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HARVARD UNIVERSITY.
IvIBRARY
OF THE
MUSEUM OF COMPARATIVE ZOOLOGY
GIFT OF
c lUO-UtU/.
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MAR 30 1923
ESSAI
SUR LA PHYSIONOMIE DKS
SERPENS.
CET OUVRAGE SE VEND CHEZ :
J. A. G. WEIGEL à Leipsic.
ARNTZ ET G.° à DûsseldovJ,
RORET à Paris.
GH. SGHWARTZ et AL. GAGNOT à Paris.
BLACK ET ARMSTRONG à Lo?ulres.
HENRY HERÏNG à Londres.
BOSSANGE BARTHE à Londres,
DE ï/IJ>II»RII»llîRIE DE .1. KIPS, J.Hz.
il f.A HAYK.
E S S A I
SUR I. A PHYSIONOMIE
DES SERPENS,
^ PAR
H. SCHLEGEX.,
DOCTEUR EN PHILOSOPHIB, CONSBEVATEUa DU MUSEK DES PATS-BàS,
MEMBRE DB PLCSIEURRS SOCIETES SAVANTES»
OUVRAGE
ACCOMPAGNÉ D'UN ATLAS
CONTENANT
AMSTEUl>A3f.
M. H. SCIiONEKAT, LlBRAlUE-ÉDlTElJri^
1837
d^i^fmi '^/u
Trans .to Mas » oî Oomp .^^Sool»
V dHSlTV
^ ^
, PARTIE GENERALE,
1
LETTRE
A
MONSIEUR C. J. TEMMINCK,
CHEVALIER DV LION NÉERLANDAIS, DIRECTEUR
DD MUS^.E DES PAYS-BAS, MEMBRE DE PLUSIEURS ACADÉMIES ET
SOCIÉTÉS SAVANTES.
t QQ^Q^vûT '■ ■
ï/origine de l'ouvrage que je mets au jour, remonte
aux premiers temps de mes études; je puis par conséquent
le regarder comme mon premier travail dans l'histoire natu-
relle. Vous m'avez accordé la faveur de mettre votre nom
à la tête de mon livre: cette permission honorable m'offi'e
la plus belle occasion de vous témoigner publiquement ma
reconnaissance et de faire savoir au monde savant, combien
vous avez contribué à faciliter mes recherches, ou plutôt ,
que c'est à vous que l'on en doit la publication. Après le
départ pour les Indes de notre infortuné ami feu Boie, vous
eûtes la bonté de confier à mes soins les collections éten-
dues quiembrassent les animaux vertébrés, l'anatomie com-
parée et les fossiles: collections qui forment la plus belle
partie du Musée des Pays-Bas. Excité par l'exemple de mon
Il
savant prédécesseur, et dans l'espoir de pouvoir être utile
à la science, en cultivant une branche de la zoologie jusqu'à
présent négligée, je dirigeai mes recherches sur la classe
des Reptiles. Je commençai par représenter au moyen de
figures exactes, les espèces les plus intéressantes de cette
classe d'êtres peu connus , et c'est ainsi que se forma petit
à petit, une suite de dessins anatomiques et zoologiques,
dont je mets aujourd'hui une partie au jour, et que je
ferai suivre de l'autre, lorsque les nombreuses difficultés
qui ont jusqu' à présent entravé la publication de mes
recherches, seront totalement levées.
J'ai résumé dans mon livre toutes les observations que
j'ai pu faire sur l'ophiologie. Cependant, l'état dans lequel
se trouve cette partie de la science, we contraignit de
dévier à beaucoup d'égards de mon plan primitif, et
de différer la publication des recherches anatomiques qui
devaient faire la base de mes travaux. Conunent, par exemple,
mes lecteurs m'auraient-ils compris , si je leur avais parlé des
nombreuses espèces nouvelles, dont la découverte est due à
nos voyageurs! Comment se recoimaître dans les méthodes,
où sont consignées un si grand nombre d'espèces, souvent
purement nominales ou formant de doubles emplois! Quel
ouvrage peut-on recommander, pour servir de guide dans
ce labyrinthe! — Je n'en connais aucun.
Ces raisons, jointes à plusieurs autres, m'ont déter-
miné à donner à mon livre la forme sous laquelle il paraît.
Cependant, en concevant ce nouveau plan, il se présentait
ni
(les difTicultés analogues [a celles , dont je viens de faire
menlion. Quelles sont les figures que je pourrais citer pour
compléter mes descriptions , et combien peu de natura-
listes sont-ils à même de consulter les ouvrages de luxe,
dans lesquels elles sont contenues? En putre, aucune étude
n'offre autant d obstacles que la coniparaison des diverses
espèces de serpens, êtres qui se ressemblent presque tous
par la forme du corps, en sorte que l'on est souvent réduit
à l'organisation de la lête, pour en tirer les caractères
dislinctifs.
Ces motifs m'ont engagé à réunir sur une même planche
les portraits de toutes les espèces d'un genre ou du moins
ceux des espèces les plus remarquables. En comparant ces
portraits , on parviendra facilement à saisir la physionomie
propre à chaque espèce et à la distinguer, par ce moyen,
des espèces voisines.
Le mot de physionomie est pris ici dans l'acception
^ordinaire ; mais il signifie également l'impression totale
que fait sur nous l'ensemble d'un être quelconque, impres-
sion que l'on peut sentir , mais qu'il est impossible de
rendre au moyen de paroles: elle est le résultat de l'har-
monie de toutes les parties isolées, dont on embrasse la con-
formation d'un coup-d'œil, et dans leurs rapports mutuels ;
on la retient dans son ensemble, sans cependant pouvoir
se rendre compte des propriétés de chacune d'elles prise
isolément. Tout ce qui existe dans la nature, soit animaux *
soit plantes, soit même êtres inanim.és, fait sur nous celte
ÎV
impression , mais elle est d'autant plus difficile à analyser,
que les êtres que nous examinons sont plus compliqués;
car plus leur nature est élevé plus les divers traits se
confondent dans l'harmonie de l'ensemble. Une des par-
ties les plus essentielles de la tâche que se propose Je
zoologiste , me paraît être d'analyser cette harmonie et
d'indiquer chaque trait caractéristique dans ses rapports
avec l'ensemble. Cependant, nos méthodes modernes nous
conduisent précisément sur un chemin opposé à celui que
je viens d'indiquer ; l'exemple faussement interprêté du
sublime auteur du système de la nature, a même sanctionné
Tusage de borner ordinairement la connaissance des êtres
à tels caractères qui se présentent au premier aspect.
En examinant une série d'animaux vivans , l'observateur
attentif remarquera qu'il se peint dans leurs traits , dans
leur regard et jusque dans leurs formes, l'expression de
certains penchans, dliabitudes, de passions , qui sont, d'une
manière plus directe que chez l'homme , le résultat de
l'organisation. On parviendra , en réitirant les observations ,
à reconnaître à ces traits les diverses espèces d'animaux;
on saisira les relations qui lient ces espèces les unes aux
autres; on les rapprochera et en procédant synthétique-
ment, on atteindra à la méthode naturelle. Cette série
d'êtres ainsi rapprochés, fera une impression totale, sem-
blable à celle que le faisait un être isolé; une impression
qu'il faut peindre dans son ensemble pour en faire con-
naître les traits principaux.
V
Cette manière d'envisager la nature est, à la vérité,
diamétralement opposée à celle qui part de quelques carac-
tères isolés pour faire connaître les êtres ; mais , comme elle
est la seule qui ofTre les moyens de tracer un tableau fidèle
de la nature , comme elle dégage Tesprit, enchaîné dans les
bornes étroites des méthodes artificielles, on devrait fixer
de bonne heure l'attention du jeune naturaliste sur l'uni-
versalité de ces vues et Taccoutumer à saisir, à la fois
d'un coup-d'œil, tous les traits dont l'ensemble forme le
caractère particulier à chaque être.
Mes propres tentatives et l'exemple de mes prédécesseurs
m'ont démontré à l'évidence que la méthode artificielle peut
s'employer avec beaucoup moins de succès chez les Reptiles
que chez les autres animaux, et qu'en suivant ces prin-
cipes, on ne parviendra jamais à donner à la science cette
clarté si nécessaire au commençant. Je me suis donc efforcé
en publiant mes travaux , de tracer en peu de mots le
portrait fidèle de chaque espèce, considérée dans les divers
rapports avec les espèces voisines ; d'indiquer le passage
d'une coupe imaginaire à l'autre , et de réduire la science
aux élémens les plus simples: tel est le but de ma classifi-
cation. Pour parvenir à ce but sans faire des innovations,
je me suis servi, relativement à la nomenclature, des
matériaux que j'ai trouvés en abondance dans les ouvrages
de mes devanciers. J'espère que les savans me sauront gré
de cette mesure ; car quelle est la mémoire capable d'embras-
ser la nomenclature, même d'une seule classe du règne
vr
animal, et de s'en servir pour se reconnaître clans l'élude
delà nature? Dans quelle confusion les naturalistes mo-
dernes n ont-ils pas plongé la plus belle des sciences, en
^érigeant ces systèmes inintelligibles, dont le seul mérite
se réduit souvent a une vaine pompe de paroles qui étour-
dissent au lieu d'éclairer. Ces systèmes ne me semblent
faits que pour leur auteur, et manquent leur but, qui est
d'ofi'rir un guide au commençant jusqu'à ce qu'il soit à portée
de juger lui-même qu'il n'existe point de systèmes dans la
nature. Encore ces métbodes artificielles modernes ne sont-
ellcs pas même à l'épreuve d'un examen rigoureux: on est
loin d'avoir fixé ce que l'on entend par espèce , par genre ;
de petites différences de forme de quelque partie isolée, due,
soità unaccident,soit à l'influence d'un climat divers, suffissent
souvent aux naturalistes pour diviser une espèce en plusieurs
sous-espèceset pour désigner cliacune sous une épithète par-
ticulière; quelques unes de ces espèces imaginaires réunies,
forment des coupes que l'on se plaît à appeler sous-genres ,
quoiqu'elles ne soient à la vérité que les espèces elles-mêmes,
etc. A quels résultats doivent conduire de pareilles vues!
La critique des ouvrages de plusieurs de mes devanciers
m'a donné beaucoup de peine: il fallait être sévère; je l'ai
été, mais aussi j'ai été impartial. J'avoue ne pas concevoir,
comment plusieurs de ces travaux si difficiles à consulter,
peuvent être utiles au voyageur qui, en sa qualité de poly-
graphe, doit rapidement se familiariser avec la nature des
êtres,, afin de régler ses observations. Un livre est ordinal-
VJI
rement, pour le savant hahitanl les villes de province, le
seul moyen cl étudier les productions exotiques de la nature :
en un mot, les livres lui tiennent aussi lieu des collections.
Le mien est seulement fait pour répondre à ce but, ou à
celui de communiquer mts observations au public où à
ceux qui ne sont pas a portée d'en faire eux-mêmes.
Vous concevez, Mor.sieur, que j'ai rencontré lors de mon
travail de grandes difiicultés: difficultés, qui tiennent leur
origine soit de la nature de la chose, soit de la manière
dont on a cultivé la science jusqu'à présent. Le premier
objet de mes recherches était la détermination rigoureuse
des espèces. Pour arriver à ce but, je fus obligé de faire
l'histoire de chacune d'elles, d'en étudierchronologiquement
la synonymie, de former des commentaires sur tous les
ouvrages iconographiques, pour prouver enfin, au moyen
de comparaisons des figures et des descriptions, l'identité des
innombrables espèces nominales avec quelqu'une de celles
que je reconnais exister. C'était principalement en m occu-
pant de ce travail ingrat et fastidieux, qu'il fallait employer
la critique la plus sévère. Je n'entrerai pas dans plus de
détails, pour discuter la question, s'il existe dans la nature,
des espèces ou non, s'il faut peut-être adopter l'existence
de races, etc.; je me bornerai à justifier mes idées, lors-
qu'elles se rencontreront avec celles de mes prédécesseurs.
Je me suis proposé de n'adopter dans mon livre que des
espèces connues d'une manière précise. Eiî soumettant les
espèces, reçues dans la catalogue méthodique des êtres, à
vfri
un examen rigoureux, on en compte un grand nombre
(l'origine incertaine; d'autres sont établies d'après de vieux
exemplaires décolorés; d'autres encore y ont été introduites
d'après un examen superficiel et sans avoir été comparées
aux espèces voisines: quelques mots suffisaient pour les
caractériser; mais très souvent ces diagnoses ou même les
descriptions détaillées, ne contiennent que l'énumération de
traits propres à toutes les espèces du genre, en sorte qu'après
les avoir analisés et rejetés l'un et l'autre, il ne reste aucune
marque distinctive pour l'espèce. On peut dire la même
chose des genres établis souvent avec autant de négligence.
Suivant mon opinion ^ une description qui n'est pas com-
parative, ne peut offrir aucune utilité. S'il est vrai qu'un
genre représente l'ensemble de toutes les espèces qui y sont
rangées, il faut aussi avouer, que l'on ne peut parvenir
à la connaissance de ces dernières, qu'en les comparant
entre elles, et en constatant ce qui est propre à chacune
d'elles et commun à toutes. Certes, il ne peut résulter que
peu de fruit pour la science de l'admission d'espèces dont
on ignore toutes les propriétés et dont on ne connaît que
le nom qu'on leur a imposé; des espèces dont le nombre
toujours croissant embrouille les méthodes. L'étude de la
nature ne consiste pas dans cette connaissance superficielle
des êtres: mais elle les envisage sous le triple rapport
de la zoologie, de l'anatomie et de la géographie phy-
sique. Mon but principal, ayant été, en publiant mes
recherches, d'exposer les relations qui existent entre les
IX
animaux et les lieux qu'ils habitent, j'ai jugé nécessaire
de n'adopter des espèces dont on ignore la patrie, que
lorsque quelque trait saillant dans l'organisation pouvait
les rendre d'un véritable intérêt pour la zooloi^ie ou pour la
physiologie.
Il faut aussi user de circonspection, en considlant les
données sur la patrie des animaux, telles qu'elles sont
consignées dans la plupart des ouvrages. Peu de naturalistes
sont à même de se procurer les objets de la première main ,
et on peut rarement se fier à la véracité des marins qui,
souvent trompés eux-mêmes , rapportent de leurs voyages
des objets d'histoire naturelle de contrées éloignées de celles
qu'ils ont visitées. On transporte quelquefois les objets d'une
colonie à l'autre: ils passent par plusieurs mains, on oublie
leur origine; enfin on les envoie en Europe sous le titre de
productions d'un pays qu'ils n'ont jamais habités. J'ai eu
souvent l'occasion d'être témoin oculaire de méprises de
cette nature. Il y a quelques aminées, qu'un de mes amis
reçût une petite collection de Reptiles javanais d'un jeune
planteur de Surinam , qui prétendait en avoir recueilli quel-
ques-uns lui-même dans les environs de Paramaribo; j'eus
beau démontrer au nouveau possesseur, que des animaux
javanais, tels que le Gecko guttatus, l'Élaps furcatus, le
Galeotes gutturosus et d'autres, ne sauraient habiter eu
même temps deux contrées aussi éloignées : on n'attacha
aucune croyance à mes démonstrations. On nous a souvent
adressé du Cap de Bonne F.spérance des Reptiles des îles de
Ceylan et de Java. M. Klinkenberg à Utrecht possède une
belle variété du Boa cencliria, que des matelots lui ont
apporté comme ayant été pris à Java; et cetteerreur aengagé
feu Boie d'en faire une nouvelle espèce de Boa, appartenant
à Tancien monde. Un de mes amis, acceptant l'offre d'un
émigrant pour les Etats-Unis , de faire des collections d'his-
toire naturelle, lui fournit les moyens d'expédier le premier
envoi; cet envol arriva: il contenait une collection de reptiles
du Cap de Bonne Espérance. Parmi les reptiles, rapportés
par M. Blomhoff et décrits par feu Boie comme provenant
tous du Japon, se trouvent évidemment des espèces de Java
ou des îles voisines, comme cela a été depuis démontré par
les recherches de M. M. von Siebold et Burger. Feu Spix a
fait figurer parmi les animaux découverts au Brésil, plusieurs
espèces recueillies lors de son séjour à Gibraltar, et y a
même ajouté des notes sur leurs mœurs, sur les lieux qu'ils
habitent, etc. Je me tais sur l'ouvrage de Seba, dont la
plupart des indications de pays sont inexactes.
D'autres difficultés, non moins grandes, se présentaient
en faisant la critique des ouvrages iconographiques. Il
paraît que l'on ne sVst pas toujours bien pénétré du but
que doit remplir une figure. Suivant ma manière de voir,
elle ne doit pas simplement servir à reconnaître l'animal
qu'elle représente; mais elle doit remplacer l'animal pour
celui qui n'est pas à même de se le procurer. Or, pour
répondre à ce but, il faut que la figure soit dans toutes ses
parties d'une exactitude mathématique , afin que l'on puisse
xr
cUulier les proporlions relatives des organes; il faut éviler
par cette même raison les raccourcis autant que possible el
ne point embrouiller la figure par des ombres projetées.
Le elîoix des objets demande également de la circonspection:
Tagonie d'une mort violente laisse souvent des traces dans
les traits convulsifs de la face; quelques parties éprouvent
des lésions accidentelles, lors de l'emballage des objets;
cliez d'autres, les organes changent leur position respective;
ce qui est particulièrement le cas chez les ophidiens, dont
les os de la tête sont susceptibles d'un mouvement assez
considérable. En traçant mes figures, j'ai lâché d'éviter tous
ces obstacles; je me suis toujours servi dindividus en
état parfait de conservation et je n'ai jamais copié que la
nature; j'ai suivi le même principe pour mes descriptions,
et lorsque je n'ai pu le faire , je l'ai expressément indiqué.
L'examen comparatif des écrits de mes devanciers m'of-
frait de loin les obstacles les plus difficiles à surmonter.
La cause principale dont j'ai souvent fait mention, et qui
paraît avoir engendré les erreurs nombreuses qui défigurent
nos systèmes, est la multiplication des espèces et des gen-
res, érigés et introduits dans le système, d'après des carac-
tères isolés. Les exemples qui pourront justifier ce que je
viens de dire, sont innombrables: que l'on consulte mes
articles Eryx , Naja porphyrica , Boa cenchria, Python
Peronii et bivittatus, Â.crochordus , Tropidonotus bipunc-
tatus et fasciatus , Grotalus horridus, Vipera berus et
maint aulie, et Ton se convaincra que la même espèce
xri
porte souvent une douzaine cl'épithètes;x£UL^lle a souvent été
répartie dans plusieurs genres divers, qu'elle forme même
les types de différentes familles, qui figurent, tantôt parmi
les serpens venimeux, tantôt parmi les non-venimeux!
Que l'on examine les élémens hétérogènes dont les auteurs
ont composé leurs genres Boa, Hurria, Scytale , Elaps,
Trimeresurus et Yipera ! En suivant ces vues, il fallait
être fidèle à ce principe de classification , séparer les
Pythons des Boas et les placer dans une autre famille ; il
fallait éloigner l'Hydrophis colubrin de ses congénères,
ranger les Acrochordes parmi les serpens de mer etc.
Vous verrez dans la suite de mon travail, qu'il est
absolument impossible de classer les Ophidiens , en établis-
sant de ces caractères tranchés et isolés; ce sujet est de
trop d'importance cependant , pour que je puisse déjà le
quitter ;~ je me contenterai de citer encore quelques exem-
ples , propres à défendre mes idées contre celles de mes
adversaires , quoique je craigne d'avoir déjà épuisé
votre patience. Tout le monde conviendra , que le genre
Drviophis est un des plus naturels de l'ordre entier: on
peut lui indiquer pour traits distinctifs, soit un museau
effilé en trompe, soit des dents maxillaires moyennes et
postérieures plus longues, soit une prunelle transversale-
ment alongée , soit des teinfes vertes, soit enfin les
écailles lisses ; mais aucun de ces traits ne peut s'appliquer
à toutes les espèces à la fois. On Cme pour caractère essen-
tiel des Najas un cou extensible ; mais chez les diverses
xin
espèces qui composent ce genre, la faculté de dilater le
cou s'observe dans tous les degrés , en sorte que celles qui
s'éloignent le plus du type , offrent à peine les traces de ce
caractère. Presque tous les serpens venimeux proprement dits
présentent des écailles carénées ; mais personne n'éloignera
de cette famille les Trigonocépliales rhodostoma et nigro-
marginatus, parce que leurs écailles offrent une surface
unie ; personne ne rejetera de la famille des serpens veni-
meux colubriformes, dont les écailles sont ordinairement
lisses, les Naja hœmacliates et Vnigrum , où le cas opposé
à lieu. On observe dans la première famille un assez
petit nombre d'espèces dont la tête revêtue de plaques les
rapproche de la seconde famille, quoiqu'elles réunissent
d'ailleurs tous les caractères de la première. Peut-on
méconnaître l'affinité qui existe entre les Boas et les Acro-
clîordes , bien que ces derniers aient une queue compri-
mée et qu'ils manquent de crochets à l'anus? A quelle
confusion n'ont pas donné lieu les innombrables différences
individuelles dans la disposition des plaques de la tête chez
les Boas et les Pythons ! Ni la position des narines , ni la
configuration des lames frontales , ni la présence , ni le
défaut de dent cannelée, ne sont des caractères constans
dans le genre Homalopsis. Feu Boie a assigné aux Tropi-
donotes trois plaques oculaires postérieures: cependant
quelques espèces parmi les mieux caractérisées s'éloignent
des autres par l'absence de cette marque distinctive, tandis
qu'il existe des Couleuvres proprement dites, qui offrent
XIV
le caractère indiqué par Boie. Un grand nombre de genres
de la division des serpens non- venimeux comprennent
plusieurs espèces à dents sillonnées, tandis que le sys-
tème dentaire des autres espèces est souvent très uni-
forme, etc.
L'ordre dans lequel j'ai rangé les espèces n'est pas
arbitraire. En comparant les espèces d'une coupe géné-
rique, on remarquera ({ue les caractères du genre se
trouvent particulièrement prononcés dans une d'entre elles:
on peut appeler cette espèce, l'espèce type de la coupe
générique , mais toutes les autres , quoique modelées sur ce
type, présentent des modificalions plus ou moins sensibles;
quelques unes mêmes s'éloignent de ce type pour se rappro-
cher d'un autre groupe voisin, auquel elles servent de passage,
•l'ai traité dans la partie descriptive de mon travail , des
espèces suivant l'ordre qui je viens d'indiquerc Une table
synoptique que j'ai jointe à mon ouvrage, facilitera la revue
des espèces; elle indiquera les rapports mutuels qui lient
les unes aux autres, en un mot, elle indiquera leurs affinités
naturelles.
J'ai également joint a mon ouvrage plusieurs cartes et une
table destinées à indiquer la répartition des espèces d'Ophi-
diens sur la surface du globe. L'objet que je me suis proposé
en les publiant est seulement de donner un aperçu universel
de la distribution géographique des Ophidiens; ceux qui vou-
dront s'instruire plus spécialement, ceux qui voudront savoir
précisément si telle ou telle espèce vit dans un terrein de
XV
telle à telle nature, 11*0111 qu*à consulter la si ronde partie
de mon ouvrage , dans laquelle ils trouveront les rensei-
gnemens nécessaires. J'ai d'ailleurs traité ce sujet dans une
dissertation, intitulée: Essai sur la distribution géogra -
phiquedesserpens, laquelle est imprimée à la suite de mon
livre. C est inutde de vous dire, Monsieur , que ce travail
m'a coûté bien des précieux momens. Presqu'uuiquement
borné à mes propres recherches par le défaut total de
travaux fournissant l'énumération des espèces d'oplii-
diens d'un certain pays, je ne trouvai tics renseignemens
utiles que dans les ouvrages du prince de Neuwied, de
Spix , de Russel et dans celui publié par la commission de
l'Egypte. Nous possédons, il esL vrai, des ouvrages, cités
précédemment, lesquels embrassent la description des ser-
pens d'un certain pays ; mais, outre que ces ouvrages sont
en petit nombre, ils sont faits, pour la plupart, d'une
manière peu conforme à l'état actuel de la science. Il y en a
même qui offrent tout simplement une énumération des
espèces caractérisées par une courte phrase, ou mieux,
qui ne sont qu'une compilation des ouvrages existans
sur l'Ophiologie. Pour faire connaître les productions
d'un pays, il est d'abord nécessaire d'en rassembler une
ample collection, composée d'individus de tout âge et de
tout sexe. En disposant ces nombreux matériaux, sans se
soucier de ce qui a été fait antérieurement , on parviendra
à connaître les espèces suivant tous leurs r^oports. Il faut ,
avant de tracer les descriptions, comparer les espèces à leurs
xvi
congénères originaires d autres pays. En consultant enfin
les travaux déjà existans, on parviendra facilement à dé-
brouiller la synonymie et à relever les doubles emplois. Il
est vrai que la composition d'un ouvrage dans ce sens
est un travail au moins de plusieurs années , particulière-
ment lorsqu'on veut y joindre des notes sur les mœurs,
sur les habitudes etc. , ce qui me paraît de première
nécessité; mais un savant doit-il considérer le temps lors-
qu'il s'agit d'être utile à la science?
Je juge nécessaire de dire quelques mots sur le choix que
j'ai fait de la langue française pour composer mon livre. Les
motifs qui m'ont porté à ce choix sont simples et faciles à devi-
ner; aussi passerais-je ce sujet sous silence, si des voix graves
ne s'étaient élevées contre quelques-uns de nos compatriotes ,
qui avaient pris le même parti que moi. De nos jours, où
tout le monde cherche à s'instruire, où les sciences ont partout
acquis de la popularité , où tant d'amateurs éclairés , l'homme
du monde, de personnes instruites sans être savantes etc.,
auxquelles le latin ne peut être familier, ont contribué
aux progrès des sciences: certes, dans ces temps heureux,
il serait hors de saison de se servir d'une langue morte. Il
fallait donc choisir parmi les langues vivantes. Le meilleur
parti à prendre était certainement celui d'écrire dans ma
langue maternelle, la seule qu'un homme puisse possé-
der parfaitement; mais des langues de l'Europe combien
peu sont assez universellement répandues pour être com-
prises de tout le monde! Je me crois donc sufisamment
XVII
justifié, par les raisons ci dessus alléguées, (.l'avoir préféré
la langue française aux autres langues modernes; les mêmes
raisons me font espérer que mes lecteurs useront d'indul-
gence, en examinant mon ouvrage sous le rapport littéraire.
Il ne me reste qu'à faire mention des moyens qui ont
été à ma disposition pour composer mon livre. Il ne m'ap-
partient pas de faire l éloge de notre Gouvernement, protec-
teur libéral des arts et des sciences; tout le monde sait
que son Excellence le Ministre de l'intérieur ne laisse
passer aucune occasion d'être utile aux sciences, et que
M. van Rappart se montre toujours plein de zèle lorsqu'il
s'agit de favoriser les études. L'Europe entière sait, par
vos nombreux écrits, que les sciences naturelles ont
reçu un accueil non moins favorable de la part du Gou-
vernement des Indes: je me tais par conséquent; qu'il
me soit cependant permis de rappeler le nom de son
Excellence, le Gouverneur de la Province de Drenthe,
M. van Ewyck ; un nom si cher aux sciences , à tous
ceux qui ont vus naître notre établissement national
et particulièrement à moi. — Il est superflu de dire
que les riches collections déposées dans les galeries du
Musée des Pays-Bas ont servi de base à mes recherches;
mais il importe de constater l'origine de ces collections,
qui m'ont mis dans le cas d'assigner avec certitude à
chaque espèce sa véritable patrie, et de pouvoir en consé-
quence fixer des lois constantes pour la répartition géogra-
phique des Ophidiens. Lorsqu'en 1820 vous conçûtes,
il
xvrif
Monsieur, le'iprojel d'ériger un monument nalioual digue
de voire patrie, la eolleetiou des serpeus se composait
d'une centaine d'échantillons, sans indication d'orisine et
provenant pour la plupart de l'ancien Cabinet Académique.
Les nombreux envois, expédiés au Musée des Pays-Bas par
M. M. Reinwardî , Kuhl et van Hasselt, envois qui conte-
naient la plus grande partie des productions de nos Golo-
iiies aux Indes oiientales, offraient les moyens d'échange
avec les Musées les plus célèbres, et procuraient à notre
Etablissement d'autres objets de contrées que le pied du
voyageur néerlandais n'avait pas encore foulées. Tel était
l'état de la collection du Musée, lorsque feu Boie quitta
l'Europe en iSsS, après avoir terminé son grand ouvrage
sur les Reptiles de .lava. Cette collection, confiée depuis à mes
soins, s'est étendue à l'égal des autres branches du Musée:
elle est aujourd'hui portée au triple de ce qu'elle était. Le
grand nombre de voyageurs, expédiés presque simultanément
dans différentes contrées de notre globe , ont particulièremenÈ
contribué à nous procurer une foule d'objets , parfaitement
conservés, et dont la patrie est constatée d'une manier e précise.
Quelques-uns de nos compatriotes, établis dans des contrées
exotiques, se sont rendus utiles à la science, en faisant
parvenir à notre Établissement depDelles collections conte- •
nant les productions de leur -patrie adoptive. D'autres
voyageurs modernes ont bien voulu nous céder les doubles
du produit de leurs recherches, ce qui^ n'a pas moins
contribué à rendre notre collection complète, que les achats
\IX
fails à Paris, à Loiithes et dans plusïcius aulros capitales.
Des particuliers enfin se sont empressés de nous couiniu-
niquer tous les objets, qui pouvaient être de quelque utilité
à mon travad.
La petite série d'Ophidiens de la Nouvelle Hollande, (jui
fait partie du Musée des Pays-Bas, a été acquise à Londres.
Le voyage de découvertes à la Nouvelle Guinée ^ entrepris
dans les années iSi^j et 1828 par les ordres de notie
Gouvernement colonial, nous a fourni un grand nombre
d'objets d'Instoire naturelle intéressans et la plupart incon-
nus. Timor, Amboine et les autres îles adjacentes ont été
explorées à différentes reprises par nos voyageurs. Une
résidence continuelle de ces infatigables naturalistes, à Java,
durant près de vingt années, a contribuée rendre les pro-
ductions de la partie occideritale de cette île presque aussi
connues que celles de lEurope. Mon ami le Docteur
Strauss m'a rapporté une petite collection de Reptiles,
formée pendajtit son séjour à Manado , à la pointe orientale
de Célèbes. M. M. von Siebold et Bi^irgeront recueillis, pen-
dant leurs voyages au Japon, une grande quantité d'ophi-
diens qui, appartenant toujouis aux mûmes espèces, nous
ont appris, combien cet empire a été exploré sous lerapport
de l'histoire naturelle. Nous ne possédons que peu de serpens
de la Chine, de Sumatra], de Malacca et en général de la
partie orientale de l'Asie: le Docieur de Witt établi à Dedford,
nous en a présenté quelques uns; d'auties ont été acquis
par nos voyageurs aux Indes. Un envoi, fl\it de Bengale
XX
en 18:27 au Musée des Pays-Bas, coiUeiiail les dépouilles
d'un bon nombre des espèces décrites par Russel. Les
productions de Ceylan ne nous sont connues que d'après
les échantillons originaires de plusieurs musées de la Hol-
lande, et par une petite collection due aux soins obligeans
de M. le Docteur Smith, Directeur du Soulli-African-
Museum. M. Lichtenstein , enfin, nous a cédé quelques
espèces d'Ophidiens , provenant du voyage de M. Eversman
en Tartarie.
Les serpens de l'Europe nous ont été en partie commu-
niqués par quelques uns de nos amis, en partie par plusieurs
voyageurs et parle Musée de Vienne: nous devons à ce
dernier établissement les serpens de l'Autriche et de la
Hongrie ; l'infortuné Michdhelles nous a fait parvenir
quelques échantillons recueillis en Espagne et la plupart de
ceux qui habitent la Dalmatie, contrée visitée depuis par
notre voyageur M. François Cantraine qui , explorant en-
suite l'Italie, la Sardaigne et la Sicile , nous en a envoyé
les productions; M. Roux nous a adressé les Reptiles du
Sud de la France, M. Lenz ceux de l'Allemagne centrale^
etc. etc.
Le voyage de M. Rûppell a fourni à notre Musée la
plupart des productions de l'Egypte. Le Colonel Humbert
nous a rapporté plusieurs serpens pris dans les États
Barbaresques , particulièrement dans les environs de
Tunis. Amateur éclairé , M. Ghfford , consul Néerlandais
à Tripoli, a exploré en naturaliste les environs de celte
XXI
YÎlle , il est vrai , peu riche en productions d'histoire
naturelle. Le climat insalubre et destructeur pour la plu-
part des Européens qui visitent la côte de Guinée, est la
cause que les objets d'histoire naturelle nous parviennent
en si petit nombre de notre colonie, établie sur cette terre
promise; cependant c'est à M. le Professeur Eschricht
à Copenhague, que nous sommes redevables d'une tren-
taine de serpens, recueiilis dans les environs du fort Danois,
sur cette même côte. La pointe australe de l'Afrique a été
explorée par les naturalistes hollandais pendant une longue
série d'années. MM. Kuhl , van Hasselt, Boie et Mack-
lot, abordant la ville du Cap lors de leur voyage aux
Indes , y ont formé des collections ; M. le Docteur van
Horstok, mis à même par sa longue résidence dans cette
ville, de se procurer les objets les plus rares, a fourni
successivement à notre Musée les matériaux pour une
Faune presque complète de cette colonie florissante;
M.M. les Docteurs Smuts et Smith enfin, ont également
contribué à enrichir nos galeries de plusieurs serpens
africains peu connus.
Il n'y a , à proprement parler, que deux pays du vaste
continent de l'Amérique méridionale, qui aient été explo-
rés sous le rapport de la Zoologie : le Brésil et la Guiane.
Une partie des objets, produit des voyages de M. Natterer
dans plusieurs provinces de cette première contrée et qui
sont déposés au Musée de Vienne, ont été communiqués
au nôtre. Le Prince de Neuwied, qui a visité la côte
XXII
orientale du Brésil, située entre le 1 3 et q 3 degré de latitude
australe, a bien voulu nous céder les doubles des Reptiles
recueillis par lui. Ces exemples ont été suivis par feu Spix,
dont les courses se sont étendues plus au Nord, le long des
bords du Maranon jusqu'à Baliie. Une petite suite d'opbi-
diens du Brésil, recueillis par M. M. Olfers, Freireiss et
Beske fait également partie du Musée des Pays-i3as. Plu-
sieurs envois de Reptiles originaires de la Province de St.
Paul, nous ont été adressés de Paris, par M. Beske de
Hambourg et par M. Boie de Kiel. Les belles et nombreuses
collections que notre Établissement doit aux soins dés-
intéressés de M. Dieperink, résidant à Paramaribo, nous
ont fourni les moyens de faire l'énumération de la plus
grande partie des productions de notre colonie à Surinam.
Nous tenons du Prince de Musignano et du Professeur
Troost àNashville, les Reptiles de l'Amérique septentrionale
qui font partie de notre Musée. Le premier nous a rapporté
un bon nombre d'objets, originaires des Provinces septen-
trionales des États-unis; le second , établi dans la Province
de Tennessee , a mis beaucoup de zèle pour nous procurer
les productions de la partie méridionale de l'Amérique
du Nord.
J'ai omis dans l'énumération des moyens dont j'ai pu
disposer, de faire mention des personnes qui ont bien
voulu me céder des objets rares et qu'il m'aurait été diffi-
cile de me procurer, ou qui ont en général contribué à
rendre mon travail le plus complet possible. Je me borne
XXIII
à citer M. M. les Professeurs van Swinderen à Groningue,
Vrolik à Amsterdam, van der Hoeven et van der Boon-Mescli
à Leydeet le Docteur van Hoorn. M. Klinkenberg à Utrecht
a mis à ma disposition les nombreuses richesses que con-
tient son Musée. M. le Directeur du Cabinet d'histoire
naturelle de Vienne m'a accordé la permission de publier
les espèces inédites que nous, tenons de cet établissement.
M. le docteur Thienemann à Dresde m'a cédé une vingtaine
de figures de serpens faites sur le vivant à Surinam par le
docteur Hering. J^dois surtout vanter la libéralité de
M.M. les Professeurs Fremery et Litli de Jeude à Utrecht;
ces savans ont poussé l'obligeance jusqu'à me laisser faire un
choix parmi la précieuse collection de Reptiles confiées à
leurs soins, et dont la plupart sont originaires deCeylan,
de la côte de Guinée , de l'Amérique du Nord , etc.
Je venais de terminer mon ouvrage lorsque , à la suite
d'une longue maladie, j'eus l'honneur, Monsieur, de vous
accompagner dans un voyage à Paris et à travers une partie de
l'Allemagne. Le grand nombre d'objets que j'ai vus pendant
ce voyage, m'a obligé de faire plusieurs additions à mon
ouvrage, additions qui cependant n'auraient pu être que de
peu d'importance, si je n'avais eu la faculté d'examiner à
loisir ces objets rares ou en partie nouveaux. Je dois cette
prérogative à la complaisance extrême de divers savans qui
se trouvent à la tête des Établissemens scientifiques; M. M.
Duvernoy à Strasbourg et Cretzschmar à Francfort se sont
empressés de me laisser un libre usage des collections confiées
XXIV
à leurs soins. M. Ruppeîl, que j'ai l'avantage de compter
parmi mes amis, m'a fourni des renseignemens sur les
divers Reptiles qu'il a été à portée d'examiner lors de
ses deux voyages ; enfin les observations de plusieurs ama-
teurs de Paris, parmi lesquels je cite particulièrement
M. le docteur Cocteau et M. Al. Lefèbre, m'ont été de la
plus grande utilité. Il sera presqu'inutile de dire que le
Musée de Paris m'a offert la plus ample récolte. Cet éta-
blissement, depuis de longues années le siège des sciences
naturelles, le dispute toujours encor? par le nombre des
objets, à la plupart des autres Musées. Tout le monde
accourt pour s'y instruire et parce que les amis des sciences
y trouvent un libre accueil. Je ne parlerais pas de cette
libéralité vantée tant de fois et à si juste titre, si des
obligations particulières ne m'en faisaient un devoir.
J'avais le bonlieur d'être lié depuis plusieurs années avec
M. M. les Professeurs de Blainville et Valenciennes; à mon
arrivée à Paris, M. Duméril m'a également honoré de sa
bienvieillance, et Ij'ai trouvé un ami franc et sincère dans
M. Bibron, naturaliste zélé et instruit, et l'émule de mes
travaux dans l'Erpétologie. Tous ces Messieurs ont concouru
à rendre mon séjour à Paris le plus utile possible : les nom-
breux matériaux qu'offre le Musée du Jardin des Plantes ont
été mis à ma disposition, et on a bien voulu me prêter et me
permettre d'emporter en Hollande toutes les espèces inédites
ou celles que je désirais soumettre à un nouvel examen. J'ai
revu, conjointement avec M. Bibron, au Jardin des Plantes,
XXV
toute celle belle collection de Reptiles, et cette revue a eu
pour suite des relations d'échange, qui ne laisseront d'être
de la plus grande utilité pour les deux Établissemens. Le
nôtre a été enrichi par cet échange, d'objets de contrées,
avecles-juelles nous n'avons pas de rapports, mais qui ont été
visitées par des voyageurs français: telles sont la Pennsylvanie ,
la Caroline et la Nouvelle-Orléans, pays d'où M. M. Lesucur ,
Milbert, Bosc, Leconte, Barabino et d'autres ont fait par-
venir les productions au Musée de Paris. Les Antilles ont
été explorées par M. M. Plée, l'Herminier, Ricord, Poey,
etc. ; Gayenne par Leschenault ; le Brésil par Langsdorf,
Vauthier, de Lalande, Aug. St. Hilaire; le Paraguay par
d'Orbigny; ce dernier voyageur a aussi fait une belle col-
lection de Reptiles au Chilé, pays visité également par M. M,
Lesson et Garnot, et par Gay. La Nouvelle Hollande a fourni
plusieurs nouvelles espèces, découvertes par Pérou, Lesson
et particulièrement par Quoy et Gaimard; d'autres ont été
recueillies lors des dernières expéditions autour du monde
à la Nouvelle Irlande, à la Nouvelle Guinée, à Waigiou,
aux Philippines, aux Mariannes et notamment dans les
environs de Manado à Célèbes. Feu Duvaucel avait fait au
Musée de Paris des envois de Sumatra, Leschenault de Java ,
Diard de la Cochinchine, de Siam et de Bengale. Les
grandes Indes ont été explorées par un grand nombre de
voyageurs français, parmi lesquels nous ne citons que
M.M. Leschenault, Reynaud, et particulièrement M. Dus-
sumier, qui a visité presque tous les points des côtes
XXV
â\i l'Asie depuis les Seyclieiles et le Malabar jusqu a la
presqu'île de Malacca. M.'\î. Goudot et Sganzin viennent de
découvrir plusieurs ophidiens curieux à Madagascar , île
vierge sous le rapport de l'histoire naturelle. Le séjour de
feu Laîande au Cap a fourni au Musée de Paris la plupart
des Reptiles propres à celte colonie. M. Perrotetena recueilli
au Sénégal et on ne cesse d'en apporter des États Earba-
resques, depuis rétablissement d'une colonie française sur
cette côte. Il en est de même des Reptiles de l'Egypte, pays
qui tient le prcinier rang avec le F>résil,parmî ceux qui ont attiré
le plus grand nombre de voyageurs. Les Reptiles recuedlis par
Olivier au Levant, sont encore les seuls connus de l'Asie
occidenlale. M. Bory de St. Vincent a fait connaître tout
récemment ceux de la Morée et M. Bibron ceux de la Sicile.
Les moyens littéraires dont j'ai pu disposer, ont
beaucoup facilité mes recherches. Votre riche et belle col-
lection de livres, Monsieur, a été toujours ouverte pour
moi; aussi en ai-je fait usage, comme si elle était la
mienne. M. le Professeur Geel, Bibliothécaire de l'Uni v'cr-
sité, a bien voulu mettre à ma disposition tous les ouvrages
dont j'avais besoin pour mon travail.
Les bontés dont M. Reinwardl m'a comblé, m'imposent
le devoir de la reconnaissance la plus profonde : ce véné-
rable savant , autrefois mon Professeur le plus chéri, m'a
communiqué et ses manuscrits et les nombreux dessins (i)
(i) J'ni commencé la publication de queltjues-iuis dans mes y/^^//-
(ht/tfe/?^ dont la preniirrc livraison vient de paraître.
XXVK
traulmaiix qu il a fait l'aire aux lutlos; sans sa bibliotlu-que
choisie, j(^ n'aurais jamais pu terminer mon travail; il
m'a aidé de ses conseils , et j'ai été assez heureux , grâce
à l'amitié dont il m'honore , pour profiter souvent de ses
lumières.
Je ne répéterai pas ici , ce que je dois à feu II. Boie; mes
faibles paroles ne suffiraient pour exprimer les sentimens
que j'éprouve en repassant dans ma mémoire les momens
c[ue la présence de cet infortuné savant rendait si pré-
cieux. Sa douceur, sa bienveillance et toutes ces qualités
d'une ame noble et élevée, le faisaient aimer de chacun qui le
connaissait; pliilantrope aussi zélé qu'éclairé, il n'employait
sa vaste érudition que pour en faire profiter ses amis et
ses découvertes étaient le secret de tout le monde. J'ai eu
le bonheur de jouir du commerce journalier de cet excellent
homme et je regrette que ce commerce n'ait été que de
très courte durée. Boie a bien voulu me confier, lors de
son départ, ce grand nombre d'observations qui ont été
publiées plus tard par son frère ; arrivé aux Indes , il n'a
cessé de me communiquer des notes relatives aux mœurs,
à la manière de vivre des Ophidiens que je me suis em-
pressé d'incorporer dans mon livre. Son jeune élève et
ami, M. Mùller, digne successeur de ses travaux, a suivi
un si bel exemple en nous faisant parvenir un grand nombre
de dessins faits sur le vivant par notre défunt ami , le
jeune van Oort. Plusieurs autres de mes amis, parmi
lesquels je compte particulièrement M.M. St. Clair Massiuh,
XXVllI
M. le professeur Caiitraiiie et M. Susanna Aduiinistraleur du
Muséum , ont bien voulu me seconder de leurs talens: je
leur en témoigne mes remercimens sincères. — Enfin , je
ne saurais terminer ces pages, sans avoir rendu grâce aux
précepteurs de ma première jeunesse , M.M. le Docteur
Winkler et le Professeur Schmidt à Altenbourg en Saxe :
s'il y a quelque mérite dans mes ouvrages sous le rapport
de l'art, on doit l'attribuer au second; le premier m'a
inspiré ce goût profond pour l'étude de l'histoire natu-
relle, qui m'a décide ensuite à me vouer entièrement à
cette belle science.
Je crois avoir dit tout ce qui est nécessaire pour l'intel-
ligence de mon livre. Son but sera rempli s'il emporte
votre approbation. Monsieur, et s'il est favorablement
accueilli de cette partie du public qui préfère la simplicité
aux innovations.
H. SCHLliGEL.
Il 1 7 II p -';: —
HES OPHÏDIEIVS KN GEIVERAL.
On a coutume de com|>rendre sous le nom de seipens tous
<:es reptiles qui joignent au défaut total d'extrémiLes, une
forme de corps extrêmement déliée; un examen plus rigou-
reux démontre cependant que plusieurs animaux qu'il faudrait,
en suivant ces principes, classer parmi les serpens, offrent,
dans l'ensemble de leur organisation, des traits qui les
éloignent, sous tous les autres rapports, des serpens , auxquels
ils ne ressemblent que par leurs formes alongées. On est
parvenu de nos jours, grâce aux recherches des anato-
mistes, à distribuer parmi les batraciens quelques uns de ces
êtres anomaux, dont cependant la plupart sont demeurés
mêlés confusément dans les méthodes. En parcourant d'un
coup-d'oeil rapide la grande série des reptiles à corps revêtu
d'écaillés, on parvient à découvrir que ces animaux, à l'excep-
tion des Ghéloniens, sont modelés sur deux types, désignés
en style familier sous les dénominations de lézards et de
serpens , et dans la science, sous celles de sauriens et d'ophi-
diens. Mais, en comparant ces animaux les uns aux autres,
on s'aperçoit que la forme plus ou moins alongée du corps
existe dans toutes les nuances (i); que le développement des
extrémités diminue à mesure que l'espèce se rapproche du
second type 5 que la fonction des côtes connne organes de
locomotion , augmente dans le même degré; que des espèces
(i) Les Scinques, le Seps, le Pygodactyle , le Monoclactylc, le Pygo-
pus , le Chalcis, le Télradaclylc, l'Opliisaïuc , le Pseiulopus etc.
I
i DKS OPHIDIENS EN GÉNÉRAL.
assez voisines offrent souvent de grandes disparités dans la
disposition des extrémités, ou bien qu'elles ne se distinguent
l'une de l'autre que par le défaut ou la présence des extrémi-
tés (i): en un mot, que le rôle que jouent chez les sauriens
les formes générales et les organes de locomotion, est totale-
ment subordonné à l'ensemble de l'organisation (2). Il est
donc évident que des caractères empruntés de ces parties-là ,
devaient toujours conduire au système artificiel ; il résulte
également de ce que nous venons de dire, que les deux types
sur lesquelles saurienset les ophidiens sont modelés, selient
par de nombreuses formes intermédiaires. De là vient aussi que
plusieurs naturalistes ont refusé d'adopter les deux divisions
précitées, qu'ils ont fondues toutes deux en une seule. Cette
manière de voir est également susceptible de défense et d'op-
position ; et ce n'est point pour faire hommage à un système
quelconque, que je m avise de suivre telle ou telle vue. Cepen-
(i) Les Amphisbènes et le Chiiole,
(1) Un examen comparatif des objets m'a démontré que ces
sauriens anomaux , c'est-à-dire, à formes alongées et à extrémités rudi-
mentaires, appartiennent toujours par l'ensemble de leur organisation
à quelque espèce de l'une ou l'autre des familles de cet ordre, parmi les-
quelles ils doivent être distribués. On ne peut nier par exemple , qu'il
V a un passage graduel des Scinques à l'Anguis et aux A.contias , par
l'intermède des Scinques brachypus, decreensis, serpens, seps, du
Pygodaclyle et du Bipes: êtres moins différens entre eux par leur orga-
nisation que par leurs formes, et qui ne composent qu'une seule famille,
celle des Scincoïdes, delaquelle on ne saurait exclure ni les Ablephares
ni le Gymnophthalme. Le même passage graduel existe dans la famille
des Lézards, des genres Lacerta et Tachydromus au Monodactyle;
on y peut ajouter comme espèce anomale le Pygopus. On pourrait rap-
procher dans la méthode le Tetradactyle, le Chalcis, le Pseudopus et
rOphisaure. Viennent enfin la famille des Amphisbènes : Chirotes,
Leposternon, Amphisbaenaet celle des Typhlops: Typhlops, Rhinophis,
Uropellis.
J)ES OPHIUlEiNS KN GÉNÉRAL. 3
(laiit, ooniiiie je me suis proposé de traiter dans mon livre des
serpens proprement dits, il convient de donner la définition
des êtres que je comprends sous cette catégorie. 11 est très
facile de se taire une idée d un serpent, lorsqu on prend pour
type une ties espèces où tous les caractères de l'ordre se trou-
vent réunis; mais il est difficile de consigner des marques dis-
tinctives qui séparent d une manière tranchée les ophidiens
des sauriens.
Les conditions principales de Texistence des êtres que
1 on désigne sous le nom de serpens , me paraissent con-
sister en: un corps très alongé pourvu d'une queue et revêtu
de tégumens cuirassés d'écaillés dures; qui se meut, supporté
par les côtes, au moyen d'ondulations latérales; dont laforme
est concentiée, par rapport aux dimensions transversales, sur
le volume le plus petit possible; mais dont les parties sont
susceptibles d'un élargissement extraordinaire, ce qui per-
mette aux serpens d'avaler les animaux volumineux, que
la nature leur a assignés pour nourriture. Or , pour répondre
à ce but, la charpente osseuse de la tête des serpens, ne forme
pas, comme dans la plupart des autres vertèbres, une masse
immobile; mais les parties qui la composent sont réunies les
unes aux autres, de manière que toutes, excepté celles qui
embrassent le cerveau, sont susceptibles d'une mobilité
plus ou moins grande et le plus souvent en sens divers. Ce
sont particulièrement les os qui entrent dans la conformation
de la mâchoire inférieure , qui déterminent la configura-
tion de la tête. Le développement des caisses, leur mode
d'attache, la mobilité dont ces os jouissent n'étant point
fixés au crâne par leur bout inférieur; enfin l'organisation
des deux branches de la mâchoire inférieure qui sont réunies,
aulieude symphyse par des ligamens élastiques, et parcelasusi
ceptibles de s'écarter considérablement : voilà les circonstances
qui contribuent principalement à cet élargissement énorme
de ia gueule des serpens. Le défaut total de pieds entraine
1 DES OPHlDlEiNS EN GÉNÉRAL.
nécessairement celui des pièces solides, telles que le sternum,
le bassin etc. , qui lient ces membres au corps: les côtes, libres
par cette raison, jouissent d'une mobilité plus uniforme, et
contribuent par cela à l'élargissement de la cavité intestinale
et à ce changement de forme du corps, si sensible dans les
diverses positions que le serpent prend en rampant, en na-
geant ou en grimpant. Pour obéir à ces divers mouvemens ,
les tégumens généraux se trouvent divisés en nombreux com-
partimens qui forment autant d'articulations , parallèles aux
parties qu'elles revêtent ; les écailles qui forment les arti-
culations au dessous de l'animal , sont ordinairement plus
grandes que le reste et remplissent la fonction de pieds ,
les côtes s'attachant au bord latéral de la face interne de ces
James. L'espace de la peau nue entre les écailles est plus
considérable que chez tous les autres reptiles, et , à la gorge
cette peau nue, pour se prêter à l'écartement des mandibules,
s'offre sous la forme d'une fente longitudinale appelée sillon
gidaire. C'est par cette organisation des tégumens généraux
que ces tuniques , contractées à l'état de repos, se prêtent à
l'élargissement extraordinaire des parties internes.
11 résulte de ce que je viens de dire sur la nature des ser-
pens, qu'il faut exclure de cet ordre les Amphisbènes et les
Typhlops , quoique les derniers se lient sous beaucoup de rap-
ports aux ophidiens et qu'ils font en quelque sorte le passage
à ces reptiles. C'est ce rapprochement qui rend difficile sinon im-
possiblelétablissement de caractères servantde distinction aux
deux ordres voisins des sauriens et des ophidiens. Appuyons
cette thèse de quelques exemples. Le sillon gulaire , propre à
tous les seipens, à l'exception des Acrochordes, se voit égale-
ment chez plusieurs sauriens tels que les Lézards etc. Quelques
espèces d'ophidiens offrent des vestiges d'extrémités posté-
rieures, analogues à ceux que l'on observe aux sauriens
apodes, ([uoique leur conformation porte à croire que ceux
des derniers êtres leprésentent le bassin, tandis que ceux
DIlS ()1>H[|)1R]NS EJ\ GKNEKAL. 5
lies opliiiliens répondent aux extrémités postérieures. L'or'^a-
nîsation de la langue chez les Varans et les Tejus ne se dis-
tingue presque en rien de celle des ophidiens. Le manque de
paupières ne peut point offrir de caractère distinctif car
ces organes se rencontrent, dans tous les degrés de dévelop-
pement, chez les diverses espèces de sauriens: quelques espè-
ces, telles que l'Abléphare et le Gymnophthalme , en sont
totalement dépourvues; lœil exigu des Aniphisbènes , des
Typhlops. de l'Acontias cœcus, est revêtu destéfjumens jréné-
raux en sorte que ces animaux ont la vue si basse, qu'ils en
sont presque aveugles; l'Acontias meleagris au contraire , a
les yeux garnis dune paupière inférieure; le Pygopus pré-
sente lin rudiment de paupière orbiculaire , bordant l'œil dans
toute sa circonférence , sans avoir la faculté de se fermer sur
cet organe; chez plusieurs Geckos enfin les paupières se pré-
sentent sous la forme de prolongemens de la peau , trop peu
développés pour servir de protection aux yeux. Une des par-
ties les plus caractéristiques du crâne des sauriens est la colu-
melle, petit os pair et linéaire qui réunit les pariétaux aux
ptérygoïdiens; cet os manque cependant aux Typhlops , aux
Aniphisbènes et même aux Acontias. Le développement de
l'oreille externe s'observe dans toutes les nuances, depuis les
sauriens aux ophidiens; les dernières traces se voient chez
l'Anguis et l'Acontias, pour disparaître totalement dans les
Aniphisbènes et les Typhlops. Les os-suspensoirs simples, les
caisses des serpens, remplacés chez la plupart des sauriens par
deux pièces, se trouventchez l'Acontias, quoiqu'ils manquent
aux Aniphisbènes et aux Typhlops.
L'ensemble des os du crâne pourrait peut-être offrir les
meilleurs traits de distinction entre les deux ordres voisins,
si quelques espèces de la famille des Typhlops, les Uropeltis,
ne se rapprochaient aussi de ce coté des ophidiens. 11 est
bon cependant de se faire une idée des principales différences,
* I * *
qui distinguent le crâne des sauriens de celui (U\s serpens
i; DES OPHlDifiiNS EN GENEllAL.
Les os de la face de ces derniers ne forment jamais une masse
immobile perforée par les narines et composée par des pièces
engrenées les unes dans les autres, tel qu'on l'observe chez les
sauriens: chez les ophidiens, l'intermaxiilaire, de forme com-
primée et en trigone, est toujours libre, mobile et jamais
soudé aux maxillaires au moYen de sutures: ces derniers os,
lorsqu'ils sont réunis intimement aux frontaux antérieurs,
n'offrent qu'une attache assez étroite, et jouissent toujours
d'un certain degré de mobilité ; les bords latéraux des nasaux
enfin sont toujours libres dans toute leur étendue. Les ptéry-
goïdiens se présentent constamment sous la forme d'os effilés,
déprimés, peu larges et articulés avec la tête au moyen de
ligamens , qui cèdent avec facilité aux mouvemens plus ou
moins limités que ces pièces sont capables d'exécuter. Aucun
ophidien n'a la bouche armée de dents grosses , coniques et
perpendiculairement enchâssées: ces organes chez les serpens,
ressemblent au contraire à des crochets, courbés en arrière et
ont leur pointe acérée ; en outre , les serpens ont , à l'exception
du seul Oligodon, le palais muni de dents semblables à celles
des mâchoires , tandis que l'on trouve chez les sauriens seu-
lement des traces de dents palatines en forme d'aspérités
petites et irrégulières.
On voit de tout ce que nous avons dit sur l'organisation
des ophidiens, que ces reptiles sont particulièrement remar-
quables sous le rapport de la locomotion et sous celui de la
manière comme ils avalent leur proie. Ce sont aussi ces condi-
tions qui modifient l'ensemble de leur organisation : la pre-
mière détermine les formes générales du corps ; la secoode
celles des parties internes. On observe, en examinant la
position générale des intestins, que les mêmes organes qui,
chez la plupart des autres vertébrés occupent une ou plusieurs
cavités spacieuses, se trouvent resserrés , chez les ophidiens, à
cause de la forme effilée de leur tronc, dans un cylindre étroit
et long. Il est évident que cette disposition ne pouvait avoir
DES 01MIII31E1NS EN (iËNKllAL. 7
lieu sans de grauils tliaiigeiiiens clans ia coriloiniation des
viscères et sans rompre la symétrie bilatérale. Voilà pourquoi
le cœiir est tantôt éloigné , tantôt rapprocln^ de la tête , suivant
quelestoinao a plus ou moins détendue; voilà pourquoi on ne
voit le plus souvent qu'un seul poumon, s'étendant quelque-
fois en avant du cœur , mais situé ordinairement derrière cet
organe: ce poumon est presque toujours terminé par une
espèce de sac plus ou moins développé servant de réservoir
de Tair. La forme du foie se trouve , par les mêmes raisons,
modifiée en un ruban étroit , s'étendant du cœur au pylore.
La vésicule du fiel, pour ne pas être gênée dans l'exercice
de ses fonctions , lorsque lestomac est rempli, est éloignée
du foie , et placée dans la même courbure du duodénum
qui reçoit le pancréas et la rate. L'estomac ressemble à un
cylindre long et peu spacieux. Suivent les intestins, dont les
nombreuses inflexions sont remplies de graisse, et qui abou-
tissent , après être descendus en ligne droite , dans la cloaque.
La partie inférieure de la cavité abdominale n'étant pas assez
spacieuse pour recevoir le reste des organes , il en résulte la
disposition anomale des reins, des testicules ou des ovaires ; la
verge enfin et un organe sécréteur sont logés dans la queue.
Il est évident d'après ce que nous venons de dire, que la
forme de la plupart des organes internes des serpens, n'a
aucune influence sur l'exercice de leurs fonctions; nous verrons
même plus tard, que la disposition de ces organes diffère non
seulement dune espèce à l'autre, mais qu'elle varie même quel-
quefois entre les individus de la même espèce.
La disposition des organes extérieurs au contraire, présente
des formes plus constantes; mais ces parties sont modifiées
suivant que l'espèce liabite les arbres, la terre ou les eaux.
La locomotion s'exerce cependant très uniformément: ce sont
les mêmes mouvemens , qui font glisser le serpent sur la terre ,
qui le poussent à travers les profondeurs de l'élément humide,
ou qui l'aident à s'entortiller autour les branches des arbres.
8 DES OS DU TRONC.
Les ondulations latérales du corps suffisent pour ce genre de
locomotion , et ce'nesont que les serpens de mer qui se servent
de leur queue, expressément organisée à ce but, et comme
rame et comme gouvernail. Lorsque la locomotion se fait
sur un corps solide, les côtes mettant en jeu les bandes
abdominales, forment autant de leviers qui supportent l'im-
pulsion , produite par les ondulations du tronc, en se relevant
et se couchant alternativement et en touchant avec leurs
extrémités antérieures le plan de position. Le degré de vitesse
de la locomotion dépend en grande partie de la nature du corps
sur lequel le serpent rampe: il se traîne avec difficulté sur une
glaire , sur une table à surface unie et polie, mais il s'échappe
avec célérité sur un terrain sablonneux , ou revêtu d'une
végétation brûlée, comme des bruyères; pour monter le long des
objets perpendiculairement élevés , le serpent sait tirer parti
de chaque petite protubérance, qui lui offre un point d'appui
pour les articulations de l'abdomen.
Pour exercer ces fonctions, il fallait que les os qui com-
posent le tronc des ophidiens ainsi que leurs muscles, fussent
disposés d'une manière propre. Chacun sera frappé au premier
coup-d'œil de la multiplicité de ces parties et de leur unifor-
mité. Toutes les vertèbres, toutes les côtés se ressemblent, à
quelques exceptions près, sous le rapport de leur conforma-
tion , et ce n'est que vers les extrémités de l'animal que ces os
diminuent de volume.
DES OS mi TROTVC
Les vertèbres du tronc portant toutes des côtes,
la distinction usuelle entre vertèbres cervicales , dorsa-
les et lombaires ne peut avoir lieu chez les serpens ;
)1 s'en suit que le nombre des côtes doit toujours être
DKS OS DU TRONC. 0
égal à celui des vertèbres; enfin, comme les arliculalions
écallleuses de la peau correspondent toujours avec les cotes,
qui en sont les leviers , il en résulte encore que le nondjre des
plaques du dessous des serpens doit être le même que celui
des côtes ou des vertèbres. Chacun sait ([ue ce nombre
varie non seulement selon les espèces, mais aussi selon les
individus, de sorte qu'il existe souvent, dans divers individus
de la même espèce, une différence de 3o ou 50 vertèbres de
plus ou de moins. Le nombre des vertèbres du tronc, et par
conséquent aussi le nombre des côtes, n'excède que rarement
3oo, et ne se trouve jamais au dessous de ioo;les vertèbres de
la queue au contraire sont quelquefois réduites à 5, tandis qu on
en compte chez d'autres serpens de i5o à 200.
La conformation des vertèbres varie également dans les
différentes espèces , quoique toutes soient modelées sur le
même type. On y distingue toujours une partie centrale,
le corps , qui est armé d'apophyses plus ou moins développées
et plus ou moins nombreuses suivant la région du corps,
ou selon les espèces. Le corps des vertèbres est le plus souvent
ramassé ; mais chez la plupart des serpens d'arbre le diamètre
longitudinal de cette partie excède de beaucoup son épaisseur,
de sorte que les os du tronc sont, relativement à la taille de
ces animaux , beaucoup moins nombreux que chez le reste
des ophidiens. Les vertèbres jouent assez librement les unes
sur les autres, au moyen d'articulations prononcées et plus
nombreuses que dans la plupart des autres animaux. La
jointure principale , celle qui se trouve presque perpendi-
culaire à l'axe de la vertèbre, se compose d'un condyle
parfaitement spViérique, séparé du corps de la vertèbre par
un étranglement en guise de col; ce condyle est reçu
par la fossette creusée dans la partie antérieure <lu corps
de la vertèbre suivante: il en résulte un mode d'articulation
qui mériterait le nom d'enarthrose dans l'acception la plus
étendue, si se§ mouvemens n étaient jias gênés par les
10 DES OS DU TRONC.
articulations des apophyses des vertèbres. Les épineuses^
très larges et volumineuses à leur base , se confondent par
derrière, avec les apophyses articulaires , qui remplacent le
plus souvent aussi les transversales; à leur face antérieure au
contraire, la base des apophyses épineuses est prolongée
en une saillie large, qui se loge dans la cavité à la base de
1 apophyse précédente : les points de réunion sont deux
paires de facettes articulaires latérales et inclinées vers l'axe de
la vertèbre; et voilà l'origine des plans articulaires surnumé-
raires chez les ophidiens. Les plans des apophyses articulaires
enfin offrent une surface plane et leur direction est parfaite-
ment horizontale. Il résulte de cette description , que les
mouvemens du corps des serpens ne s'exécutent librement
que dans le sens latéral et vertical , et encore la mobilité
dans ce dernier sens est-elle modifiée suivant la conformation
des apophyses épineuses. Il est évident que cette mobilité doit
diminuer à mesure que ces dernières ont acquis du dévelop-
pement. Chez les Boas , les Tortrix , et chez plusieurs Cou-
leuvres, ophidiens qui ont la faculté de rouler leur corps
fortement en dedans, les apophyses épineuses supérieures
sont peu développées ^ et on n'en voit d'inférieures qu'à la
partie antérieure du tronc. D'autres ophidiens au contraire, et
particulièrement les serpens venimeux proprement dits, ont
toutes les vertèbres hérissées d'apophyses épineuses, tant
mférieures que supérieures, extrêmement développées et dont
les dernières sont souvent assez larges et serrées. Le déve-
loppement de ces parties variant cependant dans les espèces
d'un même genre, nous renvoyons à la partie spéciale de
notre travail pour des informations ultérieures; il ne me reste à
constater ici que les épineuses inférieures, lorsqu'elles existent,
ne se trouvent le plus souvent que dans les vertèbres qui com-
posent la partie antérieure du tronc, à partir du coeur.
Nous avons déjà dit plus haut que les vertèbres des ophi-
diens sont, à quelques exceptions près , dénuées d'apophyses
DES OS J)IJ Tiionsc. 11
transversales , ilont on ne retrouve des parties analogues que
chez les Bongares , où elles consistent de chaque côté en deux
lamelles très minces: l'une supérieure, peu développée et
légèrement oblique, l'autre antérieure assez considérable et
large au bout.
Une saillie de l'os, placée de chaque côté à la partie anté-
rieure du corps des vertèbres et dirigée un peu vers le dessous,
porte la facette articulaire pour les côtes. Ces os , larges
et comprimés à la base, où ils offrent par derrière une
petite apophyse émoussée, sont presque cylindriques, dirigés
en arrière, toujours arqués, mais dans un degré différent
selon les espèces; leur longueur varie également, suivant
la circonférence du tronc qu'ils doivent embrasser. Leur
extrémité sternale se termine en un cartilage , qui se prolonge
sur les bords des bandes abdominales.
La forme extérieure des serpens indique que le développe-
ment des vertèbres, de leurs apophyses et des côtes, doit
diminuer vers les deux bouts du tronc : aussi les côtes
de la première vertèbre sont-elles très petites ou manquent
même tout-à-fait. L'atlas , souvent dépourvu d'apophyse
épineuse, a son corps perforé par l'apophyse odontoïde,
qui se présente sous la forme d'une saillie conique, entourée
par les trois plans articulaires, qui forment la cavité glénoïde,
destinée pour la réception du condyle occipital. La petitesse
des premières vertèbres et le peu de développement de leurs
apophyses , fait que leurs plans articulaires sont assez obli-
térés , et même confondus les uns avec les autres. Les
vertèbres de la queue offrent , à la disposition des apophyses
près , une conformation analogue à celles du tronc , mais leur
développement diminue insensiblement , à mesure qu elles se
rapprochent du bout de ce membre. Elles sont constamment
pourvues d'apophyses transversales dirigées en bas , qui aug-
mentent en longueur vers la base de la queue où elles sont
souvent, comme les dernières côtes, fendues en deux, de
12 DES OS DE LA TÈTE.
sorte qu'il en existe quatre ou six rangées ou plus. Le Jévelop-
pemeîit des épineuses supérieures de la queue se rè'de sur
celui des apophyses des vertèbres du tronc, quoique dans les
serpens de mer, elles soient d'une longueur peu conmiune ; les
inférieures au contraire, sont toujours fendues longitudinale-
ment, ou plutôt on en compte une double rangée. Dans
quelques ophidiens à queue obtuse et grosse , tels que l'Eryx,
le nombre des apophyses de la queue est très grand et on en
voit par les raisons ci-dessus énoncées, chez les Bongares,
trois rangées de transversales.
DES OS DE LA TETE.
Le crâne proprement dit des ophidiens, ou l'ensemble
des os qui renferment le cerveau et la plupart des organes
des sens, forme la plus petite partie de la charpente
osseuse qui sert de base à toute la tête. Les organes solides
de la manducation au contraire, avec leurs attaches et leurs
leviers assez développés, qui jouissent tous d'une mobilité
plus ou moins limitée , composent une autre partie du crâne,
plus étendue que la première, et de laquelle dépend presque
entièrement la forme extérieure de la tête. Le crâne propre-
ment dit est toujours alongé, et offre sa plus grande largeur
immédiatement derrière les yeux ; d ici ses bords latéraux
vont le plus souvent en convergeant vers le bout du
museau ; la partie postérieure du crâne se rétrécit brus-
quement et forme un cylindre plus ou moins effilé, évasé
à la base, boursoidflé au milieu, et plus gros vers le bout.
Les (ôtés de cette partie servent de point d'insertion aux
nuiscles temporaux , dont l'action produit avec l'âge une
crête saillante sur le sonmiet i\u crâne. La fosse temporale
ainsi iormée, n'est par derrière que vaguejnenl terminée pai les
DKS OS l)i: LA rftTK. lA
-caisses; par devant ce sont les frontaux postérieurs, loiquils
existent, cpil indiquent les limites entre cette cavité et
celle qui renferme l'œil. Il est évident que cettiî dernière
doit être plus ou moins complète suivant le degré de déve-
loppenu^nt de ces os; d'ailleurs cette cavité n'est jamais
parfaitement fermée qu'à sa partie antérieure. La cavité
nasale (Mifin , toujours ouverte vers le devant, et dont les
ouvertures internes sont très rapprochées du bout tlu
museau , occupe la partie antérieure du crAne et n'est que
très incomplètement recouverte par les nasaux.
Les pièces osseuses qui forment les parois de la cavité du
crâne sont toutes soudées entre elles, et se composent des
suivantes :
i) Le s p hé n o ï de, os impair de forme effilée, occupant la
base du crâne, est pourvu de chaque côté,chez plusieurs serpens
non venimeux et notamment chez les Boas, d'une saillie ou
d'une petite protubérance, qui sert d'attache aux ptéryooïdiens
internes; c'est au contraire chez les serpens venimeux propre-
ment dits, que sa partie postérieure est amincie en une crête
qui se prolonge souvent en arrière pour former , conjoii-te-
nient avec l'occipital inférieur , ce long crochet analo^^ue aux
apophyses épineuses inférieures des vertèbres, et qui offre un
levier puissant , servant de point d'insertion aux muscles
flécliisseurs de la tète.
2j Le pariétal, os également impair, qui détermine
principaieniiînt la forme de la partie postérieure de la tète et
dont nous avons par conséquent mentionné plus haut la
configuration.
3j Les frontaux proprement dits, os constamment en
nombre pair, qui terminent la cavité du crâne en avant; ils
sont le plus souvent à surface plane en dessus, et descendent
dans l'orbite pour se réunii- avec le sphénoïde.
4) Les occipitaux, divisés en iid'érieurs et supérieui
engrenés à l'extrémité postérieure du crân(!, et munis (\(
s,
14 DES OS DE Là TETE.
plusieurs protubérances, dont celles qui entourent le trou
occipital sont les plus remarquables. L'entrée de cette cavité est
protégée au dessus par une lame osseuse, en guise d'écaillé,
assez saillante et voûtée; au dessous se projeté le condyle
occipital, porté sur un col et composé de trois pièces qui, se
soudant avec l'âge, ne forment qu'un seul plan articulaire
tantôt en trèfle , tantôt en cœur.
5) Viennent enfin les rocliers, enchâssés de chaque côté
^ntre les occipitaux et le pariétal , et dont les cavités contien-
nent les organes de l'ouïe ; la postérieure reçoit le rocher.
L'assemblage des os de la face se trouve dans le même
plan avec ceux qui forment la boîte osseuse du crâne propre-
ment dit , et que nous venons de décrire. On observe d'abord
une paire d'os , les frontaux antérieurs , qui sont le plus sou-
vent en trigone, qui déterminent les parties latérales de la face,
et dont le plan postérieur sert à former la partie antérieure de
l'orbite; la face inférieure de cet os touche au maxillaire , avec
lequel il est articulé chez les serpens venimeux proprement dits:
sa forme et sa direction varient extrêmement, suivant les fonc-
tions qu'il doit remplir, et son volume est réduit, chez ces der-
niers êtres, à très peu de chose; la face interne enfin compose
le fond de la cavité nasale, dont l'étendue cependant est en
grande partie formée par plusieurs os liés au crâne au moyen
de ligamens , et permettant un mouvement plus ou moins libre
et dans le sens vertical. Ces pièces, qui servent en même temps
de base au museau, et qui déterminent le degré de mobilité
dont il est susceptible, reçoivent à leur bout antérieur l'in-
termaxillaire : ce sont i) le vomer, composé de deux pièces
symétriques, se réunissant le long de leur face interne, larges
et triangulaires en avant, effilées vers l'extrémité qui les réunit
au sphénoïde; 2) les nasaux, presque toujours triangulaires,
et dont une lamelle intérieure descend pour former la cloison
qui sépare les narines; ils recouvrent ia cavité nasale; 3) un
petit os, analogue aux cornets.
DKS OS DE LA TKTK. 15
•
On observe de plus dans le crâne des ophidiens plusieurs
pièces surnuméraires, qui cependaiU sont loin de se trouver
constannnent chez toutes les espèces. Les premières, les
frontaux j)ostérieurs , sont des os qui descendent du som-
met du front pour protéger le bord postérieur de l'œil;
chez les Trigonocéphales, les Crotales et chez d'autres serpens
non venimeux on ne voit que des vestiges de ces os; ils
disparaissent chez les Elaps et les Tortrix, tandis qu'ils sont
très développés chez les Boas , chez plusieurs Vipères , etc. ;
chez l'Acrochordc enfin, ils s'étendent jusqu aux frontanx
antérieurs, et remplacent ainsi les surorhitaux , autre paire
de pièces osseuses surnuméraires, propres aux Pythons, et
enchâssées entre les trois frontaux.
Tous les autres os de la tête appartiennent plus ou moins
directement au grand appareil, destiné à la manducation , si
toutefois ce terme peut s'employer chez les animaux dont
nous traitons. Cet appareil se divise naturellement en deux
parties: la première, qui se compose de la mâchoire supé-
rieure et de son train; la seconde, qui est formée par la
mâchoire inférieure et les pièces qui la suspendent au crâne.
Il faut rapportera la première, l'in ter ma xillaire, petit
os placé transversalement au bout du museau, rarement armé
de dents, et dont la manche se loge entre les nasaux et le
vomer : étant au reste libre, il suit les mouvemens de ces
os. Les maxillaires, également libres à leur extrémité anté-
rieure, sont réunis au crâne par l'intermède des frontaux
antérieurs ; leur extrémité postérieure se lie avec les ptéry-
goïdiens externes: mais il s'en faut bien que leur conforma-
tion et leur mode d'attache soient toujours les mêmes, dans les
différens genres d'ophidiens. Chez les serpens non venimeux
cet os est assez alongé, posé horizontalement, armé d'une
rangée de dents nombreuses, et toujours lié au moyen d'un
pont plus ou moins large aux palatins ou même aux ptérygoï-
diens internes; chez les venimeux au contraire, il est réduit à
k; des os de la tète.
une pièce assez courte , et frautant plus petite que le
serpent est plus venimeux: c'est ainsi que l'on voit chez
les serpens venimeux proprement dits , cet os porter unique-
ment les crochets, articulé au frontal antérieur et libre dans
tout le reste de son étendue. Il est évident , que le développe-
ment des ptérygoïdiens externes, vrais leviers de la mâ-
ciioire supérieure, doit se trouver en raison inverse de celui
des maxillaires; cette pièce intermédiaire entre les maxillaires
et les ptérygoïdiens internes est toujours dépourvue de dents ,^
et s'amincit à mesure qu'elle augmente en longueur : elle se
montre conséquemment chez les serpens venimeux, en forme
de stylet linéaire et très menu. Les ptérygoïdiens internes, aux-
c[ueîs se réunissent en avant les palatins, forment avec ceux-
ci deux branches, le plus souvent en S , et qui s'étendent sur
presque toute la longueur du crâne. Leur extrémité antérieure
est libre ou liée au vomer au moyen de ligamens, la posté-
rieure s'attache au bord interne de la caisse, près de sa base.
Ces branches sont , excepté chez le seul Oligodon , armées de
dents. Outre la réunion avec le ptérygoïdien externe, le ptéry-
goïdien interne se lie, chez plusieurs serpens non venimeux,
au sphénoïde. Il en est de même des palatins qui, chez toute
cette tribu et chez les serpens venimeux proprement dits,
s'attachent, au moyen d'une petite apophyse, à la base du
crâne.
Il me reste à parler de la mâchoire inférieure.
Tout le monde sait, que ses deux branches sont réunies à
leur bout antérieur au moyen d un ligament, au lieu d'être sou-
dées. Chaque branche se compose de deux os principaux: le
dentaire et l'articulaire ,pièces dont les sutures sont recouvertes
à la face interne de trois petites pièces surnuméraires; on a
comparé la supérieure à l'apophyse coronoïde du squelette des
mammitères, mais chez plusieurs ophidiens et notamment
chez les serpens venimeux proprement dits , la pièce dont
«ous pailons seti'ouve presque réduite à rien et placée sous le
DES OS DE LA TÈTE. 17
(icntahe, tandis que la vcritahlo apophyse coionoidoest assez
développée et occupe la partie postérieure de l'articulaire près
de sa jonction avec les caisses. Le dentaire portant à lui seul
les dents, en est toujours hérissé dans toute sa longueur: il varie
assez dans les différentes espèces, ayant acquis le terme du déve-
loppement chez les Boas,tandis qu'on observe l'excès opposé
chez les serpens venimeux; il est superllu d'observer que le
développement des deux pièces principales de la mandibule
inférieure doit avoir lieu en raison inverse l'une de l'autre, et que
l'étendue de cette mâchoire en son entier augmente naturelle-
ment, à mesure que ses os-suspensoirs ont acquis du déve-
loppement. Ces os-suspensoirs se trouvent au nombre de deux
de chaque côté: i) le mastoïdien , collé au crâne au dessus
du rocher , et 2) les caisses ou os lympaniques, liés aux
mastoïdiens au moyen de ligamens , et portant à leur extrémité
inférieure un plan articulaire plus ou moins échancré, qui
produit la jonction en charnière avec le condyle de la mâchoire
inférieure. Les mastoïdiens, rarement soudés au crâne, comme
dans les Tortrix, et le plus souvent en forme d'écaillé, sont
toujours placés dans le même plan avec la surface du crâne, et
le cèdent , relativement à leur étendue, aux caisses dont la
direction et la forme varient assez dans les diverses espèces:
ramassées et suspendues presque dans le sens vertical chez les
Elaps, les Boas, les Tortrix et plusieurs autres serpens non
venimeux, ces dernières pièces sont eifdées, filiformes, diii-
gées en dehors et dans une position plus ou moins verticale
chez beaucoup d'ophidiens, notamment de la division des
venimeux proprement dits.
Il résulte de la conformation de ces parties, que la bouche
des ophidiens est d'autant plus susceptible d'élargissement,
que les os-suspensoirs de la màchou-e inférieure ont acquis plus
de développement, et que ceux qui composent l'assemblage de
la mandibule supérieure sont libres ; si, au contraire, comme
chez beaucoup d'ophidiens, ces derniers se lient entre eux et
18 DES MUSCLES
au Liane, si leurs caisses sont petites, les os acquièrent de la
solidité ou un diamètre plus considérable, et la bouche peut
se dilater dans un degré beaucoup moindre.
DES MUSCLES.
Plusieurs anatomistes se sont attachés à décrire les muscles
des ophidiens. Sir Ever. Home (i) a fourni des observations
intéressantes relatives à ce sujet. On doit à M*. Hùbner (2),
médecin de Berlin, une dissertation dans laquelle l'auteur décrit
les organes de locomotion du Boa canina, mais cet opuscule
académique se rencontre très rarement dans les bibliothèques.
M.M. DuGÈs(3)et DiivERNOY(4)ont publié des descriptions et
de belles figures des muscles de la tête. Les recherches que
Meckel (5) a faites par rapport aux muscles des ophidiens,
sont de loin les plus complètes , qui aient jamais parues sur
cette partie difficile de la science. J'ai disséqué les muscles de
plusieurs serpens de différens genres; mais ces organes m'ont
offert dans les diverses espèces des modifications si sensibles,
qu'il aurait fallu faire des recherches très-étendues et compa-
ratives, pour ramener toutes ces disparités à un type commun.
Un pareil travail, plutôt d'un intérêt physiologique, serait
étranger au but que je me suis proposé dans mon ouvrage: je
me contente par conséquent, de donner un aperçu superficiel
des muscles des ophidiens en général.
Ces organes, particulièrement ceux du tronc, sont remar-
quables par le volume considérable que l'on remarque dans
(1) Phil. Trans. vol. Xel Lectures on comp, Jnat. — (2) />e orgnnis
motoriis Bo(ie caninae, — (3) Ann., d, se. nat, vol. XII . — (4) ibid.
XXVI , PI. 10. — (5) Vergl. A nat. vol. lit p. i3o. suiv.
DES MUSCLES. VJ
quelques-uns, et par le développement extraordinaire des ten
dons, qui acquièrent chez quelques espèces, notamment dans
les serpens venimeux proprement dits, une étendue peu
commune. Cette organisation était nécessaire pour produire
la force et l'énergie, avec lescjuelles sont exécutés les mouve-
mens ondoyans du corps, les principaux dans la locomotion
des ophidiens. Les muscles qui produisent ces effets sont
situés le long des côtés du dos et à la face antérieure des
vertèbres; mais comme les côtes exercent, en même temps
chez les ophidiens, la fonction d'organes de locomotion , il est
évident que les muscles nombreux qui s'attachent à ces os,
doivent beaucoup contribuer aux mouvemens latéraux du
tronc. Les muscles des ophidiens étant souvent enlacés les
uns dans les autres, il devient très difficile de donner une
description exacte de chacun d'eux pris isolément, et il n'est pas
moins difficile de comparer ces organes avec ceux des animaux
d'un rang plus élevé et de constater les modifications qu'ils ont
éprouvés en s'éloignant de leur type.
La partie supérieure de l'épine ou , si l'on veut, la posté-
rieure, offre un grand nombre de muscles, qui prennent leur
origine à la partie latérale des apophyses épineuses, et qui se
réunissent à de longs tendons, provenant des apophyses arti-
culaires: ils forment un muscle composé, qui répond aux
muscles épineux et demi-épineux des mammifères, et qui
envoyé dans toute sa longueur des tendons aux bouts des
apophyses épineuses; il se divise sur le cou en deux parties,
dont l'intérieure s'attache à l'atlas , tandis que l'extérieure se
prolonge sur l'occiput, pour remplir les fonctions de releveur
de la tète. Les muscles que nous venons de décrire se lient
étroitement avec les épineux transversaires qu'ils recouvrent,
et dont la partie antérieure s'attache également à la face pos-
térieure de l'occiput. L'extenseur de l'épine est un autre muscle
très considérable, composé d'un grand nombre de faisceaux ,
enlaces les uns dans les autres et se terminant eii tendons:
20 DES MUSCLES.
ces faisceaux proviennent des apophyses liansversaires et
envoyent souvent des tendons aux apophyses épineuses; ils sont
étroitement hés avec d'autres faisceaux musculaires, qui réu-
nissent les côtes dix à dix, et qui se prolongent par devant sur
les côtés de l'occiput. Les espaces entre les apophyses des vertè-
bres sont remplis par les muscles épineux et intertransversaires.
Les muscles des côtes sont nombreux et compliqués ; quelques
uns servent à redresser ces leviers en les réunissant quatre à
quatre; d'autres, dont la direction est presque perpendiculaire,
ont en outre l'usage de relever les côtes. On voit d'autres
muscles provenant également des côtes qui descendent sur la
peau des flancs jusqu'à Tabdomen; ils recouvrent des faisceaux
qui se dirigent obliquement en arrière, pour réunir les côtes
deux à deux, et qui forment par derrière le fléchisseur de la
queue. On distingue en outre deux à trois paires de muscles
intercostaux, dont les externes réunissent les côtes tantôt
deux à deux, tantôt quatre à quatre. La surface intérieure des
côtes et l'inférieure des vertèbres, présentent plusieurs mus-
cles assez développés, provenant en partie delà partie latérale
des vertèbres, en partie des côtes mêmes, et qui s'attachent
aux côteSjSoit au milieu, soit à l'extrémité sternale: ces muscles
ont l'usage de rabaisser les côtes et de les tirer en arrière ; ils
s'étendent sous la queue en formant le fléchisseur de ce mem-
bre; mais ils sont remplacés sur le cou par les abaisseurs de
la tête, dont la configuration rappelle celle d'un triangle aign,
et qui sont accompagnés des muscles qui contribuent aux
mouvemens latéraux de la tête.
La tête elle-même reçoit en outre plusieurs muscles, qui
prennent leur origine sur les apophyses épineuses postérieures
des vertèbres collaires: l'un d'entre eux s'étend le long de la
mâchoire inférieure; un autre, plus court,va des vertèbres cer-
vicales à l'articulation de cette mâchoire. Le muscle costo-man-
dibulaire s'étend des côtes antérieuressouslagorge, pour s'atta-
cher aux braiichesde la mâchoire inférieure, dont les bouts sont
DES EXTREMITES. 21
liés par un petit muscle transversal. Les muscles de la man-
ducation sont le plus souvent assez développés: le temporal
est constamment divisé en deux parties, dont l'antérieure
passe au-dessous des glandes salivaires , pour s'attacher en
large ruban sur la mâchoire inférieure; les fibres qui se
prolongent sur la glande venimeuse, et qui servent à la com-
primer lors de la moi-sure, proviennent également de ce muscle.
On a comparé au digastrique le muscle qui s'étend à la face
supérieure des caisses. Le muscle qui va de l'articulation delà
mâchoire inférieure au ptérygoïdien externe, a reçu le nom de ce
dernier os: dans les serpensvenimeux il envoie deux tendons,
l'un destiné pour le maxillaire, l'autre pour la capsule des cro-
chets. Outre les muscles déjà décrits, il en existe deux autres,
qui prennent leur origine près de l'articulation de la mâchoire
inférieure: i) le ptérygoïdien interne, et 2) le muscle qui se
fixe à la base de l'occiput. Un troisième muscle assez long, réunit
l'os ptérygoïdien interne au sphénoïde, où il s'attache souvent
par deux têtes; il existe enfin un petit muscle entre le sphé-
noïde et le palatin.
DES VESTIGES D'EXTREMITES
POSTÉRIEURES.
Plusieurs serpens présentent de chaque côté de l'anus un
petit crochet j à moitié caché par les écailles, et dont on a
reconnu l'existence depuis longtemps; mais c'est au professeur
Mayer à Bonn, qu'on en doit la première connaissance
exacte: ce savant a démontré, que ces organes doivent être
regardés comme vestiges d'extrémités postérieures. Dans
l'ordre des ophidiens on n'a observé jusqu'à présent ces
os que chez les Tortrix proprement dits, chez les Python 5
et les Boas; tous les autres serpens, d'après mes propn 35
22 DES EXTRÉMITÉS.
recherches en sont absolument dépourvus. Ces organes se
trouvant développés à un degré supérieur chez les Boas ,
et la taille de ces animaux étant favorable à l'examen de par-
ties aussi délicates , on a choisi le type des descriptions de ces
organes parmi les espèces de ce genre. Ces vestiges d'extrémités
postérieures consistent de chaque coté en nn assemblage de
trois pièces osseuses principales, et de^deux petites pièces
accessoires, attachées au point d'articulation du tibia et du
tarse. L'os terminal, le seul qui paraît en dehors, est en forme
d'ongle crochu et revêtu d'une peau dure et écailleuse. On
découvre, au moyen d'une incision longitudinale faite dans
les chairs au côté de l'anus, que la pièce intérieure, la plus
développée de toutes, plus ou moins en S et comparable au
tibia,se prolonge avec son bout libre jusque dans la cavité abdo-
minale. La pièce moyenne au contraire, qui représente le
tarse, est grosse, courte, un peu arquée et complètement
cachée dans les chairs. Les muscles qui meuvent l'appareil que
nous venons de décrire, sont d'une construction très simple ;
les principaux sont un extenseur, avec son antagoniste, le
fléchisseur: tous deux sont insérés près du bout supérieur du
tibia et s'attachent à l'os du tarse: l'extenseur à la face anté-
rieure près de l'ongle , le fléchisseur à une apophyse située au
milieu de la face postérieure de cet os. Deux autres muscles
moins développés, suspendus aux chairs et attachés aux deux
petites pièces accessoires du tarse, produisent le mouvement
latéral: l'adducteur, qui se dirige vers l'abdomen, est beaucoup
plus petit que l'abducteur, dont les fibres se prolongent sur les
côtés du dos. On voit chez les Boas,outre ces muscles,un second
fléchisseur très petit, situé à la face interne du tibia et du tarse,
et contribuant à la mobilité de l'articulation dont jouissent ces
deux pièces. L'appareil,représentant les extrémités postérieures
chezles autres serpens qui en sont pourvus est,quelques légères
modifications exceptées, absolument modelé sur celui des
Boas.
DES MOUVEMENS. 23
On ignore justju à présent l'usage de ces vestiges d'extrénii-
lés. Lenr pou de développement défend de supposer qu'ils
puissent contribuer à la locomotion. On a avancé (ju'ils
seraient d'utilité lors de la co[)ulation : opinion à lacjuelle
on ne peut guère opposer le fait que les deux sexes en sont
également pourvus. D'autres savans ont soutenu qu'ils
servent pour s'accrocher plus fortement aux objets ,
qu'embrassent les circonvolutions de la queue ou du tronc;
ce qui est peut-être de toutes les bypollièses la plus pro-
bable.
DES MOUVi:31EI\S.
Après avoir décrit les organes de locomotion, nous parle-
rons des divers mouvemens que les serpens sont à même
d'exécuter. En repos parfait , ces reptiles aiment à rouler leur
corps en spirale, en sorte que la tête seule, qui se Irouve au
centre, s'élève un peu au-dessus des autres parties: ayant
cependant la faculté de ployer leur corps flexible en mille sens
divers, on en rencontre souvent de simplement étendus à terre
ou à corps recourbé en contours sinueux. Pour produire le
mouvement progressif, le serpent n'a qu'à dérouler son corps;
en s'appuyant ensuite sur la queue, en repliant son corps en
des sinuosités latérales successives, et en portant à terre les
nombreux points de contact qu'offrent les extrémités anté-
rieures des côtes, le reptile est poussé en avant et transporté
avec une promptitude, égale aux efforts ou à la puissance des
agens de la locomotion. Nous avons déjà observé ci-dessus,
que tous les mouvemensprogressifs des ophidiens sont à-peu
près exécutés de la même manière, et que ce n'est que la
queue qui seconde la locomotion plus ou moins diversement,
selon les modifications que sa conformation éprouve dans les
24 DES MOUVEMENS.
différentes races. Très souvent , pour examiner ce qui se passe
autour d'eux, les serpens s'érigent perpendiculairement, en
s'appuyant seulement sur la queue ou sur une partie de l'abdo-
men; leur tronc est alors raide et parfaitement droit, et ce
n'est le plus souvent que la tête qui est courbée et dirigée en
avant ; d'autres plient leur corps en S, gonflant souvent leur
cou dans cette position. Suspendus perpendiculairement à
une brandie d'arbre les Boas ressemblent à un corps raide
et sans vie. Pour descendre d'un arbre ou d'un objet élevé
quelconque,!es serpens se laissent tout simplement tomber de
baut en bas, leurs formes et la grande élasticité de leurs par-
ties empêchant que cette chute n'ait des suites dangereuses ;
ayant atteint la terre, le choc qu'ils ont éprouvé en tombant,
au lieu de leur nuire et de les retenir, les pousse en avant ,
et sert d'impulsion aux mouvemens suivans.
On a beaucoup parlé de serpens qui peuvent également
bien exécuter la marche rétrograde; cette particularité s'at-
tribue par excellence à ces serpens fouisseurs , dont le corps
cylindrique est terminé par une queue très grosse et obtuse au
bout; mais comme ce fait n'a jamais été constaté ni par des
voyageurs instruits ni par des naturalistes de profession, on a
lieu d'en douter : peut-être doit -il son origine aux préjugés
des anciens (i) , qui décrivent sous le nom d'Amphisbène
(double-marcheur) un serpent pourvu à chaque bout d'une
tête et ayant la faculté de marcher dans les deux sens; ce nom,
servant à désigner un ophidien de l'ancien monde,probablement
l'Eryx, s'est conservé chez les naturalistes modernes qui l'ont
appliqué à des serpens de l'Amérique, en suivant l'exemple
des Portugais.
La plupart des serpens non venimeux et les venimeux colu-
briformes se défendent contre les attaques de leurs ennemis ,
en se précipitant sur eux, la tctc élevée, afin de pouvoir
(0 Pmn, 8. ^5 et Afliancj 23.
DES DEINTS. 25
mordreavec plus cl énergie; quelques-uns, tels que les Najas ,
redressent le devant de leur corps, et prennent unt^ pf)sillon
toute particulière. La plupart font entendre dessifflemens aigus,
qui préludent au combat; quelquefois on entend aussi un
soufflement produit par l'air, qu'ils chassent avec violence par
les narines. Plusieurs espèces se jetent , en faisant de grands
bonds, sur leur proie, qu'ils saisissent le plus souvent avec la
gueule;d'autres la retiennent en l'entortillant avec la queue,et les
Boas l'entourent même par des circonvolutions de leur tronc.
Les serpens venimeux proprement dits employent le
même moyen pour s'emparer des animaux dont ils font leur
nourriture, et pour se débarrasser de leurs ennemis. Indolem •
ment étendus à terre , ils attaquent indifféremment tout être
vivant, qui vient les inquiéter de trop près; mais connaissant
la force de leurs armes, ils se contentent d'infliger le coup
meurtrier qni manque rarement son but. Pour exécuter ce
coup, ils redressent le plus souvent la tête, ils portent la
partie antérieure du tronc en arrière, et déroulent d'un seul
trait les replis de leur corps , en s'appuyant sur la queue ; le
saut que produit ce mouvement est comparable à un ressort
qui se débande, et il dirige le coup qu'infligent les crochets,
par un mouvement subit et extrêmement vite de la tête en bas.
DES DENTS.
Les ophidiens avalant en entier les animaux dont ils se
nourrissent, leurs dents ne servent ni à mâcher ni à broyer
les alimens: ce sont de simples crochets, destinés à frapper
des plaies, a retenir la proie, et à agir lors de la déglutition.
Indépendamment de ces fonctions, ces dénis servent souvent
26 DES DENTS.
à conduire dans les plaies qu'elles ont laites, la liqueur pio-
duite par les glaudes dont la tête est le siège. Ces glandes
sont de double nature: les unes, composées à l'instar des
glandes salivaires des mammifères et des oiseaux, d'un grand
nombre de petits grains, sécrètent un fluide analogue à la
salive , et dont l'usage est de préparer les substances nutritives
pour la digestion j les autres au contraire, sont d'une structure
toute différente: elles forment un sac épais, dont l'inté-
rieur est divisé en de nombreux compartimens ; ces glandes
distillent une liqueur qui, par les effets fatals qu'elle produit
dans le corps animal, devient larme funeste au moyen de la-
quelle lesserpens détruisent les animaux qui leur servent de
nourriture. Les glandes salivaires sont propres à tous les
ophidiens, mais à peine le quart des espèces connues sont-
elles pourvuesen outre de glandes venimeuses. Les dents, qui
conduisent le venin dans la plaie, toujours caves et percées
aux deux bouts, s'apellent crochets: elles ont constam-
ment leur place à l'extrémité antérieuredu maxillaire, où elles
sont fixées et qu'elles occupent quelquefois à elles-seules :
cachées par les gencives, qui forment à cet endroit une es-
pèce de gaine , elles sont couchées à l'état de repos du serpent
et ne s'érigent que lorsqu'il veut mordre. Le reste des dents,
et toutes celles dont la bouche des non-venimeux est garnie,
sont solides, à l'exception du creux qui contient les organes
nutritifs de la dent. On a cependant observé un bon nombre
de serpens non-venimeux, de genres très divers, qui oflrenl
des mâchoires pourvues d'une ou de deux dents plus volumi-
neuses que le reste,et le plus souvent sillonnées par une fente,
qui s'étend tout le long de leur face antérieure. Ces dents can-
nelées se trouvent toujours au bout postérieur du maxillaire,
et ce n'est que rarement qu'on en voit une seconde au milieu
des mâchoires: elles n'ont d'autres fonctions quede verser dans
les morsures qu'elles ont faites, une salive plus abondante,
sécrétée par la partie postérieure des glandes salivaiies, qui
DES DEINTS. 27
sont plus volumineuses dans laréj^ion qu'occupent ces dents
cannelées, (i)
(i) C'est à tort, que l'on a classé dans la tribu des venimeux ces serpens
qui offrent des dents postérieures plus longues et cannelées. Les données
vagues et contradictoires sur les qualités des ophidiens, données four-
nies par les indigènes de Java, ont probablement causé ces erreurs. Aux
Indes comme au Brésil, en Afrique comme en Europe, le peuple répute
indifféremment venimeux le plus grand nombre des serpens, et notam-
ment ceux dont l'aspect offre quelque chose de hideux. M. Reinw^ardt,
lors de sa résidence à Java, fit la découverte de l'existence de dents can-
nelées chez plusieurs espèces de l'ancien genre Couleuvre: communiquée
ensuite par feu Leschenault et par d'autres voyageurs, et accompagnée
de récils sur la nature des serpens en vogue dans cette île,cette découverte
vint fixer l'attention des naturalistes en Europe. Boie constata les ob-
servations du professeur Reinwakdt sur plusieurs autres ophidiens.
J'ai publié en 1827, dans un mémoire inséré parmi ceux des Curieux de
lanaturedeBonn , mes propres recherches relatives à cefail. Depuis celte
question a été souvent agitée,et on est même arrivé,au moyen d'investiga-
tions anatomiques,à la conclusion,de considérer comme dangereuses toutes
les espèces à dents postérieures plus longues ou cannelées. J'ai obtenu
par des recherches analogues , et au moyen d'un examen rigoureux des
récits que l'on débite sur le caractère suspect de certains serpens , un
résultat tout-à-fait opposé. L'organisation de la soi-disant glande veni-
meuse postérieure, absolument semblable aux autres glandes salivaires,
ne permet guère de douter qu'elle ne sécrète un fluide de la même
nature que la salive ordinaire: aussi les observations récentes de nos
voyageurs servent-elles à constater, que, ni la morsure des Dryiophis
ni celle des Dipsas, serpens à dents sillonées , n'ont des conséquences
fatales pour l'homme (ij.
( 1 ) Les glandes de la tète des serpens ont fourni matière à un grand nombre
de dissertations publiées par Ranby Phil. Tians. ^'^. 4o[ p. 877 suiv. ,par
RussEL, par Seifpert, par Tiedemajvk Mém.de l'ac. de Munich i8i3 p. a5,
parCLOQUET Ne'm. du Muséum VII p. 62 , par Desmoulins ap. Macendie
Journ. de Physiol. IV p. 274 suiv., par Meckel Jrc/iiv 1. i et par Duverhoy
Ann. d. se. nat. XXVl et XXX, On trouve en outre des renseignemens
relatifs a ce sujet dans les ouvrages deRiDi , Mead, FonrAifA , et Chabas.
28 DES DENTS.
Cependant , en étudiant le développement des dents
des Ophidiens y on s'aperçoit cpi'il y a un passage insensible
des dents solides aux crochets. Chaque dent consiste, dans les
premiers degrés du développement, d'une lamelle à bords ren-
trans, de sorte qu'elle est ouverte à sa face antérieure. Dans
les dents solides, celte fente se soude dès la première jeunesse
de l'animal; elledemeur<^ ouverte un peu plus longtemps dans
les crochets des serpens venimeux proprement dits,maisà l'état
parfait, ces crochets n'offrent que les deux orifices destinées à
l'entréeetà la sortie du venin, etdontl'inférieur conserve toujours
la forme d'une fente longitudinale;le reste des serpens venimeux
présente des crochets analogues, mais on découvre toujours
les traces de la fente , qui réunit les deux orifices pour le venin;
la cannelure enfin des dents postérieures plus longues de cer-
tains ophidiens innocens, n'est que cette fente, qui reste ou-
verte pendant toute l'existence de l'animal (i). Chaque dent
avant de se développer, est recouverte d'une espèce de rnem-
brane,qui contient en même temps les matières nutritives: en
s'ossifiant, la dent se colle par sa base sur les creux qui repré-
sentent les alvéoles, et se fixe à mesure que l'ossification
avance; très souvent et principalement dans les crochets,
il reste par derrière à leur* base un petit orifice pour
l'entrée des vaisseaux et des nerfs: aussi les crochets se réu-
nissent-ils plus intimement avec les os que les autres dents.
On observe souvent les germes de nouvelles dents, cachés à
côté des anciennes, dans les gencives, et servant à remplacer
les dents lorsqu'elles sont détruites par quelque accident:
aussitôt la nouvelle dent se déplace pour occuper l'alvéole
dégarnie, où elle se fixe en se développant de la manière dé-
crite (2). Les crochets étant plus exposés que les autres dentt»
(1) Voyez, fig, i, 2, 3 et 4 PL 16 de mon mémoire cité.
(a) Voir le mémoiic sur la leproduclion des crochets publié par
RosA , méiuoiic (jue je ne connais que par l'extrait donné par Mlcrel
trad. alL de l'aitat. comp. de Cuvieb to/. III. /?. 126 suiv.
DES DENTS. 21;
la nature a veille à Jour lepicxluetion, en piaeant denièie eux
plusieurs germes de nouveaux crochets, dont le nombre s'élève
quelquefois jusqu'à six, et qui se succèdent dans tous les
degrés de développement; on ignore si les anciens crochets
tombent spontanément à certaines époques, et si ce remplace-
ment des crochets a lieu oraduellement. La structure interne
de ces organes offre cela de remarquable, que le canal conduc-
teur du venin est séparé par une cloison, du creux contenant
les matières nutritives de la dent(i).
Des dents solides se trouvent indifféremment chez tous
les ophidiens ; mais leur nombre, leur forme et leur disposi-
tion présentent des différences considérables dans les diverses
espèces. A l'exception de l'Oligodon, qui est dépourvu de
dents palatines, on compte toujours quatre rangées de dents
à la mâchoire supérieure et deux à finférieure. On n'observe
de dents intermaxillaires que chez les pythons et quelque-
fois chez le Tortrix scytale : leur nombre s'élève rarement au
dessus de quatre. Les dents solides des ophidiens sont le
plus souvent toutes de la même longueur: chez les Boas
cependant elles augmentent en étendue vers le bout du museau,
ce qui a lieu dans un sens inverse chez plusieurs espèces des
genres Coluber,Tropidonotus etc.;les Lycodons offrent à l'extré-
mité antérieure du maxillaire, plusieursdentsplus développées
que les autres; les dents des Dryophis et des Psannnophissont
assez inégales, et on en voit plusieurs de très longues au milieu
des mâchoires et au bout postérieur des maxillaires: ces dents,
ainsi que les dents postérieures de certaines espèces des genres
Dipsas, Homalopsis etc., sont souvent cannelées; tandis que
d'autres ophidiens, tels que les Xénodons, les Coronelles,
plusieurs Homalopsis etc. ont le bout postérieur du maxillaire
garni d'une dent très développée mais solide. Il est évident
que le nombre des dents varie suivant le développement du
(i) Voir les figures des crochet» dans l'ouvrage de Fontana,
30 DES GLANDES.
maxillaire et de l'os dentaire de la mâchoire inférieure: chez la
plupart des Couleuvres , chacune de ces branches contient
jusqu'à 20 ou 25 dents; ces dents sont moins nombreuses chez
lesHomalopsis, les Tortrix, les Calamars, et réduites à un très
petit nombre chez les serpens venimeux. Nous avons déjà dit
plus haut, que le maxillaire des serpens venimeux proprement
dits n'est armé que de crochets : mais cet os, ayant acquis
plus de développement chez les venimeux colubriformes , il
porte le plus souvent derrière les crochets, une ou plusieurs
dents solides (l).
DES GLANDES.
Les glandes saliv aires de la tête des serpens pré-
sentent des modifications sensibles, sous le rapport du déve-
loppement, de la situation et de la forme, non seulement
selon les divers genres de cet ordre, mais aussi selon les es-
pèces. Leur volume est toujours beaucoup plus considérable
dans les espèces innocentes que dans celles qui sont munies
en outre d'une glande venimeuse. On a désigné ces glandes
suivant le lieu qu'elles occupent, en sorte qu'on en distingue
d^ nasales , de lacrymales etc. j on peut subdiviser celles
qui garnissent les mâchoires en maxillah^es et mandibulaires.
Toutes ces glandes salivaires, quoique d'une organisation
(1) Le Tropidonote rude offre une anomalie fort curieuse par la
présence de pointes émaiilées en guise de dents, qui surmontent lesex-
trémités des apophyses épineuses inférieures des sept ou huit dernières
vertèbres collaires : ces dents sont dirigées en arrière et rappelenl celles
des cyprins et de certains crustacés , quoique leur usage , à en juger
par leur direction , est peut-être analogue à celui des appendices coni-
ques de l'œsophage des tortues marines. Elles percent les tuniques de
l'œsophage ,' et s'aperçoivent facilement à l'intérieur du canal alimen-
taire, même dans les très jeunes sujets.
DES GLANDES. 31
seiiil)l:il)le, présentent cependant entre elles qu(;lqnes diffé-
lences par rapport à l'aspect et à la configuration: la
nasale, par exemple, est toujours plus dure au toucher que
celle des mâchoires; la lacrymale offre le plus souvent une
surface unie et une couleur plus pâle, aussi est-elle d'une
consistance plus molle que le reste; les maxillaires enfin,
lorsqu'elles présentent un lobe postérieur très développé,
ont quelquefois cette portion de la glande divisée en d'autres
lol)es plus petits mais cohérents entre eux.
La lacrymale envoie, d'après les observations de M. J.
Cl'jquet (i), une partie du fluide qu'elle sécrète, dans la
cavité en avant du globe de l'œil : elle est sous ce rapport
une véritable glande lacrymale ; mais son grand développe-
ment dans plusieurs serpens dont l'œil est très petit, et la
circonstance que l'humeur superflue est versée par plusieurs
petits canaux excréteurs, dans la bouche, font supposer avec
raison qu'elle remplit les doubles fonctions de glande lacry-
male et de glande salivaire, et qu'elle mérite peut-être, chez
beaucoup d'ophidiens , ce dernier nom par excellence. Elle se
trouve constamment dans tous les ophidiens: située derrière le
globe de l'œil et protégée , lorsqu'ils existent, parles frontaux
postérieurs , elle est souvent recouverte par le muscle tem-
poral; tandis qu'elle rentre chez d'autres serpens plus ou
moins complètement dans l'orbite, en entourant le bord
postérieur de l'œil.
On observe une glande nasale (2) chez la plupart des
ophidiens. Elle occupe, lorsqu'elle existe, la région frê-
naie et borde les narines par derrière. M. Mùller a trouvé
qu'elle verse sa liqueur dans la bouche, au moyen d un canal
excréteur réuni à celui de la lacrymale. Cette glande est très
(i) Mérn. du Mus. vol Fil p. 62. suiv. —
(2) Le savant professeur Muller en a le premier constaté l'existence
chez les ophidiens ; voyez Meckf.l Jrc/tiv on n. 1829 />. 70.
:]2 DES GLANDES.
(Icveloppée chez le Xenopeltis, cliez quelques Couleuvres ,
chez le Tiigonocépliale à bouche rose etc.
Les glandes sali v aires , qui garnissent les mâchoi-
res , sont beaucoup moins développées chez les serpens veni-
meux que chez les non venimeux. 11 n'y a que peu d'espèces
de la dernière tribu qui offrent des glandes petites et l'Eryx
est même totalement dépourvu de glandes maxillaires. Les
espi'ces au contraire, à dents maxillaires postérieures sillon-
nées ou plus longues, présentent toujours une glande assez
développée dans cette région , et qui est quelquefois plus ou
moins parfaitement séparée du reste de la glande maxillaire.
Chez les serpens où on voit, outre les dents postérieures,
une dent plus longue au milieu des mâchoires , la glande
acquiert également à cet endroit un volume plus considéra-
ble, afin de fournir à cette grosse dent une liqueur plus
abondante. Chez plusieurs autres serpens les glandes maxil-
laires s'étendent sous la plaque rostrale, se réunissant ainsi
des deux côtés ; mais très souvent la rostrale est séparée des
maxillaires. Régnant tout le long des mâchoires, les glandes
maxillaires et mandibulaires envoient dans la bouche, l'hu-
meur qu'elles sécrètent, au moyen de petits canaux excréteurs,
dont l'embouchure donne dans les gencives, à la base des
dents. Le canal de la grosse glande chez les serpens à dents
postérieures cannelées, est assez sensible, et correspond exac-
tement avec le sillon, qui conduit la salive dans la plaie. Très
souvent la glande maxillaire est suspendue, au moyen d'un
ruban tendineux à l'articulation de la mâchoire inférieure.
Outre cet appareil salivaire compliqué et commun à tous
les serpens, on observe chez plusieurs espèces une glande
toute particulière, destinée à sécréter un fluide qui,
porté dans le corps animal, y produit des effets plus ou moins
fatals. Cette glande, appelée venimeuse, parce qu'elle
forme le caractère principal des serpens venimeux, est ren-
fermée dans une enveloppe tendineuse assez épaisse , tenace
DU vi:nin. 3:^
et dure au toucher, dont une portion s amincit par derrière en
forme de ruban étroit, qui attache la glande à Tarticulation
de la mâchoire inférieure. En avant , cette enveloppe se
rétrécit pour former un canal assez spacieux , qui s'étend le
long du maxillaire, et ne descend que pour donner dans 1 ori-
fice situé à la face antérieure de la base du crochet. Chez les
serpens venimeux proprement dits, ce canal est plié lorsque
les lonofs crochets sont couchés , afin d'avoir la faculté de
s'étendre et d'obéir avec facilité aux mouvemens du maxil-
laire. L'intérieur de la glande venimeuse est divisé en un
grand nombre de compartimens exigus ou de cellules , pro-
duites par des parois très minces et se croisant sous un angle
plus ou moins aigu (i): c'est à cette structure seule, toute dif-
férente de celle des glandes salivaires, qu'est due la sécrétion
An fluide appelé venin, à cause des effets délétères qu'il
produit dans l'œconomie animale. Il est vrai que la morsure
des animaux les plus innocens peut avoir des suites funestes
par le concours de certaines circonstances, telles que la tem-
pérature du climat, l'état psychologique et pathologique de
l'être mordu , la fureur dont l'animal qui mord est animé, etc. ;
et c'est par cette même raison, que la piqûre des serpens non
venimeux peut devenir dangereuse, même pour l'homme,
lorsque la nature de leur salive a été altérée par des circon-
stances analogues. Mais le venin des serpens venimeux tient
ses qualités délétères de sa propre nature, quoique les circon-
stances que nous venons de mentionner peuvent contribuer
à lui rendre plus d'activité.
Ce venin est, à l'état frais, un fluide transparent, lim-
pide, d'une teinte jaunâtre tirant sur le verdâtre , un peu
gluant quoique moins que la salive à laquelle il ressemble
sous plusieurs rapports: desséché, il devient visqueux et
s'attache fortement à d'autres objets; exposé au feu , il
(i) Voy<»/. Mûii.iR, De penitiori glandularurn structura.
?>
34 1)13 VENIN.
s'évapore sans brûler ; il s'enfonce dans 1 eau , la trouble et la
blanchit légèrement , lorsqu'on la secoue en l'y mêlant. Sa
nature tient beaucoup de celle du mucus; en le mettant en
contact avec des substances réactives , on découvre qu'il n'est
ni acide ni alcalin; son odeur n'offre rien de particulier;
appliqué sur la langue, il produit des sensations semblables à
celles produites par la graisse; on peut même , suivant Fon-
TANA (i) , le prendre à l'intérieur, sans que se déclarent les
moindres conséquences fâcheuses: cette observation cepen-
dant a été récemment contredite par les expériences que le
Docteur Hering (2) a faites à Surinam sur la nature du venin
d un Crotale muet. Ce voyageur, prenant à différentes reprises
des doses diverses de ce poison mêlé avec de l'eau , en res-
sentait les effets pendant huit jours et plus: ils se mani-
festaient par des douleurs dans le larynx et dans d'autres
parties du corps , par une sécrétion multipliée de mucus dans
les membranes du nez et de l'œsophage , par une diarrhée fré-
quente, accompagnée de douleurs dans le rectum etc. : à ces
symptômes s'en joignaient plusieurs autres assez curieux,
dûs à l'influence que ce poison aurait, selon M. Hering ,
sur les facultés morales.
Il conste de ce que nous venons de rapporter, que le venin
des serpens ne produit des effets délétères que lorsque , en
1 introduisant dans une plaie, il se mêle au sang: dès lors
se manifestent des symptômes morbides d'autant plus af-
freux et avec d'autant plus de rapidité que la quantité
du venin a été considérable et qu'il a été inoculé dans
une région du corps, riche en vaisseaux sanguifères. Voilà
pourquoi la morsure des grandes espèces est plus dangereuse
que celle des petites , pourquoi une piqûre faite à la langue
ou dans une veine est presque toujours mortelle , tandis
f 1) Ce fait était déjà connu d.ins ranU(|nil('.
(2) A|). Stapf. Archh' X calu 1 ; voir 1.kn/./>», Ifîo sui\.
DU VENIN. 35
qu'elle esl souvent sans les moindres conséquences fâcheuses
lorsqu'elle n'a atteint que les parties dures et calleuses du
corps (i). Cependant il faut encore attribuer la plus ou moins
grande activité du venin à beaucoup d'autres causes, outre
celles déjà alléguées: tantôt ce n'est qu'une seule dent qui entre
dans la chair, tantôt toutes deux y distillent leur venin; les
crochets pénètrent avec plus de facilité dans une partie du
corps peu volumineuse, telle que les doigts, que dans la cuis-
se, le tronc etc.; les serpens enfin, en mordant à plusieurs
reprises , épuisent leur venin , de sorte que les piqûres subsé-
quentes entraînent des conséquences moins fàcheiises que
les premières. Il faut également considérer la taille de l'ani-
mal mordu par rapport à celle du serpent : en Europe, l'homme
meurt rarement des suites de la piqûre de notre vipère;
il faut même jusqu'à trois ou quatre vipères pour faire périr
un cheval ou un bœuf, tandis qu'une seule morsure suffit
pour tuer en peu de temps de petits mammifères. 11 n'en est
pas ainsi dans les contrées tropiques, où la morsure des
grands serpens venimeux a le plus souvent des suites égale-
ment fatales pour l'homme et pour les animaux. Ainsi , on
peut établir comme loi que l'activité du venin aug-
mente avec une température du climat plus élevée,
(i) Le venin a beaucoup moins d'effel sur les animaux à sang froid
que sur les mammifères et les oiseaux; sur la plupart des invertébrés, il
ne produit pas les moindres effets fâcheux: ces faits nous montrent que
le mot venin n'est pas toujours employé dans l'acception pi imitive ,
mais plutôt dans un sens relatif et plus particulièrement par rapport
aux effets que produit ce (luidc sur Tliomme ou sur les animaux a
sang rouge.
(2) Cette circonstance paraît avoir donné lieu à l'opinion émise
par plusieurs naturalistes, que la Vipère elle-même et d'autres animaux
tels que l'Orvet , les Buses , étaient à l'épreuve de la morsure des ser-
pens venimeux; ces prétendus faits n'ont du moins été prouvés d'au-
cune manière certaine.
36 DU VENIN.
que la {)iqiire est d'autant plus dangereuse , que ce poison a été
dislillé plus abondamment dans la plaie, et que l'animal qui fit
la plaie et l'être qui en est la victime, ont été agités par des
émotions plus vives. D'innombrables expériences ont été
laites pour connaître le degré d'activité du venin
des différentes espèces de serpens , et les moyens les plus
sûrs pour en arrêter les effets. Laurentius s'est acquis de la
célébrité par des essais de cette sorte; tout le monde a entendu
parler des six mille expériences faites par Fontana ; les obser-
vations de RussET. à ce sujet sont passées dans presque tous
les traités d'Erpétologie ; M. Davy y en a joint récemment
plusieurs nouvelles, résultats d'expériences faites a l'île de
Ceylan ; M. Lenz en a fait un grand nombre avec la vipère
commune; enfin une foule d'autres naturalistes, des méde-
cins , des chimistes ont rapporté des faits détachés , servant
à éclaircir cette partie obscure du savoir humain. Mais malgré
ce grand nombre d'observations , les résultats , que l'on peut
en tirer sont peu satisfaisans. Toutes aboutissent à démon-
trer ce que nous avons dit plus haut , savoir que les symptô-
mes , dont la morsure des serpens venimeux est suivie , sont
modifiés à l'infini d'après les circonstances prévalentes. Pour
obtenir des résultats sûrs, il faudrait faire un très grand nom-
bre d'expériences avec des serpens de même taille, dans les
mêmes lieux, dans la même température, et leur faire mordre des
animaux de la même race, et de la même constitution : répé-
tant ensuite ces mêmes expériences avec d'autres espèces de
serpens, on pourrait parvenir à découvrir, en prenant
comme résultat le terme moyen des observations, si la nature
du venin diffère suivant les diverses espèces de serpens. Sans
révoquer en doute cette hypothèse, émise par plusieurs au-
lenis, j'ai lieu de croire que la morsure des serpens venimeux
pro[)rement dits est plus dangereuse que celle des venimeux
colubriformes et des serpens de mer, à cause de la puis-
sance des armes dont les premiers sont numls.
DU VENIN. 37
Le venin des ophidiens allecle beaucoup moins les animaux
à sang blanc que les vertébrés. Chez la plupart de ces derniers
les e f f e t s de la morsure se manifestent le plus souvent
incontinent après qu'ils ont été mordus. Lhomme en ressent
aussitôt une douleur aiguë dans le membre atteint par les cro-
chets, qui ne font qu'une ou deux petites piqûres à peine per-
ceptibles, et d'où s'écoulent quelques gouttes de sang: l'endioit
blessé se gonfle ensuite et l'inflammation se déclare avec plus
ou moins de promptitude; les progrès des effets du venin
dans les autres parties du corps s'annoncent par une faiblesse
générale; la marche devient pénible, la respiration gênée
et difficile; le malade éprouve une soif ardenle; des nau-
sées, des vomissemens succèdent bientôt , et sont souvent
suivis d'angoisses, d'éblouissemens qui , conjointement avec
les douleurs les plus vives, ôtent au souffrant l'usage de ses
facultés intellectuelles. Des taches livides entourant la plaie
sont les précurseurs de la gangrène qui, se propageant dans
les autres parties du corps, entraîne la mort, après un terme
plus ou moins long. Il est heureux que la piqûre des ser-
pens, dans les contrées tropiques même ne soit pas toujours
mortelle: cependant, les individus qui ont été mordus ressen-
tent après guérison , et cela souvent toute leur vie, des souf-
frances périodiques, ou sont frappés d'une paralysie partielle
ou complète des parties affectées, ou bien éprouvent une
perturbation continuelle des facultés intellectuelles.
Nous aurons soin d'énumérer, en parlant des erreurs dont
Ihistoire des serpens est enveloppée , plusieurs des prétendus
antidotes contre la morsure des serpens; on a essayé une
foule d'autres remèdes, dont l'efficacité a été vantée par les uns,
révoquée en doute par d'autres, et enfin démontrée nulle par
des expériences ultérieures. Chaque pays offre des pei sonnes,
qui prétendent posséder l'art de guérir les morsures des ser-
pens; mais on ne peut guère se lier à des gens superstitieux,
le plus souvent inq>osleurs et dont toutes les connaissances
38 DU VENIN.
reposent sur l'empirisme. Souvent chaque tribu des nom-
breuses peuplades des deux Amériques a une manière diverse
de traiter les malades de cette sorte: mais les plantes, dont les
uns vantent les vertus, sont inconnus à d'autres ou rejettéespar
eux. Dans les villages de l'Europe centrale, ce sont particu-
lièrement des pâtres, des bergers qui, exerçant la médecine,
ne jugent nullement au dessus de leurs capacités, de guérir
les morsures des vipères. Aux Indes et en Egypte, cet art
fait l'occupation d'une caste à part, aussi ignorante au-
jourd'hui que l'étaient leurs ancêtres des temps classiques.
Au lieu de rapporter ici ce que l'on a écrit sur ce sujet ,
je me borne à signaler les remèdes, que l'on a employés
avec le plus de succès et dont l'usage a été généralement
reconnu.
La première précaution à prendre, lorsqu'on a
été piqué par une serpent venimeux, est de nettoyer l'endroit
mordu pour empêcher que le venin qui pourrait adhérer à la
peau, ne puisse entrer dans la plaie lors de la scarification
qu'il est bon de faire sur-le-champ; on peut également se
servir de la pierre à cautère ou du fer rouge, pour corroder les
chairs de cette partie. Après avoir ensuite lavé la blessure de
nouveau , on la presse , et cherche à arrêter les progrès du venin
en la suçant ou , ce qui vaut mieux en y appliquant la ven-
touse. Une ligature sur la plaie même, et une autre établie
au dessus du lieu blessé si sa conformation le permet , pour
empêcher la communication du venin dans les autres parties
du corps, ont été reconnus être d'un grand service, pourvu
qu'elles ne soient point trop serrées. Nous ne citons des nom-
breux remèdes proposés pour être pris à l'intérieur que les
sudorifiques , que l'on censé être de bon effet. M. Lenz (i) a
employé avec un succès déterminé l'acide muriatique oxigéné
et recommande son application tant à l'intérieur qu'à l'extérieur:
[i) p. 1/^6 suiv.
I)K LA LANGUE. 39
on peut preiulre par jour sans inconvt'nieni une once et davan-
tage de cette préparation chimique, plus connue sous le nom de
Chlore. Des onctions faites avec de bonne huile d'olive ont été
également reconnues efficaces dans plusieurs occasions. Quel-
ques naturalistes attribuent à l'ammoniaque des qualités que
d'autres lui refusent : il en est de même de l'arsenic et de plusieurs
autres remèdes, que l on ne doit employer qu'avec précaution
et après avoir inutilement administré ceux dont nous venons
de faire mention ( i).
DE LA LANGUE.
La langue des ophidiens se fait particulièrement remar-
quer par sa grande extensibilité. Revêtue de tuniques assez
dures; faible, mince et divisée au bout antérieur en deux
fdets plus ou moins grêles, elle peut se retirer dans un fourreau ,
dont l'issue s'ouvre à une petite distance en avant de la glotte ;
la position de ces organes varie dans les diverses espèces : chez
les Hydrophis par exemple, ils se trouvent très près du bout du
museau , tandis qu ils sont placés plus en arrière chez les serpens
terrestres et d'arbre. La langue des ophidiens, quoique parfai-
tement semblable à celle de certains sauriens , tels que les
Moniteurs, les Téjus etc., s'en distingue cependant par la
grande simplicité des pièces dures qui la supportent ; en effet
il se trouve , au lieu d'un os hyoïde composé de plusieurs
pièces , un simple fil cartilagineux attaché à la face interne des
tégumens généraux de la région gulaire, et dont les deux
bouts se prolongent très en arrière. Ce cartilage est quelque-
(i) Consultez, outre l(?s dissertations déjà citées, la 'l'oxicolopc
iI'Orfila.
40 DES IINTRSTINS.
lois , comme dans les Boas , intimement réuni aux muscles de
la gorge, dont il entrecoupe les fibres, son extrémité postérieure
s*attachant alors à la peau sur les cotés du cou ; mais dans la
plupart des autres ophidiens les cornes de l'hyoïde sont libres,
très rapprochées et se prolongent dans la cavité de la poitrine ,
quelquefois jusqu'au cœur. Chacune de ces cornes est accom-
pagnée d'un muscle cylindrique de la même étendue, avec lequel
elles se réunissent au bout postérieur : ces muscles , antago-
nistes des génio-hyoïdes , retirent la langue dans le fourreau.
La langue, par sa construction, est un véritable organe du
toucher , et ne peut ni servir comme organe du goût, ni parti-
ciper dans la déglutition, attendu qu'elle demeure retirée dans le
fourreau pendant cet acte. Une petite échancrure au bout du
museau, dont la plupart des serpens, à l'exception des aquati-
ques, sont pourvus, offre l'ouverture par laquelle ces animaux
font jaillir la langue, sans ouvrir la bouche: ce mouvement
se fait ordinairement avec de la lenteur , et ce n'est que lors-
qu'ils sont émus par des passions, qu'ils dardent la langue
avec vitesse (i).
DES INTESTINS.
Le canal alimentaire des ophidiens (2) se fait remarquer
par sa grande simplicité. L'œsophage et l'estomac ne formant
qu'un canal continu, il est impossible d'assigner à chacune de
ces parties des limites précises. Ce canal descend tout droit
derrière le cœur et , s'élargissant insensiblement, il se termine
souvent en une poche plus ou moins spacieuse; se tournant
(i) Voyez Hellmann Uber den Tastsinn der Schlangeiu — (51) Voir
pour la description des organes de la digestion les inémoir<7s de Duvkrnoy ,
Ann. (I. \c. nat. ; et de Meckel , A^V/)?/. J/tat.
DKS INTESTINS. 41
ensuite à droite il s'amincit brusquement , pour former en
se rétrécissant, un petit boyau, au bout duquel se trouve
la valve du pylore, plus ou moins prononcée suivant les
espèces. Le canal intestinal occupe ordinairement
Vautre moitié de la longueur du tronc : plissé dans presque
toute son étendue, le plus souvent d'égale grosseur, et peu
spacieux, le canal intestinal mérite en grande partie le nom de
grêle ; ce n'est que vers les régions postérieures du tronc
qu'il s'élargit en un cylindre spacieux, plus ou moins long,
qui représente le rectum: la séparation de ces deux parties de
1 intestin est indiquée soit par un rétrécissement soit par un
pli transversal , ou une valvule plus ou moins prononcée ,
suivie à une distance considérable d'une ou de plusieurs autres
cloisons semblables. Quelques espèces des genres Tortrix ,
Homalopsis et d'autres offrent un petit cœcum près de l'inser-
tion de l'intestin grêle au rectum. Une autre valvule, extrême-
ment développée, se trouve à une petite distance de lanus ,
et sépare le rectum du cloaque: cette dernière cavité est
ordinairement assez spacieuse , et se prolonge souvent en
poche au dessous de la valvule ; c'est constamment dans elle,
que se trouvent les issues des organes uropoétiques et de la
génération. Animaux carnassiers , les ophidiens ont leur canal
intestinal peu long, relativement aux dimensions de leur
corps; cependant on observe chez les diverses races des
modifications assez sensibles sous ce rapport : les B o a s par
exemple, présentent des intestins grêles assez spacieux, extrême-
ment courts et par conséquent peu plissés; ce canal est plus déve-
loppé sous le rapport des dimensions longitudinales chez les
E 1 a p s , chez plusieurs Couleuvres etc. ; chez la plu-
part des autres ophidiens , particulièrement chez les H o m a-
1 o p s i s , les replis sont très serrés.
La tunique musculaire des parois du canal abnientaire
est en général peu prononcée: à partir de l'œsophage, elle
devient plus sensible à mesure (|ue l'on ,-. appioche du sac
42 DU PANC[\ÉAS.
soacieux représentant lestomac ; il en est de njènie des
intestins proprement dits , dont la tunique musculaire est
plus développée vers le rectum , que dans lintestin grêle. Les
tuniques intérieures du canal alimentaire sont pliées
longitudinalement ; ces plis deviemient plus abondans dans
l'estomac, où ils sont moins réguliers, se croisant parfois
en divers sens, et offrant l'aspect de rides très prononcées:
ils s'évanouissent, lorsque ces parties sont distendues par les
alimens. On observe des plis ou de rides semblables dans le
rectum. La muqueuse de l'intestin grêle offre une construction
diverse : elle paraît toujours comme veloutée par le nombre
infini des petites franges, dont sa face interne est garnie; quel-
quefois comme dans le Python bivittatus , ces villosités sont
tellement prononcées, qu'elles pendent en guise de petits
bouquets; chez I'Eryx enfin elles forment des papilles plates,
très serrées et en forme de feuilles. Toutes ces appendices
disparaissent cependant vers la fin de l'intestin grêle , où se
voient des plis longitudinaux assez considérables; les Pythons ,
seulement ont cette partie de l'intestin munie de nombreux
plis transversaux, analogues aux valvules qui séparent l'intestin
grêle du rectum.
DU PANCREAS.
Constanmient placé dans la première courbure que fait
l'intestin à partir du pylore , le pancréas est de forme et
de volume assez variable chez les diverses espèces d'ophidiens, et
présente même sous ce rapport des différences accidentelles*
Cet organe est divisé en un nombre plus ou moins consi-
dérable de lofjules , dont chacun offre quelquefois un canal
excréteur distinct : ces conduits , le plus souvent réunis l'un
DE LA HATE, UV FOIE. 4
o
à l'autie et accompagnant le canal cholédoque, versent le
suc pancréatique dans l'Intestin , à une petite distance du
pylore.
DE LA RATE.
Tous les ophidiens possèdent une rate de forme glohu-
leuse ou ovale, d'une consistence assez ferme et le plus
souvent cachée pnrmi les lobes du pancréas , avec lesquels elle
est quelquefois intimement réunie , ce qui a fait que Ion a
méconnu cet organe au point de nier son existence : sa position
varie cependant chez plusieurs espèces, vu qu'elle se trouve
parfois éloignée du pancréas et isolée à la face postérieure de
l'estomac; ayant même observé des différences individuelles
sous ce rapport, je suis porté à croire , que la place qu'occupe
cet organe, entre pour peu de chose dans l'exercice de ses
fonctions.
DU FOIE.
Chez tous les ophidiens, le foie se présenlesous la forme d'un
long ruban aminci vers les bouts, quelquefois imparfaitement
divisé en deux lobes, et qui s'étend le long de l'œsophage et de
l'estomac , depuis le cœur jusque vers le pylore. La configura-
tion de cet organe dépendant en grande partie de l'ensemble
des formes du serpent, il sera superflu de décrire les innom-
brables modifications qu'il subit dans les diverses espèces ; il
suffit de constater relativement à sa longueur, que l'extrémité
postérieure du foie touche quelquefois au pancréas , tandis
(]ue dans d'autres serpens , elle en reste considérablement
44 DKS WUNS.
éloignée. Sortant de la face intérieure du foie, le canal hej)a-
tique descend vers le pancréas, pour conduire la hile dans
l'intestin grêle: ce n'est que dans celte région et le plus souvent
enveloppé du pancréas qu est situé le réservoir destiné à la
réception de la bile, qui ne peut y arriver, comme l'a fort
bien remarqué M. Duvernoy (i), que par une sorte de reflux.
Constamment remplie d'un fluide abondant, la vésicule
du fiel le décharge lors de la digestion, par un conduit
court et qui se réunit sous un angle plus ou moins aigu au
canal hépatique; le canal cholédoque ainsi formé, se loge
entre les lobules du pancréas, pour percer l'intestin grêle; on
reconnaît son orifice à un petit bourrelet, assez vaguement
prononcé.
DES REINS.
Les reins des opliidiens , remarquables par leur position
peu symétrique , et par leur fornie alongée , sont divisés en un
assez grand nombre de petits lobes, adhérens les uns aux
autres au moyen du tissu cellulaire : ils sont ordinairement
précédés par des corps extrêmement minces, qui représentent
probablement les reins succenturiaux : placés le plus souvent
à une petite distance de lanus , les reins s'étendent assez en
avant dans la cavité abdominale. Les uréthères , conduits plus
ou moins longs, suivant l'éloignement des reins de l'anus, sont
assez spacieux, longitudinalement plissés à la face interne,
(j^uelquefois élargis à leur bout inférieur en un (anal plus
ou moins gros, naissant au bout supérieur des reins, et séten-
danttout le long du bord externe de ces organes; ils déchargent
lurine dans le (^loaque; leur embouchure est indiquée par un
DES orgam:s de \A (AiNEiWnoy. 45
ou deux hoinrt'U'ts , qiu'lcjueiois assez proiiDiicôs , saillaiis et
prolongés en une protul)éian("e cylindrique: ces mêmes bour-
relets tiennent lieu de la verge, car c'est par eux que se
décliarge le sperme, les vaisseaux déférens donnant dans
les uréthères. Cela prouvé, il faut considérer les deux corps
que le mâle introduit dans l'intestin de la femelle lors de la
copulation et qui se retirent ensuite dans la queue , comme de
simples crochets au moyen descjuels ces animaux se retiennent
ou se stinmlent durant cet acte.
DKS ORGANES DK LA GENERATION.
Les dimensions que présentent les corps dont nous venons
<le parler chez plusieurs espèces, les piquans dont ils sont
le plus souvent hérissés dans toute leur longueur , et avant
tout la circonstance qu'ils ne conduisent aucune liqueur, sont
autant de preuves pour rendre certaine l'assertion énoncée plus
haut, et pour constater l'analogie dans l'arrangement des organes
de la génération proprement dits chez les oiseaux et les ophi-
diens. Cette fausse verge, qui se trouve aussi chez les sauriens,
est toujours composée de deux corps symétriques, parfaitement
semblables l'un à l'autre, et qui occupent de chaque côté de la
queue l'espace laissé par les apophyses transversaires et épineuses
inférieures. Chacun de ces corps est formé par un prolongement
de la j)eau de l'anus qui, descendant sous la queue, forme un
cylindre plus ou moins long et fermé de tous côtés. Enveloppé
extérieurement d'une menibrane tendineuse et d un muscle
assez prononcé , ce cylindre est garni à la face interne de nom-
breuses appendices, tantôt molles tantôt dures, tantôt serrées
et peu développées, tantôt volumineuses, éparses et sous forme
de piquans : ce cylindre , se rétrécissant ensuite , les piquans pren-
nent la forme de rugosités, ses parois augmentent en épaisseur,
46 DES ORGANES DE LA GÉNÉllATION.
et sa structure offre de lanalogie avec le corps caverneux du
pénis des classes supérieures du règne animal ; enfin à une dis-
tance d'un ou de deux pouces de l'anus, ce corps se termine en
un muscle conique et tellement alongé, qu'il s'étend quelquefois
jusque vers le bout de la queue. L'appareil que nous venons de
décrire, en sortant lors de la copulation, se retourne comme le
doigt d'un gant , et ce n'est que dans cet état, que l'on observe
sa face interne hérissée de piquans et devenue alors externe. La
forme de ces organes varie dans les diverses espèces d'ophidiens,
tant par leur volume que par leur longueur ; mais aucune espèce
ne les présente dune configuration aussi singulière que le
Coluber canus du Cap, dont les fausses verges sont extrê-
mement alongées, garnies de très petits piquans serrés, et
chacune parfaitement divisée, en sorte qu'il y a deux fausses
verges de chaque côté ou quatre en tout.
On observe à la même place chez les femelles des ophidiens,
une poche , appelée poche anale; elle est formée par une
membrane blanche, élastique et très tenace, dont la face
interne sécrète un fluide fétide, sentant fortement l'ail : attaqués
les serpens font jaillir ce fluide par les issues de ces bourses à
côté de l'anus. J'ai trouvé des organes absolument semblables
chez les mâles de plusieurs espèces ; ils sont alors moins déve-
loppés et situés au dessous de la fausse verge ; mais dans im
grand nombre d'ophidiens ce sexe en est privé ou ces bourses
sont remplacées par une petite poche, creusée de chaque côté
de la base de la queue , dans la cavité anale même.
Les organes de la génération proprement dits des ophidiens se
trouvent toujours dans la cavité abdominale: occupant la
région des hypocondres en avant des reins , les testicules
et les ovaires se font également remarquer par leur forme
effilée et comprimée et par leur position, qui n'est pas
symétrique comme dans les autres animaux. Ils sont renfermés,
ainsi que les reins et les parties inférieures de l'intestin , dans
des enveloppes du péritoine, membrane qui est souvent teinte,
DE LA DK(;LUTIT[(>N. 47
dans la région lombaire, d'une couleur noire, ( omnie cela a
lieu chez beaucoup d'autres reptiles et cliez plusieurs poissons.
Les ovaires contiennent un assez grand nombre d œufs ,
dont la grandeur varie, et que l'on trouve disposés sur
deux rangées. L'oviducte, pour recevoir les oeufs, a son bout
antérieur élargi et terminé par un bord frangé; ce canal
descend tout droit vers l'anus et donne , par une issue assez
spacieuse, dans le fond du cloaque, au dessous de la valvule
qui sépare cette cavité du rectum.
Les testicules, de forme variable chez les diverses
espèces d'ophidiens, présentent une teinte moins foncée que
les reins. Les vaisseaux déférens sortent de la face interne du
testicule; en faisant de nombreux petits replis, ils descendent
le long du bord externe des reins, et se collent dans toute
leur étendue aux uréthères: se rapprochant sur le dos du
cloaque, ils pénètrent les parois communes de cette cavité et
des uréthères , et s'ouvrent dans l'embouchure de ces derniers,
qui est indiquée comme nous l'avons déjà dit, par une éléva-
tion conique. Ces issues des vaisseaux déférens sont tellement
délicates, qu'elles ne deviennent perceptibles que dans les
serpens de très grande taille, ce qui rend les recherches ana-
tomiques assez difficiles, parce que l'on ne peut ni enfler ces
organes, ni passer la sonde, vu leur disposition ondulée.
DE LA DEGLUÏITIOIV.
\
La manière dont les serpens avalent leur nourriture est assez
simple. Ils commencent toujours par la tête de leur proie qu'ils
font entrer dans la gueule: pendant que les dents s'accrochent
d'un côté dans la proie pour la retenir, la mâchoire opposée
s'avance, et les dents s engageant dans la victime, la retirent
dedans: au moyen de ce jeu alternatif des mandibules, pendant
48 DE L\ DKiESTlON.
lequel liiiférieure joue plus particulièrement le dernier rôle ^ la
déglutition est effectuée après des efforts plus ou moins
grands suivant le volume de la proie ; c'est aussi dans cette
même raison que sécartent les mâchoires, pour rendre la
gueule plus spacieuse: durant cet acte, le serpent dégorge une
salive abondante sur sa proie, qu'il rend par cela glutineuse, et
plus facile à avaler. Quelquefois l'animal qu'ils veulent dévorer
étant trop volumineux , ils ne viennent à bout de le faire entrer
totalement dans leur gosier qu'au bout d'un temps considé-
rable; les serpens trouvés dans cet état, offrent un aspect
hideux: le dégoût qu'ils inspirent alors, augmenté par les
odeurs méphitiques qu'exhale le cadavre de la proie déjà
attaqué par la putréfaction , a donné lieu à de nombreuses
fables, que les poètes n'ont pas laissé d'embellir. La déglu-
tition se fait de la même manière chez tous les serpens que
l'on a observés sans en excepter les venimeux qui lors de cet
acte, redressent leurs crochets et les cachent dans la gaine
des gencives, pour ne point les exposer à des injures (i).
DE LA DIGESTION.
La digestion se fait assez lentement , nonobstant Tactivité
du suc gastrique des serpens : il paraît cependant que ce
fluide n'est sécrété en abondance que dans les régions de
festomac situées près du pylore; car les animaux que l'on
retire du ventre d'un serpent sont toujours décomposés à leur
bout inférieur, tandis que les parties qui se trouvent plus vers
l'œsophage, n'offrent pas la moindre trace de putréfaction:
(i) Voir pour la déglutition des serpens les recherches de M. DncKs ,
insérées dans les Jn/i. (L se. iiat. 1827 XII p. 362, suiv.
DES OlUi. l)K LA CinCl LATlOiN. 49
j'ai vérifié ce tail, observé p;ir M. Lenz ;i), sur un oraiid
nombre cl espèces exotiques. Dans la captivité, les serpens
rejelent par la bouche les matières indigestes, telles (nie
les plumes, les poils etc.: cette propriété leur est commune
avec la plupart des oiseaux.
Lorsqu'on pt)ursuit un serpent qui vient d avaler sa nour-
riture, il la dégorge souvent pour se rendre plus alerte à
fuir (2): ce fait a été également observé chez plusieurs
oiseaux (3).
DES ORGANES DE LA CIRCLLATIOIV.
Le cœur des ophidiens, le plus souvent de forme alongée,
se fait remarquer par sa position écartée de la tête: il se
trouve quelquefois à la fin du premier quart de la longueur
totale du tronc. On lui reconnaît deux oreillettes spacieuses
^t séparées Tune de lautre par une cloison membraneuse; le
ventricule au contraire est imparfaitement divisé en deux
cavités assez étioites, par une cloison naissant de la base
du cœur et s^e confondant dans les fibres charnues de cet
organe: les ^raiois des oreillettes, quoique charnues, sont
minces; celles du ventricule ont une épaisseur considérable,
notamment sur le côté gauche de cette partie, qui s'étend en
forme d'appendice conique sous l'oreillette gauche. Chaque
oreillette communique avec le ventricule par une ouverture
assez large, mais susceptible rl'être fermée au moyen d'une
valvule. L'oreillette droite reçoit toutes les veines du corps
qui forment, à lexception de la jugulaire gauche, avant de
(i) p. 48. — (2) Note comiminiquée par M. Dieperink à Para-
maribo; voyez aussi Lenz. /. c. — (3) Les slercoraii"€s, les mouettes ,
les liiioridelles de nver, etc.
50 DES ORGANES
peiForer les parois de rorelilette, une espèce de sac plus ou
moins long et qui offre, outre les tuniques ordinaires , une
tunique musculaire bien prononcée: deux grandes valvules
servent à fermer l'entrée commune des veines dans cette
oreillette. Le sang parvenu dans la chambre droite du ven-
tricule, est chassé dans l'artère pulmonaire, dont l'embou-
chure offre deux valvules ; comprise à sa hase dans le tronc
commun des aortes , cette artère se courbe au dessous de
l'aorte gauche et se rapproche, en s'éloignant de celle-ci, du
poumon, dont elleborde la face postérieure avant de pénétrer
rians l'intérieur de cet organe. TJne seule veine pulmonaire,
perçant le poumon en arrière de l'artère du même nom , rap-
porte le sang oxydé dans l'oreillette gauche , qui est de forme
conoïde et moins spacieuse que celle du côté droit. Le sang
oxydé , après avoir passé dans la cavité gauche, est poussé
vers le côté droit, où se trouvent les embouchures des deux
aortes, d(^nt chacune offre deux valvules semicirculaires ,
même lorsque ces embouchures sont réunies en une seule,
comme je l'ai observé plusieurs fois. Nous avons déjà dit
(pie toutes les artères naissent dun même tronc, dont elles
creusent poiir ainsi dire l'intérieur; les artèrescependant sont
ie phis souveiît séparées l'une de l'autre par des cloisons qui,
quoique chacune serve à la fois de parois à deux vaisseaux
voisins, empêchent que le sang qu'elfes conduisent, puisse se
mêler avant d entrer dans le cœur. L'aorte droite, beaucoup
îîiolns grosse que la gauche, se divise, à peu de distance de sa
sortie du îronc commun des artères, en plusieurs branches ,
(pii seules pourvoient de sang le cou et la tête ; se cour-
bant ensuite en arrière, elle descend derrière le cœur pour
se réunir avec l aorte gauche, qui a suivi de l'autre côté un
chemin send)lable. Cette grande arîèie descend ensuite tout
le long du corps, et ne se perd qu'à l'extrémité de la queue;
elle pourvoit dans son cours les organes environnans : après
avoir donné naissance aux artères intercostales, elle envoie des
DE L\ CIRCCLATION. 51
î)ranches à resfoniac et an i'oie, aux organes de la «vénération
et aux reins; l'artère mésentère naît à-peu-près vis-à-vis du
pylore, et il y a plusieurs autres branches qui se distribuent
sur le canal intestinal. I/aorte droite envoie vers la tète,
avant de desceiulre derrière le cœur , une branche considérable,
iippelée par Guvier artère collaire (ij: cette branche après
avoir fournie les artères intercostales du cou , pénètre les
nuiscles fléchisseurs de la tête, où elle se perd. Les carotides
naissent du tronc de l'aorte droite près de sa base: s'éten-
dant le long de l'œsophagcT^ elles se dirigent vers la tête, dans
laquelle elle pénètrent après s'être divisées en de nombreuses
branches, qui pourvoient de saîig les organes situés à l'exté-
rieur de la tête. Cette disposition des carotides, décrite d'après
le Boa constrictor, est loin de se trouver la même dans les
autres serpens, qui n'offrent ordinairement qu'une artère
carotide unique (2) , celle du côté gauche; cette artère fournit
à elle seule tout le sang de la tête de sang. Les carotides
envoient une petite branche à la glande thyroïde, et d'autres
branches aux organes renfermés dans la cavité du cou. Deux
veines jugulaires, accollées aux carotides ou descendant le
long de l'œsophage, rapportent le sang de la tête au cœur.
J'ai observé chez un Boa constricteur trois veines impaires
sortant de la coh)nne vertébrale: la première près de la tête,
la deuxième vers le milieu du cou, lu troisième dans la région
abdominale ; il est évident que , pour se rendre au cœur, la
dernière veine monte, tandis que les deux autres descendent.
La veine qui transporte le sang des parties postérieures de
l'animal, se divise pour former les deux rénales qui bordent
dans toute leur longueur la face interne des reins, dont elles
reçoivent un grand nombre de petites branches ; après avoir
donné naissance à la veine cave, la branche du côté droit se
(i) Arleria verlebralis, Schlemm. I. 1. — (2) L'artère carotide
commune de CuviER ; arteria cephalica de Schlemm.
52 DE LA RESPIRATION.
réunit à celle du côté gauche pour former une grosse veine;
c'est la veine cave inférieure , qui pénètre dans le parenchyme
du foie , pour recevoir le sang apporté par la veine porte ; en
sortant de l'extrémité supérieure du foie, qui s'avance en
pointe, cette veine cave parcourt une petite distance et entre
comme partie principale dans la formation de ce sac veineux
décrit plus haut, qui communique avec l'oreillette droite,
et dans lequel plusieurs autres veines donnent: on observe
de fortes valvules à l'embouchure de chacune de ses
veines (i).
Le cœur des ophidiens porte constamment à sa face supé-
rieure une glande conglomérée, plus ou moins développée et
entourée de plusieurs autres glandes de forme et de nombre
très divers selon les espèces : cette première glande a été
regardée par plusieurs anatomistes comme l'analogue du
thymus; d'autres , et je suis de ce nombre , font comparée
à ia thyroïde (2).
DE LA RESPIRATION.
Pour se faire une idée juste de la respiration des
ophidiens, il faut examiner avec attention un serpent dans
l'état de repos. On observe alors que le tronc se contracte
et se dilate alternativement par le jeu des côtes , et que ce
(i) La description des organes de lacirculation a été en majeure partie
dressée d'après le Boa constricteur : consultez pour des détails ulté-
rieurs, les travaux de Cuvier Leçons (Variât, comparée, vol. 11; Schlemm
dans TiKDEMANN Zeitschrift «0/. Il P. 1 PL 7 , Retzius Schwed.
Verhandl. i83o et his iS'ii» p, 5a4suiv; Meckkl System, vol. F p^
218 suiv. . — (2) Consultez l'excellent mémoire de M. Haugstedt,
intitulé Thytni ilescriptio ^ p. \bi suiv.
DE LA UKSPIIIATION. 53
inouvcinent se léncle avec Icntcui" ci à iulei vulles réguliers;
maison observe égiileiiieut , que les naiines restent fermées
durant cet acte, et ne s'ouvrent qu'à des intervalles beaucoup
plus éloignés, entre lesquels le corps se contracte souvent
jusqu'à une trentaine de fois: il résulte de ces observations,
que les poumons des ophidiens ont, outre leur fonction
ordinaire, ce'.le de servir de réservoir à l'air atmosphérique;
ce réservoir rempli par une seule inspiration, contient une
quantité suffisante d'air pour que loxyciation du sang puisse
se faire par les contractions des poumons, sans nécessiter
une nouvelle inspiration, qui ne suit (jue lors de l'expiration
de l'air contenu dans le pcnimon, et dont l'oxygène a été
totalement absorbé.
La structure des poumons des ophidiens prouve à 1 évi-
dence ce que nous venons d'avancer : elle est notamment
remarquable sous deux rapports, d'abord parce que le poumon
se termine ordinairement en une vessie ou un sac sans cellules,
fornié simplement par une production de la membrane
séreuse, enveloppant le poumon; et en second lieu, parce
que les rameaux les plus considérables des conduits aériens
s'ouvrent dans l'intérieur de la cavité du poumon même: par
celte première disposition le poumon des ophidiens devient
un réservoir assez spacieux pour contenir un volume d'air
suffisant à un grand nombre d'inspirations; par la seconde,
l'air contenu dans ce réservoir peut être chassé dans les
cellules, par des contractions du thorax, sans qu'une nou-
velle inspiration soit nécessaire.
La configuration du poumon subit de nombreuses modifi-
cations dans les différentes races d'ophidiens. La forme de cet
organe est ordinairement celle d'un sac simple, conique et
s étendant depuis le cœm^ vers les régions inférieuies de les-
tomac, où il se termine en une poche membraneuse. La
trachée, composée d'un grand nombre de demi-anneaux
qui sont réunis antérieurement par une membrane, aboutit
54 DE LA RESPIRATION.
dans la naissance du poumon par une ouverture coupée
obliquement ; cet organe se divise cependant plus ou
moins parfaitement en deux bronchies chez les boas, chez
la plupart des t o k t r i x , des d i ps a s et chez plusieurs autres
ophidiens, où l'on aperçoit le vestige d'un second lobule du
poumon, quelquefois de moitié aussi grand que celui de l'autre
côté. Les cellules aériennes de la cavité pulmonaire s'étendent
chez plusieurs ophidiens, sur la membrane qui réunit les
anneaux de la trachée artère, de sorte qu'elles occupent quel-
quefois cette membrane dans toute sa longueur; il y a d'autres
espèces, où cette membrane assez dilatéerenferme un nombre
de cellules aussi considérable que le poumon même; chez
le Xénodon sévère, chez les serpens venimeux proprement
dits et chez d'autres ophidiens , cette membiane élargie en
sac assez spacieux, contient à elle seule toutes les cellules
aériennes, de sorte qu'il résulte de la disposition particulière
du poumon un déplacement complet de cet organe qui, con-
trairement à ce que l'on observe chez les autres ophidiens, est
situé en avant du cou entre la glotte et le cœur. La disposition
des organes de la respiration chez les serpens de mer est
encore plus extraordinaire: dans I'hy dro phis colubrin
la trachée artère se prolonge jusqu'aux hypocondres , où
elle se termine en un sac membraneux qui s'étend jusqu'à
une distance de deux pouces de l'anus ; mais au lieu d'une
membrane qui réunit les anneaux de la trachée, c'est le pou-
mon qui enveloppe ce tube dans toute sa longueur. Chez
I'hydropkis pELAi^îis la trachée artère s'enfle dès son
origine pour se rétrécir vers le cœur , forme un canal très
étroit, et descend derrière l'estomac pour s'élargir de nou-
veau en un sac très spacieux , dont le bout s'étend jusqu'à
l'anus, en se logeant entre les apophyses épineuses inférieu-
res de la queue; les cellules aériennes chez cette espèce sont
beaucoup moins nombreuses que chez la précédente, quoi-
qu elles boident la trachée depuis son origine jusqu'au point
nu cnwKAi' v:\: des m:ius. :)»^
ou elle ioriue cet ;jppeiuli(!e spacieux , qui lieui [irobal )!(.'-
nient aussi lieu rie vessie natatoire.
Cette disposition diverse des organes de la respiration
variant même chez les diiïérentes espèces des ophidiens ,
prouve à l'évidence, (jue la forme de ces organes est de ])eu
d'importance pour l'exercice de ses fonctions , et que l'on
a eu tort de tirer de ces anomalies de forme, des caractères
pour la classification des serpeiis, ou de regarder les espèces
dont le poumon est divisé en deux lobes, connue consumant
un volume plus considérable d'oxygène, et comme étant [)ar
conséquent d une organisation plus parfaite.
Les cellules aériennes principales sont quelquefois sup-
portées pardes rubans cartilagineux et étroits , qui se per<lent
dans les petits tuyaux formant cette partie du réseau pulmo-
naire, où a lieu l'oxydation. Le bout supérieur dn larvnx
est surmonté par les deux cartilages aryténoïdes, qui lais-
sent entre eux une simple fente longitudinale, la glotte: cet
appareil simple, mu par deux paires de muscles, représente
chez les ophidiens , l'organe de la voix qui ne consiste qu'en
un sifflement plus ou moins aigu , produit par lair chassé
des poumons. Cette ouverture correspondant avec l'ouverture
intérieure des narines, est plus ou moins rapprochée de lex-
trémité du museau, suivant que l'espèce fréquente les eaux
ou la terre.
DU CERVEAU ET DES NERI S.
La petitesse du cerveau des ophidiens devient particu-
lièrement sensible lorsque, en choisissant des espèces où les or-
ganes de la manducation ont acquis un grand développement,
on compare le volume de cet organe à celui de la tête. En avant,
les deux hémisphères se prolongent en se rétrécissant, dans le
56 DE L'ODORAT.
lobule olfactif, de soileqiie cette partie est portée sur un assez
long pédicule ; on observe à leur face postérieure les lobes
optiques, assez grands et passant au dessous des hémisphères
pour se diriger vers l'œil et former le nerf qui porte le
même nom. Le cervelet, petit organe situé derrière les
lobules optiques, est presque d'une venue avec la moelle
épinière , et n'offre qu'un renflement peu considérable (i).
L'extrême délicatesse des nerfs de la tête rend l'examen de
ces parties assez difficile. Outre les nerfs olfactif, optique et
auditif, on distingue particulièrement le nerf de la cin-
quième paire qui envoie ses branches , de même que chez,
l'homme, à l'œil, à la mâchoire supérieure et à l'inférieure.
Le grand nerf sympathique s'entrelace sur tant de points avec
les nerfs vagues, qu'il est impossible de tracer avec certitude
son origine.
Quant aux facultés intellectuelles, les ophidiens se trou-
vent évidemment au même degré que les animaux des deux
premiers ordres de la classe des reptiles. On a souvent
exagéré la force de régénération dont les organes des ophi-
diens sont doués ; mais il est peu probable qu'elle soit plus
grande que chez les Sauriens ou les Chéloniens ; ce qui est
certain, c'est que, lorsqu'un membre tel que la queue a été
mutilé, il ne se reproduit jamais.
DE L'Oî>ORAT.
Les serpens n'ont pas l'od orat fin; aussi l'étendue de la
membrane muqueuse du nez est-elle peu considérable, vu la
i) Voir: Sv.v.^'es, Jnat. comp.ducerveau^ Allas PI ^fig. l'iôet 127;
i32 et i33. fig, du cerveau du Naja haje, de l'aspic et de la vipère fà
raies parallèles ?}
DE LW:iL. 57
conformation simple des conques. La cavité du ne/ est plus
ou moins spacieuse , suivant les diverses races. Les narines
varient extrêmement d'un genre à l'autre, soit par leur posi-
tion, soit par leur forme ou leur grandeur. On peut établir
connue règle constante que les espèces purement aquatiques
offrent des narines petites , dirigées vers le ciel et le plus
souvent susceptibles d'être fermées au moyen d'une valve;
tandis que les narines des espèces terrestres ou de celles
qui habitent les arbres, sont ordinairement latérales et assez
ouvertes. Chez les serpens fouisseurs, ces orifices se présen-
tent presque toujours sous la forme orbiculaire et se distin-
guent par leur petitesse; elles sont de forme semblable,
quoique plus ouvertes, chez les serpens pélagiques, mais les
Homalopsis en ont qui offrent une fente transversale en
forme de croissant.
On observe chez les Trigonocéphales et les Crotales , sur les
côtés du museau, derrière les naiines, une large cavité dont
l'usage n'a pas encore été reconnu , mais que 1 on peut, selon
toutes les apparences, considérer comme une cavité accessoire
du nez. Cette cavité, creusée dans la surface supérieure du
maxillaire, est revêtue d'une espèce de membrane muqueuse:
elle offre de petits trous pour le passage des nerfs, et reçoit
probablement une portion du fluide sécrété par les glandes
voisines. M. Home(i), qui a traité ce sujet, dans un mémoire
spécial, suppose que ces cavités sont analogues aux larmiers
de certains ruminans.
DE r/ŒIl..
Nous avons déjà fait mention plus haut de la diversité de
(l) A p. RlISSEL app.
58 . DK r;()ElL.
la position (u* l 're i ! (liez les dilTërentes races crojjhidieiis , du
volume (le cet organe, de la ibiine de la prunelle etc. ; nous
avons épalenient constaté que les tégumens extérieurs revêtent
lœil tout entier, mais que ces tuniques sont sur cet endroit
extrêmement minces, diaphanes, et se présentant sous la
l'orme d'une lamelle hémisphérique , adhérante aux plaques
qui composent le tour de l'orbite: il est évident que eallc
lamelle comme partie intégrante de ia peau, se renouvelle
lors de la mue, et que l'ancienne lamelle est rejetée avec
l'épiderme. Le globe de l'œil , le plus souvent de forme
orbicuiaire, est revêtu à sa face antérieure de la conjonctive
(|ui, se repliant sur elle même, forme une cavité dans laquelle-
sont versées les larmes, selon les observations de M. J. Clo-
quet ( i). La cornée est assez épaisse et offre un segment à- peu-
près de la même péripliérie que la sclérotique; cette dernière
tunique, également épaisse et très tenace, n'est supportée ni
par des os ni par des cartilages: ses deux faces sont teintes
d'un brun assez foncé ; on ohserve au fond du globe de l'œil
un tiou orbicuiaire pour l'entrée du nerf optique, (psi
perfore obliquement la substance de la sclérotique. A sa
surface externe s'attachent les muscles du globe de l'œil ,
dont le nombre est comme à l'ordinaire de six. La choroïde,
d'un tissu peu serré, a ses deux faces couvertes d'une pig-
ment foncé. La ruischienne est assez développée. L'uis a une
étendue considérable: la couleur qu'elle présente, varie
d'une espèce à l'autre. La rétine, passablement épaisse, n'offic
rien de particulier. L'existence des lames de la tunique vi-
trée ciiez les serpens n'a été démontrée que très récem-
ment (2). La lentille crystalline , de forme sphérique, s'enfonce
(i ) i^Je'tn. (la Mus. t' 11 p. 62 saw : voir aussi Mùller dans Tieuf-
MANN Zeit.schr. IV. I PL \i;)fig 14. — ['i) Voyez l'excellente analomie
(lu Python à deux raies , publiée par M, Rf.tzius : Isis i832/^ ^12
siàv.
DK i;Ol\EILLE. 51)
(Je plus de la moitic dans rimiueiu- viliee , qui tst peu volu-
mineuse.
La structure rie l'oreille démontre que les ophi-
diens ont l'o u ï e plus dure que la plupart des autres animaux
de la classe des Amphibies. L'osselet de l'oreille étant enfoncé
dans les chairs, vu le manque total de tympan, il s'en suit
que les sons ne peuvent pénétrer dans l'oreille même qu'après
avoir fait vibrer cette cuirasse épaisse que forment chez les
ophidiens les tégumens généraux: cet osselet, appelé par
CuviER l'étrier de l'oreille, quoiqu'il représente les trois osse-
lets de l'oreille des animaux d'un rang supérieur, est en
forme de fil qui se prolonge ordinairement d'un côté jusqu a
l'arliculation de la mâchoire inférieure; tandis que l'autre bout
est élargi en disque pour fermer la fenêtre ovale. Immédiate-
ment derrière cette entrée de l'oreille intérieure se trouve
une autre ouverture représentant , comme il a été constaté
par M. WiNDiscHMANN , la fenêtre orbiculaire. Le même
savant a observé que la structure de l'oreille interne des
ophidiens se rapproche de celle de tous les sauriens qu il a
examinés ; c'est à dire qu'on leur reconnaît un organe de
forme ovale, appelé anneau cartilagineux et destiné à recevoir
le nerf de l'ouïe , qui se distribue à sa surface: ce nerf forme
d un côté un renflement assez considérable, appelé lagena
à cause de la configuration de cette partie qui ressemble à
celle d'une bouteille: voir Windischmann , /V. a fig. 12:
organes de loreille interne d un Dipsas.
(;() uïîs TÉ(;LMr^NS.
DKS TEC; UM EX S.
Les t é g II ni e n s g é n ë r a u x des ophidiens , pour résister à
l'influence des élémens et aux causes mécaniques extérieures ,
forment une cuirasse très épaisse qui revêt tout le corps de
l'animal et qui est munie d'un épidémie souvent assez dur et
corné. Pour obéir aux mouvemens de l'animal et à l'extensioTi
des parties par laquelle estproduit l'agrandissementdu volume
du corps, il fallait que cette peau lût divisée en un grand
nombre de compartimens , séparés par des intervalles, de
sorte qu'il résulte de cette construction autant d articidations
susceptibles d'être rapprochées et éloignées les unes des
autres. Ces compartimens saillans, qu'on appelé écailles
lors([u'ils sont petits, lames ou plaques dans le cas
opposé, sont formés par des couches de tégumens beaucoup
plus épaisses que celles des intervalles, qui offrent au contraire
une peau d'une organisation plus délicate, fortement contractée
dans l'état de repos de l'animal et revêtue d'un épidémie très
mince, peu transparent et mou. Il est évident que ces der-
ineres parties ne paraissent à l'œil que lors de la dilatation
du corps de l'animal: cachées presqut* conlinuellemenl par les
bords des écailles , et privées de lumière, elles sont constam-
ment d'une couleur blanchâtre , et ce n'est que chez (|uelques
Tropidonotes , que le tissu muqueux de ces parties est teint ,
sui* la région du cou, d'un beau rouge vermillon, l! n en est
pas aiîisi de <;ette portion du tissu muqueux qui entre dans
la formation des écailles , el qui brille le plus souvent de tout
léclat de larc-en-ciel , éclat plus ou moins vif suivant la
nature de l'épiderme corné et transparent dont toutes les
écailles sont revêtues: vodà , pourquoi plusieuis serpens et
notamment ceux du genre Dendrophis présentent un système
de coloration assez uniforme, quoicjue leur lissu muqueux
soit orné des plus jolies teintes; il est également clair que
les teintes des serpens doivent changer vers le temps de la
I)|<S rKGlIMEXS. (il
m\ic , où l'(''j)l(ierin(' se ternit en se détacliant insenslMeinent
(les couches inféi ieures de la peau : ne laissant passer alors
qu'imparfaitement les rayons de la lumière, elle les rellécliit
dans un sens divers du sens ordinaire et fait paraître les
couleurs des ophirliens sous un jour beaucoup moins agiéable
qu aussitôt après la mue.
11 résulte des lois établies ci-dessus, que la forme des
écailles doit être déterminée par la direction des mouve-
mens, exécutés par les organes qu'elles protègent. Les écailles
du tronc sont par conséquent disposées sur des lignes paral-
lèles au contour des côtes; ces lignes sont entrecoupées sous
un angle plus ou moins aigu par d'autres lignes , et c'est aifisi
que se forment les bords des écailles. De la direction respec-
tive de ces lignes dépend la forme plus ou moins régulière
des écailles: si ces lignes se croisent sous un angle droit, les
écailles sont de forme carrée ; si au contraire une de ces liones
est plus inclinée vers Taxe du tronc que l'autre, les écailles
tiennent du rbombe, et s approchent d'autant plus du lancéolé
ou même on linéaire, que ces lignes sont divergentes l'une
de l'autre. 11 a? rive presque toujours que ces lignes dévient
/le leur direction primitive en se courbant pour se réunir à la
rangée médiane des écailles, du dessous de l'animal: de là
que la forme des écailles à partir du dos , devient de plus en
plus irrégulière , quoique ces organes gagnent à mesure en
étendue. C'est constamment sur les parties antérieures du
tronc que ces lignes, particulièrement celles qui se dirigent
en arrière , sont inclinées vers l'axe du corps ; et voila
pourquoi la forme des écailles qui revêtent cette région,
doit servir de type à la description : vers la queue et sur
ce membre même, les lignes se croisent sous un angle
presque droit, et les écailles deviennent nécessairement
moins irré<£ulières. Cette différence de forme des écailles
sur les diverses parties d'un même individu est très sensible
dans les Najas et les Xénodons, où les côtes du cou , moins
62 BES TÉGUMENS,
iucuiées que les autres , et susceptibles <1 une mobilité eoiisi-
(lérabie d'arrière en avant, produisent un agrandissement du
volume du corps dans le sens latéral: dans l'état de repos ,
les écailles de cette région se recouvrent par leurs bords
latéraux; elles sont de forme effilée ou linéaire, tandis que
( eiîes de la queue, imbriquées comme d'ordinaire, sont de
forme carrée. -^
Le nombre des rangées longitudinales sur lesquelles
sont disposées les écailles , ne varie pas seulement suivant
les espèces; ces anomalies s observent même fréquemment
chez, divers individus de la même espèce; encore ce nombre
<'St-il loin de se trouver le même dans les différentes régions
du corps. C'est sur le cou , à une petite distance de la tête,
que les rangées des écailles sont les plus nombreuses; vers
le milieu du tronc, elles connnencent à diminuer, les deux
écailles voisines de l'abdomen n'étant suivies que par une
seule : ces rangées disparaissant petit à petit l'une après
lîiutre, elles se réduisent au bout de la queue à une
seule lame écailleuse. Le nombre des rangées longitudinales
est ordinairement impair , tous les ophidiens ayant la
ligne médiane du dos garnie d'une seule rangée d'écaillés,
quelquefois plus grande et d'une forme différente des
autres : l'exception que fait à cet égard l'Erpétodryas
caréné, qui a le dos muni de deux rangées d'écaillés et
où le nombre total des rangées est par conséquent pair,
est d'autant plus remarquable qu'elle est unique dans tout
Tordre,
On est tenté de croire que les rangées transversales se
I rouvent toujours en nombre égal à celui des vertèbres ou
des lames, qui garnissent le dessous du tronc; mais il n'en est
pas ainsi chez les ophidiens dont le corps est revêtu d'un
grand nombre de petites écailles de forme carrée , tels que les
Boasj l'Eryx , plusieurs serpens de mer etc. En examinant
les écailles de ces serpens , on voit , en partant de l'abdomen ,
])RS TKOîMENS. Vùl
que les Tanoo<\s d'écallIes, d'abord larges, deviennent étroites
et se perdent entre d'autres rangées de très petites écailles
qui descendent du dos.
Les modilications de forme que présentent les lames é( -ail-
leuses chez les diverses espèces de serpens, sont variées à
l'infini. Leurs bords sont tantôt arrondis, tantôt tronqués au
bout , tantôt alongés en pointe plus ou moins aiguë. Leur épi-
démie est le plus souvent assez dur, et les bords des écailles
sontsniilans, en sorte qu'elles se recouvrentles unes les autres,
<'()nin)e les tuiles d'un toit: on désigne ces écailles propies
à lu plupart des serpens par l'épithète d'indjriquées; d'autres
ophidiens au contraire et particulièrement les serpens de mer
ont, à l'exception d'une seule espèce, leurs écailles revêtues
d un épiderme très mince, et ces organes, parfois très petits,
se montrent sous la forme d'un hexagone. La peau qui occupe
les intervalles entre les écailles est, chez ces ophidiens,
l)eaucoup moins dilatable que chez les autres serpens, et
cette particularité se trouve au plus haut degré chez les
Acrochordes où les innombrables petits compartimens de
la peau ne sont guère susceptibles d'être écartés les uns des
autres.
Les écail'es des ophidiens offrent le plus souvent une sur-
face unie et lisse ; niais dans un j^rand iionihre d'espèces elles
présentenl une saillie longitudinale pinson moins tranchante,
tantôt mucronée, tantôt émoussée et quelquefois réduite à
une simple protubérance sphérique, comme dans plusieurs
serpens de mer: c'est ce qu'on appelé des écailles carénées.
Ces csrènes, quelquefois assez oblitérées, comme dans
plusieurs Couleuvres , n'occupent alors que les rangées
supérieures des écailles dorsales; d'autres espè(^es en ont
toutes les rangées hérissées; mais leur développement
diminue toujours vers le dessous, en sorte que les deux
rangées voisines de l'abdomen en sont le plus souvent dépour-
vues. Plusieurs autres espèces de serpens du genre Dipsas et
(;4 DES TEGUMENS.
îiotainment le Psaniniophis laceitina , présentent au contraire
des écailles creusées d'un sillon longitudinal plus ou moins
profond , mais les espèces qui offrent ce caractère se trouvent
en très petit nombre. On ignore l'usage de ces ditféren-
ces dans la conformation de la surface des écailles; on a
supposé que les carènes étaient particulièrement propres
aux serpens aquatiques, mais il n'en est pas ainsi, et nous
verrons dans la suite que des espèces d'un même genre et
très voisines entre elles, ne diffèrent souvent que par la
présence ou l'absence de ces saillies: peut-être ne servent-
elles qu'à prêter une plus grande solidité aux tégumens.
La ligne médiane des parties inférieures des ophidiens est
le plus souvent garnie de lames écailleuses plus larges que
les autres, mais celles de la queue sont presque toujours
différenmient organisées de celles de l'abdomen. Ces der-
nières sont disposées sur une seule rangée qui se prolonge
uniformément depuis l'anus jusque sous la gorge, où elle
se perd. Ces lames, dont les terminales sont toujours divisées
en deux, sont quelquefois très étroites, comme dans les
Tortrix , les Boas etc., et ressemblent alors aux écailles du
tronc; elles ont plus détendue chez, d autres serpens , et le
plus grand nombre de ces animaux en offre de très larges ,
qui montent sur les flancs , en entourant une bonne partie de
la périphérie du tronc: c'est alors que leur forme, dépendant
en entier de celle du tronc, varie suivant le genre de loco-
motion que l'animal exerce, et qu'elles sont tantôt convexes ,
tantôt anguleuses aux côtés et planes en dessous , tantôt
îiiême à angles latéraux échancrés. Leur surface, unie chez
la plupart des ophidiens, l'st munie de deux protubérances
chez les Hydrophis proprement dits , ce qui provient proba-
blement de ce que chacune d'elles consiste en deux lames,
soudées ensemble: plusieurs autres espèces du même genre
offrent ce caractère très remarquable que la ligne médiane
de l'abdomen est indiquée par la suture produite par la rangée
d'écaillés dont l'iiacuiu' de ses coK's est: garnie; les Acro-
chordes enfin ont un»? crête saillante qui règne le lon^ de
l'abdomen hérissée de très petites écailles miicronées • vt
des écailles semblables recouvrent toutes les parties de leur
corps.
Les lames écailleuses du dessous de la queue ne forment
une seule rangée mitoyenne que ohez les Boas, l'Eryx et
plusieurs autres ophidiens; la plupart des autres animaux de
cet ordre ont cette partie garnie d'une double rangée de
plaques et c'est de cette diliérence que dérive l'expression
de plaques divisées , en opposition de plaques ou de bandes
simples.
La tête des ophidiens est très rarement revêtue d'écaillés
semblables à celles du corps; on y distingue toujours plusieurs
lames plus grandes que les autres, garnissant les divers organes
placés dans le crâne. La plupart des serpens ont même la
tête munie de plaques de forme plus ou moins déterminée et
symétrique , toujours à surface unie, mais dont l'arrangement
et la configuration sont sujettes à d'innombrables modifica-
tions. Comme la conformation de ces lames écailleuses offre des
caractères faciles à saisir , on s'en est servi pour en tirer des
traits distinctif, ce qui a donné lieu à une nomenclature,
inventée tout exprès pour désigner ces organes suivant les
régions qu'ils occupent. Les plaques des Couleuvres propre-
ment dites étant celles qui offrent le plus de svmétrie dans
leur disposition, on peut les regarder comme forme normale;
toutes les autres paraissant modelées sur ce type , il est
facile d'y rapporter les nombreuses modifications qu'elles
éprouvent soit par excès soit par défaut. Les plaques qui
revêtent les parties immobiles flu crâne, comme celles du
sommet de la tête, jouissent d'un mouvement très limité ou
nul. La peau qui entre dans leur formation est très mince
et le plus souvent collée au crâne. On observe très générale-
ment sur le sommet de la tête une plaque impaire, la
:")
(;(; DES TÉGUMENS.
verticale, qui offre pour ainsi dire un centre immobile,
autour duquel se rangent les autres lames écailleuses: ordinai-
rement en pentagone dont la hase regarde le museau , cette
plaque est tantôt très effilée, tantôt extrêmement ramassée selon
la forme générale de la tête, et elle affecte la forme trigone
ou hexagone ou même lancéolée suivant la nature des lames
qui Fenvironnent; elle est de configuration irrégulière chez
plusieurs Boas , ou même divisée en deux par une suture
longitudinale; chez d'autres ophidiens son volume se
réduit tellement qvi'elle cesse de se distinguer du reste des
écailles.
Cette plaque est le plus souvent suivie d'une paire d'autres
lames, appelées occipitales, d'une configuration se rap-
prochant de celle du trapèze , mais très diverse selon les
genres et même selon les espèces : ces lames se touchent
toujours par leur bord interne, et ce n'est que chez le
Tortrix scytale et le Xénopeltis que , placées vers les côtés de
la tête, elles reçoivent une plaque mitoyenne surnuméraire,
et se confondent parmi les écailles du tronc. Les occipitales
n'existent jamais que conjointement avec la verticale: elles
sont très petites chez plusieurs espèces des genres Dipsas,
Xénodon, Homalopsis , Hydrophis, Tortrix, Boa etc.; on
n'en voit que des vestiges dans le Trigonocéphale cenchris,
et elles sont remplacées par de petites plaques de forme
très irrégulière chez plusieurs Boas.
Les surciliaires sont une paire de plaques placées à
côté de la verticale , et protégeant le dessus de l'œil; elles
débordent presque toujours l'orbite , formant une voûte tant
soit peu mobile, au dessous de la quelle le globe de l'œil
peut librement exercer les mouvemens limités dont il jouit.
Leur forme et leur étendue varient à l'infini: tantôt convexe
tantôt échancrées à leur bord externe , le plus souvent voû-
tées et quelquefois planes, elles sont relevées dans l'Acan-
thophis, tandis que leur surface se trouve chez les autres
DES TEGUMENS. (17
opludioîis dans le inenic plan avec le sonimet de la tête.
Elles sont placées très en arrière chez plusieurs Tortrix , et
fondues dans la masse de la plaque oculaire unique chez le
Tortrix scytale. Existant même dans heaucoup de serpens
dont la tète est dépourvue de plaques, elles sont remplacées
chez d'autres par un tour de petites écailles.
Deux paires de plaques, les frontales antérieures et pos-
térieures , revêtent, chez la plupart des ophidiens, le sommet
du museau. Leur forme est en grande partie déterminée par
les bords latéraux de cette partie , de sorte qu'elles sont
elfilées chez les Dryiophis, trapues chez les Dipsas etc. Les
antérieures le cèdent en étendue aux postérieures: celles-là
sont quelquefois très petites , comme chez plusieurs espèces
des genres Lycodon, Dipsas, Elaps, Homalopsis etc. ; chez
d'autres Homalopsis elles sont réduites à ime seule paire,
enchâssée entre ou derrière les nasales, qui viennent occuper
leur place; chez les Hydrophis, les Tortrix et les Calamars
proprement dits, elles disparaissent totalement, et on ne
voit alors qu'une seule paire de frontales. Leur nombre est au
contraire plus élevé chez d'autres ophidiens , comme chez
plusieurs Boas, le Trigonocéphale hypnale, l'Hétérodon ,
l'Hvdrophis colubrin ; chez d'autres Boas, elles sont rempla-
cées par de petites plaques de forme irrégulière , qui se
confondent parmi les écailles. Les modifications qu'éprou-
vent les formes de ces plaques dans les diverses races
d'ophidiens sont nombreuses, comme on peut le voir,- en
examinant les figures de nos planches.
Le museau des serpens est toujours terminé par une plaque
plus ou moins développée, et constamment échancrée en
dessous , pour recevoir le bout de la mâchoire inférieure.
La conformation de cette plaque rostr al e varie suivant son
usage. Le plus souvent en pentagone, dont la forme est
déterminée par celle du nmseau, elle est large et très bombée
chez la plupart des ophidiens; ciiez d'autres, tels que les
(Î8 DES TÉCUTMENS.
fî(''t(;ro(U)ns , le Naja lisemacliate, TEi-vx , plMslonrs Trigoiio*
rcphales etc., elle est obliquement Tronquée en dessous;
chez les Dryiophis enfin , elle erstrc dans la formation de
l'appendice mobile dont le museau de ces animaux est
pourvu.
On nomme labiales les plaques qui garnissent le bord
des lèvres ; elles sont le plus souvent disposées sur une seule,
quelquefois sur deux ou plusieurs rangées, ou plutôt on voit
plusieurs plaques surnuméraires, enchâssées entre ces plaques
labiales: ce cas a lieu chez les Hydrophis , chez plusieurs
Homalopsis etc. Le nombre , la configuration et la disposi-
tion de ces plaques sont très variables et l'énumération de
ces disparités rentre par conséquent dans la partie spéciale
de mon travail j on peut cependant observer que celles de
la lèvre supérieure vont en diminuant vers le bout du
museau , chez la plupart des serpens , ce qui a en quelque
sorte lieu dans un sens inverse à la mâchoire inférieure. Il
arrive le plus souvent que les labiales supérieures forment
le dessous du bord de l'œi!.
Cet organe a alors ses bords latéraux gainis de plusieurs
petites plaques, qu'on désigne sous le nom d'oculaires.
Beaucoup d'ophidiens n'en offrent qu'une antérieure unique,
tandis que le nombre des postérieures varie de deux à quatre,
selon les espèces: quelquefois elles se prolongent au dessous
de l'œil, et chez beaucoup de serpens à tête revêtue d'é-
cailles, elles sont petites et forment une rangée entourant Tœil
darjs toute sa périphérie. Chez le Tortrix scytale, toutes les
plaques marginales de l'œil sont fondues en une seule, au
i'entre de laquelle est placé cet organe.
Il arrive rarement que les narines percent la plaque
nasale sans la diviser verticalement en deux ; ce cas a cepen-
dant lieu chez plusieurs espèces des genres Tortrix, Boa,
Elaps et chez la plupart des serpens venimeux proprement
dits; quelquefois même, comme dans d'autres Elaps, les
DES TÉGUMEISS. G9
narines s'ouvrenl précii=i^iiient t^ntre deux [«laquos de forme
diverse, dont on peut regarder la postérieure comme plaque
frênaie. La confit^uration des nasales et leur disposition subit
des modificalions considérables dans les diverses espèces
d'ophidiens: chez les serpens aquatiques, ces lames sont ordi-
nairement rapprochées au sommet du museau , et tiennent
quelquefois lieu des frontales antérieures, comme dans les
Hydrophis: mais ordinairement elles occupent les côtés du
museau, touchant à la rostrale par leur bord antérieur.
Elles sont le plus souvent suivies d'une autre plaque, la
frênaie, qui s'étend jusqu'aux oculaires antérieures; cette
plaque manque cependant dans un grand nombre d'ophi-
diens, tandis que sa place est occupée dans d'autres par
deux, trois ou plusieurs lanies d'étendue et de configuration
très diverses.
Les lames temporales n existent que conjointenjent
avec les occipitales et les labiales supérieures, entre lesquelles
elles sont placées, et dont dépend leur nombre et leur
configuration.
Nous avons dit plus haut que le bord de la mandibule
inférieure est presque constamment garni de lames, dont on
distingue la mitoyenne placée au bout et répondant à la
rostrale. La seconde paire se prolonge le plus souvent sous
le menton , pour se réunir à une ou deux paires de plaques
enchâssées entre les labiales, et qu'on désigne sous le nom
de mentales. Quoique de forme assez variable , elles man-
quent rarement, et leur bord intérieur forme toujours ce
sillon profond qui contribue tant à l'élargissement de cette
partie de la peau, et que l'on connaît sous le nom de fente
g u 1 a i r e.
Une terminologie plus étendue pour désigner ces lames
écallleuses nous ayant paru superflue, nous concluons ici
cette partie de notre travail , rappelant toutefois qu'il est
facile de s'y reconnaître, si l'on fait attention que ces termes
70 FORMES.
sont toujours dérivés de Ja région qu'occupent les organes:
c'est ainsi que l'on nomme écailles gulaires celles qui se
prolongent entre les labiales et les premièi es bandes abdomi-
nales qui, le plus souvent divisées, portent à leur tour le
nom de plaques gulaires; la dernière plaque abdominale,
également divisée et recouvrant l'orifice de l'anus, s'appele
anale etc. etc.
FORMES.
Les ophidiens diffèrent infiniment entre eux relativement
a leur port et à l'ensemble de leurs formes. Ces dernières
dépendent en grande partie de leur manière de vivre, de la
nature des lieux ou de l'élément qu'ils habitent et en consé-
quence aussi du genre de locomotion qui leur est propre.
Les espèces qui fréquentent les arbres se distinguent parti-
culièrement par leurs formes effilées , tandis que celles qui
préfèrent les plaines ou qui se retirent dans des terriers , sont
reconnaissables à leur corps ramassé et terminé par une
queue très courte; intermédiaires entre ces deux tribus,
quant au développement des parties, un grand nombre
de serpens préfèrent le séjour à terre, mais grimpent et
nagent cependant avec plus où moins de facilité; d'autres
enfin , qui se plaisent plus particulièrement dans les lieux
humides ou qui ne quittent jamais les eaux, offrent des
formes très variées et plus ou moins propres à ce genre de
locomotion.
Un tronc latéralement comprimé s'observe dans la plupart
des ophidiens, mais aucune famille offre ce caractère à
\in degré aussi saillant que ces serpens d'arbre que nous
avons compris dans le genre Dipsas , et les serpens de mer
qui ont le ventre plus ou moins complètement en carène
FOHMKS. 71
afin de mieux fendre les eaux. Les serpens au coiiiraiie qui
méritent plus particulièrement le nom de terrestres , tels
que les Tortrix, les Calamars, les Elaps etc., se distinguent
par leurs corps plus ou moins cylindrique. D'autres, tels
que les Tropidonotes, également terrestres quoique bons
nageurs, ofirent un ventre très large et arrondi vers les
flancs. Plusieurs Boas ont la faculté de rendre à leur tronc,
lorsqu'ils marchent ou pendant la natation , les mêmes formes
qu'on observe chez les Tropidonotes ; mais leur tronc
devient latéralement comprimé par un mouvement opposé
des côtes lorsqu'ils se préparent à grimper ou à se rouler
en dedans. Ces changemens de volume du tronc, qui s'opè-
rent lors de l'exécution des mouvemens , à un degré plus
ou moins considérable chez tous les ophidiens, rentl la
détermination exacte de leurs formes assez difficile : pour
indiquer celles du corps, nous nous sommes bornés à décrire
la figure qu'offrent les coupes transversales faites , l'une au
milieu du tronc, l'autre à la queue près de sa base, d'où il
résulte que les serpens à tronc comprimé présentent une
coupe en ovale plus ou moins alongé , qui s'approche chez
les Hydrophis de la forme lancéolée ; dans les serpens com-
plètement terrestres ou à corps cylindrique , la coupe est
plus ou moins orbiculaire; les nageurs, ou ceux dont le
ventre est large, convexe et le dos allant un peu en carène,
ont la figure de cette coupe , triangulaire ou en pentagone
à angles très émoussés. Cette dernière figure s'observe dans
un degré plus parfait chez les serpens où le dessous, plus
ou moins applati, est séparé des flancs par un angle obtus:
c'est ce qu'on appelé abdomen anguleux. Cette circon-
stance a particulièrement lieu dans beaucoup de serpens
grimpeurs ; plusieurs Dendrophis orit même les bords
latéraux du ventre garnis d'un angle saillant en forme de
carène.
La forme de la queue est encore plus variée que celle
72 FORMES.
du tronc: aussi cet organe remplit-il des fonctions très di^-
verses. Excessivement ramassée et courte , d'égale grosseur efi
conique au bout , la queue des serpens fouisseurs sert à secon-
der, à diriger les mouvemens du tronc y ou peut-être aussi i*
touiller dans la terre. Un peu plus longue mais très vigou-
reuse et conique chez la plupart des serpens terrestres, elle
offre un point d'appui solide pour le corps, dont elle supporte
tout le poids, lorsque l'animal s'érige et se raidit en bâton.
Pour remplir les fonctions de rame et de gouvernail, elle est
aplatie dans le sens vertical , courte et de forme lancéolée,
chez les serpens de mer,* mais cette configuration n'est pas
absolument nécessaire pour la locomotion dans les eaux ,*
car beaucoup d autres ophidiens aquatiques ont la queue
conformée comme d'ordinaire. Quand ce membre est long et
grêle , comme chez les serpens d'arbre , il acquiert , outre
ses fonctions ordinaires , celles de se rouler autour des
branches, et de capturer ou entortiller dans ses replis les
animaux dont ces serpens font leur nourriture. Cependant,
une queue prenante proprement dite, c'est à dire celle qui a
la faculté de se rouler complètement en dedans , ne se
trouve que chez les Boas; plus elle devient courte, plus elle
est propre à s'accrocher à un objet quelconque , pourvu
qu'elle puisse l'embrasser: elle est alors assez vigoureuse
pour soutenir l'animal tout entier suspendu à un seul point.
Les Boas nageurs n'ont pas la queue différemment organisée,
et ce n'est que chez les Acrochordes qu'elle devient un peu
comprimée. Le bout de la queue est le plus souvent muni
d'une siniple écaille soit conique, soit plus ou moins poin-
tue ou crochue; cette pointe est convertie en épine dure
chez le Crotale muet ; mais les autres Crotales l'ont pour-
vue d'un instrument bruyant tout particulier, souvent
assez volinnineux , quoique ce soil un simple produit de
l 'épidémie.
La tète n'ollre pas toujours des rapports de formes avec
J'OUIMKS. 73
]es autres parties du corps. Elle est , par exemple, très grosse
et ramassée dans les Dipsas qui cependant ont de même que
Jes Dendrophis, les formes du corps efHlées , quoique la tète
<le ces derniers soit très alongée et grêle. On f oit par cela
que la forme de la tête se règle plutôt daprès le genre de
nourriture des espèces. Celles qui avalent des animaux de
grande taille relativement à la leur, ont par conséquent une
tête grosse dont les parties peuvent se dilater, et c'est
l'opposé chez celles qui vivent de vers, d'insectes ou
d'animaux de petite taille et à formes élancées. Chez ces der-
nières espèces la tête esta peine distincte du tronc, le plus
souvent courte , arrondie au bout , et orosse : tels sont les
Tortrix , les Calamars , les Elaps etc. Chez les premières au
contraire , elle est très large à la base , assez distincte du tronc
et conséquen)ment susceptible de se dilater au plus haut degré;
ce qui a particulièrement lieu chez les serpens venimeux
proprement dits et chez quelques espèces des genres Dipsas,
Xénodon , Boa , Coluber etc. Le museau achève de déter-
miner la configuration générale de la tête ; il est tantôt court
et gros, tantôt arrondi ou tronqué , tantôt effilé et pointu.
Chez les uns, il se termine en écaille dure et retroussée;
chez d'autres il s'alonge en une appendice charnue et mobile.
Quelquefois, comme dans l'Erpéton, on voit de ces appendices
de chaque côté du museau ; mais celles que portent plusieurs
Vipères sur la région surciliaire, ne sont que des écailles pro-
longées en pointe plus ou moins développée. Le bout du
museau déborde toujours la mâchoire inférieure, dont les
bords se logent dans ceux de la supérieure , cependant ,
l'échancrure de la plaque rostrale laissée pour en faire jaillir
la langue , empêche que la bouche puisse se fermer hermétique-
ment, et ce n'est que chez les serpens aquatiques proprement
dits que les bouts des mâchoires s'emboîtent si exactement
que l'entrée de l'eau devient impossible.
La position des yeux et des narines dépend du
74 FORMES.
genre de vie des es[)èces. Les aquatiques oui ces (jrg.iîies sou-
vent assez peu développés, dirigés vers le ciel et par consé-
quent placés au sommet de la tête ; il en est de même chez les
Toi Irix et plusieurs serpens terrestres : chez d'autres et particu-
lièrement chez plusieurs serpens d arbre ils sont larges et plus
ou moins latéraux. Les serpens venimeux terrestres offrent très
souvent des narines extrêmement ouvertes, et il y a une famille
entière de venimeux proprement dits, où ces organes sont
suivis d'une seconde fosse creusée dans le maxillaire, et qui
parait remplir les fonctions d'un organe d'odorat accessoire.
11 est bon d'observer que les fossettes creusées dans le bord
des lèvres chez plusieurs Boas, ne communiquent nullement
avec l'intérieur de la tête, et n'offrent en conséquence aucune
anologie avec celles des Trigonocéphales et des Crotales.
La bouche des ophidiens, plus ou moins fendue suivant
le degré de dilatation dont les parties de la tête sont suscep-
tibles et suivant la forme de cet organe, offre tantôt des bords
flroits, tantôt des bords en S, et quelquefois montant en angle
|)ius ou moins obtus vers la connnissure des lèvres. Les diver-
sités de forme et de disposition des parties de la tête des ophi-
dient» que nous venons de mentionner, donne à chacune des
espèces une physionomie particulière d'autant plus caractéris-
tique que les traits en sont saillans; imprimée dans la mémoire,
elle sert à faire reconnaître les nombreuses races de ces êtres
intéressans. Les circonstances qui contribuent le plus à ren-
dre caractéristique la physionomie des ophidiens, sont une
tête large, haute, anguleuse, cordiforme et revêtue de petites
écailles à surface inégale, une bouche fendue et à bords cour-
bés, de grosses lèvres, de larges fossettes aux côtés rl'un museau
tronqué ou retroussé au bout, enfin de petits yeux à pupille
alongée, et ombrag'és par des lames surciliaires saillantes: ca-
ractères qui sont le plus souvent réunis chez des espèces à
formes lourdes, tels que les serpens venimeux proprement dits
et d'autres. Cependant ces traits prononcés ne constituent
TElNTitS. 75
pas toujours le caractère distinctif des opliidieus dangereux;
car plusieurs espèces innocentes , tels que i'Hétérodon , les
Homalopsis^ les Boas et d autres joignent à leur physionomie
l'arouclieun naturel doux; tandis que les Elaps, les Najasetles
Bongares, qui ne se distinguent guère des Couleuvres par des
signes extérieurs, sont pourvus des mêmes armes redoutables
que les Vipères, les Crotales etc.
Le cou des ophidiens offre le plus souvent les mêmes
formes que leur tronc, et ce n'est que dans les Najas ou dans
plusieurs Xénodons que les côtes, plus droites que d'ordi-
naire et susceptil)les d'un mouvement considérable dans le
sens horizontal , produi-sent la forme plus ou moins aplatie
du cou ; il faut cependant remarquer que la plupart des
serpens ont la faculté d'aplatir et d'élargir le cou, ce qui
s'observe lorsque, émus de colère , ils font entendre ces siflle-
mens qui préludent ordinairement à 1 attaque.
TEINTES.
Il est impossible de fixer des lois constantes du système
de coloration chez les ophidiens. Tantôt uniformes et
ternes, tantôt brillantes et d'un éclat égal à celui des pierres
précieuses, leurs teintes sont variées à l'infini et très diverse-
ment disposées, non seulement chez les différentes races,
mais souvent aussi chez les espèces d'un même genre. Chez
d'autres genres au contraire, on observe, dans les espèces voi-
sines, unecerlaineconformité dans la distribution descouleurs,
qui sontsouventanalogues aux objets qui environnent les lieux
habités par ces animaux. Beaucoup de serpens grimpeurs par
exemple, présentent une livrée d'un vert uniforme, absolument
semblable à celui des feuilles; tandis que d'autres , tels que plu-
sieurs espèces des genres Dendrophis elDryiophis, ressemblent
76 TEINTES.
sous ce rapport à de petites branches nues; enfin il en est, les-
Dipsas, dont le système de coloration rappelé les vieux troncs
d'arbre revêtus d'une mousse fine et abondante. Les serpens
qui habitent les eaux douces se font souvent remarquer par
des teintes sombres et uniformes; le vert, le jaune et le
bleu, couleurs qui ornent le corps des serpens pélagiques,
les confondent avec les vagues au vaste océan. Les habitans
du désert, tels que l'Eryx, la Vipère de l'Egypte eî;c., se dis-
dinguent à peine du sable, si uniformément ix^pandu dans cet^
tristes lieux ; d autres serpens fouisseurs se reconnaissent à
leurs belles couleurs polies, fortement irisées, et dont le rouge
domine sur les parties inférieures. Une multitude d'autres
ophidiens offrent des couleurs qui imitent tan lot le brun terne
d'un sol tourbeux, marécageux ou ombragé par d'épaisses
forets , tantôt le vert des herbes , tantôt les teintes bigarées des
lieux revêtus de mousses et de hchens; enfin il y en a dont la
livrée, ornée descouleurs les plus éclatantes, paraît rivaliser avec
la pompe qu'étalent les fleurs des végétaux tropiques. On re-
marque particulièrement les espèces de cette dernière catégorie
parmi les serpens terrestres et parmi les giimpeurs, de sorte que
l'on peut citer comme les plus beaux des ophidiens les espèces
<lont le corps est entouré de bandes alternes de rouge ver-
millon, de noir, de blanc ou de jaune: tels sont lesCoronellii^
venustissima et coccinea , le Lycodon formosus, plusieurs
espèces des genres Tortrix et Hétérodon , la plupart des Elàps ,
le Naja lubrica , le Dendrophis ornata et le Dipsas macrorhina.
D'autres Dendrophis, plusieurs Dryiophis, certains Dipsas
etc. sont également remarquables par la splendeur et par
Id diversité des teintes qui ornent leur livrée.
La distribution des couleurs est variée à l'inlini chez les
serpens: les uns ont le corps rayé longitudinalement, chez
d'autres il est entouré de bandes transversales; il est souvent
tacheté, quelquefois parsemé de points ou de marbrures; tantôt
c'est un fond clair qui est relevé par des traits de toute
TEINTFS.
/ /
■ç^pècc , tantôt (test la couleur foMC'éc cpii (louiiuc, et la lolnJc
primitive ne s'entrevoit qu'indistinctement: de là la orande
difficulté de rendre par des descriptions les nuances infinies
de la livrée des serpens. Cette difficulté est souvent at^ravée
par les changeniens qu'éprouvent les teintes avec l'âge, dans
les différentes périodes de la vie etc. ; encore sont-elles le plus
souvent diverses dans les deux sexes, et les variétés acciden-
telles que l'on observe à cet égard sont très nombreuses; la
vivacité des teintes subit enfin des métamorphoses conti-
nuelles, produites par le changement de la peau. On peut
établir la loi, que plus l'individu est jeune, plus vives sont les
teintes, plus distincte en est la distribution ; car souvent les
teintes qui ornent les jeunes s'effacent totalement avec l'âge
ou deviennent absolument uniformes : témoins les Coluber
<.'anus, melanurus, l'Homalopsis buccata, le Xénodon severus
et d'autres.
La faculté de changer spontanément de teinte, faculté que
possèdent plusieurs batraciens, un grand nombre de sauriens ,
et particulièrement les caméléons, ne s'observe qu'à un
degré inférieur chez les ophidiens et notamment chez les
serpens grimpeurs distingués par leur couleur verte.
On n'a que peu étudié les différences qui existent relati-
vement aux couleurs entre le mâle et la femelle et les
changemens que chacun des deux sexes peut éprouver
dans les principales périodes de la vie ; quelquefois, comme
chez notre ïropidonote à collier , les deux sexes se ressemblent
parfaitement, ce qui n'a point lieu chez la Vipère com-
mune, où la livrée de la femelle subit d'assez considérables
modifications avant que l'individu ait atteint le terme de sa
croissance, tandis que les mâles offrent au sortir de l'œuf des
teintes analoijues en tout aux adultes du même sexe.
Nous avons déjà parlé plus haut de la grande influence
(|u exerce la mue sur la beauté primitive des teintes: les
< hangemens qii'elle produit sont dautant plus dignes de
78 TEINTES.
l'attention des naturalistes, que la unie s'opère insensible-
ment et qu'elle se répète plusieurs fois chaque année.
Il arrive presque toujours que les teintes des ophidiens
s'effacent en grande partie après la mort ou que, exposées à
l'influence des liqueurs fortes, elles éprouvent des change-
mensplus ou moins marqués. Le noir, le brun, le jaune d'ocre
et plusieurs autres couleurs ternes ne perdent cependant pas
toujours même le lustre que réfléchit la surface unie des
écailles; au nombre de ces espèces qui conservent leurs
teintes après la mort, appartiennent les Calamaria arcti-
ventris et Brachyorrhos, le Tortrix maculata, le Xénopeltis,
le Coronella rufula, les Lycodons hebe et subcinctus , les
Coluber constrictor, Aesculapii et melanurus, plusieurs
espèces des genres Naja, Homalopsis, Yipera et beaucoup
d'autres. La couleur verte se ternit après la mort, perd de sa
vivacité, ou passe au bleuâtre: elle se communique faci-
lement à l'esprit de vin, qui en est alors coloré. Le blanc
perd presque constamment sa pureté et devient sale ou jau-
nâtre, tandis que le jaune clair passe au blanchâtre. Il
en est de même des belles teintes rouges dont le corps de
plusieurs serperis est orné; cette couleur disparaît presque
totalement après la mort , passe au jaune blanchâtre ou
au brunâtre. Le bleu, si rare dans l'ordre des ophidiens,
s'efface chez la plupart; il en est de même des taches
d'un vert très clair. Presque toutes les autres teintes inter-
médiaires se ternissent ou perdent, du moins en partie,
leur éclat, après avoir été exposées à l'influence des liqueurs
fortes.
VAHIKTKS. 7i)
VARIETES.
Parmi les variétés, que l'on observe si souvent chez
les reptiles dont nous traitons , il faut regarder plusieurs
comme dues à l'influence du climat ; d'autres, le plus sou-
vent assez constantes, ne s'éloignent que par des disparités
assez légères, telles que les différences de teinte etc., de leurs
espèces types, avec lesquelles elles habitent les mêmes lieux ;
mais la plupart des variétés sont piirement accidentelles et
offrent des modifications aussi innombrables que diverses.
Toutes les parties de l'animal sont sujettes à des variétés
accidentelles: elles consistent principalement dans les nuan-
ces et la distribution des teintes, dans la configuration des
plaques de la tête, dans la longueur de la queue, dans le
nombre des lames du dessous; quelquefois mêmes ce sont
les formes qui subissent des modifications: nous avons
fait mention des principales variétés à l'article de cha-
que espèce , mais il est impossible de les indiquer toutes.
De l'expérience et le but constant de ramener autant que
possible des individus analogues à l'architype, sont le seul
moyen d'applanir les difficultés qui ne cessent de se pré-
senter au zoologiste lors de la détermination des espèces.
Partant de ces vues, il ne saurait regarder comnje espèces
les variétés de climat, quels que puissent être leurs carac-
tères, même pas lorsqu'elles s'offrent constamment les mêmes
dans un certain lieu. L étude de ces différences locales,
négligée jusqu'à nos jours, est de la dernière importance
pour la connaissance exacte des êtres qui habitent notre
globe. Nous avons, en conséquence, eu soin de consigner
dans la partie spéciale de notre travail, un grand nombre
d'observations détachées relatives à ce sujet.
80 SRBPE^S MONSTRUEtlX.
SERPENS MONSTRUEUX.
On a quelquefois , mais très rarement, observé des ser-
pens monstrueux: à ce nombre appartient la Cou-
leuvre à deux têtes prise aux bords de l'Arno, que Redi
conserva vivante pendant plusieurs semaines , et dont il a
fourni la description dans un de ses ouvrages (i). Lacépède (2)
a rassemblé plusieurs autres faits relatifs à des serpens à
deux têtes, et donne lui même la figure d'un individu sem-
blable, conservé dans les galeries du Musée de Paris. Le
portrait d'un troisième serpent à deux têtes se trouve che/
Edwards (3). M. de Froriep en possède également nn indi-
vidu, dont cependant les têtes et les queues sont parf\ùtement
séparées. M. Mitchill (4) lait mention de plusieurs monstres
de ce genre, observés dans l'Amérique Septentrionale; les
têtes de ces sujets étaient plus ou moins réunies ensemble,
de sorte que quelques uns ne présentaient que trois yeux
et une seule mâchoire inférieure. On a trouvé dans le même
pays un serpent, probablement de l'espèce appelée Coluber
constrictor, dont toutes les parties étaient tellement défigu-
rées par une maladie, que l'on a cru reconnaître dans cette
espèce de monstre, le fameux serpent de la Mer du Nord, si
célèbre par sa taille énorme. On voit l'extrait de la disser-
tation , publiée exprès à ce sujet à Boston , dans le Journal
de Physique^ tome 86, p. 397.
(1) Observât, lll p. 1 siiiv, — (2) Qurtr/r. ovip. Il PL 20,
fig, 1 p. 475. ■ — (3) Oiseaux, PL 207. — (4) Silliman Jouhk
X p. 48; voir Isis 18^2 p. 10/^6.
ENNEMIS DES SERPENS. h\
enns:mis Di:s sb:upens.
Les scrpcns ont de nombreux ennemis parmi les animaux.
CJniversellement détestés, l'homme en tue, indifférenmient
que leur nature soit venimeuse ou innoffensive, partout où
il s'en présente à sa vue. Toutes les contrées du globe offrent
certains manmiifères qui poursuivent les serpens avec une
ardeur acliarnée; chez nous, ce sont principalement: le blai-
reau , le hérisson, les belettes, les martes et le putois qui
contribuent à la destruction des serpens ; dans les contrées
tropiques de l'Ancien Continent, ils rencontrent des ennemis
terribles dans les civettes, les mangoustes et d'autres carni-
vores. Plusieurs oiseaux leur font une guerre continuelle:
tel est particulièrement le messager du Cap, monté à ce qu'iî
paraît expressément sur de longs pieds enéchasses pour rendre
ia morsure des serpens infructueuse, dans l'Amérique Méri-
dionale, ce sont le faucon rieur et d'autres oiseaux deproio qui
les poursuivent avec acharnement; les grandes cicognes des
Indes, telles que le marabou, détruisent un grand nombre
de serpens ,• en Europe il faut compter parmi leurs ennemis,
outre les cicognes, les corbeaux , les milans et plusieurs buses.
Dans les mers tropiques ce sont les requins qui dévorent avi-
dement les serpens pélagiques; enfin , beaucoup d'ophidiens
se font même entre eux une guerre mutuelle , n'épargnant
quelquefois pas même leur propre race.
En transplantant les animaux ennemis des serpens , dans
des contrées que ceux-ci infestent , on pourrait peut-être em-
pêcher lu trop grande multiplication de ces dangereux
reptiles. On a fait cet essai, en transportant le messager du
<^ap dans les colonies à sucre françaises des Indes Occiden-
tales (i); peut-être les mammifères que nous venons de citer
82 ENNEMIS DES SERPENS.
o\i les cicognes, rendraient-ils d'aussi bons ou de meilleurs
services.
On parvient facilement à faire périr les serpens à coups
de bâton , en leur cassant la colonne vertébrale ; mais
outre que cette manière ne peut s'employer que pour les
espèces de petite taille, elle a cela d'inconvénient que les
individus ainsi tués sont de peu d'utilité pour les Cabinets.
Pour éviter que cela n arrive, il vaut mieux de les retenir
au sol au moyen d'un bâton au bout duquel on peut atta-
clier une espèce de pince qu'on leur applique sur le corps
près de la tête. Pour les grandes espèces et pour celles qui
habitent les arbres, il n'y a souvent d'autre moyen que de les
abattre à coups de fusil. Les serpens aquatiques s'engagent
quelquefois dans les filets que l'on tend aux poissons, et
voilà peut-être le seul moyen de s'en rendre maître, vu qu'en
nageant ils n'exposent presque jamais aucune partie de leur
corps hors de l'èau. Mais le plus grand nombre de serpens
innocens se prend facilement avec la main, soit en les saisis-
sant par le cou, soit par la queue: plusieurs cependant ont la
faculté de se redresser et de mordre, tandis que d'autres
souillent leur agresseur d'un fluide fétide qu'ils font jaillir à
une distance assez considérable. Il n'entre pas dans le plan de
notre ouvrage d'exposer ici toutes les diverses manières que
Ton peut employer pour faire la chasse aux serpens: pour
avoir des informations exactes, que l'on consulte l'Ouvrage de
M. Lenz, qui en traite amplement, et à qui une longue expé-
rience a appris les moyens de s emparer facilement de ces
êtres dangereux, et d'éviter en même temps les nombreux
dangers que l'on court lorsqu'on s'en occupe. On trouve dans
ce même ouvrage des lenseignemens relatifs à la meilleure
manière de détruire ces reptiles malfaisans ou du moins
d'en empêcher la trop grande multiplication; les remèdes
(|ue ce savant énumère, consistent dans les points princi-
paux suivans : d'abord, de détruire antant que possible
ENINRMÏS DKS Sr.UrFNS. 8,3
los nnimaiix ((iii servent de nouiTituro aux serpoiis, tels que
les souris, les rats, les grenouilles et antres; de favoriser les
oîinenùs des serpcns que nous avons cités plus haut, et
parmi lesquels occupe le premier rang la cicogne, qui se rend
doublement utile par les ravages qu'elles fait parmi les gre-
nouilles; ensuite, de brûler la végétation des lieux infestés
par un trop grand nombre de serpens ou, lorsque ce sont des
plaines, de les labourer; enfin, de décerner une prime à ceux
qui peuvent produire certaines parties des serpens qu'ils ont
tués , abolissant en même temps l'usage d'accorder des primes
pour la destruction de ces oiseaux rapaces qui font la guerre
aux serpens, tels que les buses, les milans, les corbeaux, etc.
Des vers intestinaux de diverses espèces infestent
les viscères des serpens. J'en ai souvent trouvé l'estomac, près
du pylore, tellement rempli, que leur présence a dû causer
des obstructions continuelles, si non la mort: accrochés aux
parois intérieures de cet intestin, ces vers y étaient par
peloton. D'autres se tiennent dans le canal intestinal ,
d'autres dans le mésentère , d'autres encore dans les membra-
nes séreuses, principalement dans celles qui enveloppent le
cœur et le poumon. Les vers intestinaux observés par M.
RuDOLPHi(i)dans diverses espèces d'Ophidiens, appartiennent
aux genres suivans: Ascaris, Distoma, Filaria, Echinorhynchus ,
Taenia, Strongylus, Trichosoma, Pentastoma et Cucullanus.
Les parasites qui, attachés extérieurement à la peau
des serpens, sucent leurs sucs, sont en nombre beaucoup
moins considérable que ceux dont nous venons de parler. On
n'en a trouvé que d'un seul genre, de celui d'Ixodes , et par-
ticulièrement de l'espèce à thorax doré , que j'ai également
observée sur des Tupinambis, des cochons, des Pangolins et
plusieurs autres animaux des Indes-Orientales: M. MiiLLER(2)
(i) Entozoorum synopsis, p, '-j^i. — (2) ixodes orniopHiLUs
Ao«rt Jeta XV J Pars II p a32 et suiv. PI. 67,
84 PROPAGATION.
a fîecTit cet insecte» Metaxa (i) a observé, sur plusieurs
ophidiens de i'Itaile, des parasites qu'il a reconiui loimei
deux espèces du genre Acare. Daudin (2) parle d'autres,
trouvés sur le Boa cenchria. J'en ai détaché de Pythons, du
Dipsas dendrophila et de beaucoup d'autres serpens javanais.
Les serpens se rendent utiles par la destruction d'ani-
maux nuisibles, tels que de petits rongeurs, de vers, d'insectes,
de mollusques, etc., auxquels ils font la chasse. Autrefois
on employait les serpens dans la médecine, et cet usage s'est.
conservé chez beaucoup de peuples, quoiqu'il ait été rejeté
par les nations les plus civilisées. Très récemment cependant
le docteur Marikrosrv (3), de Rosenau en Hongrie, dit avoir
employé avec succès le fiel des serpens contre l'épilepsie.
Le préjudice que les serpens causent dans plusieurs
contrées, surpasse de beaucoup leur utiUté. Les espèces veni-
meuses se multiplient tellement dans certains pays entretro-
piques et particulièrement dans l'île de la Martinique, qu'elles
deviennent un véritable fléau et qu'elles font périr annuelle-
ment un grand nombre d'hommes et d'animaux domestiques.
Les serpens aquatiques font souvent assez de tort aux lacs et
aux rivières poissonneuses ; les espèces terrestres mangent des
mammifères, des oiseaux utiles à l'homme , et en détruisent
Très souvent les nids pour dévorer les œufs ou les petits.
PROPAGATION,
Chez nous, les serpens ne font des petits qu'une seule fois
par an; la copulation a le plus souvent lieu dans les
premières belles journées des mois d'Avril ou de Mai. Pour
(1) Monogr,/, 7 ^^ 9- — " (2) jRept. vol. F, p. 20a. — (3) Hufelani*
Jonrn. année i85i c((h. 10.
PROPACzATION. 85
s'accoupler, les deux sexes s'entortillent avec leurs corps, en
sorte qu'ils ne paraissent former qu'un seul individu à deux
têtes qui se regardent lacecontie l'acej le mâle introduit alors
dans la cloaque de la femelle les deux corps cylindriques et
hérisses d'épines qui, en se retournant sur eux-mêmes, ont
été retirés du dessous de la queue: les deux sexes restent ainsi
réunis pendant plusieurs heures (i); mais on ne saurait au
juste fixer la durée de l'accouplement. Il faut, du moins
chez nos espèces indigènes , un espace de trois à quatre mois,
avant que les œufs soient prêts à être pondus: durant
cet intervalle, ils subissent déjà une espèce d'incubation
dans le ventre de la mère; car en ouvrant les œufs après
qu'ils ont été pondus, on y aperçoit presque toujours un fœtus
plus ou moins développé et quelquefois même entièrement
formé. Dans ce dernier cas, les petits ne sont renfermés
que dans une membrane mince, qu'ils déchirent au moment
même de naître, pour commencer leur existence indépendante.
Dans un grand nombre de serpens, au contraire, les œufs
sont enveloppés d une tunique tenace et de nature coriace
ou plutôt tenant de celle du parchemin: les petits, n'étant
qu'imparfaitement développés lors de la ponte de ces œufs,
il leur faut quelquefois l'espace d'un mois et davantage
avant d'éclore. Voilà sur quoi repose la distinction que l'on
fait entre serpens vivipares et ovipares: distinction qui, à la
vérité, n'est fondée que sur le plus ou moins de développe-
ment du fœtus dans l'œuf, lors de la naissance, ou sur la
nature de l'enveloppe extérieure de l'œuf. Les ophidiens sont
donc toujours ovipares et c'est à tort que l'on a comparé
cette espèce de génération vivipare à celle des manmiifères ,
où le petit reçoit sa nourriture de la mère au moyen d'un
placenta.
Les conditions nécessaires pour le développement de
(i) LtNZ. p. St et suiv.
86 PROPAG.rriON.
rembiyon dans l'œuf sont, selon Mr. Heuholdt (i): i lia-
midi té produite par une faible fermentation végétale, con-
jointement avec une température proportionée (entre + 2û
et -^ 6" R)] enfin, des circonstances propres à favoriser l'absorp-
tion et l'évaporation à travers l 'enveloppe extérieure de l'œuf,
C'estdelàquelesserpens recherchent, pour déposer leurs œufs ,
des lieux où ces conditions se trouvent combinées, tels que
des tas de fumier ou de feuilles, amassés dans les endroits
exposés au soleil ; c'est pour le même motif que plusieurs
espèces ovipares aiment à s'établir dans le voisinage des
maisons, dans des serres, etc.
On a erronément avancé que les serpens venimeux mettent
toujours des petits vivans au monde , et que les serpens non
venimeux seuls pondent des œufs; il n'en est pas ainsi,
car il y a plusieurs de ces derniers qui sont vivipares , tandis que
certaines espèces de la première tribu pondent des œufs comme
la plupart des couleuvres, il paraît même que cette diver-
sité dans la génération n'a aucun rapport avec l'organisa-
tion de l'animal même, vu que ces deux modes de génération
se trouvent quelquefois chez des espèces très voisines d'un
même genre : la Coronelle lisse par exemple, produit de petits
vivans comme notre Vipèie conmiune, mais plusieurs autres
Coronelles pondent des œufs renfermés dans une enveloppe
coriace; il en est de même avec le Python à deux raies,
tandis que le Boa rativore est complètement vivipare; parmi
les venimeux, il y a les Najas et plusieurs autres qui sont
ovipares.
Durant la ponte, les serpens se tiennent étendus à terre et
lèvent seulement la queue pour faire sortir les œufs; cette
opération n'est ni longue ni pénible. (2) Les œufs des Ophi-
diens contiennent, avant le développement de l'endnyon ,
un fluide homogène d'une couleur jaune foncé, et analogue
(j) Ch'C/iii;t iiVSo p. /j cl suiv. ~~~ (v.) Lenz p /jfjB,
PROPAGATION. 87
au juuiie (le 1 œut d'oiseaux. Il paraît (juc ic fluide blanc
manque totalement dans l'œuf des serpens : aussi se distin-
guent-ils de celui des oiseaux par le défaut total de chambre
aérienne. Le jaune est enveloppé d'une tunique propre qui
est pourvue d'un grand nombre de vaisseaux sanguifères ,
dont les troncs principaux se rendent, conjointement avec le
conduit du vitellus, à Tombilic de Tembryon: cette tunique,
appelée allantoïde par plusieurs physiologistes, a été regardée
par d'autres comme l'analogue du chorion. (i) Probablement
cette tunique est-elle composée, comme dans l'œuf des tor-
tues, de deux lamelles dont l'extérieure contenant les vais-
seaux sanguifères, peut être comparée au chorion de l'embryon
des mammifères, tandis que l'intérieure est la véritable allan-
toïde. (2) L'embryon même est renfermé dans une membrane
séreuse, l'amnios. Le conduit du vitellus donne dans l'in-
testin grêle près du pylore ; mais l'ouverture ombilicale ne
se trouve pas toujours en face de cette région : chez le Trigo-
nocephalus Atrox où elle est près de l'anus, le conduit du
vitellus est obligé, pour se rendre au duodénum, démonter
dans 1 intérieur de la cavité abdominale^ tout le long des
intestins.
Le nombre de petits que font les Ophidiens en une seule
ponte, diffère considérablement d'une espèce à l'autre. Je
n'en ai observé dans plusiein\s Calamars qu'une dixaine;
quelques Couleuvres en font jusqu'à 20 ou 25; j'en ai trouvé
3o et davantage chez le Trigonocéphale Atrox, et l'on dit que
notre Couleuvre à collier en pond jusqu'à Ao. En ouvrant le
ventre d'un serpent plein , on voit les œufs serrés les uns
(1) C'est pour cette raison que les uns nient l'existence de l'aliantoide
dans l'œuf des Ophidiens, tandis que d'autres opinent pour le con-
traire; comparez: Desmollins AIcm. ci. la Soc. mcd. ; Rathkb ap.
BuRUACH Phys, 11. p, /,oy et 563 ; IIelholdt Oiersigt, etc. —
(a) TiEDEWANW Jubelfeicr p. a5.
hj\ DÉVELOPPEMENT.
contre les autres et rang*3s en pelotons, occuper Jans toute leui
étendue les oviductes qui ressemblent alors à un chapelet.
L'embryon a tous ses tégumens sans teintes, et les yeux extrê-
mement développés et saillans j la tête est bombée, le museau
court , en pente et ressemblant à celui d'un marsouin ou an
bec d'une poule. A mesure que le fœtus se développe, ses
ibrmes se rapprochent de celles de l'animal parfait. Pour
se défaire de sa prison, le serpenteau, probablement à
force de se remuer , parvient à déchirer les tuniques qui le
tiennent enfermé. Cette opération se fait aisément lorsque
ces tuniques sont membraneuses , comme dans les espèces
vivipares; mais il faut de grands efforts pour lompre
l'enveloppe coriace des œufs proprement dits: trois ou
jjuatre fentes longitudinales, rapprochées du bout de l'œuf,
indiquent le lieu par où le serpenteau s'est échappé, (i).
^^ a jMjr K' a- s^L'^a.^'N T
Les petits au sortir de l'œuf, diffèrent ordinairement de
leurs parens , outre leur taille , par un système de coloration
plus vif et plus tranché, par une tête plus émousée et plus
arrondie, par la grandeur des yeux, et parle moindre déve
loppement de l'épiderme et de ses appendices. Au reste, ils
sont pourvus de dents parfaitement semblables à celles des
adultes, aussi en font ils tout de suite usage, et les venimeux ,
instruits par l'instinct du pouvoir de leurs armes, élèvent et
baissent alternativement leurs crochets, et se défendent contre
les attaques avec cette fureur , innée à toute leur race. On a
(ï) Voir, pour ce qui a rapport au développement de l'œuf des
serpens, l'excellent Mémoire du professeur HERUOLnT, accompagné de
belles platicjïes: Oversigt 1819 •• — 3o^;. /» cl suiv. avec Jig. a.
DÉVFXOPPEMEINT. 8î)
longtciiips cru que la queue est, en projxullon du tronc, plus
courte chez les jeunes que cliez les acliiUes, et que ce mem-
bre offre en conséquence chez ceux-là un nombre moindre
de plaques souscaudales. S'il en était ainsi, il faudrait sup-
poser qu'il se développe avec 1 âge de nouvelles plaques,
connue on l'observe chez les Juins; mais comme le nombre des
plaques correspond à celui des vertèbres , il faudrait égale-
ment supposer la production de nouvelles pièces osseuses ,
ce qui est peu probable chez des êtres d'un ordre aussi élevé
que celui dont nous traitons. D'ailleurs, les recherches que
j'ai faites à cet égard, m'ont prouvé le contraire, vu que
parmi une grande quantité d'individus, les jeunes n'offraient,
quant au nombre des plaques , d'autres différences avec les
adultes que celles qui ne sont dues qu'au hazard: pour être sûr
du fait, j'ai répété ces expériences sur un grand nombre d'es-
pèces les plus diverses, et j'ai toujours obtenu le même résultat.
Peu de temps après leur naissance, lespetitsophidiens subis-
sent la première m u e. Cette opération se répète , chez nous ,
suivant les observations de M. Lenz , cinq fois par an, savoir:
tous les mois depuis la fin d'Avril jusqu'au commencement
de Septembre ; d'où il résulte qu'il n'y a point de change-
ment de peau pendant le sommeil d'hiver. Il serait d'un grand
intérêt de savoir, combien de mues subissent les serpens
dans les climats tropiques où l'engourdissement n'a pas lieu.
Dans la domesticité, une manière de vivre peu propre à la
nature des êtres, influe notamment sur les fonctions de la
peau dont l'épiderme ne se renouvelle plus dans des pério-
des déterminées et fixes; très souvent alors, cette opéra-
tion est assez longue et si pénible, que l'animal souffre beau-
coup , ou qu'elle est quelquefois suivie de la mort. Pour rejeter
l'ancien épiderme, qui conmience à se détacher par la tête,
et notamment le long des bords des lèvres , le serpent s'engage
dans les mousses, dans les herbes ou dans les bruyères, et
parvient,au moyeu d un mouvement progressif lent et continu^
90 DÉVELOPPEMtNT.
ou d'un fi oltciiHiit , à se (îobarasser petit à petit de la tunique
extérieure de sa peau, qui est déjà remplacée en dessous par
un épidémie nouveau. La dépouille ainsi enlevée se trouve
tournée à l'envers d'un bout à l'autre, et présente un sac à
surface réticulée plus ou moins diaphane, plus large que
le corps du serpent à cause du dilatement des intervalles
membraneux, et qui n'offre, à l'exception de celles de la
gueule et des narines , d'autre ouverture que l'orifice
postérieur du tronc ; car tout le monde sait , que la liiem-
brane hémisphérique protégeant extérieurement le globe de
l'œil, fait partie des tégumens extérieurs et tient par consé-
quent à la dépouille rejetée. Cette dépouille, d'abord molle,
se dessèche bientôt , et se conserve facilement dans les Cabi-
nets ; mais il arrive rarement de les rencontrer entières , vu
qu'elles se déchirent souvent pendant l'opération que nous
venons de décrire. Nous en possédons quelques-unes qui sont
fojt belles de plusieurs espèces exotiques, qui prouvent que le
dépouillement se fait de la même manièrecheztouslesserpens.
Les changemens qu'éprouvent les Ophidiens avant d'avoir
acquis le terme de leur développement sont encore peu étudiés.
Aussi quelquefois, ainsi que nous l'avons dit plus haut, la
livrée des deux sexes offre-t-elle dans les diverses périodes
de la vie des différences considérables. Les mâles ont souvent
la queue plus grosse et plus longue que les femelles, probable-
ment parce. que ceux-là ont les organes de génération logé dans
une cavité à la base de ce membre; les femelles au contraire «
acquièrent une taille plus forte que les mâles , et leur tronc
est alors d'un volume plus considérable. On ignore
absolument l'âge, auquel parviennent les diverses races de
serpens, quoiqu'on puisse leur supposer une vie très longue,
comme à tous les autres reptiles; on ignore également si ces
êtres ont un terme iixe de croissance ni de quelle durée il est.
îl est probable qu'ils grossissent durasit tout le temps de leur
vie; mais mes observations me porteni à croire, que celte
DÉVELOPPEMENT. Di
jii!j^iiieiilaLi()!j lie voliiiiH* a lieu diverscmeiil dans les dilTe-
lenles périodes de la vie, et (jnelle est assujettie aux mêmes
luis qui rèj^Kîut le développement de la plupart des autres
animaux veitébrés. Les formes lamassées et arrondies qui
ilistinguent le serpenteau, disparaissent dans les premiers
mois de son existence et deviennent plus alongées à mesure
<{uil approche de répocjue de pouvoir procréer: ce terme
est fixé chez nous , selon M. Lenz, à la quatrième année.
Il paraît qu'après cette époque les serpens croissent moins
rapidement que dans leur première jeunesse, et que le
développement de leurs parties a plutôt lieu par rapport
au volume qu'à la longueur: cet âge se caractérise par des
traits prononcés et la plénitude des formes. Cependant,
avant d'arriver au terme de leur existence, les dimensions
ordinaires serpens augmentent quelquefois du double : la
grosseur des parties, une tête obtuse et ramassée, et des for-
mes vigoureuses distinguent ces très vieux individus, qu'il est
cependant assez rare de rencontrer.
Beaucoup de voyageurs, et notanmient ceux d'une époque
plus reculée, parlent de serpens détaille monstrueuse, qu'ils
disent avoir rencontrés dans leurs courses dans l'intérieur
des terres inter-tropiques , et dont ils font souvent aller la
longueur jusqu'à 4» pieds et davantage (i). Quelque soit
le pays où ces grands reptiles se trouvent, on leur applique
souvent la dénomination de Boa Constrictor, familière à
tout le monde, quoique le véritable Boa Constrictor des
Méthodes , le cède pour les dimensions de beaucoup à d'au-
tres espèces des genres Boa et Python. Les recherches
nombreuses des Naturalistes voyageurs modernes et instruits
ontdémenti la plupart des fables qu'on a débitées sur la nature
de ces Ophidiens; on sait aujourd'hui que les plus gigan-
tesques ne surpassent guère vingt à vingt cinff pieds de
(i) Voir noue article B o \.
1)2 HABITUDES.
longueur totale, que leur grosseur n'a tout-au-plus que sepi
pouces de diamètre , et que les notions que l'on a sur de.--
espèces d'une taille plus forte ne reposent que sur les don-
nées vagues des indigènes. Il faut placer au premier rang de
tous les serpens connus, par rapport aux dimensions, le Boa
murina originaire des régions équatoriales de l'Amérique. Le
Python à deux raies, répandu dans toute l'Afrique et l'Asie
intertropiques, est dans l'ancien continent le représentant de
ce Boa , et atteint à-peu-près la même taille. Viennent ensuite
le Python de Schneider, habitant des Indes, à formes effilées
et surpassant rarement i5 pieds de longueur totale; le Boa
constrictor du Nouveau Monde, qui joint à des dimensions
longitudinales iiûerieures, une grosseur considérable; enfin ,
plusieurs autres Boas, des Couleuvres, etc. Chez nous, les
serpens vont rarement au-delà de cinq pieds de longueur,
mais dans le midi de l'Europe, il y a une espèce de Couleu-
vre (ij qui parvient jusqu'à la taille de 8 pieds.
HABITUDES.
Les ophidiens sont répandus dans tous les pays où se trou-
vent les conditions nécessaires à l'existence des reptiles en
général. Tout le monde sait que ces animaux à sang froid
aiment la chaleur ; que leur nombre diminue par cette raison
à mesure que l'on s'approche des régions tempérées ou froi-
les, et qu'ils préfèrent par cette même raison les terrains bas
t exposés aux i-ayons du soleil, aux lieux élevés et cou-
erts d'une végétation abondante et épaisse. Cependant , il y a
nême chez nous des espèces, communes dans les plaines,
jui fréquentent en même temps les pentes des montagnes
(i) ror. UBER QU ATiï ui\ A Dî A fUs, Ic Boa (\{S aocicns Uouiains.
flARlTUDKS. 93
jusqu'à uno clovation c\v [)liisi(Hjrs niilliors de, piods au-tlessus
<lii niveau tie la mer. Plusieurs Tmpldonoles peuplent, à lava ,
les sommets solitaires des nombreux vohîans éteints dont celle
île est hérissée. Mais de loin le plus grand nombre d'ophidiens
habitent les terrains bas , découverts ou ondjragés , secs ou
humides et marécageux. Les uns ne se rencontrent que dans
les vastes plaines sablonneuses de l'Ancien Monde; les déserts
analogues des deux Amériques, connus sous les noms de
Pampas, de Lanos ou des Savannes sont peuplés par d'autres
espèces, souvent répandues sur unegrande étendue de terres
de ce continent. TJn grand nombre de serpens fréquentent
les lieux ombragés et se trouvent souvent même jusque
dans les forêts les plus sombres, tantôt cachés sous les
herbes ou le feuillage épais, tantôt confondus parmi les mous-
ses , les lichen ou autres plantes parasites. Plusieurs espèces
se plaisent dans les lieux marécageux, parce que c'est là
qu'elles trouvent une nourriture abondante et conforme à leurs
goûts. D'autres recherchent le voisinage des eaux douces qui
leur procurent et les moyens d'existence et un asyle protec-
teur contre les poursuites de leurs ennemis; mais ces mêmes
espèces se trouvent quelquefois loin de tout lieu humide,
tantôt étendues sur un sol sec et revêtu d'une végétation brû-
lée, tantôt suspendues aux branches des arbres. Le nombre
des serpens qui passent toute leur vie dans les eaux, est très
petit, et cette manière de vivre est plus particulièrement pro-
pre aux serpens de mer qui peuplent, quelquefois en bandes
nombreuses , les parages les plus reculés de notre Globe.
Plusieurs espèces d'ophidiens se creusent des boyaux qu'elles
ne quittent que pour aller pourvoir à leurs besoins; d'autres
s établissent dans les terriers de petits mammifères quilseri
chassent quelquefois; d'autres encore cherchent un asyle dans
des trous d'arbres , sous leurs racines , près des habitations et
même jusque dans les maisons , ou c'est tantôt un tas de
fumier ou de feuilles desséchées qui leur servent de refuge^
94 ÎÎABITUDES.
enfin , ii on esl qui recherchent les champs ou ]es hcux cui-
tives,pour faire lâchasse aux insectes et aux petits inolhisqucs
qui abondent dans ces endroits.
Ces données démontrent que beaucoup de serpens ne
préfèrent tel ou tel lieu , que parce qu'il leur offre de quoi
subsister, ou parce qu'il réunit toutes les conditions nécessai-
res à leur existence: aussi, voit-on souvent les serpens
déserter le lieu ordinaire de leur liabitation, dès qu'il cesse
de leur fournir les moyens de subsistance. Il est vrai que ce
fait peut être appliqué, avec plus ou moins de modifications,
à tous les animaux; mais avec cette différence, que les reptiles,
attachés au lieu qui les a vu naître , ne savent pas entrepren-
dre ces migrations lointaines qui excitent notre admiration
chez les oiseaux etchezplusieurs mammifères. Le plus souvent,
les serpens terrestres ne s'éloignent qu'à de très petites dis-
tances de l'endroit où ils se sont établis , et on les trouve
i^resque toujours si proches de leur habitation, qu'ils peuvent
la gagner à l'approche du moindre danger.
Beaucoup de serpens vivent en société, et il paraît qu'ils
ne se font mutuellement aucun mal: tels sont la plupart des
espèces aquatiques, plusieurs Couleuvres et notamment les
serpens pélagiens, qui se montrent quelquefois en bancs
immenses à la surface de l'Océan. Les venimeux terrestres , au
contraire, dont le nondjre des individus est infiniment plus
restreint, recherchent moins fréquemment la société de
leurs semblables, et se tiennent souvent isolés au milieu des
lieux solitaires qu'ils habitent.
Les serpens ont entre eux plusieurs rapports dans les
mœurs et dans les habitudes. Presque tous ont un naturel
stupide, timide et farouche; mais réduits à la domesticité, ils
contractent bientôt des mœurs assez douces, excepté toute-
fois les espèces venimeuses, dont le naturel farouche
empêche de changer leur caractère féroce. Cependant, il existe
des serpens tant venimeux qu'inoffensils, qui ne font presque
lïAniTODES. 95
jnmais usage de leurs armes pour se défendre contre leur
agresseur : tels sont parmi les premiers , les llydropliis et les
Elaps, parmi les deiniers plusieurs (Couleuvres , des Tropidono-
tes et d'autres. Cette facilité de s'apprivoiser est particulièrement
propre aux plus grandes espèces de la famille des 15oas qui ,
après avoir été pris, ne font jamais mal à qui qjic ce
soit (i). D autres espèces refusent de prendre aucune nourri-
ture, et deviennent les victimes de leur obstination ; mais il
paraît qu'au moyen d'un traitement conforme à leurs besoins,
on peut parvenir à rendre la captivité supportable à la plupart
de ces reptiles.
Les serpens venimeux proprement dits, les serpens
fouisseurs et plusieurs espèces d'autres genres, ont un natiue!
liés engourdi et tranquille: aussi , leurs mouvemens progres-
sifs sont-ils exécutés avec lenteur j mais la plupart des Ophi-
diens sont alertes et tous leurs mouvemens annoncent une
force et ur>e agilité extrêmes : on a cependant beaucoup
exagéré leur vitesse, qui n'est jamais assez considérable, pour
qu'un homme ne puisse facilement leur échapper.
Les serpens qui mènent une vie n octu r ne sont moins
nombreux que ceux qui préfèrent le grand jour aux
ténèbres : à la première catégorie appartiennent les Dipsas
proprement dits , plusieurs Ophidiens venimeux et d'autres;
mais beaucoup de serpens combinent les deux genres
(i) M. DiEPERiNK à Paramaribo inc mande, qu'il tient conlinucUe-
ment chez lui phisieurs Boas de diverses espèces, qui vivent en
parfaite harmonie enlre-eux et avec d'autres animaux domestiques. I-e
professeur Reinwardt, cependant, a été témoin, à.Tava , d'un speclaclc
qui prouve qu'il ne fant pas toujoiu'S se fier à ces animiuv:. Un
Javanais ayant apporté chez M' le baron van der capelle un grand
Python, et voulant le faire sortir du panier dans lequel il se trouvait,
le serpent, par un seul coup, lui fit une blessure assez considérable, en
lui enviant l'avant-bras dans tonte sa longueur.
96 HABIWDES
(lo vie, ci (liassent tantôt ou plein jnnr, tantôt pen-
dant la nuit, suivant leurs besoins; il faut ranger dans eelte
dernière eatèi^orie les espèees tjui offrent une pupille alon-
gée, soit vertiealenient , soit transversalement et cpii paraît
plus particulièienient propre à se dilater ou à se eontracter ,
suivant la niasse des rayons lumineux qu'il est besoin de faire
entrer dans la cavité de Tœil: dans Tobseurité, cette prunelle
ainsi configurée, se dilate de manière à ce qn'elle devient
tout-à-fait orbiculaire (i). La loi, établie par la plupart des
naturalistes, que les animaux à pupille alongée soient plus
spécialement nocturnes, est contredite par ces observa-
tions; il paraît plutôt que des yeux volumineux indiquent un
genre de vie nocturne, quoique plusieurs Klaps etdesNajas,
dont les yeux sont assez petits, vont chercher leur proie pen-
dant la nuit. Peut-être a-t-on tort , de vouloir appliquer ri-
goureusement cette règle à la manière de vivre des serpens, dont
un bon nombre passe une grande partie de son existence dans
une langueur ou un engourdissement comparable au som-
meil , et qui ne se dérangent que quand il s'approche d'eux
quelque être vivant dont ils s'emparent lorsqu il convient à
leur goût; tombant ensuite dans une léthargie plus profonde,
qui les rend quelquefois, pour un temps assez long, incapables
de se livrer à la chasse.
La plupart des ophidiens choisissent leur nourriture indif-
féremment parmi les trois premières classes des animaux ver-
tébrés ; les espèces aquatiques se nourrissent plus ou moins
exclusivement de poissons, selon que leur genre de vie les
lie à lélément humide; les espèces de petite taille enfin , et
notamment les terrestres et fouisseurs , font la chasse aux
insectes, aux mollusques, aux vers ou à d autres animaux des
classes inférieures; les serpens d arbre, enfin, paraissent
préférer les oiseaux, non pas parcecjue cette espèce de
(i) Voyez Hari.ak , >>;/. p. 369.
HAIUTCDKS Îi7
nourriture convienne mieux à l(;ur ^oût,mais parce qu'elle est
plus à leur portée.
Tout le monde sait que les serpens peuvent, comme les
autres reptiles, jeûner fort longtemps: un Boa constrictor,
envoyé de Surinam en Hollande, était plus de six mois sans
prendre la moindre nourriture; quelquefois ils sont plus
longtemps encore avant de mourir de faim.
On ignore si les serpens boivent et s'il est juste d'opiner
pour la négative: toutefois on n'a jamais aperçu de fluides dans
ceux dont on a examiné l'estomac.
Les changemens continuels qui s'opèrent dans notre at-
mosphère, influent plus ou moins puissamment sur les ophi-
diens. Amis de la chaleur , ils recherchent avidement les lieux
exposés aux rayons du soleil, tandis qu'ils restent cachés
dans les temps pluvieux, ou lorsqu'il fait du vent; a fapprr/che
dun orage, quand fatmosphere est surchargée d'électricit«,
on les voit souvent sortir de leur retraite, dans une agitation
qui n'est pas naturelle à leur race, et traverser les endroits
découverts. Ne pouvant supporter les effets du froid qui
leur ôte en même temps les moyens de subsistance, les
serpens se retirent, a l'approche de l'hiver, dans des asyles le
plus souvent souterrains et toujours garantis des intempéries
de la saison ; ce sont tantôt des terriers ou des amas de
pierres, tantôt des tas de fumier ou des creux d'arbre; c'est
là qu'on en voit souvent plusieurs dans un même lieu de
retraite, dans un engourdissement profond, jusqu'à ce
que les rayons vivifîans du soleil du printemps les raniment.
Tl est manifeste que la durée de ce sommeil périodique doit
être plus ou moins longue, suivant le climat que les serpens
habitent, et que , dans les régions ou règne un éternel prin-
temps, ces reptiles ne sont pas du tout sujets à passer un
certain temps de leur existence dans cette torpeur. Les
recherches des voyageurs ont démontré qu'il en est ainsi, et
néanmoins il y a des excepHions a cette règle, ce qui fait sup-
98 FABLES ET PREJUGES.
po^îer que c est le défaut de nourrituie qui cause cet engour-
dissement. M. von Humboldt (i) mande, d'après les rapports
des indigènes, que le Boa rativore , durant les longues pluies
qui inondent les immenses déserts de l'Amérique Méridionale,
demeure enseveli dans le sol argileux, jusqu'à ce que ce terrain,
desséché par les chaleurs auxquelles succède inmédiatement
le temps des pluies , se fend pour faire sortir le monstrueux
reptile, du tombeau qui le tenait enfermé. A Surinam, au
Brésil , et dans d'autres pays de l'Amérique Méridionale que ce
Boa habite également, il passe au contraire, de même que les
autres serpens, toute l'année dans une activité continuelle(2).
Chez nous et dans l'Amérique du Nord (3), les serpens se
retirent dans leur retraite hivernale vers le mois d'Octobre
environ, et reparaissent à la fin du mois de Mars ou en Avril;
pkis tôt ou plus tard selon le plus ou moins de durée de
l'hiver. Les épaisses couches de graisse dont leurs intestins
sont enveloppés en automne, s'absorbent en grande partie
lors de l'engourdissement, et il leur faut au printemps quel-
ques jours avant d'avoir acquis leurs forces. Un froid excessif
les fait périr, tandis que plusieurs belles journées consécutif
\'es suffisent souvent pour les faire sortir de leur retraite au
milieu de l'hiver.
C'est encore à l'ouvrage de M. Lenz (4) que nous ren-
voyons pour le récit détaillé des observations, que ce natura-
liste a fait pour connaître les effets qu'exerce fe froid sur
les reptiles.
FABLES ET PREJUGES.
Le serpent a joué un grand rôle dans l'an tiquité, et itîe
joue encore actuellement parmi la plupart des peuples bai'-
(i) AnsiclUtni I p. 36.' — ('^) Neuwied. Bcitr. p. ii. — (3) Pali-
sot-11eatîvais ap. Latr. JIH p. 70. -- (/4) p. ^r.
FABLES ET PRÉJUGÉS. 99
bares ou à demi- civilises. Des causes nombreuses ont donné
lieu à ce phénomène. L'homme , intimidé par l'aversion qu'il
a pour ces êtres et qui lui est en quelque sorte innée, n'est
parvenu que par l'expérience à savoir que seulement un
petit nombre de ces reptiles se font redouter par leurs quali-
tés malfaisantes, tandis que d'autres décèlent sous les mêmes
apparences trompeuses un caractère doux et innoffensif.
Mille propriétés diverses que successivement on a découvert
chez les serpens , ont ouvert à l'homme un vaste champ à
la méditation ; tout en fournissant ample matière à orner ses
idées religieuses , elles lui offraient le sujet d'un nombre infini
de mythes; il en emprunta des symboles , et finit par rendre
à ces êtres redoutés un culte , établi pour les motifs les plus
divers et les plus opposés. Il semble que c'est dans la nature
humaine de se servir précisément des mêmes animaux qui lui
sont nuisibles, pour se procurer les moyens de se préserver
du mal qu'ils peuvent lui causer : de là l'usage établi dès les
temps les plus reculés , de tirer des serpens les remèdes pour
se garantir contre leur morsure , tandis que de Vautre côté
on croyait apaiser leur fureur, en les révérant comme
des divinités. Les anciens , employant souvent les traits les
plus saillans des animaux pour leurs allégories , trouvaient
dans les habitudes des serpens, dans leurs qualités ou même
dans leur forme , un fond inépuisable pour faire travailler leur
imagination féconde, qui s'exalta sans cesse en embelissant ce
que l'observation de la nature leur avait appris. C'est à ces
tlifférentes causes et à des circonstances peut-être inconnues
aujourd'hui, qu'il faut attribuer, que le serpent inspirait à
l'homme à la fois la crainte , de la haine et de la vénéra-
tion.
On trouve dans les mythes de la plupart des anciens
peuples, des traces qui attestent que l'idée du serpent, comme
mauvais principe, fut établie dès l'origine des nations. C'est
ainsi (jue le serpent fut cause du premier péché et de la
100 FABLES ET PRÉJU(.ÉS.
chute de l'homme; mais Arimane , empriinlant la forme clan
serpent , cherche en vain de vaincre son antagoniste Oros-
made , qui représente le bon principe dans le dualisme des
anciens Perses.
On croit que les anciens Grecs choisissaient l'allégorie
d'un grand serpent, tué par les flèches d'Apollon pour repré-
senter les vapeurs pestiférées développées dans les fanges ma-
récageuses qui couvraient la terre après le déluge ou les inon-
dations annuelles, vapeurs que le soleil seul pouvait dissiper:
dès-lors ce serpent Python est devenu l'attribut d'Apollon et
de ses prêtresses à Delphes, et Ton s'en servit dans la suite
comme emblème à la Prévoyance et à la Devination. Des cir-
constances analogues ont peut-être donné lieu à la fable de
l'Hydre de Lerne, exterminée par les efforts d'Hercule et de son
compagnon Jolas. Chez les anciens Egyptiens, le serpent fut le
symbole de la Fertihté: ils représentaient sous la forme d'un
serpent, entouré d'un cercle ou entortillé autour d'un Globe,
le Cneph de leur Cosmogénie qui est le même que l'Amon
ou i'Agathodémon, l'esprit ou l'âme de la création , le prin-
cipe de tout qui anime, qui gouverne et qui éclaire le
Monde (i): Les prêtres de ce peuple gardaient, dans les
temples , des serpens vivans et , à leur mort on les enter-
rait dans ces sanctuaires de la superstition (2).
Emblème de la Prudence et de la Circonspection, le serpent
fut l'attribut constant d'Esculape , et l'on avait même pour ces
reptiles la vénération due au père ou dieu de la Médecine
(3): c'est de là que le serpent devint le symbole de la Méde-
cine et de la Magie. Les Ophites, sectaires chrétiens, établi-
rent vers le deuxième siècle de notre ère, un culte qui se
distinguait particulièrement de cehii des autres Gnostiques ,
(i) EusÈBE Prcd. E^'ang. 33; Horapollo cap. 1 , 1 Creutze»
Symh.l\. So'] et S2li. — (2) Elten 17, 5; Hérodote i\ 7/(. —
(3) Pausan. 1 , 0.6 — '*8.
FABLES ET PREJUGES. 101
cil ce qu'ils ailoraieiit un serpent vivant ; se conformant ainsi
aux anciennes traditions de leur croyance;, ils regardaient cet
animal comme riniage delà Sagesse et des émotions sensuelles
qu'elle éveille (i). Les monumens des Mexicains, des Japonais
et de plusieurs autres peuples qui doivent la base de leur civi-
lisation aux anciens habitans de l'Asie, attestent que le ser-
pent joue également dans leurs mystères religieux un rôle
plus ou moins important; mais le temps et les relations qui
existent entre ces peuples et les Européens , ont en partie
aboli ces usages, et ce n'est aujourd'hui que chez quelques
tribus nègres et la côte occidentale de l'Afrique, que le ser-
pent figure parmi les divinités du premier rang (2).
Il n'entre point dans le pkn de mon ouvrage d'expliquer
ou même de rapporter les allégories nombreuses que
représentait chez les anciens le serpent: tout le monde
sait qu'on en armait les mains de la Discorde, ainsi que le
fouet des Furies^ et que la tête des Euménides en était hérisséej
l'image de deux serpens qui s'entortillent autour du Caducée
deMercure est d'une éloquence insinuante; le cercle que forme
un serpent qui se mord la queue, n'ayant ni commencement ni
fin, fut choisi pour le symbole de l'Eternité; la promptitude
des mouvemens uniformément répétés pour exécuter la mar-
che progressive devint celui de la vitesse du temps et de la
succession infinie des siècles ; les fables, enfin, d'Achéiaus, de
Jupiter métamorphosé en serpent pour captiver l'objet de
ses amours et maintes autres attestent que les anciens attri-
buaient au serpent les quaUtés les plus opposées, et que
le même être réunissait suivant eux , à la fois, la force et la
timidité, la beauté et des formes qui inspirent delhorreuv , la
douceur, la ruse ou la fraude.
On doit attribuer à de causes send)lables à celles que nous
(1) MosnKiM Cc.sch d. Sch/tinf(cnhr. p. i. (i) Voii^ noUe aiiide
du Pvlhon à deux laies.
102 FABT.ES ET PREJUGES.
venons de ciler, à cette superstition, apannge de la nature
humaine, ces innombrables erreurs qui défigurent jusqu'à
nos jours l'histoire des serpens. Un grand nombre de ces
fables, inventées dans Tenfance du genre humain et transmises
à la postérité par les auteurs classiques, se sont répandues au
point de devenir populaires, vu l'autorité que l'on ne cesse
d'accorder à ces écrivains. Pour prouver cette assertion , il
suffit de rappeler que plusieurs écrivains modernes ont répété
dans leurs ouvrages, que les cochons tuent les serpens pour
les manger, et que les serpens font du lait un grand délice:
erreurs qui datent des temps d'ARisTOTE (i)et dePLiNE(2) ,
mais propagées de l'Europe en Amérique et dans les autres
parties du monde. On lit dans les mêmes auteurs (3) que la
Mangouste, pour se mettre à l'abri des morsures des serpens,
se cuirasse de limon, et qu'elle mange d'une certaine herbe
que ces reptiles ont en aversion : ce préjugé , qui repose sur
le simple fait que les petits mammifères dont nous venons de
parler, ainsi que beaucoup d'autres, sont les ennemis naturels
des serpens , s'est conservé dans beaucoup de contrées des
Indes Orientales. La plante , qui doit posséder la vertu de
repousser les serpens , ou de servir comme antidote contre
leur morsure, est suivant Kaempfer (4) l'Ophiorhiza mungoz;
selon d'autres l'Aristolochia indica , dont les jongleurs de ces
contrées prétendent se servir avec succès : cependant les ex-
périences de RussEL (5) ont démontré , que toutes ces don-
nées reposent sur des préjugés populaires. 11 en est de
même des prétendues effets de l'emploi du Polygala se-
neca (6), plante célèbre chez plusieurs peuples de l'Amérique
Septentrionale , tandis que d'autres nations sauvages la
rejettent , pour se servir de plantes des genres Prenantes ,
(ij HLst. an. 9. 1. — (2) Hist. nat. 8. 14. — (3) Arist. g. 7; Plin,
8, 3G. — (4) -^tnœii, exot. [p. 3o5 etsuîv. — (^) Serp. I p 86. —
(6) Palisot Rauv. ap. Latr. III p, 90. et suiv.
lAliLliS ET PREJUGES. KM
Ijiu luca , Meliaiitlius , Spiraea , etc. , dont l'eflicacité , coiimii'
remède contre le venin, est aussi peu constatée que celle des
précédentes. Des voyageurs njodernes et de grande autoritéont
fourni des faits curieux relatifs à une plante (i), à hupielle
les hahitans de la Colombie attribuent les mêmes qualités
' que ceux des Indes à lAristoloche ; mais il serait à désirer ,
que ces expériences fussent répétées par des personnes, aux-
quelles la nature des serpens est familière. Il sera superflu de
rapporter tout ce que les Anciens ont inventé à l'égard des
antidotes innombrables dont ils vantent le plus ou moins
d'efficacité : en consultant les passages de Pline , que nous
allons citer (2) , on verra que les anciens recommandent
indifférement, à cet effet, les productions les plus hétérogènes;
mais que les essais qu'ils ont faits ne sont que le résultat
d'un empirisine grossier. Des charlataneries de cette nature
s'exercent encore aux Grandes Indes et à Geylan , où l'on
vend des pastilles et des pillules de diverses espèces, compo-
sées arbitrairement de substances des règnes animal , véofétal
et minéral , et qui n'agissent que sur l'imagination du
malade (3).
Nous avons dit plus haut que l'usage de tirer des ser-
pens même les remèdes contre leur morsure , date des
plus anciens temps: Antonius , médecin d'Auguste em-
ployait les vipères dans plusieurs maladies (4); mais ce n'est
que sous l'empereur Néron , lorsque le médecin Andromaque
de Crête (5) inventa la Thériaque, que cette pratique?
devint générale. Cette thériaque est une composition arbitraire
d'un grand nombre de médicamens hétérogènes , que l'on
employa dans la suite dans les maladies les plus diverses; on
( i) PUintes èqainox. 1. PL lof). — (a) ///.'A na/. -28, i'Z ; •nj , i5,
17. 9,0 , -J.^ , 22 , 25 , 'iG; 32, 17 el ii) etc. — (')} R.11SSKI, / j). 7/1 et
suiv. ; Da\y. Ceylon. p. 100. - ^ 4) Pr.JN. »o, 3y. - (5) (ijk (iAi.E-\.
I^e nntidolis lif>. i , cnp- (>.
1 04 FABLES ET PRÉ J CJGÉS.
en confectionna au moyen âge dans presque toutes le.§
villes de l'Europe, particulièrement de l'Europe Méridionale:^
aujourd'hui la pratique de faire entrer le serpent dans la
composition de ce médicament ne s'est conservée qu'en
Italie, où la Thériaque se fait dans. plusieurs endroits. En
Sicile, on n'en prépare qu'à Palerme. Celle de Venise est
très célèbre : on y emploie des milliers de Vipère aspic,
assez commune dans les environs de cette ville (i). La
grande fabrique de Thériaque qui existe dans Naples , sous
la protection du Gouvernement, est l'entreprise de par-
ticuliers, à la tête desquels se trouve le savant professeur
Délie Chiaje ; on y emploie indifférement toutes les espèces
de serpens, quoiqu'on préfère les vipères que des paysans
appelés Vipériers , apportent vivantes dans des paniers.
M. von Siebold m'assure que l'on emploie fréquemment
une espèce de Thériaque en Chine et au Japon ; les habitans
des îles Lioukiou, tirent des médicamens de l'Hydrophis
eolubrin ; et à l'île de Banka , les Chinois (2) estiment la bile
des grands Pythons comme un remède précieux contre plu-
sieurs maladies. Je passe sous silence l'usage que l'on faisait
dans le moyen âge des diverses parties du serpent , dont on
attribuait à chacune des qualités salutaires ; de nos jours, on
y a entièrement renoncé.
Ce n'est que dans les temps récens que Ton a fait des expé-
riences sur les effets de la morsure des serpens, expériences
que nous avons rapportées dans un autre lieu ; les anciens,
comme le font encore beaucoup de personnes, réputaient
venimeux indifféremment toutes les espèces de serpens; ils
plaçaient le siège de l'arme dangereuse dans la langue ou
dans la pointe de la queue, et attribuaient à la morsure de
chacune des espèces, selon leur fantaisie, des suites diverse-
(i) Noie manuscrite communiquée par feu le docl. Mïchahelles.
(2) Olivier Lund en Zet'togten II p, /»47.
FABLES ET PREJUGES. 105
ment fâcheuses (i). La civilisation n'a pu déiruire ces
erreurs ,et l'on est étonné He les entendre répéicr par des per
sonnes instruites; de voir reproduit, dans plusieurs ouvrages,
le conte des trois fds d'un colonisle, niorls successivement et
à de longs intervalles d'une blessure que leur aurait cau-
sée la dent d'un Crotale resté dans uîie des bottes de leur
père, qui avait péri de la première morsure : conte que les
habitans de Surinam, aussi bien que ceux des Etats-Unis, se
plaisent à répéter aux étrangers comme s'étant passé dans
leur pays; on est étonné d'entendre parler d'un serpent de
mer de forme et de taille monstrueuses (2) , de Boas de 4^ à
5o pieds de longueur qui attaquent les hommes, les boeufs, les
tigres , les avalant en entier après les avoir enduits d'une
bave écumante (3): absurdités qui rappelent ces fables de
monstres ailés, de dragons dont la Mythol'jgie des anciens
habitans de l'Asie nous a conservé la mémoire, et dont
l'imagination bizarre des Chinois a multiplié les formes. Que
dire lorsqu'on lit, dans des ouvrages ujodernes et de grande
réputation, la description des effets merveilleux, produits
sur les serpens par la musique; lorsque des voyageurs, hom-
mes de talens , nous racontent avoir vu des serpenteaux se
retirer dans la gueule de leur mère chaque fois qu'il se pré-
sentait quelque danger. Malheureusement les naturalistes , en
rangeant ces fables au nombre des faits, en ont souvent
embelli le récit, ce qui a contribué à les accréditer univer-
sellement. Qui, par exemple, ne serait pas frappé de la
description que La treille et Lacépède ont faite des habitudes
du Boa et des autres serpens de grande taille! combien de
qualités ces savans n'attribuent-ils pas à ces êtres , qui n'ont
jamais existé que dans leur imagination ?
Il n'est guère personne qui n'ait entendu parler du pré-
(i) Voir: Lucan, PAars. c). c^'^'j su'w. ell^icx-^Dv.R fie T/ieriacis. —
{2) Voir noire aiiide nydrophis. -- (^) Voir iiolro arlicle Boa.
106 FABLES ET PRÉJUGÉS.
tendu pouvoir magique que doivent exercer les serpeiis sur
les petits animaux, lorsqu'ils veulent s'en rendre maîtres; il
y a peu d'ouvrages d'histoire naturelle, où l'on n'ait pas traité
de ce phénomène, contredit par plusieurs, défendu par d'au-
tres, sans que l'on ait pu arriver à un résultat satisfaisant. Je
ne répéterai poir7t ici les absurdités que les voyageurs ont
écrites à cet égard , et qui sont quelquefois extrêmement cu-
rieuses (i); il suffit de dire que ces contes, dont on trouve des
traces chez plusieurs auteurs classiques (2), sont particulière-
ment en vogue dans l'Amérique du Nord, tandis qu'on les ignore
dans Jes Indes Orientales et en Europe , contrées riches en
serpens de toute espèce. Cette observation est trop curieuse,
pour ne pas mériter quelque attention, vu qu'elle prouve com-
bien un fiiit vrai ou supposé peut se répandre au point de
devenir populaire. Plusieurs causes peuvent avoir donné lieu
à l'origine de ce prétendu pouvoir de fascination des
serpens. Il est vrai que la plupart des animaux paraissent
absolument ignorer le danger qui les menace, lorsqu'ils se
trouvent en société d'ennemis aussi cruels que les serpens ;
on les voit souvent marcher sur le corps de ces reptiles , les
piquer à la tête, les ronger, où se coucher familièrement à
leur côt^; mais aussi ne saurait-on nier qu'un animal , surpris
à l'improviste, attaqué d'un adversaire aussi redoutable,
voyant son attitude menaçante, ces mouvemens exécutés
avec tant de promptitude , ne soit saisi d'une frayeur qui le
prive pour le premier moment de ses facultés , et le rend
incapable d'éviter le coup fatal , exécuté à l'instant même où
il se voyait assailli. M. Barton-Stnith , dans un Mémoire,
composé expressément pour réfuter tout ce que l'on a avancé
sur la faculté de fascination des serpens à sonnettes, rapporte
plusieurs faits qui prouvent que les oiseaux ne se montrent
(1) Voir Lf.vaili. ■>. /'or. /'/\ ^H; Barrow, /j 1/6; — ^ r^) A.f,lia>
2, i\ ; PoMP. Mkla 1, 19.
FABLES ET PREJUGES. 107
effrayés, que lorsque les serpens s'appiochent de leurs nuls,
pour s'emparer de leur progéniture; c'est alors qu'on voit les
parens effrayés voler autour (1(^ leur ennemi, en poussant des
cris plaintifs , absolument connue font nos fauvettes, quand
quelqu'un s'arrête dans le voisinage de leur nid. Il se peut
également que les' animaux qu'on prétend avoir vu sauter
autour du serpent et enfin tomber dans sa gueule, aient
déjà auparavant été atteint de la dent meurtrière , ce qui
coïncide parfaitement avec îa manière dont les serpens
venimeux proprement dits s'emparent de leur proie. Plu-
sieurs serpens d'arbre saisissent leur proie , en entortillant
leur queue déliée autour du cou de leur victime : Dampier (i)
a été plusieurs fois témoin de ce spectacle: voyant un oiseau,
battant des ailes et faisant entendre des cris, sans qu'il
s'envolât , ce voyageur ne s'aperçut que le pauvre animal
était étreint dans les replis d'un serpent , que lorsqu'il voulut
le prendre de la main. Russel (2), présentant un jour une
poule à un Dipsas , cet oiseau donnait au bout de peu de temps
les signes de mort; ne concevant pas comment la morsure
d'un serpent non venimeux et de si petite taille pût produire
de pareils effets, il examina soigneusement la poule, et
trouva que c'étaient les étreintes de la queue du serpent
autour du cou de la poule, qui l'eussent fait périr ,
s'il n'avait pas eu le soin de la dégager. Plusieurs oiseaux
de petite taille ont la coutume de poursuivre les oiseaux de
proie et d'autres ennemis de leur race , ou de voler autour
du lieu, où l'objet de leur haine se tient caché: on a lieu de
croire que ce phénomène , connu en Europe de tout le
monde, ait aussi lieu dans les contrées exotiques, et peut-
être est-ce encore un de ceux qui ont contribué a l'invention
des contes que l'on a débités sur le pouvoir de fascination
des serpens.
(1) f'oyage fil p. i-j'-i. — ^j) llussiiL T p. 20.
108 FABLES ET PREJUGES.
Mais j'ai déjà trop longtemps entrave la marche de mon
ouvrage, en exposant les nombreuses erreurs dont on a
défiguré une des plus belles parties des sciences naturelles, et
je crois devoir ornmettre les fables du Basilic, de serpens
bâtards produits par la copulation d'anguilles et de serpens,
et maintes autres aussi étranges qu'absurdes, mais qui sont
encore accréditées chez beaucoup de monde. Cependant,
avant de terminer cette partie de mon travail , je parlerai du
pouvoir magique que certaines personnes prétendent savoir
exercer sur les serpens. Ce prétendu art, qui a fait de tout
temps et chez plusieurs peuples , l'occupation d une caste
particulière, consiste en certains jeux que les serpens exécu-
tent au gré des bateleurs, qui les dressent expressément
à cette fm : comme l'on emploie plus spécialement le Naja à
lunettes et le INaja haje , nous avons déjà rapporté, dans ces
deux articles , la manière dont on se sert des serpens dans
ces jeux.
Ces bateleurs existent aujourd'hui aux Grandes Indes et en
l'Egypte (i); ceux du dernier pays se vantent être les descen-
dans des Psylles (2), tribu habitant l'ancienne Libye et les
Indes, et célèbres par leurs connaissances dans l'art de guérir
les morsures des serpens , et de s'en garantir eux-mêmes. Un
autre peuple , moins connu et habitant l'Italie , étaient les
Marses (3) ; on sait encore moins relativement aux Ophigènes ,
dont la patrie était la Grèce (4).
Parmi les peuples les plus civilisés de l'Europe, les person-
nes qui prétendent posséder l'art de fasciner les serpens se
rencontrent assez rarement : ce sont le plus souvent des
(i) Geoffr. De.scr. de l'Éî^ypte XXlV p. 88. — (2) Plin. 7 2;
Aelian. 16, 37; 17 , 27 ; LucAN. 9, 891 ; consultez aussi la disser-
tation de M. Spalding, intitulée « IJber die Zauberei durch Schlangen ,
et insérée dans les Mémoires de ï Académie de Berlin i8o/j — 1 i ; clasae
historico-philolo^iiquc p. y et suiv. — (3) Yirg. Jeu. 7 , 750; Sil.
ÏTAT, 8, /,y5. — (4) Plin. 7 , 2j Aeman. 12, 39.
HISTOIRE DE L'OPHIOLOGIE. 109
charlatans igiiorans, qui en imposent au bas peuple, cherchant
à l'effrayer en jouant familièrement avec les serpens , dorit ils
ne connaissent souvent que les espèces non -venimeuses.
M. Lenz a consigné dans son ouvrage (i) l'histoire et la fin
tragique d'un de ces prétendus sorciers, qui paya de sa
vie une témérité fondée sur l'ignorance absolue de la nature
des vipères.
HISTOIRE DE L'OPHIOLOGIE.
En traçant dans les pages suivantes un tableau succinct de
l'histoire de l'ophiologie, nous nous bornerons à faire con-
naître seulement les principaux auteurs qui ont plus particu-
lièrement contribués aux progrès de cette partie de l'histoire
naturelle, considérée comme science.
Les premiers renseignemens de cette nature se trouvent
dans le précieux ouvrage que nous a laissé Aristote : il
résulte de ses observations, que ce grand homme a fait des
recherches assez exactes sur la nature des serpens et sur leur
anatomie(2); mais malheureusement son livre est défiguré
par plusieurs préjugés , en vogue de son temps et qu'il rap-
porte de bonne foi: cet auieur ne s'occupe point à énumé-
rer les espèces, et ne parle que vaguement de l'Aspic , de la
Vipère et des serpens en général.
La grande compilation de Pline est beaucoup plus riche en
faits curieux, maiserronnés, que le travail du philosophe grec
dont nous venons de parler ; il omet la plupart des détails
anatomiques fournis par Aristote, mais il fait mention des
principales espèces , connues à cette époque, et prouve par sa
(i) Pa^. 192 suiv. — (2) 2, 12; 4, iï; 5, 3; 5, a8 ; 87
37 et 19 , etc.
ÏÎO HISTOIRE DE L'OPHIOI.OGIE.
ciesoription des crochets de la Vipère (i) que le véritable
siéfife de l'orsane venimeux n'était pas ig^noré des anciens.
Do 1 O
Élien surpasse encore son prédécesseur par le grand nom-
bre d'erreurs qu'il rapporte à l'égard des moeurs des serpens,
dont il décriv plusieurs espèces , le plus souvent d'après ses
devanciers.
D'autres écrivains classiques, tels que Nicandre, Virgile,
LucAiN, etc., parlent dans leurs ouvrages plus ou moins direc-
tement des serpens, de leurs qualités, des effets de leur
morsure ; mais ces productions poétiques ont peu contribué
à avancer la connaissance d'animaux, dont les anciens ont
ignoré les véritables propriétés.
Les Grecs comprenaient indifféremment tous les serpens
sous les dénominations universelles de dganoor et ôocptGj
dérivées des verbes, i^iQueiv et onreiv ^ qui signifient toutes
deux: voir. La première de ces dénominations a été adoptée
par les Latins, mais ce peuple se servait en outre des noms
généraux, (Ccmgids et de serpens^ pour désigner les ophi-
diens. Le mot allemand Schiange de schlingen a une étymologie
analogue au latin serpens , de serpere , dont les Français
ont fait leurs mots serpent et serpenter. Plusieurs autres
noms, en usage chez les anciens, paraissent avoir été
appliqués assez "vaguement , quoique dans un sens très
étendu : Élien [p.) par exemple énumère seize espèces d'as-
pics , tandis qu'il résulte de passages d'autres écrivains (3) ,
que l'Aspic par excellence était le Naja haje. Il n'est guère
possible de déterminer au juste les espèces d'ophidiens
connus des anciens, vu les descriptions incomplètes qu'ils
en ont fourni : aussi n'est-ce qu'en hésitant que je hasaide
des conjectures à cet égard. Les voici : les moeurs que
(i) /. c, II, 6?.. — (2) /. c. 10, 3i. — (3) NiCâNDET. in
Thcriac.^ Luî^an. 9, 695; Pmn. 8, 35.
HISTOIRE DE L'OPHIOI.OGIE. 111
Pline i^i) <-'t Élieii (2) aLlribii<^iiLaii J ac u 1 u s, coïncident par-
faitement avec ceux du Cokiber llavolineatus ; l'A m phi s-
baena (3) de ces auteurs est probablement identique avec
notre Éryx j letymologie du mot Céraste (1) prouve que
c'est encore le même serpent , que nous connaissons sous ce
nom ; Cuvier a supposé avec raison , que le Bo a de Pline (5)
n'est qu'une grande Couleuvre d'Italie , probablement le
Col. quaterradiatus; j'ai lieu de croire que notre Vipera
Ecliis, dont la tête est souvent ornée d'une tache blanche , a
servi de type au Basilic de la Cyrenaique, décrit par
Pline (6); il se peut que l' Hy d re (7) du naturaliste romain
repose sur notre Tropidonote à collier, mais Elien (8) décrit
incontestablement sous ce même nom des serpens de mer;
les Dipsas; enfin, les Paria et d'autres serpens, dont
les auteurs classiques font mention , sont trop vaguement
indiqués , pour être rapportés à leur type.
Ceux, qui cherchent à s'instruire plus en détail sur les
connaissances que les anciens ont eues des serpens, n'ont
quà consulter l'ouvrage du savant Gessner, qui a en outre
réuni dans son travail toutes les fables que l'on a écrites à l'égard
de ces êtres dans le moyen âge. Nous omettons ces renseigne-
mens, de très peu d'intérêt réel pour la science, qui ne
pouvait non plus acquérir de la solidité par des travaux tels
que ceux d'Ai^DROvANDE et de Jonston, compilations faites
sans goût et sans génie, et dans lesquelles on voit répétés soit
les innombrables erreurs de leurs devanciers, soit les pré-
jugés qui ont défiguré l'histoire de l'ophiologie, soit même
la description de ces êtres chimériques , appelés D r a c o n s ,
que ces érudits n'ont pas laissé d'illustrer par des figures.
Ray fut le premier, qui essaya de donner une espèce de
(ij /, /. 8, 35. — (2) /.c. 6, 18 et 8, i3 — (3) Plin. 8, 35;
Elien 9 , 23. — (4) Plin. 8 , 35. — (5)8, i4. - (6)8,23.—
(7) /. r. 29, 22. — (8) /. c. 16, 8.
112 HISTOIRE DE LOPHIOLOGIE.
classification des serpens; mais son système, fdnclé sur une
base peu solide, est abandonné depuis longtemps. Ce n'était
que dans le siècle suivant, que parut l'histoire naturelle des
serpens de son compatriote Owen, livre écrit sans critique
et qui fourmille de récits erronnés et fabuleux.
Plusieurs iconographes se sont signalés dans cette période
par la publication de recueils, contenant des figures d'histoire
naturelle plus exactes que n'en avaient fournies jusqu'alors
leurs prédécesseurs. Il convient de citer en premier lieu
ScHEucHZER, qui a donné dans un ouvrage volumineux et
d'une nature hétérogène un bon nombre de portraits de
serpens en noir, dont la plupart, quoique médiocres, sont
assez reconnaissables. Sera, qui a surpassé tous les icono-
graphes par le grand nombre de figures que l'on doit à ses
soins, a représenté dans les deux premiers volumes de son
ouvrage, les serpens qui faisaient partie de son Musée, un
des plus riches de ce temps; plusieurs de ces portraits sont
très fidèlement rendus, d'autres sont passables, quelques-uns
assez mauvais; mais la plupart sont si bizarrement coloriés,
qu'il est très difficile de reconnaître l'animal qui a servi de
modèle. Cet auteur ne paraît avoir eu en vue que d'étaler
dans son ouvrage toute cette innombrable série d'objets qui
ornaient son cabinet: les figures s'y trouvent accumulées
sans choix et sans jugement; le même serpent y est souvent
représenté jusqu'à dix fois et davantage, et ces différens
portraits d'un même animal offrent quelquefois très-peu
de ressemblance^ vu que l'artiste a su défigurer chacun
d'eux. Le te3>te qui accompagne ces planches , fourmille
d'erreurs et de fausses données par rapport à la patrie
des animaux et aux noms de pays: on voit à l'évidence
que Seba n'a fait que rapporter les récits des marins, dont
l'avidité inventait des mensonges, pour profiter de sa cré-
dulité. Au lieu do tracer en peu de mots les caractères essen-
tiels des animaux figurés, cet ifonographe s'arrête souvent
lïISTOlUK DE L'OPHIOLOGIE. 113
à la description cVuri petit point, d'une tache ou de quelque
autre trait insij^nifiant, ce qui rend son texte explicatif
absolument inutile. Cependant, ce recueil immense a fourni
matière à beaucoup de naturalistes; il a été jusqu'à nos jours
une riche mine que l'on ne cesse de fouiller et dont plu-
sieurs savans ont puisé ces connaissances qu'ils ont ensuite
mises à profit , pour composer des ouvrages.
L'histoire naturelle de la Floride, publiée par Catesby, à
peu près dans la même période, est encore très utile pour
connaître les productions de cette contrée, qui depuis n'a
été explorée, sous ce rapport, par aucun voyageur: les figures
qu'elle contient sont pour la plupart passables, mais plu-
sieurs d'entre elles sont rendues avec fort peu d'exactitude.
Un bon nombre de figures de serpens, assez reconnaissables,
se trouvent dans le Muséum du prince Adolphe-Frédéric,
ouvrage publié par Linné, et qui a paru avant les der-
nières éditions du Systenia naturae; l'auteur cite lui-même
un second volume de ce travail, et a été suivi à cet égard
par ses successeurs, quoique ce volume ne soit jamais par-
venu à la connaissance du public. C'est à ce grand homme,
inventeur de la méthode dichotomique, que l'on doit la
première ébauche d'une véritable classification des ophi-
diens (i); chez lui, ces êtres forment la seconde tribu de la
classe des Reptiles, qu'il caractérise ainsi: serpentes apodes ^
spirantes ore. Les six genres, établis par lui, reposent sur
des caractères empruntés de l'organisation des tégumens
généraux. Abstraction faite des Amphisbènes et des Céciles,
qui font partie chez Linné de la famille des ophidiens, il ne
reste que les genres Crotale, Boa, Coluber et Anguis,
distribués d'après la forme des plaques du dessous du corps;
le premier genre comprend tous ces serpens, qui ont la
queue munie d'un appareil bruyant, connus sous le nom de
(i) Syst. nat. XTI p. 347.
8
1 I \ HISTOIRE DE L'OPHIOLOGIE.
soîiîictles; les Boas ne se disLingiient des Couleuvres que pur
les plaqeuîs souscautlales entières; les Anguis enfin offrent,
en dessous, des plaques semblables aux écailles des autres
parties. Il est évident qu'une méthode, basée sur des carac-
tères aussi fugitifs que ceux dont se servait Linné pour la
sienne, devait être en o])position avec la nature; aussi, toutes
les affinités naturelles qui lient les diverses espèces d'ophi-
diens , sont-elles rompues dans son Species; on y voit des
Trigonocéphales à côté des Boas; son genre Anguis comprend
a la fois des Scinques, des Tortrix, des Typhlops, des Hydro-
phis et rOphisaurus ; le reste des serpens est réparti dans
son genre Goluber, où figurent pele-mele des Vipères, des
!^ythons, des Calamars, des Najas, des Flomalapsis,des Dipsas,
des Dryiophis , etc.
Tous les successeurs de Linnoeus, ayant en quelque sorte
suivi sa méthode que, pour ainsi dire ils n'ont qu'étendue,
et, se laissant guider par les mêmes principes, il s'ensuivit
que l'on ne pouvait parvenir à établir un système naturel. Nous
verrons dans la suite à combien d'erreurs cette manière de
voir a donné lieu , et sur quelle fausse route elle a conduit.
Klein (i), le plus souvent guidé dans ses travaux par un
esprit d'opposition, a rangé parmi les serpens plusieurs anné-
lides et même des vers intestinaux; les vrais serpens se trou-
vent divisés chez lui en deux classes caractérisées d'après la
forme de la tête et de la queue: ceux où la tête est d'une
venue avec le tronc et qui ont la queue courte et arrondie,
forment les genres Amphisbène et Scytale; l'autre classe com-
prend les Kynodons ou serpens venimeux, dont il distingue
les Vipères, les Najas et les Crotales; les serpens non-veni-
meux , enfin , sont distribués dans les genres Ichthyodon ,
Lytaidon et Anodon, genres établis d'après la nature des
dents.
(t) Tentamen Herpetologiœ. Kônigsb. J755.
HISTOIRE DE L'OPHIOLOGIE. 1 1 5
On voit que cet auteur est le premier qui ait proposé de
séparer les serpens venimeux des non-venimeux ; ce n'est que
dans la suite que Gra^v (i) s'est expressément attaché à décou-
vrir des traits , pour caractériser ces deux, divisions : le résul-
tat de ses recherches est , qu'il n'y a d'autre moyen de recon-
naître les venimeux, que de s'assurer de la présence des
crochets: ce mémoire contient plusieurs bonnes observations
sur le système dentaire des serpens.
La grande réputation que s'est acquise Làurentius (2) en
publiant son Synopsis, n'est rien moins que méritée en sa
qualité de méthodiste. Son troisième ordre des Reptiles com-
prend les serpens qui se trouvent distribués dans les genres
Chalcides , Caecilia , Amphisbsena, Anguis, Natrix , Cérastes,
Coronella , Boa, Dipsas, Naja, Caudisona, Goluber , Vipera ,
Cobra, Aspis, Constrictor et Laticauda. Les nombreuses
espèces dont il a enrichi son tableau, ayant été en grande
partie établies et caractérisées d'après des figures de Seba,sont
pour la plupart purement nominales, comme on peut le voir
en analysant sf!S genres Naja, Boa et Constrictor j d'un autre
côté il suffit d'analyser ses genres Natrix , Cérastes et autres ,
pour se convaincre du peu de certitude qui règne dans ses
vues , relativement aux caractères qu'il établit pour désigner
ces coupes artificielles.
L'ordre des serpens, tel qu'il existe dans^Védition du système
de la nature, publiée par Gmelin (3) , ne diffère de celui de
son véritable auteur que par l'addition des espèces , décrites
jusqu'à cette époque par divers savans et voyageurs.
C'est à-peu-près à la même époque qu'a paru le travail (4)
de Datjbenton sur les reptiles , en forme de dictionnaire :
(i) PhiL Trans. w/. 79 P. 1 p. 21 suiv. — (2) Syn. Rept, Vienne
1768. — (3) LiNN. Syst. nat. ed, 13 cura Gmel. Lips, 1788. — (4) IJ
fait partie de VEncyclopédie méthodique dont le premier volume a
paru en 1782. —
IIG HISTOflU: DE L'OPHIOLOGIK.
travail rarement consulté, quoiqu'il ait servi de base à ceux
de Lacépède et de Bonnaterre (i).
Dans le grand ouvrage du comte de Lacépède , les serpens
composent un quatrième ordre de la classe des reptiles, opposé
aux trois premiers qui forment ceux des quadrupèdes ovipares à
queue, sans queue, et des bipèdes ovipares. En adoptant les six
genres de serpens inventés par Linné , le continuateur de But-
fou y a joint les Langahas et l'Acrocliorde, d'après les indica-
tions deBruguières et deHornstedt; car ce n'est qu'une quinzaine
d'années plus tard qu'ont été établis les genres Erpéton ,
Leioselasme, Disteire et Trimeresure. Ce travail se recom-
mande i»ar la beauté du style, poétique en beaucoup d'endroits,
(juoique les faits qui font la. base de ses raisonnemens ,
ne soient pas toujours conformes à la vérité; les descrip-
tions, plus étendues que celles de ses devanciers, pèchent
rarement contre l'exactitude, mais elles sont loin de suffire
à une détermination rigoureuse des espèces. Les figures qui
servent à illustrer cet ouvrage, sont médiocres et quelques-
unes même assez mauvaises.
Ce n'était qu'une dixaine d années après la publication de
l'histoire naturelle des reptiles de L'^cépède, qu'il en parut
une traduction allemande, de la plume du célèbre Bechstein;
ce savant dépourvu de connaissances dans cette paitie de la
science, a réuni dans cette traduction tout ce qui était connu
de son temps sur les reptiles, et a fait copier un grand nombre
de figures de Seba , de Russel , de Merrem et d'autres; j'ai
quelquefois cité celte compilation, dans laquelle Bechstein a
consiofné de très bonnes observations orio^inales sur les
ophidiens indigènes.
La classification des reptiles proposée en 1799 par M. Al.
Brongniart ('2) , est basée sur l'ensemble de forganisation et
^1) Encycl. mélhod, Paris 1802. — (2) Bidlelin de la .soc, philom,
3^ Année n.^ 35 et 36-
HISTOIRE DE L'OFHIOLOGIi:. M?
re])ose sur des principes trop solides poiu' ne pas èlie adoptée
parles naturalistes. (Vest à ce savant qu'on doit l'invention des
quatre ordres , tels qu'ils existent encore aujourd'hui; mais
comme il donne pour marques distinctives des ophidiens ;
point de pattes , corps alongé et cylindrique , il est évident
que ni les Anguis, ni les Céciles devaient être exclues de cet
ordre; Brongniart y a rangé, pour le reste , les genres adoptés
par Lacépède, toutefois en y joignant celui des Vipères qui
comprend plusieurs serpens venimeux.
Schneider, traitant les sciences natuielles en homme de
lettres, a créé les genres Hydrus, Pseudo-13oa et Elaps ,
pour y classer des serpens de nature assez hétérogène: on
voit figurer dans le premier, à côté des vrais Hydropliis ,
TAcrochorde et des Tropidonotes, tandis que les deux der-
niers genres offrent un mélange confus de serpens assez
distincts les uns des autres.
Il est difficile de comprendre pourquoi Latî\eille a pré-
féré à la classification de Brongniart , une méthode analooue
à celle de Lacépède. En parcourant le travail qu'il a puhlié,
et qui est orné de jolies figures en miniature, mais d'aucun
intérêt pour la science, on remarque que ce savant entomo-
logiste s'est presque uniquement servi , pour composer son
ouvrage, des matériaux fournis par Seba et par Lacéjjède , ainsi
que de quelques observations de voyageurs. 11 a cependant
étendu le cadre des genres, en créant ceux de Scytale, llété-
rodon , Plature , Hydrophis, Enhydrus , et en établissant des
subdivisions dans ceux de Couleuvre et de Vipère.
La seconde partie du troisième volume de la General
Zoologie de Shaw , publiée en 1802, contient la description
des serpens: ce travail n'offre de toute part qu'une compila-'
tion indigeste et stérile ; les espèces nouvelles que l'auteur fait
connaître sont en très petit nombre; il paraît que Shaw s'est
servi, pour les serpens de mer, des objets rapportés par
Russel.
.[18 HISTOIRE DE L'OPHIOLOGIE.
Le travail le plus complet qui ait paru sur les ophidiens
est celui de Daudin ; il fait partie de son histoire natu-
relle des reptiles, puhliée en 1802 et années suivantes.
L'auteur a suivi la méthode de Brongniart , mais on lui
doit rinvention de plusieurs genres: à l'exemple de Russel,
il a séparé les Pythons des Boas ; son genre Bongare n'a
subi jusqu'à ce jour aucun changement ; celui de Vipère
comprend chez lui la plupart des serpens venimeux propre-
ment dits; ses genres Lachesis , Hurriah , Eryx, etc., n'ont
été rejetés que par moi, tandis que d'autres, tels que ceux de
Coralle et Glothonie, n'ont jamais été adoptés par les natura-
listes. Les descriptions de Daudin sont le plus souvent assez
détaillées; mais comme il manque de connaissances solides
et élémentaires, et dominé par l'esprit de contradiction,
cet auteur, peu exercé à la critique, commet souvent des
erreurs assez graves. Les figures dont son ouvrage est orné ,
valent mieux que celles de Lacépède ; mais réduites dans de
trop petites proportions , la pliipart pèchent contre l'exacti-
tude. Daudin a mis à profit les nombreux matériaux , fournis
par les iconographies de P/Ierrem et de Russel , et publiées
en partie avant l'époque à laquelle il écrivit.
Le premier des ouvrages que nous venons de citer , les
Beltrâge de Merrem, contient des figures très reconnaissables
de serpens, accompagnées de bonnes descriptions. Le second
est le recueil le plus vaste et le plus riche , qui ait jamais
paru pour illustrer cette partie d'une faune qui traite des
ophidiens. Les portraits qu'il contient , principalement ceux
du second volume , sont pour la plupart très exacts , quoi-
qu'on puisse reprocher aux artistes , d'avoir souvent négligé
de faire usage des nombreux moyens que l'art moderne
offre , et dont les peintres français ont su si adroitement
tirer parti. On est redevable à Russel de plusieurs bonnes
observations sur les habitudes des serpens : les expériences ,
qu'il a faites sur les effets de la morsure de ces êtres ,
HISTOIKK OK J. OPaiOLOGlE. IID
mentent d'être citées: aussi ses successeurs oiii-ils eu suiii
d'en faire passer l'extrait dans leurs ouvrages.
De toutes les ligures qui ont paru jusqu'à ce jour sur
l'histoire naturelle des animaux , celles qui se trouvent dans
\e grand ouvrage sur V Egypte, sont sans contredit les plus
parfaites sous le rapport de la fidélité avec laquelle elles
représentent les objets. Le texte explicatif de ces planches
n'a été publié que très récemment , et encore n'embrasse-t-il
que la première partie; les o])jets, représentés par Savigny
dans le supplément, ayant été perdus.
Une nouvelle classification des reptiles , insérée d'abord
dans les Annales des sciences naturelles a été publiée sépa-
rément en 1811 à Munich. L'auteur, feu Oppel , s'écarte
sous beaucoup de rapports, de ses prédécesseurs. En adoptant
les quatre ordres établis par Brongniart , il y a apporté de
nombreuses modifications, en réunissant les Sauriens et les
Ophidiens comme subdivisions de son ordre Squamata, en
rangeant les Orvets parmi les Sauriens, et en plaçant, d'après
les indications de M. Duméril,les Géciles dans l'ordre des Batra-
ciens. Ce système, plus naturel qu'aucun autre publié par la
suite , n'a été goûté que de nos temps. On doit à feu Oppel
l'établissement de plusieurs genres assez naturels, tels que
Tortrix, Trigonocéphalus, Vipera, etc.; mais il a porté la
confusion dans le système en réunissant les Bongares sous la
dénomination générique de Pseudo-Boa, tandis qu'il applique
ce premier nom aux Dipsas. Les sept familles qu il a créées
pour subdiviser les ophidiens sont fondées sur un trop
petit nombre d'observations , pour être utiles de nos
temps: quelques-unes même sont très peu naturelles; par
exemple celle des Pseudo- vipères qui comprend les genres
Acrochorde et Erpéton; puis les Vipérins, où se trouvent
réunis les Vipères , les Bongares et les Najas, etc.
J'arrive maintenant aux travaux que Cuvier a faits sur les
serpens. i'ondés sur des observations cpi'il a d'abord insérées
120 HISTOIRE DE L'OPHIOLOGIE.
dans son Anatomie comparée, cet illustre savant a publié en
1817 une classification des ophidiens (i) , dont nous donne-
rons l'aperçu ; reproduite depuis dans la seconde édition du
livre qui la contient, on n'y a rien changé d'essentiel , sinon
qu'elle embrasse quelques genres de plus; c'est pourquoi
nous nous servirons , pour notre extrait , de ce dernier tra-
vail. Cuvier, ayant classé dans l'ordre des ophidiens tous les
reptiles apodes, il s'ensuit que des êtres d'une organisation
différente de celle des serpens, tels que les Anguis, les Pseu-
dopus , les Céciles en devaient faire partie. La première
famille, celle des Anguis, comprend les genres Anguis,
Pseudopus, Ophisaurus et Acontias. La seconde famille,
celle des vrais scupens, se trouve subdivisée en deux tribus:
celle des Doubles-marcheurs , qui contient les genres Amphis-
bène et Typhlops , et celle des serpens proprement dits qui ,
embrassant tout le reste des ophidiens , se divise de nouveau
ne coupes. Viennent d'abord les non-venimeux, distribués
dans les genres Tortrix, Boa , Coluber et Acrochordus, genres
que l'on pourrait très bien appeler familles, et dont la
plupart sont composés de plusieurs sous-genres peu naturels:
à côté des Boas figure le Scytale coronata, l'Eryx et l'Er-
péton ; parmi les Couleuvres sont confondus les Pythons ,
les Homalopsis(i) , le Xénopeitis, l'Hétérodon , les serpens
d'arbre et l'Oligodon. Les serpens venimeux sont 'divisés
en venimeux proprement dits , ou à crochets isolés et
en venimeux dont les armes dangereuses sont suivies de
plusieurs autres dents solides. La première de ces deux familles
est établie en faveur de celle des Crotales, des Trigonocé-
phales, des Vipères, des Najas, des Élaps , du Plature, du
Langaha, et de plusieurs autres sous-genres nouveaux, mais
de trop peu d'importance pour être nommés ici ; la deuxième
famille comprend les Bongares, les serpens de mer et J'Acro-
fi) Le lir^f/r animal, vol. JI.^ (2^ Ccmr Ccrbcrus, de M, Cuvier.
fllSlOUŒ DE L'OPHIOLOGIE. 121
cliordoïdc sous le nom de (Jhersydriis. LesCéciles, comme
troisième tribu , terminent l'ordre des ophidiens. En passant
de revue cette classification, nous nous bornons à observer
que Cuvier , attachant trop d'importance au système dentaire
des serpens et à la forme des plaques du dessous, s'est écarté
à beaucoup d égards du système naturel. Du moins , il me
semble qu'une réunion telle que des Hydrophis , des Bon-
gares et de l'Acrochordoïde ne peut convenir dans aucune
méthode, soit artificielle, soit naturelle. Comment se fait-il
que les Elaps et les Najas, ophidiens dont le maxillaire est
garni, outre les crochets , de dents solides, aient été rangés
parmi les serpens venimeux à crochets isolés ! Le Langaha
s'y trouve également, quoique ni ses formes , ni son organi-
sation n'offrent les moindres rapports avec les serpens veni-
meux. On voit dans ce système, les Boas, les Pythons et les
Acrochordes figurer dans quatre familles diverses. Le Scytale
couronné et l'Eryx font partie du genre Boa; les Uropeltis ,
(de véritables Typhlops) , se trouvent à la suite des Tortrix ,
tandis que le Xenopeltis en a été exclu , pour prendre place
parmi les Couleuvres. Ces observations suffiront pour faire
voir à combien d erreurs a donné lieu le principe de classer
les serpens d'après la conformation des plaques sous-caudales.
Outre les ouvrages de Lacépède , deLatreille et de Daudin ,
on ne possède d'énumération complète des espèces connues
de serpens que celle publiée en 1820 par Merrem(i). L'au-
teur, en adoptant les grandes divisions des ophidiens en
venimeux et innocens, a rangé la plupart des derniers dans
le genre Coluber, dénomination qu'il a changée très mal-à-
propos , en celle de Natrix; il termine la longue série de ces
êtres par le genre Dryinus. A la tête des serpens non-veni-
meux se trouvent rangés, dans l'ordre suivant, les autres
genres de cette famille: i ,) l'Acrochorde; a,) le Rhinopirus^
^i) Tentamen systernatis amphihionim.
122 HISTOIRE DE L'OPHIOLOGIE.
nom remplaçant celui d'Erpéton; 3) les Tortrix, mélange
clés genres Tortrix , Eryx , Typhlops , Acontias , etc. ; 4) l'Eryx;
5 et 6) les Boas et les Pythons, genres qui comprennent un
grand nombre d'espèces hétérogènes; y) les Scytale, mélange
confus, auxquels suivent les Hurriahs, réunion d'espèces
aussi insensée que le nom qui a servi pour les désigner.
Merrem a eu soin d'adopter, pour distribuer les serpens
venimeux ^ presque toutes les dénominations génériques ,
inventées par ses devanciers; il a multiplié leur nombre en
y ajoutant plusieurs nouvelles: son Sépédon est établi en fa-
veur de THémachate; ses Pélias embrassent une Vipère et un
Trigonocéphale; ses Echis reposent sur des Vipères, etc.; mais
ce savant a, sans la moindre nécessité , fait plusieurs chan-
gemens dans la nomenclature : telles sont l'introduction des
noms génériques d' Acanthophis , d'Echidna, deCophiaset de
Natrix remplaçant ceux anciennement /eçus d'Ophryas, de
Vipera, de Trigonocephaîus et de Coluber.
C'est à-peu-près de cette même époque que datent les tra-
vaux étendus que feu H. Boie a faits sur les reptiles. Ce natu-
raliste zélé et infatigable, en disposant des matériaux que lui
offraient la collection de serpens du musée des Pays-Bas, a
imaginé un grand nombre de coupes génériques, établies en
majeure partie aux dépens de celles déjà connues antérieu-
rement. La publication du grand ouvrage, dans lequel Boie a
déposé ses recherches, ayant été entravée jusqu'à ce jour, il
est arrivé que des extraits ont été communiqués à plusieurs
erpétologistes , qui se sont empressés d'adopter les vues de
feu Boie, avant que les travaux originaux aient pu parvenir à
la connaissance du pubhc. Ce n'était qu'en 1827 que M. Fr.
Boie de Kiel a communiqué l'aperçu des recherches de son
frère, enrichi de ses propres observations; voici les noms des
genres nouveaux d'ophidiens, consignés dans l'ouvrage de
feu Boie: Xenopeltis (Reinwardt) ; Brachyorrhos (Kuhl);
Lycoflon fBoie) ; Oligodon (Boie); Amblycephalus (Kuhl);
HISTOIUK DE L'OPHIOLOGIE. 123
Elapodis (Boie) ; Homalopsis (Kuhl) ; Xenodon (Boie) ; Tro-
pklonotus (Kuhl); Erpetodryas (Boie); Dendrophis (Boie);
Psammopliis (Boie) ; et Chrysopelea (Boie). La partie spéciale
de mon livre étant en quelque sorte basée sur les travaux de
Boie, on peut , en consultant le mémoire que je viens de citer,
voir en quoi mes vues diffèrent de celles de mon prédécesseur.
On vit paraître à la même époque plusieurs ouvrages
iconographiques, et des observations relatives à l'illustration
de la faune du Brésil , qui ont beaucoup contribué à l'éclaircis-
sement d'une des partie les plus embrouillées de la science.
Les travaux du Phiînce de Neuwied méritent d'être cités en
premier lieu; cet auguste voyageur étant presque le seul qui
ait fait des observations sur les habitudes des serpens exo-
tiques, son livre appartient au nombre des plus précieux qui
aient jamais paru sur l'Erpétologie: ses descriptions exactes,
quoique minutieuses, ne laissent pas d'être très utiles; les
planches qui servent à les illustrer , sont exécutées avec
soin , et représentent les objets avec exectitude. On regrette
de ne pouvoir attribuer les mêmes qualités à celles publiées
• par Waglepi d'après les sujets recueillis lors des voyages
de M. Spix: on voit introduit dans son livre, sous de nou-
veaux noms, les espèces les plus communes; la même espèce
se trouve quelquefois figurée sous plusieurs dénominations
diverses et même disposée en des genres différens; des
espèces recueillies en Espagne y sont décrites comme habi-
tant le Brésil; le nombre des genres a été augmenté sans
les moindres apparences de nécessité; on à arbitrairement
substitué de nouvelles dénominations génériques aux an-
ciennes; l'auteur, en surchargeant ses descriptions de détails
oiseux, les a rendues diffuses: en un mot, les défauts dont
fourmille cet ouvrage, ne sont guère compatibles avec l'os-
tentation déployée dans cette publication et dans des pb li-
cations analogues.
(i) Isis vol. XX p. 5o8 suiv. N
124 HISTOIRE DE L'OPHIOLOGIE.
La tendance de l'ouvrage de M. Fitzinger, étant de
distribuer les reptiles d'après leurs affinités naturelles, cet
erpétologiste a réuni aux sauriens les ophidiens, qui se trou-
vent divisés en plusieurs familles; les dénominations dont
il s'est servi pour désigner les nombreuses coupes génériques
qu'il a crées, sont en grande partie empruntées de la no-
menclature barbare de Seba ; une énumération des espèces
d'ophidiens faisant partie du Musée de Vienne et annexée à
son opuscule, peut servir à illustrer sa manière de voir. La
mienne s'en éloignant sous beaucoup d'égards, je rapporte
ici quelques faits épars de son livre, afin que l'on puisse s'en
servir comme point de comparaison : le genre Duberria de
M. Fitzinger, embrasse des espèces qui font partie chez nous
des genres Calamar, Goluber, Xenodon , Coronella, Naja et
Lycodon; on voit rangé' parmi ses Couleuvres, des Coronelles,
des Psammophis, des Lycodons, des Xénodons, des Herpé-
todryas, des Dipsas, des Tropidonotes et des Couleuvres
proprement dites; dans sa famille des Colubroïdes sont
réunis l'Acrochorde, des Hydrophis, l'Elrpéton, le Xéno-
peltis , enfin, tout le reste des serpens non-venimeux, a l'ex-
ception des Tortrix et des Boas; mais les deux familles subsé-
quentes contiennent chacune des serpens de mer, qui figurent
à côté des Vipères , ou Elaps et des Najas, genres éloignés l'un
de l'autre pour prendre place dans deux familles distinctes.
La nature du système, publié récemment par feu Wagler, s'op-
pose à toute analyse: toujours entraîné parla fougue d'une ima-
gination ardente, guidé souvent par des principes qui devaient
à jamais demeurer étrangers à la science, anticipant l'esprit
de son temps, ce laborieux zoologiste a créé un système
où sont accumulés pêle-mêle, les serpens venimeux avec les
innocens, les serpens de mer avec ceux de terre, les serpens
d'eau douce avec ceux qui habitent les arbres: un système ap-
puyé par d'amples mais ingér)ieux raisonnemens souvent forcés
et plus j)ji\isans que justes; système dans lequel il établit une
HISTOIKE DE L'OPHIOLOGIE. 125
foulede coupes nouvelleiiient inventées, dont le nombre seul
t'ait trembler la mémoire la plus heureuse. — Ce même écrivain
s'est rendu utile par la publication de planches erpétologiques.
11 me reste à parler de M. Lenz, qui a étudié, jusque dans
les moindres détails, les moeurs et les habitudes des serpens
indigènes. J'ai eu souvent recours aux observations classiques
de ce naturaliste, qui se trouvent consignées dans une espèce
d'histoire naturelle générale des serpens, écrite dans un style
populaire souvent diffus, mais qui décèle que l'auteur est plus
familier avec la littérature de cette partie de la science qu'avec
les objets mêmes.
J omets plusieurs autres tentatives faites par des anato-
mistes ou par des philosophes, pour établir des systèmes
naturels des serpens : il suffit de citer comme exemple des
essais d'un tel genre celui de M. Rietgen , inséré dans le £4'"^
-volume^ o}^^ partie pcig. 245 et sawantes des Transactions de
V Académie Léopoldine, Beaucoup d'autres savans, enfin, ont
contribué aux progrès de l'ophiologie en publiant des obser-
vations isolées. Des voyageurs ont enrichi leurs journaux
de nombreux faits épars, relatifs aux mœurs des serpens, dans
lesquels ils ont décrit des espèces inédites: à ce nombre appar-
tiennent Pallas, Hasselquist, Forskâl, Bruce, Bartram, Bosc,
Palisot de Bauvais , Paterson , Russel , M . Mérian , Marcgrav,
Mikan, Raddi, le prince deNeuwied,Spix, Say , Davy, White,
Lesson, Wiegmnnn et beaucoup d'autres que nous auronssoin
de citer en parlant de leurs ouvrages. D'autres naturalistes se
sont attachés à décrire ou àénumerer les ophidiens d'un certain
pays, ou de rassembler du moins des matériaux pour les
faunes des diverses contrées du globe. Outre les grands ouvra-
ges déjà mentionnés sur les Indes orientales, le Brésil , l'Améri-
que du Nord et sur l'Egypte, se distinguent particulièrement
sous ce rapport la monographie des serpens des environs de
Rome par Metaxa; de la Hongrie, publiée par Frivaldszky; de la
Suisse par Wyder; delaLithuanieparDiùmpelmann; de l'Italie
I2(> REVUE SYi% OPTIQUE.
par le Prince de Miisignanoj de l'Allemagne par Sturni; de lu
Hollande par van Lier , et de l'Amérique septentrionale par
Harlan. Plusieurs savans tels que Wolf, Meissner, Wagner y
Boie, Vosmaer, Fleischman, Boddaert , Gronovius, Bell, Grav,
Lichtenstein , Brandt et Batzeburg , et maints autres, ont
publié des observations détachées sur la nature des serpens,
ou ont étendu le cadre de nos connaissances, par les descrip-
tions qu'ils ont données de nouvelles espèces.
Il importe , enfin , de faire mention des travaux dont les
anat omis tes et les physiologistes ont, notamment dans
les temps récens , éclairé l'ophiologie. Les belles et nom-
breuses expériences , faites sur le venin de la Vipère , par
Redi , Charas et principalement par Fontana , et la descrip-
tion que ces savans ont donné des organes venimeux, sont
dignes de l'attention des naturalistes de tous les temps. De
célèbres anatomistes , tels que Guvier et Meckel ont exposé
dans leurs manuels zootomiques l'organisation des serpens ;
d'autres tels que Cloquet , Duvernoy, Mayer, Tiedemann ,
Schlemm, Windischmann , J. Mùller, etc., ont fourni des
dissertations intéressantes sur divers organes de ces êtres ,*
M. Herholdt a fait des recherches sur la physiologie de nos
espèces indigènes: une foule d'autres observateurs, enfin, dont
je rapporterai les noms à leurvplace, ont contribué à étendre
nos connaissances dans l'histoire naturelle des serpens.
REVUE SYNOPTîaUE.
Je viens maintenant à mon propre travail. J'ai déjà exposé,
dans ma préface, les motifs qui m'ont guidé, en donnant à
mon livre la forme sous laquelle il paraît. La partie générale
de mon ouvrage n'aura pas besoin de commentaire ; il ne me
reste par conséquent que de fournir dans les pages suivantes
le Synopsis de la partie spéciale.
UEVUE S\NOPTlQCi:. 127
J'ai conservé l'ancieiiiie division des serpens en noTi-
voninieux et en venimeux. Le caractère constant de
ces derniers est d'être pourvus d'une glande à structure cellu-
laire, sécrétant un fluide qui , apporté dans le corps animal, y
produit des effets délétères. Des dents maxillaires , beaucoup
plus lon<Tues que les autres , intérieurement creuses , munies
aux deux bouts d'ouvertures pour l'entrée et pour la sortie du
venin, et que l'on appelé crochets, sont les armes, au
moyen desquelles ces serpens infligent les blessures, et dans
lesquelles s'introduit en même temps le fluide destructeur. Il
^st très-difficile sinon impossible d'assigner aux serpens
venimeux des traits distinctifs extérieurs: plusieurs d'entre eux,
comme les serpens de mer se signalent par leur queue appla-
tie ; les serpens venimeux proprement dits ont quelque chose
de si particulier dans l'ensemble de leurs formes et dans leur
physionomie qu'il ne faut que peu d'expérience pour les
reconnaître au premier coup d'oeil : mais il n'en est pas ainsi
de cette famille de serpens venimeux, à laquelle j'ai donné
l'épithète de colubriformes : le plus grand nombre de ces
reptiles ressemblent tellement aux serpens innocens, que des
naturalistes même en ont confondu les deux races. Un museau
le plus souvent gros et arrondi, et une queue courte, grosse
et conique: voilà les seuls caractères extérieurs, peu tran-
chansà la vérité , que l'on peut assigner aux serpens venimeux
colubriformes. Les mœurs des serpens venimeux offrent plu-
sieurs autres traits pour les distinguer des non-venimeux, et
il convient avant tout de constater que ces premiers habitent
exclusivement ou la terre ou la mer , qu'ils ne grimpent pas
sur les arbres (i) , et qu'ils ne fréquentent jamais , peut-être à
l'exception de quelques espèces du genre Naja , les eaux.
(i) Les Trigonocéphales à teintes vertes font exception à cette règle,
en ce qu'ils ont l'habitude de s'accrocher avec leur queue prenante , aux
branches des arbustes , pour guetter leur proie.
V2H . REVUE SYNOPTIQUE.
En distribuant les serpens non -venimeux en familles
j'ai particulièrement eu en vue leur manière de vivre. Ces
coupes, auxquelles il ne faut attacher aucune importance,
sous le rapport de l'organisation, ont seulement été créées
dans le but de faciliter la revue des espèces. J'ai établi six
familles dans la grande division des serpens non venimeux.
La première famille comprend les Serpens fouis-
seurs ou le genre unique des Rouleaux: T ORTRIX. On
peut leur assigner comme marques distinctives: un corps
cylindrique, offrant presque sur toutes les parties du tronc
les mêmes dimensions; une queue courte et conique; une
tête petite, obtuse, d'une venue avec le tronc et revêtue de
plaques imparfaitement développées; de petits yeux; des
narines étroites; une gueule peu fendue; des caisses très-
ramassés; des dents courtes et coniques; enfin, une certaine
ressemblance dans l'ensemble des formes avec les Ampliis-
bènes, les Typhlops , etc. Les Rouleaux offrent souvent des
crochets à l'anus; ils habitent les contrées chaudes des deux
Mondes et se tiennent toujours à terre , où ils se creusent des
boyaux. On n'en connaît que cinq espèces. — J'ai placé à la têle
du genre jIctortrix scYTALEde Surinam , remarquable
par son tronc effilé, filiforme et annelé de noir et de rouge;
ses yeux sont placés au centre de la plaque oculaire; le tronçon
de la queue est assez obtus; il atteint quelquefois jusqu'à
3 pieds; plaques 225 -j- 12. — La deuxième espèce , le tor-
TRix RUFA vient de Java et de Gélèbes où il forme une
variété de climat reconnaissable à ses teintes foncées; plus
ramassée que la précédente, elle offre un tronc d'un brun
noirâtre irisé, orné de bandes transversales blanches qui
deviennent d'un beau rouge sur la tête et sur la queue; elle a
la queue très-courte et pointue; dimensions 2 pieds et demi,
plaques 195-}- 6. — L'île de Ceylan nourrit un Rouleau, le
TORTRix MACULAT A, Semblable sous beaucoup de rajjports
au précédent, mais qui s'en distingue, outre de petites
REVUE SYNOPTIQUE. 129
différences de forme, à sa couleur d'un brun jaunâtre, relevée
par un dessin réticulaire noir; il ne dépasse guère un pied
en longueur totale et offre environ 190 _|_ 6 plaques. —
l'er Y X, quatrième espèce du genre Tortrix, habite les terrains
sablonneux qui s'étendent depuis l'Egypte jusque dans l'In-
douslan : elle a le tronçon de la queue ramassé et obtus;
toutes les parties sont revêtues d'écaillés assez petites; le
museau est coupé obliquement au bout; l'œil offre une
prunelle perpendiculairement alongée; elle atteint jusqu'à
2 pieds et demi, et présente 195 -i- lio plaques. Aux Indes,
cette espèce forme probablement plusieurs variétés con-
stantes, mais dont on n'a pas encore bien étudié les traits
distinctifs. - Très voisin de lEryx est le psr. udo -er y x,
originaire de la Nouvelle Hollande: il se distingue de celui-là
par une queue plus longue et prenante, par un corps plus
gros et plus comprimé, par des lames abdominales et frontales
plus développées, enfin par le nombre des plaques qui
est de aoo -h 60. — La sixième espèce, le xénopeltis,
offre un tronc moins cylindrique que les précédentes, sa queue
est plus développée et conique, il est dépourvu de crochets à
l'anus, et les plaques de la tête se rapprochent de la forme nor-
male; un beau bleu noir fortement irisé réfléchit de toute la
surface de l'épiderme polie; la tête est blanche dans les jeunes ;
taille 2 pieds; plaques 175.4-28. Patrie: les îles de Java,
Sumatra et Célèbes. — \ient enfin le tortrix boa, espèce
rare, découverte à la Nouvelle Irlande; elle a à-peu-près les
formes générales du Xénopeltis, mais ses lèvres sont creusées
de fossettes comme dans les Boas, et le corps est entouré
d'anneaux alternes de noir et de blanc; on lui compte
25o -f- 44 plaques.
La deuxième famille des ophidiens non-venimeux est
celle des Serpens lombrics: elle est composée du genre
unique G AL AM ARIA. Ce sont de petits serpens terrestres,
dont le corps, presque constamment cylindrique en forme de
9
130 M:VUE SYNOPllQUE.
ficelle, est terminé par une queue le plus souvent courte et
conique. La tête est, dans la plupart, d'une venue avec le
tronc , et revêtue de plaques dont celles du museau sont ordi-
nairement moins nombreuses que dans les serpens des genres
suivans. Les Calamars offrent très fréquenmient des teintes
irisées, et le rouge domine quelquefois sur les parties infé-
rieures. Les plaques du dessous sont rarement nombreuses.
Ils habitent les climats chauds ou voisins des tropiques, et se
trouvent dans l'un et l'autre monde. -- Une des espèces les
plus remarquables est le c al. l u m b r i c o i d e a 5 très rare dans
les îles de Java et de Célèbes. Son corps, long de plusieurs
pieds , est partout de la grosseur d'une tuyau de plume de
cygne; la queue est courte, conique et offre 16 à 23 lames
divisées. 11 n'existe qu'une paire de frontales, qui tiennent en
même temps lieu des frênaies; et on lui voit seulement deux
oculaires. Dessus d'un bleu noirâtre , dessous bleuâtre avec
des taches noirâtres et une raie jaune le long des flancs.
Ecailles lisses, carrées et disposées sur i3 rangées. PI. abd.
190 à 217. — Une autre espèce de 1 île de Java, le cal.
LiNNAEi, ressemble à la précédente par les formes et la
disposition des plaques de la tête et des écailles du tronc;
mais son corps beaucoup moins effilé ne dépasse guère un
pied en longueur. Les teintes ne sont pas moins sujette > à
varier que la longueur de la queue. Le dessous est le plus
souvent d'un rouge vermillon , orné de larges taches carrées
noires. Plaques 180 + 90 à 160 -h 20. — Le C4l. orbig-
NYi du Chile paraît représenter dans le nouveau monde le
Cal. lombric, dont il offre les formes et le port; mais son
cou est entouré de i5 rangées d'écaillés et toutes ses parties
sont plus minces. Sur le dessus d'un rouge de brique ardent,
les parties inférieures sont couleur de nacre. Le sommet de
la tête, une tache sur la nuque, et une bande sur la queue,
d'un noir foncé 264 -4- 3o. — L'Amérique du Nord produit
le CAL. AMOENA qui répond par sa touille, et sa stucture
UFA'UE SYNOPTIQUE. 131
au Cal. Linnaei des Indes orientales; ses formes sont
cependant plus menues , et les bandes abdominales ainsi que
les plaques nasales un peu plus larges. Dessus brun luisant,
dessous rouge. Nombre moyen des plaques i2o-f-3o. —
Les espèces suivantes s'éloignent plus ou moins des quatre
précéderites qui tbrment les types du genre. Le c a.l. d i a-
DEMA, le seul connu de la Nouvelle Hollande, offre cependant
tout-à-fait le port et les formes des espèces types 5 mais on lui
voit deux paires de plaques frontales. Il est d'un brun pâle
jaunâtre, plus clair en dessous , avec une taclie tranversale et
blanche sur l'occiput. 1^0 -|- 45. i3 Rangées décailles. — Les
îles de Java et d'Amboine nourrissent un Calamar, cal.
BRACiiYORBiios, qui présente le même nombre des plaques
tle la tête que le précédent, mais qui joint à une taille plus forte
que les espèces types, un corpsplus gros etaminci vers les bouts,
et une tête assez conique. D'un brun terne uniforme, passant
au jaunâtre sur le dessous , cette espèce a le corps entouré
de 17 rangées d'écaillés. i38 -l- i3 à 180 + 38 plaques. —
Le CAL. B ADi a de Cayenne, tout en présentant des formes
moins vigoureuses et une taille moindre, a le port du précé-
dent 5 cependant sa queue est plus effilée, la tête plus obtuse,
les yeux sont plus volumineux , et il existe de chaque côté une
petite plaque frênaie. Nuancée de brun et de jaune d'ocre ,
cette espèce offre une disposition des teintes assez variable
d'un individu à l'autre. 17 R. d'écaillés; plaques i5o -+- 20 à
1 84 -h 44' — Le CALA M. ARCTivENTRis vicnt du Cap , et
ressemble par ses formes à une petite Couleuvre; la tête et les
plaques dont elle est revêtue sont plus développées que d'ordi-
naire ; le corps est assez gros pour la taille de l'animai, et la
queue pointue. Son ventre fortement anguleux et ses teintes
servent à distinguer cette espèce des autres. Dessus brunchàtain,
dessous jaune; flancs bleu-grisâtre , moucheté de points noirs
serrés. i3o -h 3o ; i5 rang, d'écaillés. — Les deux Amériques
produisent un Calamar, c. m e l anocepha la, dont les
\m REVUE SYNOPTIQUE.
formes rappelent celles des Elaps: il a le corps d'égale grosseur ;
la queue est plus efillée que dans les précédens, la tête tron-
quée au bout et à peine distincte du cou. Le système de colora-
tion offre de bons traits distinctifs : dessous jaunâtre; dessus
brun pâle avec trois raies longitudinales noires; tête ornée de
taches noires. 1 55 -h 60, i5 rangées d'écaillés. — Ressemblant
au précédent , le cal a m. punctata, originaire des parties
méridionales de l'Amérique du Nord, s'en éloigne par un corps
moins cylindrique, une tête plus distincte du cou, des écailles
plus petites et un système de coloration divers. Le dessus est
brun gris foncé avec un collier blanc; desous blanc-jaunâtre.
Une suite de points noirs s'étend sur la ligne médiane de
l'abdomen. i5 Rangées d'écaillés. Plaques: 170 4- 5o. — La
onzième espèce du genre est très remarquable parce qu'elle offre
dans l'ordre entier le seul exemple d'un serpent dépourvu de
dents palatines; c'est le cal. oligodon, analogue d ailleurs,
par les formes et le port, aux autres Calamars. Sa tête
est cependant un peu grosse, obtuse et enflée aux joues.
L'espèce est aussi très reconnaissable à ses teintes: les par-
ties inférieures sont, comme dans le Calam. de Linné, d'un
rouge vermillon orné de taches carrées ; le dessus est d un
brun foncé avec de larges taches blanchâtres distribuées à de
distances régulières sur le dos; on voit, sur la tête, plusieurs
bandes noires. Ce Calamar est rare à l'île de Java et forme, à
Sumatra , à Ceylan et aux îles Philippines , de jolies variétés
de climat distinguées par la distribution des teintes; les taches
abdominales sont réduites dans les deux dernières variétés à
des points disposés sur trois rangs ; la variété de Sumatra a
des taches dorsales, ovales, larges et serrées. i45 + 35j
17 Rangées d'écaillés. — Le cal. scytale, des îles Philip-
pines et de Ceylan , caractérisé par la présence d'une plaque
frontale antérieure impaire, ainsi que par sa queue munie en
dessous de plaques simples , se rapproche , par ses formes ,
du Calamar brun. Dessus brunâtre, passant sur le dessous ,
REVUE SYNOPTIQUE. 133
au jaune d'ocre sale; trois taches foncées sur l'occiput; autant
de raies composées de points foncées sur le dos et les lianes.
i4o -h 3o; 17 rang, d'écaillés. — Les parties méridionales des
jjltats-Unis de l'Amérique du Nord nourrissent un petit (Cala-
mar, CAL. STRiATULA, qui liabitc également l'île de ]\Iarti-
nique. 11 se reconnaît à sa tête conique revêtue de lames
semblables à celles des Couleuvres, à l'exception des frênaies
qui manquent; puisa ses yeux volumineux, à une queue assez
pointue, et aux écailles lancéolées qui sont toutes surmon-
tées par une forte carène. Dessus brun-pâle ou grisâtre, des-
sous jaunâtre. Plaques: 120 -f-35; i5 à 17 rangées d'écaillés. —
Le c A L. E L A p o I D E s , de Java, offre des écailles lancéolées et
carénées comme le précédent; mais il parvient à des dimensions
plus fortes , ses yeux sont plus petits , tandis que les narines
sont assez ouvertes; la tête présente une forme diverse et la
queue est plus effilée; les teintes enfin, qui sont des plus bril-
lantes , le distinguent de toutes les autres espèces. Dessus
rouge carmin ; dessous bleu d'azur pâle; i5o +70; i5 rangées
d'écaillés. — Le c a l a m. b l u m 1 i , espèce anomale de l'Amé-
rique méridionale se rapproche à la fois des Tortrix et de cer-
tains Homalopsis. D'une taille plus forte qu'aucune autre
espèce , elle offre cependant un tronc cylindrique et une queue
conique et vigoureuse. Sa tête est déprimée, obtuse; les yeux
sont très petits, et on voit une dent très longue à l'extrémité
postérieure du maxillaire; 6 plaques labiales, 2 oculaires et
2 frontales; occipitales alongées. Dessus brun , marbré de
points foncés, et relevé par trois raies effacées. Dessous et
demi-collier jaunâtres. 180 + 35; 1 5 rangées d'écaillés. — On
vient de découvrir , à la côte de Guinée, un Calamar dont les
formes et les plaques de la tête rappelent celles desCoronelles ,
mais qui offre le port et la petite taille des Calamars; sa queue
est plus grêle que d'ordinaire, le tronc un peu comprimé et en-
touré de 19 rangées d'écaillés: c'est le cal. coronata,
distingué par les quatres bandes transversales noires qui
Î34 REVlJË SYNOPTIQUE.
ornent la tête. D'un gris jaunâtre sur le dessous, cette espèce
tire sur le dessus au brun. Plaques: ï85 + yo. — Nous avons
ranoé dans ce genre une espèce anomale originaire duCliile,
et qui se rapproche, par ses formes , de certains Lycodons ,
mais dont la distribution des teintes rappelé celle du Goronella
venustissima, de l'Élaps corail etc. Elle a l'abdomen anguleux
et le corps annelé de rouge et de noir; i5 rangées d'écaillés;
196 + 57 plaques: c'est le CAL. atrocincta. — Yient enfin
le CAL. c o R ON E L L A , que l'on prendrait , nu premier abord,
pour une petite Coronelle lisse; mais sa tête est assez grosse ^
les plaques frênaies manquent, les occipitales sont larges,
ses formes sont assez ramassées, on ne lui compte que i5
rangées d'écailies , etc. D'un gris jaunâtre tirant sur le brun ,
cette espèce a les parties supérieures ornées de nombreuses
bandes transversales foncées mais très peu distinctes.
Nous avons réuni dans la troisième famille des ophidiens
non-venimeux tous ces Serpens terrestres, qui n'ont
pas été compris dans les deux familles précédentes. Ils
offrent, à l'exception des Hétérodons , peu d anomalies dans
leur organisation 5 et sont modelés, pour ainsi dire , sur le
type des Couleuvres proprement dites : la plupart ont le som-
met de la tête orné de 9 plaques et des écailles de moyenne
grandeur et lisses. *
Le premier genre , celui de C O R O N E L L A , renferme des
espèces qui rappel en î, par leur organisation les (Couleuvres
proprement dites; mais qui offrent une taille moindre; un
tronc moins comprimé , ordinairement en pentagone et revêtu
d'écaillés le plus souvent lisses et distribuées sur 17 à 19
rangées ; enfin une queue conique et peu longue. Les
Coronelles se trouvent dans les climats chauds et tempérés
des deux mondes; on n'en a pas encore observées dans la
Nouvelle Hollande. Elles habitent les plaines, et de préférence
les lieux humides. — L'Amérique méridionale nourrit une
très belle espèce, reconnaissable à ses formes effilées et à ses
REVUE SYNOPTIQUE. 135
teintes: d un beau rouge vormillon, elle a toutes ses parties
entourées environ de i5 paires d'anneaux noirs bordés de
blanc. Les écailles distribuées sur i5 rangées ont la pointe
noire. C'est la co u o n. vii is usti ssi m a. On lui compte 200
placpies abdom.; celles de la queue variant de 4^ ^ ioo«
A Surinam cette espèce est remplacée par un serpent tout-à fait
analogue; mais qui offre un tronc moins effilé, et par consé-
quent un nombre moindre de plaques abdominales, qui n'est que
d'environ 180: on pourrait conférer à ce serpent, lorsqu'on
veut en faire une espèce à part, le nom de CORON, venu s ta;
il est très commun, et connu sous celui de Goluber agilis. —
Une autre espèce semblable pour les teintes à la précédente,
habite l'Amérique du Nord; c'est la coron, coccinea; mais
elle présente une taille moindre que celle-là, ses yeux sont
moins volumineux, la plaque verticale est ramassée et les
surciliaires petites. Plaques 170 4-35. 17 Rangées d écailles. —
LacoRON. MER RE M Mil, coumiunc au Brésil, est remar-
quable par le grand nombre de variétés accidentelles et d'âge
qu'elle forme. Sa têie est très large, et revêtue au sommet de
lames petites et de forme alongée. Les écailles, disposées sur
17 à 19 rangées, sont grandes et en rbombe. Le dessous est
ordinairement jaunâtre; dans les adultes, le dessus est d'un
vert brunâtre, encadré en guise de tache ronde au centre de
chaque écaille. Les jeunes ont un système de coloration
semblable à celui de l'espèce précédente , mais les anneaux
noirs s'effacent avec l'âge et la teinte rouge rembrunit. i3g
-1- 5o ou i83+68. — On a observé à Surinam, dans le Brésil,
et même à la Guadeloupe, une Goronelle, c. reginae, qui
ressemble, quant aux formes, à la précédente, mais dont les
teintes sont diverses: dessus bleu-grisâtre, dessous jaune avec
des taches noires carrées ; de petites taches noires ornent les
Hancs , et on en voit de blanches près de l'angle de la bouche
etaucou. i4o-+- 70; ly rangées d'écaillés. — 5'"'^Esp: coron.
coiiELLA. Commune à Surinam, elle paraît également se
136 KEVOE SYNOPTIQUE.
trouver dans l'Amérique du Nord. Formes plus lourdes que dans
les deux précédentes. Dessus varié de brun de deux nuances; des-
sous jaune foncé, orné de taches noires carrées. Écailles bordées
de noir ou de blanc. 1 60 H- 5o: i '7 rangées d'écaillés. — On ne
connaît qu'une seule espèce du genre Coronelle des îles de la
Malaisie: c'est lacoRON. balîodeira, découverte à Java et
à Sumatra. D'une taille moins forte que la plupart des autres
espèces, elle se rapproche par son port des Calamars, mais
ses yeux sont très grands et sa tète haute. Dessus d'un brun
vif, relevé par des taches blaîiches en œil; dessous jaunâtre.
128 + 68; i3 r. d'éc. — L'Europe ne produit également
qu'une seule Corone!le, la coron, laevis, qui préfère les
lieux secs aux terrains bas et humides; elle est d'un brun bai
très luisant, et orné de taches noires déchiquetées et irrésju-
lières qui forment, sur la tête, un dessin très caractéristique.
Le dessous est jaunâtre, marqué de taches carrées noires.
1^5 4- 55; 21 rangées d'écaillés. Les jeunes de cette espèce
éclosent dans le ventre de leur mère. Les contrées méridionales
de l'Europe nourrissent une variété de climat, distincte par des
teintes plus claires. — La huitième espèce est du Chilé, c'est la
CORONELLA CHiLENsis. (Tacliymcnes de Wiegmann). Elle
ressemble à l'espèce d'Europe, mais sa tète est plusconique et
revêtue de lames moins grandes. Sa queue est plus courte , et les
parties supérieures offrent 4 raies foncées qui s'étendent sur l'oc-
ciput, tandis qu'on observe sur le dessous plusieurs rangées de
taches noirâtres souvent peu distinctes. i58h-46; i9rangéesd'é-
caîlles. — Les quatre espèces suivantes sont duCap, et s'éloignent
sous plusieurs rapports des précédentes. La coron, rhom-
BEATA rappelle par l'ensemble de son organisation l'espèce
d Europe, quoiqu'elle se rapproche, par ses formes effilées,
des Psammophis. Sa tête est menue, conique et terminée par
une plaque rostrale étroite qui se prolonge sur le sommet du
museau; les autres plaques de ces ])arties sont étroites et les
occipitales courtes. On voit une dent sillonnée postérieure
REVUE SYNOPTIQUE. 137
aux mâchoires. Le brun jaunâtre du dessus est orné de 3 ou
4 rangées de taches œillées en lozange. i55 "+"72; 17 rangées
d'écaillés. — Une autre espèce du Cap, très diverse de la précé-
dente, est la CORON, rufescens, qui se reconnaît à ses
teintes unifjrmes d un brun pourpre pale et à une large
tache foncée sur la nuque. Le dessous est jaune. Elle a la
prunelle de l'œil alongée dans le sens vertical, et offre une
dent postérieure sillonnée aux mâchoires. 160+4^5^9 rangées
d'écaillés. — La coronella rufula se rapproche des
Lycodons par ses formes et ses dents antérieures un peu phis
longues que les autres ; mais la prunelle de l'œil est orbicu-
laire, et les plaques de la tête un peu alongées. D'un brun
uniforme tirant sur le rougeâtre, elle offre une queue assez
grosse et beaucoup plus longue que d'ordinaire ; iSy H- iio;
19 rangées d'écaillés. — Une des espèces les plus belles et
lespl us rares estla COR ON ELLA aurorv. Elle est très recon-
naissable à ses teintes: jaune sur le dessous, brun jaunâtre
sur le dessus; le dos est orné d'une large raie jaune orange
qui occupe l'animal dans toute sa longueur. Elle a des formes
plus lourdes que d'ordinaire; sa queue très grosse ne va
guère en diminuant que vers le bout. Le museau est obtus; les
plaques temporales ont la forme d'écaillés et les abdominales
sont assez serrées. 180 -h /lôj^ig rang. d'éc. — Viennent
enfin deux espèces un peu anomales de l'Asie, dont la
première , la coronella octolineata offre un corps
mince, à abdomen étroit et un peu anguleux aux côtés.
Il n'existe que 6 plaques labiales et une frênaie de chaque
côté; la rostrale est large et s'étend entre les frontales. On
voit sur un fond d'un jaune brunâtre 4 lî^ies dorsales longi-
tudinales et foncées , dont les latérales sont quelquefois
doubles: ces raies se prolongent sur la tête où elles forment
un angle aigu. 178 + 52; 17 rangées d'écaillés. — 11 existe
au Bengale une Coronelle très jolie, la cor. russelii. Elle
se rapproche de certains Xénodons, dont elle a le système
138 REVUE SYNOPTIQUE.
tîeiitaire, et nolaiiiiiient du Xén. pourpre, auquel elle ressemble
aussi par la distribution des teintes. Le museau est o])lique-
ment coupé en dessous. ly Rangées d'écaillés de forme
sublancéolée. Dessus brun de terre , relevé par une rangée
de taches larges, décliiquetées et de forme peu constante. On
voit sur la tête plusieurs traits anguleux. i55 -+• 54- —
Le deuxième genre des serpens terrestres est celui de
XENODON; ce sont des Coronelles le plus souvent de
grande taille, qui offrent des formes lourdes, une tête large, un
museau court ou tronqué, dont le tronc est gros et le ventre
aplati. On leur voit à la mâchoire supérieure une dent solide
postérieure assez longue et comprimée. Leurs écailles sont
iisses et disposées sur des rangées assez obliques, notamment
sur le cou qui est assez expansible et dont les côtes sont moins
courbées que d'ordinaire , ce qui rapproche ces animaux des
Najas. Les plaques de la tête sont trapues et larges. Ce genre
n'est pas riche en espèces, et les Xénodons appartiennent au
nombre des serpens rares , qui habitent en petit nombre les
contrées chaudes et tempérées des deux mondes; on ne connaît
aucune espèce ni de l'Afrique ni de la Nouvelle Hollande. Les
uns préfèrent les lieux humides , mais d'autres qui se plaisent
dans des terreins secs, s'éloignent des espèces types pour se
rapprocher du genre suivant, celui des Hétérodons. — Le
XENODON sEVEïius dc Surinam et du Brésil réunit par excel-
lence les caractères que nous avons assignés à ces animaux en
général. Il a toutes les parties assez lourdes et trapues , et les
plaques de la tête petites et larges. Le poumon, enveloppant la
trachée , occupe l'espace entre le cœur et la gorge. D'un jaune
brunâtre pâle, les parties supérieures sont ornées d'une dou-
zaine de taches foncées en œil et extrêmement larges. On
observe sur la tête plusieurs bandes transversales et des traits
en angle sur l'occiput. Les teintes chez les adultes sont telle-
ment effacées qu'on en reconnaît avec^ peine la distribution
primitive. J'ai vu des individus d'un rougeAtre \iniforme ,
REVUE SYNOIMIQUE. I3î>
taiulîsqued'autresétaientd iinhiun verdàtre. i/io-\-^6y2ï rang,
dëc. Cent un serpent de grande taille qui paraît se nourrir
exclusivement du grand crapaud de l'Amérique méridionale,
et qui nage avec beaucoup de dextérité. — Le x e n o o o n
R UABDOCEPHALUS (lu Brésil est tellement voisin du précé-
dent qu'il ne paraît en former qu'une race, distinguée par des
formes un peu plus alongées, comme il résulte du nombre
des lames qui varie de i4o à 180, et de 44 ^ ^^' ^9 I^^ngées
d'écaillés. Le poumon s'étend derrière le cœur dans la cavité
abdominale. Les couleurs de ce Xénodon sont très sujettes à
varier,' on en trouvede bruns, de rouges, et quelquefois même
d'un gris olivâtre uniforme. — Lcxenodon inornatus
habite l'île de Java, où il est assez rare; il esl d'un brun
olivâtre uniforme, et offre à-peu-près les formes du Xen.
severus , quoiqu'il lui reste assez inférieur par rapport à sa
taille. 120+ 38; ig rangées d'écaiPes. Le jeune a les parties
supérieures relevées par des bandes transversales assez indis-
tinctes, et on voit sur l'occiput plusieurs bandes qui se réu-
nissent en angle. — L'île de Java nourrit une autre espèce de
Xénodon , le xen. purpurascens. Aussi rare que la précé-
dente, elle s'en distingue ainsi que de toutes les autres, par
un système de coloration extrêmement agréable. Les formes
rappelent celles de la Coronelle lisse; mais notre Xénodon est
plus robuste et d'une taille un peu plus forte. Il a la plaque
rostrale assez développée, voûtée et saillante; le museau est
un peu tronqué au bout, et l'abdomen légèrement anguleux.
D'un rouge de brique ou pourpre couvert de marbrures fon-
cées, le dessus est orné de 18 bandes larges ou taches d'un
blanc rougeâtre pointillé de noir. lyS +4^; 19 r. d'éc. —
Il existe au Brésil une troisième espèce de Xénodon, le
xen. schottii, qui offre des formes plus élancées que les
précédens, et dont la tête étroite est terminée par une plaque
rostrale un peu saillante. Dessus d'un brun olivâtre, dessous
jaunâtre. 178 -H 46; 19 rangées décailles. Le seul Xénodon
140 REVUE SYNOPTIQUE.
d'Europe connu, xen. michahellis, habite l'Espagne et la
France méridionale. 11 se reconnaît à sa tête courte et conique ,
terminée par une plaque rostrale proéminente, à ses écailles
disposées sur 27 rangées, au nombre élevé des plaques,
(216 + 60), à sa queue courte et conique, enfin à ses teintes
qui sont d'un brun olivâtre relevé par deux raies dorsales
foncées,- plusieurs autres raies descendent sur les côtés de la
tête. Le système de coloration des jeunes diffère entièrement
de celui des vieux, en ce que ceux-là ont les teintes très-
claires et relevées par de larges taches. — Le xenoûon
TYPHLOS des Guyanes réunit à la taille des Goronelles , les
formes du Xén. sévère, toutefois en exceptant qu'il a la tête
et les plaques qui la revêtent moins larges, et que son abdomen
est un peu anguleux. Dessous jaune, parties supérieures
couleur de plomb enfumé, tirant tantôt sur le verdâtre ,
tantôt sur le bleuâtre. i4o H- 5o; 19 rangées d'écaillés. — J'ai
placé à la suite du genre Xénodon un ophidien d'origine
incertaine, mais qui vient probablement du Brésil: c'est notre
xen. bicinctus. Use rapproche des Goronelles, et offre des
formes assez robustes. L'œil est bordé d'un tour de 6 plaques,
et la rostrale est assez déprimée. Le corps est entouré de
larges bandes ou anneaux géminés et bruns, disposés sur un
fond jaunâtre, et qui forment, sur le dessous, des taches
carrées. 192 + 89.
Les HÉTÉRODONS sont des Goronelles ou plutôt des
Xénodons, dont la tête se prolonge en un museau conique
terminé , le plus souvent , par une lame saillante tronquée au
bout , et dure. Ils n'ont été observés que dans le Nouveau
Monde où ils habitent les terreins sablonneux. Les autres
plaques de la tête sont moins développées que d'ordinaire.
La couleur dominante est le rouge, relevé par des taches ou
anneaux foncés. Ces animaux ne parviennent pas à une forte
taille et sont du nombre des ophidiens rares. — L'espèce la
plus connue est l'h eterod. pî.atyrhinus, reconnaissabie
REVOE SYNOPTIQUE. 141
à ses formes trapues et vigoureuses, et particulièrement à sa
plaque rostrale retroussée et saillante en forme de croissant;
on lui voit plusieurs écailles frontales, l'œil est bordé d'un
tour de petites écailles, et les plaques labiales sont très hautes.
Écailles lancéolées, carénées et disposées sur 21 rangées.
124 + 38. Corps couvert de larges taches foncées sur un
fond d'un gris rougeâtre. Patrie: l'Amérique du Nord; le
Brésil produit une variété de climat de la même espèce. —
Originane du Brésil, Theterodon r h in os to ma ressemble
au précédent par la forme de sa plaque rostrale ; mais cette
partie est plus petite dans noire espèce , les plaques de la tête
affectent une forme plus régulière; ses écailles sont lisses et
disposées sur i5rangées,etsoncorpsoffredes formes beaucoup
plus élancées. 190 4- 64- Extrêmement rare. — La troisième
et dernière espèce de ce genre, le xenodoncoccineus
est de petite taille, a la tête pointue, le museau saillant mais
non retroussé , et le corps d'un jaune ardent marqué de
larges taches ovales de rouge pourpre. 19 Rangées d'écaillés ;
plaques 170 + 5o. L'espèce vient du Mexique et des provinces
méridionales des Etats Unis,
Les LYGODONS composent le quatrième genre des ser-
pens non-venimeux terrestres. Ce sont des ophidiens de taille
moyenne , dont le corps est ordinairement mince , et quelque-
fois même effilé. Ils offrent le caractère particulier d'avoir des
dents maxillaires antérieures plus longues que les autres. Les
yeux sont petits et à prunelle verticalement alongée. La plaque
verticale et les frontales antérieures sont petites et ramassées,
mais les occipitales sont assez alongées ; il n'existe qu'une seule
frênaie. Les écailles sont en lozange et ordinairement lisses,
l'abdomen est anguleux dans la plupart des espèces, et la queue
souvent munie de lames simples. La teinte dominante est un
brun couleur de terre; les écailles sont quelquefois bordées de
blanc, et le cou orné d'un collier clair; d'autres espèces ont le
corps annelé de noii- et de blanc ou de rouge. Les Lycodons
142 RF.VÎJE SYNOPTIQUE.
habitent les pays équatoriaux des deux mondes, mais on u en
connaît point de la Nouvelle Hollande. — i^^ Esp. lyco-
DON HEBE, à tète déprimée et à museau obtus. Les plaques
frontales postérieures et les occipitales sont très alongées.
1964-68; 17 rangées d'écaillés. D\in brun-gris plus ou moins
foncé, le dessus est orné de taches claires et déchiquetées.
Cette dernière teinte borde les écailles et forme, derrière
l'occiput, un large collier. La distribution des teintes est
sujette à des variétés accidentelles; d'autres sont ducs au
climat: les individus du Bengale sont très clairs; ceux de Java
et de Timor plus foncés et d'une taille moins forte. — 2™®
Esp. T.YcoDON CARiwATUs. Vit à Gcylau , où il est assez
rare. Il a des bandes simples sous la queue, et des écailles
carénées disposées sur i^ rangées. Couleur: brun de café,
plus clair sur le dessous qui est marqué de taches blanchâtres.
1 88 -f- 60. — 3"^^^ Esp. L Y c o D o N j A R A. Des grandes Indes.
Peiite espèce noire à col'ier blanc trè;s large; les écailles
sont marquées de deux raies fines. Dessous blanchâtre.
1^5 -f- 56. — '4'"^ Esp. LYcoDON GEOMETRicus. Grande
et belle espèce à formes ramassées, dont on ignore la patrie.
Dessus brun rougeâtre; le dessous, deux raies sur les flancs, et
une autre qui borde le sommet delà tête , jaunâtres. 21 Ran-
gées d'écaillés lisses. 220 -[- 5i. — 5*"^ Esp. lycodon
HORSTOKii. Observé au Cap et à la Côte d'or. De petite
raille, d'un brun olivâtre foncé assez luisant, avec le bout
des écailles marqué d'une tache couleur de nacre, couleur
qui forme quelquefois des bandes étroites et transversales.
Dessous jaunâtre. 190 -j- 4^ ; 17 rangées d'écaillés. — 6'^** Esp.
LYCODON UNicoLOR. Formc avcc la précédente les deux
seules espèces du genre connues de l'Afrique. Elle habite la
côte de Guinée, et se reconnaît à ses teintes uniformes d'un
brun fuligineux, plus clair sur le dessous; elle se distingue
de la précédente par Je nombre des pla(jues et des écailles qui
€st de 220 4-60 et de 27. — 7™*^ Esp. lycodon for mosus:
REVUE SYNOPTIQUE ^ 143
très belle espèce a formes minces, à tête étroite, à plaque
iVeiiale assez aiongée qui s'étend jusqu'à l'œil, et dont le
coips est marqué d'anneaux alternes très larges d'un beau
rouae vermillon et d'un noir luisant. Les écailles offrent des
bfirdures noires. 66 Paires de lames sous-caudales, yj à ly
Rangées d'écaillés; les lames abdominales variant de 168 à
220. Habite le Brésil. — 8'"*^ Esp. t. ycodon cleha. Très
remarquable par les variétés qu'il forme, la configuration
de la tête vai'iant d'un individu à l'autre , et la queue offrant
des lames tantôt simples, tantôt disposées par paires. Couleur:
brun de terre, quelquefois clair, souvent foncé, nuque ornée
d'un collier blanc, pointes des écailles brunes. Dents anté-
rieures à peine plus longues que les autres. i5 à 19 Rangées
d'écaillés. Plaques variant de 148 4- 65 à 2 i 8 -+- loi. Patrie:
Le Brésil et Surinam. — 9™^ Esp. lycodon subcinctus.
Museau extrêmement large et obtus. Plaque frênaie touchant
à l'œil, vu le manque d'oculaire antérieure. Narines très
ouvertes. D'un brun noirâtre luisant, le corps de cette espèce
est entouré d'une vingtaine de larges bandes blanches.
208 -I- 76; 17 rangées d'écaillés. Du Bengale et de Java. —
10™* Esp. LYCODON MODESïus. Voisiu , pour l'organisa-
tion, du Lycodon Clelia. Tête plus conique que d'ordinaire.
Ecailles à surface unie, presque carrées, et disposées sur 17
rangées. 2004-84. Dessus brun foncé; dessous et collier
jaunâtres. Habite l'île d'Amboine, et aussi la Nouvelle Guinée
où il acquiert une très forte taille, offrant alors des teintes
assez claires. — 11"^^ Esp. lycodon nympha. Formes
effilées, tète ramassée à museau obtus, yeux assez volumi-
neux, i3 rangées d'écaillés lisses, abdomen étroit et anguleux,
aao -4- 85. Corps brun, orné de bandes ou de taches claires.
Habite au Bengale. — i:*"'* Esp. lycodon atjdax. Du
Paraguay, se rapproche, pour les fornjes, des Dipsas. Tronc
comprimé et alongé, queue très mince et effilée, tête grosse
par derrière. Varié de brun et de jaune, qui forme de larges
144 REVUE SYNOPTIQUE.
taches déchiquetées et irréguhères. Plaques de la tête foncées
au centre. 200-+-110. 19 Rangées d'écaillés. — iS*"* Esp.
LYCODON PETOLARius. A formcs effilées commc le précé-
dent j mais sa tête est heaucoup moins large et le corps plus
mince. Dents d'égale grosseur. 210+ 100. Corps brun foncé,
marqué de nombreuses bandes ou anneaux clairs, dont fa
disposition varie selon les individus. Habile les Guyanes et se
trouve aussi au Brésil.
Cinquième genre de la famille des serpens terrestres : C O L U-
}5ER. Comprend tous les serpens terrestres de grande taille
qui, tenant le milieu entre tous les ophidiens, ne présentent
guère de faits extraordinaires dans l'organisation. Ils habitent
ordinairement les lieux secs; mais quelques uns préfèrent
le voisinage des eaux. Ils se plaisent également sous les
climats chauds et tempérés des deux mondes, mais on ne
connaît qu'une espèce dans l'Afrique australe, et ils paraissent
manquer absolument à la Nouvelle Hollande. Les plaques
abdominales sont ordinairement assez nombreuses. Leurs
écailles dorsales offrent le plus souvent des carènes assez fai-
bles. La plupart ont 2 plaques oculaires postérieures. Ce genre
est très riche en espèces. — 1) coluber aesculapii. De
l'Europe centrale et méridionale ; 21 rangées d'écaillés, brun
olivâtre, avec un collier clair , dessous jaunâtre. 22^8 -f- 79. —
2)coLUBER coNSTRicTOR. Voisin du précèdent pour les
formes; mais il a 17 rangées d'écaillés et est couleur de
plomb foncée uniforme. i83-t-94. Habite les Etats-Unis de
l'Amérique du Nord. — 3) coluber radiatus. A formes
plus sveltes que d'ordinaire. Dessus d'un brun clair, relevé
par quatre raies longitudinales foncées. Occiput marqué d'une
bande transversale. 23o + 88 ; 19 rangées d'écaillés. Patrie: la
Cochinchine , les îles de Sumatra et de Java. — 4) coluber
suBRADiATUS. Remplace le précédent à l'île de Timor. Il
lui ressemble assez; mais ses teintes sont plus foncées , la
bande sur locciput manque, les raies sont interrompues
REVUE SYNOPTIQUE. HT)
et Tes plaques plus petites disposées sur 23 rangées. 235 -f-
gO, 5) COLUBÊR ftLUMENBAClIII, OfflC dcS foi mCS
élancées et une queue eflilée. La tête est plus distincte du
cou que dans les précédentes ; l'œil est plus volumineux ; l'ab-
domen anguleux et garni de lames assez larges; le dos est un
peu en carène et les écailles sont disposées sur i^ rangées
plus obliques que dans les autres espèces. 200 + i25. Brun-
olivâtre tirant sur le jaune sur le dessus, (jui est orné de
bandes transversales étroites foncées, souvent assez eifacées,
irrégulières ou entrelacées. Ecailles bordées de noir- L'espèce
a élé observée au Malabar, au Bengale et à Java. — 6) c o l u-
BER KORROS. Très analogue à la précédente, dont elle diffère
par des plaques labiales plus étroites et un museau plus court,
par une tète moins liante , enfin un tronc moins comprimé et
moins alongé. 170 -f- 120; i5 rang, d'écaillés; des îles de Java
et de Sumatra. — 7)coluber corais. La plus grande des
Couleuvres connues , atteint jusqu'à 8 pieds de longueur et
la sfrosseur d'un bras d'enfant. Vient de Surinam. Ses formes
sont très robustes , sa tête vigoureuse et le museau gros.
Sa pbysionomie ressemble à celle des Najas. 17 Rangées de
grandes écailles. D'un brun rougeâtre tirant sur le gris-pour-
pre ; les jeunes à bandes transversales foncées sur les flancs.
Dessous blanc jaunâtre. 202 4- 70. — 8) coll'ber mela-
NURTJS. A tête ramassée et déprimée et à museau obtus ;
19 rangées d'écallles fortement carénées. Les plaques labiales
sont étroites. Le tronc est comprimé et l abdomen assez angu-
leux. 218-1- 9^- Remarquable par les changemens qu'éprouve
le système de coloration avec l'âge, Les jeunes sont d'un beau
noir luisant avec une raie dorsale jaune de citron ; flancs
ornés d une suite de tacbes en œil à centre blanc ; joues d'un
blanc pur. Chez les adultes, la teinte du fond change au brun,
passant souvent au jaune d'ocre sur le dessus, couleur qui
représente la raie dorsale ; les taches des flancs deviennent
indistinctes et ne sont visibles que sur le cou. Les parties
10
14G REYUE SYNOPTIQUE.
postérieures passent au uoirâtre. ÎJe Java. L iie de Célèbes
produit une variété de climat, reconnaissable à un trait en
angle aigu qui orne le dessus du cou. Une autre variété lo-
cale , caractérisée par deux raies dorsnles noires , et par
une raie semblable sur les côtés du cou , vient de Sumatra. —
9) coiiUBER PANTHERiNus. Belle ct grande espècc , qui
habite au Brésil dans les lieisx marécageux. Formes élancées.
Tête alongée et large. Dessus brun pâle, presque totalement
couvert par deux suites de taches extrêmement larges, irré-
gulières et qui forment quelquefois des bandes transversales.
Deux raies foncées sur le cou , et deux ou trois bandes sur
le sommet de la tête. i5 Rangées d'écaillés très grandes et
lisses. 175-1-90. — 10) GOLUBER viRGATUS. Parai l rem-
placer, au Japon, notre Couleuvre quatre-raies. Corps com-
primé, abdomen anguleux, museau large et obtus. Dessus
brun plus ou moins clair, tirant sur le vert ou sur l'olivâtre,
couvert de larges taches ou bandes transversales. Ces taches
disparaissent avec lâge, en sorte qu il n'en reste que des
raies longitudinales effacées. 23 Rangées d'écaillés carénées.
Plaques: 240 + 110. — 11) coluber qu adrivïr gatus.
Egalement du Japon, et très voisine de l'espèce précédente,
dont elle se distingue par sa tête plus conique et moins grosse ,
revêtue de plaques plus aîongées ; par un corps moins vigou-
reux entouré de 19 rangées de plaques seulement , et orné
de 4 raies dorsales distinctes dans l'âge adulte. Elle est d'une
taille moins forte que laprér^édente et offre 200 -\- 87 plaques.
Les teintes varient tellement que l'on observe des individus
presque totalement noirs. — 12) coluber 'diadema.
Ecailles carénées. Plaques 280+ 60. Couleur brun déterre,
une bande noire entre les yeux. Des «randes Indes. —
1 3) COLUBER M I N 1 A T u S. Patrie .' île de France. Forme s
élancées , queue extrêmeuient déliée , de là le nombre élevé
de plaques qui est de 199 + i45. 2 5 Rang, décailles lisses
et en îo/ange. Jaune d'ocre par devant , couleur qui passe,
REVUE SYNOPTIQUE. 147
vers les parties postérieures, au rouge de minium cl au pourpre
couvert de marbrures jaunes. — i4) coluber variabilis.
A corps annelé et tacliete de noir et de blanc ou de jaune. 11 a
les formes assez élancées, le tronc est très comprimé, l'abdomen
anguleux et le dos en carène. Les écailles en lozano^e sont très
grandes, carénées et disposées sur i5 rangées. Plaques 204 -4-
100. Dents longues et aiguës. Il existe un petit poumon acces-
soire. L'espèce rappelé certains serpens d'arbre du genre Dip-
sas, notamment le D. dendrophile. Habite les bois de Surinam
et du Brésil. — i5) coluber plumbeus. Assez reconnais-
sable à son système de coloration uniforme : couleur de
plomb dessus . jaunâtre dessous. Il se distingue en outre par la
présence d'une dent postérieure longue et sillonnée , par ses
formes lourdes et ramassées , par une tête large, grosse et
arrondiej ennn par sa physionomie, qui ressemble à celle de cer-
tains Homalopsis. Il aie corps presque cylindrique, la queue
courte et conique, et des écailles presque carrées , à surface
unie et luisante , et disposées sur 19 rangées. 240 4-68. Est
le même au Brésil et à Surinam. — 16) coluber poëciLos-
TOMA. Belle espèce de grande taille , rare à Surinam , vient
aussi du Brésil; reconnaissabieà sa tête très grosse, ramassée,
laige, et revêtue de lames assez larges; à ses écailles lancéo-
lées , carénées et disposées sur 21 rangées , à sa queue
effilée , et aux teintes qui sont d'un jaune tirant tantôt sur
le brun, tantôt sur le vert. La tête est d'un brun rouge et les
parties postérieures sont souvent foncées, tandis que l'abdo-
men est jaunâtre. La femelle a le dessous de la tête rougeâtre.
L'œil est volumineux et bordé par derrière de 3 lames.
Habite les lieux marécageux dans les grands bois , et se rap-
proche, par ses mœurs, des Tiopidonotes. — 17) colu-
ber CANUS. La seule espèce du genre connu dans l'Afrique
du Sud, se rapproche , par son organisation , des Psanmiophis
ou serpens de sable. Tête petite et très conique; museau ter-
miné par une plaque saillante et voûtée; yeux peu volumineux ;
148 REVUE SYNOPTIQUE.
écailles petites, à pointe tronquée, lisses et disposées sur 27
rangées ; queue courte et grosse. Son anatomie présente
plusieurs fait curieux: la verge est double de chaque côté, le
cr.ane offre les formes de celui des Herpétodryas , les mastoï-
diens sont extrêmement développés , et les fortes dents
deviennent plus longues vers le bout du museau. Taille très
forte , jusqu'à 6 pieds. Plaques 194 — 64. Cette espèce curieuse
est encore remarquable par les changemens qu'éprouvent
les teintes avec l'âge: brun-rouge pâle relevé par quatre ran-
gées de taches œillés, au jeune âge ; grisâtre, tirant sur Toli-
vàtre, le brun ou le noir, à l'état d'âge adulte. — 18) colu-
BER SAYi. Du Missouri. Tête assez conique, plaque verticale
en forme de triangle , rostrale saillante ; 25 rangées d'écaillés
carénées. Jaune rougeâtre, le dos est brun foncé; ces teintes
forment des taches et des bandes. 224 + 55. — i9)coluber
QUATERRADiATus. Quelquefois de y à 8 pieds,' habite
l'Europe méridionale. Tête distincte du tronc, très alongée,
haute près des yeux ; museau gros ; oeil volumineux et om-
bragé par une lame saillante ; plaques occipitales allant en
pointe; queue forte, 25 rangées d'écaillés petites et lancéo-
lées ; 212 -f. y 5. Dessus brun relevé par 4 raies brunes plus
ou moins distinctes ; une raie foncée va de l'œil à l'angle de
la bouche. Cette Couleuvre a les moeurs très douces. —
20) coLUBER viRiDiFLAvus. Dcs mêmcs contrées que le
précédent, mais d'une taille moins forte, plus répandu et
plus commun. Queue très élancée et plane en dessous; tronc
presque cylindrique à abdomen convexe; 19 rangées d'écail-
lés lisses; 195 + io3. Dessus vert foncé, dessous et une tache
centrale des écailles jaunes. Ces teintes varient assez, et passent
souvent au brun et même au noir. Cette espèce a les mœurs
assez sauvages. - — 21) coluber cliffordii. Du Nord de
l'Afrique. Région des tempes et des freins revêtues d'écaillés.
Plaques labiales étroites et nombreuses. Ecailles carénées et
disposées sur 23 rangées. Teintes livides. Dessus brun-jaunâtre
KliVUIi SViNOPilQljL. 14'J
sale, orné de trois rangs de taches un peu plus foncées
et souvent confluentes. 236 ~^ 84- Moins fort que le précé-
dent.—22) coLUBER Hip PO c RE PI s. Intermédiaire entre
les deux précédens. Taille et formes de la Coul. verte et
jaune , mais à tête plus large et à queue moins effilée. L'œil
entouré postérieurement et par dessous de 6 petites plaques
environ; 25 rangées d'écaillés ; 282 +91. D'un jaune rougeâtre
assez vif, le dessus est relevé par 3 rangées de larges taches
foncées , orbiculaires sur le dos, carrées et plus petites sur les
flancs: les traits qui ornent le sommet de la tête présentent
quelquefois de la ressemblance avec un fer-à-cheval. Habite la
plupart des pays entourant la Méditerranée. — 23) coluber
FLORULENTUS. A formcs plus délicates que les précédens.
D'un gris jaunâtre ou brunâtre , varié d'un grand nombre de
taches et de bandes assez effacées. Menton et tempes garnis
de nombreuses petites plaques ou écailles; 19 rang, d'écaillés
alongées. 214 -H 93. De l'Egypte. — 24) coluber tra-
BALis (i). Un peu plus fort que notre Coronelle lisse, de
laquelle il ne diffère guère que par ses écailles surmontées
d'une faible carène : Patrie: la Tartarie. 25 Rangées d'écaillés.
195+75. — 25) COLUBER GUTTATUS. De lAuiérique du
Nord. D'une taille plus forte que notre Coronelle lisse , il
offre en outre une tête plus petite et une queue moins longue.
L'abdomen est un peu anguleux. 210 + 56 ; 25 rangées
d'écaillés lisses. Dessus gris-rougeàtre, moucheté de noir , et
relevé par 3 ou 5 rangées de taches, dont les mitoyennes sont
assez larges et plus ou moins orbiculaires. Un trait noir
bifourchu sur l'occiput, et une bande entre les yeux. Des-
sous jaune foncé, avec de taches noires carrées et alternes. -
26) coLUBERLEOPARDiNus. Système de coloration analogue
à celui du Golub. guttatus, avec cette exception que les taches
(i) C'est le Col. Dione Pall. du Musée de Berlin , où noUe Psain-
mophis moniliger poiie le nom de Coluber trabdlis. Pall.
150 REVUE SYNOPTIQUE.
dorsales sont moins larges et souvent confluentes. Formes
plus délicates que dans le précédent. Tête comme chez la
Couleuvre d'Esculape; 23 rangées d'écaillés lisses. 240 + ^5.
Le Sud-Est de l'Europe, et l'Afrique septentrionale. — ay)
COLUBER coNSPiLLATUS. Très aualoguc au précédent,
pour le système de coloration, mais à formes plus lourdes, à
écailles plus grandes et à plusieurs petites plaques frênaies.
Des bandes transversales au lieu de taches sur le tronc ; une
tache en massue précédée par un trait en angle sur l'occiput.
2 1 Rangées d'écaillés 210 + 68. Originaire du Japon.
6me Genre des serpens non-venimeux terrestres: FI ERP ET O-
DRYAS. Les Erpétodryas sont des Couleuvres qui aiment le
séjour dans les bois ou qui fréquentent ordinairement les
arbres. Ils rappelent les Couleuvres par leur organisation ,
mais ils ont des formes plus élancées, leur tête est plus effilée,
et la plupart offrent une livrée d'un vert plus ou moins uni-
forme. Ils ont les mœurs sauvages et habitent les pays chauds
des deux mondes, mais n'ont point encore été observés ni en
Afrique, ni à la Nouvelle-Hollande. L'Europe et le Japon n'en
produisent non plus. La plupart se nourrissent d'oiseaux.
i) H ERPETODRYAS cARiNATus. Serpent remarquable
parce que son dos étant garni de deux rangées de plaques, le
nombre total de ces rangées est pair, exemple unique dans
tout l'ordre des Ophidiens. Il est encore remarquable parce
que toutes les parties sont sujettes à varier considérablement.
12 Rangées d'écaillés, dont les deux dorsales sont souvent
surmontées d'une forte carène. Plaques variant de 1/^1 -^ 98
à 199 -+- 204. On observe dans cette espèce plusieurs races
distinctes par leurs formes plus ou moins élancées. Dessusbrun
tirant au vert , au gris noir , ou au rouge; dos quelquefois plus
clair. Dessous jaune. Habite le Brésil et est très-commun à
Surinam. Parvient à une taille de 6 pieds. — 2) h erpéto-
dryas SERRA. Espèce très rare du Brésil. Formes grêles ,
tronc fortement comprimé, dos en carène, queue assez déliée.
REVUE SVJNOlMinUE. 151
abdomen ani>iileux. Plaques frontales étroites. Ecailles forte-
ment carénées, lancéolées et disposées sur 21 rangées. 241 -+-
106. La dernière dent maxillaire longue et sillonnée. Une
suite de larges taches dorsales carrées sur un fond d'un gris
rougeâtre pâle, qui passe au noir sur la queue. — 3) her pe to-
DRYAs viRiDissiMus. Tête large et comprimée; abdomen
assez anguleux; 19 rangées d'écaillés à surface unie et très
luisante. Taille de 2 à 3 pieds. D un vert bleuâtre, plus clair
sur le dessous. 2i5 4- I ip. Habite Surinam. — 4)herpeto-
DRYASoLFERSii. Fomics nioius effilées que le précédent,
les dernières plaques labiales larges. Vert , à tête et raie dor-
sale d'un brun vif. Une raie noire derrière l'œil. Abdomen
convexe. 178 "^9^. Du Brésil et de Surinam, où il forme une
variété distinguée par les teintes vertes à-peu-près unifor-
mes. 5) IIERPETODRYAS MARGARITIFERUS. Taille
et formes de lErpétodryas d'Olfers; mais à tête un peu plus
large. 19 Rangées d'écaillés faiblement carénées, noires à centre
bleu et à pointe jaune. Sommet de la tête brun vif, région
des tempes noire. i54~^ ii5. De la Nouvelle -Orléans. —
6)herpetodryas boddaertîi. Voisin de l' Erpéto-
dryas d'Olfers; mais à abdomen un peu anguleux, à tête
plus déprimée, a plaques labiales plus étroites, et d'un
vert gris ou olivâtre uniforme. 170+ 102. De Surinam. —
7) herpetodryas aestivus. Distingué des trois précé-
dens par 17 rangées d'écaillés lancéolées et fortement caré-
nées, par des formes plus grêles^ et par des teintes d'un beau
vert d'herbe. Habite les deux Amériques. 1^5 -H 3o. —
8) herpetodryas tricolos. Port de FErpét, très vert,
mais de rhoindre taille; aussi sa tête est-elle plus courte,
grosse à la base et très conique; le tronc est moins haut, et
la plaque frênaie manque. i5 Rangées d'écaillés carrées
et lisses. Les plaques occipitales très développées. Dessus
vert-olivâtre ou brunâtre; dessous jaune; une raie noire va
de lœil aux côtés du cou. i?>o H- iif). Assez rare dans l'île
152 REVUE SYNOPTIQUE.
de Java. 9) herpetodryas goudotii, Formes très effi-
lées, queue extrêmement déliée. Brun jaunâtre sur le dessus;
sur les flancs de nombreuses raies noires et obliques, pro-
duites par les bordures des écailles; côtés de l'abdomen
tachetées de noir qui forme une raie sur les côtés de la queue.
21 Piangées d'écailies lancéolées et lisses. 186 -h i58. Patrie:
l'île de Madagascar. 10) herpetodryas oxycephalus.
De très forte taille, et du port des Couleuvres. Tronc assez
comprimé et haut; abdomen fortement anguleux; queue
longue et vigoureuse; tête acuminée, particulièrement le
museau; plaque frênaie petite et très alongée. 25 Rangées
d'écaillés lancéolées et lisses. Vert, dessous jaune, queue
brune. 25o H- i4o. Patrie: file de Java. L'île de Célèbes
produit une variété de climat, reconnaissable à ses teintes
brunes, qui passent au noir sur les parties postérieures. —
II) HERPETODRYAS LiNEATUS, Petite cspècc de Surinam,
où elle est très-commune. Gris -blanchâtre, dessus brunâtre,
avec trois raies foncées. 19 Rangées d'écaillés lisses. Oeil
grand, plaque verticale étroite. lyo-i-yo. Le Brésil nourrit
un ophidien toutà-fait analogue, mais dont toutes les
écailles sont bordées de noir, et les raies dorsales interrom-
pues et composées de taches noires. — 12) herpetodryas
HELENA. Très jolie espèce de Bengale, où elle est assez rare:
écailles petites, lisses, et disposées sur 27 rangées; formes
très effilées. Plaques: 23o +90. Dessous couleur de nacre.
Dessus rose pourpre, passant au brun vers les parties posté-
rieures; sommet de la tête de la dernière teinte; une raie
dorsale vert-jaunâtre ; sur la nuque, une paire de raies bleues
en massue , et renfermant une ligne en zigzag qui se pro-
longe sur le dos. l3) HERPETODRYAS RHODOGASTER.
Teintes: dessus comme dans l'Erpétodr. rayé; dessous rouge»
Formes beaucoup plus élancées que dans l'Erpét. rayé; mais la
lête est peu grande, ramassée et revêtue de lames peu dévelop-
pées; frênaie petite. Nombre des plaques abdominales 186,
REVUK SYNOPTIQUE. 153
des caudales au dessus de 70; 17 rangées d'écaiHes lisses.
Habite l'île de Madagascar. — i4) herpetodryasge mi-
nât us. De Java. Taille petite. Formes assez effilées; tronc
cylindrique partout d'égale grosseur. Tête petite, presque
d'une venue avec le cou, déprimée et à museau obtus. i5
Rangées d'écaillés lisses en lozange. 166 + io5. Marbré de
brun-gris foncé ; deux raies dorsales d'un gris-argenté. Un
demi-collier jaunâtre sur la nuque. — i5) herpetodr yas
PSAMMOPHis. Ressemble à la Couleuvre jaune et verte par
le port et le système de coloration ; mais ses formes sont plus
élancées, l'abdomen est un peu anguleux, et la tête plus
effilée. Physionomie rappelant celle des Psammophis; plaque
verticale alongée. 196+ ii4« 17 Rangées d'écaillés Uncéolées
ou lisses. Patrie: la Nouvelle-Orléans. — 16) herpeto-
DRYAS DENDROPHis. 1 5 Rangées d'écaillcs caréuécs ct lan-
céolées. Dessous de la queue aplati ; ventre convexe.
î4o-l- 196.^^ Dessus brun-olivâtre, marqué de nombreuses
bandes étroites transversales foncées , qui renferment des
taches claires. De Cayenne. — 17) herpetodryas dip*
SAS. Rappelé les Dipsas par la configuration de sa grosse tête.
Yeux très grands. Ecailles lisses, grandes, disposées sur i3
rangées. Formes élancées et cependant vigoureuses , queue
assez déliée. Noir-bleuâtre luisant. Dessous et parties anté-
rieures jaune- brunâtre, les dernières couvertes de marbrures;
des taches en triangle sur les flancs. 194 ^' i3o. Espèce de
grande taille, originaire de l'île de Gélèbes. — 18) herpe-
todryas GETULus. Ses formes lourdes le rapprochent des
Couleuvres. Tronc gros, abdomen anguleux. Tête presque
d'une venue avec le cou. Museau tronqué , à plaque rostrale
voûtée. Yeux petits. 21 Rangées d'écaillés lisses et en lozange.
216 -H 44- Noir, varié de bandes et raies jaunes enchaînées
entre elles. L'Amérique du Nord. — 19) herpetodryas
cursor. D'une taille peu forte. Formes des Couleuvres.
Dessous de la queue assez convexe; i6à 17 rangées d'écaillcs.
154 REVUE SYNOPTIQUE.
Noirâtre, avec 4 ^ixies jaunes sur le dessus. 1954- io5. Des
deux Amériques.
Le septième et dernier genre des serpens terrestres, les P S A M-
MOPHIS comprend ces Couleuvres qui se rapprochent des ser-
pens d'arbre par leurs formes et par plusieurs points de l'organi-
sation. La plupart habitent des lieux incultesou sablonneux cou-
verts de broussailles. Ils offrent une anomalie dans le système de
dentition, en ce queles dents postérieures et celles du]niiheu sont
ordinairement plus longues queles autres et quelquefois sillon-
nées. Leur tête est aiongée, peu large et revêtue de plaques
dont la verticale est très étroite; la région du frein est en
gouttière. Quelques-uns ont des formes assez élancées et un
corps mince; d'autres se rapprochent, par leurs formes ramas-
sées , des Couleuvres. Ils habitent les contrées chaudes et
tempérées des deux Pdondes , mais n'ont pas encore été
observés à la Nouvelle Hollande. Ils parviennent rarement à
une forte taille, i) psammophis lacertïna. Taille plus
forte et formes plus lourdes que dans les autres espèces. Se
reconnaît facilement à ses écailles creusées d'un sillon, et au
sommet de la tête concave et séparé en manière de casque.
Plaque verticale très étroite; frontale antérieure et occipitales
petites. Dessus brun-olivâtre ou verdâtre, orné de 5 rangées
de taches ; dessous jaunâtre; plaques labiales et mentales avec
de larges taches vertes. 189 + 80. Habite presque tous les
pays entourant la Méditerranée. — 2) psammophis mo n i-
LîGER. De moindre taille et à formes moins robustes que le
précédent. Tête moins large et plus déprimée. Brun verdâtre
ou olivâtre; une raie dorsale jaune; souvent deux raies sem-
blables sur les flancs. Plaques de la tête ornées de grandes
taches effacées. Varie extrêmement tant pour les formes que
pour le système de coloration. Plaques abdominales i36 à
170; pi. sous-caudales 62 à 126; i5 à 17 rangées d écailles
lisses. Patrie: toute l'Afrique jusqu'au Levant; la pointe
australe de ce continent produit un grand nombre de variétés
REVUE SYNOPTIQUE. 155
de cette espèce, et on en trouve une race analogue à île de
France. — 3) psàmmopiiis pulverulenta. De très petite
taille. Queue assez courte. Dents sillonnées cxirèmement
développées. Tête conique; museau bombé et assez court;
plaque verticale assez effilée. Jaune-rougeàtre, variant au
brun et au noir; tête rayée de noir; une raie dorsale foncée
accompagnée d'une rangée de tacbes alternes. L(S teintes
varient assez d'un individu à l'autre. i53-h 54- Du Bengale,
de Sumatra et de Java. — 4) ps A-Mimophis seychellensis.
Tête effilée et déprimée, museau tronqué; 17 ran. d'écailles
lancéolées et fortement carénées. Brun -foncé varié de
taches blanches et noirâtres alternes; une raie claire bordée
de noir va des lèvres sur les côtés du cou. 188-+-107. —
5) PSAMMOPHis antillensis. Formcs effilées. Port du
Psamm. moniliger. Tête large et conique; museau terminé
par une pointe émoussée. La plaque verticale est moins
alongée que d'ordinaire. Toutes les dents d'égale longueur.
Dessus brun-jaunâtre, orné de 5 raies foncées qui s'effacent
plus ou moins avec l'âge. Dessous jaunâtre. Taille: 3 pieds
environ; 17 à 19 rangées d'écailles lancéolées et lisses. Pla-
ques: 190 -H 122. — 6) PSAMMOPHis DAHLii. Sc rap-
proche par ses formes très élancées et grêles des Dendrophis.
Abdomen un peu anguleux. Tête étroite et alongée, mais
garnie de plaques plus développées que chez les précédentes.
Oeil grand; deux plaques oculaires antérieures. Dents toutes
d'égale long^ueur. Une grosse glande surnuméraire derrière
la lacrymale. Dessus gris-olivâtre; 4 ^^ ^ taches en oeil sur
les côtés du cou. Longueur 3 à 4 pieds. Plaques: 211 + 122.
Originaire de la Dalmatie; se trouve peut-être aussi en
Egypte. — 7) PSAMMOPHIS elegans. Espèce assez jolie
et rare de la côte occidentale de l'Afrique. Formes assez
effilées. Museau conique alongé, un peu retroussé et tronqué
en dessous. Dessus brun-pâle, avec trois raies foncées. Des-
sous : ([i:atre raies effacées et verdâtres sur un fond jaune.
156 REVUE SYMOPTÏQUE.
191 -i- 159; 17 rang, d'écaillés petites , lancéolées et lisses. —
8) PSAMMOPHis TEMMiNCKii. Ptéunit au port et aux
formes lourdes des Couleuvres la physionomie des Psammo-
phis. A-bdomen étroit et anguleux. Dessus brun-clair, relevé
par 4 raies foncées; écailles marquées d'une ou de plusieurs
taches noires. 180-+-10J. Du Chilé. —
La quatrième famille des serpens non-venimeux renferme
les Serpens d'arbre. Ils sont particulièrement propres à
peupler les grandes forêts des régions chaudes. En assez petit
nombre dans l'Afrique, et très rares à la Nouvelle Hollande ;
l'Europe n'en produit que des espèces anomales. Ils ont les
formes ordinairement très alongées, passent la plus grande
partie du jour sur les arbres ou les arbustes , et se nourrissent
d'oiseaux ou de reptiles sauriens.
Le premier genre de cette famille comprend les DENDRO-
PHIS. Ce sont, pour ainsi diie, des Couleuvres à formes très
alongées et grêles. Leur tronc est comprimé, l'abdomen et
même la queue sont ordinairement anguleux et revêtus de
lames très larges. Les écailles, disposées sur des rangées assez
obliqueSjSont de forme lancéolée ou même linéaire surle cou,
La queue est très effilée ; la tête offre à-peu-près la même
organisation que celle des Couleuvres ou des Erpétodryas,
mais ses formes sont beaucoup plus élancées. L'œil est grand
et à prunelle orbiculaire. Les Dendrophis sont ornés de
teintes très vives , et habitent les contrées chaudes des deux
mondes; ils n'existent pas en Europe et ils sont rares dans la
Nouvelle Hollande. — i) dendrophis li o ce r eu s. Ecailles
carénées, disposées sur i5 rangées. La plaque frênaie manque
i55 + i45. Dessus couleur de bronze, passant sur le devant
au vert et au blanc sur le dessous. Une raie noire, derrière
l'œil. Dents délicates et dégale longueur. Depuis la Martinique
jusqu'au Brésil et au Chilé. — 2) dendrophis catesbyi.
Très voisin du précédent , mais il s'éloigne par des
écailles lisses dont on compte 17 rangées, par des teintes
REVUK SYNOPTIQUE. 157
verdâtres et par une queue un peu plus effilée. 170 -4- 184. De
rîle St. Doniingue. 3) D ENDROPHis aurata. Formes plus
délicates que dans aucun autre serpent. Tête assez petite ,*
museau plus court que d'ordinaire, yeux grands, abdomen
convexe: i3 rangées d'écaillés lisses. Teinte dominante:
bronze doré. i44 4- i^^* Extrêmement rare à Surinam —
4) DENDROPHis PICT A. Dans toutc l'Afrique ct l'Asie iu-
tertropicales, depuis le Sénégal jusqu'à la Nouvelle Hollande.
Assez sujetà varier. Ecailles lisses; une rangée dorsale d'écaillés
très larges en forme de plaques. Angles de l'abdomen saillans et
échancrés. Dessus brun-bronzé. Côtés de l'abdomen marqués
d'une raie jaune bordée de noir. Dessous blanchâtre. Sur les côtés
du cou souvent des taches obliques noires et bleues. iy5 •+•
128. — 5) DENDROPHIS F O R M O S A. Taille ct port du précé-
dent ; mais sa tête et les écailles dorsales sont plus grandes ,
les yeux plus volumineux , les lames occipitales plus petites ,
et la teinte du fond est un beau bleu foncé relevé sur les
flancs par deux raies noires. 180 -f- i4o. Patrie: les îles de
Java et de Sumatra. — 6) dendrophis rhodopleuron.
A formes plus effilées que les précédens. Queue très plane
en dessous; tête déprimée; 17 rangées d'écaillés carénées ;
dents maxillaires postérieures sillonnées ; angles de l'abdomen
saillans et échancrés. D'un rouge pourpre pâle , passant tan-
tôt au jaune , tantôt au vert ou au brun , et varié plus ou
moins de noirâtre. Dessous tirant sur le jaune ; la ligne
médiane du dessous de la queue marquée |d'une raie noire
210 4- iy4' De l'île d'Amboine. — 7) dendrophis ornât a.
Formes un peu moins élancées que d'ordinaire. D'un beau
vert foncé , orné sur le dos de traits jaunes et rouges de
diverse figure, et varié de noir qui occupe les bords des
écailles. Tête avec plusieurs bandes jaunes. Angles de l'abdomen
extrêmement saillans et échancrés; ly rangées d'écaillés lisses.
200-f-ii3. Depuis le Bengale et Ceylan jusqu'aux îles de
Sumatra et de Java. — 8) dendrophis praeornata. Du
i58 REVUE SYNOPfiQlJE.
Sénégal. Voisin du précédeiît ; mais à abdomen presque con-
vexe et à corps moins gros. Jaune-citron , relevé sur le dos
par trois raies noires qui sont remplacées , sur le cou et la
lête , par des taches et bandes transversales. Dessous gris
pourpre; côtés de Tabdomen marqués d'une suite de ]^»v)ints
foncés. 178 -î- 12 5. 9) DENDROPÎïlS S M A R-A G ï> I N A.
A teintes d'un vert brillant uniforme. ï5 Rangées décailles
fortement carénées. Angles de Fabdomen fortement saillans;
dents maxillaires postérieures assez longues. i65 H- i33.
Habite la côte d'or. — 10) dendrophis golubrïna. Es-
pèce anomale, du Gap de B. Esp. , qui rappelé par ses formes
élancées mais très vigoureuses les Herpétodryas ou même les
Dipsas, Tête très grosse, à plaques ramassées dont les fron-
tales antérieures petites; œil assez volumineux; une dent
postérieure maxillaire longue et sillonnée. 21 Rangées d'écail-
lés fortement carénées; poumon avec un lobe accessoire.
Brun verdâtre ou olivâtre foncé ; dessous jaune verdâtre.
189 -i- 1 13.
Les DRYioPHis forment le deuxième genre des serpens
d'arbre. Ils sont très reconnaissables à leur museau extrê-
mement effilé et le plus souvent alongé en une pointe plus
ou moins saillante. Leurs formes sont des plus élancées, le
tronc assez comprimé et à abdomen convexe. La plupart ont
des teintes vertes ou couleur de bronze. La mâchoire supé-
rieure porte ordinairement plusieurs dents très développées
et sillonnées au milieu et au bout postérieur. Les écailles sont
souvent de forme linéaire, et les lames abdominales assez
hautes. L'œil n'est pas volumineux ; dans les premières espèces
la prunelle est transversalement alongée. Ce sont de véritables
serpens d'arbre qui habitent les pays intertropicaux de
l'Asie et des Amériques. On peut établir dans ce genre deux
divisions géographiques. A. Les Dryiophis de l'ancien
monde ou Dryiopliis propremen t dits, ont des dents
maxillaires sillonnées et la pupille de l'œil alongée dans le
aKVlJK SYlNOPTIQUE. 159
sens horizontal. i)dryiophis na su ta. Depuis le Malabar et
Ceylan jusqu'à Java, aux îles Mariannes et Philippines. Ecailles
lisses, celles delà rangée dorsale un peu plus grandes. Plaque
rostrale prolongée en pointe. Vert dTierbe, dessous plus
clair; une raie jaune s'étend le long des côtés de l'abdomen et
de la queue. 180 -h i53. — 2) dryiophis langaha.
Serpent curieux de l'île de Madagascar. Museau prolongé
en une appendice charnue d'un demi pouce de longueur,
revêtue de petites écailles, et de forme assez variable, souvent
acérée, et quelquefois comprimée et élargie en forme de
feuille. Écailles carénées. Teintes d'un brun vif, passant au
jaune sur le dessous. Formes moins élancéts que d'ordinaire.
Ventre un peu anguleux. 148 + i36. — 3) dryiophis
PRASiNA. Tête conique, museau tronqué; plaque rostrale à
bords saillans, labiales très hautes. Dents sillonnées assez
développées. Ecailles lisses. 200 -+- 160. Patrie: le Bengale, la
Cochinchine, les îles de Java , de Sumatra et de Célèbes; les
individus de cette dernière île forment une variété à queue
plus élancée. — B. Les fau x-dryiophis ou les dryio-
phis du Nouveau Monde ont des dents moins développées
et une prunelle orbiculaire. — 5) dryiophis cateseyi.
A teintes vertes et écailles carénées. Museau très comprimé
et assez obliquement tronqué au bout. 204 + 1^0. De
Cayenne jusqu'à la Floride. — 6) dryiophis argenté a.
Formes plus délicates que d'ordinaire; six plaques à la lèvre
supérieure; écailles lisses. Blanc-argenté moucheté d'une
teinte plus foncée et orné, sur les flancs et le dessous, de larges
raies longitudinales d'un bleu profond. 200-1-90. Habite à
Cayenne. — 6) dryiophis aura ta. A formes plus sveltes
encore que le précédent. Toutes les parties extrêmement
délicates. 190 -{- 162. D'une belle couleur de bronze doré,
moucheté de blanc et de noir. Depuis le Brésil jusqu'au
Mexique et peut-être aussi à la Floride. —
Les serpens d'aibre renfermés dans le genre DIPSAS 5é
160 REVUE SYNOPTIQUE.
reconnaissent à leur tête assez grosse , large et obtuse , à leiit
tronc vigoureux mais très comprimé ; à la prunelle de leur
œil ordinairement verticale ^ etc. Cependant, ils ont les
formes alongées propres aux animaux de cette famille. Leurs
écailles sont le plus souvent lisses et lancéolées et on observe^
dans beaucoup d'espèces, une rangée dorsale de plaques plus
grandes que le reste; les plaques de la tête très ramassées , l'ab-
domen convexe et les narines très ouvertes. On leur voit quel-
quefois aux mâchoires une dent postérieure sillonnée. Les
Dipsas habitent de préférence les grandes forets de l'Asie et
de l'Amérique intertropicales. Les autres parties du monde en
sont dépourvus , ou nourrissent des espèces plus ou moins
disparates et en très petit nombre, i) dipsas dendro-
PHILA. De grande taille, atteint jusqu'à ^ pieds de longueur.
Formes assez vigoureuses. Tête très grosse. Des dents posté-
rieures sillonnées. Un petit lobe du poumon accessoire. 21
Rangées d'écaillés , dont les dorsales assez développées.
220 — 102. Corps d'un beau noir luisant et entouré de nom-
breuses bandes d'un jaune d'or. Se trouve dans l'île de Java et
à Sumatra ; les individus de Célèbes ont les bandes jaunes
plus serrées et l'occiput orné de plusieurs taches de la même
couleur. — 2) dipsas multimaculata. Port du précé-
dent, mais à taille beaucoup moins forte. Dents toutes
d'égale longueur. D'un gris brun ou olivâtre bigarré de brun
foncé; sur les flancs, 2 rangées de taches dont les supérieures
assez étendues; sommet de la tête marqué d'un trait en angle;
une raie foncée derrière l'œil ; dessous couleur de rose ,
marbré et tacheté de brun, i^ Rangées d'écaillés lisses,
207 + 84. Habite au Bengale et se trouve dans les îles de
Java et de Célèbes. — 3) dipsas trigonata. Du Bengale.
Voisin du précédent ; mais à dent maxillaire postérieure très
longue, à queue plus courte et à teinte d'un jaune olivâtre,
marqué sur le dos de taches triangulaires blanches et bordées
de noir. 233 j^ 80. — 4) «ipsas cynodon. Beau serpent
REVUE SYINOITIQUE. IGl
d-es îles de Java et de Sumatra, de grande taille et à foi ines assez
effilées. Tronc extrêmement comprimé. 21 Rangées d'écaillés;
les dorsales en hexagone et assez larges. Dents plus larges à
Textrémité antérieuie des mâchoires. Oeil très voluniineux.
D'un gris-pourpre, finement marbré ou moucheté de brun et
relevé par des bandes noires et serrées.Plusieurs taches blan-
ches sur les flancs. Une raie noire derrière l'œil. 260 -h i4o. —
DiPSAS DRAPIEZ I. 5) Fomics ct taille à-peu-près sem-
blables à celles du précédent; mais à museau beaucoup plus-
court, à tronc moins haut, et à dents d'égale longueur par-
tout. La plaque du frein manque ordinairement. 260 -h i3o.
Dessous rose pourpre bordé de noir; une suite de taches
rouges bor(iées de noir près de l'abdomen. D'un brun
presque uniforme dans l'âge adulte. Observé à Ceylan, à
Sumatra, à Java, à Célèbes et à la Nouvelle-Guinée. —
6) DIPSAS iRREGULARis. Port du D. dcndropliilc. Taille
assez forte. Ecailles dorsales de la même étendue que les
autres. Écailles occipitales assez petites. Plaques souscau-
dales souvent en partie simples. D'un brun olivâtre, relevé
par des bandes foncées et étroites qui descendent du dos
obliquement en arrière, mais qui s'effacent avec l'âge. 23
Hanaées d'écaillés. 25o-h 100. Patrie: les îles de Célèbes et
dAmboine. — ^7) dipsas colubrina. Ecailles dorsales
comme dans le précédent, auquel il ressemble aussi par
les teintes; mais à formes beaucoup moins alongées, à
queue courte et vigoureuse, à corps entouré de 27 rangées
d'écaillés, et orné de 6 suites détaches foncées disposées en
quinconce. 183+67. Habite l'rle de Bourbon et Madagas-
car. — 8) dipsas iEGYPTiAcus. Yoisiu du Dips. anomal
par le port et le manque d'écaillés dorsales larges; mais
d'une taille moins forte, à corps moins haut, et à tète plus
petite, très déprimée et obtuse. Il n'offre qu'une seule paire
de petites plaques mentales et une teinte d'un brun-gris
enfumé , avec de nombreuses bandes claires et effacées. Les
1 1
1 i>2 REVUE- SYNOPTloy E.
<'uxiilles sdul pelites et on en compte 4ï rangées. 256-+- y 4' —
p) DiPSAS NEBULATA. Taille petite. Tête très haute; mn-
seau court et liant; point de plaque frênaie. Formes moins
effilées que cfordinaire. Dents délicates et en peigne. ï5
llano-. d'écaillés à surface unie. 180 + 80. Une ran£fée de
lames dorsales. Cellules du poumon s avançant sur la trachée.
Glandes lacrymales et nasales assez développées. Corps
chargé de marbrures brunes et claires: côtés du dos ornés
de taches ou i)andes. Dessous jaune. DeSurinam. — io)dïpsas
M I K A N 1 1. SeuiblabU? au précédent, mais à tête plus alongée ,
à museau très gros et arrondi, à tronc moins haut et à lames
dorsales moins développées. Dessus d\in brun -jaunâtre
marbré de brun et orné de larges taches ou bandes foncées.
Bout du museau et collier blanchâtres. 170 H- 58. Cette
espèce parait remplacer la précédente du Brésil. — ii)dipsas
WEiGEî. î. Foriues' excessivement grêles et délicates. Têle
oetite 5 large à la base et conique. Queue de ia moitié de la
longueur du tronc. Ecailles dorsales assez larges. 2*56 4- i6o.
Dessus blanc jaunâtre ou rougeâtre bigarré de brun , et relevé
par une rangée de grandes taches d un brun rouge bordées
de noir. Habite le Brésil. — 12) dipsas catesbyi. Offre
plusieurs rapports avec le précédent, mais il a des formes
beaucoup moins alongées; son museau est plus large et tron-
qué au bout; les plaques gulaires sont très développées;
celles de la têle beaucoup plus larges; ses écailles sont plus
grandes; les taclies du tronc ont plus d'étendue et on voit un
collier et une bande d'une teinte claire entre les narines.
i(J2 -h 82. Des Guyanes. — 1 3) dipsas pavonina. Inter-
médiaire entre les deux précédens sous presque tous les rap-
ports. Tête comme dans le Dips. de Gatesby; mais à queue
plus longne et garnie de i34 lames. Lames abdominales: 2ïy.
Teinte du fond ne tirant pas sur le rouge; taches toutes
ovales. Paraît représenter avec le précédent, aux Guyanes
le Dips. de Weigel, i4) dipsas bucephala. Que Ton
REVUE SYNOPTIQUE. \(]:i
(lit originaire de l'île de Sumatra. Très lecoiinaissahle à son
tronc assez haut; à sa lete petite mais très large , grosse et à
museau extrêmement court ; à l'étendue des lanies dorsa-
les; aux lames abdominales qui s'avancent jusque sous le
menton etc. Les lames delà tête sont très ramassées , et les
frênaies manquent totalement. Pointe de la mâchoire infé-
rieure courbée en haut, aoo -\- io5. Dessus d'un brun rou^feà-
tre, relevé par de nombreuses bandes transversales larges et
d'un jaune rougeâtre bigarré de brun. — i5) dipsas die-
PERiNKii. De moyenne taille. Tronc haut, plus gros vers
la tête qui est, proportions gardées, plus grande que dans
aucune autre espèce. 21 Rangées d'écaillés faiblement caré-
nées. Abdomen un peu anguleux. Prunelle de l'œil ronde.
Dents d'égale longueur. Queue effilée et grêle. Dessus brun-
clair, avec des traits en angle. Dessous tirant sur le jaunâtre;
une raie fine derrière l'œil. 224 -t~ i5o. De Surinam , où l'es-
pèce est des plus rares. — 16) dipsas boa. Espèce curieuse
et disparate. Remarquable par la petitesse des lames du som-
met de la tête qui sont saillantes et bombées; par son museau
très court , étroit et conique; par la présence de lames indivi-
sées sous la queue; par un tour de petites plaques oculaires;
par son œil volumineux à prunelle orbiculaire, et par des
plaques mentales assezlarges. II existe plusieurs dents longues
au bout de la mâchoire inférieure. 1 54 -h 98; i3 rang,
d'écaillés lisses , dontles dorsales très larges.D'un gris-pourpre
sur le dessus, relevé, sur les fiancs, par une vingtaine de
larges taches couleur de rose. Habite l'intérieur de l'île de
Java. - — 17) DIPSAS CARINATA. Dc petite taille. Tête
extrêmement large et grosse; museau arrondi et plus court
que dans aucune autre espèce; lèvres saillantes et courbées;
œil entouré de 4 plaques; lames mentales assez volumineuses;
i5 rangées d'écaillés carénées, dont les dorsales un peu
plus grandes et à bout tronqué ; dents délicates et en peigne ;
os du crâne minces. 168 -f- 60. Dessus brun marron avec «les
î64 REVUE SYINOPIIQUE.
bandes loiicees et serrées ; un trait à quatre pointes sur ia
nuque. De Java. i8) dipsas laevis. Egalement de Java ,
de moindre taille encore que le précédent, auquel il res-
semble, sauf qu'il a tous les traits beaucoup moins prononcés,
les formes plus ramassées et la queue plus courte, que son
corps est revêtu d'écaillés lisses , qu'il manque de plaque
frênaie et d'oculaire inférieure, enfin que les lames occipitales
sont entourées d'une rangée d'autres lames plus petites. D'un
brun foncé, relevé, sur le dessus, par des bandes transversales
noires. i58 -j- 37. 19) dipsas l eu co cephala. Écailles
presque de même grandeur, à bout légèrement tronqué et
disposées sur 19 rangées. Abdomen faiblement anguleux.
Dessus gris-pourpre marbré de brun et relevé par environ
5o bandes transversales et foncées. Formes assez élancées.
244-4- 108. Du Brésil. — 20) dipsas macrorhi n a. D'une
taille considérable. Formes élancées quoique robustes. Tête
assez grosse; museau très large, presque d'une venue à bout
tronqué et arrondi. Narines extrêmement ouvertes. Lame
rostrale s' avançant sur le sommet du museau: frontales anté-
lieures petites. 19 Rangées d'écaillés fortement carénées,
271 -h 118. Il existe des dents maxillaires postérieures sillon-
nées. Corps marqué d'anneaux alternes de noir et de blanc;
collierblanchâtre; vient de Cayenne. — 21) dipsas natte-
RERi. S'éloigne des autres Dipsas par sa tête, dont les
formes se rapprochent de celle des Dendiopbis. Le museau
cependant en est court et étroit, et la prunelle de l'œil verticale.
Lames du museau petites, du sommet de la tête alongées et
étroites. 17 Rangées d'écaillés lancéolées, surmontées d'une
carène et de la même étendue partout. Une dent maxillaire
postérieure plus longue que le reste. De petite taille. Brunâ-
tre; dos avec 4 raies foncées. 168 +74- Du Brésil. — 22) dip-
sas puNCTATissiMA. Taille, port et formes absolument
comme dans le précédent ; mais à écailles lisses, à queue plus
élancée, à teintes plus claires , à plaque verticale plus alongée^
mWE SY^OPTIQliE. 105
et à œil moins grand. iDo-i-po. Habite les terres au Nord
du jleuve des Amazones. — 23) dipsas gai m ardu. Très
jolie espèce de l'ile de Madagascar, à formes assez élancées et
extrêmement délicates. Corps peu élevé , côtés de la queue
légèrement anguleux. Tête assez petite. 17 Rangées d'écaillés
partout d'égale grandeur. 276+116. D'un brun-pourpre
pâle, un grand nombre de bandes transversales sur le dos,
accompagnées souvent de taches sur les flancs. — 24) dip-
sas ANNULAT A. Ressemble au précédent par les teintes et
la physionomie ; mais ses formes sont beaucoup plus ramas-
sées , sa tête plus volumineuse , la queue plus courte, etc.;
186 -\- 89. Depuis le Paraguay jusqu'à la Nouvelle-Orléans. —
23) DIPSAS FALLAX. Espècc disparate, qui se rapproche
des Coronelles. Semblable à la précédente, mais plus robuste,
et à queue plus courte; aussi ses occipitales sont-elles plus
petites, la tête moins haute et l'œil moins volumineux. La
plaque frênaie est alongée et touche à l'œil. II existe au bout
postérieur des mâchoires une longue dent sillonnée. 19 Ran-
gées d'écaillés lisses. 206-4- 55. Depuis la Dalmalie jusqu'au
Levant. Dessus gris-brun marbré de noir et relevé par plu-
sieurs rangées de larges taches foncées. Une tache en croix sur
la nuque.
La cinquième famille des serpens non-venimeux ren-
ferme les Serpens d'eau douce. Ces serpens se rap-
prochent dans leur organisation plus ou moins des Couleu-
vres, et habitent dans les eaux, ou préfèrent du moins le
voismage des rivières ou des lacs à d'autres lieux. Je ne veux
pas dire par là que tous les ophidiens qui ont des habi-
tudes semblables doivent être réunis dans cette famille,
puisqu'il faudrait alors y ranger des Couleuvres et la plupart
des Boas qui offrent une organisation tout-à-fait diveise.
J'ai plutôt réuni sous un même nom les serpens dont je
parle, parce que, analogues entre eux par rapport à leur
organisation et leur physionomie, ils composent une coupe
im REVUE SYNOPTIOIE.
naturelle, mais nullement séparée par des caractères tran-
chés, des autres subdivisions. Cette famille con^prend deux
genres, dont le premier n'offre , à quelques exceptions près,
rien d'intéressant dans l'organisation, tandis que les espèces
du second sont toutes caractérisées par des traits aussi
Tuarqués que curieux.
Le premier, celui des TROPIDONOTES forme un assem-
blage de serpens ^ès analogues aux Couleuvres, mais dont
les formes sont plus ramassées ; qui ont le ventre très large
et convexe, et dont la tête est large, conique mais à sommet
étroit et à museau court. Leur œii n'est pas volumineux et
leurs narines sont peu ouvertes. Ils ont ordinairement 3
plaques derrière l'œil, 19 rangées d'écailies en lozange et
carénées et l'angle de la bouche montant. Souvent de couleur
sombre, mais ornée de taches à teintes vives, les Tropido-
notes ne parviennent pas à une forte taille et la plupart ne
surpassent guère 3 à 4 pieds de longueur. Ils habitent le
voisinage des eaux douces, ou dans les eaux-elles-mêmes et
sont très bons nageurs. Vivant en société, ils sont coriimuns
dans les lieux qu'ils fréquentent , et ce genre est encore
assez riche en espèces. On n'en a point encore observé dans
la Nouvelle Hollande, ni dans l'Amérique méridionale, où
ils sont remplacés par les Homalopsis. L'Afrique méridionale
ne nourrit qu'une seule espèce remarquable par son organi-
sation anomale. — i) tropidonotus natrix. Habite
presque toute l'Europe jusqu'à la Sibérie. Serpent très com-
mun et connu de tout le monde. Reconnaissable à ses teintes
bleuâtres ou verdâtres relevées par des taches noires, car-
rées sur le dessous; et à son collier blanchâtre suivi d'une
large tache noire. Il existe des individus tout noirs, d'autres
sont variés de teintes claires, et on observe dans le midi de
l'Europe une variété à dos raie de jaune. i63-f-62. Habite
les prés et les bords des rivières ou des lacs, et s'établit sou-
vent dans le voisinage des maisons. — 2) tropidonotus
lU:VUi: SYNOPTIQUE. 1(17
QUI NcuNc I Aïus. Grande et belle espèce truii brmi oli-
vâtre, orné de 5 à 7 rangées de taches disposées en quin-
conce. Une raie oblique sur les tempes, une au're sous l'œil.
Teintes très sujettes à varier , soit accidentellenient, soit par
rinfluence d'un climat divers. Les individus de Java ont les
taches du dessus conlluentes pour former des raies longitu-
dinales Ceux des îles Mariannes ont l'abdomen pointillé de
noir. Depuis je Malabar jusqu'aux Philippines et aux Marian-
nes. 134 + 72. Narines un peu verticales; lames frontales
antérieures coniques. — 3)tropidonotus umbratus.
Jaunâtre varié de noir, téîe toute noire. i4^~t"83. Patrie:
Bengale et l'île de Geylan. — 4) t r o p i d o n o t u s r 11 o d o-
MELAS. Aussi joli que rare. Dessus rouge de brique, des-
sous plus clair, dos orné d'une raie foncée, sur les flancs
une suite de points noirs. Tête très large et grosse, museau
court et conique, lames occipitales et frontales petites.
i3 1-4-44' De file de Java. — 5) tropidonotus trian-
GULiGERUS. Vert-olivâtre foncé ; dessous jaune d'ocre ; flancs
ornés de larges taches triangulaires rouges; museau plus
long et plus conique que chez les précédens. 137 +81. Ha-
bite l'île de Java. — 6)tropidonotus ciirysargos.
Formes tout-à-fait analogues à celles du précédent, mais de
taille un peu moindre, à museau moins conique, et à flancs
ornés de bandes noires et de taches jaunes. Dessous couleur
de rose pourpre. 176-I-81. Habile l'île de Java. Une jolie
variété locale à teintes uniformes se trouve à Célèbes, une
autre à teintes vives à Sumatra. — y) tropidonotus
suBMiN I ATUS. Eucorc voisin des deux précédens par
l'organisation, le port et les formes; mais à tête plus courte
et haute, et à lèvre supérieure assez enflée. Brun tirant sur
le vert, sur le rouge ou sur le noir et varié de noir; dessous
jaune avec deux rangées de points noirs; peau nue du cou
ou espace entre les écailles dun beau rouge vermillon ; sur
la nuque, une tache noire précédée d'un collier jaunâtre.
16^ REVUE SYNOPTIQUE.
i3i H- 67. De Java. — 9) tropidonotus tïgrinus.
Port, physionomie et teintes à-peu-près du Trop, à col-
lier; mais là tête est moins déprimée, les écailles sont plus
larges et plus fortement carénées, et les yeux plus volumi-
neux, les taches dorsales enfin ont plus d'étendue, dans
l'espèce du Japon. 161 H- 71. — 10) tropidonotus viba-
KARi. De très petite taille et à formes assez minces. Tête peu
développée et guères distincte du cou. Ecailles faiblement
carénées. Brun pâle, à raie dorsale plus foncée; dessous plus
clair; collier blanc; plaques labiales blanchâtres bordées de
brun. 142 +74* Longueur totale 16 pouces. Du Japon comme
le précédent. — 11) tropidonotus stolatus» Taille
un peu plus forte et formes moins délicates que le précédent;
physionomie rappelant celle du Tropid. subminiatus. Dessus
brun olivâtre foncé, relevé par un dessin réticulaire produit
par deux raies jaunes entrecoupées de bandes noires, et
marqué sur les angles de taches blanches. 146-H 61. Depuis le
Malabar jusqu'à la presqu'île de Malacca; habite aussi les îles
Philippines. • — 12) tropidonotus vittatus. Abonde
dans les lieux inondés dans l'île de Java. Taille et formes à-peu-
près du précédent. Brun livide, relevé par 3 raies noires; une
raie d'un rouge pâle sur la dernière rangée d'écaillés. Lames
du dessous bleu de schiste à bordures noirâtres. i44 "+" 78. —
i3) tropidonotus schistosus. Pessus gris-schisteux ;
dessous jaunâtre. Taille moindre que celle du Trop, à collier.
Tête courte et conique, à plaques ramassées. Yeux petits.
Ecailles surmontées d'une très forte carène. 1 5o + 80. Observé
à Madagascar, au Bengale et aux îles Philippines. — i4) tro-
pidonotus bipunctatus. Ressembler beaucoup d égards
à notre Trop, à collier , et notamment à la variété du midi de
l'E^irope; mais il a la tête plus alongée; les yeux sont plus
petits , le collier et la tache sur la nuque manquent. Dessus
marqué de taches irrégulières Iranversales. Lames abdomi-
nales ornées d'une tache noire. i4i "+" 67. Patrie: la
RFAUE SYINOPTIQUE. 169
Martinique, la Floride, les Carolines, le MexiL|ue , etc. —
TROPiDONOTUS SA u RIT A. Offre , pour les teintes et même
pour la physionomie, une analogie frappante avec le précé-
dent; mais s'en éloigne ainsi que de tous les autres Tropi-
doiiotes par ses formes élancées* qui le rapprochent des
Erpétodryas. Tête plus alongée que d'ordinaire. Teinte du
fond d'un brun foncé , relevé par des raies longitudinales
noires. ï66 4- m. Patrie: l'Amérique du Nord jusqu'à la
Martinique.—- 16) tro?idonotus fasciatus. Atteint
une très forte taille. Tête un peu plus alongée que d'ordi-
naire; écailles fortement carénées ; yeux peu volumineux;
narines étroites et presque verticales. i36 -H 65. Brun gri-
sâtre , relevé par de larges taches foncées rondes et souvent
confluentes. Dessous jaunâtre. Habite les mêmes contrées que
les deux précédens. — 17) tropidonotus viperinus.
Du Sud de l'Europe , se trouve aussi dans les Etats Barbares-
ques et jusqu'à la mer Caspienne. Tête plus alongée que dans
les autres espèces , assez conique, et revêtue de plaques plus
ef61ées. Dessus vert-brunâtre marqué de plusieurs rangées de
taches foncées ; dessous jaune avec des taches noires carrées.
L'Espagne nourrit une jolie variété à raies dorsales jaunes.
186 -H 68. — 18) tropidonotus scaber. C'est un des
serpens les plus curieux , en ce qu'il a les extrémités des
apophyses épineuses antérieures des vertèbres collaires en
guise de dents qui percent les tuniques de l'œsophage. La
glande lacrymale, d'un volume extraordinaire , s'étend jus-
qu'à l'angle de la bouche. D'ailleurs , ce serpent ne s'éloigne
des autres Tropidonotes par aucun trait marquant. Sa tête est
très grosse, courte, ramassée et revêtue de lames de forme
trapue; la frênaie manque. Les écailles, disposées sur 2'j
séries , sont surmontées d'une carène plus prononcée que
d'ordinaire. Le tronc est alongé et la queue courte. 200 + 4^.
Dents petites et d'égale longueur. Vient du Cap. — 19) tro-
pidonotus M o R T u AR I u s. Tête alongée ; narines et yeux
170 REVUE SYNOPTIQUE.
très petits et presque verticaux ; plaques frontales antérieures
et surciliaires petites; plusieurs lames oculaires antérieures;
aS ranpées d'écaillés , surmontées d'une très forte carène.
Teintes à-peu-près comme dans le Trop, à taches en quin-
conce, mais plus sombres. Fait le passage aux Homalopsis.
Du Bengale iSj -4- 70.
Les HOMALOPSIS qui forment le deuxième et dernier
genre des Serpens d'eau douce, méritent à tous les égards ce
dernier surnom. Ils ont les formes le plus souvent lourdes et
ramassées, et leur tête offre une physionomie toute particulière,
quoique cet organe soit d'une conformation assez diverse selon
les espèces : il est très gros , à museau court et arrondi , et
revêtu de lames écailleuses le plus souvent assez nombreuses
et de forme plus ou moins irrégulière. Cette physionomie par-
ticulière des Homalopsis est due en grande partie à leurs petits
yeuxplus ou moins verticaux, et à leurs narines dirigées vers le
ciel et en croissant, et qui sont tellement rapprochées, qu'il
n'existe ordinairement qu'une seule lame frontale antérieure.
Ils ont les lèvres assez enflées et rentrantes, l'angle de la
bouche est assez montant. On leurobserve ordinairement des
dents maxillaires postérieures plus longues et souvent sillon-
nées , et ils ont des glandes de la tête très développées. Leur
squelette est compose d'os assez vigoureux; et les cellules de
leur poumon se prolongent souvent sur la trachée. La plupart
présentent des teintes sombres , et parviennent à une grande
taille. Les Homalopsis n'ont été observés que dans les contrées
chaudes de l'Asie et des Amériques, dont ils habitent les
eaux douces en petit nombre , faisant la chasse aux poissons
ou à d'autres animaux aquatiques, i) homalopsis buc-
CATA. Très caractérisé par sa tête extrêniement grosse et
haute, par le grand nombre de plaques labiales, par ses
petites écailles faiblement carénées, dont on compte jusqu'à 89
rangées. Il a les lames occipitales petites et une frontale anté-
rieure unique par suite de la disposition des nasales, qui sont
REVUE SYNOPTIQUE. 171
rapprochées sur le sommet du museau. Un tour de petites
plaques environnant l'œil. Quatre ou 5 paires de mentales
convergentes, le reste de la gorge revêtu d'écaillés. Dents
maxillaires postérieures sillonnées. Joues assez enflées. Dessus
jaune d'ocre , couvert de larges bandes noirâtres. Une suite de
points foncés le long des côtés du ventre. Sommet de la tête
orné de traits. i6o -|- 78. Formes lourdes. Taille très forte.
Habite l'île de Java. — homalopsis schneideri. De
moindre taille et à formes beaucoup moins trapues que le
précédent, auquel il ressemble par son profd,- mais il a une tête
beaucoup plus alongée et à sommet revêtu d'écaillés sembla-
bles à colles du tronc , de sorte que il n'existe des plaques
que sur le museau. 26 Rangées d'écaillés carénées. Yeux
assez dirigés vers le ciel. i/^ô + Sy. Habite Pondiçhéry , le
Bengale , Java , Timor , Amboine et même la Nouvelle-
Guinée. — 3) HOMALOPSis DECussATA. De très
petite taille ; 19 rangées d'écaillés lisses; queue très ramas-
sée; tête petite d'une venvie avec le tronc , arrondie au bout
et revêtue au dessus de 9 plaques. Corps marqué de bandes
alternes de brun rouge et de blanc ; cette dernière teinte
forme le collier, et une tache sur le museau. i36 -i- 3o.
Habite l'île de Java. — 4)ïi<^^ï^i^opsis leucobaha.
Espèce singulière par la forme de sa tête qui est très large,
grosse , haute , arrondie et à sommet étroit revêtu de 8
plaques peu développées , dont les yeux sont assez petits
et les hautes plaques labiales seulement au nombre de 5 ;
deux oculaires postérieures, une antérieure; 26 rangées
d'écaillés lisses et en lozange. Dessus noirâtre ; bandes irrégu-
lières des côtés et dessous blanchâtre. i54 + 33. Formes
assez lourdes. Habite l'île de Timor. — 5) homalopsis
F L. u M B E a. Formes moins trapues que dans le précédent.
Tête large et arrondie , avec 8 plaques sur le sommet; 19 ran-
gées d 'écailles lisses et carrées ; queue très ramassée. De
Java. 121 -+- 37. TJne dent maxillaire postérieure sillonnée.
172 REVIE S\NOPTIQlE.
Dessus couleur de plomb, dessous blanchâtre. — 6) ii o m à-
Lopsis AER. Assez analooue au précédent ; mais à tétc
plus alongée , à museau moins large, petit et revêtu de lames
moins développées; à tronc plus comprimé , et à queue plus
effilée. 25 Rangées d'écaillés en lozange. i48 + 02. Couleur de
plomb tirant sur le brun, avec deux raies dorsales claires;
flancs jaunes avec une raie foncée. Se trouve à Java et au
Bengale. y)HOMALOPSis sieboldii. Tronc plus com-
primé que d'ordinaire; dos en toit par la forte carène qu'il
forme , abdomen très étroit ; 29 rangées d'écaillés lisses.
Formes ramassées. Tête à-peu-près comme dans l'Homal.
buccata ; mais moins obtuse, à sommet plus étroit, à lames
labiales moins nombreuses et à œil plus volumineux; aussi
observe-ton deux frontales antérieures. Dessus gris-brun
tirant sur le pourpre , couleur presque couverte par plusieurs
suites de très larges taches foncées ; dessous jaune marbré
de brun. 147 + 5i. Du Bengale. — 8) homalopsis
CARI NIGAUD A. Habite les deux Amériques. Voisin de
l'Hom. plumbea de Java; mais à tête plus alongée, à queue
plus effilée; aussi l'œil est-ii plus volumineux^ et les écailles
sont à bout tronqué et surmontées d'une carène assez forte
mais seulement sensible sur les parties postérieures. Cou-
leur de plomb assez foncé; dessous jaunâtre, avec deux
rangées mitoyennes de taches noirâtres. iSy -H 56. — p)
HOMALOPSIS ANGULATA. Port dcs Tropidouotcs ; mais
à formes un peu plus ramassées. Tête grosse et arrondie,
revêtue de 8 plaques assez peu développées , et dont la fron-
tale impaire s'avance entre les nasales. Yeux plus volumineux
que d'ordinaire. 19 Rangées d'écaillés surmontées d'une très
forte carène. Jaunâtre, passant, sur les flancs, au rouge; dessus
orné de très larges taches foncées anguleuses, dont les pointes
se prolongent sur le dessous pour former des taches carrées
et alternes. Dents postérieures sans sillon. 118 -4- 66. Poumon
simple. Depuis le fleuve des Amazones jusqu'r\ la Martinique. —
REVUE SYNOPTIQUE. 17:^
lo) ♦iioMALOPSis pLicATiLis, Asscz recoiiiiaissable à sa
tcte très 'alongée et étroite, mais dont le museau est d'une
Inièveté remarquable ; cà ses grandes écailles émoussées, lisses
et disposées sur if) rangées; et aux teintes. La lame frênaie
manque. Taille*^ très forte. Tronc assez gros et cylindrique.
i34 + 38. Dessus brun roux; sur les flancs une très large raie
foncée accompagnée d'une suite de taches. Dessous jaunâtre ;
sur chaque coté, deux rangées de points brunâtres. Du Brésil,*
il en existe, à la Nouvelle-Orléans, une jolie variété locale,
caractérisée par ses teintes vives. — 1 1) hom alopsîs
MARTii. Tête à-peu-près comme dans l'Hom. plumbea , mais
plus déprimée et un peu plus alongée. Yeux assez petits.
Narines très rapprochées du bout du museau. Tronc beau-
coup plus effilé que d'ordinaire, et cylindrique. 1 5 Rangées
d'écaillés lisses. Corps entouré d'anneaux alternes bruns de
deux teintes ; les adultes sont d'un noir presque uniforme , et
ont la peau très luisante. i58 4- 48. Depuis le fleuve des Ama-
zones jusqu'à Surinam. 12) HO M ALOPSIS REINWARDTII.
De grande taille et à formes assez alongées. Queue très
courte et grosse. 21 Rangées d'écaillés lisses. Tronc presque
partout d'égale grosseur et un peu comprimé, physionomie
ressemblant à celle de l'Homalops. plicatile. Dessus brun-roux
noirâtre, dessous jaune-rougeâtre : ces deux teintes s'entre-
lacent pour former sur les flancs des bandes et des taches,
180 -I- 42. Découvert dans la Louisiane. — i3) homa-
Lopsis LEOPARDINA. Voisin de l'Homalop. angulata par
l'organisation des écailles, de l'Hom. plicatile par la configu-
ration de la tète. Plaque frontale impaire enchâssée entre les
nasales. D'un rouge-brunâtre relevé, sur le dessus ,par 5 suites
de taches en quinconce. Queue alongée par rapport aux-
dimensions du tronc. 117 + ^3. Patrie inconnue. — 14) homa-
Lopsis HERPETON. Espècc tout.-à-fait anomale et un des
serpens les plus remarquables par deux appendices charnues
qui se ])rolongent du hout du museau et qui sont revêtues
Î74 REVUE SYNOl?TiQUlî.
(récaii'es. Plaques abdominales à-peine plus larges que les
écailles et surmontées chacune de deux carènes. 35 Rangées
d'écaiiles fortement carénées. Port, taille et formes de l'Hom.
de Schneider ; mais le tronc est très gros au milieu , la tête
revêtue de petites écailles , et au sommet , de 9 plaques entre
lesquelles on voit plusieurs écailles de forme, irrégulière. Dents
d'égale longueur. 140 H- 96. Brun , rayé d'une teinte claire.
Patrie inconnue.
J'ai réuni les BOAS dans la sixième famille des ser-
pens non-venimeux, ils ont la queue prenante et la faculté de
s'entortiller é.^^^alement avec leiu' tronc autour d'autres corps.
Leur écailles sont nombreuses et les lames du dessous très
peu développées. La tête grosse et à traits prononcés , est
revêtue d'écaillés ou de, petites plaques dont la forme et la
disposition sont assez disparates. Les yeux sont petits et ordi-
nairement à prunelle horizontalement alongée ; les narines
plus ou moins verticales. Les plaques labiales sont souvent
creusées de plusieurs fossettes, ils ont le poumon ordinaire-
ment divisé en deux lobes, et un crochet à l'anus. Habitans
des contrées chaudes des deux mondes , les espèces de ce
genre ne sont prrs nombreuses et la plupart d'entre elles dé-
passent tous les autres serpens dans leurs dimensions. Plusieurs
espèces fréquentent les eaux douces; d'autres habitent les
bois ; et il en est qui sont essentiellement aquatiques. Ils ont
l'habitude d'écraser leur proie dans les replis de leur corps et
de lui concasser les os avant de l'avaler. Cette famille se divise
en trois coupes génériques.
Genre i: Les boas proprement dits. (BO il). Ce sont
les espèces dont l'intermaxillaire est dépourvu de dents, dont
l'orbite est, comme dans les autres ophidiens, formée en
dessus par les frontaux mitoyens, et qui ont le dessous de la
queue garni de lames simples. Plus particulièrement propres
à l'Amérique intertropicale. Ceux de l'ancien monde sont de
petite taille et offrent des formes disparates. — i) boa
HEVUE SYINOPJIQUK. 17r,
c o N s T r, I c T o II. Espèce terrestre, d'une taille de 9 à 1 2 pieds.
Très recoiinaissable aux petites écailles lisses qui revêtent
le corps et toute la tète, et dont on compte jusqu'à 6y
rangées , et à sa teinte rougeatre relevée par un dessin com-
posé de larges taches ovales , de bandes et de raies entre-
lacées et d'un brun-rougeatre. Formes assez vigoureuses ;
queue courte, tète en forme de cœur. 243 4- 58. Habite les
bois de TAmérique intertropicale, où il se suspend aux bran-
ches des arbres pour guèter les petits mammifères dont il se
nourrit. — 2) boa imurina. Le plus grand serpent connu.
Narines verticales rapprochées au bout du museau ; cette
partie et les lèvres revêtues de plaques. Yeux dirigés vers
le ciel; 47 rangées d'écaillés lisses. Tètealongée, à museau
arrondi et à cotés assez Inclinés. 25o -\- 66. Brun fuligineux ,
avec 2 ranimées de taches orbiculaires sur le dos et une double
suite de taches en œil sur les flancs. Espèce aquatique et vivi-
pare qui atteint jusqu'à 20 pieds de longueur. Patrie : comme
la précédente. — 3) boa ce n chu i a. De moindre tailie
que les précédentes. Espèce terrestre , a les habitudes du Boa
constricteur. Tète à-peu -près comme dans la précédente ; mais
à plaques labiales creusées d'une fosse , et à plaques verticales
remplacées par de petites lames de forme irrégulière. Queue
courte. Narines ouvertes et latérales. 35 Rangées d'écaillés
lisses. 240-1-48. D'un roux-brun jaunâtre; dessus orné
d'une double suite de taches orbiculaires , claires et bordées
de noir ; trois rangées de taches moins larges et foncées sur
les flancs. Les taches confluent souvent pour former un
dessin réticulaire. Patrie connue les précédens. — A) boa
CANIN A. Assez caractérisé par ses teiiites vertes relevées
par des taches dorsales blanches en lozange; dessous jaunâ-
tre. Les jeunes souvent de couleur jaune. Dents antérieures
très longues. Corps fortement comprimé, et plus particu-
lièrement propre à se rouler en dedans. Queue prenante
douée d'une s^rande force. Tète en cœur , revêtue au
Î7G REVUE SYNOPTIQUE.
sommet cVécailles de forme irrégulière et plus grandes vers
le bout du museau. Toutes les lames labiales creusées de
fossettes. 53 Rangées d'écaillés lisses. Taille 6 pieds environ.
1^6 -{- 70. Depuis le fleuve des Amazones jusqu'à Surinam. —
5) BOAHORTULANA. Rcconnaissablc , outre ses formes
élancées et la queue très longue, à une large fosse creusée
dans la joue; on voit également des fossettes sur les der-
nières lames de la lèvre inférieure. Dents antérieures plus
longues que les autres. Tête en cœur irrégulièrement revêtue
d'écaillés au dessus ; il existe une paire de lames frontales
îarfifes , deux frênaies et une oculaire antérieure. Tronc très
comprimé. Abdomen un peu anguleux et revêtu de lames
plus larges que d'ordinaire. 89 Rangées d'écaillés alongées
et lisses. Brun-roux ; une suite de larges tacbes foncées , or-
biculaires ou en lozange, et assez grandes sur les flancs.
Disposition des teintes peu constante. Tète ornée d'un grand
nombre de traits foncés vermiculaires. 2^3 -+- 117. Fré-
quente probablement les arbres, se nourrit d'oiseaux et
habite tout le Brésil , Surinam , et a aussi été observé sur
l'île de St Vincent. — 6) boa dussumieri. De l'ancien-
monde , d'une petite île près de Maurice. Formes effilées et
queue longue comme dans le Boa hortulana ; mais à plaques
labiales sans fossettes, à 39 rangées d'écaillés carénées , et à
tête très alongée , revêtue d'écaillés , à rexception du museau
qui porte , au dessus, 2 paires de lames. Queue peu prenante.
La rostrale est obliquement tronquée. Yeux latéraux. Na-
rines étroites et un peu verticales. 238 -f- 128. Taille beau-
coup moindre que dans les espèces de l'Amérique du Sud.
Dessus gris- brunâtre , avec quelques taches sur la nuque;
dessous jaunâtre. — y) boa carinata. Espèce de très
petite taille des Moluques et de la Nouvelle-Guinée. Tête
assez alongée et déprimée; museau anguleux aux côtés et
tronqué au bout : ces parties revêtues d'écaillés, à l'exception
des freins et des lèvres. Narines et yeux latéraux; les
REVUE SYNOPTIQUE. 177
tîerniers suillans. Abdomen convexe et garni de hnncs plus
larges que d'ordinaire. Plusieurs dents maxillaires longues
au devant de la bouche. D'un brun-roux, varié de mar-
brures blanches et de taches foncées, qui conduent souvent
pour former des raies dorsales. i^ Rangées d'écaillés forte-
ment carénées. 170 4- 5o. — 8)boaconica. Peu connu.
Du Bengale. Taille du précédent. Queue très courte et
conique. Brun-foncé, une large raie noire bordée de blanc
serpente le long du dos; sur les flancs, une suite de taches
foncées et orbiculaires. Dessous, couleur de nacre. 209+ 10. —
9) B o A M EL A N u R A. Espècc auomalc , rapprochant les Boas
des Tortrix. Taille et port des espèces de l'ancien monde.
Formes ramassées. Tête revêtue de 9 plaques peu dévelop-
pées. Point de crochet à fanus. Queue très courte et forte-
ment prenante. 25 Rangées d'écaillés carénées e»; de forme
carrée. 206 4- 38. Gris-jaunâlre, une suite de taches noires
sur les flancs près du ventre; une autre suite de taches très
effacées, sur le dos: ces taches confluent sur la queue en
formant une teinte noire uniforme. Dessous jaune d'ocre clair.
Les PYTHONS composent le second genre de la famille
des Boas. Ce sont tous des serpens de grande taille, qui
habitent exclusivement l'ancien monde: ils ont l'intermaxil-
laire garni de dents; la voûte de leur orbite est complétée
par un os surnuméraire, qui n'existe dans aucun autre ser-
pent; et on observe au dessous de la queue des lames divi-
sées. Les lèvres sont toujours creusées de fossettes, et les
plaques de la tête plus développées que dans les Boas pro-
prement dits. — i) PYTHON BiviTTATUs. Lame rostralc
et les deux premières labiales seules creusées de fossettes.
Museau et sommet de la tête revêtus de plaques irrégulières.
Région des freins excavée. 63 Rangées d'écaillés hsses et
petites. 270 4- 70. D'une teinte jaunâtre, relevée par un des-
sin composé de larges taches alternes brunes. Sommet de la
tête bordé par deux raies, formées par la teinte du fond.
178 REVUE SYNOPTIQUE.
Flancs variés et bigarrés de blanc et de noir. Dessous avec
des taches carrées foncées. Depuis la côte occidentale de
l'Afrique, par toute l'Asie inter tropicale, jusqu'à la Chine
et à l'îie de Java. Le plus grand serpent de l'ancien monde;
atteint jusqu'à 20 pieds de longueur. -—2) python
SCHNEIDER I. Fomics bcaucoup plus effilées, tête beau-
coup plus alongée, et taille moindre que le précédent. Tête
étroite, revêtue de plaques plus développées que d'ordinaire.
Museau renflé au bout, à plaques labiales antérieures creu-
sées d'un sillon ; les dernières lames de la lèvre inférieure
également pourvues d'une fossette. Ecailles du tronc assez
petites. 320 + 90. Gris-brun jaunaLre, avec une raie noire
mitoyenne sur le sommet de la tête et qui s'étend sur le corps,
pour s'entrelacer avec d'autres raies, en formant un dessin
réticuiaire. Va jusqu'à i4 pieds et habite Malacca, Java,
Sumatra et Amboine. — 3) python amethystimus.
Plaques de la tête plus développées que dans les autres es-
pèces; fossettes labiales à-peu-près comme dans la précé-
dente; formes plus effilées que d'ordinaire; 4^ rangées
d'écaillés. Soo-î-gG. Varié de brun rougeâtre et de jaunâtre;
teintes qui forment souvent un dessin réticuiaire effacé.
Taille: six pieds environ. Vient de Saparua, petite île dans
le rayon d' Amboine. Les îles de Timor , de Samao et la Nou-
velle Irlande nourrissent un Python tout-à-fait semblable,
mais à traits moins prononcés. — '4)p'^thon peronii. De
la Nouvelle-Hollande. Taille 6 pieds environ. Tête beaucoup
plus large que dans les autres espèces. Narines très spacieuses
et dirigées vers le ciel. Museau assez obtus. Dessus de la
tête revêtu de lames écailleuses nombreuses, irrégulières et
plus grandes vers le bout du museau. Fossettes aux lèvres
comme dans les précédens. 4i Rangées d'écaillés lisses.
275 4- 83. Noir, parsemé de traits et de taches d'un jaune
d'or, plus ou moins grandes, à ce qu'il paraît, selon les lieux
qu'hal)ite l'espèce.
REVUE SYNOPTIQUE. 17<}
3°*'^Gemo de la famille des Boas: les AGROCIIOllDES.
Ophidiens très curieux et disparates par leur organisation.
€e sont cependant des Boas, mais des Boas anomaux. Ils ont
une queue ix)rtement prenante et comprimée comme leur
tronc. Ils manquent de crochets à l'anus. Leur tête est
tirrondiej les yeux extrêmement petits, un peu verticaux, à
prunelle orbiculahe, et leurs narines , tubulaires et rappro-
chées au sommet du museau, sont dirigées en avant ou vers
le ciel. Toutes leurs parties sont revêtues d'écaillés exces-
sivement petites, non-imbriquées et mucronées, et on voit
sur la li^ne médiane du ventre une crête saillante , hérissée
d'écaillés. Le dessus de l'orbite est formé par une apophyse
du frontal postérieur. Dents comme dans les Boas propre-
ment dits. Ils sont essentiellement aquatiques, habitent les
indes Orientales, et ont des teintes très sombres. Poumon
prolongé jusqu'à l'anus. On ne connaît que 2 espèces de ce
genre. — iVacrockordus javanicus. Dans les rivières
de Java. D'une taille de 8 pieds et à formes assez ramas-
sées. Narines dirigées en avant. Brun foncé, chargé de nom-
breuses marbrures. Crâne de forme bizarre par la brièveté
de la partie antérieure, la petitesse des mastoïdiens et l'ex-
trême longueur des caisses. — 2)acrochordus fasciatus.
Formes beaucoup plus grêles et taille moindre que le précé-
dent; écailles des lèvres plus développées. Narines presque
verticales. Brun , avec des bandes claires sur les flancs.
Depuis les grandes Indes jusqu'à la Nouvelle-Guinée.
La seconde grande division des serpens comprend les
Serpens venimeux. Ils sont tous pourvus d'une dent
meurtrière fixée sur le maxillaire, dont le volume est plus ou
moins réduit, de sorte qu'il porte rarement d'autre dents que
les crochets. Cet embranchement se divise naturellement en
trois groupes ou familles.
La première, celle des Serpens venimeux colub ri-
for m es, renferme tous ces ophidiens venimeux qui rappelent
180 ilEVUE SYNOPTIQUE.
par leurs fondes, les serpens non-venimeux terrestres, aux-
quels ils ressemblent quelquefois beaucoup , et dont ils ne
se distinguent souvent par d'autres signes extérieurs que
par la grosseur du museau. Ils ont le tronc alongéj la
queue courte , ramassée et conique; les yeux peu volumineux
et à prunelle orhiculaire; les narines ouvertes et latérales.
Leurs écailles sont grandes, en lozange et presque toujours
lisses. Leur tête est revêtue de plaques semblables à celles
des Couleuvres , dont la rostrale est assez développée j tandis
que la frênaie manque ordinairement. L'appareil venimeux
est beaucoup moins développé que d'ordinaire: le maxillaire
est long et armé souvent de dents placées derrière les
crochets, qui sont courts mais forts, et pourvus d'une fente
qui réunit les orifices; la mâchoire inférieure avec ses pièces
suspensoires est peu développée. Ces Ophidiens habitent les
contrées chaudes des deux mondes, ne se trouvent point en
Europe , et ne forment que trois genres.
i) Les ELAPS, à tronc cylindrique très effilé et de même
grosseur, entouré ordinairement de i5 rangées d'ecailles
larges et lisses ; à tête alongée et peu distincte du tronc;
teintes le plus souvent assez vives et belles. Ils fréquentent
les lieux boisés ou couverts de "végétation et paraissent fuir
les terrains arides. Ils habitent dans les deux mondes, et
forment un groupe naturel , dans lequel on peut établir
plusieurs divisions géographiques: A, Espèces américai-
nes, à corps marqué d'anneaux alternes de rouge et de noir, i)
ELA.PS coRALLiNus. Tête uu pcu couiquc ; lames occipitalcs
assezlarges. Parvient à une taille de 4 pieds et plus sur une gros-
seur d'un doigt d'homme. Sommet de la tête noir; teintes extrê-
mement sujettes à varier, de même que les lames du dessous, qui
chez les uns au nombre de i^S-f-sS, s'élèvent chez d'autres
à Î222 4- 45. Couleur du fond, du rouge au jaune, au blanc ou
au brun ; anneaux souvent effacés et seulement reconnaissa-
bles à leurs bordures blanches. Du Brésil jusqu'à la Caroline. —
REVUE SYNOPTIQUE. 181
3) EL APS LE MN isc A.TUS. Apeiiic clistiiict (kl procèdent.
Vient des Guyanes. Formes un peu plus élancées; yeux plus
petits et moins latéraux; une hnnde noire entre les yeux;
anneaux du corps noirs et ordinairement rapprochés trois à
trois. 2 3o -h 36. — elaps sur in a m en si s. Très recon-
naissable à sa tête large, courte, déprimée, et revêtue de
plaques peu développées et bordées de noir ; à son museau
obtus , à ses formes trapues ; à son corps entouré d'anneaux
rapprochés 3 à 3 et dont celui du milieu est très large ; enfin
aux écailles dorsales un peu plus larges que les autres;
parvient à une très forte taille et habite la Guyane hollan-
daise. — B. Espèces d'Afrique. On n'en connaît qu'une
seule. 4) Eî-Aps hygikae. Facile à reconnaître au caraclère
artificiel tiré de la présence d'une lame nasale indivisée, percée
par les narines ; verticale assez alongée j 6 labiales. Plaques
abdominales moins larges que d'ordinaire. 200 ^- 28. De
petite taille. Habite au Cap. Teintes de toute beauté: jau-
nâtre, dessus d'un rouge vif, orné de bandes noires, quelque-
fois continentes; dessous liigarré de noir. — C. Espèces
de l'Asie. 5) elaps collaris. Peut-être identique avec
l'Elaps des lies Philippines. Formes de FElaps lemniscatus;
mais à tête courte, grosse et déprimée ; la sixième plaque
verticale, évasée et touchant aux occipitales. Brun foncé,
dessous marqué de taches rouges, dont les angles se pro-
longent sur les flancs. Cou orné d'un collier. 229 4- 17. —
6) ELAPS TIII3ÎAGULATUS. Vient des grandes Indes. De
très petite taille. Formes extrêmement délicates; queue par-
tout de la même grosseur. Dessus brun clair ; avec une raie
dorsale noire , accompagnée d'autres raies étroites sur les
flancs. Tête , bout de la queue et anus noirs. Dessous jau-
nâtre. Queue blanche, mouchetée de noir, 241 + 32. —
7)elapsfurcatus. i3 Rangées d'écaillés. Corps fiHforme.
255 -H 22 Tête d'une venue avec le tronc et étroite. Dessus
brun très foncé; une raie dorsale bifourchue sur la tête,
182 REVUE SYNOPTIQUE.
d'un beau jaune , qui passe au rouge sur la queue ; une raie
blanche sur les flancs. Dessus d'un vert vif, avec des bandes
transversales foncées. Taille i5 pouces environ. Habite
Java et se trouve aussi sur la presqu'île cle Maîacca et à
Sumatra 5 où il forme une variété de climat. — 8) elaps
BiviRGATUS. Très belle et rare espèce. A peine de la gros-
seur du petit doigt sur une longueur de 3 à 4 pieds. Corps
extrêmement effilé, cylinrlrique et partout d'égale grosseur.
Queue plus longue que d'ordinaire. Tête presque d'une
venue avec le tronc. Dessus bleu violet, passant, vers la
queue, au pourpre. Flancs marqués d'une raie blanche ,
ondulée et étroite. Tête et dessous rouge écarîate. 2yo -^49'
Habite les îles de Ja\a et de Sumatra , où il forme une variété
caractérisée par une raie sur la ligne médiane du dos. —
D. Espèces de l'Au str alasie. 9) elaps mûlleri. De
la Nouvelle-Guinée et des îles adjacentes. A corps plus gros au
milieu que d'ordinaire , et à queue courte et plus conique.
Tête distincte du tronc, revêtue de plaques très alongées ,
mais à museau court. Dessus brun ou brun roux; dessous
tantôt jaune , tantôt vert j une raie jaune ou couleur de rose
va des lèvres sur les flancs. 162 ■+■ 28. — 10) elaps cor o-
NATUs. Pour la taille et les formes, semblable au précédent,
mais à museau plus pointu; i38 + 52 lames indivisées. 6
Larges lames labiales , une seule temporale. D'un vert-bru-
nâtre; sommet de la tête bordé par un trait noir, ii) elaps
PSAMMOPHis. Ressemble , à s'y méprendre , à certains Psam-
mophis et notamment à la variété verdâtre du Psamm. moni-
liger du Gap. Queue plus effilée que d'ordinaire. i86H-^6.
D'un vert olivâtre. Dessous et bord de l'œil jaunâtres.
Le deuxième genre de la famille des serpens venimeux
colubriformes , celui des BONGARES, ne comprend que
deux espèces assez voisines , assez reconnaissables à leur dos
revêtu d'une raitgée d'écaillés hexagones et plus larges que
le reste. Ils ont le port et la physionomie des Elaps , mais
REVUE SYNOPTIQUE. 183
leurs lorinoi» sont plus vigoureuses et ils parvienneni à une
taille beaucoup plus forte. L'abdomen est convexe , la queue
robuste, revêtue en dessous de lames indivisées. i5 à 117 llan-
gées d'éoalUes lisses. Corps annelé de jaune et de noirâtre.
Tête à-peu-près comme dans les Elaps. Leur squelette est
pourvu de larges apophyses transversales , évasées en forme
de lamelles. Plusieurs dents solides derrière les crochets. Os
de la tête très robustes. Ils habitent les grandes Indes ainsi
que les îles de Ceylan et de Java. — - i) dungarus annu-
LARis. Corps entouré d'anneaux complets de noir et de
jaune. Queue extrêmement vigoureuse , carénée sur le des-
sus , et très grosse jusqu'au bout. Deux raies formant un
angle aigu, sur le sommet de la têle. 2i3-+-34. Longueur
6 pieds. — 2)bungahus semî fascîatus. Taille un peu
moindre que le précédent. Os beaucoup moins vigoureux.
Corps entouré de demi-anneaux. Queue plus élancée et
conique. Tête plus déprimée : yeux moins volumineux^
20^ 4- /^G, Teintes assez sujettes à varier.
Le troisième et dernier genre des serpens venimeux colu-
briformes est celui des NAJAS. Ils ont des formes plus ro-
bustes que les Elaps et les Bongares; leur tronc n'est pas cylin-
drique , mais plus gros au milieu ; leur queue est plus alongée
et toujours conique ; l'abdomen large et convexe ; leur cou
jouit plus ou moins de la faculté de se dilater en disque;
leur tête est assez distincte du tronc et souvent très conique;
leurs yeux sont grands et latéraux, ainsi que les narines qui
sont ouvertes ; la plaque rostrale se prolonge ordinairement
sur le sommet du museau ; favant-dernière plaque labiale
souvent de forme irrégulière; leurs écailles enfin sont presque
toujours lancéolées , et mêine quelquefois carénées. Les
Najas habitent les contrées chaudes ou voisines des tropiques
de l'ancien monde. — i)naja tripudîans. C'est le célèbre
serpent dont les bateleurs des Indes se servent pour exécuter
des jongleries, et auquel on a donné le nom de serpent à
184 REVUE SYNOPTIQUE.
lunettes, parce que son cou est orné d'un trait ayant
quelque analogie avec certaines espèces de cet instrument. Son
cou est assez dilatable. Il atteint uue forte taille. 23 à Si
Rangées d'écaillés. 187 -f 47- Brun plus ou moins foncé ^
tantôt uniforme 5 tantôt orné de bandes obliques et étroites-
Teintes assez sujettes à varier. Depuis le Malabar jusqu'aux
îles Philippines. Une variété de climat à teintes foncées
existe à Sumatra; les individus de Java ont les teintes pres-
que noires , la queue plus courte et on ne remarque le dessin
du cou que dans le jetîne âge. Se nourrit de crapauds. —
2) NAJA HAJE. Analogue au précédent, mais à cou moins
dilatable, à tête plus conique, à plaque rostrale saillante, à
lames labiales plus larges , et à teintes diverses. 208 + 58,
33 Rang, d'écailies. Brunâtre , varié de taches foncées et
claires. Habite TEgypte ; une variété de climat se trouve
au Cap : elle a le système de coloration peu constant , variant
du brun au jaune et même au blanc. C'est l'Aspis propre-
ment dit , célèbre dans l'antiquité et encore de nos jours par
les jeux qu'exécutent avec lui les sorciers de l'Egypte. —
3) NAJA BUNGARus. Fomic plus grêlcs ct taille moindre
que les précédens ; museau court et un peu tronqué au bout;
yeux volumineux ; queue élancée et écailles dorsales un peu
plus grandes que les autres. 260 4- 3o s. -+- 80 div.; ou
262 -h 23 s. 4- î 18 div.; 19 rangées d'écaillés. Dessus bleu
noir , relevé par de nombreux traits en angle et blanchâtres..
Habite les îles de Java et de Sumatra ; espèce très rare. —
4) NAJA BUNGAROIDES. Semblable au précédent pour les
teintes; mais à tête plus large et plus ramassée, à écailles
d'égale grandeur, à queue plus courte, et à yeux moins
volumineux; 2i4 + 52 lames simples; 21 rang, d'écaillés. — .
5) NAJA PORPHYRICA. Port du Naja à lunettes; mais
de taille moindre; à i5 rangées d'écaillés seulement; à
museau assez obtus, etc. Dessus bleu noir, flancs rose-pourpre,,
dessous jaune. Plaq. abdominales 180; 5o sous-caudales^
(
l\E\VE S\N01MIQCK. 185
qui sont en partie inclivisées. Se trouve sur les sables de
bruyère à la Nouvelle-Hollande. — 6) naja ii^ m a c ii a te s-
Espèce bien caractérisée par des formes assez ramassées ,
par sa tête large à la base et pointue vers le bout du
museau , et par ses écailles carénées, disposées sur 19 rangées.
Le ('OU est un peu dilatable. 137 + 4^^' N( ir pourpre varié
le jaunâtre. Habite les plaines sablonneuses au Cap de Bonne
Espérance. — 7) naja riiombeata. De moindre taille
que le précédent, dont il a à-peu-près le port. 19 à 21 llan-
oées d'écaillés faiblement carénées sur le dos. Queue
extrêmement courte et vigoureuse. i34 -^ 21. Point de
dents solides derrière les crochets. Grisâtre-pâle, dessous
plus clair ; une suite de taches en lozange sur le dos , une
large tache anguleuse sur la tête. Observé au Cap et à la
Cote d'Or. — 8) naja lubrica. Reconnaissable à son corps
entouré de larges anneaux noirs et rouges. Lame rostrale
très large et s'avançant assez sur le sommet du museau.
Taille de 2 pieds environ. 19 à 21 Rangées d'écaillés lisses.
i5o-h24. Du Cap. — 10) naja elaps. D'origine incon-
nue et de très forte taille. Intermédiaire entre les Najas et
les Élups. Formes assez vigoureuses. Tête distincte du cou ,
qui n'est pas dilatable. Lames frontales postérieures et occi-
pitales très développées. Avant-dernière plaque labiale res-
serrée vers la région des tempes. Yeux assez petits. i83 + 41;
i5 rangées d'écaillés lisses en lozange , jaunes d'ocre à centre
brun-marron. — 11) naja curta. Formes extrêmement
ramassées. Prunelle de l'œil un peu verticalement alongée.
Queue très courte et grosse. 19 Rangées d'écailles lisses.
Lame surciliaire un peu saillante. Tête très large, à joues
saillantes. D'un vert-olivâtre uniforme, plus clair sur le des-
sous, fytrie: la Nouvelle-Hollande.
La 2™* Famille des S e r p e n s venimeux comprend les
Serpens de mer, que j'ai tous réunis dans le genre HY-
DROPHIS. Ils se distinguent facilement de tous les autres
186 REVUE SYNOPTIQUE.
ophidiens par leur queue très large , et élevée dans le sens
vertical en forme de rame. Leur tête est petite, d'une venue
avec le tronc et revêtue de plaques, comme dans la plupart de
serpens , mais avec cette différence que les nasales rappro-
chées au sommet du museau , remplacent les frontales anté-
rieures, qui manquent alors ; les narines sont par conséquent
tout-à-fait verticales , elles ont une forme orhiculaire et sont
susceptible d'être fermées au moyen d'une valve. Les lèvres
sont à bords reotrans, de sorte que la bouche peut se fermer
hermétiquement. L'œil est petit et cà prunelle orbiculaire ; les
crochets sont peu développés et toujours suivis de plusieurs
dents solides et délicates. Le tronc s'amincit considérable-
ment vers les deux extrémités de l'animal , de sorte que le cou.
est souvent assez grêle. Les écailles sont en lozange ou en
hexagone , non imbriquées , revêtues d'un épidémie mince ,
et surmontées d'un tubercule: on en voit deux sur la rangée
médiane des écailles de l'abdomen qui sont à peine plus
larges que les autres. Leur poumon est souvent prolongé en
un réservoir pour l'air , qui s'étend jusqu'à l'anus. La couleur
dominante est le jaune ou le vert. Ils ont le corps souvent
marqué d'anneaux ou de bandes foncées ou de taches en
lozange. Les serpens de mer habitent exclusivement les pa-
rages intertropicaux des mers des Indes orientales et du grand
Océan pacifique. Ils vivent probablement de poissons , et ne
vont jamais à terre. Ou n'en connaît que 7 espèces, dont la der-
nière est en quelque sorte anomale , en ce qu'elle offre des
narines latérales , 5 lames frontales , des lames abdominales
assez larges et des écailles lisses, imbriquées et revêtues d'un
épidémie dur. i) hydropuis schistosa. A museau
brusquement conique au bout, et courbé en bec. Lame rostrale
étroite , prolongée en pointe , verticale ; de forme lancéolée ,
nasales en trigone. Yeux assez verticaux. 5i Rang, d'écaillés.
3oo + 5o. Gris»ardoisé^ avec de larges bandes brunâtres plus
ou moins effacées. Les adultes ont des teintes uniformes.
REVUE SYNOPTIQUE. 187
Habite le Golie de Bengale. — 2) iiydropius striât a.
Tête arrondie, museau obtus, une rangée de petites lames
Irigones enchâssées entre les labiales, sur le bord de la lèvre
inférieure. Jaune verdàtre, marqué sur le dessus de taclies en
rlioujbe plus ou moins foncées, disposées transversalement
et quelquefois en forme de bandes. Formes moins vigou-
reuses que dans la précédente. Longueur 6 pieds environ. 29
Rangées d'écaillés; 344 ■+- 5c^. Des mers des Indes, de la
Soude et de la Chine. — 3)i!Ydrophis nigrocincta.
Assez voisine de la précédente, mais elle a la sixième plaque
labiale assez évasée et touchant aux occipitales en s'étendant
sur la région des tempes; sa tète est plus étroite et plus
arrondie; elle manque de petites lames surnuméraires à la
lèvre inférieure; son corps enfin est entouré d'anneaux com-
plets et très foncés. 3o6-|-49} 29 rangées d'écaillés. Observée
dans le Golfe de Bengale. — 4)hydrophis gracilis. Port
des précédens, mais d'une taille moindre, et à formes extrê-
mement grêles, notamment vers le cou, qui est assez effilé.
Tête plus petite que dans les autres espèces, et très étroite.
Jaunâtre, à taches transversales en lo;iange et noires; cette
dernière couleur occupe toutes les parties antérieures, de sorte
que la teinte du fond ne paraît que sous forme de bandes
étroites. Tête noire, une tache claire au dessus de l'œil.
355 4- 5o. 27 Rangées d'écaillés. Golfe de Bengale et mers de
la Sonde. — 5)hydrophis pela mi s. A. petites écailles
hexagones disposées en pavé. Formes ramassées. Tête très
alongée. Ligne médiane de l'abdomen indiquée par une suture
formée parles deux dernières rangées des écailles, dont on
compte 47 en tout. 35o -h 60. Dessus brun noirâtre, dessous
jaune; queue, et quelquefois même tout le corps de l'animal,
varié de 'ces deux teintes. La plus commune des espèces; se
trouve dans tous les parages qu'habitent les serpens ma-
rins. — 6) HYDROPiiis PELAMID01DES. Formes beau-
coup plus trapues et tête plus courte que le précédent, du(juel
Î88 REVUE SYrx OPTIQUE.
îl se rapproche par ia conformation des écailles; mais ces orga-
nes sont plus grands et on n'en compte que 25 à 3o ranoées.
Des vestiges d'écaillés abdominales, enchâssés sur la suture
médiane du ventre. Jaunâtre, à larges taches dorsales en
lozange. i36 -î- 27. Golfe de Bengale et mers de la Chine et
des Moluques. — 'j) uyûrophis col tj brin a. Espèce
anouKile, très facile à reconnaître aux écailles lisses, imbri-
quées et revêtues d'une épidémie cornée; aux narines latéra-
les; à la présence de 5 lames occipitales; à ses lames abdomi-
nales beaucoup plus larges que d'ordinaire. 23 Rangées
d'écailies. Plaques: 220 4- 38. Vert foncé, marqué de larges
anneaux noirâtres, assez effacés dans l'âge adulte. Presque
aussi conmiun que le Pékiînide ; habite les mêmes lieux.
La troisième et detnière famille des serpens venimeux com-
prend les S erp en s venimeux proprement dits. Ils ont
une physionomie tout-à-fait particulière et quelque chose de
hideux dans leur aspect j on pourrait même dire que leur
caractère malfaisant s'exprime dans chacune de leurs parties:
car ils ont des formes lourdes et ramassées , une queue très
courte , une tête grosse , très large à la base , et en forme de
cœur; toutes les parties sont ordinairement hérissées d'écail-
lés lancéolées et surmontées d'une forte carène ; leur museau
est souvent tronqué ou môme retroussé; les freins, dans
plusieurs genres, sont creusés d'une fosse spacieuse et pro-
fonde ; la lèvre supérieure est renflée et descendante comme
dans les chiens-dogue; l'ouverture de la bouche est assez
arquée ; les yeux sont petits , à prunelle verticale , et enfon-
cés sous une lame surciliaire saillante ; leurs crochets enfin
sont extrêmement développés, et occupent à eux-seuls le
maxillaire qui est réduit à un assez petit volume , tandis que
les ptérygoïdiens externes forment un levier en guise de
stylet. Cette organisation détermine leur mode d'attaque , qui
est tout particulier . en ce qu'ils attendent tranquillement jus-
qu'à ce que les animaux, dont ils se nourrissent, soient à leur
IVEVUE SYNOPTIQUE. 18Î)
portée; se jetant ensuite sur eux, ils frappent d'un seul
coup la plaie meurtrière, qui, mettant leur proio hors d'ctat
de s'échapper , la fait tomher dans leur pouvoir. Les serpens
venimeux proprement dits se trouvent dans les cinq parties
du monde. Ils hahitent tantôt les bois, tantôt les plaines.
On en connait trois genres. Les deux premiers ont des fosses
nasales.
i) TRIGONOGEPHALUS. A queue terminée par
une plaque cornée et conique. Ils habitent les régions boisées
des deux mondes , mais n'ont été observés ni en Europe,
ni en Afrique , où ils sont remplacés par les Vipères. On peut
établir dans ce genre deux divisions, fondées sur la nature
des tégumens de la tête. — A. Espèces à tête revêtue d'écail-
lés. Elles sont plus particulièrement propres à !a Zone
torride. — i) trigonocephalus jararaca. Formes
un peu plus effilées que d'ordinaire ; tête plus alongée , revêtue
d'écaillés plus grandes vers le bout du museau dont les
bords sont garnis de plaques; 9 lames labiales; 188 + 53;
27 rangées d'écaillés lancéolées et fortement carénées. Brun-
olivâtre , ordinairement relevé par de larges bandes ou taches
en lozange. Habite les forêts du Brésil. — 2) trigonoce-
p II A LU s ATRox. Très analogue au précédent, qu'il paraît
représenter aux Guyanes; mais à 8 lames labiales , à 4 paires
de mentales, à museau plus conique, à écailles moins effilées
dont les carènes assez saillantes , et à teintes plus claires et
tirant au gris pourpre. 194 -4- 64- — 3) trigonocepua-
Lus LANCEOLATus. Remplace les précédens aux petites
Antilles, et leur est très voisin ; mais à lames abdominales
plus nombreuses , à teintes tirant sur le vert ou sur le jaune ,
à 2 paires de plaques mentales assez petites, et à 3i rangées
d'écaillés plus petites. 255 + 64» — 4) trigonocepiialus
BiLiNEATUS. Très reconnaissable à sa queue mince et
susceptible de se rouler en dedans, à son tronc assez com-
primé, élancé et à ventre étroit, à ses petites écailles, enfin
190 REVUE SYNOPTIQUE.
à ses belles teintes vertes passant au brun-roux sur la queue,
et relevées par une raie jaune de citron près de l'abdomen.
Dessus jaune -blanchâtre 280 + 78; 29 rangées d'écaillés.
Très rare au Brésil et à Cavenne. — 5) trïgonocephalds
NiGROMARGiNATUS. Espccc de petite taille , assez carac-
térisée par ses écailles en lozange, lisses, disposées sur 19
rangées, plus grandes sur le sommet de la tête; par 2 larges
plaques au bout du museau ; par des plaques surciliaires
divisées, etc. i^^-}- 56. Dessus vert foncé, orné par des
taches noires. Vient de Geylan. — 6) trigonocephalUvS
wAGLERî. Tête très large et grosse; museau anguleux aux
côtés et obliquement tronqué en dessous ; 5 paires de men-
tales assez trapues; 25 rangées d'écaillés pourvues de forte
carènes, prolongées en pointe sous la gorge. Dessus vert
foncé avec des bandes transversales jaunes. i4o + 48. Habite
l'île de Sumatra. — 7) trigonocepïialus vïridïs.
Taille moyenne. Dessus vert uniforme ; dessous jaune. Deux
grandes lames au bout du museau , qui descend presque
perpendiculairement. 21 Rangées d'écaillés lancéolées et caré-
nées. 164 4- 64. Des grandes Indes, vit aussi dans les îles
de Sumatra , Célèbes et Timor. — • 8) trigonocepha-
i,us PUNICEUS. Très reconnaissable à son œil protégé au
dessus par une rangée de petites écailles relevées en pointe.
Tète très large, en cœur et à sonnuet plane; museau anguleux
et excavé aux côtés, à bout arrondi et obliquement tronqué,
162 + 54. Brun-roux , bigarré et varié de jaunâtre , de
pourpre ou de grisâtre; queue très foncée. Patrie: l'île de
Java. — B. Espèces à sommet de la tète revêtue de lames.
9) TR IGONOCEPHALUS RHODOSTOMA. Très bcUc CSpècC.
Formes assez vigoureuses. Tête en cœur, garnie sur le som-
met de 9 lames plus développées que d'ordinaire ; museau
assez conique à bout proéminent et mobile; écailles lisses,
en lozange et plus grandes sur la rangée médiane du dos qui
est en carène. Queue courte et pointue. i47 -+-55. Brun-
I\EVUE SYNOPTIQUE. !91
rouj^eatro, i)lus clair sur le clos, dont les cotés sont ornés
de larires taches foncées trianirulaires. Sonunet de la tête
bordé d'une large raie rougeàtre ; une raie noire derrière
l'œil. Habite l'île de Java. — lo) tri go no ce ph a lus iiy p-
NALE. De Ceyian et des îles Philippines. Taille petite.
Museau prolongé en pointe retroussée et saillante, revêtu nu
dessus cVécailles, auKcpielles succèdent la lame verticale,
les surcihaires et les occipitales. 19 Rangées d'écaillés
carénées. 142 -f- 4^)- Teintes du corps à-peu-prc^s comme dans
le précédent. — n) t kigonocepiialus ha lys. Formes
plus grêles que d'ordinaire. Tête alongée, revêtue de g lames
dont les frontales antérieures assez ramassées; museau court
et arrondi. 2^7 Rangées d'écaillés lancéolées et carénées.
i65 + 3^. Dessus gris-jaunâtre, avec 5 rangées détaches
brunâtres. Observé dans la Tartarie. — i2)TRiGONOGE-
piiALus BLOMnoFFii. Lamcs de la tête à-pcu près commc
dans le précédent, mais à formes plus lourdes et à tête plus
grosse; 25 rangées d'écaillés fortement carénées. 189 -j- 5i.
Dessus brun-olivâtre , avec deux rangées de taches ovales
foncées; une large raie noiie derrière l'œil. Du Japon. —
i3) TRiGONOGEPHALus CENCHRïs. De rAméri(|ue
du Nord ; assez reconnaissable à ses petites lames occipitales ,
cjui manquent quelquefois totalement ; et aux écailles de
l'occiput cjui sont hérissées de tubercules au lieu de carènes.
Formes ramassées. i3o + 43. Corps orné sur le dessus de
larges bandes de brun-cuivré, qui font entrevoir la teinte du
fond sous forme de grandes taches en lozange et d'un
brun-grisâtre.
Le deuxième genre des serpens venimeux proprement dits
est celui de CROTALE. Ils sont propres au nouveau-
monde, et habitent de préférence les lieux secs et incultes;
on pourrait dire qu'ils remplacent les Vipères dans les deux
Amériques. Ils ont des fossettes nasales comme les Trigonocé-
phales, mais leurs formes sont plus robustes , leur tête est plus
192 REVUE SYNOPTIQUE.
grosse et leur queue aruiée au bout, soit d'un instrument bru-
yant appelé sonnettes , soit d'une écaille dure prolongée en
pointe longue et acérée. On ne connaît dans ce genre que 4
espèces, dont plusieurs parviennent à une taille plus forte
qu'aucun autre serpent venimeux. — i) c rot al us hor-
RiDUS. Le grand Crotale de l'Amérique du Sud. A museau
revêtu de 3 ou de 4 paires de lames. 29 Piangées d'écaillés en
lozange et surmontées d'une carène tranchante. i45 -f- 25.
Dessus d'un brun-jaunâtre relevé, sur le dos, par une rangée
de larges taches en lozange. — 2) crotalus durissus.
Remplace le précédent dans l'Amérique du Nord et se trouve
jusqu'au Mexique. Très voisin du C. horridus, mais il n'a
qu'une ou deux paires de lames sur le museau; les carènes
des écailles sont moins développées , les yeux sont plus petits,
les teintes plus foncées , les taches souvent en forme de ban-
des, et la queue noire. 1^70+22. — 3) CROTALUS MILIA-
Rius. Petite espèce de FAméiique du Nord , assez reconnais-
sable à sa tête revêtue au sommet de 9 plaques assez dévelop-
pées. 23 Rangées d'écailles. i3i -\- 16. Oeil volumineux. D'un
gris-rougeâtre , orné de 3 suites de taches plus foncées. —
4) CROTALUS MU TU s. Remarquable parce que sa queue est
armée au bout , au lieu de grelots , d'une pointe dure et
acérée. Tête revêtue d'écailles. Dos en carène. Ecailles sur-
montées d'une carène en fornie de tubercule. Parvient à une
taille de dix pieds : c'est le plus grand serpent venimeux. Fait
le passage aux Trigonocéphales; mais sa physionomie est
tout-à-fait celle des Crotales. 227 4- 49- De l'Amérique méri-
dionale.
3'"^ Genre: VIPERE; comprend tous les serpens veni-
meux proprement dits, qui manquent de fosse nasale. Ils ont
ordinairement la tête et le corps revêtus d'écailles lancéolées
et carénées. Leurs formes sont le plus souvent très lourdes
et leurs teintes d'un gris ou brun terne. Ils habitent les
déserts ou les lieux incultes de l'ancien monde. — iWipera
REVUE SYNOPTIQUE. 193
A R 1 E T A N s. De f oitc taille et à formes extrêmement lourdes et
hitlcuses. Tête grande , très aplatie et à museau assez large
et obtus. Narines verticales, extrêmement spacieuses. Tête
et corps revêtus d'écaillés lancéolées relevées par une forte
carène. 134-1-27. Dessus jaunâtre orné de 3 rangées de
taches, souvent en œil, dont 2 paires sur l'occiput. Du Gap
et de la Côte- d'or. Une variété locale à teintes plus claires
habite le Kordofan. — 2)vipera atropos. Du Cap. Taille
moindre et formes moins vigoureuses que la V. arietans.
Tête plus petite, narines moins spacieuses et plus latérales.
D'un brun très foncé, relevé sur le dessus > par 4 rangées de
taches en œil. i38-+-23. — 3) vipera corndta. Taille
petite j formes extrêmement trapues. Oeil protégé en dessus
d'une rangée d'écaillés prolongées en pointe. Narines latérales.
Gris-brun , orné de taches foncées, dont les dorsales disposées
en une rangée médiane. 124-4-= 22. Du Cap ; très rare. — 4) vi-
pera ECHis. Oeil entouré d'une rangée de petites écailles;
narines étroites, rapprochées du bout du museau qui est garni,
sur le dessus , de 2 lames. Queue courte , garnie de plaques
simples. i56"ï"3o. Des grandes Indes; se trouve aussi dans
l'Afrique septentrionale. Brun-grisâtre ou jaunâtre , à raies
et à taches en œil sur le dessus. — 5) vipera cérastes.
Assez distincte par sa tête très large et en cœur; par son
museau court , obtus et arrondi ; par des narines assez
étroites , verticales et placées au bout du museau ; par ses
écailles surmontées d'une carène en forme de tubercule ;
par ses teintes pâles , grisâtres ou couleur de terre ; enfin
par le développement des écailles surciliaires , dont l'une
est souvent convertie en pointe assez longue. i34 -f 2g.
Habite les déserts du Nord de l'Afrique. — 6) vipeba
ELEGANS. Formes plus effilées que d'ordinaire. Oeil protégé
par une lame surciliaire ; narines très ouvertes, latérales.
Museau étroit, enflé et anguleux aux côtés. De grande taille;
168 -4- 52. Vient des grandes Indes et de Ceylan. Brun-jaunâtre
i3
194 REVOE SYNOPTIQUE.
vif , avec trois rangées de taches ovales , bordées de noir et
de blanc sur le dessous. — 7) vipera berus. La Vipère
commune dans le Nord et le centre de l'Europe , est aussi
répandue dans une grande partie de l'Asie. Taille moyenne.
Tête revêtue en dessus de lames, parmi lesquelles distingue une
verticale , des surciliaires et deux occipitales. Museau arrondi
et anguleux aux côtés. Narines tout-à-fait latérales. i45 -i- 35.
Varie du brun au gris, au noir et au roux; une large raie dentelée
le long du dos. Les mâles ont les teintes claires. — 8) vipera
AS PI s. Remplace la précédente dont elle se rapproche
beaucoup, dans le Sud-Ouest de l'Europe et se trouve jusqu'en
Sicile. Formes un peu plus effilées ; tête plus grande , revê-
tue au sommet d'écaillés de forme irrégulière ; museau un peu
retroussé; corps avec plusieurs rangées de taches. Varie comme
la précédente. i52 H- 42. — 9) vipera ammodytes. En-
core voisine des deux précédentes par le port et la physio-
nomie ; mais à formes plus trapues, à museau prolongé en
pointe dirigée en haut, à sommet de la tête assez irrégulière-
ment revêtue d'écaillés et de petites plaques. iDo-l-34. Sys-
tème de coloration à-peu près comme dans la Vipère com-
mune , mais souvent à queue rougeâtre. Habite le Sud-Est
de l'Europe depuis la Sicile et la Dalmatie jusqu'en Grèce. —
10} vipera agantophis. Espèce anomale de la Nouvelle
Hollande ; à formes ramassées ; à queue mince et terminée par
une pointe dure ; à tête revêtue au sommet de 9 lames ; à
lames surciliaires , ordinairement relevées et inclinées vers le
sommet de la tête; et à a i rangées d'écaillés carénées. 11 5 4- 4^.
Gris-brunâtre , varié et tacheté de noir.
»o-*
ESSAI
SUR J.A
DISTRIBUTION GEOGRAPHIQUE
DES OPHIDIENS.
rsriiiMi-^''d
Me proposant de donner dans les pages suivantes, un
aperçu sur la répartition des serpens à la surface du globe,
je me vois obligé d'entrer en détails nombreux, dont j'aurais
pu me passer, si cette partie de la science avait été cultivée
avant moi, ou si on en avait du moins posé les fondemens.
Je me suis occupé avec assez de zèle de cette étude, qui mérite
une attention toute particulière, non pas parce qu'elle regarde
les animaux dont je traite dans mon livre, mais parce qu'elle
doit conduire , selon moi , à des résultats beaucoup plus satisfai-
sans que l'étude de la distribution géographique des animaux
des autres classes du règne animal, ou même des végétaux. Les
raisons qui militent en faveur de cette thèse sont claires.
Mille agens divers contribuent à disperser les différentes
espèces de plantes à la surface du globe : les semences des
végétaux sont emportés par le vent et les vagues; l'homme
transplante continuellement un grand nombre de végétaux
d'une contrée dans l'autre; et, par la culture, il a tellement
changé la nature qui l'environne, que la surface de la terre
a en quelque sorte perdu sa face primitive, et que la végéta-
tion a du moins éprouvé de grandes modifications. — La
plupart des animaux ont les moyens de se distribuer à la
19() DISTRIBUTIOIN GÉOGRAPHIQUE
surface du globe. L'élément qui les a vu naître n'offre point de
bornes aux animaux marins. Certains mammifères élendenl
continuellement leur sphère d'habitation , et se répandent quel-
quefois, peu-à peu, sur plusieurs parties du monde. D'autres
espèces, accompagnant l'homme dans ses voyages , même
au delà des mers, se dispersent dans les diverses régions, soit
que l'homme les transplante lui-même, soit que, retrouvant
leur liberté, ils ont, pour ainsi dire, formé des colonies loin
de leur mère-patrie, où il arrive quelquefois que leur race est
totalement détruite, ou que tous les individus ont passé l'état
de domesticité. — Les oiseaux jouissent plus que tous les autres
animaux de la faculté de se transporter d'un lieu à un autre;
l'élément dans lequel ils se meuvent ne leur présentant des bor-
nes nullepart, un grand nombre des liabitans de l'air mènent
une véritable vie nomade, et viennent souvent s'établir dans des
lieux où ils n'ont pas été observés auparavant; la plupart se
dispersent, dans les migrations périodiques, dans les contrées
les plus éloignées, et deviennent de véritables cosmopolites,
la même espèce habitant souvent à la fois dans toutes les
parties du monde. — 11 en est tout autrement des Reptiles.
Aucun des faits que nous venons de constater, ne peut s'ap-
pliquer rigoureusement à ces animaux. Privés, pour la plu-
part, des moyens d'entreprendre des voyages lointains, ils
sont en quelque sorte attachés aux lieux où ils sont nés, et
on ne leur reconnaît point l'instinct de fuir le sol natal, lorsque
certaines circonstances sembleraient l'exiger. Le froid , qui
leur dérobe les moyens de subsistance, les fait tomber en
même temps dans une léthargie profonde , et la nature veille
ainsi d'une manière simple à leur conservation pendant l'hiver.
L'homme éprouve de l'aversion pour tous ces animaux, dont
plusieurs sont nuisibles, à la vérité, mais dont quelques uns
cependant sont inoffensifs et même utiles,* il les repousse
et ne cherche pas à les apprivoiser ; encore moins se
touve-t-il incliné à les transplanter sans motif d'un lieu ù
DES SERPENS. 197
l'autre. Il est vrai quil existe certains reptiles, qui font
exception à ce que nous venons de dire. Plusieurs espèces
de tortues ont été dispersées sur divers points du globe (i);
des Scinques, des Geckons ont peut-être été apportés d'une
région dans l'autre, par des vaisseaux; des tortues de mer
entreprenant des voyages dans certaines périodes de l'année,
ont été jetées sur des côtes, que leur race n'habite jamais,-
des Crocodiles (2) ou des Boas (3) ont été quelquefois
entrainés j)i{v des courans, loin de leur patrie; mais ces
exemples sont très peu nombreux en comparaison de ce que
l'on observe chez les mammifères et les oiseaux , et forment
seulement des exceptions par rapport aux serpens (4) dont
nous nous occuperons dans les pages suivantes. — Il est
évident, d'après ce que nous venons de dire, que la distribu-
tion géographique des ophidiens doit offrir un intérêt tout
particulier, en ce qu'elle présente les moyens les plus sûrs pour
faire connaître les rapports qui existent entre les êtres et les
lieux qu'ils habitent. Cette étude contribuera à éclaircir les
grandes et importantes questions des foyers de là création
et de rimnuitabilité des espèces. En s'appuyant sur les faits
qu'elle nous présente, on parviendra plus facilement à se faire
une idée de la face de la nature telle qu'elle était dans l'état
(i) La tortue indienne, probablement originaire de Madagascar et des
îles voisines, a été acclimatée aux îles Galapagos, en Californie et sur beau-
coup d'autres points de la côte Occidentale de l'Amérique du Sud. — •
(a) Lesson, (f^oy. de la Coquille, Zoologie, II, 2, chnp. 9, pag. 10),
cite deux faits, tirés de Mariner et de Ivotzebue, et qui font
soupçonner la présence d'un grand Crocodile dans les îles Pelew et
Fidschi, oij ces animaux n'habilent ordinairement pas. — (3) Guil-
DiNG, Zoolog. Journal 111 p. 4o3, raconte un fait de cette nature; un
Boa entortillé autour d'un arbre avant été entraîné des côtes voisines
du continent de l'Amérique et jeté sur les côtes de St. Vincent. — (/j)Jjes
Hydrophis, par exemple , ont leur patrie constamment circonscrite dans
les mêmes limites , quoique tous ces ophidiens habitent la mer.
/
198 DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE
primitif j avant que l'art de l'iioiiime eût transfornié la surface
de la terre, avant qu'il eut chassé de leur habitation un grand
nombre d'animaux, les détruisant totalement, les réduisant
à l'état de domesticité et changeant ou modifiant leur nature j
en changeant celle des lieux qu'ils habitent. On ne peut
guère appliquer ce que je viens de dire aux Reptiles en géné-
ral et encore moins aux serpens. Les lieux de leur habita-
tion sont les forets, les marais, ou même les déserts, et ces
lieux se sont le moins ressentis de l'influence de la culture.
Ne se multipliant que rarement jusqu'à incommoder les
hommes en général, et sachant se soustraire aux poursuites,
en se retirant dans les lieux incultes qui leur servent de
retraite, la guerre qu'on leur fait n'est ordinairement dirigée
que contre les individus- de là que le nombre des espèces
ainsi que celui des individus doit être demeuré à-peu-près
au point fixé, dans l'ordonnance générale de la nature, dès
le principe 5 et c'est encore un des faits qu'il est essentiel de
constater dans la géographie physique. Or, supposant que les
êtres dont nous venons de parler, vivent encore dans les
mêmes lieux qui leur furent assignés dès l'origine; qu'ils vivent
encore sous le même climat, et sous les mêmes conditions, il
est évident qu'ils ne peuvent guère avoir subi de change-
mens dans le cours des siècles: ils offrent donc, plus que les
autres êtres vivans des points d'appui pour fixer avec cer-
titude, ce que l'on doit entendre par espèce, par variété
constante, par variété locale ou de climat, etc. — Les obser-
vations que je viens d'énoncer suffiront pour montrer com-
bien est importante l'étude de la distribution géographique
des Reptiles et particulièrement des ophidiens, et l'influence
que cette étude doit excercer sur celle de la distribution
géographique des animaux en général, de la zoologie, de la
géologie et de la géographie physique.
La distribution géographique des serpens est à-peu-près sou-
mise aux mêmes lois que celle des autres Reptiles: c'est à dire
DES SEKPEîNS. 199
que leur nombre augmente considérablement vers la zone tor-
ride, tandis qu'ils ne se trouvent que rarement dans les régions
froides; il paraît même que les serpens ne s'avancent pas aussi
loin vers le nord que les lézards ou les batraciens, qui appar-
tiennent probablement au nombre des Reptiles les plus répan-
dus. — La distribution géograpbique des serpens, envisagée
par rapport aux différentes parties du monde i) , offre plu-
sieurs faits intéressans à observer. Un des plus curieux est
sans doute l'absence totale de serpens dans les nombreuses
îles de l'océan pacifique (2) , phénomène d'autant plus singu-
lier, que les îles voisines qui composent le grand Archipel
indien, appartiennent à ces régions de la terre qui sont le
plus peuplées de serpens. Un autre point non moins im-
portant à savoir est que les serpens, et tous les Reptiles du
Nouveau monde appartiennent constamment à des espèces
diverses de celles de l'Ancien monde (3), fait prouvé et très
curieux , parce qu'un grand nombre d'oiseaux et plusieurs
mammifères de l'Amérique du Nord sont exactement les
mêmes qu'en Europe, ainsi que dans une grande partie de
l'Asie; et parce que plusieurs de nos Reptiles se trouvent dans
(1) J'ai donné plus haut, pag, 92 et suiv, , quelques observations sur
la nature des lieux que les serpens habitent; mais, comme on ne possède
guère de renseigneraens exacts pour constater leur distribution perpen-
diculaire , c'est à dire par rapport aux hauteurs jusqu'où ils se trouvent,
je puis me passer d'en parler ici. — (2) Lesson, P'oy. d, l. Coqii. ZnoL
II 1. p. 9, rapporte quelques observations qui tendent à constater la
présence de seipens dans les îles deRotouma et d'Oualan; mais ces obser-
vations ont besoin d'être confirmées : les Mariannes au contraire nour-
rissent plusieurs espèces d'opiiidiens , et Dampier, Voy» I p. Ii3, parle
de serpens verts des îles Galapagos. Je n'aurai pas besoin de réfuter
l'hypothèse, émise par Quoy et Gaimard, Voy, de VUranic ^ Part,
Zool. p. III, que ces animaux n'habitent peut-être pas dans ces îles et
dans des lieux analogues à cause de leur nature volcanique, — Ci) On
conçoit que j'excepte de ce nombre les tortues de mer.
200 DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQCE
toute l'Asie tempérée jusqu'au Japon, et souvent sans pré-
senter la plus légère différence. L'Amérique du Sud nourrit en
général des espèces autres que celles de l'Amérique du
Nord, quoique plusieurs d'entre elles soient parfaitement
identiques dans ces deux grandes terres: quelques espèces de
la première région habitent encore les Antilles et se trouvent
même jusque dans les parties méridionales des Etats-Unis , où
ellesforment quelquefois des variétés de climat; d'autres espèces,
communes dans toute l'Amérique du^Nord, sont^répandues
jusqu'au Mexique, et se rencontrent souvent aussi dans les
Antilles. L'Amérique en général, particulièrement dans ses
contrées équatoriales , est presque aussi riche en serpens que
la Malaisie. Il n'en est pas ainsi de la Nouvelle-Hollande , qui
ne parait habitée que par un petit nombre d'ophidiens , for-
mant, peut-être à l'exception de quelques unes des parties
septentrionales, des espèces propres à cette grande île. Les
serpens du Japon appartiennent sans exception à des espèces
particulières, et qui n'ont encore été observées dans
aucun autre point du globe. Les nombreuses îles du grand
Archipel de la Malaisie nourrissent souvent des espèces tout
à fait les mômes , et elles sont souvent encore absolument iden-
tiques avec celles de Malacca , du Bengale , des grandes Indes
et même de Ceylan. Quelquefois cependant , les espèces de
ces lieux divers présentent des différences plus ou moins
marquées, et donnent lieu à l'établissement de variétés locales.
A en juger d'après le peu de productions que l'on en connaît, il
paraît que la grande île de Madagascar a une Faune à elle,
L'Afrique n'est pas très riche en ophidiens. Les parties méri-
dionales de cette immense presqu'île produisent des espèces
différentes de celles de l'Europe et des autres parties du
monde ; et ces mêmes espèces sont souvent répandues sur
toute l'Afrique intertropicale , se trouvant même jusque
dans les parties septentrionales de ce continent* mais outre
quelques espèces particulières , ces dernières contrées en
DES SEI\1>E1NS. 201
préseiUeiit plusieurs autres qui habitent eu nièuic temps
presque tous les pays riverains de la Méditerranée jusqu'en
Syrie et en conséquence dans une grande partie de l'Europe.
La plupart des serpens de ce dernier continent, eniln , sont
répandus dans une grande partie de l'Asie tempérée, con-
trée qui ne paraît produire qu'un très petit nombre d'es-
pèces particulières.
La distribution géographique des genres ou des familles ,
envisagées comme représentant les diverses formes principales,
n'est pas moins curieuse à étudier que celle des espèces. Nous
voyons tout d'abord , que les Serpens venimeux sont distri-
bués , peut-être à l'exception de quelques îles, dans toutes les
contrées habitées par des serpens en général} ces Reptiles
dangereux ne paraissent pas non plus redouter le froid , car
on les rencontre souvent aussi loin vers le Nord que les non-
venimeux. Mais leur nombre est beaucoup plus limité que
celui de ces derniers: car en portant le nombre de toutes
les espèces d'ophidiens connues à 263 , dont 5^ (i) sont veni-
meuses , on voit que le rapport des dernières aux non-veni-
meuses est environ de i à 5. Nous verrons cependant par la
suite que cette proportion n'est pas la même dans tous les
pays du globe , et que le nombre des serpens venimeux , du
moins celui des individus , paraît être plus considérable dans
les contrées découvertes et stériles , où celui des non-venimeux
semble diminuer. L'Afrique et la Nouvelle -Hollande en four-
nissent des exemples: dans ce premier continent les espèces
de serpens non-venimeux connues sont en raison de deux ou
trois à un , tandis que c'est presque le contraire dans la Nou-
velle-Hollande, où de dix espèces de serpens connus, il y en
a sept de venimeuses. Quant au nombre des individus , il est
évidemment beaucoup plus borné dans les serpens-venimeux,
(i) Il faut, en outre, observer que 7 espèces venimeuses habitent
exclusivement la mer, où les non- venimeuses ue se iciiconlienî jamais.
202 DISTRIBUTION GÉOGRAPHïQlJE
ces derniers vivant, à l'exception des serpens de mer, presque
toujours isolés , et ne se multipliant guère au point de devenir
abondans que par le concours de circonstances assez favora-
bles, comme cela a lieu aux îles de sucre Françaises, à l'égard
du Trigonocépliale lancéolé , ou en Dalmatie à l'égard de la
Yipère amniodyte. Les serpens venimeux appartiennent donc
généralement au nombre des rares, et ils sont peut-être beau-
coup plus rares qu'on ne le pense ordinairement, soit que le
nombre des individus en est souvent très circonscrit , soit que,
grâce à leurs habitudes, ils échappent plus facilement aux
recherches de l'homme. (î) — Exceptant les espèces anomales
qui composent la famille des Tortrix , il n'existe aucun genre
de serpens ^ qui soit à-la-fois répandu sur toutes parties du
o'iobe, habitées par des Reptiles, et ce fait curieux nous servira
à démontrer combien est intime la relation qui existe entre
l'organisation des êtres et la nature des lieux qu'ils habitent.
Les COULEUVRES PROPREMENT D I T E S , par exemple , qui
sont destinées à peupler les contrées boisées ou marécageuses
mais couvertes dîme végétation abondante, n'ont pas encore
^té observées à la Nouvelle-Iiollande , et sont tellement rares
dans l'Afrique australe, que l'on n'y connaît qu'une seule
espèce, qui s'éloigne, en outre, par plusieurs points de son
organisation , des autres Couleuvres , en ce qu'elle se rapproche
à ces serpens qui habitent de préférence les contrées désertes
ou sablonneuses. On peut à-peu- près appliquer les mêmes
observations au genre coronelle, serpens qui habitent les
pleiiies marécageuses ou couvertes de bruyères, et dont on ne
(î) Les nombreux envois que l'on ne cesse d'adresser au musée des
diverses parties du monde, pourront peut-être fournir une échelle de
comparaison pour faire connaître le noudne respectif des individus des
deux grandes tribus de serpens : les recherches que j'ai faites à cet
égard, m'ont démontré que, pris pour terme moyen, le nombre d'indi-
vidus des serpens venimeux est à celui des individus des non-venimeux
environ conrme de un à vîns^t, '
DES SEKP EN 203
connaît aucune espèce dans la Nouvelle-HoUaiuic , tandis que
celles de rAfiique méridionale s'éloignent des espèces types.
Les SERPENS d'arbre sont plus particulièrement propres
aux contrées équatoriales;mais, connue ils lialnlent les grandes
forets ou des contrées boisées, ils ne se trouvent pas dans les
pays où ces conditions nécessaires à leur existence, ne se ren-
contrent pas: de là probablement que ces serpens n'ont pas été
observés dans la plus grande partie de la r^ouvelle-Hollande,
et que l'Afrique australe ne nourrit qu'une seule espèce de
cette famille, disparate en outre et se rappochant des Couleu-
vres. Les trois genres qui composent cette famille des serpens
d'arbre se rencontrent dans Tun et l'autre monde ; mais il est à
observer que les dipsas de l'Amérique ne parviennent pas à
cette forte taille que l'on lemarque chez la pi upart des espèces de
rinde; et que les dryophis des Amériques forment une véri-
table division géographique, en ce qu'ils ont le système dentaire
et le museau moins développés, ainsi que la prunelle de l'œil
orbiculaire. Les serpens d'eau douce, qui sont compris dans les
deux genres tropidonotus etiioMALOPSisse trouvent
en abondance dans les contrées riches en lacs ou arrosées par
de nombreuses rivières: de là que ces animaux sont communs
dans l'Asie , dans TAmérique et même en Europe , qu'ils
ne se rencontrent peut-être pas du tout à la Nouvelle-
Hollande, et qu'ils sont rares en Afrique; car il n'existe
qu'une seule espèce de Tropidonote dans la partie australe
de ce dernier continent, et encore cette espèce offre-t-elle
une organisation tout-à-fait anomale. Les Homalopsis même
qui sont par excellence les serpens d'eau douce et essentiel-
lement aquatiques, et qui appartiennent aux contrées chaudes,
n'ont été observés ni à la Nouvelle-Hollande ni en Afrique,
tandis qu'ils prédominent dans les Amériques; ils remplacent
même dans l'Amérique du Sud les Tropidonotes , qui n'ont
pas encore été observés dans cette grande presqu'île. La dis-
tribution géographique des boas nous présente plusieurs faits
204 DISTRIBUTIQIN GÉOGRAPHIQUE
dignes d'être rapportés. Ce sont également des serpens propres
aux contrées chaudes. Les véritables Boas n'habitent que dans
l'Amérique méridionale ; ils sont remplacés dans l'ancien
monde, par les Pythons; mais on observe, en outre, dans les
Indes, plusieurs serpens en tout analogues aux Boas, mais de
très petite taille et dont il n'existe , dans tout l'hémisphère occi-
dental , qu'un représentant à l'île de Cuba. Les Acrochordes
enfin sont un genre tout-à-fait propre aux Indes orientales. — •
Parmi les serpens venimeux , ce ne sont que les Vipères et
peut-être quelques Crotales qui s'avancent vers le Nord ,
jusque dans les régions tempérées ou froides; les autres genres
paraissent plus particulièrement destinés à peupler les contrées
intertropicales. -— Des serpens venimeux colubriformes , il
n'y a que le genre él aps qui se trouve à la fois dans les deux
Mondes , et encore les Elaps de l'Amérique forment-ils un
petit groupe géographique distingué par le système de colo-
ration et par quelques petits détails de forme; ceux des Indes
sont rayés longitudinalement, au lieu d'être annelés de rouge
et de noir; ceux de la Nouvelle-Hollande enfin peuvent être
considérés comme formant des espèces anomales. Lcsbon-
G ARE s sont propres auxîndes orientales, où se trouvent aussi
des NAJAS, quoique le plus grand nombre de ces derniers
serpens paraissent habiter de préférence des plaines arides ou
sablonneuses, ce qui explique pourquoi ils prédominent dans
l'Afrique et dans la Nouvelle-Hollande. — On n'a pas encore
pu parvenir à expliquer le phénomène que les serpens de
MER se trouvent exclusivement dans les mers des Indes depuis
le Malabar jusque dans le grand Océan pacifique.- — Enfin, il
reste à faire quelques observations curieuses sur la distribution
des SERPENS VENIMEUX PROPREMENT DITS. DeS trois
genres dont cette famille est composée, l'un, celui de Vipère,
est propre à l'Ancien monde, tandis que celui de Crotale
n'habite que dans les Amériques, où il remplace le premier;
mais les Trigonocéphales se trouvent dans l'un et l'auti'e
DES SEKPENS. 205
inondo. Les tlcrnlers reptiles , qui habitent les contrées boisées
et les o-iandes forets, n'ont été observés, par cette raison,
ni en AtVi({ue ni à la Nouvelie-Hollande, où ils sont remplacés
par les Vipères; mais il est à observer que la Vipère de la
Nouvelle-Hollande forme une espèce anomale , tandis que
celles qui habitent l'Europe s'éloignent également des espèces
types et se rapprochent des Trigonocéphales. On peut établir
dans ce dernier genre deux divisions, dont l'une comprend
les espèces à tête revêtue d'écaillés , qui habitent plus particu-
lièrement les contrées tropicales, tandis que ceux qui ont le
sommet de la tête garni de plaques , se trouvent jusque dans
les régions tempérées.
Après avoir donné, dans les pages précédentes, des notions
générales sur la distribution géographique des ophidiens ,
nous nous proposons de traiter en particulier chaque contrée
du globe, que l'on sait habitée par ces animaux. En commençant
par l'Europe, nous voyons que cette partie du monde ne
nourrit ni des Calamars, ni des Hétérodons ou des Lycodons;
qu'il ne s'y trouve point de véritables Serpens d'arbre, pas
même des ïlerpetodryas; qu'il n'y existe non plus des Homa*
lopsis ou des Boas; que les familles des seipens venimeux
colubriformes et des serpens de mer ne s'y rencontrent
jamais; enfin que les serpens venimeux proprement dits n'y
ont d'autre représentans que plusieurs espèces du genre
Vipère. Il n'y a guère d'espèce qui soit propre au centre ou
aux parties septentrionales de ce continent, presque toutes
se trouvant également au Sud de l'Europe, région qui produit
beaucoup d'espèces qui habitent aussi dans les parties envi-
ronnantes d'Afrique ou d'Asie. On peut cependant assigner
des limites à quelques unes des espèces, ce qui donne lieu à
plusieurs observations curieuses. La Vipère commune par
exemple, Vipera berus, habite toute la partie centrale de
l'Europe et paraît être répartie dans TAsie tempérée jusqu'au
lacdeBaical; elle vit aussi en Angleterre et en Suède; mais
2(K> DlSTarBUTION GEOGRAPHIQUE
vers rOuest, elie ne se trouve guère au delà de la Seine, tandis
que les Alpes paraissent former les limites de cette espèce (i)
dans le Sud. Dans la partie méridionale de l'Ouest de l'Europe ^
elle est r<^nîplacëe par la Vipère aspic, Vip. aspis, qui se
trouve depuis Trieste dans toute l'Italie jusqu'en Sicile,
puis en Suisse et dans toute la France au delà de là Seine
jusqu'aux Pyrénées, et peut-être aussi dans la Péninsule
ibérique. Les parties méridionales de l'Est de l'Europe pro-
duisent au contraire une troisième espèce de ce genre,
Vip. ammodytes, qui se trouve depuis la Styrie jusqu'au
Sud de la Hongrie, puis dans la Grèce, dans la Dalmatie,
en Sicile , et peut-être aussi dans la Galabre. Cette distribution
des espèces paraît modifiée par la nature de terrains qu'elles
habitent: la première préférant en général les bruyères, les
lieux marécageux, et boisés; la seconde un sol sec et aride;
la troisième les terrains rocailleux. On n'a pas observé , dans
ces serpens des variétés locales ou de climat; mais il n'en
est pas ainsi de plusieurs autres serpens d'Europe , qui sont
répartis presque sur toute l'étendue de ce continent: on peut
citer comme exemple la Goronella laevis et les Tropi-
donotus natrix et viperinus. Ces espèces , dont les deux
premières habitent presque toute l'Europe septentrionale et
centrale, et la dernière jusque vers le 5o degré de lat, bor. , se
trouvent également dans le Midi de l'Europe, où elles forment
souvent, outre un grand nombre de variétés accidentelles,
des variétés locales. En Espagne, par exemple, le Trop,
vipérin a le dos rayé longitudinaîement; le même cas a lieu
à l'égard duTropidon. commun dans l'île de Sardaigne, et les
individus de ce serpent tués en Sicile offrent encore d'autres
disparités légères; la Coron, lisse enfin, forme (2) en Italie une
(i) On dit qu'elle se rencontre aussi dans la vallée du Pô jus({u'au
Florentin , mais en très petit nombre. — (2) Je puis assurer que le
caractère <ln jnélcndu Colni>. Riccioli, tiré de la plaque nasale indi-
DES SERPENS. 207
variété locale ou de climat, variété à teintes plus claires, qui
se trouve jusque dans les environs de Marseille, et qui remplace
notre Coronelle dans le Sud de l'Europe. La Couleuvre d'£s-
culape qui habite dans le Sud de l'Allemagne, se trouve en
Dahnatie et en Italie, jusqu'en Provence. Le Col. viiidi-
flavus a été observé dans toute l'Europe méridionale en
Grèce, en Hongrie, en Dahnatie, en Italie, en Sicile, en Sar-
daigne jusqu'en France et en Suisse. Le Col. hippocrepis
habite l'Espagne et la Sardaigne, tandis que le Col. leopar-
dinus se trouve en Sicile, en Dahnatie et en Grèce; mais,
autant que je sache, aucune des deux espèces n'a été obser-
vée en Italie. Le Psammophis lacertina , commun en Dal-
matie, en Espagne et dans une grande partie de la France,
et qui habite la plupart des autres pays riverains de la
Méditerranée, n'a pas non plus été trouvé en Italie ni dans
aucune des îles adjacentes. Les contrées méridionales de
l'Europe produisent plusieurs autres espèces de serpens, qui
ne paraissent pas habiter une grande étendue de terres : telles
sont le Xénodon de Michahelles de l'Espagne; le Psammo-
phis Dahlii de la Dal matie qui se trouve également en
Grèce et qui se rapproche par ses formes élancées des serpens
d arbre; le Dipsas fallax des mêmes contrées, que l'on
doit considérer comme espèce anomale du genre; enfin le
Tortrix Eryx, qui se trouve seulement en Grèce, et dont
les déserts de l'Afrique et de l'Asie sont la véritable patrie. —
En comparant les observations que nous fournissent les autres
animaux de l'Europe à celles que nous venons d'énoncer
sur les Reptiles de cette partie du monde, on parvient à
déduire des résultats analogues. Nous voyons que les animaux
des contrées septentrionales sont souvent remplacés dans le
visée est purement accidente!, comme on peut se convaincre en
examinant la série d'individus de cette Coronelle, conservée dans noire
Musée.
208 DlSTRîBLiTiON GÉOGRAPHIQUE
centre de l'Europe 5 par d'autres, qui forment des variétés
locales ou quelquefois même des races; et la comparaison
des animaux de l'Europe centrale avec ceux du Midi de
l'Europe offre souvent le même résultat. On peut citer de
nombreux faits à l'appui de cette thèse; je n'en rapporterai
que quelques uns. Notre corbeau, par exemple, est remplacé,
aux îles Far, par une variété à teintes mélangées de blanc.
La corneille mantelée et la corneille noire, sont deux races
de la môme espèce qui se représentent mutuellement, etdontla
première appartient aux contrées septentrionales de l'Europe.
On sait que la même chose a lieu a-peu-près à l'égard des
étourneaux vulgaire et unicoîore, dont le dernier habite plus
particulièrement le Midi de l'Europe. Notre Emberiza schoeni-
clus est remplacée en Dalmatie et en Italie par l'Emberiza
paluslris, qui offre ordinairement un bec beaucoup plus fort,
mais dont l'existence comme espèce ne pourrait être prou-
vée, parce qu'on observe souvent des individus exactement
intermédiaires entre ces deux races. Tout le monde connaît
les races locales que forme notre moineau au delà des
Alpes et des Pyrénées ou dans l'Afrique septentrionale. La
distribution géographique des mammifères nous présente de
nombreux faits pour éclaircir notre thèse. Chacun sait qu'il
existe, dans les différentes parties de l'Europe et du Nord
en général, des Lynx plus ou moins divers les uns des autres,
et qui paraissent former des races produites par l'influence
(ij II ne faut pas s'imaginer que chacune de ces races soit, par
rapport au Heu de l'habitation, parfaitement séparée de l'autre race
qu'elle doit remplacer; très souvent elles se mêlent dans leurs migra-
lions, ou vivent dans les mêmes lieux, se perdant insensiblement à
mesure que leurs représciitans se montrent; il arrive aussi que les indi-
vidus de deux races voisines se propagent ensemble, comme font les
Corvus cornix et coron e , fait que j'ai constaté par de nombreuses
observations faites dans les environs de Dresde. Consulter par rapport
à ces questions les exceilens travaux de M, Gr.ocEa de Breslau.
DES SERPENS. 209
tlu climat sur le poil (i). Le renard du Nord (a) est d'uncr
taille plus forte et offre un peLige mieux fourni que celui
du centre de l'Europe; en Italie il Teste assez petit, et a le
ventre noirâtre, (Canis melanogaster, Bon.). Les belettes
(Mustela erminea) de la Sardaigne et de la Sicile (3) diffèrent
un peu par les teintes des individus du reste de l'Europe.
Le mulot (Mus decumanus) est remplacé dans le Midi de
ritalie par une race qui s'en éloigne à-peine: c'est le Mus
tectorum du Prince de Musignuno. Un autre animal très
curieux, qui y représente dans beaucoup de lieux notre taupe,
est le Talpa coeca. On sait que les chamois des Alpes offrent
de légères différences avec ceux des Pyrénées; il serait donc
curieux de savoir, s'il en est de même des bouquetins de
ces deux chaînes de montagnes. — Les Reptiles nous
présentent également plusieurs exemples de ces différences
locales: nos Salamandres aquatiques offrent souvent des teintes
plus vives dans le Sud ou dans l'Ouest de l'Europe ^ tandis
que les Crapauds vulgaires de l'Italie ont des teintes plus
uniformes que d'ordinaire, et le corps hérisséd'épines. Il existe
de légères différences entre les tortues grecques de l'Italie,
de la Grèce, de la Syrie ou du Nord de l'Afrique; les rainettes
communes ont souvent en Sardaigne le corps couvert de
(i) La même chose s'observe dans les tigres du Nord de l'Asie com-
parés à ceux du Bengale, ou même de Sumatra et de Java; on voit des
phénomènes analogues dans certaines plantes à feuilles lisses qui , ap-
portées dans un climat froid, se revêtent souvent de poils, pour
se garantir du froid. — (a) Le Japon, situé sous le même parallèle que
le JMidi de l'Europe, produit des renards de forte taille et d'un beau
pelage, mais en tout semblables à nos renards d'Europe, dont on con-
naît une belle variété dans l'Amérique du Nord, (Canis argentatus,
Geoffroy). — (3) On en a fait des espèces fondées sur une pré-
tendue différence dans le nombre des molaires, observation qu'il n'est
pas nécessaire de contredire.
i4
210 DISTRiBUTlON GÉOGUAPHIQUE
larges lâches effacées; en Grèce, notre orvet a le corps parse-
mé de points foncés, et c'est alors TAnguis punctatissima de
Bibron; enfin je pourrais citer un grand nombre de faits
analogues tirés de la classe des insectes, mais ce serait
m'enfoncer dans un gouffre, où l'on ne parviendra peut-être
jamais à voir clair.
L'étude de la répartition géographique des animaux dans
l'Afrique, offre un grand nombre de faits extrement curieux,
et de la plus haute importance pour la géographie physique
et même pour la zoologie descriptive. Il n'est peut-être pas
de contrée de la terre qui fournît des preuves aussi frappantes
des rapports qui existent entre les animaux et les lieux
qu'ils habitent. En étudiant donc la constitution physique
de ce grand continent, on pourra en quelque sorte deviner
la nature de ses productions. Le trait prédominant de
l'Afrique est la présence de grandes plaines arides, soit qu'elles
forment de véritables déserts de sable , soil qu'elles se
présentent sous l'aspect de ces plateaux en terrasses, élevés
quelquefois à une hauteur de plusieurs milliers de pieds
au dessus du niveau de la mer, et qui se revêtent de végé-
tation seulement pendant une courte période de Tannée. Un
sol de cette nature, brûlé sans cesse par les rayons per-
pendiculaires du soleil, est peu propre à produire des
vapeurs qui , se condensant dans l'atmosphère , en tom-
bent ensuite sous forme de pluie, de neige ou de grêle,
pour féconder la terre. Ces conditions et l'absence de hautes
montagnes dans cette partie de l'Afrique modifient la nature
des eaux douces ou courantes en général. De là que les fleuves
de ce continent sont sous tous les rapports inférieurs à ceux
des autres continens; ils ne forment que rarement ces grands
rassemblemens d'eau douce, qui sont si favorables au déve-
loppement des vapeurs; leurs bords ne sont pas ordinairement
couverts de cette luxuriante végétation, qui attire un si
grand nombre d'êtres de toutes les classes d'animaux; ces
DES SEllPKNS. 211
fleuves, gonfles dans la saison des pluies, pendant un
court espace de temps, par la crue subite des eaux, se
retirent après cette période dans leur lit, ou se réduisent
souvent même au point de ne plus mériter le nom de fleuve
ou de rivière. Il résidte de ce que nous venons de dire que
l'Afrique , n'étant ni arrosée pas de larges rivières ni couverte
d'une végétation abondante et dénuée de grandes forêts , ne
doit nourrir qu'un petit nombre de ces animaux qui habitent
les eaux douces ou les bois, tandis que les animaux qui sont
plus particulièrement destinés à peupler les plaines, doivent
s'y trouver en abondance: et ces suppositions se confirment
par l'expérience. Nous voyons en Afrique, au lieu des Cerfs
une quantité d'espèces d'Antilopes, errant par troupes nom-
breuses dans ces lieux découverts. Les Ecureuils y habitent
en très petit nombre et les espèces qui s'y trouvent s'éloignent
encore ordinairement des véritables écureuils par leurs habi-
tudes terrestres. Le grand nombre de rongeurs qui peuplent
ce continent appartiennent presque tous à des espèces terres-
tres; beaucoup d'entre eux même vivent dans les lieux décou-
verts, et dépourvus des moyens de défense, la nature a pourvu
à leur conservation , en développant leurs organes de locomo-
tion , au point d'en faire de véritables sauteurs , et c'est de
cette manière que ces animaux ont la faculté d'échapper par
une prompte fuite, aux poursuites de leurs ennemis. On
observe enfin le même fait dans certains mammifères de
l'ordre des Insectivores. — Les Reptiles de cette partie du
monde offrent des exemples encore plus frappans, de ce que
nous venons d'avancer. L'Afrique nourrit à elle seule plus
d espèces de tortues terrestres que toutes les autres parties
du monde prises ensemble ; mais les tortues d'eau douce sont
en si petit nombre que l'on n'en connaît qu'une seule Emyde
et peut-être une ou deux espèces du genre Trionyx. Une
autre observation digne de remarque est le petit nombre de
batraciens propres à ce continent: il y existe à peine plusieurs
212 DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE
orapautls , quelques espèces du genre Bombinateur, u-
tant de grenouilles, et une ou deux rainettes , qui sont du
nombre des animaux très-rares. Le même fait se présente nar
rapport aux serpens d'arbre et aquatiques: les Dryopbis et
les Homalopsis y manquent totalement , et il n'y existe que
deux espèces du genre Dipsas , deux Dendropbis et un ou
deux Tropidonotes. L'exemple le plus frappant enfin est
Tabsence presque totale de poissons dans les eaux douces de
l'Afrique méridionale. — - Cependant , les observations que
nous venons de faire sur la constitution physique de l'Afrique
ne peuvent être appliquées à toutes les contrées de cette
partie du monde. Au point de la plus grande largeur de
ce continent , le grand plateau qui en occupe toute la partie
australe, descend rapidement vers les plaines désertes du
Nord, et se prolonge d'un côté, au delà du Quorra, dans
le haut Sudan, tandis que les terrasses de ce même plateau
entourent de l'autre côté les Alpes de l'Abyssinie. C'est de ces
hautes montagnes, ou de la pente septentrionale du grand
plateau de l'Afrique en général que naissent les plus grands
fleuves de ce continent ; c'est au pied de ces montagnes ou
terrasses que se forment ces marais boisés désignés sous le nom
de Kidla^ et qui entourent, dans le centre de l'Afrique, ce
grand bassin d'eaux douces, que l'on pourrait comparer aune
mer intérieure. Offrant un sol plus fertile, les régions dont nous
venons de parler sont couvertes d'une végétation plus abon-
dante que les autres parties de l'Afrique, et ces terres ainsi
que les fleuves dont elles sont fécondées, nourrissent un nom-
bre plus varié d'animaux, appartenant souvent à des genres
différens. Cette diversité dans la constitution physique des
différentes régions de l'Afrique doit nécessairement exercer
une influence considérable sur la distribution géographique
des êtres qui y habitent. — Les animaux qui sont plus
particulièrement destinés à peupler les plaines élevées de
la partie méridionale de ce continent, se trouvent souvent
DES SKIIPKNS. 213
sur tous ces points du grand plateau qui réunissent les
conditions nécessaires à leur existence. De là que beaucoup
d'aninuuix du Cap de 13onne Espérance ont été observé
jusqu'à la cote de Guinée, et même jusqu'en Abyssinie.
Tantôt ces animaux se trouvent être exactenuMit les mêmes
dans des régions aussi distantes l'une de l'autre ; tantôt ils
présentent dans l'un et l'autre lieu de légères différences, qui
n'existent souvent que dans les nuances , les vivacités ou
des teintes même seulement dans leur distribution; tantôt
enfin, il arrive que ces animaux diffèrent constanmient et
d'une manière assez essentielle pour justifier l'élévation de ces
représentans respectifs au rang d'espèces. D'un autre côté on
observe une certaine identité entre beaucoup d'animaux de
TAbyssinie et de la Sénégambie: ces deux pays nourrissant
parfois les mêmes espèces; les représentans d'un même ani-
mal, y formant tantôt des variétés locales, tantôt des espèces
diverses. Les productions de ces pays montrent quelquefois
de l'affinité avec ceux de l'Asie intertropicale, et on y trouve
même plusieurs espèces d'animaux , qui ont également été
observés dans une partie de l'Asie et même dans la Malaisie.
Cette identité est plus frappante encore entre les animaux
qui habitent les contrées situées au Nord du grand plateau
de l'Afrique, et ceux qui habitent l'occident de l'Asie jusquà
rindoustan ; il est vrai que dans les deux continens ces
animaux choisissent pour séjour des déserts qui semblent se
continuer l'un l'autre. Les contrées de l'Afrique enfin, situées
près des côtes de la Méditerranée, nourrissent quelques ani-
maux qui sont propres à la plupart des pays riverains de cette
mer, et qui se trouvent par conséquent aussi dans plusieurs
points de l'Europe. — Avant d'entrer en détail sur la distribu-
tion géographique desserpens d'Afrique , que l'on me permette
de citer à l'appui de mes observaiions , plusieurs faits curieux
tirés de la distribution des autres animaux qui habitent ce con-
tinent. Le nombre des animaux qui sont distribués à la surfa< c
214 DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE
de l'Afrique, sans offrir des différences locales, paraît être
assez limité, et ces animaux appartiennent souvent à des
espèces de grande taille: telles sont l'Eléphant, la Giraffe,
l'Hippopotame , le Crocodile vulgaire, le Lion , etc. Parmi les
animaux communs à la plupart des points du grand plateau
de l'Afrique, se distinguent notamment un grand nombre de
ruminans ; tels sont par exemple , le Buffle du Gap , dont M. Rûp-
pell a rapporté les dépouilles d'Abyssinic, l'Antilope strep-
siceros qui habite le Cap , l'Abyssinie et la côte de Guinée;
l'Antilope equina du Sénégal , probablement identique avec
l'Antilope leucophaea du Cap; TAnt. oreotragus qui vit au
Cap , à Ashantée et en Abyssinie ; VAntil. pygarga (dont l'Ant.
personata est le jeune) qui se trouve au Cap et à la Côte d'or,
etc. ; beaucoup d'autres animaux ont également été observés
dans ces terres distantes l'une de l'autre, commepar exemple, le
Phascochoere ordinaire qui est le même au Cap et au Sénégal,
Sciurus setosus également propre à ces deux régions , ensuite
Myoxus murinus, Canis pictus , le Ratel (Gulo mellivorus)
la tortue géométrique et d'autres. Un nombre non moins
considérable d'animaux offre , au contraire , 'sur ces dif-
férens points de l'Afrique, des variétés locales quelquefois
très curieuses. Nous voyons ainsi le chacal du Cap , (Canis
mesomelas) remplacé, dans les parties septentrionales de
l'Afrique , par une variété à teintes claires , n'ayant pas de
noir sur le dos, (Canis variegalus et anthus? duMus.de
Francf.); leDamanetlaZoriile du Cap ne diffèrent de ceux du
nord de l'Afrique que par des teintes plus foncées; la Genette
du Cap (Viverra genetta et felina (i) ) habite aussi l'Es-
pagne, mais elle est remplacée au Sénégal et en Abyssinie
par une variété locale, remarquable par ses teintes assez pâles,
(Viverra senegalensis). L'Ichneumon de l'Egypte (Herpestes
(i^ La différence entre ces deux mammifères se réduit à la nuance
des teintes, et me paraît puremeul périodique.
DFS SEKPriNS. 215
ichneumoii) est remplacé à la pointe australe de lAfrique par
une variété locale à pelage plus foncé (Herp. cafer et griseus);
il en est de même de richneumon versicolor de l'Ahyssinie,
qui a les teintes moins claires au Cap de Bonne Espérance.
L'xA.ntilope mergens du Cap est représentée en Sénégambiepar
l'Ant. Grimmia, et en Abyssinie par l'Antil. madaqua (llùpp.
Neue JVii'heUh. — p. "] fig- i); l'Antil. eleotragusou Lalandei
du Cap par l'Ant. redunca du Sénégal et de l'Abyssinie;
rOuribi de l'Abyssinie (Antil. montana) montre de légères
différences avec celui du Cap (Ant. scoparia) , et il en est de
même de l'Oryx de ce premier pays, (Antil. Beisa, Rûpp.),qui
forme une race , distinguée par une disposition diverse dans
le système de coloration , de celles d'Ashantée et du Cap.
Quelquefois il arrive même qu'il existe dans chacun des
pays dont je viens de parler des races représentant la même
espèce, comme l'Antilope sylvatica, scripta et decula, qui
se représentent mutuellement au Cap, au Sénégal et en
Abyssinie, conmie l'Antilope Mborr de la Barbarie y rem-
place l'xAntil. Dama , dont la véritable patrie est le Kordofan et
la Nubie etc. D'autres animaux enfin diffèrent dans ces divers
lieux d'une manière assez considérable pour mériter peut-
être d'être élevés au rang d'espèces (i): tels sont, par
exemple, le Phascochoere d'Elien qui représente en Abyssi-
nie le Phase, commun de la côte de Guinée et du Cap; puis le
Sciurus rutilans, représentant dans l'Afrique orientale le Se.
setosus du Sénégal et du Cap, et plusieurs autres. — Des
faits analogues à ceux que nous venons de citer s'observent
dans la classe des Oiseaux et des Pieptiles; mais craignant de
donner à mon travail trop d'étendue , je me bornerai dans la
suite à la classe des Mammifères et des Reptiles qui , d'ailleurs,
sont plus propres à fournir des preuves certaines. Les Monitor
(i) L'Hvfena vlllosa du Cap ne diffère guère de l'Hyène striée quo
par son pelage lonjc rt touffu , ot par des teintes plus foncées.
216 iJlSTfaBlJTION GÉOGRAPHIQUE
exanthematicus et niloticus de l'Egypte et du Sénégal sori£
remplacés au Cap par des variétés locales à teintes plus fon-
cées et à dessin plus prononcé; ce sont alors lesTupinambis
albogularis de Daudin et le Lacerta capensis de Sparman. La
Vipère arietans du Gap offre des teintes beaucoup plus pâles
en Nubie et en Abyssinie ; il en est de même du crapaud du
Cap (Bufo pantherinus, Boie) , qui y remplace le Bufo arabi*
eus de l'Egypte, dont le système de coloration est beaucoup
moins agréable. Le Naja baje de l'Egypte est représenté au
Cap par le Naja nivea , et on trouve même au Gap une variété
du Lézard véloce, (Lac. pardalis) , qui vit jusqu'en France et
en Espagne. Certaines tortues nous présentent des exemples
extrêmement curieux de cette influence du climat (2) sur les
animaux, ou des différences que présentent souvent, dans di-
verses contrées, les espèces qui sont modelées sur un seul type.
La grande tortue de terre du Gap , (Testudo pardalis , Bell) a été
également rapportée du Sénégal et de TAbyssinie; maisaulieu
d'avoir, dans ces lieux la carapace ornée d'un beau dessin noir
et jauiie, cette partie est d'un gris-jaunâtre uniforme, teinte
qui occupe également toutes les autres parties du corps ;
enfin toutes les appendices de la peau ont acquises, sous l'in-
fluence d'un climat aussi vigoureux, un développement plus
fort, de sorte que les écailles des pieds de devant ont été
toutes transformées en pointes ou même en épines : cette
variété locale est connue sous les noms de Testudo sulcata
(ï) Voyez la revue du genre Monitor, dans la 3* livraison de
nies Abh'ddim^en^ où j'ai rectifié les erreurs commises par les natura-
listes en déterminant les espèces de ce genre. — (2) J'espère que
l'on n'ira pas comparer ma manière de voir à l'égard des expres-
sions, race, variété locale ou de climat, aux; idées de Buffon qui
aurait volontiers réunis en une seule espèce tous les lièvres du
monde, ou encore moins à celles de Lamark, qui alla jusqu'à tâcher de
prouver la possibilité de la transmutation de ToraDg-oulan en l'espèce
humaine.
DES SEUPENS. 217
ou calcarata. Le Testutio angulata du Gap, (|ui se trouve
aussi à SierraLeone, à éprouvé , dans ces derniers lieux, des
changeniens analogues à ceux que je viens de citer comme
ayant eu lieu à l'égard de la Test, pardalis; mais, dans la
tortue dont nous parlons, cette influence d'un climat différent
s'est particulièrement concentrée sur le développement de la
carapace et de ses bords: (cette race forme le genre Kinnyxis
de Bell.) Nous faisons mention, en dernier lieu , d'une diffé-
rence non moins curieuse entre les Emydes, qui se représen-
tent mutuellement au Gap, au Sénégal et à Madagascar: on
peut regarder comme forme type l'Emys galeata du Gap,
espèce l'une des mieux caractérisées du genre; cette Emyde
est remplacée, en Abyssinie par l'Emys Gehafie de Riippell,
qui s'en distingue seulement par quelques caractères légers mais
constans (i) ; à Madagascar enfin, nous voyons , au lieu de ces
deux variétés, une race différente, le Sternotlioerusnigricans
qui, quoique modelée sur le même type, se distingue con-
stamment de ses représentens , par des formes plus lourdes,
une carapace moinslarge et unplastronen partie mobile. (2) —
En résumant ce que nous venons de dire de l'influence du
climat sur les animaux d'Afrique , et en déduisant des lois ,
on arrive à ce résultat, que la différence des animaux qui se
(ij Ces caractères se bornent presque à la forme un peu diverse
du plastron, et aux lames antérieures de cette partie , disparité si fré-
quente chez les Chéloniens. — (2) J'espère avoir constaté, dans mon
travail sur les Chéloniens , inséré dans la Faune du Japon, le peu d'im-
portance du caractère tiré de la mobilité du plastron, et démontré que
très souvent ce caractère est purement accidentel, ou l'effet de l'âge. En
tout cas, et adoptant même la différence spécifique de celte dernière
Erayde, je crois que l'on détruit les affinités naturelles en élevant
cet animal, eu faveur d'un caractère isolé, au rang de genre, et en
l'éloignant, dans la méthode artificielle, de ses représentans en Afrique.
On pourrait dire que cette Emyde est à ses représentans ce qu'est l'Emys
pennsylvanica à l'Emys scorpioidea de Surinam.
218 DISTRIBUTION GEOl^RAPHiQUE
représentent mutuellement dans FAfrique australe et septen-
trionale, se réduit souvent à un développement plus ou moinfr
complet de certaines parties et à une diversité dans les teintes ;
ceux qui habitent les dernières contrées , montrent ordinaire-
ment une livrée d'un jaune ou gris pale , couleur propre à tant
d'animaux qui fréquentent ces lieux déserts (i) et que j'appe-
lerais volontiers la couleur du désert. — L'état borné
de nos connaissances par rapport aux animaux de l'Afrique
en général ne nous permet guère de donner un tableau exact
de la distribution géographique des serpens dans cette partie
du monde, et encore moins d'assigner à chaque espèce les
limites précises qui déterminent les lieux d'habitation que
la nature a désignés à chacune; ne connaissant, à proprement
parler, d'une manière exacte que les productions de trois à
quatre points principaux (a) de ce continent qui ont été
explorés, nous nous voyons obligés de nous borner à l'indi-
cation des espèces et des lieux où elles ont été observées.
L'Afrique est en général beaucoup moins riche en Reptiles et
notamment en serpens que l'Asie et l'Amérique. Le nombre
des genres est également plus circonscrit dans ce continent;
maison y voit, dans les Reptiles le même phénomène qui s'ob-
serve dans les autres animaux et les plantes de cette partie du
monde, savoir : que les espèces de certains genres sont extrê-
mement nombreuses , et que ces diverses espèces habitent
souvent les mêmes lieux: fait qui s'applique également, quoi-
que dans un sens moins étendu, à la Nouvelle-Hollande. Ce
sont en général les animaux qui habitent les plaines, dont le
nombredes espèces est multiplié en Afrique. C'est ainsi que nous
(l) Comme par exemple, la plupart des antilopes de l'Afrique septen-
trionale, les nombreuses espèces de renards de ces contrées , les dipus,
les lièvres , plusieurs rongeurs; puis un grand nombre d'oiseaux, des
reptiles, comme l'agame du désert, le caméléon, l'éryx, le céraste etc. —
(a) L'Egypte jusqu'en Abyssinie, l'Algérie, une partie de la Séné-
gambie fet de la côte de Guinée, enfin le Cap de Bonne î^spérance.
DES SERPENS. 219
voyons, à la pointe australe de ce continent , trois à quatre
espèces de tortues terrestres, quatre espèces de serpens du
genre Coronelle , autant du genre Naja, el trois du genre
Vipère. Les autres genres de serpens qui y habitent, n'ont
pour représentant qu'une seule espèce. Ces serpens appar-
tiennent presque sans exception à des espèces propres à ce
continent. On en a retrouvé quelques-unes à la côte de Gui-
née: telles sont le Lycodon de Horstok et le Naja rhombeata;
le Psammophis moniliger s'y trouve également, mais il y
forme une variété locale qui se rapproche de celle qui habite
l'Egypte. C'est en Sénégambie que vivent trois espèces de
serpens d'arbre du genre Dendrophis, différentes de celles
du Gap, et dont l'une, le Dendropli. picta, est répandue dans
une grande partie de l'Asie jusqu'à la Nouvelle- Guinée. Les
contrées intertropicales de l'Afrique nourrissent le Python à
deux raies j dont la patrie s'étend également jusqu'en Chine
et à l'île de Java. La Vipère bondissante du Cap, Vip. arietans,
se trouve jusqu'en Abyssinie , où elle forme une variété locale
à teintes pâles. L'Afrique septentrionale produit plusieurs
espèces de serpens différentes de celles du reste de l'Afrique :
telles sont l'Eryx et la Vipère Echis qui habitent jusque dans
rindoustan, le Céraste, un Dipsas et plusieurs Couleuvres.
D'autres espèces, comme le Naja haje, le Psammophis moni-
liger diffèrent plus ou moins de leurs représentans à la pointe
australe de l'Afrique. Les pays de ce continent situés sur les
bords de la Méditerranée, nourrissent plusieurs espèces qui se
trouvent également dans l'Europe méridionale ; et cette ana-
logie entre les animaux de ces deux parties du monde est
particulièrement sensible en comparant ceux des côtes de la
Barbarie aux animaux de l'Espagne et du Portugal , contrées
qui, par la nature de leurs productions , se rapprochent plutôt
de l'Afrique que de l'Europe (i). On n'a pas encore observé
(i) La presqu'île ibérienrn? nourrit le caméléon, la {:;cn€ne, une
220 DISTRIBUTION GEOGRAPHIQUE
des serpens dans les îles situés dans le rayon de Ix^frique, et ,
on peut tenir pour certain que les Canaries n'en produisent
pas (i).
La grande île de Madagascar ne paraît appartenir à
l'Afrique que par sa partie occidentale, de ce côté de la chaîne
des montagnes qui parcourt cette terre vierge dans toute
sa longueur. Se rapprochant des Indes, quant aux produc-
tions de la côte orientale, la seule partie un peu connue,
cette grande île offre cependant une Faune toute particulière
sous beaucoup de rapports; et on pourrait peut-être appliquer
la même observation aux îles avoisinantes. C'est dans ces
terres que se trouvait autrefois le Doudou, et qu'ha])itent
les Lemurs avec l'espèce anomale connue sous le nom de
Cheirogaleus, l'Aye-Aye, le Caméléon à nez fourchu, dont
les pointes saillantes du museau sont assez sujettes à varier,
et qui a été introduit dans plusieurs autres îles , le Ptyodactyle
frangé, etc. — A l'exception du Tropidonote schisteux, qui
habite aussi dans une grande partie de l'Asie, tous les ser-
pens de cette contrée appartiennent à des espèces particu-
lières. Nous en citons le Langaha, espèce anomale et très
curieuse du genre Dryophis , les Erpétodryas de Goudot et
rhodogaster, et le Dipsas de Gaimard , tous propres à l'île
de Madagascar. Les Mascareignes produisent une très belle
Couleuvre, (Col. miniatus) et un petit Boa à formes élancées
et à queue effilée, (Boa Dussumieri). On ne connaît des îles
Seychelles qu'un serpent du genre Psammophis.
En exceptant les deux presquîles de l'Inde, l'Asie n'est
pas peuplée d'un grand nombre de Reptiles. Cette observation
amphisbène, et beaucoup d'oiseaux inconnus dans le reste de l'Europe.
(i) Je dois observer ici que les Reptiles de ïénériffe appartiennent
à des espèces Européennes , mais que tous les Sauriens de celte île ont
les teintes extrêmement foncées : on y trouve le Scinque ocellé, le Lézard
des murailles et la Rainette commune.
DES SEllPÊNS. 221
paraît fondeo, quoique les autres points de l'Asie iraient
]>as été aussi souvent explorés que ceux que nous venons
(le nommer ; car elle s'explique facilement par la posi-
tion (le l'Asie dont la plus grande partie est situ(^e sous la
zone tempérée et la zone glaciale , régions peu propres
à la multiplication des Reptiles. L*Asitî septentrionale ou
plut(')t la Sibérie produit un grand nombre d'animaux qui se
trouvent également en Europe; et le même cas paraît avoir
lieu à l'égard des serpens (i). Un ophidien curieux, propre
aux contrées méridionales de la Sibérie est le Trigonocéphale
halys , intermédiaire par son organisation entre les Vipères
d Europe et les Trigonocéphales à tête garnie de plaques.
Les déserts au Sud de la Mer Caspienne, qui se prolongent
d'un côté jusque dans l'Indoustan, tandis que de l'autre
ils sétendent par l'Iran en Arabie et en Syrie, pour se réunir
à ceux de l'Afrique, ces déserts nourrissent un petit nombre
de Reptiles, qui habitent également les déserts analogues de
ce dernier continent. On y a observé le Monitor exanthema-
ticus, les Stellions, l'Agame du désert, la Vipère Echis, le
Psammophis lacertin, et l'Eryx , répandu jusqu en Sibérie,
mais qui forme dans les Grandes Indes une ou plusieurs
variétés locales ou races distinctes. Nous sommes dans une
ignorance absolue à l'égard des Reptiles du reste de l'Asie
moyenne ; mais les animaux que nous connaissons de la
Chine, dumoinsceux des environs de Canton , offrent souvent
une grande analogie avec les productions des îles du grand
Archipel indien. Avant de parler des deux presqu'îles de
l'Inde, [qu'il convient de rapprocher encore de la Malaisie,
*(i) La plupart des voyageurs conviennent que nos Tropidonoles,
noire Vipère, nos Lézards etc. se trouvent en Sibérie; mais, n'ayant
admis dans mon livre que des faits fondés sur l'autopsie , soit des sujets
mêmes soit de bonnes figures des sujets, je ne me suis que rarement
servi d'observations des voyageurs.
222 DISTRIBUTION GEOGRAPHIQUE
je me vois obligé de dire quelques mots sur les îles qui
composent l'empire japonais, qui se rattachent , par leurs
productions, à l'Asie tempérée et à l'Europe, mais dont les
parties méridionales montrent de l'identité avec l'Asie inter-
tropicale. L'étude des animaux du Japon offre les plus beaux
résultats pour justifier ma manière de voir, savoir de rap-
procher les animaux qui, étant modelés sur le même type,
se représentent mutuellement dans les diverses contrées du
globe, et de les comprendre sous un même nom spécifique,
admettant, comme subdivisions, des variétés locales ou de
climat; les résultats que nous obtenons au moyen de cette
étude, pourront en même temps servir à détruire le préjugé,
que les espèces voisines sont rigoureusement séparées les
unes des autres, en sorte que l'on puisse établir des traits
distinctifs saillans pour chacune d'elle. Plusieurs Mammi-
fères du Japon (i) ne se distinguent guère de ceux de
l'Europe; il existe dans cet empire un blaireau, absolument
semblable au nôtre, mais à teintes un peu plus foncées et à
taille moins forte; la taupe du Japon s'éloigne de celle de
l'Europe par des teintes un peu plus claires; les martes de
ce pays ont la tache sous la gorge plus jaune que chez les
nôtres; le Renard et la Loutre sont tout-à-fait les mêmes
que chez nous; l'Ecureuil s'approche de la variété de lEcu-
reuil qui vit dans les hautes montagnes de l'Europe. D'autres
mammifères de ce pays s'éloignent de ceux d'Europe: tels
sont, dans l'île de Jezo, un grand Ours, probablement
analogue à l'Ours féroce des Rocky-Mountains; puis dans les
autres îles de l'empire, l'Ours du Tubet, un singe (Innuus
(i) Les nombreuses recherches faites au Japon par M. von Siebold
et plus lard par M. Bûrger nous ont mis en possession de la plupart
des productions de cet empire; ayant de chaque espèce un grand
nombre d'individus sous les yeux, on peut être sûr des faits que nous
avançons dans les pages suivantes.
DES SEUPENS. 223
speciosus) ; un nouveau chien très curieux (Canis viveninus);
un lièvre; doux espèces de Ptèromys , dont l'une à très forte
taille; un chamois analogue aux Antilopes sumatrensis et
niontana des montagnes rocheuses; enfin plusieurs manmii-
fères inédits de petite taille. Le nomhre des oiseaux qui habi-
tent en même temps l'Europe et le Japon monte à plus de
cent: plusieurs d'entre eux, comme les espèces aquatiques
et la plupart des oiseaux de passage y sont absolument les
mêmes que chez nous; mais les espèces stationnaires ou celles
qui traînent une vie nomade, sans quitter les grandes îles
dont nous parlons, présentent souvent des différences plus
ou moins marquées: ie Geai du Japon offre une disposition
des teintes un peu diverse du nôtre, et diffère encore de la
variété qui se trouve dans les monts Himalaya. Les Mé-
sanges, Parus major, caudatus etc. sont beaucoup plus petits
au Japon que chez nous, les teintes ont une nuance un peu
diverse, et la dernière espèce s'éloigne en outre de notre variété
en ce qu'elle suspend son nid aux branches des arbres
à-peu-près comme le fait notre remiz, (Parus pendulinus);
les individus Japonais de la Lavandière, MotaciUa alba,
sont de la variété connue sous le nom de Motac. lugubris; la
Caille, le Courlis grand, le Bec-fm cisticole du Japon pré-
sentent des différences lorsqu'on les compare aux individus de
l'Europe, etc. Enfin, beaucoup d'autres oiseaux du Japon
s'éloignent plus ou moins de ceux d'Europe, mais ils offrent
souvent des différences si légères, que les ornithologistes
même n'ont pas toujours cru devoir en faire mention ; (voir
Temminck Manuel III p. 5o et suiv.). Je ne parlerai point
des poissons d'eau douce du Japon, dont plusieurs repré-
sentent nos espèces d'Europe; ces dernières offrant souvent
des différences d'un pays ou d'une rivière à l'autre, il sera
inutile de dire combien il est difficile de déterminer avec
exactitude celles du Japon. Les Reptiles de cette contrée
donnent lieu à une observation assez remarquable, en ce
224 DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE
oue les sauriens et les ophidiens appartiennent sans exception
à clés espèces qui ne se trouvent point en Europe; tandis
qu'on observe parmi les deux autres ordres de Reptiles, des
races analogues de la même espèce dans ces deux contrées:
telles sont nos deux grenouilles et la Rainette, Rana escu-
îenta, temporaria et Hyla arborea, qui sont exactement les
mêmes au Japon ; puis notre tortue vulgaire, Emys vuîgaris,
connue aussi sous le nom d'Emys caspica et lularia, qui
forme, au Japon, une variété locale constante; le Crapaud
du Japon enfin , quoique très-voisin du nôtre pour l'ensemble
des formes et des teintes, s'en éloigne cependant par plu-
sieurs points de son organisation. Les serpens du Japon se
réduisent, à l'exception des Hydrophis, à trois espèces du
genre Couleuvre, à deux Tropidonotes et à un Trigonocé-
phale. La présence de ce dernier, ainsi que celle d'un
Trionyx, du Sorex moschatus, d'un grand écureuil volant
rappelent la Faune des Indes; tandis que plusieurs autres,
tels que le ScinqueàS raies, les nombreuses Salamandres, etc.,
démontrent qu'il existe aussi des rapports entre les Faunes
de l'Amérique du Nord et du Japon. — L'examen des pro-
ductions des deux presqu'îles de l'Inde, y compris l'île de
Ceylan, nous montre qu'il existe une grande analogie entre
ces contrées et les îles du grand archipel Indien, et cette
analogie devient tout-à-fait frappante, lorsqu'on compare les
animaux des points les plus rapprochés des pays que nous
venons de nommer; comme par exemple ceux de la pres-
qu'île de Malacca à ceux de Sumatra. Cette analogie cependant
iî'est pas aussi évidente par rapport aux mammifères (i), que
par rapport aux oiseaux, aux reptiles, aux poissons et parti-
culièrement aux productions du règne végétal; et il existe
(i) Les Singes de la Malaisie par exemple, appartiennent presque
sans exception à des espèces différentes de celles du Bengale, des
«jrandcs Indes ou de Cevlan.
DES SEPxPKNS. 225
«îansia presqu'île en deçà du Gange plusieurs Reptiles propres
à cette contrée, et appartenant même à des genres qui ne se
retrouvent pas dans la Malaisie, comme, par exemple,
les Caméléons, les Vipères, etc. L'île de Ceylan , quoique
assez voisine de !a côte de Coromandel , nourrit cependant
plusieurs animaux (i) qui n'habitent pas cette dernière
contrée: ce sont parmi les serpcns, le Tortrix maculé, le
Calamar scytale, le Lycodon caréné et deuxTrigonocéphales,
les Tr. hypnale et nigromarginatus. C'est dans ces parages que
commencent à se montrer les Hydrophls, ophidiens intéressans
qui habitent exclusivement la mer et qui se trouvent depuis ce
point, dans tous les parages intertropicaux, situées à l'Est
du Malabar, jusque dans la Polynésie. Le nombre de serpens
qui habitent les deux presqu'îles du Gange, sans se trouver
dans la Malaisie, paraît être très limité: tels sont l'Eryx, les
Coronelles de Russel et à huit raies, plusieurs espèces des
genres Couleuvre et Lycodon, le Dipsas trigonata, plusieurs
Tropidonotes, TElaps triple-tache et plusieurs Vipères Les pix)-
ductions de la presqu'île indienne au-delà du Gange étant
très peu étudiées, nous passerons à la Malaisie, qui nous
offre un des points les plus curieux du globe, pour étudier
la répartition géographique non seulement des animaux mais
aussi des végétaux* et ce sont les résultats obtenus par cette
étude qui contribueront grandement à affermir les idées que
nous avons si souvent émises dans notre livre, sur les
modifications innombrables que présentent les animaux de
la même souche, dans les diverses contrées qu'ils habitent.
Les terres qui composent le grand archipel Indien , appar-
tiennent au nombre des îles du premier rang, et sont
entourées d'une quantité de récifs ou d'îlots plus ou moins
considérables. Situées sous les tropiques, couvertes d'une
végétation luxuriante, et peuplées d'un nombre extrêmement
(i) Le OuanderoLi, plusieurs Semnopillièques etc.
10
^20 DiSTilïlUiTlON GÉOGRAPHIQUE
i;raiKl (Vanimaux de toutes les classes, elles sont séparées
les unes tles autres par des bras de mer le plus souvent
assez étroits , mais qui forment une barrière insurmontable
à la plupart des animaux (i). En observant donc à-la-fois, sur
plusieurs (ie ces lies, la même espèce, on peut être sûr que
ces animaux des diverses îies, n'ayant pas de communication
entre eux, doivent former, sur chacune d'elles, une famille
isolée, dont les individus, vivant depuis leur création ou du
moins depuis que ces terres ont reçues leur forme actuelle ,
dans des lieux d'une nature plus ou moins différente, doivent
nécessairement montrer des mcdiiications plus ou moins
sensibles. L'expérience nous prouve en effet la vérité de ce
que nous venons d'avancer. 11 arrive souvent que la même
espèce d'animaux a été découverte à la fois à Sumatra,
à Java, à Bornéo, à Timor, à Gélèbes et même aux îies
Pliilippines, ou sur le continent de l'Asie, et qu'elle
offre dans chacun de ces lieux, des disparités, à la vérité
qiîelquefois très subtiles, mais ordinairement constantes.
Nous demandons ce au'il reste à faire de ces variétés
locales: s'il faut les considérer comme telles ou comme
des races de la même espèce, ou si elles méritent d'être
élevées au rang d'espèce même. Les tentatives que j'ai
faites afm de m'arranger pour ainsi dire avec la nature,
m'ont conduit au résultat, que ce serait embrouiller la
(i) Outre l'archipel de la P^lalaisie, celui des Grandes Antilles serait
le seul point du i;lobe qui j)Ourrait offrir un point favorable pour
l'étude comparative d(;s individus de la même espèce, habitant à la
fois plusieurs contrées séparées par la mer; mais ces dernières îles
sont toutes situées à-peu-près sous le même parallèle; elles ne sont ni
aussi noml>reuses, ni aussi grandes ni aussi distantes les unes des
autres que celles de la Malaisie; d'ailleurs elles sont beaucoup moins
riches en productions d'histoire naturelle et n'ont été que peu explorées
en comparaison des îles de la Malaisie, qui sont depuis plus de vingt ans
l'objet des recherches assidues de nos voyaj;eurs.
DKS SiaUMuXS. 227
science, que de désigner chacune de ces petites variétés sous
lin nom propre et spécifique, et qu'il vaut mieux de connaître
une seule des conditions qui modifient la nature des êtres,
que d'avoir augmenté de plusieurs noms nouveaux le cata-
logue de ceux-ci. Je sais que mes lecteurs auront de la peine
à se faire, au moyen de descriptions, une idée de toutes les
petites modifications que peut éprouver la même espèce dans
des lieux divers, et qu'il est souvent difficile d'indiquer^
mais, ne pouvant leur mettre sous les yeux ces collections
immenses et ces suites nombreuses d'individus de la même
espèce, en un mot les matériaux qui ont servi de base à mes
travaux, je me vois obligé de rapporter plusieurs faits, qui
pourront justifier ma manière de voir. Choisissons d'abord
nos exemples parmi les mammifères. Le singe le plus com-
mim et le plus répandu dans l'Archipel indien est le Macaque,
Cercopithecus cynomolgus. La variété ordinaire de cette
espèce vient de l'île de Java; elle est constamment d'une
teinte vejdâtre et les poils du sommet de la tête sont un peu
relevés en touffe; les individus de Timor ressemblent en
tout point à ceux de Java, excepté quils offrent des teintes
plus foncées, et que leur pelage est mieux fourni, ce qui leur
donne l'air plus fort et fait paraître leurs extrémités moins
grêles que les individus de Java ; ceux de l'île de Sumatra ont
le dos souvent nuancé de rougeatre, leur face est un peu plus
noire que d'ordinaire, et les poils de la tête, plus courts que
dans les individus de Java, ne sont point susceptibles de
s'ériger en touffe; la race de l'île de Bornéo est intermédiaire
en quelque sorte, entre celles de Sumatra et de Java, ayant
la teinte du pelage de celles de Java et ressemblant à celle de
Sumatra par le manque de touffe et par la couleur de la face;
enfin , nous avons reçu de Siam, un singe tout-à-fait analogue
à la variété javanaise de notre Macaque, mais dont la queue est
un peu plus longue que chez celui-là. N ayant pas été à même
d'en examiner des séries complètes, j'ignoie si les petites
228 DîSTrjBUTION GÉOGRAPHIQUE
différences qui existent entre les individus des Civettes
(Viverra zihetha) de Java, de Sumatra, de Siam, de Bornéo
et d'AniLoine, que j'ai vus sont constantes ou accidentel*
les. Les mêmes raisons me retiennent d'énoncer des obser-
vations sur la Yiverre Lisang, dont nous possédons des
sujets de Siam , de Sumatra et de Java. Le Paradoxure com-
mun, Paradoxurus lypus est répandu au Bengale, à Siam,
à Sumatra, à Java, à Bornéo, à Amboine, à Timor, etc., et
forme dans ces divers lieux de nombreuses variétés qui se bor-
nent ordinairement à la nuance et la distribution des teintes,
mais €]uelquefois ils diffèrent aussi par la taille: à Sumatra,
par exemple, l'espèce devient beaucoup plus forte qu'à Java,
à Java plus forte qu'à Timor, etc. (i) ; il paraît exister en plu-
sieurs lieux une race qui a la pointe de la queue blanche, et les
individus de certaines parties de l'île de Java ont le pelage d'un
jaune pâle avec trois raies sur le dos. L'écureuil bicolore a
le pelage moins varié de blanc à Sumatra et à Malacca qu'à
Java, et a le dos d'un brun noir uniforme à Siam. L'Ecu-
reuil de Railles, a à Malacca et à Siam, les côtés du corps
variés d'un blanc tr^s pur; dans les individus de Bornéo au
contraire cette teinte est constamment mêlée d'une couleur
plus foncée. Les variétés nombreuses que forme le grand Ecu-
reuil des îndes, Sciurus maximus , qui habite au Bengale, à
Malacca et à Sumatra, sont peut-être en grande partie acci-
dentelles. Je n'ai jamais pu parvenir à établir des distinctions
spécifiques entre les Tupajas de différentes contrées de l'Asie,
et dont j'ai examiné une quantité d'individus rapportés du
continent de l'Inde, de Sumatra, de Bornéo et de Java; mais
(i) La série trindivichis de ccUe espèce que l'on voit exposée
clans les galeries du Musée des Pays-Bas , offre à elle seule une étude
parliculière, et nous montre quels matériaux il faut pour se faire
une idée complète d'une seule espèce, lorsqu'on veut en connaître
<lavantage que le nom et les principaux tr;iits dislinclifs.
DKS SEKPENS. ^221)
je n'oso circuler celte question ditTicilc à résomire, vu les
grands changeniens qu'éprouvent ces aiiiniaux avec Tàge
notannnent par rapport aux lornies de leur crâne; il est
cependant bon de constater que les Tupajas de Java ne par-
viennent jamais à cette forte taille qui distinguent ceux de
Sumatra et de Bornéo. Le Sanglier ordinaire des Indes , Sus
vittatus, a été rapporté par nos voyagenrs, de Java, de Su-
matra, de Bornéo et de Timor j mais les différences qui
existent entre les individus de ces lieux divers, sont si peu
sensibles qu'il ne vaut guère la peine de les signaler. Le Cerf
des Moluques est d'une taille bien inférieure à celui de Java,
((]ervus Russa) , quoiqu'il appartienne évidemment à la même
espèce. Le petit chat des Indes, Felis minuta, javanica ou suma-
trensis, présente dans les teintes des disparités plus ou moins
marquées selon que fespèce habite Java, Sumatra, Malacca,Siani
ou Bengale; et on observe en outre un grand nombre de variétés
accidentelles. Le petit Chevrotain des Indes, Moschus javani-
cus, devient un peu plus fort et offre des teintes plus foncées
à Sumatra (Moschus Napu); il habite aussi les îles de Bangka,
de Penang et la presqu'île de Malacca; les individus de Bornéo
atteignent une assez forte taille, et ceux de Siam offrent
même une disposition des teintes différente , quoique la phy-
sionomie de cette race soit tout-à-fait la même que celle de
Java. L'Ecureuil nain des Indes, Sciurus melanolis qui, par
son extrêiiie petitesse, est aux autres Ecureuils ce qu'est le
Falco cœruleus au reste des faucons, cet Ecureuil habite Java,
Sumatra et Bornéo , et offre, dans ces contrées diverses, des
variétés locales plus ou moins constantes. Un des Ecureuils
les plus communs aux Indes est le Sciurus nigrovittalus qui,
perdant à certaines périodes de Tannée la teinte gris-noire
du ventre, forme alors les espèces nominales, introduites
dans les systèmes sous les noms de Sciurus plantani, ginginiunus
et ])ilineatus: cet Ecureuil vit à Java , à Sumatra, à Malacca,
en Chine etc.; il offre, sur ces divers points du giolx?
230 DlSTPaBUTlON GÉOGRAPHIQUE
plusieurs variétés^ mais dont les caractères sont tellement
subtiles , que je n'en oserais parier sans avoir examiné de
chaque variété un grand nombre d'individus. — Enfin, je ne
parlerai pas des différences souvent très marquées, que présen-
tent les mêmes espèces de Chéiroptères dans diverses contrées;
mais j'ajouterai seulement qu'il existe souvent même des
différences par rapport à des caractères essentiels, comme la
longueur du museau etc. : voir le 2'^*^" vol. des Monographies
de M. Temminck. — Pour les oiseaux, il en existe un grand
nombre d'espèces qui, vivant à la fois dans diverses îles de
cet Archipel, y forment des variétés locales quelquefois assez
curieuses, mais qui se bornent ordinairement à des diffé-
rences dans la taille ou le système de coloration. — La classe
des Reptiles présente des faits analogues à ceux que nous
offrent les mammifères. L'Emyde de Spengler se présente
souvent sous des formes tellement disparates , que l'étude
de cet animal ne sert qu'a embrouiller l'idée que Ton se
forme du mot espèce (i). Le Monitor à deux raies, Mon.
bivittatus, qui se trouve à Sumatra, à Java, à Bornéo,
à Célèbes et jusqu'à l'île de Luçon, varie plus ou moins
selon les lieux qu'il habite, ce qui a engagé plusieurs
naturalistes à en faire une espèce à part, quoique ces
différences se réduisent souvent à de petites disparités dans
le système de coloration. La même observation peut s'ap-
pHquer au Basilic des Indes qui vit À Célèbes, à Amboine
jusque dans les îles Philippines. Le Scinque de Kuhl est ré-
pandu , à ce qu'il paraît, depuis le Bengale jusqu'aux îles
Philippines et aux Mariannes : les individus de Bengale, de
Sumatra, de Java, de Bornéo et de Célèbes ne présentent
guère de différences sensibles , mais ceux de Timor ont des
(1) Tout ce que nous pourrions dire pour prouver ce que nous
avançons serait superilu ; l'autopsie peut seule justiiier nos idées sur
ce point.
DES SiaU'EN'S. 2:u
teiiiles [)lus vives et plus tranchées. Poui les Diacoiis, il est
prescjue impossible de résumer en peu de mots t(^utes les
différences que présente souvent cliacpie espèce dans les lieux
divers qu'elle habite (i). Le Geckon à gouttelettes, de Timor,
offre des teintes un peu plus foncées que celui de Java. Lu
Grenouille cancrivore et la Rainette leucomystax, qui sont
absolument identiques dans toutes les îles de la Sonde et
même dans les îles Philippines, s'éloignent, à Timor, de lu
race type, par un système de coloration un peu divers et
forment ainsi une variété locale ou de climat constante. Les
Najas des îles de la Sonde diffèrent constamment par plusieurs
caractères de ceux du Bengale et des îles Philippines. Le
Cératophrys de Sumatra forme une variété locale ou une race
diverse de celle de Java. — Les serpens ne sont pas moins
riches en exemples de cette nature que les autres ordres des
Reptiles. Nous voyons que les individus du Tortrix rufa de
Célèbes se distinguent de ceux du Bengale et de Java, par
un dos d'une teinte uniforme et par deux petites taches sur
l'occiput. Le Calamar Oligodon découvert à Java , offre à Su-
matra une disposition des teintes un peu diverse sur le dos,
et forme à Ceylan et aux îles Philippines une troisième variété
locale très jolie. Des différences analogues existent entre les
Coronella baliodeira de Java et de Sumatra. Le Lycodon hebe
de Java est d'une moindre taille et à teintes un peu diverses
et moins claires que ceux du Bengale; les individus de Timor
restent plus petits que ceux de Java et ont les teintes plus
foncées. La belle Couleuvre à queue noire, Coluber melanu-
rus, habite à Java, à Sumatra et à Célèbes; mais les individus
de la dernière île ont la nuque constamment ornée d'un
trait angluleux noir, tandis que ceux de Sumatra offrent un
dos rayé de noir. L'Herpétodryas oxycéphale est d'un beau
(i) Nous renvoyons ù la troisunie livraison (!<" nos /fbbildiinpm , «ni
nous avons assez ajuplcnicnl tiaitr (e sujet.
232 DLSTRIDUIION GÉOGIIAPHIQIJE
vert d'herbe à Java; cette teinte tire sur le brun dans les sujets
de Bornéo, et ceux de Céièbes ont toutes les parties supé-
rieures d'un brun noir assez foncé. Il suffira de dire que le
Dendrophis picta habite la plupart des contrées intertropicales
de IMsie , depuis le Sénégal jusqu'à la Nouvelle-Guinée , pour
faire deviner combien cette espèce doit varier dans des con-
trées aussi distantes l'une de l'autre. Le Dryophis nasuta , qui
vient ordinairement du Bengale et des Mariannes a le ventre
raie de jaune à Java. Le Dryophis prasina, commun dans
les îles de la Sonde, forme une variété locale à Céièbes; le
Tropidonote à taches en quinconce , qui est un des plus ré-
pandus dans l'Inde, offre à Java des taches confluentes, en
sorte qu'il a les parties supérieures rayées de noir. Les Tro-
pidonotes chrysargos de Sumatra sont distincts de ceux de
Céièbes, et tous deux de ceux de Java; et cette différence,
produite par une disposition diverse des teintes, paraît être
constante d'après les localités. L'Homalopsis de Schneider, qui
habite depuis les grandes Indes jusqu'à la Nouvelle-Guinée,
offre dans ces lieux divers de nombreuses petites disparités,
mais dont le plus grand nombre paraît accidentel. Le grand
Python à deux raies vient des îles de la Sonde et de la Chine;
il habite les deux presqu'îles de l'Inde, l'île de Ceylan , et se
trouve jusqu'en Sénégambie, vivant probablement dans une
grande partie de l'Afrique intertropicale; je regarde tous ces
Pythons comme appartenant à la même espèce, mais j'ignore
si plusieurs naturalistes ne trouveront peut-être entre les
individus de ces lieux divers des différences suffisantes à
leurs yeux pour établir plusieurs sous-espèces , ce qui aura
nécessairement pour suite l'établissement de l'espèce même
comme sous-genre. Les Elaps furcatus et bivirgatus offrent à
Sumatra une distribution des couleurs différente de ceux de
Java. Enfin , je pourrais remplir un livre à part , en décrivant
toutes les petites modifications qu'éprouve , dans ces terres
diverses, chaque famille isotée de la même espèce d'animaux,
DKS SEIIPKNS. 23;?
dont Je nombre est si grand sur ce point du globe. —
Cliacune de ces terres produit cependant des espèces qui lui
sont particulières, ou qui se trouvent seulement sur plusieurs
d'entre elles. Tout le monde sait que les îles de Sumatra et
de Bornéo nourrissent plusieurs animaux, et même quelques
uns de très grande taille ; et que ces mêmes animaux ne se
trouvent dans aucun autre point de l'Archipel , ni même
à Java, qui produit en revanche certains animaux qui ne
paraissent pas habiter dans les autres îles. On est tenté de
considérer la constitution géologique des terres comme dé-
terminant la distribution géographique des êtres; mais l ex-
périence nous démontre, qu'elle n'est que d'une influence
secondaire ou indirecte , en ce qu'elle modifie en général la
nature des terrains, ou parce qu'elle détermine l'âge de ces
terres ou îles. Le climat, qui n'influe pas même toujours sur
la distribution des végétaux, ne présente ordinairement aucun
obstacle à celle des animaux, particulièrement lorsque les
autres conditions nécessaires à leur existence se trouvent
réunies, et qu'ils trouvent pendant toute l'année la nourri-
ture que la nature leur a assignée (i). On aurait d^nc tort de
supposer qu'un être qui habite une contrée d'origine volcanique
ne puisse jamais se trouver que dans des terrains de la même
nature; ou que les terrains de formation primitive doivent
nourrir des espèces particulières, etc. Supposant même que
cela arrive, comme dans l'île de Java comparée à celles de
Sumatra et de Bornéo, il faut tout au plus attribuer ces diffé-
rences à l'âge divers de la première île, et au défaut d'un terrain
ou d'une nourriture propres à l'existence des animaux. Il est
(ij L'orang-outan et le Semnopithèque nasique, par exemple,
vivent à Sumatra et à Bornéo , dans des lieux tout-à-fait analogues ;
et, ne fréquentant jamais des lieux d'une autre nature, ils ne se
répandent pas sur toute l'île , quoiqu'il rl'y ait guère d'obstacles
physiques qui les en empêche : il en est ainsi de la plupart défi
animaux.
234 DISTIUBETIOA: GÉOGriAPHiOUi:
doiîc difficile sinon inipossi'ble de classer ces terres, d après
leurs productions, en cantons, ou de chercher à établir des
régions , comme on Fa fait pour la distribution des plantes à
la surface de certains pays. Quant au Grand Archipel indien,
nous verrons que les lies de la Sonde offrent, dans leurs pro-
ductions, beaucoup de rapports avec les parties avoisinantes
du continent de l'Asie, et même avec celles du Bengale et
des grandes Indes. Les îles de Sumatra et de Bornéo nour-
rissent un bon nombre d'animaux, dont quelques uns de
grande taille, ne se trouvent point à Java; mais il existe pour
les animaux de petite taille une assez grande analogie entre
la partie méridionale de Bornéo et entre lîle de Java. Cette
dernière île produit plusieurs animaux qui se trouvent dans les
contrées méridionales de la Chine , et probablement aussi dans
la chaîne d'îles qui s'étendent vers l'Est jusqu'à Timor. C'est
dans la grande île de Célèbes que commencent à se montrer
plusieurs formes d'animaux, inconnus dans les îles de la
Sonde; ces formes nouvelles deviennent plus nombreuses
dans les Moluques, et se rattachent à celles qui sont propres
à la Nouvelle-Guinée, dont plusieurs rappelent à leur tour
les productions hétérogènes de la Nouvelle-Hollande. Les îles
Philippines enfin offrent de l'analogie avec celles de la Sonde,
et ce qui est curieux, c'est que l'on y observe plusieurs ani-
maux de Gevlan et des grandes Indes. En nous bornant aux
observations que nous offrent les classes des mammifères et
des Reptiles, nous voyons que les traits principaux qui carac-
térisent la Faune de ces îles, sont les suivans. — L'île de
Sumatra est la seule de toutes les îles de la Malaisie, qui
produise l'Éléphant; le Tapir de l'Inde (j) se trouve aussi à
(i) Il s'entend de soi-même que les observations sur l'absence de
certains animaux dans certaines terres ne peuvent pas toujours être
regardées comme certaines. Nous ne pouvons que juger d'après les
faits connus, et des découvertes nouvelles apporteront sans doiilc
des modifications à ces assertions.
DUS SKUPIilNS. 235
13ornco et ces animaux habitent en même temps le continent
de l'Asie. Le grand Cerf de Sumatra, Cervus bi[)pelaplius (^uv. ,
se trouve à Bornéo et probablement aussi dans la presqu'île
de Malacca. L'Iîylobate syndactyle et le Senmopitbècjue me-
lalopbos dont le ilavimanus ne paraît pas différer, n'ont été
trouvés jusqu'à présent que dans l'île de Sumatra; mais on
assure que le Lar de Raffles , Hylobates llafllesii, auquel il faut
également rapporter les Hyl, agilis et variegatus, habite
aussi l'île de Gélèbes. Le Gymnure, grand insectivore ter-
restre et le grand Ghamais noir (Ant. sumatr.) n'ont encore été
observé qu'à Sumatra; mais le Rongeur curieux, décrit par
M. Temminck sous le nom de Nyctoclepte et le Porc-épic à
longue queue, habitent aussi à Malacca. Il paraît que l'île de
Sumatra a une espèce de Rhinocéros à elle , si toutefois le
Rhinocéros de Bornéo n'appartient pas. à la même espèce.
Pkisieurs autres animaux se trouvent en même temps à Su-
matra et à Bornéo, mais n'ont pas été observés dans les autres
îles de la Malaisie: tels sont l'Orang-outan, les Semnopi-
thèques nasicus et cristatus, l'innuus nemestrinus, le Felis
macrocelis, l'Ursus malayanus, qui habite cependant aussi
Gélèbes; ensuite plusieurs Ecureuils, appartenant en partie
à des espèces nouvelles, dont quelques-unes ^e retrouvent à
Malacca, à Siam et en Ghine; mais qui nont pas encore été
observés à Java. L'île de Sumatra a plusieurs Ghéloniens de
commun avec Bornéo; mais les Sauriens et les Batraciens
appartiennent pour la plupart à des espèces qui habitent
aussi Java. En jetant un coup-d'œil sur le tableau que nous
avons donné sur la répartition géographique des ophidiens,
nous voyons que les serpens de Sumatra habitent aussi Java ,
presque sans exception, et qu'un bon nombre d'entre
eux proviennent également des grandes Indes et de Bengale»
Le Trigonocéphale de Wagler au contraire ne paraît se
retrouver dans aucune autre île de la Malaisie que Sumatra
et Bornéo, où nos voyageurs viennent de découvrir
236 DlSrraBUTiON GÉOGPxAPHlQUE
l'espèce. Jii va, !a plus belle et la mieux connue des îles de ia
Malaisie, s'éloigne des autres terres de ce grand Archipel,
en ce qu'elle produit plusieurs animaux qui lui sont propres,
tandis qu'il y manque un bon nombre d'autres, qui sont
répandus à Sumatra, à Bornéo et même dans le continent de
l'Asie. Il n'existe point d'indices sûrs que les Eléplians aient
jamais vécu à Java; le Tapir des Indes, l'Orang-outan, le
Semnopithèque nasique, l'Hylobate syndactyîe, l'Ours des
Malais, l'Innuus nemestrinus, et beaucoup d'autres animaux
de Sumatra et de Bornéo n'y habitent pas. Il ne s'y trouve
pas des Antilopes. Le Rhinocéros à deux corne> de Sumatra
y est représenté par une espèce unicorne très diverse, el qui
paraît avoir de grands rapports avec le Rhinocéros du conti-
nent de TAsie. Le Cerf de Sumatra y est représenté par une
espèce moins belle, Gervus Russa; le Léopard de Sumatra et de
Bornéo , Felis macrocelis , par une espèce semblable au Léopard
de l'Afrique, mais à taches très petites, à queue longue et à
taille moindre (i), qui paraît être propre à l'île de Java. Non
compris l'Hylobate syndactyîe de Sumatra, chacune des îles
ou des points principaux de l'Asie intertropicale paraît nour-
rir une seule espèce du genre Hylobate, plus ou moins dif-
férente des autres. L'Hylobate Lar de Sumatra est représenté
(i) Je puis assurer que tous les Léopards de l'ile de Java appar-
tiennent à l'espèce appelée par M. Temminck Felis pardus , et que le
véritable Léopard , qui est répandu dans la plus grande partie de
l'Afrique, depuis la Barbarie jusqu'au Gap de Bonne Espérance, et
que l'on dit aussi habiter aux grandes Indes , ne se trouve jamais
à Java; mais il existe dans cette île des individus du pardus, dont la
queue est beaucoup plus courte que d'ordinaire et qui se rapprochent
par ce point du Léopard ordinaire; ce qui milite en faveur de l'opinion
de considérer le Léopard de Java comme race ou variété locale de celui-
là. Cette opinion se trouve , d'autre côté, renforcée par l'existence de
plusieurs variétés locales ou races du Lion en Afrique el en Asie,
du Léopajd de l'Afrique , etc.
DES SERPENS. :>37
à Java par le Wou-Wou , Hylobates leiiciscus; ccilui ci est
remplacé à Bornéo par une race à teintes plus foncées,
THyl. concolor au Harlanii. Aucune de ces espèces ne paraît
jamais se trouver sur le continent de Tlnde , car les Hylobates
que l'on a rapportés de Slam et de plusieurs autres points de
la presqu'île au delà du Gange , appartiennent à l'espèce connue
sous lenomdeHylob. albimanus, et qui est le grand Gibbon de
Buffon ou le véritable Lar deGmelin. Des deux Semnopithèques
comnuins dans lîle de Java, l'un, le Semnop. mitratus, est
propre à cette île, mais on observe à Siam un Singe tout-à-fait
analogue mais à teintes un peu plus foncée; l'autre, le Semn.
maurus n'a pas non plus été observé sur aucun autre point
du globe, mais cette espèce est évidemment remplacée, à
Sumatra et à Bornéo, par le Semnop. cristatus ou prui-
nosus , qui ne paraît différer du maurus que par son
pelage mêlé de grisâtre. Une troisième espèce que l'on
dit exister dans la partie orientale de Java, mais que nous
n'avons jamais reçu de cette île, le Semn. auratus (i)
ou pyrrhus paraît appartenir à une espèce qui habite
l'île de Bornéo. Java est beaucoup moins riche en Ecureuils
que les autres îles de la Sonde; on y trouve les Sciurus
bicolor, nigrovittatus , insignis et melanotis, et aucune des
espèces que nous venons de nommer n'est propre à cette
île. Les Tupajas n'y atteignent pas la forte taille de ceux
de Bornéo et de Sumatra. Le Tigre royal , qui ne paraît
pas habiter Bornéo ni aucune autre île de la Malaisie, à l'ex-
ception de Sumatra, y forme, comme dans cette dernière
(i) La livrée jaunâtre de ce singe est évidemment périodique, ou
peut-être due à une différence sexuelle. L'individu du Musée de Paris
présente des indices de l'apparition de poils noirs sur les extrémités;
nous en avons au Musée dans la livi'éc de passage; d'aulres sont
tout-à-fait noirs, à l'exception d'une raie jaune sur la partie interne des
pieds et sous la queue.
238 DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE
île une variété locale à poils très ras; et cette variété forme
l'extrême opposé de celle du Nord de l'Asie, à laquelle le
pelage bien fourni donne une apparence toute diverse (i).
L'île de Java nourrit un beau sanglier de très forte taille,
Sus verrucosus, assez divers de l'autre espèce, Sus vitta-
tus, qui habite également Java et presque toute la Ma-
laisie. Un des quadrupèdes les plus remarquables de l'île de
Java est le Buffle sauvage, le Banting des indigènes, qui se
trouve probablement aussi à Bornéo et à Sumatra , et qui
ne paraît guère différer du Gaour (Bos frontalis ou syllie-
tanus) du Bengale, dont il forme probablement une race (2).
(i) En comparant dans notre Bîusée les individus du Tigre de la
Corée (Corai) à ceux de Java, on peut se convaincre des effets de cette
influence du climat, particulièrement en examinant la grosseur relative
de la queue: dans les premiers ce membre paraît être de la grosseur
d'un bras , dans ceux de Java il a celle d'un fort pouce d'homme. —
(2) Un fait digne de remarque, c'est que le Bœuf domestique des
îles de la Sonde appartient à une espèce toute différente de cette espèce
sauvage. Le premier, que l'on y désigne sous le nom de Carbau , et qui
est retourné à l'état sauvage à Sumatra, descend évidemment de l'Arni
ou buffle sauvage de Tlndoustan , ce qui fait supposer avec raison, que
l'introduction de ce buffle aux îles de la Sonde remonte à cette époque
reculée, de laquelle date l'introduction de la culture du riz, que l'on
dit avoir été également apportée de l'Indoustan. Quoiqu'il en soit ,
l'observation que nous venons d'énoncer nous prouve ,que l'étude de la
répartition des animaux domestiques peut servira éclairer plusieurs points
obscurs dans l'histoire du genre humain , et qu'elle peut contribuer
k nous faire connaître l'état de civilisation des habitans primitifs de
l'île de Java, que l'on croit avoir joué autrefois un rôle si important.
(Voir les travaux de Crawfurd, et l'ouvrage de W. von Huraboldt, intitulé:
Uber die Kawi-Sprnche.) Un autre fait non-moins curieux que celui
dont nous venons de parler, c'est que le Buffle de l'Italie, apporté en
Europe dans le moyen âge, paraît également descendre de ce même Arc i,
qui serait alors répandu depuis la Chine j usqu'en Abyssinie et en Italie; ces
<leiixfaitspronvés,on aurait un point de comparaison assez curieux poiu-
DES SEUPENS. i);Ui
Pour les oiseaux nous nous bornons ;i rcniaïquer que le
Paon sauvage représente à Java l'Argus de Sumatra et de
Bornéo; le grand Buceros de cette île (Biiceros lunatus)
forme une race diverse du véritable Buceros Rhinocéros de
éîudior l'influence des climats divers sur les animaux qui, dans la
race d'Europe, se serait particulièrement concentrée sur la courbure
tles cornes et sur les cavités du front, phénomènes d'ailleurs très
ordinaires chez les animaux domestiques. — Quant à notre Bœuf domes-
tique du reste de l'Europe, auquel paraît aussi appartenir l-i race
domestique au Japon, et qui a été répandu dans presque toutes les
contrées du globe, depuis la découverte de l'Amérique et l'ouverture
d'un passage par mer aux Indes; quant à ce boeuf, dis-je, on a des
raisons de croire qu'il est également venu des Indes dans les temps
les plus reculés; ces raisons sont: ij que le Zébu, le Bœuf domestique le
plus commun dans le continent de l'Asie, que l'on transporte aujouid'hui
comme nos bêtes à cornes , quelquefois à Java et dans d'autres contrées,
appartient sans doute à la même espèce que notre Bœuf, et qu'il forme la
variété produite par l'influence du climat dans les contrées chaudes;
a) que le Bœuf des anciens Grecs et Romains paraît avoir été le même
que notre Bœuf domestique; enfin , que le seul Buffle qui vive en
Europe à l'état sauvage, forme une espèce totalement diverse de
notre Bœuf, et que l'on pourrait plutôt rapprocher du Bison de
l'Amérique du Nord. A moins d'adopter l'hypothèse que nos bêtes à
cornes soient descendues de l'espèce éteinte aujourd'hui, et connue
sous le nom de Bos primigenius, on serait forcé de chercher une
race-mère pour notre bœuf parmi Its espèces sauvages des Indes.
J'avais fixé depuis longtemps mon attention sur le Gaour, mais ne
connaissant par l'autopsie que la race de Java, je n'ose rien décider,
et j'avance cette supposition seulement dans le but de fixer Tatlention
des naturalistes et des voyageurs sur ce point intéressant. On dit qu'il
existe dans l'Indoustan, à l'état sauvage , une race de Buffle bâtarde,
produite par l'accouplement du Gaour et derArni. — L'origine de notre
chien domestique pourra peut être contribuer à jeter de la lumière sur
celle de notre bœuf On sait qu'en démontrant l'impossibilité de
l'identité du loup ou du renard avec notre chien, on est du moins
parvenu au résultat que notve chien n'est pas d'origine Européenne;
i40 DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE
Sumatra et de Bornéo, etc. Parmi les Reptiles, c'est le
Trionyx étoile, qui n'a encore été observé dans aucune
autre des îles de la Sonde qu'à Java , où vit également le
Trionyx subplanus, qui est la seule espèce connue du genre
à Bornéo, à Sumatra et à Malacca. L'Emys trijuga (i) paraît
propre à l'île de Java, ainsi qu'un petit nombre de Reptiles
Sauriens et Batraciens, mais qui appartiennent tous à des
espèces de petite taille. Un fait curieux est que deux des
espèces les plus remarquables du genre Trigonocéphale,
(Trigonoc. puniceus et rhodostoma) n'ont été observées jus-
qu'à présent qu'à Java; tandis que le Trigonocéphale vert,
si commun aux grandes Indes, au Bengale, à Sumatra,
mais on a cherché en vain de trouver une race-mère pour ce Carnivore.
Je n'hésite pas à adopter pour telle le chien sauvage des hautes mon-
tagnes du continent de l'Asie, dont on nous a adressé des individus de
Bengale, qui se trouve aussi à Sumatra, à Java et à Bornéo, et que
l'on a nommé Canis rutilans, sumatranus etjavanicus. En prenant,
pour faire la comparaison, le chien domestique du Japon, ou même
notre chien de berger, races qui ont le moins dégénéré, on voit qu'il
existe une telle analogie entre ces animaux et le chien sauvage des
Indes qu'il est presque impossible de douter de leur identité; il
n'existe pas même des différences sensibles entre les squelettes de
ces animaux, et leurs crânes se ressemblent au point de s'y méprendre;
cette même observation peut s'appliquer au crâne du chien des Esqui-
maux. — Nos poules enfin proviennent sans doute des Indes, sinon
de la poule sauvage de Java , du moins d'une race analogue du conti~
Tient de l'Asie. — Je finis, regrettant de ne pouvoir développer les
observations que je viens de communiquer, en publiant des recherches
étendues que m'offrent les nombreux matériaux réunis dans les galeries
du Musée des Pays-Bas, où l'on peut constater par l'autopsie ce que
je viens d'avancer. — (i] On trouve à Pondichéry une espèce analogue,
mais à tête beaucoup moins grosse , que M. Bibron prend pour la
véritable trijuga de Scliweigger : Boie se serait donc trompé en appli-
quant dans l'Erpétologie de Java, cette épilhètc à l'espèce javanaise,
qu'il faut alors considérer comme nouvelle.
ÎDES SERPKNS. 24 1
et à Timor, n'existe pas du tout à Java. Les Bongares, qui
habitent Ceylan , les grandes Indes et le Bengale, ne parais-
sent pas se rencontrer dans aucune autre des îles de la
Sonde que dans Java. — Bornéo, la plus grande des îles de
la Malaisie, n'était guère connue sous le rapport de l'histoire
naturelle aTant les voyages que M. M. Diard, Korthals et
MûUer ont fait dans l'intérieur de cette terre. L'Éle^phant
ne paraît pas y habiter; mais on y trouve le Tapir des Indes,
et on a des preuves certaines de l'existence d'un Rhinocéros,
quoiqu'on ignore à quelle espèce il appartient. Bornéo a en
commun avec Sumatra, TOrang-Outan, les Semnopithecus
nasicus et cristatus , le Felis macrocelis , l'Innuus nemestrinus,
l'Argus etc.; l'Hylobate de cette île se rapproche tellement
de celui de Java , qu'on ne saurait le regarder comme une
espèce particulière; il s'y trouve un Semnopithèque voisin
du pyrrhus de Java; le grand Cerf appartient à l'hippelaphus
de Sumatra, et on a aussi observé àBornéoTUrsus malayanus.
Les mammifères propres à cette île paraissent tous appartenir
à des espèces nouvelles de petite taille, et on y voit déjà
plusieurs animaux curieux, dont la véritable patrie est les
Moluques: tels sont parmi les Mammifères, le Tarsius; parmi
les Reptiles, le Basilic, et d'autres (i). — C'est dans l'île de
Célèbes que commencent à se montrer des formes d'ani-
maux toutes particulières, ou des espèces dont on ne trouve
aucune trace dans les îles de la Sonde: ce sont les Phalangers,
le Babyrussa, THarpye, leCéphalote, les Mégapodes, l'Antilope
celebica, les Scinques éméraude et à queue bleue etc.,
animaux dont le plus grand nombre habite aussi plusieurs
(i) M.M. Mùller et Korthals viennent d'arriver en Europe avec
une partie des riches collections formées dernièrement par eux à
Bornéo ; je regrette de n'avoir pu en faire usage pour mon travail ;
mais j ai profilé des communications verbales que ces messieurs ont
bien voulu me faire.
16
242 DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE
des îles voisines peu connues, les Moliiques, ou même ^
comme le petit Scinque à queue bleue j jusque dans la mer dû
Sud. On remarque, parmi les serpens de Célèbes un bel
Erpétodryas, (Herp. Dipsas), et le Dipsas irregularis qui se
trouve également à Amboine; plusieurs autres espèces sont
absolument les mômes qu'à Java ou à Sumatra; mais quelques
une d'entre elles forment des variétés locales constantes,
quoique seulement distinctes par une disposition un peu
diverse des teintes: à ce nombre appartiennent le Tortrix
rufa, le Goluber melanurus, l'Erpétodryas oxycéphale, le
Dryiophis prasina, le Dipsas dendropbile et le Tropidonotus
chrysargus. — Des Moluques, il n'y a, à proprement
parler, que l'île d'Amboine, dont les productions sont un
peu connues. On y voit trois ou quatre espèces de serpens
qui se trouvent aussi à Java; mais il ne paraît pas qu'on
retrouve dans les îles delà Sonde le Lycodon modestus, le Boa
carinata, le Dendrophis rhodopleuron ni le Python ametbysti-
nus. — Timor est en quelque sorte intermédiaire, par
rapport à ses productions, entre Java et les Moluques: on y
trouve beaucoup d'animaux de cette première île, tandis
qu'il y en existe un bon nombre qui vivent aussi dans
l'Archipel que nous venons de nommer. Le Python de Timor
est peut-être divers de celui d'Amboine; on y a découvert un
Homalopsis très curieux, (Hom. leucobalia); le Lycodon hebe
de cette île a les teintes plus foncées que la variété de Java;
et le Coluber radiatus est représenté à Timor par une espèce
analogue mais diverse (Col. subradiatus). — LaNouvelle-
Guinée avec les îles adjacentes, tout en montrant plus ou
moins d'analogie avec les autres îles de laMalaisie, se rap-
proche de l'autre côté de la Nouvelle Hollande, parla présence
de certains animaux, tels que lesPétaures, les Kangoroos, les
Péramèles,etc. M. MiiLLERy a découvert un Zonure trèscurieux,
un Acontias presque aveugle, un Typhlops à formes dispa-
rates, une Kainette cornue très remarquable, un Cératophrys
DES SEUPENS. 243
nouveau, un Monitor très beau, à formes élancées et à
teintes vertes, un Scinque à formes anomales, et plusieurs
autres Reptiles très jolis et incoimus. Il y existe aussi plu-
sieurs espèces nouvelles de serpens, comme le Tropidonotus
picturatuSjl'Elaps MùUeri, espèces qui se trouvent également à
Waigiou. — Il me reste à dire quelques mots sur les îles
Philippines, dont on ne connaît en fait de zoologie qu'un
petit nombre d'objets, recueillis dans les environs de Manille
dans l'île de Luçon, et dont l'étude donne cependant lieu à
l'observation curieuse, qu'il existe une grande analogie entre
certaines productions de cette île et de celle de Ceylan : ce fait
est très frappant du moins, par rapport aux serpens, dont
plusieurs espèces n'ont été observées que dans ces deux îles.
Le Naja des îles Philippines appartient à la variété ordinaire
du N. tripudians, qui habite les grandes Indes et qui est con-
stamment diverse de celle des îles de la Sonde. On trouve,
en revanche, dans les îles Philippines , plusieurs animaux qui
n'existent probablement pas à Ceylan ou au Bengale: de ce
nombre sont le Basilic, le Monitor bivittatus et d'autres.
La Nouvelle- Hollande étant trop peu connue et les
objets d'histoire naturelle que l'on apporte de ce pays en
Europe, étant presque toujours rassemblés sur les mêmes
points, il est difficile de rien dire sur la répartition des
animaux dans cette grande île. D'ailleurs, tout le monde
a entendu parler des productions singulières de cette
contrée (i), dont un petit nombre habitent aussi à la terre
de Diemen, présentant quelquefois, dans ces diverses locali-
tés des différences semblables à celles qu'on observe entre
les mêmes animaux de plusieurs points de l'Archipel des
Indes. Pour les serpens, la Nouvelle-Hollande produit presque
(i) Les Kangoroos, l'Ornithorhinque, l'Échidne, les Phascaiomys et
Phascolarctos , les Dasyurus, le Thylacinus, la Maenure , l'Emeu,
les Phyllures, et plusieurs autres.
244 DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE
sans exception, des espèces particulières, dont la plu-
part appartiennent à la famille des serpens venimeux;
on n'y a pas encore observé des serpens aquatiques. La
distribution des autres Reptiles dans ce continent n'offre
rien de curieux; mais il mérite d'être rapporté , qu'il
n'y existe, à l'exception des espèces marines, qu'un seul
Chélonien, l'Émys longicollis: l'absence de tortues ter-
restres est d'autant plus remarquable, qu'on en trouve un
nombre considérable dans la pointe méridionale de l'Afrique,
contrée qui offre plusieurs rapports avec la Nouvelle-
Hollande. Nous avons déjà dit plus liaut que les innombrables
îlots qui sont dispersés dans le grand Océan pacifique, ne
paraissent pas produire de serpens. Les Mariannes cepen-
dant font exception à cette règle générale, et Dampier
parle de serpens verts qu'il dit avoir vu dans les îles
Galapagos.
Nous voici arrivés à l'A m é r i q u e , qui ne laisse pas de
présenter plusieurs faits curieux par rapport à la distribu-
tion des animaux. Cette partie du Monde est naturellement
divisée en deux grands continens, dont chacun offre une
Faune particulière; mais l'Amérique centrale composée de
la langue de terre étendue qui réunit ces deux continens,
et des îles adjacentes, nourrit un grand nombre d'ani-
maux, qui ont pour patrie l'une ou l'autre de ces deux
grandes presqu'îles. Quelques espèces d'animaux cependant
sont les mêmes dans les deux Amériques. D'autres, com-
muns dans l'Amérique du Nord , se retrouvent sous la
même latitude australe dans l'Amérique du Sud, où ils
forment quelquefois des variétés de climat. Un grand
nombre d'espèces qui habitent ce premier continent se
trouvent jusqu'en Mexique et dans les Antilles; tandis qu'il
y en a plusieurs, commune* dans l'Amérique du Sud, qui
sont répandues vers le Nord jusqu'en Floride et dans la
Louisiane, où elles forment souvent des variétés de climat.
DES SERPENS. 245
On remarque même quel(|uefois des différences locales entre
les animaux de contrées moins éloignées que celles que je
viens de citer, comme par exemple le Brésil et Surina nj
ou en général les Guyanes. Enfin, les animaux des terres
situées à la pente occidentale des Cordillères diffèrent sou-
vent spécifiquement de ceux du Brésil , mais certaines
espèces sont les mêmes dans ces deux contrées, ou bien
elles n'y présentent que de légères variétés. — L'Amériqui-
du Sud produit d'abord ce grand nombre de Singes , dont
la race n'a pas encore été observée dans l'Amérique du
Nord; et ces Singes, dont la même espèce vil quelque-
fois sur une étendue de terre de plus de vingt degrés de
latitude, doivent nécessairement montrer dans des lieux
aussi distans, des différences plus ou moins sensibles, dues
particulièrement à l'influence du climat (i). Un assez grand
nombre d'autres animaux de l'Amérique du Sud n'ont pas
encore été observés jusqu'à présent dans la presqu'île sep-
tentrionale du nouveau continent : tels sont le Lama , que
Ton pourrait appeler le Gbameau du Nouveau Monde,
animal originaire des Cordillères qui forme , dans l'état
de domesticité ces nombreuses races, distinctes par leur
(ij C'est un fait avéré que plusieurs singes du Sud du Paraguay
changent de poil à certaines époques de l'année, pour se revêtii
d'un pelage mieux fourni d'une ou espèce de robe d'hiver, ce qui n'a
pas lieu à l'égard des individus de la même espèce qui vivent sous
l'Equateur. Ajoutons à cela d'abord les changeniens presqu'incroya-
bles qu'éprouvent certaines espèces de singes avec l'âge, et ensuite
les différences qui existent ordinairement chez ces animaux entre les
sexes , et on pourra se faire une idée des difficultés qui se présentent
en s'occupant de l'élude de ces animaux. Je ne puis assez recom-
mander aux naturalistes de cabinet la le<;lure des précieux ouvrages
que nous a laissé feu Renggcr, dont j'ai eu souvent occasion de
vérifier les observations, sur les nombreux matériaux qu'offre le Musée
des Pavs-Bas.
MG DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE
coiileur diverse 5 et dont on a fait plusieurs espèces (i);
puis îe Tapir de l'Amérique, les Porc-épics à queue pre-
nante, les Tatous; les Paresseux, les Myrmécophages , les
Chinchillas, les Nasuas que je rapporterais volontiers tous à
la même espèce (2); les Çavias, l'Autruche de l'Amérique,
etc. Plusieurs autres animaux se trouvent jusqu'au Mexique
et même dans les parties méridionales de l'Amérique du Nord:
tels sont le Lion d'Amérique (Felis concolor); le Jagouar,
(Fehs onça), dont la longueur de queue paraît très variable
suivantes les individus; les Mouffettes , Yiverra putorius et
mephitis (3) etc. il existe très peu d'animaux qui soient les mêmes
dans les deux Amériques; comme par exemple , le Lièvre,
(i) Mes recherches à ce sujet m'ont démontré à l'évidence qu'il faut
réduire toutes les variétés de cet animal à une seule espèce, 'le Lama
rouge. — » (2) On ne rencontre guère deux individus de Nasuas, qui
se ressemblent parfaitement, ce qui empêche d'appliquer pour la déter-
mination des espèces aucun des caractères que les naturalistes onf, assigné
aux deux principales espèces de ce genre , non pas même ceux tirés
du crâne, dont la forme éprouve des changemens avec l'âge. On objec-
tera peut-être que ces deux espèces ont une manière de vivre differen'.e,
objection que j'ai souvent été obligé de réfuter par la simple obser-
vation, que beaucoup d'animaux, parvenus à un certain âge, adoptent
un genre de vie divers: les jeunes vivant ordinairement en société et
entreprenant des courses plus ou moins distantes, tandis que les vieux
s isolent pour se retirer dans les grandes forêts ou les contrées monta-
gneuses. On pourrait comparer à ces habitudes celles des oiseaux
de passage, chez lesquels , on lésait, les jeunes se séparent toujours
des adultes ^ pour entreprendre des voyages lointains. Je prie les
naturalistes voyageurs, de fixer leur attention sur ce point intéres-
sant dans les habitudes des animaux. — (3) Toutes les prétendues
espèces de ce genre que j'ai vues paraissent se rapporter à une seule
espèce, dont le pelage noir varie souvent au brunâtre et dont les raies
})lanchesse trouvent plus ou moins larges, selon les individus, ou manquent
quelquefois presque totalement , particulièrement dans les jeunes, dont
on nous a envoyé des sujets sous le nom de Mustcla leucauchen.
DES SERPENS. 247
Lepiis americanus et braslliensis. Enfin il y en a qui se re-
présentent clans les deux A.nîériques, toutefois en appartenant
à des espèces diverses: tels sont les Cerfs, plusieurs Chiens,
lesProcyons, les Didelphes, etc. 11 convient de citer comme
un fait très remarquable que, dans une contrée couvent-
d'épaisses forêts et d'une étendue immense, comme l'est If
B-'ésil , il ne paraît exister qu'une seule espèce d'Ecureuil,
le Sciurus aestuans; ce fait est d'autant plus remarquable,
qu'on y observe un grand nombre de Reptiles qui vivent
continuellement sur les arbres, comme des Rainettes, des
Leguans, des Anolius etc.; et qu'il existe plusieurs espè-
ces d'Ecureuils dans l'Amérique du Nord (i). L'Amérique
du Sud nourrit un nombre assez considérable d'animaux
aquatiques, particulièrement parmi la classe des Reptiles,
mais c'est encore un fait assez remarquable, qu'il n'existe
parmi ce grand nombre de tortues d'eau douce aucune
espèce du genre Trionyx, que l'on pourrait appeler tortues
aquatiques par excellence, et dont il se trouve une espèce
dan^ l'Amérique du Nord. Par rapport aux grands mammi-
fères, ceux de l'Amérique du Nord sont presque tous
différens de ceux de la presqu'île méridionale du Nouveau-
Monde, et ont souvent une grande affinité avec ceux de
l'Europe, appartenant ordinairement aux mêmes genres. On
y voit, par exemple, deux espèces de bœuf dont l'un, le
Bison, paraît être assez voisin de l'Urus ou Bison d'Europe;
il s'y trouve des Elans et des Rennes, divers, à ce qu'il paraît
de ceux d'Europe; les Loups (Canis nubilus et latrans) ne
forment probablement que des variétés locales de ceux de
(i) L'une des espèces de celle contrée, le Sciurus capishalus et caro-
linensis, est très remarquable par les nombreuses variétés qu'elle forme ;
il y en a de blancs, de noirs, de gris, de bruns , enfin de toutes couleurs.
L'espèce parait habiter jusqu'au Mexique : comparer le Sciurus
hypoxanlhus de Lichlenstein,
248 DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE ^
l'Europe ; le Castor de l'Amérique du Nord , au contraire , offre
des différences spécifiques avec le nôtre ; de trois ours qui y
habitent, deux , (Ursus ferox et americanus) , sont propres à
cette presqu'île, le troisième est le même qu'en Europe; on y
voit ce grand nombre de Spermophiles , dont quelques-uns
ressemblent assez aux espèces d'Europe et d'Asie; les Mar-
mottes, le Renard commun , le Lynx ordinaire^ le Glouton de
l'Amérique du Nord n'y différent guère de ceux d'Europe ,
mais le Blaireau du Labrador s'éloigne considérablement du
nôtre. Le Scalops et la Gondylure y représentent nos taupes et
nos Desmans. Enfin , les hautes montagnes qui s'étendent
le long delà côte occidentale de l'Amérique du Nord, produi-
sent plusieurs animaux très curieux , dont nous ne citons que
les Antilopes furcifer et montann. Quant aux Reptiles, cette
grande presqu'île offre un nombre bien grand de tortues
aquatiques des genres Emys et Trionyx; mais, à l'exception
des parties méridionales, il n'y existe pas de tortues terres-
tres, ou plutôt, l'animal qui doit les remplacer, l'Emys clausa,
est une espèce intermédiaire entre les tortues aquatiques et les
terrestres. Les Reptiles sauriens s'y trouvent en très petit nom-
bre, comparativement à ce que l'on observe dans l'Amérique du
Sud, et on n'y voit guère des espèces qui habitent les arbres.
Les batraciens, au contraire, y sont très communs et c'est là
que l'on trouve cette grande quantité de Salamandres (i) , et
ces batraciens singuliers, que l'on prendrait volontiers pour
<les larves de Salamandres ou pour des animaux incomplets ,
et que l'on peut comparer à notre Protée d'Europe; mais
les Bombinators n'ont pas encore été observés dans l'Amé-
rique du Nord. — En comparant entre-ellcs les espèces
de Reptiles, ou plus particulièrement les serpens des deux
( i) Les Salamandres, propres aux régions tempérées de Thémisphère
boréal , et les Géciles qui habitent sous les tropiques, paraissent se
remplacer dans ces deux zones.
DES SEUPEjVS. 241)
grandes presqu'îles que forme le Nouveau Gonliiient , on peut
quelquefois établir des parallèlles assez intéressans : la Gre-
nouille commune de l'Amérique du Nord, (Rana mugiens) par
exemple, est représentée dans FAmérique du Sud par une.
espèce analogue, delà même taille, mais à doigts entièrement
libres, (Rana pachypus). Le Crapaud des Etats-Unis, (Bufo
musicus), qui habite aussi plusieurs des Antilles, ne se trouve
pas dans l'Amérique du Sud, où il est remplacé par le Crapaud
Aguaj le Crotalus horridus, commun dans toute l'Amérique
du Sud, a pour représentant dans l'Amérique du Nord, le
Crotalus durissus; la Coronella venustissima y est repré-
sentée par la Coron, coccinea , l'Emys scorpioides par l'Emys
odorata, etc. La comparaison cependant que nous venons
de faire entre les Reptiles des deux Amériques ne s'applique
qu'à un petit nombre d'espèces; et il arrive souvent que
l'une des deux presqu'îles produise des espèces ou môme des
genres, dont on ne rencontre pas des représentans dans
l'autre (i). Les Tortrix, les Dipsas, les Dendrophis, les
Boas, n'ont encore été observés que dans l'Amérique du
Sud jusqu'aux Antilles; les Tropidonotes, au contraire, ne
s'y trouvent pas, mais sont communs dans l'Amérique du
Nord , et sont aussi répandus sur plusieurs des Antilles. Un
petit nombre d'espèces de serpens de l'Amérique méridionale,
ont aussi été observées dans l'Amérique du Nord ; ce sont les
suivantes: Calamaria melanocephala, Lycodon clelia, Coro-
nella cobella, Herpetodryas cursor, Dryophis Gatesbyi, Elaps
corallinus, Homalopsis carinicauda ; l'Hétérodon platyrhinus
(j) L'Ophisaure qui y représente notre Pseudopus et dont les
couleurs sont très sujettes à varier, en sorte que l'on en a fait plusieurs
espèces, est propre à l'Amérique du Nord; les genres de Reptiles
propres à l'Amérique du Sud sont en nombre plus considérable;
nous en citons les Bombinators , les Lézards ou Ccntropyx, les Cérato-
phrys , ks Céciles , les Typhlops , les Amphisbènes , etc. ; plusieurs
de ces animaux se trouvent jusque dans les Antilles.
250 DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE
et l'Herpetodryas aestivus au contraire, qui sont communjs^
dans l'Amérique du Nord, ont aussi été découverts au Brésil (i).
Les espèces suivantes de l'Amérique du Nord habitent
aussi les Antilles: Calamaria striatula, Coronella coccineaj
Heterodon platyrhinus, Coluber constrictor, Herpetodryas
œstivus et cursor, Tropidonotus bipunctatus , fasciatus et
saurita. Les suivantes se trouvent également aux Antilles ,
quoique leur patrie soit l'Amérique du Sud: Calamaria mêla*
iiocepliala , Coronella reginae, Lycodon délia, Dendropbis
liocercus, Dryopbis Gaîesbyi et aurata, Dipsas annulata ,
Homalopsis angulata, Boa constrictor et cenchria, enfin
l'Elaps corallinus. Il ne reste donc que quatre espèces environ
qui sont propres au grand Archipel dont nous parlons, savoir:
Psammophis antillensis, Trigonocephalus lanceolatus, Den-
drophis Gatesbyi et Boa melanura. En comparant les Serpens
des Guyanes à ceux du Brésil, nous voyons que ces deux
contrées ont en commun un grand nombre d'espèces,
dont plusieurs forment des variétés locales plus ou moins
distinctes, comme cela s'observedans les Herpetodryas lineatus
et Olfersii, le Coluber poëcilostoma, etc. Plusieurs autres
espèces paraissent propres à l'une ou l'autre de ces contrées,
comme par exemple: Calamaria badia, Xenodon typhlus,
Coluber Corais, Herpetodryas Boddaertii, Dendropbis aurata,
Dryopbis Gatesbyi et argentea , Homalopsis plicatilis, Elaps
lemniscatus et surinamensis , etc., qui n'ont été observés
qu'aux Guyanes, où les suivans, originaires du Brésil, parais-
sent manquer totalement: Calamaria Blumii, Coronella Mer-
remii, Xenodon Scbottii et rhinostoma, Lycodon formosus,
Herpetodryas serra , Homalopsis carinicauda et Martii , etc.
D'autres encore paraissent se représenter sur ces deux
points de l'Amérique australe, en sorte que l'on pourrait
placer les Coronella venustissima, Dipsas Mikani, Weigeli,
(i) Il est à remarquer que l'Heterodon plalyrhinus et l'Homalopsis
carinicauda forment des variétés locales dans ces lieux distans.
DES SERPENS. 251
leucoccphala et Nattoreri, puis le Trigonoceplialus Jararaca,
tous du Brésil , en parallèle avec les Coronella venusla ,
Dipsas nebulata, Gatesbyi, macrorhina, punctatissima , et le
Trigonoceplialus atrox des Guyanes. — Les autres parties de
l'Amérique du Sud sont trop peu connues, pour que l'on
puisse établir une comparaison entre les Reptiles des diverses
contrées de ce continent; il est cependant bon de remarquer,
que l'on vient de découvrir au Cliile, plusieurs serpens nou-
veaux, qui ne paraissent pas exister en deçà des Cordillères.
Je termine cette revue de la répartition géographique des
serpens, craignant d'avoir déjà abusé de la patience du lec-
teur, en entrant dans beaucoup de détails dont j'aurais pu
me passer ici et que je me propose de traiter plus amplement
dans un autre ouvrage qui m'occupe depuis longtemps.
Je regrette enfin de ne pouvoir ajouter, à la suite de ce
livre, des observations sur les Serpens fossiles. On n'a
trouvé jusqu'à présent que les restes d'un très petit nom-
bre (i); et ces restes , se bornant presque toujours à quelques
vertèbres, souvent a^^compagnées de côtes, ou tout-au-plus à
quelques pièces isolées du crâne , sont trop incomplètes pour
servir à la détermination exacte des genres ou des familles aux-
quels ces êtres ont appartenu. Les observations peu nombreu-
ses faites sur les serpens fossiles, paraissent cependant donner
lieu à la supposition, que ces animaux ne se trouvaient pas en
abondance dans les temps antidiluviens, et qu'ils n'existaient
pas encore à cette époque reculée où la terre était peuplée
par ces Sauriens d'une taille énorme ou ces animaux curieux ,
connus sous les noms de Plesiosaurus ou Ichtliysaurus,
reptiles dont on a trouvé tant de beaux restes dans les for-
mations jurassique et de craie.
(i) Consultez les travaux de Morren ; puis Cuvier Ossem, foss,
IV, /?. 180 et Fol. F, P. 2 , />. 168; GoLDFUss Nom Jeta XV P.
1 PI, Z,fig. 8 etc.
ir^ -^î^-^ngB