé après : « vérité (pag. 520,
lig. 33) »;— « Le déterminer... l'accepter (lig. 10 à 12) » est placé après: « causeurs
(lig. 2) »"; — « Ils passent... conséquences (pag. 520, lig. 33 à p. 528, 1. 1) » est
placé après : « l'accepter (lig. 12) »]. — 13, eoustumes, R, costume. ~ 30, moyens,
R, causes.
530. — 534, 22, dire, R, le dire. — 25, sommes, R, que ,nous somes. — 35, en-
questante, R, enquesteuse. — 40, L'admiration, D, dict Platon. — 43, establir, R,
conceuoir. — 44, qu'à, R, que pour. — 44, establir, R, conceuoir. — 536, 14,
offre, R, donne. — 21, du sens, R, de sens. — 33, impérieusement, D, Videanlur
sane ne affirmenlur modo. — 538, 2, A, Videantur... modo. — 37, ce genre, R,
cette nature. — .8, ciguë, R, cicue. — 22, par fois se pcuuent ainsin, R, se peu-
uent ainsi par fois. — 24, pas iuge, R, ny iuge. — 31, la pensée, R, ma pensée. —
540. — 542, 1, esleuees, R, si esleuees. — 544, 1, accroire, R, à croire. — 2, au
compte, R, en recette. — 546. — Ch. XII. — 17, maisons, R *, maçons. — 29,
boutades, R, saillies.
550, 4, besoigne, D, et plus vtile. — 11, acquisition, R, emploite. — 12, ailleurs,
R, au reste. — 14, vaisseau, R, vasseau. — 14, nous auons, R, auons. — 552, 3, A,
non que. — 3, naturelle, R, populere. — 16, qu'aigu, R, que aigu. — 30, aigu, R,
vif. — 31, nous eslance, R, et eslance. — 32, solide, R, rassis. — 34, combat, R,
conflit. — 554, 28, despece, R, desmenbre. — 556, 40, nécessaire, R, propre. — 42
à 558, 4, les beaux... piller, R, les admirables iardins qui sont autour de la ville
de liamas en abondance et délicatesse, restei'cnt vierges des mains de ses soldats
tous ouuers et non clos, com'ils sont. — 5, Fauonius, R, Faonius [suivant Plutar-
que]. — G republique, R, estât. — 8, A, trouble et hazarde tout, et qui. — 11,
prier, R, de prier. — 18, sie, R, siese. — 27, colloque, D *, desmenbrant sa mère et
en douant à ronger les pièces à sesantiens enemis. — 27, de haines, R, de haynes.
— 30 loy, R, parole. — 31, amorçons, R, amorchons. — 33, estât, R, visage.
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 10
Db.l46 ESSAIS DE MO>JTAIGNE.
560, 6, nioy, R, à 11103-. — 28, tiror, D, en. — 32, A, de mal. — 3^1, soummission,
R, siiinniission. — 562, couiiiio. D, à. — 23, droicteiir, R, droitur. — 564, 17, sans,
R, que ie n'a3'e. — 20, sçaurois, R, puis. — 22, euidemment, R *, auidemant. —
38, qu'il est vrai à demj-, R, que certes à peu près. — 566, 5, office, R, ordre. —
20, falloit, R, me falloit. - 568, 8, A, alors. — 26, chauraa, R, chaume.
570, 10, auec, R, à tout. — 572, à la, R, la. — 8, ce neantmoins, R, neantmoins.
— 20, de tous les maux, R, des maux. — 574, 1, torment, R, tourment. — 8, A.
csloignée. — 30, total, R, tout. — 31, pourtant, R, jiortant. — 576, 2. sentiment,
R, goust. — 9, préméditation, R, preuoj'ance. — 10, préméditée, R, pourpensôe.
— 16, A, hurt et au. — 17, coup, D, presant. — 17, en souffre, R, se en sent. —
21, A, plus. — 37, autre, R, l'autre. — 578, 1, affaire, R, à faire. — 16, ieunes, R,
iunos.
580, 3, puérile, R, sec et sain mais quand et quand naïf et bas. — 4, inima-
ginable, D*, véritable franc efîuste au delà de tout exemple. — 17, vne oisiue,
R, vn' oisiue. — 34, sécurité, R, niaise en vne sécurité — 34, enfantine, R, pué-
rile. — 582, 3, d'elle, D, mesmes. — 14, encheuestrions et battions, R, encheues-
trons et battons. — 15, tuions, R, tuons. —37, oisiueté, R, enhortemens d'autruy.
— 584, 10, lié, R, empilé. — 17, incognues, R, inconues. — 18, Cela c'est, D *, en
consciance. — 23, il effaçoit, R, à chacun il me sembla effacer. — 25, et parmy,
R, parmy. — 25, suis, R, iesuis. — 586, 1, cettuy-ci, R, cettuy ici. — 2, eusse, R,
en eusse. — 2 à 5, Eh quoy... perdre, R, D'auantage, telle faueur gratieuse que la
fortune peut m'auoir offerte par l'entremise de cet ouurage eut lors i-encontre
vne plus seson. — 13, s'espessit, R, se croupit. — 21, donrois-ie, R, dourrais-ie.
— 22, Socrates, D. qui. — 24, si disgracié, R *, et vn visage si vilain. — 24, si
discouenable, R, disconuenable. — 31 à 34, et nous... bien, R, et souuent nous des-
goute par bien legieres causes : du teint d'vne tâche d'vne rude contenance de
quelque cause inexplicable sur des menbres bien. — 36, toutesfois, R, pourtant.
— 36, le plus, R, très. — 38, qui, D, est. — 38, difformité, R, deformité. — 588,
16, non a, R, n'a. — 18, rang, R, ranc. — 21, appartenir aux beaux, R, aux beaux
appartenir. — 25, fait-il, R, dict-il.
590, 27, seule, R. la seule. — 30, religions, non, R, relligions nous. — 592. 6,
vne apparence, R, vn port. — 10, celle, R, celuy. — 33, mon soupçon, R, ma
supçon. — 594, 3, l'interprétation, R, interprétation. — 17, enuieux, R, ialoux.
— 20, en, R, dans. — 20, dans, R, en. — 26, remonte, R, remonta. — 36, dis-
persé, R, desparti. — 596, 6, liarquebusier, R, harquebousier. — 9, harquebu-
sade, R, harquebousade. ^ 28, lendemain, R, l'endemain. — 33, indiscrète li-
berté, R, Hberté indiscrète. — 598, 9, punition, R, vengence. — 11, laideur, R,
haine. — 12, abhorrer, R, hayr. — 18, De niesnie qu', R, Comme. — Ch. XIII.
— 27, A, de beaucoup. — 27, plus vil, R, moins digne.
600, 2, conférence, R, ressemblance. — 602, contrat, R, vn contrat. — 604, 9,
et redoutons, R, redoutons. — 26, sur qui, R, auquel. — 36, contraire, R, rebours.
— 606, 3, à soye, R, de soye. — 19, raccourcissement, R, racourciment. — 20,
ou, A, signe. — 23, A, et tourneuire. — 31, on, R, l'on. — 42, commentaires, R,
commenteres. — 608, 2, s'entent, R, s'antent. — 10, leurs ouurages, R, leur ou-
urage. — 29; d'Hydra, R, de Hydra. — 30, dist, R, fit. — 33, tu nous en apportes,
R, en voicy.
610, 7, bout, R, coin. — 614, 6, estrené, R *, aussi estrené. — 616, 15, peut, R,
sauroit. — 19, gouuernement, R, son gouuernement. — 24, peint, R, trop peint.
— 28 robuste, D, vertu. — 29, A, quiète.
620, 10, Euthydemc, D, en Xenophon. — 22, de cette, R, à cette. — 26, Nihil,
R, Nil hoc. — 622, 28, c'est, R *, ainsi que de. — 624, 14, d'oreilles, R, des oreil-
les. — 626, 22, pour, D, le seruice de. — 36, beaucoup, R, de beaucoup. — 628,
9, apprins, R, apris. — 13, niauuais, R, mauues. — 41, à cette heui'e, R, asture.
630, 24, moy, R, à moy. — 632, 8, sottises, R, bestises. — 9, mettons, R. ietons.
— 15, tiennent, R, disent. — 634, 18, respondit, R, respondoit. — 20, ordinaire,
R, ordinere. — 20, bruit, R, son. — 21, de l'eau, R, l'eau. — 26, déporta, R,
laissa. — 27, semo5ent, R, semoint. — 29, emploj'a, R, continua. — 636, 6, aussi
au changement, R, au changement aussi. — 36, trois, D *, bones. — 638. 32, il a,
R, il m'a. — 32, ni'imprimer, R, imprimer. — 34, l'inquisition, R, inquisition.
VARIANTES (loGo-Ex. de Bordeaux). LIV. Ilf, Cil. XII. VOL. HT. Db.J47
640, 1(1. oriifos. R. si'i'uic-cs. — 20, A, Tandis (|U(\ - 646, M, coiirso. 1». iialii-
relle. — 648, 10, l'vtilitt', lî, vtilit('>. — 18, allongcra-lon, R, alongera tu. — 18,
vostre, R, nostre.
650, 4, cet office, R, ce service. — 27, compagnie, D, ordinaire. — 28, sain, R,
autre. — 29, dit-il, R, faict-il. — 652, 33, quoy, R, qui. — 654, 16, qu'à cette
heure, R, qu'asturc. — 656, 17, entr'engendrent, R, s'entr'engendrent.
660, 11, cognoistre, R, conestre. — 664, 8, A, et tout vn peuple. — 21, secous-
ses, R, sesons. — 24, l'aage, R, tantost de si.x ans, le cinquantième. — 33, A, et
mes yeux. — 33, incontinent, D, et mes yeux. — 666, 16, paisiblement, D, seule-
ment. — 33, sicut, R, si oui. — 668, 2, leur nourriture, R, nourriture.
670, 28, r'allie, R, r'allia. — 32, me semble, R, semble. — 672, 1, m'ennuyent, .
R, me fâchent. — 10, auoyent, R, auoint. — 674, 15, A, ils se trompent, et. — 17,
et dix, R, dix. — 18, qui ay, R, ay. — 20, prodigieuse, R, monstrueuse. — 30,
las, R, lasse. — 678, 3, A, sur tout les vieillards. — 5, d'almanachs, D, les epho-
merides et aux médecins. — 5, A, les espérances et les pronostiques. — 18,
galbe, R, garbe. — 31, contraire, R, rebours.
680, 1, et ne bois, R, ne bois. — 11, vin, D, d'eau. — 15, ou non, R, non. —
19, buroit, R, boiroit. — 682, 21, ses compagnons, R, les autres. — 24, A, natu-
l'elle. — 29, des hommes à Rome, R, à Rome des gens. — 35, pour quelle, R, à
ce qu'elle. — 38, aux festins, R, à leurs festins. — 684, 7, desdaigné, R, refusé.
— 9, souueraine, R, principale. — 10. Mon... forclost. [Phrase reportée lig. 12
après « il se trouue »]. — 11, pour soy... saueur, R, des conuiez y apporte la prin-
cipale grâce. — 15, de prendre, R, prendre. —686,4, veulent que,R, tiennent. — 5,
A, soyent. — 0, comme dit Aristote, qui d'vne farouche stupidité, R, qui d'vne fa-
rouche stupidité, comme dit Aristote. — 7, font les degoustés, R, sont desgoutez.
— 7, A, d'autres. — 10, ne leur coûtant, R, et ne leur couste. — 11, substantent,
R, sustantent. — 13, leurs femmes, R, les famés. — 23, plus, R *, bien plus. —
34, humains et corporels, R, naturels et par conséquent necesseres et iustes. —
38, vocation, R *, vacation. — 688, 9 à 12, avez-vous sceu composer... villes, R,
Composer nos mœurs est nostre office, non pas composer des liures, et gaigner
non pas des batailles et prouinces, mais l'ordre et la tranquillité à nostre con-
duite. — 12, Le glorieux... c'est, R, Nostre grand et glorieus chef d'euure c'est.
— 17, au deuis, R, à son deuis. — 30, dispensé, R, despansé. — 35, Bacchus, D,
mis est indulgendum non seruiendum. [Traduction : « 11 faut le leur pardonner, et
ne pas leur en faire un grief »]. — 37, voluptez, D -^j naturelles.
690, 5, des mœurs, R, de meurs. — 7, vne geniture, R, vn'origine. — 24, A,
En la... clieual [phrase reportée lig. 32]. — 25, Et emmy... Et le premier emmy. —
26, A, le premier. — 32, abstinence, D, 11 s'est veu en la bataille Deliene releuer
et sauner Xenophon renuersé de son cheual. — 692, 17, bien, D, naturellement.
— 696, 5, afin, R, pour. — 7, chagrigne, R, chagreigne. — 12, l'amplifier, R, am-
plifier. — 698, 2, substanlassions, R, sustentissions. — 0, que piustost... produi-
sist, R, plus tost qu'on les produisit encore. — 20, la volupté, R, volupté. — 29,
ne va, R, va.
700, 1, expliquer, R, exprimer. — 702, 10, fâcheux à digérer, R, à digérer fa-
cheus. — 19, les plus, R, le plus. — 704, 5, miracle, D, et.
FASCICULE E
L'ESPRIT DES ESSAIS.
EXTRAITS, CLASSÉS PAR MATIÈRE ET DANS UN ORDRE
MÉTHODIQUE, DES IDÉES CARACTÉRISTIQUES QUI Y SONT ÉMISES.
« Montaigne, le meilleur philosophe moral que nous ayons, plus profond que
subtil, a dit d'Aguesseau, n'est jamais mieux que cité; on ne lui trouve pas tant
de génie à le lire de suite, ses propos saisissent plus que les développements qu'il
leur donne ». — Ses propos, on les trouvera, en majeure partie, énoncés ici; et,
en se reportant aux indications de volume et de page qui les accompagnent, il
sera aisé, à qui voudra, de les replacer dans leur cadre pour en mieux juger et
méditer.
Ces extraits, synthétisant ■• l'esprit des Essais », sont textuels, en dehors des
légères retouches qu'il a fallu faire à quelques-uns pour les rendre compréhensi-
bles tout en les présentant isolément. — Le style et l'orthographe en ont été con-
servés, pour ne rien leur enlever de leur précision et de leur pittoresque.
Ce relevé, joint au sommaire des Essais (fascicule B), présente de fait la quin-
tessence de cet ouvrage : l'un dans son ensemble, l'autre dans ses idées caracté-
ristiques.
La pensée n'en est pas nouvelle; elle a déjà été réalisée, au moins à deux repri-
ses au xvni" siècle, d'une manière fort judicieuse, bien que dans des conditions
ne nous donnant pas pleine satisfaction,-ce qui nous a déterminé à la reprendre,
en faisant à cet égard table rase du passé.
Le difficile, dans un travail de ce genre, est de ne pas se laisser entraîner, tout
en n'écartant rien d'essentiel. Mais la corrélation entre ce relové et le Répertoire
analytique des principales matières traitées ou mentionnées dans les Essais (fas-
cicule Hb) et, d'autre part, le recours immédiat au texte que rend possible la
contexturc de « Self-édition », résolvent ce point épineux.
11 est à observer que cet « Esprit des Essais » diffère entièrement dos <• Extraits
do Montaigne » qui, sous ce nom et en assez grand nombre, en donnent in ex-
tenso les morceaux les plus intéressants, n'y faisant que les coupures indispen-
sables suivant la catégorie de lecteurs auxquels ils sont destinés.
Le titre de chaque article indique le sujet auquel il est plus particulièrement
afférent et souvent aussi, entre parenthèses, d'autres articles auxquels il y a lieu
de se reporter pour ce même objet, car, ici non plus, on n'a pu se garder complè-
tement de la confusion qui partout existe dans les Essais, où à propos de tout il
est question de tout.
Dans l'article « Divers », plus encore que dans les autres, on trouvera un pou
de ce tout; les sujets y sont classés d'après l'ordre alphabétique du mot qui, dans
l'alinéa, attire le plus l'attention.
Nota. — Les nombres suivant chaque aUnéa, indiquent : ceux en caractères
romains, le volume; ceux en caractères arabes, la page où se trouve l'extrait qu'il
relate.
Pour chaque sujet, outre l'article qui lui est propre, consulter également ceux
qui accessoirement sont indiqués dans l'en-tcto, et aussi l'article « Divers ».
ESSAIS DE MONTAIGNE.
L'ESPRIT DES ESSAIS.
EXTRAITS, CLASSÉS PAR MATIÈRE ET DANS UN ORDRE
MÉTHODIQUE, DES IDÉES CARACTERISTIQUES QUI Y SONT ÉMISES.
ABONDANCE.
II n'est rien si empeschant, si desgouté que l'abondance, I, 490.
ABSENCE (amitié, mariage).
Si nous ne iouyssons que ce que nous touchons, adieu noz escus quand ils sont
on noz coffres, et noz enfans s'ils sont à la chasse, III, 434.
Vnc faim insatiable de la présence corporelle, accuse vn peu la foiblesse en la
iouissance des âmes, III, 436.
ACTIONS.
le hay quasi à pareille mesure vne oysiueté croupie et endormie, conmie vn
oinbesongnement espineux et pénible. L'vn me pince, l'autre m'assoupit, III, 276.
Toutes actions, dit la philosophie, siéent egaliement bien et honnorent egalle-
ment le sage, III, 692.
Les choses moins craintes sont moins défendues et obseruees. On peut oser
plus aysement, ce que personne ne pense que vous oserez, qui dénient facile par
sa difficulté, III, 274.
Est-ce pas erreur, d'estimer aucunes actions moins dignes de ce qu'elles sont
nécessaires? Si est ce vn tres-conuenable mariage, du plaisir auec la nécessité,
auec laquelle, dit vn ancien, les Dieux complottent tousiours, 111,-700.
A l'enfourner, il n'y va que d'vn peu d'auisenient, mais depuis que vous estes
embarqué, toutes les cordes tirent, III, 512.
La pluspart de nos actions ne sont que masque et fard, I, 406.
Noz plus grandes agitations, ont des ressorts et causes ridicules, III, 512.
L'insuffisance et la sottise est loiiable en vne action meslouable, III, 274.
ADULTÈRE (chasteté, mariaoe).
11 faut estre ingénieux à euiter cette ennuyeuse et inutile cognoissance,
III, 234.
Mais le monde en parle. Vn galant homme en est pleint, non pas desestimé. Et
puis, de qui ne parle on en ce sens, depuis le petit iusques au plus grand?
III, 234.
E.lo4 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Chacun de vous a fait quelqu'vn coqu : or nature est toute en pareilles, en com-
pensation et vicissitude. La fréquence de cet accident, en doibt mes-huy auoir
modéré l'aigreur : le voyla tantôt passé en coustume, III, '231.
l'en sçay qui à leur escient ont tiré et proflit et auancement du cocuage, dc-
quoy le seul nom effraye tant de gens, I, 464.
La curiosité est vicieuse par tout : mais elle est pernicieuse icy. C'est folie de
vouloir s'esclaircir d'vn mal, auquel il n'y a point de médecine, qui ne l'empire
et le rengrege : duquel la honte s'augmente et se publie principalement par la
ialousie : duquel la vengeance blesse plus nos enfans, qu'elle ne nous guérit.
Vous asséchez et rtiourez à la queste d'vne si obscure vérification. Combien pi-
teusement y sont arriuez ceux de mon temps, qui en sont venus à bout? On ne
se fnoque pas moins de celuy qui est en peine d'y pouruoir, que de celuy qui
l'ignore. Le charactere de la cornardise est indélébile : à qui il est vne fois atta-
ché, il l'est tousiours. Le chastiement l'exprime plus, que la faute. Il faict beau
voir, arracher de l'ombre et du doubte, nos malheurs priuez, pour les trompeter
en eschaffaux tragiques : et malheurs qui ne pinseni, que par le rapport,
III, 232.
Misérable passion, a cecy encore, d'estre incommunicable. Car à quel amy
osez vous fier vos doléances : qui, s'il ne s'en rit, ne s'en serue d'acheminement
et d'instruction pour prendre luy mesme sa part à la curée? I, 464.
AFFAIRES (fortune, vie pibliqie).
Il faut manier les entreprises humaines, plus grossièrement et superficielle-
ment; et en laisser bonne et grande part, pour les droits de la Fortune. II n'est
pas besoin d'esclairer les affaires si profondement et si subtilement. On s'y perd
a la considération de tant de lustres contraires et formes diuerses, II, 540.
Qui en recherche et embrasse toutes les circonstances, et conséquences, il em-
pesche son eslection. Vn engin moj'en, conduit esgallement, et suffit aux exécu-
tions, de grand et de petit poix, II, 542.
Nous guidons les affaires en leurs commencemens, et les tenons à nostre
mercy : mais par après, quand ils sont esbranlez, ce sont eux qui nous guident
et emportent, et auons à les suyure, III, 514.
Vn sage homme peut pour l'interest d'autruy, comme pour ne rompre indé-
cemment compagnie ou pour ne discontinuer vn autre affaire d'importance, re-
mettre à entendre ce qu'on luy apporte de nouueau : mais pour son interest ou
plaisir particulier, mesmes s'il est homme ayant charge publique; pour ne rom-
pre son disner, voyre ny son sommeil, il est inexcusable de le faire, I, 656.
AFFECTION (enkants).
Les choses nous sont plus chères, qui nous ont plus cousté. Et donner, est de
plus de coust que le prendre, II, 20.
Ce n'est pas merucille, si à reculons l'affection des enfans aux pères, n'est pas
si grande. loint que celuy qui bien faict à quelcun, l'aime mieux, qu'il n'en est
aimé. Et celuy à qui il est deu, aime mieux, que celuy qui doibt : et tout ouurier
aime mieux son ouurage, qu'il n'en seroitaimé, si rouuragc auoit du sentiment,
II, 20.
Au demeurant il est aisé à voir par expérience, que cette affection naturelle, à
qui nous donnons tant d'authorité, a les racines bien foibles. Pour vn fort léger
profit, nous arrachons tous les iours leurs propres enfans d'entre les bras des
mères, et leur faisons prendre les nostres en charge. Et voit-on en la plus part
d'entre elles, s'engendrer bien tost par accoustumance vn'affection bastarde, plus
véhémente que la naturelle et plus grande sollicitude de la conseruation des en-
fants empruntez, que des leurs propres, II, 46.
La seule raison doit auoir la conduite de nos inclinations, II, 22.
L'ESPRIT DES ESSAIS. AGE. E.i5o
AGE.
Nos aines sont desnouôos à vingt ans, elles sont aiois ce qu'elles doiuent estre,
ot proniettont tout ce qu'elles pourront. laniais aine qui n'ait donné en cet aage
là, arie bien euidentc de sa force, n'en donna depuis la prcuue, I, 596.
En la vie des mesmes hommes souuent la belle moitié, ils la vescurent de la gloire
acquise en leur ieunesse : grands hommes depuis au prix de touts autres, mais
nullement au prix d'eux-mesmes, I, 598.
Il est possible qu'à ceux qui employent bien le temps, la science, et l'expé-
rience croissent depuis cet aage (trente ans) auec la vie : mais la viuacité, la
promptitude, la fermeté, et autres parties bien plus nostres, [)lus imi)ortantes et
essentielles, se fanissent et s'allanguissenl, I, '6\È.
AxMBASSADEURS.
l'ay trouué bien estrange, qu'il fust en la puissance d'vn Ambassadeur de dis-
penseï" sur les aduertissemens de grande conséquence qu'il doit faire à son mais-
tre. Et m'cust semblé l'office du seruiteur estre, de fidèlement représenter les
choses en leur entier, comme elles sont àduenuës : afin que la liberté d'ordonner,
iuger, et choisir demeurast au maistre. Car de luy altérer ou cacJier la vérité, de
peur qu'il ne laprcigne autrement qu'il ne doit, et que cela ne le pousse à quel-
que mauuais party, et ce pondant le laisser ignorant de ses affaires, cela m'eust
semblé appartenir à celuy, qui donne la loy, non à celuy qui la reçoit, au cura-
teur et maistre d'eschole, non à celuy qui se doit penser inférieur, conune en
authorité, aussi en prudence et bon conseil, I, 91.
AMBITION.
Nous ne sommes pas naiz pour nostre particulier, ains pour le publicq ; beau
mot, dequoy se couure l'ambition et l'auarice, I, 410.
L'ambition n'est pas vn vice de petis compaignons, et de tels clTorts que les
nostres, III, 520.
Où l'amour et l'ambition seroient en esgalc balance, et viendroient à se cho-
quer de forces pareilles, ie ne fay aucun double, que ceste-cy ne gaignast le prix
de la maistrise, II, (>42.
L'ambition ne se conduit iamais mieux selon soy, que par vne voyc csgarec et
inusitée, III, 322.
L'ambition paye bien ses gents, de les tenir tousiours en montre, comme la
statue d'vn marché. Ils n'ont pas seulement leur retraict pour retraitte, III, 156.
AME (immortalité de l'ame).
La génération de l'ame suyt la commune condition des choses humaines :
comme aussi sa vie. On la voyt naistre à mesme que le corps en est capable; es-
leuer ses forces comme les corporelles; on y recognoit la foiblesse de son enfance,
et auec le temps sa vigueur et sa maturité : et puis sa declination et sa vieillesse,
et en fin sa décrépitude. On l'appcrçoit capable de diuerses passions et agitée de
plusieurs mouuemens pénibles, (l'oii elle tombe en lassitude et en douleur, capa-
ble d'altération et de cliangement, d'allégresse, d'assopissement, et de langueur,
subjecte à ses maladies et aux ofïences, comme l'estomach ou le pied : esblouye
et troublée par la force du vin : desmue de son assiette, par les vapeurs d'vne
fieure chaude : endormie par l'application d'aucuns medicamens, et reueillée par
d'autres. Dauantage on sent l'ame s'engager en la mort, comme le corps. Ce que
l'image du sommeil nous montre assez : car c'est vne défaillance et cheute de
l'ame aussi bien que du corps, II, .316.
L'ame loge au cerueau : ce qui appert de ce que les blessures et accidens qui
touchent cette partie, offensent incontinent les facultez de l'ame, II, 312.
L'ame, par sa faculté ratiocine, se souuient, comprend, iugo, désire et exerce
toutes ses autres opérations par diuers instrumens du corps, comme le nocher
gouuerne son nauire selon l'expérience qu'il en a, II, 312.
E.lo6 • ESSAIS DE MONTAIGNE.
Nos aines se trouuent souuent airitoi^s de diuersos passions. D'où nous voyons
les enfans, qui vont tout naifuenient après la nature, pleurer et rire souuent de
mesme chose : Et quelque gentille flamme qui eschauffe le cœur des filles bien
nées, encore les despend on à force du col de leurs mères, pour les rendre à leur
espoux. Ainsin il n'est pas estrange de plaindre celuy-là mort, qu'on ne voudroit
aucunement estre en vie, I, 406.
Puisque l'ambition peut apprendre aux hommes, et la vaillance, et la tempé-
rance, et la libéralité, voire et la iustice : puis que l'auarice peut planter au
courage d'vn garçon de boutique, nourri à l'ombre et à l'oysiueté, l'asseurance
de se ietter si loing du foj'cr domestique, à la mercy des vagues et de Neptune
courroucé dans vn fraile bateau, et qu'elle apprend encore la discrétion et la
prudence : et que Venus mesme fournit de resolution et de hardiesse la ieunesse
encore soubs la discipline et la verge; et gendarme le tendre cœur des pucelles
au giron de leui*s mères : ce n'est pas tour de rassis entendement, de nous iuger
simplement par nos actions de dehors : il faut sonder iusqu'au dedans, et voir
par quels ressors se donne le bransle, I, 612.
Ce n'est pas pour la montre, que nostre ame doit iouër son rolle, c'est chez
nous au dedans, où nuls yeux ne donnent que les nostres : là elle nous couure do
la crainte de la mort, des douleurs et de la honte mesme : elle nous asseure là,
de la perte de nos enfans, de nos amis, et de nos fortunes : et quand l'opportu-
nité s'y présente, elle nous conduit aussi aux hazards de la guerre. Ce profit est
bien plus grand, et bien plus digne d'estre souhaité et espéré, que l'honneur et la
gloire, qui n'est autre chose qu'vn fauorable iugement qu'on fait de nous, II, 452.
l'ordonne à mon ame, de regarder et la douleur, et la volupté, de veuë pareil-
ment réglée : et pareillement ferme : mais gayement l'vne, l'autre seuerement.
Et selon ce qu'elle y peut apporter, autant soigneuse d'en esteindre l'vne, que
d'estendre l'autre, III, 692.
Il n'est point ame si chetifue et brutale, en laquelle on ne voye reluire quel-
que faculté particulière : il n'y en a point de si enseuelie, qui ne face vne saillie
par quelque bout. Et comment il aduienne qu'vne ame aueugle et endormie à
toutes autres choses, se trouue vifue, claire, et excellente, à certain particulier
efïect, il s'en faut enquérir aux maistres, II, 502.
Comme les âmes vicieuses sont incitées souuent à bien faire, par quelque im-
pulsion estrangere? aussi sont les vertueuses à faire mal. Il les faut doncq iuger par
leur estât rassis : quand elles sont chez elles, si quelquefois elles y sont : ou au
moins quand elles sont plus voysines du repos et en leur naifue assiette, III, 118.
La pluspart des facultez de nostre ame, comme nous les employons, troublent
plus le repos de la vie, qu'elles n'y seruent, III, 24.
Les secousses et esbranlemens que nostre ame reçoit par les passions corporelles,
peuuent beaucoup en elle : mais encore plus les siennes propres : ausqùelles elle
est si fort prinse, qu'il est à l'aduanture soustenable, qu'elle n'a aucune autre al-
leure et mouuement, que du souffle de ses vents, II, 350.
Nous ne sommes iamais sans maladie : des efTects d'vne passion ardente, nous
retombons aux effects d'vne passion frileuse, II, 354.
Les maux du corps s'esclaircissent en augmentant. Nous trouuons que c'est
goutte, ce que nous nommions rheume ou foulleure. Les maux de l'ame s'obscur-
cissent en leurs forces : le plus malade les sent le moins, III, 188.
Quand les médecins ne peuuent purger le caterrhe, ils le diuertissent, et âoa-
uoyent à vne autre partie moins dangereuse. C'est aussi la plus ordinaire recepto
aux maladies de l'ame. On luy fait peu choquer les maux de droit fil : on ne luy
en fait ny soustenir ny rabatre l'atteinte : on la luv fait décliner et gauchir.
III, 164.
Entre les functions de l'ame, il en est de basses. Qui ne la void encor par là,
n'acheue pas de la connoistre. Et à l'aduenture la remarque Ion mieux où elle va
son pas simple, I, 554.
Ny n'entendent les Stoïciens, que l'ame de leur sage puisse résister aux pre-
mières visions et fantaisies qui lu\- suruiennent : ains comme à vne subiection
naturelle consentent qu'il cède au grand bruit du ciel, ou d'vne ruine, pour
exemple, iusques à la palleur et contraction : ainsin autres passions, pourueu
L'ESPRIT DES ESSAIS. AME. E.157
que son opinion demeure sauue et entière, et que l'assiette de son discours n'en
souffre atteinte ny altération quelconque, et qu'il ne preste nul consentement à
son effroy et souffrance. Le sage Peripateticien ne s'exempte pas des perturba-
tions, mais il les modère, I, 82.
11 est malaisé que le discours et l'instruction, encore que nostre créance s'y ap-
plique volontiers, soyent assez puissants pour nous acheminer iusques à l'action,
si outre cela nous n'exerçons et formons nostre ame par expérience au train, au-
quel nous la voulons renger : autrement quand elle sera au propre des effets, elle
s'y trouuera sans doute empeschée, I, GOl.
le trouue par expérience, qu'il y a bien à dire entre les boutées et saillies de
l'ame, ou vne résolue et constante habitude : il n'est rien que nous ne puissions,
iusques à pouuoir ioindre à l'imbécillité de l'homme, vne resolution et asseu-
ranco do Dieu : mais c'est par secousse, II, 590.
A combien de vanité nous pousse cette bonne opinion, que nous auons de nous?
la plus réglée ame du monde, et la plus parfaicte, n'a que trop affaire à se tenir
en pieds, et à se garder de s'emporter par terre de sa foiblesse. De mille il n'en
est lias vne qui soit droite et rassise vn instant de sa vie : et se pourroit mettre
en doubte, si selon sa naturelle condition elle y peut iamais estre, I, 021.
Comme le corps est plus ferme à la charge en le roidissant : ainsin est l'ame,
I, l.'jti.
D'autant que l'ame est plus vuide, et sans contrepoids, elle se baisse plus faci-
lement souz la charge de la première persuasion, I, 288.
11 semble que l'ame csbranlee et esmeuë se perde en soy-mesme, si on ne lu.y
donne prinse : et faut tousiours luy fournir d'obiect où elle s'abutte et agisse; et
voyons qu'en ses passions elle se pipe plustost elle mcsme, se dressant vn faux
subiect et fantastique, voire contre sa propre créance, que de n'agir contre quel-
que chose, I, 40.
L'ame qui n'a point de but estably, elle se perd : Car comme on dit, c'est n'es-
tre en aucun lieu, que d'estre par tout, I, 58.
Le prix de l'ame ne consiste pas à aller haut, mais ordonnément. Sa grandeur
ne s'exerce pas en la grandeur : c'est en la médiocrité, III, 1 18.
La grandeur de l'ame n'est pas tant, tirer à mont, et tirer auant, comme sça-
uoir se ranger et circonscrire. Elle tient pour grand, tout ce qui est assez. Et
montre sa hauteur, à aimer mieux les choses moyennes, queleseminentes, III, 092.
Le relaschement et facilité honore ce semble à merueilles, et sied mieux à vne
ame forte et généreuse. Epaminondas n'estimoit pas que de se mesler à la dance
des garçons de sa ville, de chanter, de sonner, et s'y embesongner auec attention,
fust chose qui derogeast à l'honneur de ses glorieuses victoires, et à la parfaicte
reformation des mœurs qui estoit en luy, III, 690.
Nostre ame s'eslargit d'autant plus qu'elle se remplit, I, 204.
Aucune ame excellente, n'est exempte de meslange de folie, I, 628.
Les âmes à mesure qu'elles sont moins fortes, elles ont d'autant moins de moyen
de faire ny fort bien, ny fort mal, I, 550.
Tout mouuement nous descouure. Cette mesme ame de Caesar, qui se fait voir
à ordonner et dresser la bataille de Pharsale, elle se fait aussi voir à dresser des
parties oysiues et amoureuses, I, 552.
Les boiteux sont mal propres aux exercices du corps, et aux exercices de l'es-
prit les anies boiteuses, I, 218.
Nous ne sommes iamais chez nous, nous sommes tousiours au delà. La crainte,
le désir, l'espérance, nous eslancent vers l'aduenir : et nous desrobent le senti-
ment et la considération de ce qui est, pour nous amuser à ce qui sera, voire
quand nous ne serons plus, I, 28.
AMITIÉ.
Il n'est rien à quoy il semble que nature nous aye plus" acheminés qu'à la so-
ciété; dont le dernier point de perfection est l'amitié, I, 298.
L'amitié est iouye à mesure qu'elle est désirée, ne s'esleue, se nourrit, ny ne
E.daS ESSAIS DE MONTAIGNE.
pronfl acci'oissance qu'en la iouyssanco, comme estant spirituelle, et l'ame s'affi-
nant par l'vsage, I, 302.
Nostre liberté volontaire n'a point de production qui soit plus proprement
sienne, que celle de l'afTection ot l'amitié, I, 300.
Oh! vn amy! Combien est vraye cette ancienne sentence, que l'vsage en est
plus nécessaire, et plus doux, que des éléments de l'eau et du feu! III, 444.
Heureux, qui a peu rencontrer seulement l'ombre d'vn amy! I, 316.
En la vraye amitié, de laquelle ie suis expert, ie me donne à mon amy, plus
que ie ne le tire à moy. le n'ayme pas seulement mieux, luy faire bien, que s'il
m'en faisoit : mais encore qu'il s'en face, qu'à moy : il m'en faict lors le plus,
quand il s'en faict. Et si l'absence luy est ou plai.sante ou vtile, elle m'est bien
plus douce que sa présence ; et ce n'est pas proprement absence, quand il y a
moyen de s'entr'aduertir, III, 430.
L'vnique et principale amitié descoust toutes autres obligations. Le secret que
i'ay iuré ne deceller à vn autre, ie le puis sans pariure, communiquer à celuy,
qui n'est pas autre, c'est moy, I, 312.
Ce que nous appelions ordinairement amis et amitiez, ce ne sont qu'accoinc-
tances et familiaritez nouées par quelque occasion ou commodité, par le moyen
de laquelle nos âmes s'entretiennent. En l'amitié dequoy ie parle, si on me presse
de dire pourquoy ie l'aymoys, ie sens que cela ne se peut expi'imer, qu'en respon-
dant : Par ce que c'estoit luy, par ce que c'cstoit moy, I, 306.
Les amitiez communes on les peut départir, on peut aymer en cestuy-ci la
beauté, en cet autre la facilité de ses mœurs, en l'autre la libéralité, en celuj'4à
la paternité, en cet autre la fraternité, ainsi du reste : mais l'anùtié parfaite est
indiuisible : chacun se donne si entier à son amy, qu'il ne luy reste rien à dé-
partir ailleurs, I, 312.
Si en cette amitié dequoy ie parle, l'vn pouuoit donner à l'autre, ce seroit ce-
luy qui receuroit le bien-fait, qui obligeroit son compagnon, I, 312.
Depuis le iour que ie perdy mon amy, faict et accoustumé à estre deuxiesme
par tout, il me semble n'cstre plus qu'à demy, I, 316.
La mémoire de noz amis perdus nous aggrée comme l'amer au vin trop vieil,
II, 538.
Des enfans aux pères, c'est plustost respect. L'amitié se nourrit de communica-
tion, qui ne peut se trouuer entre eux, pour la trop grande disparité, et offence-
roit à l'aduenture les deuoirs de nature, I, 298.
De comparer à l'amitié l'affection enuers les femmes, quoy qu'elle naisse de
nostre choix, on ne peut. Son feu, ie le confesse, est plus actif, plus cuisant, et
plus aspi'e. Mais c'est vn feu téméraire et volage, ondoyant et diuers, feu de fieb-
ure, subiect à accez et remises, et qui ne nous tient qu'a vn coings I, 300.
En ces autres amitiez communes, il faut marcher la bride à la main, auec
prudence et précaution. Aymez le, disoit Chilon, comme ayant quelque iour à le
haïr: haïssez le, comme ayant à l'aymer. Ce précepte si abominable en la souue-
raine et maistresse amitié, est salubre en l'vsage des amitiez ordinaires et cous-
tumieres : à l'endi'oit desquelles il faut employer le mot d'Aristote, 0 mes amys,
il n'y a nul amy, I, 310.
le tésmoigne volonti(frs de mes amis, par ce que l'y trouue de loiiable. Et d'vn
pied de valeur, l'en fay volontiers vn pied et demy. Mais de leur prester les qua-
litez qui n'y sont pas, ie ne puis : ny les défendre ouuertement des imperfections
qu'ils ont, II, 514.
AMOUR.
L'amour est vue passion qui mesle à bien peu d'essence solide, beaucoup plus de
vanité et resuerie fieureuse, III, 256.
Tout le mouuement du monde se resoult et rend à cet accouplage : c'est vue
matière infuse par tou't: c'est vn centre où toutes choses regardent, III, 210.
Que celuy ayme pou, qui ayme à la mesui-e, I, 3.30.
Vn galant homme n'abandonne point sa poursuite, pour estre refusé, pourueu
L'ESPRIT DES ESSAIS. AMO. E.159
que ce soit vn refus de chastetc", non de choix. Nous auons beau iurer et menas-
ser, et nous plaindre : nous mentons, nous les en a) nions mieux. Il n'est point
de pareil leurre, que la sagesse, non rude, et renfrongnee, III, 218.
A quoy sert l'art de celte honte virginalle? cette froideur rassise, cette conte-
nance seuere, cette profession d'ignorance des choses, que les femmes sçauent
mieux, que nous qui les en instruisons, qu'à nous accroistre le désir do vaincre,
gourmander, et soûler à nostre appétit, toute cette cérémonie, et ces obstacles? La
beauté, toute puissante qu'elle est, n'a pas dequoy se faire sauourer sans cette
entremise, II, 43G.
L'amour est vn commerce qui a besoin de relation et de correspondance. Les au-
tres plaisirs que nous receuons, se peuuent recognoistre par recompenses de nature
diuei"se : mais cettuj -cy ne se paj'e que de mesme espèce de monnoye, III, 282.
L'amour ne me semble proprement et naturellement en sa saison, qu'en l'aage
voisin de l'enfance, III, 282. , ,
C'est vne agitation esueillee, viuo, et gaye. Elle n'est nuisible qu'aux fols, III,
27G.
Vieux, nous demandons plus, lors que nous apportons moins. Nous voulons le
plus choisii-, lors que nous méritons le moins d'estre acceptez, III, 280.
Qui no sçait en son eschole, combien on procède au rebours de tout ordre.
L'ostude, l'exercitation, l'vsage, sont voyes à l'insuffisance ; les nouices y régen-
tent. Sa conduicte a plus de galbe quand elle est meslee d'inaduortance, et de
trouble : les fautes, les succez contraires y donnent polncte et grâce. Pourueu
qu'elle soit aspre et affamée, il chaut peu, qu'elle soit prudente. Voyez comme.il
va chancelant, chopant, et folasti-ant. On le met aux ceiis, quand on le guide par
art, et sagesse. Et contraint on sadiuine liberté, quand on le submet à des mains
barbues et calleuses, III, 284.
L'amour est vn désir forcené après ce qui nous fuit. La iouïssance le'pcrd,
comme ayant fin corporelle et suiette à sacieté, I, 302.
L'amour n'est autre chose, que la soif de celte iouyssance en vn subiect désiré:
plaisir que nature nous donne et qui deuient vicieux ou par immoderation, ou~
par indiscrétion, III, 238.
Le désir et la iouyssance nous mettent pareillement en peine. La rigueur des
maistresses est ennuyeuse, mais l'aisance et la facilité l'est encores plus, la satiété
engendre le dégoust, II, ^4.
0 lo furieux aduantago que l'opportunité! Qui me demandcroit la première
partie en l'amour, ic respondrois, que c'est sçauoir prendre le temps : la seconde
de mesme : et encore la tierce. C'est vn poinct qui peut tout, III, 226.
En amour, qui principallement se rapporte à la veuë et à l'atouchement, on
faict quelque chose sans les grâces de l'esprit, rien sans les grâces cor|)orellcs : si
l'vne ou l'autre des deux beautez deuoit nécessairement y faillir, l'eusse choisi de
quitter plu.stost la spirituelle. Elle a son vsagn en meilleures choses, III, 152.
Sans espérance, et sans désir, nous n'allons plus rien qui vaille. Nostre maistrise
et entière possession, est infinieiuentà craindre pour la femme. Depuis qu'elle est
du tout rendue à la mercy de nostre foy, et constance, elle est vn peu bien hasar-
dée : soudain qu'elle est à nous, nous ne sommes plus à elle, III, 256.
D'où peut venir cette vsurpalion d'authorité souueraine, que vous prenez sur
celles, qui vous fauorisent à leurs despens, que vous en inuestissez incontinent
l'interest, la froideur, et vne auctorité maritale? C'est vne conuention libre; que
ne vous y prenez vous, comme vous les y voulez tenir ? Il n'y a point de pi-escription
sur les choses volontaires, III, 272.
En Italie, ils font les poursuyuans et les transis, de celles mesmes qui sont à
vendre : et se défendent ainsi : Qu'il y a des degrez en la iouj'ssanco : ot que par
seruices ils veulent obtenir pour eux, celle qui est la plus entière. Elles ne vendent
que le corps. La volonté ne peut estre mise en vente, elle est ti'op libre et trop
sienne. Ainsi ceux cy disent, que c'est la volonté qu'ils entreprennent, et ont rai-
son. C'est la volonté qu'il faut seruir et practiquer, III, 258.
On ayme vn corps sans ame, quand on ayme vn corps sans son consentement,
et sans son désir. Toutes iouyssances ne sont pas vues. Il y a des iouyssancos éthi-
ques et languissantes. Mille autres causes que la bien-vueillance, nous peuuent
E.160 ESSAIS DE MONTAIGNE.
acquérir cet octroj' des dames. Ce n'est suffisant tesmoignage d'affection. Il y peut
eschoir de la trahison, comme ailleurs, III, '260.
AMPLEUR DE VUE.
A voir nos guerres ciuiles, qui no crie que cette machine se bouleuerse, et que
le ionrdu iugement nous prent au collet: sans s'auiser que plusieurs pires choses
se sont veuës, et que les dix mille parts du monde ne laissent pas de galler le bon
temps cependant, I, 25().
Quant les vignes gèlent en mon village, mon prebstre en argumente l'ire de Dieu
sur la race humaine, et iuge que la pépie en tienne des-ia les Cannibales, I, 250.
ANIMAUX.
Tout ce qui nous semble estrange, nous le condamnons, et ce que nous niMiten-
dons pas. Il nous adulent ainsin au iugement que nous faisons des bestes, II, lOfi.
Nous ne sommes ny au dessus, ny au dessous : tout ce qui est sous le ciel, dit If
sage, court vue loy et fortune pareille. II y a quelque différence, il y a des ordres
et des degrez : mais c'est soubs le visage d'vne mesme nature. II, 1,7J.
Pourquoy les priuons nous et d'ame, et de vie, et de discours? y auons nous re-
cognu quelque stupidité immobile et insensible, nous qui n'auons aucun com-
merce auec eux que d'obéissance? Dirons nous, que nous n'auons veu en nulle
autre créature, qu'en l'homme, l'vsage d'vne ame i-aisonnable? Et quoy? Auons
nous veu quelque chose semblable au soleil? Laisse-il d'esti-e, par ce que nous
n'auons rien veu de semblable? et ses mouuements d'estre, par ce qu'il n'en est
point de pareils? Si ce que nous n'auons pas veu, n'est pas, nostre science est
meruêilleusement raccourcie, II, 136.
Quant ie rencontre parmy les opinions plus modérées, les discours qui essayent
à montrer la prochaine ressemblance de nous aux animaux: et combien ils ont
de part à nos plus grands priuileges ; et auec combien de vray-semblance on nous
les apparie; certes l'en l'abats beaucoup de nostre présomption, et me démets vo-
lontiers de cette royauté imaginaire, qu'on nous donne sur les autres créatures.
Quand tout cela en seroit à dire, si y a il vn certain respect, qui nous attache, et
vn gênerai deuoir d'humanité, non aux bestes seulement, qui ont vie et sentiment,
mais aux arbres mesmes et aux plantes. Nous deuons la iustice aux hommes, et
la grâce et la bénignité aux autres créatures, qui en peuuent estre capables. Il y
a quelque commerce entre elles et nous, et quelque obligation mutuelle, II, 108.
Nature leur a empreint le soing d'elles et de leur conseruation. Elles vont
iusques-là, de craindre leur empirement : de se heurter et blesser : que nous les en-
cheuestrions et battions, accidents subiects à leur sens et expérience. IMais que
nous les tuions, elles ne le peuuent craindre, ny n'ont la faculté d'imaginer et
conclure la mort, III, 582.
Les naturels sanguinaires à l'endroit des bestes, tesmoignent vne propension
naturelle à la cruauté, II, 104.
ART MILITAIRE.
La guerre est la plus grande et pompeuse des actions humaines, et tesmoignage
de nostre imbécillité et imperfection, II, 176.
le tiens que c'est aux Roys proprement, de s'animer contre les Roys, III, 84.
Le tromper peut seruir à la guerre pour le coup : mais celuy seul se tient pour
surmonté, qui sçait l'auoir esté ny par ruse, ny de sort, mais par vaillance de
troupe à troupe, en vne franche et iuste guerre, I, 46.
Les victoires, qui se gaignent sans le maistre, ne sont pas complètes. Ce niaistic
devroit rougir de honte, d'y prétendre part pour son nom, n'y ayant embesongné
que sa voix et sa pensée. Ny cela mesme, veu qu'en telle besongne les aduis et com-
mandemens, qui apportent l'honneur, sont ceux-là seulement, qui se donnent sur
le champ, et au propre de l'affaire. Nul pilote n'exerce son office de jued fei-me,
II. 544.
I/ESPUIT DES ESSAIS. ART. E.i61
Au mestior de la guerre, les apprentis se iettent bien souuent aux hazards,
d'autre inconsideration qu'ils ne font après y auoir esté escliauldez, II, ÏM.
Arrester son armée pied coj- attendant l'ennemy : autant cela aflbiljlit la vio-
lence, que le courir donne aux premiers coups : et quant et quant oste l'eslance-
ment des combattans les vus contre les autres, qui a accoustumé de les remplir
d'impétuosité, et de fureur, plus qu'autre chose, quand ils viennent à s'entrechoc-
quer de roideur, leur augmentant le courage par le cry et la course ; et rend la
chaleur des soldats en manière de dire refroidie et figée. — Mais on peut aussi bien
dire qu'au contraire la plus forte et roide assiette, est celle en laquelle on se tient
planté sans bouger, et que qui est en sa marche arresté, resserrant et espargnant
pour le besoing, sa force en soj'-mesmes, a grand aduantage contre celuy qui est
esbranlé, et qui a desia consommé à la course la moitié de son haleine? outre ce
que l'armée estant vn corps de tant de diuerses pièces, il est impossible qu'elle
s'esmeuue en cette furie, d'vn mouuement si iuste, qu'elle n'en altère ou rompe
son ordonnance : et que le plus dispost ne soit aux prises, auant que son com-
pagnon le secoure. — Cloarchus commandant les Grecs, les menoit tout bellement à
la chargo, sans se haster : mais <à cinquante pas près, il les mettoit à la course : es-
pérant par la brieueté de l'espace, mesnager et leur ordre, et leur haleine : leur
donnant cependant l'auantage de l'impétuosité, pour leurs personnes, et pour
leurs armes à trait. D'autres ont réglé ce double en leur armée de cette manière :
Si les ennemis vous courent sus, attendez les de pied coy : s'ils vous attendent de
pied coy, courez leur sus, I, 524.
Attendre l'ennemi en ses terres c'est auantage, de conseruer sa maison pure et
nette des troubles de la guerre, afin qu'entière en ses forces, elle puisse conti-
nuellement fournir deniers, et secours au besoing : la nécessité des guerres porte
à tous les coups, de faire le gast, ce qui ne se peut faire bonnement en nos biens
propres, et si le païsant ne porte pas si doucement ce rauage de ceux de son
party, que de l'ennemy, il s'en peut ajsément allumer des séditions, et des trou-
bles : la licence de desrober et piller, qui ne peut estre permise en son pais, est
vn grand support aux ennuis de la guerre : et qui n'a autre espei-ance de gain
que sa solde, il est mal aisé qu'il soit tenu en office, estant à deux pas de sa
femme et sa retraicte : celuy qui met la nappe, tombe tousioursdes despens; il y
a plus d'allégresse à assaillir qu'à deffendre : la secousse de la perte d'vne bat-
taille dans nos entrailles, est si violente, qu'il est malaisé qu'elle ne croulle tout le
corps, attendu qu'il n'est passion contagieuse, comme celle de la peur, ny qui se
prenne si aisément à crédit, et qui s'espande plus brusquement : et les villes qui
ont ouy l'esclat de cette tempeste à leurs portes, qui ont recueilly leurs Capitaines
et soldats tremblans encore, et hors d'haleine, il est dangereux sur la chaude,
qu'ils ne se iettent à quelque mauuais party. — De voir venir l'ennemy, on peut
imaginer au contraire, qu'estant chez soy et entre ses amis, on ne peut faillir d'auoir "
planté de toutes commoditez; les riuieres, les passages à vostre deuotion, vous con-
duiront et viures et deniers, en toute seureté et sans besoing d'escorte : on aura
ses populations d'autant plus afïectionnez, qu'elles auront le danger plus près :
qu'ayant tant de villes et de barrières pour sa seureté, c'est à soy de donner loy
au combat, selon son opportunité et aduantage : et s'il plaisoit de temporiser, à
l'abry et à son aise, on pourra voir morfondre son ennemy, et se deffaire soy
mesme, par les difficultez qui le combattroyent engagé en vnc terre contraire,
où il n'auroit deuant ny derrière luy, ny à costé, rien qui ne luy fist guerre :
nul moyen de rafraîchir ou d'cslargir son armée, si les maladies s'y mettoient,
ny de loger à couuert ses blessez; nuls deniers, nuls viures, qu'à pointe de lance;
nul loisir de se reposer et prendre haleine; nulle science de lieux, nj' de pays,
qui le .sceust deffendi-e d'embusches et surprises : et s'il venoit à la perte d'vne
bataille, aucun moyen d'en sauuer les reliques. — Et il n'j- a pas faute d'exemples
pour l'vn et pour l'autre party, I, 526.
Qui est ouuert d'vn costé, l'est partout. Nez pères ne pensèrent pas à bastir des
places frontières, II, 438.
Ce n'est pas bien procédé, de recognoistre seulement le flanc et le fossé : pour
iuger de la seureté d'vne place, il faut voir, par où on y peut venir, en quel estât
est l'assaillant, III, 404.
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. Il
E.162 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Celuy qui commande à tout vn pays ne se doit iamais engager qu'au cas de
cette extrémité, qu'il y allast de sa dernière place, et qu'il n'y eust rien plus à
espérer qu'en la deiTence d'icelle. Autrement il se doit tenir libre, pour auoir
moyen de prouuoir en général à toutes les parties de son gouuernement, II, 656.
A le bien prendre, il est vray-semblable, que le corps d'vne armée doit auoir
vne grandeur modérée, et réglée à certaines bornes, soit pour la difficulté de la
nourrir, soit pour la difficulté de conduire et tenir en ordre. Aumoins est il bien
aisé à vérifier par exemple, que les armées monstrueuses en nombre, n'ont
guère rien fait qui vaille. Ce n'est pas le nombre des hommes, ains le nombre des
bons hommes, qui faict l'aduantage : le demeurant seruant plus de destourbier
que de secours, II, 652.
Ceux qui assaillent, doiuent penser à entreprendre, non pas à craindre, II, 56.
Le vray veincre a pour son l'oolle l'estour, non pas le salut, I, 372.
Trouuer les ennemis par effect plus foibles qu'on n'auoit espéré n'est pas de
tel interost : que de les trouuer à la vérité hien forts, après les auoir iugez foi-
bles par réputation, II, 648.
Quintus Fabius Maximus RutiHanus, contre les Samnites, voyant que ses gents
de cheual à trois ou quatre charges auoient failly d'enfoncer le bataillon des en-
nemis, print ce conseil : qu'ils débridassent leurs cheuaux, et brochassent a toute
force des espérons : si que rien ne les pouuant arrester, au trauers des armes et
des hommes renuersez, ils ouurirent le pas à leurs gens de pied, qui parfirent
vne tres-sanglante deffaite, I, 540.
Il y a plusieurs exemples en l'histoire Romaine, des Capitaines qui comman-
doient à leurs gens de cheual de mettre pied à terre, quand ils se trouuoient
pressez de l'occasion, pour oster aux soldats toute espérance de suite, et pour
l'aduantage qu'ils esperoient en cette sorte de combat, I, 532.
Se reietter au danger après la victoire, c'est la remetti'e encore vn coup à la
mercy de la fortune : l'vne des plus grandes sagesses en l'art militaire, c'est de
ne pous.ser son ennemy au desespoir, I, 518.
11 fait dangereux assaillir vn homme, à qui vous auez osté tout autre moyen
d'eschapper que par les armes : car c'est vne violente maistresse d'escole que la
nécessité, I, 520.
D'autre part, quell' espérance peut-on auoir qu'il ose vn' autre fois attaquer
ses ennemis ralliez et remis, et de nouueau armez de despit et de vengeance, qui
ne les a osé ou sceu poursuiure tous rompus et effrayez? I, 518.
Tant que l'ennemy est en pieds, c'est à recommencer de plus belle : ce n'est
pas victoire, si elle ne met fin à la guerre, I, 518.
La vaillance a ses limites, comme les autres vertus : lesquels franchis, on se
trouue dans le train du vice : en manière que par chez elle se peut rendre à la
témérité, obstination et folie, qui n'en sçait bien les bornes, malaisez en vérité à
choisir sur leurs confins, I, 86.
Nous qui tenons celuy auoir l'honneur de la guerre, qui en a le profit, et disons
que. Où la peau du Lyon ne peut suffire, il y faut coudre vn lopin de celle du
Regnard, les plus ordinaires occasions de surprise se tirent de cette praticque :
et n'est heure, où vn chef doiue auoir plus l'œil au guet, que celle des parlemens
et traités d'accord. Et pour cette cause, c'est vne règle. Qu'il ne faut iamais que
le Gouuerneur en vne place assiégée sorte luy mesmes pour parlementer, I, 46.
A la guerre, on ne se doit attendre fiance des vns aux autres, que le dernier
seau d'obligation n'y soit passé : encores y a il lors assés affaire. Et a tousiours
esté conseil hazardeux, de fier à la licence d'vne armée victorieuse l'obseruation
de la foy, qu'on a donnée à vne ville, qui vient de se rendre par douce et fauo-
rable composition, et d'en laisser sur la chaude, l'entrée libre aux soldats, I, 50.
ART MILITAIRE (quelques façons de procéder de César).
Caîsar disoit qu'il falloit exécuter, non pas consulter les hautes entreprises,
II, 654.
11 auoit accoustumé de dire, qu'il aimoit mieux la victoire qui se conduisoit
L'ESPRIT DES ESSAIS. AUT. E.I63
par conseil que par force : Et en la guerre contre Petreius et Afranius, la For-
lune luy présentant vne bien apparente occasion d'aduantage ; il la refusa, es-
pérant auec vn peu plus de longueur, mais moins de liazard, venir à bout de ses
ennemis, II, 652.
11 estoit excellent mesnager du temps : car il redit maintes-fois, que c'est la
plus souueraine partie d'vn capitaine, que la science de prendre au poinct les
occasions, et la diligence, qui est en ses exploicts, à la vérité, inouye et incroya-
ble. II, GW.
Il accoustumoit sur tout ses soldats à obeyr simplement, sans se mesler de con-
treroUer, ou parler des desseins de leur Capitaine; lesquels il ne leur comuiuni-
quoit que sur le poinct de l'exécution, II, G 18.
C'estoit sa coustume, de se tenir nuict et iour près des ouuriers, qu'il auoit en
besoigne, II, 652.
En toutes entreprises de conséquence, il faisoit tousiours la descouuerte luy-
mesme, et ne passa iamais son armée en lieu, qu'il n'eust premièrement recognu,
II, 652.
Il faisoit grand cas de ses exhortations aux soldats auant le combat, II, G50.
Où les occasions de la nécessité se presentoyent, et où la chose le requeroit, il
ne fut iamais homme faisant meilleur marché de sa personne, II, 654.
Il auoit cette opinion, que la science de nager estoit tres-vtile à la guerre, et
en tira plusieurs commoditez : s'il auoit à faire diligence, il franchissoit ordi-
nairement à nage les riuieres qu'il rencontroit, II, 658.
11 tenoit la bride plus estroite a ses soldats, et les tenoit plus de court estants
près des ennemis, II, 658.
11 ne requeroit en ses soldats autre vertu que la vaillance, ny ne punissoit
guère autres vices, que la mutination, et la desobeyssance, II, 6^18.
A cette courtoisie, il mesloit toutefois vne grande seuerité, à les reprimer. 11
les rappaisoit plus par authorité et par audace, que par douceur, II, 650.
AUTEURS.
La science, le stilc, et telles parties, que nous voyons es ouurages estrangers,
nous touchons bien aysément si elles surpassent les nostres : mais les simples
productions de l'entendement, chacun pense qu'il estoit en luy de les rencontrer
toutes pareilles, et en apperçoit malaisément le poids et la difficulté, si ce n'est,
et à peine, en vne extrême et incomparable distance, II, 510.
Les escriuains indiscrets de nostre siècle, qui, parmy leui*s ouurages de néant,
vont semant des lieux entiers des anciens autheurs, pour se faire honneur, font
le contraire. Car cett' infinie dissemblance de lustres rend vn visage si pasle, si
terni, et si laid à ce qui est leur, qu'ils y perdent beaucoup plus qu'ils n'y gai-
gnent, I, 228.
N'ayans rien en leur vaillant, par où se produire, ils cherchent à se présenter
par vne valeur purement estrangere, I, 2^30.
le voudroye que chacun escriuist ce qu'il sçait, et autant qu'il en sçait : non
en cela seulement, mais en tous autres subiects. Car tel peut auoir quelque par-
ticulière science ou expérience de la nature d'vne riuiore, ou d'vne fontaine, qui
ne sçait au reste, que ce que chacun sçait : il entreprendra toutesfois, pour faire
courir ce petit loppin, d'escrire toute la Physique, I, 358.
Quiconque met sa décrépitude soubs la presse, faict folie, s'il espère en es-
preindre des humeurs, qui ne sentent le disgratié, le resueui- et l'assoupy. Au-
tant est la vieillesse incommode à cette nature de besongne, qu'à toute autre.
Nostre esprit se constipe et s'espessit en vieillissant, III, 586.
AVARICE.
L'auarice n'a point de plus grand destourbier que soy-mesme. Plus elle est
tendue et vigoureuse, moins elle en est feitile. Communément elle attrape plus
promptement les richesses, masquée d'vn image de libéralité^ III, 494.
E.1G4 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Ce n'est pas la disette, c'est plustost l'abondance qui produict l'auarice, I, IGG.
Non la vieillesse seulement, mais toute imbécillité, est promotrice d'auarice,
II, 24.
L'auarice, folie si commune aux vieux, est la plus ridicule de toutes les hu-
maines folies, I, 472.
BEAUTÉ.
La beauté estvne pièce de grande recommendation au commerce des hommes.
C'e.st le premier moyen de conciliation des vns aux autres; et n'est homme si bar-
bare et si rechigné, qui ne se sente aucunement frappé de sa douceur, II, 478.
le ne puis dire assez souuent, combien ie l'estime qualité puissante et aduan-
tageuse. Nous n'en auons point qui la surpasse en crédit. Elle tient le premier
rang au commerce des hommes. Elle se présente au douant : seduict et préoc-
cupe nostre iugement, auec grande authorité et merueilleuse impression. le main-
tiendroy volontiers le rang des biens : La santé, la beauté, la richesse, III, 588.
11 est vray-semblable que nous ne sçauons guerre, que c'est que beauté en
nature et en gênerai, puisque à l'humaine nous donnons tant de formes diuerses,
de laquelle, s'il y auoit quelque prescription naturelle, nous la recognoistrions en
commun, comme la chaleur du feu. Nous en fantasions les formes à nostre ap-
pétit, II, 192.
La beauté de la taille, est la seule beauté des hommes : les autres beautez, sont
pour les femmes, II, 482.
C'est leur vray aduantage : elle est si leur, que la nostre, quoy qu'elle désire
des traicts vn peu autres, n'est, en son point, que confuse auec la leur, puérile
et imberbe, II, 152.
Il y a des beautez, non fieres seulement, mais aigres : il y en a d'autres douces,
et encores au delà, fades, III, 590.
Il est saison à trente ans, qu'elles changent le titre de belles en bonnes, III, 284.
BIEN, BIENS.
Les Dieux nous vendent tous les biens qu'ils nous donnent : c'est à dire, ils ne
nous en donnent aucun pur et parfaict, et que nous n'achetions au prix de quel-
que mal, II, 538.
Il n'est point de combat si violent entre les philosophes, si aspre, que celuy
qui se dresse sur la question du souuerain bien de l'homme : Les uns disent
nostre bien estre, loger en la vertu : d'autres, en la volupté : d'autres, au con-
sentir à Nature : qui en la science : qui à n'auoir point de douleur, II, 370.
Nostre bien estre, ce n'est que la priuation d'estre mal. Voyla pourquoy la
secte de philosophie, qui a le plus faict valoir la volupté, encore l'a elle rengée
à la seule indolence. Le n'auoir point de mai, c'est le plus auoir de bien, que
l'homme puisse espérer, II, 212.
Nostre bien et nostre mal ne tient qu'à nous, I, 551.
L'aisance et l'indigence dcspcndcnt de l'opinion d'vn chacun, et non plus la
richesse, que la gloire, que la santé, n'ont qu'autant de beauté et de plaisir, que
leur en preste celuy qui les possède, I, 474.
Le voir sainement les biens, tire après soy le voir sainement les maux, II, G92.
BON SENS.
On dit communément que le plus iuste partage que Nature nous aye fait de
grâces, c'est celuy du sens : car il n'est aucun qui ne se contente de ce qu'elle
luy en a disti-ibué, II, 510.
Chascun est bien ou mal, selon qu'il s'en trouue, I, 471.
L'ESPRIT DES ESSAIS. BON. E.163
BOxNHEUR.
Non de qui on le croid, mais qui le croid de soy, est content : et en cella seul
la créance se donne essence et vérité, I, 474.
Maintenons en la mémoire seulement le bonheur passé, pour en effacer les
desplaisirs que nous auons soufferts, II, 214.
Il ne faut iuger de nostre heur, qu'après la mort, I, 102.
Nul auant mourir ne peut estre dict heureux. Celuy la mesme, qui a vescu, et
qui est mort à souhait, peut il estre dict heureux, si sa renommée va mal, si sa
postérité est misérable? I, 32.
BONTÉ.
Toute autre science, est dommageable à celuy qui n'a la science de la bonté, 1, 218.
CARACTÈRE.
le loue vn'ame à diuers estagcs, qui sçache et se tendre et se desmonter : qui
soit bien par tout où sa fortune la porte : qui puisse deuiser auec son voisin, de
son bastiment, de sa chasse et de sa querelle : entretenir auec plaisir vn char-
pentier et vn iardinier. l'enuie ceux, qui sçauent s'apriuoiser au moindre de leur
suitte, et dresser de l'entretien en leur propre train, III, 140.
le hay à mort de sentu* au dateur, I, 438.
De moy i'ayme mieux estre importun et indiscret, que dateur et dissimulé,
II, 406.
l'honnore le plus ceux que i'iionnore le moins : et où mon ame marche d'vne
grande allégresse, i'oublie les pas de la contenance : et m'offre maigrement et
fièrement, à ceux à qui ie suis : et me présente moins, à qui ie me suis le plus
donné, I, 438.
le congnois mes gens au silence mesme, et à leur soubsrire, et les descouure
mieux à l'aduanture à table, qu'au conseil, III, 148,
CÉRÉMONIE.
Nous ne sommes que cérémonie, la cérémonie nous emporte, et laissons la sub-
stance des choses : nous nous tenons aux branches et abandonnons le tronc et
le corps. Nous auons appris aux Dames de rougir, oyants seulement nommer, ce
qu'elles ne craignent aucunement à faire : nous n'osons appeller à droict noz
membres, et ne craignons pas de les employer à toute sorte de débauche. La
cérémonie nous deffend d'exprimer par paroUes les choses licites et naturelles, et
nous l'en croyons : la raison nous deffend de n'en faire point d'illicites et mau-
uaises, et personne ne l'en croit, II, 466.
CHANGEMENTS.
En toutes choses, sauf simplement aux mauuaises, la nmtation est à craindre,
I, .500.
CHASSE.
Les poètes font Diane victorieuse du brandon et des flesches de Cupidon, II, 100.
CHASTETÉ.
Certes le plus ardu et le plus vigoureux des humains deuoirs, nous l'auons re-
signé aux dames, et leur en quittons gloire, III, 218.
L'idée mesme que nous forgeons à leur chasteté est ridicule. Le neud du iuge-
ment de ce deuoir, gist principallement en la volonté. Il y a eu des maris qui ont
souffert cet accident, non seulement sans reproche et offence enuers leurs fem-
mes, mais auec singulière obligation et recommandation de leur vei'tu. Telle, qui
E.166 ESSAIS DE MONTAIGNE.
aynioit iiiieiix son lionnour que sa vie, l'a prostitué à l'appétit forcené d'vn mor-
tel enneni}', pour sauner la vie à son mary : et a faict pour luy ce qu'elle n'eust
aucunement faict pour soy, III, 230.
Cette grande et violente aspreté d'obligation, que nous leur enioignons, pro-
duit deux efl'ects contraires à nostre fin : elle aiguise les poursuyuants, et faict
les femmes plus faciles à se rendre, car la delTence les incite et conuie, III, 236.
Le prix de la victoire se considère par la difficulté. Voulez vous sçauoir quelle
impression a faict en son cœur, vostre seruitude et vostre mérite? mesurez-le à
ses mœurs. Telle peut donner i)lus, qui ne donne pas tant. L'obligation du bien-
faict, se rapporte entièrement à la volonté de celuy qui donne : les autres cir-
constances qui tombent au bien faire, sont muettes, mortes et casueles. Ce peu
luy couste plus à donner, qu'à sa compaigne son tout. Si en quelque chose la
rareté sert d'estimation, ce doit estre en cecy. Ne regardez pas combien peu
c'est, mais combien peu l'ont, III, 220.
Telle a les mœurs desbordées, qui a la volonté plus reformée que n'a cet'
autre, qui se conduit soubs vne apparence réglée. Comme nous en voyons, qui
se plaignent d'auoir esté vouées à chasteté, auant l'aage de cognoissance : l'en
ay veu aussi, se plaindre véritablement, d'auoir esté vouées à la desbauche,
auant l'aage de cognoissance. Le vice des parens en peut estre cause : ou la force
du besoing, qui est vn rude conseiller, III, 232.
le ne sçay si les exploicts de Cajsar et d'Alexandre surpassent en rudesse la re-
solution d'vne belle ieune femme, nourrie à nostre façon, à la lumière et com-
merce du monde, battue de tant d'exemples contraires, se maintenant entière,
au milieu de mille continuelles et fortes poursuittes. Il n'y a point de faire, plus
espineux, qu'est ce non faire, ny plus actif. le trouue plus aysé, de porter vne
cuirasse toute sa vie, qu'vn pucelage, III, 218.
C'est donc folie, d'essayer à brider aux femmes vn désir qui leur est si cuysant
et si naturel. Et quand ie les oye se vanter d'auoir leur volonté si vierge et si
froide, ie me moque d'elles. Elles se reculent trop arrière. le suis fort seruiteur
de la nayfueté et de la liberté : mais il n'y a remède, si elle n'est du tout niaise
ou enfantine, elle est inepte, et messeante aux dames en ce commerce : elle gau-
chit incontinent sur l'impudence. Leurs desguisements et leurs figures ne trom-
pent que les sots : le mentir y est en 'siège d'honneur : c'est vn destour qui nous
conduit à la vérité; par une fauce porte, III, 228.
Refuser tout abbor, c'est tesmoignage de foi blesse, et accusation de sa propre
facilité : vne dame non tentée, ne se peut venter de sa chasteté, III, 220.
Des violences qui se font à la conscience, la plus à euiter à mon aduis, c'est
celle qui se faict à la chasteté des femmes; d'autant qu'il y a quelque plaisir cor-
porel, naturellement meslé parmy : et à cette cause, le dissentement n'y peut es-
tre assez entier; et semble que la force soit meslée à quelque volonté, I, 640.
CHATIMENTS.
Les chastiemens, qui se font auec poix et disci'etion, se reçoiuent bien mieux,
et auec plus de fruit, de celuy qui les souffre, II, 608.
CHOSES.
Nous sçauons les choses en songe, et les ignorons en vérité, II, 226.
Combien y a il de choses peu vraj -semblables, tesnioignees par gens dignes de
foy, desquelles si nous ne pouuons estre persuadez, au moins les faut-il laisser en
suspens, I, 292.
Assez de choses peuuent estre et auoir esté, desquelles nostre discours ne sçau-
roit fonder la nature et les causes, II, 130.
La foiblesse de nostre condition, fait que les choses en leur simplicité et pu-
reté naturelle ne puissent pas tomber en nostre vsage. Les elemens que nous
iou\'SSons, sont altérez : et les métaux de mesme, et l'or, il le faut empirer par
quelque autre matière, pour l'accommoder à nostre seruice, II, 536.
L'ESPRIT DES ESSAIS. CIIO. E.167
Les gloses augmentent les doubles et l'ignorance : il ne se voit aucun iiure, soit
humain soit diuin, sur qui le monde s'embesongne, duquel l'interprétation face
tarir la difficulté : il se sent par expérience, que tant d'interprétations dissipent
la vérité et la rompent, III, 604,
L'humaine cognoissance, acheminée par les sens, peut iuger des causes des
choses iusques à certaine mesure, mais estant arriuée aux causes extrêmes et
premières, il faut qu'elle s'arreste et qu'elle rebouche : à cause ou de sa foiblesse,
ou de la difficulté des choses. Elle a certaines mesures de puissance, outre les-
quelles c'est témérité de l'employer, II, 336.
Les choses qui sont à nostre cognoissance les plus grandes, nous les iugcons
estre les extrêmes que nature face en ce genre, I, 290.
Les choses dequoy on se moque, on les estime sans prix, I, 556.
Si n'est-ce pas entièrement mesdire de quelque chose, d'y trouuer des deffauts:
il s'en trouue en toutes choses, pour belles et désirables qu'elles soyent, III, 320.
Les hommes sont tourmentez par les opinions qu'ils ont des choses, non par
les choses mesmes, I, 440.
La nouvelleté des choses nous incite plus que leur grandeur, à en rechercher
les causes, I, 290.
De toutes choses les naissances sont l'oibles et tendres. Pourtant faut-il auoirles
yeux ouuertsaux commencements. Car comme lors en sa petitesse, on n'en descou-
ure pas le danger, quand il est accreu, on n'en descouure plus le remède, III, 516.
Peu de gens faillent : notamment aux choses malaysées à persuader, d'affermer
qu'ils l'ont veu : ou d'alléguer des tesmoins, desquels l'authorité arreste notre
contradiction. Suyuant cet vsage, nous sçauons les fondemens, et les moyens, de
mille choses qui ne furent onques. Et s'escarmouche le monde, en mille questions,
desquelles, et le pour et le contre, est faux, III, 528.
Combien de choses nous seruoyent hyer d'articles de foy, qui nous sont fables
auiourd'huy? I, 296.
Pour iuger des choses grandes et haqltes, il faut un' ame de mesme, autre-
ment nous leur attribuons le vice, qui est le nostre. Il n'importe pas seulement
qu'on voye la chose, mais comment on la voye, I, 474.
Les choses à part elles, ont peut estre leurs poids et mesures, et conditions :
mais au dedans, en nous, nostre ame les leur taille comme elle l'entend. La mort
est effroyable à Cicero, désirable à Caton, indifférente à Socrates, I, 554.
Les choses ne sont pas si douloureuses, ny difficiles d'elles mesmes : mais nos-
tre foiblesse et laschcté les fait telles, I, 474.
Des choses incommodes, il n'en est aucune si laide et vitieuse et euitable, qui
ne puisse deuenir acceptable par quelque condition et accident, tant l'humaine
posture est vaine, III, 200.
CIVILITÉ.
Non seulement chasque pais, mais chasque cité et chasque vacation a sa ciui-
lité particulière. La nostre Françoise a quelques formes pénibles, lesquelles
pourueu qu'on oublie par discrétion, non par erreur, on n'en a pas moins de
grâce. l'ay veu souucnt des hommes inciuils par trop de ciuilité, et importuns
de courtoisie, I, 84.
Pour moy ie retranche en ma maison autant que iepuis de la cerimonie. Quel-
qu'vn s'en offence : qu'y fcrois-ic 1 11 vaut mieux que ie l'offence pour vne fois,
que moy tous les iours : ce seroit vne subiection continuelle. A quoy faire fuit-
on la seruitude des cours, si on l'entraîne iusques en sa tanière? I, 84.
C'est inciuilité à vn Gentil-homme de partir de sa maison, comme il se faict le
plus sonnent, pour aller au deuant de celuy qui le vient trouuer, pour grand
qu'il soit : et il est plus respectueux et ciuil de l'attendre, pour le receuoir, ne fust
que de peur de faillir sa route; il suffit de l'accompagner à son partement, I, 84.
C'est vne règle commune en toutes assemblées, qu'il touche aux moindres de
se trouuer les premiers à l'assignation, d'autant qu'il est mieux deu aux plus ap-
parens de se faire attendre, I, 81.
C'est au demeurant vne tres-vtilc science que la science de l'entregent. Elle est.
E.168 ESSAIS DE MONTAIGNE.
comme la grâce et la beauté, conciliatrice des premiers aboixls de la société et l'a-
miliarit»>, I, 86.
Entre les masles dépuis que l'altercation de la prerogatiue au marcher ou à se
seoir, passe trois répliques, elle est inciuile, III, 444.
COLÈRE.
11 n'est passion qui osbranle tant la sincérité des iupenients, que la cholere.
Pendant que le pouls nous bat, et que nous sentons de l'esmotion, remettons la
partie: les choses nous sembleront à la vérité autres, quand nous serons r'accoi-
sez et refroidis. Au trauers d'elle, les fautes nous apparoissent plus grandes,
comme les corps au trauers d'vn brouillas, II, (j08.
La tempeste ne s'engendre que de la concurrence des choleres, qui se produi-
sent volontiers l'vne de l'autre, et ne naissent en vn poinct. Donnons à chacune
sa course, nous voyla tousiours en paix. Vtile ordonnance, mais de difficile exécu-
tion, II, 618.
C'est vn' arme de nouuel vsage : nous remuons les autres armes, ceste cy nous
remue : nostre main ne la guide pas, c'est elle qui guide nostre main : elle nous
lient, nous ne la tenons pas, II, 618.
C'estvne passion qui se plaisten soy,etqui s(> flatte. Combien de fois nous estans
esbranlez soubs vne fauce cause, si on vient à nous présenter quelque bonne def-
fence ou excuse, nous despitons nous contre la vérité mesme et l'innocence, II, 612.
On incorpore la cholere en la cachant : Il vaut mieux qu'elle agisse au dehors,
que de la plier contre nous, II, 616.
La philosophie veut qu'au chastiement desoffences receuës, nous en distrayons
la cholere: non afm que la vengeance en soit moindre, ains au rebours, afin
qu'elle en soit d'autant mieux assenée et plus poisante. A quoy il luy semble que
cette impétuosité porte empeschement. Non seulement la cholere trouble : mais
de soy, elle lasse aussi les bras de ceux qui chastient. Ce feu estourdit et consomme
leur force, III, 494.
L'espander en empesche l'effect et le poids. La criaillerie téméraire et ordinaire,
passe en vsage, et fait que chacun la mesprise, II, 616.
COMBAT.
Le but et la visée, non seulement d'vn Capitaine, mais de chasque soldat, doit
regarder la victoire en gros; et que nulles occurrences particulières, quelque in-
terest qu'il ayt, ne le doiuent diuertir de ce point là, I, 504.
COMMANDEMENT.
Il n'appartient de commander à homme, qui ne vault mieux que ceux à qui il
commande, 1, 488.
COMPASSION.
La plus commune façon d'amollir les cœurs de ceux qu'on a offencez, lors qu'ayans
la vengeance en main, ils nous tiennent à leur mercy, c'est de les esmouuoir par
submission, à commisération et à pitié : toutesfois la brauerie, la constance, et la
resolution, moyens tous contraires, ont quelquesfois scruy à ce mesme effet, I, 17.
CONDUITE (fortune).
C'est vne absolue perfection, et comme diuine, de sçauoir iouyr loyallement de
son estre. Nous cherchons d'autres conditions, pour n'entendre l'vsage des nostres :
et sortons hors de nous, pour ne sçauoir quel il y faict. Si auons nous beau
monter sur des eschasses, sur des eschasses encores faut-il marcher de nos Ïam-
bes, III, 702.
L'ESPRIT DES ESSAIS. GOND. E.169
L'apretô et la violence des désirs, empesche plus, qu'elle ne sert à la conduite
de ce qu'on entreprend. Nous remplit d'impatience enuers les euenemens, ou
contraires, ou tardifs : et d'aigreur et de soupçon enuers ceux, auec qui nous
negotions, III, 492.
Nous ne conduisons iamais bien la chose de laquelle nous sommes possédez et
conduicts. Celuy qui n'y employé que son iugement, et son addresse, il y procède
plus gayement : il feint, il ployé, il diffère tout h son aise, selon le besoing des
occasions : il faut d'atteinte, sans tourment, et sans affliction, prest et entier pour
vne nouuelle entreprise : il marche tousioui-s la bride à la main. En celuy qui est
enyuré de cette intention violente et tyrannique, on voit par nécessité beaucoup
d'imprudence et d'iniustice. L'impétuosité de son désir l'emporte. Ce sont mou-
uements téméraires, et, si Fortune n'y preste beaucoup, de peu de fruit, III, 492.
Le jeune doit faire ses apprests, le vieil en iouïr, disent les sages. Et le plus
grand vice qu'ils remerquent en nous, c'est que noz désirs raieunissent sans
cesse. Nous auons le pied à la fosse, et noz appetis et poursuites ne font que nais-
tre, II, 588.
Ne pouuant régler les euencments, ie me règle moy-mesme : et m'applique à
eux, s'ils ne s'appliquent à moy, II, 486.
Qui fait bien principalement pour sa propre satisfaction, ne s'altère guère pour
voir les hommes iuger de ses actions contre son mérite, III, 510.
Pour me sentir engagé à vne forme, ie n'y oblige pas le monde, comme chas-
cun fait, et croy, et conçoy mille contraires façons de vie, I, 398.
l'ayme les malheui-s tous purs, qui ne m'exercent et tracassent plus, après l'in-
certitude de leur rabillage : et qui du premier saut me poussent droictement eu
la souffrance. L'horreur de la cheute me donne plus de fiebure que le coup. Le
ialoux, a plus niauuais conte que le cocu. Et y a moins de mal souuent, à perdre
sa vigne, qu'à la plaider. La plus basse marche, est la plus ferme : c'est le siège
de la constance. Vous n'y auez besoing que de vous. Elle se fonde là, et appuyé toute
en soy, II, 488.
Pour souffrir l'importunité des accidents contraires, ausquels nous sommes
subjects, ie nourris autant que ie puis en moy cett' opinion: m'abandonnant du
tout à la Fortune, de prendre toutes choses au pis; et ce pis là, me résoudre à le
porter doucement et patiemment, II, 486.
l'aiguise mon courage vers la patience, ie l'affoiblis vers le désir, III, 322.
le m'attache à ce que ie voy, et que ie tiens, et ne m'eslongue guerre du port,
II, 490.
En tous deuoirs de la vie, la route de ceux qui visent à l'honneur, est bien di-
uerse à celle que tiennent ceux qui se proposent l'ordre et la raison, III, 514.
Qui ne participe au hasard et difficulté, ne peut prétendre interestà l'honneur
et plaisir qui suit les actions hazardeuses, III, 328.
Si ce qu'on a, suffit à maintenir la condition en laquelle on est nay, et dressé,
c'est folie d'en lascher la prise, sur l'incertitude de l'augmenter, II, 490.
Celuy à qui la Fortune refuse dequoy planter son pied, et establir vn estre tran-
quille et reposé, il est pardonnable s'il iette au hazard ce qu'il a, puis qu'ainsi
comme ainsi la nécessité l'enuoye à la queste, II, 490.
CONFÉRENCE.
Aux disputes et conférences, tous les mots qui nous semblent bons, ne doiuent
pas incontinent estre acceptez. La plus part des hommes sont riches d'vne suffi-
sance estrangere. 11 peut bien aduenir à tel, de dire vn beau traict, vne bonne
responce et sentence, et la mettre en auant, sans en cognoistre la force, III, 360.
CONFESSION.
Comme en matière de biens faicts, de mesme en matière de mesfaicts, c'est par
fois satisfaction. Est-il quelque laideur au failhr, qui nous dispense de nous en
confesser? III, 188.
E.170 ESSAIS DE MONTAIGNE.
La pii'e de me actions ot conditions, ne me semble pas si laide, comme ie
trouue laid et lasche, de ne l'oser aduouer. Chacun est discret en la confession,
on le deuroit estre en l'action. La hardiesse de faillir, est aucunement compensée
et bridée, parla hardiesse de le confesser. Qui s'obligeroit à tout dire s'obligeroit
à ne rien faire de ce qu'on est contraint de taire, III, 186.
CONFIANCE.
La fiance de la bonté d'autruy, est un non léger tesmoignage de la Vjonté propre,
I, 472.
le me fie aysement à la foy d'autruy : mais mal-aysement le feroi-ie, lors que ie
donrois à iuger l'auoirplustost faict par desespoir et faute de cœur, que par fran-
chise et fiance de sa loyauté, I, 48.
CONNAISSANCE DE SOI-MÊME.
Sauf toy, ô homme, chasque chose s'estudie la première, et a selon son besoin,
des limites à ses trauaux et désirs. Il -n'en est vne seule si vuide et nécessiteuse
que toy, qui embrasses l'vniuers. Tu es le scrutateur sans cognoissance : le magis-
trat sans iuridiction : et après tout, le badin de la farce, III, 482.
Cette opinion et vsance commune, de regarder ailleurs qu'à nous, a bien pour-
ueu à nostre affaire. C'est vn obiect plein de mescontentement. Nous n'y voyons
que misère et vanité. Pour ne nous desconforter. Nature a reietté bien à propos,
l'action de nostre veuë, au dehors, III, 482.
Si l'homme ne se cognoist, comment cognoist-il ses functions et ses forces? II, 338.
Si chacun se regardoit attentiuement, il se trouueroit plein d'inanité et de fa-
daise. Nous en sommes tous confits, tant les vns que les autres. Mais ceux qui le
sentent, en ont vn peu meilleur compte.: encore ne sçay-ie, III, 482.
Tous les iours et à toutes heures, nous disons d'vn autre ce que nous dirions
plus proprement de nous, si nous sçauions replier aussi bien qu'estendre nostre
considération, II, 38.
De l'expérience que i'ay de moy, ie trouue assez dequoy me faire sage, si i'estoy
bon escholier. Qui remet en sa mémoire l'excez de sa cholere passée, et iusque où
cette fieure l'emporta, voit la laideur de cette passion, et en conçoit vne haine
plus iuste. Qui se souuient des maux qu'il a couru, de ceux qui l'ont menasse,
des légères occasions qui l'ont remué d'vn estât à autre, se prépare par là, aux
mutations futures, et à la rccognoissance de sa condition. Escoutons y seulement :
nous nous disons, tout ce, dequoy nous auons principalement besoing. Qui se
souuient de s'estre tant et tant de fois mesconté de son propre iugement : est-il
pas vn sot, de n'en entrer pour iamais en deffiancc? III, 616.
Nulle particulière qualité n'enorgueillira celuy, qui mettra quand et quand en
compte, tant d'imparfaites et foibles qualitcz autres, qui sont en luy, et au bout,
la nihilité de l'humaine condition, I, 682.
Ce que nous rions des autres adulent à chacun de nous : nul ne cognoist estre
auare, nul conuoiteux : ic ne suis pas sumptueux, disons nous, mais la ville re-
quiert vne grande despence : ce n'est pas ma faute, si ie suis cholere, c'est la faute
de la ieunesse. Ne cherchons pas hors de nous nostre mal, il est planté en nos
entrailles. Et cela mesme, que nous ne sentons pas estre malades, nous rend la
guerison plus malaisée, II, 566.
En toutes nos fortunes, nous nous comparons à ce qui est au dessus de nous-,
et regardons vers ceux qui sont mieux. Mesurons nous à ce qui est au dessous :
il n'en est point de si misérable, qui netrouue mille exemplesoù se consoler, 111,402.
Si quelcun s'enyure de sa science, regardant souz soy : qu'il tourne les jeux au
dessus vers les siècles passez, il baissera les cornes, y trouuant tant de milliers
d'esprits, qui se foulent aux pieds, I, 682.
Quand i'oy reciter Testât de quelqu'vn, ie ne m'amuse pas à luy : ie tourne in-
contimenl les yeux à moy, voir comment l'en suis. Tout ce qui le touche me re-
garde. Son accident m'aduertit et m'esueille de ce costé-là, II, 38.
La coustume a faict le parler de soy, vicieux : et le prohibe obstinéement en
L'ESPRIT DES ESSAIS. CONxX. E.171
hayne de la ventanco, qui semble tousiours estre attachée aux propres tesmoigna-
ges. le trouue plus de mal que de bien à ce remède, I, 678.
Quiseconnoistrabicn, qu'il sedonnehardimentà connoistre parsa bouche, 1,682.
Il n'est description pareille en difficulté, à la description de soy-mesmes, ny
certes en vtilité. Encore se faut il testonner, encore se faut il ordonner et renger
^pour sortir en place, I, 678.
le tien qu'il faut estre prudent à estimer de soy, et pareillement conscientieux
à en tesmoigner: soit bas, soit haut, indifféremment, I, 680.
De dire de soy plus qu'il n'en y a, ce n'est pas tousiours présomption, c'est en-
core souuent sottise, I, 68*.?.
De dire moins de soy, qu'il n'y en a, c'est sottise, non modestie : se payer de
moins, qu'on ne vaut, c'est lascheté et pusillanimité, I, 680.
CONSCIENCE.
Les loix de la conscience, que nous disons naistre de nature, naissent de la
coustume, I, 168.
En tout et par tout, il y a assés de mes yeux à me tenir en office : il n'y en a
point, qui me veillent de si près, ny que io respecte plus, I, 158.
11 n'y a que vous qui sçache si vous estes lâche et cruel, ou loyal et deuotieux :
les autres ne vous voyent point, ils vous dcuinent par coniectures incertaines: ils
voyent, non tant vostre naturel, que vostre art. Par ainsi, ne vous tenez pas à leur
sentence, tenez vous à la vostre, III, 114.
Aucune cachette ne sert aux meschans, disoit Epicurus, par ce qu'ils ne se peu-
uent asseurer d'estre cachez, la conscience les dcscouurant à eux mesmes, I, 660.
Vue ame courageusement vitieuse, se peut à l'aduenture garnir de sécurité :
mais de satisfaction, elle ne s'en peut fournir, III, 112.
Comme la conscience nous remplit de crainte, aussi fait elle d'asseurance et de
confiance, I, 660.
Il n'est bonté, qui ne resiouysse vne nature bien née. Il y a certes ie ne sçay
quelle congratulation, de bien faire, qui nous resiouit en nous mesmes, et vne
fierté généreuse, qui accompagne la bonne conscience. Ces tesmoignages plaisent,
et nous est grand bénéfice que cette esiouyssance naturelle : et le seul payement
qui iamais ne nous manque. De fonder la recompence des actions vertueuses,
sur l'approbation d'autruy, c'est prendre vn trop incertain et trouble fondement,
signamment en vn siècle corrompu et ignorant, comme cettuy-cy : la bonne
estime du peuple est iniurieuse. A qui vous fiez vous, de veoir ce qui est louable?
Dieu me garde d'estre homme de bien, selon la description que je voy faire tous
les iours par honneur à chacun de soy, III, 112.
Merueilleux effort de la conscience : elle nous fait trahir, accuser, et combattre
nous mesmes, et à faute de tesmoing estranger, elle nous produit contre nous, 1, 658.
Aussi à mesme qu'on prend le plaisir au vice, il s'engendre vn desplaisir con-
traire en la conscience, qui nous tourmente de plusieurs imaginations pénibles,
veillans et dormans, I, 660.
On faut autant à iuger de sa propre besongne, que de celle d'autruy. Non seu-
■ lement pour l'affection qu'on y mesle : mais pour n'auoir la suffisance de la co-
gnoistre et distinguer, III, 368.
C'est office de charité, que, qui ne peut ostervn vice en soy, cherche ce neant-
moins à l'oster en autruy : où il peut auoir moins maligne et rcuesche semence.
Tousiours l'aduertissemcnt est vray et vtilc : mais si nous auions bon nez, nostrc
ordure nous deuroit plus puïr, d'autant qu'elle est nostre, III, 318.
^e ne dis pas, que nul n'accuse, qui ne soit net : car nul n'accuseroit : voire ny
net, en mesme sorte de tache. Mais i'entens, que nostre iugement chargeant sur
vn autre, duquel pour lors il est question, ne nous espargne pas, d'vne interne et
seuere iurisdiction, III, 348.
La force de tout conseil gist au temps : les occasions et les matières roulent et
changent sans cesse. Il y a des parties secrettes aux obiects, qu'on manie, et
indiuinables : signamment en la nature des hommes : des conditions muettes,
sans montre incognues par fois du possesseur mesme : qui se produisent et es-
E.172 ESSAIS DE MONTAIGNE.
iieillent par des occasions su menantes. Si ma prudence ne les a peu pénétrer et
profetizer, ie ne luy en sçay nul mauuais gré : sa charge se contient en ces li-
mites. Si l'euenement ine bat, et s'il fauorise le party que i'ay refusé : il n'y a re-
mède, ie ne m'en prens pas à moy, i'accuse ma fortune, non pas mon ouurage, III, 1 2(3.
CONSEIL.
Nous deuons aux nostres assiduité de correction et d'instruction : mais d'aller
prescher le premier passant, et régenter l'ignorance ou ineptie du premier ren-
contré, c'est vn vsage auquel ie veux grand malj III, 364.
CONSTANCE.
Le commencement de toute vertu, c'est consultation et délibération, et la fin et
perfection, constance, I, 602.
CONTINENCE.
Il est à l'aduenture plus facile, de se passer nettement de tout le sexe, que de
se maintenir deuëment de tout poinct, en la compagnie de sa femme, II, M6.
CONTRADICTION, CONTRASTE.
11 n'y a raison qui n'en aye vne contraire, II, 432.
Nous ne goustons rien de pur, II, 536.
Des plaisirs, et biens que nousauons, il n'en est aucun exempt de quelque mes-
lange de mal et d'incommodité, II, 538.
Nostre extrême volupté a quelque air de gémissement, et de plainte. Diriez vous
pas qu'elle se meurt d'angoisse? II, 538.
L'extrémité du rire se mesle aux larmes, II, 538.
La profonde ioye a plus de seuerité, que de gayetc. L'extrême et plein conten-
tement, plus de rassis que d'enioué. L'aise nous masche, II, 538.
Le trauail et le plaisir, très dissemblables de nature, s'associent pourtant de ie
ne sçay quelle ioincture naturelle, II, 538.
Nostre volonté s'aiguise par le contraste : et il n'est rien naturellement si con-
traire à nostre goust que la. satiété, qui vient de l'aisance: ny rien qui l'aiguise
tant que la rareté et difficulté, II, 432.
Nostre appétit mesprise et outrepasse ce qui luy est en main, pour courir après
ce qu'il n'a pas. Nous défendre quelque chose, c'est nous en donner enuie. Nous
l'abandonner tout à faict, c'est nous en engendrer mespris. La faute et l'abondance
retombent en mesme inconuenient, II, 434.
CONTRAINTE.
Sauf la santé et la vie, il n'est chose pourquoy ie vueille ronger mes ongles, et
que ie vueill' acheter au prix du tourment d'esprit et de la contrainte, II, 484.
CONVERSATION.
Le plus fructueux et naturel exercice de nostre esprit, c'est à mon gré la confé-
rence. Et si i'estois à cette heure forcé de choisir, ie consentirois plustost, ce
crois-ie, de perdre la veuë, que l'ouyr ou le parler, III, 322.
L'estude des liures, c'est vn mouuement languissant et foible qui n'eschaulTo
point : là où la conférence, apprend et exerce en vn coup, III, 322.
L'vnisson, est qualité du tout ennuyeuse en la conférence, III, 334.
Les vieillards sont dangereux, à qui la souuenance des choses passées demeure,
pt ont perdu la souuenance de leurs redites. I'ay veu des récits bien plaisants, de-
L'ESPRIT DES ESSAIS. CONV. E.n3
uenir tres-ennuyeux, cliascun de l'assistance en ayant esté abbreuvé cent fois, 1, 00.
le festoyé et caresse la vérité en quelque main que ie la trouue, et m'y rends
alaigrement; et pourueu qu'on n'y procède d's'ne troigne trop impérieusement
magistrale, ie prends plaisir à estre reprins, III, 33G.
Les contradictions des iugemens, ne m'ofîencent, ny m'altèrent : elles m'esueil-
lent seulement et m'exercent. Nous fuyons la correction, il s'y faudroit présenter
et produire notamment quand elle vient par forme de confei*ence, non de ré-
gence. A chaque opposition, on ne regarde pas si elle est iuste, mais, à tort ou à
droit, conmie on s'en deffera. Au lieu d'y tendre les bras, nous y tendons les
griffes, III, 334.
Il est malaisé d'attirer les hommes de mon temps à céder. Ils n'ont pas le cou-
rage de corriger, par ce qu'ils n'ont pas le coui-age de souffrir à l'estre. Et par-
lent tousiours auoc dissimulation, en présence les vns des autres, III, 336.
La plus part changent de visage, de voi.x, où la force leur faut : et par vne
importune cholere, au lieu de se venger, accusent leur foiblcsse, ensemble et leur
impatience, III, 366.
Quand on me contrarie, on esueille mon attention, non pas ma cholere : ie
m'avance vers celuy qui me contredit, qui m'instruit. La cause de la vérité, de-
uroit estre la cause commune à l'vn et à l'autre, III, 1^536.
Il faut ne se formalizer point des sottises et fables qui se disent en notre pré-
sence : car c'est vne inciuile importunité de choquer tout ce qui n'est pas de nos-
tre appétit. Contentons nous de nous corriger nous mesmes, I, 244.
Aux disputes et conférences, tous les mots qui nous semblent bons, ne doiuent
pas incontinent estre acceptez. La plus part des liommes sont riches d'vne sufli-
sance estrangere. Il peut bien aduenir à tel, de dire vu beau traict, vne bonne
responce et sentence, et la mettre en auant, sans en cognoistre la force, III, 360.
l'oy iournellement dire à des sots, des mots non sots. Ils disent vne bonne
chose : sçachons iu.sques où ils la cognoissent, voyons par où ils la tiennent, III, 362.
Ces iugemens vniuersels, que ie voy si ordinaires, ne disent rien, l'ay veu plus
souuent que tous les iours, aduenir que les esprits foiblement fondez, voulants
faire les ingénieux à remarquer en la lecture de quelque ouurage, le point de
la beauté : arrestent leur admiration, d'un si mauuais choix, qu'au lieu de nous
apprendre l'excellence de l'autheur, ils nous apprennent leur propre ignorance,
JII, 362.
Le silence et la modestie sont qualitez tres-commodes à la conuersation, I, 244.
P'aire à l'enuy parade de son esprit, et de son caquet, c'est vn mestier ti'es-mes-
seant à vn homme d'honneur, III, 334.
L'obstination et ardeur d'opinion, est la plus seuere preuue de bestise, III, 364.
COURAGE (fermetk).
Le courage et la hardiesse sont qualitez qui ne tombent aucunement en ceux
qui sont exempts de danger, III, 326.
Quand la vertu mesme seroit incarnée, ie croy que le poux luy battroit plus
fort allant à l'assaut, qu'allant disner : voire [il est nécessaire qu'elle s'eschauffe
et s'esmeuue, I, 500.
Il y a des pertes triomphantes à l'enui des victoires, I, 370.
Celuy qui tombe obstiné en son courage, il est battu non pas de nous, mais de
la fortune : il est tué, non pas vaincu : les plus vaillans sont par fois les plus
infortunez, I, 370.
L'estimation et le prix d'vn homme consiste au cœur et en la volonté : c'est là
où, gist son vray honneur, I, 370.
COUTUME (habitude, usage).
C'est une violente et traistresse maistresse d'escole, que la coustume. Elle establit
en nous, peu à peu, à la desrobée, le pied de son authorité : mais par ce doux et
humble commencement, l'ayant rassis et planté auec l'ayde du temps, elle nous
E.174 ESSAIS DE MONTAIGNE.
descouure tantost vn furieux et tyrannique visage, contre lequel nous n'auons
plus la liberté de hausser seulement les yeux, I, 156.
11 n'est rien qu'elle ne face, ou qu'elle ne puisse : et auec raison l'appelle Pin-
darus. la Royne et Eniperiere du monde, I, 1(38.
Que ne peut elle en nos iugomens et en nos créances? }' a il opinion si bizarre :
ie laisse à part la grossière imposture des religions, dequoy tant de grandes na-
tions, et tant de suffisants personnages se sont veuz enyurez : car cette partie
estant hors de nos raisons humaines, il est plus excusable de s'y perdre, à qui n'y
e.st extraordinairement esclairé par faueur diuine : mais d'autres opinions y en a
il de si estranges, qu'elle n'aye planté et estably par loix es régions que bon luy
a semblé ? I, 160.
11 ne tombe en l'imagination humaine aucune fantasie si forcenée qui ne ren-
contre l'exemple de quelque vsage public, et par conséquent que nostre raison
n'estaye et ne fonde, I, 160.
Chasque nation a plusieure coustumes et vsances, qui sont non seulement in-
cognues, mais farouches et miraculeuses à quelque autre nation, II, 632.
Les subiects ont diuers lusti-es et diuerses considérations : de là s'engendre
principalement la diuersité d'opinions. Vne nation regarde vn subiect par vn vi-
sage, et s'arreste à celuy là : l'autre par vn autre, II, 376.
Ce qui est hors les gonds de la coustume, on le croid hors les gonds de la rai-
son : Dieu sçait combien desraisonnablement le plus souuent, I, 170.
Le principal effect de sa puissance, c'est de nous saisir et empiéter de telle
sorte, qu'à peine soit-il en nous, de nous r'auoir de sa prinse, et de r'entrer en
nous, pour discourir et raisonner de ses ordonnances, I, 170.
C'est merueille comme la coustume en ces choses indifférentes plante aisément
et soudain le pied de son authorité, I, 496.
La pluspart des choses qui nous sont entre mains, c'est plustost accoustumance,
que science, qui nous en oste l'estrangeté, I, 290.
Les premières et vniuerselles raisons sont de difficile pei-scrutation. Qui veut
les taster se iette d'abordée dans la franchise de la coustume, I, 172.
Qui voudra se deffaire de ce violent preiudice de la coustume, il trouuera phi-
sieurs choses receuës d'vne resolution indubitable, qui n'ont appuy qu'en la
barbe cheniie et rides de l'vsage, qui les accompaigne : mais ce masque arraché,
rapportant les choses à la vérité et à la raison, il sentira son ingénient, commei
tout bouleuersé, et remis pourtant en bien plus seur estât, I, 172.
Quand ceux de Crète vouloient au temps passé maudire quelqu'vn, ils prioient
les Dieux de l'engager en quelque mauuaise coustume, I, 170.
11 n'est rien en somme si extrême, qui ne se trouue receu par l'vsage de quel-
que nation, II, 376.
Chacun appelle barbarie, ce qui n'est pas de son vsage, et nous n'auons autre
mire de la vérité et de la raison, que l'exemple et idée des opinions et vsances
du pais où nous sommes, I, 358.
L'assuefaction endort la veuë de nostre iugement, I, 162.
C'est la coustume qui nous fait impossible ce qui ne l'est pas, I, 392.
C'est par l'entremise de la coustume que chascun est contant du lieu où na-
ture l'a planté, I, 170.
C'est vn commun vice, non du vulgaire seulement, mais quasi de tous hom-
mes, d'auoir leur visée et leur arrest, sur le train auquel ils sont nais, I, 544.
Il n'est supportable, qu'aux grandes âmes et illustres de se priuilegier au des-
sus de la coustume, I, 244.
CRÉDULITÉ (prédictions, miracles).
II s'engendre beaucoup d'abus au monde : ou pour dire plus hardiment, tous
les abus du monde s'engendrent, de ce, qu'on nous apprend à craindre de faire
profession de nostre ignorance; et sommes tenus d'accepter, tout ce que nous
ne pouuons réfuter, III, 534.
C'est merueille, de combien vains commencemens, et friuoles causes, naissent
L'ESPRIT DES ESSAIS. CRÉ. E.175
ordinairement l'ameuses impressions. Cela mesnies en empesclie l'information.
Car pendant qu'on cherche des causes, et des fins fortes, et poisantes, et dignes
d'vn si grand nom, on pert les vrayes. Elles eschapent de nostre veuë par leur
petitesse, III, 532.
Peu de gens faillent : notamment aux choses malaysées à persuader, d'affer-
mer qu'ils l'ont veu : ou d'alléguer des tesmoins, desquels l'authorité arreste
notre contradiction. Suyuant cet vsage, nous sçauons les fondemens, et les moyens,
de mille choses qui ne furent onques, III, 528.
Nous ne sommes pas seulement lasches à nous défendre de la piperie : mais
nous cherchons, et conuions à nous y enferrer, III, 528.
Quiconque croit quelque chose, estime que c'est ouurage de charité, de la per-
suader à vu autre. Et pour ce faire, ne craint point d'adiouster de son inuention,
autant qu'il voit estre nécessaire en son compte, pour suppléer à la résistance et
au deffaut qu'il pense estre en la conception d'autruy, III, 530.
L'erreur particulière, fait premièrement l'erreur publique : et à son tour après,
l'erreur publique fait l'erreur particulière, III, 530.
En choses de pareille qualité, surpassant nostre cognoissance : ie suis d'aduis,
que nous soustenions nostre iugement, aussi bien à reieter, qu'à receuoir, III, 534.
CRITIQUE.
le trouue rude de iuger celui là, en qui les mauuaises qualitez surpassent les
bonnes. Platon ordonne trois parties, à qui veut examiner l'ame d'vn autre :
science, bienueillance, hardiesse, III, 624. ^,
11 faict besoin d'oreilles bien fortes, poui' s'ouyr franchement iuger. Et par ce
qu'il en est peu, qui le puissent souffrir sans morsure : ceux qui se bazardent
de l'entreprendre enuers nous, nous montrent vn singulier effect d'amitié. C'est
aimer sainement, d'entreprendre à blesser et offencer, pour profiter, III, 624.
La vérité mesme, n'a pas ce priuilege, d'estre employée à toute heure, et en
toute sorte : son vsage tout noble qu'il est, a ses circonscriptions, et limites. 11
adulent souuent, comme le monde est, qu'on la lasche, non seulement sans l'ruict,
mais dommageablement, et encore iniustement, III, 626.
CROYANCE (religion).
Quiconque est creu de ses presuppositions, il est nostre maistre et nostre Dieu :
il prendra le plant de ses fondemens si ample et si aisé, que par iceux il nous
pourra monter, s'il veut, iusques aux nues, II, 300.
Il est bien aisé sur des fondemens auouez, de bastir ce qu'on veut; car selon
la loy et ordonnance de ce commencement, le reste des pièces du bastiment se
conduit aisément, sans se démentir. Par cette voye nous trouuons nostre raison
bien fondée, et discourons à boule-veuë, II, 300.
Ce qui fait qu'on ne doubte de guère de choses, c'est que les communes im-
pressions on ne les essaye iamais; on n'en sonde point le pied, où git la faute
et la foiblesse : on ne débat que sur les branches : on ne demande pas si cela
est vray, mais s'il a esté ainsin ou ainsin entendu. Ainsi se remplit le monde
et se confit en fadeze et en mensonge, II, 298.
" II est besoin que le peuple ignore beaucoup de choses vrayes, et en croye
beaucoup de fausses », disoient Sceuola grand pontife et Varron grand théolo-
gien en leur temps, II, 290.
CRUAUTÉ.
l'ay souuent ouy dire, que la couardise est mère de la cruauté : et si ay par
expérience apperçeu, que cette aigreur, et aspreté de courage malitieux et in-
humain, s'accompagne coustumierement de mollesse féminine. l'en ay veu des
plus cruels, subiots à pleurer aiséement, et pour des causes friuoles, II, 568.
Les premières cruautez s'exercent pour elles mesmes, de là s'engendre la crainte
E.17G ESSAIS DE MONTAIGNE.
d'vne iuste reuanche, qui produict après vne enfileure de nouuelles cruautez.
pour les estoulTer les vues par les autres, II, bSO.
La vaillance de qui c'est l'effect de s'exercer seulement contre la résistance,
s'arreste à voir l'ennem}- à sa mercy. La pusillanimité, pour dire qu'elle est aussi
de la feste, n'ayant peu se mesler à ce premier rolle, prend pour sa part le se-
cond, du massacie et du sang, II, 568.
DEVOIR.
11 ne faut pas laisser au iugement de chacun la cognoissance de son deuoir :
il le luy faut prescrire, non pas le laisser choisir à son discours : autrement
selon l'imbécillité et variété infinie de nos raisons et opinions, nous nous for-
gerions en fin des deuoirs, qui nous mettroient à nous mander les vns les autres.
II, 202.
DÉVOTION (Dieu, prières).
Il ne faut mesler Dieu en nos actions qu'auecque reuerence et attention pleine
d'honneur et de respect, I, 581.
Nous deuons plus larement le prier : d'autant qu'il n'est pas aisé, que nous
puissions si souuent remettre nostre ame, en cette assiette réglée, reformée, et
deuotieuse, où il faut qu'elle soit pour ce faire : autrement nos prieies ne sont
pas seulement vaines et inutiles, mais vitieuses. Pardonne nous, disons nous,
comme nous pardonnons à ceux qui nous ont olTencez. Que disons nous par là,
sinon que nous luy offrons nostre ame exempte de vengeance et de rancune?
Toutesfois nous inuoquons Dieu et son ayde, au complot de nos fautes, et le con-
uions à l'iniustice. L'auaricieux le prie pour la conseruation vaine et superflue
de ses thresors : l'ambitieux pour ses victoires, et conduite de sa fortune : le
voleur l'employé à son ayde, pour franchir le hazard et les difficulté?., qui s'op-
posent à l'exécution de ses meschantes entreprinses : ou le remercie de l'aisance
qu'il a trouué à desgosiller vn passant. Au pied de la maison, qu'ils vont eschel-
1er ou petarder, ils font leurs prières, l'intention et l'espérance pleine de cruauté,
de luxure, et d'auarice, I, 590.
Aux vices leur heure, son heyre à Dieu, comme par compensation et compo-
sition, I, .582.
11 semble, à la vérité, que nous nous semons de nos prières, comme d'vn iar-
gon, et comme ceux qui emplojent les paroles sainctes et diuines à des sorcel-
leries et effects magiciens : et que nous facions nostre compte que ce soit de la
contexture, ou son, ou suitte des motz, ou de nostre contenance, que dépende
leur effect. Car ayans l'ame pleine de concupiscence, non touchée de repentance,
ny d'aucune nouuelle reconciliation enuers Dieu, nous luy allons présenter ces
parolles que la mémoire preste à nostre langue : et espérons en tirer vne ex-
piation de nos fautes, I, 592.
C'est erreur, de recourir à Dieu en tous nos desseins et entreprises, et l'ap-
peller à toute sorte de besoing, et en quelque lieu que nostre foiblesse veut de
l'aide, sans considérer si l'occasion est iuste ou iniuste; et d'escrier son nom, et
sa puissance, en quelque estât, et action que nous soyons, pour vitieuse qu'elle
soit, I, 578.
Celuy qui appelle Dieu à son assistance, pendant qu'il est dans le train du
vice, il fait comme le coupeur de bourse, qui appelleroit la iustice à son ayde; ou
comme ceux qui produisent le nom de Dieu en tesmoignage de mensonge, I, 592.
Sa iustice et ,sa puissance sont inséparables. Pour néant implorons nous sa
force en vne mauuaise cause. Il faut auoir l'ame nette, au moins en ce moment,
auquel nous le prions, et deschargée de passions vitieuses : autrement nous luy
présentons nous mesmes les verges dequoy nous chastier, I, 580.
Quelle prodigieuse conscience se peut donner repos, nourrissant en mesme
giste, d'vne société si accordante et si paisible, le crime et le iuge? I, 582.
L'assiette d'vn homme meslant à vne vie exécrable la deuotion, semble estre
aucunement plus condemnable, que celle d'vn homme conforme à soy, et dissolu
par tout. I, 580.
L'ESPRIT DES ESSAIS. DIEU. E.177
DIEU (dévotion. PlUKliKS, IfF.I.UIlUN).
L'humaine raison ne lait que loiiruoyoi' par tout, mais spécialement quand
elle se mesle des choses diuinos, II, 264.
Rien du nostre ne se peut apparier ou rapporter en quelque façon que ce soit,
à la nature diuine, qui ne la tache et marque d'autant d'imperfection. Cette
infinie beauté, puissance, et bonté, comment peut elle soufl'rir quelque cor-
respondance et similitude à chose si abiecte que nous sommes, sans vn ex-
trême interest et déchet de sa diuine grandeur? II, 208. •
Timœus ayant à instruire Socrates de ce qu'il sçait des Dieux, du monde, et
des honmies, propose d'en parler comme vn homme à vn homme; et qu'il suffit,
si ses raisons sont probables, comme les raisons d'vn autre : car les exactes rai-
sons n'èstre en sa main, ny en mortelle main, II, 2.38.
le connoy par moi, dit S. Bernard, combien Dieu est incompréhensible, puis
que les pièces de mon estre propre, ie ne les puis comprendre, II, 30G.
Nostre arrogance nous remet tousiours en auant cette blasphemeuse apparia-
tion, II, 280.
Qu'est-il plus vain, que de vouloir deuiner Dieu par nos analogies et coniec-
tures : le régler, et le monde, à nostre capacité et à nos loix? et nous seruir
aux despens de la diuinité, de ce petit eschantillon de suffisance qu'il luy a pieu
despartir à nostre natui'elle condition? et par ce que nous ne pouuons estendrc»
nostre veuë iusques en son glorieux siège, l'auoir ramené ça bas à nostre cor-,
ruption et à nos misères? II, 250.
Quand nous disons que l'infinité des siècles tant passez qu'auenir n'est à Dieu
qu'vn instant : que sa bonté, sapience, puissance sont mesme chose auecques
son essence; nostre parole le dit, mais nostre intelligence ne l'appréhende point.
Et toutesfois nostre outrecuidance veut faire passer la diuinité par nostre esta-
mine. Et de là s'engendrent toutes les resueries et erreurs, desquelles le monde
se trouue saisi, ramenant et poisant à sa balance, chose si esloignée de son poix,
II, 278.
De toutes les opinions humaines et anciennes touchant la religion, celle là me
semble auoir eu plus de vray-semblance et plus d'excuse, qui recognoissoit Dieu
comme vne puissance incompréhensible, origine et conseruatrice de toutes
choses, toute bonté, toute perfection, receuant et prenant en bonne part l'hon-
neur et la reuerence, que les humains luy reudoient soubs quelque visage, soubs
quelque nom et en quelque manière que ce fust, II, 250.
Pythagoras adombra la vérité de plus })res : iugeant que la cognoissance de
cette cause première, et estre des estres, deuoit estre indéfinie, sans prescrij)-
tion, sans déclaration : que ce n'ostoit autre chose, que l'extrême effort de nostre
imagination, vers la perfection : chacun en ajnplifiant l'idée selon sa capacité.
Mais l'esprit humain ne se sçauroit maintenir vaguant en cet infini de pensées
informes : il les luy faut compiler a certaine image à son modelle. La majesté
diuine s'est ainsi pour nous aucunement laissé circonscrire aux limites corpo-
rels, II, 250.
A chaque chose, il n'est rien plus cher, et plus estimable que son estre et cha-
cune rafiporte les qualitcz de toutes autres choses à ses propres qualitez. Les-
quelles nous pouuons bien estendre et racourcir, mais c'est tout; car hors de ce
rapport, et de ce principe, nostre imagination ne peut aller, ne peut rien di-
uiner autre, et est impossible qu'elle sorte de là, et qu'elle passe au delà. D'où
naissent ces anciennes conclusions. De toutes les formes, la plus belle est celle
de l'homme : Dieu donc est de cette forme. Nulle raison ne peut loger ailleurs
qu'en l'humaine figure : Dieu est donc reuestu de l'humaine figure, II, 286.
Cette attribution à la diuinité d'vne forme corporelle est cause de ce qui nous
adulent tous les iours, d'attribuer à Dieu, les euenements d'importance, d'vne
particulière assignation. Par ce qu'ils nous poisent, il semble qu'ils luy poisent
aussi, et qu'il y regarde plus entier et plus attentif, qu'aux euenements qui nous
sont légers, ou d'vne suitte ordinaire. Nostre arrogance .nous remet tousiours en
auant cette blasiihemeuse appariation, II, 278.
ESSAIS DE MONTAIG.NK. — T. IV. 12
E.d78 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Los hommes, dit sainct Paul, sont deuenus fols cuidans estre sages, et ont
mué la gloire do Diou incorruptible, en l'image de l'homme corruptible, II, 280.
DIEUX.
11 est bien plus aisé de satisfaire, parlant de la nature des Dieux, que de la
nature des hommes : par ce que l'ignorance des auditeurs preste vne belle et
large carrière, et toute liberté, au maniement d'vne matière cachée. Il adulent
de là, qu'il n'est rien.creu si ferme, I, 376.
Il est impossible d'establir quelque chose de certain, de l'immortelle nature,
par la mortelle. II, 262.
L'homme ne peut estre que ce qu'il est, ny imaginer que selon sa portée. C'est
grande présomption, dit Plutarque, à ceux qui ne sont qu'hommes, d'entrepren-
dre de parler et discourir des Dieux, présumant comprendre par quelque légère
coniecture, des effects qui sont hors de sa cognoissance, II, 264.
Sur quoi fondement de leur iustico les Dieux peuuent ils recognoistre et re-
compenser à riiomme après sa mort ses actions bonnes et vertueuses : puis que
ce sont eux mesmes, qui les ont acheminées et produites en luy? Et pourquoy
s'offencent ils et vengent sur luy les vitieuses, puis qu'ils l'ont eux-mesmes pro-
duict en cette condition fautiue, et que d'vn seul clin de leur volonté, ils le
peuuent empescher de faillir? II, 262.
Platon en ses loix fait trois sortes d'iniurieuse créance des Dieux, Qu'il n'y en
ayt point. Qu'ils ne se meslent pas de noz affaires. Qu'ils ne refusent rien à noz
vœux, offrandes et sacrifices. La première erreur, selon son aduis, ne dura
iamais immuable en homme, depuis son enfance, iusques à sa vieillesse. Les deux
suiuantes peuuent souffrir do la constance, I, 580.
De toutes les religions, que Sainct Paul trouua en crédit à Athènes, celle qu'ils
auoyent dédiée à vne diuinité cachée et incognue, luy sembla la plus excu-
sable, II, 250.
DIRE ET FAIRE.
Le dire est autre chose que le faire, il faut considérer le presche à part,
et le prescheur à part. C'est sans doubte vne belle harmonie, quand le faire, et le
dire vont ensemble : et ie ne veux pas nier, que le dire, lors que les actions
suyuent, ne soit de plus d'authorité et efficace : mais vn homme de bonnes
mœurs, peut auoir des opinions faulces, et vn meschant peut prescher vérité,
voire celuy qui ne la croit pas, II, 610.
Apprenons non à bien dire, mais à bien faire, I, 436.
DISSIMULATION.
le hay capitalement cette nouuelle vertu de faintise et dissimulation, qui est à
cett'heure si fort en crédit : et de tous les vices, ie n'en trouue aucun qui tesmoi-
gne tant de lascheté et bassesse de cœur, II, 492.
DIVERS.
Tout abbregé sur vn bon Hure est vn sot abbregé, III, 368.
L'accoustumance, n'est pas chose de peu, I, 158.
L'accoustumance est vne seconde nature, et non moins puissante, III, 496.
L'accoustumance à porter le trauail, est accoustumance à porter la douleur, I, 244.
Tu as bien largement affaire chez toy, ne t'esloigne pas, III, 486.
II nefaut pas se precipiteresperduement après nos affectionset interestz, III, 50l.
L'affirmation et l'opiniastreté, sont signes exprez de bestise, III, 620.
A combien de soties âmes sert vne mine froide et taciturne, de tiltre de pru-
dence et de capacité? III. 352.
L'ESPRIT DES ESSAIS. DIV. E.179
Nostro appétit est irrésolu et incertain : il ne sçait rien tenir, ny rien iouyr de
bonne façon, I, 566.
Il luesprise et outrepasse ce qui hiy est en main, pour courir après ce qu'il n'a
pas, I, 434.
Bien apprentis sont ceux qui syndiquent leur liberté, I, 31(5.
0 le vilain et sot estude d'estudier sou argent, se plaire à le manier et recom-
terî c'est par là, que l'auai'iee faict ses approches, III, 392.
Les arts qui pi'omettent de nous tenir le corps en santé, et l'anie en santé, nous
promettent beaucoup : mais aussi n'en est-il point, qui tiennent moins ce qu'elles
promettent, III, 628.
L'auarice et la profusion ont pareil désir d'attirer et d'acquérir, I, 570.
Les Barbares ne nous sont de rien plus merueilleux que nous sommes à eux :
ny auec plus d'occasion, I, 162.
La bestise et la sagesse se rencontrent en mesme poinct de sentiment et de
resolution à la souffrance des accidens humains : les sages gourmandent et com-
mandent le niai, et les autres l'ignorent, I, 570.
On dit : Il ne sçauroit estre bon, })uis qu'il n'est pas mauuais aux meschans. Ou
bien ainsi : 11 faut bien qu'il soit bon, puis qu'il l'est aux mcschants mesme, III, 598.
Chacun en sa chacunicre, I, 390.
Quand nous voyons vu homme mal chaussé, nous disons que ce n'est pas mer-
ueillc, s'il est chaussetier, I, 218.
Rien ne chatouille, qui ne pince, III, 564.
La plus grande chose du monde c'est de sçauoir estre àsoy, I, 418.
La maladie se sent, la santé, peu ou point : ny les choses qui nous oignent, au
prix de celles qui nous poignent, III, 520.
Toutes choses ont leur saison, les bonnes et tout. Et le puis dire mon patenostro
hors de propos, II, 586.
Nous admirons et poisons mieux les choses estrangeres que les ordinaires, II, 104.
La difficulté donne prix aux choses, II, 434.
L'application aux légères choses nous retire des iustes, III, 270.
La plus part des choses du monde se font par elles mesmes, III, 358.
Toutes choses tombent en discrétion et modification, III, 458.
On me faict haïr les choses vray-semblabl(>s, quand on me les plante pour in-
faillibles, III, 534.
Les choses se guérissent par leurs contraires : le mal guérit le mal, I, 350.
11 n'est chose, en quoy le monde soit si diuers qu'en coustumes et loix. Telle
chose esticy abominable, qui apporte recommandation ailleurs, II, 370.
On commence ordinairement ainsi : Comment est-ce que cela se fait?*mais, se
fait-il? faudroit il dire, III, 528.
Qui ne peut venir à bout du commencement, ne viendra pas à bout de la fin.
Ny n'en soustiendra la cheute, qui n'en a peu soustenir l'esbranslement, III, 510.
Il y a beaucoup de commodité. à n'estre pas si aduisé, II, 218.
L'issue authorise souuent vue tresinepte conduite, III, 354.
La confession généreuse et libre, encrue le reproche, et desarme l'iniure, III, 444.
le croy des hommes plus mal aisément la constance que toute autre chose, et
rien plus aisément que l'inconstance, I, 602.
Pour mesurer la constance, il faut nécessairement sçauoir la souffrance, III, 506.
Tous les iours la sotte contenance d'vn autre, m'aduertit et m'aduise, 111,332.
Nous nous corrigeons aussi sottement souuent, comme nous corrigeons les au-
tres, III, 412.
Cqmme si nous auions l'attouchement infect, nous corrompons par nostre ma-
niement les choses qui d'elles mesmes sont belles et bonnes, I, 344.
Il ne faut pas croire à chacun, parce que chacun peut dire toutes choses, II, 358.
Encore fau^il du courage à craindre, III, 288.
le n'ay point l'authorité d'estre creu, nyne le désire, me sentant trop mal ins-
truit pour instruire autruy, I, 232.
l'ay peur que nous ayons les yeux plus grands que le ventre, et [)lus de curio-
sité, que nous n'auons de capacité, I, 354.
E.180 ESSAIS DE MONTAIGNE.
La curiosité de cognoistre les choses, a esté donnée aux hommes pour fléau,
dit la saincte Escriture, II, 470.
La défense attire l'entreprise, et la deffiance l'offense, II, 438.
Nous défendre quelque chose, c'est nous en donner enuie. Nous l'abandonner
tout à faict, c'est nous en engendrer mespris, II, 43L
Il ne faut rien designer de si longue haleine, ou au moins auec telle intention
de se passionner pour en voir la fin, I, 120.
Nostre désir s'accroist par la malaisance, II, 432.
Au pis aller, courez tousiours par retranchement de despence, deuant la pau-
ureté, III, 382.
Qui est desloyal enuers la vérité, l'est aussi enuers le mensonge, II, 194.
Il fait bien piteux, et hazardeux, despendre d'vn autre, III, 420.
Nous ne prestons volontiers à la deuotion que les offices, qui flattent noz pas-
sions, II, 120.
Les dieux s'esbatent de nous à la pelote, et nous agitent à toutes mains, III, 404.
La difficulté donne prix aux choses, II, 434.
Qui establit son discours par brauerie et commandement, montre que la raison
y est foible, III, r.36.
Il y a encore plus de discours à instruire autruy qu'à estre instruit, III, 160.
Le vray miroir de nos discours, est le cours de nos vies, I, 272.
La dissimilitude s'ingère d'elle-mesme en nos ouurages, nul art peut arriuer à
la similitude, III, 600.
Il ne nous faut guère de doctrine, pour viure à nostre aise, III, 550.
Comme le donner est qualité ambitieuse, et de prerogatiue, aussi est l'accepter
qualité de summission, III, 422.
La douleur a quelque chose de non euitable, en son tendre commencement : et
la volupté quelque chose d'euitable en sa fin excessiue, III, 692.
Platon veut plus de mal à l'excès du dormir, qu'à l'excès du boire, III, 662.
Les effectz nous touchent, mais les moyens, nullement, III, 528.
L'éloquence faict iniure aux choses, qui nous destourne à soy, I, 278.
Nous embrassons tout, mais nous n'estreignons que du vent, I, 353.
Enfant, tu es venu au monde pour endurer : endure, souffre et tais toy, III, 648.
L'enfance et la décrépitude se rencontrent en imbécillité de cerueau, I, 570.
Nous ne faisons que nous entregloser. Tout fourmille de commentaires : d'au-
theurs, il en est grand cherté, III, 606.
Les esprits hauts, ne sont de guère moins aptes aux choses basses, que les bas
esprits aux hautes, III, 466.
On s'appriuoise à toute estrangeté par l'vsage et le temps, III, 532.
Où cuidez-vous pouuoir estre sans empeschement et sans destourbier? 111,458.
Estant peu apprins par les bons exemples, ie me sers des mauuais : desquels la
leçon est ordinaire, III, 322.
Ny vne estuue nj- vne leçon, n'est d'aucun fruict si elle ne nettoyé et ne de-
crasse, III, 460.
Les euenemens, sont maigres tesmoings, de nostre prix et capacité, III, 356.
Autant se fâche le cheuelu comme le chauue, qu'on luy arrache le poil, I, 470.
Il y a moyen de faillir en la solitude, comme en la compagnie, I, 428.
Tout ce qui peut estre faict vn autre iour, le peut estre auiourd'huy, I, 118.
le ne me mesle pas de dire ce qu'il faut au monde : d'autres a.ssés s'en mes-
lent : mais ce que i'y fay, I, 214.
Toute femme estrangere nous semble honneste femme, III. 434.
Les femmes qui communiquent tant qu'on veut leurs pièces à garçonner : à
medeciner, la honte le deffend, I, 346.
La fortune a meilleur aduis que nous, I, 386.
La fortune se rencontre souuentau train de la raison, I, 384.
Plaisante foy, qui ne croid ce qu'elle croid, que pour n'auoir le courage de le
descroire.
La gloire et la curiosité, sont les fléaux de nostre ame. Cette cy nous conduit
L'ESPRIT DES ESSAIS. DIV. E.181
à mettre le nez par tout, et celle là nous défend de rien laisser irrésolu et indécis,
I, 296.
Le goust des biens et des maux despend en bonne partie de l'opinion que nous
en auons, I, 440.
La hastiueté se donne elle mesme la Ïambe, s'entraue et s'arreste, III, 494.
L'homme qui présume de son scauoir, ne seait pas encore que c'est que scauoir,
II, 132. ' .
L'honmie n'est non plus instruit de la cognoissance de soy, en la partie corpo-
relle, qu'en la spirituelle, II, 330.
L'homme forge mille plaisantes societez entre Dieu et luy, II, 290.
L'honneur, c'est vn priuilege qui tire sa principale essence de la rareté : et la
vertu mesme, II, 12.
Qui veut guérir de l'ignorance, il faut la confesser, III, 534.
Combien en a rendu de malades la seule force de l'imagination, II, 208.
Nous sommes plus ialoux de nostre interest, que de celuy de nostre créateur,
II, 206.
le ne fav qu'aller et venir : mon iugement ne tire pas tousiours auant, il flotte,
il vague. II. 348.
C'est iniustice de se douloir qu'il soit aduenu à quelqu'vn, ce qui peut aduenir
à chacun, III, 648.
L'extrême espèce d'iniustice, c'est que, ce qui est iniuste, soit tenu pour iuste,
III, 558.
11 est force de faire tort en détail, qui veut faire droict en gros; et iniustice
en petites choses, qui veut venir à chef de faire iustice es grandes, III, 612.
L'innocence ciuile, se mesure selon les lieux et saisons, III, 468.
Les ieunes se doiuent faire instruire; les hommes s'exercer à bien faire : les
vieux se retirer de toute occupation ciuile et militaire, viuants à leur discrétion,
sans obligation à certain office, I, 418.
Il ne faut pas iuger les conseils par les euenemens, III, 358.
C'est vne mauuaise prouision de pais, que iurisconsultes, et médecins, 111,602.
Nostre licence nous porte tousiours au delà de ce qui nous est loisible, et per-
mis, III, 462.
La licence des iugements, est vn grand destourbier aux grands affaires, II, 454.
Quiconque combat les loix, menace les gents de bien d'escourgées et de la
corde, I, 244.
On est assez à temps à sentir le mal, sans l'allonger par le mal de la peur, 111,660.
La tourbe des menus maux, offence plus, que la violence d'vn, pour grand qu'il
soit, III, 386.
Seruons nous pour consolation des maux presens, de la souuenance des biens
passez, et appelons à nostre secours vn contentement esuanouy, pour l'opposer à
ce qui nous presse, II, 214.
De nos maladies la plus saunage, c'est mespriser nostre estre, III, 692.
Il n'est pas marchant qui tousiours gaigne, III, 366.
La maturité a ses deffaux, comme la verdeur, et pires, III, 586.
La meschanceté fabrique des tourmens contre soy, I, 660.
Ny les Dieux, ny les gens de bien, dict Platon, n'acceptent le présent d'vn mes-
chant, I, 594.
Chacun peut faire bonne mine par le dehors, plein au dedans de fiebure et d'ef-
froy, II, 454.
On se doibt modérer, entre la haine de ladouleur, et l'amour de la volupté, 111,484.
Le monde n'est que variété et dissemblance, I, 612.
Qui se faicl mort viuant, est subiect d'estre tenu pour vif mourant, III, 442.
Il est incertain où la mort nous attende, attendons la par tout, I, 116.
L'estre mort ne fasche pas, mais ouy bien le mourir, II, 426.
La moins préméditée mort^ est la plus heureuse, et plus deschargee, II, 576.
E.182 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Les plus mortes morts sont les plus saines, I, 120.
La plus volontaire mOrt, c'est la plus belle, I, 630.
Les morts le ne les plains guère, et les enuierois plustost; mais ie plains bien
fort les mourans, II, 100.
Vne mort courte, est le souuerain heur de la vie humaine, II, 421.
Le soing des morts nous est en recommandation, III, 471.
A celuy qui disoit à Socrates : Les trente tyrans t'ont condamné à la mort : Et
nature eux, respondit-il, I, 142.
Nature peut tout, et fait tout, I, 218.
La vie despend de la volonté d'autruy, la mort de la nostre, I, 630.
Nature nous a mis au monde libres et desliez, nous nous emprisonnons en cer-
tains destroits, III, 428.
Les loix de Nature nous apprennent ce que iustemcnt il nous faut, III, 494.
Tout ce qui vient au reuers du cours de nature, peut estre fascheux : mais ce.
qui vient selon elle, doibt estre tousiours plaint, III, 674.
La nécessité compose les hommes et les assemble. Cette cousture fortuite se
forme après en loix, III, 398.
Il fait bon auoir bon nom, c'est à dire crédit et réputation, I, 508.
Le meilleur prétexte de nouuelleté est tres-dangereux, I, 177.
De l'obeyr et céder naist toute autre vertu, comme du cuider,tout péché, II, 204.
L'offence a ses droits outre la iustice, III, 442.
L'offence a sans mesure plus d'aigreur, que n'a la perte, III, 562.
L'ordre est vne vertu morne et sombre, III, 116.
L'orgueil gist en la pensée : la langue n'y peut auoirqu'vne bien légère part, 1,682.
Est l'opiniastreté sœur de la constance, au moins en vigueur et fermeté, 11,628.
L'opiniastreté est plus excusable, que la pusillanimité, III, 516.
Toute opinion est assez forte, pour se faire cspouser au prix de la vie, I, 446.
11 est impossible de voir deux opinions semblables exactement : non seulement
en diuers hommes, mais en uîesme homme, à diuersos heures, III, 604.
Il faut refuser l'opportunité à toute action importune, II, 28.
Il y a prou de loy de parler par tout, et pour et contre, I, 518.
Le n'oser parler rondement de soy, accuse quelque faute de cœur, III, 372.
Qui n'arreste le partir, n'a garde d'arrester la course, III, 510.
La passion nous commande bien plus viuement que la raison, II, 660.
Lapauuretédes biens, est aisée à guérir; lapauureté de l'ame, impossible, 111,496.
Chacun poise sur le péché de son compagnon, et esleue le sien, I, 612.
La peur extrême, et l'extrême ardeur de courage troublent également le ventre,
et le îaschent, I, 568.
Qui a sa pensée à prendre, ne l'a plus à ce qu'il a prins. La conuoitise n'a rien
si propi'e que d'estre ingrate, III, 298.
Qui ne peut d'ailleurs, si se paye de sa bourse, III, 522.
Ce qui poiucte, touche et esueille mieux, que ce qui plaist, III, 332.
Tout ce qui plaist, ne paist pas, III, 552.
C'est vne sotte présomption, aller desdeignant et condamnant pour faux, ce qui
ne nous semble pas vray-semblable, I, 290.
Il se faut prester à auti-uy, et ne se donner qu'à soy-mesme, III, 484.
La prière me gaigne, la menace me icbute, la faueur me plove, la crainte me
roydit, III, 380.
La prudence et l'amour ne pcuuent ensemble, III, 276.
La prudence si tendre et circonspecte, est mortelle enncmye des hautes exécu-
tions, I, 196.
La raison nous ordonne bien d'aller tousiours mesme chemin, mais non toutes-
fois mesme train, I, 500.
La raison va tousiours torte, boiteuse, et deshanchée : et auec le mensonge
comme auec la vérité. Par ainsin, il est malaisé de descouurir son mescompte, et
desreglement, II, 316.
L'ESPRIT DES ESSAIS. DIV. E.183
^'ul ne mot en compte publique sa recette : chacun y met son acquest, I,
•240.
Nostre religion est faite pour extirper les vices : elle les couure, les nourrit, les
incite, II, 122.
La ressemblance ne faict pas tant, vn, comme la différence faict, autre. Nature
s'est obligée à ne rien faire autre, qui ne fust dissemblable, III, 600.
le veux estre riche par nioy, non par emprunt, II, 451.
Rien de. noble ne se faict sans hazard, I, lOli.
Rien n'est extrême, qui a son pareil, I, 'M\.
Il en est sur qui les belles robes pleurent, III, 291.
Nostre sagesse n'est que folle deuant Dieu : et de toutes les vanitez la plus vaine
c'est l'homme, II, 132.
En beaucoup de sagesse, beaucoup de desplaisir, II, 218.
Ce n'est pas sagesse d'écrire à l'enuy de celuy, qui peut proscrire, III, 330.
Il n'est science si ardue que de bien sçauoir viure cette vie, III, 692.
La plus belle science qui soit, c'est la science d'obéir et de coninifOider, I, 222.
L'estude des sciences amollit et efféminé les courages, plus qiPil ne les fermit et
aguerrit, I, 224.
Combien a\'-ie veu de mon temps, d'hommes abestis, par temei-aire auidité de
science, I, 264.
A quoy la science, à qui n'a plus de teste? III, 498.
Toute cognoissance s'achemine en nous par les sens, ce sont nos maistres, II,
390.
On se met souuent sottement en pourpoinct, pour ne sauter pas mieux qu'en
saye, 111,410.
D'apprendre qu'on a dit ou fait vne sottise, ce n'est rien que cela. Il faut ap-
prendre, qu'on n'est qu'vn sot. Instruction bien plus ample, et importante, 111,618.
Qui craint de souffrir, il souffre desia de ce qu'il craint, III, 660.
C'est folie de rapporter le vray et le faux à nostre suffisance, I, 288.
II est bien plus aisé et pUis plaisant de suiure, que de guider, I, 488.
Le temps me laisse : sans luy rien ne se possède, III, 498.
L'achat donne tiltre au diamant, la difficulté à la vertu, la douleur à la deuotion,
l'aspreté à la médecine, I, 464.
Chaque vsage a sa raison, III, 454.
L'vsage, conduit selon raison, a plus d'aspreté, que n'a l'abstinence, II, 646.
L'vsage nous faict veoir, vne distinction énorme, entre la deuotion et la con-
science, III, 592.
La vérité et le mensonge ont leurs visages conformes, le port, le goust, et les
alleures pareilles : nous les regardons de mesme œil, III, 528.
La vertu est qualité plaisante et gaj'e, III, 186.
La vertu n'est pas plus grande, pour estre plus longue : la vérité, pour estre plus
vieille, n'est pas plus sage, II, 632.
Tel a la veuë claire, qui ne l'a pas droitte : et par conséquent void le bien, et
ne le suit pas : et void la science, et ne s'en sert pas, I, 218.
Le vice, n'est que des-reglement et faute de mesure; et par conséquent, il est
impossible d'y attacher la constance, I, 602.
C'est nostre vice, que nous voyons plus ce qui est dessus nous, que volontiers,
ce qjni est dcssoubs, III, 402.
C'est chose tendre que la vie, et aysee à troubler, III, 386.
La deffaillance d'vne vie, est le passage à mille autres vies. Prenons, sur tout
les vieillards : le premier temps opportun qui nous vient, III, 582.
On peut continuer à tout temps l'estude, non pas l'escholage. La sotte chose,
qu'vn vieillard abécédaire, II, 588.
La laideur d'vne vieillesse aduouee, est moins vieille, et moins laide à mon gré,
qu'vne autre peinte et lissée, III, 282.
E.184 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Qui abandonne en son propre, le sainement et gayement viure pour en seruir
atitruy, prent à mon gvé vn mauuais et desnaturé party, III, 492.
Le viure, c'est seruir, si la liberté de mourir en est à dire, I, 630.
Qui ne vit aucunement à aulruy, ne vit guère à soy, III, 490.
DIVERSION.
Peu de chose nous diuertit et destourne : car peu de chose nous tient. Nous ne
regardons gueres les subiecis en gros et seuls : ce sont des circonstances ou des
images menues et superficielles qui nous frappent : et des vaines escorces qui
reiallissent des subiects, III, 172.
DOULEUR.
La douleur ne tient qu'autant de place en nous, que nous luy en faisons, I, 456.
Tout ainsi que l'ennemy se rend plus aspre à nostre fuite, aussi s'enorgueillit
la douleur, à nous voir trembler soubs elle. Elle se rendra de bien meilleure com-
position, à qui luy fera teste : il se faut opposer et bander contre, I, 456.
D'auantage cela nous doit consoler, que naturellement, si la douleur est vio-
lente, elle est courte : si elle est longue, elle est légère, I, 454.
Mon iugement m'empesche bien de regimber et gronder contre les inconue-
nients que Nature m'ordonne à souffrir, mais non pas de les sentir, III, 184.
l'ay tousiours trouué ce précepte cérémonieux, qui ordonne si exactement de
tenir bonne contenance et vn maintien desdaigneux, et posé, à la souffrance des
maux. Pourquoi la philosophie se va elle amusant à ces apparences externes?
Qu'elle laisse ce soing aux farceurs et maistres de rhetoi'ique, qui font tant d'es-
tat de nos gestes. Qu'elle condone hardinjent au mal, cette lascheté vojelle, si
elle n'est ny cordiale, ny stomacale : et preste ses pleintes A'olontaires au genre
des souspirs, sanglots, palpitations, pallissements, que nature a mis hors de nos-
tre puissance. Pourueu que le coui-age soit sans effroy, les parolles sans deses-
poir, qu'elle se contente. Qu'importe que nous tordions nos bras, pourueu que
nous ne tordions nos pensées? Si le corps se soulage en se plaignant, qu'il le face :
se tracasse à sa fantasie, qu'il crie tout à faict, III, 26.
Ce que nous deuons craindre principalement en la mort, c'est la douleur son
auant-coureuse coustumiere. Toutesfois ny ce qui va deuant, ny ce qui vient
après, n'est des appartenances de la mort. Nous nous excusons faussement. C'est
plustost l'impatience de l'imagination de la mort, qui nous rend impatiens de la
douleur : nous la sentons doublement grieue, de ce qu'elle nous menace de mou-
rir, I, 452.
DUEL (escrime).
Qu'est-il plus farouche que de voir vne nation, où par légitime coustume il y
ayt^^oubles loix, celles de l'honneur, et celles de la iustice, en plusieurs choses fort
contraires : aussi rigoureusement condamnent celles-là vn demanti souffert,
comme celles icy vn demanti reuanché : par le deuoir des armes, celuy-là soit
dégradé d'honneur qui souffre vn'iniure, et par le deuoir ciuil, celuy qui s'en
venge encoure vne peine capitale? qui s'adresse aux loix pourauoir raison d'vne
offense faicte à son honneur, il se deshonnore : et qui ne s'y adresse, il en est
puny et chastic par les loix, I, 174.
L'escrime est vn art vtile à sa fin. Mais ce n'est pas proprement vertu, puis
qu'elle tire son appuy de l'addresse, et qu'elle prend autre fondement que de
soy-mesme. L'iionneur des combats consiste en la ialousie du courage, non de
la science, II, 576.
C'est aussi vne espèce de lascheté, qui a introduit en nos combats singuliers, cet
vsage, de nous accompagner de seconds, et tiers, et quarts. La solitude faisoit
peur aux premiers qui l'inuenterent : car naturellement quelque compagnie que
ce soit, apporte confort, et soulagement au danger. On se seruoit anciennement
L'ESPRIT DES ESSAIS. DUEL. E.I80
de personnes tierces, pour garder qu'il ne s'y fist desordre et desloyauté, et pour
tesmoigner de la fortune du combat. Mais depuis qu'on a pris ce train, qu'ils
s'engagent eux mesmes, quiconque y est conuié, ne peut honnestement s'y tenir
comme spectateur, de peur qu'on ne luy attribue, que ce soit faute ou d'affection,
ou do cœur. Outre l'iniustice d'vne telle action, et vilenie, d'engager à la protec-
tion de vostre honneur, autre valeur et force que la vostre, ie trouue du desad-
uantagc à vn homme de bien, et qui pleinement se fie de soy, d'aller meslcr la
fortune, à celle d'vn second : chacun court assez de hazard pour soy, sans le
courir encore pour vn autre : et a assez à faire à s'asseurer en sa propre vertu,
pour la deffence de sa vie, sans commettre chose si chère en mains tierces. Car
s'il n'a esté expressément marchandé au contraire, des quatre, c'est, vne partie
liée. Si vostre second est à terre, vous en auez deux sus les bras, II, 572.
Nos pères se contentoyent de reuencher vne iniure par vn démenti, vn démenti
par vn coup, et ainsi par ordre, lis estoient assez valeureux pour ne craindre pas
leur aduersaire, viuant, et outragé. Nous tremblons de frayeur, tant que nous
le voyons en pieds, II, 572. ^
> ÉCONOMIE.
le vis du iour à la iournée, et me contente d'auoir dequoy suffire aux besoings
presens et ordinaires : aux extraordinaires toutes les prouisions du monde n'y
sçauroyont suffire. Et est follie de s'attendre que fortune elle mesmes nous arme
iamais suffisamment contre soy. C'est de noz armes qu'il la faut combattre. Les
fortuites nous trahiront au bon du faict, I, 472.
Tout compté, il y a plus de peine à garder l'argent qu'à l'acquérir, I, 470.
Mal aysément peu^on establir bornes certaines au désir d'amasser et arrester
vn poinct à l'espargne : on va tousiours grossissant cet amas, iusques à se priuer
vilainement de la iouyssance de ses propres biens : et l'establir toute en la garde,
et n'en vser point, I, 470.
Tout homme pecunieux est auaricieux à mon gré, I, 470.
EDUCATION.
La^ plus grande difficulté et importance de l'humaine science semble estre en
cet endroit, où il se traitte de la nourriture et institution des enfans, I, 232.
Ce n'est pas raison de nourrir vn enfant au giron de ses parens. Cette amour
naturelle les attendrit trop, et relasche, voire les plus sages, I, 242.
Ne prenez iamais, et donnez encoi'c moins à vos femmes, la charge de leur
nourriture : laissez les former à la fortune, souz des loix populaires et naturelles :
laissez à la coustume, de les dresser a la frugalité et à l'austérité; qu'ils ayent
plustot à descendre de l'aspreté, qu'à monter vers elle, III, 670.
Noz plus grands vices prennent leur ply dés nostre plus tendre enfance, et nos-
tre principal gouuerhement est entre les mains des nourrices. C'est passetemps
aux mères de veoir vn enfant tordre le col à vn poulet, et s'esbatre à blesser vn
chien et vn chat. Et tel père est si sot, de prendre à bon augure d'vne ame mar-
tiale, quand il voit son fils gourmer iniurieusement vn païsant, ou vn laquay, qui
ne se défend point : et à gentillesse, quand il le void affiner son compagnon par
quelque malicieuse desloyauté, et tromperie. Ce sont pourtant les vrayes semen-
ces et racines de la cruauté, de la tyrannie, de la traliyson. Elles se germent là, et
s'esleuent après gaillardement, et profitteut à force entre les mains de la cous-
tume. Et est vne tres-dangereuse institution, d'excuser ces villaines inclinations,
par la foiblesse de l'aage, et légèreté du subiect, I, 158. . -
La laideur de la piperie ne dépend pas de la différence des escutz aux espin-
gles : elle dépend de soy. le trouue bien plus iuste de conclurre ainsi : Pourquoy
ne tromperoit il aux escutz, puisqu'il trompe aux espingles? que, ce n'est qu'aux
espingles : il n'auroit garde de le faire aux escutz, I, 158.
Les ieux des enfants ne sont pas ieux : et les faut iuger en eux, comme leurs
plus sérieuses actions, I, 158.
EJ86 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Les mères ont raison de tancer leurs enlans, quand ils contrefont les borgnes,
les boiteux, et les bicles, et tels autres défauts de la personne : car outre ce que
le corps ainsi tendre en peut receuoir vn niauuais ply, il semble que la Fortune
se ioiie à nous prendre au mot : et i'ay ouy reciter plusieui-s exemples de gens
deuenus malades ayant dessigné de feindre l'estre, II, 5o4.
Ce nous est grande simplesse d'abandonner les enfans au gouuernement et à
la charge de leurs pères, au lieu d'en commettre aux ioix la discipline, tout en vn
Estât despendant de leur éducation et nourriture? II, 606.
A vn enfant de maison, qui rechercfie les lettres, non pour le gaing ny tant
pour les commoditez externes, que pour les sienes propres, et pour s'en enrichir
et parer au dedans, ayant plustost enuie d'en réussir habiThomme, qu'homme
sçauant, ie voudrois qu'on fust soigneux de luy choisir vn conducteur, qui cust
plustot la teste bien faicte, que bien pleine : et qu'on y requist tous les deux,
mais plus les moeurs et l'entendement que la science, I, 236.
A son eleue, il dira ce que c'est que seauoir et ignorer, qui doit estre le but de
l'estude : que c'est que vaillance, tempérance, et iustice : ce qu'il y a à dire entre
l'ambition et l'auarice : la seruitude et la subiectioii, la licence et la liberté : à
quelles marques on congnoit le vray et solide contentement : iusques où il faut
craindre la mort, la douleur et la honte. Quels ressors nous meuuent, et le moyen
de tantdiuers branles en nous. Car il me semble que les premiers discours, de-
quoy on luy doit abreuuer l'entendement, ce doiuent estre ceux, qui règlent ses
mœurs et son sens, qui luy apprendront à se cognoistre, et à sçauoir bien mou-
rir et bien viure, I, 254.
Puis que la Philosophie est ce qui instruict à viure, et que l'enfance y a sa le-
çon, comme les autres aages, pourquoy ne la luy communique Ion? On nous ap-
prend à viure, quand la vie est passée. Cent escoliers ont pris la verolle auant
que d'estre arriuez à leur leçon d'Aristote de la tempérance, I, 262.
Vn enfant en est capable au partir de la nourrisse, beaucoup mieux que d'ap-
prendre à lire ou escrire. La philosophie a des discours pour la naissance des
hommes, comme pour la décrépitude, I, 262.
Les Perses apprenoient la vertu à leurs enfans, comme les autres nations font
les lettres, I, 220.
On demandoit à Agesilaus ce qu'il seroit d'aduis, que les enfans apprinsent :
Ce qu'ils doiuent faire estans hommes, respondit-il, I, 222.
C'est vne grande simplesse d'aprendre à nos enfans, la science dés astres et le
mouuement de la huictiesme sphère, auant que les leurs propres, I, 254.
On ne cesse de criaillera leurs oreilles comme qui verseroit dans vn antonnoir;
et leur charge ce n'est que redire ce qu'on leur a dit. le voudroisque nostre gou-
uerneurcorrigeast cette partie; et que de belle arriuee, selon la portée de l'ame,
qu'il a en main, il commençast à la mettre sur la montre, luy faisant gouster les
choses, les choisir, et discerner d'elle mesme. Quelquefois luy ouurantle chemin,
quelquefois le luy laissant ouurir. le ne veux pas qu'il inuente, et parle seul : ie
veux qu'il escoute son disciple parler à son tour. Socrates, et depuis Arcesilaus,
faisoient premièrement parler leurs disciples, et puis ils parloient à eux, I, 236.
Qu'il ne luy demande pas seulement compte des mots de sa leçon, mais du
sens et de la substance. Et qu'il iuge du profit qu'il aura fait, non par le tesmoi-
gnage de sa mémoire, mais de sa vie. Que ce qu'il viendra d'apprendre, il le luy
face mettre en cent visages, et accommoder à autant de diuers subiects, pour
voir s'il l'a encore bien pris et bien faict sien, I, 238.
Les abeilles pillotent deçà delà les fleurs, mais elles en font après le miel qui
est tout leur; ce n'est plus thin, ny mariolaine. Ainsi les pièces empruntées d'au-
truy, il les transformera et confondra, pour en faire vn ouurage tout sien : à
sçauoir son iugementyson institution, son trauail et estude ne vise qu'à le for-
mer, I, 240.
Pour nous apprendre à bien iuger, et à bien parler, il nous faut exercer à par-
ler et à iuger. A cet apprentissage tout ce qui se présente à nos yeux, sert de
liure suffisant : la malice d'vn page, la sottise d'vn valet, vn propos de table; le
commerce des hommes y est merueilleusement propre, et la visite des pays estran-
gers, I, 242.
L'ESPRIT DES ESSAIS. EDU. E.187
Ce n'est pas à dire que ce ne soit vne belle et bonne chose que le bien dire :
mais non pas si bonne qu'on la faict, et suis despit dequoy nostrc vie s'embeson-
gne toute à cela. le voudrois piemiei'enient bien sçauoir ma langue, et celle de
mes voisins, où i'ay plus ordinaire commerce. C'est vn bel et grand agencement
sans double, que le Grec et Latin, mais on l'acheptc trop cher, I, 280.
Qu'on le rende délicat aux chois et triage de ses raisons, et aymant la perti-
nence, et par conséquent la briefueté. Qu'on l'instruise sur tout à se rendre, et à
quitter les armes à la vérité, tout aussi tost qu'il l'apperceura : soit qu'elle naisse
es mains de son aduersaire, soit qu'elle naisse en luy-mesmes par quelque raui-
sement, I, 246.
Qu'on luy mette en fantasie vne honneste curiosité de s'enquérir de toutes
choses : tout ce qu'il y aura de singulier autour de luy, il le verra, I, 2-18.
La sottise mesmes, et foiblesse d'autruy luy sera instruction : à contreroUer les
grâces et façons d'vn cliacun, il s'engendrera enuie des bonnes, et me»pris des
mauuaises, I, 248.
Qu'il luy l'ace tout passer par l'estamine, et ne loge rien en sa teste par simple
authorité, et à crédit. Dans cette diuersité de iugemens, il choisira s'il peut : si-
non il en demeurera en doubte, I, 238.
S'il embrasse les opinions de Xenophon et de Platon, par son propre discoure,
ce ne seront plus les leurs, ce seront les siennes. Qui suit vn autre, il ne suit
rien : il ne trouue rien : voire il ne cerche rien, I, 238.
Nous nous laissons si fort aller sur les bras d'autruy, que nous anéantissons nos
forces, I, 122.
La vérité et la raison sont communes à vn chacun et ne sont plus à qui les a
dites premièrement, qu'à qui les dit après. Qu'il oublie hardiment s'il veut, d'où
il les tient, mais qu'il se les sache approprier, I, 23^.
Qu'il celé tout ce dequoy il a esté secouru, et ne produise que ce qu'il en a
faict. Nul ne met en compte publique sa recette : chacun y met son acquest, 1, 240.
Il ne dira pas tant sa leçon, comme il la fera. Il la répétera en ses actions. On
verra s'il y a de la prudence en ses entreprises : s'il y a de la bonté, de. la iustice
en ses deportemcnts : s'il a du iugement et de la grâce en son parler : de la vi-
gueur en ses maladies : de la modestie en ses ieux : de la tempérance en ses vo-
luptez : de l'ordre en son œconomie : de l'indifférence en son goust, 1,270.
Que sa conscience et sa vertu reluisent en son parler, et n'ayent que la raison
pour conduite. Qu'on luy face entendre, que de confesser la faute qu'il descou-
urira en son propre discours, encore qu'elle ne soit apperceuë que par luy, c'est
vn elfet de iugement et de sincérité, qui sont les principales parties qu'il cher-
che. Que l'opiniatrer et contester, sont qualitez communes : plus apparentes aux
phis basses âmes. Que se r'aduiser et se corriger, abandonner vn mauuais party,
sur le cours de son ardeur, ce sont qualitez rares, fortes et philosophiques, 1, 246.
Si son gouuerneur tient de mon humeur, il luy foi-mera la volonté à estre
tres-loyal seruiteur de son Prince, et tres-affectionné, et tres-courageux : mais il
luy i-efroidira l'enuie de s'attacher autrement que par vn deuoir publique, I, 246.
Que notre disciple soit bien pourucu de choses, les parolles ne suiuront que
trop : il les traînera, si elles ne veulent suiure. l'en oy qui s'excusent de ne se
pouuoir exprimer; et font contenance d'auoir la teste pleine de plusieurs belles
choses, mais à faute d'éloquence, ne les pouuoir mettre en euidence : c'est vne
baye. Sçauez vous à mon aduis que c'est que cela? ce sont des ombrages, qui
leur viennent de quelques conceptions informes, qu'ils ne peuuent démesler et
esclarcir au dedans, ny par conséquent pi-oduire au dehors, I, 272.
Cette institution se doit conduire par. vne seucre douceur, non comme il se
fait. Au lieu de conuier les enfans aux lettres, on ne leur présente à la vérité,
qu'hdrreur et cruauté. Ostez moy la violence et la force; il n'est rien à mon
aduis qui abâtardisse et estourdisse si fort vne nature bien née. Si vous auez
enuie qu'il craigne la honte et le chastiement, ne l'y endurcissez pas. Endur-
cissez le à la sueur et au froid, au vent, au soleil et aux hazards qu'il luy faut
mespriser. Ostez luy toute mollesse et délicatesse au vestir et coucher, au man-
ger et au boire : accoustumez le à tout : que ce ne soit pas vn beau garçon et
dameret, mais vn garçon vert et vigoureux, I, 266.
E.188 ESSAIS DE MONTAIGNE.
l'axiciise toute violence en l'éducation d'vne ame tendre, qu'on dresse pour
l'honneur, et la liberté : et tiens que ce qui ne se peut faire par la raison, et par
prudence, et addresse, ne se fait iamais par la force, II, 26.
le n'ay veu autre effect aux verges, sinon de rendre les âmes plus lasches, ou
plus malitieusement opiniastres, II, 26.
11 faut régler l'ame à son deuoir par raison, non par nécessité et par le besoin,
ny par rudesse et par force, II, 26.
Pour tout cecy, ie no veux pas qu'on emprisonne ce garçon, ie ne veux pas
qu'on l'abandonne à la colère et humeur melancholique d'vn furieux maistre
d'escole : ie ne veux pas corrompre son esprit, à le tenir à la géhenne et au
trauail, quatorze ou quinze heures par iour, comme vn portefaiz. Ny ne trou-
ueroye bon, quand par quelque complexion solitaire et melancholique, on ie
verroit adonné d'vne application trop indiscrette à l'estude des Hures, qu'on la
luy nourrist. Cela les rend ineptes à la conuersation ciuile, et les destourne
de meilleures occupations. Et combien ay-ie veu de mon temps, d'hommes
abestis, par téméraire auidité de science? I, 261.
A la vérité nous voyons encores qu'il n'est rien si gentil que les petits enfans
en France : mais ordinairement ils trompent l'espérance qu'on en a conceuë
et hommes faicts, on n'y voit aucune excellence. l'ay ouy tenir à gens d'enten-
dement, que ces collèges où on les enuoie, les abrutissent ainsin, I, 264.
Au nostre, vn cabinet, vn iardin, la table, et ie lict, la solitude, la compa-
gnie, le matin et le vespre, toutes heures luy seront vues : toutes places luy
seront estude : car la philosophie, qui, comme formatrice des iugements et des
meurs, sera sa principale leçon, a ce priuilege, de se mesler par tout, I, 2ô4.
le retombe volontiers sur ce discours de l'ineptie de nostre institution. Elle a
eu pour sa fin, de nous faire, non bons et sages, mais sçauans : elle y est arriuée.
Elle ne nous a pas appris de suyure et embrasser la vertu et la prudence : mais
elle nous en a imprimé la deriuation et l'etymologie. Nous sçauons décliner
vertu, si nous ne sçauons l'aymer. Si nous ne sçauons que c'est que prudence
par effect, et par expérience, nous le sçauons par iargon et par cœur, II, 516.
Ceux qui, comme nostre vsage porte, entreprenent d'vne mesme leçon et pa-
reille mesure de conduite, régenter plusieurs esprits de si diuerses mesures et
formes : ce n'est pas merueille, si en tout vn peuple d'enfants, ils en rencontrent
à peine deux ou trois, qui rapportent quelque iuste fruit de leur discipline, I, 236.
Il faut s'enquérir qui est mieux sçauant, non qui est plus sçauant. Nous ne
trauaillons qu'à remplir la mémoire, et laissons l'entendement et la conscience
vuide, I, 208.
Que mon guide se souuienne où vise sa charge; et qu'il n'imprime pas tant à
son disciple, la date de la ruine de Carthage, que les mœurs de Hannibal et de
Scipion : ny tant où mourut Marcellus, que pourquoy il fut indigne de son de-
uoir, qu'il mourust là. Qu'il ne luy apprenne pas tant les histoires, qu'à en iuger,
I, 248.
Les inclinations naturelles s'aident et fortifient par institution : mais elles ne
se changent gueres et surmontent. Mille natures, de mon temps, ont eschappé
vers la vertu, ou vers le vice, au trauers d'vne discipline contraire. On n'ex-
tirpe pas ses qualités originelles, on les couure, on les cache, III, 120.
Les ieux mesmes et les exercices seront vne bonne partie de l'estude : la course,
la lucte, la musique, la danse, la chasse, le maniement des chenaux et des armes,
le veux que la bien-seance extérieure, et l'entre-gent, et la disposition de la per-
sonne se façonne quant et quant l'ame. Ce n'est pas vne ame, ce n'est pas vn
corps qu'on dresse, c'est vn homme, il n'en faut pas faire à deux. Et comme dit
Platon, il ne faut pas les dresser l'vn sans l'autre, mais les conduire également,
comme vne couple de chenaux attelez à mesme timon, I, 266.
Ce n'est pas assez que nostre institution ne nous gaste pas, il faut qu'elle nous
change en mieux, I, 216.
Ce sont natures belles et fortes qui se maintiennent au trauers d'vne mauuaise
institution, I, 216.
Vne bonne institution change le iugement et les mœurs, II, 516.
Il faut apprendre soigneusement aux enfants de haïr les vices de leur propre
L'ESPRIT DES ESSAIS. ÉDU. E.189
contexture, et leur en faut apprendre la naturelle difformité, à ce qu'ils les
fuient non en leur action seulement, mais sur tout en leur cœur : que la pensée
mesme leur en soit odieuse, quelque masque qu'ils portent, I, 158.
Le corps est encore souple, on le doit à cette cause plier à toutes façons et
coustumes : et pourueu qu'on puisse tenir l'appétit et la volonté soubs boucle,
qu'on i-ende hardiment vn ieune homme commode à toutes nations et con»pa-
gnies, voire au desreglement et aux excès, si besoing est. Son exercitation suiue
l'vsage. Qu'il puisse faire toutes choses, et n'ayme à faire que les bonnes, 1, 268.
Il n'est rien qu'on doiue tant recommander à la ieunesse, que l'actiueté et la
vigilance. Nostre vie n'est que mouuement, III, 660.
Qui par souhait ne trouue plus plaisant et plus doux, reuenir poudreux et vic-
torieux d'un combat, que de la paulme ou du bal, auec le prix de cet exercice :
ie n'y trouue autre remède, sinon qu'on le mette pâtissier: fust il fils d'vn Duc,
I, 260.
Vn ieune homme, doit troubler ses règles, pour esueiller sa vigueur ; la garder
de moisir et de s'apoltronir. Et n'est train de vie, si sot et si débile, que celuy
qui se conduict par ordonnance et discipline. Il se reiettera souuent aux excez
mesme, s'il m'en croit : autrement, la moindre desbauche le ruyne. Il se rend
incommode et des-aggreable en conuersation. La plus contraire qualité à vn
honneste homme, c'est la délicatesse et obligation à certaine façon particulière.
Et elle est particulière, si elle n'est ployable, et soupple. Il y a de la honte, de
laisser à faire par impuissance, ou de n'oser, ce qu'on voit faire à ses compai-
gnons. Par tout ailleurs, il est indécent : mais il est vitieux et insupportable à
vn homme de guerre, lequel se doit accoustumer à toute diuersité, et inégalité
de vie, III, 636.
Voicy mes leçons : Celuy-là y a mieux proffité, qui les fait, que qui les sçait.
Si vous le voyez, vous l'oyez : si vous l'oyez, vous le voyez, I, 270.
Le guain de nostre estude, c'est en estre deuenu meilleur et plus sage, I, 240.
ÉLOQUENCE.
En la vertu parliere, ie ne trouue pas gi-and choix, entre ne sçauoir dire que
mal, ou ne sçauoir rien que bien dire, I, 434.
Vn rhetoricien du temps passé, disoit que son mestier estoit, de choses petites
les faire paroistre et trouuer grandes. C'est vn cordonnier qui sçait faire de
grands souliers à vn petil pied, I, 558.
Au don d'éloquence, nous voyons que les vus ont la facilité et la promptitude,
et ce qu'on dit, le boutehors si aisé, qu'à chasque bout de champ ils sont prests :
les autres plus tardifs ne parlent iamais rien qu'elabouré et prémédité. En ces
deux diuers aduantages, le tardif seroit mieux mieux Prescheur, ce me semble, et
l'autre mieux Aduocat, I, 68.
La part de l'Aduocat est plus difficile que celle du Prescheur : et nous trou-
uons pourtant ce m'est aduis plus de passables Aduocats que Prescheurs, au
moins en France. Il semble que ce soit plus le propre de l'esprit, d'auoir son
opération prompte et soudaine, et plus le propre du iugement, de l'auoir lente
et posée, I, 70.
Fy de l'éloquence qui nous laisse enuie de soy, non des choses, I, 436.
C'est vn vtil inuenté pour manier et agiter vue tourbe, et vne commune desre-
glée : et est vtil qui ne s'employe qu'aux Estais malades, comme la médecine, 1, 558.
En ceux où le vulgaire, où les ignorans, où tous ont tout peu, comme celuj'
d'Athènes, de Rhodes, et de Rome, et où les choses ont esté en perpétuelle tem-
peste, là ont afflué les orateurs, I, 560.
Les republiques qui se sont maintenues en vn estât réglé et bien policé, elles
n'ont pas faict grand compte d'orateurs. Ariston définit sagement la rhétorique,
science à persuader le peuple : Socrates, Platon, art de trompei- et de flatter. Et
ceux qui le nient en là générale description le vérifient par tout, en leurs pré-
ceptes : ils font estât de tromper nostre iugement, et d'abastardir et corrompre
l'essence des choses, I, 558.
L'éloquence a fleury le plus à Rome lors que les affaires ont esté en plus mau-
E.190 ESSAIS DE MONTAIGNE.
uais estât, et que l'oi-age des guerres ciuiles les agitoit; comme vn champ libre
et indompté porte les herbes plus gaillardes. Il semble par là que les polices,
qui dépendent d'vn Monarque, en ont moins de besoin que les autres : car la
bestise et facilité, qui se trouue en la commune, et qui la rend subiecte à estre
maniée et contournée par les oreilles, au doux son de cette harmonie, sans venir
à poiser et connoistre la vérité des choses par la force de raison; cette facilité,
dis-ie, ne se trouue pas si aisément en vn seul, et est plus aisé de le garentir
par bonne institution et bon conseil, de Timpression de cette poison, I, 569.
ENFANTS.
Une vraye affection et bien réglée pour nos enfants deuroit naistre, et s'aug-
menter auec la cognoissance qu'ils nous donnent d'eux, II, 22.
le n'aj' iamais estimé qu'estre sans enfans, fust vn défaut qui deust rendre la
vie moins complète, et moins contente. La vacation stérile, a bien aussi ses com-
moditez. Les enfans sont du nombre des choses, qui n'ont pas fort dequoy estre
désirées. Et si ont iustement dequoy estre regrettées, à qui les perd, après les
auoir acquises, III, 478.
Il faut eolloquer les enfans, non selon les facultez de leur pcre, mais selon les
facultez de leur ame, I, 262.
ESCRIME (duel).
L'escrime est vn art vtile à sa fin, duquel la cognoissance a grossi le cœur à
aucuns, outre leur mesure naturelle. Mais ce n'est pas proprement vertu, puis
qu'elle tire son appuy de l'addresse, et qu'elle prend autre fondement que de soy-
mesme. En mon enfance, la noblesse fuyoit la réputation de bon escrimeur
comme iniurieuse : et se desroboit pour l'apprendre, comme mestier de subtilité,
desrogeant à la vraye et naïfue vertu. Cet exercice, est 'd'autant moins noble,
qu'il ne regarde qu'vne fin priuée : qui nous apprend à nous entreruyner, contre
les loix et la iustice : et qui en toute façon, produict tousiours des effects dom-
mageables, II, 576.
ESPÉR-INCE.
Toutes choses sont esperables à vn homme pendant qu'il vit, I, (i36.
0 la courageuse faculté que l'espérance : qui en vn subiect mortel, et en vn
moment, va vsurpant l'infinité, l'immensité, et remplissant l'indigence de son
maistre, de la possession de toutes les choses qu'il peut imaginer et désirer,
autant qu'elle veut! Nature nous a là donné vn plaisant iouët, I, 514.
ESPRIT.
C'est vn grand ouurier de miracles que l'esprit humain, II, 362.
Il est malaisé de lui donner bornes : il est curieux et auide, et n'a point oc-
casion de s'arrester plus tost à mille pas qu'à cinquante, II, 338.
Sur ce mesme fondement qu'auoit Heraclitus, et cette sienne sentence, Que
toutes choses auoyent en elles les visages qu'on y trouuoit, Democritus en tiroit
vue toute contraire conclusion : c'est que les subiects n'auoient du tout rien de
ce que nous y trouuions : et de ce que le miel estoit doux à l'vn, et amer à
l'autre, il argumentoit, qu'il n'estoit ny doux, ny amer, II, 387.
C'est vne espineuse entreprinse, et plus qu'il ne semble, de suyure vne alleure
si vagabonde, que celle de nostre esprit : de pénétrer les profondeurs opaques de
ses replis internes : de choisir et arrester tant de menus aii"s de ses agitations,
I, 678.
Ce que ma force ne peut descouurir, ie ne laisse pas de le sonder et essayer :
et en retastant et pestrissant cette nouuelle matière, la remuant et l'eschauf-
fant, i'ouure à celuy qui me suit, quelque facilité pour en iouyr plus à son ayse,
et la luy rends plus soupple, et plus maniable. Autant en fera le second au
L'ESPRIT DES ESSAIS. ESP. E.191
tiers : qui est cause que la difficulté ne me doit pas désespérer; ny aussi peu
mon impuissance, car ce n'est que la mienne. L'homme est capable de toutes
choses, comme d'aucunes, II, 338.
Les hommes mescognoissent cette maladie naturelle de leur esprit. Il ne faict
que fureter et quester; et va sans cesse, tournoyant, bastissant, et s'empestrant,
en sa besogne : comme nos vers à soye, et s'}- estouffe. Ce n'est rien que foiblesse
particulière, qui nous faict contenter de ce que d'autres, ou que nous mesmes
auons trouué en cette chasse de cognoissance : vn plus habile ne s'en contentera
pas. 11 y a tousiours place pour vn suiuant, ouy et pour nous mesmes, et route par
ailleurs. 11 n'y a point de fin en nos inquisitions. Nostre fin est en l'autre
monde, III, 606. ■•
C'est vn outrageux glaiue à son possesseur mesme, que l'esprit, à qui ne sçait
s'en armer ordonnément et discrettement. Et n'y a point de beste, à qui il faille
plus iustement donner des orbieres, pour tenir sa veuë subjecte, et contrainte de-
uant ses pas; et la garder d'e.xtrauaguer ny çà ny là, hors les ornières que l'vsage
et les loix luy tracent, II, 334.
C'est un vtil vagabond, dangereux et téméraire : il est malaisé d'y ioindre l'or-
dre et la mesure : il s'empesche soy mesmes, II, 334.
Nous ne sommes ingénieux qu'à nous mal mener : c'est le vray gibbier de la
force de nostre esprit : dangereux vtil en desreglement, III, 254.
le hay vn esprit hargneux et triste, qui glisse par dessus les plaisirs de sa vie,
et s'empoigne et paist aux malheurs, III, 186.
Les esprits, voire pareils en force, ne sont ])as tousiours pareils en application
et en goust, III, 376.
ESSAIS.
Si ces Essays estoient dignes, qu'on en iugeast, il en pourroit aduenir à mon
aduis, qu'ils ne plairoient guère aux esprits communs et vulgaires, ny guère aux
singuliers et excellens : ceux-là n'y entendroient pas assez, ceux-cy y entendroient
trop : ils pourroient viuoter en la moyenne région, I, 572.
Et quand personne ne me lira, ay-ie perdu mon temps, de m'estre entretenu
tant d'heures oisiues, àpensemenls si vtiles et aggrcables? II, 524.
Combien de fois m'a cette besongne diuerty de cogitations ennuieuses? Et doi-
uent estre comptées pour ennuyeuses toutes les friuoles, II, 524.
Il n'est subiect si vain, qui ne mérite vn rang en cette rapsodie, I, 84.
le parle de tout, et de rien par manière d'aduis. le ne serois pas si hardy à
parler, s'il m'appartenoit d'en estre creu, III, 540.
le discours selon moy, non ce que ie croy selon Dieu, d'vne façon laïque, non
cléricale : mais tousiours tres-religieuse. Comme les enfants proposent leurs es-
says, instruisables, non instruisants, I, 590.
le sçay bien que fort peu de gens rechigneront à la licence de mes escrits, qui
n'ayent plus à rechigner à la licence de leur pensée. le me conforme bien à leur
courage : mais i'offence leurs, yeux, III, 186.
ÉTAT (gouvernement).
Toute domination populaire me semble la plus naturelle et équitable, I, 38.
A l'aduis d'Anacharsis le plus heureux estât d'vne police, seroit où toutes au-
tres choses estants esgales, la precedence se mesureroit à la vertu, et le rebut au
vice, I, 494.
Non par opinion, mais en vérité, l'excellente et meilleure police, est à chacune
nation, celle soubs laquelle elle s'est maintenue. Sa forme et commodité essen-
tielle dépend de l'vsage. Nous nous desplaisons volontiers de la condition pré-
sente. Mais ie tiens pourtant, que d'aller désirant le commandement de peu, en
vn estât populaire : ou en la monarchie, vne autre espèce de gouuernement, c'est
vice et folie, III, 398.
Les maladies et conditions de nos corps, se voyent aussi aux estats et polices :
les royaumes, les republiques naissent, fleurissent et fanissent de vieillesse,
comme nous, II, 554.
E.192 ESSAIS DE MONTAIGNE
Nostre police se porte mal. Il en a esté pourtant de plus malades, sans mourir,
III, 404.
Il est bien aysé d'accuser d'imperfection vne police : car toutes choses mortel-
les en sont pleines : il est bien aysé d'engendrer à vn peuple le mespris de ses
anciennes obseruances : iamais homme n'entreprint cela, qui n'en vinst à bout :
mais d'y restablir vn meilleur estât en la place de celuy qu'on a ruiné, à cecy
plusieurs se sont morfondus, de ceux qui l'anoient entreprins, II, 508.
Rien ne presse vn estât que l'innouation : le changement donne seul forme à
l'iniustice, et à la tyrannie. Quand quelque pièce se démanche, on peut l'estayer :
on peut s'opposer à ce que l'altération et corruption naturelle à toutes choses, ne
nous esloigne trop de nos commencemens et principes. Mais d'entreprendre à
refondre vne si grande masse, et à changer les fondements d'vn si grand basti-
ment, c'est à faire à ceux qui pour desci-asser effacent : qui veulent amender
les defîauts particuliers, par vne confusion vniuerselle, et guarir les maladies
par la mort, III, 400.
Au reste, ie me suis ordonné d'oser dire tout ce que i'ose faire : et me deplaist
des pensées mesmes impubliables, III, 186.
Ceux qui donnent le branle à vn Estât, sont volontiers les premiers absorbez
en sa ruine. Le fruict du trouble ne demeure guère à celuy qui l'a esmeu ; il bat
et brouille l'eaue d'autres pescheurs, I, 178.
Tout ce qui branle ne tombe pas. La contexture d'vn si grand corps tient à
plus d'vn clou. Il tient mesme par son antiquité : comme les vieux bastimens,
ausquels l'aage a desrobé le pied, sans crouste et sans cyment, qui pourtant
viuent et soustiennent en leur propre poix, III, 404.
Heureux peuple, qui fait ce qu'on commande, mieux que ceux qui comman-
dent, sans se tourmenter des causes, II, 508.
Le monde est inepte à se guarir. 11 est si impatient de ce qui le presse, qu'il
ne vise qu'à s'en deffaire, sans regarder à quel prix. II se guarit ordinairement à
ses despens : la descharge du mal présent, n'est pas guarison, s'il n'y a en gêne-
rai amendement de condition, III, 400.
Quiconque propose seulement d'emporter ce qui le masche, il demeure court :
car le bien ne succède pas nécessairement au mal : vn autre mal luy peut succé-
der; et pire, 111,400.
Qui se doit désespérer de sa condition, voyant les secousses et mouuemens de-
quoy Testât de Rome fut agité, et qu'il supporta? III, 404.
La foiblesse de nostre condition, nous pousse souuent à cette nécessité, de nous
seruir de mauuais moyens pour vne bonne fin, II, 55C.
Epaminondas ne pensoit pas qu'il fust loisible pour recouurer mesmes la li-
bellé de son pays, de tuer vn homme sans cognoissance de cause, III, 20.
Nous sommes subiects à vne repletion d'humeurs soit de bonnes, soit de mauuaises,
qui est l'ordinaire cause des maladies. De semblable repletion se voj ent les estats
souuent malades : et a Ion accoustumé d'vser de diuerses sortes de purgation :
tantost on donne congé à vne grande multitude de familles, pour en descharger
le pais, lesquelles vont chercher ailleurs où s'accommoder aux despens d'autruy,
tantost on se rejette en la guerre estrangere, II, 554.
Vne guerre estrangere est vn mal bien plus doux que la ciuile : mais ie ne
croy pas que Dieu fauorisast vne si iniuste entreprise, d'offencer et quereler au-
truy pour nostre commodité, II, 550.
ÉTAT MILITAIRE (profession).
11 n'est occupation plaisante comme la militaire : occupation et noble en exé-
cution (car la plus forte, généreuse, et superbe de toutes les vertus, est la vail-
lance) et noble en sa cause. II n'est point d'vtilité, ny plus iuste, ny plus vniuer-
selle, que la protection du repos, et grandeur de son pays, La compagnie de tant
d'hommes vous plaist, nobles, ieunes, actifs : la veuë ordinaire de tant de specta-
cles tragiques : la liberté de cette conuersation, sans art, et vne façon de vie,
masle et sans cérémonie; la variété de mille actions diuerses : cette courageuse
L'ESPRIT DES ESSAIS. ÉTAT. E.193
harmonie de la musique guerrière, qui vous entretient et escliauffe, et les oreilles
et l'ame : l'honneur de cet exercice : son aspreté mesme et sa difficulté, III, 662.
La mort est plus abiecte, plus languissante, et pénible dans vn lict, qu'en vn
combat : les fiebures et les caterrhes, autant douloureux et mortels, qu'vne har-
quebuzade, III, 664.
EXPÉRIENCE.
Il n'est désir plus naturel que le désir de cognoissance. Nous essayons tous les
moyens qui nous y peuuent mener. Quand la raison nous faut, nous y employons
l'expérience qui est vn moyen de beaucoup plus foible et plus vil, III, 598.
Comme nul euenement et nulle forme, ressemble entièrement à vue autre,
aussi ne ditl'ere l'vne de l'autre entièrement. Ingénieux meslange de Nature. Si
nos faces n'estoient semblables, on ne sçauroit discerner l'homme de la beste :
si elles n'estoient dissemblables, on ne sçauroit discerner l'homme de l'homme.
Toutes choses se tiennent par quelque similitude. Tout exemple cloche. Et la re-
lation qui se tire de l'expérience, est tousiours défaillante et imparfaicte. On
ioinct toutesfois les comparaisons par quelque bout, III, 608.
Mais la conséquence que nous voulons tirer de la conférence des euenements,
est mal seure, d'autant qu'ils sont tousiours dissemblables. Il n'est aucune qualité
si vniuerselle, en cette image des choses, que la diuersité et variété, III, 6(X).
Quel que soit doncq le fruict que nous pouuons auoir de l'expérience, à peine
seruira beaucoup à nostre institution, celle que nous tirons des exemples estran-
gers, si nous faisons si mal nostre profit, de celle, que nous auons de nous mesme,
qui nous est plus familière : et certes suffisante à nous instruire de ce qu'il nous
faut, III, 644.
FATALITÉ.
Parmy noz autres disputes, celle du fatum, s'y est meslée : et pour attacher
les choses aduenir et nostre volonté mesme, à certaine et ineuitable nécessité,
on est encore sur cet argument, du temps passé : Puis que Dieu preuoit toutes
choses deuoir ainsin aduenir, comme il fait, sans double : il faut donc qu'elles
aduiennent ainsin. A quoy noz maistres respondent, que le voir que quelque
chose aduienne, comme nous faisons, et Dieu de mesmes (car tout luy estant
présent, il voit plustost qu'il ne preuoit) ce n'est pas la forcer d'aduenir : voire
nous voyons, à cause que les choses aduiennent, et les choses n'aduiennent pas,
à cause que nous voyons. L'aduenement fait la science, non la science l'aduene-
ment. Ce que nous voyons aduenir, adulent : mais il pouuoit autrement aduenir :
et Dieu, au registre des causes des aduenements qu'il a en sa prescience, y a
aussi celles qu'on appelle fortuites, et les volontaires, qui despendent de la liberté
qu'il a donné à nostre arbitrage, et sçait que nous faudrons, par ce que nous
auons voulu faillir, II, 598.
FEMME (amour, mariage, ménage).
C'est vn doux commerce, que celuy des belles et honnestes femmes : mais c'est
commerce où il se faut tenir vn peu sur ses gardes : et notamment ceux en qui
le corps peut beaucoup. C'est folie d'y attacher toutes ses pensées, et s'y engager
d'vne affection furieuse et indiscrète, III, 148.
C'est vne desplaisante coustume, et iniu rieuse aux dames, d'auoir à prester
leurs leures, à quiconque a trois valets à sa suitte, pour mal plaisant qu'il soit. Et
nous mesme n'y gaignons guère : car comme le monde se voit party, pour trois
belles, il nous en faut baiser cinquante laides. Et à vn estomach tendre, vn mau-
uâis baiser en surpaie vn bon, III, 258.
Cette loy qui leur commande de nous abominer, par ce que nous les adorons,
et nous havr de ce que nous les aymons, est cruelle, ne fust que de sa difficulté,
III, 220.
Qu'elles se dispensent vn peu de la cérémonie, qu'elles entrent en liberté de
discours sur l'amour, nous ne sommes qu'enfans au prix d'elles, en cette science.
essais de MONTAIGNE. — T. IV. 13
E.194 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Oyez leur représenter nos poursuittes et nos entretiens : elles vous font bien co-
gnoistre que nous ne leur apportons rien, qu'elles n'ajent sçeu et digéré sans
nous : il n'est ny parole, ny exemple, ny démarche qu'elles ne sçachent mieux
que nos Hures. C'est vne discipline qui naist dans leurs veines, que ces bons
maistrcs d'escole, nature, ieunesse, et santé, leur soufflent continuellement dans
l'ame. Elles n'ont que faire de l'apprendre, elles l'engendrent, III, 208.
Celle qui est eschappee bagues sauues, d'vn escolage libre, apporte bien plus
défiance de soy, que celle qui sort saine, d'vne escole seuere et prisonnière, III, 262.
A vne femme desraisonnable, il ne couste non plus de passer par dessus vne
autre. Elles s'ayment le mieux où elles ont plus de tort. L'iniustice les allèche :
comme les bonnes, l'honneur de leurs actions vertueuses, II, 42.
l'en ay veu, qui desrobboit gros à son mary, pour, disoit-elle à son confesseur,
faire ses aulmosnes plus grasses. Fiez vous à cette religieuse dispensation, II, 36.
Il n'y a aucune d'elles, pour malotrue qu'elle soit, qui ne pense e.stre bien ay-
mable, et ne se recommande par son aage, ou par son poil, ou par son mouue-
ment (car de laides vniuei-sellement, il n'en est non plus que de belles), III, 150.
Elles n'ont pas tort du tout, quand elles refusent les règles de vie, qui sont in-
troduites au monde : d'autant que ce sont les hommes qui les ont faictes sans
elles, III, 204.
Nos pères dressoient la contenance de leurs filles à la honte et à la crainte (les
courages et les désirs tousiours pareils), nous à l'asseurance : nous n'v entendons
rien, III, 262.
Vne femme estoit alors estimée assez sçauante, quand elle sçauoit mettre diffé-
rence entre la chemise et le pourpoint de son marj-, I, 216.
Les anciens Gaulois estimoient à extrême reproche d'auoir eu accointance de
femme, auant l'aage de vingt ans : d'autant que les courages s'amollissent et di-
uertissent par l'accouplage des femmes, II, 28.
Ce n'est pas tant pudeur, qu'art et prudence, qui rend nos dames si circons-
pectes, à nous refuser l'entrée de leurs cabinets, auant qu'elles soyent peintes et
parées pour la montre publique, II, 196.
EIIqs couurenl leur sein d'vn reseul, les prestres plusieurs choses sacrées, les
peintres ombragent leur ouurage, pour luy donner plus de lustre. Il y a certaines
autres choses qu'on cache pour les montrer, III, 254.
Les femmes ont tort de nous recueillir de ces contenances mineuses, querelleu-
ses et fuyardes, qui nous esteignent en nous allumant. La femme qui couche
auec vu homme, doit auec sa cotte laisser quant et quant la honte, et la reprendre
auec sa cotte, I, 140.
Selon la loy que Nature leur donne, ce n'est pas proprement à elles de vouloir
et désirer : leur roUe est souffrir, obeyr, consentir. Nature leur a donné vne per-
pétuelle capacité; à nous, rare et incertine. Elles ont tousiours leur heure, afin
qu'elles soyent tousioure prestes à la nostre, III, 264.
le loue la gradation et la longueur, en la dispensation de leurs faueurs : en
toute espèce d'amour, la facilité et promptitude est interdicte aux tenants, 111,264.
Se conduisant en leur di.spensation, ordonnement et mesurement, elles pipent
bien mieux nostre désir, et cachent le leur. Qu'elles fuyent tousiours deuant
nous, ie dis celles mesmes qui ont à se laisser attraper : elles nous battent mieux
en fuyant, comme les Scythes, III, 204 .
Ce que nous craignons le moins chez la femme, est à l'auanture le plus à
craindre. Leurs péchez muets sont les pires, III, 228.
Tout beau et honneste que vous estes, quand vous aurez faillj' vostre pointe,
n'en concluez pas incontinent vne chasteté inuiolable en vostre maistresse : ce
n'est pas à dire que le muletier n'y trouue son heure, I, 60-1.
Vne femme se peut rendre à tel personnage, que nullement elle ne voudroit
auoir espousé : ie ne dy pas pour les conditions de la fortune, mais pour celles
mesmes de la personne, III, 202.
C'est vn vilain desreglement, qui les pousse si souuent au change, et les em-
pesche de fermir leur affection en quelque subiect que ce soit : mais si est-il vra)',
que c'est contre la nature de l'amour, s'il n'est violant, et contre la nature de la
violance, s'il est constant, III, 264.
L'ESPRIT DES ESSAIS. FEM. E.195
le ne conseille aux Dames, d'appeler honneur, leur deuoir. Leur deuoir est le
marc : leur honneur n'est que l'escorce. Et ne leur conseille de nous donner cette
excuse en paiement de leur relus : l'oflence et onuers Dieu, et en la conscience,
seroit aussi grande de le désirer que de l'effectuer. Toute personne d'honneur
choisit de perdre plus tost son honneur, que de perdre sa conscience, II, 464.
Il est tousiours procliue aux femmes de disconuenir à leurs maris. Elles saisis-
sent à deux mains toutes couuertures de leur contraster : la première excuse leur
sert de pleniere iustification, II, 3G.
Ceux qui ont à négocier auec des l'enmies testues, peuuent auoir essayé à quelle
rage on les iette, quand on oppose à leur agitation, le silence et la froideur, et
qu'on desdaigne de nourrir leur courroux. Elles ne se courroucent, qu'affin qu'on
se contre-courrouce, à l'imitation des loix de l'amour, II, 614.
Nul maniement leur semble auoir assez de dignité, s'il vient de la concession
du mary. 11 faut qu'elles l'vsurpent ou finement ou fièrement, et tousiours iniu-
rieusement, pour luy donner de la grâce et de l'authorité, II, 36.
Il faut laisser bonne partie de leur conduite, à leur propre discrétion : car ainsi
comme ainsi n'y a il discipline qui les sçeut brider de toutes parts, II, 262.
En nostre siècle, elles reseruent plus communément, à estaller leur's bons of-
fices, enuers leurs maris perdus : Tardif tesmoignage, et hors de saison. Elles
prennent plustost par là, qu'elles ne les ayment que morts. La vie est pleine de
combustion, le trespas d'amour, et de courtoisie. Elles ont beau s'escheueler et
s'esgratigner. Leur rechigner est odieux aux viuans, et vain aux morts. Nous
dispenserons volontiers qu'on rie après, pourueu qu'on nous rie pendant la vie.
Est-ce pas de quoy resusciter de despit : qui m'aura craché au nez pendant que
i'estoy, me vienne frotter les pieds, quand ie ne suis plus? S'il y a quelque hon-
neur à pleurer les maris, il n'appartient qu'à celles qui leur ont ry : celles qui ont
pleuré en la vie, qu'elles rient en la mort, au dehors comme au dedans. Aussi, ne
regardez pas à ces yeux moites, et à cette piteuse voix : regardez ce port, ce
teinct, et î'embonpoinct de ces iouës, soubs ces grands voiles : c'est par là qu'elle
parle François. Il en est peu, de qui la santé n'aille en amendant, qualité qui ne
sçait pas mentir. Cette cérémonieuse contenance ne regarde pas tant derrière
soy, que deuant; c'est acquest, plus que payement, II, 662.
La plus part de leurs deuils sont artificiels et cérémonieux. On y procède mal,
quand on s'oppose à cette passion : car l'opposition les pique et les engage plus
auant à la tristesse. On exaspère le mal par la ialousie du débat, III, 158.
Nous sommes quasi par tout iniques luges de leurs actions, comme elles sont
des nostres, lit, 264.
Il n'est passion plus pressante, que cette cy, à laquelle nous voulons qu'elles
résistent seules : non simplement, comme à vn vice de sa mesure : mais comme
à* l'abomination plus qu'à l'irréligion et au parricide : et nous nous y rendons ce-
pendant sans coulpe et reproche, III, 206.
On les leurre en somme, et achai'ue, par tous moyens. Nous eschauffons et in-
citons leur imagination sans cesse, et puis nous crions au ventre, III, 216.
Nous les traictons inconsidérément en cecy, après que nous auous cogneu,
qu'elles sont sans comparaison plus capables et ardentes aux effects de l'amour
que nous, III, 204,
De la trahison commune et ordinaire des hommes d'auiourd'huy, il aduient, ce
que nous montre l'expérience : c'est qu'elles se r'allient et reiettent à elles mesmes,
ou entre elles, pour nous fuyr : ou bien qu'elles se rengent aussi de leur costé, à
cet exemple que nous leur donnons : qu'elles louent leur part de la farce, et se
prestent à cette négociation, sans passion, sans soing et sans amour, III, 150.
Il en est, qui ayment mieux prester cela, que leur coche : et qui ne se conmiu-
niquent, que par là, III, 260.
Les masles et femelles, sont iettez en mesme moule, sauf l'institution et l'vsage,
la différence n'y est pas grande. Il n'y a pas de distinction entre leur vertu et la
nostre. 11 est bien plus aisé d'accuser l'vn sexe, que d'excuser l'autre, III, 286.
E.d90 ESSAIS DE MOiNTAIGNE.
FERMETÉ (COURAGE).
La loy de la resolution et de la constance ne porte pas que nous ne nous dénions
couurir, autant qu'il est en nostre puissance, des maux et inconueniens qui nous
menassent, ny par conséquent d'auoir peur qu'ils nous surpreignent. Au rebours,
tous moyens honnestes de se garentir des maux, sont non seulement permis,
- mais louables. Et le ieu de la constance se iouë principalement à porter de pied
ferme, les inconueniens où il n'y a point de i-emede, I, 78.
FESTIN.
En vn festin il ne faut pas tant regarder ce qu'on mange, qu'auec qui on
mange. Il n'est point de si doux apprest, ny de sauce si appétissante, que celle qui
se tire de la société, III, 676.
Varro demande cecy au conuiue : l'assemblée de personnes belles de présence,
et aggreables de conuersation, qui ne soyent ny muets ny bauards : netteté et dé-
licatesse aux viures, et au lieu : et le temps serein, III, 684.
FLATTERIE.
C'est vn plaisir fade et nuisible, d'auoir affaire à gens qui nous admirent et
facent place, III, 338.
FOLIE.
On a raison d'appeller folie tout eslancement, tant loUable soit-il, qui surpasse
nostre propre Jugement et discours. D'autant que la sagesse est vn maniment réglé
de nostre ame, et qu'elle conduit auec mesure et proportion, et s'en respond, 1,628.
Qui ne sçait combien est imperceptible le voisinage d'entre la folie auec les
gaillai'des eleuations d'vn esprit libre; etleseffects d'vne vertu suprême et extraor-
dinaire, II, 210.
Dequoy se fait la plus subtile folie que de la plus subtile sagesse? Comme des
grandes amitiez nais.sent des graîndes inimitiez, des santez vigoreuses les mortel-
les maladies: ainsi des rares et vifuos agitations de noz âmes, les plus excellentes
manies, et plus détraquées : il n'j- a qu'vn demy tour de chenille à passer de
l'vn à l'autre, II, 210.
l'ay quelque opinion de l'enuers de cette sentence, que qui aura esté vne fois
bien fol, ne sera nulle autre fois bien sage, III, 290.
FORTUNE.
La fortune ne nous fait ny bien ny mal : elle nous en offre seulement la ma-
tière et la semence laquelle nostre ame, plus puissante qu'elle, tourne et applique
comme il luy plaist : seule cause et maisti-esse de sa condition heureuse ou mal-
heureuse, I, 47-4.
Il est malaisé es actions humaines, de donner règle si iuste par discours de rai-
son, que la Fortune n'y maintienne son droict, I, 650.
Et de vray en toutes republiques on a tousiours laissé bonne part d'auctorité au
sort, I. 76.
Les biens de la fortune tous tels qu'ils sont, encores faut il auoir le sentiment
propre aies sauourer. C'est le iouïr, non le posséder, qui nous rend heureux, I, 186.
L'inconstance du bransle diuers de la fortune, fait qu'elle nous doiue présenter
toute espèce de visages, I, 384.
On s'apperçoit ordinairement aux actions du monde, que la fortune, pour nous
apprendre, combien elle peut en toutes choses : et qui prent plaisir à rabattre
nostre présomption : n'ayant peu faire les mal-habiles sages, elle les fait heureux :
àl'enuy de la vertu. Et se mesle volontiei's à fauoriser les exécutions, où la ti'ame
est plus purement sienne, III, 358.
Il semble que la fortune quelquefois guette à point nommé le dernier iour de
L'ESPRIT DES ESSAIS. FOR. E.197
nostre vio, pour montrer sa puissance, de renuerser en vn moment ce qu'elle
auoit basty en longrues années, I, 104.
C'est iniure et deffaueur de Fortune, de nous ofTrirdes présents, qui nous rem-
plissent d'vn iuste despit do nous auoir lailly en leur saison, III, 498.
Plus nous amplifions nostre besoing et possession, d'autant plus nous engageons
nous aux coups de la Fortune, et des aduersitoz, III, 498.
L'heur et le mal'heur sont à mon gré deux souueraines puissances. C'est im-
prudence, d'estimer que l'humaine prudence puisse remplir le roUe de la fortune.
Et vaine est l'entreprise de celuy, qui présume d'embrasser et causes et consé-
quences, et mener paT la main, le progrès de son l'aict, III, 356.
C'est chose vaine et friuole que l'humaine prudence : et au trauers de tous nos
proiects, de nos conseils et précautions, la fortune maintient tousiours la posses-
sion des euenements, I, 19().
Les euenemens et issues dépendent, notamment en la guerre, pour la ])lus part,
de la fortune : laquelle ne se veut pas renger et assuiettir à nostre discours et pru-
dence. Mais à le bien prendre, nos conseils et délibérations en despendent bien
autant ; et la fortune engage en son trouble et incertitude, aussi nos discours, 1, 528.
l'ay veu de mon temps mill' hommes soupples, mcstis, ambigus, et que nul ne
doubtoit plus prudens mondains que moy, se perdre où ie me suis sauué, 11,454.
Qu'on regarde qui sont les plus puissans aux villes, et qui font mieux leuPS be-
songnes : on trouuera ordinairement, que ce sont les moins habiles. Il est aduenu
aux femmelettes, aux enfans, et aux insepsez, de commander de grands estats, à
l'esgal des plus sulïisans Princes. Et y rencontrent, plus ordinairement les gros-
siers que les subtils. Nous attribuons les effects de leur bonne fortune à leur pru-
dence, III, 356.
le suis homme, qui me commets volontiers à la Fortune, et me laisse aller à
corps perdu, entre ses bras. Dequoy iusques à cette heure i'ay eu plus d'occasion
de me louer, que de me plaindre. Et l'ay trouuée et plus auisée, et plus- amie de
mes affaires, que ie ne suis. 11 y a quelques actions en ma vie, desquelles on peut
iustement nommer la conduite difficile; ou, qui voudra, prudente. De celles-là
posez, que la tierce partie soit du mien, certes les deux tierces sont richement à
elle. Nous faillons, ce me semble, en ce que nous ne nous fions pas assez au ciel
de nous. Et prétendons plus de nostre conduite, qu'il ne nous appartient. Pour-
tant fouruoyent si souuent nos desseins. 11 estenuieuxde l'estenduë, que nous at-
tribuons aux droicts de l'humaine prudence, au preiudice des siens. Et nous les
racourcit d'autant plus, que nous les amplifions, III, 594.
le trouue l'effort bien difficile à la souffrance des maux, mais au contentement
d'vne médiocre mesure de fortune, et fuite de la grandeur, i'y trouue fort peu
d'affaire, III, 322.
FOULE.
La contagion est tres-dangereuse en la presse, I, 410.
11 y a infinis exemples de conclusions populaires, qui semblent plus aspres, d'au-
tant que l'effect en est plus vniuersel. Elles le sont moins que séparées. Ce que le
discours ne seroit en chacun, il le fait en tous : l'ardeur de la société rauissant
les particuliers iugements, I, 648.
11 n'est rien moins esperable de ce monstre ainsin agité, que l'humanité et la
douceur, il receura bien plustost la reuerance et la crainte, I, 198.
FRANÇAIS.
I'ay honte de voir nos hommes, enyurez de cette sotte humeur, de s'effaroucher
des formes contraires aux leurs. Il leur semble estre hors de leur élément, quand
ils sont hors de leur village. Où qu'ils aillent, ils se tiennent à leurs façons, et
abominent les estrangeres. Pourquoy non barbares, puis qu'elles ne sont Fran-
çoises? La pluspart ne prennent l'aller que pour le venir. Ils voyagent couuerts et
resserrez, d'vne prudence taciturne et incommunicable, se defendans de la conta-
gion, d'vn air incogneu, III, 454.
E.198 ESSAIS DE MONTAIGNE.
FUNÉRAILLES.
S'il esloit besoin d'en ordonner, ie seroy d'aduis, quant aux funérailles, comme
en toutes actions de la vie, que chascun en rapportast la règle, au degré de sa for-
tune, de ne les faire ny superflues ny mechaniques; et lairrois purement la cous-
tume ordonner de-cette cérémonie, et m'en remeltrayàla discrétion des premiers
à qui ie tomberay en charge, I, 36.
GENS DE LETTRES.
le ne sçay comment il aduient, et il aduient sans doubte, qu'il se trouue autant
de vanité et de foiblesse d'entendement, en ceux qui font profession d'auoir plus
de suffisance, qui se meslent de vacations lettrées, et décharges qui despendent des
Hures, qu'en nulle autre sorte de gens, II, 514.
GLOIRE (réputation).
De toutes les resueries du monde, la plus receuë et plus vniuerselle, est le soing
de la réputation et de la gloire, que nous espousons iusques à quitter les riches-
ses, le repos, la vie et la santé, qui sont biens effectuels et substantiaux, pour
suyure cette vaine image, cette simple voix, qui n'a ny corps ny prise, I-, 476.
C'est à Dieu seul, à qui gloire et honneur appartient. Et n'est rien si esloigné
de raison, que de nous en mettre en queste pour nous, II, 442.
Toute la gloire du monde ne mérite pas qu'vn homme d'entendement estende
seulement le doigt pour l'acquérir, II, 142.
Toutes autres choses tombent en commerce. Nous prestons nos biens et nos
vies au besoin de nos amis : mais de communiquer son honneur et d'estrener
autruy de sa gloire, il ne se voit gueres, I, 478.
Combien auons nous veu d'hommes vertueux, suruiure à leur propre réputa-
tion, qui ont veu et soulïert esteindre en leur présence, l'honneur et la gloire
tres-iustement acquise en leurs ieunes ans? II, 460.
C'est le sort qui nous applique la gloire, selon sa témérité. le l'ay veuë fort sou-
uent outrepasser le mérite d'vne longue mesure. Comme l'ombre, elle va quelque
fois deuant son corps: et quelque fois l'excède de beaucoup en longueur, II, 448.
Nous appelions aggrandir nostre nom, l'estendre et semer en plusieurs bou-
ches : nous voulons qu'il y soit receu en bonne part et que cette sienne accrois-
sance luy vienne à profit : voyla ce qu'il y peut auoir de plus excusable en ce
dessein. Mais l'excès de cette maladie en va iusques là, que plusieurs cherchent
de faire parler d'eux en quelque façon que ce soit, plus désireux de grande que
de bonne réputation. Ce vice est ordinaire. Nous nous soignons plus qu'on parle
de nous, que comment on en parle : et nous est assez que nostre nom coure par
la bouche des hommes, en quelque condition qu'il y coure, II, 456.
Qui ne contrechange volontiers la santé, le repos, et la vie, à la réputation et à
la gloire? la plus inutile, vaine et fauce monnoye, qui soit en nostre vsage, 1,416.
De ceux mesme, que nous voyons bien faire : trois mois, ou trois ans après, il
ne s'en parle non plus que s'ils n'eussent iamais esté, II, 460.
Infinies belles actions se doiuent perdre sans tesmoignage, auant qu'il en vienne
vne à profit. Et si on prend garde, on trouuera, à mon aduis, qu'il aduient par
expérience, que les moins esclattantes sont les plus dangereuses : et qu'aux guer-
res, qui se sont passées de notre temps, il s'est perdu plus de gens de bien, aux
occasions légères et peu importantes, et à la contestation de quelque bicoque,
qu'es lieux dignes et honnorables, II, 450.
Tuer vn homme, ou deux, ou dix, se présenter courageusement à la mort, c'est
à vérité quelque chose à chacun de nous, car il y va de tout : mais pour le
monde, ce sont choses si ordinaires, il s'en voit tant tous les iours, et en faut
tant de pareilles pour produire vn effect notable, que nous a'en pouuons attendre
aucune particulière recommendation, II, 458.
Au demeurant, en toute vne bataille où dix mill' hommes sont stropiez ou tuez,
L'ESPRIT DES ESSAIS. GLO. E.199
il n'en est pas quinze dequoy Ion parle. De tant de niiliasses de vaillans liommes
qui sont morts depuis quinze cens ans en France, les armes en la main, il n'y en
a pas cent, qui soyent venus à nostre cognoissance. La mémoire non des chefs
seulement, mais des battailles et victoires est enseuelie, II, 458. f
Il faut trier de toute vne nation, vne douzaine d'hommes, pour iuger d'vn ar-
pent de terre, et le ingénient de nos inclinations, et de nos actions, la plus diffi-
cile matière, et la plus importante qui soit, nous la remettons à la-A^oix de la
commune et de la tourbe, mère d'ignorance, d'iniustice, et d'inconstance. Est-ce
raison de faire dépendre la vie d'un sage, du iugement des fols? II, 452.
Entre toutes les voluptez, il n'y en a point de plus dangereuse, ny plus à fuir
que celle qui nous vient de l'approbation d'autru'y. 11 n'est chose qui empoisonne
tant que la flatterie, rien par où les meschans gaignent plus aiséement crédit : ny
maquerelage si propre et si ordinaire à corrompre la chasteté des femmes, que
de les paistre et entretenir de leurs louanges, II, 442.
Celuy qui fait tout pour l'honneur et pour la gloire, que pense-il gaigner, en se
produisant au monde en masque, desrobant son vray estre à la cognoissance
du peuple ? Louez un bossu de sa belle taille, il le doit receuoir à iniure : si vous
estes couard, et qu'on vous honnore pour vn vaillant homme, est-ce de vous
qu'on parle? On vous prend pour vn autre, III, 190.
La gloire est pour elle mesme désirable : mais il faut éviter comme deux ex-
trêmes vicieux, l'immoderation, et à la rechercher, et à la fuyr, II, 446.
La vertu elle mesme est chose bien vaine et friuole, si elle tire sa recommen-
dation de la gloire, II, 418.
Les actions de la vertu sont trop nobles d'elles mesmes, pour rechercher autre
loyer, que de leur propre valeur : et notamment pour la chercher en la vanité
des iugemens humains, II, 460.
Qui n'est homme de bien que par ce qu'on le sçaura, et par ce qu'on l'en esti-
mera mieux, après l'auoir soeu, qui ne veut bien faire qu'en condition que sa
vertu vienne à la cognoissance des hommes, celuy-là n'est pas personne de qui
on puisse tirer beaucoup de seruice, 11,450.
Toute la gloire, que ie pretens de ma vie, c'est de l'auoir vescue tranquille, et
tranquille selon moy, II, 418.
GUERRE CIVILE (troubles intérieurs).
Monstrueuse guerre. Les autres agissent au dehors, ceste-cy encore contre soy :
se ronge et se defaict, par son propre venin. Elle est de nature si maligne et rui-
neuse, qu'elle se ruine quand et quand le reste : et se deschire etdespece de rage.
Nous la voyons plus souuent, se dissoudre par elle mesme, que par disette d'au-
cune chose nécessaire, ou par la force ennemie. Toute discipline la fuit. Elle vient
guérir la sédition, et en est pleine. Veut chastier la désobéissance, et en n^ontre
l'exemple : et employée à la deffence des loix, faict sa part de rébellion à rencon-
tre des siennes propres. Où en sommes nous? Nostre médecine porte infection. —
En ces maladies populaires, on peut distinguer sur le commencement, les sains
des malaies : mais quand elles viennent à durer, comme la nostre, tout le corps
s'en sent, et la teste et les talons : aucune partie n'est exempte de corruption.
Car il n'est air, qui se hume si gouluement : qui s'espande et pénètre, comme
faict la licence. Nos armées ne se lient et tiennent plus que par simant estranger :
des François on ne sçait plus faire vn corps d'armée, constant et réglé. Quelle
honte! 11 n'y a qu'autant de discipline, que nous en font voir des soldats emprun-
tez. Quant à nous, nous nous conduisons à discrétion, et non pas du chef; chacun
selon la sienne : il a plus affaire au dedans qu'au dehors. C'est au commande-
ment de suiure, courtizer, et plier : à luy seul d'obeïr : tout le reste est libre et
dissolu. Il me plaist de voir, combien il y a de lascheté et de pusillanimité en l'am-
bition : par combien d'abiection et de seruitude, il luy faut arriuer à son but.
Mais cecy medeplaist de voir, des natures débonnaires et capables de iustice, se
corrompre tous les iours, au maniement et commandement de cette confusion. La
longue souffrance, engendre la coustume; la coustume, le consentement et l'imi-
E.200 ESSAIS DE MONTAIGNE.
tation. Nous auions assez d'ames mal nées, sans gaster les bonnes et généreuses,
III, 354.
Les guerres ciuiles ont cela de pire que les autres guerres, de nous mettre
chacun en echauguette en sa propre maison. C'est grande extrémité, d'estre
pressé iusques dans son mesnage, et repos domestique, III, 421.
En ces temps, on battisoit les vices publiques do mots nouueaux plus doux pour
leur excuse, abastardissant et amollissant leurs vrais litres, 1, 178.
Ce qui fait voir tant de cruautez inouies aux guerres populaires, c'est que cette
canaille de vulgaire s'aguerrit, et se gendarme, à s'ensanglanter iusques aux
coudes, et deschiqueter vn corps à ses pieds, n'ayant resentiment d'autre vail-
lance. Comme les chiens couards, qui deschirent en la maison, et mordent les
peaux des bestes saunages, qu'ils n'ont osé attaquer aux champs, II, 570.
La cause des loix, et defence de l'ancien estât, a tousiours cela, que ceux
mesmes qui pour leur dessein particulier le troublent, en excusent les défenseurs,
s'ils ne les honorent, III, 86.
Mais il ne faut pas appeler deuoir, vue aigreur et vnc intestine asprotc, qui
naist de l'interest et passion pi-iuee, ny courage, vne conduitte traistresse et mali-
tieuse. Ils nomment zèle, leur propension vers la malignité, et violence. Ce n'est
pas la cause qui les eschauffe, c'est leur interest. Ils attisent la guerre, non par ce
qu'elle est iuste : mais par ce que c'est guerre, III, 86.
Sur tout il se faut garder qui peut, de tomber entre les mains d'vn luge en-
nemy, victorieux et armé, I, 88.
Confessons la vérité, qui trieroit de l'armée mesme légitime, ceux qui y mar-
chent par le seul zèle d'vne affection religieuse, et encore ceux qui regardent
seulement la protection des loix de leur pays, ou seruice du Prince, il n'en sçau-
roit bastir vne compagnie de gens-darmes complète. D'où vient cela, qu'il s'en
trouue si peu, qui ayent maintenu mesme volonté et mesme progrez en nos niou-
uemens publiques, et que nous les voyons tantost n'aller que le pas, tantost y cou-
rir à bride aualéc? et mesmes hommes, tantost gaster nos affaires par leur vio-
lence et aspreté, tantost par leur froideur, mollesse et pesanteur; si ce n'est qu'ils
y sont poussez par des considérations particulières etcasuelles, selon la diuersité
desquelles ils se remuent ? II, 120.
HABITUDES (coutumes, us.vges).
L'accoustumancc nous peut duirc non seulement à telle forme qu'il luy plaist,
mais aussi au changement et à la variation : qui est le plus noble, et le plus vtile
de ses apprentissages, III, 636.
Les gueux ont leurs magniticences, et leurs voluptez, comme les riches : ce sont
effects de l'accoustumance, III, 636.
HISTOIRE.
Les historiens sont ma droitte baie : car ils sont plaisans et aysez : et quant et
quant l'homme en gênerai, de qui ie cherche la cognoissance, y paroist plus vif
et plus entier qu'en nul autre lieu : la variété et vérité de ses conditions internes,
en gros et en détail, la diuersité des moyens de son assemblage, et des accidents
qui le menacent, II, 76.
C'est la matière à laquelle nos esprits s'appliquent de plus diuerse façon. l'ay
leu en Tite Liue cent choses que tel n'y a pas leu. Plutarche y en a leu cent; ou-
tre ce que i'y ay sceu lire : et à l'aduenture outre ce que l'autheur y auoit mis,
I, 248.
l'aymeles historiens, ou fort simples, ou excellens. Les simples, qui n'ont point
dequoy y mesler quelque chose du leur, et qui n'y apportent que le soin, et la dili-
gence de r'amasser tout ce qui vient à leur notice, et d'enregistrer à la bonne foy
toutes choses, sans chois et sans triage, nous laissent le iugement entier pour la
cognoissance de la vérité, II, 78.
Ixs bien excellens ont la suffisance de choisir ce qui est digne d'estre sçeu.
L'ESPRIT DES ESSAIS. HIS. E.201
peuuent trier de deux rapports celuy qui est plus vray-sembiable, II, 78.
Ceux d'entre-deux, qui est la plus commune façon, nous gaslent tout : ils veu-
lent nous mascher les morceaux; ils se donnent loy de iuger et par conséquent
d'incliner l'Histoire à leur fantasie : car depuis que le iugoment pend d'vn costé,
on ne se peut garder de contourner et tordre la narration à ce biais. Ils entre-
prennent de choisir les choses dignes d'estre sçeues, et nous cachent souuent
telle parole, telle action priuée, qui nous instruiroit mieux : obmettent pour
choses incroyables celles qu'ils n'entendent pas, II, 78. —
Les seules bonnes Histoires sont celles, qui ont esté escrites par ceux mesmes
qui commandoient aux affaires ou qui estoient participans à les conduire, ou au
moins qui ont eu la fortune d'en conduire d'autres de mesnie sorte, II, 80.
Que peut on espérer d'vn médecin traictant de la guerre, ou d'vn eschoiier
traictant les desseins des Princes? 11,80.
le voudroye que chacun escriuist ce qu'il sçait, et autant qu'il en sçait : non en
cela seulement, mais en tous autres subiects, I, 358.
Un homme simple et grossier, est en condition propre à rendre véritable tes-
moignage; les lines gens remarquent bien plus curieusement, et plus de choses,
mais ils les glosent, et pour faire valoir leur interprétation, et la persuader, ils
ne se peuuent garder d'altérer vn peu l'Histoire, I, 358.
le tien moins hazardeux d'escrire les choses passées, que présentes : d'autant
que l'escriuain n'a à rendre compte que d'vne vérité empruntée, I, 152.
HOMME.
Certes c'est vnsubiect merueilleusement vain, diuers, et ondoyant, que l'homme :
il est malaisé d'y fonder iugement constant et vniforme, I, 20. ^
Moy à cette heure, et moy tantost, sommes deux. Quand meilleur, ie n'en puis
rien dire. Il feroit bel estre vieil, si nous ne marchions, que vers l'amendement,
III, 412.
le connoy des hommes assez, qui ont diuerses parties belles : qui l'esprit, qui
le cœur, qui l'adresse, qui la conscience, qui le langage, qui vne science, qui
vn' autre : mais de grand homme en gênerai, et ayant tant de belles pièces en-
semble, ou vne, en tel degré d'excellence, qu'on le doiue admirer, ou le comparer
à ceux que nous honorons du temps passé, ma fortune ne m'en a faict voir nul,
II, 514.
Il semble que considérant la foiblesse do nostre vie, et à combien d'escueils or-
dinaires et naturels elle est exposée, on n'en deuroit pas faire si grande part à la
naissance, à l'oisiueté et à l'apprentissage, I, 598.
Les hommes sont diuers en sentiment et en force : il les fairt mener à leur
bien, selon eux : et par routes diuerses, III, 576.
Nous sommes tous de lopins, et d'vne contexturc si informe et diuerse, que
chaque pièce, chaque moment, faict son ieu. Et se trouue autant de différence
de nous à nous mesmes, que de nous à autruy, I, 610.
A nous autant d'actions, autant faut-il de iugemens particuliers. Le plus seur,
à mon opinion, seroit de les rapporter aux circonstances voisines, sans entrer en
plus longue recherche, et sans en conclurre autre conséquence, I, 604.
Si par expérience nous touchons à la main que la forme de notre estre des-
pend de l'air, du climat, et du terroir où nous naissons : non seulement le tainct,
la taille, la complexion et les contenances, mais encore les facultez de l'ame : que
deuiennent toutes ces belles prerogaliues de quoy nous nous allons (lattans? 11,366.
Pourquoy n'estimons nous vn homme par ce qui est sien? Il a vn grand train,
v^ beau palais, tant de crédit, tant de rente : tout cela est autour de luy, non en
luy, I, 482.
Pourquoy estimant vn homme l'estimez vous tout enueloppé et empacqueté?
C'est le prix de l'espée que vous cerchez, non de la guaine. Il le faut iuger par
luy mesme, non par ses atours. Et comme dit tres-plaisamment vn ancien :
Sçauez vous pourquoy vous l'estimez grand? vous y comptez la hauteur de ses
patins. La base n'est pas de la statue. Mesurez le sans ses eschaces. Qu'il mette
à part ses richesses et honneurs, qu'il se présente en chemise. A il le corps pro-
E.202 ESSAIS DES MONTAIGNE.
pre à ses functions, sain et allègre? Quelle ame a il? Est elle belle,' capable, et
heureusement pourueue de toutes ses pièces? Est elle riche du sien, ou de l'au-
tru}'? La fortune n'y a elle que voir? Si les yeux ouuerts elle attend les espées
traites : s'il ne luy chaut par où luy sorte la vie, par la bouche, ou par le gosier :
si elle est rassise, cquable et contente : c'est ce qu'il faut veoir, I, 482.
Plutarquedit qu'il ne trouue point si grande distance de beste à beste, comme
il trouue d'houmie à homme. 11 parle de la suffisance de l'ame et qualitez internes,
l'encherirois volontiers : et dirois qu'il y a plus de distance de tel à tel homme,
qu'il n'y a de tel homme à telle beste, I, 480.
Là où, si nous considérons vn paisan et vn Roy, vn noble et vn villain, vn ma-
gistrat et vn homme priué, vn riche et vn pauure, il se présente soudain à nos
yeux vn' extrême disparité, qui ne sont différents par manière de dire qu'en
leurs chausses. Ce ne sont pourtant que peintures, qui ne font aucune dissem-
blance essentielle. Car comme les loueurs de comédie, vous les voyez sur l'eschaf-
faut faire vue mine de Duc et d'Empereur, mais tantost après, les voyla deuenuz
valets et crocheteurs misérables, qui est leur nayfue et originelle condition, 1,484.
Si nous nous amusions par fois à nous considérer, et le temps que nous met-
tons à contreroller autruy, et à connoistre les choses qui sont hors de nous, que
nous l'employissions à nous sonder nous mesmes, nous sentirions aisément com-
bien toute cette nostre contexture est bastie de pièces foibles et défaillantes, 1,564.
le croy des hommes plus mal aisément la constance que toute autre chose, et
rien plus aisément que l'inconstance. Qui en iugeroit on détail et distinctement,
pièce à pièce, rencontreroit plus souuent à dire vray, I, 602.
Il y a quelque apparence de faire ingénient d'vn homme, par les plus com-
muns traicts de sa vie; mais veu la naturelle instabilité de nos mœurs et opi-
nions, il m'a semblé souuent que les bons autheurs mesmes ont tort de s'opinias-
trer à former de nous vne constante et solide contexture. Ils choisissent vn air
vniuersel, et suyuant cette image, vont rengeant et interprétant toutes les ac-
tions d'vn personnage, et s'ils ne les peuuent assez tordre, les renuoyent à la dis-
simulation, I, 600.
Pour iuger d'vn homme, il faut suiure longuement et curieusement sa trace :
si la constance ne s'y maintient de son seul fondement, si la variété des occurren-
ces luy faict changer de pas, (ie dy de voye : car le pas s'en peut ou haster, ou
appesantir) laissez le courre : celuy là s'en va auau le vent, I, 610.
Sauf l'ordre, la modération, et la constance, i'eslime que toutes choses soient
faisables par vn homme bien manque et deffaillant en gros. A cette cause, il faut
pour iuger bien à poinct d'vn homme, principalement contreroller ses actions
communes, et le surprendre en son à tous les iours, II, 590.
Ce n'est pas tour de rassis entendement, de nous iuger simplement par nos ac-
tions de dehors : il faut sonder iusqu'au dedans, et voir par quels ressors se donne
le bransle, I. 612.
Chaque parcelle, chasque occupation de l'homme, l'accuse, et le montre égale-
ment qu'vn autre, I, 556.
La sagesse ne force pas nos conditions naturelles. Tant sage qu'il voudra,
c'est vn homme : qu'est il plus caduque, plus misérable, et plus de néant? II
faut qu'il sille les yeux au coup qui le menasse : il faut qu'il frémisse planté au
bord d'vn précipice, comme vn enfant : Nature ayant voulu se reseruer ces légè-
res marques de son authorité, inexpugnables à nostre raison, et à la vertu Stoique :
pour luy apprendre sa mortalité et nostre fadeze. Il pallit à la peur, il rougit à
la honte, il gémit à la colique, sinon d'une voix désespérée et esclatante, au
moins d'vne voix cassée et enrouée, I, 624.
Comme si la bonne fortune estoit incompatible auec la bonne conscience : les
hommes ne se rendent gents de bien, qu'en la mauuaise, III, 380.
L'homme en tout et partout, n'est que rappiessement et bigarrure, II, .540.
Nostre estre est simenté de qualitez maladiues : l'ambition, la ialousie, l'enuie,
la vengeance, la superstition, le desespoir, logent en nous, d'vne si naturelle
possession, que l'image s'en recognoist aussi aux bestes. Desquelles qualitez, qui
osteroit les semences en l'homme, destruiroit les fondamentales conditions de
nostre vie, III, 80.
L'ESPRIT DES ESSAIS. HOM. E.203
La peste de l'homme c'est l'opinion de sçauoir, II, 204.
Voulez vous vn homme sain, lo voulez vous réglé, et en ferme et seure posture?
affublez le de ténèbres d'oisiueté et de pesanteur. 11 nous faut abestir pour nous
assagir: et nous esblouir, pour nous guider, II, 212.
Pa.rmy les conditions humaines, cette-cy est assez commune, de nous plaire
plus des choses estrangeres que des nostres, et d'aymer le remuement et le chan-
gement, III, 380.
En aucune chose l'homme ne sçait s'arrester au poinct de son besoing. De vo-
lupté, de richesse, de puissance, il en embrasse plus qu'il n'en peut estreindre.
Son auidité est incapable de modération, III, 550.
Les hommes sont si formez à l'agitation et ostentation, que la bonté, la mode-
ration, l'equabilité, la constance, et telles qualitez quiètes et obscures, ne se sen-
tent plus, III, 520.
La saincte Parole déclare misérables ceux d'entre nous, qui s'estiment : Bourbe
et cendre, leur dit-elle, qu'as-tu à te glorifier? 11,222.
le ne pense point qu'il y ait tant de malheur en nous, comme il y a de vanité,
ny tant de malice comme de sotise : nous ne sommes pas si pleins de mal, comme
d'inanité : nous ne sommes pas si misérables, comme nous sommes vils, I, 556.
Il suffit à l'homme de brider et modérer ses inclinations : car de les emporter,
il n'est pas en luy, I, B24.
Nous faisons trop de cas de nous, il semble que l'vniuersité des choses souffre
aucunement de nostre anéantissement, II, 420.
Dieu a faict l'homme semblable à l'ombre, de laquelle qui iugera, quand ipav
l'esloignement de la lumière elle sera esuanouye? II, 222.
Les hommes vont ainsin. On laisse les loix, et préceptes suiure leur voye, nous
en tenons vne autre, III, 460.
Il n'y a point de beste au monde tant à craindre à l'homme, que l'homme, II, 536.
l'ay veu des coquins, pour garantir leur vie, accepter de pendre leurs amis et
consorts, ie les ay tenus de pire condition que les pendus, III, 98.
Il n'est rien si beau et légitime, que de faire bien l'homme et deuëment, 111,692.
Le pire estât de l'homme, c'est où il pert la connoissance et gouuernement de
soy, I, 644.
HONNÊTETÉ.
Vn cœur généreux ne doit point desmentir ses pensées : il se veut faire voir
iusques au dedans: tout y est bon, ou aumoins, tout y est humain, II, 492.
On argumente mal l'honneur et la beauté d'vne action, par son vtilité : et con-
clud-on mal, d'estimer que chacun y soit obligé, et qu'elle soit honeste à chacun,
si elle est vtile, III, 106.
Ne craignons point d'estimer qu'il y a quelque chose illicite contre les ennemys
mesmes : que l'interest commun ne doibt pas tout requérir de tous, contre l'inte-
rest priué : et que toutes choses ne sont pas loisibles à vn homme de bien, pour
le seruice de son Roy, ny de la cause générale et des loix, III, 104.
Voyla pourquoy en cette incertitude et perplexité, que nous apporte l'impuis-
sance de voir et choisir ce qui est le plus commode, pour les difficultez que les
diuei-s accidens et circonstances de chaque chose tirent: le plus seur, quand autre
considération ne nous y conuieroit, est à mon aduis de se rejetterau party, où il
y a plus d'honnesteté et de iustice : et puis qu'on est en doute du plus court che-
min, tenir tousiours le droit, I, 194.
Il est loysible à vn homme. d'honneur, de parler ainsi que les Lacedemoniens,
deffaicts par Antipater, sur le poinct de leurs accords : Vous nous pouuez com-
mander des charges poisantes et dommageables autant qu'il vous plaira : mais
de honteuses, et deshonnestes, vous perdrez vostre temps de nous en comman-
der. Chacun doit auoir iuréàsoy mesme, ce que les Roys d'iEgypte faisoient so-
lennellement iurer à leurs iuges, qu'ils ne se desuoyeroient de leur conscience,
pour quelque commandement qu'eux mesmes leur en fissent. A telles commissions
il y a note euidente d'ignominie, et condemnation, III, 92.
E.204 ESSAIS DE MONTAIGNE.
IGNORANCE.
L'ignorance qui se scait, qui se iuge, et qui se condamne, ce n'est pas vne en-
tière ignorance. Pour l'estro, il faut qu'elle s'ignore soy-mesme, II, ^iO.
Ce n'est pas sans raison, que nous attribuons à simplesseet ignorance, la facilité
de croire et de se laisser persuader, I, 288.
IMAGINATION.
La iouyssance, et la possession, appartiennent principalement à l'imagination.
Elle embrasse plus chaudement et plus continuellement ce qu'elle va quérir, que
ce que nous touchons, III, 434.
Nostre discours est capable d'estoffer cent autres mondes, et d'en trouuer les
principes et la contexture. Il ne luy faut ny matière ny baze. Laissez le courre :
il bastit aussi bien sur le vide que sur le plain,et de l'inanité que de matière,
III, 528.
Que de choses nous semblent plus grandes par imagination, que pareffect, 1,668.
Nous embrassons et ceux qui ont esté, et ceux qui ne. sont point encore, non que
les absens, III, 436.
Nous tressuons, nous tremblons, nous pallissons, et rougissons aux secousses de
nos imaginations. Chacun en est heurté, aucuns en sont renuersez, I, 134.
Nous auons raison de faire valoir les forces de nostre imagination : cartons nos
biens ne sont qu'en songe, II, 204.
Les bestes mesmes se voyent comme nous, subiectes à la force de l'imagination,
I, 148.
IMMORTALITÉ DE L'AME.
Sans l'immortalité des âmes, il n'y auroit plus dequoy asseoir les vaines espé-
rances de la gloire, qui est vne considération de merueilleux crédit au monde :
et c'est vne tres-vtile impression, que les vices, quand ils se desroberont de la veur
et cognoissance de l'humaine iustice, demeurent tousiours en butte à la diuinc,
qui les poursuyura, voire après la mort des coupables, II, 322.
Le fruict de l'immortalité, consiste en la iouyssance de la béatitude éternelle.
Confessons iugenuement, que Dieu seul nous l'a dict, et la foy : car leçon n'est-ce
pas de Nature et de nostre raison. Et qui retentera son estre et ses forces, et de-
dans et dehors, sans ce priuilege diuin : qui verra l'homme, sans le flatter, il n'y
verra ny efficace, ny faculté, qui sente autre chose que la mort et la terre, II, 324.
IMPOSTURE.
Le vray champ et subiect de l'imposture, sont les choses inconnues : l'estrangeté
mesme donne crédit, I, 376.
Il n'est rien creu si fermement, que ce qu'on sçait le moins, ny gens si asseurez,
que ceux qui nous content des fables, I, 376.
INDÉPENDANCE.
l'essaye à auoir exprès besoing de nul, III, 420.
le hay. les morceaux que la nécessité me taille. Toute commodité me tiendroit
à la gorge, de laquelle seule i'aurois à despendre, III, 460.
On iouyt bien plus librement, et plus gayement, des biens empruntez : quand
ce n'est pas vne iouyssance obligée et contrainte par le besoing : et qu'on a, et
en sa volonté, et en sa fortune, la force et les moyens de s'en passer, III, 420.
le fuis à me submettre à toute sorte d'obligation. Mais sur tout, à celle qui
m'attache, par deuoir d'honneur. le ne trouue rien si cher, que ce qui m'est
donné : et ce pourquoy, ma volonté demeure hypothéquée par tiltre de gratitude.
Et reçois plus volontiers les offices, qui sont à vendre. Pour ceux-cy, ie ne donne
que de l'argent : pour les autres, ie me donne moj'-mesme, III, 416.
L'ESPRIT DES ESSAIS. INI). E.205
La subiection essentielle et effectuelle, ne regarde d'entre nous, que ceux qui
s'y conuient, et qui ayment à s'honnorer et enricher par tel s^eruice : car qui se
veut tapir en son foyer, et sçait conduire sa maison sans querelle, et sans pro-
cès, il est aussi libre que le Duc de Venise, I, 492.
Mes amis m'importunent estrangement, quand ils me requierent^do requérir
vn tiers. Et ne me semble guère moins de coust, desengager celuy qui me doibt,
vsant de luy : que m'engager enuers celuy, qui ne me doibt rien, 111,422.
l'ayme tant à me descharger et desobliger, que iay parfois compté à profit, les
ingratitudes, offences, et indignitez, que i'auois reçeu de ceux, à qui ou par na-
ture, ou par accident, i'auois quelque deuoir d'amitié : prenant cette occasion de
leur faute, pour autant d'acquit, et descharge de ma debte, 111,418.
INDIGENCE.
Par diuerses causes l'indigence se voit autant ordinairement logée chez ceux
qui ont des biens, que chez ceux qui n'en ont point, I, 4G8.
Et me semble plus misérable vn riche malaisé, nécessiteux, affaireux, que celuy
qui est simplement panure, I, 4G8.
INITIATIVE.
En toutes choses les hommes se ietteni; aux appuis estrangers, pour espargnel'
les propres : seuls certains et seuls puissans, qui sçait s'en armer, III, 562.
Nous sommes chacun plus riche, que nous ne pensons : mais on nous dresse à
l'emprunt, et à la queste : on nous duict à nous seruir plus de l'autruy, que du
nostre, III, 548.
INSATIABILITÉ DE L'HOMME.
Ceux qui accusent les hommes d'aller tousiours béant après les choses futures,
et nous apprennent à nous saisir des biens presens, et nous rassoir en ceux-là,
comme n'ayants aucune prise sur qui est à venir, voire assez moins que nous
n'auons sur ce qui est passé, touchent la plus commune des humaines erreurs :
s'ils osent appeller erreur, chose à quoy nature mesme nous achemine, pour le
seruice de la continuation de son ouurage, I, 28.
INSPIRATION.
Chacun sent en soy quelque image d'agitations d'vne opinion prompte, véhé-
mente et fortuite. C'est à moy de leur donner quelque authorité, qui en donne si
peu à nostre prudence. Et en ay eu de pareillement foibles en raison, et violentes
en persuasion, ou en dissuasion, ausquelles ie me laissay emporter si vtilement et
heureusement, qu'elles pourroyent estre iugees tenir quelque chose d'inspiration
diuine, I, 78.
INTOLÉRANCE.
Fascheuse maladie, de se croire si fort, qu'on se persuade, qu'il ne se puisse
croire au contraire, I, 582.
IRRÉSOLUTION.
L'irrésolution me semble le plus comumn et apparent vice de nostre nature,
1,600.
, Nous dotions entre diuers aduis : nous ne voulons rien librement, rien abso-
luëment, rien constamment, I, 604.
IVROGNERIE.
L'yurongnerie entre les autres, me semble vn vice grossier et brutal, l'esprit
a plus (le part ailleurs : cestuy-cy est tout corporel et terrestre. Les autres vices
altèrent l'entendement, cestuy-cy le renuerse, et estonne le corps, I, 644.
E.206 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Mon goust et ma complexion est plus ennemie de ce vice que mon discours,
le le trouue bien vn vice lasche et stupide, mais moins malicieux et dommagea-
ble que les autres, qui choquent quasi tous de plus droit fil la société publique. Il
couste moins à nostre conscience que les autres : outre qu'il n'est point de dif-
ficile apprest, ny malaisé à trouuer : considération non mesprisable, I, 618.
Le vin redonne aux hommes la gayeté, et la ieunesse aux vieillards, I, 622.
Boire, c'est quasi le dernier plaisir que le cours des ans nous desrobe, I, 620,
Le vin est capable de fournir à l'ame de la tempérance, au corps de la santé.
Toutesfois : on s'en espargne en expédition de guerre. Que tout magistrat et
tout iuge s'en abstienne sur le point d'exécuter sa charge, et de consulter des af-
faires publiques. Qu'on n'y employé le iour, temps deu à d'autres occupations :
ny celle nuict, qu'on destine à faire des enfants, I, 622.
11 y en a qui conseillent de se dispenser quelquefois à boire d'autant, et de
s'enyurer pour relascher l'ame, I, 616.
Le vin faict desbonder les plus intimes secrets, à ceux qui en ont pris outre
mesure, I, 614.
JALOUSIE.
La ialousie est la plus vaine et tempesteuse maladie qui afflige les âmes hu-
maines, III, 222.
Lors que la ialousie saisit ces panures âmes, foibles, et sans résistance, c'est
pitié, comme elle les tirasse et tyrannise cruellement. Elle s'y insinue sous titre
d'amitié : mais depuis qu'elle les possède, les mesmes causes qui seruoient de
fondement à la bien-vueillance, seruent de fondement de hayne capitale : c'est
des maladies d'esprit celle, à qui plus de choses seruent d'aliment, et moins de
choses de remède. La vertu, la santé, le mérite, la réputation du mary, sont les
boutefeux de leur maltalent et de leur rage. Cette fiéure laidit et corrompt tout
ce qu'elles ont de bel et de bon d'ailleurs. Et d'vne femme ialouse, quelque
chaste qu'elle soit, et mesnagere, il n'est action qui ne sente l'aigre et l'impor-
tun, III, 224.
A dire vray, ie ne sçay si on peut souffrir d'elles pis que la ialousie. C'est la
plus dangereuse de leurs conditions, comme de leurs membres, la teste, III.
236.
JEUX PUBLICS.
Les bonnes polices prennent soing d'assembler les citoj'ens, et les r'allier,
comme aux offices sérieux de la deuotion, aussi aux exercices et ieux. La so-
ciété et amitié s'en augmente, et puis on ne leur sçauroit concéder des passe-
temps plus réglez, que ceux qui se font en présence d'vn chacun, et à la veuë
mesme du magistrat, diuertissement de pires actions et occultes, I, 288.
JUGEMENT.
Le iugement est vn vtil à tous subiects, et se mesle par tout, I, 552.
Nature enserre dans les termes de son progrez ordinaire, comme toutes au-
tres choses, les créances, les iugemens, et opinions des hommes : elles ont leur
reuolution, leur saison, leur naissance, leur mort, comme les choux : le ciel les
agite, et les roule à sa poste, II, 366.
Le sçauoir est moins prisable, que le iugement; cestuj-cy se peut passer de
l'autre, et non l'autre de cestuy-cy, I, 216.
La science et la vérité peuuent loger chez nous sans iugement, et le iuge-
ment y peut aussi estre saos elles : voire la reconnoissance de l'ignorance est
l'vn des plus beaux et plus seurs tesmoignages de iugement que ie trouue,
II, 62.
Combien diuersement iugeons nous des choses? combien de fois changeons
nous noz fantasies? Ce que ie tiens auiourd'huy, et ce que ie croy, ie le tiens,
et le croy de toute ma croyance; ie ne sçaurois embrasser aucune vérité ny con-
seruer auec plus d'asseuraace, que ie fay cette-cy. l'y suis tout entier; i'y suis
L'ESPRIT DES ESSAIS. JUG. E.207
voyrement : mais ne m'est-il pas aduenu non vne fois, mais cent, mais mille, et
tous les iours, d'auoir embrassé quelque autre chose en cette^mesme condition,
que depuis i'ay iugé fauce? II, 34"2.
Nostre appréhension, nostre iugement et les facultez de nostré ame en gê-
nerai, souffrent selon les mouuements et altérations du corps, lesquelles altéra-
tions sont continuelles. N'auons nous pas l'esprit plus esueillé, la mémoire plus
prompte, le discours plus vif, en santé qu'en maladie? La ioye et la gayeté ne
nous font elles pas receuoir les subjects qui se présentent à nostre amc, d'vn
tout autre visage, que le chagrin et la melancholie? II, 344.
Ce ne sont pas seulement les fieures, les breuuages, et les grands accidens,
qui renuersent nostre iugement : les moindres choses du monde le tourneuirent.
Par conséquent, à peine se peut-il rencontrer vne seule heure en la vie, où nos-
tre iugement se trouue en sa deuë assiette, II, 346.
Qui se souuient de s'estre tant et tant de fois mesconté de son propre iuge-
ment : est-il pas vn sot, de n'en entrer iamais en deffiance? III, 018.
Si nostre iugement est en main à la maladie mesmes, et à la perturbation, si
c'est de la folie et de la témérité, qu'il est tenu de receuoir l'impression des
choses, quelle seurté pouuons nous attendre de luy? II, 352.
Il se tire vne merueilleuse claité poui- le iugement humain, de la fréquenta-
tion du monde. Nous sommes tous contraints et amonceliez en nous, et auons
la veuë racourcie à la longueur de nostre nez : nous ne regardons que sous ^
nous. A qui il gresle sur la teste, tout l'hemisphere semble estre en tempeste et
orage, I, 250.
Nos iugemens sont encores malades, et suyuent la deprauation de nos mœurs,
le voy la plupait des esprits de mon temps faire les ingénieux à obscurcir la
gloire des belles et généreuses actions anciennes, leur donnant quelque inter-
prétation vile, et leur controuuant des occasions et des causes vaines. Grande
subtilité. Qu'on me donne l'action la plus excellente et pure, ie m'en vois y
fournir vraysemblablement cinquante vitieuses intentions, I, 400.
Vous recitez simplement vne cause à l'aduocat, il vous y respond chancellant
et doubteux : vous sentez qu'il luy est indiffèrent de prendre à soustenir l'vn ou
l'autre party : l'auez vous bien payé pour y mordre, et pour s'en formaliser,
commence-il d'en estre intéressé, y a-il escliauffé sa volonté? sa raison et sa
science s'y eschauffent quant et quant : voylà vne apparente et indubitable vé-
rité, qui se présente à son entendement : il y descouure vne toute nouuelle lu-
mière, et le croit à bon escient, et se le persuade ainsi, II, 350.
L'ardeur qui naist du despit, et de l'obstination, à rencontre de l'impression
et violence du magistrat, et du danger : ou l'interest de la réputation, ont en-
uoyé tel homme soustenir iusques au feu, l'opinion pour laquelle entre ses amys,
et en liberté, il n'eust pas voulu s'eschauder le bout du doigt, II, 350.
Il se faut garder de s'attacher aux opinions vulgaires, et les faut iuger par la
voye de la raison, non par la voix commune, I, 354.
Les choses ne logent pas chez nous en leur foi-me et en leur essence, s'il estoit
ainsi, nous les recourions de mesme façon : le vin seroit tel en la bouche du ma-*
lade, qu'en la bouche du sain; tandis qu'il ne se void aucune proposition, qui ne
soit débattue et controuersee entre nous, ou qui ne le puisse estre, ce qui montre
bien que nostre iugement naturel ne saisit pas bien clairement ce qu'il saisit :
car mon iugement ne le peut faire receuoir au iugement de mon compagnon :
qui est signe qui ie I'ay saisi par quelque autre moyen, que par vne naturelle
puissance, qui soit en moy et en tous les hommes, II, 340.
Nous recognoissons aysément es autres, l'aduantage du courage, de la force
corporelle, de l'expérience, de la disposition, de la beauté : mais l'aduantage du
iugement, nous ne le cédons à personne. Et les raisons qui partent du simple
discours naturel en autruy, il nous semble qu'il n'a tenu qu'à regarder de ce
costé là, que nous ne les ayons trouuees, II, 508.
Si chascun qui oid vne iuste sentence, regardoit incontinent par où elle luy
appartient en son propre : chascun trouueroit, que cette cy n'est pas tant vn
bon mot comme vn bon coup de fouet à la bestise ordinaire de son iugement.
Mais on reçoit les aduis de la vérité et ses préceptes, comme adressés au peu-
E.208 ESSAIS DE MONTAIGNE.
pie,, non iamais à soy : et au lieu de les coucher sur ses mœurs, chascun les
couche en sa mémoire, tres-sottement et tres-inutilement, I, 170.
Il eschappe souuent des fautes à nos yeux : la maladie du iugement consiste
à ne les pouuoir apperceuoir, lors qu'vn autre nous les descouure, II, 62.
11 est peu de choses, ausquelles nous puissions donner le iugement syncere,
par ce qu'il en est peu, ausquelles en quelque façon nous n'ayons particulier in-
terest, III, 321.
C'est vn lesmoignage merueilleux de la foiblessc de nostre iugement, qu'il re-
commande les choses par la rareté ou nouuelleté, ou encore par la difficulté, si
la bonté et vtilité n'y sont ioinctes, I, 568.
Il ne faut pas iuger ce qui est possible, et ce qui ne l'est pas, selon ce qui est
croyable et incroyable à nostre sens. Et est vne grande faute, et en laquelle
toutesfois la plus part des hommes tombent : de faire difficulté de croire d'au-
truy, ce qu'eux ne soauroient faire, ou ne voudroient, II, 628.
Tout ce qui nous semble estrange, nous le condamnons, et ce que nous n'en-
tendons pas, II, 166.
C'est vne hardiesse dangereuse et de conséquence, outre l'absurde témérité
qu'elle traine quant et soy, de mespriser ce que nous ne conceuons pas, I, 294.
Condamner résolument vne chose pour fausse, et impossible, c'est se donner
l'aduantage d'auoir dans la teste, les bornes et limites de la volonté de Dieu, et
de la puissance de nosti-e mère nature : et il n'y a point de plus notable folie au
monde, que de les ramener à la mesure de nostre capacité et suffisance, I, 290.
L'incertitude de mon iugement, est si également balancée en la pluspart des
occurrences, que ie compromottrois volontiei-s à la décision du sort et des dets.
II, 506.
le ne fay qu'aller et venir : mon iugement ne tire pas tousiours auant, il flotte,
il vague. 11 se fait mille agitations indiscrettes et casueles chez moy. Ou l'hu-
meur melancholique me tient, ou la cholérique; et de son authorité priuée, à
cett' heure le chagrin prédomine en moy, à cette heure l'allégresse. A iun ie me
sens autre, qu'après le repas : si ma santé me rid, et la clarté d'vn beau iour,
me voyia honneste homme : si i'ay vn cor qui me presse l'orteil, me voylà ren-
froigné, mal plaisant et inaccessible. Vn mesme pas de cheual me semble tantost
l'ude, tantost aysé; et mesme chemin à cette heure plus court, vne autre fois
plus long : et vne mesme forme ores plus ores moins aggreable. Maintenant ie
suis à tout faire, maintenant à rien faire : ce qui m'est plaisir à cette heure,
me sera quelquefois peine. Quand ie prens des Hures, i'auray apperceu en tel
passage des grâces excellentes, et qui auront féru mon ame; qu'vn' autre fois
i'y retombe, i'ay beau le tourner et virer, c'est vne masse incognue et informe
pour mo}'. Maintes-fois, comme il adulent de faire volontiers, ayant pris pour
exercice et pour estât, à maintenir vne contraire opinion à la mienne, mon es-
prit s'appliquant et tournant de ce coste-là, m'y attache si bien, que ie ne trouue
plus la raison de mon premier aduis, et m'en despars. le m'entraine quasi où
ie panche, comment que ce soit, et m'emporte de mon poix. Chacun à peu près
en diroit autant de soy, s'il se regai-doit comme moy, II, 348.
Ma foiblesse n'altère aucunement les opinions que ie dois auoir de la force et
vigueur de ceux qui le méritent. Rampant au limon de la terre, ie ne laisse pas
de remarquer iusques dans les nues la hauteur inimitable d'aucunes âmes héroï-
ques, I, 398.
JUSTICE (langage judiciaire, lois). *
Nous appelions iustice, la dispensation et pratique, des loix très ineptes souuent
et très iniques, III, 36.
Les Stoïciens tenoient que Nature mesme procède contre iustice, en la plus-
part de ses ouurages. Les Cyrenaïquès qu'il n'y a rien iuste de soy: que les cous-
tumes et loix forment la iustice, III, 162.
L'humaine iustice est formée au modelle de la médecine, selon laquelle, tout ci'
qui est vtile est aussi iuste et honneste, III, 612.
Considérez la forme de cette iustice qui nous régit; c'est vn vray tesmoignage
L'ESPRIT DES ESSAIS. JUS. E.209
do riiiiiuaiuc iiiibocillité : tant il y a de conti-adictiou et ilVii'ciir. (i- (|ui' nous
trouuons faneur et rigueur en la instice : et y en trouuons tailt, que ie ne sçay
si l'entre-deux s'y trouue si sonnent : ce sont parties uialadiues, et fiienibres in-
iustes, du corps niesmes et essence de la iustice. Combien auons nous descou-
uert d'innocens auoir esté punis ; ie dis sans la coulpe des iuges; et combien en
y a-il eu, que nous n'auons pas descounert"? Combien aj'-ie veu de condemna-
tions, plus crimineuses que le crime? Il n'y a remède. l'en suis là que ie ne me
representoray iamais, que ie ])uisse, à homme qui décide de ma teste : où mon
honneur, et ma vie, dependt' de Tindusti-ie et soing de mon procureur: plus-que
démon innocence, III, <il(i.
Qu'est-il ])lus farouche (pi(> de voir vue nation, où par légitime coustume la
charge de iuger se vende; les iugements soyent payez à purs deniers contans;
et où légitimement la iustice soit refusée à qui n'a dequoy la payer? I, 171.
De ce mesme papier où il vient d'escrirc l'arrest de condemnation contre vu
adultère, le iuge en desrobe vn lopin, pour en faire vn poulet à la femme de
son compagnon. Celle à qui vous viendrez de vous frotter illicitement, criera
plus asprement, tantos't, en vosti'C presiMice mesme, à rencontre d'vne pareille
faute de sa compaigne, que ne fei'oit Porcie. Et tel condamne les hommes à mou-
rir, pour des crimes, qu'il n'estime point fautes, III, 4G9.
Tel qui rapporte de sa maison la douleur de la goutte, la ialousie, ou le lari'o-
cin de son valet, ayant toute l'ame teinte et abbreuuée de colère, il ne faut pas
doubter que son ingénient ne s'en altère vers cette part là, II, 316.
Quelque bon dessoin qu'ait vn iuge, s'il ne s'escoute de près, à quoy pou de
gens s'amusent; l'inclination à l'amitié, à la parenté, à la beauté, et à la ven-
geance, et non pas seulement choses si poisantes, mais cet instinct fortuite, ipii
nous fait fauoriser vue chose plus qu'vno autre, et qui nous donne sans le congé
de la raison, le choix, en deux pareils subjects, ou quelque vmbrage de pareille
vanité, peuuent insinuer insensiblement en son iugement, la recommondation
ou deffaueur d'vne cause, et donner pente à la balance, II, 340.
l'ay ouy parler d'vn iuge, lequel où il rencontroit vn aspre conflit entre Harto-
lus et Baldus, et quelque matière agitée do plusieurs contrarietez, mcttoit en
marge de son liure. Question pour l'amy, c'est à dire que la vérité estoit si oui-
brouillée et debatue, (|u'en pareille cause, il pourroit fauoriser celle des parties.
que bon luy sembloroit. Il ne tenoit qu'à faute d'esprit et de suffisance, qu'il ne
poust mettre par tout, Question pour l'amy. Les aduocats et les iuges de nostre
temps, trouuentà toutes causes, assez de biais pour les accommoder où bon leur
semble, II, 378.
Receuons quelque forme d'arrest qui die : La Cour n'y entend rien ; tels les
Areopagitos : lesquels se trouuans pressez d'vne cause, qu'ils no pouuoiont dos-
uelopper, ordonneront que les parties en vicndroiont à cent ans, I, 536.
Certes i'ay eu sonnent despit, de voir des iuges, attii'oi- par fraude et fauces
espérances do faneur ou pardon, le criminel à descouurir son fait, et y employer
la piperie et l'impudence. C'est vue iustice malicieuse : et ne l'estime pas moins
blessée par soy-mesme, que par autruy, III, 80.
La cholere et la hayno sont au delà du douoir de la iustice : et sont passions
seruans seulement à ceux, qui ne tiennent pas assez à leur deuoir, par la raison
simple. Toutes intentions légitimes sont d'elles mesmes tempérées : sinon, elles
s'altèrent en séditieuses et illégitimes, III, 82.
C'est vn vsage de nostre iustice, d'en condanmer aucuns, pour l'aduertisso-
ment des autres. De les condamner, par ce qu'ils ont failly, ce seroit bestise, car
ce qui est faict, no se peut defl'aire : mais c'est afin qu'ils ne faillent plus de
mesmes, ou qu'on fuye l'exemplo do leur faute. On no corrige pas celuy qu'on
pdnd, on corrige les autres par luy, III. 330.
C'est raison qu'on face grande différence entre les fautes ([ui viennent do nos-
tre foiblesse, et celles qui viennent de nostre malice. Car en celles icy nous som-
mes bandez à nostre escient contre les règles de la raison, que nature a em-
preintes en nous : et en celles là, il semble que nous puissions appeller à ga-
rant cotte mesme nature pour nous auoir laissé en telle imperfection et deffail-
lance, I, 88.
ESSAIS L)l', MONTAIGM.. — T. I\ . 14
E.210 ESSAIS DE MONTAIGNE.
le hay moins l'iniure j)iofesse quo trahitresse; guerrière que pacifique et iuri-
(lique, ill, 426.
i.os supplices aiguisent les vices plustost qu'ils no les amortissent : ils n'en-
^'ondrent point le soing de bien faire, c'est l'ouurage de la raison, et de la disci-
jiline : mais seulement vn soing do n'estre surpris en faisant mal, II, 438.
C'est mettre ses coniectures à bien haut prix, que d'en faire cuire vn homme
tout vif, III, 5-10.
A tuer les gens : il faut vne clairté lumineuse et nette, III, 538.
Quant à uioy, en la iustice mesme, tout ce qui est au delà de la mort simple,
me .semble pin-e cruauté, II, 102.
Nostre iustice no nous présente que l'vne de ses mains; et encore la gaucho.
Quiconque il soit, il en sort auecques perte, III, 612.
LÂCHETÉ (peur).
La plus commune façon de chastier la couardise, est par lionte et ignominie.
Toutesfois quand il y auroit vne si grossière et apparente ou ignorance ou
couardise, qu'elle surpa.ssast toutes les ordinaiies, co soroit l'aison do la prondi-e
l)0ur suffisante prouue de meschanceté ot de malice, et de la chastier pour telle,
I. ÎMJ.
LAIDEUR.
Entre les laideurs, ie compte les beautez artificielles et forcées. La laideur d'vno
vieillesse aduouoc, est moins vieille, ot moins laide à mon gré, qu'vne autre
pointe et lissée, III, 282.
LANGAGE.
Nostre parler a ses foiblesses ot ses deffaults, comme tout le reste. La plus paît
des occasions dos troubles du monde sont Grammariens. Noz proQez ne naissent
que du débat de l'interprétation des loix; ot la plus part des guerres, de cette
impuissance do n'auoir sçeu clairement exprimer les conucntions et traictez
d'accord des Princes, II, 276.
Le parler que i'aymc, c'est vn parler simple et naif, tel sur le paiiier qu'à la
bouche : vn parler succulent ot neruoux, court et serré, non tant délicat et pei-
gné, comme véhément et brusque. Plustost difficile qu'ennuieux, esloigné d'af-
fectation : desreglé, descousu, et hardy : chaque loppin y face son corps : non
pedantesque, non fratesque, non pleideresque, mais plustost soldatesque, I, 278.
En nostre langage ie trouuo. assez d'estofïe, mais vn peu faute do façon. Car il
n'est rien, qu'on ne fist du iargon do nos chasses, et do nostre guerre, qui est
vn généreux teri-ein à emprunter. Et les formes do parler, comme les herbes,
s'amendent et fortifient en les transplantant. le le trouuo suffisamment abondant,
mais non pas maniant ot vigoureux suffisamment. Il succombe ordinairement à
vne puissante conception. Si vous allez tendu, vous sentez souuent qu'il languit
soubs vous, et floschit : et qu'à son delfaut le Latin se présente au secours, et le
Grec à d'autres, III, 242.
Personne n'est exempt de dire des fadaises : le malheur est, de les dire cu-
rieusement, III, 78.
Il en est de si sots, qu'ils se destournent de leur voj^e vn quart de lieue, pour
courir après vn beau mot. Au rebours, c'est aux paroles à seruir ot à suiuro, et
que le Gascon y arriue, si le François n'y peut aller, I, 270.
Qui a dans l'esprit vne viue imagination et claire, il la produira, soit en Bor-
gamasquo, soit par mines, s'il est muet, I, 274.
Le maniement ot employte des beaux esprit, donne prix à la langue : non pas
l'innouant, tant, comme la remplissant de plus vigoreux et diuers seruices, l'os-
tirant et ployant, III, 240.
Le long ou le court, ne sont proprietez qui ostent ny qui donnent prix au lan-
gage, II, 476. ^
Les Athéniens ostoient à choisir de deux architectes, à conduire vne grande
L'ESPKIT DKS ESSAIS. LAN. E.211
fabrique; lo premier se présenta auec vn beau discours jiremedité : mais l'autre
on trois mots : Seigneurs Athéniens, ce que cettuy a dict, ie le feray, I, 274.
LANGAGE JUDICIAIRE.
Quelle chose peut estre plus estrange, que de voir vn peuple obligé à suiuro
des loix qu'il n'entendit oncques : attaché en tous ses affaires domesticquos, ma-
riages, donations, testaments, ventes, et achapts, à des règles qu'il ne peut
sçauoir, n'estans escrites ny publiées en sa langue, et desquelles par nécessité il
luy faille acheter l'interprétation et l'vsage, I, 174.
Pourquoy est-ce, que notre langage commun, si aisé à tout autre vsage, dé-
nient obscur et non intelligible, en contract et testament : et que celuy qui s'ex-
prime si clairement, quoy qu'il die et escriue, ne trouue en cela, aucune manière
de se déclarer, qui no tombe en doute et contradiction? Si ce n'est, que les Prin-
ces de cet art s'appliquans d'vne peculiere attention, à trier des mots solemnes,
et former des clauses artistes, ont tant poisé chasque syllabe, espluché si prime-
ment chasque espèce de cousture, que les voila enfrasquez et embrouillez en l'in-
linité des ligures, et si menues partitions: qu'elles ne peuuent plus tomber soubs
aucun règlement et prescription, ny aucune certaine intelligence, III, 002.
La libéralité n'est pas bien en son lustre en main souueraine : les priuez y ont
plus de droict. Car à le prendre exactement, vn Roy n'a rien proprement sien;
il se doibt soy-mesmes à autruy, III, 293.
Comment assouuiroit il les enuios, qui croissent, à mesure qu'elles se remplis-
sent? Qui a sa pensée à prendre, ne l'a plus à ce qu'il a prins. La conuoitise n'a
l'ien si propre que d'estre ingrate, III, 298.
A nostre mode, ce n'est iamais l'aict : le reçcu ne se met i)lus en compte : on
n'ayme la libéralité que future. Par quoy plus vn Prince s'espuise en donnant,
plus il s'appaourit d'amys, III, 298.
Il faut à qui en veut retirer fruict, semer de la main, non pas verser du sac :
il faut espandre le grain, non pas le respandre, III, 293.
Il est trop ays(' d'imprimer la libéralité, en celuy, qui a dequoy y fournir au-
tant qu'il veut, aux despens d'autruy. Et sou estimation se réglant, non à la
mesure du présent, mais à la mesure des moyens de celuy qui l'exerce, elle
vient à estre vaine en mains si puissantes. Us se trouuent prodigues, auant-
qu'ils soient libéraux, III, 295.
LIBERTÉ.
La vraye liberté c'est pouuoir toute chose sur soy, III, 50 1.
La i)remeditation de la moi't, est préméditation de la liberté. Qui a apris à
mourir, il a desapris à seruir, I, 110.
Le sçauoir mourir nous afranchit de toute subiection et contraincte, I, IIO.
• LIVRES.
Les Mures ont beaucoup de qualit(!Z aggreables à ceux qui les sçavent choisir.
Mais aucun bien sans peine. C'est vn plaisir qui n'est pas net et pur, non plus
(lue les autres : il a ses incommoditez, et bien poisantes. L'ame s'y exerce, mais
le corps demeure ce pendant sans action, s'atterre et s'attriste, le ne sçaclie
'wcez plus dommageable, ny plus à euiter, en la déclinaison d'aage, III, 158.
LOIS (justice, LANCiAGE JUDICIAUIE).
Les loix prennent leui- authorité de la possession et de l'vsage : il est dange-
reux de les ramener à leur naissance : elles grossissent et s'annoblissent en rou-
lant, comme nos riuieres, II, 380.
Elles se maintiennent en crédit, non par ce qu'elles sont iustes, maià |)ar ce
• lu'elles .sont loix. C'est le fondement mystique de leur authorité : elles n'en ont
puint «l'aiilre. (){\i liicii h-ui' scrl. Elles sont souucMit faicics par des suis. Plus
E.212 ESSAIS DE MONTAIGNE.
souuent par des gons, qui en liaine d'equalité ont faute d'oquité. Mais tousiours
par dos liomnies, autliours vains ot irrésolus. III, G14.
Il n'est rien si lourdement, et largement fautier, (jue les loix : ny si ordinaire-
ment. Quiconque leur obéit par ce qu'elles sont iustes, ne leur obeyt pas iustc-
ment par où il doit, III, 014.
Il n'est si homme de bien, qu'il mette à l'examen des loix toutes ses actions et
pensées, qui ne soit pendable dix fois en sa vie. Voire tel, qu'il seroit très-grand
dommage, et très-iniuste de punir et de perdre, III, 402.
Tel pourroit n'offencer point les loix, qui n'en meriteroit point la louange
d'homme de vertu : et que la philosophie feroit tres-iustemcnt foiter. Tant cette
relation est trouble et inégale, III, 402.
Quelle bonté est-ce que ie voyois hyer en crédit, et demain ne l'estre plus :
et que le traiect d'vne riuierc fait crime? Quelle vérité est-ce que ces montai-
gnes bornent mensonge au monde qui se tient au delà? II, 374.
Poui" la reuerence des lois la vraye vertu a beaucoup à se desmettre de sa vi-
gueur originelle : et non seulement par leur permission, plusieurs actions vitieu-
sesont lieu, mais encores à leur suasion, III, 92.
Les loix mesmes de la iustice, ne peuuent subsister sans quoique meslange
d'iniustico. Et ceux-là entreprennent de couper la teste de Hydra, qui prétendent
oster dos loix toutes incommoditez et inconueniens, II, 540.
Los pires nous sont si nécessaires, que sans elles, les hommes s'entre-mange-
roient les vns les autres ; sans loix, nous viurions comme bestos, II, 334.
Quiconque combat les loix, menace les gents de bien d'oscourgees et de la
corde, I, 244.
Le pis que ie trouue en nostre estât, c'est l'instabilité : et que nos loix ne peu-
uent prendre aucune forme arrestée, II, 508.
Il n'est rien subiect à plus continuelle agitation que les loix. Depuis que ie
suis nay, i'ay veu telle chose qui nous estoit capitale, deuenir légitime ; prenant
vue essence contraire en l'espace de peu d'années de possession, II, .372.
L'opinion de celuy-là ne me plaist guère, qui pensoit parla multitude des loix,
brider l'authorité des iuges, en leur taillant leurs morceaux. Il ne sentoit point,
qu'il v a autant de liberté et d'estenduë à l'interprétation des loix, qu'à leur fa-
çon, III, 000.
Toutes choses se tiennent par quelque siinilitude. Tout exemple cloche. Et la
relation qui se tire de l'expérience, est tousiours défaillante et imparfaicte. On
ioinct toutesfois les comparaisons par quelque bout. Ainsi seruent les loix; et
.s'assortissent à chacun de nos affaires, par quelque interprétation destournéo,
contrainte et biaise, III, 010.
Les hommes vont ainsin. On laisse les loix, et préceptes suiure leur voyo, nous
en tenons vne autre. Non par desreglement de mœurs seulement, mais par opi-
nion souuent, et par iugement contraire, III, 400.
Nous auons en France, plus de loix que tout le reste du monde ensemble; et
plus qu'il n'en faudroit à régler tous les mondes d'Epicurus : et si auons tant
laissé à opiner et décider à nos iuges, qu'il ne fut iamais liberté si i)uissante et
si licencieuse. Qu'ont gaigné nos législateurs à choisir cent mille espèces ot faicts
particuliers, et y attacher cent mille loix? Ce nombre n'a aucune proportion,
auec l'infinie diucrsité des actions humaines. La multiplication de nos inuen-
tions, n'arriuera pas à la variation dos exemples. Adioustez y en cent fois au-
tant : il n'aduiendra pas pourtant, que des euenemens à venir, il s'en trouue
aucun, qui en tout ce grand nombre de milliers d'euenemens choisis et enre-
gistrez en rencontre vn, auquel il se puisse ioindre et apparier, si exactement,
qu'il n'y reste quelque circonstance et diuersité, qui requière diuerse considé-
ration de iugement, III, 000.
Il y a peu de relation de nos actions, qui sont en perpétuelle nmtation, auec
les loix fixes et immobiles. Les plus désirables, ce sont les plus rares, plus sim-
ples, et générales. Et encore crois-ie, qu'il vaudroit mieux n'en auoir point du
tout, que de les auoir en tel nombre que nous auons, III, 002.
Il y a grand doute, s'il se peut trouuer si euidont profit au changement d'vne
loy receïie telle qu'elle soit, qu'il y a de mal à la remuer, I. 170.
L'ESPRIT DES ESSAIS. LOIS. E.2I3
La foi-tuiie nous présente aucunes-fois la nécessité si vrgento, qu'il est besoin
que les loix luy lacent quelque place. Quand on résiste à l'accroissance d'vne iu-
nouation qui \dent par violence à s'introduire, de se tenir en tout et ])ar tout en
bride et on règle contre ceux qui ont la ciel' des champs, ausqiiels tout cela est
loisible qui peut auancev leur dessein, qui n'ont n.v loy ny ordre que de suiure
leur aduantage, c'est vue dangereuse obligation et ine((ualité. Il est encore re-
proché à ces deux grands personnages, Octauius et Caton, aux guerres ciuiles,
l'vn do Sylla, l'autre de Ciesar, d'auoir plustost laissé encourir toutes oxtreniitez
à leur patrie, que de la secourir aux dospens de ses loix, ot que de rien remuer.
Mieux vault faire vouloir aux loix ce qu'elles peuuent, lors qu'elles ne pouuent
ce qu'elles veulent. C'est ce dequoy Plutarque loiie Philoi)femon, qu'estant né
pour commander, il sçauoit non seulement commander selon les loix, mais aux
loix mesmes, quand la nécessité publique le requeroit, I, 181.
Il y a ie ne sçay quelle douceur naturelle à se sentir louor, mais nous luy pres-
lons trop de beaucoup. le no me soucie pas tant, quel ie sois chez autruy,
comme ie me soucie quel ie sois en moy-mesme. Les estrangers ne voyent que
les euenemens et apparences externes : chacun peut faire bonne mine par le
dehors, plein au dedans de fieburo et d'effroy. Ils ne voyent pas mon cn>ur, ils
ne voyent que mes contenances, II, 151.
LOUANGE (ki.attf.hie, (ii.oun;, réputation).
La louange est tousiours i)laisante, de qui, et pourquoy elle vienne. Si faut-il
pour s'en aggreer iustement, cstre informé de sa cause, III, 4L2.
Louez un bossu de sa belle taille, il le doit receuoir à iniure : si vous estes
couard, et qu'on vous honnore pour vn vaillant homme, est-ce do vous qu'on
parle? On vous prend pour vn autre, III, 190.
MAL.
Le mal est à riionuao bien à son tour. Ny la douleur ne hiy est tousiours à
fuir, ny la volupté tousiours à suiure, II, 214.
En toutes nos fortunes, nous nous comparons à ce qui est au dessus de nous,
et regardons vers ceux qui sont mieux. Mesurons nous à ce qui est au dessous :
il n'en est point de si misérable, qui ne trouue mille exemples où se consoler.
C'est nostre vice, que nous voyons plus mal volontiers, ce qui est dessus nous,
que volontiers, ce qui est dessoubs, III, 102.
Qui dresseroit vn tas de tous les maux ensemble, il n'est aucun, qui ne choisist
plustost de remporter auec soy les maux qu'il a, que de venir à diuision légi-
time, auec tous les autres hommes, de ce tas de maux. H on [irendre sa quotte
part, III, 404.
Les plus griefs et ordinaires maux, sont ceux (pie la fantasie nous charge,
III, 042.
Qui se faict plaindre sans raison, est homme pour n'estre pas plaint, quand la
raison y sera. C'est pour n'estre iamais plaint, que se plaindre tousiours, faisant
si souuent le piteux, qu'on ne soit pitoyable à personne, III, 440.
Le plus vieil et mieux cogneu mal, est tousiours plus supportable, que le mal
récent et inexpérimenté, III, 402.
Tous les maux qui n'ont autre danger que du mal, nous les disons sans danger.
Celuy si grief qu'il soit, d'autant qu'il n'est pas homicide, qui le met en conte de
maladie? I, 152.
M AL A DIB»
On n'a point à se plaindre des maladies, qui partagent loyallemeat le toinps
auec la santé, III, ihl.
Nous nous perdons d'impatience. Les maux ont leur vie, ot leurs bornes,
leurs maladies et leur santé. Les maladies ont leur fortune limitée dés leur nais-
sance : et leurs iours. Qui essaye de les abbreger impérieusement, par force, au
E.214 ESSAIS DE MONTAIGNE. •
trauers de leur course, il les allonge ot multiplie : et les harselle. au lieu de les
appaiser. Il ne faut ny obstinéenicnt s'opposer aux maux, et a l'estourdi : ny
leur succomber de mollesse : mais il leur faut, céder naturellement, selon leur
condition et la nostre. On doit donner passage aux maladies : elles arrestent
moins chez qui les laisse faire. Laissons faire vn peu à Nature : elle entend mieux
ses affaires que nous. Mais vn tel en mourut. Si ferez vous : sinon de ce mal là,
d'vn autre. Et combien n'ont pas laissé d'en mourii-, ayants trois médecins à leur
costé? III, 04().
le n'ayme pointa guarir le mal parle mal. le hay les remèdes qui importunent
|)lus que la maladie. D'estre subiect à la colique, et subiect à m'abstenir du plai-
sir de manger des iiuitres, ce sont deux maux pour vn. Le mal nous pinse d'vn
costé, la règle de l'autre. Puis-qu'on est au hazard de se mesconter, hasardons
nous plustost à la suitte du plaisir. Le monde faict au rebours, et ne pense rien
vtile, qui ne soit pénible. La facilité luy est suspecte, III, (i)42.
Sinon l'allégresse, aumoins la contenance rassise des assistans, est propr(\
près d'vn sage malade. Pour se voir en vn estât contraire, il n'entre point en
querelle auec la santé. Il luy plaist de la contempler en autruy, forte et entière:
et en iouyr au moins par compagnie. Pour se sentir fondre contre-bas. il ne
reiecte pas du tout les pensées de la vie, ny ne fuit les entretiens communs, III, 14:1.
Les maladies se coniurent mieux par courtoisie, que par brauerie. Il faut souf-
frir doucement les loix de nostre condition. Nous sommes pour vieillir, pour
alToiblir, pour estre malades, en despit de toute médecine, III, 646.
MARIAGE.
Le mariage, outre ce que c'est vn marché qui n'a que l'entrée libre, de durée
contrainte et forcée, dépendant d'ailleurs que de nostre vouloir : il y suruient
mille fusées estrangeres à desnieler parmy, suffisantes à l'ompre le lil et troubler
le cours d'vne viue affection, I, 302.
Il n'est plus temps de regimber quand on s'est laissé entrauer. II faut prudem-
ment mesnager sa liberté : mais depuis qu'on s'est submis à l'obligation, il s'y
faut tenir soubs les loix du debuoir commun, aumoins s'en efforcer, III, 200.
Vn mariage plein d'accord et de bonne conuenance, peut ne pas tousiours pi-e-
senter beaucoup de loyauté : il n'est pas impossible de se rendre aux efforts de
l'amour, et ce neantmoins reseruer quelque deuoir enuers le mariage : on le
peut blesser, sans le rompre tout à faict, II, 202.
La beauté, l'oportunité, la destinée (car la destinée y met aussi la main) l'ont
attachée à vn cstranger : non pas si entière peut estre, qu'il ne luy puisse rester
quelque liaison par où elle tient encore à son mary, III, 202.
On ne se marie pas pour .soy, quoy qu'on die : on se marie autant ou plus,
pour sa postérité, pour sa famille. L'vsage et l'interest du mariage touche no-stre
race, bien loing par delà nous. Pourtant me plaist cette façon, qu'on le conduise
plustost par main tierce, que par les propres : et par le sens d'autruy, que par le
sien. Tout cecy, combien à l'opposite des conuentions amoureuses? III, 194.
le frouue peu d'aduancement à vn homme de qui les affaires se portent bien,
d'aller chercher vue femme qui le charge d'vn grand dot; il n'est point de debte
estrangere qui apporte plus de ruyne aux maisons, II, 40.
C'est vne religieuse liaison et deuote que le mariage : voyia pourquoy le plaisir
qu'on en tire, ce doit estre vn plaisir retenu, sérieux et meslé à (juelque seue-
rité : ce doit estre vne volupté aucunement prudente et consciencieu.se, I, 346.
Confessons le vray, il n'en est guère d'entre nous, qui ne craigne jilus la
honte, qui luy vient des vices de sa femme, que dos siens : qui ne se soigne plus,
(esmerueillable charité) de la conscience de sa bonne espouse, que de la sienne
propre : qui n'aymast mieux estre voleur et sacrilège, et que sa femme fust
meurti'iere et hérétique, que si elle n'estoit plus chaste que son mary. Inique es-
timation de vices, III, 216.
Celuy là s'y entendoit, ce me semble, qui dit qu'vn boa mariage se dressoit
d'vne femme aueugle, auec vn mary sourd, III, 236.
|;ESPRIT des essais. MAR. E.21Ij
L«>s aigi-eiii's comme les douceurs du mariage se tiimneiit secrettes par les
sages, III, 234.
Bonne femme et bon mariage, se dit, non de qui l'est, mais duquel on se
taist, II, -234.
Fay auec despit, veu des maris hayr leurs femmes, de ce seulement, (|u"ils leur
l'ont tort. Aumoins ne les faut il pas moins aymer, de nostre faute : par repen-
tance et compassion aumoins, elles nous en deuroient estre plus chères, 111,201.
Le mariage e.st vn marché plein de tant d'espineuses ciconstances, qu'il est
malais(! que la volonté d'vne femme, s'y maintienne entière long temps. Les
hommes, quoy qu'ils y soyent auec vn peu meilleure condition, y ont trop af-
faire. La touche d'vn bon mariage, et sa vraye preuue, regarde le temps que la
société dure; si elle a esté constamment douce, loyalle, et commode, II, Wti.
Ce qu'il s'en voit si peu de bons, est signe de son prix et de sa valeur. A le
bien façonner et à le bien prendre, il n'est point de plus belle pièce en notre; so-
ciété. Nous ne nous en pouuons passer, et Talions auillissant. Il en adulent ce qui
se voit aux cages, les oyseaux qui en sont dehors, désespèrent d'y entrer; et d'vn
pareil soing en sortir, ceux qui sont au dedans, III, 200.
Socrates, enquis, qui estoit plus commode, prendre, ou ne prendre point de
feumie : Lequel des deux, dit-il, on face, on s'en repentira, III, 200.
le ne voy point de mariages qui faillent plustost, et se troublent que ceux qui
s'acheminent par la beauté, et désirs amoureux. Il y faut des fondemens plus so-
lides, et plus constans, et y marcher d'aguet : cette boi'iillante allégresse n'y
vaut rien, III, 190.
Peu de gens ont espousé des amies qui ne s'en soient repentis, III, 202.
l'ay veu de mon temps en quelque bon lieu, guérir honteusement et deslion-
nestement, l'amour, par le mariage : les considérations sont trop autres, 111,202.
Le mariage est vn nom d'honneur et dignité, non de folastre et lasciue concu-
piscence, I, 348.
II faut, dit Aristote, toucher sa femme prudemment et seuerement, de peur
qu'en la chatouillant trop lasciuêment, le plaisir ne la face sortir hors des gons
de raison, III, 19(j.
Les plaisirs mesmes des maris à l'accointance de leurs femmes, sont reprou-
uez, si la modération n'y est obseruée : il y a dequoy faillir en licence et des-
bordement en ce subiect là, comme en vn subiect illégitime. Ces encherimcnts
deshontez, que la chaleur première nous suggère en ce ieu, sont non indécem-
ment seulement, mais dommageablement employez enuers noz femmes. Qu'elles
apprennent l'impudence jiu moins d'vne autre main. Elles sont tousiours assez
esueillées pour nostre besoing, I, 346.
Les mariez, le temps estant tout leur, ne doiuent ny presseï" ny taster leur
entreprinse, s'ils ne sontprests. Et vault mieux faillir indécemment, à estreinei'
la couclie nuptiale, pleine d'agitation et de fieure, attendant vne et vue autre
commodité plus priuée et moins allarmée, que de tomber en vne perpétuelle mi-
sei-e, pour s'estre estonné et désespéré du premier refus, I, 142.
La libéralité des dames est trop profuse au mariage, et esmousse la poincte de
l'affection et du désir, III, 204.
Vne trop continuelle assistance, et l'assiduité blesse : chacun sent par (expé-
rience, que la continuation de se voir, ne peut représenter le plaisir qu(; Ion sent
à se desprendre, et reprendre à secousses, III, 431.
L'amitié a les bras assez longs, pour se tenir et se ioindre, d'vn coin de monde
à l'autre : et spécialement celle de mari à femme, où il y a vne continuelle com-
munication d'offices, qui en reueillent l'obligation et la souuenance, III, 431.
Le mariagt! a pour sa part, l'vtilité, la iustice, l'honneui-, et la constance : vn
plaisir plat, mais plus vniuersel. L'amour se fonde au seul plaisir: et l'a de vray
plus chatouilleux, plus vif, et plus aigu : vn plaisir attizé par la difliculté : il }•
faut de la piquourc et de la cuison. Ce n'est plus amour, s'il est sans flèches et
sans feu, 111,201.
Vn bon mariage, s'il en est, refuse la compagnie et conditions de l'amour : il
tasche à représenter celles de l'amitié. C'est vne douce société de vie, pleine de
constance, de liance, et d'vn nombre inliny d'vtiles et solides offices, et obliga-
E.216 ESSAIS DE MONTAir.NE.
lions mutuelles. Aucune femme qui en sauourc le goust, ne voudroit tenir lieu
de maistresse à son mary. Si elle est logée en son affection, comme femme, elle
y est bien plus honorablement et seurement logée. Quand il fera l'esmeu ailleurs,
et l'ompressé, qu'on luy demande pourtant lors, à qui il aymeroit mieux arriuer
vne honte, ou à sa femme ou à sa maistresse, de qui la desfortune l'affligeroit le
. plus, a qui il désire plus de grandeur : ces demandes n'ont aucun double en va
mariage sain, III, l!t8.
L'amour hait qu'on se lionne par ailleurs que par luy, et se mesle laschemont
aux accointances qui sont dressées et entretenues soubs autre titre : comme est
le mariage, III. 191.
le me mariay à trente trois ans, et loue l'opinion de trente cinq, qu'on dit estre
d'Aristote. Platon ne veut pas qu'on se mai-ie auant les trente, II. Ht.
MÉDECIN. xMÉDECIXE (mai x. maladie).
Il y auoit en .-Egypte vno loy plus iuste, par laquelle le médecin ])renoit son
patient en cliargo les trois premiers iours, aux périls et fortunes du patient :
mais les trois iours passez, c'estoit aux siens propres, III, 42.
L'expérience est proprement sur son fumier au subiect de la médecine, où la
raison luy quitte la place. Tybère disoit. que quiconque auoit vescu vingt ans,
se deuoit respondre des choses qui luy estoient nuisibles ou salutaires, et se sça-
uoir conduire sans médecine. Et le pouuoit auoir apprins de Socrates : lequel
conseillant à ses disciples soigneusement, et comme vn très principal estude,
l'estude de leur santé, adioustoit, qu'il estoit malaisé, qu'vn homme d'entende-
ment, prenant garde à ses exercices à son boire et à son manger, ne discernasl
mieux que tout médecin, ce qui luy estoit bon ou mauuais, III, 628.
C'est de mal'heur que la science la plus importante qui soit en noslre vsagc,
comme celle qui a charge de nostre conseruation et santé, soit la plus incertaine,
la plus trouble, et agitée de plus de changemens, III, 46.
Les ^Egyptiens auoient raison de reiecter ce gênerai mestier de médecin, et
descoupper cette profession à chaque maladie, à chasque partie du corps son
œuurier. Cette partie en estoit bien plus proprement et moins confusément traic-
tée, de ce qu'on ne regardoit qu'à elle spécialement. Les nostres ne s'aduisent
pas, que, qui pouruoid à tout, no pouruoid à rien : que la totale police de ce pe-
tit monde, leur est indigestible, III, 51.
L'art de medef ine, n'est pas si résolue, que nous soyons sans authorité, quoy
que nous facions. Elle change selon les climats, et selon les Lunes : selon Fernel
et selon l'Escale. Si vostre médecin ne trouue bon, que vous dormez, que vous
vsez devin, ou do telle viande : ne vous chaille : io vous en Irouueray vn autre
qui ne sera pas de son aduis. Ladiuersité dos arguments et opinions médicinales,
embrasse toute sorte de formes, III, 611.
Qui vid iamais médecin se seruir de la recepte de son compagnon, sans y re-
tranchei'ou adiouster quelque chose? Ils trahissent assez par là leur art : et nous
font voir qu'ils y considèrent plus leur réputation, et par conséquent leur profit.
que l'interest de leurs patiens. Celuy là de leurs docteurs est plus sage, qui leur
a anciennement prescript, qu'sn seul se mesle de traicter vn malade : car s'il ne
fait rien qui vaille, le reproche à l'art de la médecine, n'en sera pas fort grand
pour la faute.d'vn homme seul : et au rebours, la gloire en sera grande, s'il vient
à bien rencontrer : là où quand ils sont beaucoup, ils descrient à tous les coups
le mestier : d'autant qu'il leur adulent de faire plus souuent mal que -bien, III, 46.
Platon auoit raison dédire, que pour estre vray médecin, il seroit nécessaire
que celuy qui l'entreprendroit, eust passé par toutes les maladies, qu'il veut gué-
rir, et par tous les accidens et circonstances dequoy il doit iuger. C'est raison
qu'ils prennent la vérole, s'ils la veulent seauoir penser. Vi-ayment ie m'en fierois
à celuy là. Car les autres nous guident, comme celuy qui peint les mers, les
escuoils et les ports, estant assis, sur sa table, et y faicl promener le modèle d'vn
nauireen toute seurté. lettez-le à l'effect, il ne sçait par où s'y prendre, 111,628.
C'est vne bonne règle en leur art, qu'il faut que la foy du patient, préoccupe
L'ESPRIT DES ESSAIS. MED. E.217
par bonne csiuM'ance et asseurance, leur effect et opération. Laquelle règle ils
tiennent iusques là, que le plus ignorant et grossier médecin, ils le Irouuent plus
propre à celuy qui a fiance en luy, que le plus expérimenté, et incognu, III, 41.
Les médecins ployent ordinairement auec vtilité, leurs règles, à la violence des
enuies aspres, qui suruiennent aux malades. Ce grand désir ne se peut imaginer,
si cstranger et vicieux, que Nature ne s'y applique. Et puis, combien est-ce de
contenter la fantasie? III, G 12.
Il n'appartient qu'aux médecins de mentir en toute liberté, puis que notre sa-
lut despend de la vanité, et fauceté de leurs promesses, III, 42.
Nous ne receuons pas aisément la médecine que nous entendons; non plus que
la drogue que nous cueillons. Si les nations, desquelles nous retirons le gayac, la
salseperille, et le bois d'csquine, ont des médecins, combien pensons nous par
cette mesme recommendation de Testrangeté, la raret('', et la cherté, qu'ils ITiçent
feste de noz clioulx, et de nostre persil? car qui oseroit mespriser les choses re-
cherchées de si loing, au hazardd'vne si longue pérégrination et si périlleuse? III, 48.
C'est la crainte de la mort et de la douleur, l'impatience du mal, vne furieuse
et indiscrète soif de la guerison, qui nous aueugle. C'est pure lascheté qui rend
croyance à la médecine si molle et maniable. La plus part pourtant ne croyent
pas tant, comme ils endurent et laissent faire, III, 06.
On se doit adonner aux meilleures règles, mais non pas s'y asseruir : si ce n'est
à celles, s'il y en a quelqu'vne, ausquelles rol)ligation et seruitude soit vtile. Il
n'est l'ien, où les malades se puissent mettre mieux en scurté, qu'en se tenantcoy,
dans le train de vie, où ils sont esleuez et nourris. Le changement, quel qu'il soit,
estonne et blesse. Estendons nostre possession iusques aux dei-niers moyens. Le
plus souucnt on s'y durcit, en s'opiniastrant, et corrige Ion sa complexion, III, (ild.
MÉDITATION.
Le méditer est vn puissant estude et plein à qui sçait se taster et employer vi-
goureusement, l'aime mieux forger mon amc, que la meubler. Il n'est point d'oc-
cupation ny plus foible, ny plus forte, que celle d'entretenir ses pensées, selon
l'ame que c'est, III, ISG.
MÉiMOIRE.
C'est vn outil de moruoillcux seruice, que* la mémoire, et sans lequel le iuge-
ment fait bien à peine son office, II, 490.
C'est le réceptacle et l'estuy de la science, II, 500.
La mémoire nous représente, non pas ce que nous choisissons, mais ce qui luy
plaist. Il n'est rien qui imprime si viuement quelque chose en nostre souuenance,
que le désir de l'oublier. C'est vne bonne manière de donner en garde, et d'em-
preindre en nostre ame quelque chose, que de la solliciter de la perdre, II, 210.
Ce n'est pas sans raison qu'on dit, que qui ne se sent point assez ferme de nie-
moire, ne se doit pas mesler d'estre menteur, I, 02.
Le manque de mémoire est vn mal duquel principallement i'ay tiré la raison
de corriger vn mal pire, qui se fust facilement produit en moy : sçauoir est l'am-
bition, car cette deffaillance est insuportable à qui s'empestre des negotiations
du monde, I, 00.
MÉNAGE (femme, maiua(;e).
La plus vtile et honnorablc science et occupation à vne mère de famille, c'est
la science du mesnage. l'en vois quelqu'vne auare; de mcsnagere, fort peu. C'est
sa maistresse qualité, et qu'on doibt chercher, auant toute autre : conmie le seul
douaire qui sert àruynerou sauuer nos maisons, III, 432.
Il est ridicule et iniuste, que l'oysiueté de nos femmes, soit entretenue de nos-
tre sueur et trauail. le vois auec despit en plusieurs mesnages, monsieur reue-
nir maussade et tout marmiteux du tracas des affaires, enuiron mid}', que ma-
dame est encore après à se coiffer et attiffer, en son cabinet, III, 432.
Les inconuenicnts ordinaires ne sont iamais légers. Ils sont continuels et irre-
E.2i8 ESSAIS l)K MONTAKiM-:.
parablos, quand ils naissent dos membres du mesnapo, continuels cl insi-paraljlt^s,
III, 380.
A mesure que ces espines domestiques sont drues et desliees, elles nous inci-
dent plus aigu, et sans menace, nous surprenant facilement à l'impourueu, III, :M).
Il y a quelque commodité à commander, fust ce dans vne grange, et à estre
obey des siens. Mais c'est vn plaisir trop vniformc et languissant. Et puis il est
par nécessité meslc do plusieurs pensements fascheux, III, 382.
le suis chez moy, respondant de tout ce qui va mal, III, 394.
Il y a tousiours quelque pièce qui va de trauers. Les négoces, tantost d'vnc
maison, tantost d'vne autre, vous tirassent. Vous esclairez toutes choses de trop
près. Votre perspicacité vous nuict icy comme si fait elle assez ailleurs. le me
desrobe aux occasions de me fascher : et me destourne de la cognoissance des
choses, qui vont mal. Et si ne puis tant faire, qu'à toute heure ie ne heurte choz
moy, en quelque rencontre, qui me desplaise. Et les fripponneries, qu'on me cache
le plus, sont celles queiesçay le mieux. lien est que pour faire moins mal, il faut
ayder soy mesme à cacher. Vaines pointures : vaines par fois, mais tousiours
pointures. Les plus menus et graisles empeschemens, sont les plus persans, III, 38 L
C'est pitié, d'estre en lieu où tout ce que vous voyez, vous embesongne, et
vous concerne, IIÏ, 186.
La plus sotte contenance d'vn Gentilhomme en sa maison, c'est lors do la Visi-
tation et assemblée de ses amis, âe le voir empesché du train de sa police : par-
ler à l'oreille d'vn valet, en menacer vn autre des yeux. Elle devroit couler insen-
siblement, et représenter vn coure ordinaire, III, 39t.
MKXSOXGE.
En vérité le mentir est vn maudit vice. Nous ne sommes hommes, et ne nous
tenons les vns aux autres que par la parole, I, 64.
C'est vn vilain vice, c'est donner tesmoignage de mespriscr Dieu, et quand et
quand de craindre les hommes. Car que peut on imaginer plus vilain, que d'estre
couart à l'endroit des hommes, et braue à l'endroit de Dieu ? II, 526.
Nostre intelligence se conduisant par la seule voye de la paroUe, celuy qui la
fauce, trahit la société publique. C'est le seul vtil, par le moyen duquel se com-
muniquent noz volontez et noz pensées : c'est le truchement de nostrc ame : s'il
nous faut, nous ne nous tenons plus, nous ne nous entrecognoissons plus. S'il nous
trompe, il rompt tout nostre commerce, et dissoult toutes les liaisons de nostr"
police, II, 526.
La menterie seule, et vn peu au dessous, l'opiniastreté, me semblent estre celles
desquelles on douroit à toute instance combattre la naissance et le progrez, elles
croissent quand et eux : et depuis qu'on a donné ce faux ti-ain à la langue, c rst
merueille combien il est impossible de l'en retirer, I, 64.
Le premier traict de la corruption des mœurs, c'est le bannissement de la vé-
rité; l'estre véritable, est le commencement d'vne grande vertu, II, 526.
C'est office de magnanimité, hayr et aymer à descouuert : iuger, parler auec
toute franchise : et au prix delà vérité, ne faire cas de l'approbation ou réproba-
tion d'autruy, II. 492.
Nostre vérité de maintenant, ce n'çst pas ce qui est, mais ce qui se persuade à
autruy : comme nous appelions monnoye, non celle qui est loyallc soulemont,
mais la fauce aussi, qui a mise, II, 526.
le ne sçay quelle commodité ils attendent de se faindre et contrefaire sans
cesse : si ce n'est, de n'en estre pas creus, lors mesmes qu'ils disent voriti'. Cola peut
tromper vne fois ou deux et tient advertis ceux qui ont aies pratiquer, que cr
n'est que piperie et mensonge qu'ils disent, II, 494.
Il ne faut j)as tousiours dire tout, car ce seroit sottise. Mais ce qu'on dit, il faut
qu'il soit tel qu'on le pense: autrement, c'est meschanceté, II, 492.
Celui qui dit vray, par ce qu'il y est d'ailleurs obligé, et par ce qu'il sert : et
qui ne craind point à dire mensonge, quand il n'importe à personne, il n'est pas
véritable suffisamment, II, 492.
La vérité n'a qu'\ n visage, le reuers de la vérité à cent mille ligures, et vn
L'ESPRIT DES ESSAIS. MEN. E.219
cliamp indefîny; le bien est certain et finj-, le mal infiny et incertain ; mille routtes
flesuoyent flu blanc : vne y va, I. <>1.
lemefay plusd'iniure en mentant, que ie n'en fayàceluy, dequiie mens, 11,511.
Nous sommes mieux en la compagnie d'vn chien cognu, qu'en celle d'vn
homme, duquel le langage nous est inconnu ; combien est le langage faux moins
sociable que le silence? I, 64.
MIRACLES (ciiKDUi.iTÉ, croyances).
Si nous ai)pelons monstres ou miracles, ce où nostre raison ne peut aller, com-
bien s'en présente il continuellement à nostre veuë, 1,200.
Les miracles sont, selon l'ignorance en quoy nous sommes de la nature, non
selon l'estre de la nature, I, 162. '
Nous n'auons que faire d'aller trier des miracles et des difficulté/ estrangeres : il
me semble que parmj- les choses que nous voyons ordinairement, il y a des es-
trangetez si incomprehensil)les, qu'elles surpassent toute la difficulté des miracles,
III, 40.
l'ay veu la naissance de plusieurs miracles de mon temps. Encore qu'ils s'es-
toulfent en naissant, nous ne laissons pas de preuoir le train qu'ils eussent pris,
s'ils eussent vescu leur aage. Car il n'est que de trouuer le bout du fil, on en des-
uide tant qu'on veut. Et y a plus loing, de rien, à la plus petite chose du monde,
qu'il \- a de celle là, iusques à la plus grande, III, 528.
On est pardonnable, de mescroire vne merueille, autant au moins qu'on peut
en destourner et elider la vérification, par voye non merueillcuse : et il vaut mieux
pancher vers le doute, que vers l'asseurance, es choses de difficile preuue, et
dangereuse créance, III, 538.
MODERATION.
La modération est vertu bien plus affaireuse, que n'est la souffi-ance, II, 646.
Au mesnage, à l'estude, à la chasse, et tout autre exercice, il faut donner ius-
(jues aux derniers limites du plaisir; et garder de s'engager plus auant, ou la peine
commence à se mesler parmy, I, 426.
La tempérance est modératrice, non aduersaire des voluptés, III, 698.
Mon mestier et mon art, c'est viure, I, 680.
l'ayme la vie, et la cultiue, telle qu'il a pieu à Dieu nous l'octroyer, III, 6!)6.
Pour me sentir engagé à vne forme, ie n'y oblige pas le monde, comme chas-
cun fait, et croy, et conçoy mille contraires façons de vie : et au rebours du
commun, reçoy plus facilement la différence, que la ressemblance en nous, 1, 198.
h; m'attache à ce que ie vov, et que ie tiens, et ne m'eslongne guère du port,
II, 490.
Où ma volonté se prend auec trop d'appétits, ie me penche à l'opposite de son
inclination. Comme ie la voy se plonger et enyurer de son vin, ie fuis à nourrir
son plaisir si auant, que ie ne l'en puisse plus r'auoir sans perte sanglante, III, 504.
Pour nioy, ie loue vne vie glissante, sombre et muette, III, 520.
M'aymerois à l'auanture mieux, deuxième ou troisiesme à Perigueux, que pre-
mier à Paris : au moins sans mentir, mieux troisiesme à Paris, que premier en
charge, lïl, 322.
Les passions, me sont autant aisées à euiter, comme elles me sont difficiles à
modérer, III, 516.
Mes humeurs sont contradictoires aux humeurs bruyantes. l'arresterois bien
vn trouble, sans me troubler, et chastierois vn desordre sans altération. Ay-ie
bosoing de cholere, et d'innammation? ie l'cmpruntf!, et m'en masque, III, .520.
Le bon heur m'est vn singulier aiguillon, à la modération, et modestie. La
|)riere me gaigne, la menace me rebute, la faneur me ployé, la crainte me roydit,
III, 380.
Si quelquefois on m'a poussé au maniement d'affaires estrangeres, i'ay promis
de les i)rendre en main, non pas au poulmon et au foye; de m'en charger, non
E.220 ESSAIS DE MONTAIGNE,
de les incorporer : de m'en soifrncr, ouy; de m'en passionner, nullenieiii : iy re-
garde, mais ie ne les couue point, III, 484.
Vax peu me mesler des cliarges publiques, sans me despartir de raoy. de la
lai'geur d'vne ongle, et me donner à autruy sans m'oster à moy, III, 492.
Le Maire et Slontaigne ont tousiours esté deux, d'vne séparation bien claire.
Mon père auoit ouy dire, qu'il se falloit oublier pour le prochain; que le par-
ticulier ne venoit en aucune considération au prix du gênerai. La plus part des
legles et préceptes du monde prennent ce train, de nous pousser hors de nous,
et chasser en la place, à l'vsage de la société publique. Ils ont pensé faire vn bel
eflect, de nous destourner et distraire de nous; presupposans que nous n'y tin-
sions que trop, et d'vne attaciie trop naturelle; et n'ont espargné rien à dire pour
cette fin. Car il n'est pas nouueau aux sages, de prescher les chosos comme elles
seruent, non comme elles sont, III, 490.
Sauf la santé et la vie, il n'est chose pourquoy ie vueille ronger mes ongles, et
que ie vueiir acheter, au prix du tourment d'esprit et de la contrainte, II, 484.
L'absence de mémoire est vn mal duquel principallement i'ay tiré la raison
de corriger vn mal pire, qui se fust facilement produit en moy : sçauoir est l'am-
bition, car cette deffaillfince est insuportablo à qui s'empestre' des ncgotiations
du monde, I, 00.
Les Princes me donnent prou, s'ils ne m'ostent lien : et me font as.sez de bien.
quand ils ne me font point de mal: c'est tout ce que i'en demande, III, 420.
le ne veux estre tenu seruiteur, ni si affectionné ny si loyal, qu'on me trouue
bon à trahii- personne. Qui est infidelle à soj-mesme, l'est excusablement à son
raaistre, III, 88.
le ne trouue rien si cher, que ce qui m'est donné: ot ce pourquoy, ma volonté
demeure hj-pothequee par- filtre de gratitude. Et reçois plus volontiers les offices,
qui sont à vendre. le crois bien. Pour ceux-cj-, ie ne donne que de l'argent : pour
les autreSj ie me donne mo3'-mesme, III, 416.
Ce qui a esté fié à mon silence, ie le celé religieusement : mais ie prens à celer
ie moins que ie puis. C'est vne importune garde, du .secret des autres, à qui n'en
a que faire, III, 80.
le ne dis rien à l'vn, que ie ne puisse dire à l'autre, à son heure, l'accent seu-
lement vn peu changé : et ne rapporte que les choses ou indifférentes, ou cogneuës,
ou qui seruent en commun, III, 88.
le ne hay pas seulement à piper, mais ie hay aussi qu'on se pipe en moy : ie
n'y veux pas seulement fournir de matière et d'occasion, III, 80.
le sçay bien dire : Il faict meschamment cela, et vertueusement cecy, III, 502.
Quantes-fois, estant marry de quelque action, que la ciuilité et la raison me
prohiboient de reprendre à descouuert, m'en suis-ie desgorgé, non, sans dessein
de publique instruction en ces verges poétiques qui s'impriment encore mieux en
papier, qu'en la chair viue, III, 524.
Quand pour sa droiture ie ne suyurois le droit chemin, ie le suyurois pour auoir
trouue par expérience, qu'au bout du compte, c'est communément le plus heureux,
et le plus vtile, III, 4.52.
l'aymeroy bien plus cher, rompre la pri.son d'vne muraille, et des loix, que de
ma parole, III, 410.
le promets volontiers vn peu moins de ce que ie puis, et de ce que i'espere te-
nir, III, 524.
le me contente de iouïr le monde, sans m'en empresser : de viure vne vie, seu-
lement excusable : et qui .seulement ne poise, ny à moy, ny à autruy, III, oOf».
Ma forme essentielle, est propre à la communication, et à la production : ie suis
tout au dehors et en euidence, nay à la société et à l'amitié, III, 146.
Les hommes, de la société et familiarité desquels ie suis en queste, sont ceux
'qu'on appelle honnosteset habiles hommes, III, 146.
le cherche à la vérité plus la fréquentation de ceux qui me gourment, que de
ceux qui me craignent. C'est vn plaisir fade et nuisible, d'auoir affaii'e à gens qui
nous admirent et facent place, III, 33?!.
l'ayme entre les galans hommes, qu'on s'exprime courageusement : que les mots
aillent où va la pensée. Il nous faut fortifier l'ouye, et la durcir, contre cette ten-
I/ESPRIT DES ESSAIS. MOL). E.221
tireur du sou cerouionioux des paroUes. l'aynie vne société, et fauiiliarité forte, et
virile : vue auiitio, qui se llatte en l'asprcté et vigueur de son commerce : connue
l'amour, es morsures et esgratigneures sanglantes, III, 336.
Aux pro[)os que ie ne puis traicter sans interest, et sans émotion, ie ne m'y
mesle, si le deuoir ne m'y force, III, 50C.
On a dcquoy couler plus incurieusement, en la pauureté, qu'en l'abondance,
iustement dispensée, II, 016.
L'immoderation vers le bien mesme, si elle ne m'offense, elle m'estonne, I, 3lt.
L'archer qui outrepasse le blanc, faut comme celuy, qui n'y arriue pas, 1, 311.
Les yeux me troublent à monter à coup, vers vne grande lumieie également
comme à deualler à l'ombre, I, 344.
Celuy qui se porte plus modérément enuers le gain, et la perte, il est tousiours
chez soy. Moins il se pique et passionne au ieu, il le conduit d'autant plus auan-
tageusement et seurement, III, 494.
11 est ordinaire, de voir les bonnes intentions, si elles sont conduites sans mo-
dération, pousser les honunes à des elïects tres-vitieux, II, 528.
le vous conseille en vos opinions et en vos discours, autant qu'en vos mœurs, et
en toute autre chose, la modération et l'attrempance, et la fuite de la nouuelleté
et de l'estrangeté. Toutes les voyes extrauagantes me faschent, II, 322.
MODES.
^'os Roys peuuent tout en telles reformations externes : leur inclination y sert
de loy. Le reste de la France prend pour règle la règle de la Cour, I, 498.
le me plains de la particulière indiscrétion, de notre peuple, de se laisser si fort
piper et aueugler à l'authorité de l'vsage présent, qu'il soit capable de changer
d'opinion et d'aduis tous les mois, s'il plaistà la coustume : et qu'il iugesi diuer-
sement de soy-mesme, I, 544.
MŒURS.
La moins dedeignable condition de gents, me semble estre, celle qui par sim-
plesse tient le dernier rang : et nous olfrir vu commei'ce plus réglé. Les mœurs
et les propos des paysans, ie les trouuc communément plus ordonnez selon la
prescription de la vraye philosoi)hie, que ne sont ceux de noz philosophes, II, 518.
Ceux qui ont essaie de r'auiser les mœurs du monde, de mon temps, par nou-
uelles opinions, reforment les vices de l'apparence, ceux do l'essence ils les laissent
là, s'ils no les augmentent. Et l'augmentation y est à craindre, III, 120.
Toute estrangeté et particularité en noz ma'urs et conditions est euitable, comme
ennemie de société, I, 268.
On dict bien-vray, qu'vn honneste homme,- c'est vn homme meslé, 111,454.
Entre nous, ce sont choses en ce monde que i'ay tousiours veuës de singulier
accord : les opinions suporcclestes, et les mœurs sonsterraines, III, 702.
MONDE.
Si nous voyions autant du monde, comme nous n'en voyons pas, nous apperce-
urions, comme il est à croire, vne perpétuelle multiplication et vicissitude de
formes. 11 n'y a rien de seul et de rare, eu esgard à Nature, ouy bien eu esgard à
nostre cognoissance, III, 30 1.
Quand tout ce qui est venu par rapport du passé, iusqucs à nous, seroit vray,
et seroitsceu par quelqu'vn, ce seroit moins que rien, au prix de ce qui est ignoré
III, 304. '
MONTAIGNE (MK.SAdE, moût, etc.).
Si ma fortune m'eust faict naistre pour tenir quelque rang entre les hommes,
j'eusse esté ambitieux de me faire avmer : non de me faire craindre ou admirer,
III, 12 1.
E.222 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Les Princes n'avment guère les discours rernu's. nv moy à faire des comptes.
II, 176.
11 n'y a point d'vtilité, pour laquelle ie me permette de mentir, III, 86.
Ceux qui ont mérité de moy, de l'amitié et de la recognoissance, ne l'ont iamais
perdue pour n'y estre plus : ie les ay mieux payez, et plus soigneusement, absens
et ig:norans. le parle plus affectueusement de mes amis, quand il n'y a plus do
moyen qu'ils le sçachent, III, 474.
le sçay bien ce que ie fuis, mais non pas ce que ie cherche, III, 426.
La médecine se forme par ('\(Miipl(>s (>t expérience : aussi fait mon opinion,
III, 32.
le hay la pauureté à pair de la douleur, III, 392.
le fay peu de part à ma prudence, de ma conduite : ie me laisse volontiers
mener à l'ordre public du monde, II, 508.
l'ay veu quelque fois mes amis appeller prudence en moy, ce qui estoit for-
tune; et estimer aduantage de courage et de patience, ce qui estoit aduantage
de iugement et opinion; et m'attribuer vn tiltre pour autre; tantost à mon gain,
tantost à ma perte, II, 94.
Ma consultation esbauche vn peu la matière, et la considère légèrement pai- ses
l)remiers visages : le fort et principal de la besogne, i'ay accoustumé de le re-
signer au ciel, III, 356.
le pense auoir les opinions bonnes et saines, mais qui n'en croit autant des
siennes? II, 510.
le n'ay point cette erreur commune, de iuger d"vn autre selon que ie suis,
l'en croy aysément des choses diuerses à moy, I, 398.
le suis diuers à cette façon commune : et me défile plus de la suffisance quand
ie la vois accompagnée de grandeur de fortune, et de i-ecommandation po])ulaire,
111,358.
le ne présume les vices qu'après que ie les aye veuz : et m'en fie plus aux
ieunes, que i'estime moins gastez par mauuais exemple, III, 390.
le demande en gênerai les liures qui vsent des sciences, non ceux qui les dres-
sent, I, 74.
Les paroles redites, ont comme autre son, autre sens. Aussi no hay-io poi'-
sonne, III, 598.
le ne cherche aux liures qu'à m'y donner du plaisir par vn honnosto amuse-
ment : ou si i'estudie, ie n'y cherche que la science, qui traicte de la connois-
sance de moy-mesmes, et qui m'instruise à bien mourir et à bien viui-e, II, 62.
l'ayme l'ordre et la netteté, au prix de l'abondance : et regarde chez moy exac-
tement à la nécessité, peu à la parade, III, 394.
le treuue laid, qu'on entretienne ses hostos, du traicteniont (|u'on loin- fait.
autant à l'excuser qu'à le vanter, III, 394.
Les voyages ne me blessent que par la despence, qui est grande, et outn^ hk^s
forces, III, 384.
Qui désirera du bien a son païs comme moy, sans s'en vlcerer ou maigrir, il
sera desplaisant, non pas transi, do le voir menas.sant, ou sa ruine, ou vue durc'o
non moins ruineuse, III, 510.
Absent, ie me despouille de tous tels pensemens : et sentirois moins lors la
ruyne d'vne tour, que ie ne fais présent, la cheute d'vne ardoyse. Mon àme si'
démesle bien ayséement à part, mais en présence, elle souffre, comme celle d'vn
vigneron. Une rené de trauers à mon cheual, vn bout d'estriuiere qui batte ma
iambe, me tiendront tout vn iour en eschec. l'esleue assez mon courage à ren-
contre des inconueniens, les yeux, ie ne puis, III, 392.
Mon élection est d'eschapper, et me desrober à cette tempeste. Qu'il laillo se
cacher, ou suyure le vent : ce que i'estime loisible, quand la raison no -iiidc
plus, III, 470.
l'eschappe. Mais il me dosplaist que ce soit plus par fortune : voire, et par ma
jirudence, que par iustice : et me desplaist d'estre hors la protection des loix,
et soubs auti-e sauuegarde que la leur, III, 414.
Non sans quelque cxcoz, i'estime tous les hommes mes compatriotes : ii em-
brasse vu l'olonois oijiiiuii' vu Fi-ani;ois, postposant cette lyaisou iialit,ii;,le. ,; l'\-
L'ESPRIT DES ESSAIS. MON. E.223
niuerselle et commune. le ne suis guère l'eru de la douceur d'vn air naturel,
III, 428.
Socrates estimoit vne sentence d'exil pire, qu'vne sentence de mort contre soy :
ie ne serav, iamais ny si cassé, ny si estroittement habitué en mon pais, que ie
le feisse, III, 428.
Mon iugement m'empesche bien de regimber et gronder contre les inconue-
nients que Nature m'ordonne à souffrir, mais non i)as de les sentir. le courrois
d'vn bout du monde h l'autre, chercher vu bon an de tranquillité plaisante et
eniouee, nioy, qui n'ay autre fin que viure et me resiouïr, III, 184.
Tout au commencement de mes fleures, et des maladies qui m'atterrent, entier
encores, et voisin de la santé, ie me reconcilie à Dieu, par les derniers offices
Chrestiens. Et m'en trouue plus libre, et deschargé; me semblant en auoir d'au-
tant meilleure raison de la maladie, III, 416.
Il ne me faut rien d'extraordinaire, quand ie suis malade. Ce que Nature ne
peut en moy, ie ne veux pas qu'vn bolus le face, III, 446.
De notaire et de conseil, il m'en faut moins que de médecins. Ce que ie n'au-
ray estabh' de mes affaires tout sain, qu'on ne s'attende point que ie le face
malade. Ce que ie veux faire pour le seruice de la mort, est tousiours faict. h)
n'oserois le dislayer d'vn seul iour. Et s'il n'y a rien de faict, c'est à dire, ou que
le double m'en aura retardé le choix : car par fois, c'est bien choisir de ne choi-
sir pas : ou que tout à faict, ie n'auray rien voulu faire, III, 446.
Engagé dans les auenues de la vieillesse, ce que ie seray doresnauant, ce ne
sera plus qu'vn demy estre : ce ne sera plus moy. le m'eschappe tous les iours,
et me desrobbe à moy, II, 482.
A chaque minute, ie me rechante sans cesse, Tout ce qui peut estre faict vu
autre iour. Je peut estre auiourd'huy. Ce que i'ay affaire auant mourir, pour
l'aciieuer tout loisir me semble court, fust ce œuure d'vne heure, I, 118.
le nu^ garderay, si ie puis, que ma mort die chose, que ma vie n'ayt premiè-
rement dit et apertement, I, 56.
La mort n'est qu'vn instant; mais il est de tel poix, que ie donneroy volontiers
plusieurs iours de uia vie, pour le passer à ma mode, III, 150.
MORT (maux, suicide, vie).
Le pi-emier iour de vostre naissance vous achemine à mourir comme à viure.
Tout ce que vous viués, vous le desrobés à la vie : c'est à ses despens. Le con-
tinuel ouurage de vostre vie, c'est bastir la mort, I, 120.
La mort se mesle et confond par tout à noslre vie : le déclin pra^occupe son
heure, et s'ing(>re au cours de nostre auancement mesme, III, 674.
Faictes place aux autres, comme d'autres vous l'ont faite. L'équalité est la pre-
mière pièce de l'équité. Qui se peut plaindre d'estre comprins où tous sont com-
pi'ins? Aussi auez vous beau viure, vous n'en rabattrez rien du temps que vous
auez à estre mort : c'est pour néant: aussi long temps serez vous en cet estât là,
que vous craingnez, comme si vous estiez mort en nourrisse, I, 128.
Nul ne meurt auant son heure. Ce que vous lais.sez de temps, n'estoit non plus
vosti-e que celuv qui s'est passé auant vostre naissance : et ne vous touche non
plus, I, 128.
Le sault n'est pas si lourd du mal estre au non estre, comme il est d'vn estre
doux et (leurissant, à vn estre pénible et douloureux, I, 124.
Et ce n'est pas la recepte à vne seule maladie, la mort est la recei)te à tous
maux. C'est vn port, tresasseuré, qui n'est iamais à craindre, souuent à recher-
cher, I, 630.
Quelle sottise, de nous peiner, sur le point du passage à l'exemption de toute
peine! I, 142.
La mort, dit-on, nous acquitte de toutes nos obligations. l'en sçay qui l'ont
prins en diuersc façon, I, 54.
Elle s'appesantit souuent en nous, de ce qu'elle poise aux autres : et nous inttV
resse de leur iutcrest, quasi autant que du nostre : et plus et tout par fois. III, 152.
E.224 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Nous i)onsons tousiours ailleurs quand elle vient : l'espérance d'vne meilleure
vie nous arreste et appuyé : ou l'espérance de la valeur de nos enfans : ou la
gloire future de nosti'e nom : ou la iuitte des maux de cette vie : ou la veniioaurc
qui menasse ceux qui nous causent la mort, III, 160.
La mort ne se sent que par le discours, d'autant que c'est le mouuement d'vu
instant. Mille bestes, mille hommes sont plustost moi'ts, que menasses, I, lôJ.
La mort est moins à craindre que rien, s'il j- auoit quelque chose de moins,
que rien. Elle ne vous concerne ny mort ny vif. Vif, par ce que vous estes :
mort, par ce que vous n'estes jtlus, I, 1^8.
Combien a la mort de façons de surprise? Ces exemples si fréquents et si or-
dinaires nous passans deuant les yeux, comme est-il possible qu'on se iiuissc
delï'aire du pensement de la mort, et qu'à chasque instant il ne nous semble
qu'elle nous tienne au collet? Qu'impoi'te-il, me dirc/î vous, comment que ce soit,
pourueu qu'on ne s'en donne point de peine? Tout cela est beau : mais aussi
quand elle arriue, ou à eux ou à leurs femmes, enfans et amis, les surprenant en
dessoude et au descouuert, quels tourments, quels cris, quelle rage et quel de-
sespoir les accable? Vistes vous iamais rien si rabaissé, si changé, si confus? 11
y faut prouuoir de meilleure heure : et cette nonchalance bestiale, quand elle
pourroit loger en la teste d'vn Jiomme d'entendement, ce que ic trouue entière-
ment impossible, nous vend trop cher ses denrées, I, 111.
Les ieunes et les vieux laissent la vie de mesme condition. Nul n'en sort au-
trement que si tout présentement il y entroit, ioinct qu'il n'est Iiomme si (li'crc-
pite tant qu'il voit Mathusalem deuant, qui ne pense auoir encore vingt ans dans
le corps, I, 112.
Quand nous iugeons de l'asseurance d'autruy en la mort, il se l'aut prendre
garde d'vne chose, que mal-aisément on croit estre arriué à ce poinct. Peu de
gens meurent résolus, que ce soit leur heure dernière, II, 420.
Or de iuger la resolution et la constance, en celuy qui ne croit pas encore cer-
tainement estre au danger, quoy qu'il y soit, ce n'est pas raison : et ne suffit
pas qu'il soit mort en cette desmarche, s'il ne s'y estoit mis iustement pour cet
effect, II, 422.
La veue esloignee de la mort aduenir, a besoing d'vne fermeté lente, et diffi-
cile par conséquent à fournir. Si vous ne sçauez pas mourir, ne vous chaille.
Nature vous en informera sur le champ, plainement et suffisamment; elle fera
exactement cette besongne pour vous, n'en empeschez vostre soing, III, 574.
Nous faisons trop de cas de nous. Il semble que l'vniuersité des choses souffre
aucunement de nostre anéantissement, et qu'elle soit compassionnée à nostre estât.
II, 420.
Et n'est rien dequoy ie m'informe si volontiers, que de la mort des liomnies :
quelle parole, quel visage, quelle contenance ils y ont eu : ny endroit des his-
toires, que ie remarque si attentifuement. Si i'estoy faiseur de liur.es, ie feroy
vn registre commenté des morts diuerses : qui apprendroit les hommes à mou-
rir, leur apprendroit à viure, I, 120.
Comme la vie n'est pas la meilleure, pour estre longue, la mort est la meil-
leure, pour n'estre pas longue, III, 426.
La plus souhaitable est la moins préméditée et la plus coui'tc, II, 42 1.
Tout ainsi que les choses nous paroissent souuent plus grandes de loing que
de près : i'ai trouué que sain i'auois eu les maladies beaucoup plus en horreur,
que lors que ie les ay senties. Par imagination ie gi'ossis ces incommoditez de la
moitié, et les conçoy plus poisantes, que ie ne les trouue, quand ie les ay sur les
espaules. l'e-spere qu'il m'en aduiendra ainsi de la mort, I, 122.
le croy à la vérité que ce sont ces mines et appareils effroyables, dequoy nous
l'entournons, qui nous font plus de peur qu'elle : vne toute nouuelle forme de
viure : les cris des mères, des femmes, et des enfans : la Visitation des personnes
i^stonnees, et transies : l'assistance d'vn nombre de valets pasles et éplorés : vne
chambre sans iour : des cierges allumez : nostre cheuet assiégé de médecins et
de prescheurs : somme tout horreur et tout effroy autour de nous. Nous voyla
des-ia enseuelis et enterrez. Les enfans ont i>eur de leurs amis mesmes quand ils
les voyent masquez; aussi auons nous. 11 faut oster le masque aussi bien des
I/ESPRIT DES ESSAIS. MOR. E.225
choses, que des personnes. Osté qu'il sera, nous ne irouuerons au dossoubs, que
cette mesme mort, qu'vn valet ou simple chambrière passèrent dernièrement
sans peur. Heureuse la mort qui oste le loisir aux apprests de tel équipage! I, 132.
Quoique la philosophie nous conduise aussi à mespriser la douleur, la pauureté,
et autres accidens, à quoy la vie humaine est subiecte, ce n'est pas d'vn pareil
seing : ces accidens ne sont pas de telle nécessité, la pluspart des hommes pas-
sent leur vie sans gouster de la pauureté, et tels encore sans sentiment de dou-
leur et de maladie, et au pis aller, la mort peut mettre fin, quand il nous plaira,
et coupper broche à tous autres inconuenients, tandis que la mort est ineuitable;
par conséquent, si elle nous faict peur, c'est vn subiect continuel de tourment,
et qui ne se peut aucunement soulager. 11 n'est heu d'où elle ne nous vienne,
I, 110.
Pourquoy craindrions nous de perdre vne chose, laquelle perdue ne peut estre
regrettée? Puis que nous sommes menacez de tant de façons de mort, que chaut-
il, quand ce soit, puis qu'elle est ineuitable? Quelle sottise, de nous peiner, sur
le point du passage à l'exemption de toute peine? Comme nostre naissance nous
apporta la naissance de toutes choses : aussi fera la mort de toutes choses, nostre
mort. Parquoy c'est pareille folie de pleurer de ce que d'icy à cent ans nous ne
viurons pas, que de pleurer de ce que nous ne viuions pas, il y a cent ans. La
mort est origine d'vne autre vie : ainsi pleurasmes nous, et ainsi nous cousta-il
d'entrer en cette-cy. Rien ne peut estre grief, qui n'est qu'vne fois. Est-ce raison
de craindre si long temps, chose de si brief temps? Le long temps viure, et le
peu de temps viure est rendu tout vn par la mort; Car le long et le coui't n'est
point aux choses qui ne sont plus, I, 124.
L'extrême degré de traittcr courageusement la mort, et le plus naturel, c'est
la veoir, non seulement sans estonnement, mais sans soucy : continuaht libre le
train de la vie, iusques dedans elle, II, 550.
Nul ne se peut dire estre résolu à la mort, qui craint à la marchander, qui
ne peut la soutenir les yeux ouuerts, II, 424.
Quelquefois la fuitte de la mort, faict que nous y courons : Comme ceux qui
de peur du précipice s'y lancent eux-mesmes, I, 634,
A combien peu, tient la resolution au mourir? La distance et différence de
quelques heures : la seule considération de la compagnie, nous en rend l'ap-
préhension diuerse, III, 5(38.
Pour euiter vne pire mort, il y en a qui sont d'aduis de la prendre à leur
poste, I, 638.
Les tyrans Romains pensoient donner la vie au criminel, à qui ils donnoient
le choix de sa mort, III, 452.
Le but de nostre carrière c'est la mort, c'est l'obiect nécessaire de nostre
visée : si elle nous effraye, comme est-il possible d'aller vn pas auant sans fiebure?
Le remède du vulgaire c'est de n'y penser pas. Mais de quelle brutale stupidité
luy peut venir vn si grossier aueuglement? I, 112.
On se peut par vsage et par expérience fortifier contre les douleurs, la honte,
l'indigence, et tels autres accidens : mais quant à la mort nous ne la pouuons
essayer qu'vne fois : nous y sommes tous apprentifs, quand nous y venons, I, 66'4.
Ce n'est pas sans raison qu'on nous fait regarder à nostre sommeil mesme,
pour la ressemblance qu'il a de la mort. Combien facilement nous passons du
veiller au dormir, auec combien peu d'intcrest nous perdons la connoissance de
la lumière et de nous! A l'aduenture pourroit sembler inutile et contre Nature
la faculté du sommeil, qui nous priue de toute action et de tout sentiment, n'es-
toit que par iceluy Nature nous instruict, qu'elle nous a pareillement faicts pour
mourir, (|^ue pour viure, et dés la vie nous présente l'éternel estât qu'elle nous
garde après icelle, pour nous y accoustumer et nous en oster la crainte, I, 666.
Nous troublons la vie par le soing de la mort. Vn quart d'heure de passion sans
conséquence, sans nuisance, ne mérite pas des préceptes particuliers, III, 574.
Toute mort doit esti-e de mesmes sa vie. Nous ne deuenons pas autres pour
mourir. l'interprète tousiours la mort par la vie. Et si on m'en récite quelqu'vne
forte par apparence, attachée à vne vie foible : ie tiens qu'ell' est produitte de
cause foible et sortable à sa vie, II, 90.
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 15
E.226 ESSAIS DE MONTAIGNE.
La mort a des formes plus aisées les vnes que les autres, et prend diuerses
qualité/, selon la fantasie de chacun, III, 450.
Il n'y a pas beaucoup de mal de mourir de loing, et à part. Si estimons nous
à deuoir de nous retirer pour des actions naturelles, moins disgratiées que cette-
cy, et moins hideuses. Ceux qui en viennent là, de traîner languissans vn long
espace de vie, ne deuroient à l'aduanture souhaiter, d'empescher de leur misère
vne grande famille. A qui ne se rendent-ils en fin ennuyeux et insupportables?
les offices communs n'en vont point iusques là. Vous apprenez la cruauté par
force, à vos meilleurs amis : durcissant et femme et enfans, par long vsage, à ne
sentir et plaindi-e plus vos maux. Et quand nous tirei-ions quelque plaisir de leur
conuei-sation (ce qui n'aduiont pas tousiours, i)Our la disparité des conditions),
n'est-ce pas trop, d'en abuser tout vn aage? Plus ie les verrois se contraindre
de bon cœur pour mo\', plus ie plaindrois leur peine. Nous auons loy de nous
appuyer, non pas de nous coucher si lourdement sur autru}- : et nous estayer
en leur ruyne. La décrépitude est qualité solitaire, III, 446.
Si ie craingnois de mourir en autre lieu, que celuy de ma naissance : si ie
pensois mourir moins à mon aise, esloingné des miens : à peine sortiroy-ie hors
de France, ie ne sortirois pas sans elïroy hors de ma paroisse. Mais la mort
m'est vne par tout. Si toutesfois i'auois à choisir : ce seroit plustost hors de ma
maison, et loing des miens. 11 y a plus de creuecœur que de consolation, à
prendre congé de ses amis. Des offices de l'amitié,, celuy-là est le seul desplai-
sant : et oublierois ainsi volontiers à dire ce grand et éternel adieu. S'il se tire
quelque commodité de cette assistance, il s'en tire cent incommoditez. l'ay veu
plusieurs mourans bien piteusement, assiégez de tout ce train; cette presse les
estoufïe. C'est contre le deuoir, et est tesmoignage de peu d'affection, et de peu
de soing, de vous laisser mourir en repos. L'vn tourmente vos yeux, l'autre vos
oreilles, l'autre la bouche : il n'y a sens, ny membre, qu'on ne vous fracasse. Le
cœur vous serre de pitié, d'ouïr les plaintes des amis; et de despit à l'aduanture,
d'ouïr d'autres plaintes feintes et masquées, III, 438.
Lors de ma santé, ie plains les malades beaucoup plus, que ie ne me trouue
à plaindre moy-mesme, quand l'en suis; la force de mon appréhension enchérit
près de moitié l'essence et vérité de la chose. l'espere qu'il aduiendra de mesme
de la mort, I, 668.
Ceux qHi'on void défaillans de foiblesse, en l'agonie de la mort, ie tiens que
nous les plaignons sans cause, estimans qu'ils soyent agitez de griéues douleurs,
ou auoir l'ame pressée de cogitations pénibles. C'a esté tousiours mon aduis,
contre l'opinion de plusieurs, que ceux que nous voyons ainsi renuei-spz et as-
soupis auoient et l'ame et-le corps enseueli, et endormy : et que par ainsin ils
n'auoient aucun discours qui les tourmentast, et qui leur pcust faire iuger et
sentir la misère de leur condition, et que par conséquent, ils n'estoient pas fort
a plaindre, I, 670.
le me contente d'vne mort recueillie en soy, quiète, et solitaire, toute mienne,
conuenable à ma vie retirée et priuée. Au rebours de" la superstition Romaine, où
on estimoit malheureux, celuy qui n'auoit ses plus proches à luy clorre les yeux,
l'ay assez affaire à me consoler, sans auoir à consoler autruy ; assez de pensées
en la teste, sans que les circonstances m'en apportent de nouuelles : et assez de
matière à m'entretenir, sans l'emprunter. Cette partie n'est pas du rolle de la
société : c'est l'acte à vn seul personnage. Viuons et rions entre les nostres, al-
lons mourir et rechigner entre les inconnuz. On trouue en payant, qui vous
tourne la teste, et qui vous frotte les pieds : qui ne vous presse qu'autant que
vous voulez, vous présentant vn visage indiffèrent, vous laissant vous gouuerner,
et plaindre à vostre mode. le me deffais tous les iours par discours, de^cette hu-
meur puérile et inhumaine, qui faict que nous desirons d'esmouuoir par nos
maux, la compassion et le dueil en nos amis. Nous faisons valoir nos inconue-
niens outre leur mesure, pour attirer leurs larmes. Et la fermeté que nous louons
en chacun, à soustenir sa mauuaise fortune, nous l'accusons et reprochons à nos
proches, quand c'est en la nostre. Nous ne nous contentons pas qu'ils se ressen-
tent de nos maux, si encores ils ne s'en affligent. Il faut estendre la ioye, mais
retrancher autant qu'on peut la tristesse, III, 410.
L'ESPRIT DES ESSAIS. MOR. E.227
Mourir de vieillesse, c'est vne mort rare, singulière et extraordinaire, et d'au-
tant moins naturelle que les autres : c'est la dernière et extrême sorte de mou-
rir : c'est bien la borne, au delà de laquelle nous n'irons pas, et que la loy de
Nature a prescript, pour n'estre point outre-passée : mais c'est vn sien rare pri-
uilege de nous faire durer iusques là. C'est vue exemption qu'elle donne par
faueur particulière, à vn seul, en l'espace de deux ou trois siècles, I, 590.
Celuy qui meurt en la meslee, les armes à la main, il n'estudie pas lors la mort,
il ne la sent, ny ne la considère : l'ardeur du combat l'emporte, III, 166.
C'est vne généreuse enuie, de vouloir mourir mesme vtilement et virilement :
mais l'efloct n'en gist pas tant en nostre bonne resolution qu'en nostre bonne
fortune. Mille ont proposé de vaincre, ou de mourir en combattant, qui ont failli
à l'vn et à l'autre : les blessures, les prisons, leur trauersant ce dessein, et leur
prestant vne vie forcée. 11 y a des maladies, qui atterrent iusques à noz désirs,
et nostre cognoissance, II, 5 16.
Pourquoy crains-tu ton dernier iour? Il ne confère non plus à ta mort que
chascun des autres. Le dernier pas ne faict pas la lassitude : il la declaire. Tous
les iours vont à la mort : le dernier y arriue, I, 130.
Les faneurs et disgrâces de la fortune ne tiennent rang, ny d'heur ny de mal- •
heur, et sont les grandeurs, et puissances, accidens de qualité à peu près in-
dilfrrente : le bon-heur de nostre vie dépend de la tranquillité et contentement
d'vn esprit bien né, et de la resolution et asseurance d'vne ame réglée et ne se
doit iamais attribuer à l'homme, qu'on ne luy ayt veu ioiier le dernier acte de
sa comédie : et sans doute le plus difficile, I, 104.
Il est certain, qu'à la plupart, la préparation à la mort, a donné plus de tor-
ment, que n'a faict la souffrance. Le sentiment de la mort présente, nous anime
l)ar fois de soy mesme, d'vne prompte resolution, de no plus euiter chose du
tout ineuitable, III, 572. •
En tout le reste il y peut auoir du masque : mais à ce dernier rolle de la mort
et de nous, il n'y a plus que faindre, il faut parler François; il faut montrer ce
qu'il y a de bon et de net dans le fond du pot. Voyla pourquoy se doiuent à ce
dernier Iraict toucher et espi'ouuer toutes les autres actions d(> nostre vie. C'est
le maistre iour, c'est le iour iugc de tous les autres, II, 101.
On a tort, de dire, celuy-là craint la mort, quand il veut exprimer, qu'il y
songe, et qu'il la preuoit. La preuoyance conuient egallement à ce qui nous
touche en bien et en mal. Considérer et iuger le danger, est aucunement le re-
bours de s'en estonner, III, 290.
Si nous auons sçeu viure, constamment et tranquillement, nous sçaurons mou-
rir de mesme, III, 571.
La vie desi)end de la volonté d'autruy, la mort do la nostre, I, 630.
NATURE (puii.osopiue)-
Tout ce qui est sous le ciel, dit le sage, court vne loy et fortune pareille. Il y
a quelque différence, il y a des ordres et des degrez : mais c'est soubs le visage
d'vne mesme nature, II, 150.
Toutes choses, dit Platon, sont produites ou par la nature, ou par la fortune,
ou par l'art. Les plus grandes et plus belles par l'vne ou l'autre des deux pre-
mières : les moindres et imparfaictes par la dernière, I, 360.
Nature est vn doux guide : mais non pas plus doux, que prudent et iuste, III,
098.
Nous ne sçaurions faillir à suiure Nature : le souuerain précepte, c'est de se
conformer à elle, III, 590.
Oui se présente comme dans vn tableau, cette grande image de nostre mère
nature, en son entière maiesté : qui remarque en son visage, vne si générale et
constante variété, et non soy, celuy-là seul estime les choses selon leur iuste gran-
deur, I, 252.
Ce que toute la philosophie ne peut planter en la teste des plus sages, ne l'ap-
prend elle pas de sa seule ordonnance au plus grossier vulgaire? I, 1^.
Nature a maternellement obserué cela, que les actions qu'elle nous a enioinctes
E.228 ESSAIS DE MONTAIGNE.
pour nostre besoing, nous fussent aussi voluptueuses. Et nous j- conuie, non
seulement par la raison : mais aussi par l'appétit : c'est iniustice de corrompre
ses règles, III, 686.
Les cupiditez sont ou naturelles et nécessaires, comme le boire et le manger;
ou naturelles et non nécessaires, comme l'accointance des femelles; ou elles ne
sont ny naturelles ny nécessaires : de cette dernière sorte sont quasi toutes celles
des hommes, ollos sont toutes superflues et artificielles. Car c'est merueille com-
bien peu il faut à Nature pour .se contenter, combien peu elle nous a laissé à
désirer. Ces cupiditez estrangeres, que l'ignorance du bien, et vue fauce opinion
ont coulées en nous, sont en si grand nombre, qu'elles chassent presque toutes
les naturelles, II, 174.
Nostre bastiment et public et priué, est plein d'imperfection : mais il n'y a rien
d'inutile en Nature, non pas l'inutilité mesmes, rien ne s'est ingéré en cet vni-
uers, qui n'y tienne place opportune, III, 80.
Nous appelions contre Nature, ce qui adulent contre la coustume. Rien n'est
que selon elle, quel qu'il soit. Que cette raison vniuerselle et naturelle, chasse de
nous l'erreur et l'estonnement que la nouuelleté nous apporte, II, 606.
NOBLESSE (noms).
La noblesse est vne belle qualité, et introduite auec raison : mais d'autant que
c'est vne qualité dépendant d'autruy, et qui peut tomber en vn homme vicieux
et de néant, elle est en estimation bien loing au dessoubs de la vertu. La science,
la force, la bonté, la beauté, la richesse, toutes autres qualitez, tombent en com-
munication et en commerce : cette-cy se consomme en soy, de nulle emploite au
seruice d'autruy, III, 196.
De mon temps ie n'ay veu personne esleué par la fortune à quelque grandeur
extraordinaire, à qui on n'ait attaché incontinent des filtres généalogiques, nou-
ueaux et ignorez à son père, et qu'on ait anté en quelque illustre tige. Et de
bonne fortune les plus obscures familles, sont plus idoynes à falsification. Com-
bien auons nous de Gentils-hommes en France, qui sont de Royalle race selon
leurs comptes? plus ce crois-ie que d'autres, I, 512.
Contentez vous de par Dieu, de ce dequoy nos pères se sont contentez : et de
ce que nous sommes; nous sommes assez si nous le sçauons bien maintenir : ne
desaduouons pas la fortune et condition de nos ayeulx, I, 512.
NOMS (noblesse).
C'est vn vilain vsage et de tres-mauuaise conséquence en nostre France, d'ap-
peller chacun par le nom de sa terre et Seigneurie, et la chose du monde, qui
faict plus mesler et mescognoistre les races, I, 512.
le sçay bon gré à Jacques Amiot d'auoir laissé dans le cours d'vn' oraison
Fj-ançoise, les noms Latins tous entiers, sans les bigarrer et changer, pour leur
donner vne cadence Françoise, I, 510.
NOUVEAUTÉ.
le suis desgousté de la nouuelleté, quelque visage qu'elle porte; et ay raison,
car i'en ay veu des effects très-dommageables, I, 178.
Quand il se présente à nous quelque doctrine nouuelle, nous auons grande oc-
casion de nous deffier, et de considérer qu'auant qu'elle fust produite, sa con-
traire estoit en vogue :et comme elle a esté renuersée par cette-cy, il pourra nais-
tre à l'aduenir vne tierce inuention, qui choquera de mesme la seconde, II, 356.
OBÉISSANCE.
L'obeyssance n'est iamâis pure nv tranquille en celuy qui raisonne et qui
plaide, II, 508.
L'ESPRIT DES ESSAIS. OBE. E.229
Nous nous soustrayons si volontiers du commandement sous quelque prétexte,
et vsurpons sur la niaistrise : chascun aspire si naturellement à la liberté et au-
thorité, qu'au supérieur nulle vtilité ne doibt estre si chère, venant de ceux qui
le seruent, comme luy doit estre chère leur simple et naifue obéissance, I, 96.
On corrompt l'office du commander, quand on y obéit par discrétion, non par
subietion. Pourtant cette obéissance si contreinte, n'appartient qu'aux comman-
dements précis et prefix. l'ay veu en mon temps des personnes du commande-
ment, reprins d'auoir plustost obey aux paroles des lettres du Roy, qu'à l'occa-
sion des affaires qui estoient près d'eux, I, 90.
ODEURS.
La commune façon des corps et la meilleure condition qu'ils ayent, c'est d'estre
exempts de senteur. La douceur mesme des haleines plus pures, n'a rien de plus
parfaict, que d'estre sans aucune odeur, qui nous offence : corne sont celles des
enfans bien sains. La plus exquise senteur d'vne femme, c'est ne sentir rien, 1, 574.
Les médecins pourroient, ce crois-ie, tirer des odeurs, plus d'vsage qu'ils ne
font : car i'ay souuent apperçeu qu'elles me changent, et agissent en mes esprits,
selon qu'elles sont, I, 576.
OPINION.
L'opinion est vne puissante partie, hardie, et sans mesure, I, 462.
Il se faut garder de s'attacher aux opinions vulgaires, et les faut iuger par la
voye de la raison, non par la voix commune, I, 354.
Quasi toutes les opinions que nous auons, sont prinses par authorité et à cré-
dit. III, 51(;.
Nos opinions ë'entent les vnes sur les autres. La première sert de tige à la se-
conde :1a seconde à la tierce. Nous eschellons ainsi de degré en degré. Et aduient
de là, que le plus monté, a souuent plus d'honneur, que de mérite. Car il n'est
monté que d'vn grain, sur les espaules du penultime, III, 608.
Nostre opinion donne prix aux choses ; pour les estimer, nous ne considérons
ny leurs qualitez, ny leurs vtilitez, mais seulement nostre coust à les recouurer : et
appelions valeur en elles, non ce qu'elles apportent, mais ce que nous y appor-
tons, 1,416.
La diuersité des opinions, que nous auons des choses, montre clairement qu'elles
n'entrent en nous que par composition, I, 442.
Et ne fut Jamais au monde, deux opinions pareilles, non plus que deux poils,
ou deux grains. Leur plus vniuerselle qualité, c'est la diuersité, III, 76.
Nous tenons la mort, la pauureté et la douleur pour nos principales parties. Or
cette mort que les vns appellent des choses horribles la plus horrible, qui ne
sçait que d'autres la nomment l'vnique port dos tourmens de cette vie? le souue-
rain bien de nature? .seul appuy de nostre liberté? et commune et prompte re-
cepte à tous maux ? Et comme les vns l'attendent tremblans et effrayez, d'autres
la supportent plus aysement que la vie, I, 442.
L'aisance et l'indigence despendent de l'opinion d'vn chacun, et non plus la ri-
chesse, que la gloire, que la santé, n'ont qu'autant de beauté et de plaisir, que leur
en preste celuyqui les possède. Chascun est bien ou mal, selon qu'il s'en trouue, 1,474.
11 n'est rien à quoy communément les hommes soyent plus tendus, qu'à don-
ner voye à leurs opinions. Où le moyen ordinaire nous faut, nous y adioustons,
le commandement, la force, le fer, et le feu. Il y a du mal'heur, d'en estre là, que
là meilleure touche de la vérité, ce soit la multitude des croyans, en vne presse
où les fols surpassent de tant, les sages, on nombre, III, 530.
C'est chose difficile de resouldre son iugement contre les opinions communes.
La première persuasion prinse du subiect mesme, saisit les simples : de là elle
s'espand aux habiles, soubs l'authorité du nombre et ancienneté des tesmoi-
gnages. Pour moy, de ce que ie n'en croii'ois pas vn, ie n'en croirois pas cent
vns. Et ne luge pas les opinions, par les ans, III, 530.
B 230 ESSAIS DE MONTAIGNE.
PARENTÉ.
C'est il lii vcritc vn beau nom, et plein de clilcction i|uc le nom (h; {wni, I, oCK).
Le père et le (ils peiuienl cstrc de complexion entièrement eslongnec, et les
frères aussi. C'est mon (ils, c'est mon parent : mais c'est vn homme Carouche, vn
mescliant, ou vn sot, I. î^XJ.
l'ayme Paris tendrement, iusques à ses verrues et à ses taches : elle e.st la
gloire de la France, et l'vn des plus nobles ornements du monde. Dieu en chasse
loing nos diuisions : entière et vnie, ie la trouue delTendue de toute autre vio-
lence. De tous les partis, le pire sera celuy qui la mettra en discorde. Et ne crains
l>our elle, qu'elle mcsme, III, 128.
l'AROLE.
La parole est moitié à celuj' qui parle, moitié à celuj- qui l'escoute, III, 646.
Il n'e.*;t aucun sens nj' visage, ou droict, ou amer, ou doux, ou courbe, que l'es-
prit humain ne trouue aux escrits, qu'il entrej)rend de fouiller. En la parole la
plus nette, pure et parfaicte, qui puisse estre, combien de fauceté et de men-
songe a Ion faict naistrc? III, 386.
PAROLE DONNÉE.
Le neud, qui me tient par la loy d'honncstetc, me semble bien plus pressant et
])lus poisant, que n'est celuy de la contrainctc ciuile. On me garotte plus douce-
ment par vn notaire, que par moy, III, 116.
Nous ne pouuons estre tenus au delà de nos forces et de nos moyens. A cette
cause, par ce que les elïects et exécutions ne sont aucunement en nostre puis-
sance, et qu'il n'y a l'ien en bon escient en nostre puissance, que la volonté : en
celle là se fondent par nécessité et s'establissent toutes les règles du dcuoir de
l'homme, I, 5L
On nous propose cet exemple, pour faire prcualoir l'vtilité priuee, à la foy don-
née. Des voleui's vous ont prins, ils vous ont remis on liberté, ayans retiré de
vous serment du paiement de certaine somme. Vn homme de bien, sera il quitte
de sa foy, sans payer, estant hors de leurs mains? 11 n'en est rien. Ce que la
crainte m'a fait vne fois vouloir, ie suis tenu de le vouloir encore sans crainte.
Et quand elle n'aura forcé que ma langue, sans la volonté : encore ie suis tenu
de faire la maille bonne de ma parole. Autrement de degré en degré, nous vien-
drons à abolir tout le droit qu'vn tiers prend de nos promesses. En cecy seule-
ment a loy, l'interost priué, de nous excuser de faillir à nostre promesse, si nous
auons promis chose meschante, et inique de soy. Car le droit de la vertu doibt
preualoir le droit de nostre obligation, III, KW.
Ceux qui par le vice de la mauuaise honte, sont mois et faciles, à accorder quoy
qu'on leur demande, sont faciles après à faillir de .parole, et à, se desdire, 111,514.
PASSIONS.
L'ameen ses passions se pipe plustost elle mesme, se dressant vn faux subiect
i!t fantastique, voire contre sa propi'e créance, que de n'agir contre quelque
chose, I, 42.
Qui ne sçait leur fermer la porte, ne les chassera pas entrées, III, 510.
Les passions qui sont toutes en l'ame, comme l'ambition, l'auarice, et autres,
donnent l)ien plus à faire à la raison : que celles qui tiennent au corps et à-
l'ame, laquelle n'y peut estre secourue, que de ses propres moyens : ny ne sont
ces appétits là, capables de satiété : voire ils s'esguisent et augmentent par la
iouyssance, II, 631.
Toutes passions qui se laissent gouster, et digérer, ne sont que médiocres,!, 26.
L'ESPRIT DES ESSAIS. VÈD. E.231
PÉDANTISME.
l'ayme et honore le sçauoir, autant que ceux qui l'ont. Et on son vray vsagc,
c'est le plus noble et puissant acquest des hommes. Mais en ceu.x, et il en est vn
nombre infiny de ce genre, qui en establissent leur fondamentale suffisance et
valeur : ie le hay, alors si ie l'ose dire, vn peu plus que la bostise. En mon pays,
et de mon temps, il amande assez les bourses, nullement les âmes, III, 3 li.
PEINE (punition).
La peine suit de bien prés le pech6 : elle naist en l'instant et quant et quant le
peclic luy mesme, I, 658.
Quiconque attent la peine, il la souffre, et quiconque l'a méritée, l'attend, 1, 6<30.
PÉNITENCE.
A qui le ieune aiguiseroit la santé et l'allégresse, ce ne seroit plus recepte salu-
taire : non plus qu'en l'autre médecine, les drogues n'ont point d'effectà l'en-
droit de celuy qui les prent auec appétit et plaisir, I, 350.
PENSÉES.
Nous empeschons noz pensées du gênerai, et des causes et conduittes vniuer-
selles : qui se conduisent trosbien sans nous : et laissons en arrière nostre faict :
et Michel, qui nous touche encore de plus près que l'homme, III, 388.
PÈRES.
le ne vis iamais perc, pour bosse ou teigneux que fust son fils, qui laissast de
l'aduoiier : non pourtant, s'il n'est du tout enyuré de cet' affection, qu'il ne s'ap-
perçoiue de sa défaillance : mais tant y a qu'il est sien, I, 226.
le veux mal à cette coustume, d'interdire aux enfants l'appellation paternelle,
et leur en e«ioindre vn' estrangere, comme plus reuerentiale, II, 32.
C'est aussi folie et iniustice de priuer les enfans qui sont en aage, de la fami-
liarité des pères, et vouloir maintenir en leur endroit vne morgue austère et des-
daigncuse, espérant par là, les tenir en crainte et obéissance. C'est vne farco
tres-inutile, qui rend les percs ennuieux aux enfans, et qui pis est, ridicules. Ils
ont la ieunesse et les forces en la main, et par conséquent le vent et lafaueur du
monde; et reçoiuent auecques mocqucrie, ces mines fieres et tyranniques, d'vn
homme qui n'a plus de sang, ny au cœur, ny aux veines : vrais espouuantails
de cheneuiere, II, 32.
Vn père est bien misérable, qui ne tient l'affection de ses enfans, que par le
besoin qu'ils ont de son secours, si cela se doit nommer affection : il faut se
rendre respectable par sa vertu, et par sa suffisance, et ayn.able par sa bonté
et douceur de ses mœurs, II, 24.
Voulons nous estre aymez de nos er^fans? leur voulons nousoster l'occasion de
souhaiter nostre mort 1 accommodons leur vie raisonnablement, de ce qui est en
nostre puissance, II, 26.
le treuue que c'est cruauté et iniustice de ne les receuoir au partage et société
de noz biens, et compagnons en l'intelligence de nOz affaires domestiques, quand
ils en sont capables, et de ne retrancher et resserrer noz commoditez pour
prouuoir aux leurs, puis que nous les auons engendrez à cet effect, II, 22.
Vn père attern; d'années et de maux, priué par sa foiblesse et faute de santé,
de la commune société des hommes, il se faict tort, et aux siens, de couuer inu-
tilement vn grand tas de richesses. Il est assez en estât, s'il est sage, pour auoir
désir de se despouiller pour se coucher, non pas iusques à la chemise, mais
iusques à vne robbe de nuict bien chaude : le reste des pompes, dequoy il n'a
E.232 ESSAIS DE MONTAIGNE.
plus que faire, il doit en estrener volontiers ceux, à qui par ordonnance natu-
relle cela doit appartenir. C'est raison qu'il en laisse l'vsage, puis que Nature l'en
priue : autrement sans doute il y a de la malice et de l'enuie, II, 28.
PEUPLES.
Les peuples nourris à la liberté et à se commander eux mesmes, estiment toute
autre forme de police monstrueuse et contre nature. Ceux qui sont duits à la
monarchie en font de mesme. Et quelque facilité que leur preste fortune au
changement, lors mesme qu'ils se sont auec grandes difficultez deffaitz de l'im-
portunité d'vn maistre, ils courent à en replanter vn nouueau auec pareilles dif-
ficultez, pour ne se pouuoir résoudre de prendre en haine la maistrise, III, 170.
C'est merueille que Tindiscrette et prodigieuse facilité des peuples, à se laisser
mener et manier la créance et l'espérance, où il a pieu et seruy à leurs chefs :
par dessus cent mescomtes, les vns sur les autres : par dessus les fantosmes, et
les songes. Leur sens et entendement, est entièrement estouffé en leur passion.
Leur discrétion n'a plus d'autre choix, que ce qui leur rit, et qui conforte leur
cause : c'est vne qualité inséparable des erreurs populaires. Apres la première qui
part, les opinions s'entrepoussent, suiuant le vent, comme les flotz. On n'est pas
du corps, si on s'en peut desdire : si on ne vague le train commun, III, 504
PEUR.
C'est ce dequoy i'ay le plus de peur que la peur. Aussi surmonte elle en aigreur
tous les autres accidents, I, 100.
La peur naist par fois de faute de iugement, comme de faute de cœur, II, 288.
Il n'est rien qui nous iette tant aux dangers, qu'vne faim inconsidérée de nous
en mettre hors, III, 290.
Ceux qui sont en pressante crainte de perdre leur bien, d'estre exilez, d'estre
subiuguez, viuent en continuelle angoisse, en perdent le boire, le manger, et le
repos; là où les panures, les bannis, les serfs viuent souuent aussi ioyeusement
que les autres. Tant de gens, qui de l'impatience des pointures de la peur, se sont
pendus, noyez, et précipitez, nous ont bien apprins qu'elle est encores plus im-
poi'tune et plus insupportable que la mort, I, 100.
le ne suis pas bon naturaliste et ne sçai guiere par quels ressors la peur agit
en nous, mais tant y a que c'est vne estrange passion : et disent les Médecins
qu'il n'en est aucune, qui emporte plustost nostre iugement hors de sa deuë as-
siete, I, 98.
Les Grecs en recognoissent vne autre espèce, qui est outre l'erreur de nostre
discours : venant, disent-ils, sans cause apparente, et d'vne impulsion céleste. Des
peuples entiers s'en voyent souuent frappez, et des armées entières, lis nomment
cela terreurs Paniques, I, 102.
PHILOSOPHIE, VÉRITÉ.
Quiconque cherche quelque chose, il en vient à ce poinct, ou qu'il dit, qu'il
l'a trouuée; ou qu'elle ne se peut trouuer; ou qu'il en est encore en queste. Toute
la Philosophie est despartie en ces trois genres. Son dessein est de chercher la
science, et la certitude. Les Peripateticiens, Epicuriens, Stoïciens, et autres, ont
pensé l'auoir trouuée : ils ont estably les sciences, que nous auons, et les ont
traictées, comme notices certaines. Les Académiciens ont désespéré de leur queste ;
et iugé que la vérité ne se pouuoit conceuoir par nos moyens. La fin de ceux-cy,
c'est la foiblesse et humaine ignorance. Ce party a eu la plus grande suitte, et
les sectateurs les plus nobles. Les Sceptiques ou Epechistes disent, qu'ils sont
encore en cherche de la vérité. Ils iugent, que ceux-là qui pensent lauoir trouuée,
se trompent infiniement; et qu'il y a encore de la vanité trop hardie, en ce se-
cond degré, qui asseure que les forces humaines ne sont pas capables d'y attein-
dre. Car cela, d'establir la mesure de nostre puissance, de cognoistre et iuger la
L'ESPRIT DES ESSAIS. PHI. E.233
difficulté des choses, c'est vne grande et extrême science, de laquelle ils doubtent
que l'homme soit capable, II, 228.
Prenez los simples discours de la philosophie, srachez les choisir et traitter à
point, ils sont plus aisez à conccuoir qu'vn conte de Boccace. Vn enfant en est
capable au partir de la nourrisse, beaucoup mieux que d'apprendre à lire ou es-
crire, I, 262.
La plus part des âmes ne se trouuent propres à faire leur profit de telle instruc-
tion : qui, si elle ne se met à bien, se meta mal, I, 218.
La philosophie a pour son but, la vertu : qui n'est pas, comme on le dit, plantée
à la teste d'vn mont coupé, rabolteux et inaccessible. Ceux qui l'ont approchée, la
tiennent au rebours, logée dans vne belle plaine fertile et (leurissante : d'où elle
void bien souz soy toutes choses; ayant pour guide nature, fortune et volupté
pour compagnes. Les autres sont allez selon leur foiblesse, faindre cette sotte
image, triste, querelleuse, despite, menaceuse, njineuse, et la placer sur vn rocher
à l'escart, emmy des ronces : fantosme à estonner les gents, I, 258.
La philosophie n'estriue point contre les voluplez naturelles, pourueu que la
mesure y soit ioincte et en iiresche la modération, non la fuite. Elle dit que les
appétits du corps ne doiuent pas estre augmentez par l'esprit. Et nous aduertit
ingénieusement, de ne vouloir point esueiller nostre faim par la saturité : de ne
vouloir farcir, au lieu de remplir le ventre : d'euiter toute iouyssance, qui nous
met en disette : et toute viande et breuuage, qui nous altère, et afiame, 111,276.
La philosophie a tant de visages et de variété, et a tant dict, que tous nos son-
ges et resueries s'y trouuent. L'iiumaine phantasie ne peut rien conceuoir en bien
et en mal qui n'y soit, II, 312.
Ce grand monde, c'est le miroïier, où il nous faut regarder, pour nous cognois-
tre de bon biais. Tant d'humeurs, de sectes, de iugemens, d'opinions, de loix, et
de coustumcs, nous apprennent à iugcr sainement des nostres, et apprennent
nostre ingénient à recognoistre son imperfection et sa naturelle foiblesse. Tant
de remuements d'estat, et changements de fortune publique, nous instruisent à
ne faire pas grand miracle de la nostre. Tant de noms, tant de victoires et con-
questes enseuelis soubs l'oubliance, rendent ridicule l'espérance d'éterniser nostre
nom par la prise de dix argoulets, et d'vn pouillier, qui n'est cognu que de sa
cheute. L'orgueil et la liereté de tant de pompes estrangeres, la maiesté si enflée
de tant de cours et de grandeurs, nous fermit et asseure la veue, à soustenir l'es-
clat des nostres, sans siller les yeux. Tant de milliasses d'hommes enterrez auant
nous, nous encouragent à ne craindre d'aller trouuer si bonne compagnie en
l'autre monde : ainsi du reste, I, 252.
C'est grand cas que les choses en soyent là en nostre siècle, que la philosophie
soit iusques aux gens d'entendement, vn nom vain et fantastique, qui se treuue
de nul vsage, et de nul pris par opinion et par efl"cct. le croy que ces ergotismes
en sont cause, qui ont saisi ses auenues. On a grand tort de la peindre inacces-
sible aux enfans, et d'vn visage renfroigné, sourcilleux et terrible : qui me l'a
masquée de ce faux visage pasle et hideux? Il n'est rien plus gay, plus gaillard,
plus enioué, et à peu que ie ne die follastre. Elle ne presche que teste et bon temps.
Vne mine triste et transie montre que ce n'est pas là son giste, I, 256.
La philosophie ne pense pas auoir mal employé ses moyens, quand elle a rendu
à la raison, la souueraine maistrise de nostre ame, et l'authorité de tejiir en bride
nos appétits, II, 632.
L'ame qui loge la philosophie, doit par sa santé rendre sain encores le corps :
elle doit faire luyre iusques au dehors son repos, et aise, I, 258.
On attache aussi bien toute la philosophie morale, à vne vie populaire et pri-
uee, qu'à vne vie de plus riche estolfe. Chaque homme porte la forme entière, de
l'humaine condition, III, 108.
PHYSIONOMIE.
C'est vne foible garantie que la mine, toutefois elle a quelque considération.
Et si i'auois à les foyter, ce seroit plus rudement, les meschans qui démentent et
trahissent les promesses que Nature leur auoit plantées au front. le punirois plus
B.234 ESSAIS DE MONTAIGNE.
aigrement la malice, en vno apparence débonnaire. 11 semble qu'il y ait aucuns
visages heureux, d'autres malencontreux, III, 51)0.
En vne face qui ne sera pas trop bien composée, il peut loger quelque air de
probité et de fiance. Comme au rebours, i'ai leu parfois entre deux beaux yeux,
(les menasses d'une nature maligne et dangereuse, III, 588.
PLAISIRS (volupté).
Il n'est aucune si iuste volupté, en laquelle l'excez et l'intempérance ne nous
soit reprochable, I, 348.
Tous plaisirs et toutes gratifications ne sont pas bien logées en toutes gens, 1, 348.
Les sages nous apprennent assez, à nous garder de la trahison de noz appétits ;
et à discerner les vrays plaisirs et entiers, des plaisirs meslez et bigarrez de plus
de peine : car la pluspart des plaisirs, disent ils, nous chatouillent et embrassent
pour nous eslrangler, I, 424.
Si la douleur de teste nous venoit auant l'yuresse, nous nous garderions de trop
boire; mais la volupté, pour nous tromper, marche deuant, et nous cache sa suitte,
I, 424.
PLURALITÉ DES MONDES.
La raison n'a en aucune autre chose plus de verisimilitude et de fondement,
qu'en ce qu'elle persuade la pluralité des mondes. Il semble n'estre pas vray-sem-
blable, que Dieu ait faict ce seul ouurage sans compaignon? et que la matière de
cette forme ayt esté toute espuisée en ce seul indiuidu, II, 270.
POÉSIE.
Nous auons bien plus de poètes, que de iuges et interprètes de poésie. II est plus
aisé de la faire, que de la cognoistre, I, 402.
La poésie populaire et purement naturelle, a des naïuetésot grâces, par où elle
se compare à la principale beauté de la poésie parfaite selon l'art. La poésie mé-
diocre, qui s'arreste entre deux, est desdaignée, et sans prix, I, 572.
Pour néant hurte à la porte de la poésie, vn homme rassis, I, 628.
PRÉDICTIONS (CRÉDULITÉ),
La faculté de prophetizer est au dessus de nous, I, 628.
C'est don de Dieu, que la diuination : voyla pourquoy ce deuroit estre vne im-
posture punissable d'en abuser, I, 364.
Le vray champ et subiect de l'imposture, sont les choses inconnues : d'autant
qu'en premier lieu l'estrangeté mesme donne crédit, et puis n'estants point sub-
iectes à nos discours ordinaires, elles nous estent le moyen de les combattre, 1, 376.
Les moyens de diuination es astres, es esprits, es figures du corps, es songes,
et ailleurs, qui restent encore entre nous, sont un notable exemple de la forcenée
curiosité de nostre nature, s'amusant à préoccuper les choses futures, comme si
elle n'auoit pas assez affaire à digérer les présentes, I, 72.
l'en voy qui estudient et glosent leurs Almanacs, et nous en allèguent l'autho-
rité aux choses qui se passent. A tant dire, il faut qu'ils disent et la vérité et le
mensonge. le ne les estime de rien mieux, pour les voir tomber en quelque rencon-
tre, I, 76.
PRÉSOMPTION.
La mère nourrice des plus fausses opinions, et publiques et particulières, c'est
la trop bonne opinion que l'homme a de soy, II, 470.
La présomption est nostre maladie naturelle et originelle. La plus calamiteuse
et fragile de toutes les créatures c'est l'homme, et quant et quant, la plus orgueil-
leuse, II, 136.
L'ESPRIT DES ESSAIS. PRÉ. E.235
Fascheuse maladie, do se croire si fort, qu'on se persuade, qu'il ne se puisse
croire au contraire : et plus fascheuse encore, qu'on se persuade d'vn tel esprit,
qu'il préfère ie ne sçay quelle disparité de fortune présente, aux espérances et
menaces de la vie éternelle! 1,582.
Il y a deux parties en la presumption : sçauoir est, de s'estimer trop, et n'esti-
mer pas assez autruy, II, 468.
Il ne faut pas iuger ce qui est possible, et ce qui ne l'est pas, selon ce qui est
croyable et incroyable à nostre sens. Et est vue grande faute, et en laquelle tou-
tesfois la plus part des hommes tombent : de faire difliculté de croire d'autruy,
ce qu'eux ne S(;auroient faire, ou ne vôudroicnt. Il semble à chacun que la mais-
tresse forme de l'humaine nature est en luy : selon elle, il faut régler tous les au-
ti'es. Les allures qui ne se rapportent aux siennes, sont faintes et fauces. Luy pro-
pose Ion (luelque chose dos actions ou facultez d'vn autre? la première chose
qu'il appelle à la consultation do son iugoment, c'est son exemple : selon qu'il on
va chez luy, selon cela va l'ordre du monde. 0 l'asncrie dangereuse et insuppor-
table, II, 628.
Il est d'autre part certaine façon d'hunulité subtile, qui naist de la présomption :
nous recognoissons nostre ignorance, en plusieurs choses, et sommes si courtois
d'auoiier, qu'il y ait es ouurages de Nature, aucunes qualitez et conditions, qui
nous sont imperceptibles, et desquelles nostre suffisance ne peut descouurir les
moyens et les causes. Que par cette honneste et conscientieuse déclaration, nous
espérons gaigner qu'on nous croira aussi de celles, que nous dirons entendre,
III, 40.
Il semble à la vérité, que Nature, pour la consolation de nostre estât misérable
et chetif, ne nous ait donné en partage que la presumption. Nous n'auons que
du vent et de la fumée en partage, II, 204.
PRÉVOYANCE.
La preuoyance conuient egallenient à ce qui nous touche en bien, et en mal.
Considérer et iuger le danger, est aucunement le rebours de s'en estonner, III, 390.
PRIÈRES (dévotion, Dieu).
le ne loue pas volontiers ceux, que ie voy prier Dieu plus souuent et plus or-
dinairement, si les actions voisines de la prière, ne me tesmoignent quelque
amendement et reformation, I, 580.
Nous prions par vsage et par coustume : ou pour mieux dire, nous lisons ou pro-
nonçons noz prières : ce n'est en fin que mine, I, 580.
C'est de la conscience que la prière doit estro produite, et non pas de la langue,
I, 584.
II ne faut pas demander à Dieu que toutes choses suiuont nostre volonté, mais
qu'elles suiuent la prudence, I, 592.
La prière dos Lacedemoniens publique et priuée portoit, simplement les choses
bonnes et belles leur estre octroyées : remettant à la discrétion de la puissance
suprême le tirage et choix d'icelles, II , 368.
Il est peu d'hommes qui ozassent mettre en euidence les requestes secrettes qu'ils
font à Dieu, I, 592.
L'Eglise peut estendreet diuersifier les prières selon le besoin de nostre instruc-
tion : c'est tousiours mesme substance, et mesmc chose. Mais le patenostre dit
tout ce qu'il faut, et est trespropre à toutes occasions. C'est l'vnique prière, dequoy
ie me sers par tout, et la répète au lieu d'en changer, I, 578.
PROCÈS.
De combien est il plus aisé, de n'y entrer pas que d'en sortir, III, 512.
Si nous estions sages, nous nous deurions resiouir et venter, ainsi que i'ouy vn
iour bien naïuement, vn enfant de grande maison, faire feste à chacun, dequoy sa
mère venoit de perdre son procès : comme sa toux, sa liebure, ou autre chose
d'importune garde, III, 512.
E.236 ESSAIS DE MONTAIGNE.
A combien do fois me suis-ie faict vne bien euidente iniustice, pour fuyr le
hazard de la receuoir encore pire des luges, après vn siècle d'ennuys, et d'or-
dres et viles practiques, plus ennemies de mon naturel, que n'est la géhenne et le
feu, m, 510.
PRODUCTIONS LITTÉRAIRES.
Des cnfans, ie ne sçay si ie n'aymerois pas mieux beaucoup en auoir produict
vn parfaictement bien formé, de l'accointance des Muses, que de l'accointance de
ma femme, II , 52. i
Ce que nous engendrons par l'ame, les enfantements de nostre esprit, de nostre
courage et suffisance, sont produits par vne plus noble partie que la corporelle,
et sont plus nostres. Nous sommes père et mère ensemble en cette génération :
ceux-cy nous coustent bien plus cher, et nous apportent plus d'honneur, s'ils ont
quelque chose de bon. Car la valeur de nos autres enfants, est beaucoup plus leur,
que nostre ; la part que nous y auons est bien légère : mais de ceux-cy, toute la
beauté, toute la grâce et prix est nostre, II, 48.
Nous disons d'aucuns ouurages qu'ils puent à l'huylc et à la lampe, pour cer-
taine aspreté et rudesse, que le trauail imprime en ceux où il a grande part.
Mais outre cela, la solicitude de bien faire, et cette contention de l'ame trop
bandée et trop tendue à son entreprise, la rompt et l'empesche, 1,70.
PROLÉTAIRES.
A quoy faire nous allons gendarmant par les efforts de la science? Regardons
à terre, les panures gens que nous y voyons espandus, la teste panchante après
leur besongne. De ceux-là, tire Nature tous les iours, des effects de constance et
de patience, plus purs et plus roides, que ne sont ceux que nous estudions si cu-
rieusement en l'escole. Combien en vois ie ordinairement, qui mescognoissent la
pauureté ; combien qui désirent la mort, ou qui la passent sans alarme et sans
affliction? Celui là qui fouît mon iardin, il a ce matin enterré son père ou son
fils. Les noms mesme, dequoy ils appellent les maladies, en adoucissent et amol-
lissent l'aspreté. La phthysie, c'est la toux pour eux : la dysenterie, deuoyement
d'estomach : vn pleuresis, c'est vn morfondement : et selon qu'ils les nomment
doucement, ils les supportent aussi. Elles sont bien griefues, quand elles rompent
leur trauail ordinairement : ils ne s'allitent que pour mourir, III, 554.
le ne vy iamais paysan de mes voisins, entrer en cogitation de quelle conte-
nance, et asseurance, il passeroit son heure dernière. Nature luy apprend à ne
songer à la mort, que quand il se meurt, III, 576.
PROVIDENCE.
Dieu pourroit nous ottroyer les richesses, les honneurs, la vie et la santé mesme,
quelquefois à nostre dommage : car tout ce qui nous est plaisant, ne nous est pas
tousiours salutaire : si au lieu de la guerison, il nous enuoye la mort, ou l'empi-
rement de nos maux : il le fait par les raisons de sa prouidence,'-qui regarde bien
plus certainement ce qui nous est deu, que nous ne pouuons faire : et la deuons
prendre en bonne part, comme d'vne main tres-sage et tres-amie, II, 370.
QUALITÉS.
C'est vne espèce de mocquerie et d'iniure, de vouloir faire valoir vn homme,
par des qualitez mes-aduenantes à son rang; quoy qu'elles soient autrement
louables; et par les qualitez aussi qui ne doiuent pas estre les siennes principales,
I, 432.
QUERELLES.
Regardez pourquoy celuy-là s'en va courre fortune de son honneur et de sa
vie, à tout son espée et son poignard; qu'il vous die d'où vient la source de ce
i;esprtt des essais, que. E.237
débat, ilne le peutfaire sans rougir; tant l'occasion en est vaine etfriuole, III, 512.
Qu'est-ce qui faict en ce temps, nos querelles toutes mortelles? et que là où nos
pères auoyent quelque degré de vengeance, nous commençons à cette heure par
le dernier : et ne se parle d'arriuée que de tuer? Qu'est-ce, si ce n'est coiiardie,
II, 570.
Qui entre légèrement en querelle, est subiect d'en sortir aussi légèrement. C'est
une mauuaise façon. Depuis qu'on y est, il faut aller ou creuer. Entrejjrenez froi-
dement, mais poursuiuez ardamment. De faute de prudence, on retombe en faute
de cœur; qui est encore moins supportable, III, 514.
Les excuses et réparations, que ie voy faire tous les ioui-s, pour purger l'indis-
crétion, me semblent plus laides que l'indiscrétion mesme, III, 516.
Vn homme d'honneur, qui doit sentir vn desmenti, et vue ofTence iusques au
cœur, qui n'est pour prendre vne mauuaise excuse en payement et consolation,
qu'il euite le progrez des altercations contentieuses, III, 500.
Aucun dire n'est si vicieux, comme le desdire est honteux, quand c'est vn des-
dire, arraché par authorité, III, 516.
La plus part des accords de noz querelles du iourd'hui, sont honteux et menteurs.
Nous ne cherchons qu'à sauuer les apparences et trahissons cependant, et desad-
uouons noz vrayes intentions aux despens de nostre franchise, et de l'honneur
de nostre courage, et cherchons des conillieres en la fauceté, pour nous accorder.
Il ne faut pas regarder si vostre action ou vostre parole, peut auoir autre inter-
prétation, c'est vostre vi'aye et Sincère interprétation, qu'il faut mes-huy mainte-
nir, quoy qu'il vous couste, III, 514.
RAISON.
La raison humaine est un glaiue double et dangereux, II, 500.
Oserons nous dire que cet aduantage de la raison, dequoy nous faisons tant de
feste, et pour le respect duquel nous nous tenons maistre et Empereurs du reste
des créatures, ait esté mis en nous, pour nostre tourment, I, 450.
Nostre raison est flexible à toute sorte d'images, II, 000.
Nos rai&ons anticipent souuent l'elTect, et ont l'estenduë de leur iurisdiction si
infinie, qu'elles iugent et s'exercent en l'inanité mesme, et au non estre, III, 542.
L'humaine raison est vn instrument libre et vague. Les hommes, aux faicts qu'on
leur propose, s'amusent plus volontiers à en cliercher la raison, qu'à en cherciier
la vérité. Ils passent par dessus les presuppositions, mais ils examinent curieuse-
ment les conséquences. Ils laissent les choses, et courent aux causes. Plaisans
causeurs. La cognoissance des causes touche seulement celuy, qui a la conduitte
des choses : non à nous, qui n'en auons que la souffrance, III, 520.
A quoy faire la cognoissance des choses, si nous en deuenons plus lasches? si
nous en perdons le repos et la tranquilité, où nous serions sans cela? I, 450.
Quelles difl'erences de sens et de raison, quelle contrariété d'imaginations nous
présente la diuersité de nos passions? Quelle assourance pouuons nous prendre
de chose si instable et si mobile, subjecte par sa condition à la maistrise ^u trou-
ble, n'allant iamais qu'vn pas forcé et emprunté? II, 352.
La raison humaine est vne teinture infuse enuiron de pareil pois à toutes nos
opinions et mœurs, de quelque forme qu'elles soient : infinie en matière, infinie
en diuersité, I, 102.
J'appelle tousiours raison cette apparence de discours que chacun forge en soy:
cette raison, de la condition de laquelle, il y en peut avoir cent contraires autour
d'un même subject : c'est un instrument de plomb, et de cire, alongeable, ploya-
ble, accommodable à tout biais et à toutes mesures : il ne reste que la suffisance
de le sçauoir contourner, II, 346.
11 n'est rien si soupple et erratique. C'est le soulier de Theramenez, bon à tous
pieds, III, 544.
E.238 ESSAIS DE MONTAIGNE.
RAISON D'ÉTAT.
Le Prince, quand vne vrgente circonstance, et quelque impétueux et inopiné
accident, du besoing de son estât, luy fait gauchir sa parolle et sa foy, ou autre-
ment le iette hors de son deuoir ordinaire, c'est malheur. A cela, nul remède :
nous ne pouuons pas tout. Ce sont dangereux exemples, rares, et maladifues
exceptions, à nos règles naturelles : il y faut céder, mais auec grande modéra-
tion et circonspection. Aucune vtilité priuee, n'est digne pour laquelle nous fa-
cions cet effort à nostre conscience : la publique bien, lors qu'elle est et tres-ap-
parente, et très-importante, III, 98.
RÉCOMPENSES HONORIFIQUES.
C'a esté vne belle inuention, et receuë en la plus pai't des polices du monde,
d'establir certaines nierques vaines et sans piix, pour en honnorei- et recompen-
ser la vertu, II, 10.
C'est à la vérité vne bien bonne et profitable coustume, de trouuei- moyen de
recognoistre ainsi la valeur des hommes rares et excellons, et de les contenter et
satisfaire par des payemens, qui ne chargent aucunement le publiq, et qui ne
coustent rien au Prince, II, 10.
Ces lojers d'honneur, n'ont autre prix et estimation que cette là, que peu de
gens en iouyssent, il n'est, pour les anéantir, que d'en faire largesse, II, 12.
Aucun homme de cœur ne daigne s'auantager de ce qu'il a de commun auec
plusieurs, II, 14.
RELIGION (dévotion. Dieu, dieux).
0 la vile chose, et abiecte, que l'homme, s'il ne s'esleue au dessus de l'huma-
nité! C'est à nostre foy Chrestienne, non à la vei'tu Stoïque, de prétendre à cette
métamorphose, II, 418.
C'est la foy seule qui embrasse viuement et certainement les hauts mystères de
nostre religion, II, 114.
Combien et aux loix de la religion, et aux loix politiques se trouuent plus doci-
les et aisez à mener, les esprits simples et incurioux, que ces esprits surueillants
et pédagogues des causes diuines et humaines? II, 230.
La peste de l'homme c'est l'opinion de sçauoir. Voyla pourquoy l'ignorance
nous est tant recommandée par nostre religion, comme pièce propre à la créance
et à l'obeyssance, II, 204.
La participation que nous auons à la cognoissance de la vérité, quelle qu'elle
soit, ce n'est point par nos propres forces que nous l'auons acquise. Dieu nous a
assez appris cela par les tesmoings, qu'il a choisi du vulgaire, simples et igno-
rans, pour nous instruire de ses admirables secrets, II, 224.
Nostre foy ce n'est pas nostre acquest, c'est vn pur présent de la libéralité
d'autruy. Ce n'est pas par discours ou par nostre entendement que nous auons
receu nostre religion, c'est par authorité et par. commandement cstranger. La
foiblesse de nostre iugement nous y aide plus que la force, et nostre aueuglement
plus que nostre clair-voyance. C'est par l'entremise de nostre ignorance, plus
que de nostre science, que nous sommes sçauans de. diuin sçauoir, II, 224.
Si nous auions vne seule goutte de foy, nous remuerions les montaignes de
leur place, dict la saincte parole : nos actions qui seroient guidées et accompai-
gnées de la diuinité, ne seroient pas simplement humaines, elles auroient quel-
que chose de miraculeux, comme nostre ci-oyance, II, 118.
Si nos moyens naturels et terrestres ne peuuent conceuoir cptte cognoissance
supernaturelle et céleste: apportons y seulement du nostre, l'obéissance et lasub-
iection, II, 224.
Ou il faut se submettre du tout à l'authorité de nostre police ecclésiastique, ou
du tout s'en dispenser. Ce n'est pas à nous à establir la part que nous luy deuons
d'obéissance, I, 294.
L'ESPRIT DES ESSAIS. UEL. E.239
En conscience tout l'acquest que riionime a retiré d'\ne si longue poursuite,
de la vérité religieuse c'est d'auoir appris à recognoistre sa foiblesse. L'igno-
rance qui estoit naturellement en nous, nous l'auons par longue estude confir-
mée et auerée. 11 est aduenu aux gens véritablement sçauans, ce qui adulent aux
espics de bled : ils vont s'esleuant et se haussant la teste droite et liere, tant qu'ils
sont vuides; mais quand ils sont pleins et grossis de grain en leur maturité, ils
commencent à s'humilier et baisser les cornes. Pareillement les hommes, ayans
tout essayé, tout sondé, n'ont trouué en cet amas de science etprouision de tant
de choses diuerses, rien de ferme, et rien que vanité, II, 226.
Les simples, dit S. Paul, et les ignorans, s'esleuent et se saisissent du ciel; et
nous, à tout nostre sçauoir, nous plongeons aux abismes infernaux, II, 220.
Il faut sobrement se mesler de iuger des ordonnances diuines, I, 376.
le trouue niauuais ce que ie voy en vsage, de chercher à fermir et appuyer
nostre religion par la prospérité de nos entreprises, I, 378.
11 est mal-aisé de ramener les choses diuines à nostre balance, qu'elles n'y
soufîï'ent du deschet, I, 378.
Rien du nostre ne se peut apparier ou rapporter en quelque façon que ce soit,
à la nature diuine, qui ne la tache et marque d'autant d'imperfection. Cette in-
fmie beauté, puissance, et bonté, comment peut elle souffrir quelque correspon-
dance et similitude à ce que nous sommes, sans vn extrême interest et déchet de
sa diuine grandeur? II, 208.
11 se faut contenter de la lumière qu'il plaist au Soleil nous communiquer par
ses rayons; et qui esleue ses yeux pour en prendre vne plus grande dans son
corps mesme, il y ))erd la veuë, I, 380.
Combien y a il d'arts, qui font profession de consister en la coniecture, plus
qu'en la science? qui ne décident pas du vray et du faulx, et suiuent seulement
ce qu'il semble? II, 236'.
Nous en valons bien mieux, de nous laisser manier sans inquisition, à l'ordre
du monde. Vne ame garantie de preiugé, a vn merueilleux auancement vers la
tranquillité, 11,236.
Nous disons que Dieu craint, que Dieu se courrouce, que Dieu aime, ce sont
toutes agitations et esmotions, qui ne peuuent loger en Dieu selon nostre forme,
ny nous l'imaginer selon la sienne, II, 224.
C'est vne estrange fantasie, de vouloir payer la bonté diuine, de nostre afflic-
tion, loint que ce n'estpas au criminel de se faire fouëter à sa mesure, et à son
heure : ce qui vient à gré àceluy qui le souffre, ne se peut attribuera punition, II, 266.
Le Sainct liure des sacrez mystères de nostre créance n'est pas l'estude de tout
le monde : c'est l'estude des personnes qui y sont vouées, que Dieu y appelle.
Les meschans, les ignorants s'y empirent. Ce n'est pas vne histoire à compter :
c'est vne histoire à reuerer, craindre et adorer. L'ignorance pure, et remise toute
en autruy, estoit bien plus salutaire et plus sçauante, que n'est cette science
verbale, et vaine, nourrice de présomption et de témérité, I, 584.
Des esprits simples, moins curieux et moins instruits, il s'en fait de bons
Chrestiens, qui par reuerence et obéissance, croyent simplement, et se maintien-
nent sous les loix. Les grands esprits plus rassis et clairuoyans, font un autre
genre de bien croyans : lesquels par longue et religieuse inuestigation, pénètrent
vne plus profonde et abstruse lumière, es escritures, et sentent le mystérieux et
diuin secret de nostre police ecclésiastique. En la moyenne vigueur des esprits,
et moyenne capacité, s'engendre l'erreur des opinions : ils suiuent l'apparence du
premier sens, I, 570.
Nous ne receuons nostre religion non autrement que comme les autres religions
se reçoiuent. Nous nous sommes rencontrez au pays, où elle estoit en vsage, ou
nous regardons son ancienneté, ou l'authorité des hommes qui l'ont maintenue,
ou craignons les menaces qu'elle attache aux mécréants ou suAuons ses promesses.
Nous sommes Chrestiens à mesme filtre que nous sommes ou Perigordins ou
Alemans, II, 122.
Plaisante foy, qui ne croid ce qu'elle croid, que pour n'auoir le courage de le
descroire, II, 124.
Nous deurions auoir honte, qu'es sectes humaines il ne fut iama'is partisan,
E.240 ESSAIS DE MONTAIGNE.
quoique difficulté et estrangeté que maintinst sa doctrine, qui n'y conformast
aucunement ses deportemens et sa vie : et vne si diuine et céleste institution ne
marque les Chrostiens que par la langue, II, 116.
Si nous tenions à Dieu par l'entremise d'vne foy viue : si nous tenions à Dieu
par luy, non par nous : si nous auions vn pied et vn fondement diuin, les occa-
sionshumainesn'auroientpas le pouuoirdenousesbranler, comme elles ont, II, 116.
Le meilleur do nous ne craind point de l'outrager, comme il craind d'outrager
son voisin, son parent, son maistre, II, 122.
Les vns font accroire au monde, qu'ils croycnt ce qu'ils ne croyent pas. Les
autres en plus grand nombre, se le font accroire à eux mosmes, ne sçachants pas
.pénétrer quo c'est que croire, II, 118.
Toutes polices ont tiré fruit de leur deuotion, II, ii50.
La religion Chrestienne a toutes les marques d'extrême iustice et vtilité : mais
nulle plus apparente que l'exacte recommandation de l'obéissance du magistrat,
et manutention des polices, I, 180.
Nostre religion n'a point eu de plus asseuré fondement humain, que le mes-
pris de la vie, I, 124.
REPENTIR.
Le repentir n'est qu'vne desdicte de nostre volonté, et opposition de nos fan-
tasies, qui nous pourmene à tout sens. Il faict desaduouër à celuy-là, sa vertu
passée et sa continence, III, 114.
Le vice laisse comme vn vlcere en la chair, vne rcpentanco en l'ame, qui tous-
iours s'esgratigne, et s'ensanglante elle mesme. Car la raison efface les autres
tristesses et douleurs, mais elle engendre celle de la repentance : qui est plus
griefue, d'autant qu'elle naist au dedans, III, 112.
le ne cognoy pas de repentance superficielle, moyenne, et de cérémonie. 11 faut
qu'elle me touche de toutes parts auant que le la nomme ainsin : et qu'elle pinso
mes entrailles, et les afflige autant profondement, que Dieu me voit, et autant
vniuersellement, III, 126.
Si n'est-ce pas guerison, si on ne se descharge du mal. Si la repentance pesoit
sur le plat de la balance, elle emporteroit le péché, III, 124.
Mais ce qu'on dit, que la repentance suit de près le péché, ne semble pas re-
garder le péché qui est en son haut appareil : qui loge en nous comme en son
propre domicile. On peut desauouor et desdire les vices, qui nous surprennent, et
vers lesquels les passions nous emportent : mais ceux qui par longue habitude,
sont enracinez et ancrez en vne volonté forte et vigoureuse, ne sont subiects à
contradiction, III, 114.
Il y a des pochez impétueux, prompts et subits, laissons les à part : mais en
ces autres péchez, à tant de fois reprins, délibérez, et consultez, ou péchez de
complexion, ou péchez de profession et de vacation : ie ne puis pas conceuoir,
qu'ils soient plantez si long temps en vn mesme courage, sans que la raison et la
conscience de celuy qui les possède, le vueille constamment, et l'entende ainsin.
Et le repentir qu'il se vante luy en venir à certain instant prescrit, m'est vn peu
dur à imaginer et former, III, 124.
RÉPUTATION (AME, gloire).
Los iugemens qui se font des apparences externes, sont merueilleusement incer-
tains et douteux : et n'est aucun si asseuré tesmoing, comme chacun à soy-
mesme, II, 454.
Des viuans mesme, ie sens qu'on parle tousiours autrement qu'ils ne sont. Et
si à toute force, ie n'eusse maintenu vn amy que i'aj' perdu, on me l'eust deschiré
en mille contraires visages, III, 450.
Le bruit ne suit pas toute bonté, si la difficulté et estrangeté n'y est ioincte.
Voyre la simple estimation, n'est deuë à toute action, qui n'ait de la vertu, III, 522.
Le marbre esleuera vos titres tant qu'il vous plaira, pour auoir faict repetasser
L'ESPRIT DES ESSAIS. RÉP. E.241
vn pan de mur, ou descroter vn ruisseau public : mais non pas les hommes, qui
ont du sens : La renommée ne se prostitue pas à si vil comte, III, 522.
Celuy qui se tient ferme dans vue francliée descouuerte, que fait il en cela,
que ne facent deuant luy cinquante pauuros pionniers, qui luy ouurent le pas, et
le couurent de leurs corps, pour cinq sols de paye par iour? II, 456.
Qui tient sa mort pour mal employée, si ce n'est en occasion signalée : au lieu
d'illustrer sa mort, il obscurcit volontiers sa vie : laissant eschapper ce pendant
plusieurs iustes occasions de se bazarder. Et toutes les iustes sont illustres assez :
sa conscience les trompettant suffisamment à chacun, II, 450.
Desdaignons cette faim de renommée et d'honneur, basse et belistressc, qui
nous le faict coquiner de toute sorte de gens : par moyens abiects, et à quelque
vil prix que ce soit. C'est deshonneur d'estre ainsin honnoré. Apprenons à n'estre
non plus auides, que nous sommes capables de gloire. De s'enfler de toute action
vtile et innocente, c'est à faire à gens à qui elle est extraordinaire et rare, III, 522.
RESSEMBLANCE, DISSE3IBLANCE.
Ingénieux meslange de Nature. Si nos faces n'estoient semblables, on ne sçau-
roit discerner l'homme de la beste : si elles n'estoient dissemblables, on ne sçau-
roit discerner l'homme de l'homme, III, GIO.
RETRAITE.
Il est temps de nous desnoïier de la société, lors que nous n'y pouuons rien
apporter. Et qui ne peut proster, qu'il se delTende d'emprunter. Nos forces nous
faillent : retirons les, et resserrons nous en nous, I, 418.
Puis que Dieu nous donne loisir de disposer de notre deslogement; préparons
nous y; plions bagage; prenons de bon'heure congé de la compagnie; despétrons
nous de ces violentes prinses, qui nous engagent ailleurs, et esloignent de nous.
Il faut desnoiier ces obligations si fortes : et meshuy aymer cecy et cela, mais
n'espouser rien que soy. C'est à dire, le reste soit à nous : mais non pas ioint et
colé en façon, qu'on ne le puisse desprendre sans nous escorcher, et arracher
ensemble quelque pièce du nostre, I, 418.
Noz affaires nous donnent assez de peine, pourquoi encores nous tourmenter,
et rompre la teste, de ceux de noz voisins et amis, I, 418.
La solitude que i'ayme, et que ie presche, ce n'est principallement, que rame-
ner à moy mes alTections, et mes pensées : restreindre et resserrer, non mes pas,
ains mes désirs et mon soucy, resignant la solicitude estrangere, et fuyant mor-
tellement la seruitude, et l'obligation : et non tant la foule des houmies, que la
foule des aft'aires, III, 146.
Celuy qui se retire ennuie et desgousté de la vie commune, doit former cette-
cy, aux règles de la raison; l'ordonner et renger par préméditation et discours.
11 doit auoir prins congé de toute espèce de trauail, quelque visage qu'il porte;
et fuir en gênerai les passions, qui empeschent la tranquillité du corps et de
l'ame; et choisir la route qui est plus selon son humeur, I, 420.
La plus contraire humeur à la retraicte, c'est l'ambition : la gloire et le repos
sont choses qui ne peuuent loger en mesme giste, I, 426.
C'est vne lâche ambition de vouloir tirer gloire de son oysiueté, et de sa ca-
chette. Il faut faire comme les animaux, qui effacent la trace, à la porte de leur
tanière, I, 428.
Quittez auecq les autres voluptez celle qui vient de l'approbation d'autruy, 1, 428.
Pour nous estre deffaicts de la Cour ef du marché, nous ne sommes pas def-
faits des principaux tourmens de nostre vie, I, 412.
Si on ne se descharge premièrement et son ame, du faix qui la presse, le remue-
ment la fera fouler dauantage. Parquoy ce n'est pas assez de s'estre escarté du
peuple; ce n'est pas assez de changer de place, il se faut escarter des conditions
populaires, qui sont en nous: il se faut séquestrer et r'auoir de soy : sinon nous
emportons nos fers quand et nous, I, 414.
ESS.^lS DE MOMAIGNE. — T. IV. 16
E.242 ESSATS DE MONTAIGNE.
L'occupation qu'il faut choisir à vne telle vie, ce doit ostro vne occupation non
pénible nj' onnujouse; autrement pour néant ferions nous estât d'y estre venu/,
chercher le seiour, I, 42?.
Souuent on j)ense auoir quitté les affaires, on ne les a que changez. Il n'y ;i
guère moins de tourment au gouuernement d'vne famille que d'vn estât entier.
Où que l'anie soit empeschée, elle y est toute. Et pour estre les occupations
domestiques moins importantes, elles n'en sont pas moins importunes, I, 41"i.
Ce n'est pas que le sage ne puisse par tout viure content, voire et seul, en la
foule d'vn palais : mais s'il esta choisir, il en fuira, mesmes la veue, I, 41<J.
Vous auez donné vostre vie à la lumière; donnez le reste à l'ombre, I, 428.
RICHESSES.
Epicurus dit que l'estre riche n'est pas soulagement, mais changement d'af-
faires, I, 4G1.
Tout soing curieux autour des richesses sent à l'auarice. Leur dispensation
mesmc, et la libéralité trop ordonnée et artificielle ne valent Y)as vne aduei'tance
et sollicitude pénible. Qui veut faire sa despense iuste, la fait estroitte et con-
trainte. La garde, ou l'emploitte, sont de soy choses indifférentes, et ne prennent
couleur de bien ou de mal, que selon l'application de nostre volonté, III, 396.
ROIS (vie publique).
Le plus aspre et difficile mestier du monde, à mon gré, c'est faire dignement le
Roy. II est difficile de garder mesure, à vne puissance si desmcsuree, III, 324.
Ce n'est pas peu de chose que d'auoir à régler autruy, puis qu'à régler nous
mesmes, il se présente tant de difficultez, I, 488.
Vn Roy doit pouuoir respondre, comme Iphicrates re.spondit à l'orateur qui
le pressoit en son inuectiue de cette manière : Et bien qu'es-tu, pour faire tant
le braue? es-tu homme d'armes, es-tu archer, es-tu piquier? le ne suis rien de
tout cela, mais ie suis celuy qui sçait commander à tous ceux-là, I, 434.
Paroistré excellent en des parties moins nécessaires, c'est produire contre soy
le tesmoignage d'auoir mal dispencé son loisir, et l'estude, qui deuoit estre em-
ployé à choses plus nécessaires et vtiles, I, 434.
Le jugement d'vn Empereur, doit estre au dessus de son empire ; et le voir et
considérer, comme accident estranger. Et luy doitsçauoir iouyr de soy à part; et
se communicquer comme lacques et Pierre : au moins à soy-mesmes, III, 500.
Toutes les vraies comraoditez qu'ont les Princes, leurs sont communes aucc les
hommes de moyenne fortune, ils n'ont point d'autre sommeil et d'autre appétit
que le nostre : leur couronne ne les couure ny du soleil, ny.de la pluie, I, 494.
La royauté adiouste peu au bon heur : ce n'est que biffe et piperie, I, 488.
L'Empereur, duquel la pompe vous esblouit en public : voyez le derrière le ri-
deau, ce n'est rien qu'vn homme commun, et à l'aduenture plus vil que le moin-
dre de ses subiects. La couardise, l'irrésolution, l'ambition, le despit et i'enuie
l'agitent comme vn autre : et le soing et la crainte le tiennent à la gorge au mi-
lieu de ses armées. La fiebure, la migraine et la goutte l'espargnent elles non plus
que nous? Quand la vieillesse luy sera sur les espaules, les archers de sa garde
l'en deschargeront ils? Quand la frayeur de la mort le transira, se r'asseurera il
par l'assistance des Gentils-hommes de sa chambre ? Quand il sera en ialousie et
caprice, nos bonnettades le remettront elles? Ce ciel de lict tout enflé dor et de
perles, n'a aucune vertu à rappaiser les tranchées d'vne verte colique. C'est vn
homme pour tous potages. Et si de soy-mesmes c'est vn homme mal né, l'empire
de l'vniuers ne le sçauroit rabiller, I, 484.
Les taches s'agrandissent selon l'eminence et clarté du lieu, où elles sont assi-
ses : et vn seing et vne verrue au front, paroissent plus que ne faict ailleurs vne
balafre, ce qui est à nous indiscrétion, à eux le peuple iuge que ce soit tyrannie,
mespris, et desdain des loix, I, 490.
C'est peu, au seruice des Princes, d'estre secret, si on n'est menteur encore,
III, 188.
L'ESPRIT DES ESSAIS. UOIS. E.243
Sans compter qu'il se faut bien garder de faire tant de seruice à son maistre,
qu'on IVnnpesche d'en trouuer la iuste recompence, III, 368.
Les anies des Empereurs et des sauatiers sont iettees à mesme moule. Les
Princes sont menez et ramenez en leurs mouuemens, par les mesmes ressers,
que nous sommes aux nostres. Ils veulent aussi légèrement que nous, mais ils
peuuent plus, II, 180.
Le langage des honnnes nourris sous la Royauté, est tousiours plein de vaines
ostentations et faux tesmoignages : chascun esleuant indifleremment son Roy, à
l'extrême ligne de valeur et grandeur souueraine, I, liO.
Vn pur courtisan ne peut auoir ny loy ny volonté, de dire et penser que fauo-
rablement d'vn lïiaistre, qui parmi tant de milliers d'autres subiects, l'a choisi
poui' le nourrir et eleuer de sa main. Cette faneur et vtilité corrompent non sans
quelque raison, sa franchise, et l'osblouiKsent, I, 21G.
L'immodérée largesse, est vn moyen foible à leur acquérir bien-vueillance : car
elle rebute plus de gens, qu'elle n'en practique, III, 298.
Les subiects d'vn Prince excessif en dons, se rendent excessifs en demandes :
ils se taillent, non à la raison, mais à l'exemple, III, 298.
Si la libéralité d'vn -Prince est sans discrétion et sans mesure, ie l'ayme mieux
auai'e. La vertu Royallo semble consister le plus en la iustice, III, 298.
Les enfans des Princes n'apprennent rien à droict qu'à manier des cheuaux : en
tout autre exercice, chacun fleschit soubs eux, et leur donne gaigné : mais vn
cheual qui n'est ny flatcur ny courtisan, verse le fds du Roy par terre, comme
il feroit le fils d'vn crocheteur, III, 32G.
Nous deuons la subiection et obéissance également à tous Rois : car elle regarde
leur office : mais l'estimation, non plus que l'affection, nous ne la deuons qu'à
leur vertu, I, 3.
, ■Qui ne bee point après la faneur des Princes, comme après chose dequoy il ne
se sçauroit passer; ne se picque pas beaucoup de la froideur de leur recueil, et
de leur visage, ny de l'inconstance de leur volonté, III, 510.
ROME.
l'ay veu ailleurs des maisons ruynées, et des statues, et du ciel et de la terre :
ce sont tousiours des hommes. Tout cela est vray : et si pourtant ne sçauroy
reuoir si souuent le tombeau de cette ville, si grande, et si puissante, que ie ne
l'admire et reuere. Le soingdes morts nous est en recommandation. Or i'ay esté
nourrydesmon enfance, auec ceux icy. Payeu cognoissance des affaires de Rome,
long temps auant que ie l'ay eue de ceux de ma maison. le sçauoisle Capitole et
son plant, auant que ie sceusse le Louure : et le Tibre auant la Seine. J'ay eu
plus en teste, les conditions et fortunes de Lucullus, Metellus, et Scipion, que ie
n'ay d'aucuns hommes des nostres. Ce seroit ingratitude, de mespriser les reliques,
et images de tant d'honnestes hommes, et si valeureux lesquels i'ay veu viure et
mourir : et qui nous donnent tant de bonnes instructions par leur exemple, si
nous les sçauions suyure. Et puis cette mesme Rome que nous voyons, mérite
qu'on l'ayme. Il n'est lieu çà bas, que le ciel ayt embrassé auec telle influence de
faneur, et telle constance. Sa ruyne mesme est glorieuse et enflée. Encore retient
elle au tombeau des marques et image d'empire, III, 47 1.
SAGESSE.
La plus expresse marque de la sagesse, c'est vno esiouissance constante : son
estât est tousiours serein, I, 258.
Mais tant sage qu'il voudra, le sage en fin c'est vn homme : La sagesse ne force
pas nos conditions naturelles : Il faut qu'il sille les yeux au coup qui le me-
nasse : il faut qu'il frémisse planté au bord d'vn précipice, comme vn enfant :
Nature aj'ant voulu se reseruer ces légères marques de son authorité, inexpugna-
bles à nostre raison, et à la vertu Stoique, pour luy apprendre sa mortalité et
nostre fadeze. Il |)allit à la peur, il rougit à la honte, il gémit à la colique, sinon
d'vne voix désespérée et esclatante, au moins d'vne cassée et enroiiée. Luy suf-
E.244 ESSAIS DE MONTAIGNE.
fise do brider et modoror ses inclinations : car de les emporter, il n'est pas en
lu y. I, 624.
La bestise et la sagesse se renconti-ent en mesme poinct de sentiment et de
i-esolution à la souffrance des accidens humains : les sages gourmandent et com-
mandent le mal, et les autres l'ignorent : ceux-cy sont, par manière de dire, au
deçà des accidens, les auti-es au delà, I, 570.
Ce grand pi-ecepte est souuent allégué en Platon, Fay ton faict, et te eongnoy.
Cliascun de ces deux membres enueloppe generallement tout nostre deuoir : et
semblablcment enueloppe son compagnon. Qui auroit à faire son faict, vorroit
que sa première leçon, c'est cognoistre ce qu'il est, et ce qui luy est propre. Et
qui se cognoist, ne prend plus l'estranger faict pour le sien : s'ayme, et se cul-
tiue auant toute autre chose : refuse les occupations superflues, et les pensées,
et propositions inutiles, I, 28.
Quand bien nous pourrions estre sçauans du sçauoir d'autruy, au moins sages
ne pouuons nous estre que de nostre propre sagesse, I, 212.
Les Stoïciens disent, le sage œuurer quand il œuure par toutes les vertus en-
semble, quoy qu'il y en ait vne plus apparente selon la nature de l'action, II, 98.
La sage-sse faict vn bon office à ceux, de qui elle renge les désirs à leur puis-
sance! 11 n'est point de plus vtile science. Selon qu'on peut : Mot de grande subs-
tance : il faut adresser et arrester nos désirs, aux choses les plus avses et voy-
sines, III, 140.
Comme la folie quand on luy octroyera ce qu'elle désire, ne sera pas contente :
aussi est la sagesse contente de ce qui est présent, ne se desplait iamais de sov.
I, 28. .
Si l'homme estoit sage, il prendroit le vray prix de chasque chose, selon qu'elle
seroit la plus vtile et propre à sa vie, II, 202.
Ne soyez pas plus sages qu'il ne faut, mais soyez sobrement sages, I, 344.
La sagesse humaine faict bien sottement l'ingénieuse, de s'exercer à rabattre le
nombre et la douceur des voluptez, qui nous appartiennent : comme elle faict
fauorablement et industrieusement, d'employer ses artifices à nous peigner et
farder les maux, et en alléger le sentiment, I, 550.
Antisthenes permet au sage d'aimer, et faire à sa mode ce, qu'il trouue estre
opportun, sans s'attendre aux loix : d'autant qu'il a meilleur aduis qu'elles, et
plus de cognoissance de la vertu. Son disciple Diogenes, disoit, opposer aux per-
tuibations, la raison : à fortune, la confidence : aux loix, nature, III, 462.
Le sage doit au dedans retirer son ame de la presse, et la tenir en liberté et
puissance de iuger librement des choses : mais quant au dehors, il doit suiure
entièrement les façons et formes receuës, I, 170.
Je hais le sage qui n'est pas sage par soy-même, I, 212.
Nos folifes ne me font pas rire, ce sont nos sapienccs, III, 146.
Le sage vit tant qu'il doit, non pas tant qu'il peut, I, 63(J.
SANTÉ.
La santé, le plus beau et le plus riche présent, que Nature nous scache faire,
II, 198.
C'est vne pretieuse chose, que la santé : et la seule qui mérite à la vérité qu'on
y employé, non le temps seulement, la sueur, la peine, les biens, mais encore la
vie à sa poursuite : d'autant que sans elle, la vie ^lous vient à estre iniurieuse.
La volupté, la sagesse, la science et la vertu, sans elle se ternissent et esuanouys-
sent, III, 'M. ,
C'est à la coustume de donner forme à nostre vie, telle qu'il luy plaist, elle peult
tout en cela. C'est le breuuage de Circé, qui diuersifie nostre nature, comme
bon luy semble : et toute voye qui nous meneroit à la santé, ne se peut dire nj'
aspre, ny chère, le ne crois rien plus certainement que cecy : que ie ne sçaui'oy
estre olTencé par l'vsage des choses que i'ay si long temps accoustumees, III. 630.
L'ESPRIT DES ESSAIS. . SAV. E.24o
SAVANTS.
Le sauoir est chose de qualité à peu près indifférente : tres-vtile accessoire, à
vne ame bien née, pernicieux à vne autre ame et dommageable : en quelque
main c'est vn sceptre, en quelque autre, vne marotte, III, 342.
Les sçauants, à qui appartient la iurisdiction liuresque, ne cognoissent autre
prix que de la doctrine; et n'aduoiicnt autre procéder en noz esprits, que celuy
de l'érudition, et de l'art, II, 510.
Ils chopont volontiers à cette pierre : ils font tousiours parade de leur magis-
tère, et sèment leurs liures par tout, I, 142.
Ceux qui ont le corps gresle, le grossissent d'embourrures : ceux qui ont la
matière exile, l'enflent de paroles, I, 250.
Qui nous contera par nos actions et deportemens, il s'en trouuera plus grand
nombre d'excellens entre les ignorans, qu'entre les sçauants: ie dy en toute sorte
de vertu, II, 202.
Ils scauent la Théorique de toutes choses, cherchez qui la mette en praciique,
I, 214.'
SAVOIR, SCIENCE.
C'est vn grand ornement que la science, et vn vtil de merueilleux seruice, no-
tamment aux personnes esleuees en certain degré de fortune : elle n'a point son
vray vsage en mains viles et basses, I, 234.
Le plus sage homme qui fut onques, quand on luy demanda ce qu'il sçauoiL
respondit, qu'il sçauoit cela, qu'il ne sçauoit rien. 11 verifioit ce qu'on dit, que la
plus grand part de ce que nous sçauons, est la moindre de celles que nous igno
rons : c'est à dire, que ce mesme que nous pensons sçauoir, c'est vne pièce, et"
bien petite, de nostre ignorance, II, 226.
C'est à la vérité vne tres-vtile et grande partie que la science : ceux qui la mes-
prisent tesmoignent assez leur bestise : mais ie n'estime pas pourtant sa valeur
iusqucs à cette mesure extrême qu'aucuns luy attribuent. Comme Herillus le phi-
losophe, qui logeoit en elle le souuerain bien, et tenoit qu'il fust en elle de nous
rendre sages et contens : ce que ie ne croy pas : ny ce que d'autres ont dict, que
la science est mère de toute vertu, et que tout vice est produit par l'ignorance.
Si cela est vray, il est subicct à vne longue interprétation, II, 110.
La science est vn bien, à le regarder d'yeux fermes, qui a, comme les autres
biens des hommes, beaucoup de vanité, et foiblesse propre et naturelle : et d'vn
cher coust. L'acquisition en est bien hazardcuse. Nous auallons les sciences en les
achettans, et sortons du marché ou infects dcsia, ou amendez. Il y en a, qui ne
font que nous empescher et charger, au lieu de nourrir : et telles encore, qui
sous liltre de nous guarir, nous empoisonnent, III, 550.
Les païsants simples, sont honnestes gents : et honnestes gents les Philosophes :
ou, selon que nostre temps les nomme, des natures fortes et claires, enrichies
d'vne large instruction de sciences vtiles. Les mestis, qui ont dédaigné le pre-
mier siège de l'ignorance des lettres, et n'ont peu ioindre l'autre, le cul entre
deux selles (desquels ie suis, et tant d'autres) sont dangereux, ineptes, impor-
tuns : ceux-cy troublent le monde, I, 572.
La science n'est pas pour donner iour à l'aïue qui n'en a point : uy pour faire
voir vn aueugle. Son niestier est, non de luy fournir de veuë, mais de la luy
dresser, de luy régler ses allures, pourueu qu'elle aye de soy les pieds, et les
iambes droites et capables. C'est vne bonfic drogue, mais nulle drogue n'est assés
forte, pour se preseruer sans altération et corruption, selon le vice du vase qui
l'estuye, I, 218.
Or il ne faut pas attacher le sçauoir à l'ame, il l'y faut incorporer : il ne l'en
faut pas arrouser, il l'en faut teindre ; et s'il ne la change, et meliore son estât
imparfaict, certainement il vaut beaucoup mieux le laisser là. C'est vn dange-
reux glaiue, et qui empesche et offence son maistre s'il est en main foible, et qui
n'en sçache l'vsagc, I, 216.
E.245 ESSAIS DE MONTAIGNE.
La plus part des amos ne se trouuent propres à l'aire leur profit (\r h\ •^ciiMicc :
qui, si elle ne se met à bien, se met à mal, I, 218.
Qui acquiert science, s'acquiert du trauail et tourment, II, 218.
Les difficultez et l'obscurité, ne s'apperçoyuent en chacune science, que par ceux
qui y ont entrée. Car encore faut il quelque degré d'intelligence, à pouuoir re-
marquer qu'on ignore : et faut pousser à vne porte, pour sçauoir qu'elle nous
est close. D'où naist cette Platonique subtilité, que ny ceux qui sçauent, n'ont à
s'enquérir, d'autant qu'ils sçauent : ny ceux qui ne sçauent, d'autant que pour
s'enquérir, il faut sçauoir, dequoy on s'enquiert, III, 620.
11 se peut dire auec apparence, qu'il y a ignorance abécédaire, qui va deuant
la science : vne autre doctorale, qui vient après la science : ignorance que la
science lait et engendre, tout ainsi comme elle deffait et destruit la première,
I, 570.
Nous ne sommes, ce croy-ic, sçauants, que do la science présente : non de la
passée, aussi peu que de la future, I, 210.
Qui fagoteroit suffisamment vn amas des asneries de l'humaine sapience, il di-
roit merueilles, II, 310.
Mais quand la science feroit par effect d'émousser et rabattre l'aigreur des in-
fortunes qui nous suyuent, que fait elle, que ce que fait beaucoup plus purement
l'ignorance et plus euidemment, II, 208.
Lors que les vrais maux nous faillent, la science nous preste les siens, II, 208.
Si ce que nous n'auons pas veu, n'est pas, nostre science est merueilleusement
raccourcie, II, 136.
Nous sçauons dire, Cicero dit ainsi, voila les meui-s de Platon, ce sont les mots
mesmes d'Aristote : mais nous que disons nous nous mesmes? que faisons nous?
que iugeonsnous? Autant en diroitbien vn perroquet, I, 210.
Nous nous laissons si fort aller sur les bras d'autruy, que nous anéantissons
nos forces, I, 212.
Nous prenons en garde les opinions et le sçauoir d'autruy, et puis c'est tout :
il les faut faire nostres, I, 210.
Sçauoir par cœur n'est pas sçauoir : c'est tenir ce qu'on a donné en garde à sa
mémoire, I, 240.
Fascheuse suffisance, qu'vne suffisance pure liuresque! I, 240.
A quoy faire la science, si l'entendement n'y est? I, 216.
Pour bien faire, il ne faut pas seulement loger Ja science chez soy, il la faut
espouser, I, 288.
La plus part des instructions de la science, à nous encoui-ager, ont plus de
montre que de force, et plus d'ornement que de fruict, III, 570.
11 y a des sciences stériles et épineuses, et la plus part forgées pour la presse :
il les faut laisser à ceux qui sont au seruice du monde, I, 426.
Toute cette nostre suffisance, qui est au delà de la naturelle, est à peu près
vaine et superflue. C'est beaucoup si elle ne nous charge et trouble plus qu'elle
ne nous sert, III, 550.
A on trouué que la volupté et la santé soient plus sauoureuses à celuy qui sçait
l'astrologie, et la grammaire : et la honte et la pauureté moins importunes? l'ay
veu en mon temps, cent artisans, cent laboureurs, plus sages et plus heureux
que des recteurs de l'vniuersité : et lesquels i'aimerois mieux ressembler, II, 202.
0 que c'est vn doux et mol cheuet, et sain, que l'ignorance et l'incuriosité, à
reposer vne teste bien faicte, III, 616.
SECRETS.
l'euite de prendre les secrets d'autruy en garde, n'ayant pas bien le cœur de
desaduouer ma science, le puis la taire, mais la nyer, ie ne puis sans effort et
desplaisir. Pour estre bien secret, il le faut estre par nature, non car obligation,
III, 188.
L'ESPRIT DES ESSAIS. SEN. E.247
SENS (des).
La première considération que i'ay sur le subiect des sens, est que ie mets en
double que l'homme soit prouueu de tous sens naturels. le voy plusieurs ani-
maux, qui viuent vnc vie entière et parfaicte, les vns sans la veuë, autres sans
l'ouye : (jui sçait si à nous aussi il ne manque pas encore vn, deux, trois, et plu-
sieui-s autres sens? Car s'il en manque quolqu'vn, nostre discours n'en peut dé-
couurir le défaut, II, 390. \
■ 11 est impossible de faire conceuoir à vn homme naturellement aueugle, qu'il
n'y void pas, impossible de luy faire désirer la veuë et regretter son défaut. Que
sçait-on si à faute de quelque sens, la plus part du visage des choses nous soit
caché? Si les diflicultez que nous trouuons en plusieurs ouurages de Nature,
viennent de là? II, 390.
Les proprietez que nous appelions occultes en plusieurs choses, comme à l'ay-
mant d'attirer le fer, n'est-il pas vraysemblable qu'il y a des facultez sensitiues
en Nature propres à les iuger et à les apperceuoir, et que le défaut de telles fa-
cultez, nous apporte l'ignorance de la vraye essence de telles choses? II, 391.
Les sectes qui combatent la science de l'homme, elles la combatent principale-
ment par l'incertitude et foiblesse de nos sens, II, 394.
Les sens sont le commencement et la fin de l'humaine cognoissance. Qu'on leur
attribue le moins qu'on pourra, tousiours faudra il leur donner cela, que par
leur voye et entremise s'achemine toute nostre instruction. La science commence
par .eux, et se résout en eux, II, 390.
De l'erreur et incertitude de l'opération des sens, chacun s'en peut fournir au-
tant d'exemples qu'il luy plaira : tant les faultes et tromperies qu'ils nous font,
sont ordinaires, II, 598.
Nous receuons les choses autres et autres selon que nous sommes, et qu'il nous
semble. Pour iuger des apparences que nous receuons des subjccts, il nous fau-
droit vn instrument iudicatoire : pour vérifier cet instrument, il nous y faut de
la démonstration : pour vérifier la démonstration, vn instrument, nous voila au
rouet, II, 408.
Cette mesme pipperie, que les sens apportent à nostre entendement, ils la re-
çoiuent à leur tour. Nostre ame par fois s'en reuenche de mesme, ils mentent, et
se trompent à l'enuy. Ce que nous voyons et oyons agitez de colère, nous ne
l'oyons pas tel qu'il est. L'obiect que nous aymons nous semble plus beau qu'il
n'est : et plus laid ccluy que nous auons à contre-cœur. A vn homme ennuyé et
affligé, la clarté du iour semble obscurcie et ténébreuse. Noz sens sont? non seu-
lement altérez, mais souuent hebetcz du tout, par les passions de l'ame. Com-
bien de choses voyons nous, que nous n'apperceuons pas, si nous auons nostre
esprit empesché ailleurs? Il semble que l'ame retire au dedans, et amuse les puis-
sances des sens. Par ainsin et le dedans et le dehors de l'homme est plein de foi-
blesse et de mensonge, II, 402.
SOCIÉTÉ.
Il n'est rien si dissociable et sociable que l'homme : l'vn par son vice, l'autre
par sa nature, I, 412..
La société des hommes se tient et se coust, à quelque prix que ce soit. En
quelque assiette qu'on les couche, ils s'appilent, et se rengent, en se remuant et
s'entassant : comme des corps mal vnis qu'on empoche sans ordre, trouuent
d'eux mesmes la façon de se ioindre, et s'emplacer, les vns parmy les autres :
souuent mieux, que l'art ne les eust sçeu disposer, III, 396.
En cette escole du commerce des hommes, i'ay souuent remarqué ce vice,
qu'au lieu de prendre cognoissancte d'autruy, nous ne trauaillons qu'à la donner
de nous : et soijimes plus en peine d'emploiter nostre marchandise, que d'en ac-
quérir de nouuelle, I, 244.
En compagnie, il faut auoir les yeux par tout : car les premiers sièges sont
communément saisis par les hommes moins capables, et les grandeurs de fortune
ne se trouuent gueres meslees à la suffisance, I, 246.
E.248 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Il nous fault prendre garde, combien c'est, de parler à son heure, de choisir son
poinct. de rompre le propos ou le changer, d'vne authorité magistrale : de so
deffendre des oppositions d'autruy, par vn mouuement de teste, vn sous-ris, ou
vn silence, deuant vne assistance, qui tremble de reuerence et de respect, I, 360.
Le masque des grandeurs, qu'on représente aux comédies, nous touche aucu-
nement et nous pippe, III, 358.
La douceur d'vne sortable et aggreable compagnie, ne se peut assez acheter à
mon gré, III, 444.
Vne ame bien née, et exercée à la practique des hommes, se rend plainemont •
aggreable d'elle mesme. L'art n'est autre chose que le contrerolle, et le registre
des productions de telles âmes, III, 148.
le fuis les complexions tristes, et les hommes hargneux, comme les em-
pestez, III, 506.
Nul plaisir n'a saueur pour moy sans communication. Il ne me vient pas seu-
lement vne gaillarde pensée en l'ame, qu'il ne me fasclie de l'auoir produit seul,
et n'ayant à qui l'olTrir. Mais il vaut mieux encore estre seul, qu'eu compagnie
ennuyeuse et inepte, III, 456.
SOTTISE.
La sottise et desreglement de sens, n'est pas chose guérissable par vn traict
d'aduertissement. Ce sont apprentissages, qui ont à estre faicts auant la main,
par longue et constante institution. Nous deuons ce soing aux nostres, et cette
assiduité de correction et d'instruction : mais d'aller prescher le premier pas-
sant, et régenter l'ignorance ou ineptie du premier rencontré, c'est vn vsage au-
quel ie veux grand mal, III, 364.
La sottise est vne mauuaise qualité, mais de ne la pouuoir supporter, et s'en
despiter et rouger, c'est vne autre sorte de maladie, qui ne doit guère à la sot-
tise, en importunité, III, 334.
Il est impossible de traitter de bonne foy auec vn sot, III, 338.
SOUVENIR.
Est-ce par nature, ou par ei-reur de fantasie, que la veuë des places, que nous
sçauons auoir esté hantées et habitées par personnes, desquelles la mémoire est
en recommendation, nous émeut aucunement plus, qu'ouïr le récit de leurs faicts,
ou lire leurs escrits? III, 476.
SUICIDE.
Il est heure de mourir lorsqu'il y a plus de mal que de bien à viure, I, 380.
Le présent que Nature nous ait faict le plus fauorable, et qui nous oste tout
moyen de nous pleindre de nostre condition, c'est de nous auoir laissé la clef des
champs. Elle n'a ordonné qu'vne entrée à la vie, et cent mille yssuës, I, 630.
S'il est mauuais de viure en nécessité, au moins de viure en nécessité, il n'est
aucune nécessité. Nul n'est mal long temps qu'à sa faute, I, 476.
Dieu nous donne assez de congé, quand il nous met en tel estât, que le viure
nous est pire que le mourir. C'est foiblesse de céder aux maux, mais c'est folie
de les nourrir, I, 632.
La Fortune peut toutes choses pour celuy qui est viuant; elle ne peut rien sur
celuy qui sçait mourir? I, 638.
Pourquoy te plains tu de ce monde? il ne te tient pas : si tu vis en peine, ta
lascheté en est cause : A mourir il ne reste que le vouloir, I, 630.
Il n'y a homme si coiiard qui n'ayme mieux tomber vne fois, qjie de demeurer
tousiours en bransle, I, 382.
L'Histoire est toute pleine de ceux qui en mille façons ont changé à la mort
vne vie peneuse, I, 642.
Comme ie n'offense les loix, qui sont faictes contre les larrons, quand i'em-
L'ESPRIT DES ESSAIS. SUI. E.249
porte le tiiion, ot que ie coupe ma bourse : ny des bout(>feuz, quand ie brusle
mon bois : aussi ne suis ie tenu aux loix laictes contre les meurtriers, pour m'a-
uoir osté ma vie, I, 632.
Il y a des polices qui se sont meslées de régler la iustice et opportunité deâ
morts volonfaii-es, I, 650.
De vray, ce n'est pas si grande chose, d'establir tout sain et tout rassis, de se
tuer; il est bien aisé de faire le mauuais, auantque de venir aux prises. De ceux
mesmes, qui se sont résolus à l'exécution, il faut voir, si <;'a este d'vn coup, qui
estait le loisir d'en sentir J'elTect. Car il est aduenu que tel résolu de mourir, et
de son pi-emier essay n'ayant donné assez auant, la dcniangéson de la chair luy
repoussant le bras, se reblessa bien fort à deux ou trois fois après, mais ne peut
iainais gaigner sur luy d'enfoncer le coup, II, 422.
Il y a des humeurs fantastiques et sans discours, qui ont poussé, non des hom-
mes particuliers seulement, mais des ])euples à se deffaire, I, 636.
C'est vue recepte, qui ne peut iamais manquer, et de laquelle il ne se faut ser-
uir tant qu'il y a vn doigt d'espérance de reste : le viure est quelquefois cons-
tance et vaillance, I, 636.
Celuy qui n'estime pas tant sa femme ou vn sien amy, que d'en allonger sa
vie, et qui s'opiniastre à mourir, il est trop délicat et trop mol : il faut que l'ame
se commande cela, quand l'vtilité des nostres le requiei't : il faut par fois nous
prester à noz amis : et quand nous voudrions mourir pour nous, interrompre
nostre dessein pour eux, I, 674.
Plusieurs tiennent, que nous ne pouuons abandonner cette garnison du
monde, sans le commandement exprès de celuy, qui nous y a mis; et que c'est à
Dieu, qui nous a icy enuoyez, non pour nous seulement, ains pour sa gloire et
seruice d'autruy, de nous donner congé, quand il luy plaira, non à nous de le
prendre : que nous ne sommes pas nays pour nous, ains aussi pour nostre païs :
les loix nous redemandent compte de nous, pour leur interest, et ont action
d'homicide contre nous, I, 632.
C'est contre Nature, que nous nous mesprisons et mettons nous mesmes à nôn-
chaloir; c'est vne maladie particulière, et qui ne se voit en aucune autre créa-
ture de se hayr et desdaigner, I, 644.
11 y a bien plus de constance à vser la chaîne qui nous tient, qu'à la rompre :
C'est l'indiscrétion et l'impatience, qui nous haste le pas, I, 632.
C'est le rolle de la couardise, non de la vertu, de s'aller tapir dans vn creux,
souz vne tombe massiue, pour euitor les coups de la Fortune. Elle ne rompt son
chemin et son train, pour orage qu'il face, I, 634.
Tous les inconueniens ne valent pas qu'on vueille mourir pour les euiter. Et
puis y ayant tant de soudains changemens aux choses humaines, il est malaisé
à iuger, à quel poinct nous sommes iustement au bout de nostre espérance, I, 636.
Il y a grand doubte sur ce, quelles occasions sont assez iustes, pour faire en-
trer vn homme en ce party de se tuer : Car quoy qu'ils dient, qu'il faut souuent
mourir pour causes légères, puis que celles qui nous tiennent en vie, ne sont
gucros fortes, si y faut-il quelque mesure, I, 636.
La douleur, et vne pire mort, me semblent plus excusables incitations, I, 652.
On désire quelquefois la mort, pour l'espérance d'vn plus grand bien, par vn
grand appétit de la vie aduenir, par où il appert combien improprement nous
appelions desespoir cette dissolution volontaire, à laquelle nous porte souuent,
vne tranquille et rassise inclination de iugement, I, 650.
L'histoire Ecclésiastique a en reuerence plusieurs tels exemples de personnes
dénotes qui appelèrent la mort à garant contre les outrages que les tyrans pre-
paroient à leur religion et conscience, I, 610.
TESTAMENT.
En gênerai, la plus saine distribution de noz biens en mourant, me semble estre
les laisser distribuer à l'vsage du pais. Los loix y ont mieux pensé que nous : et
vaut mieux les laisser faillir en leur eslection, que de nous hazarder de faillir té-
mérairement en la nostre. Ils ne sont pas proprement nôstres, puis que d'vne
E.230 ESSAIS DE MONTAIGNE.
prescription ciuile et sans nous, ils sont destinez à certains successeurs. Et en-
core que nous ayons quoique liberté audelà, ie tien qu'il faut vne f^rande cause
et bien apparente pour nous faire oster à vn, ce que sa Fortune luy auoit ac-
quis, et à quoy la iustice commune rapi)elloit : et que c'est abuser contre raison
de cette liberté, d'en seruir noz fantasies friuoles et priuées, II, 42.
l'ay veu plusieurs do mon temps conuaincus par leur conscience retenir de
l'autruy, se disposer à satisfaire par leur testament, et après leur decés. Ils no
font rien (jue vaille. Ny de prendre terme à chose si pressante, ny de vouloir
restablir vne iniure auec si peu de leur ressentiment et interest. Ils doiuent du
plus leur, I, 5(3.
Ceux là font encore pis, qui reseruent la déclaration de quelque haineuse vo-
lonté enuers le procjie à leur dernière volonté, l'ayants cachée pendant la vie,
I, 56.
TORTURE.
C'est vne dangereuse inuention que celle des géhennes, et semble que ce soit
plustost vn essay do patience que de vérité. Et celuy qui les peut souffrir, cache
la vérité, et celuy qui ne les peut souffrir, I, 662.
Pour dire vray, c'est vn moyen plein d'incertitude et do danger. Que ne diroit
on, que feroit on pour fuyr à si griefues douleurs? D'où il adulent, que celuy
que le iuge a géhenne pour ne le faire mourir innocent, il le face mourir et in-^
nocent et géhenne. Mille et mille en ont chargé leur teste de faulces confessions,
1,662.
TRAHISON.
Celuy enuers qui vous en trahissez vn, duquel vous estes pareillement bien
venu : sçait-il pas, que de soy vous en faites autant à son tour? Il vous lient
pour vn meschant homme : ce pendant il vous oit, et tire de vous, et fait ses af-
faires de vostre desloyauté. Car les hommes doubles sont vtiles, en ce qu'ils ap-
portent : mais il se faut garder, qu'ils n'emportent que le moins qu'on peut,
III, 86.
Si la trahison doit estre en quelque cas excusable : lors seulement elle l'est,
qu'elle s'employe à chastier et trahir la trahison, III, 94.
TRISTESSE.
le suis des plus exempts de cette passion, et ne l'ayme ny l'estime : quoy que
le monde ayt entrepris, comme à prix faict, de l'honorer de faneur particulière.
Ils en habillent la sagesse, la vertu, la conscience. Sot et vilain ornement, I, 22.
TROUBLES POLITIQUES (guerres civiles).
Est-il quelque mal en vne police, qui vaille estre combatu par vne drogue si
mortelle que la guerre ciuile? Non pas, disoit Fauonius, l'vsurpation de la pos-
session tyrannique d'vne republique. Platon de mesme ne consent pas qu'on face
violence au repos de son pais, pour le guérir : et n'accepte pas l'amendement
qui trouble et hazarde tout, et qui couste le sang et ruine des citoyens, III, 558.
De se tenir chancelant et mestis, de tenir son affection immobile, et sans in-
clination aux troubles de son pays, et en vne diuision publique, ie ne le trouue
ny beau, ny honneste : Cela peut estre permis enuers les affaires des voysins :
ce seroit vne espèce de trahison, de le faire aux propres et domestiques affaires,
ausquels nécessairement il faut prendre party : mais de ne s'embesongner point,
à homme qui n'a ny charge, ny commandement exprez qui le presse, ie le
trouue plus excusable qu'aux guerres estrangeres : desquelles pourtant, selon
nos loix, ne s'empesche qui ne veut. Toutesfois ceux encore qui s'y engagent tout
à faict, le peuuent, auec tel ordre et attrempance, que l'orage debura couler par
dessus leur teste, sans offence, III, 84.
L'ESPRIT DES ESSAIS. TRO. B.251
Quand ma volonté nie donne à vn party, ce n'est pas d'vne si violente obliga-
tion, que mon entendement s'en infecte. Aux presens brouillis de cet estât, mon
interest ne m'a faict mescognoistre, ny les qualitez louables en noz aduersaires,
ny celles qui sont reprochables en ceux que i'ay suiuy. Ils adorent tout ce qui
est de leur costé : moy ie n'excuse pas seulement la plus part des choses, qui
sont du mien. Vn bon ouurage, ne perd pas ses grâces, pour plaidei^contre moy.
Hors le nœud du débat, ie me suis maintenu en equanimité, et pure indirt'eronce,
• III, m).
Rien n'empesche qu'on ne se puisse comporter commodément entre des hom-
mes qui se sont ennemis, et loyalement : conduisez vous y d'vne, sinon par tout
esgale aflection (car elle peut soulfrir différentes mesures) au moins tempérée, et
qui ne vous engage tant à l'vn, qu'il puisse tout requérir de vous. Et vous con-
tentez aussi d'vne moienne mesure de leur grâce : et de couler en eau trouble,
sans y vouloir pescher, III, 86.
le veux que l'aduantage soit pour nous : mais ie ne forcené point, s'il ne l'est.
le me prens fermement au plus sain des partis. Mais ie n'affecte pas qu'on me
remarque spécialement, ennemy des autres, et outre la raison generalle, III, 502.
Ceux qui allongent leur cholere, et leur haine delà des affairesj comme faict la
plus part, montrent qu'elle leur part d'ailleurs, et de cause particulière, III, 502.
A nous autres petis, il faut fuyr l'orage de plus loing : il faut pouruoir au sen-
timent, non à la patience; et escheuer aux coups que nous ne scaurions parer,
III, 508.
Il faut viurc par droict, et par auctorilé, non par recompense ny par grâce.
Combien de galans hommes ont mieux aymé perdre la vie, que la deuoir? III, 416.
On peut regretter les meilleurs temps : mais non pas iuyr aux presens : on
peut désirer autres magistrats, mais il faut ce nonobstant, obeyr à ceux icy. Et
à l'aduanture y a il plus de recommendation d'obeyr' aux mauuais, qu'aux bons,
III, 470.
Les dissentions intestines produisent souuent ces vilains exemples : Que nous
punissons les priuez, de ce qu'Hs nous ont creu, quand nous estions autres. Et
vn mesme magistrat fait porter la peine de son changement, à qui n'en peut
mais. Le maistre foitte son disciple de docilité, et la guide son aueuglc. Horrible
image de iustice, III, 102.
VANITÉ (présomption).
Nostre monde n'est formé qu'à l'ostentation. Les hommes ne s'enflent que de
vent : et se manient à bonds, comme les balons, III, 546.
Que nous presche la vérité : que nostre sagesse n'est que folie deuant Dieu :
que de toutes les vanitez la plus vaine c'est l'homme : que l'homme qui présume
de son seauoir, ne sçait pas encore que c'est que sçauoir : et que l'homme, qui
n'est rien, s'il pense estre quelque chose, se séduit soy-mesmes, et se trompe?
I, 132.
C'est par la vanité qu'il s'égale à Dieu, qu'il s'attribue les conditions diuines,
qu'il .se trie soy-mesme et sepaji'e de la presse des autres créatures, taille les parts
aux animaux ses confrères et compagnons, et leur distribue telle portion de fa-
cultez et de forces, que bon luy semble, II, 136.
VENGEANCE.
Chacun sent bien, qu'il y a plus de brauerie et desdain, à battre son ennemy,
qu'à l'acheuer, et de le faire bouquer, que de le faire mourir. D'auantage que
l'appétit de vengeance s'en assouuit et contonte mieux : car elle ne vise qu'à don-
ner ressentiment de soy. Voyla pourquoy, nous n'attaquons pas vne beste, ou
vne pierre, quand elle nous blesse, d'autant qu'elles sont incapables de sentir
nostre reuenche. Et de tuer vn homme, c'est le mettre à l'abry de nostre offence
et lui prêter le plus fauorable de touts lys offices de la vie^ qui est de mourir
promptement et insensiblement, II, 570.
E.2o2 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Tuer son ennemi est bon pour euiter l'offonce à venir, non pour venger celle
qui est laicte. C'est vne action plus de crainte, que de brauerie : de précaution,
que de courage : Nous quittons par là la vraye fin de la vengeance et auons à
conniller, à trotter et à fuir les officiers de la iustice qui nous suyuent et luy est
en repos, II, 572.
Tout ainsin est à plaindre la vengeance, quand celuy enuers lequel elle s'eni-
ploye, pert le moyen de la souffrir. Car comme le vengeur y veut voir, pour eu
tirer du plaisir, il faut que celuy sur lequel il se venge, y voye aussi, pour en
receuoir du dcsplaisir, et de la repentance, II, 570.
VÉRITÉ (philosophie).
La voye de la vérité est vne et simple, celle du profit particulier, et de la com-
modité des affaires, qu'on a en charge, double, inégale, et fortuite, III, 90.
Pour le profit des hommes, il est souuent besoin de les piper, II, 248.
La vérité a ses empeschements, incommoditez et incompatibilitez auec nous.
Il nous faut souuent tromper, afin que nous ne nous trompions. Et siller nostre
veuë, estourdir nostre entendement, pour les redresser et amender, III, 490.
Nous ne sentons rien, nous ne voyons rien, toutes choses nous sont occultes,
il n'en est aucune de laquelle nous puissions establir quelle elle est, II, 244.
VERSATILITÉ.
Ceux qui s'exercent à contreroller les actions humaines, ne se trouuent en au-
cune partie si empeschez, qu'à les r'apiesser et mettre à mesme lustre : car elles
se contredisent communément de si estrange façon, qu'il semble impossible
qu'elles soient parties de mesme boutique, I, 600.
Non seulement le vent des accidens me remue selon son inclination : mais en
outre, ie me remue et trouble moy mesme par l'instabilité de ma posture, et qui
y regarde primement, ne se trouue guère deux fois en mesme estât. le donne
à mon ame tantost vn visage, tantost vn autre, selon le costé où ie la couche.
Si ie parle diuersement de moy, c'est que ie me regarde diuersement. Toutes
les contrarietez s'y trouuent, selon quelque tour, et en quelque façon : Honteux,
insolent, chaste, luxurieux, bauard, taciturne, laborieux, délicat, ingénieux, hé-
bété, chagrin, débonnaire, menteur, véritable, sçauant, ignorant, et libéral et
auare et prodigue : tout cela ie le vois en moy aucunement, selon que ie me
vire : et quiconque s'estudie bien attentifuement, trouue en soy, voire et en son
iugement mesme, cette volubilité et discordance. le n'ay rien à dire de moy,
entièrement, simplement, et solidement, sans confusion et sans meslange, ny en
vn mot. Distinguo, est le plus vniuersel membre de ma Logique, I, 606.
Qui pour me voir une mine tantost froide, tantost amoureuse enuers ma femme,
estime que l'vne ou l'autre soit feinte, il est vn sot, I, 408.
Il n'est pas estrange de plaindre celuy-là mort, qu'on ne voudroit aucunement
estre en vie, I, 406.
Nous auons poursuiuy auec résolue volonté la vengeance d'vne iniure, et res-
senty vn singulier contentement de la victoire; nous en pleurons pourtant ; ce
n'est pas de cela que nous pleurons : il n'y a rien changé: mais nostre ame re-
garde la chose d'vn autre œil, et se la représente par vn autre visage : car chasque
chose a plusieurs biais et plusieurs lustres, I, 408.
Nulle qualité nous embrasse purement et vniuersellement, I, 408.
En nostre ame, bien qu'il y ait diuers mouuements, qui l'agitent, si faut-il
qu'il y en ayt vn à qui le champ demeure : mais pas auec si entier auantage,
que les plus foibles par occasion ne regaignent encores la place, I, 406.
Nostre façon ordinaire c'est d'aller après les inclinations de nostre appétit, à
gauche, à dextre, contremont, contre-bas, selon que le vent des occasions nous
emporte : comme les choses qui flottent, ores doucement, ores auecques violence,
selon que l'eau est ireuse ou bonasse. Nous ne pensons ce que nous voulons, qu'à
l'instant que nous le voulons : et ce que nous auons à cett'heure proposé, nous le
L'ESPRIT DES ESSAIS. VER. E.253
changeons tantost, et tantost encore retournons sur nos pas : ce n'est que branle
et inconstance, I, G02.
N'est-ce pas vn singulier tesraoignage d'imperfection, ne pouuoir r'assoir nostre
contentement en aucune chose, et que par désir mesme et imagination il soit
hors de nostre puissance de choisir ce qu'il nous faut? I, 566.
Non par iouj'ssance, mais par imagination et par souhait, nous^ne pouuons
estre d'accord de ce dequoy nous auons besoing pour nous contenter. Laissons
à nostre pensée tailler et coudre à sou plaisir : elle ne pourra pas seulement dé-
sirer ce qui luy est propre, et le satisfaire, II, 368.
VERTU.
La douleui", la volupté, l'amour, la haine, sont les premières choses, que sent
vn enfant : si la raison suruenant elles s'appliquent à elle: cela c'est vertu, III, 694.
La vertu présuppose de la difficulté et du contraste, elle ne peut s'exercer sans
partie. C'est à l'auenture pourquoy nous nommons Dieu bon, foi't, et libéral, et
iuste, mais nous ne le nommons pas vertueux. Ses opérations sont toutes naifues
et sans effort, II, 86.
La vertu est chose autre, et plus noble, que les inclinations à la bonté, qui
naissent en nous. Les âmes réglées d'elles mesmes et bien nées, elles suyuent
mesme train, et représentent en leurs actions, mesme visage que les vertueuses.
Mais la vertu sonne ie ne sçay quoy de plus grand et de plus actif, que de se
laisser par vne heureuse complexion, doucement et paisiblement conduire à la
suite de la raison, II, 84.
Les principaux bienfaicts de la vertu, le mépris de la mort est le moyen qui
fournit nostre vie d'vne molle tranquillité, et nous en donne le goust pur et
amiable sans qui toute autre volupté est esteinte, I, 110.
Si la fortune comnmne luy faut, la vertu luy esc happe; ou elle s'en passe, et
s'en forge vne autre toute sienne : non plus flottante et roulante : elle sçait estre
riche, et puissante, et sçauante, et coucher en des matelats musquez. Elle aime
la vie, elle aime la beauté, la gloire, et la santé. Mais son office propre et parti-
culier, c'est sçauoir vser de ces biens là regléement, et les sçauoir perdre cons-
tamment, I, 260.
La vertu se contente de soy : sans discipline, sans paroles, sans effects, I, 416.
La vertu n'aduoiie rien, que ce qui se faict par elle, et pour elle seule, I, 400.
11 faut aymer la vertu pour elle mesme, II, 492.
11 n'eschoit pas de recompense à vne vertu, pour grande qu'elle soit, qui est
passée en coustume : et ne sçay auec, si nous l'appellerions iamais grande, estant
commune, II, 12.
Nous pouuons saisir la vertu, de façon qu'elle deuiendra vicieuse : si nous l'em-
brassons d'un désir trop aspre et violant, I, 344.
On peut et trop aymer la vertu, et se porter excessiuement en vne action iuste,
I, 344.
Voyla pourquoy quand on iuge d'vne action particulière, il faut considérer
plusieurs circonstances, et l'homme tout entier qui l'a produicte, auant la bap-
tizer, II, 94.
L'estrangeté de nostre condition, porte que nous soyons souuent par le vice
mesme poussez à bien faire; si le bien faire ne se iugeoit par la seule intention.
Parquoy vn fait courageux ne doit pas conclurre vn homme vaillant : celuy qui
le seroit bien à poinct, il le seroit tousiours, et à toutes occasions. Si c'estoit
vne habitude de vertu, et non vne saillie, elle rendroit vn homme pareillement
résolu à tous accidens : tel seul, qu'en compagnie : tel en camp clos, qu'en vne
bataille : car quoy qu'on die, il n'y a pas autre vaillance sur le paué et autre au
camp. Aussi courageusement porteroit il vne maladie en son lict, qu'vnc bles-
sure au camp : et ne craindroit non plus la mort en sa maison qu'en vn assaut.
Nous ne verrions pas vn mesme homme, donner dans la bresche d'vne braue
asseurance, et se tourmenter après, comme vne femme, de la perte d'vn procez
ou d'vn fils. Quand estant lasclie à l'infamie, il est ferme à la pauureté : quand
E.254 ESSAIS DES MONTAIGNE.
estant mol contre les rasoirs des barbiers, il se troiiue roide contre les espées des
aduei'saires ; l'action est louable, non pas l'homuie, I, 008.
Nostre vertu mesine est fautiere et repentable, I, G80.
La vertu refuse la facilité pour compagne; cette aisée, douce, et pancliante
voie, par où se conduisent les pas réglez d'vne bonne inclination de nature,
n'est pas celle de la vraje vertu. Elle demande vn chemin aspre et espineux,
elle veut auoir des diflicullez estrangeres à luicter, II, 88.
Nuls accidens ne font tourner le dos à la viue vertu : elle cherche les maux et
la douleur, comme son aliment. Les menasses des tyrans, les géhennes, et les
bouireaux, l'animent et la viuifient, I, 632.
Quoy qu'ils «lient, on la vertu mesmo, le dei-nier but de nostre visée, c'est la
volupté : mot qui, signifiant quelque suprême ))laisir, et excessif contentement,
est mieux dçu à l'assistance de la vei-tu, qu'à nulle autre assistance, I, 108.
Le prix et hauteur de la vraye vertu, est en la facilité, vtilité et plaisir de sou
exercice : si esloigné de difficulté, que les enfans y peuuent comme les hommes,
les simples comme les subtilz. Le règlement c'est son vtil, non pas la force. C'est
la mère nourrice des plaisirs humains. En les rendant iustes, elle les rend seurs et
purs. Les modérant, elle les tient en haleine et en appétit. Retranchant ceux
qu'elle refuse, elle nous aiguise enuers ceux qu'elle nous laisse : et nous laisse
abondamment tous ceux que veut nature : et iusques à la satiété, sinon iusques à
la lasseté; maternellement, I, 260.
Nous auons grand tort de dire, quand nous venons à la vertu, que les suittes
et difficultez qui l'accablent, la rendent austère et inaccessible. Elles anoblissent,
aiguisent, et rehaussent le plaisir diuin et parfaict, qu'elle nous moienne, et ce-
luy là est certes bien indigne de son accointance, qui contrepoise son coust, à
son fruict : il n'en cognoist ny les grâces ny l'vsage, I, 108.
le voy que plusieurs vertus, comme la chasteté, sobriété, et tempérance, peuuent
arriuer à nous, par deffaillance corporelle. La fermeté aux dangers, si fermeté
il la faut appcUei-, le mcspris de la mort, la patience aux infortunes, peut venir
et se treuue souuent aux hommes, par faute de bien iuger de tels accidens, et ne
les conceuoir tels qu'ils sont. La faute d'appréhension et la bestise, contrefont
ainsi par fois les effects vertueux. Comme i'ay veu souuent aduenir, qu'on a
loué des hommes, de ce, dcquoy ils meritoyent du blasrae, II, 92.
A quelque chose sert le mal'heur. Il fait bon naistre en vn siècle fort depraué :
car par comparaison d'autruy, vous estes estimé vertueux à bon marché. Qui
n'est que parricide en nos iours et sacrilège, il est homme de bien et d'honneur,
II, 490.
C'est chose facile et lasche que de mal faire; de faire bien, où il n'y eust point
de danger, c'est chose vulgaire : de faire bien, où il y ayt danger, c'est le pro-
pre office d'vn homme de vertu, II, 88.
VICES.
Socrates disoit, que le principal office de la sagesse est distinguer les biens et
les maux: Nous autres, à qui le malheur est tousiours en vice, deurions de mesmo
auoir la science de distinguer les vices : sans laquelle, bien exacte, le vertueux
et le meschant demeurent meslez et incognus, I, 612.
Il faut voir son vice, et l'estudier, pour le redire : ceux qui le cèlent à autruy,
le cèlent ordinairement à eux mesmes ; et ne le tiennent pas pour assés couuert,
s'ils le voyent. Ils le soustrayent et desguisent à leur propre conscience, III, 186.
Les vices sont tous pareils en ce qu'ils sont tous vices : mais encore qu'ils soyent
également vices, ils ne sont pas égaux vices. Et que celuy qui a franchi de cent
pas les limites, ne soit pas de pire condition, que celuy qui n'en est qu'à dix
pas, il n'est pas croyable : et que le sacrilège ne soit pire que le larrecin d'vn
chou de nostre iardin : Il y a autant en cela de diuersité qu'en aucune autre chose,
I, 012.
le tiens pour vices, mais chacun selon sa mesure, non seulement ceux que la
raison et la nature condamnent, mais ceux aussi que l'opinion des hommes a
forgé, voire fauce et erronée, si les loix et l'vsage l'auctorise, III, 112.
L'ESPRIT DES ESSAIS. VIC. E.2o5
Il n'est véritablement vice qui n'offence, et qii'vn iugement entier n'accuse.
Car il a de la laideur et incommodité si apparente, qu'à l'aduanture ceux-là ont
raison, qui disent, qu'il est principalement produict par bestise et ignorance :
tant est-il mal-aisé d'imaginer qu'on le cognoisse sans le haïr. La malice hume
la pluspart de son venin, et s'en empoisonne, III, IIJ.
Aucuns, ou poyr estre collez au vice d'vne attache naturelle, 0l^ par longue
accoustumauce, n'en trouueut plus la laideur. A d'autres, le vice poise, mais ils le
contrebalancent auec le plaisir, ou autre occasion : et le souffrent et s'y prestent,
à certain i)rix. Vitieusement pourtant, et lasehement, III, 122.
L'aml>ition, l'auarice, l'irrésolution, la peur et les concupiscences, ne nous aban-
donnent jjoint pour changer de contrée : Elles nous suiuent sonnent iusques
dans les cloistres, et dans les escoles de Philosophie. Ny les dcsers, ny les rochers
creusez, ny la hère, ny les ieusnes, ne nous en démeslent, I,-412.
C'est vne tres-vtile impression, que les vices, quand ils se desroberont de la
veuë et cognoissance de l'humaine iustice, demeurent tousiours en butte à la di-
uine, qui les poui-suyura, voire après la mort des coulpables, II, 322.
Ny les Dieux, ny les gens de bien, dict Platon, n'acceptent le présent d'vn mes-
chant, I, 594.
Combien auons nous de mestiers et vacations receuës, dequoy l'essence est vi-
cieuse? I, 582.
Il y a des vices légitimes, comme plusieurs actions, ou bonnes, ou excusables,
illégitimes. La iustice en soy, naturelle et vniuerselle, est autrement réglée, et
plus noblement, que n'est cette autre iustice spéciale, nationale, contrainte au
besoing de nos polices, III, 90.
La corruption du siècle se fait, par la contribution particulière de chacun de
nous. Les vns y confèrent la trahison, les autres l'iniustice, l'irréligion, la tyran-
nie, l'auarice, la cruauté, selon qu'ils sont plus puissans : les plus foibles y ap-
portent la sottise, la vanité, l'oisiueté, III, 378.
C'est dommage qu'vn meschant homme ne soit encore vn sot, et que la décence
pallie son vice, III, 190.
VIE.
Ceux qui ont apparié nostre vie à vn songe, ont eu de la raison, à l'aduanture
plus qu'ils ne pensoyeut. Quand nous songeons, nostre ame vit, agit, exerce
toutes ses facultez, ne plus ne moins que quand elle veille ; mais si plus moUe-
lement et obscurément: là elle dort, icy elle sommeille plus et moins; ce sont
tousioui's ténèbres, et ténèbres Cynimeriennes. Nous veillons dormants, et veil-
lants dormons : pourquoy ne mettons nous en doul>te, si nostre i)enser, nostre
agir, est pa.s vn autre songer, et nostre veiller, quelque espèce de dormir? II, 404.
La vie est vn mouuement inégal, Irregulier, et multiforme, III, 13G.
La raison nous ordonne bien d'aller tousiours mesme chemin, mais non toutes-
fois mesme train. Quand la vertu mesme seroit incarnée, ie croy que le poux
luy battroit plus fort allant à l'assaut, qu'allant disner : voire il est nécessaire
qu'elle s'eschaulfe et s'csmeuue, I, 500.
Les plus belles vies, sont à mon gré celles, qui se rangent au modelle commun
et humain auec ordre : mais sans miracle, sans extrauagance, III, 704.
Les ieunes se doiuent faire instruire; les hommes s'exercer à bien faire : les
vieux se retirer de toute occupation ciuile et militaire, viuants à leur discré-
tion, sans obligation à certain office, I, 418.
Si vous auez vescu vn iour, vous auez tout veu : vn iour est égal à tous iours.
Il n'y a point d'autre lumière, ny d'autre nuict. Ce Soleil, cette Lune, ces Estoil-
les, cette disposition, c'est celle mesme que vos ayeuls ont iouj^e, et qui entretien-
dra vos arriere-nepueux : au pis aller, la distribution et variété de tous les actes
de ma comédie, se parfournit en vn an. Si vous auez pris garde au branle de
mes quatre saisons, elles embrassent l'enfance, l'adolescence, la virilité, et la
vieillesse du monde. 11 a ioiié son ieu : il n'y sçait autre finesse, que de recom-
mencer; ce sera tousiours cela mesme, I, 126.
E.2[i6 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Où que vostre vie finisse, elle y est toute. L'vtilité du viure n'est pas en l'es-
pace : elle est en l'vsage. Tel a vescu long temps, qui a peu vescu, I, 128.
11 faut apprendre à souffi-ir, ce qu'on ne peut euiter. Nostre vie est composée,
comme l'harmonie du monde, de choses contraires, les biens et les maux j- sont
consubstantiels. Nostre estre ne peut sans ce meslange; et y est l'vne bande non
moins nécessaire que l'autre, III, 648.
Le glorieu.v chef-d'œuvre de l'homme, c'est viure à propos. Toutes autres
choses : régner, tliesauriser, bastir, n'en sont qu'appendicules et adminicules,
pour le plus. C'est aux petites âmes enseuelies du i)oix des affaires, de ne s'en
sçauoir purement desmesler : de ne les sçauoir et laisser et reprendre, III, 688.
Nostre principalle suffisance, c'est sçauoir s'appliquer à diuers vsages. C'est
estre, mais ce n'est pas viure que se tenir attaché et obligé par nécessité, à vn
seul train. Les plnS belles âmes sont celles qui ont plus de variété et de .sou-
plesse. III, 136.
Qui oublieroit de bien et saintement viure; et penseroit estre quitte de son
deuoir, en y acheminant et dressant les autres; ce serait vn sot. De mesnie, qui
abandonne en son propre, le sainement et gayement viure, pour en seruir au-
truy, prent à mon gré vn mauuais et desnaturé pai-ty, III, 492.
La vie n'est de soy ny bien ny mal : c'est la place du bien et du mal, selon que
vous la leur faictes, I, 126.
Aucun ne fait certain dessein de sa vie, et n'en délibérons qu'à parcelles, 1,610.
Ce n'est pas merueille que le hazard puisse tant sur nous, puis que nous viuons
par hazai'd : à qui n'a dressé en gros sa vie à vne certaine fin, il est impossible
de disposer les actions particulières, I, 610.
Il faut estre tousiours botté et prest à partir, en tant que en nous est, et sur
tout se garder qu'on n'aye lors affaire qu'à soy : car nous y aurons assez de be-
songne, sans autre surcrois, I, 118.
L'opinion qui desdaigne nostre vie, est ridicule : car en fin c'est nostre estre,
c'est nostre tout. C'est de pareille vanité, que nous desirons estre autre chose, que
ce que nous sommes, I, 634.
Nostre vie est partie en folie, partie en prudence. Qui n'en escrit que reuerem-
ment et régulièrement, il en laisse en arrière plus de la moitié, III, 270.
Il y a tant de mauuais pas, que pour le plus seur, il faut vn peu légèrement et
superficiellement couler ce monde : et le glisser, non pas l'enfoncer. La volupté
mesme, est douloureuse en sa profondeur, III, 488.
La carrière de noz désirs doit estre circonscripte, et restraincte, à vn court li-
mite, des commoditez les plus proches et contigues, III, 498.
Le ieune doit faire ses apprests, le vieil en iouïr, disent les sages. Et le plus
grand vice qu'ils remerquont en nous, c'est que noz désire raieunissent sans
cesse. Nous recommençons tousiours à viure, II, 586.
Nous sommes nés pour agir : ie veux qu'on agisse, et qu'on allonge les offices de
la vie, tant qu'on peut : et que la mort me treuue plantant mes choux; mais
nonchallant d'elle, et encore plus de mon iardin imparfait, I, 120.
11 n'y a rien de mal en la vie, pour celuy qui a bien comprins, que la pri na-
tion de la vie n'est pas mal, I, 116.
C'est le viure heureusement, non le mourir heureusement, qui fait l'humaine
■félicité, III, 132.
Il faut souffrir doucement les loix de nostre condition. Nous sommes pour vieil-
lir, pour affoiblir, pour estre malades, en despit de toute médecine, III, 646.
11 y a en la vie plusieurs accidens pires à souffrir que la mort mesme, 1,630.
Tant les hommes sont accoquinez à leur estre misérable, qu'il n'est si rude con-
dition qu'ils n'acceptent pour s'y conseruer, III, 24.
Les Stoïciens disent, que c'est viure conuenablement à Nature, pour le sage, de
de se départir de la vie, encore qu'il soit en plein heur, s'il le faict opportuné-
ment : et au fol de maintenir sa vie, encore qu'il soit misérable, pourueu qu'il
soit en la plus grande part des choses, qu'ils disent estre selon Nature, 1, 632.
La loy de viure aux gens de bien, ce n'est pas autant qu'il leur plaist, mais
autant qu'ils doiuent, III, 67 L
C'est tesmoignage de grandeur de courage, de rotournei- en la vie pour la con-
LESPRIT DES ESSAIS. VIE. E.2HT
sideratioii d'autruy, comme plusieurs excellens personnages ont faict : et est vn
traict de bonté singulière, de conseruer la vieillesse, (de laquelle la commodité la
plus grande c'est la nonchalance de sa durée, et vn plus courageux et desdai-
gneux vsage de la vie,) si on sent que cet office soit doux, aggreable, et profitable
à jquelqu'vn bien affectionné : c'est quelquefois magnanimité que viure, II, 676.
Au iugement de la vie d'autruy, ie regarde tousiours comment s'eh est porté
le bout, et des principaux estudes de la mienne, c'est qu'il se porte bien, c'est à
dire quietemont et sourdement, I, lOG.
VIE PRIVÉE.
La forme de viure plus vsitée et commune, est la plus belle : toute particula-
rité, semble à euiter : l'vsage publiq donne loy, III, 680.
C'est vne vie exquise, celle qui se maintient en ordre iusques en son priué, III, 1 11.
Heureux, qui ait réglé à si iuste niesure son besoin, que ses richesses y puis-
sent suffire sans son soing et empeschement : et sans que leur dispensation ou
assemblage, interrompe d'autres occupations, qu'il suit, plus conuenables, plus
tranquilles, et selon son cœur, I, 474.
11 faut auoir femmes, enfans, bien, et sur tout de la santé, qui peut, mais non
pas s'y attacher en manière que nostre heur en despendc, I, 416.
Qui ne couue point ses enfans, ou ses honneurs, d'vne propension osclauo, ne
laisse pas de viure commodément après leur perte, III, 510.
Pourquoy asseruir nostre contentement à la puissance d'autruy? Anticiper les
accidens de fortune, se priuer des commoditez qui nous sont en main, comme
plusieurs ont fâict par deuotion, se seruir soy-mesnies, coucher sur la dure, ietter
ses richesses, reciierclier la douleur, c'est l'action d'vne A-ortu excessiue; ny la
raison, ny la nature ne le veulent. Il y a pour moy assez affaire sans aller si
auant : il me suffit souz la faueur de la fortune, me préparer à sa défaueur, I, 420.
Gaigner vne brèche, conduire vne ambassade, régir vn peuple, ce sont actions
esclatantes : tancer, rire, vendre, payer, aymer, hayr, et conuerser auec les
siens, et auec soy-mesme, doucement et iustement : ne relascher point, ne se
desmentir point, c'est chose plus rare, plus difficile, et moins remerquable, III, 1 16.
Tel a esté miraculeux au monde, auquel sa femme et son valet n'ont rien veu
seulement de remercable. Peu d'hommes ont esté admirez' par leurs domesti-
ques. Nul a esté prophète non seulement en sa maison, mais en son pais, dit
l'expérience des histoii'es. De mesmes aux choses de néant, III, 116.
Misérable à mon gré, qui n'a chez soy, où estre à soy : où se faire particuliè-
rement la cour : où se cacher, III, 156.
Il se faut reseruer vne arrière boutique, toute nostre, toute franche, en laquelle
nous establissions nostre vraye liberté et principale retraicte et solitude, I, 416.
VIE PUBLIQUE
0 que je feroy peu d'estat de ces grandes dignitez electiues, que ie voy au
monde, qui ne se donnent qu'aux hommes jjrests à partir : ausquelles on ne
regarde pas tant, combien deuement on les exercera, que combien peu longue-
ment on les exercera : dés l'entrée on vise à l'issue, I, 498.
Nous nous préparons aux occasions eminentes, plus par gloire que par cons-
cience. La plus courte façon d'arriuer à la gloire, ce seroit faire pour la cons-
cience ce que nous faisons pour la gloire, III, 118.
La vie commune doibt auoir conférence aux autres vies. La vertu de Caton
estoit vigoureuse, outre la raison de son siècle : et à vn homme qui se mesloit
de gouuerner les autres, destiné au seruice commun; il se pourroit dire, que
c'estoit vne iustice, sinon iniuste, au moins vaine et hors de saison! 111,464.
A ceux, qui nous régissent et commandent, qui tiennent le monde en leur
main, ce n'est pas assez d'auoir vn entendement commun : de pouuoir ce que
nous pouuons. Ils sont bien loing au dessoubs de nous, s'ils ne sont bien loing
au dessus. Comme ils promettent plus, ils doiuent aussi plus : et pourtant ! III, 352.
ESSAIS i)E MONTAIGNE. — T. IV. 17
E.2o8 ESSAIS DE MONTAIGNE.
La iurisdiction ne se donne point en faneur du iuridiciant : c'est en faueur du
iuridicié. On fait vn supérieur, non iamais pour son profit, ains pour le profit
de l'inférieur : et vn médecin pour le malade, non pour soj'. Toute magistrature,
comme tout art, iette sa fin hors d'elle, III, 293.
Nous ne sçauons pas distinguer les facultez des hommes. De conclurre par la
suffisance d'vne vie particulière, quelque suffisance à l'vsage public, c'est mal
conclud. Tel se conduict bien, qui ne conduict pas bien les autres, III, 4G6.
Les dignitez, les charges se donnent nécessairement, plus par fortune que par
mérite: et a Ion tort souuent de s'en prendre aux Roys. Au rebours c'est merueille
qu'ils y ayent tant d'heur, y ayans si peu d'adresse, III, 354.
Qui pourroit trouuer moyen, qu'on en peust iuger par iustice, et choisir les
hommes par raison, establiroit de ce seul trait, vne parfaite forme de police,
III, 358.
Toutes actions publiques sont subiectes à incertaines, et diuerses interpréta-
tions : car trop de testes en iugent, III, 518.
Toutes charges importantes ne sont pas difficiles, III, 518.
le n'aclîuse pas vn magistrat qui dorme, pourueu que ceux qui sont soubs sa
main, dorment quand et luy. Les loix dorment de mesme, III, 520.
C'est agir, pour sa réputation, et proffit particulier, non pour le bien, de re-
mettre à faire en la place, ce qu'on peut faire en la chambre du conseil : et en
plain midy, ce qu'on eust faict la nuict précédente, III, 520.
L'innouation est de grand lustre. L'abstinence de faire, est souuent aussi gé-
néreuse, que faire : mais elle est moins au iour, III, 524.
le serois d'aduis qu'on estendist nostre vacation et occupation autant qu'on
pourroit, pour la commodité publique : et ie trouue la faute en l'autre costé de ne
nous y embesongner pas assez tost, I, 596.
le ne veux pas qu'on refuse aux charges qu'on prend, l'attention, les pas, les
parolles, et la sueur, et le sang au besoing : mais c'est par emprunt et acciden-
talement; l'esprit se tenant tousiours en repos et en santé : non pas sans action,
mais sans vexation, sans passion, III, 492.
Combien de gens se bazardent tous les iours aux guerres, dequoy il ne leur
chault : et se pressent aux dangers des batailles, desquelles la perte, ne leur trou-
blera pas le voisin sommeil, III, 492.
Qui se vante, en vn temps malade, comme cestuy-cy, d'employer au seruice
du monde, vne vertu naifue et sincère : ou il ne la cognoist pas, les opinions se
corrompans auec les mœurs, ou s'il la cognoist, il se vante à tort : et qu'il die,
faict mille choses, dequoy sa conscience l'accuse, III, 468.
La plus part de noz vacations sont farcesques. Il faut iouer deuement nostre
roUe, mais comme roUe d'vn personnage. emprunté. Du masque et de l'apparence,
il n'en faut pas faire vne essence réelle, ny de l'estranger le propre. Nous ne
sçauons pas distinguer la peau de la chemise, III, 500.
Il faut apprendre à distinguer les bonnetades, qui nous regardent, de celles qui
regardent nostre commission, ou nostre suitte, ou nostre mule, III, 500.
VIE SOCIALE.
Considérant la foiblesse de nostre vie, et à combien d'escueils ordinaires et
naturels elle est exposée, on n'en deuroit pas faire si grande part à la naissance,
à l'oisiueté et à l'apprentissage, I, 598.
En noz actions accoustumees, de mille il n'en est pas vne qui nous regarde,
I, 416.
La plus part des règles et préceptes du monde prennent ce train, de nous pous-
ser hors de nous, et chasser en la place, à l'vsage de la société pubhque, III, 490.
La société publique n'a que faire de nos pensées : mais le demeurant, comme
nos actions, nostre trauail, nos fortunes et nostre vie, il la faut prester et aban-
donner à son seruice et aux opinions communes, I, 176.
La volonté et les désirs se font loy eux mesmes, les actions ont à la receuoir de
l'ordonnance publique, III, 88.
L'ESPRIT DES ESSAIS. VIE. E.259
Les hommes se donnent à louage. Leurs facultez ne sont pas pour eux; elles
sont pour ceux, à qui ils s'asseruissent; leurs locataires sont chez eux, ce ne sont
pas eux. Il faut mesnager la liberté de nostre ame, et ne l'hypotequer qu'aux
occasions iustes; lesquelles sont en bien petit nombre, si nous iugeons saine-
ment, III, 486. . V
L'occupation est à certaine manière de gents, marque de suffisance et de di-
gnité. Leur esprit cherche son repos au bransle, comme les enfans au berceau. Ils
se peuuent dire autant seruiables à leurs amis, comme importuns à eux mesmes.
Personne ne distribue son argent à autruy, chacun y distribue son temps et sa
vie. H n'est i-ien dequoy nous soyons si prodigues, que de ces choses là, desquelles
seules l'auarice nous seroit vtile et louable. Pour l'vsage de la vie, et seruice du
commerce public, il y peut auoir de l'o.xcez en la pureté et perspicacité de noz
esprits. Cette clarté pénétrante, a trop de subtilité et de curiosité. Pourtant se
trouuent les esprits communs et moins tendus, plus propres et plus heureux à
conduire affaires. Et les opinions de la philosophie esleuées et exquises, se trou-
uent ineptes à l'exercice, III, 48G.
La granité, la robbe, et la fortune de celuy qui parle, donne souuent crédit à
des propos vains et ineptes. Il n'est pas à présumer, qu'vn monsieur, si suiuy, si
redouté, n'aye au dedans quelque suffisance autre que populaire : et qu'vn homme
à qui on donne tant de commissions, et de charges, si desdaigneux et si mor-
guant, ne soit plus habile, que cet autre, qui le salue de si loing, et que personne
n'employé, III, 350.
Celuy qui va en la pres-se, il faut qu'il gauchisse, qu'il serre ses couddes, qu'il
recule, ou qu'il auance, voire qu'il quitte le droict chemin, selon ce qu'il rencon-
tre. Qu'il viue non tant selon soy, que selon autruy : non selon ce qu'il se pro-
pose^ mais selon ce qu'on luy propose : selon le temps, selon les hommes, selon les
affaires? Somme, il faut viure entre les viuants, et laisser la riuiere courre sous
le pont, sans nostre seing : ou à tout le moins, sans nostre altération, III, 316.
De vray, pourquoy sans nous esmouuoir, rencontrons nous quelqu'vn qui ayt
le corps tortu et mal basty, et ne pouuons souffrir le rencontre d'vn esprit mal
rengé sans nous mettre en cholere? Cette vitieuse aspreté tient plus au iuge,
qu'à la faute, III, 346.
Ceux, qui se desrobent aux offices communs, et à ce nombre infini de règles
espineuses, à tant de visages, qui lient vn homme d'exacte preud'hommie, en la
vie ciuilo : font, à mon gré, vne belle espargne : quelque pointe d'aspreté pecu-
liere qu'ils s'enioignent. C'est aucunement mourir, pour fuir la peine de bien
viure. Ils peuuent auoir autre prix, mais le prix de la difficulté, il ne m'a iamais
semblé qu'ils l'eussent. Ny qu'en malaisanco, il y ait rien audelà, de se tenir
droit emmy les flots de la presse du monde, respondant et satisfaisant loyalement
à touts les membres de sa charge, II, frW.
Indiscrette nation. Nous ne nous contentons pas de faire sçauoir nos vices, et
folies, au monde, par réputation : nous allons aux nations estrangeres, pour les
leur faire voir en présence. Mettez trois François aux déserts de Lybie, ils ne
seront pas vn mois ensemble, sans se harceler et esgratigner. Vous diriez que
cette pérégrination, est vne partie dressée, pour donner aux estrangers le plaisir
de nos tragédies : et le plus souuent à tels, qui s'esiouyssent de nos maux, et qui
s'en moquent, II, 576.
La naifueté et la vérité pure, en quelque siècle que ce soit, trouuent encore
leur opportunité et leur mise, III, 82.
C'est vn excellent moyen de gaigner le cœur et volonté d'autruy, de s'y aller
soubsmettre et fier, pourueu que ce soit librement, et sans contrainte d'aucune
nécessité, et que ce soit en condition, qu'on y porte vne fiance pure et nette; le
front au moins deschargé de tout scrupule, I, 198.
La crainte et la deffiance attirent l'offence et la conuient, I, 196.
Le monde n'est que babil, et ne vis iamais homme, qui ne die plustost plus,
que moins qu'il ne doit, I, 272.
On ne parle iamais de soy, sans perte. Les propres condemnations sont tous-
iours accreuës, les louanges mescruës, III, 332.
La plus honorable vacation, est de seruir au pubiiq, et estre vtile à beaucoup
III, 390.
E.260 ESSAIS DE MONTAIGNE.
La plus heureuse occupation à chascun, faire ses particuliers affaires sans
iniustice, III, 394.
Vn honneste iiomme n'est comtable du vice ou sottise de son mestier; et ne doit
pourtant en refuser l'exercice. C'est l'vsage de son pays, et il y a du proffit. Il
faut viure du monde, et s'en preualoir, tel qu'on le trouue, III, 500.
Pour estre aduocat ou financier, il n'en faut pas mescognoistre la fourbe, qu'il
y a en telles vacations, III, 500.
En toute police, il y a des offices nécessaires, non seulement abiects, mais en-
cores vicieux. Les vices y trouuent leur rang, et s'employent à la cousture de
nostre liaison : comme les venins à la conseruation de nostre santé. S'ils deuien-
nent excusables, d'autant qu'ils nous font besoing, et que la nécessité commune
efface leur vraye qualité : il faut laisser iouer cette partie, aux citoyens plus vi-
goureux, et moins craintifs, qui sacrifient leur honneur et leur ,'conscience, comme
ces autres anciens sacrifièrent leur vie, pour lo salut de leur pays. Nous autres
plus foibles pi-enons des rolles et plus aysez et moins hazardeux. Le bien public
requiert qu'on trahisse, et qu'on mente, et qu'on massacre : resignons cette com-
mission à gens plus obeissans et soupples, III, 80.
Il ne se faict aucun profit qu'au dommage d'autruy. et à ce compte il faudroit
condamner toute sorte de guain. Le marchand ne faict bien ses affaires, qu'à la
débauche de la ieunesse : le laboureur à la cherté des bleds : l'architecte à la
ruine des maisons : les officiers de la lusticeaux procez et querelles des hommes :
l'honneur mesme et pratique des Ministres de la religion se tii-e de nostre mort et
de noz vices. Nul Médecin ne prent plaisir à la santé de ses amis mesmes.'dit l'an-
cien Comique Grec; ny soldat à la paix de sa ville : ainsi du reste. Et qui pis est,
que chacun se sonde au dedans, il trouuera que nos souhaits intérieurs pour la
plus part naissent et se nourrissent aux despens d'autruy. Nature ne se dément
point en cela de sa générale police : la naissance, nourrissement, et augmentation
de chasque chose, est l'altération et corruption d'vn' autre, I, 154.
Cent fois le iour, nous nous moquons de nous sur le subiect de nostre voysin,
et détestons en d'autres, les défauts qui sont en nous plus clairement : et les ad-
mirons d'vne merueilleuse impudence et inaduertence, III, 346.
Ayons tousiours en la bouche ce mot de Platon : Ce que ie treuue mal sain,
n'est-ce pas pour estre moy-mesmes mal sain? Ne suis-ie pas moy-mesmes en
coulpe? mon aduertissement se peut-il pas renuerscr contre moy?Sage et diuin
refrein, qui fouete la plus vniuerselle, et commune erreur des hommes. Non seu-
lement les reproches, que nous faisons lesvns aux autres, mais noz raisons aussi,
et noz arguments et matières controuerses, sont ordinairement retorquables à
nous : et nous enferrons de noz armes, III, 346.
VIEILLESSE.
Nulle vieillesse peut estre si caducque et si rance, à vn personnage qui a passé
en honneur son aage, qu'elle ne soit vénérable, II, 26.
C'est faute, de ne se sçauoir recognoistre de bonne heure, et ne sentir l'im-
puissance et extrême altération que l'aage apporte naturellement et au corps et
à l'ame, II, 30.
Quelle resuerie est-ce de s'attendre de mourir d'vne défaillance de forces, que
l'extrême vieillesse apporte, et de se proposer ce but à nostre durée : veu que
c'est l'espèce de mort la plus rare de toutes, et la moins en vsage ? Nous l'appel-
ions seule naturelle, comme si c'estoit contre nature, de voir vn homme se rom-
I)re le col d'vne cheute, s'estoufer d'vn naufrage, se laisser surprendre à la peste
ou à vne pleurésie, et comme si nostre condition ordinaire ne nous présentoit à
tous ces inconuenients. Ne nous flattons pas de ces beaux mots : on doit à l'auen-
ture appeler plustost naturel, ce qui est gênerai, commun et vniuersel, I, 594.
C'est vne puissante maladie, et qui se coule naturellement ot imperceptiblement :
il y faut grande prouision d'estude, et grande précaution, pour euiter les imper-
fections qu'elle nous charge : ou aumoins affoiblir leur progrez, III, 134.
Tantost c'est le corps qui se rend le premier à la vieillesse : par fois aussi c'est
l'ame : et en ay assez veu, qui ont eu la ceruelle affoiblie, auant l'estomach et les
L'ESPRIT DES ESSAIS. VIE. E.261
iambes. Et d'autant que c'est vn mal peu sensible à qui le souffre, et d'vne obs-
cure montre, d'autant est-il plus dangereux, I, 598.
Dieu faict grâce à ceux à qui il soustrait la vie par le menu. C'est le seul béné-
fice de la vieillesse. La dernière mort en sera d'autant moins plaine et nuisible :
elle ne tuera plus qu'vn domy, ou vn quart d'iiomiue, III, 674. ^
Bien sert à la décrépitude de nous fournir le doux bénéfice d'inappcrceuance
et d'ignorance, et facilité à nous laisser tromper. Si nous y mordions, que seroit-
ce de nous? II, 36.
La raison nous commande de nous dospouiller, quand nos robbcs nous char-
gent et empeschent, et de nous coucher quand les iambes nous faillent, II, 30.
En la vieillesse, nos âmes sont subiectes à des maladies et imperfections plus
importunes, qu'en la ieunesse. La sagesse, en elle, est le desgout des choses pré-
sentes deu à l'impuissance. Outre vue sotte et caduque fierté, vn babil ennuyeux,
ces humeurs espineuses et inassociables, vn soin ridicule des richesses, lors que
l'vsage en est perdu, i'y trouue plus d'enuie, d'iniusticcet de malignité. Elle nous
attache plus de rides en l'esprit qu'au visage :et ne se void point d'amcs, ou fort
rares, qui en vieillissant ne sentent l'aigre et le moisi, III, 134.
Nostre estude et nostre cnuie deuroyent quelque fois sentir la vieillesse. Nous
auonsie pied à la fosse, et noz appétits et poursuites ne font que naistre, II, 588.
Voyez vn vieillart, qui demande à Dieu qu'il luy maintienne sa santé entière
et vigoureuse; c'est à dire qu'il le remette en ieune.sse. N'est-ce pas folie? Sa
condition ne le porte pas, III, 648.
Le soulagement que ie trouue en ma vieillesse, c'est qu'elle amortist en moy
plusieurs désirs et seings, dequoy la vie est inquiétée. Le seing du cours du
monde, le seing des richesses, de la grandeur, de la science, de la santé, de moy,
II, 588.
C'est grand simplesse, d'alonger et anticiper, comme chacun fait, les incom-
moditez humaines. l'ayme mieux estre moins long temps vieil, que d'estre vieil,
auant que de l'estre, III, 182.
A mesure que les commoditez naturelles nous faillent, soustonons nous par les
artificielles. C'est iniustice, d'excuser la ieunesse de suyure ses plaisirs, et deffen-
dre à la vieillesse d'en rechercher, III, 136.
Il faut retenir à tout nos dents et nos griffes, l'vsage des plaisirs de la vie, que
nos ans nous arrachent des poings, les vns après les autres, I, 426.
le hay cet accidentai repentir que l'aage apporte. Le chagrin, et la foiblesse
nous impriment vne vertu lasche^ et caterreuse. Il ne nous faut pas laisser em-
porter si entiers, aux altérations naturelles, que d'en abastardir notre iugement,
III, 130.
Qui vit iamais vieillesse qui ne louast le temps passé, et ne blasmast le présent,
chargeant le monde et les mœurs des hommes, de sa misère et de son chagrin?
II, 420.
L'esprit parfois a le priuilege, de se r'auoir de la vieillesse, ie luy conseille
autant que ie puis, de le faire : qu'il verdisse ce pendant, s'il peut, comme le guy
sur vn arbre mort, III, 184.
Quand ie pourroy me faire craindre, i'aimeroy encore mieux me faire aymer.
Il y a tant de sortes de deffauts en la vieillesse, tant d'impuissance, elle est si
propre au mespris, que le meilleur acquest qu'elle puisse faire, c'est l'affection et
amour des siens : le commandement et la crainte, ce ne sont plus ses armes, II, 34.
La vieillesse a vn peu besoin d'estre traictee plus tendrement. Recommandons
la à ce Dieu protecteur de santé et de sagesse : mais gaye et sociale, III, 704.
VOLUPTÉ (pi,.usnis).
l'estime pareille iniustice, de prendre à contre cœur les voluptez naturelles, que
de les prendre trop à cœur, III, 684.
Qui ne se donne loisir d'auoir soif, ne sçauroit prendre plaisir à boire, I, 488.
La volupté est qualité peu ambitieuse; elle s'estime assez 'riche de soy, sans y
mesler le prix de la réputation : et s'ayme mieux à l'ombre, III, 182.
E.262 ESSAIS DE MONTAIGNE.
L'intempérance est peste de la volupté : et la tempérance n'est pas son fléau :
c'est son assaisonnement, III, 692.
La iouissance des voluptez mesmes, l'aysance et la facilité, este aux roys l'ai-
gredouce pointe que nous y trouuons, I, 488.
VOYAGES.
Le voyager me semble vn exercice profitable. L'ame y a vne continuelle exerci-
tation, à remarquer des choses incogneuës et nouuelles. Et ie ne sçache point
meilUeure escole, à façonner la vie, que dé luy proposer incessamment la diuer-
sité de tant d'autres vies, fantasies, et vsances : et luy faire gouster vne si perpé-
tuelle variété de formes de nostre nature. Le corps n'y est ny oisif ny trauaillé :
et cette modérée agitation le met en haleine, III, 430.
l'observe en mes voyages cette praticque, pour apprendre tousiours quelque
chose, par la communication d'autruy, qui est vne des plus belles escholes qui
puisse estre, de ramener tousiours ceux, auec qui ie confère, aux propos des
choses qu'ils sçauent le mieux. Car il adulent le plus souuent au contraire, que
chacun choisit plustost à discourir de mestier d'un autre que du sien : estimant
que c'est autant de nouuelle réputation acquise : par ce train vous ne faictes
iamais rien qui vaille. Ainsin, il faut trauailler de reietter tousiours l'architecte,
le peintrcj le cordonnier, et ainsi du reste chacun à son gibier, I, 92.
TABLE DES MATIERES
OBJET DE CE FASClCtlLE.
Abondance.
Absence (Amilié, Ma-
riage).
Actions.
Adultère {Chasteté, Ma-
riage).
Affaires (Fortune , Vie
publique).
Affection {Enfants).
Age.
Ambassadeurs.
Ambition.
Ame {Immortalité de
Vâme).
Amitié.
Amour.
Ampleur de vue.
Animaux.
Art militaire.
Art mil. {Quelques façons
de procéder de Jules
César).
Auteurs.
Avarice.
Beauté.
Bien, Biens.
Bon sens.
Bonheur.
Bonté.
Caractère.
Cérémonie.
Changements.
Chasse.
Chasteté.
Châtiment.
Choses.
Civilité.
Colère.
Combat.
Commandement.
Compassion.
Conduite {Fortune).
Conférence,
Confession.
Confiance.
Connaissance de soi-
même. '
Conscien ce.
Conseil.
Constance.
Continence.
Contradi ction {Con-
traste).
Contrainte.
Conversation.
Courage (Fermeté).
Coutume (Habitude).
Crédulité (Prédictions,
Miracles).
Critique.
Croyances (Religion).
Cruauté.
Devoir.
Dévotion {Dieu, Prières).
Dieu (Dévotion, Prières,
Reliques).
Dieux.
Dire et faire.
Dissimulation.
Divers.
Diversion.
Douleur.
Duel (Escrime).
Économie.
Éducation.
Éloquence.
Enfant.
Escrime (Duel).
Espérance,
Esprit.
Essais.
État (Gouvernement).
État militaire (Profes-
sion).
Expérience.
Fatalité.
Femme (Amour, Ma-
riage, Ménage).
Fermeté (Courage).
Festin.
Flatterie.
Folie.
Fortune.
Foule.
Français.
Funérailles:
Gens de lettres.
Gloire (Réputation).
Guerre civile (Troubles
intérieurs).
Habitudes (Coutumes).
Histoire.
Homme.
Honnêteté
Ignorance.
Imagination.
Immortalité de l'âme.
Imposture.
Indépendance.
Indigence.
Initiative.
Insatiabilité de l'homme.
Inspiration.
Instruction.
Irrésolution.
Ivrognerie.
Jalousie.
Jeux publics.
Jugement.
Justice (Langage judi-
ciaire. Lois).
Lâcheté (Peur).
Laideur.
Langage
E.264
ESSAIS DE MONTAIGNE.
Langage judiciaire.
Libéralité.
Liberté.
Livres.
Lois (Jnslice, Langage
judiciaire).
Louange (Flatterie,
Gloire, Répulalion).
Mal, maux.
Maladie.
Mariage.
Médecin, médecine
[Maujc, Maladie).
Méditation.
Mémoire.
Ménage [Femme, Ma-
riage).
Mensonge.
Miracles {Crédulité,
Croyances).
Modération.
Modes.
Mœurs.
Monde.
Montaigne (Ménage,
Mort, etc.).
Mort (Maux, Suicide,
Vie).
Nature (Philosophie).
Noblesse (Noms).
Noms (Noblesse).
Nouveauté.
Obéissance.
Odeurs.
Opinion.
Parenté.
Paris.
Parole.
Parole donnée.
Passions.
Pédantisme.
Peine (Punition).
Pénitence.
Pensées.
Pères.
Peuples.
Peur
Philosophie ( Vérité).
Physionomie.
Plaisirs ( Volupté).
Pluralité des mondes.
Poésie.
Politique.
Prédictions (Crédulité).
Présomption.
Prévoyance.
Prières (Dévotion, Dieu).
Procès.
Productions littéraires.
Prolétaires.
Providence.
Qualités.
Querelles.
Raison.
Raison d'État.
Récompenses honori-
fiques.
Religion (Dévotion, Dieu,
Dieux).
Repentir.
Réputation (Ame,
Gloire).
Ressemblance, Dissem-
blance. ,
Retraite.
Richesses.
Rois (Vie publique).
Rome.
Sagesse.
Santé.
Savants.
Savoir, science.
Secrets.
Sens (Des).
Société.
Sottise.
Souvenir.
Suicide.
Testament.
Torture.
Trahison.
Tristesse.
Troubles politiques
(Guerre civile).
Vanité (Présomption).
Vengeance.
Vérité (Philosophie).
Versatilité.
Vertu.
Vices.
Vie.
Vie privée.
Vie publique.
Vie sociale. v
Vieillesse.
Volupté (Plaisirs).
Voyages
FASCICULE F
NOTES
« II faut des notes aux Essais.
« II en faut, parce qu'on y trouve en grand nombre des mots hors d'usage, des
" faits historiques altérés ou qu'on ne sait à quelles époques rapporter, des allu-
« sions obscures à des événements politiques du temps, des noms propres qui ne
■< disent rien par eux-mêmes, et aussi parce que souvent l'auteur se borne à
« dire : un ancien, un de nos rois, etc.; dans tous ces cas, il faut aider le lec-
« teur et rectifier l'auteur s'il y a Heu.
« Il en faut pour commenter Montaigne par lui-même, pour renvoyer d'un
" passage où il cxpi'ime une pensée, à un autre endroit où il dit le contraire, ou
« exprime la même opinion en d'autres termes. II en faut pour signaler les lar-
« cins qu'il a faits à une foule d'auteurs, et rappi-ocher leur phrase de la sienne.
« Il en faut encore pour citer les emprunts que les modernes se sont permis
'< si souvent à son égard, souvent sans le nommer, et les idées dont ils lui sont
« redevables.
« Enfin, pour indiquer les principaux changements qu'il a apportés à son ou-
« vrage dans ses éditions successives, et suivre les modifications d'opinions
« qu'ont pu causer chez lui l'âge, les voyages, l'expérience des afïaires, etc.
« Docteur Payen. »
Les nombres en marge, en caractères gras, indiquent les pages; les autres, les
lignes. Le mot qui suit chacun de ces derniers sert de renvoi au passage du texte
auquel la note est afférente.
Dans le corps du texte, les groupes de nombres indiquent, le premier en
chiffres romains et en caractères gras, le volume; le second, en caractères ordi-
naires, la page.
La lettre N signifie note ; les nombres et mots qui la suivent indiquent le vo-
lume, la page et la note auxquels il faut se reporter.
Les dates en caractères gras se rapportent aux temps antérieurs à notre ère.
ESSAIS DE MONTAIGNE.
NOTES.
PREMIER VOLUME.
Titre. Essais. — Ce titre, donné par Montaigne à son ouvrage, semble de prime
abord assez singulier. La signification en est controversée. Généralement
on l'explique en disant qu'en écrivant son livre, l'auteur s'essayait à écrire
et l'on s'est appuyé à cet effet sur ce que lui-même dit, en parlant du Discours
de la Boétie' sur la Servitude volontaire : « 11 l'écriuit par manière d'essay
en sa première ieunesse (I, 298) ». — II y a plutôt lieu d'en rechercher
l'explication dans ce membre de phrase du dernier chapitre de son pre-
mier livre : « Toute cette fricassée que ie barbouille icy, n'est qu'vn re-
gistre des es-sais de ma vie (III, 626) », d'après quoi son ouvrage serait
l'exposé des essais, c'est-à-dire des conceptions morales et physiques, au-
trement dirdes idées qu'il s'était faites au cours de sa vie, sur les hommes
et les choses.
Montaigne. — On a beaucoup discuté sur la prononciation du nom de
Montagne : les uns opinant pour dire « Montègne », comme il se dit ac-
tuellement le plus ordinairement; les autres pour dire « Montagne »,
comme il so dit couramment dans le Périgord et le Bordelais. — Les pre-
miers invoquent Catherine de Médicis dont on a un autographe ou il est
écrit « Montègne », comme vraisemblablement on a pu dire à la cour; les
autres se réclament notamment de Voltaire, qui a écrit <■ Montagne », ce
qui indique que le débat remonte loin.
11 est hors de doute que le premier mode a aujourd'hui tendance à préva-
loir, mais le second se justifie par les considérations ci-après : Le village
origine de ce nom était ainsi appelé en raison do son site élevé (élévation,
très relative du reste), et il se nommait et se nomme encore Montagne »,
alors qu'on écrivait « Montaigne », comme on prononçait ménage, dom-
mage, image, sauvage, campagne, Espagne, Allemagne, gagner, tout en
écrivant menaige, domaige, ymaige, sauluaigc, campaigne, Espaigne, AI-
iemaigne, gaigner; comme on écrit encore Saint-Aignan, Cavaignac, bien
que l'on prononce Saint-Agnan, Cavagnac.
Dans une lettre parvenue jusqu'à nous, adressée en 1585 par Henri IV au
maréchal de Matignon, le nom de Montaigne, qui s'y trouve deux fois, est
écrit une première fois « Montaigne » et la seconde « Montagne ». — Sca-
liger, avec lequel il était en assez mauvaises relations, a écrit un article
assez malintentionné à son endroit qu'il a intitulé : « Monsieur de Mon-
tagne ». Cette prononciation ressort encore de cette recommandation ty-
pographique que lui-même avait rédigée en vue de la réédition des Es-
sais : Écrire campaigne espaigne gascouigne etc. mettez un (/) devant le (g)
corne a monlaigne non pas sans (i) campagne espagne (V. Note sur la lan-
gue de Montaigne, fasc. G); et aussi de la teneur du diplôme de bourgeoi-
sie romaine qui lui a été délivré (III. 480) où il est désigné sous le nom de
F.270 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Montanus, traduction littérale de Montagnard, dont Montaigne n'est qu'une
forme dérivée. Enfin nombre d'auteurs du xvii' siècle, Bayle entre autres,
l'écrivent exclusivement de cette dernière façon; V. N. II, 136, D'elle. —
Une anecdote à ce propos : Pendant la Terreur, dit-on, un administrateur
des prisons, en tournée, voyant un détenu lisant un livre, l'interpella :
« Que lis-tu là? • — « Montaigne, » répondit celui-ci en prononçant à la
Bordelaise. — « Montagne J bravo. » s'écria son interlocuteur qui, peu
lettré, s'imaginait qu'il s'agissait d'une œuvre de propagande ou d'une apo-
logie du parti révolutionnaire de ce nom aloi's au pouvoir et omnipotent.
D' Payes.
14,
Dans l'édition originale de 1595, le texte est précédé d'une longue préface, do
style diffus et ampoulé, de Mademoiselle de Gournav; nous l'avons suppri-
mée comme n'émanant pas de Montaigne. Dans l'édition qui suivit, portant
la date de 1598, son auteur la remplaçait par une autre de quelques lignes,
s'excusant de la première par l'état d'âme où il s'était trouvé, en se voyant
en possession et chargé de la réédition de cet ouvrage qui l'avait si fort
séduit. Toutefois, en 1635, à quarante ans d'intervalle, Mademoiselle de
Gournay rééditait cette préface, mais remaniée. Les défauts dont on lui
avait fait reproche ont alors disparu ; comme auparavant elle y discute et
réfute, mais cette fois avec assez de bonheur, les critiques principales dont
déjà, dès leur apparition, les Essais avaient étç l'objet. — Cette édition ori-
ginale de 1595, imprimée à Paris, par Abel L'Angelier, a été éditée par lui
et simultanément par Michel Sonnius également à Paris; l'impression est
unique, sauf la partie inférieure du frontispice où chacun a apposé sa mar-
que et son nom.
Av Lectevr. — Cette même édition originale, sauf quelques exemplaires
tirés en dernier lieu, ne porte pas cet avis qui existe dans toutes les édi-
tions qui l'ont précédée. Cette particularité proviendrait de ce que la copie
en aurait été égarée au moment de l'impression, qu'on ne s'en serait aperçu
que lorsque le tirage était presque terminé, et qu'à ce moment il y a été
pourvu à la hâte. D' Payex. — Celui donné ici est tel que le porte l'exem-
plaire de Bordeaux, avec les corrections que l'auteur y a apportées de sa
main.
1, Liure. — A l'origine l'u et le v se confondaient dans l'imprimerie, proba-
blement par suite des inscriptions lapidaires où celte confusion se re-
trouve. Au xvi' siècle, dans les lettres majuscules, on ne faisait usage que
du v; dans les minuscules, le v s'employait toujours au commencement des
mots, tandis que dans le corps il était fait exclusivement emploi de l'u;
c'est Voltaire qui, finalement, dans son dictionnaire, établit la distinction
actuellement existante entre ces deux lettres, le v consonne, et l'u voyelle.
— L'i et le j s'employaient pareillement l'un pour l'autre ; toutefois le j ne
se rencontre guère que dans le cas, assez rare, de deux ou plusieurs i mi-
nuscules consécutifs, le dernier est alors figuré par un j : Dij, viij.
10, Fusse. — Les éd. ant. port. : paré de beautez empruntées ou me fusse
tendu et bandé en wm meilleure démarche, au lieu de : « mieus... estudiée ».
13, Vit. — Add. des éd. ant. : mes imperfections.
20, Vins. — Déjà au temps de Montaigne, on disait quatre-vingts au lieu
d'octante; et aussi soixante-dix et quatre-vingt-dix pour septante et no-
uante qui, encore d'usage courant en Belgique, ne se disent plus guère en
France que dans quelques localités du midi ; la disparition de ces expres-
sions est aussi regrettable qu'illogique. — L'édition de 1588 est datée
i2 juin 1588; l'exemplaire de Bordeaux, premier mars mille cinq cens
quattre vins, écrit de la main de Montaigne ; c'est cette même date, mais
avec le millésime en chiffres arabes, que portent les éditions de 1580, 82
et 87.
16,
18.
NOTES. UV I, CH. T. VOL. I, PAG. 16. F.271
PREMIER LIVRE
CHAPITRE I. ^
6, Galles. — Connu sous le nom de « Prince Noir », de la couleur de l'ar-
mure qu'il portait; le môme qui gagna la bataille de Poitiers (1356) où il (it
pi'isonnier le roi Jean le Bon. Son père, Edouard III, roi d'Angleterre, avait
érigé pour lui la Guyenne en principauté (1363); il fixa sa résidence à Bor-
deau.x où il tint une cour vraiment royale et y demeura jusqu'à sa mort, y
laissant la mémoire de grands exploits, de grandes vertus et d'une vie sans
tache.
17, Ville. — En 1370, lors de la gueri-e de Cent Ans. Les trois gentilshommes
en question étaient Messires de Villemur, de la Roche et de Beaufort, ca-
pitaines delà cité : « Nous sommes morts, se dirent-ils, si nous ne nous dé-
fendons et vendons chèrement notre vie, ainsi que tout chevalier doit
faire. Et ainsi firent; le prince, de son char, les vit et y applaudit fort. »
Fkoissart, I. — Limoges, pillée et brûlée, fut presque complètement dé-
truite.
18, Scanderberch. — Autrement dit Alexandre bey; c'était le surnom de
Georges Castriot, roi d'Albanie (anc. Epire), qui reconquit son royaume
dont son père avait été dépouillé par les Turcs, desquels il devint la terreur.
Les Albanais le chantent encore dans leurs chants nationaux.
Assiégé. — En 1140, dans Weinsberg, ville de la haute Bavière. Calvitius,
Opiis chronolvgicum. — V. N. III, 560, Gibelin.
12, Lascheté. — Singulière propension.
15, Stoiques. — Secte de philosophie dont les adeptes se distinguaient par-
ticulièrement par leur fermeté d'àme et l'austérité de leur morale; ils esti-
maient la vertu comme le souverain bien, niaient que la douleur fût un
mal, croyaient à la Providence et insistaient sur les causes, comme étant
plus à considérer que les effets. Les Stoïciens les plus célèbres après Zenon,
furent : chez les Grecs, Chrysippe et Epictète; chez les Romains, Caton
d'Utique, Sénèque et l'empereur Marc-Aurèle; chez les modernes, .Juste-
Lipse.
22, Enfans. — Par contre, La Fontaine dit de l'enfance : « Cet âge est sans
pitié » ; et au chapitre XXII de ce même livre (I, 158), Montaigne semble
avoir changé d'avis.
25, Vertu. — Sous-entendu : « il peut se dire », comme on lit quelques li-
gnes plus haut.
31, Peine. — Avec beaucoup de peine.
36, Arrogante. — Scipion Émilien, accusé de concussion, agit à peu près
de même et avec autant de succès, V. I, 660 et N. Pièces.
36, Balotes. — Petites balles ou bulletins employés pour aller aux voix dans
les jugements ou les élections.
38, Personnage. — Plutahqce, Comment on peut se louer soi-même. — Épa-
minondas avait prolongé de quatre mois son commandement pour avoir le
temps de réduire les Spartiates, ses ennemis, à l'impuissance et de relever
de ses ruines et repeupler Messène, leur ennemie séculaire. Il termina son
plaidoyer, en cette circonstance, en demandant qu'on inscrivît sur sa
tombe qu'il avait été condamné pour avoir contraint, malgré eux, les Thé-
bains à prendre leur revanche des Lacédémoniens qui les avaient pillés
et brûlés cinq cents ans auparavant, rebâti Messène deux cent trente ans
après sa destruction par ces mêmes Lacédémoniens, remis les peuples de
l'Arcadie en confédération et restitué aux Grecs leur liberté.
20,
4, Vengeance. — Le siège de Reggium (368) avait été motivé par une
F.272 ESSAIS DE MONTAIGNE.
demande que Denys l'Ancien, tyran de Syracuse, avait adressée pour ob-
tenir en mariage une fille de cette cité, demande à laquelle il fut répondu
qu'on n'avait à lui donner que la fille du bourreau; le siège dura onze
mois, la famine seule eut raison de la résistance des habitants. Diodore de
Sicile, XIV, 29.
22, Homme. — Cette idée si juste et les termes employés à la rendre si
heureux sont passés à l'état d'aphorisme que l'on entend dire sans cesse.
Charron s'en est emparé comme de tant d'autres de Montaigne ; le chapitre 1
du premier livre de son ouvrage sur la Sagesse commence ainsi :
« L'homme est un sujet merveilleusement divers et ondoyant, et sur lequel
il est très malaisé d'y avoir un jugement assuré. » — « L'inconstance des
hommes est si variée dans ses effets, qu'on peut essayer de la peindre,
même après Pascal • (Chateaubriand). — Ondoyant et divers est du reste une
expression qu'affectionne Montaigne, on la retrouve à diverses reprises dans
les Essais, I, 300: II, 70.
22, Vniforme. — Pensée à rapprocher du ch. I du liv. II, où Montaigne
traite de l'inconstance de nos actions.
27, Peine. — En 79. Les Mamertins étaient les descendants des mercenaires
employés, lors de leurs guerres, par les Syracusains et les Carthaginois.
Ramassis de gens sans aveu et de tous les pays, ils s'étaient établis par les
armes aux environs de Messine, en Sicile, dont ils avaient fait leur place
d'armes, prenant pour nom celui de leur dieu Mamers ou Mars confirmant
par là leur résolution de faire ia guerre pour la guerre, et, de fait, ne vi-
vant que de brigandage. — Lors de la guerre civile entre Marins et Sylla,
ils avaient embrassé le parti du premier à l'instigation de l'un de leurs
orateurs (que Plutarque nomme Stenon dans Vlnstmœiion pour ceux qui
manient affaires d'état, Stennius dans les Apoihthegmes, Stenis dans la Vie
de Pompée), ce qui avait attiré sur eux Pompée, lieutenant du second.
S'étant tout d'abord réclamés de leur privilège, ils s'étaient attiré cette ré-
ponse : « Que parlez-vous de lois à qui porte l'épée? » — Lors de la reddi-
tion de Calais aux Anglais, en 1347, Eustache de S. -Pierre a renouvelé
l'acte de dévouement de Sténon à l'égard de ses concitoyens.
27, Peruse. — En 82. Le jeune Marins, battu, s'était réfugié à Preneste (et
non Pérouse), dans le Latium, contrée d'Italie avoisinant Rome. La ville,
assiégée par les troupes de Sylla, dut capituler. Cetliegus, lieutenant de
Sjflla, avait promis la vie sauve à la population ; mais le dictateur, s'y étant
rendu en personne, fit d'abord juger et exécuter chacun des habitants en
particulier; puis trouvant que ces formalités lui prenaient trop de temps,
il les fit tous rassembler en un même lieu au nombre de 12.000, et égorger
en sa présence. Il ne voulut faire grâce de la vie qu'à son hôte, mais celui-ci
lui dit qu'il ne voulait pas devoir son salut au bourreau de sa patrie, et,
se jetant au milieu de ses compatriotes, il se fit tuer avec eux. Plutarque,
Instruction pour ceux qui manient affaires d'état.
22,
8, Talons. — • Et qu'on y trauersast vue corde ». Add. de 1558.
15, Opposition. — En 332. Outre que la résistance prolongée de Gaza avait
contrarié les projets d'Alexandre en retardant son entrée en Egypte, ce siège
avait coûté beaucoup de sang aux Macédoniens, lui-même y avait été
blessé. De là son ressentiment contre Bétis qui avait été l'àme de la défense,
à quoi il faut ajouter, dit Quinte-Curce, IV, 6, qu'en cela il se glorifiait
d'imiter en quelque sorte dans sa vengeance Achille, l'auteur de sa race,
traînant le cadavre d'Hector ainsi attaché derrière son char.
29, Esclaues. — En 335. Les Thébains avaient pris occasion de donner le
signal du soulèvement de la Grèce asservie par Philippe de Macédoine, alors
qu'Alexandre son successeur combattait les Barbares sur l'Ister (Danube).
Revenant en hâte, et ses offres de conciliation ayant été repoussées, le
nouveau l'oi assiège Thèbes, s'en empare après une défense acharnée qui
coûte 6.000 h. à ses adversaires, et la fait raser. A l'exception des prêtres,
de ses partisans et des descendants de Pindare dont il avait respecté la
NOTES. LIV. I, CH. I. VOL. I, PAG. 22. F.273
maison, tout le reste fut vondu comme esclaves. Sa colère passée, Alexan-
di'e lit bon accueil à tous les Thébains échappés au désastre, qui s'adres-
sèrent à lui ; et, par la suite, il marqua à diverses reprises son regret de
s'être montré si dur en cette circonstance. Il attribua le meurtre de Clitus.
le refus de son armée de le suivre au delà de l'indus, à la rancune de Bac-
chus, dieu tutélairc de T)icbes. Diodoue de Sicile, XVII, 4.
CHAPITRE II.
24.
•,>, Malignité. — . 'fristi'y.in, eu italien, signifie malignité, méchanceté; ot
Irislilia, tristesse, ennui.
0, Perse. —En 525; 11i';i!uijoti:, III, 14.
H, Domestiques. — Ne signilie pas ici serviteur, mais ami de la maison,
familier, sens que ce mot avait en latin et au temps de Montaigne, et qu'il
a conservé longtemps encore après. Hérodote dit que cet homme était un
vieillard qui mangeait ordinairement à la table du roi (Le Clerc).
11, Nostres. — Un prince des nôtres, c'est-à-dire un prince français, mais
n'appartenant ni à la maison royale de France, ni à celle des Bourbons. —
Il est question ici du cardinal Charles de Lorraine qui, en LjG3, était au
concile de Trente (Tyrol), lorsqu'il apprit l'assassinat du duc de Guise par
Poltrot de Méré et la mort, à la suite de la bataille de Dreux, d'un autre
frère bâtard, abbé de Cluny.
31, Exprimer. — Cette disposition d'esprit si contradictoire existe en moi et
probablement chez beaucoup d'autres : Toute histoire touchante que je lis,
tout drame que je vois représenter au théâtre, me font venir les larmes
aux yeux, tandis que les faits analogues de la vie réelle dont je suis té-
moin, si tragiques soient-ils et lors même que j'y suis directement inté-
ressé, me laissent impassible. La nouvelle de la mort de mon fils aîné, sur-
venue au Tonkin et apprise par la voie des journaux, ne m'a causé sur le
moment nulle émotion apparente, tandis que depuis, et aujourd'hui encore,
après bien des années, ma pensée ne se reporte jamais sur lui sans un at-
tendrissement manifeste. G. I\I. — A la suite de cette réponse de Psam-
méjiite, Cambyse donna ordre de délivrer son fils et .«.a fille; mais déjà le
premier, conduit au supplice un mors dans la bouche, ce qui était un
signe de servage, n'était plus, et lui-même, il le traita avec bonté. Dans
la suite, Psamménite ayant incité les Égyptiens à la révolte, fut condamné
à boire du sang de taureau, ce dont il mourut sur-le-champ. Hérodote,
III, 14.
o7, Dueil. — Lors de la guerre de Troie (XIV'' siècle), des vents contraires
persistants empêchant la flotte des Grecs de mettre à la voile, les devins
déclarèrent que c'était du fait de Diane irritée contre Agamemnon leur
chef et que la déesse ne pouvait être apaisée que par le sang d'une prin-
cesse de la famille royale. Après avoir longtemps lutté, Agamemnon, cédant
aux sollicitations de ses alliés, consentit au sacrifice d'Iphigénie sa fille.
Diane satisfaite substitua à la victime une biche qui lui fut immolée et
transporta la princesse en Tauride où elle en fit une prétresse de son culte.
— Le peintre qui peignit cette scène, Timanthe (IV" siècle), donnait au
grand prêtre Calchas, qui avait réclamé le sacrifice, l'air abattu ; il repré-
sentait Ulysse consterné, Ajax frémissant de rage d'une telle cruauté, Mé-
nélas poussant des cris lamentables, un aruspice, des amis, un frère en
pleurs, et Agamemnon, le père de la victime, la tête couverte d'un voile,
laissant, a-t-on dit, à la sensibilité du spectateur à juger de sa douleur
peut-être aussi n'était-il affublé de ce voile qu'en suite du rite en pareille
circonstance, ainsi que cela se voit dans certaines cérémonies de l'Église
catholique, lors des relevailles par exemple. Cicérox, Orat., 22; Valéke
Maxime, VllI, II. — Plutarque raconte un fait identique au sacrifice d'Iphi-
génie : le consul romain Métellus, devant passer en Sicile avec son armée,
ESSAIS DE MO.NTAIGNE. — T. IV. 18
F.274 ESSAIS DE MONTAIGNE.
avait sacrifié aux Dieux, mais en omettant Vesta. Celle-ci pour se venger
fit également souffler des vents contraires qui mettaient obstacle au départ.
Pour l'apaiser, Métellus, sur le conseil des devins, consentit également
à lui sacrifier sa fille et Vesta, comme Diane prise de compassion, substi-
tua une génisse à la victime qu'elle transporta à Lavinium et attacha à
ses autels. — Ce passage des Essais est peut-être ce qui a inspiré à Robert
Fleury de représenter, dans son tableau de la mort de Montaigne, sa veuve
la figure masquée par un mouchoir qu'elle tient à la main.
40, Rocher. — Niobé, glorieuse de ses sept garçons et de ses sept filles, en
vint à mépriser Latone qui n'avait d'enfants qu'Apollon et Diane. La
déesse offensée leur remit le soin de la venger; ils firent périr sous leurs
flèches tous ceux de Niobé, tandis que la mère elle-même était changée en
rocher. Mythologie.
11, Malis. — Le texte d'Ovide porte : DiriguUque malis.
26,
9, Mena. — Mena, dans cette acception, est purement latin; on dit dans
cette langue ducere bellum, faire la guerre. Naigeon.
• 10, Hongrie. — En 1560, à propos de la couronne de Hongrie que Ferdi-
nand 1, empereur d'Allemagne, disputa d'abord à Jean I Zapoix', puis à
son fils Jean 11, dont les droits étaient défendus par sa mère Isabelle, con-
flit qui se termina par le mariage de Jean II avec la fille de Ferdinand.
31, Nocte. — Ces vers de Catulle sont une imitation d'une ode de Sappho,
que Boileau a traduite. Delille a fait quelques changements à cette traduc-
tion, pour se rapprocher davantage de la forme de l'ode sapphique :
« De veine en veine, une subtile flamme
Court dans mon sein, sitôt que je te vois;
Et, dans le trouble où s'égare mon ame,
Je demeure sans voix.
Je n'entends plus, un voile est sur ma vue;
j Je rêve, et tombe en de douces langueurs;
Et, sans haleine, interdite, éperdue.
Je tremble, je me meurs! »
39, louïssance. — Add. de 1588 : accidenl qui ne m'est pas incoqneu.
28,
1, Routte. — Déroute, de l'italien rotta qui a même signification.
1, Cannes. — Le fait est affirmé par Pline, VII, 54. — Tite-Live en raconte
un semblable arrivé après la bataille de Trasimène, perdue l'année précé-
cédente (217) également par les Romains contre Annibal.
1, Sophocles. — Sophocle serait mort de joie, disent les uns, en apprenant
le succès d'une de ses pièces; selon d'autres, en avalant un grain de raisin,
comme il arriva à Anacréon. On attribue à Sophocle, mort à 90 ans en-
viron, 120 à 130 pièces de théâtre; vingt fois, il avait remporté la palme
de la tragédie. — Chilon serait également mort .de joie, en embrassant son
fils couronné aux Jeux Olympiques.
2, Tyran. — Pline (VII, 54) dit que ce fut la joie d'avoir remporté le prix
de tragédie qui causa la mort de Denys; Diodore de Sicile, que ce furent
les excès de table auxquels il se livra en suite de la satisfaction qu'il en
éprouva. — Cette épithète de « tyran » n'impliquait pas, dans l'antiquité
comme de nos jours, une idée de cruauté; chez les Grecs, comme chez les
Romains, elle désignait un souverain de pouvoir absolu et le plus souvent
usurpé.
4, Décernez. — En Corse, en 163, Thalva, ou mieux Thalna, offrait un sa-
crifice quand il reçut le décret du Sénat qui lui accordait les honneurs du
triomphe; il l'ouvrit, le lut et tomba expirant de l'autel. Vau:re Maxime,
IX, 12. — Pour obtenir les honneurs du triomphe, il fallait avoir vaincu
dans une bataille où cinq mille ennemis au moins avaient été tués, ce qui
amenait souvent à continuer le carnage, lors même que déjà on était vic-
torieux.
NOTES. LIV. 1, CH. II. VOL. I, PAG. 28. P.27S
7, Mourut. — En 1521; Léon X venait d'apprendre coup sur coup la reprise
de Milan, de Plaisance et, le jour même de sa mort, celle de Parme sur les
Français qu'il abhorrait. Sa fin inopinée donna lieu à des soupçons d'em-
poisonnement que discrètement on s'abstint d'élucider. Glicciardin, Hist.
d'Ilalic,Xl\. — Martin du Bellay (1. Il) dit ;issez plaisamment à cette occa-
sion : •< Le pape Léon X fut bien aise de mourir de joie. »
11, Faict. — Diodore mourut de honte de n'avoir pu répondre sur le moment
même à des raisonnements captieux que lui proposait Stilpon. Pline, VII, 53
CHAPITRE III.
14, Béant. — Béer, verbe qui avait le sens du mot latin inliiare; n'est plus
aujourd'hui usité qu'aux participes : bouche bée, bouche béante.
26, Plus. — « Le présent n'est jamais notre but; le seul avenir est notre objet;
ainsi nous ne vivons jamais, mais nous espérons vivre. » Pascal. — « La
nature nous rendant malheureux en tous états, nos désirs nous figurent
un état heureux; et, quand nous arriverions à les satisfaire, nous n'en se-
rions pas plus heureux pour cela, parce que nous en aurions d'autres con-
formes à notre nouvel état. » La Bruyère. — « La vie... se passe toute à
désirer; l'on remet à l'avenir son repos et ses joies... Ce temps arrive qui
nous surprend dans les désirs...; on en est là quand la fièvre nous saisit et
nous éteint; si on eût guéri, ce n'eût été que pour désirer plus longtemps. »
La Bruyère.
il, Anxius. « Tant de prudence entraîne trop de soin,
Je ne sais pas prévoir les malheurs de si loin. •
Racine, Andromaque.
... « La prévoyance! La prévoyance qui nous porte sans cesse au delà de
nous, souvent nous place où nous n'arriverions point ; voilà la véritable
source de toutes nos misères. » J.-J. Rousseau, Emile.
28, Congnoy. — « Un beau mot, dit Platon dans Timée, court depuis long-
temps dans le monde, c'est que seul le sage s'attache uniquement à ses
propres affaires et arrive .' se connaître lui-même. » — Cette même idée se
retrouve dans ces sentences si souvent reproduites : rvwôl asauTÔv et Nosce
le ipsum (Connais-toi toi-même).
30,
4, L'aduenir. — Épicure enseignait que le plaisir est le souverain bien de
l'honmie et que tous ses efforts doivent tendre à l'obtenir; mais il faisait
consister le plaisir dans la culture do l'esprit et la pratique de la vertu.
Après lui, ses disciples dénaturèrent sa doctrine en l'étendant aux plaisirs
des sens, que ses adversaires ont alors présentés comme étant son unique
but, ce qu'avec eux la postérité a trop facilement admis. 11 expliquait tout
par le concours fortuit des atomes, rejetait l'immortalité de l'àme, admet-
tait des dieux, êtres d'une nature supérieure à l'homme, mais leur refusait
toute action sur le monde et niait la Providence, prétendant détruire ainsi,
par la racine, toute superstition.
6, Mort. — Il en était ainsi dans l'Egypte ancienne à l'égard des rois et même
des simples particuliers. Tout le monde avait le droit d'accusation, et, si le
fait incriminé était prouvé, il entraînait la privation de sépulture légale,
c'est-à-dire en rapport avec le rang que le mort avait occupé et dans le
lieu que ce rang lui assignait. Diodore de Sicile, I, 6. — •• Il est étonnant et
regrettable, lit-on dans rEnc}xlopédie du xvin" siècle, que ceux qui ont ima-
giné le dogme de l'immortalité de l'àme, ne s'en soient pas servis pour, en
même temps, persuader aux hommes qu'ils entendront dans l'autre monde les
jugements divers qu'on portera sur eux lorsqu'ils ne seront plus. >• Dans ces
jugements il ne faut probablement pas comprendre ces panégyriques
F.276 ESSAIS DE MONTAIGNE.
d'usage, toujours exagérés, quand ils ne sont pas complètement menson-
gers, prononcés aujourd'hui sur nos tombes.
• Quand un roi fainéant, la vergogne des princes,
Laissant à ses flatteurs le soin de ses provinces,
Entre les voluptés indignement s'eodort.
Quoique l'on dissimule, on n'en l'ait point d'estime.
Et si la vérité se peut dire sans crime,
C'est avecque plaisir qu'on survit à sa mort. »
Malherbe.
On ne saurait dire toutefois que, même de nos jours, la mémoire des Chefs
d'État qui, abusant de leur irresponsabilité constitutionnelle, laissent tout
faire, échappe à toute sanction. La simple énonciation d'une quelconque de
ces mentions, suivant le cas : <■ Panama, Fachoda, Algésiras, Grèves uni-
verselles. Expulsion des congrégations, Suppression de l'enseignement reli-
gieux. Confiscation des biens de l'Église, Accroissement des monopoles, Dé-
ficit,etc... », au revers d'une médaille à leur effigie, en dira plus à la posté-
rité que toutes les polémiques de l'époque.
7, Loix. — Comparaison tirée des corporations de métiers : le maître et le
compagnon.
9, Successeurs. — A Venise, après la mort d'un doge, on nommait trois
inquisiteurs chargés de recevoir les plaintes de ceux auxquels il avait pu
faire quelque dommage pécuniaire ; ses héritiers en devaient réparation,
quelquefois même avec amende. — Il devrait bien en être actuellement ainsi
en France, non seulement à l'égard des Chefs de l'État, mais de tout minis-
tre, et cette instruction s'ouvrir dès qu'ils sortiraient de charge et s'éten-
dre «ans que jamais il y ait prescription à tous les dénis de justice, quels
qu'ils soient, commis aussi bien par action que par omission, c'est-à-dire
qu'Usaient commis soit par abus d'autorité, faiblesse, compromis politique et
même par ignorance, ou laissés s'accomplir quand leur devoir eût été de s'y
opposer; on évincerait peut-être de la sorte de ces fonctions, pour le plus
grand bien de la chose publique, nombre de gens sans caractère ou inca-
pables que nous voyons journellement briguer ou accepter ces mandats.
13, Leur. — Au ch. XLII de ce même livre (I, 492), Montaigne reprend cette
même idée : « ... le méchant, le bon roy... autant en a l'vn que l'autre ».
14, Roys. — A moins qu'ils ne commandent le crime, comme fit, en 1572,
le vicomte d'Orthez refusant de se prêter, à Rayonne, aux massacres de la
Saint-Barthélémy : « Sire, répondit-il à Charles IX, j'ai communiqué le
commandement de V. M. à ses fidèles habitants et gens de guerre de la
garnison; je n'y ai trouvé que bons citoyens et fermes soldats, mais pas
un bourreau. C'est pourquoi eux et moi vous supplions de ne vouloir em-
ployer nos bras et nos vies qu'en choses possibles, quelque hasardeuses
qu'elles soient. » — D'autres encore se refusèrent à l'exécution des ordres
relatifs à ces massacres : parmi lesquels Éléonor de Chabot, gouverneur de
la Bourgogne ; le marquis de la Guiche, à Maçon ; le duc de Longueville, en
Picardie; Matignon, en Normandie; Saint-IIéran, en Auvergne. — Le nom-
bre des victimes fut, dans les principales localités : à Paris, 2.500 à 3.000; à
Orléans, 500; à Meaux, 200; à Lyon, 7 à 800.
28, Tesmoignages. — TrrE-LivE, XXXV, 48.
32, Mal. — Le premier était le tribun militaire Subrius Flavius, le même
dont il est question II, 145, le second le centurion Sulpitius Afer, tous deux
inculpés dans la conspiration de Pison (65). Tacite, Ann., XV, 67 et 08.
32,
1, Police. — Est employé ici et à maintes reprises dans les Essais avec sa
signification grecque : tcôXi;, ville, et iio),iT£ta, république.
6, Leurs. — Hérodote, VI, 68.
8, Dernier. — Hérodote,- VI, 68. — Postrême et dernier sont synonymes; le
premier vient du latin poslremus et en a retenu le sens.
34.
NOTES. LIV. I, CM Ul. VOL. I, PAG. 32. F.277
S,Aristote. — Ai-istoto fut lo génie le plue vaste de l'antiquité (IV siècle). Il
a embrassé toutes les sciences connues de son temps et en a même créé
plusieurs. Pendant un grand nombre de siècles, ses écrits posèrent la borne
du savoir humain et jouirent d'une autorité absolue; au moyen. âge, no-
tamment, il lut l'oracle des philosophes et des théologiens scolastiques. Il
est l'auteur d'un grand nombre de traités, dont les progrès de la science
moderne ont démontré la valeur; les principaux portent sur la Logique, la
Rhétorique, la Politique, l'Histoire des animaux, la Physique, le Ciel, la
génération, le Monde, la Métaphysique. En philosophie, il donne comme
base à la science tout à la fois l'expérience et la raison ; il démontre l'exis-
tence de Dieu qu'il présente comme le centre auquel tout aspire; dans
l'art, il ramène le beau à l'imitation de la nature; en morale, il fait consis-
ter la vertu dans l'équilibre entre les passions, gardant un juste milieu pré-
venant tout excès; en politique, il assigne l'utilité comme but à la société.
V. N. II, -202 : Sienne.
10, Heureux. — Hérodote, I, 32; Aristote, Morale à Nicomaque, I, 10.
21, Vindicat. — Montaigne a fait quelque changement aa texte latin.
23, Auuergne. — Brantôme, Mémoires, H. — En 1380; sa mort fut cachée aux
assiégés qui ne la connurent que le lendemain quand ils vinrent se rendre;
celui qui les en avait sommés en son nom, ayant eu la présence d'esprit de
leur déclarer que s'ils ne se décidaient, il était résolu à ne plus avoir de
communication avec eux. — Duguesclin, attaché au parti de Charles de
Blois qui revendiquait le duché de Bretagne; à la mort de celui-ci, il se
mit au service de Charles V qui le soutenait. Vainqueur du roi de Navarre à
Cocherel (1364), il fut cette même année battu et fait pr^onnier à Auray.
Rendu à la liberté, il délivre la France des grandes compagnies en les con-
duisant en Espagne où il est battu et fait à nouveau prisonnier (1367). H se
i-achète une seconde fois, et, rentré en France, il se remet à guerroyer,
cette fois avec plein succès, contre les Anglais qu'il avait toujours eus en
face de lui, à Auray comme en Espagne; il les chasse de la Normandie et du
Poitou et meurt au siège de Chàteau-Rendon (1380). Ce fut un des plus
grands hommes de guerre de France; il avait été fait connétable en 1370
et fut enterré à Saint-Denis.
33, Craindre. — En 1515. Brantôme, II; Guicciardin, XII.
38, Corinthiens. — En 425, durant la guerre du Péloponnèse. La discussion
qui s'éleva à ce propos entre Niciaset ses adversaires portait sur ce que les
coi'ps de deux des siens avaient échappé aux recherches de ceux qui, après lo
combat, avaient été chargés de les enlever, et avaient dû leur être réclamés;
cela ne changeait du reste rien au résultat, seule la réputation du général
athénien eut à en souffrir. Pi.utarque, Nicias, 2.
39, Bœotiens. — En 394. Le lendemain de la bataille de Coronée qui avait été
indécise, les Thébains demandèrent une trêve pour relever et ensevelir
leurs morts; Agésilas la leur accorda, considérant cette demande comme
une confirmation de sa victoire. Plutarque, Agésilas, 6.
41, Soing. — Les éd. ant. aj. : que nous auons.
6, Mourant. —En 1307. André du Chesne, Hist. d'Angleterre, XIV.
12, Zischa. — Ou mieux Ziska; héros national de la Bohême, avait perdu l'un
après l'autre les deux yeux dans différents conibats.
13, Wiclef. — Un des prixurseurs de la Réforme; niait la transsubstantia-
tion, repoussait la confession, la primauté du Pape et la hiérarchie ecclé-
siastique. ,Iean IIuss, en Bohême, adoptant ses idées, fit des prosélytes qui
engendrèrent une guerre civile de 1174 à 1434.
26, Corps. — En 1524, au combat de Romagnano (Italie), où, franchissant la
Sesiâ, il était demeuré le dernier pour couvrir la retraite. — Bayard, sur-
nommé le Chevalier sans peur et sans reproche, réunissait en lui les vertus
qu'on admire séparément dans plusieurs hommes de l'antiquité. II s'illustra
dans les guerres de Charles VII, Louis XII et François I"; ce dernier, pour
lui témoigner sa haute estime, voulut être armé chevalier de sa main, sur
F.278 ESSAIS DE MONTAIGNE.
le champ de bataille de Marignan. — Les détails rapportés par Montaigne
sont tirés des Mémoires de du Bellay, II.
34, Présent. — Philippe II, roi d'Espagne, (ils de Charlos-Quint, né lui-même
do Pliilippe le Beau, fils de Maximilien.
38, Percée. — Cette critique n'a pas empêché cette façon de faii'e do se con-
tinuer chez certains grands seigneurs, dont les plus titrés, j)armi ceux on
agissant ainsi, furent le duc de Vendôme sous Louis XIV et le duc d'Or-
léans, régent de France, sous Louis XV.
36,
38,
5, Profession . — La profession d'homme de guerre qu'à diverses reprises, au
cours do son livre, Montaigne, sans rien préciser et sans que renseigne da-
vantage aucun document autre que son tombeau, laisse entendre comme
ayant été la sienne.
7, Mort. — Ce ne furent pas les seules excentricités de co prince, rocom-
mandable du reste sous bien des rapports. Il avait fait faire son cercueil, y
avait joint le drap mortuaire et tous les objets nécessaires à ses funérailles,
le tout disposé dans un coffre dont il avait la clef et que, dans les dernières
années de sa vie, on portait à sa suite dans tous ses voyages. A sa mort^
occasionnée, comme celle de son père, pour avoir mangé immodérément
du melon, il ordonna qu'on lui coupât les cheveux, qu'on lui arrachât les
dents, qu'on les broyât et les r<;duisît en cendres, et que son corps fût en-
fermé dans un sac rempli do chaux vive.
13, Religion. — Cyrus, fils de Cambyse, seigneur perse, et de Mandanc, fdle
d'Astyage, roi des Mèdes, commanda d'abord les armées de Cyaxare, fils
et successeur d'Astyage; puis, se rendant indépendant, se fit nommer roi
des Perses qui depuis longtemps étaient sous la domination des Mèdes
(560). Peu à peu, il agrandit son empire, défit Crésus, roi de Lydie, à la
iDataille de Thynabrée (548), et s'annexa ses états; s'empara de Babylone
(538); hérita de la Médie, et devint ainsi le maître d'un empire qui em-
brassait la majeure partie de l'Asie. C'était un prince brave, énergique,
qui ne demandait aux vaincus qu'obéissance et tribut, et respectait leurs
institutions. On ignore quelle fut sa fin; Xénophon, dont Montaigne adopte
la version, le fait mourir âgé, entouré de ses enfants; selon Hérodote, il
fut tué dans une expédition contre les Massagètes, peuple de la Scythie, et
son corps étant resté entre leurs mains, Thomyris leur reine, dont le fils
avait péri peu auparavant, lui fit couper la tête et plonger dans une outre
pleine de sang, en disent : « Monstre, abreuve-toi de ce sang dont tu as
toujours été altéré » (530). — Le fait mentionné ici dans les Essais est re-
laté par Xénophon [Cyropédie, VIII, 7).
14, Grand. — L'éd. de 88 porte « grand prince », ce que confirme la suite
du récit.
20, Traicts. — C.-à-d. sur le point de rendre l'esprit.
25, Montre. — De la cérémonie, c.-à-d. la manière dont serait formé le
cortège.
33, Choses. — Emilius Lepidus était grand pontife et prince du sénat depuis
six ans; il prescrivit à ses fils, avant de mourir, de ne consacrer à ses ob-
sèques qu'une somme modique, ne dépassant pas pour chacun dix pièces
de bronze, de n'y produire ni son image, ni celles de .ses ancêtres et de
ne faire montre de luxe d'aucune sorte. TriE-LivE, EpUome du liv. XLVIII.
2, Mechaniques. — Diogène Laerce, V.
4, Charge. — Var. 88 : « Plustost la coustumc ordonner de ceste cerimonie,
et sauf les choses requises au seruice de ma religion, si c'est en lieu où il
soit besoing de l'enioindre, m'en remettray volontiers à la discrétion des
premiers à qui cette sollicitude tombera on partage », au lieu de : « pure-
ment... charge ».
10, Voudrez. — Platon, vers la fin du Phédon.
31, Soin. — Ne s'occupa que du soin.
33, Rendre. — Accomplir.
40.
42,
NOTES. r.IV. I, CIL III. VOL. L PAG. :{8. F.279
57, Supplice. — En 406, à l'accusation portée contre eux, en vain ils oppo-
sèrent qu'une violente tempête étant survenue, ils avaient été empêchés de
recherciier et recueillir leurs morts; ils n'en furent pas moins condamnés.
Socrate se trouvant alors être du Sénat auquel il appartenait de sanction-
ner les arrêts du peuple, ni les clameui's les plus liruyantes, ni hîs me-
naces les plus terribles ne purent le contraindre à autoriser de son appro-
bation cet acte de démence publique; son opposition ne put empêcher le
peuple de se souiller d'un sang innocent. Ils étaient dix : six furent mis
à mort; deux s'étaient exilés volontairement; un était prisonnier des La-
cédémoniens; Conon, le dixième, n'avait pas été compris dans l'accusation.
— En cette circonstance, comme en tant d'autres, le peuple athénien se
prit peu après à avoir honte de sa conduite; celui qui avait porté l'ac-
cusation fut mis en jugement et condamné à son tour sans qu'on voulût
seulement entendre sa défense; exemple bien typique de la versatilité des
foules. DiODOKE DE Sicile, XIII, 31 et 32.
1, Souppe. — C.-à-d. de la môme façon.
8, Superstition. — Diodore de Sicile, XV, 9. — Sous le règne de Constantin
Copronyme, empereur d'Orient, une flotte de 2.600 barques qu'en 766 ce
prince avait équipées contre les Bulgares, fut assaillie par un ouragan qui
brisa une partie des navires et en submergea une autre; l'empereur passa
quatre mois à recueillir les corps flottants sur les eaux et à leur rendre les
devoirs funèbres. Lebeau.
10, lacent. — Cyrano de Bergerac a dit dans le même sens :
« Une heure après ma mort, mon âme évanouie
Sera ce qu'elle était, une heure avant ma vie. ■
18, Dit. — La manière dont Montaigne use des documents qu'il met en œu-
vre, se révèle tout entière dans cette restriction : Le public ou un auteur
croit ou dit telle chose. Lui-même n'en est pas aussi sûr, qu'importe? il suf-
fit que cela se prête à sa thèse pour qu'il en use, en laissant la responsa-
bilité à celui de qui émane cette croyance ou cette assertion.
CHAPITRE IV.
26, Deult. — Fait mal, endolorit, du latin dolel qui a cette même significa-
tion.
26, Vent — N'atteint que le vide. Image tirée d'un terme employé au jeu
de paume.
2, Dit. — Dans la Vie de Périclès, au commencement.
5, Vain. — Oisive.
8, Que. — Sous-entendu « plustôt », qui se trouve quelques lignes plus haut,
et éviter la répétition; ces élisions sont fréquentes dans Montaigne.
22, Frères. — En 211, Publius et Cneius Scipion, l'un et l'autre à la tète
d'armc-es romaines opérant en Espagne contre les Carthaginois, après huit
années de hauts faits et de triomphes, abandonnés de leurs alliés, furent
tous deux, à un mois d'intervalle, défaits et tués, et leurs troupes sérieu-
sement compromises. Tite-Live, XXV, 37.
25, Dueil. — Cicéron, T'use, III, 26.
28, Athos. — En 480, Xerxès fit fouetter l'HelIespont parce que la tempête
avait rompu un pont de bateaux qu'il y avait fait établir, et percer le mont
Athos pour donner passage à sa flotte et n'avoir pas à le doubler. Héro-
dote, VII, 24 et 35; Plutarque, De la colère.
30, Passant. — Séxèque, De Ira, III, 21. — Cyrus, irrité de ce qu'il avait failli
périr au passage de ce fleuve, où un de ses chevaux s'était noyé, entreprit
F.280 ESSAIS DE MONTAIGNE
de le dessécher et à cet effet fit creuser trois cent soixante canaux par les-
quels ses eaux devaient se perdre. Hérodote (I, 189) dit qu'il consacra tout
un été à cette œuvre de folie et Orose qu'il y employa toutes ses troupes
durant une année entière.
31, Plaisir. — C'est déplaisir qu'il y a lieu do lire, faute «l'impression com-
mise dans la première édition et qui a toujours été reproduite depuis :
« Caligula, dit Sénèque (De Ira, III, 22), lit démolir une très belle maison,
dans le quartier d'Heirule, parce que sa mère y avait été détenue en quelque
sorte on prison. »
32, Voysins. — Probablement Alphonse XI, roi de Castille. Chari.es de Bo-
vELi.Es, Géométrie pratique.
44,
46,
6, Mer. — En 37, lors de sa guerre contre Sextus Pompée, durant laquelle,
la tempête ayant dispersé sa flotte, il fut battu près du cap Scylla (pointe
S.-O. do ritalie). SvÉTOîiE, Auguste, IG.
11, Allemagne. — En l'an 9, VarHS, attiré dans une embuscade par les Ger-
mains, y périt avec trois légions romaines.
14, Mesmes. — 80 et 88 aj. : à belles iniures.
18, Titanienne. — C.-à-d. comme avaient fait les Titans révoltés contre les
dieux.
18, Flèche. — Héhodote, IV, 0-4.
lu, Plutarque. — Dans son traité Du Contentement ou Repos de respril. 1.
CHAPITRE Y.
23, Parlementer. — C'est deviser, conférer, entre doux ou plusieurs, sur
quelque affaire; se dit ordinairement des pourparlers en vue de la capi-
tulation d'une place assiégée.
30, Sénat. — Constituait à Rome le premier corps de l'État. Institué par Ro-
mulus, il comprit d'abord cent membres, dont le nombre s'éleva progres-
sivement jusqu'à mille sous César, mais qui avant et après lui n'était que
de six cents, ce qui semble avoir été le plus généralement. Les sénateurs
étaient nommés à l'élection, mais le furent aussi parfois par les consuls,
les censeurs ou tout autre exerçant le pouvoir suprême; ils devaient avoir
une fortune de 800.000 sesterces (163.000 fr.) sous la République et de
1. 200.000 (241.000 fr.) sous l'Empire; le sénateur porté le premier sur la liste
était appelé Prince du Sénat.
2, Bataille. — En 170. Le procédé de L. Marcius n'en fut pas moins finale-
ment approuvé par le sénat; .ses atermoiements avaient empêché Persée de
profiter de l'avance considérable de ses préparatifs et firent que l'année
suivante la guerre se terminait par sa ruine complète. Tite-Live, XLII, 37;
il le nomme Quintus, au lieu de Lucius.
3, Médecin. — En 275. Pyrrhus, venu en Italie au secours des Tarentins,
avait déjà remporté une victoire sur les Romains, quand son médecin leur
ofi'rit de les débarrasser de leur ennemi en l'empoisonnant. Le consul Va,-
bricius dénonça au roi cette offre de trahison, et celui-ci, plein d'admira-
tion, lui renvoya sans rançon les prisonniers qu'il avait faits, y joignant
des propositions de paix. Les Romains lui renvoyèrent le même nombre
de Samnites et de Tarentins, ses aUiés, qui étaient en leur pouvoir, et, pour
le reste, lui déclarèrent qu'ils ne pouvaient traiter, tant qu'il n'aurait pas
évacué l'Italie. Plutarque, Pyrrhus.
4, D'escole. — En 394, se trouvant en guerre avec les Romains, et ceux-ci
assiégeant leur ville Paieries (auj. Sainte-Marie de Falari), leur maître d'é-
cole amena à leurs ennemis pour les leur livrer et contraindre ainsi la
ville à se rendre, les enfants des principaux citoyens confiés à ses soins.
Camille qui, en qualité de dictateur, commandait l'armée romaine, refusa
cette offre criminelle, fit dépouiller le traître de ses vêtements et ramener
NOTES. LiV. 1, Cil. IV. VOL. 1, PAG. 46. F.281
par ses élèves à coups de verge; touchés de cette noble actiou, les Phalis-
ques firent leur soumission. Pi.ltahque, Camille.
11, Sentence. — 8f) et 88 port. : .Si e.'it-ce que le Sénat Romain à qui le seul
aduantage de la vertu sembloit moyen iuste pour acquérir la vi«toire, Irouua
celle pratique laide et deshonneste, n'ayant encore ouy sonner à ses oreilles
celle belle sentence, au lieu de : « Si est-ce... sentence ».
13, Polybe. — Liv. XIII, ch. I.
2ô, Vaincre. — Plus conséquentes que les gens de Ternate, et tenant qu'à la
gueri-e le succès seul est à considérer et que rien ne doit être négligé pour
l'obtenir, les nations modernes, dites civilisées, non seulement mettent en
œuvre à cet eftet tous leurs moyens, mais cherchent encore à en dérober
la connaissance à toutes autres, nos amis d'aujourd'hui pouvant être nos
ennemis de demain. — Pour en atteindre le but qui est l'anéantissement
aussi rapide et aussi complet que possible de l'ennemi, tout est bon sauf
la déloyauté; et encore, si chacun, à cet égard, est d'accord en théorie, la
divergence est immense dans la pratique; et seul a tort celui qui sera
vaincu, au point que s'accentue chaque jour davantage la tendance d'at-
taquer sans même faire de déclaration de guerre. Cela, à la vérité, s'est vu
de tous temps : en Europe, dans ces deux derniers siècles, on ne compte
pas moins de 110 cas où les hostilités ont commencé sans déclaration ou
avant toute déclaration; c'est notamment dans ces conditions que les An-
glais, coutumiers du fait plus que tous autres, détruisirent en 1718 la flotte
espagnole, en 1807 bombardèrent Copenhague, et en 1900 ont failli en user
à notre endroit lors de l'incident de Fachoda; c'est aussi ce qu'ont fait les
Japonais à l'égard des Russes en 1904. Cette pratique est éminemment re-
grettable pour la paix du monde et la fortune publique; elle ruine les États
en les obligeant à être constamment en armes et risque de faire dégénérer
toute question en éventualité de guerre. Elle est une tentation continue
pour ceux sans scrupule, par l'avantage que peut donner un jour ou deux
d'avance sur l'adversaire dont cela déroute les prévisions, trouble la mo-
bilisation, restreint les ressources, en livrant à l'envahisseur celles des ter-
ritoires sur lesquels il a inopinément pénétré. Aussi quelle infériorité pour
ceux chez lesquels le droit de déclarer la guerre est, à si juste titre, sou-
mis à l'assentiment du pouvoir législatif! — Étant donné qu'elle est sans
cesse menaçante et peut aboutir à la ruine, il nous faut être forts, très
forts, le plus forts possible et toujours j)rêts, mais en outre il serait à sou-
haiter que la responsabilité de ceux investis du pouvoir de l'engager fût
rendue aussi effective et afflictive que possible. Pour cela, nous souhai-
terions qu'il s'introduisît dans nos idées que les chefs d'État et membres de
gouvernement, dont les agissements l'ont amenée, méritent de payer de
leur vie ce forfait, sont de ce fait voués à tout jamais à la .vindicte pu-
blique, et que tout attentat contre eux est œuvre pie. Puissions-nous voir
des associations (voire même internationales, ce serait bien ici le cas), sorte
de Tugend-bund, se former et propager cette doctrine et faire des prosé-
lytes, et il n'en manquerait pas, que n'arrêteraient point sa mise en ap-
plication, rendue facile avec les progrès de la science à qui a fait le sa-
crifice de sa vie ! Devant les risques personnels auxquels ces mandataires
des peuples, abusant de leurs mandats, se trouveraient de la sorte exposés,
il est à croire qu'ils se montreraient plus circonspects. C'est là, dira-t-on,
une provocation à l'assassinat; j'en conviens, mais c'est le seul moyen de
conjurer ce fléau, la plupart du temps déchaîné ou accepté d'un cœur
léger et sans raison suffisante, en admettant qu'il en existe en dehors d'une
invasion; de 'plus, qu'est-ce que le meurtre d'une douzaine de grands
coupables, auprès de celui de cent, deux cent mille innocents tombant de
part et d'autre par la faute de ces criminels et des ruines, quelle que
soit l'issue de la lutte, si considérables et de toute nature pour le pays et
les individus dont ils sont cause! Guerre à la guerre ! G. M. — En ces der-
nières années, un Congrès international permanent de la paix, auquel
toutes les nations ont adhéré par pudeur plutôt que par conviction, s'est
F. 282 ESSAIS DE MONTAIGNE.
constitué à La Flayc sur l'initiative de Nicolas II, empereur de Russie.
L'intention est excellente, mais faute de sanction efficace possible, il est
douteux que les résultats en soient jamais de quelque importance. De fait,
on n'y a guère obtenu jusqu'ici que la consécration du principe de l'ar-
bitrage, auquel on avait déjà recours auparavant, et qui n'a chance de
prévaloir que pour des questions de peu d'importance. — On a proposé qu'en
cas de conflit arrivant à l'état aigu, les hostilités ne puissent s'ouvrir avant
un délai de quinze ou vingt jours, durant lequel les gouvernements amis
[)Ourraient intervenir et essayer de régler le litige à l'amiable. En cas de
non-consentement à cet ajournement des hostilités, la nation opposante
serait mise à l'index, ce qui comporterait l'impossibilité, pour elle, de re-
cevoir, pendant toute la durée de la guerre, aucune aide financière ou com-
merciale, de la part des autres puissances signataires. L'adoption de cette
proposition constituerait assurément un grand progrès humanitaire, mais
outre qu'elle ralliera difficilement l'unanimité des suffrages, la pénalité qui
s'y trouve introduite, en supposant qu'elle ait l'efficacité qu'on lui prête,
ne serait-elle pas aisément éludée? — D'autres prônent la réduction des
armements; il est peu probable que cette proposition chimérique puisse
même être présentée. Sur quelles bases opérer avec tant d'éléments et
d'intérêts dont il faudrait tenir compte et sur lesquels l'accord ne se fera
jamais? Et puis, il est si facile par des dispositions accessoires de modifier
le fond des choses : la Prusse limitée dans ses armements par le traité de
Tilsitt n'est-elle pas arrivée à mettre en ligne, cinq ans après, des effectifs
bien supérieurs à ceux qu'elle avait présentés jusqu'alors?
28, Exercite — Armée, du latin exercitus.
29, Martinella. — Du nom de Saint-Martin, dérivé lui-même de Jlars, dieu
de la guerre; maîtresse cloche dont on usait en cas d'alarme. — De là, le
mot de Pierre Capponi, premier secrétaire de la république de Florence,
qui, déchirant le papier où étaient écrites les conditions que lui faisait
Charles VIII, s'écria: •< Eh bien! s'il en est ainsi, sonnez vos trompettes,
nous sonnerons nos cloches! « Sismondi, Hisl. des républiques italiennes, XII.
32, Regnard. — Plutarque, Lysandre, 4. — Coudre la peau du renard à celle
du lion, c'est ajouter la ruse à la force.
48,
7, Mousson. — Pont-à-Mousson, contre le duc de Nassau, en 1521. Cette red-
dition eut lieu dès que l'artillerie de l'assiégeant se fit entendre; la gar-
nison, composée de nouvelles levées, effrayée, ayant obligé ses deux chefs
à entrer en pourparlers. Non seulement ceux-ci eurent la faiblesse d'y con-
sentir, mais ils commirent encore la faute qui leur est reprochée ici de
sortir tous deux de la place et de se rendre au camp ennemi pour parle-
menter. Du Bellay, I.
18, Ville. — En 1521, alors que nous étions maîtres du duché de Milan. Regge,
ville des États de l'Église, à peu de distance de là, était le refuge de tous
ceux que nous avions bannis; ils devaient nous être livrés. Pour les obte-
nir, le maréchal de Foix, seigneur de l'Escut, vint sommer Guy de Ran-
gon, qui était gouverneur de la place, de les lui remettre; c'est pendant les
pourparlers que se produisit cette échauffourée dont le résultat fut que nous
n'obtînmes pas satisfaction. Du Bellay, I; Ctuiccl\rdim, XIV.
28, Anglais. — En 1359. Le château était abondamment pourvu et les as-
siégés ne se doutaient pas qu'il fût si complètement sapé. Froissart, I, 209,
où le capitaine anglais a nom de Brunes.
.NOTES. LIV. I, eu. VI. VOL. I, PAG. 50. F.283
CHAPITRE VI.
50,
3, Chapitre VI. — Ce chapitre n'est qu'une suite du précédent.
7, Pièces. — En 1569. La ville était assiégée par les Catholiques coniriiandés
par le comte de Brissac qui y lut tué. La capitulation portait que la gar-
nison aurait la vie sauve ; mais, furieux de la mort de leur chef, les vain-
queurs la massacrèrent dès qu'elle fut hors de vue de la place.
26, Militaire — En 190. La ville avait, quelques jours avant, subi un assaut
(lu'elle avait repoussé. Régillus, voyant ses efforts impuissants à arrêter le
pillage, s'efforça de sauvegarder la vie des habitants; et, quand l'ordre l'ut
rétabli, il s'appliqua à réparer de son mieux le préjudice qu'ils avaient
subi. TiTE-LivE, XXXVII, 31
31, Subtilité — Vers l'an 600. Cléomène avait conclu avec les Argiens une
trêve de huit jours; la troisième nuit, il reprit les hostilités. Sa mauvaise
foi ne lui fut en effet d'aucune utilité; il avait pensé, ay)rès ce mauvais
coup, surprendre la ville d'Argos, mais les femmes, détachant des temples
les ai'mes qui s'y trouvaient en trophée, coururent aux murailles et le re-
poussèrent. Plutarque, Apophlhegmes des Lacédémoniens,
52,
;!. Romaine. — L'an 214. Casilinum était assiégée par les consuls Fabius
et Marcellus; l'année précédente, Annibal s'en était rendu maître à la suite
d'un siège mémorable. Tite-Live, XXXIV, 19.
9, Xénopbon. — Dans la Cyropédie. — Xénophon débuta dans la guerre du
Péloponnèse, où il se distingua; il lit partie des contingents grecs à la solde
de Cyrus le .leune contre son frère Artaxerxès et il en dirigea la retraite,
connue sous le nom de ■< Retraite des dix mille »; plus tard, il combattit à
Coronée contre ses concitoyens qui l'avaient banni et ne le rappelèrent que
25 ans après, ce qu'il n'accepta pa-s. Il est l'auteur de nombreux ouvrages
historiques, politiques et philosophiques, parmi lesquels : l'Anabase ou
Retraite des dix mille, la Cyropédie, les dits mémorables de Socrate; c'est
lui qui publia l'histoire de Thucydide, restée jusque-là inconnue, et qu'il a
continuée. Son style est d'une élégance et d'une douceur exquises, parfois
cependant diffus et languissant. Comme philosophe, il est l'interprète le
plus fidèle des doctrines de Socrate, dont il avait été un des disciples pré-
férés.
14, Cappoûe — En 1501. La ville avait résisté à une première attaque. Assié-
gée une seconde fois, elle se résolut à capituler; mais, pendant les pour-
parlers, la garnison épuisée par de longues veilles s' étant relâchée de sa sur-
veillance, les Français surprirent une des portes et pendant plusieurs jours
ce ne fut que meurtre et pillage. Un grand nombre de femmes s'étaient ré-
fugiées dans une tour. César Rorgia, fils naturel du pape Alexandre Vl,
qui marchait avec nous, se les fit toutes amener et choisit les quarante
plus belles qu'il envoya à son palais, à Rome, pour y constituer son sérail.
SiSMONDi, Hisl. des républiques italiennes. — En 1705, à Barcelone, lord Pé-
terboroug, en pareille occurrence, agit tout autrement : Il traitait de la
capitulation de la ville, lorsque les Anglais, profitant du moment, s'y in-
troduisirent par surprise. Lord Péterboroug aussitôt, suspendant les pour-
parlers, entre dans la ville, court à ses troupes, leur fait honte, parvient à
les ramener et reprend les négociations. Servan.
20, Saisie. — En 1542. Yvoy fut pris par le duc d'Orléans, un pan de mur
étant venu à s'écrouler. Cet accident, dont les assiégeants profitèrent sur-le-
champ, s'est-il produit pendant les pourparlers et est-ce à cela que se rap-
porte le fait, je ne saurais le dire.
22, Gènes. — En 1522. Les habitants, réduits à peu près à eux-mêmes, dès
l'approche de l'ennemi, demandèrent à traiter; pendant qu'on était en
conférence, les Espagnols, ayant en connaissance d'un endroit où le mur
était en mauvais état et qui n'était pas gardé, s'y portèrent et, l'escaladant.
F. 284 ESSAIS DE MONTAIGNE.
pénétrèrent dans la villo où ils passèrent au fil (!<■ !( |.< .■ tout ce qu'ils ren-
contrèrent. Du Beli.ay, II.
26, Barrois. — En I.o44. Les Impériaux ])('uétrèrent dans le château par la
porte de secours, pendant que l'on discutait les conditions de la capitula-
tion. Du Bei,i,ay, IX.
32, Chrysippus. — Cicéuon, De Off., III, 10.
54,
I, Desrobées. — Quinte-Curce, IV, 13.— Conseil donné à Alexandre la veille
de la bataille d'Arbelles au succès de laquelle Polyporchon eut grande
part (331).
CHAPITRE VII.
II, Ginquiesme. — Ceci rappelle l'épitaphe de Pépin le Bref: « Ci-glt Pé-
pin, père de Charlemagne » ; et cette autre inscription gravée sur le socle
d'une statue de Louis XIV à Pau : « Celuy cy est le petit-fils de nostre bon
roy Henry ».
lo, Décédé. — En 1509. Le duc de Suffolk était de la maison rivale de Lan-
castro et Henry VII, malgré de très grands services rendus, le redoutait.
Le duc, averti des mauvaises disposition du roi à son égard, s'était réfugié
en Flandre; et, lors d'une traversée de Flandre en Espagne, Dom Philippe
ayant été contraint de relâcher en Angleterre, Henry VII ne le laissa se
rembarquer qu'après qu'il eut livré le duc de Suffolk, sous promesse, il est
vrai, d'épargner sa vie, engagement qu'il tint ainsi qu'il est rapporté ici. Du
Bellay, L — Durant cette guerre civile, dite des Deux Roses, qui désola l'An-
gleterre aux xv"" et xvi» siècles, causée par la rivalité des maisons de Lan-
castre et d'York se disputant le trône, lès partisans du duc d'York avaient
adopté une rose blanche comme signe de ralliement, les Lancastre une
rose rouge. — Dans cette déloyale manière de faire, Henry VII avait eu
un précurseur dans David qui, aux approches de sa fin, donna ordre à
Salomon, son fils, « de ne pas laisser les cheveux blancs ni de Joab ni de
Séméï descendre en paix dans le séjour des morts ». Joab avait, malgré
ses recommandations, tué Absalon son fils, qui s'était révolté; Séméï l'a-
vait insulté, tandis qu'il fuyait devant ce même Absalon, et il lui avait
promis la vie sauve (X^ siècle). Livre des Rois, I, 2.
19, D'Aiguemond. — En 1568. Les comtes de Horn et d'Egmont, tous deux
de là plus haute noblesse des Pajs-Bas alors sous la domination de l'Espagne,
avaient, dans les rangs de l'armée espagnole, puissamment contribué aux
victoires de Saint-Quentin et de Gravelines. Lors des troubles qui éclatè-
rent peu après dans leur patrie pour secouer le joug de l'étranger, d'Egmont
étant entré en relations avec Guillaume d'Orange et les confédérés, le duc
d'Albe, gouverneur des Pays-Bas pour le roi d'Espagne Pàilippe' II, le fit
arrêter, et avec lui de Horn son ami, dont la connivence était mojns prou-
vée, et après neuf mois de détention, les fit décapiter; leur véritable crime
était d'appartenir à la religion réformée. — Cet épisode a fait le sujet
d'un drame de Gœthe, plein d'émotion et d'intérêt; et plus i-écemment
en France d'une tragédie : Patrie! de Mctorien Sardou, depuis mis en
opéra.
27, Puissance. — Saint Bernard dit que « l'homme est si peu d'accord avec
lui-même, qu'on ne peut bien juger de ses actions par ses intentions, ni de
celles-ci par celles-là ».
56,
4. Enfans. — Au XII° siècle. L'architecte n'est pas nommé par Hérodote
(II, 121); le roi s'appelait Rhampsinit ou Rhamsès et passait pour posséder
des trésors incalculables. Abusant du secret que leur avait livré leur père,
les deux fils de cet architecte puisaient dans ces trésors; s'étant aperçu
qu'on le volait, le roi dressa un piège dans lequel donna l'un de ses voleurs
qui, se voyant pris, en avertit son frère, l'avisant de lui couper la tète et
de l'emporter, pour qu'on ne le reconnût pas.
NOTES. LIV. I, CH. VII. VOL. I, PAG. 56. F.28b
9, Leur. — C.-à-d. ils doivent faire de plus grands sacrifices personnels et
ne pas se iiorner à une réparation qui de fait ne leur coûte rien.
CHAPITRE VIII.
58,
10, Habitat. — Montaigne a traduit ce vers avant de le citer.
16, Meshuy. — Désormais. Moshuy est mis pour mais liuy, du latin magis
hodie, au delà d'aujourd'liuy.
:^l, Mesmes. — C'est l'idée qui a donné naissance aux Essais. L'a date à
laquelle cette idée a éclos se trouve déterminée par ce i)assage du début
du dernier chapitre du second livre : « Jo me suis envieilli de sept ou huit
ans depuis que ie commençay »... Comme ce livre terminait la preunère
édition de l'ouvrage, dont l'yVvis au lecteur est daté du l" mai 1580, on est
conduit à penser qu'il a été commencé en 1571. C'est au surplus ce que
corrobore une inscription de la bibliothèque de l'auteur qui porte qu'au
jour anniversaire de ses trente-huit ans, le 28 février 1571, las de toute
servitude, il s'est réfugié dans l'intimité des vierges du Parnasse.
CHAPITRE IX.
25, Mémoire. — Add. de 80 et 88 : que moy.
;W, Réputation. — Add. de 80 : l'en pourvois faire des comités merueilleux, mais
pour cesle lieure il vaut mieus suyure mon thème.
32, Déesse. — Platon, dans Çritias.
34, Mienne. — Montaigne se plaint encore de sa mémoire au chap. XVII du
second livre. Malebranche et quelques autres l'accusent d'avoir prétendu
faussement n'en pas avoir; ils en donnent pour preuve ses nombreuse ci-
tations. Mais outre qu'elles ne sont pas toujours exactes et qu'il lui arrive
de se contredire, ceux qui ont écrit savent qu'il ne faut pas beaucoup de
mémoire pour citer, et citer souvent : « à faute de mémoire naturelle,
l'en forge de papier », dit-il, liv. 111, chap. XLIII; là est tout le secret. Le
Clf.iîc.
60,
35, Arrouté. — C.-à-d. une fois qu'on est en train.
30, Pertinents. — C.-à-d. les gens habiles, qui ont du tact.
62,
5, Ancien. — Cet ancien, c'est Cicéron qui, dans sa défense de Ligarius,
ch. Xll, dit à César : « Jamais tu n'oublies, si ce n'est les injures ».
G, Protocole. — Y. N. II, 402, Protocole.
7, Athéniens. — En 499. Les Athéniens, soutenant les Ioniens révoltés
contre les l'erses, s'étaient emparés de Sardes, chef-lieu d'une des satrapies
(gouvernements) de leur empire, et l'avaient brûlée. Hérodote, V.
12, Menteur. — •- Il faut qu'un menteur ait de la mémoire ». Ai'ui.ée.
13, Grammairiens. — En particulier Nigidius dans Aulu-Gelle, XI, et Nonius,
V; Montaigne ne fait ici que traduire ce dernier. Le Clerc.
19, Tout. — Cette locution « marc et tout » n'est pas claire, bien que la
pensée le soit. Elle semble vouloir dire : principal et accessoires, ce que
confirme ce passage du ch. XVll du liv. II (II, 464), où Montaigne dit :
■• le ne conseille non plus aux dames d'appeler honneur leur deuoir. .. leur
deuoir est le marc, leur honneur n'est que l'escorce. »
64,
1, Art. — Ce mot est d'emploi fréquent dans les Essais, et, sauf dans doux
ou trois passages, toujours au féminin.
7, Vice. — Homère, dans l'Iliade, fait dire a Achille : « Je hais, à l'égal des
portes de l'enfer, celui qui pense d'une façon et i)arle d'une autre ». ~ Il
esta regretter que nous n'ayons, en bon français, <[u'un seul mot pourqua-
C.286 ESSAIS DE MONTAIGNE.
lifier toute altération de la vérité sciemment faite, qu'elle ait lieu ou non
avec le désir ou la volonté de nuire. Dans le premier cas, elle est réellement
coupable et mérite toute réprobation; dans le second au contraire, elle
s'impose parfois, quand elle a pour objet d'éviter à quelqu'un une déception,
une désillusion, un chagrin ; elle est excusable, lorsqu'elle n'a d'autre but
que de plaisanter, ou de donner plus de piquant à un récit fait uniquement
pour divertir. Menterie (mensonge léger, sans conséquence), employé par
atténuation dans le style familier, est lui-même un ternie éveillant toujours
à l'égard du propos auquel il s'applique quelque idée de blâme ou de cri-
tique. Ces distinctions, dans l'altération volontaire de la vérité suivant
l'intention, faisaient dire à Voltaire : « Le mensonge n'est un vice que
lorsqu'il fait du mal; c'est une grande vertu quand il fait du bien ». Elles
sont admises des théologiens et sont l'origine de ces restrictions mentales
qui créent des excuses à qui est ainsi amené à mentir, restrictions que
certains, auxquels le reproche en est souvent fait, ont érigées en système. —
Quelque chose d'analogue se produit pour la délation et l'espionnage, qui
emportent constamment une idée de réprobation parce que nous n'avons
pas de mots distincts pour la désignation de faits de ces caractères, soit
qu'ils constituent des actes justifiant la réprobation publique, soit qu'ils
témoignent au contraire de la plus haute vertu. Commettent on effet tous
deux de la délation l'être méprisable qui, dans un but d'intérêt personnel
ou pour lui porter préjudice, dénonce son prochain sans nécessité, et
l'homme de cœur qui signale des crimes qui sans lui échapperaient à la
vindicte de la société, ou de belles actions qui, sans son intervention, de-
meureraient inconnues; de même tous deux font de l'espionnage, le traître
qui vend à l'ennemi les secrets de sa patrie, et le héros qui expose sa vie
pour surprendre ceux de l'adversaire et en faire profiter les siens. — Ce
sont là des lacunes regrettables de notre langue.
26, Blanc. — C.-à-d. détournent du but. Expression qui vient de ce que les
buts sur lesquels on tirait, et on tire encore en certains pays de France,
à l'arc et à l'arbalète, sont constitués par des cercles peints en blanc.
29, Père. — Saint Augustin.
31, Vice. — Passage de Pline, Hist. nat., VII, I, que Montaigne a modifié
pour mieux l'adapter à sa thèse ; l'auteur latin dit : « alieiio pêne non sit (ne
sont presque point) ».
66,
68,
1, Rouet. — Mettre au rouet, c'est fermer la bouche à quelqu'un, lui ôter le
moyen de répondre, l'embarrasser.
12, Niepce. — Cette princesse, peu après cet épisode, épousa en effet le duc
de Milan, et, postérieurement, le duc de Lorraine François II.
14, Interest. — Signifie ici dommage, préjudice. Ce mot se prend encore au-
jourd'hui dans ce sens, quand en langage juridique on dit de quelqu'un
qu'il est « condamné aux dépens, dommages et intérêts ».
41, François. — En 1534, l'incident Merveille s'était produit l'année précé-
dente. Du Bellay, IV. — Ainsi que permettent de le constater les por-
traits de ce prince, le roi François I avait le nez d'une longueur peu ordi-
naire.
7, Vie. — En 1513. Erasme, IV. Le roi d'Angleterre était Henry VIII; le roi de
France Louis XII et non François P' qui ne monta sur le trône qu'en 1515,
après la mort de Jules II survenue l'année où le fait en question s'est
passé.
CHAPITRE X.
8, Données. — Ce vers est de la Boétie.
10, Boutebors. — Présence d'esprit ou faculté d'exprimer plus ou moins fa-
cilement et sur-le-champ sa pensée.
NOTES. LIV. I, CH. X. VOL. I, PAG. 68. F.287
11, Beau. — Il existe, datant du xvi' siècle, un livre espagnol, traitant de
la gymnastique, à l'usage du beau sexe.
22, Lice. — Le poète Accius, auquel on demandait pourquoi il ne plaidait
pas, lui qui réussissait si bien au théâtre, répondait ? « Dans mes tragé-
dies, je dis tout ce qui me plaît; à la barre, je serais obligé d'entendre
tout ce que je ne voudrais pas. » — Bayle, qui donne cette réponse, dit qu'il
connaît un homme d'espiit qui ont recours à cette raison pour détourner
son (Ils do la jurisprudence et le pousser vers la théologie : - Quoi de plus
commode, lui disait-il, que de parler devant des gens qui ne vous contre-
disent pas? c'est l'avantage des prédicateure (il pourrait ajouter aujour-
d'hui et des conférenciers on général, car tout maintenant est matière à
conférence, où parfois à la vérité, mais bien exceptionnellement, la con-
trovei"se est admise); et quoi de plus incommode que d'être obligé d'enten-
dre, dès que vous avez parlé, quelqu'un vous réfuter, en passant au crible
tout ce que vous avez dit? ce qui est la condition de l'avocat. » Il faut con-
venir du reste que beaucoup de ceux-ci se soucient fort peu de ces réfuta-
tions qu'ils n'écoutent pas toujours, comme font en particulier nos parle-
mentaires qui, n'ayant souvent ni compétence ni conviction, ne parlent que
pour donner des gages à leur parti, signe de vie à leurs électeurs, pronon-
çant des discours fréquemment vides de sens auxquels personne ne prête
attention, chacun ayant, la plupart du temps, son siège fait à l'avance. G. M.
25, Marseille. — Clément VII et François V% en 1533. Le pape, venu par mer,
séjourna un mois entier à Marseille; cette entrevue avait pour objet une
entente contre l'empereur Charles-Quint; l'accord fut scellé parles fiançail-
les de Catherine de Médicis, duchesse d'Urbin, nièce du pape, qui l'avait
amenée avec lui, avec le second lîls du roi, depuis Henri II. Du Bellay, IV.
70,
7, Prescbeurs. — On naît oi-ateur, tandis qu'on devient prédicateur; et ce
qui est don de nature prévaut toujours.
7, France. — « Les Français, dit Stern (et Arthur Young est du même avis),
conçoivent mieux qu'ils ne combinent. »
12, Cassius. — Orateur célèbre du temps d'Auguste, que son humeur sati-
rique finit par faire bannir. Il se distinguait par la violence de ses écrits et
de ses discours, ne gardant aucune mesure, aucune décence dans l'expres-
sion, et, dans l'ardeur de frapper ses adversaires, querellait plus qu'il ne
combattait. Sénèque le Rhéteur, III. (V. II, 50, et N. II, 72 : Fil).
13, Pense. — On en disait autant de Cazalis, député de la noblesse aux États
généraux de 1789.
21, Part. — Le même reproche de « sentir l'huile • fut fait à Démosthène
par Pythéas, autre orateur, critiquant par là en lui la préparation excessive
de ses discours, ce qui ne l'empêchait pas d'être le premier orateur de son
temps et peut-être de tous les temps. — « L'improvisation ne s'improvise
pas; il faut une longue préparation et des méditations approfondies pour
parler d'abondance. »
31, Fortuites. — C'était le cas de Mirabeau, le grand orateur de ces mêmes
États généraux de 1789; la contradiction l'enflammait. Au début ses vues
étaient confuses, sa parole entrecoupée, mais, peu à peu, avec la discus-
sion et les interruptions, la lumière se faisait dans son esprit, ses expres-
sions se précisaient, s'accentuaient, et son génie oratoire et politique se fai-
sait jour et s'imposait.
72,
8, Jour. — C.-à-d. le hasard m'en offrira le sens.
F.288 ESSAIS DE MONTAIGNE.
CHAPITRE XI.
10, Pièce. — Dès longtemps, comme poi'tent certaines éditions; c'est un
italianisme, im buonpezzo, dit-on en italien; ailleurs Montaigne écrit pieça.
11, Crédit. — « Notre ignorance générale des causes premières nous interdit
toute pr(;diction. La plupart du temps ce ne sont que des hypothèses ba-
sées sur des analogies, et ne devraient se borner qu'à un avenir fort rap-
proché; toujours elles sont de réussite assez douteuse. Les prédictions des
rêveurs que rien n'autorise, se confirment parfois, mais ce n'est que par
liasard ; combien infinie la quantité d'autres, émanant de même source, qui
ne se réalisent pas et dont personne ne parle! » G. Leison.
M, Delphis. — Delphes était regardée par l'antiquité grecque comme une
ville sainte; on la tenait comme occupant le centre de la terre; son temple
d'Apollon et les oracles qui s'y rendaient étaient en gi-ande vénération. Tou-
jours obscurs et ambigus, ces oracles étaient rendus par la Pythie, prê-
tresse du dieu, qui, à cet effet, mâchait dos feuilles de laurier, arbi'e qui
lui était consacré, et se tenait sur un trépied au-dessus d'une ouverture d'où
s'échappaient des vapeurs qui lui communiquaient une certaine exaltation.
21, Abolies. — Les aruspices étaient des sacrificateurs qui révélaient l'ave-
nir par l'inspection des entrailles des victimes; les augures, d'ordre plus
relevé, le révélaient d'après le vol, le chant et l'appétit des oiseaux. Les
devins émettaient des prédictions, interprétaient les songes, les présages à
la façon de nos diseurs de bonne aventure; il en était à peu près de même
des oracles, mais rendus en un lieu, dans des formes et au nom d'une di-
vinité déterminée, ils avaient un caractère plus offici-el et inspiraient da-
vantage créance.
27, Préoccuper. — Anticiper; ne s'emploie plus dans ce sens déi'ivé de son
étymologie latine.
74,
I, Olympi. — L'Olympe, sur les confins de la Macédoine et de la Thessalie,
montagne la plus élevée (environ 2.5C)0) de la péninsule hellénique. Les an-
ciens en avaient fait la résidence de leurs dieux; Jupiter, souverain maître
des dieux et des hommes, 'l'était aussi de l'Olympe.
8, Salusse. — Une fille de celte famille s'est alliée en 158G à un Lur des en-
virons de Bordeaux, fondant la branche des Lur-Saluces qui y existe en-
core, et deux de leurs petits-fils ont épousé les deux petites-filles de Mon-
taigne. V. N. II, 44 : Masculines.
12, Faire. — C.-à-d. « de changer de parti », comme il est dit quelques li-
gnes plus bas. Certains éditeurs, choqués de cette longue suspension de
sens, ont substitué : « de tourner sa robe •>, autrement dit « tourner ca-
saque ». COSTE.
IG, Dauantage. — « Il était homme, écrit du Bellay, qui ajoutait foi aux
devins, lesquels lui avaient prédit que l'Empereur devait cette année dé-
trôner le roi de son royaume. »
27, Contestée. — En 1536. Cette trahison eut aussi pour cause le désir qu'a-
vait le marquis de Saluées d'obtenir de Charles-Quint le marquisat de
Montferrat auquel il prétendait; c'était déjà pour recevoir des territoires
qui étaient en notre possession et qu'il revendiquait, qu'il était passé dans
nos rangs. 11 fut tué l'année suivante au siège de Carmagnoles. Du Bei.i.av.
• VI et VIII.
39, Tort. — C.-à-d. au contraire, ceux-là sont dans l'erreur qui croient la
maxime que voici.
1, Art. — GicÉRON, De Divin., II, 23. — Les Etrusques (auj. Toscans) étaient
les grands magiciens de l'Italie, comme les Thessaliens ceux de Grèce, les
Chaldéens ceux de l'Asie. L'empereur Juhen, lors de son expédition en
Perse, avait avec lui des aruspices toscans.
78,
NOTES. LIV. I, (".H. XI. VOI,. I, PAC. 7G. F.289
7, Fortuite. — Platon, dans sa République, V, 8, etc., veut en effet que les
chefs du gouvernement fassent en sorte que les plus excellents hommes
soient mariés avec les plus excellentes femmes, et de même les hommes les
plus méprisables avec des femmes de leur caractère; mais que la chose
soit décidée par une espèce de sort, ménagé avec tant d'artifice, que ces
derniers s'en prennent à la fortune, dont la part dans son système est
pourtant faite très restreinte, et non à leurs gouvernants.
28, Nombre. — Diagoras, disciple de Démocrite, très pieux au début de sa
vie, en vint, à la suite d'un parjure dont il avait été victime, à nier l'exis-
tence des dieux, ce qui le fait appeler d'ordinaire Diagoras l'Athée.' Pour-
suivi par les Athéniens pour ses tendances antireligieuses, il s'enfuit, et sa
tête fut mise à prix : un talent à qui le tuerait et deux à qui le livrerait
vivant (le talent avait une valeur variant entre 2.G0O et 5.000 fr., le talent
attique était de 5.000). — Sa réponse, dans la circonstance présente, est re
lalée d'une manièi'e un peu différente par Diogène Laërce : « Vous en
verriez bien davantage, lui fait-il dire, si c'étaient là les images de ceux
qui ont péri! » Cicéron, De Xal. deor., I, 37, cite do lui cette autre réponse :
« H était à bord d'un vaisseau qui essuya une forte tempête ; pendant le
gros temps, quelqu'un dit qu'on avait bien méi-ité ce qui arrivait pour
avoir embarqué un impie comme lui : ■< Regardez, répondit Diagoras, le
« grand nombre do navires qui souffrent de la même tempête que nous,
« crojez-vous que je sois aussi dans chacun de ces bâtiments? »
28, Cicero. — I)e Divinat., I, 3.
32, Principesques. — Catherine de Médicis, entre autres, qui avait un astro-
logue attitré, Ruggieri, qu'elle avait amené d'Italie et pour lequel elle
avait fait construire un observatoire. Il lui avait prédit qu'il y avait dan-
ger pour le roi son mari (Henri II) à prendre part au tournoi où il fut
blessé mortellement, et elle avait fait en suite de cette prédiction tous ses
efforts pour détourner ce prince d'entrer en lice.
32, Vanitez. — Chez les Romains, on punissait quelquefois un général vaincu
de ne pas avoir tenu compte^des présages; c'était un effet de leur politi-
que, voulant montrer ainsi au peuple que les revers qu'ils éprouvaient ne
provenaient pas de la mauvaise constitution de l'État, ou de sa faiblesse, mais
de l'impiété d'un citoyen contre lequel lesdieux étaient irrités.
30, Grèce. — Ces prédictions de l'empereur Léon concernaient la chute du
Bas-Empire et les malheurs de Constant! nople; elles sont consignées dans
un manuscrit grec de la bibliothèque de l'Escurial (résidence ordinaire des
rois d'Espagne).
10, Plaira. — Parmi ces prophéties, les plus célèbres sont celles sur les pa-
pes, de Malachie, archevêque d'Arnagh, en Irlande (xi° siècle), qui, du
reste, sont considérées comme apocryphes; et celles de Nostradamus
(xvi" siècle), dont Henri II et Catherine de Médicis faisaient grand cas et
qui sont formulées en quatrains extravagants où l'on peut voir tout ce que
l'on veut.
12, Discours. — De sa raison. — Ce mot « discours », qui revient souvent
dans Montaigne, y est pris dans les acceptions les i)lus variées. Outre son
acception ordinaire en tant qu'expression de la pensée, entretien, conver-
sation, il est pris souvent an cours des Essais dans le sens de raison, in-
telligence, entendement, comme il arrive ici, et dans bien d'autres, signi-
liant : Raisonnement, jugement : « l'ay veu quelqu'vn... courre la mort
à force... par diuers visages de discours que ie ne luy scéu rabattre » (I,
418); — Sagesse: « Gallus Vibius... se pouuoit vanter d'estre deuenu fol
par discours », porte l'f'dition de 1588; « par sagesse », porte celle de 1595
(I, 134); — Dessein : « le m'abandonne... à tousiours dire ce que ie pense, et
par complexion et par discours », porte l'édition do 1588; « et par des-
sein », porte cellede 1598 (II, 490): —Opinion : « lia cuidé m'imprimer non
tant son discours, que son sentiment » (III, 038); — Volonté : « II y a phi-
sieurs mouuemens en nous qui ne se partent pas de nostre discoure »,
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV 19
F.290 ESSAIS DE MONTAIGNE.
porte l'édition do 1588, ■< de nostre ordonnance », porte celle de 1595
(1,392); — Supériorité, dilTiculté; « Il y a encore plus de discours à instruire
autruy qu'à estif instruit » (II, 160); — Art, artifice, ingéniosité, parti pris :
■• A peine est-il en son pouuoir... de gouster un seul plaisir... encore se met-
il en peine de le retrancher par discoui-s » (I, 350). Motheau et Jouaust,
Glossaire.
15, Suiuies. — Socrate prétendait entendre constamment en lui une voix
intérieure, qu'il appelait son démon familier, l'inspirant et en lequel il
manifestait une confiance aveugle. En cela, il semble avoir été de la plus
entière bonne foi; il n'y a pas apparence que c'ait été de sa part une im-
posture pour donner plus de crédit à sa parole et aidera son rôle de réfor-
mateur; du i-este, Montaigne ne le met pas en doute et ne fait qu'en don-
ner une exj)lication. Voir sur Socrate N. III, 576 : L'vn. — On retrouve
l'analogue dans les voix de Jeanne d'Arc la sollicitant sans cosse, d'après
son dire que nous ne contestons pas davantage, à s'employer à jeter les
Anglais hors de France.
17, Fortuite. — Daniel de Foë, l'auteur de Robinson Critsoé, a écrit, comme
suite à cet ouvrage, sur l'importance qu'il y a à ne pas négliger ces sortes
de pressentiments qu'il attribue à des avei'tissements donnés par des intel-
ligences célestes; peut-être n'est-ce simplement que le fait du travail in-
conscient de l'esprit préoccupé d'une idée qui nous fait entrevoir des éven-
tualités qtie nous retenons loi'squ'elles ont de l'à-propos, et dont nous ne
nous souvenons même pas quand, ce qui arrive le plus souvent, elles ne se
réalisent pas et, par suite, n'éveillent pas notre attention.
20, Socvates. — Plato.n, dans Théagès.
80.
CHAPITRE XII.
3, Visage. — On assure que les Parthes^les Scythes combattaient ainsi; et
Corneille s'est servi de cette tradition dans ce vers de Rodogune : « Elle
fuit, mais en Partlïe, en nous perçant le cœur. » — Les Indiens bravos des
Attakapas (Amérique du Nord) se défendaient de même, lançant aussi
adroitement leurs llèches en fuyant que s'ils avaient regardé l'ennemi en
face.
12, Sier. — Terme de marine de l'époque employé pour « tourner, virer » :
vient du latin sedere (%g placer); signifie, ici, se reporter.
14, Victoire. — En 479. Les Perses, au nombre de plus de 3(X).00U, sous les
ordres de Mardonius, qui y fut tué, y furent vaincus par les Grecs,* com-
mandés par Pausaniasroi de Sparte, et forts seulement de 110.000 hommes,
et cependant l'armée la plus considérable peut-être que jamais ils aient
réunie. A en croire Hérodote, sauf un corps de 40.000 hommes qui ne fut
pas engagé, à peine 3.000 parmi les vaincus auraient sui'vécu, tandis que
la perte des vainqueui-s n'aurait été que de quelques centaines d'iiommes.
— Le propos que tient ici Socrate est tiré de Platon, dialogue de Zachès.
22, Manger. — •< D'y mordre », porte l'exemplaire de Bordeaux, auti-ement
dit : d'en tàtcr, pour juger ce dont nous sommes capables.
24, Saoul. — Le fait est conté par Hérodote, IV, 127, qui nomme ce roi des
Scythes, Idanthryse. Cette expédition (508) se termina à la confusion des
Perses qui furent obligés de se retirer pour échapper à la famine dont ils
étaient menacés par le vide que les Scythes faisaient devant eux et aussi
par la crainte de se voir la retraite coupée. Elle fut la cause originelle des
gueri'es médiques, le roi des Perses voulant se venger de Miltiade qui, chef
d'un des contingents grecs à sa solde, préposés à la garde du pont qu'il
avait jeté sur l'isler (auj. le Danube) pour assurer ses communications,
avait proposé à ses congénères de le rompre.
21), Compagnons. — En 1805, à un combat sur l'IUor (Tyrol), au moment où
un de ses officiers, sa coiffure à la main, rendait compte au maréchal Ney
82.
NOTES. LIV. I, CM. Xd. VOL. I, PAO. 80. F.291
d'une mission qu'il venait de remplir, un boulet pa-ssa si près d'eux, que
l'officier baissa instinctivement la tête, tout en continuant son rapport :
« Cest très bien, lui dit Ney, quand il eut aciievc de parler, seulement, une
autre fois, ne saluez pas si bas. » Marco Saint-Hilaire. — Le bailli de SufTren
disait que lorsqu'il rencontrait l'ennemi en raer, il en éprouvait tout d'a-
bord un dérangement d'entrailles au point d'en maculer ses culottes, mais
qu'ensuite il ne songeait qu'à la besogne.
31, Prouence. — En 1536; cette invasion échoua par la résistance de Mar-
seille qui obligea les Impériaux à une retraite difficile.
38, Corps. — La ville d'Arles n'était point en état de défense et l'Empereur
délibérait s'il s'y porterait ou non. Ses hésitations donnèrent le temps d'y
constituer une garnison et d'armer la place; ce fut alors qu'il procédait à la
reconnaissance des travaux en cours d'exécution que le marquis du Guast
faillit être tué. Du Bellay, YIIL
1, Roy. — En 1517; sa blessure lui fit lover le siège. C'était le père de Cathe-
rine de Médicis, mère de François II, de Charles IX et de Ileni'i III, qui
i-égnait quand Montaigne écrivait ce passage.
i, Regardait. — Actuellement qu'on se sert d'étoupilles au lieu de mèche
à canon pour mettre le feu aux pièces d'artillerie, et que les projectiles sont
à éclatement, des faits de cette nature ne sont plus susceptibles de se pro-
duire, parce qu'on ne voit plus mettre le feu, que la vitesse du projectile
est trop gi-ande et la gerbe des éclats trop étendue pour pouvoir se garer,
quand on aperçoit la lueur du coup, si déjà on n'est à l'abri. — Au siège
de Sébastopol (185.5-56), où assiégés et assiégeants faisaient usage de bom-
bes, étant donné leur volume, leur peu de vitesse et la durée de leur
parcours, il était encore possible de s'en préserver, dans une certaine me-
sure, en se terrant à temps, ce que chacun faisait, quand on entendait le
cri : « Gare la bombe! » pqussé par l'un des observateurs placés à cet effet,
apercevant le projectile développant sa courbe dans les airs.
21, Souffrance. — Charles V, roi de France, disait d'un homme « qui, dans
son épitaphe, était mentionné comme n'ayant jamais eu peur, qu'apparem-
ment il n'avait jamais mouché une chandelle avec les doigts ». — A cette
époque, on s'éclairait avec des chandelles, et leur mèche ne se consumait
pas à mesure qu'elle brûlait; il fallait les moucher, ce qui se faisait avec des
ciseaux ou d^îs mouchettes, et lorsqu'on n'en avait pas, avec les doigts,
non sans grand risque de se brider.
26, Conforme. — Ces pensées sont traduites presque textuellement d'Aulu-
Gelle (XIX, I), qui les avait traduites lui-même du cinquième livre, aujour-
d'hui perdu, des Mémoires d'Arrien sur Epictète. Le Clerc.
20. Péripateticien. — Les péripatéticiens (ou promeneurs) étaient les disci-
ples d'Aristote, ainsi nommés parce qu'ils se réunissaient au Lycée, prome-
nade d'Athènes, pour y entendre leur maître, et que l'enseignement se don-
nait d'ordinaire tout en se promenant. Leur doctrine est indiquée dans la
note relative à Aristote, V. I, 32; au moyen âge, elle fit le -fond de la phi-
losophie scolastique et domina sans partage jusqu'au xvi' siècle.
84.
CHAPITRE XIII.
5, Marguerite. — Marguerite d'AngouIéme, sœur de François I"', épouse
, de Henri d'AIbret, roi de Navarre, grand'mère de Henri IV.
)9, Attendre. — « L'exactitude est la politesse des Rois », dit un adage; elle
est également aujourd'hui celle des particuliers grands et petits et il n'y a
que les malotrus et les parvenus qui l'oublient.
21. Ville. — Il alla attendre à Nice.
2;îi Trouuer. - V. N. I, 68 : Marseille.
25, Luy. — En 1532, entre ce même pape Clément \'lll et l'empereur Charles-
P.292 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Quint, qui poursuivait la convocation d'un concile oecuménique qui fut
placé sous la protection impériale, la papauté menacée par la Réforme.
oO, Eux. — Actuellement, comme autrefois, ces questions sont minutieu-
sement réglées d'avance, dans tous leurs détails, par le service dit du
« Protocole ». — Bien que les rapports personnels des souverains entre eux
soient toujours suscoj^ibles d'y introduire des modifications, généralement
quand un .souverain vient en visiter un autre, celui-ci envoie à la limite
de ses états un service d'honneur poui- le saluer et l'a-ssister durant tout le
temps de son séjour et lui-même l'attend au lieu de sa résidence; d'ordi-
naire à son arrivée il se trouve à la gare où a été fait un déploiement plus
ou moins grand de troupes, le reçoit, l'accompagne où il doit loger et ren-
tre chez lui, où il attend sa première visite qu'il lui rend aussitôt après.
C'est surtout dans le plus ou moins d'importance du service d'honneur,
dans les honneurs plus ou moins grands rendus à l'arrivée, dans l'étendue
et l'éclat plus ou moins considérables des têtes qui suivent, et surtout dans
la participation plus ou moins enthousiaste des. populations avec lesquelles
il faut compter plus qu'auti'efois, que consistent les nuances.
86,
10, Entregent. — Façon convenable de converser et d'agir selon les per-
sonnes, le sujet, le temps et le lieu ; art de se pousser dans le monde, était
à l'époque pris exclusivement en bonne part.
11, Familiarité. — Auch. XVII du liv. II, l'auteur redit à peu près la même
chose de la beauté : « C'est vne pièce de grande recommandation au com-
merce des honmies, elle est le premier moyen de conciliation des vns auec
les autres. •
14, Communicable. — « La civilité est une envie de plaire ; la nature la
donne, mais l'éducation l'augmente. » M.\dame de Laaibert. — « La politesse
n'est qu'une forme de la bonté, de la charité, de la bienveillance, et une
imitation de l'amitié. » Al. Karu. — « La politesse ne coûte rien, ne nuit
jamais et rapporte beaucoup. »
CHAPITRE XIV.
Chapitre XIII. — Sous ce numéro, les éditions antérieures et l'exemplaire
de Bordeaux donnent ici le chapitre XV de la présente édition : « Que le
goust des biens et des maux, despend, en bonne partie de l'opinion qu(>
nous en auons » ; celui-ci y porte le numéro XV et tous ceux de XV à XXXIX
se trouvent y avoir leurs numéros accrus chacun d'une unité.
Raison. — La thèse émise dans ce chapitre est absolument l'opposé des
idées actuelles qui veulent qu'en toutes sitiïations de guerre, un soldat
combatte jusqu'à ce qu'il soit réduit à l'impuissance la plus absolue, que ce
soit dans une place ou en rase campagne, ce que. notre grand Corneille a
si noblement et magnifiquement exprimé dans Horace :
« Que vouliez- vous qu'il fît contre trois?
— Qu'il mourût,
Ou qu'un beau désespoir alors le secourût. •
Cette obligation, nos lois la sanctionnent, mais pas aussi sévèrement encore
qu'elles le devraient, quoi qu'en disent les^ philanthropes et les internationa-
listes, parce que c'est là une question de salut public. Les Anglais ont eu rai-
son de fusiller en 1756 leur amiral Bing qui avait laissé reprendre Mahon ;
Napoléon a regretté de n'avoir pas agi de même en 1808 à l'égard de Dupont
qui avait signé la capitulation de Baylen;'avoir fait grâce à Bazaine ca-
pitulant à Metz en 1870, a été une grosse faute.
27, Bâfre. — Battre en brèche.
27, Dedans. — En 1524. Cet acte de cruauté ne fit qu'irriter les assiégés et les
inciter à se défendre avec plus d'opiniâtreté, ce qui donna le temps aux
NOTES. LIV. r, Cil. XIV. VOL. I, PAG. 86. F.293
Impériaux, surpris par notre brusque entrée en campagne, de rassembler
leurs forces et de venir au secours de la ville qui fut sauvée par la bataille
livrée sous ses murs (bataille de Pavie, 1525); les assiégeants durent sus-
pendre le siège pour y participer et ne purent le reprendre. Du Bellay, II.
28, Dauphin. — François, fils aine de François I", qui mourut cette même
année (1536), par suite d'une imprudence. Échauflé par une partie de
jeu de paume, il but de l'eau glacée; il en résulta une fluxion de poi-
trine qui eut vite raison d'un tempérament délabré par un abus précoce des
plaisirs. Le roi, dans sa douleur, crut à un empoisonnement, on ouvrit une
instruction; l'empoisonneur présumé fut écartelé et on accusa ouvertement
l'empereur Charles-Quint, et même Catherine de Médicisi, femme du fils ca-
det du roi, d'avoir inspiré le crime; mais ces soupçons ne reposaient sur
rien et on dut les abandonner.
28, Monts. — Au delà des Alpes, en Italie.
88,
2, Raison. — En 1536. Le château de Villane, perché sur un roc, est d'a-
bords inaccessibles; la garnison, d'environ 200 Espagnols, s'y croyait à l'a-
bri de toute entreprise ; mais les Français, avisant un rocher voisin et y his-
sant à l'aide de cordages quelques pièces d'artillerie, parvinrent à prati-
quer une brèche, par laquelle, à grand renfort d'échelles, ils pénétrèi-ent
par escalade. Du Bellay, VIII.
5, Place. — En 1543. La tour de Saint-Bony interceptait nos communica-
tions avec Turin. L'exemple du reste profita et l'armée française n'é-
prouva plus aucune résistance des forts d'arrêt assez nombreux dans la ré-
gion. Du Bellay, IX.
16, Orient. — Les éd. ant. aj. : les Tamburlans, Mahumets.
CHAPITRE XV.
Ce chapitre a le n" XVI dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
24, Capitaine. — Probablement François, duc de Guise.
27, Bouloigne. — En 1546, au roi d'Angleterre Henry VllI, qui l'assiégeait
en personne ; de Vervins eut la tète tranchée. Du Bellay, X.
90.
12, Charge. — « Qui donna jamais à l'erreur le nom de crime"? » Séxèque.
— Plutarque rapporte à ce propos ce mot d'Archélaiis, roi de Macédoine.
On l'animait un jour contre quelqu'un qui, par mégarde, avait jeté de l'eau
sur lui : k Ce n'est pas moi qu'il a mouillé, dit le Prince, mais celui pour
qui il m'a pris. »
18, Emmy. — Au milieu, du latin in medio, d'où vient aussi midi, médius
dies, et même minuit, média nox.
20, Honte. — Diodore de Sicile, XII, 4. — L'empereur Juhen, dont il va être
question, se trouvant dans les Gaules, obligea pareillement 600 soldats qui
n'avaient pas bien fait leur devoir devant l'ennemi à traverser le camp
accoutrés en femmes, ce qui leur fut si sensible qu'au premier combat qui
suivit, ils effaceront leur honte par dos prodiges de valeur. Lebeau.
26, Effundere. — Tertullien, Apologétique, à propos de la loi romaine qui
punissait de mort les débiteurs, peine à laquelle l'empereur ^eptime-Sévère
substitua la vente de leurs biens.
26, Anciennes. — En 363. L'empereur Julien étant en opérations contre les
Parthes et trois de ses escadrons ayant fui après un combat insignifiant,
en abandonnant à l'ennemi un de leurs étendards, leur fit appUcation
des lois anciennes et les décima, dégradant, avant de les faire mettre à
mort, ceux que le sort avait désignés. Ce fut là un acte exceptionnel de sa
part; en d'autres cas analogues, il s'était montré beaucoup moins rigou-
reux (V. N. I, 90 : Honte). Peut-être la gravité des circonstances néces-
sitait-elle un exemple. Ammien Marcellin, XXIV ot XXV.
F.294 ESSAIS DE MONTAIGNE.
31, Mort.— Ce Cn. Fulvius était préteur; lui aussi en 215, peu après la ba-
taille de Cannes (216), subit en Apulio, du fait d'Annibal, une sanglante
défaite dans laquelle il perdit 16.000 h. sur 18.</J0 qu'il commandait; lui-
même s'('tait enfui avec à peine 2(X) cavaliers. Aux soldats échappés à ces
deux désastres le Sénat romain infligea, comme châtiment, d'être relé-
gués en Sicile et d'y servir jusqu'à la fin de la guerre, avec défense d'hi-
verner dans les places fortes et de camper à moins de dix milles (20 kil.) de
quelque ville que ce fût. Tite-Live, XXV et XXVI, 2 et 3.
37, Espagnols. — En 15*23. Franget allégua, pour sa défense, une conspira-
tion qui s'était formée dans le but de livrer la ville; admis à le prouver,
il n'y parvint pas. Dr Bellay, II.
41, Entra. — En 1530. La ville de Guise devait être évacuée, et le château
demeurer seul occupé. Les Espagnols la surprirent pendant que l'i-vacua-
tion s'effectuait, et bien que le château eût eu le temps de fermer ses portes,
il n'en capitula pas moins à première sommation. Du Bellay, VII.
92,
CHAPITRE XVI.
Ce chapitre porte le n° XVII dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
5, Voyages. — Montaigne aimait beaucoup les voyages; il en a fait d'as-
sez fréquents en France, et en a accompli un de dix-huit mois en 1580-81
cn Italie par la Suisse et l'.^rilemagne, dont il a laissé un journal écrit partie
en français, partie en italien; en partie dicté, en partie de sa main.
8, Mieux. — De Sacy (anagramme d'isaac), de Port-Royal (1612 à 1684), avait
mis à profit cette leçon de Montaigne, et toujours il ramenait la conversa-
tion sur ce qui était l'occupation de son interlocuteur, parlant peinture
avec Pnilippe de Champagne, philosophie avec Pascal, etc. — Le général
Desvaux (1810 à 1887) qui, en Algérie, développa si grandement la coloni-
sation dans la province de Constantine et y introduisit la construction des
puits artésiens d'après nos procédés, le même qui, en 1870,' à Metz, chef
par intérim de la Garde impériale, dont il commandait la cavalerie, fut le
seul à se déclarer contre la capitulation, dans le conseil de guerre où elle
fut décidée, agissait de même.
II, Armenti. — Traduction itahenne d'un passage de Propercc, II, i, 43, dont
le texte latin est :
Navita de verûis, de lauris narrât aralor :
Enumerat miles vulnera, paslor oves.
16, Poète. — Plutarqle, Apophthegmes des Lacédémoniens . — Voltaire était
plus porté à ije targuer de ses connaissances assez faibles en géométrie et en
astronomie (lue de ses talents littéraires; Diderot était dans le même cas;
le peintre David se croyait législateur; l'abbé Delille voulait parler d'his-
toire naturelle; le Jésuite Daniel, se connaître en détails stratégiques; Fré-
déric II, être poète; le peintre Carteaux et le médecin Doppet, sous la Ré-
volution, être généraux en chef.
21, Ingénieur. — Allusion au pont que César fit construire sur le Rhin, pour
le passage de ses troupes en Allemagne, construction sur laquelle il s'étend
volontiers dans ses Commentaires, De Bello Gallico, IV, 17; Montaigne v re-
vient au ch. XXXIV du liv. II (V. N. II, 650 : Rhin).
24, Guère. — Diodoue de Sicile, XV, 6. — Ce fut aussi le travers du cardinal
de Richelieu.
26, Estude. — Cabinet de travail; le mot étude est employé ici dans le
même sens que l'on dit aujourd'hui : étude d'avoué, de notaire.
Vis. — 3Iontaigne avait d'abord écrit: « la vis par où il estoit monté »,
texte qu'il a ensuite modifié, mais qui ne laisse aucun doute sur la signi-
fication du mot « vis •> qui n'est autre ici qu'un escalier tournant.
NOTES. LIV. I, CH. XVT. VOL. 1, PAG. 04. F.29d
94,
96,
14, Conduire. — Si Montaigne eût vécu de notre temps, il eût pu ajouter :
« Quant à ceux, si nombreux aujourd'hui, qui font profession d'écrire
sur tout, leur style est souvent leur seul mérite; la plupart du temps il n'y
a rien à puiser dans leurs écrits; bien plus, il faut s'en défier. Ne connais-
sant rien à fond de ce dont ils parlent, ils ne peuvent en juger que su-
perliciellement: la compétence leur fait défaut, si grande que soit leur
assurance, sans compter qu'ils n'ont pas plus souci de la vérité et de l'exac-
titude, que du mal qu'ils font sciemment ou inconscienmient. •
16, Langey. — Guillaume du Bellay, seigneur de Langeais.
•i:î, Soldats. — « Et subjects » = Add. des éd. ant. et de l'ex. de Bordeaux.
27, Batteau. — En 1536. Ce consistoire ne fut à proprement parler qu'une
audience publique du Pape, où l'Empereur arriva inopinément, mais avec
l'idée préméditée d'y défier François I". Ce défi était un des trois moyens
qu'il suggérait pour terminer leurs différends : la guerre, l'accession à ses
revendications, le combat singulier; les duchés de Bourgogne et de Milan,
qu'il réclamait, devaient être dans ces diverses éventualités le prix du
vainqueur. Du Bellay, V. — Quel malheur que les chefs d'États ne règlent
pas toujours leurs différends en combat singulier, comme le proposait
Charles-Quint, au lieu de recourir à la guerre! ce serait au moins un
cas où le duel aui-ait du bon et il n'en serait pas pour cela beaucoup plus
fréquent.
13, Subiectioa. — Pensée traduite d'Aulu-Gelle, I, 13, auquel est aussi em-
prunté le fait suivant.
11, Heureux. -— Parce qu'il était très riche, très noble, très éloquent, fort
savant sur le droit et souverain pontife. Aulu-Gelle.
37, Décret. — Cette observation de Montaigne est juste. C'est ainsi qu'à la
guerre, il est de principe que celui qui est sur place est maître absolu de
ses faits et gestes, tout en se conduisant, dans les limites du possible, sui-
vant les instructions qu'il a reçues; et c'est à l'inobservation de cette règle
que, dans la deuxième partie du xvni» siècle, les armées autrichiennes, re-
cevant leur direction du Conseil aulique siégeant à Vienne, ont dû d'é-
prouver de nombreux revers. Le maréclial Pélissier, à Sébastopol, en 1855,
harcelé par les recommandations et instructions qui lui venaient pareil-
lement de Paris, y mit fin en menaçant de couper le cable télégraphique
qui le reliait à ceux qui avaient la prétention de le tenir ainsi en lisière.
Ceci nous amène à cette question si délicate de l'emploi souvent abusif
qui est fait de l'armée en temps de paix et des droits et devoirs de chacun
en pareil cas :
« On ne peut commander et on ne doit obéir que pour le bien du service
<■ et l'exécution des règlements militaires; cette règle régit tous les échelons,
" y compris le Ministre de la guerre et le Gouvernement lui-même.
« L'obéissance indiscrète outrepasse les ordres; l'obéissance imparfaite s'y
" tient strictement; l'obéissance parfaite obéit en tout ce qui est permis;
•■ or, il n'est permis à personne, non plus qu'au Gouvernement et à ses
« représentants, d'enfreindre les lois fondamentales de l'humanité, de rien
« faire au delà des limites assignées par les règlements, ni au delà de ce
« que permet l'honneur.
« L'armée n'a pas à assurer en temps habituel l'exécution des lois; ses
•■ occupations, comme ses devoirs, sont autres : la cavalerie n'est pas lancée
■• à la poursuite des voleurs, caissiers et autres; l'infanterie ne procède ni
•■ aux arrestations, ni aux transferts de prisonniers; l'artillerie ni le génie
" ne détruisent les bâtiments destinés à disparaître: rien de tout ceja ne
■ regarde les militaires; pour toutes ces besognes, il y a des agents spé-
•■ ciaux.
« Dans cet emploi irrégulier de l'armée, sa participation à toutes les inau-
■• gurations, à toutes les fêtes, à toutes les expositions, est pour beaucoup;
• on est arrivé à la considérer comme bonne à tout faire. » G"' Donop.
F.296 ESSAIS DE MOiNTAIGNE.
Notons encore que chacun, dans raccomplissemciit de la mission qu'il a
reçue, n'a d'instructions à l'ecevoirque de son cJiet direct; nul autre n'a à
s'immiscer dans les moyens d'exécution.
Ces principes consacres par le bon sens, étaient jadis confirmés d'une façon
péremptoire par les règlements; mais ceux-ci ont été à cet égard quelque
peu modifiés récemment pour avoir raison des résistances que rencon-
traient des exigences abusives; ici comme ailleurs, quand la politique sec-
taire s'en môle, rien de ce qui devrait l'être, n'est plus respecté.
98,
CHAPITRE XVII.
Ce chapitre porte le n" XVIII dans les éd. ant. et l'cx. de Bordeaux.
4, Passion. — La peur est naturelle à l'homme, peu d'entre eux l'ignorent;
le plus grand nombre finit par en triompher, le lâche est celui qui s'3^
abandonne.
8, Esblouissements. — « De tous les animaux, a dit le prince de Ligne,
l'homme est le plus peureux. »
8, Vulgaire. — Il n'y a pas que le vulgaire à subir des impressions irrai-
sonnées; les esprits forts n'en sont point exempts. Hobbes, qui s'est élevé si
énergiquement contre l'existence de Dieu et l'immortalité de l'àme, telles
que la religion nous les présente, ne pouvait sans crainte des revenants
traverser un cimetière; à cette époque, xvii" siècle, pas plus en Angleterre
qu'en France, les cimetières n'étaient clôturés.
13, Corselets. — Petites cuirasses que portaient les piquiers dans les régi-
ments dos gardes et dont le nom s'étendait à ceux qui en étaient revêtus.
14, Rouge. — Croix blanche et croix rouge. La croix, depuis les croisades,
était fréquemment employée en guerre, dans la catholicité, par les nations
adverses pour distinguer les belligérants. A la bataille de Bouvines (1214),
les Flamands et les Allemands, opposés aux Français, avaient, pour se
distinguer, adopté une croix rouge; au xvr siècle, la croix blanche était
le signe distinctif des Français, la croix rouge celui des Espagnols.
23, Campaigne. — En 1527. Le connétable de Bourbon, opérant pour son
propre compte à la tète de partisans auxquels il avait promis le pillage de
Rome, exécutait la reconnaissance de la place ; l'acte de cet enseigne lui
révéla l'existence de cette brèche, par laquelle il fit immédiatement donner
l'assaut qui réussit, mais où il trouva la mort. Du Bellay, III.
27, Canonnière. — Embrasure ou ouverture ménagée pour le tir du canon.
II est vraisemblable que c'est là une faute d'impression commise en 1580,
qui s'est reproduite d'édition en édition et qu'il faut lire « caponière >■,
sorte de retranchement élevé pour couvrir un passage ou une sortie dans
les ouvrages de fortification.
27. Assaillans. — En 1537. Il s'agit ici du siège de Saint-Pol, en Artois. La
ville fut emportée d'assaut; cinq mille personnes, tant de la garnison que
des habitants, périrent dans les massacres qui suivirent. Guillaume du Bellay,
qui raconte le fait (liv. .VIII), dit : « Et celuy-cy ie le vey » ; il fut également
témoin du suivant qui se trouve consigné au même livre de ses Mémoires.
100,
I, Partoit. — L'an 3. Germanicus, après avoir rendu les derniers devoirs
aux légions de Varus détruites en ce même endroit six ans auparavant,
continuait la poursuite des Germains, lorsque, arrivée à une forêt où Ar-
minius avait fait cacher les siens, la cavalerie romaine fut assaillie à l'im-
proviste et rejetée sur l'infanterie qui la soutenait; le désordre, se propa-
geant, menaçait de se transformer en désastre, quand Germanicus, arrivant
avec le corps de bataille, parvint à l'arrêter. Tacite, Annales, I, 63.
10, L'empire. — En 832, en Cappadoce. ■< Il vaut mieux, lui dit-il, que vous per-
diez la vie que si, étant prisonnier, vous faisiez éprouver un si grand dés-
NOTES. LIV. I, CH. XVII. VOL. I, PAG. 100. F. 297
honneur à la République. » (iràco à cette intervention do Manuel, l'empe-
reur échappa aux mains de l'ennemi; mais, à rencontre de Montaigne,
Zonaras (\iv- III), d'où le fait est tiré, donne ce parti pris de ne point fuir,
comme un trait de valeur inconsidéré de Théophile, et non de frayeur.
12, Vaillance. — « Son courage est peut-être un effet de la peur. • Corneille,
Théodore.
1 J, Hannibal. — Son père lui avait fait jurer une haine implacable aux Ro-
mains. En 219, il ralluma la guerre contre eux en prenant et saccageant
en pleine paix la ville de Sagontc (Espagne), leur alliée. Puis, franchissant
les Pyrénées, le midi de la Gaule et les Alpes, il les vainc à la Trébie, au
Tessin, au lac Trasimène (Italie septentrionale), enfin à Cannes (Italie mé-
ridionale) en 216. La fortune cessa dès lors de lui être favorable, et, après
s'être maintenu quatorze ans en Italie, sans autres hauts faits, il dut re-
passer en Afrique pour aller défendre Carthage menacée. Vaincu à Zama
(202), pour ne pas tomber aux mains des Romains, il s'exile en Asie Mi-
neure, où il ne cesse do leur fomenter des ennemis, et finalement s'em-
poisonne pour ne pas leur être livré.
10, Victoire. — Bataille de la Trébie, en 218. Tite-Live, XXI, 56.
30, Suspendues. — Cicéron, Tu.'ic., III. — En 48. Fuyant en Egypte, après sa
défaite à Pharsale, Pompée y fut assassiné, au moment où il débarquait,
par des soldats du roi Ptolémée envoyés à sa rencontre comme pour lui
faire honneur; sa tête fut portée à César qui versa des larmes à cet as-
pect, et peu après punit les meurtriers.
102,
7, Discours. — C.-à-d. qui n'est pas causée par une erreur de notre juge-
ment, en est indépendante et se produit en dépit de lui.
15, Ire. ~ Colère, du latin ira qui a même signification.
lo, Dieux. — Ces paniques qui furent assez fréquentes à Carthage, notam-
ment durant ses guerres avec les Syracusains qui, passés inopinément en
Afrique, avaient failli surprendre la ville (vers l'an 400), étaient considé-
rées par elle, concurremment avec les défaites qu'elle éprouvait, comme
autant de manifestations de la colère des dieux qu'ils cherchaient à apai-
ser par des sacrifices humains. Diodore de Sicu.e, XV, 7.
16, Paniques. — Ainsi nommées de ce qu'elles passaient comme inspirées,
le plus ordinairement, par Pan, le dieu des champs par excellence. — Les
paniques sont des défaillances collectives qui se produisent sans même
qu'on sache pourquoi; parfois elles sont amenées par une surprise de l'en-
nemi, très souvent elles naissent sur les derrières de l'armée, elles sont de
tous les temps; on en constate chez tous les peuples, quoique l'histoire ne
les énumère guère, mais on n'aime pas à parler des siennes et on ignore
celles survenues chez l'adversaire. Chez nous, durant les vingt-trois ans
qu'a duré l'épopée révolutionnaire, on en a relevé jusqu'à trois cents. Sou-
vent elles sont l'effet d'un énervement prolongé et c'est ce qui fait qu'elles
se produisent fréquemment le soir ou le lendemain d'une action, même
chez le. vainqueur, comme chez nous à Wagram à la fin de la bataille, et
le lendemain à Solférino (1850); chez les Prussiens, le soir du 18 août 70; à
léna, en 1806, les mêmes en éprouvèrent une deux ou trois jours avant la
bataille. — Le cheval y est sujet plus encore que l'homme. (Général Dau-
dignac).
CAPITRE XVIII.
Ce chapitre porte le n" XIX dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
17, Mort. — Montaigne a déjà effleuré ce sujet au ch. III de ce même livre.
19, Débet. — Saint-Ange à donné de ces vers d'Ovide la traduction suivante :
■ ... Nul homme, certain d'un bonheur sans retour,
.\c peut se croire heureux avant son dernier jour, »
F.2'J8 ESSAIS m MONTAIGNE.
•20, Propos. — HÉRODOTE, I, 86.
29, Diuers. — C'est ce qu'après Solon, Sophocle a donné comme conclusion
do sa tragédie cVŒdipe à Colone, et que Ducis a rendu de la sorte :
« c'est pourquoi, jusqu'au jour qui termine la vie,
Ne regardons personne avec un œil d'envie ;
Peut-on jamais prévoir les derniers coups du sort?
Ne proclamons heureux nul homme avant sa mort. »
Un proverbe italien dit dans le même sens : « Louez la vie après la mort,
et le jour quand il est nuit. » — Un autre, français celui-là, dit de même :
« Attends le soir pour louer un beau jour, attends la mort pour louer une
belle vie. »
32, Malheureux. — Plutarque, Apophlh. des Lacédémoniens .
33, Rome. — Philippe, un des fils de Perséé, roi de IMacédoino, fut réduit,
après la conquête de ce royaume par les Romains (167), à se faire menui-
sier, et postérieurement devint greffier à Rome ; ce qui fait attribuer par
Montaigne ce double changement de fortune à deux individus différents.
104,
1, Corinthe. — Den}s le Jeune, tyran de Syracuse, en ayant été chassé, se
retira à Corinthe. où, pour subsister, il se fit maître d'écolo, 343. — En
1793, lors de la Révolution, le duc d'Orléans, depuis Louis-Philippe roi de
France, donna pendant huit mois, pour pouvoir vivre, des leçons de ma-
thématiques et de géographie, à Reiguenau (Suisse).
8, Marché. — Sous le règne de Louis XII, qui l'y avait fait enfermer (1500);
on montre encore dans les ruines du château la chambre, on contre-bas
du sol, où il fut détenu.
10, Cruauté. — Marie Stuart, reine d'Ecosse, qui passait pour la plus belle
femme do son temps. Veuve de François II, roi de P'rance, elle fut décapi-
tée par ordre d'Elisabeth, reine d'Angleterre, après dix-huit ans de capti-
vité (1587), alors que son fils, qui devait succéder à Elisabeth sur le trône
d'Angleterre, occupait celui d'Ecosse; du reste, au point de vue de la mora-
lité, la victime valait encore moins que le bourreau, mais le malheur lui a
fait une auréole.
25, Fuit! — Laborius, chevalier romain, sur les instances de César auquel il
n'osa refuser et moyennant une somme de 500.000 sesterces (10.000 fr., le
petit sesterce valait 0 fr. 20), dut jouer lui-même, sur le théâtre, certaines
des pièces qu'il avait composées. Il se vengea do cotte humiliation dans un
prologue (dont est tirée la citation de Montaigne), où il déplore ce caprice
d'un homme puissant qui commande non seulement quand il invite, mais
encore quand il prie, et, en lançant cette épigramme mise dans la bouche
d'un de ses personnages : « Désormais, Romains, nous avons perdu la li-
berté! » dite en public, en présence même de César.
28, Réglée. — « Le bonheur n'est pas chose aisée; il est très difficile de le
trouver en nous, et impossible de le trouver ailleurs. » Chamfort. — L'éd.
de 80 porte : bien assenée. i
41, Ancien. — Sénèque, Epist. 102.
106,
I, Passées. — - Voltaire appelle le moment de la mort : « celui où les men-
teurs disent vrai ». Lettre à d'Alemberl.
6, Alors. — Scipion, beau-père de Pompée, auquel une vie de débauche ot
de nombreuses exactions étaient à reprocher, se trouva par des vents con-
traires rejeté sur la côte d'Afrique et son bateau bientôt envahi par les
ennemis qu'il fuyait. Ceux-ci, qui ne le connaissaient pas, le cherchant et
demandant où était le général : « Le Général, leur répondit-il, est en
sûreté », et sur ces mots, il se perça de son épée (46). — Ce que Montaigne
dit ici de ce Scipion, d'après Sénèque, Epist. 24, on pourrait le dire égale-
ment de l'empereur Othon dont la mort, après la bataille de Bebriac (69), fait
presque pardonner la mollesse et les débauches de sa vie et dont Tacite
NOTES. LIV. I, CM. XVJII. VOI.. I, PAG. 106. F.299
dit : « Los autres ont conservé plus longtemps le pouvoir, personne ne l'a
quitte avec plus de courage et de sérénité. » — Ces exemples témoignent
de la justesse de cette observation de Vauvenargues : « On ne peut juger
de la vie par une plus fausse règle que la mort. »
9, Résoudre. — Plltarque, Apophlhegmcs.
16. Croist. — De sa croissance, à la fleur de son âge, disons- nous aujour-
d'hui. — ■< Celui qu'aiment les dieux, meurt jeune. •> Menandre.
■Jl, Course. — Il semble qu'il soit ici question de Uenri de Lorraine, dit le
Balafré, duc de Guise, qui aspii-ait au trône de France et était sur le point
d'y parvenir, quand il fut assassiné à Blois, par ordre de Henri III (1588);
précisément à l'époque ou peu après, Montaigne a dû licrire ces lignes qui
ne se trouvent i)as dans l'édition parue celte même année.
CHAPITRE XIX.
Ce chapitre porte le n' XX dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
i\, Mourir. — Charron qui, dans tout le cours de son traité de la Sagesse, a
copié Montaigne, ne lui a fait nulle part des emprunts aussi étendus et
aussi multipliés que dans ce chapitre et dans le chapitre III du livre II
(Coustume de l'isle de Cea); on peut s'en assurer enlisant particulièrement
son ch. XI du liv. II, intitulé : « Se tenir toujours prêt à la mort, fruit de
la sagesse. »
26, Mort. — « Toute la vie des philosophes, disait Socrate, est une continuelle
méditation de la mort. » Platon, dans le Phédon; Cicékon, Tusc, I, 31.
108,
I, Escriture. — « J'ai reconnu que rien ne vaut mieux que de se réjouir et
de se donner du bien-être pendant la vie. • Ecclésiaste, III, 12.
10, Mesme. — « La vertu est la disposition ferme et continue de l'àme à
faire le bien et à fuir le mal; mais de même que le soleil a des taches, la
vertu a des défaillances, ce qui justifie ce mot prêté à Brutus, se tuant de
désespoir : 0 vertu, tu n'es qu'un mot!... Vertu et vice sont deux mots
dont ne se sert jamais l'Écriture sainte (l'assertion n'est pas tout à fait
exacte, car le ch. XXVI de l'Ecclésiastique débute aussi : « Heureux est le
mari d'une femme vertueuse »); elle dit partout et toujours: les bons et les
méchants. C'est que c'est là la vraie division. Combien sont bons, malgré
leurs fautes, et quelquefois à cause de leurs fautes, et trouveront là-haut
le père souriant. Combien sont méchants et mauvais, malgré leur vertu, et
quelquefois à cause de leur vertu, et trouveront là-haut le juge sévère. »
Victor Hugo.
11, Volupté. — ■< Le plaisir est la vertu sous un nom plus gai. » Young.
U3, Fruict. — C.-à-d. qui calcule si les avantages de la vertu peuvent dédom-
mager des peines qu'il en coûte pour devenir vertueux; autrement dit, qui
met en balance, d'un côté ce qu'elle coûte à acquérir, de l'autre les avan-
tages qu'elle procure, n'est pas de ses adeptes.
110,
14, Règles. — Var. des éditions antérieures : sectes des Philosophes, au lieu
de : « règles ».
22, Santé. — « Ignorant toutes les incommodités de l'humanité, il mourut
dans des conditions telles qu'on ne saurait en souhaiter de meilleures »,
dit Valère Maxime, VIH, 13, en parlant de Xénophyle de Chalcis, philo-
sophe pythagoricien, que Montaigne qualifie musicien.
24, Broche. — Couper broche, c'est mettre fin, interrompre. V. N. III, 444 :
Broche.
33, Tantale. — Tantale, roi de Lydie, ayant reçu la visite des dieux, leur lit
servir, pour éprouver leur divinité, les membres de son propre fils. Pour ce
forfait, il fut précipité dans le Tartare et condamné à une soif et à une
faim inextinguibles; on le représente au milieu d'un fleuve dont l'eau s'a-
F-300 ESSAIS DE MONTAIGNE.
baisse dès qu'il on approche les lèvres, et sous des arbres dont les branches
s'élèvent dès qu'il veut en détacher les fruits. — Cicéron et Montaigne,
avec lui, le confondent ici avec Sisyphe, roi do Corinthe, qui, en punition
de ses brigandages et de ses cruautés, fut condamné, après sa mort, à rou-
ler dans les Enfers, au sommet d'une montagne, un rocher qui redes-
cendait sans cesse au bas des pentes, dès qu'il atteignait le faîte. Mytho-
logie.
35, Commis. — Ceci se pratique encore fréquemment en France; l'acte de
condamnation porte toujoui-s où se fera l'exécution.
112,
3, Mort. — ■< La mort est bien le bout, non pourtant le but de la vie, » dit
ailleurs Montaigne avec beaucoup plus de raison. V. N. 111,574: But.
4, Comme. — Comment. Corneille l'emploie parfois aussi dans ce sens, il
dit dans Horace :
J'ai su par son rapport...
Comme de vos deux fils vous portez le trépas.
8, Queue. — Brider l'àne par la queue, c'est s'arranger mal, mal prendre ses
mesures, un âne ne se bridant pas de la sorte.
12, Seignent. — Font le signe de la croix.
19, Vescu. — Plutarque, Vie de Cicéron, 12.
20, Consolent. — Ils disaient de même et pour le même motif : semiani-
mis (à demi vivant), tandis que nous disons : « à demi-mort ».
21, Feu. — Défunt, se dit de quelqu'un récemment décédé; semble venir du
latin fuit (il a été); cette étymologie assez naturelle est cependant contestée.
21, Maistre leban. — Appellation qui se donnait aux pédants, aux savants
et aux docteurs. V. N. II, 478 : Maistre;Iean.
22, L'argent. — Proverbe; quand on a du temps devant soi, on a possibilité
de se procurer de quoi se tirer d'embarras. Les Anglais disent avec un
sens analogue : Time is money (le temps, c'est de l'argent).
25, lanuier. — En France, l'année a eu différents points de départ : le
\" mars, sous les rois de la première race ; le jour de Noël, sous ceux de la
deuxième; le jour de Pâques, sous ceux de la troisième jusqu'à Charles IX
qui, par une ordonnance rendue en 1563, en fixa le commencement au
1" janvier. Par suite, le 1" janvier 1563 devint le premier jour de l'an 1564;
le parlement ne se conforma à cette ordonnance que trois ans après, en
1567. — Ajoutons qu'en 1793, le début de l'année fut fixé au 22 septembre,
en même temps que cette même année était dénommée an 2 de la Répu-
blique; cette manière de compter prit fin le 1" janvier 1806.
26, Autant. — Montaigne aj-ant trente-neuf ans à ce moment, devait à son
compte aller jusqu'à soixante-dix-huit; c'est beaucoup. D'après les tables
de mortalité étabUes par Déparcieux en 1746, les premières, croyons-nous,
qui aient été faites, il pouvait espérer arriver à l'âge de soixante à soixante-
cinq ans; de fait cette probabilité s'est réalisée, puisqu'il est mort en 1592,
dans sa soixantième année V. N. I, 596 : Esperable.
114.
1, Terme. — Les éditions antérieures à 1588 ajoutent : « et ce fameux Ma-
humet aussi. » Ce membre de phrase a disparu, Montaigne s'étant vraisem-
blablement aperçu de l'inexactitude qu'il commettait, Mahomet n'ayant
commencé à prêcher qu'à quarante ans et étant mort à soixante-deux.
6, Lyon. — En 1305. Le pape Clément V (Bertrand de Got), que Montaigne
appelle son voisin parce qu'il était gascon et qu'il avait été archevêque de
Bordeaux, venait d'être couronné à Lyon. Après la cérémonie, retournant
à son logis, il traversait la ville à cheval, la tiare sur la tête. Le roi (Phi-
lippe le Bel) et successivement ses deux frères avaient tenu la bride de sa
monture, et cet honneur venait d'échoir au duc Jean II de Bretagne, quand
passant près d'un mur surchargé de spectateurs, le mur s'écroula, le pape
fut renversé de cheval, sa tiare tomba; il y eut douze morts, dont le duc
NOTES. UV. I, CH. XIX. VOL. I, PAG. 114. F.301
de Bretagne, et un grand nombre de blessés, dont le duc de Lorraine qui
eut un bras et une cuisse cassés.
7, louant. — Henri II, blessé à mort, en 1559, dans un tournoi, par le cotnte
de Montgommery, capitaine de ses gardes.
8, Pourceau. — En 1131. Philippe, Hls aîné de Louis le Gros, âgé de seize
ans, qui avait été couronné du vivant de son père, comme il était de règle
à cette époque, pour mieux assurer l'hérédité. Se promenant k cheval, un
pourceau vint à se jeter dans les jambes de l'animal qui s'abattit, brisant
la tète de son cavalier contre une borne et l'étouffant de son poids.
9, L'airte. — Sur ses gardes. On écrit aujourd'hui « alerte » ; les Italiens
disent encore « /are ail' erta », être alerte, être au guet, prendre garde à soi.
Le Clerc.
10, L'air. — En 406. D'après la tradition, il avait été prédit à Eschyle qu'il
périrait en plein air. VAii^iiE Maxime, IX, 12, 2.
11, Raisin. — Anacréon suçant le jus d'un grain de raisin, un pépin s'arrêta
dans sa gorge et il en mourut. Valèke Maxime, IX, 12, 8.
VS, Huis. — Pline, Hist. nat., VII, 33; les deux exemples qui suivent se trou-
vent aussi en cet endroit.
14, Conseil. — Ce fut un accident analogue qui causa la mort du roi de
France Charles VIII; se rendant à une partie de jeu de paume, il se heurta
le front contre le haut d'une porte basse, et quelques heures après n'était
plus (1498).
10, Mantoue. — Guy de Gonzague, père de ce Ludovic, avait été condamné par
ses concitoyens àperdre la tête sur l'échafaud, pour cause d'adultère (1382).
17, Platonicien. — Tertuilien (Apologétique, 46) rapporte le fait, mais seule-
ment comme un on-dit. Diogène Laërce conte au contraire que Speusip-
pus, perclus depuis déjà quelques années par suite de paralysie, et accablé
de douleurs, se donna la mort dans un âge avancé, version que Montaigne
reproduit, I, 632.
18, Papes. — Le pape Jean XII fut, dit-on, assassiné dans les bras de sa
maîtresse (964).
21, Siens. —Cet exemple et le précédent sont tirés de Pline, VII, 33.
22, Frère. — Montaigne eut quatre frères et trois sœurs. — Ses frères
étaient : Thomas, seigneur de Beauregard, qui épousa Mademoiselle Carie,
belle-fille de la Boétie, qui était mort depuis quelques années quand le ma-
riage eut lieu; Mademoiselle Carie possédait la propriété d'Arsac en Médoc,
dont son mari prit le nom. Pierre, seigneur de la Brousse, propriété de la
famille, non loin de Montaigne. Arnaud, dit le capitaine Saint-Martin, dont
il est question ici. Bertrand, seigneur de Mattecoulom, petite propriété près
de Bordeaux. — Ses sœurs : Jeanne, mariée à Richard de Lestonna, con-
seiller au parlement de Bordeaux. Léonor, mariée à Thiébaud de Camain,
également conseiller. Marie, mariée à Bernard de Cazalis. V. N. III, 32 :
Mère.
24, Esteuf. — Balle dont il était et est encore fait usage pour jouer à la
paume.
27, Causa. — Les cas de mort subite sont journahers et se produisent en toutes
circonstances; Rabelais en cite plusieurs, en outre de quelques-unes des
précédentes : Spurius Saufeius mourut, dit.il, en humant un œuf mollet en
sortant du bain; Fabius, préteur romain, fut suffoqué par un poil de chè-
vre en buvant une tasse de lait; Philomènes, par un fou rire que lui causa
la vue d'un àne mangeant des figues nouvelles qu'on avait apportées pour
lui-même; Zeuxis, le peintre, en se pcàmant de rire, en considérant le mi-
nois d'une vieille dont il venait de faire le portrait, et autres. — De nos
jours en 1904, la mère d'un cardinal mourait à la nouvelle que son fils
venait d'être promu patriarche de Venise; une servante du Limousin, en
apprenant qu'elle venait de gagner 25.000 fr. à une loterie ; en Champagne,
un candidat à la députation, à l'annonce de son élection. — La plupart du
temps cependant, les circonstances extérieures dans lesquelles les morts
subites se produisent et qui font qu'on les remarque, n'y sont i)our rien.
F.302 ESSAIS DE MONTAIGNE.
34, Veau. — Niais; celte qualification de veau était souvent appliquée aux
gens par trop simples d'esprit.
44, Dessoude. — Soudainement, du latin de subito, à l'imprévu, comme por-
tent les éditions antérieures.
116,
17, Accoustumons-le. — « Il n'est point d'objet si effra}'ant qu'on ne puisse
envisager sans crainte, quand on s'est familiarisé avec lui; plus on s'oc-
cupe de la mort, moins on la redoute. » De Séguk. — « C'est un accident si
banal, si inévitable, si peu à redoutei- pour qui a la conscience tranquille, que
ce n'est vraiment pas la peine d'y penser, si on amis ordre à ses affaires et
si rien de particulier ne vous porte à désirer une prolongation d'exis-
tence. » G. M.
27, Egyptiens. — Héuodote, II, 78.
29, Secbe. — Un squelette.
32, Attende.
<> C'est un arrêt du ciel, il faut que l'iiomme meure.
Tel est son partage et son sort.
Rien n'est plus certain que la mort,
El rien plus incertain que cette dernière heure. » AnnÉ Testc.
3G, Mal. — ■< Le jour de la mort vaut mieux que le jour de la naissance:
mieux vaut la fin d'une chose que son commencement. » Ecclésiaste, Vil,
1 et 8.
40, Mesme. — Persée, qui n'eut pas le courage, en se tuant, de suivre le
conseil qui lui était implicitement donné et qu'on fit mourir dans sa pri-
son, de faim, disent les uns, en le privant de sommeil, disent les autres,
après avoir servi d'ornement au triomphe de son vainqueur. Plutarqle,
Paul Emile, 17; Cicéro.\, T'use, V, 40.
118,
3, Ageret. — Mademoiselle de Gournay a donné de ce vers de Catulle la
traduction suivante : « Quand mon âge fleuri roulait son gai printemps »,
qui mérite d'être conservée pour sa grâce et la fidélisé originale de la tra-
duction. Le Clerc.
11, Non plus. — Pas davantage. On trouve dans V Horace de Corneille cette
expression avec la même signification :
• Quel malheur si l'amour de sa femme
Ne peut non plus sur lui, que le mien sur ton âme. »
2G, Près. — Le 6' paragraphe du ch. XXIII du liv. I de l'Imitation de Jésus-
Christ résume, ainsi que l'a fait Montaigne, ici et ailleurs, les divers genres
de mort qui nous menacent continuellement; Corneille le traduit ainsi :
• Combien de fois entends-tu dire : Dans les débris d'un bâtiment
Celui-ci vient d'être égorgé; A fini ses jours et ses vices;
Celui-là d'être submergé; L'autre au milieu d'un bon repas.
Cet autre, dans les fers, expire. L'autre parmi d'autres délices
L'un, écrasé subitement. Se sont vus surpris du trépas. »
37, Mort.
« Que l'homme connaît peu la mort qu-'il appréhende.
Quand il dit qu'elle le surprend!
Elle naît avec lui; sans cesse lui demande
Un tribut dont en vain son orgueil se détend:
Il commence à mourir, longtemps avant qu'il meure.
Et périt en détail imperceptiblement;
Le nom de mort qu'on donne à notre lieure dernière,
N'en est que l'accomplissement. " M""' DEsiiouLiÈr.Es.
120,
5, Estre. — Dans sa fable « La mort et le mourant », La Fontaine a déve-
loppé cotte môme pensée de Montaigne, si bien résumée parle dernier vers
NOTES. LIV. I, Cil. XIX. VOL. I, PAG. 120. F.303
de cette fable : « Le plus semblable aux morts, meurt le plus à regret. »
Cette fable se retrouve du reste dans Abstemius, fabuliste italien du
w" siècle.
10, Mortes morts. — Les morts où tout meurt à la fois chez l'homme, par
- opposition à celles où il s'éteint graduellement, perdant tout ou partie de
ses facultés avant de perdre la vie.
l;}, Manent. — Le texte de Virgile porte Pendent.
19, Agir. — Les éditions antérieures ajoutent : El ie suis d'aduis que non
seulement vu Empereur, comme disoit Vespasien, mais que luiili/allant homme
doit mourir debout.
32, Lycurgus. — Plupauque, Vie de Lycurgue, 20.
35, Condition. — Actuellement, par mesure d'hygiène, les cimetières sont
établis loin des groupes d'habitations; le souvenir et le culte des morts y
ont perdu. Être inhumé au pied de son clocher, au centre même du lieu
où l'on avait vécu, de ses affections, avait autrement de poésie que d'être,
comme aujourd'hui, relégué au loin et à l'écart.
42, Tel. — Cette exhibition, au dire même d'Hérodote qui la rapporte, n'a-
vait nullement pour objet, comme Montaigne le donne à entendre, une
pensée morale, mais, au contraire, celui de s'exciter à boire et à mener
joyeuse vie, bannissant peines et soucis, se rappelant le peu de temps durant
lequel il est donné à l'homme d'en jouir.
122,
1, Diuerses. — Ce registi-e, à la vérité non commenté, et c'est là le point es-
sentiel de l'idée de Montaigne, existait de son temps, établi par de Ravisi
(Bàle, 1552); d'autres depuis, toujours sans commentaires, en ont pareille-
ment donné des relevés. Parmi les auteurs mômes qu'il avait dans sa biblio-
thèque, Pline, Valère Maxime, Boccace y ont consacré des chapitres entiers
de leurs ouvrages.
7, Fin. — CicÉROX, De 01]'., 11, 5. Dicearchus, dans son livre, énumère tout
ce qui concourt à la destruction de l'homme : épidémies, cataclysmes de
toutes sortes, et termine en montrant que les guerres, les séditions, en un
mot la fureur de l'homme contre ses semblables, en fait périr plus que
toutes les autres calamités réunies.
23, César. — De Bello Gallico, Vil, 81.
30, Mort. — Montaigne mourut, comme il en manifeste l'espoir, avec cou-
rage et résignation. Il s'éteignit lentement le 13 septembre 1592. « Depuis
trois jours déjà, il ne pouvait plus parler, mais était plein d'entendement.
Sentant sa fin approcher, il fit mander à quelques gentilshommes ses voi-
sins de venir, pour qu'il prît congé d'eux; et, alors qu'on était réuni et
tandis qu'on disait la messe dans sa chambre, à l'élévation, par un effort
suprême il joignit les mains, tenta de se dresser sur son séant et rendit
l'àme. •' Pasquif.[{.
33, Manet! — Citation tirée de Pseudo-Gallus. Galius, contemporain d'Au-
guste, prit part aux grandes affaires de l'État, et composa des élégies qui ne
nous sont pas parvenues. Il en a été, nonobstant, publié sous son nom, en
1501; elles semblent lui avoir été faussement attribuées et être d'un poète
inconnu du vi' siècle que certains dénomment Maximianus et que l'on a
pris le parti de désigner sous l'appellation de Pseudo-Gallus.
37, Vie. — SKNi:(>ri;. J-:/>isl. 70.
124,
5, Vieillesse. — Curius Dentatus, i'a])porte Sénèque, disait " préférer être
mort que vivre mort ».
, 21, Figue. — « Faire la figue », expression italienne. C'est se moquer de
quelqu'un en lui faisant un geste indécent avec les doigts, lui montrant le
bout du pouce entre l'index et le médius. En 1162, Frédéric Barberousse,
empereur d'Allemagne, pour se venger des IMilanais, qui avaient promené
ignominieusement sa femme sur une mule, les ayant battus, fit placer une
figue dans les parties génitales de la mule et chacun de ses prisonniers dut,
à tour de rôle, sous peine de mort, la retirer avec les dents, d'où ce geste
F. 304 ESSAIS DE MONTAIGNE.
et cette expression, rappelant cette aventure aux Milanais et tenu par eux
comme une injure.
■ 34, Mort. — Dior.KNE Laerce, II, 15; Cicéros, Tusc, 1, 40. — Socrate no fut
pas condamné à mort par les ti'ente tyrans, mais api'ès leur expulsion, pai-
les Athéniens eux-mêmes (400), ou n)ieux par le conseil des Iléliastes. Ce
conseil, ainsi nommé parce qu'il siégeait en plein air, et dont le nombre
des membres variait de 200 à 600, était composé de sénateurs. Pour Socrate,
556 membres étaient présents; il fut déclaré coupable à la majorité de
3 voix, et condamné à mort à celle do 33; il est vraisemblable que la har-
diesse de sa défense indisposa d'un scrutin à l'autre quelques-uns de ceux
qui, de prime abord, s'étaient prononcés pour la non-culpabilité. Y.
N. III, 570 : L'vn.
40, Ans. — Allusion au sentiment éprouvé par Xerxès voj'ant défiler son ar-
mée et songeant que, dans cent ans, de tous ces êtres humains, pas un no
demeurerait, fait mentionné ci-après, I, 408. — Un jour, en présence du
peuple romain auquel il dçnnait des jeux, Titus versa des larmes provo-
quées par de semblables réflexions. '
126,
7, Décrépitude. — Cicéron, Tusc, I, 39.
10, Éternité. — •< L'éternité commencée tout à l'heure, est aussi ancienne que
l'éternité datée de la première mort, du meurtre d'Abel. ». Chateaubriand.
11, Arbres. — 11 existerait au Mexique, encore actuellement en 1907, près d'un
village appelé Chepultepec, un cyprès qui aurait trente-cinq mètres de tour
et qui, d'après les botanistes, serait âgé de plus de six mille ans. On trouve
également en Amérique, notamment en Californie, des séquoias qui auraient
de 3000 à 3500 ans d'existence; en Judée, au jardin de Gethsémani, sont
nombreux les oliviers qui ont été témoins de l'agonie de .lésus-Christ; en
Angleterre existe un chêne de toute beauté auquel on attribue une exis-
tence de douze siècles. 11 y a en Normandie un chêne qui serait contempo-
rain de Guillaume le Conquérant; en Sar daigne se trouveraient des oran-
gers qui auraient sept cents ans; à l'orangerie de Versailles en existe un, en
fort bon état, planté au xv® siècle par Éléonore de Castille. Larousse.
11, Animaux. — L'éléphant serait de tous les animaux celui qui vivrait le
'plus longtemps; on en cite un qui, pris par Alexandre le Grand, lors de la
défaite de Porus, pouvant avoir à ce moment une cinquantaine d'années,
existait encore à Alexandrie trois siècles après. La tortue, la corneille, le
perroquet atteindraient cent ans; l'aigle, cent cinquante ans. Les estur-
geons, les squales, passent pour vivre plusieurs siècles; on prétend que dans
les pièces d'eau du château de Fontainebleau, se trouvent des carpes da-
tant de la fondation par François I", il y a quatre cents ans. Larousse.
12, Ridicule. — Sénèque, Consol. ad Marciam, 20.
16, Monde. — « Il est aussi naturel de mourir que de naître. » Bacon.
20, Création.
« Homme, contre la mort, quoi que l'art le promette,
Il ne saurait te secourir.
Prépares-y ton cœur; dis-toi : C'est une dette
Qu'en recevant le jour j'ai faite;
Nous ne naissons que pour mourir. • M' Desboulièhes.
« L'enfant naît pour mourir, la maison s'élève pour tomber. « Adage arabe.
23, Viure.
« ... Tout passe et tout meurt : tel est l'arrêt du sort.
L'instant où nous naissons est un pas vers la mort. »
VoLTAmE, Exhortation villageoise du Curé de C.
25, Pendet. — Add. de 80 : Et ne maures iamais trop lost.
27, Mort. — « Nous allons sans cesse au tombeau, ainsi que des eaux qui se
perdent sans retour. » Bossuet, Oraison funèWe de Madame la ducltesse
d'Oiléans.
NOTES. LIV. I, CH. XIX. VOL. 1, PA.G. 126. F. 305
« Le moment où je parle est dôjà loin de moi. • Boileau.
• Dans tout berceau germe une tombe. » Victor Hugo.
128,
^, Disposition. — Terme d'astronomie; c'est l'état des astres et leur aspect.
11, Mesme. — « Ce qui a été, c'est ce qui sera, et ce qui s'est fait, c'est ce qui
se fei'a; il n'y a rien de nouveau sous le soleil. » Ecclésiaste, I, 9.
38, Videmus. — La phrase qui précède est la traduction de ces deux vers.
45, Vsage. — ■• La durée de la vie se compte l'éellement, non par le nombre
des années, mais par celui des pensées et des actions. » De Ségur.
4C, Vescu. — « Quelque jeune qu'on soit, quand on a bien su vivre, on a
toujours assez vécu. » M""" Deshoulifikes. *
130.
1, Issue. — A Saint-Antoine de Padoue (Italie), on voit dans le cloîti-o une
tombe française, datant de 1595, dont l'épitaphe se termine par ce vers :
0 Car il n'est si beau jour qui n'amène sa nuit. »
i'I, Donnée. — « Si Dieu avait donné le choix, ou de mourir, ou de toujours
vivre; après avoir médité profondément ce que c'est, que de ne voir nulle
fin à la pauvreté, à la dépendance, à l'ennui, à la maladie; ou de n'essayer
des richesses, des plaisirs et de la santé que pour les voir changer inévita-
blement en leurs contraires par la révolution du temps, et être ainsi le
jouet des biens et des maux, l'on ne saurait guère à quoi se résoudre. La
nature nous fixe et nous ôte l'embarras de choisir; et la mort qu'elle nous
rend nécessaire, est encore adoucie par la religion. » La Bruyère. — « Si
nous étions immortels, nous serions des êtres très misérables. Il est dur,
sans doute, de mourir; mais il est doux d'espérer qu'on ne vivra pas tou-
jours et qu'une meilleure vie finira les peines de celle-ci. Si on nous offrait
l'immortalité sur la terre, qui est-ce qui voudrait accepter ce triste pré-
sent? quelles ressources, ciuels espoirs, quelles consolations nous resteraient
contre les rigueui'S du sort et les injustices des hommes?» J.-J. Rousseau,
Emile, 11.
24, Priué. — Le Tasse, près de rendre le dernier soupir, disait : « Si la mort
n'était pas, il n'y aurait au monde rien de plus misérable que l'homme. »
« La vie n'est qu'un amas de craintes, de douleurs.
De travaux, de soucis, de peines;
Pour qui connaît les «lisères humaines,
Mourir n'est pas le plus grand des mallieurs. » M""" Deshoiilikues.
" Celui-là qui meurt jeune, est aimé des dieux. » — « J'aurais bien aimé à
mourir entre les bras de ma nourrice, cela m'aurait ôté bien des ennuis et
m'aurait donné le ciel bien sûrement et bien aisément » (M"" de Savigné).
30, Indifférent. — Diouène Laerce, I, 35.
132,
1, Arriue. — C'est de cette niètye idée que s'inspire cette inscription qui se
lit fréquemment sur les cadrans solaires : <• Vulneranl omnes, ultima necat
[Toutes lex heures nous bl'ssent, la dernière nous lue) », que certains trouve-
raient plus juste si elle était ré(lig(!'e : « \'ulneranl omnes, ullima sanal (la
dernière guérit) », puisque cette dernière met fin à nos maux.
2, Nature. — Tout ce discours de la nature est imité de Lucrèce, III, du
vers 915 jusqu'à la fin du livi'e. Les deux dernières phrases sont traduites
, de SÉNÈQUE, Episl. 20; le traité de ce même philosophe. De brevilale vilœ, a
aussi fourni à Montaigne quelques imitations. Le Clerc.
14, Prescheurs. — « Qui demandent : Où voulez-vous, Monsieur, qu'on vous
enterre? » VoltauieJ La PuccUe.
17, Nous. — Cette idée et celle de la phrase suivante appartiennent à Si>
NÈQUE, Episl. 24. — « C'est moins la mort qui est horrible, que le fantôme
sous lequel on nous la fait envisager. » Chu.ox.
essais de .MONTAIGNE. — T. IV. 20
F.306 ESSAIS DE MONTAIGNE..
17, Masque. — « La mort est belle ; elle est notre amie. Néanmoins, nous
ne la reconnaissons pas, parce qu'elle se présente à nous masquée et que
son masque nous épouvante. » Chateaubhiand.
20, Mort. — Les éd. ant. aj. : el heureuse trois fois.
21, Equipage. — « Mon ami, je mourrai aujourd'hui. Quand on en est là, il
ne reste plus qu'une chose à faire, c'est de se parfumer, de se couronner ()e
Heurs, de s'environner de musique, afin d'entrer agréablement dans ce
sommeil dont on ne se réveille plus. » Paroles de JIirabeau à Cabanis, le
jour de sa mort. — •< Le dernier plaisir de la vie. a dit Cksah, est de mou-
rir sans y penser. »
CHAPITRE XX.
Ce chapitre porte le n" XXI dans les éd. ant. et lex. de Bordeaux.
2,3, L'imagination. — Charron a puisé dans ce chapitre la plupart des idées
qu'il exprime au ch. 17 du liv. I de son Traité sur la Sagesse.
134,
18, Sagesse. — Ce Vibius Gallus était rhétoricien de profession. 11 s'imagina
que les emportements de la raison, représentés devant ses auditeurs, cap-
tiveraient leur esprit; et, par le soin qu'il prit à contrefaire le fou, il le
devint effectivement. « C'est le seul homme que je sache, dit Sénkque i.e
Rhéteur, Controv., Il, 9, à qui il est arrivé de devenir fou, non par acci-
dent, mais par acte de jugement. »
21, Imagination. — On a vu maintes fois des patients mourir sur la table
d'opération, avant même que le chirurgien eût, commencé. — En 1794, Hé-
bert, ce terroriste qui avait envoyé de si nombreuses victimes à l'échafaud,
appelé à son tour à y monter, fut si faible devant la mort que ses jambes
ne le portaient plus; il fallut, lorsqu'on le descendit de la charrette, l'asseoir
sur le pavé. A la vue de la fatale machine, il s'évanouit; il était sans vie,
lorsqu'on l'attacha sur la bascule; on ne guillotina qu'un mort. — Au col-
lège royal d'Aberdeen, en Angletei-re, des étudiants ayant à se plaindre du
portier, s'en saisissent et lui annoncent qu'ils vont lui trancher la tête; ils
i'agenouillent les yeux bandés et le frappent à la nuque avec une serviette
mouillée; quand on le relève, il a cessé de vivre. — Lors du catacljsme
qui, en 1902, ravagea la Martinique et détruisit la ville de Saint-Pierre, tous
les navires qui étaient dans la rade périrent consumés par les flammes.
Un seul, le « Roddus », parvint à s'échapper indemne; on n'y découvrit pas
moins, une fois en sûreté, dans le salon du bord, 'les cadavres de plusieurs
matelots qui, effrayés par la soudaineté de l'éruption et la pluie de feu,
avaient dû se réfugier en toute hâte dans cette pièce et y étaient morts de
peur, car ils ne portaient aucune trace de blessure. Fulbert Dumo.nteil.
28, Cruentent. — Montaigne a rendu lui-même, avant de les citer, l'idée ex-
j)rimée dans ces deux vers de Lucrèce, dont la traduction textuelle est la
suivante : « Semblables aux (lots tumultueux d'un fleuve franchissant toute
limite, les amoureux inondent leurs ^^tements. »
31, Italie. — Valère Maxime, V, 6, qualifie Cippus de préteur et dit qu'étant
sorti de Rome en habit de général et l'accident dont parle Montaigne lui
étant arrivé, les devins déclarèrent qu'il. serait roi, s'il retournait à Rome:
sur quoi, il se condamna volontairement à un exil éternel. V. aussi Pi.ine,
XI, 58. -,
35, Refusée. — En 546, Crésus, roi de Lydie (Asie Mineure), avait un fils
muet de naissance. Lors de la prise de sa capitale par les Perses, l'un d'eux
allait tuer le roi qu'il ne connaissait pas, lorsque son fils qui était à ses
côtés, saisi d'effroi, fit un effort qui lui rendit la voix : • Soldat, se serait-
il écrié, ne tue pas Crésus! » et, pour le reste de sa vie, il conserva la fa-
culté de parler. Hérodote, I, 85.
37, Ame. — Antiochus, fils de Séleucus Nicator roi de Syrie, dépérissait. Era-
sistrate, son médecin, ne pouvant en pénétrer la cause, pensa qu'il se
NOTES. LIV. I, Cil. XX. VOL. I, PAG. 134. F.307
mourait d'amour, et, pour connaître l'objet de sa passion, imagina de
mettre la main sur le cœur du malade et de faire défiler devant lui toutes
les personnes de son entourage. A l'entrée de chacune, le jeune homme
resta parfaitement calme, jusqu'à l'arrivée de Stratonice, sa belle-mère; à
ce moment, il change de couleur, une sueur froide l'envahit, un frisson
s'empare de lui, son cœur palpite; ces mouvements révèlent au médecin ce
qu'il voulait connaître et il déclare au roi que le seul moyen de sauver son
fils est de l'unir à la princesse; Séleucus consentit à la lui céder. Lcgien,
Traité de la déesse de Syrie.
38, Nopces. — Outre cet exemple de changement de sexe, Pline, Hist. nul.,
VII, 1. en cite plusieurs autres, mais aucun en sens inverse d'homme
changé en femme; Ausone leur consacre une de ses épigrammes. — Le fait
se présente de temps à autre, mais plus apparent que réel, ne tenant en
quoi que ce soit du merveilleux ; chez la plupart, il n'est que le fait de faus-
ses déclarations, faites à la naissance par les parents qui espèrent de la sorte
éviter à leur fils le service militaire. Cependant, en dehors de toute super-
cherie, il naît parfois des hermaphrodites; les Romains avaient pour prin-
cipe de les détruire; de nos jours, on les admet à l'existence comme tous
autres. Cette année même (1906), à Charlottenbourg (Prusse), un nouveau-
né aurait été insciit à l'état civil sans indication de sexe, l'accord n'ayant
pu se faire sur sa détermination, et l'on aurait remis à l'avenir de décider
la question.
41, Ipbis. — Lors de la naissance d'Iphis, son père, partant en voyage, avait
ordonné que si c'était une fille, ce qui arriva, elle fût exposée. Sa mère,
pour la sauver, déguisa son sexe et l'éleva comme un garçon. Quand vint
le moment de la marier, durant la cérémonie nuptiale, les dieux, cédant à
ses prières et à celles de sa mère, la changèrent en garçon ; et, par recon-
naissance, Iphis offrit un sacrifice à Isis (une des divinités principales de
l'Egypte, personnification de la nature), inscrivant sur un e.x-voto le vers
que cite Montaigne. Myth.
136,
1, François. — Vitry-le-François s'écrit et se prononce encore avec un 0.
Cette ville a été bâtie par François I", pour recevoir les habitants de Vitry-
le-Brûlé, bourg distant d'environ 5 kil., que Charles-Quint venaitde détruire
(1554).
2, Soissons. — En 1580. Dans son journal de voyage, Montaigne écrit : « Nous
ne le sceumes voir, parce qu'il cstoit au village ». Il y est dit aussi que ce
fut l'évêque de Chàlons, et non de Soissons, le cardinal de Lenoncourt, qui
lui donna ce nom de Germain. Le Clerc
9, Marie Germain. — Le fait est mentionné par Ambroise Paré; c'était,
dit-il, une jeune paysanne du nom de Marie Garnier qui, à l'âge de quinze
ans, gardant les moutons et ayant sauté un fossé, éprouva une vive douleur
et se trouva avoir changé de sexe; on lui donna alors le nom de Germain.
Ce devait être, ajoute le célèbre chirurgien de l'époque, un véritable gar-
çon, dont les organes étaient jusque-là demeurés à l'intérieur. Cuvier. —
En 1907, à Savia (Italie), est né un enfant hermaphrodite, chez lequel les
médecins n'ont pas été d'accord sur le sexe prédominant. — La duchesse
d'Orléans, mère du Régent, sous Louis XV, parle dans ses IMémoires de
Marie Germain, et avoue avoir, dans l'espoir de devenir homme comme
elle, fait, elle aussi; des sauts si terribles que c'est miracle si, cent fois, elle
ne s'est pas rompu le cou.
16, Daçfobert. — Ce roi, dit la légende, était couvert de lèpre; s'étant dévo-
tieusement frictionné avec la rosée de certain lieu d'une vénération par-
ticulière, il en fut miraculeusement guéri, ne conservant que les cicatrices
de ses plaies.
16, Saint François. — Deux ans avant sa mort (1224), saint François d'As-
sise étant en prière, tomba en extase; le Christ sur la croix lui apparut,
et, en même temps, il se sentit comme percé de trous dans tous les mem-
bres où les clous avaient été enfoncés dans ceux deNotre-Seigneur; et de-
P.308 ESSAIS DE MONTAIGNE.
puis il en conserva les cicatrices. — Ce fait de stigmates a été relevé à di-
verees reprises; en des temps rapprochés, en 1843, il a été assez longue-
ment question d'un cas semblable, cliez trois vierges, dans le Tyroi. En
ce qui touche saint François d'Assise, le fait a été accepté par l'Église qui
a institué une fête en cet honneur; ce qui n'a pas empêché un incrédule
d'avancer qu'au dire des Jacobins, advereaires des Cordeliors dont saint
Fi-ançois est le fondateur, ces stigmates avaient été produits par saint
Dominique ai'nié d'une broche, loi's d'un différend survenu entre eux.
19. Autre. — Cet autre, c'est Kestittitus. Cilé de Dieu, XIV, 21.
2i, Haleine. — Les extases, plus ou moins prolongées, sont un fait courant
que la science explique dans une certaine mesure et qu'on arrive même
assez aisément à provoquer cliez certaines personnes, par le magnétisme.
27, Visions. — « Des miracles », ajoutent toutes les éd. ant. et l'ex. de Bor-
deaux.
32, Liaisons. — « Dos mariages », ajoutent les éditions antérieures. Il s'agit
ici de nouement d'éguillettes, ou impuissance momentanée empêchant la
consommation du mariage, attribuée alors à des maléfices et qui jadis était
l'objet de bien des préoccupations: Virgile semble y faii'e allusion ; l'Écriture
sainte relate la peine de mort contre ceux .se livrant à des enchantements
pour les produire; la loi salique leur inflige une amende de quarante
sous d'or.
138,
IC à 22, On n'a pas... préseruer. — Var. des éd. ant. : .1 r/ui a assez de
loisir pour se rauoir el se, remellre de ce trouble, mon conseil est qu'il diuer-
lisse ailleurs son pensemenl ou qu'on luy persuade, qu'on luy fournira des
contrencltanlcmens d'vn e/fecl merueilleux et certain.
31, Test. — A la base du crâne.
140,
1, Resueillon. — Collation faite au milieu do la nuit, quand on veillait, fré-
quemment pratiquée alors, le souper avant lieu d'ordinaire à 5 heures du
soir; est encore, de nos jours, de pratique coui'ante la nuit de Noël, mais
avec en plus une idée de divertissement qui à l'époque n'en faisait pas
partie intégrante.
' 32, Sacrifices. — Hérodote, II, 81, d'où le fait est tiré, dit que ce fut Laodice
qui s'avisa de faire vœu à Vénus de lui ériger une statue, ce dont elle s'ac-
quitta très lidolement.
31, Mineuses. — Qui font des mines, des manières; minaudières.
35, Allumant. — Var. des éd. ant. : « Mais il faut aussi que colles, à qui lé-
gitimement on le peut demander, ostent ces façons cérémonieuses et affec-
tées de rigueur et de refus, et qu'elles se contraignent vn peu, pour s'ac-
commoder à la nécessité de ce siècle malheureux », au lieu de : « Or elles
ont... allumant ».
35, Cotte. — Ce propos émane de Théano. Cf. Hérodote, 1, 8.
142,
4 à 5, Qui luy... suiuantes. — Var. des éd. ant. : que celle frayeur s'en
augmente et redouble à toutes tes occasions suiuanles : el sans quelque con-
tremine on n'en vient pas aisément à bout.
144,
13, Saint Augustin. — Dans la Cité de Dieu, W\, 21; voir aussi le commen-
taire de Vives sur ce passage. — Il y a vingt ou* trente ans, un individu,
tirant parti de cette même affection, afflublé de la qualité de Peptomane.
se donnait en spectacle à Paris; il en était arrivé à jouer certains airs.
25, Pouuoir. — Claude, empereur romain. Slkto.ne (C/ourfe, 32) dit seulement:
11 méditait, assure-t-on, de rendre un édit « pour permettre de lâcher des
vents à sa table », parce qu'il avait appris qu'un de ses convives avait
pensé mourir pour s'être retenu devant lui. • Ne vous étonnez pas davan-
tage, dit Rabelais, de celui-ci qui, pour retenir son vent et défaut de péter
un mauvais coup, mourut subitement en présence de Claudius ■■, origine
probable de cette intention.
NOTES. LIV. I, Cil. XX. VOL. I, PAG. 146. F.309
146.
12, Espaigne. — Les éciouolles, aflection clironique des glandes du cou,
vulgairement appelées •• humeurs froides -. — Les rois de France passaient
jadis pour avoir le don de guérir cette maladie. A cet effet, ils faisaient
sur la face du malade un signe de croix, en le touchant du fi'ont au men-
ton et d'une oreille à l'autre, en disant : « Le loi te touche. Dieu te guérit. »
Us procédaient à cette opération, plus particulièrement le jour de leur
sacre et à difl'érentes fêtes annoncées à l'avance, pour que ceux qui le vou-
laient pussent se présenter. Le jour de son sacre, Louis XIV en toucha
près de 2.000. Les étrangers se présentaient en grand nombre, notamment
les Espagnols, chez lesquels cette maladie était, parait-il, assez répandue;
caseraient eux qui, pour cacher ce mal, auraient inventé ces grandes fraises,
en usage autrefois, ))articulièrement au xvr siècle. — L'antiquitc- est fer-
tile en supei-stitions de ce genre : l'yrrhus, roi d'Épire, guérissait les gens
malades de la i-ate en leur touchant le liane gauche avec son orteil droit;
ils devaient au préalable avoir sacrifié un coq blanc. Montaigne, d'après
Plutarque, cite ailleurs le fait de Vespasien rendant la vue à deux aveugles
en leur humectant la paupière avec sa salive.
17, Aposéme. — Apozème, terme de médecine; potion faite d'une décoction
d'herbes.
37, Façon. — Ce trait est, après Montaigne, rapporté dans les anecdotes de
médecine de Dumonchau. — De cet effet d'imagination vrai ou faux, on
peut rapprocher celui bien réel qui se produit iourneUement quand on souf-
fre des dents et qu'on se décide à s'en faire arracher; l'appréhension de
la douleur fait que très fréquemment le mal disparait, quand le dentiste se
dispose à opérer.
148,
7, Douleur. — Des faits semblables sont assez fréquents dans les annales
médicales. — L'illustre chirurgien Vei.peau eut jadis à traiter un malade
persuadé qu'il avait avalé une couleuvre et le guérit en procédant de la
même façon. — Tout récemment le docteur Richolot, à l'hôpital Cochin, à
Paris, avait affaire à une femme prétendant avoir avalé, en buvant à un
ruisseau, il y avait une quarantaine d'années, un œuf de lézard, qui avait
éclos en elle et produit un lézard qui la gênait de plus en plus et était de-
venu intolérable. Il l'endormit, lui fit une incision superficielle et, à son
réveil, lui produisit un magnifique lézard vert, d'une trentaine de centi-
mètres de long, dont il s'était nanti au préalable. La femme fut convain-
cue et guérie, jusqu'à ce que quelque temps après, apprenant la super-
cherie par les journaux, les marnes effets se reproduisirent en elle. — Ces
effets sont le résultat de troubles nerveux très connus aujourd'hui, qui
affectent parfois une forme -plus curieuse encore dans le cas de la grossesse
nerveuse, où la femme se figure être enceinte, en présente tous les symp-
tômes, a dès les premiers mois des vomissements, s'imagine plus tard sentir
remuer l'enfant qui n'existe pas, jusqu'à ce que vers le neuvième mois tout
rentre insensiblement de soi-même dans l'ordre.
20, Regard. — C'est la croyance au mauvais œil, dont, quelques lignes plus
loin, Montaigne gratifie les sorciers. La Scythie n'était pas le seul pays où
pareille croyance existait, et nous la trouvons encore aujourd'hui dans
bien des pays se disant civilisés, notamment en Italie, où le « jettatore »
(jeteur de sorts) est un être redouté, faisant le mal sans même en avoir
I'int(întion. Au.ssi, s'en garde-t-on avec grand soin; heureusement, il est
, facile à reconnaître; du reste, pour s'en protéger, il existe des préservatifs :
pour conjurer le mauvais sort les dames romaines portaient à cet effet,
dans l'antiquité, des priapes de bronze d'or, que les modernes remplacent
par des cornes en. corail ou en jais; les Orientaux donnent la préférence à
des mains en argent, assez grossièrement imitées, les cinq doigts ouverts;
à la rigueur, si on est surpris, la main ainsi étendue, les doigts écartés et
dirigés vers celui qui vous menace ainsi, d'une façon consciente ou incons-
ciente, suffit pour vous en défendre.
F.310 ESSAIS DE MONTAIGNE.
37, More.— Ludovic Sforza, duc de Milan, dont il a ôté question, I, 104, dit
le More ou le Maure, en raison de son teint basané.
150,
2, lacob. — Jacob était convenu avec Laban, son beau-père, qu'il garderait ses
troupeaux et que comme salaire tout agneau ou chevreau tacheté serait sa
propriété. 11 prit alors, dit la Genkse, XXX, 37, des baguettes vertes de
peupHer, d'amandier et de platane, il y pela des bandes en mettant à nu le
blanc des baguettes, et plaça ces baguettes dans les abreuvoirs, et quand les
brebis s'accouplaient devant les baguettes, elles faisaient des petits rayés,
tachetés et marqués; et comme en outre il prenait la précaution d'agir ainsi
à l'égard des brebis les plus vigoureuses, Laban n'avait que des agneaux
peu nombreux et chétifs, tandis que les siens étaient en bien plus grand
nombre et vigoureux, et de la sorte, ajoute l'Écriture sainte, il devint ex-
trêmement riche.
17, Moy. — De nombreuses éditions postérieures à celle de 1595, portent
« conte », au lieu de « comme », indicatif du verbe conimer (faire applica-
tion); le sens ne justifie pas cette modification.
152,
13, Partis. — Quoique catholique et partisan de l'autorité royale, Montaigne
conserva toujours de bonnes relations avec les chefs de tous les partis, la
politique n'eut jamais très grande action sur lui.
23, Punissables. — Montaigne cherche plus en effet dans les contes et anec-
dotes qu'il présente, des occasions d'exprimer sa façon de penser, que d'en
tirer des déductions, ce qui le porte à se préoccuper fort peu de leur exac-
titude qui souvent laisse fort à désirer.
28, Ainsi. — Les poètes de cette époque écrivaient « ainsii^ » pour éviter des
liiatus, quand le mot suivant commençait par une voyelle, ce dont ce pas-
sage semble une critique.
CHAPITRE XXI.
Ce chapitre porte le n° XXII dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
154.
1, Demades. — Sk.nèque, De Beneficiis,\l, d'où presque tout ce chapitre a
été pris.
6, D'autruy. — « C'est ce qui fait qu'il est si difficile de détruire les abus; il
n'y en a pas qui ne profitent à quelques-uns. »
8, Guain. — Ceci a été et sera de tous temps, et l'on peut ajouter que cha-
cun cherche à vendre le plus cher possible et à acheter au prix le moins
élevé; c'est ce que de nos jours on appelle « la lutte pour la vie ». d'autant
plus ardente que la civilisation va sans cesse augmentant les appétits, créant
de nouveaux besoins. C'est ce qui fait que le patron veut la journée de
travail la plus longue et l'ouvrier la moins longue possible; que les comp-
tables, les professeurs réclament contre les emploj'és des ministères qui, à
temps perdu, et Dieu sait s'ils en ont, s'occupent de travaux de comptabi-
lité, donnent des leçons; que les tailleurs et cordonniers réclament contre
les maîtres ouvriers des corps de troupe, qui travaillent pour le dehors, etc. ;
et aussi que les produits similaires de l'étranger sont frappés de droits
protecteurs pour permettre à nos producteurs de mieux écouler leurs pro-
duits, à notre détriment à nous consommateurs; l'acharnement des méde-
cins contre les rebouteurs, des pharmaciens contre les herboristes dont
pâtissent les malades n'a pas d'autre cause. — Mais ce qui se justifie moins
encore, c'est l'exagération apportée dans la pratique de cette loi de « l'offre
et de la demande » qui n'est autre qu'une variante de la loi du plus fort
aussi inique qu'elle et qui fait que souvent le gain d'un homme occupé
durant la journée entière ne suffit pas à le faire vivre, parce que l'em-
ployeur abuse des facilités qu'il trouve à faire exécuter ce travail pour le
rémunérer d'une façon insuffisante; cela a lieu surtout à l'égard de la
NOTES. IJV. 1, en. XXr. VOL. I, PAG. lo4. F.3H
femme dont le travail est souvent payé d'un prix dérisoire, notamment
celles que font travailler à domicile les grands magasins, dont la fortune
est faite de leur misère. C'est cette même loi qui fait que dès qu'une
plus grande affluence de monde par suite d'une circonstance quelconque
survient dans une localité, on voit du môme coup s'élever le prix de
toutes les denrées de première nécessité. — Dans ce même ordre d'idées
rentre la question du repos hebdomadaire dans laquelle il a fallu que la loi
intervienne, pour que ceux qui l'accordent ne pâtissent pas de ce que
d'autres refusent à l'accordei'. En bonne conscience iî devrait, sauf le cas
de nécessité absolue, avoir lieu le dimanche parce que c'est dans les habi-
tudes que, ce jour-là, les échéances soient prorogées, les grandes administra-
tions fermées; les enfahts ne vont pas à l'école; c'est le jour habituel des
grandes manifestations de la vie sociale et politique; certainement il peut
y avoir inconvénient pour quelques-uns, mais c'est l'avantage du plus grand
nombre. Quant au salaire, il no saurait actuellement être payé par le pa-
tron pour les journées où l'on chôme, .mais forcément le prix de la journée
de travail s'élèvera d'autant, ce qui reviendra au même pour l'ouvrier ou
l'employé, l'employeur tout naturellement aussi se rattrapera en surélevant
d'autant ses prix: finalement ce sera le consommateur qui paiera, et il ne
saurait en être autrement.
i;^, Grec. — Ce comique, c'est Philémon, poète du IV'' siècle, qui mourut,
dit-on, dans un accès de rire, à 97 ans. — Un autre auteur gr?c, abondant
dans le même sens, raconte que quelqu'un, rencontrant son médecin, lui
demanda pardon de la bonne santé dont il jouissait depuis longtemps.
13, Reste. — « Le précepte de ne jamais nuire à autrui, emporte celui de
tenir à la société humaine le moins qu'il est possible; car, dans l'état so-
cial, le bien de l'un fait nécessairement le mal de l'autre. » J.-J. Rousseal",
Emile, III. — « Ce qui nuit à l'un, duit à l'autre. >• (Proverbe ancien).
16, D'autruy. — La Rochefoucault fait de l'amour-propre et de l'intérêt per-
sonnel la base de toutes nos actions, et chacune de ses maximes n'est que
le développement de ce principe, dont il a pu trouver dans Montaigne l'idée
première.
CHAPITRE XXII.
Ce chapitre poi-te le n" XXIII dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
23, Receûe. — Ce chapitre est un de ceux méritant le plus d'attention; il offre
un champ très vaste aux réflexions et renferme un assez grand nombre
d'idées fortes et peu communes. On y trouve entre autres des observations
très judicieusessur la nécessité de corriger de bonne heure, chez les enfants,
plusieurs vices, défauts ou penchants qui pi'ennent racine en eux dès la plus
tendre enfance. Naigeon.
156,
2, Encore. — Chez les Romains, ce conte avait donné lieu à un proverbe
que PÉTRONE, XXV, exprime ainsi : « Qui l'a pu porter veau, peut le porter
bœuf. » On le trouve aussi dans Stobée qui le cite d'après Favorinus et dans
les Adages d'ERASME.
3, Coutume. — Le fait cité est plus ici une question d'habitude que de cou-
tume; la conclusion émise n'en est pas moins juste pour l'une comme pour
l'autre : « En amour notamment le lien de l'habitude est bien fort; pour
s'en apercevoir, il faut être sur le point de rompre; combien de gens vi-
vent ensemble comme s'ils s'aimaient, faute de pouvoir se passer l'un de
l'autre. •> M"" de Rieux. — « Le mariage doit combattre sans trêve, ni repos,
ce monstre qui dévore tout, l'habitude. » Balzac.
10, République. — Cet antre est aux Enfers, un lieu où, selon Platon^ Répu-
blique, YII, toutes les âmes séjournaient après la mort, en attendant qu'il
fût statué sur leur sort. Celles d'entre elles appelées à retourner sur la terre,
P.312 ESSAIS DE MONTAIGNE.
libres de choisir tel ou tel genre de vie, choisissaient toujours immanqua-
blement, et c'est ce à quoi il est fait ici allusion, d'après leurs anciennes
habitudes.
1*2, Poison. — Mithridate, roi du Pont, s'était habitué au poison, on en pre-
nant régulièronient à petites doses, dans le but de déjouer les tentatives
d'empoisonnement, si bien que, dans sa vieillesse, réduit par les circons-
tances à se tuer, il essaya en vain de ce moyen. — C'est sur un principe
analogue que repose la vaccination, dont la découverte fut duo au hasard,
et aussi l'emploi do tous les sérums que la science de Pasteur a par déduc-
tions créés contre la rage, le croup, etc., ouvrant un champ aux recherches
de ses élèves et successeurs, méi'itant par là d'être considéré comme l'un
des bienfaiteurs de l'huftianité. — Cette accoutumance toutefois ne s'ap-
plique pas à tout, et le czar Pierre le Grand voulut en vain habituer les
enfants do ses matelots à ne boire que de l'eau de mer, tous moururent.
14, Indes Nounelles. — Dénomination sous laquelle on désigna tout d'abord
l'Amérique. — Ici et dans tout le cours des Essais, Montaigne se fait l'écho
des contes.de toute nature, et pour la plupart faux ou exagérés, qui circu-
laient alors sur cette partie du monde, qu'on venait de découvrir (1 192), il
n'y avait pas encore un siècle.
17, Viures. — En certaines circonstances, les choses n'ont plus de prix. —
En 1871, lors du premier siège de Paris, les stocks do denrées alimentaires
s'épuisant de plus en plus, le dernier jour du siège, un poulet se vendait
50 fr.; un lapin, 45 fr.; les œufs, 2 fr. 50 pièce; les haricots, 8 fr. le litre.
Depuis six semaines, on était rationné à 300 gr. de pain fait partie de fa-
rines de toute nature et de toutes qualités, partie de toutes autres subs-
tances plus ou moins comestibles, telles que la paille, etc. ; et, depuis quinze
jours, à 30 gr. de viande de cheval; de chiens, de chats, il n'en existait
plus dans Paris et sa banlieue; le rat d'égout même avait presque complè-
tement disparu.
23, Essayons. — C.-à-d. nous éprouvons. Montaigne emploie souvent le mot
« essayer » dans ce sens : « Comme essayent les voysins des clochiers », dit-
il quelques lignes plus bas.
25, Nil. — La cataracte du Niagara (Amérique du Nord) qui , à la vérité,
passe pour la plus belle et la .plus grande du globe (la largeur du cours
d'eau, qui est de 4 kil. en amont, s'y réduit à un, et la hauteur de la chute
est de 50'"), s'entend à 70 ou 80 kil. de distance; ceux qui, habitant aux en-
virons, sont faits au bruit qu'elle produit, n'y prennent pas garde.
30, CaroUes. — Vieux mot qui signifie <■ danse en rond », et, dans le cas
présent : mouvement de révolution des astres.
33, Soit. — Tout ce passage, depuis l'exemple des « cataractes du Nil », est
imité de Cicéron, Songe de Scipion.
35, Fleurs. — Ce qu'on a appelé plus tard « collet de senteur », espèce de
pourpoint de peau parfumée, à petites basques et sans manches. Coste.
41, Diane. — A la pointe du jour. Vient du latin dies, jour; en espagnol dià;
c'était le temps de la dernière veillée de la sentinelle de nuit et le signal
de l'heure où cette veillée prenait fin, donné par le tambour, le fifre ou la
trompette; aujourd'hui c'est, aux armées, le signal du réveil sonné ou battu
au point du jour.
158,
1, Aue Maria. — On dit aujourd'hui VAngelus. — Cette prière se récitait
déjà chaque soir, au coucher du soleil, depuis le xr siècle, quand Louis NI
introduisit à Paris l'usage de la dire en outre le matin et à midi, et do
sonner les cloches pour en avertir les fidèles.
6, Peu. — DioGÈNE Laerce, III, 38, d'où cette anecdote est tirée, met en scène,
au lieu d'un enfant jouant aux noix, un homme jouant aux dés, ce qui
donne plus de portée à l'observation de Platon.
8, Nourrices. — « Au moral, l'homme est déjà formé à dix ans, il se forme
sur les genoux de sa mère. » Joseph de Maistre.
26, Escutz. — Locution proverbiale dont l'explication est donnée par la phrase
NOTES. LIV. I, CH. XXII. VOI.. I, P.VG. 158. F.3J3
qui précède. Le dicton populaire « Qui vole un œuf, vole un bœul» ti-aduit
la même manière de voir que Montaigne, à laquelle se range également
Racine, estimant que l'un mène à l'autre :
' € Quelques crimes toujours prccèdenl les i;rau<ls crimes. »
• Ainsi que la vertu, le crime a ses dcgrcs. »
31, Duict. — Accoutumé dès mon enfance.
38. Doubles. — Le double était une petite monnaie qui ne valait qu'un dou-
ble denier (un peu moins qu'un centime). Le doublon était une monnaie
d'Espagne, de la valeur d'une double i)istole (environ vingt francs); le dou-
ble doublon représentait par suite environ quarante francs.
160,
8, Donné. — C(ir il r/aii/ne sa vie à se faire voir. Add. des éditions an-
térieures.
13, France. — En 1773, on a vu à Paris un maître d'école liégeois, né sans
bras, qui, avec le pied, écrivait et taillait ses plumes (on faisait alors usage
de i)lumes d'oie). — En 1840, à Paris, un peintre, César Ducornet, égale-
ment sans bras, peignait avec le pied et a exposé des tableaux au salon,
alors qu'à cette époque il fallait notablement plus de talent qu'aujour-
d'hui pour y être admis.
25, Veritatis. — Le texte latin porte pelere, au lieu de quœrcre.
27, Public. — C'est ce qui fait que, même de nos jours, des usages très dis-
semblables, dus aux mœurs et coutumes d'antan, subsistent souvent entre
deux localités parfois très rapprochées, particulièrement si elles sont de
nationalités différentes. Prenons par exemple Londres et Paris pourtant
voisines et en rapports continus :
Londres est individualiste, Paris collectiviste; Londres respire, Paris
étourte; Londres est bâti en briques, Paris en pierres; les maîson de Lon-
dres sont basses, celles de Paris sont hautes; Londres fixe les persiennes à
l'intérieur, Paris à l'extérieur; Londres a des fenêtres à guillotine, Paris
à espagnolette; à Paris les rues ont des arbres, celles de Londres en sont
dépourvues.
A une heure du matin Paris est dans l'obscurité, Londres est inondé de
lumière; Londres a son trousseau de clefs, Paris son concierge; Londres
quitte son lit très tard, Paris se lève de bon matin; Londres s'embrasse sur
la bouche, Paris sur les joues; Londres s'amuse le .samedi après-midi, Pa-
ris travaille; le dimanche, Londres reste chez lui, prie ou boit, Paris
s'amuse et se promène; Londres a des bars intérieurs ou l'on boit du
whisky, Paris a des cafés qui débordent sur les trottoirs et où l'on cause.
Le dimanche, Londres dîne pendant que Paris déjeune. Londres mange
peu de pain, Paris beaucoup; Londres boit de l'eau, Paris du vin.
A Londres la nourriture est mauvaise, à Paris elle est excellente; Lon-
dres fume la pipe, Paris la cigarette.
Londres est triste. Paris est gai; Londres voit le brouillard, Paris le soleil;
Londres est toujours pressé, Paris jamais; Londres est commerçant, Paris
industriel; Londres a peu de soldats, Paris en a trop; à Londres les sol-
dats portent la tunique rouge et le pantalon noir, à Paris ils portent la
tunique bleue et le pantalon rouge. A Londi-es la Tamise est un bras de
mer, à Paris la Seine est une simple i-ivière; à Londres la Tamise est
toujours sale, à Paris la Seine est souvent propre; à Londres, dans les
piscines ou dans la rivière, on se baigne souvent nu, à Paris toujours en
caleçon.
A Londres les cochers conduisent à gauche, à Paris à droite. L'automé-
don à Londres prend place sur le derrière de son véhicule, celui de Paris
sur le devant. A Londres le « hooligan » se bat à coups de poing, à Paris
r - apache » se bat à coups de couteau et de revolver. A Londres le mont-
de-piété s'appelle « mon oncle », et à Paris « ma tante ». Londres a le sys-
tème duodécimal, Paris a le système décimal. La fenmie à Londres aime
F.314 ESSAIS DK MONTAIGNE.
la politique, à Paris elle s'en désintéresse. A Londres c'est le père qui lève
l't couche ses enfants, à Paris c'est la mère.
Londi'es ferme ses théâtres le dimanche, Paris les laisse ouverts. A Lon-
dres le derby est un mercredi, à Paris lo grand prix est un dimanche.
A Londres la femme salue la première, à Paris c'est l'homme qui com-
mence. A Paris le mariage donne à la femme la liberté, à Londres le ma-
riage la lui enlève. A Londres les clergymen se marient, à Paris les prêtres
se contentent de célébrer les mariages des autres.
Et cette énumération humouristiquo jjourrait être notablement allongée.
;iO, Honorer. — Dans le midi de la France, notamment en Périgord, on se
dit • Adieu » quand on se rencontre ou qu'on arrive en visite, ce qui ail-
leurs ne se dit généralement que lorsqu'on se sépare.
162.
Ki, Sarbatane. — On dit aujourd'hui sarbacane : long bâton pei'cé d'un
bout à l'autre avec lequel on projette, en soufflant, de petites balles contre
les oiseaux ; par extension, parler par sarbatane, c'est parler par personnes
interposées.
18, Soigneusement. — En Guinée, à la Côte-d'Or notamment, pays qui, il est
vrai, sont sous l'équateur, les deux sexes vont complètement nus jusqu'à
l'âge de neuf à dix ans. Dans plusieurs cantons, les filles n'y portent même
pas de pagne (morceau d'étolïe dont les nègres et les Indiens se couvrent
de la ceinture aux genoux), jusqu'au jour de leur mariage: celles qui ne
trouvent pas de maris sont aussi nues à trente ans qu'à quinze. Payen.
21, Poste. — A leur gré, à leur fantaisie, selon leur goût. — Dans l'île de
Chypre, dit Justin, c'était une coutume d'envoyer sur le bord de la mer, à
certains jours fixes, les jeunes filles nubiles, sans dot, en gagner une, en
sacrifiant à Vénus leur virginité; cet usage, d'après Valère Maxime, aurait
également existé à Carthage, et aussi chez les Lydiens et les Babyloniens,
au dire d'Hérodote.
28, Faire. — Dans nombre de pays d'Europe, au moyen âge, princes, sei-
gneurs et même abbés et chanoines, entre autres les chanoines de Lyon,
avaient, sur leurs vassaux, le droit de se substituer au marié, la première
nuit des noces, droit dénommé « Jus luxanda cosù {droit d'effraction) ». Ce,
droit existait notamment en Ecosse, où il avait été établi par le roi Eve-
nus III, au début de l'ère chrétienne; « de telle sorte, dit Blchanax, que
le roi ne ménageant pas plus la chasteté des femmes de ses nobles que
ceux-ci celle des femmes do ses serfs, les uns et les autres se trouvaient à
cet égard sur un piedéd'égalité absolue »; il y subsistait encore dans la
deuxième moitié du xi' siècle, époque à laquelle Malcolm III, aux pieuses
sollicitations de sa femme Marguerite, l'abolit et lui substitua une rede-
vance d'un demi-marc d'argent qui fut payée jusqu'au xvr siècle. — Aux
îles Canaries, on offrait aux chefs les prémices de toutes les vierges qui se
mariaient et celles qui se trouvaient acceptées, en étaient très honorées.
32, Guerre. — J.-J. Rousseau, dans une lettre à d'Alembert, n'émet-il pas
l'idée d'envoyer les femmes à la guerre et de les faire entrer dans les con-
tingents à fournir aux armées, dans la même proportion que les hommes
dont le nombre serait de la sorte réduit de moitié?
164.
5, Vieillarts. — Coutume de certains peuples de Thrace.
6, Femmes. — Au moyen âge, en France, on faisait usage de couches et de
couchettes. Les couchettes étaient des lits de proportions égales aux nôtres
à deux places; les couches avaient dix à onze pieds (3°" 1/2 environ), dans
les deux sens, sorte de lits de camp où l'on couchait sur deux rangs, les
pieds de chaque rang vers le milieu du lit; on en trouvait encore de la
sorte, il y a un siècle, dans quelques vieux châteaux de province. Le châ-
telain, sa dame, ses frères d'armes, ses hôtes, ses cliiens de chasse y cou-
chaient tous ensemble. Souvent, en outre, on faisait coucher ses serviteurs
dans ses chambres et cela encore aux xvr et xyii' siècles ; c'est ainsi que le
soi»' de la Saint-Barthélémy, Charles IX, qui voulait sauver Coligny, le
NOTES. LIV. I, CH. XXll. VOL. I, PAG. 164. F.315
garda longtemps au Louvre, et comme il s'en allait, cherchant à le retenir,
lui dit : - Reste donc ce soir, tu coucheras avec mon valet de chambre. »
— « Ma foi non, il est trop tard, je m'en vais, » reprit Coligny.
10, Besoing. — Les Cosaques Zaporogues, qui habitaient les îles du Dnieper,
n'admettaient parmi eux aucune femme; pour se reproduire, ils usaient
de captives qu'ils reléguaient hors de leur camp; ils en élevaient les en-
fants mâles, et chassaient les filles. Payen. — En Mongolie, se trouve une
ville sans femmes « Maïtmachin », dont le nom signifie marclié; elle compte
70.000 habitants, est située sur le chemin des caravanes, sur les confins de
la Sibérie, et n'est peuplée que de commerçants; le gouvernement chinois
' en interdit l'accès aux femmes, pour empêcher ses sujets de s'établir à
peu de distance de la frontière. G" Niox.
10, Oyseaux. — Chez les (luèbi-es ou Parsis, dans les Indes, les cimetières sont
des tours à ciel ouvert de douze à quinze pieds ( t à 5'" de haut), sans ou-
vertures latérales; la partie supérieure est garnie de barres de fer qui for-
ment une sorte de grille liorizontale sur laquelle on place les corps pour y
servir de pâture aux oiseaux de proie, jusqu'à ce que les os tombent d'eux-
mêmes sur lo sol, où ils s'accumulent, constituant un véritable charnier.
"21. Roy. — 11 en est, encore aujourd'hui, de même dans les mosquées; on
n'y entre qu'après avoir ùté ses sandales, si on est musulman, ou chaussé
de baboj^hes par-dessus ses chaussures, si on est chrétien et qu'on soit
autorisé à y pénétrer. Dans les synagogues, les Juifs ne se découvrent pas,
et il est malséant de le faire. A Rome, ceux auxquels il est accordé d'assister
<à la messe du Pape, à la chapelle Sixtine, le font les hqmmes en habit, les
fennnes en mantille, les uns et les autres sans gants.
'22, Eunuques. — De sOvtî, lit, et êxw, je garde. Nom donné aux hommes
auxquels on a ùté la faculté d'engendrer et dont on se sert en Orient pour
garder les femmes dans les sérails; cette opération rend l'homme imberbe,
modifie sa voix, lui donne des allures féminines et généralement porte à
l'embonpoint. Elle se pratique également sur la femme, en llindoustan, en
vue du même i-ùle, et s'effectue en piquant les ovaires avec une aiguille
trempée dans un liquide caustique, ce qui amène l'ati'ophie de cet organe
et aussi des transformations physiques, dit-on, qui font que ces femmes
ressemblent à des hommes.
23, A dire. — Vieille locution qui subsiste encore dans le midi et signifie : de
moins, manquer, faii-e défaut; de là vient le mot « adiré », une pièce adirée,
c.-à.-d. perdue, employé dans le langage du palais. V. N. 111,230 : Adiré.
21, Démons. — Se rendre les démons favorablet. Accointer, c'est rechercher
quelqu'un pour se le concilier, le gagner à soi.
2.J, Lyon. — Les Hottentots (Afrique australe) adoraient le lion.
31, Leze-maiesté. — Cet usage existait en Pologne, et aussi en d'autres
pays du Nord.
166,
1, Police. — Du gouvernement; cette acception du mot « police » est presque
constante dans les Essais.
9, Eftroy. — Cette facilité dans l'accouchement n'est pas rare, chez nous,
parmi les femmes de la campagne ; elle a été signalée comme habituelle
chez les négresses et aussi chez les indiennes de l'Amérique du Nord.
10, Greues. — Des jambières ou armures de jambe.
15, Accroupis. — Dans les pays mdsulmans, les deux sexes généralement
urinent accroupis; en Guinée, dit Suidas, il est défendu aux hommes, sous
peine d'amende, d'uriner debout.
20, Douze. — Les Ilurons, les Hottentots passent pour nourrir les enfants au
sein pendant quatre ou cinq ans; les femmes sauvages de la Louisiane,
jusqu'à six ou sept ans; les Mexicaines, plus encore. Suivant Amlsdse.n,
explorateur du pôle arctique de 1900 à 1903, chez les Esquimaux les fem-
mes donneraient le sein à leurs enfants jusqu'à dix ans.
25, Senteur. — Il en était ainsi chez les Mexicains, d'après Gomara; les Chi-
nois, dit-on, sont également peu délicats sous ce rapport.
F.316 ESSAIS DE MONTAIGNE.
30, Ongle. — En Chine, les lettrés et les docteurs, surtout ceux qui sont de
basse extraction, ne se coupent jamais les ongles ; ils affectent de les laisser
croiti'e jusqu'à la longueur d'un pouce. Du Halde. — Les négresses de la
Cùte-d'Or les laissent croître jusqu'à les avoir quelquefois aussi longs
qu'une phalange ; elles les entretiennent fort propres et s'en servent, le cas
échéant, pour prendre de la poudre d'or. Aktls.
82, Gentillesse. — De nos jours, certains font de même, laissant croître par
coquetterie, par snobisnie pour pailer l'argot <le nos gens à la mode, d'un
centimètre à un centimètre et demi l'ongle du petit doigt de la main droite.
38, Fils. — Au Gabon, la mère reçoit ouvertement les cai-esses de son fils, et
les filles celles de leurs pères. Artus.
168,
i, -Humaine. — Les Munbos, tribu de l'Afrique équatoriale, mangeaient de la
chair humaine. Fakio. — Les Anzikos, autre tribu africaine, tuaient et man-
geaient tous les prisonniers qu'ils faisaient à la guerre; ils se mangeaient
même les uns les autres, sans en excepter leurs propres parents; la chair
humaine se vendait sur leurs marchés, comme le bœuf dans les boucheries
d'Europe. Picafetta.
3, Aage. — « Que la lie de l'esprit et du corps est humiliante à supporter;
j'aimerais les pajs où par amitié on tue ses vieux parents, si cela pouvait
s'accommoder avec le Christianisme • (M"" de Sévigné). ,
5, Tuez. — A Sparte notamment.
7. Seruir. — Lycurgue, à Sparte, avait admis qu'un mari ayant des en-
fants, prêtât sa femme à un autre qui n'en pouvait avoir de la sienne.
9, Masles. — On lit dans Hérodote, à propos des Guidanes, peuplade de
Libye : « On dit que leurs femmes portent chacune autour de la cheville
du pied autant de bandes de peau qu'elles ont connu d'hommes; celle qui
en a davantage est la plus estimée, comme ayant été aimée d'un plus grand
nombre. • — Hérodote, du reste, dit bien d'autres choses : « Dans la Baby-
lonie, les mariages se font à la criée : Une fois l'an, dans chaque bourgade,
toutes les filles nubiles sont réunies et on en forme deux groupes, les belles
et celles qui ne le sont pas. Les premières sont alors mises aux enchères,
en commençant par la plus belle; on passe ensuite. aux autres en commen-
çant par la plus laide. Les prix d'adjudication des filles du premier groupe
sont payés par les acheteure ; pour celles du second, ils le sont aux acqué-
reurs sur l'argent qui vient d'être versé pour celles-là, qui sert de la sorte à
constituer la dot de celles-ci.
11, Main. — Les Amazones, peuplade fabuleuse de la Scythie, qui se perpé-
tuaient, dit-on, par un commerce passager avec les habitants des pays
voisins, et exposaient leurs enfants mâles. — En Bohème, au vm° siècle,
il a existé de véritables Amazones qui, pendant plusieurs années, répandi-
rent la terreur dans la région, et qui ne purent être exterminées qu'à
grand'peine.
12, Et ce que. — Add. des éd. ant. h 88 : la raison et.
15, Festoyée. — Les Thraces, d'après Vai.èke Maxime; on ne peut que louer,
dit cet auteur, la sagesse de ce peuple qui accueille par des pleurs la nais-
.sance de l'homme, et célèbre ses funérailles par des réjouissances, ayant,
sans les leçons des philosophes, deviné notre véritable condition. — Les édi-
tions antérieures présentent la variante ci-après : L'horreur de la mort esloit
mesprisée, mais l'heure de sa veniie, à l'endroit des plus chères personnes qu'on
eut, festoyée auec grande allégresse : et quant à la douleur, 7wus en sçauons
d'autres où les enfans de sept ans souffroyent pour l'essay de leur constance,
à estre foëltez iusques à la mort sans changer de démarche ny de visage.
17, Visage. — A Lacédémone, d'après Plutarque.
21, Nasitort. — Nom du cresson alénois (à feuilles découpées).
21, Eau. — En Perse, au temps de Cyrus, suivant Xénophox.
22, Cio. — Auj. Céos; les habitants de cette île étaient réputés par leur mo-
ralité, autant que ceux de Chio (île de l'Archipel, auj. Scio) passaient pour
être de mœurs dissolues.
NOTES. LIV. I, Cil. XXII. VOL. I, PAG. 168. F.317
23, Honneur. — Ces nombreux exemples, dont pour quelques-uns nous avons
indiqué la source, sont empruntés- d'IlKRODOTE, de Xénophon, de PixrAKQUEy
de Sextls Empuucus, de Vai.kke Maxime et des ouvrages publiés alors sur
l'Asie, l'Afrique et l'Amérique.
2G, Monde. — Pindare dit cela de la loi (v6(aoç) ; mais Hérodote, III, 38, en
citant ses paroles, donne à vô(xo; le sens de coutume. — On en dit autant,
et avec non moins de raison, de l'opinion.
34, Famille. - Les Hottentots, une l'ois reçus hommes en céi-émonie publi-
que, peuvent, sans scandale, maltraiter et battre leur mère. Koi.ba.
31, Avislote. — .Matale à Xicumm/ue, VII, G.
170,
I, Coustume. — On ne saurait disconvenir de celte as.sertion. Le milieu am-
biant, la mentalité du mSment exercent une action pi-épondi'rante sur la
façon dont on envisage toutes choses. A la guerre, l'homme le moins
rapace ti'ouve parfois tout naturel de s'emparer du bien d'autrui; le plus
- sensible, de tuer sans nécessité. Les moins cruels, les |)lus délicats finissent
par prendre goût aux courses de taureaux et voient sans dégoût éven-
trer les malheureux chevaux sans défense qu'on y sacrifie. Tout Rome
assistait avec ti'ansports aux combats de gladiateurs. Ne voit-on pas jour-
nellement, dans les pays non civilisés, les gens de nations tenant la tète
de la civilisation, qui y résident, commettre ou voir exercer sans en êti-e
révoltés leà pires cruautés sur les indigènes? Sous la Terreur, familia-
risé avec la guillotine, on n'y prêtait plus attention ; on n'était plus guère
émotionné par le passage des charrettes de condamnés; parmi les victimes
elles-mêmes destinées à y monter le lendemain, la plupart n'en étaient
pas autrement troublées, pas plus qu'en temps d'épidémie, oii la mort est
l'affaire de quelques heures, on ne se tourmente outre mesure. Il en est
de même a fortiori de la coutume et ce sont bien en réalité' les lois de la
société, du pays et du moment, c'est-à-dire les mœurs, qui créent les no-
tions éminemment relatives et variables du bien et du mal, et font que
tels on tels actes sont aujourd'hui vice ou vertu, caractère qu'ils n'avaient
pas hier, au moins au même degré et qui se modifiera probablement de-
main.
4, Crète. — Valère Maxime, VIL
33, Maistrise. — Le cas est fréquent. Il n'en est guère de plus caractéris-
tique dans les temps modernes que celui des Anglais mettant à mort leur
roi Charles I" parce qu'il voulait, disaient-ils, attenter à leur liberté et à leurs
privilèges et qui se rangèrent, au même moment, aux lois autrement dures
et tyranniques de Cromwell, dont ils portèrent le joug patiemment et,
après lui, supportèrent sans se plaindre celui presque aussi despotique de
Charles II. — Chez nous, la période de Louis XVI, la Révolution, Napo-
léon, Louis XVIII, nous représentent quelque chose d'analogue. En 1815,
nous nous sommes retrouvés presque exactement au même point qu'en 1789,
après être passés par les phases les plus aiguës: et ce n'est qu'en 1830 qu'un
nouvel à-coup d(? protestation s'est produit. Tout régime succédant à un
autre emporté par le flot populaire, peut, sous une autre forme, reprendre
les mêmes errements, avec grande chance de ne pas voir se renouveler
d'un certain temps semblable manifestation; toutefois, moins que parle
passé ces à-coups interrompent l'évolution de l'humanité : le sufl'rage uni-
versel, les progrès de l'instructioi'i, l'émancipation des masses de plus en
plus avides de libéralisme, de socialisme, l'instantanéité de communica-
tions, la rapidité et la facilité des transports, l'action continue et pénétrante
de la presse, font que chacun a une part beaucoup plus efl'ective, bien
qu'encore souvent inconsciente et passive, aux questions d'ordre politique
dont la généralité se désintéressait jadis. A l'autorité d'un seul, s'est subs-
tituée celle non moins intolérable, ni plus stable, des groupes; les trans-
formations s'opèrent par la force môme des choses, mais sous le couvert
de la légalité; elles sont peut-être moins apparentes, mais tout aussi
réelles que par le passé et acheminent fatalement aux mômes revirements.
F.318 ESSAIS DE MONTAIGNE.
35, Ecosse. — Les Ilighlaiidei's. ou Montagnards, ainsi qu'on les appelle au-
joufd'liui.
39. Eux-mesmes. — Ceci est tiré d'IIÉRODOTE, III, 38. <• Chez les Padéens,
dit-il, peuplade de l'Inde, ses plus proches parents et ses meilleurs amis
tuent quiconque tombe malade, donnant pour raison que la maladie le
ferait maigrir et que sa chair serait moins bonne ; il a beau nier qu'il soit
malade, ils l'égorgent impitoj'ablement et se régalent de sa chair. Ils tuent
de même et mangent ceux arrivés à un grand âge; mais il s'en trouve
peu dans ce cas, en raison des risques d'un sort semblable que chacun
court dès qu'il est malade. V. N. II, 376 : Coustume.
172.
1, Horreur. — Nous voyons se reproduire ce même fait pour la mémo
cause, c'est-à-dire la force de l'habitude, et' aussi quelque peu à la répro-
bation dont, on ne sait pourquoi, la frappe l'Église catholique, qu'il faut
attribuer le peu de progrès que fait en France la crémation, en dépit des
appréhensions qu'inspirent les inhumations précipitées. Ces appréhensions
sont cependant des pJus justifiées; en Angleterre, rien que par le fait des
exluimations pratiquées de 1900 à 1905, dans les cimetières, il aurait été
relevé que 149 personnes ainsi exhumées avaient été enterrées vivantes. —
La crémation est aujourd'hui admise à peu près partout en Europe, mais
pourtant encore peu en faveur surtout par les raisons sus-indiquées. En
France, il existe des fours crématoires à Paris, Lyon, Rouen, Reims:
d'autres sont en construction ou en projet à Marseille, Dijon, Nîmes. Nice.
A Paris, de 1889 à la fin de 1905, 3.825 incinérations ont été effectuées; en
cette dernière année, il y en a eu 311. La durée de l'opération est d'une
heure environ, la redevance de 50 fr., le poids des cendres recueillies à
peu près le douzième de celui des corps incinérés.
15, Platon. — Lois, VIII, 6.
10, Preposteres. — A rebours, à contre-sens; par extension : autrement
qu'il ne faut, contre nature.
23, Entants. — Un oracle avait prédit à Thyeste, frèi-e du roi d'Argos, qu'il
aurait un fils de sa propre fille; pour éviter ce crime, Thyeste, à la nais-
sance de celle-ci, la fit élever loin de lui. Dans la suite, l'ayant rencontrée
dans un bois sans la connaître, il lui fit violence et la rendit mère. — Une
prédiction avait été faite à Laïus, roi de Thèbes, que l'enfant qu'il atten-
dait de Jocaste, sa femme, lui donnerait la mort. Pour échapper à ce sort,
dès la naissance de l'enfant, il le fit exposer. Un berger de Corinthe l'ayant
trouvé, le porta à la reine, qui le nomma Œdipe et le fit élever. Devenu
grand, Œdipe consulta l'oracle sur sa destinée et apprit qu'il serait le
meurtrier de son père et époux de sa mère. Se croyant fils de la reine
de Corinthe, pour déjouer la fatalité il s'expatria. Chemin faisant, il fit
rencontre de Laïus, se prit de querelle avec lui et le tua. Quelque temps
après, il arriva à Thèbes, et trouva la ville désolée par le Sphinx; il le vain-
quit et, pour prix de sa victoire, obtint la main de Jocaste, promise à qui
délivrerait la ville de ce monstre, et réalisa ainsi, sans le savoir, la prédic-
tion dont il avait été l'objet. — Macareus eut un fils de sa propre sœur:
leur père, instruit de cet inceste, envoya à sa fille une épée avec laquelle
elle se tua; son frère échappa par la fuite au châtiment qui l'attendait, et
se réfugia à Delphes, où il fut admis au nombre des prêtres d'Apollon.
Myth.
32, Chrysippus. — Sextus Empiricus, Pyrrh. /lypoL, I, 1 1.
35, Preiudice. — Signifie ici préjugé.
174,
3, Etat. — Certains ont pensé voir, nonobstant ce qui suit, une allusion aux
préjugés religieux; il est hors de doute que telle na pas été l'intention de
Montaigne qui, de parti pris, s'en tient sans discussion aux enseignements
■ de l'Église.
G, Oncques. — Le droit romain qui était d'application courante et qui alors
n'existait écrit qu'en latin.
NOTES. LIV. f, Cli. XXII. VOL. I, PAG. 174. F.319
(H, Langue. — Au moyen âge, il était fait usage du latin pour la rédaction
des actes judiciaires et notariés. En 1580, une ordonnance de François I",
datée de Villers-Cotterets, prescrivit que dorénavant tout acte, etc. serait
" prononcé, enregistré et délivré aux parties en leur langue maternelle. De-
puis, cette langue s'est transformée, mais les grimoires de la Basoche,
continuant à être écrits dans le langage d'il y a quatre siècles, sont rede-
venus presque incompréhensibles pour la génération actuelle en- attendant
qu'une nouvelle ordonnance intervienne.
9, Isocrates. — Discoui'n à Nicoclès.
17, Impériales. — Peut-être VVaifre ou Hunoid, ducs d'Aquitaine à l'époque
de Charlemagne... Paul Ému-e, historien latin du xv siècle, dit: « Charlema-
gne projetait de donner une nouvelle législation à ses peuples, en commen-
çant par ceux de France; un de ceux, gascon, qui l'avaient suivi en Espa-
gne, se prononça et devant l'opposition des conseils tenus à cet effet, ce
projet fut abandonné. •
19, Vende. — La vénalité des charges de juge, introduite en France en 152G,
sous François I", par le chancelier Duprat, comme moyen de subA'enir à
la pénurie du Trésor, a subsisté jusqu'à la Révolution. — Sans demander
que ces errements soient rétablis, les juges s'en trouvaient incontestable-
ment plus indépendants, et il serait à désirer aujourd'hui que par mode de
recrutement et d'avancement, ils fussent à nouveau affranchis des pouvoirs
publics et des pressions que trop souvent ceux-ci exercent sur eux, cher-
chent à exercer ou passent pour le faire; l'inamovibilité qui leur avait été
donnée comme garantie est insuffisante à cet effet, d'autant qu'on ne la
respecte même plus. Il faudrait que, du haut en bas de la hiérarchie, le
corps judiciaire se recrutât exclusivement par lui-même dans des conditions
déterminées par la loi ; peut-être alors cours et tribunaux en reviendraient,
comme jadis, à ne rendre que des arrêts et non plus des services, alors que
les parlements tenaient tête à l'occasion à l'autorité royale et qu'en dépit
de la prison et de l'exil, ils se refusaient à l'enregistrement de ses édits
quand ils estiTnaient qu'il y avait abus ou déni de justice.
'20, Payer. — Nous n'en sommes plus tout à fait là, mais pas loin. Dans les
procès civils, les deux parties ne sont-elles pas condamnées fréquemment
aux frais, celle qui gagne comme celle qui perd, la première ayant simple-
ment recours sur l'autre? — Ce n'est pas là du reste le seul grief que dans
les temps actuels on articule contre la magistrature, en voici quelques-uns :
L'omnipotence, le sans-gêne et l'arbitraire des juges d'instruction qui
prolongent la détention préventive au delà de toute raison; n'a-t-on pas cité,
en l'an 1906, un honorable négociant, accusé d'avoir soustrait la valeur
d'une lettre chargée, détenu ainsi pendant treize mois, sans qu'il fût pro-
cédé à l'examen de l'affaire?
La lenteur avec laquelle se jugent les affaires civiles. C'est ainsi que, dans
le ressort de Paris, de simples procès en séparation attendent de longs mois
avant d'être appelés. A cela on objecte le grand nombre d'affaires; mais si,
quand l'encombrement le comporte, les audiences commençaient plus tôt
et finissaient plus tard, si elles avaient lieu tous les jours au lieu de trois
fois par semaine, si les tribunaux ne prenaient pas chaque année de si
longues vacapces et même s'en passaient quand le service l'exige, les re-
tards seraient infiniment moins considérables. On pourrait encoie aug-
menter leur nombre, ou mieux lea réduire à un juge unique, comme en
Angleterre, aux États-Unis, ce qui permettrait avec le même personnel do
faire triple besogne et aurait en outre l'immense avantage de substituer
une responsabilité individuelle à une trinité anonyme, d'où une plus grande
attention apportée à l'étude des affaires et plus d'équité dans le jugement
à intervenir.
Les ajournements fréquents à huit, quinze jours pour le prononcé du
jugement dans les affaires correctionnelles, ce qui prolonge les angoisses
des inculpés et prête à ce que dans l'intervalle les juges prennent langue au
dehors; le jugement devrait toujours être rendu séance tenante comme aux
F.320 ESSAIS DE MONTAIGNE.
assises, et seule sa rédaction ôtre ajournée quand cela est nécessité par les
considérants à exposer.
De ne pas cliercher à s'éclairer suffisamment et de trop s'en rapporter à
la parole des divers agents qui portent l'accusation, alors que leurs téflioi-
j?nages sont contestés, sous prétexte qu'ils sont assermentés, ce n'est pas
toujours une garantie suffisante.
Enfin d'avoir intérêt a la multiplication des affaires, ce qui porte à exer-
cer des poursuites i)our des vétilles qui n'en valent jias la peine, pour don-
ner plus d'im])ortance au ressort.
27, Contraires. — Une distinction analogue, non moins farouche, comme dit
Montaigne, subsiste, suivant que le dommage causé à autrui, l'est par un
fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions, ou partout autre. Sans parler
des pouvoirs exorbitants dévolus en France, par le code lui-même, aux
préfets qui ont qualité pour pratiquer des actes qui devraient être l'apa-
nage exclusif de l'autorité judiciaire, dans toutes les branches de l'adminis-
tration, les abus, quels qu'ils soient, échappent à toute répression. — Outre
que ceux qui les commettent ne font souvent qu'appliquer les instructions
de leurs supérieui-s, les unsetlesauti-es n'ont à répondre en dernier ressort
de leurs faits et gestes que vis-à-vis du Ministi-e dont ils i-elèvent, lequel est
toujours prêt à les couvrir de sa responsabilité, chose illusoire entre toutes.
Seule la justice, unique pour tous, devrait connaître de ces abus et des
dommages en résultant, comme de tous autres; la tâche des fonctionnaires
en deviendrait assurément iihis difficile et plus délicate, mais en somme
ils sont faits pour le public, et devant une responsabilité effective, ils s'ob-
servei'aient davantage.
30, Vertu. — La vertu militaire, le courage.
176,
1, Partage. — .lusqu'au xvn" siècle, robe longue s'est dit de la magistrature
et du clergé, robe courte de l'armée.
11, Commun. — Dans le ch. 111 du liv. 111, Montaigne revient sur ces idées
et les développe.
16, Receûes. — Saint Augustin était de cet avis lorsqu'il répondait à un prê-
tre qui lui demandait s'il valait mieux suivre la liturgie de Rome ou celle
de Milan : •< A Rome, suivez la liturgie de Rome; à Milan, celle de Milan. »
Par contre, La Bruyèke dit à ce sujet : « Il faut faire comme les autres, »
maxime suspecte qui signifie presque toujours : « Il faut mal faire », dès
qu'elle s'applique au delà de ces choses purement extérieures, qui n'ont point
de suites et dépendent de l'usage, de la mode ou de la bienséance. —
■< Différence complète au dedans, dit Sénèque à ce même propos, mais res-
semblance entière au dehors. » — « Pour ne pas rompre l'harmonie, le
sage doit parler la langue des fous. « Abbé des Fontaines.
23, Est. — En disant que la première loi est de se conformer à celles du pajs
dans lequel on se trouve, Montaigne l'entend sous tous rapports, sous ce-
lui des usages tout aussi bien que des lois proprement dites; de fait, pour
ne parler que de l'hygiène, de l'alimentation, de l'habillement, la plupart
de ceux qui, en pays étranger, ont voulu faire mieux que les indigènes,
ont eu à s'en repentir.
26, Remuer. — S'il en était ainsi, toute réforme, tout progrès seraient impos-
sibles et les abus se perpétueraient. 11 est des cas où l'expérience révèle des
inconvénients sérieux pour les intérêts généraux, à s'en tenir aux anciennes
pratiques. Quand le fait est bien démontré, il n'y a pas d'hésitation à avoir :
ce qui existe, esta modifier, sans avoir égard aux intérêts de moindre impor-
tance qui s'en trouveront lésés; car, comme le disait Caton, il n'y a aucune
bonne loi qui soit avantageuse à tout le monde. 11 est incontestable, en outre,
qu'il y a des circonstances où la nécessité presse au point qu'il faut que les
lois lui fassent place. Mais de là à tout bouleverser, comme cela avait lieu à
l'époque où écrivait Montaigne, et ainsi que cela existe, de parti pris, en ce
moment en France, à l'effet d'y introduire le socialisme d'État, il y a un
abîme.
NOTES. LIV. I, CIT. XXH. VOL. I, PAG. 17G. P.32t
29, Tburiens. — Cliarpndas. Diodore de Sicile, XII, 24.
34, Ordonnances. — Lycurgue qui, après avoir donné à sa patrie une légis-
lation à laquelle longtemps elle dut sa gloire et sa force, fit jurer à ses con-
citoyens de n'y rien changer pendant son absence, puis entreprit un long
voyage duquel, de propos délibéré, il ne revint jamais. Plutarque, Lycur-
gue, 22.
178,
1, Façon. — Phrynis ajouta deux cordes à la citiiare qui n'en avait alors
que sept. Aristophane, dans sa comédie des Nuées, lui reproche d'avoir sub-
stitué à la musique noble et mâle de ce temps, des aire mous et efféminés.
'.). Marseille. — Cette épée, suivant Valère Maxime, II, G, 7, avait servi à
trancher la tète aux criminels; elle existait depuis la fondation de la ville,
était rongée de rouille et presque hors de service.
7, Dommageables.— Que dirait aujourd'hui Montaigne, en voyant l'action
inconsciente des foules se substituant de plus en 2)lus dans le domaine so-
cial et politique à l'activité consciente des individus? « nouuelleté », Tune
des caractéristiques principales de l'âge actuel, absolument en dehors de
celles auxquelles il fait allusion, et qui, nous conduisant insensiblement au
socialisme, dépasse si fort ses prévisions les plus pessimistes.
8, Ans. — La réforme, qui avait été introduite en France vingt-cinq ou trente
ans auparavant, comme le porte l'éd. de 88.
11, Nez. — S'en prendre au nez; ne pouvoir s'en prendre qu'à soi. Cette lo-
cution viendrait, dit-on, d'une ancienne coutume qui obligeait celui qui
avait accusé quelqu'un à faux, à lui faire réparation publique, en se tenant
soi-même le nez.
20, Fons. — Charles I"' d'Angleterre, Louis XVI et en général la chute de
tous les souverains victimes de révolution, témoignent de la justesse de cette
assertion. — Chez ceux auxquels l'ambition fait concevoir l'idée de dépos-
séder un roi pour prendre sa place, c'est plutôt, d'après l'auteur même des
Essais, l'inverse qui se produit : « Michel Montaigne me dit un jour, rap-
porte d'Aubigxé dans son Histoire umverselle, que les prétendants à la cou-
ronne trouvent, jusqu'au marchepied du trône, tous les échelons petits et
aisés, mais que le dernier ne peut se franchir, en raison de sa hauteur. >•
■■ Cromwell lui-même, ajoute d'Aubigné, n'osa se parer du titre de roi. ••
Nombreux en effet sont ceux qui, comme les maires du palais, à la fin de la
race mérovingienne, s'étant emparés du pouvoir, l'ont exercé en demeu-
rant au second plan. Napoléon, dans les temps modernes, a montré moins
d'hésitation.
22, Mal. —■ Allusion aux excès des catholiques tombant dans la rébellion, à
l'imitation des protestants.
25. Heureusement. — Facilement, sans peine.
29. Tbucydides. — Liv. III, 52.
35, Est. — TiTE-LivE, XXXIV, 54, dit cela à propos d'un règlement nouveau
prescrivant que, dans certains spectacles, le peuple devait être séparé des
Sénateurs, qui jusqu'alors avaient été assis avec lui sans aucune distinc-
tion, et il ajoute : ■< Les hommes aiment mieux qu'on s'en tienne aux an-
ciennes pratiques, si l'on en excepte celles où l'expérience fait voir des
inconvénients palpables. »
180, I
13, Polluantur. — En 301. Le peuple romain réclamait que des pontifes et
des augures qui étaient à nommer, fussent pris parmi les plébéiens, ce à
quoi le Sénat se refusait, ne voulant pas abandonner le privilège de rem-
plir les fonctions sacerdotales, les seules auxquelles le peuple n'eût pas
accès à cette époque. Tite-Live, X, 6.
18, Propre. — Hérodote, VIII, 36.
25, Politique. — Il est assez curieux de voir ici Montaigne donner le pas aii
pouvoir temporel sur le spirituel, et mettre l'autorité politique quelle qu'elle
soit, au-dessus de l'autorité ecclésiastique; il y a là en germe la doctrine de
l'église gallicane.
ESSAIS de MONTAIGNE. — T. IV. 21
P.322 ESSAIS DE MONTAIGNE.
182.
l, Isocrates. — Discouts à Nicoclès.
i, Party. —Le passage qui suit, « car qui... sequor (lig. 2 à 30)», ne figure
pas sur la majeure partie des exemplaires de l'édition originale de 1595; il
a été ajouté seulement sur les derniers tirés, M"' de Gournay s'étant pro-
bablement aperçue de l'omission en cours de tirage,
184,
13, Inequalité. — Il est certain qu'un homme placé dans une circonstance
critique se trouve dans le cas du chien de La Fontaine qui porte à son cou
le dîner do son maître, qui après l'avoir défendu de son mieux, trop faible
contre ceux qui l'attaquaient, voulut au moins en avoir sa part et fut le
premier à prendre un morceau; du reste c'est toujours l'homme que peint
notre fabuliste, quand il fait parler ou agir ses animaux.
24, Remuer. — Tiberius Gracchus proposait aux Patriciens de se dessaisir
en faveur des citoyens pauvres, et moyennant indemnité, de terres qu'ils
détenaient contrairement à la loi; Octavius son collègue au tribunat, usant
de son droit, mit opposition à cette proposition, ce qui conduisit T. Grac-
chus à en formuler de plus dures, accentua la division entre l'oligarchie et
le peuple et amena les désordres qui conduisirent à la guerre civile entre
Marins et Sylla et à la dictature de ce dernier. — Caton le Jeune, par son
opposition à la loi qui rappelait à Rome Pompée et son armée, et cela par
crainte del'inlluence que celui-ci en retirerait, le porta à s'unir à César, ce
qui les rendit tout-puissants, puis rivaux, et engendra entre eux la guerre
civile qui mit fin à la République romaine. — De nos jours, en France, la
résistance du Pape Pie X à la constitution des associations cultuelles de la loi
de séparation de 1905 de l'Église et de l'État, que beaucoup de bons esprits
et excellents catholiques de France, y compris nombre de membres de tous
rangs du clergé, estimaient acceptable, donna lieu en 1906 à une nouvelle
loi qui enleva au clergé les immeubles dont la jouissance lui avait été con-
servée et lui fit une situation beaucoup plus précaire, dont en ces temps
d'indifférence religieuse il est plus difficile de prévoir l'issue.
28, Veulent. — « Il faut vouloir ce qu'on ne peut empêcher », dit le proverbe.
29, Heures. — Après la bataille de Leuctres, 371, qui enleva à tout jamais
aux Spartiates la prééminence en Grèce, le nombre des fuyards fut consi-
dérable, et les lois de Lacédémone les notaient d'infamie; devant l'inconvé-
nient d'avoir un aussi grand nombre de citoyens frappés d'incapacité, alors
qu'on avait tant besoin de soldats, Agésilas proposa et fit adopter de laisser
dormir les lois ce jour-là, et de leur rendre toute leur autorité le lendemain.
PwTARQVE, Agésilas et Apophlh. des Lacédémoniens. C'était en fait l'amnistie
que nous appliquons si fréquemment à tout propos et souvent hors de
propos, accommodée suivant les convenances du parti au pouvoir.
30, Calendrier. — Alexandre assiégeait Tyr, 332. Le devin Aristandre lui
annonça à la suite d'un sacrifice que, d'après l'examen des entrailles des
victimes, la ville tomberait, dans le mois, on son pouvoir. On était au dei'-
nier jour du mois, et les assistants se moquaient de cette impossibilité fla-
grante. Alexandre, ne voulant pas que la science du devin, dont il usait
fréquemment pour faire accepter ses projets par son armée, se trouvât en
défaut, ordonna que ce jour, qui était le trentième du mois, fût compté
comme seulement le vingt-septième, et sur l'heure il fit sonner les trom-
pettes et donner l'assaut; la ville, assiégée depuis sept mois, fut emportée
le jour même. Plutarqle, Alexandre.
31, May. — Cet autre, c'est encore Alexandre. Les. Grecs et les Perses se
trouvaient en présence sur les bords du Granique; on était au mois de juin
(en grec Daisios), et un ancien usage voulait que les rois de Macédoine n'ou-
vrissent pas les hostilités ce mois-là. Alexandre, pour n'être pas arrêté par
cette superstition, déclara qu'à l'avenir ce mois serait appelé « second mai »
(en grec Artemisios), et, passant outre, livra sa première grande bataille con-
tre les Perses, 334. Plutarque, Alexandre. — Une superstition analogue, qui
ne leur permettait pas de se mettre en marclie avant la pleine lune, avait
■ NOTES. UV. I, CM. XXrr. V0[.. I, PAG. 184. F.323
empêclu' les Spartiates de prendre part à la bataille de Mai-atlion, 490.
36, Marine. — Vers la fin de la guerre du Péloponnèse, 431 à 404, les alliés
de Lacédémone redoutant de voir le commandement de la flotte confédérée,
alors exercé par Lysandre, en lequel ils avaient toute confiance, passer en
d'autres mains, députèrent à Sparte, pour qu'il lui fût maintenu. Les lois
ne permettant pas de lui continuer une seconde année la charge d'ami rai,
les Lacédémoniens, pour satisfaire aux désirs de leurs alliés, en investiront
un certain Aracus, auquel Lysandre fut adjoint à titre de lieiitenant, mais
ayant seul toute l'autorité. Plutauque, Lysandre, 4.
186,
:*, Deffendu. — Ces ambassadeurs, en vue de rétablir la bonne harmonie
entre les Athéniens et les Mégariens, poursuivaient l'annulation d'un décret
i-endu par les premiers contre les seconds; malgré l'ingéniosité de la ré-
plique, ils n'obtinrent pas satisfaction. Plutauque, Périclès, 18.
i, Plutarque. — Parallèle de Flaminius avec Philopœmen, vers la fin.
5, Requérait. — C'est presque toujours en se retranchant derrière la léga-
lité, devenue injuste ou oppressive, et ne la faisant pas fléchir en temps
opportun, que les gouvernements provoquent les émeutes, et parfois les ré-
volutions.
CHAPITRE XXIII.
7, Nostres. — En 1562; Fcançois de Guise, surnommé le Balafré, do la
maison de Lorraine. V. N. I, 2-4 : Nostres.
:il, Propos. — Récit tiré de La Fortune de la Cour, par de Dampmaktin, cour-
tisan du règne de Henri III.
188,
8, Tuer. — Les éd. ant. etl'ex. de Bordeaux portent : homicider.
9, Raison. — Voi.tauie a mis en vers cette pensée dans sa tragédie d'Alzirc,
et Guznian, par la bouche de qui il l'exprime, est en même situation que
le duc de Guise :
« Des dieux que nous servons, connais la différence.
Les tiens l'ont commandé le meurtre et la vengeance.
Et le mien, quand ton liras vient de m'assassin<'r.
M'ordonne de te plaindre el de te pardonner. »
11, Auguste. — Ijc, récit qui suit est traduit, presque mot pour mot, de Sé-
NÈyuE, De la Clémence, I, 9; il a été reproduit presque textuellement par
CoRNEuj.E dans sa tragédie de Cinna; le fait se passait en l'an 4.
35, Caepio. — Ces conspirations eurent lion : celle de Lépide en 28 (ce Lépide
était fils du triumvir et neveu de Brutus) ; celle de Murena (celui-ci était
beau-frère do Mécènes) et de Cœpio en 21; colle d'Egnatius on 18. Eux et
leurs complices furent mis à mort.
190,
20, Libertin. — Affranchi, du latin liberlus ou libertinus; l'afiranchi était
l'esclave rendu à la liberté.
38, Trahison. — Ce même duc dé Guise dont il est parlé au commencement
du chapitre et qui, après avoir échappé à l'attentat médité contre lui à
Rouen, fut assassiné l'année suivante, 1563, au siège d'Orléans.
G, Euenemens. — Comme contre-partie de ce qui advint entre Auguste et
Cinna, et i)our confirmer l'intitulé que Montaigne a donné à ce chapitre,
on peut en rapprocher le récit ci-après qu'on trouve dans LunPKAND, relatif
à l'empereur Bcranger I, roi d'Italie, arrière -petit- fils de Charlemagne :
■> Dans l'enceinte mémo de "Vérone, cette ville jusque-là si fidèle à Béran-
ger, des traîtres complotèrent sa mort. Leur chef était Flambert, comblé
de bienfaits par Béranger, qui avait même voulu être le parrain de son fils.
F. 324 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Le vieil oniporour (Il avait déjà 36 ans :1e règne) eut connaissance de la
conspiration et voulut cette fois encore pardonner. Il lit venir Flambeit,
lui rappela en termes pathétiques tout ce qu'il avait fait pour lui : <■ On
« m'a pourtant dit, ajouta-t-il, que tu en voulais à ma vie : c'est impossible!
• Tu me dois tout, dignités et richesses; j'ai fait pour toi ce que je n'avais
« fait pour personne, et ne m'en tiendrai pas là, si tu persistes dans la fidé-
« lité que tu m'as jurée. » Puis, lui présentant une coupe d'or, pleine d'un
vin précieux : » Bois à ma santé, lui dit-il, et garde la coupe pour l'amoui-
" de moi. » Cette magnanimité fut sans effet sur l'âme du traître, qui ne
profita de la clémence du roi que pour hâter su mort, 924.
22, Part. — Dans le domaine de l'électricité, pai- exemple, cette fée des temps
modernes, que de découvertes primordiales dues au hasard, mais obser-
vées par des honmies de génie! —C'est ainsi, pour ne relever que les prin-
cipales, qu'une grenouille dépouillée pour en étudier la structure anato-
mique, suspendue à un balcon par un fil de cuivre et dont les cuisses
éprouvent un. mouvement de contraction chaque fois que le balancement
produit par le vent, lui fait toucher le fer du balcon, observée par Galvani,
étudiée par Volta, amène ce dernier à imaginer la pile électrique. —
Œrstedt démontrant que le courant d'une pile peut faire rougir un fil de
platine, remarque que toutes les fois qu'il ouvre ou ferme le circuit, une
aiguille aimanti'e qui se trouve dans le voisinage est actionnée; Arago lais-
sant traîner le conducteur d'une pile sur de la limaille de fer, s'aperçoit
qu'elle s'y attache, et voilà l'électro-magnétisme découvert. — Le hasard fait
constater par Rœtgen que certains corps, considérés jusqu'ici comme ab-
solument opaques, se laissent dans certaines conditions traverser par des
effluves électriques qui ont reçu le nom de rayons X, d'où la radiographie.
— C'est par le dépôt de cuivre qu'il aperçoit se former sur le zinc d'une
pile, que Jacobi doit d'avoir inventé la galvanoplastie. — La constatation
accidentelle par Branly des ondes électriques sur une poudre métallique,
dont elles agglutinent passagèrement les molécules, rendant ainsi momen-
tanément continu un circuit dont les extrémités y aboutissent, est le dé-
part de la télégraphie sans fil. — Et il en est ainsi de la genèse de la
plupart des découvertes et progrès tant soit peu importants, dans toutes les
sciences humaines à tous les âges.
34, Intention. — Les éd. ant. port. : invention.
194,
1, Militaires. — Cornélius Nepos affirme que dans l'attribution delà gloire
militaire, la part de la fortune est prédominante. — Quinte-Curce dit nette-
ment que les conquêtes d'Alexandre sont moins l'ouvrage de la valeur que
celui de la fortune. — Timoi.kon avouait que ses grands succès étaient
l'œuvre des dieux, une grâce de la fortune, du bonheur, bien plus que le
fait de sa prudence. — La victoire de Marengo (bSOO), un instant perdue,
fut due à l'arrivée inopinée de Desaix; la défaite de Waterloo (1815), l'une
des batailles les mieux ordonnées de Napoléon, au mauvais temps et à l'ar-
rivée imprévue de Bulow, puis à celle de Blucher; à Gravelotte, 1870, sans
l'inaction de parti pris et injustifiable de Bazaine, les Allemands eussent
éprouvé un désastre irréparable, qui dès le début de la campagne eût
changé du tout au tout l'issue de la guen*e.
10, Fortune. — « Sylla désarma l'envié en se louant souvent de sa bonne for-
tune, et finalement en prenant le nom de Faustus (heureux). Plutarque, Com-
ment on peut ne louer soi-même. — D'autres estiment qu'en ajoutant cette
épithète à son nom, Sylla avait plutôt en vue d'inspirer plus de hardiesse
à ses partisans et de crainte à ses adversaires, la fortune étant un don de
la Providence dont les effets sont sans limites.
11, Discours. — Sylla, dit Plutarque, a écrit dans ses commentaires que les
entreprises qu'il hasardait selon l'occasion, s'y lançant à corps perdu aloi's
qu'auparavant ses résolutions étaient contraires, étaient celles qui lui i-éus-
sissaient le mieux.
31, Humanité. -— L'éd. de 88 porte : si notable bonté.
NOTES. LIV. l, CH. XXIII. VOL. I, PAG. 196. F.325
196,
2, Autruy. — Sénèque, Epist. 4. — C'est ce que prouva d'une façon bien
énergique ce major prussien dont parle J.-J. Rousseau, qui, bàtonné à la
tête de son bataillon par Frédéric-Guillaume I", déchargea l'un de ses pis
tolets aux pieds du roi et de l'autre se brûla la cervelle.
7, Amis. — Cette confiance de Dion ne lui réussit pas. Calippus, dont il
avait été l'hôte à Athènes et qui l'avait suivi en Sicile, mit à exécution
contre lui les mauvais desseins qu'on lui prêtait, 354. Plutarque, Apophlh.
\iy Présente. — Quixte-Curce, III, 6.
1 1, Faire. — L'éd. de 88 aj. : Z^a vaillance n'est pas seulement à la guerre.
■.'0, Vn. — Henri III.
■Jt), Contraire. — Henri de Navarre, plus tard Henri IV.
'SS, Espérances. — Sjphax, roi de la Numidie occidentale, était hésitant en-
tre l'alliance de Rome et celle de Carthage; Scipion, qui venait d'expulser
les Carthaginois de l'Espagne, au risque de tomber entre leurs mains ou
d'être retenu prisonnier par Syphax, franchit la mer, avec deux vaisseaux
seulement, pour avoir une entrevue avec lui et le décider en sa faveur, ce
à quoi il réussit, 207. Tite-Live, XXVIII, 17. — On raconte un fait ana-
logue du général russe Skobelew : En 1881, après la prise de Geok-Tépé,
réduit de la résistance du Turkestan, faisant une reconnaissance avec une
sotnia de cosaques, il tomba sur un parti de cavaliers Turkmènes; ceux-ci
protestant de leur soumission, Skobelew renvoya ses cosaques et les prit
pour escorte, acte d'audace et de confiance qui acheva ce qu'avait com-
mencé la force des armes. G"' Niox.
[0, Rebours. — Au rebours se rapporte à ces mots: « La prudence si tendre
et circonspecte... »; Montaigne eût dû l'effacer, lorsque postérieurement il
a ajouté le trait relatif à Scipion qui ne se trouve pas dans les éditions
antérieures. Ces intercalations nombreuses dans les Essais, sont une des
causes de la difficulté qu'on a parfois à comprendre.
198,
3, Luy. — Louis XI, qui, en 1468, se mit en grand danger, ainsi que le
rapporte, en l'en blâmant, Phh.ippe de Comines, son historien, 'dans sqs Mé-
moires, II, 5 à 7. Lors de son entrevue avec Charles le Téméraire, duc de
Bourgogne, à Péronne, place appartenant à ce dernier, la ville de Liège
sétant révoltée conti-e le duc, à l'instigation du roi qui ne pensait pas que
l'événement fût si prompt, Louis XI. retenu prisonnier par son vassal
irrité, courut risque de la vie, et, pour sortir de ce mauvais pas, dut subir
de très humiliantes conditions, grâce auxquelles, sur le moment, il réussit
à tromper son adversaire par la confiance qu'il lui témoigna, et en arriva
à le détacher de ses ennemis comme c'était son dessein. Une fois hoi-s de
danger, en fin renard qu'il était, il éluda pou à peu toutes les concessions
qui lui avaient été arrachées.
1, Cxsar. — II est souvent question de César dans les Essais, c'est pourquoi
nous ri'sumons ici la partie la plus saillante de la vie de ce grand capi-
taine. — Après quelques succès en Espagne, il conquiert la Gaule (58
à 49) et pénètre jusque dans la Bretagne (auj. l'Angleterre). Arrivé au
terme de son commandement,. Pompée, jusqu'alors son allié, jaloux de ses
succès, empêche qu'il lui soit continué. Irrité de ce qu'il considère comme
une injustice. César passe les Alpes avec son armée, franchit avec elle le
Rubicon, ce que les lois interdisaient, et marche sur Rome, d'où Pompée
s'enfuit avec le Sénat, 49. César entre à Rome, se fait décerner la dicta-
ture, bat en Italie et en Espagne les lieutenants de Pompée, l'atteint lui-
même en .Macédoine et remporte sur lui une bataille décisive dans les
plaines de Pharsale, 48. Pompée s'enfuit en Egypte où il est assassiné. Cé-
sar y arrive après lui; de là il va en Asie où, en trois jours, il détrône le roi
du Pont qui s'était révolté; passe en Afrique, }' détruit à Thapsus l'armée
républicaine commandée par Métellus, Scipion et Caton, 46; puis en Espa-
gne où, battant à Munda, 45, le fils de Pompée, il achève d'anéantir le
parti. Revenu à Rome, il se fait décerner la dictature à vie, et, maître du
^.326 ESSAIS IlE MONTAIGNE.
pouvoir absolu, n'en use que i)OMr le bien. Accusé par ses ennemis d'as-
pirer à la royauté, il est- assassiné en plein Sénat, 44. — Grand guerrier
et grand homme d'État, César était aussi un excellent orateur et un écri-
vain élégant; de ses écrits, il ne nous reste que ses Commentaires sur la
guerre des Gaules et les guerres civiles, simples souvonir's d'un soldat, qui,
par le mouvement, la netteté, la concision, sont un modèle du genre des
mémoires historiques.
10. Metuens. — En 48, à Plaisance. Les soldats accusaient leurs chefs de traî-
ner la guen-e eu longueur; César, alors à Marseille, revenant d'Espagne,
accoui'ut en hâte. Ayant apaisé la sédition, il livra au supplice douze des
plus mutins tirés au sort sur 120 des plus coupables; un d eux prouva son
innocence, le centurion qui l'avait dénoncé fut exécuté place. Dans
ses Commentaires, César ne mentionne pas cette nmtinerie.
20, Scrupule. — ■• De toute marque de crainte et de défiance. »
25, Tué. — En 1548, à Bordeaux, lors d'un soulèvement occasionné pas l'im-
pôt de la gabelle (impôt sur le sel, dont chacun était tenu d'acheter une
quantité déterminée), imposé à la ville qui, jusqu'alors, n'y avait pas été
soumise. Tristan de Monnaisis, qui en était gouverneur et dont il est ques-
tion ici, périt dans cette émeute.
27, Soubsmission. — 88 port. : d'humilité.
28, Suyuant qu'en guidant. — Var. de 88 : flatlanl que commandant .
30, Vne gracieuse... confiance. — Var. de 88 : la fermeté, l'aulhorilé et vne
contenance de paroles.
34. Bienséance. — Autrement dit : « 11. n'y a l'ien qu'on ne puisse moins
attendre d'une populace surexcitée que l'humanité et la douceur : elle est
bien plutôt susceptible de respect et de crainte » ; ce qui est de toute vérité,
les foules étant aussi lâches que cruelles.
38, Aualer toute. — Soutenir jusqu'au bout sa première résolution.
40, Démise. — Soumise, du latin demissus.
40, De saigner... sur soy. — Var. de 88 : de se remplir l'âme et le front de re-
pentance, n'ayant plus autre soing que de sa conseruation; si qu'abandon-
nant son premier rolle de régler et de guider, et cédant plustot que s'oppo-
sant, il attira cet orage sur soy, employant tous les moyens de le fuir et es-
cnaper.
200,
1, Conniller. — Esquiver, se dérober. Ce terme, jadis d'usage courant dans
le S.-O. de la France, a tendance à disparaître; vient de connil, nom du
lapereau, dérivé du latin. Le connil, peu enclin à la bravoure, va, à la
moindre alerte, se cachant dans les haies ou. dans ses terriers appelés égale-
ment de ce nom, connilières.
2, Soy. — Le triomphe des révoltés fut de courte durée; le connétable de
Montmorency, dirigé sur Bordeaux, les contraignit à rentrer dans le de-
voir; plusieurs exécutions suivirent et la ville se vit enlever nombre de ses
privilèges. — Parlementer avec l'émeute, et par surQroît le faire en per-
sonne, ne réussit jamais. Le fait du général de Bréa, à Paris, en juin 1848,
assassiné pareillement par les insurgés, en est encore une preuve, outre
bien d'autres; seule une attitude résolue en impose aux foules en délire,
tout le reste est pris pour de la faiblesse. Faire tirer à blanc, ou tirer en
l'air notamment, ne fait que les surexciter; ce n'est qu'en inspirant de la
crainte qu'on empêche le désordre de prendre de l'extension, qu'on en
triomphe, en prévient le retour et évite de plus grands malheurs; et cela, sans
que le plus souvent on soit contraint d'en venir aux pii'cs extrémités de-
vant lesquelles toutefois il ne faut pas reculer mais qu'il est presque tou-
jours possible d'atténuer en prenant quelques précautions. Les difficultés
ne proviennent guère, en pareil cas, que de ce que les émeutiers espèrent
que la loi sur les attroupements, demeurée si fréquemment à l'état de lettre
morte, le sera une fois de plus -en la circonstance.
2, Montre générale. — Une grande revue. Le fait se passait en 1583. Le com-
mandant du Château Trompette à Bordeaux, Vaillac, avait promis au duc
NOTES. UV. I, eu. XXIII. VOL. I, PAG. 200. F.327
de Guise de le lui livrer; le maréchal de Matignon, lieutenant du roi en
Guyenne, déjoua ce projet, en contraignant Vaillac à cesser ses fonctions.
Mais celui-ci, demeuré à Bordeaux, continua ses menées; et, le maréchal
s'étant absenté, il crut le moment favorable pour y faire se prononcer un
mouvement en faveur de la Ligue. C'est à ce propos que Montaigne, qui
était alors maire do, la ville, fit faire, pour tenir les suspects en crainte, cette
revue qui rassura la population.
14, Poudre. — Salves d'artillerie ou de mousqueterie tirées en manière
d'honneurs militaires dans des circonstances particulières, et notamment
lors d'une revue passée par un haut personnage, à son arrivée devant les
troupes, ainsi que cela se pratique encore.
16, Confidence. — Confiance, ainsi que portent plusieurs éditions postérieures.
C'est là l'attitude constante dos hommes politiques de tous les partis au
pouvoir, vis-à-vis de l'armée : « Vous êtes admirables de dévouement, lui
disent-ils sur tous les tons et à tous propos, vous avez notre sympathie,
notre confiance, et toute notre bienveillance vous est acquise. •• La pre-
mière de ces assertions est constamment vraie, la seconde l'est beaucoui)
plus rarement, quelle que soit l'emphase de l'expression; seul le peuple,
quand il est libre de toutes suggestions, l'acclame toujours sans restriction
mentale, parce qu'elle émane de lui et le personnifie en ce qu'il y a de
plus généreux en lui.
18, Clémence. — Add. des éd. ant. : et douceur'.
33, Escus. — Plutarque, Apophth.
202,
5, Monopoles. — Conjurations, conspirations. — Rabelais, I, 17, s'est servi
de ce mot dans le mémo sens : « Plût à Dieu, dit-il en parlant des mutine-
ries du peuple de Paris, que ie susse l'officine en laquelle sont formés ces
schismes et monopoles pour les mettre en évidence es confrairies de ma
paroisse. »
8, Domination. —Gauthier de Brienne, duc d'Athènes, descendant d'anciens
croisés auxquels avait été donné ce duché qui, en 1312, fut enlevé à son
pore au profit des rois de Sicile. Gauthier, ajant pris du service dans l'ar-
mée de Florence et s'étant fait remarquer contre les Pisans, avait acquis
une grande autorité; profitant de la lutte des factions qui se disputaient le
pouvoir, il s'attribua lui-môme la seigneurie à vie (1342); mais son despo-
tisme et ses cruautés soulevèrent la population contre lui, et, l'année sui-
vante, il dut se dérober, par la fuite, au mécontentement général.
9, Autrefois. — Appiex, liv. IV des Guerres civiles.
22, Gaillard. — Add. des éd. ant. : et hardy.
CHAPITRE XXIV.
Ce chapitre est numéroté XXV dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
28, Pédantisme. — Ce chapitre contient des observations très judicieuses sur
la mauvaise manière d'enseigner et d'élever les enfants, et forme avec le
suivant un traité presque complet d'éducation, très supérieur à VÉmile de
J.-J. Rousseau, qui en a tiré ce qu'il a dit de mieux sur la matière. — A
proprement parler, le pédantisme consiste dans une haute opinion de son
savoir et un ridicule étalage de science empruntée. Naioeon.
30. Italiennes. — En fait de comédies de ce genre, on peut citer : El Pé-
dante, de F. Balo, 1538; mais comme le dit Montaigne, on trouve des rôles
de pédant dans une foule de pièces du théâtre italien du xvi» siècle.
30, Pédante. — N'est pas le féminin de pédant, mais le nom italien, qui est
à prononcer : Pédante, avec un accent l'e final.
30, Badin. — Aujourd'hui adjectif; était un personnage ridicule de l'ancienne
farce française, tels actuellement Jocrisse, Polichinelle, etc.
F.328 KSSAIS DE MONTAIGNE.
204.
7, Dit. — Plutarque, Cicéron, 2. — Longtemps à Rome, les pédagogues fu-
rent pour la plupart des Grecs.
11. Sapientes. — C'est une sentence que Rabelais, Gargantua, I, 39, met dans
la bouche de Frère Jean, fidèle portrait des moines de ce temps et qui
s'excuse de la sorte de son ignorance, ce que Reonier, Sat. III, a traduit par
ce vers : « Pardieu, les plus grands clercs ne sont pas les plus fins ». — Il
y a dans ce chapitre quelques autres imitations de Rabelais. Le Clerc.
17, Princesses. — Probablement Marguerite de Valois, fille de Henri 11,
dont Montaigne parle souvent et qui n'étant pas encore mariée était, de
par son rang, la première des princesses de France.
ol, Temps. — Allusion aux comédies d'Aristophane, dans lesquelles Socrat(>
notamment était cruellement ridiculisé. — Les éd. ant. aj. : wais au re-
bours des nostres.
1)3, Prests. — Est dit ici par ironie, il faut entendre : « Ils en sont bien loin. »
31, C'est. — Cette façon de parler était encore d'usage du temjjs de Con-
NEu,LE, où, dans Horace, il est dit : « Le roi ne sait que c'est d'honorer a
demi. » Aujourd'hui nous disons : « ce que c'est ».
206,
10, Insolents. — Tout ce passage depuis : « Et quant aux philosophes... » est
traduit du Théélèle de Platon. Le Clerc.
27, louet. — Archimède qui, par ses inventions, tint en échec, pendant
trois ans, 214 à 212, les Romains assiégeant Syracuse, Plutarque, Marcel-
lus, 6.
35, Armées. — Diogène Laerce, VI, 92.
36, Frère. — Il faut entendre ici, non la royauté proprement dite, mais une
charge particulière qui en portait le nom à Éphèse, comme chez les Athé-
niens, et les Romains après qu'ils eurent renoncé au gouvernement monar-
chique. Payen.
38, Compagnie. — Diogène Laerce, IX, 6.
208,
2, Offrirent. — Diogène Laerce, VIII, 63. — Les éd. ant. continuent : Vn
d'entre eux, Thaïes.
6, Trafique. — II prit à ferme tous les pressoirs à huile autour de Milet, dans
la prévision d'une bonne récolte et alors que les oliviers étaient encore en
fleurs; la récolte fut excellente, et, de sa spéculation, Thaïes retira un bé-
néfice considérable. Diogène Laerce, I, 26.
16, Vienne. — Add. des éd. ant. : à nos maistres d'école.
17, Sciences. — Ce mot « sciences », qui se retrouve fréquemment dans
Montaigne, signifie chez lui les connaissances philosophiques et littéraires,
ou lettres, dont on s'occupait à peu près exclusivement à son époque, et
nullement les sciences dans la signification actuelle de ce mot, dont le
domaine est devenu si vaste, par suite des découvertes et de leurs appli-
cations faites depuis un siècle et demi. La distinction entre lettres et
sciences, si nette aujourd'hui, n'existait pas alors; les lettres étaient tout, les
sciences à peu près rien.
23, Homme. — Passage imité de Sénèque, Episl. 88.
29, Plus sçauant. — « Une tète bien faite vaut mieux qu'une tète bien
pleine. »
210,
1, Vent. — « Nous ne pensons pas; mais écrivons de point en point ce que
les autres ont pensé. » Voltaire.
13, letter. — Jusqu'au viii« siècle, on faisait souvent usage dé jects ou je-
tons pour compter; et même jecter ou jetter se disait pour calculer.
18, Cbalemie. — C'est à proprement parler une flûte de pâtre, faite de paille,
de chalumeau de blé; il signifie ici une de ces chansons chantées par les
pâtres au son du chalumeau.
19, âu'em. — Montaigne traduit ce proverbe, après l'avoir cité.
20, Sommes là. — Un proverbe cité dans le dictionnaire de Leroux, disait
NOTES. LIV. 1, Cil. XXIV. VOL. 1, PAG. 210 F. 329
pareillement : « Il n'y a qu'à siffler et remuer les dofgts », pour exprimer
d'une chose qu'elle est facile à faire.
23. Perroquet. — Lord Chesterfield (1694 à 1779) avait bien senti le vice de
cette instruction que lui-même avait reçue à l'université de Cambridge, et
qui à ce moment n'avait fait do lui qu'un petit pédant, vain et superficiel;
et dans ses Lettres à son (ils, il en dépeignait ainsi le résultat : « Quand
je voulais bien parler, je copiais Horace; quand je voulais faire le plaisant,
Martial; et pour paraître homme du monde, je copiais Ovide. »
31. Gens. — Cet original s'appelait Calvitius Sabinus et vivait au temps de
Sénèque qui rapporte le fait, Episl. 27. — Chacun des esclaves en question
lui avait coûté 400.000 sesterces, soit 80.000 fr. (il s'agit ici du petit ses-
terce qui valait 0 fr. 20, tandis que la valeur du grand sesterce était de;
0 fr. 80), il on avait neuf; il ne les avait pas trouvés tout faits, il lui avait
fallu les commander. — Ce prix de 400.000 sesterces pour un esclave a
parfois été dépassé; I'i.ine, VII, 39, cite Daphnus, grammairien, qui fut
payé 700.000 sesterces (140.000 fr.), et Pœson, eunuque de Sylla, qui attei-
gnit 50.000.000 de sesterces (10.000.000 de fi*.)', mais, pour ce dernier, la
passion s'en mêlait.
37, Nous. — Add. des éd. ant. : de mesmes.
212,
5, Soy. — Comparaison tirée do Plutarqle, Comment il faut ouïr, à la lin.
8, Capitaine. — Add. des éd. ant. : et siadiiisé sans l'essay et.
9, Mode. — Quand il fut envoyé pour combattre Mithridato, 73, dit CicÉ-
Kox, Acad., II, I, Lucullus passa tout le temps do la route et de la traver-
sée, soit à s'enquérir auprès de gens experts en l'art do la guerre, soit à
lire les comptes rendus do faits y afférents; si bien qu'il arriva en Asie, gé-
néral consommé, que la victoire couronna, alors qu'il était parti de Rome
ignorant les premiers rudiments de cet art. — L'empereur Julien, alors
César, se révéla lui aussi, à son arrivée on Gaule (3.Ô5J, tout d'un coup
grand capitaine. — L'eunuque Narsès (552) se montra de même habile gé-
néral, sans jamais avoir été militaire auparavant. — II est certain que le
génie de la guerre et la science militaire sont distincts l'un de l'autre. Le
génie est inné, se rencontre rarement, et pour se produire a besoin que
les événements s'y prêtent; en dehors d'une disposition d'esprit toute spé-
ciale, il comjjorto un ensemble de facultés portées à un haut degi'é : du ca-
ractère, un grand bon sens, de la volonté, de l'initiative, de la décision, de
l'audace, do la prudence, du sang-froid, du coup d'œil, une grande acti-
vité physique, une santé robuste, le mépris de la vie humaine, une con-
naissance approfondie dos hommes et des choses. La science en est le com-
plément, mais elle, elle s'acquiert voire même assez facilement, et celui
chez lequel le génie existe a tôt fait de se l'assimiler. A défaut de génie,
mais unie à l'expérience, ce qui est le cas le plus ordinaire, la science n'est
pas sans conduire à des résultats souvent considérables ; seulement rare-
ment alors elle en arrive à tirer aussi complètement parti que le génie des
circonstances imprévues si fréquentes à la guerre et à triompher quand
même dans les cas difficiles.
17, loçé;. — Dans les éditions antérieures, Montaigne faisait suivre cette ci-
tation de sa traduction que nous donnons d'après lui : Je haï, dict-il, le
sage qui n'est pas sage pour soy-mesmes.
19, Quiret. — Les mots : « Ex quo Ennius » qui, dans les Essais, sont détachés
de la citation qui les suit, en font partie dans le texte do Cicéron.
■ 23. Dionysius. — Los sages réflexions attribuées ici à un Donys quelconque,
sont de Diogène le Cynique, comme on peut le voir dans la vie de ce phi-
losophe écrite par Diogène Laërce, VI.
28, Cher. — J'aimerais autant.
35, Grossir. — Volt.\ire, dans le conte de la Bégueule, dit pareillement en
parlant de l'orgueil ;
« Boufû, mais sec, ennemi des ébats,
Il renfle l'àme et ne la nourrit pas. »
F. 330 ESSAIS DE MONTAIG>E.
11, Peine. — Platon, Prolagoras. — Parmi ces disciples, Protagoras comp-
tait Evathlus, qui s'était engagé à lui solder le prix de ses leçons, loi's-
qu'il aurait gagné sa première cause; le moment venu, il déclara n'avoir
rien à payer, et sur la menace d'être cité en justice, dit à son maître .
• Allons, si les juges se prononcent pour moi, d'après la sentence, je ne
devrai rien; si c'est toi qui l'emportes, ayant perdu, je ne devrai pas da-
vantage, du fait même du pacte que nous avons conclu. » A quoi le maître
répondit : •< S'ils se prononcent pour moi. tu devras me payer selon la
sentence; si tu l'emportes, ayant gagné, tu le devras pareillement, aux
termes mêmes de notre convention. » Maître et disciple étaient aussi retors
et fripons l'un que l'autre. V. N. III, 344 : Protagoras.
41, Cbouez. — Frustrés, déchus de leurs espérances. — De chouer. qui n'est
plus d'usage, est venu échouer.
214.
16, Galimatias. — IMélange confus de paroles et d'idées incohérentes que l'on
ne saurait comprendre, quoiqu'elles semblent signifier quelque chose. —
Vient des mots latins galli et Mathias que prononça, s'embrouillant, au lieu
de dire gallus Malhise, l'avocat d'une cause où il s'agissait d'un coq ap-
partenant à un Mathias.
2(t, Robbe. — Xicole a dit que la pédanterie est un vice de l'esprit et non de
la robe. — On naît pédant, même sur les marches d'un trône. Joachim di
Bellay, dans un sonnet, dit que pédant ou roi se touchent de près, que
l'un et l'autre régentent et ont état et sujets, et termine en disant de Denys
le Jeune :
• Et c'est pourquoi, jadis, le roi syracusain
Voulut être pédant, ne pouvant être prince. »
26, Creux. — C'est le cas des intellectuels de nos jours chez lesquels, comme
chez le pédant de Montaigne que La Fontaine a aussi connu et.stigmatisé,
l'instruction et le jugement vont rarement de pair, et qui, mécontents de
la société où la place qu'ils occupent, pour si honorable qu'elle soit bien
que modeste, ne leur semble pas en rapport avec le mérite qu'ils s'attri-
buent; et partant de là, ils se font en France, à la remorque des socialistes,
les apôtres de ' l'internationalisme et de l'antimilitarisme et s'appliquent à
renverser l'état social actuel, en sapant chez la jeunesse confiée à leurs
soins la religion et l'armée qui en constituent les bases essentielles, s'y
adonnant avec une ardeur qui n'a d'égale que celle que leurs congénères de
l'Allemagne ont, en sens inverse, apportée à son relèvement après léna et
Wagram. Ceux-ci ont abouti aux succès de 1815 et à ceux plus éclatants
encore de 1870-71; à quels nouveaux désastres ceux-là, qui ont déjà à leur
actif la Commune et, ce qui nous a fait plus de mal encore, les troubles
démoralisateurs dont l'afTaire Dreyfus a été le prétexte, ne nous exposent-
ils pas dans leur aveuglement et malgré leur infime minorité, secondés
qu'ils sont, il faut bien le reconnaître, par l'inertie non moins regrettable
de tous les autres que le patriotisme et les leçons de l'expérience devraient
rendre plus clairvoyants !
32. Courtisane. — A la manière des courtisans, des gens qui fréquentent la
cour.
33, Trauers. — C'est à peu près la même idée qu'exprime Molikre dans ce
passage des Femmes savantes :
• Le moindre solécisme en parlant vous irrite.
Mais vous en faites, vous, d'étranges en conduite. •
36, De son. — Add. des éd. ant. : gibier et de son.
216,
5, Titan. — Prométhée, l'un des Titans (branche collatérale de celle dont
était issu Jupiter, avec lequel les Titans, étant entrés en lutte, furent frap-
pés de la foudre et précipités du ciel). Ayant formé l'homme du limon de
NOTES. LIV. I, CH. XXIV. VOL. I, PAG. 216. F.331
la terre, et l'ayant animé avec le feu du ciel dérobé à cet effet, Pi-oniéthée
fut en punition, par ordre de Jupiter, lié sur le Caucase, où continuelle-
ment un vautour lui déchirait le foie sans cesse renaissant, supplice dont
le délivra Hercule. Mythologie.
8, Mieux. — Add. des éd. ant. : et qu'elle nous amende, ou elle est vaine cl
inutile.
0. Officiers. — On désignait sous ce nom, d'une façon générale, tous ceux
qui étaient pourvus de charges publiques ou offices; il est question ici des
officiers de justice : conseillers au parlement, au Chàtelet, etc.
19, Est. — Traduction de la citation qui précède. — Molièke, dans les Fem-
mes savantes, exprime la même idée, mais en l'accentuant : ■• Un sot savant
est sot plus qu'un sot ignorant. » — « On est quelquefois sot avec de
l'esprit, a dit un autre, jamais avec du jugement. • •
28, Femmes. — « La sciei\ce des femmes, comme celle des hommes, doit se
borner à s'instruire par rapport à leurs fonctions; la différence de leurs
emplois doit faire celle de leurs études » (Fénelon).
Les temps ont bien changé ; et au nom de l'égalité, la femme moderne
réclame aujourd'hui même instruction que l'homme et l'admission à des
fonctions que jusqu'ici il était seul à remplir. C'est là quand même une
erreur; la mentalité de l'homme et celle de la femme ne sont pas iden-
tiques, même lorsque celle-ci est très instruite. Ils peuvent avoir des inté-
rêts communs, des sentiments communs, ils ne sont pas impressionnés de
la même façon par les mêmes choses, n'ont pas des enchaînements de pen-
sées semblables, leur logique diffère. En dehors de cette raison, déjà suf-
(isante à elle seule, les malaises fréquents de la femme, les troubles de
santé qu'elle éprouve périodiquement, les devoirs de la maternité, les soins
qui lui incombent dans l'intérieur de la famille, dont à la v.érité beaucoup
s'affranchissent, doivent de par la nature elle-même les faire exclure de
tou^s les occupations physiques ou intellectuelles susceptibles de les ac-
caparer tout entières à un moment donné, telles les professions d'avocat,
de médecin, etc. — Quant à la revendication de leurs droits politiques, elle
est plus justifiée; du reste ce n'est pas chose nouvelle et, dit-on, en 1793 Con-
dorcet avait été chargé par la Convtmtion d'élaborer un projet dé consti-
tution admettant le vote des femmes. Il ne serait cependant pas sans incon-
vénient, et ce pour les mêmes causes, qu'elles exerçassent elles-mêmes
ces droits; et il semble qu'il en serait suffisamment tenu compte, en at-
tribuant dans ces questions double vote au mari ou au père de famille.
Sur un autre terrain, leurs revendications sont plus sérieuses et méritent
considération. Elles demandent :
Que la femme mariée demeure propriétaire de son salaire et que l'éva-
luation du travail ménager lui donne un droit de pourcentage sur le sa-
laire du mari. L'homme se fait si souvent la part du lion et si souvent né-
glige de pourvoir aux besoins de la famille, qu'il n'y a là rien qui étonne.
Qu'à travail égal masculin ou féminin, le salaire soit égal; ce n'est que
justice, surtout quand on constate que la majorité des métiers féminins
ne rapporte en moyenne cpie la somme dérisoire de I fr. 25 par jour.
Que le travail à domicile soit réglementé : ce travail en effet, par voie
de concurrence, préjudicie à l'extrême aux intérêts de toutes, de celles
qui le pratiquent tout comme à ceux de celles qui travaillent au dehors,
par l'exploitation éhontée dont il est l'objet. Sait-on que la confection de
chemises d'homme arrive à n'être payée que 0 fr. 90 à 1 fr. la douzaine;
celle d'un pantalon d'homme 0,25, etc., et encore faut-il que l'ouvrière
fournisse (il. aiguille, machine à coudre! Des vachères travaillant la jour-
née entière à coudre des gants, en gardant leur troupeau, gagnent 0 fr. 40
par jour; des femmes de pêcheurs, en Bretagne, la passant à faire des
broderies, n'arrivent qu'à trois francs par semaine. Dans ces abus, rentre
le travail de certaines communautés subventionnées d'autre part, dans
des conditions qui ne leur laissent pour ainsi dire aucunes charges aux-
quelles elles aient à pourvoir, et peuvent produire à des prix dérisoires-
F.332 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Question compliquée, mais qui vaut la peine d'être étudiée, si difficile
qu'il paraisse d'espérer une solution satisfaisante.
Et si des faits nous remontons aux causes et que nous recherchions
pourquoi ce qui jadis a été à l'état d'exception a tendance à devenir au-
jourd'hui de pratique courante, cela tient au bouleversement de la société
et à ce que chacun recherche de plus en plus le confort et sacrifie au luxe.
Pour satisfaire à ces appétits, le gain de l'homme devient insuffisant aux be-
soins du ménage et la femme est conduite à chercher du travail qui ajoute
au salaire du père de famille; tandis que, d'autre part, chez l'homme, beau-
coup par veulerie, en quête de besognes faciles, envahissent les métiers
de la femme, se font couturiers, modistes, fleuristes* etc., obligeant celle-ci
à se tourner vers ceux qu'ils abandonnent et à se faire avocat, médecin,
emplojé d'administration, cocher, manœuvre, etc.
3-1, Mary. — Cette réponse se retrouve égalepient dans les Femmes savantes
de MoLiÈKE :
« Nos pères, sur ce point, étaient gens bien sensés.
Qui disaient qu'une femme en sait toujours assez,
Quand la capacité de son esprit se hausse
A connaître un pourpoint d'avec un haut-de-chausses. »
218,
0, Pedantisme. — Signifie ici pédagogie.
6, ladis. — Science et sagesse se confondaient, l'un menait à l'autre. Char-
les V, dit le Sage, roi de France, dut à son savoir (sage dit pour savant]
cette appellation que de nos jours nous sommes portés à attribuer a la sa-
gesse, pourtant si remarquable, avec laquelle il gouverna, tant pendant la
captivité de son père que durant son propre règne.
7, Desunt. — J.-J. Rousseau, dans son Discours sur les lettres, traduit ainsi
cette phrase de Sénèque : « Depuis que les savants ont commencé.à paraître
parmi nous, les gens de bien se sont éclipsés ».
11, Ceux. — A l'exception de ceux.
13, Science. — Idée qui, ainsi généralisée, n'est pas juste et que l'on s'étonne
de rencontrer chez Montaigne : il y revient parfois (I, 234); par contre,
il l'infirme dans différents passages (I,2'48) et particulièrement au ch. XLII
do ce même premier livre.
32, Cbaussetier. — On montrait à un savant anglais les fabriques de drap
de Norwich; les ouvriers y étaient tout déguenillés; on lui disait : « Voici
les draps pour le Nord, ceux pour l'Allemagne, pour l'Italie, pour l'Amé-
rique. » — « Fort bien, dit-il, mais je ne vois pas où sont les draps pour
les ouvriers de Norwich ! »
35, Suffisant. — Capable. Les mots suffisance, suffisant, sont toujoui*s em-
ployés, dans les Essais, dans le sens de capacité, capable, et en bonne part,
à l'exclusion de toute idée de vanité, de présomption qu'ils comportent par-
fois aujourd'hui.
220,
4, Dit. — Dans le premier Alcibiade.
25, Dire. — Donner la raison du parti qu'ils prenaient.
26, Xénophon. — Cyropédie, I, 3.
222,
1, T-jTTTw. — Je frappe. Ce verbe est, dans la plupart des grammaires grec-
ques, donné pour modèle des verbes de la première conjugaison.
4, Ils. — Les Lacédémoniens, dont il est question avant cette histoire inci-
dente de Cyrus, qui interrompt le sens général de ce passage.
14, Respondit-il. — Plutakque, Apophlh. des Lacédémoniens. — J.-J. Rousseau
s'est approprié ce mot dans &Qn Discours sur les lettres : « Que faut-il donc
qu'ils apprennent? Voilà, certes, une belle question! Qu'ils apprennent ce
qu'ils doivent faire étant hommes. »
15, Admirables. — C'est en cela que l'on a pu dire que c'était le maître d'é-
cole qui, en Prusse, avait fait Sadowa, et plus tard les succès de 1870-71.
Mais cette métaphore, répétée à satiété en France, après nos revers, y a
NOTES. LIV. I, CH. XXIV. VOL. I, PAG. 222. F.333
été intei-pi-étée de singulière façon. — Au lieu do voir là un résultat dû au
sentiment patriotique insufflé à l'enfant, dès le bas âge, par ces humbles
éducateurs de la jeunesse, obéissant, en vue du relèvement, à un mot d'or-
dre venu à la suite de l'effrondrement de la monarchie prussienne au com-
- mencement du siècle dernier, et se poursuivant sans trêve chez l'homme
après s'être exercé sur l'enfant, grâce à un ensemble d'institutions con-
courant à leur inspirer par-dessus tout la haine du Français auteur de ces
désastres, nous n'y avons vu que l'à-côté : l'instruction primaire plus ré-
pandue et donnée à un degré plus élevé. — Fatale erreur! elle a fait que
tout en donnant à cette instruction une extension exagérée peut-être, mus
par un état d'âme qui nous est particulier, nous inculquons à l'enfant,
non des sentiments de patriotisme surchauffé comme en Allemagne, mais
des idées de confraternité universelle qui en sont presque l'opposé, eu
même temps qu'une connaissance approfondie des droits de l'homme, mais
sans insister simultanément sur ses devoirs, ce qui eût été logique et un
palliatif des exagérations auxquelles peut aboutir la revendication des uns
sans l'observance des autres; laissant en outre jeter le discrédit sur ces
doux bases essentielles des sociétés, factices comme elles si on le veut,
mais sans lesquelles elles ne sauraient avoir le calme et la sécurité : la re-
ligion qui prêche ces devoirs et l'armée qui en impose l'exécution, qui sont
leurs sauvegardes tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. — De là cette situa-
tion si troublée en laquelle nous vivons, en butte à des désordres intérieurs
continus, à ces grèves sans cesse renaissantes, qui se produisent partout
et en tout, solidaires les unes des autres et qui portent de si profondes at-
teintes à notre industrie et à notre commerce, tandis que, d'autre part,
malgré les charges écrasantes de notre état militaire et la volonté de nos
gouvernants d'éviter la guerre à tout prix, sans en avoir l'air, nous som-
mes constamment anxieux dos faits et gestes de nos voisins qu'inquiète
également notre attitude imprécise.
18, D'armée. — Le titre d'imperator était donné, à l'origine, aux seuls géné-
raux victorieux.
29, Pays. — Pixt.a.rqle, Apophth. des Lacédémoniens. — En 330, à la suite de
la défaite qu'Antipater roi de Macédoine venait de leur infliger et dans la-
quelle avait péri Agis II, leur roi, après des prodiges de valeur.
33, Commander. — Plutarque, Agésilas, 7.
31, Hippias. — Platon, Ilippias major.
224,
12, Lettres. — Aujourd'hui et depuis des siècles, les Turcs constituent un
dos Etats les plus faibles d'Europe, où ils ne se maintiennent que parce que
les autres ne veulent voir aucun d'entre eux se substituer à eux. Cette dé-
chéance est due en grande partie à l'ignorance et à la stagnation en les-
quelles ils sont demeurés alors que tout autour d'eux progressait. On ne
saurait cependant nier chez eux une légère tendance à un relèvement auquel
la femme, si paradoxal que cela paraisse, n'est pas étrangère. Celle-ci, en
effet, dans les classes élevées, n'est pas l'être avili et annihilé qu'on ne cesse
(le se représenter, son inlluence dans l'intérieur des familles est moins
olfacée qu'on le suppose: dans certaines, elle reçoit de l'éducation ; les pro-
ductions littéraires de l'Occident pénètrent dans le harem et avec elles les
idées modernes, et il n'est pas déraisonnable d'admettre qu'à la longue
l'effet peut s'en faire sentir et une sorte de rénovation morale de la nation
en résulter. G"' Niox.
16, Grèce. — De 395 à 401, sous le commandement d'Alaric.
'20, Oysiues. — Pu. Camerarius, Médit, hisl., III, 51. — C'était aussi l'opinion
(les Goths du royaume d'Italie, si l'on en croit Procope, historien grec du
m" siècle : Le grand Théodoric (489 à 526) ne voulait pas, pour cette
raison, que les Goths envoyassent Icure enfants aux écoles; on blâmait la
reine Amalasonte de donner à son fils Attalaric une éducation trop litté-
raire, prétendant que cela l'amollissait. — Quant à moi, je suis sur ce point
de l'avis tle Montaigne, mais je tiens (jue ce n'est pas la seule cause d'amol-
p. 334 ESSAIS DE MONTAIGNE.
lisseinent d'un peuple; l'excès de bien-être pénétrant toutes les classes de la
société en est une bien plus grande encore, d'autant plus débilitante que
cette jouissance au delà du nécessaire est plus considérable et date depuis
plus longtemps.
22, Toscane. — Cette conquête s'effectua en cinq mois (1495), c'était prompt
à une époque où tous les bourgs étaient fortifiés et les moyens de les réduire
bien moins puissants que de nos jours et où les armées vaincues se refor-
maient assez rapidement; elle se perdit du reste la même année avec. la
même rapidité, par suite de la coalition contre nous du Pape, des Princes
d'Italie et de l'Espagne.
25, Guerriers. — Voir sur cette question assez controversée de l'influence
des lettres, la Sayesse de Charhon, 111, et les célèbres paradoxes de.I.-J. Rous-
SEAL.
CHAPITRE XXV.
Ce chapitre est numéroté XXVI dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
226,
1, Entans. — Ce chapitre est un des plus intéressants des Essais. Mon-
taigne y développe ses idées sur l'éducation des enfants, dont une grande
partie se retrouve dans la République de Platon. Il en avait jeté les bases
dans le chapitre précédent; c'est la source où sont venus s'inspirer Charron,
J.-J. Rousseau et tant d'autres après eux, non sans prêter à la critique en
raison des points importants que l'auteur s'est abstenu de traiter et du
point de vue par trop particulier auquel il s'est placé. — « Il ne porte
guère son attention, dit Margerie, quB sur ce qui a pour objet de dévelop-
per l'intelligence et de fortifier le corps. Mais l'enfant a aussi une âme à
élever, un caractère à former; et cette éducation morale, importante au
même degré que l'autre, est sans contredit plus délicate et plus difficile. A
cet égard, Montaigne ne se préoccupe que des vertus faciles qui naissent
et grandissent d'elles-mêmes et coûtent peu à acquérir et à pratiquer, mais
les autres? 11 ne dit mot, par exemple, du dévouement, non plus que des
devoirs sociaux et politiques et pas davantage de la lutte contre les passions
sensuelles qu'il dépeint cependant si bien. • — Déjà auparavant G. Guizot,
après avoir relevé que la religion n'a point de place dans le système d'édu-
cation de Montaigne, ajoutait : « 11 est à observer que sa visée est très
générale et le cas qu'il pose très particulier : il veut former un homme et
ne parle que pour un jeune seigneur; malgré l'apparente étendue des idées,
ce qu'il dit ne vient que de son éducation personnelle et ne va qu'à celle
de son petit voisin du château de Ourson. » — La pédagogie de Montaigne
est en effet émineniiîient aristocratique; il n'en est pas moins un précur-
seur en fait d'instruction. Devançant de plusieurs siècles la marche du
progrès, en outre de la simultanéité de l'éducation morale et de l'éduca-
tion physique, il préconise de restreindre, dans les procédés d'instruction, le
recours à la mémoire à laquelle on fait jouer un trop grand rôle au pré-
judice de la raisd^, de développer l'esprit d'initiative et de décision, de
consacrer moins de temps à l'étude, et d'en donner davantage à celle des
langues vivantes, toutes choses encore aujourd'hui presque à l'état de de-
siderata, en France tout au moins.
A la vérité aussi, ces principes ne sont pas émis en vue ûo l'instruction
primaire parce qu'alors elle n'existait pour ainsi dire pas et que le besoin
ne s'en faisait pas sentii-; mais, étant donné son immense bon sens, il n'y
a pas doute que s'il eût eu à en parler, il se fût élevé aussi contre la di-
rection qui lui est donnée chez nous et dont les résultats sont si pernicieux
en faisant naître, chez la plupart, des espérances qu'il ne sera pas donné au
plus grand nombre de pouvoir réaliser. Son but devrait être uniquement de
coopérer à ce que les enfants, les jeunes gens des classes dites laborieuses
(dont malgié cette éj)ithète le travail est bien loin d'être l'apanage exclusif
et qui dans leur sphère, si l'envie ne s'en mêle, ont ici-bas autant de
NOTES. LIV. I, CH. XXIV. VOL. I, PAG. 220. F. 335
chances de bonheur que tous autres), deviennent, eux aussi, des êtres forte-
ment trempés au physique et au moral, de les préparer aux réalités et aux
devoirs de ce monde en les rendant propres à participer pleinement à la
vie sociale et à satisfaire pour le mieux aux conditions du milieu où la
Providence les a placés, tel Cincinnatus tiré à diverses reprises de sa charrue
pour exercer la dictature et n'aspirant qu'à y retourner, sans éveiller ni
encourager en eux le désir d'en sortir en croyant s'élever, grosse erreur,
malheureusement si i-épandue et qui la plupart du temps fait leur malheur,
sans que la société y ait bénéfice.
Pour ce faire, il faudrait ici encore s'adresser moins à la mémoire qui,
à elle seule, ne conduit à rien de bon, qu'à la raison et à la réflexion;
réduire au minimum l'instruction primaire proprement dite, les connais-
sances générales qu'elle comporte et le temps passé à les acquérir, sans
cesser de maintenir le contact journalier de l'enfant d'abord, de l'adoles-
cent ensuite avec la ferme, l'atelier, le magasin, l'usine et la participation à
leurs travaux suivant la condition de chacun, et affirmant la pratique dans
dos cours techniques annexes, appropriés aux populations ambiantes, déve-
loppant à la fois l'habileté professionnelle, l'initiative, et tenant au courant
du progrès. En généralisant cette méthode, aujourd'hui limitée à quelques
grands centres, en la mettant à portée du plus grand nombre, on augmen-
tera les chances de prospérité de chacun et de tous et on réagira contre
l'exode si fâcheux des campagnes sur les villes.
1, Gurson. — Diane de Foix, fille du comte de Candalle, avait épousé, en
1579, son cousin Louis de Foix, comte de Gurson, qui fut tué avec deux
de ses frères, en 1586, au combat de Monterabeau, près de Nérac : quoique
catholiques, ils suivaient le parti de Henri IV, dont ils étaient proches
parents.
1. Françoise.
Pour l'érudition donl la lourdeur accable,
Si nous la négligeons, le mal n'est pas bien grand ;
Le gros savoir fait un pédant.
L'esprit, lui seul, fait l'hamme aimable
Qui, chez nous, est le vrai savant. » De Boissy.
10, Mathématique. — On entendait par mathématiques toutes les sciences
où interviennent les théories des nombres; elles comprenaient quatre
parties : l'arithmétique, la géométrie, la musique et l'astronomie.
13, D'Aristote... moderne. — Var.,des éd. ant. : de Platon ou d'Arislote.
15, Faict. — Add. des éd. ant. : ce n'eut pas mon occupation.
'Z3, Danaïdes. — Filles de Danaiis, roi d'Argos. Elles étaient au nombre de
cinquante; contraintes d'épouser les cinquante fils du roi d'Egypte leur
oncle, et ce mariage leur paraissant une impiété, elles les massacrèrent la
nuit même de leurs noces. Pour ce crime, précipitées dans les Enfers, elles
y furent condamnées à y remplir éternellement un tonneau sans fond.
Myth.
228,
3, Fiert. — Frappe, du latin ferit. — C'est une i-éminiscence de ce passage
de Montaigne, qui permit à J.-J. Rousseau d'être l'heureux interprète de la
devise de la maison de Solar : « Tel fiert qui ne tue pas ». Le Clerc.
19, Voyre. — Disant que c'est vrai, que vraiment. — Voyre signifie quelque-
fois même; d'autres fois oui, ce qui est ici le cas. Il a le sens de même dans
ces vers de La Fontaine :
« Cliapilre, non de rals, mais chapitre de moines,
Voyre chapitre de chanoines. »
Il signifie oui, dans ces deux vers de l'épitaphe de S. Innocent :
« Que disons-nous de ce grand purgatoire?
U en est un, ony dea, tredani voyre! •
F.336 ESSAIS DE MONTAIGNE.
23, Descouuei^t. — Add. des M. aiit. :car autrement {'engendrerais des mons-
tres : comme font.
3G, Allégation. — Diogène Laerce, Chrysippe, VIII; Épicure, X. — Allégation
signifie ici citation.
37, Passage. — C.-à-d. sur un de ces beaux passages des anciens, copiés par
les écrivains indiscrets du siècle de Montaigne.
230,
14, Franchise. — D'asile. Pris ici au figuré : endroits tels que les temples,
les églises, les palais des ambassadeui-s où il n'était pas permis de procéder
à des arrestations.
23, Pâlot. — Pâlot était le nom que l'on donnait à la bêche; « tenir pâlot ■•
d'après certains signifierait : avoir possibilité, ayant une bêche, de creuser
un fo-ssé, en signe de défi ou pour se défendre entre soi et quelqu'un, d'où
lui t(Mur tête, aller de pair avec lui.
232,
3. Dire. — C.-à-d. : « Je n'cni|)loie, je ne cite les pensées des anciens
que pour avoir plus d'occasions de produire mes propres pensées; bien
différent en cela de ceux qui se couvrent des armes d'autrui, jusqu'à ne
pas montrer seulement le bout de leurs doigts ». — Ou encore : « Je n'em-
ploie les idées des autres que pour rendre d'autant mieux les miennes »,
ainsi qu'on peuten juger en se reportant au ch. X du liv. II (I, 252), où
il est dit : « car le fay dire aux autres... ce que ie ne puis si bien dire par
foiblesse de mon langage ou par foi blesse de mon sens ».
3, Cantons. — Mot venant du grec et signifiant -k proprement parler un
manteau fait de pièces d'étoffes rapportées, un habit d'Arlequin. — Le
centon est une pièce en vers le plus généralement composée de vers entiers
ou de passages pris de côté et d'autre dans un même auteur, comme les
centons d'Ausone, composés de vers de Virgile, soit chez divei'S et disposés
dans un ordre autre, ce qui donne à ces fragments un sens tout. différent
de celui qu'ils ont dans l'original. Quoi qu'en dise Montaigne, le style de
ces sortes d'ouvrage est par trop plein d'expressions dures, impropres et
énigmatiques; en français, il n'en existe guère qu'en prose et ce ne sont
pour la plupart que des assemblages de proverbes, sans intérêt aucun.
7, Politiques. — Vaste compilation de Juste Lipsc sur le droit et la poli-
tique, publiée en 1589 et qui, à l'époque, eut un grand retentissement. Cet
ouvrage a en effet tous les caractères d'un centon, était composé de sen-
tences et de maximes tirées des historiens, poètes, philosophes, orateui-s
grecs et latins, auxquelles l'auteur n'a ajouté que le fil qui les unit, ce
qui, joint au mérite de les avoir recueillies et présentées d'une façon in-
téressante, n'en dénote pas moins beaucoup d'érudition et de patience. —
Montaigne se montre ici reconnaissant, car Juste Lipse, lui envoyant son
livre, lui écrivait : « 0 tui similis mihi leclor sit [Que ne sont-ils tous sem-
blables à toi, mes lecteurs)! »
16, Autruy. — « Scienter nesciens et sapienter indoclus [savant dans son igno-
rance, simple dans sa sagesse) », a-t-on dit de Montaigne, lui appliquant
ces paroles du pape Grégoire II à l'adresse de saint Benoît. Jamet.
25, Viendra. — Le mariage de Diane de Foix (V. N. I, 220 : (jurson) avait été
négocié par IMontaigne ; le premier-né de cette union fut en effet, en 1582,
un fils, Frédéric de Foix, qui devint maréchal de camp et grand .sénéchal de
Guyenne.
25, Auez. — Add. des éd. ant. : de tout temps.
26, Seruitude. — Peut-être la teiTe de Montaigne qui, depuis qu'elle était
dans la famille Eyquem, relevait de l'archevêque de Bordeaux, avait-elle, à
une époque antérieure, relevé des comtés de Gurson, dont le château se
trouvait à peu de distance, et dont était Diane de Foix dont il est ici
question.
33, Difficulté. — C'est le langage que, dans Platon, Théagès, tient à Socrate
un père qui, accompagné de son fils, vient le. consulter pour savoir à qui
en confier l'éducation.
NOTES. MV. I, Cil. XXV. VOf-. î, PAG. 234. F. 337
234,
3, Eux-mesmes. — C.-à-d. combien dans l'âge mûr ils ont été différents
de ce qu'ils étaient dans leur enfance.
10, Pied. — Les éd. ant. port. : goust.
18, Basses. — Cette infériorité d'une partie de la race humaine, déjà men-
tionnée par Montaigne (N. I, 218 : Science), si attentatoire à la doctrine de
l'Evangile, est soutenue, dans toute son amplitude, par S. Thomas d'Aquin,
dont l'ouvrage de Sobond, qui est analysé ici, est considéré comme résu-
mant les opinions. « Quant aux laboureurs, dit saint Thomas, aux indus-
triels et aux marchands, il est manifeste qu'il ne faut pas les considérer
comme des citoyens, ni comme faisant partie eux-mêmes d'une société
bien organisée... Ces hommes vils, en raison de leurs occupations abjectes,
ne sauraient se livrer à la contemplation de la vérité et à la pratique des
arts libéraux. »
236,
1, Maison. —- Enfant noble, de bonne famille.
1, Lettres. — Les éd. ant. ajoutent : et la discipline.
8, Réussir. — Est employé ici dans le sens de l'italien riuscire, aboutir,
conclure, arriver à un résultat bon ou mauvais.
17, Montre. — Lui donner occasion de se montrer. — Terme de maquignon-
nage ; c'était le lieu où l'on essayait les chevaux. Montaigne continue cette
môme figure quelques lignes plus loin : « Il est bon qu'il le fasse trotter
deuant luy, pour iuger de son train ».
22, Eux. — DiOGÈNE Laerce, IV, 36.
238,
8, Platon. — Par des interrogations; d'après la méthode suivie par Socrate
dans les dialogues de Platon.
II, Cuire. — Add. de 88 : « On ne cherche réputation que de science.
Quand ils disent, c'est vn homme sçauant, il leur semble tout dire. »
24, Estamine. — Qu'il lui fasse tout exaniiner, analyser. — Expression pro-
verbiale qui vient du tissu peu serré de crin, de soie ou de fil, appelé de
ce nom, dont sont garnis les tamis servant à passer les matières pulvéri-
sées, quand on veut en séparer les parties ténues d'avec les parties grossières.
28, Double. — Dans l'exemplaire dé Bordeaux, Montaigne ajoutait : « II n'y
a que les fols, certains et résolus », addition qu'il a ensuite rayée.
34, Imboiue. — « Imboire » ne se trouve pas dans les dictionnaires, où
figure seul « imbu » qui semble en être le participe passé.
240,
2, Apres. — Cette pensée se retrouve dans La Bruyiîre : « Horace ou Des-
préaux l'ont dit avant vous. — Je le crois sur votre parole, mais je l'ai dit
comme mien; ne puis-je pas parler après eux d'une chose vraie, dont
d'autres encore parleront après moi ? »
0 Dis-je quelque chose assez belle ; C'est une plaisante donzelle.
L'antiquité toute en cervelle Que né venait-elle après moi,
Me dit : • Je l'ai dit avant toi. • J'aurais dit la chose avant elle. » Ch. Nodu-r.
• Rien n'appartient à rien, tout appartient à tous;
Il faut être ignorant comme un maître d'école
Pour se flatter de dire une seule parole
Que personne ici-bas n'ait pu dire avant vous;
C'est imiter quelqu'un, que de planter des choux. » A. de Musset.
3, Espices. — Salaire des vacations de juges, d'expéditions judiciaires, etc.,
L'usage de qualifier de la sorte la rémunération officieuse de certains ser-
vices rendus, était fort ancien et avait pour origine la rareté des épices et
le cas qu'on en faisait, quand le commerce avec les Indes qui les produit,
n'existait pas; on en offrait aux grands seigneurs et en général à ceux
dont on avait à reconnaître ou se ménager les bons offices. Cette rede-,
vance, passée dans les mœurs, a été plus tard convertie on argent; elle
n'est pa-s à confondre avec ce que nou;3 appelons aujourd'hui épingles ou
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 22
F.338 ESSAIS DE MONTAIGNE.
encore pots de vin qui sont des dons illicites, soliicit(!'S abusivement ot
consentis pour obtenir des passe-droits.
IG, Epicharmus. — Dans les Stromales (mélanges) de Clément d'Ai-f.xan-
uKiE, 11 ; et dans Plu tarque, De la Sagacité des animaux.
17, Empennées. - Arrangées, préparées à l'instar des flèches que l'on garnit
de plumes, ou des traits qu'on munissait d'ailerons, pour les empêcher de
tourner sur eux-mômes et faire qu'ils aient plus de portée et de justesse.
25, Sçauoir. — « L'érudition n'est pas la .science, de même que les maté-
riaux ne sont ])as le bâtiment » (Proverbe turc). — Cette distinction a peu
cours en France, même dans l'Université, d'où nos méthodes d'in.struction
encore si défectueuses.
33, Caprioles. — Du latin capra, chèvre; terme de danse qui désignait alors
un rythme particulier. On dit maintenant, mais dans une acception un peu
différente « cabrioles », du provençal cabra, signifiant également chèvfe.
35, L'esbranler. — Add. des éd. ant. : « et mettre en besongne •.
242,
1, Luth. — Instrument à cordes des plus anciens, aujourd'hui disparu, avait
quelque ressemblance avec une harpe de très petite dimension.
9, Botanda. — Le Panthéon qu'Agrippa fit construire à Rome, sous le règne
d'Auguste; c'est le seul des temples de Rome antique qui soit conservé
dans son intégrité.
10, Lima. — 11 y avait à Rome, au xvi^ siècle, une femme remarquable par
sa beauté et les grâces de son esprit; c'était Livia Colonna, fille de Marc-
Antoine Colonna. Plusieurs poètes de l'époque l'ont célébrée et nous ap-
prennent qu'elle avait pour adorateur tout le peuple romain. Un jour elle
s'éloigna de Rome et des pluies diluviennes suivirent son départ; « les
eaux qui menacèrent subitement d'inonder la ville éternelle, venaient, dit
l'une de ces poésies, des larmes de ses amants ». Avait-elle des caleçons
d'une forme et d'une richesse exceptionnelles, c'est ce que les madrigaux
écrits en son honneur nous laissent ignorer. Rostain.
12, Médaille. — Montaigne se moque ici quelque peu des antiquaires et
même des érudits dont les longues et ennuyeuses dissertations n'ont sou-
vent de but ni utile, ni instructif.
15, Enfance. — « Avant de voyager pour s'instruire, il faut, dit-on parfois,
s'instruire pour voyager. » C'est bien dit, mais ce n'est pas absolument
exact : On s'instruit en voyageant, l'enfant comme tous autres; seulement
les voyages profitent bien plus à qui est instruit qu'à celui qui ne l'eist pas.
27, Remède. — C-à-d. pas moyen de faire autrement.
35, Compagnie. — C.-à-d. unie à un corps.
36, Leçon. — Dans mes lectures.
244,
9, Geaule. — Geôle, prison; d'où vient geôlier; viendrait lui-même du latin
(/abiola, cage. ■
10, L'espreuue. — Nous en \oyons tous les jours la preuve et quiconque...
Ces lignes ont été écrites pendant les gueri'es civiles sous le règne de
Henri 111 et à l'avènement de Henri IV.
23, Fables. — Est mis ici dans le sens de hâbleries, propos pleins de vantai'-
dise et d'exagération.
27, Contraster. — Blâmer, contredire, censurer.
246,
9, Mestier. — Les procureurs et avocats, qui, trop souvent, par situation,
poursuivent et défendent de parti pris, quels que soient leurs convictions
personnelles.
26, Reluisent. — Add. des éd. ant. : iusques.
27, Particulières. — Quoique remplissant fidèlement ses devoirs de citoyen,
de sujet et même de catholique, Montaigne, fidèle à ce principe, refusa cons-
tamment de s'attacher au service des rois par des obligations particulières
contractées envei's eux, non plus qu'à s'inféoder à l'un quelconque des
partis qui, à celte époque, divisaient la France.
NOTES. LIY. l, en. XXV. VOL. I, \\\G. 240. F.339
'•ii. Ames. — Errare humanum est, perseverarv dlabolicum (Faille erreur est le
fait de Vliommc, s'y obstiner celui du démon) », dit uii adage bien connu,
dont la source ne l'est pas.
248,
2. Suffisance. — Langage tout différent de celui tenu, I, 218.
■1. Malttoisie. — Vin grec qui a pris son nom de Napoli di Malvasia (auj.
Xauplie). ville du Péloponnèse.
22. Veut. — Add. de 80 : et qui ne sejiropose autre fin que le plaisir; mais.
21, Platon. — Dans Hippias major.
2.'i. Nostre. — Plutarque traduit en français par Amyot, dont la traduction
(les Hommes illustres avait paru en 1559, il y avait donc une douzaine
d'années, et celle des Œuvres morales était en cours de publication, quand
Montaigne écrivait son premier livre des Essais, 1574.
29, Là. — Annibal et Métellus étaient en présence près de Venouso (Italie
méridionale). Une colline dont l'occupation importait aux deux partis était
entre les deux camps; Annibal, arrivé premiei-, ne l'occupa pas et préféra
y tendre^ une embuscade, persuadé que les Romains chercheraient à s'y
établir. C'est ce qui arriva : Marcellus, consul, s'y porta avec son collègue
pour en faire la reconnaissance, et y fut tué; son collègue moui-ut lui aussi,
peu après, de ses blessui'es, 208; il n'était pas encore arrivé aux Romains
de perdre leurs deux consuls dans un môme combat. Plutarque dit de
Marcellus, à cette occasion, qu'en se précipitant inconsidérément et sans
nécessité dans le danger, il est mort, non en général d'armée, mais en en-
fant perdu ou en batteur d'estrade.
250,
2, Besongne. — Henri IV partageait ce sentiment d'estime que Montaigne
avait pour Plutarque : « Il me sourit toujours d'une fraîche nouveauté,
écrivait-il à Marie de Médicis; c'est un ami; il m'a dit à l'oreille beaucoup
de maximes excellentes pour ma conduite et pour le gouvernement de
mes affaires. »
2, Mille. — Add. des éd. ant. : et mille.
0, Mot. — Dans son traité de la Mauvaise honte.
19, Faut. — Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens.
25, Monde. — Cicéron, Tusc., V, 37; Plutarque, De l'Exil. — Socrate pouvait
être internationaliste au point de vue philosophique, mais nul ne connut
et ne pratiqua mieux ses devoirs envers sa patrie, n'en observa mieux les
lois, ne la servit avec plus de dévouement à la guerre, V. N. III, 576 :
L'vn.
D'après ce même traité De l'Exil, de Plutarque, on a fait dire à Hercule :
« Quoiqu'on me fasse Argien ou Thébain,
Point ne me vante être de lieu certain,
Toute cité de Grèce est ma patrie. »
28, Nous. — Montaigne émet ici une de ces id(';cs au mirage enchanteur,
mais qui tout en ayant fait fortune, ne sont que mirage. — Tous les hom-
mes sont frères et ils devraient s'aimer en tant qu'hommes et non comme
Suisses ou Anglais. Cette conception généreuse, déjà formulée longtemps
avant notre ère, a été prônée depuis à maintes reprises; elle est la base de
la religion chrétienne; Plutarque s'en est fait l'avocat; Mirabeau et après
lui Ronald ont pronostiqué que l'Europe ne ferait qu'une famille; Rallanche
comme avait fait Rousseau, et comme firent en des temps plus rappro-
' chés de nous Lamennais, Lamartine, Emile de Girardin, et autres, ont
soutenu la même doctrine, en même temps que Bossuet flétrissait la guerre
qui fait périr tant d'innocents et que Pascal et Voltaire déclaraient un
acte de démence inexcusable de tuer un homme parce qu'il demeure de
l'autre côté de l'eau. Si séduisantes que soient ces espérances, si justifié
que soit cet anathème, en attendant que ces utopies actuelles deviennent
dans l'avenir des réalités, il faut être de son époque et ne ])as devenir dupe
F. 340 ESSAIS DE MONTAIGNE.
et victime par trop de simplicité, c'est pourquoi,, en attendant d'ètro mis
au rang des bienfaiteurs de l'humanité, ceux qui prêchent à la France le
désarmement, taxent le patriotisme d'imbécillité, s'appliquant à détruire
en elle les sentiments et les institutions dont l'existence est nécessaire
pour assurer son indépendance, sont des individus coupables au premiei-
chef, alors même qu'ils seraient sincèi-es. et dangei-eux au même titre que
ceux qui sapent les idées religieuses non moins indispensables à l'humanité
pour lui faire prendre en patience les misères de la vie, que n'est une ar-
mée forte et disciplinée pour la sauvegarde du territoii-e; tant qu'il y
aura des loups, il faudra des chiens de garde, et des médecins tant qu'il
y aura des malades.
31, Cannibales. — La pépie est une membrane cornée qui croît dans le bec
des oiseaux, en particulier des poules, et les empêche de manger et de
boire. Le curé de Montaigne s'imagine que parce qu'il est survenu un acci-
dent dans son village, le monde entier va s'en ressentir; et que jiarce que
les vignes y ont été gelées, que le vin fera défaut, les Cannibales qui habi-
tent une autre partie du globe et auxquels il est inconnu souffriront quand
même de la soif.
34, Galler. — Se réjouir; de ce mot viennent gala, régaler.
« Je plains le temps de ma jeunesse.
Auquel est plus qu'en autre temps galle. » Villon.
252,
23, Argoulets. — Archers à cheval, puis arquebusiers à cheval, qui devin-
rent plus tard les dragons. Au temps de Montaigne, était le nom géné-
rique du soldat de peu d'importance, dont on ne faisait pas cas, pro-
bablement parce que tirant à cheval, leurs coups n'étaient pas fort à re-
douter, et que, comme cavaliers, ils étaient empêchés par leur arme à feu.
^, Pouillier. — Expression bourguignonne : poulailler, bicoque, et par ex-
tension, mauvaise place de guerre non défendable.
39, Pytbagoras. — Cicéron, T'use, V, 3. — J.-J. Rousseau, dans V Emile, IV,
parait avoir transcrit ce passage d'après les Essais.
39, Retire. — Ressemble; retirer à quelqu'un c'est lui ressembler; de là l'ex-
pression « tirer un portrait », qui se dit parfois pour « faire un portrait ».
254,
2, Physique. — Les éd. ant. port. : Musique.
3, Desja. — Add. des éd. ant. : le goust.
13, Elles. — On a déjà vu que Montaigne emploie le mot « art » au féminin;
mais ici c'est assez surprenant, ayant dit à la ligne précédente les « arts
libéi'aux ». — La pensée est de Sénèque, Episl. 88.
23. Vtilité. — Aux sciences qui sont d'utilité. — Diogkne Laerce, Socrate,
II, 21, dit -< : Socrate fut le premier philosophe qui fit porter ses études rela-
tives à la conduite dans la vie et aux mœurs, sur ce qui est bien et ce qui
est mal. »
30, Aqua. — Les Poissons, le Lion, le Capricorne sont trois des constellations
du Zodiaque, zone idéale de la sphère céleste dont l'écliptique, plan dans
lequel le soleil se meut, occupe le milieu. Chacune des constellations du Zo-
diaque, au nombre de douze, correspond à peu près à un mois de l'année
durant lequel le Soleil semble s'y mouvoir d'un mouvement continu, ce
sont : la Vierge (septembre), la Balance (octobre), le Scorpion (novembre),
le Sagittaire (décembre), le Capricorne (janviei*), le Verseau (février), les
Poissons (mars), le Bélier (avril), le Taureau (mai), les Gémeaux (juin), le
Cancer (juillet) et le Lion (août).
Îi5, BowTEw. — Les Pléiades et le Bouvier sont des constellations de l'hémi-
sphère boréal.
36, Pytbagoras. — Diocène Laerce, 11,4.
256,
5, Deuis. — En forme de convei"sation. Devis n'est plus en usage dans ce
sens, mais on le retrouve dans le mot deviser qui se dit en style familiei-.
NOTES. LIV. I, Cil. XXV. VOL. I, PAG. 256. F.341
11, Pour. — Add. des éd. ant. : après sa mode.
12, Leçon. — Add. des éd. ant. : qui est la philosophie.
14, Gaza. — Auteur d'une grammaire grecque, un pou obscure, pour les com-
mençants.
27, Grammairien. — Plutarque, Des oracles qui onl cessé, 5. — Démétrius re-
venait d'Angleterre; son observation n'avait rien de critique, c'était une
simple entrée en matière, à la suite de laquelle il se lit admettre à prendre
part à la conversation.
oi, BâX),ti). — Je jette, je lance; l'ait au futur BaXbi, avec un seul X.
o4, BÉXTKrrov. — C.-à-d. qui perdent leur temps à chercher d'où peuvent dé-
river ces comparatifs et superlatifs (comparatifs et superlatifs des adjectifs
XsCpeui;, mal, et àYaÔô;, bon), dont la formation est irrégulière ou qui dérivent
de mots autres que leurs positifs.
258,
13, Baralipton. — Mots barbares qui, dans l'ancienne logique scolastique,
servaient à distinguer deux des dix-neuf formes de syllogisme. — Ce n'est
|)as, a dit Pascal, Baroco et Baralipton qui forment le raisonnement...; et
1 une des principales raisons qui éloignent le plus ceux qui entrent dans
ces connaissances, du véritable chemin qu'ils doivent suivre, est l'imagi-
nation qu'on prend d'abord que les bonnes choses sont inaccessibles.
15, L'âme. — Les éd. ant. port. : la fortune.
17, Epicycles. — Terme d'astronomie; cercle dont le centre est sur la circon-
férence d'un autre cercle, servant dans le système planétaire de Ptoléméc,
qui n'a plus cours, à expliquer les irrégularités apparentes du mouvement
des planètes et leurs distances variables par rapport à la terre. — Pris ici
au figuré, a le sens d'hypothèses.
19, Inaccessible. — L'école d'Aristote dont les enseignements faisaient loi à
l'école; cette thèse avait été du reste celle de beaucoup d'autres, de Simo-
nide entre autres.
"20, Rebours. — Cette divergence d'opinions subsiste toujours. D'Alembert,
Portails ont dit « que la véritable philosophie est à la portée de tous, que
le vrai, même en métaphysique, se trouve en germe dans tous les esprits
qui le reconnaissent dès qu'on le leur montre »; et Cousin déclare que
« le genre humain n'est pas philosophe et que la philosophie est l'aristo-
cratie de l'espèce humaine >■.
23, Doux fleurantes. — Odoriférantes; l'expression paraît forgée par Mon-
taigne.
21, Célestes. — Il semble que Jlontaigne ait eu ici une réminiscence des
termes d'une traduction d'un passage de Xénophon, exprimant du reste
l'idée contraire à la sienne, traduction parue en 1553 et qu'il possédait :
«... Paré des plus riches couleurs.
Le vice nous conduit par des chemins de fleurs;
De roses sous ses pas les plaisirs nous enchaînent;
Mais des sentiers aigus à la vertu nous mènent.
Et son temple est fondé sur un roc sourcilleux. •
30, Despite. — Courroucée, qui marque du dépit. — On trouve "dans Cl.
Marot : •
« Le Tout-Puissant de leurs façons despites
Se moquera, car d'eux il ne lui chault. •
31, Gents. — Quoi qu'en dise ici Montaigne, ce n'est pas là le chemin de la
vertu, qui, d'après Bossuet, est un chemin où le chrétien grimpe plutôt
qu'il ne marche. Du reste au liv. II, ch. XI (II, 88), il dit avec plus de vé-
rité que « la vraye vertu demande vn chemin aspre et épineux... >>.
34, Poètes. — Hésiode, "Epy. xai ^|x., v. 287.
37, Angélique. — Héroïnes du poème de l'Arioste « Roland furieux ».
41, Garce. — Jeune fille. V. N. I, 458: Garces.
Il, Attifet. — Coiffure du temps; à proprement parler, carcasse en fil de fer
F.342 ESSAIS DE MONTAIGNE.
soutenant lo haut du bonnet et lui donnant la forme figurant d'ordinaire
dans les portraits de Catherine de Médicis et de Marie Stuait.
260,
2, Phrygie. — Paris, qui eut à décerner le prix de beauté que se disputaient
Junon, Pallas et Vénus, et qui l'attribua à cette dernière.
2, Leçon. — « Lo passage qui suit est un bel éloge de la vertu, il serait dil-
ficile d'en parier plus dignement et avec plus de justesse. » P.vyen.
13, Lasseté. — Lassitude, qui en dérive et l'a remplacé dans la langue.
15, Crudité. — Indigestion, de cruditas qui, en latin, a même signification.
19, Musqués. — ■• La vertu humaine la plus parfaite, est celle qui sait réduire
le plus ses besoins. » Plutarque.
02, Sinon. — Addition de l'e.xemplaire de Bordeaux écrite de la main de
Montaigne : « que de bone jieure son gouuerneur l'estrangle s'il est sans
tesmoins, ou ».
262,
8, Rota. — Roue, plateau horizontal que le potier met en mouvement avec
les pieds, et sur lequel il place, pour la façonner, l'argile qu'il emploie pour
les objets qu'il confectionne. •
11, Disait. — Dans un passage cité par SÉNf:QUE, Epist. 49. — La réflexion
suivante se trouve également dans Sénèque.
16, Action. — Ce passage rapproché de celui-ci : « C'est vn bel agencement
que le grec et le latin, mais que l'on acheté trop cher », et de cet autre :
'< Fâcheuse suffisance, qu'vne suffisance pure liuresque », renferme la con-
damnation de notre système d'éducation.
Dans son remarquable ouvrage - la Psychologie de l'éducation », M. G.
Lebon dit en substance à ce propos :
Sous ce rapport, nous nous en tenons opiniâtrement à ce qui existait
au XVII" et xvni° siècle et qui, déjà critiqué alors, est de plus en plus
funeste en ces temps-ci où les conditions d'existence ont été profondément
modifiées par les grandes découvertes modernes et les transformations in-
cessantes qu'elles amènent; au point que nous en arrivons à nous trou-
ver dans un état d'infériorité qui nous conduit insensiblement à la ruine,
la lutte pour la vie n'étant pas une vaine formule, mais bien, pour les
peuples comme pour les individus, une réalité qui, de jour en jour, devient
plus aigué.
En France, oublieux de cet autre passage des Essais : •■ Ce n'est pas vue
âme, ce n'est pas vn corps qu'on dresse, c'est vn homme; il ne faut pas
les dresser l'vn sans l'autre, mais les conduire également » (I, 266), dans
les programmes d'instruction secondaire, on n'attache pas aux exercices
physiques, à la vie au grand air, une importance suffisante, et au grand
préjudice du développement corporel de l'adolescent on exagère la durée
des classes et des études; son éducation morale est pareillement nulle ou
à peu pi'ès et l'enseignement intellectuel à la fois ti-op étendu, trop super-
ficiel, embrassant trop d'inutilité et mal donné. Partant de ce principe
faux en matière d'éducation que la théorie doit précéder la pratique et
que les connaissances entrent dans l'entendement par la mémoire, l'en-
seignement classique s'adresse uniquement à celle-ci, gavant ses élèves
d'autant de matières, pour la plupart inutiles, que le temps le permet, sans
même lui donner seulement celui de les digérer et sans avoir recours
simultanément à l'enseignement par les yeux et les oreilles qui seul fait
naître en nous l'esprit d'observation, l'habitude de réfléchir, de raisonner,
la faculté de déduire l'inconnu du connu et est de nature à développer sa
volonté, son jugement, son initiative, sa valeur morale, de former en un
mot des caractères. Aussi, quand cette instruction prend fin, que l'étudiant
devenu homme, livré à lui-même, en arrive à l'application, ce n'est le plus
souvent qu'un incapable chez lequel les germes de ces qualités primor-
diales sont atrophiées, de là le naufrage de tant d'intelligences et de ca-
ractères, une tendance à éviter ce qui peut être difficulté, une profonde
indifférence pour ce qui se passe en dehors de lui, défauts caractéristiques
NOTES. LIV. I, OH. XXV. VOL. I, PAG. 262. F.343
de notre race, dont la décadence est fatalement liée à ces affaiblissements
physiques, intellectuels et moraux de l'individu, qui le plus souvent n'est
qu'un mineur que toute sa vie durant il faudra diriger.
Au lieu de former des industriels, des agriculteurs, des commerçants, des
colonisateurs, cet enseignement, dit classique, ne peut conduire qu'aux
professions libérales et en raison de l'énorme disproportion entre le nom-
bre des appelés et celui des élus, il crée cette multitude de déclassés et de
mécontents qui végètent et parmi lesquels le socialisme recrute ses adeptes
les plus fervents.
Quelques efforts ont bien été faits pour, concurremment avec l'enseigne-
ment classique, développer en France l'enseignement professionnel qui au.\,
connaissances générales réduites au minimum joint l'enseignement pra-
tique d'une quelconque des branches des arts, des sciences, de l'industrie,
de l'agriculture ou du commerce suivant la spécialité de l'école, mais ce
progrès s'est effectué sans faire la place plus grande à l'éducation physique
et morale, et là encore prévalent l'instruction théorique et la récitation
des manuels; aussi ne saurait-on s'étonner que dans de semblables condi-
tions, cet enseignement dont ont si fort à se louer les peuples qui en ont
fait la base de l'éducation, ne produise pas en France les mêmes heureux
résultats.
Chez les Anglo-Saxons notamment le système suivi est le contrepied de
celui admis en France; l'enseignement professionnel en raison de son uti-
lité et de ses avantages prédomine. Partant de ce principe que l'expérience
qui seule instruit les hommes, est aussi seule capable d'instruire la jeu-
nesse, on en déduit que la pratique doit précéder la théorie, par suite les
langues s'enseigner tout d'abord en les parlant, les sciences physiques par
les manipulations, un métier, une profession par l'apprentissage, donnant,
de ce fait même, occasion de se développer à l'esprit d'observation, à la ré-
flexion, au jugement, à la volonté, à l'initiative, à la persévérance. Laissé
libre de bonne heure et ayant possibilité d'agir de lui-même, c'est par les
conséciuences qui résultent pour lui de ses actes, que l'étudiant arrive à
distinguer le bien du mal et contracte cette discipline interne qui constitue
la moralité; il se développe au physique et acquiert du coup d'œil, l'esprit
de solidarité, l'empire sur soi, le dévouement aux intérêts de la collectivité;
quant au respect de l'ordre public, des coutumes établies, à l'obéissance
à l'autorité, c'est affaire de mœurs et de mentalité de race. Dans ces con-
ditions, au sortir même du collège, le jeune Anglais, avec une instruction
générale restreinte, n'a aucune difficulté à trouver sa voie, et est à mèmi!
d'apprendre en peu de temps le complément dont il peut avoir besoin pour
la suivre et le plus souvent devenir quelqu'un.
Aujourd'hui que le télégraphe et la vapeur en réduisant les distances ont
fait du monde un seul et même théâtre d'action, le succès est acquis aux
peuples dont les individualités sont tout à la fois capables, bien trempées au
physique et au moral, dont l'émancipation est complète, et l'esprit de so-
lidarité absolue, quand il s'agit d'intérêts collectifs ; cela nous place incon-
testablement dans une situation désavantageuse pour le présent et inquié-
tante pour l'avenir.
Pour y remédier, au mieux de ce qui est possible, en ce qui concerne
l'éducation, il y aurait lieu en France, de :
Transférer lycées et collèges des villes à la campagne, ce qui est relative-
ment facile en raison de la rapidité des communications.
Réduire dans une notable proportion la durée des classes et des études
et donner aux jeux et aux exercices physiques la même importance qu'aux
autres branches de l'éducation.
Faire de même touchant l'éducation morale; donner de bonne heure et
progressivement aux élèves plus de liberté, les abandonnant à eux-mêmes
dans une assez large mesure afin de leur apprendre à se conduire.
Pour la généralité, réduire l'enseignement, classique au strict nécessaire
de mnémonique, le rendre expérimental; à l'étude du grec et du latin qui
F.344 ESSAIS DE MONTAIGNE.
est sans profit, substituer des traductions et une étude plus sérieuse des
langues vivantes. Supprimer les concours, les classements, les diplômes,
toutes choses où la chance a trop de part et qui engendrent la jalousie plus
que l'émulation, crée des espérances trop souvent chimériques, et les rem-
placer par des examens de passage d'une classe à une autre.
Mais que de difficultés pour la réalisation de pareilles réformes, qui de-
vraient commencer par celle même des professeurs qui, dressés à une mé-
thode qu'ils tiennent pour excellente, dont ils ont le train-train et qui les
fait vivip, sont incapables d'en concevoir et d'en appliquer une autre; en
second lieu, il faudrait rendre iri-esponsables les chefs d'établissement,
sauf le cas de lourde faute, des quelques inconvénients et accidents qu'en-
traine inévitablement de temps à autre le système; et aussi faire que les
parents acceptent de voir leurs enfants retardés dans leurs classes, quand
ils ne sont pas jugés aptes à passer à la classe supérieure, sans qu'il en
résulte du discrédit pour l'établissement. Enfin et par-dessus tout, il y au-
rait à modifier l'esprit public, de telle sorte que l'enseignement classique,
qui en raison de son inutilité est chose de luxe, ne soit donné qu'à ceux
auxquels leur état de fortune permet de ne rien faire, au lieu de s'étendre
de plus en plus, par l'octroi de bourses, si bien que dans notre pays, dont
la population agricole, commerciale et industrielle est les 9/10 de la po-
pulation totale, la clientèle de l'enseignement professionnel n'est que le 1 s
du nombre de nos étudiants; et ce, parce que pour la plupart des emplois
de tout repos des administrations de l'État, dont l'obtention est le desi-
deratum de la majorité des Français, pour lesquels quelque garantie d'ins-
truction est demandée, les diplômes de l'enseignement classique sont a
peu près les seuls admis ou tout au moins dont il soit tenu compte ; à quoi
s'ajoute ce préjugé qui longtemps encore pèsera sur nous, par suite du-
quel le plus infime clerc, le plus humble fonctionnaire, le moindre emplo} é,
le plus modeste professeur se croient d'une caste bien supérieure à celle
d'un industriel, d'un commerçant, d'un artisan ou ^'un paysan dont les
travaux cependant exigent beaucoup plus d'intelligence. Malheureusement
aussi, avec la propension de l'Université à monopoliser l'instruction, et de
la sorte supprimer la concurrence, il est à craindre que ces errements né-
fastes se perpétuent au point que le mal devienne irrémédiable.
Notons encore que l'enfant ne peut plus tout apprendre, qu'il faut choisir,
et nos programmes, nos méthodes, nos établissements d'instruction ne rt'-
pondent plus à la diversité des vocations et des mœurs, aux conditions
changeantes de la vie moderne; par suite aussi, un lycée, un collège ne sau-
rait davantage demeurer un froid immeuble administratif, taillé sur un
modèle uniforme, celui si peu attrayant, si généralement dénué d'air et
de lumière que nous connaissons.
39, Lasse. — Diogèxe Laerce, X, 122.
41, Garçon. — Dans un collège, comme portent les éd. ant. ; qu'on l'y mette
interne.
264.
8, Affolé. — DiOGÈxE Laerce, IV, 62.
25, Faire. — Plutarque, Symposiaques (mélanges), I, 1.
oo, Conuiue. — Banquet, festin, repas (en latin convivium) ; nom d'un dialo-
gue de Platon.
38, Autres. — C.-à-d. il n'y a pas doute qu'ainsi dressé à la recherche et à
l'amour de la vertu, il ne soit moins désœuvré que les autres.
266,
11, Platon. — Cité par Plutarque dans le traité Des moyens de conserver la
santé.
16, Il se fait. — Var. des éd. ant. à 88 : aux collèges où.
17, Lettres. — Add. des éd. ant. h 88: et leur en donne goust.
25, Dameret. — Efféminé, qui fait le beau et cherche à plaire aux dames.
31, Office. — Leur devoir ; pendant les classes, les études, la récitation des leçons.
36, Quintilian. — Jnstil. oral., 1,3.
NOTES. LIV. I, CH. XXV. VOL. J, PAG. 268. F.34b
268,
1, Grâces — Étaient dans l'antiquité la personnification de ce qu'il y a de
plus séduisant dans la beauté. Elles étaient au nombre de trois : Aglaé (qui
excite l'admiration), Thalie (qui inspire la joie), Euphrosyne (qui réjouit
l'àme) ; on les représentait sous la ligure de trois jeunes vierges nues, sans
ceinture, les mains et les bras entrelacés, formant des danses gracieuses
autour de Vénus. Myth.
2, Speusippus. — Diogène Laekce, IV, 1.
15, Soleil. — Sextus Empiricus, Pyrrh. Hyp., 1, II.
10, Cocqs. — Plutarque, De l'envie el de la, haine, vers le commencement.
— Alexandre le Grand frémissait, dit-on, au seul toucher d'une pêche;
Turenne se trouvait mal, assure-t-on, s'il voyait une araignée : petites fai-
blesses dé grands homme, si cela est exact. — Jacques l""" d'Angleterre,
qu'on ne saurait mettre sur le même rang, se trouvait mal, dit-on encore,
à la vue d'une épée nue; peut-être était-ce le souvenir de sa mère qui
l'obsédait. — Plusieurs membres de la famille de Candale, avec laquelle
Montaigne était lie, et c'est probablement à eux qu'il lait allusion ici, ne
pouvaient supporter l'odeur de la pomme. — Ambroise Paré en dit autant
de Wladislas, roi de Pologne, et cite des exemples de l'horreur inspirée par
le pain, les œufs, les légumes, les chats, les souris, les araignées, etc.. —
Les cas de ces singulières antipathies et autres analogues sont fort nom-
breux, en voici quelques autres : Alaiis Borrichius cite un cabaretier qui
frémissait et se couvrait d'une sueur froide, quand il voyait du vinaigre;
une demoiselle qui ne pouvait regarder une plume, sans jeter des cris; un
gentilhomme écossais qui pleurait à l'aspect d'une anguille. — Le maréchal
de Brézé s'évanouissait à la vue d'un lapin: la fièvre s'emparait d'Erasme,
dès qu'il voyait ou sentait du poisson; Joseph Scaliger tremblait en aper-
cevant du lait, et ne pouvait souffrir davantage le cresson; l'illustre ma-
thématicien Cardan avait horreur des œufs; Ladislas Jagellon redoutait
les pommes; si l'on faisait sentir ce fruit à un sieur La Chesnaye, secré-
taire de François P% le sang s'échappait en abondance de ses narines; on
cite des gens que le froissement d'une robe de soie fait tomber en pâmoi-
son. — Samuel Pelissius parle d'un homme qui se troublait et divaguait,
(|uand il voyait de la salade; un autre éprouvait une douleur aiguë quand
on parlait des pieds ou de ce qui s'y rapporte, bas, souliers, etc., et cette
douleur cessait dès qu'on parlait do la tète ou de ce qui s'y rapporte, che-
veux, etc.. — Henri III ne pouvait demeurer dans une chambre où était
un chat; le maréchal de Schomberg avait la même aversion. — Un con-
seiller au parlement de Bordeaux avait été si effrayé à la vue d'un hérisson
qu'il crut, pendant plus de deux ans, que ses entrailles étaient dévorées par
cet animal. — D'api'ès Pierius Valerianus, l'odeur des roses faisait évanouir
te cardinal Caraffa; il en dit autant d'un cardinal de Cordoue, d'un évêque
de Breslau; et ce qui est plus particulier, il cite un espagnol, Dom Juan
Ruai de Polemaque, sur lequel entendre prononcer le mot Lana produisait
le même effet. — Balzac a éci-it : « La rose est mon inclination, comme
c'était l'aversion de M. le chevalier de Guise » ; Catlicrine de Médicis ne
pouvait non plus en supporter l'odeur. — Le chancelier Bacon tombait en
défaillance, quand il y avait une éclipse de lune; le duc d'Epernon quand,
' dans un repas, on lui servait du levraut; le maréchal d'Albret, du marcassin.
— II existe sur ce sujet deux ouvrages publiés l'un en 1617, l'autre en 1665,
le premier de Sagittarius, savant allemand, le second de Martin Schoo-
ckius, savant hollandais. Payen.
26, Boucle. — C.-à-d. contenir. Métaphore tirée' de l'usage où l'on est de
boucler une jument par l'interposition d'un anneau pour empêcher qu'elle
ne soit saillie, ce qui était également le principe des ceintures de chasteté
du moyen âge, dont le musée de Cluny, à Paris, à des spécimens; se dit
aussi de quelqu'un jeté en prison.
32, D'autant. — Boire d'autant, c'est faire raison, tenir tête à quelqu'un à
F.346 ESSAIS DE MONTAIGNE.
table, buvant à chaque invitation qu'il vous en fait en buvant lui-même.
270,
7, Recita. — Peut-être Gaspard de Schomberg, qui était reçu à Montaigne
et qui a rempli pour la France diverses missions en Allemagne, et avait
été notamment chargé par Charles IX d'aller justifier auprès des seigneurs
de cette contrée les massacres de la Saint-Barthélémy en faisant connaître
les nécessités qui avaient motivé cet acte politique.
0, Alcibiades. — Pixtakque, Alcibiade, 14.
18, Vtramque. — Montaigne emploie ces deux vers dans un sens directe-
ment opposé à celui qu'ils ont dans Horace, d'où ils sont tirés.
1!>, Leçons. — Var. des éditions antérieures : Voicij mes leçons, où le faire va
auec le dire. Car à quoy sert il qu'on presche l'esprit, si les effccts ne vont
quant et quant? au lieu de : « Voie}'... escrites » (19 à 32).
20, Voyez. — ■< Voulez-vous, disait S. Ckégoire, un abrégé de la règle de saint
Benoît, considérez sa vie; voulez-vous un précis de sa vie, considérez sa
règle : l'une est l'expression de l'autre. »
21, Platon. — Dans le dialogue intitulé Les Rivaux.
27, Philosophe. — Ce n'est pas Heraclite, mais Pythagore, qui fit cette ré-
ponse; ce fait rapporté par Cicéron, Tusc, V, 3, a été relevé par lui dans
un livre d'Heraclite.
32, Escrites. — Diogèxe Laerce, \1, 48.
272,
7, Paroles. — Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens .
9, Babil. — Plus encore que chez toute autre race, l'exubérance de paroles
existe chez les Latins, dont nous sommes. De tous temps, ils ont été grands
discoureurs, amis des mots et de la logique, se préoccupant très peu des
faits et faciles à gagner à toute idée présentée dans un beau langage. Au-
jourd'hui chacun s'en mêle et il n'est même plus besoin de logique; pour
l'éussir, il ne suffit plus, en France, mais c'est uije chose à laquelle rien
ne supplée, que d'être prêt à parler, à l'impromptu, sur quoi que ce soit, et
à même de trouver de suite des arguments, tout au moins brujants, pour
répondre à ses adversaires; la compétence, pas plus que la vérité et la
sincérité, ne sont nécessaires; des lieux communs, un langage tant soit peu
amphigourique, des évocations flattant les passions de l'auditoire assurent
le succès; et cette nécessité d'être à môme de parler sans réfléchir est telle,
qu'elle élimine des affaires publiques, et notamment du Parlement, nom-
bre d'hommes de val«ur réelle et de jugement pondéré.
33, Ombrages. — Ombres, apparences, ou encore aperçus, comme on dit au
jourd'hui.
39, Tiens. — Add. des éd. ant. : que qui en a l'esprit.
274,
2, Bergamasque. — Le patois de Bergame passait, du temps de Montaigne,
pour le langage le plus grossier de l'Italie.
7. Pas. — C.-à-d. pas plus que ne fait, que ne sait. — Un emploi analogue
du verbe faire se retrouve dans cette expression « si fait », encore en
usage : « Vous ne mangez pas? — Si fait (si, je fais l'action de manger) ».
7, Petit pont. — Aujourd'hui, pont du Châtelel, un des ti'ois premiers ponts
de Paris, ainsi nommé par opposition au Grand pont, devenu le Pont au
Change et actuellement le Pont-Neuf.
10, Maistre es arts. — Gradué des anciennes universités à la suite d'épreu-
ves soutenues avec succès, qui avait qualité pour enseigner les humanités
et la philosophie; arts était alors synonyme de lettres.
15, A fer. — Tacite, Dial. des Orateurs; le texte latin porte Aper.
22, Faire. — Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens.
28, Feray. — Plut.arque, Instruction pour ceux qui manient les affaires d'É-
tat, 4.
30, Consul. — Plutarque, Caton. — Montaigne donne un sens trop général à
la réflexion de Caton qui ne se moquait pas de l'éloquence de Cicéron.
mais de l'abus qu'il en fit, dans le temps de son consulat, un jour que,
.NOTES. LIY. I, CH. XXV. VOL. I, PAG. 274 F.347
plaidant pour Muréna contre lui Caton, il se mit à tourner en ridicule les
principes essentiels de la philosophie stoïcienne, d'une manière par trop
comique, peu digne de la fonction qu'il occupait, ce qui lui attira cette
observation de son adversaire plus piquante que tous les traits qu'il venait
de lui décocher. Coste. — Ciccron était, du reste, lui-même fort porté à
l'épigramme. Dans ses Saturnales, Mackobe cite quelques-unes de ses plai-
santeries. Parlant de César : « La ceinture m'a trompé », dit-il, faisant al-
lusion à ce qu'il portait sa toge à la mode dos jeunes gens efféminés, fui
qui était l'homme d'action par excellence. De Pompée, qui venait de con-
céder le droit de cité à un barbare : ■< Il le donne aux autres et est impuis-
sant à nous le rendre à nous-mêmes. » De Caninius Dibulus fait consul,
on 45, la veille du jour où finissait l'année, avec laquelle sa charge prenait
fin : « Nous avons eu en Caninius un consul vigilant; de tout son consu-
lat il n'a pas goûté le sommeil. •
35, Force. — C.-à-d. n'importe, il n'y a pas lieu de s'y opposer, de l'y con-
traindre. Cette locution se retrouve avec le même sens dans Rabelais.
276.
10, Vers. — Plutarque, Si les Athéniens ont été plus excellents en armes qu'en
lettres, 4. — On raconte à pou près la même chose de Racine qui écrivait
d'abord ses pièces en prose et les estimait terminées, lorsqu'il ne lui res-
tait plus qu'à les mettre en vers.
11, Le demeurant. — Var. des éd. ant. : les mots, les pieds et les césures qui
sont d la vérité de fort peu au pris du reste. Et qu'il soit ainsi...
18, Fera il. — C.-à-d. mais que fera notre jeune élève, si on le presse... —
Montaigne revient ici à son principal sujet, qu'il semblait avoir entière-
ment perdu de vue.
•20, Désaltère. — Parmi les singularités de ce genre, nous rappellerons en-
core celle-ci : « Vous avez des cornes ou vous n'avez pas de cornes : Or
vous n'avez pas de cornes, donc vous avez des cornes. »
•21, Respondre. — SÉNh:QUE, Epist. 49.
"23, Empesche. — Diogène Laerce, II.
"26, Aage. — DiotiÈNE Laerce, VIL
36, Quérir. — Montaigne détourne, en effet, assez fréquemment le sens des
citations qu'il donne; il était capable d'inventer le procédé; mais il a pu
le trouver dans saint Paul, ainsi que le reconnaît saint Jérôme.
36, Suiure. — « Qui traite un beau sujet, est sans peineéloquent. » Euripide.
37, Aller. — J.-J. Rousseau a dit aussi : « Toutes les fois qu'à l'aide d'un so-
h'cismc, jo pourrai me faire mieux entendre, ne pensez pas que j'hésite. »
Il s'est bien fait entendre sans avoir besoin de solécismes; mais cette phrase
montre qu'il était aussi peu esclave que Montaigne des exigences de la
grammaire. Le Clerc.
278,
Brusque. — Montaigne excelle, en effet, à user du laconisme, témoin le
membre de phrase qui se rencontre quelques lignes plus haut : « Que le
(iascon y arrive, si le François n'y peut aller. »
4. Feriet. — Épitaphe de Lucain, citée dans la Bibliothèque latine de Fa-
hricius.
5, Affectation. — Les éd. ant. aj. : et d'artifice. •
7, Fratesque. — Monacal, de ritalien fratre, moine.
8, Gaesar. — Add. des éd. de 80, 82 et 87 : Qu'on lui reproche hardiment ce
qu'on reprochoit à Séneque, Que son langage estoit de chaux viue, mais que
, le sable en estoit à dire.
9, Appelle. — Suétone, César, 55, ne dit pas que l'éloquence de César était
soldatesque, c.-à-d. brève, saccadée, nerveuse, comme on imagine le lan-
gage du soldat, parce que la devise qui lui convient est « acta non verba
(des actes et non des paroles) », mais que, sous ce rapport aussi bien que
sous celui des talents militaires,- il est hors de pair. L'erreur de Montaigne
vient de ce que certaines éditions de l'auteur latin sont mal ponctuées en
ce passage; par suite sa remarque à cet égard est sans objet.
F.348 ESSAIS DE MONTAIGNE.
22, Soy. — C.-à-d. l'éloquence qui fixe toute l'attention de l'auditeur fait tort
aux choses dont on parle, elle en fait en quelque sorte la critique.
27, Paris. — Quand on demandait à Malherbe son avis sur quelque mot
français, il renvoyait ordinairement aux crocheteurs du Port au Foin, di-
sant que c'étaient ses maîtres pour le langage, ce qui a donné lieu à cette
protestation de Régnier :
« Comment! 11 faudrait donc pour faire une œuvre grande,
Qui de la calomnie et du temps se défende
Et qui nous donne rang parmi les bons auteurs.
Parler comme à Saint-Jean parlent les crocheteurs. •
II y a toutefois lieu de croire que cette indignation était inspirée à Ré-
gnier plus par son esprit de contradiction que par ses convictions, si on
s'en rapporte au jugement que Bou.eau a porté sur lui :
Heureux si ses discours, craints du chaste lecteur,
Ne se sentaient des lieux où fréquentait l'auteur.
30, Seulement. — Diogène Laerce, X, 13.
37, Platon. — Des Lois, I.
40. Meilleurs. — Les éd. ant. port. ; miens.
40, Disait. — Stobée, Serm., 34.
280.
•25. Latine. — Cet Allemand se nommait Horstanus; il professa dans la suit«î
au collège de Guyenne. Le père de Montaigne essaya d'en agir de même
pour ses autres enfants; il dut y renoncer par la difficulté de trouver à qui
en donner la charge.
28, Moy. - Latiniser ainsi, c'est bien: mais que devient, durant ce temps,
la douce et irremplaçable éducation, qui ne peut se donner en latin, que
nous recevons sur les genoux de nos mères, qui forme nos premiers élans
vers les choses généreuses, notre première préparation aux combats de la
vie? A l'égard de Montaigne, cette manière de faire a dû favoriser en lui
l'impatience de toute règle et de toute discipline. Margerie.
282,
4, Romanorum — Ouvrage estimé, publié en 1555.
6. Temps. — Dans ses ouvrages, Muret expose en un parfait latin antique
des idées toutes modernes. On a de lui des notes sur les auteurs anciens,
dont ses études ont beaucoup contribué à épurer les textes, des Harangues,
des Poésies et des Épîtres. — On raconte de lui qu'étant en Italie, il tomba
gravement malade et entra dans un hôpital. Là. deux médecins délibérant
près de lui sur le traitement à suivre à son égard, et le prenant pour un
homme du commun, ils se dirent en latin : « Faciamus periculum in anima
vili (Que risquons-nous sur un être de rien)? » pensant bien n'être pas
compris; et Muret de leur crier aussitôt : « Ati vilis anima pro qua mor-
luus est Christus (Eh quoi, n'est-ce rien, un être pour lequel le Christ a
donné sa vie)? » Et il sortit au plus vite de ce lieu pour échapper aux ex-
périences. BolilCet.
14, Intelligence. — Si Montaigne ne savait pas le grec, il n'en était pas de
même de sa sœur Madame de Lestonna, témoin l'anecdote suivante qui
n'est pas sans analogie avec celle de la note précédente : M. de Lestonna
reçut un jour la visite d'un ami venant lui proposer une « débauche d'a-
mourette » ; et sa femme se trouvant là, l'ami pensant n'être pas compris
d'elle, s'exprimait en grec ; il se trompait, elle le lui fit bien voir, il dut dé-
taler au plus vite.
16, Tablier. — Table servant aux jeux de dames, d'échecs et de trictrac,
comme il en existe encore aujourd'hui.
25, Et ne tus... seruist. — Var. de 80 .et auoil, vn ioueur d'espinelte pour
cet effect.
NOTES. MV. I, CH. XXV. VOL. I, PAG. 282. F.349
20, Instrument. — Ce soin était confié, comme l'indique la note précédento,
à un joueur d'épinelte, petit clavecin qui est devenu le piano. — Le ré-
veil de Montaigne, enfant, a fait le sujet d'un tableau par Ed. Hamman,
(lui a été exposé à Paris, au salon de 1847.
:i5, Bien. — Var. des éd. ant. : d'vn higement bien seur et ouuert.
284,
(i, Guienne. — A Bordeaux.
U), Lire. — Les Eléments de mathématiques d'Euclido furent pour Pascal
ce qu'avaient été poui' Montaigne les Métamorphoses d'Ovide.
23, Lancelot du Lac. — Un des principaux chevaliers do la Table Ronde
(ordre do chevalerie fabuleux, institué, suivant les légendes de la Grande-
Hretagne, à la fin du v siècle) ; ses exploits ont été chantés au moyen âge,
dans un roman de ce nom.
2.'{, Amadis. — Amadis des Gaules, poème espagnol de chevalerie du moyen
âge, écrit par divers auteurs, traduit en français par ordre de François I".
23, Bordeaux. — Huon de Bordeaux, clianson de geste, autrement dit de faits
héroïques du xn" siècle.
25, Discipline. — C.-à-d. le soinrj qu'on auoit à'mon institution (qu'on ai)por-
tait à mon éducation), comme le portent les éditions antérieures.
29, Conniuer. — Qui eut le bon esprit d'être de connivence, d'accord avec
moi, en ayant l'air de ne pas s'en apercevoir.
30. L'JEneide. — Poème épique, l'un des chefs-d'œuvre de Virgile, ayant pour
héros Enée, un des chefs de Troie, venu en Italie pour s'y établir, après
la ruine de cette ville, et auquel les Romains faisaient remonter leur origine.
286,
2, Parties. — Acception tirée de l'anglais, signifie ici : qualités, talents,
moyens intellectuels.
7, Fainéantise. — Var. des éd. ant. : Stupidité.
27, Cognoissait. — « Sous ses airs d'indolence, l'esprit de Montaigne n'en
était pas moins, en effet, plein de hardiesse, couvant bien des audaces. »
Sainte-Beuvk.
288,
5, Deformabat. — Montaigne s'élève ici contre la réprobation qui, à cette
époque et longtemps encore après, pesait sur les comédiens. De nos jours
ils sont estimés à juste titre à l'égal des autres suivant la conduite privée
de chacun, bien qu'on puisse leur reprocher à tous en général que la ré-
clame à outrance qui se fait autour de leurs noms et qu'excusent les né-
cessités du métier, les porte trop à en prendre les exagérations pour des
réalités, à quoi il faut ajouter qu'une différence existe entre eux plus
accentuée que dans n'importe quelle autre carrière. Les artistes de second
ordre (acteurs et chanteurs) qui vont pérégrinant de ville en ville, peinant
à l'extrême pour arriver à jouer presque chaque jour des pièces différen-
tes, gagnent peu, sont parfois obligés pour vivre à des compromissions
que le besoin excuse, et leur considération s'en ressent. Combien autre est
l'existence des coryphées de la profession, jouant cent fois de suite et plus
la même pièce ! Ils ont des loisirs que les précédents ne connaissent pas et
en outre réalisent des bénéfices qui leur permettent la vie la plus large;
à cela rien à dire. Seulement il y en a parmi eux qui oublient trop que le
monde dépense sans compter pour ses plaisirs, alors qu'il est le plus re-
gardant pour ce qui est de première nécessité, et ils jaugent leur valeur
d'après l'argent dont on les comble et deviennent encombrants, s'estimant
sans vergogne au-dessus de ceux-là mêmes dont ils interprètent les œuvres,
ne se disant pas que dans Molière, dont ils s'honorent, c'est l'observateur,
le moraliste, l'écrivain incomparables qu'on admire, et pas du tout l'acteur
depuis longtemps ignoré de beaucoup.
8, Valent. — Qui méritent d'y être admis.
17, Spectacles. — Le premier édifice moderne, complètement clos, spéciale-
ment destine'; à cet usage, a été élevé, vers 1500, par le Bramante, dans le
Vatican, à Rome; ce n'est (|u'à partir du xvii" siècle, qu'il a été construit
F.3i>0 ESSAIS DE MONTAIGNE.
on Franco des salles porinanentos do tli(''âtre. — Tout récemment, on a
ciierché à faire revivre dans le midi, à Béziers, à Orange, le théâtre on
plein air, et cela a réussi surtout par l'originalité, la rareté du fait; mais
ces immenses scènes antiques à ciel ouvert conviennent bien mieux aux
jeux du cirque, aux combats de gladiateurs, aux courses de taureaux, qu'à
des représentations littéraires.
17. Diuertissement. — Diversions, qui servent à détourner les gens de se li-
vrer en secret, à l'écart, à des actions qui ne sont pas à louer.
17, Occultes. — Tout ce passage est en contradiction avec ce qu'a écrit plus
tard .J.-.l. Rousseau sur ce même sujet dos spectacles; et ce que Montaigne
on dit est incontestablement plus vrai, plus solide et mieux pensé que les
sophismos éloquents du philosophe de Genève.
22, Espouser. — Ce chapitre, qui ne saurait être ni trop loué, ni trop lu, ni
trop médité, fait autorité en matière d'éducation; la partie de V Emile où
J.-J. Rousseau ti-ait'î cette question, n'en est qu'un commentaire. Ce sont
les mêmes vues, les mêmes idées plus ou moins étendues ou resserrées,
mais présentées d'une manière moins piquante, moins originale, avec
une éloquence plus iiTfposanto sans doute, mais moins persuasive, parce
qu'elle est moins naturelle. 11 est à observer que les seuls précoptes vérita-
blement utiles et pratiques sur l'éducation des enfants qu'on remarque
dans le livre do Rousseau sont précisément ceux qu'il doit à Montaigne :
pour peu qu'il s'écarte de son guide, il ne dit guère que des lieux com-
muns, ou bien s'égare et se perd dans un dédale d'idées vagues, incohé-
rentes, chimériques.
CHAPITRE XXVI.
Ce chapitre est numéroté XXVII dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
23, Suffisance. — Rien n'est plus vrai du fait même de notre raison dont la
conception est des plus limitées, qui ne peut en outre juger que par déduc-
tion et est bien loin de voir les choses comme elles sont et en ignore tou-
jours les causes premières, et plus encore par les influences des milieux
ambiants qu'elle subit jusqu'à complet anéantissement.
Cet effet est particulièrement manifeste quand on considèi-e à quelle
omnipotence atteignent les croyances les plus contraires à la raison : « Credo
quia absurdum, je crois par cela même que c'est absurde », aphorisme émis
par Tertullien en matière de foi, est un axiome d'application constante.
De fait, une croyance ne dépend pas de la part de vérité ou d'erreur
qu'elle peut contenir, mais uniquement des sentiments qu'elle fait naître
et des sentiments qu'elle inspire. Impérativo au suprême degré, elle n'ad-
met ni analyse ni discussion et par elle les erreurs les plus évidentes so
transforment en vérités éclatantes; chez les convaincus, l'intelligence la
plus haute est impuissante contre l'entraînement de la foi ; l'apôtre ne
doute de rien, aucune difficulté ne l'embarrasse.
En dépit de tout l'aisonnement, les croyances communes constituent une
force qui donne à un peuple une cohésion, une énergie qui contribuent
dans la plus large mesure à sa sauvegarde; et l'un de nos plus grands
dangers à l'époque actuelle est bien certainement de n'avoir plus guère do
croyances communes (G. Lebon).
29, Saturusque. — Le texte latin porte saliate; saturus mis pour satur cons-
titue un barbarisme. Le Clerc.
290,
1, Juger. — Add. des éd. ant. : des choses.
2, Nature. — Les éd. ant. port. : Dieu.
NOTES. LIV. T, CH. XXVI. VOL. I, PAG. 292. F. 351
292.
12. Rien trop. — Maxime philosophique célèbre attribuée par Aristote à
Bias ; Pline en fait honneur à Chilon ; Diogkne Laerce pareillement, mais
ensuite il en dote Solon; on l'a attribuée à d'autres encore. — Elle a été
émise à maintes reprises ; on en retrouve le sens dans Homère ; Térence,
dans son Andrienne, la met dans la bouche d'un esclave : « .Je pense, dit-il,
que beaucoup est chose utile dans la vie, pourvu que beaucoup ne soit pas
trop. » Horace, dans sa satire I, la développe en deux vers souvent cités :
« En toutes choses, il est certain tempérament, il y a des limites détermi-
nées et le bien ne se trouve ni en deçà ni au delà. » Abstemius l'e.xprime
de la sorte : •- Nul immodéré ne dure longtemps. » « Trop, c'est trop, » a
dit RivARoi.. « Surtout, Messieurs, pas de zèle, » répétait Tài.leyrand à ses
diplomates. « L'excès en tout est un défaut, » est un aphorisme des plus
usités. On dit encore : <■ De peu on jouit, de trop on pàtit. » Dans le Para-
dis perdu de Milton, Adam demande à l'ange Gabriel s'il vivra longtemps :
« Oui, dit l'ange, si tu observes la règle : Rien de trop. » La Fontaine en
a fait le titre d'une de ses fables et a dit d'elle avec vérité »
• Uien (le trop est un point
Dont on parle souvent et qu'on n'observe point. »
Enfin, on peut en dire aussi qu'elle était la maxime favorite de Montaigne,
qui aurait pu la prendre pour devise au même titre que « Que sçay-ie »,
car dans ses jugements en toutes choses, comme dans tous les actes de sa
vie politique et privée, il en a fait une application constante.
15, Moquer. — En 1385. Froissaut, III, 17, dit que la rapidité avec laquelle la
nouvelle en parvint du Portugal en France, au comte de Foix, fut attribuée
à ce que celui-ci avait à son service un malin esprit qui lui rapportait la
nuit les nouvelles de ce qui, présentant de l'intérêt pour lui, s'était passé
la veille dans le monde entier.
25, Perdue. — En 93. Antonius Saturninus, qui commandait deux légions
dans la Germanie supérieure, s'était soulevé et avait été battu par le lieu-
tenant de l'empereur en Gaule. La distance du lieu du combat à Rome,
évaluée par Plutarque, Paul Emile, à 20.000 stades (le stade valant 150 pas
environ), ce qui ferait 500 lieues, est en réalité de 250. La nouvelle s'en ré-
pandit dans la capitale de l'empire, le jour même où le fait se produisit,
et Domitien, parti nonobstant à la tète d'une armée pour le combattre,
rencontra, chemin faisant, le courrier qui lui était envoyé pour lui annon-
cer sa défaite.
20, L'accident. — Guerre civile, III, 30.
35, Nature. — Il est exact que Pline présente comme vrais, nombre de faits
qui depuis ont été controuvés, mais c'est inévitable, et dans le domaine de
la science bien des vérités du jour au lendemain perdent cette qualité ; c'est
ainsi qu'il n'existe plus de gaz permanents, alors qu'il n'y a pas un demi-
siècle, on en comptait cinq. Par contre, certaines autres do ses assertions
que nous tenons comme invraisemblables, ne le sont sans doute que parce
que nous ne les avons pas encore vériliées : telle cette propriété qu'il relate
de l'huile maintenant le calme dans une certaine mesure parmi les flots
d'une mer agitée, ce que longtemps on a considéré comme une fable, jus-
qu'à ce qu'assez récemment le hasard l'ait confirmé. Pline, qui manquait
des moyens d'investigation si nombreux aujourd'hui, a composé son His-
toire naturelle, comme Buffon a écrit la sienne qui, sous le rapport de l'exac-
, titude, laisse aussi fort à désirer, ce dont ce dernier est peut-être moins
excusable, vu la différence des temps et une plus grande facilité de con-
trôle; il n'en est pas moins un auteur éminemment précieux qui a con-
servé à la postérité beaucoup d'indications, de procédés que nous avons
utilisés et qui, sans lui, ne seraient pas parvenus jusqu'à nous.
38, Impudence. -^ L'édition de 1588 porte : imprudence.
39, Tesmoigne. — De Cimtale. Dei, XXII. — Les corps de ces deux frères,
P.352 ESSAIS DE MONTAIGNE.
martyrisés au i"' siècle, découverts, d'après uite tradition, on 380, par saint
Anibroise, sur l'indication qu'eux-mêmes, dans une apparition, lui avaient
donnée du lieu où ils avaient été ensevelis, furent transférés par ses soins
dans la cathédrale qu'il faisait construire à Milan; et c'est dans le cours de
cette translation, qu'un aveugle qui avait touché le brancard portant ces
j'eliques avait i-ecouvré la vue.
294,
1-2, Recors. — Témoins; du verbe latin rec-ordari, se souvenir. D'où cette
appellation donnée couramment à ceux qui assistent un huissier pour lui
servir de témoins et lui prêter main-forte en cas de besoin.
IG, Frangèrent. — On s'étonne de voir Montaigne, surtout après avoir dé-
cliné la cro3ance aux miracles attribués à saint Hilairo, se faire le dé-
fensoui" si zélé de ceux que rapporte saint Augustin, parmi lesquels se
trouvent quelques cas de résurrection. La vertu et la piété des témoins ne
sont piis en pareille matière d'importance primordiale, elles peuvent même
porter à se délier de témoignages de personnes dont la foi a pu sur ce point
troubler le jugement et faire préférer ceux de profanes moins portés à cé-
der à semblable entraînement. — Il y a du reste un point qui, en fait de
guérisons miraculeuses, donne à réfléchir : Pourquoi tous les miracles
de cette nature, des temps anciens comme de nos jours, prêtent-ils tous à
être expliqués par la science à laquelle il arrive de résoudre elle-même des
cas semblables? Que n'a-t-on vu une fois, une seule fois, une impossibilité
indiscutable se réaliser, quelqu'un amputé d'un membre, par exemple, ne
serait-ce que d'un petit doigt, le recouvrer soudainement et en user, comme
avant l'accident survenu; ce serait là un miracle idéniable que seraient
obligés de reconnaître les plus incrédules.
26, Créance. — C'est ce triage entre les choses à ci'oire et celles à ne pas
croire qui dans l'Église a donné naissance à la plupart des hérésies et des
schismes, ce qu'indique l'étymologie même du mot hérésie, aîç-naiz, qui
signifie proprement choix; quant au schisme, de ayiGiia., division, il n'en
est que la conséquence.
34, Obéissance. — C'est le principe même de la religion catholique et, de
fait, une religion ne saurait être une sans cela; seulement l'application de
cette autorité souveraine est chose délicate : l'obligation de ne pas empié-
ter sur ce qui n'est pas de son domaine, de s'adapter, dans chaque pays, à
ses mœurs et à ses lois, de n'être ni oppressive ni opprimée, est de bien
grande difficulté, d'autant que toute erreur, toute maladresse préjudicie, à
tort mais d'une façon effective, à la religion elle-même, surtout en des
temps comme les nôtres de libre discussion et d'indifférence religieuse.
39, Sçauans. — Add. des éd. ant. : et bien fondez.
CAPITRE XXYIl.
Ce chapitre est numéroté XXVIIl dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
296,
en a transporté des passages entiers et nombreux.
10, L'ensuiure. — Le suivre des yeux, le regarder travailler, voir comment
il s'y prend.
12, Suffisance. — Élaboré, travaillé avec tout le soin dont il est capable.
24, Ignoré. — Qui ne savaient pas qu'il était déjà désigné sous ce titre.
24, Contre-vn. — Le Contre-un, ou Discours sur la servitude volontaire (Con-
tre-un veut dire : contre le gouvernement d'un seul, la monarchie}, opus-
cule d'une trentaine de pages in-octavo, est un pamphlet qui s'élève contre
les abus du despotisme. Inspiré par les troubles de l'époque, il n'a pour-
tant pas trait aux événements d'alors, et de plus, il ne conclut pas. —
Montaigne dans les éditions antérieures indique que La Boétie l'a composé
à l'àgo de dix-huit ans, et on fin de ce chapitre il dit seize, probablement
NOTES. LIV. I, en. XXVII. VOL. T, PAf.. 290. P.3:i3
pour mieux faire valoir la précocité d'esprit de son ami, car il ne se piquo
guère en général d'exactitude. Ce serait, d'après cela, vers 1548 (^uo ce dis-
cours aurait été écrit; mais il témoigne d'une maturité de talent qui donne
à penser à certains qu'il pourrait bien dater de 1554, alors que l'auteur
avait vingt-quatre ans, ou tout au moins qu'il a été retouché à ce mo-
ment; ils s'appuyent pour cela sur ce qu'il y est fait mention de du Bellay
qui n'avait rien publié avant 1549, de la Franciade de Ronsard et. d'autres
poètes de la Pléiade, dont les poésies commençaient seulement à se répandre.
— Ce n'est que dix ans environ après la mort de l'auteur, en 1574, que cet
('crit fut publié pour la première fois à Bàle, et encore en latin et par ex-
traits; il ne l'a été intégralement et en français qu'en 1576, à Genève, in-
séré, comme du reste en 1574, dans un recueil comprenant d'autres pièces
s'inspirant de la même idée. Du reste, il produisit peu d'effet sur le mo-
ment et n'a réellement acquis de la vogue qu'aux époques révolutionnaires,
en 1789, 1852, où on le remit en lumière, adapté aux besoins du moment.
Par lui, on a fait de La Boétie un précurseur des révolutions modernes :
de telles idées étaient bien loin de son caractère, et ce discours a été de sa
l)art un morceau purement littéraire où les sentiments généreux et la
fougue de la jeunesse se sont donné carrière, plutôt qu'une œuvre politique
rélléchie: Bonnekon. V. I, 318.
25, leunesse. — Les éd. ànt. aj. ; N'ayant pas alleinl le dix-huitiesme an de
son aage.
38, Gentil. — A ici le sens de généreux qui se retrouve dans « gentilhomme »,
mais dans lequel il n'est plus guère employé aujourd'hui, sauf dans quel-
ques rares localités, avec tendance à disparaître complètement.
298,
G, Ciuiles. — L'édit de janvier 1562, sous le règne de Charles IX encore mi-
neur. Cet édit accordait aux Huguenots l'exercice public de leur religion.
Le parlement refusa d'abord de l'enregistrer, en disant : « Nec possumiis,
nec debemus (nous ne pouvons et ne devons) », et finit par s'exécuter après
deux lettres de jussion. Il y a dans cet édit une sorte de règle de conduite
pour les Protestants; il y est dit qu'« ils n'avanceront rien de contraire au
concile de Nicée, au Symbole des Apôtres, ni à l'Ancien et au Nouveau
Testament ».
7, Place. — Le mémoire de La Boétie sur cet édit, si jamais il a été im-
primé, n'existe plus. On ignore dans quel sens il était écrit; il est a sup-
poser toutefois, étant donné le caractère de l'auteur et l'opposition que cet
édit rencontrait, qu'il devait en approuver la teneur et constituer un plai-
doyer en faveur de la tolérance religieuse.
10, Lumière. — A Paris, en 1571. — Les œuvres de La Boétie se composent :
d'une traduction de l'Économique de Xénophon, parue sous le titre de Mes-
nageri<> ; de celle de deux petits traités de Plutarque, de fragments du Dante ;
pièces de vers latins, de vers français, du Discours sur la servitude volon-
taire et de Mémoires sur nos troubles résultant de l'édit de janvier 1562.
Ces deux derniers opuscules, Jlontaigne ne les publia pas, craignant qu'ils
ne devinssent une arme pour les fauteurs de désordre de l'époque; la note
ci-dessus, I, 296, Contre-vn, indique ce qui advint du premier. V. N. I, 320 :
.Main.
19, Siècles. — A l'appui de sa thèse, Montaigne aurait pu indiquer ceux qui,
dans l'antiquité, ont eu des liaisons de cette nature : Hercule et Philoctète,
Thésée et Pirithoiis, Oreste et Pylade, Pythias et Damon, Épaminondas et
Pélopidas, Alexandre et Iléphestion, Scipion et Lelius, et pour clore par un
mot de Phèdre : « Rien de plus commun que le nom, de plus rare que la
chose. »
20, Aristote. — Morale à Nicomaque, VIII, I.
300,
5, Enîans.— L'infanticide est commun en Chine; il y a nombi-e de gens,
même à leur aise qui ne gardent |>as plus de deux ou trois enfants. Annales
de la propagation de la Foi.
ESSAIS UE MONTAIGNE. — T. IV. 2.J
F.Hoi ESSAIS DE MONTAIGNE.
7, L'aultre. — Les (jd. ant. aj. : L'amitié n'en vient iamais là.
8, Aristippus. — Diogkne Laerce, II.
11, Plutarque. — De l'amitié fraternelle.
14. Dilection. — Tendresse, affection, du latin dileclio, qui a même significa-
tion.
15, Alliance. — Ce Xerme de « frère » était souvent employé à cette époque
pour marquer les relations d'affection entre personnes que n'unissait aucun
lien du sang. C'est dans ce même ordre d'idées que Montaigne appelait
Mademoiselle de Gournay sa fille d'alliance; ne dit-on pas dans le même
sens des « frères d'armes » et « frères » et ■< sœurs » dans les communautés
i-eligieuses. Cette appellation est d'usage courant chez les peuples sémi-
tiques, c'est à elle qu'est probablement due cette assertion de Renan, dans
la Vie de Jésus, cette si charmante idylle, que Notre-Seigneur avait des
frères.
18, Fraternelle. — Allusion probable au droit d'aînesse qui subsistait alors,
d'après lequel l'aîné avait des privilèges et était favorisé, souvent de la
façon la plus abusive, dans la succession des parents, et qui n'était pas sans
avantage au point de vue de la société. Il maintenait la famille en lui
donnant un chef et à ce chef une situation qu'il devait utiliser pour aider
tous autres à se tirer d'affaire. Ce droit, aujourd'hui aboli en France, sur-
vit encore dans quelques majorats, immeubles ou dotations inaliénables
attachés à la possession d'un titre de noblesse et permettant au titulaire de
■ . garder son rang. L'idée essentielle sur laquelle reposait le droit d'aînesse
était d'empêcher la noblesse de péricliter, l'idée de la famille n'en était
qu'une résultante; c'est au contraire exclusivement cette dernière qui a
donné naissance à la pensée récemment émise de permettre de constituer
des biens familiaux destinés à parer à la désagrégation de la famille, amenée
par les exigences de l'existence et les facilités de se répandre au loin;
biens de valeur restreinte, mais qui, bénéficiant de certaines immunités,
demeureraient, quoi qu'il, arrive, un centre à l'abri de toute éventualité.
20, Souuent. — << Rara concordia fratrum (la concorde, chose rare chez des
frères) », est une maxime de jurisconsultes.
« Le frère est ami de nature.
Mais son amitié n'est pas sûre. »
28, Amitié. — » Le sort fait les parents, le choix fait les amis » (Delille).
302,
\b, Vsage. — L'abbé Sagette estime trop au-dessus de tout autre sentiment
cçtte amitié bien éthérée pour de simples mortels, et que son culte pour la
mémoire de son ami emporte l'auteur des Essais au delà de l'humaine na-
ture, incapable d'un sentiment platonique si pur et si désintéressé.
2.0, Fins. — L'éd. de 80 aj. : comme de la génération, alliances, richesses.
:]l, Durable. — Mais inversement. Les femmes haïssent mortellement pour
des sujets très légers. M"" de Genlis.
:?7, Reietté. — Contre cette opinion qui regarde les femmes comme peu pio-
pres à l'amitié, Thomas, littérateur français du xvin» siècle, dans son
Essai sur les femmes, 1773, dit : « Rien ne leur échappe, elles devinent l'ami-
tié qui se tait, encouragent l'amitié qui souffre » ; les rapports de M""' Ré-
camier (1778 à 1849) avec de Chateaubriand et Ballanche témoignent de la
vérité de cette appréciation; en amour, Thomas leur accorde les mêmes
délicatesses.
38, Grecque. — Passage des plus curieux où est fort bien expliqué ce que
c'était que cet amour des Grecs pour les jeunes gens, dont on a tant et si
diversement parlé.
304,
33, Achilles. —Achille, roi des Myrmidons, peuple de Thessalie (anc. Grèce):
le plus fameux des héros grecs qui prirent part à la guerre de Troie et
immortalisé par Homère dans l'Iliade; célèbre en particulier par sa liaison
NOTES. LIV. I, CM. XXVII. VOL. I, PAG. 304. F.3;w
avec Patroclc, tué par Hector qu'AcliilIe tue à son tour pour venger la
mort de son ami, et tué lui-même par Paris d'une flèche au talon, seule
partie de son être qui lût vulnérable (XIII° siècle). Son nom, dans toutes
les langues, est synonjme de bravoure et d'intrépidité.
306,
7, Aristogiton. — Aristogiton était l'amant de Harmodius. Hipparque, qui
gouvernait Athènes, conjointement avec son frère Hippias, cherchant à
s'imposer à Harmodius, celui-ci et Aristogiton le tuèrent. D'autres disent
qu'Hipparque, insulté par Harmodius, s'en vengea en insultant la sœur de ce
dernier, qui avec l'aide de son ami tua l'insulteur. Ce faisant, Harmodius
tomba lui-même sous les coups des gardes do son ennemi, tandis qu'Aristo-
giton, arrêté, périssait peu après dans les tortures. Leur mort fut le point de dé-
part d'un mouvement populaire qui délivra Athènes du joug de la tyrannie,
509.
14, Equable. — C.-à-d. « d'une espèce d'amitié plus juste et plus égale » que
celle dont il vient d'être parlé.
19, Parle. —Ce qui suit est une peinture des plus touchantes de l'amitié,
condensée en quelques lignes.
25, Fatale.
« Il est des nœuds secrets, il est des sympathies
Dont, par le doux rapport, les âmes assorties
S'attachent l'une à l'autre, et se laissent piquer
Par un je ne sais quoi qu'on ne peut expliquer, e Corneille.
33, L'autre. — Il y a dans saint Ambroise pleurant la mort do son frère, et
répandant sur sa tombe les fleurs de son éloquence, des mots d'une ten-
dresse charmante, des pensées d'un raffinement de sensibilité bien rare,
que rappellent certaines pansées et certaines expressions de Montaigne.
Payen. — Il en est de même dans les lettres de saint Jérôme à l'occasion
de la mort de Népotien. — Quant à ce passage même des Essais, on en re-
trouve l'imitation suivante dans Lamartine :
« Par l'infaillible instinct, le cœur soudain frappé,
Ne craint pas de retour, ni de s'être trompé.
On est plein d'un attrait qu'on n'a pas senti naître;
Avant de se parler, on croit se reconnaître;
Pour tous les jours passés on n'a plus un regard ;
On regrette, on gémit de s'être vus trop tard ;
On est d'accord sur tout avant de se répondre;
L'âme, de plus en plus, aspire à se confondre. »
34, Publiée. — Dans le recueil déjà cité plus haut, Paris, 1574; ot plus ré-
cemment.
36, Durer. — Montaigne et La Boétie avaient lié connaissance en 1559; leurs
relations durèrent donc quatre ans, ainsi du reste qu'il est dit un peu plus
loin; lorsqu'ils se connurent, La Boétie avait 29 ans et Montaigne en
avait 26.
308,
11, Pareille. — C.-à-d. avec un désir et un empressement égaux de part et
d'autre.
15, Intelligence. — Tiberius Gracchus avait obtenu le vote d'une loi agraire
qui distribuait aux citoyens pauvres les richesses qu'Attale, roi de Per-
game, avait laissées au peuple romain; devant la résistance qu'y fit le sénat,
un mouvement populaire se produisit dont les adversaires de Tiberius, qui
redoutaient son influence, profitèrent pour le faire assassiner au milieu
de ses partisans, contre lesquels, lui mort, des poursuites furent exercées,
133. CicÉRON, De l'Amitié, 11; Plutarque, Vie des Gracques, b; Valère
Maxime, IV, 7.
20, Lselius. — A semblables questions insidieuses, que dans leur ardeur
judiciaire les accusateurs publics sont trop souvent portés à adi'esser, une
F.336 ESSAIS DE MONTAIGNE.
seule réponse est à faire, c'est celle que fit Monseigneur Turinaz, évêque
de Nancy, poursuivi en justice à l'occasion de faits amenés en France par
la loi de séparation de l'Église et de l'État. Le Président du tribunal lui
disant à un moment donné : « Et qu'auriez-vous fait, si vous n'aviez été
évêque t » — -La question ne se pose pas, répondit le prélat, puisque je
suis évèque. «•
ii4, Gvaccbus. — Les éd. ant. aj. : de laquelle il se poiiuoU respondre comme
de lu sienne. — A la suite de cet événement, Blosius, qui ne fut pas autre-
ment inquiété, quitta Rome pour retoui-nor en Asie; mais peu après, il se
donna la mort.
29, Commis. — Abandonné, confié ; du latin commillere, s'en remettre.
3G, Plus. — C.-à-d. n'est pas plus déplacée que ne le serait la mienne.
310,
13, Déifier — « L'advereité est la pierre de touche de l'amitié. » Maxime
indienne. — « Les faux amis sont comme les hirondelles, qui paraissent
dans la belle saison, et disparaissent dans la mauvaise. » Cicéron. — «Le
faux ami ressemble à l'ombre d'un cadran qui se montre quand le soleil
briQe et disparaît quand les nuages le voilent. » — Réflexion d'OviDE exilé,
que Ponsard traduit ainsi :
« Heureux, vous trouverez des amitiés sans nombre;
Mais vous resterez seul, si le temps devient sombre. »
« Les amis de l'heure présente II faut en essayer cinquante,
Ont le naturel du melon ; Avant que d'en trouver un bon. • Mermet.
' « L'ami de tous et d'aucun, c'est toui un. »
15, L'aymer. — Aulu-Gelle, I, 3, qui attribue cette maxime à Chilon. Elle
l'est à Bias, par Aristote, Diogène Laërce et Cicéron; elle l'a été à Thaïes;
elle se retrouve dans YAjax de Sophocle. — Elle a donné lieu à bien des
controverses : les anciens, en général, abondent dans ce sens : <■ Je blâme
l'homme qui, en exerçant l'hospitalité, fait d'excessives démonstrations
d'amitié, comme aussi celui qui traite mal son visiteur; toutes choses sont
mieux qui demeurent dans la mesure convenable. » Homère, Odyssée. —
« Les leçons d'une longue expérience nous ont appris que les mortels de-
vraient nouer leurs amitiés par des attaches légères, faciles à rompre ou à
serrer, et qui ne pénètrent pas jusqu'à l'àme (mot à mot : jusqu'à la pire
moelle de l'àme). D'une affection trop tendre qui trouble la vie, naissent,
dit-on, plus de tourments que de charmes; aussi, je préfère en tout la
modération à l'excès et j'aurai pour moi l'opinion des sages. » Euripide, Hip-
polyte. — Cicéron, dans son dialogue sur l'amitié, est du même avis. —
•SIarc-Alrèle disait avoir appris de son père à « éviter les fureurs dans les
attachements, même les plus purs ••. — Les vers suivants sont la contrepartie
de cette même thèse :
• Ah .' périsse à jamais ce mot affreux d'un sage,
Ce mot, l'effroi du cœur et l'effroi de l'amour:
« Songez que votre ami peut vous trahir un jour. »
Qu'il me trahisse, hélas! sans que mon cœur s'offense,
Sans qu'une douloureuse et coupable prudence.
Dans l'obscur avenir, cherche un crime douteux.
S'il cesse un jour d'aimer, qu'il sera malheureux ! »
— De Sacy l'a aussi combattue dans son traité De UAmilié. — De Jolbert
enfin est cette pensée, commentaire en quelque sorte de celle qui nous oc-
cupe: « Il n'y a plus aujourd'hui d'inimitiés irréconciliables, parce qu'il n'y
a plus de sentiments désintéressés; c'est un bien né d'un mal. »
En somme cette maxime, appliquée à la vie privée, est très discutable;
elle l'est beaucoup moins dans la vie publique et doit être de règle absolue
dans les relations de peuple à peuple ; ce n'est pas, comme dit La Bruyère,
un principe moral, c'est un axiome politique. — C'est ce qui fait que l'An-
gleterre, malgré l'entente cordiale que présentement on s'efforce d'établir
NOTES. LIV. I, CH. XXVII. VOL. I, PAG. 310. F. 357
entre ellft et nous, et les grands avantages économiques qu'elle en retirerait,
se refuse obstinément et à bien juste raison à laisser construire le tunnel
sous la Manche. Ne sachant ce que sera demain, elle ne veut pas mettre
une chance contre elle, une chance d'invasion, si faible soit-elle, alors que
de par sa position insulaire elle est inexpugnable. (Ce tunnel projeté de
Sangatte (Pas-de-Calais) à Douvres aurait une longueur de 24 milles
(44 kil. 1/2) sous la mer et 30 milles (55 kil. 1/2) avec les raccordements à
fleur du sol; la dépense est évaluée approximativement à 400 millions). —
C'est en vertu de ce même principe que notre attitude boudeuse et
hargneuse depuis 1870-71 est si inepte; nous aurions dû accepter de bonne
grâce les conditions que nous avons signées à Francfort, jusqu'au moment
où nous nous serions crus en mesure de le rompre et résolus à le faire;
c'était ce à quoi nous invitait Gambetta quand à propos de la revanche il
disait qu'il fallait y penser sans cesse et n'en parler jamais; c'est du reste
sous cotte rt'>serve que sont conclus tous les traités de paix quels qu'ils soient.
Nous avons fait et continuons à faire tout le contraire; sans y penser,
c'est-à-dire alors que nous sommes pour la paix atout prix, que si la guerre
survient c'est qu'elle nous sera imposée, qu'il nous sera impossible de
nous y dérober, nous en parlons toujours, d'où une situation constamment
tendue, et nous nous étonnons de trouver l'Allemagne, que par surcroît notre
presse est -sans cesse à exciter, en travers de toutes nos intentions. Une
semblable attitude, peu digne, n'a que des inconvénients, celui entre autres
de nous mettre à la remorque de quiconque a intérêt à attiser notre ran-
cune.
19, Amy. — Diogène Laerce, V, 21. — Dans Don Quichotte se trouve ce pro-
verbe espagnol : « Il n'y a point d'ami; pour ami, les cannes deviennent
des lances. » — Autre proverbe : « Il faut se dire beaucoup d'amis et s'en
croire peu. »
29, Eux. — « Tout est commun entre nous, l'amitié est commerce d'égalité. »
Maxime pythagoricienne.
32, Aristote. — Diogène Laerce, V, 20.
312,
1, Ensemble. — Cette interdiction a pour unique objet d'empêcher que, lors
. du décès, ces donations ne lèsent les héritiers naturels du défunt.
5, Le libéral. — Les éd. ant. port. : l'honnesle et le courtois.
8, Demandoit. — Diogène Laerce, VI, 16.
10, Singulier. — Extrait du Toxaris de Lucien, 22.
16, Suruiure. — Le Poussin a consacré par son pinceau cette action sublime;
il a représenté Eudamidas dictant ses dernières volontés; la gravure a re-
produit ce tableau.
21, Talens. — Le talent n'avait pas une valeur uniforme, celle du talent at-
tique était de 5.720 francs.
2 1, Jour. — « On chercherait en vain dans les temps modernes un pareil
trait à citer, et les filles sans dot de notre époque ne sauraient s'en pré-
valoir pour concevoir des espéranc^es. «Victor Thierry. — On cite bien un
fait s'en rapprochant, mais déjà les conditions sont autres : Eulalius qui,
de fort riche, était devenu fort pauvre, institua son héritier .lustin I, em-
pereur d'Orient; i\ le chargeait de faire élever ses filles, de les doter et
aussi de payer ses dettes; Justin accepta et remplit les clauses du testa-
ment, v* siècle. — Charlotte Corday, condamnée à mort, chargea son dé-
fenseur Chauveau-Lagarde de payer, de sa bourse, ce qu'elle devait dans
' sa prison, 1793.
314,
2, Moy. — Cette façon de penser n'est pas celle de tous : <■ Une confidence
faite à un ami, sur ce qui touche l'honneur d'autrui, est une atteinte à la
charité. » S. Ambroise. — Bourdaloue a exprimé la même idée en la dé-
veloppant.
20, Alliance. — Xénophon, Cyropédie, VIII, 3.
24, Reste. — C.-à-d. sans exception, ni restriction aucune.
F.358 ESSAIS DE MONTAIGNE.
28, Doiuent. — Un tivêquc de Crax;ovie avait pour marchand un Juif; pour
fermier, un socinien (adhérent à la secte de Sozzini, hérésiarque italien
du XVI" siècle, qui repoussait le dogme de la Sainte Trinité et en particu-
lier la divinité de .lésus-Christ); pour intendant, un protestant, et disait :
" Ces gens -là seront damnée dans l'autre monde, mais ils me sont néces-
saires dans celui-ci. •
316,
1, Cil. — Celui; cil est un joli mot qu'on aurait dû conserver, quand ce
n'eût été qu'à cause des services qu'il peut rendre à la poésie. Coste.
5. Action. — 11 s'agit ici d'Agésilas. Plutarque, Agésilas, 9. — On raconte
un fait analogue de Henri IV qui, surpris par l'amba-ssadeur d'Espagne, à
quatre pattes, promenant ses enfants à cheval sur son dos. lui dit : « Vous
êtes père, Monsieur l'Ambassadeur, vous me comprenez et m'excusez. »
13, Menander. — Le même Ç[ui a dit : « Celui-là meurt jeune qui est aimé
des dieux. »
14, Amy. — Plutarque, De l'Amitié fraternelle, 3.
20, Années. — De 1559 à 1563. Les éd. ant. port. : quatre ou cinq années, au
lieu de « quatre ».
31, Particeps. — Montaigne, comme il fait souvent, a changé plusieurs mots
dans cette citation.
1^3, Demy.
« Pleurez, mes yeux, et fondez-vous en eau :
La moitié de moi-même a mis l'autre au tombeau. » Corneille.
318,
7, Amabo. — La lecture de ce chapitre qui, de fait, se termine ici, est à
compléter par celle du chapitre des œuvres de Bourdalole intitulé des
Amitiés humaines, dans lequel il examine le danger des amitiés trop ar-
dentes, aveugles, partiales ou trop tendres, et où il repousse les entraî-
nements du cœur qui offensent la justice, faussent la conscience et perver-
tissent la charité.
8, Seize. — Les éd. ant. port. : dixhuict.
9, Ouurage. — Le Discours sur la servitude volontaire que Montaigne re-
nonce à insérer contrairement à ce qu'il s'était proposé au commencement
de ce chapitre, parce qu'il venait d'être partiellement publié en Suisse par
les Protestants (1578), dans le but de s'en faire une arme contre la royauté.
V. N. I, 296 : Contre-vn.
18, louant. — C'est ce que dit Cornélius Nepos d'Épaminondas : « 11 était
tellement respectueux de la vérité, qu'il ne mentit jamais même en jouant. »
29, Autre. — Les vingt-neuf sonnets qui font l'objet du chapitre suivant.
30, Enioué. — Les éd. ant. aj. : Ce sont 29 sonnets que le sieur de Poiferrc
homme d'affaires et d'entendement, qui le connoissoit long temps auanl moy,
a retrouué par fortune chez lui, parmy quelques autres papiers, et me les
vient d'enuoyer : dequoy ie luy suis 1res obligé, et souhaiterois que d'autres
qui détiennent plusieurs lopins de ses escris, par-cy, par-là, en fissent de
mcsme.
CHAPITRE XXVllI.
Ce chapitre est numéroté XXIX dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
31, Chapitre XXVIII. — Ce chapitre n'est à proprement parler que la dé-
dicace à Madame de Grammont de vingt-neuf sonnets de La Boétie, élégie
amoureuse à l'imitation de Pétrarque, composée dans la jeunesse de l'au-
teur et aussi faible dans la forme que dans le fond. Us ont été supprimés,
comme n'étant pas de Montaigne, dans la plupart des éditions postérieures
à celle de 1588. Nous en aurions fait autant, s'il était bien prouvé que la
mention écrite, à la vérité de sa main, sur l'exemplaire de Bordeaux :
« Ces vingt neuf sonnets d'Estienne de la Boétie, qui estoient mis en ce
lieu, ont esté despuis imprimez avec ses œuurcs », et qui figure, à l'ex-
iNOTES. LIV. 1, CH. XXVIII. VOL. I, PAG. 218. F.3o9
clusion des dits sonnets, sur l'édition originale de 1595, témoignait incon-
testablement qu'il n'avait pas l'intention de les reproduire, auquel cas la
dédicace aurait dû disparaître également et ce chapitre tout entier être
supprimé. La conserver seule est, comme le font oberver Courbet et Roj-er,
une anomalie.
33, Guissen. — Diane, vicomtesse de Louvigny, de la maison de Foix, connue
avant son mariage sous le nom de la Belle Corisande (rAndouihs, avait
épousé le comte de Grammont et de Guiche, qui mourut au siège de La
Fèi-e en 1580. Le nom exact est Guissen, dont par corruption on a fait Gui-
fhen, puis Guiche. Devenue veuve, Madame de Grammont devint et de-
meura longtemps la maîtresse de Henri de Navarre avant son avènement
au trône de France. 11 en était éperdument amoureux et eut même l'in-
tention de l'épouser; c'est pour aller la retrouver qu'il s'arrêta, au lieu de
pousser de l'avant, après la bataille de Coutras et perdit de la sorte le fruit
de sa victoire. Du reste, elle le payait de retour et lui fut dévouée toute
sa vie; pendant les guerres de la Ligue, elle vendit pour lui ses diamants,
engagea ses biens et alla jusqu'à lui envoyer des levées de 20 à 24.000 gas-
cons qu'elle avait enrôlés à ses frais.
320.
12, Main. — Montaigne est ici quelque peu aveuglé par son affection pour
son ami. Cette pièce de vers, élégie ayant trait à quelque aventure de jeu-
nesse de l'auteur, n'offre rien d'intéressant; ce n'est d'un bout à l'autre
qu'une plainte amodreusc exprimée en style assez rude et confus, où écla-
tent les faiblesses et les emportements d'une passion inquiète qui se nour-
rit de soupçons, de craintes, de défiances, dont elle est accablée. En voici
le thème :
« L'auteur constate qu'il est amoureux. Ce sentiment, auquel jusqu'ici il
« avait été étranger, le tient tout entier; en vain il a cherché à s'en dé-
" fendre, il s'avoue vaincu, un regard de celle qui l'a conquis, a suffi pour
" le mettre à sa merci. Il ne la nomme pas; mais en disant qu'elle est la plus
" belle, chacun la reconnaîtra; elle est sa Dordogne, et bientôt ses chants
- et son amour feront passer son nom à la postérité. — Mais est-il payé
« de retour? Elle demeure sourde à ses pi'ières, et lui va se consumant. 11
■< perd courage; se jouerait- elle de lui? Qu'elle prenne garde; s'il sait
« aimer, il sait liaïr aussi! — Dieu! quel blasphème et combien il maudit
•< les vers qui ont pu exprimer une telle pensée! Et voilà qu'au lieu du
« châtiment mérité, un mot d'elle vient l'assurer de son pardon. — C'en
« est fait, c'est pour la vie qu'il se reprend à l'aimer." Mais, hélas! si sa
" bienveillance va le captivant de plus en plus, c'est sans lui rien concé-
» der. Aussi quelle douleur est la sienne; et cependant il se complaît dans
•• ses souffrances; il en mourra, mais est-il possible qu'il en soit autre-
« ment? Ses vers, du moins, en révélant son triste sort, le vengeront de
- l'Amour, en même temps qu'ils l'exalteront, elle dont la grâce et les per-
« fections sont de nature à asservir tous les cœurs. »
La Boétie (N. I, 208 : Lumière) a composé quelques autres pièces de vers
français, on y relève les passages suivants :
• J.e premier coing duquel l'or fut battu,
En t)atlanl l'or abattit la vertu. »
Ainsi l'on voit en vn ruisseau coulant. Par cette-ci celle-là est poussée
Sans Dn l'vne eau après l'autre roulant; Et cette-ci par vne autre auancee :
Kl tout de rang d'vn éternel conduit, Tousiours l'eau va dans l'eau, et lousiours est-ce
l-'vne suit l'autre, et l'vne l'autre fuit; . Même ruisseau et tousiours eau diuerse. •
17. L'oreille. — - Ce secret a-t-il été révélé? Toujours est-il que le nom de la
personne qui a inspiré ces vers, ne nous est pas connu.
326,
27, Dourdouigne. — Le poète personnifie ici la dame de ses pensées en la
Dordogne (N. I, 328 : Honte) au cours placide; plus loin (Sonnet xiv), dans
P.360 ESSAIS DE MONTAIGNE.
un moment d"irritation, il l'assimilera à sa sœur la Vézère, au cours ca-
pricieux.
:î5, Fidelle. — Ce vers, qui exprime très heureusement une idée fort juste,
a pris place parmi les locutions fréquemment employées : « Qu'est-il plus
beau qu'vne amitié fidelle? •
328,
8, lumeaux. — Castor et Pollux, qui reçurent le don d'immortalité dont ils
jouissaient alternativement; la belle Hélène, cause de la guerre de Troie,
était leur sœur.
12; Honte. — La Dordogne, formée de deux ruisseaux : la Dore et la Dogne,
prend sa .source à quelques lieues en amont de Sarlat, patrie de La Boétie,
et se termine en Guyenne. A cette époque, cette province et la France,
dont elle avait été séparée pendant plus d'un siècle, quoique réunies, con-
ser\'aiont encore leurs appellations distinctes; c'est ce qui fait dire à l'au-
teur que sa Dordogne a honte de se montrer si modeste on France, alois
que lorsqu'elle en sort et devient gasconne, son cours est beaucoup plus
important.
13, Sorgues. — Ruisseau illustré par les poésies de Pétrarque en l'honneur
de la belle Laure de Noves, qu'il avait rencontrée à Avignon qui se trouve
à proximité.
15, Loir. — Nommé ici, parce qu'il passe à Vendôme, ville aux environs de
laquelle est né Ronsard, auquel ce passage fait allusion.
18, Mince. — Le Mincio. Mentionné comme rappelant Virgile, originaire de
ilantoue, qu'arrose cette rivière.
19, Ame. — L'Arno, qui passe à Florence, patrie de Pétrarque dont le sou-
venir a été évoqué quelques lignes plus haut et l'est encore dans le son-
net suivant.
31, Migregeois. — A moitié grec. Properce est ainsi qualifié en raison des
tournures grecques qu'affecte son style, bien qu'il écrive en latin.
330,
3, Mesure. — Ces quatre derniers vers : Chacun sent..., sont sans contredit
les meilleurs de la pièce ; par les idées qu'ils expriment, la manière dont
ils les rendent, ils méritent attention.
17, Leandre. — Se noya en franchissant à la nage l'Hellespont, ainsi qu'il le
faisait chaque nuit, pour aller voir Héro, son amante, prêtresse de Vénus,
qui de désespoir se précipita dans les Ilots. Myth.
25, Sauuez. — .\lIusion à la fable d'Hellé, fille d"un roi de Thcbes, et de son
frère. Travei-sant la mer sur un bélier à toison d'or, pour fuir les fureurs
de leur belle-mère, Hellé tomba dans les flots et y péril, tandis que son
frère et le bélier furent saufs, d'où cette mer prit le nom d'Hellespont (ac-
tuellement détroit des Dardanelles). — La largeur de l'Hellespont varie de
1.750 à 3.000 mètres; il est donc facilement franchissable à la nage, par
un excellent nageur; lord Byron, en 1810, l'a franchi dans ces conditions
à la suite d'un pari. On ne saurait en dire autant du Pas-de-Calais, dont la
traversée à la nage a été souvent tentée et ne semble avoir été accomplie
qu'une fois, au siècle dernier, par un Anglais, le capitaine Webb, parti de
France pour atterrir en Angleterre ; il est vrai que sa largeur est de 34 ki-
lomètres et que des courants régnant au large obligent à un parcours
notablement plus considérable et augmentent les difficultés.
334,
3, Faux. — Les sonnets xiv et xv que, dans son repentir, l'auteur désavoue.
21, Breuet — Un billet qui a la vertu d'un talisman.
336,
30, Meleagre. — Les destins avaient décidé qu'il vivrait tant que durerait
un tison qui brûlait dans le foyer au moment de sa naissance. Sa mère
éteignit aussitôt ce tison et le conserva soigneusement. Dans la suite, une
discussion s'étant élevée entre lui et ses oncles, dans la chaleur de la dis-
pute, il les frappa d'un coup mortel; sa mère, irritée du meurtre de ses
frères, jeta au feu le tison fatal et son fils expira aussitôt. Myth.
iNOTES. LIV. I, CH. XXIX. VOL. I, PAG. 334. F. 361
CHAPITRE XXIX.
Ce chapitre est numéroté XXX dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
344,
20, Excessiuement. — Les éd. ant. port. : immodérément.
•20, luste. — Les éd. ant. aj. : et vertueuse.
21, Diuine. — Saint Paul, Ep. aux Romains, XIII, 3. — « Ne sois pas juste à
l'excès et ne te montre pas sage outre mesure. • Ecclésiaste, VII, 6.
'12, Sage. — Moi.ièhe, dans le M isatilhrope, émet la même pensée:
La parfaite raison fuit toute extrémité.
Et veut que l'on soit sage avec sobriété.
C'est là encore une application de la maxime : « Rien trop » (N. I, 292). -
24, Sorte. — Il y a probabilité que Montaigne veut parler ici de Henri III,
roi de France, qui, par des retours de conscience, alliait à des débauches
sans nom les pratiques de la religion la plus austère et duquel le cardinal
d'Ossat écrivait à sa veuve que « ce prince avait vécu une vie aussi et
même plus religieuse que royale » ; tandis que Sixte-Quii^t en disait : « Il
n'est rien qu'il n'ait lait et ne fasse pour être moine, ni que je n'aie fait,
moi, pour ne l'être point. »
28, Fils. — Pausanias, roi de Sparte, trahissant la Grèce auprès des Per-
ses et ayant été dénoncé, se réfugia dans le temple de Minerve, pour
échapper à une condamnation à mort prononcée contre. lui. Nul n'osait
violer cet asile lorsque Alcithée, sa mère, se présenta, dit-on, devant le tem-
ple et, sans proférer une parole, prenant une brique qu'elle avait ap-
portée, la plaça sur le seuil de l'entrée et revint chez elle. Les Lacédémo-
niens, adoptant son jugement, l'imitèrent et murèrent ainsi la porte du
temple. Pausanias fut réduit à y mourir de faim, 477. Diodore de Sicile,
XI, 45; Cornélius Nepos, Pausanias, 5. — Plutarque, citant également
ce fait, en raconte un semblable survenu à Rome, lors de la guerre contre
les Latins, 341. Un nommé Cassius Brutus avait fait marché avec l'ennemi
pour lui ouvrir les portes de la ville; découvert, il s'enfuit dans le temple
de Minerve auxiliatrice, où son père le tint tant enfermé qu'il l'y fit mou-
rir de faim et jeta son corps sans sépulture.
30, Reng. — Dans une guerre entre les Romains et les Volsques, Posthumius,
dictateur, aurait fait tomber sous la hache la tête de son propre fils qui,
séduit par l'espoir du succès, aurait quitté son poste et livré un combat
d'où il était sorti vainqueur, 496. En relatant lô fait, Tite-Live, IV, 29, dit
ne pas y croire et qu'il doit y avoir erreur chez les historiens antérieurs à
lui qui le rapportent et auront confondu avec l'acte analogue de Manlius
Torquatus. — Plutarque, dans sa Collation abrégée d'histoires romaines
avec autres semblables grecques, prête, d'après Ctésiphon, la même conduite
à Epaminondas, en la mettant en parallèle avec celle de Manlius. Se trou-
vant en présence des Lacédémoniens et rentrant momentanément à Thèbes
pour l'élection des magistrats, Epaminondas avait remis le commandement
de l'armée à son fils Stesimbrotus, en lui défendant de combattre. Les La-
cédémoniens, avertis de son absence, vinrent provoquer son fils, lui re-
prochant de n'oser, faute de cœur, se mesurer avec eux, si bien que, pas-
sant outre aux ordres de son père, il accepta le défi et battit l'ennemi.
. Epaminondas, de retour, lui aurait ceint le front d'une couronne, emblème
de sa victoire, et trancher la tète pour sa désobéissance.
33, A coup. — Tout à coup. Marot a dit dans le même sens : « Si tu ne veux
qu'à coup, je perde l'àme. »
35, Platon. — Dans le Gorgias.
346,
13, Endroit. — Dans la Secunda Secundse, 154, 9.
19, Raison. — Les éd. ant. aj. : soit en l'amitié, soit aux effets de la iouis-
F.362 ESSAIS DE MONTAIGNE.
sance. — C'est là une raison aussi étrange qu'inexacte. Cette prohibition,
prononcée par nombre de législateurs de tous les temps, est motivée par la
dégénérescence physique et intellectuelle qui résulte parfois pour les enfants
de la consanguinité des parents à un degré trop rapproché, ce dont il existe
de nombreux exemples. Ces mariages de nos jours se font rares : dispersé
de bonne heure par les nécessités de l'existence moderne, le milieu familial
existe et dure de moins en moins ; et versant dans l'extrême opposé, on ne
s'y marie plus guère ; on prend femme ailleurs là où le sort vous a porté,
sans prendre le temps de se connaître autrement que d'une façon banale,
sans rien savoir généralement des tenants et des aboutissants l'un de l'au-
tre, autrement dit sans garantie aucune; qu'ils sont loin de nous ces dic-
tons de jadis qui cependant n'ont rien perdu de leur vérité :
« Harie-toi dans ta rue, si tu veux; dans la maison, si tu peux. .
« Qui va loin se marier, sera trompé ou veut trompai-. »
• Homme de passage n'attrape femme sage. »
23, Liberté. — Syndiquer sa liberté, c'est l'aliéner, donner à un autre des
droits sur elle, d'où syndicat, mot qui aujourd'hui rend si bien la chose;
en ce que ceux qui en font partie abdiquent toute volonté entre les mains
de quelques-uns qui se font les porte-paroles des revendications de tous
ceux qui les suivent, parfois à regret, parfois contre leurs intérêts, jusque
dans leurs exagérations et leure violences, au risque parfois de tuer dans
un avenir plus ou moins proche la poule aux œufs d'or, autrement dit l'in-
dustrie qui les fait vivre. — Les syndicats qui, en France, sont présente-
ment (1906) au nombre de 12.000, réunissant 2.000.000 d'adhérents, consti-
tuent un mode d'association dont la puissance est énorme, par le nombre et
l'unité de volonté. C'est une force aveugle souvent, redoutable toujours,
d'autant qu'ils sont irresponsables, qui transforme de craintifs mercenaires
en hommes avec lesquels il faut discuter sur un pied d'égalité; malheu-
l'eusement leurs tendances despotiques dépassent souvent le but, les excès
qu'ils provoquent portent trop fréquemment atteinte à notre industrie et à
notre commerce et rendent peu enviable le sort des patrons. La nécessité
finira par amener une détente dans ces rapports, on arrivera à comprendre
que les intérêts de ceux-ci et de leurs ouvriers sont de même ordi*e, que
les uns et les autres ont un maître commun, la clientèle seule régulatrice
réelle des salaires, mais que de désastres avant d'en être arrivés là! En at-
tendant il serait indispensable que les syndiqués portassent solidairement
la responsabilité des attentats aux personnes et aux propriétés qu'ils com-
mettent et que de ce fait leui"s chefs soient passibles des peines portées con-
tre quiconque a incité à commettre les crimes et délits dont sont l'occasion
les désordres dont ils sont la cause première.
Leur action a du reste parfois jdes effets impi-évus, bien différents de ce
qu'ils espéraient; c'est ainsi qu'en voulant réglementer les heures de tra-
vail et les salaires, ils ont amené les patrons à restreindre le nombre de
leurs ouvriers, à ne garder que les plus capables et les payer à la tâche.
Les autres sont allés grossir le nombre déjà si considérable des ratés de
toutes sortes, et s'ils cherchent encore à demander au travail quelques
moyens d'existence, ils sont obligés d'accepter à des prix dérisoires celui
qu'ils arrivent accidentellement à se procurer d'industriels éhontés qui ex-
ploitent leur misère et contre lesquels leurs syndicats ne peuvent rien.
G. Lebon.
25, S'il s'en... acharnez. — Var. des éd. ant. : ■< car il y a grand dangicr
qu'ils ne se perdent en ce débordement ».
28, Obsernée. — Montaigne traite ce même sujet, liv. 111, ch. V (III, 196). —
Ce précepte devait être d'observation difficile dans l'antiquité, là où il était
dans les habitudes que les époux couchassent nus dans leur lit, ce que
mentionne Hérodote et dont on trouve confirmation dans nombre d'au-
teui-s anciens, dans S. Cyprien entre autres. Pavex.
NOTES. LIV. I, CM. XXIX. VOL. I, PAG. 346. F.363
20. Illégitime. — C'est dans cet esprit que l'Église prônant la continence
interdisait tout' rapprochement entre les nouveaux mariés durant les trois
premiers jours de leur union, et aussi défendait au mari de voir sa femme
nue : '■ Maritus non débet uxorem suam nudam videre. » Payen. Cette absti-
nence durant les trois premiers jours, l'ange Raphaël la conseilla pareille-
ment, pour conjurer le démon, à Tobie épousant Sara, qui déjà avait eu
sept maris, morts dès la première nuit de leurs noces, sans l'avoir déflorée.
Livre de Tobie.
21), Encheriments. — Caresses, démonstrations d'affection, de clierer ou
chérir, caresser :
• Ne vous forcez de nie cherer.
Chere ne quiert point violence. » Mauot.
Chérir est seul demeuré dans la langue, mais avec un sens plus plato-
nique.
35, Simple. — Dans une annotation sur un exemplaire des Essais, Florimond
DE RÉMON, auquel Montaigne avait vendu sa charge de conseiller au par-
lement, avait écrit : « l'ai ouy dire à l'autour, qu'encore que plein d'ardeur
et de ieunesse, il eut épousé sa femme très belle et bien aimable, si est ce
qu'il ne s'estoit iamais ioué auec elle, (ju'auec le respect et l'honnesteté que
la couche maritale requiert, sans auoir vu oncques à decouuert que la main
et le visage, non pas mesme son sein, quoique parmi les autres fenmies il
fut extrêmement folâtre et débauché. »
;37, Seuerité. — Saint Jérôme regarde la chasteté conjugale comme plus
difficile que celle de l'état de virginité ou de viduité. Bourualoue.
38, Consciencieuse. — « La santé et la disposition morale des époux, au
moment de la conception, ont l'influence la plus grande sur la santé, le
caractère et les dispositions des enfants; et il est très important de se
pénétrer de la grandeur, de la sublimité du mystère de la procréation et
de ne jamais s'approcher de sa femme avec indifférence et pensant à autre
chose. » Sterne.
11, Embrassement. — Var. des éd, ant. : celte accoinlance : cela tiens ie pour
certain qu'il est beaucoup plus saincl (sain) de s'en abstenir.
348,
1, Platon. — Lois, VIII.
3, Flueurs. — Du latin fluere, couler; d'où par corruption et ignorance est
venu « fleurs », qui n'a aucun sens. — La loi de Moïse punissait ce fait de
mort, mémo en mariage légitime : « Si un liomme couche avec une femme
qui a son indisposition menstruelle, ils seront retranchés tous deux du mi-
lieu du peuple. » Lévitique, XX.
1, Mariage. — Épouse d'Odenath, un de ceux qui, de la captivité de l'empe-
reur Valérien à la mort do Gallien son lils, se proclamèrent <^mpcreurs et
sont connus dans l'histoire sous le nom dés « trente tyrans », bien qu'ils
fussent loin d'être dos tyrans et d'atteindre ce nombre. Après la mort de
son mari, on 272, Zénobie poursuivit, non sans éclat, l'accomplissement de
ses audacieux projets, déployant un grand faste; elle finit par être vaincue
par Aurélien, successeur de Gallien, 275. Trebei-liusPollion, 30.
7. Déduit. — Ce poète si. mal qualifié c'est Homère {Iliade, XIV, 294); mais
il .se borne à dire que Jupiter, apercevant Junon, ressentit la même ardeur
que celle qu'il avait éprouvée lorsqu'il allait jouir d'elle pour la première
fois.
îîO, Respect. — Plutarque, Préceptes du mariage.
25, Capitaine. — Pi.utarque, Instructions pour ceux qui manient affaires
d'État.
30, Chastes. — Cicéron, De Officiis, I, -10.
30, Consciencieuse. — Par motif de conscience.
34, Concupiscence. — Spartie.v, Verus. — « Dans le mariage il n'y a pas
d'amour, parce qu'on ne peut aimer où il n'y a pas d'obstacle ; si Laure eut
F.364 ESSAIS DE MONTAIGNE.
clé la femme de Pétrarque, il n'aurait point passé sa vie à rimer des son-
nets en son honneur. » Lord Byron.
37, Desbordez. — Le fait est rapporté par S. Justin et se serait passé sous
Marc-Aurèle. S. Jérôme cite le cas de Fabiola, dame romaine, mariée à
un homme corrompu au point qu'elle le prit en aversion et le quitta; en-
core jeune, elle se remaria et, après sa mort, fut canonisée. Le' fait de cette
femme de Catalogne, mentionné par Montaigne, rentre un peu dans ce cas.
En France, en 19.., le tribunal de la Seine prononçait un divorce pour
oxcès d'amour.
350,
20, Gallio. — Tacite, Annales, VI, 3.
38, Isthme. — L'isthme de Corinthe, vers 1445. Amurat II fit la conquête
de la Morée.
352,
1, Aage. — L'Amérique, que venait de découvrir Christophe Colomb, 1492.
7, D'autres. — Au Mexique, avant la conquête espagnole. On fendait la poi-
trine de la victime avec un couteau de pierre, et on en retirait le cœur
dont on frottait le visage de l'idole. A certaines fêtes, des sacrifices humains
avaient lieu où les prêtres écorchaient les victimes et revêtaient de
leurs peaux des ministres subalternes qui se distribuant dans les divers
quartiers de la ville, allaient chantant et dansant.
20, Guerre. — Il s'agit ici de Montézuma qui immolait tous les ans plus de
20.000 de ses ennemis ou de ses sujets rebelles; il se faisait, à Mexico, des
sacrifices qui, à eux seuls, coûtaient la vie à ce nombre de captifs.
CHAPITRE XXX.
Ce chapitre est numéroté XXXI dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
29, Cannibales. — A proprement parler, peuplades anthropophages d'Améri-
que; mais, dans les Essais, cette dénomination s'applique indistinctement
à tous les indigènes du Nouveau Monde, en dehors du Mexique et du Pé-
rou, dont il avait eu occasion de voir quelques-uns venus en France, sous
Charles IX, lesquels font en majeure partie le sujet de ce chapitre.
30, Italie. — Plutarque, Pyrrhus, 8. — Pyrrhus guerroya à deux reprises
différentes en Italie contre les Romains : en 280 et en 274.
354,
I, Pais. — L'an 197, quand Flaminius vint à leur secours contre Philippe,
roi de Macédoine, qu'il vainquit à Cynocéphales, 196. Plutarque, Flami-
nius, 3.
3, Galba. — L'an 200, lors de la guerre suscitée par la mise à mort, par les
Athéniens, de deux Araucaniens qui, par imprudence, avaient surpris les
mj'stères de Cérès. Les Araucaniens, pour venger la mort de leurs conci-
toyens, firent appel à Pliilippe de Macédoine; les Athéniens demandèrent et
obtinrent le secours de Rome; c'est à l'arrivée de ces secours qu'il est fait
allusion ici. Cette guerre est la même que celle à laquelle se rapporte la
note précédente; la venue de Sulpitius Galba en marque le commencement,
celle de Flaminius la fin. Tite^Live, XXXI, 34.
8, Antartique. — Villegaignon, envoyé par Henri II pour faire une explo-
ration en Amérique et y fonder une colonie, débarqua au Brésil en 1555 ;
l'établissement qu'il y fit ne s'y maintint pas. Bayle, Villegaignon.
13, Ventre. — Var. des éd. ant. : coinme on dict, le et dit on de ceux, ausquels
Cappetit et la faim font plus désirer de viande, qu'ils n'en peuuent emj)Ocher.
le crains aussi que nous auons beaucoup, au lieti de : « et ».
15, Platon. — Dans le Timée.
28, Déluge. — Cette croyance des anciens qu'on retrouve dans Platon, Élien,
Ammien Marcellin, S. Grégoire, a-t-elle été une réalité, ou l'Atlantide
n'a-t-elle été qu'une île imaginaire, on ne saurait dire; certains ont voulu
y voir le continent américain.
NOTES. LIV. I, Cil. XXX. VOL. [, PAG. 354. F.36;>
31, Italie. — La séparation de la Graiide-Bretagno d'avec la Gaule s'est pro-
bablement elTectuée aussi de la même façon.
34, Surie. — La Syrie (Asie Mineure).
35, Bœoce. — La Béotie (Grèce ancienne).
4i, Espaigne. — Platon ne dit rien de semblable. — On trouve aussi dans
les phrases suivantes quelques erreurs géographiques, répandues sans doute
[lar les premiers voyageurs qui parcoururent le Nouveau Monde.
356,
\\), Contiennent. — Ces modifications dans les rives des cours d'eau qui vont
gagnant et se retirant tantôt d'un côté, tantôt d'un autre, sont fréquentes:
si bien que les conséquences en sont réglées juridiquement : les terrains
ainsi détruits par l'érosion des eaux sont perdus sans donner lieu à in-
denmité; ceux, au contraire, provenant d'alluvions ou de retrait des eaux
l)rofitent au riverain.
•..'3, Fourriers. — C.-à-d. qu'ils assignent à la mer, lui marquent en quoique
sorte la limite dans laquelle elle doit se contenir.
■i'.\, Montioies. — Ou mieux « mont joug », du latin mons jugum; ce sont à
proprement parler des mouvements de terrain dénommés « croupes » en
topographie ; cette appellation est fréquente dans les régions montagneuses,
notamment dans le Jura; de là vient le nom du château ou fort de Joux,
près de Pontarlier.
2'), Pais. — Arzac est une localité à cinq lieues de Bordeaux. — L'enva-
liissement des sables dans le Médoc est estimé de 20 à 25 mètres par an.
On a calculé que depuis l'époque à laquelle remonte la formation de ces
dunes (environ ii.50O ans), l'Océan a empiété sur les terres de 80 kilo-
mètres; le fort Cantin, construit en 1754, à plus de 200" en arrière du
rivage, est depuis plus de cinquante ans déjà enseveli sous les eaux; dans
deux mille ans, les sables atteindraient Bordeaux, si on ne les arrêtait
ou s'ils ne s'arrêtaient d'eux-mêmes; on les combat au moyen de plantes
à racines nombreuses et traçantes qui les fixent et finissent par les con-
vertir en terres cultivables.
29, Gibaltar. — Gibraltar. Selon les anciens, ce détroit n'existait primitive-
ment pas; d'après la fable, ce serait Hercule qui aurait ouvert ce pas-
sage aux eaux de l'Océan, en séparant les deux monts Abyla et Calpé qui,
depuis, furent dénommés « Colonnes d'Hercule ». Le nom de Gibraltar qu'il
porte aujourd'hui, dérive de l'arabe « Djebel et-Tarik (montagne de Tarik),
le premier général musulman qui, le franchissant, envahit l'Espagne, 710.
39, Estât. — Le fait se serait passé en l'an 397. Partie de l'équipage qui au-
rait fait cette découverte, se serait établie sur ce nouveau territoire, tandis
que le reste revenait à Carthage où le Sénat les fit tous mettre à mort,
redoutant pour l'avenir de la ville les conséquences qu'elle pouvait avoir.
358,
3, Tesmoignage. — Cette assertion est discutable; l'ignorance et la simpli-
cité d'esprit portent à accepter comme vrai tout ce qu'on voit, tout ce
qu'on vous dit; on n'observe pas, on n'analyse rien, aussi avec elles le
merveilleux s'accredite-t-il facilement.
360,
8, Entreprinses. — J.-J. Rousseau a sans doute puisé dans ces réflexions
de Montaigne le célèbre morceau qui commence VÉmile : « Tout est bien,
sortant des mains de l'Auteur des choses ; tout dégénère entre les mains
de l'homme, etc. » Amaury Duval.
14, Platon. — Lois, X.
19, Originelle. — Le caractère essentiel de la civilisation, c'est de raisonner
et de prévoir, qui fait qu'aux instincts du présent qui est l'unique préoc-
cupation des peuples primitifs, se substitue chez les peuples civilisés une
conception des conséquences pour l'avenir. G. Lebon.
35, Vsage. — L'éd. de 88 port. : gousL
362,
1, Perfection. — L'exemplaire de Bordeaux ajoute ici cette citation: « Viri
F.366 ESSAIS DE MONTAIGNE.
a fins récentes (voilà des Jiommes qui sortent de la main des dieux) ». Sk-
NÈQUE, Episl. 90. Elle a probablement été supprimée par les éditeurs de
1595, comme faisant double emploi avec la suivante.
19. Flanq. — Les Canadiens habitent dans des bâtiments de 100 pieds de
long, sur 15 à 20 de lai-ge. où il nV a ni fenêtres, ni cheminées. — En Gui-
née, les sauvages ont leurs habitations semblables à des granges, pouvant
recevoir plus de cent personnes. Wilson.
.*7, D'autant. — C-à-d. dans le jour et abondamment.
32, Duit. — Du verbe duire qui vient du latin decet, il sied, il convient. —
Le breuvage des sauvages brésiliens est fait avec la racine de manioc ou
yucca (plante à racine charnue comme la pomme de terre), que l'on fait
bouillii- et que les femmes mâchent ensuite et rejettent dans des vases où
elle bout une deuxième fois. Le manioc est de deux espèces : l'une, dont
un des emplois vient d'être indiqué, se mange aussi cuite sous la cendre;
l'autre est un poison violent. — 11 se fait également de la boisson avec du
maïs.
364,
31, Brusier. — Hérodote, IV, 69.
366,
1, Boutes. — Déroute, défaite; mis pour roupte, du latin ruptus, rompu.
12, Absens. — Dans la Nouvelle-Zélande (grandes îles de l'Océanie au nom-
bre de deux et qui sont l'antipode de la France), l'anthropophagie est re-
gardée moins comme une satisfaction physique, que comme une excitation
morale, et il est honorable pour le vaincu d'être mangé par le vainqueur,
c'est le sort des armes; un prisonnier qui n'est pas mis à mort est désho-
horé. L'anthropophagie ne s'y pratique qu'entre tribus belligérantes et
seulement durant la guerre. Reybaud.
38, Nourriture. — Di0Gf:NE Laerce, VII, 188.
368,
2, Dehors. — On a employé en médecine la momie d'Egypte; il en entrait
dans la Thériaque de Venise (préparation pharmaceutique). Ambroise Paré,
contemporain de Montaigne, en fait souvent mention, mais presque tou-
jours pour en blâmer l'usage. Payen.
11, Vberté. — Fertilité, fécondité, du latin uberlas, qui a même signification.
34, Liberté. — Add. des éd. ant. : et leur fournissent de toutes les commo-
ditez de quoy ils se peuuent aduiser.
370,
1, Loyer. — Add. des éd. ant. : vertu et à leur.
22, Pugnat. — Le texte, latin porte : etiam si ceciderit (et s'il tombe).
25, Fortune. — Sésèque, De Constantia sapientis, 6.
26, Vaincu. — Les éd. ant. aj. : c'est son maVheur qiCon peut accuser, non
pas sa lâcheté.
29, Sicile. — Salamine; victoire navale remportée par les Grecs sous Eury-
biade, roi de Sparte, et Thémistocle, chef des Athéniens, contre les Perses,
480. — Platée; les Grecs, sous Pausanias, roi de Sparte, et Aristide, gé-
néral des Athéniens, y défirent les Perses, 479. — Mycale; la flotte grec-
que commandée par l'Athénien Xantippe y vainquit celle des Perees, le
même jour qu'avait lieu la bataille de Platée. — Sicile ; il s'agit probable-
ment de la défaite qu'y éprouvèrent les Athéniens, en 414, devant Syra-
cuse, du fait de Gylippe, général lacédémonien.
31, Thermopyles. — En 480, Léonidas, roi de Sparte, préposé à la défense
de ce défilé, après y avoir arrêté, pendant quelques jours, l'invasion de
Xerxès à la tête d'une armée incroyablement plus nombreuse, apprenant
quMl allait être tourné et se rendant compte que tout ce qui demeurerait
serait exterminé, ne conservant avec lui que 300 Spartiates et les contin-
gents de Platée et de Thespie, ensemble 4.000 hommes, succomba après
une défense héroïque, obéissant aux lois de Lacédémone qui lui interdi-
saient d'abandonner un poste qui lui avait été confié et. du même coup,
assurant à Sparte, par ce .saci'ifice. la supériorité morale sur toutes les au-
NOTES. IJV. I, CH. XX.X. VOL. I, PAG. 370. P.367
très villes. — Los historiens grecs estiment à deux et même à trois mil-
lions d'hommes l'armée des Perses en présence de laquelle se trouvait Léo-
nidas. Mais, outre que dans leurs armées le nombre des non combattants
excédait celui des combattants, ce n'est que par les Grecs que nous con-
naissons les guerres médiques, et il y a lieu de penser que leur amour-
propre et leur vanité ont de beaucoup exagéré les forces de leurs ennemis,
et que le récit de leurs hauts faits, par manque de renseignements con-
tradictoires, est lui-même quelque peu sujet à caution. — Quoi qu'il en soit,
l'appréciation qu'en porte Montaigne est pleinement justifiée, parce que, ne
])ouvant vaincre, ils sont morts; en dehors d'être, jusqu'au dernier, dans
limpossibilité de combattre, il n'est pas de défaite glorieuse.
[)?,, Perte. — En 364, lors de la guerre entre Sparte et Thèbes dont les Ar-
cadiens étaient les alliés. Diodore de Sicile, XV, 64.
372,
15, Tuition. — Défense, mot francisé par Montaigne, du latin tuilio qui a
même signification.
iO, Trétous. — Ou trestouts, souvent employé dans les Essais, semble le su-
perlatif de tous.
34, Nostre. — Ce sentiment d'admiration pour la vie primitive, sorte d'âge
d'or, se retrouve dans tous les écrivains de cette époque, qui n'ont fait que
passer dans ces nouveaux continents. Ceux qui y ont séjourné, en parlent
tout autrement ; en vivant au milieu de ces peuples, disent-ils alors, on y
retrouve tous les vices et les mauvais penchants des pavs civilisés.
374,
4. Vertu. — Les éd. ant. port. : valeur.
7, Maris. — La mémoire, ou plutôt l'attention de Montaigne est en défaut;
Sara était femme non de Jacob, mais d'Abraham ; n'ayant pas d'enfant et
pensant n'en avoir jamais, elle lui donna, pour lui en procurer, Agar, ser-
vante égyptienne, qu'elle chassa ensuite, elle et son fils, quand elle-même
vint à en avoir. — Lia et Rachel, femmes de Jacob, agirent à peu près
de même, mais avec plus d'humanité : Rachel, jalouse de ce que Lia sa
sœur avait des enfants, donna Bêla sa servante à son mari pour en avoir,
et Lia, ayant cessé d'en avoir, se fit suppléer, elle aussi, par Zelplia sa ser-
vante, et elles considérèrent comme leurs les enfants nés dans ces conditions.
Des douze fils de Jacob (il eut aussi des filles), six naquirent de Lia, deux
de Rachel (Joseph et Benjamin), deux de Bêla et deux de Zelpha. Genèse.
8, Auguste. — L'empereur Auguste fut toujours fort adonné aux femmes,
dit Slétone (Auguste, 71), et, avec l'âge, aima surtout les vierges; aussi lui
en cherchait-on de tous côtés, même sa femme. pour arriver de la sorte à
conserver son ascendant sur lui. Dans le même but. Madame de Pompa-
dour se prêtait pareillement aux caprices amoureux de Louis XV, ce fut
l'origine du Parc aux cerfs.
8, Interest. — Contre son intérêt, à son détriment, à ses dépens; cette ac-
ception, tout opposée à celle de nos jours, est fréquente dans les Essais.
12, Père. — Ne pouvant avoir d'enfant de Déjotarus son mari, Stratonice,
pour ne pas laisser le trône de Galatie sans héritier, le pria d'en chercher
auprès d'une autre et choisit elle-même à cet effet, parmi les captives faites
à la guerre, une belle jeune fille qui avait nom Electra. Plutarque, Des
vertueux faits des femmes. — Une reine de Portugal, Elisabeth, prenait sur
ses genoux les enfants que son mari avait eus de diverses maîtresses; Diane
de Poitiers le faisait pour les enfants de Catherine de Mêdicis.
14, Vsance. — Usage; de l'italien usanza, qui a même signification.
30, Deçà. — De ce côté-ci des mers, de notre pays.
34, Estait. — • En 1562, après la reprise de cette ville par le duc de Guise sur
les Protestants.
376,
8, Maisons. — On voit que ce n'est pas chez Proudhon qu'est née l'idée que
la propriété, c'est le vol ; ce paradoxe, si cher aux socialistes et base de
leurs revendications, émis avant lui sous une autre forme par ces .sauvages.
P.368 ESSAIS DE MONTAIGNE.
il n'a pas davantage été lo premier à le soutenir; on le trouve, en effet,
exposé et développé dans un dialogue d'Estienne Pasquier, datant de 156U.
Payen.
13, Capitaine. — Chef; du latin caput, tête.
17, Espace. — C'est de cette façon, au dire d'Hérodote, que Xerxès avait pu
faire le dénombrement de son immense armée.
2^ Chausses. — « Comment saurait-on être Persan '•,a dit, un siècle après,
Montesquieu, avec la même ironie narquoise. Bonnefon. — « La prévention
du pays et l'orgueil de la nation (auxquels nous appartenons) nous font
oublier que la raison est de tous les climats et que l'on pense juste partout
où il y a des hommes. » La Brlvère. — Le haut- de-chausses était la partie
du vêtement couvrant depuis la ceinture jusqu'au.x genoux, ce qu'actuel-
lement on appelle communément culotte.
CHAPITRE XXXI.
Ce chapitre est numéroté XXXII dans les éd. ant. et l'ex. do Bordeaux.
26, Platon. — Dans Critias.
378,
9, Esteut. — Au propre, leur balle; est ici pris au figuré: leur jeu.
29, larnac. — En mai 1569, avait eu lieu à La Roche l'Abeille une échauf-
fourée, où l'amiral Coligny, chef des Protestants, avait eu le dessus sur
l'armée catholique que commandait le duc d'Anjou (depuis Henri III),
lequel, le mois précédent, avait été vainqueur à Jarnac, et, quelques mois
après, en octobre, gagnait la bataille de Montcontour.
32, Froid. — Prendre d'un sac deux moutures, c'est se faire indemniser
deux fois pour un même service rendu. — Souffler le cliaud et le froid,
c'est soutenir indifféremment le' pour et le contre, c'est avoir la langue
double. La Fontaine, dans « le Satyre et le Passant », une de ses fables le
moins bien réussies, conclut :
« Arrière ceux dont la bouche Souffle le cliaud et le froid. •
Avant lui. Le Noble avait usé de cette locution, à l'adresse des avocats :
• Quoi, coquin!... Souffler de même bouche et le chaud elle froid. •
35, D'Austria. — 1571, dans le golfe de Lépante, où la flotte turque fut dé-
truite par les flottes combinées de l'Espagne, de Venise et du Pape. —
•• Dom » et « Don » viennent de Dominus (seigneur). Don est un titre d'hon-
neur en Espagne, en Autriche et en Portugal, et se place devant le nom ;
en France, on disait Dom, accolé également en avant du nom, on parlant
de religieux de haut rang de certains ordres.
380,
1, Hérésie. — Arius n'admettait ni le mystère de la Sainte Trinité, ni la
divinité de Jésus-Christ.
4, Amo. — Arius, nommé patriarche de Constantinople, malgré l'opposition
de saint Alexandre évoque d'Alexandrie, allait faire son entrée solennelle
dans son église, quand il mourut subitement d'une violente colique; ses
partisans prétendirent qu'il avait été empoisonné, ses adversaires que sa
mort était un miracle accordé par Dieu à la prière du saint évéque, 336.
Sandius, Hisl. ecctés., II. — Léon avait été nommé pape en 364, par les
évoques hérétiques; il régna vingt mois, mais ne figure pas sur la liste des
papes, qui porte un interrègne. Au concile de Poitiers, discutant avec
saint Hilaire, il fut pris de mal de ventre, alla aux lieux où, n'en revenant
pas, on alla le chercher ; on le trouva les entrailles sorties du corps. Atha-
NASE, EpUre à Sérapion.
6, Retraict. — En 222, dans une sédition de sa garde prétorienne; pour lo
NOTES. I.IV. T, en. XXXT. VOL. ï, PAG. 378. F.3G9
cas où il serait contraint par un cvcnonient semblable de se donner la
mort, il avait fait des préparatifs tout autres (V. II, 424 et N. Mourii'j.
Lampridius, Héliogabale, 17.
7, Fortune. — Par contre l'empei'eur Charles-Quint n'est-il pas né à Gand,
dans des lieux d'aisance où sa mère Jeanne la Folle s'est trouvée surprise
par les douleurs de l'enfantement? 1500.
CHAPITRE XXXI I. .
380,
^1, Viure.
" Quand on a tout i)erdu ol qu'on n'a plus d'espoir,
La vie est un opprobre et la mort un devoir. » Voltaire.
29, 'AÔXiw;. — On trouve dans Stobke, .Ser»*., 20, des .sentences toutes sembla-
bles à ces trois-lcà.
382,
7, Lucilius. — Sknkque, Episl. 22. — Lucilius, pei'sonnage peu important
du temps de Néron, dont le nom a été conservé à la postérité, à la faveur
de celui de Sénèque qui lui a adressé de nombreuses lettres qui passent
pour son chef-d'œuvre.
23, Syrie. — Il s'y trouvait exilé i)ar l'empereur Constance à la sollicitation
des évoques ariens.
24, Deçà. — De ce côté-ci de la mer, c.-à-d. en France.
25, Nourrie. — Élevée; de môme on rencontre, dans les Essais, nourritui-o
pris dans le sens d'érducation.
37, loye. — Abra avait fait vœu de chasteté, et son père craignait que si
elle venait à lui survivre, ce qui était dans les lois de la nature, elle ne
pût résister aux demandes en mariage dont elle était l'objet, d'où l'ardeur
de ses prières pour qu'elle mourût avant lui. Bouciiet.
42, S. Hilaire. — Le mariage n'était, dans le principe, interdit aux prêtres
ni avant, ni après l'ordination. Plus tard, les règles ecclésiastiques ont
beaucoup varié sur ce point, et, bien que condamné par différents conciles,
entre autres par celui de Latran, 1139, qui défendit d'entendre la messe
de prêtres mariés, on en voit encore longtemps après qui le sont, l'indi-
gne cardinal Dubois notamment qui fut sacré archevêque de Cambrai par
l'évoque de Nancy, assisté de Massillon. A l'époque actuelle, chez les Maro-
nites, chrétiens d'Asie Mineure, rite reconnu par Rome, les prêtres ne peu-
vent se marier; mais les gens mariés sont admis à l'exercice du sacerdoce.
384,
ij, Commun. — « C'est égal, dit une jeune femme, à la lecture de ce pas-
sage, saint Hilaire n'était qu'un égoïste qui n'aspirait qu'à sa parfaite tran-
quillité; et si j'eusse été sa femme, j'aurais demandé la même grâce... pour
lui d'abord. » Victor Thierry.
CHAPITRE XXXIII.
6, Raison. — Dans ce chapitre qui est l'analogue du chapitre XXIII de ce
même livre, Montaigne semble s'être proposé de prouver que la Providence
dirige parfois les événements par une intervention immédiate et directe.
— Le mot fortune considéré comme ayant le sens de fatalité, qui se trouve
employé ici et ailleurs dans bien d'autres passages des Essais avec cette
acception et qu'il eût pu remplacer sans rien changer à son idée par celui-là
, même de Providence, est un de ceux qui, à Rome, prêtèrent à la censure,
lorsque le livre fut examiné par les docteurs moines, ainsi que les appelle
l'auteur dans son journal de voyages, lors de son séjour en Italie en 1581.
Dans les pays d'inquisition^ à Rome surtout, il était défendu de dire fatum
ou fala (destin, fatalité). Montaigne se justifie (I, 588) d'avoir employé
quelques-uns de ces mots prohibés, verba indisciplinata, plaidoyer qu'il
n'a introduit dans son ouvrage, qu'après son retour de Rome. Le Clerc.
ESSAIS de MONTAIGNE. — T. IV. 24
F. 370 ESSAIS DE MONTAIGNE.
19, Fortune. — En 1Ij03. Guicciardixi, Uisl. de France, YI. — Cette autre
pire fortune fut qu'à partir de ce moment, le duc de Valentinois, César Bor-
gia, vit renverser sa puissance et tout tourner contre lui. Le pape Jules II.
successeui' de son père, le fit arrêter et le contraignit à livrer toutes ses
forteresses; à peine sorti de prison, il fut arrêté à nouveau par Gonzalve
de Cordoue et envoyé au roi d'Espagne qui avait des griefs contre lui.
Étant parvenu à s'échappei-, il .se réfugia auprès du roi de Navarre son
beau-frère, et l'ayant accompagné dans une expédition contre l'Espagne,
fut tué au siège de Viana, 1507.
2^i, Foungueselles. — Ou plutôt Fouquei"olles. Du Bellay, II.
386.
3, Amorem. — Dans les éd. ant. à 1588, cette citation de Catulle se continue
par ce quatrième vers : Posset vl abrupto viuere coniugio {comme s'il était
possible de vivre étant ainsi séparés) ?
G, Dames. — Du Bellay, II. — En 1525. Les Espagnols s'étant approchés de
Saint-Omer, la garnison fit une sortie qui fut repoussée; le sieur de Liques
fut pris en soutenant la retraite; sa mise en liberté, à laquelle s'employa le
seigneur d'Estrées, fut la suite d'un renvoi, sous caution, des prisonniers
dont le nombre embarrassait le vainqueur.
8. Finit. — Constantin le Grand, après avoir triomphé de ses compétiteurs,
mis fin aux incursions des Barbares et fait de la religion catholique la re-
ligion de l'empire romain, transporta le siège du gouvernement à Byzance,
qui prit de lui le nom de Constantinople, 330. Cet état de choses se main-
tint, avec de nombreuses vicissitudes, jusqu'en 1453, date à laquelle l'em-
pire prit fin par la prise de Constantinople, par les Turcs, sur Constan-
tin XII, qui, après uhe défense honorable, mourut en héros sur la brèche.
11, Diuine. — En 508. Le fait est rapporté, sans autre détail, par S. Grégoire
DE Tours : « Le Seigneur accorda, dit-il, au roi Clovis, une si grande grâce,
qu'à sa vue, les murs s'écroulèrent d'eux-mêmes. <•
15, Ruine. — Vers l'an 1002. Le règne de ce roi faible et dévot à l'excès, est
fécond en prodiges de toute nature; Bouchet, qui mentionne celui-ci, n'en
dit pas davantage. Au roi Robert est due la construction, à Orléans, d'une
église consacrée à S. Aignan pour lequel il avait un culte particulier.
19, Empenné. — C.-à-d. que le mur soulevé retomba tout d'une pièce, verti-
calement sur sa base, sans que ses pierres emboîtées comme les barbes d'une
plume se soient disjointes.
20, Moins. — En 1524; Arone, que défendaient les Impériaux, avait déjà
résisté à un siège de vingt-cinq jours et à deux ou trois assauts, quand le
seigneur de Rence s'avisa de ce dernier moyen qui échoua par suite de la
circonstance relatée ici, et qui le détermina à la retraite. Du Bellay, II.
26, Guérit. — C'est la version do Pline, Hist. nat., VII, 50; Valère Maxime ot
Sénèque disent que c'est d'un assassin que Jason reçut cet important service.
33, Attaindre. — Pline, 7/tsL nat., XXXV. Ce chien à l'écume faisait partie du
tableau « le chasseur Jaljse », chef-d'œuvre de ce peintre. Ce tableau, qui
périt à Rome dans un incendie, sauva Rhodes que Démétrius Poliorcète
assiégeait; pour ne pas livrer aux flammes le faubourg où Protogène avait
son atelier et que ce tableau ne fût pas compromis, ce prince attaqua la ville
d'un autre côté et échoua.
33, Adresse. — Ne redresse-telle pas.
38, Fortune. — Les éd. ant. à 88 aj. : to print en mer.
39, Seureté. — Froissart. En 1326; la reine Isabelle de France, fille de Phi-
lippe le Bel, mariée à Edouard II, roi d'Angleterre, se voyant négligée par
son mari, livrée à d'indignes favoris, vint sur le continent solliciter des se-
cours étrangers, à l'aide desquels repassant en Angleterre, elle s'empara de,
sa personne, fit prononcer sa déchéance et proclamer roi son fils Edouard 111 ;
c'est d'elle que celui-ci et ses successeurs prétendaient tenir des droits à la
couronne de France.
42, BowUûeTai. — Ménandre. Ce vers que Montaigne traduit après l'avoii- cité,
était passé en proverbe chez les Grecs.
NOTES. I.IV. 1, CH. XXXni. VOT.. T, PAG. 386. F.37I
43, Icetes. — Vers 354, après l'expulsion de Dcnys le Jeune par Timoléon.
Pi.uTARQUE, Timoléon.
388.
15, Attiques. — Le mine attique valait 100 drachmes (environ 50 francs).
18, Prudence. — N'a-t-on pas vu, lors du cataclysme qui, en septembre 1905,
a si fortement éprouvé l'Italie méridionale, à Stefanoconi, dans les Calabres,
une famille de quatre personnes ensevelie sous l'effondrement de leur
maison ; et, quelques heures après, une nouvelle secousse de tremblement
de terre faire crouler le clocher voisin qui, tombant sur un mur resté
debout, ouvrit une issue à cette famille qui, ainsi, j)ut sortir saine et
sauve.
21, Fils. — Api'ies, Guerres civiles, IV. — En 42, sous le tri umvii-at d'Octave,
Antoine et Lépide; Suétone désigne les victimes sous le nom d'Aquilius
Florus.
CHAPITRE XXXIV.
Ce chapitre est numéroté XXXV dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
390,
10, Nécessité. — La réalisation de cette idée ne s'est pas fait trop attendre,
car déjà torsqu'en 1G31 Renaudot fonda le premier journal français la
Gazelle, il y introduit 1' « Inventaire des adresses du bureau de rencontre,
où chacun peut donner et recevoir avis de toutes les nécessités et com-
modités de la vie ». Et depuis, quels progrès !' c'est devenu l'unique objet
des Petites affiches, qui datent de 1752, et des bureaux de placement; en
outre il n'est pas une feuille publique de nos jours, et elles sont légion,
qui ne lui réserve, contre deniers comptants, une grande place qui, si grande
qu'elle soit, e.st encore insuffisante , puisque ces mentions vont s'étalant
sur tous les mure, et même en pleine campagne, au grand détriment du
pittoresque.
17, Soubaiteroit. — On suppose que c'est à lui-même que Montaigne fait
allusion.
34, Qu'il auoit. — Les éd. ant. port. : qu'es commandemens qui lui esloient
tombés en main, il auoit.
38, Cbacuniere. — Chez soi. Rabelais, auquel l'expression semble empruntée,
a dit de même : « Ainsi chascun s'en va à sa chascuniere. »
CHAPITRE XXXV.
Ce chapitre est numéroté XXXVI dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
392.
G. Mores. — Indiens et Jlores (ou Maures), appellations anciennes; la pre-
mière des peuplades indigènes de l'Amérique, la seconde de la population
dominante dans l'Afrique septentrionale (Tripolitaine, Tunisie, Algérie et
Maroc).
12, Eguille. — Expression proverbiale signifiant : ■• Etre pourvu de tout ce
qu'il faut pour se suffire. •
25, Nostre. — Sous la même latitude que nous.
28, Contadins. — Paysans, de l'italien contadino, qui a même signification.
394,
7, Face. — Cette réponse fut faite à Florimond de Rémon (V. N. I, 340 :
Simple). — Ei.iEN prête la semblable à un Scythe dont le roi des Perses
plaignait la nudité en temps de neige.
12, Moy. — Sainte Thérèse, alors carmélite, couchant sur la paille, une nuit
d'un froid excessif, priait ses compagnes de lui donner de quoi mieux se
couvrir; elles lui répondirent avec un éclat- de rire : « Comment, notie
Mère, vous avez tout ce qu'il y a de couvertures à la maison et vous n'en
avez pas encore assez ! •>
p. 372 ESSAIS DE MONTAIGNE.
13, Massinissa. — Cicéron. De Seneclule.
10, Dit. — Liv. III, 12.
21. Agesilas. — Plutarque, Agésilas.
22, Vesture. —Vêtement, habillement; du latin veslitus qui a même signifi-
cation. Ne se dit aujourd'hui, du reste avec même étymologie, que de la
prise d'habit dans les couvents, cérémonie où l'on revêt pour la première
fois un novice de l'habit de l'ordre.
22, Suétone. — Dans sa Vie de César, 58.
31, Cbeual. — Balbi, joaillier vénitien, qui visitait les Indes en 1579.
34, Roy. — Etienne Bathoi-y qui, en 1571, succéda sur le trône de Pologne
au l'oi issu de la maison de Franco qui l'y avait précédé (le duc d'Anjou,
depuis Henri 111) (V. N. I, 460 : Luy-mesme). — C'est à lui, et non à son pré-
décesseur, que se rapportent les mots qui suivent : « qui est à la vei'ité
l'vn des plus grands princes de nostre siècle ».
39, Vari^o. — Pline, Hist. nal., XXVllI.
396,
1, Père. — Cela a été présenté comme une bizarrerie; mais, à l'époque,
par suite de la bigarrure dos costumes introduite par François I", cela
n'avait rien de singulier.
2, Luxembourg. — En 1513, loi-s du i-avitaillement de cette place dont nous
nous étions emparés et que s'efforçait de reprendre Charles-Quint; la
réussite de ce ravitaillement décida les Impériaux à se retirer. Du Bellay, X.
1, Coignée. — Dans l'hiver de 1408, les choses s'étaient passées de même à
Paris; DE CoMiNES parle d'un froid pareil survenu en son temps, en 1469,
dans le pays de Liège; en 1544, par toute la France, le vin se coupa à coups
de hache, dans les tonneaux.
5, Ouide. — Les éd. ant. aj. : à deux doigts près.
11, Nauale. — Le Palus Mœotis, dit Strabon, VII, se prend à l'époque des
grands froids et l'on vit, dit-on, Néoptolème, l'un des lieutenants de Mi-
thridate, y battre les barbares, l'été dans un combat naval, et l'hiver dans
un combat de cavalerie. — En 1658, le roi de Suède traversa le Sund sur la
glace, pour envahir l'île de Seeland, en Danemark. — A une époque plus ré-
cente, en janvier 1795, la cavalerie française s'empara de la flotte hollan-
daise, immobilisée par les glaces à l'entrée du Zuyderzée, flotte qui, à la
vérité, se rendit à première sommation.
13, Plaisance. — En 218, à la .bataille de la Trébie où Annibal défit le con-
sul Sempronius. Tite-Live, XX, 54.
19, Païs. — En 401, lors du retour, connu sous le nom de Retraite des
Dix mille, sous la conduite de Xénophon, à travers l'Asie Mineure, avec des
dangers et des fatigues inouïs, des Grecs qui avaient combattu à Cunaxa
pour Cyrus le Jeune. Xénophon, Anabase, IV, 5.
30, Gelée. — Quinte-Curce, VII, 3. ■- La nation en question est celle des
Parapamisades, populations clairsemées dans les hautes vallées de 4 à
5.000 mètres d'altitude, séparées et dominées par des cimes de 7 à 8.000 mè-
tres qui constituent le plateau de Pamir, nœud de montagnes d'où partent
les chaînes les plus puissantes de l'Asie.
30, Voir. —Cela a lieu en effet en France : dans le Roussillon pour les oran-
gers, dans les environs de Paris pour les figuiers où ces arbres sont du
reste en petit nombre.
CHAPITRE XXXVI.
Ce chapitre est numéroté XXXVII dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
398,
1, Gaton. — Dit le Jeune, pour le distinguer de son grand-oncle, sur-
nommé l'Ancien; dit aussi d'Utique, du lieu où il se donna la mort dans
des conditions qui en font un des actes de l'humanité le plus admirés. V. N.
III, 586 : leune Caton.
NOTES. LIV. r, GH. XXXVI. VOL. I, PAG. 398. F.373
2, Moy. — Var. des éd. ant. : iuger d'aulruy selon moy, et de rapporter la
condition des autres hommes à la mienne : ie croy aysement d'autruy beaucoup
de choses, où mes forces ne peuuent altaindre ; au lieu de : « iuger... moy ».
10, Capucbins. — Les Feuillants, ordre monastique des plus rigoureux, déri-
vant de l'ordre de S. Benoît; ils devaient avoir la tète et les pieds nus, dor-
mir sur des planches, manger à genoux et boire dans des crânes humains;
mais l'austérité de la règle fut bientôt adoucie; ils prirent une grande part
aux troubles de la Ligue. — Les Capucins, religieux de l'ordre de S. Fran-
çois, ainsi nommés du capuchon ou capuce dont ils se couvraient la tète,
furent introduits en France par Catherine de Médicis; ils s'y multiplièrent
rapidement, vivant d'aumônes et se livrant à la prédication.
17, Confidunt. — Citation tirée de Cicéron, Orator,.!, ou encore des Tusca-
lanes, l\, 1, que Montaigne, on raison des changements qu'il y a faits, semble
avoir in.sérée de mémoire.
21, Corruption. — Add. des éd. ant. : et débauche.
21, le ne dis... l'imagination. — Var. des éd. ant. : le goust.
29, Possent. — Montaigne applique ici à la vertu ce que Cicéron dit de la
philosophie et de ceux qui la blâment.
31, Action. — Add. des éd. ant. ; purement.
400,
8, Potidée. — En 479; l'auteur a mis par méprise « Potidée » au lieu de
Platée.
19, Passée. — Hérodote, IX; Cornélius Nepos, Pausanias. — Aristodème et
Eurylus, tous deux du corps dos trois cents Spartiates qui accompagnaient
Léonidas aux Thermopyles, étaient, au début de l'action, retenus dans un
bourg voisin, par une maladie d'yeux. Eurylus, à la nouvelle de la situation
critique dans laquelle allait se trouver la troupe à laquelle il appartenait,
se fit armer par son ilote, conduire au lieu du combat et y fut tué; Aris-
todème n'en fit rien, il retourna à Sparte où il fut couvert d'opprobres jus-
qu'à ce qu'à Platée il eût réparé ce moment de faiblesse. Que les Spartiates
lui aient tenu compte, pour lui refuser le prix de la valeur, de sa conduite
antérieure aux Thermopyles, cela se conçoit; que le désir de se réhabiliter
ait été le mobile auquel lui-même a obéi, c'est probable ; mais la justesse
du motif allégué à l'appui de son éviction est discutable : pourvu qu'on
agisse bien, qu'importe la cause? on peut même ajouter avec Juvénal :
« Qui pratiquerait la vertu, s'il n'en attendait la récompense? »
19, Nos iugemens. — Les éd. de 80, 85, port. : Qui plus est, nos iugements.
402,
5, Ny dressée à. — Remplacé dans les éd. ant. par : « pour imaginer et ».
10, Ambition. — Les éd. ant. à 88 aj. : et de ceux qui font l'honneur, la fin
de toutes actions glorieuses.
11, Gloire. — C'est dans cet esprit critique qu'en 1794, lors de leur procès
devant le tribunal révolutionnaire, Fabre d'Eglantine faisait application à
Danton son co-accusé de ces vers de Campistrous, dans sa tragédie de
Juba :
• Tu verras que Caton, loin de nous secourir.
Toujours fier, toujours dur, ne saura que mourir. •
lo. Atteindre. — Velleius Paterculus dit do lui: « Il n'a jamais fait de bonnes
actions pour paraître les avoir faites, mais parce qu'il n'était pas en lui
do faire autrement. »
16, Latins. — Ces cinq poètes, dont il est donné plus loin dos citations, sont,
dans l'ordre où ces citations sont faites : Martial, Manilius, Lucain, Horace
et Virgile.
26, Cognoistre. — Il est sûrement plus facile de faire de mauvais vers, et même
des vers médiocres, que do se connaître en beaux vers; mais il est bien plus
difficile do faire de bons vers que do bien juger une tragédie ou un poème;
et quoique à vrai dire les bons juges soient fort j'ares, les grands poètes, les
F. 374 ESSAIS DE MONTAIGNE.
grands orateurs, les grands philosophes, etc.. le sont plus encore. Naigeon.
— HuET (savant prélat français, 1630 à 1721), après avoir jugé Corneille et
lui avoir refusé l'équité et la justesse dans l'appréciation des poèmes et des
poètes do l'antiquité, termine en disant : ■< tant est vrai ce que j'ai osé af-
firmer ailleurs, contrairement à l'opinion commune, qu'on trouvera plus
de poètes excellents, lesquels sont cependant très rares, que d'appréciateurs
habiles et équitables de la poésie ».
404,
4, L'autre. — Toutes ces images sont prises de Vlon de Platon.
19, Catoni.
« En faveur de César les dieux ont combattu,
Les dieux servaient le crime et Caton la vertu. » Lebuin.
« Devant le grand Dandin, l'innocence est hardie.
Oui, devant ce Caton de basse Normandie,
Ce soleil d'équité qui n'est jamais terni,
Victrix causa Diis placuit, sed vicia Catoni. » Racine.
CHAPITRE XXXVII.
Ce chapitre est numéroté XXXVIIl dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
30, Pleurer. — En 273. Deux partis divisaient Argos, qui avaient appelé,
l'un Antigone roi de Macédoine, l'autre Pyrrhus roi d'Épire, qui tous deux
avaient répondu à leur appel. Dans un combat qui se livra dans la ville
même, Pyrrhus fut tué, frappé d'une tuile que, du haut d'un toit, une
femme lui lança pour sauver son fils que ce roi menaçait; témoin du fait,
le fils d'Antigone lui coupa la tète et courut la présenter à son père demeuré
hors ville. Plutarque, Pyrrhus. — V. I, 494 et N. Italie.
31, Deffaire. — Devant Nancy, en 1477.
406,
1, Dueil. — En 1364, près de Vannes. — Sophocle porta, dit-on, le deuil
d'Euripide, son rival, qui mourut quelque temps avant lui.
8, Spectacle. — Plutarque, César, 13. V. N. I, 100 : Suspendues.
18, Est. — La traduction qui est donnée de cette citation, est de M"" de
Gournay.
20, Passions. — Rubens, dans un tableau de la naissance de Louis XllI, a
su exprimer deux sentiments opposés sur le visage de Marie de Médicis :
la douleur de l'enfantement et la satisfaction de l'orgueil maternel.
408,
4, Badin. — Écervelé (V. N. I, 202 : Badin). — Veau avait parfois et a ici le
sens d'ignorant.
0, Bren. — Ou bran, Fi! interjection qui marque le mépris. — Bran est un
mot gaulois qui signifiait le son, la partie la plus grossière du blé.
14, Pitié. — Agrippine, mère de Néron, s'attachant à lui, le provoquant
même à l'inceste potir conserver son pouvoir sur lui, celui-ci, fatigué de
ces obsessions, témoigna le désir d'en être débarrassé et acquiesça à sa
mort. Une tentative fut faite pour la noyer comme par accident, elle
échoua; le lendemain même il la fit poignarder, 59. — Tacite, Annales,
XIV, 4, en racontant la dernière entrevue entre la mère et le fils, n'est pas
aussi affirmatif que Montaigne sur la cause de l'émotion que fit paraître
ce dernier et donne à penser que ce pouvait bien être pour endormir les
soupçons de sa victime.
30, Larmes. — En 480, au commencement de la deuxième guerre médique
fV. I, 42 et N. Athos; N. I, 370 : Thermopyles). Hérodote, VIH, 45 et 46;
Pi.iNE, Episl., m, 7; Valère Maxime, IX, 13.
410,
1, Corps. — Faire un ouvrage complet et tout d'une pièce.
6, L'autre. — Plutarque, Timoléon; Diodore de Sicile, XVI. — Vers 365.
NOTES. LIV. 1, Cir. XXXVII. VOL. 1, PAG. 410. F.37d
Après s'être opposé de toutes ses forces aux entreprises de son frère Timo-
phane qui voulait usurper le pouvoir à Corinthe, n'ayant pu le détourner
de ses projets criminels, Timoléon le lit mettre à mort, et, s'exilant volon-
tairement après ce sacrifice, resta vingt ans éloigné des affaires.
CHAPITRE XXXVIII.
Ce chapitre est numéroté XXXIX dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
7, Solitude. — Les pages écrites par Madame Périer sur les mortifications de
Pascal, son frère^ sont le contrepied complet de ce chapitre de Montaigne;
leur lecture simultanée est, à cet égard, de grand intérêt. Payen.
10, Publicq. — Traduction d'un vers de Lucain, II, 383, à l'éloge de Caton
d'Utique.
1:?, Recherche. — A remarquer trois sujets, dont deux au pluriel, et le verbe
au singulier.
13, Particulier. — Le bien public a été de tous temps le prétexte de tous
ceux qui, mus par une ambition et un intérêt tout personnels, vont, sur
une plus ou moins grande échelle, soit isolément, soit en association, agi-
tant le monde; c'est en particulier, de nos jours, le cas de la plupart de
ceux qui s'adonnent à la politique : bien peu dans le nombre, quoi qu'ils en
disent, ont un mobile désintéressé; s'ils sont dc»valeur, ils visent à tout;
ceux de peu d'envergure se bornent à trafiquer de leurs voix, de leurs re-
commandations et à pêcher en eau trouble; les scrupules et la conscience
n'arrêtent ni les uns, ni les autres ; les Verres y sont nombreux, les Pho-
cion bien rares.
17, Société. — « La plus contraire humeur à la retraite, c'est l'ambition, »
dit plus loin Montaigne (I, 426), en contradiction, mais seulement apparente,
avec lui-même : l'ambitieux, veut-il dire, n'a que lui-même en vue, et ne
peut songer à abandonner un seul instant la partie.
17, Franches. — Les éd. ant. à 88 aj. : et point de compagnon.
10, Grande. — Diogène Laerce, Bias.
20, Bon. — « Ayez beaucoup d'amis qui vivent en paix avec vous, mais
choisissez pour conseil un homme entre mille. » Ecclésiastique, VI, 6.
23, Presse. — La contagion chez les foules est constante et presque irrésis-
tible, les exemples en sont innombrables. C'est elle qui fait qu'on les voit si
souvent se livrer à des manifestations, sans que le plus grand nombre de
ceux qui y prennent part sache ce dont il s'agit, et que, si fréquemment sans
motif plausible, elles changent de caractère et de pacifiques en viennent à
commettre des actes criminels. Les paniques n'ont pas d'autre cause. C'est
également à la contagion que l'on doit de voir parfois, lorsqu'un accident
se produit, les gens et jusqu'aux parents les plus proches venir successi-
vement affirmer l'identité de victimes qu'on voit plus tard réapparaître
saines et sauves, que les incidents les plus saillants d'un combat sont
inexactement rapportés, si bien qu'il est impossible d'accorder pleine
(créance au témoignage des foules et que l'unanimité des témoins est loin
d'être une garantie de vérité.
2(), Dissemblables. — Réflexions traduites de Sénèque, Epist. 7.
412,
3, Moy. — Diogène Laerce, Bias.
8, Bord. — Variante de l'exemplaire de Bordeaux : « en sauueté », au lieu
de « à bord <>. — Singulière idée qu'eut là Albuquerque, qui aurait plutôt
l'air d'une plaisanterie que d'un acte religieux, si on ne savait à quel
point la superstition porte le trouble dans l'esprit de la plupart des hom-
mes. Naigeon.
15, Compagnie. — Diodore de Sicile, XII, 4. — Nous nous bornons présente-
ment à leur dire : « Dis-moi qui tu hantes, je te dirai qui tu es. »
18, Malades. — Diogène Laerce, Antisthène.
28, Marché. — Place publique, acception du mot latin fàrum.
F.376 ESSAIS DE MONTAIGNE.
34, Cura. — La traduction donnée de cette citation est de Boileau, dont le
vers élégant est passé en dicton.
414,
i, Soy. — « On ne s'amende pas pour aller à Rome, » dit un proverbe. — La
Fontaine exprime la même idée; parlant d'un pèlerin, il dit :
« Prou de pardons il auoit rapporté.
De vertus point, chose assez ordinaire. »
30, Vnquam. — Montaigne a traduit lui-même ce vers avant de le citer.
li?, Sien. — Sénèque, Epist. 9, dont Montaigne a adopté la vei-sion, dit bien
que Stilpon avait perdu femme et enfants; mais il est seul à le dire; ni
Diogène Laërce, ni Plutarquc n'en font mention, en rapportant sa réponse
(jui s'exprime mieux ainsi. Dire n'avoir rien perdu, s'il avait perdu tous les
siens, eût été pousser par trop loin le stoïcisme. Naigeon.
45, Naufrage. — Diogène Laerce, VL
416,
3, Entier.— En 409, lors de l'invasion des Goths. S. Grégoire de Tours men-
tionne qu'en cette circonstance, S. Paulin racheta de sa propre liberté le
fils d'une pauvre veuve réduit à l'esclavage.
8, Despende. — On peut rendre son bonheur indépendant des biens de la
fortune et même cela est sage ; mais il est bien difficile d'avoir pareille in-
différence pour la santé, dont on peut dire aussi ce que La Fontaine dit de
la liberté : « Ce bien sans lequel les autres ne sont rien » ; ainsi du reste
que Montaigne en convient plus loin, « d'autant que sans elle, dit-il, la vie
nous vient à estre pénible et iniurieuse ».
23, Regarde. — Quiconque réfléchit et observe, peut, à tout moment, cons-
tater la vérité de cette assertion en lui et chez les autres.
29, Délices. — « Cette citadelle que défend un soldat et qu'un autre attaque ;
et le fait de cet érudit acharné à l'étude de Plaute, ces deux petits ta-
bleaux, ces deux toiles de Meissonier, c'est du pur La Bruyère. » G. Guizot.
34, Plaute. — Mélanchthon, savant théologien du xvi' siècle, a, le premier,
reconnu lamesure des vers de Térence; jusqu'alors tous les anciens manus-
crits de cet auteur présentaient un texte suivi, comme si c'eût été de la prose.
418,
2, Gens. — Ce sentiment est indépendant de nous : on est bon ou méchant,
vertueux ou vicieux selon qu'on veut; mais on n'est pas plus sensible
qu'insensible à volonté et à moment donné, ce que Chaulieu exprime si
bien, à propos d'un ami que la mort lui a enlevé :
« J'appelle à mon secours raison, philosophie;
Je n'en reçois, hélas.' aucun soulagement.
A leurs belles leçons insensé qui se fie !
Elles ne peuvent rien contre le sentiment.
J'entends que la raison me dit que vainement
Je m'aiflige d'un mal qui n'a point de remède,
Mais je verse des pleurs dans le même moment
Et sens qu'à ma douleur toute ma vertu cède. »
Tout ce que l'on peut concéder, c'est que le premier moment passé, la
raison est à même de reprendre le dessus sur la nature, et qu'en outre de
l'effet du temps, en s'évertuant à écarter de sa pensée les sujets pénibles,
on finit dans une certaine mesure par y échapper.
32, Dit. — Cette maxime des Pythagoriciens n'est pas de Socrate; Montaigne
la lui attribue parce que dans le recueil de Stobée, d'où il l'a tirée, elle
suit immédiatement un mot de Socrate.
35, Office. — La rédaction du texte grec est la suivante : « Chaque âge a
ses devoirs particuliers : les enfants doivent suivre les écoles ; les jeunes gens
s'appliquer à connaître les lois et les usages de la société; aux hommes
faits incombe d'agir et d'occuper les charges publiques; aux vieillards les
NOTES. LIV. I, CH. XXXVIU. VOL. I, PAG. 418. F.377
fonctions de juge et l'entrée dans les conseils en raison de leur expé-
rence. » — Une autre sentence grecque dit pareillement : « Le vieillard
délibère, l'homme fait agit, l'adolescent s'instruit. »
420,
31, Paix. — De nos jours, ce sont les manœuvres dites à double action, que
clôturent les manœuvres d'automne, qui constituent cette préparation à la
guerre ; mais ici encore on a trop tendance à donner dans l'extrême. —
C'est sans contredit une chose excellente que tout chef fasse manœuvrer sur
le teri-ain l'unité qu'il commande, en vue de la conduite à tenir à une
proximité telle de l'ennemi, qu'on peut en venir aux mains d'un moment à
l'autre. Or, dans ces conditions, le conmiandement immédiat ne saurait
excéder le corps d'armée ; par suite, doux corps d'armée agissant l'un con-
tre l'autre est le maximum d'envergure qu'on peut raisonnablement donner
à ces manœuvres. Cette limite imposée dans la réalité par l'étendue des
fronts à la guerre, l'est encore ici par les invraisemblances du temps de
paix qui augmentent considérablement avec les effectifs en présence et les
espaces sur lesquels on opèi'e; et si quand même on veut faire concourir à
une même action au delà de deux corps d'armée opposés, on en arrive au
grotesque et chacun y désapprend au lieu d'apprendre ; du reste c'est sur-
tout avec des effectifs moyens, composés des trois armes (régiment, bri-
gade, division), qu'en dehors de toute autre considération les manœuvres
de ce genre sont le plus profitables.
A la vérité, il est non moins indispensable de former le commandement
et les états-majors à la manœuvre et à l'établissement des ordres de mou-
vement d'effectifs comprenant plusieurs corps d'armée dans la péi-iode qui
prend fin au moment où la bataille est sur le point de s'engager, alors que
par exemple la distance qui sépare les masses opposées n'excède pas une
journée de marche, soit une vingtaine de kilomètres; mais, pour cela, les
manœuvres dites sur la carte satisfont amplement; les hypothèses suffi-
sent, la présence des troupes n'ajoute rien, bien plus elle est nuisible par
les conditions différentes du temps de guerre dont il faudrait tenir compte ;
la vue du terrain n'est pas indispensable; il ne l'est pas davantage que
chefs et états-majors soient réunis, chacun peut demeurer à son poste ha-
bituel; le travail peut se faire et s'est fait (car ce n'est point là une innova-
tion) par correspondance, les participants aux quatre coins de la France;
il peut prendre des mois, cela importe peu, d'autant qu'il faut laisser à cha-
cun le temps delà réflexion, point capital quand il s'agit d'études.
Quant aux manœuvres d'automne, limitées quant aux effectifs comme il
a été dit, leur durée devrait être de sept à neuf jours, coupée par une
journée de repos et non compris l'aller et le retour; les cantonnements,
changés le moins possible, n'être pas distants de plus de 8 à 10 kilomètres
du point initial de la manœuvre et de celui où elle doit prendre fin. On y
arriverait pai- l'emploi de la tente-abri, concurremment avec le cantonne-
ment; la saison s'y prête, elle ne surchargerait pas outre mesure l'homme
qui ne porte à peu près rien, il ne perdrait pas l'habitude d'en faire usage,
le temps donné à la manœuvre s'en trouverait accru et bien des situations
de guerre pourraient être envisagées dont il n'est pas tenu compte actuel-
lement. — La revue finale est à supprimer ; elle donne à la vérité occasion
aux hommes politiques de se montrer, de prononcer des banalités, de
prodiguer des éloges sans v^aleur parce que la compétence leur fait défaut;
mais en dehors de cela elle est sans utilité, influe quelquefois défavorable-
ment sur la conduite des manœuvres et ajoute à la dépense.
Les manœuvres dites de forteresse, comme celles du service de santé, sont
de la plus complète inutilité : les premières par l'impossibilité d'exécuter
les travaux de terrassement dans les conditions et avec tout le développe-
ment que comporte la réalité, les secondes parce que tout y est fictif; de
simples conférences sur le terrain les remplaceraient avantageusement. De
même les manœuvres avec tirs réels et aussi les feux de guerre consti-
tuent des superfluités coûteuses, dont les résultats sont absolument nuls; la
F.378 ESSAIS DE MONTAIGNE.
détermination des effets du tir dans telles et telles conditions se fait dans
les polygones ; ces expériences sont à reproduire de temps à autre dans les
garnisons en se plaçant dans les meilleures conditions de réussite pour
que chacun puisse en juger, tout le monde sachant du reste que plus on
s'éloigne de ces conditions et notamment quand la distance est mal appré-
ciée, les résultats déclinent rapidement pour en arriver facilement à être
réduits à zéro et tout exercice réel de ce genre est superflu.
34, Permettoit. — Diogène Laerce, IV, 38.
35, Demis. — Ses détracteurs ont également reproché à Sénèque d'avoir écrit
sur le mépris des richesses, alors que lui-même en avait de considérables;
chez n'importe qui le luxe n'a rien de répréhensible, s'il a été bien acquis.
Le mal, en pareil cas, n'est pas d'y entrer et d'en user, mais de savoir en
sortir.
422,
2, Patience. — On juge, en effet, de tout par comparaison; et souvent, on
est moins malheureux quand on voit plus malheureux que soi.
5, Accoustumance. — Au dernier alinéa du ch. XIX de ce même livre, Mon-
taigne a déjà dit que les paysans et les gens du commun ont plus de véri-
table philosophie.
22, Saluste. — Catil., 4.
23, Çyrus. — Xéxophon, Économique, IV, 20.
30, Rnfus. —'Pline, Epist., I, 3. — C'est à un Caninius Rufus, au lieu de Cor-
nélius Rufus, que ce conseil est adressé.
37, Immortelle. — Cicérox, Orator, 43. — « Si tu cherches la retraite, que
ce soit pour parler à toi, et non pour faire parler de toi », dit, au con-
traire, Séxèque, Epist. 25. V. I, 428.
424,
5, Contradiction. — N'en déplaise à Montaigne, il n'y a pas contradiction à
chercher à occuper ses loisirs, quand on s'est retiré de la vie publique.
Outre que, sans cela, on serait le plus souvent à charge à soi-même et aux
autres, on ne saurait blâmer ceux qui emploient au mieux de ce qui leur
est possible « les restes d'une vie qui s'en va, d'une ardeur qui s'éteint ».
Du reste, développant son idée, l'auteur ne critique que l'excès que l'on
peut apporter dans les occupations nouvelles- auxquelles on se livre, ce en
quoi il a raison; mais, là où tout le monde peut ne pas partager son en-
thousiasme, c'est quand il exalte ceux qui se confinent dans la solitude,
pour y mener une vie exclusivement contemplative ; leur tranquillité re-
lative est indéniable, mais pour avoir droit au repos, il faut l'avoir gagné,
et c'est pourquoi, en ce qui les concerne, chaque cas est à juger en par-
ticulier.
21, Conseil. — Le conseil de Pline à Rufus.
22, Liures. — Les éd. ant. à 88 aj. -.si elle a faute de règle el de mesure, elle.
31. Pbilistas. — Passage traduit de Sénèque, Epist. 51. — ^ De ce nom « Phi-
listas », ou mieux de celui de Phélestas (en grec çï)),f,Tïi;) que les anciens
Égyptiens donnaient aux voleui*s de grand chemin (d'où viennent le mot
latin fallere tromper et le mot français filou), a pu provenir celui de Phi-
listins, attribué par les Hébreux à ces tribus qui occupaient une partie de
la côte de Syrie, aux dépens desquels ils s'établirent, avec lesquels ils
furent si fréquemment en guerre, et le nom est peut-être l'origine de celui
de Palestine, donné par les Romains à cette contrée.
34, Suitte. — Ésope conte que Jupiter, voulant un jour mêler ensemble la
volupté et la douleur, n'y parvint pas, et décida alors qu'elles se suivraient
mutuellement, règle qui, en fait, est bien loin d'être d'application courante,
aussi Antisthène recommandait-il de rechercher les plaisirs qui suivent la
peine et non ceux qui la précèdent.
426,
13, Via. — Citation que Montaigne a fait précéder de sa traduction.
21, Presse. — Pour le monde, au bénéfice de la société.
34, Autres. — Les éd. ant. à 88 aj. : et les alonger de toute nostre puissance.
NOTES. LIV. I, CH. XXXVTIl. VOL. I, PAG. 426. F. 379
Quamcumque Deus libi forlunaueril horam, Grata sume manu, nec dulcia
differ in nnnum (Quelle que soit l'heure à laquelle Dieu se montre favora-
ble à toi, accepte avec reconnaissance, n'ajourne pas à plus tard ce qui est
doux à recevoir).
38, Ambition. — V. I, 110 et N. Société.
428,
5, Troupe. — C.-à-d. se jeter j)lus avant dans la foule. — Faulsée est un vieux
mot qui signifie choc, charge, incursion, irruption.
7, Philosophes. — Épicure etSénèque; le premier chef de la secte qui porte
•son nom, le second appartenant à celle des épicuriens. — Sénèque (Episl.
21) cite un passage de la lettre d'Épicure à Idoménée, différente de celle
que nous a conservée Diogène Laërci;. Le Clerc.
19, Mesme. — Sknèque, Episl. 7.
23, Vray. — Épicure écrivait à Idoménée.
25, Peuple. — Cette idée, Sénèque l'attribue à Déniocrile.
27, Tanière. — Sénèque, Epist. 68.
32, Gouuerner. — Sénèque, Epist. 25.
430,
2, Train. — C;-à-d. le respect que vous avez pour eux, vous remettra sur le
droit cliemin.
5, Cogitations. — Pensées; du latin cogilatio qui a même signification,
y. Premiers. — Pline le Jeune et Cicéron.
CHAPITRE XXXIX.
Ce chapitre est numéroté XL dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
10, Couples. — Épicure et Sénèque d'une part, Cicéron et Pline le Jeune de
l'autre.
14, Registres. — Pline ne mérite pas ce reproche. Cicéron, Epist. fam., V,
12, écrivant à Lucceius, le prie, en effet, de ne pas s'attacher simplement
à son endroit aux règles de l'histoire, et de franchir hardiment, en sa fa-
veur, les bornes de la vérité; tandis que Pline, Epist., VII, 33, déclare ex-
pressément à Tacitç qu'il ne demande pas qu'il donne la moindre atteinte
à ce qui est : l'histoire", ajoute-t-il, doit émaner de la vérité qui suffit pour
que soient acceptés tous les faits qu'elle relate.
16, Histoires. — Ce désir de voir leurs faits et gestes passer à la postérité
(toute altération de la vérité mise de côté) était bien excusable chez ces
deux pereonnages, en raison des services qu'ils avaient conscience d'avoir
rendus. Les en blâmer serait condamner un des plus puissants stimulants,
chez l'homme, du bien et du beau ; et l'humanité, s'il en était ainsi, sans
y rien gagnei-, pourrait y perdre beaucoup.
20, Amis. — Les lettres de Cicéron ne semblent pas, comme Montaigne le
donne à entendre, avoir été écrites pour le public; lui-même n'en avait
conservé que soixante-dix, les autres ont été recueillies par Tiron après sa
mort; il suffit de lire surtout les lettres à Atticus pour être persuadé
qu'elles ne s'adressaient qu'à lui. A l'égard de Pline le .leune, l'assertion est
au moins douteuse.
24, Monde. — D'une république souveraine du monde.
432,
7, Personnage. — Diderot ne partage pas cette manière de voir : « Le ta-
lent de s'immortaliser par les lettres n'est pas une qualité malséante pour
personne à quelque rang que ce soit : la guirlande d'Apollon s'entrelace
sans honte sur le même front que celle de Mars. »
9, Atriquain. — Térence, dont il est ici question, était d'origine africaine ;
amené à Rome comme esclave, il avait été acheté par Scipion Émilien et
rendu par lui à la liberté.
11, Luy mesme. — Il ne l'avoue pas, et les passages du prologue de sa co-
médie des Ad'elphes où l'on a cru en voir indice ne sont autres que des
F.380 ESSAIS DE MONTAIGNE.
marques de déférence à l'égard de protecteurs, ne comportant nullement
l'idée de coopération; du reste, il était plus âgé que Scipion et Lélius et sa
notoriété avait précédé la leur. Cicéron, dont on invoque aussi le témoi-
gnage sur ce point, ne le donne que comme un on dit, qu'il ne garantit
pas. Paven.
14, Louables. — Montaigne reproduit la même idée, I, 356.
17, Arquebusier. — Cette pratique d'un art manuel était assez fréquente
cliez les grands. Chez les Musulmans, elle est de règle, ce qui ne veut pas
dire qu'elle soit toujours observée; le Coran les y incite : « Prends un rabot,
c'est une arme qui te fera combattre cette maladie de l'àme, cet affreux
poison de la vie, qu'on appelle l'ennui. » Haroun er-Raschid, un de leurs
plus célèbres khalifes, excellait dans la broderie sur cuir, dit la chronique
de son temps, et dut à ce talent de ne pas perdre la vie; il s'était aven-
turé, incognito, chez un malfaiteur dont il avait surpris la criminelle in-
dustrie et dont, sur le point de se défaire de lui, la cupidité se laissa sé-
duire par la proposition que le khalife lui fit de l'employer à des travaux
de cette nature qu'il trouverait à vendre avantageusement, ce qui donna
possibilité au prisonnier, par les arabesques dont il composa ses dessins,
de faire connaître sa situation au dehors et d'être délivré. — Louis XVI,
excellent géographe, s'adonnait aussi à la serrurerie. Un jour qu'il faisait
admirer à un de ses valets de chambre une serrure qu'il venait d'achever,
celui-ci lui fit cette réponse que devaient confirmer si tragiquement les
événements qui, déjà peut-être, la lui inspiraient : « Quand les rois. Sire,
s'occupent des ouvrages du peuple, le peuple s'empare des fonctions des
rois! »
17, Bague. — Jeu d'adresse, où, étant à cheval et au galop, ceux qui y pren-
nent part, tâclicnt d'enfiler et d'emporter avec le bout de leur lance des
anneaux suspendus de place en place sur la carrière où se fait la course.
19, Propres. — Montaigne, dans tout ce chapitre, s'est montré fort sévère à
l'égard de Pline et de Cicéron qui étaient précisément dans le cas qu'il ad-
met : l'éloquence et la beauté du style n'étaient pas leurs seules qualités,
elles se trouvaient unies à d'autres talents sinon plus rares et plus estima-
bles, du moins d'une utilité plus générale dans les situations qu'ils ont oc-
cupées, quoiqu'il n'y ait peut-être pas eu de ville au monde où l'art de
bien parler ait plus importé qu'à Rome. Naigeon.
28, Philippus. — Plutarqle, Démosthène. En 358, avant les hostilités entre
Philippe d'une part et les Athéniens et les Thébains de l'autre, qui abou-
tirent à la bataille de Chéronée.
38, Sciât. — Citation tirée de Virgile, mais où ]Montaigne introduit des chan-
gements.
434,
7, Bien. — Pi.utakque, Périclès, I.
10, Moy. — Plutarque, Comment on peut discerner le flatteur d'avec Vami, 25.
10, Iphicrates. — Pixtarque, De la Fortune. — Iphicrate est demeuré fameux
par la discipline qu'il exigeait des troupes. Faisant une ronde au siège de
Corinthe et trouvant une sentinelle endormie, il la perça de son javelot;
et, comme on le blâmait de l'avoir ainsi tuée : « Telle je l'ai trouvée, dit-
il, telle je l'ai laissée. » C'est lui qui créa les Peltastes, soldats armés à la
légère.
14, Ceux-là. — Plltarque, Traité de la Fortune. — Au moins en principe, il
était admis jadis, dans les gouvernements démocratiques comme dans tous
autres, que gouverner c'est conduire et non être conduit, mais ceux qui
conduisent étant effectivement responsables de la manière dont ils s'en
acquittent.
Les choses ont bien change, c'est même le principe contraire que con-
sacre cette institution, créée par crainte du despotisme, de rois constitu-
tionnels et autres chefs d'État aux dénominations diverses qui sont irres-
ponsables et dont le rôle, dans sa partie essentielle, se borne à la repré-
sentation, à la constitution des ministères et à la promulgation des lois et
NOTES. LIV. I, CH. XXXIX. VOL. I, PAG. 434. F.381
décrets à la rédaction desquels ils demeurent étrangers. Réduite à ce qu'elle
est, leur action poui'rait encore être de quelque efficacité ; mais, pour cela,
il faudrait qu'ils aient du caractère. Il est bien loin d'en être toujours ainsi;
n'avons-nous pas vu l'un d'eux, durant les sept années qu'il a occupé ces
fonctions, désavouer en maintes occasions ce que, contre le gré de sa cons-
cience, il ratifiait de sa signature, sans jamais user du droit, peut-être illu-
soire, mais dont il eût dû user néanmoins, que lui conférait la constitution
d'en appeler à une seconde délibération.
Malheureusement, on France, où, Dieu merci, aucune classe privilégiée
n'existe plus sur laquelle on puisse prendre appui pour gouverner sauf à
en abuser parfois pour opprimer les autres classes, mais où les minorités
ne sont pas représentées en proportion de ce qu'elles sont, la passivité du
chef de l'État, faute de contre-poids, conduit insensiblement à la ruine.
Tous les pouvoirs se trouvant entre les mains des parlementaires qui, pour
se faire nommer, ont promis à qui mieux mieux tout ce qui pouvait ap-
pâter les électeurs; une fois élus, irresponsables eux aussi, ils ne cherchent
qu'à préparer leur réélection en se faisant des partisans, et vont gaspillant
à cet effet la fortune publique dont ils n'ont cure.
Les causes de ces accroissements incessants de nos budgets, auxquels, pour
y suffire, pointe à l'horizon l'impôt sur le revenu si inquisitorial, si dange-
reux par son élasticité et la possibilité qu'il donne de dégrever les amis
et surcharger les adversaires politiques, sont multiples. En dehore des dé-
penses introduites pour donner satisfaction aux intérêts électoraux parti-
culièrement sous forme d'amendements introduits au dernier moment lors
du vote du budget et qui foisonnent surtout en fin de législature, des gas-
pillages résultant de la pléthore, également en progrès incessants, de fonc-
tionnaires, des gestions directes de l'État si onéreuses, si tyranniques et qui
vont aussi s'étendant de plus en plus, certains errements ajoutent encore au
mal dans de notables proportions : c'est la défaveur irréfléchie attachée aux
demandes de crédits supplémentaires qui, en effet fort souvent sujets à
caution, devraient être examinés sans idée préconçue quand elles provien-
nent d'évaluations demeurées au-dessous des prévisions, ce qui, en l'état
actuel, porte à demander au delà du nécessaire pour n'avoir pas à faire de
nouvelles demandes; et en second lieu, aux crédits demeurés sans emploi,
ce qui, trop souvent, entraîne des réductions non justifiées sur le bud-
get suivant et fait qu'on dépense quand même la totahté des allocations;
ce sont là des abus auxquels remédierait de pouvoir, sous certaines garan-
ties, effectuer des virements pour, à l'aide de fonds demeurés disponibles,
solder les dépenses insuffisamment dotées.
C'est à ces errements que nous devons d'avoir, pour l'année 1906, un
budget qui, en dehors des budgets des départements et des communes qui
le doublent, s'élève à trois miUiards sept cents millions, dans lequel même
on n'a pas tenu compte des recettes qui feront défaut par suite de la ré-
forme postale, du rétablissement du privilège des bouilleurs de crû, etc.,
votés au dernier moment. En 1870, après les désastres de 1870-71 et le
paiement de l'indemnité de guerre à l'Allemagne, le budget ne s'élevait
qu'à deux milliards six cents millions, soit plus d'un milliard en moins.
— Et simultanément, notre dette, y compris les dettes départementales (cinq
cents millionsl et les dettes communales (quatre milliards), accrue de trois
cent soixante-six millions pendant la seule législature de 1902-1906, atteint
quarante-quatre milliards. — Nous avons mentionné la marée toujours
croissante de fonctionnaires; leur nombre (en dehors de l'armée et des
fonctionnaires coloniaux) s'élève toujours en cette même année 1906 à qua-
tre cent cinquante mille, alors qu'ils n'étaient que deux cent quarante
mille en 1873! la moitié, payée moitié plus, suffirait; eux-mêmes, les ser-
vices auxquels ils sont attachés et aussi le budget y gagneraient.
Comment en serait-il autrement? Les ministres ne sont que des délé-
gués, choisis non d'après leurs aptitudes, mais en raison de leur verbiage
effronté et de leurs opinions du moment, faits et défaits au caprice d'une
F.382 ESSAIS DE MONTAIGNE.
chambre houleuse où chacun n'a en vue (jue son intérêt personnel, préoc-
cupation à laquelle eux-mêmes n'échappent pas. Ils sont par suite absolu-
ment hoi's d'état de résister au mandat impératif de leurs commettants,
d'autant que leur responsabilité n'existe pas en fait et se borne à faire place
à d'autres, quand ils ont cessé de plaire.
Le remède à pareil état de choses désastreux pour le paj's, ressort de cet
exposé même :
Il y aurait lieu de donner au Chef de l'État ])liis d'indépendance et plus
d'autorité sans cependant lui donner possibilité de renverser la Constitu-
tion. On ne saurait en effet oublier les malheurs et la misère qui marquè-
i-ent la fin du l'ègne de Louis XIV, dont les débuts avaient été si glorieux
la corruption et les hontes de celui de Louis XV; la faiblcs.so de Louis XVI
à laquelle sont dus en partie les excès de la Révolution, faiblesse qu'il a
payée de sa tête, et avec lui, bien d'autres qui n'en pouvaient mais; — le
despotisme et l'ambition de Napoléon I"' qui, après avoir reconstitué la
France, l'avoir parée d'une gloire éternelle, l'a finalement, malgré tout son
génie, laissée amoindrie; — les journées de 1830, auxquelles conduisirent
la réaction et le fanatisme religieux sous Louis XVIII et Charles X; Louis-
Philippe fuyant comme son prédécesseur à la première manifestation tu-
multueuse; — Napoléon III, pour parer à des agitations intérieures, abou-
tissant à Sedan, après 25 années de prospérité. — Tout cela, qui n'embrassa
pas moins de deux siècles de malaises et de crises, ne saurait être perdu
de vue, non plus que les procédés employés en 1802 pour transformer le
consulat en Consulat à vie, et deux ans après convertir le titre de premier
consul en celui d'empereur, escamotages qui se renouvelèrent en 1848, 1851
et 1852, et il n'est que sage de se méfier et de chercher à en prévenir le
retour.
On donnera plus d'indépendance au Chef de l'État, en le faisant élire non
parla représentation nationale dont il demeure la créature et qui le choisit
à sa dévotion, non par le suffrage universel direct trop irraisonné et trop
facile à s'emballer et à être trompé, mais par ces mêmes collèges électoraux
qui élisent les sénateurs. Du même coup on aura accru son autorité, ce
mode d'élection ayant l'avantage de faire arriver à ces fonctions des
hommes non inféodés à"\un parti et qui ne craindront pas d'user, en cas
de divergence de vue avec les pouvoirs législatifs, des droits qu'il détient
actuellement, auxquels devrait être ajouté celui d'ajourner à la législature
suivante l'examen de tout projet de loi adopté contre sa manière de voir,
et n'ayant pas obtenu une majorité de plus des deux tiers; et aussi de pou-
voir retirer son portefeuille à tout ministre dont tels ou tels actes n'auraient
ni son assentiment ni celui de la majorité de ses collègues et qui, en pa-
reille situation, persisterait à ne pas démissionner.
Mais cela serait encore insuffisant si on ne modifiait également le mode
d'élection des membres de la chambre des députés, de façon à les rendre
eux aussi plus indépendants de leurs électeurs et moins dans l'obligation,
pour assurer leur réélection, de sacrifier l'intérêt général aux intérêts lo-
caux et particuliers, ce qui conduit à substituer le scrutin de liste au scru-
tin individuel, avec faculté de répéter le même nom sur un même bulletin
autant de fois qu'il y a de candidats à élire. On assurerait de la sorte la
représentation des minorités, ce qui n'est que justice et serait souvent une
ressource précieuse pour le Gouvernement, contre les exagérations et les
exigences de la majorité. En outre, les sénateurs, élus pour neuf ans, ne
devraient pouvoir l'être à nouveau qu'après un intervalle de trois ans, et
les députés élus pour quatre ans, et rééiigibles, ne pouvoir après ces huit
années être à nouveau réélus qu'apfès un intervalle de quatre ans; de la
sorte ils se retremperaient de temps à autre auprès de leurs électeurs, et
jugeraient mieux des abus.
Accessoirement, il serait désirable que le nombre des députés fût réduit
à un ]iour 150.000 habitants, au lieu de 100.000, et le nombre des sénateurs
diminué pareillement d'un tiers. Afin de permettre une représentation
NOTES. - LIV. I, CH. XXXIX. VOL. I, PAG. 434. F. 383
des minoi-ités, chaque circonscription électorale devrait comporter au moins
trois sénateurs et quatre députés et leur remaniement être efTectué en con-
séquence. Cette réduction dans le nombre des députés et sénateurs com-
penserait en partie les 5.000.000 dont ils viennent de grever le budget déjà
si lourd et en déficit, en augmentant leur indemnité, bien que cela ne figurât
sur la profession de Coi d'aucun d'eux, quand il était candidat.
Un projet de loi a été déposé en UXKÎ, et même adopté par la Commission
de la chambre, ce qui ne présage malheureusement pas son adoption pro-
chaine et définitive, proposant la division de la France en dehors de Paris
on vingt-cinq régions, au lieu des 86 départements actuels, ce que justifient
pleinement les immenses progrès réalisés dans les facilités (!t la prompti-
tude des communications. Ces régions seraient désignées par le nom de
leurs capitales : Lille, Amiens, Rouen, Caen, Orléans, Versailles, Reims,
Troyes, Nancy, Besançon, Dijon, Boui'ges, Tours, Nantes, Rennes, Poitiers,
Clormont-Ferrand, Lyon, Grenoble, Marseille avec la Corse, Nîmes, Mont-
pellier, Toulouse, Bordeaux et Pau. — Les services publics actuellement
organisés par départements, le seraient par régions; préfectures et sous-
préfectures disparaîtraient, cantons et communes continueraient à subsis-
ter tels que. l\ serait fort à souhaiter que cela aboutît, et qu'on en profitât
pour apporter au nombre et au mode d'élection des sénateurs et députés
dos modifications dans le sens sus-indiqué; mais si logique que ce soit, cela
léserait trop d'intérêts locaux, pour qu'on puisse avant bien longtemps en
espérer la réalisation.
Une cour suprême élective serait à créer, permettant d'en appeler des
abus de pouvoir des ministres et de leurs agents.
Contre nos mandataires eux-mêmes abusant de leur mandat, le référen-
dum devrait être admis contre tout acte d'un conseil municipal, d'un con-
seil général ou du pouvoir législatif, lorsqu'il serait demandé par un quan-
tum d'électeurs déterminé, la moitié par exemple du nombre de votes émis
au renouvellement de ces corps électifs.
La loi des candidatures multiples est à maintenir.
Les hommes mariés ou veufs avec enfants mineurs devraient avoir double
vote, ils déposeraient dans l'urne deux bulletins au lieu d'un. — Les abs-
tentions devraient constituer un délit, entraînant amende et affichage à la
porte des mairies quand elles ne peuvent être justifiées et témoignent parti
pris ou négligence.
Tout projet de loi, émanant du Gouvernement ou de rinitiatiye parle-
mentaire, devrait avant discussion être soumis soit au Conseil d'État, soit
aux Conseils supérieurs existants dans les différents ministèi'cs que la ques-
tion intéresse et leur avis être joint; si le projet entraîne des conséquences
budgétaires, l'évaluation de la dépense en résultant serait mentionnée et
aussi les ressources disponibles avec lesquelles on se propose d'y subvenir.
Toute loi devrait avoir obtenu, dans chaque chambre, les voix des trois
cinquièmes de ses membres. — L'indemnité allouée aux membres du Par-
lement, décomptée à raison de 300 jours par année, devrait être retenue
aux absents, quel que soit le motif de l'absence, à raison de 1/300, soit
cinquante francs par journée d'absence.
La loi de finance devrait comporter comme dépenses obligatoires toutes
celles résultant de lois antérieures non abrogées par de nouvelles rendues
dans les formes ordinaires; et aucune dépense n'y être admise en cours de
discussion, dont le .service qu'elle a pour objet d'assurer n'ait été au préa-
lable l'objet d'une loi spéciale ; on éviterait de la sorte ces demandes
éhontées et si nombreuses de crédits qui, présentées au dernier moment,
passent à la faveur de la surprise et de la hâte que l'on a d'en finir et qui
pullulent surtout en fin de lo'gislature.
Enfin que d'économies à réaliser, par exemple ces affichages de discoui's
qui seraient moins répétés s'ils avaient lieu aux frais de ceux qui les votent;
dépense d'une douzaine de mille francs chaque fois, bien inutile, car per-
F.384 ESSAIS DE MONTAIGNE.
sonne ne les lit sur les murs, les feuilles publiques renseignant amplement
chaque int»!'ressé.
Ces propositions ne sont pas nouvelles, voilà beau temps que l'opinion
publique les réclame, mais elles gêneraient ceux dont elles ont pour objet
d'enrayer les abus, et c'est à eux qu'il appartient de prononcer!
16, Flustes. — Pi.uTARQUE, Périclès.
24, Volume. — La dernière édition des Essais publiée du vivant de l'auteur
(celle de 1588) était en un seul volume ; en 1598, ils parurent en deux volumes
in-S"; en 1608 en trois volumes in-12; en 1617 en quatre volumes in-4'>; en
1669 en dix volumes in-12; déjà y avaient été ajoutés une notice sur l'auteur,
la traduction des citations, des sommaires, des notes et une table analytique ;
toutefois jusqu'en ces derniers temps cette augmentation dans lo nombre
des volumes, qui dans les éditions modernes varie de trois à six, n'avait pas
tant eu pour cause, comme actuellement, l'accroissement des commentaires
que l'intention de réduire le foi-mat de manière à lo rendi-e plus portatif.
27, Essais. — C'est précisément en «'inspirant de cette indication, « en esplu-
chantvn peu plus curieusement les Essais», qu'est résultée l'extension donnée
aux notes qui accompagnent la présente édition.
33, Air. — En disant que son livre « porte la semence d'vne matière plus
riche et plus hardie et souuent à gauche vn ton plus délicat », Montaigne
veut probablement parler entre autres des questions afférentes à la poli-
tique intérieure à laquelle il ne fait que des allusions très indirectes, suf-
fisantes toutefois pour indiquer qu'il trouvait que tout de ce côté n'allait
pas à son gré, et à la religion, dont il parle à maintes reprises, mais avec
des réticences continues dénotant un antagonisme profond, sur ce point,
. entre ses croyances de parti pris et sa raison.
436,
' 3, Philosophes. — Épicure et Sénèque.
12, Publiques. — Sénèque, Epist. 21.
15, Cadence. — Par cette critique, Montaigne donne à penser que dans les
lettres écrites par Cicéron, la forme seule a de la valeur. Ce n'était pas ce
qu'en pensaient ses contemporains; Cornélius Nepos entre autres, dans sa
Vie d AUicus, les apprécie comme « pouvant en quelque sorte remplacer
l'histoire, et offrant tant de détails sur les hommes célèbres du temps, sur
leurs vertus et leurs vices, sur les révolutions de Rome, qu'elles semblent
en révéler tous les secrets ».
27, Chose. — Il nous reste une trentaine de lettres de Montaigne, dont deux
seulement sont intéressantes : l'une, écrite à son père pour lui raconter la
mort de La Boétie; l'autre, très courte, adressée à sa femme, où il lui d(''-
clare sans ambage que le temps est passé de la courtiser et de la caressei-
(il y avait cinq ans qu'ils étaient mariés), et, pour la consoler de la perte
qu'elle vient de faire d'une fille, seule enfant qu'ils avaient eue jusque-là,
née et morte en son absence, n'ayant vécu que deux mois, il lui envoie la
traduction par La Boétie d'une lettre de Plutarque se rapportant à sembla-
ble situation. Toutes les autres sont dénuées d'intérêt, la plupart « cerimo-
nieuses », s'accordant peu avec son caractère et son talent.
28, Verues. — Les Essais, qu'ailleurs leur auteur qualifie de rapsodie (I, 84),
et ailleurs encore de galimafrées.
438,
17, Contenance. — Var. de 1588 : Ceux que i'aime me mette en peine, s'il
faut que ie le leur die, au lieu de : « l'honnore... contenance ».
21, Bienuienner. — Complimenter, féliciter quelqu'un sur son heureuse ar-
rivée, l'assurer de sa bienvenue.
32, Embabouinée. — Niaisement possédée, adonnée à.
34, Mal. — Montaigne exagèi-e lorsqu'il dit qu'il peignait (écrivait) insup-
portablement mal; les spécimens qu'on a de lui sont d'une écriture très
lisible, bien rangée, qui révèle peu la vivacité de caractère que certains lui
attribuent; même ses annotations sur l'exemplaire de Bordeaux et sur dif-
férents ouvrages lui ayant appartenu, sont assez facilement déchiffrables.
NOTES. LIV. 1, CH. XL. VOL. I, PAG. 440. F.385
CHAPITRE XL.
Ce chapitre est luuiiéi'oté XIV dans les éd. ant. et l'ex. do Bordeaux.
440,
19, Auons. — Ce chapitre est très beau, mais assez diflicile à entendre.
Montaigne y traite avec art et subtilité le thème qu'il lui a donné pour
titre, on y trouve entre autres une digression très curieuse et très philo-
sophique sur les trois (>tats différents dans lesquels lui-même s'est trouvé
sous le rapport di' la fortune. Naigeon.
20, Ancienne. — Manuel d'ÉPiCTÈTE, 10.
21, Mesmes. — Cette maxime est um; de celles qui, dans son texte grec,
étaient peintes sur les solives du plafond de la bibliothèque de Montaigne.
27, Cbeuiroms. — iN'en profiterions-nous, n'en jouirions-nous? — Chevir est
un vieux mot qui signifie venir à bout d'un(> chose, en jouir, en disposer;
d'où chevance, bien que l'on possède.
442,
17, Parties. — Parties adverses, comme on dit au barreau; autrement dit
« ennemies », mot que dans quelques éditions on a substitué à celui de
parties.
21, Maux.
« La mort est simplement le terme de la vie. Que par une conduite sage
De pensers et do biens elle n'est point suivie; La loi de l'univers engage
Ce n'est qu'un paisible sommeil, A n'avoir jamais de réveil. .
Abdé de Chaulieu.
22, La supportent.... la vie. — Var. des éd. ant. : Ne la recoiuent ils pas de
tout autre visage?
27, Tuer. — En 295, alors que ce philosophe était envoyé près de lui, à titre
de négociateur, par Ptolémée I, roi d'Egypte.
28, Cantbaride. — Cicéhon, Tusc, 40. — Avec la cantharide, insecte dont
on fait grand usage en médecine pour les vésicatoires, on composait un
poison qui était assez employé chez les anciens.
30, Populaires. — Les éd. ant. a]. : et communes.
444,
8, leusne. — C'est le sujet d'une épigramme d'OwEN, I, 123.
21, Errer. —'Les éd. ant. port. : que de se départir de ses opinions quelles
qu'elles fussent, au lieu de : « que se laisser... errer ».
22, Print. — En 1477, lors de la mainmise sur l'Artois, par Louis XI, à la
mort de Charles le Téméraire.
26, Gallee. — Locution signifiant : « Viv(î le plaisiri » ou encore : « Allons,
tout est bien! » ■• Vogue la galéo! >• dit Panurge, dans Rabelais, se voyant
sorti sain et sauf d'une tempête (V. N. I, 250 : Galler). Aujourd'hui on dit
et on écrit par corruption : « Vogue la galère ! » dont l'étymologie est autre
et la signification : « Advienne que pourra! » différente.
446,
1, Mesmes. — On présentait à Mandrin, voleur fameux du xvni' siècle,
qu'on allait rouer, un religieux pour confesseur; il répondit qu'« il le trou-
vait trop gras, pour un homme qui prêchait l'abstinence ». — Ce mépris
de la mort, en pareille occurrence, n'est pas l'apanage exclusif des scélé-
rats; les honnêtes gens, victimes des fureurs populaires, se sont montrés
maintes fois aussi indifférents. Les exemples en ce genre abondent sous la
terreur : le général Biron, entre autres, condamné par le tribunal révolu-
tionnaire, au moment d'être conduit à l'échafaud, se fit servir des huîtres
et offrit un verre de vin au bourreau, en lui disant : « Prenez, cela vous
donnera du courage ; vous devez en avoir besoin au métier que vous faites. »
4, Des leurs. — Il en était de même en Thrace, au dire d'IIÉRODOTE.
4, Constamment. — Avec constance, courage, résignation.
9, Rescousses. — De prises et de reprises. — Rescousse signifiait secours,
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 25
F.386 ESSAIS DE MONTAIGNE.
délivrance, d'où l'expression : •■ A la rescousse » ; ce tei*me est encore usité
dans la jurisprudence maritime pour i-eprise d'un navire dont on s'est
trouvé dépossédé.
13, Sepmaiae. — En 1520; sous François I", alors que les Français, en pos-
session du duché de Milan depuis cinq ans, et depuis le même temps eu
lutte pour s'j' maintenir, en étaient définitivement chassés.
18, Nombre. — Plutarque, Brutus, 8. — En 42. Après la mort de César, Bru-
tus et Ca.ssius cherchèrent à se créer un centre de résistance dans l'Asie
Mineure. La ville de Xanthe n'accédant pas à leurs projets, Brutus l'assié-
gea et s'en empara. Les Xanthiens se détendirent avec acharnement, allant
au-devant de la mort, se sacrifiant, eux, leurs femmes et leurs enfants; si
bien que, touché de compassion, Brutus alla jusqu'à promettre une récom-
pense à tout soldat qui sauverait un habitant. A peine parvint-on de la
sorte à en sauver cent cinquante qui se décidèrent à accepter la vie à la-
quelle on s'efforçait de les retenir.
19, Vie. — ■<■ Toute opinion peut être préférée à la vie, dont l'amour cepen-
dant parait si fort et si naturel. » Pascal.
22, Aux leurs. — Diodore de Sicile, V, 19. — En 479. Lors de la deuxième
guerre médique, les différents peuples de la Grèce, un peu avant la bataille
de Platée, s'unirent par un serment demeuré célèbre dans l'antiquité et
dont voici la foi-mule : « Je n'estimerai pas la vie plus que la liberté; je
n'abandonnerai mes chefs ni vivants, ni morts, et j'ensevelirai mes com-
pagnons tués dans le combat. Vainqueur, je ne contribuerai jamais à la
destruction d'aucune des villes qui ont pris part au combat. Je ne relève-
rai aucun des temples brûlés ou renversés; je laisserai subsister ces ruines,
comme un monument qui doit rappeler à la postérité la fureur sacrilège
des Barbares. »
25, Castille. — Ferdinand et Isabelle. Expression consacrée par les Espa-
gnols qui ne séparent pas ces deux noms : Isabelle était, de fait, reine de
Ca.stille, mais son mari Ferdinand le Catholique y régnait en son nom.
Après l'expulsion des Maures, en J4U2, ils prirent en commun le titre de
rois d'Espagne.
25, luifs. — En 1492. Cette expulsion anéantit le commerce et l'industrie de
l'Espagne; beaucoup se réfugièrent en Hollande et en France.
31, Escbarcement. — Chichement, avec trop d'épargne; de l'italien scareo,
qui veut dire chiche.
448,
5, Pais. — En 1497. Ce revirement chez Emmanuel fut dû à la reine, fille
d'Isabelle de Castille, qui en avait fait une condition absolue de son ma-
riage; la persécution qui s'ensuivit fut une des principales causes des trou-
bles et divisions qui ont agité le Portugal pendant trois siècles.
20, Religion. — Le P. Jésuite Marianna dit, dans son Histoire d'Espagne.
XXYI, 13, qu'en vertu de cet édit, les enfants devaient être baptisés de
force, et il ajoute : « édit cruel, tout à fait contraire aux lois et maximes
chrétiennes ».
27, Prefix. — Qu'il leur avait fixé; du latin prœfijoere, déterminer.
34, Opinions. — En 1225. L'hérésie des Albigeois, dérivée de celle des Mani-
chéens, repoussait entre autres choses l'autorité du pape et des prêtres.
Née dans le xi* siècle, elle embrasa tout le midi de la France, que les persé-
cutions dirigées contre elle mirent à feu et à sang. Cette guerre ne prit fin
que vers 1229; mais aux croisades auxquelles elle avait donné lieu, .se
substituèrent alors, dans la région, pour y consolider la foi, l'Inquisition et
toutes ses horreurs.
450,
2, Mort. — Il en est de même aujourd'hui : En France, du 1" janvier 1895 au
l" janvier 1905, on n'a pas relevé moins de 695 enfants de 16 ans et
au-dessous qui se sont donné la mort, et voici quelques-unes des raisons
alléguées dans les billets laissés par certains d'entre eux ; — « Je me noyé,
mon père m'a grondé. » — . Je me suicide parce que je n'ai pas eu de
iNOTES. LIV. I, Cil. XL. VOL. I, PAG. 450. F.387
prix. » — « Je nie tue parce que j'ai trois dents cassés. » — Il en est qui
se tuent par simple imitation ou bravade : « Tiens, dit l'un, en apercevant
un pendu, il faut que je me pende aussi » ; et il le lait séance tenante. —
« Je me suis brûlé la cervelle exprès », écrit un autre qui se tue pour mon-
trer qu'il est capable d'agir comme un homme. — En janvier 1907, à Paris,
un collégien de dix-neuf ans se noyait dans la Seine de dépit d'une répri-
mande; un autre, de même âge, se tuait par chagrin d'amour.
3, Ancien. — Le fond de cette pensée est dans Sénèque, Epist. 70.
10, Orage. — Diogène L.4erce, IX, 68.
29, Dernier. — Var. des éd. ant. : souuerain.
30, Eftect. — CicÉRON, Tusc; II, 13.
452,
2, Mal. — CicÉKON, T'use, 11,25, raconte le fait un peu différemment : Pom-
pée venant de Syrie à Rhodes, où se trouvait Posidonius, désirait l'enten-
dre et lui exprimait ses regrets de ne le pouvoir pas, le voyant affecté de
douleurs aiguës : « L'état de souffrance où vous me trouvez, lui répondit
le philosophe, ne m'empêchera pas de satisfaire à votre désir; il ne sera
pas dit qu'un aussi grand homme soit venu inutilement honorer ma re-
traite de sa présence. » Réponse, ajoute Cicéron, qui fut suivi d'un dis-
cours, aussi grave qu'éloquent, sur cette question qu'il n'y a rien de bon
que ce qui est honnête.
17, Instant, — Louis Racine fait dire à ce propos à un épicurien :
« Plongeons-nous sans effroi dans ce muet abhnc
Où la vertu périt, aussi bien que le crime;
Et, suivant du plaisir l'aimable mouvement,
Laissons-nous au tombeau conduire mollement. »
»
19, H«bet. — C'est là une des assez fréquentes citations qui se rencontrent
dans les Essais, composées d'auteurs différents et que ne distingue même
pas la ponctuation : le premier de ces deux vers est de La Boétie, le second
d'Ovide.
21, Craindre. — Les éd. ant. port. : Et à la vérité, ce que les Sages craignent,
au lieu de : « Aussi... craindre».
34, Homicide. — Cela est vrai du mal de dents, mais non de la goutte qui
Unit fort souvent par devenir mortelle.
39, Estre. — Observer, pour la compréhension du texte, que, dans ce qui
précède, Montaigne a fait parler ceux qui disent que la douleur est un mal;
et que, maintenant, il va répondre à leui-s arguments, en s'efforçant de
prouver qu'il est en nous, sinon de faire que nous ne la ressentions pas,
du moins d'en réduire notablement la sensation.
454,
6, Trampe. — Var. de 80 et 88 : ie ne le croy pas.
13, Vulgaire. — Cette phrase est encore une de celles qui témoignent le plus
que Montaigne a été aux armées et considérait comme sienne la profession
des armes.
32, L'ame. — Les éd. ant. aj. : c'est d'auoir eu trop de commerce auec le corps.
34, Attendre. — De ne pas compter assez sur elle. — Certaines éditions por-
tent : fonder. Attendre est employé ici dans le même sens que dans ces
vers de La Fontaine: « Ne t'attends qu'à toi seul, c'est un commun pro-
verbe " (L'alouette et ses petits avec le mailre d'un champ). — « T'attendre
aux yeux d'autrui, quand tu dors, c'est erreur » {Le fermier, le chien et le
renard).
456,
23, Craint. — dans le Phédon.
25, Desclouë. — Une très violente douleur, de même qu'une volupté exces-
sive, détache l'àme du corps, en ce qu'elle s'en empare en entier et ne
laisse plus à celle-là aucune action sur celui-ci, comme s'il n'existait plus
aucune liaison entre eux.
F.388 ESSAIS DE MONTAIGNE.
33, Doluerunt. — Add. des ôd. ant. : dicl S. Attr/uslin.
37, Jnseruerunt. — Montaigne détourne ici le sons de ce passage de saint Au-
gustin.
40, Grandes. — « Tu engendreras tes Tds dans la douleur, » dit la Genèse,
m, 10.
458,
1, .égyptiennes. — Que nous appelons aujourd'hui Bohémiennes, nom qui
varie suivant les pajs, et qui se donnent elles-mêmes comme étant de celui
des Pharaons. — Les Bohémiens sont des bandes nomades d'aventuriers
qui se trouvent un peu partout et dont la véritable origine est inconnue;
les premiers qui vinrent en France, arrivaient de Bohême, d'où leur nom.
Ils ont une phjsionomie particulière, parlent entre eux un argot spécial,
vivent de petits métiers, disent la bonne aventure; on ne sait trop quelle
est leur religion; leur morale est très relâchée et ils pratiquent volontiers
le vol.
7, Garces. —Jeunes filles. Du temps de Montaigne, on disait une jeune garce
pour dire une jeune fille, et. garçon pour jeune homme; aujourd'hui ce
mot garce est injurieux et ne se donne qu'aux fiUes pubUques, tandis que
celui de garçon s'est maintenu dans la langue avec sa signification pri-
mitive.
11, lumeaux. — Plltarque, De l'Amour, 34. —En 78, Sabinus, seigneur gau-
lois, prit le titre de César, au commencement du règne de Vespasien, et fut
vaincu. Proscrit, il se fit passer pour mort et vécut caché dans les ruines
de sa maison, à laquelle il avait mis le feu. Éponine, sa femme, vint l'y
rejoindre et y mit au monde deux jumeaux. Découvert au bout de plu-
sieurs années, sa femme implora vainement sa grâce; ne pquvant l'obte-
nir, elle se mit à invectiver l'empereur, demandant à partager le supplice
de son mari, ce à quoi Vespasien eut la cruauté d'accéder.
12 {Car ils... malice). — Var. des éd. ant. : {car le larreçin y estoit ac-
tion de vertu, mais par tel si, qu'il estoit plm vilain qu'entre nous d'y estre
surpris).
15, Descouurir. — Plutarque, Lycurgiœ, 14.
18, Mystère. — Valère Maxime, III, 3, qui cite le fait, l'attribue à un jeune
Macédonien.
21, Cicero. — Dans les Tusculanes, V, 27.
34, Brasier. — TriE-LivE, II, 12. — En 503. Porsenna, roi des Étrusques,
avait pris en main la cause des Tarquins chassés de Rome qu'il assiégeait.
L'acte de Mucius Scevola, par la crainte de le voir se renouveler, le décida
à lever le siège et à faire la paix.
36, Incisait. — Sénèque, Epist. 78.
40, Philosophe. — Sénèque, Epist. 78. — Il semble être question ici d'A-
naxarque, que Nicocréon, tyran de Chypre, fit torturer et finalement broyer
dans un mortier, sans pouvoir vaincre sa constance (IV« siècle). V. I, G2G.
460,
4, Peau. — Les éd. ant. à 88aj. : et l'en surnommoit on Madame l'escorchée.
14, Espagnole. — Pour avoir une taille élégante et svelte, comme l'ont les
Espagnoles.
16, Mourir. — Catherine de Médicis, dans le commencement de son séjour
en France, avait inventé de nouvelles parures, entre autres le corset, « sorte
de gaine qui emboîtait la poitrine depuis le dessous des mamelles jusqu'au
défaut des côtes et qui finissait en pointe sur le ventre » {Galerie des
femmes célèbres, 1827). On ne faisait pas encore usage pour cet ajustement
de fanons de baleine, qu'on remplace aujourd'hui par des lamelles d'acier;
on se servait d'éclisses en bois qui, pressées fortement, rendaient à la lon-
gue la chair insensible et aussi dure que la corne ou le cal qui vient aux
mains de certains ouvriers.
20, Luy mesme. — Lorsque Henri III, qui était roi de Pologne, la quitta
secrètement pour venir occuper le trône de France à la mort de Charles IX
(1574), le grand chambellan de sa cour le suivit et l'atteignit sur les fron-
NOTES. LIV. I, CH. XL. VOL. I, PAG. 460. F. 389
tièi'os d'Autriche. N'ayant pu le déterminer à revenir, au moment de se
séparer de lui, il lui promit une fidélité inviolable et, au grand étonnement
du roi, il se donna un coup de poignard dans le bras et suça le sang de la
plaie, voulant par là attester son dévouement et la sincérité de ses paroles.
21, Blois. — Ces États généraux, tenus à Blois en 1576, y avaient été con-
voqués par Henri III, pour en obtenir la condamnation du Protestantisme
et des subsides pour le combattre, ce à quoi ils se refusèrent d'une façon
absolue.
24, Poinçon. — Longue épingle à cheveux dont usent les femmes, encore
actuellement, pour maintenir l'échafaudage de leur chevelure.
30. Aspres. — Monnaie turque qui vaut environ un sou.
35, Croix. — Loreque l'empereur Honorius rapporta à Jérusalem la vraie
croix que les Perses lui avaient rendue et que leur roi Chosroès II avait
enlevée quatorze ans auparavant, il la porta lui-même sur ses épaules jus-
qu'au haut du Calvaire (622).
36, Foy. — Le suie de Joinville, dans ses Mémoires, IL
40, Nuict. — On montre encore à Notre-Dame de Paris la discipline de saint
Louis.
42, Angleterre. — Mariée d'abord avec Louis VII (1137), Éléonore de Guyenne
lui apportait en dot le duché de ce nom et d'importantes annexes. Répu-
diée pour son inconduite (1152), elle épousa peu après Henri, comte d'An-
jou et duc de Normandie, qui, en II54, devenait roi d'Angleterre et, tant
par lui-même que par son mariage, se trouvait déjà avoir sur le continent
une puissance territoriale surpassant notablement en étendue les domaines
directs de son suzerain le roi de France. Cette situation a été le point de
départ de la rivalité qui, depuis, n'a cessé d'exister entre la France et l'An-
gleterre et qui s'est traduite de la part de cette dernière par une opposi-
tion constante à notre endroit, et à maintes reprises par des guerres de
plus ou moins longue durée; notamment :
En 1159, II60, 1173, 1177, II88, 1194, 1198; — de 1202 à 1206; — de 1213
à 1217, de connivence, marquée par la bataille de Bouvines ; — de 1328 à
1340, bataille navale de l'Ecluse; — de 1345 à 1348, bataille de Crécy, prise
de Calais ; — de 1350 à 1360, bataille de Poitiers, traité de Brétigny ; — de
1369 à 1375; — de 1378 à 1453, bataille d'Azincourl, Jeanne d'Arc, combat
de Ca.stillon; — de 1521 à 1525 et de 1544 à 1546, de connivence avec Char-
les-Quint; — de 1557 à 1559, de connivence avec Philippe II, roi d'Espagne,
marquée par la reprise de Calais; — de 1627 à 1629, pendant la guerre
de Trente Ans, marquée par le siège de la Rochelle; — de 1678 à 1679,
jointe à la Hollande, à l'Espagne, à l'empereur d'Allemagne et à l'électeur
de Brandebourg; — de 1692 à 1697, faisant partie de la ligue d'Augsbourg,
durant laquelle eurent lieu les batailles navales de la Hougue et du cap
Saint-Vincent; — de 1701 à 1712, unie à l'Autriche, la Hollande, le Portu-
gal, la Savoie, et où elle s'empara de Gibraltar sur l'Espagne notre alliée;
— de 1742 à 1748, où, alliée de l'Autriche, elle ruina notre marine et notre
commerce; — de 1755 à 1763, où, alliée à la Prusse, elle nous enleva à peu
près toutes nos colonies dont les Indes et le Canada; — de 1778 à 1783, qui
aboutit à l'indépendance des États-Unis d'Amérique, est la seule où nous
ayons été agresseurs vis-à-vis d'elle; — 1793 à 1802, coalisée avec l'Au-
triche, la Russie et les divers États d'Italie, marquée par la prise de Toulon,
le combat de Quiberon, la bataille navale d'Aboukir, le siège de Saint-Jean
d'Acre, la convention d'El-Arisch ; — de 1803 à 1815, avec la coopération
successive des diverses puissances européennes, marquée par la bataille de
Trafalgar, le bombardement de Copenhague, les batailles de Vittoria, de
Toulouse, de V^^aterloo, et enfin les traités de 1815.
Et depuis, si aucune guerre ouverte n'a plus eu lieu, parce que toujours
nous avons cédé, soit par faible.sse, soit par duperie, ayant la trop géné-
reuse habitude de traiter les affaires sans arrière-pensée comme sans mé-
fiance, que d'humiliations ne nous a-t-elle pas imposées, que d'entraves ne
nous a-t-elle pas créées? —• En 1823, elle nous contraint à aller combattre
F.390 ESSAIS DE MONTAIGNE.
on Espagne les principes mêmes de notre Révolution ; — en 1830, elle nous
oblige à presser notre expédition d'Alger, pour qu'elle ne l'empêche pas;
— Plus tard, elle est contre nous dans rafîairo dite des « mariages espa-
gnols • ; — en 1854-56, elle se sert de nous pour contenir la Russie, et cette
alliance lui pèse tant, qu'au lendemain d'inkeimann, dans un conseil tenu
par ses généraux, Tun d'eux émet l'avis que « l'ai'mée anglaise se rem-
barque, laissant les Français recourir à la miséricordieuse générosité de
l'empereur Nicolas • ! — En 1860, en Syrie, elle paralyse noti-e action et
fait qu'elle n'aboutit à aucun résultat utile ; — Puis elle nous évince
de la direction des douanes chinoises; — au Mexique, elle nous aban-
donne; — elle nous élimine de l'accord primitivement conclu pour
la gestion des finances de l'Égj'pte en vue du paiement de sa dette; —
elle accapare les actions du canal de l'isthme de Suez, construit par
nous en dépit de son opposition et dont elle se rend ainsi maîtresse; —
elle nous immobilise en Extrême-Orient, durant la guerre Russo- Ja-
ponaise, par le traité qu'elle conclut dans ce but avec le .lapon; —
elle nous humilie au plus haut point dans l'affaire de Fachoda et par
ses prétentions et l'arrogant procédé qu'elle emploie pour les l'aire triom-
pher, qui n'a d'égal que la facilité avec laquelle nous obtempérons à sa
volonté et à ses menaces; — nos difficultés continues avec le Siam sont
son œuvre ; — enfin, elle nous pousse dans le guêpier d'Algésiras avec la
pensée, d'une part, que nous nous userons au Maroc, et de l'autre, nous
faisant miroiter une alliance sans grande valeur réelle dans la circonstance,
que nous finirons, sous l'effet de ses excitations, à en venir aux prises avec
l'Allemagne, et que s'entre-détruiront pour son plus grand avantage les
deux seules puissances qui, pour le moment, comptent pour elle en Europe,
l'une qu'elle jalouse et exècre depuis des siècles, l'autre qu'elle redoute
par l'extension que prennent son commerce et sa marine.
Si longue que soit cette énumération sommaire des manifestations des
dispositions de l'Angleterre à notre égard, qui ne relate que ce que tout le
monde connaît, elle serait bien autre si elle était dressée en toute cons-
cience par notre ministère des Affaires étrangères!
Et cependant, se laissant prendre à des démonstrations qui seraient flat-
teuses, si elles n'étaient aussi intéressées, si on pouvait oublier que toujours
dans ses alliances l'Angleterre n'a en vue que de tirer de ses alliés le maxi-
mum de services possibles et s'évertue à leur persuade)' qu'elle leur fait grand
honneur en leur accordant sa confiance et les faisant se battre pour elle,
nos gouvernants méconnaissant ces leçons de l'histoire, hypnotisés par l'o-
rage qui peut venir de l'autre rive du Rhin et qu'ils provoquent sans cesse,
au lieu de s'appliquer à le conjurer, donnent en plein dans le piège, rui-
nant la France en entretenant un état militaire qui l'écrase et qui ne se
justifierait que s'ils étaient résolus à en user à bref délai, tandis qu'au
contraire, ils espèrent bien n'en jamais venir là! Au lieu de maugréer et
de surexciter les populations par l'idée d'une revanche qui n'est pas dans
leur pensée, que ne se résignent-ils, tout en réservant l'avenir, ce qui est
dans l'ordre naturel, et n'imitent-ils l'Autriclie après Sadowa? L'Allemagne
détient l'Alsace-Lorraine, mais n'oublions pas pour cela en quelles mains
sont le Canada, nos anciennes colonies des Antilles, des Indes et les îles
dit«s Anglo-Normandes !
462,
4, Seigneur. — Ce pèlerinage fut entrepris par Foulques en expiation de
ses fautes; traîné sur une claie, il criait pendant qu'on le flagellait : « Sei-
gneur, ayez pitié de Foulques, traître et parjure. »
14, Deuil. — CicÉROx, Tusc, 111, 28.
19, Nourrice. — Pendant lallaitement fait hors de chez moi. De son mariage
avec Françoise de Chassagne, Montaigne eut six filles, dont cinq mouru-
rent toutes âgées de moins de trois mois; une seule survécut, Léonor, pour
laquelle il n'était pas sans tendresse. — Cette phrase lui a ét^ vivement et
souvent reprochée, et probablement à tort. Elle ne figure pas dans les édi-
NOTES. LIV. I, en. XL. VOL. L PAG. 462. P.391
tions antérieures; et l'exemplaire de Bordeaux porte : « l'en ay perdu, mais
en nourrice, deux ou trois », au lieu de : « mais i'en ai perdu en nourrice
deux ou trois ». Elle est donc postérieure à 1588. Or, à ce moment il avait
perdu SCS cinq enfants en bas âge; par suite ces mots « deux ou trois » ne
s'appliquent qu'au nombre de ceux qui avaient été mis en nourrice, ce
placement en nourrice n'étant qu'un détail auquel, avec raison, il n'attache
pas d'importance; si toutefois il le mentionne, c'est pour expliquer que le
regret de leur perte a été atténué, ce qui s'explique assez naturellement,
par ce fait qu'ils n'étaient pas élevés sous ses yeux.
31, Pallefrenier. — Plutarque, Apophth.
35, Esse. — TiTE-LivE, XXXIV, 17. —Cette mesure fut appliquée à tout le
pays entre les Pyrénées et l'Èbre dont Caton, allant entrer en opérations
dans le raidi de l'Espagne, redoutait les soulèvements sur ses derrières.
38, Vilité. — Bassesse, du latin vilitas qui a cette même signification et d'où
dérive notre adjectif vil.
40, Desbaucbe. — Sous-entendu : qui régnait autour de lui.
10, Conuioyt. — Ce verbe est au singulier, bien qu'ayant quatre sujets, dont
un au pluriel; ce mode est fréquent dans Montaigne, il se rencontre sou-
vent aussi dans Racan.
464,
12, Mortelle. — Origène se fit eunuque, prenant à la lettre ce passage de l'É-
criture : « Beati qui se castraverunt propter regnum cœli (Heureux ceux qui
se réduisent à l'impuissance pour l'amour du ciel) ». Matth., XIX, 12.
14, Creua. — Démocrite, qui, a-t-on dit, se serait rendu aveugle en se cre-
vant les yeux par la réflexion des rayons solaires à l'aide d'un miroir; mais
le fait est controuvé. Tertullien l'accepte et dit que c'était pour se défendre
de l'attrait des femmes; Plutarque le nie et donne comme probable que la
cécité a été causée par l'âge et qu'il a fait de nécessité vertu ; d'autre part,
S. .Jérôme, écrivant à Abigans pour le consoler d'être devenu aveugle,
lui dit que « quelques philosophes se sont arraché les yeux, afin que leur
esprit, dégagé de tous les objets sensibles, pût former des idées de plus
en plus pures ». — En Chine, fréquemment des anachorètes agiraient
ainsi, « fermant de la sorte, disent-ils, deux portes à l'amour, pour en ou-
vrir mille à la sagesse ». — D'après la légende, Somona Codom, le légis-
lateur des Siamois, aurait eu recours à ce même moyen, pour être moins
distrait par les objets extérieurs.
-18, Soy. — Au dire de Diogène Laerce, I, 26, la réponse de Thaïes aurait
été : « C'est que j'aime les enfants » ; laquelle prête à double interprétation,
étant donné ce que les anciens entendaient par aimer les enfants.
lit, Choses. — Non moins que la coutume (V. I, 170). — L'opinion est reine
du monde, elle l'est si bien que « lorsque la raison veut la combattre, elle
est condamnée à mort; il faut qu'elle renaisse vingt fois de ses cendres,
pour arriver peu à peu à chasser l'usurpatrice » (Voltauie). — « Qui dis-
pense la réputation, donne le respect et la vénération aux personnes, aux
grands, sinon l'opinion? Elle dispose de tout » (Bossuet).
27, Fret. — C.-à-d. nous prêtons toujours aux choses une valeur en rapport .
avec ce qu'elles nous coûtent. — Le fret d'un navire, c'est son prix de location
et son chargement; courir <à faux fret, c'est naviguer avec un chargement
au-dessous de ce qu'il pourrait transporter et par extension à perte.
2t), Tel. — Aristippe. — Dror.ÈNE Laerce, 11, 77; Horace, Sat., II, 3, 100.
. 31. Dit. — SÉNÈQUE, Epist. 17.
466,
1, Soulagement. — « Grande foi^une, grande servitude »: — « Qui n'a
guère, n'a guerre »; — « Il n'est richesse que de science et de santé », di-
sent des adages bien répandus.
1.5, Piperesse. — C.-à-d. de manière que par loyauté, je devenais économe
et inspirais ainsi plus d(> confiance à mes créanciers. Coste.
21, Iniurieusement. — Injustement; du latin injuria, qui signifie contre le
droit, tort, injustice.
F.392 ESSAIS DE MONTAIGNE.
32, Sens. — C.-à-d. à ma prévoyance et à ma raison.
33, Caesar. — Avant d'occuper aucune charge publique, César était endetté
de 1.300 talents, près de six millions et demi de notre monnaie; et lorsqu'on
qualité de préteur il reçut le gouvernement de l'Espagne, il devait 8.000 ta-
lents, soit environ trente-huit millions (Pi.utarque).
468,
1, Rente. — C'est probablement à cela que s'élevaient ses revenus. — Deux
mille écus, c'est six mille francs, l'écu étant de trois livres, quand il n'est
pas spécifié qu'il est de six; mais la valeur de l'argent, à cette époque,
était environ le double de ce qu'elle est aujourd'hui.
8, Frangitur. — Godeau, évoque de Grasse, a donné de ce vers la traduc-
tion suivante, que Corneille a transportée dans Polyeucte :
Et comme elle a l'éclat du verre, Elle en a la fragilité.
9, Poincte. — Renverser, bouleverser, mettre sens dessus dessous. — Cette
expression « cul sur poincte » vient de ce qu'anciennement on appelait
« cul », dans l'aiguille, la partie opposée à la pointe, qu'actuellement nous
appelons « tète ».
21, De l'argent... prins. — Var. de 88 : de.s biens, ausquels ie me prins si
chaudement, que.
24. Ordinaire. — C.-à-d. si on n'avait une avance d'une année de revenu.
470,
13, Bion. — Sknèque, De la Tranquillité de rame. 8.
20, Enuis. — C.-à-d. « et moins à contre-cœur », tournure latine minus in-
vitus.
27, Part. — » L'argent est un bon serviteur, mais un mauvais maître • (Ba-
con).
30, Platon. — Des Lois, I, 1.
33, Fils. — Plutarque, Apophlh. — Le fait y est attribué à Denys l'Ancien.
33, Eut. — Add. de 88 : sur ce propos.
40, Quelques. — L'éd. de 88 aj. : quatre ou cinq.
472,
1, Despence. — Probablement celui qu'il fit en Allemagne en 1580-81.
12, Faict. — C.-à-d. précisément au moment où nous en aurons le plus be-
soin.
16, Terres. — Pourtant il en acheta; il existe trace, à cet égard, de deux
acquisitions assez importantes.
20, Vieux. — Add. de 88 : laquelle i'ai tousiours tenu la moins excusable.
21, Folies. — Il ne faudrait pas en conclure que Montaigne ait dilapidé son
patrimoine, il l'a plutôt accru; à son décès, sa succession a été estimée
90.000 livres et l'argent avait alors une valeur bien autrement grande que
de nos jours.
31, Amy. — Xénophon, Cyropédie, VIII, 3. — Chateaubriand écrivait à Jou-
bert : « Je suis ennuyé de toujours courir pour mon compte les chances
de la vie; et si quelqu'un voulait se charger de me nourrir, de me vêtir
et de m'aimer, cela me ferait grand plaisir. »
474,
10, Trouue.
« Est toujours malheureux, et toujours a grand tort,
Celui-là qui jamais n'est content de son sort. •
• Rien n'a, qui assez n'a. » (Proverbe).
12, Vérité. — Qu'importe, en effet, que l'on soit fondé ou non à se plaindre
de son sort? Du moment qu'on se trouve malheureux dans une position
heureuse ou agréable, on l'est réellement; le bonheur ou le malheur sont
choses purement relatives, et il est aussi absurde d'en vouloir juger chez
autrui, que du degré de sensation de froid et chaud (|u'il peut éprouver.
28, Eau. — Tycho-Brahé (astrologue suédois du xvr siècle) est. dit-on, le
premier qui ait bien connu et expliqué la réfraction.
NOTES. I,îV. I, CIL XL. VOL. I, PAG. 47t. F.393
29, Voye. — Depuis ces mots : « Certes, tout en la manière », jusqu'ici,
. Montaigne traduit Sknèqle, Epist. 8L
;^, Abstersiue. — Du latrn abstergere, dissiper, faire disparaître, nettoyer.
476,
7, De se reietter... reliques. — Var. des éd. ant. : nous doniier en paiement
cecy.
8, Nécessité. — Sénkque, EpisL li.
CHAPITRE XLL
23, Autre. — < La passion de la gloire est la dernière dont les sages eux-
mêmes se dépouillent. » Tacite, Hist., IV, 6.
30, L'encontre. — C.-à-d. que vous ne pouvez guère lui résister.
30, Cicero. — Dans le Plaidoyer pour Archias, IL — Cette pensée est re-
produite aussi par Pascal.
478,
0, D'autruy. — Plutarque, Marius. — En 102. LesCimbres descendant d'Al-
lemagne par la vallée de l'Adige, Luctatius qui leur était opposé abandonna
la région montagneuse pour se retirer sur le cours inférieur de ce fleuve, sur
lequel il construisit un pont lui permettant de passer à volonté d'une rive
sur l'autre et de conserver ainsi sa liberté de manœuvres; mais les barbares
obstruèrent le cours d'eau, le franchiront ; les Romains effrayés s'enfui-
rent. Le consul fit alors lever l'aigle, ce qui était le signal de la retraite,
et, courant aux premiers rangs, se mit à leur tête, aimant mieux que la
honte de ce mouvement rétrograde tombât sur lui, plutôt que sur sa patrie,
et que les soldats eussent l'air non de prendre la fuite, mais de suivre leur
général. Marius, son collègue, qui venait d'exterminer les Teutons, alliés
des Cimbres, qui avaient essayé de pénétrer par la Ligurie, en suivant le
bord de la mor, l'ayant rejoint, ils vainquirent et exterminèrent les Cim-
bres à leur tour, à Verceil.
17. Despens. — Antoine de Lèves, le plus habile des généraux de Charles-
Quint, qui de simple soldat s'était élevé aux plus hautes dignités militaires,
croyait tellement cette entreprise immanquable, dit Brantôme, Vies des
hommes illustres, qu'il disait à l'empereur qu'il espérait bien que cela le
mènerait à Paris, et demandait pour récompense d'être enterré à Saint-
Denys. Son vœu fut e.xaucé, en ce qu'il mourut de chagrin, dit-on, de voir
cette expédition échouer, et qu'il fut enterré à Saint-Denys, mais non près
Paris, dans une église de Milan, placée sous ce vocable. — D'autres assu-
rent, au contraire, que ce général fut entièrement opposé à ce dessein rui
devait réussir si mal, et qu'il alla jusqu'à se jeter aux pieds de Charles-Quint
pour le détourner de franchir les Alpes.
22, N'estoit. — Pi.ltahqle, Apophth. des Lacédémoniens.
34, Exploit. — En 13 10. « Quoi qu'il arrive, aurait, au dire de Froissart, I, 30,
ajouté le roi, ne vous adressez plus à moi de la journée, lant que mon fils
sera vivant. » Ce fait est d'autant plus remarquable, <|u'on ne saurait nier
que, chez les princes, la jalousie contre leurs fils ou leurs frères, et, en gé-
néral, contre ceux qui doivent leur succéder, ne soit un mal très fréquent.
37, Sienne. — Plutarque, Instructions pour ceux qui manient les affaires
d'État.
Il, Obeyr. — Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens.
480.
4, Personne. — En 1591, Grégoire XIV promulgua un bref, à l'occasion de
la Réforme, qui permettait à tous les ecclésiastiques de porter les armes
contre les hérétiques.
8, Raison. — C.-à-d. les fit lui-même prisonniers.
11, Salsberi. — Le comte de Salisbury commandait les Anglais; c'était un
frère bâtard de Jean Sans-Terre, roi d'Angleterre à ce moment.
12, Autre. — C.-à-d. c'était une subtilité de conscience à celle dont il va
être parlé, car il s'agit de ce même évêque à la môme bataille.
F.39i ESSAIS DE MONTAIGNE.
11, Masse. — De la sorte il mettait les gens hors de combat en les assom-
mant, mais sans verser le sang-, ce qu'interdisait aux ecclésiastiquoii un
concile tenu à Trente en 1163, dont il respectait la décision en la tournant.
Antoine Guerara parle d'un prêtre espagnol qui, lors de la conquête de
l'Amérique, armé d'une arquebuse, tirait sur les Indiens, les bénissant au
préalable en faisant un signe de croix avec son instrument de mort. — La
masse d'armes tenait de la massue et du casse-tête; elle se composait d'une
tige de fer, d'environ O^jSO de long, terminée par une masse de même mé-
tal, soit sphérique, soit ovoïde, de la dimension d'une grosse orange, soit
unie, soit garnie de pointes.
CHAPITRE XLII.
16, Entre nous. — Montaigne ne traite cette question qu'en ce qui touche
l'individu ; elle se pose aujourd'hui, autrement sérieuse, au point de vue
des collectivités.
L'idée de remédier aux injustices du sort, en mettant en commun tout
ce qui constitue les richesses d'un paj's, en les confisquant ou les rachetant
au profit de l'État, avec charge de les exploiter, chacun y participant sous
son contrôle, et d'en répartir les revenus, n'est pas nouvelle; elle était la
base de la législation à Sparte, et les Gracques cherchèrent à la faire
triompher à Rome; aujourd'hui elle prend corps de plus en plus en
France.
C'est là le principe fondamental du socialisme qui, avec l'accaparement
par l'État de toutes les entreprises et de toutes les industries-, vise à faire
disparaître les fortunes grandes et moyennes par l'impôt progressif sur le
revenu, l'élévation des droits de succession; tarissant du même coup tout
ce qui stimule l'homme, le porte aux inventions, aux entreprises hardies
et de longue haleine, en l'éloignant de toute préoccupation d'avenir et d'am-
bition; nivelant toutes les intelligences par une éducation identique, gra-
tuite et obligatoire; enfin, par la puissance du nombre, dépouillant les
classes actuellement dirigeantes de tout pouvoir politique : idéal qui n'est
autre que celui d'une basse égaliU; et humiliante servitude.
Le socialisme répugne à reconnaître la supériorité intellectuelle, à laquelle
l'humanité doit tous les progrès, et est ennemi du capital qui n'est en somme
que le résultat du travail soit matériel, soit intellectuel, accumulé, qui seul
permet les grandes entreprises; en Russie il a ua champ d'expérience, le
collectivisme agraire règne dans certaines régions et, de ce fait, le perfec-
tionnement de la culture y est entravé, le rendement est moindre et le
paysan russe n'aspire qu'à être libéré de ce joug et à voir se constituer
la propriété individuelle, au rebours de ce que chez nous rêve le socia-
lisme !
C'est surtout parmi les manœuvres, les ouvriers de la plus infime caté-
gorie, mais qui sont aussi les plus nombreux, et les déclassés, qu'il recrute
ses adeptes; les artisans, les populations agricoles, chez lesquels prévaut
l'instinct de la propriété, y sont moins accessibles. Les plus ardents sont
le produit dégénéré de nos universités et de nos écoles, cette cohue de li-
cenciés et de bachehers sans emploi, d'instituteurs mécontents de leur
sort, professeurs dont le mérite est méconnu. A ces épaves des concours
que l'État n'a pu caser, viennent se joindre quelques âmes candides autant
<|ue peu clairvoyantes qui, par un sentiment non raisonné, accepté par
contagion, voient dans la réalisation de ce programme le règne de la jus-
tice et de la félicité universelles, comme si elles étaient de ce monde; enfin
il a pour lui. et c'est là sa plus sûre chance de réussite, la peur et l'indif-
férence, ces deux grandes infirmités de la bourgeoisie moderne; sans
compter qu'il se trouve en terrain tout préparé par la prédominance que
l'État occupe en France, où chacun recherche sa tutelle.
Ce concours de circonstances fait que le Socialisme progresse chez nous
NOTES. LIV. I, CIT. XLIT. VOL. I, PAG. 480. F.49b
à grands pas; déjà, il a gangrené les sphères parlementaires, a pris place
dans le gouvernement, si bien qu'il n'est pas chimérique de prévoir qu'il en
arrivera à ses fins à assez bref délai. Mais, vraisemblablement aussi, 1 lieure
de son avènement sera aussi celle de son déclin; il se lieurtera alors à des
nécessités économiques et psychologiques qui amèneront de sanglants ca-
tacljsmes, et la foule déçue et si versatile se jettera, en l'acclamant, au.x
pieds d'un César quelconque qui sera parvenu à rétablir l'ordre intérieur,
au prix de la liberté et peut-être au risque des pires aventures, continuant
ainsi le cj'cle perpétuel des événements au.xquels est assujettie l'hu-
manité.
Ce socialisme d'État est présenté par tous ses partisans comme l'unique
solution à la lutte entre le travail et le capital qui, avec les progrès de l'indus-
trie, acquiert d'autant plus d'acuité, que, du fait de l'énorme extension donnée
aux affaires, patrons et ouvriers deviennent de plus en plus étrangers les uns
aux autres que n'existe plus l'affection familiale d'antan née de leurs rap-
ports continus, lutte qui, au grand préjudice de leurs intérêts communs, se
traduit par des grèves répétées de plus en plus longues comme durée, don-
nant lieu à des incidents de plus en plus graves. — 11 est indéniable que les
revendications ainsi poursuivies, qui ne sont autres qu'une amélioration du
sort des travailleurs, proportionnée aux bénéfices qu'ils contribuent à réa-
liser, sont des plus légitimes. Depuis longtemps elles ont reçu un commence-
ment de satisfaction dans bien des cas et sous bien des formes : caisses de
retraites, assurances diverses, sociétés de secours nmtuels, sociétés coopé-
ratives d'alimentation, maisons ouvrières, etc.; mais toutes ces institu-
tions, quoique d'efficacité réelle, ne sont que des palliatifs entachés d'un
vice originel : l'intrusion du patron. Seules sont susceptibles d'être acceptées
sans froissement d'amour-propre celles qui, affranchies de tout caractère
de dépendance, mettent l'employé sur un pied d'égalité avec celui qui
l'emploie et créent au premier les mêmes droits qu'il réclame sur un ton
d'autant plus élevé que la loi, en autorisant des syndicats irresponsables
et des grèves sans garantie effective contre la violence, sans sauvegarde
réelle pour ceux qui veulent continuer le travail, lui donne une force dont,
excité par des meneurs soudoyés souvent par l'étranger qui a intérêt à voir
ruiner les industries similaires du voisin, soutenu parfois de ses subsides,
il ne se fait pas faute d'abuser.
Au premier abord, la participation aux bénéfices semble réaliser cet ac-
cord si désirable pour l'un comme pour l'autre, entre l'ouvrier et le patron ;
mais la pratique n'a pas confirmé la théorie; l'accord existe quand il y a
bénéfice et disparaît quand il ya perte. Le seul mode qui a donné le moins
de mécomptes, est l'exploitation en commun, dont il existe quelques exemples
de différentes genres, tous ceux y attachés en étant copropriétaires par le
moyen d'actions de prix peu élevé, 25 fr. par exemple, facilement acquises
par chacun au moyen d'un léger prélèvement obligatoire sur son salaire
journalier récupéré à la longue par la participation au dividende (G.
Lebon).
17, Lieu. — Dans son traité Que les bêtes vsent de raison, vers la fin.
18, Internes. — Add. de l'éd. de 80 : Car quant A la forme corporelle, U est
bien éuidenl que les espèces des bestes sont distinguées de bien plus apparente
différence que nous ne sommes les ims des autres.
20, Commun. — Add. de l'éd. de 80 : [car les folz et les insensez par accidents
ne sont pas hommes entiers).
22. Beste. — Add. des éd. ant. : c'est-à-dire que le plus excellent animal est
plus approchant de V homme de la plus basse marclie, que n'est cet homme d'vn
autre grand et excellent.
35, Brasses. — Longueur de l'étendue des deux bras, y compris le travers du
corps, d'où son nom ; exactement cinq pieds de 0"',33, Isoit l'",65. Est encore
employée dans la marine comme mesure de profondeur d'eau et de la lon-
gueur des cordages.
41, Circo. — Ce passage de Ju vénal a été imité par Boileau ;
F. 396 ESSAIS DE MONTAIGNE.
On l'ait cas d'un coursier qui, fier et plein de cœur,
Fait paraître, en courant, sa bouillante vigueur;
Qui jamais ne se lasse, et qui, dans la carrière,
S'est couvert mille fois d'une noble poussière.
482,
2, Oyseau. — Un oiseau de fauconnerie.
2. Longes. — Terme de fauconnerie; laisse de cuir à l'aide de laquelle on
portE^it et maintenait l'oiseau sur le poing. -
5. Poche. — « Acheter chat en poche », c'est acheter une ciiose sans la voir,
s'engager sans se rendre compte de ce qu'on fait; on disait jadis « chat en
sac», de ce que pour dissimuler le gibier, en l'cnferiaait dans un sac, et
que, vendu de la sorte, le lièvre ou lapin qui était censé s'y trouver, n'était
souvent qu'un chat.
6, Cheual. — Sénkque, Epist. 80.
6, Bardes. — Ornements, caparaçons.
2"i. Quatrain. — Ancienne monnaie valant un liard (un peu plus d'un cen-
time); du latin quadrans, également pièce de monnaie qui était le quart de
l'as romain.
24, Ancien. — SÉNi^:QUE, Ejmt. 76.
31, Traictes. — Nues, tirées du fourreau; du latin destrictus.
32. Equale. — Égal; du latin œqualis. Mot forgé par Montaigne.
42, Empire. — Add. des éd. ant. : et ses richesses : il vit satisfait, content
et allègre.
484,
3, Stupide... seruile. — Var. des éd. ant. : ignorante, stupide et endormie,
basse, seruile, pleine de fiebure et de fraieur.
8, Vilain. — Roturier; un vilain, c'était à proprement parler un serf; ce
mot dérive du latin villanus, qui lui-même vient de villa, métairie. Il est
à remarquer que ce nom de villa, ville, qui était autrefois uniquement at-
tribué aux habitations d'exploitation en pleine campagne, a reçu une ac-
ception opposée à son étymologie en s'étendant aux agglomérations impor-
tantes.
11. Chausses. — On désignait sous ce nom la partie du vêtement de l'homme
depuis la ceinture jusqu'aux genoux. — Ce passage a été pris à partie par
Pascai, : « Cela est admirable, dit-il : on ne veut pas que j'honore un homme
vêtu de brocatelle et suivi de sept à huit laquais ! Eh quoi ! il me fera donner
les étrivïères, si je ne le salue. Cet habit, c'est une force, il n'en est pas de
même d'un cheval bien harnaché à l'égard d'un autre. Montaigne est plaisant
de ne pas voir quelle différence il y a, d'admirer qu'on y en trouve et d'en
demander la raison. » — Cette critique a aujourd'hui bien perdu de sa va-
leur; on ne risque plus d'être battu, à ne pas saluer qui que ce soit; et la
presse notamment respecte aussi peu les gens que la vérité ; elle en est ar-
rivée, en effet, à un degré de licence d'autant plus grand que la protection
de la justice contre ses écarts est aussi insignifiante dans la répression que
douteuse, difficile et coûteuse à obtenir; c'est bien elle qu'Ésope qualifierait
maintenant la meilleure et la pire de toutes les choses.
15, Diane. — Hérodote, V, 7, d'où cette assertion est tirée, dit que les rois
de Thrace adoraient Mercure à l'exclusion de tout autre dieu et se croyaient
descendus de lui, mais il n'ajoute pas qu'ils méprisaient les autres.
15, Peintures. — Montaigne en revient à son idée que les rois et les grands
ne sont différents des autres hommes que par les habits.
29, Lictor. — Licteur, sorte d'appariteur, qui, dans l'ancienne Rome, mar-
chait devant les premiers magisti'als; il portait une hache entourée d'un
faisceau de verges. Le préteur en avait six, le consul 12, le dictateur- 24;
la vestale, quand elle sortait, était également précédée d'un licteur.
486,
2, Bonnetades. — Salutations en ôtant son bonnet, sa coiffure.
1. Cohque. — Dans les lettres attribuées à Diogène le Cynique, on lui fait
dire : - Les murailles ne te défendront pas, les maux sautent par-dessus;
NOTES. LIV. 1, Cil. XLll. VOL. I, l'AG. 486. P.397
la fièvre n'est pas arivtée par un mur, ni le catarrhe par une armée d'alliés. »
12, Dieux. — Plutauque, Apolhlh., Alexandre. — Ce fut dans un combat contre
les Assacéniens, peuplad(> du cours supérieur de l'Indus, qu'Alexandre,
atteint par un trait au talon, tint ce propos. Toujours avec ses troupes, nul
ne se prodigua davantage, et nombreuses furent ses blessures : En Illyrie, il
faillit être assommé d'une pierre et reçut un coup de pilon sur la nuque;
au passage du Granique, il eut son casque fendu; à la bataille d'Issus, la
cuisse traversée d'un coup d'épée que lui porta Darius lui-même; au siège
de Tyr, il fut blessé assez grièvement à la poitrine; à celui de Gaza, un
. trait le frappa au pied, un autre lui transperça l'épaule; en llyi-canîe, sur
les bords de la mer Caspienne, une pierre l'atteignit à la figure et faillit lui
faire perdre la vue ; au pays des Maracandiens, dans la Sogdiane, il fut
blessé à la jambe; il a été question plus haut de la blessure qu'il reçut chez
les Assacéniens; chez les Malliens, nation du cours moyen de l'Indus, un
trait l'atteignit à la poitrine.
15, Rien. — Pi.utahqle, Apophth., Antigone.
20, Cela. — C.-à-d. qu'importe.
33, Podagram. — Les éd. ant. aj. cet autre vers d'Horace, que l'édition de
1595 reporte à III, 684 : Sincerum est nisi vas, quodcunque infimdis, acescit
(dans un vase impur, tout ce que vous y versez se corrompt).
30, Paré. — C'est là une observation qui, tout au moins, comporte des ex-
ceptions. Pour ma part, j'ai longtemps possédé un cheval d'armes qui,
lorsqu'on lui mettait son harnachement de grande tenue, devenait tout
autre; il piaffait pendant qu'on le sellait et, une fois monté, arrondissait son
encolure, relevait ses allures et ne souffrait (ju'impatiemment de se voir
précédé par un autre, habitué qu'il était en pareil cas à tenir la tête.
30, Platon. — Lois, II.
488.
I, Strette. — Pincement, élancement; du latin sl)-ettus, serré, pressé.
1, Grandeurs. — Dans Don Quichotte, SanchoPança dit qu' <■ un pape enterré
ne tient pas plus de place qu'un sacristain ». — Un dicton populaire :
« Mieux vaut goujat debout, qu'empereur enterré. » — Et Malherbe :
• Et la garde qui veille à la porte du Louvre,
.N'en défend point nos rois. •
10, Biffe. — De l'italien beffa, pierre fausse, et par extension niche, moquerie;
signifie ici : dehors trompeurs, fausse apparence.
12, Terre. — Plutakque, Si l'homme sage doit se mêle)' d'affaires d'État.
13, Roy. — Depuis Montaigne des changements radicaux se sont produits en
France à cet égard. A l'autorité efTective des rois, s'est d'abord substituée
l'action dirigeante des classes moyennes, au profit surtout desquelles s'était
faite la Révolution de 1789. Celles-ci, abstraction faite de quelques rares
individualités, par le manque de caractère qui leur est propre, méconnais-
sant dans leur vue courte et inconsciente les devoirs que cette situation
leur imposait, plus préoccupées de ce qui, sur le moment, les touche person-
nellement que de l'avenir et de l'intérêt généi-al, ont laissé s'implanter le
parlementarisme. A ce régime, de chute en chute et aidés dans cette évo-
lution par l'affaiblissement des croyances religieuses et les conditions nou-
velles d'existence et d'idées, suite des découvertes modernes dans les
sciences et l'industrie, nous devons d'en être arrivés à l'avènement des
classes populaires à la vie pohtique, et à leur aspiration à la direction des
affaires pubUques; à ce que Le Bon appelle l'ère des foules.
Ce n'est plus, dit-il avec bien juste raison, dans les conseils des princes,
mais dans l'àme des foules que se préparent les destinées des nations.
Leur voix est devenue prépondérante; par leur organisation actuelle, main-
tenant surtout que des mains imprévoyantes ont successivement renvereé
toutes les barrières qui pouvaient les contenir et que déjà une partie des
pouvoirs pul)lics est à elles, elles constituent uae puissance avec laquelle il
F.398 ESSAIS DE MONTAIGNE.
faut compter, et leure revendications qui portent sur l'augmentation de
plus en plus grande des salaires, concurremment avec la limitation des
heures de ti-avail, l'expropriation de toutes les sources de revenus, des che-
mins de 1er, des mines, du sol, le partage égal de tous les produits, l'élimi-
nation de toute supériorité, tendent à la destruction de la société actuelle et
à un retour au communisme primitif des groupes humains.
En analysant l'esprit qui les anime, on constate que les foules ont pour
caractéristiques essentielles : l'irréflexion; souvent les mots les plus vides
de sens, frappant leur imagination, suffisent à les conduire; une crédulité
excessive, l'invraisemblance n'existe pas pour elles ; l'exagération, la soudai-
neté de leurs résolutions; une intolérance qui fait qu'elles ne supportent
aucune objection, ne se laissant arrêter par aucune considération; le senti-
ment de leur force qui est devenue immense en raison de leur nombre et
de ce qu'elles échappent à toute responsabilité; l'inconscience de leure actes.
Très difficiles à gouverner, elles veulent les choses avec frénésie et sont
surtout propres à détruire; la justice et la raison sont sans prise sur elles;
la force seule leur en impose, pour elles la bonté n'est qu'un signe de fai-
blesse : « 11 n'est rien moins esperable de ce monstre... que l'humanité et
la douceur; il receura bien plustost la reuerancc et la crainte » (I, 198).
L'individu en foule difl'ère essentiellement de l'individu isolé; du moment
qu'il est en foule, il'acquiert le sentiment d'une puissance irrésistible, s'ima-
gine irresponsable et cède à des instincts que seul il eût forcément refré-
nés, car par une sorte d'hypnotisme produit par les effluves qui émanent
du milieu dans lequel il se trouve, sa mentalité s'altère, le plus intelligent, le
plus savant descend au niveau de ceux qui le sont le moins : il n'a plus
de volonté, sa raison cesse de le guidei-, il devient inconscient et capable
d'obéir à toutes les suggestions, • Tardeur de la société rauissant les particu-
liers iugements » (I, 648). Cet effet se produit que la foule soit homogène
ou non, qu'elle soit composée d'éléments quelconques ou choisis; c'est à cela
qu'on voit des jurys rendre des verdicts que désapprouvent chaque juré
individuellement, des assemblées parlementaires adopter des lois et des
mesures que réprouvent en particulier chacun de ses membres ; sous ces
influences ambiantes l'avare se transforme instantanément en prodigue, le
sceptique en croyant, Thonnète homme en criminel, le héros en poltron;
« la contagion est très dangereuse en la presse • (I, 410).
Les foules ne sauraient se passer de meneurs. Ce sont le plus souvent des
rhéteui-s subtils ne poursuivant que des intérêts pereonnels, cherchant à
persuader en flattant de bas instincts, agissant fréquemment en sous-main,
et s'esquivant quand il pourrait y avoir danger. Leur autorité très despo-
tique, ne s'imposant la plupart du temps que par ce despotisme, peut à un
moment être très grande, et de plus en plus ils tendent à remplacer les
pouvoirs publics au fur et à mesure que ceux-ci se laissent discuter, sans
cependant que pour eux la Roche Tarpéienne soit toujours très proche
du Capitole. — Parmi les meneurs, il en est parfois qui ont foi et sacrifient
tout, intérêts, famille, à leurs convictions, toujours prêts à l'action; leur pa-
role en acquiert d'autant jilus de puissance; mais ceux-là sont rares et
presque toujours c'est pour d'autres "qu'ils retirent les mairons du feu.
Les foules sont au plus haut degré impressionnables, et qui connaît l'art
de les impressionner, connaît aussi celui de les gouverner. Ce qui frappe
leur imagination affecte toujours une forme simple, nette, c'est-à-dire dé-
gagée de toute interprétation, de tout commentaire accessoires, en même
temps que très exagérée, tels : une grande victoire, un grand miracle, un
grand accident, un grand crime, un grand espoir. L'orateur qui veut les
séduire, doit s'imprégner de ces idées et affirmer, exagérer, répéter, sans
se laisser aller à produire de preuve ou tenter de démontrer quoi que ce
soit par le raisonnement, — Pour acquérir sur elles une action prolongée,
il faut la foi, ou le prestige, qu'il vienne du nom, de la situation ; et encore
faut-il dans l'un ou l'autre cas que l'occasion se produise et que les cir-
constances s'y prêtent.
NOTES. I,IV. 1, CH. Xl.ll. VOL. I, PAG. 488. F.399
l(j, Imbécillité. — Faiblesse, du latin imbecUlUas qui a cette même signili-
calion atténuée. C'est dans ce sens que ce mot est constamment employé
dans les Essais.
25. Xenophon. — Dans le traité intitulé Hiéron ou de lu condition des rois.
32, Ennuyeuse.
« Ne soûlez pas voire désir.
Car si tôt qu'un plaisir nous lasse.
C'est moins plaisir que déplaisir. » Ch. d'Akcussia.
490,
1, Démettre. — Rabaisser, descendre; du latin demillere qui a ce sens.
14, Butte. — C.-à-d. les princes sont trop en vue et trop observés.
21, Mesme. — Cicéron, De Legibus, III, 14.
30, Maiesté — Sémélé, mère de Bacchus qu'elle tenait de Jupiter, cédant aux
conseils insidieux de Junon qui, jalouse d'elle, avait pris les traits de sa
nourrice pour la perdre, demanda au maître des dieux de se montrer à elle
dans tout l'éclat de sa puissance. Après avoir longtemps résisté, Jupitoi-
céda et lui apparut au milieu des foudres et des éclairs; le palais s'embrasa,
et Sémélé périt dans les flammes. Mvth.
33, Pais. — Les lois fondamentales de certains pays interdisaient aux rois de
sortir de leurs États. Les temps sont bien changés, les souverains de nos
jours passent leur temps à voyagei', et Paris ayant l'honneur de leur visite
qui fréquemment leur est rendue dans leur propre pays, ce ne serait pas
une minime économie budgétaire que d'établir en principe que, sauf circons-
tances toutes particulières, l'incognito est de rigueur pour tout souverain
qui mot le pied sur le sol français et que, comme jadis aux doges de Ve-
nise, il est interdit au Président de la République, pendant la durée de ses
fonctions, de sortir du territoire; sans compter que, s'il en eût été ainsi,
ne se serait pas produite, lors d'une visite rendue à Rome au roi d'Italie,
cette grossièreté (qu'il eût été si facile d'éviter, si elle n'avait été intention-
nelle, en choisissant une autre ville comme lieu de rencontre) faite au Pape,
de ne pas aller le voir, de sembler l'ignorer, alors que la religion catholi-
que, dont il est le chef, était encore reconnue par le Gouvernement, auprès
duquel il n'avait cessé d'avoir un représentant attitré; la question de la sé-
paration de l'Église et de l'État était déjà à la vérité dans l'esprit de quel-
ques-uns, cet incident a pu la précipiter parce qu'on en veut toujours à ceux
envers lesquels on a des torts; on reconnaîtra qu'il n'était cependant pas
indispensable pour y arriver.
42, Percée. — Louis XIV, à Vei-sailles, en 1685, avait sur l'état de sa maison
un office de cette nature qui y figurait pour une dépense de 15.000 livres.
492,
6, Temps. — CÉSAK, De Bello Cfallico, VI, 23, dit simplement que chez les
Germains, et non en Gaule, « en paix il n'y a pas de magistrats dont l'ac-
tion s'étende sur l'ensemble ; ce sont les chefs qui, dans chaque territoire
et dans chaque localité, rendent la justice et veillent au bon ordre ». Mais
peut-êti-e Montaigne a-t-il une réminiscence d'un passage de Cicéron, Ep.
fam.,\ll,b, qui reproduit ici une lettre de César qui écrit: «Quant à
M. Orfius que tu me recommandes, j'en ferai un roi des Gaules, on l'en-
verrait quelque part autre avec une délégation. »
20, Venise. — Nous disons aujourd'hui le Doge de Venise; quant à être libre,
il no l'i'tait guère, quoi qu'en dise Montaigne.
'32, L'autre. — Idée déjà émise liv. 1, ch. III (I, 30).
494,
7, Plus tost... la leur. — Var. des éd. ant. : pour en tirer leurs agrandissemeiis
et commodilcs particulières.
7, Fortune. — Montaigne semble s'être inspiré ici du souvenir de TAcrrE
qui fait dire par l'empereur Galba à Pison qu'il vient d'associer à l'empire :
« Toi et moi, nous nous parlons aujourd'hui en toute franchise; les autres
parlent à notre fortune i)lus (|u'à nous-mêmes »; et il ajoute : » Ce qui
F. 400 ESSAIS DE MONTAIGNE.
coûte, c'est conseiller aux princes de taire leur devoir; les approuver dans
tout ce (ju'ils font, ce n'est pas les aimer. »
14, Seroient. — Ammien Marcelun, XXII, 10.
25, Semez. — Aurel. Victor, Dioclétien. — L'empereur Dioclétien avait abdi-
qué. Les affaires de l'empire s'aggravant, Maximien, auquel il avait cédé le
pouvoii', l'envoya solliciter de les repreridie; pour toute réponse celui-ci
l'invita à venir voir ses jardins à Salone.
25, Anacharsis. — Pi.utarque, Banquet des sept sages, 13.
28, Precedence. — Supériorité; du latin prsecedere, précéder, exceller, sur-
passer.
29, Italie. — Pi.utarque, Pyrrhus. — En 280. Pyrrhus, roi d'Épire, avait des
talents, mais ambitieux et inconstant, il n'a laissé que la réputation d'un
aventurier; il conquit la Macédoine qu'il ne put conserver, .combattit les
Romains, guerroya en Sicile et fut tué à Argos. — Dans sa première Épître,
BoiLEAU a imité ce passage. —V. N. I, 1(3: Médecin; 352: Italie; 404 : Pleu-
rer; 524: lournée.
496,
4, Deux. — En 1815, Bliicher, le vainqueur de Waterloo, bivouaquant quel-
ques jours après dans le château de S.-Cloud, disait, en en admirant les ri-
chesses : " Faut-il qu'un homme soit fou, pour avoir été courir à Moscou,
quand il avait toutes ces belles choses en sa possession! »
CHAPITRE XLIIl.
12, Fin. — Philippe le Bel fit des lois pour réprimer le luxe qui devenait ex-
cessif : les ducs, les comtes et les barons ne pouvaient donner à leurs
femmes que quatre robes par an ; les dames moins riches ne devaient en
avoir qu'une; il n'y avait que les femmes de grands seigneurs qui pouvaient
employer des étoffes à 30 sols l'aune (I"",20); les boui-geoises ne pouvaient y
mettre que dix sols, ce qui équivalait à 20 sous de notre monnaie. Ces or-
donnances tombèrent bien vite en désuétude.
16, Choses. — Les éd. ant. port. : vanitez.
23, Degrez. — C.-à-d. nous et le rang que nous occupons.
498,
I, Ville. — Les éd. ant. port. : que vous en faisiez soudain argument que
c'estoit un homme de néant (éd. ant. à 88), peu (éd. de 88).
6, Pollisseure. — Propreté, du latin politura qui a même signification; et
par extension, éclat.
7, Roys. — Les éd. ant. a}. : et les princes.
12, Locriens. — Diodore de Sicile, XII, 20. — Une des lois de Zéleucus portait
que l'adultère aurait les yeux crevés; son fils ayant été convaincu de ce
crime, il voulut lui appliquer la loi ; le peuple demanda grâce. Zéleucus
condescendit à ses instances, en ne lui faisant crever qu'un œil, dit-on,
mais en s'en faisant crever un à lui-même.
17, Putain. — Le roi saint Louis ne permettait qu'aux courtisanes de porter
des ceintures dorées, d'où le proverbe : « Bonne renommée vaut mieux que
ceinture dorée. »
17, Ruffians. — Entremetteur, proxénète, de l'italien ruffians.
20, Diuertissoit. — Détourner, du latin divertere qui a même sens.
25, Cour. — L'éd. de 88 aj.: ces façons vitieuses naissent près d'eux. — « Les
citoyens d'une république sont tels que ceux qui les gouvernent. » Platon.
Toutefois on dit plutôt aujourd'hui et avec juste raison : <■ On a le gouver-
nement que l'on mérite. » — « A l'exemple des rois, un chacun se gouverne. »
Lacroix de Maine. Longtemps avant lui, Claudie.n avait écrit cet hémi-
stiche passé en proverbe : Régis ad exemplar (à l'exemple du roi). — « Les
exemples des rois nous font ce que nous sommes. » S. Didier. — « L'exemple
du monarque est la loi de la terre. » La Hari'e. — Louis XI ne voulait pas
que son fils sût un mot de latin; toute la cour de son temps méprisa les
NOTES. I.IV. I, en. XIJII. VOL. I, PAG. 498. F.401
belles-lettres; François I" les fait enseigner à ses enfants, toute la cour s'y
remet. Henri III aime la débauche, le luxe, toute la cour s'y livre. — De
nos jours, un président do la Chambre des députés (un des rois du moment
en France) se marie en redingote, voilà l'habit de cérémonie démodé. Le
roi d'Angleterre arbore un chapeau melon, le chapeau haut de forme est
menacé. — Le roi Alphonse comparait ses sujets aux plantes qui, toutes,
se tournent toujours vers le soleil.
« Communément la ville et la province
Règlent leurs mœurs sur celles de leur prince. » M"'' Liieritier.
■ L'exemple est plus puissant sur les esprits vulgaires
Que toutes les raisons et tous les commentaires. > Pemcai'd.
i?0, Chaussure. — On comprenait sous cette appellation le vêtement de la
partie inférieure du corps, qui parfois n'était que d'une seule pièce, mais
qui plus communément se subdivisait en haut-de-chausses, culotte s'arrê-
tant au genou, ot bas-de-chausses ou simplement bas. Lo reproclie que lui
fait ici ftlontaigne de dessiner la forme des membres occultes, il l'a déjà for-
mulé I, I7G.
500,
G. Loix. — Liv. VIII.
CHAPITRE XLIV.
502,
(). Pressant. — Pi.utahqle, Alexandre, 7. — Dans la nuit qui précéda la ba-
taille d'Arbelles (331), et contrairement à ses habitudes en pareil cas. — Le
grand Condé dormit également la veille de la bataille de Rocroy (1643). « Le
lendemain à l'heure marquée, il fallut réveiller d'un profond sommeil cet
autre Alexandre. » Bossuet. — Napoléon disait que ce n'était pas là une
preuve de grandeur d'esprit, mais de lassitude; lui-même dormit de la sorte
la nuit qui précéda Austerlitz (1805).
12, Ronfler. — Plutauque, Othon, 8. — \'aincu à Bébriac (69), Othon, quoi-
qu'il n'eût pas encore lieu de désespérer, se sacrifia, contre le sentiment de
ses soldats qui lui étaient tout dévoués, dans la pensée, qui ne se réalisa
pas, de ramener la paix et l'union dans l'empire. — Louis XVI dormit pai-
siblement la nuit qui précéda son supplice (1793); de même le général Bironj
en 1794, lo maréchal Ney, en 1815.
22, Parlement. — Départ. — Pi.utarque, Galon d'Utique, 19. V. N. II. 586 :
leune Caton.
31, Outrance. — Vraisemblablement des gladiateurs; gens qui se louaient
pour combattre à l'épée, jusqu'à ce que mort s'ensuive, pour le plaisir du
peuple, ot aussi pour tous autres qui les prenaient à leur service, sans souci
de leur propre vie, non plus que de celle de leur advei^saire.
40, Escarmouche. — Plutarque, Calon d'Utique, 8. — Métellus proposait de
rappeler à Rome, sous prétexte do la protéger. Pompée et ses troupes alors
en Asie; c'était en réalité pour lui donner la dictature. Caton, collègue do
Métellus au tribunat, s'y opposa; et, après une lutte de plusieurs jours où
il eut à résister à la foule qui faillit lo lapider, il parvint à empêcher que la
loi ne passât (63). V. N. II, 586 : leune Caton.
41, Cet homme. — Les éd. ant. port. : ces Iruis /iommes,H modifient en con-
séquence la contexturo de la phrase.
504,
2, Ordinaires. — Le sommeil répare le corps, l'espérance répare l'esprit, ce qui
faisait dire à Platon : « L'espérance est le sommeil de l'homme qui veille. ■-
3, Combat. — Suétone, Auguste, 16.
10, Ennemis. — En 36. Montaigne, comme Suétone d'après lequel il cite ce
fait, dissimule la lâcheté d'Auguste, dont toutes les victoires qui l'éievèrent
à l'empire furent l'œuvre d'autrui; celle de Philippes fut due à Antoine
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 26
F.402 ESSAIS DE MONTAIGNE.
seul; celle d'Actium, comme la défaite do Sextus Pompée dont il est ques-
tion ici, furent le fait d'Agrippa; nonobstant, il s'acquit l'affection des
soldats, qui faisaient plus de cas de la libéralité de leur général que de son
courage.
17, Plus. — Pi.iTAKQUE, Sylla, 13. — En 82, près de Préneste; Marius le
Jeune, battu, se tua.
20, Sommeil. — En 186. Suivant les uns, Persée se laissa mourir de faim
dans sa prison. Suivant d'auti-es, ayant mécontenté ses gardiens, ceux-ci
pour se venger, épiant le moment où le sommeil le prenait, employaient
toutes sortes de moyens de le tenir éveillé; il finit par mourir de cette in-
somnie continue.
21, Dormir. — Mécènes, agité d'une fièvre continue, ne dormit pas un seul
moment durant les trois dernières années de sa vie. Pline, Hist. naf., VII,
52: c'est le seul exemple qu'il en donne.
23, Années. — Hérodote, IV; il dit n'en parler que par ouï dire et ne pas y
croire ; cela .s'applique probablement aux peuples habitant les régions po-
laires, dont l'année, disait-on, était composée d'un jour de six mois et d'une
nuit de même durée, ce qui déjà ne voudrait pas dire que les gens y de-
meureraient éveillés ce jour entier et dormiraient d'un seul trait toute la
nuit qui la suit; en réalité pendant six mois les jours y sont excessivement
courts, tandis que pendant les autres six mois ce sont les nuits dont la durée
y e.st de plus en plus réduite.
24, Suitte. — DiooÈNE Laerce, I; Pline, VII, 52.
CHAPITRE XLV.
25, Dreux. — Livrée en 1562, sous Charles IX, et gagnée par les catholiques
sous le commandement du connétable de Montmorency et le duc de Guise,
contre les protestants ayant à leur tète le prince de Condé.
506,
4. Macbanidas. — En 206, à Mantinée; bataille autre que celle livrée en
ce même lieu par Epaminondas. Celle dont il est ici question se termina
par une sorte de combat singulier entre Philopœmen et Jlachanidas, celui-
ci cherchant à fuir, celui-là à l'arrêter, et dans lequel Machanidas fut tué.
Plutarque, Philopœmen, 6.
18, Bœotiens. — En 394, à Coronée. Plutarque, Agésilas.
30. Route. — En pleine déroute; comme si, précipité du haut d'une mon-
tagne, il était contraint à une descente rapide, s'exécutant en désordre et
sans arrêt possible. V. N. I, 366 : Routes.
CHAPITRE XLVI.
508,
3, Galimatrée. — Terme de cuisine : sauce rapidement faite, dans laquelle
il entre de la moutarde et de la poudre de gingembre; par extension, as-
semblage, mélange, galimatias.
5, Benoist. — Jehan était souvent, au moyen âge, employé comme synonyme
de sot, innocent, badaud; on dit encore de nos jours, dans le même sens:
« Jeanjean » ; — Guillaume se disait parfois, comme terme de mépris, des
gens dont on ne faisait pas grand cas ; — Benoist et Benêt se prononçaient
de même façon et avaient même signification, qu'a conservée l'épithète de
- benêt », niais ridicule.
8, Guillaumes. — Quatorze rois d'Egypte portèrent le nom de Ptolémée;
huit rois d'Angleterre celui de Henri: neuf rois de France, à l'époque de
Montaigne, s'étaient appelés Charles; la Flandre a eu neuf de ses comtes
du nom de Baudoin; l'Aquitaine, dix de ses ducs du nom de Guillaume.
10, Venu. — Guienne ne vient pas de Guillaume, mais de l'ancien nom ro-
main du pays, Aguilania, dont on a fait d'abord Aquienne, et ensuite la
Guyenne.
NOTES. [JV. I, CH. XLVI. VOL. I, PAG. SOS. F.403
18, Nom. — Guillaunio le Breton (conseiller intime de Philippe-Auguste),
étant venu à Rouen, invita à manger chez lui, le jour do la fête de son
saint patron, tous les chevaliers portant ce nom; il s'en trouva trois cents.
19, Seruiteurs. — C'est la très grande afiluence de gens du même nom, se
distinguant parfois, ma;is pas toujours, par des surnoms ou des sobriquets,
qui, lors des croisades, au xn- siècle, introduisit en France, pour permettre
de s'y reconnaître, l'usage des noms de famille. Chez les anciens, ce nom
n'existait pas davantage, toutefois, dans les grandes familles, le nom de l'un
des ancêtres qui avait marqué était quelquefois conservé, et si ses descen-
dants ne le portaient pas toujours, il servait néanmoins à indiquer qu'il en
faisait partie, tels les Séleucides en Grèce, la gens Fabia à Rome, et même
les Mérovingiens, les Carlovingiens dans l'ancienne France. Cela se retrouve
encore chez les Orientaux; mais, en outre, au nom de chacun s'accole d'une
façon indissoluble l'indication de qui il est fils : Atman ben Mohamed (At-
man fils de Jlohamed).
22, Viandes. — Spartien, Gela, 5.
25, Réputation. — « Les noms ont une très grande vertu. « Platon. — « 11
faut donner de beaux noms aux enfants; un beau nom vaut mieux qu'une
fortune. » Pline.
• Les noms onl efficace et puissante vertu. » KoNSAnD.
26, Nom. — Add. des éd. ant. : beau ef.
31, Droit. — C.-à-d. ne pouvoir, à cause de son nom, nommer à un grade ou
à une place un gentilhomme, bien qu'il y eùi droit.
510,
1, Gascongne. — Philippe 11, roi d'Espagne, ne voulut jamais rien faire
pour un ecclésiastique, parce qu'il s'appelait Luther, du même nom que le
célèbre réformateur. . '
4, Enfants. — Il importe, en effet, de ne pas donner aux enfants des noms,
c'est-à-dire des prénoms ridicules qui dans leur jeune âge leur attirent des
railleries de leurs camarades (cet âge est sans pitié), ce qui peut les rendre
malheureux, leur aigrir le caractère, créer des inimitiés. De même de ceux
qui sont susceptibles de donner lieu dans l'avenir à des contrastes trop
saillants; combien de Blanche sont brunes, de Rose sont pâles. — On conte
à ce propos l'anecdote des deux filles du roi d'Espagne Alphonse IX. L'une
s'appelait Urraca et l'autre Blanca. Des envoyés de Philippe, roi de France,
vinrent demander en mariage, pour leur maître, l'une ou l'autre de ces
princesses. Urraca était l'aînée et beaucoup plus belle que sa sœur; celle-ci
fut pourtant préférée parce que le nom d'Urraca avait moins bonne grâce
et eût été moins bien accueilli en France. L'auteur qui rapporte ce fait,
ajoute : « Qui ignore qu'en France le nom de Henri est considéré comme
néfaste, en raison de la fin tragique des rois qui l'ont porté : Henri II, tué
dans un tournoi; Henri III et Henri IV, assassinés »; toujours est- il
qu'il n'a pas porté bonheur à celui de leurs descendants qui a pris le nom
de Henri V et n'est jamais monté sur le trône. — - On cite encore à ce sujet
une remarque assez piquante du maréchal Pélissier: « Voyez quelle bizar-
rerie, dit-il, en parlant de quelques maréchaux ses compagnons d'armes :
Canrobert s'appelle Certain (il était au contraire de peu de décision); Vail-
lant, Alexandre, et Randon, César (tous deux, administrateurs estimés, ne
passaient pa-s pour des foudres de guerre); et moi, je m'appelle Aimable (ce
qu'il était fort peu)! — Quant à l'importance des noms patronymiques, elle
est bien autrement grande ; ne voit-on pas, en effet, journellement, môme
à notre époque, nombre de grandes familles de France redorer leurs blasons
et revivifier leur race par des alliances avec les filles de financiers, d'indus-
triels et de commerçants auxquels la fortune a souri, comme du reste leurs
pères avec les filles de fermiers généraux, alliances dans lesquelles le nom
qu'ils tiennent d'illustres aïeux est leur seul apport!
M, Voyons. — Bolchet, de qui le fait semble tiré, dit que le jeune homme,
F.404 ESSAIS DE MONTAIGNE.
presque un enfant, était le neveu du dojen de Notre-Dame la Grande qui
s'appelait alors Saint-Nicolas. Couché avec une fille de joie, ce jeune homme
apprit d'elle qu'elle se nommait Marie. Saisi de honte, il s'abstint de la
toucher et eut une si grande contrition de son péché qu'il en mourut sur
l'heure. En raison de la circonstance, il fut inhumé en terre profane;
mais quelques jours après apparut sur sa tombe <• une rose blanche sur
branche verte nouvellement venue », bien que ce ne fût pas la saison. En
raison de ce prodige, on e.xhuma le corps et l'on trouva dans la bouche
un papier portant en lettres d'or le nom de Marie. On informa et a3ant
acquis la conviction qu'il était décédé de douleur et de repentir, on le mit
en terre sainte, et en commémoration on changea le vocable de l'église,
qui devint Notre-Dame.
14, Voyelle. — Vocale, orale.
16, Pythagoras. — Sextus Empiricvs, A dver sus Mat hem., IV.
19, Spondaïque. — Monotone; ce qualificatif de spondaïque s'appliquait à
à un genre de musique^ usité dans l'antiquité, composé de notes longues
et d'égale durée.
22, Foy. — Tout ceci est dit par ironie contre les Calvinistes qui affectaient
une piété excessive et donnaient à leurs enfants des prénoms tirés de l'An-
cien Testament, au lieu de ceux en usage chez les catholiques.
512,
2, Cognoissance. — Il est bien regrettable que ce souhait exprimé par
Montaigne, bien souvent renouvelé depuis lui, soit encore à l'état de de-
sideratum, et qu'on continue à franciser les noms propres étrangers, aussi
bien les noms d'hommes que les noms de lieux, tandis que par contre on
a une tendance prononcée à emplo3er dans le langage courant nombre
de mots exotiques pour désigner des choses qui souvent ont leur nom en
français. Pourquoi nous obstiner à dire Londres au lieu de London, Rome
au lieu de lîoma; à appeler Guillaume, Charles, au lieu de Wilhelm, de
Carie, les souverains de l'Allemagne, du Portugal! Cette manie de déna-
turer les no/ns propres n'a-t-elle pas transformé en « Pas des lanciers » un
lieu dit de Provence « Pas de l'ansie » dont l'appellation, par sa significa-
tion, « pas de l'angoisse, passage difficile », en expliquait la nature, et com-
bien d'autres dans le même cas.
12, Eschappé. — La maison régnante de France était celle des Valois qui
prit fin avec Henri III et descendait de Charles de Valois, fils cadet de
Philippe .111, petit-fils par conséquent de saint Louis, branche indirecte des
Capétiens dont le point de départ, remontant déjà à trois siècles, était cer-
tainement ignoré alors de beaucoup. Et il en était de même en ce qui
concernait Henri IV qui allait succéder à Henri 111 et tenait également ses
droits de saint Louis d'une façon tout aussi indirecte du fait de son sixième
fils Robert de Clermont, sire de Bourbon. On connaissait les Valois et les
Bourbons, on n'avait plus guère souvenir de la manière dont ils se rat-
tachaient aux Capétiens.
20, D'autres. — Elles sont nombreuses, en effet, les familles qui se croient
ou se disent issues de sang royal: rien qu'en Gascogne, les Montesquiou,
les Montlezun, les Pardailhan, les Comminges se font descendre de la pre-
mière race. Mais il y en a ailleurs en France, et un peu partout : les de
Croy se disent venir des rois de Hongrie; les Carrion Nisas, des rois d'A-
ragon; les Commène, les Lascaris, des empereurs d'Orient; lés Montmo-
rency ont une tradition mérovingienne; plusieurs princes russes, d'origine
lartare, se donnent comme descendants de Gengis Khan, etc., etc., car
ils sont légion. Qu'ils soient ou non de bonne foi, en dehors des origines
qu'ils avouent et de celles qu'ils n'avouent pas, de combien d'autres non
moins illustres, tout comme un chacun du reste, ne seraient-ils pas en droit
de se targuer, s'ils les connaissaient? Le calcul ne démontre-t-il pas qu'en
France, à raison de trois générations par siècle, tous nous avons dans
les veines le sang de vingt millions de contemporains de l'an mil; à qui
donc à ce compte peut-on dénier d'avoir au moins un prince dans ses
NOTES. LIV. I, CH. XLVI. VOF.. I, PAG. 31 1. F. 405
alliances, tout on laissant de côté les liens de parenté que nous pouvons
revendiquer du fait d'Adam et Eve, nos ancêtres communs?
514,
4, Face. — Voir pour la signification de ce langage héraldique la notice sur
les illustrations. — Montaigne était fort épris de ses armoiries; il les laissa,
ainsi qu'il le relate dans le Journal de ses voyages, à Plombières, Augsbourg
et dans plusieurs autres villes; à Pise, il les fit « blasonner et dorer avec
de belles et vives couleurs », les encadra et les cloua au mur de sa cham-
bre « sous la condition qu'elles y resteraient; son hôte le lui promit » et
en fit serment ». A sa mort, n'ayant point d'héritier mâle, il les légua à
Charron, devenu son ami.
"23, Procez. — Allusion au Jugement des voyelles de Lucien, où la consonne
grecque 2 (sigma) porte plainte, devant les sept voyelles, contre T (tau),
autre consonne, pour vol et violence, cette dernière la dépouillant de
nombre de mots dans lesquels T s'est introduite, alors qu'ils se pronon-
cent comme ^i c'était elle, ï, qui entrait dans leur composition, ce qui se
retrouve, du reste, dans notre langue où, fréquemment, t se prononce
comme c, s ou z, ce qui est même une des modifications que poursuivent
ceux qui, de nos jours, préconisent la réforme de l'orthographe.
'26, Bon. — C.-à-d. ceci est important.
2S, Connestable. — Ce nom que nous écrivons Gucsclin, se trouve écrit dans
les actes publics de l'époque : Glecquin. Gléaquin, Glayaquin, Glesquin,
Gleyquin, Claikin, etc.. Mighei.et. — En dehors des formes que signale
Montaigne, Ménage en a relevé nombre d'autres : Guéclin, Gayaquin, Gues-
quinius, Guesclinius, Guesquinas, etc.. — Dans ses Mémoires, III, 70, Frois-
SART rapporte, sur l'origine de Duguesclin et de son nom, qu'un chevalier
breton lui conta qu'au temps où Charlemagne combattait en Espagne les
rois maures qui en étaient les maîtres, l'un de ces rois, du nom d'Aquin,
passa par mer en Bretagne, débarqua à Vannes, conquit le pays et, pour
afi'ermir sa conquête et au besoin assurer sa retraite, construisit non loin
de là, sur le bord de la mer, une tour « moult belle », qu'on appela le Glay.
Charlemagne, de retour de son expédition, se porta contre Aquin qui,
vaincu, s'enfuit en si grande liàtc, qu'en se rembarquant, il oublia un de
ses enfants qui dormait dans la tour. L'enfant fut porté à Charlemagne
qui le fit baptiser; Roland et Olivier furent ses parrains; et, en souvenir
de ces diverses circonstances, il reçut le nom d'Olivier du Glay-Aquin et
de lui serait issu Bertrand du Guesclin. V. N. I, 32 : Auvergne.
30, D'Alsinois. — François I""^ avait fait à son sujet cet assez mauvais jeu
de mots : <■ Pauvre comte qui ne possède que six noix. »
31, Escrits. — Le surnom de Lenis (doux) que Suéto.ve, Olhon, 10, semble
donner à son père, paraît résulter d'une erreur de la part de ceux qui ont
lu de la sorte. Le manuscrit où cela se lit, est avarié en cet endroit et
certains estiment que ce qui s'y lit n'est que la fin du mot Paulinus, dont
la première syllabe a disparu; de fait un Suétone Paulinus, personnage
cité par d'autres écrivains, se trouve dans les conditions à être le père de
l'auteur des Douze Césars. — Quant au surnom de Tranquillus, c'était
bien effectivement celui de Suétone; Pline le Jeune, dans ses lettres, sui-
vant l'usage des Romains, le désigne souvent par ce seul surnom.
516,
16, Laconum. — Ce vers, traduit du grec par Cicéron, est le premier de quatre
vers élégiaques qui furent gravés au bas de la statue d'Épaminondas. V.
N. III, 18 : Epaminondas.
19, Queat. — Fragment, également rapporté par Cicérox, de l'épitaphe que
fit Ennius pour le grand Scipion, le premier, l'Africain, dont il était le
familier.
F. 406 ESSAIS DE MONTAIGNE.
CHAPITRE XLVII.
518,
3, Parler. — C.-à-d. on a toute liberté de parler, ou, on peut parler à son
aise.
9, Sainct Quentin. — En 1577; bataille livrée par le connétable de Mont-
morency aux Espagnols assiégeant Saint-Quentin. Le connétable y fut liattu
et fait prisonnier avec une foule de seigneurs, toute son artillerie et 4.000
hommes; pareil nombre demeura, en outre, sur le champ de bataille. Le duc
de Savoie, qui commandait l'armée ennemie, voulait marcher sur Paris.
Philippe 11 s'y opposa et fit continuer le siège. La ville, défendue par l'a-
miral de Coligny avec fort peu de moyens, fit une défense admirable et
fut prise d'assaut après dix-sept jours d'attaque, alors que son enceinte
était percée de onze brèches. En retenant aussi longtemps l'adversaire, elle
sauva le royaume en permettant de reconstituer la résistance.
2'1, Guerre. — C'est cette même idée qui faisait dire à quelqu'un qu' « un
général qui remporte des victoires dont tout le fruit est pour ceux qui
vendent des crêpes et du drap noir, n'a pas grand mérite et ne rend pas
grand service ».
27, Vaincre. — Pi.utarque, César, 11. — En 48. César et Pompée s'y ti-ou-
vaient en présence, mais dans des conditions bien difi'érentes : Pompée,
avec toute son armée et dans la plus complète abondance, |)arce qu'il était
maître de la mer; César, avec peu de monde et en proie à la disette,
parce que, pour atteindre son adversaire et le fixer, il avait fait diligence,
devançant le gros de ses troupes demeuré à Brindisi, de l'autre côté de
l'Adriatique, prêt à s'embarquer pour le joindre, mais attardé par le mau-
vais temps et le manque de bateaux.
db, Sociale. — Cette guerre (91 à 87) eut lieu entre Rome et ses alliés d'I-
talie, et en particulier les Marses, qui revendiquaient le bénéfice de leur
alliance et entre autres le droit de cité qu'ils obtinrent. Tout en les com-
battant. Marins était avec eux de cœur et les épargnait dans la mesure du
possible pour se les concilier, car déjà sa rivalité avec Sylla avait com-
mencé.
520,
5, Mort. — En 1512. Bataille gagnée sur les Espagnols et les troupes du
Pape, par les Français commandés par Gaston de Foix qui y périt en di-
rigeant une charge contre l'infanterie espagnole qui se retirait en bon
ordre; elle fut une des plus sanglantes de cette époque en Italie. Outre
leur général, les vainqueurs y perdirent 6.000 hommes;. les vaincus 12.000,
leur artillerie et leurs bagages. Ses résultats furent nuls en raison de la
désorganisation qui régnait dans notre armée, en proie, faute de solde, à
l'indiscipline et à la désertion.
7, SerizoUes. — En 1544. Cette bataille gagnée avec des forces inférieures
par les Français, commandés par le duc d'Enghien sur les Impériaux sous
les ordres du marquis du Quast, qui y perdirent 12.000 hommes, leurs ca-
nons et leurs bagages, n'aboutit qu'à une trêve de trois mois, l'invasion
de nos frontières de Champagne et de Picardie ayant obligé au pi-élèvo-
ment d'un fort contingent sur notr^ armée de Piémont.
10, Necessitatis. — C'est ce que Montaigne vient de dire en français.
17, Malheur. — L'an 419; Agis 1" était roi de Lacédémone etPharax, un des
membres du conseil de Sparte, l'assistait plutôt pour lui dicter sa conduite
dans les cas graves que pour émettre de simples avis. Diodoke de Sicile,
XllI, 25.
20, Mourut. — En 528. Lancé à la poursuite de son adversaire en fuite, Clo-
domir ne s'aperçut pas qu'il était bien en avant des siQns, et, entendant
à quelque distance retentir son cri de guerre, il y alla; c'était un piège, il
tomba au milieu d'ennemis qui le massacrèrent sur place.
24, Cœsar. — Suétone, César, 67.
iNOTES. LIV. I, CH. XLVII. VOL. I, PAG. 520. F.40'7
27, Xenophon. — Cyropédie, IV, 4.
29, Chères. — Justin dit des Scythes qu'ils ne faisaient ugage de l'or et do
l'argent que pour en ornementer leurs armes. — Cet usage des Asiatiques,,
notamment des Perses, de se faire ainsi accompagner de leurs familles et
do leurs serviteurs à la guerre, grossissait considérablement leurs ar-
mées, où le nombre des non combattants excédait souvent de beaucoup ce-
lui des combattants, ainsi que ce fut également le cas lors des invasions
des Barbares dans les derniers siècles de l'Empire romain. Cela ralentissait
leur marche, compliquait leur ravitaillement, mais n'influait guère sur le
gain ou la perte d(^ la bataille, parce qu'on combattait toujours de front,
sans jamais manœuvrer; aujourd'hui la chose serait impossible. Par contre
toute défaite sérieuse se transformait alors en un véritable désastre, ainsi
qu'il arriverait immanquablement aussi en ces temps-ci, à qui se ferait
suivre de pareils impedimenta.
34, Samnites. — De 343 à 290. Ces peuples ne se faisaient cependant pas
remarquer par leur luxe et l'affirmation de Montaigne à leur sujet est ha-
sardée; ils étaient surtout adonnés à la vie pastorale et à la guerre; comme
caractéristique, les filles les plus belles, les plus vertueuses et les plus riches
étaient chez eux le prix de services rendus à la patrie.
35, Antiochus. — Aulu-Geixe, V, 5. Après avoir repris aux Égyptiens des
provinces perdues par ses prédécesseurs et conquis l'Asie Mineure, Antio-
chus le Grand, roi de Syrie, était passé en Grèce, quand les Romains, qu'il
avait indisposés en donnant asile à Annibal, appelés par les vaincus à leur
secours, le battirent auxThermophyles(191) ot, l'année suivante, à Magné-
sie (Asie Mineure).
522,
3, Battaille. — Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens.
10, Vitellius. — Plutarque, Ollion, 3. Ou plutôt à ses lieutenants Cecina et
Valons qui commandaient en son absence et gagnèrent pour lui la bataille
de Bébriac (69), que les troupes de son adversaire s'étaient difficilement
décidées à accepter et après laquelle Othon se donna la mort. C'est en vi-
sitant ce champ de bataille, quelques jours après le combat, qu'il prononça
ces horribles paroles : « Le corps d'un ennemi mort sent toujours bon. »
26, Meslée. — Cette question qui pouvait avoir sa raison d'être jadis, alors
que le corps à corps était à peu près l'unique mode de combat, ne se pose
plus aujourd'hui où l'action se livre la plupart du temps à des distances
telles que l'on se distingue à peine, si bien que parfois amis et ennemis
se prennent les uns pour les autres, agissent en conséquence et n'arrivent à
se reconnaître que lorsque le mal est fait.
524,
I, lournée. — Plutarque, Pyrrhus, 8; le texte grec porte Mégaclès. — En
278, à la bataille d'Asculum. Ayant observé qu'il était l'objet d'attaques
poi'sonnelles de l'ennemi, Pyrrhus avait donné son manteau et ses armes à
Mégaclos, un de ses amis, dont lui-même avait pris .l'armure. Ces attaques
se poursuivant, Mégaclès, qu'on prenait pour le roi, finit par succombei-, ot
la nouvelle de la mort du roi se répandant, faillit compromettre le succès
de la journée : l'ardeur des Romains s'en accrut, tandis que les siens s'en
trouvaient découragés, ce qui amena Pyrrhus à se multiplier en combat-
tant à découvert pour que chacun fût à même de constater qu'il existait
encore. V. I, 494 et N. Italie.
3, Particulière. — Nelson, au combat de Trafalgar (1805), paré de toutes
ses décorations, était facilement reconnaissable. — Henri IV se distinguait
également bien au milieu des siens : « Si vous perdez vos enseignes, cor-
nettes ou guidons, ralliez-vous à mon panache blanc, leur disait-il, à la
bataille d'Ivry (1.590); vous le trouverez toujours au chemin de l'honneur et
de la victoire. »
4, Gilippus. — DioooRE de Sicu.e, Xlll, 33. — Ce qualificatif de grand attri-
bué à Gylippe ne s'explique guère, à moins que ce ne soit par ironie. A la
F. 408 ESSAIS DE MO^NTAIGNE.
vérité, il battit les Athéniens à Syracuse, mais condamné à mort pour s'être
approprié une partie des contributions de guci're qu'il devait transporter
à Sparte, il fut contraint de s'expatrier pour échapper au supplice. Son
père, Cléarque, s'était trouvé dans le même cas. En dehors de cela, dit Plu-
tarque, tenus tous deux pour d'excellents hommes (V« siècle).
5, Pbarsale. — Plutarque, Pompée, 19. — L'an 48. César y remporta sur
Pompée une victoire décisive qui fut bientôt suivie du meurtre de ce der-
nier en Egypte, où il allait chercher asile. — César, De Bello civ., III, 17,
blâme aussi Pompée de la faute qui lui est reprochée ici.
21, Haleine. — A l'époque actuelle où l'armement est tout autre et où, au
combat, on manœuvre beaucoup plus que par le passé, l'offensive surex-
cite le soldat, accroît son moral, lui masque ses pertes, est dans le cas de
surprendre l'ennemi, de faire que ses réserves immobilisées ou retardées
n'arrivent pas à temps, l'empêchent de modifier, comme il conviendrait,
son ordre de bataille. — La défensive-offensive qui consiste à laisser venir
l'adversaire se briser contre une position favorable, dont les avantages na-
turels ont pu encore être accrus par les travaux qu'on a pu exécuter, puis
à prendre à son tour l'offensive contre lui, quand il est épuisé, est théori-
quement ce qu'il y aurait de mieux, si, à la guerre, on était maître des
événements. Mais l'attaque se produit si souvent dans une direction autre
que celle où on l'attend, l'offensive est si difficile à reprendre au moment
précis où il faudrait qu'elle se produise, que ce procédé est inférieur à l'of-
fensive pure et simple. — Quant à la défensive de parti pris, sans la ferme
résolution de passer à l'offensive en cours d'action, elle a grande chance
d'insuccès, et, dans les cas les plus favorables, ne mène à rien.
Bien des facteurs, du reste, entrent en ligne de compte pour décider de
l'attitude à prendre, alors même qu'elle n'est pas imposée, entre autres par
les effectifs dont on dispose, l'état moral des troupes, les conditions de
réapprovisionnement; d'une façon générale, le mauvais temps favorise la
défensive et est préjudiciable à l'offensive : un terrain facile et découvert
également, c'est l'inverse si le terrain est coupé et couvert, sous réserve
cependant qu'il ne soit pas tellement difficile qu'on ne puisse s'y mouvoir
et que la défense n'ait eu le temps d'atténuer les inconvénients qu'il pré-
sente pour elle, par des travaux appropriés.
Enfin, il esta observer qu'aujourd'hui, avec la puissance et la vitesse du
feu de l'infanterie, il est presque impossible de donner, en ayant chance
de succès, l'assaut à une ligne ennemie qui déjà n'a pas été notablement
désorganisée par celui auquel elle-même a été en but, pendant un temps
plus ou moins long, en vue de la préparation de l'attaque.
25, Perses. — A la bataille de Cunaxa (401), entre Artaxerxès II dit Memnon,
roi des Perses, et Cyrus le Jeune, son frère, qui voulait le détrôner et qui y
périt, tué de sa propre main, tandis que les Grecs, qu'il avait pour auxi-
liaires, remportaient pour lui la victoire, que sa mort rendit stérile, les
obligeant, pour rentrer, dans leur pays, à cette retraite célèbre connue sous
le nom de retraite des Dix mille. V. N. I, 396 : Pais.
31, Trait. — Xénophon, Anabase, I, 8.
33, Sus. — Plutarque, Préceptes du mariage, 34. — Ce principe est encore
vrai, mais son application délicate ; et seul peut espérer réussir qui sait
apprécier sainement le pour et le contre au moment même de l'exécution.
526,
1, D'eslire. — C.-à-d. dans le cas de choisir.
2, Terres. — C'est à ce dernier parti qu'il s'arrêta. Charles-Quint revenait
d'Afrique, et François I" avait profité de son éloignement pour renouveler
ses tentatives sur le Milanais. L'empereur entra en Provence avec 50.000 h.
Le connétable de Montmorency, chargé de lui résister, fit le vide autour de
lui, détruisant tout dans le pays, attaquant ses convois, si bien que l'armée
impériale, en proie à la famine, dut lever le siège de Marseille et repasser
la frontière; son état d'épuisement fut tel, qu'ai'rivé à Nice, Charles-Quint
conclut une trêve de dix ans, qui, de fait, n'en dura que six (1536).
NOTES. LIV. I, CH. XLVII. VOL. 1, PAG. 526. F.409
6, Gast. — Desgast, comme portent les éditions antérieures à 1588.
7, Faisant. — L'habitant du pays, la population.
23, Est-ce. — Quoi qu'il en soit, toujours est-il que le roi se décida à rappe-
ler. — Tout ce qui suit est tiré 'presque mot pour mot d'un discours que
François 1" tint en conseil et qui est rapporté par du Bellay, VI.
26, Planté. — Abondance, du latin plenitas, d'où viennent plein, plénitude.
528,
1, Party. — Attendre l'ennemi chez soi, peut être avantageux quand le
territoire qu'on cède ainsi est pauvre et vaste, que l'ennemi ne pourra }'
trouver facilement à vivre, que ses lignes de communication s'allongeront
outre mesure, comme en Russie en 1812, ou encore que, de peu de ressources,
la population y est par surcroît fanatisée comme en Espagne en 1808; dans
le cascontraii'e c'est presque toujours une faute. En 1536, la Provence était
peu riche, et en outre elle ne mène à rien ; de plus, à cette époque toutes
ses villes étaient fortifiées et en état de résister aux moyens d'attaque d'a-
lors. — Mais on n'est pas toujours libre d'agir comme on le voudrait.
Aujourd'hui, il faut s'attendre plus que jamais à voir les hostilités éclater
sans déclaration de guerre préalable, comme ont eu lieu en février 1904 les
attaques simultanées des Japonais contre Port-Arthur et Tchemulpo; et,
étant donné la rapidité avec laquelle on peut entrer en opérations, on est
exposé d'un moment à l'autre, en pleine paix, à une invasion que rien ne
faisait prévoir alors que déjà elle s'est produite. En présence de l'intérêt
qu'il y a à n'être point surpris de la sorte, à rendre impossible toute tenta-
tive de cette nature qui trouble la mobilisation, stérilise une partie de vos
ressources en hommes et vous enlève toutes autres que présente le terri-
toire envahi, causant en outre un effet moral désastreux dans le pays tout
entier; quand on a une frontière, comme notre frontière de l'Est, ainsi me-
nacée de l'irruption soudaine de 111.000 honîmes, 10.000 sabres, 888 pièces
d'artillerie dont plus de 150 de grosse artillerie (obusiers de 150 et mortiers
de 210) capables d'avoir raison de nos forts les plus solidement construits,
à laquelle nous ne pouvons opposer que 52.000 hommes, 8.(X)0 sabres et
388 pièces d'artillerie de petit calibre (165 bataillons, 72 escadrons, 148 bat-
teries à effectifs renforcés contre 104 bataillons, 68 escadrons, 89 batteries
à effectifs réduits), au total moitié moins; que de plus la forme de notre
gouvernement ne nous permet pas de la prévenir et qu'elle ferait tomber,
sans coup férir, dès la première heure entre les mains de l'adversaire une
ville aussi considérable que Nancy et un territoire aussi populeux et riche
que ce qui nous reste de la Lorraine, semblable éventualité est à prévoir et
le devoir est de parer à cette situation, en augmentant le nombre des uni-
tés de combat que nous avons sur cette frontière, en portant et maintenant
constamment ces unités à leurs effectifs de guerre, et construisant autour
de Nancy quelques ouvrages non pour en faire une place forte, mais pour
la mettre, vu la proximité de la frontière, à l'abri d'un coup de main. — Pour
Nancy, c'est uniquement affaire d'argent ; pour le relèvement de nos forces,
il faudrait supprimer nombre de nos garnisons de l'Ouest et du Sud-Ouest
et réorganiser en partie notre état militaire en réduisant à deux dans les
régiments d'infanterie des corps d'armée de l'intérieur le nombre des ba-
taillons, en substituant aux brigades de cavalerie de corps de simples ré-
giments, réduisant d'un groupe les régiments d'artillerie de corps, et, avec
les économies en hommes, chevaux, bataillons, escadrons et batteries ainsi
réalisées, renforcer les effectifs des troupes de l'Est et augmenter le nombre
de leurs unités de combat. Il faut, en un mot, placer à demeure sur cette
frontière le tiers, la moitié si le tiers ne suffit pas, de notre armée du temps
de paix, ne laissant à l'intérieur que des embryons qui ne prendront corps
qu'à la mobilisation, par l'incorporation des réserves. Le fera-t-on? Jamais,
nous sommes trop veules pour cela; des raisons de politique intérieure
interviendront encore, comme toujours :'on fera sonner bien haut les dé-
penses résultant de la construction de nouveaux casernements; les engage-
ments pris vis-à-vis des localités auxquelles on enlèverait ou dont on dimi-
F.410 ESSAIS DE MONTAIGNE.
nuerait los garnisons; on redoutera leur mécontentement et les consé-
(|uences que cola peut avoir pour leurs élus du moment. Ce sera comme
pour les sous-prefectures : tout le monde est d'accord sur l'inutilité d'un
aussi grand nombre, mais personne ne concède que la sienne soit de celles
qui sont à supprimer et toutes demeurent.
9, Sien. — Pour obliger Annibal à évacuer l'Italie méridionale qu'il occu-
pait depuis quatorze ans,-Scipion l'Africain passa en Afrique. Carthage me-
nacée rappela ses troupes d'Italie, et bientôt après, la deuxième guerre pu-
nique se terminait par la victoire de Zama que Scipion remportait .sur An-
nibal (202).
11, Contraire. — La Sicile était peuplée de colonies grecques.de race do-
rienne et ionienne, les unes clientes de Sparte, les autres d'Athènes. Pen-
dant la guerre du Péloponnèse, les premières profitèrent des embarras de
celle-ci pour opprimer les secondes ; aussi les Athéniens, qui avaient i'ar-
rière-pensée de s'annexer la Sicile, n'hésitèrent-ils pas à intervenir quand,
en 421, venant de signer avec Sparte une trêve de cinquante ans, ils eu-
rent leurs coudées franches; mais cela ne leqr réussit pas. V. N. I, 524 :
Gilippus; N. II, 424 : Sicile.
12. Soy. — Agathocle, assiégé dans Syracuse par les Carthaginois, équipa
une flotte, en déroba la sortie à ses ennemis, aborda en Afrique, brûla ses
vaisseaux pour mettre ses soldats dans la nécessité de vaincre, et, par cette
diversion, obligea Carthage à rappeler ses troupes de Sicile (310). — Héra-
clius, empereur d'Orient, se trouva également bien de quitter Constanti-
nople menacé par les Perses, pour aller porter la guerre chez eux (622).
28, Engage... aussi. — Var. des éd. ant. : 7i'est pas plus incertaine et téméraire
que.
CHAPITRE XLVIIl.
530,
4, Romans. — C.-à-d. les auteurs qui écrivent en roman. La langue romane
a pris naissance au moyen âge; elle était alors dénommée « le nouveau lan-
gage », et est, à proprement parler, l'origine de la langue française.
5, Equos. — Les chars romains s'attelaient généralement à trois chevaux de
front : un dans les brancards, funalis ou d'attelage, les deux autres en de-
hors, à droite et à gauche; ces deux derniers, ou l'un d'eux seulement,
('taient parfois montés. Montaigne appelle celui de droite dextrarius; ce
mot ne se trouve que chez certains auteurs du moyen âge. — Les desul-
lorii étaient des chevaux de selle accouplés, desquels' on passait, on sau-
tait, comme l'indique leur nom, de l'un sur l'autre.
9, Gendarmes. — Le gendarme était anciennement l'homme de guerre, à
cheval, armé de toutes pièces et accompagné de ses suivants; ici ce mot
désigne les cavaliers numides.
23, Coustillier. — Valet qui portait la coustille (sorte d'épée ou de long poi-
gnard) et se tenait près de l'homme d'armes.
24, Maistre. — Hérodote, V. — La manière de faire du cheval d'Artibius
était connue, et l'écujer d'Onésilus l'avait rassuré en lui disant qu'il se
chargeait de l'animal. Le fait se passait en 493, au début de la première
guerre médique; Artibius fut tué, mais dans ce même combat périt Onésilus.
28, Vray. — Ce cheval s'appelait Savoye ; c'était, dit Philute de Comines, le
plus beau cheval de son temps; il avait 29 ans; un poète de l'époque lui a
consacré des vers. A cette même bataille de Fornoue O'I^S), le ©ardinal
archevêque de Lyon demeura constamment près du roi,, à cheval, la mitre
eh tête et la croix à la main.
35, Bons hommes de. — Var. de 80 : bien à.
532,
2, Carrière. — Faire prendre carrière à un cheval, c'était, en langage des
gens de cheval du temps, le faire galoper à toute vitesse. — Pi.ltauqif..
César, 5,
NOTES. LIV. 1, CH. XLVIII. VOL. I, PAG. o32. F.4H
7, Toreau. — D'où son nom « Tète de taureau ••. Alexandre était de pre-
mière jeunesse quand ce cheval vint en sa possession, lui-même le dompta et
dressa; l'animal ne se laissait monter que par lui et à plusieurs reprises il
sauva la vie à son maître en le tirant de la mêlée; il mourut vers 17 ou
18 ans, de fatigue suivant les uns, suivant d'autres de blessures reçues à la
bataille livi-ée contre Porus. Alexandre le fit enterrer et sur l'emplacement
éleva une ville qu'il appela Bucéplialie. Bucéphale avait été acheté treize
talents (65.000 fr.); on peut rapprocher ce prix de ceux payés de nos jours
pour un cheval de course, Gladiateur, et un taureau, Duke ofConnaugt, ven-
dus aux enchères le premier 200.000 fr., le second 118. 125 fr. Disons encore
qu'il y a un siècle et demi, en 1764, d'Eclipsé, le père de tous les chevaux
pur sang anglais, il a été refusé 300.000.
12, Venus. — Scktone, César, 61.
15, Platon. — Lois, Vil.
15, Pline. — Liv. XXVIII, 1.
17, Xenophon. — Cyropédie, IV, 3.
17, Loy. — Add. des éd. ant. : de Cyrus.
18, lustinus. — Liv. XLl.
29, Combat. — Quand le sort des armes était douteux, dit Suétone, Césdr,
60, il renvo3'ait tous les chevaux, à commencer par le sien, afin d'imposer
à ses soldats l'obligation de vaincre, en leur ôtant les moyens de fuir. —
Dans les temps modernes, les régiments de dragons ont été créés dans ce
double but de pouvoir combattre soit à cheval, soit à pied; actuellement,
toute la cavalerie (les cuirassiers exceptés, fiui n'ont d'autre raison d'être
que la gloriole des potentats du jour de les voir leur servir d'escorte) est
dressée en vue de semblable utilité.
29, Tite-Liue. - Liv. IX, 22.
33, Grand Seigneur. — Appellation sous laquelle on désignait le sultan de
Constantinople.
534,
1, Anglois. — La guerre de Cent Ans, commencée en 1337 sous Philippe VI
de Valois, à l'occasion de la protection accordée par Edouard 111, roi d'An-
gleterre, à Robert, comte d'Artois, condamné par les Pairs de France à la
perte de son comté, entremêlée de trêves, et terminée après de nombreux
combats et fortunes diverses par l'expulsion hors de France, en 1453, des
Anglais qui, au début, y possédaient de nombreux fiefs, l'Anjou, la
Guyenne, etc., représentant à un moment beaucoup plus que ce qui de-
meurait à la France elle-même.
1, Assignées. — Ayant lieu pour ainsi dire de commun accord, d'où le
nom de batailles rangées où chacun des adversaires avait pris ses disposi-
tions essentielles de combat avant le commencement de l'action; la guerre
de Cent Ans en fournit de nombreux exemples cités par Froissart. Ce qui
jadis était presque de règle, est devenu aujourd'hui l'exception; on cher-
che surtout maintenant à surprendre l'ennemi, et la victoire s'obtient plus
par les mouvements subséquents opérés une fois l'action engagée, que par
suite des dispositions préliminaires conduites fréquemment davantage en
vue de tirer profit de la victoire que de la remporter.
5, Xenophon. — Cyropédie, IV, 3. — Chrysanthe, seigneur perse, fut, auprès
de Cyrus, le promoteur de l'usage qui s'étabht chez ce peuple, de ne se dé-
placer qu'à cheval, au point de trouver déshonorant d'aller à pied, sauf le
cas de force majeure.
19, Respondre. — C-à-d. les armes les plus courtes sont les meilleures, ce
que corroborait cet adage du temps: « A vaillant homme, courte épée. »
Cette assertion n'est vraie que pour le combat corps à corps; exacte pour
les guerres anciennes, elle ne l'est plus pour les guerres actuelles, où cette
sorte de combat se fait de plus en plus rare.
22, Rouët. — L'un des moyens employés à cClte époque pour rinflammation de
la poudi'o dans les armes à feu portatives, consistait en un silex (pierre à fusil),
dont on liiait des étincelles par l'action d'une roue en acier, dite rouet,
F.412 ESSAIS DE MONTAIGNE.
29, Nostres. — L'auteur avait vraisemblablement l'intention de traiter ulté-
rieurement en détail cette question des armes; il ne l'a pas fait et s'est
borné à cette addition insérée dans l'édition de 1595 qu'on trouve quelques
lignes plus bas, commençant à ces mots : « Celle de quoy les Italiens - pour
se terminer à ceux-ci : « representoient de bien près nos inuentions ».
32, L'vsage. — On ne prévoyait pas à ce moment à quel degré de puissance
et de rapidité de tir en arriveraient canons et fusils; nul doute qu'aujour-
d'hui Montaigne ne penserait pas ce qu'il dit de leurs effets et de leur
abandon. *
32, Italiens. — Les Italiens des temps anciens, avant même la fondation de
Rome, ainsi qu'il ressort de la citation de Virgile, qui se rapporte à des
' événements antérieurs à cette fondation et fait expressément mention de
cet engin de guerre.
34, laueline. — Sorte de trait pouvant être lancé à la main, qui se distin-
guait du javelot par une plus grande longueur de hampe ou hante, comme
on disait et écrivait alors.
536,
14, Destinassent. — Cette adresse évoque le souvenir d'Aster, habile archer
qui, au siège de Méthone (Alacédoine), creva l'œil droit de Philippe de Ma-
cédoine avec une flèche sur laquelle était écrit, dit-on : « Aster, à l'œil
droit de Philippe. » A quoi le roi répondit en en faisant lancer dans la
place une autre portant : « Si Philippe prend la ville, Aster sera pendu » ;
ce qui eut lieu (353). — Ou encore, celle de Guillaume Tell abattant d'une
flèche une pomme placée sur la tête de son fils (1307), fait discuté qui se
retrouve également dans les légendes du Danemark.
17, Asie. — Les Galates, mélange de Gaulois et de Grecs qui, en l'an 278,
envahirent l'Asie et s'établirent dans la partie N. de l'Asie Mineure.
24, Retraitte. — Effectuée après la bataille de Cunaxa. V.N. I, 396 : Pais; I,
524 : Perses.
28, Armé. — Xénophon, Anabase, V, 2.
28, Engeins. — Catapultes qui lançaient des pierres énormes et des pièces
de bois dont la tète était armée de fer et dont la longueur atteignait jus-
qu'à 15 pieds (5 mètres). Euen, Var. Hist., VI, 12, en attribue l'invention à
Denys; Diodore de Sicile, XIV, 42, se borne à dire qu'elle fut inventée de
son temps à Syracuse; Pline, Vil, 56, dit que ce furent les Syro-Phéniciens
qui s'en servirent les premiers.
31, Inuentions. — Au temps de Montaigne, les armes à feu commençaient à
faire leur apparition. L'arquebuse n'excédait guère en portée l'arbalète,
une centaine de mètres, sa justesse était moindre, elle lui était encore plus
inférieure sous le rapport de la rapidité du tir; le canon avait un effet no-
tablement supérieur aux balistes et ses boulets de pierre portaient à plu-
sieurs centaines de mètres, un kilomètre, tandis que les quartiers de roche
que lançaient celles-ci allaient à peine à cent ou cent cinquante mètres. —
Aujourd'hui le fusil, sous un angle de 32°, porte à 3.600'"; avec la hausse
de 400"°, il atteint de 0'" à 400'" tout homme debout ou à genou ; l'écart à
cette distance n'est que de 0"',12 (à 800'", de 0"',30); sa balle, à cette même
distance de 400"', pénètre de 0'",60 dans de la terre, traverse une lam-
bourde de sapin de même épaisseur et une plaque de fer de 0'",005; la vi-
tesse du tir peut atteindre 12 coups pai" minute... Le canon de campagne,
du calibre de 0'",075, a sous un angle de 17 une portée de 6 kilomètres;
son écart à 2 k. est de 10" ; à la même distance son obus à mitraille tra-
verse sans se rompre un mur de maçonnerie de 0°',50 d'épaisseur; indépen-
damment de ses fragments d'enveloppe, il projette en éclatant 180 balles qui,
à 200"' du point d'éclatement, sont encore meurtrières; sa vitesse de tir
peut atteindre seize coups par minute. Les pièces de la marine, pour ne
prendre que le canon de 0,305, et il en est de calibre supérieur, ont
une portée qui atteint 12 kilomètres; le Variai, lors de la guerre russo-
japonaise, a été coulé à la distance de 6 kilomètres; leurs projectiles per-
cent des cuirasses d'acier de 0'",28 d'épaisseur et ils peuvent tirer jusqu'à
NOTES. LIV. I, CH. XLVIII. VOL. I, PAG. 536. F.413
trois coups en cinq minutes. — Quant aux effects de destruction des engins
dont usèrent les anciens, si ingénieusement conçus et si puissants qu'ils
aient été, peuvent-ils être comparés pour leure effets aux énormes projec-
tiles incendiaires de nos jours, qui, chargés de cent à cent cinquante kilos
de mélinite (la mélinite est six à huit fois plus brisante que la poudre), qui
écrasent les voûtes de maçonnerie de plusieurs mètres d'épaisseur lés plus
solidement construites, formant en éclatant des entonnoirs qui ont jusqu'à
cinq ou six mètres de profondeur et dix ou douze de diamètre; ou à ces
torpilles dont une seule suffit pour anéantir en quelques minutes ces colosses
que sont les cuirassés d'escadre dont quelques-uns jaugent jusqu'à 18.000
tonneaux, portent un millier d'hommes et coûtent trente millions et au delà !
32, Sur sa mule. — Var. des éd. ant. : à chenal.
33, Paris. — El ailleurs, aj. les éd. ant.
538,
1, Gascons. — Monstrelet, I, 66; il y joint les Lombards.
4, Mots. — Add. des éd. ant. : le ne sçay quel maniement ce pouuoit eslre, si
ce n'est celuy de noz passades (les carrousels de nos jours).
4, Suéde. — César, De Bello Gall., IV, 1. — Il s'agit des Suèves, peuple de
Germanie, devenus plus tard les Souabcs. Les Bretoas, dit César quelques
lignes plus bas, avaient un usage semblable.
11, Autresfois. — Dans son voyage en Italie, en 1581, à Rome, du fait d'un
Italien qui avait été longtemps esclave en Tt^rquie.
19, Alphonce. — Alphonse XI, roi de Léon et de Castille.
2"2, D'argent. — Le marc de Castille était de 230 gr., d'une valeur par suite
de 46 fr. de notre monnaie, abstraction faite de la plus-value de l'argent
à cette époque.
28, Mules. — En Judée, au temps des Hébreux, l'àne servait de monture
aux personnages les plus considérés, c'était d'ailleurs la mieux appropriée
à la configuration accidentée du pays; c'est sur un âne que Notre-Seigneur
fit à Jérusalem l'entrée triomphale que l'Église célèbre le dimanche des
Rameaux. — Par contre, dans les pays musulmans où le Juif est un objet
de mépris, monter un cheval ou un mulet lui sont interdits; l'âne est la
seule monture qui lui soit tolérée. Dans ces mêmes pays, il n'y a pas long-
temps encore, un chrétien ne pouvait davantage aller à cheval.
28, Xenophon. — Cyropédie, III. 3.
540,
2, Metellus. — En 118. « Boire leur urine et celle de leurs chevaux ne leur
réussit pas; ils excitaient par là leur soif plus qu'ils ne l'apaisaient, et cela
leur occasionna des souffrances que le vainqueur lui-même ne les eût pas
contraints à endurer. Valère Maxime, VII, 6.
9, Indes. — Les Indes occidentales; nom donné à l'Amérique lors de sa dé-
couverte.
13, Viandes. — Vivres, du latin vivandus, qui sert à vivre. V. N. III, 550.
10, Deçà. — Los Indes orientales; l'Hindoustan actuel,
20, Seul. — Akriex, Hist. Ind., 17.
23, Rutilianus. — Ou plutôt RuUianus, Tite-Live/ VII, 30. — En 322, Papi-
rius Cursor étant dictateur. L'idée première d'enlever leurs brides aux
chevaux vint de L. Cominius, tribun militaire. Ce combat, où les Romains
eurent l'avantage et où périt, dit-on, 20.000 ennemis, fut livré par Fabius,
' maître de la cavalerie, en l'absence et contre les ordres de Papirius Cursor
qui, à l'exemple de Manlius, voulut punir cette désobéissance; et, malgré
son nom et sa victoire, Fabius eût payé de mort ce succès, si Rome, toute
entière, ne s'était omploj'ée à fléchir le dictateur.
34, Transcurrerunt. — Tite-Live, XL, 40. — L'an 180; cette mesure pro-
cura cette fois encore le résultat attendu, la cavalerie romaine rompit les
Celtibériens contre lesquels s'était brisée l'infanterie et fixa la victoire en
faveur de Rome. — A Waterloo, en 1815, la cavalerie anglaise chargeant
la nôtre lors de notre première attaque du plateau de Mont Saint-Jean,
avait aussi enlevé, dit-on, les gourmettes à ses chevaux.
F.414 . ESSAIS DE MONTAIGNE.
542,
1, Délices. — LcsTarlares font, avec le lait de jiniicnt fermenté, une boisson
enivrante appelée kiimisse, qu'on a employée parfois en Europe comme
médicament.
:3, Langue. — Cette servitude, qui avait commencé vers le milieu du
\ur siècle, se maintint jusque vers la fin du xv.
7, Vitale — Dans la campagne de Russie de 1812, on a vu des blessés se
réfugier dans l'intérieur de chevaux morts.
8, Tamburlan. — En 1402, à la bataille d'Ancyre (auj. Angora), en Asie
Mineure, où Bajazet, sultan de Constantinople, fut battu et fait prisonnier
par Tamerlan I\Iogol qui, dit-on, mais le fait semble controuvé. l'enfei-ma
dans une cage de fer et le traîna ainsi à la suite de ses hordes. Dans cette
bataille, qui dura trois jours et deux nuits, un million d'hommes se com-
battirent et 240.000 furent mis hoi"s de combat. — Bajazet était borgne;
Tamerlan, par suite de blessures reçues à la main et au pied, était manchot
et boiteux.
8, Belle erre. —En grande hâte; on retrouve ce mot avec ce sens dans une
ballade de La Fontaine :
#
« Et je maintiens, coranie article de foi.
Qu'en débridant matines à grand'erre.
Les Augustius sont serviteurs du roi. »
16, Prodige. — Un mauvais présage pour lui. Hérodote, I, 78.
18, Oreille. — Montaigne ne parle que des crins et de la queue; contre son
habitude, il se tient sur la réserve; pour être exact, il eiit dû ajouter: et
est propre à la reproduction.
18, Montre. — C.-à-d. et on n'en admet pas d'autres dans les montres ou
revues.
21, Triomphe. — Plut arque, Nicins, 10. V. N. I, 528 : Contraire.
24, L'autre. — Quinte-Curce, VII, 7. ,
30. Second. — Premier écuyer du roi; Montaigne, lors de son premier
voyage à Paris, vers 1555, a pu le voir, dans l'exercice de ses fonctions,
donnant aux fds de Henri II leur leçon d'équitation, et peut-être est-ce le
souvenir qu'il en a conservéqui lui a fait écrire au ch. Vil du liv. III (III,
326) : « Vn chenal qui n'est ny flateur ny courtisan, verse le fils du Roy par
terre, comme il feroit le fils d'vn crocheteur. »
35, Estrier. — Vers 1840, en Algérie, le commandant de Bonnemain, alors
sous-officier de spahis, accomplit un tour de force équestre analogue, mais
plus étonnant encore. Élevé depuis l'âge de onze ans parmi les indigènes,
même aux yeux des Arabes, c'était un cavalier émérite. Cheminant un
jour, avec une troupe nombreuse, dans la plaine des Haractas, un lièvre
fut aperçu. Si Mustapha, c'était le nom qu'il avait reçu des indigènes, se
lança à sa poursuite, le suivit dans tous ses tours et détours, le força à la
course et sans s'arrêter ni descendre de cheval, vidant d'un pied l'étrier et
y conservant l'autre, il le saisit et l'enleva à la main.
36, Viuoit. — C'est ce même Italien dont il est question plus haut. V. N. I,
538 : Autresfois.
38. A tours. — Tour à tour.
544.
8, Reaies. — Petite pièce de monnaie d'Espagne, en argent, valant environ
25 centimes.
CHAPITRE XLIX.
14. Laelius. — Les éd. ant. port. : Scipion.
546,
16, Sagos. — Rétablir cette citation ainsi qu'il suit : Sinistras sagis... — Le
sagum était l'habit militaire des Romains; en paix, ils portaient la toge.
NOTES. Ll\ . I, (.H. XLIX. VOL. I, PAG. 546. F.415
Chez les Gaulois, c'était le vêtement de tout temps; nos paysans le portent
encore sous le nom de saye ou blouse.
18, Respondre. — Cksak, De Bello Gafl., IV, 5, dit que les Gaulois aiiêtaient
ceux qu'ils rencontraient, non pour leur demander qui ils étaient, mais
pour s'enquérir des nouvelles; — on peut ajouter que cela leur était et
est encore commun avec bien d'autres; ce qui l'était moins et explique
cette remarque de César, c'est que chez eux il était interdit de répandre
des nouvelles dans le public, et cependant le journal n'était pas chose
inconnue à ce moment. Il existe trace de journaux, en quelque sorte of-
ficiels, en Egypte, 2(X)0 ans avant notre ère; ils publiaient également tous
les laits intéressants et notamment les scandales. Les Romains eurent d'a-
bord les Annales tenues par h^s pontifes, et qui, du temps dq César, firent
place aux Actes diurnes ou .lournaux, lesquels comprenaient à peu près
■ tout ce qu'on trouve dans les feuilles publiques de nos jours, partie of-
ficielle et chronique. Ils prirent fin avec l'empire, pour renaître au quin-
zième siècle, eu Italie, où ils se vendaient une « gazetta », petite pièce de
monnaie, d'où le nom que Théophile Renaudot donna à sa feuille quand il
la créa en 1631. V. N. I, 390 : Nécessité.
21, ïambes. — Sénèque, Episl. 86.
28, Front. — Les femmes du temps de Montaigne s'ép'ilaient probablement
le front, afin d'en augmenter la hauteur. '
30, Propres à cela. — Add. des éd. ant. : qui seruoyent à cela de faire tom-
ber le poil. — L'éd. de 80 aj. : quHls appelloient « psilotrum ».
37, Caton. — Plutarque, Caton d'Utique, 15.
39, Assis. — Les Grecs et les Romains dînaient assis, parce que ce repas était
fort court. Au souper, qu'ils prolongeaient beaucoup, étant alors débar-
rassés de leurs affaires, à l'exception des femmes qui étaient toujours as-
sises, ils mangeaient ordinairement étendus sur des sortes de divans, les-
quels, lorsqu'on était nombreux, étaient juxtaposés autour de la table, dont
un côté demeurait libre pour le service. Sur chacun de ces lits ou di-
vans, prenaient généralement place trois personnes; on s'y étendait la têle
du côté de la table, la poitrine surélevée par des coussins, les pieds à
l'opposé,' en contrebas. On s'appuyait sur le coude gauche et on se servait
avec la main droite; on pouvait ainsi facilement poser la tète sur la poi-
trine de son voisin de gauche, ainsi que fit saint Jean sur le sein de Jésus-
Christ lors de la cène. De nos jours, les Arabes en agissent encore ainsi, sauf
que, les divans n'existant pas, on s'étend à même le sol sur des tapis ou
des nattes et que l'élévation de la table est réduite en conséquence.
548,
8, L'autre. — Diogéne Laerce, VI, 89.
9, Table. — Ab ovo usque ad mala (depuis l'œuf jusqu'à la pomme), dit Ho-
race, Sat., l.
Il, Obscœne. — Sa!, malpropre, répugnant en raison de l'usage qui en était
fait.
16, Estoufta. — Sénèque, Epist. 70.
16, Catze. — De l'italien cazzo, pénis, membre viriL
"^0, Passans. — Dans toutes les grandes villes, en France, il est actuellement
pourvu à cette nécessité; avant, c'était une servitude des couloirs d'entrée
des maisons, dont nombre comportaient des aménagements à cet effet.
C'est à M. le Préfet de police de Rambuteau, dont longtemps ils ont gardé
le nom, que Paris doit depuis moins d'un siècle environ les édicules dont
certaines de ses rues sont pourvues pour cet objet; mais c'est à l'empereur
Vespasien, dont ils ont également porté le nom. que l'idée première ap-
partient. En les établissant, il les avait frappés d'un impôt et son fils Titus
l'en ayant plaisanté, il lui mit, dit-on, sous le nez, le premier argent en
provenant, en lui disant .• « Sent-il mauvais? » — A Venise, il n'y a pas
encore longtemps, aucune disposition particulière n'existait à cet égard et
en certains endroits se prêtant le plus à la satisfaction de ce besoin, était
parfois tracée sur le mur une croix noire bien apparente avec cette ins-
F.416 ESSAIS DE MONTAIGNE.
cription : Rispetlo (à respecter), que Théophile Gautier, qui narre le fait,
rend plaisamment par cette traduction du vers d'Horace : « Enfants, allez
plus loin; cet endroit estsaci'é », ajoutant que la recommandation est loin
d'être pieusement observée.
20, Trenchans. — Eschançons et trenchans étaient des esclaves dont l'office
était, celui des premiers, de verser à boire; celui des seconds, de dé-
couper les viandes.
550,
1, Nous. — Montaigne estimait ses contemporains inférieurs aux anciens,
en vices et en vertus; était-ce exact? Les hommes semblent à cet égard
avoir été, être et devoir être toujours à peu près les mêmes dans tous
les siècles; et, pour un observateur consciencieux qui. ne se laisse pas
arrêter par les apparences et va au fond des choses, la somme des vertus
et des vices dans un siècle est sensiblement la même comparée à ce qu'elle
est dans un autre siècle. Naioeon.
3, Mal. — La Rochefoucault a exprimé cette même pensée de la sorte :
« Un sot n'a pas assez d'étoffe pour être bon ».
14, Estuues. — Les Romains, du moins dans le courant de la vie ordinaire,
ne prenaient que des bains de vapeur, comme cela se pratique encore dans
les pays orientaux; mais ces bains étaient d'usage journalier, ce qu'ex-
plique le climat, la vie passée continuellement au grand air et les loisirs
de leur existence. Le confort moderne n'avait pas encore introduit chez eux
l'eau et le feu à domicile, d'où, à peu d'exceptions près, la nécessité de ther-
mes ou établissements de bains publics dont les ruines attestent les immen-
ses proportions et la magnificence; entre autres, aux Thermes de Caracalla, à
Rome, trois mille personnes pouvaient se baigner à la fois ; il y avait seize
cents sièges de marbre et de porphyre, et des baignoires de granit. On y
accédait par des portiques somptueux ; à l'intérieur se trouvaient des salles
de conversation, des bibliothèques, des jardins décorés de statues et d'œu-
vres d'art, c'était quelque chose comme les étabhssements thermaux de
nos jours dans certaines villes d'eaux, mais ils étaient publics, à Rome, du
moins pendant l'empire; tout le monde y avait accès et il en existait dans
la plupart des villes. — Les bains sont bien loin d'être aussi en faveur en
France; Louis XIV, dit Saint-Simon, n'en prit jamais que sur ordonnance
de médecin, et en ces derniers temps, il nous a été donné d'entendre une
femme d'âge, venue à Lourdes y chercher la guérison, justifier son ap-
préhension à descendre dans la piscine de la grotte, en disant qu'elle n'a-
vait jamais pris de bain de sa vie. Actuellement on a tendance à y venir;
bains et bains-douches, déjà d'usage courant dans l'armée, s'introduisent
dans les populations, du moins dans celles de quelques grandes villes; des
piscines municipales ont même été créées dans quelques-unes où pour
quinze ou vingt centimes chacun peut se baigner; mais de fait, ce ne sont
encore que de rares exceptions.
14, Hommes. — Jusque sous l'empereur Adrien, les bains des femmes n'é-
taient pas séparés de ceux des hommes.
19, Apollinaris. — Carm. IV, 239.
23, Naulage. — Les éd. ant. port. : voiture. — La question est de peu d'im-
portance ; actuellement on opère de deux façons : généralement on paie
d'avance quand le prix est élevé ou qu'il peut y avoir grande affluence
(chemins de fer, paquebots à destination lointaine, etc.), en cours de route
ou à l'arrivée dans le cas contraire (omnibus, petites voitures, etc.).
28, Nicomedis. — Concubine; littéralement « la ruelle de Nicomède ». Sué-
tone, César, 49. — César, dans sa jeunesse, avait vécu quelque temps à la
cour de ce prince, roi de Bithynie (Asie Mineure), et passait pour avoir
été de la plus grande intimité avec lui, ce qui, en ce temps, était fréquent
et admis; et c'est pourquoi il avait été gratifié de cette épithète dont l'o-
rigine provient de ce que, chez les Romains, la femme au lit couchait
d'ordinaire, ainsi que le dit Montaigne, du côté de la ruelle. V. N. II, 634 :
Nicomedes.
NOTES. LIV. I, CH. XLIX. VOF.. I, PAG. 550. F.417
33, Cbampisses. — Jlalignes, goguenardes; viendrait de « champis » qui, en
Poitou, signifie enfant naturel, comme qui dirait procréé dans les champs,
auquel on attribuait plus de rnalice qu'aux autres.
34, lane. — Janus, le plus ancien roi d'Italie, XV° siècle. Établi dans le La-
tium, il y fit régner la paix. Il avait, à Rome, un temple dont les portes
étaient ouvertes en temps de guerre et fermées en temps de paix et avant
Auguste, elles ne furent closes que deux fois, l'une sous Numa, l'autre
après la première guerre punique. C'est de Janus que le mois de Janvier
passe pour avoir pris son nom.
37, Romaines. — Hérodien, IV, 2, 6.
39, Creu. — Les reines de France portaient jadis le deuil en blanc; Anne
de Bretagne fut la première qui, à la mort de Charles VIII, le porta en
noir. Les Chinois le portent également en blanc et, par exception, en rouge
éclatant, pendant le premier mois, après la mort d'un père ou d'une mère;
les Égyptiens le portaient en jaune: les Éthiopiens, en gris.
CHAPITRE L.
552,
7, Ceux. — C.-à-d. et même de ceux.
15, Entiers. — Les éd. ant. aj. : et à fons de tuue.
■ 17, De cent... descouure. — Var. des éd. ant. : De mille visages qu'ils ont
chacun, l'en prens celuy qui me plaît : ie les saisis volontiers par quelque
lustre extraordinaire et fantasque : i'en trieroy bien de plus riches et pleins
si i'auoy quelque autre fin proposée que celle que i'ay. Toute action est pro-
pre à nous faire connoistre.
21, Inusité. — « Dans la plupart des auteurs, je vois l'homme qui écrit; dans
Montaigne, je vois l'homme qui pense. » Montesquieu.
554,
27, Escbecs. — Le jeu d'échec ayant été inventé, dit-on, par Palamède, lors
de la guerre de Troie, il est possible qu'Alexandre l'ait pi-atiqué;
32, Autre. — Socrate.
556,
9, Friuole. — C'est la même idée déjà exprimée, I, 432.
24, Mérite. — « Il ne faut pas permettre à l'homme de se mépriser tout en-
tier, de peur que, croyant, avec les impies, qiie notre vie est un jeu où
règne le hasard, il ne marche sans règle et sans conduite au gré de ses
aveugles désirs. » Bossuet.
34, Hommes. — Le mot « misanthrope » n'existait pas encore du temps de
Montaigne»
558,
2, Peine. — Pi.utarque, M. Brutus, 3.
4, Face. — Dioc.ène Laekce, II, 95.
(». Fols. — DioGÈNE Laekce, II, 95.
CHAPITRE LI.
8, Paroles. — Ce chapitre a été traduit, vers 1689, en langage de l'époque
par M. DE Pi.ASSAC.
U), Pied. — Ce mot est d'Agésilas. Pi.utarque, Apophth. des Lacédénioniens.
l'î, Thucydidez. — Non l'historien, mais le chef à Athènes du parti aristo-
cratique contre Périclès; frappé d'ostracisme en 444, c'est alors qu'il se
trouvait à Sparte; le fait est rapporté par Pi.utarque, Périclès, 5.
23, Orateurs. — Sextus Empiricus, Adv. Âfath., IL — « Los grands diseurs ne
sont [)as les grands faiseurs », dit un adage.
24, Peuple. — Quintiuien, 11, 16.
25, Flatter. — Dans le Gorf/ias.
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 27
F. 41 8 ESSAIS DE MONTAIGNE.
560,
15, Rudes. — Du latin rudis, ignorant, grossier, qui n'est pas cultivé.
.17, Dit-il. — TriE-LivK, X. 22.
22, Caratte. — D'une illustro famille napolitaine dont la mémoire fut abolie
par le Sénat i-oinain, en 1560, à la suite d'un procès amené par les exac-
tions de quelques-uns de ses membres, procès qui, en 1560, fut revisé et
suivi de la réintégration dans leurs titres et honneurs des survivants,
parmi lesquels le cardinal dont il est ici question, qui personnellement
avait été condamné à une amende de 100.000 écus.
562,
i:l. Macédoine. -— Pi.ltaiique, Paul-Émile, 15. — En 167. Le discernement,
l'attention, l'exactitude qu'apporta Paul-Émile dans les fêtes qu'il donna à la
(irèce, après sa victoire de Pj'dna sur Persée (jeux, sacrifices, festins, fêtes
de toute nature), excitèrent l'admiration à l'égard de cet liommc qui mon-
trait tant de diligence et de soins dans ces détails, et qui, chargé de si
grandes affaires, observait dans les plus petites jusqu'à la moindre bien-
séance. Que nous sommes donc loin ici de cet adage si fort en lionneur
maintenant chez nous : ■< De minimis non curât prselor (le préteur ne porte
pas .son attention sur les détails) », que l'on a si souvent à la bouche, et
qui, exact quand il s'applique à des cas où on ne sait pas faire la part
des nécessités, blâmable quand il constitue des empiétements sur les de-
voirs et attributions d'autrui au lieu de se borner à en être le contrôle,
ne fait dans toutes les autres circonstances que favoriser la paresse des
uns, les abus des autres, au grand détriment des affaires publiques.
18, ApoUidon. — Palais merveilleux qu'éleva, avec le secours de la nécro-
mancie, Apollidon, un des personnages du roman d'Amadis des Gaules.
20, Allégorie. — Métonymie, métaphore, allégorie, sont des termes et figures
de rhétorique.
22, Pellegrin. — Fin, poli, délicat; de l'italien pcUegrlno qui a cette même
signification.
20, Puissance. — C'est ainsi, pai- exemple, qu'à Rome, les consuls étaient les
premiers magistrats de la République; qu'au moj-en âge, c'étaient dans
quelques villes les anciens échevins (conseillers municipaux), dont le man-
dat avait pris fin ; qu'avant la Révolution, on appelait ainsi les juges des
tribunaux de commerce; et qu'actuellement, certains de nos représentants
à l'étranger, soit diplomatiques, soit simplement commerciaux, portent ce
nom .
27, De reproche à. — Les éd. ant. port. : lesmoignage d'vne singulière va-
nité de.
27, Indignement. — Vai'. des éd. ant. : vainement et sans aucune considéra-
tion.
CHAPITRE LU.
564,
2, Carthaginois. — Valèke Maxime, IV, 4, 6. — En 256, alors que, consul,
après avoir battu les Carthaginois en Sicile, il venait de passer en Afrique
et de les battre à nouveau. -
3, Publique. — Au gouvernement.
5, Terre. — Environ trois hectares.
1!), Dehors. — Pi.utarque, Caton le Censeur.^ 3. — Les uns i-egardaient cette
conduite de Caton comme un effet de son avai-ice, les autres comme le
résultat d'un parti pris pour corriger ses concitoyens de leur luxe et les
ramener à la simplicité; on ne saurait cependant excuser qu'il se servît do
ses esclaves comme de bêtes de somme, qu'il les chassât et les vendît quand
ils devenaient vieux. — Cette exagération de sa part fut le point de déj^art
de l'animosité avec laquelle plus tard il poursuivit Scipion. Il avait été
désigné comme son questeur, lorsque celui-ci fut envoyé en Sicile, d'où il
devait passer en Afrique. Voyant qu'il vivait avec magnificence et ])i-odi-
NOTES. I.IV. f, en. LIT. VOL. 1, PAf4. 564. F.419
guait l'argent à ses troupes sans ménagement, il l'en reprit, lui disant que
le plus grand mal n'était pas dans la dépense excessive, mais dans l'alté-
ration de l'ancienne simplicité des soldats, qui employaient en luxe et en
plaisirs le superflu de leur paye. A quoi Scipion répondit qu'il n'avait pas
Ijcsoin d'un questeur si exact; que dans la guerre, il allait à pleines voiles,
devant compte à la République non des sommes qu'il aurait dépensées,
mais des exploits qu'il aurait accomplis. Sur cette réponse. Caton le quitta
dès la Sicile. N. II, 60 : Caton le Censeur.
21, Légation. — L'an 130. VAi.i^:uK Maximk, IV, 3, 13.
23, Vn. — SÉNÈQLE, Conxol. ad Helv., 12. •
25, Romains. — Montaigne détourne le fait du .sens que lui donne Pi.l-
TARQUE, Lcit Gracques, 3, qui, en l'exposant, dit bien qu'une allocation aussi
dérisoire ne fut attribuée à Tiberius Gracchus que i)0ur lui faire honte
et dépit. Tribun du peuple, il venait de faire revivre une ancienne loi
agraire interdisant à un même individu de posséder ime étendue de terres
de plus do cinq cents plèthres (le plèthre valait environ six ares); et ce
qui serait ainsi rendu disponible devait être affermé à ceux ne possédant
aucun fonds. Lorsqu'il dut partir pour effectuer cette opération, le Sénat,
pour se venger, ne lui alloua pour sa dépense que neuf oboles par jour
(un franc -trente-cinq centimes), contrairement à ce qui se faisait d'or-
dinaire, où ces commissions étaient largement rétribuées.
CHAPITRE LUI.
566,
G, Faut. — C'est ce qui a donné lieu à col aphorisme : -Fac ul credeft, ri
quod prohiberi non potes, accipe (Fais ce que dois et accepte ce que tu ne
peux empêcher) », dont la deuxième partie est corroborée par cet autre :
" Unquam felix, nisl sua sorte contentus (Qui n'est pas satisfait de son sort,
n'est jamais heureux). »
30, Façon.. — S. Jean Chrysostome nous conseille de ■< no désirer que peu de
choses, si nous voulons être heureux ».
33, Reuerence. — S. Ambroise dit que « la concupiscence s'imagine une in-
finité de besoins, qu'elle tâche de satisfaire k tout prix ».
3.'j, Exterreamur. — Dans les éd. ant., cette citation est suivie de sa tra-
duction : Il se fait, par vn vice ordinaire de nature, que nous ayons et plus
de fiance, et plus de crainte des choses, que nous n'auons pas veu, et qui sont
cachées et inconnues.
CHAPITRE LIV.
68,
1, Lettre. — C'était une manie des poètes latins du moyen âge, surtout aux
xn" ot xui" siècles.
2, Haches. — Et fréquemment aussi des autels, des chalumeaux.
4, Figure. — Comme bizarrerie analogue, citons entre autres que, dans un
recueil de noëls de 1740, on en trouve un de cent deux vers, dont tous les
mots n'ont qu'une syllabe.
Plutarque. — Xénocrate, au dire de Plutarque, indiquait le nombre û(^
cent millions deux cent mille comme celui des syllabes que forment les di-
verses lettres de l'alphabet.
■ II, Exercice. — Il semble assez difficile do faire passer, on le pi-ojetant et
môme sans le projeter, un grain de mil par le trou d'une aigudle. Quix-
TiLiEN, II, 20, d'où le fait est tiré, et qui attribue à Alexandre d'avoir récom-
pensé cette adresse on proportion do son utilité, dit, ce qui est plus ad-
missible, qu'elle consistait, ayant un pois chiche dans la bouche et soufflant,
à le lancer sur une aiguille à certaine distance et le ficher à la pointe d<î
cette aiguille, et que cet homme no manquait jamais son coup. Le minot
valait uu jjeu moins d'un litre.
K, loinctes. --- Platon, dans un cas analogue, ne fut pas plus indulgent
F.420 ESSAIS DE MONTAIGNE.
qu'Alexandre : seul, il n'admira pas un certain Anniceris, si bon cocher
qu'il faisait faire cent tours à son char sans s'écarter de la plus petite dis-
tance de la morne ornière; Platon jugeait qu'un homme qui s'était appliqué
avec une attention si soutenue à atteindre une perfection si inutile, était
incapable de grandes choses. A quoi on peut répondre que tout le monde
n'est pas tenu à être propre aux grandes choses, sans pour cela cesser d'être
estimable.
23, Marche. — Le titre de « dame », qui se donne aujourd'hui indistincte-
ment à toutes les femmes mariées, était anciennement affecté aux femmes
de chevaliers; les femmes des écujers et toutes les autres femmes, mariées
ou non, étaient simplement qualifiées de - Demoiselles » ; c'est ce qui ex-
plique que Montaigne écrivant à^sa femme, mettait en tète de sa lettre :
« A Mademoiselle Jlontaigne, ma femme. » Cette appellation de « Dame »
était en outre, comme il le dit, appliquée aux femmes de basse extraction,
et aussi dans le sens de maîtresse, etc.. Quand il s'agissait de femmes de
mauvaise vie, on employait indifféremment l'une ou l'autre expression.
25, Disait. — Plutarque, De Placil. philosoph., IV, 10.
34, Appetissans. — Du latin appetitus, rendant désirable et, par extension,
diminuant, affaiblissant, autrement dit dans le cas présent, dorant la
pilule.
570,
1, Desgoutement. — On dit aujourd'hui dégoût.
3, Rôtissent. — Les coups de chaleur et de soleil produisent, en effet, sur
les plantes et les animaux, l'homme compris, les mêmes effets que les grands
froids; dans les deux cas, les plantes sont comme brûlées et dépérissent, et
chez les êtres animés il y a congestion et danger de mort.
3, Gueux. — Gueuses, de l'allemand ^tese?!, fondre; masses ou lingots de mé-
tal sortant de la première fonte. — Montaigne ne rapporte pas exactement
la pensée d'AnisTOTE qiii se borne à dire que l'étain fond plus tôt que le
plomb, puisqu'il se fond même dans l'eau, et indique ensuite des procédés
de fusion.
C, Volupté. — Dans le Phédon, Platon fait dire à Socrate que « le plaisir et
la douleur se tiennent ».
16, Impression. — « La prospérité fatigue l'àme du sage, l'adversité l'affer-
mit et la retrempe par les coups mêmes dont elle la frappe. »
24, Engendre. — C.-à-d. pour savoir qu'on ignore, il faut beaucoup savoir;
ce qui est à l'adresse de ceux qu'en langage familier nous appeloùs des
« demi-savants ».
24, Première. — C'est ce que Bacox a traduit par : « Un peu de philosophie
éloigne de la religion, beaucoup y ramène. » — J. de Maistre, dans ses
Soirées de S.-Pétersbourg, a reproduit et développé cette idée de l'ignorance
qui croit savoir, et de la science qui s'ignore.
25, Instruits. — Sçauanls (var. de ^).
29, Sens. — Allusion à ceux qui, sans plus ample examen, séduits par leur
simplicité, embrassèrent les doctrines nouvelles de Luther et de Calvin. —
Gresset, dans Verl-vert, exprime la même pensée, appliquée d'une façon
plus générale :
« L'homme éclairé suspend l'éloge et la censure. »
L'observation de Montaigne est d'application constante. De son temps,
c'était la question religieuse qui préoccupait les esprits, depuis elle a cédé
le pas à la politique ; sauf cela, rien n'est changé à cet égard ; peu de gens,
aujourd'hui comme alors, sont capables de penser par eux-mêmes et, parmi
ces privilégiés, peu prennent le temps de réfléchir et s'astreignent à l'effort
de la réflexion ; aussi l'influence du journal qui fournit sur chaque chose
une opinion toute faite et dont chacun fait sa lecture quotidienne, est elle
considérable, on finit par ne plus penser et ne plus voir que par lui; c'est
pourquoi la mauvaise presse fait tant de mal et pourquoi aussi la bonne
NOTES. LIV. I, CH. LIV. VOL. I, PAG. 570. F.421
presse, qui seule peut compenser l'induence néfaste de la première, est à
soutenir et à encourager.
572,
U.Mestis. — C.-à-(l. ceux cjui tiennent des uns et des autres. — Métis vient
du latin mixtus, mélangé; signilic engendré du l'ait d'espèces différentes,
tels le mulâtre, né d'un blanc et d'une négresse ; le mulet, d'un âne et d'une
jument.
19, Villaneles. — Poésies pastorales, dont tous les couplets sont suivis d'un
même refrain.
29, Vulgaires. — Ignorans (var. de 80).
29, Singuliers et excellens. — Délicatzet sçauants (var. de 80).
31, Trop. — L'éd. de 80 aj. en errata : adioules, ils trouueroient place entre
ces deux extrémités .
31, Région. — Lucilius, dans Cicéron, dit qu'il ne veut pour lecteurs de ses
ouvrages, ni savants, ni ignorants, parce que les uns sont trop habiles pour
lui, les autres pas assez.
CHAPITRE LV.
574,
;>, Plutarque. — Vie d'Alexandre, 1.
5, D'estre... senteur. — Var. des éd. ant. : de ne sentir rien de mauuais.
9, Nihil olet. — Plaute, Mostell., I, 3, 116. — Montaigne, après avoir cité
ce vers, le traduit en le modifiant quelque peu ; « L'odeur de la femme,
dit exactement le poète, est normale, est bonne, quand elle ne sent
rien. »
10, Rien. — L'éd. de 88 et l'ex. de Bordeaux aj. : comme on dict que la Tneil-
ieure odeur de ses actions, c'est qu'elles soient insensibles et sourdes. — « Une
bonne réputation vaut mieux qu'un bon parfum, » dit I'Ecclésiaste, VII, I,
mais en l'appliquant à tous, hommes et femmes.
576,
5, L'air. — La science moderne attribue la contagion à l'existence d'êtres
réels bien qu'infiniment petits : bacilles, microbes; ce sont eux qui, d'après
elle, sont la cause et produisent l'effet; l'odeur n'est jamais qu'un indice et
une conséquence.
7, Socrates. — Diogi^ine Laerge, II, 25.
16, Contemplation. — L'encens, brûlé lors des sacrifices, semble plutôt avoir
eu pour objet dans le principe de combattre les émanations des foules
assemblées dans les temples et aussi l'odeur du sang provenant des victimes
immolées.
20, Thunes. — Muley Haçan, bey de Tunis, qu'au chap. VIII du liv. II,
Montaigne appelle Muleasses. Il vint à Naples en 1543, mais il n'y trouva
pas Charles-Quint qu'il venait implorer contre les Turcs qui le menaçaient.
A son retour, son lils, qui en son absence s'était emparé du pouvoir, lui
fit crever les yeux.
23, Parties. — Ses livres de compte, ses mémoires de dépense.
23, Ducats. — Monnaie d'or de la valeur de 9 à II francs.
30, Boue. — Par marais, il faut entendre les lagunes qui entourent Venise
et les canaux si nombreux qui s'y trouvent et qui exhalent souvent des
odeurs pestilentielles. — A Paris, la voirie n'était ni établie, ni entretenue
comme aujourd'hui, et la boue, dans la mauvaise saison, était une des
grandes incommodités do Paris; Boileau, bien que de son temps (1660) elle
se fût bien améliorée, nous en a conservé le souvenir dans une de ses
satires :
« Six chevaux attelés à ce fardeau pesant,
ont peine à l'émouvoir sur le pavé glissant;
D'un carrosse, en tournant, il accroche la roue,
Et du choc le renverse en un grand tas de boue. »
F. 422 ESSAIS Dl' MONTAIGNE.
CHAPITRE LVI.
578,
1, Prières. — Ce chapitre est, on général, difficile à comprendre; on y est
souvent arrêté et pas toujours sûr d'en saisir le sens; on y trouve plusieurs
traits contre les calvinistes.
13, Icy. — Bien des auteurs, plus hardis que Montaigne, ont, au moyen âge
et dans les siècles qui ont suivi, comme lui désavoué à l'avance, par crainte
des persécutions, ce qui dans leurs écrits poui-rait choquer l'Église; pré-
caution inspirée, la plui)art du temps, pUr la prudence plus que par les
convictions. — Quoi qu'il en soit, la déclaration ici est formelle et, étant
donné que l'auteur la renouvelle assez fréquemment sous une forme ou sous
une autre dans le cours des Essais, elle indique nettement que la différence
qu'il accuse entre Montaigne et le mai)-e de Bordeaux (III, 500) subsiste
également chez lui entre le chi'étien et le moraliste. Comme chrétien, sa
foi est voulue. Entretenue peut-être par le désir qui chez lui primait tout
de vivre en paix avec lui-même comme avec tous autres, elle n'admet
ni examen ni discussion; tandis que les l'éfiexions qu'il couche en sa rap-
sodie, sont telles que son bon sens lui suggère, et qu'elles soient ou non
contraires aux solutions et prescriptions de l'Église, ce qui est fréquent, le
naoraliste n'en a cure.
16, Dieu. — L'oraison dominicale, laquelle est tirée textuellement de YÉvan-
gile de S. Mathieu. — On trouve dans le second Alcibiade de Platon une
prière qui, en substance et tenant compte de la différence des temps, n'en
diffèi'e pas beaucoup. Dans ce même dialogue, Socratc, lui aussi, s'applique
à démontrer qu'avant de prier, il faut réfléchir à l'objet de sa prière, parce
qu'on risque, sans cela, de demander aux dieux des biens qui pourraient
être des maux, et il conclut à la formule suivante : « Puissant Jupiter, donne-
nous les biens, soit que nous les demandions, soit que nous ne les deman-
dions pas; et éloigne de nous les maux, quand même nous te les deman-
derions! »
20, Fust le. — Les éd. ant. aj. : seul.
'■29, Cette là. — S. Cvpiuen tient l'oraison dominicale comme la prière la plus
parfaite. — " Le Paternoster est ma prière, a dit Luther; il n'en est aucune
qui. lui soit comparable, je l'aime mieux qu'aucun psaume. »
580,
4, Soit. — C'est ce qui a fait dire avec quelque exagération à Ch. Lemesi.e
que, dans de telles conditions, la prière est une impiété.
9, D'icelle. .. demandes. — Var. des éd. ant. : de sa iustice non selon »o.s
inclinations et volonté:-.
10, Loix. — Liv. X.
15, Vieillesse. — Cette assertion prête fort à la controverse. Que Dieu exist(%
personne ne le nie; mais qu'est-ce que Dieu, personne non plus ne saurait le
dire; tout au plus peut-on admettre cette vague définition : qu' - Il est ce
qui préside à tout ce qui existe ». Dire qu'il nous a faits à son image et
, par conséquent qu'il est à la nôtre, aller jusqu'à lui prêter nos passions, c'est
aller trop loin ; notre raison, qu'en somme nous avons pour en user, se refuse
à une telle proposition que rien ne ju.stifie et qui est de la part de l'homme
d'une outrecuidance dépassant toutes les bornes; de là aussi ce malentendu
entre ceux qui sont dits croyants et ceux dont on dit qu'ils ne croient
pas. — Ceci posé, il ne semble pas que -Montaigne soit dans le vrai, quand
il donne comme règle générale que ceux qui doutent en leur jeunesse,
viennent à résipiscence dans leur vieillesse. Ce qui est plus vrai, c'est que
chez beaucoup le scrupule de combattre, chez cjui a le bonheur d'en avoir,
les croyances religieuses toujours si réconfortantes et jamais préjudiciables,
le respect de la liberté de conscience chez autrui, et même à certains mo-
ments les défaillances de notre être, comme aussi un certain esprit de
concession à l'égard de ceux qu'ils aiment, font qu'ils ne se montrent, pas
toujours aussi récalcitrants pour des pratiques auxquelles ils n'attachent pas
NOTES. MV. I. CH. I.Vf. VOL. I, PAG. .o80. F. 423
autrcniont d'importance, (lui en (léliiiilive font généralenKMit du bien, et
même à ceux auxquels elles n'en l'ont pas, ne font jamais de mal.
3:.', Malice. — •- La prière des impies est un nouveau péché. >• Le Père
Qlesnei,.
582,
•,'. La haine... l'iniustice. — ]'su7'es, vcnin/ii-rs ,'i paillardises (var. de 88).
0, Dieu. — Autrement dit : Il faut faire tout en temps et lieu. — Dans Paris
ridicule (édition de 1666), Le Petit dit à une fille galante qui l'invite à la
débauche :
• ... Ce sera, s'il plaît à Dieu,
Pour dimanche, après la grand'messe.
Il faut tout faire en temps et lieu. »
16, Quoy. - (].-;'i-d., mais qui^ dire do ceux qui fondent leur vie entière
SUl'...
584.
7, L'Eglise. — Les éd. ant. aj. : t'al/ioliijue.
1, Promiscue. — Confus, indifférent: du h^tiii /inniiiscuiifs qui a le même
sens.
8, Dauid. — Les psaumes, rlont la majeure partie est de David; cantiques
sacr(''S des Hébreux, dont un gi-and nombre sont passés dans notre liturgie,
et que les Protestants chantent constamment.
15, Tracasser. — Traîner. — L'imI. de 88 aj. : entre les mains de loules per-
sonnes.
21, Sursum corda. — « Haut les cieurs! ' — Paroles que le prêtre prononce
à la messe, au moment où, après l'Évangile, et immédiatement avant la
Préface, c'est-à-dire lorsqu'il va commencer à procéder au Saint Sacrifice
proprement dit. — Cette même interjection se dit encore à propos de faits
extraordinaires qu'on va énoncer, pour \- préparer et pour qu'on se mette à
l'unisson. Bossuet l'affectionnait d'une façon particulière, comme de mise
à tous les moments do l'existence; quand le cœur souffre, que le sort est
contraire; aussi bien dans la vie publique, la vie sociale, que dans la vie
privée. C'est par elle que débutait la proclamation qu'en 1870 (tamrett.v
adressait à la France, lui annonçant la capitulation de Metz et l'invitant à
un nouvel effort [X. X. II, 'ri : Sursum corda).
ib. Empirent. — " Les mauvais esprits font de la parole de Dieu ce (|u'un
méchant lapidaire fait d'un diamant. » S. JiiKÔ.ME.
27, Gents. — Les Protestants. C'est là une charge à fond contre le Protestan-
tisme qui admet le libre examen et les prières du culte dans la langue
usuelle.
:>j, Chacun de. — Le traduire el ladd. d(î 88).
586.
5, Apparence. — En novembre 1901, des protestations unanimes, qui ont
dégénéré, dans les rues d'Athènes, en une émeute sanglante, ne se sont-glles
pas produites en Grèce, parce qu'une tentative a été faite d'y rendre d'usage
courant une traduction en grec moderne des textes sacrés; troubles causés
précisément par les difficultés d'interprétation qui faisaient que, chacun
appréciant à sa façon, la traduction donnée ne satisfaisait personne. —
C'est là, en effet, la raison pour laquelle l'Église maintient les langues
mortes, l'hébreu, le grec et le latin, pour les liturgies de Jérusalem, de
Constantinople et de Rome, qui sont actuellement les trois principales do
la Chrétienté; elles se trouvent delà sorte soustraites aux fluctuations des
langues vivantes qui, chaque fois qu'une adaptation serait terminée, obli-
geraient à en préparer une autre. Du reste le grand nombre de livres où,
conjointement, les principales prières sont traduites en langage courant
avec le texte ancien en regard, supplée à l'inconvénient que les cérémonies
aient lieu dans une langue incomprise des fidèles. — A titre de spécimen
de ce à quoi on arrive par les traductions ainsi faites par chacun, nous
F.424 ESSAIS DE MONTAIGNE.
citerons ce veiset du Miserere, relevé dans la traduction en vers des
Psaumes faite à l'instigation de Marguerite de Valois en 1543 par Clément
Marot, poète de valeur et zélé protestant; le roi David, s'adressant à Dieu,
lui dit : « Amptius lava me ab iniquitate mea cl a peccato meo munda me
(Seigneur, purifiez-moi de plus en plus de mon iniquité, purifiez-moi de
mon p(fché) » ; ce que Marot traduit ainsi :
« Lave-moi, mon Sire, et relave bien fort.
Car je suis un gros butor. »
7, Langue. — Le Nouveau Testament avait déjà été traduit en basque en
1571.
8, Ardu. — Difficile, du latin arduus, qui a même signification; par exten-
sion, délicat, qui est le sens dans lequel ce mot est employé ici.
17, Gentils. •-- De génies, nations. Nom sous lequel les païens sont désignés
dans l'Evangile et parles premiers chrétiens; S. Paul, qui les a évangélisés
et n'est point des douze apôtres, est appelé l'Apôtre des Gentils.
24, Humaine. — Ce sont pareillement les passions antireligieuses qui, de
nos jours, ont fait prononcer la séparation de l'Église et, de l'État : loui'de
faute au point de vue politique, qui fait que l'Église échappe à la main mise
sur elle, grâce au Concordat. Faute d'autant plus grave de la part du Gou-
vernement actuel, dont les tendances ne sont rien moins que conservatrices,
(lue, dans quelques années, remise de la secousse, l'Église rendue à elle-
même, sans jouer de rôle apparent, sera un appoint sérieux dans la lutte
des partis, en groupant contre le socialisme et l'anarchie avouée ou dissi-
mulée les différents partis conservateurs républicains et autres, leur four-
nissant un point d'appui et de concentration qui leur fait défaut aujour-
d'hui et est cause que chaque jour ils vont perdant de plus en plus de
terrain.
25, Théodose. — S. Ambroise ou S. Grégoire de Nazianze qui, tous deux,
ont été les conseillers de Théodose le Grand.
33, Continuoyent. —. La discussion, au dire de Nicétas, II, 4, historien
d'Andronic Comnène, avait lieu dans la tente de celui-ci, entre Euthyme,
évêque de Patras, et un nommé .Jean Ciname; elle portait sur ces paroles
de l'Évangile de S. Jean : « Paler major me est (Mon père est plus grand
que moi) » ; il n'y est pas question de Lapodius.
35. Platon. — Lois, liv. L
588,
1, Euesque. — Cet évêque est Osorius qui ne dit pas de ses habitants qu'ils
n'épousent qu'une seule femme dans toute leur vie, mais seulement qu'ils
n'en épousent qu'une à la fois, autrement dit qu'ils ne sont pas polygames
(V. la note suivante).
2, Isle. — L'île en question semble celle qui aujourd'hui a nom Socotora;
elle est située dans l'océan Indien, à la sortie du golfe d'Aden. Occupée
par les Portugais au xv" siècle pour surveiller le détroit de Bab-el-Man-
deb, elle est depuis 1886 sous le protectorat de l'Angleterre; c'est un rocher,
prolongation en quelque sorte du cap Guardafui, peuplé d'indigènes pil-
lards, de naturel fourbe, de religion musulmane, ne vivant guère que des
épaves des nombreux navires qui y font naufrage, par suite des brouil-
lards qui y régnent six mois de l'année.
17, Nom. — Plutauque, De l'Amour, 12. — Autant en peuvent dire tous les
honmies, de tous les temps, de tous les lieux, en parlant de la divinité; mais
leur orgueil égale leur ignorance sur ce point et les empêche d'en convenir.
33, Sacraire. — Sanctuaire; de sacrarium qui en latin a même signification.
36, Indisciplinatis. — Non orthodoxes. Ces deux mots verbis indisciplinalis
ne figurent pas dans les éditions antérieures; ils ont été ajoutés, à titre
d'amende honorable, pour satisfaire aux observations qu'à Rome, la cen-
sure lui avait faites sur l'emploi de certains mots et expressions. V. N.
II, 528 : Conscience; III, 474 : Reuere.
NOTES. LIV. I, CH. LVI. VOL. I, PAG. 588. F. 425
38, Mode. — Vulf/atre (add. de 88).
590,
5, Instruisants. — Nouvelle déclaration de l'auteur, confirmant combien
en lui chrétien et moraliste sont deux. V. N. I, 578 : Icy.
11, Nostres. — Autrement dit les Protestants. — L'éd. de 88 port. : de noslre
auis.
17, Xenopbon. — Xénoplion semble être nommé par erreur; c'est proba-
blement du second Alcibiade de Platon qu'il est ici question.
22, Vitieuses. — Et détestables, aj. l'éd. de 80.
22, Pardonne. — Montaigne, peut-être par réminiscence du latin qui a été
la langue de ses jiremiers ans et, en tout cas, conséquent avec ses idées
sur les rapports qui doivent exister entre les parents et les enfants, est
pour le tutoiement vis-à-vis de Dieu, ce père par excellence; les Protes-
tants en agissent de même.
25, Toutesfois. — le vois qu'en nos vices mesmes.
27, Diuis. — Sknèque a dit de même : « A voix basse, ils font aux dieux des
prières exécrables; et si quelqu'un vient à les écouter, ils se taisent, dé-
couvrant à Dieu ce qu'ils ne veulent pas qu'il soit su des hommes. »
32, Desgosiller. — Égorger; on disait aussi esgosiller, qui s'est conservé,
mais avec un sens autre.
33, Petarder. — Faire sauter à l'aide d'un pétard (grosse cartouche remplie
de poudre).
35, Auarice. — Épicure disait que « si les dieux accordaient aux mortels tout
ce qu'ils demandent, le genre humain serait bientôt anéanti ».
592,
1, Marguerite. — Marguerite d'Angoulème, sœur de François P"^ et femme
d'ilenri d'Albret, roi de Navari-e.
9, Deuotion. — La reine conte qu'à l'aller il ne s'arrêtait jamais, mais qu'au
retour il ne manquait pas d'entrer et de demeurer longtemps en oraison.
— Louis XI demandait à la petite image de la Vierge qu'il portait à son
bonnet, pardon de ses méfaits qui, pour lui être inspirés par la politique,
n'en étaient pas moins grands et fort nombreux.
11, Matières. — Var. de 88 : mystères.
20, Requestes. — Add. des éd. ant. : et prières.
34, Mot. — Platon, second Alcibiade. — Œdipe, en apprenant qu'il était le
meurtrier de son père et le mari de sa mère (V. N. I, 172 : Enfans), se creva
les yeux et vécut caché dans son palais; mais il en fut chassé par ses fils
Étéocle et Polynice, et, dans son irritation, forma le vœu rapporté ici et
qui se réalisa : l'accord entre les deux frères ne fut que de courte durée;
ils en appelèrent aux armes et se livrèrent un combat singulier où, dans
leur acharnement, ils se tuèrent réciproquement, XIV° siècle.
35, Prudence. — « Qui sait ce qui est bon pour l'homme dans la vie? » Ec-
CLKSIASTE, VI, 12.
594,
2, Expiation. — Générale, aj. les éd. ant.
il, Platon. — Lois, IV.
15, Pénates. — Les Pénates; dieux qui, chez les Romains, présidaient aux
biens domestiques; ils sont souvent confondus avec les dieux Lares qui'
étaient plutôt, dans les familles, chargés du soin des personnes que de ce-
lui des richesses.
CHAPITRE LVIl.
22, Huict ans. — Plutarque, Calon d'U tique, 20.
24, S'entretiennent de. — Se consolant en (var. des éd. ant.).
596,
4, Espérable. — On meurt de vieillesse, ou pour mieux dire d'usure, à tout
âge, suivant le degré de force vitale que l'on a reçus en naissant, et le
F. 426 ESSAIS DE MONTA K.NE.
éprcuvos survenues postérieurement. Toutefois on piMii adinrHif (ju'au-
cune autre cause de mortalité n'intervenant, ce degré do force est normal,
quand il fait durer l'homme jusqu'à 70 ans, et a fortiori au delà. Les
tables de mortalité de Duvillard établissent que sur un million d'êtres
humains qui viennent au monde viables : 117.000 arrivent à l'âge de
70 ans; 35.000 à celui de 80 ans; 1.000 à 90; -.^07 à 100; 1 à 109; aucun à
110. — Des cas <le longévité plus considérable sont cependant accusés,
même en assez grand nombre, dans les temps reculés, mais seule la tra-
dition les rapporte et nous n'avons rien qui permette de les contrôler.
Les plus saillants .sont, d'après la Bible : Adam, qui vécut 930 ans; Mathu-
salem, 969; d'api'ès les auteurs profanes : la Sibylle d'Erythrée, 1000 ans;
Épiménide, en Crète, 157 ans. On cite aussi, et celui-là avec un certain
caractère d'authenticité, le cas d'un Anglais, qui serait né en 1 183 et mort
en 1651, aj'ant vécu 169 ans; dix rois, dans ce laps do temps, se sont suc-
cédé sur le trône d'Angleterre.
19, Durer. — Les chances théoriques, mais non effectives, que nous avons
d'arriver à tel ou tel âge, varient suivant celui auquel nous sommes par-
venus. Ces cliances sont actuellement assez exactement déterminées par
les tables de mortalité : Montaigne, par exemple, qui avait quarante-deux
ans, quand, vers 1574, il écrivait ce chapitre, avait plus de chances de
longévité, infirmités à part, que lorsque, n'ayant que trente- neuf ans, il
écrivait le ch. XIX" de ce môme livre. V. I, 112 et N. Autant. — Toutefois
ces indications, résultat de statistiques, qui vont acquérant de jour en jour
plus d'exactitude, ne sont pas immuables; elles accusent un accrois-soment
constant de longévité. La vie moyenne qui, avant la Révolution, était de
29 ans, .semble, en Franco, être de 46 ans (15 pour les hommes, 47 pour les
femmes), grâce surtout aux mesures prises pour la conservation des nou-
veau-nés et des enfants en bas âge, aux progrès de l'ingiène et à une
plus grande préoccupation do l'homme ]jour sa conservation, quelque
peu aussi à l'avancement des sciences médicales, mais ce, il faut bien le
dire, au détriment de la santé, de plus en plus compromise par le maintien
à l'existence, à force de soins et de précautions, d'individus chétifs et per-
pétuellement souffreteux; la sélection qui s'opérait jadis, se faisant moins
bien aujourd'hui, ils vont transmettant à ceux qu'ils engendrent les tares
dont ils sont eux-mêmes affectés, que viennent aggraver à chaque géné-
ration le surmenage intellectuel et physique, moins d'exercices fortifiants,
moins de grand air, l'abus de l'alcool, les excès et la continuité des jouis-
sances de toute nature, et aussi les falsifications de plus en i)lus nom-
breuses et nocives des denrées alimentaires. En somme, la durée de la vie
humaine s'accroît, mais à tous les âges on se porte notablement plus mal;
est-ce progrès"?
25, Trente ans. — Scétone, Auguste, 12. — Les lois fi.xaient chez les Ro-
mains l'âge de 31 ans pour l'obtention de la questure; 37, pour l'édilité;
40, pour la préture; 43, pour le consulat; mais on accordait souvent des
dispenses, témoin Scipion Émilien postulant le consulat et répondant à
quelqu'un qui lui objectait qu'il n'avait pas l'âge : « Je l'aurai, si je suis
nommé. En 81, Sjdla fit rendre une loi complémentaire interdisant de
commander une armée avant d'être questeur, et cohsuI avant d'en avoir
commandé une; et elle interdisait d'être nommé une seconde fois à une
même charge avant deux ans d'intervalle.
27, Guerre. — Aulu Geli.e, X, 28.
28, Seiour. — Repos, retraite.
32, Cettuy-ci. — Auguste, dont il vient d'être parlé.
34, Trente. — Cette émancipation des souverains est générale, et partout
on les voit exercer le pouvoir royal à un âge où, simples particuliers, ils
ne pourraient gérer leurs propres intérêts. 11 semble qu'il y ait pour la
gestion des affaii-es publiques des grâces d'état, car indépendamment de
cette anomalie, en partie justifiée par l'éducation spéciale dont ces princes
sont l'objet, combien de nos hommes politiques gèrent les nôtres, qui, au
NOTES. LIV. I, en. F.VII. VOL. I, PAG. b96. F.427
su et connu (le tuiit le monde, iio savent pas gérer les "leurs et auxquels
nous ne confierions pas nos intérêts privés; que les incrédules aillent se
renseigner, auprès des trésoriers de nos deux Chambres, sur les opposi-
tions dont sont l'objet les traitements, au début de leurs mandats, de nos
dijputés et sénateurs.
35, Estre. — iMontaiguo se prononce ici pour l'émancipation complète de
l'homme à 20 ans. De son temps, les coutumes, sur ce point, étaient va-
riables; cependant, en général, la majorité légale était, à pou près partout,
li.xée à 21 ans, mais les droits qu'elle concédait étaient restreints; la majo-
rité parfaite, qui seule permettait de disposer des immeubles, n'avait lieu
qu'à 26 ans. Depuis la Révolution, sauf sous le rapport du mariage, excep-
tion dont se poursuit l'abrogation, on est absolument hors tutelle à 21 ans.
37, Arre. — Arrhe, marque, témoignage. — Pim,u>i>E dk Comines dit de même :
« 11 faut noter que tous les hommes qui jamais ont (^té grands et fait de
grandes chc^ses, ont commencé fort jeunes; cela tient à l'éducation, ou
vient de la grâce de Dieu. »
598.
29, Tard. — Les éd. ant. port. : longtemps.
LIVRE SECOND
CHAPITRE PREMIER.
600,
(3, Venus. — Son audace el son intrépidité dans les dangers l'avaient fait
tout d'abord appeler ■< fils de Mars » ; mais, par la suite, ses actions ayant
témoigné des qualités tout opposées, on l'appela « fils de Vénus ». Pi.u-
TAitQKE, Marius, à la fin.
8, Chien. — Boniface VIII, d'un caractère tout à la fois (in, impérieux et
violent, eut de vifs démêlés [avec l'empereur d'Allemagne et surtout avec
le roi de France Philippe le Bel, parce qu'il voulait élever la puissance
spirituelle du pape au-dessus de la puis-ance temporelle des souverains.
Arrêté par ordre du roi de France qui voulait le faii-e juger par un con-
cile, il fut délivré quatre jours après par le peuple; mais, tombé malade,
les uns disent par suite des mauvais traitements qu'il avait subis, de dépit
suivant d'autres, il mourut (1303). — Le Dante, qu'il avait voulu faire
périr, l'a placé dans son enfer.
12, Mort. — Sénkque, De Clemenlia, II, 1. — Quand Néron fit cette réponse h
Burrhus, préfet du prétoire, qui lui présentait à signer la condamnation
de deux voleurs, il était jeune, venait à peine d'être élevé au pouvoir, n'é-
tait pas encore corrompu par la toute-puissance et les tlatteurs de son en-
tourage, et son caractère atrocement cruel ne s'était pas encore révélé.
18, Potest. — L'i'd. deSOaj. : C'esl vn mauuais conseil qui ne se peut chanijer
(traduction de la citation qui précède).
602,
6, luges. — C.-à-d. que les juges les plus hardis n'ont pu porter sur son •
, caractère un jugement sûr et arrêté.
12, Ancien. — Sénèque, Epist. 20.
17, Mesure. — Certains vices peuvent faire naître des quaUt»;s : l'avarice
produit la sobriété; la peur, la prudence; la défiance, l'ordre; l'orgueil, la
charité.
21, Constance. — « La prudence est le principe de toutes les vertus; le cou-
rage en est la perfection; l'une nous enseigne la route, l'autre nous y af-
fermit. » DÉMOSTHÈNE, daus le Discours funèbre, qui lui est attribué, sur les
guerriers morts à Chéronée.
F.428 ESSAIS DE MONTAIGNE.
29, Couche. — Le caméléon, petit lézard inoffensif qui a une couleur gri-
sâtre assez mal définie qui lui est propre, mais dont la nuance change
sous l'effet de la présence des objets ambiants dont, par reflet, il prend la
coloration.
604,
6, Librement. — Certains ont vu là une réfutation embrjonnaire du libre
arbitre attribué à l'homme qui ferait librement ce qu'il veut, mais qui
invinciblement, fatalement serait astreint à vouloir telle chose, plutôt que
telle autre, ce qu'en d'autres termes on nomme la carte forcée. — La phrase
elle-même est traduite de Sénèqle, Epist. 52.
12, Mourir. — Diogkne Laerce, Vlll, 83. — Élien prête ce mot à Platon.
12, Discours. — Cette phrase est la suite de celle qui finit trois lignes plus
haut par ces mots : des choses aux autres. La phrase intermédiaire, qui
n"cst point dans les éditions antérieures, rompt la liaison des idées, cas
assez fréquent dans les Essais.
14, Touché. — C.-à-d. celui qui a posé le doigt sur une des touches d'un cla-
vier, les fait résonner toutes. — On donnait autrefois le nom de marches
aux touches des clavecins, des orgues, etc.
19, Estât. — C.-à-d. les désordres engendrés par les guerres civiles de l'époque.
20, Lucrèce. — Femme romaine, épouse de Tarquin CoUatin. Violée par
Sextus, fils de Tarquin le Superbe, roi de Rome, elle fit l'aveu de son
malheur à ses proches et se tua sous leurs yeux, en demandant vengeance
(509) ; ce fut l'occasion du renversement de la royauté et de l'établisse-
ment de la République.
30. Non si difficile. — Bonne et amiable (var. de l'éd. de 80).
32, Pointe. — C.-à-d. quand vous n'aurez pu réussir à obtenir les faveurs
de votre maîtresse. — Certains pensent qu'il y a ici une faute d'impres-
sion, qu'il faut « sailly • au lieu de failly (1' s initial et 1' f ne différant
dans les caractères d'imprimerie de l'époque que par le trait horizontal
que celle-ci porte en son milieu) ; le sens serait alors : Parce que vous aurez
•satisfait votre maîtresse. Ceux qui en tiennent pour cette version, s'ap-
puient sur le membre de phrase qui précède : « Comme dit le compte »,
que l'on croit être la deuxième nouvelle de la troisième journée de Boccace,
intitulée « Un Palefrenier », où il est question d'un homme de cet état, qui
s'introduit près de la reine des Lombards avec laquelle il couche, celle-ci
s'imaginant, avant comme après, qu'elle a affaire à son mari.
34, Heure. — Voltaire a exprimé la même idée :
« Et l'amant maltraité prend souvent pour vertu
Les fiers dédains d'un cœur qu'un autre a corrompu. ■
38, Froidement. — Var. des éd. ant. : lâchement.
606,
1, Vie. — Plltarque, Pélopidas, 1.
17, Englouti. — En 1456, pendant les opérations se rapportant au siège de
Belgrade, défendu par Hunyade et où échoua Mahomet II qui y fut blessé
et faillit y être fait prisonnier.
20, Lendemain, — Les Espagnols ne disent pas d'un homme qu'il est brave,
ils disent qu'il fut brave tel jour.
. 24, Autre. — Lasche, port, les éd. ant.
29, Simple. — Ce composé d'idées contraires qu'est l'homme est constaté par
les philosophes de tous les temps, et bien souvent a été donnée en expli-
cation l'existence en lui de deux âmes, l'une végétative gouvernant l'or-
ganisme, l'autre intellectuelle; cette doctrine a même été condamnée en
divers conciles et en dernier lieu et d'une manière formelle dans le con-
cile œcuménique de Latran en 1513. — Pascal, d'après Montaigne, a dit
comme lui, copiant môme ses expressions : « Suyvons nos mouvements, ob-
servons-nous nous-mêmes et voyons si nous n'y trouverons pas les carac-
tères vivants de ces deux natures. Tant de contradictions se trouveraient-
NOTES. LIV. II, Cil. T. VOL. I, PAG. 606. F.429
elles dans un sujet simple? Cette duplicité de l'homme est si visible, qu'il
y en a qui ont pensé que nous avions deux âmes, une seule leur sem-
blant incapable de telles et soudaines variétés d'une présomption dé-
mesurée à un horrible abattement de cœur. » — Bacon l'admet : « L'une
d'ordre divin, l'autre matérielle. » — En tout cas, il y a bien incontestable-
ment en nous deux principes, celui du bien et celui du mal, qui, au début,
sont en conflit continu; leur degré de puissance n'est pas le même chez
tous, non plus qu'à tous moments chez un même individu, et suivant que
l'un ou l'autre l'emporte, nous agissons bien ou mal. L'homme vertueux
est celui qui d'ordinaire triomphe de la tentation, et, à la longue, cela lui
devient naturel : le principe du mal est vaincu ; il demeure encore, mais à
l'état latent. C'est l'inverse qui se produit chez celui qui d'ordinaire n'é-
coute pas la voix de sa conscience : elle se fait de plus en plus faible au
fur et à mesure qu'on l'écouduit davantage et fmit par somnoler, le prin-
cipe du mal l'emporte et règne alore sans conteste; chez l'un comme chez
l'autre, l'habitude est devenue une deuxième nature.
08, Véritable. — Véridique. »
608,
4, Distinguo. — Terme de logique, emprunté du latin, signifiant : Je dis-
tingue, qui se retrouvait à tous propos dans les discussions scolastiques,
faisant le pendant de ces deux autres : Concedo (j'accorde, j'admets) et Nego
(Je nie, je n'admets pas).
17, Assaut. — Devant l'ennemi, l'homme est retenu par l'honneur et le de-
voir; sa mort est exaltée à l'avance; s'il recule, c'est l'infamie et il a pour
témoin l'armée entière; dans son lit, aucun de ces mobiles ne le soutient,
sa pensée le reporte vers ce qu'il a sujet de regretter, son entourage gé-
mit, l'au-delà l'inquiète, souvent ses idées sont affaiblies; les circonstances
sont absolument différentes, il est naturel que l'état d'âme s'en ressente.
21, Barbiers. — La lancette du chirurgien. Les barbiers, jadis, faisaient en
partie office de chirurgiens; jusqu'en 1789, ils continuèrent de saigner et
de panser certaines blessures.
23, Cicero. — Tusc. Quœst.', II, 27.
34, Pusillanimité. — La superstition dont fit preuve Alexandre le Grand
a été expliquée par ce fait que, confiant en sa fortune, il tenait, pour sou-
tenir le courage de ses soldats, à faire ratifier les entreprises qu'il conce-
vait par les devins qui l'accompagnaient et passaient aux yeux de la foule
pour être les interprètes de la volonté des dieux; et à cette fin, il fallait se
les concilier pour s'en faire des auxiliaires. Cette appréciation se trouve
confirmée par l'apostrophe qu'il adressa à l'un d'eux qui se montrait dé-
favorable à une attaque qu'il préparait : « Si, quand tu te livres aux pra-
tiques de ton art, quelqu'un intervenait, tu le considérerais probablement
comme gênant et fort mal venu. — Sans doute. — Eh bien, que penses-tu
d'un devin superstitieux qui, lorsque je suis occupé de choses autrement
sérieuses, vient se jeter à la traverse en me parlant des entrailles des vic-
times? ■'
36, Courage. — « En voyant Clitus tomber à ses pieds, la colère d'Alexandre
s'évanouit; il arrache la javeline du corps de sa victime et veut s'en frap-
per; ses gardes le retiennent et l'emportent; il passe toute la nuit et le
jour suivant à fondre en larmes; épuisé, n'ayant plus la force de crier ni
de se lamenter, il reste étendu par terre sans proférer une parole, ne pous-
sant que de profonds soupirs jusqu'à ce qu'Aristandre, lui remémorant un
songe se rapportant à cette mort, lui représenta que ce malheur était écrit
et sa victime prédestinée à pareille fin, ce qui amena l'apaisement dans
son esprit. •> Plutarque, Alexandre.
610,
1, Rapportées. — L'ex. de Bordeaux porte ici intercalée la citation sui-
vante : •■ Voluplalcm contemnunl, in dolore sunt molles, gloriam negligunt,
franguntuv infamia (Les mômes hommes qui méprisent la volupté, montrent
une extrême faiblesse quand ils souffrent, négligent le soin de leur réputa-
F. 430 ESSAIS HE MONTAIGNE.
lion et ne peuvent supporter sans en être profondément affectés In perte dr
l'honneur et de l'estime publif/ue). >•
' 4, Visage. — Des poingts (var. des éd. ant.).
11, Auau le vent. — Commo souffle le vent.
12, Talebot. — Général anglais qui se signala pendant les guerres des i-é-
gnes de Charles VI et Charles VII; fut défait et tué, ainsi que son fils, à
la bataille de Castillon (1453), non loin du château de Montaigne; a ét<'
inhumé à la place où il est tombé, son tombeau s'y voit encore. — En par-
lant de lui, qui pendant 60 ans combattit contre nous, Montaigne dit :
« Nostre Talbot », peut-être parce qu'il était d'une famille originaire du
Limousin; peut-être aussi parce que nul plus que ce preux n'a laissé
meilleur souvenir en Guyenne, où il s'est toujours comporté avec justice
et humanité, ne manquant jamais à sa parole, dans un temps où on ne s'en
faisait pas faute, et dont la mort fut celle d'un héros. — La bataille de Cas-
tillon est le dernier fait de la guerre de Cent Ans; c'est là que pour la
première fois nous fîmes usage de canons.
12, Ancien. — Sénèque, Epist. 71 et 72.
23, Qu'on. — L'Aréopage. Cicéron, De Senectule, 7.
25, Tragédies. — Le procès intenté à Sophocle sur le déclin de sa vie par
l'un de ses fils avait pour objet de s'opposer à la reconnaissance d'un autre
comme enfant légitime : « Ou je suis un imbécile, dit le poète dans sa dé-
fense, ou je suis Sophocle; et, dans ce cas, je ne suis pas un imbécile » ; et.
pour convaincre ses juges, il leur récita un fragment de son Œdipe à Co-
lone qu'il venait d'achever, celui de l'arrivée d'Œdipe dans la forêt saci'ée,
où se trouvent plusieurs passages applicables à sa propre situation et à la
conduite de son fds, et l'enthousiasme qu'il souleva emporta leurs suf-
frages. — Le fait toutefois n'est pas absolument établi, et le serait-il qu'il
ne prouverait pas grand'chose; on peut être grand poète et, comme tout
le monde, avoir des faiblesses à certains moments.
27, Tirèrent. — Hérodote, V, 20.
612.
8, Gendarme. — Remplit de courage, de hardiesse. — A proprement parler,
gendarmer signifie braver. Pasquier, dans son jugement sur les Essais, re-
proche à Montaigne d'avoir employé, comme dans le cas présent, des mots
dans un sens incorrect, •■ auxquels, si je ne m'abuse, dit-il. malaisément
l'usage donnera vogue ».
CHAPITRE IL
23, Pas. — C'est sur le principe contraire, si inique par lui-même, qu'est
fondée notre législation pénale : la même peine atteint le malheureux qui
vole un objet de peu de valeur, et le banqueroutier éhonté qui réduit à la
misère nombre d'individus dont il a capté la confiance; l'étendue du pré-
judice commis n'entre pas en considération. De ce fait, le faible et le pau-
vre sont bien plus frappés que le riche et le puissant : leurs peines finies,
ceux-ci jouissent impunément du fruit de leurs larcins, ceu.x-là se trouvent
dans une position pire qu'avant.
31, D'acquest. — A gagner.
34, Sien. — C.-à-d. cherche à rendre le sien plus léger, à l'atténuer; le sou-
lève pour qu'il ne pèse pas autant dans le plateau de la balance. — La Fon-
taine, dans sa fable de la Besace, commente cette mànie idée : « Lynx en-
vers nos pareils, et taupes envers nous » ; c'est, autrement dit, la question
de la paille et de la poutre de l'Évangile.
37, Maux. — « La sagesse vaut mieux que la force, et l'homme prudent que
l'homme robuste. • Ecclésiaste, VI, 1.
614,
9, Crefîit. — D'après ce que Montaigne dit quelques lignes plus loin des Al-
lemands servant dans nos l'angs, de l'usage qu'ils font de grands verres à
NOTES. \A\. Il, CH. IF. VOI.. T, PAG. 614. F.431
la lin dos repas, de leur façon do boire, il se pourrait que co soit eux qu'il
veuille designer ici. — L'ivrognorie, qui s'est bien généralisée, est plutôt
un vice des pays froids que du midi, parce que, dans les pays do vigno-
bles, on s'enivre avec du vin, dont il faut pour produire l'ivresse une cer-
taine quantité et qui n'est pan malfaisant quand il n'est pas frelaté, tandis
que, dans le nord, on a recours à l'alcool qui agit beaucoup plus sous un
bien moindre. volume, et avec d'autant plus de force qu'il est de plus
mauvaise provenance, ce qui est le cas le plus fréquent : c'est alors un v(''-
l'itable poison, dont l'action délétère s'exerce sur l'organisme, l'intelligence
ot le moi-al de l'individu. La chimie moderne en augmentant chaque joui-
la production, et aussi malheureusement la nocivité, en même temps qu'elle
on réduit le prix do revient, l'alcoolisme, inconnu aux temps jadis,, va so
développant de plus en plus, mal d'autant plus redoutable que l'intoxica-
tion des parents est héréditaire et pèse lourdement sur la constitution
physique et les facultés intellectuelles des enfants à naître, comme font
sur ceux déjà existants la misère et le mauvais exemple qu'elle introduit
au foyer domestique.
10, Renuerse. — « L'ivresse est un acheminement vers la folie. » Pvtiiagore.
24, D'autant. — Aussi fréquemment et aussi copieusement qu'on vous y
convie par les toasts, sorte de défis courtois qu'on vous porte et dont la for-
mule au temps de Montaigne était : « Je bois à vous »; à quoi l'on répon-
dait : - Je pleige d'autant », qui peut se traduire : Et moi de même. — Les
.Juifs, à l'époque de .losèphe (67), étaient divisés en plusieurs factions; pour
se défaire do lui, ses ennemis lui ayant envoyé un émissaire pour l'attirer
dans un guet-apens, il enivi-a cet émissaire et apprit de lui les mauvais
dessoins (|u'on avait sur sa personne. Josf;PHE, De Vita sua.
20, Yure. — Ces deux exemples sont tirés de Sknkque, Epist. 83, auquel, dans
ce chapitre, plusieurs idées sont empruntées.
30, More Lyaso. — Ln citation diffère un peu du texte de Virgile dont elle
est tirée.
31, Cassius. —L'instigateur du complot contre César, par haine de la tyran-
nie et aussi parce que celui-ci ne s'i'tait pas prononéé pour lui quand il
briguait le consulat; ce fut lui qui détermina Brutus, son beau-frère, à se
mettre à la tète des conjurés (44).
;35, Rang. — Du quai-tior où ils logent, du mot d'ordre, do leur place dans
les rangs.
616,
1, Macédoine. — .Justin, IX, 6. — Pausanias, jeune gentilhomme macé-
donien, outragé par Attale, grand de Macédoine qui, dans un foStin, l'a-
vait enivré pour abuser de lui, poignarda Philippe, quelque temps après,
pour se venger de ce qu'il n'avait pu obtenir, de lui, justice de cette of-
fense; Olympias, mère d'Alexandre le (îrand, que Philippe venait de r('>-
pudier pour épouser la sœur d'Attalo, fut soupçonnée d'avoir- poussé à ce
meurtre (336).
16, Consent. — Qui se sentirait coupable de ce fait.
22, Vice. — On peut même dire que les Livres saints n'y sont pas abso-
lument opposés : <■ Donnez à ceux qui sont affligés, lit-on aux Proverbes,
XXXI, 6 et 7, une liqueur qui soit capable de les enivrer, et du vin à
ceux qui sont dans l'amertume du cœur; qu'ils boivent et qu'ils oublient
leur pauvreté et perdent pour jamais la mémoire de leur douleur. »
25, D'autant. — C.-à-d. de se donner liberté de boire autant qu'ils veulent.
La suppression de ce complément « d'autant " amènerait un sens tout
opposé et signifierait s'exempter de boire.
25, L'ame. — Ce reproche de s'adonner à l'ivrognerie a été adressé à maints
hauts personnages, entre autres : à Philippe de Macédoine; à son fils
Alexandre; à l'empereur Trajan; à Michel III, empereur d'Orient (842 à 867),
surnommé l'Ivrogne; à Selim II, empereur ottoman, le vaincu de Lé-
pante, auquel fut donné ce môme sobriquet: à Pierre le (irand de Kussio
(1672 à 1725).
F.432 ESSAIS DE MONTAIGNE.
27, Ferunt. — Ce qui ne veut pas dire que Socrate s'enivrât; aussi bien
sous ce rapport que sous tous autres, ses mœurs étaient irréprochables, et
rien, dans les accusations portées contre lui par ses ennemis, ne porte à
supposer le contraire. V. III, 690.
■*'S. Ce censeur... autres. — El la vraye Image de la verlu sloique (vai-. des
éd. aut.).
30, Vertus. — .I.-H. Rousseau a ainsi paraphrasé ces deux vers d'Horace : ^
La vertu du vieux Galon, Était souvent, nous dit-on,
(liiez les nomains tant prônée, De falerne enluminée.
« On a reproche à Caton l'Ancien de s'enivi'er; ceu.x qui lui adressent ce
reproche me feront plus facilement voir une vertu qu'un vice chez Ca-
ton; il réjouissait par le vin son esprit fatigué des affaires publiques. »
Sénkque. — Pi.uTAKQUE ne scmblc pas admettre cette sorte de réhabilitation :
« Au coniinencement, dit-il, Caton l'Ancien ne consacrait que fort peu de
temps à ses repas, ne buvant qu'un seul coup ; après quoi, il se levait; mais,
dans la suite, il prit plaisir à boire et passait souvent une grande partie de
ses nuits à table. » — V. N. II, 586 : Caton le Censeur.
oii, Cyrus. — Pi.utakque, Artaxerxès, 2. — Il s'agit ici de Cyrus le Jeune. V.
N. I, 324 : Perses.
36, Paris. — Célèbre par son avarice, qui lui valut de Buchanan une épitaphe
en latin dont voici la traduction : • Ci-gît Silvius qui jamais ne donna rien
gratis; mort, il gémit de ce que, gratis, tu peux lire ceci. » — Silvius pa.s-
sait pour l'homme de son temps parlant la langue latine avec le plus do
pureté et d'élégance.
38, S'engourdir. — C'était aussi, paraît-il, l'avis d'Hippocrate. Payf.n. —
L'éd. de 8<S aj. : Platon luy attribue le mesme effect au sendce de l'esprit.
.39, Affaires. — Hékodote, I, 133, et autres auteurs. — Les Perses discutaient
bien le verre en main des affaires sérieuses, mais sans prendre de décision,
laquelle était toujoure remise au lendemain où la discussion reprenait
alors qu'ils étaient de sang-froid.
618,
27, Lots. — Dix bouteilles, huit litres.
34, Ressiners. — Goûter, collation qu'on fait après le diner; vient de re-
caenare, fait de cwna, dîner, le repas du milieu de la journée. — « U n'est
desjeuner que d'escholiei-s; dipner que d'advocats; ressiner que de vigne-
rons; souper que de marchands. •
40, L'amour. — « Sans Cerès et Bacchus, Vénus est languissante. » Térence,
Eunuque; contradiction qui n'est qu'apparente, Montaigne ne parlant ici
que de l'abus du vin poussé jusqu'à l'ivresse.
620,
6, Marc Aurele. — Cette histoire de Marc-Aurèk ou \' Horloge des Princes,
parue en 1629 à Valladolid (Espagne), est présentée par les critiques de
l'époque comme un tissu d'inventions indignes d'un écrivain qui se res-
pecte et a fortiori d'un évoque (Gueraha, qui en était l'auteur, était évoque
de Cadi.x); cet ouvrage, nonobstant très estimé en Espagne par ses contem-
porains, a été traduit en français deux ans après sa publication et en plu-
sieurs autres langues.
15, Barre. —Jeter la barre; cet exercice a été remis en pratique depuis
qu'en ces derniei-s temps la gymnastique de chambre est en faveur; c'est
ce qui s'exécute soit avec des haltères, soit des boules accouplées par une
barre.
16, Plombées. — Madame i>e Genlis faisait porter de semblables souliers à
ses élèves Louis-Philippe d'Orléans, devenu l'oi de France, et sa sœur Madame
Adélaïde.
16, Prim-saut. — De son agilité; littéralement du premier saut. — Prin ou
prim est un vieux mot qui signifie premier ; il nous reste dans « printemps ••.
iNOTES. LIV. Il, CH. II. VOL. I, PAG. 620. F.433
primum tempus. De primsault est venu « prirasaultier », dont Montaigne
se sert ailleurs en pariant de lui-même et qui, encore on usage, signifie un
homme de prompte décision, prenant parti d'après sa première impression
(V. X. II, <>4 : Primsautier).
17. Miracles. — Au nombre de ces petits miracles, on peut ranger la nais-
sance de son dernier fils Mathecoulom, né le -20 août 1560, aloi-s que lui-
même était du 29 septembre 1495; ce Benjamin avait donc été engendré à
plus de 64 ans.
18, Alaigresses. — De notre agilité, ou plutôt de notre peu d'agilité; vient
du latin alacritas, qui a même sens qu'agililas.
21, Propos. — De la chasteté.
22, Nommée. — Qui méritât d'être mal famée, qui eût mauvaise réputation.
30, Italie. — Le père de Montaigne, Pierre Eyquem, écuyer, seigneur de
Montaigne, était né à Montaigne en 1495 et }• mourut en 1568. 11 demeura
plusieui-s années aux armées, fit la guerre en Italie sous Charles VII, fut
maire de Bordeaux de 1554 à 1556; occupa un siège de conseiller à la cour
des aides de Périgueux en 1.554, quand cette cour fut créée, et le transmit
l'année suivante à son fils; en cette même année 1554, il reconstruisait
l'habitation de son domaine qu'il fortifia, la mettant en état de se défendre,
ce qui n'était pa.s superflu, à cette époque où pour sa sûreté il fallait
compter plus sur soi-même que sur les pouvoirs publics. Pierre Eyquem
avait épousé en 1528 Antoinette de Louppes qui mourut en 1597; il en eut
huit enfants, cinq fils dont Michel Montaigne était l'aîné et trois filles: elle
était protestante, lui-même était catholique; deux de leurs enfants (un fils
et une fille) furent protestants.
30, Bouteilles. — Au sujet qui nous occupe, qui a ti'ait à l'ivrognerie.
33, Plaisir. — Nalurel (add. de 80).
622,
3, Prix. — Quoique plus réservé ici que dans d'autres passages de son
livre, Montaigne n'en reste pas moins très Compréhensible.
10, Manger. — Les Orientaux ne boivent pas pendant les repas, mais seu-
lement lorsqu'ils ont fini; ils étaient étonnés de voir, en Egypte, les fran-
çais faire autrement. Payen.
13, A mesme. — Aussitôt que, lorsque.
15, Anacbarsis. — Diogène L.\erce, I, 104.
lît, Platon. — Lois, liv. II.
20, Ans. — Une loi, portée par Zaleucus, défendait aux Locriens, sous peine
de mort, de boire du vin, à moins que ce ne fût comme médicament et
sur l'ordre d'un médecin. — A Marseille, il en était une prescrivant à la
femme de ne boire que de l'eau. — A Rome, le vin était interdit aux es-
claves, aux femmes libres et aux adolescents jusqu'à trente ans; une dame
romaine ayant forcé le tiroir où son mari serrait la clef du vin, fut con-
damnée à mourir de faim; Mécénius tua la sienne pour en avoir bu et fut
absous. Salmuth.
25, Loix. — Liv. II, vers la fin.
3,'>, Publiques. — « Ce n'est point aux rois de boire du vin, ni aux puissants
de rechercher les liqueurs fennentées, de peur qu'en buvant ils n'oublient
la loi et ne faus.sent le droit de tous les malheureux. » Livre des Proverbes,
XXX, 4 et 5.
624,
' 1, Enfants. — Cette exception concernant aussi bien les femmes que les
liommes, pour observer le précepte de Platon, ils auraient donc dû se
donner le mot, quand ils étaient dans cette intention. Coste.
.1, Pur. — DlOGKNE Laerce, II, 120.
5, Arcesilaûs. — Diogène Larhce, IV, 44. — « On assure que Solon et Arcé-
silas se livraient au plaisir du vin, » dit aussi Sénèque.
7, Sapientise. — Citation donnée comme parodie.
17, Amoureux. — Lucrèce était sujet à des accès de fi-énésie, maladie qui
provenait, dit-on, d'un philtre que lui avait fait prondiV une maîtresse
essais de MONTAIGNE. — T. IV. 28
F.434 ESSAIS DE MONTAIGNE,
jalouse; il finit par so donnor la mort dans un de ses accès; il avait 44 ans.
:>3, Desespérée... enrouée. - Les éd. ant. port. : vaincue du mal, au moins
oomme estant en vne aspre meslée.
35, Putet. — Montaigne détourne ici le sens de ce vers de Térence pour
l'adapter à sa pensée.
:!G, Descharger. — Dispenser, exempter.
11, lusques là. - Plutarque, Publicola, 3 — Le (ils de Brutus et son neveu
avaient conspiré pour le rétablissement des Tarquins (509); celui de Man-
lius Torquatus avait, contre son ordre, dans une guei-re contre les Latins,
accepté un défi d'un ennemi et l'avait vaincu en combat singulier (337).
Tous deux, le premier consul, le .second dictateur, prononcèrent eux-mêmes
la sentence de mort et la firent exécuter en leur présence. V. N. I, 311 :
Reng. — Au dire de Plutarque, Darius, roi des Perses, aurait agi comme
fit Brutus à l'égard de son fils Ariobarzan qui entretenait des intelligences
avec Alexandre.
626,
4, Secte. — Celle des Stoïciens. V. N. I, 18 : Stoiques.
G, Moite. — Celle d'Épicure. V. N. I, 30 : L'aduenir.
11, Pilez. ~— DiÔr.KNE Laeuce, IX, 58.
14, L'autre. — C'est ce que Prudence, liv. Des Couronnes, hymne II, 401,
fait dire à S. Laurent. ^ Celui-ci était diacre tt trésorier de l'Église de
Rome, quand éclata en 258 la persécution contre les Chrétiens de l'empe-
reur S^alérien. 11 refusa de livrer le trésor dont il était gardien et le dis-
tribua aux pauvres. Pour l'en punir, il fut d'abord déchiré à coups de fouet
par le bourreau, puis attaché à un gril sous lequel étaient des charbons
ardents.
14, losephe. — De Maccab., 8.
23, Acharne les. — Ces paroles, sans être textuelles d'aptes le récit qu'en fait
l'historien, qui donne en grand le supplice des sept frères Macchabées et
de leur mère martyrisés (167) pour s'être refusés à manger de la viande
de porc proscrite par la religion juive à laquelle ils appartenaient, repro-
duisent ce que dans l'ensemble chacun d'eux a dit et que Montaigne met
dans la bouche d'un seul.
27, 'Hffôeisiv. — Ari-u (Jeli.e, IX, 5; Diot.i':.\E Laerce, VI, 3; Montaigne traduit
ces mots avant de les citer.
32, Luy. — Sénèque, Epist. 66 et 92, etc. — Ce passage confirme au sujet
d'Epicure ce que relate la note citée plus haut, I, 30 : L'aduenir, et va à
rencontre du reproche de sensualité que, par ignorance, on est porté à lui
adresser.
628.
1, Siège. — Lorsqu'elle est dans son état normal.
8, Premiers. — On conte qu'en 1756, loi's de la prise de Port-Mahon par le
duc de Richelieu sur les Anglais, forteresse qui passait pour imprenable,
ceux-ci manifestant leur étonnement que l'assaillant eût pu escalader la
muraille rocheuse qui fermait l'enceinte là où elle avait été forcée, les
mêmes qui avaient pénétré dans la place par ce point, essayèrent de re-
nouveler cet exploit, mais n'étant plus surexcités parla chaleur du combat,
ne purent y parvenir.
10, Dict. — Dans son dialogue de Vlun.
12, Aristote. — Problem., 30.
13, Folie. — Les éd. ant. port. : fureur.
17, Argumente. — Dans le Timée.
CHAPITRE III.
Il n'est question qu'à la fin de ce chapitre de ce qui fait l'objet de son
en-tête, qui ne s'expliquerait guère, par ce seul fait, si, se rappelant ce pas-
sage )tle Str^bon : « C'est un bel usage de l'île de Ceos que, lorsqu'on ne
NOTES. LIV. II, CH. III. VOL. I, PAG. 628. F.43a
peut plus vivre avec honneur, on ne vivo pas misérable », on ne se disait que
Montaigne a tout simplement intervei-ti l'ordre de son sujet et l'a commenté
avant de l'exposer.
24, Cathedrant. — Docteur, celui qui enseigne en chaire.
21, Volonté. — Les éd. ant. port. : sacro-sainle volonté.
20, Contestations. — Dans ce chapitre, l'auteur penche visiblement pour le
suicide; mais ne voulant pas mettre les théologiens contre lui, il débute
en rééditant son adhésion à tout ce qui, chez eux, est de princ|i>e, ainsi
qu'il agit chaque fois qu'il va émettre une proposition tant soit peu hardie
et en opposition avec les idées en cours, déclarant que telle n'est ])as sa
croyance et qu'il ne fait qu'enquérir et débattre. — .I.-.I. Rousseau, dans ses
fameuses lettres pour et contre le suicide (Nouvelle Héloïse, liv. II, lettres
1 et 2), a puisé ici plusieurs des arguments qu'il met en avant.
26, Philippus. — En 338, après la bataille de Chéronée. — Cet exemple et
les suivants sont tirés de Plutau^ue. Apophth. des Lacédémoniens.
:"î(). Agis. — Agis I, roi de Sparte.
• Qui sait mourir, n'a plus de maître. » Sit.Lv Prudhomme.
;{1, Viiire. — Vraiement (add. des (kl. ant.).
630,
3, Mesme. — Les Romains avaient rendu un décret autorisant à se tuer
quiconque auijuel la vie avait cessé de plaire. — Montesquieu, .I.-.I. Rous-
seau se prononcent en faveur du suicide; Madame de Staei, le présente
comme un acte héroïque. V. N. I, 632 : Contraste.
7, Maison. — Son maître lui demandait ■< le pot à pisser », l'enfant refusa;
son maître insistant, il préféra se tuer (|ue d'accomplir ce qu'il considérait
comme déshonorant.
1(1, Volontiers. — En 330, à la suite du refus qu'ils faisaient de lui donner
ciiKlMante de leurs enfants en otage. V. N. I, 226 : Païs.
12, Dit. — Celui qui parle ainsi, c'est Sé.ni^ique, Epist. 70.
1"), Romains. — Tacite, Annale.s, XIII, 56. — Boiocalus, chef d'une peuplade
de Germains, revendiquait des terres disponibles, pour prix de sa fidélité
envers Rome; déçu de sa demande, il (it. cette réponse et tenta d'acquérir
parla force ce qu'il ne pouvait obtenir autrement; mais le sort des armes
lui fut défavorable, lui et ses gens furent exterminés (58).
25. Maladie. — La plupart dé ces idées sont de Sé.nèque, Epist. di) et 70.
41, Médiane. — C'est la veine qui paraît dans le pli du coude.
632,
2, A tuer... insensibles. — Elvescut depuis ayant cette partie du corps morte
(var. des éd. ant.).
:J, Insensibles. — Pline, Nal. liist., XXV, 3. — Cicéron le cite comme un
critique émérite qui distinguait aisément de quels auteurs étaient tels ou
tels vers qu'on lui citait, tellement il était fait à la manière de chacun,
(j, Stoïciens. — Ckéron, De Finibus, III, 18.
11, Hegesias. — Diogène Laekce, 94.
20, Speusippus. - Diogène Laerce, IV, 3.
22, Contraste. — Eurii>ide attache au suicide une sorte de (létrissure; — Pv-
iiiA(;0RE dit que l'homme est à son poste comme une sentinelle et qu'il ne
peut l'abandonner sans l'ordre de son général; — Platon érigeait en prin-
cipe que nous ne devons pas quitter le poste où les dieux nous ont placé;
— Aristote le tient pour une lâcheté ; — Cicéron met ces paroles dans la bou-
che de Paul-Émile, parlant à Scipion, son fils adoptif : « Vous devez cons-
tamment retenir votre âme dans le corps où elle a son poste, autrement
vous seriez coupable de rébellion envers la bonté divine » ; — Martial opine
dans le même sens dans plusieurs de ses épigrammes : ■< 11 est bien facile
de mépriser la vie, quand on est dans le besoin; le véritable courage con-
siste à soutenir dignement sa misère ». « Tandis que Fannius fuyait son
ennemi, il se tue lui-même; n'est-ce pas, je vous le demande, une étrange
F.436 . ESSAIS DE MONTAIGNE.
folie, que de se tuer pour échappera la mort? » « Je n'approuve pas un
homme qui achète la renommée au prix de son sang, qu'il lui est aisé de
répandre; j'estime celui qui peut se rendre digne de louanges sans se
donner la mort. » — Sénèque : « Mourir ainsi, c'est s'avouer vaincu. » —
S. Augustin dit que c'est à tort qu'on a exalté Lucrèce, Caton et d'autres
qui se sont abandonnés au suicide. — Napoléon : « S'abandonner au cha-
grin sans y résister, se tuer pour s'y soustraire, c'est se retirer du champ
de bataille avant d'avoir vaincu. » — Lamartine : « Quant à moi, je serais
déjà mort mille fois de la mort de Caton, si j'étais delà religion de Caton;
mais je n'en suis pas, j'adore Dieu dans ses desseins; obéir à Dieu, voilà
la vraie gloire; mourir, c'est fuir. » V. N. I, 630: Mesme.
er II est plus grand, plus difficile,
De souffrir le malheur que de s'en délivrer, t M""= Deshodlières.
22, Plusieurs. — Les éd. ant. aj. : outre l'authorilé qui en défendant Vliomi-
cide, y enueloppe l'homicide de soy-mesme : d'autres philosophes...
' 30, Caton. — V. N. III, 324 : Regulus; N. II, 424 : Premier.
634,
28, Vsque. — Ssepc vsque (var. de 80).
32, Loix. — Liv. LX.
42, Desdaigner. — L'assertion n'est pas établie d'une manière absolue. Cer-
tains cas de suicide semblent avoir été constatés chez quelques animaux.
Outre ce qu'on dit du scorpion qui, entouré de charbons ardents, se pique
de son propre dard pour se donner la mort, Montaigne donne comme exem-
ple d'attachement (II, 172) le fait de deux chiens se jetant d'eux-mêmes
dans les bûchers où brûlaient les corps de leurs maîtres. On cite comme
s'étant laissé mourir de faim le cheval de Nicomède, roi de Bithynie, après
que celui-ci eut été tué (N. II, 184 : Ora); et Varron en mentionne (N. II,
170 : Parenté) un autre qui se serait de lui-même précipité et brisé la tête,
parce qu'on venait de lui faire sailhr sa mère.
636,
5, 'EîaYwyrjv. — « Sortie raisonnable » ; c'était l'expression employée par les
Stoïciens. Diogène Laerce, VIII, 130.
1 1 , Milesiennes. — Plutarque, Des Faits vertueux des femmes.
11, Reliques.— Restes; du latin reliquiae qui a même signification. Reliques
en français ne se dit plus guère que des saints quç l'on conserve et propose
à la dévotion des fidèles.
15, Ville. — En Allemagne, de 1880 à 1903, on a relevé 1.152 cas de suicide
de garçons et de fillettes dans les écoles, dont 812 âgés de moins de 15 ans,
soit 44 par an, sur lesquels un tiers par peur de punition.
28, Fortune. — Plutarque, Agis el Cléoméne, 14. — Cléomène III, roi de
Sparte, qu'il s'était aliéné par ses efforts pour y rétablir les institutions de
Lycurgue, battu à Seliasie (222) par Antigone roi de Macédoine, s'embar-
quait pour passer en Egypte où il allait chercher un asile et sohiciter des
secours, quand eut lieu entre lui et Therj^cion, un de ses plus fidèles parti-
sans, le fait dont il est ici question. Trois ans après, malgré toute sa téna-
cité, Cléomène suivit l'exemple de Therycion, le roi d'Egypte qui l'avait
accueilli étant mort et son successeur ayant manifesté à son égard des dis-
positions tout autres.
34, Ancien. — Sénèque, Epist. 13.
638,
9, Si. — De tel biais (var. des éd. ant. à 88).
10, Inconuenient. — En 67, alors que Josèphe, gouverneur de Galilée au
nom du grand conseil de Jérusalem en insurrection contre les Romains, se
trouvait à Tarichée en butte à une sédition excitée contre lui, sous prétexte
qu'il s'était approprié des prises qui provenaient d'extorsions et que, pour
cette cause, il avait fait rendre à ceux qui en avaient été dépouillés. Etant
parvenu à échapper par la fuite à ceux qui avaient dessein de le tuer, puis
NOTES. LIV. II, CH. III. VOL. I, PAG. 6.38. F. 437
à so faire ocoutor par le peuple, il finit par le mettre de son côté. Josèphe,
De Vita sua.
13, L'occasion. — A la première bataille de Philippes (en Macédoine) qu'après
la mort de César, Antoine et Octave livrèrent à Cassius et à Brutus qu'ils
poursuivaient, Cassius, qui commandait à l'aile gauche, la voyant plier et
cro\'ant à tort Brutus battu aussi de son côté, se perça de son épée. Un
mois après, Brutus, vaincu en ce même lieu où il venait d'être victorieux,
en fit autant (42). On dit qu'en mourant, il s'écria : « Vertu, tu n'es qu'un
mot -; mais cette parole désespérante n'a rien d'authentique. V. N. II,
6^6 : Brutus.
17, Victoire. — Moxtllc, Commentaires. — En 1544, dans le courant de l'action,
le duc d'Enghien, voulant arrêter le gros de l'infanterie ennemie, qui, à un
moment donné, devenait menaçant, le chargea à la tête dé sa gendarmerie,
mais ne parvint ni à le rompre, ni à l'arrêter, et éprouva des pertes énor-
mes : « Dans son désespoir, M. d'Angujen, dit Montluc, voyant ses gens
de pied en fuite et qu'à peine lui restait cent chevaux pour soutenir le
choc de cette colonne de cinq mille piquiere suivant toujours au grand trqt
leur victoire, deux fois se donna de l'espée dans son gorgerin, se voulant
offenser soi-même. » Son acte do désespoir, comme l'effort de cette infan-
terie adverse, n'eurent pas de suites et la victoire se prononça en notre faveur.
24, Tuer.— Pline, XXV, 3, dit qu'il n'y a guère que trois sortes de maladie
pour lesquelles on se tue : la pierre, les douleurs d'estomac et les douleurs
de tète. Quant au droit de se tuer, qu'elles peuvent conférer, il n'en parle
pas; du reste, les éd. ant. port. : accouslumé, au lieu de : « droit ».
"25, jRetenùe. — Maladie dont Montaigne était atteint, c'est pourquoi il la
cite à l'exclusion des deux autres que mentionnaient cependant les éd. ant. :
la seconde, la douleur d'estomach : la tierce, la douleur de teste.
25, Seneque. — Epist. 58.
31, Corps. — TiTE-LivE, XXX VII, 46. — En 190; les Étoliens avaient été
défaits par le consul Acilius Glabrio; Damocrite échappa de la sorte à la
honte de figurer au triomphe qui fut décerné au vainqueur.
35, Couurir. — -TrrE-LivE, XLV, 2G. — En 167; Antinoiis et Théodotus, tous
deux citoyens de Passaron, ville d'Épire, s'étaient compromis au point de
no pouvoir espérer trouver grâce auprès des Romains.
42, Siens. — Goze, petite île à l'occident de celle de Malte, dont elle n'est pas
très éloignée; elle avait été cédée avec cette dernière en 1530, par Charles-
^ Quint, aux Chevaliers de S.-Jean de Jérusalem, lorsque l'île de Rhodes leur
avait été enlevée par les Turcs; ceux-ci et les corsaires d'Afrique la rava-
gèrent à diverses reprises, en particulier en 1551, année joù se passa le fait
que relate Montaigne; ils l'abandonnèrent peu après, ayant préalablement
rasé le château.
640,
1, Antiocbus. — Antiochus Épiphane, roi de Syrie, voulant fusionner les
peuples sous sa domination, défendit aux Juifs de circoncire leurs enfants;
ceux qui contrevenaient étaient crucifiés, leurs femmes pendues à leur
côté avec leur enfant pendu au cou (167). Josèphe, Antiquités judaïques,
Xll, 5, 4.
12, Curée. — Montaigne renverse ici les rôles: Drusus Libon délibérait s'il
se donnerait la mort ou s'il l'attendrait; Scribonia lui demanda quel plai-
sir il trouvait à faire la besogne d'un autre. Cette observation, dit Sénèque,
Epist. 70, ne persuada pas Libon; il se tua et, ajoute-t-il, il eut raison.
30, Diuine. — Macchabées, II, 14. — En l'an 162; Nicanor était général de
Démétrius 1, roi de Syrie.
642,
1, Pelasgia. — Pelagia était d'Antioche (Asie Mineure) et était âgée de
15 ans seulement. Surprise chez elle par l'édit de persécution et mise en
demeure de choisir entre sa virginité ou sa religion, elle obtint des soldats
qui avaient envahi sa demeure un répit pour mettre ordre à sa toilette,
promettant de les satisfaire; et, montant à l'étage supérieur, elle se précipita
F-438 ESSAIS DE MONTAIGNE.
})nr une fenêtre. Sa more et ses deux sœurs s'étaient enfuies; sur le point
d'être atteintes, elles se dirigèrent vers la rivière qui était proche, y entrè-
rent comme pour s'y baigner, et s'avançant jusqu'à ce qu'elles perdissent
pied, s'y noyèrent volontairement. S. Amhkoise, De Virg., III.
I, Sophonia. — En 311, loi-s de la persécution à laquelle mit fui la victoire,
.sous les murs do Rome, de Constantin, qui assura le triomphe définitif du
Christianisme (321). Kuiin, lïist. ccrlés., VIII, 27; Elskbe, Hisl. ccclés., VIII,
M, toutefois celui-ci ne la nomme pas, quoique ce soit la même.
1.'), Marot. — « 1)0 ouy et nenny », poésie de Cl. Mauot :
• Un doulx nenny, avec un doulx sourire,
Est tant honnestel II vous le faut apprendre.
Quant est d'ouy; si veniez à le dire,
D'avoir trop dict je vouldrois vous reprendre;
Non que je sois ennuyé d'entreprendre
Le duic^t dont le désir nie poiiict;
Mais je vouldrois qu'en me le laissant prendre.
Vous me disiez : Non, vous ne l'aurez point. »
18, Passé. — T.^CME, Ann., VI, 48. — En 36. Aruntius, impliqué dans un
procès d'adultère imaginé pour le perdre, se tua, alors que ses amis cher-
chaient à lui persuader qu'il s'en tirerait en temporisant, disant que
l'avènement à l'empire de Caligula lui faisait prévoir un esclavage pire que
celui que Tibère avait fait peser sur eux et (|u'il voulait mettre fin à la fois
au passé et à l'avenir. L'estime en laquelle on le tenait était telle, que l'em-
pereur Auguste, près de mourir, l'avait déclaré digne du rang suprême.
18, Proximus. — TAcrrE, Ann., XV, 71.
25, Prinse. — S'étant emparé du camp des Perses, Spargapisez et ses Scy-
thes avaient fait main basse sur ce qui s'y trouvait, s'y étaient enivrés et
endormis, si bien que surpris parleurs ennemis, ils avaient été faits prison-
niers ; revenu à lui, et appi'onant le fâcheux état en lequel il se trouvait.
Spargapisez .sollicita qu'on lui ûtât .ses liens et se tua (530). IIéiiodote, I.
28. Cbeuance. — On comprenait sous ce nom l'ensemble de tout ce que quel-
qu'un possédait.
35, Soy-mesme. — En 475, pendant la deu.xième guerre médiquo, lors des
opérations qui suivirent la bataille de Platée. Hérodote, VII.
644,
16, Feu. — Le fait s'est passé sous la domination portugaise, qui, commen-
cée en 151 1, a pris fin on 16^11, date à laquelle les Hollandais se substituè-
rent aux Portugais pour faire place en 1824 à l'Angleterre à laquelle ce
territoire appartient actuellement.
20. Compagnie. — Tacite, Ann., VI, 29. — Scaurus s'était aliéné Tibère par
une tragédie dont le sujet (Atrée)et quelques vers lui avaient été dénoncés
comme une critique; ce fut la cause d'une accusation de lèse-majesté, que
l'on renforça en y joignant une imputation d'adultère avec Livie, la mère
de l'empereur, et de sacrifices magiques. A l'instigation de sa femme, qui
partagea sa mort, il prévint son jugement, en .se tuant (34). — Labéon,
gouvei'neur de Mysie (Asie Mineure), était accusé de malversations; Tibère
lui lit signifier qu'il lui interdisait sa maison; c'était une de ses formules
de disgrâce et de proscription. Devançant la venue du bourreau, Labéon
se fit ouvrir les veines; Paxéa, sa femme, imita son exemple (34).
21, Nerua. — Tacite, Ann., VI, 26.
34, Garde. — « Une femme ne cèle que ce qu'elle ne sait pas. » Proverbe. —
Caton l'Ancien disait qu'il fallait se repentir de trois choses seulement : vr-
véler son secret à une femme; passer un jour dans l'oisiveté; aller par mer
dans un endroit accessible par terre.
35. Corps. — Auguste avait exprimé devant Fulvius ses regrets de laisser
l'empire à Tibère son beau-fils et l'idée que, parfois, il avait de revenir sur
sa détermination. Fulvius rapporta le fait à sa femme, et celle-ci à Livie.
femme d'Auguste et mère de Tibère, qui vint récriminer. Aussi, le lendemain,
NOTES. MV. II, CH. III. VOL. I. PAG. 644. 439
quand Fulvius vint le s.alncr, lui disant suivant sa coutume : ■• Dieu te
garde, César », Auguste lui répondit : « Dieu te fasse sage, Fulvius ». II
comprit de suite par là que lui d'abord, sa femme ensuite, avaient trop
parle. Plutarque, Du trop parler, !). — Tacite, Ann., I, 5, rapporte égale-
ment le fait; mais il l'attribué à un nommé P'abius Maximus et ne dit pas
(|ue sa femme se tua. mais seulement qu'à ses funérailles on l'entendit
s'accuser d'être la cause de sa mort.
36, Virius. — Tite-Live. XXVI, 13-15. — Après la défaite de Cannes, Capoue,
* à l'instigation de V'ibius Virius, s'était détachée de Rome et avait ouvert
ses portes à Annibal. Trois ans après, les Romains vinrent mettre le siège
devant cette ville; il durait depuis deux ans déjà, et ils avaient dû l'inter-
rompre à diverses reprises, mais enfin la résistance était à bout, quand Vi-
bius, pour échapper à leur vengeance, prit la détermination dont il est ici
que.stion (211).
646,
19, Delà. — De Capoue, ou de la Campanie. comme dit TriE-LivE, Ann.,
XXVI, 1.^).
33, Consul. - Lors de la reprise de Capoue par les Romains (211). — D'a-
près une autre version, Jubellius Taurea ne se serait pas tué lui-même;
compris au nombre de ceux condamnés à périr, il aurait simplement à ce
moment apostrophé le consul Quintus FiUviûs. Tite-Live rapporte égale-
ment qu'au moment où le supidice de ces sénateurs s'apprêtait, on remit
au consul un courrier an-ivanl de Rome, contenant un sénatus-consulte
leur faisant grâce, et que Fulvius, le pressentant, remit à l'ouvrir jusqu'à
ce que l'exécution fût terminée.
39, Vie - Ce fait semble se rappoi-ier non à une ville des Indes, mais à
celle d(,'S Marmaréens, peuplade qui occupait sur les frontières de la Lycie
un rocher foi-lillé. Ayant attaqué l'an-ière-garde d'Alexandre, celui-ci revint
sur .ses pas et mit le siège devant leur forteresse; convaincus bientôt de
l'inutilité de toute jésistance, .ses défenseurs décidèrent de tuer enfants,
femmes et vieillards, de mettre le feu aux maisons, d'exécuter ensuite une
sortie et de se sauver dans les montagnes voisines, ce qu'ils firent (334).
DiODOIlE DE SlCM.E, XXVII, 18.
648,
17, Suiuoit. — En 206. Astapa était assiégée par Marcius, chevalier romain,
qui, après la mort des ileux frères Scipions, avait pris le commandement de
l'armée (V. I, I-.J et N. Frères); fidèle aux Carthaginois et placée sur les
communications de l'armée romaine, elle en interceptait les convois. Tite-
Live, XXVIII, 22,23.
24, Soy. — En 348. Abydos, auj. un des forts des Dardanelles, était une co-
lonie d'Athènes; la guerre entre Philippe roi de Macédoine et les Athé-
niens avait été amenée i)ar la mise à mort par ceux-ci de deux Acarnaniens
(l'Acarnanie était située entre l'Étolie et l'Épire), peuple allié de Philippe,
qui par suite d'une erreur dv; leur part, bien que non initiés, étaient entrés
dans le temple de Cérès pendant la célébration des mvstères d'Eleusis.
TiTE-I.ivE, XXXI, I7et 18.
27, Séparées. -— Que lorsqu'elles ont été prises séparément.
28, lugements. - C'est exactement l'idée qui a cours aujourd'hui sur la
mentalité des foules et la modification qu'y subissent, momentanément
mais inéluctablement, les facultés intellectuelles de quicon(}ue s'v trouve
mêlé. V. N. I, 488 : Roy.
650.
2, Testament. — Tacite, Ann., VI, 29. — Au .lapon, les nobles qui sont
condamnés à mort peuvent encore, dit-on, par faveur spéciale obtenir de
s'exécuter eux-mêmes par le harikiri, privilège des hautes classes, qui
consiste à s'ouvrir le ventre et, simultanément, être décapité par un ami,
suivant un rite particulier; mourant de la sorte, ils évitent eux aussi la
confiscation de leurs biens qui passent à leurs héritiers.
4, lesus-Christ. — Epist. ad P/tUipp.. I.
F. 440 ESSAIS DE MONTAIGNE.
5, Liens. — L'pisl. ad Rom., VII.
5, Ambraciota. — D'Ambracie. Cicéron, Tusc, l, 34.
6, Phsedon. — Un des dialogues de Platon, ainsi appelé du nom d'un des
disciples de Socrate les plus fidèles à sa doctrine; dans le Phédon, il est
traité plus particulièrement de l'immortalité de l'àme. V. N. II, 72: Platon.
11, Soissons. — En 1250, quand, après la bataille de Mansourah, l'armée se
i-etirait sur Damielte, retraite dans laquelle saint Louis fut fait prisonnier.
16, Terres. — L'Amérique. Cela se voit aussi dans l'ancien continent : au
.Japon, aux Indes; dans cette dernière contrée, au royaume d'Aracan, on
promène chaque année l'idole Guiay-Pora dans un grand char sous les
roues duquel les plus dévots du pays se font écraser.
25, La iustice... volontaires. — Ce double (var. des éd. ant.).
31, Soy. — Yalère Maxime, II, 6, 7. — Ce désir de mort volontaire y était
admis pour cause soit d'adversité, soit de prospérité : l'une si elle était de
durée prolongée, l'autre de peur qu'elle ne vint àces.ser; le fait relaté dans
l'alinéa suivant rentre dans ce dernier cas.
31, Ailleurs. — Suivant Amundsen, explorateur moderne (1900), le suicide
est permis chez les Esquimaux.
35. Compagnie. — Yalère Maxime, 11,6, 8. — Le fait se passait en 51.
652,
19, Mercure. — Dieu de l'éloquence, du commerce et des voleurs; avait
aussi la mission de conduire les âmes aux Enfers, où toutes, indistincte-
ment, allaient après la mort: les unes aux Champs Eh'sées, séjour des bons;
les autres au Tartare, réservé aux méchants.
25, Hyperborée. — Nation que Pi.ixe, Hist. nat., IV, 12, place au delà de
l'Océan glacial arctique qu'il nomme Aquilon glacial, où, dit-il, les jours
sont de six mois, les nuits de même durée; nation heureuse, ajoute-t-il, où
la discorde est ignorée ainsi que toute maladie, où on ne meurt que par
satiété de la vie.
31, Incitations. — Cicéron, Tusc, II, 27. — Cette opinion est conforme à la
doctrine des Stoïciens, qui qualifiait de lâches ceux qui s'attachaient
quand même à la vie, lorsque les infirmités les accablaient ou qu'ils
étaient l'objet d'infortunes flétrissantes. — En somme, indépendamment des
avis particuliers, dans un sens ou dans un autre, déjà cités (V. N. I, 630 :
Mesme; N. I, 632: Contraste), d'une façon générale : La loi de Moyse ré-
prouve le suicide; les suicidés chez les Hébreux étaient privés de sépul-
ture ou tout au moins enterrés de nuit, la Bible mentionne du reste fort
peu de suicides. Les anciens livres sacrés des Hindous, les Védas, le con-
damnent, mais la religion de Brahma l'encourageant à titre de sacrifice
religieux, le nombre de ceux qui, dans les Indes, s'immolent ainsi par fana-
tisme est inouï. En Chine, le suicide est fréquent; au Japon, on s'en fait
souvent un point d'honneur. Zoroastre le condamne; de même Mahomet,
et les suicides sont très rares chez les Musulmans. Dans l'antiquité grecque
où Socrate en est un adversaire déclaré, il se produit fréquemment ; et
quoique condamné en principe par les lois, comme le Sénat à Marseille,
l'Aréopage à Athènes l'autorisait quand il en approuvait les motifs. Nous
connaissons l'opinion des Stoïciens ; les Sceptiques, eux, se désintéressaient
de la question. A Carthage, les fluctuations de la politique firent qu'il était
de pratique courante. A Rome, rare au début, il l'est beaucoup moins vers
la fin de la République, et, sous l'empire, nombreux sont ceux qui ont re-
cours au suicide pour échapper à la tyrannie du prince ; mais sous tous
régimes il est réprimé avec une extrême rigueur chez le soldat dont
toute tentative avortée entraîne la peine capitale. II est fort en honneur
chez les peuples primitifs de la Gaule, les vieillards y avaient souvent re-
cours. Parmi les chrétiens, saint Augustin est le premier qui se prononce
contre, sans restriction aucune; les conciles qui suivent le frappent d'excom-
munication; sous saint Louis, les suicidés sont jugés et les mesures prises
contre leurs restes sont empreintes d'une extrême sévérité et leurs biens
sont confisqués. Le protestantisme le réprouve également; J.-J. Rousseau et
.NOTES, IJV. II, Cil. III. VOL. I, PAG. 650. F.441
N'oltaire se déclarent plutôt pour que contre; la Révolution abroge les
peines qui le frappent. — Depuis, en France, comme partout ailleurs du
reste, il tend à augmenter d'année en année particulièrement dans les
grandes villes, motive surtout par des maladies cérébrales, les souffrances
physiques, et l'inconduite; puis encore par la misère, les revers de for-
tune, les chagrins domestiques, des amours contrariés, le désir d'éviter des
poursuites judiciaires, l'ivrognerie, et chez quelques-uns le dégoût du ser-
vice militaire. De 1.700 par an qu'était, en moyenne, on France, en 1827 le
nombre des suicides, il s'est élevé, par une gradation ininterrompue, à
7.267 en 1865; sur ce nombre qui comprend des enfants de seize ans
et au-dessous, les gens mariés entrent pour moitié, les femmes pour un
quart. Cette progression est due à la même cause qui fait que la crimina-
lité va croissant; chacun veut, chaque jour davantage, l'existence meilleure
et plus facile et en supporte d'autant moins les déboires inévitables, ce
qui est plutôt veulerie; on ne saurait douter non plus que n'y contribue
chez beaucoup l'affaiblissement de la foi qui seule, qu'elle repose sur la
vérité ou l'erreur, ce qui importe peu, donne, quoi qu'on en dise, aux
croyants (heureuses gens!), patience et consolation en cette vie. — Pour
conclure, on peut dire du suicide, conime de tant d'autres choses de ce
monde, que le jugement à en porter est essentiellement variable suivant
chaque cas particulier; s'il est en général à condamner, il est parfois excu-
sable et dans quelques circonstances être le fait d'un grand caractère et
d'un non moins grand courage, ne prêtant en rien à la critique la plus
sévère.
CHAPITRE IV.
654,
1, Auec. — Grande (add. des éd. ant.).
7, Grec. — Montaigne avait appris le grec, il n'y a pas doute à ce sujet;
mais il ne l'avait jamais su à beaucoup près comme le latin, et il est fort.
croyable qu'à l'âge où il était arrivé il n'y entendait plus grand'chose.
7, Sens. — Si beau (add. des éd. ant.).
16, Breufaire. — "Livre dont les ecclésiastiques doivent lire journellement
des passages déterminés; par extension, livre de lecture habituelle, qui ■< ne
quitte point nos mains, nuit et jour feuilleté », a dit Bou,eau.
17, Resigne. — Abandonne, signale.
21, Soy. — Moins embarrassé, plus naturel.
23, Plutarque. — Traité de la Curiosité, 14.
656.
15, De Boutieres. — Du Bei.i.ay, IX. — En 1543. Cet avis portait qu'une ten-
tative allait être faite, à l'aide de voitures de foin qu'on chercherait à in-
troduire dans la ville dont il était gouverneur, pour s'emparer de l'une des
portes. De Routières négligea d'en prendre connaissance et ce ne fut que
parle fait du hasard qu'échoua ce coup demain consistant en cinq voitures
de foin, portant au-dessous de leur fond des cages très ingénieusement
aménagées, dans chacune desquelles avaient pris place six soldats qui de-
vaient en sortir à l'improviste et, avec l'aide des conducteurs qui étaient
également des soldats déguisés, assaillir le poste et s'en emparer.
20, Présenta. — Plltarqle, /. César, 17. — Cet ayis fut donné à César par
, Artémidore de Cnido, qui enseignait à Rome les lettres grecques et latines;
voyant habituellement les complices de Brutus, il était en partie au cou-
rant de la conjuration. « Lisez seul et promptement, » lui dit-il en lui
remettant son écrit. César essaya de lire à plusieurs reprises, mais il en fut
empêché par la foule de ceux q.ui venaient lui parler; d'autres disent que
cette même foule empêchant Artémidore d'approcher, il lui fit remettre
ses papiers par un autre; toujours est-il que César entra au Sénat sans en
prendre connaissance. Les éd. ant. aj. ici : contenant le faict de l'entreprise.
21, Préparait. — Plitak^le, De l'esprit familier de Socrate, 27. — En 378; le
F.442 ESSAIS DE MONTAIGNE.
promier Arcliias cHait un capitaine thébain, gouvernant Thobes au nom de
Spaite qui l'y avait installé; l'autre, son hôte et son ami, était souverain-
pontife à Athènes.
o3, Faire. — En 1846, le prince de Metternich. chancelier d'Autriche, celui-
là même qui avait tant contribué à la chute de Napoléon 1", était, dit-on,
jouant un soir aux cartes, quand sui'vint une dépèche de Gallicie, où ré-
gnait une certaine fermentation. Tout entier à son jeu, ce ne fut que trois
heures après qu'il décacheta cette dépèche, pai- lequelle on lui transmettait
des propositions qui eussent tout arrangé. C'était trop tard : il y avait ur-
gence, et la réponse n'arrivant pas, un conflit s'était pi'oduit, faisant deux
mille victimes. Le prince gai-da tout le restant de ses jours le remords de
cet instant d'oubli.
34, Consulaire. — Plutarque, Propos de table, I, 3, 2.
'.ib, Deliure. — Plus dégagé.
36, Pour entretenir... assis. — Var. des éd. ant. : ou pour potier nouuelles
à reliiy qui serait assis, ou pour lui donner quelque aduerlissemenl à l'oreille.
658.
CHAPITRE V.
*
Conscience. — •• 11 est au fond de nos âmes un principe inné de justice
et de vertu, d'après lequel, malgré nos propres maximes, nous jugeons
nos actions et celles d'autrui comme bonnes ou mauvaises; c'est à ce
principe que je donne le nom do conscience. » J.-J. Rousseau.
1, Voyageant... durant. — Var. de 80 : le passois vn iour pais pendant.
7, Air. — Foyer (var. dos éd. ant.).
19, Masque. — Sur sa physionomie et malgré la croix, signe distinctif des
catholiques, qu'il portait sui' sa casaque (sorte de pardessus à manches
largos), bien qu'il n'appartint pas à ce parti. — Los protestants portaient
l'écliarpo; celle des partisans de Henri IV était blanche.
25, Pœonien. — Ce mot signifie à la fois : chargé des soins à donner aux
paons, et individu originaire de la Pœonie. Les doux sons ont cours; avec
le premier. Dessus serait une soi'te de valet de ferme; nous avons adopté
le second, l'anecdoto étant vraisemblablement tirée' de Pi.utarque, Pour-
quoi la justice divine, etc., 8, qui le qualifie de capitaine, chef d'une troupe
à pied, et le donne comme ayant abattu co nid avec une pique qu'il avait
en main.
31, Pénitence. — On fait souvent allusion à ce mode d'intervention imprévu
de la Providence, sous le nom des « Grues d'Ibycus ». Ibycus -assassiné
par des brigands, au milieu d'une forêt, était sur le point d'expirer, quand
voyant dans les aiis un vol de grues, il les piit à témoin de l'attentat
dont il était victime. Quelque temps après, ses assassins se trouvant aux
jeux Olympiques, l'un d'eux, voyant passer un vol de grues, s'écria impru-
demment : « Voilà les témoins d'ibj'cus! » Ce propos, sur lequel il fut ap-
pelé à s'expliquer, révéla leur culpabilité. Erasme.
660.
1, Péché. — Plutarque, Pçiirquoi la justice divine, c\c., 9.
2. L'attend. — Sknèque, Epist. 105, à la fin.
2, Meschanceté. — D'elle mesme (add. de 80).
8, Cantbarides. — Plutarque, Pourquoi la justice divine, etc., 9. — La
cantliaride est un insecte de la famille des coléoptères, qui, réduit en
poudre, est la base dos vésicatoires. Cette poudre, absorbée à l'intérieur,
est un poison violent qui était assez en usage chez les anciens. Ils attri-
buaient en outre à la piqûre même de l'insecte la propriété de donner la
mort qui se produisait, croyaient-ils, dans la disposition où l'on était à
l'instant où l'on était piqué : si à ce moment, par exemple, on riait, on
mourait en riant. La science moderne assigne le camphre comme antidote
des empoisonnements par la cantharido; quant à receler en elle-même son
contrepoison, Plutarque ne le raj)porte que comme un on-dit.
NOTES. UV. II. r.ll. V. VOL. K PAG. «60. 443
18, Maux. — Pi.UTVKQLE. Pourquoi la justice divine, etc., H: I'olyen, IV, 6, IS.
20, Mesmes. — SÉNÈyiE, Epint. 97. — Sophocle et Lucien énietteril uiio idée
analogue : « Rien n'est caché, car lo temps voit, entend et révèle tout, »
dit le premier. « Tu pourras peut-être, dit le second, dérober aux hom-
mes la connaissance de tes actions coupables; tu ne le pourras envers les
dieux malgré tous tes calculs. » ~ La formule d'ÉpiCLKE que donne Mon-
taigne et que L. Racine a traduite dans son poème de La Religion :
• De ses remords secrets triste et lente victime,
Jamais un criminel ne s'absout de son crime...
l.e cruel repentir est le premier bourreau
Qui dans un sein coupable enfonce le couteau »,
semble moins prêter à controverse, et cependant on peut dire que; chez le
méchant, c'est-à-dire chez celui en lequel le mal prédomine, la conscience
est oblitérée; soit parce qu'elle a toujours été telle, soit parce que trop
souvent il a négligé de l'écouter, elle ne se fait plus entendre, le remords
n'existe pas. Aussi sommes-nous de ceux qui n'en voulant pas au méchant,
le considérant comme inconscient, voyons en lui un être malfaisant que
la société a le devoii" non de punir, elle n"a guère elle-même la faculté
«l'en juger sainement, mais de mettre liors d'état de lui nuire, comme
elle fait d'un fou, d'un pestiféré, d'une bête fauve, d'un chien enragé, lors-
qu'il est avéré qu'il constitue un danger public. Contrairement à ce qu'a
introduit la chicane, c'est le fait qui esta apprécier et non l'intention; la
constatation du premier est généralement facile, l'autre est toujours im-
possible, notre état mental, à tous, à un moment donné, essentiellement
variable, échappant à toute appréciation : principe qui est la base de la loi
du talion et de l'action civile ou réparation du préjudice causé. 11 est à
portée dos intelligences les plus simples et a suffi dans les sociétés primi-
tives à assurer le maintien de l'ordre, à protéger les personnes et les
choses, au moins aussi bien que nous y parvenons dans nos sociétés mo-
dernes avec notre légi.slation si prolixe, où tout est agencé pour jeter
de la confusion dans les esprits, favorisant les mauvais au préjudice des
bons, à ro[)posé de ce que commandent la raison et l'équité.
ol, Importante. — Plltarque, Comment un peut se louer soi-même, 5. — En
190. Scipion l'Africain, la loi semblant s'y opposer et les questeurs hési-
tant à le faire, de lui-même, simx>le particulier à ce moment, mais déjà
paré des lauriers de Zama, avait ouvert le trésor public réservé pour parer
à une 'guerre contre les Gaulois, et y avait puisé pour faire face aux
besoins de la guerre que Rome méditait contre Antiochus, roi de Syrie,
dont les progrès commençaient à donnei- do l'inquiétude, guerre dont son
frère allait être chargé.
33, Teste. — De juger dans une affaire pouvant entraîner une condamna-
tion capitale.
40, Suitte. — ViUCKE Maxime 111, 7, 1. — En 188. 11 avait accompagné son
frère en Asie en qualité de lieutenant, et, en réalité, dirigé la guerre qui
avait contraint Antiochus à restituer aux allif'-s de Rome toutes les con-
quêtes qu'il avait faites sur eux, quand, à leur retour, les deux frères fu-
rent accusés par le tribun Nevius de s'être laissé corrompre par l'ennemi.
-17, Pièces. — 'Tite-Live, XXXVIII, 54 et 55. — En 187. Cette accusation
. portée contre Scipion l'.Africain et Scipion l'Asiatique est la même, re-
nouvelée, que la seconde dont Montaigne vient do parler et à laquelle ils
avaient écliappé l'année précédente en évoquant le souvenir do Zama.
Sommé de produire ses comptes, Scipion l'Africain lacéra le registre où ils
étaient consignés, disant qu' « il ne s'abaisserait pas à se justifier d'une
dépense de 4.000.000 de sesterces (800.000 fr.) pour une expédition, lui
qui, par ses victoires, avait enrichi le trésor de 200.000.000 de sesterces
(40.000.000 de fr.), et n'en avait rapporté que le surnom d'Africain, et que
s'ils étaient riches, c'était en ennemis beaucoup j)lus qu'on argent ■■ ; et il
F.444 ESSAIS DE MONTAIGNE.
s'exila volontairement à Literne en Campanie, où il mourut en 184. Son
frère fut condamné à une forte amende; ne pouvant la payer intégrale-
ment, il allait être conduit en prison, quand T. Sempronius Gracchus, au-
tre tribun du peuple, qui jusqu'alors s'était montré l'ennemi des Scipions,
s'y opposa. Ruiné par cette amende, Lucius Scipion n'accepta de ses pa-
rents et amis, qui mirent à sa disposition des sommes immenses, que de
quoi racheter ce qui était strictement nécessaire à son existence.
47, Cauterizée. — Ulcérée, torturée par le remords.
662,
4, Innocence. — « La vertu s'avilit à se justifier. » Voltaire, Œdipe.
5, Géhennes. — La torture, appliquée aux accusés pour les forcer à avouer
leur crime ou nommer leurs complices, dite question préalable, a été abo-
lie en France par Louis XVI, en 1780.
11, Guerdon. — Une si belle récompense que celle.
22, Confessions. — Accusations, porte l'éd. de 88.
24, Fit. — Quinte Clkce, VI. — En 329. Accusé d'avoir trempé dans un
complot contre Alexandre le Grand, fut mis à la torture, déclaré coupable
et lapidé. Le fait principal à sa charge était que pendant deux jours, alors
qu'à diverses reprises il avait vu le roi, de l'intimité duquel il était, et
ayant toute qualité pour l'entretenir, il ne lui avait pas donné avis d'une
conjuration dont il avait été averti pour l'en prévenir, et à deux reprises
différentes avoir répondu à celui qui l'en avait instruit, que l'occasion lui
avait manqué pour le faire; ce que, pour sa défense, il expliquait en disant
qu'il n'avait pas attaché d'importance à la révélation qui lui avait été faite,
n'estimant pas vraisemblables les projets qu'on lui dénonçait.
35, Conte. — Il est dans Fkoissart, IV, 87.
37, Justicier. — BajazetI, appelé aussi l'Amorabaquin, ce qui signifierait fils
d'Amurat.
CHAPITRE VI.
664,
6, L'exercitation. — Montaigne traite dans ce chapitre de l'exercice de la
vertu, ou plutôt de la nécessité de ne pas se borner à l'exalter et d'y join-
dre la pratique.
11, Empescbée. — Les éd. ant. aj. : Quelques bonnes opinions qu'elle ait.
16, Escient. — Exprès, à dessein; c'est un sens que ce mot a fréquemment
dans les Essais.
666,
2, Marault. — Monstre (var. des éd. ant. à 88).
12, Amis. — SÉNÈQUE, De Tranq. animi, 14. — Allant au supplice, ajoute Plu-
tarque, il dit à un de ses amis qui l'accompagnait, qu'il viendrait lui parler la
nuit suivante; il lui apparut en effet et discourut avec lui sur l'immortalité
.de l'àme et la lumière pure et éclatante dans laquelle la sienne se trouva
après la mort. — Dans un autre ordre d'idées, surtout dans un but humani-
taire et avec l'arrière-pensée d'y trouver un argument pour la suppression
de la peine de mort, on s'évertue aujourd'hui à reconnaître si un individu
décapité conserve encore sa connaissance dans l'instant qui suit l'exécution :
si par exemple, à l'appel de son nom, un indice se produit qu'il l'a perçu ;
jusqu'ici les expériences faites à cet égard n'ont rien donné de concluant.
38, Souffrances. — Actions, port, les éd. ant., à quoi celle de 80 aj. : opéra,
lions.
668,
1, Insensible. — « Qu'on interroge les médecins et les ministres du culte
accoutumés à observer les actions des mourants et à recueillir leurs der-
niers sentiments, ils conviennent qu'à l'exception d'un petit nombre de
maladies aiguës où l'agitation causée par des mouvements convulsifs sem-
ble indiquer des souffrances chez le malade, dans toutes les autres on
meurt doucement, tranquillement et sans douleur. » Blffon. — Cela est
NOTES. LIV. II, Cil. VI. VOL. I, PAG. 668. 445
vrai, mais en tant seulement des derniers moments où l'organisme brisé
par le mal qui le détruit est anéanti et va cesser d'être, autrement c'est
assez discutable; la plupart du temps ce n'est qu'une accalmie et ce pas-
sage de vie à trépas a été précédé de souffrances dont il y a lieu de tenir
compte avant de conclure. — « Une douleur très vive, ajoute Buffon, pour
peu qu'elle dure, conduit à l'évanouissement ou à la mort. Nos organes,
n'ayant qu'un certain degré de force, ne peuvent résister que pendant un
certain temps à un certain degré do douleur; si elle devient excessive, elle
cesse, parce qu'elle est plus forte que le corps, qui, ne pouvant la suppor-
ter, peut encore moins la transmettre à l'àme, avec laquelle il ne peut cor-
respondre que quand les organes agissent, etc.. » — En écrivant ce
passage, et quelques autres que nous signalons plus loin, Buffon s'est cer-
tainement rappelé plusieurs idées de ce chapitre des Essais. Le Clercq.
21, Mort. — Montaigne a déjà dit la môme chose, à peu près dans les mêmes
termes. V. I, 122 et N. Mort.
23, L'effort. — Montaigne est ici bien dans le vrai, quoiqu'il agisse tout au-
trement, car son livre est plein de l'attente de cet événement. A quoi bon
en effet cette préoccupation continue de la mort? Avec cette pensée tou-
jours présente à l'esprit, on n'entreprendrait jamais rien, on ne jouirait de
rien, et notre existence se passerait tout entière anxieuse et stérile. Qu'on
y soit constamment préparé, c'est-à-dire qu'on ait toujours ses affaires en
ordre, parce qu'elle peut nous surprendre, c'est raisonnable; que celui qui
croit en une autre vie, où il renaîtra avec son individualité, et recevra la
récompense ou le châtiment de ses faits et gestes sur cette terre, pense
fréquemment à cette fin dernière pour y j)uiser une aide dans la voie du
bien et une consolation dans l'affliction, cela se conçoit, mais quelle su-
perlluité que do s'en préoccuper sans cosse! Quelles que soient les disposi-
tions en lesquelles nous nous sommes ingéniés à être pour la recevoir, elle
accomplit son œuvre sans que la pose que nous y mettons, y change quoi
que ce soit, non plus que si elle vient sans que nous nous soyons mis en
peine pour la recevoir.
25, Deuxiesmes. — Il y eut, en ce temps, huit guerres de religion : la se-
conde, de 15G(J à 15G8, fut marquée par le combat de S.-Denis où fut tué le
connétable de ^Montmorency ; la troisième, de 1568 à 1570, en cette dernière
eurent lieu les batailles de Jarnac et de Montcontour.
36, Petit homme. — C'est Montaigne lui-même; voir son portrait ch. XVII
du liv. II.
38, Contre-mont. — Ou, comme on dit familièrement, les quatre fei's en
l'air.
3(», Estendu. — Mort eslendu, port, les éd. ant.
670,
15, Menus. — Peu à peu.
40, Faiblesse. — L'éd. de 80 aj. : et de longue maladie.
41, Douleurs. — Les plus terribles agonies elles-mêmes effraient pli^ les
spectateurs qu'elles ne tourmentent le malade. Combien n'en a-t-on pas vu
qui, après avoir été à cette dernière extrémité, en sont revenus n'ayant
aucun souvenir de ce qui s'était passé, de ce qu'ils avaient paru sentir;
ils avaient réellement cessé d'être pour oux-mèmes pendant ce temps, puis-
qu'ils sont obligés de rayer de leur existence les moments passés dans cet
état duquel il ne leur reste aucune idée; c'est qu'en effet la douleur que peut
' endui'er le corps est proportionnée à sa force et à sa faiblesse; or, dans
l'instant de la mort, il est plus faible que jamais, il ne peut donc éprou-
ver qu'une très petite douleur, si même il en éprouve quelqu'une. Buffon.
42, Pénibles. — La douleur de l'àme ne peut être produite que par la trans-
mission qu'elle en reçoit du corps; une douleur excessive, venant à excé-
der ce que le corps peut supporter, l'anéantit et du même coup le fonction-
nement de ses organes; il est hors d'état de continuer à transmettre à
l'àme" ses sensations, dont elle cesse, elle aussi, d'être affectée, n'en recevant
plus communication. Buffon.
P.44fi ESSAIS l)K MONTAIGNE.
672,
33, Ego. — Ii'is, messagère des dieux et en paiticuliei- de Juiioii.
674,
1. Sens. — Qui sortent au hasard, mais n'ont aucun sens.
•23, Dressent et couchent. — Les éd. ant. port. : et esmeuuenl.
36, Nue. — En l'air.
41, Vsage. — Comme par habitude.
676.
13, Moins poisante — Les éd. ant. port. : si plaisante.
20, Encore. — Quatre ans après (add. de 80).
33. Léger. — J,-J. Rousseau nous a laissé, lui aus.si, un récit de ses sensa-
tions, loVs d'une chute à Menilmontant, en 177().
:î5, Pline. — Nat. Hist.,XXU, 24.
678,
G, Anciens. — Dans le nombre : chez les Grecs, Archiloque et Alcée; chez
les Latins. Lucilius, et plus tard Marc-Aurèle et S. Augustin, ce derniei"
dans ses Confessions. En des temps plus rapprochés : .J.-.I. Rousseau, éga-
lement dans ses Confessions qui, elles, ne sont que du roman; Restif de la
Bretonne, dans S. Nicolas ou le cœur humain dévoilé (1794).
24, Place. — C.-à-d. faire toilette et prendre une attitude convenable pour
se présenter, se produire en société.
23, Vicieux. — Pascal, qui prohibait jusqu'au mot « moi », a dit au sujet des
Essais : •• Le sot projet que Montaigne a eu de se peindre lui-même. » Voir
N. II, 18 : Extrauagant, la réponse qu'y l'ait Voltaii-e.
39, Veaux. — Balivernes, niaiseries, contes ridicules. Cette locution vient
de ce que les veaux ne se bridant pas. les brides à veaux n'existent pas, que
c'est autant dire rien.
680,
1, Trottoir. — C.-à-d. sur la voie pul)liquo, si bien que tout h; monde en
parle ou est à même d'en parler.
9, Voisins. — Les protestants.
\2, Viure. — « Vivre, est le métier que je lui veux apprendre. ■■ .I.-J. Rolsseal,
Emile, I.
15, Gloire. — S'il est vain et présomptueux de proclamer soi-même ce que
l'on vaut. — Le mot gloire était souvent employé, à cette époque, dans ce
sens de vanité, présomption
10, Hortense. -r- Mis pour Hortensius; Montaigne manque à son parti piis
de ne pas franciser les noms propres étrangers; ce qui, par habitude, lui
arrive encore parfois.
'2.0, Skeletos. — Un squelette, ou plutôt un écorché pour études anatomiques.
31, Indifféremment. — Caton l'Ancien disait qu'il était aussi ridicule de se
louer soi-même, que de se blâmer.
'.]ï), Aristote. — Morale à j\icom.aque, IV, 7.
35, Fausseté. — Nul homme vertueux ne cherche à se faire valoir par les
qualités qu'il n'a pas.
682,
22, Nihilité. — Néant; mot forgé par Montaigne, du latin ni/til. rien.
23, A certes. — Sincèrement, sérieusement.
FIN DES NOTES DU PREMIER VOLUME.
NOTES.
DEUXIEME VOLUME.
LIVRE SECOND
[Suile).
CHAPITRE VII.
10,
1, Cœsar. — Suétone, Auguste,25.
10, Meurte. — Myrto; ce nom de meui'te lui l'tait assez général dans le midi
de la France.
12, Flambeau. — Lors de la première guerre punique, après la bataille de
Jlylos (260), la première victoire navale qu'ils aient remportée, les Romains
décernèrent au consul Duilius, avec les honneurs du triomphe, le privilège
de se faire accompagner, le soir, à la lueur de ilambeaux et au son des flû-
tes; de plus, une colonne rostrale fut élevée sur le forum, colonne qui
existe encore, restaurée à la vérité, et sert actuellement de support à un
réverbèi'e !
13, Titres. — Après la Révolution de 1793, Napoléon rétablit la noblesse en
France. Déjà en 18(M, Masséna, entre autres, avait été fait duc de Rivoli ;
mais de 1806 date réellement la constitution de la noblesse impériale qui,
dès le début, outre les royautés des Espagnes, de Hollande, de Naples et de
Sicile, la vice-royauté d'Italie, comprit les duchés de Dalmatie, d'istrie, du
Frioul, de Cadore, de Bellunc, de Conégliano, de Trévise, de Feltre, de
Rassano, de Vicence, de l'adoue et de Rovigo; auxquels vinrent s'ajouter
plus tard et successivement ceux de Bénévent, Gaètc, Otranle, Ponte-Coi-vo,
Reggia, Trente, Massa, Carrare, Parme, Plaisance, Clèves et Berg, d'Auer-
stadt, d'Elchingen, les principautés de Guastalla, de Neufchatel, de Wagi'am,
d'Essling, etc. Les Ministres, Sénateurs, Conseillers d'État, etc., devinrent
comtes; les Présidents des diverses cours, les évéques, les maires des 52 vil-
les les plus importantes de l'empire devinrent barons; réserve était faite
pour les généraux, préfets, officiers civils et militai res des titres qui pouvaient
être conférés à chacun.— De nombreuses dotations furent jointes à certains
de ces titres, elles arrivèrent à dépasser 30.000.000 fr. de revenus, dont par-
tie constituaient des majorats, c'est-à-dire étaient attribués à titre perpétuel
et inaliénable à l'aîné des fils. Ces majorats pouvaient être égalem(>nt cons-
titués, avec ou sans le concours de l'État, par le dignitaire lui-même : les
grands dignitaires de l'empire, en affectant 200.000 Ir. de revenus à ces
majorats, conféraient à leur fils le di'oit de porter le titre de duc, dèsle vi-
vant du père; les comtes ayant 30.000 fr. de revenus, les barons en ayant
, lû.fXX) et en constituant un tiers en majorât, dotaient l'aîné de leurs
enfants du titre immédiatement inférieur au leur et les autres étaient
chevaliers; de ce fait, le budget est aujourd'hui encore grevé de plus d'un
million. — En tout. Napoléon I" a fait 9 princes, 32 ducs, 388 -comtes et
1..000 barons.
Trois générations successives dans la Légion d'honneur transmettaient la
noblesse à toute la descendance ; cette disposition, tombée d'elle-même, n'a
pas été abrogée
Enfin en 1811, on procéda à la régularisation des anciens titres féodaux.
Pb. 448 ESSAIS DE MONTAIGNE.
qui avaient été supprimés i)ar décret du 17 juin 1790 de l'Assemblée cons-
tituante.
En principe, l'institution des titres de noblesse se justifie parfaitement;
mais la prodigalité les discrédite et leur perpétuité, qui contribue à les
multiplier outre mesure, les fait tomber dans la banalité et leur enlève tout
stimulant. Leur transmission semblerait devoir être limitée à une, deux,
trois ou quatre générations au plus, chacune ne conservant que le titre im-
médiatement inférieur à celui delà génération précédente, si par elle-même
elle n'en a acquis un plus élevé. C'est le système inverse qui est appliqué,
aggravé encore par les substitutions, abus que rien ne justifie, qui font que
sur les 50.000 nobles qu'on peut compter en Fi-ancc, un millier à peine peut
se prévaloir de titres qui soient indéniables.
Quant à la particule de, dite nobiliaire et regardée communément comme
attestant une noble origine, elle n'a jamais eu, par elle-même, ce caractère
et n'est pas un critérium infaillible de noblesse.
Abolis à nouveau par la République de 1848, les titres de noblesse ont
été une seconde fois rétablis en 1852 par le prince Louis Napoléon.
13, Armoiries. — La maison d'Estaing, par exemple, portait des fleurs de
lys dans ses armoiries, parce qu'à la bataille de Bouvines (1214), l'un des-
siens avait sauvé la vie au roi Philippe-Auguste.
12,
3. Sainct Michel. — L'ordre de Saint-Michel, institué par Louis XI en 14G9.
Cet ordre, primitivement destiné à la haute noblesse, finit par être accordé
aux gens de robe, de finance, etc.; supprimé à la Révolution, rétabli à la
Restauration, il a été définitivement aboli en 1830.
10, Plustost... vtile. — Var. de 80 : qu'à nulle autre.
12, D'occasions. — Add. des éd. ant. : c'est vue monnaye à toute espèce de
marchandises.
IG, Trahison. — Add. des éd. ant. : et autres que nous employons à noslre
vsage, par l'entremise d'autruy.
28, Fidélité. — L'éd. de 80 port. : frugalité.
32, D'honneur. — Ces récompenses honorifiques.
34, Largesse. — Les décorations sont en effet un moyen précieux de recon-
naître le mérite et les services rendus; mais l'abus le déconsidère; et ce
que constate ici Montaigne pour l'ordre de S.-Michel est presque chose faite
pour notre ordre de la Légion d'honneur qui pendant près de trois quarts
de siècle a été à si juste titre en si iiaute estime; si bien qu'aujourd'hui,
nombre de ceux qui croient l'avoir mérité, dédaignent de le porter, tant
il a été prodigué; au commencement de 1907, en effet, on ne comptait pas
moins, en France, de 52.000 membres de la Légion d'honneur et 220.000 dé-
corés ou médaillés de tous ordres nationaux ; jamais il n'avait été fait pa-
reille débauche de décorations que depuis que nous sommes en République,
gouvernement qui par sa nature même devrait en être plus sobre que tout
autre. — Outre l'abus qu'on fait de cette décoration, on en crée journelle-
ment de toutes sortes; croix et médailles pullulent, sans compter les dé-
corations étrangères pareillement distribuées avec non moins de profusion
et sans plus de raison ; aussi les unes comme les autres ont-elles perdu tout
prestige, et de prime abord et jusqu'à plus ample informé, elles témoignent
plutôt de l'intrigue que du mérite. — Depuis trente ans, certains de nos
gouvernants, inespéréraent arrivés au pouvoir dont ils ne savent que
mésuser, ne voient là qu'une ressource facile et commode de donner satis-
faction, sans qu'il leur en coûte rien, à ceux qui les y ont portés et à l'en-
tourage qui les flatte et souvent gouverne en leur nom; d'autres entraînés
par les théories socialistes, dont ils sont les apôtres généralement plus in-
téressés que convaincus, y ajoutent l'arrière-pensée d'arriver à tuer» par le
discrédit une institution qu'ils exècrent, pai'ce qu'elle leur vient d'une autre
époque et qu'elle porte atteinte à l'égalité qu'ils poursuivent, en ramenant
le plus pos.sible, ici comme en tant d'autres choses, tout ce qui a tendance
à s'élever à leur niveau moral, au niveau inférieur.
NOTES. LIV. II, CH. VII. VOL. II, PAG. l± Fb.449
35, Nostre. — Montaigne dit « nostre », parce que lui-même était chevalier
de S. -Michel; l'ordre du S. -Esprit, créé vers cette époque, l'était quand il
écrivait ce chapitre, puisqu'il en parle un peu plus loin, seulement il ne
l'ava-it pas.
14,
10, Parle. — La vaillance militaire.
14, Militaire. — C'était l'idée de l'amiral de Coligny; il voulait réunir tous
les Français dans une guerre visant la conquête des Pays-Bas espagnols;
Charles IX semblait goûter ce plan, avant de s'engager dans la S. -Barthé-
lémy, et ce fut le motif par lequel, à la cour, on retint, à ce moment-là,
Coligny qui se méfiait. 11 se peut que Montaigne ait écrit ce passage sous
une réminiscence do ce fait.
16.
18.
i. Dernière. — L'ordre du S.-Espi-it, institué par Henri 111 en 1578. — Pour
y être admis, il fallait être catholique et avoir déjà reçu l'ordre de S. -Mi-
chel. 11 est passé par les mêmes vicissitudes que ce dernier (V. N. II, 12 :
Sainct Michel). — Ces ordres et celui de S. -Louis, créé plus tard, disparus
à la Révolution, ont fait place quelques années après à celui de la Légion
d'honneur, qui seul subsiste aujourd'hui. Institué par décret des Consuls
du 19 mai 180'2, il fut inauguré le 11 juillet 1804. Le Chef de l'État en est le
Grand-Maitre: l'administration en est confiée à un Grand-Chancelier qui
travaille directement avec lui; cet ordre est destiné à récompenser les ser-
vices civils et militaires, il se compose de 80 grands-croix, 200 grands-of-
ficiers, 1.000 commandeurs, 4.000 officiers et un nombre illimité de che-
valiers (V. N. II, 10 : Titres). — En dehors de cet ordre, et de catégorie tout
autre, nous avons encore nombre de récompenses honorifiques, dont la
médaille militaire et la médaille d'honneur ou de sauvetage, dont le pres-
tige à bien juste titre est intact, parce que généralement elles sont mé-
ritées; les Palmes académiques, le mérite agricole qui se distribuent par
lu'assées, les médailles commémoratives et- d'autres de toutes natures, sans
compter les Ordres coloniaux, auxquels il faut ajouter les Ordres étrangers, ■
qui pullulent également, au point qu'aujourd'hui en France est décoré qui
veut, et que seuls se remarquent ceux qui ne le sont pas.
11. Propos. — Les éd. ant. aj. : et nous estant si familier par l'air François
quon lui a donné si perf'ect et si plaisant.
19, Force. — Virtus, en latin, signifie force, courage; de là est venu le mot
français vertu, ces qualités constituant, chez les anciens, la vertu par ex-
cellence. « La force, dit J.-J. Rousseau, Emile, V, est la base de toute vertu;
la vertu n'appartient qu'à un être faible par sa nature et fort par sa volonté »
(V. N. II, 8G : Vertueux).
20, Militaire. — Cela était encore vrai du temps de Montaigne, mais a cessé
d'être. Quand, à la Révolution, Napoléon rétablit les titres nobiliaires, par
une pensée bien digne de son génie, il s'en servit pour récompenser tous
les genres de mérites et de services, aussi bien ceux rendus dans la vie mi-
litaire que dans les charges civiles; dans les lettres, les arts, les sciences
le commerce, l'industrie, l'agriculture qu'à la guerre, et son exemple a été
suivi depuis.
CHAPITRE VIII.
Enfants. — Ce chapitre est un des plus beaux des Essais, on y ti-ouve
partout du bon sens, de la raison, un jugement exquis. Montaigne y parle
en philosophe qui a beaucoup observé, et ses idées sages et réfléchies sur
ce sujet de première importance sont exposées d'une manière simple et
naturelle dans l'ordre où elles se sont offertes à son espi'it. Naigeon.
1, D'Estissac. — Louise de la Bcraudière, veuve du baron d'Estissac, devint
la maîtresse d'Antoine de Navarre (le père de Henri IV), et épousa, en se-
condes noces, de Combaut, premier maître d'hôtel du roi. Sa lille. mariée à
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 29
Fb.450 ESSAIS DE MONTAIGNE.
un de la Rochefoucauld, a apporté à une branche cadette de cette famille
le nom d'Estissac qu'elle porte encore.
12, Extrauaguant. — C'était l'avis de Pascal (V. N. I, 67B : Vicieux), auquel
Voltaire répondait : « Le charmant projet que Montaigne a eu de se peindre
naïvement, comme il a fait; car il peint la nature humaine. Si Nicole, Ma-
lehranciie avaient toujours parlé d'eux-mêmes, ils n'auraient pas réussi. Mais
un gentilhomme campagnard du temps de Henri 111, qui est savant dans
un siècle d'ignorance, philosophe parmi les fanatiques et qui peint, sous
son nom, nos faiblesses et nos folies, est un homme qui sera toujours aimé. »
17, L'honneur. — El reuerence singulière {aûd. des éd. ant.).
20,
3, Fils. — Fut un des compagnons de Montaigne, quand celui-ci lit son
voyage en Italie en 1580-81 ; tué en duel en 1586.
G, Puérilité. — Jeunes.se, ou mieux enfance, comme portent les éditions
antérieures et l'exemplaire de Bordeaux; vient du latin puerilitas, qui a
cette même signification.
24, Grande.
« L'affection, comme les fleuves, | Descend et ne remonte pas. » Nadaud.
24, Aristotélique. — Aristote, Morale à Nicomède, IX, 7.
28, Estre. — D'autant que nous régardons l'être, l'existence, comme une
chose précieuse.
22,
8, Moy. — Je préférais les voir mis en nourrice (V. N. I, 462 : Nourrice).
17, Nostre. . hommes. — Var. des éd. ant. : le plaisir que nous en receuions,
non pour eitx-mesmes.
22, Mesme. — Au moment, sur le point de le quitter.
'Si, Etfect. — En Guyenne, la législation sur la puissance paternelle, con-
forme au droit romain, admettait que ce que le fils mineur et non marié
acquérait, appartenait au père ; dans certaines l'égions, quel que fût son
âge, fùt-il marié et père de famille lui-même, il demeurait sous l'autorité pa-
ternelle tant qu'il n'était pas émancipé et que, du consentement du père,
la vie commune n'avait pas été interrompue pendant dix ans.
24,
21, Moins. — Les Gascons paraissent avoir eu à cette époque assez mauvaise
réputation ; ce passage de Montaigne implique en eux une certaine ten-
dance à s'approprier le bien d'autrui; ce que confirme Rabelais, 111, 42, en
y ajoutant encore : ■■ Le Gascon semble vouloir se battre avec tout le monde :
il est enclin à dérober; bonnes femmes, prenez garde à votre ménage. »
' 23, En. — Var. de 80 : de Gascogne.
27, Contrées. — Add. de 80 : .de la France.
37, Aristote. — Morale à .Nicomède, IV, 3.
26,
16, Coups. — A deux reprises différentes.
18, Nourrisse. — Pendant l'allaitement (V. N. I, 462 : Nourrice).
19, Infortune. — Léonor de Montaigne, dont il est encore parlé au ch. V du
liv. III (III, 208), née en 1571, morte en 1616, épousa en premières noces,
en 1590, un seigneur de la Tour, mort en 1594; elle en eut une fille, dont
la postérité s'éteignit à la première génération. Remariée en 1608 à un vi-
comte de Gamaches, de cette deuxième union naquit une deuxième fille,
dont la descendance est représentée aujourd'hui par les familles de Puyse-
gur, de Segur et Pontac.
38, Questuaire. — C.-à-d. dans les autres états où l'on est obligé de travail-
ler, de rechercher le gain pour vivre; du latin quwsluarixis, mercenaire.
41, Ans. — <■ Le vingt-trois septembre 156.'), i'espousai Françoise de la Chas-
saigne », a inscrit Montaigne dans ses éphémérides.
42, Aristote. — Poliliq., Vil, 16; porte trente-sept, et non trente-cinq.
42, Trente. — République, VI; de trenle à trente-cinq, y est-il dit. — « Con-
duis ta femme à ta maison en temps opportun, quand tu auras ni beau-
NOTES. LIV. II, en. VMI. VOL. II, PAG. 26. Fb.4al
coup moins ni beaucoup plus de trente ans; c'est l'âge convenable pour te
marier. » Hésioue.
28,
■2, Engeance. — Leur lignée, leur progéniture; ce mot ne s'emploie plus
guère qu'en mauvaise part :
• Quand de ces médisants l'engeance tout entière
Irait, la tête en bas, rimer dans la rivière. » Boii.eac.
5, Temps. — Diogknf. Laeuce, I, 26.
G, Gaulois. — Ce que Jlontaigne attribue ici aux Gaulois, probablement
d'après Cksak, celui-ci le dit, non des habitants de la Gaule, mais de ceu.x
de la Germanie, De Bello GalL, VI, 21.
18, D'enfants. — Mahomet, le père de ce roi de Tunis dont il a déjà été
question au ch. LV du liv. 1 (V. N. I, 576 : Thunes), avait eu, de différentes
femmes, trente-quatre enfaiits. — J'ai connu, en 1860, un cheikh du Fer-
djoua (Province de Constantine, Algérie), Bon Akkas, le dernier chef arabe
ayant conservé son indépendance, laquelle a pris fin à cette époqq^. qui,
alors âgé de près de quatre-vingts ans, passait pour en avoir eu soixante-
douze dans les mêmes conditions.
19, D'autres. — F'laton, Lois, XL — Jecus, Astylus, etc., étaient des athlètes.
20, Olympiques. — Jeux qui se donnaient durant les fêtes célébrées dans
l'ancienne Grèce, à Olympie, en l'honneur de Jupiter Olympien. L'origine
de ces fêtes se perd dans les temps fabuleux; elles revenaient tous les qua-
tre ans, avaient lieu au solstice d'été et duraient cinq jours; elles servirent
pendant des siècles, pour la supputation du temps. De 776 à 292, les Grecs
ne comptèrent que par olympiades.
21, Palaistrine. — Lieu public chez les Grecs et les Latins, où on se for-
mait aux exercices du corps; se disait également des luttes qui consti-
tuaient le principal de ces exercices.
37, Pompes. — Les éd. ant. à 88 aj. : et de ses riches alours.
30,
r, Acquise. — Charles-Quint, empereur d'Allemagne et roi d'Espagne, ab-
diqua la couronne d'Espagne en 1555 (il avait alors 55 ans), en faveur de
son fils Philippe II; et, l'année suivante, il céda l'empire à son frère Ferdi-
nand, se retirant au monastère de S.-Just en Estramadure (Espagne), où il
demeura jusqu'à sa mort (1558); on dit qu'il regretta vivement le pouvoir
dont il s'était démis,
y, Ducat. — Boileau a traduit, ainsi qu'il suit, ces deux vers d'Horace :
« Malheureux, laisse en paix ton cheval vieillissant,
De peur que tout à coup, efflanqué, hors d'haleine,
11 ne laisse, en lombanl, son maître sur l'arène. •
14, Monde. — « Les vieillards ne se croient jamais vieux; ils parlent de leur
passé, parce que la faiblesse se plaît à revivre le temps de la force, et la
souffrance dans le temps des plaisirs; de leur expérience, qui est la chose
du monde à laquelle on croit le moins. Ils exigent des respects qui sont des
aumônes; tenus dans une dépendance universelle, ils n'obtiennent qu'une
compassion sèche. Un homme qui a vécu, c'est-à-dire observé, réfiéchi,
trouve dans le mépris de toutes choses la seule consolation du vieil âge. »
Lamennais.
^2h, Accoustumé. — Les éd. ant. aj. : de produire librement ce qin me vient
à la bouche.
32,
17, Commodité. — Cette cohabitation des parents avec les enfants à même
lie vivre de leur vie propre et ainsi tenus en tutelle, aboutit rarement au
résultat qu'on avait espéré. Montaigne n'en a pas fait l'expérience: il n'a
pas vécu jusqu'à un âge où une vie aussi calme que possible devient un
impérieux besoin, ce que, malgré les apparences, les conditions qu'il pré-
36,
Fb.452 ESSAIS DE MONTAIGNE.
conise réalisent rarement. Chacun chez soi, ou à sa chacunière, suivant sa
propre expression, est, à cet égard, ce que l'on peut faire de mieux.
21, Reume. — On comprenait alors sous ce nom de rhume : les catarrhes, la
goutte et plusieurs autres maladies. Payen.
37, Authorité. — Comme si la nature n'avait pas assez bien pourvu à notre
autoi'ité.
38, Famille. — Henri lY introduisit pareillement cette réforme dans sa fa-
mille, <- car il ne voulait pas, dit Pérkfixe, que ses enfants l'appellassent
monsieur, nom qui semble rendre les enfants estrangers à leur père et qui
marque la servitude et la sujétion ; mais qu'ils l'appellassent papa, nom
de tendresse et d'amour » {Hist. de Henry le Grand).
34,
G, Cheneuiere. — Mannequins ou drapeaux servant à mettre en fuite les
oiseaux qui viennent manger les graines en terre, dans les champs où croît
le chanvre, ou tous autres ensemencés. '
22, Addonne. — S'attache à lui.
12# Desseignée. — Faite à dessein, préparée d'avance.
M, (Economies. — Soins de ménage, administration de maison; c'est dans
ce même sens qu'on dit : l'Économique d'Aristote, de Xénophon.
14, Etfect. — C.-à-d. j'ai vu assez de ménages où les choses, pendant un
temps souvent long et d'une façon continue, se passaient exactement ainsi.
16, Maris. — Montaigne veut dire : « Les femmes ont toujours du penchant
à contrarier la volonté des mai'is » et sa phrase est passée à l'état de dicton.
• Ci-gît ma femme... Oh I quel bien | Pour son repos et pour le mien! »
« Qui femme a, noise a. » Proverbe.
« A qui Dieu veut aider, sa femme lui meurt. • Proverbe.
« Gai, gai, de profundis! i Dieu, faut-il lui survivre?
Ma femme Me laut-il la pleurer?
A rendu l'âme. l Non, non, je veux la suivre...
Qu'elle aille en Paradis. | Pour la voir enterrer. • Bérangeu.
16, Couuertures. — Prétextes, mojens détournés.
32, D'ennemis. — Sknèque, Epist. 47; Macrobe, Saturnales, 1, 11, etc.
38,
21, De Montluc. — L'auteur des Commentaires. — Son fils Bertrand, dit le
capitaine Peyrot, se rendait en Afrique avec j^trois vaisseaux qu'il avait
équipés, pour y tenter aventure et s'y créer un établissement. Une tempête
le porta sur l'île de Madère où, bien qu'on fût en paix avec les Portugais, ils
firent feu sur lui; il descendit à terre, prit la place et se fût emparé de l'île,
s'il n'eût été blessé à mort (1568).
40,
4, Tyrannique. — « Je ne puis lire qu'avec les larmes aux yeux (dans les
Essais de Montaigne) ce que dit le maréchal de Montluc du regret qu'il a
de ne s'être pas communiqué à son fils, et de lui avoir laissé ignorer la
tendresse qu'il avait pour lui. Mon Dieu, que ce livre est plein de bon
sens. » M"" de Sévigné, Lettre à sa fille.
7, Science. — Les éd. ant. à 88 port. : souuenance.
9, Amy. — Cette invocation s'adresse au souvenir de La Boétie.
12, Obsèques. — De m'en remémorer à tout jamais, constamment, le souve-
nir. — « 11 devrait y avoir dans le cœur des sources inépuisables de dou-
leur pour certaines personnes. » La Bruyère.
18, Cœsar. — De Bello Gai., VI, 18.
30, Escus. — 11 y avait le petit écu et l'écu de six livres. Quand la valeur n'é-
tait-pas spécifiée, c'était toujours du petit écu qu'il était question; il va-
lait trois livres, soit environ trois francs de notre monnaie.
36, Dot. — Sa femme, Françoise de Chassaigne, lui avait apporté 7.000 li-
vres de dot, et renoncé à tous droits sur la succession de ses père et mère.
42,
44,
NOTES. LIV. II, CH. VIII. VOL. II, PAG. 40. Fb.453
37, Maisons. — La maison est ce qui porte le nom. — La «lot apportée par la
femme demeurant sa propriété, ce pouvait être, dans l'idée, une cause de
ruine, si elle était considérable, parce qu'elle était tenue en dehors des
dépenses d'ordre général, qu'il l'ailait qu'elle se retrouvât intacte lors de la
dissolution du mariage, pendant lequel la femme avait tendance à l'ac-
croître au préjudice de la communauté et aussi à s'en prévaloir pour aug-
menter son luxe tout en en laissant la charge au mari.
19, Mère. — Les livres saints {Proverbes, XXXI, 3) disent : « Ne donnez point
votre bien aux femmes. »
7, Masculines. — Attribution à des héritiers mâles, d'héritages qui devraient
i-ovonir à des femmes, afin d'empêcher que par elles ils ne passent dans
des maisons étrangères. — A sa mort, IMontaigne n'a pas été conséquent
avec lui-même; cédant précisément à ces préoccupations masculines qu'il
condamne quelques lignes plus bas, mû par le désir de perpétuer son nom,
ce à quoi son livre a surabondamment pourvu, il a fait un testament par
lequel il disposait de plus qu'il ne possédait et instituait le puîné de ses
descendants héritier de sa terre et de son nom, ce qui a donné lieu à un
procès qui ne s'est terminé que deux sièclesaprès; le seigneuret le philosophe,
en cette circonstance, se sont tenus nettement en contradiction. Le fait
s'est produit dans les conditions ci-après : En 1590, lors du mariage de sa
fille Eléonore avec François de la Tour, Montaigne attribua par contrat de
mariage, avec substitution graduelle et perpétuelle au second des enfants
mâles qui naîtraient de ce mariage, la terre de Montaigne, ses dépendances
et une somme de 30.000 livres. François de la Tour mourut en 1594, lais-
sant une fille, Françoise, qui, en 1600, n'ayant que six ans, fut fiancée à Ho.
noré de Lur qui n'en avait que neuf; le contrat définitif de mariage fut
passé en 1607. L'année suivante, Eléonore se remariait au vicomte de Ga-
maches, et dès ce moment la disposition insérée par son père dans son
premier contrat devint un sujet de difficultés entre les deux branches.
Françoise de la Tour était moite en 1613, laissant un fils, le vicomte d'O-
rellian, né l'année précédente; Eléonore, en 1616, lorsqu'elle mourut, le
nomma à la substitution de la terre de Montaigne. De son second mariage,
elle avait eu une .seconde fille, Marie de Gamaches, qui épousa Louis de Lur,
baron de Fargues, frère d'Honoré, le mari de sa sœur Françoise {V. N. I,
74 : Salusse). Un accord survenu en 1627 entre les deux frères régla à l'amia-
ble le différend pendant par suite de la substitution; mais la mort du vi-
comte d'Oreillan, tué en 1639, au siège de Salces, dans le Roussillon, rou-
vrit les revendications de la branche cadette et il en résulta une série de
procès qui durèrent deu.x cents ans.
-il, Platon. — Lois, XI.
29, Delphique. — « rvwOl aeauTÔv (Connais- toi toi-même) », inscription qui
était gravée au fronton du temple d'Apollon à Delphes. V. N. I, 28 : Congnoj-.
46,
12, Loy. — La loi salique, code civil et pénal des Francs Saliens. Un de ses
articles fixe que les mâles seuls peuvent succéder au fief donné au guer-
rier en vue du service militaire; appliquée jusqu'alors uniquement aux
propriétés particulières, elle le fut, pour la première fois, à la couronne
de France, en 1316, à la mort de Louis le Hutin.
• 26, Petits. — Add. des éd. ant. : ny fjousl de parenté.
31, Charge. — Ce qui n'empêche que les siens, « il ne les souffrait pas vo-
lontiers nourris près de lui » (II, 22), « et qu'il en a mis deux ou trois
en nourrice » (I, 462 et N. Nourrice). — Ce qui convient sur ce point,
en ces temps-ci où les santés et les constitutions sont si délabrées par
'hérédité de parents déjà malingres ou avariés dans le sens général du
mot comme dans celui plus spécial dans lequel on l'emploie aujourd'hui,
par la vie à outrance que chacun mène soit pour ses plaisirs, soit par
nécessité de situation et les habitudes nouvelles, et aussi par la sophisti-
Fb.4o4 ESSAIS 1)K MONTAIGNK.
cation la plus (Hcnduc et la plus éhontce de toutes les denrées alimen-
taires, semble être que l'enfant est à mettre en nourrice si la mère est
vraiment hors d'état de l'allaiter dans de bonnes conditions et qu'elle est
coupable lorsqu'elle s'affranehit de le nourrir elle-même, étant à luêino de
le faire.
oti. Nostres. — 11 en est malheureusement encore ainsi; pourtant la légis-
lation est récemment intervenue pour, dans une certaine mesure, prévenir
les abus : elle interdit notamment de priver tout enfant de moins de trois
mois, du lait de sa mère pour le donner à un nourrisson. Dans sa comédi<>
des « Remplaçantes »,M. Brieux combat ces mêmes errements si contraires
aux lois de l'humanité; mais plus nous allons, moins on a de propension
à faire passer avant toute autre considération l'intérêt de l'enfant, d'après
lequel toute femme qui peut nourrir son enfant et ne le fait pas commet
un crime, et que celle qui, ne le pouvant pas, s'y obstine pouvant faire
autrement, tout en étant excusable, parce qu'elle obéit à un sentiment na-
turel, n'en commet pas moins une faute grave.
48.
17, Indifféremment. — Si dans certaines contrées les femmes étaient en
commun, il en était d'autres où les mariages se faisaient à la criée, conte
également Hérodote. En Babylonie, une fois l'an, dans chaque bourgade,
les lilles nubiles étaient réunies et divisées en deux catégories : les belles,
et celles qui ne l'étaient pas, étaient estropiées, etc. On commençait par
les premières et dans celles-ci par la plus belle, chacune était successive-
ment attribuée au plus offrant; on passait ensuite aux autres en procédant
par la moins avenante. Le prix d'adjudication des premières était payé par
les acheteurs, et pour les secondes remis aux acquéreurs, l'argent versé
pour les belles servant de la sorte à constituer des dots aux laides.
19, Pas. — Hérodote, IV, 180, dit que l'on regarde alors comme le père de
chaque enfant celui auquel il ressemble le plus.
21, Autres nous mesmes. — Les éd. ant. port. : chair de nosire chair et os
de nos os.
32, Platon. — Dans Phèdre.
50,
2, Fille. — NiCrPHORE, XII, 34. — Ses histoires éthiopiques qui comprennent
entre autres l'histoire amoureuse de Théagène et Charyclée, qu'appréciait
tellement Racine que, dit-on, il la savait par cœur. Le fait raconté par
Montaigne est contredit par Bayle, Héliodore.
20, Estudes. — Ce genre de peine, qui ne s'applique plus aujourd'hui, s'est
longtemps maintenu de pratique courante; et, jusqu'à la Révolution, on
condamnait au feu et on brûlait un peu partout, en France, en Angleterre,
aussi bien qu'à Rome, les livres frappés d'interdit et notamment ceux en-
tachés d'hérésie. — En 1735, Voltaire eut ses Lettres philosophiques, ou
Lettres anglaises, brûlées à Paris par la main du bourreau; et en 1760.. il
en fut de même, à Genève, de VÉmile de J.-J. Rousseau.
28, Ensemble. — Sénèque le Rhéteur, Controverses, V. — Ce Labienus n'est
pas le fils, mais le petit-fils du lieutenant de César, qui, devenu son ad-
versaire, périt à la bataille de Munda (45). Quintus son fils alla, après la
mort de César, chez les Parthes pour les décider en faveur de Brutus, et
fut vaincu, pris et mis à mort par Ventidius, lieutenant d'Antoine.
37, Manger. — Tacite, Ann., IV, 31. — En 20; c'était la première fois qu'une
accusation de ce genre était portée ; elle le fut à l'instigation de Séjan :
l'auteur se défendit avec énergie en présence même de Tibère. L'ouvrage
condamné échappa nonobstant à la destruction; on le cacha et plus tard
il reparut.
52,
L Bouche. — Tacite, An7i., XV, 70. En 65; Lucain avait participé à la con-
juration de Pison contre Néron, par ressentiment de ce que ce dernier,
par jalousie littéraire, cherchait à étouffer la gloire de ses vers et lui avait
défendu de les montrer. Tandis que, les veines ouvertes, son sang s'é-
NOTES. LIV. If, CFI. vn[. VOL. II, PAG. 52. Fb.455
chappait et qu'il allait s'affaiblissant, il so rappela un passage où il avait
décrit cliez un soldat bless('' une mort analogue et s'éteignit en les récitant.
V. II, (56 et N. Lucain.
10, Epicurus. — Diogène Laehce, X, 22; Cicéko.n, De Finibus, II, 30.
22, Entans. — Saint Augustin, d'après ses Confessions, aurait eu des enfants,
avant sa conversion; mais cette appréciation de Montaigne, qui est de celles
qu'on lui a reprochées, ne saurait être incriminée que par des critiques
pai' trop superficiels, ce n'est chez lui qu'une manière de dire.
;!:!, Rome. — Les éd. ant. port. : France.
'•y\, Aristote. — Murale à Nicomaque, IX, 7.
3S, Lacedemoniens. — Diodore de Sicile, XV, 87. — Épaminondas blessé
niortellejnent à la bataille de Maiitinée (363), ses amis l'entouraient et l'un
d'eux s'écria en pleurant: «Ah! Épaminondas! faut-il que tu meures sans
enfants! >• — " De par Jupiter, répondit celui-ci, cela n'est pas; je laisse
deux tilles, la victoire de Leuctres et celle de Mantinée. » — D'après Corné-
lius Népos, Épaminondas, 10, ce grand capitaine n'aurait parlé que d'une
tille, la bataille de Leuctres, ignorant peut-être à ce moment que son nou-
veau succès qui lui coûtait la vie fût aussi complet (V. N. I, 314 : Reng;
N. III, 18 : Epaminondas).
39, D'eschanger... gorgiasses. — Var. des éd. ant. : à eschanger celles-là
aux mieux nées et mieux coiffées.
54,
I, Estre. — Tous deux en eurent : Alexandre en eut un. Hercule, de Bar-
sine, fille d'Artabase, du sang des rois d'Arménie, ce fils atteignit l'âge de
dix-sept ans; et un autre posthume, Alexandre, de Roxane, fille d'un satrape
de Pei-se. Cassandrc, fils d'Antipater, les fit mourir tous deux avec leurs
mères ("V. N. III, 14 : Possession). L'histoire conserve encore le souvenir
d'un troisième, né de Cléophis, reine d'un royaume des Indes, qui reçut
son nom et régna sur les états de sa mère. — De César, on connaît Césarion,
qu'il eut de Cléopàtre (Y. N. II, 634 : Cœsarion); on lui attribuait aussi la
paternité de Brutus, l'un de ses assassins, fils de Servilia, sœur de Caton
d'Utique.
1, Phidias. — Ses œuvres les plus célèbres sont : le Jupiter Olympien, les
sculptures du Parthénon, dont il fut l'architecte, et la statue de Minerve,
qui en surmontait le fronton.
6, Filles. — Attila avait un grand nombre de femmes parmi lesquelle's se
trouvait une de ses filles, nommc-c Esca; ces alliances incestueuses n'étaient
pas réprouvées par les Huns. — Dans des conditions particulières, l'his-
toire des filles de Loth nous présente quelque chose d'analogue (Genèse,
XIX).
6, Fils. — Cette assertion de Montaigne (ivoque le souvenir de la réplique
de Maric-.\ntoinette accusée, devant le Tribunal révolutionnaire, d'avoir
corrompu son fils, dans la tour du Temple : >■ La nature se refuse à pa-
reille question faite à une mère; j'en appelle à toutes celles qui sont ici •>
(1793). — Et cependant on a accusé Agrippine d'avoir cherché à retenir,
par ce moyen, son influence sur son fils qu'elle sentait lui échapper; mais
ce fils était Néron, et l'une comme l'autre étaient des prodiges de vice.
8, Pygmalion. — Devint amoureux de la statue de Galathée qui était son
propre ouvrage, obtint de Vénus que ce marbre s'animât et l'épousa. Mylh.
— Cette fable est le sujet d'un charmant opéra-comique de Massé, paru
• en 1852.
CHAPITRE IX.
20, Salade. — Casque léger sans cimier, ou arniet, à l'usage des hommes à
cheval du xv*^ au xvir siècle, qui venait des Italiens qui l'appelaient celata,
dont par corruption on a fait salade.
24, Esloigner. — S'éloigner de; cette inènu! construction se rencontre en
Corneille dans sa tragédie de Pompée :
Fb.4o6 ESSAIS DE MONTAIGNE.
• ... Ses vaisseaux en bon ordre,
Ont éloigné la ville... •
29, Cortex. — Il s'en fabrique aujourd'hui pour les colonies, confirmant le
proverbe que rien n'est nouveau sous le soleil; il est vrai que ce n'est pas
comme défense contre le plomb ou le fer, mais contre les rayons solaires.
56,
8, Tacitus. — Annales, III, 43.
11, LucuUus. — Plutarque, Lucullus, 13.
12, Garentir. — On l'a essayé; les cuirasses des navires, les tourelles et cou-
poles cuirassées en acier chromé qui prptègent les pièces d'artillerie, les
bétonnages épais qui revêtent les parapets ou recouvrent les abris, réali-
sent dans une certaine mesure cette garantie contre le canon; on a été
moins heureux pour les abris mobiles offrant dans la guerre de campagne
une protection tant soit peu efficace, où les tranchées-abris et les boucliers
métalliques des pièces d'artillerie d'usage récent donnent seuls des résultats
appréciables.
19, Èlepbans. — Les éléphants jouèrent un grand rôle dans les guerres d'A-
lexandre et de ses successeurs, dans celles de Pyrrhus en Italie, durant les
guerres puniques du côté des Carthaginois. On leur protégeait la tète et
le poitrail, on garnissait leurs défenses de pointes d'acier et on les sur-
montait de tours portant généralement de six à huit hommes; la Bible
parle de 32, cela semble exagéré. — Actuellement, on les emploie encore
aux armées, dans les pays où on peut s'en procurer aisément, dans les
Indes, aux transports, voire même à celui de pièces d'artillerie légères. —
En certaines autres contrées, notamment en Afrique, dans le Sahara, entre
l'Algérie et Tombouctou, on utilise de même, pour les expéditions qui s'y
font, le méhari, dromadaire de selle, qui peut soutenir, pendant une quin-
zaine de jours, des marches quotidiennes de 70 kilomètres et franchir en
cas de besoin 120 kilomètres en douze heures; le méhari est la monture
habituelle des Touareg, seuls habitants de cette région. Déjà, en 1798,
lors de la campagne d'Egypte, avait été constitué un régiment de droma-
daires pour pouvoir excursionner dans le désert et y atteindre l'ennemi
en fuite.
21, Cbausse-trapes. — Clou de 12 à 15 centimètres de long, formé de quatre
'pointes dont une se trouve toujours en l'air. — En Espagne, en 124.
Valère Maxime, III, 7, 2, dont le fait est tiré, ne le présente que comme
une idée proposée à Scipion qui la repoussa; aujourd'hui on n'en agirait
pas de même; on estime avec raison que tout, en dehors de ce qui est dé-
loyal, est licite à la guerre, qui de fait n'est soumise qu'à la loi du plus
fort et à celle, fort élastique et peu précise, de la conscience des belligé-
rants.
28, Gauche. — Plutarque, Apophth. de Scipion le Jeune, 18. — Allusion à ce
que le bouclier, arme défensive, se portait an bras gauche, et que les armes
offensives, armes de main et armes de jet, se maniaient avec la main droite
et qu'à la guerre attaquer vaut mieux que se défendre.
36, Caracalla. — Xiphilin, Caracalla.
38, Morion. — Casque à l'usage des hommes à pied, assez semblable à celui
du nom de « salade », affecté aux gens à cheval (V. N. II, 54 : Salade).
38, Escu. — Bouclier; vient du latin scutum, provenant lui-même du grec
sculos (cuir), parce qu'anciennement les boucliers étaient en cuir.
58,
2, Paux. — Pieux, palissades; pluriel de pal, du latin palus qui a cette si-
gnification.
3, Poix. — Dans nos dernières guerres, le chargement du fantassin s'éle-
vait à une vingtaine de kilos, soit un tiers de moins que celui du soldat
romain. Malgré cette énorme différence, ce poids est devenu écrasant
pour notre époque où tout ce qui est à peu près valide est appelé sous les
drapeaux, et n'a pas la force des soldats de métier des temps passés; aussi
NOTES. LIV. II Cil. IX. VOL. II, PAG. 60. Fb.457
s'évertue-t-on à réduire ce chargement à l'indispensable, ce qui permettra
de le ramener à douze ou treize kilo.s. Mais, au lieu de supprimer l'excé-
dent, on en surcharge les trains régimentaires, perdant de vue que fré-
quemment, avec nos armées à gros effectifs, ils ne rejoindront pas et qu'en
outre, il est bien inutile de les encombrer d'effets de remplacement, alors
qu'on peut si facilement en assurer le renouvellement par les services de
l'arrière au fur et à mesure des besoins,
5, Haste. — Plutarque, Marins, 4. — Ses exigences envers ses soldats leur
avaient fait donner le sobriquet de « mulets de Marius » ; toutefois on as-
signe encore une autre origine à cette appellation : Au siège de Numance,
Scipion examinait les chevaux et mulets de ses troupes, pour vérifier en
quel état ils se trouvaient; Marius amena les siens qu'il soignait lui-même
et les présenta en si bon état qu'il passa dès lors en proverbe, pour louer
avec raillerie un homme laborieux, assidu et patient, et en particulier un
soldat présentant ces qualités, de dire que c'était un mulet de Marius.
9, Cuit. — Plutarque, Apophth. du second Scipion. — En 133. Scipion, nommé
consul pour la seconde fois, vint prendre en Espagne le commandement
de l'armée qui, devant Numance, était depuis dix ans tenue en échec. Il
y trouva un grand désordre. 11 chassa du camp deux mille femmes de
mauvaise vie, les aruspices, les devins qui la transformaient en un lieu
d(> débauche et un champ de foire; en bannit le luxe; ordonna que l'on
dînât debout, sans manger de viande chaude; au souper, on pouvait s'as-
seoir, mais on devait se borner à de la soupe et un plat de viande; lui-
même s'était mis à ce régime et, vêtu d'un manteau noir, disait qu'il por-
tait le deuil de son armée. A ses soldats, il fit élever des murailles, creuser
des fossés qu'il renversait et comblait ensuite : « Qu'ils se couvrent de
boue, disait-il, puisqu'ils ne veulent pas se couvrir de sang. » Il temporisa
pour attaquer à nouveau l'ennemi, jusqu'à ce qu'il se crût en mesure de
l'emporter, et finit par les réduire à s'entr'égorger. Après la prise de la
ville, les vieillards reprochaient à leurs défenseurs de s'être laissé battre par
des gens qu'ils avaient battus tant de fois ; un d'eux leur répondit : « Les
moutons sont bien les mêmes, mais le berger a été changé. »
14, Marcellinus. — Ammien Makcellin, XXIV, 7. — Fit longtemps la guerre
en Germanie, dans les Gaules, et accompagna l'e^tipereur Julien dans son
expédition contre les Perses (V. N. II, 532 : Marcellinus).
17, Romaine. -^ Les éd. ant. aj. : Or, par ce qu'elle me semble bien fort ap-
prochante de la nostre, i'ay voulu retirer ce passage de son autheur, ayant
pris aulresfois la peine de dire bien amplement, ce que ie sçauois sur la com-
paraison de nos armes, aux armes Romaines : mais ce lopin de mes brouil-
lars m'ayant esté desrobé auec plusieurs autres, par vn homme qui me ser-
uoit, ie ne le priueray point du profit, qu'il en espère faire : aussi me seroit-
il bien malaisé de remascher deux fois vne mesme viande.
•il, Lieu. — Ammien Marcellin, XXV, 1.
38, Bardes. — Avec son armure et celle de son cheval.
il, Soixante. — Plutarque, Démétrius, 6. — Montaigne fait quelque change-
ment au récit de l'historien qui dit qu'Alcymus revêtait une armure de
cent vingt livres, tandis que celles de Démétrius et de tous autres n'étaient
que de soixante ; et que le roi en fit faire deux pour Alcymus et pour lui-
même, qui n'en pesaient que quarante, mais se distinguaient par la trempe
du métal, si bien qu'à la distance de vingt-six pas, un trait lancé par une
' machine de l'époque n'y produisait qu'une enipreinte très légère, à peine
perceptible.
CHAPITRE X.
60,
Liures. — Dans ce chapitre, Montaigne passe en revue les principaux
auteurs latins ou français dont il faisait sa lecture habituelle et qui ont
fourni la majeure partie des faits ou des idées qui ont servi soit de point
Fb.4oS ESSAIS T)E MONTAIGNE.
de (lôpart, soil d'argiimonls à l'appui des réflexions qui composent les Essais.
1. Acquises. « Comment Montaigne peut-il parler ainsi, après les lectures
infinies dont son ouvrage même est la preuve? N'est-ce pas acquérir que de
lire beaucoup, et surtout de réfléchir, comme lui, sur tout ce qu'on a lu? »
Servan.
14, Rétention. — Je suis homme qui ne retiens rien de ce que j'ai appris.
15, lusques... i'en ay. — Les éd. ant. port. : ce que ie pense : Exculienda dn.
I mua praecordia (donnant nos pensées pour ce qu'elles valent), citation qui
n'est donnée que par l'éd. de 88, et qui est rayée en cette place sur l'ex. de
Bordeaux et reportée sur cet exemplaire et la présente édition liv.llI,ch.IX,
III, 444 : et iusques à quel poinct monte, pour cette heure, la rnnnoissance
que ray de ce dequoy ie traitte.
16, S'attende. — Ne s'arrête pas
16, Matières... i'y donne. — Var. des éd. ant. : choses de quoi/ ie parle, mais
à ma façon d'en parler et à la créance que i'en ay.
17, Qu'on voye... sçauroient payer. — Var. des éd. ant. : Ce que ie desrohe
d'autruy, ce n'est pas pour le faire mien ; ie ne prétends icy nulle part que
celle de raisonner et de iuger : le demeurant n'est pas de mon rolle. le n'y
demande rien sinon qu'on voie si i'ay sceu choisir ce qui ioignoit iustemenl
à mon propos. Et ce, que ie cache parfois le nom de l'autheur à escient e'.s
choses que Remprunte, c'est pour tenir en bride la légèreté de ceux qui s'en-
tremettent de iuger les choses par elles-mesmes, s'arrestenl au nom de l'ou-
urier et à son crédit.
26, Solage. — Terroir, terrain; du latin solum qui a cette même significa-
tion et dont nous avons fait sol.
28, Escrits. — Les éd. ant. aj. : et n'ayant pas le nez capable, de gousler les
choses par elles-mesmes, s'arrestenl au nom de l'ouurier et de son crédit.
62,
1, Vulgaire. — Qui sont en langage vulgaire, ce qui met tout le monde à
même d'en parler, et aussi donne à croire qu'il n'y a rien que de vulgaire
dans le plan et les pensées.
3, Veux. — Les éd. ant. port. : fe veux qu'ils s'eschaudenl à condamner Ci-
ceron et Aristote en moy, au lieu de : « le veux... moy
« Le critique imprudent, qui se croit bien habile,
Donnera sur ma joue un soufflet à Virgile ;
Et ceci (tu peux voir si j'observe ma loi),
Montaigne, il t'en souvient, l'avait dit avant moi. » Andrk Ghémer.
5, Musser. — Cacher par de belles paroles : « Louis XI savait, par de, belles
paroles, donner la musse à ses ennemis. » Pasquier.
5, Crédits. — « Montaigne a commis plagiats sur plagiats; il s'en accuse en
particulier envers Sénèque, Plutarque, déclarant que s'il ne signale pas les
emprunts qu'il leur a faits, c'est qu'il est bien aise que ceux qui critique-
ront les Essais,*critiquent ces auteurs et autres dont il s'est inspiré, en
croyant le critiquer lui-même; mais, au moins en ce qui touche Sénèque,
il est plus facile que Montaigne ne le croit de reconnaître la phrase courte,
figurée, sentencieuse, presque toujours antithétique de l'auteur latin, au
travers de la riche abondance du style des Essais, étendue sans être lâche,
détaillée sans être prolixe. » Ch. Nodier.
Quant à Cicéron, vis-à-vis duquel il est très sévère et qu'il ne nomme pas
parmi ceux auxquels il a fait des emprunts très considérables cependant,
S. DE Sacy écrivait en 1865 : « Je viens de relire Cicéron et je sais Montaigne
par cœur; j'affirme que les traités philosophiques du premier, dont celui-
ci dit : « qui me peuvent servir chez lui, à mon desseing », notamment ceux
de la Nature des dieux et de la Divinité, ont passé presque tout entiers
dans les Essais; on peut même y joindre les Tusculanes et les Questions
académiques. Non seulement Montaigne a pris le fond, il s'est aussi inspiré
de la forme. » — Par contre, Charron, dans son traité de la Sagesse,
XOTKS. IJV. Il, Cil. X. VOL. Il, PAG. 62. Fb.-159
a copié textuolleiTicnt do Montaigne ses plus magnifiques passages et d'au-
tres aussi que Montaigne a tirés de Sénèque ou de tel autre. La Mothe le
Vayer, La Bruyère, S-Evremond, Fontenelle, Bayle et Voltaire ne se sont
pas montrés plus délicats; mais aucun d'eux cependant n'approche de
Pascal dans l'audace du larcin. Parmi les Pensées de ce dernier il y en a
qui lui appartiennent en propre, ce sont celles empreintes de mélancolie
superstitieuse, morose, et comme illuminée, qui trahit l'état où le plongeait
la maladie; mais ces élans d'une âme forte, ces traits grands et inattendus,
dont on a dit qu'ils tenaient plus des dieux que de l'homme, c'est Timéc
de Locres, S. Augustin, Charron et spécialement Montaigne qui les ont
fournis; et le ton tranchant et dédaigneux dont nonobstant il parle des
Essais, comme si, non content de s'en être enrichi, il voulait les perdi-e de
considération pour hériter seul de leur gloire, impressionne défavorable-
ment. Ch. Nodier.
'.), Nation. — C.-à-d. d'où ils viennent.
i\, Bande. — Sergent de bande ou de bataille; celui qui les jours de combat
rangeait les troupes en bataille.
•J7, Témérairement. — C.-à-d. dont on peut parler sans préparation et har-
diment. — Personne n'a jamais et plus exactement rendu le pèie-mèle, la
demi-science, le jugement qui se rencontrent dans les Essais, que leur au-
teur ne le fait ici.
31, Science. — Add. des éd. ant. : mesrne.
64,
6, Primsautier. — Qui fait ses plus grands eflorts du premier coup, de
prime saut; du latin a primo saltu. V. N. 1,620 : Prim-saut.
9, Dissipe. — L'exemplaire de Bordeaux porte ajouté, puis rayé : mon es/iril
pressé se ielle au rouet.
18, Intelligence. — Les éd. ant. port. : ne se satisfaicl pas d'vne intelligence
moyenne, au lieu de : « ne sçait... intelligence ». — Montaigne veut dire
qu'il n'avait qu'une médiocre connaissance de la langue grecque, ce qu'il
a déjà indiqué au ch, XXV du liv. I et au ch. IV du liv. II, ce qui ne l'em-
pêche pas d'en citer assez souvent des passages.
19, Decameron. — Ouvrage capital de Boccace, publié en 1352 et qui l'a place
à la tête des prosateurs italiens et a immortalisé son nom. C'est un recueil
(he cent nouvelles pleines de gaité, où la décence n'est pas toujoure respec-
tée, mais dont le style original n'a été égalé par aucun des écrivains con-
temporains de l'auteur.
19, Rabelays. — Auteur de l'histoire de Gargantua et Pantagruel, roman
satirique publié de 1533 à 1534 (en partie après la mort de l'auteur), rempli
de folies, d'extravagances, de quolibets, de mots barbares et forgés à plai-
sir, de passages inintelligibles, et, en même temps, plein d'originalité, de
bon sens et même d'érudition ; c'est un ouvrage où le fond et la forme sont
tout imagination, mais qui, dans certains détails, offre d'utiles leçons, des
allusions piquantes et de sévères censures; les moines et le clergé y sont
surtout fort maltraités. — Rabelais, disait Boileau, veut toujours être plai-
sant et l'est toujours. — Nul, disait J.-J. Rousseau, n'a mieux connu les ri-
chesses et l'énergie de la langue française et n'en a su si bien tirer parti.
2i\ Second. — Poésie latine du genre élégiaque, publiée en 1511, se compo-
sant d'épigrammes sur le sujet constituant le titre de l'ouvrage. — L'auteur,
mort n'ayant pas encore vingt-cinq ans, un des meilleurs poètes latins mo-
• dernes, fut qualifié par un de ses contemporains, par ce jeu de mots :
« .lean Second, qui fut loin d'être le second parmi ceux de son époque ».
20, Tiltre. — Add. des éd. ant. : et des siècles vnpeu au dessus du nostre l'His-
toire jEthiopique.
21, Amadis. — Ce roman espagnol de chevalerie, autrefois très célèbre, a
pour héros Amadis de Gaule, dit le Chevalier du lion, fils de Perion, roi
fabuleux de France, qui est resté le type des amants constants et respec-
tueux, aussi bien que de la chevalerie errante dans ce qu'elle avait de no-
ble et de beau ; on pense que les aventures qui y sont relatées, n'ont rien
Fb.460 ESSAIS DE MONTAIGNE.
d'historique, on ne sait même à quelle époque les rapporter. La traduction
qui en a été faite au xm" siècle par le Sieur des Essarts a été longtemps
en grande faveur et fut longtemps classique: on peut }■ cueillir, disait un
écrivain de ce temps, toutes les belles Heurs de notre langue française.
24, L'Arioste. — Auteur italien de Roland furieux (Orlando f'urioso), épopée
chevaleresque publiée en 1516, dont Roland, neveu de Charlemagne, est le
héros et où les exploits des paladins sont racontés avec un art inimitable
qui mêle le plaisant et le sérieux, le gracieux et le terrible, et fait marcher
de front une foule d'actions diverses qui toutes intéressent.
25, Ouide. — Dont le chef-d'œuvre est sans contredit son poème des Métamor-
phoses, un des plus brillants monuments de la poésie latine, vaste épopée
qui embrasse tous les faits de la mytliôlogie et des temps fabuleux.
'3\, Axiocbe. — Dialogue d'une très haute antiquité; longtemps attribué à
Platon, bien qu'il n'en reflète pas le style, et qui au jugement des meilleure
critiques serait d'Eschine, disciple de Socrate.
33, Outrecuidé. — C.-à-d. il n'est pas si vain, comme portent les éditions
antérieures; ou : il n'est pas si sot, comme il y a dans l'exemplaire de
Bordeaux.
34, Qu'il tient... faillir. — Var. des éd. ant. : nyne se donne lémérairemenl la
loy de les pouuoir accuser.
66,
3, Esope. — Ces fables ne sont pas de lui ; les Grecs se sont emparés de ses
apologues et les ont arrangés sous diverses formes, soit en vers, soit en
prose ; mises en recueil, pour la première fois, 200 ans après sa mort, elles
ont été traduites dans toutes les langues et imitées notamment par Phèdre
et La Fontaine.
8, Virgile. — L'Enéide, les Géorgiqiies et les Bucoliques composent l'œuvre
de Virgile. — Les Bucoliques sont des églogues ou pastorales écrites avec
esprit et élégance, quelquefois vagues et obscures, mais où se révèle déjà
néanmoins le génie de leur auteur, alors âgé de 25 ans. Les Géorgiques, qui
suivirent, sont un poème didactique, un ouvrage d'économie rurale où se
trouvent décrits les travaux des champs et le bonheur de la vie champê-
tre; on y admire une infinie variété de formes, la richesse des descrip-
tions, une sensibilité pénétrante qui anime tout, enfin une excellence litté-
raire qu'il est impossible de trouver une seule fois en défaut. — L'Enéide,
poème épique, dont le héros est Énée, prince troyen venu d'après les tradi-
tions s'établir en Italie, dans le Latiuni, après la chute de Troie et auquel
les Romains faisaient remonter leur origine. L'auteur y chante le berceau de
Rome et les antiquités de l'Italie ; c'est une composition plutôt faible sous
le rapport du plan et des caractères, mais on y admire l'art de rendre la
passion, l'exquise délicatesse des vers, la perfection du style, le fini de
l'exécution. Virgile, quand il mourut, n'avait pas entièrement terminé
l'Enéide qu'il travaillait depuis dix ans, et par son testament, il ordonna de
jeter au feu son œuvre inachevée; l'empereur Auguste s'y opposa.
8, Lucrèce. — Imbu des principes d'Épicure, Lucrèce s'est fait, au I" siècle,
l'apôtre du matérialisme et de l'athéisme dans son poème philosophique
célèbre • De la Nature des choses », écrit dans un langage d'un souffle puis-
sant et parfois sublime, sans égal dans aucune langue, comme audace de
pensée, amertume de sentiment et rigueur de logique.
9, Catulle. — Catulle réussit surtout dans l'épigramme et le genre erotique;
on a aussi de lui deux poèmes épiques qui, notamment celui des Noces de
Pelée et de Thétis, révèlent des qualités sérieuses en ce genre; tout cela
d'un style exquis, achevé, d'une brièveté raffinée sous un air de simplicité
extrême.
9, Horace. — Quatre livres d'odes, un d'épodes, deux de satires, deux d'épi-
tres, et une épître aux Pisons connue sous le nom d'Art poétique, com-
posent l'œuvre de ce poète si célèbre. Dans ses odes, il se montre à la fois
brillant, énergique, sublime et naïf, délicat, gracieux; ses satires et ses
épitres sont des modèles d'urbanité, de raillerie douce et bienveillante ; sou
68,
70,
NOTES. LIV. II, CH. X. VOL. II, PAG. 66. F.461
Arl poétique e&t un poème didactique que Boileau a imité en le développant
et qui encore aujourd'hui est le code des hommes de goût. Horace est le
type accompli de l'épicurien latin; c'est un poète élégant et habile, un mo-
raliste spirituel et savant ; il est aussi courtisan, sans cesser de conserver
une certaine liberté de langage et d'humeur; de caractère indépendant, il
faisait consister le bonheur dans l'usage modéré des biens de la vie.
15, Lucain. — Auteur de la Pharsale, poème épique où il raconte la guerre
civile entre César et Pompée; œuvre brillante et élevée, mais pompeuse
et déclamatoire; au reste le poète n'eut guère le temps de la polir et de la
terminer, obligé qu'il fut de se donner la mort par ordre de Néron. V. II,
50, et N. 52 : Bouche.
17, Terence. — 11 ne nous reste plus de lui que six comédies, parmi les-
(juelles l'Andrienne. Térence était l'ami de Scipion Émilien et de Lelius
qui, dit-on, prirent quelque part à la composition de ses pièces; son stjle
est élégant et pur, la composition chez lui est régulière, le ton parfait, mais
souvent l'intérêt est presque nul et on y trouve peu de mouvement et de
gai té.
■13, Inégale. — Le style de l'Enéide est beaucoup plus parfait que celui do
Lucrèce, sa poésie plus magnifique, quoique ennuyeuse parfois; mais celui-
ci est plus plein, pense davantage, est par moment aussi grand poète, et
a plus d'originalité.
30, Plaute. — Il nous reste de lui une vingtaine de pièces qui, la plupart,
ont ét(' imitées par nos auteurs français. 11 est caractérisé par son origina-
lité, des coups de théâtre imprévus, un dialogue rapide, une verve étin-
celante, des pointes, des jeux de mots, des charges souvent grossières,
mais vraies au fond; il est franchement comique et faisait les délices du
peuple.
32, Romaine. — Cicéron.
34, Compagnon. — Ce juge, c'est IIouace qui dit dans son .irt poétique,
V. 270 : •■ Il est vrai que nos pères ont goûté les vers et les saillies de
Plaute; à mon sens, leur admiration a été excès d'indulgence, pour ne pas
dire sottise. »
10, Oublions... table. — Var. des éd. ant. : fuyons la fin de son hisloire.
15, Petrarchistes. — A l'imitation de Pétrarque, l'un des créateurs de la
langue italienne, célèbre entre autres par les sonnets et les contons qu'il
(?crivit pour Laure de Noves.
10, Martial. — Auteur d'épigrammes sur toutes sortes de sujets, pièces fugi-
tives, élégantes, acérées, écho fidèle de la dépravation de l'empire romain,
et dont bien des traits, encore justes, pourraient s'appliquer à notre épo-
que; à beaucoup d'esprit, joint souvent une licence excessive et parfois
aussi une basse adulation.
26, Sont assez... iambes. — Var. de 88 : peuuent aller à pied.
29, Noblesse. — Add. des éd. ant. à 88 : en recompense de cette grâce qu'ils ne
peuuent imiter.
3G, lours. — C.-à-d. vêtus des habits qu'ils mettent d'ordinaire, comme por-
tent les éditions antérieures ; cette expression est encore en usage et assez
répandue en France.
1, Auoir besoin... saunages. — Var. des éd. ant. : il faut qu'ils s'en-
farinent le visar/e, il leur faut trouuer des veslemenls ridicules, des mouue-
ments et des grimaces.
11, Furieux. — L'Orlando furioso, ou le Roland furieux de l'Arioste, œuvre
capitale de ce poète, où il raconte les exploits des paladins, mêlant avec art
le plaisant et le sérieux, le gracieux et le terrible, faisant marcher de front
une foule d'actions diverses auxquelles il sait également intéresser.
14, Seruent. — Add. des éd. ant. : plus ordinairement.
14, Plutarque. — Auteur des Vies des hommes illustres de la Grèce et de
Home, et de nombreux traités de i)olitique, d'histoii'e ou de morale, dits
Fb.462 KSSAIS DK MONTAIGNE.
Œuvres morales, que quchjues lignes plus bas Montaigne désigne sous le
nom d'Opuscules, parmi lescjucls on remarque ceux intitulés : L'Origine de
Came; Du dénie de Socrale: Du Silence des oracles: Questions de table; Des
Contradictions des Stoïciens. — On trouve dans ses écrits un grand jugement,
des connaissances profondes et variées, une bonhomie et une morale
douce qui les font lire avec charme; il vous fait vivre intimement avec
les hommes dont il raconte la vie. La qualification de parallèles donnée à
certains fragments des Vies de Plutarque, vient de ce qu'il y place en i-e-
gard un (Jrec et un Romain dont les existences, dans leur ensemble, pré-
sentent de l'analogie, et les comjjare, semblant s'être proposé de montrer que
la Grèce n'était point inférieure à Rome. — Plutar(|ue venait d'être 'traduit
en français pai' Amyotet publié (les \'ies des hommes illustres en 1555, les
Œuvres morales en 1574), loi'sque Montaigne ('crivait les Essais.
15, Seneque. — On a de lui un grand nombre d'écrits sur la philosophie; il
y prêche la morale la plus austère et enseigne surtout le mépris des riches-
ses et de la mort; son style est brillant et élégant, mais souvent affété et
rempli d'antithèses; il vise beaucoup à l'effet. Dans s(!s Lettres à Luciiius,
le penseur déploie toutes les ressources de son esprit, et l'écrivain tous les
charmes de son style. — Montaigne lui a souvent fait de très larges em-
prunts et a souvent adopté ses idées.
■A), Profitable. — On s'étonne de cette préférence pour cette partie de l'œu-
vre de Plutarque qui, malgré son mérite, ne saurait être comparée à ses
« Vies des hommes illustres »; du reste au ch. XXXII de ce même livre (N.
II, 630), Montaigne revient sur son jugement et dit que ses « Parallèles »,
qui sont partie intégrante des « Vies », constituent « la pièce plus admi-
l'able de ses œuures ».
■^i, Autres. — Add. de 88 : Vayme en général les liures qui vsent des scien-
ces, non ceux qui les dressent. (Cette phrase est reportée un peu plus loin
avec variante dans la présente édition, pag. 74, 5).
iî), Romains. — Sénèquc fut précepteur de Néron. Plutarque l'aurait été' de
Trajan suivant les uns, d'Adrien suivant d'autres. A l'égard de Trajan, on
s'appuie sur une lettre dont l'authenticité est contestée; ce qui porterait
en outre à penseï' que cela n'a pas été, c'est qu'ils étaient à peu près du
même âge ; mais Plutarque a fait des leçons publiques de [ihilosophie à
Rome, et il se peut très bien que Trajan ait été du nombre de ses audi-
teurs. — Sénèque était né à Cordoue (Espagne) : Plutarque, à Chérouée, en
(Irèce. — Le poète anglais Dkyden {id'M à 1701) a éci'it un parallèle de
Pliitar(|U(' et de Sénèque.
72,
■i, Cicero. — V. N. II, 028. Ce fut le plus éloquent des orateurs romains;
sans rival surtout dans l'éloquence judiciaire, par la richesse de son ima-
gination, la souplesse de son génie plein d'abondance, de grâce et de sé-
duction, et par l'habileté de sa dialectique; comme écrivain, s'est, sans
grand succès, adonné dans sa jeunesse à la poésie, mais est sans contredit
le premier des prosateurs latins, et nul n'a jamais dépassé la pureté, la
richesse, l'harmonieuse élégance de son style. 11 ne nous est parvenu
(|u'une partie de ses ouvrages, que l'on divise en quatre groupes : 1" les
Harangues, parmi lesquelles on admire surtout les Catilinaires et les Phi-
lippiques; 2" \g% Livres de Rhétorique , dont le plus beau est l'Orateur; 3''l(>s
Traités philosophiques, dont les plus estimés sont De la Nature des dieux
et les Tusculanes; 4" les Lettres, parmi lesquelles nombre d'épîtres fami-
lièi-es; elles constituent un monument incomparable et un modèle du genre
épistolaire; on y distingue surtout celles à Atticus, à Quintus, à Rrutus:
elles fournissent les matériaux les plus- i)récieux pour l'histoire du temps
(V. N. I, 430 : Amis).
4, De la philosophie... morale. — Var. des éd. aiit. : des meurs et règles dr
nostre vie.
4, Morale. — Avant Cicéroii, les Romains, si on en i'\re]>1i' Lucrèce, s'o
74,
NOTES. IJV. H, eu. X. VOL. II. PAG. 72. Fb.46;^
taient peu adonnes à la piiilosopliie, et n'y avaient que médiocrement
réussi.
6, Impudence. — Allusion à la lettre de Cicéron par laquelle il prie Luc-
ceius d'écrire l'histoire de son consulat de manière à lui mériter les éloges
de la postérité (V. I, 430 et N. Registres).
7, Préfaces. — Les éd. ant. aj. : digressions.
10, Apprêts. — Jlontaigne parle du style de Cicéron en des termes qui ne
permettent pas de douter qu'il en fait beaucoup moins de cas que de Sé-
nèque; le cardinal Duperkon (1556 à 1618) ne pensait pas de même : » Il y
a plus, disait-il, en deux ftages de Cicéron, qu'en dix pages de Sénèque. »
•21, Fil. — Il est en efTet peu de coure, de conférences, de plaidoyers et aussi
de sermons dont on puisse dire ce que Sénèque disait des harangues de
Cassius Severus, " que tout y portait coup et que les plus courtes distrac-
tions de ses auditeurs leur faisaient toujours perdre quelque chose d'inté-
ressant >■ (V. I, 70 et N. Cassius, et II, 50). De combien de nos hommes
politiques peut-on en dire autant?
:{(), Or oyez. — Ce cri, sorte d'avertissement d'avoir à prêter attention à ce
qui allait suivre, est encore employé en Angleterre, dans certaines solenni-
tés, par les héraults d'armes dont l'usage s'est conservé et qui, lorsque bien
rarement ils remplissent un devoir de leur charge, le font en observant les
traditions du passé.
31, Hoc âge. — Sentence philosophique grecque qui se complétait par ces
mots : et eris beatus (Fais ainsi et tu seras heureux, tu y trouveras avantage,
cela te réussira).
32, Sursum corda. — Cette formule, dans l'ancienne Église, précédait tou-
joui-s la célébration de ses plus augustes cérémonies, rappelant les assis-
tants au recueillement; les pa'iens, dans le même but, disaient : Favete
linr/uis (Favorisez-nous de votre silence), pour le recommander lors de la
célébration de leurs principaux mystères.
37, Platon. — Célèbre par sa philosophie, qui est la plus haute expression de
l'idéal et se rapproche parfois des idées chrétiennes. Platon a laissé un grand
nombre d'écrits, presque tous sous la forme de dialogues; Socrate y joue
le principal rôle; les plus importants sont : Crilon, ou le Devoir des ci-
toyens; Phédon , ou de l'Ame; V Apologie de Socrate; Théétète, ou de la
Science; le Sophiste, ou de l'Être; la Politique; Parménide, ou des Idées;
le Banquet, ou de l'Amour; Phèdre, ou du Beau; Théagès, ou de la Sa-
gesse; Lâchés, ou du Courage; Lysis, ou de l'Amitié; Clorgias, ou de la Rhé-
torique; .]fénon, ou de la Vertu; Ion, ou de l'Enthousiasme poétique: la
République ; Timée, ou de la Nature; Critias; les Lois. — Ses écrits, où l'on
admire la sublimité de ses conceptions, la pureté de sa morale, la noblesse
de son style, sont le monument le plus important de la dialectique des an-
ciens; en même temps qu'ils sont un chef-d'œuvre d'art, ils nous offrent
par la méthode d'interrogation et de réfutation qui y est partout suivie,
un modèle d'analyse philosophique.
6, Premiers. — Sénèque et Plutarque.
(i, Pline. — Pline l'Ancien ou le naturaliste. — Certains de ses ouvrages
sont perdus; nous ne possédons plus de lui que son Histoire naturelle en
37 livres, sorte d'encyclopédie encore estimée, traitant de l'astronomie, de
la géographie, de la zoologie, de la botanique, de la minéi'alogie et acces-
soirement de questions touchant l'agriculture, la métallurgie, les moii-
• naies, etc.; son style a de la vigueur et de l'originalité.
10, Epistres. — Les éd. ant. aj. : et notamment celles.
18, VeiHu. — Ce traité de Brutussur la vertu est perdu; il subsistait encon»
du temps de Sénèque qui en cite un fragment.
19, Practique. — « Les vertus comme colles de Brutus (Brutus était, dit-on,
le (ils de César qui l'aimait, l'avait appelé à lui et comblé de faveurs; au
moment de mourir, le voyant au nombre des conjurés, il s'écria : « Et toi
aussi, mon fds! »), ces vertus sont si voisines du crime, que la conscience
Fb.464 ESSAIS DE MONTAIGNE.
des républicains eux-mêmes se trouble, en face du vote du duc d'Orléans
prononçant la mort de Louis XVI. >■ Lamartine, Les Girondins.
30, Beaucoup. — Dans le petit nombre d'erreurs qu'on peut reprocher à
Montaigne, est le jugement qu'il porte sur Cicéron; il qualifie bien son élo-
quence d'incomparable, mais il estime que hors la science, il n'y avait pas
beaucoup d'excellence en son âme. Avait-il donc une âme commune, cet
orateur que ni l'oi-, ni les intrigues, ni la violence des passions ne purent
jamais ni corrompre, ni intimider ; qui déconcerta, par l'autorité de son
langage et la fierté de ses regards, l'audace môme de Catilina; qui sur ses
vieux jours, abandonnant les doux loisirs de Tusculum, reparut avec son
génie sur le théâtre où la liberté et les dépouilles du monde romain étaient
le prix offert aux triomphes de l'ambition, poursuivit de son courroux
éloquent le plus implacable des triumvirs, et périt avec gloire, victime de
son amour pour la patrie. Abbé Jay.
32, Vers. — « On peut être honnête homme et mal faire des vers. » Molièke.
34, Nom. — Ce jugement de Montaigne sur les vers de Cicéron, n'est pas
celui de tous; et peut-être sa grande réputation d'orateur a-t-elle fait tort
à celle de poète; un autre que lui eût, sans doute, été plus estimé pour
ses poésies.
35, L'égalera. — Saint .Jérôme a dit de lui : « Démosthène t'a ravi la gloire
d'être le premier orateur; toi, tu lui as ôté celle d'être l'unique. » — Les
éd. ant. aj. : Si est-ce qu'il n'a pas en cela franchi si net son aduantage,
comme Vergile a faict en la poésie : car bien tosl apr'es luy, il s'en est
trouué qui l'ont pensé égaler et surmonter, quoy que ce fusl à bien fauces
enseignes, mais à Vergile nul encore depuis luy n'a osé se comparer, et à ce
propos l'en veux icy adiouster vne histoire.
76,
78,
8, Présence. — Sénèque, Suasor, 8.
12, Elumbem. — Cicéro.n, De Oratoribus, 18.
15, Souuent. — Se reporter à ce même dialogue, De Oratoribus, 23.
19. Essem. — Pour pouvoir, en dehors de la négligence de style résultant de
la répétition de mots que présente cette phrase, juger exactement de la
défectuosité de sa prononciation qu'incrimine Montaigne, il faudrait l'en-
tendre dire avec celle de l'époque que nous ne connaissons guère, faute de
données suffisantes sur ce point.
20, Baie. — C.-à-d. la lecture des historiens est mon passe-temps le plus
agréable, celui où je me complais davantage; métaphore tirée du jeu de
paume, où, quand la balle vous arrive de côté droit, elle est plus facile à
renvoyer. — Les éditions antérieures présentent cette variante .• Les hia-
loriens sont le vray gibier de mon estude, car ils sont plaisans et aysez : et
quant et quant la considération des natures et conditions de diuers homm£s,
les coustumes des nations différentes, c'est le vray suiect de la science mo-
rale, au lieu de : « Les historiens... menacent ».
28, Plutarque. — Add. des éd. ant. : le recherche bien curieusement non seu-
lement les opinions et les raisons Muerses des philosophes anciens sur le
suiect de mon enlreprinse, et de toutes les sectes, mais aussi leurs meurs,
leurs fortunes et leur vie.
29, Laërtius. — Diogène Laërce, historien grec, auteur d'une biographie
des principaux philosophes; toute critique en est absente et les anecdotes y
tiennent plus de place que les vues scientifiques, l'ouvrage n'en est pas
moins précieux par les nombreux renseignements qu'il contient.
2, Salluste. —'A écrit l'histoire de Rome depuis la mort de Sylla jusqu'à la
conspiration de Catilina, il n'en reste que des fragments; nous avons en-
core de lui la guerre de Catilina et celle de Jugurtha. 11 se distingue par la
précision de son style, sa perspicacité, sa science pratique; mais il a ten-
dance à la partialité et présente des lacunes et de fréquentes digressions.
7, Dit Cicero. — Cicéron, Brutus, 4. — Voici le jugement qu'il en porte, et
il est d'autant plus flatteur qu'il était compétent et n'aimait pas César :
NOTES. LIV. II, CH. X. VOL. II, PAG. 78. Fb.465
« Parmi les orateurs, il n'en est point à qui César doive céder; il y a dans
sa manière de l'élégance et de l'éclat, de la magnificence et de la gran-
deur; qui pourrait l'emporter sur lui pour l'abondance et la vigueur de ses
pensées? » Comme historien : " Ses Comnlentaires sont un livre excellent;
le style en est simple, pur, élégant, dépouillé de toute pompe de langage;
c'est une beauté sans parure; en ne chargeant pas d'ornements frivoles
ces grâces naturelles, il a ôté aux gens de goût, jusqu'à l'onvie de traitei-
le môme sujet. ••
H, Ennemis. — Add. des éd. ant. : mesmes et tant de vérité.
iO, Froissard. — Chroniqueur français. Sa chronique de France, d'Angle-
terre et d'Ecosse, de 131'6 à 1400, est une suite de récits sans ordre, qui
offrent beaucoup d'incorrections, mais où l'on trouve une grâce et une
naïveté qui charment; ses descriptions sont d'un naturel saisissant. — Le
jugement qu'en porte Montaigne réduit par trop son mérite : le siège de
Calais, la bataille de l'oitiers par exemple, ne se composent pas seulement
de renseignements recueillis çà et là et rassemblés sans ordre, ni triage;
c'est de l'histoire.
36, Biais. — « Les faits changent de forme dans la tète de l'historien ; ils se
moulent sur ses intérêts; ils prennent la teinte de ses préjugés. » J.-J. Rous-
seau, Emile, IV.
80,
1, Latin. — Antérieurement à Slontaigne et même encore de son temps, le
latin était la langue universelle en Europe, et les érudits, en France, écri-
vaient beaucoup plus en latin qu'en français; ce n'est guère qu'à partir de
son époque que la langue française se fixait et qu'on en fit usage dans le
monde savant; lui-même est un de ceux qui y contribuèrent le plus.
('». Dimensions. — Add. des éd. ant. : Ceux-là .^ont aussi, bien plus recoin-
iiuindables historiens, qui connoissent les choses, dequoy ils escriuent, ou pour
auoir este de la partie à les faire, ou priuez auec ceux qui les ont conduiles.
■20, Et le sçauoir... communément. — Les éd. ant. port. : de la fortune estait
toiisiours accompagnée du .sçauoir.
22, Douteux. — Les éd. ant. aj. -.S'ils n'escriuoient de ce qu'ils auoient veu,
ils auoient aunioins cela, que l'expérience au maniement de pareils affaires,
leur rendoit le iuçiement plus sain.
31, Absence. — Suétone, Cé.mr, 56. — « Pour ce motif, ajoutait Asinius Pollio,
César avait été dans l'intention de refaire ou de corriger ses Commen-
taires. »
36, Accident. — C.-à-d. si l'on ne confronte les témoignages, si l'on ne re-
çoit les objections, lorsqu'il s'agit de prouver les moindres détails de chaque
fait. — Au lendemain même de la bataille de Sedan (1870), il n'a pas été
possible, malgré une polémique longue et ardente, de déterminer qui, du
général de Bauffremont ou du général de Galliffet, menait ces charges
héroïques de cavalerie qui arrachèrent à l'empereur Guillaume cette excla-
mation : « Ah! les braves gens! » si bien que l'honneur en revient à tous
^t à personne en particulier. La charge avait été préparée par le général
Margueritte qui, au dernier moment, avant de la lancer, se portant en avant
pour bien juger de la direction à lui donner, fut blessé à mort; voyant
leur général ramené, déjà ne se soutenant plus, les tètes de colonne, d'un
mouvement spontané, se précipitèrent, brûlant du désir de le venger; les
autres suivirent.
88, Bodin. -— Dans l'ouvrage qu'il a publié en 1566, sous le titre : Méthode
pour faciliter la vérification des faits historiques.
82,
9, Lisant. — Parmi les livres ainsi annotés par Montaigne se trouve un
exemplaire des Commentaires de César (V. N. II, 646 : Militaire) acheté
sur les quais, par un amateur, au prix de 0 fr. 90; ce livre, acquis depuis
par le duc d'Aumale, se trouve à la bibliothèque de Chantilly, aujourd'hui
propriété de l'Institut.
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. .30
Fb.4fi6 KSSAIS DE MONTAIGNE.
11, Guicciardin. — A écrit une histoire de l'Italie, allant de 1490 à 1534, ou-
vrage de mérite dans lequel l'auteur, qui avait joué un rôle considérable
de ce temps-là, se montre de l'école sceptique de Machiavel.
36, Soy. — Sur l'exemplaire de Bordeaux. Montaigne avait ajouté : « très
conuijune et très dangereuse corruption du iugement humain ■•; mais il a
bilTé ensuite cette addition qui, pourtant, exprime une vérité très réelle.
'M, Comines. — A laissé sui- les règnes de Louis XI et de Charles MU des
mémoires qui parurent en 1523; il s'y montre politique profond, chroni-
queur fidèle, écrivain original; mais en racontant les actes les plus iniques,
n'y ajoute pas un mot pour les flétrir; il ne juge les événements que par le
résultat.
84,
1, Du Bellay. — Les Mémoires des Seigneurs du Bellay (dix livres, dont les
quatre premiers et les trois derniers sont de IMartin du Bellay, et les autres
de son frère Guillaume de Langey) embrassent les événements de Franco
de 1515 à 1547, autrement dit le règne de François I", dont ils sont plutôt
le panégyrique que l'histoire.
0, De louinuille. — Les Mémoires du Sire de .loinville constituent une
histoire de S. Louis et des Croisades entreprises par ce prince: c'est le
récit d'un témoin oculaire plein de naturel, de sensibilité et de charme
(fin du xme siècle). — Domestique signifie ici qui est de la maison, familier.
V. N. I, 24 : Domestiques.
6, Eginard. — Secrétaire de Charlemagne dont il a écrit la vie, et, y faisant
suite, l'histoire des événements pendant les premières années de Louis le
Débonnaire, ensemble de 741 à 829.
8, Icy. — Dans les Mémoires des du Bellay.
14, De Montmorency. — Le connétable de Montmorency, que des intrigues
de cour firent exiler dans ses terres, en 1547, par François 1". disgrâce à
laquelle mit fin l'avènement de Henri II.
14, De Brion. — Philippe de Chabot, amiral de France, connu sous le nom
de Seigneur de Brion, chargé en 1535 du commandement de l'armée en
Piémont, après de brillants succès, s'arrêta court à Verceil, ce que Fran-
çois I"' ne lui pardonna pas, condamné en 1540 comme concussionnaire,
il ne fut sauvé que par la protection de la duchesse d'Étampes, maîtresse
du roi.
CHAPITRE XI.
86,
7, Partie. — Sans partie adverse, sans opposition.
9, Vertueux. — J.-J. Rousse.\u, dans son Emile, répète Montaigne en le
précisant: ■< Quoique nous appelions Dieu bon, nous ne l'appelons pas ver-
tueux, parce qu'il n'a pas besoin d'effort pour bien faire. » V. N. II, 16 :
Force.
10, Des philosophes. — Dans la traduction, le passage du texte : • Des phi-
losophes, non seulement Stoïciens, mais encore Epicuriens (et cette en-
chère... colunt, et retinent) », a été, pour plus de clarté, placé après celui-ci :
•• Des philosophes Stoïciens et Epicuriens, dis-je... virlus lacessila ».
13, Rencontre. — Réplique. — Dioijkne Laerce, IV, 43.
18, Reconnaissant. — Montrant plus de bonne foi.
27, Retinent. — A observer l'insistance que Montaigne apporte à réhabiliter
la secte d'Épicure, à l'encontre de l'opinion générale qui veut que les Épi-
curiens soient moins rigides dans leur doctrine que les Stoïciens, ce qui au
fond n'est pas vrai.
36, Secte. — Cicérox, De Of'/lciis, 1, 44. — Épaminonda-s était de l'école de
Pythagore. Cette école, fondée à Crotone en Italie (VI' siècle), formait dans
le principe une sorte de congrégation où l'on n'était admis qu'après un
long noviciat et diverses épreuves, entre autres un silence de plusieurs
années. Les Pythagoriciens menaient la vie la plus fiugale et s'abstenaient
88.
NOTES. r.IV. H. r.H. Xr. vol. ÎI. PAG. 86. F.V6-
de luan^ei" de la chair des animaux; ils croyaient à la métempsycose ou
transmigration des âmes d'un corps dans un autre. On ne sait rien de bien
certain sur les autres points de leur doctrine, parce qu'on n'a aucun ('-cril
de Pythagore, dont l'esprit cependant embrassait toutes les sciences con-
nues de son temps, et qu'il exerçait un empire absolu sur ses disciples qui
admettaient tous ses dogmes sans discussion.
1. Esmoulu. — Qui est une rude et dangereuse épreuve pour la vertu.
— Combattre à fer émoulu, c'est combattre avec des armes aiguisées, pour
tout de bon.
28, Commune. — Du peuple ou des plébéiens,
3-1, Vertu. — Plut.\rque, Marins, 10. — Saturninus proposait, pour un par-
tage de tezres, un plébiscite contraire à la loi et qui, en outre, portait que
tout sénateur jurerait devant le peuple de concourir à son exécution. Mé-
tellus Numidicus seul refusa d'y acquiescer, quelque pression qu'on exerçât
sur lui, et les partis étant sur le point d'en venir aux mains par suite da sa
résistance, il préféra s'exiler que d'être cause d'une sédition (102).
90,
'.i, Très certaines. — Cickron, De JnnibuK, II, 30.
5, Entrailles. — V. N. II, 430 : Premier.
8, Etfroy. — Add. des éd. ant. : de la mort.
H», Brigand. — C'est César que Montaigne qualifie de la sorte, malgré l'ad-
miration qu'il lui témoigne souvent; mais il l'envisage ici comme auteur
du plus grand des crimes, l'asservissement de sa patrie. Cickron, dans ses
Lelires à Alticus, VU, 18, le gratifie de la même épithète perclilm lalru (bri-
gand fieffé).
25, Ferocior. — C'est en parlant de Cléopâtre qu'HoiucE s'exprime ainsi;
Montaigne en fait application à l'àme de Caton.
26, Populaires. — Add. des éd. ant. : vai)h<i.
3i>, Erat.
• Galon, le fer en uiain, prêt à finir son sort.
Rassure par ces mois ceux qui craignaient sa mort :
« Cessez de me flatter d'une làclie espérance.
• .le hais tout dans César, jusques à sa clémence;
« Apprenez aujourd'hui qu'un Uomàin, qu'un Caton,
« Fuit bien moins son courroux, qu'il ne fuit son pardon. •
Épigramme de i.'.\r.i.AMANNi.
92
'l5, Fit-il. - DiO(iÈNE Laerce, 11, 76. — V. N. III, 576 : I.'vn.
16, Personnages. — Socrate et Caton.
94,
16, Tenue. — Ne serait-ce pas de la constatation et du fait de cet état que
viendrait ce vieux dicton : ■< Français, plus qu'hommes au venir, moins
que femmes à la retraite », cité par II. Holssaye, dans son ouvrage intitulé
Waterloo.
96.
15, Vndsp. — La Balance, le Scorpion, le Capricorne sont trois des constel-
lations du Zodiaque (V. N. I, 254 : Aqua).
18, Mal. — DiOGÈNE Laerce, VI, 17.
84, Taster. — Diogène Laerce, II, 67.
36, Faschoit. — Diogène Laerce, II, 17; Horace, SaL, II, 3, 10.
38, Laborieusement. — Cet exemple et beaucoup d'autres soit dans un sens,
soit dans l'autre, prouvent que les mœurs sont tout à fait indépendantes des
opinions religieuses.
41, Repas. — Diogène Laerce, X, 11.
98,
I, Infecté... autre. — Var. des éd. ant. : corrompu par le dérèglement de
met) meurs; ains au rebours, Il luge plus exactement et plus rigoureusement
Fb.468 ESSATS DE MONTAIGNE.
de moy, que de tout (80 porte nul) autre : mes débauches quant à celle partie
là, m'ont depleu comme elles deuoient.
6, Antres. — La Fontaine a rendu la même idée dans sa fable Les deux
chiens et l'âne mort :
0 Les vertus devraient être sœurs,
Ainsi que les vices sont frères;
Dès que l'un de ceux-ci s'empare de nos cœurs,
Tous viennent à la file, il ne s'en manque guère, »
24, Incontinent. — Aristote convient que tout en ne mettant pas l'homme
qui en est imbu à l'abri de toutes les faiblesses de la nature humaine, la
justice n'en contient pas moins le principe de toutes les vertus : « Elle en
est la plus éclatante; niHesperus (l'étoile du soir), ni Lucifer (l'étoile du ma-
tin), ne sont plus admirables. »
27, Discipline. — Cicéron, Tusc, IV, 37.
29, L'autre. — Cicéron, De Fato, 5.
40, Accez. — Cicéron, De Senectute, 12.
100,
3, Venus. — Vénus, déesse de la beauté, présidait aussi à la génération.
Myth.
9, M'y cognais ... miracle. — Var. des éd. ant. : encore que ie lui donne plus
de crédit sur moy que ie ne deurôis, si est-ce que ie ne prens aucunement
pour miracle.
12, Nauarre. — Add. des éd. ant., : Marguerite.
13, Heptameron. — Ouvrage ainsi nommé, parce qu'il est divisé en sept
parties ou journées; est aussi appelé Nouvelles de la reine de Navarre. C'est
un recueil de contes imités de Boccace, écrit par Marguerite de Navarre,
imprimé en 1559; on y trouve beaucoup d'imagination et d'esprit et aussi
une grande licence.
18, Comme il y ... rencontre. — Var. des éd. ant. : auquel il semble qu'il
y ait plus de rauissement : non pas à mon aduis que le plaisir soit si f/rand
de soy, mais parce qu'il ne nous donne pas tant de loisir de nous bander et
préparer au contraire, et qu'il nous surprend.
20, Attouchemens. — <■ Nous connaissons, dit Sénèque, ce genre de conti-
nence de ces nouveaux mariés, qui, alors même que la première nuit de leurs
noces ils épargnent la pudeur de ces vierges timides dont ils sont les époux,
n'en lutinent pas moins, en se jouant, les parties circonvoisines de l'objet
de leurs désirs. » — Ces derniers mots répondent à cette expression « s'en
tenir à la petite vie » ; ou, suivant Marot : « S'en tenir aux faubourgs de
la cité d'amour, sans entrer dans la ville » ; continence qui n'est que de
l'onanisme réciproque.
22, Cette secousse ... ailleurs. — Var. des éd. ant. : Cette secousse de
plaisir nous frappe si furieusement, qu'il seroit malaisé véritablement, à
ceux qui aymeat la chasse de retirer en cet instant l'âme et la pensée de ce
rauissement.
25, Poètes. — Diane était la déesse de la chasteté et de la chasse, et Cupidon,
fils de Mars et de Vénus, était le dieu de l'amour. — L'amour faict place
au plaisir de la chasse, port, les éd. ant., voyla pourquoi les poêles font
Diane...
28, Obliuiscitur. — Les éd. ant. aj. : C'est icy vn fagotage de pièces décousues;
ie me suis détourné de ma voye, pour dire ce mot de la chasse.
102,
2, Estrangler. — En 81. En revenant d'Asie, après la mort de Sylla, César
fut pris par des pirates, qui lui demandèrent trente talents (environ
160.000 fr.) pour sa rançon; il leur promit le triple. Rendu à la liberté,
après être resté un mois en leur pouvoir, il arma quelques bâtiments, se
mit à leur poursuite, s'en empara et leur fit subir le sort dont il les avait
menacés.
NOTES. UV. 11, CH. XI. VOL. II, PAG. 102. F.469
4, Latin. — Cet autour est Suétone, César, 74, qui s'exprime ainsi à l'occa-
sion du fait de Pliilonion, esclave et secrétaire de César, que celui-ci,
comme le rapporte Montaigne, fit simplement mettre à mort, sans le livrer
à la torture, pour, de concert avec ses ennemis, avoir conçu le projet de
l'empoisonner.
G, Deuiner. — Les éd. ant. port. : qu'il n'estoil pas du temps de la bonne
Home et qu'il iuge selon les, au lieu de : « qu'il est frappé des ».
7, Mirent. — Add. des éd. ant. : depuis.
9, Cruauté. — Cette appréciation, émise à un point de vue plus général,
est reproduite dans les mémos termes, II, 584. — Déjà, au v° siècle,
saint Augustin s'était élevé contre la torture « qui force les innocents eux-
mêmes à mentir » ; elle ne fut abolie en France que 200 ans après que
Montaigne le réclamait ; en 1780, la question préparatoire, qui avait pour
objet la recherche de la vérité, fut supprimée et, en 1788, la question préa-
lable, infligée au condamné et qui constituait ce que Montaigne dénomme
si bien l'au-delà de la mort simple; la marque au fer rouge et le carcan ne
l'ont été qu'en 1830, le pilori en 1851.
9, Nous. — Nous, chrétiens, qui croyons à l'immortalité do l'àme.
31, Changée. — L'exemplaire de Bordeaux donne, de la main de Montaigne,
une variante de cet épisode : « Ces iours passés... l'avoir changée » (lig. 12 à
31), lequel n'existe pas dans les éditions antérieures. En se reportant au re-
levé de ces variantes (fasc. E), on aura un spécimen relativement étendu
de l'orthographe personnelle de l'auteur des Essais, et la comparaison des
doux textes ne laissera aucun doute sur la supériorité de celui de 1595.
104,
14, Hault chapeau. — Plutarque, Apophth. — Sorte de tiare; coiffure monu-
mentale portée autrefois, chez les Perses et d'autres peuples de l'Orient, par
les grands et les pontifes; la tiare du pape, la mitre des évoques en sont
des restes.
16, Représentez. — Hérodote, 11, dit qu'il n'j' avait que les pauvres qui on
agissaient ainsi : « Par indigence, ils font des pourceaux de pâte, et les
offrent on sacrifice après les avoir fait cuire. » — En ces derniers temps
U905), on a trouvé des poupées dans certaines sépultures de la Haute-
Egypte, et on on a donné la cause suivante, se rattachant à la même idée :
Dans les temps reculés, il était d'usage dans ce pays d'égorger le bou-
cher, le boulanger et le tailleur qui avaient été attachés au service d'un
illustre personnage passant de vie à trépas, et d'enterrer leurs cadavres
autour de sa momie; ils continuaient, d'après les croyances religieuses, à
le servir dans l'autre monde ; peut-être aussi était-ce, d'après les idées so-
ciales d'alors, comme garantie contre toute tentative d'empoisonnement;
quand les mœurs s'humanisèrent, les artisans et les esclaves acquirent peu
à peu le droit de se faire remplacer dans le paiement de ce suprême im-
pôt du sang par des statuettes qui leur ressemblaient plus ou moins exac-
tement, ce sont elles que l'on retrouve aujourd'hui.
106,
11, Metempsychose. — Transmigration des âmes d'un corf)s dans un autre.
Ce dogme est d'origine indienne; de l'Inde, il passa en Egypte, d'où plus
tard Pythagore l'importa en Grèce; on trouve cette croyance mêlée à la
religion de presque tous les peuples anciens; elle devait conduire ceux qui
l'admettaient à défendre l'usage des viandes, comme exposant l'homme à
se nourrir de l'un des siens; aussi cette abstention est-elle une des prescrip-
tions fondamentales de la i-eligion des Brahmes et de la philosophie py-
thagoricienne; cette doctrine est une ébauche imparfaite et grossière de
l'immortalité de l'àme. V. II, 326.
12, Druides. — Ministres de la religion chez les anciens Gaulois ou Celtes.
Les Druides croyaient à la métempsycose; l'objet de leur culte était sur-
tout la nature; cependant ils reconnaissaient plusieurs dieux, dont Ten-
tâtes, le dieu de la guerre; ils n'avaient point de temples et se réunissaient
dans les forêts; ils se livraient à nombre de pratiques superstitieuses, at-
Fb.470 ESSAIS DE MONTAIGNE.
tacliaient une vertu particulière au gui de cliêuc qui. à certains jours, se
cueillait en cérémonie, avec une faucille d'or; dans les grandes calamités,
ils immolaient des victimes humaines : ces énormes pierres, dolmens et
menhirs, qui se rencontrent parfois en grand nombre dans certaines ré-
gions, passent pour avoir servi d'autels à ces sacrifices sanglants. Ce culte
comportait aussi des prêtresses qui prédisaient l'avenir; il a disparu vers
le vi" siècle.
34, Eram. — C'est ce que Pythagore disait de lui-même et c'est dans sa
bouche qu'OviDE, Métam., XV, 60, place ces paroles. — V. N. II, 326 : Ans.
108,
6, Plutarque. — Dans son traité d'Isia et Osiris, .39.
7, Enfermez. — Si l'on veut, dit-on, qu'un chat entre librement dans une
chambre, il faut lui procurer et qu'il entrevoie le moyen d'en pouvoir sor-
tir de même.
10, Et rvtilité... diuine. — Var. des éd. ant. : en cet autre, ou quelque autre
effect.
19, Royauté. — Add. des éd. ant. : vaine et.
28, Feste. — Les caresses.
29, Aumosnes. — Établissements d'assistance; on disait jadis l'aumône pu-
ijlique do Paris pour l'administration de l'assistance publique de cette
ville.
30, Bestes. — Le Coran défend de surcharger le chameau et de maltraiter
le cheval. — Chez nous, la loi Grammont a pareillement pour objet d'em-
pêcher l'abus des animaux domestiques et de les protéger contre les mau-
vais traitements, et la société protectrice des animaux s'est donné la tâche
de veiller à son application et d'en propager les idées humanitaires.
32, Sauué. — Cicéron, Pro Rose. Am., 20; Tiïe-Live, V, 47; Pline, X, 22. —
Le Capitole, temple et citadelle de l'ancienne Rome. — En 390, après la
bataille de l'Allia, les Gaulois entrèrent dans Home qu'ils livrèrent aux
flammes après l'avoir pillée et assiégèrent le Capitole. Ils étaient sui" le
point d'y pénétrer de nuit, quand, excitées par le bruit, <ies oies qui s'y
trouvaient par hasard, se mirent à criei', et, par leurs cris, réveillèrent les
défenseurs, ce qui permit de repousser l'assaut et fut pour Rome le salut.
33, Hecatompedon. — Plutarque, Calun le Censeur, 3. — Le Parthénon, tem-
ple de Minerve à Athènes, appelé Hecatompedon parce qu'il avait cent
pieds de large. Sa construction en était due à Périclès. L'exécution en avait
été dirigée i)ar Phidias ; une statue de la déesse en ivoire, sculptée par lui,
le décorait.
35, Empescbement. — Les Romains en usaient de même à l'égard des bètes
de somme, employées aux travaux de fortifications de leur ville.
38, Enfans. — A Paris, ou mieux dans ses environs immédiats, existent sous
le patronage de la société protectrice des animaux des cimetières pour les
chiens, chats, etc., que leurs maîtres veulent voir inhumés; àGennevilliers,
notjimment, s'en trouve un assez coquet et fort bien entreteau, où cer-
tains ont même de petits monuments.
110,
1, Depuis. — DiODORE de Sicile, XIII, 17.
3, Trespas. — « Si dans une maison, dit Hérodote, II, 65, 60, etc., il meurt
un chat de mort naturelle, quiconque l'habite se rase les sourcils; si c'est
un chien, on se rase la tète et le corps entier. »
5, Olympiques. — Hérodote, VI, 103; Élie.n, Hisl. des animaux, XII, 40.
6, Chef. — Sur un cap, un promontoire.
7, Nom. — Plutarque, Calon le Censeur, 3. — Lors de la seconde guerre
médique, l'évacuation d'Athènes ayant été résolue (480), le chien de Xan-
tippe, père de Périclès, se jeta à la mer, lorsque son maître se fut em-
barqué, et nagea près de son vaisseau jusqu'à Salamine, où il aborda épuisé
de fatigue et expira sur le rivage; l'endroit où il fut enterré, a porté de-
puis le nom de Cynosséma (sépulture du chien).
9, Seruy. — Plutarque, Cal07i le Censeur, 3, cite cette manière de faire de
NOTES. MV. II, Cil. \ll. VOL. H, PAG. HO. Pb.471
sa part, pour l'opposer v celle de Caton qui faisait vendre ses esclaves,
lorsqu'ils devenaient vieux, pour n'avoir pas à nourrir des bouches inu-
tiles.
CHAPITRE XII.
Chapitre XII. — Le plus long et, au jugement de bien des gens, le
plus important et le plus curieux des Essais. — Raymond Sebond, dans son
ouvrage la Théologie naturelle, ou Livre des créatures, paru pour la première
fois en 1487, écrit en un latin barbare, et qui fut condamné au concile de
Trente, a voulu démontrer que les seules lumières de la raison suffisent,
sans la révélation, pour admettre les bases de la religion, à l'encontre de
ceux qui soutiennent, au contraire, qu'on ne peut prouver par des moyens
humains l'existence de Dieu et de sa Providence. 11 voit la preuve de son
assertion dans l'infériorité et la soumission de tous les animaux vis-à-vis de
l'homme, qui ne peut avoir reçu que d'un Dieu cette supériorité en toutes
choses, d'où il conclut à quels devoirs de reconnaissance il est tenu envers
son Créateur et qu'il peut s'élever jusqu'à lui, par l'observation de ses
commandements. — Montaigne, lui, dans ce chapitre, fait plus l'apologie
de la religion révélée que celle de l'ouvrage de Sebond, il tient à l'encontre
de celui-ci que notre première illusion est de nous imaginer supérieurs aux
autres animaux; leurs actes sont de fait semblables aux nôtres : Nous pré-
tendons que c'est l'instinct seul qui les guide; quel avantage, si cela est,
n'ont-elles pas sur nous, de faire d'elles-mêmes ce à quoi notre raison nous
conduit d'un pas si incertain et sans toujours aboutir? Puis, laissant les
bêtes, il s'attache à l'homme lui-même; nous montre les mieux doués, ceux-
là mêmes qui ont fait de la raison l'étude de toute leur vie, en arriver à
reconnaître que l'esprit humain est hors d'état d'atteindre à la vérité et
de la distinguer de l'erreur. Passant en revue, d'une manière succincte et
un peu confuse, mais cependant complète, les systèmes philosophique des
anciens et, sous prétexte de défendre Sebond qu'il a traduit, exposant ses
propres idées, il va, en réalité, directement à l'opposite de la pensée et du
dessein de l'auteur qu'il prétend appuyer; il fait ressortir de quelle incer-
titude est empreint le témoignage de nos sens, par lequel nous commu-
niquons avec ce qui est en dehors de nous; combien la raison est elle-
même limitée dans ses connaissances, que d'erreurs elle commet dans ses
déductions; et, devant son impuissance à conduire l'homme à aucune vé-
rité certaine, il conclut que dans le chaos des contradictions humaines,
la foi en la religion chrétienne apparaît comme le parti le plus simple et
le plus probable; et il l'adopte, non par conviction, mais par esprit de con-
duite et par insouciance, s'y abritant comme dans un port tranquille où
il cherche le repos et un certain engourdissement de l'àme. En somme, il
sacrilie la philosophie à la théologie, acceptant et mettant hors de cause
tout ce que la foi nous enseigne, à l'opposé d'Abailard qui soutenait « qu'il
ne faut croire que les clioses qui se peuvent prouver par des raisons na-
turelles », ce qui, du reste, le fit considérer comme hérétique; mais les
motifs qui le font se montrer aussi exclusivement chrétien, c'est encore
chez lui du scepticisme, c'est uniquement parce que la raison humaine
courte et débile ne le mène à rien et que l'Église assure l'avenir, sans qu'il
ait à s'en inquiéter davantage. — Scaliger, qui était un critique de parti
pris de Montaigne, dit de ce chapitre : « H y a de tout, et cela pioduit le
même elfet que Magnificat à matines. »
Sebonde. — Montaigne écrit indifféremment Sebon, Sebond, Sebonde
Sabonde.
lô, Contens. — Diolkne Laekce, Vil, 16ô.
17. L'ignorance.
' Du vieux Zenon l'aiilique" confrérie
Disait tout vice être issu d'ânerie. •
Fb.472 ESSAIS DE MONïAIGiNE.
112,
8, Luther. — A la suite de persécutions amenées par une protestation de sa
part contre la vente des indulgences, Luther se sépara de l'Église catho-
lique, ne reconnaissant d'autre autorité que celle des livres saints, atta-
quant le Pape et l'Église romaine, les vœux monastiques, le célibat des
prêtres, la hiérarchie ecclésiastique, la possession de biens temporels par
le clergé, rejetant le culte des saints, le purgatoire, les commandements
de l'Église, la confession, le dogme de la transsubstantiation, la messe,
la communion sous une seule espèce, ne conservant d'autres sacrements
que le baptême et l'eucharistie sous les deux espèces. — Excommunié en
1520, il n'en devint que plus ardent, parcourut l'Allemagne, propageant ses
idées nouvelles; il fit de nombreux prosélytes qui résistèrent aux persécu-
tions par les armes et, après de nombreuses vicissitudes, ses sectateurs ob-
tinrent définitivement, par la paix de Nimègue (1582), la liberté de cons-
cience. Conséquent avec lui-même, Luther s'était marié en 1526. — Vers
1538, Calvin se faisait, en Guyenne, l'initiateur de cette même doctrine.
. 12, Athéisme. — En matière d'athéisme, les hommes, à peu près dans tous
les temps, ont communément traité d'athées ceux qui simplement ne pen-
sent pas comme eux; si bien que, de fait, nous en sommes arrivés à con-
fondre dans une même acception ces deux termes de théiste et d'athée
qui, grammaticalement parlant, sont tout l'opposé l'un de l'autre. En fait,
l'athée n'existe pas; il n'est personne qui nie l'existence d'un principe
inconnu, qui n'a pas eu de commencement, qui n'aura pas de fin et qui
fait que l'univers existe; mais son essence, la façon dont il s'exerce, la
raison d'être de toutes ses créatures, des mondes et des êtres animés et
inanimés dont ils se composent, échappent à la faiblesse de notre intelli-
gence, et tous nous errons quand nous cherchons à le pénétrer, parce
qu'il est au-dessus de toute conception de notre part et que nous n'avons
de données sur ce point que de soi-disant révélations contestables et con-
testées. En cette recherche stérile qui ne saurait aboutir et qui ne conduit à
aucun résultat autre que le doute, non sur l'existence de Dieu, mais sur sa
nature et sur notre fin, l'esprit humain s'égare et s'attriste; reste la foi,
mais la foi ne se commande pas.
12, Vulgaire. — Les éd. ant. aj. : (et tout le monde est quasi de ce genre).
14, Mesmes. — Les éd. ant. aj. : et par la raison.
32, Foible. — C'est le cas des Essais traduits en langage de nos jours. Le
style de l'auteur a un cachet, un charme si particuliers, la langue fran-
çaise de son époque, surtout sous sa plume, avait tellement plus d'énergie
qu'actuellement, que toute traduction, quoi qu'on fasse, sera toujours infé-
rieure au texte primitif pour ceux à même de le lire à peu près couramment.
•37, Mort. — Montaigne commença cette traduction en 1567; il l'avait ter-
minée en 1568. Elle fut imprimée une première fois en 1569, mais d'une
façon si incorrecte que les éd. ant. des Essais aj. ici : auec la nonchalance
qu'on void, par l'infiny nombre de fautes, que Vimprimeur y laissa, qui en
eust la conduite luy seul. Elle a été réimprimée, en 1581, dans de meilleures
conditions.
114,
9, Turnebus. — Les éd. ant. port. : Tournebeuf.
11, D'Aquin. — Le plus grand théologien de l'Église d'Occident et le plus
grand philosophe du moyen âge. Ses ouvrages principaux sont : la Somme
de la foi, établissant toutes les vérités catholiques d'après les Écritures, et
la Somme théologique longtemps classique, où l'auteur discute les prin-
cipales questions de la théologie, de la philosophie et de la morale (somme,
terme de théologie, signifie ouvrage abrégé d'un plus grand; de la même
étymologie vient sommaire).
25, Bonté. — Les éd. ant. port. : sacrosaincte bonté.
116,
30, Sua. — Vers imités de Virgile, faits par un auteur inconnu à la louange
de Ronsard.
NOTES. IJV. Il, en. XII. VOL. II, PAG. 118. Fb.473
118,
2, Cbrestiens. — Socrate n'était pas chrétien, ce qui n'a pas empoché qu'il
soit parvenu à un si haut degré de vertu, que le paganisme peut l'oppo-
ser à tous ceux que le christianisme présente en ce genre : sa mort excite
l'admiration; jusqu'à son dernier soupir, il se montra aussi grand qu'il
avait vécu; on peut apprendre de lui à bien vivre et à bien mourir. —
Erasme, cet autre sage de son temps, dit quelque part : « Peu s'en faut
que je ne dise : Saint Socrate, priez pour nous ! »
4, Martyres. — U y a des martyrs dans toutes les religions; Tertulliex di-
sait : « Ce n'est pas le supplice qui t'ait le martyre, mais la cause. •
8, Tartare. — Joinvh.le, 19. — Le pape Innocent VII avait envoyé, pour
y prêcher le christianisme, des missionnaires en Tartarie, dont le roi pro-
jeta d'envoyer une ambassade à Rome, pour vérifier les assertions de ces
missionnaires; mais eux-mêmes, par crainte de la mauvaise impression
qu'elle pourrait en rapporter, le dissuadèrent d'y donner suite. Ce qui a
pu porter Montaigne à penser que c'était saint Louis qui l'en avait dé-
tourné, c'est qu'à ce moment il était en Chypre, se rendant en Terre sainte,
et l'ambassade vint l'y saluer, mais ne poussa pas plus loin.
18, Vicieuses. — Montaigne paraît avoir emprunté cette histoire du Déca-
méron de Boccace, 2" journée, 2° nouvelle, où le juif Abraham, pressé par
un ami de se faire chrétien, s'y résout, après un voyage à Rome, par les
raisons indiquées ici.
20, Parole. — Évangile selon S. JIatthieu, XVII, 19 et S. Paul, Épitre aux
Corinthiens.
23, Credas. — Cette citation est de Quintilien qui n'était pas chrétien, c'est
dire que Montaigne la détourne du sens qu'elle a dans le texte latin.
■il, A nos passions. — Les éd. ant. port. : aux hommes.
120,
19, Celle là. — Allusion à la situation de Henri III après le traité de Loches
(1576). Mécontents des concessions faites par le roi aux Protestants, les
Catholiques, qui jusqu'alors avaient marché avec lui, se liguent contre
lui, tandis que ses adversaires de la veille se déclarent pour lui.
20, Besoing. — C.-à-d. n'admettre pour vrai que ce qu'il est de notre inté-
rêt qu'on croie tel.
21, Dire. — Bayle, dans son dictionnaire, remarque I de l'art. Holman, cite
et commente ce passage, disant : " Tant que le monde sera monde, il y
aura partout des doctrines ambulatoires dépendantes des lieux et des
temps. » C'est ce qu'à notre époque nous appelons l'opportunisme, qui,
quoi qu'on en puisse dire, est l'une des lois les plus sensées de la politique,
dont les principes sont tout autres que ceux de la morale avec lesquels ils
sont rarement du tout au tout conciliables; celle-ci est la théorie, celle-là
la pratique.
32, Remuent. — Au début des troubles qui agitèrent la France à cette épo-
que, les Protestants, visant à renverser Charles IX et à faire arriver au
trône Henri de Navarre, mettent en avant le droit de déposer les rois et
de tuer les tyrans; les Catholiques, au contraire, repoussent tout principe
autre que la légitimité. A la mort de Henri III, le roi de Xavarre se trou-
vant, par droit d'hérédité, ap[)elé à lui succéder, ce sont les Catholiques qui
contestent ce principe de la légitimité qu'a pour lui Henri IV et qui reven-
diquent le droit de passer outre et de lui substituer un prétendant de leur
choix; chaque parti se trouvait ainsi avoir changé de thèse et adopté celle
de SOS adversaires.
35, Chrestienne. — Ç.-à-d. il n'est point d'hostilités qui se prêtent mieux à
la satisfaction de nos passions que celles qui ont pour cause l'intérêt de la
religion.
37, Detraction. — Larcin, du latin detraclio qui a même signification.
122,
1, Vices. — Sous-entendu : et, au contraire.
2, Dict. — C.-à-d. frauder la dîme, en ne donnant que de la paille sans
Fb.474 ESSAIS DE MONTAIGNE.
grain; Dieu est mis ici pour les ministres du culte, par un toui- d'expres-
sion dont l'usage est aussi ancien que le monde. Coste. — De ce dicton
qui signifie se moquer, aussi bien que frustrer quelqu'un de ce qui lui
est dû, on donne encore une autre explication, cela voudrait dire : « Faire
la barbe avec un bouchon de paille. » P.wen. — Rabelais, 1, 11, l'emploie
avec une variante : « Gargantua faisoit gerbe de feurre au.x Dieux. •
14, Bigue. — C.-à-d. voulut échanger l'un pour l'autre. — Bigue signifiait
échanger, troquer.
17, Orpheus. — Diogène Laerce, VI, 4. — Les initiés composaient une secte
dissidente des philosophes pythagoriciens; ils avaient en vue la pratique
de la vertu, croyaient à l'expiation des crimes dans l'autre monde et s'abs-
tenaient de manger la chair des animaux; ils prétendaient avoir reçu
d'Orphée les dogmes qu'ils professaient.
26, Prestre. — Diooène Laerce, VI, 39.
35, lesus-Christ. — S. Paul, dans son ÉpUre aux Philipp., 1, 23.
36, Donnait. — Cicéron, Tusc, I, 34; Callimaque, Epigr., 24; Ovide, m Ibin,
V. 495; S. AuGUSTi.N, De Civil. Dei, I, 22.
124,
1. Alemans. — Voltaire, dans Zaïre, exprime la même idée :
« Je le vois trop : les soins qu'on prend de notre enfance,
Forment nos sentiments, nos mœurs, notre croyance.
J'eusse été, près du Gange, esclave des faux dieux,
Chrétienne dans Paris, musulmane en ces lieux:
]>'instruction tait tout; et la main de nos pères
Grave en nos faibles cœurs ces premiers caractères. •
9, ^e ramené. — Var. des éd. ant. à 88 : vne extrême douleur ou voisinage
de la mort, ne ramènent par force...
13, Plato. — Lois, au commencement du liv. X. passage déjà cité dans les
Essais, I, 580.
17, Dit-il. — Plato.n, République, I.
23, Loix. — C'est le résultat de ce que dit Platox sur la fin du second livre
au commencement du troisième de sa République.
29, Bion. — Diogène Laerce, IV, 4. — Cette réflexion même, si juste et si na-
turelle, est de Diogène Laerce, qui d'ordinaire s'abstient de tout commen-
taire.
31, Force. — Les sectateurs d'Aristippe et d'Épicure fondaient la religion
sur la crainte; la loi, sur l'utilité; la justice, sur la coutume.
126,
29, Luy-mesmes. — S. Paul, Épilre aux Romains. — C'est Dieu qui est pré-
senté comme tenant ce langage parce que l'apotre est considéré comme
pai-lant en son nom.
32, Facteur. — « Tout ainsi que par ce peu de lumière que nous auons la
nuict, nous imaginons la lumière du soleil qui est esloignée de nous; de
inesme, par l'estre du monde que nous connoissons, nous argumentons l'es-
tre de Dieu, qui nous est caché... » R. Sebond, Théologie naturelle, 24, tra-
duction de Montaigne.
128,
4, Œuures. — Dans VÉpitre aux Romains. — S. Paul, surnommé l'apôtre des
Gentils parce qu'il a évangélisé en dehors de la Judée, n'est ni du nombre
des douze apôtres proprement dits, quoiqu'il soit toujours com pté comme
tel, ni même des disciples de Jésus-Christ. Né de parents juifs, il se nom-
mait Saul et fut d'abord un persécuteur violent du christianisme ; mais,
sur le chemin de Damas, il eut une vision, se convertit, devint un des plus
ardents propagateurs de la religion nouvelle et finit par obtenir le martyre
à Rome. On a de lui les Actes des apôtres qui sont sa propre histoire et
quatorze lettres aux Églises avec lesquelles il était en relation, elles se
distinguent par la logique et la sagesse des principes qu'il expose. —
Godeau, évêque de Grasse (1605-1672), dit de lui :
NOTES. LIV. Il, Cil. XII. VOL. II, PAG. 128. Fb.47o
« Et la grâce en son cœur ayant fait des miracles,
Sa bouche expliquera les plus sacrés oracles. »
0, Leges. — Les éd. ant. aj. : Si mon imprimeur (de la Théologie naturelle)
estait si amoureux de ces préfaces guettées et empruntées, de quoy par i hu-
meur de ce siècle il n'est pas liure dii bonne maison, s'il n'en a le front garny,
il se deuroit seruir de tels vers, que ceux cy qui sont de meilleure et plus an-
cienne race que ceux qu'il est allé planter.
130,
3, Couche. — Ou incline, on penche en faveur. — Les éd. ant. port. : Celui
qui est d'ailleurs imbu d'vne créance reçoit bien plus aisément les discours qui
lui seruoit, que ne fait celuy qui est abreuué d'vne opinion contraire, comme
font ces gens icy, au lieu de : « On couche... en soy ».
il, 'EayTÔv. — cette pensée est d'HiiRODOTE, qui la met dans la bouche d'Arta-
ban cherchant à détourner Xerxès de son expédition contre les Grecs.
21, Platon. — Dans le Timée.
d'2, S. Augustin. — De civitale Dei, XXI, 5. — Le premier îles Pères de l'É-
glise. Eut une jeunesse fort dissipée, se convertit, fut baptisé à Si ans et
devint, par la parole et la plume, un des plus ardents et solides défenseurs
du christianisme. Ses principaux ouviages sont: La Cité de Dieu, son chef-
d'œuvre, admirable peintui-e de la religion chrétienne; ses Confessions, où il
fait l'histoire de ses eri-eurs et de sa conversion, et le Traité sur la grave
et le libre arbitre; on a encore de lui nombre de sermons, de lettres et d'é-
crits contre les hérétiques de son temps.
132,
3, Philosophie. — S. Paul, .4ux Colossiens, IL tS.
5, Dieu. — S. Paul, Aux Corinthiens, I, 3, 19.
5, Vanitez. — Pensée tirée de VEcclésiaste et de Pline.
7, Sçauoir. — Pensée tirée de Lucrèce et de VÉpitre de S. Paul aux Corin-
thiens.
8, Trompe. — Celte pensée se trouve également dans Lucrèce et dans
S. Paul, Épltre aux Galates.
134,
1, Cestuy-la. — Le philosophe stoïcien Balbus qui, dans Cicéron, s'exprime
comme le porte la citation qui suit.
136,
tj, Mouuements. — On croyait encore généralement alors que le soleil tour-
nait autour de la terre, etc.
13, Plutarque. — Plutarque dit bien que, peut-être, la Lune est habitée, que
ses habitants doivent y être plus dispos, plus légers au physique, plus fa-
ciles à nourrir que nous, mais il ne parle pas de colonies.
19, Quant et quant. — Les éd. ant. aj. : dict Pline.
23, Trois. — C.-à-d. avec les animaux vivant sur terre, et, par cela même,
^de pire condition que ceux des deux autres espèces : les oiseaux qui volent
dans les airs, et les poissons qui nagent dans les eaux.
34, D'elle. — Cette pensée a été traduite en vers par Senecé :
• Mais sait-on, dit Montaigne, Si le chat n'a pas eu tète
Quand avec son chat d'Espagne Que l'homme est une bête
Un homme prend ses ébats, Propre à divertir les chats. »
Observons, en passant, que cette rime, dans les deux premiers vers, de
.Montaigne avec Espagne, montre bien comment encore à cette époque
(1717) on prononçait le nom de l'auteur des Essais. — A propos de chat,
Mahomet en avait un qu'il aimait au point qu'un jour, dit-on, cet animal
dormant sur un pan de son caftan, et le moment de la prière étant venu,
le prophète coupa son vêtement, afin de ne pas troubler le sommeil de l'a-
nimal.
138.
Saturne. — Dans la Politique. — Chassé du ciel par Jupiter, et accueilli
Fb.476 ESSAIS UE MONTAIGNE.
sur terre par Janus, roi du Latium, auquel il succéda, Satui-ne apprit aux
Latins l'art des semailles, fit fleurir la paix, l'abondance, la justice, et son
règne fut l'âge d'or pour l'Italie. Mylh.
18, Troglodytes. — Ancien peuple de l'Afrique qui vivait dans des cavernes
ou dans des trous creusés dans la terre. Mais, dans bien des contrées,
voire même en France, existent des vestiges de pareilles habitations éta-
blies dans des anfractuosités naturelles, grossièrement aménagées et qui
remontent aux temps préhistoriques; on a qualifié de ce môme nom de
Troglodytes, ceux dont elles ont été la demeure.
20, Thyaneus. — Philostrate, Apollonius de Thyane, 1, 20.
20, Melampus. — Apollodore, I, 9, 11.
.20, Tirasias. — Apollodore, III, 6, 7, etc.
22, Roy. — Dans l'intérieur de l'Afrique, dit Pline, Hist. 7iat., IV, 30, au
delà de la Nubie, se trouvent les Ptoemphanes, qui ont pour roi un chien,
dont ils consultent les divers mouvements. — Cette erreur ne proviendrait-
elle pas de la similitude du mot latin canis (chien) avec les mots qui dans
plusieurs langues signilient le roi ou seigneur comme, par e.xemple, Khan
chez les Tartares, King en anglais, Kœnig en Allemagne? Payes.
24, Nous. — « Les enfants des hommes sont en eux-mêmes semblables aux
bêtes, ils ont même destinée; l'homme n'a pas d'avantage sur la bête. »
Ecclésiasle, III.
25, Intelligence. — Les éd. ant. aj. -.de leurs mouuemens et.
34, Qu'il y a. — Add. des éd. ant. à 88 : de la menasse et.
36, Voix. — C.-à-d. qui ne profèrent aucun son.
140,
27, Cestuy-cy. — Ce langage par gestes.
32, Langue. — Aux extrémités de l'Ethiopie, dit Pline, VI, naissent des ani-
maux et des hommes de formes monstrueuses; l'excessive mobilité des
feux solaires varie les corps et les multiplie à l'infini; et, parmi ces phé-
nomènes, il en est certains qui n'ont d'autre langage que les gestes et les
signes.
37, Mot. — Plutarque, Apophlh. des Lacédémoniens.
142,
6, Prudence. — Les éd. ant. port. : prouidence.
39, Par art. — Les éd. ant. aj. : et jmr industrie.
144,
33, Vniforme. — Les éd. ant. aj. : te faiblesse de nosire naissance se trouue
à peu près en la naissance des autres créatures.
40, Souffrir. — Les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux aj. : le visage, les pieds, les
mains, les ïambes, les espaules, la teste, selon que Vvsage nous y conuie.
146.
3, Nombril. — Louis XIII avait une profonde répugnance pour cette exa-
gération qui se maintint jusqu'au milieu de xviii" siècle; on cite de lui à
cet égard plusieurs anecdotes. — Voulant, un jour, s'emparer d'une lettre
qu'une dame de sa cour avait cachée dans son sein et qu'il avait intérêt à
connaître, il alla l'y chercher avec des pincettes. — Une autre fois, se trou-
vant à table et voyant s'approcher de lui une femme habillée et découverte
suivant cette mode, il retint une gorgée de vin dans la bouche et la lui
lança dans le sein, ce qui la fit se retirer toute honteuse.
6, Plier. — Plutarque, Lycurgue, 13.
21, Labourage. — Les éd. ant. aj. : sans aucune nostre industrie.
22, Planté. — En abondance. — Ce mot dérive de plénité, qui vient du latin
plenitas qui a ce même sens : saturation complète, plénitude.
148,
6, Icbneumon. — Appelé aussi mangouste et rat de Pharaon ; carnassier
de la grosseur d'un chat et de la forme de la martre ; les Égyptiens le révé-
raient parce qu'il détruit les œufs de crocodile.
7, Crocodile. — Appelé aussi alligator, reptile de l'ordre des sauriens, am-
phibie à quatre pattes de la forme d'un énorme lézard, mais atteignant
NOTES. LIV. Il, Cil. XII. VOL. II, P.\G. 148. Fb.477
jusqu'à 3 et 4 mètres de longueur; se rencontre sur les bords de grands
cours d'eau de la zone tropicale en Afrique, en Asie et en Amérique; le
crocodile était à Thèbes, en Egypte, l'objet d'une grande vénération.
13, Faire. — Ce l'ait s'est renconti-é en Allemagne (Gaspard Hauser), en
France (le sauvage de l'Aveyron), et on pourrait en citer d'autres. —
Gaspard Hauser qui, de 1828 à 1833, excita vivement l'attention en Bavière,
fut découvert à l'âge apparent de 15 à 16 ans; il semblait n'avoir jamais
rien vu. rien, appris, être absolument étranger à la vie commune; il n'a-
vait aucune idée du temps, des distances, était presque inconscient de ses
mouvements. — Le sauvage de l'Aveyron, enfant trouvé en 1800 dans les
forêts de cette région, pouvait avoir une dizaine d'années, il se trouvait
physiquement et moralement en même état que Gaspard Hauser; il fut
placé à l'institution des sourds et muets, où plusieurs années de soins
assidus parvinrent à éveiller, mais bien faiblement, son intelligence et le
, langage.
22, Oyseaux. — C.-à-d. ne conversons-nous pas avec eux dans un autre lan-
gage et en employant d'autres termes qu'avec les oiseaux.
27, Lactance. — Insl. div., 111, 10.
28, Encore. — Quant au rire, cela se rencontre parfois chez le chien ; on en
a vu riant comme fait une personne, sans éclat de voix cependant. Pour
ce qui est de la parole proprement dite, il en est qui pensent que les ani-
maux, ou au moins certains d'entre eux, la possèdent; toujours est-il que
jusqu'ici on n'en trouve que trois qui, d'après la Bible et la fable, aient usé
de la même langue que l'homme : l'ànesse de Balaam, le berger de Phryxus
et le cheval d'Achille. — Balaam, dit la Bible, était un prophète madia-
nite ; l'ànesse qu'il montait, effrayée par la vue d'un ange, demeuré invi-
sible à Balaam, ayant à trois reprises fait un écart, et son maître la frap-
pant, elle finit par protester en paroles très nettes; et ses yeux se dessillant
alors, Balaam aperçut l'ange et reconnut que tout cela s'était accompli,
par la volonté de Dieu. — Phryxus, fils du roi de Thèbes, fuyant une accu-
sation d'inceste, avait traversé sur un bélier à toison d'or le détroit qui
sépare l'Europe de l'Asie, et abordant sur la côte opposée, s'y était endormi.
Les habitants le découvrirent et se disposaient à lui faire un mauvais
parti, lorsque son bélier le réveilla et lui apprit avec une voix humaine le
danger auquel il était exposé. Mylh. — Dans V Iliade, lorsque Achille s'é-
lance pour venger Patrocle, Xanthe, un de ses chevaux, avec la permission
de Junon, lui prédit sa mort prochaine.
30, Aristote. — Hisl. des animaux, IV, 9.
37, Deuination. — Conjecture.
150,
21, Desespoir. — « L'homme n'a qu'un privilège, celui de l'imagination, et
il le paie cher. ■> Sainte-Beuve. — Est-il prouvé que les animaux n'ont pas
d'imagination?
31, Meilleure. — Cette question de l'àme des bêtes, leur connaissance, leur
raisonnement, discutée à toutes les époques, a donné lieu à de nombreux
ouvrages où sont cités à l'appui d'innombrables exemples dont quelques-
uns sont reproduits dans les pages suivantes. Montaigne, dans cette con-
troverse, semble pencher pour l'affirmative, au point que Bayle prétend
que son intention a été que l'apologie de Raymond Sebond fut en partie
celle des bêtes. Les auteurs qui ont agité ce problème, inclinant soit dans
, un sens, soit dans un autre, abondent aussi bien dans l'antiquité que de
nos jours; parmi eux : Aristote, PUne, Descartes, Leibnitz, Locke, Tous-
senel.
152,
17, S^auancer. — Plutaiique, De l'Industrie des animaux, 12.
22, Paix. — Argumentation souvent citée en logique et connue sous le nom
de « Sorite du renard » ; sorite signifie une série de propositions si bien
liées entre elles, que la dernière est ou semble la conclusion naturelle do
la première.
Fb.478 ESSAIS DE MONTAIGNE.
31. Climacides. — Mot dont la signification est écliellières. — Plutarque,
Comnienl un penf discerner le flatteur d'avec raini, 3.
;J."j. Concubines. — Ce terme n'éveillait dans l'antiquité aucune idée d'im-
moralité; c'était une femme au même titre que l'épouse dite légitime,
mais de condition sociale inférieure à celui qui l'épousait.
36, Mary. — Chacun, dit Hérodote, V, 5, a plusieurs femmes; lorsqu'il vient
à mourir, il s'élève entre elles de grandes contestations pour savoir celli»
qu'il aimait le mieu.x ; ses amis s'intéressent vivement à la dispute. Celle
en faveur de qui on s'est prononcé reçoit les éloges de l'assistance; son
plus proche parent l'immole ensuite sur le tombeau de son mari et on
l'enterre avec lui; les autres femmes sont très affligées de cette préférence,
qui est pour elles un très grand affront. — Voii- aussi Pomponiis Mêla,
II, 3, etc.
10, Capitaines. — Le chef des Sotiates, peuple de l'Aquitaine (Gaule), dit
César, De Bello Gali., III, 22, était accompagné de 600 hommes dévoués,
liés à lui par un pacte tel qu'ils jouissaient de tous les biens de la vie dont
ce chef lui-même avait la jouissance, mais par contre, s'il venait à périr
de mort violente, ils participaient à son sort et se tuaient de leurs propres
mains: institution à laquelle certains font remonter l'origine du régime
féodal.
154,
5, Seruice. — Pétrone, SaL, 117.
15, Tombe. — Hérodote, IV, 71 et 72.
23, Sert. — Diogène Laerce, VI, 75.
36, Partons. — Du verbe partir, partager, diviser en plusieurs parts. Ce
mot vieilli n'est plus d'usage que dans cette phrase proverbiale : <■ Ils ont
toujours maille à i)artir entn? eux » ; mais on le retrouve dans ses déri\és :
répartir, répartition, etc.
38, Chasseurs. — Pline, X, 8.
43, Colliers. — Collets, lacs à prendi-e des lièvres, des lapins, etc.
■14, Secbe. — Plutarque, De l'Industrie des animaux, 28. — La siche, ou seiche,
mollusque de mer, qui projette autour de lui un liquide noirâtre, quand il
cherche à se dérober à un ennemi, liquide duquel on extrait la sépia.
156,
10, Sylla. — Allusion à la maladie pédiculaire dont il mourut (78), consi'--
quence des débauches auxquelles il se livra toute sa vie. Cette maladie,
connue sous le nom de phtiriase, est très rare ; elle est caractérisée par la
génération rapide d'une telle quantité de vermine, qu'elle finit par ronger
vivant le malheureux atteint de cette affection. Le roi Hérode, l'empereur
Galère périrent de la sorte, et les premiers chrétiens y virent- une punition
céleste du premier pour le massacre des innocents, du second pour la
persécution dont eux-mêmes furent l'objet sous le règne de Dioclétien et
dont il avait été le principal in.stigateur : il s'en produirait encore des
cas, particulièrement chez les alcooliques invétérés. — Pascal a exprimé
d'une façon analogue cette fragilité de l'homme : « Cromwell allait ra-
vager toute la chrétienté; la famille rojale était perdue et la sienne à
jamais puissante, sans un petit grain de sable qui se mit dans son urètre;
Rome même allait trembler sous lui, mais ce petit gravier qui n'était
rien ailleurs, mis en cet endroit, le voilà mort, sa famille abaissée et le roi
rétabli. • Seulement, Pascal a fait erreur : Crom\vell n'est pas mort de la
pierre, mais de la fièvre.
11, Empereur. — Du latin imperator, titre qui se décernait, à Rome, aux
généraux victorieux; c'est le sens dans lequel il est employé ici.
15, Rubarbe. — Rhubarbe; plante dont la racine est stomachique et purga-
tive.
15, Polypode. — Sorte de fougère qui s'emploie contre la toux.
17, Dictame. — Plante aromatique et vulnéraire.
19, Origanum. — Origan: plante aromatique qui ne croît qu'aux hautes alti-
tudes.
NOTES. IJV. H. (-11. XII. VOL. II, P.VG. 156. Fb.4-9
19, Dragon. — Petit lézard inofïeiisif.
20, Fenoil. — Fenouil ; plante aromatique et apéritive.
21, Elephans. — Le plus gros des animaux de notre époque; mammifère de
l'ordre des pachydermes, i-cmarquable par sa taille, ses défenses et sa
trompe ; on distingue l'éléphant d'Afrique et celui d'Asie, ce dernier nota-
blement plus grand que le premier. Dans l'Inde, on emploie l'éléphant
comme bête de trait et de somme; il y est l'objet d'une grande vénéra-
tion; on lui prête des vertus et des vices; dos mœurs raisonnées, jusqu'à
l'observance d'un culte, celui du soleil et de la lune; il vit en société. An-
ciennement il était fort employé à la guerre par certains peuples (V. N. II,
50 : Elephans); plus tard à Rome, dans les divertissements publics; on en
cite de capables de tracer des caractères, d'autres se distinguant dans la
danse, l'acrobatie.
23, Porus. — Plutarque, De Vlnduslrie des animaux, 13.
31, Chrysippus. — Sextus Empmucus, Pyrrh. hypot., I, 14.
31, A la queste... poursuite. — Var. des éd. ant. .: estant à la suyte de son
mahlre (lequel il a esgaré pour s'estre endormy et ne l'auoil vu partir du
logis) ou à ta queste.
36, Ratiocination. — Add. des éd. ant. : et sans discours.
158,
37, Plutarque. — De Clnduslrie des animaux, 18.
38, Père. — Vespasien le père de Titus et de Domitien.
160.
8, Reuenu. — Ranimé. Se revenir, du latin se recolligere, a cessé d'être
pronominal, et on dit aujourd'hui : revenir d'un profond sommeil, d'un
évanouissement.
12, Languedoc. — C'étaient des roues à chapelet ou à godets, qu'en Espagne
on nomme norias, appellation qui est passée dans notre langue ; leur usage
est très répandu en raison même de la l'usticité du système.
16, Court. — Plutarque, De l'Industrie des animaux, 20. — Les paysans ven-
déens disaient : « îs^os bœufs connaissent le dimanche et ne veulent pas
travailler ce jour-là. »
20, Democritus. — Plutarque, De l'Jnd. des anim., 14.
22, Tistre. — Vieux mot qui signifie faire quelque ouvrage de fil, de soie ou
de cheveux.
24, Aristote. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 18; Pline, Ilist. nat., X, 29.
;38, Arrius. — Arrien, Hist. Indic., 14. — Arrius est une faute d'impression
qui se trouve dans toutes les éditions originales, qui devraient porter Ar-
rianus.
162,
4, Apprendre. — Plutarque, DeVhul. des anim., 12.
7, Maistres. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 12; Pline, Vlll, 3. — Le fait
est donne comme s'étant produit du temps de l'empereur Domitien; battu
pour n'avoir pas bien exécuté sa leçon, un de ces animaux fut vu la répé-
tant de lui-même, la nuit suivante, au clair de lune.
8, Respondant. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 18.
23, Dit. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 12.
32, Barbarie. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 12. — La Barbarie, partie
septentrionale de l'Afrique depuis Tripoli jusqu'au Maroc, ainsi nommée
au moyen âge des Berbers, ses premiers habitants, qui subsistent encore
sous les noms de Kabyles, de Touareg, absolument distincts des Arabes.
34, luba. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 10. — Juba avait passé une grande
partie de sa jeunesse à Rome, et s'était adonné à l'étude de l'histoire et de
la nature; il a écrit, en grec, divers ouvrages aujourd'hui perdus.
164,
12, Cendre. — Plutarque, Dé l'Ind. des anim., 10. — Dans le même genre,
on cite encore ce trait d'un éléphant qu'un peintre voulant peindre la
trompe élevée, son cornac, pour le maintenir en retto position, feignait de
Fb.480 ESSAIS DE MONTAIGNE.
lui jeter du pain. Ennuyé d'être ainsi dupé, l'animal remplit sa trompe
d'eau et, ne se trompant pas sur la cause de la mauvaise plaisanterie qu'on
lui faisait, en aspergea le peintre et son tableau que celui-ci dut renoncer
à terminer. ,
16, Elepbans. — Add. des éd. ant. : qu'on y mesloU.
21, Tyrio. — Annibal est qualifié de tyrien par le poète, comme étant de
Carthago fondée elle-même par une colonie phénicienne (870).
IJ9, Aspreté. — C'est ce que plusieurs peuples de l'antiquité avaient déjà
pratiqué. Pi.ixe, VIII, 40, conte : « En vue de la guerre, les Colophoniens
et aussi les Castabalenses organisent des troupes de chiens qu'ils font com-
battre en première ligne. et qui jamais ne cèdent; ce sont là des auxiliaires
qui ne le cèdent pas aux mercenaires. » — Strabox dit. de son côté, que
les anciens Gaulois se servaient à la guerre do chiens d'Angleterre aussi
bien que de ceux de leur pays. — Cet emploi s'est depuis reproduit souvent
en Amérique et en Afrique, dans les rencontres d'Européens avec des ad-
versaires d'autre race; il était rendu possible surtout par la quasi-nudité
de ceu.x-ci et la différence d'odeur qu'ils exhalent; et, dans la chasse des
nègres fugitifs, du temps où l'esclavage existait, il était d'usage courant.
On s'est occupé, en ces dernières année*, de leur utilisation dans la guerre
moderne : les expériences n'ont pas été satisfaisantes; en tout cas, si jadis
il a pu être question de meutes lâchées sur l'ennemi, leur action ne saurait
être aujourd'hui qu'individuelle et fort restreinte, par exemple, comme
auxiliaire d'une sentinelle pour éventer l'approche ou la présence de quel-
qu'un. — On semble devoir éprouver moins de déconvenue dans l'essai que
l'on tente aujourd'hui de les adjoindre à la police, dans ses rondes de nuit;
leur concours parait devoir être précieux contre ces rôdeurs et assassins
dont le nombre et l'audace vont croissant dans des proportions excessives
^ dans les grandes villes et leurs banlieues, et dont on n'aura raison que par lo
rétablissement des peines corporelles.
166,
3, Passé. — Les éd. ant. port. : Xous viuons, et eux et nous, sous même
tact, et humons vn m£sme air; il y a, sauf le plus et le moiiis, entre nou^,
vne perpétuelle ressemblance, au lieu de : « C'est vne... le pas.sé • (lig. I à 3).
20, Murène. — Pllt.-vrque, De l'Ind. des anim., 24. — La murène est un poisson
de mer qui ressemble à l'anguille; il était fort estimé des anciens Romains
qui en conservaient dans des viviers.
22, Aretbuse. — Les eaux de cette source passaient pour conserver toute
leur pureté à travers les eaux amères et fangeuses dans lesquelles elles
vont se perdre. — L'éd. de 80 aj. ici : et d'autres poissons.
28, Religion. — Pline, VIII, 1. — Démocrite, Xénocrate et plusieurs autres
philosophes dans l'antiquité ont accordé une religion aux animaux.
35, Part. — C.-à-d. nous ne pouvons prendre ni en bonne ni en mauvaise
part les actions dont les mobiles nous sont absolument inconnus.
38, Vid. — Pi.LTARQUE, De Vlnd. des anim., 12.
39, Fourmis. — Fourmi, aujourd'hui féminin, était autrefois masculin.
168,
9, Par là. — Les éd. ant. aj. : (encore qu'à son iugement les testes soient
incapables de raison).
17, Nauale. — Bataille d'Actium (auj. Arta), sur la côte orientale de la mer
Ionienne; bataille gagnée par Agrippa, qui, en donnant la supériorité à
Octave (devenu depuis l'empereur Auguste) sur Antoine son rival, mit lin
de fait à la république romaine (31).
29, Dehors. — Pline, XXXII, I. — Rémora signifie en latin retardement,
obstacle. — Le rémora est un petit poisson qui s'attache aux vaisseaux, aux
rochers, quelquefois à d'autres poissons; mais qu'il puisse retarder la
marche même d'une simple barque, et a fortiori l'arrêter, est pure fable. —
Les anciens lui attribuaient du reste bien d'autres propriétés : il servait à
composer des poisons capables d'amortir et d'éteindre les feux de l'amour,
d'arrêter l'action de la justice, de prévenir les accidents chez l(^s femmes
NOTES. LIV. H, Cil. XII. VOL. II, PAG. 168. Fb.481
enceintes; conservé dans du sel, il avait pouvoir de retirer du fond d'un
puits l'or qui pouvait y être tombé. Quant à sa propriété capitale d'arrêter
la marche d'un bateau, il la partageait avec cette coquille du genre porce-
laine, du nom de conque de Vénus, qui lui aurait été donné en mémoire du
fait suivant : Périandre, tyran de Corinthe, ayant envoyé un navire portant
l'ordre de mutiler, en vue de les rendre impropres à la reproduction, trois
cents enfants nobles de Corcyre, un grand nombre de ces coquillages s'at-
tachèrent à la carène du vaisseau qui ne put avancer malgré toute la fureur
du vent.
31, Tirer. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 15.
35, Assis. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 28.
170,
6, Nous. — Toute cette partie de l'apologie de Sebond, dans laquelle Mon-
taigne a exalté les animaux comparés à l'homme, et qui a eu pour objet
de rabaisser ce dernier et de lui faire sentir la débilité de sa nature et le
ridicule de son orgueil, a été approuvée par Pascal qui a soutenu la même
thèse; Bossuet, au contraire, l'a réfutée. Dans son troisième sermon pour
la Toussaint, prêché devant le roi, en 16G9, après avoir nommé Montaigne,
il l'apostrophe ainsi : « Mais dites-moi, subtil philosophe, qui vous riez si
finement de l'homme, parce qu'il s'imagine être quelque chose, comptez-
vous donc pour rien de connaître Dieu? en connaître le principe, adorer
son éternité, admirer sa toute-puissance, louer sa sagesse, s'abandonner à
sa Providence, obéir à sa volonté, n'est-ce là rien qui nous distingue des
bêtes? » C'est là une belle période oratoire mais qui, au fond, n'est qu'une
manifestation de plus de l'immense orgueil de l'homme uniquement ctayée
sur le magnifique langage propre à Bossuet, qui en outre a le tort de
prendre ainsi de la sorte Montaigne à partie comme entaché d'athéisme,
rien dans son livre ni dans sa vie ne l'y autorisant, -r- Cicéron, beaucoup
plus rationnel, concilie ainsi, dans les Tusculanes, ces opinions si diver-
gentes : « Toutes les âmes renferment je ne sais quoi de mou, de lâche, de
bas, d'énervé, de languissant: s'il n'y avait que cela en lui, rien ne serait
plus hideux que l'homme; mais, en même temps, il s'y trouve bien à propos
cette maîtresse, cette reine absolue, la raison, qui, par les efforts qu'elle a
d'elle-même le pouvoir de faire, se perfectionne et devient la suprême vertu.
Or, pour être vraiment homme, il faut lui donner pleine autorité sur celte
autre partie de l'àme dont le devoir est d'obéir. » Dans le même ordre
d'idées, Cicéron écrit ailleurs : • Quand on a dit à l'homme : Connais-toi
toi-même, ce n'était pas seulement pour rabaisser son orgueil, c'était aussi
pour lui faire sentir ce qu'il vaut. »
8, Oyseaux. — Sextus Empiricus, Pyrr. hypof., I, 14.
IG, Torpille. — Poisson du genre de la raie, qui présente la propriété d'être
une source d'électricité, dont la décharge engourdit qui la touche, et se
transmet dans l'eau, en raison de la conductibihté de ce liquide, à tout
corps à distance suffisamment courte; de là l'appellation donnée à l'engin
de guerre de ce nom, destiné à couler les navires ennemis.
38, Nostre. — - Les éd. ant. aj. : Car à nos enfans il est certain que bien auant
en l'aage, nous ny découurons rien sauf la forme corporelle, par où nous en
puissions faire triage.
172,
G, Beste. — Boerhaave, médecin célèbre du xvni' siècle, laissa en mourant
un gros registre, dans lequel on comptait trouver de précieux renseigne-
ments sur son art; on y lut seulement ce conseil, aphorisme populaire dont
l'origine se perd dans la nuit des temps : « Tenez-vous la tête fraîche, le
ventre libre, les pieds chauds, iît moquez-vous des médecins. » Payen.
10, Ef factuelle. — Add. des éd. ivnt. : et plus naturelle.
30, Hyrcanus. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 13.
33, Pyrrhus. — id., ibid.
174.
15, Jour. — S' Pierre, dit-on, à un moment de son existence, ne mangeait
essais de MONTAIGNE. — T. IV. 31
Fb.482 ESSAIS DE MONTAIGNE.
que des olives, et même que des mauves d'après S' Grégoire de Nazianze ;
mais avec, il mangeait du pain. Payen.
25, Saisissant. — La présence d'étrangers, même en petit nombre, suffit à
altérer l'àme d'un peuple. Ce fut rintiltration pacifique des Barbares, bien
plus que leurs invasions guerrières, qui amenèrent la transformation de la
civilisation romaine; et c'est là un danger pour les Etats-Unis qu'envahit
l'émigration étrangère, aujourd'hui presque entièrement composée d'élé-
ments inférieurs; de 1880 à 1890, ils ont reçu près de 6.000.000 d'émigrants.
— 11 en est de même de la France, pays riche dont la population ne s'ac-
croît plus (l'excédent des naissances sur les décès n'a été en 1905 que de un
sur mille), entouré de pays pauvres dont la population s'accroît constam-
ment et dont les tendances à l'émigration sont favorisées par les exigences
croissantes de nos ouvriers qui les rendent nécessaires pour les besoins de
l'agriculture et de l'industrie. Ils n'étaient pas 400.000, il y a cinquante ans;
ils dépassent aujourd'hui un million et demi et arrivent en rangs chaque jour
plus pressés. — Parmi les moyens préconisés pour ralentir ce mouvement,
sont : le service dans la légion étrangère pour ceux âgés de moins de vingt-
cinq ans et ayant deux ans de présence ; une taxe militaire pour ceux plus
âgés; suppression à peu près absolue de la naturalisation; impôt du quart
des revenus et des salaires pour tous les individus d'origine étrangère, natura-
lisés ou non, établis en France depuis moins de cinquante ans (G. Lebon).
26, Sont. — Add. des éd. ant. : à la vérité.
176,
2, Tettins. — Plutarque, De l'Ind. des amm., 17. — Les éléphants semblent
prêter volontiers à des histoires de ce genre : Jijba en mentionnait un qui
aimait une marchande de parfums et lui versait dans le sein les pièces de
monnaie qu'il recevait; on en cite un autre qui, passionné pour un jeune
syracusain de l'armée de Ptolémée, refusait de manger chaque fois qu'il ne
le voyait pas.
4, Glaucia. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 17.
6, Parenté. — Oppien, Poème de la chasse, I, 236. — Varron dit : « Il s'est
produit à cet égard un fait incroyable. On vpulait faire saillir à un cheval
la jument de laquelle il était né; ne pouvant l'y amener, on lui couvrit les
yeux; quand, après la monte, on les lui découvrit, il se précipita contre un
mur et se tua net » (V. N. I, 634 : Desdaigner).
22, Finesse. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 15; Elien, Hist. des anim., V^ll,
42. — La Fontaine a traité ce sujet à peu près de même façon dans sa fable
« L'àne chargé d'épongés et l'âne chargé de sel ».
178,
31, Duello. — Il s'agit ici de la guerre de Troie, l'événement le plus célèbre
des temps mythologiques. — Cette guerre causée par l'enlèvement par Paris,
prince troyen, d'Hélène femme de Ménélas, roi de Sparte, dura dix ans et
se termina par la prise de la ville et la destruction de ce royaume par les
Grecs confédérés, sous les ordres d'Agamemnon, roi d'Argos (1200 av.).
V. N. III, 512 : Pomme.
35, Trouble. — La Fontaine, dans sa fable des Deux coqs, a exprimé la même
idée à sa façon :
« Deux coqs vivaient en paix ; une poule survint,
Et voilà la guerre allumée!
Amour, tu perdis Troie; et c'est de toi que vint
Cette querelle envenimée
Où du sang des dieux même on vit le Xanthe teint. »
45, Fntuam. — Subjonctif de fuluere, qui vient du grec çuteuw (je plante),
signifiait accomplir l'acte de génération et uniquement entre hommes et
femmes; contrairement à pa?rf!ce7?i qui s'entendait du commerce avec les gar-
çons, parfaitement admis avant le christianisme; mentula, membre indica-
teur du sexe masculin, est souvent employé dans Martial. Le grave Théo-
dore de Bèze, docteur du protestantisme, s'est laissé aller à en faire le sujet
d'une petite pièce qui ne manque pas d'agrément (V. N. III, 208 : Fouteau),
NOTES. LIV. II, CH. XII. VOL. II, PAG. ilS. Fb.483
49, Canant. — Cette épigramme est de l'empereur Auguste; elle nous a ('ît<^
conservée par Martial, qui en la reproduisant dit, avec juste raison, que
ses propres vers n'offrent rien de pire. Fontenelle s'est risqué à la traduire,
mais, à la différence du poète la,tin, il a transformé les quelques mots, et
particulièrement ceux relatifs à Manias, qui constituent la satire la plus
mordante à l'égard de Fulvie :
• Parce qu'Antoine est cliarmé de Glaphyre,
Fulvie à ses beaux yeux pense m'assujetlir.
Antoine est infidèle : eh bien, serait-ce à dire
Que des fautes d'Antoine on me fera piUir?
Qui? moi! Que je serve Fulvie!
Suffit-il qu'elle en ait envie?
A ce compte, on verrait se retirer vers moi
Mille épouses mal satisfaites.
Aime-moi, me dit-elle, ou combattons? Mais quoi,
F.lle est bien laide! Allons, sonnez trompettes. »
180,
1, Donné. — Marguerite de France, femme du roi de Navarre, depuis
Henri IV, à laquelle, croit-on, Montaigne adressait cette apologie de Sebond.
— Sœur de Charles IX, son mariage, né de la politique, ne fut pas heureux :
mari et femme étaient aussi dévergondés l'un que l'autre : leur union se
termina par une annulation prononcée par le Pape en 1599. Longtemps
Marguerite (Margot comme on l'appelait) s'y refusa, « ne voulant pas, écri-
vait-elle en 1593 à Duplessis, que cette bagasse (ancienne prostituée, — il
s'agissait de Gabrielle d'Estrées) soit mise à sa place sur le trône de France ».
Elle (init cependant par céder, mais sa rivale n'en bénéficia pas : la demande
d'annulation, faite en février, fut prononcée en décembre; dans l'intervalle,
en avril, la favorite était morte subitement.
2, Mouuements. — C.-à-d. une armée.
3, Lybico. — Les anciens donnaient le nom de mer de Libye aux deux
golfes formés par la mer Méditerranée sur les côtes de la Tripolitaine et de
la Tunisie et qui, remplis de bas-fonds, étaient très redoutés des navigateurs.
9, Brouée. — Brouillard épais, brume qui souvent règne l'hiver, dans la
matinée.
10, Terre. — Pascal s'est inspiré de cette idée : « L'esprit du plus grand
homme du monde n'est pas si indépendant, qu'il ne soit sujet à être troublé
par le moindre tintamarre qui se fait autour de lui ; il ne faut pas le bruit
du canon pour empêcher ses pensées, il ne faut que le bruit d'une girouette
ou d'une poulie. »
18, Poëte. — Allusion aux abeilles que chante Virgile, et aux essaims des-
quels on se rend maître en les enfumant.
21, Armes. — Plutarque, Sertorius, 6. — Ce ne fut pas contre Pompée que
Sertorius se donna l'avantage de combattre un adversaire aveuglé par la
poussière, mais contre les Caracitaniens, peuple d'Espagne, qui s'étaient
réfugiés dans de profondes cavernes creusées dans le roc, dont il parvint à
les déloger en plaçant devant l'entrée des tas de terre qu'il avait remarqués
se réduisant facilement en poussière qu'un vent contraire, qui persista
pendant deux jours, emporta dans le repaire de l'ennemi qui, suffoqué,
dut capituler (82). — Dans les guerres d'Algérie, le maréchal Pelissier,
. alors colonel, eut recours à un .procédé analogue, pour avoir raison au
Dahra (1845) d'insurgés réfugiés 'avec leurs familles et leurs biens dans des
gorges inaccessibles. Il les y enfuma en mettant le feu à des broussailles
amoncelées à l'entrée; cinq cents périrent.
21, Antigonus. — Le fait s'est bien produit dans un combat entre Eumène
et Antigone et où le premier eut l'avantage; mais il fut indépendant de sa
volonté et profita également à son adversaire qui, grâce à cette même pous-
sière produite par le piétinement des chevaux sur un sol sablonneux et qui
obscurcissait la vue, sauva ses bagages des mains de l'ennemi.
Pb.484 ESSAIS DE MONTAIGNE.
21 , Crassus. — A la bataille de Carrhes, en Mésopotamie (Asie), où les Romains,
commandés par Crassus, furent vaincus par les Parthes et perdirent
30.000 h. (55); la cavalerie adverse souleva des nuages si épais de poussière
que les Romains, sur lesquels le vent la faisait refluer, ne pouvaient ni se
voir, ni se parler; mais ce fut là un fait qui n'avait pas été prémédité. —
Inversement à la grande bataille de Verceil où Marins anéantit les Cimbres
(101), par suite des mouvements de ces multitudes, une poussière intense
s'éleva protégeant les Romains contre les efforts de leurs adversaires, sou-
tenant leur courage en leur cachant la supériorité numérique considérable
des ennemis qui avaient encore ce désavantage d'avoir le soleil en face et
d'être incommodés par une chaleur (on était à la fin de juillet) à laquelle
ils n'étaient pas habitués. Plutarque.
33, Dire. — Le roi Emmanuel, qui dirigeait ce siège, y fut blessé d'une flèche;
cette circonstance et le peu d'importance de la place le décidèrent à lever
le siège (1510). — Les gens de Tamly utilisant les abeilles pour se défendre,
eurent recours, certainement à leur propre insu, à un procédé mentionné
dans la Bible : « J'enverrai devant toi les frelons, dit Jéhovah à Moïse sur
le Sinaï, qui chasseront loin de ta face les Hévéens, les Chananéens et les
Héthéens ». Exode, XXIIl, 28.
34, Sauatier. — Savetier. Savatier, qui vient plus directement de savate,
prévalait jadis ; c'est ainsi qu'on trouve dans Villon : « Et vous, Blanche
la savatière. »
34, Moule. — Cette phrase : « Les âmes des empereurs et des savetiers sont
jetées dans le même moule », a servi d'épigraphe en 1792 à un journal de
la Révolution, intitulé « Journal des Sans-culottes ». — L'idée s'en retrouve
• dans La Servitude volontaire de La Boétie : « Nature le ministre de Dieu et
la gouvernante des hommes, nous a tous faits de même forme, et, comme
il semble, à même moule. »
37, Importantes. — « Quelquefois, quand les rois sont en conseil, les peuples
croient qu'ils parlent de changer le pôle arctique de l'antarctique; et le
plus souvent ils prennent des mouches » (Malherbe), ainsi que faisait Do-
mitien qui, au début de son règne, s'enfermait des heures entières dans
son cabinet, se livrant à cette occupation. Suétone. — « Ces grandes et
éclatantes actions qui éblouissent les yeux, sont représentées par les poli-
tiques comme les effets de grands desseins, au lieu que ce sont d'ordinaire
les effets de l'humeur et de la passion; ainsi la guerre d'Auguste et d'An-
toine, qu'on rapporte à Pambition qu'ils avaient de se rendre maîtres du
monde, n'était peut-être qu'un effet de jalousie » La Rochefoucalxd. On
pourrait inférer de l'épigramme d'Auguste : Quod futuit Glaphyran....
qu'a reproduite Montaigne à la page précédente, que la guen e entre Antoine
et lui a été amenée par un caprice de Fulvie auquel il s'est dérobé, mais
il y a lieu d'observer que celle-ci est morte en 40, alors que n'avait pas
encore éclaté leur rupture définitive dont fournirent l'occasion les amours
d'Antoine avec Cléopàtre, reine d'Egypte, qui lui firent délaisser Octavie,
sa seconde femme, sœur d'Octave (nom de l'empereur Auguste avant son
avènement à l'empire). — Pareillement, cette visite de l'empereur d'Alle-
magne à Tanger qui, en i905, fit de la question marocaine une question
européenne, visite attribuée à une politique préconçue, est née d'une simple
boutade, parce qu'on sç trouvait dans le voisinage, et que la mer était
quelque peu forte. Si elle n'avait pas eu lieu, trois grandes puissances ne
seraient pas revenues sur des accords déjà pris, nous ne nous retrouverions
pas avoir les mains .iées à tout jamais à l'égard du Maroc et nous n'aurions
pas été réduts au ridicule d'accepter d'y exercer en coopération la police
sous le contrôle de l'Europe, tâche qui n'offre que des difficultés en perspec-
tive, et où notre impuissance n'aura d'égale que la responsabilité que nous
assumons.
43, Plus. — • Les grands et les petits'ont mesmes accidents, mesmes fascheries
et mesmes passions; mais les uns sont en haut de la roue, les autres près
du centre et ainsi moins agités par les mesmes mouvements. » Pascal.
. NOTES. LIV. H, CH. XII. VOL. II, PAG. 180. Fb.485
43^ Giron. — Très petit insecte de la famille des parasites, qui s'attache à la
peau.
182,
8, lustice. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 12. — C'est sur un acte de
même nature que repose la légende du chien de Montargis : « Sous
Charles V, un gentilhomme aurait été assassiné dans la forêt de Bondy; ce
"gentilhomme avait un chien qui, témoin du meurtre, après l'avoir fait dé-
couvrir en s'obstinant à demeurer près du corps, s'acharnant ensuite contre
l'assassin chaque fois qu'il l'apercevait, fit soupçonner la vérité. Un combat
singulier fut ordonné entre eux, et l'homme, vaincu, avoua son crime. »
Mais le même fait, avec des acteurs de même nom, se retrouvant dans une
chanson de geste du temps de Charlemagne, on estime aujourd'hui que la
scène finale ne s'est pas passée à Montargis, comme on le répète générale-
ment, et que ce n'est que parce qu'elle a été reproduite par hasard, en
peinture, dans la salle du château, lors de sa restauration par Charles VIII,
que cotte croyance s'est formée.
10, Maistre. — Plutarque, ibid. ; Pausamas, IX, 31.
27, Siècle. — Plutarque, ibid.; Elien, De Animal., VII, 13.
30, Spectateur. — C'est Aulu-Gelle, V, 14, qui rapporte le fait comme le
tenant d'Appion qu'il déclare sujet à caution; mais il est confirmé par
Sénèque qui dit : « Nous avons vu dans l'amphithéâtre un lion qui, ayant
reconnu un homme auquel il avait appartenu autrefois, le protégea contre
les autres bêtes qui allaient fondre sur lui. » Elien, De Animal., VII, 48, en
nomme le héros Androclès au lieu d'Androdus. — Cet épisode a été mis en
vers français.
184,
13, Emhatis. — Je rencontrai, je gagnai. S'embattre, c'était arriver fortuite-
ment en un lieu, et aussi intentionnellement.
16, Musse. — Caché, blotti; mot d'étymologie grecque.
24, En hors. — Désormais, depuis ce moment, dès lors.
35, L'empereur. — D'après Appion, cet empereur serait Caracalla; mais si
Sénèque en a été témoin, ce ne peut être que Néron ou l'un de ses prédé-
cesseurs. V. N. II, 182 : Spectateur.
46, Ora. — Pline, VIII, 42, affirme expressément lui aussi que les chevaux
pleurent quelquefois la mort de leur maître et assure que le roi Nicomède
ayant été tué, son cheval se laissa mourir faute de manger.
186.
7, Escare. — Plutarque, De l'Ind. des anitn., 26.
12, Barbiers. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 26. — Le barbier est un
poisson de mer du genre osseux.
17, Balaine. — Enorme cétacé qui atteint 20 à 25 mètres de long et un poids
de 100.000 kilos; sa peau a jusqu'à trois centimètres d'épaisseur. Sa pêche,
à peu près épuisée dans les mers du Nord, s'effectue actuellement plutôt
dans les mers australes ; l'espèce tend à disparaître. On utilise surtout, dans
la baleine, l'huile, le lard et les fanons, lames cornées, au nombre de 7 à
800, qui garnissent la bouche.
19, Guide. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 32. — Le requin serait, pareille-
ment, constamment accompagné d'un poisson, qu'on appelle « pilote »,
jouant le même rôle. /<
, 28, Gouuernail. — Le caracal, carnassier du genre chat, qui a l'odorat aussi
développé que le lion l'a peu, en agirait à peu près de même avec celui-ci.
Faible, pas plus gros qu'un renard, il va devant le lion, lui découvre une
proie et l'en avertit; le lion met à profit l'avertissement et laisse en rému-
nération une partie de la victime à son batteur d'estrade.
39, L'offenser. — Plutarque, De VInd. dés anim., 32; Pline, VII, 25: Elien, De
Animal., III, II, etc. —Le crocodile (V. N. II, 148 : Crocodile), dans l'eau,
absorbe des sangsues; à terre, des fourmis pénètrent dans sa gueule béante;
les unes et les autres s'y attachent sans que, en raison de la disposition de
sa langue, il puisse s'en débarrasser; le pluvier entre dans sa bouche et lui
Fb.486 ESSAIS DE MONTAIGNE.
rend service, becquetant ses dents, son palais, ses gencives. Héroivîte. —
Un autre oiseau, le piquebœuf, rend au buffle les mêmes offices : avide des
tiques qui le dévorent, il l'en débarrasse et celui-ci endure patiemment des
coups de bec dont il reconnaît l'utilité; de plus, si l'oiseau aperçoit un
chasseur, il pousse un cri et s'envole, ce qui est un avertissement pour le
buffle. Cosmos.
40, Nacre. — La nacre n'est pas un coquillage, mais une matière blanchâtre
et brillante qui forme l'intérieur de beaucoup de coquilles marines univalves
et bivalves; la partie est ici prise pour le tout.
40, Pinnotbere. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 32; Cicéron, De Nal. deor.,
II, 48. — Le pinnothère est une espèce de crabe qui vit ordinairement dans
les coquilles des testacés bivalves.
188,
4, Tuns. — Plltarque, De VJnd. des anim., 29, 31; Aristote, De Animal., VIll.
13; Eliex, De Animât, IX, 42. — Le thon est un gros poisson qui va par
bande et se trouve principalement sur les côtes de la Méditerranée.
5, Mathématique. — Ailleurs (I, 226 et N. Mathématique), Montaigne compte
quatre parties dans les mathématiques; ici, il en distrait la musique qu'on
y comprenait.
16, Longueur. — Les oies sauvages, dans leurs migrations, se forment bien
géométriquement en triangle, par bandes de quarante à cinquante indi-
vidus. L'oie qui est en tête fend la première la résistance de l'air : cette
fonction est très fatigante et, pour la remplir, toutes se relèvent succes-
sivement, celle qui la quitte se mettant à la queue. Lorsqu'elles s'arrêtent,
quelques-unes font sentinelle et chacune y passe à son tour. — Les canards
sauvages voyagent aussi par troupes, mais moins bien organisées et ne
s'élevant pas aussi haut dans les airs.
23, Luy. — Plutarque, De l'Ind. des anim., 14.
27, Mourir. — Arries, Hist. indic, 14.
32, Hoste. — Plutarque, De VInd. des anim., 19.
37, Halcyons. — Plutarqu-e, De l'Ind. des anim., 34; Pline, X, 32; Eliex, De
Animal., X, 17. — L'alcyon est un oiseau assez semblable à l'hirondelle,
qui fréquente la mer et les marécages.
190,
1, Latone. — Neptune, d'un coup de son trident, lit sortir cette île du fond
de la mer, pour assurer à Latone, persécutée par Junon, un lieu où elle
pût mettre au monde Apollon et Diane. Dans la suite, par reconnaissance,
Apollon, dont elle devint le sanctuaire principal, de flottante qu'elle était,
la rendit immobile. Myth.
21, Desmeut. — Dérange, disjoint; du latin dimovere qui a ce même sens.
30, Seulement. — Cette description du nid de l'alcyon rappelle une des plus
gracieuses pages de saint François de Sales. Chez Montaigne, la description
est plutôt technique et scientifique, d'une grande habileté, exacte et pitto-
resque; chez saint François de Sales, elle est plutôt poétique, d'une grâce
et d'une fraîcheur incomparables, et il en tire des inductions mystiques,
pleines de justesse, de charme et de profondeur. Abbé Sagette.
192,
40, Appétit. — La Bruyère est d'un avis opposé: il dit au ch. Des femmes :
• L'agrément est arbitraire; la beauté est quelque chose de plus réel et de
plus indépendant du goût et de l'opinion. »
41, Color. — Properce, II, 17, 26. — Les populations du N. de l'Europe ont
le teint plus pâle que celles du Midi, chez lesquelles il est plus basané, ce
qui peut tenir à ce qu'elles vivent davantage au grand air, sous un soleil
plus ardent, et à un efl"et d'atavisme se joignant à cette cause première.
194,
9, Oreille. — William Daltox rapporte qu'il est de coutume chez les Bernias
de se percer dans le lobe de l'oreille un large trou que, suivant sa richesse
ou sa position, chacun remplit par un ornement d'or, d'argent, de papier
doré et de boisj et qu'invariablement, quand cette ouverture n'est pas oc-
NOTES. LIV. II, CH. XII. VOL. II, PAG. 194. Fb.487
cupée autnement, hommes, femmes et enfants l'utilisent comme porte-ciga-
rette lorsque, pendant qu'ils fument, ils viennent à être interrompus dans
cette occupation, y plaçant alors machinalement le bout non allumé.
10, Soing. -r- L'usage du bétel, plante de l'Inde, dont les Hindous mâchent les
feuilles, produit cet effet.
14, Pline. — Livre IV, 13.
20, Massiue. — Chez les Hollandais, c'est bien autre chose encore; on peut en
juger en comparant les tableaux de Rubens, Rembrant, etc., avec ceux de
• Raphaël, Léonard de Vinci, etc.
20, Estrillée. — Mince et svelte, ce que Montaigne appelle (I, 460) un corps
bien espagnole.
26, Aualler. — Comprendre, admettre, adopter; 'se dit encore aujourd'hui
dans ce sens en langage trivial : Faire avaler quelque chose à quelqu'un,
lui en conter ^
26, Boule. — Dans le Timée; voir également Cicéron, De Nat. deor., I, 10.
196,
7, CoDstitution. — Décrites par Platon et Cicéron : par le premier dans le
Timée; par le dernier dans son traité De la Nature des dieux, II, 54 etc.
13, Vitales... c'est. — Les éd. ant. port. : et plus nobles, c'est à ce que disent
les médecins.
17, Excusables. — Les éd. ant. aj. : puis que l'homme n'auoit pas de quoy se
présenter nud à la veue du monde.
20, Soye. — Les éd. ant. aj. : et autres commoditez empruntées.
25, Libre. — Add. des éd. ant. : connoissance.
31, Refroidie. — Les éd. ant. port. : desgoutée.
32, Cognoissance. — Var. des éd. ant. : iouyssance.
33, Autres. — C'est ce qu'exprime cet adage ancien :
« Après trois jours, l'homme s'ennuie
De femme, d'hôte et de pluie. »
198,
4, Ordre. — c.-à-d. : ce que je dis là ne concerne que le commun des
hommes et des femmes, et je ne serai pas sacrilège au point...
5, Sacrilège. — Var. des éd. ant. : Téméraire.
8, Terrestre. — Compliment à l'adresse de la reine Marguerite. V. N. II,
180 : Donné.
13, Raison.
« De tous les animaux qui s'élèvent dans l'air.
Qui marchent sur la terre ou nagent dans la mer.
De Paris au Pérou, du Japon jusqu'à Rome
Le plus sot animal, à mon avis, c'est l'homme. » Boileau, Sal., Vlll.
17, Faire. — Les Latins disaient : <• Se bien porter, est la première des
choses » ; les Grecs : « Qui n'a santé, n'a rien » ; c'est ce que nous disons
tous quand nous l'avons perdue.
18, — Stoïque. — Plutarque, Des communes conceptions contre les Stoïciens.
23, Circé. — A fourni à l'Odyssée d'HoMÈRE un de ses principaux épisodes :
, Ulysse ayant abordé dans son île (l'île d'^Ea, au S. de l'Italie), elle trans-
forma, par ses breuvages enchantés, tous ses compagnons en pourceaux;
seul il échappa, grâce à un antidote que Mercure lui avait donné. Devenue
éprise de lui, Circé rendit à ses compagnons leur forme première et les
retint près d'elle une année entière.
36, Abandon. — Cette phrase, ainsi qu'en témoigne du reste sa contexture,
est une ironie de la part de Montaigne.
38, Vaine tantasie. — L'éd. de 80 port. : biffe et piperie.
41, Insensé. — Les éd. ant. aj. : C'est donc (bute nostre perfection d'èstre
homme.
Fb.488 ESSAIS DE MONTAlGxNE.
200, I
3, Discours. — C.-à-d. par de bonnes raisons.
5, Société. — Voir N. II, 170 : Nous.
11, Surpayé. — Exalté cette belle raison.
10, Socrates. — Xénophon, Mémoires sur Sacrale, 1, 1, 12. — L'éd. de 88 port. :
la philosophie.
34, Grecs. — Varron et Aristote. — Yarron, homme de loi, fut aussi tribun
du peuple, exerça un commandement militaire en Espagne; d'une immense
érudition, était surnommé par ses contemporains « le plus savant des
Romains » ; a écrit plus de cinq cents volumes dont il ne nous reste que
fort peu. — Aristote, V. N. I, 32 : .Vristote.
202,
1, SienDe. — Aristote fut l'objet de nombreuses imputations, mais qui sont
loin d'avoir été prouvées. On a dit que, dans sa jeunesse, il avait dissipé
son patrimoine; qu'à Athènes, il aurait joué le rôle d'espion, lorsqu'en 348
av. J.-C. la guerre éclata entre les Athéniens et Philippe de Macédoine ; qu'il
aurait comploté contre Alexandre, parce que Callisthène, son parent et
disciple, s'était attiré la haine de ce prince; enfin, il fut accusé d'impiété
comme aj'ant rendu un culte à sa femme, en l'érigeant en divinité à l'égal
de Cérès.
4, Rigent. — « Au jeu d'amour, le muletier fait rage, » répond La Fontaine.
11, Tient... choses. — Var. des éd. ant. : est encore moins.
13, Plus comme. — L'ex. de Bordeaux ajoute : la beauté.
36, Epicurus. — Ou plutôt l'épicurien Colotès, ainsi qu'on peut voir dans le
traité que Pi.ltahquf. a éci;it contre lui. — Un autre philosophe de cette
même école a dit : « Si tous les hommes pouvaient voir les choses de la
même manière et se i-essouvenir à propos du parti le plus utile à prendre,
ils n'auraient pas besoin de lois. »
204,
1, Guider. — La présomption, la prétention, une confiance exagérée en soi.
5, Sereines. — Par la douceur de leur chant, les Sirènes entraînaient les
voyageurs pour lesquels elles étaient invisibles à se précipiter dans la mer,
où ils se noyaient. — Dans VOdyssée, Xll, 188, Ulysse, prévenu, ne leur
échappe qu'en bouchant avec de la cire les oreilles de ses compagnons et
se faisant attacher lui-même au mât de son navire. V. aussi Cicéron, De
Fin., V, 18.
11, Cecy. — Add. des éd. ant. : pour le moins.
14, Nous. — Var. des éd. ant. : La science ne nous décharge point de douleur,
de crainte, de désir et de reurne, au lieu de : « Mais... nous ».
17, Pituita. — Pituite; humeur blanchâtre et visqueuse que, dans certaines
indispositions, on i-ejette par la bouche.
2Q, Presumption. — L'éd. de 80 aj. : et la gloire.
20, Epictete. — Manuel, 11.
26, Braues. — C.-à-d. : entendez ce pauvre et malheureux animal faire le
brave, se pavaner.
31, Offense. — Cicéron, Tusc, l, 26.
206,
7, Cestuy-cy. — Lucrèce. Un breuvage que lui donna sa femme ou sa mai-
tresse lui troubla la raison et il finit par se donner la mort. Chron. d'EusÈBE.
9, Sapience. — « Folie et génie sont congénères »; c'est une des applications
fréquentes de cet autre proverbe : « Les extrêmes se touchent >•, et les exem-
ples à l'appui sont nombreux. En tout cas, il faut reconnaître que beau-
coup d'hommes de génie et de personnages illustres se sont trouvés affectés
d'une demi-aliénation mentale et sujets à un état anormal du système ner-
veux : Socrate, Malebranche, Newton, Descartes, J.-J. Rousseau, Le Tasse,
étaient hallucinés ; Lucrèce, Pierre le Grand, Balzac, Michel-Ange étaient
maniaques. — Cicéron dit qu' « il ne se trouve pas d'esprit sublime sans
quelque mélange de folie, et que la mélancolie est le propre des natures
excellentes ». — M"" de Staël : « La mélancolie est le sceau du génie. »
NOTES. LIV. II, GH. XII. VOL. II, PAG. 206. Fb.489
10, Choses. — CicÉRON, Acad., II, 23.
11, Mortels. — Cicéron, De Fin., II, 13.
12, Dieu. — Plutarque, Des communes conceptions, etc., 30.
14, De soy. — Add. des éd. ant. : et aquis par ses estudes.
17, Surmonte. — Sénèque, Epist. 23, à la fin.
19, Il n'y a. — Les éd. ant. font précéder ces mots de : et toutes fois ie re-
connoy qu'il.
'27, Poules. — 11 usera jusqu'à épuisement de toutes ses ressources. — « Faire
de ses œufs poules », c'est s'abuser sur sa richesse, ses ressources; c'est un
proverbe qui a le mémo sens que le proverbe anglais : « Tout homme
prend ses oies pour des cygnes. »
28, Chemise. — Proverbe; c.-à-d. le réduire à la pauvreté la plus absolue,
presque à la nudité.
o2. Mal. — Cicéron, Tusc, II, 25.
34, Secte. — Add. des éd. ant. : ce n'est que vent et paroles.
35, Carneades. — Cicéron, De Fin., V, 31. — Un des familiers d'Épicure, par
suite, autre que le fondateur de la nouvelle académie qui est postérieure de
60 ans à ce dernier.
208,
5, Stoïques. — Le fait est donné par Cicéron, Tusc, II, 25, qui, dans un
autre passage, dit que ce même philosophe, aj^ant mal aux reins, criait à
tue -tête que tout ce qu'il avait jugé auparavant de la douleur était faux.
6, Rabattre. — Les éd. ant. aj. : quelque chose des pointes de la douleur et de.
8, Pyrrho. — Diogène Laerce, IX, 69. — Pyrrhon, clief de l'école des Scep-
tiques, posait en principe que rien n'est certain; qu'à chaque proposition
on peut opposer une proposition contraire également probable; que, par
suite, le sage doit suspendre son jugement et' tout soumettre à l'examen (en
grec SxÉTiTn;). On a prêté à Pyrrhon mille folies que dément la réputation
de sagesse dont il jouissait auprès de ses contemporains.
17j Naturelle. — Add. des éd. ant. : Certes la cognoissance nous esguise plutost
au ressentiment des maux qu'elle ne les allège.
19, Ignorance. — Certains ont voulu voir là une allusion à la castration; le
texte s'explique cependant très bien sans semblable hypothèse; de ce que
l'enfant ne s'attend pas à une opération quelle qu'elle soit, qu'on va lui
faire subir, et que chez un cheval, il ne s'en rend pas compte davantage,
n'éprouvant pas d'appréhensions, ils s'en Refendent moins.
22, Discours. — Sorte de gens sur lesquels, dans Le Malade imaginaire,
Molière a si spirituellement exerce sa verve sati«'ique.
23, Science. — C'est la médecine que Montaigne met ici en cause; ce qu'il
indique lui-même plus loin, en ajoutant du reste que ce qu'il en dit s'ap-
plique à toutes autres.
27, Indisposition. — Critique à l'adresse de la chiromancie qui, ainsi que
l'astrologie, avait encore nombre d'adeptes à cette époque.
210,
2, Philosophes. — Des philosophes sceptiques. V. N. II, 208 : Pyrrho.
13, Viure. — Allusion aux avances qui lui étaient faites pour obtenir qu'il
rentrât dans la vie publique, dont il s'était déjà retiré.
14, Maladies. — Les éd. ant. aj. : et de foiblesse; et 80 aj. en plus : Les
hommes engagés au seruice des Muses m'en sçauroient bien que dire.
,24, Homme. ~ Idée qu'a traduite La Fontaine. V. N. II, 202 : Rigent. —
Avant Montaigne et lui, Marot avait dit :
« six ou sept fois, ce n'est point le mestier
D'homme d'honneur; c'est pour le muletier. »
212,
14, Ouurages. — Un oratorien, Thom^ssin (I6I9 à 1695), homme d'une éru-
dition profonde, qui avait fait de nombreuses conférences sur les Pères de
l'Église, les conciles, l'histoire, oublia sur la fin de sa vie tout ce qu'il avait
su et ne se souvenait même plus. d'avoir rien écrit. Payex.
Fb.490 ESSAIS DE MOiNTAIGNE.
15, Informes. — Il s'agit ici du Tasse, l'auteur de la Jérusalem délivrée,
qui, lorsque Montaigne voyageait en Italie, en 1580, était enfermé comme
fou dans un couvent de Ferrare où il demeura ainsi pendant sept ans, de
1579 à 1586. Le texte pris à la lettre implique que Montaigne l'a vu dans sa
prison et la gravure a reproduit cette visite; néanmoins il ne semble pas
qu'elle ait eu lieu et il n'en dit rien dans son journal de voyage. Le mot
« voir » serait, dans ce cas, mis pour avoir appris, savoir, sens dans lequel
il est assez fréquemment emplo)'é, en parlant d'un fait accompli.
18, Assagir. — S* Paul, Epilre atix Romains, a dit de même en renversant
la proposition : « Ils allaient disant vouloir devenir des sages, ils sont de-
venus des sots. » — Assagir, rendre sage, n'est pas demeuré dans la langue
française, qui a retenu abestir, rendre bête, stupide ; dans La Boétie, on
trouve de même formation assotir, pour rendre sot.
19, Guider. — « Prenez de l'eau bénite, faites dire des messes, cela vous fera
croire et vous abêtira; étrange moyen de nous rapprocher de Dieu, que
d'étouffer la raison qui est un don de lui et nous fait à son image. » Pascal.
— Tertullien n'a-t-il pas dit : « Credo quia absurdum {j'y crois par cela
mêm£ que c'est une absurdité) » ; — et Bossuet : « Nous ne sommes capables
d'entendre Dieu, que par une entière cessation de notre intelligence » ; —
JouBERT : « Ferme les yeux et tu verras » ; — Hlet : « Pour arriver à croire,
il est utile de ne pas croire » ; — Diderot : « Le premier pas vers la philo-
sophie, c'est l'incrédulité » ; — la reine Christine : « En matière de foi, il
faut se crever les yeux pour voir clair » ; — enfin l'Évangile : « Heureux les
pauvres en esprit, car le roj^aume des cieux est à eux. »
24, Fuir. — Les éd. ant. port. : à désirer qu'à craindre, au lieu de : « à coup
qu'à fuir ».
32, Valentem. — Ces vers sont tirés de la satire de La Boétie, dont il a été
question liv. I, ch. XXVII,, I, 306.
34, Volupté. — La secte d'Épicure. — Les éd. ant. âj. : et l'a montée à son
plus haut pris.
36, Auoir de bien. — Var. des éd. ant. : heureux bien estre.
38, Mali. — Citation que Montaigne fait précéder de sa traduction.
214,
7, Plombée. — Dans un tel état d'apathie.
13, Sentir. — Cicéron, Tusc, III, 7.
216,
1, Soufferts. — Gigéron, Tusc, III, 45.
2, Oubly. — C'est pourtant là le moyen le plus efficace, peut-être le seul de
retrouver le calme et de n'être pas trop malheureux. Ressasser constam-
ment, au contraire, en son esprit, les griefs vrais ou imaginaires que l'on
peut avoir contre les hommes ou contre les choses, rend l'existence insup-
portable. <• Ce qui est passé, est mort, » dit un proverbe arabe; et, quand
on s'y applique, il n'est pas si malaisé que le dit Montaigne. La nature nous
y aide, en atténuant avec le tenips nos souvenirs; mais il faut pour cela
écarter résolument et aussi souvent qu'ils se présentent à nous, les sujets
dont nous voulons nous dégager; et, si nous y joignons une occupation
suivie qui empêche que nous ne demeurions sans cesse en tête-à-tête avec
nos pensées, sur ce point comme sur bien d'autres, la volonté finit par
avoir raison de toute obsession, quelle qu'elle soit.
13, Perdre. — « On s'en souvient, en songeant qu'il faut qu'on l'oublie. »
MONCRIF.
17, Ausus. — D'Épicure.
31. Acceptassent. — Il est douteux que semblable marché soit accepté de
quiconque a encore du sang dans les veines. Cette vie agréable et tranquille
que les Italiens qualifient de vita del bealo porco (vie béate du porc) ne
saurait convenir à qui a du cœur et se sent capable de faire mieux, état
d'àme que Raci.ne a mieux su rendre que Montaigne, quand il fait dire à
Achille ;
NOTES. LIV. II, CH. XII. VOL. II, PAG. 216. Fb.491
• Je puis choisir, dit-ou, ou beaucoup d'ans sans gloire,
Ou peu de jours suivis d'une longue mémoire;
Mais, puisqu'il faut enfin que j'arrive au tombeau,
Voudrais-je, de la terre inutile lardeau...
Et toujours de la gloire évitant le sentier,
Ne laisser aucun nom et mourir tout entier? •
218,
7, Desplaisir. — Cette histoire et celle de Lycas qui précède sont tirées
d'ATHÉNÉE, XIII.
9, Bt'o;. — Montaigne a traduit ce vers avant de le citer.
10, Ecclesiaste. — Ch. 1, versets 17 et 18.
18, Résiste. — Le commencement de cette citation est un passage altéré de
Sénèque; le reste est de Cicéron.
20. Cette réflexion sur la transformation du B en V ne doit s'appliquer ici
qu'à bibat; introduite dans abeat, elle n'aurait aucun sens; le proverbe
latin : « AiU bibat, aut abeat {qu'il boive ou qu'il s'en aille) » qui signifie :
« Il faut s'accoutumer à l'humeur de ceux avec qui on vit ou s'en séparer »,
devient alors avec la prononciation gasconne : « Aut vivat aut abeat {qu'il
vive ou qu'il meure). » — C'est cette même transformation de lettres fami-
lière aux Gascons qui a fait dire d'eux : « Beata gens, oui bibere idem est ac
vivere {Heureuses gens pour qui boire et vivre ne font qu'un) » ; ou encore :
« Felices quibus bibere, vivere est {Heureux ceux pour lesquels boire, c'est vivre. •>
32, Pendre. — Plutarqije, Contredits des philosophes stotques, 14.
34, Approcher. — Id., ibid.
36, Hart. — Diogène Laerce, VI, 86.
37, Plutarque. — Comment on pourra apercevoir si on s'amende, etc., 5. —
Sextus le pythagoricien est cité fréquemment par Sénèqde dans ses diffé-
rents ouvrages, en particulier dans ses lettres 59, 64, etc.
220,
12, Valentian. — L'empereur Valens.
14, Mahumet. — Mahomet, fondateur de l'Islamisme qu'il commença à prê-
cher à la Mecque vers quarante ans; l'opposition qu'il rencontra au début
l'obligea à s'enfuir à Yatreb (622) où il fut accueilli avec transports et dont
le nom, dans la suite, a été changé en celui de Médine (ville du prophète),
en souvenir de cette fuite ou hégire, d'où date l'ère des Musulmans (Musul-
man et Islamisme ont même étymologie et viennent de l'arabe A^ selam ,
qui signifie abandon complet en Dieu de sa personne et de ses biens, ré-
signation). A partir de ce moment, Mahomet poursuivit avec succès son
œuvre les armes à la main ; et, à sa mort, survenue en 632 à Médine où
est sa tombe, dans la majeure partie de l'Arabie, y compris la Mecque, la
religion nouvelle avait remplacé le culte des idoles. Ses successeurs ou kh^
lifes (lieutenants), continuant ses conquêtes et son prosélytisme, ont été en
progrès constant jusqu'au xiv siècle ; leurs croyances dominent encore au-
jourd'hui sur une grande partie du globe : l'Asie occidentale, l'Afrique
septentrionale, la Turquie. Les dogmes et les préceptes de la religion de
Mahomet sont consignés dans le Coran (le livre, livre par excellence), qui
embrasse à la fois la religion, la législation pénale et civile, ainsi que l'ad-
ministration. Ses principaux dogmes sont : l'unité de Dieu, l'immortalité
de l'àme, un paradis avec des jouissances toutes sensuelles; le fatalisme,
n'excluant pas pourtant la responsabilité de nos actes; les préceptes sont :
la circoncision, la prière, l'aumône, les ablutions, le jeûne, l'abstinence du
vin et de toutes les liqueurs fermentées; la polygamie est autorisée, le Coran
autorise quatre femmes légitimes. — Mahomet n'a nullement interdit ni les
sciences, ni les lettres à ses adeptes; mais dans le principe, ses lieutenants
se conduisirent à la vérité comme si elles étaient proscrites. Un revirement
se fit plus tard et pendant un temps les arts et les sciences ont compté des
savants émérites parmi ses sectateurs, mais il faut convenir qu'actuellement
il ne semble plus guère en être question dans le monde musulman.
Fb.492 ESSAIS DE MONTAIGNE.
16, Lycurgus. — Sa législation, qui fit de Sparte une république militaire plus
qu'une monarchie, et à laquelle elle dut la prépondérance sur toute la
Grèce, tant qu'elle l'observa fidèlement, avait principalement pour but
d'établir l'égalité entre tous les citoyens et de former un état guerrier sans
esprit de conquêtes. Ses dispositions essentielles étaient : le partage des
terres en portions égales, avec interdiction d'accroître, de diminuer et
d'aliéner tout ou partie du lot échu à chaque famille; la sulistitution d'une
monnaie de fer a la monnaie d'or et d'argent; les repas pris en commun;
une éducation austère, toute martiale, et exclusivement dirigée en vue do
développer la moralité, la force et l'adresse, donnée en public; les arts, les
sciences, et tous les métiers en général abandonnés aux esclaves; comme
gouvernement : deux rois, ayant l'initiative des lois, présidant à tous les
actes de la vie publique, commandant les armées, mais dont l'autorité était
limitée par les Ephores ; un sénat de 28 membres décidant de la paix ou de la
guerre et des alliances; l'assemblée du peuple élisant les magistrats, votant
les contributions, ratifiant les lois. — D'après la tradition, Lycurgue, après
avoir fait jurer aux Spartiates l'observation de ses lois jusqu'à ce qu'il
revînt, se serait expatrié sans esprit de retour.
37, Vices. — Ce passage est une reproduction d'une idée de Varron, qu'on
trouve consignée dans Nonius Marcellus.
222,
11, Droicturiere. — C'est là, bien qu'il ne les nomme pas, une sortie de
Montaigne contre Luther et Calvin.
13, Aet(Ti8ai[jLovta! — Desdémone (superstition); c'est le nom de l'héroïne de la
tragédie d'Othello, de Shakespeare.
14, neiteTai. — Mot attribué à Socrate et que Montaigne a traduit avant de
le citer.
15, Empescbes. — Pascal s'est inspiré de cette pensée : « Il y a, dit-il, assez
de lumière pour ceux qui ne désirent que voir, et assez d'obscurité pour
ceux qui sont en disposition contraire; assez de clarté pour éclairer les uns
et assez d'obscurité pour les porter à s'humilier; assez d'obscurité pour
aveugler les autres et assez de clarté pour les condamner et les rendre
inexcusables,... c'est pourquoi il est juste et utile que Dieu nous soit en
partie caché et en partie découvert. » — « La vanité et l'orgueil coûtent
plus que la faim et la soif. » Jefferson.
16, Sage. — Platox, Apologie de Socrate. — Chérophon, disciple et ami de
Socrate, étant à Delphes, demanda à l'oracle s'il y avait sur la terre un
homme plus sage que Socrate; la prêtresse lui répondit qu'il n'y en avait
aucun; ce que Socrate interpréta, en disant que la réponse de l'oracle
n'avait d'autre but que de le donner pour exemple, parce qu'il reconnaissait
qu'il n'y avait véritablement aucune sagesse en lui. V. N. III, 576 : L'vn.
24, Sagesse. — « La vanité est l'amour-propre qui se montre; la modestie,
l'amour-propre qui se cache. • Fontexelle.
26, Cendre. — « Souviens-toi que tu es poussière et que tu retourneras en
poussière », c'est la formule, tirée de la Genèse, 111, 19, de l'Église à la céré-
monie du mercredi des cendres.
« Dieu cunnait le néant d'où naissent les humains,
Puisque ses propres mains
Les ont jadis créés de poussière et de boue;
11 connaît leur faiblesse, et sait de quel mépris
La fortune se joue
De tous les grands desseins que forment leurs esprits. » Racan.
27, Ombre. — Cette phrase se trouve dans les Psaumes de David. — On lit
encore dans I'Ecclésiaste : « Dieu a fait l'homme semblable à l'ombre après
le coucher du soleil » ; et aussi : « Pendant les jours de sa vie fugitive,
l'homme passe comme l'ombre. » — Dans l'oraison funèbre d'Henriette
d'Angleterre, Bossuet dit : « L'homme que Dieu a fait à son image, n'ost-i!
qu'une ombre? •
NOTES. LIV. II, CH. XII. VOL. II, PAG. 222. Fb.493
38. Scire. — « Dieu t'a fait pour l'aimer, et non pour le comprendre. » L.
Racine.
224,
4, Aymé. — Ne trouve-t-on pas dans l'Ecriture elle-même que Dieu se re-
pent : « Jéhovah se repentit du mal qu'il avait parlé de faire à son peuple »,
Exode, XXXIIl, 14; qu'il se moque, qu'il se rit, etc.
5, Cognoistre.
« Qu'est-ce que Dieu?
Loin de rien décider de cet être suprême,
Gardons, en l'adorant, un silence profond;
I,e mystère est immense et l'esprit s'y confond.
Foui" dire ce qu'il est, il faut être lui-même. » L. Racine.
lu, Prudence. — Le passage qui suit est une traduction intégrale de Cicérox,
De Nai. deor., III, 15.
20, Aristote. — Morale à Nicomaque, VII, I.
226,
G, Croyans. — S. Paul, Ep. aux Corinthiens, 1, 1, 19.
11, Recognoistre. — Add. des éd. ant. : sa vililé el.
17, Cornes. — L'idée est reproduite de Plutarque, Contredits des philosophes
stoïques, 10; mais l'expression appartient à Montaigne.
22, Appris. — Cicéron, De Nal. deor., I, 17.
29, Descouure. — Diogène Laerce, 1, 122.
29, Onques. — Socrate (V. N. II, 222 : Sage). — Les éd. ant. aj. : (Et qui à
Vauenture n'eust nulle plus viste occasion, d'estre appelé sage, que celte sienne
sentence). ,
31, Rien. — « Je ne sais qu'une chose, c'est que je ne sais rien, » disait aussi
de lui-même Pline l'Ancien.
39, Lettres. — Valère Maxime, II, 2, 3, ne dit rien de semblable; Montaigne
a été ici induit en erreur par une incorrection qui subsiste dans quelques-
éditions de cet auteur.
228,
21, Admirables. — Les éd. ant. aj. : en règlement et en droicture.
28, Queste. — C'est précisément par là que Sextus Empiricus, d'où Montaigne
a tiré bien des choses, commence son livre des Hypotyposes [expositions,
hypothèses) pyrrhoniennes, et en déduit d'une façon générale la caractéris-
tique des différentes manières de philosopher : l'une dogmatique, c'est
celle qui assure avoir trouvé la vérité; une autre académique, appliquée par
ceux qui déclarent qu'elle est au-dessus de notre compréhension; la troisième
sceptique, qui est le propre de ceux qui la cherchent encore.
30, Stoïciens. ■— Péripatéiiciens, V. N. I, 32 : Aristote, et I, 82 : Peripatéti-
ciens; — Epicuriens, V. N. 1, 30 : L'aduenir ; — Stoïciens, V. N. I, 18 : Stoiques.
.33, Académiciens. — École philosophique fondée à Athènes, par Platon,
vers 388; elle tirait son nom d'un jardin, devenu promenade publique, ayant
appartenu primitivement à un certain Acadwnus et dans lequel Platon
donnait ses leçons. — On compte trois Académies : la première, ou Aca-
démie ancienne, avait pour base les enseignements de Socrate, transmis
et érigés en système par Platon : elle admettait l'existence d'un Dieu, d'une
Providence, l'immortalité de l'âme ; au point de vue moral, elle considérait
la raison humaine comme impuissante à nous donner la solution précise
de toutes les questions en présence desquelles l'homme se trouve, et in-
diquait dans l'ordre moral la pratique du bien, comme le plus sûr moyen
d'arriver au bonheur: dans les arts, le beau, comme l'idéal du but à pour-
suivre; Aristote, qui plus tard fonda l'école 'les Péripatéiiciens, Speusippe,
Xénocrate, Crantor en firent partie. La deuxième, ou Académie mojenne,
fondée vers 244, par Arcési as, posait en principe qu'en rien on ne peut
arriver à la certitude. La troisième, ou Académie nouvelle, fondée par Car-
néade, vers 160, sans tomber dans un scepticisme absolu, enseignait que
l'on ne peut atteindre qu'au- probable, — Ces principes se modifièrent encore
Fb.494 ESSAIS DE MONTAIGNE.
par la suite, avec Philon notamment qui, vers l'an 88, revint à la doctrine
de Platon et s'efforça de la concilier avec le stoïcisme.
37, Epecbistes. — Qui hésitent, qui s'abstiennent de juger; qualification
donnée aux sceptiques et que Montaigne explique un peu plus loin. —
V. N. II, 208 : Pyrrho, et Lexique au mot Sceptiques.
38. Homère. — Auteur de VIliade et de ['Odyssée, considérées toutes deux
comme les chefs-d'œuvre de l'épopée. On ne sait que peu de chose de lui;
la tradition le représente vieux et aveugle, errant de ville en ville et récitant
ses vers; certains ont contesté son existence et émis l'idée que ces deux poèmes
résument les œuvres éparses d'une époque fabuleuse de la Grèce. — Dans
VIliade, Homère chante les effets de la colère d'Achille, les malheurs des
Grecs au siège de Troie pendant la retraite de ce héros et la vengeance
terrible qu'il tire du meurtre de Patrocle son ami. On y admire la grandeur
des conceptions, la beauté et la simplicité du plan, la hardiesse de l'imagi-
nation, la richesse et la sublimité des images. — Dans l'Odyssée, il raconte
les aventures d'Ulysse errant de contrée en contrée après la prise de Troie,
et le retour de ce prince dans son royaume d'Ithaque. Le plan en est ré-
gulier, l'imagination moins éclatante, mais un vif intérêt et une séduisante
naïveté vous captivent. — Ces deux poèmes, en dehors de leur beauté in-
trinsèque, avaient pour les anciens le mérite de renfermer les traditions
théologiques, les noms et l'origine des peuples, la description et la situation
des pays, et, à ce titre, jouissaient chez eux, sous ces divers rapports, d'une
grande autorité.
38, Sages. — Thaïes, Solon, Bias, Chilon, Cléobule, Pittacus, Périandre;
quelques-uns substituent à ce dernier Myson, d'autres Anacharsis, bien que
celui-ci fût scythe; ils s'occupaient surtout de morale et de politique.
39, Arcbilochus. — Aussi méchant que licencieux dans ses poésies; il fut
banni par plusieurs villes qui mirent ses écrits en interdit, et il finit par
être assassiné; il était cependant tellement estimé pour ses talents poétiques,
qu'on le regardait presque comme l'égal d'Homère; il ne reste de lui que
quelques fragments de poésie.
39, Euripide. — Son style, modèle d'élégance, brille surtout par le pathétique ;
il fait exprimer à ses héros des maximes philosophiques d'une grande
hardiesse. Il avait composé, dit-on, 84 tragédies; il ne nous en est parvenu
que dix-neuf; les plus estimées sont Hécube, les Troyennes, Médée, Iphigénie
en Tauride.
230,
21, Science. — Cicéron, Acad., II, 47.
232,
27, Intrasquer. — Du latin infrascare qui signifie couvrir de feuillages, d'où
par métaphore, embrouiller, embarrasser.
31, Choisissiez. — Cicéron, Acad., II, 43.
234,
1, Panaetius. — Montaigne continue de traduire Cicéron, Acad., 11, 33.
8, Praeoccupé. — Prévenu, rempli de préjugés.
17, Sustineatur. — Cicéron, Acad., I, 2. — Le texte porte assensio, au lieu de
asserlio, qui semble une erreur de copie.
236,
2, Naturelles. — Sextus Empiricus, Pyrrh. hypol., I, 6.
7, Pyrrbo. — Les éd. ant. port. : ce que Laerlius dict de la vie de Pyrrho
et à quoy Lucianus, Aulus Gellius et autres semblent incliner, car ils, au
lieu de : « ce qu'on... Ils ». — Du temps de Julien, la plupart des écrits de
Pyrrhon avaient déjà péri, et cet empereur s'en félicitait. Lebeau.
11, Souche. — Montaigne, qui se déclare ici ouvertement et avec raison
contre cette aveugle insensibilité qu'on a attribuée à Pyrrhon, semble la
reconnaître ailleurs (liv. II, ch. XXIX, II, 592), quoiqu'elle lui paraisse, dit-il,
quasi incroyable.
17, Secte. — Ici encore l'auteur copie Cicéron, Acad., II, 31.
37, Deuement. — La complaisance avec laquelle Montaigne s'étend ici sur le
iNOTES. LIV. II, CH. XII. VOL. II, PAG. 23G. Fb.49a
Pyrrhonisme et conclut en sa faveur, montre bien qu'il est de cette école.
• Tous les principes qu'il expose comme étant ceux de ces philosophes sont
les siens; cela ne fait pas doute pour qui est au fait de sa vie et auxquels
les Essais sont quelque peu familiers; ce sont eux qui lui ont inspiré sa
devise « Que sais-je? » que l'on retrouve un peu plus loin; il leur a même
emprunté la leur « 'Enéy^w (je m'abstiens) ». V. N. II, 276 : Que sçay-ie?
238,
14, L'Ecclesiaste. — 111, 22, et V, 17.
20, Troisiesme. — Les deux premières comprennent les Académiciens et les
Sceptiques; la troisième, que Montaigne désigne sous le nom collectif de
Dogmatistes, comprend les Péripatéticiens, les Stoïciens, les Epicuriens.
29, Sectateurs. — Des sectateurs de Platon, de qui est le Timée dont il
vient d'être question, et non des Dogmatistes dont l'auteur semble, au
début de l'alinéa, vouloir nous entretenir en détail; du reste le philosophe
qu'il met en cause est Cicéron, qui était de l'école des Académiciens.
240,
6, Et si. — C.-à-d. Aristote est le prince des dogmatistes, et cependant
nous apprenons de lui.
7, Doubter. — Cette pensée n'est pas d'Aristote ; on l'attribue à ^Eneas Syl-
vius, qui a été pape en 1458, sous le nom de Pie IL
8, Escient. — Les éd. ant. aj. : {comme pour exemple sw le propos de l'im-
morlalité de l'âme).
19, Difficulté. — L'obscurité, — pour en voiler leurs opinions (add. de l'éd.
de 1588).
23, Estait. — Cicéron, Acad., II, 45.
24, Facilité. — C.-à-d. c'est pourquoi Epicure a évité dans ses écrits d'être
clair et facile à entendre.
25, SxoTEivo;. — Le ténébreux. Cicéron, De Fin., II, 5.
31, Cicero. — De Offic, I, 6.
35, Cyrenaiques. — Diogène Laekce, II, 92. — Secte de philosophes grecs
qui avaient pour chef Aristippe de Cyrène (Afrique sept.), qui, après la
mort de Socrate, dont il était un des disciples, fonda cette école, qui ne
tarda pas à se fondre avec les Epicuriens. Dénaturant la morale de son
maître, il plaçait le souverain bien dans les plaisirs des sens modérés par
la raison.
37, Disciplines. — Diogène Laerce, VIII, 32.
39, Exercice. — Chrysippe, dans Plutarque, Contredits des philosophes stoï-
ques, 25, dit le contraire de ce que Montaigne lui fait dire ici.
242, ^
9, Profuerunt. — Ici, comme en maintes autres, le texte de la citation est
altéré.
10, Sçauoir. — Add. des éd. ant. : et par la philosophie.
13, Dubitateur. — Add. des éd. ant. : et ne rien établissant.
22, Asseuerante. — Chancelante et n'assurant rien.
22, L'est. — Pic de la Mirandole, un des disciples les plus fervents de
Platon, à dix-huit siècles d'intervalle, après beaucoup d'efforts pour dé-
terminer le but de chacun des dialogues de ce philosophe, fut obligé de
convenir qu'il n'y en avait pas. Dans le traité des Lois, il est parlé de la
nature de l'àme, de sa génération, de son immortalité; il est encore ques-
tion de cette immortalité dans Phédon, le Phèdre et le Timée; il est parlé
de géométrie dans le dialogue de Menon, qui est un discours sur la vertu,
sur laquelle on trouve une digression dans celui d'Alcibiade, etc. etc.
Payen. — On s'étonne quelque peu de voir cet admirateur sans égal de
Montaigne relever chez un autre ce désordre littéraire, quand c'est là une
des ^jaractéristiques essentielles de son auteur de prédilection.
22, Disait. — Dans le Théétèle de Platon.
30, Engin. — Esprit; du latin ingenium.
31. D'autrui. — Socrate résumait son rôle, en se disant « Accoucheur d'es-
Fb.496 ESSAIS DE MONTAIGNE.
prits », avouant et rappelant ainsi la profession de sa mère qui, elle-
même, était sage-femme. V. N. III, 576 : L'vn.
38, Prez. — Les éd. ant. port. : Chez qui se peut voir cela plus clairement,
que chez noslre Plularque? combien diuersemp.nt discourt il de mesme chose?
combien de fois nous présente il deux ou trois causes contraires de mesme sub-
iect, et diuerses raisons, sans choisir celle que nous suons à suiure, au lieu
de : - Cela... prez » (lig. 36 à 38).
244,
5, Fantasies. — Socrate entendant Platon lire son dialogue de Lysis, ou
de l'Amitié, se serait écrié : « Dieux ! que de choses ce jeune homme me
prête! • Et, en effet, Platon a mis sous le nom de son maître beaucoup
de choses que celui-ci n'a jamais dites. Diocèse Laerce.
26, Vérité. — Add. de 88 : Car au bout de ses discours, il venoit à s'escrier...
29, Elle est. — Cicéron, Acad., II, 5; Sextus Empiricus, Adv. mathem.
35, Bride. — Retenue; modération, comme port. les éd. ant.
36, Figues. — Le texte grec de Plutarque, Propos de table, I, 10, porte con-
■ combre au lieu de figue (ce qui du reste importe peu à la moralité de
l'histoire); Montaigne a suivi ici la version française d'Amyot ou le latin
de Xylander. Coste.
246,
3, Despita. — Add. des éd. ant. : et se mit en cholere.
26, Profession. — Ainsi s'exprime Cicéron, Acad., II, 41.
31, Soudainement. — Plutarque. Qu'on ne saurait vivre joyeusement selon
la doctrine d'Épicure, 8. — L'éd. de 88 aj. : comme fut Phaelon.
248,
1, Nombres. — Les Atomes, les Idées, les Nombres, sont des hypothèses
diverses imaginées par ces philosophes pour expliquer, chacun à sa façon,
leurs théories sur le système du monde; c'est du reste ce qu'indique la
citation latine qui suit.
2, Sages. — Les éd. ant. port. : cleruoyans.
8, Contraires. — C'est l'idée du proverbe italien : « Se non e vero, e bene
trovato (si ce n'est vrai, c'est bien trouvé). »
15, Religions. — Les éd. ant. aj. : car il n'est pas de/fendu de faire nostre
profit de la mensonge mesme, s'il est besoing.
20, A certes. — C.-à-d. comme certain.
26, Loix. — Les Lois,, de Platon, traité sur les institutions à donner à un
peuple.
31, Republique. — Liv. V. La République de Platon, traité sur la meilleure
forme de gouvernement.
32, Piper. — D'où cette coutume, assez généralement existante dans les
religions anciennes, de s'entourer de mystères et d'en tenir les profanes à
l'écart. En Gaule, notamment, les Druides agissaient ainsi : ils cachaient
avec soin au peuple les doctrines qu'ils s'étaient faites sur la terre et les
cieux, ne les enseignaient qu'à leurs disciples sans les écrire, et il fallait
à ceux-ci jusqu'à vingt années d'études pour acquérir toute cette science.
38, Académique. — V. N. II, 228 : Académiciens.
40, Belutez. — Etudiés, scrutés; bluter, c'est passer au blutoir (tamis pour
séparer la farine du son).
250,
28, Sortables. — Montaigne (liv. I, ch. XXXI, I, 378) blâme l'usage « de cher-
cher à affermir et appuyer nostre religion par la prospérité de nos entre-
prises; nostre créance, ajoute-t-il, a assez d'autres fonderaens, sans l'au-
thoriser par les euenemens ».
36, Et. — Add. des éd. ant. : voy là pourquoi.
39, Excusable. — Saint Paul, ayant reçu mission du Saint-Esprit de prêcher
les Gentils, était à Athènes (51). Conférant avec quelques philoBophes épi-
curiens et stoïciens sur les idées qu'il venait propager, ceu.x-ci le menèrent
à l'Aréopage pour qu'il y exposât sa doctrine, et là il s'exprima de la sorte :
« Athéniens, lorsqu'en passant je regardais les objets de votre culte, j'ai
NOTES. LIV. 11, eu. XII. VOL. lî, PAG. 2liO. Fb.497
aperçu un autel avec cette inscription : Au dieu inconnu; ce Dieu que
vous adorez sans le connaître, c'est lui que je viens vous annoncer.' » Actes
des apôtres, XVII, 23.
40, Près. — Approcha la vérité de plus près, en traça une image plus Adèle
— Adombra, mot latin francisé par Montaigne, de adumbrare, imiter, re-
présenter.
252,
5, Numa. — D'origine sabine, Numa vivait dans la solitude et avait qua-
rante ans, quand les Romains l'appelèrent au trône. Pas une guerre ne
troubla son règne, tout entier voué à la législation et aux institutions reli-
gieuses. Il fonda des temples, donna des lois écrites, régularisa l'année
qui jusque-là n'avait que dix mois et à laquelle il en donna douze, et ré-
partit le peuple en corps de métiere. Pour faire adopter ses institutions,
il feignait des révélations d'Egérie, nymphe révérée des Romains comme
déesse des fontaines. Certains critiques modernes pensent que Numa n'a
pas existé et qu'il n'est que la personnification de la législation religieuse
et civile des Romains.
20, Ettect. — La religion de Confucius observée en Chine est la religion des
lettrés, ses pratiques extérieures ne sont que des formalités traditionnelles
qui au fond lui sont étrangères; de fait, elle reconnaît un Dieu suprême,
n'a ni dogmes, ni culte, ni prêtres, consiste uniquement en principes de
morale qui ne le cèdent en rien à ceux de la religion chrétienne, et est peut-
être celle qui se rapproche le plus de la religion idéale philosophique. Mais
Montaigne est dans le vrai quand il estime qu'il faut aux peuples une re-
ligion qui le saisisse; et l'Église catholique avec son unité, le principe
de l'amour du prochain qui en est la base essentielle, les espérances si
consolantes, si bien conçues, pour aider l'homme à lutter contre ses mau-
vais instincts, à le soutenir contre les adversités auxquelles chacun est ou
se croit plus ou moins en but ici-bas, la confession qui lui rend la paix
de la conscience quand il l'a perdue, ses cérémonies répétées, si bien
ordonnées, tout à la fois simples et grandioses, si propres à saisir l'ima-
gination et en même temps accessibles à tous, est incontestablement sous
ce rapport la plus parfaite de toutes, lorsque ses ministres s'abstiennent
de l'intolérance si peu dans l'esprit du Christ, si compatissant au contraire
pour toutes les faiblesses humaines, à laquelle certains ont quelque pro-
pension et qui, à d'autres époques, en ont terni l'histoire.
D'une façon générale la religion qui répond à un des besoins essentiels ^
de l'humanité (car à qui a la foi, elle donne un but à la vie), est un soutien
et une consolation dans ses épreuves, en est aussi l'agent moralisateur par
excellence, et personne jusqu'ici n'a rien trouvé en- approchant qui comme
efficacité soit de nature à lui être substitué. •< S'il n'existait pas, il faudrait
l'inventer », a-t-on dit de Dieu; on peut en dire autant de la religion, et
bien aveugles sont ceux qui le nient, bien criminels ceux qui la com-
battent. Si son action est bienfaisante, et en conscience le contraire n'est
pas soutenable, qu'importe ce que sont ses dogmes et ses mystères! ses
ennemis au nom de la raison les taxent de superstition, de mystifications,
peut-être, mais qu'opposer à ce fait qu'il y a parmi les croyants autant
d'intelligences supérieures que parmi ceux qui ne le sont pas?
De nos jours ces derniers, l'emportant dans les conseils du Gouverne-
ment, dans l'espoir de la saper, après en avoir chassé les Congrégations
religieuses enseignantes et hospitalières dont, à juste titre, ils redoutaient
rinfiuence pour le triomphe de leurs idées, sont, dans leur aveuglement,
arrivés à faire prononcer en France la séparation do l'Église et de l'État.
Envisagée à ce seul point de vue, c'est là une lourde faute politique : l'État
y perd la main-mise sur le clergé, qu'il avait du fait du Concordat; après
quelques années d'épreuve, l'Église, devenue indépendante, sera plus forte
que jamais, et aura acquis de pouvoir jouer un rôle politique considérable
alors qu'auparavant elle n'en avait aucun. Quel sera ce rôle? Il est dou-
teux qu'elle entre dans le jeu de ceux qui ne rêvent que ^a ruine; conser-
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 32
Fb.498 ESSAIS DE MONTAIGNE.
vatrice par essence, elle apportera aux conservateurs un point d'appui qui
leur fait actuellement défaut, et son action pourra devenir prépondérante
si elle a la sagesse de ne s'inféoder plus particulièrement à aucun des
partis (monarchiques ou républicains) de cette nuance. 11 lui suffira, pour
cela, qu'après avoir, i)ar les moyens dont elle dispose, fait de la propagande
et stimulé le zèle électoral de tous ses fidèles, restant neutre entre tous les
partis conservateurs jusqu'après le premier tour de scrutin, de propos
délibéré elle agisse au second tour, avec toute son énergie, exclusivement
en faveur de celui d'entre eux, quel qu'il soit, qui, au premier, aura obtenu
la majorité, lui ralliant tous ceux. sur lesquels son influence a action.
20, Celles. — Des divinités. — Dans les éd. ant. cette phrase suit immé-
diatement celle où il est parlé de la divinité inconnue à Athènes, ce qui
explique l'interruption d'idée que le texte présente.
21, Requis. — Add. des éd. ant. : pour la conception du peuple.
23, Soleil. — De toutes les idolâtries, celle du soleil passe pour la plus an-
cienne, et, comme le dit Montaigne, c'est la plus naturelle. Encore au
vn* siècle, les Perses adoraient le Soleil; son culte, d'où découle celui du
feu observé par les sectateurs de Zoroastre, subsiste encore en certains
lieux de l'Asie centrale; dans le nouveau monde les Péruviens, les Natchez
le pratiquaient; par contre les Ilottentots adoraient la Lune.
42, Tbales. — Cette analyse de la théologie païenne est extraite surtout de
CicÉRON, De Nal. deor., I, 10, 11, 12, etc.
256,
1, lupiter. — Ou Zeus; le dieu suprême, père et maître des dieux et des
hommes chez les Romains, comme chez les Grecs. II était fils de Saturne
et vainquit les Titans qui avaient détrôné son père qu'il rétablit sur le
trône, et qu'il renversa lui-même plus tard, pour se partager l'empire du
monde avec ses frères Neptune et Pluton, donnant au premier les mers,
au second les enfers, et se réservant le Ciel et la Terre. Il épousa sa sœur
Junon, dont le caractère altier lui causa bien des ennuis, et eut une foule
de maîtresses tant parmi les déesses que parmi les mortelles. Vulcain,
Bacchus, les Muses, Apollon et Diane, Mercure, Hercule, Minerve et nombre
d'autres étaient ses enfants. Il est représenté sur un trône, tenant d'une
main un sceptre, de l'autre lançant la foudre; à ses pieds un aigle déployé.
Le chêne lui était consacré; ses temples les plus célèbres étaient ceux de
Dodone et d'Olympie en Grèce, d'Ammon en Libye et le Capitole à Rome.
19, Genus. — Exnius, cité par Cicérox, De Divinat., II, 50.
23, Miennes. — Les mœurs et les idées qui diffèrent des miennes.
32, L'ancienneté. — Les éd. ant port. : car d'adorer celles de nostre sorte,
maladiues, con^ptibles et mortelles, comme faisoit toute V ancienneté, des
hom,mes qu'elle auoit veu viure et mourir, et agiter de toutes nos passions,
au lieu de : <■ Parquoy... ancienneté ».
33, Discours. — C'est ce que même la faiblesse de noti-e raison ne peut
excuser.
258,
20, Isis. — Sérapis, dieu égyptien en lequel ses adorateurs vo}'aient le dieu
suprême, celui qui ressuscite et donne la vie et la santé ; on l'identifie'
parfois avec Osiris, et il semble que ce soit le cas de Montaigne. Isis était
sœur et femme d'Osiris; l'Egypte célébrait en son honneur des mystères
qui se répandirent dans la Grèce et l'Italie. — En réalité Osiris et Isis,
avant d'être déifiés, auraient été, croit-on, des souverains qui avaient régné
sur l'Egypte et y avaient fait fleurir l'agriculture; le bœuf Apis, qui y était
adoré, semble n'avoir été qu'un emblème rappelant ce règne bienfaisant.
23, Varro. — Cité par S. Augustin, De Civ. Dei, XVIII, 5.
26, Cicero. — Tusc, I, 26.
33, Pluton. — Ou plutôt prairie où, suivant Platon, au sortir du corps,
toutes les âmes vont séjourner plus ou moins longtemps d'après ce qu'ont
pu rendre nécessaire, pour se purifier, leurs faits et gestes en ce monde.
Deux chemins en partent : l'un conduit au Tartare (partie de l'Enfer des
NOTES. LTV. II, CH. XII. VOL. II, PAG. 2;i8. Fb.499
anciens où les méchants subissaient la peine due à leurs crimes), l'autre
aux îles fortunées; c'est en somme la conception, sous une forme plus
anodine, du Purgatoire de la religion chrétienne. Plutarque appelle de ce
même nom et donne cette même affectation à l'espace entre la terre et
la lune, où, suivant lui. les âmes viennent après la mort et d'où, après
une pénitence suffisante, celles des bons se rendent dans les régions visi-
bles de la lune, et celles des méchants dans les régions invisibles.
260.
17, Ce qu'elle peut. — Var. des éd. ant. : nous arauom la faiblesse cl inca-
pacité de nos forces.
29, S. Paul. — Lettre aux Corinthiens, I, 2, 9, d'après Isaie, LXIV, 4.
35, Hector. — Participa avec gloire au siège de 'Troie où il soutint de nom-
breux combats contre les plus redoutables guerriers grecs; tua plusieurs de
leurs chefs, entre autres Patrocle, l'ami d'Achille, et périt lui-même sous
les coups de ce dernier, sorti de son inaction pour venger son ami. Achille
vainqueur attacha son cadavre à son char et le traîna trois fois autour des
mure de la ville ; il consentit cependant à rendre ce corps à Priam venu
pour l'implorer; ces faits et la colère d'Achille qui les a précédés sont le
sujet principal de l'Iliade.
262.
1, Ny que... nous. — Var. des éd. ant. : et qu'il souffre pour luy? et.
IL', Premier. — Pline, A'aL Hist., X, 2. — Le phénix était un oiseau fabuleux
qui, suivant les anciens, était unique en son espèce, vivait plusieurs siècles,
se faisait périr sur un bûcher et renaissait de ses cendres.
40, Luy. — Selon l'expression du pape S. Calixte et de S. Augustin que le
concile de Trente a adopté, « Dieu couronne ses dons, en couronnant nos
mérites ».
13, Faillir. — « Pourquoi nous as-tu fait fourvoyer, ô Eternel, hors de tes
voyes, pourquoi as-tu estrangé nostre cœur de ta crainte? • Isaie, traduc-
tion de Calvin.
264,
14, Plutarque. — Dans le traité : Pourquoi la justice divine diffère quelquefois
la punition des maléfices, 4.
20, Cognoissance. — De nos jours, on n'hésite cependant pas, en France, à
faire de pareils gens ministres de la guerre et de la marine et eux-mêmes ne
doutent pas un instant être à hauteur de leur tâche et les voilà jouant avec
la plus entière conviction le rôle de la mouche du coche, avec cette diffé-
rence toutefois que leur action, moins anodine, s'exerce surtout sur le per-
sonnel qu'ils bouleversent, sans la moindre conscience, au gré de leurs
passions politiques. Pour le reste, la machine, il est vrai, continue à fonc-
tionner en vertu de la vitesse acquise; les conséquences de leur direction
nulle ou néfaste ne se font sentir qu'à la longue, alors qu'en a déjà disparu
la cause; mais le mal est fait, l'aiguillon demeure dans la plaie I Puissent
les événements, par de trop cruelles épreuves, ne pas ouvrir trop tardive-
ment nos yeux sur le danger que présentent pour le pays ces atteintes
flagrantes au bon sens.
21», Sempronius. — En 196. — Tite-Live, XLI, 16.
3ï, Minerue. — Tite-Live, XLV, 33. A Amphipolis, en 168, lors des fêtes
données pour célébrer la défaite de Persée et la pacification de la Grèce;
ipais les armes seules des ennemis furent brûlées, les autres dépouilles furent
envoyées à Rome et les masses de numéraire, lingots et objets d'orfèvrerie
versés au Trésor étaient si considérables que les citoyens romains ne
payèrent plus, dit-on, d'impôt jusqu'à l'an 44, c.-à-d. pendant plus d'un
siècle.
35, Aussi. — " A l'embouchure de l'Indus, Alexandre s'avança au delà et en
pleine mer sacrifia aux dieux et précipita dans les flots les taureaux im-
• moles à Neptune et les coupes d'or qui ont servi aux libations, demandant
aux dieux de protéger le voyage que Néarquo va entreprendre dans le golfe
Pb.oOO ESSAIS DE MONTAIGNE.
Persique. • Arrien, VI, 19. — Aucun historien ne parle des sacrifices hu-
mains ou boucheries d'hommes, que lui prête Montaigne.
40, Vmbris. — Pallas, fils d'Évandre, roi du Latiura, allié d'Énée, ayant été
tué par Turnus, roi des Rutules, que la jalousie avait armé contre ce
dernier, celui-ci, après lui avoir fait de magnifiques funérailles, com-
prenant les sacri lices dont il est ici question, vengea sa mort en tuant
Turnus. Ce sujet est le thème des six derniers livres de l'Enéide.
266,
1, Getes. — HÉRODOTE, IV, 94.
10, Amestris. — Plutahque, De la superstition, 13; Hérodote, VII, 114. —
Amestris était la femme et non la mère de Xerxès; celle-ci était Atossa, fille
de Cyrus.
14, Themixtitan. — Ou plutôt Tenuxtitlan, pris souvent pour une divinité,
est l'ancien nom de Mexico; ce nom de Mexico (source d'eau) n'était alors
• lui-même que celui d'une partie de la ville, les Espagnols l'ont appliqué à
la ville entière.
16, Innocence. — Ces sacrifices humains, d'enfants et autres, étaient fré-
quents chez les Mexicains; en une seule fois, rapportent les chroniques,
auraient été immolés douze mille prisonniers de guerre. Au début de la
conquête, des blancs, faits prisonniers ou dont les indigènes s'étaient em-
parés par surprise, furent sacrifiés de la sorte. «Dans certains temples, on
nourrissait parfois une année durant, un esclave qui représentait l'idole
principale et qui, après avoir joui tout ce temps de l'adoration, était
sacrifié à la fin de son règne. Herrera et autres.
18, Carthaginois. — Pi.utarque. De la superstition. 13.
22, Lacedemoniens. — Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens, vers la fin.
25, Gratifier. — Add. des éd. ant. : l'ouurier par la ruyne de son ouarage, et.
27, Coulpables. — Préserver les coupables de la peine qu'ils avaient méritée.
30, Commises. — V. N. I, 24 : Dueil.
33, Et ces ... ennemis. — Var. de 88 : Et que Decius pour acquérir la
bonne grâce des dieux, enuers les affaires Romaines, se brulasl tout vif en
holocauste à Saturne, entre les deux armées.
33, Decius. — Décius, consul romain, dans une bataille qu'il livra aux Latins,
se voua aux dieux infernaux, sur la foi d'un oracle, pour assurer la victoire
à son armée, et se jetant au milieu des rangs ennemis, y périt sous le.urs
coups (341). Son fils et son petit-fils imitèrent son dévouement : le premier,
dans une bataille livrée aux Samnites (295); le second, dans la guerre
contre Pyrrhus (279). — Codrus, le dernier roi d'Athènes, se sacrifia de
même dans une guerre contre les Ioniens, un oracle ayant déclaré que
l'avantage demeurerait à celui des deux peuples dont le chef serait tué
(1132).
268,
9, Poisson. — Hérodote, III, 41 et 42. — La mauvaise fortune que Polycrate
avait si infructueusement tenté de conjurer, finit par l'atteindre : alors
qu'il méditait la conquête de l'Ionie, il fut pris par trahison et mis en
croix (524).
11, Mabometans. — Les Corybantes étaient les prêtres de Cybèle dont ils
célébraient le culte, de la façon la plus bruyante et la plus désordonnée,
hurlant et allant jusqu'à se déchirer dans leurs accès de frénésie (V. N. II,
594) — Les Ménades ou Bacchantes célébraient le culte de Bacchus, leur
dieu, par des orgies oii elles se livrai.ent à des transports furieux de même
ordre. — De nos jours encore, chez les Mahométans, les Aissaoua en
Afrique, les Fakirs en Orient et surtout dans les Indes, se soumettent aux
jeûnes les plus austères et aux tortures les plus afi'reuses pour mériter la
félicité éternelle et la vénération de leurs coreligionnaires.
20, Mastiner. — C.-à-d. de mutiler son corps, le rendre incapable des fonc-
tions qui lui appartiennent, fonctions purement matérielles et soumises par
leur nature à la direction de l'àme, et cela pour épargner à celle-ci...
33, Jnterest. — Préjudice.
NOTES. LIV. 11, CH. XII. VOL. Il, PAG. 270. Fb.oOi
270,
2, Cela. — DioGÈNE Laerce, II, 117.
26, Seiour. — Sans jamais se reposer.
32, Attaquent. — Var. des éd. ant. et de l'ex. de Bordeaux : attachent.
272,
14, L'asseure. — Dans le Timée.
23, Epicurus. — Diogène Laerce, X, 85.
29, Ceres. — Bacchus répandit, parmi les hommes, la culture de la vigne;
Cérès leur enseigna l'agriculture.
29, Hérodote. — Les dires qui suivent sont tirés de Pline, Vil et Vlll, et
d'Hérodote, 111 et IV; mais, en les rapportant, ils ne les présentent que
comme des on-dit, et déclarent en même temps ne pas y croire; Pline
ajoute même que, si on les admettait, il faudrait également ajouter foi à
tous les contes dont la fausseté a été avérée depuis tant de siècles.
34, Pâtes. — Pline estime que ce doit être une espèce de singes.
40, Feu. — Dans les îles Mariannes, dans le Grand Océan, découvertes par
Magellan en 1521, les habitants, outre quantité de choses que nous croyons
nécessaires à la vie, qui leur manquaient, n'avaient jamais vu de feu; ils
ignoraient également qu'il y eût d'autres terres et se regardaient comme les
seuls hommes qui fussent dans l'univers.
41, Noire. — Un curieux et habile anatomiste, dit Hérodote, m'a assuré que
le fait était absolument faux.
42, Hommes. — II est vraisemblable que ces transformations étaient produites
tout simplement parce que ces gens se vètissaient une partie de l'année de
peaux de loup et de cheval.
43, Plutarque. — Dans son traité De la face de la Lune; Pline, VII, 2.
44, Odeurs. — Plutarque en effet, et Pline avec lui, parlant sur la foi de
Mégasthène, disent qu'à l'extrémité des Indes, près des sources du Gange,
il y a une peuplade qui n'a point de bouche, ce qui les fait nommer « As-
tômes »; ils sont tout velus, et ne mangent ni ne boivent; ils font brûler
une certaine racine qui se trouve dans le pays et se nourrissent du parfum
qui s'en exhale, qu'ils respirent par les narines.
274,
14, N'auoit. — Add. des éd. ant. : ny force, ny cognoissance.
16, Noire. — Cicéron, Acad., II, 23 et 31 ; Gauen, II, I ; Lactance, Div. Inslit.,
m, 23; etc. Dans des temps plus rapprochés, un Allemand, Voigt, a publié
aussi une dissertation Adversus alborem nivis (contre la blancheur de la
neige).
18, Dire. — Cicéron, Acad., II, 23; Sextus Empiricl'S, Hyp. Pyrrh.
21, "EffTi. — Citation que Montaigne a fait précéde1|,de sa traduction. — Cette
pensée d'Euripide a été utilisée, comme forme et comme fond, par Arnobe,
Descartes, Bossuet, Pascal et d'autres : « Ce que l'on appelle veiller (être
éveillé), n'est peut-être qu'une phase du sommeil perpétuel. » Arnobe. —
« Qui sait si cette autre partie de la vie où nous pensons veiller, n'est pas
un autre sommeil, peu différent du premier. »
24, Eloise. — Eclair. Le mot est encore employé couramment dans les cam-
pagnes du S.-O. de la France; vient du latin elucere, briller, comme le mot
éclair lui-même.
29, Melissus. — Diogène Laerce, IX, 24.
32, Protagoras. — Diogène Laerce, IX, 51 ; Sénèque, Episl. 99.
35, Mansiphanes. — Sénèque, ^pist. 88. — Est mis ici, par erreur de typo-
graphie, pour Nausiphanez, rectification que porte l'ex. de Bordeaux.
276
2, Comprins. — Cicéron, Acad., II, 37; Sénèque, Epist. 88.
3, Il m'a. — Dans les éd. ant. ce passage commence par cette précaution
oratoire : le ne sais si la doctrine Ecclésiastique en iuge autrement, et me
soubs-mets en tout et par tout à son ordonnance, mais il m'a.
11, Grammariens. — C.-a-d. viennent du fait des grammairiens; sont « ques-
tion de mots -, dirions-nous aujourd'hui. — Cette influence omnipotente
Fb.D02 ESSAIS DE MO.NTAlGiNE.
de la grainiiKiiiT, .Molière, dans Les femmes savantes, la signale de la
sorte :
• La grammaire qui sait régenter juscju'aiix rois.
Et les fait, la main haute, obéir à ses lois. »
« Quelque étrange que cette assertion puisse paraître, dit de son côté
M" DupANLOUP, Discours de réception à l'Académie française, je ne crains
pas d'aflirmer que la grammaire et le dictionnaire sont deux colonnes de
la raison et de la société humaine. •
16, Hoc. — Mot latin qui signifie « ceci », et par lequel commence la l'or-
mule de la consécration dans le sacrement de l'Eucharistie : « Hoc est cor-
pus meum (ceci est mon corps). » — Allusion de Montaigne à la querelle
sur ce point des catholiques et des protestants, ceux-ci niant la transsuli-
stantiation, autrement dit le changement qui s'opère en ce moment du
pain et du vin en la substance même du corps et du sang de N.-S. Jésus-
Christ.
BoiLEAU, dans sa Satire XII, Sur l'Équivoque , qui traite précisément
de la diversité des interprétations auxquelles prête le langage (satire qui
fut frappée d'interdit et ne parut qu'après la mort de l'auteur), celui-ci
faisant allusion aux disputes religieuses soulevées au iv siècle, entre les
orthodoxes disant que le Fils est de même substance que le Père « homou-
sios », et les Ariens soutenant qu'il est d'une substance semblable « homoiou-
sios », mots qui ne diffèrent que par la diphtongue oi, qui manque dans le
premier et se trouve dans le second, a dit :
« El l'Eglise elle-même eut peine à s'en sauver...
Lorsque attaquant le Verbe et sa divinité,
D'une syllabe impie, un seul mot augmenté
Remplit tous les esprits d'aigreurs si meurtrières
Et fit du sang chrétien couler tant de rivières! »
Il avait d'abord écrit :
• Tu fis dans une guerre et si triste et si longue,
Périr tant de chrétiens, martyrs d'une diphtongue. »
21, Donc — C'est le raisonnement désigné en scolastique sous le nom de
« Sophisme du menteur », attribué par les uns à Zenon (Cicéro.n, Acad.,
II, 29; Aulu-Gelle, XVIII, 2; etc.), par d'autres à Épaminondas, et qui a
été le sujet de discussions innombrables : « Tu dis que tu es un menteur:
si tu dis vrai, tu mens; si tu mens, tu ne dis pas vrai; donc tu n'es pas un
menteur. »
36, Que sçay-ie? — Cette devise et la balance en équilibre, sont devenues
l'épigraphe des Essais. Elles figurent pour la première fois dans l'édition
de 1635, au-dessous du portrait de Montaigne. Elles caractérisent du reste
parfaitement sa philosophie, que peint également bien cette maxime qu'il
avait inscrite en grec sur les solives de sa bibliothèque : <■ 11 n'est point
de raisonnement auquel on ne puisse opposer un raisonnement con-
traire. » C'est ce « Que sçay-ie? » qui indignait si fort Pascal et lui a fait
dire en parlant de Montaigne : « Il met toutes choses dans un doute si
universel et si général, que l'homme doutant même s'il doute, son incerti-
tude roule sur elle-même dans un cercle perpétuel et sans repos, s'opposant
également à ceux qui disent que tout est incertain et à ceux qui disent
que tout ne l'est pas, parce qu'il ne veut rien assurer. C'est dans ce doute
qui doute de soi, et dans cette ignorance qui s'ignore, que consiste l'es-
sence de son opinion. Il ne peut l'exprimer par aucun terme positif; car,
s'il dit qu'il doute, il se trahit en assurant au moins qu'il doute, ce qui
étant formellement contre ses intentions, il en est réduit à ne s'expliquer
(jup par interrogations, de sorte que, ne voulant pas dire : « Je ne sais », il
dit : " Que sais-je? » de quoi il a fait sa devise, en la mettant sous les bassins
NOTES. LIV. II, eu. XII. VOL. II, PAG. 276. Fb.b03
d'une balance, lesquels pesant les contradictions, se trouvent dans un par-
fait équilibre; en un mot, il est pur Pyrrhonien. • — Et, ce disant, Pascal
était bien dans le vrai, car non seulement Montaigne était pyrrhonien,
mais il en a convenu : Lors de la reconstruction de son château, après
l'incendie de 1885, on a trouvé dans les décombres un jeton de cuivre dont
l'empreinte figure au Musée de Périgucux et porte : sur une face les armes
de Montaigne entourées du collier de Saint-Michel et l'exergue « Michel,
SEiGNEVR DE Mo.NTAiGNE • ; au rcvers, dans un écu, une balance dont les pla-
teaux sont horizontaux et la légende « 4?. 1576 'Enlxw » (Je m'abstiens),
qui est précisément le mot d'ordre et le principe essentiel de l'école des
sceptiques : le chiffre 42 indique l'âge que Montaigne avait alors, en 1576.
— Une autre épigraphe : « Vires acquinl eundo (ses forces s'accroissent au
fur et à mesure qu'il va) », se trouve sur une édition de 1598 et un grand
nombre d'autres subséquentes. Elle est écrite de la main même de l'auteur
sur l'exemplaire de Bordeaux qui devait servir à la réimpression de l'ou-
vrage, et cependant elle n'a été reproduite ni sur l'édition de 1595, ni sur
celle de 1635, ce qui porte à croire que les éditeurs posthumes de Mon-
taigne, s'inspirant .probablement de sa pensée qu'ils avaient été à même
de connaître, ne l'ont considérée que comme une idée à laquelle, à la ré-
flexion, il n'aurait pas été donné suite; si exacte fût-elle, puisque le texte
primitif allait toujours en augmentant, appliquée à son œuvre par l'auteur
lui-même, elle eût dénoté par trop de prétention, escomptant par avance
une vogue qui n'est venue que notablement plus tard.
278,
2, Irreuerence. — Dont il est question plus haut : « Dieu ne peut faire ceci
ou cela. »
6, Ancien. — Cet ancien c'est Pline, II, 7, dont Montaigne, dans les éd.
ant., avait inscrit le nom que, finalement, il a rayé.
28, Point. — Ne le comprend point. — Du temps de Montaigne, le mot
appréhender, du latin apprehendere, prendre, saisir, n'était employé que
dans ce sens et absolument inconnu dans celui de craindre qui, aujour-
d'hui, a tendance à prédominer. ^
32,' Poix. — Montaigne, en philosophe, contredit ici l'auteur qu'il a traduit
et qu'il dit défendre : « L'homme, dit très orthodoxement Sebond, est, par
sa nature, en tant qu'homme la véritable et vivante image de Dieu; de
même que le cachet marque son empreinte sur la cire, Dieu a empreint en
l'homme sa ressemblance, etc.. »
38, Encore. — C.-à-d. et je désire qu'aucun chrétien ne fasse comme eux.
40, Yeux. — El mesurer à nostre mesure, ajout, les éd. préc.
41, Nostres. — C.-à-d. chrétien comme nous. Il s'agit ici de Tertullien, dans
ce passage si connu et si souvent cité dans les discussions théologiques :
•< Quis negal Deus esse corpus, elsi spirilus sit? (Qui peut nier que bien
qu'espion, Dieu n'ail aussi un corps?) » ce qui, à tout prendre, n'est qu'une
assertion de rhéteur qui n'éclaire en rien la question.
280,
1, Curant. — Cicéron, De \al. deor., 111, 35. — Ce que ce même auteur a
encore exprimé sous cette autre forme plus connue : « De minimis, non
curât prxlor [le préteur [magistrat romain qui, dans les provinces, était
investi de tous les pouvoirs] ne s'occupe pas des détails) »; maxime favorite
de bien des paresseux et de bien des ignorants, portés à en faire l'excuse
' de leur paresse et de leur ignorance, par une application abusive et aussi
une traduction fautive, pour être trop littérale, son vrai sens étant : Le
préteur ne se laisse ni absorber ni arrêter par les détails, une fois sa déci-
sion prise et l'action en train,
26, S. Paul. — Ep. aux Romains, 1, 22 et 23.
34, Faustine. — IIérodien, IV. — C'est par ironie que Montaigne l'appelle
'■ honneste femme »; ses débauches n'étaient ignorées, dans l'empire, que
de Marc-Aurèle, son mari.
35, Cbeuremorte. — Porter quelqu'un ainsi, c'est le porter sur le dos, ses
Fb.b04 ESSAIS DE MONTAIGNE.
bi'as entourant le cou, ses jambes, que l'on soutient, enserrant le corps de
celui qui porte.
282,
9, Offre. — Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens.
10, Douzaines. — La Bruyère a exprimé la même pensée : - Faites donc
seulement une goutte d'eau », dit-il, au lieu de : « II ne sçauroit forger vn
ciron » ; seulement l'assertion de Montaigne est toujours vraie, tandis que
les progrès de la science ont réduit à néant le défi de La Bruyère.
10, Trismegiste. — Hermès Trismégiste; personnage fabuleux que les Égyp-
tiens et, d'après eux, les Grecs, regardaient comme le père de toutes les
sciences, le législateur et le bienfaiteur de l'Egypte, et que l'on place dans
le XX« siècle. Il existait sous son nom quai'ante-deux livres sacrés, appelés
•• livres hermétiques », confiés aux prêtres seuls et qui contenaient toute
l'encyclopédie religieuse et scientifique des premiers temps de l'Egypte.
13, Faire. — Asclepius dialog., ap. Apuleium.
17, Animal. — Animé. — Cicéron, De Nat. deor., III, 13, 14; tous les argu-
ments qui suivent sont tirés du même ouvrage, II, 6, 8, 11, 12, 16, etc.
284,
1, Imbécillité. — De faiblesse, d'imperfection.
8, Desbastiment. — Le théisme et l'athéisme, tous ces ai'guments pour et
contre la divinité, se forgent...
10, Estirons. — Étendons, allongeons.
21, Mont Senis. — Montaigne cite ici le mont Cenis, au pied duquel il était
passé en revenant d'Italie, comme i-eprésentant pour lui et vraisemblable-
ment son époque, le point le plus élevé de la terre, bien qu'il n'ait que
3.600 m., tandis que son voisin le mont Blanc, sommet culminant de l'Eu-
rope, en a 4.800. Jlais on s'inquiétait peu alors de ce dernier, perdu dans le
massif des Alpes, non plus que de ces autres absolument inconnus, il y a
à peine quatre-vingts ans : le Kilimandjaro (6.130 m.) en Afrique; le Sorata
(7.900 m.), un des sommets des Andes dans l'Amérique du Sud; le Gauri-
zankar (8.840 m.) dans l'Himalaya, en Asie, la plus haute montagne du
globe. — Quant à la profondeur des mers, on n'avait pas sur elle de données
plus approchées; ce n'est également que depuis le siècle dernier qu'on a
donné à cette étude une extension de laquelle il résulte qu'à l'heure actuelle
la plus grande profondeur relevée se trouve dans l'océan Pacifique, en un
point dénommé « Fosse du Néro », où a été constaté un fond de 9.650 m.
22, Astrolabe. — Instrument pour mesurer la hauteur des astres au-dessus
de l'horizon.
27, Temple. — Le fait, rapporté par Josèphe, Anl. jiid., XVIII, 4, qui parle
d'Anubis, au lieu de Sérapis, se passa en l'an 32, sous le règne de Tibère,
qui fit crucifier les prêtres qui avaient pris part à ce sacrilège, détruire le
temple, jeter la statue du dieu dans le Tibre et exila l'amoureux, lui accor-
dant les circonstances atténuantes, en raison de la violence de son amour.
38, Diuins. — Plutarque, Romulus, 3, qui donne Taruncius, qu'il nomme
Tarucius, non comme un jeune homme, ce qui eût été plus généreux de
la part du Dieu, mais comme un homme déjà fort âgé.
39, Estoc. — Des deux côtés, du côté paternel et maternel — Estoc, ligne
d'extraction, source d'une lignée, point auquel la lignée entière rapporte
son commencement. Nicox.
286,
2, Neptune. — Platon descendait au sixième degré, par sa mère, de Selon
qui, lui-même, tirait son origine de Neptune.
4, Platon. — Plutarque, Symposiaques, VIII, 1, rapporte que, d'après une
tradition, Apollon aurait apparu à Ariston, lui défendant d'avoir commerce
avec sa femme, parce qu'elle était enceinte de son fait, et qu'elle accoucha
le jour même de l'anniversaire de ce dieu, dont Platon était considéré
comme étant fils. Voir aussi Diogène Laerce, III, 2. — C'est le cas identique,
à quatre siècles d'intervalle, à celui de Joseph et de Marie, au dire des
saintes Ecritures.
NOTES. LIV. II, CH. XII. VOL. II, PAG. 286. Fb.SOa
11, Langue. — Ce nom de « merlin » donné à ces enfants supposés nés du
fait d'un enchantement, d'un miracle, est probablement une allusion au
célèbre enchanteur de ce nom. qui vivait au v° siècle et était issu, disait-
on, d'une religieuse et d'un démon ayant pris forme humaine pour la
circonstance, ce que l'Église (S. Cyprien, S. Augustin), et aussi la science
(Ambroise Paré), ont longtemps admis; aussi, les tribunaux ecclésiastiques
n'hésitaient-iis pas à pourchasser le démon en livrant au feu sa victime,
pour la débarrasser de son persécuteur.
2;i Figure. — Cicéron, De Nat. deor., I, 18.
26, Xenophanes. — Eusèbe, Prép. évang., XIII, 13.
28, Nous. — Cette réflexion de Montaigne rappelle cette boutade de Fonte-
nelle, répondant à quelqu'un disant devant lui que Dieu avait fait l'homme
à son image : • Celui-ci, depuis, le lui a bien rendu. »
36, Mangent. — Dans tout ce passage, Montaigne, qui combat les idées de
ceux qui estiment que tout a été fait pour l'homme, est en opposition
complète avec Sebosd, ch. 97 : « Le ciel te dit (à l'homme) : le te fournis de
lumière le iour, à fin que tu veilles; d'ombre la nuict, à fin que tu dormes
et reposes; pour ta récréation et commodité, ie renouuelle les saisons, ie
te donne la fleurissante douceur du printemps, la chaleur de l'esté, la fer-
tilité de l'automne, les froideurs de l'hyuer... L'air : le te communique la
respiration vitale, et offre à ton obéyssance tout le genre de mes oyseaux.
L'eau : le te fournis de quoy boire, de quoy te lauer. La terre : le te sou-
tiens; tu as de moy le pain de quoi se nourrissent tes forces, le vin de
quoi tu esiouis tes esprits, etc.. » — Bossuet, critiquant sur ce point la
manière de voir de l'auteur des Essais et son mode de discussion, prend
notamment à partie ce passage où il assimile l'homme à l'oison : « Les
hotiimes voudraient se persuader qu'ils ne sont que corps, et ils aspirent à
la condition des bêtes qui n'ont que leur corps à soigner; ils semblent
vouloir élever les animaux jusqu'à eux-mêmes, afin d'avoir droit de s'a-
baisser jusqu'aux animaux et de vivre comme eux. Ils trouvent des piiilo-
sophes qui It^s fiattent dans ces pensées : Plutarque a fait des traités
entiers sur le raisonnement des animaux qu'il élève, ou p-u s'en faut, au-
dessus des hommes; c'est plaisir de voir Montaigne faire raisonner son oie,
qui, se promenant dans sa basse-cour, se dit à elle-même que tout est fait
pour elle; que c'est pour elle que le soleil se lève et se couche; que la terre
ne produit ses fruits que pour la nourrir; que la maison n'est faite que
pour la loger; que l'homme lui-même n'existe que pour prendre soin d'elle
et qu'enfin, s'il égorge parfois des oies, ainsi fait-il bien de son semblable! »
38, Région. — Un poète anglais a émis la même idée : •- Le crabe, au fond
de la mer, dit : Dieu est trop bon de me traiter aussi magnifiquement et
de tant faire pour moi! »
288,
11, Veteris. — Telluris iuvenes, les Enfants de la Terre, appelés aussi les
Titans, ou les Géants, êtres fabuleux, de taille colossale, qui tentèrent, en
entassant Ossa sur Pélion (deux montagnes de la Grèce anc), d'escalader
le Ciel pour détrôner Jupiter, lequel, aidé d'Hercule, les terrassa et, les
frappant de la foudre, précipita les uns dans les Enfers, et ensevelit les
autres sous des njontagnes volcaniques. Myth.
17, Tenet. — Neptune avait construit les murs de Troie; mais le salaire con-
, venu lui ayant été refusé, il se déclara contre elle, lors de la guerre qui
éclata entre ses habitants et les Grecs; Juaon avait également pris parti
pour ces derniers par rancune du jugement de Paris. V. Lex., Scaees.
22, Territoire. — Hérodote, I, 172.
23, Nécessité. — C.-à-d. la puissance des dieux est partagée et répartie
suivant nos besoins; l'un guérit... — On peut en dire autSint d'S saints de
l'Église romaine où beaucoup sont particulièrement honorés dans certaines
localités et certains invoqués d-ins des cas spéciaux comme, par exemple,
S. Antoine de Padoue pour retrouver ce qui est égaré, pour ne parler que
de l'un de ceux le plus en faveur de nos jours.
Fb.506 ESSAIS DE MONTAIGNE.
28, Ponant. — Occident; ce terme était fréquemment employé au xvr siècle.
35, Venerandus. — Le texte d'Ovide ajoute erat, addition qui figure égale-
ment sur la plupart des éditions modernes.
41, Mille. — Ce renseignement parait tiré d'IlÉRODOTE, Opéra et Dies, 252;
toutefois cet auteur n'en compte que trente mille; par contre, son assertion
est tenue comme beaucoup trop faible, notamment par Maxime de Tyr, qui
dit qu'ils sont innombrables, et par Varron. — On estime à vingt-cinq mille
environ les saints de l'Église catholique.
290,
5, Physiciens. — Médecins. Celle dénomination leur était fréquemment
donnée jadis dans les campagnes; elle leur est encore appliquée parfois,
dit-on, en Angleterre. Payen.
9, Cbrysippus. — Plutarque, Des communes conceptions, etc., 27.
13, Creten. — Jupiter avait été secrètement élevé dans l'île de Crète, par
les soins de sa mère et à l'insu de Saturne son père, auquel Titan, frère
aîné de ce dernier, avait cédé le trône sous condition qu'il n'élèverait pas
d'enfant mâle. Myth.
18, Fallitur. — S. Augustin ajoute que Varron estimait que " là était tout
le secret des politiques et des ministres d'état ». Les choses ne semblent
guère avoir changé depuis : l'homme le plus honnête, le plus courtois dans
la vie privée, perd absolument toute notion de probité et de courtoisie dès
qu'il est mêlé à la politique; de quelque parti qu'il soit, mentir, tromper,
manquer à ses engagements, caser ser créatures, gaspiller les deniers
publics, n'avoir d'autre règle en quoi que ce soit que son intérêt poli-
tique et cela impudemment, sans la moindre vergogne, sont pour lui
une seconde nature; les débutants et les naïfs se transforment rapidement
et inconsciemment de la sorte; et, dès lors, chez eux comme chez tous
autres plus ou moins éhontés ou ayant déjà vécu dans cette atmosphère cela
devient calcul et parti pris.
21, Pbaeton. — Avait obtenu d'Apollon, son père, de conduire le char du
Soleil; mais, l'entreprise étant au-dessus de ses forces, les chevaux mal
dirigés s'emportèrent, la surface de la terre fut embrasée, les eaux des-
séchées, et Jupiter ne put mettre fin à ces désordres qu'en foudroyant l'im-
prudent conducteur.
25, Fer, et. — L'ex. de Bordeaux aj. : auecq Anaxagoras. — Xénopho.n,
Memor., IV, 7, 7; Plutarque, De Plac. phil., II, 20.
26, Dit-il. — Cicéron, De Nat. deor., II, 22.
32, Socrates. — Xénophon, Mém. sur Socr., IV, 7, 2.
34, Polyxnus. — Cicéros, Acad., II, 38.
37, Xenopbon. — Mémoires sur Socrate, IV, 7, 6 et 7.
292,
I, Perscrutent. — Qui recherchent, scrutent; mot forgé par Montaigne,
du latin perscrulari, chercher, rechercher avec soin, examiner à fond.
7, Herbes. — Montaigne semble dire que le soleil ne tue ni les plantes, ni
les herbes; cela se produit dans certaines conditions. Pour ce qui est de la
pierre qui, dit-il, « ne luit point au feu », on rend facilement incandescent
aujourd'hui un caillou avec les hautes températures que l'on obtient avec
le four électrique, et on ne peut pas plus fixer ces foyers de 3000° qu'on
ne peut regarder fixement le soleil.
8, Point. — Ce n'est pas précisément sur les questions de science, au.\-
quelles il était étranger, que la manière de voir de* Socrate offre de l'in-
térêt; toutefois sur ce point particuher, lui et Montaigne sont bien dans
le vrai. Certaines sciences, en effet, qui ont donné tout ce qu'elles pou-
vaient et au.xquelles il n'y a pas d'intérêt réel à s'adonner davantage, sont
encore pratiquées aujourd'hui : telles sont l'astronomie poussée à outrance
et réduite à étudier la topographie de la lune et les taches du soleil, et ces
explorations des régions polaires inabordables actuellement, suffisamment
connues pour qu'on sache qu'il n'y a présentement aucun parti à en tirer.
En citant l'astronomie transcendante, nous n'avons pas entendu y com-
NOTES. LIV, II, CH. XIl. VOL. II, PAG. 292. Fb.b07
prendre la ni«Héorologie, science bien autrement importante, dédaignée de
sa grande sœur et presque encore en enfance.
24, Ordo. — Citation empruntée à la desci-iption du char du Soleil.
29, Platon. — République, X, 3.
'M, Acceptât. — Ces vers, rapportés par le grammairien Valérius Probus,
sont de Varron ; leur reproduction n'est toutefois pas textuelle. — Les cinq
zones dont il est ici question, environnant le monde, sont celles détermi-
nées par les deux cercles polaires arctique et antarctique, et les deux tro-
piques du Cancer et du Capricorne; la bordure qui les traverse oblique-
• ment, c'est le zodiaque avec ses douze constellations. V. N. I, 254 : Aqua.
294,
1, Ainigmatique. — Platon ne dit ni que la nature est une poésie, ni même
(Qu'elle est énigniatique, ce qui néanmoins est de toute vérité; il dit simple-
ment, à propos d'un vers d'Homère dont le sens est difficile à saisir, que
'< toute poésie est, de sa nature, énigniatique ».
9, Descousu. — Timon l'appelle, par iniuve, grand f'oryeur de miracles;
addition de l'ex. de Bord, que l'on a cru devoir insérer dans la traduction.
— Timon est un poète satirique, cité par Diogène Laerce, dans'sa Vie do
Platon.
16, Empruntée. — Sous François II, Montaigne étant encore enfant, les
hommes trouvèrent qu'un gros ventre donnait un air de majesté; les femmes
s'imaginèrent aussitôt qu'il en seraii de même d'un gros derrière : on eut
alors de gros ventres et de gros derrières postiches et cette mode ridicule
• dura trois ou quatre ans. Essais historiques sur Paris, 1757. — Qu'est-ce
autre chose qu'un de ces derrières postiches, généralement dans de fort
modestes proportions, il est vrai, que cet ajustement, du nom de tournure,
dont font usage nos femmes pour faire bouffer leurs robes?
19, Epicycles. — Cercles dont les centres se meuvent sur la circonférence
d'un autre de plus grand diamètre. En faisant décrire aux planètes des
orbites de cette nature, Ptolémée, astronome du n' siècle, expliquait leurs
mouvements et les irrégularités apparentes de ces mouvements.
20, Astrologie. — Du temps de Montaigne, on entendait par là l'astronomie.
22, Subject. — S. Hilaiz^e de Poitiers dit que l'orgueil caché des prétendus
sages les porterait, s'ils le pouvaient, à aller jusque dans le ciel, changer
et corriger les mouvements des astres. — Alphonse, roi de Castille, auquel
le système de Ptolémée déplaisait,' disait qu'il se croyait de taille à donner
de bons conseils à Dieu.
25, Platon. — Dans le Timée.
\M, Rauissement. — Rétrogradation, trépidation, ascension sont autant de
termes empruntés au système astronomique de Ptolémée, qui tenait la
terre comme fixe et en faisait le centre du monde : recuiement, ravissement
y sont ajoutés par plaisanterie.
34, Petit monde. — En grec : microcosme.
39, Ame. — Quelques auteurs ont donné à l'homme deux âmes : l'une ration-
nelle, l'autre sensitive; Platon en compte trois. C. de M.
296,
1, Imaginaire. — Une république, un gouvernement imaginaire.
9, Condonons. — leur concédons; mot francisé, par Montaigne, du latin
condonare, accorder, pardonner, remettre.
21, Pieds. — Platon, qui dans le Théélèle conte ce fait, dit seulement que
Thaïes, marchant les yeux levés vere le ciel pour contempler les astres,
tomba dans un puits, et ne fait nullement intervenir sa servante comme
cause de l'accident. Cela semble avoir fourni à La Fontaine le sujet de sa
fable : « l'Astrologue qui se laisse tomber dans un puits », on il dit :
• Tandis qu'à peine à les pieds tu peux voir,
Penses-tu lire au-dessus de te tête? •
et encore :
Pb.508 ESSAIS DE MONTAIGNE.
« C'est l'image de cpux qui bâillent aux chimères
Ce pendant qu'ils sont en danger,
Soit pour eux, soit pour leurs affaires. »
24, Plagas. — Cette critique présentée par Montaigne, comme émise par
Démocrite et reproduite par Cicéron, émane au contraire de celui-ci et est
dirigée contre le premier. — Dans sa fable (liv. II, fabl. 13) La Fontaine
reproduit cette citation : •• Sans rien voir sur la terre, on se perd dans les
cieux. »
27, Platon. — Dans le Thééléle, là même où il est question de l'accident de
Thaïes.
42, Congé. — Autorisation, permission.
298,
6, Faucée. — Du latin fauces, entrée, avenue, défilé, brèche, pénétration.
— Le sens de la phrase est : « Mais savoir comment une impression
spirituelle peut exercer une action si intense sur la partie matérielle de
l'homme, connaître la nature des rapports et de la connexité de ces ad-
mirables ressorts, jamais homme ne l'a fait. • De nos jours, les médecins,
les physiologistes disent que c'est un effet de sympathie, ce qui signifie
qu'ils n'en savt^nt pas plus, à cet égard, que du temps de Montaigne.
8, Sçeu. — Les éd. ant. aj. : comme dict Salomon.
9, Pline. — Nal. Hist., II. 37.
9, S. Augustin. — De Civ. Dei, XXI, 10.
33, Autre. — L'autorité d'Aristote fut toute-puissante pendant des siècles, au
point qu'en 1624, le parlement de Paris bannit de son ressort trois hommes
qui avaient voulu soutenir publiquement des thèses contre la doctrine de
ce philosophe, et qu'il défendit à toute personne de publier, vendre et
débiter les propositions contenues dans ces thèses à peine de punition
corport^Ue, et d'enseigner aucune maxime contre les anciens auteurs ap-
prouvés, à peine de la vie; qu'en 1629, cette même cour édictait qu'on ne
pouvait choquer les principes de la philosophie d'Aristote, sans manquer à
ceux de la théologie scolastique reçue par l'Église. Bayle.
300,
1, Diogenes. — Diogène d'Apollonie. Sextus Empiricus, Pyrr. hypot., 111, 4.
9, Priuation. — Montaigne énumère ici les principes essentiels que chacun
des philosophes qu'il mentionne avait imaginés pour expliquer le système
du monde : — Platon admettait l'existence de certains types ou modèles
qu'il appelait Idées; — Épicure expliquait tout par le concours fortuit des
Atomes; — Leucippe et Démocrite, par le Vide et les Atomes en nombre
infini doués d'un mouvement éternel; — Thaïes posait comme principe
matériel de toutes choses l'Eau ou l'état liquide, et y ajoutait l'esprit comme
principe moteur; — pour Anaximandre, c'était l'Infini; — pour Diogène
d'Apollonie, c'était l'Air; — pour Pythagore, les Nombres; le monde lui-
même n'était qu'un tout harmonieusement composé; — pour Parménide, il
n'existait qu'un être, unique, immuable, infini ; — Anaxagore estimait qu'à
l'origine, tous les éléments, en nombre infini, étaient confondus, et que
c'est par l'intervention d'une intelligence suprême qu'avait eu lieu la sépa-
ration des éléments hétérogènes et l'assemblage des éléments" similaires. —
Empédocle admettait quatre éléments : le feu, la terre, l'air et l'eau, et
deux causes premières : l'amitié qui les unit, la haine qui les sépare; —
pour Heraclite, il n'existait qu'un principe, le feu, mais un feu pur et subtil,
bien différent de celui que nous voyons; — enfin Aristote, estimant que les
points de vue sous lesquels toute chose peut être envisagée se réduisent
aux éléments dont elle est composée, à sa nature intime ou essence, à sa
cause et au but ou fin vers laquelle elle tend, distinguait quatre principes :
la matière, la forme, la cause efficiente et le principe final, lesquels doivent
se retrouver partout et que la philosophie a pour mission de déterminer.
15, L'escole. — Aristote, dont les éd. ant. mettent le nom.
21, Boule-veuë. — A première vue; comparaison tirée du jeu de boules.
NOTES. LIV. II, CH. XH. VOL. II, PAG. 300. Fb.509
Jouer à boule-vue, c'est agir sur un simple coup d'œil jeté sur le jeu sans
se donner le temps d'apprécier la distance ni de calculer ce qu'il y a de
mieux à faire.
26, Volonté. — « Appartenir à une école, c'est en épouser nécessairement
les préjugés et le parti pris. » Le Bon. Cela est vrai aussi bien en politique
qu'en scolastique.
302,
9, Pbilodoxes. — Platon, Rép., V (vers la fin), les définit ainsi : Gens qui
se remplissent d'opinions dont ils ignorent les fondements, qui s'entêtent de
mots, qui n'aiment et ne voient que les apparences des choses.
15, Philosophique. — 11 ne saurait cependant^à de semblables propos, être
fait de réponses plus probantes.
40, Essais. — C'est aller un peu loin que de vouloir d'un philosophe qu'il
connaisse le pourquoi et le comment de toutes choses; il observe, cherche
à se rendre compte de tout, mais ne saurait être tenu d'en donner, quand
même, une explication.
304,
15, L'aimant. — Diogène Laerce, I, 24. — Combien aujourd'hui avec ce que
nous connaissons de l'électricité, qui n'est du reste qu'une forme particulière
du magnétisme ou aimantation, s'affermirait en eux cette idée, bien moins
singulière à la réflexion qu'elle ne semble de prime abord.
22, Dicœarchus. — C.-à-d. la rais n humaine a appris à Cratès et à Dicéar-
que qu'il n'y avait absolument point d'àme et que le corps s'ébranlait, etc.
Sextus Empiricus, Pyrr. hypot., II, 5; Cicéron, T'use, I, 10.
24, Platon. — Lois, X.
25, Repos. — Thaïes ajoutait : -• et qui se meut de soi-même ». Plutarque,
De Plac. pfiil., IV, 2; là, se trouve également rapportée l'opinion d'As-
clépiade.
27, Parmenides. — Macrobe, in Somn. Scip., I, 14.
27, Empedocles. — Cicérox, T'use, I, 9.
27, Sang. — Certains font dériver le mot latin anima, âme, du grec alfia,
qui signifie sang.
29, Posidonius. — Diogène Laerce, VIII, 156.
30, Chaleureuse. — Galien, tout en admettant cette idée, déclare qu'en fin
de compte il n'ose rien affirmer sur la nature de l'âme.
32, Hippocrates. — Macrobe, in Somn. Scip., I, 14.
32. Varro. — Lactance, De Opif. Dei, 17.
35, Elemens. — Suivant Zenon, l'âme est du feu; et cette idée qu'elle est la
quintessence des quatre éléments que lui attribue Montaigne, est d'Aristote
qui, au dire de notre auteur, quelques lignes plus loin, se serait tu sur sa
nature. Cicéron, Tusc, I, 10.
35, Ponticus. — Stobée, Eclog. phys., I, 40.
35, Xenocrates. — Macrobe, in Somn. Scip., I, 14.
40, Aristote. — S.-ent. qui définit l'âme.
. 41, Entelechie. —Mot grec signifiant « la perfection ». Cicéron, Tusc, I, 10.
306,
2, Lactance — De Opif. Dei, 47, au commencement.
3, Seneque. — Nat. quaest., VII, 14.
6, S. Bernard. — Lib. de anima, 1.
8, Heraclitus — Diogène Laerce, IX, 7.
11, Essence — Qu'est-ce que l'âme? disons-nous à notre tour. C'est le prin-
cipe lie la vie, ou encore, d'après nos dictionnaires, l'ensemble des facultés
morales et intellectuelles de ce qui a vie. Mais ce ne Sont là que des effets et
ils n'en expliquent pas la production. De fait, nous nous trouvons en pré-
sence d'un de ces infinis problèmes que notre intelligence n'arrive pas à ré-
soudre, et si nous tentons de l'élucider, il nous faut, comme en tant d'autres
choses, déduire l'inconnu du connu. Or les manifestations de l'âme ne pren-
nent naissance en nous que peu à peu; au début de l'existence, rien n'ap-
paraît ; c'est ensuite l'instinct, c'est-à-dire une action irréfléchie, qui se montre
Fb.tilO ESSAIS DE MONTAIGNE.
seul; puis, en germe, chez l'homme, du moins, parce que son organisme le
comporte, tout ce qui compose l'âme telle que nous la concevons dans l'être
humain : la notion du bien et du mal, les vertus et les vices, toutes les
qualités bonnes ou mauvaises, les affections, les répulsions ainsi que la
volonté, la mémoire, l'intelligence, la raison, la rénexion qui les mettront
en œuvre, variables chez chaque individu suivant la conformation de son
cerveau, qui est l'organe qui en est le point de départ et dont un rien
congénital ou accidentel suffit à différencier toute la vie durant ou momen-
tanément l'homme de génie de l'imbécilo, le fou du sage, le criminel de
l'honnête homme, ce que du reste le bon sens populaire rend si exactement
quand il dit de quelqu'un qui n'est pas comme tout le monde, qu'il lui
manque une case; et cet ensemble grandissant ensuite peu à peu, s'épa-
nouissant au fur et à mesure que le corps lui-même se développe; et, chez
tous, reposant quand il repose, s'oblitérant plus ou moins quand il est
malade, mourant quand il meurt, l'abandonnant la plupart du temps
partiellement avant même que la vie n'ait pris fin, dès que la désagréga-
tion commence. — Qu'en conclure, sinon que l'àme est essentiellement
fonction de l'être, qu'elle ne fait qu'un avec lui, qu'elle est une conséquence
de son organisation à laquelle elle ne survit pas? Pas plus que lui elle ne
vient du néant, ni n'y retourne, mais, comme lui, elle se forme et se trans-
forme, telles l'électricité, la chaleur, la lumière qui partout, à l'état latent,
apparaissent ou disparaissent suivant que les éléments d'où elles naissent
sont dans telles ou telles conditions ; tel encore par exemple le fer qui, dans
le minerai, échappe à notre vue et dont certaines transformations le dé-
gagent, que certaines préparations assimilent aux êtres animés, aux végé-
taux, que la rouille réduit en poussière et rend à la terre, où ses molécules
impalpables, sans jamais cesser d'exister, demeurent susceptibles de parti-
ciper à tout, sans jamais redevenir elles-mêmes ; ainsi l'âme qui, en nous,
naît dans des conditions données, se transforme avec ces conditions; et
quand celles-ci cessent d'exister, elle se désagrège et ses éléments retour-
nent se confondre avec l'universalité des choses, où de toute éternité là
aussi tout est dans tout, à l'état embryonnaire.
12, Heropbilus. — Plutarqce, Des Opiv. des phil., IV, 5.
13, Aristote. — Sextus Empiricls, Adv. Mathem.
20, Stoïciens. — Plutarqle, Des Opin. des phil.. IV, 5.
20, Erasistratus. — Id., ibid.
21, Empedocles. — Id., ibid.
22, Moyse. — Genèse, IX, 4; LéviL, VII, 26; Dealer., XII, 23: etc.
24, Strato. — Plutarque, Des Opin. des phil., IV, 5.
30, Cbrysippus. — Galien, De Plac. Hipp. et Plat., II, 2.
39, Stoïciens. — Sénèque, Epist. 57.
42, Trapelle. — Souricière, de l'italien (rappela, qui a même signification.
308,
8, Plutarque. — Thésée, préambule.
8, Chartes. — Cartes géographiques; du latin charla, feuille de itapier.
8, Orée. — Bord, extrémité; du latin ora qui a même sens.
14, Bestise. — Pascal a dit aussi eç parlant de l'homme : « Trop et trop
peu d'instruction l'abêtissent. » Et, en un autre passage : « Les sciences
ont deux extrémités qui se joignent : la première est la pure ignorance
naturelle où se trouvent tous les hommes en naissant; l'autre est celle
où atteignent les grandes âmes qui, ayant parcouru tout ce que les
hommes peuvent savoir, trouvent qu'ils ne savent rien et se rencontrent
dans cette même ignorance, d'où ils sont partis. »
19, Platon. — Plaisanterie que l'on attribue à Diogène le Cj-nique, et à
lax]uelle il fut répondu en ajoutant à la définition déjà donnée « et à larges
ongles ». Diogène L.ierce, IV, 40.
35, Iliade. — Cicéron, De Nat. deor., Il, 37.
36, Zenon. — Id., ibid., III. 9.
38, Cotta. — Jd.,ibid., II, 12.
NOTES. IJV. H, CM. XII. VOL. II, PAG. 310. Pb.Sli
310.
0, Sectes. — Les éd. ant. aj. : comme il s'en voit infinis chez Plutarque
contre les Epicuriens et Stoïciens : et en Seneqtie contre les Peripateticiens.
8, Montre. — Un échantillon.
17, Lasches. — Les éd. ant. aj. : combien de fois leur coyons-nous dire les
choses diuerses et contraires?
18, Ailleurs. — Dans le premier Alcibiade. C'est Socrate qui, par ses ar-
guments, réduit Alcibiade à le dirr.
32, Inconstante. — « Montaigne sut ramener sur le territoire de la philo-
soplùe le bon sens qui en avait été si longtemps exilé. » Déuerande.
312,
17, Fortuit. — C.-à-d. je me suis trouvé philosophe sans l'avoir cherche'
et tout à. fait par hasard.
18, Ame. — Les éd. ant. aj. : {car i'ai choisi ce seul exemple pour le plus
commode à tesmoigner nostre f'oiblesse'et vanité). — L'analyse qui suit de
la doctrine de Platon est prise dans la seconde partie du Timée, ou sim-
plement de DiOGÈNE Laerce, 111, 67.
24, Ratiocine. — Raisonne; du latin ratiocinari qui signifie la même chose.
81, Inconuenient. — Aussi n'est-il pas étrange, extraordinaire.
•12, Vniuerselle. — L'empereur Julien pensait ainsi. Payen.
314,
ti, Locum. — Delille a donné de cette citation la traduction ci-après :
• Dieu remplit, disent-ils, le ciel, la terre et l'onde ;
Dieu circule partout, et son âme féconde
A tous les animaux prête un souffle léger;
Aucun ne doit périr, mais tous doivent changer,
Et, retournant aux cieux, en globes de lumière.
Vont rejoindre leur être à la masse première. »
28, Touche. — Plutarque, Pourquoi la justice div., etc., 19.
30, Recordation. — Souvenir; mot francisé par Montaigne, du latin re-
cordaiio qui a cette même signification.
37, Sçauantes. — Add. des éd. ant. : et pleines de suffisance.
41, Sçauoir. — Add. des éd. ant. : de cette prudence eLsapience.
42, Platon. — Dans le Phédon.
316,
15, Nous. — Vivants.
31, Futurs. — Autant de mauvaises actions on aurait commises, autant de
personnes on aurait lésées de la sorte, seraient d'après Platon, République,
X, punies d'une peine de dix ans chacune, jusqu'à concurrence de dix
fois, soit cent ans, durée de la vie humaine.
33, Temporelles. ~ Origène, d'après saint Augustin, rejetait l'éternité des
peines.
36. Receue. — Add. des éd. ant. : aux siècles anciens.
318,
12, Desmue. — Tirée hors de, déplacée, détournée; participe passé de des-
mouvoir, qui vient du latin dimovere, dont c'est la signification.
43, Philosophe. — Ils ne remédient pas au cas où, par accident, chez un
philosophe...
320,
12, LWsage. -- Var. des éd. ant. : le goust.
28, Decidere. — Montaigne a traduit cette citation avant de la transcrire.
38, Aristote. — Mctaphys., II, 1.
43, Syrius. — De Syros. Cicéron, Tusq^., I, 16. — Le texte latin porte TuUius.
322,
11, Gloire. — Les éd. ant. aj. : et de la réputation. .
13, Platon. — Lois, X, 13.
20, Estançonner. — Appuyer, étayer; s'estançonner par ses inventions,
c'est assurer, renforcer son existence par ses propres imaginations.
Pb.5d2 ESSAIS DE MONTAIGNE.
324,
7, Nemrotb. — Il semble que la pyramide dont il est ici question soit celle
qui existait à Barsippe en Chaidée, pyramide quadrangulaire à gradins,
demeurée inachevée de temps immémorial et que les Chaldéens identi-
liaient avec la tour de Babel.
24, Raison. — Car cela ne nous a été nullement appris par la nature, non
plus que par la raison.
24, Retentera. — Essayer, éprouver de nouveau; du latin retentare, tenter
derechef.
29, Stoïcien. — Sénèque.
326,
1, Nous. — L'ex. de Bordeaux aj. : en diuers lieux; add. dont il a été
tenu compte dans la traduction; cette croyance existe en effet en Perse,
en Hindoustan et ailleurs.
2, Pytbagoras. — La métempsycose, que Lucrèce appelle un officieux
mensonge qui délivre des frayeurs de la mort et rassure l'esprit en lui
donnant l'espérance de renaître dans un autre corps.
7, Maison. — Les éd. ant. ajout. : Socrate, Platon et quasi tous ceux qui
ont voulu croire l'immortalité des «mes, se sont laissez emporter à cette
inuention, et plusieurs nations, comme entr'autres la noslre et nos Druides.
— Ces derniers mots : et nos Druida manquent dans l'éd. de 1588.
10, Ans. — Montaigne a déjà traité ce sujet et cite (vol. II, pag. 106) un
passage d'OvioE à ce propos. — D'après Hékaclide de Pont, Pythagore
racontait avoir été Éthaiide que l'on disait fils de Mercure; et ce Dieu
lui ayant promis de lui accorder tout ce qu'il voudrait, excepté l'immor-
talité, il lui avait demandé à conserver pendant sa vie et après sa mort,
la mémoire de tout ce qui lui arriverait; c'est pourquoi il était à même
d'affirmer être passé dans le corps d'Euphorbe après avoir été Éthaiide;
être ensuite devenu Ilermoline; puis Pyrrhus, un pêcheur de Déios, et
enfin Pythagore. D'autre part, Euphorbe, blessé par Ménélas au siège de
Troie, déclarait avoir été Éthaiide et prétendait se rappeler par quelles
plantes, dans quels animaux son âme avait successivement passé depuis
qu'il avait cessé d'être Éthaiide, ce qu'elle avait éprouvé aux enfers et ce
qu'il avait vu éprouver aux autres. Hermotine disait avoir été Euphorbe
et, pour le prouver, avait été au temple d'Apollon et avait montré son
bouclier que Ménélas, après l'en avoir dépouillé, avait consacré à ce Dieu,
à son retour de Troie. Pyrrhus, le pêcheur de Délos, se souvenait d'avoir
été Éthaiide, Euphorbe, Hermotine ; et Pythagore avait conservé les mêmes
souvenirs, en y ajoutant celui de Pyrrhus. — V. également DioGf:.NE Laerce,
VIll, 4, 5.
16, Recite. — De quelques faiseurs d'horoscope, dit S. Augustin, De Civ.
Dei, XXII, 28.
18, Cbrysippus. — Lactance, Div. instil., VU, 23.
19, Platon. — Dans le Ménon.
21, Ailleurs. — Platon, dans le Timée.
328,
17, Dit-il. — Romulus, 14.
28, Socrates. — Ce sont là deux des opuscules des œuvres morales de
Plutarque, intitulés, l'un, « De la face qui apparaît dedans le rond de la
lune •; l'autre, « Du démon de Socrate ».
330,
3, Physicien. — V. N. II, 290 : Physiciens.
4, Disait. — Diogène Laerce, II, 17.
6, Dit. — Pi.utarque, Des Opin. des phil., V, 3. Les citations qui suivent
sont tirées de ce même chapitre.
19, Democritus. .— • Plutarque, Des Opin. des phil., V, 5, dit expressément
que Démocrite était d'une opinion contraire, mais que Zenon et Aristote
étaient tous deux de cet avis sur ce point.
28, Moys. — Ceci porte à croire que la mère de Montaigne était, ou croyait
NOTES. LIV. H, Cil. XII. VOL. Il, PAG. 330. Fb.513
être accouchôe de lui au onzième mois de sa grossesse. En ce qui me touche,
la conception d'une de mes petites-filles m'a été J».nnoncée par ses parents
un premier janvier, et, sous la direction d'un médecin des hôpitaux de
Paris, la mère, qui a ressenti successivement tout ce que la femme éprouve
en pareil cas, a pris les précautions d'usage, et l'enfant n'est venu au
monde que le vingt-deux décembre, sans que rien d'anormal, sauf sa
durée, se soit produit dans la gestation. — En pareille matière, rien n'est
moins certain que la supputation du temps, la question n'a jamais été
complètement décidée pour l'espèce humaine, et les observations faites
sur les animaux prouvent qu'il y a chez eux de grands écarts (Cuvier).
D'après la loi française, l'enfant qui vient au monde avant l'expiration
du 300° jour (dix mois) après la mort du mari est seul réputé légitime;
Plixe, chez les anciens, admettait onze mois; Rabelais également, qui cite
de nombreux auteurs à l'appui de son dire.
37. Protagoras. — Sextus Empiricls, Adv. Math.
332,
6, Thaïes. — Diogène Laerce, I, 36.
8, Vous. — La personne à laquelle ce chapitre est dédié, et qu'ainsi qu'il a
été dit plus haut, on pense être Marguerite de France, fille de Henri II,
reine de Navarre, à la demande de laquelle cette apologie de Sebond aurait
été écrite.
9, Corps. — De m'étendre si longuement sur un même sujet.
16, Reseruément. — De ce passage on peut conclure que Montaigne est
d'avis que, dans les disputes philosophiques en général, et en particulier
dans celles où la religion est intéressée, il ne faut invoquer l'incertitude
de nos connaissances, se réfugier dans le doute et, en matière religieuse,
admettre la tradition, que lorsque, pressé de toutes parts, on n'a plus
aucune bonne raison à alléguer en faveur de son opinion.
21, Deux. — HÉRODOTE, III, 78. — En 522, lore de la conjuration qui donna
le trône à Darius (V. N. III, 324 : Perse). Gobrias, un des conjurés, avait
saisi l'usurpateur par le corps et luttait avec lui dans l'obscurité, quand,
de crainte de voir son adversaire lui échapper, il dit à Darius, son complice,
de frapper sans souci de l'atteindre lui-même.
26, Impatiens. — Ne pouvant supporter.
33, Mie. — Pas, nullement.
38, Attrempance. — Mesure, réserve gardée dans ce qu'on fait et dans ce
qu'on dit.
334,
3, Plaist. — Ceci confirme ce que l'on suppose de la dédicace de ce chapitre
à Marguerite de France (N. II, 332 : Vous), en raison de son rang, de son
érudition et aussi de ce qu'elle était une des plus belles personnes de son
temps.
6, Fantasie. — Add. des éd. ant. : et qui se fut seruy à faire son amas,
d'autres que de noslre Plutarque.
7, Epicurus. — Plutarque, Contre Colotès, 27.
9, Platon. — Lois, IX.
28, Outrageux. — L'éd. de 1588 port. : dangereux:.
35, Effrénée. — Les éd. ant. port. : iugemenl à cette liberté desreglée, au lieu
de : •< vol... effrénée ».
336,
' 14, Vsage. — On ne plaide plus, on ne discute pas pour savoir si cette mon-
naie est de bon ou de mauvais aloi», mais seulement si elle est d'usage, si
elle passe ou ne passe pas.
16, Liaisons. — Nouement d'éguillettes. V. N. I, 136 : Liaisons.
17, Domitications. — Du latin domus, maison, et facere, faire. Terme d'as-
trologie signifiant le partage du ciel en douze zones, en vue de tirer l'ho-
roscope de quelqu'un.
18, Pbilosopbale. — Substance à la recherche de laquelle s'adonnaient les
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 33
Fb.SU ESSAIS DE MONTAIGNE.
alchimistes «t à laquelle on prêtait la propriété de transformer en or tous
les métaux.
23, Vif aie. — Mensale, vitale, etc., sont des termes de chiromancie (art de
prédire la destinée par l'inspection de la main) : la mensale est la ligne qui
à l'intérieur de la main va de dessous le petit doigt vers l'index; la vitale,
celle qui du milieu du poignet va aboutir entre le pouce et l'index; la
moyenne naturelle, celle qui a son point de départ entre le pouce et l'index
et aboutit entre le poignet et le petit doigt; au centi-e de la main est le
triangle sur lequel Mars a action; l'enseigneur, c'est l'index; les tubercles,
appelés monts, sont les proéminences formées par la dernière phalange de
chaque doigt. Chacune est plus spécialement soumise à l'action d'un dieu
ou d'une déesse et son plus ou moins de saillie accuse, plus ou moins
accentués chez l'individu, la qualité ou le vice auxquels préside cette di-
vinité.
338.
y, Lescbant. — Add. de 80 : e< formant.
33, D'accord. — Add. des éd. aut. : s'ils ne le sont meshuy après tant de
siècles !
340,
1, lugement. — Les académiciens admettaient quelques modifications à ce
jugement sur notre complète ignorance.
5, Spbere. — Eudoxe estimait le monde formé de sphères concentriques
dont la terre était le centre et dans chacune desquelles se mouvaient dans
l'ordre suivant, d'après leur éloignement de la terre : la Lune, le Soleil,
Mercure, Vénus, Mars, Jupiter, Saturne; une huitième sphère comprenait
les mouvements de tous les autres astres, système qui fut adopté par Platon
et par Aristote.
10, Plus vray-semblables. — Var. des éd. ant. : beaucoup plus véritable et
plus ferme.
15, Vray semblable. — Logique. Montaigne veut dire que l'opinion des pyr-
rhoniens est plus liée, se soutient mieux que celle des Académiciens.
27, Pas. — Add. des éd. ant. : le corps et.
:30, Vanter. — Jouer, aller au gré du vent.
342,
8, L'autre. — Add. des éd. ant. : car la vérité n'est iamais qu'vne.
344,
19, Pas. — Sous-entendu : habiter, tenir; ellipse analogue à celle que pré-
sente cette locution : « Il n'en peut plus ...
3.Ô, Sappbo. — Les anciens sont unanimes pour admirer la verve et le feu
qui brillaient dans ses vers; on la surnommait la dixième muse; il ne
nous reste d'elle que quelques fragments. Se confond souvent avec une
autre Sapho, également lesbienne, courtisane célèbre qui vécut plus tard.
36 Cleomenes. — Plutarque, Apophfh. des Lacédémoniens.
346,
1, fortuna. — Add. des éd. ant. et de l'ex. de Bordeaux : qu'il iouysse de
ce bon heur (traduction de la citation qui précède).
7, Part là. — Le code criminel, établi lors de la refonte de nos codes, après
la première révolution, était très dur et très rigoureux, et était tel, disait-on,
parce qu'il avait été rédigé par Treilhard (1742 à 1810) alors tourmenté de
la gravelle.
7, Aréopage. —Ce tribunal était composé de 31 membres; on n'y tolérait
aucun artifice oratoire susceptible d'émouvoir ou d'attendrir les juges:
longtemps il jouit d'une immense réputation de sagesse et d'impartialité;
il siégeait de nuit comme l'indique Montaigne et rendait son jugement
séance tenante, nul procès à Athènes ne pouvant durer plus d'un jour.
15, Tourneuirent. — Le tournent et le virent en tous sens.
21, Vie. — Un dicton latin résume ain.si l'existence humaine : « .Vasci, pati, ■
mort (nailre, souffrir, mourir). ->
NOTES. I.IV. II, OH. XII. VOL. II, P.\(;. US. Pb.ol!)
348,
14, Homme. — Montaigne dit ailleurs (III, 186) : « le croy Platon de bon
cœur, qui dit les humeurs faciles ou difficiles, ostre vn grand preiudice à
la bonté ou maunaistié de l'ame. »
•21, Moy. — Add. de 88 : sans le congé du iugement.
"26, Viver. — Add. des éd. ant. : en cent visages.
42, Comme moy. — Var. de l'éd. de 88 : bien.
350,
7, Foi^maliser. — Pour y conformer son esprit, son jugement, son attention.
31, Cupiditez. — Passions.
32, Tbemistocles. — Prit part à la bataille de Marathon (490) et porta un
coup mortel à la flotte de Xerxès par la victoire de Salamine (486) ; exilé
par suite des intrigues de Sparte, il se réfugia chez les Perses et s'empoi-
sonna pour n'être pas obligé de porter les armes contre la Grèce.
32, Demostbenes. — Ce [)rince de la parole n'acquit son grand talent ora-
toire que grâce à un travail long et opiniàti-e; son style était pur et concis;
son éloquence, éminemment persuasive, était absolument dépouillée d'arti-
fice. Pendant quinze ans il s'employa tout entier contre Philippe de Macé-
doine qui voulait asservir sa patrie, et prononça contre lui ses immortelles
Philippiques et Olynthicnnes; il assista à la bataille de Chéronée (388);
après la mort d'Alexandre, il mit son éloquence au service des Grecs
confédérés, et s'empoisonna pour échapper à Antipater.
38, Clémence. — Var. de l'éd. de 80 : libéralité et à la iuslice.
352,
9, Vertueuses. — Add. des éd. ant. : Au moins cecy ne sçauons nous qiw
trop, que les passions produisent infinies et perpétuelles mutations en nostre
ame et la tyrannisent merueilleusemenl. Le iugement d'vn homme courrouce
ou de celuy qui est en crainte, esH-ce le iugement qu'il aura lantost quand il
sera rassis?
18, Trouble. — Var. des éd. ant. : desreglement et de la cécité?
19, Maladie. — Var. des éd. ant. : fauceté.
20, Perturbation. — Var. des éd. ant. : l'erreur.
20, La témérité. — Var. des éd. ant. : le mensonge.
2Ô, Insensez. — Platon, Phèdre.
28, Sommeil. — Cicéron, De Divinat., 1, 57.
31, Apporte. — Par son anéantissement (l'anéantissement de la raison), causé
par la fureur ou le sommeil, image de la mort, nous devenons...
•40, Pas. — La philosophie.
354,
5, Infiable. — Infidèle, peu digne de foi.
13, Souffre. — « Le premier soupir de l'amour est le dernier de la sagesse. »
22, Planir. — Diminuer et s'aplanir.
39, Volubilité. — Add. des éd. ant. : et imperfection.
40, Constance. — Add. des éd. ant. : et fermeté.
356,
7, Entier. — Var. de 1588 : pur et entier, au lieu de : •< entier ■ .
19, Nicetas. — Cickron, Acad., Il, 39, où suivant l'édition on lit Nicétas ou
Hicétas.
19, Syracusien. — Var. des éd. ant. : il y a enuiron 18. cens ans que quel-
qu'vn, au lieu de : " Cleanthe... Syracusien ».
21, Aixieu. — V. N. I, 254 : Aqua. -* Cette constatation semble due au.x
Assyriens, desquels l'auraient tenue Pythagore et son école, mais contre
laquelle s'éleva Aristote. Pour cette théorie, Cleanthe, au dire de Pll-
T.AUQUE, De la Face de la Lune, 4, sur la dénonciation d'Aristarque, qui
demandait qu'il fût poursuivi comme blasphémateur, faillit avoir le sort
qui, vingt siècles après, menaça Cxalilée pour avoir soutenu cette même
thèse alors que déjà deux cents ans auparavant elle avait été rééditée pai-
Copernic. Celui-ci admettant en effet le double mouvement de la terre sur
elle-même, mouvement s'affectuant suivant im plan (celui de l'écliptique)
Fb.516 ESSAIS DE MONTAIGNE.
incliné par rapport à la ligne des pôles, établit sur ce principe le système
planétaire qui porte son nom et qui a renversé celui de Ptolémée admis
jusqu'alors. — Certains toutefois estiment, en ce qui concerne Cléanthe,
qu'une erreur a dû être commise dans la transcription du texte de Plu-
tarque et que les rôles \' sont inversés: d'après eux ce serait Aristarque
qui affirmait le mouvement de la terre et Cléanthe qui lui en faisait un
crime.
24, JVe nous... deux. — Var. des éd. ant. : n'y a guiere d'asseurance, ny en Vvn
ny en Vautre.
34, Vogue. — Var. des éd. ant. : crédit et aidhorilé.
35, Précédentes. — Les Essais venaient à peine de paraître, quand s'est pro-
duite cette tierce opinion, émise par Tycho-Brahé (1546 à 1601), dont le
système en progrès sur celui de Copernic, modifié par Kepler (1571 à 1631)
que lui-même avait formé, et confirmé par Newton (1642 à 1727), est la base
de l'astronomie moderne.
37, Introduicts. — V. au sujet de ces principes N. Il, 300 : Priuation. —
Les éd. ant. aj. : de matière, forme et priuation.
39, Lettres. — S.»ent. de crédit.
43, Boute-hors. — D'être déboutés, jetés dehors.
43, Beuanciers. — « Y a-t-il une chose, dit l'Ecclésiaste, dont on puisse
dire ; c'est du nouveau? Non, cette chose a déjà été dans les siècles qui
furent avant nous; on ne se souvient plus des choses d'autrefois, de même
on ne se souviendra plus des choses à venir, parmi ceux qui viendront
plus tard. » Ceci, qui était déjà vrai du temps de Salomon, l'est probable-
ment encore aujourd'hui; car nul ne peut assurer que notre civilisation
ne disparaîtra pas comme d'autres qui l'ont précédée; et des hommes,
dans la suite des siècles, découvriront encore ce que nous avons découvert
avant eux et croiront que c'est du nouveau (Harduin).
358,
36, Toucher. — Telles sont en effet l'hyperbole et ses asymptotes : la pre-
mière ligne courbe, de la nature de celles que l'on obtient en sectionnant
un cône par un plan oblique à son axe, les secondes, lignes droites en
corrélation particulière avec la première, si bien que toutes trois prolon-
gées indéfiniment, les asymptotes vont approchant toujours de plus *en
plus J'hyperbole sans, comme l'indique leur nom, jamais la rencontrer,
quoique sises dans le même plan. I\lais leur découverte est bien antérieure
à Jacques Peltier ; on en trouve mention dans Apollonius, géomètre grec
du IIP siècle.
39, Combattre. — Add. des éd. ant. : et ruiner.
360,
7, Antipodes. — L'existence des antipodes a été fort controversée dans
les temps passés : les philosophes anciens ne les admettaient pas ; l'Église
primitive pas davantage. Lactance dit à cet égard : « Quel est l'homme
assez insensé, pour croire qu'il y a des hommes dont les pieds sont plus
élevés que la tête? S. Augustin abondait dans le même sens, parce que,
disait-il, « les antipodes seraient au delà de la mer et que la mer est intra-
versable ». Cette idée des antipodes, émise par Virgile prêtre, depuis fait
évêque et canonisé, fut même qualifiée d'hérésie par le pape Zacharie,
comme admettant, sous la terre, une autre terre, un autre soleil, une
autre lune et des habitants sur cette autre terre, ne descendant pas
d'Adam.
13, Sçauojr mon. — Il reste à savoii-.
15, Bisent. — Add. de 88 : Aristote dict que toutes les opinions humaines ont
esté par le passé et seront à Vaduenir, infinies autresfois. Platon qu'elles
ont à renouueller et reuenir en estre après trente six mille ans.
17, Platon. — Dans le dialogue intitulé la Politique.
20, Hérodote. — Liv. II, 142, 143, etc.
28, Salomon. — « Ce qui a été, est encore; ce qui doit être, a déjà été:
Dieu rappelle ce qui est passé. ^ Ecclésiaste, III, 15. — Outre qu'il bâtit
NOTES. LIV. Il, CH. XII. VOL. II, PAG. 360. Fb.317
le temple de Jérusalem et les murailles de cette ville, Saloraon possédait
un savoir immense; on lui attribue plusieurs des livres saints : les Pro-
verbes, le Cantique des Cantiques, l'Ecclésiaste.
28, Isaïe. — « Je m'en vais créer de nouveaux cieux, une terre nouvelle, et
tout ce qui a été auparavant s'effacera de la mémoire. » Isaie, LXV, 17.
Nombre des prophéties d'Isaïe nous sont parvenues; elles se distinguent
par la sublimité des idées, l'énergie des tableaux et le style qui est d'une
véhémence extraordinaire; on admire surtout le cantique sur la ruine de
Babylone.
;J1, Changement. — Rien ne se fait avec rien, donc l'univers n'a pas eu de
commencement; rien ne se perd, tout se transforme, donc il ne prendra
jamais fin. Ce dernier principe, nous en voyons par nous-mêmes l'action
incessante en ce qui touche les choses de la terre; il n'est pas moins vrai
en ce qui concerne les astres. Ceux-ci, en raison de la loi de la gravita-
tion universelle, dont la réalité est vérifiée par le mouvement des corps
célestes qu'elle explique jusque dans leurs anomalies apparentes qu'elle
arrive h prévoir, ne peuvent résister éternellement à la désagrégation,
ni se désagréger sans que leurs débris aillent, à travers les espaces, s'ag-
glomérer à la longue à d'autres existants.
32, Escholes. — Celle de Platon.
39, Derrière. — Cette théorie du monde, de la terre, etc.. pourvus d'une
âme en même temps que d'un corps, et ayant des mouvements propres,
aurait été émise .par l'école de Pythagorc; d'autres la trouvent en germe
dans certains passages du Timée de Platon. Corpet.
39, Heraclitus. — Di0Gh:NE Laerce, IX, 8.
362,
2, Mère. — On estime que cette lettre n'est pas d'Alexandre le Grand, mais
d'un Alexandre, écrivain grec du r' siècle. S. Augustin, qui la relate,
semble avoir fait confusion.
5, Cicero. — De Divinat., I, 19.
5, Diodorus. — Liv. III, 31.
7, Pline. — Nat. Hist., XXX, 1.
7, Zoroastre. — Sa doctrine, qui constituait la religion des mages et pré-
dominait en Perse avant que cette contrée ne devînt musulmane, est con-
signée dans le Zend Avesta. Elle admettait deux principes opposés, au-dessus
desquels s'élève un Dieu suprême; elle prescrivait le culte du feu, réglait
la vie publique comme la vie privée, annonçait des peines et des récom-
penses après la mort; c'est en somme un dieu unique, l'immortalité de
l'âme et le jugement dernier. On ignore si Zoroastre a réellement vécu,
ou si on a simplement rattaché à ce nom les traditions de cette religion
des mages qui dominait dans le centre de l'Asie du XIII« au vi' siècle.
8, Dit. — Dans le Timée.
11, Sais. — 11 y existait un temple d'isis, où se lisait cette inscription :
« Je suis ce qui a été, ce qui est, ce qui sera, et nul n'a encore soulevé
le voile qui me couvre. »
16, Exemples. — Montaigne entasse ici, comme il l'a déjà fait précédem-
ment, sans les avoir contrôlés, nombre de récits relatés dans les premiers
ouvrages écrits par les Espagnols, après la conquête de l'Amérique, où
l'ignorance et la prévention se sont donné beau jeu et dont l'exactitude
est plus que douteuse.
. 29, Crédit. — Pierre Meslie, Diverses ^eçons, 1, 3, établit que le signe de la
croix était pratiqué et estimé en certaines contrées de l'ancien monde,
bien avant que N.-S. Jésus-Christ ne fût crucifié.
30, S. André. — Croix dont les deux branches sont de même longueur et
ne se coupent pas à angle droit. C'est sur une croix de cette nature, par
suite les jambes écartées à l'égal des bras, que S. André fut crucifié, d'où
son nom; c'est également sur une croix de cette espèce, au lieu de roue,
que souvent l'on plaçait les grands criminels condamnés à être roués, les
y clouant et leur rompant ensuite bras et jambes.
ï'b.518 ESSAIS DE MONTAIGNE.
364,
22, Liberté. — Tacite en dit autant des Germains.
24, Figures. — Dans le genre de l'écriture hiéroglyphique, ou encore de
la langue chinoise. Cette langue, remarquable par son originalité, son an-
tiquité, son immutabilité, son extension dans les contrées les plus peu-
plées de l'Asie, est, de toutes les langues anciennes, non seulement la
seule qui soit encore parlée de nos joure, mais la plus usitée des langues
actuelles. — La langue écrite n'est pas alphabétique; c'est la réunion d'une
immense quantité de caractères plus ou moins compliqués, dont chacun
exprime un mot, représente une idée ou un objet. Les caractères primi-
tifs, qui sont des signes ou plutôt des dessins grotesques, sont au nombre
de 214. 11 y a quelques caractères pour le ciel, l'homme, les parties du
corps, les animaux, les métaux, les plantes, etc. Ces caractères primitifs
ont servi à former une innombrable quantité de signes, composés le plus
souvent arbitrairement, mais qui offrent quelquefois des symboles in-
génieux, des définitions vives et pittoresques, des énigmes d'autant plus
intéressantes qu'on en a perdu la clef. Les notions abstraites furent très
difficiles à exprimer : la colère est peinte par un cœur surmonté du signe
de l'esclavage; une main tenant le symbole de milieu, désigne l'historien,
dont le devoir est de n'incliner d'aucun côté; le caractère de la rectitude
indique le. gouvernement; deux images de perles (il est si difficile d'en
trouver deux bien appareillées) désignent un ami; d'autres mots ont des
compositions tout arbitraires, mais un grand nombre sont intéressants
à analjser; beaucoup d'allusions et de traits piquants sont perdus, les
étymologies ne se retrouvent pas toujours, mais bien certainement les
Chinois se sont peints dans leur langue. — On traçait primitivement les
signes avec une pointe métallique sur un bambou; mais trois siècles avant
J.-C, on découvrit l'art de faire du papier et de l'encre, et le pinceau
remplaça le poinçon. On écrit les caractères en lignes verticales en com-
mençant par la droite et allant vers la gauche. Il y a aujourd'hui 30 à
40.0(X) cai-actères, mais les deux tiers seuls sont usités, et, en retranchant
les synonymes, on trouve que la connaissance de 5 à <jOO caractères suffit
à comprendre les textes originaux. — La langue parlée est composée d'un
nombre Hmité d'intonations monosyllabiques, 450 environ, qui, par la
variation subtile des accents, se multiplient jusqu'à 1.600 environ; elle
serait très facile (G" Niox).
30, Aspergez. — Goupillons; le mot aspergez, qui vient de ce à quoi sert
la chose, existe encore â l'état de substantif, mais est peu usité.
366,
10, Deffubler. — Découvrir, dégager, ôter un affublement.
25, Poste. — A son gré; c'est une expression italienne : a sua posta.
27, Main. — Nous sommes à même de nous rendre compte, de constater.
30, L'ame. — Chaque race possède une constitution mentale qui lui est propre,
née à la longue de la communauté de sentiments et d'idées, créée par suite
plus du fait des ancêtres que des vivants, car l'homme ne se forme pas
tout seul, et la race dont il sort, comme le milieu où il vit, lui apportent
leurs divei-ses influences. De cette mentalité procèdent ses croyances et ses
institutions qui sont plus souvent des eflets que des causes; son rôle dans
l'existence de la race est prépondérant par l'influence qu'elle exerce d'une
façon latente, mais continue, sur sa moralité, autrement dit sur ses règles
fixes de conduite et sa fidélité à les observer, ainsi que sur ses actes. — Les
différences dans la constitution mentale des peuples font qu'ils sentent,
raisonnent et agissent de façons fort différentes, de sorte qu'ils se trouvent
fréquemment en dissentiment sur nombre de questions dès qu'ils sont en
contact; de là naissent la plupart des guerres. — Ces mentalités par
exemple, chez les races latine et anglo-saxonne, se distinguent en ce que
la première est beaucoup plus vaniteuse, loquace, superficielle, mobile,
l'imagination y prédomine, elle est davantage portée à l'agriculture, la
seconde à l'industrie, au commerce, à la colonisation. Les Latins se soucient
NOTKS. MV. II. CH. XII. VOL. II. PAG. .366. Fb.519
peu de la liberté (chaque parti estime qu'elle règne, quand il est le plus
fort), mais ils sont épris d'égalité, ce qui leur fait supporter tous les des-
potismes, à condition qu'ils soient impersonnels: et, de fait, chez eux,
république, monarchie, socialisme sous des étiquettes différentes ont même
effet, l'absorption de l'individu par l'État; les Anglo-Saxons sont assoiffés
de liberté, la réalité est un mj'the, et qu'ils soient en monarchie comme en
Angleterre, ou en république comme aux États-Unis, l'action de l'État est
réduite au minimum, celle des jmrticuliers est sans limites.
En France en particulier, où les idées socialistes gagnent de plus en plus
et viennent ajouter à la mentalité latine, s'accentue cette ingérence de
l'État en toutes choses; alors qu'il ne devrait pas être le tuteur et le pro-
fesseur perpétuels des citoyens, mais uniquement leur protecteur, parfois
leur initiateur et dans certains cas leur serviteur, il va substituant son action
à celle des individus et des associations et entrave ainsi leur libre dévelop-
pement, en dépit de l'expérience qui enseigne combien la gestion directe
par l'État est plus onéreuse, plus routinière et moins à la dévotion du public ;
c'est ainsi qu'il monopolise les postes, le télégraphe, le téléphone, les tabacs,
les allumettes, on pourrait même dire l'instruction, convoite les chemins
de fei-, a une imprimerie, des manufactures (Sèvres, les Gobelins), exploitant
au lieu de se borner à contrôler. II est vrai que c'est un moyen de se pro-
curer des emplois à donner à soi-même quand la roue de la fortune tour-
nera, à ses adhérents toujours nombreux à la curée, et d'augmenter le
nombre des fonctionnaires et des employés qui sont autant d'électeurs dont
on escompte les votes.
Cette intervention de l'État s'étend à tout, disons-nous : n'a-t-elle pas étt'
s'immiscer dans les détails de ces fêtes séculaires qui ont lieu chaque année
à Orléans, en mémoire de la levée, en 1429, du siège de cette ville, par le
fait de .leanne d'Arc!
32, Athènes. — Elle était consacrée à Minerve, d'où son nom Athéna qui est
celui en grec de cette déesse. Pendant des siècles elle eut dans l'antiquité
un éclat tout particulier; longtemps elle' domina sur mer et eut de nom-
breux comptoirs et fonda un grand nombre de colonies : plus longtemps
encore y fleurirent les lettres, les arts et l'esprit; elle fut la patrie de Phidias,
de Socrate, de Périclès, de Déniosthène et d'une multitude de philosophes,
d'hommes d'état, d'écrivains, d'artistes éminents: on y admirait une foule
de monuments, dont quelques-uns tels que le Parthénon étaient des chefs-
d'œuvre et dont les ruines dénotent encore la splendeur.
35, Valentes. — Hésiode, Pindare, Épaminondas. Plutarque, nés à Thèbes
ou environs, démentent la complète exactitude de cette réputation de
" lourdauds ■> faite aux Béotiens.
368,
10, Infertiles. — Hérodote, IX, d'où le fait est tiré, prête à Cyrus une seconde
raison : - De conquérants qu'ils étaient, leur dit-il. ils deviendraient la
proie de quelque peuple belliqueux »; argument, ajoute l'historien, qui leur
fit perdre l'envie qu'ils avaient eue d'émigrer. — Cette influence du climat,
qu'Hérodote constatait il y a vingt-deux siècles, disant : ■■ Les pays mous
font des hommes mous », a été reconnue de tous temps; on la trouve accu-
sée, entre autres, par Hippocrate, Platon, Galien, Cicéron, Sénèque, Bodin,
Malebranche, Montesquieu, J.-J. Rousseau.
22, louyssance. - Qu'en dehors de ce que nous ne pouvons réaliser, même
en imagination nous sonmies incapables de désigner...
32, Lacedemoniens. — Platon, Second A Icibiade.
37, Et le Cbrestien... Dieu. — V^ar. des éd. aut. : C'eut pourquoy le chrestien
plus humble, et plus sage, et mieux recognoissant que c'est que de luy, se
rapporte à son créateur de choisir et ordonner ce qui luy faut. Il ne le supplie
d'autre chose, sinon, au lieu de : « Et le Chrestien supplie Dieu ».
370,
2, Desprier. — Mot créé par Montaigne; on n'en saurait trouver de plus
clair, de plus court, de plus expressif pour rendre l'idée qu'il exprime ici;
Fb.520 ESSAIS DE MONTAIGNE.
il est demeuré dans la langue, mais avec un sens plus restrictif, celui de
retirer une invitation.
2, Prières. — Pour le délivrer de ce don funeste, dont il l'avait gratifié sur
sa demande, Bacchus fit baigner Midas dans le Pactole qui, depuis, dit la
fable, roule des paillettes d'or dans ses flots.
8, Atteindre. — Atteindre; se disent encore l'un pour l'autre dans certaines
parties de la France.
11, Biton. — HÉRODOTE, I, 31. — Un jour de sacrifice, alors que tardaient à
venir les bœufs qui devaient traîner au temple le char de leur mère qui
en était prêtresse, ils s'y attelèrent eux-mêmes. Le peuple les acclama;
leur mère, ravie, pria la déesse de leur accorder en récompense ce qui
leur serait le plus avantageux, et, quand elle sortit du temple, elle les trouva
tous deux endormis pour toujours dans les bras l'un de l'autre; ■< la mort
est donc, en conclut Plutarque, qui conte aussi le fait, ce qu'il y de plus
heureux ».
11, Agamedes. — Plutarque, Consolation à Apollonius, 14. — Ayant demandé
à Apollon leur salaire pour la construction du temple de Delphes, le dieu
leur répondit qu'il le leur donnerait le septième jour, et ils moururent ce
jour-là. — Une autre version raconte leur fin d'une façon moins honorable
pour eux et moins probante pour la morale que Montaigne veut en tirer.
Chargés postérieurement de bâtir pour le roi d'Ôrchomène un édifice
pour y conserver ses trésors, ils y ménagèrent une entrée secrète, au moyen
de laquelle ils venaient, la nuit, y puiser. Ce prince s'étant aperçu qu'on
le volait, tendit un piège. Agamède y fut pris. Trophonius, craignant ses
révélations, lui coupa la tête et s'enfuit en l'emportant, ce qui est une réédi-
tion de l'histoire de l'architecte de Rhampsinit. V. N. I, 56 : Enfans.
32, Varro. — S. Augustin, De Civ. Dei, XIX, 2.
34, Disputât. — ^Au lieu de disputât, l'ex. de Bord, porte dissentit, variante
conforme au texte de Cicéron.
372,
1, Apparences. — « Le corps d'un athlète et l'àme d'un sage, voilà, a dit
Voltaire, à propos de Buffon, ce qu'il faut pour être heureux » ; c'est le
« mens sana in corpore sano [du jugement et de la santé) » de Juvéxal, Sat.,
X, 152. Mais cela ne dépend pas de nous et, d'un moment à l'autre, peut
cesser d'être; seul, celui qui sait être content de son sort, possède les
conditions de bonheur en ce monde. — Le bonheur est une illusion, le
plaisir souvent une duperie ; il faut arranger sa vie de manière à éviter la
douleur et se garer de l'ennui (d'après Schopenhauer).
6, Aristote. — Morale à Nicomaque, IV, 3.
7, Archésilas. — Sextus Empiricus, Pyrr. Hypot., I, 33.
12, Ataraxie. — Mot grec qui signifie tranquillité, sérénité parfaite, indif-
férence absolue.
17, Lipsius. — Juste Lipse a rempli en partie ce vœu dans un ouvrage assez
considérable sur le stoïcisme qui parut en 1604, douze ans après la mort
de Montaigne.
31, Diuin. — C.-à-d. qu'ainsi que la divinité, au dire même de Socrate, le
lui avait elle-même appris, c'est satisfaire à ses devoirs que de se conformer
aux lois de son pays.
38, Loix. — Cette agitation ne semble pas s'être calmée depuis l'époque où
Montaigne écrivait. En France, durant la législature de 1898 à 1902, la der-
nière pour laquelle ce renseignement subsiste, en quatre ans, ont été
présentés : 2.781 projets ou propositions de loi, dont 627 dits d'intérêt
général, et il a été statué sur 1.690 d'entre eux; à quoi il y a lieu d'ajouter
la discussion de 130 interpellations, 118 questions adressées aux Ministres,
et enfin le dépôt de 3.597 pétitions; ce qui ne veut pas dire que la législa-
ture ait été plus profitable ou plus utile qu'une autre; jamais, au contraire,
nous n'avons été plus éloignés de la pratique de cet adage : « acta, non
verba » qui devrait être la devise d'un état bien gouverné; mais chacun
veut avoir l'air de faire.
NOTES. LTV. II, CH. XII. VOL. II, PAG. 372. Fb.521
39, Voisins. — Montaigne a pu voir en effet, de 1534 à 1558, les Anglais ou
plutôt la cour d'Angleterre sous Henri VIII, Edouard VI, Marie Tudor et
Elisabetli, changer quatre fois de religion.
374,
o, Capitale. — Qui nous exposerait à une peine capitale.
10, Ancien. — Xénophon, Mémoires sur Sacrale, 1, 3, 1. — Ce Dieu, c'est
Apollon, dont la Pythie, sa prêtresse, rendait à Delphes ses oracles, montée
sur un trépied.
15, Estait. — Il serait peut-être plus exact de dire : « celle dans laquelle on
a été élevé » ; d'aucuns diraient : à quoi bon? ou, avec Renan : « l'orthodoxie
f)rocure de grandes joies, mais elle ferme à la vérité ». Admirons avec quelle
iiùte après avoir risqué cette assertion, sur laquelle du reste il ne se pro-
nonce pas, Montaigne fait amende honorable ; il se trouve là tout entier.
C'est un grand tort, à mon sens, que de lier d'une manière indissoluble ces
deux idées : Dieu et la Religion." La première, pereonne ne la discute, et le
plus souvent ceux qui en raisonnent, déraisonnent, parce que pour tous
c'est 'l'inconnu ; seule, la seconde est en cause : elle s'étaye sur la première
dont elle ne saurait se passer, tandis que celle-ci, dans son infinité, n'a que
faire d'elle.
Il n'en est pas moins vrai que la Religion est une idée naturelle à l'homme
dès qu'il est à même de juger do son néant en face de l'Univers et de ses
merveilles sans cesse renaissantes qui n'ont point eu de commencement et
n'auront pas de fin, et ce n'est pas sans raison que la Providence, l'àme de
ce tout sans limites, tout en ne faisant pas qu'elle soit identique chez tous,
ce qu'elle n'a pas probablement jugé indispensable, nous l'ait infusée,
comme elle a fait de la raison, de la conscience, laissant à notre libre arbitre
d'en faire l'estime que nous croyons, de même que, dans tous nos actes,
nous tenons plus ou moins compte de ce que nous soufflent la raison et la
conscience.
La religion, chez ses adeptes sincères, nous affermit dans l'observation de
nos devoirs envers nous-mêmes et envers le prochain, et par l'espérance nous
soutient dans l'adversité; elle ne fait que du bien, jamais de mal; par elle
la morale et la résignation pénètrent les masses sur lesquelles n'ont point
prise les dissertations philosophiques qui ne s'adressent qu'à la raison; il
leur faut quelque chose qui préférablement agisse sur l'imagination, ce que
leur offrent les légendes religieuses et les cérémonies du culte.
Chaque religion comporte trois choses : la morale, le dogme et le culte.
Chez les peuples civilisées elles n'ont jamais beaucoup différé sous le
premier de ces rapports. Entre toutes cependant, la religion chrétienne qui
a pour base essentielle la charité, aimer le prochain comme soi-même, faire
à autrui ce qu'on voudrait qu'il soit fait pour vous-même, tient incontes-
tablement, par cela même, le premier rang.
Comme dogmes, toutes se valent. Toutes ont pour point de départ l'exis-
tence de Dieu que tout démontre, que personne ne nie, que chacune dé-
peint à sa manière, y joignant, pour le rehausser, comme s'il en était besoin,
certains faits surnaturels qui relèvent exclusivement de la foi, sorte d'hypno-
tisme, auquel il est difficile de se prêter quand on ne l'a pas; sur ces faits
qu'elles imposent à notre croyance, toute discussion est stérile, car la raison
et la foi sont deux antipodes, et entre elles nul ne sait où est la vérité.
C'est sous le rapport du culte que les diverses religions, et dans chacune,
ses diverses sectes, diffèrent le plus.» — Par son unité, par ses cérémonies
réellement impressionnantes, la religion catholique l'emporte de beaucoup
à cet égard sur toutes les autres. Elle l'emporte aussi par la confession auri-
culaire, qu'à rencontre de bien d'autres je prise particulièrement; très
discutable en théorie, bien innocente en réalité, elle permet à l'homme, être
essentiellement faible, par l'aveu de ses fautes et l'absolution qu'il en obtient,
d'en mesurer l'étendue, d'en éprouver des regrets, du repentir, d'être en-
couragé à les réparer, à résister aux tentations qui peuvent se reproduire,
d'en faire en quelque sorte pénitence et en recevoir l'absolution, allège, ré-
Fb.522 ESSAIS DE MONTAIGNE.
conforte et amende, à l'instar de ce qui se passe quand le criminel fait
l'aveu de son crime au juge d'instruction et qu'il paie sa dette à la justice
humaine; l'idée est grande et l'effet salutaire.
Ce sont ces considérations qui font que, personnellement, je place la
religion catholique, apostolique et romaine au-dessus de toutes les autres.
Mais si j'estime d'effet utile, pour le maintien de l'unité, l'autorité du pape,
en matière de dogme et de culte, je tiens pour abusive son ingérence dans
les questions d'administration diocésaine et les rapports du clergé avec les ,
fidèles, et ceux des uns et des autres avec l'État; ce sont là des affaires du
ressort, en cas de conflit, de conciles provinciau.x ou nationau.x. — Les
erreurs, les abus si monstrueux commis à diverses époques par ses minis-
tres, qui se sont montrés si intolérants chaque fois qu'ils ont eu la supré-
matie, n'altèrent en rien son excellence; ces ministres sont hommes et en
ont les imperfections, il faut le regretter, sans en faire porter la responsa-
bilité à l'institution; et c'est pourquoi je suis de tout cœur de l'Église
catholique, apostolique et romaine en ce qui touche le spiritue.l, français
en ce qui est afférent au temporel.
27, Au delà. — Pascal, qui a jugé si sévèrement Montaigne et copié en tant
d'endroits, dit : « On ne voit presque rien de juste ou d'injuste, qui ne
change de qualité, en changeant de climat; trois degrés d'élévation du pôle
renversent toute la jurisprudence, un méridien décide de la vérité; à quel-
ques années d'intervalle, les lois fondamentales modifient le droit; plaisante
justice qu'une rivière ou une montagne borne : qui, vérité en deçà des
Pyrénées, est erreur au delàl... Pourquoi me tuez-vous? Eh quoi ! ne demeu-
rez-vous pas de l'autre côté de l'eau? » — Cette même idée, Chateaubriam»
l'exprime lui aussi : « Un homme, écrit-il, peut être pendu de ce côté-ci
d'un ruisseau, pour des principes réputés sacrés de l'autre côté de ce même
ruisseau. » Payen.
376,
7, Indifférentes. — Les philosophes de la secte de Zenon et de Pyrrhon
l'admettaient aussi, cela et bien d'autres choses; en le relatant, Sextus
Empiricus ajoute que toutefois ils se fussent bien gardés de jamais, dans la
pratique, agir à rencontre de ce qui est universellement admis.
7, Platon. — De la République, 1.
24, Inconstance. — Autre pensée que Pascal s'est encore appropriée et qu'il
rend de la sorte : <■ Le larcin, l'inceste, le meurtre des enfants et des pères,
tout cela a sa place entre les actions vertueuses...; il y a sans doute des'
lois naturelles, mais cette belle raison humaine a tout corrompu. » Payen.
•28, Autre. — Ce qui gouverne les hommes, ce sont les idées, les sentiments,
les mœurs; leur ensemble crée à chaque race une mentalité particulière;
les coutumes, les institutions, les lois ne sont que l'expression de cette
mentalité; aussi, comme elle, sont-elles variables d'un peuple à un autre.
30, Coustume. — Les Hindous. Sextus Empiricus, Pyrr. Hypot., III, 24. —
Strabon l'attribuait aussi aux Massagètes (peuple de la Scythie) : « Ils esti-
maient, dit-il, que la mort la plus honorable, quand l'âge les a rendus
inutiles, c'est d'être tués et mangés avec de la viande de mouton; quant à
ceux qui étaient usés par la maladie, ils les détruisaient comme impies et ne
les considéraient que comme dignes d'être dévorés par les bêtes féroces. » Un
autre auteur les représente comme ne tenant rien comme plus malheureux
que de périr autrement que par le fer, et c'est pourquoi ils se faisaient une
loi de tuer ainsi les vieillards et de les manger. V. I. 170 et N. Eux-mesmes.
378,
10, Courage. — Diocêne Laerce, II, 78.
14, Goujon. — Id., II, 67.
17, Choulx. — DioGÈNE L.4ERCE, 11,68; Horace, EpisL, I, 17, 1.
23, Pacis. — Après la citation, les éd. ant. aj. : Il aduient de cette diversité
de visages, que les iugements s'appliquent diuersement au choix des choses.
27, Impuissantes. — Diogène Laerce, I, 63.
30, Socrates. — Id., II, ;fô.
NOTES. LIV. Il, en. XII. VOL. Il, PAG. .378. Fb.!)2.3
32, Seruitude. — Sextus Empiricus, Pyn\ Hypot., III, 24; Plutarque, Cicéron,
26; JuvÉNAi,, I, 105, etc.
33, Public. — Sextus Empiricus, Pyrr. Hypot., I, 14; III, 24.
37, Colit. — » Les chrétiens, qui adorent un seul et même Dieu, se sont, à
diverses reprises, montrés aussi acliarnés les uns contre tes autres que
ces anciens peuples, parce que leurs croyances différaient sur certains
points. » CosTE.
380,
5, Semble. — Un avocat italien disait à une cour devant laquelle il plaidait :
- Le mois dernier vos Excellences ont jugé ainsi ; ce mois-ci, dans le même
cas, vous jugez d'une façon tout opposée: de quelque façon que ce soit,
c'est parfait. » Payen.
18, Considérable. — A considérer.
19, Fust. C.-à-d. qu'il ne fallait pas considérer (qu'il importait peu), dans
la paillardise, de quelle manière on s'y livrait. — Pi.utarque, Règles et pré-
ceptes de santé, 5. Mais Arcésilas entendait condamner, par là, la débauche
sous quelque forme qu'elle se produisît chez l'un aussi bien que chez l'autre,
parce que, ajoute Plutarque, il y a autant de mai d'un côté que de l'autre.
23, Propos. — De l'amour des garçons.
24, Diogarchus. — L'ex. de Bord, porte Dicearchus, ce qui est confoi-me au
texte latin.
382,
8, Cérémonies. — Les éd. ant. aj. : Chacun a ouy parler de la deshuntéc
façon de vivre des philosophes cyniques.
8. Chrysippus. — Plutarque, Contredits des philosophes sloïques, 31.
12, Hippoclides. — Hérodote, VI, 129.
12, Fourché. — Jeu d'enfant consistant à se tenir verticalement sur les bras,
contre un arbre ou un mur, la tête en bas, les jambes en l'air écartées l'un(!
de l'autre.
13, Metrocles. — Diogèxe Laerce, VI, 94.
24, Affoler. — Ravaler, déprécier.
28, Estimation. — Le mystère, la réserve, la circonspection dans la jouissance
, des plaisirs de l'amour, font partie de leur prix.
35, Oisifs. — Lex. de Bord, raye : vagabonds et oisifs.
35, Malaisance. — Pie V voulut, au commencement de son pontiticat, sup-
primer les maisons de tolérance, mais il se vit bientôt dans l'obligation de
les rétablir. — Au début de la conquête de l'Algérie, le général Bedeau,
bien que, par son caractère et ses sentiments religieux, fort opposé à la
prostitution, favorisa à Sétif, où il commandait, l'établissement de maisons
publiques, comme sauvegarde de la tranquillité des femmes honnêtes.
36. Coruine. — Le texte de Martial porte Scaevine.
384,
8, Aulx. — Ce fait, généralement attribué à Diogène le Cynique, n'est fondé
sur le témoignage d'aucun auteur ancien. Bayle, Hipparchia.
9, Autheur. — S. Augustin, De Cit^ Dei, XIV, 20. — Le passage où il exprime
cette appréciation est, pour le moins, aussi licencieux que le français de
' Montaigne.
19, Frottant. — Diogène Laerce, VI, 69.
21, Rue. - fd., VII, 58. •
23, Discrétion. — Sans faire de distinction; du latin discretio, qui a cette
' signification; aujourd'hui, ce mot ne s'emploie plus dans ce sens.
25, Règle. — Diogène Laerce, VI, 96. — L'ex. de Bord, portait : s'accouploit
à lui en pjublic; mais cette addition a ensuite été rayée. — Les éd. ant. et
l'ex. de Bord, ajoutent : Solon fut, à ce qu'on treuue, le premier qui donna
par ses loix liberté aux femmes, de faire profit publique de leurs corps. Cette
phrase rayée depuis sur l'ex. de Bord, y avait été complétée de la sorte :
toutefois, si te ne me trompe, Hérodote recite auant lui cet vsage receu à plu-
sieurs polices, addition qui a pareillement été rayée.
31, Protagoras. — Sextus Empiricus, I, 29 et 32.
Pb.*524 ESSAIS DE MONTAIGNE.
386,
7, Maintenir. — Luther faisant allusion aux interprétations diverses que
chacun en tirait à l'appui de ses dires, appelait l'Écriture sainte « le livre
des hérétiques ». — Montesquieu en parle de même : « C'est un pays où
les chrétiens de toutes sectes font des descentes et vont comme au pillage ;
c'est un champ de bataille où les nations ennemies se rencontrent, se
livrent bien des combats; où l'on s'attaque, ou l'on escarmouche de bien
des manières; la plupart des interprètes n'ont point cherché dans l'Écri-
ture ce qu'il fallait y croire, mais ce qu'ils croyaient en eux-mêmes. »
23, Pourtant. — C'est pourquoi, c'est pour cette raison. — Montaigne, qui
fait un usage fréquent de ce mot, l'emploie presque toujours dans ce sens.
32, Landit. — Par le landit. — Le landit ou lendit était le salaire de leurs
leçons que les écoliers donnaient à leurs maîtres, et qu'il était d'usage de
remettre lors de la foire dite du Landit, qui se tenait à S.-Denis; d'où le
nom attribué à ce paiement fait constamment à cette époque et qui, pour
les élèves de l'université, consistait en six ou sept écus d'or fichés dans un
citron et qu'on mettait dans un verre de cristal; les écoliers désignaient
entre eux, sous le nom de « frippelandis », ceux qui frustraient leurs régents
de ce présent. Quant au nom même de la foire, il viendrait du latin indic-
tum, comme ayant toujours lieu à jour dit, fixé d'avance une fois pour
toutes.
37, Dire. — Rabelais, prologue du livre I de Gargantua, exprime la même
idée : « Croyez-vous, en vostre foy, qu'oncques Homère, escriuant l'Iliade et
Odyssée, pensast es allégories, lesquelles de luy ont calfreté Plutarche,
Heraclides Ponticq, Eustatie, Phornute, et ce que d'iceux Potitian a desrobé?
Si le croyez, vous n'approchez ne de pieds ne de mains à mon opinion qui
décrète icelles aussi peu auoir esté songées d'Homère que d'Ouide, en ses
Métamorphoses, les sacremens de l'Euangile, lesquels vn frère Lubin, vray
croquelardon, s'est efforcé demonstrer, si d'aduenture il rencontroit gens
aussi fols que luv. »
388,
16, Mesmes. — Et on le met en opposition avec lui-même.
20, Heraclitus. — Sextus Empiricus, Pyrr. Hypot., I, 29.
25, Amer. — Sextus Empiricus, Adv. Malh., 163.
28, Cyrenayens. — Ou Cyrénaïques. Cicéron, Acad., 11, 7.
34, Chacun. — Cicéron, Acad., 11, 46.
37, Retirée. — Séparée, disjointe.
38, Cogitation. — C'est la conclusion que Platon poursuit dans le Phédon et
le Théétète.
390,
14, Sentiment. — C'est à peu près la même idée qu'exprime Helv-etius, quand
il dit : « Juger, c'est sentir. »
17, Cognoissance. — Descartes, Lqcke, Condillac et autres philosophes de
temps postérieure à Montaigne, n'ont fait que le copier, quand ils ont dit
et répété leur fameux : « Coffito, ergo sum {Je sens, je pense, donc j'existe). »
24, Dit. —Acad., U, 27.
30, Perdu. — Plutarque, Contredits des phil. stoïques, 9.
392,
22, Appréhendent. — Ne le saisissent, ne le conçoivent.
31, Bute. — Le tir à l'arquebuse.
40, Costier. — Que le coup a porté trop haut, ou à côté du but.
394,
1, Dire. — Que nous ayons à regretter, qui nous manque.
4, Sens. — Sextus Empiricus, Pyrr. Hypot., 1, 14.
7, Rapporter. — Que peuvent être ces vertus d'assécher ou restreindre
que Montaigne prête à la pomme? S'il veut dire qu'elle pourrait être
susceptible de se dessécher et de se contracter, ce qui est, nous le con-
statons par la vue ; s'il entend par là causer de l'altération et de la consti-
pation, nous sommes à même de le constater par le palais et les intestins.
NOTES. LIV. II, Cil. XII. VOL. II, PAG. 394. Fb.525
Aussi, tout en saisissant parl'aitenient l'idée de l'auteur qui veut dire que
« si la pomme a d'autres propriétés que colles que nous lui connaissons,
elles nous échappent parce que peut-être nous ne possédons pas les sens
nécessaires pour que nous nous en apercevions », faute de pouvoir pré-
ciser plus qu'il ne fait, nous le reproduisons textuellement.
12, Choses. — Cette réflexion de Montaigne se confirme de plus en plus de
nos jours, avec les progrès de l'électricité dont nous constatons les effets,
les produisant et même en tirant parti, alors que leur explication nous
échappe et qu'eux-mêmes vont déroutant complètement notre entende-
ment, comme il arrive encore de la lélégrapltie sans fil, des rayons X,
du radium, etc., etc.
396,
11, Videtur. — Montaigne a traduit ces deux vers, avant de les citer.
'21, Timagoras. — Cicéron, Acad., II, 25.
25, Epicuriens. — Au jugement des Épicuriens, c'est de.
398,
6, Plaira. — Aux exemples qu'il va donner, Montaigne aurait pu en
ajouter beaucoup d'autres, particulièrement en ce qui touche la vue, le
plus trompeur de nos sens; les illusions d'optique dues à la réflexion, à
la réfraction, au mirage etc., abondent en effet.
34, Vastité. — Etendue, immensité; mot forgé par Montaigne, du latin
vasHtas, d'où vient notre adjectif vaste.
41, Zenon. — Diogène Laerce, IV, 23.
400,
6, Fascheux. — Ne fut pas blâmable, n'eut pas tort.
9, Moy. — Diogène Laerce, IV, 36.
19, Espaigne. — Le corail.
20, Oceane. — Les perles.
22, Sien. — « L'irréel est, dans certains cas, plus vrai que le réel; ainsi, les
objets ont des états, des formes nettement déterminés; états et formes
qui n'importent pas tant que ceux sous lesquels nous les voyons constam-
ment, souvent très différents de la réalité » (Le Bon), ainsi qu'il arrive,
dans les effets de perspective, au théâtre, par exemple.
27, Narcisse. — Était d'une admirable beauté; s'éprit de sa propre image
et, de chagrin de ne pouvoir la posséder, se noya dans la source où il
l'apercevait et fut changé en la fleur qui porte son nom.
34, Sequiturque. — Le texte latin porto loquiturque.
38, Tours. — Leur hauteur est de 68 m. L'église est érigée sur l'emplacement
de l'ancienne cathédrale mérovingienne qui avait, elle-même, remplacé un
temple païen; sa construction, commencée en 1163, ne fut achevée qu'en
1230, et encore seulement dans son ensemble.
402,
3, Terre. — Idée reproduite par Pascal : « Le plus grand philosophe du
monde, sur une planche plus large qu'il ne faut pour marcher à son ordi-
naire, s'il y avait dessous un précipice, quoique la raison le convainque
de sa sûreté, son imagination prévaudra. »
4, Deçà. — Les Pyrénées, de ce côté-ci de la France.
12, Yeux. — Démocrite; mais le fait est controuvé. Cicéron, De Fin. boit et
mal., 29, n'en parle que comme d*une chose incertaine, et Plutarque, De
la Curiosité, 11, dit positivement que c'est une fausseté.
20, Tbeophrastus. — Plutarque, Comment il faut ouïr, 2.
28, Fureur. — L'inverse se produit également : David, jouant de la harpe,
calmait Saul tourmenté par le mauvais esprit; Odette de Champdivers
endormait parfois, en touchant de son luth, la sombre folie de Charles VI;
et, de nos jours, des médecins parlent de traiter par la musique certaines
maladies.
34, Protocole. — Protocole était, du temps de Montaigne, le qualificatif
appliqué à qui, le texte d'un discours en main et placé derrière celui qui
le prononçait, lui soufflait ce qu'il avait à dire s'il se trompait ou demeu-
Pb.526 ESSAIS DK MONTAIGNE.
rait court; ((ui en un mot lemplissait un rôle analogue à celui du soulfleur
au théâtre. Ce terme ne s'applique plus aujourd'iiui qu'au formulaire suivi
dans l'accomplissement d'actes publics et aux procès -verbaux auxquels
donnent lieu certains d'entre eux.
34, Gracchus. — Plltarque, Comment il faut refréner la colère, 6. — T. Grac-
chus était emporté, violent dans sa manière de dire, et avait pour le cal-
mer un (le ses serviteurs qui, avec une petite flûte, jouant sur un ton
doux et mélodieux quand sa voix s'élevait, l'en avertissait. « Je voudrais,
quant à moi, ajoute Plutarque, que l'on me présentât un miroir quand
je me mets en colère et que j'j' visse mes traits convulsés par cette passion;
ce serait aussi utile à d'autres. » — L'histoire romaine présente un autre
cas d'un joueur de llùte attaché aux pas d'un autre personnage; mais c'est
à un tout autre titre, non pour le l'appeler à lui-même, mais pour le si-
gnaler aux autres : à Duilius, vainqueur à la première bataille navale rem-
portée sur les Carthaginois (l'an 200, lors de la première guerre punique),
le Sénat accorda, à titre d'honneur, d'être reconduit le soir à la lueur de
flambeaux et précédé d'un joueur de flùle. A celte même occasion fut érigée
à Rome une colonne rostrale qui, restaurée à diverses reprises, existe en-
core; l'inscription qu'elle porte est un des monuments les plus anciens de
la langue latine; cette coionn(! est aujourd'hui surmontée d'un bec de gaz!
404,
1, Enuy. — Pascal a reproduit cette même idée, en employant les mêmes
termes : « Les sens abusent la raison par de fausses apparence^; et cette
même piperie qu'ils lui apportent, ils la reçoivent d'elle à son tour. Elle
s'en revanche : les passions de l'âme troublent les sens et leur font des
impressions fâcheuses. Ils mentent et se trompent à ^envJ^ »
8, Tbebas. — On voit..., comme voyait Penthée, roi de Thèbes, poursuivi
par les Bacchantes dont il avait surpris les mystères et qui le mirent en
pièces.
25, Cymmeriennes. — Semblables aux ténèbres au milieu desquelles \ ivent
les Cimmériens, peuple mythologique habitant la région montagneuse au
Sud de Naples, et qui passait pour vivre sous terre dans des ténèbres conti-
nues; les poètes plaçaient chez eux l'une des entrées de l'enfer.
406,
4, Democritus. — Plutarque, Des Opinions despliil., IV, 10.
14, Cherchons. — Pendant longtemps, la salive a joui d'une grande répu-
tation contre beaucoup de maladies, en particulier contre les plaies et les
ulcères. Payen.
15, Marins. — Poisson qu'on nomme aussi cycloptère ou blême. « 11 ne
peut, dit-on, raconte Pline (.Va<. Hist.,XXXU., 1), être capturé vivant; par
contre, lorsqu'il e.st dans son élément, il suffit de le toucher du doigt,
pour être empoisonné et en mourir. •
18, Poisson. — C.-à-d. : Que croire? est-ce le poisson qui e.st un poison ])our
l'homme, ou l'homme qui est un poison pour le poisson?
25, Hyposphragma. — Sextus Empiricus, Pyrr. Hypot., I, 14. — L'Hypo- ,
sphragma est un épancheraent de sang sous la conjonctivite, membrane
qui unit les paupières au globe de l'œil.
408,
4, Ordinairement. — Sextus Empiricus, Pyrr. Hypol., 1, 14.
28, Choses. — Les éd. ant. portent : Les malades prestent de l'amertume
aux choses douces : par où il nous appert que nous ne receuons pas les choses
comm£ elles sont, mais, au lieu de : « Nous... choses ».
34, Quoy. — S'agit-il maintenant de prouver que les sens...; ou encore :
Veut-on une preuve que nos sens...
36, Plate. — Sextus Empiricus, Pyrr. Hypot., 1, 14.
38, Sentiment. — Odorat.
40, Veue. — Sextus Empiricus, Pyrr. Hypol.. 1, 14.
41, Pennes sans fin. — Bague en métal bruni fort en usage jadis et qui
n'a pas complètoiaent disparu, qu'on af)[)olle parfois aujourd'hui ■• bague
NOTES. LIV. II, CH. XII. VOL. II, PAG. 408. Fb.527
sorcière » , constituée par un anneau strié extérieurement comme des
barbes de plumes. Les stries qui forment entre elles un angle obtus sem-
blent, par un effet d'optique, s'évaser lorsqu'on tourne la bague sur le
doigt, présentant alors quelque ressemblance avec la plume d'oiseau; si
le métal n'est pas bruni, l'illusion est moins prononcée. C'est un effet
analogue à celui qui se produit quand on regarde deux colonnes torses
dont les hélices sont en sens contraire; elles paraissent n'être pas paral-
lèles, alors même que toutes deux sont dressées verticalement.
410,
6, Oculaire. — Sksèque, JVat. QuœsL, l, IG.
11, Humeur. — Sextls Empiricus, Pyrr. Hypol., 1, 14.
24, Veillent. — Les éd. ant. aj. : puis que cet estât là, a force de donner aux
choses vn autre estre, que celuy qu'elles ont : puis qiCvne humeur iaunâlre,
nous change toutes choses en iaune.
29, Tempéré. — Sextls Empiricls, Pyrr. Hypot., l, 14.
34, Vérité. — Les éd. ant. aj. : ny quelle est leur nature.
412,
16, Rouet. — C.-à-d. au bout de nos moyens d'action. — Être au i-ouet,
terme de chasse, se dit du lièvre qui, pourchassé ot épuisé par une longue
course, ne fait plus que tourner autour des chiens.
27, Passions. — Sensations, perceptions.
29, Discrepances. — Différences, du latin discrepantia, contradiction, dis-
convenance, diversité.
414,
15, Platon. — Dans le Théétèle.
18, Fluxion. — Vicissitude; du latin fluere, couler, s'échapper, s'évanouir.
18, Muance. — Changement, transformation, du latin mvere qui a même
signification.
22, Labile. — Sujette à changer; du latin labilis, tombant, caduc, fragile.
25, Heraclitus. — Sénèque, Epist. 58; Plutarque,. Traité sur le mot El.
29, Autres. — Tout ce qui suit, jusqu'aux mots « et sans fin » (pag. 418,
lig. 15), excepté les vers qui s'y trouvent inclus, est un passage de Plutarque,
Traité sur le mot El, transcrit dans les propres termes d'Aniyot, son tra-
ducteur.
416,
41, Incontinent. — « Le moment où je parle est déjà loin de moi. >• Boileau.
« Le présent est très court; si court que quelques hommes ont nié son
existence ; en effet, il est toujours en marche : il vole, se précipite, il a
cessé d'être avant d'être arrivé. » Sénèqite.
418,
9, Sera. — Plutarque ne fait ici que transcrire et développer ces paroles
du Timée de Platon : « Nous avons tort de dire, en parlant de l'éternelle
essence : Elle fut, Elle sera; ces formes du temps ne conviennent pas
à l'éternité; elle est, voilà son attribut. Notre passé et notre avenir sont
deux mouvements; or l'immuable ne peut être de la veille, ni du lende-
main; on ne peut dire qu'il fut, nj, qu'il sera; les accidents des créatures
sensibles ne sont pas faits pour lui, et des instants qui se calculent ne
sont qu'un vain simulacre de ce qui est toujours. »
19, Payen. — Plutarque, ou peut-être Platon don^ Plutarque vient d'exprimer
la pensée.
20, Condition. — Païen comme le premier, c'est Sénèque.
' 21, Dit-il. — Sénèque, Nat. Quaeàt., 1, préf.
27, Car. — Les éd. ant. port. : Il n'est mol en toute la secte stoïque plus
véritable que celuy la, mais, au lieu de : « Voilà... car ».
31, Célestes. — Cette conclusion résume bien la thèse absolument contraire
à celle de Sebond, que l'auteur s'est proposée dans ce long chapitre : que
l'homme ne peut, par ses propres moyens, arriver à rien de cei-tain et
qu'il a besoin à cet effet, d'être éclairé par une lumière divine.
Fb.528 ESSAIS DE MONTAIGNE.
CHAPITRE XIII.
420,
2, Humaine. — « C'est un beau cinquième acte, qu'une bonne mort. •
Sainte-Beuve.
4, Résolus. — Persuadés, convaincus.
35, Qu'vn. — J.-J. Rousseau exprime et développe cette même pensée, qui
chaque jour devient de plus en plus vraie, en ce temps de vie à outrance :
« Nous tenons à tout, nous nous accrochons à tout; les temps, les lieux,
les hommes, les choses, tout ce qui est, tout ce qui sera, importe à chacun
de nous; notre individu n'est plus que la moindre partie de nous-
mêmes... 0 homme! resserre ton existence au dedans de toi. »
422,
5, Mei. — César, dans sa hâte de suivre Pompée passé en Grèce, avait,
faute de moyens de transport suffisants, laissé la majeure partie de ses
troupes à Brindisi. Ne les voyant pas arriver et craignant qu'elles ne
fussent coupées de lui par la flotte dont disposait Pompée alors que lui-
même n'avait que des bâtiments de commerce, voulant presser leur venue,
il s'embarqua incognito, de nuit, sur une barque, par un temps affreux;
et, le pilote n'arrivant pas à surmonter les difficultés. César, pour stimuler
ses efforts, lui dit : « Que crains-tu? tu portes César et sa fortune. » Nonob-
stant cette confiance en lui-même, il ne parvint pas à effectuer la tra-
versée qu'il avait en vue, les flots le rejetèrent à son point de départ.
18, Actions. — L'éd. de 88 et l'ex. de Bord. aj. -.et qu'vn grand roy lui cousle
plus à tuer qu'vne puce.
29, Temps. — Il faut encore tenir compte si c'est une mort soudaine ou qui
vienne pour ainsi dire à pas comptés.
32, Tourmens. — Le cruel empereur qui voulait faire sentir la mort à ses
victimes, c'est Caligula (Suétone, Caligula, 30); et c'est Tibère qui dit, de
l'une des siennes qui s'était tuée elle-même, qu'elle lui avait échappé
(Suétone, Tibère, 61); mais ces deux monstres se ressemblent si fort en
cruauté, qu'il est aisé de les prendre l'un pour l'autre.
39, Desseignoit. — Avait dessein, projetait.
43, Planché. — Planchéié, comme il se dit aujourd'hui.
424,
4, Mourir. — Lampridius, Heliog.., 33. — Héliogabale fut tué dans une
sédition militaire par des soldats qui le massacrèrent dans des latrines
où il s'était Téfugié : son cadavre fut traîné par les rues et jeté dans un
égout; mais l'égout s'étant trouvé trop étroit, on le précipita, une pierre
au cou, dans le Tibre (222). V. I, 380 et N. Retraict.
8, Propre. — Si on l'eût mis dans le cas de se tuer.
14, Prusse. — Les Abruzzes, province de l'Italie méridionale. — On a
pensé qu'il y avait là une faute d'impression évidente et qu'il faut lire
Prusse; c'est douteux, du moins en ce qui touche la substitution d'un
P au B : certains auteurs, en effet, écrivent Apruzia, d'où Montaigne a
fait la Prusse, comme l'Apulia, autre province de la même région, est
devenue la Pouille.
15, Apres. — En 48, à Corfinium. Désespérant de pouvoir s'y défendre,
bomitius demanda du poison à son esclave qui était médecin. L'ayant
absorbé et apprenant avec quelle bonté César traitait ses prisonniers,
il regretta son acte, mais son esclave le rassura en lui avouant que ce
n'était qu'un narcotique qu'il lui avait remis. Satisfait de cette assurance,
il alla trouver César qui l'accueillit avec beaucoup d'amitié, ce qui no
l'empêcha pas de passer, peu après, à nouveau dans le camp de Pompée.
Plutarque, César, 10. ^
22, Gents. — Tacite, Annales, IV, 22. — Plautius Sylvanus était sous le
coup d'une accusation capitale pour avoir précipité sa femme du haut
de sa maison (22).
NOTES. LIV. II, CH. XIII. VOL. II, PAG. 424. Pb.529
24, Parties. — A ses ennemis. — Tacite, Ann., VI, 48. Aibucilla était ac-
cusée d'adultère et d'impiété envers le prince (36).
25, Sicile. — Plutarque, .\Hcias, 10. — Lors de l'expédition des Athéniens en
Sicile, en 413, Démosthène, l'un de leui-s généraux, se voyant, après une
résistance opiniâtre, hors d'état d'échapper, se perça de son épée; mais,
ne s'étant pas tué du coup, il fut fait prisonnier et, quelque temps après,
lapidé par les Syracusains.
26, Impetra. — Obtint par des prières; du latin impelrare qui a cette si-
gnification; inipétrer est demeuré dans le langage judiciaire.
27, Acheuer. — Appien, De Bello Mithrid. — Fimbria, un des plus fougueux
et plus cruels partisans de Marins. Envoyé en Asie Mineure, il y assas-
sina son général pour se substituer à lui ; pressé par Sylla, il se donna
la mort (85). Un de ses hauts faits fut la destruction de fond en comble
d'Ilion (l'ancienne Troie), et le massacre de tous ses habitants.
31, Transperça. — Tacite, Ann., XVI, 15. — Ostorius, qui jouissait d'une
grande réputation militaire et de l'éclat d'une coui'onne civique méritée
en Bretagne, fut réduit à se tuer, parce que, chez lui, avait été lu un
poème satirique contre Néron (68).
35, Tuer. — Xiphilin, .Adrien. — Cette précaution ne lui réussit pas; pressé
par la maladie et voulant en finir, il ne trouva personne qui voulût lui
porter le coup mortel, ni lui donner du poison.
37, Courte. — Suétone, César, 87. — César tint ce propos dans un repas, la
veille de sa mort; ce disant, il faisait allusion aux conspirations journel-
lement ourdies contre lui et dont on ne cessait de l'entretenir, et il ajouta :
« Mieux vaut mourir une fois, que de craindre toujours. »
39. Humaine. — Pline, Hist. nat., VII, 53, dit : « une mort .mbite ». — « Le
dernier plaisir de la vie, est de mourir sans y penser. •
426,
4, Mourir. — De là cette locution si répandue : « Je voudrais, je préférerais
être mort », qui se dit fréquemment à propos de toute difficulté ou souf-
france morale ou physique dont la mort vous délivrerait. Mais avant d'être
mort, ce que l'on peut souhaiter de fort bonne foi, il faut mourir; et nos
appels à la mort en sont moins sincères, ainsi que l'a si bien rendu La
Fontaine, dans sa fable de •< la Jlort et le bûcheron » ; parce qu'entre les
deux, pour qui est en pleine possession de lui-même, il y a un moment re-
doutable à franchir : le corps s'y trouve généralement aux prises avec la
douleur, et fi-équemment Pâme appréhende l'inconnu de l'au-delà.
5, .Slstimo. — Le vers latin, qui est do Cicéron, est la traduction d'un vers
grec d'Epicharme.
18, Cogitation. — Mesuré et calme, plutôt qu'aigri et surexcité par le far-
deau d'une telle pensée. V. N. III, 576 : L'vn.
28, Fois. — Cornélius Nepos, Atlicus, 22. — Nulle mort dont le récit nous
a été conservé ne témoigne un plus grand détachement de la vie; parmi
les plus belles, on peut dire que celle de Socrate lui était imposée par sa
condamnation, celle de Caton par la situation, et qu'ils ont eu à cœur de
se montrer à hauteur do leurs principes; chez Atticus, aucun motif n'ex-
cite son courage, il meurt parce qu'il est las de la vie, sans forfanterie, à
l'insu de tout le monde.
33, Cleantbes. — Diogène Laerce, VIII. ^
40, Marcellinus. — Tout ce récit est emprunté de Sénèque, Epist. 11.
428,
' 13, Rouons. — Tournons. Ce mot est encore aujourd'hui employé comme
terme de marine : Rouer un câble, c'est le plier en l'enroulant sur lui-
même.
15, Mort. — C'est ce que les Anglais appellent le spleen.
30, Essayer. — La goûter, la savourer.
430,
4, Premier. — Après la bataille de Thapsus (46), Caton qui commandait à
Utiquo, voyant les affaires perdues, après avoir pourvu à la sûreté de tous
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 34
Fb.530 ESSAIS DE MONTAIGNE.
ceux qui s'étaient réfugiés dans la place et se trouvaient compromis, réso-
lut de se tuor, ne voulant pas en outre devoir de grâce à César, dont on
connaissait les dispositions bienveillantes à son égard. Sa résolution avait
transpiré; pour l'empêcher de la mettre à exécution, la veille on lui avait
retiré son épée; il s'en était aperçu et l'avait fait rapporter, observant à
ses proches et amis qui le pressaient de renoncer à son dessein, que fina-
lement une épée n'était pas indispensable pour mettre fin à ses jours. Il
passa la nuit à lire et méditer le Phédo7i, dialogue où Platon traite de l'im-
mortalité de l'âme. Le lendemain matin, jugeant le moment venu, il fit
-retirer chacun et se perça de son épée; le bruit qu'occasionna sa chute fit
accourir son fils' et ses amis; on profita de son évanouissement pour panser
la blessure qu'il s'était faite, mais revenu à lui, il repoussa le médecin
avec violence, arracha le pansement, déchira la plaie de ses propres mains
et expira sur-le-champ. — Ce sujet fut le premier donné, l'an V (1797) de
la République, par l'Institut national de France, aux élèves de peinture
pour le concours du grand prix, aj)rès l'interruption causée par la Révo-
lution. V. N. II, 586 : leune Caton.
CHAPITRE XIV.
7, lustement. — Également.
10, Faim. — C'est le sophisme dit de l'âne de Buridan qui, supposant un
âne également pressé par la faim et la soif, placé entre une mesure d'avoine
et un seau d'eau et à égale distance, demandait : « Que fera-t-il? » Si on lui
répondait qu'il demeurerait immobile : « Il se laissera donc mourir? • disait
Buridan. On lui répliquait qu'il ne serait pas bête à ce point. « Alors,
concluait-il, se tournant d'un côté plutôt que d'un autre, il a donc son
libre arbitre. » — Ce sophisme embarrassa fort, paraiMl, les dialecticiens
de l'époque; il était cependant aisé d'y répondre : Comment aurez- vous la
certitude que lorsqu'il se décidera l'animal sera au même degré pressé par
un besoin et par l'autre, et qu'il ne cède pas à celui qui, à votre insu, le
presse le plus?
11, Stoïciens. — Plutarque, Contredits des phil. stoïques, 24.
28, Circonférence. — Ces absurdités sont jeux d'écoliers, nous ne connais-
sons pas le raisonnement captieux démontrant que « le contenu est plus
grand que le contenant ». — Pour prouver que « le centre d'un cercle est aussi
grand que sa circonférence, on suppose le cercle se déroulant suivant une
ligne droite ; sa circonférence se développant de A en A y'y yoy >
a' a;
le centre 0 vient en 0', or 00' = AA'. De même acabit sont les problèmes
suivants :
« Le diamètre d'un cercle est égal à sa demi-circonférence. " Observons
tout d'abord que dans un cercle les deux demi-circonférences décrites sur
les deux moitiés d'un diamètre sont au total égales à la demi-circonférence
qui les englobe r'V^ ; appliquant ce principe de proche en proche à
toutes les demi-circonférences intérieures que l'on peut construire de la
sorte, leur total reste égal à la demi-circonférence extérieure en même
temps qu'elles en arrivent à se confondi'e avec le diamètre. — Si on con-
sidère que dans le problème précédent AA' est égal à trois fois le diamètre,
et que la présente démonstration conclut à ce que le diamètre est égal à
la demi-circonférence, on en arrive à ce que un égale deux.
Si un égale deux, « deux égale trois ». Supposons trois nombres a, b, c,
tels 4ue : a = b -f c. Il en ressort que : 2 a = 2 b -f 2 c et aussi 3 a = 3 b
-t- 3 c; de ces deux additions égales en inversant les deux termes de la
seconde, ona:2a-|-3b-h3c = 2b-f2c-f3a:de chacun des deux
termes de cette dernière retranchons 5 a, elle devient 3b-f3c — 3a = 2b
iNOTES. LIV. II, m. XIV. VOL. Il, PAG. 430. Fb.53i
+ '2 c — 2 a ou o (b 4- c — a) = 2 (b + c — a); supprimant le facteur
commun b + c — a, on a 3 = 2.
« Une bouteille vide égale une bouteille pleine. » On est en droit de
poser : 1/2 bouteille vide = 1/2 bouteille pleine; supprimons 1/2 facteur
commun, et l'énoncé du problème est démontré.
« Une flèche qui atteint le but, dit Zenon d'Élee, n'a pu cependant fran-
chir la dislance. » Divisons cette distance en deux parties; ce qui reste
également, continuons de la sorte indéfiniment, il restera toujours quelque
chose à diviser, et par suite à franchir. — C'est une démonstration du
genre de celle qui prouve que deux courriers se pourchassant, si vite
qu'aille celui qui poursuit, il ne peut rattraper l'autre, si lente que soit
l'alluro de ce dernier et si faible que soit la distance qui les séparait au
début.
30, Cercle. — La recherche de la i)ierre philosophale (alchimie) et de la qua-
drature du cercle (construction d'un carré de surface équivalente à celle
d'un cercle donné) sont deux problèmes insolubles, qui occupaient beau-
coup les esprits aux temps jadis.
32, Pline. — Les éd. ant. aj. : // n'y a rien de certain que l'incerlilude et
rien de plus miséraôle et plus fier que l'homme. Cette addition est la traduc-
tion de la citation qui suit.
CHAPITRE XV.
432,
Malaisance. — Difficulté d'avoir les choses.
2, Remaschois. — Au figuré, remâcher, c'est repasser à diverses reprises
dans son esprit.
2, Mot. — Les éd. ant. aj. : et très véritable. — Cet ancien, c'est Sénèque,
Episl. 4.
5, Préparez. — Sénèque, Epist. 4.
0, Fruition. — Jouissance; mot forgé, par Montaigne, du latin frui, jouir.
9, Estroict. — Les éd. ant. port. : ferme.
15, Parens. — Danaé, (ille d'Acrisius, roi'd'Argos (Grèce), fut enfermée dans
une tour d'airain par son père, auquel l'oracle avait prédit qu'il serait tué
par l'enfant qui naîtrait d'elle. Jupiter pénétra dans cette tour sous forme
d'une pluie d'or (la toute -puissance de l'argent a été connue de tous
temps), et séduisit Danaé. De cette union naquit Persée, qui plus tard, en
effet, fut, par accident, le meurtrier d'Acrisius. Myth.
24, D'autre. — Plut.vrque, Lycurgue, 11.
28, Sauce. — Dans son poème Les filles de Minée, La Fontaine dit :
■ La défense esl un charme; on dit qu'elle assaisonne
Les plaisirs, et surtout ceux que l'amour nous donne. •
•
34, Morsures. — Plutarque, Pompée, 1.
434,
6, Ancone. — La marche d'Ancône, province de l'Italie centrale, où est le
sanctuaire de N.-D. de Lorette en qui l'on croit posséder la Santa Casa ou
maison de la S. Vierge et une statue d'elle, en bois de cèdre, sculptée par
l'apùtre S. Luc. Cette maison de la Vierge aurait été transportée par les
saints Anges de Nazareth à Lorette; à rencontre de cette tradition un éru-
dit, le chanoine Ulysse Chevalier, a publié en 1906 que, d'après ses études,
elle a tout simplement été construite avec les pierres d'une carrière voi-
sine, par des architectes nommés Anges.
7, Sainct laques. — S. -Jacques de Compostelle à Santiago en Galice
(Espagne), où se trouvait le corps de l'apôtre S. Jacques.
8, Liège. — A Liège (Belgique). Non loin de là se trouvent les eaux de Spa,
appelées ici, par Montaigne, les bains d'Aspa.
10, François. — Par application du proverbe : « Nul n'est prophète en son
pays. -
12, Autre. — Pi.utakqle, Caton d'Ulique, 7. — Caton, qui avait deux enfants
Fb.532 ESSAIS DE MONTAIGNE.
d'un mariage antérieur, avait consenti à se séparer de sa femme Martia,
dont il n'en avait pas, pour la céder à Hortensius son ami, qui n'en avait
pas non plus, ce qui était admis par les mœurs romaines. A la mort d'Hor-
tensius, autant par afl'ection que pour ne pas la laisser dans une position
difficile, Caton reprit Martia par un second mariage en règle, toutes choses
qu'autorisait à Rome la faculté illimitée du divorce; César néanmoins
lui en faisait de vifs reproches dans son Anti-Calon : « S'il avait besoin de
femme, disait-il, pourquoi céder la sienne à un autre; et, s'il n'en avait pas
besoin, pourquoi la reprendre? Cela ne montre-t-il pas une arrière-pensée :
on prêtait une femme pauvre à Hortensius, on espérait la retrouver riche ».
V. N. II, 586 : leune Caton.
28, Plus. — La Fontaine disait à une courtisane chez laquelle il était entré
un jour par hasard et qui se laissait doucement caresser, sans opposer la
moindre résistance à ses désirs : « ,Je t'en prie, repousse-moi un peu. »
37, Amants. — Tacite, Ann., XIII, 45. — Chez les Lacédémoniens, les filles
sortaient en public à visage découvert et les femmes voilées, parce qu'il
faut, disaient-ils, que les filles trouvent mari et que les femmes gardent
celui qu'elles ont; comme quoi, une même chose peut être envisagée à deux
. points de vue complètement opposés.
41, Bastions. — Au propre, saillants de fortification; ici, pris au figuré,
allusion aux vertugadins, paniers dont les dames faisaient alors usage
dans leur toilette, sorte de jupons garnis de cercles de baleine, assez
analogues aux crinolines du second empire, soutenant les jupes et rendant
les robes bouffantes.
43, Appétit. — Par la difficulté, aj. l'éd. de 88.
436,
8, Desbaucher. — Porter à une gaîté licencieuse.
10, Triompher. — Add. de l'éd. de 88 et de l'ex. de Bord. : de la rigueur.
14, Haissent. — Add. de l'éd. de 88 : mortellement.
30, Seruist. — Valère Maxime, II, 1, 4. — Cette assertion est-elle exacte? ce
qu'il y a de certain, c'est qu'à Rome les femmes étaient assez libres et le
divorce appliqué pour la moindre cause. — Toujours est-il que son intro-
duction en France est loin de confirmer la thèse de Montaigne. Il y a été
autorisé en 1884; de 1885 à 1890, la moyenne annuelle des demandes a été
de 9.300, suivant d'année en année une progression ascendante constante.
En 1901, 10.500 instances ont été introduites se répartissant à peu près
également entre gens ayant des enfants et gens n'en ayant pas, 9.000 ont été
accordées, à quoi il convient d'ajouter plus de 2.000 séparations de corps.
En 1904, il y en a eu 9.860 prononcés en dehors des séparations de corps;
en 1905, 10.019. — Il est à observer que les divorces pour cause d'adultère
sont presque en nombre double pour adultère de la femme, que pour cette
même faute commise par l'homme; ce n'est pas que celui-ci soit plus res-
pectueux de la foi conjugale, mais outre que dans son cas il n'y a pas
risque d'un enfant pouvant en résulter, cela tient encore à ce que pour des
raisons diverses la femme supporte plus facilement d'être trompée et aussi
qu'elle est plus facile à l'être. Et aujourd'hui que le divorce est passé dans
les mœurs, l'idée gagne de l'affranchir des fictions judiciaires qui en res-
treignent l'obtention : les motifs légaux n'existant pas, on les suppose, on
va jusqu'à en créer les apparences de commun accord; d'où la tendance à
l'admettre par consentement mutuel, et même sur la volonté d'un seul
avec conditions de délai; il y a bien la question des enfants, mais n'a-t-on
pas déjà passé outre! C'est là le seul point intéressant; et à rencontre
de ce qui se pratique, il semble qu'il vaudrait mieux pour eux, quel que
soit le motif du divorce, au lieu d'être attribués à l'un, sous réserve de
certains droits concédés à l'autre, que celui auquel ils sont laissés, les ait
sans restriction ni obligation vis-à-vis de la partie adverse; les obtiendrait
celui en faveur duquel le divorce serait prononcé dans les cas d'indignité,
d'inconduite, de sévices et injures graves; celui contre lequel la demande
en divorce aurait été introduite dans le cas d'incompatibilité d'humeur
NOTES. LIV. II, CH. XV. VOL. II, PAG. 436. Pb.533
quand il sera admis, ce qui avec les idées actuelles ne saurait tarder beau-
coup. — Du reste, le mariage lui-même tend à être réduit à sa plus simple
expression. On voudrait le rendre aussi facile que possible à contracter, ne
le subordonner à aucun consentement autre que celui de ceux qui veulent
s'unir; supprimer la puissance maritale, diacun des conjoints ayant mêmes
droits, toute liberté et toute indépendance; le régime de la séparation de
biens deviendrait la règle unique; l'adultère cessant d'être un délit ne serait
plus qu'une cause de divorce, dont l'obtention serait du reste grandement
facilitée, si bien que les seules différences qui subsisteraient encore entre le
mariage et l'union libre, se réduiraient à la publicité donnée à l'union
contractée, l'octroi de la légitimité aux enfants nés pendant sa durée et la
possibilité de liquider les intérêts matériels de chacun après sa dissolu-
tion.
438,
5, Serpunt. — L'auteur parle ici des Juifs et de leur religion; Montaigne
applique son dire à un sujet tout autre.
8, Moyen. — Peut-être; mais l'excès contraire a plus d'inconvénients en-
core; et, à notre époque, la peine de mort est tellement atténuée, la prison
si bénigne à tous ses degrés, la grâce et les réductions de peine sont telle-
ment passées dans les habitudes, que les malfititeurs, dont le nombre, ainsi
que l'audace et la fréquence des méfaits, vont croissant en proportion du
besoin de bien-être et de luxe, conséquence des progrès de la civilisation,
s'en donnent à cœur joie. La publicité des exécutions n'a plus de raison
d'être, n'amenant plus chez le spectateur que cette simple remarque :
« Tiens! ce n'est que cela! » En la supprimant, on ferait cette peine un peu
plus redoutée; en n'abusant pas du droit de grâce, en n'en usant que
lorsqu'il y a des circonstances atténuantes dont il n'a pas été tenu compte,
ou qu'un doute peut exister sur la culpabilité, en un mot comme correctif
d'une erreur possible du jury ; en rendant beaucoup plus pénibles les divers
genres d'emprisonnement et réduisant d'autant la durée des condamnations,
on modifierait rapidement l'état d'esprit de nombre de criminels qui,
actuellement, se disent que ce qui peut leur arriver de pis, c'est de vivre
sans rien faire aux dépens de la société, dans des conditions bien moins
pénibles que s'il leur fallait gagner leur vie par le travail, ce qui est bon
seulement pour les honnêtes gens. — Et pourtant, l'expérience est faite :
Pour parer aux recrudescences de crimes à certaines époques contempo-
raines, les Anglais, qui cependant ont beaucoup plus que nous le respect de
la liberté individuelle, n'ont pas hésité à rétablir temporairement des
moyens de répression tombés en désuétude : le Treadmille où le condamné
est mis automatiquement dans l'obligation de coopérer, à l'aide des mains
et des pieds, à faire tourner une roue; le Cat (le chat à neuf queues) qui
consiste à infliger matin et soir, pendant un nombre de jours déterminé,
un certain nombre de coups dejfouet; ces procédés depuis mis de côté,
sans cesser d'être légaux pour le cas où le besoin s'en ferait de nouveau
sentir, eurent vite raison de ces associations de bandits qui terrorisaient
Londres en étranglant les passants, etc., tout comme nos apaches parisiens
en agissent actuellement avec le couteau et le revolver. Mais, chez nous,
gouvernants et législateurs ont plus souci de jouir de la situation à laquelle
ils sont arrivés, d'assurer leur réélection pour continuer à vivre aux dépens
de la chose publique, que de satisfaire à leurs devoirs essentiels, faire régner
la liberté et refréner la licence, favoriser le bien, poursuivre et punir le
mal; assoiffés de popularité, imbus par calcul d'idées soi-disant humani-
taires, leurs actes démentent leurs paroles, leurs sympathies vont de fait
aux scélérats bien plus qu'à leurs victimes.
9, Argippées. — Hérodote, I\^, tS, dit qu'il ne les connaît que par ouï-dire;
qu'ils sont chauves, ont le nez aplati et ne se nourrissent que de fruits et de
lait. Chacun habite sous un arbre que, l'hiver, il recouvre d'une étoffe de
laine blanche, qu'il a soin d'ôter l'été. Personne ne les insulte, ils n'ont pas
d'armes et sont considérés comme sacrés.
Fb.534 ESSAIS DE MONTAIGNE.
19, Violence. — C.-à-d. peut-être la facilité qu'on a Centrer dans ma maison,
contribue-t-ello à la mettre à l'abri de la violence.
32, Frontières. — Ce n'est pas en effet des places frontières qui sont à cons-
truire. La défense des frontières d'un étal est le propre des armées elles-
mêmes; les fortifications ne devraient être employées que pour couvrir
certains points en nombre très restreint, particulièrement importants en
vue de l'offensive beaucoup plus qu'en vue de la défensive, ceux où sont
nos approvisionnements, et aussi les grandes agglomérations plus particu-
lièrement menacées dont il importe, en raison des ressources qu'elles pré-
sentent, de ne pas laisser l'ennemi s'emparer dès le début sans coup férir.
Les murailles de Chine n'ont jamais dans le passé satisfait à ce qu'on en
attendait, et y satisferont moins encore dans l'avenir, étant donnés les
moyens actuellement mis en œuvre, au nombre desquels il faut compter
l'envahissement du territoire de l'adversaire sans déclaration de guerre
préalable. Vauban, qui à l'époque de Louis XIV avait organisé la défense
de nos frontières sous l'empire de ces idées, reconnut, sur la fin de sa vie,
cette erreur, qu'après 1870 ses élèves, héritiers de sa science mais non de son
génie, ont commise à nouveau, nous amenant à fortifier, une fois encore,
outre mesure notre frontière de l'Est au lieu de renforcer ses effectifs dans
toute la limite du possible, avec ceux qui, pour des raisons de clocher,
demeurent disséminés dans le reste de la P>ance où ils n'ont que faire. S'il
en eût été ainsi, Nancy, bien que sans fortifications, serait à l'abri d'un coup
de main; et, ayant ces troupes stationnées ailleurs, on n'aurait pas été
tenté de les emplojer abusivement à des œuvres de police, pour lesquelles
l'armée n'e.st point faite, qui la discréditent, où se perd la notion du devoir,
auxquelles la nécessité fait que la masse se prête à contre-cœur, non sans
que cependant se produisent quelques rares protestations, qui honorent
leurs auteurs, mais ruinent leur carrière.
36, Riches. — Pauvres et riches s'intéressent au pillage que promet une
incursion sur un territoire étranger; les riches seuls le sont à s'en défendre
sur leur propre territoire.
37, Faitte. — Le père de Montaigne avait, en 1554, réédifié sa maison, en la
fortifiant selon les habitudes et les nécessités de l'époque; Montaigne nous
fait connaître ici que lui-même ne jugea pas à propos de tirer parti de ces
dispositions défensives. Cette maison demeura telle jusqu'en 1859, où ses
descendants s'en défirent. Déjà en partie transformée par les changements
que les acquéreurs y avaient apportés, elle devint la proie des flammes
en 1885, à l'exception de la grosse tour et de quelques communs qui furent
épargnés; elle a été reconstruite depuis, mais sur un plan notablement
différent : seules la tour et la pièce constituant la bibliothèque de Montaigne
qu'il décrit III, 156, ont été maintenues dans leur état primitif.
440,
2, Defortitié. — Henri IV et surtout Richelieu firent en effet démanteler
quantité de ces forteresses particulières.
3, Dangereux. — Regrettable, triste, fâcheux.
6,, Infiables. — Suspectes.
12, Impronidence. — Votre défaut de vigilance et de prévoyance à pourvoir
à votre sûreté. — Montaigne affectionne ces mots négatifs formés avec un
préfixe (dé, il, im, in, ir, suivant le cas), et les forge fréquemment quand ils
n'existent pas.
29, Enregistrable. — La maison de Montaigne, épargnée jusque-là, finit par
être pillée.
29, Ans. — Ces troubles avaient commencé en 1560.
NOTES. LIV. II, r.H. XVI. VOL. II, PAG. 442. Fb.535
CHAPITRE XVI.
442,
19, Hominibus. — Dans l'Évangile de S. Luc, d'où cette citation est tirée, la
phrase est complétée par ces mots : bonae voluntatis {aux hommes de bonne
volonté).
•io, Diogenes. — Cicéron, De Fin., III, 17.
32, Louanges. — « L'art de louer commença l'art de plaire. » Voltaire.
36, Fleurisse. — Traduction d'un vers d'Homère, que Cicéron a également
traduit. De Fin., V, 18.
39, Acquérir. — Cicéron, De Fin., III, 17.
444,
5, Cache ta vie. — Ce précepte, dû à Nicoclès frère d'Épicure, devint un
des principes fondamentaux de l'école. Dans un de ses traités, intitulé : Si
ce mot commun « cache ta vie » est bien dit? Plutarque s'élève avec force
contre cette maxime qu'il considère comme destructive de tous intérêts
sociaux, en détournant de se mêler des affaires publiques, dont le tracas
est incompatible avec la tranquillité; elle est plutôt à entendre comme
signifiant qu'exposés à l'envie comme nous le sommes, il est prudent de
cacher ses avantages pour pouvoir en jouir à l'aise.
• Pour être heureux, n'excitez point l'envie.
Le secret du bonheur est de cacher sa vie. » De la Booissk.
8, Celuy. — Épicurc.
23, Hermacbus. — Cette lettre d'Épicure est dans Cicéron, De Fin., 11, 30,
qui dit Hermarchus; Diogène Laerce, X, 22, la donne comme adressée à
Idoménée, autre disciple de ce philosophe.
446,
1, Metrodorus. — Cicéron, De Fin., 11, 31.
2, Désirable. — Cicéron, De Fin., 111, 17, attribue cette doctrine aux Stoï-
ciens, et ajoute qu'ils ne l'ont admise que parce que, sur ce point, ils
n'ont pu répondre à Carnéade. — Carnéade, député à Rome par ses con-
citoyens, s'y était fait remarquer par son éloquence ; mais une fois, ayant
parlé au Sénat avec un égal talent pour et contre une même question,
Caton fit décider de renvoyer au plus tôt un sophiste aussi dangereux.
8, Fuyr. — Aristote, Morale à Nicomède.
10, Subiect. — Ce traité de Cicéron sur la gloire est' aujourd'hui perdu ;
Pétrarque semble l'avoir possédé. C. de M.
13, Suitte. — Marcellus avait élevé un temple à la Vertu, un autre à l'Hon-
neur, et il fallait passer par le premier pour arriver au second, sym-
bolisant ainsi que la vertu est le principe même de l'honneur.
18, Philosophe. — Montaigne, dont les critiques à l'égard de Cicéron sont
jusqu'ici pour la plupart justifiées, en arrive à l'exagération et à l'injus-
tice. Cicéron aimait passionnément la gloire, comme il aimait la justice
et aussi la liberté à laquelle il a fait le sacrifice de sa vie. Il n'a pas dit
que la gloire fût préférable à la vertu : « Si la vertu, lit-on dans son
Discours pour Milon, pouvait envisager un prix, le plus haut de tous
serait la gloire; elle seule nous console de la brièveté de la vie par les
longs ressouvenirs de la postérité; elle nous rend présent où nous ne
sommes point, elle nous fait vivre même après la mort. »
26, Toy. — Cicéron, De Fin., II, 18.
31, Richesses. — Plotius avait légué toute sa fortune à Peduceus, à l'insu
de sa veuve, à laquelle celui-ci la restitua. Cicéron, De Fin., Il, 18.
34, Cicero. — De Fin., 11, 18. — Un nommé Fadius Gallus, homme extrême-
ment riche, pour éluder une loi qui limitait ce dont pouvaient hériter les
femmes, avait institué comme son légataire S. Rufus, mais en le priant de
transporter tout son héritage à sa fille Fadia. S. Rufus nia cette clause, et.
Fb.536 ESSAIS DE MONTAIGNE.
se retranchant derrière la loi. se borna à abandonner à Fadia ce à quoi
elle avait lég'alement droit.
36, Hortensius. — Quelques intrigants avaient apport<^ de Grèce à Rome
un faux testament d'un nommé Minocius Balbus, homme fort riche. Afin
de recueillir plus facilement la succession, ils s'étaient donné pour cohé-
ritiers Crassus et Hortensius, deux des hommes les plus puissants de l'é-
poque. Ceux-ci soupçonnaient bien la fausseté de l'acte, mais ils n'y avaient
pas trempé et ils ne se refusèrent pas à profiter du crime d'autrui. Ci-
CKRON, De OfT; m, 18.
448,
16, Vouloit. — » La gloire sait la vertu, comme l'ombre suit le corps. »
CiCÉRON.
450,
4, Blessé. — L'éd. de 88 aj. : mais d'Hannibal ie sçay bien qu'on le dit, et de
Scanderberg. — Alexandre l'a été maintes et maintes fois (V. N. I, 486),
parfois assez grièvement, notamment au siège de Tyr, et dans son expédi-
tion contre les Malliens Oxydraques, peuplade du bassin de l'Indus. Na-
poléon l'a été une fois à la cuisse au siège de Toulon, une autre fois au
talon à Ratisbonne, chaque fois sans gravité. — Une blessure à la guerre
ne prouve généralement pas grand'chose. sinon qu'on y était, surtout
actuellement avec la longue portée des armes; bien rares sont celles re-
çues dans l'accomplissement d'un fait méritant une mention personnelle.
Napoléon, à Waterloo, avait un guide pris sur place, suivant son habi-
tude, les cartes n'indiquant que d'une façon générale et sommaire les
mouvements de terrain; ce guide, lié sur son cheval, faisait mauvaise
figure aux balles et aux boulets, il s'agitait sur sa selle, détournait la tète,
se courbait sur l'encolure de sa monture, si bien que l'empereur lui dit
à un moment : « Mais, mon ami, ne remuez pas tant; un coup de fusil
vous tuera aussi bien par derrière que par devant et vous fera une plus
vilaine blessure. » H. Houssaye. Dans ma jeunesse, un de mes camarades,
fort brave du reste, qui depuis a été tué en 1870 à Frœschviller, et qui
avait fait ses premières armes en Crimée où il avait été blessé deux fois
et avait été décoré de la médaille militaire, nous contait, en toute fran-
chise, que sa première blessure, il l'avait reçue alors que derrière une
haie il mettait culotte bas, et la seconde, alors que surpris par les Russes
dans une embuscade il fuyait à toutes jambes; pas plus dans un cas que
dans l'autre, il ne faisait face à l'ennemi.
40, Faire. — C'est-à-dire la satisfaction du devoir accompli. Mais l'homme
est homme; et, outre qu'il y en a peu qui n'aient besoin d'être encou-
ragés dans la voie du bien, c'est un impérieux devoir pour ceux auxquels
cela incombe, que de rechercher et récompenser ceux qui demeurent
ainsi dans l'ombre et de ne pas s'en laisser imposer par ces autres, tou-
jours prêts à se faire valoir, soit en s'exaltant eux-mêmes, soit en recou-
rant à autrui à charge de revanche; lés sociétés d'admiration mutuelle
sont un des plus grands obstacles que le vrai mérite rencontre sur sa
route.
452,
18, Lemetrius. — Sénèque, Epist. 91.
454,
1, Timon. — Passage de Sénèque, Epist. 85, que Montaigne paraphrase.
7, Absence. — Tite-Live, XLIV, 22. — En 168. — « N'ajoutez foi, dit
en substance Paul-Émile au peuple romain, qu'à ce que je vous écrirai;
n'accréditez pas, par votre crédulité, des rumeurs vaines et sans fonde-
ment. 11 y a des gens qui s'érigent en maîtres, critiquent tout ce qui n'est
pas conforme à leur manière de voir; cette habitude est funeste. Je ne
me crois pas infaillible, mais c'est de ceux qui ont de l'expérience, qui
sont sur les lieux et connaissent la situation, que je prends avis. Si donc
il est quelqu'un parmi vous qui se croit à même de me donner quelque
conseil utile, qu'il vienne avec moi, je le défrayerai de tout; autrement
NOTES. LIV. H, CH. XVI. VOL. II, PAG. 4S4. Pb.537
qu'il se taise et saclie que les avis de mes compagnons d'armes me suf-
fisent. » — Semblable propos serait également de mise aujourd'hui en
France: mais ce n'est pas à un personnage ayant le courage de le tenir
que l'on confierait le commandement de nos armées; et en tout cas, si,
y étant nommé, il se révélait tel, de semblables exhortations de sa part
demeureraient lettre morte, et le premier prétexte venu, le moindre échec
sans conséquence, toujours possible, le feraient indubitablement tomber
en disgrâce. — Ce discours de Paul-Émile est donné par l'avant-dernier
chapitre de Tite-Live qui nous ait été conservé, car nous ne possédons
qu'une faible partie de son Histoire qui allait jusqu'à l'ère chrétienne, et
ce qui nous en reste s'arrête à l'an 166. Le pape Grégoire, vers la fin du
vi" siècle, le jugeant dangereux en raison des fréquents prodiges qu'il
rapporte, le comprit dans la proscription des livres profanes qui lui est
attribuée et fit brûler tous les manuscrits qu'il en put découvrir.
8, Destourbier. — Trouble, obstacle, empêchement; du latin dislurbare,
empêcher.
12, Consentement. — Fabius, par sa prudence, s'étant attiré beaucoup de
critiques et Minutius, son chef de cavalerie, ayant obtenu quelques légers
succès en combattant contre la défense qu'il lui en avait faite, avait vu
son autorité répartie entre eux deux, et pour ne pas l'afi'aiblir avait pro-
posé à son ancien lieutenant de commander à tour de rôle. Celui-ci,
pour rester maître de ses actions, avait préféré répartir les troupes entre
eux. Peu après, il se faisait battre et n'était sauvé que par Fabius, auquel
spontanément il fit amende honorable, en même temps qu'il se replaçait
sous ses ordres (217).
34, Main. — Il est ici question de l'anneau de Gygès. Platon, République, II,
3; CirÉRON, De Off'., III, 9. — Gygès était le favori de Candaule, roi de Lydie
(Asie Mineure). Candaule, fier de la beauté de .sa femme, la lui fit voir
toute nue; celle-ci, outragée, mit Gygès dans l'alternative de périr lui-
même ou de tuer le roi ; il prit ce dernier parti et épousa la reine et
monta lui-même sur le trône (VIP). Platon fait de Gygès un berger et ra-
conte qu'ayant trouvé dans les fiancs d'un cheval d'airain un anneau ou
bague merveilleuse qui, en tournant le chaton à l'intérieur de la main,
rendait invisible celui qui le portait, il en profita pour séduire la reine
et assassiner le roi; et il ajoute que si un tel anneau était en la posses-
sion d'un sage, il ne s'en prévaudrait pas pour faire le mal, les honnêtes
gens considérant si une chose est honnête et non si elle est ignorée.
456,
17, Herostratus. — Le temple de Diane à Éphèse (Asie Mineure), qu'Éros-
trate brûla (356), dans le but de s'illustrer par quelque moyen que ce fût,
était regardé comme une des sept merveilles du monde. (On désigne com-
munément sous ce nom, sans toutefois que l'accord existe à cet égard :
1° les jardins suspendus et les mwrs de Babylone; 2° les pyramides d'E-
gypte; 3» le phare d'Alexandrie; 4° le colosse de Rhodes; o° le Jupiter
Olympien de Phidias; 6° le tombeau de Mausole; 7° le temple d'Ephèse).
L'incendie de ce temple eut lieu la nuit même de la naissance d'Alexandre
le Grand. Les Ephésiens, pour déjouer les calculs du fou qui en était
l'auteur, rendirent un décret qui défendait sous peine de mort de pro-
noncer son nom; c'était le meilleur moyen de les réaliser. — La réflexion
que relate Montaigne à son sujet, émane de Valère Maxime, VIII, 14, et
non de Trogue-Pompée.
17, Capitolinus. — Tite-Live, VI, II. — Après la bataille de l'Allia, Man-
lius, voyant Rome au pouvoir des Gaulois, se jeta dans le Capitole. Cette
fortere.sse elle-même allait tomber aux mains des Barbares qui déjà en
escaladaient les murs, lorsque Manlius, éveillé par le cri des oies sacrées
que l'on y noumssait, prit les armes et précipita l'ennemi du haut des
murailles, ce qui lui valut le nom de Capitolinus (390). Dans la suite,
aspirant à la tyrannie et accusé devant le peuple, il sut se faire absoudre
en montrant le Capitole qu'il avait sauvé; mais une autre fois l'assemblée
Fb.538 ESSAIS DE MONTAKINE.
s'étant réunie dans un autre lieu d'où on ne pouvait apercevoir ce théâtre
de ses exploits, il fut condamné à être précipité du haut de la roche
Tarpéienne (384).
',.'0, Parle. — Nous avons plus de souci qu'on parle de nous, (|ue de la façon
dont on en parle.
23, Autruy. — Il semble que pour être connu, il faille en quelque sorte
commettre sa vie...
26, Fantastique. — Boileau, dans une de ses épitres, blâme égale ment^ cette
tendance à trop agir avec la préoccupation de ce que les autres pourront
en penser :
« C'est là de tous nos maux le fatal fondement;
Des jugements d'aulrui nous tremblons follement.
Et chacun, l'un de l'autre, adorant les caprices.
Nous cherchons hors de nous nos vertus et nos vices. »
456,
1, Surnom. — Ce nom d'Eyquem, que l'auteur qualifie de surnom (mais
au xvi" siècle, surnom s'employait souvent comme synonyme de nom), était
bel et bien son nom de famille, et il est le premier qui l'ait abandonné. —
Son bisaïeul, Ramon Eyquem, habitait le village de Blanquefort en Médoc,
à quelques kil. N.-O. de Bordeaux, et avait dans cette dernière ville une
maison de commerce de vins, de pastels et de poissons salés, située près
du fort du Ha (actuellement le palais de justice), dans l'espace existant entre
ce fort et l'église cathédrale de Saint-André. Ce Ramon acheta, en 1478,
la maison noble de Montaigne (à environ cinq lieues en aval de Bergerac),
dont son arrière-petit-fils prit le nom à l'exclusion du sien, ce qui se fai-
sait et se fait encore communément. — Ce nom d'Eyquem, il est vraisem-
blable que Montaigne ne l'a supprimé qu'après la mort de son père et après
avoir quitté ses fonctions de conseiller, car on trouve encore les deux
noms accolés dans le passage du testament de La Boétie où celui-ci lègue
ses livres et papiers à M. Michel Ayquem de Montaigne, conseiller, etc.
— Ce nom, qui semble venir du flamand Ecke (chêne) et du germain
Heim (hameau, habilation), existant en Gascogne et se retrouvant en An-
gleterre, il est probable que c'est le fait des alliances contractées entre
Gascons et Anglais durant les trois siècles pendant lesquels la domination
étrangère s'est maintenue dans cette partie du midi de la France.
4, Place. — L'autre nom de Montaigne, c'est Michel, son prénom qui, en
effet, pouvait et a dû être attribué à bien d'autres.
6, Fauorir. — Favoriser, donner du relief; du latin favere qui a le même
sens; c'est un mot que comme un certain nombre d'autres Montaigne a
fait passer de son chef dans notre langue. Favorir l'inanité, c'est favoriser
le néant, donner de l'importance à ce qui n'est pas.
7, Inanité. — L'éd. de 88 aj. : quel proufit m'en reuient-il?
9, Violae. — Montaigne change ici le sens de la citation, où, en outre, il
substitue les mots Laudat posteritas à Laudant convivfe.
34, Nous. — Combien peu de Grecs et même de Romains, malgré tant d'écri-
vains... dont les noms sont parvenus jusqu'à nous !
« Un redoutable instant nous détruit sans réserve:
On ne voit au delà qu'un obscur avenir;
A peine de nos noms un léger souvenir
Parmi les hommes se conserve. » M"" Deshoulières.
37, France. — Montaigne ne prévoyait pas les progrès que devait faire l'im-
primerie et le développement que prendraient ses moyens de vulgarisation.
— Une autre raison du reste qui a fait qu'à rencontre de ses prévisions, le
souvenir de ces temps troublés est de ceux de notre histoire qui se sont
le moins effacés, c'est qu'un des effets des guerres civiles est de faire que
plus qu'en toute autre situation, chacun se montre à découvert, avec ses
NOTES. LIV. II, CM. XVI. VOL. II, PAC. 4;i8. Fb.H.^O
talents et ses vices i)rédominants, et qiae les bouleversements profonds et
imprévus qui en résultent, modifient souvent du tout au tout la fortune
des individus et parfois aussi celle des classes de la société et des partis
qui la divisent. Qui connaîtrait Cromwell, sans la révolution de 1649;
Napoléon, sans celle de 1793; Gambotta, sans celle de 1870? — Nonobstant,
l'observation de Montaigne est très juste; aujourd'hui les noms d'un beau-
coup plus grand nombre reçoivent de la publicité, mais combien éphé-
mère! Bientôt enfouis dans les bibliothèques, ils, y dorment du plus pro-
fond sommeil, à jamais ignorés tout comme avant, en dépit des efforts,
pour de bien rares exceptions, de quelque érudit en mal de réputation
pour lui-même; on peut même dire plus : notre époque, avec ses idées
utilitaires, plus préoccupée du présent et de l'avenir que ses devancières, en
dehors de ceux qui y ont un intérêt direct, se soucie au fond beaucoup
moins qu'elles du passé.
38, Muses. — Elles étaient au nombre de neuf, et présidaient : Clio, à l'his-
toire; Euterpe, à la musique; Thalie, à la comédie; Melpomène, à la tra-
gédie; Terpsichore, à la danse; Erato, à l'élégie; Polymnie, à la poésie
lyrique; Uranie, à l'astronomie; et Calliope, à l'éloquence et à la poésie
héroïque.
38, Battaille. — Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens.
460,
8, Faueur. — C'est ce qu'un poète latin a rendu : « Habenl sua fala libeUi
{Les livres ont leur destinée). » Cet aphorisme, après avoir été attribué aux
plus célèbres poètes latins, se trouve être d'un des plus obscurs, Teiien-
TiANUs Maurus; il est lui-même un exemple de la vérité de sa réflexion,
car on ne cite guère de lui que ce fragment de vers, et encore en le
crojant d'un autre (Larousse). — Ceux qui suivent, assez médiocres, du
reste, d'un auteur non moins inconnu, expriment cette même idée, en la
développant davantage :
« L'esprit seul ne saurait faire vivre un écrit,
Chaque jour nous en donne une nouvelle preuve.
Il faut plus, si du temps on veut franchir l'épreuve.
Que d'auteurs qu'on a lus, que de livres de prix...
Enveloppent le poivre, ou sont mangés des vers!
Seule la destinée éternise les vers. •
12, Assignées. — Rangées.
40, Traian. — Fils d'un soldat de fortune élevé aux honneurs par Vespasien,
Trajan se montra lui-même brave et habile. Élevé à l'empire, il refréna
les Daces et les Parthes, qui le menaçaient; à l'intérieur, il fit fleurir la
justice, cesser les délatit)ns, s'environna de capacités de tous genres, allégea
les impôts et mérita, au moins par sa vie publique, d'être considéré comme
le meilleur des empereurs romains. ^
40, Néron. — Empereur grâce aux intrigues d'Agrippine sa mère qui l'avait
fait adopter par Claude, au détriment de son propre fils, il affecta beau-
coup de douceur au début de son règne, mais bientôt se montra cruel et
débauché, s'entoura de courtisanes, d'histrions, prit part aux jeux du
cirque et finit par se livrer aux pires atrocités, ne reculant devant aucun
crime, assa-ssinant successivement Britannicus, sa mère, sa femme; accusé
d'un incendie qui consuma la moitié de Rome, il en rejctg, l'accusation sur
les chrétiens et ouvrit contre eux une ère de persécutions qui fut des plus
violentes; fit périr quiconque lui déplaisait ou le gênait, et lui-même, ren-
versé par une conspiration amenée par ses excès, eut à peine le courage
de se tuer. Il demeure, dans l'histoire, le type le plus accompli d'un tyran
exécrable, d'un monstre de cruauté.
462,
4, Platon. — Lois, XII.
9, Pédagogue. — Platon et Socrate. — La plupart des ouvrages de Platon
Pb,540 ESSAIS DE MONTAIGNE.
sont présentés sous forme de dialogues. Le personnage principal expose le
fond du sujet: ses auditeurs, par leurs questions et leurs objections, aident
à son développement. Dans presque tous, c'est Socrate qui est ce person-
nage principal; dans les Lois, c'est Platon lui-même qui, par modestie,
dissimule sa personnalité sous celle d'un Athénien étranger.
13, Miracles. — Diogène Laerce, Platon, III, 26.
23, Numa. — V. N. II, 252 : Numa.
23, Sertorius. —Avait, dans la guerre civile entre Sylla et Marins, embrassé
le parti de ce dernier; quand il fut vaincu, Sertorius passa en Espagne
(84), s'y rendit indépendant et se maintint tel jusqu'à sa mort. Il avait
établi dans son armée un simulacre de Rome : un sénat, des consuls, etc.;
il inspirait à ses soldats une confiance aveugle et leur avait persuadé qu'il
était en commerce avec les dieux, par l'entremise d'une biche blanche dont
il se faisait suivre partout; il fut assassiné par un de ses lieutenants jaloux
de sa supériorité,
27, Zoroastre. — V. N. II, 362 : Zoroastre.
29, Oromazis. — Principe du bien, comme Ahriman était^ celui du mal,
c'est lui qui avait créé le monde, la lumière, la chaleur, les puissances
bienfaisantes; il est constamment en lutte contre l'esprit des ténèbres.
29, Trismegiste. — Trismégiste, législateur des Égyptiens, leur donna des
lois au nom de Mercure; cette double élision se reproduit dans les membres
de phrase qui suivent.
30, Zamolxis. — V. Lexique.
30, Cbarondas. — Se perça, dit-on, de son épée, parce qu'il avait enfreint
par mégarde une loi qu'il avait portée lui-même, qui défendait de se pré-
senter en armes dans l'assemblée du peuple; à celui qui lui faisant obser-
ver qu'il était en défaut en enfreignant sa loi : « Non, dit-il en se tuant, je
la confirme. •
31, Minos. — Gouverna avec tant de sagesse, que les poètes en ont fait un
des trois juges des enfers avec Rhadamante, son frère, et Éaque, roi d'Égine.
31, Lycurgus. — V. N. II, 220 : Lycurgus.
32, Dracon. — Ses lois criminelles étaient si rigoureuses qu'on alla jusqu'à
dire qu'elles étaient écrites avec du sang; aussi ne tardèrent-elles pas à
tomber en désuétude.
32, SoloB. — Un des sept sages de la Grèce; reçut mission vers l'an 593,
des Athéniens, de leur donner des lois au lieu et place de celles qu'ils
avaient reçues de Dracon; y substitua un code sage, humain; établit en
même temps une constitution qui était un mélange habile de démocratie
et d'aristocratie, et calma ainsi momentanément les troubles violents dont
la ville était l'objet incessant et qui reprirent de plus belle moins de dix ans
après, pour aboutir à la tyrannie de Pisistrate.
34, Moïse. — Né en Egypte, où les Hébreux étaient en quelque sorte captifs.
Moïse fut exposé dès sa naissance sur le Nil, en vertu des ordres de Pharaon,
roi d'Egypte, qui voulait faire périr tous les enfants màles de cette race;
il fut sauvé par la fille même du roi, élevé à la cour et instruit dans les
sciences des Égyptiens. Informé de sa naissance, il s'enfuit au désert et
reçut, de Dieu, mission de délivrer les Israélites de la servitude; il y parvint
(1645), et mourut, les ayant amenés jusque sur les confins de la terre de
Judée, et leur ayant donné, dans l'intervalle, les tables de la loi que lui-même
avait reçues de Dieu, sur le mont Sinaï. Moïse est l'auteur du Pentateuque,
c'est-à-dire des cinq premiers livres de l'Ancien Testament, qui renferment
l'histoire sacrée depuis la création du monde jusqu'à l'entrée des Hébreux
dans la Terre promise, un code de lois et un recueil de prescriptions reli-
gieuses. — Il est à observer que le moyen employé par Moïse pour faire
accepter ses lois, est analogue à celui dont ont usé les législateurs dont
Montaigne vient de parler : II s'entretenait seul à seul sur le Sinaï avec
Dieu, par des temps d'orage et de brouillard, le peuple étant consigné à
distance {Exode, XIX).
35, Bedoins. — L'islamisme.
NOTES. LIV. II, CH. XVf. VOL. II, PAG. 462. Fb.541
35, louinuille. — Dans ses Mémoires, 58.
464,
6, Escorce. — V. N. I, 62 : Tout.
CHAPITRE XVII.
Presumption. — Dans ce cliapitre, Montaigne dit d'excellentes choses et
donne des détails sur son caractère et la nature de son esprit, sur sa per-
sonne, ses écrits, son style, son défaut de mémoire, son ignorance des
choses les plus communes, sur son irrésolution qu'il appelle une cicatrice
bien mal propre à produire en public.
21, Valeur. — De notre mérite.
466,
27, Fuit. — Pour avoir écrit leurs mémoires.
31, Propensions. — Il n'est pas étrange, il n'est pas extraordinaire que nous
ayons des qualités, des penchants, etc.
36, Consente. — Qui s'accordait, qui était en harnionie avec...
37, Gras. — Add. des éd. ant. : Estant douez d'vne extrême beauté, ils s'y
aidoient vn peu, sans y penser, par mignardise.
37, Csesar. — Plutarque, César, I, à la fin. — On a dit la même chose de
Pompée. Sénèque, Contr., III, 19; Plutarque, De l'Utilité à retirer de ses
ennemis, 6.
39. Bincer. — Froncer, rider ; du latin ringi, grogner en montrant les dents,
en parlant des chiens enragés.
42, Salutations. — Var. de 1588 : Bonnetades.
468,
2, Gloire. — Par orgueil.
9, Constantius. — L'empereur Constance II, fils de Constantin; Ammien
Marcellin, XXI, 14, se borne à parler de sa prestance et de sa dignité
hautaine; le surplus semble une amplification de Montaigne.
15, Moy. — Les gestes et le port du corps, dont il a parlé plus haut.
17, Vice. — A une vaine et sotte fierté, ainsi qu'il est dit également au com-
mencement de ce paragraphe.
32, Maistrise. — Là possession.
470,
4, Eftect. — Lorsque je me propiîse de faire telle ou telle chose, je n'ai
point d'avance la notion exacte des moyens dont je pourrai user pour
réussir, et je n'en suis instruit que par le résultat.
7, Desseigne. — Je les détermine, j'en forme le dessein.
30, Escriture. — L'Ecclésiaste dit : « Ce désir infini de savoir qui est né
avec nous, a été donné par Dieu à l'homme, comme une démangeaison et
une lèpre, pour le tourmenter sans aucun fruit. » — Les légendes d'Eve
chez les chrétiens, de Pandore chez les anciens, sont la personnification
des méfaits de la curiosité.
37, Prix. — Je me regarde comme étant de la classe commune et ordinaire
des hommes, et m'en contente; les défauts les plus communs, les plus ré-
pandus dans les basses classes, je les ai et ne les désavoue ni ne m'en
excuse; la seule chose que j'apprécie en moi, c'est que je sais ce-que je vaux.
472,
5, Foiblesse. — Les éd. ant. aj. : le me connoy tant, que s'il estait party de
moy chose qui me pleut, ie le deuroy sans double à la fortune.
7, Ouurer. — A l'employer, à la mettre en œuvre.
11, Poësie. — II est sur que c'est l'espèce d'ouvrage qui souffre le moins la
médiocrité, et c'est bien de la poésie et des poètes qu'on peut dire : « Qui
ne vole au sommet, tombe au plus bas degré. » NaigeÔn.
18, Est. — Ce mot manque dans les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux.
19, Peuples. — Des peuples tels que ceux dont il va être parlé, qui, malgré sa
puissance, marquèrent si vivement le mépris qu'ils éprouvaient pour la
mauvaise poésie de Denys.
Fb.542 ESSAIS DE MONTAIGNE.
•29, Olympiques. — Ces jeux se célébraient tous les quatre ans à Olympie.
Pendant leur durée les hostilités étaient suspendues; les femmes n'j- pou-
vaient assister; seuls les Grecs (y compris ceux de leurs colonies) pouvaient
y prendre part. Ils comprenaient des courses de chars et de chevaux; —
des courses à pied; — la lutte, où les adversaires étaient absolument nus et
oints d'huile; — le pugilat, où ils avaient la tête protégée par une calotte
d'airain et usaient de gantelets en lanière de cuir; cet exercice, toujours
sanglant, était souvent mortel et ceux qui s'y livraient mouraient presque
tous avant l'âge; le pancrace, comprenant la lutte et le pugilat; mais les
poings étaient nus, il était interdit de mordre et le combat se prolongeait
jusqu'à ce que l'un des adversaires se déclarât vaincu, aussi y avait-il
souvent mort d'homme; — le panthèle, se composant, comme l'indique
son nom, de cinq épreuves : la lutte, le saut, la course, le jet du disque et
celui du javelot; les enfants y prenaient part dans un concours particulier.
— Ils comportaient aussi des concours de poésie. — Les vainqueurs étaient
particulièrement honorés; les poètes, les sculpteurs ont maintes fois célébré
leurs hauts faits; Chylon, un des sept sages, mourut de bonheur en em-
brassant son (ils victorieux.
De nos jours on a cherché à faire revivre en Grèce, quelque peu modifiés
en raison des temps, ces jeux auxquels ce nom a été maintenu, bien qu'ils
aient lieu à Athènes. En 1906, les résultats des principaux exercices ont été
les suivants : Course, dite de Marathon, exécutée sur le parcours suivi par
ce guerrier qui, après la bataille de ce nom (490], vint en toute hâte à
Athènes annoncer la victoire et, sa mission remplie, tomba mort d'épuise-
ment aux pieds des magistrats : la distance à franchir, l'ikil., l'a été en
2" 51 min. : il est à observer que la route est dure et en mauvais état;
même parcours (aller et retour) sur vélocipède en 2" 41; saut en hauteur
avec élan, l'",T7; sans élan, 1"',56; lancement du disque, 35'", 17.
30, Faillit. — Manqua, ne put aborder.
33, Poëme. — Diodoke de Sicile, XIV, 104.
43, Leneïens. — Diodore de Sicile, XV, 74. — La tragédie dont il est ici ques-
tion, présentée par Denys aux fêtes Lenéennes (fêtes qui avaient lieu à
Athènes en l'honneur de Bacchus, et se célébraient par des concours dra-
matiques), a nom ■< la Rançon d'Hector ».
474,
1, Conceut. - V. N. I, 28 : Tyran.
19, Estage. — Les éd. ant. portent : Et en mon imagination mesmes, ie ne
conçoy pas les choses en leur plus grande perfection, au lieu de : « Et cette...
estage ».
25, D'y aspirer. -^ Var. des éd. ant. : de me le représenter.
27, Quelqu'vn. — Ce quelqu'un, c'est Xénocrate. Plutarque, Préceptes du
mariage, 26.
30, Gratiis. — « L'amitié même a besoin d'elles », a dit Moncrif. Dans une
épître à Fontenelle, le cardinal de Bernis écrit :
• Les Grâces seules embellissent j Et nos talenls son des ressorts
Nos esprits, ainsi que nos corps; I Que leurs mains légères polissent. »
36, Moy. — C'est pour me conformer à moi-même, être fidèle à mon caractère.
476,
1, Rabirius. — • Orateurs qui^ au dire de Cicéron, Acad., I, 2, dissertaient
sur toutes choses, sans art, en style vulgaire et sans jamais conclure; ils
appartenaient à la secte des Épicuriens, lesquels méprisaient la rhétorique
et la dialectique.
II, Les raisons. — Les éd. ant. font précéder ces mots de ceux-ci : Ce que
i'ay à dire, ie le dis tousiours de toute ma force.
13, Commune. — De sujets communs, de choses vulgaires.
15, Exorde. — Cicéron, De Universo, 2. — L'exorde est la première partie
• d'un ouvrage. *
20, Profonder. — Approfondir.
NOTES. LIV. II, Cil. XVII. VOL. II, PAG. 476. YbM.i
26, lamais. — Cela est particulièrement vrai pour Platon, qui est souvent
bien vide de choses et dont le pins grand mérite consiste dans le style et
l'élocution. Naigeon.
30, Affection. — Var. des éd. ant. et de l'ex. de Bordeaux : Uaffeclation;
version qui a été introduite dans la traduction.
34, Platon. — République, X.
40, Seneque. — Montaigne n'a ni les saillies de Sénèque, ni en général son stylo
et sa manière; il est plus dense, plus serré, plus nerveux; il ne revient pas
aussi souvent que Sénèque sur les mêmes pensées et ne cherche pas autant
que lui à faire de l'esprit; comme lui, son style est heurté, inégal, mais la
manière et la tournure d'esprit diffèrent notablement. Naic.eox.
41, Taire. — L'ex. de Bord, porte : faille; variante adoptée dans la traduction.
478,
6, Tacitus. — De Oratoribus, à la fin.
10, Greu. — - Ce n'est pas le langage de Montaigne, c'est son imagination
qu'il faut i-egretter. • Voi.tauie. — Nonobstant, ce langage a bien son. mérite,
eu égard à Tétat de la langue française à l'époque où il écrivait.
16, Anffoulemoisin. — Ou mieux, comme porte l'ex. de Bordeaux : Angou-
moisin, patois de l'Angoumois et non d'Angoulème.
18, Gascon. — Les éd. ant. aj. : pur et désirerais le sauoir.
25, Maistre lean. — Est ici synonyme de savant. Cette qualification de
« maistre », en dehors de son sens ironique (V. N. I, 112 : Maistre lehan),
était aussi donnée aux lettrés et à ceux qui excellaient dans un art quel-
conque ; elle est devenue courante à notre époque, particulièrement à l'égard
des gens du barreau et de bien d'autres encore; quoique fréquemment
employée abusivement, elle est de celles qui flattent le plus ceux auxquels
elle s'adresse, et bien rares sont ceux qui s'en offusquent.
480,
16, Beauté. — C'est bien plutôt la force, la finesse, la ruse, en un mot ce droit
« ... qu'un esi)rit, vaste et ferme en ses desseins,
A sur l'esprit grossier des vulgaires humains »,
qui ont donné aux uns le pouv(Tir sur les autres. Les avantages corporels
ont contribué sans doute à établir, ou du moins à préparer cette supériorité ;
mais la vraie source de ce pouvoir, et ce qui a servi à le conserver chez
ceux qui en jouissaient, n'est autre que l'inégalité des facultés intellectuelles.
La force physique asservit un individu à un autre individu, mais elle ne
lui soumet pas une multitude; s'il est plus fort que tel ou tel homme, il est
plus faible que trois, que quatre, que dix; mais un degré supérieur d'intel-
ligence suffit pour fonder cette prééminence d'un individu sur tout un
peuple. Lucrèce n'a pas manqué de joindre sur ce point à la force physique
la supériorité de l'esprit, et s'il assigne également une grande influence à
la beauté, c'est lorsqu'elle se trouve réunie à la force corporelle et au génie.
Naigeon.
23, Présence. — Prestance.
25, Haulteur. — Végèce, I, 5.
28, Doigt. — L'Église fait de même pour ses prêtres, et, indépendamment
des autres conditions à remplir, n'accepte pas, pour ces fonctions, ceux de
taille trop au-dessous de la moyenne, ou affectés de défauts physiques qui
prêteraient à la raillerie.
30, Militaire. — S'il n'a pas cette taille commune, déjà assez faible, que le
Courtisan exige pour son gentilhomme, et s'il était au-dessous, je n'en
voudrais pas comme soldat.
31, Aristote. — Morale à Nicomaque, IV, 7.
34, Procerité. — Haute taille ; mot forgé, par Montaigne, du latin pruceritas,
grandeur.
34, Personnes. — Aristote, Politique, IV, 4, le dit des Éthiopiens; en ce
qui concerne les Indiens, c'est Strabon qui rapporte que certains d'entre
eux choisissaient pour roi lo plus beau d'entre les concurients.
Fb.o44 ESSAIS DE MONTAIGNE.
482,
2, Hominum. — La question de la beauté de Jésus-Christ a été souvent
débattue. Montaigne donne ici la prophétie de David dix siècles avant sa
venue : « Il est le plus beau des hommes » ; d'autre part, deux siècles
après, le prophète Isaïe disait : « Nous l'avons vu, il n'avait ni éclat, ni
beauté » ; on concilie ces deux témoignages opposés en objectant qu'Isaïe
le représente au moment de la Passion, quand il est abreuvé d'outrages
et en proie à la souffrance. Ce qui est, c'est qu'aucune constatation pou-
vant être tenue pour authentique, n'existe. Ceux qui en tiennent pour
l'opinion de David font surtout valoir que du fait même de sa divinité,
il ne pouvait en être autrement; les autres, que s'il en eût été ainsi, cela
eût été immanquablement consigné dans les documents de l'époque ayant
trait à lui et notamment dans les évangiles: ce qui porte à adopter une
opinion moyenne et à dire qu'il est probable qu'au point de vue physique,
rien en lui n'attirait particulièrement les i-egards, mais que la sublimité
de sa vie a fait croire à la beauté de ses traits.
2, Platon. — République, VU.
7, Pbilopœmen. — L'éd. de 80 porte : Phocion (ie puis aisément me mes-
conter aux noms, mais non pas à la substance). — Le fait est tiré de Plu-
TARQCE, Philopœmen, 1. Philopœmen était le généralissime de la Ligue
achéenne (ligue qui subsista de 281 à 146), constituée par les principales
villes du Péloponnèse (Grèce), pour sauvegarder leur indépendance et dont
pendant longte-mps il fit triompher les efforts; il mourut les armes à la
main; on l'a surnommé le dernier des Grecs. A des talents militaires
sérieux, il joignait toutes les vertus civiques.
11, Pbilopœmen. — Var. de l'éd. de 80 : Phocion.
28, Maladies. — Les éd. ant. à 88 portent : quoyque ie m'en sois serui assez
licentieusemenl, au lieu de : « rarement... maladies ».
31, Vns. — Ce qui donne à penser que ceci a été écrit un peu après 1573,
« pieça » n'existant pas dans les premières éditions.
37, Euntes. — C'est ce qui fait que les contemporains s'étonnent souvent
de ne ])as reconnaître certains personnages dans les statues qu'on leur
élève après leur mort; c'est qu'avec juste raison le sculpteur fait choix
le plus souvent, pour les représenter, de l'époque où, dans la plénitude de
leurs moyens, ils ont accompli ce à quoi ils doivent de se survivre. Si
notre image doit passer à la postérité, n'est-il pas juste que ce soit tel que
nous étions « avant d'avoir subi du temps l'irréparable outrage » ? C'est ce
qui conduisit la reine Victoria d'Angleterre, alors octogénaire, à faire faire,
dit- on, sa statue la représentant à vingt ans, dans tout l'éclat de sa jeunesse
et de sa beauté, qui aurait été déposée, à l'insu de tous, dans une chapelle
close et à demi enfouie sous les ronces d'une de ses demeures seigneu-
riales, et découverte par hasard quelques années après sa mort, avec cette
mention « qu'elle l'avait fait faire afin que l'on sut qu'elle avait été jolie
femme et épouse aimée ».
484,
6, Gourdes. — Pesantes, maladroites; du latin gurdus qui, eu langage
trivial, signifiait sot, stupide; de gourd, vient engourdir.
8, Clerc. — A part cela, en dépit de ces défectuosités qui n'entachent pas
le fond, j'en sais autant qu'un autre. — Clerc est à prendre ici dans le
sens de savant, capable, comme dans la fable de La Fontaine « les Ani-
maux malades de la peste » :
« Un loup, quelque peu clerc, prouva par sa harangue
Qu'il fallait dévouer ce maudit animal. ■
10, Plunae. — Avant que l'usage des enveloppes de lettres se fût généra-
lisé, on pliait celles-ci pour les fermer; et avant l'invention des plumes
métalliques qui ne remonte guère qu'à quatre-vingts ans, on écrivait avec
des plumes d'oie, que chacun taillait pour s'en servir.
NOTES. LIV. II, CH. XVIF. VOL. II, PAG. 484. Fb.545
12, Oyseau. — Dans la chasse au faucon, et aussi avec d'autres oiseaux y
employés, chasse qui ne se pratique plus guère aujourd'hui, l'oiseau prêt
à être lancé, était encapuchonné et porté sur le poing, jusqu'au moment
où on le lâchait sur le gibier.
24, Aurum. — Les Ilots du Tage roulent de l'or en petite quantité.
26, Soing. — Montaigne avait d'abord écrit : le ne treuue rien si chèrement
acheté que ce qui me coiiste du souing; addition portée sur l'ex, de Bord,
et qui finalement a été rayée.
36, Inquiétude. — La parenthèse et ce qu'elle renferme ne figurent pas sur
le manuscrit de Bordeaux qui porte : et en im tel degré de sens que i'ay senti
en auoir occasion; addition dont il a été tenu compte dans la traduction.
38, Austris. — Les vents étaient fils du Ciel et de la Terre. Ils avaient pour
roi Eole, qui les tenait enfermés dans les cavernes des îles Eoliennes (auj.
Lipari, au x\. de la Sicile), d'où il les déchaînait sur la terre et les mers;
les principaux étaient : Eurus, le vent d'orient; Notus et Auster, les vents
du midi; Borée et Aquilon, les vents du nord; Zéphyr, celui d'occident.
Myth.
41, Contenter. — Je n'ai eu besoin que de la suffisance de me contenter
de ce que j'avais. — Les éd. ant. commençaient cette phrase ainsi : Estant
né tel, qu'il ne m'a fallu mettre en queste d'autres commodités.. .
486,
18, Mises. — De mes dépenses.
21, Furibus. — Montaigne détourne ici les paroles d'Horace de leur vrai
sens, pour les adapter à sa pensée.
488,
10, Habillage. — Par l'incertitude de les prévenir ou de les atténuer.
23, Gaudisseur. — Railleur. Gaudir, c'est se moquer par jeu et en riant. Nicox.
490,
16, Passé. — Les auteurs anciens qu'il affectionnait.
24, Sont. — Dans une édition des Essais (Lefebvre, Lyon, 1595), on a sup-
primé, comme injurieux pour la nation, ce passage qui relate un propos
que certains ont attribué au chancelier Michel de l'Hôpital. Tite-Live ne
nous avait pas beaucoup plus ménagés, dans ce passage que Rabelais,
dans Gargantua, traduit de la sorte : « Telle est la nature et la complexion
des Français, qu'ils ne valent qu'à la première pointe : lors, ils sont pires
que des diables; mais s'ils séjournent, ils sont moins que femmes. »
492,
8, Vtiles. — C.-à-d. un prince ne peut faire ses affaires (réussir) qu'en
se conciliant la bonne volonté (l'affection de son peuple); et nulles autres
qualités (plus que celles qui viennent d'être indiquées) ne peuvent lui
gagner cette affection, lui être plus utiles.
16, Plier. — L'ex. de Bord, porte tordre, qui est bien plus expressif.
26, Humain. — Les éd. ant. portent : tel qu'il est, car il n'y a rien qui ne
soit digne d'estre veu, au lieu de : « Tout y ... humain ».
26, Aristote. — Morale à Nicomaque, IV, 8.
29, Apollonius. — Sentence rapportée par Philostrate.
32, Sert. — Parce que cela lui sert, lui est utile.
38, Sottise. — « 11 y a des vérités qu'il faut laisser au fond de leur puits. »
— « Les injures sont souvent des vérités sans voile. » — « La vérité est
utile à qui l'entend, nuisible à qui la dit. » Térence, Andrienne.
494,
6, Princes. — Louis XI, Charles VIII.
8, Macedonicus. — Aurelius Victor, De Viris ill.,66. — Nombre d'éditions
postérieures à 1595 ajoutent ici : et publier. Cette variante, étant dans le
sens de la phrase, a été adoptée dans la traduction, bien que ne se trou-
vant ni dans les éd. antérieures, ni dans l'ex. de Bordeaux.
9, Régner. — Maxime favorite de Louis XL
20, Chose. — Donneraient un conseil de quelque utilité.
33, Enfance. — En 1537; Montaigne avait quatre ans.
ESS.tlS DE MONTAIGNE. — T. IV. 35
Fb.546 ESSAIS DE MONTAIGNE.
496,
•2, Dissimulé. — Cette phrase est à lier avec le membre de phrase qui ter-
mine l'avant-dernier alinéa : « Qui est desloj^al enuers la vérité, l'est aussi
enuors le mensonge » ; il en était ainsi dans les éd. ant. où l'alinéa
intoniRuliaire n'existe pas.
17, Aristippus. — Dior.f;NE Laerçe, II, 68.
21, Tout. — Jlontaigne s'est déjà plaint de la faiblesse de sa mémoire, liv. I,
ch. IX (I, 58).
24, Tablettes. — Je ne saurais me charger de quelque commission, sans en
prendre note.
498,
32, Maison. — V. III, 156 et Notice sur les Illustrations, pi. III, vol. IV,
fasc. A.
500,
7, Mémoire. — Pli.ne, A^at. IlisL, VII, 24, dit que Messala Corvinus oublia
jusqu'à son nom.
8, Trapezonce. — Mourut dans une extrême vieillesse, ayant oublié tout
ce qu'il savait.
13, Perfluo. — Les éd. ant. et l'ex. de Bord, portent effîuo.
16, Ciceron. — « Je n'ai jamais ouï dire, écrit Cicéron, dans son Traité sur
la vieillesse, 7, qu'un vieillard ait oublié l'endroit où il avait caché son
trésor; il se souvient à merveille de tout ce qui l'intéresse, et sait fort
bien ce qu'il a affermé ses terres, quels sont .ses créanciers et surtout ses
débiteurs. »
26, Dire. — M"" de Gournay s'est livrée à ce travail qui porte sur près de
douze cents citations, et, sauf une cinquantaine, les a, à peu près, toutes
retrouvées, tâche difficile, l'auteur en ayant mêlé parfois deux ou trois
ensemble et parfois aussi les ayant altérées soit dans la forme, soit dans
le sens.
502,
10, Occupation. — Allusion à une anecdote que rapporte Pline le Jeune,
V, 3, pour montrer combien son oncle, Pline l'Ancien, était ménager de
son temps, ayant été jusqu'à s'impatienter do ce qu'un de ses amis assis-
tant avec lui à une lecture, avait interrompu pour faire répéter une
phrase mal lue, mais cependant encore intelligible.
28, Get. — Ou mieux ject, du latin jactus. Ni avec des jetons, ni avec la
plume. V. N. I, 210 : letter.
42, Brossailles. — Ceci s'applique à Démocrite, jugeant à Abdère, et non
à Athènes, des dispositions de Protagoras pour les sciences, en le voyant
arranger artistement des fagots. Diogène Laerce, IXj 53 et Aulu Gelle,
V, 3.
44, Faim. — L'éd. de 80 ajoute : et fay grand double., quand lauroy vn
cheual et son équipage, que l'eusse l'entendement de l'accommoder pour m'en
seruir.
504,
4, Suiet. — Les éd. ant. ajoutent : qui est moy.
23, Barleduc. — Lors du voyage que la cour de France y lit en 1559, le
roi conduisant on Lorraine Claude de France, sa sœur, mariée au duc
Charles III.
24, René. — Le père du duc René, le vainqueur de Charles le Téméraire,
duc de Bourgogne. C'est ce roi René qui se retira en Provence, ce qui
donna lieu au dicton.: « Se chaufler à la cheminée du roi René », pour
dire : se chauffer au soleil. — On a pensti que l'exhibition de ce portrait
avait eu pour objet de donner occasion aux Guise d'entamer un plaidoyer
en faveur do leur maison, afin d'obtenir pour l'un des leurs l'investiture
qui leur fut octroyée du duché de Bar, lequel duché était distinct de la
principauté du même nom qu'ils détenaient déjà et qui à la mort du dit
roi René avait fait retour à la couronne de France ; du reste François II
était inféodé aux Guise dont il avait épousé la nièce, Marie Stuart.
NOTES. I.IV. Il, Cil. XVII. VOL. II, PAG. "iOi. Fb.547
27, Creon. — Crayon ; beaucoup de personnes encore prononcent créon,
d'après l'orthographe ancienne.
35, Cbrysippus. — Diogène Laerce, VII.
42, Vent. — Expression proverbiale fondée sur ce que font parfois ceux qui,
ne sachant où porter leurs pas, jettent une plume en l'air et vont du côte
vers lequel l'emporte le vent; ici, elle veut dire, comme Montaigne l'ex-
plique lui-même, s'abandonner à la merci de la fortune.
506,
5, Dets. — Rabelais a aussi imaginé un procès ainsi jugé avec des dés.
9, Mattbiam. — Lors de l'élection par les Apôtres, pour se compléter à
douze, d'un des disciples du Christ, en remplacement de Judas qui s'était
donné la mort après l'avoir trahi et livré. — Le nom de Mathias ne figure
pas néanmoins parmi ceux des autres apôtres dont, à certain moment de
la messe, il est fait mention; tandis que celui de S. Paul, quoiqu'il n'ait
pas compté au nombre des apôtres proprement dits, s'j' trouve accolé à
celui de S. Pierre. Cette anomalie tient précisément à ce que Blathias n'a
pas été choisi comme apôtre par Jésus-Christ en personne et que S. Paul a
été appelé à lui, sur le chemin de Damas, par Notre-Seigneur lui-même; et
il a été qualifié l'apôtre des Gentils, parce que ses prédications ont eu
principalement pour objet la conversion des Gentils ou païens, plus que
colle des Hébreux.
11, Baston. — Voyez combien de bouts a ce bâton ; c'est-à-dire de combien
(le façons cliaque chose peut être présentée.
20, Machiauel. — Son principal écrit est « le Prince », ouvrage où il enseigne
aux tyrans le moyen de réussir, jnême au mépris de la justice et de l'hu-
manité, et où il expose cette détestable politique qui a reçu, de son nom,
la qualification de machiavélique. On a aussi de lui le « Discours sur Tite-
Live », où il se montre grand penseur et où l'on retrouve des doctrines non
moins perverses; enfin, des comédies licencieuses. Quelque opinion que l'on
ait de sa moralité, on ne peut contester qu'il ne soit un grand écrivain.
508,
5, Remuement. — Cette assertion étrange, qui étonne de la part de Mon-
taigne, quelque satisfait qu'il put être de sou propre sort et si assoilTé qu'il
fût de tranquillité, ne s'explique que par la lassitude résultant de l'état de
troubles et de guerres civiles continues, durant lequel tout allait de mal
en pis, qui en son siècle a désolé la France.
23, Monde.
« Sans songer comment va la flotte j Je laisse la crainte au pilote,
Qui vogue avec moi sur les eaux, I Et la manœuvre aux matelots. » Gresset
26, Céleste. — Ne dirait-on pas ceci écrit de nos jours quand on voit com-
bien le peuple, sans distinction aucune, pas plus sous le rapport de l'in-
telligence que sous celui des moyens d'existence, et les pitis fortunés, à cet
égard, plus encore peut-être que ceux qui le sont moins, se désintéressent
absolument des actes de leurs mandataires. — C'est ainsi qu'on en est
arrivé à voir ces atteintes légales ou illégales journellement portées à la
liberté religieuse, à la liberté politique, à la liberté du travail, à la liberté
individuelle, à toutes les libertés, et souffrir toutes licences de quiconque a
une attache gouvernementale officielle ou officieuse ; à être témoin d'un gas-
pillage des deniers publics tel que ni l'accroissement effrayant de notre
dette, ni l'augmentation continue des impôts n'y peuvent suffire; à assister
à la délation érigée en système de gouvernement, à l'antimilitarisme pro-
gressant sans cesse dans notre armée de terre et de mer dont les chefs
sont constamment tenus en suspicion et jamais soutenus; à l'impossibilité
d'obtenir justice pour qui n'adhère pas hautement et ne donne de gages
aux idées sectaires qui nous dominent; c'est à cela encore que nous devons
notre politique étrangère si hésitante et si timorée, ces tendances à ac-
croître les monopoles de l'État si contraires à toutes les lois économiques
Fb.548 ESSAIS DE MONTAIGNE.
et que nous devrons l'impôt sur le revenu qui nous assujettira tous au bon
plaisir des répartiteurs. — 11 faudrait cependant réagir, et pour cela
d'abord ne pas s'abandonner comme nous le faisons tous, les partis
extrêmes exceptés. Lors des élections, des comités se forment qui provo-
quent des réunions électorales, donnant à ce moment un coup de collier;
mais une fois les élections terminées, plus rien, c'est fini, les comités se
dissolvent ou sommeillent, on laisse aller les choses à vau-l'eau; sauf,
comme nous venons de le dire, chez les partis avancés, qui, eux, ne perdent
pas de vue leur élu, lui envoient des injonctions, l'obligent de temps à
autre à venir s'expliquer, rendre compte de son vote. C'est là ce que tous
doivent faire; les comités demeurer constitués en permanence, pour secouer
l'apathie des électeurs, les convoquer chaque fois que des questions impor-
tantes sont à l'ordre du jour, recueillir leur manière de voir, la porter à
la connaissance de leur mandataire, de telle sorte qu'il n'en ignore et y
puise une force qui lui permette de réagir contre les influences étrangères
qui trop souvent déterminent son vote; et, lors des réélections, rejeter im-
pitoyablement tous ceux qui auraient forfait par faiblesse ou autrement
aux idées sous l'empire desquelles ils avaient été élus.
Mais surtout il ne faudrait pas aux élections, entre les divers groupes de
conservateurs (monarchistes et républicains), de ces divisions inti-ansi-
geantes qui sont la chance la plus sûre de leui's adversaires communs, lors
même que ceux-ci, ce qui est le cas le plus fréquent, ont l'infériorité numé-
rique. 11 devrait être de règle absolue qu'au premier tour de scrutin, si
l'accord n'a pu se faire, que chacun vote suivant ses préférences; mais
qu'au second tour, n'en tenant plus aucun cdmpte, tous, sans exception
aucune, votent pour le candidat conservateur qui aurait obtenu le plus de
voix au premier tour, tous les autres se désistant en sa faveur ; hors de là,
pas de salut!
Voilà pour l'avenir; en ce qui touche le présent, alors qu'on voit ceux
qui détiennent le pouvoir, manquer au premier de leurs devoirs qui est de
s'appliquer à faire régner l'ordre et la paix dans le pays, y semer l'inquié-
tude, fomenter l'agitation et, se faisant les complices des fauteurs de troubles,
le mener à sa ruine, comment s'étonner de voir certains caractères éner-
giques qui, estimant que les grands maux appellent les grands remèdes,
cherchent à stimuler le clan si craintif et si veule des conservateurs de
toutes nuances et préconisent le recours à la violence, comme en Russie,
mais dans un but diamétralement opposé, contre les criminels qui entre-
tiennent pareil état de choses, provoquant contre eux des actes individuels
dont il est malaisé de se défendre parce qu'ils ne peuvent se prévoir et que
celui qui a fait le sacrifice de sa vie est maître de celle d'autrui, à l'exclu-
sion de tout acte collectif qui, dirigé contre quiconque dispose de la force
et de la légalité, serait en ce temps de télégraphe, de téléphone, d'armes à
tir rapide, inévitablement écrasé dès qu'il serait démasqué.
32, Contradiction. — C.-à-d., si on s'aperçoit qu'on manque de jugement,
cela seul est au contraire une preuve qu'on en a.
40, Disposition. — De bonne santé, c'est le sens qu'a encore aujourd'hui
l'adjectif dispos.
40, Beauté. — Les éd. ant. ajoutent : et de la noblesse; additio^i qui avec
juste raison a disparu, car la différence est grande entre le titre et la chose,
elle existe chez beaucoup qui ne sont point qualifiés pour la posséder et
inversement, et dans bien des cas le monde est loin de ratifier le jugement
qu'à cet égard chacun porte sur soi.
510,
2, Touchons. — Nous sentons, nous apercevons bien facilement si elles
surpassent les nôtres.
6, Peine. — Et encore avec beaucoup de peine.
10, Nom. — Les éd. ant. ajoutent : Le plus sot homme du monde pense auoir
autant d'entendement que le plus habile.
13, Art. — C.-à-d. on doit s'attendre à fort peu d'encouragements et d'éloges
NOTES. LIV. II, Cil. XVII. VOL. Il, PAG. 510. Fb.S49
à propos des ouvrages philosophiques et des simples productions de l'en-
tendement que nous pouvons écrire parce que les savants qui les ont dans
leur domaine, ne font cas que de l'érudition et de Tart et n'attachent de
prix qu'à la science.
22, Sens. — Du jugement.
26, Siennes. — « D'où vient qu'un boiteux ne nous irrite pas et qu'un esprit
boiteux nous irrite? C'est qu'un boiteux reconnaît que nous marchons
droit et qu'un esprit boiteux dit que c'est nous qui boitons. »' Pascal.
514,
24, Nul. — J'ai soixante-dix ans, j'ai vu et approché beaucoup de monde et
je puis en dire autant. Bien rares sont les hommes qui, vus de près, s'élè-
vent notablement au-dessus de la moyenne des gens que nous tenons
comme bien doués; plus rares encore sont ceux qui présentent un en-
semble de qualités essentielles dont rien ne trouble l'harmonie. Parmi ces
exceptions je n'en ai guère connu que trois : le général Desvaux, le com-
mandant du Vallon, le général Niox.
Le général Desvaux (1810 à 1885), dont j'ai été l'officier d'ordonnance,
devenu sous-gouverneur de l'Algérie et commandant de la cavalerie de la
Garde impériale en 1870, à Metz, où il fut l'un des rares membres, le seul,
dit-on, du Conseil de guerre, convoqué à la dernière heure, qui se soit
prononcé contre la capitulation, était un homme chez lequel le jugement,
l'instruction, la capacité, le caractère et les qualités du cœur allaient de
pair; c'était un excellent administrateur et un chef militaire de premier
ordre. A diverses reprises, après nos désastres, le Ministère de la guerre
lui fut offert; il s'y refusa, les nécessités de la politique intérieure du mo-
ment rendant impossible l'obtention des mesures que son intégrité et son
esprit de discipline lui faisaient considérer comme indispensables et sur
lesquelles sa conscience ne lui permettait pas de transiger.
Le commandant du Vallon (1837 à 1866), tué au Mexique, étant à 29 ans
déjà chef d'escadron et officier de la Légion d'honneur, et qui par sa
grande intelligence, son esprit résolu, son ampleur de vue, sa facilité d'élo-
cution, sa carrière si brillamment commencée, était appelé, si la mort ne
l'eût arrêté, à de hautes destinées, étant donnés les événements qui ont
suivi et dont seul Gambetta a émergé, tant étaient grandes les médiocrités,
pourtant si nombreuses, en situation de devenir quelqu'un, qui s'y sont
trouvées mêlées.
Le général Niox (né en 1840), l'ami de toute ma vie, devenu commandant
de la place de Paris, puis des Invalides et Directeur du Musée de l'armée,
qui lui doit son organisation. Remarquable entre tous par son intelligence
supérieure, un jugement jamais en défaut, une honnêteté de sentiments à
toute épreuve et une grande indulgence naturelle affermie par ses idées
philosophiques, il est bien regrettable, au point de vue de l'intérêt com-
mun, qu'une faiblesse de l'ouïe l'ait empêché, comme toutes ses qualités
et connaissances l'y appelaient, d'arriver à la direction de notre état mili-
taire qui n'eût jamais été en meilleures mains.
34, Liures. — Les éd. ant. aj. : et de la science. — Cette classe de gens qui,
de nos jours, a nom « intellectuels », n'a pas varié dans leurs vaniteuses
prétentions qui les poussent parfois hors des bornes de la raison; ils ont
de la science, de l'esprit à foison, mais pas toujours du bon sens, appelé
si à tort du sens commun.
516,
12, Hierosme. — S. Jérôme; a laissé un grand nombre d'écrits, les uns his-
toriques, les autres polémiques, dans lesquels il combat les hérésies de son
temps; son style est pur et éloquent, mais il se laisse entraîner à de vifs
emportements; son plus beau titre est sa traduction latine de la Bible,
faite sur l'hébreu, connue sous le nom de Vulgate et adoptée comme
canonique par le concile de Trente.
14, Institution. — Système d'instruction ou mieux d'éducation. — Se reporter
particulièrement à ce sujet au ch. XXIV du liv. I.
Fb.SoO ESSAIS DE MONTAIGNE.
22, Elle. — Notre éducation nous a appris.
34, Lecteur. — Lecteur public, professeur.
37, Vie. — Polémon, dans sa jeunesse, s'était livré à la dissipation; la leçon
qu'il entendit de Xénocrate parlant sur la tempérance, lui fit concevoir
une telle honte de ses excès, qu'il se convertit aussitôt à la philosophie; il
devint le disciple le plus zélé de Xénocrate et mérita de lui succéder dans
la chaire de l'Académie. Diocèse Laerce, Polémon, IV, 16; Valèke Maxime,
YI, 9, etc.
518,
22, Excellent. — Daurat, de Bèze, etc., sont ici cités pour leurs poésies en
latin; Ronsard, du Bellaj* comme poètes français.
30, Vieillesse. — A la bataille de S.-Denis (1567) où, lors de la deuxième
guerre de religion, les catholiques furent vainqueurs, mais perdirent leur
chef le connétable de Montmorency, homme d'une austérité qui atteignait
à la rudesse.
33, De la Noue. — Après avoir changé plusieurs fois de parti, fut blessé
mortellement, pour le service de Henri IV, au siège de Lamballe (Bre-
tagne); on a de lui des « Discours politiques et militaires », mémoires qui
renferment des faits intéressants.
34, Parts. — Partis, factions.
36, l'ay pris. — Cet alinéa, consacré à M"' de Gournay, n'existe pas dans les
éditions antérieures; c'est en elïet seulement lorsque Jlontaigne vint à
Paris pour surveiller l'impression de l'édition de 1588, qu'il fit sa connais-
sance. — Dans l'édition de 1635, qu'elle-même a publiée, ce passage est
modifié ainsi qu'il suit : les mots « beaucoup plus que » et les deux membres
de phrase ci-après : « Et enveloppée ... au monde «, « El enlr'autres ... cruel-
lemeiit », sont supprimés. Il est à croire qu'ils avaient, prêté à de malignes
interprétations et que leur suppression dont elle s'excuse en disant : « En
ce seul poinct ai-je esté hardie, de retrancher quelque chose d'vn passage
qui me regarde », a été une concession qu'elle a faite aux mauvaises
langues de son temps, de même que quelques autres coupures dans cette
même édition ont été une satisfaction donnée aux scrupules de ceux que
choque une certaine liberté d'expressions. — Cicéron avait eu aussi sa
Marie de Gournay : une dame romaine nommée CaroUi se lia d'intimité
avec lui, en tout bien, tout honneur, par amour pour la philosophie; elle
avait 70 ans. Marie de Gournay n'en avait que 22.
38, D'alliance. — Marie le Jai-s, demoiselle de Gournay du nom du lieu où
elle habitait (1565 à 1645), née à Paris. — Elle avait dix-huit ans, quand
ayant lu les deux premiers livres des Essais, elle se prit pour leur auteur
d'une véritable admiration. En 1588, ayant appris la présence de Montaigne
, à Paris, elle vint l'y voir et le charma si bien par son esprit et son érudi-
tion, qu'elle réussit à l'attirer à Gournay, en Picardie, chez sa mère, où il
fit plusieurs séjours prolongés. De retour chez lui, il s'empressa d'insérer
dans la nouvelle édition en préparation de sçn ouvrage, celle à laquelle la
mort l'empêcha de mettre la dernière main, l'éloge de sa jeune admira-
trice, qu'il qualifie sa fille d'alliance. — Mademoiselle de Gournay pleura
Montaigne comme un père lorsqu'il mourut cinq ans plus tard; elle et un
ami, le poète Pierre de Brach, l'avaient aidé lors de l'impression de sa dernière
édition, aussi les désigna-t-il comme exécuteurs d'une réédition à laquelle
il travaillait lorsque la mort vint l'atteindre. En vue de cette réédition il
avait annoté et retouché un exemplaire de son édition de 1588; fidèle
observatrice de ses intentions, sa veuve, pour ne pas se défaire de l'ori-
ginal, chargea Pierre de Brach de la mise au net de ces notes manuscrites,
qu'il transcrivit en leur lieu et place sur un autre exemplaire de cette
même édition, se bornant à rectifier quelques incorrections, et cette copie,
envoyée en 1594 à Mademoiselle de Gournay qui la fit imprimer accom-
pagnée d'une trop longue préface qu'elle-même avait composée, constitua
l'édition de 1595. Cette copie est perdue; quant à l'original, longtemps
ignoré, il a été retrouvé deux siècles après chez les Feuillants de Bordeaux
NOTES. LIV. If, CH. XVJI. VOL. II, PAG. 518. Fb.55I
et se trouve actuellement à la bibliothèque de cette ville. — Ce pieux devoir
accompli, Mademoiselle de Gournay, en 159G, se rendit en Guyenne pour
faire visite à la veuve et à la lille de son père par alliance, et s'inspirer de
la vue des lieux où il avait vécu et où il avait écrit ce livre qu'elle mettait
au-dessus de tout; elle n'avait alors que 29 ans; elle en vécut encore cin-
quante, toujours fidèle au culte de Montaigne, ne publiant pas moins de
onze éditions de ses Essais, dont la dernière en 1035, magnifique in-folio
qu'elle eut la bonne fortune de pouvoir dédier au cardinal de Richelieu.
Elle-même était écrivain, et prit une large part au mouvement littéraire
de l'époque; on a d'elle des poésies, quelques écrits dont le plus remar-
quable est « L'Égalité des hommes et des femmes », et des traductions de
morceaux de Virgile, de Tacite et de Salluste.
520,
7, Bastantes. — Suffisantes; de l'italien baslare, suffire, d'où vient égale-
ment « baste •' encore en usage dans le style familier.
12, Quartier. — Pays.
15, Considération. — Il est à remarquer que IMontaigne parle toujours avec
plus (U^ chaleur et d'enthousiasme de ces liaisons où le sang n'est pour
rien, de son amitié avec La Boétio, de son alliance avec M'^° de Gournay,
que de ses affections de famille.
16, Aage. — Dans ce siècle, en ce temps.
CHAPITRE XVIII.
28, Ouuroirs. — Ateliers. Ce mot « ouvroir », qui s'appliquait jadis aux locaux
où '■ ouvraient >• (travaillaient) les gens de métier, ne se dit plus aujour-
d'hui que do locaux où on forme les jeunes filles à la couture et d'autres
travaux analogues, et où des associations charitables exécutent, préparent
des travaux de même genre pour les jeunes filles et femmes pauvres.
522,
2, Fermir. — Appuyer, fortifier; du latin firmare. — Affermir, qui est
d'usage, a même racine et à peu près même signification; ferme, fermeté
en dérivent plus directement encore.
3, Solide. — Allusion aux Commentaires de César et à l'Anabase de Xéno-
phon, où tous deux font le récit de faits auxquels ils ont pris part; c'est
également ce qui donne tant d'intérêt aux Commentaires de Napoléon.
8, Rogatus. — Le texte d'Horace porte coucous, qui signifie : je ne fais
cette lecture qu'à mon corps défendant, lorsque j'y suis obligé; le chan-
gement apporté par Montaigne exprime plus exactement sa pensée.
14, Turgescat. — L'éd. de 88 donne le vers de Perse en entier, ajoutant :
dare pondus idonea fumo {de donner du poids à la fumée).
18, Image. — A entrer en communication avec moi et me rappeler à son
souvenir, grâce à ce tableau que je trace de moi-môme.
29, Seing. — Add. de l'ex, de Bord, que l'on a cru devoir insérer dans la
traduction : des heures (livre de prières, dénomination qui subsiste encore).
30, Peculiere. — Particulière, personnelle; du latin peculiaris, qui a même
signification. — Les éd. ant. ajoutent : vn harnois, vne espée qui leur a
serui, te les conserue pour l'amour d'eux, autant que ie puis, de l'iniure du
temps.
30, Gaules. — On vaquait beaucoup à ses affaires, à cheval, en ce temps; et
on a supposé que ces longues gaules pouvaient être des sortes de cravaches
confectionnées en bois de houx ou tout autre également flexible, comme
il s'en fait aujourd'hui dans le Roussillon en bois de micocoulier; peut-
être n'était-ce que de simples baguettes comme on en tient souvent à la
main; mais en raison du qualificatif qui les accompagne, il y a plutôt
probabilité que ce devait être de longs bâtons, constituant de hautes
cannes, comme celles qui furent si fort à la mode sous Louis XIV.
Fb.552 ESSAIS DE MONTAIGNE.
36, Escriture. — L'imprimerie.
37, Aisée. — Les éd. ant. ajoutent : pour m'exempter de la peine d'en faire
plusieurs extraits à la main.
524,
4, Testonner. — Ajuster, parer. La Fontaine a employé ce mot, en l'expli-
quant, dans sa fable « L'homme entre deux âges » :
« Ces deux veuves, en badinant,
L'allaient quelquefois testonnant,
C'est-à-dire ajustant sa tête. »
7, Premières. — Me peignant pour autrui, je me suis réellement rendu
meilleur que je n'étais auparavant; le portrait a formé l'original.
8, Autbeur. — Mon livre et moi sommes un; je ne suis pas autre qu'il me
représente, et il n'est pas différent de ce que jo suis. C'est cette même idée
dont Montaigne tirait parti, quand il écrivait à Henri III, auquel il avait
fait hommage de la première édition des Essais et qui l'en avait fait com-
plimenter, disant que l'ouvrage lui plaisait extrêmement : « Il faut donc
que je plaise à Votre Majesté, car il ne contient qu'un discours (une re-
production) de ma vie et de mes actes. » Boxnefon.
13, Heure. — Dans un soliloque de quelques instants.
13, Primement. — Exactement.
32, Sagoin. — Sagouin, sorte de petit singe. — Allusion ironique appliquée
à un Sagon, par Marot contre lequel était dirigée son épître intitulée :
« Fripelippes, valet de Marot, à Sagon ».
526,
6, Pindare. — Clément d'Alexandrie, Strom., VI, iO; Stobée, Serm., XI.
13, François. — Vers 450, époque où écrivait Salvl\m;s, Z)e Gubernatione Deî,
I, 14; il s'agissait des Francs, tribu de la Germanie, qui habitaient entre le
Mein, la mer du Nord, l'Elster et l'Elbe, et qui venaient d'envahir la Gaule
septentrionale.
31, Ancien. — Plutarque, Ly sandre, 4.
34, Vilité. — Bassesse; du latin vilitas, comme l'adjectif vil qui est demeuré
dans notre langue.
528,
11, Prononcée. — Rien chez les Perses, lit-on dans Hérodote, n'est si honteux
que mentir; et, après le mensonge, que contracter des dettes, surtout,
disent-ils, parce que celui qui a des dettes, ment nécessairement.
11, Grèce. — Lj^sandre; voir sa vie dans Plutarque.
19, Grecs. — A l'appui Se cette assertion on peut, entre autres, indiquer les
deux faits historiques ci-après : — Marius, défié par un des chefs ennemis,
lors de la guerre sociale (90), qui lui criait : « Si tu es si grand capitaine,
viens te battre avec moi! » lui répondit : « Si tu es toi-même si grand
guerrier, force-moi à combattre. » — Après la bataille d'Actium (31), Antoine
ayant envoyé défier Octave, celui-ci répondit qu'Antoine avait assez
d'autres chemins pour aller à la mort, sans s'exposer à périr honteusement
comme un gladiateur.
26, Barbe. — Plutarque, Pompée, 16; Caton d'Utique, 7. — Il n'est pas exact
que César fût appelé voleur à sa barbe. Il était en Gaule et Curion deman-
dant au Sénat, ou que Pompée congédiât son armée, ou que César fût au-
torisé à retenir la sienne sous les drapeaux, le consul Marcellus, traitant
ce dernier de brigand, opina pour qu'il fût déclaré ennemi de la Patrie,
s'il ne posait immédiatement les armes. — Quant à la circonstance où
Caton le qualifia d'ivrogne devant ce même corps constitué, elle est relatée
au ch. XXXIII de ce même livre des Essais (II, 638).
NOTES. LIV. II, CH. XIX. VOL. II, PAG. 528. Fb.553
CHAPITRE XIX.
Ce chapitre, traduit presque textuellement d'Ammien Marcellin, contient
un bel éloge de l'empereur Julien; et, à son tour, a fourni à Voltaire la
plupart do ce qu'il a dit sur ce prince. — Ce même chapitre, en raison des
termes en lesquels il y est parlé de Julien, et avec lui les passages où, dans
les Essais, sont taxés de cruauté les supplices au delà de la mort simple, et
surtout l'usage répété qui s'y rencontre du mot « fortune », employé dans
le sens de hasard, de fatalité, en place de celui plus orthodoxe de Provi-
dence, donnèrent lieu, à Rome, on 1580, de la part de la censure, à des
observations dont l'auteur, du reste, ne tint aucun compte. V. N. I, 588 :
Indiscipliaatis, et V. N. III, 171 : Reuere.
530,
16, Monde. — Vopiscus, in TacHo imp., 10.
18, Créance. — Une grande partie des ouvrages de cet historien a été perdue,
Montaigne en donne l'explication. Nous n'avons que des fragments de ses
Annales qui allaient de la mort d'Auguste à celle de Néron; et de ses His-
toires qui vont de l'avènement de Galba jusqu'à Nerva. Tacite est univer-
sellement regardé comme le plus grand historien des temps anciens ; il est
grave, profond, énergique, concis sans manquer d'abondance; il peint ses
portraits des plus vives couleurs; ses jugements flétrissent le crime et la
tyrannie; il est d'ailleurs exact, n'écrivant que ce qu'il a vu ou que dos
contemporains lui ont raconté.
22, Julian. — Était neveu de Constantin le Grand. Envoyé en Gaule avec le
titre de César, il fixa son séjour à Lutèce (Paris) et se signala contre les
Germains. Élu empereur en 361, il renonça ouvertement au christianisme
dans lequel on l'avait élevé, ce qui le fit surnommer l'Apostat (du grec
&(f\,(jxa.y.on, se retirer), et fit de vains efforts pour relever le paganisme. 11 ne
régna que deux ans; durant ce temps, il fit de sages lois, réforma les abus
les plus criants, fit la guerre aux Perses, débuta par des succès, mais dut
battre en retraite, la région où il avait pénétré ayant été dévastée par
l'ennemi et n'offrant plus aucunes ressources; blessé mortellement au cours
de cette retraite, il mourut peu après (363). — Dédaigné à la cour dans sa
jeunesse, il s'était adonné à l'étude et possédait à fond l'éloquence et la
philosophie; il appartenait à l'école des Stoïciens dont il portait le manteau,
la longue barbe, en même temps qu'il pratiquait l'austérité de leurs mœurs;
jamais sa haine contre le christianisme ne le porta à aucune violence
contre les Chrétiens.
23, L'apostat. — « Ce sont deux grands écueils de tout croire et de ne rien
croire. Si vous voulez savoir quels étaient Constantin et Julien, ne croyez
ni tout le mal qu'on a dit de Julien, ni tout le bien qu'on a dit de Cons-
tantin. » Catherinot.
23, Rare. — Par ses vertus et ses actes, l'empereur Julien a été au-dessus de
son époque, et Montaigne, avec juste raison, le représente comme tel. — 11
est à observer toutefois, d'une façon générale, que notre auteur ne se
piquait nullement d'exactitude, acceptait sans les contrôler (il en a fait
l'aveu I, 150) tous faits et dires qu'il jugeait à propos, pour les traiter à sa
mode; si ses déductions sont presque toujours frappées au coin de la logique
et du bon sens, on ne saurait cependant sans discussion s'appuyer sur son
autorité on matière d'histoire ou de science.
30, Vne. — Ammien Marcellin, XXIV, 8.
532,
2, Prédécesseurs. — Ammien Marcellin, XXII, 10; XXV, 5 et 6. — « Julien, a
dit Voltaire, qui eut le malheur d'abandonner la religion chrétienne, mais
qui fit tant d'honneur à la religion naturelle; Julien, le scandale de notre
église et la gloire de l'empire romain. » — Plus philosophe qu'empereur,
il était de ceux qui, si déjà l'empereur Antonin ne l'avait exprimé, auraient
Fb.t)54 ESSAIS DE MONTAIGNE.
pu inspirer à Etienne Tabourot, auteur comique du xvi° siècle, ces mauvais
vers qui traduisent une pensée assurément juste :
« Heureuses seront les provinces, i Des princes qui philosopheront,
Dedans lesquelles régneront I Ou quand les sages seront princes. »
4, Marcellinus. — Ammien IMarcellin. — V. II, 58 et N. Marcellinus. A
écrit une histoire des empereurs romains depuis Nerva jusqu'à Valentinien ;
le premier livre en est perdu. Cet ouvrage jouit d'une grande autorité,
surtout dans sa dernière partie, où l'auteur rapporte ce qu'il a vu; la
modération, bien rare pour l'époque, qu'il apporte quand il parle du chris-
tianisme et du paganisme, fait qu'on ne peut deviner par ses écrits et qu'on
ne sait, quoique Montaigne donne à supposer ici qu'il était chrétien, à
quelle religion il appartenait.
4, Histoire. — Amm. Marcellin, XXII, 10, etc.
9, Nous. — Chrétiens.
11, Recitent. — Sozoméne, Bisl. ecclés., V, 4.
16, Affectant. — Julien affecta, témoigna en cette circonstance.
21, Sang. — Eutrope, X, 8.— Sans persécution; par opposition à celles qu'à
diverses reprises avait eu à endurer le christianisme naissant. — L'édition
de 1580 porte ici le passage afférent à l'exclamation prêtée à l'empereur
Julien, lorsqu'il se sentit frappé à mort, que l'édition de 1595 reproduit
légèrement modifiée, un peu plus loin (II, 534 : Ce langage, etc.).
24, Constantius. — Amm. Marcellin, XXII, 2. — A la mort de Constantin le
Grand (337), l'empire fut partagé entre ses trois fils : Constantin, Constance
et Constant. Le second ne tarda pas à demeurer seul par suite de la mort
de ses frères (350); mais il se rendit tellement odieux, que les armées de
Gaule proclamèrent Julien empereur; il marchait contre lui, quand la mort
le surprit en route (361).
•26, Accoustumoit. — Les éd. ant. ajoutent : lousiours..
27, Guerre. — Amm. Marcellin, XVI, 2.
31, Estudier. — Id., XVI, 17; XXVI, 5.
40, Artifice. — Id., XVI, 2.
534,
8, Armées. — Amm. Marcellin. XXV. 3.
13, Sacrifices. — Jd., XXV, 6.
27, Gloire. — Id., XXV, 4.
28, Brutus. — Dans la nuit qui précéda la première bataille de Philippes
(42), où Cassius, battu, se tua, Brutus, qui commandait avec lui, avait
vu apparaître un fantôme qui, interpellé, lui dit : « Je suis ton mauvais
génie, tu me verras dans les plaines de Philippes. » Un mois après, la
veille de la deuxième bataille de ce nom, où, à son tour, Brutus éprouva
le même sort que Cassius, et comme lui se tua, cette vision se serait
renouvelée. V. N. II, 646 : Brutus.
29, Mort. — Amm. Marcellin, XX, 5; XXV, 2.
30, Nazaréen. — Théodoret, Ilist. ecclés., III, 20.
35, Attache. — Ce passage : « Ce langage... attache » (lig. 29 à 35), existe
un peu modifié dans l'édition de 1580 (V. N. II, 532 : Sang); supprimé dans
les éditions suivantes, il a été rétabli dans celle-ci où nous le retrouvons.
30, Marcellinus. — Amm. Marcellin, XXI, 2.
536.
5, Constantinople. — Parait avoir été fondée par les Grecs, sous le nom
de Byzance, à une époque très reculée et avoir joué dès les temps les
plus anciens un rôle important; à diverses reprises ravagée ou détruite,
elle devint sous Constantin le Grand, qui lui donna son nom, la capi-
tale de l'empire (330), et bientôt surpassa Rome même, par la magnifi-
cence de ses monuments, sa population, ses richesses et son commerce.
Les Turcs s'en sont emparés et en ont fait leur capitale en 1453.
8, Religion. — Amm. Marcellin, XXII, 3.
NOTES. LIV. II, CH. XIX. VOL. Il, PAG. 530. Fb.555
12, Intelligence. — Cette même politique avait été observée, au dire de
DiODORE iiE Sicile, par les Égyptiens qui laissaient se multiplier chez eux
divers cultes, dans l'idée que les dissensions qui se produiraient entre
eux, détourneraient de créer des difficultés au gouvernement; c'est un
peu ce que chercha à faire Catherine de Médicis pour contenir les catho-
liques par les protestants et réciproquement; c'est également le système
actuel de gouvernement des sultans de Constantinople, ce n'est en somme
qu'une application ])articulière du principe d'application si générale :
« Diviser, pour régner. »
CHAPITRE XX.
31, Elemens. — L'air, le feu, la terre et l'eau, tenus encore, du temps de
Montaigne, comme les éléments essentiels de tout ce qui a vie.
32, Matière. — Les éd. ant. ajoutent : plus vile.
538,
1, Seruice. — L'or et l'argent, en raison de leur peu de dureté relative,
ne sont, en effet, employés à l'état pur, ni dans les monnaies, ni dans
l'orfèvrerie, mais alliés au cuivre à raison de 9/10 de métal fin (or ou
argent) et 1/10 de cuivre pour les monnaies; pour les pièces d'orfèvrerie
la proportion de l'alliage (du cuivre) est un peu plus forte.
4, Aristippique. — Telle que la conçoit l'école cyrénaïque fondée par Aris-
tippe. V. X. II, 240 : Cyrenaiques.
12, Morbidezza. — Terme de peinture et de sculpture; mollesse et délica-
tesse des chairs, en particulier chez la femme et chez l'enfant.
17, Donnent. — C'est là une pensée d'ÉpiCHAiniE, conservée par Xénophon,
dans ses Mémoires sur Sacrale, II, I, 20. Elle a été reproduite par Voiture :
« Pour l'ordinaire, la fortune nous vend bien chèrement ce qu'on croit
qu'elle nous donne. » Elle se retrouve chez La Fontaine, qui dans son
poème de « Philémon et Baucis » semble l'avoir imitée de V^oiture :
• Il lit au front de ceux qu'un vain luxe environne,
Que la Fortune vend ce qu'on croit qu'elle donne. •
De son côté, Voltaire dit :
« Le bonheur est un bien que nous vend la Nature. •
21, Socrates. — Dans le Phédon de Platon.
23, Metrodorus. — Sénèque, Episl. 99.
29, Melancholie. — La Fontaine, dans Psyché, II, exprime la même pensée :
• ... Il n'est rien
Qui ne me soit souverain bien.
Jusqu'au sombre plaisir d'un cœur mélancolique. »
32, Seneque. — Episi: 63.
3^^!, Veteris. — L'ex. de Bordeaux porte veluli, et aussi le texte de Catulle.
540,
3, Fondre. — S'enfoncer, s'effondrer, succomber.
7, Enfondrer. — Où il ne peut se fixer et où il craint de s'embourber.
10, Platon. — Telle n'est pas la pensée beaucoup plus restrictive émise par
Platon, République, IV, 5, qui dit que si au préalable on ne fait pas
l'éducation de la jeunesse et qu'on ne la dresse pas à respecter les lois,
elles deviennent inutiles, parce qu'il n'y en a pas de parfaites, et quelque
amendement qu'on y apporte, on ne pare à un inconvénient qu'en
en substituant d'autres, si bien que quelles qu'elles soient, elles sont tou-
jours en défaut dans un cas donné. Xaigeon.
17, Hydra. — L'hydre de Lerne, serpent monstrueux qui, d'après la Fable,
séjournait dans le lac de Lerne en Argolide (Grèce ancienne); il avait
Fb.5S6 ESSAIS DE MONTAIGNE.
sept têtes, et chacune repoussait à mesure qu'on la coupait; Hercule en
délivra la terre. Le monstre, transporté au ciel, forme la constellation
australe de l'Hydre. Myth.
2G, Pourtant. — C'est pour cela que...
542,
6, Vérité. — Cicéron, De Nat. deor., I, 22; Bayle, Simonide. — Le roi Hiéron
avait prié Simonide de lui dire ce que c'est que Dieu ; celui-ci lui répondit
qu'il avait besoin d'un jour pour examiner la question. Le lendemain, le
roi ayant renouvelé sa question, le poète demanda encore deux jours pour
faire réponse; et, chaque fois, il alla doublant le nombre de jours deman-
dés. Cicéron, rapportant le fait, dit : « Je crois que Simonide, après avoir
promené son esprit d'opinions en opinions, toutes plus subtiles les unes
que les autres, et cherché vainement la plus probable, désespéra finale-
ment de trouver la vérité. »
6, Qui. — Cet alinéa fait suite à l'avant-dernier de ceux qui précèdent;
entre les deux a été intercalé l'incident de Simonide, qui n'existe pas dans
les éditions précédentes, d'où un peu d'obscurité dans le texte.
8, Engin. — Un esprit ordinaire, de moyenne capacité; vient du mot latin
ingenium, esprit.
12, Mesnage. — D'économies, de savoir-faire.
18, Conte. — Probablement Henri III; ce fut aussi le caractère, de Louis XV.
CHAPITRE XXI.
23, Debout. — Suétone, Vespasien, 24.
25, Propos. — Spartien, Verus, 6. « Un empereur doit mourir dans la plé-
nitude de ses facultés physiques et morales et non affaibli par l'âge ou
les maladies. » On peut du reste en dire autant de tous ceux qui ont à
commander ou à administrer, toutefois l'application de ce principe aug-
mente d'autant plus d'importance que la fonction occupée en a elle-même
davantage.
30, Appoltronny. — Proprement accoutumé au lit; viendrait de poltroniser,
dérivé lui-même de poltro qui, en italien, signifie lit, couche, oreiller,
coussin; d'où, par extension, s'accoutumer à la paresse, rendu lâche, énervé;
c'est là une étymologie de notre mot poltron, quelque peu différente de
celle qu'on lui attribue généralement (V. N. II, 568 : Voyage).
32, Nonchalant. — Si peu soucieux.
544,
13, Absence. — Henri de Navarre, devenu Henri IV.
13, Selym I. — Plein de courage et de fermeté, mais ambitieux, perfide et
cruel, Sélim l" détrôna et fit périr son père, ordonna" la mort de plusieurs
de ses frères, soumit la Syrie et prit le titre de calife (vicaire de Mahomet),
dont il déposséda le dernier calife Abbasside de Bagdad et que ses suc-
cesseurs à Constantinople ont conservé depuis; conquit l'Egypte sur
les Mamelouks, la Mecque et Alger.
15, Complètes. — Cela est exact; mais, par contre, tout aussi vrai quand
au lieu de victoires que l'on remporte, ce sont des défaites que l'on éprouve :
François ler, à Pavie; Philippe de Valois, à Crécy; Jean le Bon, à Poitiers;
Charles XII, à Pultawa; Napoléon, à Waterloo, etc. — C'est là du reste
une question qui n'est pas d'actualité en France où de parti pris le chef
de l'État n'a guère chance d'être un soldat; il semble d'ailleurs devoir en
être de même dans un avenir prochain du Ministre de la guerre. Les gens
politiques n'ont-ils pas toute science infuse, et qu'y aura-t-il de changé
sauf que les bureaux dirigeront au lieu d'être dirigés, et que le personnel
sera bouleversé au gré des inlluences et passions politiques du moment?
Aussi, ce qu'en semblable situation on peut espérer de mieux pour notre
état militaire c'est l'existence d'un Conseil supérieur de la guerre, com-
prenant tous ceux désignés pour, en cas de guerre, exercer le commande-
NOTES. LIV. II, CH. XXI. VOL. II, PAG. 544. Fb.557
ment de nos armées, dont les avis en toute question militaire de quelque
importance soient d'obligation et toujours communiqués in extenso à
qui il appartient de décider; l'établissement des tableaux d'avancement et
l'initiative des nominations à tous les hauts grades et emplois de l'armée
devraient également lui être attribués. La guerre éclatant, le Ministre,
qu'il soit civil ou militaire, demeurerait, continuant à pourvoir aux be-
soins de tous, avec l'assistance de l'un des sous-chefs de l'État-Major gé-
néral du temps de paix, toujours prêt à remplacer son chef, devenant,
ipso facto, le Major général des armées opérant sur le principal théâtre
d'opérations. Une fois les hostilités commencées, ce sont les événements
qui décident de ce qui suit, toute prévision à cet égard est sans objet,
toute idée préconçue peut être une entrave; il faut et il suffit que les
hommes appelés à y pourvoir aient été choisis à hauteur de la tâche qui
peut leur incomber, qu'ils soient au fait de la situation et aient du ca-
ractère.
17, Pensée. — Cela n'a jamais été d'une absolue vérité, l'action dirigeante
du chef en dehors du combat ayant toujours eu quelque influence sur le
résultat, bien qu'incomparablement moindre qu'aujourd'hui, comparée
à sa conduite pendant le combat proprement dit. D'abord on ne manœu-
vrait guère autrefois, on se bornait généralement à se porter à la ren-
contre les uns des autres; et, d'autre part, le combat se livrait sur une
étendue peu considérable, si élevés que fussent les effectifs en présence;
tout ce qui s'y passait, était vu d'un grand nombre et, transmis à la voix,
était à l'instant su de tous; l'effet en était immédiat, et dans ces condi-
tions l'attitude du chef était d'importance capitale. — De nos jours, c'est
tout autre : Dès le principe et longtemps avant qu'on n'en vienne aux
mains, le chef manœuvre en vue d'acquérir la supériorité morale, d'avoir
toute liberté de mouvements et d'entraver celle de l'adversaire, et de
faire que, tout en ne se compromettant pas trop lui-même, un succès de
sa part, quand le heurt se produira, soit aussi désastreux que possible pour
son ennemi. Quand approche le moment de l'action, il prend, dans la
mesure du possible, les dispositions que commande la situation. Quand
elle s'engage, il observe, mais de loin pour mieux juger de l'ensemble
sans être distrait par les détails, et n'intervient que par l'envoi en ligne
de ses réserves quand il le juge utile. Lorsqu'elle prend fin, c'est lui qui,
s'il a le dessus, s'applique à faire que la poursuite transforme la défaite
de l'adversaire en déroute, ou à le contenir s'il a le dessous. Du commen-
cement à la fin, sa pensée est toujours en action, et moins il engage sa per-
sonne, mieux il fait; sur une zone aussi étendue que celle sur laquelle se
livrent les combats actuels, à moins qu'il ne s'agisse d'un engagement
insignifiant par le nombre des combattants, l'intervention personnelle
d'un chef, dans la mêlée, ne saurait guère excéder en résultat physique
celle du moindre de ses soldats, elle a toute chance d'être sans effet réel-
lement utile, et risque fort de compromettre la direction. — Cette der-
nière partie de l'assertion de Montaigne qui, de fait, est on ne peut plus
vraie, doit donc s'entendre du chef qui, présent sur le théâtre de l'action,
exerce le commandement effectif des troupes engagées, à l'encontre de
celui qui, à distance, prétend gouverner les événements et dicter des
ordi-es à ceux qui, sur place, sont aux prises avec les difficultés dont il
ne peut juger.
20, Ferme. — « Ayant les pieds sur la terre ferme », comme un planteur
de choux. Coste.
21, Hottomane. — Branche de la race turcomane (race dominante dans le
Turkestan, en Perse et en Asie Mineure), du nom d'Othman 1, fondateur
de l'empire turc (xui" siècle).
25, Ammurath. — Vainquit les Perses et les Hongrois, enlevant aux pre-
miers trois provinces, aux seconds, l'importante place de Raab; avait
débuté en faisant étrangler ses cinq frères, tous en bas âge.
27, Edouard. — Prétendant à la couronne de France, du chef de sa mère,
Fb.S58 ESSAIS DE MONTAIGNE.
sœur de Charles le Bel, gagnait contre Philippe de Valois la bataille de
Crécy (1346), prit Calais (1347) et plusieurs autres villes; son fils le prince
de Galles gagnait sur le roi Jean, successeur de Philippe, la bataille de
Poitiers (I35G); mais moins heureux contre Charles V, il perdait peu à peu
toutes ses conquêtes et ne possédait plus que quelques places maritimes en
France, quand il mourut.
ti8, Charles: — Fit avec succès la guerre à Edouard III d'Angleterre qui avait
envahi la France, au roi de Castille, et réunit à la couronne le Poitou, la
Saintonge, le Rouorgue, une partie du Limousin, le comté de Ponthieu et
la Guyenne. Il eut pour généraux Olivier de Clisson, Bertrand du Guesclin,
Boucicaut; témoin des malheurs causés par la captivité de son père Jean
le Bon, fait prisonnier à la bataille de Poitiers, il s'était fait une loi de ne
point commander ses troupes en personne et dirigeait tout du fond de
son cabinet.
33, Castille. — Montaigne fait ici allusion à la découverte et à la conquête
du Mexique, du Pérou, de la Nouvelle-Grenade, du Chili et de Buenos-
Ayres, réalisées à cette époque, au nom des rois de Castille, par les Chris-
tophe Colomb, les Fernand Cortez, les Pizarre, etc.
33, Portugal. — Par les expéditions de Diaz, de Vasco de Gama, de Cabrai,
les conquêtes d'Albuquerque, le Portugal, au xvi' siècle, était maître, en
Asie, des Indes, des Moluques, et en Amérique, du Brésil.
35, Facteurs. — Agents des grandes compagnies par lesquelles, jadis, les
états européens exploitaient leurs colonies.
39, Respirer. — Zonaras, d'où ceci est tiré, dit : « Julien se. démontra si
sobre, que presque il ne rotait ni ne crachait et allait jusqu'à dire que,
s'il était possible, un philosophe devrait môme se garder de respirer. »
546,
3, Persienne. — Xésophon, Cyropédie, I, 2, IG, ne parle pas plus de la
sueur à propos des Perses, que Zonaras à propos de Julien ; il dit seule-
ment qu'il était déshonnête parmi eux de cracher, de se moucher et de
paraître plein de vents.
5, Seneque. — Epist. 88.
10, Fortune. — « Venez voir mourir un maréchal de France, » disait Ney
faisant à Waterloo (1815) un dernier effort, avec la brigade Brue, contre
les lignes anglaises prenant l'offensive pour seconder l'action de Bliicher.
« Je ne rentrerai à Paris que mort ou victorieux, » disait de son côté
le général Ducrot, en sortant pour livrer la bataille de Champigny (1871).
Et tous deux, bien que demeurés constamment exposés aux coups des en-
nemis, se retrouvaient vivants en fin d'action, malgré ce qu'ils avaient dit
et espéré.
17, Gradiuum. — Porteur de glaive, surnom du dieu Mars.
18, Deos. — En 479. Les Romains, en guerre avec les Èques, avaient vu
échouer leurs efforts par l'insubordination de leurs soldats, motivée par
une loi agraire en discussion à Rome. Redoutant la même mauvaise volonté
l'année suivante, alors qu'on était en présence des Étrusques, qui venaient
les insulter jusque dans leur camp, les consuls refusèrent quand même
d'en venir aux mains, jusqu'à ce que leurs soldats eussent juré de vaincre
ou de mourir, ce qu'ils firent, et tinrent parole, à rencontre de ce qu'en
dit Montaigne. — Celui-ci semble confondre cet épisode avec celui des
Fabiens, guerriei's à l'effectif de 306, tous de la famille Fabia, qui, deux
ans après (477), ayant à leur tète le consul Fabius Vibulanus, se char-
gèrent à eux seuls de combattre les Véiens, qu'ils battirent en diverses
rencontres; mais étant tombés dans une embuscade, ils périrent tous,
accablés par le nombre.
31, Philistus. — Plutarque, Dion, 8. Philistus défait fut, suivant les uns,
pris et tué par les ennemis; selon d'autres, il se tua pour ne pas tomber
entre leurs mains.
38, Frustratoirement. — Inutilement, en vain. Frustratoire est encore en
usage au palais ; frustratoirement n'est plus français.
NOTES. IJV. II, CH. XXI. VOL. II, PAG. 548. Fb.5S9
548,
4, Castille. — De Thou, LXV. — Bataille d'El-Ksar cl-Kebir, au Maroc, en
1578. Y périrent : Sébastien, roi de Portugal, qui disparut dans le com-
bat; le vainqueur Muley Abd el-Melek, roi do Fez et de Maroc, terrassé
par la maladie dans le cours même de la bataille; Muley Mohammed, son
neveu, qu'il avait détrôné et à l'instigation duquel était venu Sébastien,
auquel il s'était joint, se noya dans sa fuite; de la sorte périrent par la
maladie, le fer et l'eau, trois rois dans cette même journée. — Sébastien
ne laissant pas d'enfants, le cardinal Henri, son oncle, lui succéda; et,
à la mort de celui-ci (1580), Philippe II, roi d'Espagne, s'empara de la
couronne du Portugal.
34, Tracasser. — Mener cà et là, malgré les souffrances qu'il éprouvait.
550,
2, Nouuelle. — De Thou, LXV, raconte qu'on prêtait le môme fait à Charles
de Bourbon, l'ancien connétable, tombant expirant au pied des murailles
de Rome, à laquelle il donnait l'assaut avec les bandes à la tète desquelles
il s'était mis (1527). — Nelson, en 1805, à Trafalgar, on agit de môme :
blessé à mort sur le pont de son vaisseau amiral, et ti-ansporté dans sa
chambre, il se fit couvrir la figure et ses décorations de son mouchoir,
afin de n'être pas remarqué de l'équipage et de ne pas l'impressionner
défavorablement.
10, Main. — N'.N. II, 430 : Premier. — Une fois sa résolution arrêtée, dit
Plut.\rque qui raconte cette mort avec grands détails, aj'ant près de lui
l'épée avec laquelle il était décidé à se tuer, il s'endormit lisant le Phédon
et alternativement prenant un peu de repos.
CHAPITRE XXII.
13, Essaye. — Éprouve, fatigue.
13, Lisais. — Dans la Cyropédie de Xénophon, VIII, 6, 9.
20, Grues. — Les empereurs du Mexique avaient des courriers à pied, qui
atteignaient à peu près à la même vitesse; ils étaient dressés à la course
et leurs exercices, à Mexico, avaient comme but final les pieds d'une idole
auxquels on arrivait en montant 120 marches.
20, Cœsar. — De Bello civiii, III, 11.
24, Mille. — Suétone, César, 57. Le mille romain valait environ 1500'" (exac-
tement 1481); cent milles font donc à peu près cent cinquante kilomètres.
27, Tiberius Nero. — Pline, Nat. Hisl., VII, 20. Tibère, le même qui devint
plus tard empereur. Le fait se passait en l'an 9; son frère Drusus, après
de nombreux succès en Gaule, opérait en Germanie, quand il tomba ma-
lade et mourut. Tibère prit la conduite des opérations et acheva la dé-
route des Germains, 8.
552,
3, Peruenit. — The-Live, XXXVII, 7. — En 190; l'armée romaine, en
marche contre Antiochus, devait traverser la Thrace; Sempronius Gracchus
fut député à Philippe de Macédoine dont elle dépendait, pour pénétrer
ses sentiments et savoir si on l'aurait pour ou contre soi. — La distance
d'Amphisc à Polla est d'environ trois cents kilomètres.
3, Postes assises. — Relais permanents, d'usage habituel. — Louis XI, en
France, fut le premier qui établit un service de poste régulier; les relais
étaient placés de deux en deux lieues (8 kilomètres). — Qu'est-ce que la
vitesse de ces moyens do transport auprès de celles réalisées de nos jours
par les moyens de locomotion qui sont venus s'ajouter aux anciens; alors
que sur hippodrome, la plus grande vitesse obtenue à pied a été de
cinq kilomètres en seize minutes et celle à cheval de 3.000'" en 3'" 15 (réa-
lisée en UX)3, par Quo Vadis, au Grand Prix de Paris), déjà avec le vélo-
cipède, dont aujourd'hui tout le monde use, on fait aisément d'une façon
suivie sur une bonne route 25 à 30 kil. à l'heure; tandis qu'en mer on
Fb.560 ESSAIS DE MONTAIGNE.
arrive à des vitesses de 33 nœuds (60 kil. à l'iieure) par des torpilleurs;
l'Angleterre a même actuellement sur chantier un croiseur qui doit mar-
cher à 36 nœuds (65 kil. 400); des trains de chemin de fer vont couram-
ment à la vitesse de 100 kil. à l'heure, le do^passant même; des automobiles
ont atteint jusqu'à 120.
5, Cecinna. — Il avait, dit Pline, Nat. Hist., X, 24, des quadriges (chars
attelés à quatre chevaux de front) qu'il faisait courir; et, pour annoncer
à ses amis le résultat, il lâchait celles de ses hirondelles qu'il emportait
avec lui à Rome, teintes de la couleur du parti qui avait remporté la
victoire. — La vitesse des hirondelles semble notablement supérieure à
celle des pigeons : récemment, une hirondelle avait été amenée d'Anvers
à Compiègne et, en même temps, 250 pigeons de même provenance.
Lâchés ensemble, l'hirondelle aurait regagné son nid en une heure sept
minutes, ce qui donne 207 kilomètres à l'heure, tandis que les premiers
pigeons arrivés auraient mis quatre heures et deux minutes pour franchir
cette même distance de 235 kilomètres.
10, Rome. — Les théâtres, dans l'antiquité, étaient à ciel ouvert. Indépen-
damment des représentations théâtrales, ils servaient, à Rome, aux com-
bats de gladiateurs, aux courees, etc., lesquels étaient l'objet de paris
dont il importait de connaître les résultats qui se transmettaient ainsi.
13, D. Brutus. — Pline, Nat. Ilisl., X, 77. — Assiégé dans Mutine (Modène),
D. Brutus fit parvenir au camp des consuls des lettres attachées aux
pattes de pigeons, et déjoua ainsi la vigilance d'Antoine, malgré les filets
tendus par celui-ci en travers du fleuve pour intercepter toute commu-
nication (43).
14, Ailleurs. — Cet emploi des pigeons pour les communications rapides est
très ancien. Les Grecs en usaient aux jeux olympiques pour signaler les
vainqueurs, les Romains aux jeux du cirque; les Chinois s'en servaient;
en Egypte, on annonçait de la sorte à l'intérieur l'arrivée des bateaux
à Alexandrie. Leur usage â la guerre est plus récent, Montaigne en cite
le premier exemple connu; pendant les croisades, les Sarrasins en firent
grand usage et les Croisés les imitèrent dans des proportions plus res-
treintes. En Europe, il ne remonte guère qu'au milieu du siècle dernier,
mais il s'est depuis considérablement étendu, nonobstant le télégraphe
et l'invention de la télégraphie sans fil. La vitesse des pigeons bien en-
traînés est estimée de 60 à 80 kil. à l'heure, et les traites fournies atteindre
4 à 500 kil., cela toutefois semblant des maxima. — Les anciens, comme
tous les peuples primitifs, ont souvent usé, pour communiquer à distance,
de feux allumés sur des points élevés dont, de jour la fumée, de nuit
la lueur, marquaient qu'un événement attendu venait de se produire.
C'est à cela que servaient, au moyen âge, les nombreuses tours dont les
ruines s'aperçoivent encore sur notre rivage méditerranéen; elles signa-
laient par leure feux l'apparition au large des navires suspects et invi-
taient les populations éparses dans les campagnes à se mettre en sûreté
dans les bourgs. — Citons encore comme moyen de communication rapide
en usage au temps jadis les cris répétés de distance en distance; c'est
ainsi, dit César, dans ses Commentaires, que le massacre des Romains qui
avait été fait à Orléans au lever du soleil, fut connu à neuf heures du soir
en Auvergne à cinquante lieues de distance. — Le télégraphe aérien,
inventé sous la Révolution, outre sa permanence, réalisait le grand avan-
tage, par son code de signaux, de pouvoir transmettre à peu près tout;
mais son fonctionnement était interrompu par la nuit et le brouillard.
La télégraphie électrique qui s'est substituée à lui, presque instantanée,
puis le téléphone semblaient le nec plus ultra, et voici que la télégraphie
sans fil va encore au delà de ce que l'on pouvait concevoir; née d'hier,
elle a déjà donné possibilité de communiquer à des distances de deux
cents kilomètres.
20, Chemin. — 11 en était de même chez les Romains, où, comme on l'a vu
plus haut, ce service comportait aussi des coches. Le cas échéant, chevaux
NOTES. LIV. II, Cil. XXII. VOL. II, PAG. 552. Fb.561
de selle, bètes de trait et véhicules pouvaient être réquisitionnés par les
courriers dans l'embarras; cette servitude fut abolie par l'empereur
Adrien.
22, Seiour. — Soulagement.
23, Vsage. — C'est cependant d'un efïet salutaire pour les longues courses,
se répétant plusieurs jours de suite, qu'on les fasse à pied ou à cheval,
mais il faut y être habitué. — Les sultans entretenaient également des
courriers à piei, auxquels, dit-on, par une opération chirurgicale, on
enlevait la rate pour les rendre plus dispos et plus agiles. Payex.
CHAPITRE XXIIl.
S54,
11, Atletes. — En dehors de l'entraînement continu auquel de nos jours
sont soumis les jockeys qui prennent part aux courses, on leur fait suivre
un régime spécial et, entre autres choses, on provoque pareillement, chez
eux, d'abondantes transpirations pour les rendre plus légers, avant qu'ils
ne montent à cheval pour courir.
20, Marée. — Foule; comme on dit « les flots de la multitude ».
22, Grèce. — Les Turcs; mais cette situation a pris fin en 1830, époque à
laquelle une insurrection datant de 1821 et la bataille navale de Navarin,
gagnée en 1827 par les flottes combinées de France, d'Angleterre et de
Russie, rendirent à la Grèce son indépendance.
32, Inconuenient. — C'est actuellement encore, en Europe, une des causes
de guerre des plus à redouter que de servir de palliatif à des difficultés
économiques, ou de dérivatif à des difficultés de politique intérieure, qui
vont croissant sans cesse par suite de l'aveuglement, de l'inertie et de la
division des conservateurs et, d'autre part, de l'esprit de plus en plus entre-
prenant et des exigences de plus en plus grandes des socialistes.
39, Carthaginois. — Carthage, située non loin de l'emplacement où se trouve
actuellement Tunis, devenue la capitale d'une république maritime très
puissante, et la rivale de Rome, eut à soutenir contre celle-ci de longues
luttes connues sous le nom de « guerres puniques », qui se terminèrent
par la prise et la destruction de la cité africaine (146).
39, Bretigny. — Froissart, I, 213. — Le traité de Brétigny (1359), par lequel
le roi Jean le Bon, fait prisonnier à la bataille de Poitiers, abandonnait à
l'Angleterre, pour racheter sa liberté, toutes les conquêtes faites par ses
prédécesseurs, ne fut pas reconnu par les États généraux convoqués à cet
effet par le Dauphin. La guerre reprit alors de plus belle, pour ne se
terminer qu'en 1453, par la bataille de Castillon; elle avait duré cent
quinze ans.
556,
2, Outre-mer. — Allusion à une expédition en Angleterre, méditée vers 1338
par Philippe IV de Valois, pour laquelle il avait réuni vingt à trente mille
liommes, et que devait commander son fils Jean, duc de Normandie, de-
puis Jean le Bon, alors âgé de 20 ans; cette expédition n'eut pas lieu, le roi
d'Angleterre ayant pris lui-même l'offensive et envahi la France.
10, Ruine. — C'était l'avis de l'amiral de Coligny ; et, s'il se trouvait à Paris
lors de la S. -Barthélémy, c'est qu'il était question, à ce moment, entre le
roi et lui, d'une guerre dans les Pays-Bas devant servir de dérivatif à nos
troubles intérieurs d'alors, guerre dans laquelle il eût exercé un com-
' mandement.
13, Commodité. — « La guerre n'est qu'un instrument de la politique. »
Clausewitz.
14, Virgo. — Némésis, déesse de la vengeance, chargée de punir le crime et
de renverser une insolente prospérité; surnommée Rhamnusia, de ce qu'elle
avait un temple à Rhamnus, bourg de l'Attique,
20, Elotes. — Plutarque, Lycurgue, 21. — Elotes ou Ilotes; à l'origine ce
nom désignait les habitants d'Hélos, ville de Laconie (Gi'èce anc), prise et
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 3G
Fb.562 ESSAIS DE MONTAIGNE.
détruite en 1059 par les Lacédéinoniens qui les réduisirent en esclavage.
Il fut ensuite étendu à tous leurs esclaves indistinctement, qu'ils traitaient
avec une extrême dureté, les entretenant soigneusement dans l'état le plus
abject.
27, Art. — Celse dit à cet égard : <- Ceux qui pratiquent la médecine ration-
nelle, estiment qu'Hérophile et Erasistrate agissaient bien, en obtenant des
rois que les criminels leur fussent livrés pour être disséqués vivants, et
qu'on pût observer, alors qu'ils étaient encore pleins de vie et avant qu'ils
eussent rendu l'àme, la disposition, la couleur, la forme, les dimensions
des organes » ; mais il ajoute : « disséquer ainsi des hommes vivants, est
aussi cruel qu'inutile ».
35, L'empereur. — Ce ne fut qu'en 403 que les combats de gladiateurs
furent abolis par l'empereur Honorius, après que les spectateurs eurent tué
à coups de pierre un anachorète, nommé Télémaque, qui, venu exprès de
l'Orient à Rome, s'était jeté entre les combattants pour les séparer.
558,
17, Rumpi. — Dans les combats de gladiateurs, le vaincu devait mettre bas
les armes et était égorgé, à moins que les spectateurs ne voulussent lui
sauver la vie; le vainqueur les consultait du regard : le bras étendu, le
poing fermé, le pouce détaché et en dessus, marquait qu'il eût à achever
son adversaire; le poing renversé, le pouce en dessous, qu'on faisait grâce.
30, Interest. — Le fait était assez fréquent jadis : le landgrave de Hesse, le
duc de Brunswick en Allemagne vendaient leurs sujets aux recruteurs
anglais; le prince de Waldeck, aux Hollandais; les Suisses se vendaient
eux-mêmes. A la bataille de S. -Quentin, il y avait des Allemands des deux
côtés; de même des Suisses, à la bataille de Fontenoy, etc.
CHAPITRE XXIV.
31, Romaine. — Ce qui a le plus contribué à rendre les Romains les maîtres
du monde, c'est qu'ayant combattu successivement tous les peuples, ils ont
toujours renoncé à leurs usages, sitôt qu'ils en ont trouvé de meilleurs.
Montesquieu.
560,
4, Suétone. — César, 56.
10, Moy. — CicÉROx, Episl. fam., VII, 5. — La lettre en question porte
M. Orfius. — Quelques-uns ont regardé l'offre de César comme un badinage,
Montaigne la prend au sérieux et il a probablement raison ; ces chefs de
peuplade étaient de fait des lieutenants de la république romaine et il n'y
a pas à s'étonner qu'elle pourvût à leur nomination.
12, beiotarus. — Cicérox, De Divin., II, 37- — Déjotarus était allié de Rome ;
malgré ses traités avec elle. César lui enleva son i-oyaume parce qu'il avait
suivi le parti de Pompée auquel il s'était lié d'amitié; plus tard, il le reçut
en grâce.
13, Gentil-homme. — Les éd. ant. à 88 ajoutent : sien amy.
16, Escus. — Suétone, César, 54, indique comme se montant à six mille talents
(27.900.000 fr.) la contribution que versa Pompée.
19, Marcus Antonius. — Plutarque, Antoine, 8.
34, Immoi^tels. - En 170. Tite-Live, XLV, 12 et 13.
562,
5, JReges. — Citation que Montaigne a traduite, avant de la donner. —
C'est le régime qui, de nos jours, subsiste dans la partie de l'Hindoustan
soumise à la domination de l'Angleterre, qui en a absorbé une portion, en
administre une autre directement et a laissé le reste à ses princes indigènes
respectifs à titre de tributaires, vassaux ou alliés. C'est ce qu'elle est en
train d'appliquer à l'Egj'pte; et ce que nous-mêmes pratiquons en Tunisie,
sous le nom de protectorat. .
10, Acquis. — En 1526, Jean Zapoly disputait à Ferdinand d'Autriche (le frère
NOTES. LIV. II, Cil. XXIV. VOL. II, PAG. 562. Fb.o63
de Charles-Quint) le trône de Hongrie : battu par son compétiteur, il
s'adressa à Soliman dont il se reconnut le vassal, et en obtint, en retour,
l'investiture d'une partie de ce royaume et des secours.
CHAPITRE XXV.
21, Appian. — Guerres civiles, IV.
29, Hébétée. — Affaiblie.
34. Liaisons. — Bandages.
564.
1, Froissard. — Mémoires, I, 29.
8, Bides. — Ceux qui louchent.
11, Mot. — C'est ce qui arrive fréquemment quand,, pour se moquer, les
enfants contrefont un tic, un défaut de prononciation : c'est ce qui leur
fait contracter si facilement et d'une façon inconsciente l'accent des pays
où ils séjournent; c'est également un effet analogue qui fait qu'entendre
tousser, voir bâiller nous provoque à le faire nous-mêmes. Cela avait donné
lieu chez les Grecs à un proverbe que rapporte Plutarque : « Si tu fré-
quentes un boiteux, tu apprendras à clocher » ; et à ce propos, Montaigne dit
encore au chap XX du livre I des Essais (I, 132) : -< Vn tousseur continuel
irrite mon poulmon. •
15, Seiourner. — Et de me reposer dessus.
19, Pline. — Nat. Hist., VII, 50.
22, Ailleurs. — « Fortis imaginalio générât casum, disent les clercs » ; entrée
en matière du ch. XX du liv. I (I, 132).
28, Lucilius. — Sénkque, Epist. 50.
CHAPITRE XXVI.
566,
20, Barbares. — Tacite, Arin., XII, 47. — Cette coutume était en usage chez
les peuples de l'Asie septentrionale : les Ibériens, les Arméniens, les Parthes.
2(3, PoUere. — Les éd. ant. aj. : qui signifie exceller sur les autres.
568,
{'), Populariter. — V. N. II, 558 : Rumpi.
11, Armées. — Suétone, Auguste, 24.
12, Italique. — Ou sociale; guerre entre les Romains et leurs alliés les peuples
d'Italie, qui réclamaient, pour prix de leurs services, le droit de bourgeoisie
et les privilèges attachés au titre de citoyen romain (91 à 87).
15, Voyage. — Les éd. ant. portent : celle guerre, au lieu de : « ce voyage ». —
Valère Maxime, V, 3, 3. — On croit que c'est de là (a pollice trunco, de ce
qu'on se mutilait le pouce pour se dispenser du service militaire) que vient
le mot poltron (V. N. II, 542 : Appoltronny). — En 367, l'empereur Valen-
linien condamna à être brûlés vifs ceux qui se coupaient les doigts pour
se soustraire à la milice. De nos jours, en France, ceux qui se rendent cou-
pables de faits semblables ou analogues, ce qui afrive de temps à autre, sont
punis judiciairement et, à l'expiration de leur peine, envoyés dans des corps
de discipline où ils accomplissent leur temps de service.
15, Quelqu'vn. — Ce quelqu'un c'est Philoclès, un des généraux d'Athènes.
, dans la guerre du Péloponnèse, qui, lui-même fait prisonnier un peu plus
tard à la bataille d'iEgos Potamos (404), fut mis à mort avec 3.000 autres
prisonniers. Plutarque, Z,ysa«dre, 5; Xénophon, Hist. Gr., II; etc.
18, jEginetes. — En 458. Cicéhon, De Off'., III, 11 ; Valère Maxime, IX, 2; mais
Elien, Plutarque et Xénophon, qui relatent également le fait, disent que ce
fut pour les mettre hors d'état de manier la lance, sans les rendre inca-
pables de ramer. Peut-être est-ce en retour que fut rendue à Egine cette
loi qui ordonnait de mettre à mort tout Athénien qui aborderait dans
l'île, loi dont faillit être victime Platon quand il y fut déporté par ordre de
Fb.SGt ESSAIS DE MONTAIGNE.
Denys le Tyran; il n'aurait dû son salut qu'à ce que quelqu'un aurait dit
par dérision que ce n'était qu'un philosophe, sur quoi on se borna à l'agréer
comme esclave. — A certains moments de l'empire romain, on coupa aussi
les jarrets aux prisonniers de guerre pour les empêcher de servir plus tard.
19, Lacedemone. — Plutabque, Lycurgue, 14.
CHAPITRE XXVII.
21, Couardise. — Lâcheté, poltronnerie.
25, Friuoles. — Robespierre, au plus fort de la Terreur, voyant pêcher,
après un repas qu'il avait fait à la campagne, s'apitoyait, dit-on, sur les
souffrances des poissons qui, une fois pris, mouraient hors de l'eau.
M°" Campan.
28, Andromacbe. — Hécube, pendant la guerre de Troie, perdit presque
tous ses enfants au nombre de dix-neuf, vit massacrer sous ses yeux son
mari, sa fille Polyxène, son petit-fils Astyanax, fils d'Hector, et devint l'es-
clave d'Ulysse, tandis que sa fille Andromaque devenait celle de Pyrrhus,
fils d'Achille, qui l'épousa. Les malheurs de l'une et de l'autre ont fait le
sujet de tragédies grecques et aussi de tragédies françaises.
29, Jours. — Plutarqle, Pélupidas, 15. — Alexandre de Phères, assistant à
une représentation des Troades d'Euripide, sortit brusquement du théâtre
et fit dire à l'acteur de ne pas s'inquiéter et de continuer à bien jouer
son rôle; que s'il était sorti, ce n'était pas qu'il fût mécontent de son jeu,
mais qu'il avait honte que lui, qui sans pitié envoj-ait tant de gens à la
mort, on le vît s'attendrir sur les malheurs d'Hécube el d'Andromaque.
570,
2, Voir. — S'arrête, dès qu'elle voit.
8, Gendarme. — S'accoutume au meurtre et devient cruel par l'habitude
de plonger, jusqu'aux coudes, ses mains et ses bras dans le sang. — « Se
gendarmer », c'est se mettre en humeur, en posture d'homme qui veut
combattre.
20, Bouquer. — « Faire bouquer quelqu'un », c'est lui causer du dépit, le
mortifier, le faire enrager, l'obliger à céder. Au propre, c'est, en se jouant,
donner sur les joues du patient, qui les tient gonflées, deux petites tapes,
du plat et du revers de la main, qui l'obligent à desserrer et à laisser
échapper l'air qui sort avec un bruit semblable à celui d'un petit coup
de baguette sur un tambour.
29, Commise. — Plutarque, Des délais de la Justice divine, 2. — Montaigne
se trompe en disant que Bias plaignait les Orchoméniens; c'est Patrocle,
un des interlocuteurs de ce dialogue de Plutarque, qui cite cet exemple
de la vengeance trop tardive des dieux, sans indiquer en quoi a consisté
cet acte de trahison, ni à quelle époque il a été commis, mais seulement
que de ce fait les Orchoméniens auraient perdu enfants, parents et amis,
et que ce ne serait que longtemps après que Lyciscus aurait été atteint
d'une maladie par suite de laquelle son corps tombait en décomposition
et que lui-même considérait comme une punition du ciel.
37, Pistolade. — Coup de pistolet.
572,
16, Vertu. — Courage. /
•19, Vaincre. — Les éd. ant. portent : mais lâc/iement, sans combat et sans
hazard; au lieu de : « plus seurement qu'honorablement ».
24, Aueugle. — « Faire la figue à quelqu'un », c'est lui faire la nique, lui
tirer la langue, lui rire au nez, en un mot se moquer de lui en lui faisant
quelque grimace (V. N. I, 124 : Figue).
■ 24, Sourd. — « Dire des pouilles à quelqu'un », c'est lui dire des injures,
des paroles méprisantes.
27, Morts. — Pline, dans sa. Préface à Vespasien. C'est Plancus lui-même
qui fit la réponse donnée par Montaigne comme exprimée en son nom.
NOTES. UV. II, CIL XXVII. VOL. II, PAG. 572. Fb.56o
29, Noisif. — Querelleur; dérive de noise que l'on retrouve encore dafis
cette expression souvent employée : « chercher noise ». .
29, Aristote. — Diogène Laerçe, IX, 18.
32, Coup. — Les éd. ant. ajoutent : de bâton.
574,
8, Combat. — C'est ce à quoi on est revenu de nos jours.
33, Heary. — Chroniques de Monstreleï, 1, 9. — En 1371 ; le duc d'Orléans,
frère de Charles VII et père de Dunois, accusé d'avoir contribué à la
maladie du roi devenu fou, et de le tenir en chartre privée, avait pro-
voqué Henry IV roi d'Angleterre, qui avait tenu ce propos; chacun; de-
vait être accompagné de cent chevaliers. Henry n'accepta pas le d^i ,
disant qu'il n'était pas dans les usages de ses prédécesseurs que le roi'fee
mesurât avec quelqu'un qui n'était pas de son sang (de moindre état qu'il
n'était lui-même).
34, Lacedemoniens. — Hérodote, I, 82; Pausanias, X, 9; Athénée, XV, 6; etc.
— Les Argiens et les Lacedemoniens, en querelle au sujet du territoire
de Thyrée, convinrent de remettre leurs intérêts à trois cents de chaque
parti. Le combat eut lieu; il ne demeura que deux Argiens et un Lacé-
démonien du nom d'Othryadès; la nuit les sépara; les deux Argiens se
retirèrent; Othryadès, resté seul, érigea un trophée avec les armes des
ennemis, y traça de son propre sang une inscription qui attribuait la
victoire à son pays et se donna la mort pour ne pas survivre à ses com-
pagnons. Mais cela ne servit de rien; on ne s'entendit pas sur le vain-
queur; les deux armées en vinrent aux mains et la victoire demeura à
Sparte (VI" siècle).
35, Curiatiens. — Le combat eut lieu à la vue des deux armées, pour dé-
cider à laquelle, de Rome ou d'Albe, appartiendrait la suprématie. Trois
frères de part et d'autre, les Horaces pour Rome, les Curiaces pour sa
rivale, étaient en présence : au premier choc deux Horaces tombèrent,
les trois Curiaces étaient blessés. Le survivant des Horaces, craignant
de succomber contre ses trois adversaires réunis, feignit de prendre la
fuite afin de les diviser, persuadé qu'ils le suivraient plus ou moins vite
suivant la gravité de leurs blessures. Sa prévision se réalisa; revenant
alors impétueusement sur ses pas, il immola successivement ses trois ad-
versaires et assura ainsi le triomphe de sa patrie (667). — En citant ce
fait, Plutarque en conte un autre, à peu près identique dans ses détails,
survenu lors d'une guerre entre les habitants de Tégée et de Phenée
(Grèce) ; des deux côtés, les champions étaient trois frères jumeaux.
39. Meslé. — A ajouter à cette nomenclature le combat des Trente, célèbre
défi porté en 1351 par Jean, sire de Beaumanoir, au châtelain anglais de Ploër-
mel. Trente chevaliers bretons et autant d'anglais en vinrent aux mains
au pied du chêne Mi-voie (Bretagne); huit anglais furent tués, les autres
se rendirent. Dans l'ardeur de l'action Beaumanoir blessé, épuisé de
fatigue et de la perte de son sang, faiblissait : « Bois ton sang, Beauma-
noir! » lui cria son frère qui était au nombre des combattants. Bouillet.
39, Domestique. — De famille. — Ce duel, dont il va être parlé, Montaigne
n'en fait pas mention dans son journal de voyage, ce qui donne à penser
qu'il a dû avoir lieu après son départ d'Italie, où son frère l'avait accom-
pagné et où il demeura après lui; on peut voir tout le détail de cette
affaire dans les Mémoires de Brantôme, touchant les duels.
576,
29, Théorique. — Nous disons aujourd'hui théorie, quoique nous ayons
conservé pratique; c'est une bizarrerie de l'usage. — Rabelais, I, 5, dit
comme 3Iontaigne : « le n'entends point la théorique; la practique, io
m'en aide quelque peu. » — Brantôme, parlant des duels, dit pareillement :
« Les Italiens en ont très bien sceu les théoriques et practiques. »
34, Germains. — Tite-Live, XXVIII, 21. — Tous deux se disputaient la
succession à uiïe principauté; ils résolurent de s'en remettre au sort des
armes. Ils se battirent en présence de l'armée romaine, dans l'arène des
Fb.566 ESSAIS DE MONTAIGNE.
gladiateurs à Carthage (et non en Espagne), alors qu'on y célébrait des
jeux funèbres à l'occasion de la mort des deux Scipion (206).
578,
15, Butes. — C'étaient des tirs organisés pour l'arc et l'arbalète, avec ou
sans banquette pour le tireur d'une part; et de l'autre, à distance conve-
nable, une levée de terre contre laquelle se plaçait le but à atteindre
comme il en existe encore beaucoup dans le Nord de la France. Le mot
« butes • signifie ici ce genre de tir, plutôt que son aménagement.
Tous les exercices concourant au développement de la force et de l'adresse,
sont à pratiquer, et notamment ceux qui sont d'utilité immédiate à la
guerre. A ce titre le tir à l'arme de guerre est particulièrement à encou-
rager, car la défense nationale y est intéressée : les efforts individuels
de quelques-uns à cet égard sont insuffisants, il faut que cela devienne une
institution d'Etat. Pour ce faire, et c'est possible, facile même, il faudrait
que ces tirs à la cible pussent s'effectuer au centre même des populations,
et nonobstant n'offrir aucun danger; être gratuits dans une certaine me-
sure, pour tout individu de nationalité française, de l'âge des enrôlements
volontaires à celui du passage dans l'armée territoriale. On peut satisfaire
aux deux premières conditions, en établissant ces tirs souterrainement ,
dans les villes, sous les promenades publiques ou les principales artères
(à Paris par exemple sous l'esplanade des Invalides, aux Tuileries sous la
terrasse du bord de l'eau, etc.), et dans les localités moindres, dans le
voisinage immédiat, à l'instar des tirs forains. On emploierait à cet effet
des tuyaux métalliques de 2 à ô"" de longueur, s'ajoutant les uns aux au-
tres, de forme appropriée, de 1" de hauteur sur 0.60 de largeur, d'épais-
seur variable suivant qu'ils seraient en acier ou en fonte, suffisante pour
n'être pas perforés par la balle ; leur longueur totale permettant le tir à
200" . A l'origine du tir serait, pour le personnel et les tireurs, une cons-
truction également souterraine analogue à celle qui vient d'être édifiée
pour un tout autre usage, à Paris, près de l'église de la Madeleine; l'autre
extrémité serait aménagée pour les marqueurs; un fil électrique les relie-
rait. Des organisations analogues ont déjà fonctionné à Lisieux, à Bergerac,
et donnent les meilleurs résultats. — Le tir aurait lieu les dimanches et
jours de fête. Le nombre des cartouches allouées annuellement à titre
gratuit aux seuls individus dont il a été question ci-dessus, pourrait être
de 36 à chaque ayant-droit, qui aurait la faculté de les tirer quand bon
lui semblerait par série de six, en trois séances au moins : l'Etat trouverait
là un heureux moyen de renouveler ses approvisionnements de mobili-
sation; on intéresserait les tireui-s, en leur tenant compte des résultats
lors de l'appel sous les drapeaux ou des périodes d'instruction. L'installa-
tion de ces tirs, et il devrait en être créé un au moins par canton, serait
peu considérable : 3.000 fr. environ; elle serait à la charge des communes
du canton. L'État pourrait leur venir en aide par des subventions, cela
constituant au premier chef une dépense d'utilité publique indispensable
pour que le tir, qui importe à un si haut degré à notre sécurité et à notre
indépendance, pénètre dans les mœurs.
15, Tournois. — Sorte de fête publique, très en faveur au moyen âge, où
les chevaliers se mesuraient entre eux à cheval, armés de pied en cap,
mais à armes courtoises. Ces jeux, qui souvent entraînaient mort d'homme,
prirent fin en France en 1559, à la suite d'un accident survenu au cours
de l'un d'eux et qui causa la mort du roi Henri II.
15, Barrières. — C'était une variante de ce qui se pratiquait dans les tour-
nois : au lieu d'avoir liberté entière de mouvements, les deux adversaires
étaient séparés par des barrières qui empêchaient le combat corps à
corps.
19, Dommageables. — Par ce qu'il a dit du duel et ce qu'il dit ici de
l'escrime — qui en est l'exercice préparatoire — on voit que Montaigne
réprouve à la fois l'un et l'autre. En ce qui touche le duel proprement dit,
cette réprobation est parfaitement justifiée, c'est un reste d'institutions
NOTES. LIV. II, Cil. XXVII. VOL. II, PAG. 578. Fb.567
barbares où le bon droit n'entre pour rien et a trop souvent le dessous,
mais il est dans les mœurs et par cela même difficile à déraciner, au
point que la peine de mort édictée contre les duellistes, et appliquée à
certains moments, n'a pu en avoir raison. De nos jours, où les lois, à cet
égard, sont absolument lettre morte, il est surtout cultivé par de faux
braves auxquels il sert à faire de la réclame. Il n'en serait pas ainsi si on
ridiculisait comme elles le méritent ces rencontres sans motifs séiùeux,
aboutissant à des résultats qui ne le sont pas davantage. Si, chaque fois,
elles devaient se poursuivre jusqu'à la mise hors de combat de l'un des
deux adversaires et n'étaient pas arrêtées à la moindre égratignure, ou à
la première balle tirée même perdue, leur nombre s'en réduirait déjà
considérablement; et bien plus encore si chaque fois aussi la justice,
comme c'est son devoir, citait devant elle sans exception et non à sa fan-
taisie tous ceux ayant soit comme adversaires, soit comme témoins par-
ticipé à un duel, quel qu'en ait été le résultat, et frappait impitoyablement
pour fait ou tentative d'homicide ou de coups et blessures celui qui serait
reconnu avoir à sa charge les torts ayant rendu le duel indispensable ou
l'ayant amené abusivement. Dans ces conditions, on se respecterait davan-
tage les uns les autres, tout en n'allant sur le terrain que pour des raisons
en valant la peine, si toutefois il en existe qui justifient que, quelle que
soit l'inégalité que crée entre les adversaires la pratique des armes, se
faire tuer ou blesser répare une injure dont on a été victime. Cela est
tellement absurde qu'il serait tout aussi efficace et bien plus logique de la
part de ceux qui sont d'accord pour régler leurs querelles de la sorte, de
fixer d'abord à l'amiable, par l'intermédiaire de leurs témoins, la répara-
lion jugée nécessaire : la mort, une balle ou un coup de poignard dans la
poitrine, dans un membre, ou encore payer une amende, accomphr tel ou
tel acte, satisfaire à telle convention, suivant ce qui aurait été ainsi dé-
cidé, et tirer au sort auquel des deux il échéerait de s'exécuter. De cette
façon, les chances seraient égales, le but ne serait pas dépassé, et la justice
n'aurait pas à intervenir; sans compter que si hétérochte que cela pa-
raisse, ce mode de règlement a parfois été déjà employé.
Quoi qu'il en soit, le duel est et restera toujours une institution
qui n'a pas le sens commun : — Tandis qu'il est permis aux personnes
soi-disant distinguées de se faire justice à coups d'épée ou de pistolet,
il est défendu à l'homme du peuple de se la faire à coups de bâton
(Colonel Perron). — On rougit dans le monde honorable de ruiner un
joueur qui ne sait pas jouer, on ne rougit pas d'ôter la vie à qui ne sait
pas se défendre. — Ces rencontres sont tout à l'avantage de l'homme im-
moral qui, parce qu'il sait manier une arme, se croit tout permis ; elles ne
prouvent même pas la véritable bravoure, s'allient souvent aux vices les
plus dégoûtants et même avec la lâcheté militaire; les plus hardis bret-
teurs ne sont parfois que de mauvais soldats (le journal l'Eclair).
2-2, Confus. — Erreur évidente; il faut lire « consul », comme le porte du
reste l'ex. de Bordeaux. — Le fait est rapporté par Valère Maxime, II, 3, 2.
28, Pbarsale. — Plutarque, César, 12. — La recommandation faite par
César à ses troupes, de frapper leurs adversaires plutôt au visage, tenait à
ce que la cavalerie de Pompée était recrutée en majeure partie parmi les
jeunes patriciens, qui appréhendaient surtout de se voir défigurés. Ce
. qu'avait prévu César, arriva : détournant la vue, se couvrant la tête pour
se préserver la face, ils ne tardèrent pas à prendre honteusement la fuite,
ce qui causa la perte du reste de leur armée.
31, Pbilopœmen. — Plutarque, Philopœmen, 12.
580,
1, Cape. — En habit de guerre.
2, Sachez. — Platon, dans le dialogue de ce nom.
8, Platon. — Traité des Z-ois, VII.
9, Cecyo. — L'ex. de Bord, porte Epicius, au lieu d'« Epeius », et Cercyo
au lieu de « Cecyo ».
Fb.568 ESSAIS DE MONTAIGNE.
11, Confèrent. — Contribuent. « Conférer », dans ce sens, est purement
latin.
12, Maurice. — Philippe est désigné sous le nom de Philippicus et indiqué
conmie beau-frère et non comme gendre de l'empereur Maurice, par Zona-
ras et Cedrenus. — Phocas, avant de tuer l'empereur qu'il avait fait pri-
sonnier, fit égorger, en présence de sa victime, ses cinq enfants. La nour-
rice du plus jeune, pour le sauver, lui avait substitué le sien; Phocas
l'apprit et le fit livrer au bourreau.
26, Macédoine. — Tite-Live, XL, 3 et 4. — Ce Philippe est celui qui, à deux
reprises, fit la guerre aux Romains, et, en dernier lieu, subit à Cynos-
céphales, on Thessalie (Grèce), une défaite qui fut suivie d'un traité hon-
teux; il allait reprendre les hostilités, quand il mourut. De naturel très
soupçonneux, il alla, sur de faux rapports, jusqu'à faire mettre à mort son
propre fils.
28, Résoudre. — Se rassurer.
37, Propos. — Ce passage « Les belles matières... à mon propos », ne figure
pas dans l'ex. de Bord. Son intercalation coupe assez inopportunément le
récit, qui est tiré de Tite-Live, XL, 4, que toutefois Montaigne ne s'est pas
astreint à traduire bien fidèlement.
582,
8, Roy. — Qui ordonnait de saisir les enfants de tous ceux qu'il avait fait
tuer.
19, loindre. — Comme ces gardes étaient sur le point de les atteindre.
24, Traictes. — Tirées du fourreau, mises à nu; du latin tractus.
26, Forte. — Plus noble, plus courageuse.
34, Maistres. — Le fait se passait on 185.
38, Vengeance. — Allusion au mot de Caligula : « Je veux qu'il se sente
mourir. » Suétone, Caligula, 30.
584,
1, Engins. — Ç.-à-d. les voilà forcés de trouver des moyens par lesquels
ils puissent savourer, à la fois, complètement et lentement le plaisir de la
vengeance.
4, Cruauté. — Cette même pensée se trouve déjà exprimée dans les mêmes
termes, liv. II, ch. II (II, 102), et ce fut un des passages des Essais dont
la censure, à Rome, fit reproche à son auteur. — Là se borne l'apprécia-
tion de Montaigne sur la peine de mort, et les philanthropes de nos jours
qui en poursuivent l'abolition ne sauraient s'appuyer sur lui. Cette peine
n'est pas à supprimer, même à l'égard des criminels ne jouissant pas de
la plénitude de leurs facultés; ils ont montré qu'ils sont un danger public,
comme l'est un chien enragé, la société a le devoir de se débarrasser d'eux
comme de lui. Quant à son efficacité préventive, elle n'est pas niable, pas
plus que celle des châtiments corporels si malencontreusement supprimés
en France. Ce qui restreint l'effroi salutaire qu'elle inspire c'est surtout
l'espoir d'y échapper, depuis que les jurys et le chef, de l'Etat ont exigé
en principe, les uns les circonstances atténuantes lors même qu'il n'y en a
pas, l'autre la grâce octroyée lors même qu'elle est le moins justifiée. Par
trop de sensiblerie pour les mauvais, on en est arrivé à compromettre la
sécurité des bons : l'assassinat, les attaques nocturnes sont devenus en
France de pratique courante; à Londres, qui a six millions d'habitants,
on ne compte en moyenne par an que seize à vingt assassinats, tandis
qu'à Paris, où la population est moitié moindre, il y en a dix fois plus.
C'est qu'aussi chez nos voisins d'outre-Manche tout assassin est pendu : il
n'y a ni circonstances atténuantes, ni distinction de sexe; toute attaque
nocturne est punie du « Chat à neuf queues », sorte de knout, sans
préjudice du « hard labour » (travaux forcés), et celui qui en a goûté
une fois, ne s'expose guère à le recevoir une seconde. — Quant à
la publicité des exécutions, elle est sans utilité et a même des inconvé-
nients, dont le plus grave est de diminuer la crainte qu'elle inspire, en
586,
NOTES. LIV. II, CIL XXVII. VOL. II, PAG. 584. Fb.569
montrant combien c'est peu de chose; l'abus qu'on en fit sous la Terreur
n'avait-il pas enlevé à la plupart des prisonniers déférés au Tribunal ré-
volutionnaire, certains dès le premier moment du sort qui les attendait,
et familiarisés avec celte idée, les préoccupations inhérentes d'ordinaire à
ceux qui sont sous le coup d'accusations capitales!
10, losepbe. — Dans VHùtoire de sa vie, vers la fin.
16, Mecbmed. — Chalcondyle, Bist. des Turcs, liv. X. — Mahomet II; s'em-
para de Constantinople dont il fit sa capitale et subjugua la presque tota-
talité des provinces qui font partie ou relèvent encore actuellement de la
Turquie d'Europe; à la gloire des armes, joignit celle des lettres; l'histoire
lui reproche cependant des actes d'une cruauté révoltante.
19, Simeterre. — Ou mieux cimeterre; sabre à lame fort large et recourbée
dont faisaient particulièrement usage les Turcs.
27, Crœsus. — Hérodote, I, 92; Plutarque, De la malignité d'Hérodote.
29, FouUon. — Artisan qui fabriquait le drap.
30, Cardes. —Sorte de peignes formés de pointes de fer très fines, disposées
sur un grand nombre de rangées, servant à démêler la laine, la bourre
ou la soie dont on fait les étoffes.
33, Vayuode. — Titre porté autrefois par les princes des principautés danu-
biennes.
38, L'enuie. — Toute la haine qu'inspiraient les méfaits de l'un et de l'autre.
Du latin invidia qui a cette signification; exemple, parmi tant d'autres, de
la propension de Montaigne à écrire le français en latin, y transposant et
adaptant tous mots, expressions et tournures de phrase lui semblant
propres à mieux rendre sa pensée.
3, Suitte. — Chronique de Carion et Annales de Silésie. — En 1514. A
l'occasion d'une croisade projetée en Hongrie contre les Turcs, un soulè-
vement de gens sans aveu éclata. Ils prirent pour chef Georges Sechel,
qui commit à l'égard de la noblesse les actes les plus horribles. Vaincu
en divei*ses rencontres et en dernier lieu à Temesvar, Sechel expia ses
forfaits par le supplice qu'indique Montaigne : nu et enchaîné sur un
chevalet, on lui mit sur la tète une couronne de fer ardent; on le saigna
et on fit boire son sang à son frère; puis après lui avoir refermé les
veines, on fit dévorer à belles dents son corps par vingt de ses complices
et ce qui demeura de son corps fut haché, bouilli et rôti, et on le leur fit
manger; eux-mêmes, on les fit périr ensuite dans d'affreux supplices.
CHAPITRE XXVIH.
4, Caton le Censeur. — Fut préteur; consul, obtint par ses succès en
Grèce les honneui-s du triomphe; enfin censeur, fonctions qu'il exerça avec
une grande sévérité. Dans ses dernières années, redoutant la rivalité de
Carthage, il terminait tous ses discours au Sénat,, quel qu'en fût l'objet,
en disant qu'il fallait la détruire. On lui a reproché son avarice (V. N. I,
564 ; Dehors; N. II, 112 : Seruy) et trop de penchant pour le vin (V. N. I,
616 : l-irlus).
4, leune Caton. — Montra de bonne heure une âme ferme et courageuse
qui ne se démentit jamais. Lors de la rivalité de César et de Pompée, il se
déclara pour ce dernier; du reste bien avant déjà il s'était prononcé
contre César dont il redoutait l'ambition et qui avait été l'amant de sa
sœur. Après la défaite de Pompée, il rallia son armée et passa en Afrique
pour continuer la résistance; la bataille de Thapsus anéantit ses espé-
rances; enfermé dans Utique, il s'y donna la mort, et de ce fait a été appelé
Caton d'Utique pour le distinguer de son grand-oncle Caton le Censeur
(V. I, 502 et N. Escarmouche; N. II, 430 : Premier; N. II, 434 : Autre;
N. I, 404 : Catoni).
5, Apparient. — Les éd. ant. portent : font à mon opinion grand honneur
Fb.570 ESSAIS DE MONTAIGNE.
au premier : car ie les Irouue eslongnex d'vne extrême distance ; au lieu de :
« apparient... siècle ».
6, Visages. — C.-à-d. le premier montra son beau naturel sous plus d'as-
pects différents.
6, Precelle. — L'emporte; du latin prsecellere, surpasser, vaincre.
11, Scipion. — L'animosité de Caton le Censeur contre Scipion l'Africain ne
prit jamais fin. Non content de l'attaquer lui-même, il lui suscita des
accusateurs (V. I, 660); et, ne parvenant pas à l'atteindre à cause de son
illustration, il poursuivit son frère I.ucius qu'il fit condamner à une
amende excédant ses ressources et plus tard, lorsque lui-même fut cen-
seur, il alla jusqu'à le priver de son cheval, pour insulter à la mémoire
de son frère.
13, Dit. — Plutarque, Caton le Censeur, 1.
14, Grecque. — Caton avait quatre-vingts ans quand il commença à se
livrer à l'étude de cette langue.
17, Enfantillage. — En enfance. Cette expression de Montaigne est de celles
' que Pasqlier lui reproche d'avoir employées dans un sens inaccoutumé.
17, Et tout. — Aussi. On dit encore dans certaines parties de la France,
notamment en Sologne, « itout », pour aussi.
18, Patenostre. — L'oraison dominicale, le Pater noster, comme l'on dit
quelquefois, ou simplement le Pater, expression d'usage courant. Patenostre,
au dire de Pasqcier, était à l'époque une expression purement gasconne :
« Dieu nous garde des patenostres de M. le Connétable », disait-on alors,
en parlant du connétable de Montmorency qui, dévot autant que sévère,
marmottait toujours Pater, Credo et Ave Maria, ne s'interrompait que
pour ordonner des mesures de rigueur et reprendre aussitôt ses oraisons.
21, Gaigna. — Plutarque, Parallèle de Flaminius avec Philopœmen. — En
197; à la bataille de Cynoscéphales, où il défit Philippe V, roi de Macé-
doine.
22, Honestis. — Dans Juvénal, d'où elle est tirée, cette phrase a un sens tout
autre que celui dans lequel elle est employée ici.
24, Encore? — Plutarque, Apophlh. des Lacédémoniens. Xénocrate, dit-il,
venait à l'école d'Eudeminondas pour y apprendre la vertu : « Quand en
usera-t-il, s'il en est encore à la chercher? » aurait observé celui-ci. Le fait
ainsi présenté semble douteux. Xénocrate ayant été des disciples de Platon,
au nombre desquels comptait également Eudeminondas, et ayant dirigé
l'Académie, après Speusippe, pendant vingt-cinq ans; mais il se peut que
Xénocrate qui, lui aussi, l'avait eu pour auditeur, allât parfois l'entendre
quand il en vint lui-même à professer.
25, Philopœmen. — Plutarque, Philopœmen, 12.
588,
1, Sages. — Cette maxime est tirée de Sénèque, Epist. 36.
20, Cettuy-cy. — Caton le Censeur.
23, Abécédaire. — Sénèque, Epist. 36.
40, Nuict. — Sénèque, Epist. 71 et 104. Le jour où Caton échoua dans l'obten-
tion de la préture, dit l'auteur latin, il alla jouer à la paume; Montaigne
parle à cette occasion de la nuit au lieu du jour, probablement par licence
littéraire, pour mieux établir le parallèle entre ce fait et celui de sa mort.
CHAPITRE XXIX.
590,
6, Quelqu'vn. — Sénèque, Epist. 73, et De Providentia, 5. — Cela rappelle
ces vers de Sylvain Maréchal, un des chantres de la Liberté et de la déesse
Raison (1750 à 1803) :
. Le Sage est plus que Dieu, sur ce globe bizarre :
Les maux que Dieu permet, le Sage les répare ;
D'un souffle, en se jouant, Dieu créant l'univers.
Est moins que Régulus redemandant des fers. »
NOTES. LIV. II, Cil. XXIX. VOL. II, PAG. 690. Fb.b71
8, Imbécillité. — La faiblesse ; du latin imbecillUas, qui a même signification.
9, Dieu. — Cette même pensée a été bien souvent exprimée. — Cicéron :
« Il n'est point de puissance que la force ou le fer ne viennent à bout de
briser ou de détruire; mais se vaincre soi-même, étoutïer son ressentiment,
modérer sa victoire..., jc'est là un héroïsme qui vous élève au-dessus des
plus grands hommes ou plutôt vous assimile aux dieux eux-mêmes. • —
P. Syrus : « On vainc deux fois quand, victorieux, on se vainc soi-même. -
— S.\L0M0N : « Qui se domine est plus grand qu'un conquérant. » — St-
NÈQUE : « 11 n'y a pas plus puissant, que celui qui se possède. • — Th. Cor-
neille :
« Un roi, né pour l'éclat des grandes actions,
Dompte jusqu'à ses passions ;
11 ne se croit point roi, s'il ne fait sur lui-même
Le plus illustre essai de son pouvoir suprême. •
La Fontaine*^ « La plus belle victoire est de vaincre son cœur. »
2(3, Manque. — Défectueux, imparfait, faible.
28, lours. — Les actes de la vie ordinaire et sa manière d'être habituelle.
592,
6, Conte. — Diogène Laebce, 62 et 63.
11, Amis. — Montaigne a dit précédemment (liv. II, ch. XII, vol. II, p. 236)
que ceux qui dépeignent ainsi Pyrrhon, enchérissent sur sa doctrine.
27, Discours. — Diogène Laerce, 66.
28, D'icy. — Du manoir de Montaigne.
31, Bien-veignant. — L'accueillant, en manière de bienvenue.
35, Nostres. — Un fait semblable, chez un jeune gentilhomme de la Sologne,
est relaté par Henry Estienxe, dans son Apologie pour Hérodote, I, et se
serait passé au milieu du xvi" siècle; peut-être est-ce le même auquel
Montaigne fait allusion.
40, Extulerat. — Le texte de Ti bulle porte extulil.
594,
3, Cibele. — Les Galles, prêtres de Cybèle, se mutilaient eux-mêmes, en
se faisant initier, coutume que l'on fait remonter à Atys leur fondateur
qui, aimé de Cybèle et commis par elle à son culte, après lui avoir juré
de garder la chasteté, ayant manqué à son serment, fut inspiré par la
déesse d'une telle fureur qu'il se mutila lui-même.
28, lours. — Peut-être Marco Polo, vénitien, dont les voyages en Asie,
notamment en Tartarie, où cette coutume semble avoir existé, bien qu'ef-
fectués à la fin du xui" siècle, n'ont été publiés qu'au commencement
du xvr.
596,
1, Baller. — Danser, de l'italien ballare qui a même signification.
17, Tristesse. — L'usage de se jeter dans les flammes à la mort du mari
existe encore dans l'Inde; dans la partie soumise aux Anglais, il faut en
obtenir la permission, et le nombre de ces sacrifices qu'ils ont tolérés
s'est, de I8Î7 à I82I, en cinq ans, élevé à 3.402 (trois mille quatre cent
deux) !
26, Gymnosopbistes. — Quinte-Curce, VIII, 9; Strabon, XV. — Ils allaient
toujours nu-tête et nu-pieds, d'où leur nom ; faisaient profession de vivre
dans la retraite, de fuir le mariage et de mépriser la douleur. Montaigne
mentionne ici d'après Plutarque, Alexandre, 21, la mort de l'un d'eux;
trois siècles plus tard, un autre nommé Zarmenochegas en agissait de
même, dans Athènes, devant Auguste.
28, Façon. — Usage, coutume.
39, Fatum. — Le destin, la fatalité. Allusion aux querelles suscitées à
maintes reprises, dans l'Église même, par le don de prescience attribué
à Dieu, qui enlèverait à l'homme son libre arbitre, son arbitrage, comme
dit Montaigne quelques lignes plus loin.
Fb.572 ESSAIS DE MONTAIGNE.
598,
26, Sarrazins. — Cette appellation donnée au moj'en âge aux armées mu-
sulmanes, viendrait de ce qu'au début certaines tribus pillardes de l'A-
rabie (Serrak, en arabe, signifie voleur) constituaient leur force princi-
pale.
27, S. Lonys. — Atteint d'une maladie dangereuse, fit vœu d'aller combattre
les infidèles. Il débarqua en Egypte où, après quelques succès, il fut battu
et fait prisonnier à la bataille de Mansourah ; ayant racheté sa liberté, il
passa en Palestine, où il demeura quatre ans sans grands résultats. En
1270, il s'embarqua pour une seconde guerre sainte, et aborda près de
Tunis; mais la peste se mit peu après dans son armée, lui-même en fut
atteint et mourut.
34, Mort. — Mémoires de Joinville.
42, Improuueu. — En 1498. Savonarole, moine jacobin et partisan de la
France à Florence, était accusé d'hérésie, de paillardise et de tromper le
peuple dans ses prédications. Un cordelier, adversaire politique et reli-
gieux des Jacobins, offrit de démentir ses impostures et ses fausses doc-
trines par l'épreuve du feu : tous deux devaient ensemble monter sur un
même bûcher; il ne doutait pas d'y rester, mais avec lui son adversaire
qui se disait certaih dy échapper. Savonarole se présenta ayant en main
le Corpus Domini (une hostie consacrée), prétendant que c'était là sa sau-
vegarde; le cordelier protesta, mais en vain, disant qu'il était impie d'ex-
poser l'hostie à être brûlée, et, de ce fait, l'épreuve n'eut pas lieu. Quelques
jours après, condamné par le représentant du pape, Savonarole périt
dans les flammes. — Mémoires de Ph. de Comixes, VIII, 19; Sismondi, Répu-
bliques italiennes du. Moyen Age, Xll, 98.
600,
2, L'Huniade. — En 1448, lors de la bataille de Crassovie, où, pendant
trois jours, les Hongrois résistèrent à l'armée ottomane quatre fois plus
nombreuse qu'eux.
2, Donner. — « A se livrer » ou « à se choquer », batailles ayant ici
le sens d' « armées ».
7, Forme. — « Au gîte », terme de chasse.
29, Espaule. — Henri de Navarre, depuis Henri IV, qui par son activité,
et quelquefois par sa témérité, suppléait aux ressources qui lui man-
quaient.
31, D'Orange. — Guillaume de Nassau, chef des Pays-Bas révoltés contre
la domination des Espagnols qui avaient mis sa tête à prix. Assassiné en
1584 par un fanatique qui le tua d'un coup de pistolet, il avait déjà été,
deux ans auparavant, l'objet d'une semblable tentative de meurtre.
602,
3, Troublé. — Actuellement le poignard est bien délaissé dans le cas où
ces attentats sont inspirés par la politique ou la question sociale qui sont
devenues tout un; au pistolet s'est substitué le revolver; mais c'est aux
explosifs que l'on a recours de préférence. Les facilités d'exécution et les
chances d'échapper soi-même sont beaucoup plus grandes; le nombre des
victimes étrangères à la cause est à la vérité plus considérable, mais de
cela n'ont cure ceux qui, à l'abri de tout danger, ont préparé le forfait.
11, Pareil. — En 1563, par Poltrot de Méré, lequel assassina le duc de
Guise qui, venant de mettre le siège devant Orléans, revenait à cheval à
son logis. Contrairement à ce que dit Montaigne, l'assassin était à pied,
embusqué derrière un buisson, et tira à six pas de distance; son arresta-
tion n'eut lieu que le lendemain; après jugement, il fut écartelé. Mémoires
de Brantôme, à l'art. M. de Guise, tome 111.
23, L'aultre. — Balthazar Gérard, l'assassin du prince d'Orange; il fut
pareillement écartelé.
25, Assassins. — Assassiniens. Peuplade de Phénicie; leur Chef n'était
connu des croisés que sous le nom de « Vieux de la Montagne • ; l'obéis-
sance absolue des initiés à ses ordres le faisait redouter de tous; nul
NOTES. LIV. II, CH. XXIX. VOL. II, PAG. 602. Fb.o73
n'était à l'abri des arrêts de mort qu'il prononçait. — On a beaucoup dis-
cuté sur leur nom, d'où nous avons fait assassins et qui est passé dans
notre langue : les uns le font dériver du pays qu'ils occupaient et qui se
serait appelé Haschischa; d'autres de ce que c'étaient des fumeurs de
« haschisch • (sorte de préparation enivrante du chanvre); d'autres, de ce
que leur arme de prédilectiofi était un poignard appelé Sahs, etc.; pour
nous, nous estimons qu'il vient du met arabe asses (gardes), encore actuel-
lement usité, parce qu'ils étaient les gardes de leur chef et que leur rôle
actif en avait fait la terreur des contrées environnantes. — Consulter à ce
sujet Sylvestre de Sacy.
'M, Saincte. — En 1151; ce crime fut le fait d'un fanatique religieux.
Ul, Montferrat. — En 1192, à Tyr; Conrad qui en était seigneur y fut as-
sassiné pour n'avoir pas fait droit à une réclamation du Vieux de la Mon-
tagne qui revendiquait, comme lui appartenant, un vaisseau dont le
Tyriens s'étaient emparé.
CHAPITRE XXX.
604,
■29, Teste. — Montaigne parle ici d'un être né viable à deux corps et une
seule tête. Ce cas est moins fréquent que celui de jumeaux unis tangen-
tiellement par une membrane qu'aujourd'hui on tente parfois de disjoindre
par une opération chirurgicale : tels les frères Siamois, dans la première
moitié du siècle dernier, qui arrivèrent à âge d'homme et demeurèrent
ainsi unis jusqu'à leur mort; celle de l'un entraîna celle de l'autre. —
En Suisse, les soeurs Marie- Adèle, opérées en 1882 et qui succombèrent
toutes deux. — En 188G, les filles du docteur allemand Bœhm, opérées par
leur père quelques jours après leur naissance; l'une d'elles mourut. — Les
sœurs brésiliennes Rosalina-Maria, opérées en 1900 et dont l'une mourut
six jours après. — Les sœurs hindoues Radica-Doodica, fillettes de 8 à 9 ans,
toutes deux tuberculeuses, opérées en 1902, qui moururent l'une six jours,
l'autre douze à quinze mois après. — Les sœurs Rosa-Josepha, nées en
1877, dans les environs de Prague, opérées en Amérique, en 1906, avec
succès, semble-t-il. — Deux jeunes Chinois, encore indemnes, que l'on
exhibe à travers lo monde dans les fêtes foraines.
30, JRoy. — llenrilll, sous lequel s'agitaient trois partis puissants : les
Catholiques, la Ligue et les Protestants.
35, Reculons. — La remarque est d'ARisTOTE qui, dans sa Rhétorique, 111,
12, dit qu'Épiménide n'exerçait point sa faculté divinatrice sur les choses
à venir, mais sur celles qui étaient passées et encore inconnues.
606,
7, Homme. — « Cette opinion de Montaigne : « Ce que nous appelons
monstres, etc.. », résume admirablement l'opinion qui prévaut de nos
jours, et la science d'aujourd'hui ne saurait rendre d'une manière plus
concise et plus énergique l'opinion à laquelle elle s'est arrêtée et qui est
bien plus sage que celle qui consiste à dire que la monstruosité est l'ab-
sence de quelque cause finale. » Chateaubriand, — Le même dit encore :
« Les monstruosités nous sont envoyées pour nous montrer ce que serait
la création, si Dieu retirait sa main. >• — « L'univers, pour qui saurait
l'embrasser d'un seul coup d'œil, serait un fait unique, une grande vérité. »
D'Alembert. — « Ce qui est hasard à l'égard de nos conseils incertains est
un dessein concerté dans un conseil plus haut. • Bossuet.
12, Soit. — « Cela est absolument vrai au physique comme au moral; tout
est dans la nature, le vice comme la vertu; et il est impropre de dire,
par exemple, que tel crime est contre nature, il n'y en a point de tel. »
Naigeon.
Fb.574 ESSAIS DE MONTAIGNE.
CHAPITRE XXXI.
20, Aristote. — Morale à Nicomaque, X, 9, où se trouve cité le passage
d'HoMÉRE sur les Cyclopes, Odyssée, IX, 114.
21, Cyclopes. — Suivant la fable, étaient des géants monstrueux n'ayant
qu'un œil au milieu du front et forgeant dans l'Etna, sous les ordres de
Vulcain, les foudres de Jupiter; suivant l'Histoire, ce furent les premiers
habitants de la Sicile, hardis pirates, toujours sur la côte à épier s'il ne
passait pas quelque navire pour le piller.
608,
7, A tout. — « Avec », comme on l'a déjà vu plusieurs fois.
7, Esclatante. — Avec une voix aiguë, des éclats de voix.
10, Eslocbements. — Synonyme d'esboittements et qui, tous deux, signi-
fient dislocations.
15, Sincérité. — Pureté, netteté de jugement; c'est le sens propre du mot
latin sinceritas.
18, Pédantes. — Aux maîtres d'école.
29, R'accoisez. — Apaisés, tranquillisés, revenus de notre emportement.
Vient de l'ancien mot « coi », qui ne se retrouve plus que dans les ex-
pressions « se tenir coi », « demeurer coi », et" qui dérive lui-même du
latin quietus, qui a même signification.
29, Brouillas. — Brouillards. — Ce passage est emprunté de Plutauque,
Comment il faut refréner la colère, et dans les mêmes termes que ceux
employés par Amyot son traducteur.
39, Gorgoneo. — Gorgones. — - C'étaient trois sœurs hideuses à voir, qui
n'avaient qu'un œil en commun et changeaient en pierre tous ceux qui les
regardaient; Persée en délivra la terre et parvint, avec le secours de
Minerve, à trancher la tête de Méduse, l'une d'elles, que la déesse fixa sur
son égide ou bouclier. Myth.
40, Rabirius. — Les éd. ant. et l'ex. de Bord, portent : Lucius Saturninus,
ce en quoi il y a confusion. — Rabirius avait été un des sénateurs les
plus opposés à Saturninus lorsque, 37 ans auparavant, ce tribun du peuple,
chaud partisan de Marins, dont César était le neveu, avait été assassiné;
et c'est de cet assassinat commis non par lui, mais par un esclave, qu'en
la circonstance, il était accusé.
610,
1, Faire. — ■< Bien dire fait rire, bien faire fait taire. »
2, Ceux-là. — Les Protestants.
7, Croit pas. — Il n'est en effet que trop vrai que les mœurs ne sont pas
toujours en concordance avec les principes religieux; on ne saurait nier
• cependant, en ce qui touche le Christianisme, que leur action ne peut être
que favorable.
11, Eudamidas. — Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens, porte Eudemo-
nidas.
14, Cleomenes. — Plutarque, ibid.
19, Viuement. — C.-à-d. le fait entre plus avant dans l'àme, frappe plus for-
tement l'esprit de ceux qui le lisent ou l'écoutent. — Les éd. ant. ajoutent :
et presse bien autrement.
30, Bien. — L'éd. de 88 porte : d'honneur, au lieu de : « de bien ».
31, Proposer. — Aulu-Gelle, XVIII, 3.
35, Aul. Gellius. — Aulu-Gelle, I, 26; on a de lui un ouvrage qui ne nous
est pas parvenu en entier, intitulé « Nuits attiques », où l'on trouve de
précieux renseignements sur l'antiquité et beaucoup de fragments d'au-
teurs anciens perdus.
612,
3, Vantait. — Cet esclave de Plutarque lui reprochait non de n'être pas
philosophe, mais de ne pas agir en philosophe.
NOTES. LIV. II, GH. XXXI. VOL. II, PAG. 612. Fb.SIS
16, Disputons. — « La valeur ne se connaît que dans la guerre, Tarnitié
dans le besoin, la sagesse dans la colère. » Prov. oriental.
16, Archytas. — Cicéron, Tusc, IV, 36; De Republica, 1, 38; Valère Maxime,
IV, 1; Lactance, De ira Dei, 18; etc.
20, Bien. — Les éd. ant. portent : comme lu mérites, au lieu de : <• bien ».
21, Platon. — SÉNÈQUE, De Ira, 111, 12.
23, Cbarillus. — Plutarque, Apophlh. des Lacédémoniens.
32, Vertu. — Séxkqle, De Ira, 1, 16, d'où le fait est tiré, est moins favorable
à Pison : « C'était, dit-il, un homme exempt de plusieurs vices, mais
mauvais et dans l'esprit duquel la sévérité était la fermeté d'àme. » 11
passait pour avoir, à l'instigation de Tibère, empoisonné Germanicus;
accusé de ce crime par Agrippine et craignant de n'être pas soutenu par
l'empereur, il se donna la mort.
614,
5, Negotier. — Qui ont affaire à des femmes têtues.
8, Celius. — SÉNÈQUE, De Ira, 111, 8.
15, Pbocion. — Plutarque, Inslructions pour ceux qui manient affaires d'Etat.
— Phocion, aussi redoutable à la tribune que sur le champ de bataille,
fut le rival de Démosthène qui l'appelait la « hache de ses discours »; il
était célèbre par son désintéressement et sa rigidité de principes; injus-
tement accusé de trahison, fut condamné par ses concitojens à boire la
ciguë.
616,
3, Dehors. — Peut-être le duc d'Anjou, devenu Henri 111.
4, Diogenes. — Diogène Laerce, IV, 34. — Diogène, venu de bonne heure à
Athènes, y étudia la philosophie, et, adhérant aux principes de l'école
des Cyniques, outra leur austérité, vivant dans la plus grande misère,
habitant, dit-on, dans un tonneau et ne subsistant que d'aumônes; faisait
surtout consister la sagesse dans les privations volontaires. On cite de lui
nombre d'anecdotes dont l'authenticité est douteuse.
7, Butfe. — Soufflet. — L'éd. de 88 porte : nazarde à son valet à peu, au
lieu de : <■ buffe... peu ».
14, Famille. — Cet alinéa semble avoir été écrit par Montaigne à l'adresse
de sa femme, qu'il ne met du reste presque jamais ostensiblement en
cause.
29, Partie. — Sans partie adverse, sans antagoniste.
30, Portent. — C.-à-d. pour en user là seulement, où elles peuvent produire
quelque effet.
618,
0, Mesme. — La chute des corps graves abandonnés à eux-mêmes est, en
effet, accélérée au fur et à mesure qu'ils descendent; cela est vrai au
moral comme au physique.
7, Paye. — Ce qui me satisfait, mè dédommage, c'est que lorsque les
occasions sont d'importance.
10, C^eruelle. — En inquiétude.
28, Aristote. — Morale à Nicomaque, 111, 8.
29, Contredisent. — Sénèque, De Ira, 1, 16.
CHAPITRE XXXll.
620,
9, Neutuiesme. — Le règne de Charles IX fut déchiré par les guerres des
Catholiques et des Protestants ; et la paix étant conclue, déshonoré par le
massacre de ces derniers, ordonné à l'instigation de la reine mère Cathe-
rine de Médicis et pratiqué à la fois sur tous les points de la France,
dans la nuit de la S.-Barthélemy (24 août 1572).
15, Esprit. — Les éd. ant. portent : sa viuacité, au lieu de : ■< son esprit ».
22, Seneque. — Sénèque a compté, de tous temps, des partisans très décidés
et de très violents adversaires : Montaigne, Balzac, le comte de Maistre
Pb.576 ESSAIS DE MONTAIGNE.
sont au nombre des premiers; Diderot en fait un éloge outré; Dryden et
La Harpe le déprécient outre mesure.
24, Dion. — A écrit une histoire romaine depuis Énée jusqu'aux temps où
lui-même vivait. Il est en général exact; on lui reproche cependant de la
partialité envers certains, entre autres contre Sénèque.
622,
5, Mort. — Tacite, Annales, XIII, 11; XIV, 53, 54, 55; XV, 60, 64. Il faut
reconnaître cependant qu'il y a dans Tacite même de terribles imputations
contre lui, notamment quand il e représente (XIV, 7) demandant à Bur-
rhus s'il faut ordonner aux soldats le meurtre d'Agrippine, et se chargeant
ensuite (XIV, II) de l'apologie de ce parricide.
23, Hannibfil. — Cette appréciation d'Annibal aurait, été émise par lui
dans une rencontre qu'il aurait eue à Ephèse avec Scipion, lorsque le
premier était réfugié auprès d'Antiochus et que le second était en ambas-
sade auprès de ce prince (190). Elle est relatée par Plutarque dans les
vies de Pyrrhus et de Flaminius. Dans la première Annibal aurait assigné
à Pjrrhus le premier rang, à Scipion le second et s'attribuait à lui-même
le troisième. Dans la seconde, il donnait la prééminence à Alexandre, le
second rang à Pyrrhus, le troisième à lui-même. A quoi Scipion lui
ayant dit : • Et comment jugeriez-vous, si vous m'aviez vaincu? » Annibal
aurait répondu : ■< Je me placerais au-dessus de tous les autres capitaines
du monde. » — Tite-Live relate également cette conversation, comme le
fait Plutarque dans la vie de Flaminius; néanmoins, elle est généralement
considérée comme apocryphe, on ne croit même pas qu'Annibal et Scipion
se soient rencontrés nulle part après Zama.
23, Autrement. — Les éd. ant. ajoutent : recité.
30, Larecin. — Plutarque, Lycurgue, 14. — Montaigne a déjà mentionné
ce fait, I, 458. .
33, Loy. — Plus de moyen, de faculté, de liberté.
36, Pyrrhus. — Plutarque, Pyrrhus, 12.
624,
9, Ailleurs. — Immédiatement après l'exemple de cet enfant dont il est
question plus haut, qui se laissa dévorer le ventre par un jeune renard
qu'il avait dérobé.
12, Cicero. — Tusc, II, 14; V, 27.
18, Tesmoins. — Valère Maxime, III, 3, cite aussi le fait, mais en attribuant
ce trait de courage à un enfant macédonien qui assistait à un sacrifice
offert par Alexandre.
29, Recite. — Liv. XXII, vers la fin du ch. 16.
40, Tua. — Tacite, A^inales, IV, 45. — L'an 25, sous le règne de Tibère.
L. Pison était gouverneur de l'Espagne citérieure; ce meurtre fut attribué
à la sévérité avec laquelle il poursuivait les rentrées au trésor public.
40, Epicbaris. — Tacite, Annales, XV. 57.
626,
10, Argoulets. — Auprès de nos soldats, de nos gens d'armes.
17, Pistole. — Avec le chien d'un pistolet. Les chiens des armes à feu de
l'époque se composaient de deux plaquettes en fer ou mâchoires reliées
par une vis et formant étau, pour tenir soit la iTièche, soit la pierre servant
à mettre ou à produire le feu.
20, Rançon. — Prix payé pour se racheter de captivité ou de mauvais
traitements auxquels on se trouvait exposé.
23, Dague. — Sorte de poignard.
628,
4, Ailleurs. — Ch. XXVI du premier livre (I, 288 et suivantes;.
14, Insupportable. — L'ex. de Bord, porte : Quelle bestiale stupidité! au lieu
de "0... insupportable? »
14, Considère. — Les éd. ant. portent : aucunes de ces armes anciennes esle^
uées iusqu'au ciel au pris de la mienne, au lieu de : « aucuns... anciens ».
21, Celles-là. — En introduisant la variante qui précède, Montaigne, ayant
NOTKS. LIV. II, CH. XXX[1. VOL. Il, l*AG. 028. Fb.577
substitué « honunes >• à « àmcs ■>, aurait dû pareillement remplacer
« celles-là » par « ceux-là ».
26, Mulcté. — Mis à l'amende; du latin mulctalus qui a ce même sens. Le
fait est tiré de Plutarque, Agésilas, 1.
32, Petalisme. r- L'ostracisme était, à Athènes, une sentence de bannisse-
ment politique pour dix ans qui, lors du vote, s'inscrivait sur une co-
quille, d'où son nom. — Le petalisme était à Syracuse et à Corinthe ce
que l'ostracisme était à Athènes; mais sa durée n'était que de cinq ans et
le vote s'exprimait sur une feuille d'olivier, d'où aussi le nom qu'il
portait.
36, Cicero. — Fut successivement préteur, édile et consul. Mérita le nom
do « Père de la patrie », en déjouant la conjuration de Catilina; embrassa
le parti de Pompée, après Pharsale se rallia à César. Ce dernier mort, il
opposa Octave, neveu de César, à Antoine qu'il attaqua vivement et dont
l'influence le fit proscrire; il périt égorgé comme il cherchait à fuir. V.
N. II, 72.
36, Aristides. — Célèbre par ses vertus civiles et militaires; son intégrité
le fit surnommer ■• le Juste » ; il était de ceux qui commandaient à la
bataille de Marathon, contribua au succès de celles de Salamiue et de
Platée, fut frappé d'ostracisme par crainte de son crédit, chargé d'admi-
nistrer le trésor commun des Grecs destiné à pourvoir aux guerres futures
contre les Perses, et mourut si pauvre que l'Etat fut obligé de pourvoir à
ses funérailles et de doter ses filles.
36. Sylla. — Lieutenant, puis collègue et enfin rival de Marius contre lequel
il représentait l'oligarchie; vainqueur de Mithridate l'oi du Pont, il parvint
après quelques alternatives à triompher des partisans de Jlarius qui était
mort dans l'intervalle, et, maître absolu de Rome, élu dictateur perpétuel,
ensanglanta ses succès par d'horribles cruautés et de nombreuses pros-
criptions. Deux ans après, sans crainte des haines qu'il avait suscitées,
il abdiquait et rentrait dans la vie privée; il mourut l'année suivante.
V. Il, 156 et N. Sylla.
36, Lysander. — Remporta sur les Atiiéniens la victoire navale d'^Egos-
Potaraos qui mit fin à la guerre du Péloponnèse (405), fut tué dix ans après
dans un combat livré contre les Thébains.
36, Marcellus. — Fut cinq fois consul; battit les Gaulois (222); envoyé
contre Annibal après la bataille de Cannes, il releva les affaires des Ro-
mains à Noie, puis à Syracuse dont il s'empara après un siège de trois
ans; Archimède périt dans le sac de cette ville, malgré l'ordre qu'il avait
donné de l'épargner (112); vainqueur d' Annibal à Canusium (210), il
périt deux ans après dans une embuscade. On l'avait surnommé ■• l'épée de
Rome ■', comme Fabius Cunctator en était « le bouclier ».
37, Pelopidas. — Ami d'Epaminondas; contribua puissamment à l'expulsion
des Spartiates de Thèbes (379); fut tu('' eu 364 à Cynoscéphales (Thessa-
lie), dans un combat contre Alexandre de Phères.
37, Pompeius. — Général romain, surnommé le Grand. Embrassa le parti
de Sylla; reprit la Sicile et l'Afrique aux partisans de Jlarius. Sylla
mort, il reprend la Narbonnaise et l'Espagne à ses adversaires politiques
à la suite de la défaite et la mort de Sertorius (78). Il triomphe en Italie
d'une révolte des esclaves; extermine les pirates de la Méditerranée, achève
la guerre de Mithridate, conquiert une partie de l'Asie et forme le pre-
. mier triumvirat (60), avec Crassus et César dont il a épousé la fille. A la
mort de cette dernière et Crassus ayant été tué chez les Parthes, il rompt
avec César; dans la lutte qui s'ensuit, soutenu par le Sénat, il n'en est
pas moins chassé d'Italie, passe en (jrèce, tient un instant son ennemi
en échec à Dyrrachium, mais battu à Pharsale, il va demander asile en
Egypte, où à son débarquement il est assassiné par ordre du roi. Pompée
parvint au faîte des grandeurs, il le dut surtout à sa bonne fortune; il
avait de l'ambition, de la morgue, des talents, mais le génie lui faisait
défaut.
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV, 37
Fb.578 ESSAIS DE MONTAIGNE.
37, Agesilaus. — Roi de Sparte; vainquit les Perses en Asie et conquit l'Asie
Mineure; gagna la bataille de Coronée sur les Grecs coalisés, et fut lui-
même vaincu à Mantinée par Epaminondas; il se distinguait par son
courage et sa grandeur d'àme; à l'âge de quatre-vingts ans il guerroyait
encore. — Au nombre des recommandations expresses faites par Lycurgue,
était celle de ne pas combattre trop fréquemment contre les mêmes enne-
mis, afin qu'ils n'arrivassent point à acquérir l'expérience de la guerre;
c'est le reproche qu'on a fait à Agésilas, d'avoir, par ses expéditions répétées
en Béotie, rendu les Thébains aussi experts en cet art que les Lacédémo-
niens et avoir fini par être battu par eux. C'est aussi ce qui est arrivé à
Napoléon qui, après avoir vaincu l'Europe si souvent, a été vaincu par
elle, autant parce qu'au jeu de la guerre, comme en tout autre, on ne
gagne pas toujours, que parce qu'en battant sans cesse ses adversaires, il
avait laissé pénétrer par quelques-uns, partie des secrets de son génie.
630,
4, Œuures. — V. II, 70 et N. Profitable.
6, Vertu. — Ce même esprit d'équité que Montaigne relève dans les « Vies
illustres » de Plutarque et notamment dans les Parallèles qui s'y trouvent
insérés, se retrouve dans la <> Collation d'aucunes histoires romaines avec
les autres semblables grecques », de ce même auteur ou parues sous son
nom. On y voit d'un côté Posthumius livrant au supplice son fils, bien
que vainqueur, pour avoir combattu contre son ordre; et, de l'autre,
Epaminondas en agir de même. Là c'est Agamemnon sacrifiant sa fille
pour obtenir des yents favorables; ici c'est la fille de Métellus qu'atteint la
même infortune. De même à propos du dévouement de Décius, de l'hé-
roïsme de Mucius Scevola, de la trahison du roi Pausanias de Sparte et de
la manière dont elle fut punie, etc.. il cite des faits analogues chez la
partie adverse, s'appliquant d'une façon indéniable à tenir la balance
égale entre les Grecs et les Romains.
25, Labienus. — L'un des plus habiles lieutenants de César en Gaule; se
sépara de lui quand celui-ci, franchissant le Rubicon, marcha sur Rome;
embrassa alors le parti de Pompée et prit part à la bataille de Munda
(Espagne) qui mit fin à la guerre civile.
25, Ventidius. — César lui confia quelques affaires importantes en Gaule;
après la mort du dictateur, il seconda Antoine contre ses meurtriers; pos-
térieurement opposé aux Parthes, il les chassa de l'Asie Mineure (35).
28, Agis. — Agis III tenta de remettre en vigueur les lois de Lycurgue,
d'abolir les dettes, de faire un nouveau partage des terres, mais il échoua
et fut mis à mort par l'influence de ceux dont il menaçait les intérêts
(244 à 239).
28, Cleomenes. — Cleomène 111, poureuivant l'œuvre d'Agis III son prédé-
cesseur, opéra une révolution à Sparte, égorgea les éphores qui s'y oppo-
saient, détruisit le Sénat, abolit les dettes, effectua un nouveau partage
des terres et bannit le luxe. Ayant à combattre les Achéens, d'abord vain-
queur, il finit par être vaincu ; il passa alors en Egypte pour y chercher
des secours, mais déçu dans ses espérances, et peu après menacé dans sa
liberté, il fut réduit à se donner la mort.
29, Lycurgus. — Les éd. ant. ajoutent : et Scipion encore à Epaminondas
qui estoyent aussi de son rolle.
32, Parangonner. — Comparer; mot d'étymologie grecque, *que les Italiens
ont conservé avec le sens qu'il a ici ; en français, n'est plus employé que
comme terme d'imprimerie.
35, Dit-il. — Dans son Parallèle de Pompée avec Agésilas.
37, Conférer. — Comparer, du latin conferre; Montaigne en fait un fré-
quent usage dans cette acception.
38, Dit-il. — Dans son Parallèle entre ces deux personnages.
632,
4, Séparément. — Ainsi que l'auteur l'observe, Plutarque, dans ses Paral-
lèles, ne porte pas d'appréciation d'ensemble sur les deux hommes qu'il
NOTES. LIV. II, Cil. XXXII. VOL. 11, PAG. 632. Fb.579
met en comparaison; il fait ressortir pour chacun, sur quelques points
caractéristiques, ce qu'il y a de plus particulier à retenir, et il est assez
difficile de conclure pour lui :
Entre Démosthène et Cicéron, il donne le prix de l'éloquence au pre-
mier et insiste sur la supériorité des mœurs du second. 11 apprécie le
désintéressement et la réserve d'Aristide, et constate que Caton l'Ancien,
dont il ne méconnaît pas le caractère, occupe une beaucoup plus grande
place. Sylla, dit- il, a fait de plus grandes actions, Lysandre de moins
grandes fautes; celui-ci a été plus tempérant et plus sage, l'autre a témoi-
gné de plus de capacité et de valeur militaires. Entre Marcellus et Pélo-
pidas, la balance est à peu près égale : leur vie comme leur mort a bien
de l'analogie; le premier a plus fait, toutefois la délivrance de Thèbes par
le second a été admirablement conçue et exécutée. Pompée se distingue
par l'éclat de ses succès et sa probité politique; Agésilas a plus de valeur
militaire réelle. Les exploits de Camille, sa droiture, le différencient de Thé-
mistocle qui avait incontestablement plus d'adresse. Entre les Gracques et
Agis et Cléomène, Tibérius Gracchus lui semble l'emporter par sa vertu.
La législation de Numa est plus douce que celle de Lycurgue; il l'a imposée
par la persuasion, Lycurgue par la force; les Romains ont obtenu d'autant
plus de succès qu'ils se sont éloignés des institutions du premier, les Spar-
tiates ont perdu leur supériorité pour avoir abandonné les lois du second.
CHAPITRE XXXIII.
8, Spurina. — Ce n'est que dans le deuxième avant-dernier alinéa de ce
chapitre qui porte sur le rôle essentiel de l'àme et des particularités
afférentes à César, avec lesquels l'histoire dé Spurina n'a aucun rapport,
qu'il est question de lui qui, à en juger par le titre, devrait en être le
sujet principal.
634,
9, Portent. — Montaigne joue ici sur les mots : haire, cilice, chemise de
crin, et hère, homme de peu, sans vigueur, sans bien, sans mérite ou sans
crédit.
9, Xenocrates. — Diogène Laerce, IV, 7. — Lais reçui les hommages de
tout ce que la Grèce renfermait d'illustre et fut la maîtresse d'Alcibiade;
on dit qu'ayant suivi en Thessalie un jeune homme dont elle était éprise,
les femmes de cette contrée, jalouses de sa beauté, l'assassinèrent.
12, Beauté. — Les éd. ant. ajoutent : de ses mignardises.
19, Satiété. — Montaigne avait oublié cette phrase, lorsqu'il écrivait vers la
fin du ch. suivant, pag. 658 : « Il y peut auoir quelque iuste modération en
ce désir de gloire, et quelque sacieté en cet appétit comme aux autres ».
25, Pinceter. — Epiler. — Suétone, César, 45.
30, Fois. — César eut quatre femines légitimes : Cossutia, issue d'une famille
équestre, possédant une grande fortune, qu'il répudia pour épouser Cor-
nelia, fille de Cinna lieutenant de Mari us. Celle-ci étant morte, il épousa
Pompeia nièce de Sylla, avec laquelle il divorça parce qu'elle était soup-
çonnée d'adultère. Enfin, Calpurnie, nièce de Pison. — Lors de sa mort,
une loi avait été préparée, et devait être présentée en son absence, qui,
pour lui permettre d'avoir des enfants, l'autoriserait à épouser autant de
femmes qu'il voudrait.
'31, Nicomedes. — Quand, à Rome, leurs généraux recevaient les honneurs
du triomphe, les soldats avaient coutume d'égayer par des chants la
marche du triomphateur; lorsque César célébra son triomphe sur les
Gaules, parmi les couplets qui se répétèrent en choeur ce jour-là, figurait
celui-ci :
« César a mis dix ans à subjuguer les Uaules,
Et Nicoméde, une heure à soumettre César »,
allusion au commerce intime auquel il s'était prêté dans son enfance avec
Fb.580 ESSAIS DE MONTAIGNE.
ce roi de Bythinie et dont il rejaillit sur lui un opprobre qui de son vi-
vant a servi de texte à une foule de railleries. V. N. I, 550 : Nicomeclis.
;i2, Cleopatra. — Non moins remarquable pai' son esprit que par sa beauté
fut la maîtresse de César, puis celle d'Antoine qui, pour l'épouser, répudia
Octavie sœur d'Octave. Après la défaite et la mort d'Antoine et après avoir
en vain cherché à séduire le vainqueur, afin de ne pas tomber vivante en
son pouvoir, elle se donna la mort, en se faisant piquer au bras par un aspic.
2'S, CsesariOD. — Plut,\kque, César, 13. — Cet enfant fut déclaré roi d'Egypte
en 42 par les triumvirs Antoine, Octave et Lépide, sous le nom de Pto-
lémée XIV et la tutelle de sa mère. En 32, il recevait le vain titre de Roi
des rois et l'an 30, peu après la mort de sa mère, il périssait par ordre
d'Auguste.
34, L'amour. — Sléto.ne, César, 50, 52 etc.
39, Caesar. — Julie, qui par sa douceur empêcha longtemps la discorde
entre le beau-père et le gendre; sa mort, survenue en 55, fit disparaiti-e
la principale cause à laquelle on devait que la guerre civile n'eût i)oint
enco)-e éclaté entre eux.
636,
2, ^gisthus. — Egisthe, fils incestueux de Thyeste et de sa fille Pélopée.
était à la fois le frère et le fils de sa nière ; Pompée, en épousant la fille
de César qui avait été l'amant de sa femme, se trouvait être à la fois
pseudo-beau-frère et gendre de son beau-père.
8, Amoureuse. — Lorsqu'il rentra dans Rome, sur son char de triomphe,
après la conquête des Gaules, les soldats, auxquels en pareille circonstance
était laissée une grande licence, chantaient : « Bourgeois, cachez vos
femmes, nous amenons le galant au crâne dénudé. » Suétone, César, ol.
10, Place. -~ Salluste dit de même de Sylla : « D'une grande intelligence,
a-ssoiffé de volupté, il l'était plus encore de gloire, car, si plongé qu'il fut
dans la luxure, jamais elle ne lui fit perdre de vue les affaires. »
14, Soldat. — Aussi vigoureux et infatigable athlète en amour qu'à la guerre.
20, Ladislaus. — Sismondi, Histoire des républiques italiennes, tome VIII, ra-
conte la mort de Ladislas d'une manière un peu différente : il aurait été
atteint à Pérouse d'une maladie que ses débauches excessives auraient
occasionnée; et une de ses maîtresses, qu'on accusait de l'avoir empoi-
sonné et qui était fille d'un médecin de cette ville, serait morte peu de
jours après, emportée par la même maladie.
24, Destroict. — Ayant réduit, par un siège rigoureux, la ville de Floi'ence
en telle détresse.
31, Attournoit. — Orner, parer; est d'étymologie grecque. D'attourner vient
atours, qui est fort en usage.
638,
10, Escrit. — En dehors de ses Commentaires sur la guerre des Gaules et
la guerre civile qui seuls nous restent, de ses lettres au Sénat, à Cicéron,
à ses amis, César aurait écrit sur la grammaire, l'éloquence, l'histoire, et
encore des poèmes, une tragédie d'Œdipe et des recueils de faits mémo-
rables qu'Auguste défendit de publiei-; on lui attribuait aussi des livres
sur les Augures et une Cosmographie qui ne furent probablement com-
posés que sur ses ordres.
15, Actiue. — Suétone dit qu'il faisait au besoin cent milles par jour (150 kil.).
passait les rivières à la nage ou sur des outres, arrivait souvent avant
qu'on ne fût instruit de son départ. Fi-oias le compare à la foudre ; et Ci-
cÉRON, dans le temps même où il parlait de lui en ennemi, le regardait
comme un prodige de promptitude et de vigilance.
16, Labeur. — Dur au travail; c'est une expression toute latine.
19, Oppius. — Suétone, César, 53. — Oppius, lieutenant et ami de César, est
regardé comme le véritable auteur des guerres d'Alexandrie, d'Afrique et
d'Espagne, attribuées à César. Plutarque estime qu'il ne saurait être cru
qu'avec réserve dans tout ce qu'il rapporte des amis et des ennemis de
celui-ci, dont lui-même était le familiei-.
NOTES. MV. If, cri. XXXIIl. VOL. If, PAG. 638. Fb.581
22. Boulanger. — Chez les Romains, tous les artisans étaient des esclaves.
io, Pays. — Suétone, César, 53.
28, Catilina. — Perdu de dettes, Catjlina entreprit de rétablir sa fortune
par le sac de Rome. Sa conjuration, ourdie parmi ses compagnons de dé-
bauche et tous les libertins do la ville, fut déjouée par Cicéron; lui-même
mourut les armes à la main, en combattant les troupes envoyées contre lui.
29, Cachetés. — Une lettre, un billet doux qui se remettent en cachette,
à la dérobée.
34, Yurongne. — Plutarquk, Calon d'UHque, 7.
640,
10, Douceur. — Montaigne, liv. Il, ch. 11 (II, 100), se montre moins indul-
gent qu'ici vis-à-vis de César. Parmi les actes qui lui sont reprochés est
l'exil à perpétuité, en un lieu déterminé avec privation de tous leurs
droits de citoyens, de nombre de ses adversaires politiques, les Plancius,
les Nigidius, les Cecina, etc., qui n'avaient d'autres torts que d'avoir dé-
fendu contre lui le Sénat et les lois.
17. Liberté. — Cn. Magius, L. VibuUius Rufus, etc. Ciîsar, De Bello civili,
I, 24; 111, 10, etc.
20. Luy. — Suétone, César, 75.
27, Romains. — Id., i/iid., 75.
32, Conduire. — Ce ne fut que durant la guerre civile et seulement envers
ceux qui avaient qualité de citoyens romains que César en agit ainsi;
ailleurs et contre tous autres il agit bien différemment, souvent avec
la plus grande inhumanité : il ne faisait d'ordinaire aucun quartier à
l'ennemi; ordonnait fréquemment, après une victoire, qu'on tuât « toute
la durée d'un jour ». A Uxellodunum (que l'on croit être Cahors), il lit
couper les mains à tous ceux qui avaient porté les armes. 11 lui est arrivé
de faire fermer les ouvertures de cavernes où s'étaient réfugiées des popu-
lations inoffensives et de les faire de la sorte mourir de faim et d'incen-
dier des forêts pour faire périr les restes d'armées en déroute. Quant à sa
conduite à l'égard de Vercingétorix vaincu (II, 656), pour être de pratique
fréquente chez les Romains, on ne saurait certes pas la qualifier de ma-
gnanime.
37, Feindre. — « La modération, a dit Montesquieu, en parlant de César,
que l'on montre après qu'on a tout usurpé, ne mérite pas de grandes
louanges. »
40, Consul. — Suétone, César, 73.
642,
1, Testonner. — Piquer, satiriser (V. N. II, .'')21); ce mot peut être traduit
ici presque littéralement, en y employant le langage familier où l'on dit
de quelqu'un vivement critiqué, qu'il a été habillé de bonne façon.
2, Mamurra. — Chevalier romain qui acquit de prodigieuses richesses
dans les Gaules où, en qualité d'Intendant de l'ai-mée, il avait accompagné
C(''sar dont il était un des compagnons de débauche. Catulle, carmen 29.
3, Table. — Suétone, César, 73.
5, Aduerty. — Id., ibid., 75.
9, Autheurs. — Id., ibid., 75.
12, Descouuert. — Id., ibid., 72.
15, Plaignist. — Id., ibid. 48.
22, Largesse. — Dion Cassius l'elati; que le soin extrême qu'avait César d'ac-
' cumuler des richesses et de se faire donner de l'argent sous quelque pré-
texte que ce fût, provenait des dépenses excessives qu'il avait à faire pour
arriver à la domination, s'y maintenir et l'agrandii-, disant lui-même que
pour parvenir à ce but, on avait besoin de deux choses qui se soutenaient
l'une par l'autre : de l'argent et des troupes.
26, Bien. — Suétone, César, 72.
26, L'enyura. — Cette furieuse passion l'enivra.
28, Nom. — L'éd. de 80 aj. : vain.
29, Loix. — Suétone, César, 77.
Fb.b82 ESSAIS DE MONTAIGNE.
30, Lny. — Ce corps politique lui apportait un décret qu'il venait de rendre
pour augmenter les honneurs qui lui étaient décernés; César était alors
assis dans le vestibule du temple de Vénus, où il était demeuré afin qu'on
ne pût dire qu'il avait, par sa présence, ôté aux Sénateurs la liberté d'o-
piner comme bon leur semblait; il ne se leva pas en voyant venir le Sénat
et écouta assis ce qu'on avait à lui dire, ce qui irrita tellement les séna-
teurs et les autres Romains, que ce fut l'un des principaux prétextes de
ceux qui conspirèrent contre sa vie. Dion Cassius.
39, Autres. — Notamment Henri IV qui laissa perdre tous les avantages de
sa victoire de Coutras (1587) afin de courii" après sa maîtresse, la belle
Corisande d'Andouins, si chère à Montaigne. Mkzerai.
644,
16, Continents. — L'éd. de 80 porte : des dames les plus continentes, au lieu
de : « plus continents ».
23, Visage. — Ce fait, rapporté par Valère Maxime, IV, 5, remonte à une
époque où l'Étrurie (nom ancien de la Toscane) ne jouissait pas encore du
droit de bourgeoisie romaine et par conséquent est antérieur au i®"" siècle
av. J.-C.
646,
10, Scipion. —Allusion à l'acte de Scipion, premier Africain, auquel, après
la prise de Carthagène (Espagne), une femme d'une grande beauté, faite
prisonnière, fut amenée. Respectant son honneur, Scipion fit rechercher
un jeune prince celtibérien dont elle était la fiancée et la lui remit; lui-
même n'avait alors que vingt-cinq ans.
CHAPITRE XXXIV.
15, Recommandation. — On ne saurait dire que les Essais aient été la
lecture favorite de Napoléon: toutefois dans le volume 23 de sa corres-
pondance, pag. 399, on le voit faire écrire à son secrétaire, le 7 mai I8I2,
au moment de partir pour la campagne de Russie : « Un Montaigne, petit
format, serait peut-être bon à mettre dans la petite bibliothèque. »
16, Apbricain. — Scipion sauva la vie à son père blessé à la bataille du
Tessin, il n'avait encore que 17 ans; préteur en Espagne en 211, il
s'empara de Carthagène tombée au pouvoir des Carthaginois, battit As-
drubal et reconquit en quatre ans cette province. De retour en Italie,
envoyé contre Annibal, il fit triompher l'idée de transporter la guerre aux
portes de Carthage, et chargé de son exécution, gagna sur Annibal, rap-
pelé par ses concitoyens alarmés, la bataille de Zama, qui mit fin à la
deuxième guerre punique (202). En 190, comme lieutenant de son frère,
il accompagna celui-ci en Asie, et l'aida à triompher d'Antiochus le Grand,
roi de Syrie, qu'ils contraignirent à la paix. A leur rentrée à Rome, injus-
tement accusés par le parti populaire auquel sa hauteur et sa partialité
pour les patriciens le rendaient odieux, il fut condamné à l'exil où il
mourut, tandis que son frère, frappé d'une amende considérable qu'il ne
put payer, était jeté en prison. Scipion réunissait au génie militaire, tous
les genres de vertu : l'humanité, la tempérance, le désintéressement, etc.
16, Brutus. — Lors de la guerre civile entre César et Pompée, embrassa le
parti de ce dernier et combattit à Pharsale; néanmoins César qui l'aimait
et qui, pensait-on, était son père, l'attira à lui et le combla de caresses ;
mais l'éducation stoïcienne qu'il avait reçue de son oncle et son nom même
l'armèrent contre lui, quand le dictateur aspira au pouvoir suprême, et il
participa à sa mort (44). Après ce meurtre, poursuivi par Antoine, et
vaincu dans les plaines de Philippes, désespérant alors du salut de la
république, il se tua. V. N. I, 638 : L'occasion.
16, Polybins. — Combattit avec Philopœmen et, envoyé en otage à Rome
où il demeura 17 ans, se lia avec Scipion Émilien qu'il accompagna au
siège de Carthage; voyagea en Afrique, en Espagne, en Gaule, et écrivit
divers ouvrages qui sont perdus et dont le plus considérable était une
NOTES. LIV. II, CH. XXXIV. VOL. II, PAG. 646. Fb.583
histoire en 40 livres de Rome et des autres états contemporains, ouvrage
dont il ne reste que cinq livres entiers. L'exactitude, le jugement, l'impar-
tialité, sont ses qualités maîtresses; il scrute les événements, les analj'se,
ce qui en fait l'historien des hommes d'état, des hommes de guerre et
des penseurs.
17, Cinquiesme. — Charles-Quint, déjà roi d'Espagne en 1516, fut élu em-
pereur d'Allemagne trois ans après, succédant à Maximilien son aïeul.
11 avait comme compétiteur à l'empire François I", roi de France, avec
lequel il fut en guerre pendant la majeure partie de son règne; il rem-
porta sur lui la victoire de Pavie (1525); échoua dans une expédition contre
Marseille (1536), fut défait à Cérisoles (1544) et assiégea inutilement Metz
(1552). Il fit avec des alternatives de succès et de revers plusieurs expédi-
tions contre l'Afrique. Il fut l'adversaire de la Réforme, mais n'en fut pas
moins obligé d'accorder la liberté du culte aux Protestants (1552). En 1556,
affaibli par les maladies, aigri par les revers, il abdiqua et céda l'empire
à son frère; déjà l'année précédente, il avait remis l'Espagne à son fils,
et il se l'ctira au monastère de S.-Just en Estramadure où il mourut;
on dit qu'il regretta vivement le pouvoir dont il s'était démis; il était d'un
caractère très dissimulé.
18. Ailleurs. — Semble désigner la i"eine Catherine de Médicis qui passait
pour s'en inspirer et qui, en tout cas, y conformait ses actes et sa politique.
22, Militaire. — Montaigne possédait un exemplaire des Commentaires de
César (V. N. II, 82 : Lisant), sur lequel, suivant son habitude, il a consigné
l'impression que la lecture de cet ouvrage lui laissait; on y lit : « C'est un
livre qu'un Général d'armée devrait avoir continuellement sous les yeux,
comme patron, ainsi que faisait le maréchal Strozzi qui le savait quasi
par cœur et l'a traduit; et non je né sais quel Philippe de Comines que
Charles Cinq avait en pareille recommandation ; de même que le grand
Alexandre avait les œuvres d'Homère, etc.. » Ce dédain que dans ces
annotations marque Montaigne pour Philippe de Comines témoigne qu'elles
ont dû être écrites avant les Essais, où l'auteur ne laisse pas de lui témoi-
gner beaucoup plus de considération, notamment dans son chapitre « des
livres » où il rapporte le jugement qu'il a porté après lecture sur les Mé-
moires de cet historien et aussi au chapitre VIII du livre III.
648,
1, luba. — Juba I"; embrassa le parti de Pompée, accueillit après la ba-
taille de Pharsale les restes de l'armée vaincue; joint à eux, il livra à
César la bataille de Thapsus (46); vaincu, il se fit tuer par un de ses
serviteurs.
9, Armée. — Suétone, César, 66. — Sur son exemplaire annoté des Com-
mentaires de César, Montaigne a inscrit : « On craint souvent l'ennemi
plus par réputation que par l'effet. »
16. Execution. — Suétone, César, 65. — « Une armée ne se doit enquérir
des desseins de son général » (annotation de Montaigne sur son ex. des
Commentaires de César). — A cela, on serait tenté d'opposer ce mot de
Napoléon : « A la guerre, chacun doit connaître sa manœuvre » ; mais la
contradiction n'est qu'apparente : Napoléon ne veut parler que du mouve-
ment en exécution, dont la divulgation n'offre plus d'inconvénient dès que
l'ordre d'exécution est donné, parce que le temps faisant défaut à l'ennemi,
il ne peut prendre pour y parer de nouvelles dispositions et en est réduit
à celles en lesquelles il se trouve.
20, Souisses. — César, De Bello Gallico, 1, 7. — En 58; ils avaient quitté
leur pays en masse, pour venir s'établir en Gaule; les uns furent exter-
minés, les autres refoulés sur la contrée d'où ils étaient partis.
31, D'accord. — Souvent, en effet, il lui est arrivé de n'accorder des trêves
que pour les violer.
33, Desobeyssance. — « César estimait plus encore l'obéissance que la vail-
lance .. (annotation de Montaigne sur son ex. des Commentaires de César).
38, Combat. — Suétone, César, 67.
Fb.o84 ESSAIS DE MONTAIGNE.
650.
1, Armez. — Suétone, César, 67. — V. I, 520 : Pareillement, qui auroitclc.
1, Grauez. — L'éd. do 80 porte : labourez.
4, Compagnons. — Slktone, César, 67.
10, Estoit. — Les (kl. ant. aj. : Irop molle et.
12, Soldats. — Suétone, Auguste, 25.
13, Seuerité. — Les éd. ant. aj. : et asseurance.
11, Plaisance. — Suétone, César, 69. — V. N. I, 198 : Metuens.
17, Douceur. — Suétone, César, 69. — La 10" légion se mutina, à Rome, on
46, aloi"s qu'il était sur le point de passer on Afrique; c'était sa légion
préférée. Il la fit rentrer dans l'ordre en se présentant aux mutins et les
appelant « Citoyens », au lieu do « Soldats » ; ils protestèrent qu'ils étaient
soldats. Il leui" pardonna, mais les plus compromis perdirent lo tiers du
• butin et des terres qui leur étaic^nt destinés.
18, Rhin. — César, De Bello Gallico, IV, 17. — Le pont construit par César
sur lo Rhin, le fut on l'an 55, près de Bonn. liétait sur pilotis et fut achevé
en dix jours; en cet endroit le fleuve a 600'" de large, mais c'était l'époque
de l'année où ses eaux sont le plus basses et, de ce fait, cette largeur peut
être réduite de moitié.
26, Combat. — Sur ce point, Cyrus, estimant les harangues inutiles (V. III.
364), différait d'avis avec César; peut-être était-ce en raison de la diffi-
culté d'en user, par suite des effectifs considérables et do la composition
des armées asiatiques formées de nombreux contingents de peuples divers,
assez peu disciplinés, alors que les armées romaines, bien inférieures en
nombre, beaucoup plus disciplinées, homogènes, constituaient des groupes
compacts dont le chef pouvait être vu et entendu. — Dans les armées
modernes, par suite des étendues considérables sur lesquelles opèrent les
armées, les harangues sur ]e champ de bataille sont généralement rempla-
cées par des ordres du jour lus avant le combat; toutefois, il est encore
des circonstances où elles se produisent. — On a conservé le souvenir de
celle qu'Henri IV, en 1590, à la bataille d'Ivry, adressait à ses troupes :
« Gardez bien vos rangs, et si vous perdez vos enseignes, cornettes et gui-
dons, ralliez-vous à mon panache blanc, vous le trouverez toujours au chemin
de l'honneur et de la victoire. » — Napoléon excellait dans l'un et l'autre
genre, comme en tout ce qui touche à l'art de la guerre : Sa proclamation
à l'armée d'Italie, en 1796, au début des hostilités, après lui avoir énuméré
ce qu'il attendait d'elle, se terminait a-insi : ■< Soldats d'Italie, manqueriez-
vous de courage et de constance? » Dans cette même campagne, au mo-
ment d'entrer en Vénétie, ayant déjà conquis le Piémont et la Lombardie,
après leur avoir fait miroiter le triomphe : « Vous rentrerez dans vos
foyers, leur disait-il, et vos concitoyens, en vous montrant, diront : Il était
de l'armée d'Italie! » En 1798, à la bataille des Pyramides : « Soldats, du
haut de ces pyramides, quarante siècles vous contemplent! » A Marengo,
en 1800, lorsque, à la fin de la journée, il reprenait l'offensive : « Souvenez-
vous que mon habitude est de coucher sur le champ de bataille! » En I8I2,
le matin de la bataille de la Moskowa, alors que le soleil, jusque-là caché
par un épais brouillard, venait de se montrer : « Soldats, leur dit l'em-
pereur, voilà le soleil d'Austerlitz. » En 1815, trois jours avant Waterloo,
comme l'armée entrait en Belgique, il lançait une proclamation, la der-
nière, se terminant par ces mots : •■ Pour tout Français qui a du cœur, le
moment est venu de vaincre ou de mourir ! » — Citons encore ce fait de
Nelson, à la bataille de Trafalgâr (1805), au moment où le combat allait
s'engager, communiquant par signaux à tous les navires de sa flotte ces
simples mots devenus depuis si célèbres : « L'Angleterre compte qu'au-
jourd'hui, chacun fera son devoir! »
29, Tonrnay. — César, De Bello Gallico, II, 21. — Cette bataille, qu'il convien-
drait mieux d'appeler de la Sambre, se livra sur le territoire des Nerviens.
aux environs de Maubeuge, contre la Gaule du Nord (53). César fut sui-
pris, pendant qu'il fortifiait son camp : les soldats attaqués se rallièrent
NOTES. LIV. II, CH. XXXIV. VOL. II, PAG. 650. Fb.585
aux premières enseignes venues, l'arrivée de l'arrière-garde rétablit le com-
bat; la race et le nom desNerviens y furent presque anéantis; de 60.000 h.
en état do porter les armes, il en resta à peine 5.000.
M, D'autres. — Jadis un chef, embrassant du regard l'ensemble de ses
troupes sur un champ de bataille, pouvait, de sa personne, se porter uti-
lement d'un point à un autre; il n'en est plus ainsi, et, en général, moins
il se déplace dans le courant de l'action, mieux cela vaut; renseigné,
minute par minute, sur les mouvements de l'adversaire et les fluctuations
du combat qu'il suit sur la carte, échappant par son éloignement aux im-
pressions suggestives exagérées que causent toujours les événements dont
on a le spectacle sous les yeux, il juge plus sainement et peut donner avec
plus d'à-propos dos ordres plus réfléchis.
652,
3, Sien. — Suétone, César, 55. — Les éd. ant. aj. : C'estoit le plus laborieux
chef de guerre et le plus diliyenl qui fui onques.
5, Coche. — Plutarque. César, 12. — L'éd. de 88 porte : sa coche.
11, Passa. — Surpassa, surmonta.
11, Extrêmes. — Dans cette guerre. César fut souvent en danger par les
embûches qu'on lui dressa, et son armée faillit périr par la disette
(48).
13, Marseille. — La ville, qui avait pi'omis sa neutralité à Césai', avait ou-
vert son port à la flotte de Pompée. Le siège fut long, et les assiégés, plu-
sieurs fois battus, ne se rendirent qu'à la dernière extrémitc', manquant de
vivres, leurs remparts démantelés et plus aucun espoir d'être secourus
(48).
14, jEgypte. — César y détrôna le jeune Ptolémée XII, tant pour le punir
d'avoir donné son assentiment au meurtre de Pompée, qu'en raison des dis-
sentiments qui s'étaient élevés entre ce prince et Cléopàtre, sa femme et sa
sœur, dont les charmes l'avaient séduit et en faveur de laquelle il se
' déclara (48). 11 le remplaça par son frère Ptolémée XII 1, âgé de 11 ans,
qu'épousa Cléopàtre au lieu et place de son frère aîné; elle-même avait
21 ans; ce second époux mourut quatre ans après. — Dans cette expédition
d'Egypte qui se réduisit, comme action militaire, à la répression du soulè-
vement d'Alexandrie, devant laquelle César, poursuivant Pompée, s'était
, arrêté en apprenant la mort de son rival, et avait débarqué précédé de ses
licteurs, ce que les Egyptiens avaient considère'' comme une offense à la
majesté de leur roi et qui leur avait fait prendre les armes, les Romains
mirent le feu à plusieurs édifices, entre autres à cette célèbre bibliothèque
des Ptolémée. 400.000 volumes furent brûlés. Reconstituée par la suite, elle
fut à nouveau partiellement incendiée par accident sous ïhéodose le Grand
et finalement anéantie en 038 de parti pris, par la barbarie des Musulmans,
qui pendant des mois employèrent les innombrables et précieux volumes
dont elle se composait à chauffer les bains publics.
16, Pharnaces. — Fils de Mithridate le Grand auquel il succéda à la suite
d'une sédition militaire; avait espéré, à la faveur des guerres civiles des
Romains, rentrer dans les conquêtes faites et perdues par son père. César
en cinq jours et dans un combat de quatre heures anéantit ses espérances
(47). C'est à cette occasion qu'il écrivit au Sénat ce compte rendu célèbre
de ses opérations ne comprenant que trois mots : Veni, vidi, vici (je suis
venu, j'ai vu, j'ai vaincu), qui, lors de son triomphe, furent reproduits sur
un tableau qui figurait au cortège.
17, luba. — A Thapsus, en 46. V. N. II, 648 : luba.
18, Pompeius. — A Munda, en 46. L'aîné des fils de Pompée s'y trouvait
seul; il périt dans sa fuite; cette bataille où César avait contre lui Labie-
nus, son ancien lieutenant en Gaule, et qu'il faillit perdre, mit fin à la
guerre civile et assura d'une manière décisive son triomphe.
26, Auaricum. — Césak, De Bello Gallico, VIII, 24. — Aujourd'hui Bourges;
en 52, au début du soulèvement des Gaules provoqué par Vercingétorix.
31, Angleterre. — Suétone, César, 58, — L'expédition de César contre les
Fb.D86 ESSAIS DE MONTAIGNE.
peuples de la Grande-Bretagne (55), où par deux fois il franchit le détroit
actuel du Pas de Calais, peut compter parmi celles témoignant le plus
d'audace; on dit qu'il l'entreprit uniquement dans l'espoir d'y trouver des
perles dont il était fort avide, comme aussi des pierres précieuses, des
statues et des tableaux antiques. Ni l'une ni l'autre de ces descentes ne
donnèrent de résultats sérieux; la première eut pour prétexte les secours
prêtés aux Gaulois, la seconde que les conditions de paix n'avaient pas été
remplies. César semble chaque fois s'être embarqué partie à VVissan, par-
tie à Boulogne, et avoir débarqué à Kent près de Douvres, au N. de Dou-
vres, à la pointe orientale du comté de Kent qui porte aujourd'hui le nom
de North Foreland près de Ramsgate.
3-2, Gué. — Vraisemblablement la profondeur de l'eau jirès du rivage, qu'il
fallait gagner en marchant plus ou moins dans la mer, les navires ne pou-
vant approcher assez près pour qu'il fût possible d'aborder autrement; du
reste Suétone, César, 58, dit à ce propos : • Il ne passa en Bretagne qu'a-
près avoir reconnu par lui-même le point de débarquement, l'itinéraire à
suivre et les conditions d'accès. -
35, Refusa. — César, De Bello civili, 1, 72.
38, Ost. — Armée; du latin hostis (ennemi). Ce mot était, dans l'ancienne
langue française, employé indifféremment pour désigner l'un et l'autre de
deux adversaires : « Si l'ost savait ce que fait l'ost, disait un adage mili-
taire de l'époque, l'ost déferait l'ost (Si l'un connaissait les projets de l'au-
tre, le premier battrait le second). »
38, Nécessité. — César fit, à diverses reprises, franchir des cours d'eau à son
armée dans des conditions assez délicates, ses hommes ayant de l'eau jus-
qu'aux aisselles, notamment la Loire, en 51, lors de l'insurrection générale
des Gaules, et la Sègre en Espagne, comme l'indique ici Montaigne, lors
de ses opérations contre Afranius en 49. En ces circonstances, sa cava-
lerie, répartie de l'un et l'autre côté , était employée, en amont, à rompi-e
le courant; en aval, à recueillir ceux qui auraient été entraînés.
654,
21, Bouclier. — César, De Bello Gallico, II, 25. — En l'an 53.
25, Présence. — Suéto.ne, César, 58.
25, Dirracbium. — Suétone, César, 58; Pi.utarqu-e, César, passim; Appien,
Guerre civile, II ; etc.
35, Siennes. — César franchit le Rubicon avec 5.000 fantassins et 3.000 ca-
valiers; il avait en Egypte 3.200 fantassins et 800 cavaliers; il n'amena en
Afrique contre Scipion et Juba que 3.000 fantassins et quelques cavalière.
— A la bataille de Pharsale il perdit 200 hommes; Pompée, 15.000. A celle
de Thapsus il en perdit 50 ; à celle de Munda, 1.000, et ses adversaires leur
armée entière.
35, Gens-là. — Alexandre et César.
37, Disoit-il. — César.
656,
3, Bout. — Suétone, César, 62.
4, Alexia. — Ce siège, qui se termina par la prise de la ville et la reddition
de Vercingétorix (52), mit fin au soulèvement général de la Gaule ; il ne
resta plus à faire rentrer dans l'ordre que quelques peuplades; la pacifica-
tion complète se termina l'année suivante.
6, Cbeuaux. — Dans ses Commentaires, VII, 64, César dit « huit mille che-
vaux » ; c'est le nombre qu'il faut lire; il est probable que Montaigne avait
écrit sur son manuscrit « huit à neuf mille », l'imprimeur aura lu • cent
neuf mille ».
7, Maniacle. — Littéralement - furieuse • ; ici, incroyable, merveilleuse.
Dans l'ancien français, maniacle et maniaque étaient synonymes; ce der-
nier seul est resté.
12, Tigranocerta. — Tandis que LucuUus, avec 15 à 20.000 hommes, assié-
geait Tigranocerte sa capitale, Tigrane roi d'Arménie vint la secourir
traînant avec lui une armée de 250.000. LucuUus, malgré son infériorité
NOTES. LIV. 11, CH. XXXI V. VOL. 11, PAG. 656. Pb.587
numérique, marcha contre eux ; les barbares s'enfuirent sans presque
soutenir le choc et perdirent KXI.OOO h.; LucuUus n'aurait eu que cinq
morts et cent blessés; peu après, il était maître de la ville (69).
20, Est. — Les éd. ant. aj. : rare et.
19, Confusion. — Césak, De Hello Gallico, VII, 71.
28, Secours. — Xénopho.n s'exprime ainsi : « Ce n'est ni le nombre, ni la
force qui donnent la victoire; elle est acquise à ceux qui, avec l'aide des
dieux, attaquent avec le plus de fermeté d'clme. » — C'est là une vérité
relative, à l'appui de laquelle on peut citer de nombreuses batailles dans
l'antiquité, alore que le combat corps à corps jouait un rôle presque exclusif
et toujours prédominant, où des résultats inouïs ont été obtenus avec des
forces absolument disproportionnées. Mais l'invention des armes à feu et
leurs perfectionnements incessants, leur accroissement en portée, en jus-
tesse et en vitesse, ont réduit à néant l'influence de la force physique des
combattants et augmenté colle du nombre dans une très notable propor-
tion. Aujourd'hui, où la question est souvent aux trois quarts résolue
quand on est encore hors de vue et bien avant que le feu soit ouvert, et
où la victoire est à peu près décidée sans que parfois on se soit abordé sur
le point décisif, même avec des effectifs en présence atteignant des cen-
taines de mille hommes de part et d'autre, le nombre joue un rôle con-
sidérable en facilitant les mouvements enveloppants. Toutefois il n'est pas
plus que jadis le seul facteur du succès; le moral des troupes, l'initiative,
l'habileté manœuvrière des chefs, surtout chez le général et ses principaux
lieutenants, peuvent, encore comme par le passé, donner la victoire à une
armée numériquement inférieure, si elle ne se cantonne pas dans une
passivité continue et, par sa mobilité et ses propres attaques exécutées en
temps opportun, s'applique à contenir et à déjouer les mouvements et les
attaques de l'adversaire.
30, Tamburlan. — Tamerlan, appelé aussi Timour et dont le véritable nom
est Timour-Leng; né à Samarcande, dans le Turkestan, il conquit ce qui
aujourd'hui constitue la Perse, l'Afghanistan, la partie N. de l'Hindoustan
et l'Asie Mineure; il marchait sur la Chine, quand il mourut. Sanguinaire
et fanatique, il incendia Delhi, Damas, Bagdad et nombre d'autres villes;
devant Delhi, il fit égorger 100.000 captifs; à Bagdad, il érigea un obélisque
avec 90.000 têtes coupées.
32, Contusion. — A Ancyre (Asie Mineure), en 1402. Un million de combat-
tants se choquèrent en cette journée; la bataille dura trois jours et deux
nuits; 240.000 h., dit-on, furent tués sur le terrain même. Des deux adver-
saires, l'un, Tamerlan, était manchot et boiteux par suite de blessures re-
çues à la main et au pied, l'autre était borgne.
34, Baster. — Suffire à un habile général. — C'était vrai jadis, et Turenne
dans son admirable campagne d'Alsace de 1675, Bonaparte dans celle non
moins remarquable de 1796 en Italie, l'ont bien montré; mais avec le
principe de la nation armée et la puissance de l'armement actuel, les
petites armées où le chef exerçait une action prédominante et pouvait
conduire les choses à son gré, ne sont plus. Le général placé aujourd'hui
à la tête d'une armée de plusieurs centaines de mille combattants, se
mouvant sur une étendue de 80 à 100 kilomètres et même davantage,
livrant bataille sur un front de plusieurs lieues, n'est plus, malgré le
télégraphe, aussi maître que jadis de les faire se mouvoir à son gré et avec
une rapidité suffisante, et une fois l'action générale engagée, les combats
partiels dont elle se compose sont si multipliés, se livrent à de telles dis-
tances et sont d'une importance telle, que son intervention, quelque
grand que soit son génie, peut être impuissante ou tardive. Aux temps
anciens et au moyen âge, on a bien vu des masses aussi considérables en
présence, mais, outre que les non-combattants s'y trouvaient dans une
proportion énormément plus considérable, le défaut d'organisation, le
combat corps à corps qui était seul pratiqué, la courte portée et la puissance
Fb.o88 ESSAIS DE MONTAIGNE.
bien moindre des armes de jet, ne permettaient guère de manœuvrer et
le nombre perdait par là beaucoup de son importance.
37, Vercingentorix. — Arverne de naissance (les Arvernes avaient poui*
territoire à peu près l'Auvergne actuelle), ^ orcingétorix souleva la Gaule
centrale que C(''sar venait de soumettre et se fit nommer généralissime
(53). César accourant aussitôt, après avoir échoué devant Gergovie, capi-
tale des Arvernes (située proche l'emplacement actuel de ClermontFer-
rand), le battit en plusieui-s rencontres, s'empara d'Avaricum, sa princi-
pale place d'armes, l'enferma dans Alésia et le contraignit à se rendre
(52). Jeté dans un cachot à Rome, Vercingétorix y demeura six ans et,
après avoir orné le triomphe du vainqueur, fut étranglé (47). Vercingé-
torix était chez les Gaulois, non un nom propie, mais un titre de com-
mandement qui pourrait se traduire par généralissime ; on ignore comment
s'appelait le chef arvorne connu sous ce nom et vaincu à Alé.sia.
39, Àlexia. — César, De Bello Gallico, VII, 8.
658,
3, Considéré. — Retenu, réfléchi, réservé, prudent: d'où inconsidéré,
étourdi.
.S, Appius. — Slktone, César, 60.
1, Estimant. — Les éd. ant. aj. : dict Suétone.
12, Appétit. — Montaigne a dit précisément le contraire, liv. 11, eh. 33, II,
634.
18, Ariouistus. — Venu en Gaule comme allié des Séquanes (peuple qui
iiabitait le territoire de l'anc. Franche-Comté), Arioviste voulut s'opposer
aux conquêtes de César après avoir feint d'être l'ami des Romains, mais
il fut complètement battu, en 58, près de Vesontio (auj. Besançon).
■2S, Foy. — César, De Bello Gallico, 1, 46.
27. Ennemis. — Suétone, César, 68.
30, Guerre. — Les histoires grecques et romaines contiennent de nombreux
récits des prouesses que les nageurs ou plongeurs ont exécutées dans
l'antiquité.
33, Alexandre. — Tout comme Alexandre du reste, César était aussi un
excellent cavalier. V. I, 530.
660,
2, Cotte d'armes. — Signifie ici son manteau de général, riche casaque
qui se mettait comme signe distinctif, par-dessus la cuirasse; du reste les
éd. ant. à 88 portent acouslrement, au lieu de « cotte d'armes », qui se dit
plus généralement d'une sorte de blouse ' faite de petits anneaux de fer
entrelacés, d'où .son nom de ■< cotte de mailles ». — En ce qui concerne les
tablettes. Voltaire conteste le fait : « Outre que César n'en parle pas dans
ses Commentaires, dit-il, quand on se jette à la mer des papiers à la main,
on les mouille »; et, quanta la cotte d'armes, Dion dit au contraire :
« César jeta son manteau de pourpre qui pouvait l'empêcher de nager;
les Egj-ptiens s'en emparant, s'en firent un trophée. »
3, L'aage. — Suétone, César, 64. — En 48. V. N. II, 652 : ^Egypte. Il
attaquait un pont dans Alexandrie, quand une brusque sortie de l'ennemi
le contraignit à se jeter dans une barque; il avait alors 53 ans.
4, Créance. — N'inspira tant de confiance.
o, Centeniers. — Centurions, chefs d'une troupe de cent hommes.
8, Nécessiteux. — Suétone, César, 68.
8, Cbastillon. — Plus connu sous le nom d'amiral de Coligny; jouit dés
le début d'une grande faveur à la cour et fut élevé en 1552 à la digniU'
d'amiral; mais las des intrigues qui se menaient autour de lui, il ne tarda
pas à résigner tous ses emplois et à se retirer dans ses terres. En 1562. lors
des guerres de religion, il fut fait lieutenant-général par le parti protes-
tant; comme tel, prit part à la bataille de Dreux, au combat indécis de
S.-Denis, aux batailles de Jarnac et de Monteontour qui furent fatales
à son parti. Après la paix de S.-Germain (1570), il revint à la coui' où il
fut des plus choyés et en 1572 une des premières et la plus illustre victime
NOTES. MV. II, CH. XXXIV. VOL. II, PAG. 660. Fb.589
de la S. -Barthélémy. Il était cl'iin caractère grave, doux et bienveillant,
général assez habile, mais nialheureux.
11, L'accompagaoient. — Les Français de son armée, c'étaient les protes-
tants; les étrangers étaient les contingents allemands au service 'de ce
parti.
18, Prenaient. — En 725; Carthage employait des mercenaires dans ses
armées en présence desquelles on était, d'où cette qualification appliquée
en la circonstance dans l'armée romaine à ceux qui ne firent pas ce sacri-
fice aux difficultés du moment.
21, Tancer. — Suétone, César, 68. — Dans les nombreuses actions de guerre
qu'il engagea, Césai" n'éprouva que deux échecs, du reste bien vite et glo-
rieusement réparés : l'un devant Gergovie en Gaule, l'autre à Dyrrachium.
21, Légions. — L'effectif de la légion romaine a varié de trois à six mille
fantassins et trois cents cavaliers; la cohorte en était une fraction qui
comprenait cinq cents hommes.
24, Flescbes. — Suétone, César, 68; César, De Bello civili, III, 53.
24, Scœua. — César, De Bello civili, 111, 53; Florus, IV, 2; Valère Maxime,
111, 3, 23; Suétone, César, 68.
29, Party. — Suétone, César, 68.
34, Propre. — En 48. — Pi.utarque, César, 5.
35, Salone. — César, De Bello civili, III, 9. — En 49, pendant les opérations
autour de Dyrrachium.
37, Aduint. — Les éd. ant. a']. : et extraordinaire.
662,
2, Engins. — Machines de guerre.
1, Cordes. — Les femmes de Carthage firent de même, lors du siège de
cette ville par Scipion Emilien.
CHAPITRE XXXV.
18, Sçait.
« Et si je 8ais compter,
Il en est jusqu'à trois que je i)ourrais citer. » Bou.eau.
664,
8, Dolent. — Citation dont les termes sont légèrement altérés, san^ que
le sens soit modifié.
8, Rechigner. — Air renfrogné; rechigner, dit Nicot, c'est user de paroles
et de regards mal gracieux et vient de ce que c'est faire en quelque sorte
comme un chien mécontent.
9, Dispenserons. — Permettrions, accepterions ; dispenser signifiait autre-
fois permettre. Nicot.
16, Voix. — " Femme rit quand elle peut et pleure quand elle veut. » Pru-
verbe.
21, Payement. — C.-à-d. : Cette cérémonieuse contenance est bien moins
pour le mort que pour les vivants; elle a plus pour objet d'acquérir que
de payer.
30, Pline le ieune. — Epis t. VI, 24.
666,
20, Faux. — Le milieu.
26, Riches. — Var. des éd. ant. : de grand lieu, au lieu de : « riches ».
27, Arria. — Le récit qui suit est en entier extrait de Pline le .Ieune, Episl.
III, 16.
28, Consulaire. — Qui avait été consul.
32, Plusieurs. — Cecina Pœtus se tua dans les circonstances que rapporte
ici Montaigne (43); Thraseas Pœtus son gendre, illustre par sa vertu et son
courage, fut un des représentants de la faible opposition sénatoriale qui
osait désapprouver Néron; il sortit du Sénat, pour ne pas entendre l'apo-
logie du meurtre d'Agrippine faitç par Sénèque. Accusé sous de frivoles
Pb.'iQO ESSAIS DE MONTAIGNE.
prétextes,, il l'ut condamné à mourir et s'ouvrit les veines; sa femme, imi-
tant l'exemple de sa mère, ne voulait pas lui survivre. Thraseas la pria
instamment de se laisser vivre pour Fannia leur fille (66).
668,
15. Sçauriez. — •■ Ne save/-vous pas, lait dire Mai-tial à Porcie fille de
Caton d'Utique, qu'on ne peut empêcher pereonne de mourir; je croyais
que mon père vous l'avait appris? » V. N. II, 430 : Premier.
29, Instant. — Var. des éd. ant. : Cela dif, au lieu de : « Et en mesme
instant ».
39, Riche. — Il est incontestable que les trois mots mis par Pline dans la
bouche d'Arria, en disent beaucoup plus, dans leur concise simplicité, que
la phrase étudiée que lui prête Martial.
44, Crainte. — Var. des éd. ant. : en quoy il estait de suyure son conseil,
au lieu de : « de la suyure en mourant ».
670,
2, Paulina. — Tacite, Ann., XV, 61 et 64.
2, leune. — L'éd. de 80 porte : belle, ieune.
4, Seneque. — Fut d'abord orateur, puis s'adonna à la philosophie; accusé
d'intrigues crimineUes avec la fille de Germanicus, il fut exilé en Corse
et il y demeura huit ans; rentré en grâce, il fut choisi comme précepteur
de Néron. Lorsque, parvenu à l'empire, celui-ci donna carrière à sa mau-
vaise nature, Sénèque essaya de s'y soustraire en sollicitant sa retraite;
l'empereur s'y opposa par hypocrisie, puis ne voyant en lui qu'un censeur
incommode, il feignit de le trouver compromis dans la conspiration de
Pison et lui envoya l'ordre de se donner la mort, ce qu'il fit en se faisant
ouvrir les veines et témoignant d'un calme absolu, ce dont Montaigne
nous donne ici un récit complet (68). On a reproché à Sénèque les ri-
chesses considérables acquises pendant qu'il était en crédit, l'approbation
qu'il a donnée à l'empoisonnement de Britannicus et l'apologie qu'il a faite
du meurtre d'Agrippine. On a de lui des écrits philosophiques et de nom-
breuses lettres à Lucilius; partout il y prêche la morale la plus austère
et le mépris de la mort; Montaigne leur a fait de très fréquents emprunts;
son style est brillant, élégant, quoique un peu aflfété. Sénèque semble né
à Rome ; on le donne parfois comme étant de Cordoue, d'où était son père
venu à l'âge de 15 ans à Rome, où il a vécu et où il est mort.
13, Estriuoit. — Refusait de se soumettre.
672,
18, Beauté. — Var. des éd. ant. : noblesse, au lieu de : « beauté ».
20, Vieillesse. — L'éd. de 80 ajoutait : {car il auoit lors enuiron cent qua-
torze ans); il en avait en réalité soixante-cinq.
30, Elle. — La poison; le mot, du temps de Montaigne, était féminin: au-
jourd'hui encore, on le fait tel dans le langage trivial. '
37, Fascbeuse. — Var. des éd. ant. à 88 : lourde, au lieu de : • fascheuse ».
674,
0, Commun. — C'est du reste de la réahté, à laquelle n'atteint jamais la
fiction, que les auteurs, se bornant à modifier certains détails et parant
le tout avec plus ou moins de talent, tirent généralement le fond des
ouvrages qui leur font le plus honneur; l'imagination serait impuissante
à concevoir l'infinité des situations que nécessite la production littéraire
qui va sans cesse croissant; et c'est en serrant au plus près la vie réelle,
ses incidents et ses accidents, qu'ils captivent le plus notre intérêt.
15, De ce. — Les éd. ant. portent : ou comme Arioste a rangé en vne suite,
ce; au lieu de : <• de ce ».
22, Lucilius. — Epist. 104.
NOTES.
TROISIÈME VOLUME.
LIVRE SECOND
[Suite).
CHAPITRE XXXVI.
10,
21, Aueugle. — Ce qui ne veut pas dire qu'il était aveugle-né; croire
quHomère est né aveuglej, dit Velleius Paterculus, c'est être soi-même
aveugle et privé de tout sens et surtout de bon sens.
21, Auant que. — Les éd. ant. aj. : les arts et.
12,
17, Elle est. — Les éd. ant. aj. : foible et.
23, Imiter. — Ce jugement sur Homère a été forniulé par Velleius Pater-
culus, I, 5.
23, Aristote. — Poétique, 24.
24, Substantiels. — Les éd. ant. aj. : et massifs.
20, Coffret. — Pline, Hist. nat., VII, 9. — A la bataille d'Issus, tout le camp
de Darius, qui traînait avec lui sa famille, sa cour, des richesses considé-
rables, et où régnait un luxe inouï, était tombé aux mains du vainqueur.
28, Militaires. — Plutarque, Alexandre, 2.
29, Cleomenes. — Plutarque, Apophlh. des Lacédémoniens.
32, Plutarque. — Dans son traité Du trop parler, 5.
37, Point. — Plutarque, Alcibiade, 3.
42, Qu'il est. — Plutarque, Apophlh. des rois, art. Hiéron.
43, Philosophes. — Cicéron, Tusc, 1, 32.
46, Hélène. — Fille de Jupiter et de Léda femme de Tyndare roi de Sparte,
était sœur de Castor et de Pollux, ainsi que de Clytemnestre femme d'Aga-
memnon. Elle épousa Ménélas, qui succéda à Tyndare comme roi de
Sparte et dont elle eut une lîllc Ilermione. Elle fut enlevée par Paris, fils
de Priam, roi de Troie, ce qui détermina la guerre de ce nom, entre les
Grecs et Troie. Après la prise de cette ville qu'Hélène livra perfidement
aux Grecs pour rentrer en grâce auprès de son époux, celui-ci la ramena
à Sparte. Ménélas mort, elle dut quitter Sparte et se retira à Rhodes où
Polixo, femme de Tlépolèmo qui avait péri au siège de Troie, la fit pen-
dre.
47, lamais. — Montaigne semble avoir des doutes que le siège de Troie ait
jamais eu lieu.
14,
5, Troyens. — Les Romains se réclamaient, par la descendance d'Énéo,
d'une prétendue origine troyenne; cette origine a été également revendi-
quée par les Vénètes; on a même été jusqu'à l'établir pour les Francs.
7, Moy. — Cette lettre a toujours passé pour apocryphe. — En citant ce
passage, Bayle dit : « Voilà comment des maux chimériques, forgés par
des poètes, ont servi d'apologie à des maux réels » ; forgés par des poètes,
par d'autres ou par nous-mêmes; cette réflexion est bien juste.
12, Atbenae. — Vers grec cité par Aulu-Gelle, III, 11, et reproduit en latiu.
Fc.592 ESSAIS DK MONTAIGNE.
— La inèiue incertitude régne sur le lieu de naissance de quelques illustra-
tions semblables : Christophe Colomb est revendiqué par Gênes, Savone,
Nervi, Cogoletto, Cuecaro et Calvi. Huit villes se sont disputé l'honneur
d'avoir vu naître Cervantes : Madrid, Tolède, Séville, Lucana, Esquivias,
Alcazar de San Juan, Consnegi-a et Alcala de Ilénarès. — On ne connaît
pas avec certitude où est né Charlemagne.
13, Alexandre le Grand. — Fils de Philippe et d'Olympias, eut Aristote
pour précepteur et monta sur le trône en 336. Dés son début, il soumit la
Grèce qui, se fiant sur sa jeunesse, avait cru pouvoir secouer le joug que
son père lui avait imposé, et détruisit Thèbes de fond en comble. Puis, se
taisant nommer généralissime des Grecs contre les Perses, il franchit l'Hel-
lespont avec 30.000 hommes et 5,000 chevaux ; défit sur les bords du Granique
(334) l'armée de Darius roi des Perses et soumit l'Asie Mineure; l'an-
née suivante il le vainquit lui-même à Issus en Cilicie (333), et y fit
prisonnière sa famille qu'il traita avec générosité; acheva la soumission de
la Syrie, de l'Egypte où il fit bâtir Alexandrie, et pénétra jusqu'en Libye
où il se fit déclarer fils de Jupiter, par l'oracle d'Ammon. A son retour, il
remporta une nouvelle victoire sur Darius (331), qui fut bientôt suivie
de la mort de ce roi et le rendit maître de toute la Perse. Poursuivant
ses conquêtes, il attaqua les Scythes, les Indiens, défit le roi Porus qu'il
traita avec magnanimité et s'avança jusqu'à l'Indus. Ses soldats refusant
de le suivre plus loin, il revint à Babylone où il mourut d'une fièvre aiguë
(323), usé qu'il était par les débauches et les excès de toutes sortes. —
A sa mort, son corps, après avoir été embaumé et exposé pendant sept
jours, fut placé dans un cercueil d'or et transporté, suivant le désir qu'il
en avait manifesté, à Alexandrie (Egypte). Sur le chariot qui effectuait le
transport et qui était traîné par 64 mulets, attelés à quatre timons, se
présentant 8 de front, sur une égale profondeur, s'élevait une chambre
sépulcrale monumentale où abondaient l'or, la pourpre et les pierreries.
César et Auguste se firent ouvrir son tombeau, et sur sa tète ce dernier
plaça une couronne d'or; l'empereur Septime Sévère en interdit l'accès; et,
depuis, on ignore ce qu'il est devenu.
31, Possession. — Alexandre ne désigna personne pour lui succéder, se con-
tentant de léguer sa couronne au plus digne. Son empire fut partagé entre
ses généraux et ce partage fut la source de guerres longues et sanglantes,
l'erdiccas, auquel en mourant il avait remis son anneau royal, se considé-
rant de ce fait comme appelé à régner sur l'ensemble, effectua le partage
sans rien se réserver pour lui-même en particulier : Séleucus reçut la
Syrie et la haute Asie; Ptolémée, l'Egypte; Antigone, l'Asie Mineure; Eu-
mène, la Cappadoce et la Paphiagonie ; Lysimaque, la Thrace ; Antipater.
la Macédoine et la Grèce. Quelques-uns, comme Séleucus et Ptolémée, firent
souche et leurs dynasties régnèrent jusqu'au moment où, deux ou trois
siècles après, leurs états devinrent simples provinces romaines.
32, Tempérance. — Ce mot est à prendre ici dans le sens de modération,
bien qu'Alexandre n'ait guère été plus modéré que tempérant.
34, Reproche. — Les éd. ant. à 88 aj. : que la colère.
38, Thebes. — Certaines éditions postérieures ajoutent : et de Persepolis. —
Pour ce qui est de la ruine de Thèbes, V. N. I, 22 : Esclaues. Celle de Per-
sépolis, que Montaigne eût également pu citer, eut lieu dans les conditions
suivantes : Dans le cours d'une orgie et sous rinfiuence de l'ivresse et à l'in-
citation de Thaïs, courtisane athénienne, Alexandre, quittant la salle du
festin, portant lui-même une torche enflammée, aUa mettre le feu au palais
des rois de Perse; ce palais, dont les ruines subsistent encore, construit en
bois de cèdre, passait pour la huitième merveille du monde (331j.
38, Menander. — Commandant d'une forteresse en Perse, ne voulut pas y
demeui-er quand Alexandre se proposa de passer dans les Indes; irrité de
son refus, ce prince le tua de sa propre main.
39, Hephestion. — Favori d'Alexandre, compagnon de ses travaux et de ses
plaisirs, atteint de maladie, mourut du fait de sa propre imprudence:
16,
NOTES. LIV. II, en. XXXVI. VOL. III, PAG. 14. Fc.593
Alcxanflre fut si affecté de cotte mort, qu'il fit, dit Plutarque, mettre en
croix lo médecin qui le soignait. Arrien conteste le fait.
39, Persiens. — Après la bataille d'Issus, où les pertes des Perses s'élevèrent,
dit-on, à cent mille hommes.
40, Indiens. — Ces Indiens, guerriers de profession, se mettaient à la solde
des peuplades voisines et les servaient avec fidélité et courage; ils avaient
fait souvent du mal à Alexandre qui, les tenant assiégés dans une ville
d'abord difficile, leur offrit une capitulation honorable pour les amener à
en sortir; comme ils se retiraient, il les surprit dans leur marche et les
fit tous passer par le fil de l'épée (330).
1, Cosseïens. — Pour se distraire du chagrin que lui causait la mort d'Hé-
phestion, Alexandre, dit Plutarque, partit en guerre, comme on va à une
partie de chasse, contre les Cosséiens qu'il e.xtermina, sans distinction de
sexe, ni d'âge, n'épai'gnant même pas les petits enfants : holocauste, dit
son entourage, à la mémoire d'Héphestion (327).
2, Clytus. — Ql'inte-Curce, X, 5. — Clitus était frère de la nourrice
d'Alexandre, ra\'ait suivi dans toutes ses expéditions et lui avait sauvé
la vie au passage du Granique. Dans un festin, le roi, échauffé par le vin,
et irrité de ce qu'il mettait les exploits de son père au-dessus des siens,
le tua (326). Revenu à lui, il le pleura l't lui fit faire des funérailles
magnifiques; mais ce qui contribua le plus à calmer sa douleur et se9
remords; c'est que la veille du meurtre, l'ayant vu en songe vêtu d'une
robe noire, assis au milieu- des enfants de Parménion qui tous étaient
morts, le divin Aristandre lui rappela ce songe, comme un indice certain
que c'était là un événement réglé par le destin; et que, d'autre part, le
philosophe Anaxagoras s'évertua à lui prêcher que toutes les actions des
princes sont justes et légitimes, et qu'il se devait à lui-même de ne pas
se laisser maîtriser par une vaine opinion.
5, Vices. — Si Alexandre a pu mériter d'être jugé ainsi au début, il n'en
a pas été de même plus tard, quand la nature s'éveillant en lui et la pros-
jtérité l'enivrant, ses passions ont pris le dessus. Dès lors, il se plongea
dans la débauche et sa vie ne fut plus' qu'une suite ininterrompue de dé-
sordres de tous genres qui scandalisèrent ses anciens sujets. Tite-Live et
Athénke le jugent beaucoup moins favorablement que Montaigne qui,
comme Plutarque et Quinte-Curce ses historiens, se montre fort indul-
gent à son égard. C'est chez ce dernier qu'on trouve le récit curieux de
son attitude vis-à-vis de Bagoas, cet eunuque mignon de Darius, qui servit
de même aux plaisirs de son vainqueur, lequel en plein théâtre lui prodi-
guait les baisers les plus lascifs; Tite-Live, qui ne s'est occupé de lui
qu'incidemment, estime qu'il n'eût pas triomphé des Romains aussi facile-
ment qu'il a subjugué les nations orientales.
9, Indes. — Ses troupes refusant de le suivre au delà du Gange, Alexandre
revint sur ses pas. Mais, pour laisser dans ces contrées une haute idée do
son nom, il fit, dit Plutakque, forger des armes plus grandes, des man-
geoires pour chevaux plus hautes, des mors plus pesants que d'ordinaire,
et les abandonna, les faisant semer çà et là.
10, Fortune. — Voir sur les faits qui précèdent : Plutarque, Alexandre,
18, 19, 22, etc.; — Quinte-Curce, IX, 3; X, 4, 5, etc.; — Diodore de Sicu.e,
XVII, 95.
13, Hommes. — Annibal, d'après Tite-Live, donnait le pas à Alexandre sur
tous autres, parce qu'avec une poignée d'hommes, il avait triomphé d'in-
nombrables ennemis, et qu'il avait atteint les régions extrêmes qu'il était
donné à l'homme de pouvoir atteindre. V. N. II, 622 : Hannibal.
15, Miracle. — Les éd. ant. à 88 aj. : car on lient entre autres choses que sa
sueur produisoit une très douce et souafue odeur, ce que Montaigne a déjà
dit dans son chapitre des senteurs, I, 574.
23, Médailles. — 'Trébelhus Pollion, Trig. lyrann., 14. — On a eu la même
opinion, après saint Louis, sur les pièces de monnaie à son effigie.
ESSAIS de MONTAIGNE. — T. IV. 38
Fc.594 ESSAIS DE MONTAIGNE.
18,
I, Epaminondas — S'était d'abord adonné à l'étude des lettres et de la
philosophie. Lié avec Pélopidas, il l'aida à délivrer Thèbes des Lacédémo-
niens qui s'en étaient emparés par trahison. Nomiiié généi-al lors de la
guerre qui s'ensuivit, il fut vainqueur à Leuctres (371), et releva Messène
do ses l'uinos pour l'opposer à Lacédémone. Postérieurement, il obtint plu-
sieurs avantages sur Alexandre, tyran de Phères; puis, la guerre ayant
repris contre les Lacédéraoniens, il les battit à nouveau à Mantinée, mais
y fut blessé mortellement (363). Epaminondas donna l'exemple de toutes
les vertus; il n'avait pas moins de frugalité et de désintéressement que de
génie et de courage. V. N. I, 344 : Reng.
13, Eux. — DiODORE DE Sicii.E, XV, 88; Pausamas, VIII, 13, etc. C'est auss
le jugement de Cicéron, De Orat., III, 34; Tusc, I, 2; il est vrai qu'ailleurs,
Acad., 11, 1, il en dit autant de Thémistocle.
16, Luy. — Pi.uTARQUE, De l'Esprit familier de Sacrale, 23.
20, Partie. — Les éd. ant. aj. : qui est de la vertu et.
23. Cestuy-cy. — Epaminondas.
25, Parangon. — En comparaison. Ce mot s'employait aussi dans le sens
de modèle : • 0 dame illustre, ô parangon d'honneur! • Marot.
20,
18, Leuctres. — Plutarque, Coriolan, 2; et dans le traité où il entreprend
de prouver Qu'on ne saurait vivre joyeusement selon la doctrine d'Épicure,
13.
19, Beaucoup. — Coucher de beaucoup, c'est exagérer, se vanter. — Ce mot
■< coucher » était à l'époque fréquemment employé et présentait des ac-
ceptions très diverses suivant la nature du complément qui l'accompa-
gnait : «■ coucher de peu », c'était faire bon marché de. faire le modeste;
« coucher gros », mettre gros jeu sur une carte par exemple; « coucher
par écrit » se dit encore dans le langage familier. Régnier a dit : « Ne
couche de rien moins que l'immortaUté », c.-à-d. ne vise, n'aspire à rien
moins qu'à l'immortalité.
20, Tant. — L'éd. de 88 aj. : vtile et.
22, Cause. — Plutarque. De l'Esprit familier de Sacrale, 4.
25, L'espargner. — Id., ibid., 17.
22,
2, Luy. — DiODORE de Sicile, XX, 88; Cornélius Népos, Epaminondas, 10;
Justin, VI, 8; etc.
24,
CHAPITRE XXXVIl.
3, Pièces. — C'est son livre même que Montaigne désigne de la sorte.
9, Oster. — Cependant, précisément dans ce chapitre (pag. 26), a été sup-
primé et remplacé par quelques mots, un assez long passage qui se trou-
vait dans l'édition de 1588.
18, Conuersation. — C.-à-d. une vie qui se prolonge jusque dans la vieil-
lesse ne se passe...
30, Membre. — Les éd. ant. et l'ex. de Bordeaux aj. : mais c'estoient vaines
propositions.
7, Msecenas. — S'était lié avec Auguste, alors que celui-ci étudiait en
Grèce. Il l'accompagna dans toutes ses guerres et, quand il devint empe-
reur, se contenta d'être son ami et refusa toutes charges et honneurs.
Il ne se servit de son crédit que pour le porter à la clémence et surtout
favoriser les gens de lettres : Virgile, Horace, Properce étaient ses amis
et ses protégés; lui-même avait composé quelques poésies, dont il ne reste
que quelques fragments.
11, Bene est. — Vers de Mécène conservés par Sénèque et que La Fontaine
a traduits ainsi dans sa fable La Mort et le malheureua; :
NOTES.
LIV. II, CH. XXXVII. VOL. III, PAG. 24.
Fc.595
26,
« ... Qu'on me rende impotent,
Cul-de-jatte, goutteux, manchot, pourvu qu'en somme
Je vive, c'est assez: je suis plus que content. »
17, Stoïcien. — Ou plutôt <- le cynique ». Est le fondateur de cette école:
il était disciple de Socrate et fut le maître de Diogène. 11 faisait consister
le souverain bien dans la vertu qu'il plaçait dans le mépris des richesses,
des grandeurs et de la volupté; c'est lui qui, le premier, prit la besace et
le bâton de mendiant comme symbole de la philosophie. — Ce trait est
rapporté par Diogène Laerce, VI, 18.
38, Essayé. — Éprouvé.
6, Accointer. ~ Me familiariser avec la mort.
13, Opter. — La pensée exprimée par ce vers de Martial a été souvent repro-
duite :
« Las d'espérer et de me plaindre
Des Muses, des grands et du sort,
« Être satisfait de son sort,
Quel qu'il soit, ne jamais s'en plain-
[dre.
C'est ici que j'attends la mort.
Sans la désirer ni la craindre. « Meynard.
Et regarder venir la mort
Sans la désirer ni la craindre. • Bussy-Rabutix.
Madame de Tracy l'a développée : « La vraie philosophie c'est de pré-
férer ce qu'on a, et de voir toutes choses du bon côté; de même le vrai
christianisme consiste à faire à tous les êtres animés, bêtes et gens, le plus
de bien possible et à attendre la mort sans crainte, comme sans impa-
tience. » — QuiNAULT l'a résumée ainsi :
« Faites choix de l'indifférence,
Elle assure un sort plus heureux. »
20, Gestes. — Au lieu de : « Qu'elle laisse... gestes » (1. 18 à 20), les éd. ant.
portent : comme si elle dressait les hommes aux actes d'vne comédie, ou
comme s'il esloit en sa iurisdiclion, d'empescher les mouuemenls et altéra-
tions que nous sommes naturellement contraincts de receuoir :. qu'elle em-
pesche donq Sacrales de rougir d'affection, ou de honte, de cligner les yeux
à la menace d'vn coup, de trembler et de suer aux secousses de la fiebure : la
peinclure de la Poésie, qui est libre et volontaire, n'ose priuer des larmes
mesmes, les personnes qu'elle veut représenter accomplies et parfaietes.
E se n'afflige tanto,
Che si morde le man, morde le labbia,
Sparge le guancie di conticuo pianlo,
elle deburoit laisser celle charge à ceulx, qui font profession de reigler nostre
maintien et nos mines. — Traduction de la citation : « Son affliction est
telle qu'il se mord les mains, qu'il se mord les lèvres et que sa joue est
sans cesse inondée de pleurs » (Auteur inconnu).
20, Condonne. — Accorde, permette, du latin condonare qui a même sens.
22. Voyelle. — Qui se décèle par la voix, par des plaintes, des gémisse-
ments.
29, Instruire. — Les éd. ant. aj. : qu'elle luy ordonne ses pas et le tienne en
bride et en office.
35, En accidens. — Précédé dans l'éd. de 88 par ; Voyla sa charge : du
dehors, il importe peu et.
37, Corps. — Les éd. ant. port. : C'est bien assez que nous soyons tels, que
auons nous accoustumé en nos pensées et actions principales : quant au corps,
s'il, au lieu de : « Si le corps ».
38, Tonrneboule. — Qu'il se tourne et se retourne comme une boule.
Fc.Fi96 ESSAIS DE MONTAIGNE.
28,
5, Epicurus. — Diogène Laerce, X, 18. /
8, Caestibus. — Gestes; gantelets garnis de fer ou de plomb, dont se ser-
vaient les athlètes dans les combats du pugilat.
12, Assaux. — Les éd. ant. aj. : de la douleur.
19, Desespoir. — Les éd. ant. aj. : et à la rage.
22, Retert. — V^ers du Philoctète d'ATTios, cités deux fois par Cicéros, De
Finibus. II, 29 et Tusc, II, 14.
30, Cicero. — De Divin., Il, 69.
32, Desgarcent. — Mot forgé par Montaigne pour exprimer que les dou-
leurs de la pierre ne le portaient à rêver qu'il avait commerce avec une
femme, comme il était arrivé à l'individu dont parle Cicéron.
33, Vreteres. — Canaux qui mettent en communication les reins et la ves-
sie.
34, Ordinaire. — Les éd." ant. aj. -.le deuise, ie ris, i'estudie, sans esmolion et
altération.
36, Préparer. — Les éd. ant. aj. : par estude et.
30,
1, Essayé. — Je me suis cependant mis à l'essai, à l'épreuve.
8, Santé. — Les éd. ant. aj. : et pure de douleurs.
13, Présomption. — Socrate disait d'Antisthène affectant de ne porter que
des vêtements dépenaillés, qu'il apercevait sa vanité au travers des trous
de son manteau. — « L'excès de modestie est un raffinement d'orgueil. •
Pascal. — « La simplicité affectée est une imposture délicate. • — • L'or-
gueil est égal chez tous les hommes; il n'y a de différence qu'aux moyens
et à la manière de le mettre à jour. • La Rochefoucauld.
32, Cartilage. — Pline, Hist. nat., VII, 12.
34, Illégitime. — Plutarque, dans son traité De ceux dont Dieu diffère la pu-
nition, 19, ne dit pas qu'on ait jamais tenu pour illégitimes ceux qui ne
portaient pas l'empreinte d'un fer de lance sur le corps; il remarque au
contraire qu'après avoir disparu, cette empreinte avait reparu dans cette
même famille après un assez long intervalle de temps.
36, Ressemblance. — C'est ce qu'HÉRODOxE, VI, 180, raconte d'un peuple de
Libye.
32,
15, Mère. — Le père de Montaigne parait avoir eu dix enfants, dont les deux
aînés seraient morts en bas âge, peut-être avant la naissance de Michel,
de telle sorte que, né le troisième après cinq années de mariage, il se
trouva être l'aîné de quatre frères et trois sœurs qui parvinrent à âge
d'homme. V. N. I, 114 : Frère.
38, Deux. — Ramon Eyquem, son bisaïeul, mort en 1478.
41, Sept. — Les éd. ant. port. : six.
34,
10, Empeschement. — Les éd. ant. port. : rengregement de mal.
13, Quatre. — Ces quatre frères étaient : Pierre, le père de Montaigne, qui
était l'aîné. Thomas, que l'on appelait M. de S. -Michel, parce qu'il était
curé de cette paroisse où se trouvait sis le château de Montaigne; il mou-
rut jeune. Pierre minor, dit Seigneur de Gavific ; il succéda aux emplois
ecclésiastiques de son frère Thomas et devint chanoine de S.-André et de
S.-Seurin de Bordeaux et curé de Lahontan, localité dont il est question
plus loin, page 60. Enfin Raymond, Seigneur de Dussaguet, avocat au par-
lement de Bordeaux.
16, Mal. — Et cela lui réussit si mal.
19, Dyspathie. — Aversion; le mot est emprunté du grec, nous disons au-
jourd'hui antipathie.
25, Considération. — Préjugé.
29, Epicurus. — Cicéron, Tusc, V, 33; Diogène Laerce, X, 129.
35, Iniurieuse. — Les éd. ant. port. : ne peut auoir ny grâce, ny faueur, au
lieu de : « nous vient... à estre iniurieuse ».
NOTES. LIV. Il, CH. XXXVII. VOL. III, PAG. 34. Fci.597
40, Secours. — Les éd. ant. et l'ex. do Bordeaux port. : de s'ayder de ces
nobles, au lieu de : « d'appeler à son secours ».
36,
2, Chère. — Les éd. ant. port. : esphieuse.
6, Certain. — Les éd. ant. aj. : Mais ie dy que ce qui s'en void en prac-
tique, il y a grand dangier que ce soit pure imposture, i'en crois leurs con-
fraires Fiorauanti et Paracelse.
8, Retforts. — Raifort; sorte de rave sauvage de goût très prononcé.
9, Séné. — Arbrisseau des pays chauds, dont les valves des fleui-s sont pur-
gatives.
11, Solon. — C'est Plutakqoe qui le lui fait dire dans le Banquet des sept
Sages, 19.
14, Vberté. — Fertilité; du latin ubertas qui a même signification.
15, Arondes. — Hirondelles;* cet ancien nom de l'hirondelle se retrouve en-
core dans « queue d'aronde », à la fois terme de charpentier et de fortifica-
tion.
19, Pastissage. — Mélange informe, espèce de salmigondis ou de macédoine.
25, Désigne. — Prescrit, ordonne.
26, Estime. — Montaigne raconte dans son Voyage que, se trouvant, pour
sa santé, aux bains « délia Villa » près de Lucques, en 1581, il laissa échap-
per cette exclamation : « La vainc chose que la médecine ! » Ce qui suit
prouve que ce mot partait du fond de l'àme ; et pour le confirmer dans
son idée, plusieure fois, rapporte-t-il encore, il fut appelé à Rome à des
consultations de médecins; à l'une, entre autres, le malade était résolu
de s'en tenir à sa décision ; et il ajoute : « J'en riois en moi-même. » Le
Clerc.
37, Ordonnances. — Les éd. ant. port. : drogues.
38,
1, Point. — Je ne me fais pas un sujet de frayeur, je ne souffre pas d'être
sans médecin ; — c'est le sens propre de « passionner » qui ne se dit plus
aujourd'hui qu'au sens figuré.
13, Censeur. — Pline, d'où cette assertion semble tirée, émet en effet que
les médecins ne furent reçus à Rome que six cents ans après la fondation
de cette ville; mais pour ce qui est de leur expulsion, il dit expressément
qu'elle n'eut lieu que longtemps après la mort de Caton.
18, Plutarque. — Vie de Caton le Censeur, 12.
19, Pline. - Ilist. nat., XXV, 8.
20, Hérodote. — Liv. IV, ch. 187. — Hippocrate dit à peu près la même
chose des Scythes.
40,
2, Platon. — Dans le Timée.
3, Appartiennent. — Dont nous avons la disposition. — Ces trois modes
de perturbations intestines sont les vomitifs, les purgations et la saignée.
7, Harpades. — Combats; coups de harpon ou de griffes. — Se harper,
c'est lutter à qui mieux mieux, corps à corps, se prenant aux cheveux, se
mordant, mettant tout en jeu pour se faire le plus de mal possible.
10, Intiable. — Incertain, sur lequel on ne peut compter.
14, Dibore. — Expression employée jadis dans le Languedoc et qui peut se
traduire par « Holà! » ou encore : « Alerte, à l'aide, au secours »; — était
employée couramment dans celte région, alors dans son premier sens, par
les laboureurs, les charretiers pour presser la marche de leurs bêtes.
15, Impiteux. — Impitoyable, sans pitié.
21, Entraine — Imitation de ce vers de Sénèque, Epist. 107 : « Ducunt vo-
lenlem fala, nolentem trahunt (Le destin mène qui s'y prête et contraint
qui résiste). » Ce que Fénei.on a rendu sous cette autre forme : <• L'homme
s'agite, Dieu le mène. »
27, Tué. — Pline l'Ancien, qui vivait avant Adrien, cite une épitaphe exac-
tement conçue dans les mêmes ternies : • Le trop grand nombre de
médecins qui l'ont assisté, l'a tué. • — Dans une de ses comédies, Casimir
Fc.b98 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Delavigne exprime la môme idée, en parodiant le vers si connu de Cor-
neille et l'appliquant à un malade auquel plusieurs médecins ont apporté
leurs soins : <- Que vouliez-vous qu'il fît contre trois? — Qu'il mourût. »
28, Diogenes. — DiOGf:NE Laeiîce, VI, 62.
29, Autresfois. — ■• Parlons fi'anchement, Docteur, dit un jour, en plaisan-
tant, Frédéric II de Prusse à son médecin. Combien avez-vous tué d'hommes
pendant votre vie? — Sire, répondit celui-ci, à peu près trois cent mille
de moins que Votre Majesté. » — « Diaulus était médecin, maintenant il
est croque-mort ; il n'a pas changé de métier. » Martial. — « Tu tuais les
hommes étant médecin ; gladiateur, tu les tues encore. » Martial.
29, Nicocles. — Le mot de Nicociès se trouve dans le ch. 46 de la Collection
des moines Antonius et Maximus; cette épigramme a souvent été répétée.
33, Faute. — Les éd. ant. à 88 port. : heur, que leur erreur et leurs fautes
sont soudain mises sous terre et enseuelies, au lieu de : « heur... faute ».
37, Moy. — Les éd. ant. port. : query à moy, au lieu de : « query moy ».
39, Subiects. — C.-à-d. les médecins s'en font honneur auprès de ceux qui
se sont mis entre leurs mains.
42
15, Morfondement. — Ce que nous appelons aujourd'hui un chaud et froid,
une affection causée par un froid subit, vous surprenant ayant chaud.
21, Propos. — De la République, III. .
27, Conte. — Dans sa fable Le malade et le médecin. — Les éd. ant. à 88
port. : ce me semble.
40, Propres. — Les Chinois, les Japonais paient, dit-on, leurs médecins, tant
par journée de bonne santé; et, quand ils sont malades, ils sont soignés
gratis. La chose n'est pas aussi paradoxale qu'elle en a l'air au premier
abord; c'est l'analogue de ce qui se pratiquait il y a un demi-siècle en
France, et qui se pratique peut-être encore dans les campagnes, où l'on
contractait abonnement avec le médecin; c'est également ce qui se passe
dans les sociétés de secours mutuels. Ce mode a disparu dans les grandes
villes depuis que les médecins ont mis leurs soins à des prix tellement
exorbitants que, pour échapper à leurs exigences souvent peu en rapport
avec leur science (les plus modestes ne sont pas les moins bons), beaucoup
de personnes de condition aisée cherchent à se faire admettre dans les
hôpitaux. On se plaint qu'en agissant ainsi , elles volent les pauvres
pour lesquels ces établissements ont été créés; c'est la nécessité qui les y
oblige : elles n'ont d'autre moyen de se procurer des soins dont elles
soient sûres, et d'échapper ainsi à l'ignorance des uns et aux prix exa-
gérés des autres. « Les anciens ne voulaient pas surtout que la vie des
hommes fût au prix d'un énorme salaire » ; mais déjà du temps de Pline
qui écrivait ainsi, les médecins étaient parfois payés des prix excessifs,
effet de la civilisation qui, augmentant le bien-être physique, fait que
chacun tient davantage à la vie. D'après lui, Erasistrate aurait reçu cent
talents (575.000 fr.) pour avoir guéri le roi Antiochus et il en cite plusieurs
qui en ont laissé plus de mille à leurs héritiers, après en avoir dépensé
autant durant leur vie. Aujourd'hui on a également tendance à l'exagé-
ration, et quand on leur parle de tarif, les princes de la science répondent
en concédant le paiement de leurs honoraires au prorata du revenu
représenté par le prix du loyer. Si encore ils étaient tenus de garantir la
guérison ou seulement du soulagement!
44,
1, .Xeculapius. — Avait appris la médecine du centaure Chiron. Non con-
tent de guérir les malades, il ressuscitait même les morts; c'est ainsi qu'il
rendit la vie à Hippolyte, fils de Thésée, qui, repoussant les obsessions de
Phèdre sa belle-mère, accusé par elle auprès de Thésée d'avoir voulu la
séduire, sur la demande, adressée par son père à Neptune, de le venger,
avait été déchiré par un monstre marin. Jupiter, irrité de l'audace d'Es-
culape, le foudroya, à la prière de Pluton, dieu des enfers, dont l'empire,
s'il eût eu des imitateurs, eût couru risque de devenir désert.
iNOTES. LIV. II, CH. XXXVII. VOL. III, PAG. 44. Fc.599
2, Hypolitus. — Les éd. ant. et l'ex. de Bord. port, à tort Ileleine, au
lieu de « Hypolitus »'.
6, Stygias. — Du Styx. Ce fleuve faisait sept fois le tour des enfers; ses
eaux étaient glacées et vénéneuses; c'est par lui que les dieux avaient
coutume de jurer et leur serment alors était irrévocable; s'ils y man-
quaient, ils étaient déchus pendant neuf ans de leur divinité.
9, Mon. — Vraiment oui, puisqu'il peut impunément... — Expression
elliptique d'usage fréquent du temps de Montaigne, mise pour ; « C'est
mon avis ». — Cette réponse de Nicoclès se trouve dans le ch. 146 de la
Collection des moines Antomus ^t Maximus.
18, Cassam. — En citant ce vers, Cicéron l'explique, ajoutant : « au lieu do
dire comme tout le monde, « un limaçon » ou plutôt fort probablement
« un bouillon de limaçons ».
20, Fanatiques. — Les éd. ant. et l'ex. de Bord. port. : fantastiques.
46,
2, Contestations. — Pline, Ilist. nat., XXIX, 1.
22, Hieropbilus. — Celse, préface du P"" livre. — Hiérophile fut le créatear
de l'anatomie; on dit qu'il poussa l'amour de la science jusqu'à disséquer
des corps de criminels vivants.
23, Erasistratus. — Erasistrate s'est adonné à l'anatomie; a été le chef de
l'école des Méthodistes qui, procédant d'après des méthodes déterminées,
était opposée à celle des Empiriques, qui s'appuyaient exclusivement sur
l'expérience; son école a jusqu'à Galien joui d'une grande célébrité.
23, Asclepiades. — 11 préconisait les douches; le premier, il a pratiqué la
broncliotomie dans le cas de l'angine.
24, Alcmaeon. — A écrit sur la nature de l'âme et sur la médecine; admet-
lait comme causes de toutes choses, certains principes fondamentaux, dont
chacun avait son contraire.
27, Strafo. — Straton; il passa une partie de sa vie en Egypte où il fut
précepteur de Ptolémée Philadelphe. Il expliquait tout par la force produc-
trice de la nature et les maladies par les entraves qu'on lui opposait.
28, Hippocra tes. — Le père de la médecine, ainsi qu'on l'a surnommé. —
Avait beaucoup voyagé; enseigna et pratiqua, surtout à Athènes. Se basait,
pour traiter les malades, sur l'observation, plus que sur des hypothèses,
comme on l'avait fait jusqu'à lui; usait de remèdes simples; le premier,
divulgua les méthodes curativos jusqu'alors tenues secrètes; a beaucoup
écrit, en relatant ses observations; n'a pas craint d'avouer ses erreurs. On a
dit de lui qu'il avait refusé des propositions d'Artaxerxès, roi des Perses,
qui, à prix d'or, voulait l'enlever à la Grèce et se l'attacher.
28, Amis. — Pline l'Ancien, Hist. nat., XXIX, 1, au commencement.
37, Peloponnesiaque. — Guerre du Péloponnèse; guerre mémorable de la
Grèce ancienne, qui eut lieu de 431 à 401, entre Sparte et Athènes, et
qui, après des alternatives de succès et de revers, se termina par la défaite
de cette dernière.
38, Science. — Tous ces détails sur la médecine sont extraits de Pline, Hist.
nat., XXIX, 1.
48,
7, Tbemison. — Restaurateur de l'école méthodiste, basée sur ce qu'il n'y
a dans la nature que de la matière animée et que la diversité des corps
provient de la diversité des atomes ou éléments qui les composent.
7, Musa. — Guérit Auguste d'une maladie dangereuse, ce qui lui valut
d'être comblé d'honneurs par le prince et par le Sénat : sa statue fut
placée dans le temple d'EscuIape; et, à sa considération, les médecins
furent exempts de toutes sortes d'impôts. — Musa était l'ami d'Horace ("t
de Virgile; c'est lui, a-t-on dit, que ce dernier a célébré dans le livre XII
de YÉnéide, sous le nom de lapis.
9, Messalina. — Les éd. ant. aj. : femme de Claudius Csesar.
23, Latineurs. — Gens qui s'expriment en latin.
25, Cueillons. — Les éd. ant. port. : nous ne sçaurions donner pris aux
Fc.600 ESSAIS DE MONTAIGNE.
drogues que nous cognoissons : si elle ne nous est inconnue, si elle ne vient
d'oulre-mer, el ne nous est apportée de quelque lointaine région, elle n'a
point de force; au lieu de : « la drogue... cueillons ».
26, Gayac. — Arbre de la Jamaïque à bois très dur et résineux dont la
décoction est un sudorifique; on le nomnio aussi « bois saint -.
26, Salseperille. — Salsepareille; plante d'Amérique, dont la racine est
(lépuralive et sudoi'ifique.
27, Esquine. — Bois d'esquine; racine d'un certain jonc des Indes, dont il
est fait usage en médecine.
'30, Mespriser. — Les éd. ant. aj. -.et estimer vaines.
3^1, Paracelse. — Prétendait révolutionner la médecine; et après avoir joui
d'une grande réputation, tomba dans le discrédit et mourut à l'hôpital.
34, Fiorauanti. — Mêlait à un peu de science beaucoup de charlatanisme,
acquit une certaine notoriété.
35, Argenterius. — Se distingua par ses vives attaques contre Galien.
50,
2, More. — Ésope, dans sa fable VÉthiopien. — Les Maures sont distincts
des Berbers, des Arabes et des Nègres dont l'ensemble forme la majeure
partie de la population de l'Afrique; ils semblent un croisement de ces
deux dernières races, habitent de préférence les villes, sont vigoureux,
basanés, fourbes et cruels, s'adonnent volontiers au brigandage, à la pira-
terie et à la traite des nègres.
22, Merueilleusement. — Met à une rude épreuve.
23, Repos. — Les éd. ant. à 88 aj. : el de ne troubler rien en son estât.
30, Affuster. — Ajuster, mener à bien; au propre, c'est appliquer une gar-
niture de bois à quelque chose.
40, Faut. — S'il se méprend, s'il manque.
52,
14, Conseil. — L'éd. de 80 aj. : {car d'en voir plusieurs biend'accord ilest mal
aisé : Hz haïssent Vvni-son de la musique).
15, Suader. — Persuader, comme portent les éd. ant. Suader est le mot latin
suadere qui a même signification.
22, Foye. — De nos jours, cela n'est plus exact : l'invention de Roengen,
autrement dit les rayons X réalisent dans une certaine mesure ce fait qui
dépasse notre intelligence, bien que nous le reproduisions à volonté, de
rendre translucides des corps opaques, notamment le corps humain, et de
nous en révélei- l'ossature et la présence de tout corps étranger.
24, Et qui. — L'éd. de 80 porte : desquels, ils disent, qu'il y en a aucuns qui,
au lieu de :. - et qui ».
35, Diuerses. — Plus tard, Voltaire, exprimant la même idée, a dit de
même : « Quelle bonne farce, d'introduire dans un corps que l'on connaît
peu des médicaments que l'on ne connaît pas. »
54,
4, Officier.— Qui est pourvu d'un office, d'une charge. Ici d'un pharmacien
ou, comme on disait alors, de l'apothicaire.
6, Pourpointiers. — Tailleurs qui ne faisaient que le pourpoint (ancien
vêtement français qui couvrait le corps du cou à la ceinture); doit s'enten-
dre de l'ensemble des vêtements du haut du corps.
6, Cbaussetiers. — Ne faisaient que les hauts-de-chausses (culottes) et les
bas.
13, .égyptiens. — Hérodote, II, 84.
14, Descouper. — Diviser en parties complètement séparées; on dit actuelle-
ment créer des spécialités. — A cet égard, le vœu de Montaigne est au-
jourd'hui complètement réalisé; les spécialistes foisonnent, il }' en a do
toutes sortes. L'idée est bonne, sa réalisation l'est moins. Adressez-vous à
l'un d'eux, à peine s'il vous examine, admet sans conteste que vous no
faites pas erreur, que votre cas relève bien de lui et, ne voyant que sa
partie, de la meilleure foi du monde, quels que soient votre tempérament et
vos antécédents qu'il ne recherche même pas, vous trace un traitement
56,
NOTES. LIV. II, CH. XXXVII. VOL. III, PAG. 64. Fc.601
d'après une des formules qu'il a adoptées. Hors certains cas de chirurgie où
incontestablement les spécialistes, en raison d'une pratique plus fréquente,
ont plus de dextérité et sont à préférer, il n'y en a pas un seul, si grande
soit sa réputation, qui vaille mieux qu'un médecin modeste et conscien-
cieux auquel vous vous confiez d'habitude, qui vous voit fréquemment,
qui vous porte affection, vous suit .et de longue date connaît votre tempé-
rament. — En somme, il est sage de n'avoir recours à un spécialiste que
sur le conseil de son médecin ordinaire.
21, Amy. — La Boétie, mort de la dysenterie en 1563.
25, Dissentieuses . — Par ces drogues mêlées confusément et qui ont des
qualités discordantes et contraires.
29, Graue. — Gravelle; maladie des reins et de la vessie donnant lieu à la
production de concrétions calcaires semblables à de petits grains de
sable.
29, Pierre. — Maladie dans laquelle les concrétions qui se produisent chez
certaines personnes atteintes de gravelle, s'agglomèrent, ce qui rend leur
expulsion beaucoup plus difficile et douloureuse.
3, Expeller. — Chasser; du latin expellere, qui a même signification et
dont le participe passé expulsus a fourni les dérivés « expulsé, expulsion ».
8, Eau. — Uriner; expression gasconne qui s'est généralisée et s'emploie
aujourd'hui assez couramment dans le langage familier.
19, Il est bon. — Le passage commençant par ces mots et se terminant
pag. 60, lig. 14, par ceux-ci : <■ en cet art », était rédigé ainsi qu'il suit
dans l'édition de 1580 : Somme, Hz n'ont nul discours, qui ne soit capable
de telles oppositions. Quant au iugement de l'opération des drogues, il est
autant ou plus incertain, fay esté deux fois boyre des eaux chaudes de noz
montaignes : et m'y suis rangé, par ce que c'est vne potion naturelle, simple,
et non mixtionnée, qui au moins n'est point dangereuse, si elle est vaine : et
qui de fortune s'est rencontrée n'estre aucunement ennemie de mon gousl (il
est vray que ie la prens selon mes règles, non selon celles des médecins)
outre ce que le plaisir des visites de plusieurs parens et amis, que i'ay en
chemin, et des compaignies qui s'y rendent, et de la beauté de l'assiete du
pais, m'y attire. Ces eaux là ne font nul miracle sans doute, et tous les effeclz-
estranges qu'on en rapporte ie ne les croy pas; car pendant qu. i'y ay esté,
il s'est semé plusieurs telz bruits que i'ay decouuers faux m'en informant vn
peu curieusement. Mais le monde se pipe aiseement de ce qu'il- désire. Il ne
leur faut aster aussi qu'elles n'esueillent l'qppetit et ne facilitent la digestion,
et ne nous prestent quelque nouuelle alegresse, si on n'y va du tout abatu
de forces. Mais moy ie n'y ai esté ny ne suis délibéré d'y aler que sain et auec-
ques plaisir. Or quant à ce que ie dis de la difficulté, qui se présente au
iugement de l'opération, en voicy l'exemple. Je fus premièrement à Aigues-
caudes, de celles là ie n'en sentis nul effet, nulle purgation apparente : mais
ie fuz vn an entier aprez en estre reuenu sans aucun ressentiment de colique,
pour laquelle i'y estoy allé. Depuis ie fus à Banieres, celles cy me firent
vuyder force sable, et me tindrent le ventre long temps après fort lâche.
Mais elles ne me garantirent ma santé que deux mois : car après cela i'ay esté
tresmal traicté de mon mal. le demanderais sur ce tesmaignage, ausquelles
mon médfcin est d'auis que ie me fie le plus, ayant ces diuers argumentz et
circonstances pour les vnes et pour les autres. Qu'on ne crie donc plus après
ceux, qui en ce te incertitude se laissent gouuerner à leur appétit et au sim-
ple conseil de nature. Or ainsi, quand ils vous conseillent vne chose plus
tost qu'vne autre, quand ils nous ordonnent les choses aperitiues, comme sont
les eauj; chaudes, ou qu'ils nous les deffendent : ils le font d'vne pareille in-
certitude, et remettent sans double à la mercy de la fortune l'euenement de
leur conseil : n'estant eti leur puissance ny de leur art de se respondre de la
mesure des corps sableux, qui se couiient en noz reins : là où vne bien legiere
di/ferance de leur grandeur peut produire en l'effet de notre santé des conclu-
sions contradictoires. Par cet exemple Ion peut iuger de la forme de leurs dis-
Fc.602 ESSAIS DE MONTAIGNE.
cours. Mais pour les presser plus viuement, il ne fauldroit pas vn homme si
ignorant comm£ ie suis de leur art.
31, Bastelant. — Faisant les bateleurs, se jouant et badinant.
58.
33, Bella Villa. — Bains près de Lucques; on les nomme actuellement tout
simplement i Bagni [les Bains).
60,
62.
1, Prise. — C.-à-d. on retient les malades au lit dans l'établissement même
où ils ont bu l'eau.
3, Corneter. — Corneter et ventouser sont synonymes; le premier est hors
d'usage; dans quelques dictionnaires modernes, on trouve encore « cornet
à ventouses ».
4, Doccie. — Douches; jets d'eau chaude ou froide que l'on dirige sur le
corps ou une de ses parties. Leur emploi, restreint au temps de Montaigne
à l'état de traitement curatif, s'est généralisé, et est devenu en outre un
de nos moyens courants d'hygiène et de propreté.
19, Ettertur. — Ausone, Epig. 74, de qui sont ces vers, joue ici sur le mot
e/fertur, efferre signifiant emporter et aussi porter en terre. — En fait de
médecins du nom d'Alcon, on n'en connaît qu'un, dont Pline dit qu'il
vivait à Rome du temps de Claude, et qu'ayant été exilé et ses biens
s'élevant à dix millions de sesterces (2.i000.(X)0) confisqués , il en gagna
autant en peu d'années, après avoir été rappelé.
25, Caupene. — Ce baron de Caupène était petit-fils du maréchal de Mont-
luc.
27, Bénéfice. — Charge ecclésiastique pourvue d'un revenu; les patrons
étaient ceux qui avaient contribué, eux ou leurs ancêtres, à la fondation
de l'église; ils présidaient aux cérémonies, présentaient un candidat à la
nomination de l'évêque et percevaient quelquefois une partie des revenus
du bénéfice. Celui dont il est question ici, était la cure de Lahontan, dont
avait été titulaire un des oncles de Montaigne. V. N. III, 34 : Quatre.
37, Bestroit. — District, pays, se livrer à la mendicité.
43, Maistres. — Voir N. II, 478 : Maistre lean.
2, Grand. — Ou monsieur, comme portent les éd. ant.
4, Compères^ — L'éd. de 80 port. : cousins. — Les bourgeois s'appelaient
entre eux compères, comme les gentilshommes s'appelaient cousins.
12, ApoBtemes. — Abcès non ouverts; apostème et apostume se disent en-
core, quoique rarement; on le trouve chez La Fontaine, dans sa fable
Le cheval et le loup :
« J'ai, dit la bête chevaline,
Un apostume sous le pied. >
25, Raccourcies. — Ce membre de phrase : « leurs vies raccourcies de moi-
tié • , est de trop. On ne saurait nier que la médecine ne soit parvenue
à force d'hygiène à prolonger la vie humaine dont certaines statistiques
fixent, de nos jours, la durée moyenne, en France, à 46 ans, alors qu'il y a
un siècle à peine, on la tenait moindre de près de 10 ans. De fait, les
maladies engendrées ou aggravées par la misère et les logements insalu-
bres, la malpropreté, la négligence dans les soins donnés aux enfants en
bas âge, ont bien diminué; et aussi les épidémies, par suite des mesures
prises dès leur apparition pour en arrêter le développement; enfin la vac-
cination a de plus en plus raison de nombre de maladies, et non des
moindres, contre lesquelles la science était jadis impuissante. Mais à quel
prix ce résultat est obtenu, Montaigne nous le dit, et cet affaiblissement
qu'il accuse dans nos tempéraments est bien réel : notre vie est plus
longue, mais plus souffreteuse; l'intensité de l'existence qui aujourd'hui
se passe, pour le plus grand nombre, dans un état de préoccupations et
souvent de surexcitations continues qui, jadis, n'était l'apanage que do
NOTES. LIV. II, CH. XXXVII. VOL. III, PAG. 62. Fc.603
quelques-uns; la sophistication des denrées alimentaires quelles qu'elles
soient, la contamination presque générale de l'eau que nous buvons;
' l'alcoolisme qui va gagnant sans cesse, font que finalement, dès la jeu-
nesse, nous sommes aux prises avec des maux d'estomac, d'intestins, avec
des douleurs de toute nature' qu'autrefois on ne connaissait guère que
dans l'âge avancé, et témoignent d'une dégénérescence qui va augmentant
de génération en génération. — Parmi ces infirmités devenues plus pré-
coces et multipliées, la tuberculose, qui présentement en France emporte
350.000 personnes par an, tient le premier rang, tant par sa gravité que
par la rapidité de son extension. Son développement excessif, depuis une
cinquantaine d'années, tient à ce qu'elle est héréditaire, et que la sélection
qui, il n'y a pas encore cent ans, s'opérait aux débuts de la vie et s'éten-
dait à tout ce qui était venu au monde avec une organisation débile, se
trouvant considérablement réduite par les progrès de l'hygiène, tous ceux
qui n'ont échappé que grâce à ces conditions d'hygiène, vont procréant
des êtres qui sont tout désignés pour être atteints à bref délai et propager
à leur tour les germes morbides qu'ils ont reçus en naissant. On peut
essayer de guérir les tuberculeux, on y parviendra peut-être pour nombre
d'entre eux; mais tous les moyens curatifs existants ou à trouver : ré-
gime, sanatoria, sérums, ne seront que des palliatifs insuffisants contre le
fléau ; pour l'enrayer, il n'est qu'un remède d'efficacité absolue : il faut
le prévenir, en tarir la source en interdisant le mariage, c'est-à-dire la
propagation de leur mal, à ceux qui sont contaminés; et pour cela il suffit
que la loi édicté qu'un bulletin de visite médicale, déUvré à bon escient,
soit joint aux pièces à produire à la mairie, par quiconque est en instance
de mariage. Conçu en termes généraux, ce bulletin aurait, du même coup,
pour effet de protéger les familles contre l'introduction subreptice dans
leur foyer des syphilitiques et autres avariés qui, plus heureux que les
tuberculeux, ont des chances de guérison; il ne serait qu'un renseignement
qui leur permettrait de savoir à quoi s'en tenir, celles qui le jugeraient
à propos ayant, à moins que l'expérience ne montre la nécessité d'un in-
terdit formel, la faculté de passer outre; le remède n'est ni difficile, ni
coûteux, ni gênant pour ceux qui sont indemnes, il suffit de vouloir.
40, Curieux. — Les éd. ant. à 88 aj. : et d'autres auec moy.
64,
5, Inusité. — Il s'agit ici de pelotes, de grosseur variable, pouvant attein-
dre cinq à six centimètres de diamètre, nommées par les savants « ega-
grophytes » et aussi « besourds d'Allemagne », composées de détritus de
plantes, de poils de l'animal et de concrétions calcaires qui se forment
assez fréquemment dans le premier et parfois dans le deuxième estomac
des ruminants.
15, Pétrifiante. — Les éd. ant. aj. : Et si celte besle est suiette à cette maladie,
ie trouue qu'elle a esté mal choisie pour nous y seruir de médicaments. —
En supprimant ce membre de phrase, Montaigne s'est bien inconsciem-
ment épargné les démentis que l'avenir lui eût apportés, lorsque 150 ans
j:)lus tard la vaccine était découverte et que trois siècles après lui le génie
de Pasteur, qui n'était pas médecin, imaginait de communiquer certaines
maladies à certains animaux et par des traitements appropriés d'en tirer
ces sérums qui immuni^nt l'homme et aussi d'autres animaux contre
ces mêmes maladies ou les en guérissent, ouvrant à la science un champ
illimité d'expériences et d'applications.
21, Euenemens. — Néanmoins, elles réussissent dans quelques heureuses
circonstances.
22, Nécessité. — « Honore les médecins à cause de la nécessité (sous-
entendu : où tu es d'y avoir recours), » dit I'Ecclésiastique, XXX VIII, 1;
et il ajoute : « parce qu'il est une création du Très-Haut ».
23, Asa. — « Affligé, dit I'Écriture (II Paralipomènes, XVI, 12), d'un mal qui
lui tomba sur les pieds et remonta plus haut (probablement la goutte), il
n'eut point recours au Seigneur et mit plutôt sa confiance dans la science
Fc.604 ESSAIS DE MONTAIGNE.
des médecins. » On croit que par médecins, il faut entendre ici les magi-
ciens, parce qu'alors la plupart des médecins usaient de sortilèges et de
superstition, et qu'il est vraisemblable que s'il en eût été autrement, ce ro-
proche ne lui eût pas été adressé.
25, Aymez. — « Le médecin, d'après Alphonse Daudet, est un homme qui
console toujours, soulage souvent, guérit parfois. • Définition fort juste
en tant qu'appliquée au médecin familial, qui vous suit au cours de la vie,
étudie et connaît votre tempérament, est votre ami autant que voti-c
conseiller, ce qui est rare dans les grands centres où abondent par trop
ce que l'on est convenu d'appeler les princes de la science et aussi les
spécialistes et les prolétaires. Aux premiers le temps fait défaut, les seconds
ne voient que ce qui les touche, les derniers parfois n'ont pas assez de
scrupule; chez certains d'entre les uns et les autres les honoraires deman-
dés sont souvent d'une exagération excessive, lors même que leur science
s'est trouvée en défaut ou que leurs soins n'ont pas abouti.
28, Vacations. — Professions.
32, Loy. — .Je leur permets, je leur donne licence.
33, Sorte. — Les éd. ant. port. : me coucher sur le coslé droit, si i'ayme au-
tant y eslre, que sur le gauche, au lieu de : « m'abrier... sorte >■.
36, Clairet. — Ancien nom du vin de Bordeaux que, dit-on, les Anglais, qui
en sont fort amateurs et gros consommateurs, lui ont conservé et qui
vient de ce que, relativement aux autres vins du Midi, il est peu chargé en
couleur.
66,
68,
10, Destroussement. — Ouvertement.
14, Soit. — Les éd. ant. port. : faim.
24, Place. — Places publiques. « C'était une loi sagement établie » , dit
Hérodote, I, 197, qui ajoute : « il n'était pas permis de passer près d'un
malade sans s'enquérir de son mal ». — V. aussi Strabox, XVI.
29, Breuets. — Barbotages est pris ici au figuré et signifie marmottages,
prières cabalistiques, etc. ; les brevets sont les préservatifs contre le poison,
les enchantements, les maladies, etc., généralement sous forme de billets
enfermés dans une sorte de gaine en étoffe ou en peau qu'on suspendait
aux bras, aux poignets et autres parties du corps, autrement dit des
amulettes; il nous en reste bien quelque chose.
32, Homère. — Odyssée, IV, 231.
36, Confrairie. — Société habituelle ; lorsqu'il écrivait les Essais et en parti-
culier ce chapitre où il se met assez souvent en cause, il ne faisait plus
partie du Parlement.
2, Desprendre. — Je ne puis quitter ce sujet.
6, Simples. — Nom vulgaire des herbes et plantes médicinales.
17, Galen. — Galien; séjourna plusieurs années à Alexandrie pour y étudier
l'anatomie; vint à Rome et y devint le médecin des empereurs Marc-
Aurèle, Vérus et Domitien. C'est, après Hippocrate, dont il suivait la
doctrine, le premier médecin de l'antiquité ; il a publié une foule dîécrits
qui formaient un corps complet d'études médicales, plusieurs sont perdus.
Il expliquait tout, en médecine comme en physique, par le fait des quatre
éléments : l'eau, l'air, la terre, le feu, et celui des quatre qualités : le
chaud, le froid, l'humide, le sec; et pour expliquer les phénomènes de la
vie, il admettait un fluide vital.
20, Vaisseau. — Vase. Un auteur du xvn' siècle dit qu'à cette époque les
Indiens considéraient du bouillon de serpent comme un excellent préser-
vatif contre la lèpre.
30, Aisée. — C.-à-d. à laquelle il faut prêter une croyance bien souple et
bien accommodante; il se trouve à nouveau non moins embarrassé pour
discerner dans quel cas et à quelle maladie il peut faire application de
ce remède.
36, Maladies. — Devant chacun de ces compléments : l'épilepsie, au mélan-
NOTES. LIV. II, CH. XXXVII. VOL. III, PAG. 68. Fc.60o
colique, on hiver, etc., les mots •< que c'est -, sont chaque fois sous-
entendus.
70,
16, Expériences. — Hippocrate, Galion et Celse.
24, Pas. — Sur ce passage, ce sujet.
72,
9, Tibère. — Tacite, Ann., VI, 46. — Tibère, encore jeune, se distingua
aux armées et, plus tard, fit fleurir la paix, l'ordre, la justice dans les pro-
vinces et administra bien les finances; mais, soupçonneux et cruel, il
donna, lorsqu'il eut le pouvoir suprême, libre cours à ces instincts. Sur
la fin de sa vie, il s'était retiré dans l'ile de Caprée, non loin de Naples,
pour échapper à la haine qu'il sentait s'élever autour de lui et se livrer
en toute liberté à ses vices.
i6. Suffisance. — L'éd. de 80 aj. : pour m'agencer et meliorer, non pour me
parer et honorer; — celle de 88 aj. : et de la valeur.
:i3, Creu. — Ailleurs pourtant, Montaigne dit qu'il faut coUoquer les gens
non selon les facultés de leur père, mais selon celles de leur àmé. Si tous
ceux, « sous de meschantes chausses », n'avaient pas fait de livres, que
de chefs-d'œuvre n'existeraient pas : Homère a mendié; Virgile naquit
paysan; Horace était (ils d'esclave; Corneille, qui touchait six francs de
droits d'auteur quand on jouait le Cid, demandait un crédit do trois sols
pour un ressemelage de souliers; La Fontaine avait souvent besoin de
Fouquet; Boileau empruntait cent pistoles à Racine pour aller aux eaux,
et Racine les demandait à Louis XIV pour les prêter à Boileau.
34, Moy. — Ne me le demandez pas à moi, qui aimerais encore mieux être
un bon cuisinier, si.
37, Ailleurs. — Le Talmud dit dans le même sens : « La science sans rà-
chesse est comme un pied sans soulier; la richesse sans la science comme
un soulier sans pied. »
74,
12, Latins. — Bien d'autres médecins latins ont écrit, entre autres : Celius
Aurelianus, contemporain de Galien; Serenus Samonicus, qui vivait sous
l'empereur Septime Sévère; Marcellus Empiricus, sous Théodose le Grand;
jEmilius Macer, contemporain de Virgile; Apulée, contemporain de Celse;
il est, du reste, à observer que les Romains s'abstenaient en général de
pratiquer cet art, que n'exerçaient guère que les Grecs. Paven.
12, Celsus. — A traité de toutes les sciences, et en particulier de la méde-
cine; seul, demeure son ouvrage sur ce dernier sujet, remarquable par le
style autant que par la valeur du fond.
14, Pincer. — C.-à-d. je ne fais que critiquer légèrement cet art des méde-
cins. — Montaigne fait le mot <• art » tantôt féminin, tantôt masculin,
mais plus souvent féminin.
14, Pline. — Liv. XXIX, ch. 1.
15, Corde. — Ou de leur latin, comme port, les éd. ant. ; c.-à-d. de leurs
ressources.
21, Gramontoises. — C.-à-d. il ne parle pas des eaux thermales de ce côté-ci
des Pyrénées qui relèvent de la seigneurie de Gramont. — Cette seigneurie,
située dans la Basse-Navarre, appartenait à la famille du même nom, dont
était madame de Duras. — L'éd. de 80 aj. ici : les montaignes où elles sont
assises ne sonent et ne retentissent rien que de Gramont.
21, Ils. — Les éd. ant. port. : Nos médecins sont encore plus hardis, car ils,
au lieu do : « Ils ».
29, Pericles. — Chef du parti démocratique à Athènes; il aimait les lettres
et les arts qui prirent, sous son initiative, un essor qui fait souvent dési-
gner son époque sous le nom de « siècle de Périclès. Il signala son admi-
nistration à l'intérieur par la construction de beaux édifices et des fêtes
somptueuses; au dehors, par de grands succès, mais qui ne se maintinrent
pas. 11 détenait le pouvoir quand éclata la guerre du Péloponnèse (V. N.
III, 162 : Peloponnesiaque) ; il n'en vit que les débuts et mourut de la peste.
Fc.606 ESSAIS DE MONTAIGNE.
30, Breuets. — Amulettes. V. N. III, 66.
76,
5, Dragmes. — Poids et monnaie grecs : comme poids, la drachme était
environ de trois grammes; comme monnaie, de cinquante à quatre-vingts
centimes environ, sa valeur ayant varié à diverses époques.
5, Opiate. — Préparation pharmaceutique de consistance un peu molle et
dont le suc de pavot (opium) était la base.
6, Violente. — Les éd. ant. aj. : et r/ui aura troublé Vassiette de mon enten-
dement et de ma raison.
11, Deriuée. — C.-à-d. qui m'est venue de, qui m'a été transmise par mes
ancêtres.
18, Assené. — Bien singulier, bien mal placé, peu justifié.
37, Diuersité. — « Diversité est ma devise, » a dit La Fontaine. — Les éd.
ant. aj. : et la discordance.
LIVRE TROISIEME
CHAPITRE PREMIER.
78,
Troisième. — Ce troisième livre a paru pour la première fois dans l'éd.
de 1588.
Honeste. — Ce chapitre traite de la conduite à tenir dans les guerres
civiles. 11 mérite attention et est assez difficile à comprendre; Montaigne y
développe les idées qui ont dû le guider et les sentiments qui ont dû l'animer
pendant le temps durant lequel il a occupé des fonctions publiques.
2, Curieusement. — Avec recherche, avec prétention, de parti pris. —
Pascal a encore ramassé ici, chez Montaigne, comme cela lui arrive
souvent, une pierre pour le lapider. Après lui avoir reproché de s'être fait
le sujet principal de son livre, il termine : « Car de dire des sottises par
hasard et par faiblesse, c'est un mal ordinaire : mais d'en dire par dessein,
c'est ce qui n'est pas supportable... »
6, Eust. — Pour peu qu'elles me coûtent.
11, Poison. — Tacite, Ann., II, 88.
38, Parer. — « L'hypocrisie est un hommage rendu parle vice à la vertu. «
La Rochefoucauld.
80,
9, Sentent. — « Cet âge est sans pitié, » a dit La Fontaine, parlant de
l'enfant.
28, Impudence. — Cette même thèse est exposée par Boguet, ce juge de
Saint-Claude qui, dans son discours sur les sorciers (1602), blâme la perfidie
dont on usait envers eux, ne voulant pas que l'avocat trahisse son client,
que le juge promette grâce à l'accusé pour le faire mourir; blâmant les
épreuves auxquelles on les soumettait, la torture qu'on leur infligeait, et
qui tout en préconisant ces principes humanitaires, fit du pays un désert;
il n'y eut jamais juge plus consciencieusement exterminateur (V. N. III,
540 : Vif).
32, Peine. — Que difficilement je trahirois le prince pour un particulier,
moi qui serais très fâché, etc.
36, Princes. — Entre le roi de Navarre, depuis Henri IV, et le duc de
Guise; postérieurement entre Henri III et le roi de Navarre. V. de Thou,
De Vita sua, III, 9.
82,
3, Masque. — Engageassent la pointe de leur lance ou de leur épée dans
mon masque.
NOTES. LIV. III, CM. I. ' VOL. III, PAG. 82. Fc.607
3, Mestier. — Les diplomatos.
5, Peuuent. — Contrefont la plus parfaite neutralité et se montrent les
plus amis qu'ils peuvent, les plus dévoués aux intérêts de ceux avec qui
ils traitent. — « Un diplomate, disent les Italiens, doit avoir la physio-
nomie ouverte et la pensée impénétrable. »
15, Hipperides. — Plutarque, De la différence du flatteur avec l'ami, 24.
— lljpéride s'employa activement contre les Macédoniens qui, vainqueurs,
se le firent livrer, lui arrachèrent la langue et le soumirent aux pires
tortures.
24, Peut. — Que le coup porte, s'il est possible.
27, Particulière. — Tacite dit de même : « Galba, Othon, Vitellius ne me
sont connus ni par les bienfaits, ni par les offenses que j'en ai reçus. •
28, Priué. — Ni excitée, ni ralentie par un intérêt personnel.
29, luste. — Cette cause est celle de la Ligue, confédération du parti catho-
lique sous Henri 111, fondée par le duc de Guise, dans le but apparent de
défendre la religion contre les Calvinistes; en réalité, pour renverser le
roi. Henri IV y mit fin par ses victoires et son abjuration en 1593.
31, Potest. — Cette citation ne figure pas ici dans l'ex. de Bordeaux; elle
est reproduite dans la présente édition une seconde fois, III, 502.
84,
4, Vieille. — Allusion à un dicton de l'époque. La vieille femme en offrant
un cierge à saint Michel, un autre au dragon avec lequel, dans les ta-
bleaux, on le représente en lutte, cherche à ménager les deux adversaires,
la chèvre et le chou, comme dit un autre proverbe. Montaigne, à son
instar, est disposé à faire sa cour aux deux partis en présence. Cet aveu
prêterait fort à la critique sans le commentaire qui le suit et dont il ne
saurait être séparé. — La Fontaine, et lui sans commentaires, a dit aussi :
« Le sage dit, selon les gens : Vive le roi. Vive la Ligue » ; mais ce n'est
qu'une constatation qu'il fait et non une opinion personnelle qu'il émet.
— Ce passage rappelle encore celui de Macrobe, où il parle d'un homme
qui avait dressé deux corbeaux, l'un pour féliciter Auguste, l'autre pour
applaudir Marc-Antoine.
7, Besoing. — Add. de 88 : el s'il ne sert.
9, Atticus. — Cornélius Népos, Atticus, 6. — Atticus s'éloigna de Rome,
pendant les guerres civiles, pour ne pas prendre part aux troubles publics.
Il se refusa constamment à toute situation officielle et resta constam-
ment lié avec les hommes les plus éminents, quoiqu'ils fussent divisés
entre eux, avec Sylla et Cinna, Pompée et César, Antoine et Cicéron,
Brutus et Octave. Jouissant d'une grande fortune et d'un grand crédit, il
n'en usa que pour faire réparer les injustices et secourir les victimes des
divers partis.
17, Honneste. — Combien est d'à propos cette appréciation de Montaigne
sur la conduite à tenir en cas de troubles. En ces temps, dès qu'il s'en
produit, on gémit, on ferme boutique, on se clôt chez soi, on émigré ou
encore on va voir, semblant faire cause commune avec les fauteurs de
désordre et de la sorte donnant plus d'importance au mouvement et ajou-
tant à la difficulté de la répression, s'en remettant exclusivement du soin
de ramener l'ordre au Gouvernement qui parfois trahit, parfois lâche pied,
et en tout cas, n'a pas toujours sous la main de quoi parer au mal, qui
va grandissant d'instant en instant. 11 en serait souvent autrement si dès
le début chacun s'y employait; en Angleterre, quand le fait se produit, cha-
cun prenant parti a possibilité de s'enrôler momentanément dans la police,
à laquelle ce concours immédiat permet la plupart du temps d'étouffer
le mal dès qu'il se manifeste. Que ne tente-t-on pareille chose en France!
il ne manque pas de gens d'ordre et de cœur pour s'y prêter; sa réalisa-
tion serait peut-être plus facile qu'on ne se l'imagine, et procurerait un
appoint moral sérieux et effectif qui n'est pas à négliger. — On commence
du reste, dans nos grandes villes où les attaques nocturnes vont se multi-
pliant dans une proportion inquiétante, à se faire à l'idée que le plus
Fc.008 ESSAIS DE MONTAIGNE.
sur est pncore de se protéger soi-inêini', et à préconiser la création de
gardes de nuit, à la charge des particuliers et à l'instar des sérénos en
Espagne et de ce qui existe de semblable en d'autres pays sous d'autres
noms, spécialement chargés de veiller dans telle rue, tel quartier, à la sû-
reté de tous, prévenii' les effractions, prêter assistance aux passants attardés,
poursuivre et arrêter les malfaiteurs. — Cette attitude inerte des popula-
tions en cas de troubles, se retrouve également lorsque se produit un in-
cendie; la plupart viennent voir, puis se dérobent aussitôt, laissant aux
sapeurs-pompiers et à l'armée, quand il s'en trouve des détachements sur
les lieux, la tàclie exclusive de le combattre; cette observation n'a pas
trait, bien entendu, à Paris et autres villes, où le service de secoure contre
l'incendie est organisé de toutes pièces et n"a besoin d'aucune aide.
18, Applicent. — D'un t'ait particulier auquel a trait cette citation, Mon-
taigne fait une maxime générale, en changeant un peu les paroles de
l'auteur.
19, Gelon. — Hérodote, VIII, 163. — En 480; mais le fait n'est pas exact :
Gelon allait se joindre aux Grecs contre Xerxès, quand les Carthaginois, à
l'instigation de ce prince, attaquèrent la Sicile, où du reste ils furent
complètement battus, et une des conditions que leur imposa le vainqueur
fut l'abolition des sacriOces de victimes humaines.
22, En eschauguette. — En sentinelle ; se dit et du lieu d'où l'on surveille
et de l'action elle-même.
•24, Concilier. — Faire alliance avec, se rendre favorable.
30, Veut. — C.-à-d. auxquelles, qui le voudrait, ne peut se dispenser de
prendre part. — La traduction présente ici un contre-sens que corrige
i'errata placé à la fin du volume. — La difficulté de compréhension de ce
membre de phrase disparaît en le lisant : « ne s'empesche pas qui ne veut
pas », ce qui n'en change pas le sens.
31, Attrempance. — Modération, du latin temperantia, qui a cette signifi-
cation.
31, De Moruilliers. — Personnage considérable de l'époque; prit part au
traité de Cateau-Cambrésis et au concile de Trente. Protégé par les Guise,
il se montra toujours contraire à la Réforme, mais ne s'associa point aux
persécutions dont elle fut l'objet.
31, Ouurent. — Travaillent.
37, Appreste. — Ceci est fort sujet à discussion. A moins de s'annihiler
complètement, et encore, ce qui en tout cas n'est ni digne, ni conforme au
devoir, la neutralité, dans les divisions politiques, est peu admise; il faut
être nettement d'un côté ou de l'autre et qui n'est pas du côté du manche,
est du côté du balai; vienne l'occasion, on le lui fera bien voir.
86,
88
3, Marcher. — Par ce fait qu'on marche.
14, Guerre. — « Nos vertus ne sont souvent que des vices déguisés. • La
Rochefoucauld. — « Les vices entrent dans la composition des vertus,
comme en médecine les poisons dans la composition des remèdes; la pru-
dence les assemble et lès tempère et elle s'en sert utilement dans les di-
verses circonstances de la vie. » La Rochefoucauld.
25, Homme. — Quand, le 15 juin 1815, de Bourmont, chef d'état-major d'un
corps d'armée français, passa à l'ennemi, quelques heures après il ren-
contrait Bliicher qui commandait l'armée prussienne qui nous était oppo-
sée. Le vieux soldat, révolté de voir un homme portant l'uniforme de
général de division déserter le matin d'une bataille, le laissa passer sans
rien lui demander et un de ses officiers s'étonnant de sa brusquerie à son
égard, alors qu'il avait arboré la cocarde blanche, dit tout haut, sans se
soucier d'être entendu par le transfuge : « Qu'importe la cocarde, Jean
foutre sera toujours Jean foutre. •
7, Lysimacbus. — Plutarque, De la Curiosité, 4. — Lysiniaque apparte-
nant à la garde royale d'Alexandre le Grand et ayant encouru sa disgrâce.
90,
92,
94,
NOTES. LIV. III, CH. I. VOL. III, PAG. 88. Fc.609
fut, par ordre de ce conquérant, exposé sans armes à la fureur d'un lion
énorme; comme l'animal ouvrait la gueule pour le dévorer, il lui saisit la
langue avec la main et l'étoulïa, ce qui excita si fort l'admiration
d'Alexandre qu'il lui rendit son amitié; il se révéla par la suite un de ses
meilleurs généraux, et à sa mort devint roi de Thrace; plus tard il con-
quit la Macédoine et périt en cherchant à s'agrandir davantage encore;
d'un caractère qui était en rapport avec sa force brutale, il se rendit
odieux par ses cruautés ; n'épargnant pas même les siens, il mit à mort un
de ses fils sur de légers soupçons.
9, Secrets. — « La pensée intime du roi doit demeurer secrète. » Livre de
Tobie.
1, Succedoit. — C.-à-d. et cela avec succès.
2, Heure. — C.-à-d, cependant je m'en détachai de bonne heure. — Allu-
sion aux fonctions de conseiller au parlement de Bordeaux que Montaigne
occupa de 1554 à 1570.
20, Engin. — Esprit; du latin ingenium qui a cette signification.
29, Bastonnades. — Cette fable d'Esope a été reproduite par La Fontaine :
L'âne et le petit chien, IV, 5.
1, Dandamys. — Plutarque, Alexandre, 20; Strabon, XV, qui l'appelle
Mandanis. — Le propos, tenu par Dandamis, sur ces philosophes grecs
était qu'ils pensaient sagement, mais avaient tort de faire passer la loi et
les coutumes avant la nature, sans quoi ils ne rougiraient pas d'aller nus
et de vivre simplement. C'est par ses conseils que le roi Taxile aurait fait
sa soumission à Alexandre. Invité à se rendre auprès de lui par ce con-
quérant qui lui promettait récompense s'il obéissait et le menaçait de châ-
timent dans le cas contraire, il refusa, faisant répondre qu'il n'avait nul
besoin qui ne trouvât déjà ample satisfaction et que la mort le débarras-
serait d'une guenille charnelle déjà usée par la vieillesse et lui procurerait
en échange une vie meilleure.
9, Nécessaires. — Telle, par exemple, celle qui a pour objet la propagation
de l'espèce.
23, Rome. — Tacite, Ann., 11, 65. — En 18, ces deux compétiteurs étaient
l'oncle et le neveu, et l'empereur qui intervint ce fut Tibère; Pomponius
Flaccus, employé en cette circonstance, était lié avec celui qu'il reçut mis-
sion d'arrêter et c'est ce qui l'avait fait désigner à cet effet, ce choix devant
moins exciter sa défiance.
26, Sentir. — Montaigne fait ici allusion à quelque trait de perfidie qui s'est
produit à l'époque où il écrivait; mais dans ces temps de corruption et de
troubles il y eut tant de faits de ce genre, qu'on ne peut deviner duquel
il veut parler. Peut-être est-ce de la Saint-Barthélémy succédant à la paix
qui venait d'être conclue avec les Protestants et ayant lieu en même temps
que se célébrait le mariage de la sœur du roi avec le roi de Navarre leur
principal chef, ou encore on a cru que ce pouvait être de la feinte récon-
ciliation de Catherine de Médicis avec le duc de Guise et qui aboutit à l'as-
sassinat de celui-ci, qu'il était question; c'est douteux, parce que l'événe-
ment s'est produit l'année même ou s'imprimait cette partie des Essais
(1588) et qu'à ce moment semblable dénouement ne pouvait se prévoir.
X), Non que. — Alors que cela n'irait pas jusqu'à assassiner...
38, Lacedemoniens. — Plutarque, Différence entre le flatteur et Vami, 21.
5, luges. — Plutarque, Apophth. des rois. — Il y a longtemps de cela! Que
de fois depuis, malgré ce qu'a pu dire un des siens, a-t-elle, dans les causes
politiques, rendu des services en rendant des arrêts; cela est et sera tou-
jours en plus ou en moins, suivant les hommes et les temps.
18, Fabricius. - Combattant Pyrrhus, le médecin de ce prince lui proposa
de l'empoisonner; il en avertit le roi auquel il renvoya le traître chargé de
liens; Pyrrhus, frappé de sa générosité, lui rendit sans rançon tous les pri-
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 39
Fc.610 ESSAIS DE MONTAIGNE.
sonniers qu'il lui avait faits et bientôt après évacua l'Italie (278). Quel-
ques années auparavant (282), vainqueur des Samnites, il avait refusé les
présents qu'ils lui offraient pour leur avoir fait accorder la paix. Deux
fois consul, une fois censeur, il mourut si pauvre que l'Etat fut obligé de
doter sa fille et de faire les frais de ses funérailles. — L'éd. de 88 port.
Flaminius, ce qui est une erreur.
23, Practiqua. — Gagna, soudoya.
26, Galant. — En habile homme.
31, Arse. — Brûlée, du latin a7-sus, part, passé de ardere qui a cette signi-
fication.
31, Totale. — Avec massacre général; — occision, du latin occidere, tué;
part, passé, occisus.
36, Conduitte. — En 1138. — Boleslas lui avait tendu une embuscade dans
laquelle il était tombé, et était demeuré quelque temps son prisonnier.
Martin Cromer, De rébus Polon., V.
96,
98,
1, Argyraspides. — Corps des plus estimés de l'armée macédonienne, com-
posé de vieux soldats et qui faisait partie de la garde d'Alexandre; à sa
mort, ils suivirent Eumène. Ils avaient de petits boucliers d'argent, d'où
leur nom, et étaient armés de la sarisse, sorte de longue lance.
1, Enmenes — Plut.\rque, Eumène, 9. — Eumène avait été secrétaire de
Philippe, père d'Alexandre. A la mort de ce dernier, il se fit le protecteur
de sa veuve et de son fils, ce qui le mit en lutte continue avec les autres
généraux et, en particulier, contre Antigone, auquel le livrèrent ses sol-
dats fatigués de ces guerres sans fin et gagnés par les promesses qui leur
furent faites. Antigone le laissa mourir de faim ; mais obligé de décamper
et la mort ne se produisant pas assez vite, il le fit égorger (315).
2, Mais. — A peine l'eut-il fait tuer.
13, Tarpeien — A Rome; roche située près du Capitole et d'où l'on précipi-
tait les criminels coupables de trahison ; l'esclave qui avait trahi Sulpitius
en fut précipité coiffé du bonnet de liberté, fruit de sa scélératesse. Valère
Maxime, VI, 5, 7.
15, Canacre — Grégoire de Tours, II, 41, d'où le fait semble tiré, dit Cha-
raric, au lieu de Canacrè, et ne le rapporte pas de la sorte; Montaigne a dû
faire confusion. 11 est à croire qu'il s'agit plutôt de Cloderic, dont il est
question immédiatement chez ce même historien : Cloderic avait fait égor-
ger Sigebert, son père, roi de Cologne, à l'instigation de Clovis; celui-ci le
fit tuer à son tour par des émissaires, qui le massacrèrent comme il leur
montrait le trésor dont la mort de son père l'avait rendu maître (509).
16, Pratiquez. — Ce à quoi il les avait incités.
20, Race. — Suivant ce qui est de coutume chez eux.
30, Conscientieuse. — C'est ainsi que venait d'en agir (1501) le duc de
Valentinois, César Borgia, et le souvenir de ce fait, consigné du reste dans
Machiavel, Prince, 7, n'en était pas encore perdu, à l'égard de Remiro
d'Orso, établi par lui gouverneur de laRomagne, qu'il lui avait asservie par
la terreur, et qu'il fit ensuite poursuivre et exposer éventré sur la place
publique, en désaveu des cruautés qu'il avait commises dans son intérêt, pen-
sant par là se concilier les populations qui ne furent pas dupes du procédé.
3, Seianus. — Quand Tibère se retira à Caprée, Séjan exerça toute l'au-
torité à Rome, enchérissant encore sur la tyrannie de son maître; mais,
pressé par l'ambition, il alla jusqu'à aspirer au pouvoir suprême et pour
y arriver conspira contre l'empereur; découvert, il fut arrêté et étranglé.
5, Forcée. — Violée. — Montesquieu fait à ce sujet la réflexion que Tibère,
en agissant ainsi, détruisait les mœurs pour conserver la coutume : Vol-
taire conteste cette aggravation d'un acte de cruauté déjà si odieux par
lui-même. L'enfant avait sept ans, Tibère en avait soixante-dix et était trop
adroit pour ordonner une barbarie aussi infâme qui, sans utilité, lui au-
rait valu, malgré l'abaissement des caractères, la réprobation universelle.
NOTES. UV. ITI, CH. I. V0[.. 111, PAG. 98. Fc.Oll
Du reste ni Tacite, Ann., V, 9, ni Suétone, qui rapportent le fait, ne disent
que cette action exécrable ait été commise avec son assentiment ou celle
du Sénat; ils se bornent à la présenter comme un bruit rapporté par les
écrivains du temps.
13, Propre parricide. — En commettant un crime semblable.
16, Vuitolde. — Cromer, De rébus PoL, XVI.
22, Foy. — Fait manquer à sa parole et violer sa foi. "
27, Géhenne. — Tourmenté, pressé, gêné.
100,
2. Reserue-il. — Dans quelle nécessité plus pressante et plus juste veut-il
s'en remettre à la pure conduite du ciel?
9, Naturelles. — De droit commun, dictées par la nature.
27, Frère. — Diodore de Sicile, XVI, 65; Plutarque, Timoléon, 3; Corné-
lius Népos, Timoléon, 1. — Son frère Timophane voulant usurper le
pouvoir à Corinthe, Timoléon, n'ayant pu le détourner de ses projets cri-
minels, le tua (365) ; après ce cruel sacrifice, il s'exila et resta vingt ans
éloigné des affaires. En 343, chargé par Corinthe d'aller délivrer Syracuse
de la tyrannie de Denys le Jeune, il le chassa, délivra de même plusieurs
autres villes de la Sicile des tyrans qui les opprimaient et repoussa les
Carthaginois; partout il rétablit la république, fit relleurir l'ordre et la
prospérité, puis abdiqua le pouvoir souverain. Il est regardé comme un
modèle de grandeur d'âme, de sagesse et de modération.
28, hiuers. — Si étrange, si singulier.
35, Cettuy-cy. — C.--à-d. le but que se proposait Timoléon en tuant son
propre frère qui»oppressait sa patrie, est excusable, autant qu'une pa-
reille action peut l'être.
102,
1, Orde. — Sale; dérive du latin sordidus, par suppression de la lettre
initiale; de ce mot dont on ne se sert plus aujourd'hui, est venu « or-
dure », qui est encore en usage.
3, Garand. — Pour justifier.
9, Elles. — CicÉRON, De Offic, III, 22.
13, Aueugle. — Le maître punit son disciple de ce qu'il a été docile; et le
clairvoyant, l'aveugle qu'il guide, du faux pas qu'il lui fait faire.
20, Rien. — Ce point de morale est controversé; V. la note ci-dessous,
lig. 28 : adhiberi. — A l'appui de l'opinion de Montaigne, on peut citer
le fait de Turenne qui, dévalisé par des brigands, leur demanda de leur
racheter un des bijoux qu'ils lui avaient enlevés, auquel il tenait particu-
lièrement, et chez qui, peu après, confiant dans sa parole, l'un de ses
voleurs n'eut pas crainte de se présenter pour toucher le prix convenu.
24, Parole. — De tenir fermement ma parole. La « maille » était une petite
monnaie de cuivre (il en fallait vingt-quatre pour faire un sou) ; faire la
maille bonne, c'est garantir que le compte est exact.
28, Adhiberi. — Cette citation est de Cicéron', De Offic, III, 30, qui parle de
Régulas, c'est-à-dire de la conduite à tenir à l'égard d'un ennemi légitime,
vis-à-vis duquel tout engagement pris doit être tenu. Au contraire et à
rencontre de ce qu'en pense Montaigne, Cicéron {De Off., III, 29) estime
que vis-à-vis d'un ennemi illégitime, tel qu'un pirate, c'est l'exemple dont
il se sert : •< Il ne peut y avoir entre vous et lui ni foi ni serments » ;
il avait déjà dit à ce même propos, dans le même ouvrage (1, 10) : « Qui ne
sent qu'on n'est pas obligé de tenir les promesses arrachées par la crainte,
ou surprises par fraude? »
31, Excellons. — Voir liv. II, ch. XXXVI, III, 18.
104,
• 4, Justice. — Plutarque, De l'Esprit familier de Sacrale, 4 et 24.
14, Gauchit. — Et évite, au milieu d'une telle mêlée, la rencontre... Plu-
tarque, De l'Esprit familier de Socrate, 17.
17, Bénignité. — C'est-à-dire celui-là maîtrisait bien la guerre, qui arri-
vait à lui faire admettre la pratique de la bonté.
Fc.612 ESSAIS DE MONTAIGNE.
23, Armez. — Plutarque, Pompée, 3. — Ce langage fut tenu par Pompée
aux Mamertins qui, cités par lui à son tribunal, s'y refusaient, invoquant
des traités antérieurs. Le différend se termina par la prise de leur ville
(82), qui ne dut d'échapper à une destruction totale qu'au dévouement
d"un de ses citojens. V. N. I, 20 : Peine.
25, Deux. — Pll'tarque, César, 11. — Réponse faite par César qui, au
début de la guerre civile, manquant d'argent, mit la main sur la réserve
du trésor public destinée à subvenir aux guerres contre les Gaulois, créée
lors du sac de Rome en 390. Cette réponse s'adressait à Métellus, tribun
du peuple, qui s'opposait à cet enlèvement; César alla même jusqu'à le
menacer de le tuer, lui disant : « Et tu sais, jeune homme, qu'il m'est plus
facile de le faire que de le dire » ; déjà aux objections qui lui avaient été
faites, touchant l'affectation déterminée de cette réserve, il avait répondu
qu' « elle n'avait plus sa raison d'être, puisque, grâce à lui, la Gaule était
soumise » ; et les tribuns hésitant encore à lui en ouvrir les portes, il
ordonna de la briser.
26, Loix. — Plutarque, Marins, 10. — Ce propos fut tenu par Maiius,
auquel on faisait reproche d'avoir en 90, au mépris de la loi, concédé le
droit de cité à un millier d'habitants de l'Ombrie, et à d'autres, pour
s'en faire des partisans.
28, Ennemis. — Épaminondas n'avait-il pas emprunté aux Lacédémoniens...
— Les Lacédémoniens sacrifiaient aux Muses, en usant à la guerre d'ins-
truments de musique dans le but indiqué ici ; et aussi pour que, par leur
intervention, leurs hauts faits passassent à la postérité.
29, Destremper. — Modérer, tempérer.
30, Parentes. — Le premier de ces deux membres de phrase est interro-
gatif dans Cicéron, et la réponse est loin d'être aussi péremptoire que le
donne à supposer la citation telle qu'elle est présentée.
106,
5, Desreglée. — César. — Lucaix, VII, 320, dont sont les vers qui suivent,
semble s'être laissé entraîner ici par sa verve poétique. Ces exhortations,
qu'il prête à César, sont en effet contraires à ce que l'histoire rapporte de
lui recommandant à ses soldats, notamment le jour de la bataille de Phar-
sale, d'épargner les citoyens romains. Le jugement que Montaigne porte
ici sur lui, sur la foi du poète, est en contradiction avec un passage
antérieur des Essais (liv. II, ch. XXXIV, II, 658), où lui-même dit que
César ne considérait pas tous les moyens comme licites pour se procurer
la victoire.
15, Regret. — Tacite, Hist., III, 51. — Le fait cité se passa en 88, dans un
combat livré au mont Janieule, sous les murs mêmes de Rome, entre
Cinna, partisan de Marins, et Cn. Pompée, père du grand Pompée.
17, Capitaines. — Tacite, Hist., III, 51. — Sous Vitellius. Les lois humaines
ne permettant pas de récompenser ce monstre, ni l'intérêt de la guerre
de le punir, on remit à un autre temps de lui donner satisfaction, sous
prétexte que le service rendu méritait plus qu'on ne pouvait faire sur le
moment; on ne sait ce qui arriva ensuite. — Cette réflexion sur le chan-
gement survenu avec le temps dans les mœurs romaines, rappelle celle
d'Annibal mourant : « Jadis, les Romains dénonçaient à Pyrrhus qui,
à la tête d'une armée, avait envahi l'Italie, son médecin méditant de
l'empoisonner; aujourd'hui, ils envoient un personnage consulaire au
prince dont je suis l'hôte, pour qu'il les débarrasse de moi par un crime. »
TlTE-LlVE.
24, Honeste. — L'éd. de 88 port. : digne.
CHAPITRE II.
Ce chapitre est un des plus beaux des Essais ; il est grave, profond,
et partout d'un grand sens. Montaigne ne s'y montre pas fort orthodoxe,
il traite son sujet en philosophe et ne le perd pas un moment de vue.
NOTES. LIV. m, CH. II. VOL. III, PAG. 106. Fc.613
— La même question a été étudiée par Charron, De la Sagesse, II, 3, 9, qui
a puisié largement ici ses inspirations.
108,
1, Fait. — Aujourd'hui, c'est fini, terminé, achevé.
3, Perenne. — Perpétuelle, comme portent nombre d'éd. post. ; — du
latin perennis qui a cette signification. Le style de Montaigne est plein de
mots latins qu'il a francisés de la sorte, changeant simplement leur termi-
naison.
5, Pyramides. — Monuments de l'ancienne Egypte qui servaient à la sépul-
ture des rois ou des animaux sacrés. Les plus célèbres sont celles de Chéops
(243'° de large à la base, 150"" de haut), de Chéfrem (102'" à la base, 133 de
haut), de Mycérinus (93"" à la base, 5-1 de haut); elles s'élèvent dans le désert
au S.-O. du Caire; leur construction remonte à une date incertaine, du
XX" au XV" s., croit-on. — Certains pensent, et il y a lieu de croire qu'il
en a été ainsi, que ces grands travaux et autres de même nature, assez
nombreux dans l'antiquité, ont été accomplis en y employant, en dehors
des ouvriers d'art, les hommes valides désœuvrés et que c'est une des
raisons qui ont fait que la mendicité, cette plaie gangreneuse des sociétés
modernes, était alors à peu près inconnue. Mais ces travaux n'ont eu
qu'un temps et ne pouvaient intéresser que des territoires limités; et l'ab-
sence de mendicité dans ces temps tient surtout à la simplicité de vie
d'autrefois, les besoins étaient moindres et recevaient plus aisément satis-
faction; il en est encore ainsi chez les peuples à demi civilisés de notre
époque où les mœurs se sont conservées telles. La mendicité tant soit
peu développée, avec accroissement des crimes et délits spéciaux contre
les personnes et la propriété, est une des conséquences les plus tangibles
des progrès de la civilisation, par ce fait que les nécessités de l'existence
et les appétits grandissants exigent plus d'efforts auxquels ne peuvent ou
ne veulent satisfaire ceux qu'accablent certaines infortunes ou que tien-
nent la paresse et l'inconduite.
18, Demades. — Plutarque, Démoslhène, 3. — Montaigne paraphrase à sa
manière ce que disait cet orateur : « Qu'il s'estoit bien contredit a soy
mesme assez de fois, selon les occurrences des affaires; mais contre le
bien de la chose publique, iamais. » — Ce passage des Essais explique et
justifie en même temps toutes les contradictions qui peuvent s'y trouver.
Quel est, en effet, l'homme toujours invariable dans sa manière de voir
et qui n'en change pas dans le cours de la vie, sur des points indifférents
par eux-mêmes et sur lesquels on peut, sans inconvénient pour soi et pour
les autres, abandonner l'opinion qu'on en a? Naigeon.
20, Résoudrais. — Je parlerais catégoriquement.
26, Premier. — Moi, je suis le premier qui me communique...
30, Cognoissance. — G.-à-d. : Mais est-ce une raison pour que, simple
particulier comme je suis et qui n'ai rien de remarquable, je prétende
m'ériger en homme public par la connaissance que je donne de moi?
110,
3, Discipline. — Du moins, j'ai ceci conforme aux principes de la science.
14, Bauasser. — Babiller, folâtrer.
21, Mesme. — C.-à-d. l'homme vraiment capable, l'est en tout; son ins-
truction apparaît dans sa conversation comme dans ses ouvrages et jusque
dans son ignorance.
37, Raconte. — L'éd. de 88 port. : narre.
112,
4, Ignorance. — « Tout vice est issu d'ànerie. » — Ailleurs (liv. II,
ch. XII, II, 110), Montaigne dit de ce même proverbe : « Si cela est vray,
il est subiect à vne longue interprétation. »
6, Empoisonne. — Pensée tirée de Sénèque, Epist. 81.
« La: crainte suit le crime, et c'est son châtiment. » Voltaire, Sémiramis.
• La peine suit le crime, elle arrive à pas lents. » Voltaire, Oreste.
Fc.614
ESSAIS DE MONTAIGNE.
114,
9, Repentance. — «Le repentir est une douleur volontaire et qui sou-
lage; le remords, une douleur qui s'impose et torture sans soulager. »
3, Mercarializer. — Reprendre, censurer. Ce mot vient de « mercuriales .,
séances du parlement de Paris qui se tenaient deux fois par an, un mer-
credi (jour de Mercure), où le Président, usant parfois d'un langage
sévère, parlait contre les désordres et les abus commis dans l'adminis-
tration de la justice.
4, Semons. — Invité, averti, sollicité; même étymologie et même sens que
« semonce », mot encore en usage.
13, Toucher. — Par lequel nous puissions juger, comme avec une pierre
de touche, du mérite de nos actions.
20, La vostre. — Celle de vostre conscience, comme port. l'éd. de 88.
25, Domicile. — Si fortement ancré en nous, qu'il semble faire partie inté-
grante de nous-mêmes.
30, Sens. — Montaigne, en résumé, dit qu'on ne se repent pas de ses fautes
habituelles, mais seulement, par un effet de la versatilité de notre carac-
tère, de celles que nous commettons accidentellement, ce qui est bien vrai
si on y réfléchit.
33, Genae. — Horace fait ici regretter à Ligur^nus, sur le retour d'âge, de
n'avoir pas abusé de sa beauté, quand cela lui était possible.
116,
118,
1, Escbatfant. — En plein théâtre, en public.
ô, Pourtant. — Et c'est pour cela, d'après ces principes, que Bias... Pll-
TARQUE, Banquet des sept Sages, 14.
8, Hommes. — Montaigne aurait pu citer aussi la réponse d'Aristippe à
quelqu'un lui disant : « En quoi êtes-vous donc supérieurs au reste des
hommes, vous autres philosophes? — En ce que, répondit-il, si les lois
étaient supprimées, notre conduite n'en serait pas moins régulière. » Dio-
GÈNE Laerce.
9, Drusus. — Ou plutôt M. L. Drusus, comme dit Velleius Paterculus. Dis-
tingué par sa naissance, son éloquence et ses vertus, étant tribun du peuple
et ses propositions sur les jugements, le partage des blés et des terres,
l'extension du droit de cité aux peuples d'Italie inquiétant le Sénat, il fut
tué dans un soulèvement organisé à cet effet (91). Lui mort, toutes
les lois qu'il avait fait rendre furent révoquées, comme prises les aus-
pices étant contraires.
13, Agesilaus. — Plutarqle, Agésilas, 5.
17, Domestiques. — « Il faut être bien héros, disait le Maréchal de Catinat,
pour l'être aux yeux de son valet de chambre. • — « La seule réputation
fondée est celle que nous font les gens avec lesquels nous vivons. » Bacon.
19, Histoires. — La plupart des héros sont comme certains tableaux; pour
les estimer, il ne faut pas les regarder de trop près. » La Rochefoucauld.
— « Pour son siècle incrédule, un héros n'est qu'un homme. » Lamartine.
24, M'acbettent. — Réédition du proverbe : « Nul n'est prophète dans son
pays », cité quelques lignes plus haut, et qui se retrouve encore dans
celui-ci : « Le sainct de la ville n'est pas oré » (prié, du latin orare).
26, Moins. — Moins de crédit, de renommée.
2, Aristote. — Morale à Nicomaque, X, 7.
11, Puis. — A ce propos, J.-B. Rousseau a écrit
« Vous, chez qui la guerrière audace
Tient lieu de toutes les vertus,
Concevez Socrate à la place
Du fier meurtrier de Clitus.
Vous verrez un roi respectable.
Humain, généreux, équitable.
Un roi digne de vos autels.
Mais à la place de Socrate,
Le fameux vainqueur de l'Euphrate
Sera le dernier des mortels. •
25, Non. — Et qui de nous ne donne pas à Tamberlan.
28, Erasme. — L'homme le plus savant de son siècle; écrivain latin des
NOTES. LIV. III, CH. II. VOL. III, PAG. H8. Fc.61d
plus purs, élégant, spirituel, en même temps qu'un des hommes les plus
sages de son temps. D'accord avec Luther sur la nécessité d'une réforme,
il se sépara de lui quand il le vit recourir à la violence, n'aimant pas
la vérité séditieuse. Son œuvre est considérable; le nombre de ses adages
et apophthegmes dépasse 4.000.
120,
4, Escbappé. — Mille natures (caractères) ont pris de mon temps le
chemin de la vertu ou du vice, quoiqu'elles eussent reçu une éducation
qui semblait devoir les acheminer dans un sens tout opposé.
11, Magistro. — Lucain, IV, 237. — C'est ainsi que ces jours-ci (1905), nous
avons vu au jardin des Plantes de Paris un éléphant, d'ordinaire fort
tranquille, soigné depuis 15 ans par un gardien qui s'y employait avec
grande sollicitude, et entre lesquels régnait une réelle affection, saisir
ce gardien avec sa trompe, lui briser les reins et le piétiner ensuite avec
rage. Chez l'homme le plus doux ne constate-t-on pas aussi, maintes fois,
des retours aux pires instincts, où la brute assoupie qui est en nous
reparaît, notamment quand il est perdu dans les foules. Il y devient alors
absolument inconscient, capable de passer d'un instant à l'autre, sans
motif (et encore notre éléphant, lui, pensait-il probablement et non sans
raison apparente que c'était à son gardien, auquel il voyait continuelle-
ment ouvrir et fermer sa cage, qu'il devait sa longue et étroite captivité,
ou qu'il ne tenait qu'à lui d'y mettre fin; et que, ne le faisant pas, c'était
un ennemi), par les sentiments les plus opposés et commettre des actes
d'une férocité inouïe, qu'une fois seul, revenant à lui-même, il réprouve
de toute son âme, ne comprenant pas comment il a pu en arriver là.
Cela se voit constamment dans les mouvements d'effervescence popu-
laire, où un rien suffit pour que les foules deviennent criminelles et leur
frénésie, leur cruauté sans limites; qui n'en a été témoin, ne peut s'en
faire une idée; une fois le monstre surexcité, personne ne sait jusqU'où
il ira, il est tout spontanéité. Aussi, combien sont coupables ceux qui
vont déchaînant les passions des masses qu'ils ne pourront pas contenir,
sans compter que ces instigateurs, une fois la mise en branle effectuée,
ont, pour la plupart, grand soin de se tenir de leur personne prudemment
à l'écart.
21, Raduiser. — Corriger, réformer; on dit bien se raviser pour changer
d'a.vis, mais raviser les mœurs, dans le sens de les redresser, ne se dit
guère.
24, Seiourne. — On s'abstient, on se dispense.
25, Externes. — Add. de 88 : et 'mternes; l'ex. de Bordeaux port, arbitreres,
que dans la traduction on a cru devoir maintenir.
35, Rauiseinens. — Retours sur soi-même, à la raison, changements d'avis;
vient de raviser, mais n'est pas demeuré dans la langue.
122,
1, Mesme. — S.-ent. du vice.
3, Cbafourée. — Confuse, barbouillée. Vieux mot de la langue française,
dont Brantôme a pareillement usé.
26, Mercy — Grâce à.
32, Science. — De la connaissance...
124,
17, Puis pas. — L'éd. de 88 aj. : facilement.
20, Ainsin. — C.-à-d. sans que l'homme soit lui-même déterminé par sa
propre volonté à persister dans ses péchés provenant de son tempéra-
ment et de sa profession.
126.
8, Regret. — De ce passage, on peut inférer que Montaigne croyait que
les actions humaines s'imposent à l'homme, par une sorte de fatalité ré-
sultant de la connexion inévitable des causes et des effets; ce qu'il confirme
dans les lignes qui suivent.
19, Moy. — Suivant la mesure de mes forces.
Fc.616 ESSAIS DE MONTAIGNE.
21, Macbeure. — Tache, contusion, meurtrissure.
26, Négoces. — Affaires.
128,
6, Moy. — Add. de 88 : de ne l'avoir sceu preuoir.
11, Fit-il. — Plutarque, Apophth., art. Phocion.
17, le n'ay deu. — L'éd. de 88 port. : cependant ie n'ay peu.
27, Volonté. — V. ci-dessus, liv. II, ch. XVII, II, 488, ce que Montaigne dit
de son aversion pour la délibération; cela explique ce qu'il dit ici.
29, Enquis. — Enquis signifie ici « requis ».
130,
1; Gariement. — C-à-d. et d'être dispensé d'en répondre. — Gariement
est un vieux mot signifiant garantie, sauvegarde.
8, Celuy. — Sophocle. — Quelqu'un lui ayant demandé si, dans sa vieil-
lesse, il jouissait encore des plaisirs de l'amour, il répondit : « Aux dieux
ne plaise! et c'est de bon cœur que je m'en suis délivré, comme d'un maî-
tre sauvage et furieux. » Cicéron, De Senect., 14.
14, Conscience. — Qui soit l'effet du repentir et d'une conscience qui se ré-
forme.
20, Ores que. — A présent que...
30, Coniure. — L'éd. de 88 port. : esconiure, qui donne au texte cette signi-
fication : ■< je les prie de se retirer » ; conjurer a ici ce même effet, mais,
pour cela, est détourné de son sens propre.
33, Clarté. — Je ne vois pas que ma raison juge de la volupté autrement ni
plus sainement qu'alors.
34, Maleficiée. — En mauvaises conditions. — L'éd. de 88 port. : maladiue.
132,
3, Cents. — C'est bon pour les gens...
4, Deliure. — Libre, comme portent plusieurs éd. post.
7, Maladie. — V. sur ce même sujet liv. III, ch. IX, III, 380.
14, Antistbenes. — Diogè.ne Laerce, VI, 5.
32, Douloureuses. — C.-à-d. à ce repentir que l'âge apporte et qui n'est
que le résultat d'un cas de force majeure et de l'impuissance.
35, Appétits. — L'éd. de 88 port. : la défaillance de nos forces, au lieu de :
" l'affoiblissement de nos appétits ».
• Chaque âge a ses humeurs, ses goûts et ses plaisirs. » Régnier.
« Chaque âge a ses plaisirs, son esprit et ses mœurs. » Boileau.
134,
7, Vieillesse. — Ce passage où Montaigne s'exprime avec une grande net-
teté est un des mieux pensés des Essais.
9, Nez. — On me reprochait de parler alors que je n'avais pas encore de
barbe au menton.
16, Enuie. — Je trouve surtout dans la vieillesse, de l'envie...
17, Visage. — Idée que Corneille a reproduite dans son Epître au Roi :
« Pour bien écrire encor, j'ai trop longtemps écrit;
Et les rides du front passent jusqu'à l'esprit. »
24, Accoustumée. — Xénophox, Apologie de Socrate devant ses juges, le dit
expressément, considérant qu'à son âge, il lui serait plus avantageux de
mourir que de vivre.
26, Puissante. — Var. de l'éd. de 88 : violente.
CHAPITRE III.
136,
Un des meilleurs chapitres de Montaigne. Il y tourne en ridicule les femmes
savantes et détermine le genre de connaissances qu'il estime leur conve-
nir. Il parle de ses amours, de la sincérité à apporter dans le commerce des
femmes; du caractère des hommes dont on doit rechercher la liaison; il
NOTES. LIV. III, CH. III. VOL. III, PAG. 136. Fc.617
passe à son troisième commerce qui est celui des livres, dont il fait l'éloge,
ainsi que l'apologie des lettres et de l'étude et de leurs avantages. Naigeox.
13, Tordre. — Quand, en effet, on embrasse une opinion quelconque, on ne
s'oblige pas à y persévérer à tout jamais, pas plus qu'on ne conserve sa
vie durant les goûts que l'on peut avoir à un moment donné; quiconque
se ferait une loi de ne pas varier à cet égard, serait en contradiction avec
tout ce qui l'entoure qui est en perpétuelle vicissitude et dont les sensa-
tions que nous en percevons, sont éminemment variables.
31, luger. — Add. de 88 : Au pris de ce fruit et amendement essentiel auquel
il vise, il fait peu de compte de Vestude qu'on emploie à charger et meubler sa
mémoire de la suffisance d'autruy. .
138,
•2, Forger. — Façonner.
8, Aristote. — Morale à Nicomaque, X, 8.
10, Discours. — Ma raison.
12, Effort. — C.-à-d. aussi peu d'entretiens dont le sujet n'est pas sérieux
et qui ne demandent aucun effort de tête, me plaisent et captivent mon
attention.
16, Lascbes. — Add. de 88 : sans pois et sans grâce.
19, Resueuse. — Add. de 88 : par fois.
24, Volet. — Entre plusieurs choses de même espèce, choisir la meilleure.
— Cette expression vient, suivant les uns, de l'habitude qu'ont les jardi-
niers de répandre leurs graines sur une planche, qu'ils nomment volet,
quand ils choisissent les meilleures pour semer; suivant d'autres, de l'usage
qu'on avait, en France, de mettre les étoffes sur le volet intérieur des fenê-
tres, pour pouvoir les examiner en détail et au grand jour.
25, Incommode. — Impropre.
29, Insipience. — Folie, sottise; du latin insipientia, dont Montaigne s'est
contenté de changer la terminaison.
140,
5, Peut. — XÉNOPHON, Mém. sur Socrate, I, 2, 3.
8, Disconuenir. — C.-à-d. de ne pouvoir m'accommoder avec les gens, en
somme assez peu nombreux, avec lesquels le hasard m'oblige à avoir des
relations fréquentes.
18, Harpe. — .Je me harponne, je m'attache fortement...
23, Froid. — Var. de 88 : mal.
24, Aftriandé de. — Var. de 88 : acoquiné dès.
25, Parfaicte. — Celle d'Etienne de la Boétie.
28, Ancien. — Plutarque, De la Pluralité d'amis, 2.
142,
5, Platon. — Traité des Lois, VI.
6, Maistral. — Magistral, d'un ton de maître.
7, Raison. — La raison que je viens d'alléguer.
14, .Xacus. — Eaque. Se signala tellement par sa justice et sa sagesse, qu'à
sa mort, Jupiter en fit un des trois juges des Enfers; il fut le grand-père
d'Achille.
29, Forchetta. — Parler sur la pointe d'une fourchette, c.-à-d. pour une
bagatelle. — Expression italienne qui correspond à notre locution fran-
çaise : « Disputer sur la pointe d'une aiguille ». Les Grecs disaient : « Dis-
puter sur l'ombre d'un ànp », tiré d'une digression de Démosthène, au
cours d'une de ses harangues aux Athéniens, leur contant, pour ranimer
leur attention, une discussion entre un ànier et un individu auquel il avait
loué son àne et qui, descendu de sa monture, en cours de route, voulait
s'abriter à son ombre des rayons du soleil, ce que, voulant faire de même,
l'ànier lui contestait, disant lui avoir loué l'àne, mais non l'ombre de
l'animal.
34, Magistère. — Science doctorale et magistrale.
144,
11, Totse. — Ce mot de Sénèque, Epist. 115, qu'il applique aux petits maîtres
É-c.eiS ESSAIS DE MONTAIGNE.
de son temps, lesquels, sous aucun rapport, ne le cédaient à ceux de nos
jours. L'un d'eux, transporté par ses esclaves, des bains chez lui, dans sa
chaise à porteurs, ne demandait-il pas « s'il était assis -, comme si c'était
chose au-dessous de lui de savoir ce qu'il faisait!
17, Judiciaire. — La science judiciaire, le droit.
18, Besoing. — La Bruyère compare une femme savante à une belle arme
de luxe.
19, Loy. — Loisir, liberté, occasion, moyen.
20, Baste. — 11 suffit, c'est assez; de l'italien basta.
29, Parlier. — Parleur, bavard.
35, Seruiteur. — Amant.
146,
2, Production. — Et me porte à produire.
7, Estrangere. — Ecartant de moi le souci que pourraient me causer les
affaires des autres.
11, Louure. — A la cour.
16, Vie. — Outre qu'il fut en rapport constant avec Henri de Navarre et
son entourage, Montaigne vint à diverses reprises à la cour de France ;
notamment, pour la première fois, vers 1555, accompagnant son père qui
venait d'être nommé maire de Bordeaux, et allait demander le rétablisse-
ment de privilèges supprimés; puis, en 1559, lors des obsèques de Henri II
et du sacre de son successeur, à la suite duquel il alla à Bar-le-Duc; en
1562, sous Charles IX, qu'il suivit à Rouen; en 1588. où son séjour fut
marqué par son incarcération de quelques heures à la Bastille.
24, Conuoiemens. — Action de reconduire quelqu'un qui s'en va.
148,
4, Substitutions. — Disposition par laquelle un testateur substitue un
héritier à un autre qui n'a que l'usufruit, sans avoir la propriété du bien
laissé; question de droit qui, aux temps jadis surtout, était pleine de
complications et une source de difficultés.
6, Confabulations. — Conversations, entretiens, discours familiers.
10, Rue. — « .\ la manière dont ils rapportent leurs provisions du marché »,
dit Plltarque, Dion, I ; ce qui porte à croire que c'était là une coutume
assez générale en Grèce, au moins chez les gens du commun, d'aller soi-
même au marché. — Un poète français a rendu, ainsi qu'il suit, la même
idée :
• Même quand l'oiseau marche, on sent qu'il a des ailes. >
13, Sutfragante. — Souple, humble, modeste, venant en seconde ligne.
15, Démette. — Qu'elle descende, s'abaisse jusqu'à nous, s'accommode à
notre portée.
16, Vtile. — Var. de 88 : belle.
22, Femmes. — Add. de 88 : ef bien nées. — « Une cour sans femmes, disait
François I", est un parterre sans roses. »
32, Argolica. — D'Argos; qualification donnée ici à la flotte grecque, parce
qu'Agamemnon, roi d'Argos, en avait le commandement suprême.
32, Capbarea. — C'est près du cap de ce nom que la tempête dispersa la
flotte des Grecs, au retour de la guerre de Troie.
150,
6, louyr. — Il faut avoir réellement bien désiré ce dont on veut avoir bien
réellement le plaisir de jouir. — Dorat, dans sa comédie de La feinte par
arnou?', a dit : « Qui plaît sans aimer, jouit sans être heureux. » On en a
fait :
« Qui jouit sans aimer, jouit sans être tieureux. >
6, Masque. — Hj^pocrisie.
11, Bracbmanes. — Dits aussi Brahmes, Bramines; prêtres de la religion
de Bouddha. Ils se distinguent par un costume spécial, et, bien qu'en
NOTES. LIV. III, CH. III. VOL. III, PAG. 150. Fc.619
principe constituant une caste d'ordre supérieur, vivant des dons des
fidèles, beaucoup sont en réalité dans la misère.
24, Platon. — Selon les principes posés par Lysias (au commencement du
Phèdre de Platon), et que réfute ensuite Socrate.
28, Engeance. — C.-à-d. je ne connais pas plus la femme sans amour, que
je ne reconnais mère celle qui n'a pas d'enfant.
152,
8, Preambulaires. — Qui précèdent un mal plus violent, plus dangereux.
11, Tibère. — Tacite, Ann., VI, 1.
13, Flora. — Etait de bonne maison et de grande lignée, et fut particulière-
ment en relations avec Pompée. Ce dont Montaigne, d'après Brantôme, Vie
des Dames galantes, I, se fait ici l'écho, est tenu comme faux par Bayle,
art. Flora.
15, Déduit. — Plaisir; viendrait, suivant certains, du latin deducere, emme-
ner, parce que, disent les étymologistes, jamais à court de déductions,
lorsque quelqu'un a du chagrin, on l'emmène ailleurs pour le consoler (?).
16, Brocadel. — La brocatelle, ou le brocart.
24, La beauté. — Var. de 88 : le corps.
31, Commerces. — L'un avec les hommes par une conversation libre et
familière, l'autre avec les femmes par l'amour.
154,
14, Bride. — Proverbe signifiant qu'il est facile de supporter quelques
ennuis, quand on a le remède sous la main.
15, Sicile. — Ce roi est dit « nostre », parce qu'il était de la famille régnante
de France, se trouvant descendre comme elle de saint Louis, son aïeul à la
cinquième génération.
37, Librairie. — Je me retire un peu plus souvent dans nia bibliothèque. —
Voir sur cette bibliothèque la notice afTérente aux illustrations, IV, fas. A.
156,
2, Dicte. — Montaigne, comme tous les seigneurs de son temps, avait à
sa disposition un secrétaire, ou quelque serviteur pouvant en tenir lieu ;
la relation do ses voyages, dont on possède le manuscrit, a été écrite
partie par lui, partie sous sa dictée.
9, Poly. — Propre, orné, de l'italien polilo, qui signifie propre, net.
11, Despense. — Si je craignais aussi peu les embarras que la dépense.
19, Liures. — A la mort de Montaigne, sa fille fit don à un abbé, grand
vicaire du diocèse d'Auch, de la totalité des livres que son père avait
possédés et dont lui-même a évalué le nombre à un millier. La plupart
sont aujourd'hui perdus, soixante-seize seulement demeurent : français,
grecs, latins, espagnols, italiens, consistant en ouvrages de médecine, de
droit, un ou deux romans, quelques poètes et relativenient nombre d'his-
toriens, entre autres les « Commentaires » de César (N. II, 82 : Lisant, et
646 : Militaire).
21, Prospect. — Vue, perspective; du latin prospectus francise pai' Mon-
taigne. — Elle a trois fenêtres qui, chacune, offrent une vue agréable et
étendue.
27, Presse. — C.-à-d. je suis bien aise qu'il soit un peu pénible d'y monter
et qu'elle soit à l'écart, parce que cela me fournit l'occasion de faire
quelque exercice et aussi m'éloigne de la foule.
158,
7, ûuesf. — Le gain, comme port. l'éd. de 88; du latin qusestus d'où est
dérivé acquêt. — l\Iaintenant pour m'amuser, et jamais en aucun temps
pour le gain.
CHAPITRE IV.
160,
4, Faisant. — En vous opposant brusquement à leur tristesse.
7, Œuure. — Mirabeau prétendait au contraire que la laideur est une
Fc.620 ESSAIS DE MONTAIGNE.
chance de succès dans un certain nombre de professions, au nombre
desquelles il plaçait la médecine.
14, Persuader. — Add. de 88 : quand il y a résistance.
17, Temps. — Var. de 88 : bonne pièce.
20, Plaint. ~ Cicéron, Tusc, III, 31.
25, Amas. — C.-à-d. et n'employant pas, pour en faire usage suivant le
cas, ces divers genres de consolation banale.
162,
2, Peloponnesiaque. — Plutarque, Périclès, 21. — On a accusé Périclès
d'avoir fait naître cette guerre pour détourner de lui les accusations dont
il était l'objet, par suite de l'envie qu'il excitait.
2, Reuoquer. — Eloigner; en ce sens, c'est purement le mot latin revocare.
5, Liège. — De Comines, iMém., Il, 3. — En 1468. La ville était en conflit
avec son évêque qui était son suzerain et que patronnait le duc de Bour-
gogne; elle était divisée et le parti de la paix avait fait décider d'ouvrir
ses portes au duc, qui s'était fait précéder du Sire d'Himbercourt. Cette
velléité de résistance eut pour effet quelques exécutions, le démantèlement
de la ville et une forte contribution de guerre, ce qui n'empêcha pas les
Liégeois de se soulever à nouveau l'année suivante, sédition qui aboutit
aux rigueurs les plus excessives.
20, Grasses. — Des offres plus avantageuses.
25, Predicament. — De cette catégorie. On appelle « prédicaments », en
logique, les dix catégories d'Aristote.
25, Atalante. — Ovide, Métam., X, 571.
164,
9, Fil. — On l'accoutume difficilement à combattre les maux en face.
19, Ptolomée. — Ptolémée Lagus (du nom de son père) passait pour fils
d'une maîtresse de Philippe de Macédoine, laquelle aurait ensuite épousé
Lagus, un des principaux officiers de ce prince. A la mort d'Alexandre, il
reçut en partage l'Egypte où régnèrent ses descendants jusqu'à la mort
de Cléopàtre. Habile et actif à la guerre, il ne le fut pas moins à l'inté-
rieur et protégea les lettres et les sciences; ce fut lui qui fonda la célèbre
bibliothèque d'Alexandrie. Il mourut en 283, il avait abdiqué deux ans
auparavant.
20, Discours. — Cicéron, Tusc, I, 34; Valère Maxime, VIII, 9. — Hégésias
prétendait qu'il vaut mieux mourir que vivre, parce que la somme des
maux l'emporte sur celle des biens; ses paroles imprimaient, dit-on, si
avant dans l'esprit de ses auditeurs l'image des choses qu'elles représen-
taient, que lorsqu'il avait parlé des maux de la vie, la plupart de ceux qui
l'écoutaient, voulaient se tuer de leurs propres mains.
32, Raualoit. — Se fixait, se reportait sur...
166,
4, Deffaict. — Exécuté. — Tacite, Ann., XV, 67; il a déjà été question de
Subrius Flavius, I, 30.
15, Estocade. — Les uns lisent « estocade », les autres « estacade ». Dans
le premier cas, cela signifie « à l'épée », l'estoc était une épée longue et
étroite; dans le second, cela veut dire ■< en champ clos », l'estacade était
une sorte de lice, environnée de barrières, où les champions se renfer-
maient pour se battre à outrance, sans êti'e gênés par le public tout en
demeurant sous ses yeux ; de fait, les deux interprétations aboutissent au
même sens.
17, Crioit. — Add. de 88 : qu'il estait mort, et.
20, Se descharger. — Se dégager, se débarrasser.
21, Syllanus. — Tacite, Ann., XVI, 9.
168,
3, Mânes. — Les mânes étaient, dans la mythologie des Romains, les âmes
des morts considérées comme divinités infernales; on leur rendait un
culte et les distinguait en bonnes et méchantes.
3, Imos. — Malédiction proférée, au dire de Virgile, En., IV, 382, 387, par
NOTES. LIV. III, CH. IV. VOL. III, PAG. 168. Fc.621
Didon contre Enée qui l'abandonne. C'est par une fiction bien éloignée de
la vérité historique que le poète fait vivre cette princesse au temps du
héros troyen, auquel elle est postérieure de plus de trois siècles.
9, Teste. — Valère Maxime, IV, 10; Diogène Laerce, Xénophon: Ei.ien, Hist.
div., III, 3. — En 363; Xénophon avait deux fils, Cyrillus était l'aîné.
Par son geste, il témoignait que la bravoure dont son fils avait fait preuve,
lui causait plus de satisfaction que sa mort no lui faisait ressentir d'araer-
tume : « Je savais, dit-il, que mon fils était mortel! » — Le Maréchal
Lefebvre, duc de Dantzig, eut son fils tué, en Espagne, dans une embus-
cade, après une défense héroïque (1811). Son corps, retrouvé peu de temps
après, était couvert de blessures; ce voyant, le vieux guerrier eut un
moment d'orgueil qui sécha presque ses larmes; et racontant à un ami
cette mort de son enfant unique : « Ses morceaux, dit-il, se défendaient
encore. »
9, Epicurus. — Dans sa lettre à Hermachus. V. liv. II, ch. XVI, II, 444,
13, Soldat. — CicÉRON, Tusc, II, 26.
14, Costé. — Cornélius Népos, Epam., 9. — Epaminondas blessé mortelle-
ment à la bataille de Mantinée (363), apprenant que l'ennemi est en
déroute : •< J'ai assez vécu, dit-il, puisque je meurs sans avoir été vaincu. »
Et, quelqu'un exprimant le regret qu'il n'eût pas de postérité : « Je laisse
deux filles immortelles, Leuctres et Mantinée », fit-il en rappelant ses deux
victoires; peu après, il expirait. Il fut enterré sur le champ de bataille
même, et, du temps de Strabon, deux cippes existaient sur son tombeau,
l'un avec une inscription béotienne, l'autre érigé par l'empereur Adrien
qui en avait composé lui-même l'inscription. V. N. III, 18 : Epaminondas.
— La même chose arriva à Nelson, à la bataille de Trafalgar (1805); appre-
nant que la victoire était complète : « A présent, dit-il, je meurs satisfait;
grâces soient rendues à Dieu, j'ai accomph mou devoir. »
20, Autres. — L'école des Stoïciens.
22, Mal. — Sénèque, Epist. 22.
23, Yurongne. — Sénèque, Epist. 83.
24, Blanc. — Est-ce atteindre le but? — Cette expression vient de ce que
jadis, comme maintenant, les tirs à l'arc, à l'arbalète, à l'arquebuse, etc..
s'effectuaient sur des buts où la partie à atteindre était marquée en blanc;
aujourd'hui que l'on tire de plus loin, un point à viser est apposé sur
cette partie blanche qu'autrefois on visait elle-même.
25, Consorce. — Dégager de notre communauté. — Consorce a été forgé
par Montaigne du latin consortium, société, association.
33, Passion. — « Cette passion (la vengeance), pour un moment plus douce
que le miel, dit Homère, trouble ensuite l'àme de sombres vapeurs et lui
prépare souvent, pour toute la vie, des maux irréparables. »
170,
3, Seiournez-le. — Donnez4ui du repos, amortissez-le...
10, L'amitié. — Est-ce l'amour de sa future femme ou d'une autre (Mon-
taigne s'est marié en 1565), qui a ainsi fait diversion au chagrin qu'il
ressentait de la perte de son ami La Boétie survenue en 1563?
21, Muant. — Changeant de lieu.
23, M'esgare. — Et ne sais ce que je deviens, me perd de vue.
31, Leniment. -^ Adoucissement, du latin lenire.
35, Chien. — Ce chien, dit Plutarque, Alcibiade, 4, remarquable par sa
taille et sa beauté, et dont la queue était le plus bel ornement, avait coûté
70 mines, environ 50.000 fr.
172,
1, Desuoyer. — Mettre hors de la voie, du chemin, désorienter.
1, Parleurs. — Les indiscrets, les cancaniers.
3, Enuoye. — Var. de 88 : chasse.
17, Enfance. — Dans le traité intitulé : Consolation envoyée à sa femme, sia^
la mort d'une sienne fille, ch. 1 ; le même que dans une circonstance ana-
Fc.622 - ESSAIS DE MONTAIGNE.
loguft Montaigne envoyait à sa femme, le 10 septembre 1570, également
en manière de consolation.
20, Romme. — Le corps ayant été porté sur la place publique où l'oraison
funèbre devait être prononcée, Antoine en la terminant prit la robe toute
sanglante et montrant les coups qu'il avait reçus (César avait été frappé
de 'ZS blessures, dont une seule mortelle qui lui avait été faite à la poi-
trine), excita le peuple qui, prenant tout ce qui était à sa portée, les bancs,
les tables des boutiques environnantes, dressa séance tenante un grand
bûcher où le corps fut placé; et, quand le feu eut fait son oeuvre, chacun
s'emparant d'un tison enflammé courut aux maisons des conjurés pour
les incendier, mais déjà ils s'étaient fortifiés et avaient paré au danger.
21, Tintoûine. — Tinte, retentit; mot forgé par Montaigne du latin lin-
Hnnare.
24, Grammairienne. — L'ex. de Bordeaux aj. : et voyelle, add. qui a été
admise dans la traduction. — C.-à-d. une plainte uniquement composée
de mots et de sons, à l'exclusion de tout sentiment effectif.
33, Désirer. — Même de désirer l'éviter.
34, Empereur. — Tibère, ce monstre de cruauté, qualifié ici de <■ bon »
par antiphrase. Suétone, Tibère, 62.
36, Bourrellerie. — Des bourreaux, des tortures.
37, Là. — Dans un état semblable.
174,
11, Didon. — Après l'abandon d'Énée; V. N. III, 168 : Imos.
11, Ariadné. — Après l'abandon de Thésée.
16, ïambe. — Diogène Laerce, 1Y, 17. — Polémon en était arrivé à se domi-
ner au point que jamais on ne vit la moindre altération sur son visage,
ni sa voix trahir aucune émotion, soit sous l'effet de la douleur, soit sous
celui de la crainte ou des plaisirs.
18, Accession. — Augmentation, accroissement, du latin accedere, part,
passé accessus, qui a même sens.
29, Empruntée. — Qu'ils s'affligent d'une douleur simulée.
33, La Fere. — En 1580; par le Maréchal de Jlatignon qui s'en empara sur
les Protestants; le duc de Grammont y fut tué par un boulet qui lui
emporta un bras.
37, Quintillian. — Inst. oral., IV, 2, vers la fin.
176,
7, Prestre-martin. — Expression proverbiale fondée sur le conte d'un
prêtre du nom de Martin qui, disant la messe, faisait à la fois fonctions
de prêtre et de clerc, chantant et répondant, ce qui s'appelle aujourd'hui :
faire les demandes et les réponses.
11, Desdaing. — Et faire diversion à la pitié par le dédain.
15, Instructiue. — Comme si le regret était un sentiment instructif, qui
nous révélât des qualités inconnues dans celui qui en est l'objet.
18, Digne. — Le texte porte digne, ce qui ne se comprend pas. 11 est pro-
bable que le texte initial portait indigne, et que c'est une erreur d'im-
pression dans l'édition de 1580; et que, passée alors inaperçue, elle s'est
reproduite dans celles qui ont suivi.
20, Exemple. — Le texte et le sens prêtent aussi bien à dire : que je dois,
ou qui m'est donné; nous avons préféré cette dernière version parce que
l'homme est plus souvent entraîné par l'exemple comme les moutons de
Panurge, que porté à le donner.
178,
7, Puisse. — Est-il un seul être dans la nature, l'homme excepté, qui se
sustente du néant; un seul être sur lequel le néant ait action?
10, Fié. — Hérodote, III, 30. — En 525 ; et cela parce qu'étant en Egypte,
il avait vu en songe un courrier de Perse, où était demeuré Smerdis
son frère, lui annonçant que son frère avait été aperçu assis sur le trône.
A ce moment du reste, Cambyse était sujet à des accès de démence que
les Égyptiens attribuaient à ce qu'il avait fait tuer le bœuf Apis. — Dio-
NOTES. UV. m, CH. IV. VOL. III, PAG. 178. Pc. 623
DORE DE Sicile raconte cet autre fait non moins atroce : Un certain Mar-
syas avait rêvé qu'il coupait la gorge à Denys le Tyran; celui-ci, qui eut
connaissance de ce rêve, le fit mourir, disant qu'il n'y aurait pas songé
la nuit, s'il n'y avait pas pensé le jour.
12, Chiens. — Plutarque, De la Superstition. 9. — En 724; Aristodème
était alors en guerre avec les Lacédémoniens; outre ces hurlements dont
il augurait mal, du chiendent avait poussé autour de sa demeure!
12, Autant. — Plutarque, De la Superstition, 9, — Midas s'empoisonna,
dit-on, avec du sang de taureau, pour la raison qu'indique Montaigne.
17, Prometheo. — Selon les uns, il fit l'homme avec de l'argile et l'anima
avec le feu du ciel qu'il avait dérobé. Selon d'autres, Jupiter n'avait pas
donné aux hommes l'usage du feu; Prométhée, en dérobant au soleil,
les en dota; Jupiter, irrité de son audace, le fit enchaîner sur le Caucase,
où un vautour lui rongeait le foie qui sans cesse renaissait; Hercule le dé-
livra. Myt/i.
CHAPITRE V.
Ce chapitre est un des plus curieux, des plus variés des Essais; Mon-
taigne s'y montre tour à tour sérieux et badin, grave et plaisant, sage
et fou, moraliste austère et cynique effronté; on y trouve do tout : de la
gaîté, du goût, de la raison, de la philosophie, une grande connaissance
du cœur humain, des vues et des conseils très sages sur la manière de
tirer parti de la vieillesse; des observations fines et judicieuses sur l'amour
en général, sur le mariage, ses avantages et ses inconvénients; sur ses
accidents, sur l'injustice de la jalousie, sur la chasteté, devoir difficile à
observer, sur les inconvénients de notre curiosité à cet égard; sur les
caractères de la véritable éloquence; sur la force que les bons esprits
donnent à leur langue et les nouvelles richesses qu'ils lui apportent; sur
les avantages et les défauts de la langue française; sur la liberté des
écrits et des paroles, sur les avantages qu'on pourrait retirer de l'amour
dans un âge avancé, etc.; en un mot, Montaigne y traite incidemment
toutes sortes de matières liées à son sujet, mais dont le rapport réel n'est
pas toujours facile à saisir. On croit, en lisant ce cliapitre, entendre causer
ensemble cinq ou six hommes d'esprit qui laissent aller la conversation
comme elle vient; qui s'arrêtent plus ou moins longtemps sur certains
textes, et disent toutes les folies qui leur passent par la tète; il est peu
de chapitres où se montre plus de verve et d'originalité. Naigeon.
22, Pensemens. — Réflexions.
23, Onéreux. — A mesure que les réflexions sur des sujets d'utilité sont
plus profondes et plus solides, elles deviennent plus embarrassantes et
plus fatigantes.
24, Greuent. — Pèsent, accablent, font souffrir, du latin gravure; est encore
en usage.
28, Bandée. — Elle extravague, pour être continuellement appliquée à une
étude si sérieuse.
31, Office. — Dans le devoir.
180,
7, Seiourne. — Qui la repose.
17, Folie. — Cette même pensée a déjà été exprimée (I, 344) : « Soyez so-
brement sages. »
. Dans le mal comme dans le bien,
Tous les excès ne valent rien .. Pat'is ridicule, 1666.
19, Siet. — Le texte latin porte : ne foret.
23, leunesses. — Var. de 88 : folies.
28, Peuuent. — Add. de 88 : encor.
Fc.624 ESSAIS DE MONTAIGNE.
30, Secousses. — De temps à autre.
34, Platon. — Traité des Lois, II.
39, Esbaudi. — Signifie à peu près la même chose que « resioui », mais
l'allégresse qu'il marque est plus démonstrative et agitée : n'est usité au-
jourd'hui que dans le langage populaire.
182,
3, Tressaillir. — J'en suis bientôt au point de me féliciter...
4, Deult. — Ne me fait du mal.
11, L'estre. — C'est, mot pour mot, ce que dit Cicéron dans son traité De ta
Vieillesse, 19.
13, Voluptez. — Cette phrase incidente : « telles que les satisfactions
d'amour-propre », que porte la traduction, n'est pas dans le texte; c'est
une phrase explicative dérivant de ce qui suit.
18, Prinssé-ie. — Que ne puis-je encore éprouver du plaisir...
20, Salutem. — Vers d'ENxius, cité par Cicéron, De OfJ'., I, '24, au sujet de
Fabius Maximus qui, dit-il, travaillait au bien public, sans se mettre en
peine de tout ce qu'on publiait à Rome pour décrier sa conduite. Coste.
32, Logis. — Cicéron, De Seneclule, 11. — Nous imposent le repos, en
nous libérant dé certaines obligations, ou nous contraignant à la cessation
de certaines fonctions à des âges déterminés, ce qui, plus que jamais, est
de règle de nos jours. Cette limite, dans l'armée, varie avec le grade; dans
la magistrature, elle vient à 70 ans; dans les autres administrations et
carrières civiles, elle est d'ordinaire de 60 ans et 30 ans de services.
41. Mal. — Souffrance, peine, douleur.
184,
11, Personne. — Add. de 88 : d'honneur. — Ce souhait de Montaigne a été
exaucé : Pierre Charron, chanoine théologal de Condom (1551 à 1603),
avec lequel il était déjà en relations depuis quelques années, devint, vers
1589, le confident de ses dernières années et le continuateur de sa pensée,
dans son traité De la Sagesse.
12, Resseante. — Fixe, sédentaire. — C.-à-d. qui soit à demeure quelque
part ou qui aime à vojager.
14, Paume. — Elle n'a qu'à faire un signe. — « Siffler en paume », c'est
siffler en soufflant d'une certaine façon entre ses doigts.
16, Vieillesse. — D'échapper à la vieillesse.
19, Affrété. — Attaché, lié, accroché. — Var. de 88, de l'ex. de Bord, et de
l'éd. de 1635 : affreré.
22, Colligence. — Étroite liaison; du latin co/ft.^are, joindre, lier, nouer en-
semble.
23, Compagnon. — Le corps.
33, Par venues. — Sans interruption; littéralement par train continu, suite
entretenue.
34, Eloises. — Éclairs. V. N. II, 274. — Est pris ici au figuré : des idées,
des conceptions.
35, Esperdus. — Pour ne pas dire les plus extravagants.
39, Veut. — Mon esprit veut encore...
186,
1, Rire. — Pline, Hisl. nat., VIII, 19. — Crassus, pour ce motif, avait été
surnommé « Agélaste », le glacé. — On a dit aussi de Jésus-Christ qu'on
ne l'avait jamais vu rire, mais qu'on l'avait souvent vu pleurer.
17, Archeanassa. — C.-à-d. de critiquer les écrits de Platon et de glisser
légèrement sur les relations qu'on lui prête avec... — On a cru trouver la
preuve de ces relations et autres de même sorte, prêtées à Platon, dans
diverees épigrammes que lui attribue Diogène Laerce, et qui portent :
« Alexis n'est plus, prononcez seulement son nom et chacun se retourne ;
Phédon n'était pas moins beau et nous l'avons perdu ». — Alexis semble
avoir été un poète comique de l'époque; Phédon était le co-disciple de
Platon aux leçons de Socrate, il était retourné en Élide, après la mort de
NOTES. LIV. III, Cil. V. VOL. III, PAG. 186, Fc.625
Socrate ; Platon a donné son nom à un de ses plus importants dialogues
sur l'immortalité.
« Cher Dion, de quel amour tu embrases mon cœur! » — Dion était le
gendre de Denys l'Ancien, Platon fut constamment dans les meilleurs rap-
ports avec lui.
« Quand tu considères les astres, chez Aster, je voudrais être le ciel, pour
te voir avec autant d'yeux qu'il y a d'étoiles. » — Aster était un jeune
homme qui se livrait à l'astronomie avec Platon ; Montaigne l'appelle Stella,
probablement parce que les deux mots ont en latin môme signification.
" La belle Archeasassa, de Colophon, est à moi. Oh! de quelle ardeur elle
a dû vous embraser, vous qui avez goûté les premiers de sa jeunesse. »
« Quand je couvrais Agatuon de baisers, mon âme était tout entière sur
mes lèvres, prête à s'envoler. »
?>i, Mineuses. — Affectées, minaudières.
188,
7, Biens taicts. — Bonnes actions; est pris ici dans le sens opposé à mes-
faicts, mot qui suit et dont l'acception n'est pas douteuse.
19, Moins. — Montaigne fait dire ici à Thaïes le contraire de ce qu'il a dit :
« Un homme qui avait commis un adultère, conte Diogène L.^erce, I, 36,
d'où le fait est tiré, ayant demandé à Thaïes s'il devait le nier par ser-
ment, Thaïes lui répondit : « Mais le parjure n'est-il pas pire que l'adul-
tère? »
23, Vice. — Quand on lui donne à choisir entre quelque entreprise périlleuse
et une action vicieuse.
24, Origene. — Comme on en usa avec Origène, en le réduisant au choix ou
d'idolâtrer, ou de se souffrir...
28, Celles. — Pourtant, dans leur erreur, elles ne seraient pas dégoûtées, les
femmes qui...
31, Ariston. — Plutarque, traité Delà Curiosité, 3.
33, Rebrasser. — Retrousser, découvrir ; on trouve dans le dictionnaire de
l'Académie : « rebrasser ses manches ».
190,
1, Sot. — Cela arrive très souvent, et a fait dire à La Rochefoucauld dans
ses Pensées qu'un sot n'a pas assez d'étoffe pour être bon.
3, Paroy. — Le côté intérieur d'une muraille.
5, Huguenots. — Mot qui dérive par corruption de eidgenossen, qui signi-
fie confédéré par serment.
10, Escbange. — D'être pris pour autre que je ne suis.
17, Cher. — J'aimerais autant.
19, Arcbelaus. — Plutarque, Apophth. desrois'. — Tout le monde connaît le
mot de Turenne à un de ses domestiques qui, lui ayant, par méprisé, ap-
pliqué un grand coup sur les fesses, lui en demandait pardon à genoux,
disant qu'il l'avait pris pour Georges son camarade : « Et quand c'eût été
Georges, dit tranquillement Turenne, en se frottant le derrière, était-ce
une raison pour frapper si fort! »
22, Socrates. — Diogène Laerce, II, 36.
35, Cabinet. — C.-à-d. que les femmes, en raison de la liberté avec laquelle
il y parle de l'amour, n'oseront lire ce chapitre qu'en particulier, dans leur
boudoir.
192,
L Réglez. — Dans sa préface de l'édition de 1595, Mademoiselle de Gournay
entrant dans les idées de Montaigne à ce propos et le défendant, dit en
substance : « Qu'ils sont donc chatouilleux sur cette question, ceux qui
font croire à la jeunesse qu'on ne peut entendre parler de l'amour sans le
ressentir; c'est comme si un prédicateur venait dire que c'est rompre l'abs-
tinence en temps de carême, que d'entendre parler de manger et de ce
qui s'y rapporte. » Mais il faut ajoutei' qu'en fait d'amour, fort probable-
ment Jlademoiselle de tJournay ne s'y connaissait guère (en 1595 elle avait
déjà 30 ans), et qu'elle en parlait un peu comme un aveugle des couleurs.
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 40 .
Fc.626 ESSAIS DE MONTAIGNE.
5, Trahir. — Cicérox, Epist. fam., IX, 22; dans cette lettre Cicéron expose
sur la liberté de langage les principes des Stoïciens.
8, Bon. — Car il est à remarquer que,..
11, Franchise. — Dans l'asile, sous la sauvegarde.
11, L'arracher. — Ce que Montaigne dit ici est exact; mais la cause de cet
état de choses qu'il peint si bien n'est autre que, si cette loi du silence,
devenue instinctive et contre laquelle il s'élève, n'existait pas, les dévergon-
dages occasionnés par cette passion, déjà si grande, en az'riveraient à un
degré tel qu'ils ne pourraient plus être contenus; elle est une sauvegarde
de la société sur un point où celle-ci est à la vérité quelque peu en con-
tradiction avec la nature. Où irions-nous, si on en pouvait parler en toute li-
berté? La délimitation entre ce qui se peut et ce qui ne se peut pas dire
sans inconvénient sur ce sujet est trop délicate à fixer, serait trop diffi-
cile à observer; il a été plus pratique et plus sage de proscrire complète-
ment ce thème de conversation.
20, Supprimez. — Tacite, parlant des Annales de Cremutius Cordus, que le
Sénat fit brûler, dit : <■ L'ouvrage n'en est pas moins resté, on le cacha et
plus tard il reparut. »
— S'-Am.\nd apprécie de même cette mesure dans sa Rome ridicule :
« C'est doublement les faire vivre,
Que les faire mourir ainsi >.
20, Aristote. — Murale à Xicomaque, IV, 9.
21, Honteux. — La pudeur doit servir...
24, Estriuent. — Résistent.
25, Suiuent. — Vers de la traduction, par Amvot, du traité de Plutarque,
Qu'il faut qu'un philosophe converse avec les Princes, 5.
30, Mal mesler. — Brouiller.
194,
4, Dieu. — Il n'y a pas si longtemps que j'ai cessé d'être enrôlé sous les
drapeaux de ce dieu.
32, Maritale. — Cette appréciation de Montaigne est aussi celle de Bernar-
din DE S. -Pierre qui, dans son Préambule de YArcadie, insère la citation qui
précède et la fait suivre de ce commentaire : « Mais, pour afTaiblir ce que
ce tableau a de licencieux et de contraire aux mœurs conjugales, le sage
Virgile oppose immédiatement après, à la déesse de la volupté, qui de-
mande à son mari des armes pour son fils naturel, une mère de famille,
chaste et pauvre, occupée des arts de Minerve pour élever ses petits en-
fants; et il applique cette image touchante, aux mêmes heures de la nuit,
pour présenter un nouveau contraste des différents usages que font du
même temps le vice et la vertu. »
33, Mousses.
« l/arijour que l'on contracte entre mains de notaire.
Ne connaît point d'amour les plus secrets mystères;
C'est un amour bâtard, qui naquit (ce dit-on),
Là-bas, dans les enlers, de la vieille Alecton.
Mais l'autre, qui fut fils de la belle Cyprine.
D'une plus douce Bamme échauffe la poitrine.
Il nous apprend des tours qui sont bien plus plaisants.
Et de cent mille jeux entretient nos beaux ans. »
Gilles Dckakd de la Bergerie, 139i.
37, Raison. — Doivent avec raison être pris en considération, entrer en
ligne de compte.
196,
3, Ailleurs. — Liv. 1, ch. XXIX; II, 34G.
4, Prudemment. — Il faut prudement, c.-à-d. avec pruderie, décence, ré-
serve; Aristote dit en effet : «■ Que le mari approche de sa femme avec
pruderie et modestie; qu'il soit vergogneux (chaste, réservé) en paroles,
NOTES. L[V. m, Cil. V. VOL. III, PAG. 194. Fc.G27
(Iroiturier et honnête en actions. • — Le concile de Trente a dit de mémo :
« Le mariage est une chose sainte, il faut le traiter saintement. ■• — Dans le
langage du x\i° siècle, pruderie était toujours pris en bonne part et signi-
fiait décence austère, exempte d'hypocrisie, comme dans ces vers du Ilu-
man de la Rose :
« Prudes femmes, par Saint Denys.
Autant en est que de Phénix. «
IC), D'aguet. — Avec précaution, circonspection; en demeurant sur ses
gardes.
21, Troubler. — Var. de 88 : mesler.
■Zb, Vertu. — Sage et judicieuse réflexion sur la noblesse comparée à la
vertu.
28, Nil. — Les sources de ce fleuve, si célèbre de toute antiquité, qui a un
cours de G.yOO kil., sont longtemps demeurées inconnues; leur recherche
préoccupait déjà les anciens. — Néron envoya une expédition pour les dé-
couvrir. Au H" siècle, Ip géogmphe Ptoi-kmée faisait sortir le Nil de deux
grands lacs situés au pied de montagnes couvertes de neiges éternelles
(montagnes de la Lune) et les cartes et les sphères du xvi" siècle indiquent
d'une manière relativement précise la situation de ces lacs, indication
que ne reproduisent pas les cartes du xvui" -siècle. A partir du commen-
cement du xvi" siècle, les Européens entrèrent en relations avec les rois
d'Abyssinie et connurent les sources du Nil bleu qui sort du plateau abys-
sin, mais plus de trois siècles devaient encore s'écouler avant que celles du
Nil blanc (Bahr el-Abiad) ne fussent découvertes. En 1850, un explorateur
anglais, Livixgstone, le signala comme sortant d'un grand lac de l'Afrique
équatoriale qu'il ne put atteindre. En 1858, Speke, officier de l'armée des
Indes, y parvint, lui donna le nom de Victoria-Xyanza, mais n'arriva pas à
reconnaître l'endroit d'où le fleuve en sort. Ce ne fut qu'en 1875 que Stan-
ley le constata, en même temps que l'existence d'un autre lac qu'il appela
l'Albert-Édouard, dont les eaux se déversent dans le cours d'eau sorti du
Victoria-Nyanza. Enfln en 181)2, un missionnaire allemand, Baumann, recon-
nut le Kagera, principal tributaire du Victoria-Nyanza, qui sort d'un lac
de beaucoup moindre étendue qu'il nomma lac Alexandra; de telle sorte
qu'on tient aujourd'hui comme sources du Nil blanc le lac Albert-Edouard
(source occidentale) et le lac Alexandra (source orientale).
38, Antigonus. — Plltarque, De la mauvaise honte, 10.
198,
10, Ruffiens. -— Amants, galants; mot de provenance italienne.
12, Leur. — Aurien dit que chez les Indiens, le peuple était divisé en plu-
sieurs ordres, et qu'une loi défendait les mariages entre individus d'ordres
différents : un laboureui" ne pouvait épouser la fille d'un artisan et ^insi
des autres.
13, Poilus. — Souillés; du latin pollulus, qui a même signilication.
18, S' entreheurter. — En dehors de ruelles étroites, il n'y a à proprement
parler que fort peu de rues à Venise; des canaux de largeur variable et
en nombre infini en tiennent lieu. On y chemine en gondoles (barques
légères), qui dans leur marche silencieuse courraient risque de se heurter,
aux tournants, dans les croisements où la vue est interceptée par les
maisons en bordure, si, par un cri particulier, les gondoliers ne se signa-
laient entre eux.
28, Est. — Ce membre de phrase et ce qu'il dit plus loin (III, 344) : « 11 y a
• toujours quelque pièce qui va de trauers, etc. », donnent à penser que dans
le ménage de Montaigne tout n'allait pas continuellement pour le mieux •
mais, comme il le dit, n'est-ce pas une règle générale et peut-il en êti-e
autrement, étant donné la versatilité de notre nature?
« Qui se marie par amour, i Qui se marie par argent,
A i)onnes nuits et mauvais jours; 1 A jour et nuil le cneur dolenl. .
Fc.628 ESSAIS DE MONTAIGNE.
200,
9, Socrates. — Diogène Laerce, II, 33.
• 9, Commode. — Avantageux.
11, Repentira.
. Aller à la guerre ou se marier
>'e doit se conseiller. >
. C'est le célibataire qui n'a point de disputes » {Proverbe cité par
S. Jérôme). — « Es-tu délivré de femme, n'en cherche point. » S. Paul.
\i. Lupus. — La première de ces deux sentences : « L'homme est à l'homme
un dieu », est du poète comique CÉcu.ius, qui ajoute : •< s'il connaît son
devoir •. La seconde, « un loup », est de Plaute, qui la complète en disant :
« lorsqu'il ne sait quel il est ».
18. CoUo. — Nombre de gens pensent de la sorte; il en a été ainsi de tous
temps, mais cela ne fait que croître avec les besoins de bien-être qu'a-
mènent les progrès de la civilisation et les difficultés de la vie; le mariage
a tendance à être délaissé, malgré l'atténuation résultant du divorce rendu
cliaque jour plus accessible, et la femme, exposée de plus en plus à rester
fille, est réduite à chercher par elle-même les moyens d'existence qu'elle
devrait tenir du travail d'un mari. — C'est qu'aussi combien est plus facile
la vie pour le célibataire : les restaurants pourvoient à sa nourriture, les
cercles à son intérieur, les maisons de santé le recueillent quand il est
malade; il lui est aisé de satisfaire ses appétits sensuels, au mieux de
ses caprices du moment; il ne connaît ni les orages, ni les embarras ni les
soucis d'un ménage; les enfants ne lui sont point à charge; il n'a à
penser et ne pense qu'à lui; toutes choses égales, il est libre et riche, aloi-s
que le père de famille a des obligations et se trouve dans la gène. ]Même
sous le rapport de l'affection, ayant dans le présent plus de ressources,
pour l'avenir l'entière disposition de son héritage, l'entourage ne lui fait
pas défaut et il trouve chez des parents, des étrangers, les attentions, les
témoignages de sentiments en apparence les plus désintéressés, qu'on ne
rencontre pas toujours chez les enfants, auxquels on en passe davantage
et qui ont des droits, qui font qu'ils en prennent beaucoup plus à leur
aise. — Le célibataire est un parasite, qui ne rend pas à la société ce
qu'il en retire; à Sparte, il était noté d'infamie, certaines exclusions
étaient portées contre lui et parmi les liontes qui lui étaient imposées, à
certaine fête, les femmes lui faisaient faire le tour d'un autel, en le bat-
tant de verges. On ne saurait à notre époque user de semblables procédés
qui seraient par trop inefficaces, et cependant il ne serait qu'équitable
de compenser, dans la mesure du possible, les obligations auxquelles il
échappe; on pourrait par exemple dans l'obtention de certains emplois,
de certaines faveurs, avantager à mérite égal les pères de famille tandis
que souvent cette situation tourne contre eux; mais surtout un impôt
spécial, proportionnel à leure revenus, devrait frapper les célibataires et
le produit en être affecté à l'attribution de subsides aux familles chargées
d'enfants qui sont nécessiteuses, etc.
19, Dessein. — A suivre mon inclination naturelle, de mon propre mouve-
ment.
28, Rebours. — Et plus à contre-cœur.
30, Espéré. — Montaigne avait épousé en 1565 Françoise de la Chassaigne,
fille "d'un conseiller au Parlement de Bordeaux, comme lui-même l'était
à co moment. 11 semble s'être marié un peu pour combler le vide laissé
en lui par la mort de La Boétie, survenue deux ans auparavant. Bien que,
dans les Essais, Montaigne se soit en quelque sorte fait une loi de passer
sous silence sa vie conjugale, qu'il n'y fasse guère allusion que lorequ'il
se plaint des difficultés que présente par moments la vie domestique, ou
qu'il exprime la confiance qu'il a, lorsqu'il s'absente, en qui en son absence
a la gestion de sa maison, il y a lieu de penser qu'avec les idées qu'il avait
sur le mariage si, comme il est probable, l'affection et la confiance ont
NOTES. UV. TU, CIL V. VOL. IH, PAG. 200. Fc.629
régné entre les deux époux, leurs épanchements ont toujours été modérés,
et qu'il n'eût pu dire, à son lit de mort, à sa femme comme son ami La
Boétie, qui avait sur ce point des idées d'une élévation de sentiments
bien autres, le dit à la sienne ainsi qu'il le rapporte lui-même : « Ayant
été joint à vous par le saint nœud du mariage, qui est l'un des plus res-
pectables et inviolables que Dieu nous ait donnés ici-bas, je vous ai aimée,
chérie et estimée autant qu'il m'a été possible et suis tout assuré que
vous m'avez rendu réciproque affection que je ne saurais reconnaître. >•
— De fait, Françoise de la Chassaigne, morte en 1627, femme de sens, très
rangée, très entendue dans les soins du ménage, paraît avoir été en même
temps une épouse discrète, s'effaçant volontiers, telle que Montaigne pou-
vait la souhaiter; lui mort, elle se dévoua à sa mémoire et à son œuvre.
202,
5, Traistre. — Ces deux vers sont d'un auteur inconnu; on peut leur ap-
pareiller ceux-ci dont la source est également ignorée :
I II
Si lu as maistre, sers-le bien: Ne souffre à la femme pour rien,
Dis bien de lui, garde le sien; Mettre son pied dessus le lien;
Son secret cèle, quoi qu'il fasse, Le lendemain, la bonne béte
Et sois humble devant sa face. Le voudra mettre sur ta leste.
10, Galantise. — Var. de 88 : gentillesse.
11, Appétit. — Qui ne s'accorde pas avec mes désirs.
14, Recognoistre. — <■ Et c'est là pour moi une consolation, a dit un com-
mentateur; je sais que je fais mal, donc je n'ai pas encore perdu la con-
naissance dii devoir et par suite l'espérance de revenir au bien. »
20, Maistre. — Vole son maître. « Ferrer la mule » , est une expression
du temps de Montaigne, signifiant gagner sur un achat fait pour le compte
d'un autre, autrement : « Faire danser l'anse du panier. •■ — Cette ex-
pression paraît venir de ce qu'aux temps où les magistrats allaient au
palais montés sur des mules, les laquais qui gardaient ces bêtes pendant
l'audience, buvaient ou jouaient pour se désennuyer, puis cherchaient
quelquefois à s'indemniser do leur dépense ou de leur perte, en comptant
à leurs maîtres des frais supposés pour le ferrage des mules.
32, Repentis.
« Amours qui commencent par anneaux,
Finissent par couteaux. -
33, lupiter. — Homère, Iliade, XIV, 295.
38, Considérations. — Préjugés.
39, Empescher. — Sans que cela nous arrête.
39, Isocrates. — Éliex, Hist. div., XIL 25.
204,
6, Deuroient. — Add. de 88 : au moins.
7, Différentes. — yElius Verus pensait comme Montaigne, quand il disait
à sa femme lui reprochant ses infidélités : « Souffrez que je passe aies
caprices avec d'autres, le titre d'épouse est synonyme d'honnêteté et non
de débauclie. » V. I, 348.
13, Profuse. — Prodigue, s'étend trop loin; du latin profusus, que Mon-
taigne a francisé, mais qui nous a donné « profusion ■■ qui est resté.
15, Lycurgus. — A Sparte, tout jeune homme désirant une jeune fille en
mariage l'enlevait à sa famille, la conduisait chez une matrone qui la
recueillait et la cachait; lui-même ne venait la voir qu'à la dérobée et
continuait à aller coucher la nuit dans les dortoirs communs avec les
autres jeunes gens; cela durait quelquefois si longtemps que des maris
avaient des enfants qu'ils ne s'étaient pas encore montrés en public avec
leurs femmes; par là les époux s'accoutumaient à la tempérance et à la
Fc.630 ESSAIS DE MONTAIGNE.
sagesse, qqi entretenaient en eux la vigueur ot la lécondité, leiii- conser-
vaient leur première ardeur et renouvelaient leur amour.
. 19, Riotte. — Petite querelle, petite dispute.
21, Tempestueux. — Morne dans les rapports les plus intimes que. d'un
connnun accord, nous avons avec elle, il y a encore désaccord et dispute.
25, Femme. — Ovioe, Mélam., III, 323. — Tirésias, un des plus célèbres
devins do l'antiquité. La fable raconte que rencontrant deux serpents qui
frayaient ensemble, il les sépara et aussitôt devint femme; au bout d'un
certain temps, les rencontrant à nouveau en môme situation, il reprit sa
première forme d'homme. Comme il avait de la sorte connu les deux sexes,
un dilléreiid s'étant élevé entre Jupiter et Junon sur la question de savoir
si les fournies ont plus do part que les hommes au plaisir vénérien, il
fut pris pour juge et prononça que de dix parts de plaisir dans cet acte, il
y en avait neuf pour la femelle et une pour le màlo: la déesse, irritoo
de ce qu'il avait pi-ononcé contre elle, le rendit aveugle; pour le dédom-
mager. Jupitei- lui accorda le don de prophétie.
28, Empereur. — Flavius Vopiscus, Proculus. — Proculus. tribun niilitairo
en Gaule qui, sous le règne de Probus, fut fait imperalor par ses troupes :
vaincu, il fut mis à mort: il avait quelques talents militaires (280).
29, Emperiere. — Impératrice. Cette impératrice c'est Messaline, épouse
de l'empereur Claude, qui se livra, s'imposa môme parfois à tout homme
de tout rang et de tout état, allant jusqu'à épou.ser publiquement, du
vivant de son époux, un de ses amants qu'elle aimait éperdument; co
qu'apprenant, Claude la lit mettre à mort.
35, Cateloigne. — En Catalogne.
38, Foy. — Qu'on ce qui touche la religion, que ceux qu'elle impose à notre
foi.
40, Hergnes. — Humeur chagrine, acariâtre; môme racine que « hargneux
(querelleui-) », qui est encore en usage.
206,
4, Dix. — Add. de 88 : par iour.
14, Prix. — Nicolas Bohier, jurisconsulte de Bordeaux, mort en 1053, conte
ainsi le fait : « En son temps, un homme de la Catalogne avait de telles
facultés prolifiques, que chaque jour il entrait jusqu'à dix fois en rapport
avec sa femme; la reine d'Aragon en fut infoi'mée secrètement; elle le lit
venir et il avoua le fait. Sur ce la reine lui interdit sous peine d'avoir
la tète tranchée d'entrer désormais plus de six fois par jour en rapport
avec sa femme, que davantage le mettait en péril de mort. Qu'est-ce qui
en cela est le plus étonnant : ou ce dont le mari était capable ou la mau-
vaise querelle que lui avait faite son épouse? »
14, Solon. — Plutarqle, De l'Amow.
17, Cela. — Que les femmes sont plus ardentes que nous aux effets de
l'amour, ce que lui-même a dit à la page précédente, pour ne donner que
maintenant sa conclusion.
18, Extrêmes. — Peut-être le sens est-il : ■• au risque de leur faire endurer
les pires et plus extrêmes souffrances » (?)
208,
1, Polemon. — Diogène L.\erce, III, 17.
3, Cassez. — Quant à ces autres femmes qui épousent des hommes vieux,
cassés.
8, Approchée. — Xiphilix, Caiigula. — Clodia Latea, à la mort de Cali-
gula, subit le supplice infligé aux Vestales convaincues d'avoir manqué
à leur vœu de virginité. Les vestales, prêtresses de Vesta, étaient à Rome
chargées d'entretenir le feu sacré sur l'autel de la déesse; elles faisaient
vœu de virginité durant le cours de leur ministère qui, commencé entre
6 et 10 ans, durait trente années; elles étaient au nombre de 6. Créées
par Numa, elles furent abolies par Théodose; elles n'étaient point
cloîtrées; jouissaient de grands privilèges, notamment d'être émancipées,
d'aller en public précédées de licteurs, et de sauver la vie à tout criminel,
NOTES. I.IV. III, CM V. VOL. III, PA(;. 208. Fc.631
mené au supplice, qu'elles rencontraient fortuitement. Si elles laissaient
éteindre le feu commis à leur garde, elles étaient punies du fouet; celles
infidèles à leur vœu de chasteté, primitivement lapidées, furent par la
suite ensevelies vivantes : on les descendait dans un étroit caveau mui'é,
où elles trouvaient un petit lit, une lampe allumée, un peu de pain, de
l'eau et de l'huile; la pierre de ce sépulcre était refermée sur elles et
scellée : leur complice devait mourir sous le fouet.
13, Boleslaus. — Surnommé « le Pudique ». Cromek, De rébus Pal., VIII.
— D'après Yllistolre ecdvsiaslique, Marcien, empereur d'Orient (v"- s.), et
S'" Pulchérie auraient agi de même; et aussi S. Henri, empereur d'Alle-
magne, duc de Bavière (x" s.), et S'" Cunégonde.
lo, Roys. — Réminiscence de l'espagnol, où les Reyes (les rois) se disait
alors souvent pour le roi et la reine; comme les Padres (les pères), pour le
père et la mère; les Hijos (les lils), pour les lils et les filles.
■20, Desgouster. — L'éducation des lilles est un point que Montaigne ne fait
(|u'cfl]eurer pour condamner les réticences exagérées dont on use vis-à-vis
d'elles et qui ne font qu'exciter leur curiosité. Si on se reporte en outre à
la manière dont, un peu plus loin, il parle des républiques où, dans les
gymnases, les deux sexes se montraient à nu l'un à l'auti-e, il semble avoir
été assez porté vers les idées actuelles de coéducation où, à l'instar de ce
qui a lieu dans certaines écoles mixtes d'Angleterre, garçons et filles sont
réunis, système préconisé comme essentiellement moralisateur et donnant
à celles-ci plus de caractère.
21, Excusent. — Admettent, tolèrent le mariage pour celles chez lesquelles
le besoin s'en fait pi'ématurément sentir. — Ceci a dû être écrit vers 1586;
Léonor, née en 1571, venait d'avoir quinze ans, limite inférieure à laquelle
la femme, en France, pouvait et peut se marier; pour l'homme il le peut
à 17 ans. En Autriche, ces limites sont de 20 ans pour l'homme et 16 pour
la femme; elles étaient de 15 et 13 ans chez les Romains; Lycurgue les
avait fixées à 37 et 17, Platon à 30 et 20. Chez les Orientaux elles sont
moindres que chez nous, la nature étant plus précoce à cet égard dans les
pays chauds que dans les pays tempérés; dans certains états de l'Amé-
rique du Sud, un homme peut se marier à quatorze ans, une femme à
douze, le mariage pourrait même avoir lieu plus tôt avec le consentement
des pères et mères, mais un garçon de quatorze ans et une fdle de douze
ne dépendent plus sous ce rapport que de leur volonté. V. II, 26.
26, Fouteau. — C'est le nom du hêtre en vieux français; mais en langage
trivial de l'époque on désignait aussi de ce nom, dérivation du mot latin
faluere (V. N. II, 178 : Futuam), l'organe génital de la femme.
34, Scelerées. — Criminelles, scélérates.
35, Interdiction. — « On peut tout dire devant les jeunes filles, disait un
contemporain de Montaigne : quand elles comprennent, on ne leur apprend
pas grand'chose; quand elles ne compi-ennent pas, on ne leur apprend
rien du tout. » A quoi on peut répondre : on excite les premières, lesquelles
sont plus nombreuses que l'homme ne le croit et fort excitables à cet âge,
et on provoque la curiosité des autres.
39, Vngui. — Voltaire, à l'âge de quinze ans, traduisait ainsi ces vers
d'HoRACE :
« Voyez cette beauté; sous les yeux de sa mcrc,
Elle apprend en naissant l'art dangereux de plaire
El d'exciter en nous de funestes pencliants.
Son enfance prévient le temps d'être coupable;
Le vice trop aimable
Instruit ses premiers ans. »
210,
1, Science. — « Le renard sait beaucoup, une femme amoureuse en sait
bien davantage. » Proverbe espar/nol.
1, Autresiois. — « Quicon(iue, dit Platon dans le Timéc, aura mené la vie
Fc.632 ESSAIS DE MONTAIGNE.
des justes, retournera dans l'astre fraternel jouir de la félicité suprême;
les coupables deviendront femmes, quand ils reparaîtront sur la terre. >■
7, Nostre-Dame. — Ancienne exclamation dite pour : « Par Notre-Dame! »
Aujourd'hui par dérivation et en accentuant l'ellipse, nous disons « Dame! "
dans le même sens.
14, Ame. — « Nature, jeunesse et santé sont trois bons maîtres. » Sed.vine.
15, Engendrent. — '■ Les hommes consacrent leur jeunesse à se former un
esprit, que les femmes apportent en naissant. Il vient à une fille avant la
raison; à 15 ans, elle est faite, tandis qu'à 30, un homme souvent n'est
qu'un sot. » J.-J. Kols^au.
22, Diffamez. — Var. de 88 : affole:.
29, Escarquillements. — Ecartement des cuisses. « Esquarquiller », est-il dit
dans le Dictionnaire de Moxet, c'est ouvrir en élargissant.
31, Strato. — Diogène Laerce, V, 59.
32, Tbeopbraste. — Id., ib., 43.
35, Pbalereus. — le, ib., 81.
36, Ponticus. — Id., ib., 87.
37, Antisthenes. — Id., VI, 15 et 18.
38, Aristo. — Id., VII, 163.
39, Cleanthes. — Id., ib., 175.
40, Spberus. — Id., ib., 178.
41, Eshontée. — Effrontée au delà de tout ce qui peut être souffert, admis,
« plus le fait d'impudiques créatures que de dieux », ajoute Diogène
Laerce, VII, 187. 188.
212,
3, Cet office. — Dans l'éd. de 88, cotte phrase suit immédiatement celle où
l'on trouve quelques lignes plus haut que Zenon, par ses lois, réglait « les
secousses du dépucelage ». L'intercalation que Montaigne a faite posté-
l'ieurement, rompt la liaison des idées et fait que l'on ne voit pas tout
d'abord à quoi se rapportent ces mots " à cet office ».
4, Nation. — Dans l'île de Chypre (Hérodote, I, 199; Athénée, XII); — à
Iléliopolis, en Phénicie (Eusèbe, Vie de Constantin, III, 58); — à Sicca
Veneria, auj. le Kef, en Numidie (Valère Maxime, II, 6, 15). — A Babylone,
dit Hérodote, I, 199, les dames, par dévotion, se prostituent une fois dans
leur vie. Ciiacune, à cet effet, se rend au temple, et n'en sort qu'après avoir
subi qui a jeté son dévolu sur elle; ne lui demandant rien pour prix de
ses complaisances et tenue de recevoir ce qu'il lui remet. Celles qui ont
une taille élégante et de la beauté n'y font pas long séjour; les laides y
restent davantage parce qu'elles ne peuvent satisfaire à la loi, il y en a
même qui y demeurent trois ou quatre ans. Après ce sacrifice, rentrées
chez elles, leur vertu y est à r.abri de toute faiblesse.
5, Garces. — L'éd. de 88 aj. : et de garçons.
6, L'office. — V. III, 232 et N. Vie et Polices.
8. Extinguitur. — Un proverbe grec dit pareillement : « On éteint le feu par
le feu » ; et une galante marquise du xvii° siècle le parodiant, disait :
« C'est en succombant à la tentation qu'on y résiste. »
20, Diuinitez. — Athénée dit, d'après Iléraclide de Syracuse, que dans cette
ville, lors de la fête des Thesmophories, en l'honneur de Cérès et de
Proserpine, le principal objet du culte des femmes était la partie qui les
distinguait des hommes; il en était fait une image avec de la farine et du
miel, et on la promenait en procession. Naigeon.
20, Bacchanales. — Fêtes en l'honneur de Bacchus qui prirent naissance
en Egj'pte, d'où elles s'introduisirent en Phénicie, puis en Grèce, et de là
en Italie. Au début, les femmes y participaient seules; ensuite les hommes
y furent admis et les désordres devinrent tels que le Sénat romain les
interdit (184). Mais la loi demeura peu de temps en vigueur; et sous
l'Empire, les Bacchanales furent célébrées de nouveau avec plus de licence
que jamais.
23, Corps. — Hérodote, II, 48.
NOTES. UV. JII, CH. V. VOL. III, PAG. 212. Fc.633
21, Couurecbef. — V^oilette que les dames nobles portaient à peu près dans
les mêmes conditions que cette partie de la toilette se porte aujourd'hui.
27, Matrones. — Dame romaine : suivant les uns, la matrone était la
lemmc mariée qui n'avait pas d'enfant; suivant d'autres, celle qui n'en
avait qu'un, celle en ayant plusieurs étant la mère de famille.
28, Priapiis. — Était surtout en honneur à Lampsaque (Asie Mineure).
Ses fêtes, là et partout ailleurs où son culte se pratiquait, étaient accom-
pagnées d'affreux désordres.
30, Nopces. — Lactance, Divin. Institut., I, 20; S. Augustin, De Civit. Dei, VI,
9. — Afin, dit Rozini dans son ouvrage sur les Antiquités romaines publié
en 1700, « que le Dieu semble avoir les prémisses de leur virginité ». Si
cet usage n'était pas très conforme aux lois de la pudeur, il était du
moins fort prudent; il ôtait aux maris tout prétexte à des soupçons qui,
fondés ou non, sont la source la plus féconde des mauvais ménages et de
tous les maux qu'ils entraînent après eux. Cette cérémonie couvrait les
faiblesses des jeunes tilles d'un voile impénétrable, leur rendait leur in-
nocenqp première et assurait à leurs maris une tranquillité qu'aucun
nuage ne pouvait plus troubler et ne contribuait pas peu à leur bonheur
mutuel. Naigeon. V. N. III, 234 : Estrangere.
32, Chaussure. — Signifie ici les hauts-de-chausses ou culotte, le reproche
que leur fait Montaigne de dessiner d'une façon trop apparente les parties
sexuelles ne laisse aucun doute à cet égard. V. N. I, 176 : Public, et I,
500 : Chaussure.
32. Suysses. — Les régiments suisses qui, à la solde de la France, entraient
dans la composition de nos armées, depuis l'an 1521, époque à laquelle
leur pays avait conclu avec François P' une alliance perpétuelle.
34, Grecgues. — Grègues, espèce de hauts-de-chausses ou culotte; ce mot
s'emploie encore quelquefois et toujours au pluriel.
214,
2, Vray. — Les nations les moins avancées en civilisation, dont les mœurs
conservent leur simplicité primitive, portent encore des vêtements qui
accusent dans toute leur réalité chez la femme les formes des parties
qu'elles recouvrent; mais on peut en dire autant des costumes tailleur et
des corsets dits de la faculté et autres de nos jours, qui chez nous les
moulent bien autrement, en en rectifiant en outre l'esthétique.
4, Pied. — C.-à-d. : Alors, on instruisait le public des avantages qu'à cet
égard on avait reçus de la nature (aujourd'hui il ne faudrait pas s'y fier),
comme à présent on donne la mesure de son bras ou de son pied.
5, Veue. — Des darnes du pays, aj. l'éd. de 88. — Ce bon homme paraît
être le pape Paul IV (Caraffa), qui régna de 1555 à 1559. Vers la même
• époque, un prince Pamphyle, à Rome, à la sollicitation des Jésuites, mu-
tila pareillement la plupart de ses statues et tableaux; postérieurement,
dit-on, il jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus. On cite
encore le duc de Mazarin, époux d'une des nièces du Cardinal, et la du-
chesse de Guise comme ayant commis le même vandalisme. Bien avant
eux, à la fin du vr s., S. Grégoire avait fait mettre à couvert certaines
statues antiques de Rome que les étrangers venaient considérer plus par
amour de la chair que par amour de l'art. Un autre pape avait fait en-
tourer de voiles de plomb les parties trop nues de magnifiques statues
placées aux angles d'un tombeau monumental. La même idée fit, à Paris,
sous Charles X, adopter sous la forme d'une feuille de vigne, une mesure
analogue, qui s'applique parfois encore.
8, Déesse. — Cérès.
13, Ruunt. — Virgile, Georg., 111, 244, que Delille traduit :
• Amour, tout sent tes feux, tout se livre à ta rage.
Tout, et l'homme qui pense, et la brute sauvage.
Et le peuple des eaux, et l'habitant des airs. <■
14, Platon. — Vers la fin du Timée, d'où Montaigne a pris tout ce paragraplie.-
Fc.634 ESSAIS DE MONTAIGNE.
IN, Forcené. — Il extravague, perd son Ijon sens.
2."], Législateur. — « Le bon Jionimc », c'est-à-dire, le pape dont il a été
précédemment parlé. Une intercalation laite dans led. de 95 entre le
passage où il en a été question et celui-ci qui se faisaient suite dans l'éd.
de 88, en a rompu la liaison.
:{-2, Royales. — Allusion aux images obscènes que, de tous temps, les ga-
mins ont tracées et tracent encore grossièrement, au charbon ou à la craie,
sur les murs des édifices publics et autres.
'S'i, Vient. — De là vient que les femmes ont un profond mépris...
216.
3, Cela. — A Sparte, où il en était ainsi, il n'y avait pas de loi contre
l'adultère.
li, Liuia. — Dion, Tibère. — Livie eut un grand ascendant sur l'empereur,
auprès duquel elle poussait la complaisance jusqu'à le pourvoi)- de jeunes
filles, belles et vierges; aussi parvint-elle à lui faire adopter et désigner
comme successeur Tibère qu'elle avait eu d'un premier mari, auquel il
ra\ait enlevée, alors (ju'elle était enceinte d'un second enfant (Drusus).
Le mot que Montaigne rapporte d'elle est du reste tout à son éloge : elle
le dit pour sauver des individus qu'on allait mettre à mort parce qu'ils
s'étaient rencontrés devant elle, dans la plus complète nudité, ce qui cons-
tituait un crime de lèse-majesté.
16, Exercices. — Non seulement, à Sparte, les jeunes filles assistaient aux
jeux auxquels dépouillés de tout vêtement les jeunes gens se livraient
dans les gymnases, mais elles-mêmes, dans le même état de nudité, aux
yeux de tous, les célibataires seuls exclus, car c'était là l'une des flétris-
sures qui leur étaient infligées, pratiquaient ces mêmes exercices : la
course, la lutte, le jet du disque et du javelot; allant aussi chantant et
parfois leurs chants, appropriés aux faits du moment, raillaient l'un des
assistants, donnait à un autre des éloges, tout cela dans le but d'exciter
chez tous une noble émulation.
17, Platon. — Républiqiœ, V. — Platon ne parle pas des femmes lacédé-
nioniennes, mais des femmes en général.
18, Vertugade. — Ou vertugadin ; gros bourrelet que les femmes portaient
sous leur robe pour en faire gonfler la jupe et produire un effet analogue
à celui obtenu au xvni" siècle des cercles en baleine dont étaient formés
les paniers, et aux cercles en acier constituant la crinoline au xix\
19, S. Augustin. — De Civil. Del, XXII, 17.
23, Acharne. — Excite. — Acharner est employé ici dans son sens direct,
qu'il n'a plus actuellement et que rend bien l'expression triviale « porter
à la peau ».
24, Ventre. — Puis nous leur reprochons les désirs que nous avons fait
naître en elles.
218,
5, Garde. — « La continence est une chose très difficile et de très pénible
garde; il est mal aysé de résister du tout à nature; or c'est icy qu'elle est
plus forte et ardente, etc. » Charron, De la Sagesse, III, 41.
8, Hallebrenez. — Épuisés, meurtris, hors d'état de subvenii- à leur tâche.
Hallebrené est un terme de fauconnerie qui sert à désigner l'oiseau de
chasse qui a une ou plusieurs plumes rompues.
15, Occupet. — Citation dont Boileau a traduit ainsi la dernière partie :
« ... Un baiser cueilli sur les lèvres d'Iris
Qui mollement résiste, et par un doux caprice
Quelquefois le refuse, afln qu'on le ravisse. •
24, Lumbis est. — Citation dont Montaigne a inscrit lui-même la traduction
en marge de l'exemplaire de Bordeaux.
30, Galant. — Un homme adroit et expérimenté.
33, Choix. — C.-à-d. et non parce qu'elle se réserve pour un galant favorisé.
NOTES. IJV. m, cil. V. VOL. Hl, PAC. 220. • Fc.63;j
220,
(S, Orront. — Écouteront. — Futur du verbe « ouïr » qui est encore en
usage.
13, Chasteté. — On croit que cette reine est Marguerite, rcim* de Navarre.
— 'On a rapproché de ce passage celui où Ovide dit : « Est chaste, celle
que personne n'a jamais sollicitée. » Les deux idées ne sont pas idem-
tiques : d'après Ovide, seules les femmes (|ui n'ont pas été mises à l'épreuvti
seraient chastes, ce qui revient à nier la chasteté chez la feminti; tandis
que la reine dit que celles-là seules peuvent se vanter d'èti-e chastes qui,
mises à l'épreuve, n'ont pas succombé. — Coknku.i.k, dans Pulyeucfc, émet
la même i)ensée :
« Ce n'esi qu'en ces assauts qu'éclaie la vertu.
Kt l'on doute d'un cœur qui n'a pas combattu. •
Réc.niek, lui, se montre plus sceptique et n'épargne que la vierge
« Et la veuve, aussi bien comme la mariée,
Celle est chaste, sans plus, qui n'en est pas priée. »
16. Se torfaire. -- Il peut se donner quelque liberté sans se rendre cou-
pable. — L'éd. de 88 poi-t. : s'a/f'oler. — Forfaire, c'est mal l'aire; il est
généralement suivi d'un complément <"t signifie alors violer, manquer a : il
a forfait à l'honneur.
32. Iniute. — A été longtemps compromise et injustement soupçonnée. —
■< Par injure » est un latinisme : injuria, c'est-à-dire sine jure, sans
justice.
38, Langage. — Ceci est rapporté dans les sentences recueillies par An-
TONirs et M.vxiMUS.
222.
11, Douceurs. — Var. de 88 : diuiiies (/races, au lieu tle : <> tendres et mi-
gnardes douceurs ».
19, Addresse. — Est sans induence sur moi, ne m'atteint pas.
21, Gratis. — Élien, Hisl. des animau:i\, XII, 12.
32, Angoisse. — Le père du triumvir. Qualifié le plus méchant des hommes,
par Sylla- auquel il espérait succéder; il s'était composé à cet effet un<'
troupe de gens sans aveu; chassé d'Italie, il se retira en Sardaigne où il
mourut de maladie qui lui vint non tant du regret de la ruine de ses
affaires, dit Pi.i tarque, Pompée, ô, que de la douleur qu'il éprouva d'une
lettre qui tomba entre ses uutins, par laquelle il connut que sa femme
avait forfait à son honneur.
35, Rapbanique. • Surmulets, poissons de mer de même espèce que le
rouget. Allusion au supplice que les Athéniens infligeaient aux adultères,
consistant à leur introduire^ dans h\ corps, par le fondement, des raves ou
des surmulets.
37, Honte. — Vulcain, qui, ayant surpris Vénus son épouse avec Mars, les
emprisonna pendant leur sommeil dans un fil<>t d'acier aux mailles im-
perceptibles et appela ensuite à jouir de ce spectacle les autres dieux qui
se moquèrent de lui.
10, Molles. — Var. de 88 : douces.
224,
1, Bastaî^d. — Énée, fils de Vénus qui l'avait eu d'Anchise et auquel elle
fit faire de nouvelles armes par Vulcain, quand, fuyant Troie qui venait
de succomber, il passa en Italie pour y fonder une nouvelle patrie.
22, Maltalent. — Méchanceté, dépit.
28, Don. — C'est ce qui ne fut que trop bien vérifié par un Octavius. Ce
fait donna lieu à un acte de dévouement d'un des affranchis du meurtrier,
qui, pour sauver son maître, se déclara l'auteur du crime; mais, quelque
temps après, la vérité fut connue et justice fut faite (58). Tacite, Ann.,
XI II, 4L
34, Monopoles. — Assemblées factieuses.
Fc.636 ESSAIS DE MONTAIGNE.
226.
fi, Chasteté. — Var. de b8 ; tempérance.
1"2, Couuertement. — Hérodote, IV, 2, dit bien que les Scythes ôtaient la
" vue à leurs esclaves, mais il ne parle ni de leurs femmes, ni du motif que
Montaigne leur prête.
10, Opportunité. — ■ Une femme (fort sage d'ailleurs à ce que dit l'histoire)
déclarait qu'elle répondait d'elle toute l'année, hormis le mois de mai. » Payex.
27, Discrepance. — Que sommes-nous du reste, sinon un amas de pensées
et de passions contraires, qui sont sans cesse en opposition entre elles?
— Discrepance : contrariété, discordance, du latin discrepanlia; n'est plus
usité.
31, Enuis. — Mal volontiers, à contre-cœur, avec répugnance; du latin in-
vilus.
32, Homère. — Odyssée, XVII, 347.
228,
3, Difficulté. — Et j'ai autant de peine à refuser ceux qui sollicitent mon
assistance.
8, Pulmonique. — Poitrinaire, ou, comme on dit plus généralement au-
jourd'hui, tuberculeuse. — « En elles, dit un proverbe lorrain, le haut dé-
fend le bas. »
11, Marché. — Elles n'en rendent leur vertu que plus suspecte, d'autant
que les excuses...
20, Contraire. — Ces deu.\ dernières phrases, depuis le mot- Outre », se
rapportent à ce que Montaigne a dit plus haut des femmes « qui se vantent
d'avoir leur volonté vierge et froide ».
26, Contrepoil. — Qui fait entendre le contraire de ce qu'elles disent.
34, Estrangere. — Qui sans ingérence étrangère, uniquement laissées à
• elles-mêmes.
230,
5, Adiré. — Égaré, perdu. Vient de « à dire » ; est encore en usage dans
le langage judiciaire : une pièce adirée,, est une pièce qui est à dire, qui
manque. V. N. I, 164 : A dire.
10, Fatua. — Varron, dans Lactance, I, 22.
13, Hommes. — « Un jour, quelqu'un reprochant à Hiéron qu'il avait l'ha-
leine puante, et lui tançant sa femme de ce qu'elle ne lui en avait jamais
rien dit, elle lui répondit : « Je pensais que l'haleine de tous les hommes
sentait ainsi. • Plutarque, Apophlh. des rois, et dans son traité Comment on
pourra recevoir utilité de ses ennemis, 7.
21, Soy. — S. Augustin conte un fait analogue : « Acindynus, consul l'an
430, étant gouverneur d'Antioche, avait menacé un débiteur du trésftr
public qui était en retard pour le paiement d'une livre d'or, de le faire
pendre, s'il ne s'acquittait à bref délai. Celui-ci avait une femme dont était
épris un homme fort riche, qui lui oflVit de payer cette dette, si elle
voulait passer une nuit avec lui. La femme, après avoir pris conseil de
son mari qui était retenu en prison, y consentit: mais après cet homme
éluda sa promesse. La victime alla porter plainte au Gouverneur qui, se
reconnaissant le premier coupable pour trop de sévérité, se condamna lui-
même à désintéresser le trésor et punit le mystificateur. • Bayle.
27, Entremise. — A cet égard, le monde n'a pas changé, et, aujourd'hui
comme aloi-s, combien d'hommes doivent leur fortune à leurs femmes!
L'ignorent-ils? quelques-uns assurément; mais pour la plupart on n'en
saurait douter, surtout quand on les entend attribuer impudemment à
leur seul mérite les hautes positions auxquelles ils sont parvenus. Victor
Thierry.
27, Argien. — Plutarque, traité De l'amour, 10.
29, Mecenas. -~ Pi.utarque, De l'amour, 16. — Ce fait est aussi rapporté
par CicÉRo.N d'après Lucii.ius qui vivait cent ans avant lui. Ce n'est donc
pas de Mécène, qui vivait au temps d'Auguste, qu'il est ici question;
on ignore également le Galba dont il s'agit.
NOTES. LIV. m, CH. V. VOL. III, PAG. 230. Fc.G37
31, Coussin. — On mangeait alors, chez les Romains, à demi couché sur
des lits analogues aux canapés sans dossier et chaises longues de notre
époque.
36, Desbordées. — Dans 1 éd. de 88, cette phrase suit immédiatement ces
mots qu'on a lus plus liaut : « Gardons les à vh plus noble siège ».
232.
G, Indes. — Arrien, Hist. bid., 17.
13, Viure. — Di0(if;sE Laerce, II, 105; Aui.u-Gelle, II, 18. — Pliédon n'en fit
pas métier de son plein gré, comme Montaigne le donne à entendre;
mais, étant esclave, son maître l'y forçait. V. N. I, 650.
15, Vie. — « Voyant, dit Hérodote, la ville remplie de jeunes gens qui, dans
l'ardeur de leurs passions ellfrénées, ne cessaient d'attenter à ce qui devait
être l'objet de leurs respects, Solon aclieta et plaça dans des lieux déter-
minés, des femmes toujours prêtes et à l'usage de tous » ; nos maisons
publiques ne sont pas autre chose.
16, Polices. — Notamment chez les Lj'diens, Hérodote, I, [M; les Baby-
loniens, HÉRODOTE, I, 196; etc.
17, Sollicitude. — De la jalousie.
19, Boucler. — Pris ici au figuré; réminiscence des ceintures de chasteté
dont il était fait usage au moyen âge et dont il existe des spécimens dans
les musées, notamment dans celui de Cluny, à Paris.
25, Rengrege. — Aggrave encore davantage.
36, Veoir. — Quelle folie d'arracher...
234,
1, Rapport. — Qui n'affligent que par la publicité qu'on leur donne.
5, Voyage. — Plutarque, Les demandes des choses romaines, 9.
10, Estrangere. — Montaigne donne de ce singulier abus qui a existé aux
temps barbares de la féodalité une explication admissible. La religion, du
fait de ses ministres, alors que la femme était bien peu (aujoui-d'hui elle
est beaucoup, et va tendant à devenir trop), a pu dans le principe inter-
venir pour la sauvegarder quand son passé n'était pas irréprochable et
assurer ainsi la paix des ménages. V. N. III, 212 : Nopces. Par la suite le
seigneur, un autre sentiment (libidinage, cupidité) se joignant à la cause
première, sera arrivé à se substituer au prêtre et de la sorte se sera établi
ce droit dit de jambage, de cuissage, de préUbation, dont l'existence a été
niée, mais dont on retrouve de nombreuses preuves irréfutables. V. N.
I, 102 : Faire. Ce droit, suzerains clercs et laïques le possédaient bel et bien
jadis et de fait en usaient quand bon leur plaisait, le remplaçant quand
ils le jugeaient à propos par une redevance qui, à la longue, devint la
règle quand les mœurs s'adoucirent et surtout lorsque serfs et bour-
geois en arrivèrent à imposer leurs revendications. — Les chanoines de
Lyon, notamment, sont mentionnés comme l'ayant possédé et s'étant long-
temps refusés à y renoncer, probablement dans sa forme pécuniaire.
Rabelais y fait allusion. Parmi ceux qui aujourd'hui le révoquent en doute,
il en est qui y voient simplement une interprétation maligne, transmise
par la tradition, de la coutume qui aurait existé au commencement, dans
la Chrétienté, de consacrer à la prière les trois premiers jours du mariage,
usage renouvelé, parait-il, des Athéniens, où la mariée, durant ces trois
jours, conservait sa couronne virginale.
24, Vicissitude. — Attendez-vous donc à la pareille et préparez-vous à l'être
à votre tour, car tout est vicissitude dans la nature et tout y est com-
pensé.
32, Sages. — « Les sages ne dévoilent pas leurs dissensions domestiques. »
Euripide.
31, Languager. — Ou langagier; bavard, verbeux, loquace, qui aime à
parler.
36, Sent. — Camus, évêque de Belley, répondit à un mari qui le priait d'en-
gager sa femme à une vie plus honnête et plus décente : <■ Tout ce que
je pourrais représenter à votre femme serait assez inutile; le silence de
Fc.638 ESSAIS DE MONTAIGNE.
ma part, et surtout de la vôtre, mo paraît beaucoup plus sage. Croyez-
moi, mon ami, il vaut mieux s'appeler « Cornélius Tacitus ■> que <• \'u-
blius Cornélius. » Naigeon.
236,
(i, Pittacus. — Plutarque, Du contentement ou repos de l'esprit, 1 1.
G, Défaut. — Incommodité, quelque chose qui trouble notre repos et nous
empêche d'être heureux.
11, Interiner. — Déclarer valable, accepter. — On dit aujourd'hui ■• enté-
riner >', et le mot n'est plus employé qu'en langage judiciaire.
13, Femme. — Ce cas, donné par Montaigne, comme admis par le Séiial
de Marseille, pour justifier à ses yeux le suicide, est de l'invention de
l'auteur; les raisons admises étaient uniquement l'adversité ou une trop
grande prospérité, ainsi qu'il est indiqué, d'après Valère Maxime, liv.
II, ch. III des Essais, I, 650.
17, Sourd. — C'est-à-dire qu'une femme doit fermer les yeux sur bien des
peccadilles et qu'un mari ne doit pas prêter l'oreille à tous les commé-
rages. BoNNEFo.N. — Cette maxime est du roi Alphonse V d'Aragon, elle a
été ainsi mise en vers :
« Il laul, pour qu'uu hymen en tous points soit heureux.
Que le mar soit sourd et la femme sans yeux. »
23, Cheuet. — Hausser le chevet; expression usitée du temps de Montaigne
pour dire « renchérir sa marchandise ».
27, Flaminius. — En 192. Devant entrer en opérations contre Antiochus
roi de Syrie, auquel on prêtait force alliés, pour ramener à leur juste
valeur les forces de ce prince qu'on exaltait devant lui, Flaminius contait
qu'un hôte, chez lequel il avait été reçu, lui ayant offert, au moi^ de juin,
un festin où figuraient du gibier en quantité abondante et variée, on
s'étonnait qu'il pût en être ainsi en cette saison. A quoi l'hôte répondit
que cette diversité n'était qu'apparente, que cette venaison n'était autre
que de la chair de porc déguisée par les assaisonnements. « Il en est ainsi,
ajoute Flaminius, des armées du roi, dont il vient d'être fait une des-
cription si emphatique. » Tite-Live, XXXV, 49.
27, Félon. — Var. de 88 : ambitieux.
39,' Parties. — Ses intrigues.
238,
10, Ville. - En 48. Tacite, Ann., XI, 26, 27.
13, Insistant. — En lui résistant.
21, Intelligence. — Tacite, Ann., XI, 36. — Entre autres Mnester et Traulus
Jlontanus. Le premier était un danseur dont Messaline était éperdument
amoureuse; ne pouvant le faire consentir à ses désirs, elle pria l'empereur
de lui commander d'obéir; Claude, sans plus s'inquiéter de ce dont il
s'agissait, lui ordonna de faire tout ce qu'il plairait à Messaline, et dès lors,
il ne fit plus de résistance. — Traulus Montanus était un jeune chevalier
romain qui, dans la même nuit, avait été appelé et renvoj'é par elle, qui
passait avec une égalité du désir au dégoût (49). — Quelques années au-
paravant (42), un Appius Silanus avait été mis à mort pour l'avoir of-
fensée en refusant de consentir à sa passion.
24, Vulcan. — Voir plus haut (III, 194) : Dixerat...
240,
1, Infusus. — Tous ces mots si naturels et si expressifs se trouvent, les
uns dans le passage de Virgile cité. III, 194, les autres dans celui de
Lucrèce qui vient d'être reproduit.
3, Rencontre. — Pointe d'esprit, jeu de mots.
4, Constante. — Douce, coulante.
7, D'efforcé. — De forcé, disons-nous aujourd'hui.
11. Penser. -- A quelqu'un lui demandant ia recette de son style, .l.-J. Rois-
seau répondait : « Pensez comme moi, vous, écrirez comme moi. »
NOTES. LIV. III, CH. V. VOL. 111, PAG. 240. Fc.630
23, Choses. — Plltakque, Démosthène, 1, s'exprime ainsi : « Bien tard
déjà, étant au déclin de ma vie, quand je vins à m'occuper d'ouvrages
latins, il m'arriva une chose étrange bien que très vraie : c'est que je n'ai
pas tant compris ce qu'ils contenaient par la connaissance quf j'avais de
la langue, que parce que je savais ce dont il était question, ce qui m'a
conduit à saisir aisément la signification des mots employés. •
30, Langue. — •< La fréquente lecture d'Amyot et de IMontaigne est une fort
bonne initiation à l'art d'écrire, parce que les tours de phrase et certaines
des expressions de leur temps ont une naïveté, une richesse ou une éner-
gie auxquelles notre langue actuelle atteindrait difficilement. » Cii. Nodikr.
33, Appesantissent. — Leur donnent plus de poids, plus de force, plus
d'expression, enrichissent la langue de tours nouveaux, grâce à l'appli-
cation sage et ingénieuse qu'ils savent en faire.
242,
1, Siècle. — Montaigne vise ici vraisemblablement Ronsard et son école,
les poètes de la Pléiade.
5, Discrétion. — Mais l'appropriation qui laisse à désirer et l'abus qu'ils
en font les perdent.
8, Nouuelleté. — Pourvu qu'ils puissent trouver dans la nouveauté de
quelques mots de quoi s'applaudir, ils ne se mettent point en peine de
peindre exactement les choses. — « Se gorgiasser », qui signifie se plaire,
se flatter, s'applaudir, est présentement tout à fait hors d'usage.
13, Emprunter. — Suivant l'idée exprimée ici, beaucoup de termes em-
ployés soit à la chasse, soit à la guerre, sont passés dans la langue, quel-
ques-uns avec une acception un peu modifiée et, comme le prévoyait Mon-
taigne, sans rien perdre de leur grâce. De la chasse, nous viennent :
prendre son essor, tenir en ses serres, faire gorge chaude, fureter, être
aux aguets, à l'affût, aux abois, sur la voie, sur la piste, sur les traces,
aller sur les brisées, se rabattre, etc.; de la guerre : se ranger sous les
drapeaux, se jeter dans la mêlée, recruter des adhérents, revenir à la
charge, reparaître dans l'arène, être désarçonné, rompre en visière, être
armé de toutes pièces, etc..
15, Maniant. — Souple, flexible, maniable.
22, Commun. — En notre langage des basses classes.
28, Mode. — Manière; du latin modus, qui signifie manière, façon.
34, Faire. — Dieu veuille qu'ils aient eu raison d'agir ainsi!
244,
2, Equicola. — Allusion aux ouvrages intitulés : « Les Assolains, de la
nature d'amour >• du cardinal Bembo, et « Délia Natura d'Eamore » d'Equi-
cola.
9, Antinonydes. — D'après Yalère Maxime, Aulu-Gelle, Plutarque et Sui-
das, c'est « Antigénides ».
25, Inaduertement. — Ce qui ne peut guère être autrement, puisque j'écris
à la hâte et sans attention.
30, Moy. — V. N. II, 524 : Autheur.
246,
20, S'encheuestroyent. — Se mettaient la chevètre (le licou), comme on
fait à une bête de somme; — signifie ici « s'embarrasser », ce qui est son
acception la plus ordinaire.
21, Eux mesmes. — Eliex, De Animal., XVII, 25; Strabon, XV. — Ale.xandre
était sur les bords de l'Hydaspe, occupé à construire la flotte qu'il envoya
en reconnaissance sur le golfe Persique, lorsque sur le sommet d'une col-
line lui apparurent rangés en bataille un assez grand nombre de ces singes;
les prenant pour des ennemis, il allait les faii-e charger, quand le roi
Taxile, qui l'accompagnait, le détrompa; ils étaient de taille extraordi-
naire, c'étaient probablement des orang-outangs (nom qui en malais signi-
fie homme de la forêt) qui existent encore dans ces contrées; ils ont une
grande ressemblance avec un homme et par leur inteUigence et leur con-
formation semblent des êtres intermédiaires entre lui et la brute; se
Fc.640 ESSAIS DE MONTAIGNE.
tiennent ordinairement debout sur les pieds de derrière, sont pleins de
force et d'agilité et de caractère relativement doux. Pour s'en emparer
vivants, les chasseurs, quand ils en voient sur un arbre, s'établissent avec
un seau d'eau à portée de leur vue et font raine de se débarbouiller,
substituent à leur seau un pot rempli de glu et s'éloignent; le singe
descend de son arbre, s'englue la figure et, n'y voyant plus, devient .de
proie facile. On procède encore, en ayant de grands sacs dans un desquels
entre le chasseur qui, en se retirant, en laisse d'autres garnis de poils et
enduits de glu à l'intérieur, que naturellement les singes essaient de chaus-
ser, ce qui les met à leur merci; néanmoins on les connaît peu, tous
ceux qui ont été amenés en Europe, n'ayant pu y supporter les rigueurs
du climat. — A la même catégorie appartiennent le Gibbon qu'on trouve
également dans ces contrées, le Chimpanzé qui dans l'ensemble se rap-
proche encore plus de l'homme et appartient au continent africain. En
Afrique se trouve aussi le Gorille, de taille beaucoup plus considérable,
dépassant parfois deux mètres, beaucoup plus fort et de caractère offensif,
n'hésitant pas à attaquer l'homme, dont, au contraire, les autres évitent
l'approche.
2,">, Serments. — Ce juron s'emploie encore fréquemment; s'il est la plus
droite des exclamations de cette nature, la moins droite, autrement dit la
moins orthodoxe, était Jarnidieu (je renie Dieu), fort employée aussi à cette
époque; d'où pour éviter un blasphème est venu Jarnicoton qui avec
Ventre-saint-gris étaient les jurons habituels d'Henri IV; Louis XI disait
Pasquedieu; Duquesne, Cent diables. — Par le Chien! est un juron sans
signification particulière, imaginé pour éviter de jurer par les dieux,
analogue à celui de Vertuchou, par la vertu du chou, qui s'emploie par-
fois en France. Cappari viendrait, dit-on, du nom italien du câprier, auquel
cas il ne signifierait également rien; ne serait-ce pas plutôt le juron grec
altéré catara, qui signifie malédiction et qui est d'usage courant dans
le pays de Naples?
27, Cappari. — DiOGf:.\E Laerce, VII, 32.
27, Uair. — Diogène Laerce, VIII, 6.
28, Superficielles. — Ceci a rapport à ce que Montaigne a dit plus haut,
qu' « on l'a veu plus souuent iurer par similitude que par complexion » ;
les deux phrases se suivent immédiatement dans l'éd. de 88.
32, Enuis. — Plus à cpntre-cœur.
248,
II, Resueries. — C'est de ce nom que îlontaigne a déjà qualifié son livre
(liv. I, ch. XXV, I, 226), et Boileau dit en en parlant :
• Tantôt son livre en main, errant dans les prairieS:
J'occupe ma raison d'utiles rêveries. »
14, l'abane. — Plus je m'efforce de ...
20, Soif. — Var. de 88 : faim.
22, Vases. — Ses organes génitaux. — L'auteur avait d'abord écrit « ses ro-
gnons >-; contre son habitude, il y a substitué le mot « vases », comme
plus décent, scrupule qu'il n'avait pas eu lorsqu'il a traduit la citation de
S. Jérôme (III, 218).
24, Socrates. — Dans le Banquet de Platon.
27, Cratippus. — Il enseignait à Athènes, eut pour disciple Brutus, le meur-
trier de César; Pompée alla le voir après la bataille de Pharsale et en
reçut des consolations.
250,
3, Platon. — Lois, I, 13. — Ce mot est cité par Polvbe, XV; Clément d'A-
LEXANDKIK, VIII; SyNESIUS, II; etC.
4, louët. — Var. de 88 -i^u'on se iouc de nous, au lieu de « qu'il est...
iouet ».
17, Deuantiere. — Si elle est toute découverte. « Devantière • était le nom
d'une sorte de grand tablier que les femmes portaient à cheval.
NOTES. LIV. ni, CH. V. VOL. III, PAG. 250. Fc.641
26, Alexandre. — Plutarque, Moyens de discerner le flatteur d'avec l'ami,
23.
39, Estendu. — Toutes les opinions s'accordent sur ce point, sans compter
que l'usage si étendu de la circoncision en est un témoignage.
39, CircoDcisioDS. — Qui en est vue punition, add. de l'ex. de Bord, qu'on
a cru devoir insérer dans le texte.
252,
1, Esseniens. — Pline, Nat. Hist., V, 17. — Les Esséniens proscrivaient le
mariage, la servitude et la guerre; ils formaient une sorte d'association
moralç et religieuse, vivant dans des espèces de monastères, mettant en
commun leurs biens et se livrant à l'agriculture; ils oflraient une grande
analogie avec ce qu'étaient les premiers chrétiens. Ils ont duré environ
deux siècles.
9, Zenon. — Diogène L.ierce, VII, 1^.
12, Fuit. — Var. de 88 : desdaigne.
19, Athéniens. — Thucydide, III, 104.
20, Mundifier. — Purifier.
22, Pœnitet. — « Nous estimons à vice nostre estre »; Montaigne a ainsi
traduit cette citation, que l'éd. de 88 fait suivre : Nous accusons en mille
choses, les conditions de nostre estre.
, 23, Mangeant. — Jean Léon, dans sa Description de l'Afrique, dit : « Dans
les déserts de Libye, les gentilshommes du pays portent en tête un linge
noir, dont ils se couvrent le visage, n'en laissant apercevoir que les yeux,
et vont toujours ainsi; quand ils mangent, ils lèvent leur voile pour
introduire leur nourriture dans la bouche et le baissent aussitôt : ils don-
nent pour motif de cette singularité que de même qu'il est indécent de
rejeter devant tout le monde ce qu'on a dans l'estomac, de même il est
inconvenant de le remplir à la vue de chacun. » — Ce port d'un voile d'une
façon continue, est encore pratiqué par les peuplades qui sillonnent le
Sahara, notamment par les Touareg, et est motivé par le besoin de se
protéger contre les sables ténus qui constituent le sol dans ces contrées
que le moindre vent déplace, qui sont en permanence en suspension dans
l'air et pénètrent partout, les vêtements aussi bien que les tentes, sans
qu'on puisse s'en défendre.
23, Grandes. — Add. de 88 : ^n toute sorte de grandeur. s
254,
6, Adorées. — En Afrique : les Atarantes, dit Hérodote; les Éthiopiens
(Strabon); les Atlantes (Pline),
10, Nécessaires. — Var. de 88 : naturelles.
18, Partisanes. — Féminin de partisans; ces lois doivent donc être des
lois de parti, de faction; mais comme Montaigne oppose ici les lois par-
tisanes de l'homme aux lois universelles de la nature, ces lois partisanes
doivent être des lois partielles, particulières, comme il les nomme à la
ligne suivante; de son invention, comme le porte une variante de l'éd. de
Bordeaux. V. ci-dessous : Ordonnances.
18, Fantastiques. — C.-à-d. aux tiennes qui sont dictées par tes passions
personnelles et tes préjugés.
20, Ordonnances. — Var. de l'ex. de Bord. : règles posiliues de ton inuentlon
V occupent et attachent et les règles de la paroisse; celles de Dieu el du monde,
au lieu de : « ordonnances... monde ».
23, Poètes. — De Virgile sur Vénus et Vulcain, III, 191; et de Lucrèce
sur Vénus et Mars, III, 238.
26, Reseui. — Ciuimpc, sorte de fichu en étofl'e légère. — Reseul, littérale-
ment réseau, du latin reticulum., filet à mailles, d'où vient également
réticule, nom donné au petit sac qu'actuellement les dames portent presque
constamment au bras, les exigences de la mode faisant que les robes n'ont
plus de poche.
20. JEgyptien. — Plutarque, De la curiosité, ?,. ^
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 41
Fc.642 ESSAIS DE MONTAIGNE.
256,
1, Ceux-ci. — Virgile et Lucrèce. •
•1, Mineuses. — Minaudières, comme nous disons aujourd'hui.
G, Aualloit. — On attribue ce souhait à Philoxkne, le même que Denys le
Tyran condamnait aux carrières pour avoir trouvé ses vers n.auvais.
Aristote, Et hic, III, 10; Athénée, I, 6.
25, Commodité. — Cette mesure apportée à nos plaisirs, tournerait à notre
avantage...
258,
2, Paissoit. — Diogè.ne Laerce, VII, 130, donne une autre raison de la
continence de Thrasonydes : c'est qu'il n'était pas aimé de sa maîtresse et
qu'appartenant à l'école stoïcienne, ses poursuites étaient contraires aux
principes de cette école qui tenait l'amour comme étant de l'amitié éveillée
par la vue de la beauté. Si la raison que lui prête Montaigne eût été réelle,
c'eût été bien de l'inexpérience de sa part, une occasion perdue ne se re-
trouvant guère, comme l'ont dit Horace : •< Carpe diem (Saisis le jour où
elle se présente) »; .Martial : « Vive hodie (Vis aujourd'hui même) », et
tant d'autres, y compris La Fontaine dans son conte de Nicaise et sa fable
Le Loup et le Chasseur :
• .louis! — Je le ferai. — Mais quaiiU donc? — Dès demain.
— Eli, mon ami! la mort peut te prendre en chemin,
Jouis dès aujourd'hui... •
5, Socrates. — Xénophon, Mémoires sur Socrate, I, 3, 11.
11, Culilingis. — Montaigne a changé le dernier mot de cette citation pour
la rendre plus acceptable.
12, Party. — Partagé.
12, Laides. — « On a cent mauvais jours pour une bonne nuit. » Remarques
d'un jsosmopolile, 1791.
15, Bon. — Martial, dans plusieurs de ses épigrammes, s'élève contre cette
mode des baisers. Les premiers chrétiens se baisaient ainsi sur la bouche
dans leurs agapes; cet usage, qui dura plus de quatre siècles, fut aboli à
cause de ses conséquences. Ce mode d'embrasser les femmes de la sorte
existait jadis en France; on dit qu'il est encore fréquent en Angleterre.
— De nos jours, le baiser où que ce soit, est l'objet d'une campagne
tendant à sa suppression par raison d'hygiène, comme propagateur de
certaines maladies contagieuses : la tuberculose, la syphilis, la diphtérie,
les maladies éruptives, etc. En Amérique s'est même formée une ligue
contre son usage. Baiser les bibles, les évangiles, les patènes, etc., offre
même danger. Les perruches en vous bécotant, les chiens en vous lé-
chant sont susceptibles de communiquer pareillement certaines maladies,
surtout, de la part du chien, des maladies parasitaires (les vers), quand
ce sont des enfants qui les caressent.
22, Practiquer. — Gagner par des pratiques adroites.
24, Saillir. — L'éd. de 88 port. : sallir.
25, Faicte. — Valère Maxime, VIII, 11, 5. — Cette Vénus, qui était en marbre
blanc, ornait le temple de Gnide (Asie Mineure). « Ce temple, écrit Pline,
est ouvert de toutes parts, de sorte qu'on peut la contempler de tous les
côtés, ce qu'on croit ne pas déplaire à Vénus; dans quelque sens qu'on
l'examine, on ne cesse de l'admirer. » Un inconnu, dit-on, se passionna
pour elle, se cacha la nuit dans le temple, et laissa sur le marbre la tache
dénonciatrice de ses amours. » — On cite dans ce même ordre d'idées,
mais plus excusables parce qu'ils sont le fait d'erreurs occasionnées par
l'art, sur des êtres privés de raison : un cheval hennissant à la vue d'une
cavale en peinture; des chiens aboyant à la vue d'une chienne représentée
dans un tableau; un taureau, à Syracuse, s'enflammant et devenant fu-
rieux, pour une génisse d'airain de parfaite ressemblance. Valère Maxime.
26, Ensueroit. — Envelopper d'un suaire, d'un linceul; ce mot, fort usité
du temps de Montaigiïfe, ne l'est plus aujourd'hui.
NOTES. UV. III, OH. V. VOL. Ill, PAG. 238. Fc.643
30, Enterrement. — Hérodote, II, 89.
31, Merueilleusement. — Var. de 88 : monstrueusement.
32, Trespassée. — On ne sait d'où Montaigne a tiré ce fait. Diogène Laerce,
I, 96, dit que Périandre, irrité contre sa femme par ses concubines, la tua
dans un accès de colère, en la précipitant du haut des degrés de son
palais, en lui donnant un coup de pied, pendant une grossesse. Quoi qu'il
en soit, on rapporte aussi qu'il sacrifia à sa mémoire toutes les parures
des femmes de Corinthe. Leur ayant prescrit de se réunir dans le temple
de Junon, elles s'y rendirent comme à une tète avec leurs plus riches
parures et là, sans distinction de rang, ni de naissance, elles furent dé-
pouillées par des gardes apostés à cet effet, et tous leurs habits brûlés
en holocauste.
34, Mignon. — D'après la Fable, avait été placé dans le ciel par Jupiter
qui, ensuite, l'en chassa et le condamna à un sommeil perpétuel, parce
qu'il avait osé attenter à l'honneur de Junon. Diane s'éprit d'une vive
passion pour lui pendant qu'il dormait et venait souvent le visiter; il est
à croire qu'Endymion cultivait l'astronomie et passait les nuits à suivre
le cours de la lune et que c'est là ce qui l'aura fait passer pour son
amant.
260,
7, Ailleurs. — Certains ont vu là un écho de la légende de la Belle Ferron-
nière qui passa pour avoir causé la mort de François I", dont elle était
la maîtresse, parce que le mari jaloux aurait inoculé à dessein à sa femme
le virus d'une maladie mortelle à cette époque, pour que son infidèle
épouse la communiquât à son insu au roi; c'est peu probable, parce que
le sens de la phrase porte sur un tout autre ordre d'idée et que François I"
est mort d'une fistule au périnée et non des suites d'une maladie syphili-
tique. Payen.
13, Comme. — Comme leur plairait la compagnie d'un gJ-os...
29, Brutalité. — Stupidité, bêtise.
32, Rien. — Var. de 88 : guère.
37, Serue. — Tyrannique, astreignante.
262,
4, Feu. — Montaigne semble disposé à généraliser ici, en ce qui touche la
femme en Italie, ce proverbe qui y a cours ; « A Gènes, les hommes sont
sans foi, les femmes sans pudeur, les montagnes sans bois, les mère sans
poissons. >'
9, Liberté. — L'éd. de 88 aj. : Ayant tant de pièces à mettre en communica-
tion, on les achemine à y employer tousiours la dernière, puisque c'est tout
d'vn pris. Nous courons à peu près mesme fortune. Ils sont trop extrêmes en
contraincte, nous en licence. De ces trois phrases, l'ex. de Bordeaux conserve
les deux dernières, que nous avons cru devoir pareillement maintenir dans
la traduction.
19, Sauues. — Sans encourir de dommages. On appelait jadis bague, non
seulement les anneaux qui se mettent aux doigts, mais encore tous les
bijoux précieux.
22, Tousiours. — Add. de 88 : estoient.
23, Sarmates. — Hérodote, VIH, 117.
29, Aristippus. — Diogène Laerce, Aristippe, II, 09.
32, Nom. — Sa réputation, sa renommée.
264,
3, Tenants. A ceux qui ont à se défendre. — Tenants est l'opposé d'assail-
lants.
3, Gourmandise. — Add. de 88 : et de faim.
9, Scythes. — « L'amour ne meurt jamais de besoin, mais souvent d'indi-
gestion. » Ninon de Lenclos.
16, Intestins. — Cachés et renfermés.
19, Amazones. — Diodore de Sicile, XVII, 10; Qui.nte-Curce, VI, 5. — Cette
peuplade, sur laquelle on a peu de données précises, semble avoir pris à un
Fc.644 ESSAIS DE MONTAIGNE.
moment quelque extension par la force des armes. Les Amazones se per-
pétuaient, dit-on, par un commerce passager avec les habitants des pays
voisins et exposaient leurs enfants mâles; on dit aussi qu'elles se brûlaient
la mamelle droite pour pouvoir tirer de l'arc avec plus de facilité. — Le
fait rapporté ici est, d'après Plltarqle, de pure invention, et à l'appui de
son dire il invoque le témoignage de Lysimachus, l'un des précepteurs
d'Alexandre qui ne l'avait jamais quitté et déclarait n'en pas avoir con-
naissance.
33, Nous sommes. — Dans l'éd. de 88, ce paragraphe suit immédiatement
la phrase du précédent où Montaigne dit que la nature a fourni les femmes
de pièces uniquement propres à la défensive. Il a ajouté depuis l'histoire
de Thalestris, d'où une certaine interruption dans le sens.
36, Fermir. — De fixer, d'affermir.
266,
4, Estonnent. — S'étonnent de l'inconstance en amour.
5, Incroyable. — Var. de 88 : monstrueuse.
7, L'arrest. — La constance.
15, Sac. — De confiance, sans voir ni connaître ce que l'on achète. On dit
aujourd'hui « chat en poche » et tel est même le texte de l'éd. de 88. —
Cette expression : « acheter chat en sac » vient de ce que jadis où le bra-
connage était très sévèrement puni, les braconniers, pour moins s'exposer,
vendaient leur gibier enfermé dans des sacs, que l'acheteur n'ouvrait
même pas de peur d'être surpris ; aussi parfois, au lieu du lièvre ou autre
produit de chasse pour lequel il avait fait marché, ne trouvait-il qu'un
chat, et, étant lui-même en faute, il n'avait garde de porter plainte.
21, Abusée. — Bayle, art. Jeanne I" de A'aples. — En 1345, André, appelé
par les Italiens Andreosso, était de sa nature très ombrageux; mécontent
de n'avoir aucune autorité parce qu'il n'était que le mari de la reine,
alors que de son propre chef il avait des droits personnels à la couronne
primant ceux de sa femme, à juste titre jaloux de ses débordements qui
étaient connus de tous, redouté pour les projets de vengeance qu'on lui
prêtait et son emportement, une conspiration se forma, dont tous les con-
jurés étaient de l'entourage de la reine, et ils l'étranglèrent avec un lacet
de soie, persuadés qu'un anneau que sa mère lui avait donné était un ta-
lisman le préservant de mourir par le fer ou le poison (1547). Son frère
Louis, roi de Hongrie, pour venger sa mort, envahit le roj'aume de Naples;
Jeanne s'enfuit dans la Provence qui lui appartenait et ne put revenir
dans ses états d'Italie que lorsque le Pape, au jugement duquel on convint
de s'en remettre, l'eut déclarée innocente de cet assassinat, après lequel elle
avait épousé son amant qui en avait été le principal auteur. Elle-même
mourut étouffée en 1587.
21, Que l'action. — C'est la suite de la phrase qui commence par : « elles
peuuent attaquer ». Depuis l'édition de 1588. Montaigne a intercalé l'exemple
de .leanne de Naples, ce qui i-end la liaison des idées moins saisissable.
22, Platon. — Traité Des Lois, XL
27, Essayant. — // peut advenir qu'en nous essavanl, ainsi que porte l'éd.
de 88.
268,
5, Personne. -^ Add. de 78 : d'honneur.
8, Lustrum. — Il y a dans le texte d'Horace « le huitième lustre (quarante
ans) », au lieu de « onzième (cinquante-cinq ans) » qu'y a plus judicieuse-
ment substitué Montaigne.
25, Consens. — Témoins.
35, IlUbenter. — De ces trois vers, le premier est le commencement d'une
épigramme des Veteru.\i poetarum Catalecta, intitulée Priapus: les autres
sont tirés d'une autre épigramme du même recueil, ayant pour titre Ad
malronas.
A l, L'essence. — Nous nous déferons aisément des vices qui ne sont tels qu'en
apparence, lorsque nous n'en aurons plus de réellement enracinés en nous.
NOTES. LIV. m, CH. V. VOL. Ilf, PAG. 370. Fc.64o
270,
i, Nouueaux. — Que nous imaginioas à notre fantaisie des devoirs nou-
veaux.
5, Fautes. — Où les fautes sont des crimes, et où les crimes ne sont que
des fautes.
10, lustes. — Cette maxime est d'une application bien générale, qu'il s'a-
gisse de la morale ou d'actes.
10, Superficiels. — Dont la vertu est toute en apparence.
13, Rechargeons. — Au contraire, nous en augmentons...
14, Panneaus. — Vieux haillons de drap; du latin panniis, qui signifie drap,
étoffes en loques.
27, N'ont. — Qu'ils ne doivent pas s'en prendre...
30, Rythme. — Pour qu'en raison de mon peu de mesure, de règle. — Cer-
tains estiment qu'il faudrait traduire : - qui, parce que je ne m'exprime
pas en vers ».
31, Deux. — Théodore de Bèze (auteur du vers latin qui suit), qui a écrit
dans sa jeunesse qui fut assez dissolue des poésies^ latines élégantes, mais
licencieuses; et S. -Gelais ^auteur du vers français cité après), qui, bien
que dans les ordres, ne s'en livrait pas moins aux plaisirs et n'y renonça
que lorsqu'il fut nommé évéque (1474).
32, Grestez. — Des plus huppés, des plus en relief.
34, Traicte. — « Quelqu'un qui prononcerait aujourd'hui ce vers parmi
nous, serait regardé comme un crocheteur ivre. Défaisons-nous donc de
nos préjugés, quand nous lisons d'anciens auteurs ou que nous voyageons
chez des nations éloignées; la nature est la même partout et les usages
diffèrent partout. » Voltaire, Dictionnaire philosophique.
272,
17, Remises. — Défaillances.
27, Destuytes. — Détours, dissimulations, défaites.
274,
2, Capitulations. — Add. de 88 : cérémonieuses.
2, Faussées. — Violées.
3, Caler. — Distendre, relâcher; terme de marine : caler les voiles, les
vergues contre les mâts, c'est les replier et les fixer; signifie ici céder,
ployer.
4, Fois. — Plus d'une fois, dans l'intérêt de leur honneur, j'ai niaitrisé le
plaisir que j'aurais pu éprouver, dans la crainte d'exposer leur réputation
en les rendant mères.
5, Assignations. — J'ai, autant que j'ai pu, pris sur moi le danger de nos
rendez-vous.
16, Génitales. — Dans l'ex. de Bord., Montaigne avait d'abord ajouté : Le
dessein d'engendrer doit estre purement legilime, qu'il a rayé ensuite; cette
addition lève tout doute sur ce qu'il a voulu dire dans la phrase précé-
dente.
22, Dec. — Montaigne veut dire par là qu'après avoir été exposé par l'amour
à bien des traverses, il est enfin débarrassé pour toujours de cette dange-
reuse passion.
276,
2, Est. — SÉxÈQUE, Epist. 95 ; le texte porte manet au lieu d'est. La Fontaine
reproduit cette idée, bien que sous une autre forme, dans sa fable des
Deux chiens et l'âne mort :
• Les vertus devraient être sœurs
Ainsi que les vices sont frères.
Dès que l'un de ceux-ci s'empare de nos cœurs,
Tous viennent à la (ile, il ne s'en manque gucres. »
6, Orbes. — Contondants, produisant des meurtrissures, sans occasionner
de plaies.
9, Panetius. — Sénèque, Epist. 117.
Fc.646 ESSAIS DE MONTAIGNE.
16, Venues. — Les assauts, les chocs continus.
18, Ensemble. — Marcher de pair, s'accorder. — « Oh! qu'il est malaisé,
dit Agésilas (Plltarque , Agésilas, 4), d'aimer et d'être sage tout à hi
fois. »
19, Illégitime. — Var. de 88 : vitieuse.
23, Dilaier. — L'éloigner le plus longtemps des atteintes de la vieillesse. —
Var. de 88 : relarder.
31, Sage. — L'éd. de 88 port. : bon homme.
32, Sacrâtes. — Xéxophox, Banquet, IV, 27.
40, Humaines. — Add. de 88 : ew règle et.
41, Dea. — Pourquoi cela ne serait-il pas.
42, Estriue. — Lutte contre, combat, conteste, contrarie, interdit.
278,
4, Ingénieusement... affame. — Var. de 88 : ingénieusement, cTéuiter toute
viande et boisson, qui nous altère et nous a/f'ame, c'est-à-dire qui nous fasse
désirer nouuelle faim.
5, Saturité. — Satiété; de saturitas, d'où viennent saturer et saturation.
12, Rigueur. — Add. de 88 : c^ d'inhumanité.
14, Prosterné. — Délabré, afl'aibli, aflaissé.
19, Desmembrons. — Var. de l'ex, de Bord. : dessirons, qui n'est autre que
le mot « deschirons » qu'il avait dabord mis et qu'il a effacé pour l'écrire
avec une orthographe conforme à la manière dont ce mot se prononce en
Gascogne.
21, Elle. — La « douleur » dont il vient d'être parlé, et non la « fantaisie »,
c.-à-d. l'imagination dont il a été parlé beaucoup plus haut.
24, ColUgance. — Union intime; du latin colligere, unir, joindre ensemble.
30, Refroidir. — D'en inspirer le dégoût à lame...
34, Infondre. — Imprégner; du latin infundere, verser dedans.
280,
4, Me tienne en haleine. — Var. de 88 : m'exerce.
17, Les nerfs. — Var. de 88 : Valeine.
36, Ancien. — Biou. — Diogène Laerce, IV, 67.
282,
6, Peut. — Vai". de 88 : ne peut.
7, Conférence. — A entretenir commerce avec des personnes auxquelles
il est â charge.
14, Suiue. — Dans la Cyropêdie, Cyrus haranguant ses soldats qu'il conduit
contre Crésus, leur dit : « Poursuivre l'ennemi, frapper, tuer, s'emparer
de tout, s'entendre louer, être libre, commander, voilà le partage des
vainqueurs; un sort tout contraire attend les lâches; que ceux qui.
s'aiment, combattent donc pour moi! » C'est ce qui fait que nombre
d'éditions des Essais portent : « Qui s'aymera, si me suyue », bien que
l'éd. de 95 et l'ex. de Bord, où seul ce passage existe, porte : « Qui
m'aymera, si me suiue », ce qui est en effet une erreur manifeste de
l'auteur, que confirme la citation italienne qui précède. Il est probable que
du temps même de Montaigne comme maintenant le dicton « Qui
m'aime, me suive » était en usage, et aura causé une faute d'impression
qui aura échappé à l'auteur et aura été se reproduisant d'édition en
édition, jusqu'à ce qu'un éditeur avisé l'ait relevée. Toutefois le mot de
la présente édition a bien été dit, notamment pai- Scipion Nasica ameutant
ses partisans contre Tibérius Gracchus (133), et par bien d'autres de-
puis, parmi lesquels Philippe de Valois se résolvant à la guerre contre
les Flamands (1328). — Dans la bouche de Cyrus, ■< Qui s'aime, me suive •
a la même signification que cet appel que, chez les Romains, dans les
cas de danger subit et grave, le Consul ou le Général, prenant un éten-
dard, adressait à tous, en s'écriant : « Que ceux qui veulent sauver la
République, me suivent »; ou que ce mot en France : « La Patrie est en
danger », de la République de 1793. — Ce sont des gestes du même genre
que celui de Sylla à Orchomène (87) voyant ses soldats plier, saisissant
NOTES. LIV. III, CH. V. VOL. III, PAG. 282. Fc.647
une enseigne et les ramenant en leur disant : « C'est ici que je veux
périr; et, quand on vous demandera où vous avez abandonné votre
Général, souvenez-vous de répondre que c'est à Orchomène! >• De Sou-
varoff, en 1800, au pont du Diable en Suisse, se couchant pour obliger les
siens en retraite à s'arrêter, ce à quoi il ne parvint pas. De Bonaparte
cette même année à Marengo, reportant ses troupes en avant par ces
mots : « C'est assez reculer, soldats! souvenez-vous que j'ai l'habituâe de.
coucher sur le champ de bataille. » — Cette erreur en rappelle une autre
de même nature, qui se rencontre dans Virgile, du fait de l'interpolation
d'un copiste : « Audaces fortuna juvat », au lieu de : « Audentes fortuna
juvat », qui présentent deux assertions de sens essentiellement différents :
la première, en disant que le succès appartient aux audacieux quels
qu'ils soient, est assez aventurée et pas toujours exacte; la seconde, en le
préconisant pour ceux qui osent après avoir pesé le pour et le contre,
est fort judicieuse et se réalise le plus souvent.
16, Composition. — IMélange.
19, Xenophon. — Anabase, II, 6, 15.
19, Menon. — Le même dont Platon a donné le nom à un de ses dialogues,
fut l'un des chefs des Grecs à la solde de Cyrus le Jeune, lorsque celui-ci
se révolta contre son frère (400); bien que soupçonné d'avoir trahi,
lorsque les Perses attirèrent ces chefs et les mirent à mort, il fut arrêté
avec eux et subit le même sort.
24, Galba. — Suétone, Galba, 21.
25, Misérable. — Ce misérable c'est Oviue qui, relégué en Sarmatie, écrit à
sa femme, demeurée à Rome sur ses instances, pour intercéder en sa
faveur et qui s'y emploie vainement, qu'apparemment le souci des maux
qu'il endure a dû le vieillir, et termine par les vers qui suivent. — Frappé
par Auguste, en l'an 9 de J.-C, pour un motif qui est demeuré une
énigme, mais que l'on suppose être une intrigue de cour qu'il aurait
connue et divulguée, Ovide ne rentra jamais en grâce, quelques sollicita-
tions dont il fût l'objet; ses espérances de rappel semblent même s'être
évanouies lors de l'avènement de Tibère. Il mourut dans son exil en
l'an 18.
30, Emonez. — Diogène Laerce, IV, 31.
284,
3, Sophiste. — Signilie « ami de la sagesse »; s'employa d'abord en bonne
part et c'est ici le cas; mai.s tomba dans le discrédit, quand ceux qui se
di.saient tels, se mirent à enseigner à prix d'argent l'art de parler et de
disputer .sur tout, fai.sant eux-mêmes profession de soutenir indifférem-
ment en toutes questions le pour et le contre et à attaquer les principes
les plus évidents et les plus respectés. Ils fleurirent en Grèce, surtout au
V siècle; Socrate les combattit ardemment en détournant ses concitoyens
de ces disputes frivoles pour les ramener à la recherche sincère de la
vérité.
4, Harmodiens. ~ Aristogiton et llaruiodius étaient deux jeunes Athé-
niens, liés d'une étroite amitié. La sœur du second ayant été outragée
par Hipparque qui, avec llippias son frère, exerçait la tyrannie à Athènes,
ils conçurent le projet d'en délivrer la ville. Harmodius fut tué, après
s'être défait d'Hipparque; et Aristogiton, mis à la torture pour dénoncer
ses complices, nomma tous les amis d'Ilippias qui furent aussitôt mis à
mort. Interrogé s'il n'en restait pas d'autres, il répondit qu'il n'y avait
plus que lui Hippias qui méritât la mort; celui-ci le fit aussitôt conduire
au supplice (514). Leur initiative amena l'expulsion d'Ilippias; les Athé-
niens leur érigèrent alors une statue et consacrèrent leur mémoire par des
fêtes. — Bion donnait les noms d'Aristogitons et Harmodiens aux premiers
poils follets qui venaient estomper le visage des jeunes gens, laissant
entendre par là qu'ils les débarrassaient des importunités dont ils étaient
l'objet, comme Aristogiton et Harmodius avaient mis fin à l'oppression
d'un tyran. Plutarqle, De l'amour,. 34.
Fc.648 ESSAIS DE MONTAIGNE.
5, Non qu'en. — Mais pas autant que dans.
13, Port. — Le port, la figure de l'amour.
16, Nescit. — Longtemps avant saint .lérônie, Anacréon avait dit : « Bacchus,
aidé de l'amour, folâtre sans règle. »
16, Galbe. — Bonne grâce, agréments. Ancien mot gaulois qui signifiait
gros et gras, et qui, pour ce motif, donné comme surnom à un ancêtre
de l'empereur Galba, est demeuré à la famille.
20, Folastrant. — Var. de 88 : aueugle.
20, Ceps. — Aux fers, dans les chaînes; du latin cippus, entrave.
30, De faire... Socratique. — Var. de 88 : d'entrer en cette noble troque. —
Harde signifie troc, changement, et ici : sacrifice, concession.
33, Platon. — République, V.
286,
1, Préoccuper. — De s'emparer, avant ses compagnes, de la gloire...
20, Nostre. — « La vertu de l'homme et celle de la femme sont les mèmeS; »
disait Antistliône. DioaÈNE L.\erce, VI, 12.
22, Paele. — Le fourgon, long crochet en fer dont se sert le boulanger pour
remuer la braise du four; paele, pelle dont il se sert pour enfourner et
retirer les pains. L'un et l'autre faisant même service et également noircis
par les cendres, « le fourgon se moque de la pelle » (dicton populaire qui
se dit aussi : « le chaudron se moque de la poêle ») peut se traduire : « l'un
vaut l'autre », ou encore ■• qui critique les autres, n'est pas sans y prêter
lui-même ».
CHAPITRE VI.
23, Cocbes. — Au xvi"^ siècle, on appelait « coches » des voitures et aussi
des bateaux affectés aux transports publics, tant par terre que par eau. —
En tant que voiture le coche était à peu près le carrosse de nos jours, un
landau ne se découvrant pas.
288,
6, Recueil. — Chez les Orientaux, l'usage est autre; c'est à celui de ces
effets qui se produit par la bouclie, provenant de vapeurs émises par
* l'estomac et témoignant d'une certaine satisfaction de cet organe quand
il est repu, qu'ils font bon accueil. Ils ne se gênent aucunement pour le
produire; sa manifestation cliez eux ne blesse en rien la bienséance, et
les assistants y répondent par la formule sacramentelle, J"^! J,*srî
(louange à Dieu), qui correspond à celle de ■< Dieu vous bénisse », que
nous répondons à ceux qui éternuent.
7, Aristote. — Problem.. 33, 9.
7, Plutarque. — Dans le traité intitulé Les Causes naturelles, 11.
32, D'armes. — La citation qui suit, se trouve dans le Banquet, dialogue
que Platox consacre à l'amour et qu'il termine par cet éloge de Socratc
qu'il place dans la bouche d'Alcibiade.
32, Route. — Déroute. V. N. I, 366.
290,
23, Leuée. — Rompre la digue, la chaussée qui m'empêche d'être submergé.
21, Epicurus. — Diogène Laerce, X, 117.
27, Robe. — A moi, comme à chacun. Dieu donne le froid, selon qu'il est
vêtu : ■< A brebis tondue, Dieu mesure le vent. »
29, Desarmé. — M'aj^ant peu garni de force...
32, Littiere. — C'était un lit reposant sur des brancards, qui étaient portés
d'ordinaire par des chevaux, surtout quand c'était une litière de voyage.
292,
2, Esgallement. — Les navires, à cette époque, marchaient soit à la voile
(vaisseaux), soit à la rame (galères).
2, Toue. — Remorque; d'où touage, ce procédé de remorquage établi sur la
NOTES. LIV. III, CH. VI. VOL. III, PAG. 292. Fc.649
Seine, dans la traversée de Paris, au moyen d'une chaîne reposant sur le
lit du fleuve et sur laquelle se hèlent les bateaux remorqueurs.
15, Pères. — Tout le xv° siècle est rempli des guerres de la Hongrie contre
la Turquie.
16, Rondelier. — Soldat armé d'une rondelle ou rondache, sorte de bouclier,
ainsi nommé parce qu'il était rond, au lieu d'être oblong.
18, Pauesade. — Ou pavoisade, garniture de pavois ou boucliers juxta-
posés en grand nombre que l'on plaçait au-dessus du pont des bateaux
armés en guerre, pour mettre de tous côtés à l'abri des traits ceux qui
servaient à bord, rameurs et autres.
18, Galliotte. — Galiote. — Bateau de petite grandeur.
25, Logis. — Un poste, une position, un cantonnement, un bivouac.
26, Impost. — Impotent, peu dispos.
28, Peinture. — Semblable à ceux que je viens de décrire.
30, Neantise. — Fainéantise.
31, Race. — Ces rois sont désignés dans l'histoire sous le nom de « rois
fainéants », parce qu'ils étaient dépourvus de toute autorité et que l'exer-
cice du pouvoir était entièrement aux mains des maires du palais. Ils
commencent à Thierry III (673) qui se laissa gouverner par Ebroïn, puis
par Pépin d'Héristal, et prennent fin à Childéric III (752), qui fut détrôné
par Pépin le Bref, son maire du palais.
32, Bœufs.
« Quatre bœufs attelés, d'un pas tranquille et lent.
Promenaient dans Paris le monarque indolent. » Boileao.
34, Luy. — Et, avec lui, une jeune musicienne (la comédienne Cytheris).
Plutarque, Antoine, 3; Cicéron, Philippic., II, 24; Pline, Hist. nat., VIII,
16.
34, Heliogabalus. — JE\.. Lampridius, Hellog., 28, 29.
294,
I, Nud. — En des temps plus rapprochés, semblables exhibitions se sont
produites. A l'entrée solennelle à Paris de Charles VI et d'Isabeau de
Bavière, dans le bassin d'une des places publiques, s'ébattaient deux belles
filles entièrement nues. — Lors de son entrée à Anvers, Charles-Quint fut
escorté d'un essaim de belles jeunes filles de la société, plus ou moins
nues. — Vers 1880, à l'inaugui-ation à Vienne (Autriche) du nouvel Opéra,
le directeur, a-t-il été dit, fit défiler devant lui, dans une fête intime, le
corps de ballet au grand complet, chaque danseuse, sans aucun voile,
portant sur l'épaule une lampe allumée, soutenue à la manière antique.
3, Rouler. — L'historien Flavius Vopiscus, Firmus, 6, ne dit pas que Fir-
mus attelait des autruches à son char, mais qu'assis sur elles, il semblait
voler avec elles; il dit aussi qu'il montait des hippopotames et accomplis-
sait d'autres prouesses du même genre.
13, Roy. — Discours à Nicoclès.
17, Parure. — N'ayant pas d'autre moyen de me faire distinguer, et cela
m'allait bien.
18, Pleurent. — Il est des hommes auxquels de beaux habits ne conviennent
pas.
21, Demosthenes. — III" Olynthienne.
25, Tbeopbrastus. — C'est Cicéron, De Off'., II, 16, qui est Fauteur de cette
critique.
27, Aristote. — Cicéron, De Off., II, 16.
28, Commune. — La populace.
30, L'emploitte. — La dépense. Montaigne continue à reproduire les pensées
'de Cicéron, De 0/f., 17.
34, Grégoire treizième. — S'est surtout rendu célèbre par la réforme du
calendrier Julien; était très versé dans la jurisprudence; aimait les lettres
et les arts et embellit Rome de plusieurs édifices; fit célébrer par d'odieuses
réjouissances la S. -Barthélémy.
Fc.650 ESSAIS DE MONTAIGNE.
35, Catherine. — Catherine de Médicis, qui fit commencer les Tuileries et
encouragea les travaux de Bernard Palissy, quand il eut découvert l'é-
mail. Quant au Pont-Neuf, jeté sur la Seine à Paris où il existe encore
sous ce nom, commencé en 1578 sous Henri III, ses travaux furent inter-
rompus de 1580 à 1601, et il ne fut achevé qu'en 1604, sous Henri IV.
296,
9, Pourtant — C'est pour cela que...
10, Porter. — Var. de 88 : aporter.
11, Boëte. — Sa cassette particulière (distincte du trésor public).
12, Mien . — Plutarque, Galba, 5. — Autres temps, autres mœurs : N'avons-
nous pas vu en ces temps-ci un Président de la République, élu pour
entrer en charge un mois après, s'abstenir dans l'intervalle de remplir ses
fonctions de Président du Sénat, en percevoir nonobstant les émoluments
et croire faire largesse en faisant abandon de ces 6.000 francs au person-
nel inférieur sous ses ordres, à la grande admiration de tous. En équité,
sinon en conscience, les avait-il gagnés et pouvait-il vraiment dire comme
Galba : « Ce n'est pas du public, c'est du mien. >■
17, Sien. — Aujourd'hui, et nous ne saurions le regretter, les recettes bud-
gétaires des états sont moins que par le passé à la dévotion des souverains,
qui en usaient comme ils l'entendaient; chefs d'état, rois ou autres, ont
actuellement leurs revenus et leur liste civile, absolument distincts du tré-
sor public, mais tout abus n'a pas de ce fait disparu. 11 y en a qui thésauri-
sent comme de bons bourgeois, qui se livrent à l'agiotage, jouant sur les
fonds publics en connaissance de cause comme du reste la plupart des
membres du Gouvernement, grâce aux renseignements qu'ils ont avant
tous autres et avec plus de certitude des événements qui peuvent influer
sur les cours, il leur arrive même de les faire naître pour servir leurs intérêts.
Nombreux sont ceux qui placent leurs fonds à l'éti-anger pour se ménager
des ressources contre les fluctuations de la politique; ils n'entament
même que bien peu leur liste civile dans leur représentation : quand ils ont
des cadeaux à faire, des prix à allouer, ils puisent généreusement dans les
manufactures de l'État, Sèvres, les Gobelins, dont c'est présentement à peu
près l'unique raison d'être, dans les haras nationaux; et, à tout propos :
voyages, réceptions de souverains ou visites rendues, expositions, etc., se
font allouer des crédits supplémentaires; toutes choses qu'il est bon de
connaître pour ne pas admirer outre mesure un faste qui, en réalité, est
un surcroît de charges pour le contribuable, lequel, malgré l'apparence, en
fait tous les frais.
21, Soy. — Ce principe a-t-il jamais existé autrement qu'en théorie? on en
douterait à voir ce qui en est aujourd'hui, où chaque jour, au grand pré-
judice de nos crédits budgétaires, on crée et maintient nombre d'emplois
dont le besoin ne se fait nullement sentir. Est-il rien de plus typique à cet
égard que le cas des sous-préfets, devenus une superfétation depuis que
les moyens de communication ont pris le développement que l'on sait
(chemins de fer, automobiles, télégraphe, téléphone, machines à écrire)?
leur inutilité est reconnue de tous, leur suppression est périodiquement
votée ; on les conserve quand même parce que ce sont de précieux agents
électoraux, et que leurs emplois sont des ressources tout particulièrement
décentes et avantageuses pour récompenser ce genre de services, ou encore
pourvoir les créatures gouvernementales, en même temps que se ménager
l'affection des villes qui en sont dotées, et à l'importance desquelles elles
ajoutent; ici, comme partout, la politique intérieure intervenant, l'intérêt
général est sacrifié à l'intérêt particulier.
22, D'elle. — C'est pourquoi en architecture, par exemple, il n'y a pas de
véritable beauté sans l'utilité, et que dire : « Voilà un bel édifice », n'a pas
de sens; on devrait dire : « Voilà une belle église, un beau palais. » Dans
l'appréciation, le but poursuivi, qui est ici la destination, est la première
condition dont il y a à tenir compte. — C'est ce qui fait qu'une armée dont
la valeur militaire est en décroissance, une magistrature dont les arrêts
NOTES. LIV. III, CH. VI. VOL. III, PAG. 296. Pc.6i)l
prêtent à suspicion, un gouvernement qui n'a pas pour unique objectif
l'intérêt public et la défense de la société, quoi qu'ils fassent d'autre part,
sont jugés exclusivement sur ces points essentiels qui sont leur seule raison
d'être.
34, Dionysius. — Apophth. de Plutarque.
35, Apprendroy. — J'apprendrais plutôt à un roi ce proverbe, etc. Cette
sentence que Montaigne traduit après l'avoir citée est tirée de Plutarque,
Si les Athéniens ont été plus excellents en armes qu'en lettres, 4, où Corinne
s'en sert pour faire sentir à Pindare qu'il avait entassé trop de fables dans
une de ses poésies.
298,
10, Practique. — Gagne.
16, Telle manière. — Var. de 88 : bouffons, maquereaux, menestriers et
telle racaille...
35, Assenait. — Plaçait.
300,
17, Princes. — Xéxophox, Ci/rop., VIII, 9 et suivants.
21, Excez. — Chez les Romains, les jeux publics faisaient partie du culte. Il
y en avait de diverses sortes; les principaux étaient les « .Jeux Romains »
ou « Grands Jeux », institués par Tarquin l'Ancien (603); ils se célébraient
du 4 an P2 septembre, tous les travaux et affaires publics étaient interrom-
pus pendant leur célébration.
31, Coffre. — Cicérox, De Off., II, 15. — Ces reproches ne lui profitèrent
guère : Alexandre se montra toute sa vie d'une prodigalité extrême. En
témoignage d'admiration, il envoie 50 talents (250.000 fr.) au philosophe
Xénocrate, qui les refuse d'abord, lui faisant répondre « qu'il a lui-même
à satisfaii'e à plus de besoins que lui » ; et finit par accepter 30 mines
(2.700 fr.) pour ne pas désobliger ses envoyés désolés de son refus. — A un
acteur qui a, dans son rôle, inséré un vers à sa louange, 10 talents
(50.000 fr.). — Un de ses soldats conduisant un mulet de son trésor, l'animal
étant fatigué et son conducteur pour le soulager ayant pris la charge sur
son dos, Alexandre l'en gratifie. — A un courtisan tombé en défaveur, au-
quel il rendait ses bonnes grâces et qui lui dit : « Daignez m'en accorder
un gage », 5 talents (25.000 fr.). — A l'occasion de son mariage avec Sta-
tira, fille de Darius, il acquitte toutes les dettes des Macédoniens de son
armée, 9.870 talents (environ 50.000.000 fr.). Pour les obsèques et le tom-
beau d'Héphestion, il dépense plus de 12.000 talents (environ 60.000.000 fr.).
— Sur la fin, il avait fixé la dépense de sa table; en dehors de tous autres
repas, 100 mines (9.000 fr.) étaient quotidiennement allouées pour le sou-
per, auquel à la vérité étaient chaque jour conviés soixante à soixante-dix
de ses amis, ce qui constituait encore une dépense de 150 à 160 fr. par
tête.
302,
7, Probus. — Vopiscus, Probus, 19. Cet auteur donne une description dé-
taillée de ces jeux.
15, Sufficit. — Le cens fixé par la loi pour appartenir à l'ordre équestre a
varié suivant les époques; au temps de César, il était de 400.000 sesterces
(77.500 fr.).
24, Vermillon. — Composition de soufre et de mercure d'un beau rouge
vif.
25, Storax. — Sorte de résine jaune, brune ou rougeàtre, d'odeur agréable.
41, Surgeons. — Sources; du latin surgere, sourdre.
45, Labourez. — Travaillés; du latin laborare qui a cette signification et
qui vient lui-même de labor, travail, d'où labourage, le travail par excel-
lence.
304,
6, Retia. — Citation que Montaigne a traduite avant de la reproduire.
10, Esprits. — Bien autrement inventifs que ne sont...
14, Pas. — La puissance de la nature est infinie et l'esprit humain ne saurait
Fc.652 ESSAIS DE MONTAIGNE.
préjuger ce que progressivement il lui sera donné d'en découvrir et d'en
faire application, jusqu'à ce qu'une de ces évolutions prévues ou impré-
vues fasse prochainement ou dans des milliards de siècles, c'est tout un
pour l'éternité, disparaître l'homme à son tour. Quant à ces allées et
venues de la science qui font dire à Montaigne que nous tournons toujours
dans le même cercle, ce qui est vrai encore et sera éternellement en ce qui
touche les idées et les institutions humaines, elles provenaient de ce que
jadis l'imprimerie ne fixait pas et ne propageait pas comme aujourd'hui
chaque progrès réalisé ; toute invention, tout perfectionnement était local
et momentané, au lieu d'entrer comme maintenant immédiatement et à
toujours dans le domaine public ; aussi l'invention de l'imprimerie est-elle,
sans conteste, la plus considérable qui se soit produite; par elle, rien ne se
perd, tout progresse en bien comme en mal, seul l'homme ne change pas-
"23, Poetae. — Les deux derniers vers de cette citation sont employés ici
dans un sens tout différent de celui qu'ils ont dans Lucrèce.
24, Solon. — Dans le Timée. — L'Egypte fut un des premiers états du monde
•connu des anciens à se civiliser, son origine se perd dans la nuit des
temps; les calculs les plus modérés font régner vers l'an 2500 Menés,
le premier de leurs rois dont nos histoires font mention.
31, Formarum. — Montaigne a modifié les deux derniers mots de cette ci-
tation pour l'approprier à son sujet, qui est tout autre que dans Cicéron.
42, Auparauant. — Les Chinois font remonter leur histoire à une très haute
antiquité; il semble vraisemblable d'admettre que leur premier législateur
vivait vers le XXX° siècle, et eux-mêmes font partir de l'an 2637 leur
ère historique. Longtemps avant les Européens, ils ont connu la boussole,
l'imprimerie, la poudre à canon, mais ces inventions sont demeurées chez
eujç à l'état rudimentaire.
306,
7, Cettuy-là. — Le poète Lucrèce, auteur du vers qui précède et de ceux
qui suivent.
14, Autre. — L'Amérique, que Christophe Colomb venait de découvrir en
1492.
16, Heure. — Il est hors de doute qu'à l'heure actuelle, toute la surface ha-
bitable de la terre nous est connue; c'est ce qui fait que les excursions
dans les régions polaires arctique et antarctique sont de si peu d'intérêt, en
dehors de la notoriété qu'y recherchent ceux qui s'y livrent; mais il est non
moins indubitable que des modifications considérables peuvent se produire
sur la surface terreètre; que de nouveaux continents peuvent surgir,
d'anciens disparaître, sous l'action des forces constamment en travail dans
l'intérieur de notre planète; comme aussi de notables changements cli-
matériques se produire, le Gulf Stream par exemple se modifiant, ou
d'autres courants s'établissant, et les conditions dans lesquelles elle est
habitée s'en trouver pareillement modifiées.
22, Siècle — C.-à-d. si de ce que dit ce poète pour prouver la jeunesse de
son siècle, nous concluons que notre monde avance vers sa fin...
26, Contagion. — Par notre communication avec lui.
30, Practiqué. — Gagné.
32, Eulx. — Les Américains.
34, Cusco. — Les Péruviens regardaient cette ville comme sacrée; on y
admirait le temple du soleil, l'un des plus vastes et des plus riches qui
aient jamais existé, et le palais des Incas (dynastie régnante lors de la
conquête du Pérou par les Espagnols).
308,
19, Dure. — Allusion aux casques, cuirasses, hauberts, brassards, cuis-
sai'ds, etc.. en métal que portaient Fernand Cortez, Pizarre et leurs com-
pagnons.
26, Inexpérimenté. — Si n'ayant aucune idée des effets de ces armes, il eût
été soudainement attaqué.
NOTES. LIV. III, CH. VI. VOL. III, PAG. 310. Fc.6S3
310,
28, Mercadence. — Les avantages du commerce, du latin merces, marchandise.
34, Misérables. — Dans les Essais apparaît partout ce noble sentiment
d'humanité, premier bienfait de la philosophie: mais il ne se montre nulle
part plus énergique et plus éloquent que lorsque Montaigne portant ses
regards sur le Nouveau Monde, n'y aperçoit de tous côtés que des bour-
reaux et des victimes. Abbé .Iay.
34, Mines. — Il s'agit ici de l'expédition (1513 à 1517) de Balboa, officier
espagnol qui, à la recherche des régions où gisait l'or trouvé au Mexique,
au moment de sa conquête, parvint, par l'isthme de Panama, jusqu'à l'A-
mérique du Sud, mais dut rétrograder, n'avant pas de troupes suffisantes.
312,
33, Enfance. — Voilà comme balbutiaient ces prétendus enfants.
36, Cannibales. — Ceci donne une idée de ce qu'étaient mes Cannibales,
c.-à-d. ces hommes du Nouveau Monde que nous traitons de sauvages.
39, Peru. — Atahualpa, dernier roi du Pérou, de la famille des Incas. Fait
prisonnier par Pizarre, il fut, quelques mois après (1533), étranglé par son
ordre. Zakate, II, 7; de la Veca, 1, 36; Gomera, 117; Herrera, V, 111, 4 et
autres historiens de la conquête de l'Amérique.
314.
9, Preuue. — On forma contre lui une accusation aussi fausse que les
preuves qu'on en donnait, savoir qu'il...
19, Mexico. — Guatimozin, dernier empereur indien de Mexico. Fait pri-
sonnier par Fernand Cortez en 1521, après avoir vainement tenté de
défendre sa capitale contre ce chef espagnol, il fut d'abord traité avec
générosité, mais plus tard eut à endurer les plus cruels tourments dans le
but de lui faire dénoncer où se trouvaient ses trésors et finalement fut
pendu en 1522. Bernal Diaz del Castillo, 157; Gomera, 146; Herrera, III,
11-8; Torque.mada, I, et autres historiens de l'Amérique.
.32, Cour. — Le cacique de Tacuba.
35, Mercy... plus. — Var. de 88 : confié de dire ce qu'il en sçauoil, pour se
redimer de celle peine Insupporlable.
316,
3, Roy. — Disons plus, un roi si grand...
4, Honteuse. — Var. de 88 : vaine.
12, Ventent. — Var. de 88 : publient.
24, De Castille. — Var. de 88 : d'Espagne.
25, Mal voulus. — Haïs, à qui on veut du mal. Diego d'Almagro qui le
premier pénétra dans le Chili, et qui dans le principe avait marché d'ac-
cord avec Pizarre le conquérant du Pérou, battu par lui à Cusco, y fut
décapité par son ordre (1538). Son fils, ralliant ses partisans, vengea son
père, par le meurtre de Pizarre (1541); et peu après éprouva le même sort
que lui, dans le même lieu (1542). Gonzalès Pizarre, frère du précédent, se
substitua a lui au Pérou, où pendant trois ans il régna en maître, Jusqu'à
ce que par ordre de Charles-Quint il fut arrêté et mis à mort comme
rebelle (1544).
31, Prudent. — Philippe II, roi d'Espagne. Sous son règne (1556 à 1598), les
colonies espagnoles de l'Amérique et des Indes rapportèrent immensément
d'or et d'argent; mais ce prince consomma follement toutes ces ricliesses
dans ses vains projets de monarchie universelle, et à sa mort, le trésor
était vide et obéré.
318,
2, Commerce. — Employé au commerce, en achat de marchandises; em-
ploite signifie ici achat ou emplette, comme on écrirait et prononcerait
aujourd'hui.
17, Paumes. — Environ cinq mètres.
320,
6, Perennes. — D'eaux vives coulant continuellement, ne tarissant pas, du
latin perennis, continu, permanent.
Fc.654 ESSAIS DE MONTAIGNE.
9, Chef. — Au bout, à la fin de la journée de marche, de chaque étape.
17, Apres. — Voir à ce sujet et sur tout ce qui précède. Robertson, Histoire
de l'Amérique, liv. VIII. L'auteur, dans cet ouvrage, s'applique à réduire
dans une juste mesure l'exagération des premiers historiens de la conquête
du Nouveau Monde. — A ce travail gigantesque qu'était cette route de
Quito à Cusco, on peut assimiler le Grand Canal impérial de la Chine qui
met en relations Pékin, la capitale du Nord, avec Nankin, la capitale du
Sud, et avec Canton; ce canal a été commencé au IX» siècle av. J.-C. et les
travaux en sont continués jusqu'à nos jours; il offre une superbe voie
navigable de 2.700 kil. sans compter de nombreux embranchements. Ce
canal peut faire le pendant de la grande muraille élevée également en
Chine sur la frontièi'e N. et N.-E. pour protéger l'empire contre les incur-
sions des nomades : Mongols, Mandchous, Tartares, et qui, formée d'un
parapet de terre, revêtu de briques dans certaines de ses parties, s'étend
sur une longueur de 1.700 kilomètres, a 6 ou 8"" d'élévation et forme une
sorte de chaussée pavée, assez large pour donner passage à 5 ou 6 cava-
liers de front; il est aujourd'hui ruiné en bien des endroits. G'' Niox.
26, Terre. — A la batailie de Caxamalca (1532). De la Vega, II, 1, 2b. Ce fut
Pizarre lui-même qui le précipita ainsi de sa chaise à porteurs. — Avaller,
c'est mettre à val. jeter bas.
CHAPITRE VII.
322,
2, Tomber. — Par exemple, par abdication comme firent Dioclétien,
Charles-Quint, Marie-Christine; ou encore, comme les chefs d'état élus
pour un temps déterminé et qui quittent le pouvoir à l'expii'ation de leur
mandat, ou spontanément parce qu'ils ne veulent pas se prêter à des
exigences que réprouve leur conscience.
9, D'affaire. — De difficulté.
15, Esgarée. — Détournée.
25. L'autre. — César. — En traversant les Alpes, dit Plutarque, César, 3,
il passa par une bourgade de Barbares, habitée par quelques malheureux
ayant grand'peine à vivre; dans son entourage, on se demandait en plai-
santant si là aussi on intriguait pour obtenir les charges publiques et s'il
y avait des compétiteurs. César, prenant la parole, dit : « Je ne sais, mais
quant à moi. je préférerais être le premier ici, que le second à Rome. »
28, Incognu. — Ni avoir à me débattre aux portes avec un huissier, comme
un misérable inconnu...
30, Moyen. — L'aurea mediocritas d'HoRACE.
• La médiocrité est le trésor des sages. » Voltaire.
« 0 médiocrité,
Mère des bons esprits, compagne du repos. » La Fontaine, Les sovhails.
• Si le bonheur nous est permis,
Il n'est point sous le chaume, il n'est point sur le trône :
Voulons-nous l'obtenir, amis?
La médiocrité le donne. »
32, Autrement. — Que désiré.
324,
2, A l'equipoUent. -~ Par contre, en revanche, en compensation, en récom-
pense.
7, Encombriers. — Accidents, empêchements, encombrements.
10, Regulus. — Vainqueur des Carthaginois en Sicile et en Afrique, il fut
à son tour défait par eux et fait prisonnier (256). Quelques années après,
en 250. les Carthaginois lui donnèrent la liberté sur parole, afin qu'il
NOTES. LIV, III, CH. VII. VOL. III, PAG. 324. Fc.655
accompagnât la délégation envoyée par eux à Rome pour traiter de
l'échange des prisonniers ; mais au lieu d'appuyer cette mesure, il ne prit
la parole au Sénat que pour en dissuader ses concitoyens, et, après avoir
parlé ainsi contre lui-même, ne craignit pas de revenir prendre ses fers à
Carthage; on l'y fit périr au milieu d'atroces supplices.
12, Luy. — CicÉRON, De Fin. bon. et mal., II, 20, auquel Montaigne a em-
prunté ce parallèle entre Th. Balbus et Régulus, donne sans conteste la
préférence à ce dernier : « La vertu, dit-il, ne laisse pas de proclamer
plus heureux que Thorius vidant sa coupe sur un lit de roses, Régulus
qui, retourné de Rome à Carthage sans y être contraint autrement que
par la parole qu'il en avait donnée à ses ennemis, périt au milieu des plus
cruels tourments, déchiré par la faim et les veilles. »
13, Mienne. — Les comparer à la mienne...
16, Aduenir. — Ce mot a ici le sens d'atteindre, comme le mot « aveindre »
qui est au commencement de ce chapitre; tous deux dérivent du latin
advenive.
17, Vsage. — Cette manière de voir, Montaigne a eu occasion de la traduire
en fait, lorsque prirent fin ses fonctions de Maire. Il était absent, sa cliarge
allait expirer, il n'avait plus qu'à présider à l'élection de son successeur;
à ce moment la peste sévissait avec intensité à Bordeaux; il ne crut pas,
dans cette situation, devoir s'y rendre. Cette attitude, contraire aux idées
de nos jours, si différente de celle tenue par Rotrou dans le siècle suivant,
dans des circonstances presque identiques, lui a été vivement reprochée en
ces derniers temps; jusque-là on n'y avait pas prêté attention, parce qu'il
était au terme de son mandat et que ce n'était pas en opposition aux
idées de l'époque, bien que se soient produites à ce moment de très
honorables exceptions. En cette occasion, Montaigne a été conséquent
avec lui-même; homme de devoir, il ne lui convenait pas d'être sans
nécessité un héros. « Rien de trop » était aussi du nombre de ses devises.
20, Perse. — Hérodote, III, 83. — A la mort de Cambyse, roi de Perse
(522j, un mage se fit passer pour son frère Smerdis, que lui-même avait
fait mettre à mort (V. III, 178 et N. Fié), et lui succéda. La supercherie
ayant été reconnue, il se forma un complot de sept grands de l'empire
(Otanez était du nombre) qui tuèrent l'usurpateur (V. II, 332 et N. Deux).
Pour le remplacer sur le trône, il fut convenu entre les conjurés que le
premier d'entre eux dont le cheval hennirait au lever de l'aurore aurait la
couronne. Ce fut Darius qui l'obtint par l'artifice de son écuyer qui avait
envoyé d'avance une cavale au lieu du rendez-vous. C'est à cette épreuve
que renonça Otanez, aux conditions qu'indique Montaigne.
25, Commande. — Ayant autant d'avereion à commander qu'à être cpm-
mandé.
29, Desmesurée. — Cette situation s'est bien modifiée ; dans les monarchies
constitutionnelles, comme dans certaines républiques, qui ne diffèrent
qu'en ce que, là, la royauté est à vie et héréditaire, au lieu qu'ici, le pré-
sident est nommé à l'élection et pour un temps déterminé, le chef de
l'état a plus le pouvoir d'empêcher que celui d'agir. Nonobstant, si res-
treint qu'il soit devenu, ce pouvoir est encore considérable et suffisant
pour prévenir le mal, sous condition qu'il soit dévolu à un homme de ca-
ractère, qui ne soit inféodé à aucun parti, et qui, au lieu de toujours céder,
use des moyens que la Constitution met à sa disposition, pour arrêter ce
qu'il condamne dans son for intérieur ou même dans des manifestations
platoniques; mais combien en agissent différemment, trahissant par leur
faiblesse les intérêts qui leur sont confiés. A Siéyès revient dans les
temps modernes l'honneur de cette conception, et il espérait au début
faire accepter ces fonctions au général Bonaparte. On sait quel accueil fut'
fait à sa proposition. Ce rôle de fétiche, assez semblable à celui des der-
niers rois de la race mérovingienne, qui toutefois n'est telle que lorsque la
personnalité n'en impose pas, car ici, comme en tout, tant vaut l'homme,
tant vaut la chose, a été assez exactement défini par cette boutade humo-
Fc.656 ESSAIS DE MONTAIGNE.
ristique attribuée au roi des Belges Léopold I, un jour que le Président de
son conseil des ministres cherchait à l'intéresser aux difficultés avec
lesquelles il était aux prises : « Avez-vous la majorité? Si oui, permettez
que j'aille me promener; si non, allez-y vous-même! •
326,
4, Finer. — Trouver, disposer. Signifie proprement : mettre à fin, venir à
bout de trouver.
5, Escossois. — Deux ouvrages d'auteurs écossais.
6, Populaire. — L'auteur qui se fait l'avocat du gouvernement par le
peuple.
20, Eux. — J.-J. Rousseau disait : « Je respecte trop M. le prince de Conti,
pour ne pas toujours le gagner aux échecs. »
27, Faëes. — Enchantées.
27, Brîsson. — Plutarque, Dv contentement ou repos de Vesprit, 12, dont le
fait est tiré, appelle ce même athlète Crisson dans un autre de ses ou-
vrages. Comment discerner le flatteur de l'ami, 15.
32, Gaigné. — Saixt-Simon rapporte une sincère admonestation du duc de
Montausier, gouverneur du Dauphin, fils de Louis XIV, à un jeune cour-
tisan qui se laissait toujours vaincre par ce prince au jeu du palet.
34, Crocheteur. — V. N. I, 542.
35, Troye. — Vénus, dans l'Iliade, voulant sauver Enée son fils, blessé et
sur le point de succomber sous les coups de Diomède, est elle-même
légèrement blessée au bras.
35, Saincte. — Déesse.
328,
11, Qualitez. — Les bonnes qualités des princes...
18, Qualité. — D'être prince.
25, Tybere. — Il ne semble pas que le Sénat l'omain décernât des prix
d'éloquence; Suétone ne mentionne que le refus par Tibère du surnom de
.< Père de la patrie » qui lui était offert.
27, Ressentir. — Prévaloir.
30, Costé. — Penchant un peu sur le côté. Plutarque, De la différence entre
le flatteur et l'ami, 8.
31, Dionisius. — Plutarque, De la différence entre le flatteur et l'ami, 8.
34, Luy. — Philippe de Macédoine ayant eu un œil crevé au siège de Mé-
thone, Clisophus, un de ses courtisans, ne parut plus devant lui qu'avec
un bandeau sur Toeil.
34, Greueures. — Hergnes ou hernies.
35, Plutarque. — De la différence entré le flatteur et l'ami, 8: mais Montaigne
a légèrement altéré la narration du fait en question.
330,
2, Mitridates. — Plutarque, De la différence entre le flatteur et l'ami, 8.
7, Fauorinus. — Spartien, Adrien, 15. Favorinus jouit quelque temps de
la faveur de l'empereur Adrien, mais finit par se l'aliéner par ses sar-
casmes.
10, Asinius PoUio. — Macrobe, Saturn., II, 14.
12, Proscrire. — « A qui peut tout prendre, donne ce qu'il demande. »
14, Carrières. — Plutarque, Du contentement de l'espiHt, 10; Diodore de
Sicile, XV, 6, 7; Diogène Laerce, III, 18 et 19. — Philo.xène ayant exprimé
trop franchement à Denj's l'Ancien, à la cour duquel il vivait, sa pensée
sur des vers de celui-ci, le tyran l'envoya aux carrières (lieux d'où on extrait
des pierres); quelque temps après, en étant sorti et consulté à nouveau
, par Denys sur le mérite d'une pièce nouvelle qu'il venait de composer, au
lieu de répondre, il se contenta de dire : « Qu'on me ramène aux carrières » :
cette fois, le maitre se mit à rire et pardonna. — Le mot est devenu
proverbial, c'est être prêt à recommencer ce qui vous a déjà attiré une
injuste persécution.
14, Esclaue. — Platon, se trouvant à Syracuse, s'attira par sa fi*ànchise la
NOTES. LIV. III, GH. VII. VOL. III, PAG. 330. Fc.Go7
colère de Denys l'Ancien, qui le fit vendre comme esclave (398) pour le
prix de vingt mines (1.822 fr.); les autres philosophes se réunirent pour le
racheter et le renvoyèrent en Grèce, en lui rappelant comme un avis
salutaire qu'un philosophe doit parler à un tyran le plus doucement pos-
sible. Plutarque, Du conlentement de l'esprit, 10; Diodoke de Sicile, XV, 0,
7; DioGÈNE Laerce, III, 18 et 19.
15, JEgine. — Le cardinal de Richelieu eut un pareil- accès do jalousie
littéraire contre Corneille; et, à l'apparition du Cid, il fit critiquer la pièce
par l'Académie (1636); par la suite, il revint sur cet acte de faiblesse,
accorda une pension au poète, auquel l'Académie ouvrit ses portes (1647).
CHAPITRE VIII.
Chapitre des plus intéressants, dont le sujet est traité à fond et sans
digressions étrangères. On y trouve des réflexions sur l'utilité de la
conversation que Montaigne considère comme plus instructive que l'étude
des livres qui est languissante et n'échauffe pas; une peinture très vive et
très spirituelle des vices qui accompagnent d'ordinaire les disputes, et, à
ce sujet, un mot en passant sur l'abus que les savants font de la science.
Montaigne constate encore que ce qui frappe nos sens, est la cause déter-
minante de nos jugements; il donne une règle pour juger de la capacité
d'un homme dans la conversation et termine par une appréciation sur le
génie et le caractère de Tacite. Naiueon.
17, Uaduertissement. — Var. de 88 : le seul exemple.
18, Platon. — Lois, XI.
24, Euiter.
• Heureux celuy qui, pour devenir sage,
Du mal d'autruy fait son apprentissage ! »
332,
5, Similitude. — Var. de 88 : exemple.
6, Caton. — Plutarque, Caton, 4.
8, Lyre. — C'était un thébain, du nom de Gémonide; il faisait jouer
devant ses disciples de bons et de mauvais joueurs de flûte et disait : « En
ce mode, il faut jouer; en cet autre, non. »
20, Mauuais. — « Un fol avise un sage. » Proverbe.
20, Ordinaire. — Au lieu du développement qui suit, l'éd. de 88 porte
seulement : la veuë ordinaire de la volerie, de la perfidie a reiglé mes meurs
et contenu.
24, Inuincibles. — Au-dessus de ma portée.
25, Conférence. — Conversation, discussion.
29, Parler. — C'est généralement ce dont conviennent les personnes qui,
ayant joui de tous leurs sens, ont plus tard perdu soit l'ouïe, soit la vue.
Ceux que ce malheur n'a pas atteints, peuvent néanmoins se faire une
opinion à cet égard, s'ils ont eu occasion de remarquer combien en
général les aveugles conservent leur bonne humeur et recherchent la so-
ciété, tandis que les sourds demeurent taciturnes et la fuient, parce
qu'ils s'y trouvent isolés.
334,
20, Autres. — S.-ent. Pyrrhoniens.
24, Balance. — Emblème de Montaigne.
34, Nature. — Encore faut-il reconnaître que les opinions accidentelles du
vulgaire peuvent être de quelque poids, qu'elles ne sont pas absolument
vaines et fantastiques, de pures rêvasseries...
336,
17, Instruit. — Var. de 88 : adueriit.
21, La "décision. — Var. de 88 : le iugemenl. •
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 42
Fc.638 ESSAIS DE MONTAIGNE.
27, Troigne. — Trogne, air, mine; ce mot, devenu trivial, ne s'emploie
plus qu'en mauvaise part-
ie?, Magistrale. — D'un visage, d'une mine arrogante et trop impérieuse.
31, Céder. — Add. de l'ex. de Bord. : Ouy, à mes despens, que l'on a cru
devoir insérer dans la traduction. — Montaigne veut dire que dans les
discussions, il cède souvent plus par civilité que par conviction, et il en
donne la raison.
36, Soys. — Quelle que soit la forme sous laquelle on me connaîtra, soit
qu'on me condamne, soit qu'on m'approuve.
338,
2, Paille. — .Je me brouille. — « Rompre paille » avec quelqu'un, c'était
déclarer ouvertement qu'on cessait toute relation avec lui. Quand, aux
temps féodaux, un vassal voulait rompre les liens qui l'unissaient à son
seigneur, il lui envoj^ait une paille rompue, ou en rompait une devant
lui; ainsi agirent, à Soissons, Robert comte de Paris et ses adhérents à
l'égard de Charles le Simple ne voulant pas leur accorder le renvoi de son
ministre Hagenon (922).
5, Suiure. — Si on fait difficulté de le suivre.
5, Recueilloit. — Accueillait, recevait.
15, Antisthenes. — Plutarque, De la mauvaise honte, 12.
31, Thème. — Du sujet de leur dispute.
340,
9, Republique. — Liv. VII, vers la fin.
14, Artiste. — Artificiel, savant.
18, Similitude. — Var. de 88 : comparaison.
19, Plus. — L'un s'attache à un mot, à une comparaison; un autre ne sent
plus...
20, Vous. — Add. de 88 : respondre.
22, L'effort. — Le fort; altération du fait de la prononciation gasconne.
30, Alemaigne. — Querelle d'Allemand; querelle sans raison sérieuse.
342,
5, Differendum. — Lire disserendum. — C'est ce qu'Épicure pensait de la
dialectique des Stoïciens, au dire de Cicéron.
9, Arts. — Professeur d'humanités et de philosophie.
27, Latentes. — En marge de l'ex. de Bord. Montaigne a inscrit la traduction
de cette citation, et aussi le membre de phrase auquel, dans Sénèque, elle
fait suite : Numquam auclores, semper interprètes (jamais auteurs, toujours
traducteurs); mais l'une et l'autre de ces deux additions ont été ensuite
rayées.
30, Nullement. — Var. de 88 : rarement.
32, Exinanition. — Epuisement, anéantissement; du latin exinanitio, qui
a même sens; on dit plus simplement aujourd'hui « inanition ».
37, Marotte^ — Sorte de sceptre surmonté d'une tète coiffée d'un capuchon
bizarre de différentes couleurs et garni de grelots; c'est l'attribut de la
fohe, c'était celui des fous des rois. — A l'imitation de Montaigne, on a
dit :
« Egarant parfois les humains,
La science est sublime ou sotte;
C'est un sceptre en certaines mains.
En d'autres c'est une marotte. • Kerivalant.
344,
G, Protagoras. — Euthydème et Protagoras sont les deux contradicteurs
de Socrate dans les deux dialogues de Platon qui portent leurs noms,
dirigés tous deux contre les sophistes, dont le second surtout était un des
échantillons le plus complets. Il avait été portefaix dans sa jeunesse, était
devenu disciple de Démocrite, puis avait tenu école de rhétorique et de
grammaire : il fut un des premiers qui fit payer ses leçons. Il enseignait
que sur toute question on peut également plaider le vrai et le faux; que
NOTES. LIV. m, CH. VIIT. VOL. III, PAG. 344, Fc.659
tout est arbitraire, lois, vertu, vérité; qu'on ne peut savoir s'il y a des
dieux ou non. Protagoras avait écrit sur la rhétorique, la physique, la
politique, mais tous ses écrits furent brûlés par ordre des magistrats
d'Athènes. V. N. I, 212 : Peine.
16, Diuine. — Montaigne traduit ici Lactance, Div. Inst., III, 28.
22, Fist. — C'est malheureux parce qu'en regardant autant l'avocat que la
cause, ou en arrive à ce que de bonnes causes sont si souvent gâtées par
la manière dont elles sont défendues, et que de mauvaises triomphent
uniquement par le talent de leur avocat.
346,
3, Pourtant. — C'est pourquoi.
10, Passé. — Heraclite. — Juvénai., X, 32.
12, Mison. — DiOGÈNE Laekce, I, 108.
2(i, Moy. — Quand on voit quelqu'un commettre une faute, il faut se demander,
comme faisait Platon : « Est-ce que je ne lui ressemble pas? » Plutarqle.
33, Olet. — Proverbe latin rapporté par Erasme et dont Montaigne a changé
le premier mot, substituant stercus (fumier) à crepitus (vent sonore). —
Add. de 88 : Somme, il faut viure entre les viuants et laisser chacun courre
sa mode, sans notre soing et altération.
36, Clairement. — « Comment peux-tu dire à ton frère : Laisse-moi ôter la
paille qui est dans ton œil, toi qui ne vois pas la poutre qui est dans le
tien ? » Evangiles selon Saint Matthieu et selon Saint Luc.
37, Inaduertence. — « Les mêmes défauts qui, dans les autres, sont lourds
et insupportables, sont chez nous comme dans leur centre; ils ne pèsent
plus, ils ne sont plus. Tel parle d'un autre et en fait un portrait affreux,
qui ne voit pas qu'il se peint lui-même. » La Bruyère. — La Fontaine a
traité de même façon ce même sujet dans sa fable de La Besace :
« Lynx envers nos pareils et taupes envers nous,
Nous nous pardonnons tout et rien aux autres hommes.
On se voit d'un autre œil qu'on ne voit son prochain.
Le fabricateur souverain
Nous créa besaciers, tous de même manière,
Tant ceux du temps passé que du temps d'aujourd'hui.
Il fit pour nos défauts la poche de derrière.
Et celle de devant pour les défauts d'autrui. »
39, Entendement. — Et gentil personnage, add. de l'ex. de Bord, que l'on a
cru devoir insérer dans la traduction.
348,
9, Agel si. — Certaines éd. post. portent Agesis; la signification est la
même, toutefois les deux mots séparés accentuent davantage la forme
conditionnelle et par suite ironique.
II, Tache. — C.-à-d. je n'entends même pas que, pour accuser, il faille
être exempt des mêmes vices qu'on reproche à un autre.
20, Socrates. — C'est Platon qui le lui fait dire dans le Gorgias.
22, Cela. — C.-à-d. qu'en général pour contenir et persuader les hommes, il
faut parler à leurs sens.
34, Passées. — Luther, Calvin et autres, promoteurs de la religion réformée.
350,
3, Conférence. — Il en est de même de la conversation.
8, Morguant. — Et qui a tant de morgue.
13, Commune. — A la conversation ordinaire, à parler de choses communes.
33, Etfectuelle. — Effective. Autant celle qui est en paroles, que celle qui se
traduit par des actes.
352,
8, Ineptes. — Inaptes, inhabiles.
13, Engin. — Esprit.
16, Socrates. — Dans la République de Platon, VI.
17, Estuyée. — En mauvais étui. — Placée en un lieu qui ne lui convient
Fc.eeO ESSAIS DE MONTAIGNE.
pas, comme une liqueur fine qui se gâte, si elle est renfermée dans un
vase qui n'est pas net.
18, AtfoUent. — Se nuisent à eux-mêmes.
27, Pourtant. — C'est ce qui fait que pour eux le silence est non seulement...
3(1. Apelles. — Pllt.4rqijE, Des moyens de discerne^' le flatteur d'avec l'ami,
14, et Elien, Hist. div., II, 2, racontent ce trait comme étant de Zeuxis.
— Alexandre, grand admirateur de son talent, ne permit qu'à Apelles de
faire son portrait. C'est aussi de lui qu'on cite le trait suivant : il exposait
ses ouvrages à la vue du public pour recueillir les jugements des passants;
dans le nombre, un savetier qui venait de critiquer une sandale, se mit
à vouloir juger aussi du reste du tableau; mais le peintre l'arrêta, lui
disant ce mot passé en proverbe : « Ne sutor ultra crepidam (que le savetier
ne juge pas au delà de la chaussure) », ce que Voltaire a réédité avec une
variante : « Faites des perruques. Monsieur André, » dit-il à un André
perruquier qui avait composé et fait imprimer une tragédie des plus mé-
diocres qu'il lui avait dédiée. — « Fou qui se tait, passe pour sage, » dit un
proverbe.
30, Ouurouer. — Ouvroir, boutique, atelier.
37, Impertinemment. — Non pertinemment, sans être à même.
354,
1, Mérite.
' Ce monde n'est rien qu'une loterie
De biens, de rangs, de dignités, de droits.
Brigués sans titre et" répandus sans choix. » Voltaire.
4, Suos. — Cette citation, tirée d'une épigramme de Martial, a été traduite
en vers par Const.\nt Dubois, qui la termine ainsi :
• La vertu des sujets est de chérir leur maître,
Celle des souverains est de les bien connaître. »
17, Yssue. — TiTE-LivE, Diodore de Sicile estiment qu'il faut juger du mérite
des personnes, non par le succès de leurs entreprises qui est tout entier
du domaine de fortune, mais d'après les moyens qu'ils ont mis en œuvre.
— « A Carthage, dit Tite-Live (XXXVIII, 48), on condamne à être crucifiés
les généraux d'armée qui, dans une expédition militaire, n'ont pas bien
pris leurs mesures, lors même que le succès a favorisé leurs entreprises. »
28, Succedoient. — Réussissaient.
30, Fortune. — Plutarque, Apophth. des anciens rois, princes et capitaines.
Prologue. — ■■ Et son roi », aj. l'historien grec qui en outre porte « Si-
ramnez ».
32, Elles mesmes. — - Le monde se gouverne par lui-même », disait le
pape Urbain VIll. — Les opinions les plus diverses se sont produites au
sujet de la part que la fortune, le hasard, la chance jouent dans la vie
humaine. Notre bonne et notre mauvaise fortune, disent les uns, dépen-
dent de notre conduite; la fortune est un fantôme que la religion a aboli;
la fortune favorise ceux qui osent. D'autres pensent comme Denys le
Jeune, auquel Philippe de Macédoine demandait comment il ne s'était pas
maintenu dans le royaume que son père lui avait laissé : « Mon père m'a
laissé ses biens, mais non sa fortune. » Juvé.nal a émis les deux opinions;
dans une de ses satires il parle de « la toute-puissance de notre étoile »,
dans une autre il dit que « tout dépend de notre prudence ». Régnier a
dit de même :
« La fortune est un mot et n'est mauvaise ou bonne.
Que selon qu'on la forme ou bien qu'on se la donne...
Elle avance un chacun, sans raison et sans choix.
Les fous sont, aux échecs, les plus proches des rois. •
37, L'atfaire. — Probablement la S'-Barthélemy, qui fut le plus gi-and fait
de lepoque.
NOTES. LIV. Ilf, CH. VIII. VOL. III, PAG. 3.Ï6. Fc.661
356,
2, Lascbes. — Var. de 88 : molles, au lieu de « basses et lasches ».
15, Fortune.
« Tous faits humains dépendent de fortune,
Non de conseil, ni de prudence aucune. •
Amyot, traduit de Plularque.
33, Thucydides. — Liv. III, 37, Harangue de Cléon.
358,
A, Suffisance. — De grande capacité, de grande habileté.
15, Melantbius. — Plutarque, Comment il faut ouïr, 7.
18, Offusquée. — Masquée, obscurcie par l'emphase du langage.
21, Antistbenes. — Diogène Laerge, VI, 8.
38, Peuple. — Lopez de Gomara, Bist. gén. des Indes, II, 77. — « Les Bour-
guignons déposaient leur roi lorsqu'il avait des insuccès à la guerre ou
que l'année avait été stérile, le considérant comme le maître des événe-
ments et des saisons. » Lebeau.
360,
3, C'est. — Combien il est avantageux.
16, Estrangere.
« Rien n'appartient à rien, tout appartient à tous;
U faut être ignorant comme un maître d'école
Pour se flatter de dire une seule parole
Que personne ici-bas n'ait pu dire avant vous. » Victor Hugo.
• C'est imiter quelqu'un que de planter des choux. • A. de Musset.
« Imaginer n'est autre que se souvenir. » La Harpe. — « Rien de nou-
veau sous le soleil. >> L'Ecclésiaste.
20, Céder. — La phrase précédente, introduite dans la présente éd. (95), in-
• terrompt quelque peu le sens.
21, A escient. — Sérieusement, de front.
26, Dessein. — Des répliques, des ripostes qui ont porté au delà de mon in-
tention. — Revirade est plutôt gascon que français; toutefois c'est un terme
en usage au jeu de trictrac, et aussi au jeu de paume où il signifie « coup
de revers ».
362,
15, Espaulettes. — Par parcelles, en détail; par intervalles et discontinua-
tion. Ainsi, en fait de maçonnerie, dit Nicot, reprendre ou refaire un mur
par espauletées, c'est le refaire et reprendre par parcelles sans l'abattre,
le réparer.
27, Aller. — « Quand j'aurais la main pleine de vérités, je ne daignerais pas
l'ouvrir pour le genre humain. » Fontenelle.
29, L'enfoncer. — L'approfondir.
29, Crouliez la. — Si vous la remuez, l'ébranlez.
364,
3, Hegesias. — Diogène Laerge, II, 95.
6, Moins. — « Les vérités qu'on aime le moins à entendre, sont souvent
celles qu'il importe le plus de savoir. « Boiste.
11, Cyrus. — Xé.nophon, Cyropédie, III, 3, 23.
11, Ost. — D'exhorter, haranguer, encourager son armée.
23, Principians. — Les commençants.
366,
I, L'asne. — -■ Les autres enseignent la sapicnce, Montaigne désenseigne
la sottise. » M"° de Gournay.
4, Gaudissans. — Gouaillant, plaisantant. Gausser (gouailler) et gaudir
(plaisanter) sont à peu près synonymes. — Montaigne fait ici l'aveu qu'il
était tant soit peu goguenard, se plaisant à la raillerie, mais aussi la sup-
portant...
8, Lycurgus. — PLvr.kRCiVE,^Li/curgue, U.
Fc.662 ESSAIS DE MONTAIGNE.
10, Souffrance. — patience, tolérance.
25, Royal. — François de Bourbbn, tluc d'Enghien, le même qtii gagna la
bataille de Cerisoles, tué en 1545, à l'âge de 27 ans, par la chute d'un
coffre que quelques seigneurs avec lesquels il jouait firent tomber sur
sa tête d'une chambre haute du château; et le marquis de Beaupréau, de
la maison de Bourbon-Montpensier, tué en 1560, à l'âge de 15 ans, en cou-
rant un lièvre.
368,
23, Fortune. — Allusion à l'Histoire universelle de Trogue-Pompée, écrivain
du I" siècle, dont l'ouvrage, qui est perdu, ne nous est connu que par
l'abrégé qu'en a fait Justin, travail écrit avec simplicité et élégance et qui
est loin d'être sot, malgré l'appréciation générale qu'en porte Montaigne.
28, Recompence. — Comines, III, 12, ne s'attribue pas ce mot; il dit au con-
traire le tenir de Louis XI qui lui-même ne s'en donnait pas comme l'au-
teur, mais le lui citait. — « Les services que les rois ne peuvent reconnaî-
tre, les rendent d'ordinaire ingrats. » D'Orléans. — « Les dettes de cette
nature ne se pouvant payer produisent ordinairement de la haine dans
l'esprit du souverain. » La Rochefoucauld. — Cette pensée a du reste été
généralisée : « Dès que nous avons des obligations extraordinaires envers
quelqu'un, il semble que nous redoutions sa présence, comme s'il nous
incitait sans cesse à la reconnaissance et qu'elle soit un blâme constant
du retard que nous mettons à lui témoigner notre gratitude. • La
Châtre.
34, Memorieux. — Doué d'une bonne mémoire. — Ce mot, qu'il ait été forgé
par Montaigne, ou usité de son temps, ne l'est plus aujourd'hui et n'a pas
son équivalent.
370,
13, Gentil-homme. — On présume que ce gentilhomme était M. de Foix,
un des beaux-frères de Diane de Foix, à laquelle Montaigne a dédié le
ch. XXV' du liv. I des Essais.
18, Particulières. — Add. de 88 : Il n'est pas en cela moins curieux et dili-
gent que Plularque, qui en faicl expresse profession.
18, Luy. — Annales, XVI, 16.
25, Longueur. — « Il abrégeait tout, parce qu'il voyait tout, » dit Mon-
tesquieu, en parlant de Tacite.
28, Nostre. — Add. de 88 : et si n'en a point oublié ce qu'il deuoit à Vautre
partie.
32, Ethiques. — Moraux; dérivé du grec tjôixoç, moral.
35, Us. — Ses contemporains.
372,
3, Foy. — Sincérité, véracité.
8, Couuert. — Renfermé, dissimulé. — Tacite, Hist., II, 38.
14, Euidence. — Encore ne faut-il pas égaler le soupçon à l'évidence, donner
autant de poids à l'un qu'à l'autre.
29, Tibère. — Tacite, Ann., VI, 6; Suétone, Tibère, 67. — Au sujet du
mobile de cette lettre, Suétone est du même avis que Tacite.
33, Dict. — Annales, XI, 11.
35, Hautain. — Droit et élevé.
374,
1, luge. — Add. de 88 : de soy.
19, Bras. — Tacite, Ann., XIII, 35. — Pendant l'hiver de 57 à 58, lors de
l'expédition de Corbulon en Arménie.
23, Historiens. — Vespasien, raconte Tacite, Hisl., IV, 81, rendit la vue à
un homme atteint de cécité qui le pressait d'humecter de sa salive ses
joues et les orbites de ses yeux, et l'usage de la main à un autre qui l'avait
paralysée. Avant de céder à leurs sollicitations, il les avait fait examiner
par les médecins qui auraient déclaré que chez le premier la fonction
visuelle n'était pas détruite, que chez le second la main était seulement
déboîtée, et que chez l'un comme chez l'autre la guérison était possible;
NOTES. LIV. III, CH. VIII. VOL. III, PAG. 374. Fc.663
elle fut très probablement déterminée par l'intensité de conviction des
deux infirmes. — Chez les anciens, l'orteil du roi des Perses passait pour
guérir certaines maladies; dans des temps beaucoup plus rapprochés, les
attouchements du roi de France, du souverain d'Angleterre avaient, di-
sait-on, le pouvoir de guérir les écrouelles, etc.
29, Luy. — Qt'iNTE-CuRCE, IX, 1.
30, L'autre. — Tite-Live, I, Prœf., et VIII, 6,
376,
5, le voys... plis. — Var. de 48 : voir si quelque autre s'en contentera.
8, Esprits. — Var. de 88 : iugements.
10, Ce que. — S.-ent. : au sujet de Tacite.
CHAPITRE IX.
La vanité. — La vanité est ce dont il est le moins parlé dans ce cha-
pitre; il n'en est question qu'au commencement et à la fin; il n'en est pas
moins des plus beaux, plein d'idées profondes, fines, ingénieuses, sérieuses
et folles, tristes ou gaies, quelquefois fausses, traitées avec verve, et où
l'auteur se révèle un parfait égoïste. 11 amuse, intéresse et captive, et non
seulement se fait lire, mais conduit à penser, ce qui du reste est, en gé-
néral, le principal mérite des Essais. Naigeon.
12, Expresse. — 11 n'y a peut-être pas de vanité plus réelle.
13, Exprimé. — « Vanité des vanités, tout n'est que vanité, » dit l'Ecclé-
siaste.
21, Bassins. — Vases de nuit.
26, Diomedes. — Montaigne semble avoir indiqué ici Diomède pour Di-
dyme. Ce dernier, contemporain d'Auguste, était un grammairien grec
d'Alexandrie, qui composa plus de 4.000 traités, tous perdus aujourd'hui ;
quant à Diomède, c'est un grammairien latin du v" siècle, qui ne paraît
pas avoir été aussi fécond et dont il reste des recherches sur la langue
et la versification latines en trois livres.
30, Tempeste. — Allusion au silence qu'imposait Pythagore à ses disciples,
qu'ils devaient garder pendant deux ans au moins et qui se prolongeait
jusqu'à cinq pour ceux qu'il reconnaissait enclins à trop parler.
378,
1, Seiour. — De son oisiveté, de son repos. — Ce mot, attribué à un Galba
quelconque, est de l'empereur Galba. Suétone, Galba, 9.
3. Coërction. — Répression, châtiment, peine, du latin coerctio qui a
même sens.
5, Autres. — Le 13 janvier 1535, François l" rendit une ordonnance sup-
primant toutes les imprimeries de France et défendant sous peine de mort
de publier aucun livre nouveau.
6. Escriuaillerie. — Démangeaison, fureur d'écrire.
10, Police. — Ajoutez que, dans un état, en devenant plus fins, plus subtils,
les esprits n'en deviennent pas plus sages.
13, Confèrent. — Y contribuent, y arrivent.
17, Pressent. — Quand la corruption nous environne de toutes parts.
21, Loy. — Loisir, faculté.
24, Philotimus. — Plutarque, Comment on distingue le flatteur d'avec l'ami,
31.
32, Chicane. — Le chancelier de l'Hospital.
33, Oubly. — Avec le parlementarisme, ces amusoires ont changé de ca-
ractère. C'est par les promesses, que souvent on ne leur demande pas,
que les politiciens cherchent à capter les populations, promesses qu'ils
n'ont nullement l'intention de tenir, contre l'accomplissement desquelles
les défend leur exagération même, et qu'en tout cas, une fois arrivés, ils
cherchent à éluder, ne regardant pas cependant aux conséquences funestes
qu'elles peuvent avoir, s'ils sont contraints de s'exécuter : telles les lois
Fc.664 ESSAIS DE MONTAIGNE.
sur l'assistance à la vieillesse, sur les retraites ouvrières, sur le revenu.
Combien est de plus en plus vraie, sur ce point, cette apostrophe de Marat,
dans l'Ami du peuple : « Tu te laisseras donc toujours duper, peuple
babillard et stupide? Tu ne comprendras donc jamais qu'il faut te défier
de ceux qui te flattent! » A la vérité, ce Suisse (Marat était né à Genève),
ce sinistre socialiste d'alors, auquel incombe une si large part des pires
excès de notre révolution de 93, combattait en écrivant de la sorte ceux
qui prêchaient la modération; ses paroles n'en démontrent que mieux
le peu que valent les mots.
38, Testonner. — Parer sa tête, se friser avec soin.
« Ces deux veuves en badinant,
En riant, lui faisaient fête,
L'allaient quelquefois testonnant,
C'est-à-dire ajustant sa tête » ;
ainsi s'exprime La Fontaine dans la fable L'homme entre detuc âges et
ses deux maîtresses; l'explication que dans son dernier vers il donne du
mot « testonner » est motivée par ce fait qu'il signifie également donner
des coups, principalement sur la tête.
380,
12, Mal-heur. — Quand je suis dans le malheur.
15, Xenopbon. — Ce précepte, que Xénophon (Cyropédie, 1, 6, 3) met dans la
bouche de Cjtus, qui dit le tenir de Cambyse son père, est que « le
moyen de gagner le plus sûrement la faveur des dieux, n'est pas de les
flatter lorsqu'on se trouve dans l'adversité, mais de se souvenir d'eux
dans la prospérité; afin que lorsqu'on sera en nécessité on se puisse ré-
clamer d'eux avec plus d'assurance, comme vous étant de longue main
propices et amis et qu'il faut en user de même avec les hommes ».
15, Raison. — Jlais non par le motif qu'il en donne, c'est-à-dire sans que
ce soit intentionnel et dans le but de gagner plus sûrement la faveur
des dieux.
29, Part. — De cette disposition d'esprit.
35, Voyager. — V. N. I, 92 : Vovages; III, 394, 430.
382,
4, Peuple. — Des gens qui sont à votre service, qui relèvent de vous.
16, loinct. — Ajoutez à cela...
17, Pied. — Allusion à une anecdote contée par Plutarque, Paul Emile, 3 :
« Un Romain avait répudié sa femme; ses amis le lui reprochaient et
énuméraient les qualités de l'épouse : « Voj'ez ce soulier, leur répondit-il;
il est bien fait, mais je suis le seul à savoir où il blesse. »
19, Prestez. — Combien vous faites de sacrifices pour...
21, Cher. — Ce passage donne à penser que dans le ménage de Montaigne,
non plus que dans tout autre, tout n'allait pas toujours à son gré. —
V. III, 384.
28, Autre. — Ceci contredit le proverbe : « Service de grand n'est pas
héritage. »
33, M'attends. — C'est ce à quoi je suis attentif, j'applique mon esprit.
36, Contentement. — « S'il est riche, qu'il dîne deux fois », disait-on jadis,
dans le peuple, plaisamment d'un homme sottement fier de ses richesses.
384,
14, Dam. — Tant pis pour lui. Dam, dommage, vient du latin damnum.
dont c'est une contraction. — Montaigne n'avait qu'un héritier, sa fille.
17, Dissemblables. — Allusion à la réponse que Phocion fit aux euA'oyés
de Philippe roi de Macédoine, qui, pour l'engager à accepter les présents
de ce prince, lui représentaient que ses enfants étaient pauvres et ne
pourraient soutenir la gloire de leur père : « S'ils me ressemblent, dit-il,
le petit bien que je possède à la campagne suffira pour les faire vivre,
comme il m'a suffi à moi-même ; s'ils ne me ressemblent pas, je ne veux
NOTES. LIV. Ifl, CH. IX. VOL. III, PAG. 384. Fc.665
pas entretenir et développer leurs mauvaises dispositions aux dépens des
intérêts* publics. » Cornélius Népos, Phoc, I.
18, Crates. — Diogène Laerce, VI, 88.
27, Négoces. — Affaires, du latin negolium.
35, Fois. — Add. de 88 : et honteuses.
35, Pointures. — Légers désagréments, petits malheurs, soit : petits par-
fois, mais quand même toujours désagréables.
386,
6, le ne suis ... poisent. — Var. de 88 : Or nous monstre assez Homère,
combien la surprise donne d'auanlage, qui faict Vlisse pleurant la mort de
son chien, et ne pleurant point des pleurs de sa mère; le premier accident,
tout legier qu'il estait, l'emporta, d'autant qu'il en fut inopinément assailly ;
il soustint le second plus impétueux, parce qu'il y estoit préparé. Ce sont
légères occasions, qui pourtant troublent la vie.
16, Cauat. — Quinault, dans son opéra d'Atys, a rendu ainsi ce demi-vers
latin :
« L'eau qui tombe goutte à goutte
Perce le plus dur rocher. »
20, Inséparables. — V. N. III, 382 : Cher.
24, Raisons. — Mes pièces de recettes et de dépenses à l'appui de mes
comptes.
33, L'estranger. — Celui que je bois chez les autres. Diogène Laerce, VI,
54. — " Pain d'autrui a bon goût. » Proverbe russe.
388,
7, Dolé. — Construit, poli, aménagé, distribué; du latin dolare, équarrir,
raboter, d'où vient également doloire, sorte de hache ou cognée dont
se servent les cliarpentiers.
8, Faineance. — Paresse, fainéantise, indolence.
32, Michel. — C'est le prénom de Montaigne; par suite cette phrase doit
s'entendre : Nous nous laissons nous-mêmes de côté, nous dont l'individu
nous touche de plus près encore que l'homme pris dans un sens général.
390,
3, Vacation. — Add. de 88 : et la plus iuste.
15, Appaster. — Proprement donner la becquée, la pâtée; ici : faire qu'en
ma vieillesse, je n'aie nuls soucis, que je ne manque de rien.
19, Amy. — Ce souhait ne fut pas exaucé. Montaigne, de son vivant, eut
bien un gendre, sa fille s'étant mariée deux ans avant sa mort; mais,
moins d'un mois après le mariage, le nouveau ménage alla habiter les
terres du mari.
26, Mescognoissance. — C'est le peu de soin que je mets à les observer,
à me rendre compte de leurs faits et gestes.
33, Argent. — Quelquefois, à dessein, je ne prends qu'une connaissance
vague, approximative de ce que j'ai exactement en fait d'argent.
392,
4, Iniure. — Tort, comme en latin le mot injuria. — Comme je me soucie
peu du tort qu'ils peuvent me faire.
12, Paresse et négligence. — Var. de 88 : Faitardise et mollesse.
14, Négoces. — Esclave de mes affaires.
16, Auachir. — Me rendre lâche, débiliter mon courage.
24, Crates. — Vendit ses biens et en retira 300 talents (environ un million
à un million 1/2), qu'il distribua à ses concitoyens; il avait de l'argent
placé chez un banquier qui avait ordre de le rendre à ses enfants s'ils n'é-
taient pas philosophes et de le donner au peuple dans le cas contraire,
parce que s'ils étaient philosophes, ils n'auraient besoin de rien. — Crates
était contrefait et d'une malpropreté et d'un cynisme révoltants; il inspira
cependant une telle estime à Hipparchia, riche et belle Athénienne, qu'elle
l'épousa malgré ses propres représentations.
Fc.666 ESSAIS DE MONTAIGNE.
25, Cures. — Soins; du latin cura, qui a même signification.
25, Maison. — « Allez au fond de la mer, objet de mauvaises pensées, lui
fait dire S. Jérôme; je vous y précipite, afin que vous ne m'j' précipitiez
pas vous-même. »
26, A pair. — A l'égal, autant que.
26, Bien, — Mais je consentirais bien à échanger...
27, Braue. — Noble.
32, Estriuiere. — Courroie qui soutient l'étrier de l'homme à cheval.
394,
6, Suruenants. — Cela fait que je reçois avec moins de plaisir et traite
moins bien les survenants.
II, Police. — Tout occupé de l'ordre.
25, Platon. — Lettre 9, àArchytas.
30, Desprendre. — A dépenser.
32, Attens. — Je m'y applique.
38, Defraudons. — Nous nous frustrons de...
396,
8, Emploite. — La dépense.
11, Aduertance. — Surveillance, attention; du latin advertere, être attentif,
prendre garde. — Le mot n'est pas français, bien que son contraire « inad-
vertance », de même origine, le soit.
14, Volonté. — La nonchalance de Montaigne dans les questions d'argent,
dont il a déjà été parlé, liv. II, ch. XVII, est nettement accusée par cette
mention qui a été relevée sur un de ses livres de dépenses : « Item, pour
mon humeur paresseuse, mille liures. »
21, Pressé. — J'en souffre trop en mon particulier.
26, Nom. — Ponéropolis, ou ville des méchants, qui, plus tard, s'est appelée
Philippopolis. Pline, Hist. nat., IV, II; Plutarque, De la Curiosité, 10.
38, Société. — « Si j'avais, dit Voltaire dans une lettre à d'Alembert, des
citoyens à persuader de la nécessité des lois, je ferais voir qu'il y en a
partout, même au jeu qui est un commerce de fripons, même chez les
voleurs. »
398,
18, Pyrrba. — Femme de Deucalion, sauvés tous deux, à cause de leur
justice, d'un déluge universel; ils repeuplèrent le monde en jetant derrière
eux des pierres qui se transformèrent, celles de Deucalion en hommes et
celles de Pyrrha en femmes. Myth.
18, Cadmus. — Fils d'Agénor, roi de Phénicie; envoyé par son père à la
recherche d'Europe sa sœur, enlevée par Jupiter, avec défense de revenir
tant qu'il ne l'aurait pas retrouvée, arriva en Grèce, où il songeait à s'éta-
blir, lorsqu'un dragon dévora ses compagnons. Il tua le dragon et en
sema les dents, sur le conseil de Minerve ; il en vit naître aussitôt autant
d'hommes armés qui s'entre-tuèrent, sauf cinq qui l'aidèrent à bâtir la ville
qu'il projetait et qu'il éleva sur le modèle de celle de Thèbes en Egypte,
d'où elle prit le nom. Myth.
19, Loy. — Loisir, liberté, faculté.
21, Solon. — Plutarque, Solon, 9. .
23, Varro. — S. Augustin, De civ. Dei, V, 4.
37, De Pibrac. — On lui a reproché d'avoir écrit une apologie de la S*-Bar-
thélemy : c'est là une accusation erronée ; il en fut au contraii-e un des
critiques les plus francs.
40, De Foix. — Paul; le même dont il est question au ch. précédent. V.
III, 370 et N. Gentil-homme.
400,
7, Innouation. — Rien n'est plus dangereux pour un état, qu'un grand
changement, une révolution.
23, Partie. — La santé et la force.
24, Mascbe. — Ce qui le ronge, le fait souffrir.
29, Contemporanées. — Contemporains.
NOTES. LIV. IH, CH. IX. VOI.. III, PAG. 400. Fc.667
35, Capouë. — Tite-Live, XXIII, 3, etc. — Ce sujet a fait l'objet d'un conte
en vers d'Andrieux.
402,
30, Resoluant. — Je ne vais pas soudain dire d'un ton résolu et décisif.
38, Peuples. — Platon, République, VIII, 2. — L'histoire moderne nous four-
nit de nombreux exemples de cette assertion : les Turcs, chez lesquels,
depuis des siècles, la guerre est à l'état endémique entre les diverses na-
tionalités dont se compose leur empire en Europe ; la France, lors de la
Révolution de 1793, d'où elle est sortie plus unifiée qu'avant; la Russie, qui
vient d'avoir à supporter une guerre des plus malheureuses et est livrée à
des désordres intérieurs, dont, il est vrai, on ne saurait encore prévoir la
fin. Seule, au xvni« siècle, la Pologne a disparu par suite de ses dissensions
intérieures, qui en ont fait la proie de ses voisins.
42, Misérable. — Var. de 88 : malotru.
404,
2, SoloD. — Valèke Maxime, XII, 2.
7, Pelote. — Se jouent de nous.
8, Habent. — Citation dont Montaigne donne le sens, avant de la trans-
crire.
18, Escbeuës. — Isocrate à Nicoclès.
35, Suo est. — Dans l'auteur latin, c'est d'un arbre qu'il s'agit.
406,
2, Fondent. — Vont au fond, coulent.
8, Tempestas. — Citation longtemps attribuée à Virgile, que l'on croit au-
jourd'hui tirée d'un auteur moderne.
32, Diuulsion. — Séparation; du latin divulsio que Montaigne a francisé.
35, Qu'enuis. — Qu'à regret, à contre-cœur.
40, Inculcation. — Action d'inculquer, répéter. — Je n'aime pas qu'on re-
' vienne souvent sur les mêmes choses, même s'il s'agit de choses utiles.
408,
14, Lyncestez. — Quinte-Curce, VII, I. — Lynceste avait conspiré contre la
vie d'Alexandre le Grand, à la suite de la mort de deux de ses frères im-
pliqués dans l'assassinat du roi Philippe. Retenu depuis trois ans dans les
fers, on avait différé de statuer sur son sort, en raison de la situation de
son beau-père Antipater, chargé du gouvernement de la Macédoine et de
la Grèce, pendant qu'Alexandre conquérait l'Asie; lors de l'affaire de Phi-
lotas, on décida d'en finir avec lui et c'est alors que se produisit la scène
dont parle Montaigne (329).
28, Desprendre. — A me le faire oublier, me le faire perdre de vue.
29, Assigné. — Confié et livré à...
32, Contenance. — Jusqu'à ne pas savoir quelle contenance tenir.
38, Profession. — De la profession militaire, ainsi qu'il résulte de la cita-
tion de Quintilien (indiquée par erreur comme étant d'Ovide), donnée
quelques lignes plus bas, de différents autres passages des Essais (III, 154,
26; 628, 21 et suivantes; 640, 9; 661, 26 et suivantes; 680, 23), et enfin du
tombeau que lui a fait ériger sa femme où il est représenté en chevalier
armé de pied en cap.
410,
2, Saye. — Pourrait se traduire de nos jours : <> On se met souvent en
habit, pour ne pas mieux danser que si on était en veston • ; toutefois saye,
qui vient du latin sagum, espèce de casaque que les Romains portaient
aux années, signifie plutôt blouse, bourgeron.
4, Curio. — Orateur médiocre qui parlait avec élégance, mais sans ordre
ni imagination, et qui, un jour, au forum, fut abandonné de tout son au-
ditoire. CicÉRO.N, Brulus, 60.
10, Artiste. — Tient trop de la forme artificielle, scolastique.
11, Baste. — Il suffit, c'est assez que je me sois promis. V. N. II, 520*:
Bastantes.
15, Présente. — Et quant à parler d'abondance, à improviser.
Fc.668 ESSAIS DE MONTAIGNE.
18, Alongeail. — Troisième addition ; c.-à-d. son troisième livre et les
additions que pour la troisième fois il faisait aux deux premiers-
19, Pas. — Les variantes ne manquent pourtant pas; du reste au ch. XII
du liv. Il, Montaigne se contredit lui-même : « le m'eschaulde souuent à
corriger et à mettre vn sens nouueau. »
28, Supernumeraire. — Quelque pièce rapportée, quelque ornement ajoute
à cet ouvrage. — Emblème est employé ici dans un sens tout différent de
celui que nous lui donnons d'ordinaire; il a celui du latin emblema, pièce
insérée, mise entre deux autres.
412,
2, Nombre. — Var. de 88 : huit.
8, Soy. — Ou des joncs, des roseaux que l'air agite par hasard et à son
gré.
11, Antiocbus. — Chercha à concilier les doctrines des Académiciens, des
Péripatéticiens et des Stoïciens, n'admettant de dissidences que sur les
mots, et fut considéré comme le chef d'une nouvelle Académie.
16, Qu'autre. — Non pas meilleure que différente; ou non pas meilleure,
mais différente.
18, Lasser. — J'aimerais mieux en être encore aux premières publications
de mes travaux, que de lasser en les publiant.
22, Voit. — Add. de 88 : ie plus souuent.
31, Orthographe. — A cette époque, des efforts étaient faits par plusieurs
(Pelletier, Ramus, etc.), pour introduire dans l'orthographe des réformes
qu'ils finirent par faire accepter. — Cette même question se produit de
nos jours, portant principalement sur l'emploi d'une seule et même lettre
pour un même son et la suppression des lettres inutilement doublées,
réforme qui, dans ces limites, semble devoir prochainement aboutir.
32, Punctuation. — Cette incurie de sa part, à cet égard, n'a pas peu con-
tribué à jeter de l'obscurité sur plusieurs passages des Essais. La ponc-
tuation, en particulier, n'est pas chose indifférente ; un même texte ponctué
de façons différentes peut présenter parfois des sens absolument opposés
(V. N. III, 512 : Ridicules). — En voici un autre exemple : Le général Fairfax,
un des généraux les plus célèbres dans les guerres civiles de l'Angleterre,
sous Charles 1" (xvn* siècle), écrivit, dit on, sous la sentence de mort du
roi, après sa signature, ces mots que n'accompagnait aucun signe de
ponctuation : « Si omnes consentiunt ego non dissentio. » Avec une virgule
après consentiunt, ils signifient : « Puisque tous sont de cet avis, je n'y
contredis pas » ; et dont la traduction, en plaçant outre cette virgule,
deux points après non, est : « Quoique tous soient de cet avis, ce n'est
pas le mien; je suis de l'avis contraire. » Fairfax se réservait, de la sorte,
la possibilité de faire valoir l'un ou l'autre sens, suivant la suite que
pourraient avoir les événements.
414,
5, Métal. — Que me trouvant vivre en des temps où cet âge nouveau, pire
que l'âge d'airain et de fer, est en plein développement, au milieu de ce
que ce siècle a de plus corrompu. — Les anciens distinguaient quatre
âges dans l'histoire du monde : l'âge d'or, l'âge d'argent, l'âge d'airain et
l'âge de fer, correspondant chacun à une diminution de plus en plus
grande de la vertu chez les hommes.
7, Nœud. — Celui de la religion.
14, Emergeant. — Sans profit, et avec perte.
16, Balance. — Proportion gardée.
17, Abbord. — Var. de 88 : porte ouuerte, au lieu de : « de grand abbord ».
21, Fumier. — De me violenter chez moi. — Être sur son fumier signifie en
sa maison, sur ses biens; un proverbe populaire du temps : « Un chien
sur son fumier est bien fort », voulait dire : un chacun est bien hardi,
bien puissant chez lui.
23, Sac. — Ceci était écrit avant 1586, année où Montaigne vit sa maison
envahie.
x\OTES. LIV. III, GH. IX. VOL. III, PAG. 410. Fc.669
416,
2, Desportemens. — Moeurs, actions.
7, Désertées. — Détruites.
9, Athénien. — Ce Lycurgue, intendant du trésor public, se fit remarquer
autant par son éloquence que par la probité avec laquelle il s'acquitta de
sa cliarge. Pi.uiAriQUE, Vies des dix orateurs. Lycurgue, 1.
27, Parole. — Principe parfait en lui-même et qui semble ne pas prêter à
la critique; mais rien n'est absolu, et malgré son excellence il a conduit
à cet autre, inepte dans ses conséquences, que les dettes de jeu sont sacrées,
comme si toutes ne l'étaient pas et comme si, en raison de leur origine,
celles-ci ne devraient pas passer après toutes auti'os, ce qui est précisément
le contraire de ce qui se fait.
32, Poinct. — L'objet, le but.
418,
4, Conscience. — L'obligation que ma conscience m'impose est...
14, Esctiarsement. — Chichement; de l'italien scarsaménle, pauvrement,
mesquinement.
15, Contre. — Je ne vais pas jusque-là, mais peu s'en faut.
15, Desobliger. — Être libre de toute obligation.
17, Indignitez. — Var. de 88 : desplaisirs.
21, Publique. — ... à m'acquitter vis-à-vis d'eux des devoirs que la société
impose...
23, Dedans. — Add. de 88 : e< de l'obligation interne de mon affection.
28, Desplaisant. — Bien fâché, peiné.
30, Entant. — Add. de 88 : et son cousin.
420,
6, Ailleurs. — Var. de 88 : obligations et bienfaicts estrangers.
9, Prou. — Beaucoup.
17, Mihi. — Le texte original est notablement modifié dans la citation.
21, Asseurez. — Nous ne sommes pas assez assurés de pouvoir nous tirer
par nous-mêmes de tout mauvais pas, pour fuir toute dépendance, ne
nous confier et ne nous adresser qu'à nous dans le besoin et. le malheur,
ce qui serait pourtant le plus juste et plus sûr.
22, Manque. — Défectueuse.
25, Hippias. — Cicéron, De Oratore, III, 32. — Hippias se vantait de tout
savoir : Platon, dans ses dialogues, l'a livré au ridicule.
31, Poil. — Soigner soi-même sa barbe et sa chevelure.
31, Braques. — Ou brayes (l'ex. de Bord. port, bagues), caleçon. Etait porté,
dit NicoT, par mesure de propreté par-dessous les hauts-de-chausses. Ce
mot, tiré du grec, signifie court, petit; les braguesen effet ne descendaient
que jusqu'au genou.
32, Soy. — Pour ne faire fond que sur lui-même et n'avoir besoin de per-
sonne autre.
34, Empruntez. — Var. de 88 : estrangers.
30, Passer. — Add. de 88 : l'ai très volontiers cerchc l'occasion de bien faire
et d'attacher les autres à moi, et me semble qu'il n'est point de plus doux
vsage de nos moyens. Il est regrettable qu'en remaniant son texte, Jlon-
taigne ait supprimé cette phrase.
422,
3, Summission. — C'est de ce principe que découle cet autre : « L'aide
apportée au pauvre par la charité, ne doit être que le moins possible gra-
tuit; si minime que soit un service rendu qu'on lui paye, sa dignité est
sauve, l'effort qu'il a dû faire le réhabilite à ses propres yeux et lui est
salutaire. »
5, Enuoyoit. — Ces présents consistaient en chevaux et oiseaux de chasse,
chacun au nombre de dix; nombre qui, au dire de Tamerlan, aggravait
l'insulte qui lui était faite, Bajazet ne devant pas ignorer que le nombre
neuf était le nombre sacré des Tartares, celui auquel il eût dû se fixer.
9, Donner. — Les errements sont autres aujourd'hui et les souverains re-
Fc.670 ESSAIS; DE MONTAIGNE.
çoivent aussi bien qu'ils donnent; seulement en France, c'est toujours le
budget ou les établissements producteurs de l'Etat, Sèvres, les Gobelins etc.,
ce qui est tout un, qui font les frais quand ce sont nos représentants qui
donnent, et quant à ce qu'ils reçoivent, ils ne manquent pas de toujours
le considérer comme leur étant personnel.
11, lupiter. — Aristote, Morale à Xicomaque, IV, 3. — Tliétis implorait
Jupiter pour qu'il vengeât Achille, son fils, de l'affront que les Grecs ve-
naient de lui faire en lui enlevant Briséis, sa captive. Le dieu acquiesça
à sa demande et ratifia sa demande par un simple signe de tête qui
ébranla l'Olympe, ce dont Phidias s'est emparé pour son Jupiter Olympien,
l'un de ses chefs-d'œuvre. Le discours de Thétis à Jupiter se trouve au
premier chant de VIliade, v. 503.
22, Autruy.
• Aclieter est meilleur marclu; que demander. » Proverbe.
• Rien n'est plus cher que le prié. » Proverbe.
2.5, Contraction. — L^exiguïté, le peu d'étendue de mes désirs et de mes
projets. — Ce mot est purement latin.
424,
2, Aristote. — Mçrale à Nicômaque, IX, 7.
8, Encores. — Xénophon, son historien, dans la Cyrovédie, VllI, 4, 4.
14, Amys. — Sylla ne pensait pas ainsi, disant de lui-même, ainsi que le
porte son épitaphe composée par lui : « Nul ne fit plus de bien à ses amis,
et plus de mal à ses ennemis. »
24, Nom. — C'est là une erreur causée par la vanité; seuls, lui et son père
sont nés à Montaigne, et lui seul, abandonnant son nom de famille, y a
substitué celui-ci qui sonnait mieux et qui, du reste, s'est éteint avec lui.
25, Accoustamons. — A tout ce que nous tournons en coutume.
28, Maux
0 Coutume, opinion, reines de notre sort,
vous réglez des mortels et la vie et la mort. » Voltaire.
29, Ecbauguette. — Var. de 88 : garnison. — Sentinelle. — L'échauguette
est une tourelle où est établie la guette, celui qui fait le guet, qui guette,
qui surveille.
426,
7, Indolence. — Cette phrase de Montaigne a été l'objet de violentes cri-
tiques de la part des solitaires de Port-Royal, injustes en cette occasion,
contre leurs habitudes; ils l'ont considérée abstraction faite de la phrase
précédente à laquelle elle est liée et en ont ainsi altéré le sens. Mon-
taigne exprime simplement une rêverie dans laquelle il se plonge, quand
il songe aux dangers qui peuvent fondre sur lui, et non une règle de
conduite. La manière dont il parle de la mort partout ailleurs dans les
Essais, la façon dont lui-même a fini, témoignent hautement qu'il ne la
redoutait et ne s'en effrayait pas.
25, Eux. — Je ne leur en veux pas non plus, il faudrait en vouloir à trop
de gens.
30, Juridique. — Ceci s'applique ici plus spécialement aux gens de justice
et aux magistrats que Montaigne sembla redouter autant que les gens do
guerre, bien qu'au chapitre suivant il dise n'avoir jamais eu de démêlés
avec la justice; mais cela peut s'entendre aussi de tous ceux qui détiennent
la moindre parcelle de l'autorité publique, soi-disant responsables vis-à-vis
de leurs supérieurs qui n'ont d'autres soucis que de les couvrir, parce
qu'en effet c'est généralement à leur instigation ou en conformité de
leurs propres idées qu'il en est ainsi. — Semblables abus sont de tous les
temps; mais, plus lieureux que nous, chez les Athéniens tout individu
investi d'un mandat pouvait être tenu de justifier ses faits et gestes
NOTES. LIV. III, CM. IX. VOL. III, PAG. 420. Fc.671
dans l'exercice de ses fonctions : des accusateurs publics étaient constitués
à cet effet; et, dit Montesquieu, les Romains étaient admirables, en ce
que chez eux on pouvait faire rendre raison de leur conduite à tous les
magistrats, les censeurs exceptés. — En France, la responsabilité des fonc-
tionnaires n'existe pas; ils peuvent commettre les plus flagrantes injus-
tices, les plus lourdes erreurs, sans en subir de conséquence aussi bien
dans le domaine administratif que dans celui de la justice et a fortiori
dans ce qui se rattache à la politique. Les abus de ce fait sont de toutes
les époques; le général André dans ses Mémoires en révèle un, des plus
caractéristiques, commis vers 1883 par le Ministère solidarisé à cet effet,
dont fut victime, à la requête de l'étranger, un sieur Bonnal. — La Ligue des
Droits de l'homme, qui s'est récemment constituée dans le but de faire
respecter ces droits, a plus de bonne volonté que d'efficacité; et il en sera
ainsi tant que tout fonctionnaire quel qu'il soit ne pourra être déféré
directement par qui se croira lésé aux cours d'assises, seuls tribunaux à
peu près indépendants, qui auraient qualité pour prononcer l'amende, la
prison, la suspension et la révocation ; une semblable institution serait
. une loi de salut public, contre les excès de pouvoirs des juges d'instruc-
tion, des fonctionnaires administratifs de tous ordres, trop souvent sanc-
tionnés par les tribunaux civils et les conseils de préfecture, qui ne jouis-
sent pas ou qu'on ne croit pas jouir, ce qui revient au même, d'une
complète indépendance.
428,
7, Taches. — Cet enthousiasme évoque le souvenir des imprécations de
J.-J. Rousseau contre Paris, auxquelles Bossuet ne se montre pas plus
favorable : « Adieu, Paris! ville de bruit, de fumée et de boue, où les hommes
ne croient plus à l'honneur, et les femmes à la vertu; adieu, Paris! cher-
chant la tranquillité et le bonheur, nous ne serons jamais assez loin de
toi. » J.-J. Rousseau. — « Paris, Paris, dont on ne peut apprécier l'orgueil,
dont la vanité se soutient toujours, malgré tant de choses qui la devraient
déprimer; quand te verrai-je renversé. » Bossuet.
7, François. — L'unité de la France n'était encore que virtuellement réa-
lisée; on était Breton, Flamand, Bourguignon, Gascon, Provençal, etc..
autant que Français; la fusion n'a réellement été opérée que par la Révo-
lution; ultérieurement par notre organisation militaire d'avant 1870; plus
tard, les chemins de fer ont contribué à parfaire cette œuvre.
15, Estât. — La prédiction de Montaigne s'est réalisée en 1871, lors de la
Commune. Ce que n'avaient pu faire les Allemands, l'insurrection l'a tenté
et ce n'est pas sa faute, mais le manque de temps, si Paris, à ce moment,
n'est devenu un monceau de cendres; si seuls les Tuileries, l'Hôtel de Ville,
le Ministère des Finances, la Cour des comptes, le Conseil d'État, la Grande
Chancellerie de la Légion d'honneur ont été la proie des flammes. Dans
l'avenir, en pareille occurrence, les explosifs viendront en aide au pétrole.
16, Abbois. — Me retirer, mourir. — Terme de chasse pris ici au figuré;
un cerf est aux abois, quand, poursuivi par les aboiements des chiens, il
est serré de près.
19, Excès. — Var. de 88 : totH. ,
20, Postposant. — Subordonnant, estimant inférieure.
20, Commune. — C'est la théorie que professent de nos jours les adeptes
de l'internationalisme. Ils préconisent le désarmement universel, ne tenant
aucun compte de la nature humaine chez laquelle, que ce soient des indi-
vidualités ou des collectivités, la force prime le droit, toujours prête à
fouler aux pieds celui d'autrui, à s'emparer de ses biens, ne les respectant
que chez ceux qui sont en état de les défendre. Cette utopie serait quand
même respectable chez ceux qui l'émettraient de bonne foi, mais formulée
par des ambitieux et des énergumènes qui n'ont en vue que de se créer
une popularité malsaine en faisant miroiter aux yeux des masses des
aspirations qui les allégeraient de toute obligation militaire, de se dé-
barrasser eux-mêmes de l'entrave qu'apporte l'armée à la réalisation de
Pc. 672 ESSAIS DE MONTAIGNE.
leurs idées subversives eu vue de s'emparer du pouvoir, c'est avec raison
qu'on les flétrit du nom de sans-patrie.
20, Féru. — Frappé, entiché, captivé par.
29, Cboaspez. — Plutarque, De l'Exil, 5; Élien, Hist. div., XII, 40. —
« Ses eaux, dit Pline, XXXI, 3, sont considérées comme admirables; les
rois des Parthes en font porter avec eux, même dans leurs plus longs
voyages » ; on la faisait bouillii*.
34, Feisse. — Sur ce point, Montaigne, conséquent du reste avec lui-même,
se montre de tout autre sentiment que bien d'autres. « Oh ! n'exilons per-
sonne, l'exil est impie », a dit Victor Hugo. « L'exilé partout est seul »,
répète Lamennais, dans une de ses plus belles pages où il peint les douleurs
de l'exil.
430,
4, Quoy? — C'est la tournure latine, quid/' quod...? Elle peut se traduire
ainsi : Que dirai-je encore? N'alla-t-il pas jusqu'à repousser l'argent que
ses amis étaient disposés à sacrifier pour le délivrer?
8, Seconde. — C.-à-d. les exemples de la première espèce sont ceux qu'il
embrasse plus par estime que par affection ; ceux de la seconde sont ceux
si élevés, si extraordinaires, qu'il en est qu'il n'arrive même pas à com-
prendre.
23, Romains. — Martial, XIV, 28; Juvénal, IX, 50.
24, Teste. — Le parasol en Italie et aussi en Espagne, transformé plus tard
en Angleterre où la pluie est plus fréquente que le soleil, y fut en usage
bien avant que la France, grâce à son climat, songeât à l'adopter. Il ne
s'est généralisé chez nous que vers la fin du xvii" siècle: le poids de ce
meuble donna longtemps à réfléchir : en l'an de grâce 1500, il mesurait
en effet l'",20 de diamètre et, confectionné en cuir, toile cirée, étoffe de
soie huilée en papier verni, ne pesait pas moins de 2 kilos.
27, Poste. — A leur gré. — Ce devait être tout simplement, à l'intérieur
des habitations, par le moyen de pankas, sorte de grands panneaux mo-
biles, suspendus au plafond, de contexture légère, recevant de main
d'homme un mouvement d'oscillation et dont il est fait un usage constant
dans les pays orientaux; à l'extérieur, à l'aide de vastes parasols et de
gigantesques éventails portés ou agités par des esclaves ou des eunuques,
comme cela se pratique encore en Chine et dans les Indes. Ce que Xéno-
phon dit des Perses à ce propos, Hérodote le dit égalemement des Lydiens
et Strabon des Bactriens.
32, Auoyé. — Une fois en route. — Être avoyé, c'est le latin in via esse.
33, Grandes. — Je suis aussi disposé, à me détourner des petites entreprises
que des grandes; il me doute autant de me mettre en train pour les unes
que pour les autres.
432,
8, Partir. — Au moyen âge, en France, on ne faisait que deux repas par
jour : le dîner à 9 heures du matin et le souper à 5 heures du soir, ce
dernier de beaucoup le plus copieux. A la fin du xv* siècle, le dîner recula
à 10 heures; d'où ce dicton de l'époque :
« Lever à^six, dîner à dix,
Souper à six, coucher à dix,
Font vivre l'homnae dix fois dix. »
Au XVI» s., du temps de Montaigne, à 11 heures; au xvii% à midi : « J'y
cours à midi sonnant », dit Boileau dans sa satire du Repas ridicule;
aujourd'hui, certains ne dînent à Paris qu'à 1 heure et demie. Ce recul
progressif amena l'usage du déjeuner (mot dont le sens est « rompre le
jeûne »). Quant au souper, il a été également reculé à 6 et 7 heures en
province, 7 heures et demie, 8 heures à Paris, il en est même qui soupent
à 10 heures, 10 h. 1/2, recul qui a introduit, pour les désœuvrés, l'habitude
du thé de 5 heures.
NOTES. LIV. HT, CH. IX. VOL. III, PAG. 432. Fc.G73
24, (Economique. — Par vertu économique, Montaigne comprend ici tout
ce qui est relatif à la bonne tenue d'une maison; non seulement l'écono-
mie proprement dite, mais aussi l'ordre, l'activité, le sens des affaires,
qualités qui sont intimement liées les unes aux autres et n'ont réellement •
d'effet utile qu'autant que nulle d'elles ne fait défaut.
24, Propre. — Je mets la mienne (ma femme) à même; je lui donne occa-
sion d'exercer cette vertu.
30, Puisse. — Pourvu que je le puisse.
32, Quiète. — Paisible, tranquille, du latin quielus, quia même signification.
434,
3, Desprendre. — Var. de 88 : perdre.
9, L'autre. — « L'absence n'affaiblit pas l'amitié, elle n'agit que éur les
passions brûlantes comme l'amour et la haine. »
• L'absence est à l'amour ce qu'est au feu le vent ;
Elle éteint le petit et rallume le grand. » B.-Rabutin.
« La beauté, même à l'œil, sait-elle toujours plaire?
Vous croyez que le temps la détruit ou l'altère;
L'habitude, voilà son plus triste ennemi.
A qui nous voit toujours on ne plaît qu'à demi. • Barthe.
La conclusion de ce quatrain est celle de Montaigne : « Un peu d'absence
fait grand bien • ; mais il se dit aussi avec non moins de vérité :
« Loin des yeux, loin du cœur! »
12, CoUigance. — Union, liaison intime, connexion; du latin colligatio.
15, Ayde. — L'exemple du doigt étendu se trouve dans Plutarque, Des
communes conceptions contre les Stoïques, 18; quant au dîner, cela semble
appartenir en propre à Montaigne.
26, Locorum. — Le texte original est ici tant soit peu altéré, pour mieux
s'adapter à l'idée.
436,
4, Non que. — Non moins que.
G, Accouez. — Attachés, accrochés. Ce terme est encore employé par les
marchands de chevaux : Accouer quatre ou cinq chevaux, c'est les atta-
cher à la file les uns des autres, le licol de l'un à la queue de celui qui le
précède.
8, Chiennine. — Saxon le Grammairien, dans son Histoire du Danemark,
VllI, parlant de la conversion des peuples de Rugen, dit que les habitants .
de Karenty, une de leurs villes, après avoir renoncé au culte de leurs
idoles, ne laissaient pas de les redouter encore, se souvenant de la manière
dont elles avaient souvent puni leurs impudicités, les coupables, en action,
demeurant liés l'un à l'autre comme des chiens sans pouvoir se dégager,
au point que parfois surpris ainsi, ils avaient été, en cet état, placés l'un
d'un côté, l'autre de l'autre, sur une perche qui les soutenait en l'air et,
de la sorte, hvrés à la risée publique.
27, Viuoit. — La Boétie.
31, Seuls. — En ne travaillant que pour nous seuls.
438,
1, Tristes. — J'éclaircià, j'égaie les tristes pensées par des parties de plaisir,
telles que les voyages.
2, Platoniques. — Platon, Lois, XII.
4, Volontiers. — Certains pensent qu'il y a erreur et que Montaigne avait
voulu mettre « plus mal volontiers » et appuient leur dire de ce qu'il
ajoute peu après : « Mais en tel aage, vous ne reuiendrez iamais... » L'er-
reur est loin d'être manifeste, au contraire; et quant aux mots cités à
l'appui, ils n'affirment cette supposition que par suite de l'intercalation
de la phrase précédente, qui n'existe pas dans l'éd. de 88.
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 13
Fc.674 ESSAIS DE MONTAIGNE.
18, Air. — Chrysippe était de Soles en Cilicie, Asie Mineure; Cléanthe,
d'Assos en Éolie, Asie Mineure; Diogène, de Babylone en Chaldée, Asie
Centrale; Zenon, de Citium, île de Chypre; Antipater, de Tarse en Cilicie.
Tous ces philosophes, de l'école stoïcienne, passèrent leur vie à Athènes.
Plltarque, De l'Exil, 12.
26, Gorge. — Montaigne dit ailleurs encore être sujet à des maux de gorge ;
il est mort d'une esquinancie.
29, Miens. — Satisfaction ne lui a pas été donnée sur ce point : il est mort
chez lui, au milieu des siens; son corps, transporté à Bordeaux, a été placé
dans l'église des Feuillants et son cœur déposé dans l'église de S.-Michel
de Montaigne. V. Notice sur sa vie, IV, fasc. A.
31, Entregent. — Civilité, politesse.
440,
6, Sortir. — Ménage, à son lit de mort, disait de même au confesseur qui
l'assistait : « On a besoin d'une sage-femme pour entrer en ce monde,
combien un homme sage est précieux pour en sortir! -
10, Coniller. — A me sauver, me cacher comme un lapin dans son trou.
V. N. I, 200.
14, Quiète. — Paisible, tranquille. V. N. III, 432.
17, Parler. — Les anciens Grecs et Romains attachaient du prix aux adieux
suprêmes; il leur semblait que l'àme, au moment où elle se détachait du
corps, anticipait sur les secrets de la toinbe et ils recueillaient comme
sacrées les dernières paroles des mourants; Andromaque, dans Homère,
regrette qu'Hector mourant n'ait pu lui adresser « quelques sages paroles
dont l'éternel souvenir vînt se mêler à ses larmes ». — Che? les Romains,
mourir sans parler, se disait encore de ceux qui mouraient intestats.
18, Yeux. — L'usage de clore les yeux et la bouche à l'instant de la mort,
était en quelque sorte un rite sacré dans l'antiquité : dans l'Odyssée,
Agamemnon aux Enfers, ou plutôt son ombre, se plaint de ce que Clytem-
nestre, au moment où elle venait de l'assassiner, s'est retirée sans accom-
plir ce pieux devoir.
23, Rechigner. — Faisant mauvaise figure, geignant, ayant l'air maussade.
La Fontaine s'est servi de ce mot dans sa fable L'aigle et hibou; dépei-
gnant les petits de celui-ci, il dit : « de petits monstres fort hideux, rechi-
gnes, la voix de mégère ».
24, Pieds. — Chateaubriand pensait de même : « Cette impossibilité de durée
et de longueur dans les liaisons humaines, cet oubli profond qui nous
suit, cet invincible silence qui s'empare de notre tombe et s'étend de là
sur notre maison, me ramènent sans cesse à la nécessité de l'isolement.
Toute main est bonne, pour nous donner le verre d'eau dont nous avons
besoin dans la fièvre de la mort. Ah! qu'elle ne nous soit pas trop chère,
car comment abandonner, sans désespoir, la main que l'on a couverte de
baisers et .que l'on voudrait tenir éternellement sur son cœur! »
27, Discours. — Par raison.
442,
2, Cheure. — Se fâcher, se mettre en colère; c.-à-d. imiter la chèvre dans
ses bonds, dans ses emportements.
12, Contrebas. — De haut en bas, tout à fait.
16, Main. — De longue main, d'avance.
31, "Vent. — Sans frapper de grands coups en i'air, sans perdre son temps.
31, Préoccuper. — Prévenir.
444,
3, Dion. — Lire Bion, ainsi que le portent l'ex. de Bord, et la traduction.
DiOGÈNE Laerce, IV, 45.
4, Broche. — Il lui ferma la bouche. Cette expression couper broche, tirée
de ce que l'on arrête l'écoulement du vin d'un tonneau, en introduisant
dans l'orifice une tige de bois ou broche que l'on coupe au ras de la douve,
correspond exactement à celles de couper court, couper net, que nous
employons aujourd'hui et dont l'origine est la même.
NOTES. LIV. III, CH. IX. VOL. III, PAG. 444. FcôT-i
12, L'iniure. — On prête à un. prédicateur des plus en renom de notre
temps un fait analogue : Piquée au vif par quelque trait de l'orateur, une
personne crut s'en venger en disant à tout venant, qu'après tout lui-
même n'était fils que d'un cordonnier. 11 est de par le monde une gent
exécrable, celle qui a la manie de rapporter perfidement à autrui ce qu'on
dit de lui, sous couleur de lui témoigner de l'intérêt, le frappant d'un
trait qui ne l'avait pas touché, au risque de créer les pires inimitiés; quelle
atteinte à la charité et que de mallieurs en résultent chaque jour! Le pro-
pos fut répété à l'intéressé, et, dans le premier sermon qui suivit : « On
me reproche, dit notre prédicateur, d'être fils d'un cordonnier; hélas! pas
même d'un cordonnier, je ne suis fils que d'un savetier qui ne faisait que
les raccommodages et les ressemelages, c^ qui du reste ne diminue en rien
l'honorabilité de mes parents. »
25, loindre. — Cet honnête homme, Montaigne le trouva, vers l'an 1586,
dans Pierre Charron, qui, après la mort de l'auteur des Essais, écrivit un
livre intitulé : ■< De la Sagesse », où il a recueilli une infinité de pensées de
Montaigne avec lequel il était lié d'une étroite amitié vers la fin de sa vie.
32; Féaux. — Les plus fidèles, les plus intimes.
37, Amy. — L'éd. de 88 et l'ex. de Bord., au Heu de : « Eh qu'est-ce qu'vn
amy! • portent : Oh! vn amy! variante beaucoup plus heureuse sous rap-
port de la forme et de l'ejfpression et qui, pour cette raison, a été suivie
dans la traduction.
39, Feu. — CicÉRON, De Amicit., 0.
446,
6,'Empescber. — Embarrasser.
Q, Indois. — C'est pourquoi les Indiens... — Montaigne dit volontiers In-
dois pour Orientaux, dans le même sens que les Romains et les Grecs di-
saient les Barbares, et les Hébreux, les Gentils. — Ce qu'il remarque ici
des Indiens, Sextus Empiricus le dit des Scythes, Strabon des Bactriens et
des Massagètes. Le passage semble tiré cI'Hérodote, où on lit : « On dit
qu'ils observent cette coutume, qu'aussitôt que quelqu'un d'entre eux,
homme ou femme, tombe malade, ses meilleurs amis le tuent, parce que,
disent-ils, il devient maigre et que la maladie corrompt sa chair; et celui-
là même qu'ils croient malade et qui ne l'est pas, ils ne laissent pas de le
tuer impitoyablement; ils font mourir de même ceux qui sont parvenus à
une extrênijC vieillesse, mais à ce régime-là, il y en a peu qui arrivent à
un âge avancé. Il y a d'autres peuples dans les Indes qui observent une
coutume un peu différente : aussitôt que quelqu'un d'entre eux est malade,
il se retire à l'écart dans un lieu désert, où il demeure tout seul, sans que
personne prenne soin de lui, soit qu'il guérisse, soit qu'il meure. » — En
ce qui concerne plus particulièrement les Massagètes (peuple scythe au N.
de la mer Caspienne), ils considéraient, dit Strabo.v, que la mort la plus
honorable, quand l'âge les a rendus inutiles, c'est d'être tués et mangés
avec de la viande de mouton. Quant à ceux usés par la maladie, ils les dé-
truisaient comme impies et ne les considéraient que comme susceptibles
d'être dévorés par les bêtes fauves. Un autre auteur ajoute qu'ils n'esti-
maient rien de si malheureux, que de périr autrement que par le fer; et
c'est pourquoi ils se faisaient une loi de tuer ainsi les vieillards et de les
manger.
10, Insupportables. — Ceux qui traînent languissants un si long espace de
vie.
19, Loy. — La liberté, le droit.
22, Maladie. — Robert Gagui.n, historien du xv« siècle, dit en parlant de
Louis XI : • Dans son désir de recouvrer la santé, il alla jusqu'à absorber
du sang humain tiré à des enfants >-; on en a dit autant du pape Inno-
cent VIII. — Celse dit : « Il y en a qui se sont guéris de l'épilepsie en bu-
vant du sang chaud d'un gladiateur qui venait d'être égorgé » ; l'empe-
reur Constantin,, malade, donna un témoignage de sa déférence au pape
Sylvestre, en renonçant à prendre des bains de sang.
FC.C76 ESSAIS DE MONTAIGNE.
24, Poisante. — Peut-être David qui, d'après le Livre des Rois, « âgé de
soixante-dix ans, ne pouvant, par suite de son âge, se réchauffer, bien
qu'ayant déjà des épouses et des concubines, fit venir du fond de ses états
une vierge pour coucher avec lui et le réchauffer de son contact » ; et,
ajoute le livre saint, il n'eut pas d'autres rapports avec elle. — On a pensé
aussi que ce pouvait être le duc d'Albe, mais si on a dit de lui qu'il se fai-
sait allaiter par deux nourrices, on ne trouve rien autre du procédé prêté
à David. — L'éd. de 88 aj. ici : le conseillerois volontiers Venise pour la
retraicle d'vne telle condition et foiblesse de vie.
30, Pendant. — Escarpé, glissant.
;U, Gaignart. — Coin. En Gascogne, on désigne de ce nom, qui semble venir
du latin canis, chien, les (joins exposés au soleil où, en hiver, les chiens, et
aussi les gueux, se rassemblent, cherchant à combattre le froid.
448,
8, lour. — « Ne remets pas à demain ce que tu peux faire aujourd'hui. »
Proverbe. — Conséquent avec lui-même, Montaigne, sentant approcher
sa fm, se leva de son lit en chemise, prit sa robe de chambre, passa dans
son cabinet et, faisant appeler tous ses serviteurs et autres personnes aux-
quelles il voulait laisser des souvenirs, il leur remit ce qu'il avait consigné
à leur intention dans son testament, par crainte des difficultés qu'auraient
pu faire ses héritiers pour acquitter les legs qu'il avait faits. Anthone, Com-
mentaire sur la coutume de Bordeaux.
Il, A peu. — Pour peu.
22, Vsage. — Qui sont uniquement à l'usage...
450,
3, Perdu. — Etienne de La Boétie. V. liv. I, ch. XXVII, I, 296 et suiv.
4, Visages. — Add. de 88 : le scay bien que ie ne lairray après moy aucun
respondant si affectionné de bien loing et entendu en mon faict, comme i'ay
esté au sien, ny personne à qui ie vousisse pleinement compromettre de ma
peinture : luy seul iouyssoit de ma vraye image, et l'emporta. C'est pourquoy
ie me deschiffre moy mesmes si curieusement.
11, M'attendre. — Qu'à m'occuper d'elle...
21, Gaton. — Caton d'Utique. V. N. II, 430 : Premier.
31, Gommourans. — Nom d'une comédie de Plaute. C'est-à-dire la bande
de ceux qui voulaient mourir ensemble, formée par Antoine et Cléopâtre;
gens qui, après la bataille d'Actium "(31), avaient formé ce projet au-
quel, le moment venu, nombre n'hésitèrent pas à se soustraire et qui en
l'attendant passaient leur temps dans les festins et la débauche. Plutarque,
Antoine, 15.
34, Petronius. — Tacite, Ann., XVI, 19. — Pétrone fut un des favoris de
Néron qui lui donna le titre d'Arbitre des élégances (intendant des plai-
sire); soupçonné d'avoir pris part au complot de Pison, il reçut l'ordre de
se donner la mort, s'ouvrit les veines et montra dans ses derniers moments
la plus grande sérénité. On a de lui un pamphlet satirique, où se trouve
entre autres un morceau, •« Le festin de Trimalcion », contenant de nom-
breuses allusions à Néron, à ses débauches et à son manque de goût;
pamphlet qu'en mourant, il lui aurait adressé à lui-même.
31, Tigellinus. — Tacite, Hist., I, 72. — Tigellinus, de basse naissance, favori
de Néron, le déprava, le façonna à tous les forfaits, osa même en com-
mettre à son insu et finit par l'abandonner et le trahir; "c'est dans ses jar-
dins que commença l'incendie de Rome. Exécré de tous, il reçut d'Othon
l'ordre de mourir; au milieu des étreintes et des baisers de ses maîtresses,
après des retards honteux, il se coupa la gorge et couronna l'opprobre de
sa vie par la lenteur et la honte de sa mort.
35, Mort. — Add. de 88 : Selon les règles de ce temps là. ^
452,
15, Vie. — A la facilité avec laquelle je quitterai la vie.
25, Fois. — Et plus encore quelquefois.
27, Propriété. — Du latin propriare, approprier; par ext., convenable, con-
NOTES. UV. III, CH. IX. VOL. III, PAG. 452. Fc.677
fortable. Certains éditeui*s, de leur propre mouvement, y ont substitué
« propreté ».
30, Conuiuium. — Cette première partie, Montaigne l'a adaptée à son sujet
en lui prêtant un sens tout contraire à celui qu'elle a dans l'original.
37, Superflue. — Voltaire était d'un avis contraire : « Le superflu, chose si
nécessaire », a-t-il dit quelque part.
454,
8, Raison. — Dans le Journal de son voyage en Allemagne et en Italie,
Montaigne dit de lui-même qu' « il se conforme et renge, en tant qu'en luy
est, aux modes du lieu où il se treuue : et qu'il portoit à Auguste (Augs-
bourg) un bonnet fourré parla ville ».
10, Vn. — Et tellement un (égal, indifférent) que je me plains, en vieillissant,
de cette manière d'être qui fait que je suis content de tout.
16, Estrangers. — « Evitez chez l'étranger de vous lier avec les gens de
votre nation, vous ne verriez ensemble que votre pays. » Bacon.
20, Estrangeres. — Les guides qui abondent actuellement, en même temps
que s'est développé en France le goût des voyages, donnent, avec juste
raison, comme principe essentiel, surtout à l'étranger, de savoir se con-
former aux goûts et aux habitudes des pays où l'on se trouve.
25, Venir. — Le retour.
34, Homme. — Honnête homme, au sens où le xvn' siècle emploiera si sou-
vent cette expression, c'est non tant l'homme d'honneur que l'homme
galant, l'homme comme il faut.
35, Façons. — A rencontre de ces hommes qui s'effarouchent des façons
contraires aux leurs, je voyage parce que je suis las de nos manières.
36, Logis. — Aussi « se faschoit-il, comme il le dit dans son Journal de
voyages, de rencontrer à Rome si grand nombre de François, qu'il ne
trouuoit en la rue quasi personne qui ne le saluast en sa langue ». — Nous
pouvons en dire autant aujourd'hui des étrangers à Paris. Anglais et Alle-
mands en particulier pullulent, non seulement en qualité de touristes qui
sont légions, mais y demeurant soit pour leur agrément, soit pour faire le
commerce ou se livrer à l'industrie : c'est une véritable invasion; et, où
qu'on soit^ où qu'on aille, on y entend parler les langues étrangères au
moins autant que le français.
456,
4, Peu. — Y a pu; forme elliptique pour : « y a pu tenir, y a pu loger ».
13, Suiure. — Add. de 88 : et qui prenne plaisir à vous assister.
30, Arcbytas. — Cicéron, De Amicitia, 23. — Archytas fut à la fois ma-
thématicien, astronome, homme d'état, général; six fois il fut élu chef
du gouvernement et à diverses reprises battit les ennemis de sa patrie. 11
avait écrit sur presque tous les sujets, il ne reste de lui que de très courts
fragments. On lui attribue l'invention de la vis, de la poulie; il avait,
dit-on, construit une colombe volante.
30, Passer. — La vie.
34, Auez-vous. — S.-ent. : mais on me dira; — ou plutôt Montaigne adopte
ici la forme d'un dialogue entre lui et un interlocuteur supposé qui l'engage
à ne pas voyager.
458,
1, Pompe. — Henri de Navarre y vint avec toute sa maison militaire et ses
équipages de chasse le 19 décembre 1584 et y séjourna deux jours; il y
vint loger une seconde fois le 23 octobre 1587, après la bataille de Coutras.
7, Destourbier. — Embarras. V. N. II, 454.
26, Moditication. — Var. de 88 : mesure.
460,
6, Non . — Où n'y en a-t-il pas /
22, Poulet. — Un billet doux.
23, Frotter. — C'est ce que Rabelais appelle faire la bête à deux dos.
26, Porcie. — Fille de Caton d'Utique, s'arracha la vie, quand elle apprit la
défaite et la mort de Brutus son mari, après la bataille de Phihppes; ne
Fc.078 ESSAIS DE MONTAIGNE.
pouvant trouver un fer pour se détruire, elle avala des charbons ardents.
27, Homme. — Probablement Théodore de Bèze, qui publia presque en même
temps des poésies amoureuses et de nombreux ouvrages très appréciés on
faveur de la Réforme, parmi lesquels malheureusement une apologie
intolérante du jugement et du supplice de Servet, brûlé vif, du fait de
Calvin, à Genève, en 1553, pour cause d'hérésie. D'autres pensent qu'il
s'agit de Muret qui, en 1552, fit imprimer et un Discours sur l'excellence
de la philosophie et des pièces fort légères en môme temps qu'un com-
mentaire assez indiscret des « Amours » de Ronsard. Bonnefon.
31, Desieuné. — Se soit régalé (en rompant son jeûne).
34, Sentez. — Ecoutez lire...; foi-me latine sentite, écoutez.
38, Ariston. — Plutarqoe, Comment il faut ouïr, 8.
462,
5, Ouurier. — Aristippe.
8, Aristippique. — Contre la vertu telle que la définissait Aristippe. Dio-
GKNE LaEIîCE, II.
Il, Presse. — La foule, la multitude.
14, Antisthenes. — Diogène Laerce, VI, 11.
17, Diogenes. — Diogène Laerce, VI, 38.
18, Confidence. — La fermeté, la résolution; c'est le sens de ce mot en
latin, mais qui n'est plus celui qu'il a de nos jours.
23, Lays. — De Guevara, Epit. dorées; venant de cette source, on a tout
lieu de tenir ce propos comme apocryphe.
38, Sua. — La relation de cette citation avec le texte, ne se saisit pas bien;
cela arrive quelquefois chez Montaigne.
41, Inégale. — « Il n'y a pas trois ou quatre peuples sur la terre où les lois
criminelles soient assez bonnes, pour qu'on ne préfère pas à leur tribunal
celui d'un seul homme de probité et de bon sens. Servan.
11 Endroicts. — De se montrer à la fois sous deux jours opposés.
13, Choses. — Les prédicateurs, les moralistes.
15, Conférence. — Du rapport, de la relation avec les autres vies.
19, Saison. — Cicéron, dans sa Lettre à Alticus, II, I, reproche encore à
Caton de parler quelquefois, comme s'il opinait dans la république de
Platon, et non dans la lie de Romulus.
28, Innocente. — Louis XVI est, chez nous, un exemple des plus probants
de cette vérité, que démontrent non moins péremptoirement ceux entre
autres de Louis XI et de Richelieu. L'expérience ne le prouve que trop,
pour gouverner les hommes et triompher, dans leur intérêt même, des
obstacles sans cesse renaissants que ceux qui en ont la gestion rencontrent
à l'accomplissement de leur mission, il ne faut voir que l'utile, sans se
préoccuper outre mesure du bien ou du mal, du juste ou de l'injuste,
quand la nécessité commande ; celui qu'arrêtent les scrupules le cas échéant,
ne fait rien qui vaille.
31, Confesseur. — Peut-être est-il question ici de saint Louis qui, de l'aveu
même de Joinville son historien et son panégyriste, fut très intolérant et
entreprit des croisades qiïî coûtèrent tant à la France, tournèrent si mal
et lui firent négliger l'administration du royaume. Naigeon. — Cela peut
s'appliquer également à Charles VIII qui, en 1484, restitua le Roussillon à
Ferdinand roi de Castille, à l'instigation de son confesseur; à Henri II,
qui persécuta les réformés à l'instigation du cardinal de Lorraine « qui
avait la conscience du roi, comme en sa manche » ; à Louis XIV, que
l'influence de ses confesseurs amena à révoquer l'édit de Nantes, fait qu'on
ne saurait toutefois imputer, comme nombre d'historiens l'ont fait, au
Père Lachaise qui, ainsi qu'en témoignent les Mémoires de Saint-Simon, y
était au contraire absolument opposé et parvint à l'empêcher tant qu'il vécut.
33, Pius. — CoME DE MÉDTCis disait : « On ne gouverne pas avec des pate-
nostres. » Et Bernadotte : « Qu'il fallait, pour conduire la France, une
main de fer gantée de velours.
NOTES. LIV. III, CIL IX. VOL. III, PAG. 466. Fc.679
466,
9, Affaires. — Cela est très vrai et explique pourquoi en politique les
hommes sont souvent inconsciemment différents de ce qu'ils sont dans la
vie privée. Mais, si dans les circonstances anormales tout acte, quel (lu'il
soit, peut avoir sa raison d'être et son excuse, en temps normal le respect
des principes constitutionnels, des libertés publiques et des droits de
chacun est de règle absolue. Ce qui n'empêche que nous voyons constam-
ment nos gouvernants y faillir, parce que nous manquons du caractère
nécessaire pour le leur imposer et que leur responsabilité morale et
légale à cet égard est illusoire. Mais les pouvoirs publics ne sont pas
immuables et il ne faut pas désespérer qu'il en survienne d'autres qui
demanderont compte à ceux qui les ont précédés plus ou moins immé-
diatement, législateurs, ministres, chefs de l'état, de leur coopération à la
confection et à l'exécution de lois injustes, ou d'actes de forfaiture; et
aussi à tous autres, investis de fonctions publiques auxquelles rien ne les
avait préparés, des mesures désastreuses résultant de leur incapacité. La
prescription en pareille matière n'existe pas, et, bien que tardivement, ils
pourront avoir à supporter dans leurs personnes et dans leurs biens les
conséquences des responsabilités encourues. Cela s'est déjà vu, quoique
assez rarement; nous souhaitons dans l'intérêt public que ce qui sous ce
rapport a été l'exception devienne la règle, sans que pour cela se modifie
la forme actuelle du Gouvernement, qui est celle ayant toutes nos préfé-
rences; mais d'elle, comme de toute institution humaine, tant vaut
l'homme, tant vaut la chose.
9, Platon. — République, IV, quelques pages après le commencement.
10, Nettes. — Les culottes intactes; c.-à-d. immaculé, sans reproche. V. N.
III, 420 : Bragues.
15, Solage. — En sol, en terrain fort différent de celui qui lui conviendrait.
40, Conseil. — Le fait est rapporté dans son Gorgias, où il est traité de
l'homme apte à gouverner les affaires publiques, et mis par Platon dans la
• bouche même de Socrate qui dit qu' « étant sénateur et sa tribu se pré-
sentant aux assemblées du peuple, il ne savait comment s'y prendre pour
recueillir les suffrages, n'étant pas un homme politique et passant son
temps à s'étudier lui-même, sans s'occuper des foules, ni de ce qu'elles
pensent ». V. N. III, 576 : Socrates.
468,
1, Nombre. — La mienne est très bornée, quoique ne s'étendant qu'à un
petit nombre d'objets.
1, Saturninus. — Trebeli.ius Poi.i.ion, Trig. Tyr., 23. — Saturninus, Gau-
lois d'origine, prit du service, se signala par ses exploits en Gaule, en Es-
pagne, en Afrique, parvint aux premiers grades, fut salué empereur dans
Alexandrie et ne prit la pourpre qu'à contre-cœur; au bout de quelques
mois, abandonné de ses troupes, il fut mis à mort (ur s.).
5, Sincère. — Var. de 88 : Exquise.
Ib, Appuyer. — Signifie ici : aider à la résistance contre la disposition au
mal.
16, Enuis. — Suivre envis une pente, un parti, une faction, c'est y être
entraîné à regret, à contre-cœur, avec répugnance, malgré soi.
26, Xenopbon. — Cet éloge s'y trouve : Hist. grecq., IV, 1 et Eloge d'Agé-
silas, III, 4; seulement il n'y est point question de passage à travers le
Péloponnèse, mais d'une entrevue dans son camp à laquelle Cotys roi de
Paphlagonie, qui n'avait pas voulu se fier au roi de Perse, se rendit sans
autre garantie que la parole d'Agésilas.
34, Capettes. — Ces bambins d'écoliers. — Babouin signifie un enfant
. espiègle; capette était le surnom donné à certains écoliers d'un collège
de Paris (collège Montaigu), du petit manteau qu'ils portaient; traités fort
durement sous le rapport de la table et de la discipline, ils ne brillaient
guère en général par l'intelligence et l'instruction, ce qui fit prendre ce
surnom en mauvaise part.
Fc.680 ESSAIS Ï)E MONTAIGNE.
35, Françoise. — Tant on entend autrement l'innocence, la vertu en France,
qu'on ne l'entendait à Sparte. — C'est ce qui était arrivé en 1540, lorsque
Charles-Quint, se rendant dans les Pays-Bas, traversa la France. Il fut
blâmé par nombre de gens de l'espèce de ceux que Montaigne traite pré-
cisément ici de « babouins capettes », pour son imprudence à se confier
ainsi à la bonne foi de François I", et celui-ci le fut pareillement de sa
simplicité à ne pas user d'une si belle occasion de se rendre maître de son
plus redoutable ennemi.
470,
16, Guerre. — C'est-à-dire que, dans l'intervalle, pouvant mourir de mort
naturelle ou être massacré par l'un des partis, il échapperait de la sorte à
cette tempête.
18, Voleurs. — Marc-Antoine, Octave et Lépide qui, de concert, s'emparè-
rent du pouvoir après la mort de César et formèrent le second triumvirat
(42).
24, Platon. — Le Phèdre, œuvre assez brillante de sa jeunesse.
26, Muances. — Changements. Ils ne font pas difficulté de passer d'un sujet
à un autre tout différent.
30, L'Eunucbe. — L'Andrienne, l'Eunuque, deux comédies de Térence.
31, Torquatus. — Sylla, Cicéron, Torquatus, titres de chapitres des Vies
parallèles de Plutarque.
32, Demoniacle. — Démoniaque, ou plutôt divine.au sens qu'a ce mot 8at-
{10V15C1Ô dans la langue grecque. *
35, Socrates. — Démon de Socrate, un des traités des Œuvres morales de
Plutarque, qui porte ce nom.
472,
1, Plus. — Surtout quand elles semblent être le fait de l'inattention et du
hasard.
4, Change. — Je change de sujet.
7, Maistres. — « Qui ne sait être fou, n'est pas sage. » Proverbe.
12, Platon. — Lois, VI.
16, Ronapu. — Luy mesme est tout poétique, add, de l'ex. de Bord, qui a été
insérée dans la traduction.
28, Maie. — Ce n'est déjà pas si mal, s'il advient...
30, C'est mon. — C'est mon avis; se disait encore en Normandie, il y a deux
siècles, pour « ouï da », sans doute.
35, Aristote. — Voir Aulu-Gelle, XX, 5, et Plutarque, Alexandre, 2.
474,
8, Trouue. — La raison.
8, Incommode. — Ailleurs, notamment III, 336, Montaigne dit qu'il
cherche la vérité ; ici, il avoue qu'il s'en soucie peu, si elle peut troubler
sa tranquillité; c'est là un des nombreux exemples de ses contradictions
et des changements que l'âge ou la maladie apportaient dans ses opi-
nions.
9, L'asnerie. — Var. de 88 : /a grosserie.
13, Ville. — De Rome.
14, Beuere. — En 1581, Montaigne séjourna à Rome quatre mois et demi. —
A son arrivée, on visita ses bagages et on saisit, comme il était de règle,
pour les examiner les livres qu'il apportait et parmi eux les Essais, dont la
première édition avait paru et avait été signalée comme renfermant des
passages peu orthodoxes ; ils lui furent néanmoins rendus avec simple-
ment invitation d'y faire quelques cJiangements ; plus tard la cour de Rome
se montra moins tolérante et par décret du 12 juin 1676 ils ont été officiel-
lement condamnés; ils figurent comme tels dans le Catalogue des ouvrages
mis à l'Index et interdits • où et en quelque temps qu'ils soient imprimés »,
et n'ont point été relevés de cet arrêt. V. N I, 588 : Indisciplinatis. — II,
528, liv. II, ch. IX, appréciation générale.
17, CapHole. — Elevé en 507, sur le mont Capitolin, une des sept collines
de Rome; brûlé trois fois : pendant les troubles de Marius, sous Vitellius
NOTES. LIV. m, Cil. IX. VOL. III, PAG. 474. Fc.68i
et sous Vespasien, il fut en dernier lieu reconstruit à grands frais par
Domitien. Le Capitole actuel, édifié sur les plans de Michel-Ange, sur l'em-
placement de l'ancien, est afifecté à la municipalité de la ville.
22, Ans. — Le père de Montaigne était mort en 1569; ceci a donc été écrit
en 1586.
28, Assigné. — Le bienfait est moins désintéressé, lorsqu'on peut espérer
du retour.
29, Arcesilaus. — Diogène Laerce, IV, . 17. — Après de longs voyages en
Grèce et en Perse, Arcésilas vint se fixer à Athènes où il fonda la 2" acadé-
mie, école qui combattait les Stoïciens et niait que l'on puisse rien perce-
voir de certain par les sens.
29, Ctesibius. — Var. et erreur de 88 : Apelles.
476,
3, Embabouyné. — Enchanté, enthousiaste, épris.
7, Est-ce. — Passage intégralement traduit de Cicéron, De fin. bon. et mal.,
ch. V, au commencement.
20, Reliques. — N'est pas employé ici dans le sens d'objets religieux, mais
est appliqué à tout ce qui demeure des hommes estimables qu'en imagina-
tion Montaigne a vus vivre et mourir, tellement il a été imprégné, depuis
son enfance, de leurs faits et gestes par l'étude de l'histoire et de la litté-
rature romaines.
25, Souuerain. — Le Pape.
26, Ailleurs. — Rome était la capitale des Etats de l'Eglise, gouvernés alors
par Grégoire XIII.
28, Princes. — Les cardinaux.
33, Empire. — « Veuve d'un peuple-roi, mais reine encor du monde. »
478,
12, Plus. — « Après moi, le déluge. »
16, Nom. — N'ayant pas d'enfant raàle, le nom de Montaigne devait s'étein-
dre et s'éteignit avec lui ; ses frères portaient des noms tirés d'autres pro-
priétés de la famille.
22, Commodités. — Cette opinion de Montaigne est celle de beaucoup; et il
faut convenir qu'elle va se répandant de plus en plus avec les progrès de
la civilisation, ce qui fait pousser les hauts cris à certains qui considèrent
comme une déchéance que l'accroissement de population soit moindre
chez nous que chez d'autres.
Les conséquences de cet accroissement varient suivant les pays : avan-
V tageux pour ceux qui ont des colonies où déverser leur excédent, ou
chez lesquels existe le goût de l'émigration, il est une cause de misères
physiques et morales quand les débouchés font défaut. Pareillement avan-
tageux dans les familles adonnées à l'agriculture où l'on tire très aisé-
ment parti de chacun, il ne l'est plus chez les autres. G. Lebon.
En France, la population, de 39.047.000 habitants qu'elle était en 1901,
a été de 39.337.000 en 1906, soit une augmentation annuelle d'en-
viron seulement 12 pour mille, inférieure à ce qu'elle est chez ses voisins,
en Allemagne notamment, où elle atteint 14 à 15. Sa densité est également
moindre; elle n'est que de 73 habitants par kilomètre carré, et en Alle-
magne de 112.
Cette situation tient aux conditions de bien-être que l'on a en France, et
que l'on redoute d'amoindrir en augmentant ses charges et en s'expatriant.
Qu'on en conclue ce que l'on voudra au point de vue des conséquences
économiques, tant que n'interviendra pas un autre système d'éducation
changeant notre tempérament et par là amenant les gens à refluer des
villes dans les campagnes, et à aller chercher fortune aux colonies, ce qui
procède du même état psychologique, rien ne saurait modilier cet état de
choses.
Aussi est-ce à un tout autre point de vue que nous sommes partisan de
l'impôt sur les célibataires, les divorcés, les veufs et les ménages sans en-
fants (on évalue à 1.3(X).00<3, en Fi-ance, le nombre des célibataires mascu-
Fc.682 ESSAIS DE MONTAIGNE.
lins âgés de plus de trente ans, et à 1.800.000 celui des ménages sans en-
fants). A cette mesure, on objecte que l'impôt ne saurait être un moyen de
réformer la société ; mais tel n'est pas le but que nous envisageons : nous
ne voyons là qu'une compensation équitable des charges qu'entraîne la
famille et dont ils sont exempts; alors qu'on cherche par l'impôt sur le
revenu à obtenir une plus juste répartition de nos contributions, quoi de
plus naturel et de plus Juste que d'atteindre ceux dont les revenus sont si
fort accrus de ce chef!
25. Désirées. — « Qui a enfant, a tourment. » Proverbe. — Evexus, de
l'île de Paros (anc. Grèce), poète dont Platon loue les talents et la sa-
gesse, disait : « De la crainte ou du chagrin, c'est ce qu'un père éprouve
en tous temps par son fils. »
31, Mieux. — Il l'agrandit tout au moins, car, en 1576, il fit acquisition pour
1.500 livres (environ 8.000 fr. de notre monnaie) d'une forêt près et
au N. de son château. — A son décès, sa succession a été estimée à
90.000 livres, dont 60.000 pour la terre, laquelle, lorsqu'elle sortit de la
famille, au commencement du siècle dernier, fut vendue liiiO.OOO, et esti-
mée à 224.000 trente ans plus tard ; aujourd'hui, manoir (en dehors de sa
réfection dernière), terres et bois, représentant une superficie d'environ
350 hectares, valent plus du double. — Sa fille, en se mariant, reçut en
dot 20.000 livres tournois.
33, Pas. — Aussi ne m'a-t-elle pas accordé de grâce.
34, Ans. — Montaigne écrivait ces lignes vers 1586; et Ramon Eyquem son
bisaïeul, auquel la famille était redevable de sa situation de fortune et de
l'acquisition du domaine de Montaigne, et par lui de son anoblissement,
était mort en 1478.
480,
2, Bulle. — Titre émanant de la chancellerie romaine. — Montaigne laisse
entendre ici que ce titre de bourgeoisie romaine lui a été conféré sans
qu'il le demande; dans son Journal de voyage en Italie, il dit à cet égard :
« Je le recherchai, et pour l'obtenir y employai mes cinq sens; j'y trouvai
de la difficulté que je parvins toutefois à surmonter. •
4, Estais. — En 1581. A cette époque, depuis longtemps déjà, ce n'était là
qu'un titre honorifique; dans les temps anciens, le droit de cité, à Rome,
comportait nombre de prérogatives, parmi lesquelles : la liberté indivi-
duelle, le citoyen romain ne pouvait être battu de verges, réduit en escla-
vage, ni même mis à mort, car il pouvait éviter la peine capitale en
s'exilant; il pouvait aspirer à toutes les magistratures; servir dans les
légions et, par suite, participer aux commandements et au butin; être
exempt de certains impôts, etc. Généralement la concession du droit de
cité n'était faite qu'avec concession restreinte des privilèges qui y étaient
attachés.
34, Condita. — Une grande incertitude règne sur la date exacte de la fon-
dation de Rome que l'on admet avoir eu lieu de l'an 754 à l'an 752 av. J.-C. ;
en conséquence pour la supputation des dates ayant trait à son histoire on
prend généralement l'an 753 (date moyenne) comme point de départ;
à en juger par ce document, cette date devrait, d'après les archives de
Rome, être l'an 750.
482,
.18, Delphes. — Sur le fronton du temple de Delphes était inscrite cette
inscription : rvwôt «autdv (Gnothi seauton), Connais-toi toi-même. V. N. I.
28 : Cognoy; III, 620 : temple,
CHAPITRE X.
484,
9, Moy. — Primo mihi, moi d'abord.
10, Affection. — Et contiendrais volontiers le sentiment d'affection qui est
en moi, de peur...
NOTES. LIV. III, CH. X. VOL. III, PAG. 484. Fc.683
15, Importables. — Insupportables.
17, Platon. — Lois, VII.
20, Soy-mesme. — Pensée imitée de Sénèque, Episl. 62.
486,
5, Entrailles. — Les embarras domestiques que j'ai dans mon intérieur.
8, Forains. — D'autres affaires extérieures, étrangères, du dehors.
14, Eux. — S.-ent. : qui y sont.
22, Causa. — Le membre de phrase qui suit est la traduction de cette citation.
29, Personne. — Toute cette période est empruntée de Sénèque, De brev.
vitse, 3.
488,
9, Aussi. — Montaigne était aux bains de Lucques, en septembre 1581,
quand il reçut la nouvelle de son élection; il répondit en déclinant l'hon-
neur qui lui était fait; mais les Bordelais s'entêtèrent et s'adressèrent au
roi qui intervint, en lui écrivant qu'en acceptant « il ferait une chose très
agréable et que le contraire lui déplairait grandement », ordre devant
lequel Montaigne céda. — Voici du reste in-extenso la lettre de Henri III
qui est datée du 15 décembre : « Pour ce que j'ai en estime grande votre .
fidélité et zélée dévotion à mon service, ce m'a été plaisir d'apprendre
que vous avez été élu major de ma ville de Bordeaux; et ai confirmé la
dite élection d'autant plus volontiers qu'elle a été faite sans brigue et en
votre lointaine absence. A l'occasion de quoi mon intention est, et vous
ordonne et enjoint bien expressément, que sans délai ni excuse, reveniez
au plus tôt que la présente vous sera rendue, faire le dû et service de la
. charge où vous avez été si légitimement appelé, et vous ferez chose qui
me sera très agréable et le contraire me déplairait grandement. »
12, Eslection. — Cette durée de deux ans et cette absence de loyer et de
gain dans les fonctions de maire de Bordeaux n'existaient que depuis 1550;
auparavant cette charge était perpétuelle et une rétribution de 1.400 livres
tournois environ y était afi"ectée qui se trouvait alors limitée à deux robes
par an aux armes de la ville.
13, Moy. — Il semble qu'on peut conclure de là qu'on fut satisfait de son
administration; Balzac a insinué le contraire, sans en donner de preuve.
17, De Matignon. — Le maréchal de Matignon avait été gouverneur à
Alençon et à Saint-Lô, lors de la Saint-Barthélémy, et s'était refusé à exé-
cuter les massacres ordonnés par le roi.
18, Minister. — Dans l'éd. de 88, ce vers est complètement entremêlé.
20, Alexandre. — Sénèque, De Benef., I, 13; Plutarque, au commencement
de son traité Des trois formes du gouvernement. Ni l'un ni l'autre ne
parlent de Bacchus, et Plutarque nomme les Mégariens, au lieu des Co-
rinthiens.
21, Desdaigna. — Var. de 88 : hocha du nez.
24, Descbiffray. — Je me fis connaître.
34, Appelle. — Le père de Montaigne qui, antérieurement, avait été, à
diverses reprises et à divers titres, membre de la municipalité de Bor-
deaux, en avait été nommé maire en 1554 et s'y était signalé par de nom-
breuses mesures administratives.
490,
13, Siller. — Fermer nos yeux. Siller les yeux, se disait des oiseaux de
chasse, auxquels quand on n'avait pas de chaperon pour leur couvrir la
tète, lorsqu'on les portait, on cousait les deux paupières avec une pointe
d'aiguille pour qu'ils n'y voient pas; dessiller, qui signifie le contraire,
ouvrir les yeux, est demeuré dans la langue.
38, Principale. — Add. de 88 : e< plus légitime.
492,
4, Propre. — Pour lui-même.
28, Entreprend. — Sénèque, De ira, I, 12.
36, Faut. — Il manque son coup.
Fc.684 ESSAIS DE MONTAIGNE.
494,
8, ïambe. — Se donne elle-même un croc-en-janibe, s'enchevêtre.
9, Implicat. — Séxèqle, Epist. 44. Ces mots terminent l'épître. Montaigne,
qui les donne un peu autrement qu'ils ne sont dans Sénèque, les traduit
exactement avant de les citer. Ils sont le développement de cette autre
sentence : Festina lente (hàtez-vous lentement), qui, dit-on, se reproduisait
souvent dans la conversation et la correspondance de l'empereur Auguste.
16, Maistre. — Probablement le roi de Navarre, depuis Henri IV.
17, Accidens. — Var. de 88 : négoces.
35, Saisir. — « Qui trop embrasse, mal étreint. »
496,
4, Opinion. — « Si tu vis conformément aux lois de la nature, tu ne seras
jamais pauvre; si tu te règles sur celle de l'opinion, tu ne sera jamais
riche; la nature se satisfait de peu, à l'opinion il faut l'immensité, etc. »
SÉNÈQUE, Epist. 16.
12, Socrates. — Cicéron, Tusc, V, 32.
14, Onces. — Environ 300 gr., la livre n'étant alors que de 400.
15, Epicurus. — Sénèque, Epist. 18.
15, Metrocles. — Plutarque, Que le vice rend Vhomme malheureux, 4.
17, Cleanthes. — C'est Zenon qui disait cela de Cléanthe, son disciple. Dio-
GÈNE Laerce, Vil, 169.
24, Outre. — Accordons-nous quelque chose de plus.
28, Nature. — « L'accoutumance est une seconde nature. » Pi^overbe latin
qu'on trouve dans Macrobe. — Fontenelle disait au sujet de cette pensée
que reproduit également Pascal, qu'il voudrait bien savoir quelle était la
première, puisque l'habitude est la seconde. Ce n'était là que boutade de
sa part; au surplus Montaigne, en poursuivant, s'explique à cet égard de
la façon la plus compréhensible : la première est celle en laquelle nous
sommes, avant les transformations que nous subissons par le seul effet des
habitudes que nous prenons par des causes diverses et qui, en s'infusant
en nous, nous modifient dans de telles proportions que l'on peut dire sans
exagération que notre nature est autre. Que de fois l'enfant ne se retrouve
pas dans l'adulte, ni l'adulte dans l'homme fait!
30, Et. — Add. de 88 : pour mon humeur.
31, Essimoit. — Amaigrissait. Terme de fauconnerie; essimer un faucon
c'est lui faire perdre un excédent de graisse, en le soumettant à un certain
régime. — L'éd. de 88 port. : estansoit.
39, le me plaindrais ... d'Arabie. — Var. de 88 : /e ne me reforme
pareillement gueres en sagesse pour Vvsage et commerce du monde, sans
regret que cet amendement me soit arrivé si tard que ie n'aye plus loisir
d'en vser : ie n'ay d'oresenauant besoing d'aultre suffisance que de patience
contre la mort et la vieillesse. A quoy faire vne nouuelle science de vie à
telle déclinaison, et vne.nouuelle industrie à me conduire en cette voye où ie
n'ay plus que trois pas à marcher? Apprenez veoir la rhétorique à vn homme
relégué aux desers d'Arabie.
40, Homme. — Ce n'est pas ce que dit le proverbe : « Mieux vaut tard que
jamais. »
498,
12, Pape. — Grégoire XIll qui, en 1582, avait réformé le calendrier dont il
avait retranché dix jours pour mettre l'année civile en concordance avec
l'année solaire. En France, on était passé subitement du 9 au 20 X* 1582
(V. III, 526 et N. France). — Un dicton populaire, antérieur à cette époque :
« A la Sainte-Luce, les jours croissent du saut d'une puce », se répète
encore, bien qu'aujourd'hui il ne soit plus vrai, la Sainte-Luce tombant le
13 X* et les jours décroissant jusqu'au 22; avant la réforme grégorienne,
cette fête tombait le 23, et du 22 au 23 l'accroissement du jour est en effet
insensible, seulement de quelques secondes.
15, Vendique. — Réclame, revendique. Terme du palais qui vient du latin
vindicare et qui n'est plus en usage; revendiquer a prévalu. "
NOTES. LIV. III, CH. X. VOL. III, PAG. 498. Fc.CSj
18, Grommelle. — Murmure entre ses dents.
26, Issue. — Montaigne fait peut-être, entre autres, allusion ici à l'élection
des papes, dans laquelle on tenait et on tient encore grand compte de
l'âge, afin que le nouvel élu ne se perpétue pas dans sa fonction.
30, Mesure. — Dans la mesure de notre état habituel.
34, Aduersitez. — « L'homme tient par ses vœux à mille choses : plus il
augmente ses attachements, plus il multiple ses peines. » J.-J. Rousseau,
Emile, V. Sénèque a souvent, lui aussi, exprimé la môme pensée.
500,
3, Pointe. — S'abandonnent à l'impétuosité de leurs désirs. Courir de
pointe, c'est courir avec impétuosité, c'est ce que les Italiens appellent la
furia francese'
5, Histrioniam. — Fragment de Pétrone, conservé par Jean de Salisbury,
Polycratic, 111, 8. — S. Jean Chrysostome et d'autres ont employé cette com-
paraison : « Le monde est une comédie qui se joue en différentes scènes;
les spectateurs se connaissent mieux que les acteurs. » Bossuet.
t Ce monde n'est qu'une œuvre de comiques,
Où chacun fait ses rôles différents,
I.à, sur la scène, en habits dramatiques,
Brillants prélats, ministres, conquérants,
Pour nous, vil peuple, assis aux derniers rangs,
Troupe futile et des grands rebutée.
' Par nous, d'en bas, la pièce est écoutée.
Mais nous payons, utiles spectateurs;
Et quand la farce est mal représentée.
Pour notre argent nous sifflons les acteurs. • J.-B. Rolsseau.
• La vie que tu vois n'est qu'une comédie,
Où l'un fait le César, et l'autre l'arlequin ;
Mais la mort la finit toujours en tragédie,
Et ne distingue point l'empereur du faquin. » Auteur inconnu.
» ... Le monde est une comédie, où le personnage que vous jouez n'est pas
des plus relevés; mais il n'y en a pas où l'on ne puisse acquérir de l'hon-
neur. Nous sommes ici-bas comme dans l'arche de Noé: peu d'hommes
et beaucoup de bêtes. » Lamothe le Vayek, 1684.
« Oui, ce bas monde est une comédie
Ou, gouvernés par une austère loi.
Pauvres acteurs des drames de la vie,
Nous remplissons bien ou mal notre emploi. • Scribe.
Balzac, Shakespeare ont aussi exprimé cette même idée. « La vie est une
comédie pour ceux qui pensent, et une tragédie pour ceux qui sentent, »
a dit Walpole.
12, Frelatent. — Se glorifient; se prélater, c'est témoigner par ses manières
qu'on se croit fort au-dessus des autres, se donner des Airs de prélat.
19, Claire. — Montaigne maire et Montaigne simple particulier ont toujours
été deux êtres absolument distincts.
23, Exercice. — C'est ce qui arrive tous les jours. Nous voyons en effet
constamment les hommes politiques commettre des actes ou s'associer à
des mesures contre lesquelles leur conscience se révolterait en tant qu'hommes
privés, si leur mentalité n'était absolument oblitérée, dans l'exercice de leur
mandat ; c'est triste, mais c'est la loi des sociétés, si différente et parfois si
opposée à la loi de nature, et c'est ce qui jusqu'à un certain point peut
leur tenir lieu d'excuse. Il en est souvent de même des avocats, qui eux
peuvent invoquer les exigences de la cause bonne ou mauvaise qu'ils ont
entrepris de défendre; cela se rencontre aussi couramment chez les jour-
nalistes, mais ceux-là ne sont point excusables, car ils n'obéissent guère
qu'à leur propre intérêt et au désir d'accroître le tirage de leurs journaux.
24, Preualoir. — 11 faut prendre le monde comme il est et, autant qu'on le
peut, en tirer avantage.
Pc.686 ESSAIS DE MONTAIGNE.
27, Pierre. — C.-à-d. familièrement, comme feraient d'obscurs personnages.
31, Presens brouillis. — Var. de 88 : dissenlions présentes.
502,
7, Contraire. — Add. de l'ex. de Bord, que l'on a cru devoir introduire
dans la traduction : Vtalur motu animi, qui vit ratione non potesl. Tra-
duction : " Que celui-là s'abandonne à la passion, qui ne peut suivre la
raison. » Cicéron, Tiisc, IV, 25. — Cette citation se trouve déjà liv. III,
ch. I, III, 82.
12, Cause. — Cest qu'ils n'en veulent pas à la cause. Cette locution subsiste
encore dans le langage familier : A qui en avez-vous? à qui en a-t-il pour
être de si mauvaise humeur?
14, Marche. — Les blesse, les incommode. On trouve 'dans Nicot : 11 a le
visage masché, c.-à-d. meurtri.
18, Forcené. — Je ne m'emporte point, je ne suis point hors de moi.
26, Hérétique. — Peut-être Clément Marot, peut-être Théodore de Bèze,
tous deux poètes et très zélés calvinistes, dont il est parlé avec éloge, de
l'un comme de l'autre, dans les Essais. V. I, 642 et II, 518.
27, Greue. — Belle jambe.
504,
10, Apollonius. — Après avoir embrassé de bonne heure la doctrine de
Pjlhagore, se soumit à toutes les austérités de cette secte; visita l'Asie
Mineure, la Chaldée, pénétra jusque dans les Indes, puis se rendit en Grèce,
en Italie, excitant partout l'admiration et faisant des guérisons miracu-
leuses. Ses contemporains le regardaient comme un homme extraordinaire
et lui reconnaissaient le don de prévoir l'avenir et de faire des miracles.
Les païens, dans les temps qui suivirent, allèrent jusqu'à le mettre en
parallèle avec le Christ. ,
10, Embuttlerent. — Séduisirent, trompèrent. Embuffler quelqu'un, c'est le
mener par le nez, comme un buffle.
11, Discrétion. — Jugement, discernement; du latin discretio, qui a cette
signification; ne s'emploie plus dans ce sens.
14, Depuis. — Le premier^ c'est le parti protestant; l'autre, né depuis, c'est
la Ligue.
18, Vague. — Si on ne suit.
28, Detraction. — Déchirement, médisance.
33, Garde. — C'est qu'en effet la cause de la guerre de Marins et de Sylla
était tout autre : cette guerre fut en réalité une de ces crises violentes de
la lutte éternelle de ceux qui n'ont pas contre ceux qui ont, qui aujour-
d'hui se traduisent par les grèves; mais, pour s'être transformé, le conflit
n'en est pas moins âpre.
Certes le droit de grève est indéniable, il est un des apanages de la liberté,
et présentement le seul moyen de défense, quelque peu efficace, de l'ouvrier
contre le patron ; mais de même que l'accaparement des choses de première
nécessité est interdit, tout arrêt d'une certaine importance dans les diverses
branches du commerce, de l'industrie ou de l'agriculture, ne saurait être
admis; le droit de grève, comme tout autre droit individuel, ne saurait
s'exercer de manière à préjudicier à la société.
En la circonstance, ces deux principes ne sont point inconciliables : il
suffit d'empêcher ces conflits de se généraliser; de faire que chaque fois
ils se limitent au cas particulier qui l'a amené et à cet efiet poureuivre
impitoyablement, pour fait d'excitation à la haine des citoyens les uns
contre les autres, tous ceux qui par leurs menées ou leurs écrits les fomentent
ou s'en mêlent alors qu'ils n'y sont pas directement intéressés. En outre,
toute atteinte à la liberté de travail de ceux qui se refusent à l'abandonner,
tout méfait tant contre les personnes que contre les propriétés seraient à
prévenir d'une façon efficace, les principaux meneurs, les membres du
sj'ndicat quand il existe, en étant personnellement et pécuniairement
responsables.
Et si, pour en arriver là, il est nécessaire d'avoir recours à l'armée, il
NOTES. LIV. III, CH. X. VOL. III, PAG. 504. Fc.G87
faut, tout en recommandant la prudence et la modération, ne pas la ré-
duire de parti pris à l'impuissance en substituant à la loi qui lui trace ses
devoirs des instructions arbitraires, qui font qu'elle doit se laisser bafouer,
insulter, frapper, et que seul son sang coulera au lieu et place de celui des
fauteurs de désordres en présence desquels on l'a mise.
Que l'on cherche à atténuer les malheurs qui peuvent se produire en
pareil cas, rien de mieux. Que ne fait-on pour cela prendre à l'infanterie
des cartouches de tir réduit qui blessent, mais ne tuent guère, disposition
qui, dit-on, vient d'être rendue réglementaire en Espagne, à la cavalerie les
lances qu'on lui fait si malencontreusement déposer, qui, en ne faisant pas
usage du fer, n'ont jamais tué personne : elles ne seront pas désarmées et
auront le moyen de se faire craindre. Au lieu de cela on leur impose une
action absolument passive, qui oblige à mettre en ligne des forces numé-
riquement considérables, qu'on livre au ridicule, sans préjudice des ou-
' trages, des coups et blessures auxquels elles sont en butte, et les grèves se
prolongent indéfiniment, ne cessant que pour recommencer à courte
échéance; c'est la misère pour les uns, la ruine pour les autres, et pour la
France de sérieuses atteintes à la paix et à la prospérité publiques.
Le mieux évidemment est de chercher à prévenir les grèves. L'un des
palliatifs de quelque efficacité à cette guerre entre le travail et le capital
semble être la participation de l'ouvrier aux bénéfices, soit par le fait
d'entreprises ouvrières effectuées en commun et dont l'intégralité des pro-
duits serait répartie entre les coopérateurs, soit que dans les entreprises
patronales où une part des bénéfices reviendrait à l'ouvrier. Plût à Dieu que
ce système si équitable, déjà appliqué par quelques-uns, se généralise et que
par lui s'améliore le sort de ces malheureuses femmes employées dans les
grandes villes à des travaux de couture par les grands magasins qui les
exploitent indignement, leur faisant à grand'peine l'aumône d'un salaire
dérisoire d'un franc cinquante à deux francs pour une journée de dix à
douze heures de travail, se retranchant, pour abuser ainsi, derrière cette loi
draconienne de l'offre et de la demande.
506,
4, Voy. — A mesure que je la vois.
ILDiogenes. — DioGÈNE Laerce, Vl,23; Vi.wx.\Kq,\}^,Apophth.des Lacédémoniens.
22, Cotys. — Plutarque, Apophlh. des rois.
39, Desinent. — Quelques pages plus bas (III, 512), Montaigne traduit lui-
même bien plus vivement cette même pensée : « De combien il est plus
aysé de n'y entrer pas, que d'en sortir! •
508,
2, Harper. — Se prendre à quelque chose.
5, Ennemis. — Accidents fâcheux. Succès est employé ici dans le sens du latin
successus, qui signifie toute espèce d'événements heureux ou malheureux.
10, Exemples. — N'entreprenons pas d'imiter ces exemples. •
17, Escbeuer. — Esquiver, éviter, de l'italien schifase, d'où vient le mot esquif.
18, Parer. ■— C'est la philosophie d'Horace.
18, Zenon. — Diogène Laerce, VII, 17.
22, Socrates. — Xénophon, Mémoires sur Socrate, I, 3, 13.
23, Contraire. — Add. de 88 : li n'espère pas que la ieunesse en puisse venir
à bout.
2(5, Disciple. — Xénophon, dans sa Cyropédie, I, 3, 13, etc.
29, Panthée. — Abradate roi de la Susiane, reconnaissant à Cyrus de la
manière dont il avait traité son épouse captive, devint son ami et allié, et
périt peu après, en soutenant sa cause, dans une rencontre avec les
Egyptiens. Pantliée se tua sur son corps.
31, Tentationem. — Montaigne paraphrase ce passage après l'avoir cité.
33, Essayée. — Tentée.
510,
4, Mesmes. — Lorsque les causes de leur erreur sont affaiblies par le temps
et bien loin d'eux.
Fc.688 ESSAIS DE MONTAIGNE.
6, Vert. — Au dépourvu. — Expression provenant d'un jeu qui se joua,
particulièrement en mai, où l'on est obligé, sous de certaines peines, à avoir
toujours sur soi quelques feuilles de verdure cueillies le jour même et où
chacun cherche à surprendre son compagnon à un moment où il n'en a pas.
H, Trabunt. — Phrase d'origine inconnue que Montaigne a traduite avant
de la reproduire.
15, Bee. — Coure, soupire. Béer, c'est appeler, souhaiter, à gueule béante,
comme fait le mouton bêlant.
17, Recueil. — Accueil, comme on dit aujourd'hui.
19, Esclaue. — Yar. de 88 : tyrannique.
35, Bruire. — Murmurer, résonner, se faire entendre. Bruire n'est plus guère
usité; ses dérivés, bruit, bruissement, sont demeurés.
42, Ordes. — Sales. V. N. III, 102.
512,
11, lournées. — Enfin, à force de soins, j'en suis arrivé à ce que...
12, Procès. — Ses héritiers, du fait de ses dispositions testamentaires, n'ont
pu en dire autant. V. N. II, 44 : Masculines.
16, Nom. — C.-à-d. j'ai bientôt écoulé une longue vie, sans avoir reçu ni
avoir fait à personne aucune offense grave et sans qu'on m'ait dit plus que
mon nom, qu'on y ait accolé d'épithète désagréable.
17, Ridicules. — « Grands effets et petites causes; mais combien souvent
au-dessous y a-t-il d'autres causes! » (S'*-Beuve), la cause apparente n'étant
que la dernière goutte faisant déborder le vase. — Le proverbe : ■• Faute
d'un point, Martin perdit son âne », appliqué aux faits de la vie courante
semblant sans importance et qui par suite de particularités imprévues sont
gros de conséquences, rend la même idée que celle exprimée ici par Mon-
taigne concernant les événements qui bouleversent le monde : Un sieur
Martin, dit la tradition, prieur de l'abbaye d'Asello (d'Italie), avait fait graver
sur la porte du couvent cette inscription : « Porta, païens esto, nulli clau-
daris honesLo (Porte, sois ouverte à tous, ne sois fermée pour aucun
honnête homme) » ; mais, par inattention, l'ouvrier avait déplacé une
virgule, ce qui permettait de lire : « Porta, païens esto nulli, claudaris
honesto (Porte, ne sois ouverte à personne, reste fermée à l'honnête
homme) », ce qui, provoquant l'indignation publique, avait amené la desti-
tution du prieur. Son successeur s'empressa de rectifier l'erreur et l'on dit
depuis : « Uno pro punclo, caruil Marlinus Aselio (Pour un seul point,
Martin perdit Aselio) », c.-à-d. son couvent, qu'un malin et après lui tout le
monde a traduit « son âne ».
19, Mouton. — Allusion à l'origine des démêlés de Charles le Téméraire, duc
de Bourgogne, d'abord avec les Suisses qui le battirent à Granson et à
Morat (1476), puis avec René de Lorraine leur allié, contre lequel 11 perdit
la bataille de Nancy, où il périt (1477). Le fait initial de ces hostilités fut
la saisie par le comte de Romont, vassal du duc de Bourgogne, à un Suisse
qui traversait ses terres, d'un chariot chargé de peaux de mouton; pour se
venger, les Suisses enlevèrent au comte de Romont une partie de ses terres,
ce qui amena celui-ci à demander aide et protection à son suzerain. Phi-
lippe DE COMINES.
19, Engraueure. — La gravure.
25, Souffert. — Plutarque, Marins, 3. — La machine en question n'est autre
que la République romaine ébranlée par la rivalité et les guerres civiles
de Marins et de Sylla, dont le point de départ fut que, Marius étant consul
et Sylla son préteur, chacun revendiquait le mérite de la prise de Jugurtha,
roi de Numidie (106) : Marius, parce qu'il commandait et que c'était lui qui
avait obtenu de Bocchus, roi de Mauritanie, beau-père de Jugurtha, de le
lui livrer; Sj'Ua, parce que c'était entre ses mains que cette livraison
avait été effectuée. Sur ces entrefaites, Sylla se fit faire, reproduisant cet
épisode, un cachet dont il se servit exclusivement, ce dont l'irritation de
Marius fut vivement accrue. On cite souvent, après Montaigne, le cachet
de Sylla à l'appui de cet adage que « de très petites causes sont le plus
NOTES. LIV. m, CH. X. VOL. III, PAG. ;il2. Fc.689
souvent la cause des plus grands événements ». La prise d'Alger en 1830,
suivie de la conquête de l'Algérie, n'a-t-elle pas eu pour cause première un
coup d'éventail donné, dans le fort d'une discussion, par le Bey d'Alger à
notre consul?
22, Autres. — Marius et Sylla.
24, Despense. — Les Etats généraux.
26, Pomme. — La pomme, prix do beauté, que se disputaient Junon, Pallas
et Vénus, cause indirecte de la guerre de Troie, suscitée par les deux
premières de ces déesses à la suite de l'enlèvement d'Hélène (V. N. II, 178 :
Duello) pour se venger à la fois de Paris qui, clioisi pour arbitre, leur avait
préféré leur rivale, et de celle-ci, armant la Grèce contre cette ville tout
spécialement protégée de Vénus et où r(»gnait la famille de Paris.
30, A tout. — Avec.
30. Poignart. — On se battait alors en duel, l'épée d'une main et la dague,
ou poignard, de l'autre.
32, A l'enfourner. — Au commencement, au début, pour savoir si vous
vous engagerez dans une affaire ou une querelle.
514, /
10, Conseil. — De céder, d'entrer en accommodements, de faire des ex-
cuses, au lieu de lutter et courir les risques qui peuvent s'ensuivre,
m'ait...
11, Gourmer. — Réprimer. GournuM' un cheval c'est lui resserrer le mors
avec la gourmette ou chaînette qui l'assujettit en passant sous le menton
du cheval.
23, Plutarque. — Dans son traité De la mauvaise honte, 8.
30, Bias. — DioGÈNE Laerce, I, 87. — Les anciens disaient proverbialement
qu'il fallait commencer par Argus et finir par Briarée (tous deux per-
sonnages mythologiques qui avaient, le premier cent yeux, le second
cent bras). — 11 faut délibérer avec lenteur, mais exécuter avec vigueur
et célérité ce qui a été résolu. Dé.\iosthène.
33, Accords. — Des réconciliations qui suivent nos querelles d'aujourd'hui.
516,
3, Conillieres. — Subterfuges, échappatoires. V. N. I, 200.
22, Temperantur. — La traduction qui est donnée de cette citation est de
Montaigne qui l'a inscrite sur l'ex. de Bord., puis effacée.
30, Acberon. — Un des bras du Nil au S. de Jlemphis (Egypte anc); for-
mait une île où se trouvait une nécropole, d'où les Grecs en ont fait un
fleuve des Enfers.
32, Sorores. — Virgile, Georij., 11, 490. Dei.ii.le a traduit ainsi cette cita-
tion :
« Heureux le sage instruit des lois do la nature,
Qui du vaste univers embrasse la structure,
Qui dompte et foule aux pieds d'importunes erreurs,
Le sort inexorable et les fausses terreurs;
Qui regarde en pitié les fables du Ténare,
Et s'endort au vain bruit de l'Aciiéron avare!
Mais trop heureux aussi qui suit les douces lois
Et du dieu des troupeaux et des nymphes des bois! »
518,
3, Ville. — De ma conduite comme maire de Bordeaux, dont il a déjà été
question au commencement de ce chapitre, III, 488.
12, Moins. — Et moins encore une preuve de...
16, Charge. — Montaigne fut réélu maire en 1583.
23, Cessation. — On m'a accusé de n'avoir rien fait.
25, Charrie. — C.-à-d. : Partout où ma volonté m'entraîne, je suis vif,
ardent, empressé. — L'éd. de 88 port, esmeu, au lieu de « trespignant ».
520,
7, Luy. — Richelieu pensait autrement et se félicitait de voir tant d'hon-
ESSAIS de MONTAIGNE. — T. IV. 44
Fc.690 ESSAIS DE MONTAIGNE.
nêtes gens dormir sans crainte à l'ombre de ses veilles; c'est lui qui veil-
lait pour assurer aux autres le sommeil du lendemain, tandis que Mon-
taigne se bornait à jouir du présent, imprévoyant des besoins du lendemain
de ses administrés. Gouverner, commander, administrer, c'est prévoir.
8, Glissante. — Facile, qui passe inaperçue, sans incidents marquants.
9, Efterentem. — Cicéron, De 0/f., 1, 34.
12, Hommes. — Les hommes de notre temps.
14, Quiètes. — V. N. III, 432. — L'éd. de 88 port, mornes.
24, Chalandise. — Acquisition de chalands, clients, clientèle; chalandise
a disparu de la langue, où demeurent chaland et achalander.
27, Alexandre. — Allusion à ce passage de Plutarque, Alexandre, 2, dans la
trad. d'Arayol : «Toutes les fois qu'il venoit nouuelles que Philippe auoit pris
aulcune ville de renom, ou gaigné quelque grosse bataille, Alexandre n'estoit
point fort ioyeux de l'entendre, ains disoit à ses egaulx en aage : Mon
père prendra tout, enfants, et ne me laissera rien de beau ni de magnifique
à faire et à conquérir auecques vous. »
33, Condition. — C'est ce que Socrate lui reproche dans le /" Alcibiade,
une ou deux pages après le commencement.
34, Amette. — Petite âme.
35, Embabouynant. — Se faisant illusion; une des acceptions assez mal
définies de ce mot.
522,
5, Consent. — Et qui convînt, qui fût témoin...
8, Batelée. — Cargaison, chargement de navire.
14, Bourse. — Qui ne peut se faire louer par les autres, qu'il se loue lui-
même.
26, Siècle. — Cicéron, De Off., II, 22.
31, Belistresse. — Gueuse, mendiante. On disait autrefois « belistrer »
pour « mendier » ; et l'on appelait les quatre ordres de bélîtres, les quatre
ordres religieux mendiants : les Jacobins, les Cordeliers, les Augustins et
les Carmes.
31, Coquiner. — Mendier.
38, Rabats. — Ce qui m'oblige à rabattre quelque chose de sa bonté, à
moins m'enthousiasmer, c'est le soupçon...
524,
6, Fiunt. — Cicéron, Tusc, II, 26.
7, Glorieux. — Vaniteux, orgueilleux. Prise dans un sens favorable, Mon-
taigne n'eût pas donné cette qualification à Cicéron.
7, Durer. — Le devoir de ma charge consistait uniquement à conserver
et à vivre en paix.
11, lour. — Moins brillante, moins en lumière.
29, Desseigné. — Que j'ai eu dessein de suivre, que je me suis tracé.
36, Affecté. — Var. de 88 : souhaité.
CHAPITRE XL
526,
Boyteux. — Montaigne ne traite son sujet que vers la fin du chapitre,
qui n'en est pas pour cela ni moins curieux, ni moins philosophique;
on y trouve d'excellentes réfiexions sur les miracles et les choses extraor-
dinaires. « Qui veut apprendre à doutei^, n'a qu'à lire ce chapitre en
entier, » en a dit Voltaire.
2, France. — 11 a déjà été question, au chapitre précédent (V. N. 111,498 :
Pape), de celte réforme du calendrier qui substitua l'année Grégorienne
(du nom du pape qui l'introduisit) à l'année Julienne, qui datait d'une
réforme de Jules César dont elle porte le nom. Le calendrier, lors de la
réforme de César, avançait de 80 jours; remis au point à ce moment,
il se trouvait être, 1600 ans après, lors de la réforme grégorienne, en retard
de dix jours. Le calendrier Julien, ou vieux style, est encore suivi par les
xNOïES. LIV. m, CH. XI. VOL. III, PAG. 526. Fc.691
Russes et par quelques autres peuples du rite grec; en ce moment, il est
en retard de 13 jours sur l'autre.
8, Sent. — Cette appréciation n'est pas juste. La réforme du calendrier
était nécessaire pour mettre de l'exactitude dans les observations et cal-
culs astronomiques, fixer avec précision certaines époques de l'histoire,
rétablir la concordance entre ses indications et la réalité; l'erreur, sous
ce dernier rapport, était déjà assez sensible pour qu'on désirât en voir
arrêter les progrès qui, à la longue, aurait amené une transposition com-
plète de saisons : déjà on était en été, que d'après lui le printemps n'avait
pas encore pris fin.
16, lours. — L'erreur qui demeure n'est pas telle que le dit Montaigne, et
on y pare par le moyen qu'il indique, mais qui avait été décidé dès le
' principe, en ne faisant pas bissextile l'année qui termine chaque siècle
qui, sans cette convention, devrait l'ôtre, son millésime étant divisible
par 4.
26, Plutarque. — Questions romaines, 24.
26, Borner. — Délimiter, donner une mesure exacte.
528,
2, Causes. — Add. de 88 : Ils passent par dessus les presupposiiions, mais
ils examinent curieusement les conséquences. — Un charlatan, au xvn* siècle,
montrait un jeune homme qui avait, disait-il, une dent d'or. Les philoso-
phes de l'époque firent à ce sujet force dissertations pour démontrer qu'il
s'était produit là un travail de la nature, analogue à celui par lequel
ce métal existe dans les minerais d'or; jusqu'à ce qu'un incrédule, exa-
minant la chose de plus près, découvrit que la prétendue dent n'était
autre qu'une dent enveloppée dans une feuille d'or et adroitement en-
trée dans la gencive (J.-J. Rousseau commence par cette histoire son
traité sur la musique). — Aux débuts de la conquête de l'Algérie, une
communication des plus intéressantes, tant par elle-même que par l'érudi-
tion dont faisait preuve l'éminent correspondant qui l'adressait à une
de nos sociétés savantes des mieux qualifiées, signalait la découverte, dans
la nouvelle colonie, d'un rat à trompe, dont plusieurs spécimens furent
présentés à la docte assemblée et donnèrent lie(u à d'importantes discus»
sions, qui ne prirent fin que lorsque l'avenir vint à révéler que ces
phénomènes n'étaient autres que des rats de l'espèce la plus commune,
auxquels un adroit loustic des Bataillons d'Afrique incisait habilement
le museau et y greffait l'extrémité de la queue d'un de leurs congénères,
et qu'il cédait à beaux deniers comptants aux touristes émerveillés des
surprises que la nature tient continuellement en réserve pour ceux qui
cherchent à pénétrer ses secrets.
15, Discours. — Raisonnement.
18, Matière. — Et avec rien, comme avec quelque chose.
23, Basteler. — Faire le bateleur en compagnie, péroi'er à perte de vue
sans but sérieux.
30, Moyens. — Var. de 88 : causes.
530,
10, Accession. — Accessoire, addition.
12, Particulière. — Sénèque, Episl. 81. — C'est ce que rend bien ce conte
humoristique qui avait cours dans mon enfance. Un Marseillais (on ne
prête qu'aux riches) se dit un jour : « Quelle bonne farce je vais leur
faire! » et à la première de ses connaissances qu'il rencontre : « Tu sais?
lui dit-il... Comment, tu ne sais pas; la baleine échouée, elle bouche
l'entrée du port, on ne peut plus ni entrer, ni sortir. — Ah, bah! » dit
l'autre, et de courir aussitôt pour voir ce spectacle, interpellant de même
façon ceux qu'il rencontre, qui à leur tour propagent la nouvelle à tous
venants, si bien que notre farceur, auquel quelqu'un la rapporte et voyant
chacun s'empresser, se prend à y croire lui-même : « Peut-être bien, se
dit-il, qu'en riant j'ai dit la vérité; il faut que j'aille voir. » Et le voilà lui
aussi parti comme les autres.
Fc.692 ESSAIS DE MONTAIGNE.
20, D'autruy. — « Les miracles ont toujours besoin qu'on les aide à se
faire. » Renax.
32, Hyperbole. — Figure de rhétorique qui consiste à exagérer les choses,
soit en les augmentant, soit en les diminuant, pour leur donner plus de
force.
37, Nombre. — Diderot cite textuellement ce passage depuis : « l'ai vou
la naissance de plusieurs miracles... » (p. 528, 1. 38), et ajoute : « Je don-
nerais la meilleure de mes pages pour celle-là. »
37, Resouldre. — De se prononcer d'une manière ferme et résolue contre...
532.
9, Appréhension. — De son imagination.
16, Giste. — Il en a été, il en est et il en sera toujours ainsi ; et il n'est pas
un de ces prétendus miracles avérés, qui ne puisse s'expliquer par
l'autosuggestion et qui ne soit contestable. Il serait cependant si simple,
s'ils avaient une source surnaturelle qui voulût se manifester de la sorte,
de se révéler dans des conditions telles que personne' ne pourrait la con-
tester, par exemple un œil arraché, un membre amputé, au su et au vu
de tout le monde, dont les blessures seraient complètement cicatrisées et
instantanément renaîtraient comme si l'accident ne s'était pas produit!
— Tous les miracles qu'on relève, sans exception aucune, même les résur-
rections qui peuvent s'expliquer par des cas de mort apparente, rentrent
dans la première catégorie; pas un dans la seconde.
534,
5, Du tout. — Tout à fait.
21, Soustenions. — Nous suspendions.
26, Stile. — L'usage.
29, Semble. — "Cicéron, Academ., II, 47.
39, Thaumantis. — Cicéron, De .Yat. Deor., III, 20. — La mythologie fait
Iris la messagère des dieux, et en particulier de Junon qui, en récom-
pense de ses services, la métamorphosa en arc-en-ciel. Elle était fille du
centaure Thaumas, d'où le surnom de Thaumantias qui lui est quelquefois
donné. Thaumas signifiant en grec « admiration », Cicéron dit que c'est
en raison de sa beauté, parce qu'elle est admirable, qu'on l'a faite née
de Thaumas, c'est-à-dire de l'admiration qu'elle inspire; version dont
use ici Montaigne. — On dit couramment : « L'admiration est la fille de
l'ignorance et la mère des merveilles » ; c'est l'idée qu'il a voulu exprimer,
elle est plus compréhensible ainsi que de la façon dont il l'a rendue :
« Iris est fille de Thaumantis », même avec ce qui v fait suite.
536,
I, Coras. — Détenu à la conciergerie de Toulouse, comme calviniste, j' fut
assassiné avec trois cents de ses coreligionnaires quelque temps après la
S. -Barthélémy.
7, Pendu. — Discours préliminaire de l'Apologie pour Hérodote, par H. Es-
TiENNE, tom. I. — Un N^ Armand du Thil avait trouvé moj'en, grâce à sa
ressemblance avec un N'' Martin Guerre, de se faire recevoir comme son
inari, par la femme de ce dernier qui était absent. Il tint sa place pen-
dant trois ans, et en eut deux enfants, sans que ni elle, ni ses parents, ni
ses amis découvrissent l'imposture; au bout de ce temps, le vrai mari
survenant, le procès en question s'engagea devant le parlement de Tou-
louse (1560); du Thil fut condamné à être pendu, puis brûlé après sa
mort. — Montaigne dit que cette affaire était si peu claire, qu'à son avis
un acquittement s'imposait; telle a été à notre époque l'affaire Dreyfus,
où la culpabilité possible n'a cependant jamais été péremptoirement éta-
blie, dont la condamnation a divisé profondément la nation et dont un
parti s'est fait si longtemps une arme contre l'armée bien innocente de la
légèreté criminelle de quelques-uns; les erreurs judiciaires, comme les in-
humations prématurées, sont journalières : on les éviterait en s'abstenant
aussi longtemps que la certitude n"est pas faite.
Il, Ans. — \alère Maxime, VIII, 1; et Aulu-Gelle, XII, 7. — II s'agissait
NOTES. LIV. m, CH. X[. VOL. III, PAG. 336. Fc.693
d'une femme de Smyrne qui avait tué son mari et son fils, lesquels avaient
assassiné un autre fils qu'elle avait eu d'un premier mariage; mù par
cette considération qu'il ne pouvait ni acquitter une femme coupable d'un
double assassinat, ni punir une mère infortunée qu'une juste douleur
avait poussée à cette vengeance, l'Aréopage ajourna à cent ans le prononcé
du jugement (68).
13, Songes. — Voir ci-dessous N. III, 540 : Vif.
14, Choses. — Il s'agit probablement de la pythonisse d'Endor que Saiil
alla consulter. Étant en présence des Philistins, se sentant pris d'inquié-
tude, il consulta le Seigneur, par l'organe de ses intermédiaires ordi-
naires. Celui-ci ne lui ayant pas répondu, Saûl fit rechercher une de ces
créatures qu'il avait proscrites, habiles dans l'art de lire l'avenir et d'évo-
quer les morts du tombeau. On lui en indiqua une à Endor. Il s'y rendit
déguisé, et lui demanda d'évoquer Samuel, ce qu'elle fit avec la permission
de Dieu, disent certains pères de l'Église avec lesquels se range ici Mon-
taigne, et elle lui prédit qu'il serait battu et que son royaume passerait
aux mains de David, ce que vérifièrent les événements (1051).
17, Engin. — Une autre intelligence que la nôtre.
25, Intelligunt. — Citation d'auteur inconnu.
26, Creduntur. — S* Augustin a dit : « Le plus souvent il advient que ceux
qui entendent méprisent, et que ceux qui n'entendent point sont touchés
de plus de zèle et de dévouement. ■>
32, Brauerie. — En se servant de termes insultants et méprisants pour
ceux à qui il parle.
538,
1, Aient. — Sous-ent. : Je l'admets pourvu qu'ils aient... — Il semble que
Montaigne fasse ici allusion aux discussions soulevées par la Réforme,
la grosse question de l'époque.
15, Autborisé. — D'accord; mais comment reconnaître que cette approbation
surnaturelle a bien été donnée à tel ou tel? Quelle preuve en peut-il donner
à ceux qui taxent de fourberie et d'imposture cette prétention de sa part?
23, Vente. — Avec la même rapidité que le vent.
31, Elider. — Briser, rompre, anéantir; du latin elidere, d'où vient élision.
540,
3, Marque. — On prétendait que le diable imprimait sa griffe sur le corps
des sorciers.
7, Ellébore. — Plante employée en médecine comme purgatif et qu'autre-
fois on croyait propre à guérir la folie.
8, Ciguë. — Plante ombellifcre, dont une espèce, la grande cigué, est très
vénéneuse; le poison extrait de cette plante était, notamment à Athènes,
l'un des moyens d'exécution employés pour la mise à mort des condamnés
à la peine capitale.
16, Nœud. — Gordius, Phrygien (Asie Mineure), de simple laboureur étant
devenu roi, avait consacré dans le temple de Jupiter à Gordium le char
qui le portait quand on vint lui annoncer la royauté; le joug était lié au
timon par un nœud si artistement fait, qu'on ne pouvait en apercevoir
les bouts; on le nommait le « nœud gordien » et un oracle avait promis
l'empire de l'Asie à qui le dénouerait. Alexandre le Grand, lors de son
expédition, s'y essaya; après plusieurs tentatives infructueuses, il le trancha
avec son épée et parvint ainsi à éludei-, sinon à accomplir la prédiction.
18, Vit. — A cette époque, on brûlait encore les gens se disant sorciers,
ou passant pour tels. — Nicolas Rcniy, conseiller du duc de Lorraine
et enquêteur sur le fait de sorcellerie, fit, dans l'espace de quinze ans,
brûler plus de 900 prétendus sorciers, dont 800 sorcières, ainsi qu'il
l'avoue lui-même dans un livre en 1596, dédié au cardinal de Lorraine :
" Ma justice est si bonne, y dit-il, que l'an dernier, il y en a eu 16 qui se
sont tués, pour ne pas passer par mes mains. » — En 1602, dans le Jura,
un autre juge, Boguet, se targuait de pareille extermination, pratiquée
pendant seize ans; il avait l'humanité de faire étrangler ses victimes avant
Fc.694 ESSAIS DE MONTAIGNE.
qu'on ne les jetât au feu, sauf toutefois les loups garous « qu'il faut avoir
bien soin de brûler vifs » ; après avoir d'abord épargné les enfants au-des-
sous de quatorze ans, il en était venu à croire que pour avoir raison de
cette lèpre, il fallait brûler tout jusqu'aux berceaux.
20, Sommier. — De cheval de somme.
21, L'estoit. — Ces sortes de métamorphoses temporaires étaient provoquées,
disait-on, au moyen d'un fromage dont certains hôteliers initiés avaient
le secret, qui changeait ceux qui en mangeaient en bêtes de somme, dont
les dits hôteliers se servaient pour leurs propres services, leur rendant
ensuite leur forme primitive. S. Augustin, qui relate le fait (De Civil. Dei,
XVIII, 18), déclare ne pas y croire et que ce sont là des effets de songes;
il admet toutefois que dans des cas très rares, ces suggestions peuvent
être inspirées par des démons et qu'alors les fardeaux qu'il vous semble
que vous portez, ce sont les démons eux-mêmes qui les portent pour
compléter l'illusion. Mieux vaudrait se borner à expliquer simplement
de semblables faits par les hallucinations dont on peut être jouet en dor-
mant, que de faire intervenir le diable.
30, Pleuuis. — Garantis. Pleuvir est un vieux mot inusité, signifiant cau-
tionner, promettre.
39, Obliger. — Var. de 88 : l'attirer.
39, Choix. — Vous fournira les moyens de choisir.
542,
11, Oîçeï. — Proverbe grec qui a son semblable en latin : Claudus optime
virum agit et que Montaigne traduit après l'avoir cité. C'est sans doute
dans cette opinion que les anciens ont fait de Vulcain, qui était boiteux,
l'époux de Vénus.
18, Décidé. — Aristote, Probl, 10, 26.
31, Coches. — L'ébranlement et l'agitation de leurs carrosses. — A un mo-
ment, on en a dit autant des machines à coudre; à ce compte où nous
conduiront l'usage des chemins de fer et des automobiles et plus encore
celui des bicyclettes! Ce que je puis cependant affirmer, c'est que des efi"ets
de ce genre se produisent parfois chez l'homme qui demeure de longues
heures consécutives, douze à quinze, à cheval.
32, Commencement. — Au commeocement de ce chapitre, III, 526, à la fin
de la page.
39, Mot. — De l'adage cité plus haut sur les boiteux.
544,
4, Italie. — Torquato Tasso, Paragone delV Ilalia alla Francia.
7, Suétone. — Vie de Caligula, 3.
10, Erratique. — Vagabond, instable, incertain. Du latin erraticus qui si-
gnifie errant çà et là; on désigne aujourd'hui sous ce nom : roche,
bloc erratique, des roches qui, par une cause quelconque, se trouvent
transportées à gi-ande "distance de leur gisement naturel.
11, Tberamenez. — Cothurne (soulier) de Tliéramène; sobriquet donné par
les Romains aux gens ménageant deux partis contraires comme avait fait
Théramène, l'un des trente tyrans d'Athènes, imposés par les Spartiates
à cette ville après leur victoire d'JEgos Potamos (404), qui adhérait aux
mesures d'oppression prises par ses collègues contre le peuple et qui,
auprès de celui-ci, les désapprouvait, ressemblant, en agissant ainsi, aux
chaussures de théâtre que chaussaient indifféremment, suivant le besoin de
son rôle, tout acteur homme ou femme, et qui, confectionnées sur une
même forme, se mettaient indifféremment à l'un ou l'autre pied. Cette
attitude de Théramène tourna contre lui, ses collègues le condamnèrent
à boire la ciguë (403). V. Érasme, Theramenis Colhumus.
12, Dragme. — La drachme (monnaie) valait un peu moins d'un sou.
14, Talent. — Monnaie de convention valant près de 5.000 francs (4.840 fr.).
15, Cynique. — Sénèque, De Benef., Il, 17.
21, Riuerso. — Proverbe italien qui existe pareillement et textuellement en
français.
NOTES. LIV. III, CH. XI. ' VOL. III, PAG. 544. Fc.69o
23, Hercules. — Obligé par les destins d'obéir à Eurysthée, roi d'Argos,
entreprit, par les ordres de ce prince, une foule de travaux périlleux,
dont les principaux, énumérés ci-après, sont connus sous le nom des
" Douze travaux d'Hercule » : Il étouffa le lion de Némée; tua l'hydre de
Lerne; prit vivant le sanglier d'Érymanthe ; atteignit à la course la biche
aux pieds d'airain; tua à coups de (lèche les oiseaux du lac Stymphale;
dompta le taureau de l'île do Crète envoyé par Neptune contre Minos;
tua Diomède, roi de Thrace, qui nourrissait ses chevaux de chair hu-
maine; vainquit les Amazones; nettoya les écuries du roi Augias, en y
faisant passer le fleuve Alphée; combattit et tua le géant Géryon, auquel
il enleva ses troupeaux; enleva les pommes d'or du jardin des Ilespérides;
enfin, délivra Thésée des enfers. Parmi ses autres travaux; il délivra Ilé-
sione d'un monstre marin; vainquit et étouffa le géant Antée; sépara les
montagnes de Calpé et d'Abyla qui auparavant étaient une seule montagne
et qui formèrent ce qu'on a nommé depuis les Colonnes d'Hercule (détroit
de Gibraltar); tua le centaure Nessus; délivra Promcthée enchaîné sur
le Caucase, etc..
24, luger. — Cicéron, Acad., II, 34.
33, Tout. — Planude, Vie d'Esope.
CHAPITRE XII.
546,
Physionomie. — Montaigne ne traite le sujet qui sert de titre à ce
chapitre que dans ses cinq ou six dernières pages.
14, Reproche. — Add. de 88 : et d'iniure.
17, Maisons. — L'ex. de Bord, porte massons; c'est la version qui a été
adoptée dans la traduction ; « maisons » est évidemment une erreur d'im-
pression qui s'est glissée dans les éditions antérieures et répercutée
d'édition en édition.
23, Vent. — « Le vent enfle les outres, l'opinion enfle les hommes. » Cette
sentence; de Stobée, se trouvait du nombre des inscriptions que portaient
les solives de la bibliothèque de Montaigne.
24, Balons. — A cette' époque l'aérostat, la simple montgolfière elle-même,
n'étaient point inventés; il ne s'agit donc ici que de simples balles de
cuir, remplies d'air, plus ou moins grosses, comme encore actuellement il
en est employé, sous ce nom, s(îit comme jouet d'enfants, soit à certains
jeux, tels que le foot-ball, si fort à la mode aujourd'hui.
26, loinctement. — Plus directement, plus spécialement.
28, Sequi. — « Régler ses actions, observer la loi du devoir, suivre la na-
ture. » La morale de Montaigne peut se résumer dans cette citation de
LucAiN, parlant de Caton, dont l'auteur des Essais fait ici application à
Socrate, le plus parfait de ses modèles, qu'il admire, mais n'imite que
dans ce qui n'est pas contraire à la tranquillité de son existence et ne
saurait v apporter de trouble dans l'avenir.
29, Pareil — Cicéron, De OU'., 1, 26.
548,
4, Braues. — Var. de 88 : noblea.
6, Ralle. — Rase la terre. Selon Cotgkave « raller à terre », c'est courir
vite et raser la terre, comme font certains oiseaux.
14, Suffisance. — ^dd. de 88 : soit pour iuger, soit pour rapporter.
24, Besoigne. — Cicéron, Acad., I, 4, où Varron développe ce caractère
moral de la philosophie de Socrate.
550,
7, Agricole. — Tacite, Agricola, 4. — Sa mère avait nom Julia Procella;
lui-même fut le beau-père de l'iiistorien Tacite qui a écrit sa vie. Général
habile, il soumit la Grande-Bretagne qu'il réduisit en province romaine,
et, le premier, reconnut que c'était une ile.
Fc.696 ESSAIS DE MONTAIGNE,
12, Viande. — Nourriture. V. N. I, 540. Se disait autrefois pour désigner
toute chose entrant dans l'alimentation. — « La sienna vianda era, pans et
aygua lot dia (Sa nourriture de tous les jours était uniquement du pain et
de l'eau), • est-il dit dans la Vie de S' Honorât. — « En cette isle seule,
naissent ces belles poires..., viande très salubre es malades, comme es
sains. » Rabelais, IV, 54. — Ne se dit plus aujourd'hui que de la chair des
animaux.
22, Pœnitence. — Ceux appartenant aux ordres monastiques et plus parti-
culièrement aux ordres mendiants.
552,
1, Propre. — Au fait, à l'épreuve.
2, Targue. — Et est armé pour la lutte, ni plus ni moins qu'avant et ab-
solument comme tout le monde l'est; — se targuer signifie proprement se
couvrir d'une targe ou targue, espèce de bouclier.
7, N'a. — Sous-entendu : imprimé.
11, Incorporels. — Sans corps, vides de sens, frivoles.
14, Céans. — Ici dans mon livre.
20, D'aban. — D'effort, de fatigue, de tourment.
21, Perche. — Se démener, ainsi que fait l'oiseau de proie qui, attaché à
une perche, s'y débat continuellement.
32, Informe. — Nous forme, façonne notre àme.
35, Reuerez. — Les pères de l'Eglise, et plus particulièrement S' Augustin,
dans ses Confessions.
37, Voirie. — De la lie du peuple; voirie, c'est l'endroit d'une ville où on
jette les immondices.
554,
2, Science. — Pourquoi allons-nous chercher dans l'étude des sciences, des
armes contre les maux et les accidents de la vie?
20, Picoreurs. — Les partisans, les maraudeurs.
21, Essayois. — J'essuyais, j'éprouvais.
34, Nous. — " 0 tempora, o mores (Dans quels temps vivons-nous) ! » s'écriait
de même Cicéron, en de semblables circonstances, s'élevant contre la per-
versité des hommes de son époque.
36, Donne. — Ces deux vers français semblent être de Montaigne; la traduc-
tion du vers de Virgile qui suit est de lui.
556,
G, Estranger. — Les mercenaires étrangers. Allemands, Suisses, Italiens,
Espagnols, qu'appelaient indifféremment à leur aide les Catholiques et les
Protestants. C'est ici la seule allusion que Montaigne fasse à l'intrusion de
l'étranger dans nos affaires politiques; quelque las qu'il soit des guerres
civiles, il ne parle jamais, soit dit à sa louange, de recourir pour y mettre
fin à l'appui que l'on pourrait recevoir du dehors.
9, Chef. — Non à la discrétion du chef, mais chacun...
23, Probibete. — Virgile dit cela d'Octave, qui plus tard devint Auguste.
Montaigne en fait vraisemblablement application ici à Henri de Navarre
qui avait sauvé l'Etat par l'assistance qu'il avait prêtée à Henri 111, dont,
au moment où Montaigne écrivait, il était devenu le successeur naturel
par la mort du duc d'Alençon, frère de ce dernier.
24, Précepte. — Il est de Cléarque, général lacédémonien, et rapporté par
Vai-i-re Maxime, II, 7, ext. 2.
26, Pourpris. — Enceinte, clos.
29, Délicieuses. — Fait rapporté par Froxtin, Stratagèmes, IV, 3, 13, au sujet
de l'armc'o de M. Scaurus en IlljTie, vers l'an 122 — Ce Scaurus, qui
s'illustra par ses services militaires et qui obtint les honneurs du triomphe,
devint prince du Sénat et, comme tel, eut, pendant un certain temps, la
direction de toutes les affaires de Rome ; mort en 97.
30, Pérégrinations. — Voyages; du \a.tin peregrinatio.
^, Rbodes. — Les chevaliers de Rhodes qui, dans leur hiérarchie, com-
prenaient le titre de commandeur, avaient été particulièrement sur mer.
NOTES. LIV. III, CH. XII. VOL. III, PAG. 556. Fc.697
pendant plusieurs siècles, la terreur des pirates musulmans. Du temps de
Montaigne, on les appelait encore de ce nom, bien qu'après la prise de
Rhodes par les Turcs (1522), ils fussent devenus chevaliers de Malte, cette
ile leur ayant été donnée comme refuge par Charles-Quint.
38, Pretix. — Déterminé, arrêté, fixe.
40, Empale. — Supplice en usage chez les Turcs, consistant à enfoncer dans
le fondement du condamné un pieu ou pal, fixé verticalement, qui lui traverse
les entrailles et le laisser ainsi jusqu'à ce que la» mort s'ensuive, ce qui
peut se faire attendre huit à dix heures; ce fut le supplice infligé en 1800
à l'assassin de Kléber. ,
40, Déport. — Sans délai, sur-le-champ.
558,
1, Damas. — Le fait se passait en 1516; Selim I, sultan ottoman, était d'une
cruauté égale à son courage et à sa fermeté; il avait détrôné et fait périr
son père et ordonné la mort de plusieurs de ses frères; c'est lui qui obtint
du dernier calife abbasside, dont déjà les sultans ottomans avaient absorbé
toute l'autorité, de lui résigner cette qualité de calife, qui lui donnait l'in-
vestiture religieuse et le mettait au-dessus de tous les princes musulmans.
5, Mortelle. — La guerre civile. — S. Thomas blâme la sédition; mais il
approuve l'insurrection consistant à renvei-ser un pouvoir injuste et tyran-
nique; alors, selon lui, elle est plus qu'un droit, elle est un devoir. 11 se
rencontre sur ce point avec un tout autre individu que lui, Robespierre,
qui, lui aussi, a dit que lorsque la loi devient oppressive, l'insurrection
devenait le plus sacré des devoirs.
5, Fauonius. — Plltarque, M. Brutus, 3.
7, Mesme. — Epist. 7, à Perdiccas.
9, Citoyens. — « Dans les séditions, les méchants seuls gouvernent. » Homère.
15, Consorce. — De notre société, c.-à-d. de la société chrétienne. — Con-
sorce est le mot latin consortium qui a cette signification et auquel Montaigne
a donné une désinence française.
27, Colloque. — Add. de l'ex. de Bord, que l'on a cru devoir conserver dans
la traduction : Desmembrant sa mère et donnant à ronger les pièces à ses
antiens ennemis.
37, Platon. — République, 11, 4; Pensées de Platon.
560,
14, Pelaudé. — Maltraité, écorché, dépouillé.
14, Gibelin. — Guelphe et Gibelin, noms de deux partis pohtiques qui,
pendant près de quatre siècles, divisèrent l'Allemagne, puis l'Italie. Ces
dissensions eurent pour point de départ les prétentions, en 1158, à la
couronne impériale de Conrad, seigneur de Wiblingen (d'où par corruption
Gibelin), et de Welf (dont on a fait Guelfe), duc de Bavière; mais elles ne
tardèrent pas à se modifier dans leur esprit, et, d'une façon générale, les
. Gi'oelins en tenaient pour la domination impériale et la hiérarchie féodale,
les Guelfes pour la domination de l'Eglise et l'indépendance nationale. Ces
querelles cessèrent par lassitude de part et d'autre et surtout par la diversion
qu'occasionna l'invasion des Français en Italie, en 1495.
17, Voisinage. — 3Iontaigne, qui lui-même était catholique, habitait en plein
pays protestant; en outre, sa mère Antoinette de Louppes était protestante
et deux de ses enfants, le sieur de Beauregard et .Jeanne de Lestonna, avaient
adopté la môme religion.
19, Desempare. — Abandonne, quitte, transgresse.
20, Recherché. — Je ne m'écarte jamais des lois et qui eût fait l'examen de
ma conduite...
20, Muettes. — Add. de 88 : e< desrobécs.
36, Démise. — Soumise; du latin demissa.
562,
8, Commettre. — Confier le soin d'une vieillesse...
10, Pourpoint. — Presque nu, avec mon seul pourpoint; ou encore, réduit
à la dernière extrémité, ne sachant quel parti prendre. — « Mettre un
Fo.698 ESSAIS DE MONTAIGNE.
homme en pourpoint », c'est à proprement parler le dépouiller complète-
ment, le réduire à la besace, dit Nicot, ce qui ressort nettement de ce
quatrain attribué à Charles IX, où il est question de François I"" :
« Le roy François ne faillit point,
Lorsqu'il prédit que ceulx de Guise
Mettroient ses enfants en pourpoinct,
* Et tous ses subiects en chemise. »
32, Mail. — MaiUet.
564,
8, Temps. — Var. de 88 : estât.
30, Vie. — Combien peu il en a coûté au repos et à la tranquillité de nia
vie, quoique j'en aie vu s'écouler plus de la moitié, pendant que s'opérait la
ruine de mon pays.
35, Escbeuer. — Eviter, esquiver. V. N. III, 508.
36, Guignent. — Qui nous visent, nous guettent, s'adressent à nous.
566,
3, Qu'à. — Mais seulement par comparaison.
5, Office. — La corruption des grands et des hommes dans les plus hautes
situations.
22, Mains. — « Cedo et manum tollo, je cède et tends la main. » Cicéron,
fragm. Consolât, ap. Lactant., III, 28.
24, Tastonner. — Flatter, amadouer. On disait : tastonner doucement les
chevaux de la main pour les adoucir, les calmer.
31, Peste. — La peste, au xvi' s., ravagea presque toute l'Eiîrope. A l'époque
où Montaigne écrivait, en 1585, elle venait de sévira Bordeaux et dans les
régions environnantes, s'étendant jusque chez lui; dans la ville seule où
elle régna six mois, de juin à décembre 1585, elle lit '16.000 victimes sur
42.000 habitants.
36, Estranges. — Add. de 88 : e^ inouys.
568,
I, Plaisante. — Singulière, étrange, surprenante. « Plaisante » est mis ici
par antiphrase.
32, Compromis. — Eussent admis d'une commune entente cette nécessité.
36, Diuerse. — Ou le goust tout diuers, comme porte l'éd. de 88.
570,
6, Descouppent. — Se répartissent, se partagent en différentes formes.
6, Neorites. — Diodore de Sicile, XVII, 105.
9, Fosse. — A cette époque, le service des inhumations n'était pas partout,
surtout dans les campagnes, un service public; on enterrait fréquemment
de ci, de là, dans les propriétés particulières, ce qui se pratiqua jusqu'au
moment de la Révolution, à l'égard des Protestants qui n'étaient pas admis
dans Ifes cimetières catholiques là où il en existait et qui encore à l'heure
actuelle y sont enterrés à part. C'est à cela qu'est dû ce grand nombre do
terrains, de quelques mètres carrés de superficie, abandonnés aujourd'hui,
qui existent dans certaines régions, notamment dans le Périgord, où il en
subsiste encore entourés de leurs murs de clôture et que signalent des
arbres funéraires.
12, Aucunement. — Presque.
15, Suffoquant. — Des soldats romains, dit Tite-Live, XXII, 51, furent, le
lendemain de la bataille de Cannes, trouvés morts en cette situation; il est
à croire que blessés grièvement et hors d'état de mettre fin autrement à
leurs souffrances, ils en avaient agi ainsi de désespoir.
572,
10, Filière. — En terme de fauconnerie, on appelle filière une cordelette
d'une vingtaine de mètres de long, que l'on tenait attachée à l'un des pieds
de l'oiseau pendant ses exercices de dressage.
NOTES. LIV. m, CH. XII. VOL. III, PAG. 572. Fc.699
16, Frappe. — « Le coup ne nous surexcite pas tant que le bruit. » Sénèque,
Episl. 74.
20, Noël. — Dès l'été, sous prétexte que vous en aurez besoin en hiver, la
S'-Jean étant en juin et Noël en décembre.
25, Main. — Par avancé.
28, Dure. — Sénèque, qui appartenait à la secte des Stoïciens, dans ses Épitres
13 et 98.
34, Volontiers. — Vraiment; ceci dit sans nul doute par ironie.
574,
10, Cbaille. — Ne vous en mettez pas en peine.
14, Incertam. — Le texte de Properce porte : At vos incertain.
30, Total. — C'est à tort qu'on veut nous apprendre à mourir, et à changer
la forme de notre vie^ alors que nous touchons à sa fin.
34, But. — « Le but de nostre carrière c'est la mort », dit ailleurs (I, 112)
Montaigne, en contradiction ici avec lui-même.
35, Visée. — Le but où elle vise.
576,
11, Descbargée. -- Et la plus légère. — Suétone, César, 87.
19, Presens. — Var. de 88 : plus gravide que nous n'auons.
20, Futurs. — Add. de 88 : e< de la mort à venir.
26, Socrates. — Socrate était fils d'un sculpteur, profession qu'il exerça
d'abord, puis abandonna vers 30 ans pour s'adonner aux sciences, Criton,
un riche Athénien, lui ayant assuré à cet effet des moyens d'existence. —
Dès lors, Socrate se donna la mission de réformer ses concitoyens et sa vie
fut un véritable apostolat qu'il exerça uniquement par la parole, conversant
avec les uns et les autres, procédant généralement par des interrogations
qui, de réponses en réponses, amenaient ses adversaires à de ridicules
absurdités, et ses disciples à découvrir par eux-mêmes les vérités qu'il voulait
, leur inculquer. Il ne tenait pas d'école proprement dite; on le rencontrait
partout où se portait la foule, dans les assemblées du peuple, les fêtes, les
gymnases, et tout servait de prétexte à son enseignement dans lequel il
s'appliquait à faire ressortir les vertus (la prudence, la tempérance, la force,
la justice), l'existence d'un Dieu, d'une Providence, l'immortalité de l'àme;
à combattre les sophistes qui prétendaient tout savoir, leur opposant que
quant à lui tout ce qu'il savait, c'est qu'il ne savait rien; à recommander
la pratique du bien comme le plus sûr moyen d'arriver au bonheur, le
respect des lois et leur observation comme un impérieux devoir. — Sa vie
fut conforme à sa doctrine; il ne cessa de donner l'exemple de toutes les
vertus publiques et privées, se signala par son désintéressement, sa géné-
rosité, son égalité d'humeur. Ses mœurs furent toujours irréprochables, et-
rien dans les accusations que ses ennemis portèrent conti'e lui n'en laisse
soupçonner la pureté. Jamais il ne se départit d'une simplicité vraiment
stoïque; il menait une vie frugale, allait toujours nu-pieds et ne se couvrait
pas plus en hiver qu'en été. — Exact à remplir tous ses devoirs de citoyen
aussi bien en guerre qu'en paix, Socrate se distingua par son courage
en diverses occasions. 11 avait 36 ans, quand Potidée se révolta et, réduite
par la famine, fut prise après un siège de deux ans (434); il s'y fit
remarquer par ses actions d'éclat, et céda à Alcibiade, qu'il avait arraché
des mains de l'ennemi, le prix de la vaillance que lui-même avait mérité.
Pendant ce siège, il demeura un jour et une nuit dans la même attitude,
comme en extase, ce qui lui arrivait quelquefois. A la bataille de Délium,
que les Athéniens perdirent contre les Thébains (424), il soutint pied à
pied la retraite avec Lâchez, jusqu'à ce que Xénophon, harassé de fatigue,
étant tombé de cheval, il le prit sur ses épaules et le porta en lieu sûr. 11
prit également part, en 422, à une expédition ayant pour objet de secourir
Amphipolis, qui appartenait à Athènes et qu'assiégeait Brasidas, général
de Lacédémone, qui y fut tué. De même en paix, notamment à l'occasion
des affaires de Diomédon (V. N. I, 38 : Supplices), et de Thcramène (V. N,
III, 544). Par sa vie tout entière, Socrate mérita d'être proclamé le plus sage
Pc.700 ESSAIS DE MONTAIGNE.
des hommes. Il se disait inspiré par un génie familier, qu'on a appelé « le
Démon de Socrate ■, qui dirigeait sa conduite. II ne semble pas que ce fût là
une assertion ajant pour objet de donner plus de poids à ses conseils ; ce devait
être cette sensation intérieure qui chez l'homme à l'esprit juste et pénétrant,
lui communique comme un pressentiment de ce qui doit arriver, avant
même que son esprit ait pu saisir la justesse de cette inspiration. — La
hardiesse et la continuité de ses censures indisposèrent à la longue ses
concitoyens: dès l'an 424, Aristophane, dans sa comédie des « Nuées »,
l'avait vivement attaqué. Il finit par être accusé de corrompre la jeunesse,
de ne pas admettre les divinités et de chercher à introduire des divinités
nouvelles; en réalité il était poursuivi surtout parce qu'il était opposé au
pouvoir démocratique. Devant ses juges, il garda l'attitude la plus fière et
fut condamné à boire la ciguë; et vit l'exécufîon de la sentence différée
durant trente jours, par suite du départ pour Délos de la galère y transportant
la députation sacrée que les Athéniens envoyaient chaque année et jusqu'au
retour de laquelle aucune exécution capitale ne devait avoir lieu. Pendant
cette longue agonie il conserva un calme, une lucidité d'esprit, une égalité
d'humeur inaltérables, et, le moment venu, subit son sort avec un courage
et une sérénité admirables. Peu après, un revirement dans l'opinion se
produisit : son principal accusateur fut condamné à mort et lapidé; les
autres, condamnés à un bannissement perpétuel, se pendirent; un deuil
universel fut ordonné et une statue lui fut érigée. — Socrate s'était marié à
l'âge de cinquante ans ; Xantippe, sa femme, passe pour avoir mis plus d'une
fois, par son humeur acariâtre, sa patience à rude épreuve; on lui prête
une seconde femme Mirto, mais l'accord n'existe pas sur ce point. Il semble
avoir eu trois enfants, dont l'un, Lamproclès, pouvait avoir 17 à 18 ans
quand il mourut, tandis que les deux autres, Sophroniscus et Menexanus,
étaient encore en bas âge. — Parmi ses disciples et avec une foule d'autres,
Socrate compte : Xénophon, Platon, Antisthène, Aristippe, Phédon, EucUde,
Criton, pour ne nommer que ceux qui*ont acquis le plus de notoriété. —
Voir en outre le concernant : III, 690; I, 78; I, 124 et N. Mort; N. I, 254 :
Vtilité; N. II, 118 : Chrestiens; II, 222 et N. Sages; II, 242 etN. D'autrui;
II, 244 et N. Fantasies; II, 426; III, 1.34 et N. Accoustumé.
27, Vie. — Tout le passage commençant par ces mots : « l'ay peur. Mes-
sieurs », et se terminant par ceux-ci : « craindre des Dieux », qui, dans la
traduction, est mis entre guillemets, est extrait de l'Apologie de Socrate.
dans Platox, ch. 17, 26, 32, etc., traduite par fragments par Cicéron dans
les Tusc, I, 41.
30, Cachée. — Var. de 88 : interne.
578,
19,^ Prytanée. — Édifice où, à Athènes, les Prytanes (magistrats charges des
affaires politiques et judiciaires) tenaient leurs .séances; on y emmagasi-
nait, en outre, des approvisionnements de blé et autres grains, et là
également prenaient leurs repas certains citoyens nourris aux frais du
trésor public.
23, Homère. — Odyssée, XIX, 163.
28, Desmettre. — Soumettre, abaisser.
580,
3, Dieux. — L'éd. de 88 aj. : Vous en ordomwre:^ doncq comme il vous
plaira, membre de phrase qui dans l'éd. de 95 se lit à la page précédente,
lig. 10.
3, Puérile. — Témoignant de sentiments d'une naïveté enfantine.
6, Luy. — CicÉROx, De Oratione, I, 54.
7, Calé. — Se fût-elle abaissée...
13, Incorruptible. — Sénèque, Epist. 31.
27, Eux-ttiesmes. — Ces dernières phrases sont copiées du traité de Pi.l-
TARQUE, intitule De l'envie et de la haine, 3.
582,
1, Ignorance. — Var. de 88 : fantasie, au lieu de « impression et ignorance ».
NOTES. LIV. m, Cil. XII. VOL. III, PAG. 582. Fc.701
8, D'augmentation. — Elle fait naître plus d'animaux de toutes espèces
qu'elle n'en enlève.
10, Dédit. — La traduction de ce vers d'Ovide est donnée dans la ligne qui
suit. '
19, Chantent. — Il y a longtemps que le chant du cygne à l'approche de la
mort, est regardé comme une fable.
36, lours. — J'augmente tous les jours le nombre de mes citations, contre
ce que, tout d'abord, je- m'étais proposé de faire et le plan que je m'étais
tracé en commençant mon livre. — On peut dire que les Essais ont paru
en trois fois : dans la première édition (1580), les citations sont assez rares;
elles sont plus nombreuses dans la seconde (1588) ; elles foisonnent dans la
troisième (1595); Montaigne en a fait, ainsi qu'il le dit, l'amusement de son
oisiveté pendant les quatre dernières années de sa vie. — « 11 y a quelque
modestie, qui sied bien, d'appuyer sa pensée de quelque autorité étran-
gère, ou de recourir à l'expression d'un autre en défiance de la sienne
propre; mais c'est un usage qui peut dégénérer en abus, et c'est ce qui
en est de cette farcissure d'exemples, comme l'appelle leur auteur, que
l'on trouve dans les Essais. Ch. Nodier.
584,
7, Liminaire. — Qui se met en tète d'un livre; on a dit depuis épître
préliminaire, et aujourd'hui préface.
12, Exagite. - Critique; une des acceptions du verbe latin exagitare. CicÉ-
RON, Oral., 13, dit aussi en parlant des dialogues de Platon où Socrate
prend à partie les Sophistes : « Plàto exagitator omnium rhetorum (Platon,
ce critique de tous les rhéteurs). >•
26, Seruice. — Et le détournent de son vrai sens, pour en faire une appli-
cation nouvelle.
30, Conte. — Et les racontent, les avouent.
31, Moy. — Leur pardonne-t-on plus qu'à moi? — Add. de 88 : Comme ceux
qui desrobent les chenaux, ie leur peins le crin et la queue et par fois ie
les eborgne : si le premier maistre s'en seruoil à bestes d'amble, ie les mets
au trot, et au bats s'ils seruoyent à la selle.
31, Naturalistes. — Qui aimons, qui suivons la nature, qui sommes parti-
sans des choses naturelles et vraies.
586,
5, Perdre. — L'auteur fait probablement allusion ici aux sentiments que
la lecture de son livre avait inspirés pour lui à Mademoiselle de Gournay.
8, Soixante. — Var. de 88 : septante.
11, Espreindre. — En exprimer.
22, Deslogeant. — Projet qui n'a pas été réalisé.
22, Parfaict. — Var. de 88 : patron admirable, au lieu de « exemplaire
parfaict ».
35, Predicament. — Était de cette catégorie.
37, Hommes. — C.-à-d. et est une preuve très incertaine de la laideur de
i'àme.
588,
2, Pied. — Add. de 88 ; Il n'est pas à croire que cette dissonance aduienne
sans quelque accident qui a interrompu le cours ordinaire.
2, Sienne. — De sa laideur.
4, Institution. — Cicéron, Tusc, IV, 37; De Fato, 5.
11, Phryné. — Une des courtisanes les plus célèbres de la Grèce ancienne;
elle eut pour amant le sculpteur Praxitèle et lui servit de modèle pour ses
statues de Vénus. Elle était si riche qu'elle offrit, dit-on, de rebâtir Thèbes
à ses frais, mais à condition qu'on placerait sur les murs cette inscription :
« Alexandre a détruit Thèbes, Phryné l'a rebâtie »; son offre fut refusée.
— Accusée d'impiété et défendue par Hypéride, elle allait être condamnée
quand, dit Sextus Empiricus, Adv. Math., II, 65, arrachant son vêtement, la
poitrine nue, elle se précipita aux pieds des juges; elle avait trouvé pour
les gagner à sa cause un argument plus puissant que ceux de son avocat.
Fc.702 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Athénée, XIII, fait, au contraire, honneur de cette idée à Hypéride. Quin-
TiLiEN, II, 15, la reporte à elle-même et commente en outre le fait de la
façon suivante : <■ Ce n'est pas à la plaidoirie d'Hypéride, tout admirable
qu'elle était, que Phryné dut son salut; mais à sa beauté dont elle acheva
le triomphe en découvrant son sein, » voulant montrer que non seulement
le talent oratoire et le bon droit peuvent faire avoir gain de cause, mais
que tout a le don de persuader : l'argent, la faveur, l'autorité de celui qui
parle, jusqu'à la présence muette de la vertu, de l'infortune ou de la
beauté. — Après cet acquittement, l'Aréopage rendit un décret qui défen-
dait d'exciter le moindre sentiment de pitié chez les juges et de juger un
accusé, soit homme, soit femme, en sa présence.
16, Pas. — Pas plus que le premier Scipion ne l'a lui-même oublié.
17, Bon. — Dans le Jardin des racines grecques de Lancelot si en faveur
dans les études il y a trois quarts de siècle, on trouve : « àyoïôo;, bon,
brave à la guerre » ; et cette indication est ainsi complétée : « prudent,
excellent, expertj propre à, utile », mais il n'y est pas question de beauté.
Cependant on rencontre quelquefois dans les textes le mot xaXoxaYaôoç,
« bel et bon », mis pour xa).bç xal àyaO^;, d'où nous est venue cette même
expression, en usage en français, aujourd'hui encore, dans le style
familier.
19, Platon. — Dans le Gorgias.
20, Aristote. — Politique, I, 3.
25, Fait-il. — Diogène Laerce, V, 20.
590,
8, Foyter. — Fouetter. — Et si j'étais chargé de punir les hommes je
châtierais plus rudement les méchants...
592,
6, Fauorable. — J'ai un visage avantageux.
10, Socrates. — S.-ent. : qui était de mine très ingrate. V. III, 586.
11, Présence. — Prestance. — Var. de 88 : mon porl, au lieu de « ma
présence ». - ^
25, Espérons. — L'avait poursuivi de très près.
28, Prins. — L'éd. de 88 port. : et desfaicts; et aj. -.ayant esté rencontrez en
desordre et fort écartez les vns des autres.
35, Enuiée. — Add. de 88 : e< nonobstant ce vain interualle de guerre auquel
lors nous estions.
594,
31, Chatouilleux. — Ce guet-apens se produisit en 1588 dans la forêt de
Villebois, près d'Orléans, alors que Montaigne se rendait à Paris, proba-
blement pour la réimpression des Essais.
34, Masquez. — L'éd. de 88 aj. : bien montez et bien armez.
34, Argoulets. — Arquebusiers, comme il les nomme plus bas. V. N. I, 252.
596,
10, Implorata. — On dit dans le même sens, en français : « M'étant déjà
voué à tous les saints du Paradis ».
12, Chef. — Add. de 88 : non plus auec ses menasses, mais.
19, Pourpensée. — Mûrement réfléchie; pourpenser est un augmentatif de
penser.
23, Non. — Add. de 88 : (l'essayerois volontiers à mon tour quelle mine il
ferait en vn pareil accident).
26, Pareille. — Et me fit promettre de lui rendre la pareille, s'il venait à se
trouver dans le même cas.
34, Droict. — A tort ou à raison; ou encore ici <■ à tort et à travers ».
598,
2, Offenser. — Et je suis si peu enclin à offenser qui que ce soit...
4, Criminelles. — Alors qu'il était conseiller au parlement.
6, Aristote. — Diogène Laerce, V, 17.
13, Trèfles. — A moi qui ne suis qu'un valet de trèfle (qu'un personnage
de peu d'importance), peut s'appliquer...
NOTES. LIV. III, CH. XII. VOL. III, PAG. 598. Fc.703
15, Plutarque. — Add. de 88 : mesme. ^
17, Mesme. — De ces deux mots cités par Plutarque, l'un se trouve dans ses
traités : 5wr la différence entre le flatteur et l'ami, 10, et De l'envie et de la
haine, 3; l'autre, dans la Vie de Lycurgue, 4.
CHAPITRE XIII.
600,
10, L'œuf. — CicÉRON, Acad., II, 18, d'où le fait semble tiré, le place à
Délos.
17, Celuy-là. — Justinien 1", empereur d'Orient (527 à 565), qui fit reviser
toutes les constitutions et ordonnances de ses prédécesseurs et en forma le
code qui porte son nom, qui fut suivi des Pandectes, des Institutes et des
Novelles ; tous ces ouvrages réunis constituent le Corpus juris civilis (code
civil).
602,
10, Montaignes. — C'était un usage assqz répandu au xiii" siècle, dans les
républiques de Lombardie, de confier à des juges étrangers l'administra-
tion de la justice; cet usage existait ailleurs, notamment dans la petite
république de S'-Marin en Italie, où il se serait maintenu jusqu'à son
absorption, en 1870, par le royaume d'Italie actuel; on le retrouve encore
dans la république d'Andorre (petit état sur les confins de la France et de
l'Espagne), qui est administrée par deux viguiers, nommés l'un par l'évêque
d'Urgel (Espagne), l'autre par la France, dont les jugements, quand ils sont
frappés d'appel, sont déférés au Président du tribunal civil de Perpignan.
11, Procez. — « Il est peu de ijations où les lois criminelles soient assez
bonnes pour qu'on ne préférât pas à leur tribunal celui d'un seul homme
de probité et de sens. >< Servan.
18, Platon. — République, 111.
22, Testament. — Et en général, en matière judiciaire de quelque nature
que ce soit. — Il est actuellement question de la rendre plus compréhensi-
ble et aussi conforme à ce que l'on veut dire, car il faut réellement être
initié pour comprendre. Vous recevez, par exemple, une « assignation à
comparaître, à trois jours francs, à dix heures du matin. Cela signifie, ce
dont vous ne vous doutiez probablement pas, qu'il est inutile de vous déran-
ger, mais que vous devez vous adresser à un avoué qui aura à se présenter
en votre lieu et place le cinquième jour à raidi.
26, Artistes. — Arrangées avec art.
27, Primement. — Exactement.
28, Enfrasquez. — Embarrassés, égarés, perdus; de l'italien enfrascarsi,
s'embarrasser dans les branches des arbres.
32, Vif. — De mercure, communément appelé encore du <• vif-argent ».
604,
8, Esmiée. — Divisée, émiettée, du latin miltas, qui signifie miettes.
8, Doctrina. — Ce sont bien les propres termes de l'auteur latin, mais
pris dans un sens tout difl'éront de celui qu'il leur a donné.
24, Clïoppent. — Bronchent.
27, Difficulté. — On dit en proverbe : « La glose d'Orléans est pire que le
texte ».
• Mais à quoi s'attacha ta savante malice?
Ce fut surtout à faire ignorer la justice.
Uans les plus claires lois, ton ambiguïté
Répandant son adroite et fine obscurité,
Aux yeux embarrassés des juges les plus sages
Tout sens devint douteux, tout mot eut deux visages.
Plus on crut pénétrer, moins on fut éclairci.
Le texte fut souveut par la glose obscurci. • Boileac.
Fc.704 ESSAIS DE MONTAIGNE,
606,
4. Pice. — Proverbe grec passé dans la langue latine. C'est aller s'embar-
rassant de plus en plus, telle une souris dans de la poix qui va s'engluant
d'autant plus qu'elle fait plus d'effort, se donne plus de mouvement pour
, se dépêtrer.
10, Estoutferent. — Fable imitée par La Fontaine, sous le titre de « Les deux
chiens et l'âne mort »; et, avant lui, par Marie de France, dans celle inti-
tulée '■ Le loup qui prend la lune pour un fromage », où un loup voyant la
lune se refléter dans une mare, boit tant d'eau de la mare pour atteindre
ce qu'il croit être un fromage, qu'il en crève comme les chiens d'Esope.
11, Crates. — Ou plutôt Socrate. Diogène Laerce, II, 22.
25, Admiration, chasse. — Var. de 88 : double.
27, Obliquement. — Les oracles d'Apollon, comme du reste tous les oracles,
étaient toujours rendus en termes obscurs et ambigus, permettant diverses
interprétations souvent contradictoires.
38, Duierse. — Ces vers sont de La Boétie, et se trouvent dans une traduc-
tion de Roland le furieux faite à la demande de Marguerite de Caries qui
devait devenir et devint sa femme.
608,
5, Grain. — Que de bien peu. Métaphore tirée du sorite du tas de blé. Le
sorite est un raisonnement tendant à démontrer qu'une quantité est par
elle-même chose indéterminée, c'est-à-dire qu'elle est à la fois petite et
grande : Qu'on se figure un tas de blé, qu'on en enlève un seul grain, puis
un autre ensuite, et qu'on continue de la sorte ; en n'enlevant chaque fois
qu'un grain, on ne détruit pas le tas et cependant il arrive finalement à
être réduit à un seul grain.
13, Aristote. — Morale à Nicomaque, IV, 13.
17, Soy. — Mon sujet veut que je revienne souvent à parler de moi.
21, Verhale. — Nos discussions ne portent que sur des mots.
24, Substance. — Locke a démontré que nous n'avons aucune idée claire et
précise de ce que nous appelons substance. V. son Essai philosophique con-
cernant l'entendement humain, liv. 1, ch. 4, § 18; liv. Il, ch. 23, § 2, etc.
29, Hydra. — De l'hydre de Lerne. Cette hydre était, selon la fable, un serpent
monstrueux à sept têtes, qui repoussaient à mesure qu'on les coupait, si
on ne les abattait toutes d'un seul coup. La destruction de ce monstre fut
un des douze travaux d'Hercule (V. N. III, 544 : Hercules). La plupart des fic-
tions mythologiques recouvrant une vérité, on pense que l'hydre de Lerne
n'était autre qu'un marais d'où s'échappaient des miasmes pestilentiels et
que les habitants parvinrent à dessécher. Au figuré, on désigne de ce nom
toute difficulté sans cesse renaissante et Montaigne en fait ici apphcation
aux discussions auxquelles prêtent les mots.
29, Memnon. — Ici et à la ligne suivante, il faut lire Menon, suivant le dia-
logue de ce nom de Platon. Cette erreur subsiste également dans toutes
les éd. ant., comme aussi dans l'ex. de Bord.
34, Ruchée. — « Qui ajoute à sa science, accroît aussi son travail. » Ecclé-
siaste.
610,
9, Ethiques. — Morales.
18, Justice. — « Montaigne mérite vraiment d'être compté parmi ceux qui
ont contribué à l'élaboration de nos lois, pour avoir concouru au triomphe
de. deux idées qui font leur sagesse et leur force : la modération dans le
droit pénal et l'équité dans le droit privé. » Galles, avocat général à la cour
d'Orléans, 18(55.
29, luges. — Au nombre des progrès réalisés par la Révolution, la publicité
des débats judiciaires est sans contredit l'un des plus importants. Elle
protège quelque peu contre l'arbitraire des juges, le sans-gêne, la partia-
lité du président à l'audience, l'inattention de ses assesseurs, et les dénis
de justice par trop flagrants dans les jugements rendus. Et voilà qu'à pro-
pos du divorce, on s'avise aujourd'hui de vouloir que le huis clos soit de
NOTES. UV. III, CH. XIII. VOL. III, PAG. GiO. Fc.TOo
règle, comme si toute afl'aire de quelque nature qu'elle soit ne pouvait don-
ner matière devant les tribunaux aux révélations intimes les plus cruelles,
aux scandales les plus éhontés et les moins attendus que l'on cherche
de la sorte à éviter. C'est un inconvénient regrettable qui frappe à pre-
mière vue, mais en y réfléchissant, il n'est pas à mettre en parallèle avec
ceux, bien autrement préjudiciables, que présente le huis clos; l'ac-
cepter dans ce cas, c'est donner de l'extension à l'abus; Dreyfus, lors
de son premier jugement, eût-il été condamné, s'il n'eût été jugé à huis
clos !
38, Accrocher. — Retarder, annuler.
612,
1, Repentance. — Non responsables.
2, Consacrez. — Sont sacrifiés, immolés aux formes...
2, Autre. — C'est bien à Philippe de Macédoine, père d'Alexandre le Grand,
que le fait se rapporte. Plutarque, en le citant, dit que l'individu que ce
roi venait de condamner, s'étant aperçu que pendant qu'il plaidait sa
cause, le prince sommeillait, en appela aussitôt : « Et à qui? » dit Phi-
lippe hors de lui. « A Philippe éveillé! » Ce reproche le fit réfléchir sur sa
sentence, dont il reconnut l'injustice et qu'il répara de son propre argent.
Plutarque, Apophlh. des rois.
9, Condamné. — Le préjudice qu'il avait causé au condamné.
12, Crime. — Elles sont nombreuses et de toutes les époques, par exemple
celle du chevalier de la Barre en 1765, supplicié à l'âge de 19 ans pour ne
pas s'être découvert au passage d'une procession et avoir tenu des propos
anti-religieux.
12, Opinions. — Plutarque, Instr. pour cettx qui manient affaires d'État, 21.
13, Gros.
« Tout désordre apparent est un ordre rée),
Tout mal particulier un bien universel. » Pope.
19, Cyrenaiques. — Diogène Laerce, II, 92.
20, Tbeodoriens. — Diogène Laerce, I, 99. — Théodore, surnommé d'abord
l'Athée, ensuite Théos (Dieu), semble avoir vécu en Egypte et à Cyrène, du
temps des premiers successeurs d'Alexandre le Grand. Il posait en principe
que le sage se suffit à lui-môme, que le monde est sa patrie, que rien n'est
honteux en soi, mais seulement quant à l'opinion qui en a été établie pour
mettre un frein à la multitude; en outre, il niait l'existence des dieux.
En conséquence, il considérait comme indigne du sage l'amitié, l'amour
de la patrie ; et, comme lui étant permis : le vol, l'adultère, le sacrilège,
pourvu qu'il choisisse bien son temps.
26, Innocence. — Plutarque, Alcibiade, 23. — Alcibiade disait qu'en pareil
cas, il ne s'en fierait à personne, pas même à sa mère. C'est cette même
idée qu'exprimait encore, en d'autres termes, je ne sais quel Président de
cour, disant que si on l'accusait d'avoir volé les tours de Notre-Dame de
Paris, il commencerait par prendre la fuite et gagner la frontière.
27, Faict. — A même de me récompenser d'une bonne action, comme il a
pouvoir de me punir dune mauvaise.
29, Point. — Var. de 88 : les autres, au lieu de : « de ne faillir point ».
31, Perte. — C'est la morale de la fable de La Fontalne, « L'huître et les
plaideurs ».
614,
9, Receu. — Ceci figure dans l'éd. de 88; c'était donc écrit lorsque, au mois
de juillet de cette année, il fut, ainsi qu'il est consigné dans ses éphémé-
' rides, par l'autorité des chefs de la Ligue et à la sollicitation du duc d'El-
beuf, en représailles de ce qu'un parent de ce duc était retenu pi-isonnier
par le roi à Rouen, enfermé à la Bastille, où il ne resta que quelques heures,
ayant été presque aussitôt remis en liberté, sur l'intervention, dit-il, de la
reine-mère.
essais de MONTAIGNE. — T. IV. 45
Fc.706 ESSAIS DE MONTAIGNE.
11, Atfady. — Je me languis tellement de la liberté, comme on dit dans
certaines parties de la France; j'en suis tellement avide, tellement fou.
12, Aucunement. — En quelque sorte, quelque peu.
18, Loix. — Montaigne parle ici de la résidence forcée et de l'interdiction do
séjour des repris de justice, un des abus de notre législation, qui de la
sorte ajoute, pour les malheureux qui en sont frappés, aux difficultés de
l'existence et les incite à poursuivre dans la voie du mal. Elle ne fait que
changer le péril qu'elle veut prévenir en les rejetant sur certains points,
sur certaines professions où ils se retrouvent et s'excitent réciproquement
contre la société, et en crée d'autres non moins dangereux : beaucoup, par
exemple, se rejettent sur les travaux des ports et c'est en partie à leur in-
fluence que sont dues ces grèves répétées qui en ce moment compromettent
si gravement notre commerce mai'itime.
23, lustes. — ■< 11 est difficile de dire" au peuple que les lois ne sont pas
justes, car il n'obéit que parce qu'il les croit telles : il serait bon qu'il com-
prît qu'on ne leur obéit que parce qu'elles sont lois et que c'est là ce qui
les rend justes. » Pascal.
25, Sert. — Et cela leur suffit. — Jubeat lex, non suadeat. « La loi ordonne,
elle ne persuade pas, » a dit le chancelier de l'Hospital.
26, Equité. — 11 est curieux de rapprocher cette appréciation de ce que
pensaient à cet égard les révolutionnaires de 1793. Déjà la Déclaration des
droits de l'homme inscrite en tête de la Constitution du 3 septembre 1791
avait posé que le but de toute association poHtique est la conservation de
ces droits, dont laliberté, la propriété, la sûreté, la résistance à l'oppression,
qui sont naturels et imprescriptibles. — Le 24 avril 1793, la Convention
discutant un projet nouveau de Constitution, Robespierre proposait d'y
introduire les articles ci-après : — Toute loi qui viole les droits impres-
criptibles de l'homme, est essentiellement injuste et tyrannique et n'est
point loi. — Tout acte contre la sûreté ou contre la propriété d'un homme,
exercé par qui que ce soit même au nom de la loi, hors des cas détermi-
nés par elle et des formes qu'elle prescrit, est arbitraire et nul; le respect
même de la loi défend de s'y soumettre et, si l'on veut l'exécuter par la
violence, il est permis de le repousser par la force. — La résistance à l'op-
pression est la conséquence des autres droits de l'homme et du citoyen.
— Lorsque le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est
pour le peuple, et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits
et le plus indispensable des devoirs. — Quand la garantie sociale manque
à un citoyen, il rentre dans le droit naturel de défendre lui-même tous
ses droits. — Et le 4 novembre 1848, la seconde République proclamait à
son tour qu'il y a des droits antérieurs et supérieurs aux lois positives. —
Cette légitimité de la résistance à des lois injustes a été fréquemment af-
firmée, notamment par Sophocle, Cicéron, Victor Hugo, Eugène Pelletan,
Léon XIll, Pie X.
28, Ordinairement. — V. N. III, 602 : Procez.
30, Doit. — ■- Rien de si fautif que ces lois qui redressent les fautes; qui leur
obéit parce qu'elles sont justes, obéit à la justice qu'il imagine, mais non
à l'essence de la loi. » Pascal. — Cicéron n^estimait pas davantage que
tout ce qui est légal, soit juste; et lui qui reconnaissait en droit la souve-
raineté du peuple, n'admettait pas que sa volonté fût légitime en tout ce
qu'il prescrit.
35, Obseruation. — Ne dirait-on pas ceci écrit de nos jours, où la plupart
de nos lois actuellement édictées, le sont par un gouvernement et des
chambres où le socialisme est en progrès constant et devant lequel s'incli-
nent autant par veulerie que par intérêt personnel nombre de législateurs,
rééditant « les crapauds du marais » de la Convention, qui ne sont inféo-
dés à ces idées ni par leur origine, ni par leurs convictions. Pour une
utile, on en compte dix qui ne le sont pas et ne tendent qu'à restreindre,
en haine de la religion, de la bourgeoisie et du capital, le peu de liberté
dont nous jouissons. Telles, pour ne parler que des plus récentes : la loi sur
NOTES. UV. m, CH. XIII. VOL. III, PAG. 614. Fc.707
les congrégations, qui les a si arbitrairement expulsées; la loi sur l'en-
seignement, qui tend chaque jour de plus en plus à la suppression des
écoles libres; celles sur les syndicats et le droit de grève, qui, par leurs
exagérations, ont allumé la guerre entre les patrons et ceux qu'ils em-
ploient, et qui ont déjà produit tant de ruines; celle sur le repos heb-
domadaire, que l'on n'arrive pas à appliquer et qui, comme les précé-
dentes, condamne au chômage bien des gens qui ont besoin de travailler
et le voudraient; celle de la séparation de l'Eglise et de l'Etat, excellente
en principe, autant qu'impolitique, mais surtout spoliatrice au suprême
degré, comme l'est celle contre les congrégations; enfin la loi en prépa-
ration sur le revenu, parfaitement rationnelle aussi en principe, mais
inquisitoriale au premier chef et qui, dans la réalité, ne sera qu'un ins-
trument de persécution et d'iniquité en donnant toute facilité de taxer
ciiacun selon ses opinions et les sympathies dont il sera l'objet.
616,
5, Physique. — C.-à-d. c'est l'unique science à laquelle je m'adonne, à
l'exclusion de toute autre, qu'elle porte sur l'étude des idées ou sur celle
des choses.
22, Vie. — « Savoir ce qu'il faut fuir et ce qu'il faut suivre, voilà ce qui
constitue le vrai sage... De même que la nature nous a fournis de pieds
pour marcher, de même elle nous a munis de prudence pour nous con-
duire. » Charron.
34, Faicte. — Diderot, dans l'entretien d'un père avec ses enfants, lui fait
dire : « Mon fils, c'est un bon oreiller que celui delà raison, mais je trouve
que ma tête repose plus doucement encore sur celui de la religion et des
lois. »
34, Ciceron. — L'éd. de 88 port. Platon.
618,
6, Populaire. — Et la vie d'un empereur, aussi bien que celle d'un homme
du peuple, est toujours...
27, N'estoit. — Add. de 88 : que ie ne voy que meniir et.
34, Prinsault. — D'un premier saut.
620,
3, Temple. — Apollon, au temple de Delphes. V. N. III, 482 : Delphes.
10, Subtilité. — Platon, Menon.
16, Socrates. — Xénophon, Mémoires sur Socrate, IV, 2, 24.
26, Loix. — lis débitent des inepties, du même ton, avec le même sérieux,
que s'ils devisaient des lois ou des dogmes sacrés; avec le style, le langage
d'un prophète ou d'un législateur.
27, Aristarchus. — Plutarque, De l'Amour fraternel, 1.
31, Exprez. — Var. de 88 : ordinaires.
35, Terre. — Antée, fils de Neptune et de la Terre. Il habitait les sables de la
Libye; arrêtait et massacrait tous les passants, parce qu'il avait fait vœu
d'élever un temple à Neptune avec des crânes humains. Hercule le terrassa
trois fois, mais en vain : la Terre, sa mère, ranimait ses forces, chaque fois
qu'il la touchait; s'en étant aperçu, le héros le souleva en l'air etl'étouffa.
Myth.
45, Ignorance. — Var. de 88 : beslise.
622,
2, Maistres — Var. de 88 : /e plus sage qui fat oncques, au iesmoignage des
dieux et des hommes, au lieu de : " le maistre des maistres ».
3, Antisthenes. — Diogène Laerce, IV, 2.
11, Conditions. — Les qualités bonnes et mauvaises.
03, Numerus. — Virgile parle ici des raisins, dont les espèces sont si nom-
breuses, dit-il, qu'on ne saurait ni les nommer, ni même les compter.
30, Basses. — Var. de 88 : viles.
624,
3, Perseus. — Tite-Live, XLI, 20.
4, Essorées. — .Si libres en leur essor. — Essorer est un terme de faucon-
Pc.708 ESSAIS DE MONTAIGNE.
nerie qui se dit du faucon lorsque, prenant son vol, grisé par la liberté
qu'on lui rend, il y met tant d'impétuosité, qu'il se laisse entraîner au
point qu'il a peine à revenir.
7, Autre. — Cet autre, c'est probablement l'auteur lui-même.
11, Simple. — Nulle faculté exclusivement bonne ou exclusivement mau-
vaise, de sorte que...
16, Morsure. — Add. de 88 : et sans amerlurrie.
20, Platon. — Dans le Gorgias.
33, Flatteurs.
• Délestables flatteurs, présent le plus luneste
Que puisse faire aux rois la colère céleste.
^Racise, Phèdre.)
« Les flatteurs du peuple sont aussi lunestes à la société, que le sont les
flatteurs des rois. » De Frauexdorf.
35, Corrompu. — Var. de 88 : trahy et pipé.
35, Canaille. — Var. de 88 : race.
35, Comment. — Comment pourrions-nous échapper à semblable danger,
puisque Alexandre...
626,
1, Nom. — Ce contrôle de ses actions serait une charge de la maison du
prince ou du maître, à laquelle ne serait attachée aucune qualification
officielle. ,
10, Forme. — Montaigne blâme ici les remontrances adressées aux rois du
haut de la chaire, par les prédicateurs, assez fréquentes à cette époque où
la Sainte Ligue était en lutte ouverte contre la royauté; le fait suivant
donne une idée des écarts de parole auxquels ils s'abandonnaient parfois :
A l'occasion d'une de ces orgies scandaleuses par lesquelles se terminaient
le plus souvent les exercices religieux de la confrérie des pénitents qu'avait
organisée Henri 111, à la cour même, et auxquels lui-même participait, un
prédicateur fameux, du nom de Poncet, dit un jour en chaire : « J'ai
été averti de bon lieu, qu'hier au soir, qui était le vendredi de leurs pro-
cessions, la broche tournait pour ces gros pénitents; et qu'après avoir
mangé le gras chapon, ils eurent pour collation de nuit le petit tendron
qu'on leur tenait tout prêt. Ah! malheureux hypocrites, vous vous mo-
quez donc de Dieu, sous le masque, et portez par contenance un fouet à
votre ceinture? Ce n'est pas là, de par Dieu, où il faudrait le porter; c'est
sur votre dos et sur vos épaules et vous en étriller très fort, il n'y a pas un
de vous qui ne l'ait bien gagné. »
29, Route. — Tout ce qui pourrait les faire changer de conduite et de réso-
lution.
31, Interest. — Sans détriment pour...
32, Qui. — Si on les en eût. — Ce sont les journaux qui, dans nos sociétés
modernes, jouent ce rôle de conseiller avertisseur, mais il faut, pour que le
remède ne soit pas pire que le mal, qu'ils soient libres et sincères, ce qui
est rare et difficile à discerner, et que les gouvernants sachent et aient
possibilité de profiter de ces avertissements.
33, Bon. — Et cela leur réussit.
35, Essay, — Tacite, Hisl., 1, 15.
38, Vie. — Des expériences morales et phjsiques auxquelles je me suis livré.
— Explication probable du titre donné par Montaigne à son ouvrage. V. N.
I, titre : Essais.
628,
2, Contrepoil. — C.-à-d. ce registre de ma vie peut être un assez bon
guide pour régler la santé de l'âme, pourvu qu'on prenne la peinture que
je fais ici de mes mœurs, non comme un modèle à imiter, mais au con-
traire comme exemple à éviter.
NOTES. LIV. m, CH. XIII. VOL. III, PAG. 628. Fc.709
« Des défauts du prochain sachons donc profiter.
Il n'est guère moins nécessaire
De voir ce qu'il faut éviter
Que de savoir ce qu'il faut faire. »
(M"'" Deshodlières.)
8, Médecine. — Tacite, Ann., VI, 46, dit que Tibère croyait peu à l'art des
médecins et plaisantait souvent ceux qui, passé trente ans, avaient besoin
que d'autres leur apprissent ce qui était nuisible ou contraire à leur tem-
pérament; Suétone ajoute que lui-même, dès cet âge, cessa de les consulter;
et Plutarqle, qu'il avait coutume de dire qu'un homme do soixante ans
mérite qu'on se moque de lui, quand il tend la main à un médecin pour
se faire tâter le pouls.
■ 13, Mauuais. — Xénophon, Mémoires sur Socrate, IV, 7, 9.
15, Platon. — République, III.
36, Dire. — Add. de 88 : à les voir et ceux qui se gouuernent par eux.
38, Eschançon. — C.-à-d. comme si j'avais été son échanson, comme si
j'avais été attaché au service personnel de cet art de la médecine; ou en-
core : à qui en voudra goûter, en ayant fait l'essai, je m'y connais et suis
à même de lui servir d'échanson.
630,
5, Destourbier. — Sans trouble.
19, Auguste. — Augsbourg, ville de Bavière; Montaigne y passa en 1580
lorsqu'il fit son voyage en Italie.
33, Seneque. — Epist. 90.
33, Cettuy-ci. — L'Allemand dont il a été question plus haut.
40, Euenus. — Plutarque, Questions platoniques, 8.
632,
2, Bas. — On dit que le vin est « au bas », quand, touchant à sa fm, le
tonneau est presque vide; le vin qu'on en soutire, acquiert alors un goût
plus prononcé en raison de son contact plus immédiat avec la lie.
22, Plus. — Comme s'il était préférable, plus probant. L'éd. de 88 porte :
comme s'il estait plus noble.
M, Lybie. — Diogène Laerce, Pyrrhus, IV, 81. — Athénée parle également
d'un certain Magon, de Carthage, qui trois fois avait traversé ce désert,
vivant uniquement de farine et sans boire.
634,
1, Lisbonne. — La distance entre ces deux villes est d'environ 650 kil. —
Le gentilhomme en question était le marquis de Pisani, ambassadeur de
France en Espagne, puis à Rome.
10, Tabut. — Vacarme.
11, Seneque. — Dans sa Lettre 56*.
18, Socrates. — Diogène Laerce, II, 36.
21, L'eau. — Des norias. Ces appareils composés jadis de pots en terre,
aujourd'hui de godets articulés, formant dans l'un et l'autre cas une
chaîne sans fin, montée sur une roue que meut un manège actionné
le plus souvent par un cheval, sont employés en grand nombre, de tout
temps et avec plus ou moins de perfectionnements, dans le midi de
l'Europe.
23, Seneque. — Epist. 108.
24, Sextius. — 11 estimait qu'il existe assez d'aliments pour l'homme, sans
qu'il se nourrisse d'êtres vivants qu'il tue à cet effet, ce qui développe en
lui son penchant à la cruauté; en outre, selon lui, la variété des mets
serait contraire à la santé. — Ce même Sextius avait refusé la dignité de
sénateur que César lui offrait, disant que ce qui se donnait ainsi, pouvait
de même se retirer.
29, Loudiers, — Couvertures ou matelas suivant leur épaisseur, constitués
par une enveloppe remplie de laine, de bourre, de crin, parfois de duvet
et piquée, servant à garnir les lits.
29, Enîondrent. — Qui enfoncent sous le poids du corps.
Fc.710 ESSAIS DE MONTAIGNE.
636,
2, Voluptez.
« Les gueux, les gueux
Sont les gens heureux. » Béranger.
« Car en quelque façon les malheurs sont propices,
Et les gueux, en gueusant, trouvent mille délices. • Béranger.
3, Politiques. — Les gueux, nom générique donné à l'ensemble des misé-
rables, infirmes, mendiants, voleurs et tous autres composant les bas-
fonds de la Société ou en rupture de ban avec elle, formaient jadis à
Paris une véritable corporation, qui avait une hiérarchie véritable. Au
xvu* siècle, leur repaire principal, appelé la cour des Miracles, était
établi près de l'église S.-Eustache; les rues de la Grande-Truanderie , de
Vide-Gousset lui doivent leurs noms; c'était un quartier formé d'un
dédale de ruelles infectes et tortueuses où gi-ouillait pêle-mêle une popu-
lation hétéroclite et où de fait régnait le droit d'asile, un peu par tolé-
rance, un peu par impuissance; le guet n'y apparaissait jamais qu'à con-
trecœur et presque toujours ses recherches étaient vaines; un roi électif
y gouvernait; cela dura des siècles. En 1656 le nombre de ces individus
s'élevait à 40.000 ; quand on se décida à mettre fin à cet état de choses,
les infirmes furent recueillis à l'hôpital général qui venait d'être achevé,
et les autres, de gré ou de force, durent se disperser. — En l'an de grâce
1907 nous en sommes à peu près revenus, à Paris, à ce qui s'y passait il y
a trois siècles : les Gueux sont devenus les Apaches, comme ils se sont
baptisés eux-mêmes; comme eux ils ont une organisation, forment des
bandes qui ont des chefs auxquels ils obéissent aveuglément; pour eux la
vie du prochain ne compte pas ; la nuit, ils sont les maîtres de Paris et de
sa banlieue, sans pour cela être toujours inactifs de jour. La police re-
doute de se commettre avec eux et les évite autant qu'elle peut le faire
décemment; le parquet les relâche le plus souvent, quand on n'a pu faire
autrement que de les arrêter, et les tribunaux, quand par extraordinaire
ils ont à les juger, se montrent à leur égard d'une faiblesse qui tient en
partie à des raisons budgétaires et n'a d'égale que le peu de rigueur des
moyens de répression que nos lois édictent contre les malfaiteurs et qu'on
a chaque jour tendance à rendre plus anodins, alors que déjà ils sont sans
efficacité sur eux.
5, Sages. — Pythagore, dans Stobée, Serm. 29. Cette maxime est ainsi
formulée dans Plutarque , De l'Exil, 7 : « Choisis la voie qui est la
meilleure, l'accoutumance te la rendra facile et plaisante. »
26, Pbilopœmen. — Ou plutôt, « comme on disait à Philopœmen ». Plu-
tarque, Phil., I.
34, lour. — C-à-d. à la belle étoile, à l'air du temps, comme il se dit en
style familier.
638,
11, Marius. — Plutarque, Comment il faut refréner la colère, 13.
15, Transparante. — On voit communément des gens auxquels il répugne
de boire du lait dans des récipients à parois transparentes, des verres par
exemple; pour qu'ils soient à l'aise, il faut qu'ils le boivent dans des tasses
ou des bols. Nombre d'autres ne peuvent souffrir la vaisselle en métal,
aussi bien la vaisselle plate que celle en étain, et toutes deux ont à peu
près disparu, celle-ci devant la faïence, celle-là devant la porcelaine : affaire
de goût autant que de prix.
21, Serein. — Vapeur humide et froide qui se dépose, en été, après le
coucher du soleil.
33, Sentiment. — Non pas tant son opinion que sa sensation.
34, Imagination. — C.-à-d. : Quoi! serait-il donc vrai que le doute même
et le soin que nous mettons à nous enquérir de ce qui est vrai ou ne l'est
pas, frappe notre imagination, et... — L'éd. de 88 port. : inquisition de
NOTES. LIV. III, CH. XIII. VOL. III, PAG. 638. Fc.71l
l'imagination nous frappe, au lieu de : « l'inquisition (la recherche) frappe
nostre imagination ».
37, Chartre. — Se sont mis à des régimes particuliers. — D'autres tradui-
sent : sont tombés dans le marasme; chartre désignant jadis, paraît-il,
une maladie de langueur amenant le dépérissement.
640,
3, Haut mal. — César, au dire de Plutarque, César, 5, était sujet à des
attaques d'épilepsie, dont il avait ressenti les premiers accès en Espagne,
alors qu'il y était comme préteur.
7, Aussi. — Add. de 88 : les autres ont pour leur part la discrétion et la
suffisance, moy Vingenuité et la liberté.
8, Obscure. — Var. de 88 : cachée.
34, Est. — Les premiers mots : An viuere tanti est, ne se trouvent pas dans
le texte de Pseudo-Gallus.
642,
10, Plaisir. — Voltaire a dit dans le même sens :
« Et puisqu'il faut que nous soyons damnés,
Damnons-nous donc pour des fautes aimables. •
28, Vices. — Ovide se vante même de quelque chose de plus.
30, Ans. — En quel âge tendre; combien j'étais jeune encore, quand...
31, Rencontre. — Ce fut bien un hasard.
33, Qaiartilla. — Pétrone, 25.
644,
5, Résolue. — Si nettement fondé sur des principes précis et déterminés.
7, Fernel. — Commença par s'adonner aux mathématiques et à l'astro-
nomie; se livra ensuite à la médecine et acquit une telle célébrité que
Henri II lui donna le titre de son premier médecin; a écrit de nombreux
ouvrages qui réunissent l'élégance du style et la solidité de la doctrine.
8, L'Escale. — Prétendait descendre de la famille délia Scala, d'où le nom
qu'il prit. La mode étant alors que tout savant se respectant, donnât à son
nom un air latin ou grec. Après avoir beaucoup voyagé, il se fixa en
France; fut, comme médecin, d'une science très réelle; visait au i-enom
d'homme universel et elTectivement savait de tout et a beaucoup écrit en
tous genres, mais c'est principalement comme grammairien qu'il mérite
sa célébrité.
23, Diuertir. — Que je m'écarte un moment de mon sujet.
33, Quelqu'vn. — Carnéade. Diogène Laerce, Vie de ce philosophe. IV, 63.
646,
7, Desmarcbe. — Se recule, se retire; en latin pedem referre, porter le pied
en arrière.
13, Jours. — Et leur durée déterminée.
21, Tenaces. — L'éd. de 88 port. : tenants.
25, Cul. — L'éd. de 88 dit plus décemment coslé.
25, Vague. — Var. de 88 : patron libre, au lieu de « mirouer vague ».
648,
11, Platon. — République, III.
13, Imbecille. — Affaibli par l'âge.
17, Sçauroit. -- Add. de 88 : plus.
32, Ctesiphon. — Plutarque, Comment il faut refréner la colère, 8.
32, Faire. — Lutter, se battre.
34, Auantageux. — Ces gens -là, les médecins, sont hautains, impérieux,
altiers.
37, Troigne. — Var. de 88 : contenance; le changement n'est pas flatteur.
6S0,
3, Pipper. — Et tromper, pour qui le peut.
20, Eringium. — Appelé aussi « panicaut » ou « chardon roland •; plante
dont la racine est apéritive.
Fc.712 ESSAIS DE MONTAIGNE.
20, Herbe du Turc. — Ou - turquette », nom vulgaire de la herniaire,
plante astringente à laquelle on attribuait la propriété de guérir la hernie.
25, Profluuion. — Écoulement ; du latin profluvium, qui a même significa-
tion.
29, Dit-il. — Dit mon esprit.
36, Ainsin. — Qui, d'une manière ou d'une autre.
652,
2, Discours. — Ta raison.
11, Pauses. — Plaisantant, riant de temps en temps.
11, Gens. — Var. de 88 : raillant à pauses auec les dames, au lieu de :
« bouffonant... tes gens ».
654,
5, Paume. — Tu lui donnes la main...
9, Inopinément. — C.-à-d. on t'aura, avec ta sécurité et ta confiance, fait
passer un matin de vie à trépas. — Passer l'eau, c'est passer dans l'autre
monde, par allusion aux idées anciennement en cours chez les Grecs que
les âmes des morts, pour se rendre au.x Enfers, passaient l'Achéron, trans-
portées dans la barque à Caron. V. N. III, 516 : Acheron.
18, Sybillines. — Une vieille femme proposa un jour à Tarquin le Superbe
(vers l'an 510) d'acheter neuf livres qu'elle lui présentait ; rebuté par le
prix qu'elle en voulait, il refusa. Elle en jeta trois au feu, et renouvela
son offre de vente, demandant le même prix des six autres; nouveau re-
fus, à la suite duquel elle en jeta à nouveau trois au feu. Tarquin lui
demanda alors ce qu'elle voulait de ceux qui lui restaient : « Autant que
des neuf, » répondit-elle. Sa fermeté fit juger à Tarquin que ces livres
devaient être d'une e.xtréme importance et il en donna le prix exigé.
C'étaient les livres sibyllins contenant l'avenir de Rome qu'était venue lui
offrir la sibylle de Cumes. Ces livres furent déposés au Capitole qui venait
d'être achevé ; ils étaient consultés dans les grandes circonstances et brû-
lèrent en 62, lors de l'incendie de cet édifice: on chercha aussitôt à les
reconstituer, mais le peu d'authenticité d'un grand nombre des prédic-
tions ainsi recueillies firent qu'ils tombèrent dans le discrédit.
20, Expérience. — C'est le recueil des feuillets composant son journal de
voyage en 1580-81 ; on s'aperçoit aisément en les parcourant qu'il ne les
avait dictés ou écrits que pour lui-même.
28, Vn aage. — Var. de 88 : quarante ans.
29, Vn autre. — Var. de 88 : quatorze.
656,
8, Contrecarre. — Opposition.
9, Vertu. — Ce sentiment est expressément combattu par Plutarque, dans
le traité Des communes conceptions contre les Stoïques, 10 et suivants.
16, Tours. — Si bien que tour à tour...
18, Fable. — Platon, Phédon.
658,
24, Coulpe. — C'est sa faute.
35, Cicero. — Comme Cicéron tâche d'adoucir et d'amuser le mal de sa
vieillesse (dans son hvre De Senectute), j'essaie d'endormir...
660,
1, Espreignent. — Expriment, tirent, font sortir.
20, Corps. — Sans que le corps souffre réellement.
40, Heures. — A cette époque, on dînait ordinairement à onze heures du
matin et soupait à six heures du soir. V. N. III, 432 : Partir.
662,
2, Platon. — DiOGÈNE Laerce, Platon, III, 39; Platon, Lois, VII, 13.
6, Scipion. — Plutarque, S'il est requis qu'un prince soit savant, 6.
30, Pays. — La profession militaire est aujourd'hui ce qu'elle était du tenips
de Montaigne, ce qu'elle a été et ce qu'elle sera de tous temps, la plus belle
et la plus noble de toutes, parce que son idéal est la gloire et l'intérêt de
la patrie, sa vertu essentielle l'abnégation et qu'elle a pour base la discipline •
NOTES. LIV. m, CH. XIII. VOL. III, PAG. 662. Fc.7i3
Quoique exclue avec juste raison de la politique et, quoi qu'en disent ses
ennemis, n'en taisant pas, quand le Gouvernement lui-même ne l'y incite
pas, celle-ci n'en réagit pas moins sur elle, parce qu'elle émane de la Nation,
qu'elle participe de sa vie et ressent le contre-coup des passions qui l'agitent.
En ce moment où les théories les plus subversives ont accès dans les sphères
gouvernementales et vont gagnant de jour en jour, l'armée, il faut en con-
venir, traverse une phase difficile; ses ennemis, et elle n'en manque pas :
les intellectuels qui la jalousent, les gens de désordre auxquels elle fait
obstacle, jusqu'aux pouvoirs publics qui tout en la cajolant, l'exaltant,
l'ont en suspicion, s'efforcent à qui mieux mieux de l'affaiblir; seul le pays,
sans arrière-pensée, lui demeure sincèrement attaché. Mais le mal fait son
œuvre, l'antimilitarisme étale ses idées au grand jour et fait de la propa-
gande, on y fomente les rivalités, favorise l'intrigue, ses institutions les plus
tutélaires sont battues en brèche, ses garanties foulées aux pieds, on la
dégrade en en usant pour des œuvres de police, on en abuse en la contrai-
gnant à subir sans riposter les injures et les coups de ceux contre lesquels
on l'emploie, on laisse dire à un ancien ministre sorti de ses rangs, qui
cinq ans durant a travaillé à sa désorganisation, qu'elle est en révolte perma-
nente contre les idées du jour, si bien qu'on en est arrivé à ce que les
caractères y sont diminués au point que ce système d'illégalité et d'arbi-
traire dicté par la haine des uns, la crainte et la faiblesse des autres, ne
soulève que de bien faibles protestations émanant de ceux qui en sont
directement atteints ; quant à ses grands chefs, qui pourraient être frappés
mais dont la voix serait entendue et dont le devoir serait de parler, à peu
d'exceptions près, par peur de se compromettre, ils se taisent et se bornent
à gémir.
36, Honneur. — Adcf. de 88 : et noblesse.
664,
9, Asseure. — Donne de l'assurance, enhardit.
13, Galleux. — La gale était alors une affection très répandue, dont la cause
était inconnue et dont on ne guérissait pas aisément. Aujourd'hui elle se
contracte beaucoup moins; on sait qu'elle est, due à un animalcule qui
s'introduit sous l'épiderme, y chemine et y pullule, et en vingt-quatre heures
on s'en débarrasse.
21, Pruantes. — Sujettes à des démangeaisons; expression gasconne.
21, Sens. — Add. de 88 : corporels.
24, L'aage. — Var. de l'ex. de Bord. : tantost de six ans, le cinquantième.
28, leunesse. — Il y a peu à dire de ma santé au temps de ma jeunesse qui
n'a guère connu la douleur. — Indolence est employé ici conformément à
son étymologie (m privatif, et dolor, douleur); son sens aujourd'hui est
tout, autre.
666,
12, Température. — Modération (de son âme).
16, Non. — .Von seulement, comme le porte l'éd. de 88.
21, Tient. — Add. de 88 : aux talons.
22, Guttur. — Le goitre est une tumeur spongieuse, susceptible de devenir
très volumineuse, qui vient à la gorge; elle est très fréquente dans certaines
vallées des Alpes.
35, Platon. — Dans le Timée.
30, Histoires. — Hérodote, IV, 181; Pomponius Mei.a, I, 8.
668,
3, Propos. — CicÉRON, De Divin., 11, 58.
6, Songeant. — Galien dit qu'ayant ouï dire qu'il arrivait à certaines gens
de marcher tout endormis, il n'en avait rien cru, jusqu'à ce qu'ayant eu à
voyager à pied toute une nuit, il fut forcé de le croire, par l'expérience
qu'il en fit lui-même. — Le fait est fréquent chez le soldat, dans les
marches de nuit.
7, Maison. — Diouène Laerce, Pyrrhon, IX, 82.
Fc.7i4 ESSAIS DE MOiNTAlGiNE.
11, Fauorinus. — Ou plutôt ce qu'il condamne, ainsi qu'il résulte d'un
passage d'AuLU-GELLE, Nuits ait., XV, 8.
30. Faict. — C.-à-d. ne pas faire bonne chère avec des mets dont les autres
se délectent...
670,
1, Galères. — Ce parent devait être vraisemblablement officier du corps des
galères du roi, lequel, en 1748, a été réuni à celui de la marine.
5, Village. — Au village de Papessus, agglomération de quelques maisons
à environ 3 kil. N. du manoir paternel, suivant une tradition locale.
19, Attacher. — C'est probablement en mémoire de ce parrain inconnu qu'il
reçut le prénom de Michel; c'était parfois l'usage de donner des gens de
peu pour parrains à de jeunes nobles, afin de leur enseigner à ne pas
rougir plus tard de leurs inférieurs. Un arrière-petit-fils de Montaigne,
Charles-François de Lur-Saluces, fut, comme son bisaïeul, tenu sur les fonts
baptismaux par des pauvi-es; il en a été de même un siècle plus tard de
Montaigne en Guyenne, comme de Buffon en Bourgogne, qui eurent pour
parrains des mendiants de la paroisse, dont les prénoms leur furent donnés,
. « afin que toute leur vie ils se rappelassent que les pauvres sont frères ».
BONNEFON.
25, Cbelonis. — Léonidas II, son père, roi de Sparte concurremment avec
Agis III, était poursuivi et contraint de quitter Sparte et remplacé sur le
trône par son gendre Cléombrote parce qu'il s'opposait aux réformes entre-
prises par Agis pour mettre fin aux abus qui s'y étaient introduits et la
ramener à l'austérité de Lycurgue (243); au bout d'un certain temps,
les partisans de Léonidas reprirent le dessus (239), Agis fut mis à mort
et Cléombrote mari de Chélonis détrôné dut à son tour prendre le chemin
de l'exil. — Le récit des faits de cette généreuse princesse est à lire dans
Plutarque, Agis et Cléomènes, 5.
34, Flaminius. — Dans sa Vie par Plutarque, c. 1.
36, Pyrrhus. — Dans sa Vie par Plutarque, c. 2.
672,
5, Auguste. — Dans sa Vie par Suétone, c. 74.
674,
12, Naturelles. — C.-à-d. à l'âge auquel je suis arrivé, ma mort est juste et
naturelle; et je ne puis désormais ni demander ni espérer de la destinée
une prolongation de vie, qui serait une faveur contraire aux règles et au
cours ordinaire de la nature.
15, SolOD. — Hérodote, I, 32.
18, Passé. — C'est Vaurea mediocritas (l'excellente médiocrité) d'HoRACE, tant
prônée avant lui, dans l'antiquité par Cléobule, un des sept sages de la
Grèce, comme une des plus sûres conditions d'une vie heureuse. Diogène
Laerce, I, 93.
• si le bonheur nous est permis.
Il n'est point sous le chaume, il n'est point sur le trône;
Voulons-nous l'obtenir, amis?
La « médiocrité • le donne. »
C'est également Cléobule qui recommandait de la mesure en tout : « Faites,
disait-ii encore, du bien à vos amis pour vous les attacher davantage, et à
vos ennemis pour vous en faire des amis. »
23, Platon. — Dans le Timée.
28, Heure. — C.-à-d. le déclin de nos facultés anticipe sur le moment où
la mort doit arriver, et augmente à mesure que nous avançons vers l'heure
fatale.
33, Tracasser. — Var. de 88 : traîner.
676,
6, Refors. — Raifort. V. N. III, 36.
10, Blanc. — V. N. III, 64 : Clairet. — Sur ce point, Montaigne s'en remettait
NOTES. MV. III, CH. XIII. VOL. III, PAG. 676. Fc.Tio
du reste, le cas échéant, aux médecins : • Ils pensent, dit-il (liv. II,
ch. XXXVII, III, 64), m'ordonner le blanc ou le clairet. ■•
20, Abondance. — Sénèque, Epist. 18.
25, Liqueur. — Vénus et Bacchus.
26, Propre. — C.-à-d. ou parce que je n'avais pour' manger avec moi, au-
cune personne dont la société me convînt.
28, Mange. — Sénkque, Epist. 91.
28, Cbilon. — Plutarque, Banquet des Sept Sages, 3.
678,
7, leusne. — Par loix de jeusne, il faut, ce nous semble, entendre ici les
régimes de toutes sortes que les médecins nous conseillent dans le cas de
telles ou telles affections et qui tous aboutissent à des interdictions qu'ils
nous imposent. D'autres ont pensé qu'il s'agissait simplement du jeune que
l'Église prescrit à ses fidèles et en concluent que son observation, d'après
ce qui suit, aurait été chez Jlontaigne beaucoup plus une question hygiénique
qu'une mortification; c'est bien, en effet, l'idée qui, à l'origine, le fit pres-
crire par la religion; et il faut reconnaître qu'aujourd'hui avec tous les
tempéraments qu'elle y a apportés pour suivre nos estomacs devenus plus
exigeants en raison de la vie plus intensive que nous menons, d'une débilité
qui va croissant parsuite de la sophistication de toutes denrées alimen-
taires et de la place déplus en plus grande qu'un accroissement dans le bien-
être général a fait occuper à la viande dans notre alimentation, le jeûne
n'est plus guère, dans l'Eglise catholique, qu'une marque d'obéissance qu'elle
demande à ses adhérents.
18, Galbe. — De parure, d'apparat.
680,
4, Auguste. — Dans sa Vie par Suétone, c. 77.
5, Democritus. — Pline, Hisl. nat., XXVllI, 6. — Le texte latin porte Démé-
trius; Montaigne a mis Democritus, probablement parce qu'il a relevé le
fait dans Erasme qui a commis la même erreur.
7, Demysetiers. — Le demi-setier, mesure de capacité ancienne, représen-
tait environ un quart de litre. Ce n'était pas, comme son nom semble l'in-
diquer, la moitié du seller; celui-ci valait près de huit litres. Trois demi-
setiers faisaient donc trois quarts de litre, c'est à peu près la contenance
de la bouteille de Bordeaux.
13, Sommelerie. — Pièce où dans une maison sont en dépôt les provisions
de consommation immédiate, et où se font les opérations qu'elles comportent.
15, Vin. — D'eau, aj. l'éd. de 88. — D'autres attribuent cet usage à Amphic-
tyon, successeur de Cranaiis. Athénée, II, 2.
24, Ditficultez. — Var. de 88 : aspretez.
35, Soulagé. — C'est la raison qui fait que, de nos jours, soit pour écrire,
soit pour l'impression, on emploie fréquemment des papiers très légèrement
teintés, de couleur crème plutôt que blancs.
35, Présent. — Montaigne avait alors cinquante-quatre ans, ainsi qu'il l'in-
dique ici même, dans l'éd. de 88.
682,
5, Coïement. — Tranquillement. L'adjectif coi, au masculin, est encore en
usage dans le style familier : « Il est resté coi. »
16, Certains. — Immobiles.
18, Rassis. — Add. de 88 : e/ pour la gesticulation, ne me trouue guiere sans
baguette à la main, soit à chenal ou à pied.
18, Chrysippus. — Diogèxe Laerce, VII, 183.
27, Diogenes. — Plutarque, Que la vertu se peut enseigner, 2.
36, Platon. — Dans le dialogue intitulé Protagoras.
684,
1, Conuiue. — S.-ent. : pour qu'un repas ait lieu dans les meilleures condi-
tions. Aulu-Gelle, XIII, II.
10, Forclost. — M'en exclut.
13, Manie. — Qui vais toujours terre à terre. _
Fc.716 ESSAIS DE MONTAIGNE.
14, Culture. — Add. de 88 : et plaisir.
16, Xerxes. — Cicéron, Tusc, V, 7.
35, Critolaûs. — Ce philosophe estimait que si dans l'un des plateaux d'une
balance on mettait les biens de l'âme, dans l'autre les biens du corps et,
en général, tous les biens matériels, les premiers l'emporteraient, même si
on ajoutait aux autres la terre et les mers. Cicéron, Tusc, V, 17. — Mon-
taigne en fait ici application à un usage fort différent.
686,
4, Cyrenaïques. — Diocène Laerce, II, 90.
6, Aristote. — Morale à Nicomaque, II, 7.
12, Bacchus. — Add. de 88 : Ces humeurs vanleuses se peuuent forger quelque
contenlement, car que ne peut sur nous la fanlasie? mais sagesse, elles n'en
tiennent tache. le hay...
13, Cercle. — La quadrature du cercle, ou transformation d'un cercle eu
un carré de surface équi:valente, est un problème insoluble.
688,
2, Vescu. — C'est le mot de La Fayette à quelqu'un lui demandant ce qu'il
avait fait pendant la Terreur, durant laquelle, membre de la Convention,
il s'était effacé de son mieux et avait réussi à passer inaperçu : « .J'ai
vécu, » répondit-il.
4, Si. — S.-ent. : Mais, me direz-vous encore, si...
14, Adminicules. — C.-à-d. n'en sont que d'infimes accessoires et super-
fétations. Appendicules et adminicules sont deux mots latins que l'on
rencontre, avec le sens ici indiqué, dans Cicéron et autres, et que I\Ion-
taigne a francisés.
16, Deliure. — Libre, dégagé de tout autre soin.
17, Brutus. — Plutarque, M. Brutus, 1.
19, Breueter. — Annoter, prendre des notes.
26, Certes. — Que ce soit en plaisantant ou sérieusement qu'on dise...
26, Théologal. — Jadis, ecclésiastiques et moines passaient pour faire bonne
chère, et, la malice populaire tenant comme vin de choix celui qu'ils bu-
vaient, qualifiait de vin théologal celui qui sortait de l'ordinaire. L'épithète
de sorbonique ne fait que renforcer cette même idée. La Sorbonne, simple
établissement d'éducation ecclésiastique dans le principe , était à cette
époque, et depuis près de trois siècles, devenue une faculté de théologie,
dont les doctrines faisaient loi en matière de foi.
27, Sorbonique. — Var. de 88 : doctoral.
31, Condiment. — Assaisonnement. Le mot est encore dans la langue et
vient du latin condimentum, qui a le même sens; on le trouve ainsi employé
dans Cicéron : « Socrate disait que la faim est l'assaisonnement (condi-
mentum) de tous mets, et la soif celui de toute boisson, quels qu'ils soient. »
35, Baccbus. — Add. de l'ex. de Bord. : Illis est indulgendum, non seruien-
. dum (il faut le leur pardonner, et ne pas leur en faire un grief).
37, Vie. — V. N. I, 616 : Virtus.
690,
5, Luy. — Épaminondas pouvait d'autant mieux être porté à en agir ainsi
que Cornélius Népos, Épaminondas, 2, le représente comme ayant si bien
appris à chanter, à danser et à sonner (du latin sonare, jouer des instru-
ments; on dit encore « sonner du cor •), qu'aucun Thébain ne lui était
supérieur dans ces différents exercices. V. N. II, 18 : Epaminondas.
5, L'ayeul. — II y a là confusion entre Scipion, le premier Africain, le
vainqueur de Zama, et son petit-fils adoptif Scipion Émilien, le second
Africain, qui prit Carthage; sur ce point, l'éd. de 88 présente la var. sui-
vante : dit ieune Scipion {tout compté, le premier homme des Romains), au
lieu de : « de Scipion... céleste ». Le premier a vaincu Annibal et ce qui a
trait à la Sicile se rapporte à lui ; mais la liaison avec Laîlius et la colla-
boration à des comédies s'appliquent nettement au second. Toutefois, il
est à observer que tous deux se sont illustrés au même degré, ont été
victimes de l'envie, ont fini dans un exil plus ou moins volontaire; qu'il
NOTES. LIV. 111, CH. XIII. VOL. 111, PAG. 090. Fc.TlT
y a eu deux Lielius, comme il y a eu deux Scipion, qui respectivement
les ont suivis chacun sur le théâtre de leur gloire et leur sont restés fidèles
dans l'adversité; qu'enfin si Térence fut le familier de Scipion ÉmiHen,
Ennius avait été celui de son aïeul.
7, Céleste. — Aulu-Gelle, Vil, 1.
8, Baguenaudant. — Musant, jouant. — Baguenauder semble venir de
baguenaudier, nom d'un arbuste de nos contrées dont le fruit est enve-
loppé d'une membrane enflée comme une vessie que les enfants s'amusent
à faire claquer. Ce nom, mais dérivant du verbe, est aussi celui d'un jeu
de bagues, sorte de jeu de patience assez répandu.
9, Coquilles. — Cicéron, De Oral., II, 6, qui le dit du premier Scipion, mais
. non du second.
10, Cornichon va deuant. — On a beaucoup ergoté sur ce que ce jeu pouvait
être. Les uns estimèrent que c'était faire des ricocliets sur la mer avec
les galets de la plage; d'autres, aller à qui ira le plus vite, tout en ramas-
sant, chemin faisant, quelque chose à terre; ce serait encore le jeu de
boules où on en lance tout d'abord une plus petite pour servir de but; ou
enfin le jeu d'enfants que nous connaissons sous le nom de sabot et que
l'on appelle aussi corniche.
10, Laelius. — « Quand ils pouvaient s'échapper de Rome, Lœlius avait
coutume d'accompagner Scipion à la campagne et là, comme des captifs
ayant rompu leurs chaînes, tous deux redevenaient enfants...; souvent
ils ramassaient des coquillages et des galets sur les rivages de Gaète et de
Laurente, et, libres de toute préoccupation, s'amusaient aux jeux les plus
puérils. » CicÉHON. — « Quand, loin du monde et des bruyantes scènes,
la vertu de Scipion et la douce sagesse de Laslius s'étaient réfugiées à la
campagne, tous deux, dénouant leur ceinture, jouaient avec Lucile et
s'amusaient avec lui comme des enfants, en attendant que les légumes
du souper fussent cuits. » Horace. — « Scipion, dit Sénèque, pratiquait
aussi la danse à la mode des héros anciens, qui s'y adonnaient de telle
sorte qu'ils pouvaient être vus sans que cela portât atteinte à leur consi-
dération. »
12, Comédies. — Ces comédies sont celles de Térence auxquelles Scipion
Émilien et Lœlius eurent beaucoup de part, au dire de Suétone dans la
Vie de ce poète, de quoi Montaigne était si fort persuadé qu'il dit (liv. 1,
39, 1, 432) : « et me feroit on desplaisir de me desloger de cette créance ».
13, Hommes. — Add. de 88 : le suis extrêmement despit dequoy le plus beau
couple de vies qui fut dans Plularque, de ces deux grands hommes (Épami-
nondas et Scipion premier Africain), se rencontre des premiers à estre
perdu.
16, Rome. — Allusion à l'hostilité intransigeante que durant sa vie entière
Caton l'Ancien et autres (V. les discours de Q. Fabius, Tite-Live, XXIX, 19)
témoignèrent au premier Scipion. Montaigne commet encore ici une mé-
prise; ce même historien ne dit pas que Scipion, en Sicile, visitait des
écoles et écoutait des philosophes, mais qu'il allait se promener au Gym-
nasium, lieu destiné aux exercices physiques, auxquels parfois il prenait
part.
18, Baller. — Danser.
27, Recourir. — Secourir.
30, Tout. — V. N. III, 544 : Theramener.
32, Abstinence. — Cette beauté, c'est Alcibiade au début de leur connais-
sance, d'après le propre dire de celui-ci; il y avait entre eux une diffé-
rence d'âge d'une vingtaine d'années.
39, Boire à lut. — Bien boire. Expression venue de l'Allemagne : boire
all-aufs [ail signifiant tout, complètement, et aufs, au mieux); d'où on a
fait allus, puis à lut, voulant dire : « Continuer à boire durant tout le
repas, sans cesser de faire raison à tous ceux qui vous provoquent » ;
c.-à-d. vider chaque fois son verre jusqu'à la dernière goutte, aussi sou-
vent qu'on vous le remplit.
Fc.718 ESSAIS DE MONTAIGNE.
692.
1. Grâce. — Socrate ne rougissait pas de jouer avec les enfants, Sénèque.
• V. N. III, 26 : Socrates.
4, Perfection. — Tout ce que dit ici Montaigne, concernant Socrate, est
tiré presque mot pour mot du Banquet de Platon, II, 16, dialogue dans
lequel ce philosophe introduit Alcibiade qui fait de son maître l'éloge
le plus beau et le plus délicat; c'est le chef-d'œuvre de Platon, et dans
ce discours d'Alcibiade, il y a un art et un goût infinis. Naigeos.
7, Ply. — C.-à-d. des exemples faibles et défectueux, à peine bons à suivre
sous un rapport.
18, Mespriser. — Var. de 88 : hayr et desdaigner.
25, Volupté. — •• Les plaisirs sont amers, d'abord qu'on en abuse. »
M"" Deshol'lières.
29, Exemplaire. — Diogène Laerce, VIll, 88. — Dans sa Morale à Nico-
maque, X, 2, Aristote réfute cette théorie d'Eudoxe sur le plaisir en quoi
il faisait consister le souverain bien, et dit positivement que lui-même se
distinguait par une tempérance extraordinaire. — Eudoxe, qui fut l'ami
de Platon, était du reste un philosophe d'éminente sagesse; astronome
renommé de son temps, il avait apprécié l'année solaire à 365 jours un
quart, ce qui fut adopté plus tard, sous César, par Sosigène pour l'établis-
sement du calendrier Julien ; géomètre, on lui doit une théorie des lignes
courbes; il était aussi médecin.
694,
I, Platon. — Lois, 1.
4, Volupté. — Des attraits excessifs et enchanteurs de la volupté. — Blan-
dices vient du mot latin blanditiœ (caresses, flatteries, attraits) que Mon-
taigne a francisé en en changeant la terminaison.
7, Escbarsement. — Modérément. V. N. I, 446.
10, Elle. — Elles se subordonnent à elle, c'est là la vertu.
19, Decours. — Var. de 88 : sa décadence, au lieu de : « son... decours ».
23, Compose. — Je me prépare...
25, Moleste. — Fâcheuse, du latin molestus, qui a même sens. Comme
adjectif, ce mot n'est pas d'usage; au contraire le verbe molester, qui a
même étymologie, est d'emploi courant.
34, Pleine. — Moncrif a rendu ainsi, en vers, cette même idée :
• Plus inconstant que l'onde et le nuage,
Le temps s'enfuit; pourquoi le regretter?
Malgré la pente volage
Qui l'oblige à nous quitter.
C'est l'arrêter, d'en faire usage.
Goûtons mille douceurs;
Et si la vie est un passage.
Sur ce passage au moins semons les fleurs. »
696.
1, Condignes. — Absolument mérités. Du latin condignus, môme sens que
dignus mais plus affirmatif encore.
6, Moy. — Je délibère avec moi-même, je raisonne de mon plaisir; je ne
glisse pas dessus, j'approfondis.
9, Sens. — Je ne permets pas à mes sens de s'en emparer exclusivement.
10, Engager. — Var. de 88 : enyurer.
23, Propose. — Je me représente...
42, A mesme. — A mesure...
44, Trauailler. — Arrien, De exped. Alex., V, 26.
47, Dire. — Qu'elle puisse ne pas éprouver...
698,
4, Maintenoit. — Diogène Laerce, I, 114. — Epiménide, d'après la légende,
recevait des Nymphes une nourriture particulière qu'il conservait dans
un pied de bœuf; il ne la prenait que par parcelles et on ne le vit jamais
NOTES. LIV. III, CH. XIII. VOL. III, PAG. 698. Pc.719
manger. On a dit aussi qu'il avait dormi cinquante ans dans une caverne ;
ce prétendu sommeil aurait été une absence de quelque durée durant
laquelle, errant de côté et d'autre, il était occupé à recueillir des simples.
24, Suyuans. — Je voudrais que les sectateurs d'une telle philosophie
n'eussent non plus de droit...
30, Fantastique. — Il n'est pas visionnaire à ce point.
700,
6, Tousiours. — Cet ancien paraît être Simonide qui dit que <■ les dieux
composent toujours avec la nécessité ». De son côté, Pittacùs a dit aussi :
« Les dieux eux-mêmes ne vont pas à rencontre de la nécessité. » Et Euri-
pide : « Le mortel qui cède à la nécessité est sage et connaît bien les
dieux. »
14, Diuina. — Cette proposition de S. Augustin, De Civ. Dei, XIV, 5, vise,
pour les condamner, les hérésies des Manichéens (III' s.), qui attribuaient
la création à deux principes, l'un essentiellement bon, l'autre essentielle-
ment mauvais, et tenaient le corps et la chair comme procédant de ce
. dernier. ,
15, Par acquit. — Var. de 88 : farcesque.
16, Condition. — Add. de 88 : naturelle.
19, Peregrin. — Et comme elle a plus de poids en une langue étrangère,
nous insisterons sur ce point, en usant du latin.
29, Capirotade. — On dit aujourd'hui capilotade; au propre, ragoût composé
de viande rôtie coupée en morceaux et assaisonnée d'ingrédients divers.
30, Arcbimedes. — Archimède était au bain quand il découvrit ce principe
de physique qui porte son nom : « Tout corps plongé dans un fluide,
perd une partie de son poids égale au volume de ce fluide qu'il déplace »;
dans sa joie, il en sortit précipitamment et se mit à courir tout nu dans
les rues de Syracuse, criant : Eupexa, eûpexa! j'ai trouvé, j'ai trouvé! ob-
servation qui le mit à même de déterminer la quantité d'alliage intro-
duite en fraude dans une couronne qu'Hiéron avait commandée en or
pur. Ses distractions, en une autre circonstance, lui furent plus fatales :
les Romains qui assiégeaient Syracuse dont son génie inventif contribuait
à prolonger la résistance qui durait déjà depuis trois ans, ayant enfin
pénétré par surprise dans la ville, Archimède, tout occupé de la solution
d'un problème, ne s'en aperçut pas, et tardant à répondre à un soldat qui
lui enjoignait de le suivre, celui-ci le tua, bien que l'ordre eût été donné
de l'épargner (212).
31, Marmaille. — Var. de 88 : voirie.
32, Diuertissent. — Et de pensées qui nous détournent de notre salut.
702,
2, S'attendre. — Dédaignent de prêter leur attention... (du latin atlendere);
ou de .s'appliquer, comme porte l'éd. de 1635 de M"° de Gournay.
1, Priuilege. — Add. de l'éd. de 88 : Nos esludes sont tous mondains; et
entre les mondains, les plus naturels sont les plus iustes.
6, Sousterraines. — Corrompues, infernales.
(], Esope. — Planude, Vie d'Esope.
18, De nos. — Var. de 88 : des humaines.
21, Immortalisation. — Ou plutôt sa déi/icalion, comme porte l'éd. de 88.
23, Hammon. — Quinte -Curce, VI, 9. — Jupiter Ammon avait au milieu
des sables de la Libye, près de l'oasis de Syouah, à 500 kil. du Caire, un
temple dont les oracles étaient réputés. Alexandre le Grand le visita en
332, après la conquête de l'Egypte; pour l'atteindre il marcha quatre jours
en plein désert; à son arrivée, les prêtres le saluèrent fils de Jupiter et lui
assurèrent qu'il serait invincible jusqu'au moment où il viendrait prendre
• sa place parmi les dieux; et, à une question de ceux qui l'accompagnaient,
l'oracle répondit qu'il serait agréable à Jupiter qu'ils rendissent les hon-
neurs divins à leur roi. Peut-être est-ce à cela, et aussi à ce qu'il avait pu
remarquer du culte grandiose dont les Egyptiens, plus que pas un autre
peuple, entouraient les restes de leurs rois, qu'Alexandre voulut reposer
Fc.720 ESSAIS DE MONTAICxNE.
clans le temple d'Ammon. Ptolémée Pliiladelphe, en conséquence de ses
dernières volontés, fit -transporter son corps à Memphis, d'où Ptolémée
Soter le transféra à Alexandrie où il fut placé dans un cercueil d'or. Ce
cercueil ayant été volé, fut remplacé par un cercueil de verre; c'est là que
le virent Jules César, puis Auguste qui lui mit une couronne d'or sur la
tête et le couvrit de fleurs. L'empereur Septime Sévère défendit qu'on le
montrât, et depuis on ne sait ce qu'il est devenu ; S. .Jean Chrysostome, à
la fin du iv° siècle, en parle comme ignoré de tout le monde, autrement
dit comme n'existant plus.
28, Ville. — Plutarque, Pompée, 7. — En 66, aloi's qu'il se rendait en
Asie, pour y continuer la guerre contre Mithridate. Pompée, qui n'avait
alors que vingt-neuf ans, avait déjà reçu le surnom de Grand que lui
avait décerné Sylla; il avait guerroyé en Italie, dans les Gaules, en Sicile,
en Espagne contre Sertorius, contre les pirates, toujours avec un égal
succès, et entre temps avait obtenu le consulat.
704,
6, Extrauagance. — Cette phrase clôt et résume la morale de Montaigne ;
morale qui n'est pas sans doute assez parfaite pour des chrétiens, mais
qu'il serait à souhaiter voir servir de guide à tous ceux qui n'ont pas le
bonheur de l'être. Elle formera toujours un bon citoyen et un honnête
homme. Elle n'est pas fondée sur l'abnégation, mais elle a pour premier
principe la bienveillance envers les autres, sans distinction de pays, de
mœurs, de croyances religieuses. Elle nous instruit à aimer le gouverne-
ment sous lequel nous vivons, à respecter les lois auxquelles nous sommes
soumis, sans mépriser le gouvernement et les lois des autres nations,
nous avertissant de ne pas croire que nous ayons seuls le dépôt de la
justice et de la vérité. Elle n'est pas héroïque, mais elle n'a rien de faible;
souvent même elle agrandit, elle transporte notre àme par la peinture
des fortes vertus de l'antiquité, par le mépris des choses mortelles et l'en-
thousiasme des grandes vérités; mais bientôt, elle nous ramène à la sim-
plicité de la vie commune, nous y fixe par un nouvel attrait et semble ne
nous avoir élevés si haut dans ses théories sublimes, que pour nous
réduire avec plus d'avantage à la facile pratique des devoirs habituels et
^des vertus ordinaires. Villemain.
7, Tendrement. — Plus doucement, plus délicatement, comme porte l'édition
de 1588.
10, Latoe. — Apollon, fils de Latone.
11, Mente. — Juvénai. résume de même ce que l'homme vraiment sage de-
mande au ciel : La santé de l'âme unie à celle du corps. Orandum est ut sit
mens sana in corpore sano.
12, Carentem. — Horace, Od., I, 31, 17. — 11 est impossible de n'être pas
frappé de l'espèce de contradiction que présentent la fin tant soit peu
épicurienne (dans le bon sens du mot) des Essais et la mort si dévotieuse
de leur auteur (V. supra, fasc. A, p. xi). — On peut dire que le souhait
emprunté à Horace par lequel Montaigne termine son livre, est le dernier
soupir du lettré; c'est le reflet mourant de l'enthousiasme de l'antiquité,
c'est la fin de la vie écrite. Dans la vie vécue, au contraire, le Montaigne
de l'apologie de Sebond reparaît, et, au point de vue religieux, il est peu
de morts plus démonstratives que celle-là. D"" Payen. — Fidèle à ses prin-
cipes, il finit comme Socrate « en se conformant aux façons et formes re-
çues autour de lui » ; sa dernière pensée fut un dernier hommage à la
religion de ses pères. Abbé Jay. — Et de fait, à tous points de vue, on
peut dans l'ensemble lui faire application de ce vers de La Fontaine :
« Rien ne trouble sa fin, c'est le soir d'un beau jour. »
FASCICULE G
GLOSSAIRE
ET
NOTE SUR LA LANGUE DE MONTAIGNE
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV. 46
NOTE SUR LA LANGUE DE MONTAIGNE
Le XVI* siècle fut pour la langue française, comme pour toutes choses, une
époque de transition, chacun écrivait un peu à sa fantaisie; Montaigne a fait de
même.
Style. — Son style est bret, concis et mouvementé. Il écrit comme il parle, en
quoi il fut un précurseur. Ce qui aussi lui est propre, c'est le choix des expres-
sions, si souvent imaginées; ce sont les locutions et mots qu'il emploie, tirés de
l'ancienne langue romane, des patois de l'époque ou forgés par lui, toujours si
parfaitement adaptés à l'idée qu'il veut rendre; et aussi ses tournures de phrase,
qui tiennent beaucoup du latin, langue dans laquelle 11 avait été élevé. Mais si, à
l'instar des meilleurs écrivains de l'antiquité, l'idée principale est toujours chez
lui exactement suivie et nettement exprimée, quand des additions ultérieures ne
sont pas encore intervenues, il ne pratique pas les longues périodes comme les
maîtres de cette époque et leurs imitateurs; ses arguments sont présentés avec
simplicité, ses déductions sont aisées, la phrase est courte et n'est pas surchargée
de propositions incidentes.
Montaigne observe généralement, dans le détail, les règles grammaticales assez
flottantes de son temps, tout en s'en écartant fréquemment au caprice de sa plume.
Les principales particularités qui à cet égard, et sans rien avoir d'absolu, se présen-
tent tant du fait de leur auteur que des errements qui alors avaient cours, et
indépendamment des fautes d'impression, sont les suivantes :
Syntaxe. — Les inversions sont fréquentes : Ainsi faisaient aucuns chirur-
giens... les opérations de leur art; — Bon est-il tousiours de les ouïr; — Mais ceci
sçais-ie par expérience.
Les pléonasmes également; surtout par le fait d'idées, de membres de phrase
jointifs, ayant une signification identique, mais parfois aussi par la répétition de
mots (noms ou adjectifs] ayant même sens; ces derniers sont notablement en
moins grand nombre dans l'éd. de 95 que dans celles qui l'ont précédée : le cher-
che à conniller et à me desrober de ce passage; — S'il arriuoit que mes humeurs
pleussenl et accordassent à quelque honnesle homme; — Estr anges et inouys; — for-
cée et tendue; — esbaudi et resioui.
Des noms, aujourd'hui masculins, sont féminins, et réciproquement : Vn dot,
vne poison. — D'autres sont des deux genres : vn art ou vue art.
Des infinitifs sont employés comme substantifs : le bien dire.
Des verbes sont mis au singulier, alors qu'ils ont plusieurs sujets, quand ces
sujets sont au singulier : La touche d'vn bon mariage et sa vraiepreuue regarde le
temps.
Certains verbes intransitifs aujourd'hui sont employés transitivement et inver-
sement : Ressembler son père ; — L'vn plainct la compagnie de sa femme.
D'autres, alors réfléchis, n'ont plus cette forme et réciproquement : Se trauail-
ler; — Nous repentons.
Les compléments indirects sont souvent unis au verbe par des prépositions au-
tres que celles que nous emploierions : Se fier de quelque chose; — Ne craindre
point à mouHr; — Si en l'aage que ie l'ai connu.
Association de compléments construits dilïéremment : plongé en l'oisiueté et
aux délices; — Labienus ne peut souffrir cette perte ny de suruiure à.
G.724 ESSAIS DE MONTAIGNE.
Adjectifs employés adverbialement : mieux sçauanl.
L'article souvent supprimé : Autant que fortune leur dure; — Comme testes fu-
rieuses.
De même la préposition de : Rien trop.
Faire employé pour éviter la répétition d'un verbe, précédent : le n'en cognois-
sois pas seulement le nom, ny ne fais encore le corps.
Aller employé comme auxiliaire, auquel cas le verbe qui suit est au participe
présent : Ceux qui nous vont instruisant.
Ils, vous, remplaçant le pronom indéfini on : Ils disent à ceux auec qui vous estes.
On s'écrivant fréquemment l'on, Ion : l'on m'aprint; — à l'aduenture les estime Ion.
Aucun, nul, ayant le sens affirmatif chaque fois qu'une négation ne les accom-
pagne pas : Aucuns me conuient d'escrire; — Exemple aussi remarquable que nul
des précédents.
Dans l'emploi de ne... pas, l'un de ces deux mots est souvent omis : Affin que
ie ne parle de luy; — Est-ce pas faire vne muraille sans pierre.
Ainsin mis pour ainsi devant un mot commençant par une voyelle : ainsin il
aduint; — en pareil cas on trouve également ains : ains instimire.
L'affixe privatif in ou im est emploj-^é avec nombre de mots qui ne le compor-
tent plus aujourd'hui : ineloquent; impremeditement (sans préméditation).
Orthographe. — La différence d'orthographe entre l'édition de 1588 et celle de
l'ex. de Bordeaux d'une part, et l'orthographe de l'édition de 1595 de l'autre,
est très sensible, surtout dans les additions de cette dernière qui se rapproche
beaucoup plus de l'orthographe actuelle; elle se ressent très manifestement de
la surveillance exercée par M'" de Gournay sur l'impression de cette édition.
Néanmoins, dans celle-ci, comme dans les précédentes, les fautes indéniables
d'impression sont fort nombreuses; dans cette catégorie, nous rangeons entre
autres les mots qui dans une même page se rencontrent avec des orthographes
différentes, tels que enfants et enfans (III, 664, 1 et 9j, plustot et plustost (III,
670, 12 et 15), et ils sont légion.
Certains mots que nous écrivons en deux ou plusieurs mots, avec ou sans trait
d'union, s'écrivent en un seul et réciproquement : Dequoy, trestout, par ce que,
bon-heur, bon heur. — Ti^ès marque du superlatif faisant indifféremment corps
ou ndn, et dans ce dernier cas presque toujours uni à lui par un trait d'union,
avec l'adjectif ou adverbe auquel il se rapporte ; Tres-desagreable, tresdesagreable
ou 1res désagréable; tres-aduantageusement, tresaduantageusement ou très aduan-
tageusement.
Le même mot, souvent à peu d'intervalle, s'écrit de diverses façons ; Dit, dy,
dict, deit, dist; — conte, comte, compte; — i^ang, reng, ranc.
Lettres w et u employées l'une pour l'autre : u si la lettre est majuscule ou ini-
tiale d'un mot, u si elle ^t à l'intérieur : ay lecteyr; — t-n Heure.
Substitution de lettres et de diphtongues les unes aux autres : a pour e, et ré-
ciproquement : accidant, harengue ; — cpour ch, pour q, pour s, cercher, donq, de-
fence; — e pour ai : fresche; — f pour pA, orthografe ; — g pourj, magesté; — i pour
j, et réciproquement; lorsque deux i se suivent, le dernier se transforme alors en
j : ie, Dij; — i pour é : cerimonie; — o pour ou : formi; — t pour c : antien;
— s pour X : pris; — u pour o, pour eu et ou, et réciproquement : vmbre, rigur,
concurre, receu; — y pour i, surtout à la fin des mots : yure, m.oy, luy; — ai mis
pour a : Montaigne, compaignîe ; — eu pour u : seureté; — ie pour e : legier; —
ai et oy pour ai : François, i'estois, i'estoys; — ou pour eu : treuue; — ui pour
i : vuide, etc.
S, X, 2 employés indifféremment comme marque du pluriel : nos, noz; lois, loix.
Addition de lettres parasites provenant d'étymologie vraie ou fausse : b : fieb-
ure; — c : plainct; — d : aduenture; — f: vifue; — g : cognoistre; — h : au-
theur; — l : tiltre; — n : besongne; — p : nopces; — s : mesme; — u : guain, etc.
Suppression du T final au pluriel de certains noms : enfans, mas, precedens.
Suppression du t euphonique : sera-il, y a il, pour • sera-t-il », « y a-t-il » ; son
remplacement parfois par V ou l : fera-Von ou fera Ion, pour « fera-t-on. »
NOTE SUR LA LANGUE DE MONTAIGNE. - G.72b
Suppression fréquente de lettres doubles : home, feme, haie, frape, balre, etc.
Etc., etc.
Il est à observer que ces modifications n'ont aucune influence sur la prononcia-
tion qui, pour la plupart des mots, est celle de nos jours.
Accents. — L'accent circonflexe n'existe pas : ame, pastre.
L'accent grave ne se trouve que sur l'a préposition, ou sur où adverbe : à moy,
où est-il.
L'accent aigu ne se met que sur \'é des syllabes finales où il n'est pas muet :
aimé, aimée, capacité, dés (dès que), es; même dans ce cas (aux, dans les) on l'omet
d'ordinaire lorsque la syllabe se termine par s,x on z : authorité, authoritez.
II est fait assez fréquemment usage du tréma sur l'é et sur l'u : poëte, deuc,
loilange, rouage.
Ponctuation. — Les phrases sont courtes, trop parfois au préjudice du sens
qui gagnerait à plus de liaison ; le point et virgule est fréquent, mais presque
toujours remplacé par deux points; les virgules sont prodiguées outre mesure, sur-
tout dans l'édition de 1595; et ce sur la recommandation expresse de l'auteur qui,
pour son propre compte, s'en abstient d'ordinaire quand c'est lui-même qui écrit.
Dans le principe, Montaigne s'en était remis complètement à ses imprimeui-s de
ces détails d'orthographe et de ponctuation, en lesquels lui-même se reconnaît « peu
expert en l'vn et en l'autre » (III, 412). Vers la fin, uniquement occupé à par-
faire son livre, il y prête davantage attention, d'où cette note écrite de sa main
au verso du titre de l'exemplaire de Bordeaux en vue de la réimpression de
l'ouvrage, note qui résume sa manière de voir en la matière, et donne un spéci-
men intéressant de sa propre orthographe :
Montre montrer remontrer etc. escriues les sans (s) a la differance de monstrç
monstrueus
cest home ceste famé escriues le sans (s) a la differance de c'est c'estoit
ainsi mettes le sans (n) quand une voyelle suit et aueq (n) si c'est vne consonante
ainsi marcha ainsin alla (Montaigne dit le contraire de ce qu'il veut dire, mais
les deux exemples qu'il donne l'indiquent sans erreur possible).
campaigne espaigne gascouigne etc. mettes vn (t) dauant le (g) corne a montaigne
non pas sans (i) campagne espagne
ne mettez en grande lettre que les noms propices ou au moins ne diversifies pas corne
en cet examplere que vn mesme mot soit tantost en grande lettre tantost en petite
la prose latine grecque ou autre estrangiere il la faut mettre parmi la prose fran-
çoise en caractère différant les vers a part et les placer selon leur nature pentamet-
tres saphiques les demi vers les comancemans au bout de la ligne la fin sur la fin en
cet examplere il y a mille fautes en tout cela
Mettes règles régler non pas reigles reigler.
Suiues lorthografe antiene
outre les corrections qui sont en cet examplaire il y a infinies autres a faire de
quoi limprimeur se pourra auiser, mais regarder de près aus poincts qui sont en ce
slile de grande importance
sil treuue vne mesme chose en mesme sens deus fois qu'il en oste l'vne ou il verra
qu'elle sert le moins
c'est vn langage coupé qu'il n'y espargne les poincts et lettres maiuscules. Moi
mesme ai failli souuant a les oster et a mettre des comma (deux points) ou il faloit
vn poinct.
qu'il voie en plusieurs lieus ou il y a des paraniheses s'il ne suffira de distinguer
le sens aueq des poincts.
quil mette tout au long les dates et sans chiffre.
Nota. — Les mots du Glossaire en italique égyptienne sont ceux des Essais;
ils sont écrits tels qu'on les y trouve, par suite : 1'/ est toujours substitué au J
et ru et le V le sont l'un à l'autre, U s' employant dans le corps des mots, et V au
commencement. En outre les accents sur les e font défaut, sauf dans les syllabes
finales dont l'e n'est pas muet.
ESSAIS DE MONTAIGNE
GLOSSAIRE
des mots et locutions qui se trouvent dans les Essais
et sont aujourd'hui tombés en désuétude ou peu usités, dont le sens s'est mo-
difié, que l'auteur emploie dans une acception qui lui est propre, ou dont l'ortho-
graphe actuelle est quelque peu différente (un grand nombre par suite de l'u-
sage, quelques-uns par faute évidente d'orthographe de l'auteur ou d'impression).
A ce que. Pour que.
A certes. Tout de bon, sincèrement.
A coup. Tout à coup.
A donc, adonques. Alors.
A escient. En connaissance de cause.
A Venuy de. Malgré, à rencontre de.
A mesme que. A mesure que.
A mont. En haut, en remontant.
A quoi. Pourquoi, à quoi faire.
A sa poste. A son gré, à sa conve-
nance.
A tous les iours. En l'état ordinaire.
A tout, atout. Avec.
A val. En bas, vers la vallée, en des-
cendant.
Aage. Temps actuels, époque, âge.
Abbois (estre aux), (rendre ses). —
Renoncer; mourir, n'en pouvoir plus.
Ablactit. Ablatif.
Abrier. Abriter, couvrir.
Abstersiue. Qui dissipe, fait disparaî-
tre, nettoie.
Abstruse. Abstraite, difficile à enten-
dre, à concevoir.
Abutter (s'). Viser, tendre à un but.
Accession. Addition, augmentation.
Accessoire. Conjoncture, accident,
danger, difficulté.
Accointances domestiques. Servi-
teurs.
Accointer. Joindre. — S'accointer. Se
familiariser, se lier intimement.
Acconsuiuy. Atteint.
Accoucher (s'). Accoucher.
Accouer. Lier, attacher à la queue l'un
de l'autre comme des chevaux que l'on
mène à la file. — Accoué, conjoint.
Accouplage. Action d'accoupler.
Accoustrer. Accommoder.
Accoustumance, accostumance. Ac-
tion de s'accoutumer.
Accoustumer vne chose. S'y accou-
tumer.
Accroissance , accroist. Accroisse-
ment.
Acharné. Attaché à la chair.
Acquest. Acquisition, profit, gain.
Addonner (s'). S'attachera quelqu'un.
Adestrer. Accompagner.
Adirer. Égarer, perdre.
Adminicule. Superfétation sans impor-
tance.
Adombrer. Représenter.
Adresser. Redresser, diriger.
Aduantageux. Hautain, impérieux.
Aduenement. Ce qui advient, événe-
ment.
Aduenir. Parvenir. — Aduenir (s'),
s'auenir. S'accorder.
Aduenture (à V). Peut-être, quoi qu'il
en soit.
Aduersaire. Contraire.
Aduertance. Surveillance, attention.
^quable. Égal.
Aéré. Qui est d'air, qui vit dans l'air.
Attady après. Languissant de.
Atfaireux. Affairé.
Affecter. Souhaiter, rechercher.
Afferir. Convenir, appartenir, con.
cerner.
Affermer. Affirmer.
Affiner. Tromper, décevoir.
Affoler. Déprécier, nuire, endommager,
profaner; rendre fou.
G. 728
ESSAIS DE MONTAIGNE.
Attolir. Affoler.
Affreré. Uni comme à un frère.
Affréter. Lier, attacher, accrocher.
Atfriandi. Affriandé.
Affronteur. Effronté, hypocrite.
Affuster. Aiguiser, ajuster, disposer.
Agréer (s'). Avoir pour agréable.
Aguet (à'). De parti pris. — Marcher
d'aguet. Marcher avec précaution,
en se tenant sur ses gardes.
Aban. Effort pénible.
Ahanner. Faire un effort pénible, souf-
frir, fatiguer.
Abeurter. Heurter.
Ainçoys. Mais plutôt.
Ains. Mais.
Ainsi comme ainsin. Dans tous les cas,
d'une manière comme d'une autre.
Ainsin. Aussi. — Par ainsin. Par là,
en conséquence.
Airte (à V). Au guet, sur ses gardes,
en plein air.
Aiser (s'). Diminuer, devenir aisé.
Aisnage. Aînesse.
Aixieu. Essieu.
Alaigresse. Agilité.
Allégation. Citation.
Alongeail. Addition.
Alternations. Alternatives.
Amazonien. Qui était le propre des
Amazones.
Ambasse. Ambassade.
Amenrons (nous). Nous amènerons.
Amette. Petite àme.
Amiable. Aimable.
Amorcber. Amorcer.
Amusoire. Amusement.
Anatomie secbe. Squelette.
Androgyne. Qui réunit les deu.\ sexes.
Animal, animant. Animé, qui a une
àme.
Anonchalir. Amollir.
Aperceuance. Perception.
Aperceuoir. Percevoir.
Apoltrony. Accoutumé à la paresse,
énervé.
Aposime, aposeme. Décoction.
Apostée. Simulée.
Apostume, aposteme. Abcès.
Appaouurir, apouurir (s'). S'appau-
vrir.
Apparier. Égaler, comparer.
Apparoir. Apparaître.
Appaster. Entretenir.
Appendicuîe. Accessoire sans valeur.
Apperceuance. Intelligence, perspica-
cité.
Appeter. Désirer fortement par ins-
tinct; soutirer.
Appetisser. Diminuer, rapetisser.
Appiler. Empiler. — S'appiler (s'). Se
ramasser, se rassembler sur soi-même,
s'entasser.
Apprantisse. Qui convient à un ap-
prenti.
Apprebender. Comprendre, conce-
voir.
Apprebension. Imagination, concep-
tion, compréhension.
Apprentit, apprentis. Apprenti.
Approuuer. Faire approuver, prouver.
Appuyer. Résister.
Apres à. A.
Araigne. Araignée.
Ardu. Difficile, délicat.
Argolet. Arquebusier à cheval.
Aristippique. Qui est propre à Aris-
tippe.
Aronde, arondelle. Hirondelle.
Arquebouse. Arquebuse.
Arrest. Constance.
Arrbe. Marque, témoignage.
Arriuée (d'). Tout d'abord.
Arrouté (estre). Être en route, en
chemin, en train.
Ars, arse. Brûlé, être en feu.
Aftialiser. Régler par l'art.
Artiste. Qui crée, qui agit, qui est fait
par ou avec art, artificiel.
Asnier. Anier.
Aspergez. Goupillons.
Assagir. Rendre, faire devenir sage.
Assault. Assaille, livre assaut.
Assener. Frapper d'aplomb, placer.
Asseons-nous. Asseyons-nous, attri-
buons-nous.
Assenerant. Affirmatif, donnant assu-
rance.
Assiduel. Assidu.
Assignations. Rendez-vous.
Assigné à. Livré à, rangé.
Assuef action. Habitude.
Asteure, asture. A cette heure.
Astrologien. Astronome.
Ataraxie. Tranquillité parfaite, séré-
nité, impassibilité.
Attendre (s'). Tendre à, s'appliquer,
s'intéresser, espérer, pratiquer.
Attifet. Coiffure de grande dame au
XVI* siècle.
Attouchement (F). Le sens du toucher.
Attourner. Orner, parer.
Attrepipance. Modération, réserve.
Attrempé. Tempéré.
Aucun, aucunement {sans négation).
Quelqu'un, quelque, en quelque sorte.
Aulmones, aumosnes. Établissements
d'assistance.
GLOSSAIRE. AUT.
G.729
Autant. Aussi. — Boire d'autant. Boire
beaucoup.
Autour. Sur, à propos.
Auachir. Rendre lâche, débiliter.
Aualée (bride). A bride abattue.
Aualer, aualler. Renverser, jeter à
terre; subir; comprendre, admettre.
Auant-ieu. Prélude.
Auau. Dans la direction de.
Aueindre. Atteindre.
Auemr(s'). Se joindre, s'allier, se con-
venir.
Auisement. Délibération.
Auoyer. Diriger, être en route {opposé
de dévoyer).
Babouin. Singe, enfant, écolier.
Badin. Ecervelé, jocrisse.
Baguenaudant. S'amusant.
Bagues sauues. Sans dommages.
Bailler. Donner, attribuer.
Baisse. Terrain affaissé, vallée.
Balbucie. Balbutiement.
Balieure. Lèvre inférieure.
Baliuernant. S'amusant.
Baller. Danser.
Balote. Petite balle servant à exprimer
les suffrages.
Bande (sergent de). Officier qui ran-
geait les troupes en bataille.
Bandé. Tendu, serré, subtil, recher-
ché.
Barbaresque. Barbare.
Barbe de paille. De la ' paille sans
grains.
Barbier. Barbeau, poisson.
Barbotant. Murmurant.
Barbottage. Marmottage.
Bardelle. Sorte de bât fait de toile et
de bourre pour monter à âne.
Bardes. Caparaçons, armure des che-
vaux de gens de guerre.
Barguinage. Action de marchander,
d'où hésitation à prendre un parti.
Barragouin. Langage inintelligible,
barbare.
Bas (vin au). Le vin dans un tonneau
touchant à sa fin.
Basseté. Bassesse.
Bastant. Suffisant.
Bastelage. Comédie, bouffonnerie.
Basteler. Faire le bateleur, le bouffon,
pérorer à perte de vue et sans
motif.
Basteleresque. De bateleur.
Baster. Suffire. — Baste. Il suffit, c'est
assez.
Bastiment. Action de bâtir, construc-
tion.
Bastine. Bât rembourré.
Bataille. Armée, troupe.
Batre. Battre en brèche.
Battelée. Charge d'un bateau.
Battures. Coups violents.
Bauasser. Bavarder, babiller, folâtrer.
Baye. Baliverne, moquerie, frivolité.
Bazocbe. Juridiction des clercs du
palais.
Beau-fait. Haut fait.
Bêchée. Becquée.
Béer. Ouvrir la bouche, s'étonner ; par
ext. soupirer, désirer.
Belistresse. Féminin de bélitre, men-
diant, misérable, honteux.
Bellique. De guerre, belliqueux.
Beluter. Bluter, passer au tamis.
Bénéfice. Charge ecclésiastique pour-
vue d'un revenu.
Beneficence. Action de bien faire, bien-
faisance.
Beniuolence, beneuolence. Bienveil-
lance.
Bergaaiasque. Langage grossier de
Bergame.
Besoigne, besouigne. Besogne.
Besongnes de nuit. Attirail de nuit.
Bide. Bigle, louche.
Bien-facteur. Bienfaiteur.
Bienueigner. Saluer, accueillir avec
bienveillance, souhaiter la bienvenue.
Biffe. Moquerie.
Bigue. Troc, échange.
Biborre. Aïe! Hue! Holà! Au se-
cours!
Blanc (deuoyer du). Manquer le but.
Blandices. Attraits, càlineries.
Boccon. Morceau.
Boete. Cassette particulière.
Boire d'autant, à lut. — Boire beau-
coup, faire raison en buvant.
Bois (rompre vn). Rompre une lance,
combattre.
Bolus. Composé pharmaceutique, pi-
lule.
Bon de (estre). Être le propre, le fait
de.
Bonasse. Bénin; se dit également de
la mer quand elle est calme.
Bonnetade. Salutation à coups de
bonnet.
Bordeau, bordel. Maison de débau-
che.
Bossé. Bossu.
Boucler. Bouclier.
G.730
ESSAIS DE MONTAIGNE.
Boule veue (à). A première vue.
Bouquer (faire). Faire embrasser de
force. Au figuré faire enrager quel-
qu'un, l'obliger à céder.
Bourrellement. Torture.
Bourrellerie. Art du bourreau.
Boursier. Celui qui tient la bourse,
qui paie.
Boutée. Poussée, impulsion, saillie,
élan; boutades, intervalles.
Boute-feu. Incendiaire.
Boute-bors. Action de mettre ou d'être
mis dehors ; de débouter ou d'être dé-
bouté; présence d'esprit; et par ex-
tension réplique, repartie.
Bouteilles (reuenir à ses). Revenir à
son sujet.
Brague. Caleçon. — Bragues nettes.
Sans se salir.
Bragueries. Jeux, divertissements.
Bran. Fi!
Branle. Mouvement.
Braue. Beau, brillant.
Brauerie. Bravoure, courage ; bravade ;
arrogance, fierté.
Brefuement. Brièvement.
Brebaigne. Femme ou femelle stérile.
Breuet. Billet, note, amulette. — Breuet
à cacbettes. Billet doux.
Breueter. Abréger, annoter, commen-
ter.
Bribes. Restes, détritus.
Bride. Retenue, modération.
Brocardai. Brocart, brocatelle.
Brocbe (couper). Interrompre, couper
la parole, fermer la bouche.
Brocber. Piquer.
Brode. Lâche, efféminé, languissant,
mou.
Brouée. Brouillard épais, brume.
Brouillars. Brouillon, écrit à mettre
au net.
Brouillas. Brouillard.
Brouillis. Dissensions, troubles inté-
rieurs.
Brutalité. Stupidité, bêtise.
Buffle. Soufnet.
Bute. Butte, but, cible.
C.
Ça bas. Ici-bas.
Cabdet. Cadet.
Cagnard, caignard. Coin où les chiens
se rassemblent, chenil.
Caler. Rabattre de ses prétentions, s'a-
baisser, céder.
Cane (faire la). Faire un plongeon, se
jeter à plat ventre, se dérober.
Cannes. Canaux, tuyaux.
Cap à pied (de). De pied en cap.
Cape. Manteau court avec capuchon
tenue de guerre.
Capette. Diminutif de cape.
Capirotade, capilotade. Jlets com-
posé de viandes rôties de diverses
sortes.
Capitalement. D'une façon capitale.
Cappari. Par la chèvre (juron italien).
Capriole. Cabriole.
Carole. Danse, promenade en rond.
Carrière (prendre). Faire galoper un
cheval à toute vitesse.
Cassez. Vieux, ne se soutenant plus.
Casuel. Qui arrive par accident, par
occasion.
Casuellement. Accidentellement, occa-
sionnellement.
Caterre. Catarrhe. — Ca terreuse. Qui
tient du catarrhe.
Catbedrant. Celui qui enseigne.
Catze. Pennis.
Causer. Demander la cause. — Causeur.
Chercheur de causes.
Cauterizé. Torturé, ulcéré.
Caution. Précaution.
Céans. Ici.
Cependant que. Pendant que.
Ceps. Liens, chaînes, entraves.
Cercber. Chercher.
Certain. Immobile, fixe.
Ceruelle. Idée, émotion, inquiétude.
Cestuy, cettuy. Celui.
Ceux-icy. Ceux-ci.
Cbafouré. Défiguré, barbouillé; confus,
perverti.
Cbagreigne, cbagrigne. Chagrine.
Chaille (ne vous). N'ajez souci, que
vous importe.
Cbaire. Chaise.
Cbalandise. Affiuencede chalands, vo-
gue.
Cbalemie. Chanson rustique.
Cbaloir. Importer, soucier.
Cbamailler. Se ruer sur quelqu'un, le
frapper.
Cbampisse, féminin de cbampi. Malin,
goguenard.
Cbanger (aller au). Quitter une proie,
une piste pour en suivre une autre.
Cbansons de Dauid. Psaumes.
Cbarriotte. Chariot.
Chartes. Cartes à jouer et autres.
Chartre. Régime particulier.
Cbartre. Maladie de langueur.
Cbascuniere. Chez soi.
GLOSSAIRK. CHA.
G.73t
Chat en sac (acheter). Acheter sans
voir, de conliance.
Chaulde (sur la). Au moment même,
sur-lc-chanip.
Cbaulde-coUe. Le premier feu de la
colère.
Ghault. Chaud.
Chault (il), chaut (il). Il soucie, il im-
porte.
Chausses. Culotte.
Chaussetier. Confectionneur de cu-
lottes et de bas.
Chaussure. Vêtements de la partie in-
férieure du corps.
Chef. Promontoire. — A chef. A bout.
- Au chef. A la fin.
Cheneuiere (épou vantail de). Manne-
quin pour éloigner les oiseaux.
Cheute. Chute. — Féminin de chu.
Tombée.
Cheualerie. Cavalerie.
Cheuance. Le bien que l'on possède.
Cheuet (hausser le). Renchérir la mar-
chandise.
Cheuir. Venir à bout, terminer, éviter,
jouir, disposer.
Cheure (prendre la). Prendre de l'hu-
meur, se fâcher, se mettre en colère.
— Emporter à la cheure morte.
Emporter sur le dos.
Chîennine. Comme font les chiens.
Chopant. Heurtant, bronchant, trébu-
chant.
Choqué. Réfuté.
Choué. Frustré, déçu de son espoir,
trompé.
Gicûe. Ciguë.
Cigongne. Cigogne.
Cil. Celui.
Circensez (ieux). Jeux de cirque.
Circonscription. Limitation, action de
refréner.
Circonstances de Dieu. Particularités
relatives à Dieu.
Citoyen. Concitoj'en.
Clairet. Nom du vin de Bordeaux.
Clause. Phrase, proposition, passage.
Clerc. Lettré, savant, habile.
Ciergesses. Femmes de clercs, savantes.
Climacide. Femme servant de marche-
pied.
Clin. Mouvement.
Coches. Eclisses servant à comprimer
la taille.
Coerction. Répression, châtiment.
Cogitation. Pensée, réflexion.
Cognoissans. Personnes, gens de con-
naissance.
Coiement. Voir Coyement. ^
Coint. Joli, beau, galant, ajusté.
Colle. Colère, désir.
Collège. Congrégation, couvent.
Collier. Collet à prendre les lièvres.
Colligence, colligance. Liaison, union
intime, connexion.
Colourine. Coulevrine.
Combien que. Bien que.
Comme. Comment, combien.
Comment que. De quelque manière
que.
Commer. Dire, raconter.
Commettre. Confier, préposer à.
Commis. Abandonné, confié.
Commourant. D'accord pour mourir.
Commune (la). Le commun, le plus
grand nombre; la généralité; le peu-
ple, les plébéiens; la populace.
Compaîgnon. Compagnon, égal.
Compères. Nom que se donnaient en-
tre eux les bourgeois.
Competemment. Sciemment, en con-
naissance de cause.
Complexion. Disposition d'esprit.
Composer (se). Se préparer.
Conciergerie. Prison.
Concilier. Faire alliance avec.
Condigne. Très digne, méritant.
Condiment. Assaisonnement.
Conditions. Qualités bonnes ou mau-
vaises, mœurs, genre de vie.
Condolu. Qui participe à la douleur de
quelqu'un, qui se lamente de compa-
gnie.
Condonner. Concéder, permettre, ex-
cuser.
Con fabulation. Entretien famiher.
Conferance, conférence. Relation,
rapport; conversation; discussion.
Conférer. Contribuer, apporter; corn
parer; obtenir un résultat.
Confidence. Courage, résolution, con-
fiance.
Conforter. Affermir, réconforter.
Confrairie. Société organisée.
Congé. Autorisation, permission.
Conioui. Se réjouir avec quelqu'un,
auprès de quelqu'un.
Conniller. Se dérober comme un lapin
dans son terrier; au figuré chercher
des échappatoires, prendre des dé-
tours.
Connillieres. Terriers, garenne ; au fi-
gurée subterfuges.
Consacrer. Sacrifier, immoler.
Consent. Témoin; complicf^; qui con-
vient; consentant.
Conserue. Esprit de conservation, d'é-
conomie.
G.732
ESSAIS DE MONTAIGNE.
Conseruer. Préserver.
Considérable. A considérer.
Considération. Préjugé.
Considéré. Retenu, réfléchi, prudent;
d'où inconsidéré (étourdi).
Consorce. Société, communauté.
Conspiré. Conjuré.
Constamment. Avec constance.
Consubstantiel à. Partie intégrante de.
Consus. Consul (faute d'impression).
Contadin. Paysan.
Contemporanée. Contemporaine.
Continemment. Avec continence.
Continent auec. Tenant à.
Contraction. Exiguïté, étendue res-
treinte.
Contraster. Blâmer, contredire, se
mettre en opposition.
Contrebas (tondre). Aller tout à fait
mal.
Contrecarre. Opposition, résistance
ouverte.
Contremont. De bas en haut.
Contrepoil (à). Au rebours*, en sens
contraire.
Contreual. De haut en bas.
Controuers. Controversé.
Contumelieux, euse. Outrageux, inju-
rieux.
Conuenance. Convention.
Conuenir. S'accorder.
Conuersation. Relation, commerce.
Conniue. Repas, festin.
Conuoiement. Action de reconduire,
d'accompagner.
Coquiner. Mener la vie d'un coquin;
mendier.
Cordée. Série.
Cornardise. Cocuage.
Cornes (baisser les). S'humilier.
Corneter. Appliquer des ventouses.
Corselet. Cuirasse légère; soldat qui
en était armé.
Costié, costier. Qui est à côté.
Couardise. Lâcheté, poltronnerie.
Coucber. Risquer. — Coucher de peu.
Risquer peu de chose. — Coucher de
beaucoup. Exagérer, se vanter. —
Coucber de rien moins. Viser, as-
pirer à rien moins.
Coulpe. Faute.
Coultre. Contre (fer de charrue).
Courant (neud). Nœud coulant.
Courir de poincte. Courir avec impé-
tuosité.
Courre. Courir, parcourir.
Court. Cour (entourage d'un souve-
rain, partie d'une habitation). —
Courts. Résidences royales.
Courtisane (à la). A la mode de la
cour.
Coutille. Épée courte ou long poignard.
— Coutillier. Valet d'armes qui en
était porteur.
Couuert. Renfermé, dissimulé.
Couuertement. En dessous; à l'abri
des indiscrétions.
Couuertures. Prétextes, moyens dé-
tournés.
Couure-chef. Voilette que portaient les
dames.
Couyte. Matelas.
Coy (pied). De pied ferme.
Coyement. Tranquillement, insensi-
blement.
Creon. Crayon.
Creté. Huppé, en position élevée, qui
est en relief.
Croist. Croissance. ,
Crotesque. Grotesque.
Crouler. Ébranler. — Croulement.
ébranlement.
Croupi. Accroupi.
Crouster. Encroûter.
Crud (à). A nu.
Crudité. Indigestion.
Cueus, cueux, queux. Lingots.
Cuider (substantif). Présomption.
Cuider (verbe). Croire, penser; faillir;
avoir de la présomption.
Cui sur pointe. Sens dessus dessous.
Cullier. Cuillère.
Cupiditez. Passions.
Cures. Soins.
Curieusement. Avec soin; avec pré-
tention; de parti pris.
D.
Baguer. Frapper à coups de dague
(sorte de poignard).
Dam (à son). Tant pis pour lui, à son
dommage.
Damasquinée. Damassée.
Dameret. Brillant, galant.
Dauantiere. Tablier dont les femmes
faisaient usage à cheval. — Sans da-
uantiere. A découvert.
De. Avec. — De quoi, de mode que.
De ce que.
Dea. Da (particule servant à renforcer
et parfois aussi interrogative, se re-
trouve dans Oui-da).
Deceu. Déçu.
Déchiffrer, descbiffrer. Décrire, se
faire connaître.
Déclinaison. Déclin.
GLOSSAIRE. DEC.
G.733
Decours. Décadence, descente.
Decroist. Décroissance.
Déduction. Récit, divertissement.
Déduit, desduit. Divertissement, passe-
temps, occupation ; plaisirs de l'a-
mour.
Detaux, dettaults. Défauts.
Dettubler. Découvrir, dégager, circon-
cire.
Detluxion. Écoulement, dépôt.
Deformité. Difformité.
Defortune. Infortune.
Detraudev, desfrauder. Frustrer.
Degré. Rang qu'on occupe.
De la en hors. Depuis lors.
Deliure. Libre, dégagé de soins. — A
deliure. A l'aise.
Démoniaque, desmoniaque. Possédé
du démon; et aussi divin dans le sens
étymologique grec.
Deneantise. Néant, nullité; état misé-
rable.
Déport. Délai.
Deportements . Mœurs, actions.
Desporter (s'en). S'en défaire.
Dequoy. Dont, de ce que.
Deriué de. Provenant, transmis.
Desaccoustumance. Action de se dé-
saccoutumer.
Desbastiment. Démolition.
Descharger. Dispenser. — Se deschar-
ger. Se dégager, se débarrasser.
Descbet. Manque, défaut, diminution.
Desconsoler. Émotionner.
Desconuenir. Différer.
Descouper. Diviser en parties dis-
tinctes, répartir en spécialités.
Desdite. Dédit.
Desemparer. Oublier, transgresser,
enfreindre.
Desfaire. Exécuter, mettre à mort.
Desfortifier. Détruire les fortifications.
Desfortune. Infortune.
Desfuyte. Défaite, faux-fujant, réponse
évasive.
Desgarcer. Ne pas être excité par le
contact de la femme.
Desgater. Faire du dégât.
Desgosiller. Égorger.
Desgoutement. Dégoût.
Desieuner (se). Manger, se nourrir, se
régaler.
Designer, desseigner. Prescrire, or-
donner, avoir dessein, entreprendre.
— Desseigné. Fait à dessein, préparé.
Deslaier, dislaier, dilayer. Retarder,
remettre, différer.
Dés lors en auant, d'ores en auant.
Dorénavant.
Desloueure. Dislocation.
Desmarcher. Reculer. — Se desmar-
cher, se mouvoir.
Desmettre. Soumettre, abattre, abais-
ser, descendre.
Desmeu. Détourné, déplacé, dérangé.
Desmis. Soumis.
Desmonter. Descendre, être renversé
de cheval.
Desmordre. Lâcher.
Desmouuoir. Déplacer, faire renoncer,
disjoindre, détourner.
Desobliger (se). Se débarrasser, être
libre d'une obligation.
Despartir. Partager, disperser, distri-
buer. — Se despartir. Quitter, aban-
donner.
' Despecées. Rompues, brisées.
Despendre. Dépenser, payer.
Despit. Dépit, mauvaise humeur.
Despiter. Maudire.
Desplaisant. Fâcheux.
Despreins (ie). Je tirai de.
Desprendre. Détacher, séparer, quitter,
renoncer ; faire oublier, perdre de vue.
Desprier ses prières. Prier pour
qu'elles ne soient pas exaucées.
Desrompre. Rouer.
Desserre. Hardes, défroque, dépouille.
Dessirer. Déchirer.
Dessoude (en), dessoute (en). Soudai-
nement, tout à coup, à i'improviste;
en désordre.
Destiné. Déterminé.
Destourbier. Obstacle, empêchement,
embarras, trouble.
Destrancher. Couper par morceaux.
Destremper. Modérer, tempérer.
Destroict. Ressort, étendue d'une juri-
diction; territoire, pays; localité,
endroit.
Destroict (à). En détresse, en telle ex-
trémité.
Destroussement. Ouvertement, 3irec-
tement, brutalement, simplement.
Desuoyer. Désorienter, égarer.
Det. Dé à jouer.
Détailler. Taillader, ébrécher, tailler
en pièces.
Detraction. Médisance, diffamation;
vol, larcin.
Deu, deuë. Dû, due.
Deult (il). 11 est douloureux, pénible.
Deuant. Avant. — Deuant que. Avant
que.
Deuination. Ce qu'on devine, conjec-
ture.
Deuis. Conversation, entretien, action
de deviser.
G.734
ESSAIS DE MONTAIGNE.
Deuiser. Discourir, raconter.
Dextre. Droite, main droite.
Dextrement. Avec dextérité.
Dez. Dés.
Dialectique. Action de raisonner avec
méthode et justesse.
Dialogisme. Sous forme de dialogue.
Dict (il). Il dit.
Die (que ie). Que je dise.
Differenter. Mettre en opposition.
Dif formation. Déformation. — Ditfor-
mer. Déformer, pervertir.
Dilection. Amour, tendresse, affection.
Dire (à). De moins. — Dire (estre à).
Donner à redire. — Dire (auoir à).
Manquer de quelque cliose, regret-
ter.
Disceptation. Examen, discussion.
Disconuenable. Qui ne convient pas.
Disconuenance. Désaccord.
Discours. Outre so7i sens ordinaire
d'expression de la pensée : entretien,
conversation; raison, intelligence,
entendement; raisonnement, juge-
ment; opinion; sagesse ; volonté ; su-
périorité ; dessein ; art, artilîce, in-
géniosité, parti pris.
Discrepance. Désaccord, contrariété.
Discrétion. Discernement, jugement,
action de distinguer.
Disertement. Nettement, catégorique-
ment.
Dispatbie, dyspatbie. Haine, aversion,
antipathie.
Dispensation. Manière de faire.
Dispenser. Permettre, disposer, ac-
cepter; employer. — Dispenser à
(se). Se laisser aller à.
Disposition. Bonne santé.
Disposition. État et aspect des astres
(terme d'astronomie).
Dissentieuses. Discordantes, se con-
trariant.
Dissiper. Morceler.
Dinars. Étrange, singulier.
Diuertir. Faire diversion, détourner.
Diuertissement. Diversion.
Diuulsion. Séparation.
Doccie. Douches.
Doctrine. Science en général, prin-
cipes.
Doint (il). Qu'il donne.
Dolé. Poli, équarri, construit, aménagé,
distribué.
Domestique. Familier, qui est de la
maison.
Donray, donrez, donrois, donrons.
Donnerai, donnerez, donnerais, don-
nerons.
Dormart. Dormeur.
Doulereux. Douloureux.
Douloir. Causer de la douleur. — Se
douloir. Se plaindre.
Doux fleurant. Parfumé.
Droict (à tort et à). A tort ou à raison.
Droicteur. Dioiture.
Du tout. Tout à fait.
Duire. Instruire à, conduire, amener.
Duit. Dressé, façonné, accoutumé.
Dy (ie). Je dis.
E.
Eage. Age.
Eff actuel. Effectif.
Bf/ray. Effroi.
Ehonté. Effronté.
Elabouré. Travaillé.
Elider. Détruire, anéantir.
Eloigner. S'éloigner
Eloise. Éclair. — Au figuré idée, con-
ception.
Embabouiner (s'). Se tromper soi-
même, se faire illusion ; s'embarras-
ser ; enchanté, épris.
Embatre (s'). Arriver en quelque lieu;
se réfugier.
Embesognement. Sollicitude, souci,
occupation.
Emblesme. Pièce rapportée.
Emboire, imboire. Se pénétrer, absor-
ber.
Embraiser (s'). S'embraser, brûler.
Embrouilleures. Embrouillements.
Embuffler. Séduire, tromper, mener
par le nez.
Emmoncaler. Amonceler.
Emmy. Parmi, au milieu de.
Emoulu. Rude, dangereux.
Empenné, empanné. Garni de plumes.
— Tout empanné. Tout d'une pièce,
d'un bloc.
Empereur d'armée. Général en chef.
Emperiere. Impératrice, souveraine.
Empescber. Embarrasser. — S'em-
pescber. Se lier.
Emplacer. Mettre en place, caser.
Emploicte. Emploi, dépense, emplette.
— Emploiter. Employer.
Empoixé. Empoissé.
Enaser. Écraser le nez.
Encheinure. Enchaînement.
Encberiment. Tendresse, caresse ex-
cessive.
Encombrier. Encombrement, misère,
embarras, accident, empêchement.
GLOSSAIRE. EXC.
G.735
Encouardi. Rendu couard.
Enci^ousté. Revêtu, incrusté, alourdi.
Endebté. Endetté, lié.
Endemain. Lendemain.
Enfantillage. Enfance.
Entieler. Mêler de fiel
Enfoncer. Approfondir.
Enfondrant. Où on enfonce, cédant
sous le poids.
Enfondrer. S'embourber, se perdre.
Enforger. Charger de fers.
Enfourcbure. Le milieu du corps,
l'enfourcluire.
Enfourner. Livrer à. — A l'enfourner.
Au début, tout d'abord.
Enfrasquer, infrasquer. Embarrasser,
empêtrer.
Engageure. Engagement.
Engeance. Progéniture, enfants.
Engin. Espiit. — Engins, facultés in-
tellectuelles; machines.
Enginieur. Ingénieur.
Enhortation, enhortement. Exhorta-
tion, conseil, remontrance.
Enborter. Exhorter, encourager, con-
seiller.
Enquis. Requis.
Ensacher. Mettre dans un sac ; par ext.
entasser.
Enseigneur. Le doigt indicateur
{terme de chiromancie).
Ensemble. Avec.
Ensuerer. Envelopper d'un suaire.
Ensuyure. Suivre, poursuivre, décou-
ler, imiter.
Entelecbie. Perfection.
Entendre de main à main. Se répé-
ter, passer de bouche en bouche.
Entourner. Entourer.
Entregent, entrejent. Civilité, poli-
tesse, savoir-vivre, usage du monde.
Entreget, entreiet. Proposition, ou-
verture; entrcjects d'accord; propo-
sitions de paix.
Entregloser (s'). Se censurer, se criti-
quer réciproquement.
Entremise. Occupation.
Entretter. Mêler, parsemer.
Enuis, enuy. Involontairement, à
contre-cœur. — A l'enuy. Jlalgré la
volonté de, avec répugnance; à qui
mieux mieux.
Epecbiste. Qui hésite, sceptique.
Equabilité. Equité, justice.
Equanimité. Egalité d'âme.
EquipoUer. Equivaloir. — A l'équi-
polent. Comme équivalent, en re-
vanche.
Eremite. Ermite.
Ergotisme. Raisonnement captieux.
Erratique. Incertain, instable, peu so-
lide.
Erre. Train, allure. — Belle erre. En
grande hâte.
Es, ez. Aux, en les, dans les.
Esbaudi. Folâtre.
Esboitement. Boiterie, claudication.
Esbraillé. Débraillé.
Escarbillat. Éveillé, gai, de bonne hu-
meur.
Escarcber. Écraser.
Escarquillement, esquarquillement.
Ecartement des cuisses.
Eschaffaut (en F). Sur une estrade,
en public.
Escbarsement. Chichement, petite-
ment, modérément.
Escbaugette (en). En sentinelle, en
observation; — lieu d'où l'on sur-
veille.
Escheler. Appliquer une échelle,
escalader; échelonner. •
Escheuer. Echapper à, éviter; termi-
ner.
Escient. Exprès, à dessein. — A es-
cient. En connaissance de cause.
Esclarcir. Éclairer.
Esclatter. Faire éclater.
Esclauer. Asservir.
Esconiurer. Conjurer, détourner, éloi-
gner.
Escorgée. Escourgée. Fouet à lanières
de cuir.
Escourter. Tailler.
Escot. Éclat de bois, écharde; troupe,
parti.
Escrier Crier.
Esci^iuaillerie. Démangeaison d'écrire.
Escruelles. Écrouelles.
Escu. Bouclier.
Escuyer de trèfle. Valet de bas étage.
Esdirer. Adirer, perdre.
Esflochement. Dislocation.
Esfoiré. Relâché, flasque.
Esgosiller. Égorger.
Esgrafignure. Égratignure.
Esiouissance. Jouissance.
Eslire. Élire, choisir.
Eslourdir. Alourdir, abêtir, assom-
mer.
Esmiée. Émiettée, divisée.
Esmoie (s). S'émeut, s'inquiète.
Espagnole. Svelte, élégant, à l'espa-
gnole.
Espandable. Qu'on peut épandre.
Esparuier. Épervier.
Espaule (faire). Prêter son concours,
mettre en relief.
G.736
ESSAIS DE MONTAIGNE.
Espaulettes (par). Par parcelles, en
détail, pas à pas.
Espengle, espleingue. Épingle.
Espérons (chausser les). Poursuivre
de près.
Espessissure. Épaisseur.
Espic. Épi.
Espices. Cadeau, présent.
Espoinçonner. Piquer, aiguillonner,
stimuler, percer.
Esprsindre. Exprimer, tirer, faire sor-
tir.
Esquarre. Équerre.
Esquart. Écart.
Esrené. Éreinté, énervé.
Essayer. Tenter, éprouver, suljir; goû-
ter, savourer.
Essimer. Affaiblir, diminuer, amai-
grir.
Essoré. Évaporé, libre dans son essor.
Essourdie. Étourdie.
Establer. Mettre à l'écurie, à l'étable.
Estacade, estocade (se battre en). Se
battre en duel en champ clos.
Estançon. Etançon, étai.
Estançonner. Etayer, soutenir.
Estât de (faire). Estinier.
Estausser. Écourter.
Estent. Balle pour le jeu de paume : ce
jeu.
Estimation. Estime; appréciation,
prix, valeur.
Estoc. Lignée, filiation. — Par dou-
ble estoc. Des deux côtés.
Estomach. Cœur.
Estouper. Boucher, clore, arrêter.
Estour. Conflit, choc, combat, mêlée.
Estoy (i'). J'étais.
Estrange. Étranger.
Estranger (s'). S'éloigner, s'écarter.
Estrenner. Étrenner, gratifier.
Estrenuer, esternner. Éternuer.
Estrieu. Étrier.
Estrit. Débat, peine.
Estrillee. Mince, svelte.
Estriuer. Quereller, disputer, combat-
tre, résister à, témoigner de la répu-
gnance, hésiter. -
Estroicy, estreci. Rétréci, étréci.
Estude. Cabinet d'affaires, salle de
travail.
Estnyé. Servant d'étui, conservé.
Ethique. Moral, ayant trait aux
mœurs.
Eulx. Eux.
Eunuche. Eunuque.
Exagiter. Critiquer, discuter.
Exaim. Essaim.
Exceller. Surpasser.
Exercitation. Exercice, préparation,
entraînement; — discussion philo-
sophique.
Exercite. Armée.
Excuser. Tolérer, admettre.
Exile. Maigre, menu, sans force, ché-
tif.
Exinanition. Inanition, épuisement.
Expeller. Pousser hors, rejeter, ex-
pulser.
Expertise. Connaissance spéciale.
Exploit. Action, puissance.
Exsuperance. Excès, exubérance.
Ez. Voir Es.
F.
Façon. Usage, coutume.
Faé, taée. Fée; enchanté, doué de pro-
priétés magiques.
Faict. Fait. — A taict. Complètement,
entièrement. — Au bon du faict. A
l'heure du besoin.
Faille (qu'il). Qu'il manque.
Faillir. Faire défaut.
Failloit (il). Il faillait, il manquait.
Faineance. Fainéantise, paresse, indo-
lence.
Faintise, feintise. Dissimulation, trom-
perie.
Fais. Faix. — Fais de bois. Fagot.
Faitardise. Paresse, fainéantise.
Fanir. Se faner.
Fantasie. Fantaisie. — Fantasier. Se
laisser aller à son imagination.
Fantastique. Visionnaire.
Farcesque. Qui tient de la comédie, de
la farce.
Farseur. Auteur comique.
Fascheux. Blâmable, manquant d'à
propos.
Faucée, faulcée. Choc, charge; incur-
sion, irruption; rupture.
Faucement. Faussement.
Faucer, faulser. Entacher de faux;
fendre, percer de part en part, dé-
foncer.
Faudra. Faillira, manquera.
Faulsit, fausit (il). Il fallut, il faillit.
Fault (il). Il faut, il manque.
Faulx, fauce. Faux, fausse, violé.
Faustier. Fautif, qui est en faute.
Faux du corps. Le milieu, le travers
du corps.
Fauorie. Favorite.
Fauorir. Favoriser.
Fay (ie). Je fais.
Féaux. Fidèles, intimes.
GLOSSAIRE. FEI.
G.737
Feit (il). Il fit.
Fenoil. Fenouil.
Fermir. Affermir, fixer, fortifier.
Féru. Blessé, frappé; entiché, captivé.
Feu (à). Par le feu.
Feue (nouuelle). Nouvelle folie.
Feus (ie). Je fus.
Fiance. Confiance.
Fient. Fiente, ordure, excrément.
Fier de (se). Se tenir assuré de.
Fiert (il). 11 frappe.
Figue (taire la). Mépriser, braver, se
moquer en faisant un geste indécent.
Filière. Ficelle {terme de fauconnerie).
Finablement. Finalement.
Finer. Venir à fin, à bout, conclure;
par extension trouver, disposer.
Fioyent (ils). Ils se fiaient.
Flaque. Flasque.
Flegme. Une des humeurs du corps
humain.
Fleute. Flûte.
Floret. Fleuret.
Flourissant. Florissant.
Fluant. Qui coule, liquide.
Flueurs. Menstrues.
Fluxions. Mouvements; vicissitudes.
Foarre. Paille. — Faire barbe de
toarre. Tromper, se moquer.
Foiblet, ette. Un peu faible.
Fonde. Fronde.
Fondre (se). S'enfoncer, s'efifrondrer,
succomber.
Fons. Fond, fonds.
Forains. Du dehors, étrangers.
Force (non). Qu'importe.
Forcée. Violée.
Forcener. Perdre la raison, être hors
de soi, s'emporter, exercer sa fu-
reur.
Forcenerie. Folie erotique, sadisme.
Forclore. Empêcher, exclure.
Formage. Fromage.
Formaliser. Prendre forme, s'assimi-
ler.
Forme (heure en). Lièvre au gîte
[terme de chasse).
Formi, fromi. Fourmi.
Formuler. Fourmiller.
Fort. Noble, courageux.
Fortitude. Force d'âme, courage, va-
leur.
Fortune (de). Par hasard.
Fourché (taire l'arbre). Se tenir sur
les mains, la tête en bas, les pieds
en l'air et écartés.
Fouteau. Nom du hêtre, en vieux
français.
Foy. Sincérité, véracité.
ESSAIS DE MONTAIGNE. — T. IV.
Foyt. Fouet.
Fraile. Frêle.
Frase. Phrase.
Fratesque. Monacal.
Froit. Froid.
Front. Fronton,
Fruition. Jouissance.
Frustatoirement. Inutilement,en vain.
Fu (ie). Je fus.
Fumier (estre sur son). Être dans son
élément, dans les meilleures condi-
tions.
Fusées. Difficultés.
«.
Galant homme. Homme habile, adroit.
Galer. Battre; par extension égrati-
gner.
Galimatrée. Assemblage, mélange.
Gallée. Galère; joie.
Galler. Caresser; se réjouir, s'amusei.
Garbe, galbe. Bonne grâce; contour
d'une figure.
Garber. Orner, ornementer, façonner;
donner un air de.
Garçonner. Dissiper, prodiguer. —
Garçonner la temme d'autrui. L'at-
tirer, avoir des relations avec elle.
Gardoire. Endroit ou l'on tient en
garde, où on conserve.
Gariement. Sauvegarde, garantie, res-
ponsabilité.
Garse, garce. Jeune fille.
Gast. Dégât, destruction.
Gauchir. Dévier, faire dévier; es-
quiver, échapper à.
Gaudisserie. Caractère, ton railleurs
et plaisants.
Gaudisseur. Railleur, qui se moque
par jeu et en riant.
Gauler le poiure. Être inquiet, tour-
menté.
Gaye. Gaie.
Gayon, goyon, gouyon. Goujon, pois-
son.
Geaule. Prison, geôle.
Gehener. Tourmenter, faire souffrir;
serrer, presser.
Géhenne. Peine, souci, chagrin, souf-
france; torture, question.
Gendarme. Homme d'armes.
Gendarmer (se). S'aguerrir.
General (le). L'intérêt général.
Gengiue. Gencive.
Genitoires. Organes génitaux.
Genitvwe. Semence.
47
G.738
ESSAIS DE MONTAIGNE.
Genouil. Genou.
Genoult. Faire la révérence, donner
un salut.
Gentil femme. Femme de gentilhomme.
Geometrien. Géomètre.
Gestes. Hauts faits, actions.
Get. Jeton.
Getter. Gîter, coucher.
Giet. Revers de la robe ou de l'habit.
Gloire. Vanité, orgueil. — Glorieux.
Vaniteux, orgueilleux.
Glosse. Explication d'un texte obscur.
Gobeau. Gobelet, coupe.
Goderonné. Paré, ajusté.
Gorgias. Mignon, propre. — Gor-
giasse. Agréable, belle, élégante.
Gorgiasser (se). Se pavaner, se flat-
ter, s'enorgueillir.
Gosseur, gaussenr. Synonyme de gau-
disseur.
Gourd. Perclus par le froid, engourdi ;
au figuré lourd, maladroit.
Gourmander. Dévorer avec avidité;
maltraiter en paroles, gourmander,
réprimander; stimuler.
Gourmer. Malmener, battre à coups
de poing.
Gouspiller. Houspiller.
Grâce. Reconnaissance.
Grammairien. Grammatical.
Grammercy. Grand merci.
Grangée. Gens réunis dans une
grange.
Grans. Grands.
Gras. Avantageux.
Gratification. Confiance, satisfaction,
faveur, reconnaissance.
Gratifier. Réjouir, remercier, féliciter.
— Gratifier à. Rendre grâce, être
agréable à.
Graue. Gravier, gravelle.
Graueleux. Atteint de gravelle.
Gregues, greguesques. Haut-de-
chausses, culotte.
Greue. Jambe; la partie de l'armure
qui couvrait la jambe, jambière;
par extension bottine.
Greuer. Peser, accabler.
Greueure. Hernie.
Griefue. Grave, pénible, dangereux.
Groin (ieter). Faire mauvaise mine,
rechigner, gronder.
Groisse. Grossesse.
Grommeler. Murmurer.
Guain. Grain.
Guerdon. Récompense.
Guère. Beaucoup.
Guide. Petit poisson.
Guigner. Viser, guetter. — Se gui-
gner. Se faire signe du coin de l'œil.
— Guigner du doigt. Tàter.
H.
Habituer (s'). Fixer sa résidence.
Haie. Halle.
Hallebrené. Épuisé, harassé, meurtri,
dépenaillé.
Hante. Hampe.
Harde. Troc, changement.
Harpade. Coup de harpon ou de grif-
fes; violent combat.
Harper (se). Se saisir violemment
l'un l'autre.
Hastiueté. Par hâte, précipitation.
Hault. Haut.
Haut de chausses. Culotte.
Hautain. Élevé.
Hautaineté. Hauteur orgueilleuse.
Hautesse. Hauteur, élévation.
Hay (ie). Je hais.
Haye. Haie.
Hazart. Hasard.
Hebeté. Obtus, languissant, affaibli.
Heretier. Héritier.
Hergne, hargne. Humeur hargneuse,
chagrine, acariâtre, tracassière.
Heur. Bonheur.
Heures. Livre de prières.
Heurte (à toute). A tout coup.
Historial. Relatif à l'histoire.
Hommenet, hommelet. Petit homme,
être sans consistance.
Hormais. Désormais, à l'avenir.
Hors. Désormais. — En hors. Au de-
hors.
Huict. Huit.
Huis. Porte.
Hurler quelqu'vn. Le huer.
Huy. Aujourd'hui.
Hydroforbie. Hydrophobie.
Hyperbole. Exagération.
Hypospbagma. Maladie de l'œil.
Hypothéqué. Exposé, soumis.
la. Certes; désormais.
lambayer. Promener, aller et venir.
lardrin. Jardin.
Iceluy, icelle. Celui, celle; celui-ci,
celle-ci.
Idoyne. Propre à.
lect, iet. Jeton ; calcul à l'aide de je-
tons.
GLOSSAIRE. lEH.
G.739
leban (maistre). Appellation appliquée
aux pédants.
Ignoble. Qui n'est pas noble.
Imbécillité. Faiblesse, imperfection.
Imboire. Absorber, se pénétrer.
Imperiere. Impératrice.
Impertinemment. Non pertinemment,
sans connaissance suffisante.
Impetrer. Prier, demander.
Impiteux. Impitoyable, sans pitié.
Implication. Action d'impliquer.
ImpoUu. Sans souillures.
Importable. Insupportable; difficile à
endurer, à supporter.
Impost. Peu dispos, peu valide, im-
potent.
Impremeditement. A l'improviste,
sans préméditation.
Improuidence. Imprévoyance.
Improuueu. Imprévu. — A l'impron-
ueu. A l'improviste.
Inaduertement. Sans attention.
Incole. Habitant.
Incommode. Impropre.
Incorporel. Sans corps, vide de sens,
frivole.
Inculcation. Action d'inculquer, de
faire entrer dans l'esprit en répétant
souvent la même chose.
Incurieusement. D'une manière in-
souciante.
Indefatigable. Infatigable.
Indefensible. Indéfendable.
Indiuinable. Qui ne peut être deviné.
Ineloquent. Non éloquent.
Inepte. Qui n'a pas d'aptitude à, inapte,
inhabile.
Inequalité. Inégalité.
Infiable. Peu digne de foi, infidèle;
incertain, suspect.
Intondre. Faire pénétrer, insinuer, im-
prégner.
Informer. Former, façonner, rensei-
gner.
Infrasquer (s'). S'embarrasser, s'em-
brouiller.
Iniure. Tort. — Par iniure. Sans
justice, à tort.
Iniurer (s'). S'injurier.
Iniurieusement. Injustement.
Innumerable. Qui ne peut se comp-
ter, innombrable.
Inobedient. Désobéissant.
Inquisition. Recherche.
Inscience. Ignorance, manque de
science.
Insculper. Graver sur.
Insipience. Manque de sagesse, folie,
sottise.
Insister. Résister.
Institution. Éducation.
Insubstantiel. Chimérique.
Interest. Préjudice causé.
Interiner. Entériner, déclarer valable,
accepter.
Intestin. Intérieur, caché, renfermé.
loignant. Près.
loinct. Joint.
loinctement. Directement.
lonchez. Joncs.
lourd'buy. Aujourd'hui.
lours (à tous les). Manière habi-
tuelle.
louste. Joute.
Ire. Courroux, colère.
Ireux. Colérique, courroucé, furieux.
ludicatoire. Juridiction, qui appar-
tient à la justice, au juge.
ludiciaire. Astrologue.
luire. Ivoire.
lun (à). A jeun.
luridiciant, iuridicié. Qui juge, qui
est jugé.
Juste. Complet, entier.
a.
Chercher en I les mots par J.
li.
Labile. Sujet à changer; coulant, fu-
gitif, fragile, glissant.
Labouré. Travaillé, orné.
Lacs. Lacets, filets.
Ladre. Lépreux.
Lairray, lairrions, etc. Laisserais,
laisserions, etc.
Landit, landy. Foire de S.-Denis; sa-
laire qui se payait ce jour-là par les
écoliers à leurs maîtres.
Languager, languagier. Qui aime à
parler, bavard.
Larrecin. Larcin, vol.
Lasseté. Lassitude.
Latineurs. Gens qui écrivent en latin.
Latinizer (se). S'imprégner du latin.
Leçon. Lecture.
Lecteur. Professeur, lecteur public.
Léger (de). Légèrement, aisément.
Légiste. Juridique.
Leniment. Adoucissement.
Lenite. Doux.
Lettiere. Litière.
Lettre ferit, lettre féru. Demi-savant,
savant de pacotille.
Leu. Lu.
Leut. Luth.
G.740
ESSAIS DE MONTAIGNE.
Liaison des mariages. Noueraent d'é-
guillettes.
Liaisons. Bandages.
Libertin. Affranchi.
Librairie. Bibliothèque.
Licentier. Autoriser.
Lict (il). Il lit.
Lict. Lit, où l'on se couche.
Limininaire. Préliminaire, préface.
Liture. Rature, surcharge.
Liuresque. Tiré des livres.
Logis. Poste, position, cantonnement,
bivouac.
Lon. L'on, on.
Longuerie. Longueur.
Longuet. Un peu long.
Loudier, lodier. Couverture de lit,
matelas, matelas de plumes.
Lourché. Regardé de mauvais œil.
Loy. Loi; liberté, moyen, faculté; loi-
sir, droit.
Loyer. Récompense.
Loyse. Permet.
Loz. Gloire, éloge.
Luite, luicte. Lutte.
Lustre. Aspect.
Lut. Boue, lie. — Boire à lut. Bien
boire, boire jusqu'à la lie.
Ly (ie). Je lis.
Machure. Tache, contusion, meur-
trissure.
Maestral, maistral. Magistral, de
maître.
Magistère. Magistrale, doctorale.
Magistrat. Magistrature.
Mail. Maillet.
Maille bonne (taire la). Compter lar-
gement. — Faire la maille bonne
de sa parole. La tenir fermement.
Main (auant), (auant la). D'avance.
Mais. De plus, et même.
Maison (homme de). De bonne fa-
mille.
Maistrise. Possession.
Mal. Mauvais.
Malaysance. Difficulté d'avoir les
choses.
Maléfices. Fautes.
Maleficiée. Maladive, en mauvaises
conditions.
Malhabile. Qui manque d'habileté.
Malmesler. Brouiller.
Maltalent. Dépit, animosité; mali-
gnité, malveillance.
Maluoulu. Haï, détesté, à qui on veut
du mal.
Maniacle, maniaque. Fou, furieux-
incroyable, merveilleux.
Maniant. Maniable, souple, flexible.
Manicle. Cabale.
Manque. Manqué, défectueux, tron
que, faible.
Manufacture. Ouvrage mécanique,
travail manuel.
Manutention. Maintien.
Marc et tout. Le suc et le résidu; le
fond et la surface, le principal et
l'accessoire.
Marchande (mettre, tirer en place).
Mettre en évidence, faire valoir; dé-
velopper.
Marchander. Passer un marché.
Marché. Les affaires.
Marche (basse). Bas degré.
Marée. Foule.
Marine. Rivage de la mer.
Marmiteux, euse. Misérable, mal en
point, piteux, portant mine désolée.
Marque. Marche.
Marry. Repentant, fâché, chagrin.
Marte. Martre, animal.
Martin (faire le prestre). Jouer plu-
sieurs rôles à la fois.
Mascher. Ronger, incommoder; bles-
ser, faire souffrir.
Mastiner. Mutiler, maltraiter, répri-
mander.
Mauuaiseté. Méchanceté.
Mechanique. Mesquin, pauvre.
Mecreable. Incroyable.
Medeciner. Médicamenter.
Meliorer. Améliorer, amender.
Memorieux. Qui a de la mémoire.
Menaceux. Qui fait des menaces.
Mensale. Ligne qui traverse le milieu
de la main {terme de chiromancie).
Menus (par les). Peu à peu, en détail.
Mercadence. Commerce, marchan-
dise.
Mercier. Remercier.
Mercurializer. Reprendre, censurer,
réprimander.
Mercy à. Grâce à. — Sa mercy. Grâce
à lui.
Merlin. Enfanté sans la coopération de
l'homme.
Merque. Marque.
Mesaduenir. Tourner à mal.
Mesaduenu (il est). Il est arrivé mal-
heur.
Mesaise. Gêne, situation pénible, ma-
laise.
Mesauenance. Mésaventure.
Mescognoissance. Action de mécon-
naître.
GLOSSAIRE. MES.
G.741
Mesconter (se). Se tromper dans son
compte.
Mescreance. Incrédulité.
Mescroire. Se refuser à croire.
Meshuy. Aujourd'hui, désormais.
Meslé (homme). Homme ni bon ni
mauvais.
Meslouable. Qu'on ne peut louer.
Meslouer. Blâmer.
Mesme (à). A mesure.
Mesmement. Surtout. — Mesmement
que. Bien que.
Mesnage, mesnagerie. Économie;
soins du ménage; conduite, savoir-
faire.
Mesprinsent (qu'ils se). Qu'ils se mé-
prennent.
Mesprit (il eB). Mal lui en prit.
Messeant. Qui n'est pas convenable.
Meur, meury. Mûr, mûri.
Meurs. 3Iœurs.
Meurte. Myrte, plante.
Mie. Pas, nullement.
Mieinement. Miaulement.
Mignarder. Courtiser, chercher à
plaire à.
Mignon. Favori.
Migregeois. A moitié grec.
MiUiasse. Mille milliards ou trillion.
Mineux, euse. Pauvre, misérable ; dis-
cret, retenu; affecté, minaudier.
Minière. Mine.
Mirouer. Miroir.
Mise (recepte et). Recette et dépense.
Moiau. Milieu, centre.
Moins de. A l'exception de.
Mole. Moule.
Moleste. Fâcheux, importun, en-
nuyeux, désagréable.
Mon. Certainement, évidemment. —
C'est mon. Sans doute, c'est mon
avis.
Monarcbe. Monarque.
Monnoye. Monnaie.
Monopole. Assemblée factieuse; intri-
gue, conspiration.
Monstre. Chose extraordinaire.
Monstre, montre. Montre, revue, pa-
rade, cérémonie; échantillon.
Mont (à). De bas en haut.
Montioie. Croupe de terrain.
Montoie. Monceau, tas, dune.
Morbidezza. Mollesse, délicatesse de
chair {terme de peinture).
Mordre. Tàter.
Mortondement. Refroidissement,
rhume.
Morguant. Ayant de la morgue; hau-
tain, menaçant, méprisant.
Morné. Émoussé, sans pointe.
Morrion. Casque à l'usage de l'infan-
terie.
Mortuaire. Funérailles.
Mouelle. Moelle.
Moulture. Mouture.
Mousquetaire. Soldat armé du mous-
quet.
Mousse. Émoussé ; tendre, mou ; inerte.
Moyenne. Ligne médiane de l'inté-
rieur de la main {terme de chiroman-
cie).
Moyenner. Procurer.
Muance. Changement, transforma-
tion.
Muer. Changer.
Mulcter. Condamner à l'amende.
Mule (terrer la). Profiter sur l'achat
que l'on fait pour un autre.
Multiforme. De formes diverses; va-
riable, changeant.
Mundifier. Purifier.
Musser. Cacher, se blottir, amuser
par de belles paroles.
Mutination. Action de celui qui s'obs-
tine, se mutine.
Mytbologiser. Donner un sens figuré.
IV.
Nait, naifue. Natif, naturel.
Naturaliser. Rendre naturel.
Naturalistes. Qui aiment, qui prônent
ce qui est naturel.
Nauiger. Naviguer.
Nazarde. Chiquenaude sur le nez.
Ne. Ni. — Ne plus ne moins. Ni plus
ni moins.
Neantise. Nullité, incapacité, paresse,
fainéantise.
Négoces. Affaires.
Negotieux. Qui tient un commerce;
qui demande du soin.
Nez (s'en prendre au). S'en prendre
à soi. — Hocher du nez. Dédaigner,
repousser. — Rincer le nez. Se grat-
ter le nez.
Niais. Inné, natif.
Nibilité. Nullité, néant.
Noicit. Qui cherche noise, querelleur.
Noleage. Prix de passage en bateau.
Nom. Renom.
Nommé (mal). Mal famé.
Non pas. Pas même.
Non que. Sans parler de, comme aussi,
à plus forte raison.
Noncbaloir. Nonchalance, paresse.
Nourrir. Élever, éduquer, entretenir.
G.742
ESSAIS DE MONTAIGNE.
— Nourry aux lettres. Versé dans
les lettres.
Nourrisse. Nourrice.
Nourriture. Éducation, entretien.
Nouuelleté. Nouveauté.
Nubileux. Nébuleux.
Nud. Nu.
Nue (en). En l'air.
Nuement. Simplement.
Nuysance. Tort, dommage, incommo-
dité.
O.
Obscène. Sale, malpropre, repoussant.
Occis. Tués.
Occision. Meurtre, massacre.
Œconomie. Administration d'une mai-
son, soins de ménage.
Officier. Pourvu d'un office, d'une
fonction publics.
Officieux. Qui accomplit son devoir.
Offusquée. Masquée, obscurcie.
Oignement. Onguent, action de oindre.
Ombrage, vmbrage. Ombre, symp-
tôme, image.
Ombrageux. Ombreux.
One, onques, oncques. Quelquefois,
jamais.
Opiate. Composé pharmaceutique.
Opiniation. Opinion, présomption.
Opiniatrise. Opiniâtreté, entêtement,
obstination.
Opposite. Opposé, contraire.
Orbe (coup). Coup contondant qui ne
fait pas jaillir le sang.
Orbiere. Œillère, garde-vue.
Ord. Sale, dégoûtant.
Ore, ores, or. Alors, maintenant. —
Répété, signifie tantôt. — Ores que.
A présent, quoique. — Ores en
auant. Dorénavant.
Orée. Bord, limite.
Orer. Pérorer, haranguer, prier.
Orra (il). Il entendra, il ouïra. — Or-
rois, orront. Entendrais, enten-
dront.
Orthographie. Orthographe.
Ost. Armée, réunion de soldats.
Ottroyer. Octroyer, accorder.
Oubliance. Oubli.
Ouir. Entendre.
Oultre. Outre.
Oultrecuidé. Outrecuidant.
Ouuragier. Qui nécessite du travail,
de la fatigue.
Ouurer. Travailler, mettre en œuvre.
Ouuroûer. Ouvroir, atelier, lieu où
l'on travaille.
Ouy. Et aussi, et même, bien plus.
Oy (V), il oyt, nous oyons, vous oyez,
ils oyent, oyant. J'entends, il en-
tend, nous entendons, vous enten-
dez, ils entendent, entendant.
P.
Pache. Pacte, traité, accord, conven-
tion.
Paele. Pelle.
Paidagogisme. Instruction de l'en-
fance .
Paille (rompre). Se brouiller, cesser
toute relation.
Pair à pair. De pair.
Pais. Pays. — Païsant. Paysan.
Paistre. Se nourrir.
Palestrine. Lutte ou palestre.
Palissement. Le fait de pâlir.
Palme. Paume.
Pâlot (tenir). Aller de pair, égaler.
Pancher. Pencher.
Panneaux. Haillons, loques.
Pante. Pente.
Par sur tout. Par-dessus tout.
Parangon de (au). En comparaison
de.
Parangonner. Comparer.
Parentelle. L'ensemble des parents,
la famille entière.
Parfournir. Fournir entièrement; af-
fermir; accomplir, achever.
Parfumier. Parfumeur.
Parlement. Action de parlementer,
pourparlers; cour supérieure de jus-
tice.
Parlementer. Conférer, entamer des
pourparlers.
Parlerie. Exubérance de paroles, ver-
biage.
Parlier. Qui parle trop, parleur, ba-
billard.
Parquoy. C'est pourquoi.
Pars, parts. Partis, factions.
Partement. Départ.
Partie. Adversaire.
Parties. Qualités, talents; livres de
compte, mémoires de dépenses;
intrigues. .
Partir. Diviser, partager, répartir ; pro-
venir de.
Partisanes. Émanant d'un parti, parti-
culières.
Passades. Carrousels; jeux, exercices
équestres.
Passer. Surpasser, surmonter.
GLOSSAIRE. PAS.
G.743
Passion. Sentiment, perception, sen-
sation; souffrance.
Passionner. Souffrir.
Pastissage. Assemblage informe, mé-
lange.
Pastissant. Construisant, édifiant.
Patron. Modèle.
Paulme. Paume, balle ; mesure de lon-
gueur [environ 25 centimètres).
Paulme (toucher en). Se toucher les
paumes des mains, se donner la main.
— Siffler en paulme. Siffler entre
ses doigts.
Pauses (à). De temps en temps, par
intervalles.
Paux, pluriel de pal. Pieu, palissade.
Pauesade. Pavois ou boucliers en grand
nombre.
Paye. Paie.
Peculier. Particulier, spécial. — Pecu-
lierement. Particulièrement, spécia-
lement.
Pédante. Celui qui enseigne aux en-
fants, pédant.
Pedantesque. Qui sent le pédant.
Peinds (ie),il peinct. Je peins, il peint.
Pelaudé. Vexé, molesté, mis à contri-
bution, dépouillé.
Pellegrin, peregrin. Voyageur, ^étran-
ger ; par extension insolite.
Peloponnesiaque. Du Péloponnèse.
Pendant. Suspendu, escarpé; qui va en
pente.
Peneux. Pénible.
Pennade. Coup de pied porté en avant
quand le cheval se dresse.
Pennes, plumes. — Pennes sans fin.
Bagues sorcières.
Pensement. Action de penser, ré-
flexion.
PenuJtiœe. Pénultième, avant- der-
nière.
Perdurable. Durable au delà de l'or-
dinaire.
Peregrin. Voir Pellegrin.
Peregriner. Aller en pays étranger,
voyager.
Perenne. Perpétuel, continu.
Perflable. Que l'air peut traverser.
Peroration. Péroraison.
Perscruter. Rechercher, scruter.
Persien. Persan.
Perspicuité. Perspicacité.
Pertinence. Qualité de ce qui est per-
tinent, aptitude.
Pertinent. Ayant de l'autorité, du tact,
qui convient, habile, apte.
Pestilent. Pestilentiel.
Petalisme. Bannissement.
Petit (vn). Un peu.
Petrarcbistes . A l'imitation de Pé-
trarque.
Peu (il a). Il a pu.
Peu que (à). Peu s'en faut que.
Peupler. Se multiplier.
Peusse (que ie), qu'il peust. Que je
pusse, qu'il pût.
Peuz (ie), il peut. Je pus, il put.
Pbantasie. Fantaisie.
Pbilistas. Larrons.
Pbilodoxe. Attaché à ses opinions.
Physicien. Qui étudie la nature; mé-
decin.
Picoreur. Soldat maraudeur, pillard.
Picquer. Piquer.
Pié. Pied.
Pieça. Depuis longtemps, déjà.
Pièce. Morceau, partie; en pièce, ja-
mais.
Pied (mettre au). Rabaisser, mettre
à bas.
Pigne. Peigne.
Pile. Javelot, trait,
Pillotter. Diminutif de piller ; butiner.
Pincer. Affecter, oppresser.
Pinceter. Épiler.
Piper. Tromper. — Piperie. Trompe-
rie— Pipeur, piperesse. Trompeur,
trompeuse.
Piqueure. Piqûre.
Pistole. Pistolet. — Pistolade. Coup de
pistolet.
Plaideresque. Qui aime à plaider, de
plaideur.
Plancher. Planchéier; lambrisser, re-
vêtir.
Planiere. De plaine.
Planir (se). S'aplanir, diminuer.
Planté. Abondance, plénitude. — A
planté. En abondance.
Plat. Plateau.
Pleinsit. Plaignit.
PJeu. Plu.
Pleust (qu'il). Qu'il plût.
Pleuuir. Garantir, promettre, affirmer.
— le pleuuy. Je garantis.
Plombé. Vicié; peu dégourdi.
Ployable. Qui peut être ployé, flexi-
ble.
Pius gue. Depuis que, après que.
Podagrique. Podagre.
Poil. Barbe, chevelure.
Poinct. Poing; point.
Poindre. Frapper du poing, battre, pi-
quer. — Us poingnent. Ils pi(iuent.
Poingnard. Poignard.
Pointures. Traits piquants, piqûres,
légers désagréments.
G.744
ESSAIS DE MONTAIGNE.
Poisamment. Pesamment.
Poisant. Pesant, lourd.
Poix. Poids.
Police. Gouvernement.
Polissure. Propreté, éclat.
Poilu. Souillé.
Poltronesque. Qui rend poltron, amol-
lit.
Poly. Propre, orné, élégant, confor-
table.
Ponant, ponent. Occident.
Ponctille, pontille. Menu détail; con-
testation, dispute sur un sujet léger.
Portoire. Ce qui sert à porter.
Porture. Allure.
Poste (à sa). A son gré, à sa disposi-
tion, à sa convenance.
Postes assises. Relais permanents.
Posthume. Descendant, héritier.
Postposer. Subordonner.
Postreme. Dernier.
Potager, potagier. Qui a charge du
potager.
Pouil. Pou.
Pouiller. Dire des injures.
Poullier, poulailler. Bicoque, place
forte sans importance.
Poultre. Poutre.
Pour. Par. — Pour ce que, pour au-
tant que. Parce que.— Pour... que.
Quelque. — Pour quoy. C'est pour-
quoi.
Pourmener. Promener.
Pourpenser. Méditer, réfléchir, pré-
voir, préméditer.
Pourpoint (estre mis en). Être dé-
pouillé, réduit à ce que l'on a sur le
corps; être dans l'embarras.
Pourpointier. Tailleur qui ne faisait
que des vêtements pour la partie su-
périeure du corps (pourpoints).
Pourpris. Enclos, surface.
Pourtant. Cependant, c'est pourquoi.
Pourtraict. Portrait.
Pourtraire. Faire le portrait.
Pourueu. Pourvu.
Pouruoyance. Prévoyance.
Pouruoyer. Pourvoir, prévoir.
Poux. Pouls, battement des artères au
poignet.
Practique. Pratique.
Practiquer. Gagner, soudoyer.
Praeexcellence. Prééminence, excel-
lence supérieure.
Preambulaire. Qui précède, de début.
Prébende. Revenu d'un bénéfice ecclé-
siastique.
Precedence. Préséance; supériorité.
Preceller. Tenir le premier rang.
Precipiteusement. Précipitamment.
Precipiteux. Précipité; dangereux.
Predicament. Catégorie.
Préférence. Supériorité.
Pretix. Fixé, déterminé, arrêté.
Prelater (se). Affecter un air de di-
gnité, se prélasser.
Prens. Prends.
Préoccuper. Occuper, saisir d'avance,
prévenir, anticiper.
Preordonner. Ordonner d'avance.
Preposteres. A rebours, à contre-sens.
Presbtre. Prêtre.
Prescry (ie). Je prescris.
Présence. Prestance
Présentation. Formule de politesse.
Presse. Monde, foule; vie publique.
Preud'hommie, prud'homie. Probité,
honnêteté.
Prime. Premier.
Primement. Premièrement, d'abord,
exactement. .
Primesaultier. Primesautier;qui don-
ne son plus grand effort dès le pre-
mier moment, qui agit dès que l'idée
lui en vient.
Principesque. Qui est le propre des '
princes.
Principiant. Commençant.
Prindrent (ils). Ils prirent.
Prins, prinse, print (il). Pris, prise,
il prit.
Prinsaut (d'vn). D'un premier saut,
subitement.
Prinse (en). En butte, aux prises.
Prisable. Digne d'être pris, estimé.
Priuation. — Manque, abstention.
Priué. Intime, familier; particulier,
personnel.
Priuement. En particulier, familière-,
ment.
Priuilegier (se). S'accorder un privi-
lège.
Prix tait (retourner à son). Retour-
ner à sa besogne.
Procerité. Haute taille, belle stature.
Proche (le). Le prochain.
Procliue. Enclin à.
Professoirement. D'une façon profes-
sionnelle, pratiquement.
Protluuion. Écoulement, flux.
Protonder. Approfondir.
Protus. Répandu abondamment.
Progeniteur. Ascendant.
Promeine (il). Il promène.
Prominant. Proéminent, dominant.
Promiscue. Mêlé, confus; commun à
tous; indifférent.
Proportion. Comparaison.
GLOSSAIRE. PRO.
G. 745
Propre (mettre an). Fournir l'occa-
sion à quelqu'un de faire une chose.
Propriété. Propreté.
Prospect. Dont la vue s'étend au loin,
perspective.
Prosterné . Délabré, affaibli, affaissé.
Protocole. Qui suggère, fait souvenir,
souffleur.
Prou. Assez, beaucoup.
Proufit. Profit.
Proumenoir. Promenoir.
Prouuoir. Pourvoir, munir, garantir.
Pronuoyance. Prévoyance.
Prouidence. Prudence.
Prouision. Précaution.
Pruant. Sujet à des démangeaisons,
qui démange.
Publiq. Public.
Prudement. Avec pruderie, avec ré-
serve.
Puérilité. Enfance.
Puïr. Puer.
Puis. Depuis.
Pulmonique. Poitrinaire.
Pulpitre. Pupitre.
Pytbagorien. Pythagoricien.
Quand et quand. En même temps;
tout de suite. — Quant et, quand et.
Avec, comme.
Quantes fois. Combien de fois.
Quart. Qui est en quatrième, qui com-
plète à quatre.
Quartelet. Diminutif de quart.
Quartier. Pays.
Quartier (à). De côté, à part.
Quelquefois. Une fois.
Quelques fois. Plusieurs fois.
Quest, queste. Gain, profit; quête, re-
cherche.
Quester. Chercher, rechercher avec
soin.
Questure, questuaire. Mercenaire, qui
est obligé de travailler pour vivre.
Queue (brider Vasne par la). Prendre
mal ses dispositions.
Quiète. Tranquille, paisible, sûr. —
Quietement. Tranquillement.
Quitte. Délivré de toute charge.
Quitter. Concéder, libérer, tenir quitte.
Quoy. Que ne faisons-nous? — Quoy
non. Que ne faisons-nous pas encore?
— Quoy que. Dirai-je que.
Rabillage. Action de raccommoder.
Racointer. Se réconcilier, revenir de
son emportement.
Racourciment. Abréviation, raccour-
cissement.
Racoyser. Calmer, apaiser.
Radoté. Radoteur, cassé.
R'aduisement, rauissement. Retour
sur soi-même.
R'aduiser, r'auiser. Corriger, amen-
der.
Raller à terre. Raser la terre; vivre
modestement.
Ramentauoir. Remettre en l'esprit,
rappeler, remémorer.
Rapetasser. Raccommoder.
Rapporter. Rendre, exprimer, dépein-
dre.
Rarité. Rareté.
Ratiocination. Raisonnement.
Raualer. Jeter bas, faire descendre.
— Se raualer. Se reporter.
Rauasser. Rêvasser.
Ray. Rais, rayon.
Reboucher. Emousser, calmer.
BeJbours. Revêche, intraitable, rétif;
qui agit à contre-cœur.
Rebrasser. Retrousser, relever, écar-
ter, découvrir.
Recelation. Secret, discrétion.
JJecepte. Recette.
iîeceu. Reçu.
Recharger. Répliquer vivement, à
nouveau.
Rechigner. Geindre, faire mauvaise
fi^-^ure.
Récitateur. Narrateur, faiseur de ré-
cits.
Reconuoyer. Accompagner, recon-
duire.
Recordation. Souvenir, mémoire.
Recors. Témoin.
Recourir. Secourir, délivrer.
Recousse, rescousse. Reprise de ce
qui a été enlevé de force; retour of-
fensif.
Recouurer. Découvrir, rencontrer.
Recouureur. Couvreur.
Recreu. Être rendu, excédé de fatigue,
hara.ssé.
Recueil. Accueil.
Jîecueiiieur. Compilateur.
Recueillir. Accueillir.
Reculement. Disgrâce.
G.n6
ESSAIS DE MONTAIGNE.
Redouter. Douter à nouveau.
Réduire. Concentrer.
Retors, retfors. Raifort, plante.
Regard de (par, pour le). Quant à,
par rapport à, en ce qui concerne.
— A mon regard. A mes yeux.
Régent. Professeur.
Régenter. Professer, gouverner. .
Régiment. Genre.
Regorger. Dégorger, vomir.
Reimperieux. Impérieux, fiers, hau-
tains.
Reistre. Long manteau à la mode al-
lemande.
Relaxation. Relâchement d'entrailles.
Reliques. Restes.
Remascher. Aie figuré repasser plu-
sieurs fois dans son esprit.
Rembarrer. Garnir.
Remerquer, remercable. Remarquer,
remarquable.
Remis en autruy. Qui se fie à autrui.
Remise. Apaisement, arrêt. — Re-
mises. Défaillances.
jReœuement. Mouvement.
Renardeau. Jeune renard.
JRenchoir. Choir à nouveau, retomber.
Rencontres. Bons mots, répliques, re-
parties.
Rendre. Accomplir.
Renger. Ranger.
Rengreger. Augmenter, accroître, ag-
graver.
Repentable. Disposé au repentir.
Repentance. Repentir.
Repratiquer. Revoir, fréquenter à
nouveau.
Reprehension. Blâme, reproche.
Reseruation. Réserve.
Reseul. Filet, fichu, guimpe.
Resigner. Indiquer, désigner.
Résolu. Persuadé, convaincu; défini-
tif.
Résoudre (se). Se rassurer, recouvrer
la tranquillité.
Response. Réponse.
Resseant. Domicilié, résidant, séjour-
nant; sédentaire.
Ressentiment. Action de sentir, d'é-
prouver.
Ressentiment (causer du). Inspirer
de la rancune.
Ressentir. Prévaloir.
Ressiner, reciner. Collation qu'on fai-
sait après le dîner; souper.
Restrinction. Restriction.
Retenter. Éprouver, essayer, sonder.
Rétention. Retenue, garde, conserva-
tion.
Retenument. D'une manière retenue.
Retirée. Séparée.
Retirer à. Ressembler.
Retraict. Latrines.
Retraicte. Retraite.
Retrain, restrain. Restreint, resserré;
par extension économe.
Retranchement. Suppression.
Rets. Filets.
Réussir. Devenir.
Reuanger. Poursuivre une affaire au
lieu et place de quelqu'un.
Reueillon. Repas pris au milieu de la
nuit.
Reuenir (se). Revenir à soi, se rani-
mer.
Reuerentiel. Respectueux.
Reuers. Étrange, bizarre.
Reuirade. Réplique, riposte.
Reuoquer. Éloigner.
Rheume, reume. Rhume, catarrhe, etc.
Riard. Rieur.
Rincer. Froncer, rider.
Riotte. Plaisanterie aigre-douce, ta-
quinerie, petite dispute.
Roidir. Roidir.
RoUe (mettre en). Mettre par écrit.
Rommeler. Grommeler, murmurer.
Rondelier. Soldat armé de la ronda-
che (bouclier de forme ronde).
Rouer. Tourner.
Rouet (mettre au). Déconcerter. —
Estre au rouet. Être à bout de res-
sources d'esprit.
Route, roupte. Défaite, déroute.
Rude. Grossier, qui n'est pas cultivé.
Ruffian. Galant; proxénète.
Rythme. Règle, mesure. — Rythmé.
Rimé.
m.
Sablons. Régions sablonneuses.
Sabouler. Malmener, houspiller, fou-
ler aux pieds; réprimander.
Sac en poche (acheter). Acheter sans
voir, de confiance.
Sacraire. Sanctuaire.
Sagette. Flèche.
Saison (en). Au moment, à l'époque.
Salade. Casque léger sans cimier.
Sale. Salle.
Salseperille. Salsepareille, plante.
Sanctimonie. Sainteté, pureté.
Saoul. Soûl. — Saouler. Soûler,
Sapience. Sagesse.
Sarbatane. Sarbacane; au figuré, per-
sonne interposée.
GLOSSAIRE. SAT.
G.747
Saturité. Satiété, saturation.
Saulter. Sauter.
Sauteler. Sautiller.
Sauterie. L'exercice du saut.
Sauatier. Savetier.
Sauue. Sauf.
Sauueté. Sûreté, hors de péril.
Saye. Saie, sayon, blouse.
Scarrebillat. Voir Escarbillat.
Sçauant. Savant. — Sçauanteau.
Petit savant, ayant plus de préten-
tion que de science.
Sçauoir, sceu, ie sçais, il sçait, ie
sçauoye, ie sceuz, qu'il sceust. Sa-
voir, su, je sais, il sait, je savais, je
sus, qu'il sût.
Sçauoir mon. Reste à savoir.
Sceleré. Scélérat, criminel.
Science. Les lettres, le savoir.
iSeau. Sceau.
Secousses. Trémoussements.
Secousses (à). De temps à autre.
Secrestin. Sacristain.
Sedon. Selon.
Seeller. Sceller.
Seigner. Signer; faire le signe de la
croix.
Sein. Sain.
Seing. Signe.
Seiour. Repos, soulagement; oisiveté.
Seiourner. Donner du repos, amortir.
— Se seiourner. S'abstenir, se dis-
penser.
Sembler. Ressembler, être semblable à.
Semons, semond. Averti, invité, solli-
cité.
Sens (ie me). Je sens.
Sentencier. Prononcer des sentences,
des jugements.
Sentiment. Odorat.
Sentir. Écouter.
Seoir. Être assis, être convenablement.
Serein. Humidité du soir.
Sereine. Sirène.
Sereiner. Rasséréner, calmer, apaiser.
Serue. Impérieuse, astreignante.
Seur. Sûr. — Seurement. Sûrement.
Seureté. Sûreté.
Si. Ainsi, autant. —Si, et si. Pourtant,
toutefois, néanmoins. — Si que. Si
bien que, de telle sorte que. — Si
est-ce que. Toujours est-il, quoi qu'il
en soit.
Sier. Convenir.
Sier. Tourner, virer; se reporter.
Signamment. Notamment, spéciale-
ment.
Signifiant. Significatif.
Siller les yeux. Ouvrir et fermer ra-
pidement les paupières; obstruer,
voiler.
Simples. Nom vulgaire des herbes et
plantes médicinales.
Simplesse. Naturel sans déguisement,
simplicité naturelle.
Sincérité. Pureté, netteté de juge-
ment.
Skeletos. Squelette, écorché pour étu-
des anatomiques.
Solage. Sol, terroir.
Solemne. Solennel.
Somme. En somme, en résumé, enfin.
Sommelerie. Pièce aux provisions,
crédence.
Sommier. Bête de somme.
Somne. Sommeil, somme.
Songneux. Soigneux.
Sonner. Signifier, exprimer ; jouer d'un
instrument.
Sorbonnique. A l'usage des étudiants
de la Sorbonne.
Sorcerie. Sorcellerie, sortilège.
Soubstenir, soustenir. Soutenir, sus-
pendre.
Soubterraines, sousterraines. Cor-
rompues, infernales.
Soudain que. Aussitôt que.
Souet, soueue. Suave.
Souffrance. Patience, tolérance.
Souloit. Avait coutume.
Sourdaux. Qui font les sourds.
Sourdre. Surgir, jaillir.
Souuenance. Souvenir.
Soye. Soie, produit des vers à soie.
Soye (qu'il), qu'ils soyent. Qu'il soit,
qu'ils soient.
Splanade. Esplanade.
Spondaique. Monotone.
Stile. Usage, coutume.
Strette. Étreinte, attaque, élancement.
Stropiat. Estropié.
Suader. Persuader.
Suasion. Persuasion, conseil, sollicita-
tion.
Subiect, subiection. Sujet, sujétion.
Succéder. Réussir, avoir du succès.
Suffisance. Capacité, habileté.
Suffisant. Capable.
Suffragant. Dépendant, subalterne;
humble, modeste; accessoire.
Suitte. Suite.
Superabondance. Surabondance.
Supererogation. Action de donner
par surcroît.
Superflument. Avec supei'fluité.
Supernaturel. Surnaturel.
Supernumeraire. Qui dépasse la me-
sure ordinaire; surnuméraire.
G.748
ESSAIS DE MONTAIGNE.
Suppediter. Subjuguer, fouler aux
pieds, l'emporter sur.
Supplir, supplissent (qu'ils). Sup-
pléer, qu'ils suppléassent.
Surgeon. Source.
Surmonter. Vaincre.
Surpayé. Exalté,, porté au delà de sa
valeur.
Surpoids. Excédant de poids.
Surprint (il), ils surpreignent. Il
surprit, ils surprennent.
Suruenance. Ce qui survient, événe-
ment.
Sus. Dessus, sur. — Sus bout. Tout
court.
Suspens. Suspendu, indécis.
Suyure. Poursuivre, continuer.
T.
Tablier. Table sur laquelle on jouait
aux dames, aux échecs, au trictrac.
Tabourin. Tambour.
Tabut. Querelle, vacarme. — Tabuter.
Inquiéter, molester.
Taint. Teint.
Talent. Monnaie de compte chez les
Grecs.
Tant. Si. — A tant. Alors. — Tant
plus [répété). D'autant plus. — De
tant que. D'autant que. — Tant il y
a. Quoi qu'il en soit.
Tantost. Bientôt.
Targue (se mettre sur sa). Se mettre
sur ses gardes.
Targuer (se). S'armer.
Tastonner. Flatter, amadouer.
Tect. Toit.
Tempérance. Modération.
Température. Modération.
Tempestatit. Impétueux, violent, em-
porté.
Tempesteur, tempestueux. Qui fait
du bruit, qui est à la tempête.
Tenants. Ceux qui sont attaqués {par
opposition avec assaillants).
Tendreur. Tendreté, qui est tendre.
Tenser. Tancer.
Terrein. Terfain.
Tesmoing. Témoin.
Test. Suture du crâne.
Testonner. Piquer, blesser quelqu'un.
— Se testonner. Se parer la tcte, se
pomponner.
Teust (qu'il se). Qu'il se tût.
Théologal. A l'usage des gens d'église.
Théorique. Théorie.
Throne. Trône.
Tiers, tierce. Troisième, qui complète
à trois.
Tiltre. Titre.
Tinst (qu'il), ils tindrent. Qu'il tînt
ils tinrent.
Tintouiner. Tinter, retentir.
Tirasser. Tirailler.
Tistre. Tisser.
Titanien. Titanique, gigantesque.
Tordre. Plier.
Tort. Tordu, contourné.
Touche. Épreuve, atteinte.
Toucher. Eprouver comme avec la
pierre de touche. — Toucher à la
main. Maintenir, prétendre.
Touer. Remorquer. •
Tournebouler. Tourner et rouler;
bouleverser.
Tourneuirer. Tourner et virer en
tous sens.
Tours (à). Tour à tour.
Tout (à), à tout de. Avec. —Et tout.
Aussi. — De tout, tout du. Tout à
fait, entièrement.
Tracasser. Mener çà et là, traîner. —
Suiet tracassé. Sujet rebattu.
Trafique. Trafic.
Trahistre. Traître.
Traict. Trait. — Traict, traicté. Tiré
du fourreau, nu, dégainé.
Traiect, traiet. Traverser. — Traiec-
ter, traietter. Transporter, passer
par eau.
Trampe. Trempe.
Tranchant. Franchissant.
Trante. Trente.
Trapelle. Petite trappe, souricière.
Trasseure. Trait de plume, rature,
surcharge.
Trépignant. Prompt et énergique.
Trepillement. Trépignement.
Tressuer. Suer abondamment.
Trestout, tretout. Augmentatif de
tout.
Treuue (ie). Je trouve.
Trichoterie, tricotterie. Tricherie,
chicane.
Troigne, trougne. Attitude, conte-
nance.
Trop. Beaucoup.
Tubercle. Mont, proéininence {term,e
de chiromancie).
Tuition. Défense.
Tumultuaire. Tumultueux, désor-
donné.
Turkesque. A la turque.
GLOSSAIRE. U.
G.749
U.
Chercher en V les mots en U.
V.
Vacation. Profession , état, occupation. •
Vaguer. Mener, suivre.
Vain. Oisif.
Val (à). En descendant. — A val de
route. En déroute.
Valeur. Mérite.
Vanter. Être le jouet des vents.
Vastité. Qualité de ce qui est vaste,
immensité.
Vau le vent (à), auau le vent. Sui-
vant la direction du vent.
Vauls (ie). Je veux.
Vausirent (ils). Ils valurent.
Vays (ie). Je vais.
Vberté. Fertilité, fécondité.
Veau. Niais, simple d'esprit. — Brides
à veaux. Balivernes, niaiseries,
contes ridicules.
Vetuage. Veuvage.
Veid (il), il veit. Il voit.
Veind (il). 11 vint.
Vendiquer. Revendiquer.
Vénérien. Qui tient de Vénus (terme
d'astrologie).
Veniance. Vengeance.
Ventance, venter. Vanterie, vanter.
Venteuses. Légères, vaines.
Venue. Train continu ; accès, attaque.
— Par venues. Sans interruption.
Veoj'd (il), il void. Il voit.
Veoir. Voir.
Verbale. Qui porte sur des mots.
Vergoigne. Vergogne, honte. — Ver-
goigner. Avoir honte. — Vergo-
gneux. Pudique.
Véritable. Véridique, disant habituel-
lement la vérité.
Verser. Renverser, se comporter.
Ver similitude. Ressemblance, vrai-
semblance.
Vert (prendre sans). Prendre au dé-
pourvu.
Vertu. Courage, vertu militaire.
Vertugade. Jupe gonflée au moyen
d'un bourrelet porté en dessous.
Verues. Caprices, fantaisies, imagina-
tions.
Vespre. Soir.
Vesquirent, vesquimes, vesquit, ves-
cut. Vécurent, vécûmes, vécut.
Vesture. Vêtement, habillement.
Veuil (ie). Je veux.
Viande. Vivres, ce qui sert à la nour-
riture.
Vilain. Roturier, serf.
Vilanie. Vilenie.
Vilité. Bassesse.
Villanelles. Sorte de poésies pastorales.
Vin au bas. Vin du fond du tonneau,
vin arrivé à la lie.
Virer. Tourner.
Visage. Aspect, apparence.
Visitation. Action de visiter, visite.
Visiue. Visuelle.
Vitale (la). La ligne de vie (terme de
chiromancie).
Vittoailles. Victuailles.
Vmbrages. Voir Ombrages.
Voglie. Volonté.
Voire. Vraiment, en vérité, oui, certes,
même. — Disant que voire. Disant
que c'est vrai. — Voire mais. Vrai-
ment môme.
Voirement. Effectivement.
Voirie. Lie, immondices, le plus bas
degré.
Vois (ie). Je vais.
Voix. Parole, mot.
Volante. Bonne volonté.
Volantiers. Volontairement, volon-
tiei's, vraiment.
Volet (trier sur le). Entre plusieurs
choses de même espèce, choisir la
meilleure.
Volupté. Plaisir, satisfaction.
Vouldra (il). 11 voudra.
Voulsist, vousist, vousisse. Voulût,
voulusse.
Voy (ie), ie voye. Je vois.
Voyager, ère. Qui aime à voyager.
Voye. Voie, chemin.
Voyelle. Qui est formé de sons, vocal,
verbal.
Vray, vraye, vrayement. Vrai, vraie,
vraiment.
Vreteres. Canaux de la vessie.
Vsance. Usage reçu.
Vtansiles. Ustensiles.
Vtil. Outil, instrument.
Vuidange. Évacuation.
Vuide. Vide.
Vulgaire (en). En langage national.
Vy (ie). Je vis.
Y.
Yambe. Jambe.
Yurogne. Ivrogne.
TABLE DES MATIÈRES
A. — Notice I
B. — Sommaire des Essais. 1
C. — Table des citations 63
D. — Variantes 95
E. — L'esprit des Essais 149
F. — Notes 265
G. — Glossaire 721
Typographie Firmin-Didot et C'«. — Mesnil (Eure).
""^^^^■^v.^^ m A ^■•*"^
^J
>^^^
N^">«K
^ûÎ
r^^
ry jn
OîS^.
^Ij^fisi
miA «