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Full text of "Eurythmies : poèmes"

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PQ 
2635 

.  09665E9 
1904 


U  d'/lf  OTTAWA 


Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2010  with  funding  from 

University  of  Ottawa 


http://www.archive.org/details/eurythmiespomeOOroy 


Eurythmies 


DU  MÊME 

[à  la  Librairie  Léon  VANŒIi) 


Exil   Doré.  1898. 


JEAN    ROYÈRE 


Eurythmies 


PARIS 

IIBRA1RIE  LÉON  VANIER,  EDITEUR 

A.    MESSEIN.    Succr 

19,     QUAI     SAINT- MICHEL,     I  9 


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'£1 


5  — 


Le  Poète  avoue  volontiers  qu'une  collaboration  décente 
avec  Stéphane  Mallarmé  —  lequel  par  malheur  je  n'ai 
pas  connu  —  ï induisit  à  prolonger  au-delà  de  l'œuvre 
choisie  le  jeu  émouvant  de  sa  lecture  en  combinant  — parée 
d'une  grâce  neuve  et  sans  plus  se  souvenir  de  V aurore  que 
s'il  se  fût  évadé  en  un  midi  supra  terrestre  —  une  Poésie 
qui  contraignît  le  lisant  à  autant  d'initiative  que  l'Ecri- 
vain, l'arrachant  à  celle  route  royale  du  verbe  qui  se  dé- 
roule fertile  et  plate  dans  l'unanime  majesté  du  paysage, 
nappe,  dans  les  forets,  régulatrice  des  futaies,  raclant  les 
guipures  des  venelles,  pour  V embellir  des  contours  nuancés 
d'Eurythmies,  quintessence,  philosophie,  rêves  repliés  — 
comme  d'un  peu  d'infini  bu  aux  lèvres  d'enfantines  con- 
fidences—  susurrements  cueillis  à  l'Ecoute  dans  le  Silence 
des  herbes  qu'un  crépuscule  balance  entre  des  tombes  —  l'im- 

r 


possible  de  la  clarté  enclos  d'harmonie  fuie  et  retrouvée 
ductile  h  V ouvrer  de  doigts  ingénieux  —  le  dû  de  V intuitif 
d'ailleurs  développé  en  discursifs  théorèmes  d'une  géomé- 
trie vive  et  succincte  pour  l'œil  ennemi  de  gloses  honteuses 
à  qui  sait  comprendre  et  sentir  le  Poème. 


EURYTHMIES 


A  mes  amis  Henry  et  Georges  Ghika . 


Une  larme  point  dérobée 
Aux  flots  qui  n'ont  pas  de  sanglots 
Regarde  vainement  ces  flots 
Vert  or,  manteau  de  scarabée, 
Sous  la  nue  étroite  et  livide 
Collant  son  visage  aux  hublots 
Et  de  la  chair  d'azur  fluide... 
Du  rythme  en  cet  espoir  falot  ?  — 
Pauvre  cœur  1  filtre  tes  pavots 
Dans  l'alambic  horreur  du  vide  ! 


n  — 


Sombre  malgré  le  clair  de  lune, 

Clair  du  regard  et  du  cerveau, 

...  Pauvre  chair  !  pauvre  âme  !...  la  dune 

Se  penche,  se  penche  sur  l'eau 

Béate  que  ne  fige  aucune 

Ombre  de  jais  sur  nul  manteau 

Fantôme  accoudé  sur  la  dune 

Ou  le  sol  mouvant  d'un  tombeau. 


—   i3  — 


La  caresse  du  soir  sur  ce  marbre  fantôme, 
Atome  inhabité  frôlant  d'autres  atomes. 
Neige,  pour  une  nuque  ironique  à  souhait, 
Dans  le  nonchaloir  que  le  crépuscule  fait 
Peser  sur  le  ciel  gris  qui  de  l'azur  se  gare 
Et  tourne  au  noir  !  C'est  la  mélancolique  gare 
Où  s'embarque,  au  déclin  de  l'arrière-clarté, 
Le  soir  espoir  humain  veuf  de  son  entité. 


r  ï   — 


Je  regarde  les  yeux  si  pâles. 
Si  pâles,  dans  les  blancs  rameaux, 
Aubes  et  langueurs  vespérales 
De  mon  cœur  les  frères  jumeaux. 

Convalescence  qui  s'apeure 
C'est  du  toujours  qui  refroidit  : 
Mais  quelle  grâce  dans  cette  heure  ! 
La  Mélancolie  est  mon  dit. 

Si  la  vie  est  l'envers  des  choses 
Il  est  logique  apparemment 
Que  les  extases  soient  encloses 
De  qui  la  mort  est  le  ferment. 


-  17 


Neigeuse  volupté  sous  la  lune  si  tendre, 
Du  crépuscule  encore  un  peu  vif  pour  entendre 
Dans  le  rose  soyeux  d'un  ciel  à  falbalas 
Les  soupirs  maniérés  de  ce  cœur  déjà  las 
De  peigner  pour  la  dent  féroce  d'Hyrcanie 
Les  agneaux  dérobés  au  bercail  de  Junie, 
Vers  ce  Sylvain  Clilandre  et  ce  Faune  Damis, 
Passant  les  rêves  flous  et  mièvres  au  tamis 
Du  désir  qui  dans  l'eau  de  la  vasque  rougeoie, 
Je  mènerai  ta  chair  inconstante  et  ta  joie  ! 


19  — 


Naïve,  comme  une  aube  enfantine  où  festonne, 
Verte  et  rose  déjà,  sous  le  regard  atone 
Du  petit  jour  la  fête  au  village  en  bandeaux 
—  Une  petite  vieille  entr'ouvre  ses  rideaux 
Aux  gnomes  sautillants  d'un  rayon  minuscule - 
Mon  âme,  en  ce  présent  passante  ridicule, 
Insensible  aux  brocards  du  crépuscule  aigri, 
Rêve  paisiblement  sous  un  ciel  rabougri. 


Une  Aube  encore  un  peu  tremblante  de  rosée, 

Heure  mélancolique  ou  d'azur  irisée, 

Et  —  pourquoi  pas  ?  —  un  soir  de  safran  et  d'extase, 

Dans  les  sentiers  où  rien  que  l'enfance  qui  jase, 

Avec  vos  yeux  d'angoisse  et  votre  âme  d'Orphée 

Ne  vous  verrai-je  pas  une  moderne  fée 

Assise  au  pied  des  lis  les  tempes  couronnées 

Filer  cet  écheveau  d'images  surannées 

Pour  en  parer  les  mains  d'une  aïeule  jaunie. 

Ogivale,  au  rêver  d'une  obscure  atonie. 


-  *3  - 


Franges  des  jours,  aubes,  pieusement 
Dans  un  tiroir  balsamique  rangées, 
Tissus  choyés  pour  l'assoupissement 
Des  fronts  dévots  qu'éclairent  doucement 
Les  vitraux  roux  aux  flammes  allongées, 
Dans  un  soupir  téméraire  et  béat 
Je  tends  la  langue  aux  riantes  hosties 
Que,  sous  le  dais  d'un  ciel  jaune  etlilas, 
Vous  dispensiez  à  l'âme  de  là-bas, 
Petites  sœurs  des  blanches  sacristies  ! 


—   2S    — 


Une  aurore-clarté  dans  les  ombres  diffuse 

Pour  l'image  plus  glauque  et  plus  lente  des  lis 

S'offre  sourire-joie  au  cortège  des  Muses 

Diaphane  qu'attriste  un  rose  enseveli 

Dans  le  gris  allongé  de  l'azur  pâle  encore... 

Çà  et  là  les  soupirs-rèves  de  la  mandore 

Des  rougeurs  que  les  cieux  traînent  incessamment 

Pleurent  le  sang  métaphorique  et  les  calices 

Des  lis,  las  de  servir  de  symbole  aux  amants, 

Des  larmes  du  matin  essorant  les  délices, 

Se  gorgent  de  rosée  emblème  en  se  pâmant. 


Le  front  sur  la  cendre  des  morts 
Quand  dans  la  chair  des  lis  tu  bouges, 
Pourrais-je,  moi,  sans  un  remords, 
Azurer  les  pétales  rouges  ? 


29  — 


J'écoute,  à  la  clarté  des  choses  endormies, 
Dans  l'espace  assoupi  de  traînantes  phalènes, 
La  Cendre  remuer  sur  vos  lèvres  blémies 
Et  sous  le  plomb  figé  la  fraîcheur  d'une  haleine. 

Vous,  nul  azurbéat/mais  une  lampe  amie, 
Ariane  aux  secrets  du  vivant  labyrinthe, 
Venez  guider  l'amour  dans  les  lacs_de  la  crainte 
Et  d'un  doigt  somnambule  égrener  les  momies, 

Pour  savoir  si,  les  plis  des  ombres  effacées  - 
Joints  au  galbe  des  lis  dont  les  urnes  sont  pleines, 
Nous  ne  trouverons  pas  dans  nos  langueurs  passées 
De  quoi  ressusciter  le  cadavre  d'Hélène  ! 


3i 


Quêteuse  —  au  seuil  de  l'ombre  idolâtre  et  profane 
Où  s'enroule,  luxure,  un  corps  de  courtisane 
Egyptienne  aux  rais  d'Ammon  inapaisé 
De  flammèches  criblant  le  fard  lourd  de  baisers 
Jusqu'à  ce  que  le  rut  du  nard  et  du  cinamme 
Sourde  des  reins  repus  au  marché  de  Pergame  — 
Vos  yeux  vrillent  le  beau  silence  hypnotisé  ! 
Mais  où  la  serpe  d'or  de  nos  regards  croisés, 
Ivre  de  l'Ombre  éteinte  en  cette  âme  fragile, 
Ira-t-elle  couper  le  rameau  de  Virgile  ? 


—  33   - 


A.  P.  Custot. 


L'hiver  a  du  printemps  dans  l'aile  !  Bleus  échos 
Devinés  sous  la  neige  immense  du  repos, 
Outre-tombe  miré  sur  le  steppe,  les  arbres 
Augustes  dénudés  comme  un  rêve  de  marbre, 
Sur  les  regards  lascifs  ce  voile  d'or  tombé, 
Si  chaste,  et  le  désir  d'un  cerne  lourd  plombé,, 
Il  va  falloir  encor  que  tout  cela  s'entr'ouvre... 

Beaux  bracelets  d'argent  encastrés  dans  le  rouvre  ! 


5) 


Poursuivons  —  tu  le  veux  —  ce  rêve  d'améthyste 

Parmi  le  ciel  sanguinolent  ! 
Hors  le  throène  aimé  que  nulle  Ame  n'attriste 

Rien  n'agite  un  suaire  blanc. 
En  nos  cœurs  tout  de  marbre  où  je  veux  que  se  mire 
L'azur  blême  du  soir  épanoui  sur  nous 
Peut-être  une  Cité,  Babylone  ou  Palmyre, 
Composera  ce  baume  où  défaille  l'époux  ! 
Mais  si  l'onde  et  les  lis  sont  à  ce  point  fragiles 
D'une  chair  plus  vivante  abhorrant  le  remous 
Va,  n'allons  pas  chercher  à  disjoindre  Targile  ! 


37  — 


Frêle  automne,  au  revers  d'un  amour  coutumier, 
Dans  la  Moire  du  cœur  mirant  ta  nuque  blonde, 
Dis  quels  reflets  d'antan  dans  les  dessins  noyés 
Que  le  vert  crépuscule  allonge  sur  cette  onde  ?... 


Moins  l'azur  dans  le  Ilot  s'enchante  et  se  marie 

Que  mon  rêve  au  vôtre  s'incarne, 

Belle  rive  dormante,  où  ne  me  contrarie 

Quand  l'œil  se  colle  à  la  lucarne 

Ni  le  regret  d'aimer  proche  la  berge  amène 

La  déesse  rieuse  aux  contours  indécis 

Que  la  brise  indolente  éparpille  et  ramène, 

Sœur  du  lis  écarlate  et  du  jaune  souci, 

Ni  de  votre  tiédeur  me  sentir  engourdi, 

Laiteuse  chair,  qui  pâme  à  mes  lèvres  fanées 

Au  refleurissement  des  roses  surannées. 


—  4i 


A.  Charles- Adolphe  Cantacu^ène. 

Le  blême  azur  qui  dort  aux  prunelles  de  marbre, 
Dans  vosyeuxd'or  mussit, regarde, comme  un  arbre, 
Vers  ce  passé  lointain  où  même  une  clarté 
Ne  se  distingue  pas  de  son  obscurité 
—  Entre  les  pavés  gris  une  mousse  si  fruste, 
Et  mon  hceccéité  !  —  Mais  pensais-je,  vétusté, 
Devant  ce  bloc  penaud  qu'illustre  un  piédestal, 
Dans  une  pauvre  cour  sans  phare  ni  chenal, 
Au  lointain  frémissant  d'une  cloche  qui  tinte, 
Voir  palpiter  si  loin  tant  de  candeur  éteinte  ! 


43   - 


Mon  âme  glisse  aux  jeux  de  langueur  éphémère 
Où  nul  mensonge  ailé  sur  un  ciel  de  chimère 
Qui  ne  heurte  en  passant  l'azur  évanoui; 
Rythmique  va-et-vient  du  rêve  épanoui 
Berce  la  nef  candide  en  ses  bras  d'émeraude: 
Plus  d'un  regard  voilé  sollicite  ou  maraude 
Vers  le  miroir  que  touche  un  égoïste  aveu, 
Et  maint  geste,  obsédé  d'un  tyrannique  vœu, 
^ûr  de  l'heure  enjôleuse  et  du  passé  frivole, 
Médite  en  évitant  de  dire  une  parole  h 


45  — 


C'est  de  l'hiver  en  plein  midi 
Que  ces  yeux  au  brusque  miroir, 
D'un  cerne  bleuâtre  agrandi, 
Avec  défense  de  s'y  voir 
Autrement  que  faune  rangé 
De  tous  les  péchés  capitaux, 
Ou  clcun  iombant  de  ses  tréteaux 
Aux  pieds  de  madame  Sapho 
Sous  l'écran  d'un  ciel  orangé  ! 


—  47 


Avec  le  midi  des  caprices 
En  chèvrefeuilles  tortillés 
J'ai  fait  vos  yeux  ensoleillés, 
Yeux  de  faunesses  que  tu  plisses 
Rut  délicat  des  jours  d'été. 

Quoi  !  cependant  que  j'y  étais, 

Je  n'aurais  pas  au  long  des  cuisses 

Grimaçantes  des  déités 

Fleuri  de  spasmes  entêtés 

Les  cheveux  pâles  des  Narcisses  ?... 

Et  tisonné  pour  le  réveil 

Tes  pauvres  feux  toujours  pareils  1 


—  49 


Sous  l'yeuse,  où  se  traîne  un  jour  décoloré, 
Cherche,  ô  silencieux,  quelque  rive  hagarde  : 
Là  brise  au  roc  poli  qu'un  doigt  fantôme  garde 
Le  reflet  pâlissant  Ju  ciel  transfiguré. 


5i  — 


L'ombre  des  pins  mouvant  sur  cette  ombre  dallée, 
Hyménéale,  unit  à  la  vie  en  allée 
Le  souffle  de  la  vie  actuelle..,  la  voie 
Prolonge  sous  l'azur  le  dessin  d'une  joie 
Devinée  à  travers  les  voiles  dans  l'église 
Au  jour  cru  des  ciseaux  sur  la  nuque  d'Elise, 
La  Voie  où  nous  allons,  chère  âme,  vous  et  moi, 
Devant  la  mort  majestueuse,  front  de  roi, 
Qui,  tandis  que  nos  cœurs  s'essorent  en  prière, 
Nous  regarde  passer  avec  ses  yeux  de  pierre  ! 


—  53  — 


Une  fontaine  au  gré  des  heures  pâlissantes 
Où  se  mirent,  candeur,  mille  clartés  décentes, 
Evanouissement  du  tremble  dans  l'azur, 
Sera  notre  clepsydre  à  dater  sur  l'impur 
Ecoulement  du  temps  les  jours  où  nous  vécûmes, 
Comme  au  gouffre  des  flots  surnage  un  peu  d'écume. 


—  55 


A.  Th.D.  Certes 

Dans  le  flot  qui  chante  et  moutonne 
J'entends  son  appel  monotone. 

Le  vent,  enchaînant  les  rameaux, 
Découvre  sa  force  aux  ormeaux. 

Nuit,  de  l'azur  le  dernier  tome, 
Serait-ce  pas  toi  son  fantôme  ?... 

Mais  rien,  dites,  dans  mon  cœur  seul, 
Même  un  lambeau  de  son  linceul...  ? 


—   57  — 


Derrière  ce  ciel  de  métal 
Cherche  les  brumes  en  allées 
De  ton  calvaire  horizontal, 
Les  brumes  d'or,  gouttes  perlées... 
—  Tant  de  soleils,  de  soleils  nus 
Sur  la  lunique  de  Vénus  !  — 
Ton  âme  passe,  plus  d'automne, 
De  printemps,  regarde  !  Personne  ! 
Arbres  en  pleurs  et  jours  en  di 
La  Douleur  seule  a  reverdi. 


59  — 


Céans  c'est  le  jardin  d'un  silence  trop  beau 
Pour  être  vrai  :  duchesse  errant  au  crépuscule, 
Riche  de  ce  parterre,  et  qu'on  fête  au  flambeau, 
Votre  Garden-party,  ce  soir,  est  ridicule. 

L'heure  approche,...  à  quoi  bon  cet  anneau  de  Gygès 
Qui  semble  ici  requis  des  invités  de  marque 
Pour  regarder  fleurir  un  bouquet  d'aloès, 
Et  jouer  au  Nocher  en  peine  d'une  barque? 


6i  — 


L'Hier  de  cet  azur  éphémère  pâli 
Sous  le  reflet  latent  des  prunelles  éteintes 
Serait-ce  ce  halo  de  jour  enseveli 
Derrière  les  clartés  où  déferlent  les  teintes 
Dans  le  prisme  usurpé  de  ce  soir  que  tu  vois, 
Gemme  des  yeux,  qu'effleure  en  fugaces  étreintes 
Je  ne  sais  quel  écho  de  formes  et  de  voix, 
Jusqu'à  ce  que  la  main  de  la  Nuit  tard  venue 
Balance  sur  le  front  de  ces  ifs  crénelés 
Dans  le  vaste  préau  des  cieux  démantelés 
L'homicide  clarté  d'une  lune  ingénue. 


-6*  - 


Peut-être  la  rosée  à  cette  fleur  de  neige, 
A  l'âme  ce  regard  d'écureuil  pris  au  piège, 
Dans  le  feuillage  encor  ces  rayons  prisonniers 
Refondent  au  pistil  des  rêves  printaniers 
Tous  les  hiers  gonflés  de  poussière  jaunâtre, 
Cependant  que  l'aïeule,  assise  au  coin  de  l'âtre, 
Face  au  galbe  assombri  d'une  Vénus  d'albâtre, 
Distraitement  regarde  au  bout  du  tisonnier 
Les  volutes  mourants  d'une  flamme  bleuâtre. 


-  65  - 


Lumière  où  s'enveloppe  un  jour  atténué 
D'aube  frêle  attardée  au  couchant  qu'étiole 
Je  ne  sais  quoi  de  rare  encore  et  de  muré 

Dans  les  ifs  d'une  nécropole 
—  Le  solitaire  effroi  de  la  cendre  mué 
En  espoir  ingénu  paré  d'azur  frivole  — 
Ou  Nuit,  nuit  qui  s'étend  sur  tous  ces  yeux  fermés , 
Passé  superposé  sous  la  pierre  tombale, 
Dis-nous,  cœur  ironique  au  vivre  accoutumé, 
Quelle  énigme  te  plut  de  ce  Sphinx  bicéphale  ? 


6* 


67  - 


Si  proches  vos  regards  en  l'azur  si  lointain 
Que  je  ne  puis  pas  voir  l'aube  spirituelle 
Fluer  sur  cette  aurore,  et  le  miroir  sans  tain 

De  votre  présence  réelle, 
—  Aurore  fugitive  au  geste  indifférent  — 
Me  renvoyer  la  flamme  invisible  qu'attend, 
Pour  luire  à  l'unisson  du  Ciel  et  du  village, 
Mon  âme  encor  fermée  au  sens  du  paysage. 


-  69  - 


Le  Soir  si  pâle  au  gré  de  la  Nuit  dense, 
Fut  la  rosace  où  rêvent  d'autres  yeux, 
S'efface,  gris  renversé  des  nuances, 
Vers  les  cyprès  du  rond-point  otieux 
Dont  l'ombre  encore  allongée  et  verdâtre 
Bronze  le  stupre  au  mur  presque  éboulé 
Du  Sang  si  vieux  qu'il  écaille  le  plâtre. 
Grotesques  trous  d'un  concombre  fêlé 
Par  les  carreaux  de  minuit  qui  grimace, 
Bave,  et  ces  chairs  gluantes  de  limace 
Sur  l'abricot  velouté  du  baiser, 
Ricanera,  blafarde,  cette  face 
Jusqu'au  fini  de  me  désabuser  ?  (*) 


(')  Un  mois  à  peine  après  cette  pièce  je  perdais  ma  mère 
manière!  —  et  trois  semaines  après  ma  sœur. 


TABLE 


Le  Poète  avoue  volontiers...  (Avant -dire) 
Eurythmies 


Une  larme  point  dérobée 

Sombre  malgré  le  clair  de  lune  .... 
La  caresse  du  soir  sur  ce  marbre  fantôme 

Je  regarde  les  yeux  si  pâles 

Neigeuse  volupté,  sous  la  lune  si  tendre  .     . 
Naïve,  comme  une  aube  enfantine  où  festonne 
Une  aube  encore  un  peu  tremblante  de  tosée 
Franges  des  jours,  aubes,  pieusement  .     .     . 
Une  aurore-clarté  dans  les  ombres  diffuse     . 
Le  front  sur  la  cendre  des  morts     .... 
J'écoute  à  la  clarté  des  choses  endormies.     . 
Quêteuse  —  au  seuil  de  l'ombre  idolâtre  et  profan 
L'hiver  a  du  printemps  dans  l'aile  !  Bleus  échos. 
Poursuivons  —  tu  le  veux  —  ce  rêve  d'améthyste 
Frêle  automne,  au  revers  d'un  amour  coutumier 
Moins  l'azur  dans  le  flot  s'enchante  et  se  marie . 


5 

7 

9 

ii 

13 

i) 

17 

l9 
21 

23 
25 
27 
29 
3i 
33 
3) 
37 
39 


72  TABLE 

Le  blême  azur  qui  dort  aux  prunelles  de  marbre     ...  41 

Mon  âme  glisse  aux  jeux  de  langueur  éphémère     ...  43 

C'est  de  l'hiver  en  plein  midi 45 

Avec  le  midi  des  caprices 47 

Sous  l'yeuse  où  se  traîne  un  jour  décoloré 49 

L'ombre  des  pins  mouvant  sur  cette  ombre  dallée  ...  51 

Une  fontaine  au  gré  des  heures  pâlissantes 53 

Dans  le  flot  qui  chante  et  moutonne 5/ 

Derrière  ce  ciel  de  métal 57 

Céans  c'est  le  jardin  d'un  silence  trop  beau 59 

L'hier  de  cet  azur  éphémère  pâli 61 

Peut-être  la  rosée  à  cette  fleur  de  neige 63 

Lumière  où  s'enveloppe  un  jour  atténué 65 

Si  pioches  vos  regards  en  l'azur  si  lointains 67 

Le  Soir  si  pâle  au  gré  de  la  nuit  dense 69 

Table 71 


FIN    DE   LA   TABLE 


296 


7 


r"<  Q  Oyj   ,1 


Saint-Araand  (Cher).  —  Imprimerie  Bissifre. 


La  Bibliothèque 
Université  d'Ottawa 
Echéance 


The  Library 
University  of  Ottawa 
Date  Due 


a39003     003297W9b 


CE    PQ       2635 

.09665Ë9    L904 

COC       ROYEREf    JEAN    EURYTHMIES. 

ACC#    1240773 


U  D"  /  OF  OTTAWA 


Il  II 


COLL  ROW  MODULE  SHELF    BOX   POS    C 
333    07       04        11       18     16    7